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1
p. 106-119
A MESSIEURS De l'Académie royale de Chirurgie.
Début :
MESSIEURS, j'ai lû avec plaisir dans le second volume de l'Académie [...]
Mots clefs :
Académie royale de chirurgie, Chirurgie, Amputation, Moignon, Jambe, Muscles, Accident, Lambeau, Chirurgien
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texteReconnaissance textuelle : A MESSIEURS De l'Académie royale de Chirurgie.
CHIRURGIE.
A MESSIEURS
De l'Académie royale de Chirurgie.
M
ESSIEURS , j'ai lû avec plaific
dans le fecond volume de l'Académie
royale de Chirurgie l'hiftoire - que M.
la Faye fait de l'amputation à lambeau ; il
y détaille avec beaucoup de fagacité les
différens accidens qui accompagnent l'ancienne
méthode ; il montre les efforts
qu'ont fait plufieurs Chirurgiens célebres
pour fe frayer une nouvelle route en confervant
un lambeau de chair pour couvrir
le moignon , éviter la ligature des vaiffeaux
, la faillie de l'os , fon exfoliation ,
former la cicatrice en moins de tems , &
enfin matelaffer le bout de l'os de façon à
parer les différens accidens qui peuvent
accompagner pendant le cours de la vie .
Mais la difficulté d'appliquer exactement
le lambeau de chair fur le bout des os ,
la crainte qu'il ne s'y rencontrât des vuides
qui donnaffent retraite à des épanchemens,
lui a fait inventer un inftrument pour rapprocher
exactement & mollement le lamJUI
N. 1755. 107
beau fur tout le moignon c'eft une perfection
effentielle qui manquoit à cette
méthode.
M. Garangeot ajoûte la ligature des
vaiffeaux dans ce même cas , & fon procedé
feroit jufte s'il la faifoit par l'ancienne
méthode.
M. Louis dont les recherches & la péné
tration font intariffables , nous donne le
détail de nombre d'autres méthodes , dont
les procédés font auffi différens que les
parties qu'il a à amputer le font entr'elles :
il voit la rétraction des muſcles après leur
fection ; il diffeque les portions de ceux
qui ont refté adhérens aux os , il les releve
par une compreffe fendue pour fcier l'os le
plus haut qu'il eft poffible.
M. Vermalle qui étoit Aide-major à
l'hôpital militaire de Landau en 1734 ,
ayant vû pratiquer l'amputation à deux
lambeaux à M. Ravaton , fon confrere ,
telle qu'il la préfenta à Meffieurs de l'Académie
, a imaginé une façon différente
de former ces deux lambeaux , à laquelle on
a donné la préférence , quoique M. Vermalle
n'ait jamais fait cette amputation
que fur un bouchon de liege , fuivant le
rapport de M. Pierron , Gentilhomme de
la chambre de S. A. S. Electorale Palatine,
chargé de l'Imprimerie de ce Prince
E vj
108 MERCURE DE FRANCE.
ami particulier de Monfieur Vermalle.
Tous les efforts qu'on a fait juſqu'aujourd'hui
pour perfectionner l'amputation,
ont eu pour objet de conferver la peau &
couvrir le moignon en moins de tems . Le
même efprit m'a toujours animé , Meffieurs
, & je vous prie d'agréer mes remar
ques für cette partie effentielle de la chirurgie
je ne m'arrêterai pas à parcourir
l'ancienne méthode , tout le monde connoît
les inconvéniens qui l'accompagnent.
Celle à lambeau inventée par M. Lowdan
, que MM. Verduin , Manget , & c.
ont répandue , & que M. la Faye & quelques
autres ont adoptée , paroît du premier
coup d'oeil impraticable aux praticiens . On
fépare les mufcles jumeaux & folaires jufqu'au
tendon d'Achille on coupe
la peau
au deffous de l'attache des mufcles extenfeurs
de la jambe à l'endroit où on veut
fcier l'os , & on releve enfuite le lambeau
pour couvrir le moignon .
Je remarquerai en premier lieu qu'on ne
peut fcier les os de la jambe fans danger
évident de toucher avec les dents de la
fcie au lambeau , d'où doit s'enfuivre des
accidens fâcheux , puifque les chairs qui
auront été déchirées font recouvertes dans
l'inftant.
Les os ne peuvent être fciés fi également
JUIN. 1755. 109
qu'il n'en refte des pointes qui piqueront
& produiront le même effet , le lambeau
devant être rapproché le plus intimement
qu'il eft poffible ; d'où naîtront des irritations
, des gonflemens , des inflammations,
des dépôts , des fufées , qui rendront le
fuccès fort équivoque. Pour répondre à
ces objections ( qui ont déja été faites ) M.
la Faye dit avoir vû des fractures avec ef
quilles qui piquoient les chairs , qui ont
guéri : pour moi je n'ai pas été fi heureux ,
j'ai vu toujours ces piquûres accompagnées
d'accidens plus ou moins fâcheux , qui ne
fe font terminés que par des dépôts , qui
ont procuré l'exfoliation des portions des
os , ou par l'épanchement d'un fuc que
j'appellerai offeux , qui les a émouffés en
les applaniffant par fucceffion de tems ,
ainfi que M. la Faye l'a remarqué au bout
des os amputés depuis long- tems.
Neft- il pas à craindre que ce fang qui
parcourt le lambeau ne foit gêné ou intercepté
dans fa marche il doit l'être au
jarret par l'angle aigu qui forme le lambeau ;
s'il force cet obftacle , il peut l'être par la
compreffion qu'on eft obligé de faire fur
toute fon étendue pour le tenir rapproché
des os ; d'où s'enfuivra la chûte par pourriture
d'une partie ou du lambeau dans
fon entier.
110 MERCURE DE FRANCE.
Peut- on efperer avec confiance que la
nature réunira des fibres mufculaires coupées
fuivant leur longueur , avec celles
qui le font tranfverfalement ? mais la fuppuration
qui doit néceffairement s'établir
dans toute la ſurface interne du lambeau ,
fuivant la fituation qu'on a coutume de
donner aux bleffés , ne pourra s'écouler
que par les parties latérales femi-fupérieures
: n'eft- il pas à craindre qu'elle ne forme
un vuide dans la partie la plus déclive
du lambeau , & qu'elle ne s'y dépofe ?
Mais ce lambeau rapproché fur toute
la furface du moignon eft-il fi juſte qu'on
ne foit forcé d'en couper des morceaux
pour le rendre parallele ? car fans cette
exacte égalité on ne peut efperer de guérifon.
