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Détail
Liste
1
p. 102-131
Ils viennent à la Tragedie qu'on represente tous les ans au College de Loüis le Grand, & tout ce qui s'est passé à cet égard. [titre d'après la table]
Début :
Ils estoient encore à Berny, lors qu'ils furent priez [...]
Mots clefs :
Tragédie, Femmes, Berny, Ambassadeurs, Roi, Collège Louis le Grand, Hercule, Ballet, Siam, Ambassadeur, Père de La Chaise, Enfants, Plaisir, Esprit, Princesses, Cheval, Portrait, Clovis, Hôtel des ambassadeurs, Abbé de Dangeau
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texteReconnaissance textuelle : Ils viennent à la Tragedie qu'on represente tous les ans au College de Loüis le Grand, & tout ce qui s'est passé à cet égard. [titre d'après la table]
Ils estoient encore à
Berny , lors qu'ils furent
priez par le Pere de la
de Siam.
103
ב
Ce
e Chaife , de venir à la Traitgedie
du College de Loüis:
le Grand , intitulée Clovis ..
Ils luy répondirent , qu'ils
nc croyoient pas qu'ils duf-
Sent voir perſonne , ny aller
en quelque Maiſon que ce
fust avant que d'avoir rendu
leurs respects au Roy ;
U
t
1
é
e
mais que puis qu'une Pere
Sonne auß ſage, les affuroit
que celaſe pouvoit , ilsy affifteroient
avec plaisir , ne
doutant point qu' allant au
[
College ,ils ne fiffent une
L iiij
104 Voyage des Amb.
choſe agreable aux deux
grands Roys. Le jour que
la Tragedie ſe devoit repreſenter
, ils partirent de
Berny des fix heures du
matin dans des Caroffes
dont les rideaux estoient
tirez , & vinrent incognita
ſe repoſer a l'Hoſtel des
Ambaſſadeurs , qui estoit
tout meublé pour les recevoir
le jour de leur Entrée.
L'heure de la Tragedie
approchant , les Jefuites
du Collegeleur ende
Siam. 105
α
e
0
S
voyerent quatreCaroffes,
avec les livrées de quelques
Princes Etrangers
qui y font en Penfion ,
parmy leſquels eftoient
celles du Fils naturel du
( Roy d'Angleterre, des Enfans
de M le Grand Ge-
S
-
neral de Pologne , & du
Fils de Mele grand General
de Lithuanie. Eſtant
arrivez au lieu qui leur
. eſtoit deſtiné , ils furent
furpris de la grandeur &
de la beauté du Theatre
106 Voyage des Amb.
où l'Action ſe devoit repreſenter
,& ils ne furent
pas moins étonnez de la
grande multitude de perſonnes
de la premiere
qualité , & d'une infinité
de peuple qui s'y trouva ,
fans qu'il y euſt la moindre
confufion. Ils admirerent
l'air dégagé des
Acteurs , & la beautédes
Danfes , & ils prirent un
tres - grand plaifir à voir
danfer les Enfans de Male
Duc de Villeroy , & de
de Siam. 107
.
1
2
-
Mts de Coëtquin, de Sourches
,& de la Mareliere ,
auffi- bien que M'le Chevalier
d'Avaux , tous Penfionnaires
, & qui charmerent
toute l'Affemblée .
Il eft neceffaire que je
yous faſſe icy un court
détail du Balet , afin de
vous faire mieux comprendre
ce qu'ils dirent de
ceDivertiſſement.
Ce Balet avoit quatre
- Parties , & chaque Partie
cinq Entrées .
108 VoyagedesAmb.
On voyoit dans la premiere
partie ce qu'Hercule
a fait pour ſa propre
gloire.
Dans la feconde
و
ce
qu'il a fait pour le bonheur
& pour l'utilité de
fes Peuples .
Dans la troifiéme , ce
qu'il a entrepris pour la
confervation defes Amis ,
&de fes Alliez .
Dans la quatriéme , ce
qu'ila execuré pour l'honneur
des Dieux.
de Siam. 109
t
Le Temps faifoit l'ouverture
du Balet . Il eſtoit
accompagné des Siecles.
Ce Dieu , aprés avoir attendu
pendant pluſieurs
années un Heros que le
Ciel luy avoit promis ,&
qui devoit effacer la gloire
de tous ceux qui a-
1 voient parujuſques alors,
› apprenoit enfin de Mercure,
qu'Hercule eſtoit ce
Heros qui devoit étonner
toute la terre par le nombre
, & par la grandeur
110 Voyage des Amb.
de fes belles actions .
Les travaux d'Hercule
eſtant rapportez à ceux
du Roy dans ce Balet , on
y voyoit ce Monarque
terraffer la Flandre , appaiſer
les Troubles au dedans
, & au dehors de fon
Royaume , dompter la
Triple Alliance , paffer le
Rhin , entrer en Hollande
, défendre les Duels ,
donner la Paix , rendre le
Commerce floriffant ,joindre
les Mers , donner du
de Siam. II
7
fecours à Candie , à la
Hongrie , auffi-bien qu'à
la Suede , foudroyer Alger
& Tripoli , delivrer
les Captifs', proteger fes
↑ Alliez , affoiblir l'Impieté,
foûtenir la vrayeReligion,
□ & détruire l'Herefie.
Il y a longtemps qu'on
| n'a fait de Balet dont le
deſſein ait efte fi beau , &
s qui ait mieux remply l'efprit.
Lors qu'on en explii
quoit les differentes Entrées
aux Ambaſſadeurs ,
112 Voyage des Amb.
ils prévenoient , ſansavoir
fçeu l'Allegorie que l'on avoit
voulu faire, tous ceux
qui leur parloient d'Hercule
, & difoient Que cet
Hercule devoit representer
leRoy , puis qu'il triomphoit
de tous ſes Ennemis , S
portoit la victoire par tout
où il paſſoit . Ils loüerent
fort la Collation qu'on
leur preſenta , & la trouverent
d'une beauté furprenante
, & d'une magnificence
extraordinaire .
de Siam. 113
Pluſieurs perſonnes de la
premiere qualité , comme
Princes , Ducs , Ambaffa-.
