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p. 205-218
ALLEMAGNE.
Début :
Le 2, le Sieur de Klinggraff remis au Ministere un nouveau Mémoire, portant [...]
Mots clefs :
Vienne, Sieur de Klinggraff, Roi de Prusse, Impératrice-Reine, Combats, Royaume de Bohême, Régiments, Dresde, Famille royale, Camp de Pirna, Soldats, Officiers, Discours de la reine, Conseillers prussiens, Ordonnance du roi, Directoire de guerre, Leipzig, Troupes prussiennes, Déclaration du roi, Commerce, Comte de Salmour, Tactique militaire, Fortifications, Berlin, Cavalerie, Infanterie, Motifs de la guerre, Hambourg, Ratisbonne, Electorat de Saxe
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texteReconnaissance textuelle : ALLEMAGNE.
ALLEMAGNE.
DE VIENNE , le 19 Septembre.
E2 , LE 2, le Sieur de Klinggraff remit au Miniftere
un nouveau Mémoire , portant en fubftance :
Que cette Princeffe n'avoit point répondu à la demande
qui fai oit le principal article du Mémoire
pré'enté par lui le 18 du mois dernier ; fçavoir ,
que S. M. Impériale & Royale , donnât une déclaration
formelle , quelle n'avoit aucune intention
d'attaquer S. M. Pruffienne , ni cette année
ni l'année prochaine : que le Roi de Pruffe avoit
entrevu , dans le filence de l'Impératrice Reine
fur cette demande , les difpofitions peu favorables
où elle étoit à ſon égard ; que cependant ce Prince
, pour faire voir combien il défiroit la confervation
de la tranquillité générale , réitéroit encore
une fois les inftances , pour obtenir les affurances
qu'il avoit demandées ; que l'Impératrice
Reine n'auroit pas plutôt donné ces affurances ,
que Sa Majefté Pruffienne feroit retirer les troupes.
La réponſe de l'Impératrice Reine à ce Mémoire
a été : « Qu'a peine il lui a été préſenté ,
» qu'Elle a reçu la nouvelle de l'entrée des trou-
»> pes Pruffiennes en Saxe , & du Manifefte pu-
» blié à cette occafion par le Roi de Pruffe ; qu'a
206 MERCURE DE FRANCE.
1
» près une aggreſſion auffi marquée , il n'eft plus
» queftion d'autre réponse que de celle que S. M.
» Impériale & Royale fe propofe de faire au Ma-
» nifefte de Sa Majefté Pruffienne ; que la der-
» niere , qui a été remife au Sieur de Klinggraff ,
» contient toutes les explications , qui peuvent
» être compatibles avec la dignité de S. M. Impé-
» riale & Royale ; que la propofition de conver-
» tir en treve une paix fondée ſur des Traités fo-
» lemnels , n'eft fufceptible d'aucune reponſe » .
Le Sieur de Klinggraff partit hier , fans prendre
congé. Leurs Majeftés Impériales ont mandé au
Comte de la Puebla , leur Miniftre en Pruffe , de
quitter Berlin de la même maniere.
On vient d'apprendre que le 13 de ce mois le
Roi de Pruffe a commencé les actes d'hoftilisé
dans le Royaume de Boheme. Huit Eſcadrons de
fes troupes ont attaqué les Gardes avancées de
·P'armée de l'Impératrice Reine ; mais ils ont été
repouffés trois fois. On leur a tué quatorze hommes
, & l'on a fait prifonnier un Huffard. Les
Autrichiens n'ont eu que deux foldats bleffés. Sept
Compagnies du Régiment de Portugal font attendues
ici , pour remplacer un pareil nombre de
Compagnies du Régiment de l'Archiduc Pierre ,
qui ont pris la route de Boheme. L'Impératrice
Reine a envoyé ordre dans les Cercles antérieurs
de ce Royaume d'enrôler tous les jeunes gens en
état de fervir , & de faire paffer dans les Cercles
voifins de l'Autriche & de la Moravie les enfans
depuis l'âge de huit ans jufqu'à feize , afin de les
fouftraire à la néceffité d'entrer au ſervice de Sa
Majesté Pruffienne . Près de huit cens familles ,
dans la crainte d'être exposées aux horreurs de la
guerre , font forties de la Siléfie Autrichienne , &
fe font réfugiées tant ici que dans les environs,
OCTOBRE. 1756. 207
On a muni de trois cens pieces de canon la Place
d'Olmutz , dont le commandement a été donné
au Baron de Marshall.
Toutes les troupes qui font en quartiers dans
les Provinces Héréditaires depuis la mer Adriati→
que jufqu'au Danube , fe tiennent prêtes à marcher.
On a envoyé des ordres à la Régence du
Tirol de faire les difpofitions néceffaires pour le
paffage d'une partie des Bataillons , que l'Impératrice
Reine retire de fes Etats d'Italie . De pareils
ordres ont été envoyés à la Régence du Trentin.
DE DRESDE , le 23 Septembre.
Les circonftances préfentes ont déterminé le
Roi à quitter cette Ville ; & Sa Majeſté , accompagnée
des Princes Xavier & Charles , s'eft
rendue au camp de Pirna. La Reine eft reftée ici
avec le Prince Royal les jeunes Princes &
Princeffes. Le Roi de Pruffe les a fait affurer
que les égards refpectueux qui leur étoient dûs ,
feroient religieufement obfervés. Par ordre de ce
Prince , on a fermé les Tribunaux , & le fcellé a
été mis à tous les Bureaux de la Chancellerie . Sa
Majefté Pruffienne arriva ici le 10. Elle n'y a pas
fait un long séjour , & Elle est allée rejoindre fes
troupes , dont le quartier général eft actuellement
à Zedlitz. A Pexception de quelques Couriers
qui apportent à la Reine des nouvelles de la fanté
du Roi , aucune perfonne venant du camp de Pirna
n'a permiffion d'entrer dans cette Ville La Gar
nifon , que le Roi de Proffe y a laiffée , eft
compofée de deux mille hommes , & eft commandée
par le Baron de Willich . II eft défendu
à tout foldat Pruffien foit dans cette Capitale ,
foit dans tout autre endroit de l'Electorat , d'éxi¬
208 MERCURE DE FRANCE.
ger pour fa fubfiftance plus de deux livres de pain ,
d'une demi-livie de viande , & de deux pots de
bier . Aujourd'hui foixante Bâtimens ont paílé
fur l'Elbe , chargés de provifions pour l'armée
Pruffienne. La quantité de celles qu'on a tirées des
différentes partes de la Saxe , afin de fatistaire aux
livr.ifons néceffaires pour cette armée , a tellement
épuifé le pays , que les grains font montés
au quadruple du prix ordinaire.
Par ordre du Roi de Pruffe , le Baron de Willich
a fait enlever l'artillerie , les armes , les drapeax
& les étendards qui étoient dans l'Arſenal
de cette Ville , & on les tranfporte à Magdebourg
pour y demeurer en dépôt jufqu'à la conclufion
d'un accommodement. Le même Commandant
ayant pris une notice exacte de tous les Officiers
Saxons qui fe trouvoient ici , leur a fignifié : « Qu'ils
Détoient prifonniers de guerre ; qu'on leur laiffoir
cependant leurs épées , mais qu'ils devoient
s'engager formellement à ne point fervir contre
»Sa Majefté Pruffienne.
Le 14 de ce mois , la Reine fit prier les Miniftres
étrangers de fe rendre au Château , où Elle
leur tint ce difcours : « Meffieurs , les circonftan-
»ces préfentes me forcent de vous déclarer que
»Sa Majesté Pruffienne , avant d'entrer en Saxe ,fit
» donner au Roi mon époux , les affurances les plus
fortes d'une amitié inaltérable . Sur des affuran-
» ces pareilles & auffi pèu équivoques , le Roi mon
wépoux ne balança point à accorder aux trou-
»pes Pruffiennes un paffage fimple & exempt de
préjudice auffi - tôt que Sa Majesté le Roi de
»Pruffe l'eût demandé à notre Miniftre à Berlin.
»Nous n'avons pas même eu la moindre défiance ,
wen voy int ces troupes étrangeres entrer fur no-
»tre territoire. Mais au lieu d'une exacte diſcipline
OCTOBRE. 1756. 209
»& d'un paiement régulier que nous attendions
»d'elle , nous avons vu avec douleur que le Prince
»de Brunſwic , non content d'avoir fait mettre le
»fcellé fur toutes les caiffes de nos revenus à
Leipfick , a convoqué nos Etats pour leur donner
des ordres abfolument contraires à nos inten-
»tions. Le Roi mon époux , envoya le Général .
Meager à S. M. Pruflienne , pour lui repréſenter
qu'on ne pouvoit combiner ces fortes d'actes
d'hoftilité avec les déclarations précédentes , &
que d'ailleurs le Roi n'avoit d'autres vues que
»d'obferver, la plus exacte neutralité dans cette
guerre. La réponse que le Général Meager reçut
par écrit , ne fut qu'un extrait de la Déclaration
publiée de la part du Roi de Pruffe , pour jufti
fier les motifs de fon entrée dans ce pays. Après
Dune réponse auffi vague & auffi peu catégorique ,
Dle Roi mon époux , toujours animé d'un vrai
ndefir d'entretenir la paix en Allemagne & le
repos dans les Etats , pria le Lord Stormont &
Dle Sieur de Malzahn d'aller au camp. Pruffien •
»pour fçavoir les intentions du Roi de Pruffe &
ce qu'il exigeoit. Mais loin de rien propofer &
»de rien entendre , le Roi de Pruffe répliqua au
»Lord Stormont : Tout ce que vous me proposez
one me convient point , & de ma part je n'ai au
cune propofition à faire. Après le retour du I ord ,
»le Roi fe rendit à Pirna. J'y voulus envoyer un
Page chargé d'une Lettre ; mais on l'arrêta , &
» même on m'a refufé d'y pouvoir envoyer un
»Gentilhomme qui ne feroit chargé d'aucune lettre.