Le lambeau figuré au moignon laiffe
encore un inconvénient également embarraffant
auquel il n'eft pas aifé de remédier
; car la peau qui eft au bord du tibia
doit fe trouver éloignée de celle du lambeau
de toute l'épaiffeur de ce même
lambeau ; elle le fera davantage fi les chairs
la débordent , comme il arrive prefque
toujours après les grandes fuppurations.
Si la fievre furvient & qu'elle foit violente
( ce qui n'eft que trop ordinaire )
tout le bâtiment s'écroule , la fuppuration
JUI N. 1755. IIT
devient féreufe , abondante , la pofition
de la gaîne du tendon d'Achille reftant ,
ainfi que la membrane oedipeufe qui lie les
mufcles les uns avec les autres ; s'exfolie ;
le lambeau s'amincit , & tend à s'éloigner
du moignon , ce qui entraîne néceffairement
fa chûte.
Je fens cependant que fi cette amputation
eft faite à un bon fujet , qu'il n'arrive
point d'accident pendant le cours du traitement
, elle peut réuffir un peu plus dif
ficilement que dans l'ancienne méthode ;
mais il faut qu'elle ait le bonheur d'être
conduite par une main auffi fage & auffi
expérimentée que celle de M. la Faye.
.M. Garangeot qui dit avoir fait plufieurs
fois cette amputation , confeille d'arrêter
l'hémorragie , en appliquant fur l'orifice
des vaiffeaux ouverts un morceau de
gui de chêne , foutenu d'une compreffe
dont le bout fortira par l'un des côtés de
la plaie. S'il avoit fait attention que ce
font des corps étrangers qu'il introduit
dans le centre d'une très-grande plaie , qui
peuvent caufer des accidens très- fâcheux ,
il auroit préféré la ligature faite avec du fil,
felon l'ancien ufage , qui n'en caufe jamais
de confidérables. Par ce coup de maître
il rend l'inftrument propofé par M. la Faye
pour rapprocher le lambeau, inutile , puif112
MERCURE DE FRANCE.
qu'il introduit un corps intermédiaire qui
s'oppose à ce rapprochement.
M. Louis embraffe toutes les façons
d'amputer les membres qui ont été propofées
, & n'en adopte aucune qu'il ne
l'eût remaniée ; il est vrai qu'il le fait avec
grace , mais il fait tout plier à fon imagi
nation : il charge d'une foule d'accidens
les méthodes qu'il lui plaît de profcrire ,
& n'en voit aucun dans celles qu'il adopte
ou qu'il crée ; il voit la rétraction des mufcles
après l'inciſion tranfverfale ; il détache
les portions de ceux qui restent adhé
rens aux os pour le fcier plus haut , & il
croit par cette découverte remédier à fa
faillie de l'os , à fon exfoliation & à la
longueur des fuppurations.
*
J'ai fait quelques amputations de cuiffe ..
& de jambe par l'ancienne méthode : j'ai
pris en opérant les précautions qui font
récommandées ; je n'aijamais apperçu que
la rétraction des muſcles fût fi confidérable
que M. Louis veut l'infinuer , quoique
j'euffe fait lâcher le tourniquet avant de
faire la ligature , pour reconnoître l'orifice .
des vaiffeaux , comme il eft d'ufage . M.
Louis convient que les mufcles adhérens
aux os ne font pas fufceptibles de cette
rétraction ; mais ceux - ci ne font - ils pás
liés intimément avec ceux qui les touchent?
JUIN. 1755. 113
& ne le font- ils pas tous les uns avec les
autres ?
Si la rétraction des mufcles étoit la feule
caufe de la dénudation de l'os après l'amputation
, cette dénudation paroîtroit à
l'inftant qu'ils font coupés ; ce qui n'eft
jamais arrivé , ni ne peut arriver. M. Louis
l'apperçoit cependant dans le cabinet
lorfqu'il fait lâcher de tourniquet ; & il
faudroit pour que cette grande rétraction
s'exécute , qu'il fe fir un déchirement ou
un alongement confidérable des liens qui
uniffent les mufcles les uns avec les autres ,
ce qui n'eft pas probable.
Si ces remarques font autorifées par
l'expérience de tous les tems , & par la
connoiffance des parties , M. Louis ne doit
plus trouver des portions des mufcles à
relever après fon incifion tranfverfale
faite , & il fera forcé de fcier l'os au niveau
des chairs , comme l'ont fait tous
ceux qui l'ont précédé.
Tout le monde fçait qu'un corps élaftique
coupé en travers s'éloigne plus ou
moins du point de fa divifion à proportion
de fa tenfion & de fon élasticité ; ce
principe a fait errer M. Louis : mais les
mufcles ( par exemple ceux de la cuiffe )
ne font que médiocrement tendus lors de
l'amputation ; leur maffe & leurs liaiſons
114 MERCURE DE FRANCE.
intimes femblent s'oppofer à un grand
écartement : il fe forme cependant un jour
lors de leur fection , mais ce n'eft qu'au
bord extérieur par le principe ci - deffus
établi , car pour les muſcles qui avoiſinent
les Os , cet écartement ou cette retraction
eft infiniment moindre. Or comme on ne
peut fcier l'os qu'après que cette rétraction
s'eft faite , & qu'on a coutume de le fcier
le plus près des chairs qu'il eft poffible , s'il
arrive faillie de l'os elle doit reconnoître
une autre cauſe , & il n'y a aucun Chirur
gien , quelque peu verfé qu'il foit dans la
pratique , qui l'ignore.
Lorfqu'on eft forcé d'amputer la cuiffe
par l'ancienne méthode à un fujet gros &
gras , il y aura faillie de l'os, quelque précaution
qu'on prenne pour l'éviter , &
cette faillie fera même plus ou moins confidérable
, à proportion des accidens qu'aura
effuyés le bleflé pendant le cours des
panfemens. Cette propofition paroîtra erronée
à M. Louis ; mais s'il veut avoir la
bonté de jetter les yeux fur la grande furface
que forme cette fection , fur les fuppurations
longues & abondantes qui l'ac
compagnent , fur la fonte des graiffes &
l'exfoliation des membranes , il apperce
vra l'affaiflement de toutes les parties char
nelles , feule & unique caufe de la grande
faillie de l'os.
JUI N. 1755. 115
Si on fuit M. Louis à l'amputation de la
jambe , on le voit conferver un morceau
de peau femi-fphérique fur le tibia , pour
pouvoir plus aisément couvrir le bout de
cet os après qu'il a été fcié : voilà de ces
efforts d'imagination marqués au bon coin
du cabinet , & qui devroient l'être au contraire
par l'expérience fouvent répétée
pour paroître dans un livre auffi refpectable
que le fera toujours celui des Mémoi
res de l'Académie royale de Chirurgie : il
difféque ici la peau , ailleurs les muſcles
adhérens aux os , & il oublie que dans
tout ceci il fait à petit pas la méthode de
l'amputation à deux lambeaux , inventée
par M. Ravaton , Chirurgien- major de
l'hôpital militaire de Landau , ou celle
en deux tems qu'il condamne ailleurs.
