A MADAME DE F**
Epars pour Marseille ,
jure ,
je vous
Madame , quej'y vais malgré moy. Vous mefiſtes hier un Portrait que j'emporte dans lecœur , &i'ay peun que cefoit untrait empoisonnéquej'emporte.
Mais , dites-moy, ce beau Portrait ,
L'avez- vous fait d'apres nature ?
N'avez- vous point feint quelque trait,
Pour embellir voſtre peinture ?
Ce teint blanc , & ces blonds cheveux,
Cette main , ce bras, cette taille ,
CetEſprit tel que je le veux ,
Qui ſurprend , qui brille, qui raille,
Enfin cet amas ſans égal Debelles qualitez , dont moname eſt
ravie ,
}
GALANT. 71 Seroit- il dans l'Original ,
Tel qu'il eſt dans voſtreCopie ?
Si cela est , Madame,pour mon re- posiene dois iamais revenir à Aix ; ou plutost j'y dois bien-toſt revenir, car ie m'imagine qu'il eſt doux de perdre Son repos pour la Belle dont vous m'avez donné uneſi riche ideé.
Par tout ce que vous m'avez dit Vous avez charmé mon Eſprit ;
Voſtre Comteſſe eſt adorable :
Mais malgré les appas dont vous m'a- vezcharmé ,
Sibientoſt je n'en ſuis aimé,
Je declare d'abord qu'elle n'eſt point aimable.
Je suisd'un Mestier , où l'on n'aime pas à perdreson temps. Vous sçavez,
Madame, que nous autres Gens d'Af- faires nous sommes fort intereſſez ,&
que iamaisnousnefaiſons d'avances fi nous ne voyons un profit prompt afſſure.
72 LE MERCVRE
Jamais à la groſſe avanture Nous ne mettons ſoins ny ſoûpirs;
Nous voulons ſeureté meſme dans noſtre ufure ,
Et pretendons gagner cent pour cent enplaiſirs.
Sansnul ſcrupule en Gens fort ſages,
Nous nous faiſons payer l'intereſt d'un ſeul jour ,
Etcomme un Juifnoſtre amour
Ne preſte que ſur bons gages.
Il est bon , Madame , de donner cet avis àvôtre aimable Comteſſe,afin qu'el le examine ſi mon commerce la peut ac- commoder. Ie reviendray en cette Ville dans quelques jours , &fi elle me veut recevoir malgré mes uſures amoureuſes ,
i'iray chez elle étaler ma marchandise.
AAix,
Dans une lettre adressée à Madame de F**, un homme d'affaires en route pour Marseille exprime son départ malgré lui, emportant un portrait de Madame qui l'a charmé. Il se questionne sur la fidélité de ce portrait et admire les qualités décrites. Prêt à sacrifier son repos pour elle, il mentionne également la comtesse de Madame, qu'il trouve adorable, mais souligne que son affection dépend du retour de ses sentiments. En tant qu'homme d'affaires, il ne fait pas d'avances sans garantie de profit, comparant son amour à un commerce nécessitant des assurances. Il invite la comtesse à évaluer si ce 'commerce' peut lui convenir et annonce son retour à Aix pour lui proposer ses services.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Reconnaissance textuelle : LES FLECHES de l'amour perduës & recouvrées.
LES FLECHES de l'amour
perdues recouvrées.
Dans un Bois embelli par la feule nature
Azile impénetrable aux ardeurs du Soleil ;;
Cupidon étendu fur un lit de verdure ,
Goutoit les douceurs du fommeil.
Pour fervir les amours du maître du tonnere ,,
Mercure ce jour-là deſcendit ſur la terre ,
Il paffa dans ce Bois , mais il fut bien furpris ,
D'y trouver le fils de Cypris..
1. Vol. II
120 MERCURE DE FRANCE .
Il approche , il faifit ſes armes :
( Ce Dieu faifoit fouvent le métier de voleur. )
fuit , l'amour s'éveille , en voyant fon malheur
,
Il ne peut retenir ſes larmes.