- deurs , & autres , les vinrent
voir pendant cette
Tragedie. Illes reçeurent
fort obligeamment ,
répondirent à chacun fe-
&
lon fon Employ , fon rang,
&fa qualité .
| M l'Abbé de Dangeau:
qui connoiſſoit parfaitement
leur merite ,&leur
eſprit , parce qu'il eſt in
time Amy de M'l'Abbé de
K
114 Voyage des Amb.
Choify , & que cet Abbé
luy a meſme adreffé une
fort belle Relation de fon
Voyage de Siam , qui n'a
point eſté imprimée, plein
de la réputation de ces
Ambaſſadeurs , & d'eftime
pour leurs belles qualitez
, les alla voir à Berny
, où ils le retinrent à
fouper . Ils ſe dirent beaucoup
de choſes ſpirituelles
; & enfin M² l'Abbé de
Dangoau dit au premier
Ambaſſadeur , Que dans
de Siam. 115
le defir qu'il avoit de converſer
avecun homme d'efprit
comme luy , il alloit
apprendre la Langue Siamoiſe
L'Ambaſſadeur luy
répondit , Que bien que ce
fuft une Langue a fée , il
luy épargneroit la moitiéde
la peine , en tachant luy
mesme d'aprendre le François
. Comme les Sçavans
font curieux , & que nous
en avons peu qui s'atta
chent plus à apprendre
que M' l'Abbé de Dan
Kij
116 Voyage des Amb.
geau , il luy fit beaucoup
de queſtions , & fut fort
content de ſes réponfes
. Tous ceux qui ont eſt é
voir ces Ambaſſadeurs , &
qui estoient d'un rang à
les entretenir, en font revenus
tout remplisde leur
efprit, & l'on a vû juſques
à vingt Compagnies en
un meſmejour ſortiravec
une entiere fatisfaction
de leurs reparties, toutes
fpirituelles ,& toutes differentes.
Leur civilité n'a
deSiam.
117
pas moins brillé que leur
- eſprit , & dés qu'ils ont
- connu parmy ceux qui les
font venus voir, quelques
perſonnes qui meritoient
d'être diftinguées,ils n'ont
- pas manqué à redoubler
leurs honneſterez . Medu
5 Mets , Garde du Trefor
Royal, eſtant alle un jour
leur rendre viſite , ils le
prierent de diſner fi-toft
qu'ils ſçeurent quiil eſtoit;
-& comme il répondit qu'il
ne pouvoit avoir cet hon118
Voyage des Amb.
neur , parce que des affaires
preffées l'obligeoient
de s'en retourner , ils dirent
que s'il vouloit leur
faire cette grace, ils prieroient
qu'on avançaſt le
difner , ce qu'ils firent ,
Mª du Mers n'ayant pů
A
refifter à une civilité fi engageante
.
Quelques Dames étant
alléesles voir à Berny , ils
ſe ſouvinrent en les enrendant
nommer qu'ils
avoient vú dancer leurs
de Siam. 119
Enfans dans la Tragedie
des Jefuites . Ils demanderent
à les voir , on répondit
qu'on les leur meneroit
dés que le Roy leur
auroit donné Audience ,
& l'on ajoûta que s'ils
vouloient , on les envoyeroitjuſques
à Siam; à quoy
ils répondirent , qu'ils y
Seroient bien receus 2
gnitez . Un autre jour apourvûs
des plus hautes di--
]
vant qu'ils partiffent de
Berny, l'Affemblée ſe trou
120 Voyage des Amb.
va tres - nombreuſe , & il
y avoit un cercle de fort
belles Dames , ce qui fut
cauſe qu'on leur fit diverfes
queſtions pendant cetteApreſdinée
là. Ily en eut
qui leur demanderent.
pourquoy ils n'avoient
pas amené leurs Femmes
avec eux , & ils demanderent
à leur tour , s'il y en
avoit parmy elles qui vouluffent
faire ce voyage en
cas que leurs Marisfe trouvaffent
obligez d'aller à
Siam
de Siam. 121
Siam. Les plus jeunes &
les plus belles de la Compagnie
leur demanderent
s'ils vouloient bien les
prendre pour Femmes, ce
qu'ellescroyoient qui leur
ſeroit permis , puis qu'ils
pouvoient en avoir pluſieurs.
Ils repartirent, Que
nonseulement ils le vouloient
bien , mais qu'ils les
traiteroient avec la diftin-
Etion qu'elles meritoient,
Leur donneroient les plus
beaux Appartemens .
L
122 Voyage des Amb.
Comme on voulut les
railler ſur ce qu'ils avoient
juſqu'à vingt-deux Femmes
, le premier Ambaf.
fadeur dit, Qu'on ne devoit
point s'en étonner , que c'étoit
l'usage du Pays , &que
dans les lieux où les modes
s'établiſſfoient , on s'y accoûtumoit
infeniblement , de
maniere qu'avec le temps ,
elles ne paroiſſfoient plus étranges
,&que par exemple
s'il arrivoit que ce fuft un
jour l'usage queles Femmes
de Siam. 123
-
de France euffent vingtdeux
Maris, il croyoit qu'il
ne leur faudroit pas beaucoup
de temps pour s'accoûtumer
à cette mode , &
- qu'elles seroient ſurpriſes
qu'on y trouvaſt un jour à
redire , de mesme qu'elles
trouvoient aujourd'huy étrange
qu'ily euft des hommes
à Siam qui euffent un
fi grand nombre de Femmes.
Ainfi ils raillerent galamment
, & avec eſprit,
celles qui avoient cru les
Lij
1.24 Voyage des Amb.
embarraffer , ce qu'ils ont
fait pluſieurs fois .
Ils reçeurent un jour
une viſite d'une Compagnie
auffi brillante qu'illuſtre.
Il y avoit M² &
Madame la Princeſſe d'IG
finguen, Madame la Princeffe
de Bournonville , &
Madame la Marquiſe de
Lavardin . Les deux Princeſſes
eſtoient à cheval ,
en Jufte- au- corps & en
Peruques,& veſtuës enfin
comme les Dames l'efde
Siam. 125
-
-
toient dans les Repetitions
du Carroufel , &
comme elles font ordinairement
lors qu'elles
vont à la Chaffe avec le
- Roy. Elles ſe mirent en
cercle,&la converſation
fut auffi galante quefpirituelle.
Les Ambaſfadeurs
furent furpris de leur voir
- des habits fi differens de
ceux des autres Femmes ,
& en demanderent la rai .
fon . On les eclaircit làdeſſus
,& ils loüerent l'a
Liij
126 Voyage des Amb.
dreffe des Dames qui ſças
voient fi bien monter à
cheval ,& comme on s'aperçeut
qu'ils auroient
bien ſouhaité voir de ces
galantes Cavalcades , les
deux Princeſſes , & Mile
Prince d'Iffinguen s'offrirent
à leur donner ce
plaifir; ce qu'ils accepterent
, mais en faiſant paroiſtre
leur refpect , &
en marquant qu'ils n'auroient
ofé le demander.
Les Dames defcendirent
ॐ
127 de Siam.
