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1
p. 97-144
Traité du feu, dans lequel on établit les vrais fondemens de la Physique.
Début :
Les effets du feu son si admirables & si terribles, / Il y a si peu de choses qui puissent passer pour certaines [...]
Mots clefs :
Feu, Incendie, Corps, Auteur, Eau, Nature, Chaleur, Esprits, Vertu, Dieu, Terre, Froid, Avantages, Traité, Principes, Force, Divinité, Substance, Couleur, Grandeur, Soleil, Physique, Entretiens
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texteReconnaissance textuelle : Traité du feu, dans lequel on établit les vrais fondemens de la Physique.
admirables & si terribles,
si utiles & si dangereux, &
j'en ai déja parlé tant de
fois superficiellement, que
4 je croy ne pouvoir mieux
faire, pourinstruire & pour
amuser le lecteur, que lui
donner un extrait des dissertationssuivantes,
oùil
verra un tableau assez exact
des qualitez & des proprietez
de cet élement.
h) ;>-t'ï
J, Traité du feu, dans lequel on établît les vraisfondemens
n' de la Physique.
-'u-j
,
Il y a si peu de choses qui
puissent passer pour certaines
& pour confiantes dans
la Physique, qu'il n'ya
rien de plus aisé que dese
tromper, lors qu'on entreprend
de prononcer decisivement
sur les matierés qui
s'y traitent. D'ailleurs,les
methodes Ics- plus regulieres
ne fonc pas toûjours les
meilleures; elles ont fouvent
beaucoup plus de
montre que d'utilité solide,
& l'on peut dire qu'en bien
des rencontres elles servent
bien plus à gêner l'esprit,
qu'à le conduire droit à la
verité. C'a été pour prendre
uneroute qui l'exposât
moins àces deux inconve-
,
niens, que le P. C. a donné
la formed'entretiens à cet
ouvrage, parce qu9ona accoûtumé
de bannir de tout
ce qui porte ce titrele ton
decisif de Docteur,aavec
ce faste & cet apparat qui
l'accompagne d'ordinaire,
&. que du reste on n'y reçoit
point les regularitez importunes,
ni les formalitez
gênantes des manieres de
l'Ecole. Ainsi les
13.
dissertarions
dont il a composé son
livre, sontautant de ron'Ver.
sations libres& sçavantes,
où il fait entrer trois personnes
d'un rare merire &
d'une fort grande érudition;
à peu prés comme Ciceron
introduit sesillustres
amis parlansdans ses ouvrages
de Philosophie. Je tjU
cherai d'informer les lecteurs
de ce qui s'y trouve
de plus remarquable 8; de
principal: mais comme je
suis obligé d'éviter la longueur
des extraits , autant
qu'il me fera possible,
& qu'il feroit difficile de
rendre compte en peu de
mots de 13.dissertations pleines
de choses considerables
&qui font un gros volume,
je me contenterai de donner
ici le précis des 5. premieres,
& je renvoyerai le
reste à un autre mois.
Nôtre auteur entre en
matiere,dans la premiere
dissertation;d'une maniere
agreable -" par une petite
disputequ'il fait naître entre
ses personnages sur cette
question curieuse : Lequel
desdeuxestleplus excellent &
le plus utile, de l'eau ou du
feu ? C'est pour se donner
jour à faire l'élogedu sujet
qu'il veut traiter, en montrant
l'avantage qu'a le feu
sur tous les corps simples,
dont il pretend qu'il est le
plusnoble à bien des égards.
On ne pouvoit gueres
mieuxtourner la chose qu'-
en laprenant de cette maniere
,
ni faire voir un plus
beau mélange de la belle
litterature avec la Philosophie,
que celui que nous
donne ici le P.C. On allegue
• de part & d'autre ce qu'on
pouvoir dire de plus curieux
à l'avantage du feu ou de
l'eau. On cite les autoritez
des Poëtes & des Philosophes,
on produit le celebre
passage de Pindare, qui des
le commencement de ses
Odes dit qu'il n'y a rien de
meilleur que l'eau. Et on lui
opposePlutarque,qui ayant
traité la même question
qu'on a gite ici, l'adecidée
en faveur du feu. On peut
bien croire qu'on n'oublie
pas là-dessus ni Vulcain, qui
étoit du nombre des grandes
Divinitez Payennes, ni le
feusucré,qui étoit l'objet de
la devotion des Perfes
; ni
l'adoration que les Chaldéens
rendoient à cet element,
qu'ils, consideroient
comme leur supreme Divinité.
Cependant comme le
feu ne craint rien si fort que
l'eau,on raconte ici une as
fez plaisante avanture,tirée
de Ruffln & de Suidas, oùles
choses ne tournerent pas à
l'avantage du Dieu de Chaldée.
Ceux de cette nation
vantoient leur Divinité,
comme la plus puissante de
toutes; & quelques-uns de
leurs Prêtres, courans de
Province enProvince,défioient
au combat tous les
f
autresDieux. Maiscomme
ceux-ci, de que lque matierequ'ils
fussent, de bois,
, ou d'airain ,ou d'argent
ou d'or, ne pouvoientresister
au feu, qui en venoit
-
enfin à bout,il le trouva un
Prêtre d'Egypte qui arrêta
de cette maniere les triomphes
de ce Dieu, qui en avoit
dévoré tant d'autres. Il
prit une cruche percée de
quantité de petits trous,
qu'il boucha avec de la cire,
mais si proprement, qu'on
n'en pouvoitrien connoître
; & après avoir rempli
cette cruche d'eau, & avoir
mis au dessus la tête de son
Idole qu'on nommoit Canope,
il accepta le défi. Les
Chaldéens mirent aussitôt
le feu à l'entour de l'Idôle:
mais la cire se fondant au
feu, ouvrit incontinent le
passage à l'eau, qui sortant
de tous cotez par les petits
trous ,qu'on ne voyoit pas,
éteignit le feu, & faisant
triompher Canope, fit avoüer
aux Chaldéens que.
le Dieu des Egyptiensétoit
le plus fort. Avec tout cela,
comme il estaussi naturel
au feu de consumerl'eau,
qu'ill'est à l'eau d'éteindre
le feu, on ne peut nier que
celui-ci ne se dédommage
quelquefois au double, parce
qu'il gagne à son tour
sur l'autre.Mais pourétablir
sur quelque chose de c'on.,
fiderable l'avantage qu'on
donne aufeu,on remarque
ici que si on recüeille les
suffrages des Philolophes,
on trouvera que le plus
grand nombre est celui de
ceux qui ont mis le feuen
tre les principes deschoses;
ce qui vient sans douce de
l'impression nature lle qu'on
a de ion excellence & de
son utilité. Qu'au reste ce
n'est pas un foible argument
pour nous en persuader,
que de voir qu'entre »
tant de sortes d'animauxil
n'y ait que l'homme à qui
a nature en ait proprement
accordé l'usage : ce qui va
siloin
,
selon la pensée de
Lactance
,
qu'il semble que
Dieu ait voulu assurer les
hommes de leur immortalité
, en leur abandonnant
l'usage & la disposition de
cet element, qui est celui de
la lumiere & de la vie. Que
quoy qu'il en soit, lavie est
un feu, & que si le feu en
est le symbole,il en est aussi
le soûtien, & leplus necessaire
instrument, puis qu'-
après tout il n'est pas possïble
ni de cuire les alimens,
ni de préparer les remedes,
ni de se prévaloir de cent
autres choses necessaires à
la vie, sans le secours de
cet element. Que d'ailleurs
quand on pourroit vivre
sans l'usage du feu,la vie
ne sçauroit être qu'extremement
miserable, privée
de tous les avantages qu'on
tire des sciences & des arts,
& plongée dans une obscurité
qui lui ôteroit tout ce
qu'elle a dagreable. Qu'en
un mot on est redevable de
toutes lescommoditez, ôc
de tous les ornemens de la
: vie au feu ,qui eR: d'une utiflité
si étenduë & si gene- rale, qu'outre le secours
qu'il prête à la vûé au milieu
de l'obscurité , il supplée
quelquefois à l'usage
[. de la parole, en donnant
aux amis éloignez de quelques
lieuës le moyen de se
pouvoir parler la nuit par
des flambeauxallumez. Enl'
fin, après avoir remarqué
que les effets mêmequ'on
lui reproche sont des preuves
de noblesse & des marques
de grandeur,on observe
quetousles peuples
l'ont prispour le symbole
de la puissance, & pourle
caractere de la majesté:d'où
vient qu'on le portoit autrefois
devant les Rois de
l'Asie, & devant les Empereurs
Romains. Et pour
achever par un endroitqui
en couronne dignementl'éloge,
on ajoûte qu'il n'y a
point eu de nation dans le
monde qui ne l'ait regardé
non feulement comme un
excellent present duCiel,
mais encore comme une illustre*
imagerdela-Divinité. Que
rQue de là est venu qu'on Fa
employé dans toutes les Religious,&
que ce n'ont point
été les Chaldéens feu ls, ni
les Poëtes, ni les Philosophesqui
ont dit que Dieu
est unfeu : mais que l'Ecriture
sainte a parlélemême
langage, & n'a pas faitdifficulté
de nous assurer que
Dieu estunfeuconsumant. 1
Aprés ces préliminaires,
il passe dans le deuxiéme
entretien à l'explication de
lanature du feu. Lefeu, sef!
on" lui, est un esprit qui soy a en unechaleur vive brûlante.
Mais il faut sçavoir
que par cet esprit il n'entend
pas ce que les Chymistes
appellent de ce nom &
qu'ils distinguent par là mêmedavec
leursouphre &
leur mercure. Dans ce que
nôtre auteur nomme ainsi,
il n'est pas tant question de
larareté dela matiere,ou
'de la legereté, quede la subtilité
& de la sorce:&en
un mot, l'esprit, dans son
sens
,
estune substance tres-déliée&
trés-subtile,très-capablede
s'insinuer&depenetrer
dans les pores de tous les corps.
cr >
Quand donc cette subtilité
se trouve jointe avec la É-lieleur,
& que celle-ci est dars
un degré de force & d'ardeur
considerable, nôtre
auteurpretend quec'estce
qui fait propremenr le feu.
D'où vient qu'il ne fait pas
de difficulté de mettre le
sel aunombredes corpsde
nature ignées parce qu outre
•
qu'il désechetoutes leschop
ses ou il s'attache, & qu'il
consume puissamment les
-
humiditez, on en tire, en
ledistillent,des eaux fortes
qui ont la vertu de dissoudre
les metaux,en bien
moins
,-
de temps quene
sçauroit faire le feu leplus
fort &le plusardentde nos
fourneaux.Au reste; comme,
l'ondistingue diverses
sortes de terres,qui, quoy
qu'ellesconviennent toutes
dans cette nature generale,
qui leur est commune; ne
laissent pas d'être differentes
en espece les unesdes
autres; nôtre aauurteeuurrine j ne
doute pointqu'on ne doive
aussidistinguer diverses sortes
de feux, qui tenant tous
en général de la nature de
cet element , différent entr'eux,
en ce qu'ilssont d'une
vivacité,d'un éclat,d'une
subtilité ,d'une force, Si
d'une activité inégale.Quelquedifferensneanmoins
qu'ils soiênt,ilveutqu'ils se
reduisent tous à deux genres
principaux:les uns, qui
ont,tout enlemble de la lumiere&
de la chaleur &
lesautres qui ont de la chaleur
,mais quin'ont point
de lumiere. Les premiers
sont ceux qu'on nomme
feux par excellence : aussi
l'auteur lesappelle-1-il des
feuxvifs, parce qu'ils renfermenc
une quantité d'esprits
vifs & lumineux, comme
font ceux d'une vive
flamme. Les autres sont des
feux beaucoup moins parfaits:
c'est pourquoyl'auteur
les appelle des feux
morts, parce qu'ils sont composez
d'espritsqui n'ont ni
vivacité, ni clarté, & qu'avec
la vertu de brûler , ils
n'ont pas celle d'eclairer &
de luire. Le poivre, le pyretbre,
l'argent vifprécipité, ôc
generalement tous lescaustiques
renferment des eA
prits de cette espece, & doivent
par cette raison être
mis entre les corps qui tiennent
de la nature du feu. /',
Maiscequ'ilyaicid'aussi
remarquable; & qui pourra
surprendre ceux qui n'aurontpoint
oüi parler du
traité de M. Boyle; deflam-
; mæ ponderabilitate y cest qu'-
excepté le feu celeste & de
la nature de celui des astres,
qu'on veut bien qui soit ler
ger. & capable de s'élever
sen haut, on soûtient que
* tous les autres tendent naturellement
vers le centre,
& qu'ilssontmême plus
pesans que tous les autres
elemens.
La troisiéme dissertation
est employée toute entiere
à soûtenir ce paradoxe,& il
fautavoüerqu'on lui donne
un grand air de vraifemblance
par les preuves qu'-
on apporte pour l'établir.
