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1
p. 40-46
« Les Lettres de Madrid du 16. Novembre, portent que la [...] »
Début :
Les Lettres de Madrid du 16. Novembre, portent que la [...]
Mots clefs :
Roi, Renne, Madrid, Feux d'artifice
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texteReconnaissance textuelle : « Les Lettres de Madrid du 16. Novembre, portent que la [...] »
Les Lettres de Madrid du
16. Novembre,portent que la
Cour partit d'Aranjuez le14.
Que leurs Majestez Catholiques
, en passant par Cien-
Poçuelos
,
où les Ennemis avoient
campé longtemps l'année
précédente
, y avoient été
reçues avec de grandes démons- -
trations de joye; que lesHabitans
avoient planté exprèssur
le chemin, une Avenue d'arbres
dm quart de lieuë de
longueur; a chacun des bouts il
y avoit un Arc de Triomphe
orné des portraits du Roy
,
de
la Reine
, e du Prince det
Asturies ; qu'ils avoient tiré
plusieurs feux d'Artifice,fait
couler des Fontaines de vin , & donnéplusieurs autres marques
de leurzele: que le
1 5.
leurs Majestez arrivèrent à
Madrid; qu'Elles allerent descendre
à IVoflre- Dame d'A..
tocha où l'on chanta le Te
Deum;que le Roy monta enfuite
à cheval, & la Reine en
Carosse,avec le Princesonfils:
que toutes les rues où leurs
À4ajefleK passerentétoient tenduesdesplus
belles Tapisseries)
avecungrand nombre de Portraits
du Roy, de la R.eine,&
du Prince; que les Boutiques
de la rui des Orphévresétoient
ornées de vases & de VaijpUe
d'or Qr d'argent, de quantité de
Bijoux &de toutesfortes de
pierreries : que la marche dura
jusqu'a la nuit, avec des acclamarions
& des marques
de zrle inexprimables ; que le
soir on fit jouer la grande Ma*
chine de feux d'Artifice qui, avoit
été dressée dans la Place du
Palais ; que les fenestres des
Maisons furent illuminées de
flambeaux de cire blanche pen-(
dant toute la nuit.
Celles du13.marquent que
les réjouissances ont continué
les deux jourssuivans par des
feux d'Artifice d'une beautésur
prenante, de l'inventiond'uncélébréArtificierd'Alcala
;par
des illuminations,&par toutes
les autres démonstrations d'une
grande joye : que le 19. on ce.
lebra dans l'EZlifè des Carmelites
Dechaussées
, une Mfie
solennelle pour rendregrâces à
Dieu de l'heureux retour de
leurs Majestez Catholiques&
du Prince leur fils; que Don
Lorenfo - Folch de Cardona
, grand Aumosnier, officia, &
que Don Juan de las Evas
Prédicateurdu , Roy,fit un très
beau Sermon ; que le 11. les
Jfùites du Collège Impérialsirent
des obseques folemmelles
pour le repos des Ames des Soldats
qui sont morts pendant lA
derniere Campagne, & que
toute la Noblessey affijla: que
plujieurs Particuliers., recommencerent
le 1 3. à donner des
marque de leurjoye pour l'arrivée
de leurs Majestez,par des
illumina/ions, par des feux
d'Artifice
, cy des Arcs de
Trbe,ornez de Peintures
&de vers à la louange de leurs
Afajejle^ ; que les deux Compagnies
de Comediens-Espagnols
allerent en Mascarade
MI Palais où ils chanterent des
Airs nouveaux, 0* répresenterent
unetrès-belle Piecequi
finit par un Bal magnifique.
Qu'à l'égard des nouvelles
de la guerre, les Lettres qu'on
Avoit reçues d'Arragon portoient
que les Troupes du Roy
quifont dans ce Royaumes'étoient
emparées de Benavarri
oùil y avoit trois cens hommes,
qui avoientétéfaits prisonniers
avec Don Bonfacto
Manrique, qui les commandoit.
16. Novembre,portent que la
Cour partit d'Aranjuez le14.
Que leurs Majestez Catholiques
, en passant par Cien-
Poçuelos
,
où les Ennemis avoient
campé longtemps l'année
précédente
, y avoient été
reçues avec de grandes démons- -
trations de joye; que lesHabitans
avoient planté exprèssur
le chemin, une Avenue d'arbres
dm quart de lieuë de
longueur; a chacun des bouts il
y avoit un Arc de Triomphe
orné des portraits du Roy
,
de
la Reine
, e du Prince det
Asturies ; qu'ils avoient tiré
plusieurs feux d'Artifice,fait
couler des Fontaines de vin , & donnéplusieurs autres marques
de leurzele: que le
1 5.
leurs Majestez arrivèrent à
Madrid; qu'Elles allerent descendre
à IVoflre- Dame d'A..
tocha où l'on chanta le Te
Deum;que le Roy monta enfuite
à cheval, & la Reine en
Carosse,avec le Princesonfils:
que toutes les rues où leurs
À4ajefleK passerentétoient tenduesdesplus
belles Tapisseries)
avecungrand nombre de Portraits
du Roy, de la R.eine,&
du Prince; que les Boutiques
de la rui des Orphévresétoient
ornées de vases & de VaijpUe
d'or Qr d'argent, de quantité de
Bijoux &de toutesfortes de
pierreries : que la marche dura
jusqu'a la nuit, avec des acclamarions
& des marques
de zrle inexprimables ; que le
soir on fit jouer la grande Ma*
chine de feux d'Artifice qui, avoit
été dressée dans la Place du
Palais ; que les fenestres des
Maisons furent illuminées de
flambeaux de cire blanche pen-(
dant toute la nuit.
Celles du13.marquent que
les réjouissances ont continué
les deux jourssuivans par des
feux d'Artifice d'une beautésur
prenante, de l'inventiond'uncélébréArtificierd'Alcala
;par
des illuminations,&par toutes
les autres démonstrations d'une
grande joye : que le 19. on ce.
lebra dans l'EZlifè des Carmelites
Dechaussées
, une Mfie
solennelle pour rendregrâces à
Dieu de l'heureux retour de
leurs Majestez Catholiques&
du Prince leur fils; que Don
Lorenfo - Folch de Cardona
, grand Aumosnier, officia, &
que Don Juan de las Evas
Prédicateurdu , Roy,fit un très
beau Sermon ; que le 11. les
Jfùites du Collège Impérialsirent
des obseques folemmelles
pour le repos des Ames des Soldats
qui sont morts pendant lA
derniere Campagne, & que
toute la Noblessey affijla: que
plujieurs Particuliers., recommencerent
le 1 3. à donner des
marque de leurjoye pour l'arrivée
de leurs Majestez,par des
illumina/ions, par des feux
d'Artifice
, cy des Arcs de
Trbe,ornez de Peintures
&de vers à la louange de leurs
Afajejle^ ; que les deux Compagnies
de Comediens-Espagnols
allerent en Mascarade
MI Palais où ils chanterent des
Airs nouveaux, 0* répresenterent
unetrès-belle Piecequi
finit par un Bal magnifique.
Qu'à l'égard des nouvelles
de la guerre, les Lettres qu'on
Avoit reçues d'Arragon portoient
que les Troupes du Roy
quifont dans ce Royaumes'étoient
emparées de Benavarri
oùil y avoit trois cens hommes,
qui avoientétéfaits prisonniers
avec Don Bonfacto
Manrique, qui les commandoit.
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Résumé : « Les Lettres de Madrid du 16. Novembre, portent que la [...] »
Le 14 novembre, la Cour quitta Aranjuez pour Madrid. À Cien-Poçuelos, les souverains furent accueillis par des démonstrations de joie, des arcs de triomphe ornés de leurs portraits, des feux d'artifice et des fontaines de vin. Le 15 novembre, à Madrid, les rues étaient tendues de tapisseries et ornées de portraits. Des acclamations et des illuminations marquèrent leur arrivée. Le soir, des feux d'artifice furent allumés sur la Place du Palais. Les réjouissances se poursuivirent avec des illuminations et des feux d'artifice. Le 19 novembre, une messe solennelle fut célébrée pour remercier Dieu du retour des souverains. Le 11 novembre, les Jésuites organisèrent des obsèques solennelles pour les soldats morts lors de la dernière campagne. Des particuliers et des comédiens espagnols exprimèrent également leur joie par des illuminations, des arcs de triomphe et des représentations théâtrales. Sur le front de la guerre, les troupes du roi prirent Benavarri en Aragon, capturant trois cents hommes, dont Don Bonfacto Manrique, leur commandant.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 111-114
Description de la Fête des Ambassadeurs d'Espagne, [titre d'après la table]
Début :
DESCRIPTION de la Fête & du Feu d'artifice qui doit être tiré à Paris sur la [...]
Mots clefs :
Fête, Feux d'artifice, Ambassadeurs, Naissance du Dauphin, Ambassadeurs d'Espagne
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texteReconnaissance textuelle : Description de la Fête des Ambassadeurs d'Espagne, [titre d'après la table]
Description de la Fête & du Feu
d'artifice qui doit être tiré à Paris fur la
Rivière , au sujet de la Naissance de Mon
seigneur le Dauphin, par ordre de S. MC.
Philippe V. Et par les foins de leurs Ex
cellences M. le Marquis de Santa-Cruz,
& M. de Barrenechea , Ambassadeurs Ex
traordinaires & Plénipotentiaires du Roi
d'Espagne , le 2 4. Janvier i7jo. in-Of
avec figures. A Paris, chez. Pierre
Gandoúin, Qítay des Auguflins , à la Belle
Image > 1730. Brochure de 31. pages,
3. livres.
_ . Cette Description est de M./' Abbé Langlet
du Frefiioy , connu déja par plusieurs
Ouvrages Dogmatiques & Historiques,
& fur tout par la Méthode pour étudier
f ij rtíìf
mi MERCURE DE FRANCE.
V ffistoire\<p'il a publiée l'année derniere
tn 4> volumes /jï-4. C'est un Ouvrage
qu'il a accordé à l'amitié 5 M M. les
Ambassadeurs d'Espagne , l'ayant honoré
de la leur depuis qu'ils sont en France.
Quoique l'Auteur n'ait pas tourné ses
e'tudesdu côté de cetce force d'Ouvrages,
on n'a pas laisse de l'approuver & de le
regarder comme une piece excellente en
ce genre , tant pour l'élegance que pour
ies traits curieux & singuliers qu'on y
trouve. Il a crû, fans doute, que pour
en ôter la secheccfle propre aux Descrip
tions , il dcyoit y semer quelques faits
historiques très-interessans, 8c Passaisonner
meme de quelques Pieces de Vers
François, qui servit à expliquer les Ins
criptions Latines que M. VAbbi Lanqlct
. a -données , & qui sont des application^
heureuses de divers endroits des anciens
Poètes, au sujet de cette illustre Fête. Il
a pris même occasion delà de faire des
Eloges sages de véritables des deux Rois
Sí même des deux Reines de ces deux
Nations , & de placer quelques pensées
brillantes, mais simples dans leurs ex
pressions.
On trouve aussi dans cetce Description
Iís Vers que M. de la Serre s homme de
beaucoup d'esprit & de sçavoir , a faits ,
jla'priere d« M M. les Ambassadeurs d'Es-
P3S"Ç
Janvier-. 17 3». n*
pagne, pour servir au Ballet en Musique
que Leurs Excellences onefait représenter
dans cectd occasions Cette fête qui devoit
se donner dès le mois de Décembre t
a e'té reculée par divers accidens.ElIe avoir
été depuis promise au 1 4. ensuite au x 1 .
&enfinell« s'est donnée le 2 4-de ce mois*
La Fête a surpassé de beaucoup la magni
ficence & le brillant qui est répandu dans
cette Description. Ge petit Ouvrage doic
être regardé. comme un morceau précieux
& comme un monument éternel de latendresse
paternelle da Roi Catholique
poor le Roi son neveu.
Comme nous donnerons une Relatiort
de cette Fête^nous ne nous arrêterons pas
plus long-temps à cette Description; mais
pour donner une idée de Ia> Versification
de l' Auteur, voici par où cette Piece est
terminée. C'est une imitation de Pfopercc*-
S'il est des Dieux fur la Terre ,
H en est dedans, les Cieux t
Ceux- cy lancent le Tonnerre ,
Seuls ils exaucent nos voeux.
II faut» Mortels , leur en faire ,.
Pour que de notre Hémisphère ,
ïls éloignent tout brouillard ,
Les vents , la plùye & l'orage }
Devroient-ils un peu plus tard, s
En envoyer davantage.
f iij . U
iû MERCtTRE DÈ FRANCÊ;
II faut donc pour cette Fête,
Aux Dieux , sans autre façon í
Présenter notre Requête ,
Les priant d'y mettre > Bon.
Mais Bon depuis le quinzième
De Janvier jusqu'au trentième.
On en doit tout espérer ;
C'est pour eux fiipeu de chose ,
Qu'ils daigneront l'accordêr í .
C'est fur quoi je me repose*
d'artifice qui doit être tiré à Paris fur la
Rivière , au sujet de la Naissance de Mon
seigneur le Dauphin, par ordre de S. MC.
Philippe V. Et par les foins de leurs Ex
cellences M. le Marquis de Santa-Cruz,
& M. de Barrenechea , Ambassadeurs Ex
traordinaires & Plénipotentiaires du Roi
d'Espagne , le 2 4. Janvier i7jo. in-Of
avec figures. A Paris, chez. Pierre
Gandoúin, Qítay des Auguflins , à la Belle
Image > 1730. Brochure de 31. pages,
3. livres.
_ . Cette Description est de M./' Abbé Langlet
du Frefiioy , connu déja par plusieurs
Ouvrages Dogmatiques & Historiques,
& fur tout par la Méthode pour étudier
f ij rtíìf
mi MERCURE DE FRANCE.
V ffistoire\<p'il a publiée l'année derniere
tn 4> volumes /jï-4. C'est un Ouvrage
qu'il a accordé à l'amitié 5 M M. les
Ambassadeurs d'Espagne , l'ayant honoré
de la leur depuis qu'ils sont en France.
Quoique l'Auteur n'ait pas tourné ses
e'tudesdu côté de cetce force d'Ouvrages,
on n'a pas laisse de l'approuver & de le
regarder comme une piece excellente en
ce genre , tant pour l'élegance que pour
ies traits curieux & singuliers qu'on y
trouve. Il a crû, fans doute, que pour
en ôter la secheccfle propre aux Descrip
tions , il dcyoit y semer quelques faits
historiques très-interessans, 8c Passaisonner
meme de quelques Pieces de Vers
François, qui servit à expliquer les Ins
criptions Latines que M. VAbbi Lanqlct
. a -données , & qui sont des application^
heureuses de divers endroits des anciens
Poètes, au sujet de cette illustre Fête. Il
a pris même occasion delà de faire des
Eloges sages de véritables des deux Rois
Sí même des deux Reines de ces deux
Nations , & de placer quelques pensées
brillantes, mais simples dans leurs ex
pressions.
On trouve aussi dans cetce Description
Iís Vers que M. de la Serre s homme de
beaucoup d'esprit & de sçavoir , a faits ,
jla'priere d« M M. les Ambassadeurs d'Es-
P3S"Ç
Janvier-. 17 3». n*
pagne, pour servir au Ballet en Musique
que Leurs Excellences onefait représenter
dans cectd occasions Cette fête qui devoit
se donner dès le mois de Décembre t
a e'té reculée par divers accidens.ElIe avoir
été depuis promise au 1 4. ensuite au x 1 .
&enfinell« s'est donnée le 2 4-de ce mois*
La Fête a surpassé de beaucoup la magni
ficence & le brillant qui est répandu dans
cette Description. Ge petit Ouvrage doic
être regardé. comme un morceau précieux
& comme un monument éternel de latendresse
paternelle da Roi Catholique
poor le Roi son neveu.
Comme nous donnerons une Relatiort
de cette Fête^nous ne nous arrêterons pas
plus long-temps à cette Description; mais
pour donner une idée de Ia> Versification
de l' Auteur, voici par où cette Piece est
terminée. C'est une imitation de Pfopercc*-
S'il est des Dieux fur la Terre ,
H en est dedans, les Cieux t
Ceux- cy lancent le Tonnerre ,
Seuls ils exaucent nos voeux.
II faut» Mortels , leur en faire ,.
Pour que de notre Hémisphère ,
ïls éloignent tout brouillard ,
Les vents , la plùye & l'orage }
Devroient-ils un peu plus tard, s
En envoyer davantage.
f iij . U
iû MERCtTRE DÈ FRANCÊ;
II faut donc pour cette Fête,
Aux Dieux , sans autre façon í
Présenter notre Requête ,
Les priant d'y mettre > Bon.
Mais Bon depuis le quinzième
De Janvier jusqu'au trentième.
On en doit tout espérer ;
C'est pour eux fiipeu de chose ,
Qu'ils daigneront l'accordêr í .
C'est fur quoi je me repose*
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Résumé : Description de la Fête des Ambassadeurs d'Espagne, [titre d'après la table]
En 1730, une brochure intitulée 'Description de la Fête & du Feu d'artifice' a été publiée à Paris pour célébrer la naissance du Dauphin, sur ordre de Philippe V, roi d'Espagne. La fête, organisée par les ambassadeurs espagnols M. le Marquis de Santa-Cruz et M. de Barrenechea, a eu lieu le 24 janvier 1730 sur la rivière à Paris. L'ouvrage, rédigé par l'Abbé Langlet du Fresnoy, est apprécié pour son élégance et ses détails curieux. Il inclut des faits historiques et des poèmes français expliquant les inscriptions latines. La fête, initialement prévue pour décembre, a été reportée à plusieurs reprises en raison de divers accidents. Elle a finalement eu lieu le 24 janvier et a été jugée magnifique, symbolisant l'affection paternelle du roi d'Espagne pour son neveu. La brochure contient également des vers de M. de la Serre, composés à la demande des ambassadeurs espagnols pour un ballet musical.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 2092-2095
« Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...] »
Début :
Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...]
Mots clefs :
Dieu, Roi, Officiers, Archevêque, Naissance, Feux d'artifice
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...] »
Cette heureufe Naiffance étant une fuite
des Benedictions que Dieu répand fur
la Perfonne du Roy & fur l'Etats le
-( 2 ) Ad Tim. c. 2. v. 3. & 2,
( 3 ) Prov. 20. v. 28.
premier
SEPTEMBRE. 1730. 2098
mier foin de S.M. dans cet heureux évenement
, a été d'en rendre à Dieu de folemnelles
actions de graces ; & le 2 de ce
mois , le Roy fe rendit à Paris , pour af
fifter au Te Deum , qui devoit y être chanté,
fuivant les Ordres que l'Archevêque de
Paris en avoit reçus de S. M.
Le Roy partit du Château de Verfailles
vers les trois heures après midi , accompagné
, dans fon Caroffe , du Comte de
Clermont , du Prince de Conti , du Prince
de Dombes , du Comte d'Eu & du
Comte de Toulouſe. Les trois autres Caroffes
étoient remplis par les principaux
Officiers de Sa Maifon , & par les Seigneurs
de la Cour. Les détachemens des
Gendarmes , des Chevaux - Legers & les
deux Compagnies des Moufquetaires de
la Garde du Roy , & le détachement des
Gardes du Corps précédoient & fuivoient
le Caroffe de S. M. & le Vol du Cabinet
étoit immédiatement devant le Caroffe de
fuite.
Le Roy arriva vers les cinq heures à la
Porte S. Honoré , d'où S. M. fe rendit à
l'Eglife Métropolitaine.Les Regimens des
Gardes Françoifes & Suiffes étoient rangez
en haye , & préfentoient leurs Armes,
dans toutes les rues par lefquelles le Roy
paffa en allant à l'Eglife Métropolitaine ,
& en retournant à Verfailles.
I Le
2094 MERCURE DE FRANCE
Le Roy fut reçu à la porte de l'Eglife
par le Chapitre , à la tête duquel l'Archevêque
de Paris complimenta S. M. & lui
prefenta l'Eau benite. Le Roy entra dans
f'Eglife au bruit des Trompettes & des
Hautbois de la Chambre , étant précédé
du Grand Maître & du Maître des Cérémonies
, devant lefquels marchoient le
-Roy & les Hérauts d'Armes , & S. M.
alla fe placer au milieu du Choeur , fur un
Prie - Dieu , au deffus duquel étoit un Dais .
Le Duc d'Orleans , le Duc de Bourbon ,
le Comte de Charolois, le Comte de Cletmont
, le Prince de Conti , le Prince de
Dombes , le Comte d'Eu & le Comte de
Toulouſe , le Cardinal de Fleury , les Officiers
de la Couronne, les Principaux Of
ficiers de S.M. & les Seigneurs de la Cour
étoient placez auprès du Roy' pendant le
Te Deum , auquel le Chancelier de France
& le Garde des Sceaux affifterent, étant I
accompagnez de plufieurs Confeillers d'Etat
& Maîtres des Requêtes.
C
>
Le Clergé , le Parlement , la Chambre
des Comptes , la Cour des Aydes & lo
Corps de Ville ayant été invitez en la maniére
accoutumée y affifterent en Robes
de Ceremonie & à leurs places ordinaires
. L'Archevêque de Paris officia pontificalement
au Te Deum , qui fut chanté au
bruit d'une Salve generale des Canons de
la Baftille & de ceux de la Ville.
Lcs
SEPTEMBRE. 1730. 2095
Les Regimens des Gardes Françoiles &
Suiffes y répondirent par trois décharges
de leur Moufqueterie.
Après le Te Deum , le Roy vint faire fa
Priére devant l'Autel de la fainte Vierge ,
d'où S.M.fut reconduite à la porte de l'Eglife
, avec les cérémonies qui avoient été
obfervées à fon arrivée. Et S. M. étant remontée
en caroffe , partit pour retourner
à Verfalles avec le même Cortege qui
l'avoit accompagnée en entrant dans Paris.
Pendant la Marche , les Officiers des Gardes
du Corps qui étoient auprès du carof
fe du Roy,jetterent de l'argent au peuple,
qui par fes acclamations cherchoit à don
ner à S. M. des preuves de fon amour ,de
fon zele & de fa joye.
Le même jour,les Prevot des Marchands
& Echevins qui la furveille avoient fait
'lluminer l'Hôtel de Ville avec beaucoup
de magnificence , firent couler des Fontaines
de vin dans la place , & le foir ils firent
tirer un tres-beau Feu d'artifice, qui
fut précédé d'une décharge de Boëtes &
de Canons de la Ville . Il y eut en même
temps chez le Duc de Gévres , chez les
Prevôt des Marchands & Echevins , ainfi
que dans toutes les rues , des Illuminations
, des Feux & toutes autres marques
de réjouiffance poffible.
des Benedictions que Dieu répand fur
la Perfonne du Roy & fur l'Etats le
-( 2 ) Ad Tim. c. 2. v. 3. & 2,
( 3 ) Prov. 20. v. 28.
premier
SEPTEMBRE. 1730. 2098
mier foin de S.M. dans cet heureux évenement
, a été d'en rendre à Dieu de folemnelles
actions de graces ; & le 2 de ce
mois , le Roy fe rendit à Paris , pour af
fifter au Te Deum , qui devoit y être chanté,
fuivant les Ordres que l'Archevêque de
Paris en avoit reçus de S. M.
Le Roy partit du Château de Verfailles
vers les trois heures après midi , accompagné
, dans fon Caroffe , du Comte de
Clermont , du Prince de Conti , du Prince
de Dombes , du Comte d'Eu & du
Comte de Toulouſe. Les trois autres Caroffes
étoient remplis par les principaux
Officiers de Sa Maifon , & par les Seigneurs
de la Cour. Les détachemens des
Gendarmes , des Chevaux - Legers & les
deux Compagnies des Moufquetaires de
la Garde du Roy , & le détachement des
Gardes du Corps précédoient & fuivoient
le Caroffe de S. M. & le Vol du Cabinet
étoit immédiatement devant le Caroffe de
fuite.
Le Roy arriva vers les cinq heures à la
Porte S. Honoré , d'où S. M. fe rendit à
l'Eglife Métropolitaine.Les Regimens des
Gardes Françoifes & Suiffes étoient rangez
en haye , & préfentoient leurs Armes,
dans toutes les rues par lefquelles le Roy
paffa en allant à l'Eglife Métropolitaine ,
& en retournant à Verfailles.