S
en meſme temps , & les
Ambaſſadeurs ſe mirent
-fur les Balcons qui regardent
la court. M'le Prince
d'Iffinguen , les deux
Princeſſes , & quelques
Gentilshommes de leur
- fuite,monterent auffi- toft
e à cheval , & aprés avoir
- fait quelques tours dans
- la court , on ouvrit le Jardin
, afin que cette galan--
te Troupe euſt plus d'étendue
pour faire voir
fon adreſſe ; les Ambaſſa-
L. iiij
128 Voyage des Amb.
dcurs pafferent de l'autre
cofté, & s'allerent mettre
aux feneftres quidonnent
fur le Jardin . Ils curent
pendant un quart d'heure
le plaifir de voir l'adreſſe
avec laquelle cesilluftres
Perſonnes ſçavoient manier
leurs chevaux. Aprés
cette Cavalcade ils monterent
tous pour prendre
congé des Ambaſfadeurs.
Le Soupé eſtoit preft , &
les Ambaſſadeurs les prefferent
de fi bonne grace
de Siam. 129
:
de leur faire l'honneur de
demeurer à fouper , qu'il
Ieur fut impoffible de s'en
défendre . Ils cederent
e leurs Fautcüils aux Princoffes
, les fervirent pendant
tout le Soupé , &
- burent à leur ſanté. On
but auffi à celle du principal
Ambaſſadeur , &
e de fes vingt- deux Femmes
. On parla du nombre
, & l'on dit agréable-
- ment que c'eſtoit beaue
coup. Il répondit qu'elles
130 Voyage des Amb.
estoient fatisfaites de luy,
& dit en s'adreffant à un
homme qui estoit à table,
Ie pourrois bien, Monfieur,
vous apprendre le Secret
d'en avoir autant . maisje
craindrois que cela ne plût
pas à Madame vostre
Femme.
Les Diamans qu'environnoient
un Portrait
une qu'avoit au bras
Dame qui estoit de ceSoupé
, ayant obligé à le regarder
, on luy demanda
de Siam. 131
de qui estoit ce Portrait.
Elle répondit que c'eſtoit
| celuy de fa Mere,&l'Ambaſſadeur
dit qu'elle devoit
mettre le Portrait
de fon Mary à l'autre
bras . Je paſse par deſsus
beaucoup de reparties ſpirituelles
qu'ils ont faites
à d'autres perſonnes.
de qualité qui ont eſté les
voir à Berny , parce que
cela me meneroit trop
- loin , & que j'ay beaucoup
de chofes curieuſes
à vous dire .
Berny , lors qu'ils furent
priez par le Pere de la
de Siam.
103
ב
Ce
e Chaife , de venir à la Traitgedie
du College de Loüis:
le Grand , intitulée Clovis ..
Ils luy répondirent , qu'ils
nc croyoient pas qu'ils duf-
Sent voir perſonne , ny aller
en quelque Maiſon que ce
fust avant que d'avoir rendu
leurs respects au Roy ;
U
t
1
é
e
mais que puis qu'une Pere
Sonne auß ſage, les affuroit
que celaſe pouvoit , ilsy affifteroient
avec plaisir , ne
doutant point qu' allant au
[
College ,ils ne fiffent une
L iiij
104 Voyage des Amb.
choſe agreable aux deux
grands Roys. Le jour que
la Tragedie ſe devoit repreſenter
, ils partirent de
Berny des fix heures du
matin dans des Caroffes
dont les rideaux estoient
tirez , & vinrent incognita
ſe repoſer a l'Hoſtel des
Ambaſſadeurs , qui estoit
tout meublé pour les recevoir
le jour de leur Entrée.
L'heure de la Tragedie
approchant , les Jefuites
du Collegeleur ende
Siam. 105
α
e
0
S
voyerent quatreCaroffes,
avec les livrées de quelques
Princes Etrangers
qui y font en Penfion ,
parmy leſquels eftoient
celles du Fils naturel du
( Roy d'Angleterre, des Enfans
de M le Grand Ge-
S
-
neral de Pologne , & du
Fils de Mele grand General
de Lithuanie. Eſtant
arrivez au lieu qui leur
. eſtoit deſtiné , ils furent
furpris de la grandeur &
de la beauté du Theatre
106 Voyage des Amb.
où l'Action ſe devoit repreſenter
,& ils ne furent
pas moins étonnez de la
grande multitude de perſonnes
de la premiere
qualité , & d'une infinité
de peuple qui s'y trouva ,
fans qu'il y euſt la moindre
confufion. Ils admirerent
l'air dégagé des
Acteurs , & la beautédes
Danfes , & ils prirent un
tres - grand plaifir à voir
danfer les Enfans de Male
Duc de Villeroy , & de
de Siam. 107
.
1
2
-
Mts de Coëtquin, de Sourches
,& de la Mareliere ,
auffi- bien que M'le Chevalier
d'Avaux , tous Penfionnaires
, & qui charmerent
toute l'Affemblée .
Il eft neceffaire que je
yous faſſe icy un court
détail du Balet , afin de
vous faire mieux comprendre
ce qu'ils dirent de
ceDivertiſſement.
Ce Balet avoit quatre
- Parties , & chaque Partie
cinq Entrées .
108 VoyagedesAmb.
On voyoit dans la premiere
partie ce qu'Hercule
a fait pour ſa propre
gloire.
Dans la feconde
و
ce
qu'il a fait pour le bonheur
& pour l'utilité de
fes Peuples .
Dans la troifiéme , ce
qu'il a entrepris pour la
confervation defes Amis ,
&de fes Alliez .
Dans la quatriéme , ce
qu'ila execuré pour l'honneur
des Dieux.
de Siam. 109
t
Le Temps faifoit l'ouverture
du Balet . Il eſtoit
accompagné des Siecles.
Ce Dieu , aprés avoir attendu
pendant pluſieurs
années un Heros que le
Ciel luy avoit promis ,&
qui devoit effacer la gloire
de tous ceux qui a-
1 voient parujuſques alors,
› apprenoit enfin de Mercure,
qu'Hercule eſtoit ce
Heros qui devoit étonner
toute la terre par le nombre
, & par la grandeur
110 Voyage des Amb.
de fes belles actions .
Les travaux d'Hercule
eſtant rapportez à ceux
du Roy dans ce Balet , on
y voyoit ce Monarque
terraffer la Flandre , appaiſer
les Troubles au dedans
, & au dehors de fon
Royaume , dompter la
Triple Alliance , paffer le
Rhin , entrer en Hollande
, défendre les Duels ,
donner la Paix , rendre le
Commerce floriffant ,joindre
les Mers , donner du
de Siam. II
7
fecours à Candie , à la
Hongrie , auffi-bien qu'à
la Suede , foudroyer Alger
& Tripoli , delivrer
les Captifs', proteger fes
↑ Alliez , affoiblir l'Impieté,
foûtenir la vrayeReligion,
□ & détruire l'Herefie.
Il y a longtemps qu'on
| n'a fait de Balet dont le
deſſein ait efte fi beau , &
s qui ait mieux remply l'efprit.
