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1
p. 168-187
« Une Marquise du plus haut rang (il en est de [...] »
Début :
Une Marquise du plus haut rang (il en est de [...]
Mots clefs :
Bretonne, Étranger, Jalousie, Belles, Rivales, Qu'en dira-t-on, Vertu, Plaisirs, Mari, Opéra, Divertissement, Rendez-vous, Tête à tête
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texteReconnaissance textuelle : « Une Marquise du plus haut rang (il en est de [...] »
Une Marquiſe du plus haut rang ( il en eft de toutesles ſor- tes ) mariée depuis fix ans àun des Principaux Officiers d'un fortgrandPrince , auroit d'affez méchantes heures à paffer par les frequens ſujets qu'il luydon- nede jalousie , fi elle n'avoit la prudence d'accommoder fon cœur à laneceffité deſa fortune.
Ce n'eſt pas qu'il n'
dreffe
'ait de laten-
&une confideration
toute particuliere pour elle ,
mais il ſe laiffe entraîner à un
penchant coquetqu'il ne ſcau- roit'vaincre , & quoy qu'il ne foit pas fort jeune, il est telle- ment ne avec la Galanterie ,
qu'il n'a pu s'en défaire par le Sacrement. Il fautqu'ilvoye les
GALANT. III
Belles. H les régale , les mene à
la Comédie & à l'Opéra , leur donnedes rétes ; &la fage маг- quife , qui ſçait combien l'éclat eſtdangereux avec un mary fur ces fortes de commerces , na
point trouvé de meilleur party à
prendre que celuydien plaifanı ter,&de ſe divertir de ſes Rivales, quandelle en peutdécou- vrir l'intrigue. Le Marquis, qui commence déja à grifonner , a
fait habitude depuis peu avec
tune aimable Bretonne , qui eft venue icy poursuivreun Procés avecſonMary. LaBelle est une de ces Femmes qui ne veulent point eſtre aimées àpetit bruit,
qui trouvent dela gloiredans le fracas , &qui aiment mieux en- tendre dire unpeu de mal d'el les ,quede n'enpoint faire par- ler. Elle n'est pas la ſeulede ce
W
112 LE MERCVRE
caractere , & nous en voyons .
tous les jours quiſemettent peu en peine du Qu'en dira-t-on pourveu qu'elles ſe puiſſent ju- ſtifier àelles-même du coſté de
leur vertu. Les apparences ſont contreelles tant qu'il vous plai- na,l'innocencedeleurs intrigues eſt untémoignage qui les fatis- fait , &n'ayant riende honteux àfe reprocher, ellespretendent que c'eſt une folie de s'aſſujet tir à vivre ſelon le caprice des Sots , qui fans vouloir penetrer les chofes, ne conſultent que leurmalignité dans le jugement qu'ils en font. Voilà l'humeur
delabelleBretonne. Le faſteluy plaift , & elle ne haït pas les Connoiſſancesd'éclat on abeau
en médire , il ſuffit qu'elle foir contented'elle-meſme,pourne pas renoncer aux plaiſirs qu'elle
GALANT. 113
5
J
s'en fait. Vne Viſite du grand
air la rejoüit ; &comme leMar- quis fait affez bonne figure à la Cour , elle s'accommoderoit
fortdes fiennes , fi enles faiſant
trop longues , il ne rompoit pas les meſures qu'elle prend pour ménager trois ou quatreProte- ſtans dont elle aime àſe divertir. Elle en a un Conſeiller , un
autrede profeffion de Bel Efprit (car il luy faut de tout ) & elle trouve moyen de rendre leurs pretentions comptables avec les foins d'unEtranger,dontla fina- ce &l'équipage luy font quel- quefois d'un fortgrand fecours.
LeMary n'y trouve rien àdire.Il aun Procés,qui luy tient plus an cœur que ſa Femme. Les fortes
Sollicitations font des abondan -
ces de Droit , qui ne ſe doivent
jamais negliger ; & de quelque
114 LE MERCVRE maniere que ce puiſſe eſtre,
quandonades lugesàfaire voir,
il est bon de ſe faire desAmis.
Le Marquis n'eut pas veutrois fois la Belle Bretonne , que la Marquiſeſa femme en fut aver- tie. Elle voulutvoir fi elle eſtoir
dignedes affiduitez defonMary,
ſe la fit montrer à l'Eglife , luy trouva de la Beauté ,&jugeant par les agrémens de ſa perſonne que l'attachement du Marquis pourroit avoir de la fuite,elle ne fongea plus qu'à sinformer à
fondde l'efprit &de la condui- te de fa nouvelle Rivale. Elle
'n'eut pas de peine à découvrir ſes habitudes. On luy nommma fur tout l'Etranger,qui luy eſtoit déja connu par la grande dé- penfe , qu'on luy voyoit faire.
Cet éclairciſſement ne luy fuffit pas. Elle pratiqua des Eſpions,
14
-
GALANT. τις qui la ſervirent fi fidellement,
qu'il ne ſe paſſoit plus rien chez la belle Bretonne,dont elle n'eût auſſi-tôt avis. Elle ſcavoit toutes les Viſites que luy rendoit fon Mary,les heures qu'elle mé- nageoit pour le Confeiller,& les teſte-à-teſte que l'Etranger en obtenoit. Sur ces lumieres elle
mouroitd'enviede trouver cette
Rivale en lieu où feignantdene la point connoiſtre , elle puſt luy rendre une partie du cha- grin qu'elle luy cauſoit. L'occa- fion s'en offrit parune rencon- tre fort inopinée. LaMarquiſe ſçavoit que fon Mary avoit re- tenu la Loge du Roy à l'Opéra,
quand ſes Efpions luy viennent dire que la belle Bretonne y al- loit auſſi ,ſans qu'ils euſſent pû découvrir avec qui. La Loge loüée par le Marquisneluyper
116 LE MERCURE
met point de douterque ce ne foit elle qu'il y mene. Elleveut eſtre témoin de ſes manieres
avec elle pendantce Divertiſſe -
ment. La choſe ne luy eſt pas difficile. Elle prendunhabit ne- gligé ;&avecuneſeule ſuivan- te ,elle fe fait ouvrir les troiſie- mes Loges , oppoſées àcelle ou devoit eſtre ſon Mary.. Elle y
trouve un Laquais qui gardoit desPlaces , reconnoiſt ſa livrée;
& s'imaginant qu'il y avoit de l'Avanture,parce que la précau- tionde les faire retenir au troifiéme rang,eſtoit une marque de Rédez-vous,elle prend les fien- nes ſurle méme Banc,&obferve
avecgrand foin ceux qui vien
nent unmoment apres occuper les autres. C'eſtoit l'Etranger avec une Dame , qui ayant ofté deux ou trois fois ſonLoup,tant
GALAN T. 117
E
1
acauſe de l'obſcurité du lieu ,
que dans la penſée qu'elle eût que rien ne luy devoit eſtre ſuſ- pect aux troiſiemes Loges , fit connoiſtre àlaMarquiſe.qu'elle avoit auprésd'elle cette meſme Bretonne , pour quielle croyoit que ſon Mary eût fait garder la Loge du Roy. L'occaſion eſtoit trop favorable pour n'en pas profiter. La Marquiſe demeure maſquée, les laifle joüir quelque moment du teſte-à-teſte , &fe
metenfin adroitemet dela converſation furdes matieres indifferentes. On commenced'allumer les chandelles , on ouvre
la Loge du Roy, le Marquisy
entre avec des Dames qu'il fait placer ; & l'Etranger l'ayant nommé d'abord , & adjoûte qu'il falloit qu'il fuſt toûjours avec les Belles , la Marquiſe
118 LE MERCVRE.
prend la parole , &dit qu'il y .
auroit dequoy faire unVolume de ſes differentes intriguesd'A- mour, fi on les ſçavoit auſſi par- ticulierement qu'elle. En mef- me temps elle commence l'Hi- ſtoire de deux ou trois Femmes, que labelle Bretonne n'é- toit pas fâchée d'écouter , s'i- maginant qu'elle ne viendroit pasjuſqu'àelle,ou que du moins elle ne parleroit que de quel- ques Viſites , qui ne devoient pas avoir fait grand bruit dans le monde. Cependant laMar- quiſe qui avoit ſon but , la vo- yant rire de quelque Avantu- re de fon Mary: ce qu'il ya de plaifant , pourſuit-elle , c'eſt que le bon Marquis , qui donne à
tout,aquité la Cour pourla Pro- vince ; c'eſt àdire qu'il fait pre- fentemet ſon quartier chezMa-
GALANT. : 419
10
16
dame de ***. C'eſt une Bretonne qui a des Amans de toute eſpece , qui les ménage tous àla fois , & qui entr'autres fait fa Dupe d'un Etranger , qu'on tient d'ailleurs honneſte Hom
me , & qui merireroit biende ne pas mettre , comme il fait , ſa tendreſſe à fonds perdu avec uneBelle , qui en aimant d'au- tres queluy,nele confidereque pourla dépenſe qu'il faitauprés d'elle. La Bretonne deſeſperée de ce commencement interrompt la marquiſe , &tâche à
tourner lediſcours ſur l'Opéra.