Enfin quoiqu'hier le Général Lentulus m'ait
waffuré de la part de S. M. Pruffienne , que la
»garnifon qu'on avoit mife en cette Capitale y
étoit pour ma sûreté , & même à mes ordres ,
non eft venu néanmoins à l'extrêmité de me
210 MERCURE DE FRANCE:
demander aujourd'hui les clefs du cabinet des
>>Archives. N'ayant pu réfifter à la force dont on
»me menaçoit , je les ai remiſes à l'Officier qui
»avoit la commiffion de les recevoir. Pour fur-
>> croit de chagrin , mes Miniftres de Conférence
» m'ont communiqué dans ce moment l'infinua
»tion qui leur a été faite par le Général Keith ,
»que le Roi de Pruffe fe propofoit de fubftituer
>> en lear place des Confeillers Pruffiens , pour
Davoir foin de l'adminiſtration de cet Electorat.
>> Telle eft , Meffieurs, la triſte ſituation où nous
nous trouvons. Nous espérons que vous en ferez
un fidele rapport à vos Cours refpectives , &
»nous fommes perfuadés qu'Elles n'approuveront
»pas le tort qui nous arrive , & qu'au contraire
»Elles jugeront qu'il eft de leurs intérêts d'épouſer
>> les nôtres. »
La Reine en remettant les clefs des Archives à
l'Officier Pruffien , qui avoit été chargé de les demander
, lui avoit dit : « Malgré le rang où la
nature m'a placée , je partage avec la derniere
»des fujettes le malheureux fort tombé fur la Saxe.
>>Séparée du Roi mon époux , & d'une partie de
»ma famille , j'effuie avec le refte de mes enfans
»le défagrément d'un état plein d'angoiffe & d'in-
» quiétude , & je me vois expofée avec cette partie
»de ma famille , qui eft auprès de moi , à manquer
» bientôt des chofes néceffaires , par la privation
des moyens propres à me les procurer. » Le Roi
de Pruffe informé des plaintes de cette Princeffe ,
lui a fait réitérer qu'il avoit donné les ordres les
plus précis pour lui faire garder le refpect qui lui
étoit dû ; que fi ces ordres étoient mal fuivis ,
Elle eût à l'en faire avertir , & qu'il puniroit févérement
les contrevenans ; qu'Elle ni la Famille
Royale & Electorale ne manqueroient jamais des
OCTOBRE. 1756. 211
chofes néceſſaires ; que la dignité de leur rang &
de leur état ne feroit jamais confondue avec les
circonftances qui regardoient le Public ; qu'ainfi
il prioit Sa Majefté de vouloir bien fe tranquillifer
, & de ne point outrer les idées qu'Elle fe formoit
de l'état des choſes. En même temps S. M.
Pruffienne a recommandé aux Officiers des Détachemens
poftés entre fon camp & cette Ville ,
de laiffer paffer librement tout ce qui étoit pour
le fervice de la Reine , des Princes & des Princeffes.
Il paffe tous les jours ici des Régimens , tant
d'Infanterie que de Cavalerie , qui vont joindre
l'armée du Roi de Pruffe. Tous les avis confirment
que ce Prince dirige fa marche fur Leitmaritz.
Depuis avant - hier les Bourgeois de cette
Capitale font difpenfés de fournir le pain aux foldats
Pruffiens , qui y font en garniſon ; mais on
continue de fournir à ces Soldats la viande & la
biere.
On publia à Torgaw le 13 , une Ordonnance ,
dont voici la teneur : « Sa Majefté le Roi de Pruf-
»fe , par des motifs fondés fur la néceffité des
conjonctures, a pris la réfolution d'établir à Tor-
»gaw un Directoire de Guerre pour la perception
»de tous les revenus , tant de la Chambre des Fi-
» nances , que de l'Ectorat de Saxe , fous quelque
nom que ce puiffe être. En conféquence , tous
les Receveurs des Accifes générales & autres
» droits , de même que les Fermiers Officiers , &
généralement tous les Suppots des Douanes &
» Péages , fans exception , font avertis d'apporter
& de délivrer fidélement audit Directoire de
» Guerre les deniers qu'ils fe trouveront avoir en
»caiffe ; & ce fous peine de double reftitution &
de caflation , ou même de prifon , fuivant l'exi
212 MERCURE DE FRANCE.
» gence du cas. Ce qu'ils devront faire à l'avenir
»tous les mois , fans y manquer : leur étant dé-
» fendu très-expreflément de remettre aucun de
ces deniers à qui que ce foit , finon au ſeul Di-
»rectoire fufdit. »
DE LEIPSICK , le 22 Septembre.
Divers Détachemens des troupes Pruffiennes
ont occupé dans cet Electorat les Villes de Merfbourg
, d'Eifleben , de Naumbourg , de Weffeinfels
, de Zeitz & de Torgaw . La Colonne ,
à la tête de laquelle eft le Roi de Pruffe , a pris
fa marche le long de l'Elbe . Elle campa le 6 à
Rothen Schoneberg , la droite appuyée fur Tan
nenberg , & la gauche fur Wundfchritz . Le jour
précédent , la Colonne du Prince Ferdinand de
Brunfwic avoit campé près de Freyberg , & celle
du Prince de Bevern à Fifchbach , de l'autre côté
de l'Elbe. Depuis le Roi de Pruffe s'eſt avanté
à Torgaw , où il a établi fon quartier genéral .
Le Comte de Stormont , Envoyé du Roi de la Grande-
Bretagne auprès de Roi , s'eft rendu auprès de
S. M. Pruthienne avec deux Miniftres de Sa Majefté.
Les Pruffiens ont vuidé les Arfenaux des
principales Villes où ils ont paffé ; & ils en ont
fait voiturer l'artillerie à To gaw.
On publia le 15 une Déclaration , dont voici la
teneur. « Sa Majesté le Roi de Pruffe ayant pris -
>>fous fa garde & protection les Etats Electoraux
» de la Maifon de Saxe ; ont fait fçavoir , de la
» part de S. M. , à tous & un chacun , que fon
»intention eft , que perfonne , à l'occafion des
> troubles actuels ne foit inquiété dans fa pro-
»feſſion , mais qu'au contraire chacun puiffe y
vaquer tranquillement , & comme à l'ordinai
OCTOBRE. 1756. 213
»re. S. M. défire auffi , que les Foires de Léipfick
& de Naumbourg , & les autres Marchés
>> publics , fe tiennent fuivant l'ufage établi ; que
tous les acheteurs ou vendeurs , qui voudront
ns'y rendre , puiffent les fréquenter librement ,
D& qu'il ne leur foit apporté à cet égard aucun
»obftacle ni empêchement . A ces caufes , S. M. fait
>> affurer tous Commerçans , Négocians , & Fa-
>> bricans , tant de cet Electorat que des pays
»étrangers , qui font dans l'habitude de fréquenwter
leidites Foires & lefdits Marchés publics , &
>> qui voudront y venir aux temps accoutumé
nqu'ils y jouiront d'une entiere liberté & fûreté
»pour leurs perfonnes & pour leurs effets ; que
S. M. les prend fous fa pro.ection & fauvegarde
>>Royale, & qu'il leur fera accordé en confequen-
» ce les faufconduits néceffaires » . Le Commiffaire
, qui eft ici de la part du Roi de Pruffe , a annoncé
aux habitans , qu'ils pouvoient payer leurs
taxes aux Receveurs ordinaires.
Sur les nouvelles affurances que le Roi a fait
donner à ce Prince par le Comte de Salmour ,
que Sa Majesté avoit toujours été dans la réfolution
de ne prendre aucune part aux différends
furvenus entre les Cours de Vienne & de Berlin ;
S. M. Pruffienne a répondu : « Qu'Elle ne fou-
»haitoit rien de plus Elle-même , que de trouver
»le Roi dans ces fentimens ; que la neutralité ,
aque le Roi défiroit d'obferver , étoit précifé-
>> ment ce qu'Elle requéroit de lui ; mais que pour
>> rendre cette neutralité plus fûre , & la mettre à
»l'abri de variation , il convenoit que le Roi fé-
»parât fon armée , & qu'il renvoyat dans leurs
»quartiers les troupes qu'il avoit affemblées à
»Pirna ; que fi le Roi vouloit donner par une
»femblable démarche la preuve de fes difpofitions
214 MERCURE DE FRANCE.
pacifiques , S. M. Pruflienne fe feroit dès lors un
»plaifir de montrer , par une égale condescendanace
, combien Elle étoit portée de ſon côté à
donner des marques réelles de ſon amitié au
>>Roi , & à fe concerter avec Sa Majeſté ſur les
arrangemens que les conjonctures peuvent requérir
» . Le Roi n'eft point dans la réfolution
d'accepter la propofition du Roi de Pruffe , & Sa
Majefté a déclaré , « Qu'Elle attendroit dans fon
camp la décifion des évenemens ; que fi les
Pruffiens entreprenoient de l'y forcer ,Elle foutiendroit
leurs efforts ».
Divers mouvemens du Roi de Pruffe donnant
lieu de croire qu'il a deffein de refferrer de tous
côtés le camp de Pirna , le Feld-Maréchal Comte
de Browne a décampé de Kollin le 9 de ce mois ,
pour fe porter en avant , & pour tâcher de conferver
la communication avec les troupes Saxonnes.
Le Corps que ce Général a détaché fous les
ordres du Comte de Wied , s'eft faifi des paffages
entre Trebnitz & Catharinenberg: On a reçu
avis que les Pruffiens établiffent des batteries pour
attaquer les Saxons dans leur camp.