Lors qu'on en explii
quoit les differentes Entrées
aux Ambaſſadeurs ,
112 Voyage des Amb.
ils prévenoient , ſansavoir
fçeu l'Allegorie que l'on avoit
voulu faire, tous ceux
qui leur parloient d'Hercule
, & difoient Que cet
Hercule devoit representer
leRoy , puis qu'il triomphoit
de tous ſes Ennemis , S
portoit la victoire par tout
où il paſſoit . Ils loüerent
fort la Collation qu'on
leur preſenta , & la trouverent
d'une beauté furprenante
, & d'une magnificence
extraordinaire .
de Siam. 113
Pluſieurs perſonnes de la
premiere qualité , comme
Princes , Ducs , Ambaffa-.
- deurs , & autres , les vinrent
voir pendant cette
Tragedie. Illes reçeurent
fort obligeamment ,
répondirent à chacun fe-
&
lon fon Employ , fon rang,
&fa qualité .
| M l'Abbé de Dangeau:
qui connoiſſoit parfaitement
leur merite ,&leur
eſprit , parce qu'il eſt in
time Amy de M'l'Abbé de
K
114 Voyage des Amb.
Choify , & que cet Abbé
luy a meſme adreffé une
fort belle Relation de fon
Voyage de Siam , qui n'a
point eſté imprimée, plein
de la réputation de ces
Ambaſſadeurs , & d'eftime
pour leurs belles qualitez
, les alla voir à Berny
, où ils le retinrent à
fouper . Ils ſe dirent beaucoup
de choſes ſpirituelles
; & enfin M² l'Abbé de
Dangoau dit au premier
Ambaſſadeur , Que dans
de Siam. 115
le defir qu'il avoit de converſer
avecun homme d'efprit
comme luy , il alloit
apprendre la Langue Siamoiſe
L'Ambaſſadeur luy
répondit , Que bien que ce
fuft une Langue a fée , il
luy épargneroit la moitiéde
la peine , en tachant luy
mesme d'aprendre le François
. Comme les Sçavans
font curieux , & que nous
en avons peu qui s'atta
chent plus à apprendre
que M' l'Abbé de Dan
Kij
116 Voyage des Amb.
geau , il luy fit beaucoup
de queſtions , & fut fort
content de ſes réponfes
. Tous ceux qui ont eſt é
voir ces Ambaſſadeurs , &
qui estoient d'un rang à
les entretenir, en font revenus
tout remplisde leur
efprit, & l'on a vû juſques
à vingt Compagnies en
un meſmejour ſortiravec
une entiere fatisfaction
de leurs reparties, toutes
fpirituelles ,& toutes differentes.
Leur civilité n'a
deSiam.
117
pas moins brillé que leur
- eſprit , & dés qu'ils ont
- connu parmy ceux qui les
font venus voir, quelques
perſonnes qui meritoient
d'être diftinguées,ils n'ont
- pas manqué à redoubler
leurs honneſterez . Medu
5 Mets , Garde du Trefor
Royal, eſtant alle un jour
leur rendre viſite , ils le
prierent de diſner fi-toft
qu'ils ſçeurent quiil eſtoit;
-& comme il répondit qu'il
ne pouvoit avoir cet hon118
Voyage des Amb.
neur , parce que des affaires
preffées l'obligeoient
de s'en retourner , ils dirent
que s'il vouloit leur
faire cette grace, ils prieroient
qu'on avançaſt le
difner , ce qu'ils firent ,
Mª du Mers n'ayant pů
A
refifter à une civilité fi engageante
.
Quelques Dames étant
alléesles voir à Berny , ils
ſe ſouvinrent en les enrendant
nommer qu'ils
avoient vú dancer leurs
de Siam. 119
Enfans dans la Tragedie
des Jefuites . Ils demanderent
à les voir , on répondit
qu'on les leur meneroit
dés que le Roy leur
auroit donné Audience ,
& l'on ajoûta que s'ils
vouloient , on les envoyeroitjuſques
à Siam; à quoy
ils répondirent , qu'ils y
Seroient bien receus 2
gnitez . Un autre jour apourvûs
des plus hautes di--
]
vant qu'ils partiffent de
Berny, l'Affemblée ſe trou
120 Voyage des Amb.
va tres - nombreuſe , & il
y avoit un cercle de fort
belles Dames , ce qui fut
cauſe qu'on leur fit diverfes
queſtions pendant cetteApreſdinée
là. Ily en eut
qui leur demanderent.
pourquoy ils n'avoient
pas amené leurs Femmes
avec eux , & ils demanderent
à leur tour , s'il y en
avoit parmy elles qui vouluffent
faire ce voyage en
cas que leurs Marisfe trouvaffent
obligez d'aller à
Siam
de Siam. 121
Siam. Les plus jeunes &
les plus belles de la Compagnie
leur demanderent
s'ils vouloient bien les
prendre pour Femmes, ce
qu'ellescroyoient qui leur
ſeroit permis , puis qu'ils
pouvoient en avoir pluſieurs.
Ils repartirent, Que
nonseulement ils le vouloient
bien , mais qu'ils les
traiteroient avec la diftin-
Etion qu'elles meritoient,
Leur donneroient les plus
beaux Appartemens .
L
122 Voyage des Amb.
Comme on voulut les
railler ſur ce qu'ils avoient
juſqu'à vingt-deux Femmes
, le premier Ambaf.
fadeur dit, Qu'on ne devoit
point s'en étonner , que c'étoit
l'usage du Pays , &que
dans les lieux où les modes
s'établiſſfoient , on s'y accoûtumoit
infeniblement , de
maniere qu'avec le temps ,
elles ne paroiſſfoient plus étranges
,&que par exemple
s'il arrivoit que ce fuft un
jour l'usage queles Femmes
de Siam. 123
-
de France euffent vingtdeux
Maris, il croyoit qu'il
ne leur faudroit pas beaucoup
de temps pour s'accoûtumer
à cette mode , &
- qu'elles seroient ſurpriſes
qu'on y trouvaſt un jour à
redire , de mesme qu'elles
trouvoient aujourd'huy étrange
qu'ily euft des hommes
à Siam qui euffent un
fi grand nombre de Femmes.
Ainfi ils raillerent galamment
, & avec eſprit,
celles qui avoient cru les
Lij
1.24 Voyage des Amb.
embarraffer , ce qu'ils ont
fait pluſieurs fois .
Ils reçeurent un jour
une viſite d'une Compagnie
auffi brillante qu'illuſtre.
Il y avoit M² &
Madame la Princeſſe d'IG
finguen, Madame la Princeffe
de Bournonville , &
Madame la Marquiſe de
Lavardin . Les deux Princeſſes
eſtoient à cheval ,
en Jufte- au- corps & en
Peruques,& veſtuës enfin
comme les Dames l'efde
Siam. 125
-
-
toient dans les Repetitions
du Carroufel , &
comme elles font ordinairement
lors qu'elles
vont à la Chaffe avec le
- Roy. Elles ſe mirent en
cercle,&la converſation
fut auffi galante quefpirituelle.
