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1
p. 472-480
LETTRE écrite à M. D. L. R. par M. L. B. Chanoine et Sous-Chantre d'Auxerre, sur l'usage des Habits Canoniaux et Militaires, à l'occasion de ce qui est rapporté dans le Mercure du mois de Juin dernier, de la Réception de M. le Comte de Chastellux.
Début :
J'aurois bien souhaité, Monsieur, que le Mémoire qu'on vous a envoyé touchant [...]
Mots clefs :
Église, Auxerre, Chanoine, Chapitre, Ecclesia, Cathédrale, Comte de Chastellux, Chanoines, Tournon, Utrecht, Habits canoniaux
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite à M. D. L. R. par M. L. B. Chanoine et Sous-Chantre d'Auxerre, sur l'usage des Habits Canoniaux et Militaires, à l'occasion de ce qui est rapporté dans le Mercure du mois de Juin dernier, de la Réception de M. le Comte de Chastellux.
LETTRE écrite à M. D. L. R. par
M. L. B. Chanoine et Sous -Chantre
d'Auxerre , sur l'usage des Habits Canoniaux
et Militaires , à l'occasion de
ce qui est rapporté dans le Mercure du
mois deJuin dernier , de la Réception de
M. le Comte de Chastellux.
J
' Aurois bien souhaité , Monsieur ,
que
le Mémoire qu'on vous a envoyé touchant
la Réception de M. le Comte de
Chastellux , en qualité de premier Chanoine
Hereditaire de notre Eglise , eût
été plus érendu , pour la satisfaction du
Public , qui goûte assez ces sortes de détails
de Ceremonies rares ; mais cela n'a
pas dépendu de moi , et il a fallu déferer
au sentiment de quelques personnes que
je respecte , qui avoient recommandé la
brieveté .
Je suis bien aise qu'au moins on y ait
inseré l'origine du droit de la Maison de
Chastellux , et qu'on y ait parié de la
Ville de Cravan ou Crevan , conformé
ment aux Titres du XV . Siecle. Le peu
qu'on en dit me confirme dans l'idée que
j'ai eue depuis que j'ai pris connoissance
de
MARS. 1733 .
473
de nos Antiquitez , qu'on a voulu l'honorer
dans l'Eglise d'Aux erre à perpetuité
, par ce droit de Restituteur de la
principale Terre du Chapitre , de même
qu'on y honote le Donateur par des marques
d'une veneration particuliere presque
tous les jours de l'année , depuis le
temps de sa mort , arrivée au X. Siecle.
Ce seroit en effet s'exposer à être taxé
d'ingratitude , que d'en agir autrement :
Alias de ingratitudinis vitio , quod abominabile
meritò judicatur , et à quibusvis
fidelibus , præsertim viris Ecclesiasticis debet
effectualiter abhorreri , possemus non immeritò
reprehendi , disoient nos
Predecesseurs.
Les mêmes personnes qui s'exprimoient
ainsi il y a trois cent ans , te
noient par tradition de ceux qui les
avoient précedez , les marques de gratitude
qu'ils nous ont transmises envers
l'Evêque Guy le Sénonois , le premier de
tous ceux qui ont eu l'Eglise Cathédrale
pour sépulture ; et sa mémoire ne pourra
jamais tomber dans l'oubli , quoique
quelques personnes ayent contribué de
nos jours par inadvertance et peutêtre
sans le vouloir , à faire perdre de
vûë les vestiges qui restent de la reconnoissance
de ce bienfait. Je ne dis rien
sur l'origine de cette donation , qui ne
soit
474 MERCURE DE FRANCE
soit déja tout publié , et dont l'on n'ait
la preuve dans l'Histoire imprimée des
Evêques d'Auxerre aux pages 445. et
446. du premier Volume de la Bibliotheque
des Manuscrits du P. Labbe ,
Jesuite ; et les Etrangers qui examinent
soigneusement les Peintures de l'Eglise
Cathédrale d'Auxerre , ne manquent pas
d'y lire sous la figure de ce Guy, Beatus
Guydo , et d'en conclure quelque chose.
Mais ceci M. n'est pas le sujet de l'apostille
que vous avez faite au Memoire
qui vous fut envoyé au mois de Juin.
Il paroit que vous souhaiteriez sçavoir
si l'usage de voir des habits Militaires ou
Seculiers réunis avec les habits Canoniaux
sur une même personne est ancien , et s'il
est à present singulier à l'Eglise d' Auxerre.
Je ne sçaurois vous parler de l'Antiquité
de cet usage qu'en vous apprenant
en même temps qu'autrefois il n'étoit
pas si rarequil l'est de nos jours . Il étoit
assez commun de voir de gros Seigneurs
Bienfacteurs d'une Eglise avoir rang parmi
les Chanoines et se placer au Choeur
en habit Militaire , même avec des Eperons
et des Armes. Les Statuts du Chapitre
de Toul , compilez l'an 1491. s'expliquent
ainsi au Chapitre IV . Nobiles
Scutiferi et Milites specialiter hujus Ecclesia
M.A R 6. 1733. 479
sia Vassalli , cùm intrant Chorum , admitts
debent portare calcaria et arma ; et collo
cantur inter Archidiaconos et Canonicos ,
quia Defensores sunt Ecclesia pro debito
sue Nobilitatis. Ce petit Monument rédigé
en Latin , n'est point encore si curieux
à lire que celui que M. Baluse a
publié dans ses Preuves de l'Histoire de
la Maison d'Auvergne , à la page 471 .
Pour vous épargner la peine de le consulter
dans le Livre même , je transcrirai
ici en entier la Notice qu'en a donnée
ce celebre Antiquaire .
Extrait des Memoires d'André Duchesne
» Acte en datte du xxvij. Noyembre
1405. en présence de Jean Guineau ,
» Clerc Notaire , par lequel il appert
» comme Noble et Puissant Messire Gui-
» chard Dauphin , Chevalier Baron de
» la Ferté- Chauderon , Seigneur de Jali-
" gny , se transportą à la Porte de l'E-
>> glise Cathédrale de Nevers , les Epe
>> rons dorez chaussez , l'Epée ceinte et
>> le Faucon sur le poing : où étant vin-
>> rent au-devant de lui le College de la
dite Eglise , Chanoines et Chapelains ,
revétus de Chappes , avec la Croix
» l'Eau - Benite et les Cierges allumez . Et
» Messire Pierre le Clerc , Archidiacre de
» Desise
476 MERCURE DE FRANCE
"
» Desise en ladite Eglise , le prenant par
» la main , le mena en l'état cy - dessus
en l'Eglise jusques devant le Grand-
» Autel. Puis la Grand'Messe étant dite ,
>>
le menerent dans le Chapitre , où ils
>> le reçurent pour leur Confrere et Cha-
» noine , ainsi qu'il avoit été fait à ses
» Prédecesseurs , après qu'il eut donné
» son Serment sur les saints Evangiles , et
protesté qu'il ne réveleroit jamais les se-
>> crets du Chapitre en choses qui lui
» pourroient préjudicier. Puis baisa à la
» bouche ledit Archidiacre , Messire Jacques
de Besson , Jean de Maurigny et
» autres Chanoines d'icelle Eglise. Puis
>> remenerent ledit Baron en l'Eglise , et
» le firent asseoir au quatriéme Siege du
» côté de l'Archidiacte de Nevers , présens
Nobles hommes Messire Pierre de
» Veaulce , Jean de Montagu le Belin
Joseph de Citin , et Claudin Bastard
» de Jaligny , Chevaliers , Philippes de
» Villaines , Guichard de Villiers , Etien-
>> ne de Poisson, Guillaume de Chevenon,
Jean Chauderon , Jean d'Aligny le jeu
» ne , et Antoine d'Armes , Ecuyers.
Etant tombé sur un Livre intitulé ,
Le Chanoine , composé par Vital Bernard,
Chanoine du Puy en Vellay , et imprimé
en 1645. j'y ai lû aux pages 8o. et 81 .
ce
MARS. 1733
477
ce qui suit. » Le Duc de Brabant est Cha-
» noine né de l'Eglise Archiepiscopale
» d'Utrecht. Charles V. Empereur et Roy
» d'Espagne ; en cette qualité de Duc ,
» ( comme il alloit recevoir la Couronne
Imperiale en la Ville d'Aix -la - Chapelle)
» passant à Utrecht , y prit le Surplis et
>> assista au Service , comme les autres
» Chanoines, le 13. Octobre 15 20. Même
» Privilege est acquis au Seigneur de Tour-
» non , en l'Eglise de S. Just de Lyon .
"
Ici l'Auteur déclare son sentiment sur
l'origine de ce droit du Seigneur de Tournon
qu'il fait venir d'une Fondation du
quatriéme Siecle ; mais je ne veux pas
en être garant. Puis il ajoûte ce trait , qui
test plus curieux . » Paradin , en son His-
» toire de Lyon , dit qu'il assista en 1542 .
à la Prise de Possession de ce Droit
» honorifique d'un Seigneur de Tournon ,
et que Jacques de Tournon , Evêque
de Valence , son frere , le voyant re
» vétu d'une courte Robbe de Damas
» avec un Surplis dessus , l'Aumusse au
» bras et l'Epée au côté. Voilà , mon frere ,
❤ ( dit- il en le raillant ) qui représente bien
les trois Etats.
Je ne m'étends point sur un droit assez
semblable, dont jouissent 4 ou 5 Seigneurs
dans l'Eglise Cathedrale d'Auch , si on en
croit
478 MERCURE DE FRANCE
croît le même Chanoine , parce que je
n'en connois point assez les circonstances
, non plus que sur les droits de certains
Seigneurs dans l'Eglise de S. Martin
de Tours , où l'on dit que le Comte d'Anjou
est Chanoine ; de consuetudine et habet
Prebendam in blado et vino et nummis ; en
mémoire du Comte d'Anjou Ingelger ,
qui fit rapporter d'Auxerre à Tours , le
Corps de S. Martin , au neuvième siècle.
Voyez encore Héméré , en son Histoire
de S. Quentin , à la page 201.
