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1
p. 1841-1854
EXPLICATION Physique des bruits entendus en l'air dans la Paroisse d'Ansacq, Diocèse de Beauvais, dont il est parlé dans le second Volume du Mercure de France du mois de Décembre 1730. par M. Capperon, Ancien Doyen de Saint Maxent.
Début :
Le Sçavant qui a écrit la Lettre dont l'Extrait est inseré dans le Mercure [...]
Mots clefs :
Explication physique, Diocèse de Beauvais, Paroisse d'Ansacq, Sons, Bruits, Tonnerre, Vibrations, Ondulations, Fermentation, Parties salines
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texteReconnaissance textuelle : EXPLICATION Physique des bruits entendus en l'air dans la Paroisse d'Ansacq, Diocèse de Beauvais, dont il est parlé dans le second Volume du Mercure de France du mois de Décembre 1730. par M. Capperon, Ancien Doyen de Saint Maxent.
EXPLICATION Physique des bruits
entendus en l'air dans la Paroisse d'Ansacq,
Diocèse de Beauvais , dont il est
parlé dans le second Volume du Mercure
de France du mois de Décembre 1730.
par M. Capperon , Ancien Doyen de
Saint Maxent.
LF savit quiseterdans le Mercure
E Sçavant qui a écrit la Lettre dont
du mois de , Février dernier m'invite
d'une maniere trop gracieuse à donner
une explication Physique des bruits entendus
à Ansacq , pour queje ne fasse pas
quelque effort pour le satisfaire . Je le fais
d'autant plus volontiers ,que je suis persua
dé que ce qu'il y a d'obligeant dans sa
A iij
Let1842
MERCURE DE FRANCE
›
Lettre vient de la seule bienveillance
qu'il a pour moi , et non de ce que j'ai
pû faire qui ait mérité son attention .
Il s'agit donc de donner une explication
physique de ces bruits qui ont été entendus
en l'air, dans la Paroisse d'Ansacq , proche
de Clermont en Beauvoisis , dont la Relation
a été écrite par le Curé du Lieu avec
beaucoup d'exactitude et d'esprit .
Pour entrer tout d'un coup ´en matiere
, je dis, que, quoique ces bruits qu'on
entend dans l'air ne soient pas bien frequens
, ils ne laissent pas d'arriver quelque
fois. L'Auteur de la Lettre écrite de Bourgogne
cite deux Particuliers qui lui ont
assuré avoir entendus des bruits à peu
près semblables ; sçavoir , l'un en Suisse
et l'autre dans la Bourgogne.
Voici même qu'on nous apprend par
une Lettre insérée dans le Mercure du
mois de May , que de pareils bruits se
sont fait entendre pendant le mois d'Octobre
de l'année derniere , dans un Lieu
que l'on ne nomme pas .
Si nous voulons aller plus loin , l'Auteur
de la Lettre écrite de Bourgogne dit ,
qu'il croit avoir lû dans laChronique d'Helinand
, Moine de Froidmont , qui vivoit
sur la fin du XII . siécle, un fait semblable.
La même chose arriva du tems de saint
Mamert
OKAATO US T. 1731 1843 .
"
Mamert , Evêque de Vienne , c'est-à- dire ,
vers l'an 469. car au rapport de saint
Avit de Vienne et de saint Cesaire d'Arles,
citez par M. Baillet ( a ) on 'entendit plusieurs
fois dans l'air de ces sortes de bruits
pendant la nuit , dont non - seulement
les hommes furent extrémement effrayez ,
mais les animaux mêmes , puisqu'il est
dit , que les Loups et les Cerfs , sortoient
des Forêts , et fuyoient jusques dans les
Villes , ce qui avoit été précédé de frequens
Tremblemens de Terre dans le
Dauphiné où cela se passoit ; et c'est à la
frayeur que causerent ces évenemens rares
et toujours formidables , que les Prieres
des Rogations doivent leur origine.g
Long- tems avant tout cela, (b) Pline avoit
rapporté que lorsque les Romains firent
la Guerre aux Danois , on entendit plusieurs
fois dans l'air unbruit tel que celui
qui se fait dans le tems d'un combat par
le cliquetis des armes , et un autre qui
ressembloit au son des trompettes :
ce qui revient assez au bruit entendu à
Ansacq , puisqu'outre le bruit tumul-
(a) Histoire des Rogations.
(b) Armorum crepitus , et tuba sonitus auditos
è cælo cimbricis bellis accepimus et postea. &c.
Plin. Natur. Hist. lib. 2. cap . 57.
A iiij tueux,
1844 MERCURE DE FRANCE
tueux , on y entendoit aussi comme un
son de Trompette.
Quoiqu'il ne soit donc pas nouveau
d'ertendre dans l'air ces sortes de bruits
et de sons , on peut dire cependant
qu'ils sont toûjours assez rares et ce
n'est que parce qu'ils arrivent si peu souvent
, qu'on en est plus surpris lorsqu'on
les entend , et qu'on ne sçait à quoi en
attribuer la véritable cause ; ce fait n'étant
pas jusqu'à present venu à la connoissance
de Gens délivrez des préjugez
populaires , et qui fussent disposez
à en chercher la cause dans une bonne
Physique. Voyons maintenant si nous
pourrons découvrir comment ces sortes
de sons et de bruits peuvent naturellement
se former dans l'air.
J'avoue qu'il est difficile de comprendre
que cela puisse arriver dans un air
très-pur : car cet air peut bien , à la vérité,
par son mouvement et son agitation , rencontrant
des corps solides diversement figurez
, former diverses sortes de sons ;
mais que des bruits tels des bruits tels que ceux d'Ansacq
, puissent être causés par un agitation
intérieure qui se formeroit dans un
air aussi pur qu'on le suppose , c'est ce
qu'on ne peut raisonnablement penser. <
Il n'en est pas de même de l'air grossier
rempil
AOUST. 1731. 1845
rempli d'exhalaisons et de vapeurs , dans
lequel il est constant qu'il se peut former
des sons et des bruits . Nous en
avons une preuve sensible dans le bruit
formidable du Tonnerre , qui se fait si
souvent entendre dans l'air , lequel est
causé par une sorte de fermentation chaude
, produite dans un nuage , par le mélange
des parties sulphureuses , salines et
terrestres , qui y sont contenuës . Comme
dans cette fermentation le soufre
par consequent le feu , sont de la partie
, il ne faut pas être surpris si la détonation
étant violente , les vibrations
et les ondulations de l'air en sont plus
fortes et plus grandes , d'où il en résulte
des sons plus éclatans et plus terribles.
,
Une fermentation chaude et enflammée
qui se fait dans l'air , étant donc capable
de former des sons et des bruits trèsviolens
, il y a tout lieu de présumer, que
s'il s'y fait des fermentations froides plus
moderées , par un simple mélange des
parties salines avec des parties terrestres
Il s'y formera aussi des sons et des bruits ,
moins grands,à la vérité,que ceux du tonnerre
, mais toujours très -sensibles et frapans.
D'ailleurs ces fermentations doivent
être rares ; parce que la chaleur faisant
élever facilement dans l'air , les parties
AY
sulphu
>
1846 MERCURE DE FRANCE
que
sulphureuses de la terre , il s'ensuit
rarement les parties salines et terrestres
doivent s'y trouver absolument destituées
de quelque mélange de soufre : et
c'est justement parce que ces fermentations
froides se font rarement dans l'air ,
qu'on entend peu souvent les bruits et les
sons qu'elles y forment ; et que quand ,
cela est arrivé , ça été dans des temps et
des lieux , où personne ne s'est avisé d'en
rechercher la cause naturelle : c'est ce
qui a fait que jusqu'à present cette matiere
n'a pas été approfondie.