Mais elle a beau faire, l'Etranger qui eſt bien-aiſedes'éclaircirde cequile regarde,la priede con- tinuer , & malgré les interru- ptions de ſaRivale, la marquiſe informée de toute ſa conduite
par ſes Eſpions , n'oublie rien
د
420 LE MERCVRE
decequiluy eſt arrivé. L'Etran gerconnoîtparlàque quand el- le a quelquefois refusé de paf- ſer l'apreſdînée avec luy , c'eſt parce qu'elle l'avoit déja promi- ſe àunautre, &qu'elle neluy eſt venuë parler depuis huit jours dans ſon Anti-chambre, d'où elle avoitgrandhaſte de le conge- dier, que pour l'empeſcher de voir qu'elle dînoit teſte-à-teſte avec le marquis en l'abſence de ſon Mary. Toutes ces particula- ritez mettent la Bretonne dans
la derniere ſurpriſe , elle croit que le lieu où ils font , donne l'eſprit de Prophetie ou de Re- velation ; & l'Opéra commen- çant , elle feint de l'écouter ,
mais apparemment elle n'eſtoit pas fort en eftat de juger de la bonté de la muſique. La Mar- quiſe fort contente du rôle qu'- elle
i GALANT. 2
3
-
elle avoit joué , s'échapa avant la fin du cinquiéme Acte. Il eſt à croire que l'Etranger,qui étoit demeuré fort réveurdepuisl'ine ſtruction qu'il avoit reçeu,ditde bonnes choſes à la Bretonne
aprés le départ de la marquiſe.
On a ſçeu depuis, qu'ils avoient rompu enſemble , & voila com-- me quelquefois un Rendez- vous de teſte à teſte produn des effets tous contraires à cequ'on s'en promet
Ce n'eſt pas qu'il n'
dreffe
'ait de laten-
&une confideration
toute particuliere pour elle ,
mais il ſe laiffe entraîner à un
penchant coquetqu'il ne ſcau- roit'vaincre , & quoy qu'il ne foit pas fort jeune, il est telle- ment ne avec la Galanterie ,
qu'il n'a pu s'en défaire par le Sacrement. Il fautqu'ilvoye les
GALANT. III
Belles. H les régale , les mene à
la Comédie & à l'Opéra , leur donnedes rétes ; &la fage маг- quife , qui ſçait combien l'éclat eſtdangereux avec un mary fur ces fortes de commerces , na
point trouvé de meilleur party à
prendre que celuydien plaifanı ter,&de ſe divertir de ſes Rivales, quandelle en peutdécou- vrir l'intrigue. Le Marquis, qui commence déja à grifonner , a
fait habitude depuis peu avec
tune aimable Bretonne , qui eft venue icy poursuivreun Procés avecſonMary. LaBelle est une de ces Femmes qui ne veulent point eſtre aimées àpetit bruit,
qui trouvent dela gloiredans le fracas , &qui aiment mieux en- tendre dire unpeu de mal d'el les ,quede n'enpoint faire par- ler. Elle n'est pas la ſeulede ce
W
112 LE MERCVRE
caractere , & nous en voyons .
tous les jours quiſemettent peu en peine du Qu'en dira-t-on pourveu qu'elles ſe puiſſent ju- ſtifier àelles-même du coſté de
leur vertu. Les apparences ſont contreelles tant qu'il vous plai- na,l'innocencedeleurs intrigues eſt untémoignage qui les fatis- fait , &n'ayant riende honteux àfe reprocher, ellespretendent que c'eſt une folie de s'aſſujet tir à vivre ſelon le caprice des Sots , qui fans vouloir penetrer les chofes, ne conſultent que leurmalignité dans le jugement qu'ils en font. Voilà l'humeur
delabelleBretonne. Le faſteluy plaift , & elle ne haït pas les Connoiſſancesd'éclat on abeau
en médire , il ſuffit qu'elle foir contented'elle-meſme,pourne pas renoncer aux plaiſirs qu'elle
GALANT. 113
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s'en fait. Vne Viſite du grand
air la rejoüit ; &comme leMar- quis fait affez bonne figure à la Cour , elle s'accommoderoit
fortdes fiennes , fi enles faiſant
trop longues , il ne rompoit pas les meſures qu'elle prend pour ménager trois ou quatreProte- ſtans dont elle aime àſe divertir. Elle en a un Conſeiller , un
autrede profeffion de Bel Efprit (car il luy faut de tout ) & elle trouve moyen de rendre leurs pretentions comptables avec les foins d'unEtranger,dontla fina- ce &l'équipage luy font quel- quefois d'un fortgrand fecours.
LeMary n'y trouve rien àdire.Il aun Procés,qui luy tient plus an cœur que ſa Femme. Les fortes
Sollicitations font des abondan -
ces de Droit , qui ne ſe doivent
jamais negliger ; & de quelque
114 LE MERCVRE maniere que ce puiſſe eſtre,
quandonades lugesàfaire voir,
il est bon de ſe faire desAmis.
Le Marquis n'eut pas veutrois fois la Belle Bretonne , que la Marquiſeſa femme en fut aver- tie. Elle voulutvoir fi elle eſtoir
dignedes affiduitez defonMary,
ſe la fit montrer à l'Eglife , luy trouva de la Beauté ,&jugeant par les agrémens de ſa perſonne que l'attachement du Marquis pourroit avoir de la fuite,elle ne fongea plus qu'à sinformer à
fondde l'efprit &de la condui- te de fa nouvelle Rivale. Elle
'n'eut pas de peine à découvrir ſes habitudes. On luy nommma fur tout l'Etranger,qui luy eſtoit déja connu par la grande dé- penfe , qu'on luy voyoit faire.
Cet éclairciſſement ne luy fuffit pas. Elle pratiqua des Eſpions,
14
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GALANT. τις qui la ſervirent fi fidellement,
qu'il ne ſe paſſoit plus rien chez la belle Bretonne,dont elle n'eût auſſi-tôt avis. Elle ſcavoit toutes les Viſites que luy rendoit fon Mary,les heures qu'elle mé- nageoit pour le Confeiller,& les teſte-à-teſte que l'Etranger en obtenoit. Sur ces lumieres elle
mouroitd'enviede trouver cette
Rivale en lieu où feignantdene la point connoiſtre , elle puſt luy rendre une partie du cha- grin qu'elle luy cauſoit. L'occa- fion s'en offrit parune rencon- tre fort inopinée. LaMarquiſe ſçavoit que fon Mary avoit re- tenu la Loge du Roy à l'Opéra,
quand ſes Efpions luy viennent dire que la belle Bretonne y al- loit auſſi ,ſans qu'ils euſſent pû découvrir avec qui. La Loge loüée par le Marquisneluyper
116 LE MERCURE
met point de douterque ce ne foit elle qu'il y mene. Elleveut eſtre témoin de ſes manieres
avec elle pendantce Divertiſſe -
ment. La choſe ne luy eſt pas difficile. Elle prendunhabit ne- gligé ;&avecuneſeule ſuivan- te ,elle fe fait ouvrir les troiſie- mes Loges , oppoſées àcelle ou devoit eſtre ſon Mary.. Elle y
trouve un Laquais qui gardoit desPlaces , reconnoiſt ſa livrée;
& s'imaginant qu'il y avoit de l'Avanture,parce que la précau- tionde les faire retenir au troifiéme rang,eſtoit une marque de Rédez-vous,elle prend les fien- nes ſurle méme Banc,&obferve
avecgrand foin ceux qui vien
nent unmoment apres occuper les autres. C'eſtoit l'Etranger avec une Dame , qui ayant ofté deux ou trois fois ſonLoup,tant
GALAN T. 117
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acauſe de l'obſcurité du lieu ,
que dans la penſée qu'elle eût que rien ne luy devoit eſtre ſuſ- pect aux troiſiemes Loges , fit connoiſtre àlaMarquiſe.qu'elle avoit auprésd'elle cette meſme Bretonne , pour quielle croyoit que ſon Mary eût fait garder la Loge du Roy. L'occaſion eſtoit trop favorable pour n'en pas profiter. La Marquiſe demeure maſquée, les laifle joüir quelque moment du teſte-à-teſte , &fe
metenfin adroitemet dela converſation furdes matieres indifferentes. On commenced'allumer les chandelles , on ouvre
la Loge du Roy, le Marquisy
entre avec des Dames qu'il fait placer ; & l'Etranger l'ayant nommé d'abord , & adjoûte qu'il falloit qu'il fuſt toûjours avec les Belles , la Marquiſe
118 LE MERCVRE.
prend la parole , &dit qu'il y .