Par exemple , to.. L'on remarque
que les briques,
qui demeurent long-temps
dans le feu, y deviennent
beaucoup plus pesantes,
quoique l'évaporation de
l'humidité en dûtdiminuer
le
le poids.2°. On rapporte un
grand nombre d'experiences
du traité de M. Boyle,
par lesquelles il paroît que
delachaux vive &, divers
metauxayant été exposez
au feu pendant deuxon
trois heures, ont considerablement
augmenté leur
poids; ce qui ne pouvoit
venir que des particules du
feu qui s'étoientmêlées
avec ces matieres. 3°. Enfin
on soûtient que le lieu prow
pre & naturel de nôtre feu
élémentaire est dans les entrailles
de la terre, levrai
cétre des choses pefanses^
lendrpiçle.plus basde tonné
l'univers, ôcquec'estçefils
central, &: non pas la chaleuo
du soleil,ou la vertu ôdesin-j
lfweçesque1,onattribueau^
astrequi est le véritable
principe de la génération
des métaux, & la veritablq
çausequi produit les sources
des rivieres&des fontaines;
;:
En .effet3il est si peuvrai
que la vertu des astres fQ
false sentirdans- les pro-l
fonds cachotsdes lieux [oûi
terrains, que l'on pose en
fait que dans les plus gran4eschaleurs
de l'Esté,lorfque
le soleil darde ses.rayons
avec plus de force, & qu'ils
donnent sur la terre à
plomb, si Tonveut bienfe
donner la peine d'observer
l'effet qu'ilsyfont, on ne
itrouvera point, je ne dirai
pas quils l'ayent penetrée
de quelque milles, mais feu-,
lement qu'ils l'ayent réchauffée
de quelques pieds
de profondeur. L'auteur
nous apprend quelque cho.
se d'asser remarquable làideflus.
Il dit que tous ceux
qui ont écrit touchant les
mi,nes, au moi,ns tous ceux1
dont il, a lû les ecrits rapportent
constammentque.
la terre est froide vers sa fuperficie;
qu'on çommence
à la trouver un peu rechauf-j
fée, lors qu'on y est defcen,
du plus avant;& qu'ensuite
plus on l'enfonce, plus on
trouve que sa chaleur se forciné,
& qu'elle s'augmente
sensiblement. C'est ce que
témoigné entr'autres J. B.
Adorin dans sa relation de
lotis fubterraneis, où il rapporte,
qu'ayant eu la curiofit-R
dedépendre dans les minesd'or
de Hongrie au mots deJuillet,
il avoit trouvé la région superieure
de la terre extremement
froide jusques environ 480.
pieds : mais quétantdescendu
plusbas, ily aVoit trouvé de
la chaleur, qui saugmentait de
relie forte a mesure qu'il s'avançoit
vers lefond,que dans
l'endroit ou étoient les ouvriers
,
ils ne poyvoient travailler
que nuds. Et l'onremarque
qu'il en est de même
dans routes les autres
mines de ce pays-là.
La quatrième -diflertation
roule
sur cette quêstion
assez curieufc
: Si lorfqueï
quelque choje est brûUe>ils'en-t
gendre une nouvellefubflancef1
Pour la resoudre clairemenr,
l'auteurexplique fort,
au long toute la nature de la
génération des substances
inanimées. Il ne reconnoit^
aucune matierepremière proprement
airifi nommée', ôc ilsoûtientfqu'il n'yen ai
point d'autre que divers
corpuscules (impies, qui onci
chacun leur figure, leur!
grandeur, & leurs autre,
proprietez; de
maniéréquel
ne dépendant nullement lest
uns des-autres, ils peuvent
également [ublifler & ensemble,
& fcparez
:
après
cela on conçoit aflfez que,
félon cet auteur, laforme des
chosesinanimées ne doit consister
que dans la conformation,
qui refaite de l'union legitimé&
naturelle deflujieurs
Jecescorpujèule., qui composent
rtt.vtJCm1l "' om-mye par exemple, la forme d'urn--emaison
n'etf autre chose
que cette ftrudture qui le
forme de l'union & de l'arrangement
convenable des
matériaux dont on la bâtir.
Et de cettemanière il'.cÍt
clairque lagenerationde toutes
ces choses ne confifie
non plus que dans taffimblage
que la na«tureIfait de ces fM- diierfespartiesqu'elleuniten- j
semblefour enfaire unmême
corps: comme à lopposite,
la corruprion n'est rien autre
chose que 14 diffilution
& laseparation de ces mêmes
parties,-que lagénération avoit
assemblées;comme on le fait
voir clairement parune experiencecurieule
du vitriol
diûile dans le fourneau de
réverbere. Car après en
Ravoir tiré d'abord un phleg:.
me presque insipide, & enfuite
une liqueur fortace-
; teuse, il ne restera plus au [fond qu'une terre d'un beau [rouge couleur de poùrprë.
I Mais si vous versez vos deux
j[ liqueurs sur cette rerre,vous
l verrez aussitôt vôtre vitriol
; réproduit
, avec sa même
couleur 1V presque son même
poids, parce qu'il a peu
,
d'esprit & dé fou phre volatile.
Enfinnôtre auteur prei
tend que les principesde cetteunion
des parties des corps.
naturels
,
dans laquelle il
veut que la génération cohj
Me, ne font autre chose,
que lesesprits & lesfels auf- j
quels il attribuë tant de
force,qu'il tient que là Oùi
les mêmes efprirs & les memes
fels se trouvent, ils ne
manquent presque jamais
de produire à peu prés la.
Inêmeconfiguratron,quél-
1
,.r que peu ae diipoirm.on qu"r1ry--
rencontrent assezsouvent
dans lamatiere sur laquelle
ils agissent. Onenrapporte
ici deux preuves, qui fèroient
bien considerables &
bien cotivaincantessi elles
étoient bien averées.La premiere
est que la terre cremt
pée&imbuëdecefanggâté
•5 & de ces humeurs infedtes
& corrompues qui forcent
des corps de ces malheureux
qu'on laisse arrachez
aux gibets
,
après leur avoir
fait souffrir le dernier supplice
; que cette terre3 disje,
ainsi detrempée prociuic
une herbe, dont la racine
exprime beaucoup mieux la
forme du corps humain>
que ne fait la racine dela
mandragore. L'autre experience
qu'on alléguéest que
tous les raiforts, qui venoient
dans un jardin,&où
l'on avoitautrefois enterré
un grand nombre de personnes,
avoient la figure de
la moitié du corps humain,
mais si bien representée,
qu'il ne se pouvoir rien de
plus rèssemblant.Cesèxemples
qui quadrent si bien
aux principes de nôtre auteur,
lui donnent occasion
depenser qu'il y a bien plus
de raison qu'on ne s'imagine
dans les regles des
physionomistes, qui tiennent
pour une de leurs grandes
maximes, que les hommes
ont d'ordinaire les inclina..
tions des animaux avec leC
quels ils ont du rapport
dans les traits & dans la forme
exterieure ; parce qu'il
paroît par là qu'ils ont à peu
prés les mêmes esprits, &
qu'il y a bien de l'affinité
entre les particules qui les
composent.
Il nest pas mal aisé de
juger, après tout ce qu'on
vient de voir, ce que nôtre
auteur doit répondre à la
question qu'on a proposée;
car. puis qu'il fait consister
la générationdans un assemblage,&
dans une union
de plusieurs parties pour ne
composer qu'un seul tour,
on voit bien que pour raisonner
consequemment sur
ses principes, il ne peut pas
dire que le feu, qui en embrasant
une matiere combustible,
ne fait qu'en dissoudre
& en separer les parties
,
produise une nouvelle
substance. Il pose donc ici en
fait que tout ceque l'embrasement
peut faire, ne peur
être toutau plus que de prd."
duire de nouvelles qualitez.Et
pour faire voir qu'en celail
ne fait que suivre le sentiment
des anciens, il allègue
là dessus un paisage d'Ari.
stote, qui ne sçauroit être
plus exprés pour,lui quoy
il joint ces beaux vers d'Oise
, où il dit que la garde
du feu sacré avoit été donnée
à des vierges,pourmarquer
,
s'il faut ainsi dire, la
virginité de cet element,par
lequel rien n'est produit.
Comme l'auteur est per.
suadé qu'il n'y a rien de plus
essentiel au feu que la chalent,
il en parle à fond dans
la cinquièmedissertation,
où il s'accache à en expliquerexactement
la nature:,
mais comme pour y bien
reüssir sélon ses principes, il
se trouve obligé de faire
comprendre comment il
conçoit que les corps qui enj
font susceptibles sont composez,
il entre d'abord dans1
un examen fort particulier j
de cette matiere, Bien qu'ilJ
rejette tout à fait lesatomes
d'Epicure, il ne laisse pas de
croire que ces corpuscules,
dont nous avons vû qu'il
composetous lescorps îèn- :';.' fibles,
sibles;sontsi minces, qu'on
n'en peut assez concevoir la
petitesse. Ce qui l'en a convaincu,
c'est,dit- il, quayanc
regardeau travers d'un microscope
de petits grains de
fromage vermoulu
,
qu'il
avoit exposez au soleil, ily
apperçut unefourmilliere
de petits vers, quel'oeil n'auroit
jamais sçû découvrir
sans l'aide de cet instrument.
Il remarque d'ailleurs
qu'on en a observé quelquefois
une grandequantité de
la même petitesse dans le
sang qu'on a tiré à des personnesqui
avoient lafievre,
& qu'il se trouvoir qu'ils
avoient la têtenoire:c'etoit
un signe que la fievre étoit
maligne & dangereuse.Nô- i
tre auteur croiroit assez-que
ces fortes de vers pourroient
devoir leur origineà
ces petits animaux queVarron
dit quisont dans l'air
mais quiyfont imperceptibles
& qui entrant dans nos corps
par la bouche & par les nari
nés,yengendrent desmaladies
difficiles & perilleuses. Mais,
pour revenir à ses corpuscules,
il tient que comme ils.
ne peuvent pas être tous de
la même grandeur) il ne se
peut pas non plus qu'ils
Soient tous de la même sigure;
Chaque espece, selon
lui, a la sienne particulière,
comme on le voit dans les
cristaux, dont chacun a ses
parties configurées d'une
certaine manière qui lui est
propre ; & ç'est de là qu'il
pretend que vient la diversitéqu'on
remarque dans la
contexture des corps, dont
les uns sont plus rares, les
autres plus ferrez, & les autresd'une
consistance mediocre.
Mij
4 Celaposé, ilvientà montrer
ce que c'est que la chaleur,
& commentilconçoit
qu'elle, se produit dans les
corps quisechauffent. Il
n'est pas dusentiment de
ceux qui en font un pur accident.
Il croit quelle envelope
necessairement dans
sa notion une substance,
puisqu'elleconsille dans
l'agitation de ces petitsfeux
ou esprits ignez, qui sont
renfermez dans les corps
chauds; ou pour mieux dire,
qu'elle n'estaucrechose que
ces mêmes feux ou esprits
violemment agitez. En effet il
n'a pas de peine à ren d re raison
par ce principe de la plupart
des effets qu'on attribuë a la
chaleur, comme de secher les
draps mouillez,d'amolir la cire,
de durcir la bouë, de faire évanouir
l'esprit de vin qui fera
dans une phiole ouverte,&c. Il
fait voir que tout cela se fait par
le mouvement & par l'agitation
violente de ces petits feuxou efpritsdont
les lieux où toutes
ces choses arrivent setrouvent
remplis. Il ne trouve pasplus de
difficulté à expliquer la maniere
dont la chaleur s'engendre
en de certains corps, &
pourquoy il y en a qui n'en font
point susceptibles. Il dit que les
premiers s'échauffent aisément,
parce qu'a yant une contexture
rare, ils reçoivent facilemenr
dans leurs pores les petits feux
étrangers qui réveillent ceux
qu'ils avoient déja dans leur
propre sein,ouils étoient comme
assoupis,& qui les remuent
& lesagitent: mais que les autres
ne s'échauffent pas, parce
que leurs pores ne font pas faits
d'une maniéré propre à admettre
ces petits feux ou esprits.
C'est de là que vient, selon lui,
que le ru bis soutient la chaleur
du feu jusques à 5. jours, & le
diamantjusques à 9 ;ce qui a
fait que les Grecs lui ont donne
le nom d'adamas, qui signifie
invincible.C'est encore, à son
avis,ce qui fait que la pierre aprelié
chalazia, parce qu'elle a la
couleur & la figure de la grêle,
conserve sa froideur dansJe
feu? comme au contraire ce,le
queles-Grecsont appelléeapiyilos,
c'etf à dire irrefrigerable),
étant une fois échauffée, conserve
toute sa chaleur pendant
plusieurs jours.
'-Il ne faut pas oublier que nôtre
auteur ne croit pas que le
froid soit une simple privation
dechaleur, comme la plupart
dumon deselepersuade. Il pretend
que comme la chaleur
consiste dans desesprits de nature
ignée ,
le froid consiste à
l'oppalire dans des esprits froids
églacez.Etil croit le prouver
invinciblement par deux experiences.
La premiere est le froid
insupportable que l'Atlasdela
Chine rapporte qu'il fait toûjours
sur une montagne de la
Prov ince Quan^ft, qui pour cet
te raison est appellée la montagnefroide
;car quoy qu'elle soit
dans la zone torride, elle est
pourtant inhabitable par l'extreme
rigueur du froid. L'autre
est la vertu qu'a la pierre nommée
æmatite, d'empêcher l'eau
de boüillir,sion la jette dans le
vaisseau; & celle qn'elle a d'arrêter
le fang, lors qu'une trop
grande fermentation le fait sortir
hors des veines. L'auteur
croit qu'une même cause produit
l'un & l'autre de ces effets,
& il ne conçoit pas qu'on
puisse attribuer ni le froid de
cette montagne,ni la vertu de
cette pierre, qu'à des exhalaisons
froides,qui arrêtent l'action
& le mouvement des esprits
chauds.
si utiles & si dangereux, &
j'en ai déja parlé tant de
fois superficiellement, que
4 je croy ne pouvoir mieux
faire, pourinstruire & pour
amuser le lecteur, que lui
donner un extrait des dissertationssuivantes,
oùil
verra un tableau assez exact
des qualitez & des proprietez
de cet élement.
h) ;>-t'ï
J, Traité du feu, dans lequel on établît les vraisfondemens
n' de la Physique.