>
par-
Il me paroît néanmoins , qu'il n'est pas
si difficile de le faire : puisqu'il n'y a qu'à
transporter à l'air grossier, rempli de
ties salines et terrestres ce qu'on voit
tous les jours arriver dans d'autres liquides
, où se font ces sortes de fermentations
froides , tels , par exemple , que le
Vin, le Cidre, et la Bierre , qui fermentent
dans un muid , ou ce qui se fait souvent
dans la mer , lorsqu'elle fait un bruit assez
grand, pour qu'il soit quelquefois entendu
à cinq ou six lieuës loin de son rivage.
Je crois qu'on ne peut pas douter que
ce ne soit une fermentation froide qui se
fait dans le Vin ou dans le Cidre nouveaux
qui soit la cause du bruit er du
murmure assez sensible qui s'entend dan
>
e lc
AOUST. 1731. 1847
.
les muids , où ces liquides et ces sucs sont
contenus ; ce qui n'arrive , que parce que
la matiere subtile , répandue dans tout
'Univers , et qui fait seule la liquidité des
fluides,'agitant continuellement leurs parties
grossieres , poreuses et tartareuses et
d'autres plus fines et plus déliées , par
ses tourbillonnemens , elle les pousse si
vivement les unes contre les autres , que
Les petites s'introduisent par ce moyen
dans les pores des plus grossieres ; et
voilà ce qui fait la fermentation , qui
cause le gouflement , le bouillonnement
de ces liquides , et le bruit qui en résulte .
Car ces parties fines et déliées , entrant
dans les pores parties grossieres , elles
en chassent nécessairement l'air qui y étoit
renfermé ; ce qui lui donne lieu de s'élancer
assez violemment hors de ces liquides
, en les faisant , non seulement gonfler
et bouillonner , mais causant encore
le bruit et le murmure qu'on entend pendant
tout le tems que la fermentation
dure 3 parce que cet air ne peut pas s'échaper
avec quelque impetuosité hors de
la superficie de ces liquides par differens
endroits , qu'il ne frappe avec force l'air
extérieur , et qu'il n'y cause des secousses
et des vibrations assez fortes , pour
ébran ler le sens de l'oüie ; et former par
A vi con
des
1848 MERCURE DE FRANCE
consequent , en même- tems , ce bruit et
ce murmure qu'on entend.
Ce terrible mugissement, pour ainsi dire,
que fait quelquefois la mer , vient d'une
fermentation à peu près pareille ; car
comme nous en sommes ici fort proches,
j'ai été curieux de voir de quelle maniere
la chose se passoit , dans le tems que ce
bruit se faisoit fortement entendre ; et je
vis étant sur le rivage , que c'étoit dans
l'interieur des eaux , que se faisoit tout le
mouvement qui causoit ce bruit , la mer
' en étant pas pour cela plus agitée audehors
d'où j'ai conclu , qu'il est à croire,
que les Rivieres et les pluyes font continuellement
entrer dans la mer une infinité
de parties terrestres , dans lesquelles
beaucoup de particules d'air se trouvent
aussi renfermées et emprisonnées.
Mais parce que l'eau de la mer à cause
de sa grossiereté , ne peut pas seule faire
une dissolution assez parfaite de ces molécules
terrestres , pour chasser l'air qui
y est envelope ; s'il arrive que dans certain
espace de mer , il s'éleve de son fond
une vapeur remplie d'un Sel acide , fin
et délicat , c'est alors , que la matiere subtile
qui cause la fluidité de ses eaux , s'emparant
des éguilles fines et pointues de ce
Sel , elle les pousse violemment contre
ces
AOUST. 1731. 1849
ces molécules ; et les faisant entrer violemment
comme autant de petits coins
dans leurs pores , elle en brise et en
écarte les parties avec plus de facilité.
Les particules de Pair ont au même
instant la liberté de s'échaper de leur pri
son ; et leurs petits ressorts se débondant
, elles font alors dans l'eau de mer,
les mêmes effets qu'elles operent lorsqu'el
les échapent dans le Vin ou dans le Ĉidre
qui fermentent, c'est-à - dire , qui si elles ne
le font pas gonfler , à cause de la trop
grande étendue de ses eaux , ni trop
visiblement bouillonner , à cause du moument
extérieur de ses vagues , au moins
en s'échapant par une infinité d'endroits
de sa superficie , elles frappent l'air extérieur
avec d'autant plus de force , qu'el
les se trouvent réunies en plus grand nombre
, d'où il en résulte un bruit d'autang
plus éclatant.
Il ne reste maintenant qu'à appliquer
tout ce que je viens de dire,aux Akousmates
en général , et en particulier aux bruits.
entendus à Ansacq. Car si des fermentations
froides , qui se font dans les liquides
tels que le Vin , le Cidre , l'eau de mer ,
forment et causent naturellement des
sons; de pareilles fermentations pouvant
se faire également dans l'air , il est clair
qu'elles
1850 MERCURE DE FRANCE
qu'elles y peuvent aussi former des bruits
et des sons. Or il est hors de doute , que
dans les vapeurs qui s'élevent en l'air , il
y en a qui emportent avec elles quan
tité de parties simplement terrestres
qui contiennent aussi de l'air , et quantité
d'aurres parties purement salines. Mes
Observations sur les Sels , contenus dans
l'air , me l'ont fait assez connoître.
Personne ne peut donc disconvenir ,
que ces parties terrestres et salines , se
trouvant ramassées ensemble dans un
nuage , elles ne puissent y fermenter
comme elles font dans la Mer , et par
conséquent y former des sons plus ou
moins grands , selon que le nuage au
ra plus ou moins d'étendue et d'épais
seur , et qui paroîtront plus ou moins éloignés
, suivant que le nuage se trouvera
plus ou moins loin.
D'ailleurs cela peut arriver dans certains
Cantons , plutôt que dans d'autres,
soit parce qu'il s'y trouve beaucoup plus
de cette espece de Sel , ou qu'il s'y en
fait dans de certains temps une éva
poration plus grande ; ou enfin parce
qu'il y arrive quelque remüement ou
Tremblement de Terre , qui contribue
à cette évaporation , propre à former
dans l'air la fermentation convenable
pour
A O UST . 1731. 1851
,
pour y causer ces sortes de bruits .
Pendant cette fermentation , si l'air
renfermé dans le Nuage en échape tout
à la fois , comme dans la mer , par quantité
d'endroits , il se formera alors un
bruit confus de sons differens , soit tel
que le cliquetis des armes ,
armes , ainsi que le
rapporte Pline , soit tel qu'un bruit confus
de differentes sortes de voix , comme
on l'a entendu à Ansacq , si l'air s'en
échappe assez violemment par une longue
traînée alors il formera des sons
semblables à ceux des trompettes , ou
tels que ceux de divers Instrumens
lon le plus ou le moins de force
de continuité , avec laquelle il s'échaperą.
>
>
seon
Car si l'air s'échape du nuage avec une
impétuosité considerable , qui approche
de plus près de ce qui se fait pendant
le Tonnerre , les bruits seront plus éclatans
et causeront beaucoup plus de
frayeur , non seulement aux hommes ,
mais même aux animaux , par la singularité
de ces sortes de bruits , auxquels
les Bêtes ne sont pas accoutumées , ce qui
a pû donner lieu aux Loups et aux Cerfs
de fuir hors des Bois et des Forêts , ainsi
qu'il est arrivé au temps de saint Mamert
; et aux Moutons , ou autres Animaux
,
1852 MERCURE DE FRANCE
maux , de forcer leurs parcs , et fuir de
tous côtez comme cela est arrivé en
Suisse et à Ansacq .