Tout eft perdu , dit- il , on m'a pris mon Carquois
•
Ces Fléches qui rangeoient tant de coeurs fous
mes loix..
C'eſt ta juftice que j'implore ,,
Puiffant maître. des Dieux ! s'il te fouvient encorc
De ces heureux momens que tu dûs à l'Amour ,,
Daigne le vanger en ce jour.
On vient de l'infulter , Mercure a fait le crime ,,
Qu'il en foit au plutôt puni .
Pour un fujet moins légitime
Du celefte féjour Apollon fut banni..
En achevant ces mots , il s'envole à Cythere ,
Il y cherche , il trouve ſa mere :;
Abbatu , languiffant , les yeux baignez de pleurs ,,
Il lui tient ce trifte langage..
O Venus ! apprenez le plus grand des malheurs ;
Je paffois par hazard dans un fombre bocage ,
Je me fentis forcé de ceder au fomeil ,
Mais que fis-je, imprudent ! hélas ! à mon reveil ,,
I.Volg Je
JUIN. 1730. 1127
Je cherchai , mais en vain , ces armes redoutables
,
Ces traits à qui je dois tant d'exploits mémorables.
Qui faifoient reſpecter mon pouvoir en tous lieux.
Ces traits qui me rendoient le plus puiffant des
Dieux ,
On avoit ofé me les prendre.
Mercure avoit commis eet horrible attentat j
Conjurez Jupiter de me les faire rendre ;
Qu'il me vange de cet ingrat.
Il ne doit point fouffrir une telle infolence ;
L'Amour fans fon Carquois eft un Dieu fans
puiffance ;
Faut-il yoir les mortels m'accabler de mépris t
Ainfi parle l'Amour , mais l'aimable Cypris
Par ces mots calma fes allarmes.
Ceffe de répandre des larmes ,
Mon fils , la perte que tu fais
Peut fans peine être réparée ;
Cours , vole vers cette contrée ;
Que l'aimable Doris orne de fes attraits ,
Ses yeux te fourniront des traits ;
Avec ces armes agréables
Tu verrás tous les coeurs fe foûmettre à tes Loix,
Ces lieux retentiront du bruit de tes exploits ,
Ils feront plus fréquents , ils feront plus dura
bles..
I.Vol.
Du
1122 MERCURE DE FRANCE
Du confeil de Venus l'amour fçut profiter ,
Il vole auffi prompt que Zéphire
Cherche Doris , la voit , l'admire ,
Et forme le deffein de ne la plus quitter.
Eh ! que ne doit-il pas a l'aimable Mortelle !
Que d'exploits glorieux ! lui-même en eft fur
pris :
C'eſt en vain que Venus maintenant le rappelle
Il fe trouve trop bien dans les yeux de Doris.
Par M..... Aix.
Résumé : LES FLECHES de l'amour perduës & recouvrées.
Le texte décrit un épisode mythologique impliquant Cupidon et Mercure. Cupidon, endormi dans un bois, se réveille pour constater que son carquois, contenant des flèches capables de faire tomber amoureux, a été dérobé par Mercure. Désespéré, Cupidon demande à Jupiter de le venger. Il se rend ensuite à Cythère pour informer sa mère, Vénus, de son malheur. Vénus le rassure et lui conseille de se rendre auprès de Doris, une mortelle aux yeux enchanteurs, pour obtenir de nouvelles flèches. Cupidon suit ce conseil et, ébloui par la beauté de Doris, décide de rester auprès d'elle, oubliant même les appels de Vénus.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Reconnaissance textuelle : LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
LA NAISSANCE
DE MONSEIGNEUR
LE DUC D'ANJOU.
O D E.
Favorable Fils de Latonne
Je ne t'invoque point en vain
Au vif éclat qui m'environne ,
Je voi , je fens ton feu divin.
