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1
p. 344-354
Omphale, Extrait, [titre d'après la table]
Début :
La Tragédie d'Omphale parut dans sa nouveauté au mois de Novembre [...]
Mots clefs :
Omphale, Alcide, Iphis, Amour, Argine, Fête, Coeur, Rival, Jeux, Triomphe
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texteReconnaissance textuelle : Omphale, Extrait, [titre d'après la table]
A Tragédie d'Omphale parut dans sa
nouveauté au mois de Novembre
1701. et eut un fort grand succès ; on la
reprit 20. ans après avec assez de réussite.
Elle vient d'être remise au Théatre plus
brillante et mieux accueillie que jamais.
Le Poëme est de feu M. de la Mothe et
la Musique de M. Destouches , Sur- Intendant
de la Musique du Roy ; voici un
court Extrait de l'Ouvrage :
Le Théatre représente au Prologue un
lieu destiné pour celebrer la gloire de
l'Amour ; les Jeux , les Plaisirs et les Graces
composent sa Cour et les Habitans
de la Terre et des Cieux , à titre de Sujets
, relevent son triomphe. Une Grace
fait l'exposition par ces Vers :
Vous qui suivez l'Amour , Graces , Plaisirs er
Jeux ,
Celebrez avez moi sa puissance et ses charmes s
Chantez ses traits , chantez ses feux ;
Et que vos chants pour lui soient de nouvelles
armes.
Une seconde Grace fait encore l'office
de
FEVRIER
. 1733. · 345
de Coriphée. Les autres Graces forment
le Balet , conjointement avec les Plaisirs
et les Jeux. Junon descend des Cieux ,
elle expose le sujet qui l'oblige à venir
implorer le secours de l'Amour , par cest
Vers :
Dieu puissant, venge moi d'un Mortel qui m'ou
trage ;
Son coeur, dès le berceau, tiriomphe de ma rage,
Må honte et mon dépit croissent par ses travaux;
Blesse Alcide ; il est temps de vaincre ce Héros :
Mais choisit ces traits redoutables ,
Dont tu sçus troubler mon repos ;
Je te pardonne tous mes maux ,
S'il en peut souffrir de semblables.
L'Amour consent à satisfaire Junon ;
il ordonne à la Jalousie qui paroît au
fond du Théatre enchainée dans son Antre
avec la Rage et le Désespoir , de sortir
de leurs fers et d'aller exécuter les
ordres de Junon . Leur obéissance prépare
le sujet de la Tragédie d'Omphale ,
où l'Auteur suppose que la victoire qu'Alcide
va remporter sur l'Amour jaloux ,
est un des plus difficiles travaux que la
Déesse irritée ait imposez à cet odieux
fils d'une Rivale.
Le Théatre représente au premier Ac-,
G iij
د
te
346 MERCURE DE FRANCE
te , des Arcs de triomphe élevez à la
gloire d'Alcide , devant le Temple de
Jupiter son pere. Iphis fait connoître
l'amour secret dont il brûle pour Omphale
, Reine de Lydie. Son Monologue
commence ainsi :
Calme heureux , innocente paix ,
C'est en vain que je vous appelle ;
Calme heureux , innocente paix,
Non , ce n'est plus pour moi que vos plaisirs
sont faits , & c.
,
Un bruit de Trompettes qui se fait
entendre , donne occasion à ce Prince
ami d'Alcide , d'annoncer la Fête qu'Omphale
doit faire celebrer en l'honneur de
ce Héros , qui vient de la rétablir sur
son Trône par la défaite des Rebelles
dont elle avoit été opprimée , et par celle
d'un Monstre horrible.
Alcide vient et ordonne qu'on aille
rassembler les Rebelles domptez , pour
leur faire éprouver la clémence de leur
légitime Souveraine ; on a trouvé que
l'Auteur s'est un peu trop pressé d'annoncer
la Fête du second Acte , dès le
commencement du premier.
Alcide fait connoître à Iphis qu'il aime
Omphale . Iphis est frappé d'une nouvelle
, qui lui donne un Rival si redoutable
FEVRIER . 1733 : 347
table dans un ami si tendrement aimé
il n'oublie rien pour combattre un amour
qui lui est si fatal ; il représente sur tout
à Alcide , qu'il a tout à craindre de la
jalouse Argine , c'est le nom que M. de
la Mothe donne à Manto , fille du celebre
Tiresie ,pour s'accommoder à la dou
ceur que la Poësie Lyrique exige même
dans les noms. Omphale , suivie de ses
Peuples , vient celebrer le triomphe d'Alcide;
elle y invite ses Lydiens par ces Vers:
Chantez le digne fils du plus puissant des Dieux;
Chantez , portez vos voix et son nom jusqu'aux
Cieux , & c.
Alcide interrompt la Fête par ces Vers
adressez à Omphale.
Cessez ces vains honneurs que vous me faites
rendre ;
Je n'entends point ces Chants , je ne voi point
ces Jeux ;
Mes soupirs , malgré moi , vous font assez en
tendre
Qu'un autre prix est l'objet de mes voeux.
Omphale qui fuit un éclaircissement ,
ordonne qu'on vienne avec elle consacrer
les Armes des mutins à Jupiter.
Au second Acte , Omphale , au milieu
de deux Confidentes , comme dans
Giiij Armide ,
348 MERCURE DE FRANCE
Armide , est félicitée sur la victoire que
ses yeux ont remportée sur le coeur du
grand Alcide. Elle reçoit leurs complimens
avec indifference , et leur fait entendre
qu'Iphis est son vainqueur ; ce
Prince vient ; elle veut sonder son coeur .
Iphis annonce à Omphale de la part
d'Alcide , la Fête préparée pour elle ;
Omphale lui dit que c'est en vain que
ce Héros soupire , et qu'il s'est laissé prévenir
par un autre : Iphis ne peut apprendre
sans jalousie que le coeur d'Omphale
est le partage d'un autre ; il parle
en faveur de son ami , n'osant parler pour
lui - même. Cette Scene est très fine de la
part d'Omphale ; mais Iphis paroît un
Amant peu intelligent , on trouve même
qu'il prend le change gratuitement ,
et qu'il se retire désesperé , sans qu'Omphale
ait rien dit d'assez équivoque pour
lui faire entendre qu'elle est offensée de
la déclaration de son amour. Iphis se
retire sans donner le temps à la Reine
de le détromper.
Alcide vient celebrer la Fête qu'il a
fait annoncer par Iphis ; Omphale ordonne
qu'on ôte les chaînes aux Mutins
domptez , puisque le Vainqueur veut bien
leur faire grace ; cette Fête est presque
toute chantée par Alcide , qui se donne
&
aux
FEVRIER . 1733. 349
aux Sujets d'Omphale pour modele de
l'ardeur dont ils doivent brûler pour une.
si aimable Souveraine ; en voici quelques
Vers :
Chantez mille fois ,
L'amour qui m'enchaîne ;
Celebrez mon choix ;
Chantez mille fois ;
Chantez votre Reine ;
Benissez ses loix.
Imitez l'ardeur si fidele ,
Qui brûle mon coeur ;
Imitez l'ardeur et le zele ,
De votre Vainqueur.
Argine vient troubler la Fête ; elle est
portée par un Dragon aîlé ; l'horreur qui
l'annonce fait fuir tout le monde hors
Alcide , à qui elle reproche la préference
qu'il donne à Omphale ; cette Scene est
des plus vives ; et parfaitement executée
par le sieur Chassé et par la Dlle Entier .
Ces deux excellens Sujets partagent également
la gloire du succès de cet Opera.
Cette grande Actrice finit le second Acte
par un morceau de fureur où son action
et sa voix sont également applaudies.
Elle termine cet Acte par la résolution
qu'elle forme de penetrer si Omphale
G v aime
350 MERCURE DE FRANCE
aime Alcide ; c'est ce dernier crime qui
doit la déterminer à perdre une heureuse
Rivale ; on a crû que le crime d'être aimé
auroit dû suffire à sa vengeance , et que
c'étoit le seul à punir.
Omphale se reproche , au troisiéme
Acte , de n'avoir pas déclaré son amour
à Iphis ; Argine vient et se cache pour
sçavoir ce qu'Omphale dit , ou plutôr ce
qu'elle pense , puisque faire un Monologue
et penser sont la même chose,théatralement
parlant Argine se persuade
qu'Omphale aime Alcide ; ce qui l'y
détermine c'est ce Vers :
Un spectacle fatal m'a contrainte au silence,
Argine le fait voir par l'application
qu'elle en fait ; voici comment elle s'exprime
:
Non je n'en doute plus , c'est Alcide qu'elle aime 3
Elle me l'apprend elle - même :
Au moment que mon Art a fait cesser leurs
jeux ,
Elle alloit déclarer ses-feux.