Selon les nouvelles qu'on a du camp de Pirna ,
le Roi a fait diftribuer aux différens Corps de fes
troupes la Déclaration fuivante. « Dès le com-
»mencement de l'invafion des troupes Pruffien-
»nes dans cet Electorat , Sa Majefté a mis tout
wen oeuvre , pour tâcher de faire un accommode-
>ment avec le Roi de Pruffe. Ce Prince ayant
mexigé des conditions inouies , Sa Majefté non-
>>feulement les a rejettées , mais a fait fçavoir à
»S. M. Pruffienne , qu'Elle aimoit mieux tout perdre
que de s'y foumettre. Ainfi Sa Majesté atptend
de la bravoure & de la fermeté de fes fidelles
troupes , qu'elles fe montreront diſpoſées à
OCTOBRE. 1756. 215
foutenir jufqu'à la derniere goutte de leur fang ,
»la réfolution qu'a prife Sa Majefté. Elle les ex-
>> horte à tout facrifier pour la défenfe de leur
>>Roi, & pour la confervation de leur
»ne ur» .
propre
hon-
Le Roi de Pruffe eſpérant de réduire l'armée
du Roi par la famine , a laiffé vingt mille hom
ines pour tenir le camp de Sa Majefté bloqué . La
femaine derniere , les Pruffiens firent fauter les
fortifications de Wittemberg, Ils fortifient actuellement
laVille de Torgaw , où leur Directoire de
Guerre eft établi . Ce Directoire a fommé les différens
Cercles, de l'Electorat , de livrer , d'ici à
trois ſemaines au plus tard , onze cens boeufs ,
deux mille cinq cens moutons , deux cens mille
mefures d'avoine , cent cinquante mille quintaux
de foin & vingt mille bottes de paille. Cette fourniture
eft évaluée à fix cens vingt - cinq mille
écus .
DE BERLIN , le 21 Septembre.
Les troupes d'Infanterie du Roi confiftent en
cent quarante bataillons. La Cavalerie eft compofée
d'un Efcadron de Gardes du Corps , de foixante
Efcadrons de Gendarmes , Carabiniers &
Cuiraffiers , de foixante-dix Efcadrons de Dragons
, de quatre-vingt Efcadrons de Huffards , &
de deux Efcadrons de Chaffeurs à cheval. Deux
Corps d'armée font affemblés dans la Haute &
dans la Baffe Siléfie , & ont occupé les défilés ,
par lesquels on peut paffer du Royaume de Bo
heme dans cette Province. Il y a auffi quelques
troupes campées dans les environs de Glatz. A
juger par ces difpofitions , il paroît que le Roi fe
propofe non feulement de couvrir la Siléfie , mais
216 MERCURE DE FRANCE.
`auffi de faire entrer de ce côté une feconde armée
en Boheme.
Dans l'expofé des motifs qui ont déterminé le
Roi à prendre les armes , Sa Majefté le plaint particuliérement
de ce que l'Impératrice Reine de
Hongrie & de Boheme , a augmenté jufqu'à foixante
pour cent , les droits fur les marchandifes
des Etats de Pruffe. Voici un des endroits les plus
remarquables de cet expofé. a Il eft certain que
>>le Roi commence les hoftilités : mais comme ce
>>terme a fouvent été confondu avec celui d'aggreffion
, l'on fe croit obligé de diftinguer le fens
de ces deux mots . Par aggreffion , l'on doit en-
»tendre tout acte , qui eft diamétralement oppofé
à l'efprit d'un Traité de Paix. Une Ligue of
fenfive ; des ennemis qu'on fufcite , & qu'on
pouffe à faire la guerre à une Puiffance ; le deffein
d'envahir les Etats d'autrui ; une irruption
>>foudaine ; toutes ces chofes différentes font au-
»tant d'aggreffions , quoique la derniere feule fe
trouve dans le cas des hoftilités . Quiconque cher-
>>che à fe défendre contre ces aggreffions , ou à en
»prévenir les fuites , peut commencer les hoftiliwtés
, mais il n'eft pas l'aggreffeur » ...... Cet Ecrit
finit ainfi : « S. M. déclare , que les Libertés du
»Corps Germanique ne feront ensevelies qu'en
>> un même tombeau avec la Pruffe. Elle prend le
Ciel à témoin , qu'ayant vainement employé les
moyens les plus convenables pour préferver fes
»propres Etats & toute l'Allemagne , des fléaux de
Dla guerre dont ils étoient ménacés , Elle eft for
cée de prendre les armes , pour diffiper une
»confpiration tramée contre fes poffeffions & fes
>> Etats .... Le Roi ne s'écarte de fa modération
»ordinaire , que parce que cette vertu ceffe d'én
pêtre une , lorfqu'il s'agit de défendre fon honneur
OCTOBRE . 1756. 217
neur , fon indépendance , fa Patrie & fa Cou-
>>ronne » . Le Comte de la Puebla , Miniftre de
Leurs Majeftés Impériales , partit le 16 , fans
prendre congé.
La petite ville de Biefenthal , fituée à quatre
lieues d'ici , a été totalement réduite en cendres.
Différentes perfonnes ont péri dans les flammes ,
entr'autres , plufieurs enfans qui avoient été renfermés
dans les maifons , pendant que leurs parens
étoient fortis pour vaquer à leurs affaires.
Le feu a pris auffi au Château de Guffou , apparte
nant au Comte de Podewils , Premier Miniftre
d'Etat ; & le dommage cauté par cet incendie ,
monte à près de vingt mille écus.
DE HAMBOURG , le 25 Septembre.
Plufieurs lettres marquent que tandis que le Roi
de Pruffe eft entré en Boheme avec quarante mille
hommes , le Feld . Maréchal Schwerin y a débouché
avec trente- cinq mille hommes, par le Comté
de Glatz. Si l'on en croit les mêmes lettres , le
fieur Calkoen , Envoyé Extraordinaire des Etats
Généraux des Provinces-Unies auprès du Roi de
Pologne Electeur de Saxe , s'eft joint au Comte
de Stormont , pour tâcher de ménager , entre
8. M. Pruffienne & S. M. Polonoiſe , un accord
qui pût procurer aux deux Parties une fûreté convenable.
Il y a eu le 21 ,à ce qu'on affure , quelques
nouveaux articles propofés de part & d'autre.
Le fieur de Soltikoff , Envoyé Extraordinaire
de l'Impératrice de Ruffie auprès des Cercles de
la Baffe Saxe , a notifié aux Magiftrats de cette
Ville , ainsi qu'aux Miniftres Etrangers qui y réfi
dent , Que cette Princeffe , vu les mouvemens des
troupes du Roi de Prufſe , ſe trouve dans la nécef-
II. Vol. K.
218 MERCURE DE FRANCE.
fitédefaire marcher une armée aufecours de fes Al
liés contre S. M. Pruffienne . Le bruit court , que
cette armée fera de cent vingt mille hommes, Oa
ajoute que S. M. Imp. de Ruffie a ordonné d'équipper
une Flotte , pour fervir au tranfport des
troupes qu'Elle jugera à propos de faire embar
quer.
DE RATISBONNE , le 24 Septembre .
Auffitôt que l'Empereur a été informé de l'entrée
des troupes Pruffiennes dans l'Electorat de
Saxe , S. M. Imp. a adreffé un Décret au Roi de
Pruffe , pour le fommer de faire retirer les troupes
, faute de quoi il feroit procédé contre S. M.
Pruffienne en la maniere prefcrite par les Loix de
l'Empire. Un autre Décret ordonne à tous les
Vaffaux des Princes & Etats d'Allemagne , qui
font employés dans les troupes du Roi de Pruffe,
de quitter inceffamment le fervice de ce Prince.
Par un troifieme Décret , l'Empereur défend à
tous Princes , Etats ou Membres du Corps Germa
nique , de fouffrir qu'il foit fait chez eux aucunes
levées de Soldats pour S. M. Pruſſienne , &
de lui prêter aucune affiftance dans les circonftances
actuelles , le tout à peine d'encourir les
condamnations ftatuées par les Conſtitutions de
l'Empire.
DE VIENNE , le 19 Septembre.
E2 , LE 2, le Sieur de Klinggraff remit au Miniftere
un nouveau Mémoire , portant en fubftance :
Que cette Princeffe n'avoit point répondu à la demande
qui fai oit le principal article du Mémoire
pré'enté par lui le 18 du mois dernier ; fçavoir ,
que S. M. Impériale & Royale , donnât une déclaration
formelle , quelle n'avoit aucune intention
d'attaquer S. M. Pruffienne , ni cette année
ni l'année prochaine : que le Roi de Pruffe avoit
entrevu , dans le filence de l'Impératrice Reine
fur cette demande , les difpofitions peu favorables
où elle étoit à ſon égard ; que cependant ce Prince
, pour faire voir combien il défiroit la confervation
de la tranquillité générale , réitéroit encore
une fois les inftances , pour obtenir les affurances
qu'il avoit demandées ; que l'Impératrice
Reine n'auroit pas plutôt donné ces affurances ,
que Sa Majefté Pruffienne feroit retirer les troupes.
La réponſe de l'Impératrice Reine à ce Mémoire
a été : « Qu'a peine il lui a été préſenté ,
» qu'Elle a reçu la nouvelle de l'entrée des trou-
»> pes Pruffiennes en Saxe , & du Manifefte pu-
» blié à cette occafion par le Roi de Pruffe ; qu'a
206 MERCURE DE FRANCE.
1
» près une aggreſſion auffi marquée , il n'eft plus
» queftion d'autre réponse que de celle que S. M.
» Impériale & Royale fe propofe de faire au Ma-
» nifefte de Sa Majefté Pruffienne ; que la der-
» niere , qui a été remife au Sieur de Klinggraff ,
» contient toutes les explications , qui peuvent
» être compatibles avec la dignité de S. M. Impé-
» riale & Royale ; que la propofition de conver-
» tir en treve une paix fondée ſur des Traités fo-
» lemnels , n'eft fufceptible d'aucune reponſe » .
Le Sieur de Klinggraff partit hier , fans prendre
congé. Leurs Majeftés Impériales ont mandé au
Comte de la Puebla , leur Miniftre en Pruffe , de
quitter Berlin de la même maniere.