J'entre dans un facré délire ;
Puiffe mon orgueilleufe Lyre
Enfanter ces accents vainqueurs ,
Qui naiffent d'un heureux génie ,
Et dont la fublime harmonie
Enchante & ravit tous les cours.
Quel aftre nouveau fur nos têtes
Répand fa brillante clarté ?
Quel Dieu ? de nos tranquilles fêtes ;
Redouble la folemnité !
Ce n'eft pas une vaine image ;
Chafte Lucine , cet ouvrage
Eft-il le fruit de ton fecours ?
Ainfi notre Reine féconde
Cij Par
2164 MERCURE DE FRANCE
Par toy du plus beau fang du monde
Promet d'éternifer le cours.
Mais , que dis-je ? Augufte Princeffe
Ces fabuleufes Déitez
'Aux yeux de ta haute fageffe
Ne font que folles vanitez.
Humble dans fa grandeur extrême
Ton coeur adore un Dieu fuprême ;
Qui confond tous les autres Dieux ;
Et dans cette faveur nouvelle ,
Reconnoit la fource immortelle
Des tréfors les plus précieux,
Déja de fa Toute- puiffance
Tu tiens cet aimable Dauphin ,
Ce Fils dont l'heureuſe naiffance
Eft un don parti de fa main.
Cette main encor libérale
Par un nouveau don qu'elle étale
Vient mettre le comble à tes voeux
Et prodigue elle fait connoître
Dans le Prince qui vient de naître ,
Combien le Ciel nous rend heureux,
Puiffe de ces précieux gages
Le nombre fans ceffe augmenter !
Puille
OCTOBRE. 1736. 2165
Puiffent nos plus parfaits hommages
: Les voir croître & les mériter
Qu'à jamais ton auguſte race ,
De fes ayeuls fuivant la trace ,
A l'Univers donne des Loix ;
Et qu'un jour la terre étonnée
Dans cette race fortunée ,
Compte fes Héros & les Rois !
Quel pompeux fpectacle m'enchante !
Prophanes , fuyez loin de moi ;
Une fainte horreur m'épouvante ,
Tous mes fens font faifis d'effroi.
Quel nouvel éclat ! Les Cieux s'ouvrent ;
A mes yeux les deftins découvrent
Leurs immuables jugemens ;
Dans l'avenir j'oſe les lire ,
Je voi , j'examine , j'admire
Les plus fameux Evenemens.
Dans les Climats où naît l'Aurore}
Je voi des Peuples confternez ;
Malgré l'orgueil qui les dévore
Ils font foumis & profternez.
Un Héros court brifer leur chaîne ,
Il quitte les bords de la Seine ,
Et va dans leur triſte ſéjour ;
Je yoi fon Char brillant de gloire ;
Diij De
2166 MERCURE DE FRANCE
Devant lui vole la Victoire ,
A fes côtez marche l'Amour.
Il vient ; & la guerre fanglante
'Auffi - tôt calme ſa fureur ;
La paix tranquille , bien -faifante
Des efprits diffipe l'erreur.
Cher Prince , à ta clemence extrême
On court offrir un Diadême
Que ta valeur a mérité ;
Ton nouveau Peuple qui t'admire ,
Goute les douceurs d'un Empire
Préférable à la liberté.
Ainfi la Divine Sageffe ,
Verra fes Décrets accomplis ;
LOUIS ; crois en ma fainte yvreffe ,
Le ciel couronnera ton Fils.
Déja ta piété folide ,
Et la vérité qui te guide
De ce fuccès font les garants
De ton fang la fource féconde
Doit à jamais peupler le monde
De Héros & de Conquerants.
D'un héritage légitime ,
L'Orphelin , libre poffeffeur ,
N'ek
OCTOBRE. 1730. 2167
N'eft plus la funefte victime ,
D'un tyrannique raviffeur.
