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p. 1453-1469
EXTRAIT de la Dissertation sur la Taille par l'appareil Lateral, luë par M. Morand à la rentrée publique de l'Académie Royale des Sciences d'aprés Pâques.
Début :
Nous avons donné dans le Mercure du mois de Decembre 1729. une [...]
Mots clefs :
Londres, Cadavres, Chirurgiens, Guérison, Opérations, Méthodes, Incision, Observation, Vessie, Gangrène
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT de la Dissertation sur la Taille par l'appareil Lateral, luë par M. Morand à la rentrée publique de l'Académie Royale des Sciences d'aprés Pâques.
EXTRAIT de la Dissertation sur la
Taille
par l'appareil Lateral, luë par M.
Morand à la rentrée publique de l'Aca
démie Royale des Sciences d'aprés Pâques .
hhhhhhhh
N
Ous avons donné dans le Mercure
du mois de Decembre 1729. une
Lettre de M. Morand , dans laquelle il
expose les motifs de son Voyage à Lon
dres , et se déclare Partisan de la Taille
Laterale qu'il a vû pratiquer par M. Che
selden , cèlebre Chirurgien Anglois. M.
Morand ayant fait sur les Cadavres tou
tes les expériences nécessaires , pour exa
miner à fond cette Operation sur les
notions que les Conferences qu'il avoit
eûes avec M. Cheselden , et que ses
lettres lui avoient données ; il la pro
que
posa à M. Maréchal premier Chirurgien
du Roy. Sous ses yeux et en présence
de plusieurs Académiciens , Medecins ,
et Chirurgiens , cette Operation se fit
l'année derniere à Paris avec grand suc
cès , et nous en avons rendus compte
dans le Mercure du mois d'Aoust 1730.
de quinze Malades taillées à l'appareil La
teral par M. Morand et Perchet , douze
II. Vol. étoient
1454 MER CURE DE FRANCE
étoient gueris , M. le Muet étoit en voye
de guérison , et a été parfaitement guéri .
Depuis ce temps là M. Perchet en a taillé
un à Louviers , et l'a bien guéri ; de sorte
que voilà seize Operations bien avérées
dont quatorze ont réussies tout au mieux ,
il n'est mort que deux personnes , et des
quatorze guéris , il y avoit quatre sujets
en trés mauvais état , lorsqu'ils furent
taillés. M. Maréchal fut si content de
ces Operations qu'il écrivit à M. Morand
de venir à Marly , afin de le présenter à
son Eminence M. le Cardinal de Fleury ,
2
qui les pierres furent montrées , et qui
exorta M. Morand à continuer.
En 1729. M. Morand avoit lû à l'Aca
démie les lettres de M. Cheselden
dans lesquelles il détailloit sa Methode
et répondoit à toutes les difficultés qu'ont
lui avoit faites . En 1730. M. Cheselden
a publié lui même sa Methode dans une
petite Dissertation en Anglois , dans la
quelle il nous apprend qu'aprés avoir
essayé toutes les Methodes de la Taille,
et les avoir comparées , il s'est dévoué
toujours à celle- cy, qu'il a reconnu la meil
feure. La voici rapportée par lui - même .
pour
Je lie le Malade comme au grand appa
reil , aprés l'avoir couché sur une Table ho
risontale de la hauteur de trois pieds , ayant
ر ا
IL. Vol. seulement:
JUIN. 1731. 455
seulement laTête un peu élevée,jefais d'abord
une incision aux tegumens , aussi longue qu'il
est possible , en commençant prés l'endroit
où elle finit au grand appareil , je continue
de couper de haut en bas , inter musculos.
acceleratorem urinæ et erectorem penis ,
et à côté de l'intestin Rectum , je tâte ensuite
pour trouver la sonde sur laquelle je coupe.
le long de laglande Prostate , en continuant
jusqu'à la véssie et assuje tissant le Rectum en
bas pendant tout le temps de l'Operation, avec
un ou deux doigts de la main gauche le
reste comme dans l'ancienne Méthode &c.
Dans la Dissertation lüe par M. Mo
rand à l'Académie , il ajoute à cette Des
cription donnée par M. Cheselden quel
ques particularités qui sont dans ses let
tres écrites pour l'Académie , il cite la
sçavante These de M. Falconet , au sujet
des raisons de préferer l'appareil Lateral.
au grand , il ajoute à ces motifs de pré
ference
, que le manuel de cette. Opera
tion lui a paru plus facile et plus sur ,
que dans l'appareil Lateral on coupe
certaines parties qu'on déchire dans le
grand ; qu'enfin ceux qui en ont été
guéris , n'ont eu de reste , ni fistule , ni
incontinence d'urine , et s'engage de faire.
voir les avantages de cette Operation dans
un Traité qu'il donnera exprés sur cette
matiere, Ensuite
1456 MERCURE DE FRANCE
Ensuite il donne à l'Académie quel
ques observations qui regardent la partie
Historique de cette Opération . Dans la
premiere est contenue presque toute la
vie de Frere Jacques , que M. Morand
a suivi par tout par ses Récherches ; ce
sont ces mêmes Récherches qui lui ont
fait voir , pour ainsi dire , deux Freres
Jacques ; à ne le connoître que sur le rap
port de M. Mery , son Operation est in
certaine , et il faut la répudier , ce sont
les mots de M. Morand même dans sa
lettre du Mercure de Decembre 1629 .
mais M. Morand a eu le bonheur de dé
couvrir deux Pieces fugitives sur l'Ope
ration de Frere Jacques que deux de
ses Confreres se sont fait un plaisir de
lui communiquer. L'une est un Ma
nuscrit de M. Hunaud , celebre Me
decin d'Angers , qui avoit vû tailler le
Frere Jacques à Angers , et qui avoit
pris la plume pour le déffendre contre
M. Mery ; l'autre est un Ouvrage de Fre
re Jacques même imprimé en 7. à 8. pag.
et dont les exemplaires sont devenus fort
rares. Dans ces deux ouvrages , l'incision
de Frere Jacques est nettement détermi
née il y est bien positivement énoncé
que Frere Jacques avoit rectifié son Opé
ration , substitué une sonde crénelée à
II. Vol. La
JUIN.
1457 1731 .
la sonde informe qu'il employoit d'abord ,
et trouvé le moyen de couper toujours le
col de laVessie. Voilà dans l'Histoire de F.
Jacques 2. Epoques bien differentes pour
son Operation , de laquelle nous serions de
meurés en possession sans nôtre vivacité.
La seconde Observation de M. Mo
rand' roule sur l'Operation de M. Rau ;
M. Morand pense que celle-cy est celle
de Frere Jacques rectifiée. 1 °. On ne
peut pas prouver le contraire , parceque
M. Rau ne donnoit point d'éclaircisse
ment de sa Méthode , que M. Rau est
mort en 1719. sans la publier luy-même ,
et qu'elle a été donnée par un autre Pro
fesseur , enfin qu'on ne voit nulle part ;
suivant la rémarque du Docteur Douglas ,
des Observations tirées de l'ouverture
des Cadavres. 2 °. On peut prouver que
cela est ainsi , parceque selon M. Albi
nus même , M. Rau et le Frere Jacques
faisoient tous deux l'incision dans le mê
me endroit, et que M.Rau ,pressé par ceux
qui l'interrogeoient sur son Operation ,
leur disoit , lisés Celse. Or il est facile
de prouver que Frere Jacques tailloit
par la Méthode de Celse.
La troisiéme Observation de M. Mo
rand est employée à expliquer cette es
pece
de Paradoxe sur la Méthode de Cel
II. Vol
se
4458 MERCURE DE FRANCE
se. M. Morand ne demande autre chose
pour cela , sinon qu'on lise avec atten
tion , et sans préjugé , le septiéme Livre
de cet Atiteur , Chap. 26. Sect. 2. on ver
ra que l'incision exterieure de Celse est
oblique et prés de l'Anus , et que l'inte
rieure interesse le col de la Vessie. Voilà
ce que fait l'appareil Lateral , et ce que ne
fait point le grand appareil. M. Morand
convient que cette Analogie a été apper
çue par M. Mery , M. Freind , M. Dou
glas , M. Falconet. Il résulteroit de-là
que l'appareil Lateral qui paroît une nou
velle Méthode seroit la plus ancienne.
M. Morand finit sa Dissertation en ré
capitulant les Opérations pratiquées par
cette Méthode depuis le mois de Mars
1727. jusqu'à la fin de 1730. Dans l'Ap
pendix de M. Cheselden , on lit les noms
de 46. Malades qu'il avoit taillés dans
l'Hôpital de S. Thomas , et dont il n'avoit
perdu que deux , M. Morand venoit de
récevoir la Liste posterieure à celle- cy ,
dans laquelle il y en a vingt de taillés ,
dont il n'est mort que deux : en la joignant
à la premiere Liste de M. Cheselden , et
à celle de M. Morand , il se trouve de
compte fait en Mars 173 1. quatre- vingt
deux personnes taillées par l'appareil La
teral , depuis Mars 1727. dont il n'est
II. Vol
mort
JUIN. 1731
1459
mort que fix , et soixante et seize ont été
parfaitement gueries , dont dix de diffe
rens âges , depuis 40. jusqu'à 67. ans.
Tels étoient les progrès de l'appareil
Lateral à Paris , lorsque M. Morand lût
sa Dissertation à l'Académie Royale des
Sciences. Depuis ce temps là , il a fair
cette Operation à M. de Janson et Du
blaisel qui sont morts six jours aprés
l'Operation. L'Ouverture de leur corps
a été faite , l'Académie Royale des Scien
ces a examiné les choses , Mrs. Chirac et
Maréchal ont vû ce qui concernoit M,
de Janson . Voici le rapport de ces deux
Ouvertures .
DETAIL de ce qui s'est trouvé à l'ou
verture de Mrs de Janson et du Blaisel.
Le 24. Avril 1731. Nous Docteurs en
Medecine , et Chirurgiens de Paris , nous
sommes transportés à neuf heures du soir
à l'Archevêché pour l'ouverture du corps
de Feu M. le Commandeur de Janson ,
mort ledit jour à neuf heures du matin
aprés avoir été taillé le Jeudi précedent
dix- neuf dudit mois et nous déclarons
avoir réconnu ce qui est détaillé à nôtre
present rapport par l'ouverture faite en
nôtre presence par M. Verdier , Chirur
ر
.
11. Vol.
gien
1460 MERCURE DE FRANCE
juré et DémonstrateurRoyal enAnatomie.
Le corps exposé sur une Table nous
n'avons vû aux parties voisines de la
playe , ni lividité , ni tension , en aucune
region du bas -ventre ni élevation ni gon
Alement , la région de la vessie étant au
contraire plate , enfoncée , et molete.
A l'ouverture du ventre il nous'a paru
à la premiere inspection qu'il n'y avoit ,
ni aux entrailles , ni à la vessie vers le
peritoine , ni au tissu cellulaire qui l'en
vironne , aucune Phlogose , inflammation,
ou marque de gangréne .
Les intestins étant ôtés du ventre , les
Reins ont été examinés , et on a trouvé
le droit diminué de la moitié de son vo
lume naturel , et sa substance glan
duleuse fondue , de sorte que l'on ne
distinguoit plus interieurement que les
sacs des entonnoirs qui étoient fort dila
tés aussi bien que les bassinets , et rem
plis d'une liqueur noire , puante , et mê
lée de quelques matieres glaireuses et
purulentes. L'uretere du même côté
dilaté depuis sa sortie du Rein jusqu'à
son insertion à la vessie , et étranglé en
quelques endroits par plusieurs infléxions
contre nature ; enfin sa trace le long du
muscle Psoas , marquée par une tache
livide et assés profonde dans la substance
II. Vol
de
JUIN. 1731. 1461
de ce muscle , dont le reste étoit de la
couleur et rougeur naturelle.
Le Rein gauche avoit les mêmes sin
gularités que le droit , mais il étoit plus
maigre et plus fondu , plein d'un pus trés
fætide , et d'un blanc sale. L'uretere de
ce côté étoit un peu moins malade que
l'autre.
La vessie nous parut s'élever assés haut
au dessus du Pubis , et sa consistence
étoit bien plus dure que dans l'état natu
rel , mais pour l'ouvrir dans toute son
étendue , et examiner plus scrupuleuse
ment toutes les parties du voisinage , et
de la dépendance de l'Operation , on a
ôté la vessie entiere avec le canal de l'ure
tre , le rectum , et la partie incisée par
la Taille.
Ensuite la vessie a été ouverte dans.
toute son étendue , depuis son fond jus
ques et au de-là de l'incision faite par la
Taille ; alors tout le corps de la vessie
nous ' a paru considerablement épaissi
on n'a trouvé dans sa cavité , ni pierre
ni fragment de celle qui avoit été tirée ,
il y avoit à la surface de sa tunique inter
ne plusieurs points blanchâtres et durs ,
quelques rugosités , mais aucun vestige
de contusion . Vers sa partie inferieure et
un peu plus du côté droit que
du gauche
,
II. Vol C IL
462 MERCURE DE FRANCE
3 il y avoit une tumeur carcinomateuse
fort dure , grosse comme un gros oeuf,
faisant corps avec la vessie même ,
aussi large par sa baze que par sa partie
saillante , et d'une étenduë assés grande
faire la vessie eut comme deux pour que
capacités , dont la plus grande étoit au
dessus du carcinôme. Prés de cette tu
meur , étoit une excroissance fongueuse
applatic , grosse et longue comme le petit
doigt , de la consistence du fongus qui
avoit été tiré avec la pierre , attaché par
un pedicule membraneux à la tunique
interne de la vessie , et flottante dans la
vessie , de façon qu'elle pouvoit tomber
dans l'incision .'
L'incision faite par la Taille étoit à la
fin de l'uretre et au cou de la vessie.
Mettant un doigt dans l'anus et un autre
dans l'incision ; on a vû que le rectum
n'avoit point été interessé, y ayant entre
deux une cloison fort épaisse : enfin en
examinant le trajet de l'incision-, nous
avons vû qu'il n'y avoit d'autre route
que celle qui conduisoit directement de
l'incision à la vessie , et qu'il n'y en avoit
point de fausse autour du rectum , ni
dans le tissu cellulaire des parties voisi
nes.
Comme nous reconnoissons dans le
II. Vel désordre
JUIN. 1731 . 146
désordre des parties dénommées au pre
sent rapport des causes de mort évidentes
et indépendentes de l'opération de la
Taille faite à M. le Commandeur de Jan
son , on n'a point fait l'ouverture de la
Poitrine ni de la Tête , et aucun de nous
ne l'a demandée. A Paris çe .27 . Avril
1731. et ont signés. Mrs. Winslow et Silva
Medecins , Guerin , Le Dran , Boudou ',
Pibrac , Morand , Verdier , Guerin fils
et Perchet , Chirurgiens .