Si à la fuite d'une amputation il arrive
faillie de l'os , M. Louis le coupe fans at
tendre fon exfoliation naturelle , qu'on
peut même accélerer par l'application de
l'eau de mercure ; il s'embarraffe peu des
accidens qui fuivent cette fection ; ce qu'en
ont dit les praticiens eft infuffifant ou inintelligible
pour lui , il y eût remédié s'il
eût été préfent : tout eft borgne ou aveu→
gle , il n'y a que M. Louis qui ait deux
bons yeux.
La cicatrice du moignon ne fe forme ,
116 MERCURE DE FRANCE.
felon M. Louis , que par l'alongement des
fibres de la peau qui eft à fa circonférence ;
il eft vrai qu'elle y concourt effentiellement
, mais les chairs y concourent auffi ,
puifqu'on voit tous les jours des portions
de tégumens fe former dans le centre des
grandes plaies , particulierement aux brûlures
étendues & profondes : il feroit fal
cile d'en rapporter des exemples ; mais cé
que la nature fait tous les jours fous les
yeux de l'obfervateur intelligent , n'a pas
befoin de preuves.
M. Vermalle , Chirurgien de S. A. S.
Electorale Palatine , ayant vû pratiquer
l'amputation à deux lambeaux à M. Rava
ton , a imaginé une façon différente de
former ces deux lambeaux ; il pofe à l'or
dinaire le tourniquet , marque au - deſſous
avec un fil l'étendue qu'il veut leur donner
; il enfonce enfuite un biftouri droit
fur le milieu de l'os , & en fait tourner la
pointe à côté & autour de l'os pour former
deux lambeaux égaux , & il les releve
pour fcier l'os , & c.
Il eft impoffible ( la ligature étant pofée
à la cuiffe ) de faire tourner un biſtouri
droit à côté & autour de l'os pour former
deux lambeaux égaux . Faut- il qu'un petit
Chirurgien de province les affure qu'il n'a
jamais pû les former fur le cadavre ? ( il
JUIN 1755 : 117
n'y a que le liege fur lequel on peut
faire
cette manoeuvre ) car enfin il eft palpable.
qu'il y a une impoffibilité morale de fermer
ces deux l'ambeaux , quand bien même
le biſtouri feroit courbe , comme le propofe
M. Louis , & je ne vois d'autre moyen
de remédier à cet obſtacle infurmontable
qu'en rendant le fer foumis à nos com→
mandemens , fi on en trouve le fecret, pour
qu'il fe plie & fe contourne à volonté , &
alors cette méthode pourra s'employer uti
lement aux amputations des cuiffes.
MM. La Faye & Louis s'accordent à
dire que l'amputation à deux lambeaux
propolée par M. Ravaton , qui confifte à
faire une coupe tranfverfale avec le couteau
courbe , & deux incifions latérales
avec le biftonri , à difféquer & relever les
deux lambeaux pour feier l'os le plus haut
qu'il eft poffible , forme une léſion trop
grande pour ne pas attirer des accidens
fâcheux; mais cette léfion ne feroit- elle
pas la même dans la méthode propofée par
M. Vermalle & n'eft - elle pas double dans
celle à lambeau de la jambe , où ces Mefheurs
ont la complaifance de n'en pas appercevoir
aucun ? Dans trente années d'ici
les décifions de ces Meffieurs fur ces matieres
pourront avoir quelque poids ;
mais en vérité pour le préfent ils permet
2
118 MERCURE DE FRANCE.
tront aux Chirurgiens praticiens de ne pas
fuivre aveuglément leurs dogmes qu'ils
ne les aient anatomifés , & pefés au poids
de l'expérience.
J'ai vû pratiquer l'amputation à deux
lambeaux à M. Ravaton avec tout le fuccès
poffible. Les deux incifions latérales
qui effrayent ces Meffieurs , & qui doivent
être caufe , felon eux , de tant d'accidens
fâcheux , font celles au contraire qui re
médient à ces mêmes accidens , en laiſſant
librement couler la matiere de la fuppu
ration , & évitant conféquemment les inflammations
, les gonflemens , les fuſées ,
les dépôts , &c. qui n'arrivent que trop
fouvent dans l'ancienne méthode ; l'os fe
trouve bien enfoncé & bien recouvert des
chairs , plus d'exfoliation : ce moignon
préfentant une moindre furface, fe cicatrife
en moins de tems , & fe trouve pour
toujours à l'abri des différens accidens qui
l'accompagnoient par l'ancienne méthode.
M. Ledran dit dans fon traité d'opérations
de Chirurgie , avoir fait l'amputation
à deux lambeaux d'une cuiffe,fous les
yeux de Meffieurs de l'Académie , & que
cette amputation a été guérie en trois femaines.
M. Louis rapporte que M. Trecour ,
Chirurgien-major du Régiment de PiéJUIN.
1755: 119
mont , l'a pratiquée avec un égal fuccès ;
je l'ai vû faire en Flandres à différens Chirurgiens,
qui ont été émerveillés du peu de
tems qu'ils ont employé à cicatrifer le
moignon . Je l'ai faite moi- même avec tant
d'avantage , que je ne puis trop recommander
aux princes de la Chirurgie de
l'examiner de plus près , afin de la mieux
connoître .
On fera fans doute furpris de me voir
prendre tant d'intérêt aux avantages que
Famputation à deux lambeaux a fur toutes
ces autres méthodes. Cette furpriſe ceffera
lorfqu'on fera informé que je fuis éleve de
M. Ravaton , & que l'humanité , le bien
public & la force de la vérité m'y ont engagé.
M. Ravaton pratique fon amputation à
deux lambeaux à toutes les parties des bras,
des avant-bras , aux cuifles & aux jambes ;
mais ce qui furprendra davantage , c'eft
que fi une maladie au pied demande l'amputation
de la jambe , il coupe cette jambe
près les malléoles ; & par le fecours d'une
bottine le bleffé étant guéri , marche avec
une facilité peu aifée à rendre. Il coupe de
même les doigts des mains & des pieds ; je
l'ai vû emporter le métatarfe , & le malade
eft guéri en peu de tems.
J'ai l'honneur d'être , & c.
A Meziere, le 20 Mars 1755.