Au reste , plus ces Auteurs sont succincts
sur ces sortes de matieres , plus ils
laissent d'obscurité
après eux ; et c'est
pour cela que je croi que le Cérémonial
observé en ces occasions , ne sçauroit être
trop expliqué. Pouvez - vous , en off.t ,
comprendre
ce que veut dire Platina ,
quand il écrit que le jour que Charles-
Quint assista au Service , dans la Cathedrale
d'Utrecht , il étoit talari indutus
linteo et sacra amictus vesie ? Vital Bernard
a tort de traduire , talare linteum , par le
mot de Surplis ; ce doit être une Aube
traînanté jusqu'aux
talons . Il laisse aussi
à deviner ce qu'étoit ce Sacra vestis qui le
couvroit ; c'étoit apparemment
une Chape
ou une Dalmatique
.
Je vous ai fait remarquer , Monsieur ,
en
MAR S. 1733- 479
en.1726. que les Empereurs lisoient encore
à Rome au xiy siécle , une Leçon à
P'Office des Grandes Fêtes , la Chape sur
le Corps , et l'Epée nuë à la main a . J'y
ajoutai une remarque touchant les Trésoriers
de quelques Cathédrales , qui anciennement
pouvoient assister à l'Office
avec des marques de distinction , sembla
bles à celles de M. de Chastellux . C'est
tout ce qui est de ma connoissance dans
la matiere dont il s'agit ; cat il ne me
reste aucune preuve qu'un semblable usag
existe dans l'Eglise de Chartres , ainsį
qu'on l'avoit divulgué , et il ne faut pas
confondre avec notre usage , celui de
Chartres, de faire présenter à l'Offrande ,
le 15 jour d'Août , par un Officier de la
Terre de Maintenon , un Epervier , pre
nant Proye ; lequel Oyseau doit être porté
par le Diacre au Régent de la Prébende
, duquel les Officiers de Maintenon
le rachetent, Ce que vous avez lû ci-dessus
, tiré des Statuts du Chapitre de Toul ,
avec ce que nous voyons dans le Nécrologe
de l'Eglise d'Auxerre , écrit au xr et
XIe siècles , et publié en partie par Dom
Martene b , où quantité de Seigneur sont
ainsi désignez ; Obiit N... Miles Sancti
a Mercure , Janvier 1726. pag. 31 et 32,
b Ampliss, Colleic, Tom. 6
Stephani
48 MERCURE DE FRANCE
Stephani , ou bien , Miles hujus Ecclesia.
Tout cela , dis- je , peut appuyer la pensée
qui vient naturellement , que le Chanoine
revêtu du Canonicat héréditaire
d'Auxerre , est à peu près dans l'état
où se trouvoient- ces anciens Deffenseurs
et Protecteurs des biens de l'Eglise .
M. Ducange , qui avoit vû cet Ouvrage
en manuscrit , n'a pas oublié dans
son Glossaire , celui qui est qualifié au
4 jour d'Avril dans ce Nécrologe : Hujus
Ecclesia Vexillarius ; et il paroît que
ce Titre de Vexillarius n'étoit pas fort
commun , puisqu'il ne rapporte que cet
exemple de Léoteric , Vicomte d'Auxer
re , qu'il joint à celui de Jacques , Roy
d'Arragon , qualifié en 1309. S. Romana
Ecclesia Vexillarius.
A Auxerre , le 10 Decembre 1732.
M. L. B. Chanoine et Sous -Chantre
d'Auxerre , sur l'usage des Habits Canoniaux
et Militaires , à l'occasion de
ce qui est rapporté dans le Mercure du
mois deJuin dernier , de la Réception de
M. le Comte de Chastellux.
J
' Aurois bien souhaité , Monsieur ,
que
le Mémoire qu'on vous a envoyé touchant
la Réception de M. le Comte de
Chastellux , en qualité de premier Chanoine
Hereditaire de notre Eglise , eût
été plus érendu , pour la satisfaction du
Public , qui goûte assez ces sortes de détails
de Ceremonies rares ; mais cela n'a
pas dépendu de moi , et il a fallu déferer
au sentiment de quelques personnes que
je respecte , qui avoient recommandé la
brieveté .
Je suis bien aise qu'au moins on y ait
inseré l'origine du droit de la Maison de
Chastellux , et qu'on y ait parié de la
Ville de Cravan ou Crevan , conformé
ment aux Titres du XV . Siecle. Le peu
qu'on en dit me confirme dans l'idée que
j'ai eue depuis que j'ai pris connoissance
de
MARS. 1733 .
473
de nos Antiquitez , qu'on a voulu l'honorer
dans l'Eglise d'Aux erre à perpetuité
, par ce droit de Restituteur de la
principale Terre du Chapitre , de même
qu'on y honote le Donateur par des marques
d'une veneration particuliere presque
tous les jours de l'année , depuis le
temps de sa mort , arrivée au X. Siecle.
Ce seroit en effet s'exposer à être taxé
d'ingratitude , que d'en agir autrement :
Alias de ingratitudinis vitio , quod abominabile
meritò judicatur , et à quibusvis
fidelibus , præsertim viris Ecclesiasticis debet
effectualiter abhorreri , possemus non immeritò
reprehendi , disoient nos
Predecesseurs.
Les mêmes personnes qui s'exprimoient
ainsi il y a trois cent ans , te
noient par tradition de ceux qui les
avoient précedez , les marques de gratitude
qu'ils nous ont transmises envers
l'Evêque Guy le Sénonois , le premier de
tous ceux qui ont eu l'Eglise Cathédrale
pour sépulture ; et sa mémoire ne pourra
jamais tomber dans l'oubli , quoique
quelques personnes ayent contribué de
nos jours par inadvertance et peutêtre
sans le vouloir , à faire perdre de
vûë les vestiges qui restent de la reconnoissance
de ce bienfait. Je ne dis rien
sur l'origine de cette donation , qui ne
soit
474 MERCURE DE FRANCE
soit déja tout publié , et dont l'on n'ait
la preuve dans l'Histoire imprimée des
Evêques d'Auxerre aux pages 445. et
446. du premier Volume de la Bibliotheque
des Manuscrits du P. Labbe ,
Jesuite ; et les Etrangers qui examinent
soigneusement les Peintures de l'Eglise
Cathédrale d'Auxerre , ne manquent pas
d'y lire sous la figure de ce Guy, Beatus
Guydo , et d'en conclure quelque chose.
Mais ceci M. n'est pas le sujet de l'apostille
que vous avez faite au Memoire
qui vous fut envoyé au mois de Juin.
Il paroit que vous souhaiteriez sçavoir
si l'usage de voir des habits Militaires ou
Seculiers réunis avec les habits Canoniaux
sur une même personne est ancien , et s'il
est à present singulier à l'Eglise d' Auxerre.
Je ne sçaurois vous parler de l'Antiquité
de cet usage qu'en vous apprenant
en même temps qu'autrefois il n'étoit
pas si rarequil l'est de nos jours . Il étoit
assez commun de voir de gros Seigneurs
Bienfacteurs d'une Eglise avoir rang parmi
les Chanoines et se placer au Choeur
en habit Militaire , même avec des Eperons
et des Armes. Les Statuts du Chapitre
de Toul , compilez l'an 1491. s'expliquent
ainsi au Chapitre IV . Nobiles
Scutiferi et Milites specialiter hujus Ecclesia
M.A R 6. 1733. 479
sia Vassalli , cùm intrant Chorum , admitts
debent portare calcaria et arma ; et collo
cantur inter Archidiaconos et Canonicos ,
quia Defensores sunt Ecclesia pro debito
sue Nobilitatis. Ce petit Monument rédigé
en Latin , n'est point encore si curieux
à lire que celui que M. Baluse a
publié dans ses Preuves de l'Histoire de
la Maison d'Auvergne , à la page 471 .
Pour vous épargner la peine de le consulter
dans le Livre même , je transcrirai
ici en entier la Notice qu'en a donnée
ce celebre Antiquaire .
Extrait des Memoires d'André Duchesne
» Acte en datte du xxvij. Noyembre
1405. en présence de Jean Guineau ,
» Clerc Notaire , par lequel il appert
» comme Noble et Puissant Messire Gui-
» chard Dauphin , Chevalier Baron de
» la Ferté- Chauderon , Seigneur de Jali-
" gny , se transportą à la Porte de l'E-
>> glise Cathédrale de Nevers , les Epe
>> rons dorez chaussez , l'Epée ceinte et
>> le Faucon sur le poing : où étant vin-
>> rent au-devant de lui le College de la
dite Eglise , Chanoines et Chapelains ,
revétus de Chappes , avec la Croix
» l'Eau - Benite et les Cierges allumez . Et
» Messire Pierre le Clerc , Archidiacre de
» Desise
476 MERCURE DE FRANCE
"
» Desise en ladite Eglise , le prenant par
» la main , le mena en l'état cy - dessus
en l'Eglise jusques devant le Grand-
» Autel. Puis la Grand'Messe étant dite ,
>>
le menerent dans le Chapitre , où ils
>> le reçurent pour leur Confrere et Cha-
» noine , ainsi qu'il avoit été fait à ses
» Prédecesseurs , après qu'il eut donné
» son Serment sur les saints Evangiles , et
protesté qu'il ne réveleroit jamais les se-
>> crets du Chapitre en choses qui lui
» pourroient préjudicier. Puis baisa à la
» bouche ledit Archidiacre , Messire Jacques
de Besson , Jean de Maurigny et
» autres Chanoines d'icelle Eglise. Puis
>> remenerent ledit Baron en l'Eglise , et
» le firent asseoir au quatriéme Siege du
» côté de l'Archidiacte de Nevers , présens
Nobles hommes Messire Pierre de
» Veaulce , Jean de Montagu le Belin
Joseph de Citin , et Claudin Bastard
» de Jaligny , Chevaliers , Philippes de
» Villaines , Guichard de Villiers , Etien-
>> ne de Poisson, Guillaume de Chevenon,
Jean Chauderon , Jean d'Aligny le jeu
» ne , et Antoine d'Armes , Ecuyers.