I Le
2094 MERCURE DE FRANCE
Le Roy fut reçu à la porte de l'Eglife
par le Chapitre , à la tête duquel l'Archevêque
de Paris complimenta S. M. & lui
prefenta l'Eau benite. Le Roy entra dans
f'Eglife au bruit des Trompettes & des
Hautbois de la Chambre , étant précédé
du Grand Maître & du Maître des Cérémonies
, devant lefquels marchoient le
-Roy & les Hérauts d'Armes , & S. M.
alla fe placer au milieu du Choeur , fur un
Prie - Dieu , au deffus duquel étoit un Dais .
Le Duc d'Orleans , le Duc de Bourbon ,
le Comte de Charolois, le Comte de Cletmont
, le Prince de Conti , le Prince de
Dombes , le Comte d'Eu & le Comte de
Toulouſe , le Cardinal de Fleury , les Officiers
de la Couronne, les Principaux Of
ficiers de S.M. & les Seigneurs de la Cour
étoient placez auprès du Roy' pendant le
Te Deum , auquel le Chancelier de France
& le Garde des Sceaux affifterent, étant I
accompagnez de plufieurs Confeillers d'Etat
& Maîtres des Requêtes.
C
>
Le Clergé , le Parlement , la Chambre
des Comptes , la Cour des Aydes & lo
Corps de Ville ayant été invitez en la maniére
accoutumée y affifterent en Robes
de Ceremonie & à leurs places ordinaires
. L'Archevêque de Paris officia pontificalement
au Te Deum , qui fut chanté au
bruit d'une Salve generale des Canons de
la Baftille & de ceux de la Ville.
Lcs
SEPTEMBRE. 1730. 2095
Les Regimens des Gardes Françoiles &
Suiffes y répondirent par trois décharges
de leur Moufqueterie.
Après le Te Deum , le Roy vint faire fa
Priére devant l'Autel de la fainte Vierge ,
d'où S.M.fut reconduite à la porte de l'Eglife
, avec les cérémonies qui avoient été
obfervées à fon arrivée. Et S. M. étant remontée
en caroffe , partit pour retourner
à Verfalles avec le même Cortege qui
l'avoit accompagnée en entrant dans Paris.
Pendant la Marche , les Officiers des Gardes
du Corps qui étoient auprès du carof
fe du Roy,jetterent de l'argent au peuple,
qui par fes acclamations cherchoit à don
ner à S. M. des preuves de fon amour ,de
fon zele & de fa joye.
Le même jour,les Prevot des Marchands
& Echevins qui la furveille avoient fait
'lluminer l'Hôtel de Ville avec beaucoup
de magnificence , firent couler des Fontaines
de vin dans la place , & le foir ils firent
tirer un tres-beau Feu d'artifice, qui
fut précédé d'une décharge de Boëtes &
de Canons de la Ville . Il y eut en même
temps chez le Duc de Gévres , chez les
Prevôt des Marchands & Echevins , ainfi
que dans toutes les rues , des Illuminations
, des Feux & toutes autres marques
de réjouiffance poffible.
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Résumé : « Cette heureuse Naissance étant une suite des Benedictions que Dieu répand sur [...] »
Le 1er septembre 1730, le roi exprima sa gratitude à Dieu pour un événement heureux. Le 2 septembre, il se rendit à Paris pour assister au Te Deum à l'église métropolitaine. Accompagné de nobles et d'officiers, le cortège royal comprenait des gendarmes, des chevau-légers, des mousquetaires et des gardes du corps. À la porte Saint-Honoré, le roi fut accueilli par le chapitre de l'église, dirigé par l'archevêque de Paris, qui lui présenta l'eau bénite. Le Te Deum fut chanté au son des canons de la Bastille et de la ville, et des régiments des gardes françaises et suisses répondirent par des salves de mousqueterie. Après la cérémonie, le roi pria devant l'autel de la sainte Vierge et fut reconduit à la porte de l'église avec les mêmes honneurs. Pendant le retour à Versailles, les officiers des gardes du corps distribuèrent de l'argent au peuple. À Paris, les prévôts des marchands et échevins illuminèrent l'hôtel de ville, firent couler des fontaines de vin et tirèrent un feu d'artifice. Des illuminations et des feux furent également allumés chez le duc de Guèvres, chez les prévôts des marchands et échevins, ainsi que dans toutes les rues.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 203-223
« Le premier Août, vingt-quatre des principaux habitans de Chantilly ont signalé [...] »
Début :
Le premier Août, vingt-quatre des principaux habitans de Chantilly ont signalé [...]
Mots clefs :
Naissance du Duc de Bourbon, Prince de Condé, Fête, Feux d'artifice, Démission, Charges, Franche-Comté, Orage, Ouragan, Monseigneur le Dauphin, Révision du régiment, Sa Majesté, Ordonnance du roi, Académie royale des sciences, Accession à des charges, Lit de justice, Ambassadeurs, Comtes, Marquis, Duc d'Orléans, Comte de Clermont, Cérémonie, M. le Chancelier, Discours du roi, Fiscalité, Parlement, Canada, Combats, Vaisseaux anglais, Succès, Duc de Gesvres, Corsaire anglais, Maréchal duc de Richelieu
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texteReconnaissance textuelle : « Le premier Août, vingt-quatre des principaux habitans de Chantilly ont signalé [...] »
LEE premier Août , vingt- quatre des principaux
habitans de Chantilly ont fignalé leur zele & leur
attachement pour le Prince de Condé , en donnant
une très- belle fête à l'occafion de la naiffance du
Duc de Bourbon , & de la convalefcence de Mile
de Bourbon. La fête a commencé par un Te
Deum folemnel , chanté dans l'Eglife de la Paroiffe
, au bruit de trente- fix pieces de canon . A
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
neuf heures du foir , on tira vis-à-vis de la façade
du petit Château , où étoient le Prince & la
Princeffe de Condé , un feu d'artifice dont le deſfein
& l'exécution furent également applaudis.
Dès que le Prince eut donné le fignal , on vit pároître
trois Bateaux fur la piece d'eau , qui eft visà-
vis du petit Château . Ils venoient de trois côtés
différens , & ils fe réunirent pour attaquer un
Fort qu'on avoit conftruit fur le bord de l'eau.
Pendant près de trois quarts d'heure , il firent
pleuvoir une infinité de fufées & de bombes fur
cette efpece de Citadelle. Dans le temps qu'on
croyoit le Fort réduit en cendres , il foudroya
d'artifice les trois Bateaux ; & toute la piece
d'eau devint un étang de feu. A cette attaque fuccéderent
plufieurs caſcades , gerbes , foleils , &c.
Un bruit de trompettes & de cors de chaffe annonça
la victoire remportée par les affiégés . Le
ficur Coufinet , Sculpteur du Frince de Condé
a donné l'idée du fiege , & a conduit le feu des
Bateaux. Le refte du feu a été dirigé par les fieurs
Caftain & Maurice , Artificiers du Roi . Lorſque
l'artifice a ceffé , neuf grands Portiques , ornés
de verdure , qu'on avoit placés en perſpective du
petit Château , furent illuminés. Celui du milieu ,
plus élevé que les autres , étoit furmonté par le
Chiffre couronné du Prince & de la Princeffe de
Condé. Au pied de ces Portiques , une Salle de
verdure , de cent trente pieds en quarré , contenoit
une table de foixante couverts , préparée
pour les époufes des principaux habitans . Sur la
fin du fouper , le Prince & la Princeffe de Condé
fe rendirent dans cette Salle . Ils y furent reçus au
fon des trompettes , cors de chaffe , violons &
autres inftrumens. Le Bal fuivit le fouper. Leurs
Akteffes Séréniffimes danferent indifféremment
OCTOBRE. 1756. 205
avec ceux qui fe préfenterent. Vers les deux
heures du matin , le Prince & la Princeffe retournerent
au Château précédés d'un grand nombre
d'inftrumens , & de douze habitans , qui portoient
chacun un falot devant Leurs Alteffes Séréniffimes.
M. le Maréchal Duc de Richelieu s'eft démis
de fa charge de premier Gentilhomme de la Chambre
en faveur de M. le Duc de Fronfac , fon fils ,
& a obtenu la furvivance de cette Charge.
Le Roi a accordé à M. de Fremeur , Lieutenant
- Général des Armées de Sa Majefté , le Ġouvernement
de Monmédy , vacant par la mort du
Comte de la Claviere , auffi Lieutenant- Général.
M. le Marquis de Talaru , Brigadier d'Infante
rie , & Colonel du Régiment de fon nom , a été
nommé Gouverneur des Villes & Châteaux de
Phaltzbourg & de Saltzbourg , fur la démiffion
de M. le Marquis de Chalmazel fon pere.
Le 9 Août , le Roi fit la cérémonie de recevoir
Chevaliers de l'Ordre de Saint Louis , M. le Comte
d'Egmont , Maréchal de Camp , & M. le Comte
de Balbi , Brigadier , Colonel réformé à la fuite du
Régiment Royal Italien.
Selon les lettres de Franche-Comté, on a effuyé
vers la fin du mois de Juillet , tant à Saint- Claude
que dans les environs , une orage des plus terribles.
Le bruit & les éclats du tonnerre étoient
fi violens , qu'ils faifoient trembler les perſonnes
les plus hardies. Les animaux dans la campagne
cherchoient en mugiffant , quelque retraite affurée.
A chaque éclat , la foudre tomboit en différentes
manieres & dans plufieurs endroits. Les
eaux deſcendoient de la montagne avec tant d'abondance
& de rapidité , qu'elles entraînoîent
rout ce qu'elles rencontroient dans leur paffage.
206 MERCURE DE FRANCE.
Vergers , Maifons , Moulins , Ecluses , rien n'a
refifté . Le 6 Août , la Ville de Saint - Claude
& les campagnes voifines ont prouvé un nouveau
fléau. Un ouragan épouvantable a ruiné dans les
campagnes tout ce que l'orage précédent avoit
épargné. Dans la Ville , la plupart des toits ont
été enlevés , & prefque toutes les cheminées abattues.
Le Clocher des Religieufes de l'Annonciade
a été renversé . Trente des plus gros arbres de la
promenade publique ont été déracinés , & tous
les autres ont été dépouillés de leurs feuilles .
Monfeigneur le Dauphin fit le 11 Août , la
revue de fon Régiment de Cavalerie , dans la
Plaine de Favieres , à cinq lieues de Compiegne.
M. le Comte de Perigord , Meftre de Camp , Lieutenant
de ce Régiment , le fit efcadronner & manoeuvrer.
M. le Marquis de Paulmy , Secretaire
d'Etat au Département de la Guerre en furvivance
du Comte d'Argenfon , accompagna Monfeigneur
le Dauphin.
Le 13 , Sa Majefté fit la revue du Régiment
Royal , Cavalerie , dans la Plaine dite du Moulin
, près de la même Ville. M. le Marquis d'Equevilly,
Meftre de Camp , Lieutenant de ce Régiment
, lui fit faire différentes évolutions . Enfuite
ce Régiment fe porta au lieu nommé le puits
de Berne , où il fit , devant le Roi , l'exercice à
pied , en bufle & en bonnet. Le fils de M. le Marquis
d'Ecquevilly , âgé de dix ans , paſſa au rang
des Cavaliers. Il fit , comme eux , le maniement
des armes & les évolutions à cheval , ainfi
que
l'exercice à pied. Sa Majefté parut très - fatisfaite .
Par une Ordonnance du 15 Fevrier 1749 , le
Roi avoit établi un Aide- Major dans chacune des
quatre Brigades du Régiment des Grenadiers de
France. Sa Majefté ayant reconnu qu'un feul
OCTOBRE. 1756. 207
Officier Major par Brigade ne pouvoit fuffire aux
différens détails de la difcipline & du fervice , a
réglé que l'Etat Major de chaque Brigade feroit à
Pavenir compofé d'un Sergent Major & d'un Aide-
Major. Les emplois de Sergens Majors feront
remplis par les Aides- Majors actuels , pour en
jouir aux honneurs & prérogatives attachés aux
autres Majors de l'Infanterie . Entend Sa Majeſté ,
que M. de Lanjamet , actuellement Major dudit
Régiment , & qui ne peut en conferver le titre
ni les fonctions au moyen de la nouvelle difpofition,
ait le commandement en fecond du Corps.
Le Roi a ordonné que les Régimens d'Infanterie
Irlandoife , de Bulkeley , de Clare , de Dillon
, de Roth , de Berwick & de Lally , fuffent
portés de quatre cens foixante - cinq hommes à
cinq cens vingt - cinq.
Le 15 Août , Fête de l'Affomption de la
Sainte Vierge , la Proceffion folemnelle , qui fe
fait tous les ans à pareil jour en exécution du Voeu
de Louis XIII , ſe fit avec les cérémonies accoutu
mées. L'Abbé de Saint -Exupery , Doyen du Chapitre
de l'Eglife Métropolitaine , y officia. Le
Parlement , la Chambre des Comptes , la Cour
des Aydes , & le Corps de Ville , y affifterent.
Dans l'affemblée générale que le Corps de Ville
tint le 16 , M. de Bernage fut continué Prevôt
des Marchands. M. Lempereur , Quartinier , &
-M Tribard , Avocat , ont été élus Echevins.
Sa Majesté a accordé à M. de Martigny & à M.
le Chevalier de Mazieres , Maréchaux des Logis de
la premier Compagnie des Moufquetaires , deux
Commiffions de Meftres de Camp , & à MM. de
Pille , de Savigny & de la Foreft , les places de
Maréchaux des Logis , vacantes dans la même
Compagnie. Elle a difpofé des Brigades qu'avoient
208 MERCURE DE FRANCE.
ces trois derniers Officiers , en faveur de MM.
d'Ormençey , de Rouville & de Mondollot. MM .
d'Elevemont , de Caffaignere & Démazet , ont
été fait Sous-Brigadiers. Le Chevalier de Monneron
, & MM. de Beaumont & de Guiry ont -
obtenu la Croix de Saint Louis. Il y a eu plufieurs
penfions , gratifications , & Commiffions de Capitaines
données à divers Moufquetaires.
Le Corfaire commandé par le Capitaine Gaftin
, de Marſeille , a fait dans l'intervalle de
quinze jours deux prifes eftimées cinquante mille
écus. Un des Corfaires de M. Roux , de Corfe , en
a fait auffi une .
L'Académie Royale des Sciences, dans fon Affemblée
du 23 Juin , propofa au Roi pour remplir la
place d'Adjoint- Géometre, vacante par la promotion
de M. de Parcieux au grade d'Affocié , M. le
Chevalier de Borda , Chevau- leger de la Garde
du Roi , & M. Bezout , Cenſeur Royal & Maître
de Mathématiques. M. le Comte d'Argenfon
a écrit le 30 à l'Académie que le Roi avoit choiſi
M. de Borda.
Dans la même Affemblée du 23 , M. Necker ,
Citoyen de Geneve , fut élu Correſpondant de
l'Académie .
Le 23 Août , les Députés des Etats de Languedoc
eurent audience du Roi. Ils furent préſentés
à Sa Majesté par M. le Comte d'Eu , Gouverneur
de la Province , & par M. le Comte de Saint Florentin
, Miniftre & Sécretaire d'Etat ; & conduits
par M. de Gifeux , Maître des Cérémonies , en
furvivance de M. Defgranges. La Députation
étoit compofée , pour le Clergé , de l'Evêque de
Viviers qui porta la parole ; du Vicomte de Polignac
, pour la Nobleffe , & de Meſſieurs Valet
Député de Saint- Pons , & Montcabrier , Député
OCTOBRE . 1756. 209
de Toulouſe , pour le Tiers-Etat ; ainfi que de
M. de Montferrier , Syndic Général de la Province.
Ces Députés eurent enſuite audience de la
Reine , de Monfeigneur le Dauphin , de Madame
la Dauphine , de Madame , & de Mefdames Victoire
, Sophie & Louife.
M. le Comte de Merle , Cornette de la premiere
Compagnie des Moufquetaires de la Garde,
eft défigné pour fuccéder à M. le Comte de Baſchi
en qualité d'Ambaffadeur du Roi auprès du Roi
de Portugal.
Sa Majefté a fait Brigadier de Cavalerie M. le
Comte de Perigord , Meftre de Camp- Lieutenant
du Régiment de Monfeigneur le Dauphin ;
Brigadier de Dragons , M. le Duc de Coigny ,
Meftre de Camp Général de ce Corps ; & Brigadier
d'Infanterie , M. le Chevalier de Gramont
Lieutenant-Colonel du Régiment de Vermandois.
Le Roi ayant réfolu de tenir fon Lit de Juftice,
Sa Majefté avant fon départ de Compiegne , ordonna
de faire dans le Château de Verfailles , les
préparatifs néceffaires pour cette cérémonie . La
grande Salle des Gardes fut choifie comme le lieu
qui y étoit le plus propre. M. Defgranges , Maître
des Cérémonies , après avoir reçu les ordres
du Roi , porta au Parlement le 20 Août au matin ,
une Lettre de Sa Majefté pour que le Parlement
fe rendît le lendemain à Verſailles en Corps de
Cour & en Robes rouges. Les Princes du Sang
furent avertis de la part du Roi par M. Defgranges
, qui envoya des Billets d'invitation aux Pairs ,
tant Eccléfiaftiques que Laïques ; aux Maréchaux
de France , aux Chevaliers des Ordres , aux Gouverneurs
& aux Lieutenans Généraux des Provinces.
Le 21 , le Parlement arriva fur les onze heures
à Versailles , & s'affembla dans les deux Salles
210 MERCURE DE FRANCE.
des Ambaffadeurs & du Confeil , d'où il fe rendit
à la Salle préparée pour le Lit de Juſtice . Lorfque
le Parlement eut pris fa féance en la maniere
accoutumée, il fit une Députation de quatre Préfidens
& de fix Confeillers , pour aller au - devant du
Roi. Sa Majesté en habit de cérémonie , fortit de
fon appartement , & la marche fe fit en cet ordre.
Les Tambours , Fifres , Haut- bois & Trompettes
de la Chambre. I es Lieutenans Généraux des Provinces
. Les Gouverneurs de Provinces. Les Chevaliers
des Ordres. Les Maréchaux de France . Les
Hérauts d'Armes . Les Princes du Sang . Le Maître
des Cérémonies . Deux Huiffiers de la Chambre
du Roi , portant leurs Maffes. M. le Prince de
Turenne , Grand Chambellan en furvivance de
M. le Duc de Bouillon ; & à la gauche du Prince
de Turenne le Comte de Brionne , Grand Ecuyer,
portant l'Epée de Parement du Roi . Le Marquis
de Mon mirel , Capitaine de la Compagnie des
Cent Suiffes de la Garde de Sa Majesté. Sur les
aîles près de la perfonne du Roi , les Préfidens &
Confellers Députés , & fix Gardes de la Manche
avec leurs Cortes d'armes & leurs Pertuifanes.
Derriere Sa Majefté , les quatre Capitaines des
Gardes du Corps . Le Chancelier de France fuivoit
le Roi , étant accompagné d'une partie des Confeillers
d'Etat & des Maîtres des Requêtes. Sa Majefté
fe plaça fur fon Trône. Elle avoit à la droite
Monfeigneur le Dauphin , dont le fiege (C ) étoit
placé fur le tapis de Sa Majefté . Aux hauts fieges
(D) du même côté , étoient le Duc d'Orléans , le
Prince de Condé , le Comte de Clermont , le
Prince de Conty & le Comte de la Marche
Princes du Sang. Sur le refte du banc , & fur un
banc en retour (G) , qui alloit juſqu'à la place du
dernier Prince du Sang ; les Ducs de Luynes , de
•
OCTOBRE . 1756 . 211
Briffac, de la Force , de Rohan , de Saint- Aignan ,
de Gefvres , le Maréchal Duc de Noailles , les
Ducs d'Aumont , de Bethune , de Fitzjames , d'Antin
, de Chaulnes , de Villars- Brancas de Lauraguais
, le Prince de Monaco , Duc de Valentinois
les Ducs de Biron , de la Valliere , & le Maréchal
de Belle -Ifle , Duc de Gifors , Pairs Laïcs . A la
gauche du Roy, aux bauis fieges ( H ) ; l'Evêque Duc
de Laon , l'Evêque Comte de Châlons , l'Evêque
Comte de Noyon , Pairs Eccléfiaftiques ; & les
Maréchaux de Coigny & de Balincourt , ( ces
deux Maréchaux de France étant venus avec le
Roi ) Aux pieds de Sa Majesté ( E ) ; le Prince de
Turenne , Grand Chambellan en furvivance du
Duc de Bouillon. A droite, fur un tabouret (F) , auprès
des degrés du Siege Royal , le Comte de Brionne
, Grand Ecuyer , portant au col l'Epée de Pa
rement du Roi. A gauche , fur un banc ( K ) au❤
deffous de celui des Pairs Ecclefiaftiques ; les qua
tre Capitaines des Gardes du Corps du Roi , & le
Marquis de Montmirel , Capitaine Colonel des
Cent Suiffes de la Garde. Plus bas étoit affis fur le
petit degré ( 2 ), par lequel on defcendoit dans le Parquet
, le fieur de Segur , Prevôt de Paris , tenant
un bâton blanc en fa main. Sur une chaise à bras
(L) couverte de l'extrêmité du tapis de velours violet
, femé de fleurs de lys d'or , fervant de drap de
pieds au Roi , Meflite Guillaume de Lamoignon ,
Chancelier de France , vêtu d'une robe de velours
violet , doublée de fatin cramoifi. Sur le banc (P)
répondant à celui où fiéent les Préfidens au Confeil
en la Chambre du Parlement ; Meffire René-
Charles de Maupeou , Premier Préfident ; MM .
Molé , Potier , le Peletier de Rozambo , de Maupeou
, de Lamoignon de Montrevault , d'Aligre ,
le Fevre- d'Ormeflon , & Bochart - de Saron , Sur
212 MERCURE DE FRANCE.
les trois bancs (QR ) couverts de tapisserie , formant
l'enceinte du Parquet ; les Confeillers d'Honneur,
les Préfidens des Enquêtes & des Requêtes , & les
Confeillers de la Grand'Chambre , mêlés . Dans le
Parquet , devant le Chancelier , étoient placés deux
tabourets , celui de la droite (M ) vacant par l'abfence
du Marquis de Dreux , Grand Maître des
Cérémonies , & celui de la gauche (N) occupé par
le fieur Defgranges , Maître des Cérémonies . Au
milieu du Parquet ( i ) & à genoux devant le Roi ,
deux Huiffiers de la Chambre de Sa Majesté ,
tenant leurs Maffes d'argent doré , & à quelque
diſtance ( k ) , fix Hérauts d'armes. Au côté droit ,
Sur les deux bancs ( SS ) couverts de tapis femés de
fleurs de lys ; les Confeillers d'Etat & Maîtres des
Requêtes , vêtus en robe de fatin noir , venus avec
le Chancelier. Sur une forme ( a ) à gauche , en entrant
, vis- à-vis des Préfidens ; le Comte de Saint
Florentin , le Comte d'Argenfon , M. Rouillé &
le Marquis de Paulmy , Secretaires d'Etat . Sur
trois autres bancs ( TVX ) à gauche dans le Parquet
, vis- a-vis des Confeillers d'Etat ; le Marquis
de Beringhen , le Comte de Lautrec , le Marquis
de Puyzieulx , le Comte de Vaulgrenant , le Marquis
de Saffenage , le Comte de Mailly , le Baron
de Montmorency , le Marquis de Chalmazel , le
Comte de la Vauguion , le Marquis d'Armentieres
, & le Marquis de l'Hopital , Chevaliers des
Ordres ; le Comte de Gifors , le Comte de Périgord
, le Marquis de la Tour-Dupin , & le Marquis
de la Salle , Gouverneurs de Provinces ; le
le Marquis de Montalambert , le Comte de Teffé ,
le Marquis de Beaupreau , le Comte de Valentinois
, le Comte de Choifeul , & le Marquis de
Brancas , Lieutenans Généraux de Provinces . A
côté de la forme où étoient les Sécretaires d'Etat ;
OCTOBRE. 1756. 213
le fieur Dufranc , Secretaire de la Cour , faifant
les fonctions de Greffier en Chef, & à côté de lui ,
un des trois principaux Commis pour la Grand'-
Chambre , tenant la plume ; ayant chacun devant
eux un bureau (66) couvert de velours violet . Sur
une autre forme (b) derriere ; le fieur Richard ,
Greffier en Chef Criminel , & les fieurs Yfabeau
& Héron-de Courgis , Secretaires de la Cour. Sur
une autreforme ( d ) , le Marquis de Sourches ,
Grand Prevôt de l'Hôtel . Sur un fiege (m) à l'entrée
du Parquet , le fieur Angely , premier Huiffier.
