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p. 204-217
« Le 9 Mai, le Bourg de Ferechampenoise, un des plus considérables du [...] »
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Le 9 Mai, le Bourg de Ferechampenoise, un des plus considérables du [...]
Mots clefs :
Capitaine, Pensions militaires, Régiments, Compagnies, Artillerie, Maréchal de Richelieu, Escadre anglaise, Conflit franco-anglais sur terre, Frégates, Officiers de marine, Conflit franco-anglais sur mer, Impératrice Reine de Hongrie et Bohême, Traité défensif d'alliance, Sa Majesté, Marquis, Lieutenant, Ambassadeurs, Cérémonies, Cardinal de Tavannes
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texteReconnaissance textuelle : « Le 9 Mai, le Bourg de Ferechampenoise, un des plus considérables du [...] »
LE 9 Mai , le Bourg de Ferechampenoiſe , un
des plus confidérables du Diocèfe de Châlonsfur-
Marne , a été prefque totalement détruit par.
un horrible incendie. Les habitans ont eu à peine.
temps de pourvoir à leur fûreté , & de fauver
leurs enfans. Dans l'intervalle d'une heure , près
de mille perfonnes fe font trouvées fans azyle &
fans reffources.
le
Le 11 , M. le Duc de Biron , après avoir fait la
revue des Gardes Françoifes dans la Plaine des
Sablons où le Régiment étoit campé , déclara que
le Roi avoit accordé une penfion de mille livres
fur le Tréfor Royal à M. le Comte d'Afpremont ,
Maréchal de Camp , Commandant du troiſieme
Bataillon de ce Régiment ; une pareille penfion à.
M. de Savary , Lieutenant de Grenadiers , ayant
Brevet de Colonel ; une de quatre cens francs ,,
auffi fur le Tréfor Royal , à M. de Chaffincourt-
Tilly , Sous- Lieutenant ; des Brevets de Colonels.
au Marquis de Rafilly , Lieutenant de Grenadiers
& au Comte du Dreneuc , Lieutenant ; & la Croix
de Saint Louis au Vicomte de Jaucourt , Lieutenant
à M. de Chaban , Sous- Aide- Major; au
JUILLET. 1756. 206
Chevalier de Palme , au Marquis de la Rochebouffeau
, à MM. de la Motte , de Termont , &
de Chieza , Sous- Lieutenans , & à M. de la Bordenne
, Enfeigne de Grenadiers.
Le Roi ayant porté à dix-fept Compagnies les
Bataillons de fon Infanterie Françoife ; & Sa Majefté
voulant que les Bataillons des Régimens de
fon Infanterie Suiffe & Grifonne , qui ne font actuellement
que de quatre cens-vingt hommes en
quatre Compagnies de cent vingt hommes chacune,
y compris les Officiers , foient rapprochés de la
compofition des Bataillons François , Sa Majefté a
ordonné que les douze Compagnies de chacun
des neuf Régimens Suiffes & de celui de Salis Grifon
, qui font à ſon ſervice , formaffent dorénavant
deux Bataillons compofés de fix Compagnies
chacun , au lieu d'être diftribuées , commé
elles font préfentement , en trois Bataillons de
quatre Compagnies. Veut Sa Majefté , que les fix
Compagnies , qui doivent compofer chacun des
deux Bataillons par Régiment , y foient placées
fuivant le rang d'ancienneté des Capitaines , &
dans l'ordre qu'éxige la nouvelle formation prefcrite
par la préfente Ordonnance . Chacune de
ces Compagnies continuera d'être compofée de
cent vingt hommes , y compris cinq Officiers ;
chaque Capitaine devant y entretenir deux Sergens
à vingt-cinq livres chacun , un troifieme
Sergent & un Fourrier à vingt livres chacun , un
Porte-Enfeigne & un Capitaine d'Armes à dixhuit
livres chacun , un Prevôt à quinze livres
quatre Caporaux , quatre Anfpeffades & cent Fufiliers
, les Tambours & les Fifres compris. Eatend
au furplus Sa Majefté que les Officiers
qui commandoient les troifiemes Bataillons defdits
Régimens Suiffes & Grifons , confervent, tant
106 MERCURE DE FRANCE.
qu'ils ne fe trouveront pas pourvus d'un grade
fupérieur , les prérogatives qui étoient attachées
à leur emploi.
Le 27 Mai , les Députés des Etats d'Artois ont
eu audience du Roi . Ils ont été préſentés à Sa
Majefté par M. le Duc de Chaulnes , Gouverneur
de la Province , & par M. le Comte d'Argenfon ,
Miniftre & Secretaire d'Etat , ayant le Département
de cette Province , & conduits par M. Def
granges , Maître des Cérémonies. La Députation
étoit compofée , pour le Clergé , de Dom de
Briois d'Hulluch , Abbé de Saint Vaaft d'Arras ;
du Comte de Beaufort , pour la Nobleffe ; & de M.
Harduin , Avocat en Parlement , & ancien Echevin
des Ville & Cité d'Arras , pour le Tiers-Etat.
Dans le travail du Roi avec M. le Comte d'Eu,
concernant le Régiment des Gardes Suiffes , Sa
Majefté a augmenté de cinq cens livres la penfion
de quinze cens que M. de Réding , Maréchal de
Camp, Premier Capitaine de ce Régiment, a fur le
Tréfor Royal . Elle a accordé une penfion de 1000 1.
auffi fur le Tréfor Royal , au Baron de Befenwald,
Brigadier , Capitaine d'une Compagnie dans le
même Régiment ; une pareille penfion , fur l'Ordre
de Saint Louis , à M. de Peftallozzi , Brigadier
, Capitaine-Commandant de la Compagnie
Lieutenante-Colonelle ; une de huit cens livres ,
fur le Tréfor Royal , à M. Altermatt , troifieme
Aide - Major ; une Commiffion de Colonel
à M. Schwitzer , Premier Lieutenant de la Compagnie
de Phiffer ; la Croix de S. Louis au Chevalier
de Maillaudor , Premier Lieutenant de la
Compagnie Générale , & à M. Schwitzer de Buonas
, fecond Lieutenant de la même Compagnie..
Depuis la defcente des troupes du Roi dans
1le Minorque, M. le Maréchal de Richelieu a
JUILLET. 1756. 207
été principalement occupé du foin de furmonter
les difficultés qui fe font rencontrées dans le
tranfport de l'artillerie à Mahon , & des munitions
de guerre & de bouche. Il eft enfin parvenu
à faire conftruire fur le Mont des Signaux une
batterie de cinq pieces de canon & d'autant de
mortiers , qui a commencé à tirer le 8 de Mai au
matin. Il afait occuper le 9 au foir le Fauxbourg,
dit la Ravale , par un Détachement de cent Volontaires,
par quatre Compagnies de Grenadiers &
parfixPiquets,aux ordres de M. le Comte de Briqueville
, Colonel , avec cinq cens Travailleurs , pour y
former des épaulemens & établir des batteries . Le
10,M. le Marquis de Roquepine Brigadier , ayant
fous lui MM . de Gaunay & d'Elva , Colonels , de
Magnac & de Virmont , Lieutenans Colonels , eft
parti dès le matin avec douze cens hommes , pour
fe porter du côté du Fort Marlboroug derriere la
Tour de Benifaïd. M. le Comte de Briqueville a
été relevé le foir par M. de la Serre , Brigadier
avec trois Compagnies de Grenadiers & neuf Piquets.
Auffitôt après , les deux Bataillons du Régiment
Royal , & le premier du Régiment Royal
Comtois , fe font portés à la droite du Fauxbourg,
le long d'une chaîne de maifons qui en forment
Fenceinte , pour protéger le travail , que M. le
Maréchal de Richelieu eft allé vifiter. M. d'Elva,
Colonel à la fuite du Régiment Royal Italien , a
été bleffé légérement à l'épaule. Les journées du
11 & du 12 Mai , ont été employées à conſtruire
des batteries à la gauche , à la droite & au centre
du Fauxbourg, dit la Ravale, fans que la Garnifon
Angloife ait inquiété les travailleurs autrement'
que par les bombes & le canon. Le 12 au foir
le Détachement du Fauxbourg fut compofé de
fept Compagnies de Grenadiers , huit Piquets &
208 MERCURE DE FRANCE.
trois Compagnies de Volontaires , & les batte
ries de bombes commencerent à tirer pendant la
nuit. Le 17 , la batterie de canons de la droite fe
trouva en état de tirer , & fut très- bien fervie. Le
18 , M. du Pinay , qui commandoit celle de la
gauche , fut tué, & le Prince Louis de Wirtemberg
, Maréchal de Camp , fut légérement bleſſé.
Le 19 , P'Efcadre Angloife ayant paru en mer ,
M. le Maréchal de Richelieu envoya treize Piquets
à M. le Marquis de la Galiffonniere , & fit
les difpofitions néceffaires pour empêcher toute
communication avec les Affiégés. Le 20 , les deux
Bataillons du Régiment Royal , aux ordres de
M. le Comte de Maillebois , Lieutenant- Général ,
fe rendirent le foir au dépôt de la tranchée , d'ou
ils envoyerent relever les poftes du Fauxbourg par
leurs Grenadiers & fix Piquets , avec cinq autres
Compagnies de Grenadiers & fix Piquets de différens
Corps. Une bombe ayant mis le feu à une de
nos batteries à deux heures après-midi , les affiégés
redoublerent leur feu , & firent une fortie de
la Lunette de la Reine , dans laquelle nos Grenadiers
les firent rentrer auffitôt. Pendant la journée
du 21 au 22 , on répara les anciennes batteries
, & l'on continua la conftruction des nouvelles.
Le 22 , l'Efcadre Françoife ayant réparu devant
le Port , l'Armée fit le foir une réjouiſſance
pour l'avantage que cette Efcadre avoit remporté
fur celle des Anglois. Le 23 , M. le Comte de
Lannion releva M. le Marquis du Mefnil à la
tranchée, avec les deux Bataillons de Royal la Marine
, indépendamment d'un pofte de Brigadier
établi dans le Fauxbourg. Cette journée & celle
du 24 ont été employées , comme les précédentes,.
aux réparations & nouvelles conftructions de bat
tories.
>
•
JUILLET. 1756. 209
Les Frégates du Roi l'Aquilon , de quarante
canons , & la Fidele , de vingt- quatre , comman
dées par MM. de Maurville , Capitaine , & de Lizardais
, Lieutenant de Vaiffeau , qui avoient ef
corté au large quelques Navires , revenoient à
Rochefort , lorfque le 17 elles ont eu connoiffance
vers l'Ile d'Oléron , d'un Vaiffeau de guerre
Anglois , de cinquante- fix canons , & d'une Frégate
, de trente , qui leur ont donné chaffe. Le
combat s'eft engagé à fix heures du foir entre le
Vaiffeau de guerre Anglois avec fa Frégate , & les
deux Frégates du Roi , de maniere que la Frégate
laFidele, a auffieffuyé d'abord quelques bordées du
Vaiffeau de guerre Anglois ; mais il eft enfuite
devenu particulier du Vaiffeau de guerre Anglois
avec la Frégate l'Aquilon , & de la Frégate Angloife
avec la Frégate la Fidele , qui ont été bientôt
hors de la vue des premiers. Le combat de la
Frégate de l'Aquilon contre le Vaiffeau de guerre
Anglois a duré près de huit heures ; & celui de la
Frégate la Fidele contre la Frégate Angloife
près de fix. Nonobftant la grande fupériorité de
l'artillerie du Vaiffeau Anglois & de la Frégate ,
tant en nombre de canons qu'en poids des boulets
, les deux Frégates du Roi les ont mis hors
de combat ; & les Anglois fe font retirés : mais il
n'a pas été poffible aux Frégates du Roi , qui
étoient défemparées de toutes leur manoeuvres, de
les pourfuivre. Elles font rentrées à Rochefort le
19 & le 20. On ne fçauroit donner trop d'éloges
à la bravoure que les Officiers , les Gardes de la
Marine & les Equipages , ont fait paroître dans
cette occafion. M. de Maurville a eu le bras droit
fracaffé dès le commencement du combat , &
Fon a été obligé de le lui couper fur le champ .