auroit dequoy faire unVolume de ſes differentes intriguesd'A- mour, fi on les ſçavoit auſſi par- ticulierement qu'elle. En mef- me temps elle commence l'Hi- ſtoire de deux ou trois Femmes, que labelle Bretonne n'é- toit pas fâchée d'écouter , s'i- maginant qu'elle ne viendroit pasjuſqu'àelle,ou que du moins elle ne parleroit que de quel- ques Viſites , qui ne devoient pas avoir fait grand bruit dans le monde. Cependant laMar- quiſe qui avoit ſon but , la vo- yant rire de quelque Avantu- re de fon Mary: ce qu'il ya de plaifant , pourſuit-elle , c'eſt que le bon Marquis , qui donne à
tout,aquité la Cour pourla Pro- vince ; c'eſt àdire qu'il fait pre- fentemet ſon quartier chezMa-
GALANT. : 419
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dame de ***. C'eſt une Bretonne qui a des Amans de toute eſpece , qui les ménage tous àla fois , & qui entr'autres fait fa Dupe d'un Etranger , qu'on tient d'ailleurs honneſte Hom
me , & qui merireroit biende ne pas mettre , comme il fait , ſa tendreſſe à fonds perdu avec uneBelle , qui en aimant d'au- tres queluy,nele confidereque pourla dépenſe qu'il faitauprés d'elle. La Bretonne deſeſperée de ce commencement interrompt la marquiſe , &tâche à
tourner lediſcours ſur l'Opéra.
Mais elle a beau faire, l'Etranger qui eſt bien-aiſedes'éclaircirde cequile regarde,la priede con- tinuer , & malgré les interru- ptions de ſaRivale, la marquiſe informée de toute ſa conduite
par ſes Eſpions , n'oublie rien
د
420 LE MERCVRE
decequiluy eſt arrivé. L'Etran gerconnoîtparlàque quand el- le a quelquefois refusé de paf- ſer l'apreſdînée avec luy , c'eſt parce qu'elle l'avoit déja promi- ſe àunautre, &qu'elle neluy eſt venuë parler depuis huit jours dans ſon Anti-chambre, d'où elle avoitgrandhaſte de le conge- dier, que pour l'empeſcher de voir qu'elle dînoit teſte-à-teſte avec le marquis en l'abſence de ſon Mary. Toutes ces particula- ritez mettent la Bretonne dans
la derniere ſurpriſe , elle croit que le lieu où ils font , donne l'eſprit de Prophetie ou de Re- velation ; & l'Opéra commen- çant , elle feint de l'écouter ,
mais apparemment elle n'eſtoit pas fort en eftat de juger de la bonté de la muſique. La Mar- quiſe fort contente du rôle qu'- elle
i GALANT. 2
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-
elle avoit joué , s'échapa avant la fin du cinquiéme Acte. Il eſt à croire que l'Etranger,qui étoit demeuré fort réveurdepuisl'ine ſtruction qu'il avoit reçeu,ditde bonnes choſes à la Bretonne
aprés le départ de la marquiſe.
On a ſçeu depuis, qu'ils avoient rompu enſemble , & voila com-- me quelquefois un Rendez- vous de teſte à teſte produn des effets tous contraires à cequ'on s'en promet
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Résumé : « Une Marquise du plus haut rang (il en est de [...] »
Le texte raconte l'histoire d'une marquise mariée depuis six ans à un officier principal d'un grand prince. Bien que son mari lui porte affection, il est souvent sujet à des accès de jalousie en raison de son penchant pour la galanterie. La marquise, consciente des dangers de l'éclat dans de tels commerces, décide de se divertir de ses rivales lorsqu'elle en découvre l'intrigue. Le mari de la marquise, le marquis, entretient une relation avec une belle Bretonne venue à la cour pour un procès. Cette femme, qui aime l'éclat et la gloire, ne se soucie pas du qu'en-dira-t-on tant qu'elle peut se justifier à ses propres yeux. Elle fréquente plusieurs amants, dont un conseiller, un bel esprit, et un étranger fortuné. Informée de cette liaison par des espions, la marquise cherche à se venger. Elle découvre que la Bretonne assistera à l'opéra dans la loge du roi, retenue par son mari. Déguisée, elle se place dans une loge opposée et observe la Bretonne en compagnie de l'étranger. Lors de l'entracte, elle engage la conversation et révèle publiquement les infidélités de la Bretonne, mettant en lumière ses différentes liaisons. La Bretonne, désespérée, tente de changer de sujet, mais l'étranger insiste pour en savoir plus. La marquise, bien informée par ses espions, détaille les aventures de la Bretonne, qui finit par être profondément humiliée. La marquise quitte l'opéra avant la fin de la représentation, laissant la Bretonne et l'étranger dans l'embarras.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 567-578
Les Quatre Semblables, Comédie [titre d'après la table]
Début :
Le 5. Mars, les Comédiens Italiens donnerent la premiere Représentation des Quatre Semblables, [...]
Mots clefs :
Coups de bâton, Arlequin, Lélio, Fabrice, Léonore, Hortense, Étranger, Demande, Chrisante, Scapin, Maison, Prison, Naples, Citadin, Épouser, Maître, Valet
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Les Quatre Semblables, Comédie [titre d'après la table]
Le 5. Mars , les Comédiens Italiens donnerent™
la premiere Représentation des Quatre Semblables
, ou les deux Lelio et les deux Arlequins ; ancienne
Piece jouée ici en Prose en 1716. et composée
à l'imitation des Menechmes de Plaute ; Lelio
y joue les deux Lelio comme Arlequins.Arlequin
y joue les deux Arlequins , avec quelque sorte de
difference dans les habits. Le sicur Dominique
vient de mettre cette Piece en Vers François
laquelle a été reçûë très -favorablement du Public
; il y a fait plusieurs changemens , pour s'accommoder
aux regles de ce Théatre , et pour
conserver et mettre dans tout leur jour les situations
picquantes de cette ingénieuse Comédie.
On en jugera par l'Extrait que voicy.
Chrisante .
ACTEURS.
Hortenfe, Fille de Chrisante.
Lisette , Suivante d'Hortense.
Fabrice.
Les deux Lelio , Fils Jumeaux de Fabrice.
Leonore .
Leandre , Frere de Leonore.
Les deux Arlequins , Valets Jumeaux.
Scapin , Aubergiste.
La Scene est à Naples
Chrisante , dont le caractere est simple et in
genu , ouvre la Scene avec Hortense , sa fille , à
qui il demande le sujet de sa mélancolie , et lui
propose
568 MERCURE DE FRANCE
propose , pour la réjouir , des Livres nouveaux
des ajustemens , des bijoux , &c. Lisette , qui
s'impatiente de tous ces raisonnemens qui ne
vont point au fait , lui dit brusquement .
Comment vous n'êtes pas encor assez habile
Pour sçavoir ce que veut une fille nubile ? ...
"
Chrisante dit qu'il n'entend point ce que signifie
ce terme , Lisette le lui explique en disant
que c'est un mary qu'il faut à sa fille . Chrisante
demande quel est l'objet de sa tendresse , et on
lui apprend que c'est Lélio qu'elle aime. Chrisante
dit que son Pere est son ancien ami ; on
l'oblige d'en aller faire la demande , & c.