En la place (f) répondante à celle qu'ils occu
pent , toutes les Chambres aſſemblées , le fieur Joly
de Fleury, Avocat du Roi ; le fieur Joly de Fleury,
Procureur Général , & le fieur Seguier , auffi Avocat
du Roi. Sur le furplus des bancs ( gh , YZ) les
Confeillers des Enquêtes & Requêtes.
Le Roi s'étant affis & couvert , M. le Chancelier
dit , par ordre de Sa Majefté , qu'Elle commandoit
qu'on prêt féance : après quoi , le Roi ,
ayant ôté & remis fon chapeau , dit : « Meffieurs ,
» Je vous ai affemblés ici , pour vous faire fçavoir
» mes intentions & mes volontés ; mon Chance-
» lier va vous les expliquer » .
M. le Chancelier étant monté vers le Roi , &
s'étant agenouillé aux pieds de Sa Majesté pour
recevoir les ordres ; puis étant defcendu , remis
en fa place , affis & couvert , après avoir dit que
le Roi permettoit qu'on le couvrît , prononça le
Difcours fuivant .
MESSIEURS ,
« Pendant qu'une Nation , de tout temps enne-
» mie de la France , fait les derniers efforts pour
» enlever aux habitans de nos Colonies , des pof-
» feffions qui leur appartiennent par les titres les
plus légitimes ; qu'au milieu de la paix la plus
214 MERCURE DE FRANCE.
» profonde , elle ne craint point de violer les trai
tés les plus folemnels ; & que pour détruire no-
>> tre Commerce , elle emploie les voies les plus
» odieufes & les plus contraires à l'humanité , le
Roi ne peut voir qu'avec une extrême ſurpriſe
la réfiftance qu'apporte fon Parlement à la pu-
>> blication de trois de fes Déclarations , dont l'exé-
» cution doit procurer à Sa Majesté des fecours
» néceffaires pour le foutien de nos Colonies & le
> rétabliffement de notre Commerce.
>> On fçait que le Roi ne fait la guerre que
» pour l'intérêt de fes Sujets. Occupé du foin de
» les venger des hoftilités injuftes & continuelles
» qu'ils éprouvoient , il l'étoit encore plus de la
crainte d'être forcé de leur impofer des charges
» extraordinaires malheureuſement indifpenfables
» pour le foutien d'une guerre .
Après avoir oppofé longtemps la patience &
la modération aux entreprifes de fes ennemis , il
» s'eft enfin déterminé à repouffer par la voie des
>> armes leurs infultes multipliées ; & dans la né-
» ceffité d'établir des impôts , il a fait choix de
» ceux qui lui ont paru le moins onéreux . Tel eft
» le motif qui a donné lieu aux trois Déclarations
» que le Roi entend faire publier en fon Lit de
>> Juftice.
» Par la première , le Roi établit un nouveau
» Vingrieme pareil à celui qui fubfifte depuis l'an-
» née 1749 , & dont le produit eſt affecté au paie-
» ment des dettes de la derniere guerre. La per-
>> ception de ce nouveau Vingtieme ceffera trois
» mois après la publication de la Paix. Cette na-
»ture d'impofition fera moins à charge aux Peuples
que toute autre , parce qu'elle fe répartit
»fut tous les Sujets , chacun à proportion de fa
>> fortune..
OCTOBRE . 1756. 215
»
>> La feconde Déclaration ordonne la continua-
» tion pendant dix ans des Deux fols pour livre du
Dixieme , à commencer du dernier jour de l'an-
» née préfente. Le terme de cette impofition &
» de celui du premier Vingrieme , quo que fixé
>> d'une maniere certaine , n'eft pas auffi proche
» que Sa Majesté le defireroit ; mais il faut confi
>> dérer que P'un & l'autre étant deftinés à l'acquit
» des dettes de l'Etat , ils doivent fubfifter julqu'i
» ce que les dettes de l'Etat foient acquittées.
» C'eſt à tort & vainement qu'on cherche à
» jetter l'allarme dans les efprits , en faifant en-
>> tendre que l'incertitude de la durée & la lon-
»gueur de ces deux impofitions font capables dedis
>> minuer le courage des fujets du Roi , & d'altérer
» la confiance qui font la véritable force du Sou-
» verain & de l'Etat. Le témoignage que Sa Ma
» jeſté ſe rend à Elle-même de la tendre affection
» pour les peuples , lui eft un gage affuré de leur
» confiance , en même-temps que les preuves
» qu'il leur a tant de fois données de fon empref-
» fement à les foulager , ſoutiendront toujours &
>> animeront leur courage , furtout dans ce mo-
➤ment où leur honneur & leur fûreté ſont égale-
» ment intéreffés.
» Enfin , par la troifieme Déclaration , le Roi
» proroge pour un certain temps , plufieurs droits
» qui fe perçoivent dans la ville de Paris . Sa Ma-
» jefté n'a pu fe difpenfer d'ordonner cette proro-
» gation qui ne peut être regardée comme pré-
» maturée , parce qu'elle eft néceffaire pour affurer
les engagemens que les conjonctures ont
» forcé de contracter . Quelque onéreux que ces
» droits paroiffent être pour les habitans de la
» Capitale , ils en font en partie dédommagés par
l'ordre & la regle que ceux qui font chargés do
216 MERCURE DE FRANCE.
» les percevoir établiffent dans les marchés pour
faciliter le débit des denrées , & pour en pro-
фу
» curer Pabondance : on voit d'ailleurs par le tarif
» attaché à la Déclaration , l'attention qu'a eu le
» Roi de diminuer , & même de fupprimer entié-
>> rement plufieurs de ces droits fur les denrées les
» plus néceffaires à la vie.
» Le Roi veut donc , que nonobftant les repré-
» fentations réitérées de fon Parlement , fes Déclarations
foient exécutées dans toute leur éten-
» due & fans délai , afin de ne pas interrompre
ni retarder les opérations néceffaires pour
» profiter des fuccès que le Ciel vient d'accorder
» à fes armes.
» Ces heureux événemens dont le Roi n'eft
» flatté que parce qu'il les regarde comme le pré-
» fage d'une paix glorieufe , doivent redoubler
> notre zele. Pourrions-nous regretter des ſecours
» que Sa Majefté ne veut employer que pour
» notre défenfe , fans manquer à ce que nous lui
રે
» devons & à ce que nous nous devons à nous-
» mêmes ! »
Après que M. le Chancelier eut ceffé de parler,
M.le Premier Préfident & tous les Préfidens & Confeillers
mirent un genou en terre. Le Chancelier
leur dit , Le Roi ordonne que vous vous leviez. Ils
fe leverent , & demeurerent debout & découverts.
Alors M.le Premier Préfident parla, & fon Diſcours
fini , le Chancelier monta vers le Roi pour prendre
fes ordres , un genou en terre . Remis en fa
place , affis & découvert , il fit ouvrir les portes ,
& il ordonna au fieur Dufranc de lire les trois
Déclarations. Les portes furent ouvertes , & le
fieur Dufranc ayant lu les Déclarations debout &
découvert , le Chancelier dit aux Gens du Roi
qu'ils pouvoient parler. Aufli -tôt les Gens du Roi
fc
OCTOBRE. 1756. 217
fe mirent à genoux . M. le Chancelier leur dit que le
Roi ordonnoit qu'ils fe levaflent . Ils fe leverent ,'
& debout & découverts , après un Difcours prononcé
par M. Joly de Fleury , Avocat du Roi ,
portant la parole , ils requirent qu'il plût à Sa
Majefté ordonner que fur le repli des trois Déclarations
il fût mis qu'elles avoient été lues &
publiées , Sa Majeſté léante en fon lit de Juſtice ,
& régiítrées au Greffe de la Cour pour être exécu
tées felon leur forme & teneur ; & qu'à l'égard
des deux premieres , Copies collationnées en feroient
envoyées aux Bailliages & Sénéchauffées du
reffort , pour y être pareillement lues , publiées
& enrégiftrées , avec injonction à leurs Subftituts
d'y tenir la main , & d'en certifier la Cour dans le
mois.
Après quoi M. le Chancelier monta vers le Roi ,
mit un genou en terre pour recevoir les ordres ,
& alla prendre l'avis de Monfeigneur le Dauphin ,
des Princes du Sang , des Pairs Laïcs , du Grand
Ecuyer & du Grand Chambellan . Il paffa devant
le Roi , lui fit une profonde révérence , & prit
l'avis des Pairs Eccléfiaftiques , des Maréchaux de
France venus avec le Roi , & des quatre Capitaines
des Gardes du Corps de Sa Majesté . Puis il defcendit
dans le parquet pour prendre les avis du Premier
Préfident , des Préfidens du Parlement , des
Confeillers d'Etats & des Maî res des Requêtes
des Confeillers d'honneur , des Préfidens des Enquêtes
& des Requêtes , & des Confeillers du
Parlement. Il remonta vers le Roi , mit un genou
en terre , redefcendit , & étant affis & couvert , il
prononça :
« Le Roi , féant en fon Lit de Juſtice , a or-
»donné & ordonne que les Déclarations , qui
viennent d'être lues, feront enrégiftrées au Greffe
I. Vol. Κ
218 MERCURE DE FRANCE.
»>de fon Parlement , & que fur le repli d'icelles ;
nil foit mis que lecture en a été faite , & l'enré-
»giftrement ordonné ; ce requérant fon Procu-
»reur Général , pour être le contenu en icelles
>> exécuté felon leur forme & teneur ; & Copies
>>collationnées des deux Déclarations , l'une por-
>> tant établiſſement d'un fecond vingtieme , l'au-
»tre portant prorogation du droit de deux fols
>>pour livre du dizieme , envoyées aux Bailliages
& Sénéchauffées du reffort , pour y être pareik
plement lucs , publiées & régiftrées . Enjoint aux
>>Subftituts de fon Procureur Général d'y tenir la
»main , & d'en certifier la Cour au mois. >>
Enfuite M. le Chancelier dit , que pour la plus
prompte exécution de ce qui venoit d'être or
donné , le Roi vouloit que par le Secretaire de la
Cour , faifant les fonctions de Greffier en Chef
de fon Parlement , il fût mis dans l'inftant même
fur le repli des trois Déclarations qui avoient été
publiées , ce que Sa Majesté avoit ordonné qu'on
y mit. Ce qui ayant été exécuté , le Roi fe leva ,
& fortit dans le même ordre qu'il étoit entré.
Le 25 Août , le Corps de Ville alla à Versailles ,
& ayant à la tête M. le Duc de Gefvres , Gouverneur
de Paris , il eut audience du Roi. Il fut préfenté
à Sa Majesté par M. le Comte d'Argenlon ,
Miniftre & Secretaire d'Etat , & conduit par M.
Defgranges , Maître des Cérémonies . M. de Ber
nage qui a été continué Prevôt des Marchands , &
MM. Lempereur & Tribard , nouveaux Echevins ,
prêterent entre les mains du Roi le ferment de
fidélité , dont M. le Comte d'Argenſon fit la lecture
, ainfi que du fcrutin qui fut préfenté par M.
de la Live de la Briche , Avocat du Roi au Châtelet.
Après cette audience , le Corps de Ville cut
l'honneur de rendre les refpects à la Reine & àla
Famille Royale .
OCTOBRE . 1756. 219
On apprend par des Lettres de l'Ifle Royale
les circonftances fuivantes d'un combat de M.
Beauffier , qui commande l'Efcadre du Roi , partie
de Breft au mois d'Avril dernier , avec les troupes
que Sa Majesté a fait paffer en Canada. M. Beauf
fier revenant de Québec , faifoit route pour Louifbourg
, lorfque le 16 Juillet il apperçut à la diftance
d'environ trois lieues dans le Sud de ce
dernier Port , deux Vaiffeaux Anglois avec deux
Frégates , qui portoient au plus près du vent pour
le reconnoître. M. Beauffier avoit alors avec le
Vaiffeau le Héros qu'il monte , l'illuftre , commandé
par M. de Montalais , Capitaine de Vaiffeau
, & les Frégates la Lycorne & la Syrene , que
commandent MM. de la Rigaudiere & de Brougnon
, Lieutenans de Vaiffeaux. Profitant du vent
du Nord qui fouffloit , il arriva fur le champ
grand fargue fur les Anglois , qui revirerent
promptement de bord , & prirent chaffe. La
crainte de tomber trop fous le vent de Louisbourg,
où il avoit ordre de remettre des provifions deftinées
pour cette Colonie , l'empêcha de poursuivre
long-temps les Anglois , & il entra le même jour
dans ce Port. Il fe preffa d'y débarquer les effets
dont il étoit chargé , ainfi que quelques malades
de fes équipages ; & le lendemain dès cinq heures
du matin , il fe trouva fous voile , & appareilla
pour aller chercher les ennemis. Vers midi il
reconnut les deux Vaiffeaux qu'il avoit chaffés là
veille , & qui n'avoient plus qu'une Frégate avec
& eux. Il força de voiles pour les joindre , & ils firent
la même maneuvre pour l'éviter. M. de
Breugnon joignit bientôt la Frégate Angloife , &
l'attaqua fi vivement , qu'elle fe replia fous le
canon des deux Vaiffeaux , dont le feu ralentit la
pourfuite de M. de Breugnon , qui fut même
M
Kij
220 MERCURE DE FRANCE.
obligé de s'écarter un peu . Sa manoeuvre fervit
cependant à donner à M. Beauffier le temps d'ap
procher les deux Vaiffeaux Anglois , dont l'un
étoit de 74 & l'autre de 64 canons. Il tira d'abord
fur l'un , comptant que l'autre qui étoit fur fa
hanche alloit être attaqué par M. de Montalais.
Mais le calme qui furvint en ce moment , rendit
inutiles tous les efforts que celui - ci put faire
pour s'approcher ; enforte que M. Beauflier eut à
combattre les deux Vaiffeaux Anglois. Le combat
fut très-vif de part & d'autre jufqu'à fept heures
du foir , qu'un petit vent qui s'éleva , ayant donné
à M. de Montalais occafion de faire de la voile ,
les ennemis en profiterent pour s'éloigner. Le
Vaiffeau le Héros fe trouvant prefque défemparé ,
M. Beauffier fut hors d'état de les pourfuivre.
Il s'occupa durant la nuit à faire changer les
voiles & les manoeuvres qui avoient été coupées
dans le Vaiffeau , & il efpéroit de pouvoir rejoin.
dre les ennemis. Mais le lendemain 20 , à huit
heures du matin , il les apperçut , forçant toujours
de voiles , & à une telle dittance , que ne pou
vant pas fe flatter de les approcher , malgré le
mauvais état où ils paroiffoient être , il prit le
parti de retourner à Louifbourg , pour y réparer
entiérement le dommage que le Vaiffeau le Héros
avoit fouffert. Ce Vaiffeau a reçu dans le combat
plus de deux cens coups de canon , foit dans fes
oeuvres- mortes , foit dans fa mâture , fans compter
ceux qui ont porté au deffous de la flottaifon .
Il y a eu dix-huit hommes tués , quarante buit de
bleffés du nombre des derniers font M. de Faget
, Enfeigne de Vaiffeau , qui a une bleffure
confidérable d'un coup de canon à la cuiffe , &
M. Beauffier lui - même , d'un éclat qui a porré
fur la jambe gauche. Cet Officier eſt arrivé au
OCTOBRE. 1756. 211
les
Port Louis le 9 Septembre , avec les Vaiffeaux le
Héros qu'il commande , PIlluftre & la Frégate
la Sirenne. Il étoit parti de Louifbourg le 13
Août , & il avoit alors avec lui la Frégate la Licorne
, commandée par M. Froger de la Rigaudiere
, laquelle s'étant féparée le jour du départ
dans une brume , eft arrivée à Breft quelques jours
avant ces autres Bâtimens. Pendant leur traverfée
, M. Beauflier a fait huit différentes prifes ,
dont trois font chargées de fucre & d'autres denrées
des Iles de l'Amérique. Il a amené avec lui
quatre cens prifonniers , dans le nombre defquels.
font deux Officiers & cent foixante - un foldats
Allemands , qui étoient deftinés pour le Régiment
Royal Américain.
Les Lettres qu'on a reçues par cette occafion ,
portent que, fuivant les rapports faits par les Capitaines
de deux Goëlettes arrivées depuis peu de
Quebec à Louisbourg , M. de Villiers , Capitaine
dans les troupes du Canada , Commandant
un Détachement compofé de Soldats , Canadiens
& Sauvages , avoit attaqué fur la riviere de
Choueguen un convoi confidérable de Bateaux
Anglois , dont il avoit tué 4 à 500 hommes , fait
60 ou 80 prifonniers , & pris tous les Bateaux ,
que les Anglois avoient abandonnés pour ſe ſauver
à terre.
M. l'Evêque d'Autun fut élût le 19 Août , pour
premplir la place qui vaquoit dans l'Académie
Françoife par la mort du Cardinal de Soubize.
La joie que le fuccès de nos armes a repandu
Fa dans tous les coeurs a été d'autant plus vive , que·
Le l'Europe entiere ne croyoit pas notre marine en
& état de former des entreprifes auffi confidérables .
La Cour a témoigné ſa ſatisfaction à l'occaſion de
ala prife du Fort Saint- Philippe , par les illumina-
K iij
222 MERCURE DE FRANCE.
tions les plus galantes . M. le Duc de Gefvres tou
jours magnifique , après s'être uni au public par
Pillumination de fon Hôtel le jour du Te Deum
chanté à la Chapelle du Roi , & le vingt- cinq
Juillet , jour du feu de joie de la ville de Compiegne
qu'il avoit ordonné comme Gouverneur de
la Province , & après avoir fait couler à la porte
de fon Hôtel des fontaines de vin , s'eft diftingué
le 6 Août par une Fête particuliere , où la magnificence
a répondu au bon goût fi reconnu de ce
Seigneur. Il fit fuccéder à un fouper fomptueux
un Feu d'artifice Italien en plufieurs décorations.
La façade & l'intérieur de fon Hôtel & des Jardins
furent fuperbement illuminés fous divers formes
d'architecture . La Fête fut terminée par un bal
où se trouverent les Princes , les Miniftres , les
Etrangers de diftinction , & toutes les Dames de
la Cour .
Le Roi chaffa le 31 Août dans la Plaine de Grenelle
, & foupa à Mont - Rouge chez M. le Duc de
la Valliere.
Meffieurs de Reillans & de Teffieres , Exempts
des Gardes du Corps dans la Compagnie de Mirepoix
, ayant obtenu leur retraite , le Roi a difpofé
de leurs emplois en faveur de M. le Chevalier de
Flahaut & de M. le Marquis de Vexin. Sa Majefté a
nommé MM . de la Villeneuve & de la Seunniere ,
Brigadiers de la même Compagnie , à la place de
MM. de la Ripiere & de Chateauroy , qui ont
auffi obtenu leur retraite . MM . de Beaupine & de
´la Boire ont été faits fous - Brigadiers. Des Commiffions
de Capitaines de Cavalerie ont été expédiées
à plufieurs Gardes du Corps .
On a arrêté deux Anglois , accufés d'être les
incendiaires , qui ont mis le feu , il y a quelque
temps , à un magaſin de Rochefort.
OCTOBRE. 1756. 223
Des Armateurs de Marſeille y ont conduit fiz
prifes eftimées fix cens mille livres.
Un petit Bâtiment à rames de huit canons ,
forti du même Port , & commandé par le Capitaine
Gaffen , s'eft battu pendant trois heures à
la vue du Port de Livourne , contre un Corfaire
Anglois de vingt canons. On eft informé par
des Lettres de ce dernier Port , que le Corfaire a
eu dix-neuf hommes de tués , & un grand nombre
de bleffés . De fon propre aveu , il étoit prêt à fe
rendre , lorfque l'équipage du Capitaine Gaffen ,
aqui étoit mêlé d'étrangers , refufa de fe préſenter
une quatrieme fois à l'abordage. Ce Capitaine n'a
perdu qu'un homme. Depuis que le Corfaire Anglois
eft retourné à Livourne , où le mauvais état
de fon Vaiffeau l'a obligé de relâcher , on y travaille
à lui faire fon procès , fur ce qu'il a défobéï
à une Ordonnance de l'Empereur , en fortant de
-ce Port avec plus de quatre canons.
M. le Maréchal Duc de Richelieu arriva le premier
de Septembre à Paris , & le même jour il eut
P'honneur de faluer le Roi à Choify . Le , M. le
-Duc de Fronsac eut à Verſailles le même honneur.
Le Roi a nommé M. l'Abbé Comte de Bernis ,
fon Ambaffadeur à la Cour de Vienne ; & M. le
Marquis d'Aubeterre eft défigné pour réfider
avec le même caractere à la Cour de Madrid.
habitans de Chantilly ont fignalé leur zele & leur
attachement pour le Prince de Condé , en donnant
une très- belle fête à l'occafion de la naiffance du
Duc de Bourbon , & de la convalefcence de Mile
de Bourbon. La fête a commencé par un Te
Deum folemnel , chanté dans l'Eglife de la Paroiffe
, au bruit de trente- fix pieces de canon . A
I vj
204 MERCURE DE FRANCE.
neuf heures du foir , on tira vis-à-vis de la façade
du petit Château , où étoient le Prince & la
Princeffe de Condé , un feu d'artifice dont le deſfein
& l'exécution furent également applaudis.
Dès que le Prince eut donné le fignal , on vit pároître
trois Bateaux fur la piece d'eau , qui eft visà-
vis du petit Château . Ils venoient de trois côtés
différens , & ils fe réunirent pour attaquer un
Fort qu'on avoit conftruit fur le bord de l'eau.
Pendant près de trois quarts d'heure , il firent
pleuvoir une infinité de fufées & de bombes fur
cette efpece de Citadelle. Dans le temps qu'on
croyoit le Fort réduit en cendres , il foudroya
d'artifice les trois Bateaux ; & toute la piece
d'eau devint un étang de feu. A cette attaque fuccéderent
plufieurs caſcades , gerbes , foleils , &c.
Un bruit de trompettes & de cors de chaffe annonça
la victoire remportée par les affiégés . Le
ficur Coufinet , Sculpteur du Frince de Condé
a donné l'idée du fiege , & a conduit le feu des
Bateaux. Le refte du feu a été dirigé par les fieurs
Caftain & Maurice , Artificiers du Roi . Lorſque
l'artifice a ceffé , neuf grands Portiques , ornés
de verdure , qu'on avoit placés en perſpective du
petit Château , furent illuminés. Celui du milieu ,
plus élevé que les autres , étoit furmonté par le
Chiffre couronné du Prince & de la Princeffe de
Condé. Au pied de ces Portiques , une Salle de
verdure , de cent trente pieds en quarré , contenoit
une table de foixante couverts , préparée
pour les époufes des principaux habitans . Sur la
fin du fouper , le Prince & la Princeffe de Condé
fe rendirent dans cette Salle . Ils y furent reçus au
fon des trompettes , cors de chaffe , violons &
autres inftrumens. Le Bal fuivit le fouper. Leurs
Akteffes Séréniffimes danferent indifféremment
OCTOBRE. 1756. 205
avec ceux qui fe préfenterent. Vers les deux
heures du matin , le Prince & la Princeffe retournerent
au Château précédés d'un grand nombre
d'inftrumens , & de douze habitans , qui portoient
chacun un falot devant Leurs Alteffes Séréniffimes.
M. le Maréchal Duc de Richelieu s'eft démis
de fa charge de premier Gentilhomme de la Chambre
en faveur de M. le Duc de Fronfac , fon fils ,
& a obtenu la furvivance de cette Charge.
Le Roi a accordé à M. de Fremeur , Lieutenant
- Général des Armées de Sa Majefté , le Ġouvernement
de Monmédy , vacant par la mort du
Comte de la Claviere , auffi Lieutenant- Général.
M. le Marquis de Talaru , Brigadier d'Infante
rie , & Colonel du Régiment de fon nom , a été
nommé Gouverneur des Villes & Châteaux de
Phaltzbourg & de Saltzbourg , fur la démiffion
de M. le Marquis de Chalmazel fon pere.