Malgré cet accident , qui l'a obligé de céder le
210 MERCURE DE FRANCE.
commandement à M. de la Filliere , Capitaine en
fecond , il n'a pas ceffé de donner des marques
de la plus grande fermeté. M. de la Filliere a reçu
trois bleffures. M. Héron , Premier Lieutenant ,
a été tué fur le gaillard d'avant ; & le Chevalier
de Cardaillac , qui commandoit le Détachement
des Gardes de la Marine , a eu un bras caffé. Il
n'y a eu aucun Officier de tué ni de bleffé ſur la
Frégate la Fidele. Dans les Equipages, la Frégate
l'Aquilon a eu quinze hommes tués & vingt-fix
bleflés ; & la Frégate la Fidele , huit tués & dixhuit
bleffés.
La Cour vient de rendre public un Ecrit qui a
pour titre , MEMOIRE concernant le précis des faits
avec leurs piecesjuftificatives , pour fervir de réponfe
aux OBSERVATIONS envoyées par les Miniftres
d'Angleterre dans les Cours de l'Europe . L'objet
des Obfervations fur le premier Mémoire de la
France étoit de juftifier le refus fait par l'Angleterre
de fatisfaire à la réquifition du Roi , du 21
Décembre dernier , & de reftituer les Vaiffeaux
pris en pleine paix . Le feul moyen de colorer ce
refus étoit d'imputer aux François des hoftilités
antérieures à celles des Anglois , & cette fauffe
´imputation eft réfutée dans l'Ecrit que nous annonçons.
On n'oppofe aux fuppofitions des Anglois
que l'expofé le plus fimple de tout ce qui
s'eft paffé entre les deux Nations , foit en Amérique
, foit en Europe , depuis le dernier Traité
d'Aix-la- Chapelle ; & l'on n'avance aucun fait
qui ne foit ou avoué des deux Cours , ou prouvé
par des pieces authentiques & irréprochables.
Parmi ces pieces font celles qui ont été trouvées
dans les papiers du Général Braddock , après le
combat dans lequel il a perdu la vie.
Il paroît une Déclaration du Roi , portant fuf-
1
JUILLET. 1756. 211
penfion du Dixieme de l'Amiral , & autres encouragemens
pour la Courſe.
M. le Marquis de Juigné ayant préféré de commander
une Brigade dans le Régiment des Grenadiers
de France , le Roi a difpofé du Régiment
de Forez , en faveur de M. le Comte de Puyfegur,
Colonel dans celui des Grenadiers de France.
Le Roi a conclu avec l'Impératrice Reine de
Hongrie & de Bohême , un Acte ou Convention
de Neutralité , & un Traité défenfif d'Alliance &
d'Amitié. Cette Convention & ce Traité furent
fignés à Verſailles le premier du mois de Mai , &
les Ratifications y ont été échangées le 28 du
même mois.
Le 17 Mai aufoir , M. le Marquis de la Galif
fonniere , commandant l'Efcadre du Roi dans fa
Méditerranée , fut informé par la Frégate la Gracieufe
, qui étoit en croifiere fur Mayorque , qu'el
le avoit découvert une Eſcadre Angloiſe , qui pouvoit
être alors à huit ou dix lieues dans le Sud. Le
18 , l'Eſcadre du Roi manoeuvra pour aller à la
rencontre de celle des Anglois , mais le calme en
empêcha. Le 19 au matin , on découvrit l'Eſcadre
Angloife du haut des mâts. Elle étoit au vent ,
& il ne fut pas poffible à l'Efcadre du Roi , de
l'approcher jufqu'à la portée du canon. Le 20
M. le Marquis de la Galiffonniere étoit parvenu
gagner le vent : mais dans le tems qu'il ſe trouvoit
dans cette pofition , le vent changea tout
d'un coup ; ce qui rendit cet avantage à l'Eſcadre
Angloife. A deux heures & demie après-midi , les
deux Efcadres fe trouverent en lignes , celle dés
Anglois compofée de dix-huit voiles , dont treize
Vaiffeaux de ligné , & celle du Roi , de douze
Vaiffeaux & quatre Frégates. Le combat fut engagé
par l'avant-garde de l'Efcadre du Roi , qui
212 MERCURE DE FRANCE.
attaqua l'arriere- garde de celles des Anglois. II
devint fucceffivement général : mais il ne le fut
pas pendant tout le tems de fa durée. Les Vaiffeaux
Anglois , qui étoient les plus maltraités
des bordées des Vaiffeaux du Roi , profitant de
l'avantage du vent , pour fe mettre hors de la
portée du canon. L'Efcadre Angloife , après avoir
porté fes plus grands efforts fur l'arriere- garde de
celle du Roi , qu'elle a trouvée fi ferrée , & dont
elle a effuyé un fi grand feu , qu'elle n'a pu l'entamer
, a pris le parti de s'éloigner. Elle avoit
toujours confervé l'avantage du vent , ce qui l'a
mife en état de ne point s'engager. Le combat a
duré près de quatre heures. En général , il n'y a
eu aucun Vaiffeau de l'Efcadre Angloife , qui ait
foutenu longtemps le feu des Vaiffeaux de l'Efca
dre du Roi , lefquels ont peu fouffert. Ils étoient
entiérement réparés dans la nuit , & en état de
combattre le lendemain. Nous n'avons eu que
trente-huit hommes tués , & cent quatre- vingtquatre
bleffés. Aucun Officier n'a été tué. Ceux
qui ont été bleffés , font MM . de Peruffy & de
Puty , Enfeignes , & M. de Gibanelle , Garde de
la Marine , fur le Vaiffeau le Foudroyant ; M. de
Seignoret , Garde de la Marine , fur le Téméraire;
M. de Gravier , Lieutenant fur le Guerrier ; le
Chevalier d'Urre , Lieutenant fur le Sage ; le
Chevalier de Beaucoufe , Lieutenant ; M. d'Alberas
, Enfeigne , & M. Dubeny , Garde de la Marine
, fur le Content..
Depuis l'arrivée de ces nouvelles qui font du
21 , il eft venu des lettres de l'Efcadre , datées du
25. L'Efcadre Angloife n'avoit point reparu , &
celle du Roi continuoit de croifer devant l'entrée
du Port- Mahon . Le Chevalier de Beaucouſe ,
Lieutenant de Vaiffeau , qui avoit eu une cuiffe.
JUILLET. 1756. 213
caffée dans le combat du 20 , & qui avoit été
tranſporté à terre à Mahon , y étoit mort le 24 .
M. de Gibanelle & de Seignoret , Gardes de la
Marine , étoient fort mal à bord des Vaiffeaux fur
lefquels ils ont été bleffés , le premier ayant eu
les reins brifés , & le fecond les deux jambes caffées
. Mais le Chevalier d'Urre , Lieutenant de
Vaifleau , qui a eu un bras caffé , donnoit beaucoup
d'efpérance de guérifon. Les autres bleffés
le font peu dangereufement.
Le 6 Juin , jour de la Pentecôte , les Chevaliers
, Commandeurs & Officiers de l'Ordre du
Saint- Elprit , s'étant affemblés vers les onze heu--
res du matin dans le Cabinet du Roi , Sa Majesté
tint un Chapitre. L'Information des vie & moeurs,
& la Profeffion de Foi , du Marquis de Saint Vital
& du Prince Jablonowski , qui avoient été propofés
le premier Janvier pour être Chevaliers ,
furent admifes , & ils furent introduits dans le
Cabinet , & reçus Chevaliers de l'Ordre de Saint
Michel. Le Roi fortit enfuite de fon apparte
ment , pour aller à la Chapelle. Sa Majesté , devant
laquelle les deux Huiffiers de la Chambre
portoient leurs Maffes , étoit en Manteau , le
Collier de l'Ordre par-deffus , ainfi que celui de
l'Ordre de la Toifon d'Or. Elle étoit précédée
de Monfeigneur le Dauphin , du Duc d'Or
léans , du Prince de Condé , du Comte de Charolois
, du Comte de Clermont , du Prince de Conty
, du Comte de la Marche , du Comte d'Eu ;
du Duc de Penthievre , & des Chevaliers , Commandeurs
& Officiers de l'Ordre. Les deux nouveaux
Chevaliers , en habit de Novices , marchoient
entre les Chevaliers & les Officiers. Après
la grande Meffe , qui fut célébrée par le Prince
Conftantin , Commandeur de l'Ordre , & Prejer
Aumônier du Roi , Sa Majefté monta fux,.
214 MERCURE DE FRANCE .
fon Trône , & revêtit des Marques de l'Ordre les
deux nouveaux Chevaliers. Le Marquis de Saint
Vital eut pour Parrain le Maréchal de Clermont-
Tonnerre. Le Marquis de Matignon fut celui du
Prince Jablonowski. Cette cérémonie étant finie,
le Roi fut reconduit à ſon appartement en la maniere
accoutumée.
M. Dufort , Introducteur des Ambaffadeurs ,
alla le 7 prendre dans les carroffes du Roi & de la
Reine , le Cardinal de Tavannes en fon Hôtel à
Verfailles , & il le conduifit chez le Roi avec
l'Abbé Durini , Camérier Secret du Pape , nommé
par Sa Sainteté pour apporter les Bonnets aux
Cardinaux de Tavannes , de Luynes & de Gefvres.
Avant la Meffe du Roi , l'Abbé Durini fut conduit
, avec les cérémonies accoutumées , à l'au
dience le Roi lui donna dans fon Cabinet
que
& il préfenta à Sa Majesté un Bref de Sa Sainteté.
Après cette audience ,le Roi defcendit à la Chapelle
, où le Cardinal de Tavannes ſe rendit à la fin de
la Meffe , étant conduit par le fieur Dufort , Introducteur
des Ambaffadeurs, Monfieur Defgranà
la
reçut ges , Maître des Cérémonies , porte
La Chapelle le Cardinal de Tavannes , lequel alla
fe placer près du Prié-Dieu du Roi , du côté de
PEvangile , & fe mit à genoux fur un carreau.
L'Abbé Dutini , revêtu de fon habit de cérémonie
, ayant remis entre les mains du Cardinal de
Tavannes le Bref du Pape , alla prendre fur la
Crédence Près de l'Autel , du côté de l'Epître
un Baffin de vermeil doré , fur lequel étoit le
Bonnet , & il le préfenta au Roi. Sa Majesté prit
le Bonnet , & le mit fur la tête du Cardinal de
Tavannes , qui en le recevant , fit une profonde
inclination , & à l'inſtant même fe découvrit.
