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1
p. 351-365
LETTRE écrite de Brest, contenant l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Début :
Un de mes amis revenu l'année passée de la Chine m'a fait voir une singularité [...]
Mots clefs :
Tragédie chinoise, Médecin, Orphelin, Fils, Tchao-Chi-cou, Mort, Chinois, Princesse, Enfant, Jeune, Tragédie, Histoire, Théâtre, Ministre, Action
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE écrite de Brest, contenant l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
LETTRE écrite de Brest contenant
l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Un de mes amis revenu l'année passée
de la Chine m'a fait voir une singula-
G vj
rité
352 MERCURE DE FRANCE
rité Littéraire que je me fais un plaisir de
vous annoncer. C'est la Traduction d'une
Tragédie Chinoise. L'Ouvrage en doit être
envoyé à Paris ; si l'idée generale que
vous en prendrez dans l'Extrait que je
vous envoye pique votre curiosité , il
vous sera facile de voir l'Ouvrage entier,
qui doit être remis à M.....
Le Traducteur avertit dans une Préface
que les Tragédies Chinoises ne sont
assujetties à aucune des Regles de nôtre
Théatre moderne , celle des trois unitez
y est absolument inconnue et une Tragédie
Chinoise est proprement une Histoire
mise en Dialogue , dont les différentes
parties sont autant de Scenes détachées
, entre lesquelles il n'y a d'autre
liaison que celle qu'ont entr'elles les diverses
actions particulieres qui forment
la suite de cette Histoire.
Le Lieu change le plus souvent d'une
Scene à l'autre , mais de même que l'Acteur
en se montrant la premiere fois à
soin de dire , je suis un tel , et je viens
telle chose ; de même aussi en
pour
changeant de lieu il a soin d'avertir qu'il
est en un tel endroit, et que c'est là mêine
que va se passer l'action.
> Il en est de même du tems lorsque
l'intervalle d'une Scene à l'autre est un
peu
FEVRIER. 1734. 353
peu considérable,l'Acteur ne manque pas
de le dire et d'ajoûter que depuis un tel
Evenement il s'est écoulé tant de tems .
,
Vous voyez par-là , Monsieur , que
ces Tragédies ont du moins le mérite de
la clarté et que le violement de nos
regles ne cause aucun embarras à l'imagination
des Spectateurs. Les Piéces
Espagnoles , Italiennes , Angloises et
même les Piéces Françoises du commencement
du dernier siécle n'étoient pas
plus régulieres que celle des Chinois ;
mais le violement de la Regle des unitez
, y jettoit une obscurité bien plus
grande,parce que le Spectateur ne sçavoit
jamais dans quel tems et dans quel lieu
il s'étoit transporté, qu'après avoir entendu
une partie de la Scene ; l'embarras
étoit peut être encore plus grand dans
quelques unes de nos Piéces où l'on
cache l'inobservation de l'unité de tems
et de l'unité de lieu au dépens de la vraisemblance
et de la bienséance , comme
dans Cinna.
Il ne paroît pas beaucoup d'art dans
la maniere dont s'annoncent les Personnages
Chinois dans la Piéce que j'ai lûë
mais je ne doute pas que d'autres Piéces
n'en montrent davantage . Si quelqu'un
des Missionnaires Européens vouloit faire
sur
354 MERCURE DE FRANCE
sur le Théatre Chinois , ce que le R. P.
Brumoi a fait sur le Theatre des Grecs ,
nous en donner une Histoire ou une
Notice , je ne doute pas que son Ouvrage
ne fut bien reçu ; et à juger des
Tragédies Chinoises par le caractere general
de cette Nation , et par le ton de
celle-ci , je suis persuadé que l'on y verroit
bien d'autres exemples de vertu et de
courage, que dans les Tragédies Grecques
où la véritable vertu est presque inconnuë
; ou le courage est une passion et
une passion turbulente qui offusque la
raison et bannit la tranquillité de l'Ame ;
où l'orgueil et l'amour de la gloire bien
plus que l'attachement au devoir sont la
Source des grandes actions et où les
crimes ne se punissent presque jamais
que par d'autres crimes .
La Déclamation Chinoise , à ce que
nous apprend le Traducteur , est souvent
entremêlée de chant. Le même Personnage
interrompant sa Déclamation
par quelques paroles chantées, et plaçant
de même au milieu d'une suite de paroles
chantées , quelques paroles simplement
déclamées. Il faudroir avoir les
oreilles bien faites à l'harmonie de la
prononciation Chinoise pour juger de
l'effet que doit produire ce mélange. Il ,
n'est
FEVRIER 1734 359
n'est pas peut être plus ridicule que cette
Déclamation empoulée , ou ce Chant
Tragique , dont les grands Acteurs que
* nous avons perdu depuis peu , ont tenté
inutilement de délivrer nôtre Theatre.
A juger de la Déclamation Chinoise
par l'idée que les Relations nous donnent
de leur prononciation , elle doit être
pour le Chant , ce que le Récitatif de
nos Opéra est pour les grands Airs . La
comparaison est d'autant plus juste que
c'est principalement pour exprimer quetque
sentiment plus vifou quelque mouvement
plus animé que les Acteurs
Chinois ont recours au Chant.