-'u-j
,
Il y a si peu de choses qui
puissent passer pour certaines
& pour confiantes dans
la Physique, qu'il n'ya
rien de plus aisé que dese
tromper, lors qu'on entreprend
de prononcer decisivement
sur les matierés qui
s'y traitent. D'ailleurs,les
methodes Ics- plus regulieres
ne fonc pas toûjours les
meilleures; elles ont fouvent
beaucoup plus de
montre que d'utilité solide,
& l'on peut dire qu'en bien
des rencontres elles servent
bien plus à gêner l'esprit,
qu'à le conduire droit à la
verité. C'a été pour prendre
uneroute qui l'exposât
moins àces deux inconve-
,
niens, que le P. C. a donné
la formed'entretiens à cet
ouvrage, parce qu9ona accoûtumé
de bannir de tout
ce qui porte ce titrele ton
decisif de Docteur,aavec
ce faste & cet apparat qui
l'accompagne d'ordinaire,
&. que du reste on n'y reçoit
point les regularitez importunes,
ni les formalitez
gênantes des manieres de
l'Ecole. Ainsi les
13.
dissertarions
dont il a composé son
livre, sontautant de ron'Ver.
sations libres& sçavantes,
où il fait entrer trois personnes
d'un rare merire &
d'une fort grande érudition;
à peu prés comme Ciceron
introduit sesillustres
amis parlansdans ses ouvrages
de Philosophie. Je tjU
cherai d'informer les lecteurs
de ce qui s'y trouve
de plus remarquable 8; de
principal: mais comme je
suis obligé d'éviter la longueur
des extraits , autant
qu'il me fera possible,
& qu'il feroit difficile de
rendre compte en peu de
mots de 13.dissertations pleines
de choses considerables
&qui font un gros volume,
je me contenterai de donner
ici le précis des 5. premieres,
& je renvoyerai le
reste à un autre mois.
Nôtre auteur entre en
matiere,dans la premiere
dissertation;d'une maniere
agreable -" par une petite
disputequ'il fait naître entre
ses personnages sur cette
question curieuse : Lequel
desdeuxestleplus excellent &
le plus utile, de l'eau ou du
feu ? C'est pour se donner
jour à faire l'élogedu sujet
qu'il veut traiter, en montrant
l'avantage qu'a le feu
sur tous les corps simples,
dont il pretend qu'il est le
plusnoble à bien des égards.
On ne pouvoit gueres
mieuxtourner la chose qu'-
en laprenant de cette maniere
,
ni faire voir un plus
beau mélange de la belle
litterature avec la Philosophie,
que celui que nous
donne ici le P.C. On allegue
• de part & d'autre ce qu'on
pouvoir dire de plus curieux
à l'avantage du feu ou de
l'eau. On cite les autoritez
des Poëtes & des Philosophes,
on produit le celebre
passage de Pindare, qui des
le commencement de ses
Odes dit qu'il n'y a rien de
meilleur que l'eau. Et on lui
opposePlutarque,qui ayant
traité la même question
qu'on a gite ici, l'adecidée
en faveur du feu. On peut
bien croire qu'on n'oublie
pas là-dessus ni Vulcain, qui
étoit du nombre des grandes
Divinitez Payennes, ni le
feusucré,qui étoit l'objet de
la devotion des Perfes
; ni
l'adoration que les Chaldéens
rendoient à cet element,
qu'ils, consideroient
comme leur supreme Divinité.
Cependant comme le
feu ne craint rien si fort que
l'eau,on raconte ici une as
fez plaisante avanture,tirée
de Ruffln & de Suidas, oùles
choses ne tournerent pas à
l'avantage du Dieu de Chaldée.
Ceux de cette nation
vantoient leur Divinité,
comme la plus puissante de
toutes; & quelques-uns de
leurs Prêtres, courans de
Province enProvince,défioient
au combat tous les
f
autresDieux. Maiscomme
ceux-ci, de que lque matierequ'ils
fussent, de bois,
, ou d'airain ,ou d'argent
ou d'or, ne pouvoientresister
au feu, qui en venoit
-
enfin à bout,il le trouva un
Prêtre d'Egypte qui arrêta
de cette maniere les triomphes
de ce Dieu, qui en avoit
dévoré tant d'autres. Il
prit une cruche percée de
quantité de petits trous,
qu'il boucha avec de la cire,
mais si proprement, qu'on
n'en pouvoitrien connoître
; & après avoir rempli
cette cruche d'eau, & avoir
mis au dessus la tête de son
Idole qu'on nommoit Canope,
il accepta le défi. Les
Chaldéens mirent aussitôt
le feu à l'entour de l'Idôle:
mais la cire se fondant au
feu, ouvrit incontinent le
passage à l'eau, qui sortant
de tous cotez par les petits
trous ,qu'on ne voyoit pas,
éteignit le feu, & faisant
triompher Canope, fit avoüer
aux Chaldéens que.
le Dieu des Egyptiensétoit
le plus fort. Avec tout cela,
comme il estaussi naturel
au feu de consumerl'eau,
qu'ill'est à l'eau d'éteindre
le feu, on ne peut nier que
celui-ci ne se dédommage
quelquefois au double, parce
qu'il gagne à son tour
sur l'autre.Mais pourétablir
sur quelque chose de c'on.,
fiderable l'avantage qu'on
donne aufeu,on remarque
ici que si on recüeille les
suffrages des Philolophes,
on trouvera que le plus
grand nombre est celui de
ceux qui ont mis le feuen
tre les principes deschoses;
ce qui vient sans douce de
l'impression nature lle qu'on
a de ion excellence & de
son utilité. Qu'au reste ce
n'est pas un foible argument
pour nous en persuader,
que de voir qu'entre »
tant de sortes d'animauxil
n'y ait que l'homme à qui
a nature en ait proprement
accordé l'usage : ce qui va
siloin
,
selon la pensée de
Lactance
,
qu'il semble que
Dieu ait voulu assurer les
hommes de leur immortalité
, en leur abandonnant
l'usage & la disposition de
cet element, qui est celui de
la lumiere & de la vie. Que
quoy qu'il en soit, lavie est
un feu, & que si le feu en
est le symbole,il en est aussi
le soûtien, & leplus necessaire
instrument, puis qu'-
après tout il n'est pas possïble
ni de cuire les alimens,
ni de préparer les remedes,
ni de se prévaloir de cent
autres choses necessaires à
la vie, sans le secours de
cet element. Que d'ailleurs
quand on pourroit vivre
sans l'usage du feu,la vie
ne sçauroit être qu'extremement
miserable, privée
de tous les avantages qu'on
tire des sciences & des arts,
& plongée dans une obscurité
qui lui ôteroit tout ce
qu'elle a dagreable. Qu'en
un mot on est redevable de
toutes lescommoditez, ôc
de tous les ornemens de la
: vie au feu ,qui eR: d'une utiflité
si étenduë & si gene- rale, qu'outre le secours
qu'il prête à la vûé au milieu
de l'obscurité , il supplée
quelquefois à l'usage
[. de la parole, en donnant
aux amis éloignez de quelques
lieuës le moyen de se
pouvoir parler la nuit par
des flambeauxallumez. Enl'
fin, après avoir remarqué
que les effets mêmequ'on
lui reproche sont des preuves
de noblesse & des marques
de grandeur,on observe
quetousles peuples
l'ont prispour le symbole
de la puissance, & pourle
caractere de la majesté:d'où
vient qu'on le portoit autrefois
devant les Rois de
l'Asie, & devant les Empereurs
Romains. Et pour
achever par un endroitqui
en couronne dignementl'éloge,
on ajoûte qu'il n'y a
point eu de nation dans le
monde qui ne l'ait regardé
non feulement comme un
excellent present duCiel,
mais encore comme une illustre*
imagerdela-Divinité. Que
rQue de là est venu qu'on Fa
employé dans toutes les Religious,&
que ce n'ont point
été les Chaldéens feu ls, ni
les Poëtes, ni les Philosophesqui
ont dit que Dieu
est unfeu : mais que l'Ecriture
sainte a parlélemême
langage, & n'a pas faitdifficulté
de nous assurer que
Dieu estunfeuconsumant. 1
Aprés ces préliminaires,
il passe dans le deuxiéme
entretien à l'explication de
lanature du feu. Lefeu, sef!
on" lui, est un esprit qui soy a en unechaleur vive brûlante.
Mais il faut sçavoir
que par cet esprit il n'entend
pas ce que les Chymistes
appellent de ce nom &
qu'ils distinguent par là mêmedavec
leursouphre &
leur mercure. Dans ce que
nôtre auteur nomme ainsi,
il n'est pas tant question de
larareté dela matiere,ou
'de la legereté, quede la subtilité
& de la sorce:&en
un mot, l'esprit, dans son
sens
,
estune substance tres-déliée&
trés-subtile,très-capablede
s'insinuer&depenetrer
dans les pores de tous les corps.
cr >
Quand donc cette subtilité
se trouve jointe avec la É-lieleur,
& que celle-ci est dars
un degré de force & d'ardeur
considerable, nôtre
auteurpretend quec'estce
qui fait propremenr le feu.
D'où vient qu'il ne fait pas
de difficulté de mettre le
sel aunombredes corpsde
nature ignées parce qu outre
•
qu'il désechetoutes leschop
ses ou il s'attache, & qu'il
consume puissamment les
-
humiditez, on en tire, en
ledistillent,des eaux fortes
qui ont la vertu de dissoudre
les metaux,en bien
moins
,-
de temps quene
sçauroit faire le feu leplus
fort &le plusardentde nos
fourneaux.Au reste; comme,
l'ondistingue diverses
sortes de terres,qui, quoy
qu'ellesconviennent toutes
dans cette nature generale,
qui leur est commune; ne
laissent pas d'être differentes
en espece les unesdes
autres; nôtre aauurteeuurrine j ne
doute pointqu'on ne doive
aussidistinguer diverses sortes
de feux, qui tenant tous
en général de la nature de
cet element , différent entr'eux,
en ce qu'ilssont d'une
vivacité,d'un éclat,d'une
subtilité ,d'une force, Si
d'une activité inégale.Quelquedifferensneanmoins
qu'ils soiênt,ilveutqu'ils se
reduisent tous à deux genres
principaux:les uns, qui
ont,tout enlemble de la lumiere&
de la chaleur &
lesautres qui ont de la chaleur
,mais quin'ont point
de lumiere. Les premiers
sont ceux qu'on nomme
feux par excellence : aussi
l'auteur lesappelle-1-il des
feuxvifs, parce qu'ils renfermenc
une quantité d'esprits
vifs & lumineux, comme
font ceux d'une vive
flamme. Les autres sont des
feux beaucoup moins parfaits:
c'est pourquoyl'auteur
les appelle des feux
morts, parce qu'ils sont composez
d'espritsqui n'ont ni
vivacité, ni clarté, & qu'avec
la vertu de brûler , ils
n'ont pas celle d'eclairer &
de luire. Le poivre, le pyretbre,
l'argent vifprécipité, ôc
generalement tous lescaustiques
renferment des eA
prits de cette espece, & doivent
par cette raison être
mis entre les corps qui tiennent
de la nature du feu. /',
Maiscequ'ilyaicid'aussi
remarquable; & qui pourra
surprendre ceux qui n'aurontpoint
oüi parler du
traité de M. Boyle; deflam-
; mæ ponderabilitate y cest qu'-
excepté le feu celeste & de
la nature de celui des astres,
qu'on veut bien qui soit ler
ger. & capable de s'élever
sen haut, on soûtient que
* tous les autres tendent naturellement
vers le centre,
& qu'ilssontmême plus
pesans que tous les autres
elemens.
La troisiéme dissertation
est employée toute entiere
à soûtenir ce paradoxe,& il
fautavoüerqu'on lui donne
un grand air de vraifemblance
par les preuves qu'-
on apporte pour l'établir.
Par exemple , to.. L'on remarque
que les briques,
qui demeurent long-temps
dans le feu, y deviennent
beaucoup plus pesantes,
quoique l'évaporation de
l'humidité en dûtdiminuer
le
le poids.2°. On rapporte un
grand nombre d'experiences
du traité de M. Boyle,
par lesquelles il paroît que
delachaux vive &, divers
metauxayant été exposez
au feu pendant deuxon
trois heures, ont considerablement
augmenté leur
poids; ce qui ne pouvoit
venir que des particules du
feu qui s'étoientmêlées
avec ces matieres. 3°. Enfin
on soûtient que le lieu prow
pre & naturel de nôtre feu
élémentaire est dans les entrailles
de la terre, levrai
cétre des choses pefanses^
lendrpiçle.plus basde tonné
l'univers, ôcquec'estçefils
central, &: non pas la chaleuo
du soleil,ou la vertu ôdesin-j
lfweçesque1,onattribueau^
astrequi est le véritable
principe de la génération
des métaux, & la veritablq
çausequi produit les sources
des rivieres&des fontaines;
;:
En .effet3il est si peuvrai
que la vertu des astres fQ
false sentirdans- les pro-l
fonds cachotsdes lieux [oûi
terrains, que l'on pose en
fait que dans les plus gran4eschaleurs
de l'Esté,lorfque
le soleil darde ses.rayons
avec plus de force, & qu'ils
donnent sur la terre à
plomb, si Tonveut bienfe
donner la peine d'observer
l'effet qu'ilsyfont, on ne
itrouvera point, je ne dirai
pas quils l'ayent penetrée
de quelque milles, mais feu-,
lement qu'ils l'ayent réchauffée
de quelques pieds
de profondeur. L'auteur
nous apprend quelque cho.
se d'asser remarquable làideflus.