Dès que le Roi fut en marche pour fortir de la
Chapelle , le Cardinal de Tavannes entra dans la
de
JUILLET. 1756 . 215
Sacriftie , où il prit les habits de fa nouvelle dignité.
Il montà enfuite chez le Roi , étant accompagné
du Maître des Cérémonies. M. Dufort ,
Introducteur des Ambaffadeurs , qui étoit toujours
refté auprès du Cardinal de Tavannes , l'introduifit
dans le Cabinet du Roi , où ce Cardinal fit
fon remerciement à Sa Majesté . Le Cardinal de
Tavannes fut conduit avec les mêmes cérémonies.
à l'audience de la Reine , à laquelle il préfenta
P'Abbé Durini , qui remit à Sa Majesté un Bref
du Pape. Pendant l'audience , on apporta un
tabouret , & le Cardinal de Tavannes s'affit . Il
fut conduit enfuite à l'audience de Monfeigneur
le Dauphin , de Madame la Dauphine , de Madame
, & à celles de Mefdames Victoire , Sophie
& Louife. Après toutes ces audiences , le Cardinal
de Tavannes fut reconduit par M. Dufort , Introducteur
des Ambaffadeurs , dans les carroffes
du Roi & de la Reine à fon Hôtel , avec les cérémonies
obfervées lorſqu'on étoit allé le prendre
pour l'amener chez le Roi.
Le 8 , le Cardinal de Luynes , & le 10 le Cardinal
de Gefvres reçurent des mains du Roi dans
la Chapelle, le Bonnet de Cardinal avec les mêmes
cérémonies.
L'Eglife de l'Abbaye Royale de Pantemont
été bénîte le 30 de Mai , par Dom Couthaud, Religieux
de l'Abbaye de Cîteau , Docteur de Sorbonne
, & Provifeur du College. La cérémonie
en fut édifiante , & fuivie d'une grand'Meffe
chantée par les Religieux , au milieu de laquelle
M. l'Abbé de la Paufe fit un Diſcours , dontl'ob
jet étoit relatif à la pureté du Temple intérieur
fignifié par la Bénédiction du Temple extérieur
qui venoit d'être faite. L'après -dinée , après Vêpres
chantées , il y eut un Salut , dont la mufique
216 MERCURE DE FRANCE.
fut dirigée par M. Balbaftre, & très - bien exécutée.
La Bénédiction fut donnée par le R. P. Général
des Bénédictins , & Madame la Ducheffe de Modene
y aflifta avec la cour & plufieurs perfonnes
de diftinction.
Le 3 Juin , Monfeigneur le Dauphin & Madame
, fe rendirent dans cette Abbaye pour nommer
deux Cloches de la nouvelle Eglife . A la porte
extérieure , ils furent reçus avec les cérémonies
accoutumées , & complimentés avec applaudiffement
par Dom Couthaud : delà arrivés à la
porte de la grille du Choeur , Madame l'Abbeffe
de Pantemont , avec fa croffe , à la tête de fa
Communauté , & accompagnée de plufieurs autres
Abbeffes , les conduifit à leur prie- Dieu en
chantant le Laudate . Dom Couthaud fit la cérémonie
, qui fut fuivie du Salut pendant l'une &
l'autre , la mufique exécuta plufieurs morceaux
& Motets choifis. Enfuite Monfeigneur le Dau
phin & Madame fuivis de leur cour , furent conduits
au Réfectoire , où trois jeunes Demoiſelles
habillées en Vierges , préfenterent trois corbeilles
remplies tant de fleurs que d'ouvrages , bourfes , -
facs & noeuds d'épée : chacune déclama différentes
pieces de vers avec autant de nobleffe que de modeftie
; Madame l'Abbeffe préſenta dans le même
Réfectoire la collation à Monfeigneur le Dauphin
& à Madame. Il y avoit , entr'autres fingularités ,
les meilleurs fruits de primeur , & les plus rares
pour la faifon ; des melons , des pêches , des cerneaux
, du raifin . Enfuite Monſeigneur le Dauphin
& Madame voulurent parcourir les Bâtimens , &
partout le Prince & la Princeffe marquerent leur
fatisfaction.
On doit obferver ici que le Monaftere & l'Eglife
de l'Abbaye de Pantemont ont été faits &
conduits
JUILLET . 1756 . 217
conduits fur les deffeins de M. Contant , Architecte
du Roi , de Monfeigneur le Duc d'Orléans
& de l'Académie d'Architecture . Il étoit réservé
au talent & à la réputation de cet Artifte de
donner un exemple public que l'on pouvoit
voûter les Dômes & les Eglifes , fuivant la conftruction
des voûtes qu'il a fait exécuter avec ſuccès
dans le Château de Biffy , appartenant à M. le
Maréchal Duc de Belleifle ; l'Eglife & le Dôme
de Pantemont font les premiers exemples exécutés
en France de cette conftruction , qui prouvent
que l'ufage de ces voûtes feroient d'une grande
utilité pour être employé à la conſtruction de
nos Eglifes modernes , & que l'on pourroit par
cette pratique leur donner avec le bon goût de
l'architecture , l'élégance & la légéreté des Eglifes
gothiques , dont la conftruction hardie & folide
caufe autant de regrets que d'admiration .
des plus confidérables du Diocèfe de Châlonsfur-
Marne , a été prefque totalement détruit par.
un horrible incendie. Les habitans ont eu à peine.
temps de pourvoir à leur fûreté , & de fauver
leurs enfans. Dans l'intervalle d'une heure , près
de mille perfonnes fe font trouvées fans azyle &
fans reffources.
le
Le 11 , M. le Duc de Biron , après avoir fait la
revue des Gardes Françoifes dans la Plaine des
Sablons où le Régiment étoit campé , déclara que
le Roi avoit accordé une penfion de mille livres
fur le Tréfor Royal à M. le Comte d'Afpremont ,
Maréchal de Camp , Commandant du troiſieme
Bataillon de ce Régiment ; une pareille penfion à.
M. de Savary , Lieutenant de Grenadiers , ayant
Brevet de Colonel ; une de quatre cens francs ,,
auffi fur le Tréfor Royal , à M. de Chaffincourt-
Tilly , Sous- Lieutenant ; des Brevets de Colonels.
au Marquis de Rafilly , Lieutenant de Grenadiers
& au Comte du Dreneuc , Lieutenant ; & la Croix
de Saint Louis au Vicomte de Jaucourt , Lieutenant
à M. de Chaban , Sous- Aide- Major; au
JUILLET. 1756. 206
Chevalier de Palme , au Marquis de la Rochebouffeau
, à MM. de la Motte , de Termont , &
de Chieza , Sous- Lieutenans , & à M. de la Bordenne
, Enfeigne de Grenadiers.
Le Roi ayant porté à dix-fept Compagnies les
Bataillons de fon Infanterie Françoife ; & Sa Majefté
voulant que les Bataillons des Régimens de
fon Infanterie Suiffe & Grifonne , qui ne font actuellement
que de quatre cens-vingt hommes en
quatre Compagnies de cent vingt hommes chacune,
y compris les Officiers , foient rapprochés de la
compofition des Bataillons François , Sa Majefté a
ordonné que les douze Compagnies de chacun
des neuf Régimens Suiffes & de celui de Salis Grifon
, qui font à ſon ſervice , formaffent dorénavant
deux Bataillons compofés de fix Compagnies
chacun , au lieu d'être diftribuées , commé
elles font préfentement , en trois Bataillons de
quatre Compagnies. Veut Sa Majefté , que les fix
Compagnies , qui doivent compofer chacun des
deux Bataillons par Régiment , y foient placées
fuivant le rang d'ancienneté des Capitaines , &
dans l'ordre qu'éxige la nouvelle formation prefcrite
par la préfente Ordonnance . Chacune de
ces Compagnies continuera d'être compofée de
cent vingt hommes , y compris cinq Officiers ;
chaque Capitaine devant y entretenir deux Sergens
à vingt-cinq livres chacun , un troifieme
Sergent & un Fourrier à vingt livres chacun , un
Porte-Enfeigne & un Capitaine d'Armes à dixhuit
livres chacun , un Prevôt à quinze livres
quatre Caporaux , quatre Anfpeffades & cent Fufiliers
, les Tambours & les Fifres compris. Eatend
au furplus Sa Majefté que les Officiers
qui commandoient les troifiemes Bataillons defdits
Régimens Suiffes & Grifons , confervent, tant
106 MERCURE DE FRANCE.
qu'ils ne fe trouveront pas pourvus d'un grade
fupérieur , les prérogatives qui étoient attachées
à leur emploi.
Le 27 Mai , les Députés des Etats d'Artois ont
eu audience du Roi . Ils ont été préſentés à Sa
Majefté par M. le Duc de Chaulnes , Gouverneur
de la Province , & par M. le Comte d'Argenfon ,
Miniftre & Secretaire d'Etat , ayant le Département
de cette Province , & conduits par M. Def
granges , Maître des Cérémonies. La Députation
étoit compofée , pour le Clergé , de Dom de
Briois d'Hulluch , Abbé de Saint Vaaft d'Arras ;
du Comte de Beaufort , pour la Nobleffe ; & de M.
Harduin , Avocat en Parlement , & ancien Echevin
des Ville & Cité d'Arras , pour le Tiers-Etat.
Dans le travail du Roi avec M. le Comte d'Eu,
concernant le Régiment des Gardes Suiffes , Sa
Majefté a augmenté de cinq cens livres la penfion
de quinze cens que M. de Réding , Maréchal de
Camp, Premier Capitaine de ce Régiment, a fur le
Tréfor Royal . Elle a accordé une penfion de 1000 1.
auffi fur le Tréfor Royal , au Baron de Befenwald,
Brigadier , Capitaine d'une Compagnie dans le
même Régiment ; une pareille penfion , fur l'Ordre
de Saint Louis , à M. de Peftallozzi , Brigadier
, Capitaine-Commandant de la Compagnie
Lieutenante-Colonelle ; une de huit cens livres ,
fur le Tréfor Royal , à M. Altermatt , troifieme
Aide - Major ; une Commiffion de Colonel
à M. Schwitzer , Premier Lieutenant de la Compagnie
de Phiffer ; la Croix de S. Louis au Chevalier
de Maillaudor , Premier Lieutenant de la
Compagnie Générale , & à M. Schwitzer de Buonas
, fecond Lieutenant de la même Compagnie..