Le 9 Août , le Roi fit la cérémonie de recevoir
Chevaliers de l'Ordre de Saint Louis , M. le Comte
d'Egmont , Maréchal de Camp , & M. le Comte
de Balbi , Brigadier , Colonel réformé à la fuite du
Régiment Royal Italien.
Selon les lettres de Franche-Comté, on a effuyé
vers la fin du mois de Juillet , tant à Saint- Claude
que dans les environs , une orage des plus terribles.
Le bruit & les éclats du tonnerre étoient
fi violens , qu'ils faifoient trembler les perſonnes
les plus hardies. Les animaux dans la campagne
cherchoient en mugiffant , quelque retraite affurée.
A chaque éclat , la foudre tomboit en différentes
manieres & dans plufieurs endroits. Les
eaux deſcendoient de la montagne avec tant d'abondance
& de rapidité , qu'elles entraînoîent
rout ce qu'elles rencontroient dans leur paffage.
206 MERCURE DE FRANCE.
Vergers , Maifons , Moulins , Ecluses , rien n'a
refifté . Le 6 Août , la Ville de Saint - Claude
& les campagnes voifines ont prouvé un nouveau
fléau. Un ouragan épouvantable a ruiné dans les
campagnes tout ce que l'orage précédent avoit
épargné. Dans la Ville , la plupart des toits ont
été enlevés , & prefque toutes les cheminées abattues.
Le Clocher des Religieufes de l'Annonciade
a été renversé . Trente des plus gros arbres de la
promenade publique ont été déracinés , & tous
les autres ont été dépouillés de leurs feuilles .
Monfeigneur le Dauphin fit le 11 Août , la
revue de fon Régiment de Cavalerie , dans la
Plaine de Favieres , à cinq lieues de Compiegne.
M. le Comte de Perigord , Meftre de Camp , Lieutenant
de ce Régiment , le fit efcadronner & manoeuvrer.
M. le Marquis de Paulmy , Secretaire
d'Etat au Département de la Guerre en furvivance
du Comte d'Argenfon , accompagna Monfeigneur
le Dauphin.
Le 13 , Sa Majefté fit la revue du Régiment
Royal , Cavalerie , dans la Plaine dite du Moulin
, près de la même Ville. M. le Marquis d'Equevilly,
Meftre de Camp , Lieutenant de ce Régiment
, lui fit faire différentes évolutions . Enfuite
ce Régiment fe porta au lieu nommé le puits
de Berne , où il fit , devant le Roi , l'exercice à
pied , en bufle & en bonnet. Le fils de M. le Marquis
d'Ecquevilly , âgé de dix ans , paſſa au rang
des Cavaliers. Il fit , comme eux , le maniement
des armes & les évolutions à cheval , ainfi
que
l'exercice à pied. Sa Majefté parut très - fatisfaite .
Par une Ordonnance du 15 Fevrier 1749 , le
Roi avoit établi un Aide- Major dans chacune des
quatre Brigades du Régiment des Grenadiers de
France. Sa Majefté ayant reconnu qu'un feul
OCTOBRE. 1756. 207
Officier Major par Brigade ne pouvoit fuffire aux
différens détails de la difcipline & du fervice , a
réglé que l'Etat Major de chaque Brigade feroit à
Pavenir compofé d'un Sergent Major & d'un Aide-
Major. Les emplois de Sergens Majors feront
remplis par les Aides- Majors actuels , pour en
jouir aux honneurs & prérogatives attachés aux
autres Majors de l'Infanterie . Entend Sa Majeſté ,
que M. de Lanjamet , actuellement Major dudit
Régiment , & qui ne peut en conferver le titre
ni les fonctions au moyen de la nouvelle difpofition,
ait le commandement en fecond du Corps.
Le Roi a ordonné que les Régimens d'Infanterie
Irlandoife , de Bulkeley , de Clare , de Dillon
, de Roth , de Berwick & de Lally , fuffent
portés de quatre cens foixante - cinq hommes à
cinq cens vingt - cinq.
Le 15 Août , Fête de l'Affomption de la
Sainte Vierge , la Proceffion folemnelle , qui fe
fait tous les ans à pareil jour en exécution du Voeu
de Louis XIII , ſe fit avec les cérémonies accoutu
mées. L'Abbé de Saint -Exupery , Doyen du Chapitre
de l'Eglife Métropolitaine , y officia. Le
Parlement , la Chambre des Comptes , la Cour
des Aydes , & le Corps de Ville , y affifterent.
Dans l'affemblée générale que le Corps de Ville
tint le 16 , M. de Bernage fut continué Prevôt
des Marchands. M. Lempereur , Quartinier , &
-M Tribard , Avocat , ont été élus Echevins.
Sa Majesté a accordé à M. de Martigny & à M.
le Chevalier de Mazieres , Maréchaux des Logis de
la premier Compagnie des Moufquetaires , deux
Commiffions de Meftres de Camp , & à MM. de
Pille , de Savigny & de la Foreft , les places de
Maréchaux des Logis , vacantes dans la même
Compagnie. Elle a difpofé des Brigades qu'avoient
208 MERCURE DE FRANCE.
ces trois derniers Officiers , en faveur de MM.
d'Ormençey , de Rouville & de Mondollot. MM .
d'Elevemont , de Caffaignere & Démazet , ont
été fait Sous-Brigadiers. Le Chevalier de Monneron
, & MM. de Beaumont & de Guiry ont -
obtenu la Croix de Saint Louis. Il y a eu plufieurs
penfions , gratifications , & Commiffions de Capitaines
données à divers Moufquetaires.
Le Corfaire commandé par le Capitaine Gaftin
, de Marſeille , a fait dans l'intervalle de
quinze jours deux prifes eftimées cinquante mille
écus. Un des Corfaires de M. Roux , de Corfe , en
a fait auffi une .
L'Académie Royale des Sciences, dans fon Affemblée
du 23 Juin , propofa au Roi pour remplir la
place d'Adjoint- Géometre, vacante par la promotion
de M. de Parcieux au grade d'Affocié , M. le
Chevalier de Borda , Chevau- leger de la Garde
du Roi , & M. Bezout , Cenſeur Royal & Maître
de Mathématiques. M. le Comte d'Argenfon
a écrit le 30 à l'Académie que le Roi avoit choiſi
M. de Borda.
Dans la même Affemblée du 23 , M. Necker ,
Citoyen de Geneve , fut élu Correſpondant de
l'Académie .
Le 23 Août , les Députés des Etats de Languedoc
eurent audience du Roi. Ils furent préſentés
à Sa Majesté par M. le Comte d'Eu , Gouverneur
de la Province , & par M. le Comte de Saint Florentin
, Miniftre & Sécretaire d'Etat ; & conduits
par M. de Gifeux , Maître des Cérémonies , en
furvivance de M. Defgranges. La Députation
étoit compofée , pour le Clergé , de l'Evêque de
Viviers qui porta la parole ; du Vicomte de Polignac
, pour la Nobleffe , & de Meſſieurs Valet
Député de Saint- Pons , & Montcabrier , Député
OCTOBRE . 1756. 209
de Toulouſe , pour le Tiers-Etat ; ainfi que de
M. de Montferrier , Syndic Général de la Province.
Ces Députés eurent enſuite audience de la
Reine , de Monfeigneur le Dauphin , de Madame
la Dauphine , de Madame , & de Mefdames Victoire
, Sophie & Louife.
M. le Comte de Merle , Cornette de la premiere
Compagnie des Moufquetaires de la Garde,
eft défigné pour fuccéder à M. le Comte de Baſchi
en qualité d'Ambaffadeur du Roi auprès du Roi
de Portugal.
Sa Majefté a fait Brigadier de Cavalerie M. le
Comte de Perigord , Meftre de Camp- Lieutenant
du Régiment de Monfeigneur le Dauphin ;
Brigadier de Dragons , M. le Duc de Coigny ,
Meftre de Camp Général de ce Corps ; & Brigadier
d'Infanterie , M. le Chevalier de Gramont
Lieutenant-Colonel du Régiment de Vermandois.
Le Roi ayant réfolu de tenir fon Lit de Juftice,
Sa Majefté avant fon départ de Compiegne , ordonna
de faire dans le Château de Verfailles , les
préparatifs néceffaires pour cette cérémonie . La
grande Salle des Gardes fut choifie comme le lieu
qui y étoit le plus propre. M. Defgranges , Maître
des Cérémonies , après avoir reçu les ordres
du Roi , porta au Parlement le 20 Août au matin ,
une Lettre de Sa Majefté pour que le Parlement
fe rendît le lendemain à Verſailles en Corps de
Cour & en Robes rouges. Les Princes du Sang
furent avertis de la part du Roi par M. Defgranges
, qui envoya des Billets d'invitation aux Pairs ,
tant Eccléfiaftiques que Laïques ; aux Maréchaux
de France , aux Chevaliers des Ordres , aux Gouverneurs
& aux Lieutenans Généraux des Provinces.
Le 21 , le Parlement arriva fur les onze heures
à Versailles , & s'affembla dans les deux Salles
210 MERCURE DE FRANCE.
des Ambaffadeurs & du Confeil , d'où il fe rendit
à la Salle préparée pour le Lit de Juſtice . Lorfque
le Parlement eut pris fa féance en la maniere
accoutumée, il fit une Députation de quatre Préfidens
& de fix Confeillers , pour aller au - devant du
Roi. Sa Majesté en habit de cérémonie , fortit de
fon appartement , & la marche fe fit en cet ordre.
Les Tambours , Fifres , Haut- bois & Trompettes
de la Chambre. I es Lieutenans Généraux des Provinces
. Les Gouverneurs de Provinces. Les Chevaliers
des Ordres. Les Maréchaux de France . Les
Hérauts d'Armes . Les Princes du Sang . Le Maître
des Cérémonies . Deux Huiffiers de la Chambre
du Roi , portant leurs Maffes. M. le Prince de
Turenne , Grand Chambellan en furvivance de
M. le Duc de Bouillon ; & à la gauche du Prince
de Turenne le Comte de Brionne , Grand Ecuyer,
portant l'Epée de Parement du Roi . Le Marquis
de Mon mirel , Capitaine de la Compagnie des
Cent Suiffes de la Garde de Sa Majesté. Sur les
aîles près de la perfonne du Roi , les Préfidens &
Confellers Députés , & fix Gardes de la Manche
avec leurs Cortes d'armes & leurs Pertuifanes.
Derriere Sa Majefté , les quatre Capitaines des
Gardes du Corps . Le Chancelier de France fuivoit
le Roi , étant accompagné d'une partie des Confeillers
d'Etat & des Maîtres des Requêtes. Sa Majefté
fe plaça fur fon Trône. Elle avoit à la droite
Monfeigneur le Dauphin , dont le fiege (C ) étoit
placé fur le tapis de Sa Majefté . Aux hauts fieges
(D) du même côté , étoient le Duc d'Orléans , le
Prince de Condé , le Comte de Clermont , le
Prince de Conty & le Comte de la Marche
Princes du Sang. Sur le refte du banc , & fur un
banc en retour (G) , qui alloit juſqu'à la place du
dernier Prince du Sang ; les Ducs de Luynes , de
•
OCTOBRE . 1756 . 211
Briffac, de la Force , de Rohan , de Saint- Aignan ,
de Gefvres , le Maréchal Duc de Noailles , les
Ducs d'Aumont , de Bethune , de Fitzjames , d'Antin
, de Chaulnes , de Villars- Brancas de Lauraguais
, le Prince de Monaco , Duc de Valentinois
les Ducs de Biron , de la Valliere , & le Maréchal
de Belle -Ifle , Duc de Gifors , Pairs Laïcs . A la
gauche du Roy, aux bauis fieges ( H ) ; l'Evêque Duc
de Laon , l'Evêque Comte de Châlons , l'Evêque
Comte de Noyon , Pairs Eccléfiaftiques ; & les
Maréchaux de Coigny & de Balincourt , ( ces
deux Maréchaux de France étant venus avec le
Roi ) Aux pieds de Sa Majesté ( E ) ; le Prince de
Turenne , Grand Chambellan en furvivance du
Duc de Bouillon. A droite, fur un tabouret (F) , auprès
des degrés du Siege Royal , le Comte de Brionne
, Grand Ecuyer , portant au col l'Epée de Pa
rement du Roi. A gauche , fur un banc ( K ) au❤
deffous de celui des Pairs Ecclefiaftiques ; les qua
tre Capitaines des Gardes du Corps du Roi , & le
Marquis de Montmirel , Capitaine Colonel des
Cent Suiffes de la Garde. Plus bas étoit affis fur le
petit degré ( 2 ), par lequel on defcendoit dans le Parquet
, le fieur de Segur , Prevôt de Paris , tenant
un bâton blanc en fa main. Sur une chaise à bras
(L) couverte de l'extrêmité du tapis de velours violet
, femé de fleurs de lys d'or , fervant de drap de
pieds au Roi , Meflite Guillaume de Lamoignon ,
Chancelier de France , vêtu d'une robe de velours
violet , doublée de fatin cramoifi. Sur le banc (P)
répondant à celui où fiéent les Préfidens au Confeil
en la Chambre du Parlement ; Meffire René-
Charles de Maupeou , Premier Préfident ; MM .
Molé , Potier , le Peletier de Rozambo , de Maupeou
, de Lamoignon de Montrevault , d'Aligre ,
le Fevre- d'Ormeflon , & Bochart - de Saron , Sur
212 MERCURE DE FRANCE.
les trois bancs (QR ) couverts de tapisserie , formant
l'enceinte du Parquet ; les Confeillers d'Honneur,
les Préfidens des Enquêtes & des Requêtes , & les
Confeillers de la Grand'Chambre , mêlés . Dans le
Parquet , devant le Chancelier , étoient placés deux
tabourets , celui de la droite (M ) vacant par l'abfence
du Marquis de Dreux , Grand Maître des
Cérémonies , & celui de la gauche (N) occupé par
le fieur Defgranges , Maître des Cérémonies . Au
milieu du Parquet ( i ) & à genoux devant le Roi ,
deux Huiffiers de la Chambre de Sa Majesté ,
tenant leurs Maffes d'argent doré , & à quelque
diſtance ( k ) , fix Hérauts d'armes. Au côté droit ,
Sur les deux bancs ( SS ) couverts de tapis femés de
fleurs de lys ; les Confeillers d'Etat & Maîtres des
Requêtes , vêtus en robe de fatin noir , venus avec
le Chancelier. Sur une forme ( a ) à gauche , en entrant
, vis- à-vis des Préfidens ; le Comte de Saint
Florentin , le Comte d'Argenfon , M. Rouillé &
le Marquis de Paulmy , Secretaires d'Etat . Sur
trois autres bancs ( TVX ) à gauche dans le Parquet
, vis- a-vis des Confeillers d'Etat ; le Marquis
de Beringhen , le Comte de Lautrec , le Marquis
de Puyzieulx , le Comte de Vaulgrenant , le Marquis
de Saffenage , le Comte de Mailly , le Baron
de Montmorency , le Marquis de Chalmazel , le
Comte de la Vauguion , le Marquis d'Armentieres
, & le Marquis de l'Hopital , Chevaliers des
Ordres ; le Comte de Gifors , le Comte de Périgord
, le Marquis de la Tour-Dupin , & le Marquis
de la Salle , Gouverneurs de Provinces ; le
le Marquis de Montalambert , le Comte de Teffé ,
le Marquis de Beaupreau , le Comte de Valentinois
, le Comte de Choifeul , & le Marquis de
Brancas , Lieutenans Généraux de Provinces . A
côté de la forme où étoient les Sécretaires d'Etat ;
OCTOBRE. 1756. 213
le fieur Dufranc , Secretaire de la Cour , faifant
les fonctions de Greffier en Chef, & à côté de lui ,
un des trois principaux Commis pour la Grand'-
Chambre , tenant la plume ; ayant chacun devant
eux un bureau (66) couvert de velours violet . Sur
une autre forme (b) derriere ; le fieur Richard ,
Greffier en Chef Criminel , & les fieurs Yfabeau
& Héron-de Courgis , Secretaires de la Cour. Sur
une autreforme ( d ) , le Marquis de Sourches ,
Grand Prevôt de l'Hôtel . Sur un fiege (m) à l'entrée
du Parquet , le fieur Angely , premier Huiffier.
En la place (f) répondante à celle qu'ils occu
pent , toutes les Chambres aſſemblées , le fieur Joly
de Fleury, Avocat du Roi ; le fieur Joly de Fleury,
Procureur Général , & le fieur Seguier , auffi Avocat
du Roi. Sur le furplus des bancs ( gh , YZ) les
Confeillers des Enquêtes & Requêtes.
Le Roi s'étant affis & couvert , M. le Chancelier
dit , par ordre de Sa Majefté , qu'Elle commandoit
qu'on prêt féance : après quoi , le Roi ,
ayant ôté & remis fon chapeau , dit : « Meffieurs ,
» Je vous ai affemblés ici , pour vous faire fçavoir
» mes intentions & mes volontés ; mon Chance-
» lier va vous les expliquer » .
M. le Chancelier étant monté vers le Roi , &
s'étant agenouillé aux pieds de Sa Majesté pour
recevoir les ordres ; puis étant defcendu , remis
en fa place , affis & couvert , après avoir dit que
le Roi permettoit qu'on le couvrît , prononça le
Difcours fuivant .
MESSIEURS ,
« Pendant qu'une Nation , de tout temps enne-
» mie de la France , fait les derniers efforts pour
» enlever aux habitans de nos Colonies , des pof-
» feffions qui leur appartiennent par les titres les
plus légitimes ; qu'au milieu de la paix la plus
214 MERCURE DE FRANCE.
» profonde , elle ne craint point de violer les trai
tés les plus folemnels ; & que pour détruire no-
>> tre Commerce , elle emploie les voies les plus
» odieufes & les plus contraires à l'humanité , le
Roi ne peut voir qu'avec une extrême ſurpriſe
la réfiftance qu'apporte fon Parlement à la pu-
>> blication de trois de fes Déclarations , dont l'exé-
» cution doit procurer à Sa Majesté des fecours
» néceffaires pour le foutien de nos Colonies & le
> rétabliffement de notre Commerce.
>> On fçait que le Roi ne fait la guerre que
» pour l'intérêt de fes Sujets. Occupé du foin de
» les venger des hoftilités injuftes & continuelles
» qu'ils éprouvoient , il l'étoit encore plus de la
crainte d'être forcé de leur impofer des charges
» extraordinaires malheureuſement indifpenfables
» pour le foutien d'une guerre .
Après avoir oppofé longtemps la patience &
la modération aux entreprifes de fes ennemis , il
» s'eft enfin déterminé à repouffer par la voie des
>> armes leurs infultes multipliées ; & dans la né-
» ceffité d'établir des impôts , il a fait choix de
» ceux qui lui ont paru le moins onéreux . Tel eft
» le motif qui a donné lieu aux trois Déclarations
» que le Roi entend faire publier en fon Lit de
>> Juftice.
» Par la première , le Roi établit un nouveau
» Vingrieme pareil à celui qui fubfifte depuis l'an-
» née 1749 , & dont le produit eſt affecté au paie-
» ment des dettes de la derniere guerre. La per-
>> ception de ce nouveau Vingtieme ceffera trois
» mois après la publication de la Paix. Cette na-
»ture d'impofition fera moins à charge aux Peuples
que toute autre , parce qu'elle fe répartit
»fut tous les Sujets , chacun à proportion de fa
>> fortune..
OCTOBRE . 1756. 215
»
>> La feconde Déclaration ordonne la continua-
» tion pendant dix ans des Deux fols pour livre du
Dixieme , à commencer du dernier jour de l'an-
» née préfente. Le terme de cette impofition &
» de celui du premier Vingrieme , quo que fixé
>> d'une maniere certaine , n'eft pas auffi proche
» que Sa Majesté le defireroit ; mais il faut confi
>> dérer que P'un & l'autre étant deftinés à l'acquit
» des dettes de l'Etat , ils doivent fubfifter julqu'i
» ce que les dettes de l'Etat foient acquittées.
» C'eſt à tort & vainement qu'on cherche à
» jetter l'allarme dans les efprits , en faifant en-
>> tendre que l'incertitude de la durée & la lon-
»gueur de ces deux impofitions font capables dedis
>> minuer le courage des fujets du Roi , & d'altérer
» la confiance qui font la véritable force du Sou-
» verain & de l'Etat. Le témoignage que Sa Ma
» jeſté ſe rend à Elle-même de la tendre affection
» pour les peuples , lui eft un gage affuré de leur
» confiance , en même-temps que les preuves
» qu'il leur a tant de fois données de fon empref-
» fement à les foulager , ſoutiendront toujours &
>> animeront leur courage , furtout dans ce mo-
➤ment où leur honneur & leur fûreté ſont égale-
» ment intéreffés.
» Enfin , par la troifieme Déclaration , le Roi
» proroge pour un certain temps , plufieurs droits
» qui fe perçoivent dans la ville de Paris . Sa Ma-
» jefté n'a pu fe difpenfer d'ordonner cette proro-
» gation qui ne peut être regardée comme pré-
» maturée , parce qu'elle eft néceffaire pour affurer
les engagemens que les conjonctures ont
» forcé de contracter . Quelque onéreux que ces
» droits paroiffent être pour les habitans de la
» Capitale , ils en font en partie dédommagés par
l'ordre & la regle que ceux qui font chargés do
216 MERCURE DE FRANCE.
» les percevoir établiffent dans les marchés pour
faciliter le débit des denrées , & pour en pro-
фу
» curer Pabondance : on voit d'ailleurs par le tarif
» attaché à la Déclaration , l'attention qu'a eu le
» Roi de diminuer , & même de fupprimer entié-
>> rement plufieurs de ces droits fur les denrées les
» plus néceffaires à la vie.
» Le Roi veut donc , que nonobftant les repré-
» fentations réitérées de fon Parlement , fes Déclarations
foient exécutées dans toute leur éten-
» due & fans délai , afin de ne pas interrompre
ni retarder les opérations néceffaires pour
» profiter des fuccès que le Ciel vient d'accorder
» à fes armes.
» Ces heureux événemens dont le Roi n'eft
» flatté que parce qu'il les regarde comme le pré-
» fage d'une paix glorieufe , doivent redoubler
> notre zele. Pourrions-nous regretter des ſecours
» que Sa Majefté ne veut employer que pour
» notre défenfe , fans manquer à ce que nous lui
રે
» devons & à ce que nous nous devons à nous-
» mêmes ! »
Après que M. le Chancelier eut ceffé de parler,
M.le Premier Préfident & tous les Préfidens & Confeillers
mirent un genou en terre. Le Chancelier
leur dit , Le Roi ordonne que vous vous leviez. Ils
fe leverent , & demeurerent debout & découverts.
Alors M.le Premier Préfident parla, & fon Diſcours
fini , le Chancelier monta vers le Roi pour prendre
fes ordres , un genou en terre . Remis en fa
place , affis & découvert , il fit ouvrir les portes ,
& il ordonna au fieur Dufranc de lire les trois
Déclarations. Les portes furent ouvertes , & le
fieur Dufranc ayant lu les Déclarations debout &
découvert , le Chancelier dit aux Gens du Roi
qu'ils pouvoient parler. Aufli -tôt les Gens du Roi
fc
OCTOBRE. 1756. 217
fe mirent à genoux . M. le Chancelier leur dit que le
Roi ordonnoit qu'ils fe levaflent . Ils fe leverent ,'
& debout & découverts , après un Difcours prononcé
par M. Joly de Fleury , Avocat du Roi ,
portant la parole , ils requirent qu'il plût à Sa
Majefté ordonner que fur le repli des trois Déclarations
il fût mis qu'elles avoient été lues &
publiées , Sa Majeſté léante en fon lit de Juſtice ,
& régiítrées au Greffe de la Cour pour être exécu
tées felon leur forme & teneur ; & qu'à l'égard
des deux premieres , Copies collationnées en feroient
envoyées aux Bailliages & Sénéchauffées du
reffort , pour y être pareillement lues , publiées
& enrégiftrées , avec injonction à leurs Subftituts
d'y tenir la main , & d'en certifier la Cour dans le
mois.