Les Ambaſfadeurs
furent furpris de leur voir
- des habits fi differens de
ceux des autres Femmes ,
& en demanderent la rai .
fon . On les eclaircit làdeſſus
,& ils loüerent l'a
Liij
126 Voyage des Amb.
dreffe des Dames qui ſças
voient fi bien monter à
cheval ,& comme on s'aperçeut
qu'ils auroient
bien ſouhaité voir de ces
galantes Cavalcades , les
deux Princeſſes , & Mile
Prince d'Iffinguen s'offrirent
à leur donner ce
plaifir; ce qu'ils accepterent
, mais en faiſant paroiſtre
leur refpect , &
en marquant qu'ils n'auroient
ofé le demander.
Les Dames defcendirent
ॐ
127 de Siam.
S
en meſme temps , & les
Ambaſſadeurs ſe mirent
-fur les Balcons qui regardent
la court. M'le Prince
d'Iffinguen , les deux
Princeſſes , & quelques
Gentilshommes de leur
- fuite,monterent auffi- toft
e à cheval , & aprés avoir
- fait quelques tours dans
- la court , on ouvrit le Jardin
, afin que cette galan--
te Troupe euſt plus d'étendue
pour faire voir
fon adreſſe ; les Ambaſſa-
L. iiij
128 Voyage des Amb.
dcurs pafferent de l'autre
cofté, & s'allerent mettre
aux feneftres quidonnent
fur le Jardin . Ils curent
pendant un quart d'heure
le plaifir de voir l'adreſſe
avec laquelle cesilluftres
Perſonnes ſçavoient manier
leurs chevaux. Aprés
cette Cavalcade ils monterent
tous pour prendre
congé des Ambaſfadeurs.
Le Soupé eſtoit preft , &
les Ambaſſadeurs les prefferent
de fi bonne grace
de Siam. 129
:
de leur faire l'honneur de
demeurer à fouper , qu'il
Ieur fut impoffible de s'en
défendre . Ils cederent
e leurs Fautcüils aux Princoffes
, les fervirent pendant
tout le Soupé , &
- burent à leur ſanté. On
but auffi à celle du principal
Ambaſſadeur , &
e de fes vingt- deux Femmes
. On parla du nombre
, & l'on dit agréable-
- ment que c'eſtoit beaue
coup. Il répondit qu'elles
130 Voyage des Amb.
estoient fatisfaites de luy,
& dit en s'adreffant à un
homme qui estoit à table,
Ie pourrois bien, Monfieur,
vous apprendre le Secret
d'en avoir autant . maisje
craindrois que cela ne plût
pas à Madame vostre
Femme.
Les Diamans qu'environnoient
un Portrait
une qu'avoit au bras
Dame qui estoit de ceSoupé
, ayant obligé à le regarder
, on luy demanda
de Siam. 131
de qui estoit ce Portrait.
Elle répondit que c'eſtoit
| celuy de fa Mere,&l'Ambaſſadeur
dit qu'elle devoit
mettre le Portrait
de fon Mary à l'autre
bras . Je paſse par deſsus
beaucoup de reparties ſpirituelles
qu'ils ont faites
à d'autres perſonnes.
de qualité qui ont eſté les
voir à Berny , parce que
cela me meneroit trop
- loin , & que j'ay beaucoup
de chofes curieuſes
à vous dire .
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Résumé : Ils viennent à la Tragedie qu'on represente tous les ans au College de Loüis le Grand, & tout ce qui s'est passé à cet égard. [titre d'après la table]
Les ambassadeurs de Siam, alors à Berny, reçurent une invitation du Père de la Chaise pour assister à une tragédie intitulée 'Clovis' au Collège de Louis-le-Grand. Ils déclinèrent initialement, souhaitant d'abord rendre leurs respects au roi, mais acceptèrent finalement en raison de la sagesse du Père. Le jour de la tragédie, ils se rendirent incognito à l'Hôtel des Ambassadeurs pour se reposer. Ils furent impressionnés par la grandeur du théâtre et la multitude de personnes présentes. La tragédie comprenait un ballet en quatre parties, représentant les exploits d'Hercule et les actions du roi de France. Les ambassadeurs apprécièrent particulièrement les danses des enfants pensionnaires, dont ceux du Duc de Villeroy et du Chevalier d'Avaux. Après la représentation, ils reçurent diverses visites, notamment celle de l'Abbé de Dangeau, qui exprima son désir d'apprendre la langue siamoise. Les ambassadeurs montrèrent une grande civilité et esprit, répondant avec finesse aux questions et railleries des visiteurs. Ils assistèrent également à une cavalcade de princesses et dames françaises, qu'ils complimentèrent sur leur adresse à cheval. Lors d'un souper, ils burent à la santé des princesses et répondirent avec humour aux questions sur leurs vingt-deux femmes.
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2
p. 1369-1370
AUTRE LOGOGRIPHE.
Début :
Mon nom sous six Lettres compris, [...]
Mots clefs :
Clovis
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : AUTRE LOGOGRIPHE.
UTRE LOGOGRIPHE
Monnom sous six Lettres compris,
Se peut diversement combiner et construire ;
On y trouve mieux qu'en LOUISA
(Soit dit , sans prétendre détruireCe qu'un Auteur disoit jadis , )
L'Instrument dont la Mécanique
Se sert bien pour les presser corps.
4. 3. 2. humain , qui me mets. en pratique
Si l'on te prend tremble pour lors ,
Voici ce queje pronostique ;
Tu mourras sur la rouë , ou seras étranglé ;
2. 3. 5. ainsi l'a réglé ;
2
II. Vol. Dans
1370 MERCURE DE FRANCE
Dans 1. 2. 3. et 6. contre ma violence
Le fruit n'est pas toûjours en assurauce.
De 2. 5. 6. un Ecusson orné ,
N'annonce pas une valeur commune.
Alorgner l'1. 3. 2. d'une piquante Brune ,
Mon plaisir n'est jamais borné..
3. 6. nourrit un animal fidele.
Le Monde au vrai Chrétien paroît 4. 5.
deux.
3. 1. adieux à l'homme de Ruelle ,
Occupa très-souvent un Romain belliqueux.
6. 3. 2.6.ct 5. sont connus en Musique ,
Et bien ailleurs en sens très - different.
5. 2. ou 6. 3. §. à Thersite s'applique ,
Comme il se dit d'Achille et du Dieu son parent.
4
P. D. F.
Monnom sous six Lettres compris,
Se peut diversement combiner et construire ;
On y trouve mieux qu'en LOUISA
(Soit dit , sans prétendre détruireCe qu'un Auteur disoit jadis , )
L'Instrument dont la Mécanique
Se sert bien pour les presser corps.