Depuis la defcente des troupes du Roi dans
1le Minorque, M. le Maréchal de Richelieu a
JUILLET. 1756. 207
été principalement occupé du foin de furmonter
les difficultés qui fe font rencontrées dans le
tranfport de l'artillerie à Mahon , & des munitions
de guerre & de bouche. Il eft enfin parvenu
à faire conftruire fur le Mont des Signaux une
batterie de cinq pieces de canon & d'autant de
mortiers , qui a commencé à tirer le 8 de Mai au
matin. Il afait occuper le 9 au foir le Fauxbourg,
dit la Ravale , par un Détachement de cent Volontaires,
par quatre Compagnies de Grenadiers &
parfixPiquets,aux ordres de M. le Comte de Briqueville
, Colonel , avec cinq cens Travailleurs , pour y
former des épaulemens & établir des batteries . Le
10,M. le Marquis de Roquepine Brigadier , ayant
fous lui MM . de Gaunay & d'Elva , Colonels , de
Magnac & de Virmont , Lieutenans Colonels , eft
parti dès le matin avec douze cens hommes , pour
fe porter du côté du Fort Marlboroug derriere la
Tour de Benifaïd. M. le Comte de Briqueville a
été relevé le foir par M. de la Serre , Brigadier
avec trois Compagnies de Grenadiers & neuf Piquets.
Auffitôt après , les deux Bataillons du Régiment
Royal , & le premier du Régiment Royal
Comtois , fe font portés à la droite du Fauxbourg,
le long d'une chaîne de maifons qui en forment
Fenceinte , pour protéger le travail , que M. le
Maréchal de Richelieu eft allé vifiter. M. d'Elva,
Colonel à la fuite du Régiment Royal Italien , a
été bleffé légérement à l'épaule. Les journées du
11 & du 12 Mai , ont été employées à conſtruire
des batteries à la gauche , à la droite & au centre
du Fauxbourg, dit la Ravale, fans que la Garnifon
Angloife ait inquiété les travailleurs autrement'
que par les bombes & le canon. Le 12 au foir
le Détachement du Fauxbourg fut compofé de
fept Compagnies de Grenadiers , huit Piquets &
208 MERCURE DE FRANCE.
trois Compagnies de Volontaires , & les batte
ries de bombes commencerent à tirer pendant la
nuit. Le 17 , la batterie de canons de la droite fe
trouva en état de tirer , & fut très- bien fervie. Le
18 , M. du Pinay , qui commandoit celle de la
gauche , fut tué, & le Prince Louis de Wirtemberg
, Maréchal de Camp , fut légérement bleſſé.
Le 19 , P'Efcadre Angloife ayant paru en mer ,
M. le Maréchal de Richelieu envoya treize Piquets
à M. le Marquis de la Galiffonniere , & fit
les difpofitions néceffaires pour empêcher toute
communication avec les Affiégés. Le 20 , les deux
Bataillons du Régiment Royal , aux ordres de
M. le Comte de Maillebois , Lieutenant- Général ,
fe rendirent le foir au dépôt de la tranchée , d'ou
ils envoyerent relever les poftes du Fauxbourg par
leurs Grenadiers & fix Piquets , avec cinq autres
Compagnies de Grenadiers & fix Piquets de différens
Corps. Une bombe ayant mis le feu à une de
nos batteries à deux heures après-midi , les affiégés
redoublerent leur feu , & firent une fortie de
la Lunette de la Reine , dans laquelle nos Grenadiers
les firent rentrer auffitôt. Pendant la journée
du 21 au 22 , on répara les anciennes batteries
, & l'on continua la conftruction des nouvelles.
Le 22 , l'Efcadre Françoife ayant réparu devant
le Port , l'Armée fit le foir une réjouiſſance
pour l'avantage que cette Efcadre avoit remporté
fur celle des Anglois. Le 23 , M. le Comte de
Lannion releva M. le Marquis du Mefnil à la
tranchée, avec les deux Bataillons de Royal la Marine
, indépendamment d'un pofte de Brigadier
établi dans le Fauxbourg. Cette journée & celle
du 24 ont été employées , comme les précédentes,.
aux réparations & nouvelles conftructions de bat
tories.
>
•
JUILLET. 1756. 209
Les Frégates du Roi l'Aquilon , de quarante
canons , & la Fidele , de vingt- quatre , comman
dées par MM. de Maurville , Capitaine , & de Lizardais
, Lieutenant de Vaiffeau , qui avoient ef
corté au large quelques Navires , revenoient à
Rochefort , lorfque le 17 elles ont eu connoiffance
vers l'Ile d'Oléron , d'un Vaiffeau de guerre
Anglois , de cinquante- fix canons , & d'une Frégate
, de trente , qui leur ont donné chaffe. Le
combat s'eft engagé à fix heures du foir entre le
Vaiffeau de guerre Anglois avec fa Frégate , & les
deux Frégates du Roi , de maniere que la Frégate
laFidele, a auffieffuyé d'abord quelques bordées du
Vaiffeau de guerre Anglois ; mais il eft enfuite
devenu particulier du Vaiffeau de guerre Anglois
avec la Frégate l'Aquilon , & de la Frégate Angloife
avec la Frégate la Fidele , qui ont été bientôt
hors de la vue des premiers. Le combat de la
Frégate de l'Aquilon contre le Vaiffeau de guerre
Anglois a duré près de huit heures ; & celui de la
Frégate la Fidele contre la Frégate Angloife
près de fix. Nonobftant la grande fupériorité de
l'artillerie du Vaiffeau Anglois & de la Frégate ,
tant en nombre de canons qu'en poids des boulets
, les deux Frégates du Roi les ont mis hors
de combat ; & les Anglois fe font retirés : mais il
n'a pas été poffible aux Frégates du Roi , qui
étoient défemparées de toutes leur manoeuvres, de
les pourfuivre. Elles font rentrées à Rochefort le
19 & le 20. On ne fçauroit donner trop d'éloges
à la bravoure que les Officiers , les Gardes de la
Marine & les Equipages , ont fait paroître dans
cette occafion. M. de Maurville a eu le bras droit
fracaffé dès le commencement du combat , &
Fon a été obligé de le lui couper fur le champ .
Malgré cet accident , qui l'a obligé de céder le
210 MERCURE DE FRANCE.
commandement à M. de la Filliere , Capitaine en
fecond , il n'a pas ceffé de donner des marques
de la plus grande fermeté. M. de la Filliere a reçu
trois bleffures. M. Héron , Premier Lieutenant ,
a été tué fur le gaillard d'avant ; & le Chevalier
de Cardaillac , qui commandoit le Détachement
des Gardes de la Marine , a eu un bras caffé. Il
n'y a eu aucun Officier de tué ni de bleffé ſur la
Frégate la Fidele. Dans les Equipages, la Frégate
l'Aquilon a eu quinze hommes tués & vingt-fix
bleflés ; & la Frégate la Fidele , huit tués & dixhuit
bleffés.
La Cour vient de rendre public un Ecrit qui a
pour titre , MEMOIRE concernant le précis des faits
avec leurs piecesjuftificatives , pour fervir de réponfe
aux OBSERVATIONS envoyées par les Miniftres
d'Angleterre dans les Cours de l'Europe . L'objet
des Obfervations fur le premier Mémoire de la
France étoit de juftifier le refus fait par l'Angleterre
de fatisfaire à la réquifition du Roi , du 21
Décembre dernier , & de reftituer les Vaiffeaux
pris en pleine paix . Le feul moyen de colorer ce
refus étoit d'imputer aux François des hoftilités
antérieures à celles des Anglois , & cette fauffe
´imputation eft réfutée dans l'Ecrit que nous annonçons.
On n'oppofe aux fuppofitions des Anglois
que l'expofé le plus fimple de tout ce qui
s'eft paffé entre les deux Nations , foit en Amérique
, foit en Europe , depuis le dernier Traité
d'Aix-la- Chapelle ; & l'on n'avance aucun fait
qui ne foit ou avoué des deux Cours , ou prouvé
par des pieces authentiques & irréprochables.
Parmi ces pieces font celles qui ont été trouvées
dans les papiers du Général Braddock , après le
combat dans lequel il a perdu la vie.
Il paroît une Déclaration du Roi , portant fuf-
1
JUILLET. 1756. 211
penfion du Dixieme de l'Amiral , & autres encouragemens
pour la Courſe.
M. le Marquis de Juigné ayant préféré de commander
une Brigade dans le Régiment des Grenadiers
de France , le Roi a difpofé du Régiment
de Forez , en faveur de M. le Comte de Puyfegur,
Colonel dans celui des Grenadiers de France.
Le Roi a conclu avec l'Impératrice Reine de
Hongrie & de Bohême , un Acte ou Convention
de Neutralité , & un Traité défenfif d'Alliance &
d'Amitié. Cette Convention & ce Traité furent
fignés à Verſailles le premier du mois de Mai , &
les Ratifications y ont été échangées le 28 du
même mois.
Le 17 Mai aufoir , M. le Marquis de la Galif
fonniere , commandant l'Efcadre du Roi dans fa
Méditerranée , fut informé par la Frégate la Gracieufe
, qui étoit en croifiere fur Mayorque , qu'el
le avoit découvert une Eſcadre Angloiſe , qui pouvoit
être alors à huit ou dix lieues dans le Sud. Le
18 , l'Eſcadre du Roi manoeuvra pour aller à la
rencontre de celle des Anglois , mais le calme en
empêcha. Le 19 au matin , on découvrit l'Eſcadre
Angloife du haut des mâts. Elle étoit au vent ,
& il ne fut pas poffible à l'Efcadre du Roi , de
l'approcher jufqu'à la portée du canon. Le 20
M. le Marquis de la Galiffonniere étoit parvenu
gagner le vent : mais dans le tems qu'il ſe trouvoit
dans cette pofition , le vent changea tout
d'un coup ; ce qui rendit cet avantage à l'Eſcadre
Angloife. A deux heures & demie après-midi , les
deux Efcadres fe trouverent en lignes , celle dés
Anglois compofée de dix-huit voiles , dont treize
Vaiffeaux de ligné , & celle du Roi , de douze
Vaiffeaux & quatre Frégates. Le combat fut engagé
par l'avant-garde de l'Efcadre du Roi , qui
212 MERCURE DE FRANCE.
attaqua l'arriere- garde de celles des Anglois. II
devint fucceffivement général : mais il ne le fut
pas pendant tout le tems de fa durée. Les Vaiffeaux
Anglois , qui étoient les plus maltraités
des bordées des Vaiffeaux du Roi , profitant de
l'avantage du vent , pour fe mettre hors de la
portée du canon. L'Efcadre Angloife , après avoir
porté fes plus grands efforts fur l'arriere- garde de
celle du Roi , qu'elle a trouvée fi ferrée , & dont
elle a effuyé un fi grand feu , qu'elle n'a pu l'entamer
, a pris le parti de s'éloigner. Elle avoit
toujours confervé l'avantage du vent , ce qui l'a
mife en état de ne point s'engager. Le combat a
duré près de quatre heures. En général , il n'y a
eu aucun Vaiffeau de l'Efcadre Angloife , qui ait
foutenu longtemps le feu des Vaiffeaux de l'Efca
dre du Roi , lefquels ont peu fouffert. Ils étoient
entiérement réparés dans la nuit , & en état de
combattre le lendemain. Nous n'avons eu que
trente-huit hommes tués , & cent quatre- vingtquatre
bleffés. Aucun Officier n'a été tué. Ceux
qui ont été bleffés , font MM . de Peruffy & de
Puty , Enfeignes , & M. de Gibanelle , Garde de
la Marine , fur le Vaiffeau le Foudroyant ; M. de
Seignoret , Garde de la Marine , fur le Téméraire;
M. de Gravier , Lieutenant fur le Guerrier ; le
Chevalier d'Urre , Lieutenant fur le Sage ; le
Chevalier de Beaucoufe , Lieutenant ; M. d'Alberas
, Enfeigne , & M. Dubeny , Garde de la Marine
, fur le Content..