Après quoi M. le Chancelier monta vers le Roi ,
mit un genou en terre pour recevoir les ordres ,
& alla prendre l'avis de Monfeigneur le Dauphin ,
des Princes du Sang , des Pairs Laïcs , du Grand
Ecuyer & du Grand Chambellan . Il paffa devant
le Roi , lui fit une profonde révérence , & prit
l'avis des Pairs Eccléfiaftiques , des Maréchaux de
France venus avec le Roi , & des quatre Capitaines
des Gardes du Corps de Sa Majesté . Puis il defcendit
dans le parquet pour prendre les avis du Premier
Préfident , des Préfidens du Parlement , des
Confeillers d'Etats & des Maî res des Requêtes
des Confeillers d'honneur , des Préfidens des Enquêtes
& des Requêtes , & des Confeillers du
Parlement. Il remonta vers le Roi , mit un genou
en terre , redefcendit , & étant affis & couvert , il
prononça :
« Le Roi , féant en fon Lit de Juſtice , a or-
»donné & ordonne que les Déclarations , qui
viennent d'être lues, feront enrégiftrées au Greffe
I. Vol. Κ
218 MERCURE DE FRANCE.
»>de fon Parlement , & que fur le repli d'icelles ;
nil foit mis que lecture en a été faite , & l'enré-
»giftrement ordonné ; ce requérant fon Procu-
»reur Général , pour être le contenu en icelles
>> exécuté felon leur forme & teneur ; & Copies
>>collationnées des deux Déclarations , l'une por-
>> tant établiſſement d'un fecond vingtieme , l'au-
»tre portant prorogation du droit de deux fols
>>pour livre du dizieme , envoyées aux Bailliages
& Sénéchauffées du reffort , pour y être pareik
plement lucs , publiées & régiftrées . Enjoint aux
>>Subftituts de fon Procureur Général d'y tenir la
»main , & d'en certifier la Cour au mois. >>
Enfuite M. le Chancelier dit , que pour la plus
prompte exécution de ce qui venoit d'être or
donné , le Roi vouloit que par le Secretaire de la
Cour , faifant les fonctions de Greffier en Chef
de fon Parlement , il fût mis dans l'inftant même
fur le repli des trois Déclarations qui avoient été
publiées , ce que Sa Majesté avoit ordonné qu'on
y mit. Ce qui ayant été exécuté , le Roi fe leva ,
& fortit dans le même ordre qu'il étoit entré.
Le 25 Août , le Corps de Ville alla à Versailles ,
& ayant à la tête M. le Duc de Gefvres , Gouverneur
de Paris , il eut audience du Roi. Il fut préfenté
à Sa Majesté par M. le Comte d'Argenlon ,
Miniftre & Secretaire d'Etat , & conduit par M.
Defgranges , Maître des Cérémonies . M. de Ber
nage qui a été continué Prevôt des Marchands , &
MM. Lempereur & Tribard , nouveaux Echevins ,
prêterent entre les mains du Roi le ferment de
fidélité , dont M. le Comte d'Argenſon fit la lecture
, ainfi que du fcrutin qui fut préfenté par M.
de la Live de la Briche , Avocat du Roi au Châtelet.
Après cette audience , le Corps de Ville cut
l'honneur de rendre les refpects à la Reine & àla
Famille Royale .
OCTOBRE . 1756. 219
On apprend par des Lettres de l'Ifle Royale
les circonftances fuivantes d'un combat de M.
Beauffier , qui commande l'Efcadre du Roi , partie
de Breft au mois d'Avril dernier , avec les troupes
que Sa Majesté a fait paffer en Canada. M. Beauf
fier revenant de Québec , faifoit route pour Louifbourg
, lorfque le 16 Juillet il apperçut à la diftance
d'environ trois lieues dans le Sud de ce
dernier Port , deux Vaiffeaux Anglois avec deux
Frégates , qui portoient au plus près du vent pour
le reconnoître. M. Beauffier avoit alors avec le
Vaiffeau le Héros qu'il monte , l'illuftre , commandé
par M. de Montalais , Capitaine de Vaiffeau
, & les Frégates la Lycorne & la Syrene , que
commandent MM. de la Rigaudiere & de Brougnon
, Lieutenans de Vaiffeaux. Profitant du vent
du Nord qui fouffloit , il arriva fur le champ
grand fargue fur les Anglois , qui revirerent
promptement de bord , & prirent chaffe. La
crainte de tomber trop fous le vent de Louisbourg,
où il avoit ordre de remettre des provifions deftinées
pour cette Colonie , l'empêcha de poursuivre
long-temps les Anglois , & il entra le même jour
dans ce Port. Il fe preffa d'y débarquer les effets
dont il étoit chargé , ainfi que quelques malades
de fes équipages ; & le lendemain dès cinq heures
du matin , il fe trouva fous voile , & appareilla
pour aller chercher les ennemis. Vers midi il
reconnut les deux Vaiffeaux qu'il avoit chaffés là
veille , & qui n'avoient plus qu'une Frégate avec
& eux. Il força de voiles pour les joindre , & ils firent
la même maneuvre pour l'éviter. M. de
Breugnon joignit bientôt la Frégate Angloife , &
l'attaqua fi vivement , qu'elle fe replia fous le
canon des deux Vaiffeaux , dont le feu ralentit la
pourfuite de M. de Breugnon , qui fut même
M
Kij
220 MERCURE DE FRANCE.
obligé de s'écarter un peu . Sa manoeuvre fervit
cependant à donner à M. Beauffier le temps d'ap
procher les deux Vaiffeaux Anglois , dont l'un
étoit de 74 & l'autre de 64 canons. Il tira d'abord
fur l'un , comptant que l'autre qui étoit fur fa
hanche alloit être attaqué par M. de Montalais.
Mais le calme qui furvint en ce moment , rendit
inutiles tous les efforts que celui - ci put faire
pour s'approcher ; enforte que M. Beauflier eut à
combattre les deux Vaiffeaux Anglois. Le combat
fut très-vif de part & d'autre jufqu'à fept heures
du foir , qu'un petit vent qui s'éleva , ayant donné
à M. de Montalais occafion de faire de la voile ,
les ennemis en profiterent pour s'éloigner. Le
Vaiffeau le Héros fe trouvant prefque défemparé ,
M. Beauffier fut hors d'état de les pourfuivre.
Il s'occupa durant la nuit à faire changer les
voiles & les manoeuvres qui avoient été coupées
dans le Vaiffeau , & il efpéroit de pouvoir rejoin.
dre les ennemis. Mais le lendemain 20 , à huit
heures du matin , il les apperçut , forçant toujours
de voiles , & à une telle dittance , que ne pou
vant pas fe flatter de les approcher , malgré le
mauvais état où ils paroiffoient être , il prit le
parti de retourner à Louifbourg , pour y réparer
entiérement le dommage que le Vaiffeau le Héros
avoit fouffert. Ce Vaiffeau a reçu dans le combat
plus de deux cens coups de canon , foit dans fes
oeuvres- mortes , foit dans fa mâture , fans compter
ceux qui ont porté au deffous de la flottaifon .
Il y a eu dix-huit hommes tués , quarante buit de
bleffés du nombre des derniers font M. de Faget
, Enfeigne de Vaiffeau , qui a une bleffure
confidérable d'un coup de canon à la cuiffe , &
M. Beauffier lui - même , d'un éclat qui a porré
fur la jambe gauche. Cet Officier eſt arrivé au
OCTOBRE. 1756. 211
les
Port Louis le 9 Septembre , avec les Vaiffeaux le
Héros qu'il commande , PIlluftre & la Frégate
la Sirenne. Il étoit parti de Louifbourg le 13
Août , & il avoit alors avec lui la Frégate la Licorne
, commandée par M. Froger de la Rigaudiere
, laquelle s'étant féparée le jour du départ
dans une brume , eft arrivée à Breft quelques jours
avant ces autres Bâtimens. Pendant leur traverfée
, M. Beauflier a fait huit différentes prifes ,
dont trois font chargées de fucre & d'autres denrées
des Iles de l'Amérique. Il a amené avec lui
quatre cens prifonniers , dans le nombre defquels.
font deux Officiers & cent foixante - un foldats
Allemands , qui étoient deftinés pour le Régiment
Royal Américain.
Les Lettres qu'on a reçues par cette occafion ,
portent que, fuivant les rapports faits par les Capitaines
de deux Goëlettes arrivées depuis peu de
Quebec à Louisbourg , M. de Villiers , Capitaine
dans les troupes du Canada , Commandant
un Détachement compofé de Soldats , Canadiens
& Sauvages , avoit attaqué fur la riviere de
Choueguen un convoi confidérable de Bateaux
Anglois , dont il avoit tué 4 à 500 hommes , fait
60 ou 80 prifonniers , & pris tous les Bateaux ,
que les Anglois avoient abandonnés pour ſe ſauver
à terre.
M. l'Evêque d'Autun fut élût le 19 Août , pour
premplir la place qui vaquoit dans l'Académie
Françoife par la mort du Cardinal de Soubize.
La joie que le fuccès de nos armes a repandu
Fa dans tous les coeurs a été d'autant plus vive , que·
Le l'Europe entiere ne croyoit pas notre marine en
& état de former des entreprifes auffi confidérables .
La Cour a témoigné ſa ſatisfaction à l'occaſion de
ala prife du Fort Saint- Philippe , par les illumina-
K iij
222 MERCURE DE FRANCE.
tions les plus galantes . M. le Duc de Gefvres tou
jours magnifique , après s'être uni au public par
Pillumination de fon Hôtel le jour du Te Deum
chanté à la Chapelle du Roi , & le vingt- cinq
Juillet , jour du feu de joie de la ville de Compiegne
qu'il avoit ordonné comme Gouverneur de
la Province , & après avoir fait couler à la porte
de fon Hôtel des fontaines de vin , s'eft diftingué
le 6 Août par une Fête particuliere , où la magnificence
a répondu au bon goût fi reconnu de ce
Seigneur. Il fit fuccéder à un fouper fomptueux
un Feu d'artifice Italien en plufieurs décorations.
La façade & l'intérieur de fon Hôtel & des Jardins
furent fuperbement illuminés fous divers formes
d'architecture . La Fête fut terminée par un bal
où se trouverent les Princes , les Miniftres , les
Etrangers de diftinction , & toutes les Dames de
la Cour .
Le Roi chaffa le 31 Août dans la Plaine de Grenelle
, & foupa à Mont - Rouge chez M. le Duc de
la Valliere.
Meffieurs de Reillans & de Teffieres , Exempts
des Gardes du Corps dans la Compagnie de Mirepoix
, ayant obtenu leur retraite , le Roi a difpofé
de leurs emplois en faveur de M. le Chevalier de
Flahaut & de M. le Marquis de Vexin. Sa Majefté a
nommé MM . de la Villeneuve & de la Seunniere ,
Brigadiers de la même Compagnie , à la place de
MM. de la Ripiere & de Chateauroy , qui ont
auffi obtenu leur retraite . MM . de Beaupine & de
´la Boire ont été faits fous - Brigadiers. Des Commiffions
de Capitaines de Cavalerie ont été expédiées
à plufieurs Gardes du Corps .
On a arrêté deux Anglois , accufés d'être les
incendiaires , qui ont mis le feu , il y a quelque
temps , à un magaſin de Rochefort.
OCTOBRE. 1756. 223
Des Armateurs de Marſeille y ont conduit fiz
prifes eftimées fix cens mille livres.
Un petit Bâtiment à rames de huit canons ,
forti du même Port , & commandé par le Capitaine
Gaffen , s'eft battu pendant trois heures à
la vue du Port de Livourne , contre un Corfaire
Anglois de vingt canons. On eft informé par
des Lettres de ce dernier Port , que le Corfaire a
eu dix-neuf hommes de tués , & un grand nombre
de bleffés . De fon propre aveu , il étoit prêt à fe
rendre , lorfque l'équipage du Capitaine Gaffen ,
aqui étoit mêlé d'étrangers , refufa de fe préſenter
une quatrieme fois à l'abordage. Ce Capitaine n'a
perdu qu'un homme. Depuis que le Corfaire Anglois
eft retourné à Livourne , où le mauvais état
de fon Vaiffeau l'a obligé de relâcher , on y travaille
à lui faire fon procès , fur ce qu'il a défobéï
à une Ordonnance de l'Empereur , en fortant de
-ce Port avec plus de quatre canons.
M. le Maréchal Duc de Richelieu arriva le premier
de Septembre à Paris , & le même jour il eut
P'honneur de faluer le Roi à Choify . Le , M. le
-Duc de Fronsac eut à Verſailles le même honneur.
Le Roi a nommé M. l'Abbé Comte de Bernis ,
fon Ambaffadeur à la Cour de Vienne ; & M. le
Marquis d'Aubeterre eft défigné pour réfider
avec le même caractere à la Cour de Madrid.
Fermer
Résumé : « Le premier Août, vingt-quatre des principaux habitans de Chantilly ont signalé [...] »
En août 1756, plusieurs événements marquants eurent lieu en France. Le 1er août, les habitants de Chantilly célébrèrent la naissance du Duc de Bourbon et la convalescence de Mademoiselle de Bourbon par une fête en l'honneur du Prince de Condé. La fête débuta par un Te Deum solennel suivi de trente-six coups de canon. Un feu d'artifice fut tiré devant le petit Château, et des bateaux sur la pièce d'eau simulèrent une attaque contre un fort, avec des fusées et des bombes. Le sculpteur Coufinet dirigea l'attaque des bateaux, tandis que les sieurs Capitain et Maurice dirigèrent le reste du feu d'artifice. Après l'artifice, neuf portiques illuminés furent révélés, et un souper suivi d'un bal fut organisé. Le Maréchal Duc de Richelieu céda sa charge de premier Gentilhomme de la Chambre à son fils, le Duc de Fronsac. Le Roi nomma M. de Fremeur gouverneur de Monmédy et le Marquis de Talaru gouverneur des villes et châteaux de Phaltzbourg et de Saltzbourg. Le 9 août, le Roi reçut les comtes d'Egmont et de Balbi comme Chevaliers de l'Ordre de Saint Louis. Des orages violents causèrent des dégâts en Franche-Comté, et le Dauphin passa en revue son régiment de cavalerie à Favières. Le Roi revit également le Régiment Royal, Cavalerie, près de Compiègne. Des ordonnances royales modifièrent l'état-major des brigades du Régiment des Grenadiers de France et augmentèrent les effectifs de plusieurs régiments d'infanterie. Le 15 août, une procession solennelle pour l'Assomption de la Sainte Vierge eut lieu à Paris. Le Roi accorda diverses promotions et pensions à des officiers des Mousquetaires. L'Académie Royale des Sciences choisit le Chevalier de Borda comme Adjoint-Géomètre et élut M. Necker comme Correspondant. Les députés des États de Languedoc furent reçus par le Roi et la famille royale. Le Comte de Merle fut désigné ambassadeur auprès du Roi de Portugal. Le Roi nomma plusieurs brigadiers et fit les préparatifs pour tenir son Lit de Justice à Versailles, où le Parlement et les pairs se rassemblèrent le 21 août. Le 25 août, le Corps de Ville se rendit à Versailles et prêta serment de fidélité au roi. Le Comte d'Argenson présenta un scrutin rédigé par M. de la Live de la Briche, Avocat du Roi au Châtelet. Le Corps de Ville rendit ensuite hommage à la Reine et à la Famille Royale. Des lettres de l'Île Royale rapportèrent un combat impliquant M. Beaufier, commandant une escadre partie de Brest en avril 1756 pour le Canada. Beaufier engagea un combat contre deux vaisseaux anglais près de Louisbourg, subissant de lourds dommages et plusieurs blessés. Il captura huit navires ennemis et amené quatre cents prisonniers. M. de Villiers attaqua un convoi anglais sur la rivière de Choueguen, tuant plusieurs centaines d'hommes et capturant des bateaux. En France, M. l'Évêque d'Autun fut élu à l'Académie Française pour remplacer le Cardinal de Soubize. La Cour célébra les succès militaires par des illuminations et des fêtes. Le Roi nomma l'Abbé Comte de Bernis ambassadeur à Vienne et le Marquis d'Aubeterre à Madrid.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 223-227
DESCRIPTION de la décoration du Temple de Mars, & du Feu d'artifice que la ville de Bordeaux a fait tirer pour célébrer la prise du Fort S. Philippe.
Début :
Le Plan du Temple de Mars représentoit un quarré parfait. [...]
Mots clefs :
Bordeaux, Temple de Mars, Feux d'artifice, Obélisque, Marbre, Dorures, Arcade, Statues, Maréchal de Richelieu, Symbolique
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : DESCRIPTION de la décoration du Temple de Mars, & du Feu d'artifice que la ville de Bordeaux a fait tirer pour célébrer la prise du Fort S. Philippe.
DESCRIPTION de la décoration du
Temple de Mars , & du Feu d'artifice que
la ville de Bordeaux a fait tirer pour célébrer
la prife du Fort S. Philippe
LE Plan du Temple de Mars repréfentoit un
quarré parfait. Sa hauteur, depuis le pavé jufqu'au
Kiv
224 MERCURE DE FRANCE.
deffus de la corniche étoit de vingt-deux pieds ;
au deffus de la corniche ou entablement , & au
pourtour de tout l'édifice régnoit une balustrade
dorée de quatre pieds de hauteur.
Au deffus , & fur le milieu du Temple , s'élevoit
un obélifque de trente-fix pieds de hauteur , furmonté
d'un grand Globe d'artifice de cinq pieds
de diametre.
Toute la hauteur de l'édifice étoit de foixantelept
pieds ; tous les corps maffifs du Temple
étoient peints en marbre Sérancolin , & les tables .
& panneaux en marbre verd antique ; les focles du
Temple & de l'obélifque étoient en grotte.
La façade , du côté de l'Hôtel de Ville , étoit
décorée d'un avant - corps de dix- fept pieds de largeur
,fur un pied fix pouces de faillie , dans le milieu
duquel il y avoit une arcade de neuf pieds de
largeur fur dix-neuf pieds d'élévation , formée
par deux pilaftres de quatre pieds de largeur , à
cadres doiés & ornés des panneaux de relief, fur
lefquels étoient peints & rehauffés en or des trophées
d'armes entrelacées de branches de lauriers.
L'impofte , l'archivolte & les tables qui régnoient
au tour de l'archivolte étoient de relief
doré.
Au deffus de l'arcade étoit placé un grand cartouche
en relief de fix pieds fix pouces de largeur
fur neuf pieds de hauteur, y compris la couronne ,
dans lequel étoient deux écuffons accolés aux Armes
de France & de Navarre , entourées des colliers
des Ordres du Roi ; le cartouche , la couronne
& tous les ornemens étoient dorés , & les écusfons
blazonnés en couleur.
Au bas du cartouche , & joignant l'archivolte ;
fortoient deux chûtes en feftons de feuilles de
laurier , en relief doré , de neuf pieds de longueur,
OCTOBRE. 1756. 225
de l'extrêmité defquelles tomboient des guirlandes
auffi de relief , attachées par des agraites.
Dans le renfoncement de l'arcade , étoit placée
la ftatue de M. le Maréchal de Richelieu fous
les habits du Dieu Mars , l'épée à la main , &
appuyée fur des trophées d'armes mêlés de lauriers
; à côté étoit un génie portant le bâton
de Maréchal de France , & les armes de M. le
Duc de Richelieu ; ce grouppe de bronze peint en
tranfparent , étoit élevé fur un piedeſtal Corinthien
de marbre de Carrare , dans le panneau duquel
on lifoit cette infcription : Marti Gallico
civitas Burdigalenfis pofuit.
Le piedeftal portoit fur trois marches de marbre
blanc , veiné.
De chaque côté de l'avant- corps & dans les
parties fimples , étoient deux grands cadres à
bordures & ceintres dorés , ornés dans leur milieu
d'agraffes , le tout en relief doré de fix pieds
fix pouces de largeur , fur treize pieds de hauteur,
y compris un fecond focle peint en marbre de
Carrare , fur lefquels repofoient deux tableaux de
coloris en tranfparent , dont l'un représentoit
Neptune fortant du fein de la mer , appuyé fur un
rocher , tendant fes bras au Génie de la France
qui lui ôtoit des fers qu'il préfentoit à la ftatue
de M. le Maréchal de Richelieu . Dans le focle
da tranfparent qui étoit au bas du tableau ,
étoient ces mots : Neptunus Mediterraneus. Liberatori
fuo. L'Attique au deffus de ce tableau
étoit ornée & chantournée d'une bordure en relief
doré , au milieu de laquelle on voyoit en tranfparent
colorié les colonnes d'Hercule pofées fur des
rochers , entre lefquels étoient la maffue de ce:
Dieu avec la dépouille du Lion de Némée : autour:
étoient ces mots : Et plus ultrà , pour défignen
Kv
226 MERCURE DE FRANCE.
que
les conquêtes du Roi fur les Anglois s'éten➡
droient au delà de Gibraltar figuré par les colonnes
d'Hercule .
Le fecond tableau auffi en tranfparent à gauche
de l'avant -corps , repréfentoit la ville de Bordeaux
fous la figure d'ure femme couronnée de
tours , couverte d'une robe rouge , parfemée de
croiflans d'argent qui font partie des armes de la
Ville. Cette figure dans une attitude d'admiration
pofoit une couronne de lauriers fur l'écuffon
des armes de Monfeigneur le Maréchal de Richelien
, fupportées par deux Génies , dont l'un tenoit
des palmes , & l'autre le bâton de Maréchal
entouré de lauriers .Cet écuffon repofoit fur des tro.
phées d'armes. A côté de la ville de Bordeaux étoit
un autre Génie appuyé fur les armes de la Ville .
Dans le focle on lifoit cette infcription : Civi
tas Burdigalenfis . Gubernatori invictiffimo. Dans
l'Attique au- deffus , ornée comme la précédente
, étoit peint en tranfparent un grand foleil
rayonnant , prefque tout couvert , & traversé dans
fon milieu par d'épais nuages , avec ces mots :
Tegitur , dum fulmina pariet ; pour repréſenter la
longue modération du Roi dont les Anglois ont
fi longtemps abufé , & le fecret impénétrable
avec lequel Sa Majesté a préparé & difpofé toutes
les opérations d'une campagne dont le fuccès
étonne aujourd'ui l'Angleterre.
Tout ce qui peut rendre plus éclatante une
grande fête , fut employé dans celle- ci avec une
magnificence extraordinaire. Illumination géné
tale , feux devant les portes , grand fouper où
cert femmes furent fervies par deux cens cava-
Jicis , feu d'artifice très- long & très - heureuſement
exécuté , bal mafqué répété dans fix falles
immenfes, tout ce que l'art , lajoie & le zele peuOCTOBRE.
1756. 227
vent inventer fut mis en ufage pour exprimer
Padmiration pour M. de Richelieu , & l'amour pour
le Roi.
Temple de Mars , & du Feu d'artifice que
la ville de Bordeaux a fait tirer pour célébrer
la prife du Fort S. Philippe
LE Plan du Temple de Mars repréfentoit un
quarré parfait. Sa hauteur, depuis le pavé jufqu'au
Kiv
224 MERCURE DE FRANCE.
deffus de la corniche étoit de vingt-deux pieds ;
au deffus de la corniche ou entablement , & au
pourtour de tout l'édifice régnoit une balustrade
dorée de quatre pieds de hauteur.
Au deffus , & fur le milieu du Temple , s'élevoit
un obélifque de trente-fix pieds de hauteur , furmonté
d'un grand Globe d'artifice de cinq pieds
de diametre.
Toute la hauteur de l'édifice étoit de foixantelept
pieds ; tous les corps maffifs du Temple
étoient peints en marbre Sérancolin , & les tables .
& panneaux en marbre verd antique ; les focles du
Temple & de l'obélifque étoient en grotte.
La façade , du côté de l'Hôtel de Ville , étoit
décorée d'un avant - corps de dix- fept pieds de largeur
,fur un pied fix pouces de faillie , dans le milieu
duquel il y avoit une arcade de neuf pieds de
largeur fur dix-neuf pieds d'élévation , formée
par deux pilaftres de quatre pieds de largeur , à
cadres doiés & ornés des panneaux de relief, fur
lefquels étoient peints & rehauffés en or des trophées
d'armes entrelacées de branches de lauriers.
L'impofte , l'archivolte & les tables qui régnoient
au tour de l'archivolte étoient de relief
doré.
Au deffus de l'arcade étoit placé un grand cartouche
en relief de fix pieds fix pouces de largeur
fur neuf pieds de hauteur, y compris la couronne ,
dans lequel étoient deux écuffons accolés aux Armes
de France & de Navarre , entourées des colliers
des Ordres du Roi ; le cartouche , la couronne
& tous les ornemens étoient dorés , & les écusfons
blazonnés en couleur.