A MESSIEURS
De l'Académie royale de Chirurgie.
M
ESSIEURS , j'ai lû avec plaific
dans le fecond volume de l'Académie
royale de Chirurgie l'hiftoire - que M.
la Faye fait de l'amputation à lambeau ; il
y détaille avec beaucoup de fagacité les
différens accidens qui accompagnent l'ancienne
méthode ; il montre les efforts
qu'ont fait plufieurs Chirurgiens célebres
pour fe frayer une nouvelle route en confervant
un lambeau de chair pour couvrir
le moignon , éviter la ligature des vaiffeaux
, la faillie de l'os , fon exfoliation ,
former la cicatrice en moins de tems , &
enfin matelaffer le bout de l'os de façon à
parer les différens accidens qui peuvent
accompagner pendant le cours de la vie .
Mais la difficulté d'appliquer exactement
le lambeau de chair fur le bout des os ,
la crainte qu'il ne s'y rencontrât des vuides
qui donnaffent retraite à des épanchemens,
lui a fait inventer un inftrument pour rapprocher
exactement & mollement le lamJUI
N. 1755. 107
beau fur tout le moignon c'eft une perfection
effentielle qui manquoit à cette
méthode.
M. Garangeot ajoûte la ligature des
vaiffeaux dans ce même cas , & fon procedé
feroit jufte s'il la faifoit par l'ancienne
méthode.
M. Louis dont les recherches & la péné
tration font intariffables , nous donne le
détail de nombre d'autres méthodes , dont
les procédés font auffi différens que les
parties qu'il a à amputer le font entr'elles :
il voit la rétraction des muſcles après leur
fection ; il diffeque les portions de ceux
qui ont refté adhérens aux os , il les releve
par une compreffe fendue pour fcier l'os le
plus haut qu'il eft poffible.
M. Vermalle qui étoit Aide-major à
l'hôpital militaire de Landau en 1734 ,
ayant vû pratiquer l'amputation à deux
lambeaux à M. Ravaton , fon confrere ,
telle qu'il la préfenta à Meffieurs de l'Académie
, a imaginé une façon différente
de former ces deux lambeaux , à laquelle on
a donné la préférence , quoique M. Vermalle
n'ait jamais fait cette amputation
que fur un bouchon de liege , fuivant le
rapport de M. Pierron , Gentilhomme de
la chambre de S. A. S. Electorale Palatine,
chargé de l'Imprimerie de ce Prince
E vj
108 MERCURE DE FRANCE.
ami particulier de Monfieur Vermalle.
Tous les efforts qu'on a fait juſqu'aujourd'hui
pour perfectionner l'amputation,
ont eu pour objet de conferver la peau &
couvrir le moignon en moins de tems . Le
même efprit m'a toujours animé , Meffieurs
, & je vous prie d'agréer mes remar
ques für cette partie effentielle de la chirurgie
je ne m'arrêterai pas à parcourir
l'ancienne méthode , tout le monde connoît
les inconvéniens qui l'accompagnent.
Celle à lambeau inventée par M. Lowdan
, que MM. Verduin , Manget , & c.
ont répandue , & que M. la Faye & quelques
autres ont adoptée , paroît du premier
coup d'oeil impraticable aux praticiens . On
fépare les mufcles jumeaux & folaires jufqu'au
tendon d'Achille on coupe
la peau
au deffous de l'attache des mufcles extenfeurs
de la jambe à l'endroit où on veut
fcier l'os , & on releve enfuite le lambeau
pour couvrir le moignon .
Je remarquerai en premier lieu qu'on ne
peut fcier les os de la jambe fans danger
évident de toucher avec les dents de la
fcie au lambeau , d'où doit s'enfuivre des
accidens fâcheux , puifque les chairs qui
auront été déchirées font recouvertes dans
l'inftant.
Les os ne peuvent être fciés fi également
JUIN. 1755. 109
qu'il n'en refte des pointes qui piqueront
& produiront le même effet , le lambeau
devant être rapproché le plus intimement
qu'il eft poffible ; d'où naîtront des irritations
, des gonflemens , des inflammations,
des dépôts , des fufées , qui rendront le
fuccès fort équivoque. Pour répondre à
ces objections ( qui ont déja été faites ) M.
la Faye dit avoir vû des fractures avec ef
quilles qui piquoient les chairs , qui ont
guéri : pour moi je n'ai pas été fi heureux ,
j'ai vu toujours ces piquûres accompagnées
d'accidens plus ou moins fâcheux , qui ne
fe font terminés que par des dépôts , qui
ont procuré l'exfoliation des portions des
os , ou par l'épanchement d'un fuc que
j'appellerai offeux , qui les a émouffés en
les applaniffant par fucceffion de tems ,
ainfi que M. la Faye l'a remarqué au bout
des os amputés depuis long- tems.
Neft- il pas à craindre que ce fang qui
parcourt le lambeau ne foit gêné ou intercepté
dans fa marche il doit l'être au
jarret par l'angle aigu qui forme le lambeau ;
s'il force cet obftacle , il peut l'être par la
compreffion qu'on eft obligé de faire fur
toute fon étendue pour le tenir rapproché
des os ; d'où s'enfuivra la chûte par pourriture
d'une partie ou du lambeau dans
fon entier.
110 MERCURE DE FRANCE.
Peut- on efperer avec confiance que la
nature réunira des fibres mufculaires coupées
fuivant leur longueur , avec celles
qui le font tranfverfalement ? mais la fuppuration
qui doit néceffairement s'établir
dans toute la ſurface interne du lambeau ,
fuivant la fituation qu'on a coutume de
donner aux bleffés , ne pourra s'écouler
que par les parties latérales femi-fupérieures
: n'eft- il pas à craindre qu'elle ne forme
un vuide dans la partie la plus déclive
du lambeau , & qu'elle ne s'y dépofe ?
Mais ce lambeau rapproché fur toute
la furface du moignon eft-il fi juſte qu'on
ne foit forcé d'en couper des morceaux
pour le rendre parallele ? car fans cette
exacte égalité on ne peut efperer de guérifon.
Le lambeau figuré au moignon laiffe
encore un inconvénient également embarraffant
auquel il n'eft pas aifé de remédier
; car la peau qui eft au bord du tibia
doit fe trouver éloignée de celle du lambeau
de toute l'épaiffeur de ce même
lambeau ; elle le fera davantage fi les chairs
la débordent , comme il arrive prefque
toujours après les grandes fuppurations.