Après ce Préambule je viens à la Tragédie
même qui y a donné occasion . Elle
est intitulée l'Orphelin de sa Maison
THEAO , et il s'agit des Avantures de
cet Enfant depuis sa naissance jusqu'à-ce
qu'il eût vangé ses Parens . Ainsi l'Action
de la Piéce dure environ 20 ans.
Sous le Regne de Cing Cong , Empe.
reur de la Dynastie des Tsine , Tou ngan
Con , Ministre de la Guerre et Theao
Tune , Ministre de la Justice et des Finances
partageoient entr'eux deux le
Gouvernement. Tou ngan Cou , jaloux
du crédit de son Rival , après avoir tenté
différentes voyes pour le faire périr, vint
enfin
356 MERCURE DE FRAN CE
enfin à bout de le rendre suspect à l'Empereur.
Ce Prince persuadé des crimes de
Tehao Tune qui avoit pris la fuite , signa
un ordre pour faire mourir la famille
et les Domestiques de ce Ministre au
nombre de trois cent personnes . Tehaoso ,
Fils du Ministre disgracié , er gendre de
l'Empereur , fut le seul épargné en considération
de son alliance avec la famille
Royale ; Tou ngan Cou , croyant sa vengeance
imparfaite tant qu'il resteroit
quelqu'un de cette Maison , supposa un
ordre de l'Empereur à Tehaoso de se
donner la mort, et le lui envoya porter
avec le fer , le poison et le cordeau , lui
laissant le choix de son supplice. Cette
espece d'Argument de la Pièce est dans
un long Monologue par lequel Ngan
Cou ouvre le Theatre.
Dans la Scene suivante Tehaoso paroît
avec son Epouse , et comme il est per--
suadé qu'on ne l'épargnera pas encore
longtems , il lui donne par avance ses
derniers ordres ; lui recommande le fruit
dont elle est enceinte et veut , qu'il soit
nommé l'Orphelin de Tehao, au cas que
cc soit un Garçon , et qu'il soit élevé
pour être le vengeur de sa famille . Dans
ce moment on apporte l'ordre de l'Empereur
; Tehaoso le reçoit à genoux ,
choiFEVRIER.
1734. 357
choisit le poignard et se frappe après
avoir renouvellé ses derniers ordres .
La Princesse est enfermée dans son Palais
pour être gardée exactement jusqu'à
ses couches . L'introduction au Prologue
nommé Sié tscè , finit - là . Il y a ensuite
cinq Sections ou divisions tchè , que l'on
peut nommer Actes à nôtre maniere.
On apprend dans la premiere partie à
Tougnen Cou , que la Princesse femme
de Tehaoso , est accouchée d'un fils et
qu'elle l'a nommé l'Orphelin de Tehao .
La haine de Ngan Cou , s'irrite à cette
nouvelle ; il jure la mort de cet Enfant ,
et donne des ordres pour redoubler la
garde du Palais de cette Princesse.
Dans la Scene suivante cette Princesse
paroît avec son fils dans ses bras ; elle
déplore ses propres malheurs , ceux de
toute sa Maison : la mort cruelle de son
Mari, le péril auquel son fils est exposé ,
dit qu'elle a envoyé chercher le Médecin
Tehing ing, le seul des 300 Domestiques
de la Maison de son Beau- pere , qui ait
échapé au carnage ; qu'elle connoît sa
vertu , son courage , son affection pour
la Maison Tehao et qu'il est le seul qui
puisse sauver les restes infortunez de
cette Maison.
Tehing ing , arrive dans l'équipage
d'un
358 MERCURE DE FRANCE :
d'un Médecin Chinois , portant avec lui
sa Cassette aux Remedes pendue à son
col . La Princesse lui propose d'emporter
le jeune Tehao , et de se charger du soin
de le cacher. Tehing ing représente à la
Princesse les difficultez et le péril d'une
telle entreprise elle se jette à ses pieds;
Tehing ing la releve , lui proteste qu'il
est prêt à tout entreprendre pour elle ;
mais continue- t-il , si je sauve mon
jeune Maître , comment poutrez - vous
cacher cette action au Tyran ? il vous
arrachera ce secret ; nous périrons moi
et ma famille , et nous périrons sans
sauver vôtre Fils. Tehing ing , dir la
Princesse , ne craignez rien de ma foiblesse
; partez avec mon fils ; son pere
est mort sous le Couteau , c'en est fait,
sa Mere va rejoindre son Epoux , elle va
mourir. En achevant ces mots ; la Prin
cesse qui a détaché sa ceinture , la passe
dans son col et s'étrangle .
Tehing-ing pénétré d'un Spectacle si
touchant prend l'Enfant et le cache
dans son coffre , le couvre de quelques
hardes et l'emporte. Il est arrêté par
Han Koné , Mandarin d'Armes qui garde
les portes du Palais par ordre de Toungan
Cou. Han Koué doit le commencement
de sa fortune à Tebao tune , et
comme
FEVRIER. 1734- 359
, comme il aime la vertu c'est à regret
qu'il obéït à Ngan Cou , dont il déteste
les crimes ; le Mandarin soupçonne bientôt
à l'air inquiet et embarassé du Médecin
, ce qu'il vient de faire , fait retirer
ses Soldats , ouvre le coffre , apperçoit
l'enfant , est attendri à sa vûë , promet
à Tehing de ne le point dénoncer
lui ordonne de l'emporter et de se retirer.