Hortense remercie Lisette , en ces termes :
Je ne puis trop payer tes soins officieux ;
Tu m'as fort bien instruite
mieux ;
et je m'en trouve
Avant qu'à tes leçons je me fusse prêtée ,
D'une extrême langueur sans cesse tourmentée ,
Je ne connoissois point ce trouble interieur
Qui souvent , malgré moi , s'élevoit dans mon coeur;
De mes fréquens soupirs la douce violence ,
Ces pleurs qui m'échappoient , ces desirs, ce silence,
Cette mélancolie et ces chagrins secrets ,
Ces jours longs écoulez , ces ennuis , ces regrets ,
Enfin de tous les maux ausquels l'Amour expose ,
Sans toi , sans ton secours j'ignorerois la cause
Hortense rentre ; Lisette apperçoit Arlequin ,
son Amant , et lui témoigne le plaisir que sa
présence
MARS. 1733.
569
présence lui cause ; Arlequin lui demande avec
empressement , quand arrivera le jour tant souhaité
de leur mariage , et l'assure qu'elle sera fort
heureuse avec lui , qu'il sera un mari fort commode
, & c.
Et pourvû qu'au logis je fasse bonne chere .
Que je ne manque pas sur tout du nécessaire ,
Qu'il me soit quelquefois permis de m'enyvrer ,
Sans crainte à ton penchant tu pourras te livrer.
Lisette satisfaite , se retire . Lélio arrive et dit à
Arlequin qu'il devient bien rare ; il répond que
c'est son amour pour Lisette qui en est cause ,
&c. Leonore paroît ; Lelio lui fait les protestations
les plus vives , Arlequin P'interrompt et dit
bas à Leonore que son Maître ne pense pas sérieusement
à tout ce qu'il lui dit , de quoi Leonore
est fort allarmée ; Lelio la rassure et lui
témoigne son impatience d'être unie avec elle .
& c.
Fabrice qui survient , arrête Arlequin qui veut
l'éviter , et lui demande la raison pourquoi il ne
voit presque plus son fils Lélio , Arlequin répond
que l'amour qu'il a pour Léonore en est cause ;
Fabrice lui dit qu'il est fort content de cette alliance
, & c.
Il parle ensuite de son autre fils Lelio , dont il
ignore le sort depuis plus de vingt ans qu'il a
quitté la Maison paternelle ; ce souvenir lui arrache
des larmes ; il ajoûte que cette perte fut
cause qu'il quitta Venise sa Patrie , pour venir
s'établir à Naples. Arlequin se rappelle en même
temps le départ de son frere qui avoit suivi Lelio;
Fabrice ne doute point qu'ils ne soient morts
tous deux. Il expose le sujet de la Piece en ces
termes :
570 MERCURE DE FRANCÉ
Tous deux le même jour reçurent là naissance ;
Ils avoient mêmes traits et même ressemblance ,
Ta mere , qui chez moi servoit fidellement ,
Mit au monde deux fils dans le même moment
Tonpere en ressentit une allegresse extrême ,
Et suivant mon exemple il les nomma de même ;
Tonfrere s'appelloit Arlequin comme toi ...
Fabrice ajoûte qu'il veut aussi reprendre un
femme, puisque son fils Lelio épouse Leonore ; i
nomme Hortense , fille de son ami Chrysante
qu'il trouve fort à son gré.
Lelio étranger arrive à Naples avec son Vale
Arlequin aussi étranger , chargé d'une valise
il témoigne la joye qu'il ressent d'être heureuse
ment débarqué , après vingt ans d'absense , i
se livre tout entier à l'espoir de revoir bien
tôt à Venise , sa Patrie , et son pere et son frer
qu'il y a laissez , et ne veut , dit - il , rester qu
deux jours à Naples.
Scapin , qui les reçoit dans son Hôtellerie , le
appelle d'abord par leurs noms , croyant pat
ler à Lelio et à Arlequin qui sont à Naples e
qu'il connoît depuis long - temps , leur fait de
offres de service , & c. Lelio est fort étonné de s
voir déja connu à Naples ; Arlequin ne l'est pa
moins de voir que son Hôte l'appelle mon che
ami , &c. ils arrêtent un Appartement , Arlequi
y porte la valise et ils y commandent à dîner.
Lelio étranger reste snr la Scene , Leonore 1
prenant pour son Amant , vient lui demande
avec empressement s'il a vû son Pere , et l'assur
que son frere Leandre souhaite avec ardeur leu
union. Lelio étonné prend Leonore pour un
Avanturiere et lui répond dans des termes pe
graciou
MARS. 1733:
571
剿
acieux. Leonore irritée , se repent d'avoir été
op crédule , et de n'avoir pas profité des avis
Arlequin et se retire. Leandre , frere de Leopre
, paroît ensuite et court embrasser Lelio en
ippellant son beaufrere futur ; Lelio le désabuse
r le champ en l'assurant qu'il ne sera jamais
n parent , ne le connoissant pas , non plus que
soeur , et se retire avec Arlequin .
Scapin vient avertir Lelio et Arlequin que le
né est prêt , mais il ne trouve personne ; un
oment après Arlequin Citadin arrive et court
abrasser son ami Scapin , qui lui annonce un
ès- bon dîné et qu'il n'a pas oblié les Macarrons.
lequin est charmé de cette agreable nouvelle ,
autant mieux qu'il ne s'y attendoit nullement.
apin lui apporte le dîné dans uu panier court
, qu'Arlequin emporte .
Lelio et Arlequin Etrangers , arrivent ; Lelio
parle que de l'aimable personne qu'il a vûë
promenade et dont les appas ont touché son
eur ; Scapin vient un moment après et demanà
Arlequin si les Macarrons étoient bons ;
lio dit à Scapin de ne pas plaisanter et de le
vir à dîner , celui- cy soutient qu'Arlequin a
porté le dîner , &c. Cette dispute devient trèsve
et finit le premier Acte par des coups de
ton dont Arlequin régale Scapin.
Au second Acte , Fabrice confie à son ami
hrisante , la passion qu'il a pour Hortense sa
le , et le dessein qu'il a de l'épouser ; Chrisante
t fort surpris de cette proposition , d'autant plus
ie sa fille , dit-il , aime Lelio son fils, je venois,
oute-t'il , vous proposer cette alliance ; Fabrice
rejette , d'autant plus que Lélio est sur le point
épouser Leonore, et enfin Chrisante lui dit qu'il
donnera son consentement , pourvû que
le Hortense y donne le sien
572 MERCURE DE FRANCE
Fabrice écrit à Hortense pour lui déclarer son
amour ; il ne sçait comment faire pour lui faire
rendre sa Lettre ; il apperçoit Arlequin Citadin
qui s'en charge, et promet de la rendre ,
nant quatre ducats que Fabrice lui donne.
moyen-
Arlequin va pour rendre la Lettre à Hortense
qui est dabord charmée de voir Arlequin , ne dou
tant nullement qu'il ne vienne de la part de Lelio,
mais elle est bien surprise après avoir lû la Lettre
de voir qu'elle vient de la part de l'Amoureux
Fabrice. La maniere dont cette Lettre est renduë
et lûë et la finesse avec laquelle cette Scene est
jouée par la Dile Silvia et par le sieur Thomassin
, fait un extrême plaisir . Hortense régale le
Porteur de coups de bâton , et lui ordonne de porter
cette réponse à Fabrice , lequel arrivant dans
le moment , demande avec empressement des
nouvelles de sa Lettre ; Arlequin l'assure qu'Hortense
l'a reçûë avec de grands transports de joye
et ajoûte :
Que mon sort est heureux !
J'aipú , m'a-t'elle dit , faire naître ses feux!
A mafélicité, non , rien n'est comparable ....
Fabrice , persuadé que c'est de lui qu'Hortense
a parlé , est au comble de sa joye , il récompense
largement Arlequin , mais il est bien surpris en
apprenant qu'Hortense a changé de visage en
lisant la fin de la Lettre et qu'elle a reconnu
qu'elle étoit de lui ; mais enfin a-t'elle fait réponse
, dit Fabrice ? oui , très - exactement ,
pond Arlequin , et en même- temps il rend à ce
Vieillard les coups de bâton dont il a été luimême
régalé. Fabrice transporté de colere contre
ce Valet , jure de s'en yenger ; il trouve un
rémoment
MARS. 1733. 573
rnoment après Arlequin étranger , qu'il charge
de mille coups , abusé par la ressemblance , et
dit en s'en allant ;
Faquin , apprend à me connoître ,
On ne maltraite pas impunément son Maître.
મે
soeur ,
Arlequin étranger est fort étonné de se vois
maltraité sans rime ni raison , son Maître ,
à qui il s'en plaint , n'y peut rien comprendre ,
& c. Lelio dit ensuite qu'il ne veut plus rester
dans l'Auberge de Scapin , à qui il ordonne de
remettre sa valise à son Valet Arlequin , &c .