Il s'en faut bien qu'elle soit digne fille
de Tiresie , si son Art n'est pas plus sûr
que ses conjectures ; elle ne balance plus à
se vanger de sa Rivale , et sçachant que
ses Peuples viennent celebrer le jour de
sa
FEVRIER. 1733. 3521
sa naissance , elle en veut faire le jour .
de sa mort ; elle ordonne aux Démons
de l'enchanter quand il en sera temps.
On vient celebrer la Fête en question ;
Omphale se place sur un Trône de fleurs
qu'on lui a dressé . Après la Fête , Omphale
congédie ses Peuples sous prétexte
qu'elle a besoin d'un peu de solitude.
le coeur
"
Argine vient ; elle ordonne aux Esprits
Infernaux d'enchanter sa Rivale ;
ils sortent des Enfers , et secoüent leurs
Torches sur Omphale ; Argine , un poignard
à la main , s'avance pour lui percer
comme on le voit encore dans
Armide. Heureusement pour la victime le
hazard conduit Alcide assez à temps pour
suspendre le coup mortel ; ce qui est
suivi d'une Scene , où nos deux premiers
Acteurs renouvellent les applaudissemens
qu'on leur a si justement prodiguez dans
l'Acte précedent. Les Démons , par l'ordre
d'Argine , enlevent Omphale , sans
qu'Alcide puisse la secourir.
Dans l'Entr'Acte du quatrième Acte
Omphale a fait connoître à Argine qu'Al
cide n'est pas l'objet de son amour , et
c'est cet aveu qui l'a empêchée de périr ;
elle n'a pourtant point nommé Iphis
de peur de le livrer à la colere d'un Ri
val aussi redoutable qu'Alcide ; Iphis ,
dans
G vj
352 MERCURE DE FRANCE
dans un Monologue , fait éclater son désespoir
, mais il ne le porte pas jusqu'à
se donner la mort ; voici la raison qu'il
en donne :
Faut-il que ma douleur me soit encor si chere ,
Que je n'ose en mourant en terminer le cours ?
Cette pensée qu'on a trouvée susceptible
de plaisanterie parodique , amene
pourtant une très jolie maxime ; la voici :
Que nos jours sont dignes d'envie ,
Quand l'Amour répond à nos voeux !
L'amour même le moins heureux ,
Nous attache encore à la vie.
Alcide vient annoncer à Iphis qu'il a
un Rival secrettement aimé ; Iphis s'offre
à le venger , ne sçachant pas qu'il s'agit
de lui - même. Argine vient ; Alcide lui
proteste qu'Omphale est désormais l'objet
de sa haine; il la prie de découvrir
son Rival par le secours des Enfers. Après
quelques reproches mêlez de tendresse et
d'emportemens , Argine consent à satisfaire
Alcide. Elle appelle les Magiciens ,
Ministres de son Art ; ils viennent par
le chemin des Airs : le charme étant fait,
l'Ombre de Tiresie , sans être apperçûë
des Spectateurs , se présenté aux yeux de
Sa
FEVRIER. 1733. 353
sa fille , il lui ouvre le Livre du Destin ;
instruite du sort d'Alcide , elle lui dit :
Tremble , frémi ; va dès ce jour ,
Voir ton Rival heureux au Temple de l'Amour.
Argine expire de douleur , et Alcide
se livre à la vengeance.
Le Théatre représente au cinquiéme
Acte le Temple de l'Amour . Omphale
vient offrir un Sacrifice à ce Maître des
coeurs ; elle croit que ce Dieu l'exauce
puisqu'il lui amene Iphis . Ce Prince lui
demande pardon de la peine que sa présence
lui peut causer , il lui promet de ne
l'en plus importuner ; Omphale le rassure
et lui déclare son amour ; cette Scene
est très - tendre de part et d'autre ; Alcide
vient dans le dessein d'immoler son
heureux Rival . Surpris de voir Iphis ,
il croit qu'il est venu pour venger
l'outrage qu'on fait à son ami ; il l'invite
à recevoir le premier prix de son
zele dans ses embrassemens. Iphis , pressé
par ses remords veut se tuer ; Omphale
lui retient le bras ; Alcide ne doute
plus qu'Iphis ne soit ce Rival qu'elle lui
préfere après quelques combats , il
triomphe de son amour , et consent au
bonheur de son ami . Autrefois Argine
finissoit la Piece ; peut- être a-t'on suppri
mé
354 MERCURE DE FRANCE
donner une
mé son retour pour ne pas
troisiéme imitation d'Armide dans un
même Opera.
nouveauté au mois de Novembre
1701. et eut un fort grand succès ; on la
reprit 20. ans après avec assez de réussite.
Elle vient d'être remise au Théatre plus
brillante et mieux accueillie que jamais.
Le Poëme est de feu M. de la Mothe et
la Musique de M. Destouches , Sur- Intendant
de la Musique du Roy ; voici un
court Extrait de l'Ouvrage :
Le Théatre représente au Prologue un
lieu destiné pour celebrer la gloire de
l'Amour ; les Jeux , les Plaisirs et les Graces
composent sa Cour et les Habitans
de la Terre et des Cieux , à titre de Sujets
, relevent son triomphe. Une Grace
fait l'exposition par ces Vers :
Vous qui suivez l'Amour , Graces , Plaisirs er
Jeux ,
Celebrez avez moi sa puissance et ses charmes s
Chantez ses traits , chantez ses feux ;
Et que vos chants pour lui soient de nouvelles
armes.
Une seconde Grace fait encore l'office
de
FEVRIER
. 1733. · 345
de Coriphée. Les autres Graces forment
le Balet , conjointement avec les Plaisirs
et les Jeux. Junon descend des Cieux ,
elle expose le sujet qui l'oblige à venir
implorer le secours de l'Amour , par cest
Vers :
Dieu puissant, venge moi d'un Mortel qui m'ou
trage ;
Son coeur, dès le berceau, tiriomphe de ma rage,
Må honte et mon dépit croissent par ses travaux;
Blesse Alcide ; il est temps de vaincre ce Héros :
Mais choisit ces traits redoutables ,
Dont tu sçus troubler mon repos ;
Je te pardonne tous mes maux ,
S'il en peut souffrir de semblables.
L'Amour consent à satisfaire Junon ;
il ordonne à la Jalousie qui paroît au
fond du Théatre enchainée dans son Antre
avec la Rage et le Désespoir , de sortir
de leurs fers et d'aller exécuter les
ordres de Junon . Leur obéissance prépare
le sujet de la Tragédie d'Omphale ,
où l'Auteur suppose que la victoire qu'Alcide
va remporter sur l'Amour jaloux ,
est un des plus difficiles travaux que la
Déesse irritée ait imposez à cet odieux
fils d'une Rivale.
Le Théatre représente au premier Ac-,
G iij
د
te
346 MERCURE DE FRANCE
te , des Arcs de triomphe élevez à la
gloire d'Alcide , devant le Temple de
Jupiter son pere. Iphis fait connoître
l'amour secret dont il brûle pour Omphale
, Reine de Lydie. Son Monologue
commence ainsi :
Calme heureux , innocente paix ,
C'est en vain que je vous appelle ;
Calme heureux , innocente paix,
Non , ce n'est plus pour moi que vos plaisirs
sont faits , & c.
,
Un bruit de Trompettes qui se fait
entendre , donne occasion à ce Prince
ami d'Alcide , d'annoncer la Fête qu'Omphale
doit faire celebrer en l'honneur de
ce Héros , qui vient de la rétablir sur
son Trône par la défaite des Rebelles
dont elle avoit été opprimée , et par celle
d'un Monstre horrible.
Alcide vient et ordonne qu'on aille
rassembler les Rebelles domptez , pour
leur faire éprouver la clémence de leur
légitime Souveraine ; on a trouvé que
l'Auteur s'est un peu trop pressé d'annoncer
la Fête du second Acte , dès le
commencement du premier.