Le Médecin sort et revient se jetter
aux pieds de Han Koué comme s'il eût
craint que tout cela ne fut un piége qu'on
lui tendit ; cette manoeuvre se répete
plusieurs fois Han Koué , reproche à
Tehing ing cette méfiance , si tu n'as pas
le courage d'exposer ta vie , lui dit- il ,
pourquoi t'es- tu engagé dans cette entreprise
? rassures- toi , ajoute-t-il , tų
n'auras rien à craindre de ma part , en
disant ces mots , Han Koué se frappe de
son poignard et tombe mort. Tehing emporte
l'Enfant , et sort en nommant le
lieu qu'il a choisi pour sa retraite.
Vous serez sans doute un peu blessé
Monsieur , de la brusque résolution que
le pauvre Han Koué prend assez legerement
de sortir de la vie pour ôter toute
inquiétude au Médecin ; c'est même- là
une répetition de ce qu'a fait la Princesse.
Il est vrai que ces deux Personnages auroient
360 MERCURE DE FRANCE
roient embarassé dans la suite de la Piéce,
mais la façon de s'en défaire me semble
un peu singuliere apparemment que
. les Chinois, malgré le peu d'opinion que
nous avons de leur bravoure , ne regardent
pas la mort avec crainte et qu'ils
croyent au moins spéculativement qu'il
n'est pas nécessaire d'avoir des raisons
bien fortes pour se la donner. Leur
Histoire confirme cette opinion
crois d'ailleurs que l'on peut juger du
caractere et des opinions d'une Nation
du moins jusqu'à un certain point , par
ses Piéces de Theatre.
و etje
Dans la Division suivante , on apprend
à Tou- ngan Cou , ce qui vient d'arriver ;
il est saisi de fureur et il forme le dessein
de
supposer un nouvel Ordre du Roy
pour se faire apporter tous les Enfans
âgez de six mois , résolu de les poignar
der tous, pour envelopper dans le Massacre
general l'Orphelin de Tehao. Je passe
Monsieur le détail des Scenes difficiles
à abréger et qui ne servent à rien pour
arriver à la quatrième Scene de cette
Section .
Le Médecin Tehing qui a pris la résolution
d'aller chercher un azile pour le
jeune Tehao auprès de Kong Lun , ancien
Ministre, ennemi de Tou -ngan Kou
et
1
FEVRIER 1734. 361
et ami de Tehao - tune , retiré à la Campagne.
Il arrive chez ce vicillard , lui découvre
son secret , et lui remet entre les mains
l'Orphelin de Tehao , et lui apprend la
Loy portée contre tous les Enfans du
Royaume , après quoi il lui déclare qu'il
est résolu de reconnoître les obligations.
qu'il a à ceux de la maison de Theao
et de sauver les jours de tous ces infortunez
condamnez à la mort par l'Arrêt
de Ngan- Kou. J'ai un Fils du même âge
que le jeune Prince , ajoute- t- il , je vais
emporter chez moi ses vêtemens , j'en
couvrirai mon Fils , vous irez me dénoncer
au Tyran comme le dépositaire et
le gardien de l'Orphelin de Tehao ;
j'avouerai touts on prendra mon Fils
pour cet Orphelin , nous mourrons lui
et moi et vous éleverez ce cher Enfant
que je vous confie ; vous l'instruirez de
son sort , et vous l'aiderez à venger
mort de ses Parens .
la
Cong - Lun répond à cela en demandant
à ce Médecin quel âge il a , et il répond
qu'il a 45 ans . Vous avez 45 ans , dit
Cong- Lun ? Il faut attendre au moins
20 ans avant que cet Enfant puisse connoître
son sort et venger sa famille , vous
aurez alors 65 ans , moi j'en aurai alors"
3.
90,
352 MERCURE DE FRANCE
90 , et quand même je pourrois vivre
jusques- là , de quel secours lui serois - je ?
Croyez moi , portez chez vous ce jeune
Orphelin , mettez- le à la place de vôtre
fils ? et puisque vous voulez bien sacrifier
ce ls , apportez - le ici , et m'allez
accuser au Tyran ? il viendra me chercher
, nous périrons vôtre fils et moi
mais vous sauverez l'Orphelin ; allez ?
ce projet est plus sage que le vôtre.
Le Médecin ne se rend qu'après avoir
employé les discours les plus pressans
pour détourner Cong Lun de son dessein ,
et l'on voit que c'est à regret qu'il consent
à sauver ses jours aux dépens de
ceux de ce Vieillard . Une chose qui mérite
d'être remarquée dans cette Scene
c'est la tranquillité avec laquelle ces deux
Hommes déliberent sur le choix de celui
qui doit s'immoler ; l'utilité dont ils
peuvent être à l'Orphelin de Theao , est
la seule chose qu'ils ayent en vûë. Je ne
crois pas que l'imagination puisse aller
au delà, pour donner une idée de l'extrê
me fermeté et de l'extrême courage .