On vient d'apprendre que le 13 de ce mois le
Roi de Pruffe a commencé les actes d'hoftilisé
dans le Royaume de Boheme. Huit Eſcadrons de
fes troupes ont attaqué les Gardes avancées de
·P'armée de l'Impératrice Reine ; mais ils ont été
repouffés trois fois. On leur a tué quatorze hommes
, & l'on a fait prifonnier un Huffard. Les
Autrichiens n'ont eu que deux foldats bleffés. Sept
Compagnies du Régiment de Portugal font attendues
ici , pour remplacer un pareil nombre de
Compagnies du Régiment de l'Archiduc Pierre ,
qui ont pris la route de Boheme. L'Impératrice
Reine a envoyé ordre dans les Cercles antérieurs
de ce Royaume d'enrôler tous les jeunes gens en
état de fervir , & de faire paffer dans les Cercles
voifins de l'Autriche & de la Moravie les enfans
depuis l'âge de huit ans jufqu'à feize , afin de les
fouftraire à la néceffité d'entrer au ſervice de Sa
Majesté Pruffienne . Près de huit cens familles ,
dans la crainte d'être exposées aux horreurs de la
guerre , font forties de la Siléfie Autrichienne , &
fe font réfugiées tant ici que dans les environs,
OCTOBRE. 1756. 207
On a muni de trois cens pieces de canon la Place
d'Olmutz , dont le commandement a été donné
au Baron de Marshall.
Toutes les troupes qui font en quartiers dans
les Provinces Héréditaires depuis la mer Adriati→
que jufqu'au Danube , fe tiennent prêtes à marcher.
On a envoyé des ordres à la Régence du
Tirol de faire les difpofitions néceffaires pour le
paffage d'une partie des Bataillons , que l'Impératrice
Reine retire de fes Etats d'Italie . De pareils
ordres ont été envoyés à la Régence du Trentin.
DE DRESDE , le 23 Septembre.
Les circonftances préfentes ont déterminé le
Roi à quitter cette Ville ; & Sa Majeſté , accompagnée
des Princes Xavier & Charles , s'eft
rendue au camp de Pirna. La Reine eft reftée ici
avec le Prince Royal les jeunes Princes &
Princeffes. Le Roi de Pruffe les a fait affurer
que les égards refpectueux qui leur étoient dûs ,
feroient religieufement obfervés. Par ordre de ce
Prince , on a fermé les Tribunaux , & le fcellé a
été mis à tous les Bureaux de la Chancellerie . Sa
Majefté Pruffienne arriva ici le 10. Elle n'y a pas
fait un long séjour , & Elle est allée rejoindre fes
troupes , dont le quartier général eft actuellement
à Zedlitz. A Pexception de quelques Couriers
qui apportent à la Reine des nouvelles de la fanté
du Roi , aucune perfonne venant du camp de Pirna
n'a permiffion d'entrer dans cette Ville La Gar
nifon , que le Roi de Proffe y a laiffée , eft
compofée de deux mille hommes , & eft commandée
par le Baron de Willich . II eft défendu
à tout foldat Pruffien foit dans cette Capitale ,
foit dans tout autre endroit de l'Electorat , d'éxi¬
208 MERCURE DE FRANCE.
ger pour fa fubfiftance plus de deux livres de pain ,
d'une demi-livie de viande , & de deux pots de
bier . Aujourd'hui foixante Bâtimens ont paílé
fur l'Elbe , chargés de provifions pour l'armée
Pruffienne. La quantité de celles qu'on a tirées des
différentes partes de la Saxe , afin de fatistaire aux
livr.ifons néceffaires pour cette armée , a tellement
épuifé le pays , que les grains font montés
au quadruple du prix ordinaire.
Par ordre du Roi de Pruffe , le Baron de Willich
a fait enlever l'artillerie , les armes , les drapeax
& les étendards qui étoient dans l'Arſenal
de cette Ville , & on les tranfporte à Magdebourg
pour y demeurer en dépôt jufqu'à la conclufion
d'un accommodement. Le même Commandant
ayant pris une notice exacte de tous les Officiers
Saxons qui fe trouvoient ici , leur a fignifié : « Qu'ils
Détoient prifonniers de guerre ; qu'on leur laiffoir
cependant leurs épées , mais qu'ils devoient
s'engager formellement à ne point fervir contre
»Sa Majefté Pruffienne.
Le 14 de ce mois , la Reine fit prier les Miniftres
étrangers de fe rendre au Château , où Elle
leur tint ce difcours : « Meffieurs , les circonftan-
»ces préfentes me forcent de vous déclarer que
»Sa Majesté Pruffienne , avant d'entrer en Saxe ,fit
» donner au Roi mon époux , les affurances les plus
fortes d'une amitié inaltérable . Sur des affuran-
» ces pareilles & auffi pèu équivoques , le Roi mon
wépoux ne balança point à accorder aux trou-
»pes Pruffiennes un paffage fimple & exempt de
préjudice auffi - tôt que Sa Majesté le Roi de
»Pruffe l'eût demandé à notre Miniftre à Berlin.
»Nous n'avons pas même eu la moindre défiance ,
wen voy int ces troupes étrangeres entrer fur no-
»tre territoire. Mais au lieu d'une exacte diſcipline
OCTOBRE. 1756. 209
»& d'un paiement régulier que nous attendions
»d'elle , nous avons vu avec douleur que le Prince
»de Brunſwic , non content d'avoir fait mettre le
»fcellé fur toutes les caiffes de nos revenus à
Leipfick , a convoqué nos Etats pour leur donner
des ordres abfolument contraires à nos inten-
»tions. Le Roi mon époux , envoya le Général .
Meager à S. M. Pruflienne , pour lui repréſenter
qu'on ne pouvoit combiner ces fortes d'actes
d'hoftilité avec les déclarations précédentes , &
que d'ailleurs le Roi n'avoit d'autres vues que
»d'obferver, la plus exacte neutralité dans cette
guerre. La réponse que le Général Meager reçut
par écrit , ne fut qu'un extrait de la Déclaration
publiée de la part du Roi de Pruffe , pour jufti
fier les motifs de fon entrée dans ce pays. Après
Dune réponse auffi vague & auffi peu catégorique ,
Dle Roi mon époux , toujours animé d'un vrai
ndefir d'entretenir la paix en Allemagne & le
repos dans les Etats , pria le Lord Stormont &
Dle Sieur de Malzahn d'aller au camp. Pruffien •
»pour fçavoir les intentions du Roi de Pruffe &
ce qu'il exigeoit. Mais loin de rien propofer &
»de rien entendre , le Roi de Pruffe répliqua au
»Lord Stormont : Tout ce que vous me proposez
one me convient point , & de ma part je n'ai au
cune propofition à faire. Après le retour du I ord ,
»le Roi fe rendit à Pirna. J'y voulus envoyer un
Page chargé d'une Lettre ; mais on l'arrêta , &
» même on m'a refufé d'y pouvoir envoyer un
»Gentilhomme qui ne feroit chargé d'aucune lettre.
Enfin quoiqu'hier le Général Lentulus m'ait
waffuré de la part de S. M. Pruffienne , que la
»garnifon qu'on avoit mife en cette Capitale y
étoit pour ma sûreté , & même à mes ordres ,
non eft venu néanmoins à l'extrêmité de me
210 MERCURE DE FRANCE:
demander aujourd'hui les clefs du cabinet des
>>Archives. N'ayant pu réfifter à la force dont on
»me menaçoit , je les ai remiſes à l'Officier qui
»avoit la commiffion de les recevoir. Pour fur-
>> croit de chagrin , mes Miniftres de Conférence
» m'ont communiqué dans ce moment l'infinua
»tion qui leur a été faite par le Général Keith ,
»que le Roi de Pruffe fe propofoit de fubftituer
>> en lear place des Confeillers Pruffiens , pour
Davoir foin de l'adminiſtration de cet Electorat.
>> Telle eft , Meffieurs, la triſte ſituation où nous
nous trouvons. Nous espérons que vous en ferez
un fidele rapport à vos Cours refpectives , &
»nous fommes perfuadés qu'Elles n'approuveront
»pas le tort qui nous arrive , & qu'au contraire
»Elles jugeront qu'il eft de leurs intérêts d'épouſer
>> les nôtres. »
La Reine en remettant les clefs des Archives à
l'Officier Pruffien , qui avoit été chargé de les demander
, lui avoit dit : « Malgré le rang où la
nature m'a placée , je partage avec la derniere
»des fujettes le malheureux fort tombé fur la Saxe.
>>Séparée du Roi mon époux , & d'une partie de
»ma famille , j'effuie avec le refte de mes enfans
»le défagrément d'un état plein d'angoiffe & d'in-
» quiétude , & je me vois expofée avec cette partie
»de ma famille , qui eft auprès de moi , à manquer
» bientôt des chofes néceffaires , par la privation
des moyens propres à me les procurer. » Le Roi
de Pruffe informé des plaintes de cette Princeffe ,
lui a fait réitérer qu'il avoit donné les ordres les
plus précis pour lui faire garder le refpect qui lui
étoit dû ; que fi ces ordres étoient mal fuivis ,
Elle eût à l'en faire avertir , & qu'il puniroit févérement
les contrevenans ; qu'Elle ni la Famille
Royale & Electorale ne manqueroient jamais des
OCTOBRE. 1756. 211
chofes néceſſaires ; que la dignité de leur rang &
de leur état ne feroit jamais confondue avec les
circonftances qui regardoient le Public ; qu'ainfi
il prioit Sa Majefté de vouloir bien fe tranquillifer
, & de ne point outrer les idées qu'Elle fe formoit
de l'état des choſes. En même temps S. M.
Pruffienne a recommandé aux Officiers des Détachemens
poftés entre fon camp & cette Ville ,
de laiffer paffer librement tout ce qui étoit pour
le fervice de la Reine , des Princes & des Princeffes.
Il paffe tous les jours ici des Régimens , tant
d'Infanterie que de Cavalerie , qui vont joindre
l'armée du Roi de Pruffe. Tous les avis confirment
que ce Prince dirige fa marche fur Leitmaritz.
Depuis avant - hier les Bourgeois de cette
Capitale font difpenfés de fournir le pain aux foldats
Pruffiens , qui y font en garniſon ; mais on
continue de fournir à ces Soldats la viande & la
biere.