Il dit que tous ceux
qui ont écrit touchant les
mi,nes, au moi,ns tous ceux1
dont il, a lû les ecrits rapportent
constammentque.
la terre est froide vers sa fuperficie;
qu'on çommence
à la trouver un peu rechauf-j
fée, lors qu'on y est defcen,
du plus avant;& qu'ensuite
plus on l'enfonce, plus on
trouve que sa chaleur se forciné,
& qu'elle s'augmente
sensiblement. C'est ce que
témoigné entr'autres J. B.
Adorin dans sa relation de
lotis fubterraneis, où il rapporte,
qu'ayant eu la curiofit-R
dedépendre dans les minesd'or
de Hongrie au mots deJuillet,
il avoit trouvé la région superieure
de la terre extremement
froide jusques environ 480.
pieds : mais quétantdescendu
plusbas, ily aVoit trouvé de
la chaleur, qui saugmentait de
relie forte a mesure qu'il s'avançoit
vers lefond,que dans
l'endroit ou étoient les ouvriers
,
ils ne poyvoient travailler
que nuds. Et l'onremarque
qu'il en est de même
dans routes les autres
mines de ce pays-là.
La quatrième -diflertation
roule
sur cette quêstion
assez curieufc
: Si lorfqueï
quelque choje est brûUe>ils'en-t
gendre une nouvellefubflancef1
Pour la resoudre clairemenr,
l'auteurexplique fort,
au long toute la nature de la
génération des substances
inanimées. Il ne reconnoit^
aucune matierepremière proprement
airifi nommée', ôc ilsoûtientfqu'il n'yen ai
point d'autre que divers
corpuscules (impies, qui onci
chacun leur figure, leur!
grandeur, & leurs autre,
proprietez; de
maniéréquel
ne dépendant nullement lest
uns des-autres, ils peuvent
également [ublifler & ensemble,
& fcparez
:
après
cela on conçoit aflfez que,
félon cet auteur, laforme des
chosesinanimées ne doit consister
que dans la conformation,
qui refaite de l'union legitimé&
naturelle deflujieurs
Jecescorpujèule., qui composent
rtt.vtJCm1l "' om-mye par exemple, la forme d'urn--emaison
n'etf autre chose
que cette ftrudture qui le
forme de l'union & de l'arrangement
convenable des
matériaux dont on la bâtir.
Et de cettemanière il'.cÍt
clairque lagenerationde toutes
ces choses ne confifie
non plus que dans taffimblage
que la na«tureIfait de ces fM- diierfespartiesqu'elleuniten- j
semblefour enfaire unmême
corps: comme à lopposite,
la corruprion n'est rien autre
chose que 14 diffilution
& laseparation de ces mêmes
parties,-que lagénération avoit
assemblées;comme on le fait
voir clairement parune experiencecurieule
du vitriol
diûile dans le fourneau de
réverbere. Car après en
Ravoir tiré d'abord un phleg:.
me presque insipide, & enfuite
une liqueur fortace-
; teuse, il ne restera plus au [fond qu'une terre d'un beau [rouge couleur de poùrprë.
I Mais si vous versez vos deux
j[ liqueurs sur cette rerre,vous
l verrez aussitôt vôtre vitriol
; réproduit
, avec sa même
couleur 1V presque son même
poids, parce qu'il a peu
,
d'esprit & dé fou phre volatile.
Enfinnôtre auteur prei
tend que les principesde cetteunion
des parties des corps.
naturels
,
dans laquelle il
veut que la génération cohj
Me, ne font autre chose,
que lesesprits & lesfels auf- j
quels il attribuë tant de
force,qu'il tient que là Oùi
les mêmes efprirs & les memes
fels se trouvent, ils ne
manquent presque jamais
de produire à peu prés la.
Inêmeconfiguratron,quél-
1
,.r que peu ae diipoirm.on qu"r1ry--
rencontrent assezsouvent
dans lamatiere sur laquelle
ils agissent. Onenrapporte
ici deux preuves, qui fèroient
bien considerables &
bien cotivaincantessi elles
étoient bien averées.La premiere
est que la terre cremt
pée&imbuëdecefanggâté
•5 & de ces humeurs infedtes
& corrompues qui forcent
des corps de ces malheureux
qu'on laisse arrachez
aux gibets
,
après leur avoir
fait souffrir le dernier supplice
; que cette terre3 disje,
ainsi detrempée prociuic
une herbe, dont la racine
exprime beaucoup mieux la
forme du corps humain>
que ne fait la racine dela
mandragore. L'autre experience
qu'on alléguéest que
tous les raiforts, qui venoient
dans un jardin,&où
l'on avoitautrefois enterré
un grand nombre de personnes,
avoient la figure de
la moitié du corps humain,
mais si bien representée,
qu'il ne se pouvoir rien de
plus rèssemblant.Cesèxemples
qui quadrent si bien
aux principes de nôtre auteur,
lui donnent occasion
depenser qu'il y a bien plus
de raison qu'on ne s'imagine
dans les regles des
physionomistes, qui tiennent
pour une de leurs grandes
maximes, que les hommes
ont d'ordinaire les inclina..
tions des animaux avec leC
quels ils ont du rapport
dans les traits & dans la forme
exterieure ; parce qu'il
paroît par là qu'ils ont à peu
prés les mêmes esprits, &
qu'il y a bien de l'affinité
entre les particules qui les
composent.
Il nest pas mal aisé de
juger, après tout ce qu'on
vient de voir, ce que nôtre
auteur doit répondre à la
question qu'on a proposée;
car. puis qu'il fait consister
la générationdans un assemblage,&
dans une union
de plusieurs parties pour ne
composer qu'un seul tour,
on voit bien que pour raisonner
consequemment sur
ses principes, il ne peut pas
dire que le feu, qui en embrasant
une matiere combustible,
ne fait qu'en dissoudre
& en separer les parties
,
produise une nouvelle
substance. Il pose donc ici en
fait que tout ceque l'embrasement
peut faire, ne peur
être toutau plus que de prd."
duire de nouvelles qualitez.Et
pour faire voir qu'en celail
ne fait que suivre le sentiment
des anciens, il allègue
là dessus un paisage d'Ari.
stote, qui ne sçauroit être
plus exprés pour,lui quoy
il joint ces beaux vers d'Oise
, où il dit que la garde
du feu sacré avoit été donnée
à des vierges,pourmarquer
,
s'il faut ainsi dire, la
virginité de cet element,par
lequel rien n'est produit.
Comme l'auteur est per.
suadé qu'il n'y a rien de plus
essentiel au feu que la chalent,
il en parle à fond dans
la cinquièmedissertation,
où il s'accache à en expliquerexactement
la nature:,
mais comme pour y bien
reüssir sélon ses principes, il
se trouve obligé de faire
comprendre comment il
conçoit que les corps qui enj
font susceptibles sont composez,
il entre d'abord dans1
un examen fort particulier j
de cette matiere, Bien qu'ilJ
rejette tout à fait lesatomes
d'Epicure, il ne laisse pas de
croire que ces corpuscules,
dont nous avons vû qu'il
composetous lescorps îèn- :';.' fibles,
sibles;sontsi minces, qu'on
n'en peut assez concevoir la
petitesse. Ce qui l'en a convaincu,
c'est,dit- il, quayanc
regardeau travers d'un microscope
de petits grains de
fromage vermoulu
,
qu'il
avoit exposez au soleil, ily
apperçut unefourmilliere
de petits vers, quel'oeil n'auroit
jamais sçû découvrir
sans l'aide de cet instrument.
Il remarque d'ailleurs
qu'on en a observé quelquefois
une grandequantité de
la même petitesse dans le
sang qu'on a tiré à des personnesqui
avoient lafievre,
& qu'il se trouvoir qu'ils
avoient la têtenoire:c'etoit
un signe que la fievre étoit
maligne & dangereuse.Nô- i
tre auteur croiroit assez-que
ces fortes de vers pourroient
devoir leur origineà
ces petits animaux queVarron
dit quisont dans l'air
mais quiyfont imperceptibles
& qui entrant dans nos corps
par la bouche & par les nari
nés,yengendrent desmaladies
difficiles & perilleuses. Mais,
pour revenir à ses corpuscules,
il tient que comme ils.
ne peuvent pas être tous de
la même grandeur) il ne se
peut pas non plus qu'ils
Soient tous de la même sigure;
Chaque espece, selon
lui, a la sienne particulière,
comme on le voit dans les
cristaux, dont chacun a ses
parties configurées d'une
certaine manière qui lui est
propre ; & ç'est de là qu'il
pretend que vient la diversitéqu'on
remarque dans la
contexture des corps, dont
les uns sont plus rares, les
autres plus ferrez, & les autresd'une
consistance mediocre.
Mij
4 Celaposé, ilvientà montrer
ce que c'est que la chaleur,
& commentilconçoit
qu'elle, se produit dans les
corps quisechauffent. Il
n'est pas dusentiment de
ceux qui en font un pur accident.
Il croit quelle envelope
necessairement dans
sa notion une substance,
puisqu'elleconsille dans
l'agitation de ces petitsfeux
ou esprits ignez, qui sont
renfermez dans les corps
chauds; ou pour mieux dire,
qu'elle n'estaucrechose que
ces mêmes feux ou esprits
violemment agitez. En effet il
n'a pas de peine à ren d re raison
par ce principe de la plupart
des effets qu'on attribuë a la
chaleur, comme de secher les
draps mouillez,d'amolir la cire,
de durcir la bouë, de faire évanouir
l'esprit de vin qui fera
dans une phiole ouverte,&c. Il
fait voir que tout cela se fait par
le mouvement & par l'agitation
violente de ces petits feuxou efpritsdont
les lieux où toutes
ces choses arrivent setrouvent
remplis. Il ne trouve pasplus de
difficulté à expliquer la maniere
dont la chaleur s'engendre
en de certains corps, &
pourquoy il y en a qui n'en font
point susceptibles. Il dit que les
premiers s'échauffent aisément,
parce qu'a yant une contexture
rare, ils reçoivent facilemenr
dans leurs pores les petits feux
étrangers qui réveillent ceux
qu'ils avoient déja dans leur
propre sein,ouils étoient comme
assoupis,& qui les remuent
& lesagitent: mais que les autres
ne s'échauffent pas, parce
que leurs pores ne font pas faits
d'une maniéré propre à admettre
ces petits feux ou esprits.
C'est de là que vient, selon lui,
que le ru bis soutient la chaleur
du feu jusques à 5. jours, & le
diamantjusques à 9 ;ce qui a
fait que les Grecs lui ont donne
le nom d'adamas, qui signifie
invincible.C'est encore, à son
avis,ce qui fait que la pierre aprelié
chalazia, parce qu'elle a la
couleur & la figure de la grêle,
conserve sa froideur dansJe
feu? comme au contraire ce,le
queles-Grecsont appelléeapiyilos,
c'etf à dire irrefrigerable),
étant une fois échauffée, conserve
toute sa chaleur pendant
plusieurs jours.
'-Il ne faut pas oublier que nôtre
auteur ne croit pas que le
froid soit une simple privation
dechaleur, comme la plupart
dumon deselepersuade. Il pretend
que comme la chaleur
consiste dans desesprits de nature
ignée ,
le froid consiste à
l'oppalire dans des esprits froids
églacez.Etil croit le prouver
invinciblement par deux experiences.
La premiere est le froid
insupportable que l'Atlasdela
Chine rapporte qu'il fait toûjours
sur une montagne de la
Prov ince Quan^ft, qui pour cet
te raison est appellée la montagnefroide
;car quoy qu'elle soit
dans la zone torride, elle est
pourtant inhabitable par l'extreme
rigueur du froid. L'autre
est la vertu qu'a la pierre nommée
æmatite, d'empêcher l'eau
de boüillir,sion la jette dans le
vaisseau; & celle qn'elle a d'arrêter
le fang, lors qu'une trop
grande fermentation le fait sortir
hors des veines. L'auteur
croit qu'une même cause produit
l'un & l'autre de ces effets,
& il ne conçoit pas qu'on
puisse attribuer ni le froid de
cette montagne,ni la vertu de
cette pierre, qu'à des exhalaisons
froides,qui arrêtent l'action
& le mouvement des esprits
chauds.
Fermer
Résumé : Traité du feu, dans lequel on établit les vrais fondemens de la Physique.