Dans la troisiéme Division le Médecin
va dénoncer Cong- Lun à Tou ngan Cou ;
celui - ci paroît douter de la verité de la
dénonciation , et lui demande les motifs
' qui l'ont porté à la faire. Le Méd.cin
réFEVRIER.
1734. 363
répond que c'est pour sauver les jours
de son propre Fils et ceux de tous les
Enfans condamnez à périr. Ngan Cou le
conduit avec lui chez Cong- Lun. On interroge
celui - ci , on lui confronte le Dénonciateur
, et je ne sçai sur quel fondement
Ngan Cou soupçonnant la bonne
foi du Médecin , et croyant qu'il y a
quelque intelligence entre lui et Cong-
Lun , oblige ce Médecin de lui donner
la Bastonnade ; cette Scene qui ne seroit
guere de notre gout , m'a paru au fond
assez mal imaginée. L'Auteur Chinois a
crû , sans doute , rendre la situation de
Cong Lun plus interessante ; mais il n'a
pas pensé qu'en voulant outrer le Grand,
on tombe dans le Gigantesque , lequel est
toujours voisin du Puerile .
CetteScene est interrompue par l'arrivée
d'un Soldat qui apporte le fils du Médecin
, qu'on prend pour l'Orphelin de
Tehao. Ngan Cou à cette vûë s'abandonne
à la joye et poignarde cette Enfant
aux yeux du Médecin et de Cong - Lun .
Celui- ci après lui avoir reproché tous ses
crimes et déploré la mort du prétendu
Orphelin se précipite du haut d'une Terrasse
et se tuë.
Ngan Cou prend chez lui le Médecin
avec le véritable Orphelin de Tehao,
qu'il
364 MERCURE DE FRANCE
qu'il croit son Fils , et déclare qu'il veut
le combler de biens , et même adopter
le Fils , parce qu'il n'a plus d'espérance
d'en avoir. C'est-là où finit la troisiéme
Section.
L'intervalle de la troisième à la quatriéme
Section , est supposé de 20 ans
entiers , comme ledit Ngan Cou , dans
la Scene qui commence cette Section .
Ce Ministre déclare que prêt à s'emparer
du Trône et à faire périr le Roy , il
va associer ce jeune Homme à son entreprise
.
Dans la Scene suivante le Médecin Tehing
, paroît un Rouleau à la main , sur
lequel il a fait dépeindre son Histoire
et celle de l'Orphelin . Il veut instruire
l'Orphelin de son sort ; mais pour s'assurer
de ses sentimens il est résolu d'essaïer
l'impression que fera sur lui la vuë de
ces Tableaux et le récit des Evénemens
qu'ils représentent. Cette idée m'a paru
ingenieuse , et malgré le défaut de la
repétition des choses déja connues , qui
se trouve dans la maniere dont cela est
exécuté , je vous avoie que cette Scene
m'a attaché à la Lecture , par la gradation
des sentimens qui s'excitent dans
l'ame du jeune homme , en écoutant une
Histoire à laquelle il croit n'avoir aucun
interêt. Cette
FEVRIER. 1734. 365
Cette Scene occupe toute la quatriéme
Section. La cinquième contient le dénoüement
ou la maniere dont l'Orphe-
"lin de Tebao se découvre au Roy , qui
donne des ordres pour arrêter et punir
Tou- Ngan Cou. L'Action du Médecin est
la même dans cette Tragédie que celle
de Leontine dans celle d'Heraclide . Les
Chinois ont mis en cette Action ce que
Corneille a mis en récit.
Voilà , M. la singularité que je vous
avois promise , mandez - moi ce que vous
et vos amis penseront de cette Tragédie
Chinoise , et si le plaisir qu'elle m'a fait
n'a pas sa source dans la disposition qui
nous porte presque toujours à admirer
les choses extrémement éloignées de nous,
soit par la distance des tems
soit par
celle des lieux. Je suis & c.
l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Un de mes amis revenu l'année passée
de la Chine m'a fait voir une singula-
G vj
rité
352 MERCURE DE FRANCE
rité Littéraire que je me fais un plaisir de
vous annoncer. C'est la Traduction d'une
Tragédie Chinoise. L'Ouvrage en doit être
envoyé à Paris ; si l'idée generale que
vous en prendrez dans l'Extrait que je
vous envoye pique votre curiosité , il
vous sera facile de voir l'Ouvrage entier,
qui doit être remis à M.....
Le Traducteur avertit dans une Préface
que les Tragédies Chinoises ne sont
assujetties à aucune des Regles de nôtre
Théatre moderne , celle des trois unitez
y est absolument inconnue et une Tragédie
Chinoise est proprement une Histoire
mise en Dialogue , dont les différentes
parties sont autant de Scenes détachées
, entre lesquelles il n'y a d'autre
liaison que celle qu'ont entr'elles les diverses
actions particulieres qui forment
la suite de cette Histoire.