>
Enfin si cet échapement de l'air hors
du nuage se fait plus lentement , mais
néanmoins avec quelque durée ; alors on
entendra comme des gémissemens : et c'est
ce qu'on observe tous les jours , lorsqu'on
met sur le feu une Marmite remplie
d'eau ; car chacun sçait , qu'au mo
ment que l'eau vient a s'échauffer , on
est souvent surpris d'entendre tout à coup
comme une voix plaintive , qui sort de
la Marmite ; ce qui ne vient pareillement
, que par une traînée d'air , poussée
hors de l'eau par le feu , qui s'en
échape et en sort avec quelque lenteur
par un seul endroit.
Je dirai en passant , que des Particuliers
de cette Ville , ayant mis dans une
marmite pleine d'eau un coeur de Mouton
et d'autres visceres , pour connoître
par des observations superstisieuses , l'Auteur
d'un prétendu maléfice , jetté à ce
qu'ils croyoient sur leurs chevaux un
bruit plaintif qui sortit de l'eau , leur
fit imaginer que c'étoit le Diable qui étoit
descendu par la cheminée , et qui hurloit
dans la marmite , ils s'enfuirent tous à
l'instant , et abandonnercnt leur opération
superstitieuse.
,
Сон
A O UST. 1731. 1853
Concluons donc de tout ce que je
viens de dire , que les Akousmates , et
les bruits entendus à Ansacq et ailleurs
, se sont naturellement formés dans
un nuage , qui étoit posé sur les lieux où
on les entendoit,ou au moins qui en étoit
peu éloigné ; ajoutons que cela est plus
vrai - semblable , que de croire , comme
le dit l'Auteur du Mémoire , inseré dans
le Mercure du mois de Mars dernier , que
la chose s'est faite par l'addresse de quelque
Particulier , qui a sçû causer ces sortes
de bruits , pour avoir le plaisir de
donner l'épouvante à ceux qui les ont
entendus : parce qu'on ne peut pas raisonnablement
présumer qu'un particulier
qui auroit voulu se donner ce
plaisir , eût pû tenir la chose si secrete,
que personne n'en eût eû la moindre connoissance
, et qu'on lui en eût gardé un
parfait secret, qu'il en cût été de même dans
tous les temps et tous les lieux , ou de
semblables bruits se sont fait entendre.
Peut-on croire que tous ceux qui au- “
roient eu une telle addresse , auroient toujours
voulu la tenir cachée? c'est ce que leur
amour propre ne leur auroit jamais permis.
Les nommez Philibert et Loillet,
dont parle l'Auteur du Mémoire n'ont
eû garde de tenir leur talent caché et se-
>
cret.
1854 MERCURE DE FRANCE
cret. On vient même de faire connoître
par la Lettre insérée dans le Mercure du
mois de May dernier , et dont j'ai parlé
cy-dessus , que la chose n'a jamais pû se
faire par un semblable moyen.
A la Ville d'Eu , le 20. de Juin 1731 .
entendus en l'air dans la Paroisse d'Ansacq,
Diocèse de Beauvais , dont il est
parlé dans le second Volume du Mercure
de France du mois de Décembre 1730.
par M. Capperon , Ancien Doyen de
Saint Maxent.
LF savit quiseterdans le Mercure
E Sçavant qui a écrit la Lettre dont
du mois de , Février dernier m'invite
d'une maniere trop gracieuse à donner
une explication Physique des bruits entendus
à Ansacq , pour queje ne fasse pas
quelque effort pour le satisfaire . Je le fais
d'autant plus volontiers ,que je suis persua
dé que ce qu'il y a d'obligeant dans sa
A iij
Let1842
MERCURE DE FRANCE
›
Lettre vient de la seule bienveillance
qu'il a pour moi , et non de ce que j'ai
pû faire qui ait mérité son attention .
Il s'agit donc de donner une explication
physique de ces bruits qui ont été entendus
en l'air, dans la Paroisse d'Ansacq , proche
de Clermont en Beauvoisis , dont la Relation
a été écrite par le Curé du Lieu avec
beaucoup d'exactitude et d'esprit .
Pour entrer tout d'un coup ´en matiere
, je dis, que, quoique ces bruits qu'on
entend dans l'air ne soient pas bien frequens
, ils ne laissent pas d'arriver quelque
fois. L'Auteur de la Lettre écrite de Bourgogne
cite deux Particuliers qui lui ont
assuré avoir entendus des bruits à peu
près semblables ; sçavoir , l'un en Suisse
et l'autre dans la Bourgogne.
Voici même qu'on nous apprend par
une Lettre insérée dans le Mercure du
mois de May , que de pareils bruits se
sont fait entendre pendant le mois d'Octobre
de l'année derniere , dans un Lieu
que l'on ne nomme pas .
Si nous voulons aller plus loin , l'Auteur
de la Lettre écrite de Bourgogne dit ,
qu'il croit avoir lû dans laChronique d'Helinand
, Moine de Froidmont , qui vivoit
sur la fin du XII . siécle, un fait semblable.
La même chose arriva du tems de saint
Mamert
OKAATO US T. 1731 1843 .
"
Mamert , Evêque de Vienne , c'est-à- dire ,
vers l'an 469. car au rapport de saint
Avit de Vienne et de saint Cesaire d'Arles,
citez par M. Baillet ( a ) on 'entendit plusieurs
fois dans l'air de ces sortes de bruits
pendant la nuit , dont non - seulement
les hommes furent extrémement effrayez ,
mais les animaux mêmes , puisqu'il est
dit , que les Loups et les Cerfs , sortoient
des Forêts , et fuyoient jusques dans les
Villes , ce qui avoit été précédé de frequens
Tremblemens de Terre dans le
Dauphiné où cela se passoit ; et c'est à la
frayeur que causerent ces évenemens rares
et toujours formidables , que les Prieres
des Rogations doivent leur origine.g
Long- tems avant tout cela, (b) Pline avoit
rapporté que lorsque les Romains firent
la Guerre aux Danois , on entendit plusieurs
fois dans l'air unbruit tel que celui
qui se fait dans le tems d'un combat par
le cliquetis des armes , et un autre qui
ressembloit au son des trompettes :
ce qui revient assez au bruit entendu à
Ansacq , puisqu'outre le bruit tumul-
(a) Histoire des Rogations.
(b) Armorum crepitus , et tuba sonitus auditos
è cælo cimbricis bellis accepimus et postea. &c.
Plin. Natur. Hist. lib. 2. cap . 57.
A iiij tueux,
1844 MERCURE DE FRANCE
tueux , on y entendoit aussi comme un
son de Trompette.
Quoiqu'il ne soit donc pas nouveau
d'ertendre dans l'air ces sortes de bruits
et de sons , on peut dire cependant
qu'ils sont toûjours assez rares et ce
n'est que parce qu'ils arrivent si peu souvent
, qu'on en est plus surpris lorsqu'on
les entend , et qu'on ne sçait à quoi en
attribuer la véritable cause ; ce fait n'étant
pas jusqu'à present venu à la connoissance
de Gens délivrez des préjugez
populaires , et qui fussent disposez
à en chercher la cause dans une bonne
Physique. Voyons maintenant si nous
pourrons découvrir comment ces sortes
de sons et de bruits peuvent naturellement
se former dans l'air.
J'avoue qu'il est difficile de comprendre
que cela puisse arriver dans un air
très-pur : car cet air peut bien , à la vérité,
par son mouvement et son agitation , rencontrant
des corps solides diversement figurez
, former diverses sortes de sons ;
mais que des bruits tels des bruits tels que ceux d'Ansacq
, puissent être causés par un agitation
intérieure qui se formeroit dans un
air aussi pur qu'on le suppose , c'est ce
qu'on ne peut raisonnablement penser. <
Il n'en est pas de même de l'air grossier
rempil
AOUST. 1731. 1845
rempli d'exhalaisons et de vapeurs , dans
lequel il est constant qu'il se peut former
des sons et des bruits . Nous en
avons une preuve sensible dans le bruit
formidable du Tonnerre , qui se fait si
souvent entendre dans l'air , lequel est
causé par une sorte de fermentation chaude
, produite dans un nuage , par le mélange
des parties sulphureuses , salines et
terrestres , qui y sont contenuës . Comme
dans cette fermentation le soufre
par consequent le feu , sont de la partie
, il ne faut pas être surpris si la détonation
étant violente , les vibrations
et les ondulations de l'air en sont plus
fortes et plus grandes , d'où il en résulte
des sons plus éclatans et plus terribles.