Alcide fait connoître à Iphis qu'il aime
Omphale . Iphis est frappé d'une nouvelle
, qui lui donne un Rival si redoutable
FEVRIER . 1733 : 347
table dans un ami si tendrement aimé
il n'oublie rien pour combattre un amour
qui lui est si fatal ; il représente sur tout
à Alcide , qu'il a tout à craindre de la
jalouse Argine , c'est le nom que M. de
la Mothe donne à Manto , fille du celebre
Tiresie ,pour s'accommoder à la dou
ceur que la Poësie Lyrique exige même
dans les noms. Omphale , suivie de ses
Peuples , vient celebrer le triomphe d'Alcide;
elle y invite ses Lydiens par ces Vers:
Chantez le digne fils du plus puissant des Dieux;
Chantez , portez vos voix et son nom jusqu'aux
Cieux , & c.
Alcide interrompt la Fête par ces Vers
adressez à Omphale.
Cessez ces vains honneurs que vous me faites
rendre ;
Je n'entends point ces Chants , je ne voi point
ces Jeux ;
Mes soupirs , malgré moi , vous font assez en
tendre
Qu'un autre prix est l'objet de mes voeux.
Omphale qui fuit un éclaircissement ,
ordonne qu'on vienne avec elle consacrer
les Armes des mutins à Jupiter.
Au second Acte , Omphale , au milieu
de deux Confidentes , comme dans
Giiij Armide ,
348 MERCURE DE FRANCE
Armide , est félicitée sur la victoire que
ses yeux ont remportée sur le coeur du
grand Alcide. Elle reçoit leurs complimens
avec indifference , et leur fait entendre
qu'Iphis est son vainqueur ; ce
Prince vient ; elle veut sonder son coeur .
Iphis annonce à Omphale de la part
d'Alcide , la Fête préparée pour elle ;
Omphale lui dit que c'est en vain que
ce Héros soupire , et qu'il s'est laissé prévenir
par un autre : Iphis ne peut apprendre
sans jalousie que le coeur d'Omphale
est le partage d'un autre ; il parle
en faveur de son ami , n'osant parler pour
lui - même. Cette Scene est très fine de la
part d'Omphale ; mais Iphis paroît un
Amant peu intelligent , on trouve même
qu'il prend le change gratuitement ,
et qu'il se retire désesperé , sans qu'Omphale
ait rien dit d'assez équivoque pour
lui faire entendre qu'elle est offensée de
la déclaration de son amour. Iphis se
retire sans donner le temps à la Reine
de le détromper.
Alcide vient celebrer la Fête qu'il a
fait annoncer par Iphis ; Omphale ordonne
qu'on ôte les chaînes aux Mutins
domptez , puisque le Vainqueur veut bien
leur faire grace ; cette Fête est presque
toute chantée par Alcide , qui se donne
&
aux
FEVRIER . 1733. 349
aux Sujets d'Omphale pour modele de
l'ardeur dont ils doivent brûler pour une.
si aimable Souveraine ; en voici quelques
Vers :
Chantez mille fois ,
L'amour qui m'enchaîne ;
Celebrez mon choix ;
Chantez mille fois ;
Chantez votre Reine ;
Benissez ses loix.
Imitez l'ardeur si fidele ,
Qui brûle mon coeur ;
Imitez l'ardeur et le zele ,
De votre Vainqueur.
Argine vient troubler la Fête ; elle est
portée par un Dragon aîlé ; l'horreur qui
l'annonce fait fuir tout le monde hors
Alcide , à qui elle reproche la préference
qu'il donne à Omphale ; cette Scene est
des plus vives ; et parfaitement executée
par le sieur Chassé et par la Dlle Entier .
Ces deux excellens Sujets partagent également
la gloire du succès de cet Opera.
Cette grande Actrice finit le second Acte
par un morceau de fureur où son action
et sa voix sont également applaudies.
Elle termine cet Acte par la résolution
qu'elle forme de penetrer si Omphale
G v aime
350 MERCURE DE FRANCE
aime Alcide ; c'est ce dernier crime qui
doit la déterminer à perdre une heureuse
Rivale ; on a crû que le crime d'être aimé
auroit dû suffire à sa vengeance , et que
c'étoit le seul à punir.
Omphale se reproche , au troisiéme
Acte , de n'avoir pas déclaré son amour
à Iphis ; Argine vient et se cache pour
sçavoir ce qu'Omphale dit , ou plutôr ce
qu'elle pense , puisque faire un Monologue
et penser sont la même chose,théatralement
parlant Argine se persuade
qu'Omphale aime Alcide ; ce qui l'y
détermine c'est ce Vers :
Un spectacle fatal m'a contrainte au silence,
Argine le fait voir par l'application
qu'elle en fait ; voici comment elle s'exprime
:
Non je n'en doute plus , c'est Alcide qu'elle aime 3
Elle me l'apprend elle - même :
Au moment que mon Art a fait cesser leurs
jeux ,
Elle alloit déclarer ses-feux.
Il s'en faut bien qu'elle soit digne fille
de Tiresie , si son Art n'est pas plus sûr
que ses conjectures ; elle ne balance plus à
se vanger de sa Rivale , et sçachant que
ses Peuples viennent celebrer le jour de
sa
FEVRIER. 1733. 3521
sa naissance , elle en veut faire le jour .
de sa mort ; elle ordonne aux Démons
de l'enchanter quand il en sera temps.
On vient celebrer la Fête en question ;
Omphale se place sur un Trône de fleurs
qu'on lui a dressé . Après la Fête , Omphale
congédie ses Peuples sous prétexte
qu'elle a besoin d'un peu de solitude.
le coeur
"
Argine vient ; elle ordonne aux Esprits
Infernaux d'enchanter sa Rivale ;
ils sortent des Enfers , et secoüent leurs
Torches sur Omphale ; Argine , un poignard
à la main , s'avance pour lui percer
comme on le voit encore dans
Armide. Heureusement pour la victime le
hazard conduit Alcide assez à temps pour
suspendre le coup mortel ; ce qui est
suivi d'une Scene , où nos deux premiers
Acteurs renouvellent les applaudissemens
qu'on leur a si justement prodiguez dans
l'Acte précedent. Les Démons , par l'ordre
d'Argine , enlevent Omphale , sans
qu'Alcide puisse la secourir.
Dans l'Entr'Acte du quatrième Acte
Omphale a fait connoître à Argine qu'Al
cide n'est pas l'objet de son amour , et
c'est cet aveu qui l'a empêchée de périr ;
elle n'a pourtant point nommé Iphis
de peur de le livrer à la colere d'un Ri
val aussi redoutable qu'Alcide ; Iphis ,
dans
G vj
352 MERCURE DE FRANCE
dans un Monologue , fait éclater son désespoir
, mais il ne le porte pas jusqu'à
se donner la mort ; voici la raison qu'il
en donne :
Faut-il que ma douleur me soit encor si chere ,
Que je n'ose en mourant en terminer le cours ?
Cette pensée qu'on a trouvée susceptible
de plaisanterie parodique , amene
pourtant une très jolie maxime ; la voici :
Que nos jours sont dignes d'envie ,
Quand l'Amour répond à nos voeux !
L'amour même le moins heureux ,
Nous attache encore à la vie.
Alcide vient annoncer à Iphis qu'il a
un Rival secrettement aimé ; Iphis s'offre
à le venger , ne sçachant pas qu'il s'agit
de lui - même. Argine vient ; Alcide lui
proteste qu'Omphale est désormais l'objet
de sa haine; il la prie de découvrir
son Rival par le secours des Enfers. Après
quelques reproches mêlez de tendresse et
d'emportemens , Argine consent à satisfaire
Alcide. Elle appelle les Magiciens ,
Ministres de son Art ; ils viennent par
le chemin des Airs : le charme étant fait,
l'Ombre de Tiresie , sans être apperçûë
des Spectateurs , se présenté aux yeux de
Sa
FEVRIER. 1733. 353
sa fille , il lui ouvre le Livre du Destin ;
instruite du sort d'Alcide , elle lui dit :
Tremble , frémi ; va dès ce jour ,
Voir ton Rival heureux au Temple de l'Amour.
Argine expire de douleur , et Alcide
se livre à la vengeance.