Le Lieu change le plus souvent d'une
Scene à l'autre , mais de même que l'Acteur
en se montrant la premiere fois à
soin de dire , je suis un tel , et je viens
telle chose ; de même aussi en
pour
changeant de lieu il a soin d'avertir qu'il
est en un tel endroit, et que c'est là mêine
que va se passer l'action.
> Il en est de même du tems lorsque
l'intervalle d'une Scene à l'autre est un
peu
FEVRIER. 1734. 353
peu considérable,l'Acteur ne manque pas
de le dire et d'ajoûter que depuis un tel
Evenement il s'est écoulé tant de tems .
,
Vous voyez par-là , Monsieur , que
ces Tragédies ont du moins le mérite de
la clarté et que le violement de nos
regles ne cause aucun embarras à l'imagination
des Spectateurs. Les Piéces
Espagnoles , Italiennes , Angloises et
même les Piéces Françoises du commencement
du dernier siécle n'étoient pas
plus régulieres que celle des Chinois ;
mais le violement de la Regle des unitez
, y jettoit une obscurité bien plus
grande,parce que le Spectateur ne sçavoit
jamais dans quel tems et dans quel lieu
il s'étoit transporté, qu'après avoir entendu
une partie de la Scene ; l'embarras
étoit peut être encore plus grand dans
quelques unes de nos Piéces où l'on
cache l'inobservation de l'unité de tems
et de l'unité de lieu au dépens de la vraisemblance
et de la bienséance , comme
dans Cinna.
Il ne paroît pas beaucoup d'art dans
la maniere dont s'annoncent les Personnages
Chinois dans la Piéce que j'ai lûë
mais je ne doute pas que d'autres Piéces
n'en montrent davantage . Si quelqu'un
des Missionnaires Européens vouloit faire
sur
354 MERCURE DE FRANCE
sur le Théatre Chinois , ce que le R. P.
Brumoi a fait sur le Theatre des Grecs ,
nous en donner une Histoire ou une
Notice , je ne doute pas que son Ouvrage
ne fut bien reçu ; et à juger des
Tragédies Chinoises par le caractere general
de cette Nation , et par le ton de
celle-ci , je suis persuadé que l'on y verroit
bien d'autres exemples de vertu et de
courage, que dans les Tragédies Grecques
où la véritable vertu est presque inconnuë
; ou le courage est une passion et
une passion turbulente qui offusque la
raison et bannit la tranquillité de l'Ame ;
où l'orgueil et l'amour de la gloire bien
plus que l'attachement au devoir sont la
Source des grandes actions et où les
crimes ne se punissent presque jamais
que par d'autres crimes .
La Déclamation Chinoise , à ce que
nous apprend le Traducteur , est souvent
entremêlée de chant. Le même Personnage
interrompant sa Déclamation
par quelques paroles chantées, et plaçant
de même au milieu d'une suite de paroles
chantées , quelques paroles simplement
déclamées. Il faudroir avoir les
oreilles bien faites à l'harmonie de la
prononciation Chinoise pour juger de
l'effet que doit produire ce mélange. Il ,
n'est
FEVRIER 1734 359
n'est pas peut être plus ridicule que cette
Déclamation empoulée , ou ce Chant
Tragique , dont les grands Acteurs que
* nous avons perdu depuis peu , ont tenté
inutilement de délivrer nôtre Theatre.
A juger de la Déclamation Chinoise
par l'idée que les Relations nous donnent
de leur prononciation , elle doit être
pour le Chant , ce que le Récitatif de
nos Opéra est pour les grands Airs . La
comparaison est d'autant plus juste que
c'est principalement pour exprimer quetque
sentiment plus vifou quelque mouvement
plus animé que les Acteurs
Chinois ont recours au Chant.
Après ce Préambule je viens à la Tragédie
même qui y a donné occasion . Elle
est intitulée l'Orphelin de sa Maison
THEAO , et il s'agit des Avantures de
cet Enfant depuis sa naissance jusqu'à-ce
qu'il eût vangé ses Parens . Ainsi l'Action
de la Piéce dure environ 20 ans.
Sous le Regne de Cing Cong , Empe.
reur de la Dynastie des Tsine , Tou ngan
Con , Ministre de la Guerre et Theao
Tune , Ministre de la Justice et des Finances
partageoient entr'eux deux le
Gouvernement. Tou ngan Cou , jaloux
du crédit de son Rival , après avoir tenté
différentes voyes pour le faire périr, vint
enfin
356 MERCURE DE FRAN CE
enfin à bout de le rendre suspect à l'Empereur.
Ce Prince persuadé des crimes de
Tehao Tune qui avoit pris la fuite , signa
un ordre pour faire mourir la famille
et les Domestiques de ce Ministre au
nombre de trois cent personnes . Tehaoso ,
Fils du Ministre disgracié , er gendre de
l'Empereur , fut le seul épargné en considération
de son alliance avec la famille
Royale ; Tou ngan Cou , croyant sa vengeance
imparfaite tant qu'il resteroit
quelqu'un de cette Maison , supposa un
ordre de l'Empereur à Tehaoso de se
donner la mort, et le lui envoya porter
avec le fer , le poison et le cordeau , lui
laissant le choix de son supplice. Cette
espece d'Argument de la Pièce est dans
un long Monologue par lequel Ngan
Cou ouvre le Theatre.