L'Original a été remis à M. le Mar
quis de Janson , avec le dessein des parties
malades , qui ont été examinées dans une
sceance par l'Académie Royale des Scien
aussi bien celles dont est ques
tion dans le rapport suivant .
ces , que
Le Samedi 28. Avril 1731. nous Doc
teur en Medecine , et Chirurgiens de
Paris soussignés , nous sommes transpor
tés à l'Hôteld'Espagne, rue duColombier,
l'ouverture du corps de M.du Blai
sel , mort la nuit précedente, aprés avoir
été taillé le Lundi 23. dudit mois.
pour
A l'ouverture du bas- ventre , l'estomach
et les intestins ont paru dans leur état na
turel, les ayant écartés pour éxaminer la ré
gion de la vessie nous avons trouvé un
abscès considerable dans le tissu cellulaire
du peritoine entre l'endroit où l'uretere
>
I La Kol Cij gauche
3454 MERCURE DE FRANCE
gauche se jette dans la vessie et le lieu de
f'incision. La vessie ouverte depuis son
fond jusqu'au de - là de l'incision , elle
nous a paru saine ; mais à sa partie pos
terieure , et entre ses tuniques étoit un
sac plein d'un grand nombre de petites
pierres , et de ce sac il suintoit quelques
goutes de pus dans la vessie.
La supression totale des urines arrivée
la veille de sa mort ayant fait tourner
nos vûës vers les reins , nous avons trou
vé le rein droit en inflammation , et par
là augmenté considerablement du volu
me naturel ; de ce rein partoient deux
ureteres , dont les vaisseaux sanguins
étoient gonflés et en inflammation , ces
ureteres s'unissant ensemble à quelques
pouces de la vessie , n'avoient qu'une et
même insertion .
Au lieu du rein gauche qui étoit obli
teré, il y avoit une capsule membraneuse
avec deux ureteres, qui sans se confondre
alloient séparément à la vessie , l'un s'ou
vroit dans la vessie à l'ordinaire , l'autre
étoit bouché en haut par deux petites
pierres , et prés de la vessie par plusieurs
autres ; enfin au lieu de s'ouvrir dans la
vessie , il se terminoit dans le sac pierreux
qui étoit en suppuration .
Cette organisation particuliere nous
11. Val.
fair
JUIN.
1731. 1469
que
fait croire le rein droit étant attaqué
d'une inflammation qui a produit la ne
phretique , le gauche n'avoit pû supléer
à ses fonctions , puis qu'il n'y en avoit
point , de là la supression des urines , et
que
la même cause qui a formé dù pus
dans le sac pierreux , a pû donner lieu à
l'abscès du tissu cellulaire . A Paris ce 6 .
May 1731. et ont signés Sylva , Boudon ,
Verdier , Morand , Perchet.
LETTRE de M. Morand à M. de la R
' Ay l'honneur de vous envoyer,Mon
sieur, le rapport de l'ouverture de M.
de Janson, et j'execute les ordres positifs
que j'en ay reçû : ces Ordres sont si pré
cieux pour moi que je n'en puis retran
cher un mot , et je vous envoye en mê
me temps la Lettre de M. Mareschal qui
me les a signifiés .
· Je viens de rendre un compte exact de
votre Operation à son Eminence M. le Car
dinal , et des obstacles invincibles de
рои
voir guerir M. de Janson ; je lui ai ajouté
que vous aviés en raison de ne point tirer
la pierre , et que cet examen avoit étéfait en
presence de M. Chirac, cela lui a faitplaisir.
Son Eminence m'a dit qu'il falloit le dire
au Roy, ce que je feray ; la seconde chose
II. Vol.. Ciij que
1466 MERCURE DE FRANCE
que vous deviés en faire une Relation pré
cise et de tous les temoins , et en faire un
article dans les Nouvelles pour détromper
le Public. Voila ce que son Eminence m'a
dit, et je crois qu'elle pense juste . Je vous sa
lue & c. Mareschal. A Rambouillet le 25.
Avril 1731 .
Je vous envoye en même temps ,
Monsieur , la Rélation de l'ouverture de
M. du Blaisel , et je crois qu'avec ces deux.
Pieces il m'est permis de demander à
l'Auteur anonyme de la Lettre inserée
dans le Mercure de May , pag. 1135 .
raison des Réflexions qu'il a ajoutées au
détail des Operations de la Taille faites
à l'Hôpital de la Charité le 14. du mois.
passé.
Je n'avois pas plus promis cette année
cy que l'autre de faire la Taille par l'Ope
ration Laterale . L'Année derniere M ..
Mareschal trouva bon qu'on la fit , je l'ai
faite devant lui , et elle a reussi . Cette
année M. Mareschal a trouvé bon qu'on
ne fit
que le grand Appareil , j'en ai fait
deux , et j'ai gueri mes deux malades.
Ainsi cette année cy comme la précedente,,
j'ay obéi.
➤
Mais l'Anonyme avance que M. Ma
reschal qui connoit les inconveniens de l'ap
pareil Lateral , en disposa autrement , en
II. Vol. execu
JUIN. 1731. 1467
1
executant lui même,et faisant executer l'Opé
ration à la maniere ordinaire. Je demande
si l'Anonyme a ordre d'expliquer les mo
tifs de M. Mareschal , et pourquoy it
abuse gratuitement d'un nom si respec
table ; car personne ne peut connoître
les inconveniens de cette Opération .
que sur des éclaircissemens fournis par
la Theorie ou sur les faits de Pratique .
Sera-ce sur les éclaircissemens de Théorie?
M. Mareschal n'est pas encore determi
né , et M. le Comte de Broglio m'a fait
l'honneur de me dire que M. Mareschal
venoit de proposer plusieurs questions à
M. Cheselden , et qu'il a demandé qu'on
envoyât icy , s'il étoit possible , les Parties
de quelqu'un , mort aprés cette Opération .
Sera-ce sur les Faits de Pratique jusqu'à
l'Epoque deM . deJanson et du Blaisel De
Londres , M. Cheselden fournira le Mé
moire de soixante six Opérations dont
soixante -deux ont réussi à Paris il y en
a eu seize l'année passée , faites par M.
Perchet et moi , et quatorze malades ont
été gueris. Sera - ce sur l'Opération de
M. de Janson ? M. Mareschal m'or
donne lui-même de faire une Rélation
exacte de l'ouverture pour détromper
le Public. Sera-ce sur la Taille de M. du
Blaisel les singularitez qu'on voit dans
II. Vol.
C iiij l'ou
1468 MERCURE DE FRANCE
P'ouverture , pourroient seules justifier
l'Operation , qui d'ailleurs fut faite très
heureusement ; mais quand on suppo
seroit le contraire , il resteroit toujours
pour vrai , que nous en avons gueri
l'année passée quatorze de seize ; qui
sçait si quatorze taillés cette année à l'ap
pareil Lateral , immediatement aprés Mrs.
deJanson et du Blaisel , n'auroient pas été
gueris ? cela étoit aussi possible cette an
née-ci que l'autre. Sera-ce enfin sur les
réprésentations de quelques Chirurgiens
qui verroient avec peine les progrès de
cette Operation ? ceux qui sont à la tête
de la Chirurgie ne préfereront jamais l'in
terêt de quelques particuliers au bien
blic. Je conclus donc que l'Anonyme
a trés imprudemment compromis le nom
de M. Mareschal .
pu
C'est avec la même licence que l'Anony
me arrange la Chirurgie de l'Hôpital . Si
M. Mareschal avoit confié le soin de l'Hô
pital à M.Guerin le Pere , comme il le dit, je
ne jouirois point de la place de Chirurgien
en Chef, dont j'ai été pourvu sur la présen
tation de M.Mareschal , mais j'enjoüis com
me auparavant, et si je ne puis assurer que
j'aye merité les faveurs de M. Mares
chal , au moins puis- je assurer qu'il ne me
les a pas retiré.
II. Vol. L'Anonyme
JUIN. 1731 1469
L'Anonyme finit ses Reflexions en
'disant , que les Pauvres serviront d'instruc
tion aux éleves sans être leurs victimes. Si
cela roule sur la Taille Laterale , comme
il n'y a pas lieu d'en douter, c'est à vous ,
M. à me vanger de cette noirceur , en rap
pellant les Faits que vous avés imprimés
l'année derniere..
L'Anonyme auroit pû terminer sa nar
ration, en disant que M. Mareschal veut de
plus amples éclaircissemens sur l'Opera
tion Laterale. C'est faire l'Eloge de sa pru
dence ; mais nous ajoutons que quand l'ex
cellence de cette Opération sera bien prou
vée ,M. Mareschal toujours plein de zéle et
daffection pour les Pauvres , voudra non ṣeu
lementy être présent, mais la fera peut être lui
même. Je suis , Monsieur , Vôtre &c.
A Paris ce 10. Fuin . 1731.
Taille
par l'appareil Lateral, luë par M.
Morand à la rentrée publique de l'Aca
démie Royale des Sciences d'aprés Pâques .
hhhhhhhh
N
Ous avons donné dans le Mercure
du mois de Decembre 1729. une
Lettre de M. Morand , dans laquelle il
expose les motifs de son Voyage à Lon
dres , et se déclare Partisan de la Taille
Laterale qu'il a vû pratiquer par M. Che
selden , cèlebre Chirurgien Anglois. M.
Morand ayant fait sur les Cadavres tou
tes les expériences nécessaires , pour exa
miner à fond cette Operation sur les
notions que les Conferences qu'il avoit
eûes avec M. Cheselden , et que ses
lettres lui avoient données ; il la pro
que
posa à M. Maréchal premier Chirurgien
du Roy. Sous ses yeux et en présence
de plusieurs Académiciens , Medecins ,
et Chirurgiens , cette Operation se fit
l'année derniere à Paris avec grand suc
cès , et nous en avons rendus compte
dans le Mercure du mois d'Aoust 1730.
de quinze Malades taillées à l'appareil La
teral par M. Morand et Perchet , douze
II. Vol. étoient
1454 MER CURE DE FRANCE
étoient gueris , M. le Muet étoit en voye
de guérison , et a été parfaitement guéri .
Depuis ce temps là M. Perchet en a taillé
un à Louviers , et l'a bien guéri ; de sorte
que voilà seize Operations bien avérées
dont quatorze ont réussies tout au mieux ,
il n'est mort que deux personnes , et des
quatorze guéris , il y avoit quatre sujets
en trés mauvais état , lorsqu'ils furent
taillés. M. Maréchal fut si content de
ces Operations qu'il écrivit à M. Morand
de venir à Marly , afin de le présenter à
son Eminence M. le Cardinal de Fleury ,
2
qui les pierres furent montrées , et qui
exorta M. Morand à continuer.
En 1729. M. Morand avoit lû à l'Aca
démie les lettres de M. Cheselden
dans lesquelles il détailloit sa Methode
et répondoit à toutes les difficultés qu'ont
lui avoit faites . En 1730. M. Cheselden
a publié lui même sa Methode dans une
petite Dissertation en Anglois , dans la
quelle il nous apprend qu'aprés avoir
essayé toutes les Methodes de la Taille,
et les avoir comparées , il s'est dévoué
toujours à celle- cy, qu'il a reconnu la meil
feure. La voici rapportée par lui - même .
pour
Je lie le Malade comme au grand appa
reil , aprés l'avoir couché sur une Table ho
risontale de la hauteur de trois pieds , ayant
ر ا
IL. Vol. seulement:
JUIN. 1731. 455
seulement laTête un peu élevée,jefais d'abord
une incision aux tegumens , aussi longue qu'il
est possible , en commençant prés l'endroit
où elle finit au grand appareil , je continue
de couper de haut en bas , inter musculos.
acceleratorem urinæ et erectorem penis ,
et à côté de l'intestin Rectum , je tâte ensuite
pour trouver la sonde sur laquelle je coupe.
le long de laglande Prostate , en continuant
jusqu'à la véssie et assuje tissant le Rectum en
bas pendant tout le temps de l'Operation, avec
un ou deux doigts de la main gauche le
reste comme dans l'ancienne Méthode &c.
Dans la Dissertation lüe par M. Mo
rand à l'Académie , il ajoute à cette Des
cription donnée par M. Cheselden quel
ques particularités qui sont dans ses let
tres écrites pour l'Académie , il cite la
sçavante These de M. Falconet , au sujet
des raisons de préferer l'appareil Lateral.
au grand , il ajoute à ces motifs de pré
ference
, que le manuel de cette. Opera
tion lui a paru plus facile et plus sur ,
que dans l'appareil Lateral on coupe
certaines parties qu'on déchire dans le
grand ; qu'enfin ceux qui en ont été
guéris , n'ont eu de reste , ni fistule , ni
incontinence d'urine , et s'engage de faire.
voir les avantages de cette Operation dans
un Traité qu'il donnera exprés sur cette
matiere, Ensuite
1456 MERCURE DE FRANCE
Ensuite il donne à l'Académie quel
ques observations qui regardent la partie
Historique de cette Opération . Dans la
premiere est contenue presque toute la
vie de Frere Jacques , que M. Morand
a suivi par tout par ses Récherches ; ce
sont ces mêmes Récherches qui lui ont
fait voir , pour ainsi dire , deux Freres
Jacques ; à ne le connoître que sur le rap
port de M. Mery , son Operation est in
certaine , et il faut la répudier , ce sont
les mots de M. Morand même dans sa
lettre du Mercure de Decembre 1629 .
mais M. Morand a eu le bonheur de dé
couvrir deux Pieces fugitives sur l'Ope
ration de Frere Jacques que deux de
ses Confreres se sont fait un plaisir de
lui communiquer. L'une est un Ma
nuscrit de M. Hunaud , celebre Me
decin d'Angers , qui avoit vû tailler le
Frere Jacques à Angers , et qui avoit
pris la plume pour le déffendre contre
M. Mery ; l'autre est un Ouvrage de Fre
re Jacques même imprimé en 7. à 8. pag.
et dont les exemplaires sont devenus fort
rares. Dans ces deux ouvrages , l'incision
de Frere Jacques est nettement détermi
née il y est bien positivement énoncé
que Frere Jacques avoit rectifié son Opé
ration , substitué une sonde crénelée à
II. Vol. La
JUIN.
1457 1731 .
la sonde informe qu'il employoit d'abord ,
et trouvé le moyen de couper toujours le
col de laVessie. Voilà dans l'Histoire de F.
Jacques 2. Epoques bien differentes pour
son Operation , de laquelle nous serions de
meurés en possession sans nôtre vivacité.