Au bas du cartouche , & joignant l'archivolte ;
fortoient deux chûtes en feftons de feuilles de
laurier , en relief doré , de neuf pieds de longueur,
OCTOBRE. 1756. 225
de l'extrêmité defquelles tomboient des guirlandes
auffi de relief , attachées par des agraites.
Dans le renfoncement de l'arcade , étoit placée
la ftatue de M. le Maréchal de Richelieu fous
les habits du Dieu Mars , l'épée à la main , &
appuyée fur des trophées d'armes mêlés de lauriers
; à côté étoit un génie portant le bâton
de Maréchal de France , & les armes de M. le
Duc de Richelieu ; ce grouppe de bronze peint en
tranfparent , étoit élevé fur un piedeſtal Corinthien
de marbre de Carrare , dans le panneau duquel
on lifoit cette infcription : Marti Gallico
civitas Burdigalenfis pofuit.
Le piedeftal portoit fur trois marches de marbre
blanc , veiné.
De chaque côté de l'avant- corps & dans les
parties fimples , étoient deux grands cadres à
bordures & ceintres dorés , ornés dans leur milieu
d'agraffes , le tout en relief doré de fix pieds
fix pouces de largeur , fur treize pieds de hauteur,
y compris un fecond focle peint en marbre de
Carrare , fur lefquels repofoient deux tableaux de
coloris en tranfparent , dont l'un représentoit
Neptune fortant du fein de la mer , appuyé fur un
rocher , tendant fes bras au Génie de la France
qui lui ôtoit des fers qu'il préfentoit à la ftatue
de M. le Maréchal de Richelieu . Dans le focle
da tranfparent qui étoit au bas du tableau ,
étoient ces mots : Neptunus Mediterraneus. Liberatori
fuo. L'Attique au deffus de ce tableau
étoit ornée & chantournée d'une bordure en relief
doré , au milieu de laquelle on voyoit en tranfparent
colorié les colonnes d'Hercule pofées fur des
rochers , entre lefquels étoient la maffue de ce:
Dieu avec la dépouille du Lion de Némée : autour:
étoient ces mots : Et plus ultrà , pour défignen
Kv
226 MERCURE DE FRANCE.
que
les conquêtes du Roi fur les Anglois s'éten➡
droient au delà de Gibraltar figuré par les colonnes
d'Hercule .
Le fecond tableau auffi en tranfparent à gauche
de l'avant -corps , repréfentoit la ville de Bordeaux
fous la figure d'ure femme couronnée de
tours , couverte d'une robe rouge , parfemée de
croiflans d'argent qui font partie des armes de la
Ville. Cette figure dans une attitude d'admiration
pofoit une couronne de lauriers fur l'écuffon
des armes de Monfeigneur le Maréchal de Richelien
, fupportées par deux Génies , dont l'un tenoit
des palmes , & l'autre le bâton de Maréchal
entouré de lauriers .Cet écuffon repofoit fur des tro.
phées d'armes. A côté de la ville de Bordeaux étoit
un autre Génie appuyé fur les armes de la Ville .
Dans le focle on lifoit cette infcription : Civi
tas Burdigalenfis . Gubernatori invictiffimo. Dans
l'Attique au- deffus , ornée comme la précédente
, étoit peint en tranfparent un grand foleil
rayonnant , prefque tout couvert , & traversé dans
fon milieu par d'épais nuages , avec ces mots :
Tegitur , dum fulmina pariet ; pour repréſenter la
longue modération du Roi dont les Anglois ont
fi longtemps abufé , & le fecret impénétrable
avec lequel Sa Majesté a préparé & difpofé toutes
les opérations d'une campagne dont le fuccès
étonne aujourd'ui l'Angleterre.
Tout ce qui peut rendre plus éclatante une
grande fête , fut employé dans celle- ci avec une
magnificence extraordinaire. Illumination géné
tale , feux devant les portes , grand fouper où
cert femmes furent fervies par deux cens cava-
Jicis , feu d'artifice très- long & très - heureuſement
exécuté , bal mafqué répété dans fix falles
immenfes, tout ce que l'art , lajoie & le zele peuOCTOBRE.
1756. 227
vent inventer fut mis en ufage pour exprimer
Padmiration pour M. de Richelieu , & l'amour pour
le Roi.
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Résumé : DESCRIPTION de la décoration du Temple de Mars, & du Feu d'artifice que la ville de Bordeaux a fait tirer pour célébrer la prise du Fort S. Philippe.
Le texte décrit les festivités organisées par la ville de Bordeaux pour célébrer la prise du Fort Saint-Philippe, mettant en avant la décoration du Temple de Mars et un feu d'artifice. Le Temple de Mars était un édifice carré de soixante-sept pieds de hauteur, orné d'une balustrade dorée et d'un obélisque surmonté d'un globe d'artifice. Les matériaux utilisés comprenaient du marbre Sérancolin et du marbre verd antique, avec des décorations en grottes. La façade côté Hôtel de Ville présentait un avant-corps de dix-sept pieds de largeur, avec une arcade de neuf pieds de largeur et dix-neuf pieds d'élévation. Cette arcade était ornée de trophées d'armes et de lauriers. Au-dessus de l'arcade, un cartouche doré affichait les armes de France et de Navarre. Dans l'arcade, une statue du Maréchal de Richelieu en habit de Mars était accompagnée d'un génie portant le bâton de Maréchal. De chaque côté de l'avant-corps, deux tableaux en transparent représentaient Neptune libérant la statue du Maréchal et la ville de Bordeaux couronnant les armes du Maréchal. Ces tableaux étaient ornés de bordures dorées et d'inscriptions latines. La célébration comprenait une illumination générale, des feux devant les portes, un grand souper servi par deux cents cavaliers, un feu d'artifice et des bals masqués dans six salles immenses. Cette fête visait à exprimer l'admiration pour le Maréchal de Richelieu et l'amour pour le Roi.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 207-209
A Caen, ce 17 septembre, 1756.
Début :
Monsieur, le silence que les nouvelles publiques gardent sur un événement qui a fixé, [...]
Mots clefs :
Caen, Duc d'Harcourt, Duc de Montmorenci, Fête, Régiment, Illuminations, Pièce en vers, Banquet, Feux d'artifice
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : A Caen, ce 17 septembre, 1756.
A Caen , ce 17 septembre , 1756.
Monfieur , le filence que les nouvelles publiques
gardent fur un événement qui a fixé , qui a ›
mérité l'attention de tous les Militaires que le Camp du Havre raffembloit fous les ordres de
Monfieur le Duc d'Harcourt , me détermine à vous
le détailler.
J'entends parler d'une Fête que Monfieur le Duc de Montmorenci
a donnée à ce Général , &
à Madame la Comteffe de Lillebonne fa belle-fille ;
Fête digne à la fois , & de qui la donnoit , & de
qui l'a reçue.
M. de Montmorenci l'a imaginée , l'a dirigée
lui-même l'objet fait l'éloge de fon difcerne
ment , l'exécution fait celui de fon goût.
20S MERCURE DE FRANCE.
Donner des preuves d'attachement à M. le Duo
d'Harcourt , c'eft acquitter près de lui les dettes.
de la Nation ; Poffeffeur du droit héréditaire d'ètre
aimé, ce Général s'eft acquis celui de fe faire
adorer.
Cambiner , faire exécuter foi- même en vingtquatre
heures , la fête la plus brillante , lui donner
l'air le plus galant fous l'appareil le plus militaire
, c'eft un chef-d'oeuvre de goût qui n'appartient
qu'à M. de Montmorency. Paffons au
détail.
Lorfque le Général & les Dames arriverent à
la Brigade de Touraine , on y trouva en bataille
devant les faiſceaux , deux cens hommes de ce
Régiment , troupe connue depuis long - temps
fous le nom de Pruffiens de M. de Montmorency ,
qui lui-même l'a inftruite à faire avec grace &
précifion le maniement des armes & les évolutions
ordinaires au refte de l'Infanterie. Il l'a fit
manoeuvrer & tout le monde convint qu'on ne
pouvoit , ni mieux commandet , nt mieux obéir.
L'arrivée des Dames aux tentes du jeune Duc ,
fut annoncée par toute l'artillerie des Forts & des
Lignes.
Il avoit fait élever devant la premiere un Fort ,
dont le front préfentoit un ouvrage à couronne ,
flanqué de deux baftions , avec des places d'armes
retranchées dans le chemin couvert. Du flanc
droit partoient des lignes défendues par des redans
& redoutes , le tout paliffadé & garni d'une
artillerie dont le volume étoit proportionné à la
capacité des ouvrages. Ces lignes entouroient
plufieurs autres tentes également grandes & magnifiques.
L'intervalle des tentes & lignes étoit
occupé par un parterre en gazon découpé , dont
les compartimens étoient pleins des chiffres de
NOVEMBRE . 1756. 209
Montmorency , Harcourt & la Feuillade. Les Ar
moiries des trois Maifons paroiffoient fur les
remparts en cartouches tranfparens . Tous les ouvrages
, les compartimens & chiffres , ou ornemens
du parterre , étoient deffinés par un nombre
infini de lampions.
L'effet de cette illumination dans une nuit
tranquille & obfcure , a furpris même les plus
difficiles en ce genre.
Avant de commencer le jeu , M. de Montmorency
préfenta à Madame de Lillebonne une piece
de vers fous le titre d'ordre : M. Defluile ' , Capitaine
au Régiment de Touraine , en eft l'Auteur,
& je les ai joints à nra Lettre.
Après le jeu , on paffa dans les tentes voisines
où étoient dreffées plufieurs tables fur lesquelles
l'abondance & la délicateffe des mets fe difputoient
l'avantage. Tous les Chefs des Corps
avoient été invités particuliérement à ce fouper,
où furent priés tous les Officiers que ela curiofité
avoient amenés à ce fpectacle. Pendant le repas
une fymphonie de haut-bois , baffons & corps - dechaffe
fe fit entendre : les fantés furent bues au
bruit de toute l'artillerie.
Lorfqu'on eat quitté la table , on tira un feu
d'artifice qui fut allumé par Madame de Lillebonne
. Le bal fut ouvert enfuite par elle & M. de
Montmorency, & fut terminé à fix heures du matin
, par le retour de cette Dame à Harfleur. Il
convenoit que le départ des graces mît fin à leur
fête.
J'ai l'honneur d'être , &c .
LA NEUFVILLE.
Monfieur , le filence que les nouvelles publiques
gardent fur un événement qui a fixé , qui a ›
mérité l'attention de tous les Militaires que le Camp du Havre raffembloit fous les ordres de
Monfieur le Duc d'Harcourt , me détermine à vous
le détailler.
J'entends parler d'une Fête que Monfieur le Duc de Montmorenci
a donnée à ce Général , &
à Madame la Comteffe de Lillebonne fa belle-fille ;
Fête digne à la fois , & de qui la donnoit , & de
qui l'a reçue.
M. de Montmorenci l'a imaginée , l'a dirigée
lui-même l'objet fait l'éloge de fon difcerne
ment , l'exécution fait celui de fon goût.
20S MERCURE DE FRANCE.
Donner des preuves d'attachement à M. le Duo
d'Harcourt , c'eft acquitter près de lui les dettes.
de la Nation ; Poffeffeur du droit héréditaire d'ètre
aimé, ce Général s'eft acquis celui de fe faire
adorer.
Cambiner , faire exécuter foi- même en vingtquatre
heures , la fête la plus brillante , lui donner
l'air le plus galant fous l'appareil le plus militaire
, c'eft un chef-d'oeuvre de goût qui n'appartient
qu'à M. de Montmorency. Paffons au
détail.
Lorfque le Général & les Dames arriverent à
la Brigade de Touraine , on y trouva en bataille
devant les faiſceaux , deux cens hommes de ce
Régiment , troupe connue depuis long - temps
fous le nom de Pruffiens de M. de Montmorency ,
qui lui-même l'a inftruite à faire avec grace &
précifion le maniement des armes & les évolutions
ordinaires au refte de l'Infanterie. Il l'a fit
manoeuvrer & tout le monde convint qu'on ne
pouvoit , ni mieux commandet , nt mieux obéir.
L'arrivée des Dames aux tentes du jeune Duc ,
fut annoncée par toute l'artillerie des Forts & des
Lignes.
Il avoit fait élever devant la premiere un Fort ,
dont le front préfentoit un ouvrage à couronne ,
flanqué de deux baftions , avec des places d'armes
retranchées dans le chemin couvert. Du flanc
droit partoient des lignes défendues par des redans
& redoutes , le tout paliffadé & garni d'une
artillerie dont le volume étoit proportionné à la
capacité des ouvrages. Ces lignes entouroient
plufieurs autres tentes également grandes & magnifiques.
L'intervalle des tentes & lignes étoit
occupé par un parterre en gazon découpé , dont
les compartimens étoient pleins des chiffres de
NOVEMBRE . 1756. 209
Montmorency , Harcourt & la Feuillade. Les Ar
moiries des trois Maifons paroiffoient fur les
remparts en cartouches tranfparens . Tous les ouvrages
, les compartimens & chiffres , ou ornemens
du parterre , étoient deffinés par un nombre
infini de lampions.
L'effet de cette illumination dans une nuit
tranquille & obfcure , a furpris même les plus
difficiles en ce genre.
Avant de commencer le jeu , M. de Montmorency
préfenta à Madame de Lillebonne une piece
de vers fous le titre d'ordre : M. Defluile ' , Capitaine
au Régiment de Touraine , en eft l'Auteur,
& je les ai joints à nra Lettre.
Après le jeu , on paffa dans les tentes voisines
où étoient dreffées plufieurs tables fur lesquelles
l'abondance & la délicateffe des mets fe difputoient
l'avantage. Tous les Chefs des Corps
avoient été invités particuliérement à ce fouper,
où furent priés tous les Officiers que ela curiofité
avoient amenés à ce fpectacle. Pendant le repas
une fymphonie de haut-bois , baffons & corps - dechaffe
fe fit entendre : les fantés furent bues au
bruit de toute l'artillerie.
Lorfqu'on eat quitté la table , on tira un feu
d'artifice qui fut allumé par Madame de Lillebonne
. Le bal fut ouvert enfuite par elle & M. de
Montmorency, & fut terminé à fix heures du matin
, par le retour de cette Dame à Harfleur. Il
convenoit que le départ des graces mît fin à leur
fête.
J'ai l'honneur d'être , &c .
LA NEUFVILLE.
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Résumé : A Caen, ce 17 septembre, 1756.
Le 17 septembre 1756, à Caen, une fête militaire organisée par le Duc de Montmorency en l'honneur du Duc d'Harcourt et de Madame la Comtesse de Lillebonne a attiré l'attention des officiers du camp du Havre. La fête, réputée pour son élégance et son organisation impeccable, a commencé par des manœuvres militaires de 200 hommes du Régiment de Touraine, dirigés par Montmorency. L'arrivée des dames a été annoncée par l'artillerie des forts et des lignes. Des fortifications ornées des armoiries des maisons de Montmorency, Harcourt et La Feuillade ont été construites et illuminées de manière spectaculaire. Montmorency a présenté une pièce de vers à Madame de Lillebonne avant un jeu. Un souper abondant et délicat, accompagné de musique, a suivi. Un feu d'artifice tiré par Madame de Lillebonne a précédé un bal qui s'est terminé à six heures du matin par le retour de Madame de Lillebonne à Harfleur.
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7
p. 165-181
Description des Fêtes données en la ville d'Arras, à l'occasion de la Naissance de Monseigneur le Comte d'Artois.
Début :
La joie que cet évènement a répandue dans l'Artois, ne s'est [...]
Mots clefs :
Fêtes, Arras, Monseigneur le Comte d'Artois, Naissance, Évêque d'Arras, Te Deum, Mandement, Heureux, Prince, Royaume, Secrétaire, Lettre du roi, Bonheur, Voeux, Providence, Banquets, Conseillers, Militaires, Religieux, Peuple, Vers d'un citoyen d'Arras, Représentations, Feux d'artifice, Destruction d'édifices, Chronographes, Peinture, Médaillons, Symboles, Histoire de l'Artois, Armes, Inscriptions latines, Arts et sciences, Royauté, Bal, Comtes, Comtesses, Marquis, Cérémonies, Sentiments, Vertus, Architecture, Décors, Concert de musique, Jésuites, Capitale, Villes de France
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Description des Fêtes données en la ville d'Arras, à l'occasion de la Naissance de Monseigneur le Comte d'Artois.
Defcription des Fêtes données en la ville d'Arras ,
à l'occafion de la Naiffance de Monseigneur le
Comte d'Artois.
LA joie que cet événement a répandue dans
l'Artois , ne s'eft pas bornée aux fentimens de
refpect , d'amour & de reconnoiffance que les
Etats de cette Province ont portés jufqu'au pied
du trône , par la députation nombreufe dont le
Mercure de Novembre a fait mention . Cette joie
a encore éclaté par des fêtes qui méritent qu'on
en conferve le fouvenir ; & nous allons détailler
ce qui s'eft paffé en cette conjoncture dans la
Capitale du pays,
Dès le 11 Octobre , jour auquel un Courier du
cabinet vint apporter aux Députés ordinaires des
Etats ( 1 ) , la nouvelle de l'heureux accouchement
de Madame la Dauphine , & du nom donné par
le Roi au Prince nouveau-né , il y eut des illuminations
& autres démonftrations publiques d'alégreffe
, tant aux Etats & à l'Hôtel de Ville , qu'au
Confeil d'Artois , à l'Evêché , à l'Abbaye de Saint-
Vaaft , &c. mais elles ne furent que le prélude
des réjouiffances brillantes qui devoient les fuivre,
M. l'Evêque fixa au Dimanche 6 Novembre , lé
(1 ) Ce font trois perfonnes choifies dans les trois
Corps des Etats , qui réfident à Arras , & font
chargées de l'adminiftration , hors du temps dés
Affemblées,
166 MERCURE DE FRANCE.
"
Te Deum ordonné par le Roi , & publia à ce fujet
un Mandement conçu en ces terines :
Jean de Bonneguize , par la grace de Dien
» & du S. Siège Apoftolique , Evêque d'Arras : à
tous Abbés , Abbeffes , Chapitres , Doyens ,
Paſteurs , Supérieurs & Supérieures des Eglifes
» & Monafteres exempts & non exempts, & à tous
» fideles de notre Dioceſe , falut & bénédiction.
» Le Seigneur , Mes Très- Chers Freres , tient
dans , fes mains , & la deftinée des Maîtres de
» la terre & le fort des Empires. Heureux les Rois
» & les Peuples , quand ils ne l'apprennent qué
par les preuves qu'il leur donne de fon amour
» & de fa protection !
» Tel eft l'avantage dont nous jouiffons , Mes
Très Chers Freres, furtout depuis que l'heureuſe
fécondité de Madame la Dauphine ajoute à tant
» d'autres faveurs du ciel , les bénédictions dont
≫ il comble par elle le Roi & le Royaume . Cha-
» que année nous ramene au pied des Autels pour
» y rendre graces d'un préſent nouveau à un Dieu
» qui véille au repos & à la profpérité de l'Etar.
» Il donne encore aujourd'hui dans le Prince qui
» vient de naître un nouvel appui au trône déjà le
» mieux affermi , & à la Nation la plus heureufe
un gage de plus de la durée de fon bonheur.
i » Mais fi la naiffance de Monfeigneur le Comté
» d'Artois doit être pour toute la France un fujer
» de joié & un objet de reconnoiffance , vous le
fçavez , M. T. C. F. cet événement intéreffe
» particuliérement cette Province ; & le nom de
ce Prince doit lui feul vous rappeller tout ce que
vous devez dans cette circonftance aux bontés
du Roi , ou plutôt aux miféricordes du Seigneur
qui , après avoir mis dans l'ame du Monarque
, l'amour de tous fes Peuples , daigné
JANVIER. 1758. 167
aujourd'hui fixer finguliérement fur nous les regards
de fa tendrefle.
>> Province heureuſe & préférée , hâtons- nous
» de faire éclater notre joie , & de fignaler notre
» reconnoiffance pour un Dieu qui nous diftingue .
» Mais joignons à nos actions de graces pour ce
préfent ineftimable de fa bonté , les prieres les
plus ferventes , pour qu'il daigne nous le con-
>> ferver. Ce Prince eſt , en naiſſant , le fondement
» & l'appui de nos efpérances : qu'il foit pendant
» le cours d'une longue vie , le gage de notre fé-
» licité , & le lien qui refferre de plus en plus les
>> noeuds de cette tendreffe paternelle , dont le Roi
»> nous donne aujourd'hui dans fa perfonne , la
preuve la plus éclatante.
» Demandons au Seigneur de graver de bonne
>> heure dans fon ame les principes inaltérables de
» de bonté & d'humanité qui nous font trouver
» le meilleur des Peres dans le plus grand des
Rois qu'il lui infpire le goût de cette piété tendre
& folide qui fait de la Reine l'exemple de la
Cour & la gloire de la Religion ; qu'il mette
» dans fon coeur le germe des vertus de Monſeigneur
le Dauphin , & de Madame la Dauphine,
»fi dignes l'un & l'autre des bénédictions multipliées
que le Ciel répand fur leur union , & fi
propres à attirer fur le Royaume celles qui peuvent
en perpétuer la gloire , le répos & la
» profpérité.
Puiffe cet augufte Enfant fi précieux à cette
» Province en particulier , devenit , pour notre
bonheur, tous les jours de fa vie , plus parfait, en
fe formant fur de pareils modeles puiffent
> nos neveux avoir des raifons de renouveller fans
» ceffe au Seigneur pour fa confervation les ac-
» tions de graces que nous allons lui rendre pour
fa naiflance,
16S MERCURE DE FRANCE.
» A ces cauſes , après avoir pris l'avis de nos
» Vénérables Freres les Prévôt , Doyen , Cha-
» noines & Chapitre de notre Eglife Cathédrale ,
» nous ordonnons de faire chanter le Te Deum,
>> chacun dans vos Eglifes , avec les folemnités
>> requifes , le premier Dimanche ou jour de
Fête , après que vous aurez reçu notre préſent
>> Mandement , les Officiers , Magiftrats des
>> lieux , & tous autres qu'il appartiendra , invités
» d'y aſſiſter .
» Donné à Arras , en notre Palais Epiſcopal ,
fous notre feing & la fignature de notre Secre-
D taire , le trois Novembre mil fept cens cinquan-
» te-fept » .
JEAN , Evêque d'Arras.
Par Monfeigneur ,
PECHENA , Secrétaire.
Lettre du Roi , à M. l'Evêque d'Arras .
Monfieur l'Evêque d'Arras , la durée du bonheur
de mes fujets étant l'objet de mes voeux les plus
ardens , tous les événemens capables de le perpétuef,
excitent en moi les fentimens que mérite
un peuple toujours empreffé à me donner des
marques de fon zele , de fa fidélité & de fon
amour. Les princes dont il a plu à Dieu de combler
mes fouhaits , affurent la tranquillité dans
mes états. Celui dont matrès chere Fille la Dauphine
vient d'être heureuſement délivrée , eſt un
nouveau don de la providence , & c'eft pour lui
rendre les actions de graces qui lui font dûes , que
je vous fais cette lettre , pour vous dire que mon
intention eft que vous faffiez chanter le Te Deum
dans votre Eglife Cathédrale , & dans toutes les
autres
JANVIERL
169
. 1758.
autres de votre Dioceſe , avec la folemnité requife
, & que vous invitiez d'y affifter tous ceux qu'il
conviendra ; ce que me promettant de votre zele
je ne vous ferai la préfente plus longue , que pour
prier Dieu qu'il vous ait , Mons. l'Evêque d'Arras
, en fa fainte garde. Ecrit à Versailles le 9 Octobre
1757. Signé , LOUIS . Et plus bas , R. de
Voyer. Etfur le repli : à Mons. l'Evêque d'Arras,
Confeiller en mes Confeils .
La fête fut annoncée le au foir par toutes les
cloches de la Ville , que l'on fonna encore le 6 ,
de grand matin. En même temps des falves d'artillerie
& de boîte fe firent entendre , & recommencerent
à différentes reptiles dans le cours de
la journée. Il y eut ce même jour à l'Hôtel de
Ville un dîner fomptueux de plus de quatre-vingts
couverts , où le trouva M. de Caumartin , Intendant
de la Province . On y avoit auffi invité l'Evêque
, l'Abbé de Saint- Vaaft , le Commandant
de la Place , le premier Préfident du Confeil d'Artois
, & la Nobleffe , ainfi qu'un certain nombre
des Officiers de la garnifon , & des autres principaux
Corps , ecclefiaftiques , civils & militaires.