,
Une fermentation chaude et enflammée
qui se fait dans l'air , étant donc capable
de former des sons et des bruits trèsviolens
, il y a tout lieu de présumer, que
s'il s'y fait des fermentations froides plus
moderées , par un simple mélange des
parties salines avec des parties terrestres
Il s'y formera aussi des sons et des bruits ,
moins grands,à la vérité,que ceux du tonnerre
, mais toujours très -sensibles et frapans.
D'ailleurs ces fermentations doivent
être rares ; parce que la chaleur faisant
élever facilement dans l'air , les parties
AY
sulphu
>
1846 MERCURE DE FRANCE
que
sulphureuses de la terre , il s'ensuit
rarement les parties salines et terrestres
doivent s'y trouver absolument destituées
de quelque mélange de soufre : et
c'est justement parce que ces fermentations
froides se font rarement dans l'air ,
qu'on entend peu souvent les bruits et les
sons qu'elles y forment ; et que quand ,
cela est arrivé , ça été dans des temps et
des lieux , où personne ne s'est avisé d'en
rechercher la cause naturelle : c'est ce
qui a fait que jusqu'à present cette matiere
n'a pas été approfondie.
>
par-
Il me paroît néanmoins , qu'il n'est pas
si difficile de le faire : puisqu'il n'y a qu'à
transporter à l'air grossier, rempli de
ties salines et terrestres ce qu'on voit
tous les jours arriver dans d'autres liquides
, où se font ces sortes de fermentations
froides , tels , par exemple , que le
Vin, le Cidre, et la Bierre , qui fermentent
dans un muid , ou ce qui se fait souvent
dans la mer , lorsqu'elle fait un bruit assez
grand, pour qu'il soit quelquefois entendu
à cinq ou six lieuës loin de son rivage.
Je crois qu'on ne peut pas douter que
ce ne soit une fermentation froide qui se
fait dans le Vin ou dans le Cidre nouveaux
qui soit la cause du bruit er du
murmure assez sensible qui s'entend dan
>
e lc
AOUST. 1731. 1847
.
les muids , où ces liquides et ces sucs sont
contenus ; ce qui n'arrive , que parce que
la matiere subtile , répandue dans tout
'Univers , et qui fait seule la liquidité des
fluides,'agitant continuellement leurs parties
grossieres , poreuses et tartareuses et
d'autres plus fines et plus déliées , par
ses tourbillonnemens , elle les pousse si
vivement les unes contre les autres , que
Les petites s'introduisent par ce moyen
dans les pores des plus grossieres ; et
voilà ce qui fait la fermentation , qui
cause le gouflement , le bouillonnement
de ces liquides , et le bruit qui en résulte .
Car ces parties fines et déliées , entrant
dans les pores parties grossieres , elles
en chassent nécessairement l'air qui y étoit
renfermé ; ce qui lui donne lieu de s'élancer
assez violemment hors de ces liquides
, en les faisant , non seulement gonfler
et bouillonner , mais causant encore
le bruit et le murmure qu'on entend pendant
tout le tems que la fermentation
dure 3 parce que cet air ne peut pas s'échaper
avec quelque impetuosité hors de
la superficie de ces liquides par differens
endroits , qu'il ne frappe avec force l'air
extérieur , et qu'il n'y cause des secousses
et des vibrations assez fortes , pour
ébran ler le sens de l'oüie ; et former par
A vi con
des
1848 MERCURE DE FRANCE
consequent , en même- tems , ce bruit et
ce murmure qu'on entend.
Ce terrible mugissement, pour ainsi dire,
que fait quelquefois la mer , vient d'une
fermentation à peu près pareille ; car
comme nous en sommes ici fort proches,
j'ai été curieux de voir de quelle maniere
la chose se passoit , dans le tems que ce
bruit se faisoit fortement entendre ; et je
vis étant sur le rivage , que c'étoit dans
l'interieur des eaux , que se faisoit tout le
mouvement qui causoit ce bruit , la mer
' en étant pas pour cela plus agitée audehors
d'où j'ai conclu , qu'il est à croire,
que les Rivieres et les pluyes font continuellement
entrer dans la mer une infinité
de parties terrestres , dans lesquelles
beaucoup de particules d'air se trouvent
aussi renfermées et emprisonnées.
Mais parce que l'eau de la mer à cause
de sa grossiereté , ne peut pas seule faire
une dissolution assez parfaite de ces molécules
terrestres , pour chasser l'air qui
y est envelope ; s'il arrive que dans certain
espace de mer , il s'éleve de son fond
une vapeur remplie d'un Sel acide , fin
et délicat , c'est alors , que la matiere subtile
qui cause la fluidité de ses eaux , s'emparant
des éguilles fines et pointues de ce
Sel , elle les pousse violemment contre
ces
AOUST. 1731. 1849
ces molécules ; et les faisant entrer violemment
comme autant de petits coins
dans leurs pores , elle en brise et en
écarte les parties avec plus de facilité.
Les particules de Pair ont au même
instant la liberté de s'échaper de leur pri
son ; et leurs petits ressorts se débondant
, elles font alors dans l'eau de mer,
les mêmes effets qu'elles operent lorsqu'el
les échapent dans le Vin ou dans le Ĉidre
qui fermentent, c'est-à - dire , qui si elles ne
le font pas gonfler , à cause de la trop
grande étendue de ses eaux , ni trop
visiblement bouillonner , à cause du moument
extérieur de ses vagues , au moins
en s'échapant par une infinité d'endroits
de sa superficie , elles frappent l'air extérieur
avec d'autant plus de force , qu'el
les se trouvent réunies en plus grand nombre
, d'où il en résulte un bruit d'autang
plus éclatant.
Il ne reste maintenant qu'à appliquer
tout ce que je viens de dire,aux Akousmates
en général , et en particulier aux bruits.
entendus à Ansacq. Car si des fermentations
froides , qui se font dans les liquides
tels que le Vin , le Cidre , l'eau de mer ,
forment et causent naturellement des
sons; de pareilles fermentations pouvant
se faire également dans l'air , il est clair
qu'elles
1850 MERCURE DE FRANCE
qu'elles y peuvent aussi former des bruits
et des sons. Or il est hors de doute , que
dans les vapeurs qui s'élevent en l'air , il
y en a qui emportent avec elles quan
tité de parties simplement terrestres
qui contiennent aussi de l'air , et quantité
d'aurres parties purement salines. Mes
Observations sur les Sels , contenus dans
l'air , me l'ont fait assez connoître.
Personne ne peut donc disconvenir ,
que ces parties terrestres et salines , se
trouvant ramassées ensemble dans un
nuage , elles ne puissent y fermenter
comme elles font dans la Mer , et par
conséquent y former des sons plus ou
moins grands , selon que le nuage au
ra plus ou moins d'étendue et d'épais
seur , et qui paroîtront plus ou moins éloignés
, suivant que le nuage se trouvera
plus ou moins loin.
D'ailleurs cela peut arriver dans certains
Cantons , plutôt que dans d'autres,
soit parce qu'il s'y trouve beaucoup plus
de cette espece de Sel , ou qu'il s'y en
fait dans de certains temps une éva
poration plus grande ; ou enfin parce
qu'il y arrive quelque remüement ou
Tremblement de Terre , qui contribue
à cette évaporation , propre à former
dans l'air la fermentation convenable
pour
A O UST . 1731. 1851
,
pour y causer ces sortes de bruits .