Etant tombé sur un Livre intitulé ,
Le Chanoine , composé par Vital Bernard,
Chanoine du Puy en Vellay , et imprimé
en 1645. j'y ai lû aux pages 8o. et 81 .
ce
MARS. 1733
477
ce qui suit. » Le Duc de Brabant est Cha-
» noine né de l'Eglise Archiepiscopale
» d'Utrecht. Charles V. Empereur et Roy
» d'Espagne ; en cette qualité de Duc ,
» ( comme il alloit recevoir la Couronne
Imperiale en la Ville d'Aix -la - Chapelle)
» passant à Utrecht , y prit le Surplis et
>> assista au Service , comme les autres
» Chanoines, le 13. Octobre 15 20. Même
» Privilege est acquis au Seigneur de Tour-
» non , en l'Eglise de S. Just de Lyon .
"
Ici l'Auteur déclare son sentiment sur
l'origine de ce droit du Seigneur de Tournon
qu'il fait venir d'une Fondation du
quatriéme Siecle ; mais je ne veux pas
en être garant. Puis il ajoûte ce trait , qui
test plus curieux . » Paradin , en son His-
» toire de Lyon , dit qu'il assista en 1542 .
à la Prise de Possession de ce Droit
» honorifique d'un Seigneur de Tournon ,
et que Jacques de Tournon , Evêque
de Valence , son frere , le voyant re
» vétu d'une courte Robbe de Damas
» avec un Surplis dessus , l'Aumusse au
» bras et l'Epée au côté. Voilà , mon frere ,
❤ ( dit- il en le raillant ) qui représente bien
les trois Etats.
Je ne m'étends point sur un droit assez
semblable, dont jouissent 4 ou 5 Seigneurs
dans l'Eglise Cathedrale d'Auch , si on en
croit
478 MERCURE DE FRANCE
croît le même Chanoine , parce que je
n'en connois point assez les circonstances
, non plus que sur les droits de certains
Seigneurs dans l'Eglise de S. Martin
de Tours , où l'on dit que le Comte d'Anjou
est Chanoine ; de consuetudine et habet
Prebendam in blado et vino et nummis ; en
mémoire du Comte d'Anjou Ingelger ,
qui fit rapporter d'Auxerre à Tours , le
Corps de S. Martin , au neuvième siècle.
Voyez encore Héméré , en son Histoire
de S. Quentin , à la page 201.
Au reste , plus ces Auteurs sont succincts
sur ces sortes de matieres , plus ils
laissent d'obscurité
après eux ; et c'est
pour cela que je croi que le Cérémonial
observé en ces occasions , ne sçauroit être
trop expliqué. Pouvez - vous , en off.t ,
comprendre
ce que veut dire Platina ,
quand il écrit que le jour que Charles-
Quint assista au Service , dans la Cathedrale
d'Utrecht , il étoit talari indutus
linteo et sacra amictus vesie ? Vital Bernard
a tort de traduire , talare linteum , par le
mot de Surplis ; ce doit être une Aube
traînanté jusqu'aux
talons . Il laisse aussi
à deviner ce qu'étoit ce Sacra vestis qui le
couvroit ; c'étoit apparemment
une Chape
ou une Dalmatique
.
Je vous ai fait remarquer , Monsieur ,
en
MAR S. 1733- 479
en.1726. que les Empereurs lisoient encore
à Rome au xiy siécle , une Leçon à
P'Office des Grandes Fêtes , la Chape sur
le Corps , et l'Epée nuë à la main a . J'y
ajoutai une remarque touchant les Trésoriers
de quelques Cathédrales , qui anciennement
pouvoient assister à l'Office
avec des marques de distinction , sembla
bles à celles de M. de Chastellux . C'est
tout ce qui est de ma connoissance dans
la matiere dont il s'agit ; cat il ne me
reste aucune preuve qu'un semblable usag
existe dans l'Eglise de Chartres , ainsį
qu'on l'avoit divulgué , et il ne faut pas
confondre avec notre usage , celui de
Chartres, de faire présenter à l'Offrande ,
le 15 jour d'Août , par un Officier de la
Terre de Maintenon , un Epervier , pre
nant Proye ; lequel Oyseau doit être porté
par le Diacre au Régent de la Prébende
, duquel les Officiers de Maintenon
le rachetent, Ce que vous avez lû ci-dessus
, tiré des Statuts du Chapitre de Toul ,
avec ce que nous voyons dans le Nécrologe
de l'Eglise d'Auxerre , écrit au xr et
XIe siècles , et publié en partie par Dom
Martene b , où quantité de Seigneur sont
ainsi désignez ; Obiit N... Miles Sancti
a Mercure , Janvier 1726. pag. 31 et 32,
b Ampliss, Colleic, Tom. 6
Stephani
48 MERCURE DE FRANCE
Stephani , ou bien , Miles hujus Ecclesia.
Tout cela , dis- je , peut appuyer la pensée
qui vient naturellement , que le Chanoine
revêtu du Canonicat héréditaire
d'Auxerre , est à peu près dans l'état
où se trouvoient- ces anciens Deffenseurs
et Protecteurs des biens de l'Eglise .
M. Ducange , qui avoit vû cet Ouvrage
en manuscrit , n'a pas oublié dans
son Glossaire , celui qui est qualifié au
4 jour d'Avril dans ce Nécrologe : Hujus
Ecclesia Vexillarius ; et il paroît que
ce Titre de Vexillarius n'étoit pas fort
commun , puisqu'il ne rapporte que cet
exemple de Léoteric , Vicomte d'Auxer
re , qu'il joint à celui de Jacques , Roy
d'Arragon , qualifié en 1309. S. Romana
Ecclesia Vexillarius.
A Auxerre , le 10 Decembre 1732.
Fermer
Résumé : LETTRE écrite à M. D. L. R. par M. L. B. Chanoine et Sous-Chantre d'Auxerre, sur l'usage des Habits Canoniaux et Militaires, à l'occasion de ce qui est rapporté dans le Mercure du mois de Juin dernier, de la Réception de M. le Comte de Chastellux.
La lettre de M. L. B., chanoine et sous-chantre d'Auxerre, aborde l'usage des habits canoniaux et militaires lors de la réception de M. le Comte de Chastellux en tant que premier chanoine héréditaire de l'Église d'Auxerre. L'auteur exprime des regrets quant à la brièveté du mémoire sur cette réception mais s'y conforme. Il rappelle l'origine du droit de la Maison de Chastellux, lié à la ville de Cravan ou Crevan, conformément aux titres du XVe siècle. L'auteur exprime sa gratitude envers l'évêque Guy le Sénonois, premier à être inhumé dans la cathédrale d'Auxerre au Xe siècle, et insiste sur l'importance de ne pas oublier cette reconnaissance malgré les tentatives de certaines personnes d'effacer ces souvenirs. Concernant l'usage des habits militaires ou séculiers avec les habits canoniaux, l'auteur note que cette pratique n'était pas rare autrefois. Il cite des exemples historiques, comme les statuts du Chapitre de Toul en 1491 et des actes du XVe siècle où des seigneurs bienfaiteurs portaient des habits militaires au chœur. Des cas similaires sont également mentionnés dans d'autres églises, telles que celles de Nevers, Utrecht et Lyon. L'auteur conclut en affirmant que le chanoine héréditaire d'Auxerre se trouve dans une situation comparable à celle des anciens défenseurs et protecteurs des biens de l'Église. Il appuie cette idée en citant des exemples tirés du nécrologe de l'Église d'Auxerre et des travaux de M. Ducange.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
2
p. 210-218
LETTRE de M. L. B. Ch. & Souchantre de l'Eglise d'Auxerre, écrite à M. l'Abbé Fenel, Chanoine de l'Eglise Metropolitaine de Sens, touchant l'origine du Proverbe, Li Chanteor de Sens.
Début :
Vous avez peut-être crû, Monsieur, que je ne parlois pas sérieusement, [...]
Mots clefs :
Proverbe, Sens, Chant, Église, Primes, Office, Auteur, Musique, Églises, Charlemagne
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. L. B. Ch. & Souchantre de l'Eglise d'Auxerre, écrite à M. l'Abbé Fenel, Chanoine de l'Eglise Metropolitaine de Sens, touchant l'origine du Proverbe, Li Chanteor de Sens.
LETTRE de M. L. B.Ch. & Souchantre
de l'Eglise d' Auxerre , écrite à M. l'Abbé
Fenel , Chanoine de l'Eglise Metropo
litaine de Sens , touchant l'origine du
Proverbe , Li Chanteor de Sens .
V
Ous avez peut-être crû , Monsieur,
que je ne parlois pas sérieusement
lorsque je vous ai demandé par ma dernie
ce qu'on pensoit à Sens tou re Lettre
>
chang
FEVRIER.. 1734. 218
chant la dénomination qu'un manuscrit
de Saint Germain des Prez , dont il y a
un Extrait dans le Mercure de Septembre
dernier , donne à votre Ville . Je n'ai eu
nulle envie de vous surprendre , lorsque
je me suis informé de vous , si cette épithete
Li chanteor de Sens n'avoit reveillé
l'attention de personne.Supposé que l'Auteur
,publié dans le Mercure,dise la verité,
et que la Liste des Proverbes courans anciennement
en France , soit du tems de
Philippe le Bel , ou environ , il s'ensuivra
seulement par rapport à la Ville de Sens ,
qu'elle étoit alors distinguée par un endroit
honorable ; et pendant que d'autres
Villes étoient renommées , je ne sçai de
quelle maniere la vôtre,qui avoit le chant
en affection , où qui étoit peuplée de
Chantres , se faisoit considerer de ce côté-
là. Vous êtes convenu en me faisant
réponse , que le chant a été cultivé autrefois
chez vous plus que mediocrement :
les preuves que vous en apportez sont ;
1º . la mesure que battoit le Préchantre
en certaines occasions ; 2 °. l'usage ancien
où le même Préchantre étoit de baller ,
ensorte qu'on disoit , à teljour le Préchantre
balle. 3 ° . La coûtume de vos dignitez
de venir à la Neume du grand répons visà-
vis le bas Cheur. Vous avez très grande
212 MERCURE DE FRANCE
de raison ces preuves sont des indices
assez forts ; mais je puis vous dire de plus
qu'il falloit que le chant dans votre Ville
fût en très singuliere recommandation´,
puisque l'Archevêque se faisoit un devoir
de chanter lui - même le celebre répons Afpiciens
, qui est le premier des Nocturnes
de l'Avent. C'est ce que j'ai lu dans l'un
des monumens de votre Eglise. Et j'en
conclus qu'il falloit qu'alors la science du
chant fut très-florissante parmi vous.