Si la fievre furvient & qu'elle foit violente
( ce qui n'eft que trop ordinaire )
tout le bâtiment s'écroule , la fuppuration
JUI N. 1755. IIT
devient féreufe , abondante , la pofition
de la gaîne du tendon d'Achille reftant ,
ainfi que la membrane oedipeufe qui lie les
mufcles les uns avec les autres ; s'exfolie ;
le lambeau s'amincit , & tend à s'éloigner
du moignon , ce qui entraîne néceffairement
fa chûte.
Je fens cependant que fi cette amputation
eft faite à un bon fujet , qu'il n'arrive
point d'accident pendant le cours du traitement
, elle peut réuffir un peu plus dif
ficilement que dans l'ancienne méthode ;
mais il faut qu'elle ait le bonheur d'être
conduite par une main auffi fage & auffi
expérimentée que celle de M. la Faye.
.M. Garangeot qui dit avoir fait plufieurs
fois cette amputation , confeille d'arrêter
l'hémorragie , en appliquant fur l'orifice
des vaiffeaux ouverts un morceau de
gui de chêne , foutenu d'une compreffe
dont le bout fortira par l'un des côtés de
la plaie. S'il avoit fait attention que ce
font des corps étrangers qu'il introduit
dans le centre d'une très-grande plaie , qui
peuvent caufer des accidens très- fâcheux ,
il auroit préféré la ligature faite avec du fil,
felon l'ancien ufage , qui n'en caufe jamais
de confidérables. Par ce coup de maître
il rend l'inftrument propofé par M. la Faye
pour rapprocher le lambeau, inutile , puif112
MERCURE DE FRANCE.
qu'il introduit un corps intermédiaire qui
s'oppose à ce rapprochement.
M. Louis embraffe toutes les façons
d'amputer les membres qui ont été propofées
, & n'en adopte aucune qu'il ne
l'eût remaniée ; il est vrai qu'il le fait avec
grace , mais il fait tout plier à fon imagi
nation : il charge d'une foule d'accidens
les méthodes qu'il lui plaît de profcrire ,
& n'en voit aucun dans celles qu'il adopte
ou qu'il crée ; il voit la rétraction des mufcles
après l'inciſion tranfverfale ; il détache
les portions de ceux qui restent adhé
rens aux os pour le fcier plus haut , & il
croit par cette découverte remédier à fa
faillie de l'os , à fon exfoliation & à la
longueur des fuppurations.
*
J'ai fait quelques amputations de cuiffe ..
& de jambe par l'ancienne méthode : j'ai
pris en opérant les précautions qui font
récommandées ; je n'aijamais apperçu que
la rétraction des muſcles fût fi confidérable
que M. Louis veut l'infinuer , quoique
j'euffe fait lâcher le tourniquet avant de
faire la ligature , pour reconnoître l'orifice .
des vaiffeaux , comme il eft d'ufage . M.
Louis convient que les mufcles adhérens
aux os ne font pas fufceptibles de cette
rétraction ; mais ceux - ci ne font - ils pás
liés intimément avec ceux qui les touchent?
JUIN. 1755. 113
& ne le font- ils pas tous les uns avec les
autres ?
Si la rétraction des mufcles étoit la feule
caufe de la dénudation de l'os après l'amputation
, cette dénudation paroîtroit à
l'inftant qu'ils font coupés ; ce qui n'eft
jamais arrivé , ni ne peut arriver. M. Louis
l'apperçoit cependant dans le cabinet
lorfqu'il fait lâcher de tourniquet ; & il
faudroit pour que cette grande rétraction
s'exécute , qu'il fe fir un déchirement ou
un alongement confidérable des liens qui
uniffent les mufcles les uns avec les autres ,
ce qui n'eft pas probable.
Si ces remarques font autorifées par
l'expérience de tous les tems , & par la
connoiffance des parties , M. Louis ne doit
plus trouver des portions des mufcles à
relever après fon incifion tranfverfale
faite , & il fera forcé de fcier l'os au niveau
des chairs , comme l'ont fait tous
ceux qui l'ont précédé.
Tout le monde fçait qu'un corps élaftique
coupé en travers s'éloigne plus ou
moins du point de fa divifion à proportion
de fa tenfion & de fon élasticité ; ce
principe a fait errer M. Louis : mais les
mufcles ( par exemple ceux de la cuiffe )
ne font que médiocrement tendus lors de
l'amputation ; leur maffe & leurs liaiſons
114 MERCURE DE FRANCE.
intimes femblent s'oppofer à un grand
écartement : il fe forme cependant un jour
lors de leur fection , mais ce n'eft qu'au
bord extérieur par le principe ci - deffus
établi , car pour les muſcles qui avoiſinent
les Os , cet écartement ou cette retraction
eft infiniment moindre. Or comme on ne
peut fcier l'os qu'après que cette rétraction
s'eft faite , & qu'on a coutume de le fcier
le plus près des chairs qu'il eft poffible , s'il
arrive faillie de l'os elle doit reconnoître
une autre cauſe , & il n'y a aucun Chirur
gien , quelque peu verfé qu'il foit dans la
pratique , qui l'ignore.
Lorfqu'on eft forcé d'amputer la cuiffe
par l'ancienne méthode à un fujet gros &
gras , il y aura faillie de l'os, quelque précaution
qu'on prenne pour l'éviter , &
cette faillie fera même plus ou moins confidérable
, à proportion des accidens qu'aura
effuyés le bleflé pendant le cours des
panfemens. Cette propofition paroîtra erronée
à M. Louis ; mais s'il veut avoir la
bonté de jetter les yeux fur la grande furface
que forme cette fection , fur les fuppurations
longues & abondantes qui l'ac
compagnent , fur la fonte des graiffes &
l'exfoliation des membranes , il apperce
vra l'affaiflement de toutes les parties char
nelles , feule & unique caufe de la grande
faillie de l'os.
JUI N. 1755. 115
Si on fuit M. Louis à l'amputation de la
jambe , on le voit conferver un morceau
de peau femi-fphérique fur le tibia , pour
pouvoir plus aisément couvrir le bout de
cet os après qu'il a été fcié : voilà de ces
efforts d'imagination marqués au bon coin
du cabinet , & qui devroient l'être au contraire
par l'expérience fouvent répétée
pour paroître dans un livre auffi refpectable
que le fera toujours celui des Mémoi
res de l'Académie royale de Chirurgie : il
difféque ici la peau , ailleurs les muſcles
adhérens aux os , & il oublie que dans
tout ceci il fait à petit pas la méthode de
l'amputation à deux lambeaux , inventée
par M. Ravaton , Chirurgien- major de
l'hôpital militaire de Landau , ou celle
en deux tems qu'il condamne ailleurs.