Dans la Scene suivante Tehaoso paroît
avec son Epouse , et comme il est per--
suadé qu'on ne l'épargnera pas encore
longtems , il lui donne par avance ses
derniers ordres ; lui recommande le fruit
dont elle est enceinte et veut , qu'il soit
nommé l'Orphelin de Tehao, au cas que
cc soit un Garçon , et qu'il soit élevé
pour être le vengeur de sa famille . Dans
ce moment on apporte l'ordre de l'Empereur
; Tehaoso le reçoit à genoux ,
choiFEVRIER.
1734. 357
choisit le poignard et se frappe après
avoir renouvellé ses derniers ordres .
La Princesse est enfermée dans son Palais
pour être gardée exactement jusqu'à
ses couches . L'introduction au Prologue
nommé Sié tscè , finit - là . Il y a ensuite
cinq Sections ou divisions tchè , que l'on
peut nommer Actes à nôtre maniere.
On apprend dans la premiere partie à
Tougnen Cou , que la Princesse femme
de Tehaoso , est accouchée d'un fils et
qu'elle l'a nommé l'Orphelin de Tehao .
La haine de Ngan Cou , s'irrite à cette
nouvelle ; il jure la mort de cet Enfant ,
et donne des ordres pour redoubler la
garde du Palais de cette Princesse.
Dans la Scene suivante cette Princesse
paroît avec son fils dans ses bras ; elle
déplore ses propres malheurs , ceux de
toute sa Maison : la mort cruelle de son
Mari, le péril auquel son fils est exposé ,
dit qu'elle a envoyé chercher le Médecin
Tehing ing, le seul des 300 Domestiques
de la Maison de son Beau- pere , qui ait
échapé au carnage ; qu'elle connoît sa
vertu , son courage , son affection pour
la Maison Tehao et qu'il est le seul qui
puisse sauver les restes infortunez de
cette Maison.
Tehing ing , arrive dans l'équipage
d'un
358 MERCURE DE FRANCE :
d'un Médecin Chinois , portant avec lui
sa Cassette aux Remedes pendue à son
col . La Princesse lui propose d'emporter
le jeune Tehao , et de se charger du soin
de le cacher. Tehing ing représente à la
Princesse les difficultez et le péril d'une
telle entreprise elle se jette à ses pieds;
Tehing ing la releve , lui proteste qu'il
est prêt à tout entreprendre pour elle ;
mais continue- t-il , si je sauve mon
jeune Maître , comment poutrez - vous
cacher cette action au Tyran ? il vous
arrachera ce secret ; nous périrons moi
et ma famille , et nous périrons sans
sauver vôtre Fils. Tehing ing , dir la
Princesse , ne craignez rien de ma foiblesse
; partez avec mon fils ; son pere
est mort sous le Couteau , c'en est fait,
sa Mere va rejoindre son Epoux , elle va
mourir. En achevant ces mots ; la Prin
cesse qui a détaché sa ceinture , la passe
dans son col et s'étrangle .
Tehing-ing pénétré d'un Spectacle si
touchant prend l'Enfant et le cache
dans son coffre , le couvre de quelques
hardes et l'emporte. Il est arrêté par
Han Koné , Mandarin d'Armes qui garde
les portes du Palais par ordre de Toungan
Cou. Han Koué doit le commencement
de sa fortune à Tebao tune , et
comme
FEVRIER. 1734- 359
, comme il aime la vertu c'est à regret
qu'il obéït à Ngan Cou , dont il déteste
les crimes ; le Mandarin soupçonne bientôt
à l'air inquiet et embarassé du Médecin
, ce qu'il vient de faire , fait retirer
ses Soldats , ouvre le coffre , apperçoit
l'enfant , est attendri à sa vûë , promet
à Tehing de ne le point dénoncer
lui ordonne de l'emporter et de se retirer.
Le Médecin sort et revient se jetter
aux pieds de Han Koué comme s'il eût
craint que tout cela ne fut un piége qu'on
lui tendit ; cette manoeuvre se répete
plusieurs fois Han Koué , reproche à
Tehing ing cette méfiance , si tu n'as pas
le courage d'exposer ta vie , lui dit- il ,
pourquoi t'es- tu engagé dans cette entreprise
? rassures- toi , ajoute-t-il , tų
n'auras rien à craindre de ma part , en
disant ces mots , Han Koué se frappe de
son poignard et tombe mort. Tehing emporte
l'Enfant , et sort en nommant le
lieu qu'il a choisi pour sa retraite.
Vous serez sans doute un peu blessé
Monsieur , de la brusque résolution que
le pauvre Han Koué prend assez legerement
de sortir de la vie pour ôter toute
inquiétude au Médecin ; c'est même- là
une répetition de ce qu'a fait la Princesse.