Le Théatre représente au cinquiéme
Acte le Temple de l'Amour . Omphale
vient offrir un Sacrifice à ce Maître des
coeurs ; elle croit que ce Dieu l'exauce
puisqu'il lui amene Iphis . Ce Prince lui
demande pardon de la peine que sa présence
lui peut causer , il lui promet de ne
l'en plus importuner ; Omphale le rassure
et lui déclare son amour ; cette Scene
est très - tendre de part et d'autre ; Alcide
vient dans le dessein d'immoler son
heureux Rival . Surpris de voir Iphis ,
il croit qu'il est venu pour venger
l'outrage qu'on fait à son ami ; il l'invite
à recevoir le premier prix de son
zele dans ses embrassemens. Iphis , pressé
par ses remords veut se tuer ; Omphale
lui retient le bras ; Alcide ne doute
plus qu'Iphis ne soit ce Rival qu'elle lui
préfere après quelques combats , il
triomphe de son amour , et consent au
bonheur de son ami . Autrefois Argine
finissoit la Piece ; peut- être a-t'on suppri
mé
354 MERCURE DE FRANCE
donner une
mé son retour pour ne pas
troisiéme imitation d'Armide dans un
même Opera.
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Résumé : Omphale, Extrait, [titre d'après la table]
La tragédie 'Omphale' a été présentée pour la première fois en novembre 1701 et a connu un grand succès. Elle a été reprise 20 ans plus tard avec une réussite notable et a été récemment remise au théâtre avec un accueil encore plus favorable. Le poème est de feu M. de la Mothe et la musique de M. Destouches, surintendant de la musique du roi. L'œuvre commence par un prologue où le théâtre représente un lieu célébrant la gloire de l'Amour. Les Grâces, les Plaisirs et les Jeux composent sa cour, et les habitants de la Terre et des Cieux en sont les sujets. Une Grâce expose le sujet par des vers, et une autre fait office de coriphée. Junon descend des Cieux et implore l'Amour de la venger d'Alcide, qu'elle considère comme un outrage. L'Amour accepte et ordonne à la Jalousie, accompagnée de la Rage et du Désespoir, de se rendre sur Terre pour exécuter les ordres de Junon. Au premier acte, le théâtre montre des arcs de triomphe élevés à la gloire d'Alcide devant le temple de Jupiter. Iphis, ami d'Alcide, révèle son amour secret pour Omphale, reine de Lydie. Alcide annonce une fête en l'honneur d'Omphale, qu'il a rétablie sur son trône après avoir vaincu des rebelles et un monstre. Alcide avoue à Iphis son amour pour Omphale, ce qui plonge Iphis dans le désespoir. Omphale célèbre le triomphe d'Alcide, mais Alcide interrompt la fête pour déclarer son amour à Omphale. Au deuxième acte, Omphale est félicitée pour sa victoire sur le cœur d'Alcide, mais elle révèle qu'Iphis est son véritable vainqueur. Iphis, jaloux, se retire désespéré. Alcide célèbre une fête en l'honneur d'Omphale, mais Argine, fille de Tirésias, vient troubler la fête en reprochant à Alcide sa préférence pour Omphale. Argine décide de se venger en tuant Omphale. Au troisième acte, Omphale se reproche de n'avoir pas déclaré son amour à Iphis. Argine, cachée, interprète mal les paroles d'Omphale et décide de la tuer lors de la fête célébrant la naissance d'Omphale. Alcide intervient juste à temps pour sauver Omphale, mais les Démons enlèvent Omphale sur ordre d'Argine. Dans l'entracte du quatrième acte, Omphale révèle à Argine qu'Alcide n'est pas l'objet de son amour, ce qui la sauve. Iphis exprime son désespoir mais ne se donne pas la mort. Alcide annonce à Iphis qu'il a un rival secret. Argine, après quelques reproches, consent à aider Alcide à découvrir son rival grâce à l'art des Enfers. L'ombre de Tirésias révèle à Argine le sort d'Alcide, ce qui la conduit à expirer de douleur. Au cinquième acte, Omphale offre un sacrifice à l'Amour et rencontre Iphis, qui lui déclare son amour. Alcide, voulant venger son ami, est surpris de voir Iphis et finit par triompher de son amour pour Omphale, permettant ainsi le bonheur de son ami.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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p. 354
« Le 22. on donna la derniere Représentation d'Omphale, dont on vient de parler, et on remit [...] »
Début :
Le 22. on donna la derniere Représentation d'Omphale, dont on vient de parler, et on remit [...]
Mots clefs :
Comédie, Théâtre, Représentation
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texteReconnaissance textuelle : « Le 22. on donna la derniere Représentation d'Omphale, dont on vient de parler, et on remit [...] »
Le 22. on donna la derniere Représentation
d'Omphale, dont on vient de parler , et on remit
au Théatre le 26. Jephté , Tragédie jouée
l'année derniere avec beaucoup de succès , et que
le Public revoit avec le même plaisir.
On apprend de Vienne , que le 27. du mois
dernier , on représenta au Palais pour la premiere
fois , le nouvel Opera Italien de Sancho Pansa
, Gouverneur , qui eut un fort grand succès.
Il fut honoré de la présence de L. M. Imp . et des
Archiduchesses. La composition du Poeme est
de l'Abbé Claude Pasquini , et la Musique du
Signor Antoine Caldara.
Quelques jours après , plusieurs Musiciens de
la Chambre de l'Empereur , représenterent devant
L. M. Imp sur le petit Théatre de la Cour
la Comédie en Prose , intitulée : Il Don Pilone.
On apprend par les Lettres de Rome , qu'on
donna le 12. du mois dernier , la premiere Représentation
de la Tragi- Comédie , intitulée : La
Fidelité victorieuse de la Trahison , qui eut beaucoup
d'applaudissemens .
d'Omphale, dont on vient de parler , et on remit
au Théatre le 26. Jephté , Tragédie jouée
l'année derniere avec beaucoup de succès , et que
le Public revoit avec le même plaisir.
On apprend de Vienne , que le 27. du mois
dernier , on représenta au Palais pour la premiere
fois , le nouvel Opera Italien de Sancho Pansa
, Gouverneur , qui eut un fort grand succès.
Il fut honoré de la présence de L. M. Imp . et des
Archiduchesses. La composition du Poeme est
de l'Abbé Claude Pasquini , et la Musique du
Signor Antoine Caldara.
Quelques jours après , plusieurs Musiciens de
la Chambre de l'Empereur , représenterent devant
L. M. Imp sur le petit Théatre de la Cour
la Comédie en Prose , intitulée : Il Don Pilone.
On apprend par les Lettres de Rome , qu'on
donna le 12. du mois dernier , la premiere Représentation
de la Tragi- Comédie , intitulée : La
Fidelité victorieuse de la Trahison , qui eut beaucoup
d'applaudissemens .
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Résumé : « Le 22. on donna la derniere Représentation d'Omphale, dont on vient de parler, et on remit [...] »
Le 22, la pièce 'Omphale' a été jouée pour la dernière fois. Le 26, la tragédie 'Jephté' a été acclamée. À Vienne, le 27 du mois précédent, l'opéra 'Sancho Pansa, Gouverneur' a été représenté en présence de l'Empereur. À Rome, le 12 du mois précédent, la tragi-comédie 'La Fidélité victorieuse de la Trahison' a été applaudie. Des musiciens ont joué 'Il Don Pilone' devant l'Empereur.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 354-364
Extrait de la Tragédie de Gustave, [titre d'après la table]
Début :
Le 6 Février, les Comédiens François donnerent la premiere Représentation de [...]
Mots clefs :
Gustave, Christierne, Adélaïde, Astolphe, Frédéric, Princesse, Mort, Mère, Prince, Tyran, Lettre, Danemark
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Extrait de la Tragédie de Gustave, [titre d'après la table]
Le 6 Février , les Comédiens François
donnerent la premiere Représentation de
Ia Tragédie de Gustave ; il y a peu de Piéces
qui ayent été reçûes avec un applau
dissement
FEVRIER. 1733. 355
dissement si unanime ; la grande idée
qu'on s'en est d'abord faite n'a fait qu'aug,
menter dans les Représentations suivan
tes. Elle est de M. Pyron , Auteur de la
Comédie des Fils Ingrats , et de la Tragédie
de Callistene. Nous n'en donnerons
qu'un Argument très- succinct , en attendant
que nous l'ayons assez éxaminée
pour pouvoir en donner un Extrait plus
détaillé .
Le Heros de cette Tragédie est le premier
de sa Maison qui ait regné sur les
Suedois ; on l'avoit d'abord annoncé
dans les affiches sous le nom de Gustave
Vasa, pour le distinguer de Gustave Adol
phe , dont le nom n'est pas moins celébre.