Si à la fuite d'une amputation il arrive
faillie de l'os , M. Louis le coupe fans at
tendre fon exfoliation naturelle , qu'on
peut même accélerer par l'application de
l'eau de mercure ; il s'embarraffe peu des
accidens qui fuivent cette fection ; ce qu'en
ont dit les praticiens eft infuffifant ou inintelligible
pour lui , il y eût remédié s'il
eût été préfent : tout eft borgne ou aveu→
gle , il n'y a que M. Louis qui ait deux
bons yeux.
La cicatrice du moignon ne fe forme ,
116 MERCURE DE FRANCE.
felon M. Louis , que par l'alongement des
fibres de la peau qui eft à fa circonférence ;
il eft vrai qu'elle y concourt effentiellement
, mais les chairs y concourent auffi ,
puifqu'on voit tous les jours des portions
de tégumens fe former dans le centre des
grandes plaies , particulierement aux brûlures
étendues & profondes : il feroit fal
cile d'en rapporter des exemples ; mais cé
que la nature fait tous les jours fous les
yeux de l'obfervateur intelligent , n'a pas
befoin de preuves.
M. Vermalle , Chirurgien de S. A. S.
Electorale Palatine , ayant vû pratiquer
l'amputation à deux lambeaux à M. Rava
ton , a imaginé une façon différente de
former ces deux lambeaux ; il pofe à l'or
dinaire le tourniquet , marque au - deſſous
avec un fil l'étendue qu'il veut leur donner
; il enfonce enfuite un biftouri droit
fur le milieu de l'os , & en fait tourner la
pointe à côté & autour de l'os pour former
deux lambeaux égaux , & il les releve
pour fcier l'os , & c.
Il eft impoffible ( la ligature étant pofée
à la cuiffe ) de faire tourner un biſtouri
droit à côté & autour de l'os pour former
deux lambeaux égaux . Faut- il qu'un petit
Chirurgien de province les affure qu'il n'a
jamais pû les former fur le cadavre ? ( il
JUIN 1755 : 117
n'y a que le liege fur lequel on peut
faire
cette manoeuvre ) car enfin il eft palpable.
qu'il y a une impoffibilité morale de fermer
ces deux l'ambeaux , quand bien même
le biſtouri feroit courbe , comme le propofe
M. Louis , & je ne vois d'autre moyen
de remédier à cet obſtacle infurmontable
qu'en rendant le fer foumis à nos com→
mandemens , fi on en trouve le fecret, pour
qu'il fe plie & fe contourne à volonté , &
alors cette méthode pourra s'employer uti
lement aux amputations des cuiffes.
MM. La Faye & Louis s'accordent à
dire que l'amputation à deux lambeaux
propolée par M. Ravaton , qui confifte à
faire une coupe tranfverfale avec le couteau
courbe , & deux incifions latérales
avec le biftonri , à difféquer & relever les
deux lambeaux pour feier l'os le plus haut
qu'il eft poffible , forme une léſion trop
grande pour ne pas attirer des accidens
fâcheux; mais cette léfion ne feroit- elle
pas la même dans la méthode propofée par
M. Vermalle & n'eft - elle pas double dans
celle à lambeau de la jambe , où ces Mefheurs
ont la complaifance de n'en pas appercevoir
aucun ? Dans trente années d'ici
les décifions de ces Meffieurs fur ces matieres
pourront avoir quelque poids ;
mais en vérité pour le préfent ils permet
2
118 MERCURE DE FRANCE.
tront aux Chirurgiens praticiens de ne pas
fuivre aveuglément leurs dogmes qu'ils
ne les aient anatomifés , & pefés au poids
de l'expérience.
J'ai vû pratiquer l'amputation à deux
lambeaux à M. Ravaton avec tout le fuccès
poffible. Les deux incifions latérales
qui effrayent ces Meffieurs , & qui doivent
être caufe , felon eux , de tant d'accidens
fâcheux , font celles au contraire qui re
médient à ces mêmes accidens , en laiſſant
librement couler la matiere de la fuppu
ration , & évitant conféquemment les inflammations
, les gonflemens , les fuſées ,
les dépôts , &c. qui n'arrivent que trop
fouvent dans l'ancienne méthode ; l'os fe
trouve bien enfoncé & bien recouvert des
chairs , plus d'exfoliation : ce moignon
préfentant une moindre furface, fe cicatrife
en moins de tems , & fe trouve pour
toujours à l'abri des différens accidens qui
l'accompagnoient par l'ancienne méthode.
M. Ledran dit dans fon traité d'opérations
de Chirurgie , avoir fait l'amputation
à deux lambeaux d'une cuiffe,fous les
yeux de Meffieurs de l'Académie , & que
cette amputation a été guérie en trois femaines.
M. Louis rapporte que M. Trecour ,
Chirurgien-major du Régiment de PiéJUIN.
1755: 119
mont , l'a pratiquée avec un égal fuccès ;
je l'ai vû faire en Flandres à différens Chirurgiens,
qui ont été émerveillés du peu de
tems qu'ils ont employé à cicatrifer le
moignon . Je l'ai faite moi- même avec tant
d'avantage , que je ne puis trop recommander
aux princes de la Chirurgie de
l'examiner de plus près , afin de la mieux
connoître .
On fera fans doute furpris de me voir
prendre tant d'intérêt aux avantages que
Famputation à deux lambeaux a fur toutes
ces autres méthodes. Cette furpriſe ceffera
lorfqu'on fera informé que je fuis éleve de
M. Ravaton , & que l'humanité , le bien
public & la force de la vérité m'y ont engagé.
M. Ravaton pratique fon amputation à
deux lambeaux à toutes les parties des bras,
des avant-bras , aux cuifles & aux jambes ;
mais ce qui furprendra davantage , c'eft
que fi une maladie au pied demande l'amputation
de la jambe , il coupe cette jambe
près les malléoles ; & par le fecours d'une
bottine le bleffé étant guéri , marche avec
une facilité peu aifée à rendre. Il coupe de
même les doigts des mains & des pieds ; je
l'ai vû emporter le métatarfe , & le malade
eft guéri en peu de tems.
J'ai l'honneur d'être , & c.
A Meziere, le 20 Mars 1755.
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Résumé : A MESSIEURS De l'Académie royale de Chirurgie.