Cependant , pour que cet attachement
au chant ait fait naître le Proverbe en
question , je pense qu'il faut encore quelque
chose de plus fort. Je me flatte de l'ayoir
trouvé. C'est , que votre Eglise a été
apparemment l'une des premieres qui ait
adinis le Déchant qui étoit la Musique du
douzième siècle et des suivans . Le Credo
que je vous ai fait voir , noté à deux parties
, dans un des Missels du treiziéme sié
cle conservez chez vous , en est une preuve
manifeste. Car , si la profession de foy
étoit récitée musicalement , comment ne
l'étoient- elles point les autres parties de
l'Office : Le Déchant Discantus fit donc
grande fortune dans l'Eglise de Sens
delà , probablement il s'étendit dans les
Eglises suffragantes . Galvanée Dominicain
Italien , qui mourut en 1297. dit de
Charlemagne
et
FEVRIER: 1734: 213
,
Charlemagne dans son Manipulus Florum.
T. XI.fcriptorum Italicorum pag. 601. Tres
fcolas pro Gregoriano Officio addiscendo ultra
montes instituit . Primam posuit Metis ,
secundam Senonis tertiam Aurelianis:
Je pense que cet Auteur n'a écrit ceci
que parce qu'au treizième siècle on le
croyoit ainsi , et qu'on n'attribuoit point
alors à d'autre qu'à Charlemagne , l'émulation
qui regnoit dans le chant à Sens et
à Orleans. Je ne sçai pas en quel temps
votre Chapitre à congedié les Musiciens ,
mais je sçai bien qu'on y chantoit encore
ce Déchant ou musique ancienne sur les
Ode Noël en 1553. Ce fut cette année là
que notre Chapitre tenant à honneur de
se regler sur le vôtre , conclut en ces termes
le seizième Décembre : Insuper Domini
volentes insequi vestigia Ecclesia Metropolitane
Senonensis & plerarunque aliaruin
Cathedralium hujus regni , concluserunt
☛ ordinaverunt quòd dum decantabuntur illa
novem folemnes Antiphona ad Magnificat
que incipiunt per O ante novem dies pracedentes
Festum Nativitatis Salvatoris D. N.
J. C. qualibet earum Antiphonarum canta
bitur bis , videlicet in principio & in fine dica
ti Cantici Magnificat in musicalibus sive
discantu et cum organis ; et tunc ad aquilam
deferentur due cruces argentea cum duabus
tadis
214 MERCURE DE FRANCE
tadis accensis , ad majorem jubilationem &
divini cultus augmentationem. Si votre Chapitre
fut des premiers à admettre l'organisation
du chant Gregorien , c'est- à - dire,
à permettre qu'on fit des accords sur ce
chant , il fut aussi des premiers à rejetter
cet usage ; non pas que ces accords blessassent
l'oreille , mais parce qu'on sentit
peut être quelques inconveniens de la part
de ceux qui l'executoient. Je crois que
votre Eglise a très prudemment fait , de
prévenir le temps des rafinemens où nous
sommes à present , temps auquel la musique
voudroit supplanter le plainchant.
Les Musiciens en general , et ceux qui
leur sont, pour ainsi dire, affiliez , ou qui leur
touchent par quelque endroir , comme ,
par exemple , seroit un Chanoine , qui
sçait un peu toucher du Clavecin ou
chanter sa partie de musique , font des
raisonnemens si pitoyables en fait de
plainchant , et traitent si malceite science ,
que tout est à craindre pour les Eglises où
ils sont écoutez .
Je présume ( quoique votre nouveau
Breviaire n'en dise rien ) que vous avez
conservé l'ancien usage de chanter dans
votre Choeur le jour de Saint - Etienne le
Pseaume All luiatique Landate 148. dans
un des modes qui sont diffens du systême
FEVRIER. 1733 . 215
me Gregorien , un mode Psalmodique
dont la dominante est corde finale même
de l'ancienne . A l'égard de la semaine de
Pâques , je suis assuré que vous chantez
comme nous aux petites Heures sur une
corde élevée d'un ton seulement au- dessus
de la corde finale de l'ancienne , conformement
aux anciens Livres de l'une et de
l'autre Eglise. Ces modes sont l'écueil de
tous les Musiciens : ils n'y entendent rien
tous tant qu'ils sont ; et en effet , si la
science de quelques-uns ne va pas jusqu'à
connoître seulement le détail du systême
Gregorien , comment pourroient- ils penetrer
dans les systêmes de chant qui sont
plus anciens , et reconnoître dans nos
Offices ce qui en est émané ? Continuez ,
Monsieur , à conserver des vestiges de ces
anciens modes . Il ne dépendra pas de moi
qu'on n'en fasse de même ici , non plus
qu'à Tours et à Langres , dont les Livres
contiennent des restes de cet ancien systême,
usité dans les Gaules avant le siecle
de Charlemagne.
Qui conservera donc toutes les varietez
de chant , si ce n'est les Eglises Cathedrales
dont le Clergé est nombreux ? Il n'y
a de contradiction à attendre là- dessus ,
de la part de ceux qui n'y comprennent
rien , et qui ne sont pas en état d'y
que
rien
216 MERCURE DE FRANCE
rien comprendre. Il y a aussi certaines autres
varietez dans le chant de l'Office Divin
, que l'on supprime quelquefois sans
assez d'attention , pour abreger seulement ,
sous prétexte que les paroles ne sont pas
tirées de l'Ecriture Sainte . Mais ce que j'ai
à leur opposer passeroit les bornes d'une
simple Lettre je n'ai garde de m'étendre
là - dessus . Lorsque se sont des Chanoines
qui raisonnent ainsi , je les fais ressouvenir
de cette belle parole de l'Auteur de
Livre de la coutume d'adorer Dieu de bout
qu'une Eglise Cathedrale doit être la dépositaire
, et la conservatrice de tout ce
qui est négligé dans les petites Eglises , et
que c'est dans son sein qu'en doit retrou
ver l'antiquité qui périt presque par tout
ailleurs , par manque de Clergé , ou faute
de zele pour sa conservation.
J'ai lûavec beaucoup de satisfaction l'éloge
que fait de votre Eglise M. de Molcon
dans son voyage Liturgique , pages
162 et 163. tant sur la séparation de toutes
les Heures de l'Office , que sur le reste.
Ce livre imprimé en 1718. mérite d'avoir
sa place dans la Bibliotheque du Chapitre.
l'Auteur en rapportant sur quel pied
il a vû celebrer l'Office de Primes lorsqu'il
passa par Sens vers l'an 1697. Primes , ditil
, est de toutes les petites Heures l'Office qui
est
FEVRIER. 1734. 217
est toûjours le mieux chanté à Sens . Ils ont
retenu l'ancien Office de Primes. Le Dimanche
, ils disent le Magna Prima ou les grandes
Primes , qui outre les nôtres , contiennent
les fix Pfeaumes qu'on diftribuë à Primes
chaque jour de la semaine . Si vos nouveaux
Breviaires ont un peu abregé le nombre
des Pseaumes , ils n'ont rien diminué de
la noblesse avec laquelle vous chantez
Primes les Dimanches . Tous les Etrangers
qui assistent en sont édifiez , comme
aussi de la majesté et de la gravité avec laquelle
on en chante l'Antienne. Pour le
coup on peut bien dire Li chanteor de
Sens. Cet exemple au reste est à proposer
aux Eglises de la Province , qui toutes ont
eu comme vous le Magna Prima les Dimanches
et dans quelques-unes desquelles
on est près de se relâcher sur ce
qui en tient lieu. Il merite encore mieux
d'être imité que celui de la Musique sur
les O de Noël que nous avons prise de
vous : et ce que vous pratiquez est
plus canonique , que ne l'est la demarche
de ceux qui sollicitent et pressent
pour qu'on chante ces Primes Dominicales
à la maniere des jours . Joly , Chantre
de Notre-Dame de Paris , a fort bien remarqué
dans son Traité de Horis Canonicis
, pag. 40, que l'Office de Primes a été
>
1
établi
218 MERCURE DE FRANCE
établi pour honorer specialement
la Sainte
Trinité ; et c'est sans doute le fondement
sur lequel est appuyée la sage pratique
de votre Eglise.
Je finirai , Monsieur , en vous marquant
que vous vous êtes trompé , lorsque
vous m'avez crû Auteur de la Réponse
, qui est dans le Mercure de Novembre
dernier à la question proposée dans
celui de Juin , touchant l'autorité des Musiciens
en fait de Plainchant . Elle contient
certaines choses qui auroient dû vous empêcher
d'avoir cette pensée. J'approuve
les raisonnemens de l'Ecrivain ; ils sont
très judicieux , mais je n'en suis point
l'Auteur. Au reste il viendra peut- être un
temps où vous verrez un petit ouvrage à
l'occasion de la Décretale de Jean XXII .
Docta Sanctorum . Extr. Comm. de vita
hon . Cleric. lequel traitera en partie la
même matiere . Alors votre jugement sera
mieux fondé. Je suis , &c.
A Auxerre le 19. Décembre 1733 .
de l'Eglise d' Auxerre , écrite à M. l'Abbé
Fenel , Chanoine de l'Eglise Metropo
litaine de Sens , touchant l'origine du
Proverbe , Li Chanteor de Sens .