La seconde Observation de M. Mo
rand' roule sur l'Operation de M. Rau ;
M. Morand pense que celle-cy est celle
de Frere Jacques rectifiée. 1 °. On ne
peut pas prouver le contraire , parceque
M. Rau ne donnoit point d'éclaircisse
ment de sa Méthode , que M. Rau est
mort en 1719. sans la publier luy-même ,
et qu'elle a été donnée par un autre Pro
fesseur , enfin qu'on ne voit nulle part ;
suivant la rémarque du Docteur Douglas ,
des Observations tirées de l'ouverture
des Cadavres. 2 °. On peut prouver que
cela est ainsi , parceque selon M. Albi
nus même , M. Rau et le Frere Jacques
faisoient tous deux l'incision dans le mê
me endroit, et que M.Rau ,pressé par ceux
qui l'interrogeoient sur son Operation ,
leur disoit , lisés Celse. Or il est facile
de prouver que Frere Jacques tailloit
par la Méthode de Celse.
La troisiéme Observation de M. Mo
rand est employée à expliquer cette es
pece
de Paradoxe sur la Méthode de Cel
II. Vol
se
4458 MERCURE DE FRANCE
se. M. Morand ne demande autre chose
pour cela , sinon qu'on lise avec atten
tion , et sans préjugé , le septiéme Livre
de cet Atiteur , Chap. 26. Sect. 2. on ver
ra que l'incision exterieure de Celse est
oblique et prés de l'Anus , et que l'inte
rieure interesse le col de la Vessie. Voilà
ce que fait l'appareil Lateral , et ce que ne
fait point le grand appareil. M. Morand
convient que cette Analogie a été apper
çue par M. Mery , M. Freind , M. Dou
glas , M. Falconet. Il résulteroit de-là
que l'appareil Lateral qui paroît une nou
velle Méthode seroit la plus ancienne.
M. Morand finit sa Dissertation en ré
capitulant les Opérations pratiquées par
cette Méthode depuis le mois de Mars
1727. jusqu'à la fin de 1730. Dans l'Ap
pendix de M. Cheselden , on lit les noms
de 46. Malades qu'il avoit taillés dans
l'Hôpital de S. Thomas , et dont il n'avoit
perdu que deux , M. Morand venoit de
récevoir la Liste posterieure à celle- cy ,
dans laquelle il y en a vingt de taillés ,
dont il n'est mort que deux : en la joignant
à la premiere Liste de M. Cheselden , et
à celle de M. Morand , il se trouve de
compte fait en Mars 173 1. quatre- vingt
deux personnes taillées par l'appareil La
teral , depuis Mars 1727. dont il n'est
II. Vol
mort
JUIN. 1731
1459
mort que fix , et soixante et seize ont été
parfaitement gueries , dont dix de diffe
rens âges , depuis 40. jusqu'à 67. ans.
Tels étoient les progrès de l'appareil
Lateral à Paris , lorsque M. Morand lût
sa Dissertation à l'Académie Royale des
Sciences. Depuis ce temps là , il a fair
cette Operation à M. de Janson et Du
blaisel qui sont morts six jours aprés
l'Operation. L'Ouverture de leur corps
a été faite , l'Académie Royale des Scien
ces a examiné les choses , Mrs. Chirac et
Maréchal ont vû ce qui concernoit M,
de Janson . Voici le rapport de ces deux
Ouvertures .
DETAIL de ce qui s'est trouvé à l'ou
verture de Mrs de Janson et du Blaisel.
Le 24. Avril 1731. Nous Docteurs en
Medecine , et Chirurgiens de Paris , nous
sommes transportés à neuf heures du soir
à l'Archevêché pour l'ouverture du corps
de Feu M. le Commandeur de Janson ,
mort ledit jour à neuf heures du matin
aprés avoir été taillé le Jeudi précedent
dix- neuf dudit mois et nous déclarons
avoir réconnu ce qui est détaillé à nôtre
present rapport par l'ouverture faite en
nôtre presence par M. Verdier , Chirur
ر
.
11. Vol.
gien
1460 MERCURE DE FRANCE
juré et DémonstrateurRoyal enAnatomie.
Le corps exposé sur une Table nous
n'avons vû aux parties voisines de la
playe , ni lividité , ni tension , en aucune
region du bas -ventre ni élevation ni gon
Alement , la région de la vessie étant au
contraire plate , enfoncée , et molete.
A l'ouverture du ventre il nous'a paru
à la premiere inspection qu'il n'y avoit ,
ni aux entrailles , ni à la vessie vers le
peritoine , ni au tissu cellulaire qui l'en
vironne , aucune Phlogose , inflammation,
ou marque de gangréne .
Les intestins étant ôtés du ventre , les
Reins ont été examinés , et on a trouvé
le droit diminué de la moitié de son vo
lume naturel , et sa substance glan
duleuse fondue , de sorte que l'on ne
distinguoit plus interieurement que les
sacs des entonnoirs qui étoient fort dila
tés aussi bien que les bassinets , et rem
plis d'une liqueur noire , puante , et mê
lée de quelques matieres glaireuses et
purulentes. L'uretere du même côté
dilaté depuis sa sortie du Rein jusqu'à
son insertion à la vessie , et étranglé en
quelques endroits par plusieurs infléxions
contre nature ; enfin sa trace le long du
muscle Psoas , marquée par une tache
livide et assés profonde dans la substance
II. Vol
de
JUIN. 1731. 1461
de ce muscle , dont le reste étoit de la
couleur et rougeur naturelle.
Le Rein gauche avoit les mêmes sin
gularités que le droit , mais il étoit plus
maigre et plus fondu , plein d'un pus trés
fætide , et d'un blanc sale. L'uretere de
ce côté étoit un peu moins malade que
l'autre.
La vessie nous parut s'élever assés haut
au dessus du Pubis , et sa consistence
étoit bien plus dure que dans l'état natu
rel , mais pour l'ouvrir dans toute son
étendue , et examiner plus scrupuleuse
ment toutes les parties du voisinage , et
de la dépendance de l'Operation , on a
ôté la vessie entiere avec le canal de l'ure
tre , le rectum , et la partie incisée par
la Taille.
Ensuite la vessie a été ouverte dans.
toute son étendue , depuis son fond jus
ques et au de-là de l'incision faite par la
Taille ; alors tout le corps de la vessie
nous ' a paru considerablement épaissi
on n'a trouvé dans sa cavité , ni pierre
ni fragment de celle qui avoit été tirée ,
il y avoit à la surface de sa tunique inter
ne plusieurs points blanchâtres et durs ,
quelques rugosités , mais aucun vestige
de contusion . Vers sa partie inferieure et
un peu plus du côté droit que
du gauche
,
II. Vol C IL
462 MERCURE DE FRANCE
3 il y avoit une tumeur carcinomateuse
fort dure , grosse comme un gros oeuf,
faisant corps avec la vessie même ,
aussi large par sa baze que par sa partie
saillante , et d'une étenduë assés grande
faire la vessie eut comme deux pour que
capacités , dont la plus grande étoit au
dessus du carcinôme. Prés de cette tu
meur , étoit une excroissance fongueuse
applatic , grosse et longue comme le petit
doigt , de la consistence du fongus qui
avoit été tiré avec la pierre , attaché par
un pedicule membraneux à la tunique
interne de la vessie , et flottante dans la
vessie , de façon qu'elle pouvoit tomber
dans l'incision .'
L'incision faite par la Taille étoit à la
fin de l'uretre et au cou de la vessie.
Mettant un doigt dans l'anus et un autre
dans l'incision ; on a vû que le rectum
n'avoit point été interessé, y ayant entre
deux une cloison fort épaisse : enfin en
examinant le trajet de l'incision-, nous
avons vû qu'il n'y avoit d'autre route
que celle qui conduisoit directement de
l'incision à la vessie , et qu'il n'y en avoit
point de fausse autour du rectum , ni
dans le tissu cellulaire des parties voisi
nes.
Comme nous reconnoissons dans le
II. Vel désordre
JUIN. 1731 . 146
désordre des parties dénommées au pre
sent rapport des causes de mort évidentes
et indépendentes de l'opération de la
Taille faite à M. le Commandeur de Jan
son , on n'a point fait l'ouverture de la
Poitrine ni de la Tête , et aucun de nous
ne l'a demandée. A Paris çe .27 . Avril
1731. et ont signés. Mrs. Winslow et Silva
Medecins , Guerin , Le Dran , Boudou ',
Pibrac , Morand , Verdier , Guerin fils
et Perchet , Chirurgiens .
L'Original a été remis à M. le Mar
quis de Janson , avec le dessein des parties
malades , qui ont été examinées dans une
sceance par l'Académie Royale des Scien
aussi bien celles dont est ques
tion dans le rapport suivant .
ces , que
Le Samedi 28. Avril 1731. nous Doc
teur en Medecine , et Chirurgiens de
Paris soussignés , nous sommes transpor
tés à l'Hôteld'Espagne, rue duColombier,
l'ouverture du corps de M.du Blai
sel , mort la nuit précedente, aprés avoir
été taillé le Lundi 23. dudit mois.
pour
A l'ouverture du bas- ventre , l'estomach
et les intestins ont paru dans leur état na
turel, les ayant écartés pour éxaminer la ré
gion de la vessie nous avons trouvé un
abscès considerable dans le tissu cellulaire
du peritoine entre l'endroit où l'uretere
>
I La Kol Cij gauche
3454 MERCURE DE FRANCE
gauche se jette dans la vessie et le lieu de
f'incision. La vessie ouverte depuis son
fond jusqu'au de - là de l'incision , elle
nous a paru saine ; mais à sa partie pos
terieure , et entre ses tuniques étoit un
sac plein d'un grand nombre de petites
pierres , et de ce sac il suintoit quelques
goutes de pus dans la vessie.
La supression totale des urines arrivée
la veille de sa mort ayant fait tourner
nos vûës vers les reins , nous avons trou
vé le rein droit en inflammation , et par
là augmenté considerablement du volu
me naturel ; de ce rein partoient deux
ureteres , dont les vaisseaux sanguins
étoient gonflés et en inflammation , ces
ureteres s'unissant ensemble à quelques
pouces de la vessie , n'avoient qu'une et
même insertion .
Au lieu du rein gauche qui étoit obli
teré, il y avoit une capsule membraneuse
avec deux ureteres, qui sans se confondre
alloient séparément à la vessie , l'un s'ou
vroit dans la vessie à l'ordinaire , l'autre
étoit bouché en haut par deux petites
pierres , et prés de la vessie par plusieurs
autres ; enfin au lieu de s'ouvrir dans la
vessie , il se terminoit dans le sac pierreux
qui étoit en suppuration .
Cette organisation particuliere nous
11. Val.
fair
JUIN.
1731. 1469
que
fait croire le rein droit étant attaqué
d'une inflammation qui a produit la ne
phretique , le gauche n'avoit pû supléer
à ses fonctions , puis qu'il n'y en avoit
point , de là la supression des urines , et
que
la même cause qui a formé dù pus
dans le sac pierreux , a pû donner lieu à
l'abscès du tissu cellulaire . A Paris ce 6 .
May 1731. et ont signés Sylva , Boudon ,
Verdier , Morand , Perchet.
LETTRE de M. Morand à M. de la R
' Ay l'honneur de vous envoyer,Mon
sieur, le rapport de l'ouverture de M.
de Janson, et j'execute les ordres positifs
que j'en ay reçû : ces Ordres sont si pré
cieux pour moi que je n'en puis retran
cher un mot , et je vous envoye en mê
me temps la Lettre de M. Mareschal qui
me les a signifiés .
· Je viens de rendre un compte exact de
votre Operation à son Eminence M. le Car
dinal , et des obstacles invincibles de
рои
voir guerir M. de Janson ; je lui ai ajouté
que vous aviés en raison de ne point tirer
la pierre , et que cet examen avoit étéfait en
presence de M. Chirac, cela lui a faitplaisir.
Son Eminence m'a dit qu'il falloit le dire
au Roy, ce que je feray ; la seconde chose
II. Vol.. Ciij que
1466 MERCURE DE FRANCE
que vous deviés en faire une Relation pré
cise et de tous les temoins , et en faire un
article dans les Nouvelles pour détromper
le Public. Voila ce que son Eminence m'a
dit, et je crois qu'elle pense juste . Je vous sa
lue & c. Mareschal. A Rambouillet le 25.
Avril 1731 .
Je vous envoye en même temps ,
Monsieur , la Rélation de l'ouverture de
M. du Blaisel , et je crois qu'avec ces deux.
Pieces il m'est permis de demander à
l'Auteur anonyme de la Lettre inserée
dans le Mercure de May , pag. 1135 .
raison des Réflexions qu'il a ajoutées au
détail des Operations de la Taille faites
à l'Hôpital de la Charité le 14. du mois.
passé.
Je n'avois pas plus promis cette année
cy que l'autre de faire la Taille par l'Ope
ration Laterale . L'Année derniere M ..
Mareschal trouva bon qu'on la fit , je l'ai
faite devant lui , et elle a reussi . Cette
année M. Mareschal a trouvé bon qu'on
ne fit
que le grand Appareil , j'en ai fait
deux , et j'ai gueri mes deux malades.
Ainsi cette année cy comme la précedente,,
j'ay obéi.
➤
Mais l'Anonyme avance que M. Ma
reschal qui connoit les inconveniens de l'ap
pareil Lateral , en disposa autrement , en
II. Vol. execu
JUIN. 1731. 1467
1
executant lui même,et faisant executer l'Opé
ration à la maniere ordinaire. Je demande
si l'Anonyme a ordre d'expliquer les mo
tifs de M. Mareschal , et pourquoy it
abuse gratuitement d'un nom si respec
table ; car personne ne peut connoître
les inconveniens de cette Opération .
que sur des éclaircissemens fournis par
la Theorie ou sur les faits de Pratique .
Sera-ce sur les éclaircissemens de Théorie?
M. Mareschal n'est pas encore determi
né , et M. le Comte de Broglio m'a fait
l'honneur de me dire que M. Mareschal
venoit de proposer plusieurs questions à
M. Cheselden , et qu'il a demandé qu'on
envoyât icy , s'il étoit possible , les Parties
de quelqu'un , mort aprés cette Opération .
Sera-ce sur les Faits de Pratique jusqu'à
l'Epoque deM . deJanson et du Blaisel De
Londres , M. Cheselden fournira le Mé
moire de soixante six Opérations dont
soixante -deux ont réussi à Paris il y en
a eu seize l'année passée , faites par M.