Il est vrai que ces deux Personnages auroient
360 MERCURE DE FRANCE
roient embarassé dans la suite de la Piéce,
mais la façon de s'en défaire me semble
un peu singuliere apparemment que
. les Chinois, malgré le peu d'opinion que
nous avons de leur bravoure , ne regardent
pas la mort avec crainte et qu'ils
croyent au moins spéculativement qu'il
n'est pas nécessaire d'avoir des raisons
bien fortes pour se la donner. Leur
Histoire confirme cette opinion
crois d'ailleurs que l'on peut juger du
caractere et des opinions d'une Nation
du moins jusqu'à un certain point , par
ses Piéces de Theatre.
و etje
Dans la Division suivante , on apprend
à Tou- ngan Cou , ce qui vient d'arriver ;
il est saisi de fureur et il forme le dessein
de
supposer un nouvel Ordre du Roy
pour se faire apporter tous les Enfans
âgez de six mois , résolu de les poignar
der tous, pour envelopper dans le Massacre
general l'Orphelin de Tehao. Je passe
Monsieur le détail des Scenes difficiles
à abréger et qui ne servent à rien pour
arriver à la quatrième Scene de cette
Section .
Le Médecin Tehing qui a pris la résolution
d'aller chercher un azile pour le
jeune Tehao auprès de Kong Lun , ancien
Ministre, ennemi de Tou -ngan Kou
et
1
FEVRIER 1734. 361
et ami de Tehao - tune , retiré à la Campagne.
Il arrive chez ce vicillard , lui découvre
son secret , et lui remet entre les mains
l'Orphelin de Tehao , et lui apprend la
Loy portée contre tous les Enfans du
Royaume , après quoi il lui déclare qu'il
est résolu de reconnoître les obligations.
qu'il a à ceux de la maison de Theao
et de sauver les jours de tous ces infortunez
condamnez à la mort par l'Arrêt
de Ngan- Kou. J'ai un Fils du même âge
que le jeune Prince , ajoute- t- il , je vais
emporter chez moi ses vêtemens , j'en
couvrirai mon Fils , vous irez me dénoncer
au Tyran comme le dépositaire et
le gardien de l'Orphelin de Tehao ;
j'avouerai touts on prendra mon Fils
pour cet Orphelin , nous mourrons lui
et moi et vous éleverez ce cher Enfant
que je vous confie ; vous l'instruirez de
son sort , et vous l'aiderez à venger
mort de ses Parens .
la
Cong - Lun répond à cela en demandant
à ce Médecin quel âge il a , et il répond
qu'il a 45 ans . Vous avez 45 ans , dit
Cong- Lun ? Il faut attendre au moins
20 ans avant que cet Enfant puisse connoître
son sort et venger sa famille , vous
aurez alors 65 ans , moi j'en aurai alors"
3.
90,
352 MERCURE DE FRANCE
90 , et quand même je pourrois vivre
jusques- là , de quel secours lui serois - je ?
Croyez moi , portez chez vous ce jeune
Orphelin , mettez- le à la place de vôtre
fils ? et puisque vous voulez bien sacrifier
ce ls , apportez - le ici , et m'allez
accuser au Tyran ? il viendra me chercher
, nous périrons vôtre fils et moi
mais vous sauverez l'Orphelin ; allez ?
ce projet est plus sage que le vôtre.
Le Médecin ne se rend qu'après avoir
employé les discours les plus pressans
pour détourner Cong Lun de son dessein ,
et l'on voit que c'est à regret qu'il consent
à sauver ses jours aux dépens de
ceux de ce Vieillard . Une chose qui mérite
d'être remarquée dans cette Scene
c'est la tranquillité avec laquelle ces deux
Hommes déliberent sur le choix de celui
qui doit s'immoler ; l'utilité dont ils
peuvent être à l'Orphelin de Theao , est
la seule chose qu'ils ayent en vûë. Je ne
crois pas que l'imagination puisse aller
au delà, pour donner une idée de l'extrê
me fermeté et de l'extrême courage .
Dans la troisiéme Division le Médecin
va dénoncer Cong- Lun à Tou ngan Cou ;
celui - ci paroît douter de la verité de la
dénonciation , et lui demande les motifs
' qui l'ont porté à la faire. Le Méd.cin
réFEVRIER.
1734. 363
répond que c'est pour sauver les jours
de son propre Fils et ceux de tous les
Enfans condamnez à périr. Ngan Cou le
conduit avec lui chez Cong- Lun. On interroge
celui - ci , on lui confronte le Dénonciateur
, et je ne sçai sur quel fondement
Ngan Cou soupçonnant la bonne
foi du Médecin , et croyant qu'il y a
quelque intelligence entre lui et Cong-
Lun , oblige ce Médecin de lui donner
la Bastonnade ; cette Scene qui ne seroit
guere de notre gout , m'a paru au fond
assez mal imaginée. L'Auteur Chinois a
crû , sans doute , rendre la situation de
Cong Lun plus interessante ; mais il n'a
pas pensé qu'en voulant outrer le Grand,
on tombe dans le Gigantesque , lequel est
toujours voisin du Puerile .
CetteScene est interrompue par l'arrivée
d'un Soldat qui apporte le fils du Médecin
, qu'on prend pour l'Orphelin de
Tehao. Ngan Cou à cette vûë s'abandonne
à la joye et poignarde cette Enfant
aux yeux du Médecin et de Cong - Lun .