V
Ous avez peut-être crû , Monsieur,
que je ne parlois pas sérieusement
lorsque je vous ai demandé par ma dernie
ce qu'on pensoit à Sens tou re Lettre
>
chang
FEVRIER.. 1734. 218
chant la dénomination qu'un manuscrit
de Saint Germain des Prez , dont il y a
un Extrait dans le Mercure de Septembre
dernier , donne à votre Ville . Je n'ai eu
nulle envie de vous surprendre , lorsque
je me suis informé de vous , si cette épithete
Li chanteor de Sens n'avoit reveillé
l'attention de personne.Supposé que l'Auteur
,publié dans le Mercure,dise la verité,
et que la Liste des Proverbes courans anciennement
en France , soit du tems de
Philippe le Bel , ou environ , il s'ensuivra
seulement par rapport à la Ville de Sens ,
qu'elle étoit alors distinguée par un endroit
honorable ; et pendant que d'autres
Villes étoient renommées , je ne sçai de
quelle maniere la vôtre,qui avoit le chant
en affection , où qui étoit peuplée de
Chantres , se faisoit considerer de ce côté-
là. Vous êtes convenu en me faisant
réponse , que le chant a été cultivé autrefois
chez vous plus que mediocrement :
les preuves que vous en apportez sont ;
1º . la mesure que battoit le Préchantre
en certaines occasions ; 2 °. l'usage ancien
où le même Préchantre étoit de baller ,
ensorte qu'on disoit , à teljour le Préchantre
balle. 3 ° . La coûtume de vos dignitez
de venir à la Neume du grand répons visà-
vis le bas Cheur. Vous avez très grande
212 MERCURE DE FRANCE
de raison ces preuves sont des indices
assez forts ; mais je puis vous dire de plus
qu'il falloit que le chant dans votre Ville
fût en très singuliere recommandation´,
puisque l'Archevêque se faisoit un devoir
de chanter lui - même le celebre répons Afpiciens
, qui est le premier des Nocturnes
de l'Avent. C'est ce que j'ai lu dans l'un
des monumens de votre Eglise. Et j'en
conclus qu'il falloit qu'alors la science du
chant fut très-florissante parmi vous.
Cependant , pour que cet attachement
au chant ait fait naître le Proverbe en
question , je pense qu'il faut encore quelque
chose de plus fort. Je me flatte de l'ayoir
trouvé. C'est , que votre Eglise a été
apparemment l'une des premieres qui ait
adinis le Déchant qui étoit la Musique du
douzième siècle et des suivans . Le Credo
que je vous ai fait voir , noté à deux parties
, dans un des Missels du treiziéme sié
cle conservez chez vous , en est une preuve
manifeste. Car , si la profession de foy
étoit récitée musicalement , comment ne
l'étoient- elles point les autres parties de
l'Office : Le Déchant Discantus fit donc
grande fortune dans l'Eglise de Sens
delà , probablement il s'étendit dans les
Eglises suffragantes . Galvanée Dominicain
Italien , qui mourut en 1297. dit de
Charlemagne
et
FEVRIER: 1734: 213
,
Charlemagne dans son Manipulus Florum.
T. XI.fcriptorum Italicorum pag. 601. Tres
fcolas pro Gregoriano Officio addiscendo ultra
montes instituit . Primam posuit Metis ,
secundam Senonis tertiam Aurelianis:
Je pense que cet Auteur n'a écrit ceci
que parce qu'au treizième siècle on le
croyoit ainsi , et qu'on n'attribuoit point
alors à d'autre qu'à Charlemagne , l'émulation
qui regnoit dans le chant à Sens et
à Orleans. Je ne sçai pas en quel temps
votre Chapitre à congedié les Musiciens ,
mais je sçai bien qu'on y chantoit encore
ce Déchant ou musique ancienne sur les
Ode Noël en 1553. Ce fut cette année là
que notre Chapitre tenant à honneur de
se regler sur le vôtre , conclut en ces termes
le seizième Décembre : Insuper Domini
volentes insequi vestigia Ecclesia Metropolitane
Senonensis & plerarunque aliaruin
Cathedralium hujus regni , concluserunt
☛ ordinaverunt quòd dum decantabuntur illa
novem folemnes Antiphona ad Magnificat
que incipiunt per O ante novem dies pracedentes
Festum Nativitatis Salvatoris D. N.
J. C. qualibet earum Antiphonarum canta
bitur bis , videlicet in principio & in fine dica
ti Cantici Magnificat in musicalibus sive
discantu et cum organis ; et tunc ad aquilam
deferentur due cruces argentea cum duabus
tadis
214 MERCURE DE FRANCE
tadis accensis , ad majorem jubilationem &
divini cultus augmentationem. Si votre Chapitre
fut des premiers à admettre l'organisation
du chant Gregorien , c'est- à - dire,
à permettre qu'on fit des accords sur ce
chant , il fut aussi des premiers à rejetter
cet usage ; non pas que ces accords blessassent
l'oreille , mais parce qu'on sentit
peut être quelques inconveniens de la part
de ceux qui l'executoient. Je crois que
votre Eglise a très prudemment fait , de
prévenir le temps des rafinemens où nous
sommes à present , temps auquel la musique
voudroit supplanter le plainchant.
Les Musiciens en general , et ceux qui
leur sont, pour ainsi dire, affiliez , ou qui leur
touchent par quelque endroir , comme ,
par exemple , seroit un Chanoine , qui
sçait un peu toucher du Clavecin ou
chanter sa partie de musique , font des
raisonnemens si pitoyables en fait de
plainchant , et traitent si malceite science ,
que tout est à craindre pour les Eglises où
ils sont écoutez .
Je présume ( quoique votre nouveau
Breviaire n'en dise rien ) que vous avez
conservé l'ancien usage de chanter dans
votre Choeur le jour de Saint - Etienne le
Pseaume All luiatique Landate 148. dans
un des modes qui sont diffens du systême
FEVRIER. 1733 . 215
me Gregorien , un mode Psalmodique
dont la dominante est corde finale même
de l'ancienne . A l'égard de la semaine de
Pâques , je suis assuré que vous chantez
comme nous aux petites Heures sur une
corde élevée d'un ton seulement au- dessus
de la corde finale de l'ancienne , conformement
aux anciens Livres de l'une et de
l'autre Eglise. Ces modes sont l'écueil de
tous les Musiciens : ils n'y entendent rien
tous tant qu'ils sont ; et en effet , si la
science de quelques-uns ne va pas jusqu'à
connoître seulement le détail du systême
Gregorien , comment pourroient- ils penetrer
dans les systêmes de chant qui sont
plus anciens , et reconnoître dans nos
Offices ce qui en est émané ? Continuez ,
Monsieur , à conserver des vestiges de ces
anciens modes . Il ne dépendra pas de moi
qu'on n'en fasse de même ici , non plus
qu'à Tours et à Langres , dont les Livres
contiennent des restes de cet ancien systême,
usité dans les Gaules avant le siecle
de Charlemagne.
Qui conservera donc toutes les varietez
de chant , si ce n'est les Eglises Cathedrales
dont le Clergé est nombreux ? Il n'y
a de contradiction à attendre là- dessus ,
de la part de ceux qui n'y comprennent
rien , et qui ne sont pas en état d'y
que
rien
216 MERCURE DE FRANCE
rien comprendre. Il y a aussi certaines autres
varietez dans le chant de l'Office Divin
, que l'on supprime quelquefois sans
assez d'attention , pour abreger seulement ,
sous prétexte que les paroles ne sont pas
tirées de l'Ecriture Sainte . Mais ce que j'ai
à leur opposer passeroit les bornes d'une
simple Lettre je n'ai garde de m'étendre
là - dessus . Lorsque se sont des Chanoines
qui raisonnent ainsi , je les fais ressouvenir
de cette belle parole de l'Auteur de
Livre de la coutume d'adorer Dieu de bout
qu'une Eglise Cathedrale doit être la dépositaire
, et la conservatrice de tout ce
qui est négligé dans les petites Eglises , et
que c'est dans son sein qu'en doit retrou
ver l'antiquité qui périt presque par tout
ailleurs , par manque de Clergé , ou faute
de zele pour sa conservation.
J'ai lûavec beaucoup de satisfaction l'éloge
que fait de votre Eglise M. de Molcon
dans son voyage Liturgique , pages
162 et 163. tant sur la séparation de toutes
les Heures de l'Office , que sur le reste.
Ce livre imprimé en 1718. mérite d'avoir
sa place dans la Bibliotheque du Chapitre.
l'Auteur en rapportant sur quel pied
il a vû celebrer l'Office de Primes lorsqu'il
passa par Sens vers l'an 1697. Primes , ditil
, est de toutes les petites Heures l'Office qui
est
FEVRIER. 1734. 217
est toûjours le mieux chanté à Sens . Ils ont
retenu l'ancien Office de Primes. Le Dimanche
, ils disent le Magna Prima ou les grandes
Primes , qui outre les nôtres , contiennent
les fix Pfeaumes qu'on diftribuë à Primes
chaque jour de la semaine . Si vos nouveaux
Breviaires ont un peu abregé le nombre
des Pseaumes , ils n'ont rien diminué de
la noblesse avec laquelle vous chantez
Primes les Dimanches . Tous les Etrangers
qui assistent en sont édifiez , comme
aussi de la majesté et de la gravité avec laquelle
on en chante l'Antienne. Pour le
coup on peut bien dire Li chanteor de
Sens. Cet exemple au reste est à proposer
aux Eglises de la Province , qui toutes ont
eu comme vous le Magna Prima les Dimanches
et dans quelques-unes desquelles
on est près de se relâcher sur ce
qui en tient lieu. Il merite encore mieux
d'être imité que celui de la Musique sur
les O de Noël que nous avons prise de
vous : et ce que vous pratiquez est
plus canonique , que ne l'est la demarche
de ceux qui sollicitent et pressent
pour qu'on chante ces Primes Dominicales
à la maniere des jours . Joly , Chantre
de Notre-Dame de Paris , a fort bien remarqué
dans son Traité de Horis Canonicis
, pag. 40, que l'Office de Primes a été
>
1
établi
218 MERCURE DE FRANCE
établi pour honorer specialement
la Sainte
Trinité ; et c'est sans doute le fondement
sur lequel est appuyée la sage pratique
de votre Eglise.