Un Roy , que le ciel daigne inftruire ;
De l'erreur qui cherche à ſéduire¸
Fait triompher la véritéé ;
Qui que ru fois , tremble , coupable ;
Et voi ta perte inévitable
Dans la fouveraine équité .
Enfin le crime fanguinaire
Tombe fous les Loix abbatu
Je vois l'interêt mercènaire ,
Fuïr à l'afpect de la vertu.
L'impofture au maintien perfide ,
La fraude qui lui fert de guide ,
L'audace à l'oeil féditieux ,
Abbandonnent une contrée ,
Qui de la favorable Aftrée
Eft le féjour délicieux.
Peuples , fignalez votre zéle ,
Pour LOUIS , en cet heureux jour
Que tout icy lui renouvelle
Votre refpect & votre amour ;
Puiffe une ingénieuſe addreffe ,
Parmi la pompe & l'allegreffe
Vous prolonger un jour fi beau :
Que mille feux d'intelligence ,
C iiij
Imi2168
MERCURE DE FRANCE
Imitent , pendant fon abfence ,
L'éclat du celefte flambeau.
Qué la joye en tous lieux féconde ,
Enfante des plaifirs divers ;
Que les Cieux , que la Terre & l'Onde
Retentiffent de nos Concerts.
Que dans les Palais magnifiques ,
Que fous les toits les plus ruftiques
Les graces , les ris & les jeux
Soient déformais unis enſemble ;
Qu'un même bienfait les raffemble ;
Qu'à jamais il comble nos voeux.
Par M. de M. D. S. d'Aix
Résumé : LA NAISSANCE DE MONSEIGNEUR LE DUC D'ANJOU. ODE.
Le texte célèbre la naissance du duc d'Anjou, fils de la reine de France, survenue en octobre 1736. Il commence par une invocation à la muse pour inspirer des vers dignes de cet événement. Le poème exalte la naissance du prince, perçue comme un don divin, et souhaite une descendance nombreuse et glorieuse pour la famille royale. Il prophétise également des conquêtes futures pour un héros qui apportera la paix et sera adoré par son peuple. Le texte loue la piété et la vérité du roi Louis, garantissant ainsi le succès de sa lignée. Il se termine par des vœux de joie et de célébrations pour marquer cet heureux événement, appelant à des réjouissances dans tout le royaume.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Reconnaissance textuelle : LETTRE écrite d'Aix le 30. Septembre 1730.
LETTRE écrite d'Aix le 30 .
Septembre 1730.
A prédilection , Monfieur , que j'ai
Ltoujours eue pour l'Ode du fecond euë
Livre d'Horace , qui commence par ces
mots Ehen ! fugaces & c. m'a fait lire avec
plaifir dans votre Mercure du mois de
Mars dernier l'Imitation qu'en a faite
M. Moreau de Mantour ; j'écrivis là- deffus
à M.le Marquis d'Eftrozzi de Margon,
avec lequel je fuis en relation de Belles-
Lettres depuis quelque- tems , pour fçavoir
fon fentiment fur cette Traduction,
le priant en même - tems d'avoir la complaifance
de m'en envoyer une de fa façon
en Vers François : la voici ; il fera
peut-être fâché que je la rende publique;
mais fi elle eft digne de votre approbation
, & d'être mife dans votre Mercure;
votre fuffrage me fera un motif fuffifant
calmer fon mécontentement envers
pour
moi . J'ai l'honneur d'être très parfaite
ment &c.
C. D. R.
Résumé : LETTRE écrite d'Aix le 30. Septembre 1730.
Le 30 septembre 1730, l'auteur admire l'Ode II, 15 d'Horace et son imitation par Moreau de Mantour. Il sollicite l'avis du Marquis d'Eftrozzi de Margon sur cette traduction et lui demande sa propre version en vers français. L'auteur espère que l'approbation du destinataire apaisera le Marquis, potentiellement mécontent de la publication.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
LOGOGRYPHE.