Le texte, rédigé par le P. C., explore la nature et les propriétés du feu, élément à la fois admirable et dangereux. L'auteur choisit une structure d'entretiens pour éviter un ton trop formel. Il commence par discuter de la supériorité du feu sur l'eau, le considérant comme le plus noble des éléments, essentiel à la vie et aux arts. Le feu est décrit comme un esprit subtil et brûlant, capable de pénétrer tous les corps. L'auteur distingue deux types de feu : les feux vifs, qui possèdent lumière et chaleur, et les feux morts, qui n'ont que la chaleur. Il soutient que, contrairement au feu céleste, tous les autres feux tendent vers le centre de la terre et sont plus pesants que les autres éléments. La troisième dissertation affirme que le feu élémentaire se trouve dans les entrailles de la terre, et non dans la chaleur du soleil ou la vertu des astres. Le texte aborde également des observations et théories scientifiques sur la chaleur, le froid et la génération des substances inanimées. Dans les mines, la chaleur augmente avec la profondeur, rendant le travail des ouvriers difficile. La quatrième dissertation explore la question de savoir si une substance brûlée engendre une nouvelle substance. L'auteur explique que les substances inanimées sont composées de divers corpuscules ayant des propriétés spécifiques. La forme des choses inanimées résulte de l'arrangement naturel de ces corpuscules. Par exemple, la forme d'une maison dépend de la structure et de l'arrangement de ses matériaux. La génération des substances consiste en l'assemblage de différentes parties, tandis que la corruption est la séparation de ces mêmes parties. Une expérience avec du vitriol illustre ce processus : en chauffant le vitriol, on obtient d'abord un phlegme insipide, puis une liqueur astringente, et enfin une terre rouge. En mélangeant les deux liquides avec la terre, le vitriol se reforme. L'auteur affirme que les principes de l'union des parties des corps naturels, impliqués dans la génération, sont les esprits et les sels. Il cite des exemples comme la croissance d'une herbe à partir de terre imbibée de fluides humains et la forme humaine des raiforts poussant sur des lieux d'enterrement. La cinquième dissertation examine la nature du feu et de la chaleur. L'auteur rejette les atomes d'Épicure mais croit en l'existence de corpuscules extrêmement petits, observables au microscope et présents dans divers phénomènes, comme la fièvre. La chaleur est due à l'agitation de petits feux ou esprits ignés dans les corps chauds. L'auteur distingue les corps susceptibles de s'échauffer de ceux qui ne le sont pas, en fonction de leur structure poreuse. Enfin, il ne considère pas le froid comme une simple privation de chaleur, mais comme la présence d'esprits froids, illustrée par des exemples comme le froid extrême sur une montagne en Chine et les propriétés de la pierre hématite.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 2572-2580
RÉFLEXIONS sur l'explication Physique, donnée par M. Capperon, ancien Doyen de S. Maixent, de l'Akousmate d'Ansacq, inserée dans le Mercure de France, du mois d'Aoust 1731.
Début :
Je n'aurois eu garde de hazarder une explication Physique de l'Akousmate [...]
Mots clefs :
Explication physique, Ansacq, Témérité, tintamarre, Colonnes d'air, Fermentation froide, Liquide, Substance
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : RÉFLEXIONS sur l'explication Physique, donnée par M. Capperon, ancien Doyen de S. Maixent, de l'Akousmate d'Ansacq, inserée dans le Mercure de France, du mois d'Aoust 1731.
RÉFLEXIONS sur l'explication Physique
,
donnée
par M. Capperon , ancien
Doyen de S. Maixent , de lAkousmate
d'Ansacq , inserée dans le Mercure de
France , du mois d'Aoust 1731.
E n'aurois eu garde de hazarder une
explication Physique de l'Akousmate
d'Ansacq , si j'eusse sçu que dans le même
temps que j'écrivois , M. Capperon
avoit la plume à la main pour traiter la
la même matiere.Concourir avec une personne
qui a produit à la République des
Lettres , tant de coups de maître ; c'auroit
été assurément une témérité à un apprentif
Physicien. Mais puisque la chose est
faite
NOVEMBRE. 1731 .
2573
faite , j'ai tout lieu de m'en consoler par
l'union et la conformité de nos sentimens.
Nous confinons , en effet l'un et l'autre
le tintamare d'Ansacq dans une nuée 3
nous disons l'un et l'autre que la rarefaction
ou fermentation d'une matiere concentrée
dans quelque concavité de la nuée,
et qui forçant sa prison , frape les colomnes
d'air voisines , est la cause des sons ';
enfin nous faisons l'un et l'autre dépendre
la variété de ces sons des differentes
manieres dont cette matiere s'échapera de
l'endroit d'où elle sort.
Nos explications ne different donc que
dans le plus ou le moins d'étenduë; peutêtre
que ce sçavant Physicien a crû les
principes Physiques si intelligibles qu'il
étoit inutile de les éclaircir davantage
du moins en cela a- t- il jugé des autres par
lui- même ; peut-être aussi , plutôt par
une prolixité trop ordinaire aux jeunes
gens , que par necessité , ai - je conduit
trop loin mes réfléxions : C'est au Lecteur
à en juger.
Il me reste neanmoins quelques scrupules
sur l'explication de M. Capperon.
1º. Je confesse avec sincerité que je ne
comprens pas bien ce que c'est que fermentation
froide. J'ai toujours crû que la
chaleur étoit le principe de la fermentation
2574 MERCURE DE FRANCE
tion , et que la violence ou le peu de
sensibilité qu'on y éprouve , n'avoit d'autre
cause que la difference du dégré de
chaleur,
2º. La cause que donne M. Capperon
de la fermentation m'embarrasse.» La ma-
» tiere subtile ( dit- il ) agitant continuel-
» lement leurs parties grossieres , poreu-
» ses et tartareuses ( des liquides ) par ses
>> tourbillonemens , elles les pousse si vi-
» vement les uns contre les autres , que
les petites s'introduisent par ce moyen
» dans les pores des plus grossieres . Je
me suis persuadé jusqu'ici que
les parties
des fluides n'avoient point de pores , que
la fluidité ne consistoit que dans un ar.
rangement de parties tres - délicates , tresfléxibles
et un peu longues , toutes contigues
ou couchées les unes sur les autres ,
sans y être adherantes ; en sorte que la
matiere subtile ait passage entre chaque
partie.
3°. Ces termes de M. Capperon , qui
se trouvent à la page 1850. » Dans les va-
» peurs qui s'élevent en l'air , il y en a
» qui emportent avec elles quantité de
parties simplement terrestres , qui con-
» tiennent aussi de l'air , et quantité d'au
» tres parties purement salines . Ces termes
, dis-je , jettent dans mon esprit une
cer-
14
NOVEMBRE. 1731. 2575
certaine confusion sur la nature des vapeurs
et de l'air. Pour dissiper tous ces
scrupules et pour me desabuser de mes
erreurs Phylosophiques , je proposerai
trois réfléxions ; j'attens de la politesse.de
M. Capperon qu'il voudra bien se donner
la peine d'y répondre s'il les trouve rai
sonnables.
PREMIERE REFLEXION.
De l'idée que nous donne M. Cappeton
de la fermentation , naissent dans l'esprit
trois conséquences , que l'expérience
contredit également.
A
9
S'il s'y peut trouver des fermentations
froides , et qu'on puisse les attribuer aux
liqueurs et à presque tous les Corps que
nous voyons capables de fermentation ;
il s'ensuivra qu'en quelque situation que
soient ces corps et en toute saison , ils seront
capables de la même fermentation
et qu'ils devront conserver ce même dégré
de froid qu'ils ont hors de ces momens
de fermentation , parce qu'ils contiendront
en eux - mêmes , et toujours ,
leur ferment , qui sera indépendant de
toute autre cause , et que la matiere subtile
roulera sans interruption ou dans leurs
pores ou entre leurs parties. Premiere
consequence,
>
Si
2576 MERCURE DE FRANCE
Si la fermentation n'avoit pour cause
que l'agitation des parties , occasionnée
par la matiere subtile, cette agitation étant
continuelle , suivant le principe même de
M. Capperon , il s'ensuivroit que cette
fermentation arriveroit aussi-bien dans un
vin fait , &c. dans un vin nouveau ;
que
et qu'elle devroit être continuelle. Seconde
conséquence.
Enfin si tout l'effet de la matiere subtile
n'est qu'une injection , pour ainsi dire ,
des parties les plus fines dans les pores des
plus grossieres , il s'ensuivra une condensation
, une diminution de volume , sans
perte de substance ( cè qui est le contraire
de la fermentation ) , parce qu'un corps
remplit d'autant moins d'espace que ses
pores sont plus serrez , ses intervalles
plus remplis par ses propres parties ; c'est
ainsi qu'une livre de laine à un volume
plus considerable qu'une livre d'or. Troisiéme
conséquence.
SECONDE REFLEXION.
Pour éviter ces trois inconvéniens , il
> me semble qu'on peut assigner trois causes
de la fermentation .
1º. Un mouvement circulaire trop violent
de la matiere subtile , occasionné par
un corps étranger ; précipitation qui ne
1
lui
NOVEMBRE. 1731. 2577
lui permet plus de glisser par ses corps
ordinaires , mais qui la chasse avec confusion
sur la surface même des parties ;
d'où il arrive que secondée par les globules
du second élement qu'elle a frappées ,
elle souleve , émousse , rompt ces parties,
entraîne avec elles toutes celles dont elle
peut se charger , qu'elle écarte ou pousse
au dehors toutes les parties qui lui résistent.
De-là les boüllons , de là le bruit , la
fumée , le tarissement. De-là l'admirable
fermentation du lait et de toutes les autres
liquides , dont les parties grasses et branchues
résistent à l'effort de ces matieres.
De -là la difference de saveur des liqueurs
qui ont boüilli , d'avec les crues , & c.
2. Un entrelassement de parties grasses
et branchuës avec les globules du second
élement, qui en enferme ou en retrécit
les interstices , et précipite par là le
mouvement de la matiere subtile ; précipitation
qui ébranle ces Globules, Ces Globules
frappez unissent leur action avec
celle de la matiere subtile , ils soulevent
ensemble ces parties grasses , les brisent,
chassent au dehors ou précipitent en bas
par leur mouvement orbiculaire les plus
grossieres , qui s'opposoient à leurs passages
,et leur action sera d'autant plus prompre
et plus sensible que l'espace sera plus
E rem- .
2578 MERCURE DE FRANCE
rempli , que les passages seront plus serrez
par ces parties grasses , et qu'elles mêmes
seront plus facilement ébranlées et
moins poreuses . De- là cette fermentation
ne doit durer qu'autant que cet obstacle
subsistera, De-là la douceur de toutes les
liqueurs nouvelles ; de- là leur dégré de
chaleur dans le tems de la fermentation
de -là plus elles ont bouilli , plus elles sont
claires , plus elles sont belles , meilleures
elles sont , et moins ily a de lie , &c,
3º. L'activité de la matiere subtile , qui
poussée par un corps étranger , détache
peu à peu les parties les plus Aéxibles d'un
corps solide , les brise , les émousse , entraine
avec elles les plus déliées , pousse ,
souleve,écarte les autres ; et son action reçoit
son dégré de vélocité , de la maniere
dont le corps étranger agit surelle.En sor,
te même que si ce corps étranger agit trop
violemment , elle enleve les parties les plus
legeres;et chassant les autres les unes dans
les autres , elle condense le corps et le fait
durcir. Tellé est la fermentation qui arrive
dans la pâte de certains fromages. Delà
il est aisé de concevoir pourquoi ces
fermentations sont plus promptes et plus
violentes l'été que l'hyver ; de-la dans
cette derniere saison cès fermentations
n'arriveroient pas , si l'on n'échauffoit la
pâte
NOVEMBRE. 1731 . 2579
pâte , si l'on ne mettoit les fromages dans
une cave chaude , & c.
Je crois,en un mot , qu'on peut par ces
trois causes donner une raison probable
de tous les phénoménes que nous voyons
dans la fermentation , sans qu'il en puisse
résulter aucune absurdité.
que
TROISIEME REFLEXION.
Les Philosophes entendent par ces termes
: Vapeur , Exhalaison , une grande
quantité de Molecules , de petites parties ,
le plus souvent insensibles , qui s'élevent
jusqu'à une hauteur indéterminée. Il est
facile de se convaincre qu'il s'en détache
de toutes sortes de corps , quoiqu'il y ait ,
des corps qui en fournissent de plus faci-)
les à se lier et à s'acrocher. Il n'est question
de
sçavoir comment ces particules s'élevent
, ce qui n'est pas fort difficile à
comprendre , quand on est persuadé
les matieres du premier et du second élement
( et sur tout la premiere ) passent
avec rapidité et continuellement dans les
pores ou intervalles de quelque corps que
ce soit ; or il est impossible qu'en passant
ainsi , ces matieres n'ébranlent,, ne détachent
et n'enlevent avec elles quelques petites
parties , qui ne pourront être plus
grosses ou plutôt même que d'un moin-
Eij dre
que
2580 MERCURE DE FRANCE
dre volume que celles qui les détachent,
Il ne faut réfléchir sur le tarissement
que
de tous les fluides , sur l'alteration de tous
les corps, pour n'en pouvoir douter. Delà
les nuées , de- là le tonnerre et tout son
tintamare , en y joignant mes principes sur
la fermentation .
De cette derniere réfléxion on doit nécessairement
conclure que les parties qui
composent ce qu'on appelle Vapeurs, sont
trop fines pour être poreuses, et pour pou :
voir par conséquent contenir de l'air ,
qu'elles sont elles -mêmes enlevées et contenuës
; d'où il suit qu'elles ne peuvent
enlever une quantité de parties qui contiennent
de l'air , comme le prétend M.