Pendant cette fermentation , si l'air
renfermé dans le Nuage en échape tout
à la fois , comme dans la mer , par quantité
d'endroits , il se formera alors un
bruit confus de sons differens , soit tel
que le cliquetis des armes ,
armes , ainsi que le
rapporte Pline , soit tel qu'un bruit confus
de differentes sortes de voix , comme
on l'a entendu à Ansacq , si l'air s'en
échappe assez violemment par une longue
traînée alors il formera des sons
semblables à ceux des trompettes , ou
tels que ceux de divers Instrumens
lon le plus ou le moins de force
de continuité , avec laquelle il s'échaperą.
>
>
seon
Car si l'air s'échape du nuage avec une
impétuosité considerable , qui approche
de plus près de ce qui se fait pendant
le Tonnerre , les bruits seront plus éclatans
et causeront beaucoup plus de
frayeur , non seulement aux hommes ,
mais même aux animaux , par la singularité
de ces sortes de bruits , auxquels
les Bêtes ne sont pas accoutumées , ce qui
a pû donner lieu aux Loups et aux Cerfs
de fuir hors des Bois et des Forêts , ainsi
qu'il est arrivé au temps de saint Mamert
; et aux Moutons , ou autres Animaux
,
1852 MERCURE DE FRANCE
maux , de forcer leurs parcs , et fuir de
tous côtez comme cela est arrivé en
Suisse et à Ansacq .
>
Enfin si cet échapement de l'air hors
du nuage se fait plus lentement , mais
néanmoins avec quelque durée ; alors on
entendra comme des gémissemens : et c'est
ce qu'on observe tous les jours , lorsqu'on
met sur le feu une Marmite remplie
d'eau ; car chacun sçait , qu'au mo
ment que l'eau vient a s'échauffer , on
est souvent surpris d'entendre tout à coup
comme une voix plaintive , qui sort de
la Marmite ; ce qui ne vient pareillement
, que par une traînée d'air , poussée
hors de l'eau par le feu , qui s'en
échape et en sort avec quelque lenteur
par un seul endroit.
Je dirai en passant , que des Particuliers
de cette Ville , ayant mis dans une
marmite pleine d'eau un coeur de Mouton
et d'autres visceres , pour connoître
par des observations superstisieuses , l'Auteur
d'un prétendu maléfice , jetté à ce
qu'ils croyoient sur leurs chevaux un
bruit plaintif qui sortit de l'eau , leur
fit imaginer que c'étoit le Diable qui étoit
descendu par la cheminée , et qui hurloit
dans la marmite , ils s'enfuirent tous à
l'instant , et abandonnercnt leur opération
superstitieuse.
,
Сон
A O UST. 1731. 1853
Concluons donc de tout ce que je
viens de dire , que les Akousmates , et
les bruits entendus à Ansacq et ailleurs
, se sont naturellement formés dans
un nuage , qui étoit posé sur les lieux où
on les entendoit,ou au moins qui en étoit
peu éloigné ; ajoutons que cela est plus
vrai - semblable , que de croire , comme
le dit l'Auteur du Mémoire , inseré dans
le Mercure du mois de Mars dernier , que
la chose s'est faite par l'addresse de quelque
Particulier , qui a sçû causer ces sortes
de bruits , pour avoir le plaisir de
donner l'épouvante à ceux qui les ont
entendus : parce qu'on ne peut pas raisonnablement
présumer qu'un particulier
qui auroit voulu se donner ce
plaisir , eût pû tenir la chose si secrete,
que personne n'en eût eû la moindre connoissance
, et qu'on lui en eût gardé un
parfait secret, qu'il en cût été de même dans
tous les temps et tous les lieux , ou de
semblables bruits se sont fait entendre.
Peut-on croire que tous ceux qui au- “
roient eu une telle addresse , auroient toujours
voulu la tenir cachée? c'est ce que leur
amour propre ne leur auroit jamais permis.
Les nommez Philibert et Loillet,
dont parle l'Auteur du Mémoire n'ont
eû garde de tenir leur talent caché et se-
>
cret.
1854 MERCURE DE FRANCE
cret. On vient même de faire connoître
par la Lettre insérée dans le Mercure du
mois de May dernier , et dont j'ai parlé
cy-dessus , que la chose n'a jamais pû se
faire par un semblable moyen.
A la Ville d'Eu , le 20. de Juin 1731 .
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Résumé : EXPLICATION Physique des bruits entendus en l'air dans la Paroisse d'Ansacq, Diocèse de Beauvais, dont il est parlé dans le second Volume du Mercure de France du mois de Décembre 1730. par M. Capperon, Ancien Doyen de Saint Maxent.
En décembre 1730, le Mercure de France rapporte des bruits mystérieux entendus dans l'air à Ansacq, une paroisse du diocèse de Beauvais. M. Capperon, ancien doyen de Saint Maxent, propose une explication physique à ces phénomènes. Ces bruits, décrits comme tumultueux et similaires à des sons de trompette, ont été observés dans diverses régions et époques, y compris en Suisse, en Bourgogne, et durant l'Antiquité. Capperon cite des exemples historiques similaires, comme ceux rapportés par Pline et lors des prières des Rogations initiées par saint Mamert. Il explique que ces bruits ne peuvent se produire dans un air pur mais sont possibles dans un air grossier rempli d'exhalaisons et de vapeurs. Il compare ces phénomènes à des fermentations observées dans des liquides comme le vin, le cidre, et la bière, ainsi qu'à des bruits marins. L'auteur suggère que des fermentations froides dans l'air, causées par le mélange de parties salines et terrestres, peuvent produire des sons et des bruits. Ces fermentations sont rares, ce qui explique la surprise et l'incertitude quant à leur origine. Il conclut que les bruits entendus à Ansacq peuvent être expliqués par des fermentations dans les nuages, similaires à celles observées dans d'autres liquides. Le texte du Mercure de France de 1852 et 1853 discute également des phénomènes acoustiques observés à Ansacq et dans d'autres régions. Il explique que les bruits entendus, tels que des gémissements ou des voix plaintives, sont causés par l'échappement de l'air hors des nuages ou de l'eau chauffée. Un exemple est donné avec une marmite d'eau chauffée, où l'air s'échappe lentement, produisant des sons similaires à des plaintes. Le texte mentionne une anecdote où des habitants de la ville, ayant placé des viscères de mouton dans une marmite d'eau, ont interprété un bruit plaintif comme étant le Diable, ce qui les a effrayés et les a fait fuir. L'auteur conclut que les bruits entendus à Ansacq et ailleurs sont dus à des phénomènes naturels se produisant dans les nuages. Il rejette l'idée que ces bruits soient causés par des individus cherchant à effrayer les autres, arguant que cela serait difficile à garder secret. Une lettre insérée dans le Mercure de mai 1731 confirme que les bruits ne peuvent pas être produits par des moyens artificiels.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 2572-2580
RÉFLEXIONS sur l'explication Physique, donnée par M. Capperon, ancien Doyen de S. Maixent, de l'Akousmate d'Ansacq, inserée dans le Mercure de France, du mois d'Aoust 1731.
Début :
Je n'aurois eu garde de hazarder une explication Physique de l'Akousmate [...]
Mots clefs :
Explication physique, Ansacq, Témérité, tintamarre, Colonnes d'air, Fermentation froide, Liquide, Substance
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texteReconnaissance textuelle : RÉFLEXIONS sur l'explication Physique, donnée par M. Capperon, ancien Doyen de S. Maixent, de l'Akousmate d'Ansacq, inserée dans le Mercure de France, du mois d'Aoust 1731.