Depuis l'arrivée de ces nouvelles qui font du
21 , il eft venu des lettres de l'Efcadre , datées du
25. L'Efcadre Angloife n'avoit point reparu , &
celle du Roi continuoit de croifer devant l'entrée
du Port- Mahon . Le Chevalier de Beaucouſe ,
Lieutenant de Vaiffeau , qui avoit eu une cuiffe.
JUILLET. 1756. 213
caffée dans le combat du 20 , & qui avoit été
tranſporté à terre à Mahon , y étoit mort le 24 .
M. de Gibanelle & de Seignoret , Gardes de la
Marine , étoient fort mal à bord des Vaiffeaux fur
lefquels ils ont été bleffés , le premier ayant eu
les reins brifés , & le fecond les deux jambes caffées
. Mais le Chevalier d'Urre , Lieutenant de
Vaifleau , qui a eu un bras caffé , donnoit beaucoup
d'efpérance de guérifon. Les autres bleffés
le font peu dangereufement.
Le 6 Juin , jour de la Pentecôte , les Chevaliers
, Commandeurs & Officiers de l'Ordre du
Saint- Elprit , s'étant affemblés vers les onze heu--
res du matin dans le Cabinet du Roi , Sa Majesté
tint un Chapitre. L'Information des vie & moeurs,
& la Profeffion de Foi , du Marquis de Saint Vital
& du Prince Jablonowski , qui avoient été propofés
le premier Janvier pour être Chevaliers ,
furent admifes , & ils furent introduits dans le
Cabinet , & reçus Chevaliers de l'Ordre de Saint
Michel. Le Roi fortit enfuite de fon apparte
ment , pour aller à la Chapelle. Sa Majesté , devant
laquelle les deux Huiffiers de la Chambre
portoient leurs Maffes , étoit en Manteau , le
Collier de l'Ordre par-deffus , ainfi que celui de
l'Ordre de la Toifon d'Or. Elle étoit précédée
de Monfeigneur le Dauphin , du Duc d'Or
léans , du Prince de Condé , du Comte de Charolois
, du Comte de Clermont , du Prince de Conty
, du Comte de la Marche , du Comte d'Eu ;
du Duc de Penthievre , & des Chevaliers , Commandeurs
& Officiers de l'Ordre. Les deux nouveaux
Chevaliers , en habit de Novices , marchoient
entre les Chevaliers & les Officiers. Après
la grande Meffe , qui fut célébrée par le Prince
Conftantin , Commandeur de l'Ordre , & Prejer
Aumônier du Roi , Sa Majefté monta fux,.
214 MERCURE DE FRANCE .
fon Trône , & revêtit des Marques de l'Ordre les
deux nouveaux Chevaliers. Le Marquis de Saint
Vital eut pour Parrain le Maréchal de Clermont-
Tonnerre. Le Marquis de Matignon fut celui du
Prince Jablonowski. Cette cérémonie étant finie,
le Roi fut reconduit à ſon appartement en la maniere
accoutumée.
M. Dufort , Introducteur des Ambaffadeurs ,
alla le 7 prendre dans les carroffes du Roi & de la
Reine , le Cardinal de Tavannes en fon Hôtel à
Verfailles , & il le conduifit chez le Roi avec
l'Abbé Durini , Camérier Secret du Pape , nommé
par Sa Sainteté pour apporter les Bonnets aux
Cardinaux de Tavannes , de Luynes & de Gefvres.
Avant la Meffe du Roi , l'Abbé Durini fut conduit
, avec les cérémonies accoutumées , à l'au
dience le Roi lui donna dans fon Cabinet
que
& il préfenta à Sa Majesté un Bref de Sa Sainteté.
Après cette audience ,le Roi defcendit à la Chapelle
, où le Cardinal de Tavannes ſe rendit à la fin de
la Meffe , étant conduit par le fieur Dufort , Introducteur
des Ambaffadeurs, Monfieur Defgranà
la
reçut ges , Maître des Cérémonies , porte
La Chapelle le Cardinal de Tavannes , lequel alla
fe placer près du Prié-Dieu du Roi , du côté de
PEvangile , & fe mit à genoux fur un carreau.
L'Abbé Dutini , revêtu de fon habit de cérémonie
, ayant remis entre les mains du Cardinal de
Tavannes le Bref du Pape , alla prendre fur la
Crédence Près de l'Autel , du côté de l'Epître
un Baffin de vermeil doré , fur lequel étoit le
Bonnet , & il le préfenta au Roi. Sa Majesté prit
le Bonnet , & le mit fur la tête du Cardinal de
Tavannes , qui en le recevant , fit une profonde
inclination , & à l'inſtant même fe découvrit.
Dès que le Roi fut en marche pour fortir de la
Chapelle , le Cardinal de Tavannes entra dans la
de
JUILLET. 1756 . 215
Sacriftie , où il prit les habits de fa nouvelle dignité.
Il montà enfuite chez le Roi , étant accompagné
du Maître des Cérémonies. M. Dufort ,
Introducteur des Ambaffadeurs , qui étoit toujours
refté auprès du Cardinal de Tavannes , l'introduifit
dans le Cabinet du Roi , où ce Cardinal fit
fon remerciement à Sa Majesté . Le Cardinal de
Tavannes fut conduit avec les mêmes cérémonies.
à l'audience de la Reine , à laquelle il préfenta
P'Abbé Durini , qui remit à Sa Majesté un Bref
du Pape. Pendant l'audience , on apporta un
tabouret , & le Cardinal de Tavannes s'affit . Il
fut conduit enfuite à l'audience de Monfeigneur
le Dauphin , de Madame la Dauphine , de Madame
, & à celles de Mefdames Victoire , Sophie
& Louife. Après toutes ces audiences , le Cardinal
de Tavannes fut reconduit par M. Dufort , Introducteur
des Ambaffadeurs , dans les carroffes
du Roi & de la Reine à fon Hôtel , avec les cérémonies
obfervées lorſqu'on étoit allé le prendre
pour l'amener chez le Roi.
Le 8 , le Cardinal de Luynes , & le 10 le Cardinal
de Gefvres reçurent des mains du Roi dans
la Chapelle, le Bonnet de Cardinal avec les mêmes
cérémonies.
L'Eglife de l'Abbaye Royale de Pantemont
été bénîte le 30 de Mai , par Dom Couthaud, Religieux
de l'Abbaye de Cîteau , Docteur de Sorbonne
, & Provifeur du College. La cérémonie
en fut édifiante , & fuivie d'une grand'Meffe
chantée par les Religieux , au milieu de laquelle
M. l'Abbé de la Paufe fit un Diſcours , dontl'ob
jet étoit relatif à la pureté du Temple intérieur
fignifié par la Bénédiction du Temple extérieur
qui venoit d'être faite. L'après -dinée , après Vêpres
chantées , il y eut un Salut , dont la mufique
216 MERCURE DE FRANCE.
fut dirigée par M. Balbaftre, & très - bien exécutée.
La Bénédiction fut donnée par le R. P. Général
des Bénédictins , & Madame la Ducheffe de Modene
y aflifta avec la cour & plufieurs perfonnes
de diftinction.
Le 3 Juin , Monfeigneur le Dauphin & Madame
, fe rendirent dans cette Abbaye pour nommer
deux Cloches de la nouvelle Eglife . A la porte
extérieure , ils furent reçus avec les cérémonies
accoutumées , & complimentés avec applaudiffement
par Dom Couthaud : delà arrivés à la
porte de la grille du Choeur , Madame l'Abbeffe
de Pantemont , avec fa croffe , à la tête de fa
Communauté , & accompagnée de plufieurs autres
Abbeffes , les conduifit à leur prie- Dieu en
chantant le Laudate . Dom Couthaud fit la cérémonie
, qui fut fuivie du Salut pendant l'une &
l'autre , la mufique exécuta plufieurs morceaux
& Motets choifis. Enfuite Monfeigneur le Dau
phin & Madame fuivis de leur cour , furent conduits
au Réfectoire , où trois jeunes Demoiſelles
habillées en Vierges , préfenterent trois corbeilles
remplies tant de fleurs que d'ouvrages , bourfes , -
facs & noeuds d'épée : chacune déclama différentes
pieces de vers avec autant de nobleffe que de modeftie
; Madame l'Abbeffe préſenta dans le même
Réfectoire la collation à Monfeigneur le Dauphin
& à Madame. Il y avoit , entr'autres fingularités ,
les meilleurs fruits de primeur , & les plus rares
pour la faifon ; des melons , des pêches , des cerneaux
, du raifin . Enfuite Monſeigneur le Dauphin
& Madame voulurent parcourir les Bâtimens , &
partout le Prince & la Princeffe marquerent leur
fatisfaction.
On doit obferver ici que le Monaftere & l'Eglife
de l'Abbaye de Pantemont ont été faits &
conduits
JUILLET . 1756 . 217
conduits fur les deffeins de M. Contant , Architecte
du Roi , de Monfeigneur le Duc d'Orléans
& de l'Académie d'Architecture . Il étoit réservé
au talent & à la réputation de cet Artifte de
donner un exemple public que l'on pouvoit
voûter les Dômes & les Eglifes , fuivant la conftruction
des voûtes qu'il a fait exécuter avec ſuccès
dans le Château de Biffy , appartenant à M. le
Maréchal Duc de Belleifle ; l'Eglife & le Dôme
de Pantemont font les premiers exemples exécutés
en France de cette conftruction , qui prouvent
que l'ufage de ces voûtes feroient d'une grande
utilité pour être employé à la conſtruction de
nos Eglifes modernes , & que l'on pourroit par
cette pratique leur donner avec le bon goût de
l'architecture , l'élégance & la légéreté des Eglifes
gothiques , dont la conftruction hardie & folide
caufe autant de regrets que d'admiration .