Capperon.
Telles sont les réfléxions dans lesquel
les l'ouvrage de M. Capperon m'a engagé.
Ces réfléxions n'ayant d'autre but
que de m'instruire , d'éclaircir la verité
et de profiter des grandes lumieres de ce
Sçavant, Je l'en fais volontiers le juge,
Lalonat de Soulàines,
,
donnée
par M. Capperon , ancien
Doyen de S. Maixent , de lAkousmate
d'Ansacq , inserée dans le Mercure de
France , du mois d'Aoust 1731.
E n'aurois eu garde de hazarder une
explication Physique de l'Akousmate
d'Ansacq , si j'eusse sçu que dans le même
temps que j'écrivois , M. Capperon
avoit la plume à la main pour traiter la
la même matiere.Concourir avec une personne
qui a produit à la République des
Lettres , tant de coups de maître ; c'auroit
été assurément une témérité à un apprentif
Physicien. Mais puisque la chose est
faite
NOVEMBRE. 1731 .
2573
faite , j'ai tout lieu de m'en consoler par
l'union et la conformité de nos sentimens.
Nous confinons , en effet l'un et l'autre
le tintamare d'Ansacq dans une nuée 3
nous disons l'un et l'autre que la rarefaction
ou fermentation d'une matiere concentrée
dans quelque concavité de la nuée,
et qui forçant sa prison , frape les colomnes
d'air voisines , est la cause des sons ';
enfin nous faisons l'un et l'autre dépendre
la variété de ces sons des differentes
manieres dont cette matiere s'échapera de
l'endroit d'où elle sort.
Nos explications ne different donc que
dans le plus ou le moins d'étenduë; peutêtre
que ce sçavant Physicien a crû les
principes Physiques si intelligibles qu'il
étoit inutile de les éclaircir davantage
du moins en cela a- t- il jugé des autres par
lui- même ; peut-être aussi , plutôt par
une prolixité trop ordinaire aux jeunes
gens , que par necessité , ai - je conduit
trop loin mes réfléxions : C'est au Lecteur
à en juger.
Il me reste neanmoins quelques scrupules
sur l'explication de M. Capperon.
1º. Je confesse avec sincerité que je ne
comprens pas bien ce que c'est que fermentation
froide. J'ai toujours crû que la
chaleur étoit le principe de la fermentation
2574 MERCURE DE FRANCE
tion , et que la violence ou le peu de
sensibilité qu'on y éprouve , n'avoit d'autre
cause que la difference du dégré de
chaleur,
2º. La cause que donne M. Capperon
de la fermentation m'embarrasse.» La ma-
» tiere subtile ( dit- il ) agitant continuel-
» lement leurs parties grossieres , poreu-
» ses et tartareuses ( des liquides ) par ses
>> tourbillonemens , elles les pousse si vi-
» vement les uns contre les autres , que
les petites s'introduisent par ce moyen
» dans les pores des plus grossieres . Je
me suis persuadé jusqu'ici que
les parties
des fluides n'avoient point de pores , que
la fluidité ne consistoit que dans un ar.
rangement de parties tres - délicates , tresfléxibles
et un peu longues , toutes contigues
ou couchées les unes sur les autres ,
sans y être adherantes ; en sorte que la
matiere subtile ait passage entre chaque
partie.
3°. Ces termes de M. Capperon , qui
se trouvent à la page 1850. » Dans les va-
» peurs qui s'élevent en l'air , il y en a
» qui emportent avec elles quantité de
parties simplement terrestres , qui con-
» tiennent aussi de l'air , et quantité d'au
» tres parties purement salines . Ces termes
, dis-je , jettent dans mon esprit une
cer-
14
NOVEMBRE. 1731. 2575
certaine confusion sur la nature des vapeurs
et de l'air. Pour dissiper tous ces
scrupules et pour me desabuser de mes
erreurs Phylosophiques , je proposerai
trois réfléxions ; j'attens de la politesse.de
M. Capperon qu'il voudra bien se donner
la peine d'y répondre s'il les trouve rai
sonnables.
PREMIERE REFLEXION.
De l'idée que nous donne M. Cappeton
de la fermentation , naissent dans l'esprit
trois conséquences , que l'expérience
contredit également.
A
9
S'il s'y peut trouver des fermentations
froides , et qu'on puisse les attribuer aux
liqueurs et à presque tous les Corps que
nous voyons capables de fermentation ;
il s'ensuivra qu'en quelque situation que
soient ces corps et en toute saison , ils seront
capables de la même fermentation
et qu'ils devront conserver ce même dégré
de froid qu'ils ont hors de ces momens
de fermentation , parce qu'ils contiendront
en eux - mêmes , et toujours ,
leur ferment , qui sera indépendant de
toute autre cause , et que la matiere subtile
roulera sans interruption ou dans leurs
pores ou entre leurs parties. Premiere
consequence,
>
Si
2576 MERCURE DE FRANCE
Si la fermentation n'avoit pour cause
que l'agitation des parties , occasionnée
par la matiere subtile, cette agitation étant
continuelle , suivant le principe même de
M. Capperon , il s'ensuivroit que cette
fermentation arriveroit aussi-bien dans un
vin fait , &c. dans un vin nouveau ;
que
et qu'elle devroit être continuelle. Seconde
conséquence.
Enfin si tout l'effet de la matiere subtile
n'est qu'une injection , pour ainsi dire ,
des parties les plus fines dans les pores des
plus grossieres , il s'ensuivra une condensation
, une diminution de volume , sans
perte de substance ( cè qui est le contraire
de la fermentation ) , parce qu'un corps
remplit d'autant moins d'espace que ses
pores sont plus serrez , ses intervalles
plus remplis par ses propres parties ; c'est
ainsi qu'une livre de laine à un volume
plus considerable qu'une livre d'or. Troisiéme
conséquence.
SECONDE REFLEXION.
Pour éviter ces trois inconvéniens , il
> me semble qu'on peut assigner trois causes
de la fermentation .
1º. Un mouvement circulaire trop violent
de la matiere subtile , occasionné par
un corps étranger ; précipitation qui ne
1
lui
NOVEMBRE. 1731. 2577
lui permet plus de glisser par ses corps
ordinaires , mais qui la chasse avec confusion
sur la surface même des parties ;
d'où il arrive que secondée par les globules
du second élement qu'elle a frappées ,
elle souleve , émousse , rompt ces parties,
entraîne avec elles toutes celles dont elle
peut se charger , qu'elle écarte ou pousse
au dehors toutes les parties qui lui résistent.
De-là les boüllons , de là le bruit , la
fumée , le tarissement. De-là l'admirable
fermentation du lait et de toutes les autres
liquides , dont les parties grasses et branchues
résistent à l'effort de ces matieres.
De -là la difference de saveur des liqueurs
qui ont boüilli , d'avec les crues , & c.
2. Un entrelassement de parties grasses
et branchuës avec les globules du second
élement, qui en enferme ou en retrécit
les interstices , et précipite par là le
mouvement de la matiere subtile ; précipitation
qui ébranle ces Globules, Ces Globules
frappez unissent leur action avec
celle de la matiere subtile , ils soulevent
ensemble ces parties grasses , les brisent,
chassent au dehors ou précipitent en bas
par leur mouvement orbiculaire les plus
grossieres , qui s'opposoient à leurs passages
,et leur action sera d'autant plus prompre
et plus sensible que l'espace sera plus
E rem- .
2578 MERCURE DE FRANCE
rempli , que les passages seront plus serrez
par ces parties grasses , et qu'elles mêmes
seront plus facilement ébranlées et
moins poreuses . De- là cette fermentation
ne doit durer qu'autant que cet obstacle
subsistera, De-là la douceur de toutes les
liqueurs nouvelles ; de- là leur dégré de
chaleur dans le tems de la fermentation
de -là plus elles ont bouilli , plus elles sont
claires , plus elles sont belles , meilleures
elles sont , et moins ily a de lie , &c,
3º. L'activité de la matiere subtile , qui
poussée par un corps étranger , détache
peu à peu les parties les plus Aéxibles d'un
corps solide , les brise , les émousse , entraine
avec elles les plus déliées , pousse ,
souleve,écarte les autres ; et son action reçoit
son dégré de vélocité , de la maniere
dont le corps étranger agit surelle.En sor,
te même que si ce corps étranger agit trop
violemment , elle enleve les parties les plus
legeres;et chassant les autres les unes dans
les autres , elle condense le corps et le fait
durcir. Tellé est la fermentation qui arrive
dans la pâte de certains fromages. Delà
il est aisé de concevoir pourquoi ces
fermentations sont plus promptes et plus
violentes l'été que l'hyver ; de-la dans
cette derniere saison cès fermentations
n'arriveroient pas , si l'on n'échauffoit la
pâte
NOVEMBRE. 1731 . 2579
pâte , si l'on ne mettoit les fromages dans
une cave chaude , & c.
Je crois,en un mot , qu'on peut par ces
trois causes donner une raison probable
de tous les phénoménes que nous voyons
dans la fermentation , sans qu'il en puisse
résulter aucune absurdité.
que
TROISIEME REFLEXION.
Les Philosophes entendent par ces termes
: Vapeur , Exhalaison , une grande
quantité de Molecules , de petites parties ,
le plus souvent insensibles , qui s'élevent
jusqu'à une hauteur indéterminée. Il est
facile de se convaincre qu'il s'en détache
de toutes sortes de corps , quoiqu'il y ait ,
des corps qui en fournissent de plus faci-)
les à se lier et à s'acrocher. Il n'est question
de
sçavoir comment ces particules s'élevent
, ce qui n'est pas fort difficile à
comprendre , quand on est persuadé
les matieres du premier et du second élement
( et sur tout la premiere ) passent
avec rapidité et continuellement dans les
pores ou intervalles de quelque corps que
ce soit ; or il est impossible qu'en passant
ainsi , ces matieres n'ébranlent,, ne détachent
et n'enlevent avec elles quelques petites
parties , qui ne pourront être plus
grosses ou plutôt même que d'un moin-
Eij dre
que
2580 MERCURE DE FRANCE
dre volume que celles qui les détachent,
Il ne faut réfléchir sur le tarissement
que
de tous les fluides , sur l'alteration de tous
les corps, pour n'en pouvoir douter. Delà
les nuées , de- là le tonnerre et tout son
tintamare , en y joignant mes principes sur
la fermentation .
De cette derniere réfléxion on doit nécessairement
conclure que les parties qui
composent ce qu'on appelle Vapeurs, sont
trop fines pour être poreuses, et pour pou :
voir par conséquent contenir de l'air ,
qu'elles sont elles -mêmes enlevées et contenuës
; d'où il suit qu'elles ne peuvent
enlever une quantité de parties qui contiennent
de l'air , comme le prétend M.
Capperon.
Telles sont les réfléxions dans lesquel
les l'ouvrage de M. Capperon m'a engagé.
Ces réfléxions n'ayant d'autre but
que de m'instruire , d'éclaircir la verité
et de profiter des grandes lumieres de ce
Sçavant, Je l'en fais volontiers le juge,
Lalonat de Soulàines,
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Résumé : RÉFLEXIONS sur l'explication Physique, donnée par M. Capperon, ancien Doyen de S. Maixent, de l'Akousmate d'Ansacq, inserée dans le Mercure de France, du mois d'Aoust 1731.
Le texte traite de l'explication physique de l'Akousmate d'Ansacq, un phénomène naturel, proposée par M. Capperon et publiée dans le Mercure de France en août 1731. L'auteur, bien que réticent à proposer une explication concurrente, se réjouit de la conformité de leurs points de vue. Les deux auteurs attribuent les sons de l'Akousmate à la rarefaction ou fermentation d'une matière concentrée dans une nuée, qui en se libérant, frappe les colonnes d'air voisines. Les différences entre leurs explications résident dans le niveau de détail. L'auteur exprime des scrupules sur l'explication de M. Capperon, notamment concernant la notion de 'fermentation froide', qu'il trouve contradictoire avec l'idée que la chaleur est le principe de la fermentation. Il questionne également la description de la matière subtile agitant les parties grossières des liquides et la nature des vapeurs et de l'air. Pour clarifier ces points, l'auteur propose trois réflexions. La première critique les conséquences logiques de la théorie de M. Capperon sur la fermentation. La seconde propose trois causes alternatives à la fermentation : un mouvement violent de la matière subtile, un entrelacement de parties grasses avec les globules du second élément, et l'activité de la matière subtile détachant les parties d'un corps solide. La troisième réflexion aborde la nature des vapeurs et des exhalaisons, concluant que les particules composant les vapeurs sont trop fines pour être poreuses et contenir de l'air. L'auteur conclut en exprimant son désir d'instruction et d'éclaircissement de la vérité, laissant à M. Capperon le rôle de juge de ses réflexions.
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3
p. 1128-1135
EXTRAIT du Memoire de M. de Reaumur, lû à l'Assemblée publique de l'Académie Royale des Sciences, du 23. Avril dernier, sur la Teigne des feüilles des Arbres.
Début :
Nous avons déja donné dans d'autres Mercures, les Extraits [...]
Mots clefs :
M. de Réaumur, Teigne des feuilles, Membranes, Espèces, Substance, Fourreau, Habits, Académie royale des sciences
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT du Memoire de M. de Reaumur, lû à l'Assemblée publique de l'Académie Royale des Sciences, du 23. Avril dernier, sur la Teigne des feüilles des Arbres.