Léandre , outré du procedé de Lelio avec sa
vient dans le dessein de s'en venger ; il
voit Arlequin étranger , qu'il prend pour le Citadin
, instruit des mauvais discours qu'il a tenus;
le maltraite. Arlequin étranger prend la fuite ;
Lelio Citadin surpris de voir courir Arlequin
avec tant de vitesse , veut l'arrêter , et un instant
après Arlequin Citadin arrive ; Lelio lui demande
par quelle raison il couroit si vîte il n'y a
qu'un moment ; Arlequin ne sçait ce qu'il veut
dire , & c.
Leonore vient faire des reproches à Lelio-
Citadin , sur la maniere dont il l'a reçû ; Lelio
veut en vain se justifier , et ne sçai à quoi
attribuer un si prompt changement ; Leonore le
quitte avec indignation , &c.
Scapin sort de son Auberge et rend à Lelio et
à Arlequin Citadins la Valise qui lui a été remise
par l'autre Lelio , &c. ils ne comprennent
pas pourquoi Scapin leur remet cette Valise ,
qu'Arlequin emporte , en disant qu'il en sera
quitte pour la rendre. Lelio Citadin reste ; plus
s'examine et moins il peut comprendre co
qui
$74 MERCURE DE FRANCE
qui peut lui avoir attiré les reproches de Leonore.
Chrisante appercevant Lelio veut lui parler
et lui proposer sa fille , il ne fait nulle attention
aux discours de Chrisante , tant il est accablé
de chagrin d'avoir pû déplaire à sa Maîtresse;
il se plaint ensuite à Leandre du retardement
de son bonheur , lui témoigne l'impatience qu'il
a d'être uni avec sa soeur , et le prie de le presenter
à elle pour la désabuser de ses soupçons injustes
. Leandre entre avec Lelio chez Leonore
et Arlequin - Citadin reste. Lelio étranger paroît;
Arlequin lui demande pourquoi il quitte si -tôt
Leonore , Lelio croit qu'il veut parler de l'Inconnue
qu'il a rencontrée à la promenade , et
dont il est si éperduement amoureux ; Arlequin
lui dit qu'il parle de Leonore , ce qui irrite fort
Lelio ; il lui ordonne de ne lui en parler jamais ,
et s'en va ; Arlequin reste .
Lelio Citadin sort de la maison de Leonore et
vient apprendre à Arlequin qu'elle est appaisée ,
et qu'elle ne doute plus de sa fidelité ; Arlequin
demande ensuite à son Maître des nouvelles de
P'Inconnue , Lelio ne comprend rien à cette demande
, et lui dit qu'il n'est occupé que de Leonore
, et il rentre dans sa maison , et Arlequin
reste. Lelio Etranger survient et trouve Arlequin
qui lui parle encore de Leonore , de Scapin
, &c. A tous ces discours extravagans Lelio
croit que son Valet est devenu fou, et celuici
croit la même chose de son Maître , &c . Le
Lecteur comprend aisément que toutes ces situations
sont tres- comiques et fort propres à
faire rire le Spectateur de l'erreur dans laquelle
sont tous les Acteurs.
Fabrice , pour se vanger des coups de bâtons
qu'Arlequin Cîtadin lui a donné au commencemeat
MARS. 1733.
ment de l'Acte , fait arrêter Arlequin Etranger
575
par des Archers qui le menent en prison.
Au troisiéme Acte , Hortense , à qui son Pere,
vient d'apprendre que Lelio épouse Leonore, témoigne
la douleur qu'elle en ressent , et voyant
paroître Lelio Etranger, veut se retirer, mais elle
ne sçauroit s'y résoudre à la vûë de son Amant ;
celui -ci la reconnoît pour la personne qu'il a
rencontrée à la promenade ; il l'aborde poliment
et lui fait un compliment des plus gracieux . Hortense
surprise de cette politesse, lui déclare qu'el
le a appris qu'il va bien- tôt épouser Leonore.Lelio
la désabuse et lui declare en même temps la
passion qu'elle lui a inspirée , cet aveu charme,
Hortense. Lelio lui demande son nom et sa demeure
, et ajoûte :
Belle Hortense , l'Amour me soumet à ses Loix ,
Je n'avois pas encor éprouvé sa puissance ,
Et mes premiers soupirs vous doivent leur naissance
•
Hortense étonnée , lui dit que ce n'est que par
l'Hymen qu'il peut obtenir et son coeur et sa
main. Lelio promet de la demander à son Pere
&c.
2
Lelio est fort surpris en rentrant , de voir Arlequin
en prison ; il croit que Scapin l'y a fait
mettre,par rapport à toutes les discussions qu'ils
ont eu ensemble , et promet de l'en retirer,
Chrisante et Fabrice arrivent , ce dernier s'applaudit
d'avoir fait mettre Arlequin en prison
pour les coups de bâton qu'il en a reçus , Arlequin
l'accable d'injures à travers sa grille. Un
moment après Arlequin Citadin arrive , et demande
ses gages à Fabrice ; ils sont fort surpris
de le voir en liberté , Payant vû un instant aupara
376 MERCURE DE FRANCE
paravant dans la prison; il se retire , et l'Etranger
reparoît en prison ; ce qui étonne si fort ces
deux vieillards , qu'ils croyent que c'est un enchantement,
et ils sont bien plus étonnez lorsqu'ils
le revoyent un moment après dans la prison.
Lelio Citadin vient prier son pere de hâter son
bonheur en l'unissant à Leonore ; Fabrice lui
donne avec plaisir son consentement. Lelio apprend
en même- temps à Leonore , qui survient ,
cette agreable nouvelle , et rentre avec elle dans
sa maison. Lelio Etranger arrive presque aussitôt
, et Fabrice lui reproche son impolitesse d'avoir
quitté si-tôt Leonore ; le même Lelio ne
comprend encore rien à ce raisonnement. Il frappe
en même temps chez Hortense et lui dit :
Pour vous prouver l'excès de l'ardeur qui me presse,
Hortense , je suis prêt à remplir ma promesse ,
Acceptez- vous ma main ?
Hortense répond qu'elle en fait tout son bonheun
, Lelio la quitte pour dire aux deux Vieillards
:
Allez dire à present à votre Leonore ,
Que la charmante Hortense est celle que j'adore ,
Et que de notre Hymen vous êtes les témoins ,
Croyez moi , desormais , employez mieux vos
soins.
Chrisante et Fabrice restent interdits , tandis
que Lelio Citadin, sortant de la maison de Leonore,
prie son pere avec instance d'envoyer chercher
le Notaire pour dresser le Contrat ; Fabrice
y consent , mais il demande en même- temps à
SON
MARS. 1733.
577
son fils , si c'est pour Hortense qu'il parle , on
pour Leonare ; Lelio assure que c'est pour Leonore
, et que son pere même ne doit pas l'ignorer,
Fabrice dit qu'il ne comprend plus rien à tant
de contrariétez , et que la tête commence à lui
tourner.
Lelio Etranger sortant de la maison d'Hortense
pour procurer la liberté à son Valet , a dit aux
vieillards qu'il va revenir dans l'instant auprès
de sa chere Hortense ; il revient en effet aussi
tot avec Arlequin qu'il a fait sortir de prison ;
Arlequin voyant Scapin et les deux Vieillards ,
s'emporte encore contre enx , et dit à son Maî→
tre ( en montrant Fabrice ) que c'est lui qui l'a
fait emprisonner. Lelio lui demande quel droit i
asur son Valet , et Fabrice lui demande à son
tour quel est le motif qui l'engage à épouser
deux femmes dans un mêmë jour , et lui dit :
Je suis las à la fin d'éprouver ton caprice :
Pour un homme d'honneur on reconnoît Fabrice.
A ce nom de Fabrice , Lelio étonné , lui dit
Fabrice est votre nom , ah ! vous êtes mon pere.
Fabrice.
Vraiment oui , je le suis , à ce que dit ta mere.
Veus voyez Lelio.
Lelio .
Fabrice .
La grande nouveauté!
Lelio.
Qüi , je suis Lelio , cefils si regretté,
H Qu'
Qu'a toujours poursuivi la Fortune cruelle
Depuis qu'il a quitté la Maison Paternelle.
Cette reconnoissance arrache des larmes à fa¬
brice , qui embrasse tendrement son fils en disant
à son ami Chrisante.