Perchet et moi , et quatorze malades ont
été gueris. Sera - ce sur l'Opération de
M. de Janson ? M. Mareschal m'or
donne lui-même de faire une Rélation
exacte de l'ouverture pour détromper
le Public. Sera-ce sur la Taille de M. du
Blaisel les singularitez qu'on voit dans
II. Vol.
C iiij l'ou
1468 MERCURE DE FRANCE
P'ouverture , pourroient seules justifier
l'Operation , qui d'ailleurs fut faite très
heureusement ; mais quand on suppo
seroit le contraire , il resteroit toujours
pour vrai , que nous en avons gueri
l'année passée quatorze de seize ; qui
sçait si quatorze taillés cette année à l'ap
pareil Lateral , immediatement aprés Mrs.
deJanson et du Blaisel , n'auroient pas été
gueris ? cela étoit aussi possible cette an
née-ci que l'autre. Sera-ce enfin sur les
réprésentations de quelques Chirurgiens
qui verroient avec peine les progrès de
cette Operation ? ceux qui sont à la tête
de la Chirurgie ne préfereront jamais l'in
terêt de quelques particuliers au bien
blic. Je conclus donc que l'Anonyme
a trés imprudemment compromis le nom
de M. Mareschal .
pu
C'est avec la même licence que l'Anony
me arrange la Chirurgie de l'Hôpital . Si
M. Mareschal avoit confié le soin de l'Hô
pital à M.Guerin le Pere , comme il le dit, je
ne jouirois point de la place de Chirurgien
en Chef, dont j'ai été pourvu sur la présen
tation de M.Mareschal , mais j'enjoüis com
me auparavant, et si je ne puis assurer que
j'aye merité les faveurs de M. Mares
chal , au moins puis- je assurer qu'il ne me
les a pas retiré.
II. Vol. L'Anonyme
JUIN. 1731 1469
L'Anonyme finit ses Reflexions en
'disant , que les Pauvres serviront d'instruc
tion aux éleves sans être leurs victimes. Si
cela roule sur la Taille Laterale , comme
il n'y a pas lieu d'en douter, c'est à vous ,
M. à me vanger de cette noirceur , en rap
pellant les Faits que vous avés imprimés
l'année derniere..
L'Anonyme auroit pû terminer sa nar
ration, en disant que M. Mareschal veut de
plus amples éclaircissemens sur l'Opera
tion Laterale. C'est faire l'Eloge de sa pru
dence ; mais nous ajoutons que quand l'ex
cellence de cette Opération sera bien prou
vée ,M. Mareschal toujours plein de zéle et
daffection pour les Pauvres , voudra non ṣeu
lementy être présent, mais la fera peut être lui
même. Je suis , Monsieur , Vôtre &c.
A Paris ce 10. Fuin . 1731.
Fermer
Résumé : EXTRAIT de la Dissertation sur la Taille par l'appareil Lateral, luë par M. Morand à la rentrée publique de l'Académie Royale des Sciences d'aprés Pâques.
En 1729, M. Morand a présenté à l'Académie Royale des Sciences une méthode de taille latérale inspirée par les travaux du chirurgien anglais M. Cheselden. Après des expériences sur des cadavres, M. Morand a réalisé cette opération à Paris avec succès, sous la supervision de M. Maréchal, premier chirurgien du roi, et en présence de plusieurs académiciens, médecins et chirurgiens. En 1730, sur quinze malades opérés par M. Morand et Perchet, douze ont été guéris et deux autres étaient en voie de guérison. M. Cheselden a publié sa méthode en 1730, détaillant une incision latérale qu'il jugeait la plus efficace. M. Morand a ajouté des particularités à cette description, soulignant les avantages de la taille latérale, comme l'absence de fistule ou d'incontinence urinaire chez les guéris. M. Morand a exploré l'histoire de cette opération, découvrant des documents sur Frère Jacques et M. Rau, confirmant l'efficacité de la méthode latérale. Il a recapitulé les opérations réussies, totalisant 82 personnes taillées par cette méthode entre mars 1727 et mars 1731, avec seulement six décès. En avril 1731, M. Morand a opéré M. de Janson et Du Blaisel, qui sont décédés six jours après l'opération. Les autopsies ont révélé des causes de mort indépendantes de l'opération, confirmant l'absence de complications liées à la taille latérale. Les rapports d'autopsie ont été examinés par l'Académie Royale des Sciences. L'autopsie de M. de Janson, réalisée le 23 mai 1731, a révélé plusieurs anomalies. Un abcès considérable a été trouvé dans le tissu cellulaire du péritoine entre l'uretère gauche et le lieu de l'incision. La vessie, ouverte depuis son fond jusqu'au-delà de l'incision, semblait saine mais contenait un sac rempli de petites pierres et de pus. L'absence d'urines la veille du décès a orienté l'examen vers les reins. Le rein droit était enflammé et augmenté de volume, avec deux uretères s'unissant avant de se connecter à la vessie. Le rein gauche était oblitéré, remplacé par une capsule membraneuse avec deux uretères, l'un bouché par des pierres. Ces anomalies ont conduit à la suppression des urines et à la formation de pus dans le sac pierreux. L'autopsie a été signée par plusieurs médecins, dont Sylva, Boudon, Verdier, Morand et Perchet.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer
2
p. 178-182
Lettre à M. Hosty. Londres, ce 5 Juin 1755.
Début :
Enfin j'ai reçu, Monsieur, la réponse du docteur Hadow à quelques-unes de vos [...]
Mots clefs :
Inoculation, Jacques Hadow, Sang, Incision, Docteur, Docteur Pringle
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Lettre à M. Hosty. Londres, ce 5 Juin 1755.
Lettre à M. Hofty . Londres , ce 5 Juin 175.5.
Enfin j'ai reçu , Monfieur , la réponſe
du docteur Hadow à quelques- unes de vos
queſtions , elle me paroît judicieufe & fatisfaifante
par rapport aux trois premieres ;
lorfqu'il aura fini , je ne manquerai pas de
vous en faire part . Je vous renouvelle les
fouhaits finceres que je fais pour tous vos
fuccès , & pour celui de l'inoculation en
général.
J'ai l'honneur d'être , &c.
Signé , Jean Pringle.
Lettre au docteur Pringle . Warwick ,
ce 2 Juin 1755.
Je ſuis honteux , Monfieur , de répondre
fi tard à votre lettre ; je n'étois point
chez moi , lorfque je l'ai reçue , & j'ai été
tellement occupé depuis à achever les inoculations
de cette faifon , & à quelques
A OUST. 1755. 179
autres affaires , que je n'ai pas eu le tems
de faire une réponſe convenable aux queftions
du docteur Hofty . Je ferai toujours
prêt à lui communiquer ou à tout autre de
vos amis , tout ce que je fçai , & tout ce
que j'ai obfervé dans la pratique de l'inoculation
.
M. Hofty fouhaite d'abord fçavoir ce
que j'obferve dans le choix d'un fujer pour
Finoculation par rapport au tempéramment
, à l'âge , au fexe ; il eft certain que
les jeunes gens qui fe portent bien font les
fujets les plus propres pour être inoculés.
Mais lorfque la petite vérole paroît en
quelque endroit , la terreur qu'elle occafionne
eft fi grande , & il fe trouve tant de
perfonnes qui demandent à être inoculées
que nous ne pouvons les renvoyer , d'autant
plus que ceux qui ont été refufés par
un inoculateur , ont recours à un autre. Je
n'ai jamais refufé qu'une feule perfonne ,
& depuis dix-huit ans que je me mêle de
cette opération , j'en ai inoculé depuis l'âge
de trois mois jufqu'à foixante - deux ans.
Je pense que le tems le plus für pour l'inoculation
eft depuis trois ans , ou lorsque les
premieres dents ont toutes perçées , jufqu'à
l'âge de dix ou douze ans. A cet age
on n'a aucune frayeur de cette maladie..
Les enfans dont les dents percent , ont des
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
accès convulfifs , quelquefois la premiere
nuit de la fievre , & aucuns enfuite , mais
plus fréquemment la nuit de l'éruption .
Je n'ai pas remarqué que ce fymptome fut
fatal , la faignée ou l'application des fangfues
le fait communément ceffer. A force
de voir des malades inoculés fans diftinction
, je fuis devenu beaucoup plus hardi
que je ne l'aurois jamais cru . Les ſcorbutiques
, les afthmatiques , ceux qui font
attaqués de rhumatifmes , les filles qui ont
les pâles couleurs , ne fe trouvent pas plus
mal de cette méthode que les autres . Un
fang épais & coëneux ne produit pas autant
de petite vérole qu'un fang bien vermeil
& qui a peu de férofité. Les perfonnes
blondes dont la peau eft fine & mince ,
l'ont communément moins que les noires
dont la peau eft épaiffe & dure . J'ai cependant
traité quelques- unes de ces derhieres
qui ont eu des ſymptomes très-favorables.
Les perfonnes maigres ne réuffiffent
pas mieux que celles qui font un peu graffes
& dans un embonpoint. J'ai inoculé
quelques hommes qui pefoient deux cens
cinquante- deux livres , dont l'éruption fe
fit d'une maniere très aifée . Les femmes
en général fouffrent davantage .
Å l'égard des préparations générales qui
forment la feconde queftion de M. Hofty ,
A O UST. 1755. 181
elles font les mêmes que celles de Londres.
Au commencement je faifois faigner mes
malades le jour qui précédoit l'inoculation
pour voir en quel' état étoit leur fang.
Si je n'en étois pas content , je leur faifois
continuer les remedes préparatoires
un peu plus long- tems , mais maintenant
je ne fuis pas fi fcrupuleux , je ne
faigne ni les enfans , ni les jeunes filles
pâles , ni les femmes hiftériques & foibles.
J'avois autrefois coutume de donner un
vomitifun foir ou deux avant que la fievre
parut , afin de nettoyer l'eftomac & les inteftins
. Mais j'ai plufieurs fois éprouvé que
la violence du vomitif occafionnoit la
fievre , qui ne difparoiffoit que dans le
tems de l'éruption ; à préfent lorfque je
juge qu'un vomitif eft néceffaire , je le
donne le foir qui fuit l'inoculation .
Pour fatisfaire à la troifiéme queftion
fur l'incifion , j'en fais maintenant une
ou deux , & auffi légere qu'il eft poffible.
Dans les commencemens , je faifois une incifion
à un bras & à la jambe opposée
Mais j'ai trouvé cette méthode fujette à
quelques inconvéniens parmi le beau fexe,
des inflammations , des clous , des tumeurs
paroiffent quelquefois auffitôt après l'exficcation
de l'incifion de la jambe.
J'ai vu quelquefois des fymptômes très182
MERCURE DE FRANCE.
violens , occafionnés par une incifion trop
profonde fur le milieu du mufcle biceps.
J'efpere la femaine prochaine répondre
à quelques autres queftions de M. Hofty s
que je voudrois obliger fur ce que vous.
m'en dites.
J'ai l'honneur d'être , &c.
Signé , Jacques Hadow , M. D.
Enfin j'ai reçu , Monfieur , la réponſe
du docteur Hadow à quelques- unes de vos
queſtions , elle me paroît judicieufe & fatisfaifante
par rapport aux trois premieres ;
lorfqu'il aura fini , je ne manquerai pas de
vous en faire part . Je vous renouvelle les
fouhaits finceres que je fais pour tous vos
fuccès , & pour celui de l'inoculation en
général.
J'ai l'honneur d'être , &c.
Signé , Jean Pringle.
Lettre au docteur Pringle . Warwick ,
ce 2 Juin 1755.
Je ſuis honteux , Monfieur , de répondre
fi tard à votre lettre ; je n'étois point
chez moi , lorfque je l'ai reçue , & j'ai été
tellement occupé depuis à achever les inoculations
de cette faifon , & à quelques
A OUST. 1755. 179
autres affaires , que je n'ai pas eu le tems
de faire une réponſe convenable aux queftions
du docteur Hofty . Je ferai toujours
prêt à lui communiquer ou à tout autre de
vos amis , tout ce que je fçai , & tout ce
que j'ai obfervé dans la pratique de l'inoculation
.
M. Hofty fouhaite d'abord fçavoir ce
que j'obferve dans le choix d'un fujer pour
Finoculation par rapport au tempéramment
, à l'âge , au fexe ; il eft certain que
les jeunes gens qui fe portent bien font les
fujets les plus propres pour être inoculés.
Mais lorfque la petite vérole paroît en
quelque endroit , la terreur qu'elle occafionne
eft fi grande , & il fe trouve tant de
perfonnes qui demandent à être inoculées
que nous ne pouvons les renvoyer , d'autant
plus que ceux qui ont été refufés par
un inoculateur , ont recours à un autre. Je
n'ai jamais refufé qu'une feule perfonne ,
& depuis dix-huit ans que je me mêle de
cette opération , j'en ai inoculé depuis l'âge
de trois mois jufqu'à foixante - deux ans.
Je pense que le tems le plus für pour l'inoculation
eft depuis trois ans , ou lorsque les
premieres dents ont toutes perçées , jufqu'à
l'âge de dix ou douze ans. A cet age
on n'a aucune frayeur de cette maladie..
Les enfans dont les dents percent , ont des
H vj
180 MERCURE DE FRANCE.
accès convulfifs , quelquefois la premiere
nuit de la fievre , & aucuns enfuite , mais
plus fréquemment la nuit de l'éruption .
Je n'ai pas remarqué que ce fymptome fut
fatal , la faignée ou l'application des fangfues
le fait communément ceffer. A force
de voir des malades inoculés fans diftinction
, je fuis devenu beaucoup plus hardi
que je ne l'aurois jamais cru . Les ſcorbutiques
, les afthmatiques , ceux qui font
attaqués de rhumatifmes , les filles qui ont
les pâles couleurs , ne fe trouvent pas plus
mal de cette méthode que les autres . Un
fang épais & coëneux ne produit pas autant
de petite vérole qu'un fang bien vermeil
& qui a peu de férofité. Les perfonnes
blondes dont la peau eft fine & mince ,
l'ont communément moins que les noires
dont la peau eft épaiffe & dure . J'ai cependant
traité quelques- unes de ces derhieres
qui ont eu des ſymptomes très-favorables.
Les perfonnes maigres ne réuffiffent
pas mieux que celles qui font un peu graffes
& dans un embonpoint. J'ai inoculé
quelques hommes qui pefoient deux cens
cinquante- deux livres , dont l'éruption fe
fit d'une maniere très aifée . Les femmes
en général fouffrent davantage .
Å l'égard des préparations générales qui
forment la feconde queftion de M. Hofty ,
A O UST. 1755. 181
elles font les mêmes que celles de Londres.
Au commencement je faifois faigner mes
malades le jour qui précédoit l'inoculation
pour voir en quel' état étoit leur fang.