PRenez
à vos yeux
Renez- moi tout entier , je presente
Un objet des plus gracieux ;
Je rappelle un fait mémorable ,
Ou de l'Histoire ou de la Fable ;
Je vous offre des Prez , des Arbres et des Fleurs
Que l'Aurore jamais ne baigna de ses pleurs.
Grand , petit , rond , quarré, comme le veut mon
pere ,
Je ne compterai point ici tous les sujets
Dont on me fait dépositaire :
Mon nom aussi vous offre une foule d'objets ;
En effet , l'on y trouve un meuble necessaire ,
Qui sert à bien plus d'une affaire ;
Vous y verrez un Elément ;
Un des enfans du premier homme ;
Une grande Cité plus ancienne que Rome ;
1. Vol.
E iij
1304 MERCURE DE FRANCE
Ce qui nous plaît infiniment ;
Ce que chacun voudroit atteindre ;
Certain Globe qui se fait craindre,
Et qui porte des coups mortels ;
Un vétement dont font usage ,
Les Ministres des saints Autels ;
Faut - il en dire davantage ?
Vous y verrez une couleur ;
Un mot Latin , qui signifie
Un Instrument dont l'harmonie ,
Annonce les Combats , excite la valeur ;
Je n'aurois jamais fait si je voulois tout dire
Vous y verrez enfin les lieux où tout respire ,
Les Plaisirs , la Joye et l'Amour ,
Lieux d'où l'on sort quand il est jour..
:
Par M. V. D. L. T. d'Aix.
ENIGME du même Auteur.
N voit à me former plusieurs Dieux con
ΟΝ courir ;
Cybelle me reçoit , et daigne me nourrir ;
Quand je sors de son sein, au Soleil je m'expose
L'Aurore de ses pleurs m'arrose;
Je suis aussi l'objet des soins ,
Et de Vertumne et de Pomone ;
d. Vola Ce
JUIN. 1731. 1305
-
Ce n'est pas tout encor, avant que je sois bonne ,
Il faut que d'autres Dieux ne me servent pas
moins ;
Le Dieu de la Plaine liquide ,
M'offre l'Elixir de ses eaux ,
Sans lui je serois insipide :
Déesse dont le bras est armé d'une Egide ,
Tu me donnes le jus du fruit de ces Rameaux ,
Qui , tandis que l'hyver attriste la Nature ,
Conservent toûjours la verdure :
Charmant Bacchus , sur moi tu répans ta Li
queur ,
Non pas telle , il est vrai , qu'elle plaît au buveur.
Mortels , en cet état je puis vous être offerte ;
Mais quel traitement je reçoi !
Plusieurs mains s'arment pour ma perte ,
Elles viennent fondre sur moi :
Est-il un destin plus funeste ?
Pour vous dire en deux mots le reste
On me porte dans un Palais ,
Où je suis bien- tôt déchirée :
Quelle injustice? helas ! par ceux à qui je plais ;
Faut- il que je sois dévorée ?
Reconnaissance textuelle : SECONDE ENIGME. du même Auteur.
SECONDE
du même Auteur.
Lecteur ,
Ecteur, voici de quoi rêver ,
De plusieurs soeurs je suis l'aînée ,
I. Vol.
Je
E.iiij
1306 MERCURE DE FRANCE
Je ne parois jamais à la fin de l'année ; ·
commencement que l'on peut me C'est au
trouver.
En Espagne j'occupe une place honorable ;
Je suis necessaire à la table ;
Pour le Jeu , je ne m'y plaits pas
Inséparable de Pallas ,
Je concours à former la valeur et l'audace ;
Je suis au milieu d'une Place :
Sans moi vous n'auriez point d'argent.
Je marche avec le pauvre , et je fuis l'opulent ;
Mais cependant je sers au faste , à la parure ;
On m'employe à l'Architecture.