Stenon , Roi de Suede , à qui ce premier
Gustave a succedé , l'avoit désigné
son Successeur , à la faveur d'un mariage
avec Adelaide , sa Fille. Christierne
Beau- Frere de Charlequint , détrôna et
fit massacrer Stenon ; il fit enfermer Adelaïde
Fille de ce malheureux Roi dans
une Tour, et il y a apparence qu'il n'auroit
pas épargné celui qui lui étoit destinépour
Epoux , s'il étoit tombé en sa puissance ;
il faut donc supposer que Gustave fut au
moins emprisonné , ou qu'il se tint caché
pendant neuf ans pour attendre le tems.
favorable, où il pourroit monter sur le
Trône
2
356 MERCURE DE FRANCE
Trône où il avoit été destiné par le légiti
me Roi . Ces neuf ans étant expirés , et le
tems de sa vangeance étant arrivé , comme
sa tête avoit été mise à prix par Christierne
, il fit courir lui- même le bruit que
Gustave avoit été tué , et que le meurtrier
devoit apporter sa tête à Christierne.
C'est ici que l'action theatrale commence.
Christierne à son retour de quelque
expédition , demande à Astolphe , fidele
Ministre de ses vangeances , ce qui s'est
passé dans Stocholm depuis son absence ;
Astolphe lui rend un compte éxact de ce
qui regarde sa nouvelle domination , et
lui annonce entr'autres choses que la Reine
, veuve de Stenon , est morte ; Christierne
lui apprend à son tour quelque
chose de plus favorable à ses projets ambitieux
, c'est l'assassinat de Gustave. E
dentPrince assez amateur du repos , pour avoir
abandonné à Christierne les droits naturels
qu'il avoit sur la Couronne de
Dannemarc , ne peut apprendre sans indignation
qu'on ait assassiné Gustave ; il
a déja commencé à devenir suspect à
Christier ne , par les voeux de la plûpart ,
des Danois pour son rétablissement au
Trône qui lui appartient ; mais ce meurtre
abominable dont le Tyran fait gloire ,
fait
FEVRIER. 1733 . 387
fait encore plus d'horreur à Casimir , l'un
des plus fideles Sujets qui soient restés
à Stenon malgré son détrônement ; de
sorte qu'il forme dès-lors le genereux des
sein de vanger Gustave , comme désigné
par Stenon pour lui succeder au Trône ;
par le droit d'Adelaïde , sa Fille. Frederic
aime cette malheureuse Princesse , dont
les fers viennent d'être brisez par un
trait de politique de Christiernę ; la Princesse
l'a toujours estimé , Christierne le
lui a fait proposer pour Epoux , mais ce
Tyran n'avoit pas encore vû cette Fille
de Stenon , et ce n'a été que long- tems
après le jour de son emprisonnement qu'il
a connu le pouvoir de ses charmes ; il
n'a garde de faire connoître son amour
à Fréderic , qu'il a interêt de flater toujours
de l'espérance de son Hymen avec
Adelaïde ; c'est dans cette vûë qu'il charge
ce Prince Danois du soin d'annoncer à
cette Princesse la mort de Gustave , lui
faisant entendre que perdant toute esperance
d'épouser l'Amant à qui son Perc
l'avoit destinée , elle n'apportera plus de
résistance au nouvel Hymen qu'on éxige
d'elle. Fréderic ne sçait comment annoncer
une si funeste nouvelle à sa Princesse ;
il craint de lui en devenit encore plus
odieux ; elle vient ; il la plaint ; elle lui
de358
MERCURE DE FRANCE
demande d'où naissent ses plaintes , et
comme il s'obstine à garder le silence
quoiqu'elle le presse de le rompre : Ah !
lui dit elle , Gustave est mort ; il la quitte
sans proferer un seul mot . Elle prend sa
retraite et son silence pour un aveu ; elle
ne doute plus de la mort de Gustave ; la
Mere de ce Prince , qui passe pour une
Suivante de cette Princesse éplorée , témoigne
plus de fermeté ; ce qui donne
lieu à ces deux beaux Vers d'Adelaïde :
Calme dénaturé , qui fait voir en ce jour,
Que le sang sur un coeur est plus fort que PA
mour !
Voilà à peu près ce qui fait le sujet du
premier Acte , nous nous y sommes un
peu étendus , croyant l'exposition de ces
circonstances nécessaires pour l'intelligence
de l'action principale
Casimir ayant appris que le prétendu
assassin de Gustave doit en apporter la
tête à Christierne , vient l'attendre dans
un endroit par où il doit passer ; prêt à
le combattre , il le reconnoît pour Gustave
même ; ce Prince lui explique.comment
il s'est transporté jusqu'à Stocholm
sans avoir été reconnu ; il lui demande si
Adelaïde lui est fidele ; Casimir l'en
ayant
FEVRIER. 1733 359
1
ayant assuré , Gustave lui dit d'un ton de
confiance :
Stocholm est libre , et Stenon est vangé.
Christierne vient ; le faux assassin qui
lui est toujours inconnu , lui raconte
en termes équivoques ce qu'il veut lui
persuader ; il lui promet de lui montrer la
tête de Gustave , qu'il dit avoir attaqué en
brave homme ; il lui demande pour toute
récompense , qu'il lui permette de rendre
à la Princesse une Lettre que Gustave a
mise entre ses mains : Christierne lit la
Lettre , il reconnoît le seing de Gustave :
par ce Billet , Gustave prie Adélaïde de
ne pas
s'obstiner à lui être fidele après sa
mort , et de recevoir un Epoux de la
main du Vainqueur ; cette Lettre étant
parfaitement conforme aux intentions de
Christierne , ce Tyran lui permet de la
donner à Adélaïde , et de l'entretenir sans
témoins, Gustave se retire ; Astolphe plus
méchant encore que Christierne lui
dit que s'il veut que son Hymen avec
Adélaïde ne soit plus traversé , il faut absolument
séparer Léonor de cette Princesse
, attendu que cette Suivante l'entretient
dans une haine implacable contre
lui ; Christierne approuve ce conseil , et
le charge de l'éxécuter quand il le trouve-
>
ra
$ 60 MERCURE DE FRANCE
ra à propos ; voilà à peu près toute l'ac
tion du second Acte.
L'entrevuë d'Adélaïde avec celui qui
doit lui donner une Lettre de Gustave ,fait
le principal incident du troisiéme Acte.
Cet incident est précedé d'un autre qui
est très- bien imaginés le voici . Léonor ne
doutant plus de la mort de son Fils , dont
elle n'a été que trop bien informée , ne
peut plus se contraindre en présence d'Astolphe
et pour réprimer l'insolence de
ses discours , elle se déclare mere de Gusrave
Astolphe la fait arrêter sur le
champ malgré les larmes et les cris d'Adélaïde
cet emprisonnement est abŝolument
nécessaire pour préparer un coup
de Théatre qui fait un honneur infini à
P'Auteur. Léonor ayant été arrachée d'entre
les bras d'Adélaïde , Gustave est introduit
auprès d'elle ; elle ne reconnoît
pas le son de sa voix , soit qu'il soit supposé
qu'il la contrefasse , soit que neuf
ans d'absence y ayent apporté assez de
changement pour la rendre méconnoissa→
ble aux oreilles d'une Princesse , accablée
d'ailleurs d'une douleur mortelle ; elle lit e;
la Lettre dont on a déjà parlé dans l'Acte
précédent ; elle fait connoître après cette
fecture qu'elle aimera toujours Gustave ,
quoiqu'il la dispense de sa foi ; à cet heureux
FEVRIER. 1733. 361
reux témoignage d'une constance éternelle
, Gustave transporté se jette à ses
pieds ; cette reconnoissance a fait un plaisir
infini ; Adélaïde à travers sa joie laisse
entrevoir une douleur dont elle apprend
la cause à Gustave ; c'est l'emprisonnement
de Léonor qu'elle fait connoître à
çe tendre Fils pour sa Mere , dont il avoit
déja pleuré la mort ; Gustave ne balance
pas à s'exposer à tout pour la délivrance
d'une Mere si chete ; il quitte la Prin
cesse dans le dessein de tout entreprendre
; Frederic vient un moment après
toujours soumis et respectueux. Adélaïde
le prie à son tour de travailler à la déli̟-
vrance de Léonor , ce genereux Prince
lui promet de la demander à Christierne
et de tout entreprendre s'il la lui refuse,
Passons à l'Acte IV.