Fermer
Résumé : « Le 9 Mai, le Bourg de Ferechampenoise, un des plus considérables du [...] »
En mai 1756, plusieurs événements marquants ont eu lieu en France. Le 9 mai, le bourg de Ferechampenoise, dans le diocèse de Châlons-sur-Marne, a été presque entièrement détruit par un incendie, laissant près de mille personnes sans abri. Le 11 mai, le duc de Biron a annoncé des pensions royales pour plusieurs officiers des Gardes Françaises, dont le comte d'Aspreumont et le lieutenant Savary. Des brevets de colonel ont été attribués au marquis de Rafilly et au comte du Dreneuc, tandis que la croix de Saint-Louis a été décernée à plusieurs autres officiers. Le roi a ordonné la réorganisation des bataillons de l'infanterie française, suisse et grisonne, augmentant leur composition à dix-sept compagnies. Les régiments suisses et grisons ont été restructurés en deux bataillons de six compagnies chacun. Le 27 mai, les députés des États d'Artois ont été reçus par le roi, présentés par le duc de Chaulnes et le comte d'Argençon. La délégation comprenait Dom de Briois d'Hulluch pour le clergé, le comte de Beaufort pour la noblesse, et M. Harduin pour le tiers-état. En juillet 1756, le maréchal de Richelieu a supervisé les opérations militaires à Minorque, notamment la construction de batteries et la défense contre les forces anglaises. Plusieurs officiers ont été blessés ou tués lors des combats. Les frégates françaises l'Aquilon et la Fidèle ont engagé un combat contre des navires anglais près de l'île d'Oléron, mettant les navires anglais hors de combat malgré des pertes importantes. La cour a publié un mémoire en réponse aux observations des ministres anglais concernant les hostilités entre les deux nations. Le roi a signé un acte de neutralité et un traité d'alliance avec l'impératrice reine de Hongrie et de Bohême, ratifiés le 28 mai 1756. Le marquis de Juigné a pris le commandement d'une brigade dans le régiment des Grenadiers de France, et le comte de Puysegur a été nommé colonel du régiment de Forez. Un combat naval a opposé douze vaisseaux et quatre frégates françaises à la flotte anglaise. Les vaisseaux anglais, bien que malmenés, ont profité du vent pour se mettre hors de portée des canons français. Le combat a duré près de quatre heures, avec des pertes françaises de trente-huit hommes tués et cent quatre-vingt-quatre blessés, sans perte d'officiers. À la cour de France, le 6 juin, le roi a tenu un chapitre de l'Ordre du Saint-Esprit, au cours duquel le marquis de Saint-Vital et le prince Jablonowski ont été reçus chevaliers de l'Ordre de Saint-Michel. Le 7 juin, le cardinal de Tavannes a reçu son bonnet cardinalice des mains du roi. Les cardinaux de Luynes et de Gesvres ont également reçu leurs bonnets les 8 et 10 juin. Le 30 mai, l'église de l'Abbaye Royale de Panthemont a été bénie, suivie d'une messe et d'un salut musical. Le 3 juin, le dauphin et Madame ont visité l'abbaye pour nommer deux cloches et ont reçu des présents.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 238-245
Nouvelles de la Cour, de Paris, &c.
Début :
Sa Majesté a accordé les grandes entrées à M. le Maréchal Duc [...]
Mots clefs :
Comte d'Egmont, Duc de Gesvres, Célébrations de la conquête de Minorque, Monument de gloire, Marquis, Maréchal, Fort de Saint-Philippe, Cardinal de Tavannes, Garnison de la Rochelle, Comtes, Prince de Croy
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Nouvelles de la Cour, de Paris, &c.
Nouvelles de la Cour , de Paris , &c.
Sa Majefté a accordé les grandes entrées à M. le
A
Maréchal Duc de Belle- Ifle .
Le jour que M. le Comte d'Egmont apporta au
Roi les articles de la Capitulation du Fort Saint-
Philippe , le Corps de Ville fit tirer à cinq & à fept
heures du foir les boîtes d'artillerie & le canon
de la Ville. Sur les neuf heures , il y eut une pareille
falve d'artillerie , pendant laqucile les Prévôt
des Marchands & Echevins allumerent , avec les
cérémonies accoutumées , le bucher qui avoit
été dreffé dans le milieu de la Place de l'Hôtel de
Ville. On tira enfuite une grande quantité de
fufées volantes. La Ville fit en même temps couler
trois fontaines de vin , & diftribuer des viandes au
peuple dans la même Place . Près de chaque fontaine
de vin étoit une Orcheſtre remplie de
Joueurs d'Inftrumens . La Place étoit éclairée par
un grand nombre d'ifs , qui portoient des lumie
res , & la façade de l'Hôtel de Ville l'étoit par
trois filets de terrines fuivant l'Ordre de l'Architecture.
L'Hôtel de M. le Duc de Gefvres , Gou
SEPTEMBRE . 1756. 239
verneur de Paris ; celui du Prevôt des Marchands,
& les maifons des Echevins & des principaux Officiers
de l'Hôtel de Ville , furent auffi illuminés.
Le Roi ayant écrit à l'Archevêque de Paris
pour faire rendre de folemnelles actions de graces
à l'occafion de la conquête de l'Ifle Minorque
on chanta le 25 Juillet le Te Deum dans l'Eglife
Métropolitaine , & P'Abbé de Saint - Exupery ,
Doyen du Chapitre , y officia. M. de Lamoignon ,
Chancelier de France , & M. de Machault , Garde
des Sceaux , accompagnés de plufieurs Confeillers
d'Etat , & Maîtres des Requêtes , y affifterent ,
ainfi que le Parlement , la Chambre des Comptes
, la Cour des Aides & le Corps de Ville , qui
y avoient été invités de la part de Sa Majesté par
M. Defgranges , Maître des Cérémonies.
On tira le même jour dans la Place de l'Hôtel
de Ville , par ordre des Prevôt des Marchands &
Echevins , un Feu d'artifice dont l'exécution ne
laiffa rien à défirer. La décoration repréfentoit
un grand trophée de guerre , élevé à la gloire du
Roi fur les débris d'un Fort . Le corps de ce tro
phée , étoit une pyramide quadrangulaire de
foixante douze pieds de haut , pofée au milieu de
la principale place d'armes du Fort ſur pluſieurs
canons démontés. Des maffes d'armures antiques ,
des efpeces de foleils formés avec les armes enlevées
aux ennemis , & des médaillons au chiffre
du Roi , ornoient les quatre faces de la pyramide.
La boule de France , furmontée d'une couronne ,
lui fervoit d'amortiffement. Cette pyramide étoit
accompagnée de deux colonnes roftrales de cinq
pieds de diametre , conftruites fur les pointes des
Ravelins , & auxquelles étoient attachés des becs
& des proues de Navires. A l'entrée des attaques
on avoit placé diverfes figures allégoriques. Qua
240 MERCURE DE FRANCE.
tre palmiers étoient plantés fur les quatre contre
gardes , qui enveloppoient le corps de la Place ,
& qui enfermoient la feconde enceinte. Les tiges
de ces arbres étoient chargées de dépouilles remportées
par les vainqueurs , & les rameaux étoient
entrelacés de guirlandes auxquelles des couronnes
de laurier de différentes grandeurs étoient fufpendues.
On voyoit au haut des deux colonnes deux
figures, qui repréfentoient, l'une Neptune , l'autre
Le Génie Tutelaire de la Place. La France , entourée
de plufieurs Génies & d'une troupe de Héros ,
paroiffoit à l'endroit de la principale attaque ,
confacrant ce monument en préſence de Mars &
de Minerve.
Cette décoration enrichie de peinture & de
rondeboffe , avoir quatre-vingt-huit pieds de longueur.
Elle étoit difpofée fur plufieurs plans concentriques
, élevés les uns au- deffus des autres , &
elle préfentoit au naturel le tableau d'une fête
militaire , donnée dans un Fort qui venoit d'être
emporté d'affaut. Les différens jeux de l'artifice
exprimerent l'attaque & la défenfe d'une Place.
Ils furent terminés par un coup de feu très-bril
lant , & par un bouquet en réjouiffance de la
victoire.
Au Feu d'artifice fuccéda une magnifique illu
mination. Un triple cordon de lumieres deffinoit
l'architecture de la façade & du grand comble de
l'Hôtel de Ville . Plufieurs luftres garnis de lanternes
de verre éclairoient diverfes parties du bâ
timent. Toute l'enceinte de la Place étoit illuminée
, ainfi que le pourtour du Feu , par des ifs
chargés de lampions .
Il y eut auffi de très- belles illuminations aux
Hôtels de M. le Duc de Gefvres & du Prevôt des
Marchands , & aux maiſons des Echevins & des
principaux
SEPTEMBRE. 1756. 245
principaux Officiers de l'Hôtel de Ville . Des fontaines
de vin coulerent , & l'on diſtribua du pain
& des viandes au peuple dans tous ces différens
endroits, de même que dans la Place de Louis XV ,
dans celle de Louis le Grand , dans celle des Victoires
, dans celle du Carroufel , dans la Place
Royale , dans les Halles , dans le Marché- Neuf ,
à la Place Maubert & à la Croix- Rouge. On
avoit mis des Orcheſtres partout où le faifoient
ces diſtributions , & le peuple jufqu'à cinq heures
du matin témoigna par les danfes la joie que lui
caufoit la profpérité des armes du Roi. Pendant
toute la nuit , la Place devant l'Hôtel de Ville fut
remplie de carroffes.
Deux Armateurs de Calais ont fait deux prifes
affez confidérables . Un Armateur de Dunkerque
a enlevé un Navire Anglois qui forto t d´´la Tamife
, & il l'a conduit à Oftende. Le chargement
de cette derniere priſe eſt eſtimé trois cens mille
livres.
Le Roi a donné le Gouvernement général de
l'Ile Minorque à M. le Comte de Lannon , Maréchal
de Camp . Sa Majefté a fait Marécha x e
fes Camps & Armées MM. de la Serre , Brigadier,
Lieutenant- Colonel du Régiment Royal la Ma
rine; de la Bliniere , Brigadier , Lieutenant- Colonel
du Régiment Royal Infanterie ; le Marquis
de Roquepine , Brigadier , Colonel du Régi
ment Royal Comtois ; le Marquis de Monti , Bi
gadier , Colonel du Régiment Royal Italien ; le
Marquis de Trainel , Brigadier , Colonel d'un
Régiment d'Infanterie ; le Comte d'Egmont , Brigadier
; Meftre de Camp d'un Régiment de Cavalerie
, & le Chevalier de Redmont , Brigadier ,
Meftre de Camp Réformé de Cavalerie. Sa Majeſté
a fait Brigadier de Dragons M. le Duc de
L
242 MERCURE DE FRANCE.
Fronfac , Mestre de Camp de Dragons ; & Elle a
fait Brigadiers d'Infanterie M. le Prince de Rohan-
Rochefort , Colonel d'un Régiment d'Infanterie ;
le Comte de Levis- Leran , Colonel du Régiment
Royal la Marine ; le Chevalier de Clermont d'Amboife
, Colonel du Régiment de Bretagne , & le
Comte de Rochambeau , Colonel du Régiment
de la Marche.
Il y a eu , tant pendant le cours du fiege da
Fort Saint- Philippe , qu'à l'attaque faite des ouvrages
de ce Fort dans la nuit du 27 au 28 Juin ,
treize Officiers tués , & quatre vingt- douze bleffés.
Quatre cens dix -neuf Soldats ont été tués , &
le nombre de ceux qui ont été bleffés monte à
neuf cens quatre- vingt- feize.