Le François m'a chassé de Rome sans raison ,
Mais je suis dans Paris ; est- il une maison ,
Où je ne trouve un sûr azile ?
Laissons ce détail inutile ,
Voici pour me connoître un signal très- certain ;
Lecteur , tu me tiens dans la main.
Reconnaissance textuelle : LE TRIOMPHE D'HEBÉ, ODE.
LE TRIOMPHE D'HEBE' ,
DEesse
O D E.
dont la main chérie ,
Du Tout- Puissant Pere des Dieux ,
Jadis lui servoit l'ambrosie ,
Et le Nectar délicieux .
Féconde source d'Allegresse.
Hebé , Reine de la Jeunesse ;
Dissipe nos folles erreurs ,
Qui par un criminel usage ,
Du plus précieux avantage ,
Font la source de nos malheurs
L'âge soumis à ton Empire ,
Forme les plus beaux de nos jours
Sous tes douces Loix tout respire ,
Les Jeux , les Ris , et les Amours.
Au gré du torrent qui l'entraîne ,
L'homme s'abandonne sans peine ,
Dans cette agréable saison ;
Heureux si le cours d'une vie ,
Aux passions moins asservie ,
Lui laissoit encor la raison.
с Maie
668 MERCURE DE FRANCE
Mais , Hélas ! Jeunesse imprudente,
Tes mouvemens impetueux ,
De la volupté qui t'enchante ,
Suivent les sentiers: tortueux;
Tantôt un aveugle caprice ,
Te fait chercher un sort propice.,
Dans tes fréquens engagemens ;
Tantôt déplorable victime ,
Tu cours te plonger dans l'abysme,,
Des plus honteux égaremens.
Comblez des dons de la Fortune ,
Rois , Princes , demi- Dieux mortels
Vous voyez la foule, importune,
Prête à vous dresser des Autels ;
La valeur , la haute naissance.
Les richesses et la puissance ,
Sont des biens en tous lieux chéris ;
Mais ta vigueur et ton adresse ,
Tes graces , aimable Jeunesse ,
Toujours en relevent le prix .
Que j'aime l'heureuse Nature
Qui de ses attraits innocens
Forme son unique parure ,
Et ses charmes les plus puissants.
Lorque le Printemps nous présente ,
I
་
AVRIL: 1733 . 669
La verdure encore naissante ,
Dans nos Champs émaillez de fleurs
Tandis que Vertumne et que Flore,
Etalent aux yeux de l'Aurore ,
Leurs plus agréables couleurs.
De Zéphire la douce haleine ,
Succede aux fougueux Aquilons ,
Le Dieu Nourrisson de Sylenne ,
De Pampre couvre nos Valons.
Déja Philomele éplorée ,
Plaint le triste sort de Terée ,
Et ravit les Echos des Bois.
Quittant leurs Ondes fugitives ,
Les Nayades sont attentives ,
Aux tendres accens de la voix.
Mortels , imitez la Nature ,
Dans le doux Printemps de vos ans ;
Votre joye en sera plus pure ,
Vos chagrins seront moins cuisans ,
Souvent au sein de la jeunesse ,
On a vû briller la Sagesse ,
Et les plus sublimes vertus.
Minerve aima le fils d'Ulysse ;
Et le départ de Berenice ,
Combla la gloire de Titus.
C ij
670 MERCURE DE FRANCE
O vous dont le coeur idolâtre ,
Court après les nouveaux plaisirs ,
Jeunes Amans , troupe folâtre ,
Calmez vos injustes desirs ,
N'allez pas ainsi que Thésée ;
De quelque Ariane abusée ,
Trahir les faux infortunez ,
Et par votre langue indiscrete ,
Augmenter la douleur secrette ,
D'un coeur que vous abandonnez.