Astolphe apprend à Christierne que
cette Léonor qui lui paroissoit si suspecte
s'est enfin fait reconnoître pour Mere de
Gustave. Christierne est frappé de cette
découverte , mais il l'est encore plus d'un
nouveau soupçon d'Astolphe , qui vient
de faire arrêter le prétendu assassin de
Gustave , parce qu'il avoit voulu séduire,
à force d'argent , les Gardes de Léonor ,
ce qui lui fait présumer qu'il se pourroit
bien que le prétendu meurtrier de Gusta362
MERCURE DE FRANCE
ve fut Gustave lui -même. Christierne en
tre dans ce soupçon ; et pour l'éclaircir
it ordonne à Astolphe de lui envoyer
Léonor , et de se tenir prêt à faire paroî
tre le prisonnier qu'il vient de faire arrê
ter , au premier signal. Ses ordres sont
ponctuellement éxecutés. Léonor vient la
premiere ; elle reproche la mort de son
Fils au Tyran ; il s'en excuse avec adresse
eh bien , lui répond Léonor , si tu
n'es pas complice de la mort de Gustave,
prouve-le moi par le supplice de son assassin
. Christierne y consent ; on amene
Gustave , Léonor le reconnoît pour son
Fils , sans oser proferer un seul mot , mais
voyant qu'on va lui donner la mort par
l'ordre de Christierne : Arrête , dit elle
parlant à celui qui va le frapper : Ah !
C'est ton Fils , dit alors Christierne : ce
coup de Théatre a parû le plus bel endroit
de la Tragédie.
,
Nous passons légerement sur ce qui
reste , pour ne pas sortir des bornes que
nous avons prescrites à cet argument.
Frederic n'ayant pû obtenir de Christierne
la liberté de Léonor , et d'ailleurs
le Tyran lui ayant dit qu'il prétend lui
même épouser Adélaïde , s'emporte d'u
ne maniere à fournir à Christierne un
prétexte de le faire arrêter , de sorte que
le
FEVRIER. 1733. 365
le danger des personnages les plus interessants
de la Piéce , paroît arrivé à son
dernier période. Heureusement on s'est
avisé trop tard de faire arrêter Casimir
par la raison qu'il étoit le moins suspect
on vient avertir Christierne que tout
conspire contre lui , et que ce Casimir
dont il ne s'étoit jamais défié, avoit , à
main armée délivré Gustave et Frederic
de sorte qu'il ne lui reste d'espoir que
dans la fuite. Christierne vaincu sur la
Mer et sur les glaces , tente un dernier
coup que le désespoir lui inspire ; il fait
paroître sur le tillac d'un Vaisseau Léonor
prête à tomber sous un coup mortel
, et par une Lettre qu'il envoye à la
Flote ennemie , par une fleche décochée ,
il fait entendre à Gustave que s'il ne lui
rend Adelaïde , sa Mere est morte ; Gustave
ne balance pas un moment à se livrer
lui- même pour sauver sa Mere; Adelaïde
s'y oppose , mais inutilement ; enfin Leonor
vient dissiper par sa présence le trouble
dont tous les esprits sont agitez ; elle
annonce que le génereux Fréderic l'a sauvée
dans le temps que Christierne lui alloit
enfoncer un poignard dans le sein ; on
amene le Tyran à Gustave , qui ne dai
gne pas répandre un sang si indigne , il
gie veut pas même qu'on attente à sa li-
L
berté
364 MERCURE DE FRANCE
berté , et l'abandonne aux remords , justes
vengeurs des crimes pour Fréderic
il a déja pris son parti en Prince génereux
, et a fait voile du côté du Dannemarc
, où les Peuples l'attendent pour
le couronner.
;
La Scene se passe dans le Palais des
Rois de Suede à Stokolm. Le principal
Rôle de Gustave est rempli et très-bien
joüé par le sieur Dufresne ceux de Christierne
, Roy de Dannemarc , de Fréderic
, Prince de Dannemarc , de Casimir ,
Seigneur Suedois , d'Astolphe , Confident
de Christierne et d'Othon , Capitaine
de ses Gardes , sont jouez par les
sieurs Sarrazin , Grandval , le Grand ,
Montmenil , et du Breuil. Les Rôles d'Adelaïde
, Princesse de Suede , de Leonor ,
Mere de Gustave , et de Sophie , Confidente
d'Adelaïde , sont remplis par les
Dlles Gaussin , Ballycourt et Jouvenot,
donnerent la premiere Représentation de
Ia Tragédie de Gustave ; il y a peu de Piéces
qui ayent été reçûes avec un applau
dissement
FEVRIER. 1733. 355
dissement si unanime ; la grande idée
qu'on s'en est d'abord faite n'a fait qu'aug,
menter dans les Représentations suivan
tes. Elle est de M. Pyron , Auteur de la
Comédie des Fils Ingrats , et de la Tragédie
de Callistene. Nous n'en donnerons
qu'un Argument très- succinct , en attendant
que nous l'ayons assez éxaminée
pour pouvoir en donner un Extrait plus
détaillé .
Le Heros de cette Tragédie est le premier
de sa Maison qui ait regné sur les
Suedois ; on l'avoit d'abord annoncé
dans les affiches sous le nom de Gustave
Vasa, pour le distinguer de Gustave Adol
phe , dont le nom n'est pas moins celébre.
Stenon , Roi de Suede , à qui ce premier
Gustave a succedé , l'avoit désigné
son Successeur , à la faveur d'un mariage
avec Adelaide , sa Fille. Christierne
Beau- Frere de Charlequint , détrôna et
fit massacrer Stenon ; il fit enfermer Adelaïde
Fille de ce malheureux Roi dans
une Tour, et il y a apparence qu'il n'auroit
pas épargné celui qui lui étoit destinépour
Epoux , s'il étoit tombé en sa puissance ;
il faut donc supposer que Gustave fut au
moins emprisonné , ou qu'il se tint caché
pendant neuf ans pour attendre le tems.
favorable, où il pourroit monter sur le
Trône
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Trône où il avoit été destiné par le légiti
me Roi . Ces neuf ans étant expirés , et le
tems de sa vangeance étant arrivé , comme
sa tête avoit été mise à prix par Christierne
, il fit courir lui- même le bruit que
Gustave avoit été tué , et que le meurtrier
devoit apporter sa tête à Christierne.
C'est ici que l'action theatrale commence.
Christierne à son retour de quelque
expédition , demande à Astolphe , fidele
Ministre de ses vangeances , ce qui s'est
passé dans Stocholm depuis son absence ;
Astolphe lui rend un compte éxact de ce
qui regarde sa nouvelle domination , et
lui annonce entr'autres choses que la Reine
, veuve de Stenon , est morte ; Christierne
lui apprend à son tour quelque
chose de plus favorable à ses projets ambitieux
, c'est l'assassinat de Gustave. E
dentPrince assez amateur du repos , pour avoir
abandonné à Christierne les droits naturels
qu'il avoit sur la Couronne de
Dannemarc , ne peut apprendre sans indignation
qu'on ait assassiné Gustave ; il
a déja commencé à devenir suspect à
Christier ne , par les voeux de la plûpart ,
des Danois pour son rétablissement au
Trône qui lui appartient ; mais ce meurtre
abominable dont le Tyran fait gloire ,
fait
FEVRIER. 1733 . 387
fait encore plus d'horreur à Casimir , l'un
des plus fideles Sujets qui soient restés
à Stenon malgré son détrônement ; de
sorte qu'il forme dès-lors le genereux des
sein de vanger Gustave , comme désigné
par Stenon pour lui succeder au Trône ;
par le droit d'Adelaïde , sa Fille. Frederic
aime cette malheureuse Princesse , dont
les fers viennent d'être brisez par un
trait de politique de Christiernę ; la Princesse
l'a toujours estimé , Christierne le
lui a fait proposer pour Epoux , mais ce
Tyran n'avoit pas encore vû cette Fille
de Stenon , et ce n'a été que long- tems
après le jour de son emprisonnement qu'il
a connu le pouvoir de ses charmes ; il
n'a garde de faire connoître son amour
à Fréderic , qu'il a interêt de flater toujours
de l'espérance de son Hymen avec
Adelaïde ; c'est dans cette vûë qu'il charge
ce Prince Danois du soin d'annoncer à
cette Princesse la mort de Gustave , lui
faisant entendre que perdant toute esperance
d'épouser l'Amant à qui son Perc
l'avoit destinée , elle n'apportera plus de
résistance au nouvel Hymen qu'on éxige
d'elle. Fréderic ne sçait comment annoncer
une si funeste nouvelle à sa Princesse ;
il craint de lui en devenit encore plus
odieux ; elle vient ; il la plaint ; elle lui
de358
MERCURE DE FRANCE
demande d'où naissent ses plaintes , et
comme il s'obstine à garder le silence
quoiqu'elle le presse de le rompre : Ah !
lui dit elle , Gustave est mort ; il la quitte
sans proferer un seul mot . Elle prend sa
retraite et son silence pour un aveu ; elle
ne doute plus de la mort de Gustave ; la
Mere de ce Prince , qui passe pour une
Suivante de cette Princesse éplorée , témoigne
plus de fermeté ; ce qui donne
lieu à ces deux beaux Vers d'Adelaïde :
Calme dénaturé , qui fait voir en ce jour,
Que le sang sur un coeur est plus fort que PA
mour !