Le texte examine diverses méthodes d'amputation pratiquées par des chirurgiens de l'Académie royale de Chirurgie. M. la Faye décrit l'amputation à lambeau, visant à conserver un lambeau de chair pour couvrir le moignon et accélérer la cicatrisation. Cependant, il mentionne les difficultés liées à cette méthode, telles que la crainte des vides sous le lambeau et les irritations possibles. M. Garangeot ajoute la ligature des vaisseaux, tandis que M. Louis explore différentes méthodes adaptées aux diverses parties à amputer. M. Vermalle propose une variante de l'amputation à deux lambeaux, observée chez M. Ravaton. Le texte critique les méthodes existantes, soulignant les risques d'inflammation, de suppuration et de chute du lambeau. M. Ravaton pratique une technique d'amputation à deux lambeaux, consistant en une coupe transversale avec un couteau courbe et deux incisions latérales avec un bistouri pour disséquer et relever les lambeaux afin de fixer l'os. Cette méthode est critiquée par M. La Faye et M. Louis pour causer une lésion trop grande et attirer des accidents. Cependant, le narrateur conteste cette critique en affirmant que les incisions latérales permettent de drainer la matière purulente, évitant ainsi les inflammations et les gonflements. Le narrateur rapporte avoir vu cette méthode pratiquée avec succès par plusieurs chirurgiens, y compris M. Ravaton, M. Ledran et M. Trecour, soulignant sa rapidité de cicatrisation et la réduction des risques post-opératoires. Le narrateur, élève de M. Ravaton, recommande vivement l'examen et l'adoption de cette méthode, soulignant son efficacité et ses avantages pour le bien public. M. Ravaton pratique cette amputation sur diverses parties du corps, y compris les bras, les avant-bras, les cuisses, les jambes, et même les doigts des mains et des pieds. Dans le cas d'une amputation de jambe, il coupe près des malléoles, permettant au patient de marcher avec une bottine après guérison.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 120-123
LETTRE de M. Descastans a M. Dupuy, Maître en Chirurgie, Associé de l'Académie de Bordeaux, & Chirurgien-major de l'Hôpital S. André de ladite ville.
Début :
MONSIEUR, j'ai communiqué à mon oncle la lettre que vous m'avez fait [...]
Mots clefs :
Bordeaux, Remèdes, Traitement, Malade, Chirurgie
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LETTRE de M. Descastans a M. Dupuy, Maître en Chirurgie, Associé de l'Académie de Bordeaux, & Chirurgien-major de l'Hôpital S. André de ladite ville.
-LETTRE de M. Defcaftans a M. Dupuy,
Maître en Chirurgie , Affocié de l'Acadé-.
mie de Bordeaux , & Chirurgien -major
de l'Hôpital S. André de ladite ville.
Monde la letreque vous m'avez fait
ONSIEUR, j'ai communiqué à mon
l'honneur de m'écrire . Il a été ført furpris
qu'il y ait des Chirurgiens & autres perfonnes
dans votre province qui prétendent
qu'il foit en relation avec eux & qu'il leur.
fourniffe fes remedes , leurs mauvais fuccès
fans doute doivent détruire cette impofture
; mais il est très-certain que vous êtes
le feul à Bordeaux & dans tout le pays
avec qui il ait des correfpondances. Il vous
fera très- facile de tirer d'erreur ceux qui
yous en parleront ; il ne s'agit que d'exiger
de ces prétendus correfpondans qu'ils montrent
les lettres de M. Daran , qui feules
peuvent certifier leur commerce avec lui ,
ou d'engager ceux qui foupçonneront cette
liaifon , de lui écrire à lui- même , & il ne
manquera pas de leur faire auffi- tôt une
réponſe qui levera tous leurs doutes . Vous
connoiffez la fignature , & il ne fera pas
aifé de vous en impofer . Ce n'eft pas feulement
à Bordeaux que l'on fuppofe ces
•¿ ¿ di armik od vcorrefpondances
JUIN. 1755. 121
correfpondances avec M. Daran . On employe
le même artifice non feulement dans,
toute la France , mais encore dans les pays
étrangers ; d'autres fans avoir recours à
cette rufe , qui leur paroît apparemment
inutile , publient que les remedes dont ils
fe fervent ont été pris chez lui , & c'eſt le
plus grand nombre : ils font répandus en
plufieurs endroits , même à Paris , & ce
qu'il y a de plus étonnant , c'eft que des
gens qui jouiffent d'ailleurs de la plus
grande réputation , fe vantent auffi d'avoir
les mêmes remedes que lui , & ils le perfuadent
d'autant plus facilement , qu'ils fe
font acquis beaucoup de crédit & de confiance
dans le public toujours fi facile à
être trompé. Il eft vrai qu'on fe defabuſe
à la fin , mais c'eſt toujours à ſes dépens
après avoir reconnu par un traitement
long , douloureux & inutile , qu'on auroit
dû d'abord s'adreffer à M. Daran. Il m'eſt
arrivé fouvent en lifant les lettres qu'il
reçoit des malades , d'y trouver qu'ils s'étoient
confiés à des perfonnes qui difoient
tenir de M. Daran lui-même les fondes &
les bougies dont elles faifoient ufage. Ces
malades l'avoient cru bonnement , & le
confultoient fur leur état en lui demandant
ce qui pouvoit avoir empêché leur guérifon
, après qu'ils s'étoient fervis de fes
II. Vol. F
122 MERCURE DE FRANCE. ,
reniedes avec toute l'exactitude poffible &
le plus grand régime : mon oncle fe trouvoit
obligé de leur répondre qu'ils avoient
été trompés , & qu'il n'étoit point du tout
vrai qu'on eût pris les remedes chez lui.
Les malades de leur côté fe voyoient dans
la trifte néceffité de fe foumettre à un nouveau
traitement complet , trop heureux
encore d'en être quittes pour l'inutilité du
premier , & de n'avoir été qu'à demi les
victimes de cette contrebande fi funefte à
tant d'autres .
Mon oncle a reçu des plaintes de quan
tité de perfonnes à qui ces faux remedes
avoient caufé des accidens très - fâcheux.
J'ai cru devoir rendre cette lettre publique
, pour détromper les perfonnes qui ont
intérêt de l'être , & pour mettre un frein
à l'avidité de ceux qui fe croyent permis
d'abufer de la crédulité publique pour leur
profit particulier on fent bien quelles
font les fuites funeftes de cet artifice . Les
malades qui voyent leur état empirer , au
lieu de changer en mieux par l'ufage des
remedes qu'ils croyent de la compofition
de M. Daran , s'imaginent que leur mal
eft incurable , parce qu'il a réfifté aux fecours
qui font généralement reconnus
comme les plus propres pour le guérir , &
tombent dans un defefpoir auffi contraire
JUI N. 1735. 123
:
à leur rétabliſſement qu'affligeant pour
leur famille mais il leur fera facile de
s'épargner un fi cruel embarras , comme
auffi le defagrément d'un traitement repété
, s'ils veulent avant que de fe confier à
qui que ce foit , écrire à M. Daran , pour
fçavoir au jufte fi ceux qui ont entrepris de
les traiter , ont des correfpondances avec
lui . Ils recevront infailliblement une réponſe
qui éclaircira leurs doutes , & les
fauvera du danger où ils s'alloient peutêtre
expofer imprudemment.