On publia à Torgaw le 13 , une Ordonnance ,
dont voici la teneur : « Sa Majefté le Roi de Pruf-
»fe , par des motifs fondés fur la néceffité des
conjonctures, a pris la réfolution d'établir à Tor-
»gaw un Directoire de Guerre pour la perception
»de tous les revenus , tant de la Chambre des Fi-
» nances , que de l'Ectorat de Saxe , fous quelque
nom que ce puiffe être. En conféquence , tous
les Receveurs des Accifes générales & autres
» droits , de même que les Fermiers Officiers , &
généralement tous les Suppots des Douanes &
» Péages , fans exception , font avertis d'apporter
& de délivrer fidélement audit Directoire de
» Guerre les deniers qu'ils fe trouveront avoir en
»caiffe ; & ce fous peine de double reftitution &
de caflation , ou même de prifon , fuivant l'exi
212 MERCURE DE FRANCE.
» gence du cas. Ce qu'ils devront faire à l'avenir
»tous les mois , fans y manquer : leur étant dé-
» fendu très-expreflément de remettre aucun de
ces deniers à qui que ce foit , finon au ſeul Di-
»rectoire fufdit. »
DE LEIPSICK , le 22 Septembre.
Divers Détachemens des troupes Pruffiennes
ont occupé dans cet Electorat les Villes de Merfbourg
, d'Eifleben , de Naumbourg , de Weffeinfels
, de Zeitz & de Torgaw . La Colonne ,
à la tête de laquelle eft le Roi de Pruffe , a pris
fa marche le long de l'Elbe . Elle campa le 6 à
Rothen Schoneberg , la droite appuyée fur Tan
nenberg , & la gauche fur Wundfchritz . Le jour
précédent , la Colonne du Prince Ferdinand de
Brunfwic avoit campé près de Freyberg , & celle
du Prince de Bevern à Fifchbach , de l'autre côté
de l'Elbe. Depuis le Roi de Pruffe s'eſt avanté
à Torgaw , où il a établi fon quartier genéral .
Le Comte de Stormont , Envoyé du Roi de la Grande-
Bretagne auprès de Roi , s'eft rendu auprès de
S. M. Pruthienne avec deux Miniftres de Sa Majefté.
Les Pruffiens ont vuidé les Arfenaux des
principales Villes où ils ont paffé ; & ils en ont
fait voiturer l'artillerie à To gaw.
On publia le 15 une Déclaration , dont voici la
teneur. « Sa Majesté le Roi de Pruffe ayant pris -
>>fous fa garde & protection les Etats Electoraux
» de la Maifon de Saxe ; ont fait fçavoir , de la
» part de S. M. , à tous & un chacun , que fon
»intention eft , que perfonne , à l'occafion des
> troubles actuels ne foit inquiété dans fa pro-
»feſſion , mais qu'au contraire chacun puiffe y
vaquer tranquillement , & comme à l'ordinai
OCTOBRE. 1756. 213
»re. S. M. défire auffi , que les Foires de Léipfick
& de Naumbourg , & les autres Marchés
>> publics , fe tiennent fuivant l'ufage établi ; que
tous les acheteurs ou vendeurs , qui voudront
ns'y rendre , puiffent les fréquenter librement ,
D& qu'il ne leur foit apporté à cet égard aucun
»obftacle ni empêchement . A ces caufes , S. M. fait
>> affurer tous Commerçans , Négocians , & Fa-
>> bricans , tant de cet Electorat que des pays
»étrangers , qui font dans l'habitude de fréquenwter
leidites Foires & lefdits Marchés publics , &
>> qui voudront y venir aux temps accoutumé
nqu'ils y jouiront d'une entiere liberté & fûreté
»pour leurs perfonnes & pour leurs effets ; que
S. M. les prend fous fa pro.ection & fauvegarde
>>Royale, & qu'il leur fera accordé en confequen-
» ce les faufconduits néceffaires » . Le Commiffaire
, qui eft ici de la part du Roi de Pruffe , a annoncé
aux habitans , qu'ils pouvoient payer leurs
taxes aux Receveurs ordinaires.
Sur les nouvelles affurances que le Roi a fait
donner à ce Prince par le Comte de Salmour ,
que Sa Majesté avoit toujours été dans la réfolution
de ne prendre aucune part aux différends
furvenus entre les Cours de Vienne & de Berlin ;
S. M. Pruffienne a répondu : « Qu'Elle ne fou-
»haitoit rien de plus Elle-même , que de trouver
»le Roi dans ces fentimens ; que la neutralité ,
aque le Roi défiroit d'obferver , étoit précifé-
>> ment ce qu'Elle requéroit de lui ; mais que pour
>> rendre cette neutralité plus fûre , & la mettre à
»l'abri de variation , il convenoit que le Roi fé-
»parât fon armée , & qu'il renvoyat dans leurs
»quartiers les troupes qu'il avoit affemblées à
»Pirna ; que fi le Roi vouloit donner par une
»femblable démarche la preuve de fes difpofitions
214 MERCURE DE FRANCE.
pacifiques , S. M. Pruflienne fe feroit dès lors un
»plaifir de montrer , par une égale condescendanace
, combien Elle étoit portée de ſon côté à
donner des marques réelles de ſon amitié au
>>Roi , & à fe concerter avec Sa Majeſté ſur les
arrangemens que les conjonctures peuvent requérir
» . Le Roi n'eft point dans la réfolution
d'accepter la propofition du Roi de Pruffe , & Sa
Majefté a déclaré , « Qu'Elle attendroit dans fon
camp la décifion des évenemens ; que fi les
Pruffiens entreprenoient de l'y forcer ,Elle foutiendroit
leurs efforts ».
Divers mouvemens du Roi de Pruffe donnant
lieu de croire qu'il a deffein de refferrer de tous
côtés le camp de Pirna , le Feld-Maréchal Comte
de Browne a décampé de Kollin le 9 de ce mois ,
pour fe porter en avant , & pour tâcher de conferver
la communication avec les troupes Saxonnes.
Le Corps que ce Général a détaché fous les
ordres du Comte de Wied , s'eft faifi des paffages
entre Trebnitz & Catharinenberg: On a reçu
avis que les Pruffiens établiffent des batteries pour
attaquer les Saxons dans leur camp.
Selon les nouvelles qu'on a du camp de Pirna ,
le Roi a fait diftribuer aux différens Corps de fes
troupes la Déclaration fuivante. « Dès le com-
»mencement de l'invafion des troupes Pruffien-
»nes dans cet Electorat , Sa Majefté a mis tout
wen oeuvre , pour tâcher de faire un accommode-
>ment avec le Roi de Pruffe. Ce Prince ayant
mexigé des conditions inouies , Sa Majefté non-
>>feulement les a rejettées , mais a fait fçavoir à
»S. M. Pruffienne , qu'Elle aimoit mieux tout perdre
que de s'y foumettre. Ainfi Sa Majesté atptend
de la bravoure & de la fermeté de fes fidelles
troupes , qu'elles fe montreront diſpoſées à
OCTOBRE. 1756. 215
foutenir jufqu'à la derniere goutte de leur fang ,
»la réfolution qu'a prife Sa Majefté. Elle les ex-
>> horte à tout facrifier pour la défenfe de leur
>>Roi, & pour la confervation de leur
»ne ur» .
propre
hon-
Le Roi de Pruffe eſpérant de réduire l'armée
du Roi par la famine , a laiffé vingt mille hom
ines pour tenir le camp de Sa Majefté bloqué . La
femaine derniere , les Pruffiens firent fauter les
fortifications de Wittemberg, Ils fortifient actuellement
laVille de Torgaw , où leur Directoire de
Guerre eft établi . Ce Directoire a fommé les différens
Cercles, de l'Electorat , de livrer , d'ici à
trois ſemaines au plus tard , onze cens boeufs ,
deux mille cinq cens moutons , deux cens mille
mefures d'avoine , cent cinquante mille quintaux
de foin & vingt mille bottes de paille. Cette fourniture
eft évaluée à fix cens vingt - cinq mille
écus .
DE BERLIN , le 21 Septembre.
Les troupes d'Infanterie du Roi confiftent en
cent quarante bataillons. La Cavalerie eft compofée
d'un Efcadron de Gardes du Corps , de foixante
Efcadrons de Gendarmes , Carabiniers &
Cuiraffiers , de foixante-dix Efcadrons de Dragons
, de quatre-vingt Efcadrons de Huffards , &
de deux Efcadrons de Chaffeurs à cheval. Deux
Corps d'armée font affemblés dans la Haute &
dans la Baffe Siléfie , & ont occupé les défilés ,
par lesquels on peut paffer du Royaume de Bo
heme dans cette Province. Il y a auffi quelques
troupes campées dans les environs de Glatz. A
juger par ces difpofitions , il paroît que le Roi fe
propofe non feulement de couvrir la Siléfie , mais
216 MERCURE DE FRANCE.
`auffi de faire entrer de ce côté une feconde armée
en Boheme.
Dans l'expofé des motifs qui ont déterminé le
Roi à prendre les armes , Sa Majefté le plaint particuliérement
de ce que l'Impératrice Reine de
Hongrie & de Boheme , a augmenté jufqu'à foixante
pour cent , les droits fur les marchandifes
des Etats de Pruffe. Voici un des endroits les plus
remarquables de cet expofé. a Il eft certain que
>>le Roi commence les hoftilités : mais comme ce
>>terme a fouvent été confondu avec celui d'aggreffion
, l'on fe croit obligé de diftinguer le fens
de ces deux mots . Par aggreffion , l'on doit en-
»tendre tout acte , qui eft diamétralement oppofé
à l'efprit d'un Traité de Paix. Une Ligue of
fenfive ; des ennemis qu'on fufcite , & qu'on
pouffe à faire la guerre à une Puiffance ; le deffein
d'envahir les Etats d'autrui ; une irruption
>>foudaine ; toutes ces chofes différentes font au-
»tant d'aggreffions , quoique la derniere feule fe
trouve dans le cas des hoftilités . Quiconque cher-
>>che à fe défendre contre ces aggreffions , ou à en
»prévenir les fuites , peut commencer les hoftiliwtés
, mais il n'eft pas l'aggreffeur » ...... Cet Ecrit
finit ainfi : « S. M. déclare , que les Libertés du
»Corps Germanique ne feront ensevelies qu'en
>> un même tombeau avec la Pruffe. Elle prend le
Ciel à témoin , qu'ayant vainement employé les
moyens les plus convenables pour préferver fes
»propres Etats & toute l'Allemagne , des fléaux de
Dla guerre dont ils étoient ménacés , Elle eft for
cée de prendre les armes , pour diffiper une
»confpiration tramée contre fes poffeffions & fes
>> Etats .... Le Roi ne s'écarte de fa modération
»ordinaire , que parce que cette vertu ceffe d'én
pêtre une , lorfqu'il s'agit de défendre fon honneur
OCTOBRE . 1756. 217
neur , fon indépendance , fa Patrie & fa Cou-
>>ronne » . Le Comte de la Puebla , Miniftre de
Leurs Majeftés Impériales , partit le 16 , fans
prendre congé.