Les habitans de Rouen ayant été informés que
M. le Cardinal de Tavannes devoit y arriver le 19
Juillet , le Chapitre de l'Eglife Métropolitaine ,
& tous les Ordres de la Ville , fe font empreffés à
l'envi de lui marquer la part qu'ils prenoient à fa
promotion au Cardinalat . Les Compagnies de la
Bourgoifie , à cheval , avec leurs trompettes &
leurs étendards , font allées au devant de lui ,
à l'entrée du Fauxbourg , dans le lieu où il devoit
fe revêtir de fes habits de cérémonie. Toutes les
Brigades de la Maréchauffée , le Grand Prevôt à
leur tête , fe font rendues au même lieu , & toutes
les perfonnes de confidération y ont envoyé leurs
carroffes, pour former un cortége pompeux . L'im- :
patience de voir le Cardinal avoit fait fortir de la
Ville une partie du peuple ; le refte rempliffoit les
rues & les places publiques. Le Cardinal , en entrant
dans Rouen , a été falué par le canon de la
Ville & par celui du vieux Palais. Le Régiment
de Lyonnois , fous les armes , formoit une doable
Laie depuis la porte du Pont juſqu'au grand Por
SEPTEMBRE . 1756. 243
tail de l'Eglife Métropolitaine , dont l'interieur
étoit gardé par les deux Compagnies de Grenadiers
de ce Corps . Lorfque le Cardinal a été prêt
d'entrer dans la grande Place qui eft devant l'E-`
glife , le Chapitre eft forti proceffionellement ,
pour aller au devant de Son Eminence. Le Haut
Doyen l'a complimentée au nom des Chanoines ,
& elle a été conduite dans le choeur de l'Eglife
Métropolitaine , où les principaux Membres du
Parlement & de la Chambre des Comptes , le
Corps de Ville , les Curés , les Supérieurs des
Communautés Régulieres , & un grand nombre
de perfonnes de diftinction , étoient placés avec
un ordre dont tout le monde a été fatisfait . On a
chanté le Te Deum en mufique & avec fymphonie.
A l'entrée de la nuit , la partie extérieure du
choeur de l'Eglife Métropolitaine , qui termine
d'un côté la cour de l'Archevêché , a été illuminée
, ainfi que toutes les maifons des Chanoines ,
les Communautés Religieufes & plufieurs autres
maifons de la Ville.
"
Le premier d'Août , les Officiers de la Garnifon
de la Rochelle , compofée des Régimens d'Infanterie
de la Sarre & de Breffe , & du Régiment
Royal Dragons , célébrerent par une fête éclatante
la prife du Fort Saint- Philippe . La grande
Place de la Ville étant plantée de plufieurs allées
d'arbres , paroiffoit faite exprès pour rendre ce
fpectacle agréable. Après que les troupes y eurent
formé plufieurs faifceaux de leurs armes , l'Aumônier
du Régiment de la Sarre dit la Meſſe fur un
Autel qu'on dreffa dans l'inftant . Enfuite les foldars
des trois Régimens que l'on mêla exprès ,
prirent leurs places aux différentes tables qui leur
étoient deſtinées , & qui furent fervies avec la
plus grande abondance . On avoit préparé des ta-
Lij
244 MERCURE DE FRANCE.
bles particulieres pour les Maréchaux des Logis &
pour les Sergens . M. de Montpouillan & les
Comtes de Carcado & de la Blache , Colonels , accompagnés
de MM. le Blanc & de Labadie , Lieutenans-
Colonels , & de MM. du Menil , de S. Mery
& de Murat, Majors , allerent inviter M. le Marquis
de Clermont- Gallerande, Lieutenans-Général, qui
commande dans la Province , & M. le Marquis de
Dreux employé fous les ordres en qualité de Maréchal
de Camp , à porter la fanté du Roi & celles
de la Famille Royale. Ces fantés furent bues au
bruit de cinq pieces de canon . Pluſieurs inftrumens
de guerre & de mufique augmenterent la
joie de ce feftin militaire. La fête fut fuivie d'un
magnifique repas fervi à une table de cent cinquante
couverts que donna le Marquis de Gallerande.
Le foir , l'Hôtel de ce Lieutenant Général
fut illuminé en tranſparent. La décoration repréfentoit
le Port-Mahon . Au deffus , on lifoit ce vers :
Difcite juftitiam moniti , &non temnere Divos.
La fête que le Prince de Croy a donnée le
même jour au Camp fous Calais , a été de la plus
grande magnificence. Quarante- cinq Dames y
avoient été invitées , ainfi que M. d'Invault , Intendant
de Picardie , & tous les Officiers des Etats
Majors des Villes , Citadelles & Forts des environs
du Camp . On fervit pour cette Compagnie &
pour les Officiers des troupes dont le Camp eft
compofé , plufieurs tables fous des baldaquins à
la Chinoife , dont les bords étoient feftonnés par
des guirlandes de fleurs . Ces mêmes guirlandes
defcendoient par diverfes circonvolutions autour
des colonnes qui foutenoient les baldaquins. Pendant
le repas, qui dura depuis quatre heures aprèsmidi
jufqu'à fept , & dans lequel il régna autant
de profufion que de délicateffe , on diftribua dụ
pain , de la viande & de la biere aux foldats. Les
SEPTEMBRE . 1736. 245
Comédiens jouerent la Comédie gratis ; & comme
la falle du Spectacle ne pouvoit contenir qu'une
petite partie des troupes , on avoit placé des Farceurs,
des Danfeurs de cordes & des Joueurs de gobelets,
à la tête de chaque Brigade . Sur les fept heures
& demie , on chanta le Te Deum dans la Chapelle
du Camp , au bruit de tous les inftrumens de
guerre. Lorfque la nuit commença , trois fufées
partirent d'une montagne à deux lieues du Camp ,
qui eft précisément vis - à-vis de Douvres . La Ville
& la Citadelle de Calais , & tous les Forts des
ennemis répondirent à ce fignal par des falves
générales de leur artillerie. Ces falves furent repétées
trois fois . Elles furent fuivies d'un Feu
d'artifice , dont la décoration repréfentoit un
Fort quarré à double enceinte , femblable à celui
de Saint-Philippe . A la fin du Feu , il tomba fur
le Fort une fleur de lys enflammée. Plufieurs fougaffes
jouerent en même temps , & renverferent
tous les ouvrages . On demeura un inftant dans
une grande obfcurité . Puis on vit s'élever par
dégrés un foleil d'artifice . Les Armes de France
parurent deffinées en feu brillant . Au deffus étoit
un Vive le Roi en caracteres lumineux , parfaitement
exécuté .
La Ville de Saint- Malo ne s'eft pas moins
diftinguée par les réjouiffances qu'elle a faites le
8 , à l'occafion de la conquête de l'Ile Minorque.
Voici le Mandement de M. l'Evêque de cette Ville ,
qui a ordonné de chanter le Te Deum à ce fujet.
Sa Majefté a accordé les grandes entrées à M. le
A
Maréchal Duc de Belle- Ifle .
Le jour que M. le Comte d'Egmont apporta au
Roi les articles de la Capitulation du Fort Saint-
Philippe , le Corps de Ville fit tirer à cinq & à fept
heures du foir les boîtes d'artillerie & le canon
de la Ville. Sur les neuf heures , il y eut une pareille
falve d'artillerie , pendant laqucile les Prévôt
des Marchands & Echevins allumerent , avec les
cérémonies accoutumées , le bucher qui avoit
été dreffé dans le milieu de la Place de l'Hôtel de
Ville. On tira enfuite une grande quantité de
fufées volantes. La Ville fit en même temps couler
trois fontaines de vin , & diftribuer des viandes au
peuple dans la même Place . Près de chaque fontaine
de vin étoit une Orcheſtre remplie de
Joueurs d'Inftrumens . La Place étoit éclairée par
un grand nombre d'ifs , qui portoient des lumie
res , & la façade de l'Hôtel de Ville l'étoit par
trois filets de terrines fuivant l'Ordre de l'Architecture.
L'Hôtel de M. le Duc de Gefvres , Gou
SEPTEMBRE . 1756. 239
verneur de Paris ; celui du Prevôt des Marchands,
& les maifons des Echevins & des principaux Officiers
de l'Hôtel de Ville , furent auffi illuminés.
Le Roi ayant écrit à l'Archevêque de Paris
pour faire rendre de folemnelles actions de graces
à l'occafion de la conquête de l'Ifle Minorque
on chanta le 25 Juillet le Te Deum dans l'Eglife
Métropolitaine , & P'Abbé de Saint - Exupery ,
Doyen du Chapitre , y officia. M. de Lamoignon ,
Chancelier de France , & M. de Machault , Garde
des Sceaux , accompagnés de plufieurs Confeillers
d'Etat , & Maîtres des Requêtes , y affifterent ,
ainfi que le Parlement , la Chambre des Comptes
, la Cour des Aides & le Corps de Ville , qui
y avoient été invités de la part de Sa Majesté par
M. Defgranges , Maître des Cérémonies.
On tira le même jour dans la Place de l'Hôtel
de Ville , par ordre des Prevôt des Marchands &
Echevins , un Feu d'artifice dont l'exécution ne
laiffa rien à défirer. La décoration repréfentoit
un grand trophée de guerre , élevé à la gloire du
Roi fur les débris d'un Fort . Le corps de ce tro
phée , étoit une pyramide quadrangulaire de
foixante douze pieds de haut , pofée au milieu de
la principale place d'armes du Fort ſur pluſieurs
canons démontés. Des maffes d'armures antiques ,
des efpeces de foleils formés avec les armes enlevées
aux ennemis , & des médaillons au chiffre
du Roi , ornoient les quatre faces de la pyramide.
La boule de France , furmontée d'une couronne ,
lui fervoit d'amortiffement. Cette pyramide étoit
accompagnée de deux colonnes roftrales de cinq
pieds de diametre , conftruites fur les pointes des
Ravelins , & auxquelles étoient attachés des becs
& des proues de Navires. A l'entrée des attaques
on avoit placé diverfes figures allégoriques. Qua
240 MERCURE DE FRANCE.
tre palmiers étoient plantés fur les quatre contre
gardes , qui enveloppoient le corps de la Place ,
& qui enfermoient la feconde enceinte. Les tiges
de ces arbres étoient chargées de dépouilles remportées
par les vainqueurs , & les rameaux étoient
entrelacés de guirlandes auxquelles des couronnes
de laurier de différentes grandeurs étoient fufpendues.
On voyoit au haut des deux colonnes deux
figures, qui repréfentoient, l'une Neptune , l'autre
Le Génie Tutelaire de la Place. La France , entourée
de plufieurs Génies & d'une troupe de Héros ,
paroiffoit à l'endroit de la principale attaque ,
confacrant ce monument en préſence de Mars &
de Minerve.
Cette décoration enrichie de peinture & de
rondeboffe , avoir quatre-vingt-huit pieds de longueur.
Elle étoit difpofée fur plufieurs plans concentriques
, élevés les uns au- deffus des autres , &
elle préfentoit au naturel le tableau d'une fête
militaire , donnée dans un Fort qui venoit d'être
emporté d'affaut. Les différens jeux de l'artifice
exprimerent l'attaque & la défenfe d'une Place.
Ils furent terminés par un coup de feu très-bril
lant , & par un bouquet en réjouiffance de la
victoire.
Au Feu d'artifice fuccéda une magnifique illu
mination. Un triple cordon de lumieres deffinoit
l'architecture de la façade & du grand comble de
l'Hôtel de Ville . Plufieurs luftres garnis de lanternes
de verre éclairoient diverfes parties du bâ
timent. Toute l'enceinte de la Place étoit illuminée
, ainfi que le pourtour du Feu , par des ifs
chargés de lampions .