4. 3. 2. humain , qui me mets. en pratique
Si l'on te prend tremble pour lors ,
Voici ce queje pronostique ;
Tu mourras sur la rouë , ou seras étranglé ;
2. 3. 5. ainsi l'a réglé ;
2
II. Vol. Dans
1370 MERCURE DE FRANCE
Dans 1. 2. 3. et 6. contre ma violence
Le fruit n'est pas toûjours en assurauce.
De 2. 5. 6. un Ecusson orné ,
N'annonce pas une valeur commune.
Alorgner l'1. 3. 2. d'une piquante Brune ,
Mon plaisir n'est jamais borné..
3. 6. nourrit un animal fidele.
Le Monde au vrai Chrétien paroît 4. 5.
deux.
3. 1. adieux à l'homme de Ruelle ,
Occupa très-souvent un Romain belliqueux.
6. 3. 2.6.ct 5. sont connus en Musique ,
Et bien ailleurs en sens très - different.
5. 2. ou 6. 3. §. à Thersite s'applique ,
Comme il se dit d'Achille et du Dieu son parent.
4
P. D. F.
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3
p. 1983-1988
MEMOIRE de M.... sur le Lieu de la Sépulture de S. Aignan, Evêque d'Orleans.
Début :
On lit dans les Actes de S. Aignan, Evêque d'Orleans, recueillis par la [...]
Mots clefs :
Saint Aignan, Orléans, Évêque, Église, Corps, Sépulture, Enterrer, Clovis, Translation
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texteReconnaissance textuelle : MEMOIRE de M.... sur le Lieu de la Sépulture de S. Aignan, Evêque d'Orleans.
MEMOIRE de M.... sur le Liew
de la Sépulture de S. Aignan , Evêque
d'Orleans.
N lit dans les Actes de S. Aignan ,
Evêqued'Orleans , recueillis par la
Saussaye ( 1 ) et par Hubert , dans
ses Preuves sur les Antiquitez de saint
Aignan , et inserées en partie dans le Ŕecueil
de Surius , que ce saint Evêque
qui mourut en 453. fut d'abord enterré
dans l'Eglise de S. Laurent des Orgerils
et y fut long- temps l'objet de la veneration
des Fideles , jusqu'à ce qu'on le
transporta de l'autre côté de la Ville
dans l'Eglise qui porte aujourd'hui son
nom ( 2 ) et qui étoit alors dédiée à l'Apôtre
S. Pierre.
Ce fait néanmoins n'est rien moins que
probable ; et sans vouloir s'inscrire en
faux contre les Actes qui le rapportent ,
et qui ne sont pas d'une authenticité
irreprochable ,il suffit de lire les Auteurs:
anciens qui nous ont parlé de S. Aignan,
(1) Annal. Eccles . Aurel.
(2 ) Autrefois cette Eglise qui se trouve mains
tenant dans la Ville , en étoit hors.
D vj pour
1984 MERCURE DE FRANCE
pour voir que le Corps de ce grand Saint
n'a jamais changé de place , et qu'il a tou
jours été dans l'Eglise ( 1 ) qui porte son
nom , et où l'on conserve encore ce qui
* pû échapper de ses précieuses Reliques.
à l'impieté des Calvinistes, dans les troubles
de 1562 .
Le silence de quelques uns de ces Au
teurs sur le lieu de la sépulture de notre
Saint , ne prouve rien pour l'Eglise
de S. Laurent , au contraire ce silence
n'auroit- il pas quelque chose de surprenant
, si en effet le Corps de S. Aignan
eût été d'abord enterré ailleurs que dans
PEglise qui portoit son nom de leur
temps ? et ce temps étoit- il si éloigné de
celui du saint Evêque , qu'ils eussent pû
ignorer un fait de cette nature ?
Car enfin ces précieuses Reliques n'ont
pû changer ainsi de place sans bruit et
sans éclat. Il falloit traverser la Ville
dans toute sa longueur d'Occident en
Orient , et la Tranflation dut être fort
solemnelle ; supposé donc , ce qui n'est
gueres croyable , qu'on en fût venu jusqu'à
ignorer le temps de cette Tranflation
, comment auroit- on pû perdre st
tôt le souvenir de la Tranflation même
(1) Cette Eglise est dans le Fauxbourg Ocoi
dental de la Ville, sur le bord de la Loire.
CeSEPTEMBRE
. 1733. 1989
Cependant il se trouve non- seulement
que personne n'en fait mention , mais
'on ne nous en dit pas même le moindre
mot qui puisse faire rien conjecturer
de semblable .( 1 ) Leodebod , Abbé de
S. Aignan et Fondateur de l'Abbaye de
S. Benoît sur Loire , sous le Regne de
Clovis II. parle ainsi de l'Eglise de saint
Aignan Dum me divina pietas Basilica
Domini Aniani , ubi ipse Dominus in corpore
requiescit , Abbati sublimatum honore,
& c. et plus bas : Monasterium sancti
Petri adificare delibero , ubi jam dictus vir
Dei sanctus videlicet Prasul Anianus , con
dignè jacet tumulatus . ( 2 ) Fredegaire , parlant
du Serment de fidelité que Godin
fils de Warnachaire , Maire du Palais
de Bourgogne sous Clotaire II . devoit
prêter sur les Reliques de S. Aignan ,
dit simplement : Ut Aurelianis in Ecclesia
sancti Aniani .... sacramentum impleturus
adiret. Gregoire ( 3 ) de Tours dit
que Namatius , Evêque d'Orleans , mort
à la fin du sixiéme siecle , fut enterré
dans l'Eglise de S. Aignan : Corpusculum
ejus ad urbem suam delatum in Basilica
* ( 1 ) Duchesne , Tom. 4. Hist. Franc. page
39. c.
(2 ) N. 54. p. 63.2.
(3) Lag. & 18: p. 437
saneta
1936 MERCURE DE FRANCE
...
sancti Aniani Confessoris sepultum est. ( 1)
L'Auteur anonime de la Vie de S. Mesmin
, qui écrivoit , comme l'on croit
au septiéme siecle , dit que S. Euspice
fut enterré dans l'Eglise de S. Aignan ,
auprès du Corps de S. Aignan même
et à sa droite : Visum est . ut in bea
tissimi Aniani Ecclesiam Corpus ejus transferretur
, et ad dextram partem corporis ejus
dem sanctissimi viri poneretur. Il ajoûte :
Quum placuisset ut per medium civitatis
sancia Reliquia portarentur.... et ventum
esset ad portam Orientalem ejuslem urbis .
que transmittit ad Monasterium sancti
Aniani , & c.