La petite ville de Biefenthal , fituée à quatre
lieues d'ici , a été totalement réduite en cendres.
Différentes perfonnes ont péri dans les flammes ,
entr'autres , plufieurs enfans qui avoient été renfermés
dans les maifons , pendant que leurs parens
étoient fortis pour vaquer à leurs affaires.
Le feu a pris auffi au Château de Guffou , apparte
nant au Comte de Podewils , Premier Miniftre
d'Etat ; & le dommage cauté par cet incendie ,
monte à près de vingt mille écus.
DE HAMBOURG , le 25 Septembre.
Plufieurs lettres marquent que tandis que le Roi
de Pruffe eft entré en Boheme avec quarante mille
hommes , le Feld . Maréchal Schwerin y a débouché
avec trente- cinq mille hommes, par le Comté
de Glatz. Si l'on en croit les mêmes lettres , le
fieur Calkoen , Envoyé Extraordinaire des Etats
Généraux des Provinces-Unies auprès du Roi de
Pologne Electeur de Saxe , s'eft joint au Comte
de Stormont , pour tâcher de ménager , entre
8. M. Pruffienne & S. M. Polonoiſe , un accord
qui pût procurer aux deux Parties une fûreté convenable.
Il y a eu le 21 ,à ce qu'on affure , quelques
nouveaux articles propofés de part & d'autre.
Le fieur de Soltikoff , Envoyé Extraordinaire
de l'Impératrice de Ruffie auprès des Cercles de
la Baffe Saxe , a notifié aux Magiftrats de cette
Ville , ainsi qu'aux Miniftres Etrangers qui y réfi
dent , Que cette Princeffe , vu les mouvemens des
troupes du Roi de Prufſe , ſe trouve dans la nécef-
II. Vol. K.
218 MERCURE DE FRANCE.
fitédefaire marcher une armée aufecours de fes Al
liés contre S. M. Pruffienne . Le bruit court , que
cette armée fera de cent vingt mille hommes, Oa
ajoute que S. M. Imp. de Ruffie a ordonné d'équipper
une Flotte , pour fervir au tranfport des
troupes qu'Elle jugera à propos de faire embar
quer.
DE RATISBONNE , le 24 Septembre .
Auffitôt que l'Empereur a été informé de l'entrée
des troupes Pruffiennes dans l'Electorat de
Saxe , S. M. Imp. a adreffé un Décret au Roi de
Pruffe , pour le fommer de faire retirer les troupes
, faute de quoi il feroit procédé contre S. M.
Pruffienne en la maniere prefcrite par les Loix de
l'Empire. Un autre Décret ordonne à tous les
Vaffaux des Princes & Etats d'Allemagne , qui
font employés dans les troupes du Roi de Pruffe,
de quitter inceffamment le fervice de ce Prince.
Par un troifieme Décret , l'Empereur défend à
tous Princes , Etats ou Membres du Corps Germa
nique , de fouffrir qu'il foit fait chez eux aucunes
levées de Soldats pour S. M. Pruſſienne , &
de lui prêter aucune affiftance dans les circonftances
actuelles , le tout à peine d'encourir les
condamnations ftatuées par les Conſtitutions de
l'Empire.
Fermer
Résumé : ALLEMAGNE.
En septembre 1756, le Sieur de Klinggraff informa le ministère que l'Impératrice Reine n'avait pas répondu à la demande du Roi de Prusse, qui souhaitait une déclaration formelle de non-agression. Le Roi de Prusse réitéra sa demande en échange du retrait de ses troupes. L'Impératrice Reine répondit qu'elle avait appris l'entrée des troupes prussiennes en Saxe et la publication d'un manifeste prussien, rendant toute autre réponse inutile. Elle confirma que sa réponse au manifeste contenait toutes les explications nécessaires. Le Sieur de Klinggraff quitta Vienne sans prendre congé, et l'Impératrice Reine ordonna au Comte de la Puebla de quitter Berlin de la même manière. Le 13 septembre, le Roi de Prusse commença des actes d'hostilité en Bohême, attaquant les gardes avancées de l'armée de l'Impératrice Reine, mais fut repoussé. Des troupes autrichiennes se préparèrent à la guerre, et des familles fuirent la Silésie autrichienne par crainte des horreurs du conflit. À Dresde, le Roi de Prusse quitta la ville pour rejoindre son armée à Pirna, laissant la Reine et les jeunes princes sous la protection de la garnison prussienne. Il ordonna de fermer les tribunaux et de sceller les bureaux de la chancellerie, et fit enlever l'artillerie et les armes de l'arsenal de Dresde, les transportant à Magdebourg. La Reine de Saxe informa les ministres étrangers de la trahison du Roi de Prusse, qui avait promis une amitié inaltérable avant d'entrer en Saxe. Des détachements prussiens occupèrent plusieurs villes en Saxe, et le Roi de Prusse établit son quartier général à Torgau. Le Comte de Stormont, envoyé du Roi de Grande-Bretagne, se rendit auprès du Roi de Prusse. Les Prussiens vidèrent les arsenaux des principales villes et transportèrent l'artillerie à Torgau. Une déclaration du Roi de Prusse indiqua qu'il avait pris sous sa garde et protection les États électoraux de la Maison de Saxe. En octobre 1756, le roi de Prusse assura que les troubles actuels n'inquiéteraient pas les professionnels dans leur travail. Il garantit la tenue des foires de Leipzig et de Naumbourg, ainsi que des marchés publics, et assura la liberté et la sécurité des commerçants, négociants et fabricants. Le commissaire prussien annonça aux habitants qu'ils pouvaient payer leurs taxes aux receveurs ordinaires. Le roi de Prusse exprima son souhait de neutralité face aux différends entre les cours de Vienne et de Berlin, mais demanda au roi de Saxe de séparer son armée et de renvoyer les troupes assemblées à Pirna pour garantir cette neutralité. Le roi de Saxe refusa et déclara qu'il attendrait dans son camp la décision des événements. Des mouvements de troupes prussiennes furent observés, et le feld-maréchal Comte de Browne se déplaça pour conserver la communication avec les troupes saxonnes. Le roi de Prusse bloqua l'armée saxonne par la famine et fortifia plusieurs villes. Les troupes prussiennes consistaient en 140 bataillons d'infanterie et divers escadrons de cavalerie, avec des corps d'armée assemblés en Silésie. Le roi de Prusse justifia son entrée en guerre par l'augmentation des droits sur les marchandises prussiennes par l'impératrice Reine de Hongrie et de Bohême. Il déclara que les libertés du Corps Germanique ne seraient pas sacrifiées et prit les armes pour défendre son honneur et son indépendance. Des incidents, comme l'incendie de la ville de Biefenthal et du château de Guffou, furent rapportés. Le roi de Prusse entra en Bohême avec 40 000 hommes, tandis que le feld-maréchal Schwerin déboucha avec 35 000 hommes. Des tentatives de médiation entre le roi de Prusse et le roi de Pologne étaient en cours. L'impératrice de Russie préparait une armée pour soutenir ses alliés contre le roi de Prusse. L'empereur adressa des décrets au roi de Prusse pour retirer ses troupes de Saxe et interdit les levées de soldats pour la Prusse.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 204-209
Relation de ce qui s'est passé à l'action du premier Août près de Minden, entre l'armée du Roi & celle des Alliés.
Début :
La prise de Minden par le Duc de Broglie ayant dérangé le projet que [...]
Mots clefs :
Duc de Broglie, Prise de Minden, Armée, Ennemis, Maréchal de Contades, Siège, Prince Ferdinand , Mouvements des troupes, Tactique militaire, Bataillons, Attaque, Infanterie, Cavalerie, Canons, Blessés et morts, Général, Commandant, Retraite, Cassel
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Relation de ce qui s'est passé à l'action du premier Août près de Minden, entre l'armée du Roi & celle des Alliés.
Relation de ce qui s'eft paffé à l'action du premier
Août près de Minden , entre l'armée du Roi &
celle des Alliés .
La prife de Minden par le Duc de Broglie
ayant dérangé le projet que le Prince Ferdinand
avoit de fe retirer fous cette ville , & notre
armée s'y étant rendue le 15 Juillet , les ennemis
dirigèrent leur marche fur Petershagen ;
• ils s'avancèrent le 16 à Todenhaufen , & s'emparèrent
le 17 d'un bois qui n'étoit qu'à une deinie-
lieue de Minden.
Comme on pouvoit croire que l'ennemi cherchoit
à engager une affaire , & l'objet du Maréchal
de Contades n'étant que de conferver Minden
& de couvrir le fiége de Munſter , on fir
prendre à l'armée une pofition défenfive. Elle fe
SEPTEMBRE 1759. 205
couvrit d'un petit ruilleau & d'un marais regardé
comme impraticable , la droite appuyée à Minden
, la gauche à la montagne & a des bois.
Le Prince Ferdinand renonçant à nous attaquer
, s'occupa des moyens de nous refferrer
dans notre pofition , & de gêner l'arrivée de
nos convois . 11 fit auffi travailler à des retranchemens
en avant , & dans le bois qui débouchoit
dans la plaine de Minden.
Quand ce Prince crut la gauche affez formidable
pour réfifter à nos efforts , il fit faire à
fon armée un mouvement qui la raprocha du
marais. Son quartier général fut établi au village
de Hill ..
Le Prince héréditaire fut enfuite détaché avec
un corps de douze mille hommes fur Labbecké ,
d'où il s'avança au débouché de nos convois.