Celui- ci après lui avoir reproché tous ses
crimes et déploré la mort du prétendu
Orphelin se précipite du haut d'une Terrasse
et se tuë.
Ngan Cou prend chez lui le Médecin
avec le véritable Orphelin de Tehao,
qu'il
364 MERCURE DE FRANCE
qu'il croit son Fils , et déclare qu'il veut
le combler de biens , et même adopter
le Fils , parce qu'il n'a plus d'espérance
d'en avoir. C'est-là où finit la troisiéme
Section.
L'intervalle de la troisième à la quatriéme
Section , est supposé de 20 ans
entiers , comme ledit Ngan Cou , dans
la Scene qui commence cette Section .
Ce Ministre déclare que prêt à s'emparer
du Trône et à faire périr le Roy , il
va associer ce jeune Homme à son entreprise
.
Dans la Scene suivante le Médecin Tehing
, paroît un Rouleau à la main , sur
lequel il a fait dépeindre son Histoire
et celle de l'Orphelin . Il veut instruire
l'Orphelin de son sort ; mais pour s'assurer
de ses sentimens il est résolu d'essaïer
l'impression que fera sur lui la vuë de
ces Tableaux et le récit des Evénemens
qu'ils représentent. Cette idée m'a paru
ingenieuse , et malgré le défaut de la
repétition des choses déja connues , qui
se trouve dans la maniere dont cela est
exécuté , je vous avoie que cette Scene
m'a attaché à la Lecture , par la gradation
des sentimens qui s'excitent dans
l'ame du jeune homme , en écoutant une
Histoire à laquelle il croit n'avoir aucun
interêt. Cette
FEVRIER. 1734. 365
Cette Scene occupe toute la quatriéme
Section. La cinquième contient le dénoüement
ou la maniere dont l'Orphe-
"lin de Tebao se découvre au Roy , qui
donne des ordres pour arrêter et punir
Tou- Ngan Cou. L'Action du Médecin est
la même dans cette Tragédie que celle
de Leontine dans celle d'Heraclide . Les
Chinois ont mis en cette Action ce que
Corneille a mis en récit.
Voilà , M. la singularité que je vous
avois promise , mandez - moi ce que vous
et vos amis penseront de cette Tragédie
Chinoise , et si le plaisir qu'elle m'a fait
n'a pas sa source dans la disposition qui
nous porte presque toujours à admirer
les choses extrémement éloignées de nous,
soit par la distance des tems
soit par
celle des lieux. Je suis & c.
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Résumé : LETTRE écrite de Brest, contenant l'Extrait d'une Tragédie Chinoise.
Un ami de l'auteur, récemment revenu de Chine, lui a montré la traduction d'une tragédie chinoise intitulée 'L'Orphelin de sa Maison Theao'. Cette tragédie relate les aventures d'un enfant depuis sa naissance jusqu'à la vengeance de ses parents, sur une période d'environ 20 ans sous le règne de l'empereur Cing Cong. La pièce ne respecte pas les règles des trois unités (temps, lieu, action) du théâtre moderne. Chaque scène est indépendante et les changements de lieu et de temps sont explicitement annoncés par les acteurs. La pièce est structurée en sections appelées 'tchè', similaires à des actes. L'intrigue principale commence avec la disgrâce du ministre Tehao Tune, accusé à tort par son rival Tou ngan Cou. Tehao Tune est condamné à mort et sa famille massacrée, à l'exception de son fils Tehaoso, épargné en raison de son alliance avec la famille royale. Tou ngan Cou ordonne à Tehaoso de se suicider, ce qu'il fait après avoir donné ses dernières instructions à son épouse enceinte. L'épouse de Tehaoso donne naissance à un fils, nommé 'L'Orphelin de Tehao'. Elle confie l'enfant au médecin Tehing ing, qui le cache et le sauve malgré les obstacles. Plusieurs personnages, comme le mandarin Han Koué et le vieillard Cong Lun, jouent des rôles cruciaux en aidant à protéger l'orphelin. Dans la troisième division, le médecin dénonce Cong-Lun à Tou Ngan Cou pour sauver son fils et d'autres enfants condamnés. Ngan Cou, doutant de la bonne foi du médecin, le fait bastonner. La scène est interrompue par l'arrivée d'un soldat apportant le fils du médecin, pris pour l'orphelin de Tehao. Ngan Cou, croyant avoir retrouvé son fils, poignarde l'enfant devant le médecin et Cong-Lun, qui se suicide ensuite. Ngan Cou adopte alors le véritable orphelin de Tehao, croyant que c'est son fils. Vingt ans plus tard, dans la quatrième section, Ngan Cou, prêt à s'emparer du trône, veut associer le jeune homme à son entreprise. Le médecin Tehing montre à l'orphelin des tableaux représentant son histoire pour tester ses sentiments. La cinquième section révèle comment l'orphelin de Tehao se découvre au roi, qui ordonne l'arrestation et la punition de Tou Ngan Cou. La pièce met en avant des thèmes de courage, de vertu et de sacrifice, caractéristiques de la culture chinoise. La déclamation dans les tragédies chinoises est souvent mélangée de chant, et les acteurs annoncent clairement les changements de lieu et de temps.
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