On voit clairement ici et sans équivoque
, que le Corps de S. Aignan étoit
dans l'Eglise de S. Aignan , et que cette
Eglise étoit à l'Orient de la Ville d'Or
léans , du côté diametramelement opposé
à celle de S Laurent , qui est à
Occident. Or S. Euspice vivoit sous.
Clovis I. Donc le Corps de S. Aignan
reposoit dès ce temps - là dans l'Eglise
qui porte aujourd'hui son ' nom , sans
qu'il paroisse encore qu'il y eût été
transporté d'ailleurs . Un témoignage du
même temps , quoique peut- être moins
recevable dans l'esprit de plusieurs , se
(4) Mabill. Act. SS . Ben. T. 1. p. 535. n. 18.
tire
SEPTEMBRE. 1733. 1987
tire de la vie de sainte Geneviève , ( 1 )
écrite dix - huit ans après sa mort et du
Mile que cette Sainte fit à Orleans
dans l'Eglise de S. Aignan : In sancti
Antani Basilica. Quand on voudroit
s'inscrire en faux contre le Miracle , il
demeureroit toujours vrai que du temps
de cet Historien , l'Eglise qui porte aujour
d'hui le nom de S. Aignan , renfermoit
le Corps de ce saint Evêque.. Dans quel
temps donc y aura - t'il été transporté ?
On ne peut guere compter que cinquante
ans d'intervalle entre la mort de saint
Aignan et le commencement du Regne
de Clovis I. Sera -ce du temps de Clovis
même , et par les ordres de ce Prince ,
comme le prétend Gubert ? Mais quelle
preuve en a- t'on ? aucune . Disons mieux,
il n'y a aucune preuve , pas même le
moindre indice de Tranflation ,
soit depuis
, soit devant Clovis ; mais on a contre
ce sentiment quelque chose de plus
positif, et il est aisé de prouver que ce
n'est pas d'aujourd'hui qu'il est combattu
par une Tradition contraire .
Un ancien Manuscrit ( 2 ) parlant de
la Translation de S. Baudifle à Orleans ,
( 1) Manuscrit de l'Abbaye de sainte Geneviève..
(2 ) Manuscrit de la Bibliotheque du Roy , N° ..
XXXVIII, qui a appartenu à M. Duchesne...
dit
1988 MERCURE DE FRANCE
dit que S. Aignan en apporta le Corps
de Nismes à Orleans , et qu'il le déposa
dans l'Eglise de S. Pierre , où il
même enterré depuis : Anianus... Baudelii..
Corpus.... in Ecclesia Beati Petri extra
muros civitatis Aureliana recondit in qua
et ipse post modum repositus est . Or , jamais
l'Eglise de S. Laurent n'a porté le
nom de S. Pierre ; c'est donc dans celle
de S. Aignan que l'Auteur veut dire que
S.Baudille a été transporté , et par conséquent
il croyoit que S. Aignan lui -même
n'avoit point été enterré ailleurs. C'en est
assez pour récuser l'autorité des Actes
de ce S. Evêque , lorsqu'ils avancent qu'il
fut enterré dans l'Eglise de S. Laurent.
Aussi les Freres de sainte Marthe, qui ont
suivi exactement la Saussaye et Guyon
dans leur Catalogue des Evêques d'Or-
Jeans , se sont bien gardez de s'en rapporter
à eux au sujet de la sépulture
de S. Aignan : Tumulatus est , disent ces
Illustres Freres , in ade sancti Petri Apos
toli , nunc dicta ab ejus nomine Regalis
Collegiata sancti Aniani in urbe.
de la Sépulture de S. Aignan , Evêque
d'Orleans.
N lit dans les Actes de S. Aignan ,
Evêqued'Orleans , recueillis par la
Saussaye ( 1 ) et par Hubert , dans
ses Preuves sur les Antiquitez de saint
Aignan , et inserées en partie dans le Ŕecueil
de Surius , que ce saint Evêque
qui mourut en 453. fut d'abord enterré
dans l'Eglise de S. Laurent des Orgerils
et y fut long- temps l'objet de la veneration
des Fideles , jusqu'à ce qu'on le
transporta de l'autre côté de la Ville
dans l'Eglise qui porte aujourd'hui son
nom ( 2 ) et qui étoit alors dédiée à l'Apôtre
S. Pierre.
Ce fait néanmoins n'est rien moins que
probable ; et sans vouloir s'inscrire en
faux contre les Actes qui le rapportent ,
et qui ne sont pas d'une authenticité
irreprochable ,il suffit de lire les Auteurs:
anciens qui nous ont parlé de S. Aignan,
(1) Annal. Eccles . Aurel.
(2 ) Autrefois cette Eglise qui se trouve mains
tenant dans la Ville , en étoit hors.
D vj pour
1984 MERCURE DE FRANCE
pour voir que le Corps de ce grand Saint
n'a jamais changé de place , et qu'il a tou
jours été dans l'Eglise ( 1 ) qui porte son
nom , et où l'on conserve encore ce qui
* pû échapper de ses précieuses Reliques.
à l'impieté des Calvinistes, dans les troubles
de 1562 .
Le silence de quelques uns de ces Au
teurs sur le lieu de la sépulture de notre
Saint , ne prouve rien pour l'Eglise
de S. Laurent , au contraire ce silence
n'auroit- il pas quelque chose de surprenant
, si en effet le Corps de S. Aignan
eût été d'abord enterré ailleurs que dans
PEglise qui portoit son nom de leur
temps ? et ce temps étoit- il si éloigné de
celui du saint Evêque , qu'ils eussent pû
ignorer un fait de cette nature ?
Car enfin ces précieuses Reliques n'ont
pû changer ainsi de place sans bruit et
sans éclat. Il falloit traverser la Ville
dans toute sa longueur d'Occident en
Orient , et la Tranflation dut être fort
solemnelle ; supposé donc , ce qui n'est
gueres croyable , qu'on en fût venu jusqu'à
ignorer le temps de cette Tranflation
, comment auroit- on pû perdre st
tôt le souvenir de la Tranflation même
(1) Cette Eglise est dans le Fauxbourg Ocoi
dental de la Ville, sur le bord de la Loire.