3
Ce mouvement engagea le Maréchal de Contades
à faire un détachement de trois mille
hommes aux ordres du Duc de Briffac , pour
protéger nos communications & couvrir les gros
équipages qui avoient été envoyés à Coesfeld.
Le détachement du Prince héréditaire de Brunf
wick ayant affoibli l'armée ennemie , dont le
flanc gauche paroiffoit fort étendu , le Maréchal
de Contades jugea que le moment éroit favorable
pour l'attaquer. L'ara će ennemie étoit derrière
le village de Hill , la gauche derrière celui
d'Holtzhaufen , & cette armée tenoit encore au
Wefer par un corps particulier campé entre le
village de Todenhaufen & celui de Petershagen.
C'eft fur ce corps particulier que le Maréchal
de Contades jugea néceffaire de faire fes premiers
efforts , dans le deffein de le culbuter & d'em➡
bratler enfuite le flanc gauche de l'ennemi.
Le Duc de Broglie avec les troupes de fa ré→
ferve fut chargé de cette attaque ; on la renforça
de huit Bataillons des Grenadiers de France
206 MERCURE DE FRANCE.
& Royaux , de fix piéces de canon de 12 livres
& de quatre obufiers , & il lui fut prefcrit dans
la difpofition générale d'attaquer l'ennemi vivement
& avec rapidité , pour ne pas donner le
temps au Prince Ferdinand d'arriver far notre
gauche qu'on avoit rendue moins forte en nombre
de troupes , parce qu'on vouloit faire le principal
effort par notre droite.
L'armée fe forma en bataille au point du jour ,
appuyant la gauche au marais , occupant le vil .
lage d'Hullem & les hayes qui l'environnent.
Quatre Brigades d'Infanterie aux ordres da
Marquis de Guerchy formoient la gauche de la
premiere ligne , foutenue en feconde ligne par
le corps des troupes Saxones aux ordres du
Comte de Luface.
Trois Brigades de Cavalerie aux ordres du Duc
de Filtz-James formoient le centre de la ligne
dans une grande bruyere qui eft entre le village
de Hullem & celui de Todenhaufen , & elles
étoient foutenues par trois autres Brigades de Cavalerie
en feconde ligne , aux ordres da Marquis
Dumefnil.
La Gendarmerie & fes Carabiniers étoient en
réferve en troifiéme ligne derriere le centre.
La droite de la ligne étoit compofée de quatre
Brigades d'Infanterie aux ordres du Chevalier de
Nicolay ; elle étoit placée à la droite de la Cavalerie
, & foutenue en feconde ligne par deux
Brigades d'Infanterie aux ordres du Comte de
Saint- Germain.
La réſerve du Duc de Broglie faifoit la droite
du tout ; & le Chevalier de Nicolay avoit ordre
de concerter les mouvemens avec ceux du Duc
de Broglie , & même de le foutenir , pour faire
dans cette partie un effort plus décifi£.
SEPTEMBRE. 1759. 107
L'action commença à cette droite à cinq heures
du matin par une canonnade fort vive entre les
troupes du Duc de Broglie , & le corps ennemi
qui s'étoit avancé au village de Todenhaufen.
Cette canonnade dura près de trois heures.
Pendant ce temps - là , fur l'avis que donna le
Duc de Broglie que les ennemis avoient plus
de troupes dans cette partie qu'on ne l'avoit jugé
la veille , le Maréchal de Contades fit marcher
deux brigades d'infanterie de la feconde ligne ,
pour renforcer encore cette droite ; mais l'attaque
ordonnée n'ayant pas eu lieu , le Prince
Ferdinand eut le temps de porter les troupes de
fa droite fur fon centre , & fit déboucher promptement
neuf bataillons fans canon fur la bruyere
vis-à - vis de notre Cavalerie; tandis que d'autres
troupes avec du canon attaquoient la gauche
aux ordres du Marquis de Guerchy , qui foutint
cette attaque avec beaucoup de fermeté.
Le Duc de Filtz James voyant déboucher
cette Infanterie vis - à- vis de lui , fit marcher fur
elle une partie de fa Cavalerie , qui fut repoulfée.
Le Maréchal de Contades dit alors au Duc
de Broglie de retourner à ſa réſerve & de fe
contenter de contenir la gauche des Ennemis ,
en attendant le fuccès du combat qui venoit de
s'engager.
Il ordonna en même temps au Marquis de
Beaupreau d'occuper avec les Brigades d'Infanterie
de Touraine & de Rouergue , & huit piéces de
canon de huit , quelques maifons entourées de
haies , qui étoient en avant de la droite de notre
Cavalerie , pour la protéger , & pour prendre
à revers l'Infanterie ennemie . Pendant que cer
208 MERCURE DE FRANCE.
'ordre s'exécutoit , quelques Brigades de Cavalerie
marcherent de nouveau fur l'Infanterie ennemie
qui foutint cette charge avec autant de fermeté
que la premiere . La Gendarmerie & les Carabiniers
firent avec peu de fuccès une troifiéme
charge. Le Marquis de Poyanne qui les commandoit
fut bleflé d'un coup de feu & de quelques
coups de fabre ; & la droite de la Cavalerie
commandée par le Marquis de Vogué, en fit une
quatriéme auffi infructueule que les autres.
Le Prince de Condé pendant toutes ces attaques
chargea à la tête de la Cavalerie avec une valeur
digne de fon fang & de fon nom .
Toute cette Cavalerie étant en déroute , le
centre fut percé. Les Brigades de Touraine &
de Rouergue qui n'avoient pas encore achevé
d'occuper les maiſons dont on vient de parler ,
furent attaquées par leur flanc droit par plu
fieurs Efcadrons de Cavalerie , & fouffrirent ertrêmement.
Le Marquis de Beaupreau qui les
commandoit fut bleffé de plufieurs coups de labre
, & le Marquis de Monty de deux coups de
feu. Elles fe replierent fur la Brigade d'Auvergne
& d'Anhalt , que le Maréchal de Contades plaça
à la hâte dans les haies en arrière de la bruyere.
L'Ennemi fe rendit maître de ces maifons & f
plaça du canon qui tira avec beaucoup de vivacité
fur nos troupes.
Tandis que ces différentes attaques ſe faifoient
au centre , l'Ennemi pouffoit avec beaucoup de
vivacité celle de notre gauche.
Le Comte de Luface foutint nos brigades de la
première ligne , & attaqua avec quelques baraillons
Saxons une tête de colonne d'Infanterie ennemie
qui débouchoit fur lui ; mais malgré les
efforts qu'il fit de fa perfonne , & avec les troupes
animées par fon exemple , les Brigades d'Aquitaine
& de Condé furent obligées de fe replier
SEPTEMBRE. 1759. 209
8
avec une perte confidérable , & le Marquis dé
Maugiron qui les commandoit fut bleffé de deux
coups de feu .
Dans ce défordre général , le Maréchal de
Contades ordonna la retraite , le Marquis de
Guerchy & le Comte de Luface replierent dans
le camp les Brigades d'Infanterie de la gauche.
Les troupes du Duc de Broglie firent leur retraite
fur la Ville de Minden ; & la Cavalerie entra
auffi dans le camp.
Ce fut dans le moment de cette retraite que le
Maréchal de Contades apprit que le Duc de
Briffac avoit été attaqué & battu auprès de Coovelt
par le corps du Prince héréditaire de Brunfwick
, & que ce Prince étoit maître du Pont de
Coovelt fur la Wera.
Il apprit en même temps par le Commandant
de l'escorte des gros équipages qui étoient à Remen
, que les Ennemis marchoient à lui , & que
pour s'en garantir il avoit fait bruler le Pont des
Salines de Remen.
Cer Pont de Coovelt occupé par l'Ennemi , &
celui des Salines brulé , qui devoient fervir a la
retraite de l'Armée , déterminerent le Maréchal
de Contades à lui faire paffer le Wefer pour fe
retirer fur Einbeck ; & l'ordre en fut donné aux
équipages , aux convois de pain qui étoient à
l'Armée , & aux troupes.
On n'a eu jufqu'à préfent que des détails imparfaits
de la perte qu'on a faite. Elle roule principalement
fur les quarante Efcadrons & les quatre
Brigades d'Infanterie qui ont eu le plus de
part a l'action .
L'Armée s'eft retirée vers Caffel. Je donnerai
dans le Mercure prochain le détail de cette marche
qui fait beaucoup d'honneur aux troupes &
aux Officiers Généraux qui les commandoient ,
Août près de Minden , entre l'armée du Roi &
celle des Alliés .
La prife de Minden par le Duc de Broglie
ayant dérangé le projet que le Prince Ferdinand
avoit de fe retirer fous cette ville , & notre
armée s'y étant rendue le 15 Juillet , les ennemis
dirigèrent leur marche fur Petershagen ;
• ils s'avancèrent le 16 à Todenhaufen , & s'emparèrent
le 17 d'un bois qui n'étoit qu'à une deinie-
lieue de Minden.
Comme on pouvoit croire que l'ennemi cherchoit
à engager une affaire , & l'objet du Maréchal
de Contades n'étant que de conferver Minden
& de couvrir le fiége de Munſter , on fir
prendre à l'armée une pofition défenfive. Elle fe
SEPTEMBRE 1759. 205
couvrit d'un petit ruilleau & d'un marais regardé
comme impraticable , la droite appuyée à Minden
, la gauche à la montagne & a des bois.
Le Prince Ferdinand renonçant à nous attaquer
, s'occupa des moyens de nous refferrer
dans notre pofition , & de gêner l'arrivée de
nos convois . 11 fit auffi travailler à des retranchemens
en avant , & dans le bois qui débouchoit
dans la plaine de Minden.
Quand ce Prince crut la gauche affez formidable
pour réfifter à nos efforts , il fit faire à
fon armée un mouvement qui la raprocha du
marais. Son quartier général fut établi au village
de Hill ..
Le Prince héréditaire fut enfuite détaché avec
un corps de douze mille hommes fur Labbecké ,
d'où il s'avança au débouché de nos convois.