Du plus parfait bonheur le Ciel m'a donc comblé
Le voilà ce cher fils , dont je vous ai parlé ,
Dont la trop longue absence a causé mes allarmes ,
Et qui tarit enfin la source de mes larme:.
Lelio demande à son pere des nouvelles de son
frere ; Arlequin fait la même chose ; ils apprennent
qu'ils sont encore vivans et courent l'un et
l'autre pour les embrasser . Ils reviennent et témoignent
à Fabrice combien ils ont été sensibles
à cette entrevûë. Enfin Lelio supplie son pere de
consentir à son bonheur , en lui permettant d'épouser
sa chere Hortense , puisque son frere doit
épouser Leonore ; le plaisir qu'à Fabrice d'avoir
retrouvé son fils , le fait consentir à tout ; Arlequin
veut aussi , dit - il , celebrer ce grand jous
en épousant son aimable Lisette , ils entrent to
chez Hortense , par où la Piece finit.
la premiere Représentation des Quatre Semblables
, ou les deux Lelio et les deux Arlequins ; ancienne
Piece jouée ici en Prose en 1716. et composée
à l'imitation des Menechmes de Plaute ; Lelio
y joue les deux Lelio comme Arlequins.Arlequin
y joue les deux Arlequins , avec quelque sorte de
difference dans les habits. Le sicur Dominique
vient de mettre cette Piece en Vers François
laquelle a été reçûë très -favorablement du Public
; il y a fait plusieurs changemens , pour s'accommoder
aux regles de ce Théatre , et pour
conserver et mettre dans tout leur jour les situations
picquantes de cette ingénieuse Comédie.
On en jugera par l'Extrait que voicy.
Chrisante .
ACTEURS.
Hortenfe, Fille de Chrisante.
Lisette , Suivante d'Hortense.
Fabrice.
Les deux Lelio , Fils Jumeaux de Fabrice.
Leonore .
Leandre , Frere de Leonore.
Les deux Arlequins , Valets Jumeaux.
Scapin , Aubergiste.
La Scene est à Naples
Chrisante , dont le caractere est simple et in
genu , ouvre la Scene avec Hortense , sa fille , à
qui il demande le sujet de sa mélancolie , et lui
propose
568 MERCURE DE FRANCE
propose , pour la réjouir , des Livres nouveaux
des ajustemens , des bijoux , &c. Lisette , qui
s'impatiente de tous ces raisonnemens qui ne
vont point au fait , lui dit brusquement .
Comment vous n'êtes pas encor assez habile
Pour sçavoir ce que veut une fille nubile ? ...
"
Chrisante dit qu'il n'entend point ce que signifie
ce terme , Lisette le lui explique en disant
que c'est un mary qu'il faut à sa fille . Chrisante
demande quel est l'objet de sa tendresse , et on
lui apprend que c'est Lélio qu'elle aime. Chrisante
dit que son Pere est son ancien ami ; on
l'oblige d'en aller faire la demande , & c.
Hortense remercie Lisette , en ces termes :
Je ne puis trop payer tes soins officieux ;
Tu m'as fort bien instruite
mieux ;
et je m'en trouve
Avant qu'à tes leçons je me fusse prêtée ,
D'une extrême langueur sans cesse tourmentée ,
Je ne connoissois point ce trouble interieur
Qui souvent , malgré moi , s'élevoit dans mon coeur;
De mes fréquens soupirs la douce violence ,
Ces pleurs qui m'échappoient , ces desirs, ce silence,
Cette mélancolie et ces chagrins secrets ,
Ces jours longs écoulez , ces ennuis , ces regrets ,
Enfin de tous les maux ausquels l'Amour expose ,
Sans toi , sans ton secours j'ignorerois la cause
Hortense rentre ; Lisette apperçoit Arlequin ,
son Amant , et lui témoigne le plaisir que sa
présence
MARS. 1733.
569
présence lui cause ; Arlequin lui demande avec
empressement , quand arrivera le jour tant souhaité
de leur mariage , et l'assure qu'elle sera fort
heureuse avec lui , qu'il sera un mari fort commode
, & c.
Et pourvû qu'au logis je fasse bonne chere .
Que je ne manque pas sur tout du nécessaire ,
Qu'il me soit quelquefois permis de m'enyvrer ,
Sans crainte à ton penchant tu pourras te livrer.
Lisette satisfaite , se retire . Lélio arrive et dit à
Arlequin qu'il devient bien rare ; il répond que
c'est son amour pour Lisette qui en est cause ,
&c. Leonore paroît ; Lelio lui fait les protestations
les plus vives , Arlequin P'interrompt et dit
bas à Leonore que son Maître ne pense pas sérieusement
à tout ce qu'il lui dit , de quoi Leonore
est fort allarmée ; Lelio la rassure et lui
témoigne son impatience d'être unie avec elle .
& c.
Fabrice qui survient , arrête Arlequin qui veut
l'éviter , et lui demande la raison pourquoi il ne
voit presque plus son fils Lélio , Arlequin répond
que l'amour qu'il a pour Léonore en est cause ;
Fabrice lui dit qu'il est fort content de cette alliance
, & c.
Il parle ensuite de son autre fils Lelio , dont il
ignore le sort depuis plus de vingt ans qu'il a
quitté la Maison paternelle ; ce souvenir lui arrache
des larmes ; il ajoûte que cette perte fut
cause qu'il quitta Venise sa Patrie , pour venir
s'établir à Naples. Arlequin se rappelle en même
temps le départ de son frere qui avoit suivi Lelio;
Fabrice ne doute point qu'ils ne soient morts
tous deux. Il expose le sujet de la Piece en ces
termes :
570 MERCURE DE FRANCÉ
Tous deux le même jour reçurent là naissance ;
Ils avoient mêmes traits et même ressemblance ,
Ta mere , qui chez moi servoit fidellement ,
Mit au monde deux fils dans le même moment
Tonpere en ressentit une allegresse extrême ,
Et suivant mon exemple il les nomma de même ;
Tonfrere s'appelloit Arlequin comme toi ...
Fabrice ajoûte qu'il veut aussi reprendre un
femme, puisque son fils Lelio épouse Leonore ; i
nomme Hortense , fille de son ami Chrysante
qu'il trouve fort à son gré.
Lelio étranger arrive à Naples avec son Vale
Arlequin aussi étranger , chargé d'une valise
il témoigne la joye qu'il ressent d'être heureuse
ment débarqué , après vingt ans d'absense , i
se livre tout entier à l'espoir de revoir bien
tôt à Venise , sa Patrie , et son pere et son frer
qu'il y a laissez , et ne veut , dit - il , rester qu
deux jours à Naples.
Scapin , qui les reçoit dans son Hôtellerie , le
appelle d'abord par leurs noms , croyant pat
ler à Lelio et à Arlequin qui sont à Naples e
qu'il connoît depuis long - temps , leur fait de
offres de service , & c. Lelio est fort étonné de s
voir déja connu à Naples ; Arlequin ne l'est pa
moins de voir que son Hôte l'appelle mon che
ami , &c. ils arrêtent un Appartement , Arlequi
y porte la valise et ils y commandent à dîner.
Lelio étranger reste snr la Scene , Leonore 1
prenant pour son Amant , vient lui demande
avec empressement s'il a vû son Pere , et l'assur
que son frere Leandre souhaite avec ardeur leu
union. Lelio étonné prend Leonore pour un
Avanturiere et lui répond dans des termes pe
graciou
MARS. 1733:
571
剿
acieux. Leonore irritée , se repent d'avoir été
op crédule , et de n'avoir pas profité des avis
Arlequin et se retire. Leandre , frere de Leopre
, paroît ensuite et court embrasser Lelio en
ippellant son beaufrere futur ; Lelio le désabuse
r le champ en l'assurant qu'il ne sera jamais
n parent , ne le connoissant pas , non plus que
soeur , et se retire avec Arlequin .
Scapin vient avertir Lelio et Arlequin que le
né est prêt , mais il ne trouve personne ; un
oment après Arlequin Citadin arrive et court
abrasser son ami Scapin , qui lui annonce un
ès- bon dîné et qu'il n'a pas oblié les Macarrons.
lequin est charmé de cette agreable nouvelle ,
autant mieux qu'il ne s'y attendoit nullement.
apin lui apporte le dîné dans uu panier court
, qu'Arlequin emporte .