EXTRAIT du Memoire de M.. de·
Raumur, lû à l'Assemblée publique de·
Académie Royale des Sciences , du 23
Avril dernier,sur la Teigne des feuilles,
des A bres.
Ous avons déja donné dans d'autres
ercures, les Extraits des deux Mé..
mones de M. de Reaumur , sur ces Insectes industrieux qui , comme nous
naissent nuds , et qui , comine nous , sçavent se faire de veritables habits. Ceux
2
I.Vol.
dont
JUIN. 1732. II29
dont les procedez y sont décrits , sont
les Teignes des Laines et des Pelleteries.
M. de Reaumur , après avoir expliqué
l'art avec lequel elles travaillent les fourreaux qui les couvrent , a cherché et a
trouvé des moyens surs d'arrêter les désordres qu'elles font dans les Etoffes de
Laines de toute espece , et dans les Fou- fures.
Le troisiéme Memoire et celui dont
il s'agit à présent , a pour objet des
Teignes qui ne sont pas aussi à craindre que les premieres , mais qui ne sont
pas moins admirables par leur industrie.
Elles se tiennent sur les arbres ; elles sont
ordinairement appliquées contre le dessous de leurs feuilles ; elles sont logées:
dans des especes d'Etuis de couleur de
feuille seche , ce qui fait qu'on remarque rarement ces Etuits , quoi qu'ils
soient assez communs , et longs de sept à
huit lignes. Un grand nombre d'especes.
d'arbres , citez dans le Memoire , nourrissent differentes especes de Teignes.
Mais il n'est point d'arbres où elles soient
plus communes que sur les Ormes ; les
fourreaux de celles-cy sont des plus remarquables pour leur forme; ils ont quelque ressemblance avec celle de l'exterieur
de divers Poissons , tels que les Carpes..
L.. Vol Lai D vj
1130 MERCURE DE FRANCE
A
,
La partie superieure du fourreau , celle
qui est tout du long du dessous du dos de
l'Insecte , est ornée de dentellures , faites
et posées à peu près comme les aillerons
que divers Poissons portent sur leur dos.
Le fourreau a une ouverture à chaque
bout celle par où l'Insecte fait sortir
sa tête et ses jambes quand il veut marcher , est circulaire ; là , le fourreau est cilindrique et un peu recourbé vers le
ventre , l'autre bout est applati ; il est
composé de lames plates , qui par leurs
contours imitent les queues de Poisson.
Ces lames n'y sont qu'appliquées l'une contre l'autre , elles s'écartent l'une de
l'autre , toutes les fois, que l'Insecte veut
jetter ses excremens ; il avance son der
riere entr'elles pour les forcer de s'entr'ouvrir , il se retire lorsqu'il a dardé
ses excrémens , et aussi- tôt les deux lames se raprochent par leur ressort.
>
Par tout où la Teigne va , elle porte
son fourreau avec elle ; lors même qu'elle
marche , il n'y a que sa tête et ses jambes qui en soient proches , qui sont à découvert. On ne peut voir marcher cet
Insecte avec une espece d'habit si singuier par la forme et la matiere dont la
ualité ne paroît pas aisée à reconnoître ,
sans quelque envie de sçavoir comment.
1. Vol. il
JUIN. 17322 1131
il le fair et de quoi il le fait, M. de Reaumur ayoüe que toutes ses conjectures ne
lui ont pû faire deviner en quoi consistent les procedez de cet Insecte , que ce
n'est qu'après l'avoir dépouillé en certaines circonstances favorables et après l'a- voir mis dans la necessité de se vétir
qu'il a reconnu l'art avec lequel il prépare l'étoffe convenable et avec lequel il
la met en œuvre ; mais pour pouvoir
faire entendre comment il s'habille , il
faut avoir expliqué comment il se nourrit.
La Teigne vit de feuilles , mais elle
ne les ronge pas de part en part , comme
font tant d'autres Insectes ; elle laisse même leur forme à celles dont elle tire son
aliment. Une feuille d'Orme , par exemple , quoique mince , est composée de
deux membranes , entre lesquelles est
renfermée une substance charnuë ; la Teigne ne se nourrit que de cette substance
charnue. Quand elle veut manger , elle
fait sortir sa tête de son fourreau , et avec
deux crochets dont elle est armée , elle
perce la membrane du dessous de la feüille; elle détache toute la substance charnuë qui est vis - à - vis le trou circulaire.
qu'elle a commencé ; elle la mange à mesure qu'elle la détache ; mais elle ne creuse
ce trou que jusqu'à la membrane superieu1. Vol re ,
#132 MERCURE DE FRANCE
re ; elle laisse celle-cy saine et entiere.
Quand elle a avancé jusques-là sa tête
elle la recourbe et commence à miner
entre les deux membranes ; elle détacher
la substance charnuë qui est entre celles
du côté où la tête s'est dirigée , et en
même temps elle écarte les deux membranes l'une de l'autre beaucoup plus.
qu'elles ne le sont naturellement ; par là
elle's'y fait une place où la tête puisse
être contenue , et être en état d'aller miner plus loin. Ainsi successivement elle:
mine dans tout le contour du trou , et
toûjours de plus loin en plus loins à
mesure qu'elle avance plus loin dans
la feuille , une plus grande partie du
corps est hors du fourreau , et se trouve entre deux membranes.
Pendant que diverses Teignes étoient
ainsi occupées à manger , et cramponnées
entre les deux membranes de la feuille ,
M. de Reaumur a retiré promptement
leurs fourreaux ; ainsi surprises , elles se
sont trouvées hors d'état d'y rentrer , elles ont donc été dépouillées sans qu'on
leur ait fait aucun autre mal et mises dans
la necessité de se vétir.
Une Teigne ainsi nuë , tâte à droit et
à gauche tout autour du trou , pour
chercher son habit ; après avoir tâté in- utilement "
L. Vel..
JUIN. 1732. 1133
utilement , elle prend le parti de conti
nuer de miner entre les deux membranes , afin d'y faire une place où elle puisse être contenuë toute entiere. A force:
de miner , de manger et d'écarter les
deux membranes , elle se trouve dans peu
entierement logće entr'elles . La voilà déja
à couvert ; et ayant des alimens tout autour de soi , bien- tôt elle recommence à
miner , et cela parce qu'en minant elle
prépare l'étoffe necessaire pour se faire:
un habit. Les portions de membranes
d'où toute la substance charnüe a été détachée , sont cette étoffe ; il n'en faut pass
de grandes pieces pour couvrir une Teigne , il en faut pourtant plus que l'état
actuel de son corps ne semble le demander, pour n'avoir pas à recommencer si
souvent ; elle fait chaque habit une fois
plus grand que le corps qu'il doit couvrir..
Les morceaux de membranes ainsi préparez, dégagez dè toute substance char
nue , sont pour elle ce qu'est pour un
Tailleur une piece de drap , et un Tailleur ne s'y prendroitpas autrement qu'elle va faire. Son habit doir être composé
de deux pieces égales et semblables , les
pieces employées à faire le devant ou le
derriere de nos juste-au- corps n'ont pas
des figures plus contournées , et contour
J. Volo. néest
1134 MERCURE DE FRANCE
nées plus bizarement , que chacune de
celles de l'habit de la Teigne. Elle les
coupe pourtant l'une et l'autre aussi régulierement que si elle étoir conduite par
un patron, elle semble nous vouloir prouver qu'elle a l'idée de leur figure ; c'est
avec les deux Serres qu'elle a au- dessous
de la tête qu'elle les coupe.
Après que les deux pieces ont été coupées , elles restent encore dans la feuille,
elles y tiennent par de petits engrainemens ; il ne s'agit plus que de les assembler et elles sont en place pour cela ,
étant l'une vis-à- vis l'autre. L'art de coudre n'est pas connu des Teignes , mais
elles sçavent filer. Les fils nouvellement
sortis de la filiore , sont gluants , ils se
collent aisément aux corps contre lesquels
ils sont appliquez. C'est avec ces fils
gluants qu'elle réunit les bords d'une des
pieces avec ceux de l'autre , par tout où
ils doivent être assemblez; ces endroits
se trouvent par la suite au dessus du dos
et au dessous du ventre ; la réunion en
est si bien faite , que quoi qu'on sçache
les endroits où elle a été faite , on ne peut
les reconnoître même avec la loupe.
Enfin, quand les deux pieces de l'habit
sont assemblées , la Teigne frotte leurs
surfaces interieures avec sa tête pour les
. 1. Vol. anir
JUIN. 1732. 1135
unir , pour les lisser ; ensuite elle les fortifie par une doublure de Soye. Alors
l'habit est fini , elle les desengraine de
l'espece d'établis où il est resté. Jusqueslà elle se met à marcher et l'emporte
avec soi sur une autre feüille où elle va
prendre de la nourriture. Il faudroit rapporter le Memoire de M. de Reaumur ,
tout au long pour faire entendre les differentes manieres dont les Teignes s'y pren-,
nent pour faire leurs habits en differentes
circonstances , lorsqu'elles se les font de
bon gré , ou lorsqu'elles se les font après
y avoir été forcées ; pour expliquer en
quel cas elles se font des habits neufs ,
et combien de fois en leur vie ; comment
elles réparent quelquefois les déchirures
ou les morceaux emportez. En quoi les
habits des differentes especes de Teignes
different entierement , et pour apprendre le reste de leur Histoire ; c'est dans
le Memoire même , lorsqu'il sera imprimé, qu'on lira tous ces faits , qui sont des
plus singuliers que fournisse l'Histoire
naturelle des Insectes , quelque féconde
qu'elle soit en merveilles.
Raumur, lû à l'Assemblée publique de·
Académie Royale des Sciences , du 23
Avril dernier,sur la Teigne des feuilles,
des A bres.
Ous avons déja donné dans d'autres
ercures, les Extraits des deux Mé..
mones de M. de Reaumur , sur ces Insectes industrieux qui , comme nous
naissent nuds , et qui , comine nous , sçavent se faire de veritables habits. Ceux
2
I.Vol.
dont
JUIN. 1732. II29
dont les procedez y sont décrits , sont
les Teignes des Laines et des Pelleteries.
M. de Reaumur , après avoir expliqué
l'art avec lequel elles travaillent les fourreaux qui les couvrent , a cherché et a
trouvé des moyens surs d'arrêter les désordres qu'elles font dans les Etoffes de
Laines de toute espece , et dans les Fou- fures.
Le troisiéme Memoire et celui dont
il s'agit à présent , a pour objet des
Teignes qui ne sont pas aussi à craindre que les premieres , mais qui ne sont
pas moins admirables par leur industrie.
Elles se tiennent sur les arbres ; elles sont
ordinairement appliquées contre le dessous de leurs feuilles ; elles sont logées:
dans des especes d'Etuis de couleur de
feuille seche , ce qui fait qu'on remarque rarement ces Etuits , quoi qu'ils
soient assez communs , et longs de sept à
huit lignes. Un grand nombre d'especes.
d'arbres , citez dans le Memoire , nourrissent differentes especes de Teignes.
Mais il n'est point d'arbres où elles soient
plus communes que sur les Ormes ; les
fourreaux de celles-cy sont des plus remarquables pour leur forme; ils ont quelque ressemblance avec celle de l'exterieur
de divers Poissons , tels que les Carpes..
L.. Vol Lai D vj
1130 MERCURE DE FRANCE
A
,
La partie superieure du fourreau , celle
qui est tout du long du dessous du dos de
l'Insecte , est ornée de dentellures , faites
et posées à peu près comme les aillerons
que divers Poissons portent sur leur dos.
Le fourreau a une ouverture à chaque
bout celle par où l'Insecte fait sortir
sa tête et ses jambes quand il veut marcher , est circulaire ; là , le fourreau est cilindrique et un peu recourbé vers le
ventre , l'autre bout est applati ; il est
composé de lames plates , qui par leurs
contours imitent les queues de Poisson.
Ces lames n'y sont qu'appliquées l'une contre l'autre , elles s'écartent l'une de
l'autre , toutes les fois, que l'Insecte veut
jetter ses excremens ; il avance son der
riere entr'elles pour les forcer de s'entr'ouvrir , il se retire lorsqu'il a dardé
ses excrémens , et aussi- tôt les deux lames se raprochent par leur ressort.
>
Par tout où la Teigne va , elle porte
son fourreau avec elle ; lors même qu'elle
marche , il n'y a que sa tête et ses jambes qui en soient proches , qui sont à découvert. On ne peut voir marcher cet
Insecte avec une espece d'habit si singuier par la forme et la matiere dont la
ualité ne paroît pas aisée à reconnoître ,
sans quelque envie de sçavoir comment.
1. Vol. il
JUIN. 17322 1131
il le fair et de quoi il le fait, M. de Reaumur ayoüe que toutes ses conjectures ne
lui ont pû faire deviner en quoi consistent les procedez de cet Insecte , que ce
n'est qu'après l'avoir dépouillé en certaines circonstances favorables et après l'a- voir mis dans la necessité de se vétir
qu'il a reconnu l'art avec lequel il prépare l'étoffe convenable et avec lequel il
la met en œuvre ; mais pour pouvoir
faire entendre comment il s'habille , il
faut avoir expliqué comment il se nourrit.