3
Ce mouvement engagea le Maréchal de Contades
à faire un détachement de trois mille
hommes aux ordres du Duc de Briffac , pour
protéger nos communications & couvrir les gros
équipages qui avoient été envoyés à Coesfeld.
Le détachement du Prince héréditaire de Brunf
wick ayant affoibli l'armée ennemie , dont le
flanc gauche paroiffoit fort étendu , le Maréchal
de Contades jugea que le moment éroit favorable
pour l'attaquer. L'ara će ennemie étoit derrière
le village de Hill , la gauche derrière celui
d'Holtzhaufen , & cette armée tenoit encore au
Wefer par un corps particulier campé entre le
village de Todenhaufen & celui de Petershagen.
C'eft fur ce corps particulier que le Maréchal
de Contades jugea néceffaire de faire fes premiers
efforts , dans le deffein de le culbuter & d'em➡
bratler enfuite le flanc gauche de l'ennemi.
Le Duc de Broglie avec les troupes de fa ré→
ferve fut chargé de cette attaque ; on la renforça
de huit Bataillons des Grenadiers de France
206 MERCURE DE FRANCE.
& Royaux , de fix piéces de canon de 12 livres
& de quatre obufiers , & il lui fut prefcrit dans
la difpofition générale d'attaquer l'ennemi vivement
& avec rapidité , pour ne pas donner le
temps au Prince Ferdinand d'arriver far notre
gauche qu'on avoit rendue moins forte en nombre
de troupes , parce qu'on vouloit faire le principal
effort par notre droite.
L'armée fe forma en bataille au point du jour ,
appuyant la gauche au marais , occupant le vil .
lage d'Hullem & les hayes qui l'environnent.
Quatre Brigades d'Infanterie aux ordres da
Marquis de Guerchy formoient la gauche de la
premiere ligne , foutenue en feconde ligne par
le corps des troupes Saxones aux ordres du
Comte de Luface.
Trois Brigades de Cavalerie aux ordres du Duc
de Filtz-James formoient le centre de la ligne
dans une grande bruyere qui eft entre le village
de Hullem & celui de Todenhaufen , & elles
étoient foutenues par trois autres Brigades de Cavalerie
en feconde ligne , aux ordres da Marquis
Dumefnil.
La Gendarmerie & fes Carabiniers étoient en
réferve en troifiéme ligne derriere le centre.
La droite de la ligne étoit compofée de quatre
Brigades d'Infanterie aux ordres du Chevalier de
Nicolay ; elle étoit placée à la droite de la Cavalerie
, & foutenue en feconde ligne par deux
Brigades d'Infanterie aux ordres du Comte de
Saint- Germain.
La réſerve du Duc de Broglie faifoit la droite
du tout ; & le Chevalier de Nicolay avoit ordre
de concerter les mouvemens avec ceux du Duc
de Broglie , & même de le foutenir , pour faire
dans cette partie un effort plus décifi£.
SEPTEMBRE. 1759. 107
L'action commença à cette droite à cinq heures
du matin par une canonnade fort vive entre les
troupes du Duc de Broglie , & le corps ennemi
qui s'étoit avancé au village de Todenhaufen.
Cette canonnade dura près de trois heures.
Pendant ce temps - là , fur l'avis que donna le
Duc de Broglie que les ennemis avoient plus
de troupes dans cette partie qu'on ne l'avoit jugé
la veille , le Maréchal de Contades fit marcher
deux brigades d'infanterie de la feconde ligne ,
pour renforcer encore cette droite ; mais l'attaque
ordonnée n'ayant pas eu lieu , le Prince
Ferdinand eut le temps de porter les troupes de
fa droite fur fon centre , & fit déboucher promptement
neuf bataillons fans canon fur la bruyere
vis-à - vis de notre Cavalerie; tandis que d'autres
troupes avec du canon attaquoient la gauche
aux ordres du Marquis de Guerchy , qui foutint
cette attaque avec beaucoup de fermeté.
Le Duc de Filtz James voyant déboucher
cette Infanterie vis - à- vis de lui , fit marcher fur
elle une partie de fa Cavalerie , qui fut repoulfée.
Le Maréchal de Contades dit alors au Duc
de Broglie de retourner à ſa réſerve & de fe
contenter de contenir la gauche des Ennemis ,
en attendant le fuccès du combat qui venoit de
s'engager.
Il ordonna en même temps au Marquis de
Beaupreau d'occuper avec les Brigades d'Infanterie
de Touraine & de Rouergue , & huit piéces de
canon de huit , quelques maifons entourées de
haies , qui étoient en avant de la droite de notre
Cavalerie , pour la protéger , & pour prendre
à revers l'Infanterie ennemie . Pendant que cer
208 MERCURE DE FRANCE.
'ordre s'exécutoit , quelques Brigades de Cavalerie
marcherent de nouveau fur l'Infanterie ennemie
qui foutint cette charge avec autant de fermeté
que la premiere . La Gendarmerie & les Carabiniers
firent avec peu de fuccès une troifiéme
charge. Le Marquis de Poyanne qui les commandoit
fut bleflé d'un coup de feu & de quelques
coups de fabre ; & la droite de la Cavalerie
commandée par le Marquis de Vogué, en fit une
quatriéme auffi infructueule que les autres.
Le Prince de Condé pendant toutes ces attaques
chargea à la tête de la Cavalerie avec une valeur
digne de fon fang & de fon nom .
Toute cette Cavalerie étant en déroute , le
centre fut percé. Les Brigades de Touraine &
de Rouergue qui n'avoient pas encore achevé
d'occuper les maiſons dont on vient de parler ,
furent attaquées par leur flanc droit par plu
fieurs Efcadrons de Cavalerie , & fouffrirent ertrêmement.
Le Marquis de Beaupreau qui les
commandoit fut bleffé de plufieurs coups de labre
, & le Marquis de Monty de deux coups de
feu. Elles fe replierent fur la Brigade d'Auvergne
& d'Anhalt , que le Maréchal de Contades plaça
à la hâte dans les haies en arrière de la bruyere.
L'Ennemi fe rendit maître de ces maifons & f
plaça du canon qui tira avec beaucoup de vivacité
fur nos troupes.
Tandis que ces différentes attaques ſe faifoient
au centre , l'Ennemi pouffoit avec beaucoup de
vivacité celle de notre gauche.
Le Comte de Luface foutint nos brigades de la
première ligne , & attaqua avec quelques baraillons
Saxons une tête de colonne d'Infanterie ennemie
qui débouchoit fur lui ; mais malgré les
efforts qu'il fit de fa perfonne , & avec les troupes
animées par fon exemple , les Brigades d'Aquitaine
& de Condé furent obligées de fe replier
SEPTEMBRE. 1759. 209
8
avec une perte confidérable , & le Marquis dé
Maugiron qui les commandoit fut bleffé de deux
coups de feu .
Dans ce défordre général , le Maréchal de
Contades ordonna la retraite , le Marquis de
Guerchy & le Comte de Luface replierent dans
le camp les Brigades d'Infanterie de la gauche.
Les troupes du Duc de Broglie firent leur retraite
fur la Ville de Minden ; & la Cavalerie entra
auffi dans le camp.
Ce fut dans le moment de cette retraite que le
Maréchal de Contades apprit que le Duc de
Briffac avoit été attaqué & battu auprès de Coovelt
par le corps du Prince héréditaire de Brunfwick
, & que ce Prince étoit maître du Pont de
Coovelt fur la Wera.
Il apprit en même temps par le Commandant
de l'escorte des gros équipages qui étoient à Remen
, que les Ennemis marchoient à lui , & que
pour s'en garantir il avoit fait bruler le Pont des
Salines de Remen.
Cer Pont de Coovelt occupé par l'Ennemi , &
celui des Salines brulé , qui devoient fervir a la
retraite de l'Armée , déterminerent le Maréchal
de Contades à lui faire paffer le Wefer pour fe
retirer fur Einbeck ; & l'ordre en fut donné aux
équipages , aux convois de pain qui étoient à
l'Armée , & aux troupes.
On n'a eu jufqu'à préfent que des détails imparfaits
de la perte qu'on a faite. Elle roule principalement
fur les quarante Efcadrons & les quatre
Brigades d'Infanterie qui ont eu le plus de
part a l'action .
L'Armée s'eft retirée vers Caffel. Je donnerai
dans le Mercure prochain le détail de cette marche
qui fait beaucoup d'honneur aux troupes &
aux Officiers Généraux qui les commandoient ,
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Résumé : Relation de ce qui s'est passé à l'action du premier Août près de Minden, entre l'armée du Roi & celle des Alliés.
Le 15 juillet 1759, l'armée française, dirigée par le Maréchal de Contades, s'installa à Minden après que le Duc de Broglie eut pris la ville. Cette action perturba les plans du Prince Ferdinand de se retirer à Minden. Les ennemis avancèrent vers Petershagen, s'emparèrent d'un bois près de Minden et prirent des positions défensives. Le Maréchal de Contades positionna son armée derrière un ruisseau et un marais, avec la droite à Minden et la gauche protégée par une montagne et des bois. Le Prince Ferdinand, renonçant à attaquer, renforça ses positions et gêna les convois français. Le Maréchal de Contades, voyant une opportunité après le départ du Prince héréditaire de Brunswick, décida d'attaquer. L'armée française se forma en bataille au point du jour, avec des unités d'infanterie et de cavalerie réparties stratégiquement. L'action débuta à cinq heures du matin par une canonnade entre les troupes du Duc de Broglie et les ennemis à Todenhaufen. Malgré des renforts, l'attaque française fut repoussée. Les ennemis perçèrent le centre français, et la cavalerie ennemie repoussa plusieurs charges françaises. Le Maréchal de Contades ordonna la retraite après des pertes significatives. Pendant la retraite, il fut informé que le Duc de Brissac avait été battu près de Coesfeld par le Prince héréditaire de Brunswick, et que les ponts nécessaires à la retraite étaient soit occupés, soit détruits. L'armée se retira vers Cassel. Les détails des pertes étaient encore incomplets, mais elles étaient principalement parmi les unités de cavalerie et d'infanterie ayant participé à l'action.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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