Je finirai , Monsieur , en vous marquant
que vous vous êtes trompé , lorsque
vous m'avez crû Auteur de la Réponse
, qui est dans le Mercure de Novembre
dernier à la question proposée dans
celui de Juin , touchant l'autorité des Musiciens
en fait de Plainchant . Elle contient
certaines choses qui auroient dû vous empêcher
d'avoir cette pensée. J'approuve
les raisonnemens de l'Ecrivain ; ils sont
très judicieux , mais je n'en suis point
l'Auteur. Au reste il viendra peut- être un
temps où vous verrez un petit ouvrage à
l'occasion de la Décretale de Jean XXII .
Docta Sanctorum . Extr. Comm. de vita
hon . Cleric. lequel traitera en partie la
même matiere . Alors votre jugement sera
mieux fondé. Je suis , &c.
A Auxerre le 19. Décembre 1733 .
Fermer
Résumé : LETTRE de M. L. B. Ch. & Souchantre de l'Eglise d'Auxerre, écrite à M. l'Abbé Fenel, Chanoine de l'Eglise Metropolitaine de Sens, touchant l'origine du Proverbe, Li Chanteor de Sens.
En février 1734, M. L. B. Ch. & Souchantre écrit à l'Abbé Fenel pour discuter de l'origine du proverbe 'Li Chanteor de Sens'. L'auteur, intrigué par ce proverbe mentionné dans un manuscrit de Saint-Germain-des-Prés, suppose qu'il pourrait indiquer une renommée particulière de la ville de Sens pour le chant. L'Abbé Fenel confirme que le chant était effectivement très cultivé à Sens, citant plusieurs preuves telles que la mesure battue par le préchantre, l'usage du préchantre de danser, et la coutume des dignitaires de venir à la neume du grand répons. L'archevêque de Sens chantait lui-même le répons 'Aspiciens' lors des Nocturnes de l'Avent, témoignant de l'importance du chant dans cette ville. L'auteur suggère que l'Église de Sens a été l'une des premières à adopter le déchant, une forme de musique du douzième siècle. Il mentionne un manuscrit du treizième siècle conservant un Credo noté à deux parties et cite Galvanée Dominicain, qui attribue à Charlemagne l'institution de l'enseignement du chant à Sens. La lettre aborde également la suppression des musiciens par le chapitre de Sens et la persistance du déchant jusqu'en 1553. L'auteur admire la prudence de l'Église de Sens en rejetant les accords sur le chant grégorien, anticipant les excès de la musique moderne. L'auteur loue l'Église de Sens pour avoir conservé des modes de chant anciens et encourage à maintenir ces traditions, soulignant l'importance des Églises cathédrales dans la préservation de l'antiquité liturgique. Il mentionne également l'éloge de l'Église de Sens par M. de Molcon dans son 'Voyage Liturgique' et approuve les pratiques liturgiques de Sens, notamment le chant des grandes Primes le dimanche.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
3
p. 838-849
LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
Début :
Il y a, Messieurs, plus de trente ans qu'un sçavant Ecclesiastique d'Orleans, [...]
Mots clefs :
Saint Aignan, Sépulture, Orléans, Évêque, Église, Saint Laurent, Nom, Translation, Saint Pierre, Saints, Églises, Roi Robert
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
LETTRE de M. L *** Ch . et S.
d'Auxerre , aux Auteurs du Mercure de
France , touchant la Sépulture de saint
Agnan , Evêque d'Orleans.
Lya , Messieurs , plus de trente ans
leans , nommé M. le Brun , avoit composé
une ample Dissertation sur la Sépulture
de S. Agnan , dont on vous a envoyé
un Extrait , que vous avez publié
dans
MAY
839
་
1734
dans le Mercure de Septembre dernier .
Ainsi je ne croi pas que celui de qui vous
tenez cet Extrair , se fasse honneur de
la Dissertation. Je la conserve écrite de
la main de l'Auteur , avec la copie d'une
Lettre que M. Baillet lui écrivit en conséquence
de la communication qu'il lui
en donna. Certe Piece servit aussi à Orleans
à détromper tous ceux qui voulurent
en prendre communication . Je
suis bien aise que vous en ayez publié
l'essentiel.
C'est en effet une erreur grossiere de
croire que S. Agnan ait été inhumé dans
l'Eglise de S Laurent , qui est située à
l'Occident de la Ville d'Orleans . Outre
Is témoignages tirez du Testament de
eodebode , de la Vie de S. Mémin , de
celle de S. Euspice , que M. le Brun a
fait valoir , il s'en présente encore un
plus formel , qui n'est pas venu à sa
connoissance , et dont on ne peut éluder
la force , quelque antiquité qu'on s'avise
de donner à la Tranflation prétenduë
du Saint Corps d'une Eglise de S Laurent
, bâtie à l'Occident d'Orleans , en
celle de S. Pierre , bâtie à l'Orient. Cette
Tranflation doit passer pour chimerique,
dès-là qu'on lit dans une Vie authentique
de S. Agnan , qu'après son décès
A iiij un
842 MERCURE DE FRANCE
de S. Laurent à l'Occid.nt d'Orleans ,
laquelle est appellée S. Laurent des Orge
rils ,mais je me croi assez fondé pour soutenir
qu'il y en a eu une autre du nom
du même Saint , du côté Oriental. Si
dans Orleans il a existé jusqu'à cinq ou
six Eglises du nom de Saint Pierre ,
deux sous le titre de Saint Jean , et deux
sous celui de S. Germain d'Auxerre ;
quelle impossibilité y a-t'il qu'il n'y ait
aussi existé deux Eglises du nom de saint
Laurent N'y a- t'il pas eû de- même à
Paris deux Eglises du nom de S. Vincent,
Martyr d'Espagne ? Combien de Villes
où il y a plus d'une Eglise du titre de
S. Martin ou de quelqu'autre Saint célebre
?
Une preuve qu'il y a eu pendant quelques
siecles une Eglise ou Oratoire de
S. Laurent dans le Champ de Tétrade à
l'Orient d'Orleans et sur le Territoire de
l'Eglise qui a porté depuis le nom de
S. Agnan , est , que la memoire de ce saint
Martyr est distinguée de temps immémorial
de celle des autres Saints étrangers
, dans l'Eglise de S. Agnan même.
Dans le Catalogue des dix- neuf Autels
que l'on y érigea lorsque le Roy Robert
fit rebâtir à neuf cette Eglise , on voit
qu'après l'Autel principal sous l'invoca
tion
MAY. 1734.
843
tion de S. Pierre et S. Paul , celui de
S. Benoît et celui de S. Euverte , c'est
celui de S. Laurent qui suit immédiate
ment , par distinction au dessus de ceux
qui portoient le nom de S. Sauveur , de
Notre- Dame , de S. Jean , de S. Michel,
qui ne sont nommez qu'après. Je ne
prétens point qu'il y ait eu dans l'étenduë
du Champ de Tétrade , ni autour
de l'Eglise de S. Pierre , dite depuis saint
Agnan , autant d'Eglises qu'on érigea
d'Autels dans le nouvel Edifice achevé
l'an 1029. mais au moins y en avoit- il
eu d'érigez sous l'invocation de ceux qui
y sont nommez les premiers avant Notre
-Seigneur et la Sainte Vierge .
Helgaud , Moine de Fleury , ne parlet'il
pas d'une Eglise de S. Martin comme
existante sous le Roy Robert , laquelle
étoit une Chapelle à l'extremité du Cloftre
de S. Agnan , et qui n'existe plus ? Il
ne faut donc pasjuger des siecles passez par
les choses qui subsistent de nos jours , ni
croire qu'il n'y a jamais eu à Orleans
qu'une seule Eglise de S. Laurent , parce
qu'on n'en voit qu'une aujourd'hui . Il
doit y en avoir existé une autre à l'Orient
de la Cité ; et c'est cette Eglise aujourd'ui
inconnue et dans l'oubli , qui
sert de fondement à la Tradition d'Or-
A vj leans
844 MERCURE DE FRANCE
leans , que le Corps de S. Agnan a été
transferé de l'Eglise de S. Laurent en celle
qui a depuis porté son nom.
Lorsque le Corps de ce saint Evêque furt
remué pour la premiere fois , il a pû se
faire qu'il reposoit alors dans un Oratoire
ou petite Eglise de S. Laurent , bâtie
dans le Champ de Tétrade , et que
de- là , vû le peu d'éloignement , le Tombeau
tel qu'il étoit , ait été transporté dans
l'Eglise de S. Pierre , qui étoit le principal
Edifice entre ceux de ce Champ . La
petite Eglise de S. Laurent ayant ensuite
été détruite comme inutile , ou étant tombée
de vétusté , il sera arrivé depuis , lorsqu'on
parloit de la Tranflation du Corps.
de S. Agnan , que le Peuple aura attribué
à l'Eglise de S. Laurent des Orgerils ,
ce qui ne convenoit , dans la verité , qu'à
P'Oratoire de S. Laurent , qui avoit été
situé dans la partie toute opposée . Ainsi
se forment souvent les Traditions populaires.
On attribuë à l'objet existant , ce
qui n'avoit été dit ou écrit que de l'objet
détruit ou anéanti ; et pendant que personne
ne produit des preuves de la méprise
, l'erreur prend racine , elle s'autorise
ensuite de son antiquité , trouve
des Protecteurs dans les Habitans du Lieu
qu le nom se conserve , et il faur user
après
MAY. 1734 845
après cela de mille ménagemens pour les
faire revenir de la bévûe où la simplicité
de leurs prédécesseurs les avoit jettez.
M. Baillet n'a pas voulu adopter la nouvelle
Tradition de S. Laurent au Fauxbourg
Occidental d'Orleans . Le Pere de
Longueval , Jesuite , ne déterminant
point la situation de l'Eglise de S. Laurent
, a évité de la favoriser ouvertement.