De l'implacable jalousie ,
Gardez - vous d'écouter la voix ,
La plus terrible phrenesie ,
Est moins funeste quelquefois.
Si ce fier tyran vous obsede ,
Appellez Bacchus à votre aide ;
Cette aimable Divinité
Dissipera votre tristesse ;
Et sa Liqueur enchanteresse ,
Vous rendra la tranquillité,
>
Au gré d'une ardeur témeraire ,
Raison , ne m'abandonne pas ,
Puisse ton flambeau salutaire ,
Eclairer sans cesse mes pas ;
Qu'un choix judicieux et sage ,
DR
A VRI L. 1733. 671
Des plaisirs permis à mon âge ,
Me soit par toi -même tracé ;
Je préfere cette Science ,
A la tardive experience ,
De l'âge le plus avancé.
Par M. de M. D. S. d'Aix.
Le texte 'Le Triomphe d'Hébé' célèbre Hébé, déesse de la jeunesse, et ses bienfaits. Hébé, ancienne servante des dieux, est invoquée pour éclairer les jeunes et les guider vers une vie sage et heureuse. Le poème met en garde contre les dangers de la jeunesse imprudente, susceptible d'être entraînée par des caprices et des passions destructrices. Il souligne les avantages des rois et princes, qui possèdent valeur, naissance, richesses et puissance, mais insiste sur l'importance de la jeunesse et de ses charmes. Le texte décrit la beauté de la nature au printemps, avec la verdure, les fleurs, et les dieux comme Vertumne, Flore et Zéphire. Il encourage les mortels à imiter la nature pour une joie plus pure et des chagrins moins cuisants. Des exemples de sagesse et de vertu en jeunesse sont mentionnés, comme Minerve aimant Télémaque et la gloire de Titus. Enfin, le poème adresse un avertissement aux jeunes amants, les exhortant à éviter la trahison et la jalousie. Il conseille de chercher la tranquillité et la sagesse, préférant la science à l'expérience tardive.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Reconnaissance textuelle : A MADEMOISELLE D*** Sur la mort d'un Serin de Canarie.
A MADEMOISELLE D ***
I
Sur la mort d'un Serin de Canarie.
L n'est plus ce Serin , si joli , si charmant ,
Ce Serin , dont le sort étoit digne d'envie .
Il fut l'objet des soins de l'aimable Silvie ,
Il en fut aimé tendrement .
Il étoit jeune encor , mais un Enfant perfide
A suscité contre ses jours ,
Un Chat cruel , un Chat avide ,
Qui vient d'en terminer le cours.
Quel est donc,direz- vous, cet Enfant téméraires
Connoissez-le , Silvie , et craignez sa colere ;
Il peut vous porter d'autres coups ,
C'est un Dieu terrible et jaloux ,
On
1
FEVRIER 1734 251
On l'adore à Paphos , et Venus est sa mere ;
A ces traits , le connoissez - vous ?
Quoi , l'Amour ? ..... Oüi , l'Amour luimême
.
Calmez cette surprise extrême ,
Silvie , écoutez -moi , vous ne douterëz pas ,
Que lui seul , du Serin , n'ait causé le trépas ,
Je vais en peu de mots ,
éclairer ce mistère ;
Ce Serin étoit né dans les Bois de Cithere ,
Dans son nid l'Amour l'avoit pris ,
Il le destinoit à Cipris ;
Il vous vit par hazard , et touché de vos charmes,
Il change d'abord de dessein ,
Il veut vous offrir le Serin.
Sa présence auroit pû vous causer des allarmes ,
Peut-être auriez - vous craint ses traits .
Il se présente à vous , sans aîles , et sans armes ;
Dépouillé de tous ses attraits ,
D'une Prude il emprunte et la taille et les traits ›
Le Serin est offert , on l'accepte , une cage
Le retient près de vous dans la captivité.