RÉFLEXIONS sur l'explication Physique
,
donnée
par M. Capperon , ancien
Doyen de S. Maixent , de lAkousmate
d'Ansacq , inserée dans le Mercure de
France , du mois d'Aoust 1731.
E n'aurois eu garde de hazarder une
explication Physique de l'Akousmate
d'Ansacq , si j'eusse sçu que dans le même
temps que j'écrivois , M. Capperon
avoit la plume à la main pour traiter la
la même matiere.Concourir avec une personne
qui a produit à la République des
Lettres , tant de coups de maître ; c'auroit
été assurément une témérité à un apprentif
Physicien. Mais puisque la chose est
faite
NOVEMBRE. 1731 .
2573
faite , j'ai tout lieu de m'en consoler par
l'union et la conformité de nos sentimens.
Nous confinons , en effet l'un et l'autre
le tintamare d'Ansacq dans une nuée 3
nous disons l'un et l'autre que la rarefaction
ou fermentation d'une matiere concentrée
dans quelque concavité de la nuée,
et qui forçant sa prison , frape les colomnes
d'air voisines , est la cause des sons ';
enfin nous faisons l'un et l'autre dépendre
la variété de ces sons des differentes
manieres dont cette matiere s'échapera de
l'endroit d'où elle sort.
Nos explications ne different donc que
dans le plus ou le moins d'étenduë; peutêtre
que ce sçavant Physicien a crû les
principes Physiques si intelligibles qu'il
étoit inutile de les éclaircir davantage
du moins en cela a- t- il jugé des autres par
lui- même ; peut-être aussi , plutôt par
une prolixité trop ordinaire aux jeunes
gens , que par necessité , ai - je conduit
trop loin mes réfléxions : C'est au Lecteur
à en juger.
Il me reste neanmoins quelques scrupules
sur l'explication de M. Capperon.
1º. Je confesse avec sincerité que je ne
comprens pas bien ce que c'est que fermentation
froide. J'ai toujours crû que la
chaleur étoit le principe de la fermentation
2574 MERCURE DE FRANCE
tion , et que la violence ou le peu de
sensibilité qu'on y éprouve , n'avoit d'autre
cause que la difference du dégré de
chaleur,
2º. La cause que donne M. Capperon
de la fermentation m'embarrasse.» La ma-
» tiere subtile ( dit- il ) agitant continuel-
» lement leurs parties grossieres , poreu-
» ses et tartareuses ( des liquides ) par ses
>> tourbillonemens , elles les pousse si vi-
» vement les uns contre les autres , que
les petites s'introduisent par ce moyen
» dans les pores des plus grossieres . Je
me suis persuadé jusqu'ici que
les parties
des fluides n'avoient point de pores , que
la fluidité ne consistoit que dans un ar.
rangement de parties tres - délicates , tresfléxibles
et un peu longues , toutes contigues
ou couchées les unes sur les autres ,
sans y être adherantes ; en sorte que la
matiere subtile ait passage entre chaque
partie.
3°. Ces termes de M. Capperon , qui
se trouvent à la page 1850. » Dans les va-
» peurs qui s'élevent en l'air , il y en a
» qui emportent avec elles quantité de
parties simplement terrestres , qui con-
» tiennent aussi de l'air , et quantité d'au
» tres parties purement salines . Ces termes
, dis-je , jettent dans mon esprit une
cer-
14
NOVEMBRE. 1731. 2575
certaine confusion sur la nature des vapeurs
et de l'air. Pour dissiper tous ces
scrupules et pour me desabuser de mes
erreurs Phylosophiques , je proposerai
trois réfléxions ; j'attens de la politesse.de
M. Capperon qu'il voudra bien se donner
la peine d'y répondre s'il les trouve rai
sonnables.
PREMIERE REFLEXION.
De l'idée que nous donne M. Cappeton
de la fermentation , naissent dans l'esprit
trois conséquences , que l'expérience
contredit également.
A
9
S'il s'y peut trouver des fermentations
froides , et qu'on puisse les attribuer aux
liqueurs et à presque tous les Corps que
nous voyons capables de fermentation ;
il s'ensuivra qu'en quelque situation que
soient ces corps et en toute saison , ils seront
capables de la même fermentation
et qu'ils devront conserver ce même dégré
de froid qu'ils ont hors de ces momens
de fermentation , parce qu'ils contiendront
en eux - mêmes , et toujours ,
leur ferment , qui sera indépendant de
toute autre cause , et que la matiere subtile
roulera sans interruption ou dans leurs
pores ou entre leurs parties. Premiere
consequence,
>
Si
2576 MERCURE DE FRANCE
Si la fermentation n'avoit pour cause
que l'agitation des parties , occasionnée
par la matiere subtile, cette agitation étant
continuelle , suivant le principe même de
M. Capperon , il s'ensuivroit que cette
fermentation arriveroit aussi-bien dans un
vin fait , &c. dans un vin nouveau ;
que
et qu'elle devroit être continuelle. Seconde
conséquence.
Enfin si tout l'effet de la matiere subtile
n'est qu'une injection , pour ainsi dire ,
des parties les plus fines dans les pores des
plus grossieres , il s'ensuivra une condensation
, une diminution de volume , sans
perte de substance ( cè qui est le contraire
de la fermentation ) , parce qu'un corps
remplit d'autant moins d'espace que ses
pores sont plus serrez , ses intervalles
plus remplis par ses propres parties ; c'est
ainsi qu'une livre de laine à un volume
plus considerable qu'une livre d'or. Troisiéme
conséquence.
SECONDE REFLEXION.
Pour éviter ces trois inconvéniens , il
> me semble qu'on peut assigner trois causes
de la fermentation .
1º. Un mouvement circulaire trop violent
de la matiere subtile , occasionné par
un corps étranger ; précipitation qui ne
1
lui
NOVEMBRE. 1731. 2577
lui permet plus de glisser par ses corps
ordinaires , mais qui la chasse avec confusion
sur la surface même des parties ;
d'où il arrive que secondée par les globules
du second élement qu'elle a frappées ,
elle souleve , émousse , rompt ces parties,
entraîne avec elles toutes celles dont elle
peut se charger , qu'elle écarte ou pousse
au dehors toutes les parties qui lui résistent.
De-là les boüllons , de là le bruit , la
fumée , le tarissement. De-là l'admirable
fermentation du lait et de toutes les autres
liquides , dont les parties grasses et branchues
résistent à l'effort de ces matieres.
De -là la difference de saveur des liqueurs
qui ont boüilli , d'avec les crues , & c.
2. Un entrelassement de parties grasses
et branchuës avec les globules du second
élement, qui en enferme ou en retrécit
les interstices , et précipite par là le
mouvement de la matiere subtile ; précipitation
qui ébranle ces Globules, Ces Globules
frappez unissent leur action avec
celle de la matiere subtile , ils soulevent
ensemble ces parties grasses , les brisent,
chassent au dehors ou précipitent en bas
par leur mouvement orbiculaire les plus
grossieres , qui s'opposoient à leurs passages
,et leur action sera d'autant plus prompre
et plus sensible que l'espace sera plus
E rem- .