CeSEPTEMBRE
. 1733. 1989
Cependant il se trouve non- seulement
que personne n'en fait mention , mais
'on ne nous en dit pas même le moindre
mot qui puisse faire rien conjecturer
de semblable .( 1 ) Leodebod , Abbé de
S. Aignan et Fondateur de l'Abbaye de
S. Benoît sur Loire , sous le Regne de
Clovis II. parle ainsi de l'Eglise de saint
Aignan Dum me divina pietas Basilica
Domini Aniani , ubi ipse Dominus in corpore
requiescit , Abbati sublimatum honore,
& c. et plus bas : Monasterium sancti
Petri adificare delibero , ubi jam dictus vir
Dei sanctus videlicet Prasul Anianus , con
dignè jacet tumulatus . ( 2 ) Fredegaire , parlant
du Serment de fidelité que Godin
fils de Warnachaire , Maire du Palais
de Bourgogne sous Clotaire II . devoit
prêter sur les Reliques de S. Aignan ,
dit simplement : Ut Aurelianis in Ecclesia
sancti Aniani .... sacramentum impleturus
adiret. Gregoire ( 3 ) de Tours dit
que Namatius , Evêque d'Orleans , mort
à la fin du sixiéme siecle , fut enterré
dans l'Eglise de S. Aignan : Corpusculum
ejus ad urbem suam delatum in Basilica
* ( 1 ) Duchesne , Tom. 4. Hist. Franc. page
39. c.
(2 ) N. 54. p. 63.2.
(3) Lag. & 18: p. 437
saneta
1936 MERCURE DE FRANCE
...
sancti Aniani Confessoris sepultum est. ( 1)
L'Auteur anonime de la Vie de S. Mesmin
, qui écrivoit , comme l'on croit
au septiéme siecle , dit que S. Euspice
fut enterré dans l'Eglise de S. Aignan ,
auprès du Corps de S. Aignan même
et à sa droite : Visum est . ut in bea
tissimi Aniani Ecclesiam Corpus ejus transferretur
, et ad dextram partem corporis ejus
dem sanctissimi viri poneretur. Il ajoûte :
Quum placuisset ut per medium civitatis
sancia Reliquia portarentur.... et ventum
esset ad portam Orientalem ejuslem urbis .
que transmittit ad Monasterium sancti
Aniani , & c.
On voit clairement ici et sans équivoque
, que le Corps de S. Aignan étoit
dans l'Eglise de S. Aignan , et que cette
Eglise étoit à l'Orient de la Ville d'Or
léans , du côté diametramelement opposé
à celle de S Laurent , qui est à
Occident. Or S. Euspice vivoit sous.
Clovis I. Donc le Corps de S. Aignan
reposoit dès ce temps - là dans l'Eglise
qui porte aujourd'hui son ' nom , sans
qu'il paroisse encore qu'il y eût été
transporté d'ailleurs . Un témoignage du
même temps , quoique peut- être moins
recevable dans l'esprit de plusieurs , se
(4) Mabill. Act. SS . Ben. T. 1. p. 535. n. 18.
tire
SEPTEMBRE. 1733. 1987
tire de la vie de sainte Geneviève , ( 1 )
écrite dix - huit ans après sa mort et du
Mile que cette Sainte fit à Orleans
dans l'Eglise de S. Aignan : In sancti
Antani Basilica. Quand on voudroit
s'inscrire en faux contre le Miracle , il
demeureroit toujours vrai que du temps
de cet Historien , l'Eglise qui porte aujour
d'hui le nom de S. Aignan , renfermoit
le Corps de ce saint Evêque.. Dans quel
temps donc y aura - t'il été transporté ?
On ne peut guere compter que cinquante
ans d'intervalle entre la mort de saint
Aignan et le commencement du Regne
de Clovis I. Sera -ce du temps de Clovis
même , et par les ordres de ce Prince ,
comme le prétend Gubert ? Mais quelle
preuve en a- t'on ? aucune . Disons mieux,
il n'y a aucune preuve , pas même le
moindre indice de Tranflation ,
soit depuis
, soit devant Clovis ; mais on a contre
ce sentiment quelque chose de plus
positif, et il est aisé de prouver que ce
n'est pas d'aujourd'hui qu'il est combattu
par une Tradition contraire .
Un ancien Manuscrit ( 2 ) parlant de
la Translation de S. Baudifle à Orleans ,
( 1) Manuscrit de l'Abbaye de sainte Geneviève..
(2 ) Manuscrit de la Bibliotheque du Roy , N° ..
XXXVIII, qui a appartenu à M. Duchesne...
dit
1988 MERCURE DE FRANCE
dit que S. Aignan en apporta le Corps
de Nismes à Orleans , et qu'il le déposa
dans l'Eglise de S. Pierre , où il
même enterré depuis : Anianus... Baudelii..
Corpus.... in Ecclesia Beati Petri extra
muros civitatis Aureliana recondit in qua
et ipse post modum repositus est . Or , jamais
l'Eglise de S. Laurent n'a porté le
nom de S. Pierre ; c'est donc dans celle
de S. Aignan que l'Auteur veut dire que
S.Baudille a été transporté , et par conséquent
il croyoit que S. Aignan lui -même
n'avoit point été enterré ailleurs. C'en est
assez pour récuser l'autorité des Actes
de ce S. Evêque , lorsqu'ils avancent qu'il
fut enterré dans l'Eglise de S. Laurent.
Aussi les Freres de sainte Marthe, qui ont
suivi exactement la Saussaye et Guyon
dans leur Catalogue des Evêques d'Or-
Jeans , se sont bien gardez de s'en rapporter
à eux au sujet de la sépulture
de S. Aignan : Tumulatus est , disent ces
Illustres Freres , in ade sancti Petri Apos
toli , nunc dicta ab ejus nomine Regalis
Collegiata sancti Aniani in urbe.
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Résumé : MEMOIRE de M.... sur le Lieu de la Sépulture de S. Aignan, Evêque d'Orleans.
Le texte traite de la sépulture de saint Aignan, évêque d'Orléans, décédé en 453. Selon les Actes de saint Aignan, recueillis par la Saussaye et Hubert, le saint aurait été initialement inhumé dans l'église de Saint-Laurent des Orgerils avant d'être transféré dans l'église dédiée à saint Pierre, aujourd'hui connue sous le nom de saint Aignan. Toutefois, cette version est contestée par un mémorialiste qui affirme que le corps de saint Aignan n'a jamais été déplacé et a toujours reposé dans l'église portant son nom. Plusieurs auteurs anciens, tels que Leodebod, abbé de Saint-Aignan, et Grégoire de Tours, confirment que les reliques de saint Aignan se trouvaient dans l'église Saint-Aignan. Le silence de certains auteurs sur un éventuel transfert est interprété comme une preuve que le corps du saint n'a jamais été déplacé. Un ancien manuscrit mentionne que saint Aignan a apporté le corps de saint Baudille à Orléans et l'a déposé dans l'église de Saint-Pierre, où il aurait lui-même été enterré. Cela renforce l'idée que l'église de Saint-Laurent n'a jamais été impliquée. Les Frères de Sainte-Marthe, dans leur catalogue des évêques d'Orléans, confirment également que saint Aignan a été enterré dans l'église Saint-Pierre, aujourd'hui connue sous le nom de Saint-Aignan. Ces témoignages convergent pour affirmer que la sépulture de saint Aignan n'a pas été déplacée et se trouve dans l'église dédiée à son nom.
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