Pendant ce repas , on jetta de l'argent au peuple
& les Magiftrats lui firent diftribuer du pain , des
viandes & du vin. Immédiatement après que la
fanté de Monfeigneur le Comte d'Artois eût été
bue au fon des inftrumens , on préfenta à tous les
convives des exemplaires de la piece fuivante ,
compofée par M Harduin , Avocat , ancien Député
des Etats d'Artois à la Cour , & Secretaire
perpétuel de la Société Littéraire d'Arras.
L. Vol. H
170 MERCURE DE FRANCE .
Sentimens d'un Citoyen d'Arras , fur la Naiffance
de Monfeigneur le Comte d'Artois .
It fort donc aujourd'hui de fon obſcurité ,
Ce Titre qu'autrefois des Héros ont porté ( 1 ).
D'un Enfant de Louis il devient le partage :
Louis , pour couronner notre fidélité ,
Daigne de fon amour nous accorder ce gage .
Vous reprenez enfin votre antique fplendeur ,
Lieux où de Pharamond le brave Succeffeur (1 )
Jetta les fondemens du floriffant Empire
Qui commande à l'Europe , & que le monde admire.
Monarque triomphant , que le Ciel a formé
Pour les vertus & pour la gloire ,
Ton peuple réuni , d'un beau zele animé ,
T'a placé dès long-temps au Temple de mémoire ,
Sous le nom de Roi Bien - Aimé.
Mais lorfque furpaffant toute notre eſpérance ,
Tu veux nous diftinguer de tes autres Sujets ,
Lorfque tu mets pour nous le comble à tes bienfaits
,
Quel nom te donnera notre reconnoiffance !
Plaifirs , volez ici fous mille traits divers :
Que Polymnie & Terpsichore
Célebrent à l'envi le Maître qu'on adore.
(1) Robert I & Robert II, Comtes d'Artois.
(2) Clodion.2
JANVIER.
1758.
171
Qu'un bruit guerrier fe mêle aux plus tendres
concerts :
Que la fiere trompette fonne :
Sur nos murs que la foudre tonne :
Que le falpêtre éclate dans les airs.
Que mille bouche enflammées
Annoncent les tranfports de nos ames charmées
Au bout de ce vafte Univers.
Je vois juſques à
l'Empyrée
S'élevér de rapides feux :
Ainfi vers la voûte azurée
S'élance l'ardeur de nos voeux.
Tels que ces
brillantes étoiles ,
Qui de la nuit perçant les voiles ,
Retombent en foule à nos yeux ,
Sur l'Enfant fi cher à la France
Puiffent
defcendre en
abondance
Les plus riches préfens des Cieux.
Dans le
raviffement où mon ame fe livre ,
En lui déja je vois revivre
Ce Frere vertueux du plus faint de nos Rois ( 1).
A nos ayeux il fit chérir fes loix :
Des cruels
Sarrafins il
confondit la rage :
Prince , lis fes exploits , & deviens fon image ...
Mais pourquoi de l'hiftoire
emprunter le fecours ▸
(1) Robert I, frere de Saint Louis , furnommé
le Bon & le
Vaillant, ‹
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
Pour acquérir une gloire immortelle ,
Il ne te faut d'autre modele
Que ton augufte Ayeul , ou l'Auteur de tes jours.
Illuftre Enfant , auprès du trône
Tu feras de l'Artois le plus ferme foutien :
De Louis & du peuple à qui fa main te donne ,
Tu refferres encor le fortuné lien .
Si tu pouvois juger de notre amour extrêmê
Si tu lifois au fond de notre coeur ,
Ah ! tu t'applaudirois toi- même
Du nom qui fait notre bonheur .
.
On avoit élevé , vis- à-vis de l'Hôtel de Ville ,
un Feu d'artifice , pour lequel on n'avoit épargné
ni foins , ni dépenfe , non plus que pour les illuminations
de cet hôtel , de la haute & admirable
tour qui l'accompagne , & des autres édifices publics
. Tous les particuliers s'étoient auffi empreffés
à illuminer leurs maiſons , d'une maniere qui
répondît à la folemnité du jour ; mais une pluie
continuelle empêcha l'effet de ces préparatifs. On
ne put faire jouer qu'une petite partie de l'artifice
; & le refte fut remis au furlendemain.
L'édifice conftruit pour le feu , fur les deffeins
du fieur Beffara , Architecte de la Ville , étoit
feint de marbre blanc , & avoit s 2 pieds d'élévation
en deux étages , furmontés d'une pyramide
de 33 pieds . Le premier étage ou rez - de - chauffée
étoit un quarré d'ordre dorique , ayant 44 pieds
de face , dont le côté principal offroit un portique
, avec fronton & baluftrade , orné des Armes
du Roi , de Monfeigneur le Dauphin , & de Mon.
feigneur le Comte d'Artois , Une colonnade ioniJANVIER.
1758. 173
que formoit le fecond étage , qui étoit circulaire.
Vingt-quatre vafes à fleurs & trophées d'armes
ou de mufique , fervoient d'amortiffemens aux
deux ordres d'architecture . Cette décoration étoit
femée de chronogrammes ou chronographes
forte d'infcription fort en ufage aux Pays Bas ,
dans laquelle on trouve , en chiffre Romain , par
la réunion de toutes les lettres numérales qu'elle
contient , l'année de l'événement qui en eſt l'objet.
Voici quelques- uns de ces chronographes :
nasCItVŕ CoMes , spLenDor artesIx.
DonVM CLI aC, regIs.
PVLChra FIDel MerCes .
LætVs aMor aCCenDIt Ignes,
Entre les différentes illuminations qui avoient
été préparées , on remarquoit aux croifées de
Pappartement que la Société Littéraire occupe à
l'hôtel du Gouverneur , trois tranfparens , fur
lefquels étoient peints autant de médaillons , imaginés
par M. Camp , Avocat , Membre de cette
Société , & actuellement Député des Etats à lạ
Cour. On croit devoir donner ici la defcription
de ces morceaux de peinture.
Premier Médaillon.
L'hiftoire de l'Artois caractérisée fpécifiquement
par une femme vêtue d'une faie blanche
rayée de pourpre ( 1 ) . Elle a fur la tête une couronne
de laurier , & une plume à la main . Devant
(1 ) Cette espece d'étoffe fe fabriquoit autrefois
par les habitans d'Arras , nommés Atrebates, avec
tant de réputation que les Romains en faifoient
leurs plus magniques habillemens.
Hiij
74 MERCURE DE FRANCE.
elle eft un grand livre ouvert , fur la couverture
duquel fe voyent les Armes de la province . Elle
tient de la main gauche un médaillon portant
celles de Monfeigneur le Comte d'Artois , qu'elle
regarde avec un étonnement mêlé de joie. Une
pile de volumes imprimés & manuſcrits , fur laquelle
font les aîles & autres attributs du Temps ,
fert d'appui au livre que cette femme tient ouvert.
Elle a un pied pofé fur un débris de monument
antique , dont les reftes font épars. Auprès eft
une urne renverfée , d'où fe répand un grand
nombre de médailles .
Légende.
QUANTA FASTORUM GLORIA !
Exergue.
COMES DATUS IXA. OCT. M. DCC. LVII .
Second médaillon ,
Minerve affife , ferrant de fon bras gauche un
vafe aux Armes d'Artois , dans lequel eft planté
un rejetton de lys , qu'elle prend foin de cultiver.
A fes pieds font des trophées relatifs aux Arts &
aux Sciences.
Légende.
CURAT NOBISQUE COLIT.
Exergue.
SOC. LITT . ATR. SPES ET VOT.
Troisieme médaillon.
Les chiffres des Rois Louis VIII & Louis XV,
figurés par deux doubles IL , placés fous une
même couronne , & accompagnées refpectivement
JANVIER. 1758 . 175
des nombres VIII & XV . Un cordon bleu fort de
la couronne , entrelace les deux chiffres , & ſe
termine par un noeud , d'où pendent les Armes de
Monfeigneur le Comte d'Artois ( 1 ) .
Légende.
AB EVO IN ÆVUM.
Exergue.
DECUS FUNDATUM ET RESTITUTUM.
Le même jour 6 Novembre , vers les dix heures
du foir , il y eut dans la grande falle de l'Hôtel
de Ville , qu'on avoit fuperbement décorée , un
bal qui fut ouvert par M. l'Intendant avec Madame
la Comteffe de Houchin , épouse du Député
ordinaire de la Nobleffe des Etats . On y fervit
fur des buffets en gradins , un ambigu fuffifant
pour fatisfaire les goûts divers de deux mille perfonnes
au moins qui fe trouverent à ce bal .
Les Etats d'Artois différerent jufqu'à l'ouverture
de leur Affemblée générale , la folemnité de
leurs actions de graces & de leurs réjouiflances ,
afin que tous les Membres des trois Ordres fuflent
à portée d'y participer. Ce fut le lundi 21 Novembre
que le fit cette ouverture ; & après la
féance , qui fe tint dans la forme ordinaire fur les
dix heures du matin , on chanta dans l'Eglife des
Récollets un Te Deum en mufique , auquel M.
(1) Louis VIII , par fon Teftament du mois de
Juin 1225 , affigna l'Artois en partage à Robert
fon fecond fils , frere de S. Louis , de qui defcend la
branche de Bourbon. Depuis ce Robert , premier
Comte d'Artois , aucun fils de France n'en avoit
porté le titre.
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE .
l'Evêque d'Arras officia pontificalement. M. fe
Duc de Chaulnes , Gouverneur de la Province ;
M. l'Intendant , & M. Briois , Premier Préfident
du Confeil Provincial , Commiffaires du Roi pour
la tenue des Etats , affifterent à cette cérémonie ,
accompagnés de tous les Membres de l'Affemblée.
Il y eut enfuite un magnifique dîner de deux cens
vingt-cinq couverts, auquel tous les Corps avoient
été invités. Sur la fin du repas , on but avec appareil
les fantés du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
& du nouveau Prince , qui furent annoncées
fucceffivement par des falves de boîtes & d'artillerie
; & les Députés ordinaires jetterent de l'argent
au peuple. Dès que la nuit fut venue , on tira
avec toute la réuffite poffible , un très- beau Feu
d'artifice au milieu de la grande place.
Ce feu avoit la forme d'un temple , dont le
premier
étage , quarré & élevé d'environ fept pieds
au deffus du pavé , fervoit de focle à tout l'édifice.
Quatre grandes rampes de dix marches occupoient
le milieu de chaque face , & conduifoient
à une galerie fermée de panneaux & d'acroteres
enrichis d'Armes du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
, & de Monfeigneur le Comte d'Artois , ainfi
que des Chiffres de la province.
Le principal corps établi fur le premier étage
avoit huit côtés , dont quatre plus larges que les
autres , faifant faillie & avant- corps , formoient
des portiques , & répondoient aux rampes. Aux
entrées de ces portiques étoient les figures fymboliques
de la fincérité & de la fidélité , qui caractérifent
les Artéfiens , & celles de la reconnoiffance
& de l'espérance , fentimens dont ce peuple eft
particuliérement affecté dans la circonftance préfente.
Les quatre côtés enfoncés étoient ornés de
iches , avec d'autres figures qui défignoient les
JANVIER. 1758. 177
Vertus protectrices du jeune Prince ; fçavoir , la
Religion , la Bonté , la Valeur & la Prudence.
Des emblêmes relatifs à ces vertus rempliffoient
le deffus des niches. La décoration générale de
toute cette partie étoit un ordre Ionique régulier ,
dont l'entablement faillant foutenoit une baluftrade
mêlée d'acroteres , fur chacun defquels on
voyoit des grouppes d'enfans , qui fembloient , en
exprimant leur joie , difputer à qui porteroit les
Armes du Roi , & celles des autres perfonnes de
la Famille Royale.
Sur le deuxieme étage étoit pofé un attique à
quatre faces , dont trois préfentoient des tableaux
emblématiques , & l'autre contenoir cette infcription
:
NOVO ARTESIA COMITI
Il y avoit des pilaftres aux angles de ce corps
d'architecture avec un entablement en faillie ,
lequel étoit couronné de quatre vafes de ronde
bolle. Une pyramide en mofaïque évidée , s'élevoit
fur l'attique qui lui fervoit de baſe , & portoit
fur fa cime les Armes d'Artois , furmontées
d'un foleil .
Aux quatre coins du temple , & à une diſtance
convenable , étoient de grands obéliſques décorés,
de chiffres , de médaillons , &c.
Toutes les parties de l'édifice étoient peintes
en grifaille , à l'exception des tableaux & des
emblêmes , qui l'étoient en camayeu de couleur
bleue. Mais cette fimplicité étoit relevée par l'éclat
de l'or répandu fur les armoiries , les infcriptions
, les cartouches , les guirlandes ; fur la pyramide
, fur les vafes , & fur tous les ornemens
où l'on avoit pu l'employer avec goût.
Cet ouvrage fut exécuté par les foins & fur les
Hy
178 MERCURE DE FRANCE.
deffeins du fieur Linque , Architecte , natif & hæ
bitant d'Arras.
Les Commiffaires de Sa Majesté & les Etats
virent jouer l'artifice d'un amphithéâtre dreffé à
l'un des bouts de la place , qui eft une des plus
vaftes du Royaume. Des fanfares de cors , trompettes
& timbales , animerent ce fpectacle , aprèslequel
plufieurs fontaines de vin coulerent pour
le peuple.
Les deux façades de l'Hôtel des Etats furent
illuminés par une quantité immenfe de lamprons
, dont l'arrangement deffinoit , fans confufion
, toute la belle architecture de cet hôtel Dans
un grand tableau tranfparent placé au deffus de
la porte d'entrée , on voyoit Lucine defcendant
du Ciel , & tenant dans fes bras le Prince nouveau-
né. Le Roi montroit à cette Déeffe la Province
d'Artois perſonnifiée qui , d'un air empreffé
, tendoit les mains pour recevoir l'augufte Enfant.
Un rayon de lumiere partant du vifage de
ce nouveau Comte , fe répandoit fur celui de la
Province ; & on lifoit fur une banderole ce chronographe
:
novo spLenDes CIt CoMIte.
A neuf heures du foir commença un concert ,
dans lequel on exécuta plufieurs pieces de mufique
Françoife & Italienne . A ce concert fuccéda
un ambigu pour les Dames , fervi fur deux tables
de foixante perfonnes chacune . La fête fut terminée
par un grand bal , que M. le Duc de
Chaulnes ouvrit avec Madame la Comteffe de
Houchin , & qui dura jufqu'au jour. Rien n'y
fut oublié , foit pour la décoration des trois falles
où l'on danfa , foit pour la maniere dont elles
furent éclairées , foit pour la fymphonie & les
rafraîchiffemens de toute efpece.
JANVIER . 1758. 179
M. l'Evêque d'Arras donna de grands foupers
la veille de l'ouverture & le jour de la clôture
des Etats. Pendant la fête du 21 , on diftribua
abondamment dans fon palais du pain , des viandes
, de la biere , du bois & de Pargent à cinq
cens perfonnes au moins . La maison du Bon
Pafteur , qui renferme plus de cent pauvres filles ,
a éprouvé les mêmes libéralités de la part de ce
Prélat.
Le 6 & le 21 , M. de Briois , Abbé de S. Vaaſt ,
fit tirer beaucoup d'artifice. Il a pareillement
fignalé fa charité , en faisant délivrer aux pauvres
quatre mille pains , du poids de trois livres &
demie:
M. de Caumartin qui , depuis le commencement
de l'Affemblée des Etats avoit donné des
preuves de fa magnificence ordinaire , y ajouta
le Dimanche 27 Novembre un dîner de cent trente
couverts. Ce feftin ne fut que pour les hommes ;
mais environ quatre- vingts Dames fouperent le
même jour à l'intendance , où il y eut audi un
bal qui ne laiffa rien à défirer . M. le premier
Préſident du Confeil d'Artois s'étoit diftingué de
fon côté le jeudi précédent , par un dîner fuivi
d'un bal , qui fut interrompu pour voir un bouquet
d'artifice & une illumination terreftre , formée
avec goût dans le parterre du jardin de ce
Magiftrat. Il fit fervir fur les neuf heures un ambigu
; après lequel il y eut concert , & l'on reprit
le bal qui ne finit qu'avec la nuit.
Enfin le 30 Novembre , les RR. PP. Jéfuites
du College d'Arras firent chanter dans leur Eglife
le Te Deum & l'Exaudiat , par toute la mufique
de la Cathédrale . M. l'Evêque d'Arra y officia ,
& les Etats qu'on avoit invités à la cérémonie ,
affifterent en corps ; après quoi ils pafferent dans
y
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
la falle des Actes , où le R. P. Dubuiffon , Profeffeur
de Rhétorique , leur adreffa une harangue
latine , dont l'objet étoit de féliciter la province
d'Artois fur la naiffance du nouveau Comte.
L'Orateur s'attacha à prouver dans la premiere
partie de fon difcours , qu'il ne pouvoit rien arriver
de plus avantageux à la Province , que de
voir fon nom porté par un Prince de la Maifon de
Bourbon ; & dans la feconde , qu'aucune Province
n'étoit plus digne de cette grace.
Les PP. Jéfuites ont fourni ce jour là de quoi
dîner à douze pauvres familles de chacune des
onze Paroiffes de la Ville. Les écoliers , tant externes
que penfionnaires , qui font de la Congré
gation de la Vierge , ont donné le même jour à
dîner & à fouper aux malheureux détenus dans
les prifons royales , lefquels étoient au nombre
de quarante , les ont fervis eux- mêmes , & leur ont
encore diftribué des aumônes.
Les autres Villes de l'Artois n'ont pas témoi
gné moins d'ardeur que la Capitale à célébrer
une époque fi glorieufe pour la Province ; & de
fimples Bourgades ont donné en cette occafion
les marques les plus éclatantes de leur zele & de
leur alégreffe.
Le Roi a nommé le Maréchal de Tomond ,
pour commander fur les côtes de la Méditerranée .
Sa Majefté a auffi difpofé du commandement de
la Guyenne en faveur du Comte de Langeron
Lieutenant-Général de fes armées , & Elle a donné
au Comte de Gramont , Brigadier d'Infanterie,
& Menin de Monfeigneur le Dauphin , le Commandement
des troupes , dans la partie du Gouvernement
de la Guyenne , qui dépend de la Généralité
d'Aufch.
Sur la démiffion de Madame la Ducheffe d'Antin,
JANVIER. 1758.
181
de la place de Dame du Palais de la Reine , le Roi a
nommé le 25 Novembre Madame la Comteffe de
Clermont-Tonnere pour la remplacer.
Le 27, M. le Comte de Rochechouart prêta ferment
entre les mains du Roi , pour le Gouvernement
de l'Orléannois.
M. Le Duc de Chaulnes étant revenu de l'armée
du Maréchal Duc de Richelieu , pour tenir les
Etats d'Artois , en fit l'ouverture à Arras le 21
Novembre.
à l'occafion de la Naiffance de Monseigneur le
Comte d'Artois.
LA joie que cet événement a répandue dans
l'Artois , ne s'eft pas bornée aux fentimens de
refpect , d'amour & de reconnoiffance que les
Etats de cette Province ont portés jufqu'au pied
du trône , par la députation nombreufe dont le
Mercure de Novembre a fait mention . Cette joie
a encore éclaté par des fêtes qui méritent qu'on
en conferve le fouvenir ; & nous allons détailler
ce qui s'eft paffé en cette conjoncture dans la
Capitale du pays,
Dès le 11 Octobre , jour auquel un Courier du
cabinet vint apporter aux Députés ordinaires des
Etats ( 1 ) , la nouvelle de l'heureux accouchement
de Madame la Dauphine , & du nom donné par
le Roi au Prince nouveau-né , il y eut des illuminations
& autres démonftrations publiques d'alégreffe
, tant aux Etats & à l'Hôtel de Ville , qu'au
Confeil d'Artois , à l'Evêché , à l'Abbaye de Saint-
Vaaft , &c. mais elles ne furent que le prélude
des réjouiffances brillantes qui devoient les fuivre,
M. l'Evêque fixa au Dimanche 6 Novembre , lé
(1 ) Ce font trois perfonnes choifies dans les trois
Corps des Etats , qui réfident à Arras , & font
chargées de l'adminiftration , hors du temps dés
Affemblées,
166 MERCURE DE FRANCE.
"
Te Deum ordonné par le Roi , & publia à ce fujet
un Mandement conçu en ces terines :
Jean de Bonneguize , par la grace de Dien
» & du S. Siège Apoftolique , Evêque d'Arras : à
tous Abbés , Abbeffes , Chapitres , Doyens ,
Paſteurs , Supérieurs & Supérieures des Eglifes
» & Monafteres exempts & non exempts, & à tous
» fideles de notre Dioceſe , falut & bénédiction.
» Le Seigneur , Mes Très- Chers Freres , tient
dans , fes mains , & la deftinée des Maîtres de
» la terre & le fort des Empires. Heureux les Rois
» & les Peuples , quand ils ne l'apprennent qué
par les preuves qu'il leur donne de fon amour
» & de fa protection !
» Tel eft l'avantage dont nous jouiffons , Mes
Très Chers Freres, furtout depuis que l'heureuſe
fécondité de Madame la Dauphine ajoute à tant
» d'autres faveurs du ciel , les bénédictions dont
≫ il comble par elle le Roi & le Royaume . Cha-
» que année nous ramene au pied des Autels pour
» y rendre graces d'un préſent nouveau à un Dieu
» qui véille au repos & à la profpérité de l'Etar.
» Il donne encore aujourd'hui dans le Prince qui
» vient de naître un nouvel appui au trône déjà le
» mieux affermi , & à la Nation la plus heureufe
un gage de plus de la durée de fon bonheur.
i » Mais fi la naiffance de Monfeigneur le Comté
» d'Artois doit être pour toute la France un fujer
» de joié & un objet de reconnoiffance , vous le
fçavez , M. T. C. F. cet événement intéreffe
» particuliérement cette Province ; & le nom de
ce Prince doit lui feul vous rappeller tout ce que
vous devez dans cette circonftance aux bontés
du Roi , ou plutôt aux miféricordes du Seigneur
qui , après avoir mis dans l'ame du Monarque
, l'amour de tous fes Peuples , daigné
JANVIER. 1758. 167
aujourd'hui fixer finguliérement fur nous les regards
de fa tendrefle.
>> Province heureuſe & préférée , hâtons- nous
» de faire éclater notre joie , & de fignaler notre
» reconnoiffance pour un Dieu qui nous diftingue .
» Mais joignons à nos actions de graces pour ce
préfent ineftimable de fa bonté , les prieres les
plus ferventes , pour qu'il daigne nous le con-
>> ferver. Ce Prince eſt , en naiſſant , le fondement
» & l'appui de nos efpérances : qu'il foit pendant
» le cours d'une longue vie , le gage de notre fé-
» licité , & le lien qui refferre de plus en plus les
>> noeuds de cette tendreffe paternelle , dont le Roi
»> nous donne aujourd'hui dans fa perfonne , la
preuve la plus éclatante.
» Demandons au Seigneur de graver de bonne
>> heure dans fon ame les principes inaltérables de
» de bonté & d'humanité qui nous font trouver
» le meilleur des Peres dans le plus grand des
Rois qu'il lui infpire le goût de cette piété tendre
& folide qui fait de la Reine l'exemple de la
Cour & la gloire de la Religion ; qu'il mette
» dans fon coeur le germe des vertus de Monſeigneur
le Dauphin , & de Madame la Dauphine,
»fi dignes l'un & l'autre des bénédictions multipliées
que le Ciel répand fur leur union , & fi
propres à attirer fur le Royaume celles qui peuvent
en perpétuer la gloire , le répos & la
» profpérité.
Puiffe cet augufte Enfant fi précieux à cette
» Province en particulier , devenit , pour notre
bonheur, tous les jours de fa vie , plus parfait, en
fe formant fur de pareils modeles puiffent
> nos neveux avoir des raifons de renouveller fans
» ceffe au Seigneur pour fa confervation les ac-
» tions de graces que nous allons lui rendre pour
fa naiflance,
16S MERCURE DE FRANCE.