J'ai l'honneur d'être , &c.
DESCASTANS.
A Paris , cè 8 Avril 1755•
Maître en Chirurgie , Affocié de l'Acadé-.
mie de Bordeaux , & Chirurgien -major
de l'Hôpital S. André de ladite ville.
Monde la letreque vous m'avez fait
ONSIEUR, j'ai communiqué à mon
l'honneur de m'écrire . Il a été ført furpris
qu'il y ait des Chirurgiens & autres perfonnes
dans votre province qui prétendent
qu'il foit en relation avec eux & qu'il leur.
fourniffe fes remedes , leurs mauvais fuccès
fans doute doivent détruire cette impofture
; mais il est très-certain que vous êtes
le feul à Bordeaux & dans tout le pays
avec qui il ait des correfpondances. Il vous
fera très- facile de tirer d'erreur ceux qui
yous en parleront ; il ne s'agit que d'exiger
de ces prétendus correfpondans qu'ils montrent
les lettres de M. Daran , qui feules
peuvent certifier leur commerce avec lui ,
ou d'engager ceux qui foupçonneront cette
liaifon , de lui écrire à lui- même , & il ne
manquera pas de leur faire auffi- tôt une
réponſe qui levera tous leurs doutes . Vous
connoiffez la fignature , & il ne fera pas
aifé de vous en impofer . Ce n'eft pas feulement
à Bordeaux que l'on fuppofe ces
•¿ ¿ di armik od vcorrefpondances
JUIN. 1755. 121
correfpondances avec M. Daran . On employe
le même artifice non feulement dans,
toute la France , mais encore dans les pays
étrangers ; d'autres fans avoir recours à
cette rufe , qui leur paroît apparemment
inutile , publient que les remedes dont ils
fe fervent ont été pris chez lui , & c'eſt le
plus grand nombre : ils font répandus en
plufieurs endroits , même à Paris , & ce
qu'il y a de plus étonnant , c'eft que des
gens qui jouiffent d'ailleurs de la plus
grande réputation , fe vantent auffi d'avoir
les mêmes remedes que lui , & ils le perfuadent
d'autant plus facilement , qu'ils fe
font acquis beaucoup de crédit & de confiance
dans le public toujours fi facile à
être trompé. Il eft vrai qu'on fe defabuſe
à la fin , mais c'eſt toujours à ſes dépens
après avoir reconnu par un traitement
long , douloureux & inutile , qu'on auroit
dû d'abord s'adreffer à M. Daran. Il m'eſt
arrivé fouvent en lifant les lettres qu'il
reçoit des malades , d'y trouver qu'ils s'étoient
confiés à des perfonnes qui difoient
tenir de M. Daran lui-même les fondes &
les bougies dont elles faifoient ufage. Ces
malades l'avoient cru bonnement , & le
confultoient fur leur état en lui demandant
ce qui pouvoit avoir empêché leur guérifon
, après qu'ils s'étoient fervis de fes
II. Vol. F
122 MERCURE DE FRANCE. ,
reniedes avec toute l'exactitude poffible &
le plus grand régime : mon oncle fe trouvoit
obligé de leur répondre qu'ils avoient
été trompés , & qu'il n'étoit point du tout
vrai qu'on eût pris les remedes chez lui.
Les malades de leur côté fe voyoient dans
la trifte néceffité de fe foumettre à un nouveau
traitement complet , trop heureux
encore d'en être quittes pour l'inutilité du
premier , & de n'avoir été qu'à demi les
victimes de cette contrebande fi funefte à
tant d'autres .
Mon oncle a reçu des plaintes de quan
tité de perfonnes à qui ces faux remedes
avoient caufé des accidens très - fâcheux.
J'ai cru devoir rendre cette lettre publique
, pour détromper les perfonnes qui ont
intérêt de l'être , & pour mettre un frein
à l'avidité de ceux qui fe croyent permis
d'abufer de la crédulité publique pour leur
profit particulier on fent bien quelles
font les fuites funeftes de cet artifice . Les
malades qui voyent leur état empirer , au
lieu de changer en mieux par l'ufage des
remedes qu'ils croyent de la compofition
de M. Daran , s'imaginent que leur mal
eft incurable , parce qu'il a réfifté aux fecours
qui font généralement reconnus
comme les plus propres pour le guérir , &
tombent dans un defefpoir auffi contraire
JUI N. 1735. 123
:
à leur rétabliſſement qu'affligeant pour
leur famille mais il leur fera facile de
s'épargner un fi cruel embarras , comme
auffi le defagrément d'un traitement repété
, s'ils veulent avant que de fe confier à
qui que ce foit , écrire à M. Daran , pour
fçavoir au jufte fi ceux qui ont entrepris de
les traiter , ont des correfpondances avec
lui . Ils recevront infailliblement une réponſe
qui éclaircira leurs doutes , & les
fauvera du danger où ils s'alloient peutêtre
expofer imprudemment.
J'ai l'honneur d'être , &c.
DESCASTANS.
A Paris , cè 8 Avril 1755•
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Résumé : LETTRE de M. Descastans a M. Dupuy, Maître en Chirurgie, Associé de l'Académie de Bordeaux, & Chirurgien-major de l'Hôpital S. André de ladite ville.
La lettre de M. Descastans à M. Dupuy, maître en chirurgie et associé de l'Académie de Bordeaux, met en lumière une fraude concernant les remèdes attribués à M. Daran. Des individus prétendent correspondre avec M. Daran et fournissent des remèdes, mais leurs échecs révèlent leur imposture. M. Daran affirme que M. Dupuy est le seul interlocuteur avec qui il correspond à Bordeaux. Pour démasquer les imposteurs, il est recommandé de demander des lettres authentiques de M. Daran ou de lui écrire directement. Cette fraude ne se limite pas à Bordeaux mais se répand en France et à l'étranger. Des personnes, même réputées, se vantent de posséder les mêmes remèdes que M. Daran, trompant ainsi le public. Les malades, après des traitements inefficaces, se retrouvent souvent dans des situations désespérées. M. Descastans conseille aux malades de vérifier auprès de M. Daran avant de se confier à quiconque, afin d'éviter des traitements inutiles et dangereux. La lettre vise à détromper les personnes intéressées et à freiner l'avidité de ceux qui abusent de la crédulité publique.
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