Si je n'en étois pas content , je leur faifois
continuer les remedes préparatoires
un peu plus long- tems , mais maintenant
je ne fuis pas fi fcrupuleux , je ne
faigne ni les enfans , ni les jeunes filles
pâles , ni les femmes hiftériques & foibles.
J'avois autrefois coutume de donner un
vomitifun foir ou deux avant que la fievre
parut , afin de nettoyer l'eftomac & les inteftins
. Mais j'ai plufieurs fois éprouvé que
la violence du vomitif occafionnoit la
fievre , qui ne difparoiffoit que dans le
tems de l'éruption ; à préfent lorfque je
juge qu'un vomitif eft néceffaire , je le
donne le foir qui fuit l'inoculation .
Pour fatisfaire à la troifiéme queftion
fur l'incifion , j'en fais maintenant une
ou deux , & auffi légere qu'il eft poffible.
Dans les commencemens , je faifois une incifion
à un bras & à la jambe opposée
Mais j'ai trouvé cette méthode fujette à
quelques inconvéniens parmi le beau fexe,
des inflammations , des clous , des tumeurs
paroiffent quelquefois auffitôt après l'exficcation
de l'incifion de la jambe.
J'ai vu quelquefois des fymptômes très182
MERCURE DE FRANCE.
violens , occafionnés par une incifion trop
profonde fur le milieu du mufcle biceps.
J'efpere la femaine prochaine répondre
à quelques autres queftions de M. Hofty s
que je voudrois obliger fur ce que vous.
m'en dites.
J'ai l'honneur d'être , &c.
Signé , Jacques Hadow , M. D.
Fermer
Résumé : Lettre à M. Hosty. Londres, ce 5 Juin 1755.
La correspondance entre Jean Pringle et Jacques Hadow, datée de juin 1755, aborde le sujet de l'inoculation contre la variole. Pringle informe Hadow qu'il a reçu une réponse satisfaisante du docteur Hadow concernant des questions posées par M. Hofty. Pringle exprime ses vœux de succès pour Hofty et pour l'inoculation en général. Dans sa lettre, Hadow s'excuse pour son retard de réponse, expliquant qu'il était occupé par les inoculations et d'autres affaires. Il se déclare prêt à partager ses observations sur la pratique de l'inoculation. Hadow répond aux questions de Hofty concernant le choix des sujets pour l'inoculation. Il note que les jeunes gens en bonne santé sont les meilleurs candidats, mais qu'il inocule des personnes de tous âges, y compris les nourrissons et les personnes âgées. Il recommande l'inoculation entre trois et douze ans, car les enfants de cet âge n'ont pas peur de la maladie. Hadow décrit également les symptômes observés chez les enfants inoculés, comme les convulsions et la fièvre. Il mentionne que les personnes de constitution différente (scorbutiques, asthmatiques, rhumatismales) ne souffrent pas plus que les autres. Il observe que les personnes à la peau fine et claire ont généralement moins de symptômes que celles à la peau épaisse et foncée. Les femmes souffrent généralement plus que les hommes. Concernant les préparations générales, Hadow indique qu'elles sont similaires à celles utilisées à Londres. Il a cessé de faire jeûner les patients avant l'inoculation et utilise des vomitifs avec prudence pour éviter de provoquer la fièvre. Pour l'incision, il préfère maintenant faire une ou deux incisions légères, évitant ainsi les inflammations et les tumeurs observées avec des incisions plus profondes.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 163-182
Suite de la Séance publique de l'Académie de Chirurgie.
Début :
M. Pipelet fit la lecture d'une observation sur la cure d'une hernie ou descente [...]
Mots clefs :
Maladie, Malade, Urine, Urètre, Exostose, Pierres, Observations, Plaie, Incision, Tissu, Fistules, Tumeur, Opération, Académie royale de chirurgie
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texteReconnaissance textuelle : Suite de la Séance publique de l'Académie de Chirurgie.
CHIRURGIE.
Suite de la Séance publique de l'Académie
de Chirurgie.
M. Pipelet fit la lecture d'une obfervation
fur la cure d'une hernie ou deſcente
d'inteftins avec gangréne. La malade, âgée
de quarante - deux ans , fit en 1726 un
effort confidérable qui lui occafionna une
hernie crurale ; la tumeur devint en quinze
jours de tems du volume d'un oeuf de
poule , mais elle rentroit avec facilité. La
malade cacha fon état dont elle ne connoiffoit
pas le danger . Sa négligence donna
lieu à l'augmentation de la tumeur
qui fouffroit en 1738 un étranglement ,
avec tous les fymptomes qui l'accompa164
MERCURE DE FRANCE.
gnent , & les accidens qui en font les fuites
ordinaires . Les fecours que M. Pipelet
donna alors , fuivant les régles de l'art ,
difpenferent de l'opération . Il réduifit les
parties , & ordonna l'ufage continuel d'un
bandage pour les contenir. Au mois d'Ocbre
1740 l'hernie fe trouva étranglée de
nouveau. Les moyens les plus convénables
pour en procurer la réduction , ayant été
infructueux , la tenfion du ventre , la petiteffe
du poulx , & le vomiffement des
matieres ftercorales , exigeoient qu'on fit
promptement l'opération. M. Pipelet qui
n'étoit point encore membre du Collége
de Chirurgie , fit appeller en confultation
M. Guerin , & celui- ci fut choifi par les
perfonnes de qui la malade dépendoit , pour
faire l'opération . L'inteftin étoit gangréné .
L'épiploon & le fac herniaire étoient dans
une difpofition gangréneufe , & toutes ces
parties étoient confondues par des adhérences
intimes qu'il n'avoit pas été poffible
de détruire , quand on en auroit eu
l'intention . Auffi fe contenta -t- on de débrider
l'arcade crurale pour faire ceffer
l'étranglement , & mettre les parties à l'aife.
Il n'étoit ni poffible ni convenable d'en
faire la réduction. Le mauvais état de la
malade fit craindre pendant quelques jours
pour fa vie ; on la foutint par l'uſage
OCTOBRE. 1755 1657
d'une potion cordiale animée : enfin le
ventre fe relâcha , les efcarres gangréneufes
dont on avoit emporté une partie , fe
détâcherent , & l'onzième jour de l'opération
la portion d'inteftin qui faifoit l'ance
fous l'arcade crurale , fe détacha , elle
avoit environ cinq poulces de longueur.
Depuis ce moment , les matieres ftercorales
qui avoient coulé en partie par l'ouverture
de l'inteftin , & plus encore par le rectum ,
cefferent tout - à- coup de paffer par cette
derniere voie , & prirent abfolument leur
route par la plaie que M. Pipelet étoit
obligé de panfer dans le commencement
jufqu'à cinq & fix fois dans les vingt- quatre
heures. La plaie devint fimple , & au
bout de quatre mois fes parois furent rapprochées
au point de ne laiffer qu'une ouverture
large comme l'extrêmité du petit
doigt. Il y avoit tout lieu de préfumer
qu'après un fi long efpace de tems les matieres
fécales continueroient de fortir par
cet anus artificiel ; on ne pouvoit rien efpérer
ni prévoir de plus avantageux pour
la malade mais les chofes changerent fubitement
de face d'une maniere inopinée.
Cette femme qu'on avoit tenu à un régi
me affez févere , mangea indifcretement
des alimens qui lui donnerent la colique
& la fievre, M. Pipeler ayant jugé à pro166
MERCURE DE FRANCE.
pos de la purger avec un verre d'eau de
caffe & de manne , fut le témoin d'un
événement auffi fingulier qu'avantageux
pour la malade. Les matieres fécales , qui
depuis long- tems ne paffoient plus que par
la plaie , prirent dès ce jour leur route vers
le rectum , elles occafionnerent d'abord des
épreintes qui furent aifément calmées par
des lavemens adouciffans. On obferva ce
phénomène pendant quelques jours , l'indication
de travailler à la parfaite confolidation
de la plaie ne préfentoit plus aucun
inconvénient , & on y réuffit en douze
ou quinze jours. La malade qui a actuellement
foixante - onze ans , jouit depuis
quinze ans d'une bonne fanté. M. Pipelet
n'a eu pour le préfent d'autre objet
que de communiquer un fait auffi curieux
à l'Académie. Il remet à une autre occafion
les réflexions que la cure de cette ma->
ladie lui a fuggérées. Son attention à obferver
promet qu'elles feront judicieuſes
& utiles.
M. Houftet lut un mémoire fur les
exoftoſes bénignes des os cylindriques . On
entend par exoftofe une tuméfaction contre
nature , ou une excroiffance des os.
Cette maladie eft fouvent occafionnée par
le vice du fang. Le virus vénérien , le
OCTOBRE . 4755. 167
à
fcorbutique , le fcrophuleux , le cancereux
, font capables de gonfler les os dans
toute leur étendue , ou d'élever quelquesunes
de leurs parties au -deffus de la furface
naturelle. L'exoftole peut auffi être produite
par des cauſes extérieures. Un effort,
un coup , une chute , par lefquels le cours
de la lymphe & du fuc nourricier fera interrompu
dans le corps de l'os , & la fimple
contufion du périofte peuvent donner
lieu à l'extravafation des fucs qui occaſionnent
des protubérances capables d'accroiffement
au point de devenir monstrueuſes.
M. Houfter diftingue avec précifion les
différens ggeennrreess d'exoftofes
par rapport
leurs caufes , & les différentes efpeces que
chaque genre renferme. Les différences
accidentelles des exoftofes , ou ce qui en
conftitue l'efpece particuliere , fe tire de
la diverſe modification contre nature du
tiffu de l'os. Quand les fucs offeux s'amaffent
dans la grande cavité intérieure des
os cylindriques , ils étendent la fubftance
offeufe qui en forme les parois , lefquelles
diviennent minces , à proportion de
l'extenfion qu'elles ont fouffert. Ces fortes
d'exoftofes font fufceptibles d'acquerir un
volume confidérable , leur intérieur eft
toujours rempli des fucs épanchés , & on .
obferve communément qu'elles font bor168
MERCURE DE FRANCE
nées à une certaine étendue de l'os. Le
refte du canal qui n'a point de part à la
maladie conferve l'état naturel . M. Houftet
rapporte au fujet de cette efpece d'exoftofes
plufieurs obfervations particulieres
qu'il compare à celles que nous ont fourni
les grands maîtres. Ces faits rapprochés
fervent à déterminer ce premier caractere
d'exoftofe.
Quand l'engorgement des fucs fe fait
entre les lames qui compofent la fubſtance
de l'os , elle fe gonfle : de compacte.
qu'elle étoit naturellement , elle devient
fpongieufe & cellulaire . M. Houftet a
trouvé ces cellules remplies de fucs blancs
médiocrement épais . Lorfque ces fucs ne
font point viciés , & qu'ils ne contractent
aucune altération acrimonieufe dans le
tiffu de l'os qu'ils diftendent , ils peuvent
paffer de l'état de fluidité à celui d'une induration
parfaite. C'eft précisément le cas
de ce tibia fans cavité que Ruifck avoit
rangé parmi fes curiofités anatomiques ,
& dont il fit fabriquer des manches de
couteaux & de fourchettes. M. Houftet ,
dont les obfervations fur la formation de
ces fortes de tumeurs font très-fuivies , remarque
que des circonstances accidentel--
les peuvent changer la terminaiſon de ces :
exoftofes ; car leur folidité vient de l'endurciffement
OCTOBRE. 1755. 169
durciffement des fucs qui s'épanchoient
peu-à-peu , & par une efpece de fuintement
entre les lames offeufes. Un épanchement
plus copieux , le mêlange d'autres
liqueurs avec le fuc nourricier , une nouvelle
caufe d'épanchement , telle qu'un
coup , une chute , &c. qui raffembleroit
de nouveaux fucs encore fluides avec des
fucs durcis & épanchés depuis long-tems
feroit prendre à cette maladie une terminaifon
différente .
Enfin il y a des exoftofes qui n'affectent
que l'extérieur de l'os ; elles font produires
par l'épaiffiffement du périofte tumefié ,
ou par les fucs nourriciers qui fe répandent
fur la furface de l'os. Elles font ordinairement
d'un volume médiocre , & leur
maffe eft folide. M. Houftet a fait connoî.
tre une nouvelle efpece d'exoftofes différentes
de toutes celles dont on avoit parlé
jufqu'à préfent , en ce qu'elle eft d'un volume
confidérable & creufe , appliquée
feulement fur le corps de l'os qui étoit à
peu de choſe près dans l'état naturel , &
repréfentant en quelque forte un crâne
vuide qui feroit appliqué par fa baſe ſur
le cylindre de l'os. La defcription de toutes
les particularités de cette exoftofe finguliere
feroit déplacée dans un extrait.
M. Houftet l'a fait d'une maniere fa-
'H
170 MERCURE DE FRANCE.
tisfaifante, & la démonſtration des parties
n'a rien laillé à defirer fur ce cas. L'exofto .
fe dont il s'agit étoit à la cuiffe . M. Houftet
donnoit fes foins à la perfonne qui en
étoit attaquée. C'étoit M. le Chevalier
de... Le commencement & le progrès de
la tumeur , les différens remedes qui furent
adminiftrés , tant par les perfonnes
de l'art que par des empiriques , & furtout
la différence des opinions qu'on a
eues fur cette maladie , rendent fort intéreffante
la relation que l'auteur en a
donné . L'examen judicieux des fignes qui
caractérisent les maladies avec lefquelles
on auroit pû confondre celle- ci , feront
des régles pour éviter de pareilles méprifes
. M. Houftet établiffant d'après plufieurs
obfervations de nouveaux fignes capables .
de fe conduire furement en pareil cas dans
la pratique , cette doctrine fera , dit- il , le
fruit des travaux de l'Académie , fi le
goût de la bonne obfervation , & l'efprit
d'émulation , & de recherche continuent
d'y fubfifter. M. Houftet a l'avantage de
donner en même tems le confeil &
l'exemple.
M. Ruffet fecond a fait part de deux
obfervations fur l'utilité des cauteres dans
la cure de l'épilepfie. Une Demoifelle de
dix- huit ans , qui avoit bien réguliéreOCTOBRE
. 1755. 171
ment fes évacuations périodiques , cut
une attaque d'épilepfie. Les faignées , les
purgations , les bains , les eaux de Balaruc
, n'empêcherent point une feconde attaque
environ un mois après la premiere ,
& la malade en eut de mois en mois
pendant deux ans, malgré tous les remédes
que l'on mit en ufage. M. Ruffet propofa
un cautere à la nuque. La malade confentit
à le porter au bras. Le premier accès reculé
de quatre mois fut moins violent que
ceux qui avoient précédé, & il ne fe forma
point d'écume autour de la bouche. Un
effet fi marqué fit demander l'application
d'un fecond cautere à l'autre bras , & la
malade a paffé neuf mois fans le moindre
reffentiment de fon mal . Surpriſe enfin
par une nouvelle attaque , plus légere
encore que les autres , elle fut foumife à
un troifiéme cautere , qu'on mit à une
jambe , & depuis ce tems il n'y a plus eu
d'accès d'épilepfie . Le bon effet des cauteres
multipliés eft prouvé par cette obfervation
. M. Ruffet en rapporte une autre
qui montre le danger de les fupprimer.