Il y eut auffi de très- belles illuminations aux
Hôtels de M. le Duc de Gefvres & du Prevôt des
Marchands , & aux maiſons des Echevins & des
principaux
SEPTEMBRE. 1756. 245
principaux Officiers de l'Hôtel de Ville . Des fontaines
de vin coulerent , & l'on diſtribua du pain
& des viandes au peuple dans tous ces différens
endroits, de même que dans la Place de Louis XV ,
dans celle de Louis le Grand , dans celle des Victoires
, dans celle du Carroufel , dans la Place
Royale , dans les Halles , dans le Marché- Neuf ,
à la Place Maubert & à la Croix- Rouge. On
avoit mis des Orcheſtres partout où le faifoient
ces diſtributions , & le peuple jufqu'à cinq heures
du matin témoigna par les danfes la joie que lui
caufoit la profpérité des armes du Roi. Pendant
toute la nuit , la Place devant l'Hôtel de Ville fut
remplie de carroffes.
Deux Armateurs de Calais ont fait deux prifes
affez confidérables . Un Armateur de Dunkerque
a enlevé un Navire Anglois qui forto t d´´la Tamife
, & il l'a conduit à Oftende. Le chargement
de cette derniere priſe eſt eſtimé trois cens mille
livres.
Le Roi a donné le Gouvernement général de
l'Ile Minorque à M. le Comte de Lannon , Maréchal
de Camp . Sa Majefté a fait Marécha x e
fes Camps & Armées MM. de la Serre , Brigadier,
Lieutenant- Colonel du Régiment Royal la Ma
rine; de la Bliniere , Brigadier , Lieutenant- Colonel
du Régiment Royal Infanterie ; le Marquis
de Roquepine , Brigadier , Colonel du Régi
ment Royal Comtois ; le Marquis de Monti , Bi
gadier , Colonel du Régiment Royal Italien ; le
Marquis de Trainel , Brigadier , Colonel d'un
Régiment d'Infanterie ; le Comte d'Egmont , Brigadier
; Meftre de Camp d'un Régiment de Cavalerie
, & le Chevalier de Redmont , Brigadier ,
Meftre de Camp Réformé de Cavalerie. Sa Majeſté
a fait Brigadier de Dragons M. le Duc de
L
242 MERCURE DE FRANCE.
Fronfac , Mestre de Camp de Dragons ; & Elle a
fait Brigadiers d'Infanterie M. le Prince de Rohan-
Rochefort , Colonel d'un Régiment d'Infanterie ;
le Comte de Levis- Leran , Colonel du Régiment
Royal la Marine ; le Chevalier de Clermont d'Amboife
, Colonel du Régiment de Bretagne , & le
Comte de Rochambeau , Colonel du Régiment
de la Marche.
Il y a eu , tant pendant le cours du fiege da
Fort Saint- Philippe , qu'à l'attaque faite des ouvrages
de ce Fort dans la nuit du 27 au 28 Juin ,
treize Officiers tués , & quatre vingt- douze bleffés.
Quatre cens dix -neuf Soldats ont été tués , &
le nombre de ceux qui ont été bleffés monte à
neuf cens quatre- vingt- feize.
Les habitans de Rouen ayant été informés que
M. le Cardinal de Tavannes devoit y arriver le 19
Juillet , le Chapitre de l'Eglife Métropolitaine ,
& tous les Ordres de la Ville , fe font empreffés à
l'envi de lui marquer la part qu'ils prenoient à fa
promotion au Cardinalat . Les Compagnies de la
Bourgoifie , à cheval , avec leurs trompettes &
leurs étendards , font allées au devant de lui ,
à l'entrée du Fauxbourg , dans le lieu où il devoit
fe revêtir de fes habits de cérémonie. Toutes les
Brigades de la Maréchauffée , le Grand Prevôt à
leur tête , fe font rendues au même lieu , & toutes
les perfonnes de confidération y ont envoyé leurs
carroffes, pour former un cortége pompeux . L'im- :
patience de voir le Cardinal avoit fait fortir de la
Ville une partie du peuple ; le refte rempliffoit les
rues & les places publiques. Le Cardinal , en entrant
dans Rouen , a été falué par le canon de la
Ville & par celui du vieux Palais. Le Régiment
de Lyonnois , fous les armes , formoit une doable
Laie depuis la porte du Pont juſqu'au grand Por
SEPTEMBRE . 1756. 243
tail de l'Eglife Métropolitaine , dont l'interieur
étoit gardé par les deux Compagnies de Grenadiers
de ce Corps . Lorfque le Cardinal a été prêt
d'entrer dans la grande Place qui eft devant l'E-`
glife , le Chapitre eft forti proceffionellement ,
pour aller au devant de Son Eminence. Le Haut
Doyen l'a complimentée au nom des Chanoines ,
& elle a été conduite dans le choeur de l'Eglife
Métropolitaine , où les principaux Membres du
Parlement & de la Chambre des Comptes , le
Corps de Ville , les Curés , les Supérieurs des
Communautés Régulieres , & un grand nombre
de perfonnes de diftinction , étoient placés avec
un ordre dont tout le monde a été fatisfait . On a
chanté le Te Deum en mufique & avec fymphonie.
A l'entrée de la nuit , la partie extérieure du
choeur de l'Eglife Métropolitaine , qui termine
d'un côté la cour de l'Archevêché , a été illuminée
, ainfi que toutes les maifons des Chanoines ,
les Communautés Religieufes & plufieurs autres
maifons de la Ville.
"
Le premier d'Août , les Officiers de la Garnifon
de la Rochelle , compofée des Régimens d'Infanterie
de la Sarre & de Breffe , & du Régiment
Royal Dragons , célébrerent par une fête éclatante
la prife du Fort Saint- Philippe . La grande
Place de la Ville étant plantée de plufieurs allées
d'arbres , paroiffoit faite exprès pour rendre ce
fpectacle agréable. Après que les troupes y eurent
formé plufieurs faifceaux de leurs armes , l'Aumônier
du Régiment de la Sarre dit la Meſſe fur un
Autel qu'on dreffa dans l'inftant . Enfuite les foldars
des trois Régimens que l'on mêla exprès ,
prirent leurs places aux différentes tables qui leur
étoient deſtinées , & qui furent fervies avec la
plus grande abondance . On avoit préparé des ta-
Lij
244 MERCURE DE FRANCE.
bles particulieres pour les Maréchaux des Logis &
pour les Sergens . M. de Montpouillan & les
Comtes de Carcado & de la Blache , Colonels , accompagnés
de MM. le Blanc & de Labadie , Lieutenans-
Colonels , & de MM. du Menil , de S. Mery
& de Murat, Majors , allerent inviter M. le Marquis
de Clermont- Gallerande, Lieutenans-Général, qui
commande dans la Province , & M. le Marquis de
Dreux employé fous les ordres en qualité de Maréchal
de Camp , à porter la fanté du Roi & celles
de la Famille Royale. Ces fantés furent bues au
bruit de cinq pieces de canon . Pluſieurs inftrumens
de guerre & de mufique augmenterent la
joie de ce feftin militaire. La fête fut fuivie d'un
magnifique repas fervi à une table de cent cinquante
couverts que donna le Marquis de Gallerande.
Le foir , l'Hôtel de ce Lieutenant Général
fut illuminé en tranſparent. La décoration repréfentoit
le Port-Mahon . Au deffus , on lifoit ce vers :
Difcite juftitiam moniti , &non temnere Divos.
La fête que le Prince de Croy a donnée le
même jour au Camp fous Calais , a été de la plus
grande magnificence. Quarante- cinq Dames y
avoient été invitées , ainfi que M. d'Invault , Intendant
de Picardie , & tous les Officiers des Etats
Majors des Villes , Citadelles & Forts des environs
du Camp . On fervit pour cette Compagnie &
pour les Officiers des troupes dont le Camp eft
compofé , plufieurs tables fous des baldaquins à
la Chinoife , dont les bords étoient feftonnés par
des guirlandes de fleurs . Ces mêmes guirlandes
defcendoient par diverfes circonvolutions autour
des colonnes qui foutenoient les baldaquins. Pendant
le repas, qui dura depuis quatre heures aprèsmidi
jufqu'à fept , & dans lequel il régna autant
de profufion que de délicateffe , on diftribua dụ
pain , de la viande & de la biere aux foldats. Les
SEPTEMBRE . 1736. 245
Comédiens jouerent la Comédie gratis ; & comme
la falle du Spectacle ne pouvoit contenir qu'une
petite partie des troupes , on avoit placé des Farceurs,
des Danfeurs de cordes & des Joueurs de gobelets,
à la tête de chaque Brigade . Sur les fept heures
& demie , on chanta le Te Deum dans la Chapelle
du Camp , au bruit de tous les inftrumens de
guerre. Lorfque la nuit commença , trois fufées
partirent d'une montagne à deux lieues du Camp ,
qui eft précisément vis - à-vis de Douvres . La Ville
& la Citadelle de Calais , & tous les Forts des
ennemis répondirent à ce fignal par des falves
générales de leur artillerie. Ces falves furent repétées
trois fois . Elles furent fuivies d'un Feu
d'artifice , dont la décoration repréfentoit un
Fort quarré à double enceinte , femblable à celui
de Saint-Philippe . A la fin du Feu , il tomba fur
le Fort une fleur de lys enflammée. Plufieurs fougaffes
jouerent en même temps , & renverferent
tous les ouvrages . On demeura un inftant dans
une grande obfcurité . Puis on vit s'élever par
dégrés un foleil d'artifice . Les Armes de France
parurent deffinées en feu brillant . Au deffus étoit
un Vive le Roi en caracteres lumineux , parfaitement
exécuté .
La Ville de Saint- Malo ne s'eft pas moins
diftinguée par les réjouiffances qu'elle a faites le
8 , à l'occafion de la conquête de l'Ile Minorque.
Voici le Mandement de M. l'Evêque de cette Ville ,
qui a ordonné de chanter le Te Deum à ce fujet.
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Résumé : Nouvelles de la Cour, de Paris, &c.
Le texte décrit les célébrations et événements liés à la conquête de l'île de Minorque par le roi de France. Le 25 juillet, le roi a ordonné des actions de grâce solennelles. À Paris, un Te Deum a été chanté dans l'église métropolitaine en présence de l'archevêque, du chancelier de France, du garde des sceaux et divers corps officiels. Un feu d'artifice a été tiré sur la place de l'Hôtel de Ville, illustrant un trophée de guerre et des scènes de bataille. La ville a été illuminée, et des fontaines de vin ainsi que des distributions de nourriture ont été organisées dans plusieurs places publiques. Des illuminations ont également eu lieu dans les hôtels des dignitaires et des principaux officiers de la ville. Le roi a procédé à des promotions militaires, nommant notamment M. le Comte de Lannion gouverneur général de l'île de Minorque et plusieurs officiers à des grades supérieurs. Les combats pour le fort Saint-Philippe ont entraîné des pertes humaines importantes : treize officiers tués et quatre-vingt-douze blessés, ainsi que quatre cent dix-neuf soldats tués et neuf cent quatre-vingt-seize blessés. À Rouen, le cardinal de Tavannes a été accueilli par une procession et des salves de canon, suivies d'un Te Deum. La Rochelle a célébré la prise du fort Saint-Philippe par une fête militaire incluant une messe, un banquet et des illuminations. Le prince de Croy a organisé une fête somptueuse dans son camp sous Calais, avec repas, spectacles et feu d'artifice. Saint-Malo a également marqué la conquête de Minorque par des réjouissances publiques.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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