Voilà à peu près ce qui fait le sujet du
premier Acte , nous nous y sommes un
peu étendus , croyant l'exposition de ces
circonstances nécessaires pour l'intelligence
de l'action principale
Casimir ayant appris que le prétendu
assassin de Gustave doit en apporter la
tête à Christierne , vient l'attendre dans
un endroit par où il doit passer ; prêt à
le combattre , il le reconnoît pour Gustave
même ; ce Prince lui explique.comment
il s'est transporté jusqu'à Stocholm
sans avoir été reconnu ; il lui demande si
Adelaïde lui est fidele ; Casimir l'en
ayant
FEVRIER. 1733 359
1
ayant assuré , Gustave lui dit d'un ton de
confiance :
Stocholm est libre , et Stenon est vangé.
Christierne vient ; le faux assassin qui
lui est toujours inconnu , lui raconte
en termes équivoques ce qu'il veut lui
persuader ; il lui promet de lui montrer la
tête de Gustave , qu'il dit avoir attaqué en
brave homme ; il lui demande pour toute
récompense , qu'il lui permette de rendre
à la Princesse une Lettre que Gustave a
mise entre ses mains : Christierne lit la
Lettre , il reconnoît le seing de Gustave :
par ce Billet , Gustave prie Adélaïde de
ne pas
s'obstiner à lui être fidele après sa
mort , et de recevoir un Epoux de la
main du Vainqueur ; cette Lettre étant
parfaitement conforme aux intentions de
Christierne , ce Tyran lui permet de la
donner à Adélaïde , et de l'entretenir sans
témoins, Gustave se retire ; Astolphe plus
méchant encore que Christierne lui
dit que s'il veut que son Hymen avec
Adélaïde ne soit plus traversé , il faut absolument
séparer Léonor de cette Princesse
, attendu que cette Suivante l'entretient
dans une haine implacable contre
lui ; Christierne approuve ce conseil , et
le charge de l'éxécuter quand il le trouve-
>
ra
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ra à propos ; voilà à peu près toute l'ac
tion du second Acte.
L'entrevuë d'Adélaïde avec celui qui
doit lui donner une Lettre de Gustave ,fait
le principal incident du troisiéme Acte.
Cet incident est précedé d'un autre qui
est très- bien imaginés le voici . Léonor ne
doutant plus de la mort de son Fils , dont
elle n'a été que trop bien informée , ne
peut plus se contraindre en présence d'Astolphe
et pour réprimer l'insolence de
ses discours , elle se déclare mere de Gusrave
Astolphe la fait arrêter sur le
champ malgré les larmes et les cris d'Adélaïde
cet emprisonnement est abŝolument
nécessaire pour préparer un coup
de Théatre qui fait un honneur infini à
P'Auteur. Léonor ayant été arrachée d'entre
les bras d'Adélaïde , Gustave est introduit
auprès d'elle ; elle ne reconnoît
pas le son de sa voix , soit qu'il soit supposé
qu'il la contrefasse , soit que neuf
ans d'absence y ayent apporté assez de
changement pour la rendre méconnoissa→
ble aux oreilles d'une Princesse , accablée
d'ailleurs d'une douleur mortelle ; elle lit e;
la Lettre dont on a déjà parlé dans l'Acte
précédent ; elle fait connoître après cette
fecture qu'elle aimera toujours Gustave ,
quoiqu'il la dispense de sa foi ; à cet heureux
FEVRIER. 1733. 361
reux témoignage d'une constance éternelle
, Gustave transporté se jette à ses
pieds ; cette reconnoissance a fait un plaisir
infini ; Adélaïde à travers sa joie laisse
entrevoir une douleur dont elle apprend
la cause à Gustave ; c'est l'emprisonnement
de Léonor qu'elle fait connoître à
çe tendre Fils pour sa Mere , dont il avoit
déja pleuré la mort ; Gustave ne balance
pas à s'exposer à tout pour la délivrance
d'une Mere si chete ; il quitte la Prin
cesse dans le dessein de tout entreprendre
; Frederic vient un moment après
toujours soumis et respectueux. Adélaïde
le prie à son tour de travailler à la déli̟-
vrance de Léonor , ce genereux Prince
lui promet de la demander à Christierne
et de tout entreprendre s'il la lui refuse,
Passons à l'Acte IV.
Astolphe apprend à Christierne que
cette Léonor qui lui paroissoit si suspecte
s'est enfin fait reconnoître pour Mere de
Gustave. Christierne est frappé de cette
découverte , mais il l'est encore plus d'un
nouveau soupçon d'Astolphe , qui vient
de faire arrêter le prétendu assassin de
Gustave , parce qu'il avoit voulu séduire,
à force d'argent , les Gardes de Léonor ,
ce qui lui fait présumer qu'il se pourroit
bien que le prétendu meurtrier de Gusta362
MERCURE DE FRANCE
ve fut Gustave lui -même. Christierne en
tre dans ce soupçon ; et pour l'éclaircir
it ordonne à Astolphe de lui envoyer
Léonor , et de se tenir prêt à faire paroî
tre le prisonnier qu'il vient de faire arrê
ter , au premier signal. Ses ordres sont
ponctuellement éxecutés. Léonor vient la
premiere ; elle reproche la mort de son
Fils au Tyran ; il s'en excuse avec adresse
eh bien , lui répond Léonor , si tu
n'es pas complice de la mort de Gustave,
prouve-le moi par le supplice de son assassin
. Christierne y consent ; on amene
Gustave , Léonor le reconnoît pour son
Fils , sans oser proferer un seul mot , mais
voyant qu'on va lui donner la mort par
l'ordre de Christierne : Arrête , dit elle
parlant à celui qui va le frapper : Ah !
C'est ton Fils , dit alors Christierne : ce
coup de Théatre a parû le plus bel endroit
de la Tragédie.
,
Nous passons légerement sur ce qui
reste , pour ne pas sortir des bornes que
nous avons prescrites à cet argument.
Frederic n'ayant pû obtenir de Christierne
la liberté de Léonor , et d'ailleurs
le Tyran lui ayant dit qu'il prétend lui
même épouser Adélaïde , s'emporte d'u
ne maniere à fournir à Christierne un
prétexte de le faire arrêter , de sorte que
le
FEVRIER. 1733. 365
le danger des personnages les plus interessants
de la Piéce , paroît arrivé à son
dernier période. Heureusement on s'est
avisé trop tard de faire arrêter Casimir
par la raison qu'il étoit le moins suspect
on vient avertir Christierne que tout
conspire contre lui , et que ce Casimir
dont il ne s'étoit jamais défié, avoit , à
main armée délivré Gustave et Frederic
de sorte qu'il ne lui reste d'espoir que
dans la fuite. Christierne vaincu sur la
Mer et sur les glaces , tente un dernier
coup que le désespoir lui inspire ; il fait
paroître sur le tillac d'un Vaisseau Léonor
prête à tomber sous un coup mortel
, et par une Lettre qu'il envoye à la
Flote ennemie , par une fleche décochée ,
il fait entendre à Gustave que s'il ne lui
rend Adelaïde , sa Mere est morte ; Gustave
ne balance pas un moment à se livrer
lui- même pour sauver sa Mere; Adelaïde
s'y oppose , mais inutilement ; enfin Leonor
vient dissiper par sa présence le trouble
dont tous les esprits sont agitez ; elle
annonce que le génereux Fréderic l'a sauvée
dans le temps que Christierne lui alloit
enfoncer un poignard dans le sein ; on
amene le Tyran à Gustave , qui ne dai
gne pas répandre un sang si indigne , il
gie veut pas même qu'on attente à sa li-
L
berté
364 MERCURE DE FRANCE
berté , et l'abandonne aux remords , justes
vengeurs des crimes pour Fréderic
il a déja pris son parti en Prince génereux
, et a fait voile du côté du Dannemarc
, où les Peuples l'attendent pour
le couronner.