Un homme de foixante ans eut une
violente attaque d'épilepfie , qui fut fuivie
d'une autre quinze jours après , malgré
les remédes généraux dont on fit ufage
dans cet intervalle. L'application d'un
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
cautere retarda le troifiéme accès , & en
diminua les fymptomes . L'établiſſement
d'un fecond cautere ôta toute inquiétude
fur la récidive . Au bout de huit mois , le
malade fe croyant radicalement guéri, laiffa
fermer un de ces ulceres. Cette imprudence
fut marquée par le retour de l'épilepfie.
Dès le lendemain de cette dernière
attaque , M. Ruffet rétablit l'égoût dont
la fuppreffion avoit été nuifible ; & le malade
à vécu depuis fept années fans aucune
rechûte .
M. Louis fit enfuite la lecture d'un mémoire
fur les pierres urinaires formées
hors des voies naturelles de l'urine . Ce
cas préfente des circonstances affez variées,
dont il eft important d'être inftruit. Pour
la formation de ces pierres , il faut que
l'urine s'infiltre d'une maniere particuliere
dans les cellules du tiffu graiffeux qui
avoifine les réfervoirs & les conduits naturels
de cette liqueur. Un enfant de dix
ans avoit une tumeur douloureufe au périnée,
M. Louis dans l'examen qu'il en fit ,
trouva qu'elle étoit fituée fous une cicatrice
folide , veftige de l'opération de la
taille que cet enfant avoit foufferte deux
ans auparavant pour une pierre dans la
veffie. Cette tumeur fe termina par une
OCTOBRE. 1755. 173
ouverture à la peau , dans laquelle fe préfentoit
une concrétion pierreufe , & qui
permettoit la fortie de l'urine. M. Louis fit
l'extraction de cette pierre , qui étoit du
volume d'une groffe aveline. Il fentit avec
l'extrêmité boutonnée d'une fonde , que
toute la circonférence de l'efpace qu'avoit
occupé cette pierre , étoit fort dure , &
dans un des points la fonde portoit à nud
fur une concrétion calculeufe ; il fit en
conféquence mettre le malade en fituation
convénable. Il fit une incifion longitudinale
fur toute l'étendue de la tumeur jufqu'au
corps étranger , & il tira fucceffivement
fix petites pierres , dont la réunion
formeroit un corps du volume d'un noyau
de pêche. La cure ne fut point longue , les
panfemens étoient très-fimples , & ne tendoient
qu'à obtenir promptement la confolidation
de cette plaie. Il s'offrit cependant
quelques difficultés toutes les fois
que le malade rendoit fes urines , il en
paffoit une partie par la plaie. M. Louis
étoit bien für de n'avoir pas intéreffé le
canal de l'uretre dans fon opération ; &
la connoiffance de la caufe de la maladie
montroit affez que l'aretre étoit percé ,
l'infiltration de l'urine pour la formation
de ces pierres n'auroit pas eu lieu , s'il n'étoit
resté une fiftule intérieure au canal
Häj
174 MERCURE DE FRANCE .
de l'uretre. A la fuite de l'opération de la
taille faite deux ans auparavant , les bougies
avec les emplâtres fondans exciterent
de la fuppuration à l'orifice de cette filtule
, par la fonte des callofités , & procurerent
la confolidation intérieure .
Cette obfervation montre une maladie
nouvelle facile à prévenir , & contre laquelle
on n'a pris jufqu'ici aucune méfure :
l'on a toujours craint que les plaies faites
à l'uretre pour l'extraction de la pierre
ne reftaffent fiftuleufes , & cet accident
n'eft que trop commun dans la méthode
ancienne du grand appareil. M. Louis en
donne les raifons ; mais voici une espece
particuliere de fiſtule, une fiftule incomplette
, qu'on pourroit appeller borgne & interne
, en fe fervant de la dénomination ufitée
pour les fiftules de l'anus , qui ont une
ouverture dans le rectum fans iffue extérieure.
Cette obfervation eft de confé- .
quence dans la pratique , puifqu'elle prouve
évidemment que la parfaite confolidation
de la plaie des tégumens , après l'opération
de la taille , n'eft point une marque
certaine que l'intérieur de l'uretre foit
bien cicatrifé . On pourroit obtenir facilement
cette cicatrice parfaite par le moyen
des bougies , leur ufage en affurant une
guérifon folide empêcheroit cette infiltraOCTOBRE
. 1755. 175
tion lente de l'urine , qui pénétre en petite
quantité à la fois dans le tiffu cellulaire
, & qui en fe décompofant y produit
par la réunion de fes parties terref
tres & falines des concrétions pierrenfes ,
fufceptibles d'un accroisement confidérable.
Quoique les Auteurs n'ayent pas fait
une mention expreffe de ces fortes de cas ,
on trouve dans leurs écrits des faits ifolés ,
qui peuvent y être rapportés , & qui font
manifeftement de la même efpece. M.
Louis n'a pas négligé d'en faire la recher
che , & d'en faire ufage à propos dans fon
mémoire,pour prouver d'une maniere convaincante
que la formation des pierres
dans le tiffu cellulaire eft un accident confécutif
de l'opération de la taille . Une
obfervation communiquée à l'Académie ,
par M. le Gaigneau , Chirurgien à Coulanges
- la- Vineufe , près d'Auxerre , montre
qu'une pierre formée dans le tiffu cellulaire
a pu acquerir un volume monftrueux
& le poids de dix onces & demie.
Le malade l'a portée plus de trente ans , &
elle eft fortie d'elle-même , après avoir ufé
par fon poids les tégumens qui la recouvroient.
Après avoir levé par des faits incontef
tables tous les doutes qu'on pourroit avoir
Hiy
176 MERCURE DE FRANCE.
fur la fiftule incomplette & interne , que
M. Louis établit pour la caufe de l'infiltration
de l'urine , il recherche comment
cette fiftule peut fe former , & il en trouve
la caufe dans la maniere dont le fait
l'incifion dans le grand appareil ; il eft meme
furprenant , dit- il , que cette fiftule
intérieure n'arrive pas plus fouvent , ou
du moins que les faits qui la prouvent ne
foient pas plus connus . En effet , fuivant
la pratique reçue , l'incifion dans le grand
appareil , eft perpendiculaire , & fe fait à
côté du raphé parallelement. Cette incifion
ne peut être prolongée autant qu'on
le défireroit par rapport au rectum : il
faut donc pour pouvoir procurer la fortie
d'une pierre même médiocre , gagner par
en-haut pour la coupe des tégumens & de
l'uretre ; la peau du périnée eft tendue
& tirée vers l'os pubis par l'aide qui foutient
le fcrotum. Lorfque cette action.
ceffe , l'angle fupérieur de l'incifion des
tégumens fe rabbat , & couvre une partie
de l'incifion de l'uretre ; delà un accident
primitif affez commun , c'eft l'échymofe
du fcrotum. Il eſt donc démontré
que dans cette maniere d'opérer l'angle
fupérieur de l'incifion des tégumens ne
correfpond point à la partie fupérieure de
Pincifion de l'uretre ; celle - ci est tou
OCTOBRE. 1755. 177
jours plus haute ; c'eft pourquoi la cicatrice
du haut de la plaie des tégumens ne
confolide point l'angle fupérieur de l'inci
fion faite à l'urethre : Ainfi , lorfqu'on
croit la plaie parfaitement guérie , il refte
une folution de continuité intérieure .
Voilà , dit M. Louis , le point par où l'urine
s'infinue dans les cellules du tiffu qui
avoifine l'uretre ; c'eft là la caufe de la
fiftule intérieure & des concrétions calculeufes
, qui fe forment confécutivement
hors des voies naturelles de l'urine . Pour
prévenir cet accident , il fuffiroit , dir
l'auteur , d'avoir recours aux bougies après
la guérifon apparente des taillés , afin de
la rendre radicale par la parfaite confolidation
de la plaie intérieure .
Après avoir expliqué comment la méthode
du grand appareil donne lieu aux
fiftules complettes , M. Louis dit que cette
opération devroit être entierement abandonnée
, fes réflexions découvrent dans
cette maniere d'opérer des inconvéniens
lefquels mis en parallele avec les avantages
de la taille latérale , donnent à celleci
la prééminence qu'elle mérite.
Quoique l'objet principal de l'auteur
ait été de parler des pierres formées hors
des voies naturelles de l'urine , comme
accident confécutif de l'opération de la
HW
178 MERCURE DE FRANCE.
taille , il traite de la production de pareilles
pierres en des perfonnes qui n'avoient
point été foumifes à la lithotomie.
On fçait que l'urine peut fe frayer des
routes extraordinaires par différentes caufes
, & que par-tout où elle peut féjourner
, elle eft très- difpofée à former des
concrétions , fur- tout lorfqu'elle charrie
des parties graveleufes : cela fe voit dans
les fiftules urinaires. M. Louis en rapporte
plufieurs exemples , & il en tire des
conféquences utiles pour la pratique. Les
pierres font des corps étrangers dont il
faut faire l'extraction ; c'eft un principe général
, mais dans un cas où il y a des fiftules
, M. Louis penfe que ce n'eft pas cette
indication qu'il importe de fuivre en premier
lieu. Il lui paroît plus avantageux de
procurer d'abord un cours libre à l'urine
par une feule iffue , foit en rétabliffant le
conduit naturel dans fes fonctions par l'ufage
méthodique des bougies appropriées
au cas , foit en faifant une incifion au périnée
pour porter une canulle dans la veffie
, afin que l'urine forte directement &
ceffe de fe porter dans tous les finus fiftuleux.
Le premier parti eft le plus doux , &
par conféquent il eft préférable , s'il peut
avoir du fuccès. Quelque parti qu'on prenne
, ce ne fera qu'après avoir procuré une
OCTOBRE . 1755. 179
voie unique pour la fortie de l'urine qu'on
doit penfer à faire l'extraction des concrétions
calculeufes. Leur fituation peut
exiger beaucoup d'habileté de la part du
Chirurgien , & une grande préfence des
connoiffances anatomiques pour pénétrer
dans le fond de ces fiftules à travers des
parties délicates qu'il faut ménager : c'eft
dans ces cas que l'habitude ne peut conduire
la main. Les opérations qui y conviennent
n'ont aucune place ni aucune
étendue fixée par les préceptes. Les fecours
de la main doivent être déterminés par la
néceffité des circonftances dont on ne peut
exprimer les variations . On peut conclure
de tout ceci que dans l'exercice de la Chirurgie
il ne fuffit pas d'avoir des hommes
qui ne fçavent marcher que dans les routes
qui leur ont été frayées. On voit auſſi
combien s'abufent ceux qui , fans avoir
égard à la diverfité prefque infinie des
circonftances , s'arrêtent dans leurs recherches
par la confiance qu'ils ont en un
inftrument ou invention particuliere , par
laquelle ils croient que toutes les difficultés
d'une opération font applanies ; comme
s'il étoit poffible de fe perfuader qu'on
peur à fi peu de frais rendre court & facile
un art que les plus grands génies ont
trouvé long & difficile.
Hvj
180 MERCURE DE FRANCE.
M. Dubertrand a terminé la féance
par
la lecture d'une obfervation fur un coup
d'épée qui a percé le diaphragme & l'eftomach.
Tout le monde connoît le danger
des bleffures des parties intérieures ; celles
de l'eftomach ont toujours été mifes au
nombre des plaies mortelles , quoiqu'elles
ne le foient pas néceffairement. Les foins.
d'un habile Chirurgien peuvent être efficaces
pour combattre les fymptomes de ces
fortes de plaies , & prévenir les accidens.
fâcheux qui pourroient en résulter.
Un homme de quarante ans, échauffé par
le vin , reçut un coup d'épée entre la derniere
des vraies côtes & la premiere des.
fauffes près de leurs portions cartilagineufes
du côté gauche ; il fit environ deux.
cens pas à la pourfuite de fon ennemi &
tomba fans connoiffance. Tranfporté chez
lui , il eut des convulfions violentes qui
ne cefferent qu'après lui avoir ferré le ventre
avec une ferviete , fecours qu'il avoit
demandé de lui -même avec inftance . M. Dubertrand
qui vit le malade une heure après
l'accident , le trouva couvert d'une fueur.
froide avec un pouls petit , concentré &
intermittent. La refpiration étoit laborieufe
; un hoquet affez fréquent , le vifage:
tiré & les yeux éteints menaçoient d'une
mort prochaine. Le ventre étoit extraordiOCTOBRE.
1755. 181
nairement dur & élevé. Pour vifiter la
plaie , on ôta la ferviete qui comprimoit
le ventre. Les mouvemens convulfifs fe renouvellerent
avec force. M. Dubertrand
fit prendre au malade quelques grains de
tartre émétique. Le vomiffement que ce
remede procura , fit rendre avec des alimens
non digérés plufieurs caillots de fang,
dont on eftima le poids de vingt onces , &
le malade en rendit environ dix onces par
en bas. La convulfion ceffa après cette évacuation
. La fituation de la plaie , fa direction
& les divers fymptomes qui fe manifeftoient
, firent juger que le diaphragme
avoit été bleffé auffi-bien que l'eftomach.
Le pouls s'étant un peu relevé , le malade
fur faigné quatorze fois pendant les deux
premiers jours chaque faignée n'étoit
que de deux paletes. La prudence ne permettoit
pas de plus grandes évacuations ,
parce que le malade tomboit en fyncope.
Les fomentations émollientes fur le basventre
, en relâcherent les parties. Une
boiffon rendue aigrelette par l'effence de
Rabel appaifoit la foif du bleffé , qui ne
prenoit par la bouche que quelques cueillerées
de cette tifanne & d'une eau de
poulet très- légere. Le troifiéme jour après
la feizieme faignée le malade tomba en
foibleffe , & rendit par les felles une gran
182 MERCURE DE FRANCE.
de quantité de matieres féreufes & foetides.