Quoique la Tranflation du Corps de
S. Agnan du premier lieu de sa Sépulture
dans le lieu qui portoit le nom de
Basilique de S. Pierre , n'eût pas été d'un
grand trajet , et qu'elle n'ait peut- être
été que d'un jet de pierre , elle a cependant
été écrite dans les anciens Martyrologes
et Calendriers , parce qu'elle a été
assez remarquable pour ces temps - là où
les remuemens des Corps des Saints ne
se faisoient gueres que lorsqu'une Eglise
menaçoit ruine ou qu'elle étoit trop petite
pour le concours qui se faisoit à leurs
Tombeaux. On la croit du commencement
du septiéme siecle. L'Ombre de
M. Thiers auroit pû l'ajouter aux exemples
de Tranflations de Saints Confesseurs
qui autorisent sa rétractation * sur celle
de S. Firmin le Confès d'Amiens , outre
1
Cette rétractation est imprimée dans le Mersure:
de Juin x7.3.1 IĮ. volume.
celles
846 MERCURE DE FRANCE
celles de S. Vaast d'Arras , qui fut faite
dans le même siecle par S. Aubert , l'un
de ses Successeurs , et celle de S. Maximin
, Evêque de Tréves , faite aussi alors
par S. Hidulfe , Corevêque de ce Siege.
Je ne parle pas de quelques autres plus
anciennes , telle que celle des Saints Evêques
de Verdun , prédecesseurs de S. Airy
, faite par lui -même au sixiéme siecle ,
ni de celle de S. Gatien , premier Evêque
de Tours , faite par S. Martin.
On doit compter parmi les Martyrologes
où la premiere Tranfiation du Corps
de S. Agnan se trouve , outre celui de
Bede , deux autres qui ont été publiez
par Dom Martene , l'un au troisiéme vofume
de ses Anecdotes , page 1556. où
on lit Aurelianis Translatio S. Aniani ;
l'autre au sixième tome de son ample Col
lection , page 708. où se lit ce qui suit :
In civitate Aurelianis Tranflatio Corporis
S. Aniani Episcopi , et liberatio civitatis
ipsius à Hunnis. Les deux premiers sont
anterieurs au Roy Robert. Le troisiéme
a été écrit de son temps ; mais il copie
le fait de la premiére Transflation , et
non pas celle qui fut faite sous son Regne
l'an 1029. M. de Tillemont s'étonnoit
en 1697. que dans le Breviaire d'Orleans
, publié en 1693 , par M. de Coiſlin ,
l'on
MAY. 1734. 847
l'on ne parlât au XIV. Juin , que de la
Tranflation faite sous le Roy Robert :
et sa surprise étoit bien fondée . Il auroit
fallu en effet parler en ce jour d'abord
de la délivrance de la Ville d'Orleans
des mains des Huns , qui est le premier
Evenement remarquable , par rapport à
ce qui regarde S. Agnan . Puisque la Tradition
étoit il y a neuf cent ans ou mille
ans , que cette délivrance étoit arrivée
le 14. Juin , il étoit bon d'en conserver
la memoire à ce jour et de ne la pas porter
au 17. de Novembre , jour de la mort
du saint Evêque , comme on m'a assuré
qu'elle y a été portée avec son ancien
nom de Fête du Miracle. Secondement ,
il étoit à propos d'y inserer le souvenir
de la premiere Tranflation , au moins
d'une maniere generale ; puisque c'est
elle probablement qui a été la cause pour
laquelle on choisit en 1029. le 14 , et le
Is. Juin faire la seconde et pour
pour
proceder à la Dédicace de la nouvelle
Basilique , dont il ne reste plus aujourd'hui
que les Souterrains.
Ce sont autant de corrections qu'on
auroit pû faire dans la nouvelle Edition
du Breviaire d'Orleans de l'an 1731. mais
au lieu de cela , les Réviseurs ont mieux
aimé rétablir dans la Legende de S. Agnan
l'expres
848 MERCURE DE FRANCE
l'expression , qui avoit fait naître ancien
nement l'erreur populaire , que M. le
Brun des Marettes a combattuë et queje
combats après lui par un texte dont
on aura de la peine à éluder la force.
Ce deffaut d'exactitude dans les Légendes
locales , se trouve aussi accompagné
du retranchement de l'Office de plusieurs
Saints Locaux . Je me contenterai pour
le présent de nommer S. Aunaire , fameux
Evêque , né au VI . siecle dans la
Ville d'Orleans , mort le 25. Septembre ,
et d'y ajoûter une Fête que les Auteurs
du IX. siecle qualifioient de celebre dans
toutes les Eglises des Gaules au 1. Octobre,
laquelle étoit en memoire d'un Saint ,
qui en passant par Orleans au V.- siecle ,
y avoit operé deux Miracles rapportez
dans les Manuscrits de la Cathédrale
même. Tant que les Calendriers des nouveaux
Breviaires particuliers , ne seront
pas fondez sur les Histoires locales , les
imperfections y seront inévitables .
Il est temps maintenant de vous donner
la Lettre que M. Baillet écrivoit
le 16. Décembre 1703. à M. le Brun ,
duquel je vous ai parlé ; les plus petites
Productions de la plume des grands
Hommes , sont toujours bonnes à recueillir..
»Ja
MAY. 1734. 849
t
it
es
To
33
» Je suis fâché , M. que le mois de
» Novembre soit achevé pour la réim-
» pression , car je me serois fait un plai-
» sir et un devoir de profiter de ce que
» vous remarquez au sujet du lieu de la
Sépulture de S. Agnan , et de l'emploi
qu'il eut à S. Laurent avant son Epis-
» copat ; et je n'aurois point fait difficul-
» té de changer le titre équivoque d'A-
» bé , quoique l'on pût l'entendre d'un
» Superieur ou Pasteur de Paroisse , sans
prétendre qu'il y eût des Moines. Il
>> me paroît que les autres endroits sur
»quoi tombent vos Remarques , peuvent
» s'expliquer favorablement et subsister
»comme je les ai mis sans préjudice de
la verité des faits , autant qu'on peut
» faire foy sur l'autorité humaine. Je
n suis , &c .
と
2
Ce 17. Novembre 1733 .
d'Auxerre , aux Auteurs du Mercure de
France , touchant la Sépulture de saint
Agnan , Evêque d'Orleans.
Lya , Messieurs , plus de trente ans
leans , nommé M. le Brun , avoit composé
une ample Dissertation sur la Sépulture
de S. Agnan , dont on vous a envoyé
un Extrait , que vous avez publié
dans
MAY
839
་
1734
dans le Mercure de Septembre dernier .
Ainsi je ne croi pas que celui de qui vous
tenez cet Extrair , se fasse honneur de
la Dissertation. Je la conserve écrite de
la main de l'Auteur , avec la copie d'une
Lettre que M. Baillet lui écrivit en conséquence
de la communication qu'il lui
en donna. Certe Piece servit aussi à Orleans
à détromper tous ceux qui voulurent
en prendre communication . Je
suis bien aise que vous en ayez publié
l'essentiel.
C'est en effet une erreur grossiere de
croire que S. Agnan ait été inhumé dans
l'Eglise de S Laurent , qui est située à
l'Occident de la Ville d'Orleans . Outre
Is témoignages tirez du Testament de
eodebode , de la Vie de S. Mémin , de
celle de S. Euspice , que M. le Brun a
fait valoir , il s'en présente encore un
plus formel , qui n'est pas venu à sa
connoissance , et dont on ne peut éluder
la force , quelque antiquité qu'on s'avise
de donner à la Tranflation prétenduë
du Saint Corps d'une Eglise de S Laurent
, bâtie à l'Occident d'Orleans , en
celle de S. Pierre , bâtie à l'Orient. Cette
Tranflation doit passer pour chimerique,
dès-là qu'on lit dans une Vie authentique
de S. Agnan , qu'après son décès
A iiij un
842 MERCURE DE FRANCE
de S. Laurent à l'Occid.nt d'Orleans ,
laquelle est appellée S. Laurent des Orge
rils ,mais je me croi assez fondé pour soutenir
qu'il y en a eu une autre du nom
du même Saint , du côté Oriental. Si
dans Orleans il a existé jusqu'à cinq ou
six Eglises du nom de Saint Pierre ,
deux sous le titre de Saint Jean , et deux
sous celui de S. Germain d'Auxerre ;
quelle impossibilité y a-t'il qu'il n'y ait
aussi existé deux Eglises du nom de saint
Laurent N'y a- t'il pas eû de- même à
Paris deux Eglises du nom de S. Vincent,
Martyr d'Espagne ? Combien de Villes
où il y a plus d'une Eglise du titre de
S. Martin ou de quelqu'autre Saint célebre
?
Une preuve qu'il y a eu pendant quelques
siecles une Eglise ou Oratoire de
S. Laurent dans le Champ de Tétrade à
l'Orient d'Orleans et sur le Territoire de
l'Eglise qui a porté depuis le nom de
S. Agnan , est , que la memoire de ce saint
Martyr est distinguée de temps immémorial
de celle des autres Saints étrangers
, dans l'Eglise de S. Agnan même.
Dans le Catalogue des dix- neuf Autels
que l'on y érigea lorsque le Roy Robert
fit rebâtir à neuf cette Eglise , on voit
qu'après l'Autel principal sous l'invoca
tion
MAY. 1734.
843
tion de S. Pierre et S. Paul , celui de
S. Benoît et celui de S. Euverte , c'est
celui de S. Laurent qui suit immédiate
ment , par distinction au dessus de ceux
qui portoient le nom de S. Sauveur , de
Notre- Dame , de S. Jean , de S. Michel,
qui ne sont nommez qu'après. Je ne
prétens point qu'il y ait eu dans l'étenduë
du Champ de Tétrade , ni autour
de l'Eglise de S. Pierre , dite depuis saint
Agnan , autant d'Eglises qu'on érigea
d'Autels dans le nouvel Edifice achevé
l'an 1029. mais au moins y en avoit- il
eu d'érigez sous l'invocation de ceux qui
y sont nommez les premiers avant Notre
-Seigneur et la Sainte Vierge .
Helgaud , Moine de Fleury , ne parlet'il
pas d'une Eglise de S. Martin comme
existante sous le Roy Robert , laquelle
étoit une Chapelle à l'extremité du Cloftre
de S. Agnan , et qui n'existe plus ? Il
ne faut donc pasjuger des siecles passez par
les choses qui subsistent de nos jours , ni
croire qu'il n'y a jamais eu à Orleans
qu'une seule Eglise de S. Laurent , parce
qu'on n'en voit qu'une aujourd'hui . Il
doit y en avoir existé une autre à l'Orient
de la Cité ; et c'est cette Eglise aujourd'ui
inconnue et dans l'oubli , qui
sert de fondement à la Tradition d'Or-
A vj leans
844 MERCURE DE FRANCE
leans , que le Corps de S. Agnan a été
transferé de l'Eglise de S. Laurent en celle
qui a depuis porté son nom.