;
La Scene se passe dans le Palais des
Rois de Suede à Stokolm. Le principal
Rôle de Gustave est rempli et très-bien
joüé par le sieur Dufresne ceux de Christierne
, Roy de Dannemarc , de Fréderic
, Prince de Dannemarc , de Casimir ,
Seigneur Suedois , d'Astolphe , Confident
de Christierne et d'Othon , Capitaine
de ses Gardes , sont jouez par les
sieurs Sarrazin , Grandval , le Grand ,
Montmenil , et du Breuil. Les Rôles d'Adelaïde
, Princesse de Suede , de Leonor ,
Mere de Gustave , et de Sophie , Confidente
d'Adelaïde , sont remplis par les
Dlles Gaussin , Ballycourt et Jouvenot,
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Résumé : Extrait de la Tragédie de Gustave, [titre d'après la table]
Le 6 février 1733, les Comédiens Français ont présenté pour la première fois la tragédie 'Gustave' de M. Pyron, également auteur des 'Fils Ingrats' et de 'Callistene'. Cette pièce a été acclamée par le public dès sa première représentation, et cet enthousiasme n'a fait que croître lors des représentations suivantes. La tragédie 'Gustave' raconte l'histoire de Gustave Vasa, premier roi de sa maison à régner sur les Suédois. Gustave a été désigné comme successeur de Stenon, roi de Suède, grâce à son mariage avec Adelaide, la fille de Stenon. Cependant, Christierne, beau-frère de Charles Quint, a détrôné et fait massacrer Stenon, emprisonnant Adelaide dans une tour. Pour éviter d'être capturé, Gustave s'est caché pendant neuf ans avant de revenir pour réclamer le trône. L'action commence avec Christierne de retour d'une expédition, apprenant la mort de Gustave et celle de la reine, veuve de Stenon. Casimir, un fidèle sujet de Stenon, décide de venger Gustave. Frédéric, amoureux d'Adelaïde, est chargé par Christierne d'annoncer la mort de Gustave à la princesse. Malgré ses réticences, Frédéric finit par révéler la nouvelle à Adelaide. Dans le deuxième acte, Casimir reconnaît Gustave déguisé et apprend qu'il est toujours vivant. Gustave demande à Casimir si Adelaide lui est fidèle. Christierne, toujours méfiant, ordonne à Astolphe de séparer Léonor, la mère de Gustave, d'Adelaïde. Le troisième acte se concentre sur la rencontre entre Adelaide et Gustave, déguisé en messager. Léonor, croyant Gustave mort, est arrêtée par Astolphe. Gustave se révèle à Adelaide, qui est ravie de le revoir. Gustave décide de libérer sa mère, Léonor, emprisonnée par Christierne. Dans le quatrième acte, Christierne découvre que Léonor est la mère de Gustave et ordonne son exécution. Gustave est amené devant Christierne, qui reconnaît finalement son erreur. Frédéric, après avoir tenté en vain de libérer Léonor, est arrêté par Christierne. Casimir libère Gustave et Frédéric, forçant Christierne à fuir. Gustave, après avoir sauvé sa mère, épargne Christierne et le laisse aux remords de ses crimes. Frédéric retourne au Danemark pour être couronné. La pièce se déroule au palais des rois de Suède à Stockholm. Les principaux rôles sont interprétés par Dufresne, Sarrazin, Grandval, Montmenil, et autres acteurs renommés.
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4
p. 364-365
« Les mêmes Comédiens ont remis au Théatre sur la fin du Carnaval, la Comédie du Malade [...] »
Début :
Les mêmes Comédiens ont remis au Théatre sur la fin du Carnaval, la Comédie du Malade [...]
Mots clefs :
Comédiens, Rôle, Théâtre
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Les mêmes Comédiens ont remis au Théatre
sur la fin du Carnaval , la Comédie du Malade
Imaginaire de Moliere ; cette Piece n'avoit point
eté représentée depuis la mort du sieur de la
Thorilliere , qui y jouoit excellemment le principal
Rôle. Ce Rôle est aujourd'hui rempli par
le sieur de Montmesnil, dont le Public paroit fort
Content.
Le 10. Février , les Comédiens Italiens remirent
-
FEVRIER.
1733. 355
rent au Théatre la petite Comédie du Je ne sçai
quoi , dans laquelle le sieur Bornet chanta pour
la premiere fois le Rôle du Maître à chanter, qui
est une Scene parodiée des Fêtes Venitiennes. Ce
nouveau Sujet a de la voix et paroît convenir au
Théatre Italien , ayant été applaudi du Public.
Le 19 Février , les mêmes Comédiens donnerent
une petite Piece nouvelle en Vers et en un
Acte , avec un Divertissement , qui a pour titre
l'Hyver ; comme on l'a interrompue à la secon
de Représentation par l'indisposition de plusieurs
Acteurs , on n'en dira pas davantage ici. Tous
les Théatres ont été fermez plusieurs fois à la
même occasion des Rhumes et Fluxions dont
plus de la moitié de Paris est attaqué cette année.
Le Février , le Lieutenant General de Police
3.
fit l'ouverture de la Foire S. Germain avec les
ceremonies accoutumées,
Il n'y a point cette année d'Opera Comique
à cette Foire , ce qui paroît assez extraordinaire
ce Divertissement n'ayant jamais manqué aux
Foires de S. Germain et de S. Laurent depuis
plus de 25 ans.
sur la fin du Carnaval , la Comédie du Malade
Imaginaire de Moliere ; cette Piece n'avoit point
eté représentée depuis la mort du sieur de la
Thorilliere , qui y jouoit excellemment le principal
Rôle. Ce Rôle est aujourd'hui rempli par
le sieur de Montmesnil, dont le Public paroit fort
Content.
Le 10. Février , les Comédiens Italiens remirent
-
FEVRIER.
1733. 355
rent au Théatre la petite Comédie du Je ne sçai
quoi , dans laquelle le sieur Bornet chanta pour
la premiere fois le Rôle du Maître à chanter, qui
est une Scene parodiée des Fêtes Venitiennes. Ce
nouveau Sujet a de la voix et paroît convenir au
Théatre Italien , ayant été applaudi du Public.
Le 19 Février , les mêmes Comédiens donnerent
une petite Piece nouvelle en Vers et en un
Acte , avec un Divertissement , qui a pour titre
l'Hyver ; comme on l'a interrompue à la secon
de Représentation par l'indisposition de plusieurs
Acteurs , on n'en dira pas davantage ici. Tous
les Théatres ont été fermez plusieurs fois à la
même occasion des Rhumes et Fluxions dont
plus de la moitié de Paris est attaqué cette année.
Le Février , le Lieutenant General de Police
3.
fit l'ouverture de la Foire S. Germain avec les
ceremonies accoutumées,
Il n'y a point cette année d'Opera Comique
à cette Foire , ce qui paroît assez extraordinaire
ce Divertissement n'ayant jamais manqué aux
Foires de S. Germain et de S. Laurent depuis
plus de 25 ans.
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Résumé : « Les mêmes Comédiens ont remis au Théatre sur la fin du Carnaval, la Comédie du Malade [...] »
En février 1733, les comédiens français reprirent 'Le Malade Imaginaire' de Molière, avec le sieur de Montmesnil dans le rôle principal, qui fut bien accueilli par le public. Le 10 février, les comédiens italiens présentèrent 'Le Je ne sais quoi', où le sieur Bornet interpréta pour la première fois le rôle du Maître à chanter. Le 19 février, les mêmes comédiens jouèrent 'L'Hiver', une pièce en vers et en un acte, accompagnée d'un divertissement, mais la représentation fut interrompue en raison de l'indisposition de plusieurs acteurs. Les théâtres furent fermés à plusieurs reprises en raison des rhumes et des fluxions qui affectaient la population parisienne. Le lieutenant général de police ouvrit la foire Saint-Germain avec les cérémonies habituelles, mais il n'y eut pas d'opéra comique cette année-là, ce qui était inhabituel puisque ce divertissement n'avait jamais manqué aux foires de Saint-Germain et de Saint-Laurent depuis plus de 25 ans.
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