» A ces cauſes , après avoir pris l'avis de nos
» Vénérables Freres les Prévôt , Doyen , Cha-
» noines & Chapitre de notre Eglife Cathédrale ,
» nous ordonnons de faire chanter le Te Deum,
>> chacun dans vos Eglifes , avec les folemnités
>> requifes , le premier Dimanche ou jour de
Fête , après que vous aurez reçu notre préſent
>> Mandement , les Officiers , Magiftrats des
>> lieux , & tous autres qu'il appartiendra , invités
» d'y aſſiſter .
» Donné à Arras , en notre Palais Epiſcopal ,
fous notre feing & la fignature de notre Secre-
D taire , le trois Novembre mil fept cens cinquan-
» te-fept » .
JEAN , Evêque d'Arras.
Par Monfeigneur ,
PECHENA , Secrétaire.
Lettre du Roi , à M. l'Evêque d'Arras .
Monfieur l'Evêque d'Arras , la durée du bonheur
de mes fujets étant l'objet de mes voeux les plus
ardens , tous les événemens capables de le perpétuef,
excitent en moi les fentimens que mérite
un peuple toujours empreffé à me donner des
marques de fon zele , de fa fidélité & de fon
amour. Les princes dont il a plu à Dieu de combler
mes fouhaits , affurent la tranquillité dans
mes états. Celui dont matrès chere Fille la Dauphine
vient d'être heureuſement délivrée , eſt un
nouveau don de la providence , & c'eft pour lui
rendre les actions de graces qui lui font dûes , que
je vous fais cette lettre , pour vous dire que mon
intention eft que vous faffiez chanter le Te Deum
dans votre Eglife Cathédrale , & dans toutes les
autres
JANVIERL
169
. 1758.
autres de votre Dioceſe , avec la folemnité requife
, & que vous invitiez d'y affifter tous ceux qu'il
conviendra ; ce que me promettant de votre zele
je ne vous ferai la préfente plus longue , que pour
prier Dieu qu'il vous ait , Mons. l'Evêque d'Arras
, en fa fainte garde. Ecrit à Versailles le 9 Octobre
1757. Signé , LOUIS . Et plus bas , R. de
Voyer. Etfur le repli : à Mons. l'Evêque d'Arras,
Confeiller en mes Confeils .
La fête fut annoncée le au foir par toutes les
cloches de la Ville , que l'on fonna encore le 6 ,
de grand matin. En même temps des falves d'artillerie
& de boîte fe firent entendre , & recommencerent
à différentes reptiles dans le cours de
la journée. Il y eut ce même jour à l'Hôtel de
Ville un dîner fomptueux de plus de quatre-vingts
couverts , où le trouva M. de Caumartin , Intendant
de la Province . On y avoit auffi invité l'Evêque
, l'Abbé de Saint- Vaaft , le Commandant
de la Place , le premier Préfident du Confeil d'Artois
, & la Nobleffe , ainfi qu'un certain nombre
des Officiers de la garnifon , & des autres principaux
Corps , ecclefiaftiques , civils & militaires.
Pendant ce repas , on jetta de l'argent au peuple
& les Magiftrats lui firent diftribuer du pain , des
viandes & du vin. Immédiatement après que la
fanté de Monfeigneur le Comte d'Artois eût été
bue au fon des inftrumens , on préfenta à tous les
convives des exemplaires de la piece fuivante ,
compofée par M Harduin , Avocat , ancien Député
des Etats d'Artois à la Cour , & Secretaire
perpétuel de la Société Littéraire d'Arras.
L. Vol. H
170 MERCURE DE FRANCE .
Sentimens d'un Citoyen d'Arras , fur la Naiffance
de Monfeigneur le Comte d'Artois .
It fort donc aujourd'hui de fon obſcurité ,
Ce Titre qu'autrefois des Héros ont porté ( 1 ).
D'un Enfant de Louis il devient le partage :
Louis , pour couronner notre fidélité ,
Daigne de fon amour nous accorder ce gage .
Vous reprenez enfin votre antique fplendeur ,
Lieux où de Pharamond le brave Succeffeur (1 )
Jetta les fondemens du floriffant Empire
Qui commande à l'Europe , & que le monde admire.
Monarque triomphant , que le Ciel a formé
Pour les vertus & pour la gloire ,
Ton peuple réuni , d'un beau zele animé ,
T'a placé dès long-temps au Temple de mémoire ,
Sous le nom de Roi Bien - Aimé.
Mais lorfque furpaffant toute notre eſpérance ,
Tu veux nous diftinguer de tes autres Sujets ,
Lorfque tu mets pour nous le comble à tes bienfaits
,
Quel nom te donnera notre reconnoiffance !
Plaifirs , volez ici fous mille traits divers :
Que Polymnie & Terpsichore
Célebrent à l'envi le Maître qu'on adore.
(1) Robert I & Robert II, Comtes d'Artois.
(2) Clodion.2
JANVIER.
1758.
171
Qu'un bruit guerrier fe mêle aux plus tendres
concerts :
Que la fiere trompette fonne :
Sur nos murs que la foudre tonne :
Que le falpêtre éclate dans les airs.
Que mille bouche enflammées
Annoncent les tranfports de nos ames charmées
Au bout de ce vafte Univers.
Je vois juſques à
l'Empyrée
S'élevér de rapides feux :
Ainfi vers la voûte azurée
S'élance l'ardeur de nos voeux.
Tels que ces
brillantes étoiles ,
Qui de la nuit perçant les voiles ,
Retombent en foule à nos yeux ,
Sur l'Enfant fi cher à la France
Puiffent
defcendre en
abondance
Les plus riches préfens des Cieux.
Dans le
raviffement où mon ame fe livre ,
En lui déja je vois revivre
Ce Frere vertueux du plus faint de nos Rois ( 1).
A nos ayeux il fit chérir fes loix :
Des cruels
Sarrafins il
confondit la rage :
Prince , lis fes exploits , & deviens fon image ...
Mais pourquoi de l'hiftoire
emprunter le fecours ▸
(1) Robert I, frere de Saint Louis , furnommé
le Bon & le
Vaillant, ‹
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
Pour acquérir une gloire immortelle ,
Il ne te faut d'autre modele
Que ton augufte Ayeul , ou l'Auteur de tes jours.
Illuftre Enfant , auprès du trône
Tu feras de l'Artois le plus ferme foutien :
De Louis & du peuple à qui fa main te donne ,
Tu refferres encor le fortuné lien .
Si tu pouvois juger de notre amour extrêmê
Si tu lifois au fond de notre coeur ,
Ah ! tu t'applaudirois toi- même
Du nom qui fait notre bonheur .
.
On avoit élevé , vis- à-vis de l'Hôtel de Ville ,
un Feu d'artifice , pour lequel on n'avoit épargné
ni foins , ni dépenfe , non plus que pour les illuminations
de cet hôtel , de la haute & admirable
tour qui l'accompagne , & des autres édifices publics
. Tous les particuliers s'étoient auffi empreffés
à illuminer leurs maiſons , d'une maniere qui
répondît à la folemnité du jour ; mais une pluie
continuelle empêcha l'effet de ces préparatifs. On
ne put faire jouer qu'une petite partie de l'artifice
; & le refte fut remis au furlendemain.
L'édifice conftruit pour le feu , fur les deffeins
du fieur Beffara , Architecte de la Ville , étoit
feint de marbre blanc , & avoit s 2 pieds d'élévation
en deux étages , furmontés d'une pyramide
de 33 pieds . Le premier étage ou rez - de - chauffée
étoit un quarré d'ordre dorique , ayant 44 pieds
de face , dont le côté principal offroit un portique
, avec fronton & baluftrade , orné des Armes
du Roi , de Monfeigneur le Dauphin , & de Mon.
feigneur le Comte d'Artois , Une colonnade ioniJANVIER.
1758. 173
que formoit le fecond étage , qui étoit circulaire.
Vingt-quatre vafes à fleurs & trophées d'armes
ou de mufique , fervoient d'amortiffemens aux
deux ordres d'architecture . Cette décoration étoit
femée de chronogrammes ou chronographes
forte d'infcription fort en ufage aux Pays Bas ,
dans laquelle on trouve , en chiffre Romain , par
la réunion de toutes les lettres numérales qu'elle
contient , l'année de l'événement qui en eſt l'objet.
Voici quelques- uns de ces chronographes :
nasCItVŕ CoMes , spLenDor artesIx.
DonVM CLI aC, regIs.
PVLChra FIDel MerCes .
LætVs aMor aCCenDIt Ignes,
Entre les différentes illuminations qui avoient
été préparées , on remarquoit aux croifées de
Pappartement que la Société Littéraire occupe à
l'hôtel du Gouverneur , trois tranfparens , fur
lefquels étoient peints autant de médaillons , imaginés
par M. Camp , Avocat , Membre de cette
Société , & actuellement Député des Etats à lạ
Cour. On croit devoir donner ici la defcription
de ces morceaux de peinture.
Premier Médaillon.
L'hiftoire de l'Artois caractérisée fpécifiquement
par une femme vêtue d'une faie blanche
rayée de pourpre ( 1 ) . Elle a fur la tête une couronne
de laurier , & une plume à la main . Devant
(1 ) Cette espece d'étoffe fe fabriquoit autrefois
par les habitans d'Arras , nommés Atrebates, avec
tant de réputation que les Romains en faifoient
leurs plus magniques habillemens.
Hiij
74 MERCURE DE FRANCE.
elle eft un grand livre ouvert , fur la couverture
duquel fe voyent les Armes de la province . Elle
tient de la main gauche un médaillon portant
celles de Monfeigneur le Comte d'Artois , qu'elle
regarde avec un étonnement mêlé de joie. Une
pile de volumes imprimés & manuſcrits , fur laquelle
font les aîles & autres attributs du Temps ,
fert d'appui au livre que cette femme tient ouvert.
Elle a un pied pofé fur un débris de monument
antique , dont les reftes font épars. Auprès eft
une urne renverfée , d'où fe répand un grand
nombre de médailles .
Légende.
QUANTA FASTORUM GLORIA !
Exergue.
COMES DATUS IXA. OCT. M. DCC. LVII .
Second médaillon ,
Minerve affife , ferrant de fon bras gauche un
vafe aux Armes d'Artois , dans lequel eft planté
un rejetton de lys , qu'elle prend foin de cultiver.
A fes pieds font des trophées relatifs aux Arts &
aux Sciences.
Légende.
CURAT NOBISQUE COLIT.
Exergue.
SOC. LITT . ATR. SPES ET VOT.
Troisieme médaillon.
Les chiffres des Rois Louis VIII & Louis XV,
figurés par deux doubles IL , placés fous une
même couronne , & accompagnées refpectivement
JANVIER. 1758 . 175
des nombres VIII & XV . Un cordon bleu fort de
la couronne , entrelace les deux chiffres , & ſe
termine par un noeud , d'où pendent les Armes de
Monfeigneur le Comte d'Artois ( 1 ) .
Légende.
AB EVO IN ÆVUM.
Exergue.
DECUS FUNDATUM ET RESTITUTUM.
Le même jour 6 Novembre , vers les dix heures
du foir , il y eut dans la grande falle de l'Hôtel
de Ville , qu'on avoit fuperbement décorée , un
bal qui fut ouvert par M. l'Intendant avec Madame
la Comteffe de Houchin , épouse du Député
ordinaire de la Nobleffe des Etats . On y fervit
fur des buffets en gradins , un ambigu fuffifant
pour fatisfaire les goûts divers de deux mille perfonnes
au moins qui fe trouverent à ce bal .
Les Etats d'Artois différerent jufqu'à l'ouverture
de leur Affemblée générale , la folemnité de
leurs actions de graces & de leurs réjouiflances ,
afin que tous les Membres des trois Ordres fuflent
à portée d'y participer. Ce fut le lundi 21 Novembre
que le fit cette ouverture ; & après la
féance , qui fe tint dans la forme ordinaire fur les
dix heures du matin , on chanta dans l'Eglife des
Récollets un Te Deum en mufique , auquel M.
(1) Louis VIII , par fon Teftament du mois de
Juin 1225 , affigna l'Artois en partage à Robert
fon fecond fils , frere de S. Louis , de qui defcend la
branche de Bourbon. Depuis ce Robert , premier
Comte d'Artois , aucun fils de France n'en avoit
porté le titre.
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE .
l'Evêque d'Arras officia pontificalement. M. fe
Duc de Chaulnes , Gouverneur de la Province ;
M. l'Intendant , & M. Briois , Premier Préfident
du Confeil Provincial , Commiffaires du Roi pour
la tenue des Etats , affifterent à cette cérémonie ,
accompagnés de tous les Membres de l'Affemblée.
Il y eut enfuite un magnifique dîner de deux cens
vingt-cinq couverts, auquel tous les Corps avoient
été invités. Sur la fin du repas , on but avec appareil
les fantés du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
& du nouveau Prince , qui furent annoncées
fucceffivement par des falves de boîtes & d'artillerie
; & les Députés ordinaires jetterent de l'argent
au peuple. Dès que la nuit fut venue , on tira
avec toute la réuffite poffible , un très- beau Feu
d'artifice au milieu de la grande place.
Ce feu avoit la forme d'un temple , dont le
premier
étage , quarré & élevé d'environ fept pieds
au deffus du pavé , fervoit de focle à tout l'édifice.
Quatre grandes rampes de dix marches occupoient
le milieu de chaque face , & conduifoient
à une galerie fermée de panneaux & d'acroteres
enrichis d'Armes du Roi , de Monfeigneur le Dauphin
, & de Monfeigneur le Comte d'Artois , ainfi
que des Chiffres de la province.
Le principal corps établi fur le premier étage
avoit huit côtés , dont quatre plus larges que les
autres , faifant faillie & avant- corps , formoient
des portiques , & répondoient aux rampes. Aux
entrées de ces portiques étoient les figures fymboliques
de la fincérité & de la fidélité , qui caractérifent
les Artéfiens , & celles de la reconnoiffance
& de l'espérance , fentimens dont ce peuple eft
particuliérement affecté dans la circonftance préfente.
Les quatre côtés enfoncés étoient ornés de
iches , avec d'autres figures qui défignoient les
JANVIER. 1758. 177
Vertus protectrices du jeune Prince ; fçavoir , la
Religion , la Bonté , la Valeur & la Prudence.
Des emblêmes relatifs à ces vertus rempliffoient
le deffus des niches. La décoration générale de
toute cette partie étoit un ordre Ionique régulier ,
dont l'entablement faillant foutenoit une baluftrade
mêlée d'acroteres , fur chacun defquels on
voyoit des grouppes d'enfans , qui fembloient , en
exprimant leur joie , difputer à qui porteroit les
Armes du Roi , & celles des autres perfonnes de
la Famille Royale.
Sur le deuxieme étage étoit pofé un attique à
quatre faces , dont trois préfentoient des tableaux
emblématiques , & l'autre contenoir cette infcription
:
NOVO ARTESIA COMITI
Il y avoit des pilaftres aux angles de ce corps
d'architecture avec un entablement en faillie ,
lequel étoit couronné de quatre vafes de ronde
bolle. Une pyramide en mofaïque évidée , s'élevoit
fur l'attique qui lui fervoit de baſe , & portoit
fur fa cime les Armes d'Artois , furmontées
d'un foleil .
Aux quatre coins du temple , & à une diſtance
convenable , étoient de grands obéliſques décorés,
de chiffres , de médaillons , &c.
Toutes les parties de l'édifice étoient peintes
en grifaille , à l'exception des tableaux & des
emblêmes , qui l'étoient en camayeu de couleur
bleue. Mais cette fimplicité étoit relevée par l'éclat
de l'or répandu fur les armoiries , les infcriptions
, les cartouches , les guirlandes ; fur la pyramide
, fur les vafes , & fur tous les ornemens
où l'on avoit pu l'employer avec goût.
Cet ouvrage fut exécuté par les foins & fur les
Hy
178 MERCURE DE FRANCE.
deffeins du fieur Linque , Architecte , natif & hæ
bitant d'Arras.
Les Commiffaires de Sa Majesté & les Etats
virent jouer l'artifice d'un amphithéâtre dreffé à
l'un des bouts de la place , qui eft une des plus
vaftes du Royaume. Des fanfares de cors , trompettes
& timbales , animerent ce fpectacle , aprèslequel
plufieurs fontaines de vin coulerent pour
le peuple.
Les deux façades de l'Hôtel des Etats furent
illuminés par une quantité immenfe de lamprons
, dont l'arrangement deffinoit , fans confufion
, toute la belle architecture de cet hôtel Dans
un grand tableau tranfparent placé au deffus de
la porte d'entrée , on voyoit Lucine defcendant
du Ciel , & tenant dans fes bras le Prince nouveau-
né. Le Roi montroit à cette Déeffe la Province
d'Artois perſonnifiée qui , d'un air empreffé
, tendoit les mains pour recevoir l'augufte Enfant.
Un rayon de lumiere partant du vifage de
ce nouveau Comte , fe répandoit fur celui de la
Province ; & on lifoit fur une banderole ce chronographe
:
novo spLenDes CIt CoMIte.
A neuf heures du foir commença un concert ,
dans lequel on exécuta plufieurs pieces de mufique
Françoife & Italienne . A ce concert fuccéda
un ambigu pour les Dames , fervi fur deux tables
de foixante perfonnes chacune . La fête fut terminée
par un grand bal , que M. le Duc de
Chaulnes ouvrit avec Madame la Comteffe de
Houchin , & qui dura jufqu'au jour. Rien n'y
fut oublié , foit pour la décoration des trois falles
où l'on danfa , foit pour la maniere dont elles
furent éclairées , foit pour la fymphonie & les
rafraîchiffemens de toute efpece.
JANVIER . 1758. 179
M. l'Evêque d'Arras donna de grands foupers
la veille de l'ouverture & le jour de la clôture
des Etats. Pendant la fête du 21 , on diftribua
abondamment dans fon palais du pain , des viandes
, de la biere , du bois & de Pargent à cinq
cens perfonnes au moins . La maison du Bon
Pafteur , qui renferme plus de cent pauvres filles ,
a éprouvé les mêmes libéralités de la part de ce
Prélat.
Le 6 & le 21 , M. de Briois , Abbé de S. Vaaſt ,
fit tirer beaucoup d'artifice. Il a pareillement
fignalé fa charité , en faisant délivrer aux pauvres
quatre mille pains , du poids de trois livres &
demie:
M. de Caumartin qui , depuis le commencement
de l'Affemblée des Etats avoit donné des
preuves de fa magnificence ordinaire , y ajouta
le Dimanche 27 Novembre un dîner de cent trente
couverts. Ce feftin ne fut que pour les hommes ;
mais environ quatre- vingts Dames fouperent le
même jour à l'intendance , où il y eut audi un
bal qui ne laiffa rien à défirer . M. le premier
Préſident du Confeil d'Artois s'étoit diftingué de
fon côté le jeudi précédent , par un dîner fuivi
d'un bal , qui fut interrompu pour voir un bouquet
d'artifice & une illumination terreftre , formée
avec goût dans le parterre du jardin de ce
Magiftrat. Il fit fervir fur les neuf heures un ambigu
; après lequel il y eut concert , & l'on reprit
le bal qui ne finit qu'avec la nuit.
Enfin le 30 Novembre , les RR. PP. Jéfuites
du College d'Arras firent chanter dans leur Eglife
le Te Deum & l'Exaudiat , par toute la mufique
de la Cathédrale . M. l'Evêque d'Arra y officia ,
& les Etats qu'on avoit invités à la cérémonie ,
affifterent en corps ; après quoi ils pafferent dans
y
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
la falle des Actes , où le R. P. Dubuiffon , Profeffeur
de Rhétorique , leur adreffa une harangue
latine , dont l'objet étoit de féliciter la province
d'Artois fur la naiffance du nouveau Comte.
L'Orateur s'attacha à prouver dans la premiere
partie de fon difcours , qu'il ne pouvoit rien arriver
de plus avantageux à la Province , que de
voir fon nom porté par un Prince de la Maifon de
Bourbon ; & dans la feconde , qu'aucune Province
n'étoit plus digne de cette grace.
Les PP. Jéfuites ont fourni ce jour là de quoi
dîner à douze pauvres familles de chacune des
onze Paroiffes de la Ville. Les écoliers , tant externes
que penfionnaires , qui font de la Congré
gation de la Vierge , ont donné le même jour à
dîner & à fouper aux malheureux détenus dans
les prifons royales , lefquels étoient au nombre
de quarante , les ont fervis eux- mêmes , & leur ont
encore diftribué des aumônes.
Les autres Villes de l'Artois n'ont pas témoi
gné moins d'ardeur que la Capitale à célébrer
une époque fi glorieufe pour la Province ; & de
fimples Bourgades ont donné en cette occafion
les marques les plus éclatantes de leur zele & de
leur alégreffe.
Le Roi a nommé le Maréchal de Tomond ,
pour commander fur les côtes de la Méditerranée .
Sa Majefté a auffi difpofé du commandement de
la Guyenne en faveur du Comte de Langeron
Lieutenant-Général de fes armées , & Elle a donné
au Comte de Gramont , Brigadier d'Infanterie,
& Menin de Monfeigneur le Dauphin , le Commandement
des troupes , dans la partie du Gouvernement
de la Guyenne , qui dépend de la Généralité
d'Aufch.
Sur la démiffion de Madame la Ducheffe d'Antin,
JANVIER. 1758.
181
de la place de Dame du Palais de la Reine , le Roi a
nommé le 25 Novembre Madame la Comteffe de
Clermont-Tonnere pour la remplacer.
Le 27, M. le Comte de Rochechouart prêta ferment
entre les mains du Roi , pour le Gouvernement
de l'Orléannois.
M. Le Duc de Chaulnes étant revenu de l'armée
du Maréchal Duc de Richelieu , pour tenir les
Etats d'Artois , en fit l'ouverture à Arras le 21
Novembre.
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Résumé : Description des Fêtes données en la ville d'Arras, à l'occasion de la Naissance de Monseigneur le Comte d'Artois.
À l'occasion de la naissance du Comte d'Artois, Arras a organisé des festivités marquantes. Dès l'annonce de la nouvelle le 11 octobre, des illuminations et des salves d'artillerie ont exprimé la joie publique. L'évêque d'Arras a ordonné un Te Deum le 6 novembre, accompagné d'un mandement célébrant la naissance du prince et appelant à la prière pour sa conservation. Le roi a demandé la célébration du Te Deum dans toutes les églises du diocèse. Le jour de la fête, des cloches ont sonné, des salves d'artillerie ont retenti, et un dîner somptueux a été organisé à l'Hôtel de Ville, avec la présence de personnalités locales. Pendant le repas, de l'argent et des vivres ont été distribués au peuple. Une pièce poétique de M. Harduin a été lue, exprimant la joie et la reconnaissance des citoyens d'Arras. Un feu d'artifice et des illuminations étaient prévus, mais la pluie a perturbé leur réalisation. L'édifice pour le feu d'artifice, conçu par l'architecte Beffara, était orné des armes royales et de chronogrammes. La Société Littéraire a exposé des transparents avec des médaillons imaginés par M. Camp, dont le premier représentait l'histoire de l'Artois symbolisée par une femme tenant un médaillon aux armes du Comte d'Artois. Le 6 novembre, un bal a été organisé à l'Hôtel de Ville, décoré somptueusement, avec un buffet pour deux mille personnes. Les États d'Artois ont reporté leurs actions de grâce pour permettre à tous les membres de participer. Le 21 novembre, après une séance solennelle, un Te Deum a été chanté à l'église des Récollets, suivi d'un dîner pour deux cent vingt-cinq personnes. Des salves d'artillerie ont annoncé les santés du Roi, du Dauphin et du nouveau prince, et des pièces d'argent ont été jetées au peuple. Un feu d'artifice en forme de temple a été tiré sur la grande place, illustrant diverses vertus et emblèmes. Les façades de l'Hôtel des États ont été illuminées, et un concert ainsi qu'un bal ont clôturé la fête. Des soupers et distributions de vivres aux pauvres ont été organisés par l'évêque d'Arras et d'autres dignitaires. Le 30 novembre, les Jésuites ont chanté un Te Deum, et une harangue latine a félicité la province pour la naissance du nouveau Comte. D'autres villes de l'Artois ont également célébré cet événement. Par ailleurs, le Roi a nommé de nouveaux commandants pour les côtes de la Méditerranée, la Guyenne, et le Gouvernement de l'Orléannois.
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