On dit qu'il témoigna d'abord par son rámage,
Que son premier état n'étoit pas regretté ,
Il préferoit cet esclavage ,
A la plus grande liberté .
Que son sort étoit doux ! de la belle Silvie
Le voilà devenu l'unique amusement ;
Ses soins le rendirent charmant .
C iiij
Hélas !
252 MERCURE DE FRANCE
Hélas ! il méritoit une plus longue vie.
Par mille tours vifs , gracieux ,
Par son ramage harmonieux ,
Il invitoit souvent son aimable Maîtresse ,
A le reposer sur sa main ;
Mais il s'en échappoit bien-tôt avec adresse
Et d'une aîle légere , il voloit sur son sein.
L'Amour voyoit ce badinage ,
Il en devint bien- tôt jaloux ,
?
Voilà donc , dit- il , mon ouvrage ;
Si ce Serin jouit des plaisirs les plus doux ,
C'est à moi seul qu'il doit un si rare avantage ;
Mais cependant Silvie , au Printems de son âge ,
Perd avec lui trop de momens
Il est temps qu'elle fasse usage ,
De ces traits , de ces agrémens
Qu'elle reçut
de la nature ;
>
Soumettons- lui les coeurs d'une foule d'Amans.
Il dit , il tente l'avanture ,
Autant de traits qu'il lance , autant de coeurs
blessez ,
Parmi ces triomphes passez ,
Il n'en voyoit aucun qui fut si mémorable ;
Il conduit à vos pieds cette foule innombrable
Et croit que docile à ses loix ,
Vous allez faire enfin un choix.
Cupidon se trompa : Quelle fut sa colere ,
Quand il vit ces mortels de vos charmes
épris ,
S'etFEVRIER.
1734. 253
S'efforcer envain de vous plaire ;
L'indifférence , ou le mépris ,
De leur vive tendresse étoit l'indigne prix ,
Ainsi donc, dit l'Amour, le plaisir d'être aimée ,
Ne fatte point son jeune coeur !
Elle est de son Serin uniquement charmée !
Eh bien ! sur ce Serin exerçons ma fureur .
Pour l'amour outragé, la vangeance a des charmes
Que sa mort va couter de larmès !
Qu'il périsse... Il alloit le percer de ses Dards,
Quand un Chat frappe ses regards ;
Sois le Ministre de ma rage ;
Viens , dit-il , il le guide à l'instant vers la cage,
Il en ouvre l'entrée , et le Chat furieux ,
Şaisit le beau Serin , le devore à ses yeux.
Tel fut de ce Serin aimable ,
Le sort tragique et déplorable.
C'est un Char qui commit ce forfait odieux ,
Mais Cupidon fut son complice ;
Vous voyez de ce Dieu , jusqu'où va la malice ,
Quand il veut se vanger d'un coeur audacieux ,
Qui brave de ses traits les terribles atteintes.
Pardonnez-lui , Silvie , et retenez vos plaintes ,
Elles aigriroient son couroux ;
Qu'à ses loix votre coeur daigne enfin se soumettre
;
De sa part j'ose vous promettre ,
Le sort le plus heureux , les plaisirs les plus doux.
Par M. de la T... d'Aix.
Résumé : A MADEMOISELLE D*** Sur la mort d'un Serin de Canarie.
Le poème 'A Mademoiselle D ***' raconte la mort d'un serin de Canarie, chéri par Silvie. Ce serin, né dans les bois de Cythère, est offert à Silvie par l'Amour, qui le prive d'ailes et d'armes pour éviter qu'il ne l'alerte. Silvie accepte l'oiseau et en prend soin. Cependant, l'Amour, jaloux de leur complicité, décide de se venger. Il utilise un chat pour tuer le serin, frustré que Silvie ne réponde pas à ses avances et reste attachée à l'oiseau. Le poème se conclut par une exhortation à Silvie de se soumettre aux lois de l'Amour pour éviter sa colère et obtenir un sort heureux.
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