CANTAT E.
SUR LA NAISSANCE
DE JESUS- CHRIST.
LA Fille du grand Roi que Betlhéem vit naître
La fille de David , Pere de tant de Rois ,
Dans sa propre Patrie en vain se fait connoître ,
P
I. Vol. Citij L'in
2574 MERCURE DE FRANCE
L'ingrate Betlhéem se rend sourde à sa voix.
Tandis que l'Etranger chez l'Etranger tranquile ,
Ygoûte les douceurs d'un paisible repos ,
La Mere de celui qui vient finir nos maux ,
Erre loin de ses murs , pour chercher un azile ;
Un voile tenebreux lui cache l'Univers.
Lejour depuis long-tems se reposoit dans l'Onde,
A ses pas égarez une Grote profonde ,
Où regnent les sombres Hyvers ,
Parmi de vils Troupeaux offre un triste réfuge :
C'est-là qu'un Dieu Sauveur oubliant qu'il est
Juge ,
Oubliant nos forfaits , et son juste courroux ,
Vient de naître et commence à
s'immoler pour
•
nous.
Air.
Volez, Zéphirs , que votre haleine ,
Dans cet Antre profond ramene ,
La douce chaleur du Printemps.
Pere du jour , avant le temps ,
Recommencez votre carriere ,
Chassez les ombres de la nuit ;
L'Univers étonné languit ,
Dans l'attente de la lumiere :
Chassez les ombres de la nuit.
Quels prodiges divers ! la terre est agitée ,
Elle tremble et frémit d'allegresse et d'effroi :
1. Vol.
La
DECEMBRE. 1732. 2575
La Mer, comme autrefois, craintive, épouvantée,
Suspend ses flots bruyans , pour adorer son Roi ,
Dans un Enfant plein de foiblesse.
Le jour , le plus beau jour à paroître s'empresse :
Dévoilez , cher Enfant , l'éternelle beauté ;
Trop long- temps votre Mere a souffert de vos larmes :
Montrez-vous , soulagez ses mortelles allarmes.
Vous , qui de cet Enfant craignez la Majesté ,
Et qui vous nourissez dans le Ciel de ses charmes,
Heureux Esprits , chantez , découvrez- nous l'amour
Qui l'anime pour nous en cet affreux séjour.
Ecoutons ; le Ciel s'ouvre , un Chœur d'Anges
s'apprête
Acelebrer dans les airs une Fête.
Air.
Le Verbe s'est fait chair pour sauver les Mortels;
Dans ses abaissemens éternisons sa gloire :
Il triomphe des cœurs, pour prix de sa victoire,
Il se verra sans cesse élever des Autels ;
Toujours de sa bonté durera la memoire.
Heureux Mortels , recevez les bienfaits ,
Qu'il vient répandre sur la Terre ;
Déja sa main écarte le Tonnerre ;
Il pleure vos forfaits ,
Il vous offre la paix ,
Et replonge aux Enfers l'impitoyable guerre.
I. Vol CY .Heu-
2576 MERCURE DE FRANCE
Heureux Mortels, recevez les bienfaits
Qu'il vient répandre sur la Terre.
On mêle à ces Concerts de rust ques accens ;
De vigilans Bergers accourus vers l'Etable ,
Y portent des cœurs innocens ,
Et forment au Sauveur la Cour la plus aimable ;'
Tandis que pleins d'amour ils pleurent ses dou- leurs ,
L'un d'eux forme ces sons , qu'interrompent
ses pleurs.
Air.
Foible Enfant, Puissance suprême ,
Je vous adore et je vous aime.
Vous soulagez tous nos besoins ,
Tout m'annonce vos tendres soins ,
Et vous vous oubliez vous- même
Vous êtes plus pauvre que nous ,
Et tout l'Univers est à vous
Foible Enfant, Puissance suprême
Je vous adore et je vous aime.
Votre main soutient l'Univers.
Elle transporte les Montagnes ;
Elle fait naître en nos Campagnes ,
Et nourrit mille fruits divers.
Votre voix ramene l'Aurore ,
Qui nous éclaire chaque jour ,
1. Vol. Et
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Et les fleurs qu'elle fait éclore ,
Sont les présens de votre amour.
Foible Enfant , Puissance suprême ,
Je vous adore et je vous aime