Lorsque le Corps de ce saint Evêque furt
remué pour la premiere fois , il a pû se
faire qu'il reposoit alors dans un Oratoire
ou petite Eglise de S. Laurent , bâtie
dans le Champ de Tétrade , et que
de- là , vû le peu d'éloignement , le Tombeau
tel qu'il étoit , ait été transporté dans
l'Eglise de S. Pierre , qui étoit le principal
Edifice entre ceux de ce Champ . La
petite Eglise de S. Laurent ayant ensuite
été détruite comme inutile , ou étant tombée
de vétusté , il sera arrivé depuis , lorsqu'on
parloit de la Tranflation du Corps.
de S. Agnan , que le Peuple aura attribué
à l'Eglise de S. Laurent des Orgerils ,
ce qui ne convenoit , dans la verité , qu'à
P'Oratoire de S. Laurent , qui avoit été
situé dans la partie toute opposée . Ainsi
se forment souvent les Traditions populaires.
On attribuë à l'objet existant , ce
qui n'avoit été dit ou écrit que de l'objet
détruit ou anéanti ; et pendant que personne
ne produit des preuves de la méprise
, l'erreur prend racine , elle s'autorise
ensuite de son antiquité , trouve
des Protecteurs dans les Habitans du Lieu
qu le nom se conserve , et il faur user
après
MAY. 1734 845
après cela de mille ménagemens pour les
faire revenir de la bévûe où la simplicité
de leurs prédécesseurs les avoit jettez.
M. Baillet n'a pas voulu adopter la nouvelle
Tradition de S. Laurent au Fauxbourg
Occidental d'Orleans . Le Pere de
Longueval , Jesuite , ne déterminant
point la situation de l'Eglise de S. Laurent
, a évité de la favoriser ouvertement.
Quoique la Tranflation du Corps de
S. Agnan du premier lieu de sa Sépulture
dans le lieu qui portoit le nom de
Basilique de S. Pierre , n'eût pas été d'un
grand trajet , et qu'elle n'ait peut- être
été que d'un jet de pierre , elle a cependant
été écrite dans les anciens Martyrologes
et Calendriers , parce qu'elle a été
assez remarquable pour ces temps - là où
les remuemens des Corps des Saints ne
se faisoient gueres que lorsqu'une Eglise
menaçoit ruine ou qu'elle étoit trop petite
pour le concours qui se faisoit à leurs
Tombeaux. On la croit du commencement
du septiéme siecle. L'Ombre de
M. Thiers auroit pû l'ajouter aux exemples
de Tranflations de Saints Confesseurs
qui autorisent sa rétractation * sur celle
de S. Firmin le Confès d'Amiens , outre
1
Cette rétractation est imprimée dans le Mersure:
de Juin x7.3.1 IĮ. volume.
celles
846 MERCURE DE FRANCE
celles de S. Vaast d'Arras , qui fut faite
dans le même siecle par S. Aubert , l'un
de ses Successeurs , et celle de S. Maximin
, Evêque de Tréves , faite aussi alors
par S. Hidulfe , Corevêque de ce Siege.
Je ne parle pas de quelques autres plus
anciennes , telle que celle des Saints Evêques
de Verdun , prédecesseurs de S. Airy
, faite par lui -même au sixiéme siecle ,
ni de celle de S. Gatien , premier Evêque
de Tours , faite par S. Martin.
On doit compter parmi les Martyrologes
où la premiere Tranfiation du Corps
de S. Agnan se trouve , outre celui de
Bede , deux autres qui ont été publiez
par Dom Martene , l'un au troisiéme vofume
de ses Anecdotes , page 1556. où
on lit Aurelianis Translatio S. Aniani ;
l'autre au sixième tome de son ample Col
lection , page 708. où se lit ce qui suit :
In civitate Aurelianis Tranflatio Corporis
S. Aniani Episcopi , et liberatio civitatis
ipsius à Hunnis. Les deux premiers sont
anterieurs au Roy Robert. Le troisiéme
a été écrit de son temps ; mais il copie
le fait de la premiére Transflation , et
non pas celle qui fut faite sous son Regne
l'an 1029. M. de Tillemont s'étonnoit
en 1697. que dans le Breviaire d'Orleans
, publié en 1693 , par M. de Coiſlin ,
l'on
MAY. 1734. 847
l'on ne parlât au XIV. Juin , que de la
Tranflation faite sous le Roy Robert :
et sa surprise étoit bien fondée . Il auroit
fallu en effet parler en ce jour d'abord
de la délivrance de la Ville d'Orleans
des mains des Huns , qui est le premier
Evenement remarquable , par rapport à
ce qui regarde S. Agnan . Puisque la Tradition
étoit il y a neuf cent ans ou mille
ans , que cette délivrance étoit arrivée
le 14. Juin , il étoit bon d'en conserver
la memoire à ce jour et de ne la pas porter
au 17. de Novembre , jour de la mort
du saint Evêque , comme on m'a assuré
qu'elle y a été portée avec son ancien
nom de Fête du Miracle. Secondement ,
il étoit à propos d'y inserer le souvenir
de la premiere Tranflation , au moins
d'une maniere generale ; puisque c'est
elle probablement qui a été la cause pour
laquelle on choisit en 1029. le 14 , et le
Is. Juin faire la seconde et pour
pour
proceder à la Dédicace de la nouvelle
Basilique , dont il ne reste plus aujourd'hui
que les Souterrains.
Ce sont autant de corrections qu'on
auroit pû faire dans la nouvelle Edition
du Breviaire d'Orleans de l'an 1731. mais
au lieu de cela , les Réviseurs ont mieux
aimé rétablir dans la Legende de S. Agnan
l'expres
848 MERCURE DE FRANCE
l'expression , qui avoit fait naître ancien
nement l'erreur populaire , que M. le
Brun des Marettes a combattuë et queje
combats après lui par un texte dont
on aura de la peine à éluder la force.
Ce deffaut d'exactitude dans les Légendes
locales , se trouve aussi accompagné
du retranchement de l'Office de plusieurs
Saints Locaux . Je me contenterai pour
le présent de nommer S. Aunaire , fameux
Evêque , né au VI . siecle dans la
Ville d'Orleans , mort le 25. Septembre ,
et d'y ajoûter une Fête que les Auteurs
du IX. siecle qualifioient de celebre dans
toutes les Eglises des Gaules au 1. Octobre,
laquelle étoit en memoire d'un Saint ,
qui en passant par Orleans au V.- siecle ,
y avoit operé deux Miracles rapportez
dans les Manuscrits de la Cathédrale
même. Tant que les Calendriers des nouveaux
Breviaires particuliers , ne seront
pas fondez sur les Histoires locales , les
imperfections y seront inévitables .
Il est temps maintenant de vous donner
la Lettre que M. Baillet écrivoit
le 16. Décembre 1703. à M. le Brun ,
duquel je vous ai parlé ; les plus petites
Productions de la plume des grands
Hommes , sont toujours bonnes à recueillir..
»Ja
MAY. 1734. 849
t
it
es
To
33
» Je suis fâché , M. que le mois de
» Novembre soit achevé pour la réim-
» pression , car je me serois fait un plai-
» sir et un devoir de profiter de ce que
» vous remarquez au sujet du lieu de la
Sépulture de S. Agnan , et de l'emploi
qu'il eut à S. Laurent avant son Epis-
» copat ; et je n'aurois point fait difficul-
» té de changer le titre équivoque d'A-
» bé , quoique l'on pût l'entendre d'un
» Superieur ou Pasteur de Paroisse , sans
prétendre qu'il y eût des Moines. Il
>> me paroît que les autres endroits sur
»quoi tombent vos Remarques , peuvent
» s'expliquer favorablement et subsister
»comme je les ai mis sans préjudice de
la verité des faits , autant qu'on peut
» faire foy sur l'autorité humaine. Je
n suis , &c .
と
2
Ce 17. Novembre 1733 .
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Résumé : LETTRE de M. L*** Ch. et S. d'Auxerre, aux Auteurs du Mercure de France, touchant la Sépulture de saint Agnan, Evêque d'Orleans.
M. L*** répond à une publication du Mercure de France concernant la sépulture de saint Agnan, évêque d'Orléans. Il mentionne que M. le Brun avait rédigé une dissertation sur ce sujet, dont un extrait avait été publié dans le Mercure de Septembre 1734. M. L*** possède cette dissertation manuscrite ainsi qu'une lettre de M. Baillet à ce sujet. La lettre rectifie une erreur selon laquelle saint Agnan aurait été inhumé dans l'église de Saint-Laurent à l'ouest d'Orléans. Plusieurs témoignages, dont ceux du testament de Chrodebode, de la vie de saint Mémin et de saint Euspice, ainsi qu'une vie authentique de saint Agnan, démontrent que cette croyance est erronée. Une église de Saint-Laurent existait également à l'est d'Orléans, et il était courant qu'une ville possède plusieurs églises portant le même nom. L'auteur soutient que le corps de saint Agnan a été transféré d'un oratoire de Saint-Laurent situé dans le champ de Tétrade à l'église de Saint-Pierre, qui est devenue par la suite l'église Saint-Agnan. Cette translation est attestée par des martyrologes et calendriers anciens, et elle est datée du début du septième siècle. La confusion populaire a attribué cette translation à l'église de Saint-Laurent des Orgerils, située à l'ouest, alors qu'elle concernait un oratoire à l'est. M. Baillet et le père de Longueval n'ont pas adopté la tradition erronée de la translation du corps de saint Agnan. L'auteur critique également le Breviaire d'Orléans de 1731 pour avoir omis de mentionner la première translation et la délivrance de la ville d'Orléans des Huns, événements liés à saint Agnan. Il conclut en mentionnant une lettre de M. Baillet à M. le Brun, datée du 16 décembre 1703, qui reconnaît les remarques de M. le Brun sur la sépulture de saint Agnan.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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