2578 MERCURE DE FRANCE
rempli , que les passages seront plus serrez
par ces parties grasses , et qu'elles mêmes
seront plus facilement ébranlées et
moins poreuses . De- là cette fermentation
ne doit durer qu'autant que cet obstacle
subsistera, De-là la douceur de toutes les
liqueurs nouvelles ; de- là leur dégré de
chaleur dans le tems de la fermentation
de -là plus elles ont bouilli , plus elles sont
claires , plus elles sont belles , meilleures
elles sont , et moins ily a de lie , &c,
3º. L'activité de la matiere subtile , qui
poussée par un corps étranger , détache
peu à peu les parties les plus Aéxibles d'un
corps solide , les brise , les émousse , entraine
avec elles les plus déliées , pousse ,
souleve,écarte les autres ; et son action reçoit
son dégré de vélocité , de la maniere
dont le corps étranger agit surelle.En sor,
te même que si ce corps étranger agit trop
violemment , elle enleve les parties les plus
legeres;et chassant les autres les unes dans
les autres , elle condense le corps et le fait
durcir. Tellé est la fermentation qui arrive
dans la pâte de certains fromages. Delà
il est aisé de concevoir pourquoi ces
fermentations sont plus promptes et plus
violentes l'été que l'hyver ; de-la dans
cette derniere saison cès fermentations
n'arriveroient pas , si l'on n'échauffoit la
pâte
NOVEMBRE. 1731 . 2579
pâte , si l'on ne mettoit les fromages dans
une cave chaude , & c.
Je crois,en un mot , qu'on peut par ces
trois causes donner une raison probable
de tous les phénoménes que nous voyons
dans la fermentation , sans qu'il en puisse
résulter aucune absurdité.
que
TROISIEME REFLEXION.
Les Philosophes entendent par ces termes
: Vapeur , Exhalaison , une grande
quantité de Molecules , de petites parties ,
le plus souvent insensibles , qui s'élevent
jusqu'à une hauteur indéterminée. Il est
facile de se convaincre qu'il s'en détache
de toutes sortes de corps , quoiqu'il y ait ,
des corps qui en fournissent de plus faci-)
les à se lier et à s'acrocher. Il n'est question
de
sçavoir comment ces particules s'élevent
, ce qui n'est pas fort difficile à
comprendre , quand on est persuadé
les matieres du premier et du second élement
( et sur tout la premiere ) passent
avec rapidité et continuellement dans les
pores ou intervalles de quelque corps que
ce soit ; or il est impossible qu'en passant
ainsi , ces matieres n'ébranlent,, ne détachent
et n'enlevent avec elles quelques petites
parties , qui ne pourront être plus
grosses ou plutôt même que d'un moin-
Eij dre
que
2580 MERCURE DE FRANCE
dre volume que celles qui les détachent,
Il ne faut réfléchir sur le tarissement
que
de tous les fluides , sur l'alteration de tous
les corps, pour n'en pouvoir douter. Delà
les nuées , de- là le tonnerre et tout son
tintamare , en y joignant mes principes sur
la fermentation .
De cette derniere réfléxion on doit nécessairement
conclure que les parties qui
composent ce qu'on appelle Vapeurs, sont
trop fines pour être poreuses, et pour pou :
voir par conséquent contenir de l'air ,
qu'elles sont elles -mêmes enlevées et contenuës
; d'où il suit qu'elles ne peuvent
enlever une quantité de parties qui contiennent
de l'air , comme le prétend M.
Capperon.
Telles sont les réfléxions dans lesquel
les l'ouvrage de M. Capperon m'a engagé.
Ces réfléxions n'ayant d'autre but
que de m'instruire , d'éclaircir la verité
et de profiter des grandes lumieres de ce
Sçavant, Je l'en fais volontiers le juge,
Lalonat de Soulàines,
,
donnée
par M. Capperon , ancien
Doyen de S. Maixent , de lAkousmate
d'Ansacq , inserée dans le Mercure de
France , du mois d'Aoust 1731.
E n'aurois eu garde de hazarder une
explication Physique de l'Akousmate
d'Ansacq , si j'eusse sçu que dans le même
temps que j'écrivois , M. Capperon
avoit la plume à la main pour traiter la
la même matiere.Concourir avec une personne
qui a produit à la République des
Lettres , tant de coups de maître ; c'auroit
été assurément une témérité à un apprentif
Physicien. Mais puisque la chose est
faite
NOVEMBRE. 1731 .
2573
faite , j'ai tout lieu de m'en consoler par
l'union et la conformité de nos sentimens.
Nous confinons , en effet l'un et l'autre
le tintamare d'Ansacq dans une nuée 3
nous disons l'un et l'autre que la rarefaction
ou fermentation d'une matiere concentrée
dans quelque concavité de la nuée,
et qui forçant sa prison , frape les colomnes
d'air voisines , est la cause des sons ';
enfin nous faisons l'un et l'autre dépendre
la variété de ces sons des differentes
manieres dont cette matiere s'échapera de
l'endroit d'où elle sort.
Nos explications ne different donc que
dans le plus ou le moins d'étenduë; peutêtre
que ce sçavant Physicien a crû les
principes Physiques si intelligibles qu'il
étoit inutile de les éclaircir davantage
du moins en cela a- t- il jugé des autres par
lui- même ; peut-être aussi , plutôt par
une prolixité trop ordinaire aux jeunes
gens , que par necessité , ai - je conduit
trop loin mes réfléxions : C'est au Lecteur
à en juger.
Il me reste neanmoins quelques scrupules
sur l'explication de M. Capperon.
1º. Je confesse avec sincerité que je ne
comprens pas bien ce que c'est que fermentation
froide. J'ai toujours crû que la
chaleur étoit le principe de la fermentation
2574 MERCURE DE FRANCE
tion , et que la violence ou le peu de
sensibilité qu'on y éprouve , n'avoit d'autre
cause que la difference du dégré de
chaleur,
2º. La cause que donne M. Capperon
de la fermentation m'embarrasse.» La ma-
» tiere subtile ( dit- il ) agitant continuel-
» lement leurs parties grossieres , poreu-
» ses et tartareuses ( des liquides ) par ses
>> tourbillonemens , elles les pousse si vi-
» vement les uns contre les autres , que
les petites s'introduisent par ce moyen
» dans les pores des plus grossieres . Je
me suis persuadé jusqu'ici que
les parties
des fluides n'avoient point de pores , que
la fluidité ne consistoit que dans un ar.
rangement de parties tres - délicates , tresfléxibles
et un peu longues , toutes contigues
ou couchées les unes sur les autres ,
sans y être adherantes ; en sorte que la
matiere subtile ait passage entre chaque
partie.
3°. Ces termes de M. Capperon , qui
se trouvent à la page 1850. » Dans les va-
» peurs qui s'élevent en l'air , il y en a
» qui emportent avec elles quantité de
parties simplement terrestres , qui con-
» tiennent aussi de l'air , et quantité d'au
» tres parties purement salines . Ces termes
, dis-je , jettent dans mon esprit une
cer-
14
NOVEMBRE. 1731. 2575
certaine confusion sur la nature des vapeurs
et de l'air. Pour dissiper tous ces
scrupules et pour me desabuser de mes
erreurs Phylosophiques , je proposerai
trois réfléxions ; j'attens de la politesse.de
M. Capperon qu'il voudra bien se donner
la peine d'y répondre s'il les trouve rai
sonnables.
PREMIERE REFLEXION.
De l'idée que nous donne M. Cappeton
de la fermentation , naissent dans l'esprit
trois conséquences , que l'expérience
contredit également.
A
9
S'il s'y peut trouver des fermentations
froides , et qu'on puisse les attribuer aux
liqueurs et à presque tous les Corps que
nous voyons capables de fermentation ;
il s'ensuivra qu'en quelque situation que
soient ces corps et en toute saison , ils seront
capables de la même fermentation
et qu'ils devront conserver ce même dégré
de froid qu'ils ont hors de ces momens
de fermentation , parce qu'ils contiendront
en eux - mêmes , et toujours ,
leur ferment , qui sera indépendant de
toute autre cause , et que la matiere subtile
roulera sans interruption ou dans leurs
pores ou entre leurs parties. Premiere
consequence,
>
Si
2576 MERCURE DE FRANCE
Si la fermentation n'avoit pour cause
que l'agitation des parties , occasionnée
par la matiere subtile, cette agitation étant
continuelle , suivant le principe même de
M. Capperon , il s'ensuivroit que cette
fermentation arriveroit aussi-bien dans un
vin fait , &c. dans un vin nouveau ;
que
et qu'elle devroit être continuelle. Seconde
conséquence.