Quelques gouttes de Lilium dans de l'eau
de plantain , foutenoient artificiellement .
les forces du malade , qu'on tâchoit de réparer
en même tems par des lavemens
nourriffans. La nuit du au 10 le malade ,
fans confulter perfonne , mangea une petite
foupe dont il fut fort incommodé , &
qu'il vomit avec un peu de fang. Le lendemain
matin la fievre revint , ce qui fit
recourir encore à la faignée. Cet orage
étant calmé , on mit le malade par dégrés
aux bouillons nourriffans , à là gelée de
viande , & à la crême de ris. I prenoit
fenfiblement des forces , lorfque fans caufe
manifefte , il lui furvint le 17 une fievre
confidérable , des hoquets fréquens , une
toux violente & une espece de phrénéfie.
Deux faignées & des potions antifpafmodiques
calmerent ces accidens. Depuis , le
malade parut chaque jour fe rétablir ; il
prit des alimens folides par degrés , & le
33° jour il vacqua à fes exercices ordinaires
fans aucune incommodité.
Suite de la Séance publique de l'Académie
de Chirurgie.
M. Pipelet fit la lecture d'une obfervation
fur la cure d'une hernie ou deſcente
d'inteftins avec gangréne. La malade, âgée
de quarante - deux ans , fit en 1726 un
effort confidérable qui lui occafionna une
hernie crurale ; la tumeur devint en quinze
jours de tems du volume d'un oeuf de
poule , mais elle rentroit avec facilité. La
malade cacha fon état dont elle ne connoiffoit
pas le danger . Sa négligence donna
lieu à l'augmentation de la tumeur
qui fouffroit en 1738 un étranglement ,
avec tous les fymptomes qui l'accompa164
MERCURE DE FRANCE.
gnent , & les accidens qui en font les fuites
ordinaires . Les fecours que M. Pipelet
donna alors , fuivant les régles de l'art ,
difpenferent de l'opération . Il réduifit les
parties , & ordonna l'ufage continuel d'un
bandage pour les contenir. Au mois d'Ocbre
1740 l'hernie fe trouva étranglée de
nouveau. Les moyens les plus convénables
pour en procurer la réduction , ayant été
infructueux , la tenfion du ventre , la petiteffe
du poulx , & le vomiffement des
matieres ftercorales , exigeoient qu'on fit
promptement l'opération. M. Pipelet qui
n'étoit point encore membre du Collége
de Chirurgie , fit appeller en confultation
M. Guerin , & celui- ci fut choifi par les
perfonnes de qui la malade dépendoit , pour
faire l'opération . L'inteftin étoit gangréné .
L'épiploon & le fac herniaire étoient dans
une difpofition gangréneufe , & toutes ces
parties étoient confondues par des adhérences
intimes qu'il n'avoit pas été poffible
de détruire , quand on en auroit eu
l'intention . Auffi fe contenta -t- on de débrider
l'arcade crurale pour faire ceffer
l'étranglement , & mettre les parties à l'aife.
Il n'étoit ni poffible ni convenable d'en
faire la réduction. Le mauvais état de la
malade fit craindre pendant quelques jours
pour fa vie ; on la foutint par l'uſage
OCTOBRE. 1755 1657
d'une potion cordiale animée : enfin le
ventre fe relâcha , les efcarres gangréneufes
dont on avoit emporté une partie , fe
détâcherent , & l'onzième jour de l'opération
la portion d'inteftin qui faifoit l'ance
fous l'arcade crurale , fe détacha , elle
avoit environ cinq poulces de longueur.
Depuis ce moment , les matieres ftercorales
qui avoient coulé en partie par l'ouverture
de l'inteftin , & plus encore par le rectum ,
cefferent tout - à- coup de paffer par cette
derniere voie , & prirent abfolument leur
route par la plaie que M. Pipelet étoit
obligé de panfer dans le commencement
jufqu'à cinq & fix fois dans les vingt- quatre
heures. La plaie devint fimple , & au
bout de quatre mois fes parois furent rapprochées
au point de ne laiffer qu'une ouverture
large comme l'extrêmité du petit
doigt. Il y avoit tout lieu de préfumer
qu'après un fi long efpace de tems les matieres
fécales continueroient de fortir par
cet anus artificiel ; on ne pouvoit rien efpérer
ni prévoir de plus avantageux pour
la malade mais les chofes changerent fubitement
de face d'une maniere inopinée.
Cette femme qu'on avoit tenu à un régi
me affez févere , mangea indifcretement
des alimens qui lui donnerent la colique
& la fievre, M. Pipeler ayant jugé à pro166
MERCURE DE FRANCE.
pos de la purger avec un verre d'eau de
caffe & de manne , fut le témoin d'un
événement auffi fingulier qu'avantageux
pour la malade. Les matieres fécales , qui
depuis long- tems ne paffoient plus que par
la plaie , prirent dès ce jour leur route vers
le rectum , elles occafionnerent d'abord des
épreintes qui furent aifément calmées par
des lavemens adouciffans. On obferva ce
phénomène pendant quelques jours , l'indication
de travailler à la parfaite confolidation
de la plaie ne préfentoit plus aucun
inconvénient , & on y réuffit en douze
ou quinze jours. La malade qui a actuellement
foixante - onze ans , jouit depuis
quinze ans d'une bonne fanté. M. Pipelet
n'a eu pour le préfent d'autre objet
que de communiquer un fait auffi curieux
à l'Académie. Il remet à une autre occafion
les réflexions que la cure de cette ma->
ladie lui a fuggérées. Son attention à obferver
promet qu'elles feront judicieuſes
& utiles.
M. Houftet lut un mémoire fur les
exoftoſes bénignes des os cylindriques . On
entend par exoftofe une tuméfaction contre
nature , ou une excroiffance des os.
Cette maladie eft fouvent occafionnée par
le vice du fang. Le virus vénérien , le
OCTOBRE . 4755. 167
à
fcorbutique , le fcrophuleux , le cancereux
, font capables de gonfler les os dans
toute leur étendue , ou d'élever quelquesunes
de leurs parties au -deffus de la furface
naturelle. L'exoftole peut auffi être produite
par des cauſes extérieures. Un effort,
un coup , une chute , par lefquels le cours
de la lymphe & du fuc nourricier fera interrompu
dans le corps de l'os , & la fimple
contufion du périofte peuvent donner
lieu à l'extravafation des fucs qui occaſionnent
des protubérances capables d'accroiffement
au point de devenir monstrueuſes.
M. Houfter diftingue avec précifion les
différens ggeennrreess d'exoftofes
par rapport
leurs caufes , & les différentes efpeces que
chaque genre renferme. Les différences
accidentelles des exoftofes , ou ce qui en
conftitue l'efpece particuliere , fe tire de
la diverſe modification contre nature du
tiffu de l'os. Quand les fucs offeux s'amaffent
dans la grande cavité intérieure des
os cylindriques , ils étendent la fubftance
offeufe qui en forme les parois , lefquelles
diviennent minces , à proportion de
l'extenfion qu'elles ont fouffert. Ces fortes
d'exoftofes font fufceptibles d'acquerir un
volume confidérable , leur intérieur eft
toujours rempli des fucs épanchés , & on .
obferve communément qu'elles font bor168
MERCURE DE FRANCE
nées à une certaine étendue de l'os. Le
refte du canal qui n'a point de part à la
maladie conferve l'état naturel . M. Houftet
rapporte au fujet de cette efpece d'exoftofes
plufieurs obfervations particulieres
qu'il compare à celles que nous ont fourni
les grands maîtres. Ces faits rapprochés
fervent à déterminer ce premier caractere
d'exoftofe.
Quand l'engorgement des fucs fe fait
entre les lames qui compofent la fubſtance
de l'os , elle fe gonfle : de compacte.
qu'elle étoit naturellement , elle devient
fpongieufe & cellulaire . M. Houftet a
trouvé ces cellules remplies de fucs blancs
médiocrement épais . Lorfque ces fucs ne
font point viciés , & qu'ils ne contractent
aucune altération acrimonieufe dans le
tiffu de l'os qu'ils diftendent , ils peuvent
paffer de l'état de fluidité à celui d'une induration
parfaite. C'eft précisément le cas
de ce tibia fans cavité que Ruifck avoit
rangé parmi fes curiofités anatomiques ,
& dont il fit fabriquer des manches de
couteaux & de fourchettes. M. Houftet ,
dont les obfervations fur la formation de
ces fortes de tumeurs font très-fuivies , remarque
que des circonstances accidentel--
les peuvent changer la terminaiſon de ces :
exoftofes ; car leur folidité vient de l'endurciffement
OCTOBRE. 1755. 169
durciffement des fucs qui s'épanchoient
peu-à-peu , & par une efpece de fuintement
entre les lames offeufes. Un épanchement
plus copieux , le mêlange d'autres
liqueurs avec le fuc nourricier , une nouvelle
caufe d'épanchement , telle qu'un
coup , une chute , &c. qui raffembleroit
de nouveaux fucs encore fluides avec des
fucs durcis & épanchés depuis long-tems
feroit prendre à cette maladie une terminaifon
différente .
Enfin il y a des exoftofes qui n'affectent
que l'extérieur de l'os ; elles font produires
par l'épaiffiffement du périofte tumefié ,
ou par les fucs nourriciers qui fe répandent
fur la furface de l'os. Elles font ordinairement
d'un volume médiocre , & leur
maffe eft folide. M. Houftet a fait connoî.
tre une nouvelle efpece d'exoftofes différentes
de toutes celles dont on avoit parlé
jufqu'à préfent , en ce qu'elle eft d'un volume
confidérable & creufe , appliquée
feulement fur le corps de l'os qui étoit à
peu de choſe près dans l'état naturel , &
repréfentant en quelque forte un crâne
vuide qui feroit appliqué par fa baſe ſur
le cylindre de l'os. La defcription de toutes
les particularités de cette exoftofe finguliere
feroit déplacée dans un extrait.
M. Houftet l'a fait d'une maniere fa-
'H
170 MERCURE DE FRANCE.
tisfaifante, & la démonſtration des parties
n'a rien laillé à defirer fur ce cas. L'exofto .
fe dont il s'agit étoit à la cuiffe . M. Houftet
donnoit fes foins à la perfonne qui en
étoit attaquée. C'étoit M. le Chevalier
de... Le commencement & le progrès de
la tumeur , les différens remedes qui furent
adminiftrés , tant par les perfonnes
de l'art que par des empiriques , & furtout
la différence des opinions qu'on a
eues fur cette maladie , rendent fort intéreffante
la relation que l'auteur en a
donné . L'examen judicieux des fignes qui
caractérisent les maladies avec lefquelles
on auroit pû confondre celle- ci , feront
des régles pour éviter de pareilles méprifes
. M. Houftet établiffant d'après plufieurs
obfervations de nouveaux fignes capables .
de fe conduire furement en pareil cas dans
la pratique , cette doctrine fera , dit- il , le
fruit des travaux de l'Académie , fi le
goût de la bonne obfervation , & l'efprit
d'émulation , & de recherche continuent
d'y fubfifter. M. Houftet a l'avantage de
donner en même tems le confeil &
l'exemple.
M. Ruffet fecond a fait part de deux
obfervations fur l'utilité des cauteres dans
la cure de l'épilepfie. Une Demoifelle de
dix- huit ans , qui avoit bien réguliéreOCTOBRE
. 1755. 171
ment fes évacuations périodiques , cut
une attaque d'épilepfie. Les faignées , les
purgations , les bains , les eaux de Balaruc
, n'empêcherent point une feconde attaque
environ un mois après la premiere ,
& la malade en eut de mois en mois
pendant deux ans, malgré tous les remédes
que l'on mit en ufage. M. Ruffet propofa
un cautere à la nuque. La malade confentit
à le porter au bras. Le premier accès reculé
de quatre mois fut moins violent que
ceux qui avoient précédé, & il ne fe forma
point d'écume autour de la bouche. Un
effet fi marqué fit demander l'application
d'un fecond cautere à l'autre bras , & la
malade a paffé neuf mois fans le moindre
reffentiment de fon mal . Surpriſe enfin
par une nouvelle attaque , plus légere
encore que les autres , elle fut foumife à
un troifiéme cautere , qu'on mit à une
jambe , & depuis ce tems il n'y a plus eu
d'accès d'épilepfie . Le bon effet des cauteres
multipliés eft prouvé par cette obfervation
. M. Ruffet en rapporte une autre
qui montre le danger de les fupprimer.
Un homme de foixante ans eut une
violente attaque d'épilepfie , qui fut fuivie
d'une autre quinze jours après , malgré
les remédes généraux dont on fit ufage
dans cet intervalle. L'application d'un
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
cautere retarda le troifiéme accès , & en
diminua les fymptomes . L'établiſſement
d'un fecond cautere ôta toute inquiétude
fur la récidive . Au bout de huit mois , le
malade fe croyant radicalement guéri, laiffa
fermer un de ces ulceres. Cette imprudence
fut marquée par le retour de l'épilepfie.
Dès le lendemain de cette dernière
attaque , M. Ruffet rétablit l'égoût dont
la fuppreffion avoit été nuifible ; & le malade
à vécu depuis fept années fans aucune
rechûte .
M. Louis fit enfuite la lecture d'un mémoire
fur les pierres urinaires formées
hors des voies naturelles de l'urine . Ce
cas préfente des circonstances affez variées,
dont il eft important d'être inftruit. Pour
la formation de ces pierres , il faut que
l'urine s'infiltre d'une maniere particuliere
dans les cellules du tiffu graiffeux qui
avoifine les réfervoirs & les conduits naturels
de cette liqueur. Un enfant de dix
ans avoit une tumeur douloureufe au périnée,
M. Louis dans l'examen qu'il en fit ,
trouva qu'elle étoit fituée fous une cicatrice
folide , veftige de l'opération de la
taille que cet enfant avoit foufferte deux
ans auparavant pour une pierre dans la
veffie. Cette tumeur fe termina par une
OCTOBRE. 1755. 173
ouverture à la peau , dans laquelle fe préfentoit
une concrétion pierreufe , & qui
permettoit la fortie de l'urine. M. Louis fit
l'extraction de cette pierre , qui étoit du
volume d'une groffe aveline. Il fentit avec
l'extrêmité boutonnée d'une fonde , que
toute la circonférence de l'efpace qu'avoit
occupé cette pierre , étoit fort dure , &
dans un des points la fonde portoit à nud
fur une concrétion calculeufe ; il fit en
conféquence mettre le malade en fituation
convénable. Il fit une incifion longitudinale
fur toute l'étendue de la tumeur jufqu'au
corps étranger , & il tira fucceffivement
fix petites pierres , dont la réunion
formeroit un corps du volume d'un noyau
de pêche. La cure ne fut point longue , les
panfemens étoient très-fimples , & ne tendoient
qu'à obtenir promptement la confolidation
de cette plaie. Il s'offrit cependant
quelques difficultés toutes les fois
que le malade rendoit fes urines , il en
paffoit une partie par la plaie. M. Louis
étoit bien für de n'avoir pas intéreffé le
canal de l'uretre dans fon opération ; &
la connoiffance de la caufe de la maladie
montroit affez que l'aretre étoit percé ,
l'infiltration de l'urine pour la formation
de ces pierres n'auroit pas eu lieu , s'il n'étoit
resté une fiftule intérieure au canal
Häj
174 MERCURE DE FRANCE .
de l'uretre. A la fuite de l'opération de la
taille faite deux ans auparavant , les bougies
avec les emplâtres fondans exciterent
de la fuppuration à l'orifice de cette filtule
, par la fonte des callofités , & procurerent
la confolidation intérieure .