Lelio et Arlequin Etrangers , arrivent ; Lelio
parle que de l'aimable personne qu'il a vûë
promenade et dont les appas ont touché son
eur ; Scapin vient un moment après et demanà
Arlequin si les Macarrons étoient bons ;
lio dit à Scapin de ne pas plaisanter et de le
vir à dîner , celui- cy soutient qu'Arlequin a
porté le dîner , &c. Cette dispute devient trèsve
et finit le premier Acte par des coups de
ton dont Arlequin régale Scapin.
Au second Acte , Fabrice confie à son ami
hrisante , la passion qu'il a pour Hortense sa
le , et le dessein qu'il a de l'épouser ; Chrisante
t fort surpris de cette proposition , d'autant plus
ie sa fille , dit-il , aime Lelio son fils, je venois,
oute-t'il , vous proposer cette alliance ; Fabrice
rejette , d'autant plus que Lélio est sur le point
épouser Leonore, et enfin Chrisante lui dit qu'il
donnera son consentement , pourvû que
le Hortense y donne le sien
572 MERCURE DE FRANCE
Fabrice écrit à Hortense pour lui déclarer son
amour ; il ne sçait comment faire pour lui faire
rendre sa Lettre ; il apperçoit Arlequin Citadin
qui s'en charge, et promet de la rendre ,
nant quatre ducats que Fabrice lui donne.
moyen-
Arlequin va pour rendre la Lettre à Hortense
qui est dabord charmée de voir Arlequin , ne dou
tant nullement qu'il ne vienne de la part de Lelio,
mais elle est bien surprise après avoir lû la Lettre
de voir qu'elle vient de la part de l'Amoureux
Fabrice. La maniere dont cette Lettre est renduë
et lûë et la finesse avec laquelle cette Scene est
jouée par la Dile Silvia et par le sieur Thomassin
, fait un extrême plaisir . Hortense régale le
Porteur de coups de bâton , et lui ordonne de porter
cette réponse à Fabrice , lequel arrivant dans
le moment , demande avec empressement des
nouvelles de sa Lettre ; Arlequin l'assure qu'Hortense
l'a reçûë avec de grands transports de joye
et ajoûte :
Que mon sort est heureux !
J'aipú , m'a-t'elle dit , faire naître ses feux!
A mafélicité, non , rien n'est comparable ....
Fabrice , persuadé que c'est de lui qu'Hortense
a parlé , est au comble de sa joye , il récompense
largement Arlequin , mais il est bien surpris en
apprenant qu'Hortense a changé de visage en
lisant la fin de la Lettre et qu'elle a reconnu
qu'elle étoit de lui ; mais enfin a-t'elle fait réponse
, dit Fabrice ? oui , très - exactement ,
pond Arlequin , et en même- temps il rend à ce
Vieillard les coups de bâton dont il a été luimême
régalé. Fabrice transporté de colere contre
ce Valet , jure de s'en yenger ; il trouve un
rémoment
MARS. 1733. 573
rnoment après Arlequin étranger , qu'il charge
de mille coups , abusé par la ressemblance , et
dit en s'en allant ;
Faquin , apprend à me connoître ,
On ne maltraite pas impunément son Maître.
મે
soeur ,
Arlequin étranger est fort étonné de se vois
maltraité sans rime ni raison , son Maître ,
à qui il s'en plaint , n'y peut rien comprendre ,
& c. Lelio dit ensuite qu'il ne veut plus rester
dans l'Auberge de Scapin , à qui il ordonne de
remettre sa valise à son Valet Arlequin , &c .
Léandre , outré du procedé de Lelio avec sa
vient dans le dessein de s'en venger ; il
voit Arlequin étranger , qu'il prend pour le Citadin
, instruit des mauvais discours qu'il a tenus;
le maltraite. Arlequin étranger prend la fuite ;
Lelio Citadin surpris de voir courir Arlequin
avec tant de vitesse , veut l'arrêter , et un instant
après Arlequin Citadin arrive ; Lelio lui demande
par quelle raison il couroit si vîte il n'y a
qu'un moment ; Arlequin ne sçait ce qu'il veut
dire , & c.
Leonore vient faire des reproches à Lelio-
Citadin , sur la maniere dont il l'a reçû ; Lelio
veut en vain se justifier , et ne sçai à quoi
attribuer un si prompt changement ; Leonore le
quitte avec indignation , &c.
Scapin sort de son Auberge et rend à Lelio et
à Arlequin Citadins la Valise qui lui a été remise
par l'autre Lelio , &c. ils ne comprennent
pas pourquoi Scapin leur remet cette Valise ,
qu'Arlequin emporte , en disant qu'il en sera
quitte pour la rendre. Lelio Citadin reste ; plus
s'examine et moins il peut comprendre co
qui
$74 MERCURE DE FRANCE
qui peut lui avoir attiré les reproches de Leonore.
Chrisante appercevant Lelio veut lui parler
et lui proposer sa fille , il ne fait nulle attention
aux discours de Chrisante , tant il est accablé
de chagrin d'avoir pû déplaire à sa Maîtresse;
il se plaint ensuite à Leandre du retardement
de son bonheur , lui témoigne l'impatience qu'il
a d'être uni avec sa soeur , et le prie de le presenter
à elle pour la désabuser de ses soupçons injustes
. Leandre entre avec Lelio chez Leonore
et Arlequin - Citadin reste. Lelio étranger paroît;
Arlequin lui demande pourquoi il quitte si -tôt
Leonore , Lelio croit qu'il veut parler de l'Inconnue
qu'il a rencontrée à la promenade , et
dont il est si éperduement amoureux ; Arlequin
lui dit qu'il parle de Leonore , ce qui irrite fort
Lelio ; il lui ordonne de ne lui en parler jamais ,
et s'en va ; Arlequin reste .
Lelio Citadin sort de la maison de Leonore et
vient apprendre à Arlequin qu'elle est appaisée ,
et qu'elle ne doute plus de sa fidelité ; Arlequin
demande ensuite à son Maître des nouvelles de
P'Inconnue , Lelio ne comprend rien à cette demande
, et lui dit qu'il n'est occupé que de Leonore
, et il rentre dans sa maison , et Arlequin
reste. Lelio Etranger survient et trouve Arlequin
qui lui parle encore de Leonore , de Scapin
, &c. A tous ces discours extravagans Lelio
croit que son Valet est devenu fou, et celuici
croit la même chose de son Maître , &c . Le
Lecteur comprend aisément que toutes ces situations
sont tres- comiques et fort propres à
faire rire le Spectateur de l'erreur dans laquelle
sont tous les Acteurs.
Fabrice , pour se vanger des coups de bâtons
qu'Arlequin Cîtadin lui a donné au commencemeat
MARS. 1733.
ment de l'Acte , fait arrêter Arlequin Etranger
575
par des Archers qui le menent en prison.
Au troisiéme Acte , Hortense , à qui son Pere,
vient d'apprendre que Lelio épouse Leonore, témoigne
la douleur qu'elle en ressent , et voyant
paroître Lelio Etranger, veut se retirer, mais elle
ne sçauroit s'y résoudre à la vûë de son Amant ;
celui -ci la reconnoît pour la personne qu'il a
rencontrée à la promenade ; il l'aborde poliment
et lui fait un compliment des plus gracieux . Hortense
surprise de cette politesse, lui déclare qu'el
le a appris qu'il va bien- tôt épouser Leonore.Lelio
la désabuse et lui declare en même temps la
passion qu'elle lui a inspirée , cet aveu charme,
Hortense. Lelio lui demande son nom et sa demeure
, et ajoûte :
Belle Hortense , l'Amour me soumet à ses Loix ,
Je n'avois pas encor éprouvé sa puissance ,
Et mes premiers soupirs vous doivent leur naissance
•
Hortense étonnée , lui dit que ce n'est que par
l'Hymen qu'il peut obtenir et son coeur et sa
main. Lelio promet de la demander à son Pere
&c.
2
Lelio est fort surpris en rentrant , de voir Arlequin
en prison ; il croit que Scapin l'y a fait
mettre,par rapport à toutes les discussions qu'ils
ont eu ensemble , et promet de l'en retirer,
Chrisante et Fabrice arrivent , ce dernier s'applaudit
d'avoir fait mettre Arlequin en prison
pour les coups de bâton qu'il en a reçus , Arlequin
l'accable d'injures à travers sa grille. Un
moment après Arlequin Citadin arrive , et demande
ses gages à Fabrice ; ils sont fort surpris
de le voir en liberté , Payant vû un instant aupara
376 MERCURE DE FRANCE
paravant dans la prison; il se retire , et l'Etranger
reparoît en prison ; ce qui étonne si fort ces
deux vieillards , qu'ils croyent que c'est un enchantement,
et ils sont bien plus étonnez lorsqu'ils
le revoyent un moment après dans la prison.