La Teigne vit de feuilles , mais elle
ne les ronge pas de part en part , comme
font tant d'autres Insectes ; elle laisse même leur forme à celles dont elle tire son
aliment. Une feuille d'Orme , par exemple , quoique mince , est composée de
deux membranes , entre lesquelles est
renfermée une substance charnuë ; la Teigne ne se nourrit que de cette substance
charnue. Quand elle veut manger , elle
fait sortir sa tête de son fourreau , et avec
deux crochets dont elle est armée , elle
perce la membrane du dessous de la feüille; elle détache toute la substance charnuë qui est vis - à - vis le trou circulaire.
qu'elle a commencé ; elle la mange à mesure qu'elle la détache ; mais elle ne creuse
ce trou que jusqu'à la membrane superieu1. Vol re ,
#132 MERCURE DE FRANCE
re ; elle laisse celle-cy saine et entiere.
Quand elle a avancé jusques-là sa tête
elle la recourbe et commence à miner
entre les deux membranes ; elle détacher
la substance charnuë qui est entre celles
du côté où la tête s'est dirigée , et en
même temps elle écarte les deux membranes l'une de l'autre beaucoup plus.
qu'elles ne le sont naturellement ; par là
elle's'y fait une place où la tête puisse
être contenue , et être en état d'aller miner plus loin. Ainsi successivement elle:
mine dans tout le contour du trou , et
toûjours de plus loin en plus loins à
mesure qu'elle avance plus loin dans
la feuille , une plus grande partie du
corps est hors du fourreau , et se trouve entre deux membranes.
Pendant que diverses Teignes étoient
ainsi occupées à manger , et cramponnées
entre les deux membranes de la feuille ,
M. de Reaumur a retiré promptement
leurs fourreaux ; ainsi surprises , elles se
sont trouvées hors d'état d'y rentrer , elles ont donc été dépouillées sans qu'on
leur ait fait aucun autre mal et mises dans
la necessité de se vétir.
Une Teigne ainsi nuë , tâte à droit et
à gauche tout autour du trou , pour
chercher son habit ; après avoir tâté in- utilement "
L. Vel..
JUIN. 1732. 1133
utilement , elle prend le parti de conti
nuer de miner entre les deux membranes , afin d'y faire une place où elle puisse être contenuë toute entiere. A force:
de miner , de manger et d'écarter les
deux membranes , elle se trouve dans peu
entierement logće entr'elles . La voilà déja
à couvert ; et ayant des alimens tout autour de soi , bien- tôt elle recommence à
miner , et cela parce qu'en minant elle
prépare l'étoffe necessaire pour se faire:
un habit. Les portions de membranes
d'où toute la substance charnüe a été détachée , sont cette étoffe ; il n'en faut pass
de grandes pieces pour couvrir une Teigne , il en faut pourtant plus que l'état
actuel de son corps ne semble le demander, pour n'avoir pas à recommencer si
souvent ; elle fait chaque habit une fois
plus grand que le corps qu'il doit couvrir..
Les morceaux de membranes ainsi préparez, dégagez dè toute substance char
nue , sont pour elle ce qu'est pour un
Tailleur une piece de drap , et un Tailleur ne s'y prendroitpas autrement qu'elle va faire. Son habit doir être composé
de deux pieces égales et semblables , les
pieces employées à faire le devant ou le
derriere de nos juste-au- corps n'ont pas
des figures plus contournées , et contour
J. Volo. néest
1134 MERCURE DE FRANCE
nées plus bizarement , que chacune de
celles de l'habit de la Teigne. Elle les
coupe pourtant l'une et l'autre aussi régulierement que si elle étoir conduite par
un patron, elle semble nous vouloir prouver qu'elle a l'idée de leur figure ; c'est
avec les deux Serres qu'elle a au- dessous
de la tête qu'elle les coupe.
Après que les deux pieces ont été coupées , elles restent encore dans la feuille,
elles y tiennent par de petits engrainemens ; il ne s'agit plus que de les assembler et elles sont en place pour cela ,
étant l'une vis-à- vis l'autre. L'art de coudre n'est pas connu des Teignes , mais
elles sçavent filer. Les fils nouvellement
sortis de la filiore , sont gluants , ils se
collent aisément aux corps contre lesquels
ils sont appliquez. C'est avec ces fils
gluants qu'elle réunit les bords d'une des
pieces avec ceux de l'autre , par tout où
ils doivent être assemblez; ces endroits
se trouvent par la suite au dessus du dos
et au dessous du ventre ; la réunion en
est si bien faite , que quoi qu'on sçache
les endroits où elle a été faite , on ne peut
les reconnoître même avec la loupe.
Enfin, quand les deux pieces de l'habit
sont assemblées , la Teigne frotte leurs
surfaces interieures avec sa tête pour les
. 1. Vol. anir
JUIN. 1732. 1135
unir , pour les lisser ; ensuite elle les fortifie par une doublure de Soye. Alors
l'habit est fini , elle les desengraine de
l'espece d'établis où il est resté. Jusqueslà elle se met à marcher et l'emporte
avec soi sur une autre feüille où elle va
prendre de la nourriture. Il faudroit rapporter le Memoire de M. de Reaumur ,
tout au long pour faire entendre les differentes manieres dont les Teignes s'y pren-,
nent pour faire leurs habits en differentes
circonstances , lorsqu'elles se les font de
bon gré , ou lorsqu'elles se les font après
y avoir été forcées ; pour expliquer en
quel cas elles se font des habits neufs ,
et combien de fois en leur vie ; comment
elles réparent quelquefois les déchirures
ou les morceaux emportez. En quoi les
habits des differentes especes de Teignes
different entierement , et pour apprendre le reste de leur Histoire ; c'est dans
le Memoire même , lorsqu'il sera imprimé, qu'on lira tous ces faits , qui sont des
plus singuliers que fournisse l'Histoire
naturelle des Insectes , quelque féconde
qu'elle soit en merveilles.
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Résumé : EXTRAIT du Memoire de M. de Reaumur, lû à l'Assemblée publique de l'Académie Royale des Sciences, du 23. Avril dernier, sur la Teigne des feüilles des Arbres.
Le mémoire de M. de Reaumur, présenté à l'Assemblée publique de l'Académie Royale des Sciences le 23 avril précédent, traite des teignes des feuilles et des arbres. Reaumur, ayant déjà étudié les teignes des laines et des pelleteries, se concentre ici sur celles des arbres, notamment celles des ormes. Ces teignes, bien que moins nuisibles, sont remarquables par leur industrie. Les teignes des arbres vivent souvent sous les feuilles, dans des étuis de couleur feuille sèche, mesurant sept à huit lignes de long. Ces fourreaux sont ornés de dentellures et imitent la forme de certains poissons. Les teignes portent leur fourreau en marchant, ne laissant apparaître que leur tête et leurs pattes. Reaumur observe que les teignes se nourrissent de la substance charnue des feuilles sans les détruire entièrement. Elles percent les membranes des feuilles avec des crochets pour accéder à cette substance. Pour étudier leur processus de fabrication des fourreaux, Reaumur a dépouillé les teignes et les a observées en train de se revêtir. Les teignes préparent l'étoffe de leur fourreau en minant entre les membranes des feuilles, détachant la substance charnue. Elles coupent ensuite des morceaux de membranes pour former deux pièces égales, qu'elles assemblent avec des fils gluants. Elles lissent et renforcent leur fourreau avec une doublure de soie avant de le détacher et de le porter sur une autre feuille. Le mémoire de Reaumur détaille les différentes manières dont les teignes fabriquent leurs fourreaux et d'autres aspects de leur histoire naturelle.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 212-214
« L'aîné, Marchand Potier d'étain, demeurant à Paris, rue S. Denis [...] »
Début :
L'aîné, Marchand Potier d'étain, demeurant à Paris, rue S. Denis [...]
Mots clefs :
Marchand, Étain, Cafetières, Café, Substance, Teinture
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : « L'aîné, Marchand Potier d'étain, demeurant à Paris, rue S. Denis [...] »
L'aîné , Marchand Potier d'étain , demeurant
à Paris , rue S. Denis , entre la Fontaine du Ponceau
& le grand Cerf , compofe un Etain de
Bis-Muth , & de Malaque , dont la qualité eft
auffi parfaite & auffi faine que celle de l'argent.
Les Médecins de Paris en ont fait plufieurs épreu-
& l'ont approuvé. Il fait , avec cette comves
•
OCTOBRE . 1763. 213
pofition , des Catteriéres , appellées Diligences ,
qui fervent à faire le Caffé par infufion .
Ces nouvelles Diligences font plus folides que
celles qui le font en Fer-blanc.; elles font exemp
tes de la rouille & de toutes les altérations auxquelles
le Fer- blanc eft fujet , & elles ne font
fufceptibles ni de mauvais goût ni de mauvaiſes .
odeurs.
L'expérience a appris que le Caffé en bouillane
per par l'évaporation , une partie de fes fucs
& de les efprits , & c'est par une économie de délicateffe
que tout le monde , après avoir été con
vaincu que le Café ait par infusion eft plus ,
clair , plus parfumé & plus agréable au goût
que celui qui eft fait par ébullition , s'eft mis aujour'hui
dans l'ufage de le faire préparer par infufion.
Le Sr l'Ainé , dans la vue d'être utile au
Public , s'eft appliqué à perfectionner les nouvelles
Diligences qu'il annonce. Elles font fabriquées
de façon qu'elles confervent toute la qualité ,
tous les efprits , & tout le parfum du Caffé & que
l'infufion qui s'y fait exprime fi parfaitement la
fubitance & même la teinture , que l'eau que
l'on feroit bouillir fur le marc après l'infuſion
n'en prendroit prèfque pas le goût , & ne teindroit
le linge que très-légèrement .
" •
Le Caffé que l'on fait par infuſion avec cess
nouvelles Diligences , n'en confomme pas une
plus grande quantité que celui qui le fait par.
ébullition , c'eft toujours une cuillerée comble pour .
chaque taffe , & à mesure égale le Caffé fait
par infufion eft plus fort que celui qui eft fair
par ébullition.
:
On peut facilement fatisfaire fa délicateffe &
fon goût. Ces nouvelles Diligences fervent auffi à
faire infuter le Thé , & toute autre chofe que
l'on voudra.
214 MERCURE
DE FRANCE.
Il en a été vendu une quantité confidérable pour
les ifles.
à Paris , rue S. Denis , entre la Fontaine du Ponceau
& le grand Cerf , compofe un Etain de
Bis-Muth , & de Malaque , dont la qualité eft
auffi parfaite & auffi faine que celle de l'argent.
Les Médecins de Paris en ont fait plufieurs épreu-
& l'ont approuvé. Il fait , avec cette comves
•
OCTOBRE . 1763. 213
pofition , des Catteriéres , appellées Diligences ,
qui fervent à faire le Caffé par infufion .
Ces nouvelles Diligences font plus folides que
celles qui le font en Fer-blanc.; elles font exemp
tes de la rouille & de toutes les altérations auxquelles
le Fer- blanc eft fujet , & elles ne font
fufceptibles ni de mauvais goût ni de mauvaiſes .
odeurs.
L'expérience a appris que le Caffé en bouillane
per par l'évaporation , une partie de fes fucs
& de les efprits , & c'est par une économie de délicateffe
que tout le monde , après avoir été con
vaincu que le Café ait par infusion eft plus ,
clair , plus parfumé & plus agréable au goût
que celui qui eft fait par ébullition , s'eft mis aujour'hui
dans l'ufage de le faire préparer par infufion.
Le Sr l'Ainé , dans la vue d'être utile au
Public , s'eft appliqué à perfectionner les nouvelles
Diligences qu'il annonce. Elles font fabriquées
de façon qu'elles confervent toute la qualité ,
tous les efprits , & tout le parfum du Caffé & que
l'infufion qui s'y fait exprime fi parfaitement la
fubitance & même la teinture , que l'eau que
l'on feroit bouillir fur le marc après l'infuſion
n'en prendroit prèfque pas le goût , & ne teindroit
le linge que très-légèrement .
" •
Le Caffé que l'on fait par infuſion avec cess
nouvelles Diligences , n'en confomme pas une
plus grande quantité que celui qui le fait par.
ébullition , c'eft toujours une cuillerée comble pour .
chaque taffe , & à mesure égale le Caffé fait
par infufion eft plus fort que celui qui eft fair
par ébullition.
:
On peut facilement fatisfaire fa délicateffe &
fon goût. Ces nouvelles Diligences fervent auffi à
faire infuter le Thé , & toute autre chofe que
l'on voudra.
214 MERCURE
DE FRANCE.
Il en a été vendu une quantité confidérable pour
les ifles.
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Résumé : « L'aîné, Marchand Potier d'étain, demeurant à Paris, rue S. Denis [...] »
Le document décrit un produit innovant conçu par Marchand Potier d'étain, résidant à Paris, rue Saint-Denis. Cet alliage, composé d'étain, de bismuth et de malachite, a été approuvé par les médecins de Paris pour sa qualité similaire à celle de l'argent. Marchand propose des 'Diligences', des ustensiles pour préparer le café par infusion. Ces Diligences sont plus solides et résistantes à la rouille que celles en fer-blanc. Elles conservent mieux les arômes et les saveurs du café, évitant ainsi la perte de substances volatiles lors de l'ébullition. Elles permettent également de préparer le thé et d'autres infusions. Le café préparé avec ces Diligences est plus fort et nécessite la même quantité de café que la méthode d'ébullition. Une quantité notable de ces Diligences a été vendue, notamment pour les îles.
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