Cette obfervation montre une maladie
nouvelle facile à prévenir , & contre laquelle
on n'a pris jufqu'ici aucune méfure :
l'on a toujours craint que les plaies faites
à l'uretre pour l'extraction de la pierre
ne reftaffent fiftuleufes , & cet accident
n'eft que trop commun dans la méthode
ancienne du grand appareil. M. Louis en
donne les raifons ; mais voici une espece
particuliere de fiſtule, une fiftule incomplette
, qu'on pourroit appeller borgne & interne
, en fe fervant de la dénomination ufitée
pour les fiftules de l'anus , qui ont une
ouverture dans le rectum fans iffue extérieure.
Cette obfervation eft de confé- .
quence dans la pratique , puifqu'elle prouve
évidemment que la parfaite confolidation
de la plaie des tégumens , après l'opération
de la taille , n'eft point une marque
certaine que l'intérieur de l'uretre foit
bien cicatrifé . On pourroit obtenir facilement
cette cicatrice parfaite par le moyen
des bougies , leur ufage en affurant une
guérifon folide empêcheroit cette infiltraOCTOBRE
. 1755. 175
tion lente de l'urine , qui pénétre en petite
quantité à la fois dans le tiffu cellulaire
, & qui en fe décompofant y produit
par la réunion de fes parties terref
tres & falines des concrétions pierrenfes ,
fufceptibles d'un accroisement confidérable.
Quoique les Auteurs n'ayent pas fait
une mention expreffe de ces fortes de cas ,
on trouve dans leurs écrits des faits ifolés ,
qui peuvent y être rapportés , & qui font
manifeftement de la même efpece. M.
Louis n'a pas négligé d'en faire la recher
che , & d'en faire ufage à propos dans fon
mémoire,pour prouver d'une maniere convaincante
que la formation des pierres
dans le tiffu cellulaire eft un accident confécutif
de l'opération de la taille . Une
obfervation communiquée à l'Académie ,
par M. le Gaigneau , Chirurgien à Coulanges
- la- Vineufe , près d'Auxerre , montre
qu'une pierre formée dans le tiffu cellulaire
a pu acquerir un volume monftrueux
& le poids de dix onces & demie.
Le malade l'a portée plus de trente ans , &
elle eft fortie d'elle-même , après avoir ufé
par fon poids les tégumens qui la recouvroient.
Après avoir levé par des faits incontef
tables tous les doutes qu'on pourroit avoir
Hiy
176 MERCURE DE FRANCE.
fur la fiftule incomplette & interne , que
M. Louis établit pour la caufe de l'infiltration
de l'urine , il recherche comment
cette fiftule peut fe former , & il en trouve
la caufe dans la maniere dont le fait
l'incifion dans le grand appareil ; il eft meme
furprenant , dit- il , que cette fiftule
intérieure n'arrive pas plus fouvent , ou
du moins que les faits qui la prouvent ne
foient pas plus connus . En effet , fuivant
la pratique reçue , l'incifion dans le grand
appareil , eft perpendiculaire , & fe fait à
côté du raphé parallelement. Cette incifion
ne peut être prolongée autant qu'on
le défireroit par rapport au rectum : il
faut donc pour pouvoir procurer la fortie
d'une pierre même médiocre , gagner par
en-haut pour la coupe des tégumens & de
l'uretre ; la peau du périnée eft tendue
& tirée vers l'os pubis par l'aide qui foutient
le fcrotum. Lorfque cette action.
ceffe , l'angle fupérieur de l'incifion des
tégumens fe rabbat , & couvre une partie
de l'incifion de l'uretre ; delà un accident
primitif affez commun , c'eft l'échymofe
du fcrotum. Il eſt donc démontré
que dans cette maniere d'opérer l'angle
fupérieur de l'incifion des tégumens ne
correfpond point à la partie fupérieure de
Pincifion de l'uretre ; celle - ci est tou
OCTOBRE. 1755. 177
jours plus haute ; c'eft pourquoi la cicatrice
du haut de la plaie des tégumens ne
confolide point l'angle fupérieur de l'inci
fion faite à l'urethre : Ainfi , lorfqu'on
croit la plaie parfaitement guérie , il refte
une folution de continuité intérieure .
Voilà , dit M. Louis , le point par où l'urine
s'infinue dans les cellules du tiffu qui
avoifine l'uretre ; c'eft là la caufe de la
fiftule intérieure & des concrétions calculeufes
, qui fe forment confécutivement
hors des voies naturelles de l'urine . Pour
prévenir cet accident , il fuffiroit , dir
l'auteur , d'avoir recours aux bougies après
la guérifon apparente des taillés , afin de
la rendre radicale par la parfaite confolidation
de la plaie intérieure .
Après avoir expliqué comment la méthode
du grand appareil donne lieu aux
fiftules complettes , M. Louis dit que cette
opération devroit être entierement abandonnée
, fes réflexions découvrent dans
cette maniere d'opérer des inconvéniens
lefquels mis en parallele avec les avantages
de la taille latérale , donnent à celleci
la prééminence qu'elle mérite.
Quoique l'objet principal de l'auteur
ait été de parler des pierres formées hors
des voies naturelles de l'urine , comme
accident confécutif de l'opération de la
HW
178 MERCURE DE FRANCE.
taille , il traite de la production de pareilles
pierres en des perfonnes qui n'avoient
point été foumifes à la lithotomie.
On fçait que l'urine peut fe frayer des
routes extraordinaires par différentes caufes
, & que par-tout où elle peut féjourner
, elle eft très- difpofée à former des
concrétions , fur- tout lorfqu'elle charrie
des parties graveleufes : cela fe voit dans
les fiftules urinaires. M. Louis en rapporte
plufieurs exemples , & il en tire des
conféquences utiles pour la pratique. Les
pierres font des corps étrangers dont il
faut faire l'extraction ; c'eft un principe général
, mais dans un cas où il y a des fiftules
, M. Louis penfe que ce n'eft pas cette
indication qu'il importe de fuivre en premier
lieu. Il lui paroît plus avantageux de
procurer d'abord un cours libre à l'urine
par une feule iffue , foit en rétabliffant le
conduit naturel dans fes fonctions par l'ufage
méthodique des bougies appropriées
au cas , foit en faifant une incifion au périnée
pour porter une canulle dans la veffie
, afin que l'urine forte directement &
ceffe de fe porter dans tous les finus fiftuleux.
Le premier parti eft le plus doux , &
par conféquent il eft préférable , s'il peut
avoir du fuccès. Quelque parti qu'on prenne
, ce ne fera qu'après avoir procuré une
OCTOBRE . 1755. 179
voie unique pour la fortie de l'urine qu'on
doit penfer à faire l'extraction des concrétions
calculeufes. Leur fituation peut
exiger beaucoup d'habileté de la part du
Chirurgien , & une grande préfence des
connoiffances anatomiques pour pénétrer
dans le fond de ces fiftules à travers des
parties délicates qu'il faut ménager : c'eft
dans ces cas que l'habitude ne peut conduire
la main. Les opérations qui y conviennent
n'ont aucune place ni aucune
étendue fixée par les préceptes. Les fecours
de la main doivent être déterminés par la
néceffité des circonftances dont on ne peut
exprimer les variations . On peut conclure
de tout ceci que dans l'exercice de la Chirurgie
il ne fuffit pas d'avoir des hommes
qui ne fçavent marcher que dans les routes
qui leur ont été frayées. On voit auſſi
combien s'abufent ceux qui , fans avoir
égard à la diverfité prefque infinie des
circonftances , s'arrêtent dans leurs recherches
par la confiance qu'ils ont en un
inftrument ou invention particuliere , par
laquelle ils croient que toutes les difficultés
d'une opération font applanies ; comme
s'il étoit poffible de fe perfuader qu'on
peur à fi peu de frais rendre court & facile
un art que les plus grands génies ont
trouvé long & difficile.
Hvj
180 MERCURE DE FRANCE.
M. Dubertrand a terminé la féance
par
la lecture d'une obfervation fur un coup
d'épée qui a percé le diaphragme & l'eftomach.
Tout le monde connoît le danger
des bleffures des parties intérieures ; celles
de l'eftomach ont toujours été mifes au
nombre des plaies mortelles , quoiqu'elles
ne le foient pas néceffairement. Les foins.
d'un habile Chirurgien peuvent être efficaces
pour combattre les fymptomes de ces
fortes de plaies , & prévenir les accidens.
fâcheux qui pourroient en résulter.
Un homme de quarante ans, échauffé par
le vin , reçut un coup d'épée entre la derniere
des vraies côtes & la premiere des.
fauffes près de leurs portions cartilagineufes
du côté gauche ; il fit environ deux.
cens pas à la pourfuite de fon ennemi &
tomba fans connoiffance. Tranfporté chez
lui , il eut des convulfions violentes qui
ne cefferent qu'après lui avoir ferré le ventre
avec une ferviete , fecours qu'il avoit
demandé de lui -même avec inftance . M. Dubertrand
qui vit le malade une heure après
l'accident , le trouva couvert d'une fueur.
froide avec un pouls petit , concentré &
intermittent. La refpiration étoit laborieufe
; un hoquet affez fréquent , le vifage:
tiré & les yeux éteints menaçoient d'une
mort prochaine. Le ventre étoit extraordiOCTOBRE.
1755. 181
nairement dur & élevé. Pour vifiter la
plaie , on ôta la ferviete qui comprimoit
le ventre. Les mouvemens convulfifs fe renouvellerent
avec force. M. Dubertrand
fit prendre au malade quelques grains de
tartre émétique. Le vomiffement que ce
remede procura , fit rendre avec des alimens
non digérés plufieurs caillots de fang,
dont on eftima le poids de vingt onces , &
le malade en rendit environ dix onces par
en bas. La convulfion ceffa après cette évacuation
. La fituation de la plaie , fa direction
& les divers fymptomes qui fe manifeftoient
, firent juger que le diaphragme
avoit été bleffé auffi-bien que l'eftomach.
Le pouls s'étant un peu relevé , le malade
fur faigné quatorze fois pendant les deux
premiers jours chaque faignée n'étoit
que de deux paletes. La prudence ne permettoit
pas de plus grandes évacuations ,
parce que le malade tomboit en fyncope.
Les fomentations émollientes fur le basventre
, en relâcherent les parties. Une
boiffon rendue aigrelette par l'effence de
Rabel appaifoit la foif du bleffé , qui ne
prenoit par la bouche que quelques cueillerées
de cette tifanne & d'une eau de
poulet très- légere. Le troifiéme jour après
la feizieme faignée le malade tomba en
foibleffe , & rendit par les felles une gran
182 MERCURE DE FRANCE.
de quantité de matieres féreufes & foetides.
Quelques gouttes de Lilium dans de l'eau
de plantain , foutenoient artificiellement .
les forces du malade , qu'on tâchoit de réparer
en même tems par des lavemens
nourriffans. La nuit du au 10 le malade ,
fans confulter perfonne , mangea une petite
foupe dont il fut fort incommodé , &
qu'il vomit avec un peu de fang. Le lendemain
matin la fievre revint , ce qui fit
recourir encore à la faignée. Cet orage
étant calmé , on mit le malade par dégrés
aux bouillons nourriffans , à là gelée de
viande , & à la crême de ris. I prenoit
fenfiblement des forces , lorfque fans caufe
manifefte , il lui furvint le 17 une fievre
confidérable , des hoquets fréquens , une
toux violente & une espece de phrénéfie.
Deux faignées & des potions antifpafmodiques
calmerent ces accidens. Depuis , le
malade parut chaque jour fe rétablir ; il
prit des alimens folides par degrés , & le
33° jour il vacqua à fes exercices ordinaires
fans aucune incommodité.
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Résumé : Suite de la Séance publique de l'Académie de Chirurgie.
Lors d'une séance publique de l'Académie de Chirurgie, plusieurs observations médicales ont été présentées. M. Pipelet a rapporté la cure d'une hernie crurale avec gangrène chez une patiente de 42 ans en 1726. La hernie, apparue après un effort physique, s'était étranglée en 1738, nécessitant une intervention chirurgicale. M. Pipelet et M. Guerin ont débridé l'arcade crurale pour soulager l'étranglement. La patiente a survécu et, après une convalescence, a retrouvé un trajet naturel pour les matières fécales. Quinze ans plus tard, elle jouissait d'une bonne santé. M. Houftet a lu un mémoire sur les exostoses bénignes des os cylindriques, des excroissances osseuses causées par diverses maladies ou traumatismes. Il a distingué plusieurs types d'exostoses en fonction de leur localisation et de leur origine, illustrant ses propos par des observations cliniques. M. Ruffet a partagé deux observations sur l'utilisation des cautères dans le traitement de l'épilepsie. Dans le premier cas, une jeune fille de 18 ans a vu ses crises épileptiques diminuer et cesser après l'application de cautères. Dans le second cas, un homme de 60 ans a connu une rémission de son épilepsie grâce à des cautères, mais a rechuté après avoir cessé leur utilisation. M. Louis a discuté des pierres urinaires formées en dehors des voies naturelles, souvent consécutives à une opération de la taille. La cause identifiée est une fistule intérieure dans l'urètre, résultant d'une cicatrisation incomplète. Cette fistule permet l'infiltration lente de l'urine dans les tissus cellulaires, favorisant la formation de concrétions calculeuses. M. Louis critique la méthode ancienne du grand appareil, qui ne permet pas une cicatrisation parfaite de l'urètre, et recommande l'utilisation de bougies pour assurer une consolidation intérieure après l'opération. Il propose également la taille latérale pour éviter ces complications et insiste sur l'importance de rétablir un cours libre à l'urine avant d'envisager l'extraction des concrétions. Enfin, M. Dubertrand a rapporté un cas de coup d'épée ayant percé le diaphragme et l'estomac, soulignant les soins nécessaires pour traiter de telles blessures.
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