Enfin si tout l'effet de la matiere subtile
n'est qu'une injection , pour ainsi dire ,
des parties les plus fines dans les pores des
plus grossieres , il s'ensuivra une condensation
, une diminution de volume , sans
perte de substance ( cè qui est le contraire
de la fermentation ) , parce qu'un corps
remplit d'autant moins d'espace que ses
pores sont plus serrez , ses intervalles
plus remplis par ses propres parties ; c'est
ainsi qu'une livre de laine à un volume
plus considerable qu'une livre d'or. Troisiéme
conséquence.
SECONDE REFLEXION.
Pour éviter ces trois inconvéniens , il
> me semble qu'on peut assigner trois causes
de la fermentation .
1º. Un mouvement circulaire trop violent
de la matiere subtile , occasionné par
un corps étranger ; précipitation qui ne
1
lui
NOVEMBRE. 1731. 2577
lui permet plus de glisser par ses corps
ordinaires , mais qui la chasse avec confusion
sur la surface même des parties ;
d'où il arrive que secondée par les globules
du second élement qu'elle a frappées ,
elle souleve , émousse , rompt ces parties,
entraîne avec elles toutes celles dont elle
peut se charger , qu'elle écarte ou pousse
au dehors toutes les parties qui lui résistent.
De-là les boüllons , de là le bruit , la
fumée , le tarissement. De-là l'admirable
fermentation du lait et de toutes les autres
liquides , dont les parties grasses et branchues
résistent à l'effort de ces matieres.
De -là la difference de saveur des liqueurs
qui ont boüilli , d'avec les crues , & c.
2. Un entrelassement de parties grasses
et branchuës avec les globules du second
élement, qui en enferme ou en retrécit
les interstices , et précipite par là le
mouvement de la matiere subtile ; précipitation
qui ébranle ces Globules, Ces Globules
frappez unissent leur action avec
celle de la matiere subtile , ils soulevent
ensemble ces parties grasses , les brisent,
chassent au dehors ou précipitent en bas
par leur mouvement orbiculaire les plus
grossieres , qui s'opposoient à leurs passages
,et leur action sera d'autant plus prompre
et plus sensible que l'espace sera plus
E rem- .
2578 MERCURE DE FRANCE
rempli , que les passages seront plus serrez
par ces parties grasses , et qu'elles mêmes
seront plus facilement ébranlées et
moins poreuses . De- là cette fermentation
ne doit durer qu'autant que cet obstacle
subsistera, De-là la douceur de toutes les
liqueurs nouvelles ; de- là leur dégré de
chaleur dans le tems de la fermentation
de -là plus elles ont bouilli , plus elles sont
claires , plus elles sont belles , meilleures
elles sont , et moins ily a de lie , &c,
3º. L'activité de la matiere subtile , qui
poussée par un corps étranger , détache
peu à peu les parties les plus Aéxibles d'un
corps solide , les brise , les émousse , entraine
avec elles les plus déliées , pousse ,
souleve,écarte les autres ; et son action reçoit
son dégré de vélocité , de la maniere
dont le corps étranger agit surelle.En sor,
te même que si ce corps étranger agit trop
violemment , elle enleve les parties les plus
legeres;et chassant les autres les unes dans
les autres , elle condense le corps et le fait
durcir. Tellé est la fermentation qui arrive
dans la pâte de certains fromages. Delà
il est aisé de concevoir pourquoi ces
fermentations sont plus promptes et plus
violentes l'été que l'hyver ; de-la dans
cette derniere saison cès fermentations
n'arriveroient pas , si l'on n'échauffoit la
pâte
NOVEMBRE. 1731 . 2579
pâte , si l'on ne mettoit les fromages dans
une cave chaude , & c.
Je crois,en un mot , qu'on peut par ces
trois causes donner une raison probable
de tous les phénoménes que nous voyons
dans la fermentation , sans qu'il en puisse
résulter aucune absurdité.
que
TROISIEME REFLEXION.
Les Philosophes entendent par ces termes
: Vapeur , Exhalaison , une grande
quantité de Molecules , de petites parties ,
le plus souvent insensibles , qui s'élevent
jusqu'à une hauteur indéterminée. Il est
facile de se convaincre qu'il s'en détache
de toutes sortes de corps , quoiqu'il y ait ,
des corps qui en fournissent de plus faci-)
les à se lier et à s'acrocher. Il n'est question
de
sçavoir comment ces particules s'élevent
, ce qui n'est pas fort difficile à
comprendre , quand on est persuadé
les matieres du premier et du second élement
( et sur tout la premiere ) passent
avec rapidité et continuellement dans les
pores ou intervalles de quelque corps que
ce soit ; or il est impossible qu'en passant
ainsi , ces matieres n'ébranlent,, ne détachent
et n'enlevent avec elles quelques petites
parties , qui ne pourront être plus
grosses ou plutôt même que d'un moin-
Eij dre
que
2580 MERCURE DE FRANCE
dre volume que celles qui les détachent,
Il ne faut réfléchir sur le tarissement
que
de tous les fluides , sur l'alteration de tous
les corps, pour n'en pouvoir douter. Delà
les nuées , de- là le tonnerre et tout son
tintamare , en y joignant mes principes sur
la fermentation .
De cette derniere réfléxion on doit nécessairement
conclure que les parties qui
composent ce qu'on appelle Vapeurs, sont
trop fines pour être poreuses, et pour pou :
voir par conséquent contenir de l'air ,
qu'elles sont elles -mêmes enlevées et contenuës
; d'où il suit qu'elles ne peuvent
enlever une quantité de parties qui contiennent
de l'air , comme le prétend M.
Capperon.
Telles sont les réfléxions dans lesquel
les l'ouvrage de M. Capperon m'a engagé.
Ces réfléxions n'ayant d'autre but
que de m'instruire , d'éclaircir la verité
et de profiter des grandes lumieres de ce
Sçavant, Je l'en fais volontiers le juge,
Lalonat de Soulàines,
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Résumé : RÉFLEXIONS sur l'explication Physique, donnée par M. Capperon, ancien Doyen de S. Maixent, de l'Akousmate d'Ansacq, inserée dans le Mercure de France, du mois d'Aoust 1731.
Le texte traite de l'explication physique de l'Akousmate d'Ansacq, un phénomène naturel, proposée par M. Capperon et publiée dans le Mercure de France en août 1731. L'auteur, bien que réticent à proposer une explication concurrente, se réjouit de la conformité de leurs points de vue. Les deux auteurs attribuent les sons de l'Akousmate à la rarefaction ou fermentation d'une matière concentrée dans une nuée, qui en se libérant, frappe les colonnes d'air voisines. Les différences entre leurs explications résident dans le niveau de détail. L'auteur exprime des scrupules sur l'explication de M. Capperon, notamment concernant la notion de 'fermentation froide', qu'il trouve contradictoire avec l'idée que la chaleur est le principe de la fermentation. Il questionne également la description de la matière subtile agitant les parties grossières des liquides et la nature des vapeurs et de l'air. Pour clarifier ces points, l'auteur propose trois réflexions. La première critique les conséquences logiques de la théorie de M. Capperon sur la fermentation. La seconde propose trois causes alternatives à la fermentation : un mouvement violent de la matière subtile, un entrelacement de parties grasses avec les globules du second élément, et l'activité de la matière subtile détachant les parties d'un corps solide. La troisième réflexion aborde la nature des vapeurs et des exhalaisons, concluant que les particules composant les vapeurs sont trop fines pour être poreuses et contenir de l'air. L'auteur conclut en exprimant son désir d'instruction et d'éclaircissement de la vérité, laissant à M. Capperon le rôle de juge de ses réflexions.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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