Lelio Citadin vient prier son pere de hâter son
bonheur en l'unissant à Leonore ; Fabrice lui
donne avec plaisir son consentement. Lelio apprend
en même- temps à Leonore , qui survient ,
cette agreable nouvelle , et rentre avec elle dans
sa maison. Lelio Etranger arrive presque aussitôt
, et Fabrice lui reproche son impolitesse d'avoir
quitté si-tôt Leonore ; le même Lelio ne
comprend encore rien à ce raisonnement. Il frappe
en même temps chez Hortense et lui dit :
Pour vous prouver l'excès de l'ardeur qui me presse,
Hortense , je suis prêt à remplir ma promesse ,
Acceptez- vous ma main ?
Hortense répond qu'elle en fait tout son bonheun
, Lelio la quitte pour dire aux deux Vieillards
:
Allez dire à present à votre Leonore ,
Que la charmante Hortense est celle que j'adore ,
Et que de notre Hymen vous êtes les témoins ,
Croyez moi , desormais , employez mieux vos
soins.
Chrisante et Fabrice restent interdits , tandis
que Lelio Citadin, sortant de la maison de Leonore,
prie son pere avec instance d'envoyer chercher
le Notaire pour dresser le Contrat ; Fabrice
y consent , mais il demande en même- temps à
SON
MARS. 1733.
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son fils , si c'est pour Hortense qu'il parle , on
pour Leonare ; Lelio assure que c'est pour Leonore
, et que son pere même ne doit pas l'ignorer,
Fabrice dit qu'il ne comprend plus rien à tant
de contrariétez , et que la tête commence à lui
tourner.
Lelio Etranger sortant de la maison d'Hortense
pour procurer la liberté à son Valet , a dit aux
vieillards qu'il va revenir dans l'instant auprès
de sa chere Hortense ; il revient en effet aussi
tot avec Arlequin qu'il a fait sortir de prison ;
Arlequin voyant Scapin et les deux Vieillards ,
s'emporte encore contre enx , et dit à son Maî→
tre ( en montrant Fabrice ) que c'est lui qui l'a
fait emprisonner. Lelio lui demande quel droit i
asur son Valet , et Fabrice lui demande à son
tour quel est le motif qui l'engage à épouser
deux femmes dans un mêmë jour , et lui dit :
Je suis las à la fin d'éprouver ton caprice :
Pour un homme d'honneur on reconnoît Fabrice.
A ce nom de Fabrice , Lelio étonné , lui dit
Fabrice est votre nom , ah ! vous êtes mon pere.
Fabrice.
Vraiment oui , je le suis , à ce que dit ta mere.
Veus voyez Lelio.
Lelio .
Fabrice .
La grande nouveauté!
Lelio.
Qüi , je suis Lelio , cefils si regretté,
H Qu'
Qu'a toujours poursuivi la Fortune cruelle
Depuis qu'il a quitté la Maison Paternelle.
Cette reconnoissance arrache des larmes à fa¬
brice , qui embrasse tendrement son fils en disant
à son ami Chrisante.
Du plus parfait bonheur le Ciel m'a donc comblé
Le voilà ce cher fils , dont je vous ai parlé ,
Dont la trop longue absence a causé mes allarmes ,
Et qui tarit enfin la source de mes larme:.
Lelio demande à son pere des nouvelles de son
frere ; Arlequin fait la même chose ; ils apprennent
qu'ils sont encore vivans et courent l'un et
l'autre pour les embrasser . Ils reviennent et témoignent
à Fabrice combien ils ont été sensibles
à cette entrevûë. Enfin Lelio supplie son pere de
consentir à son bonheur , en lui permettant d'épouser
sa chere Hortense , puisque son frere doit
épouser Leonore ; le plaisir qu'à Fabrice d'avoir
retrouvé son fils , le fait consentir à tout ; Arlequin
veut aussi , dit - il , celebrer ce grand jous
en épousant son aimable Lisette , ils entrent to
chez Hortense , par où la Piece finit.
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Résumé : Les Quatre Semblables, Comédie [titre d'après la table]
Le 5 mars 1716, les Comédiens Italiens ont présenté 'Les Quatre Semblables', une pièce inspirée des 'Ménéchmes' de Plaute et jouée en prose. Dominique a adapté cette pièce en vers français, introduisant des changements pour respecter les règles du théâtre et accentuer les situations comiques. L'intrigue se déroule à Naples et implique plusieurs personnages principaux, notamment Lelio, Hortense, Fabrice, Chrisante, Arlequin et Leonore. La pièce commence avec Chrisante et sa fille Hortense. Hortense est mélancolique et Lisette, sa suivante, révèle qu'Hortense est amoureuse de Lelio. Chrisante décide alors de demander la main de Lelio pour Hortense. Hortense remercie Lisette pour ses conseils, et Lisette exprime son plaisir de voir son amant Arlequin. Arlequin parle de leur mariage imminent. Lelio arrive et discute avec Arlequin, qui explique que son amour pour Lisette le rend rare. Leonore apparaît et Lelio lui fait des déclarations d'amour. Arlequin interrompt pour dire à Leonore que Lelio ne pense pas sérieusement à ses paroles, ce qui alarme Leonore. Lelio la rassure et exprime son impatience de l'épouser. Fabrice, le père de Lelio, interroge Arlequin sur l'absence de son fils. Arlequin répond que Lelio est amoureux de Leonore, ce qui satisfait Fabrice. Fabrice parle ensuite de son autre fils Lelio, disparu depuis vingt ans, et de son départ de Venise pour Naples. Arlequin se rappelle le départ de son frère, qui avait suivi Lelio. Un Lelio étranger arrive à Naples avec son valet Arlequin, chargé d'une valise. Ils sont accueillis par Scapin, l'aubergiste, qui les confond avec les Lelio et Arlequin locaux. Lelio étranger est surpris d'être reconnu à Naples et Arlequin l'est également. Ils commandent à dîner et restent sur scène. Leonore, prenant Lelio étranger pour son amant, lui demande des nouvelles de son père et exprime le désir de son frère Leandre de les voir unis. Lelio étranger, étonné, la prend pour une aventurière et lui répond de manière peu gracieuse. Leonore, irritée, se retire. Leandre apparaît et embrasse Lelio étranger, qu'il croit être son futur beau-frère. Lelio étranger le détrompe et se retire avec Arlequin. Scapin annonce que le dîner est prêt, mais ne trouve personne. Arlequin Citadin arrive et embrasse Scapin, qui lui annonce un bon dîner avec des macaronis. Arlequin est ravi et emporte le dîner. Lelio et Arlequin étrangers reviennent et discutent avec Scapin, qui les confond avec les autres. Une dispute éclate et se termine par des coups de bâton. Au second acte, Fabrice confie à Chrisante son amour pour Hortense et son désir de l'épouser. Chrisante est surpris, car Hortense aime Lelio. Fabrice rejette cette alliance, car Lelio va épouser Leonore. Chrisante accepte finalement si Hortense est d'accord. Fabrice écrit une lettre à Hortense pour lui déclarer son amour et la confie à Arlequin Citadin. Hortense, surprise, apprend que la lettre vient de Fabrice. Elle régale Arlequin de coups de bâton et lui ordonne de porter une réponse à Fabrice. Fabrice, ravi, récompense Arlequin, mais est surpris d'apprendre qu'Hortense a changé d'expression en lisant la lettre. Arlequin rend à Fabrice les coups de bâton. Fabrice, furieux, maltraite Arlequin étranger par erreur. Lelio étranger décide de quitter l'auberge de Scapin. Leandre, furieux contre Lelio Citadin, maltraite Arlequin étranger. Scapin rend la valise à Lelio et Arlequin Citadins, qui ne comprennent pas. Chrisante propose à Lelio Citadin de l'épouser, mais celui-ci est accablé de chagrin. Lelio Citadin demande à Leandre de le présenter à Leonore pour la désabuser de ses soupçons. Leonore, apaisée, ne doute plus de la fidélité de Lelio Citadin. Lelio étranger et Arlequin Citadin se croisent et se prennent pour fous. Fabrice fait arrêter Arlequin étranger par des archers.
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