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p. 165-178
Lettre de M. L. R. Desh. P. R. sur la Chronologie de M. Newton.
Début :
COMME j'ai peu approfondi l'étude de la Chronologie, & que cet oeil de [...]
Mots clefs :
Chronologie, Newton, Règne, Rois, Roi, Expédition, Chiron, Sésostris, Égypte, Argonautes
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texteReconnaissance textuelle : Lettre de M. L. R. Desh. P. R. sur la Chronologie de M. Newton.
Lettre de M. L. R. Desh . P. R. fur la Chronologie
de M. Newton.
Cde la
Chronologie , & que cet oeil de OMME j'ai peu approfondi
l'étude
l'Hiftoire , graces à nos écrivains & à l'injure
des tems , eft couvert d'un nuage qui
nous en dérobe la clarté , mes opinions
pour ou contre M. Newton , ne peuvent
lui être ni favorables ni préjudiciables :
ainfi , Monfieur , je hazarde quelques reflexions
fur fa chronologie . Soyez perfuadé
le feul motif de vous obliger
m'a mis la plume à la main .
que
J'ai toujours penfé que l'Aftronomie
n'avoit été d'aucun fecours à l'Hiſtoire , &
cela pour deux raifons principales. 1 °.
Parce que nous ne fommes nullement furs
ni des Obfervateurs ni de la juſteſſe des
obfervations. 2 ° . Parce qu'il nous refte fi
peu de ces obfervations , qu'en les fuppo
166 MERCURE DE FRANCE.
1
fant très - exactes nous n'en ferions pas plus
avancés. Ce que je dis ici ne regarde que
les habitans de notre hémisphere. Les peuples
de la haute Afie font infiniment plus
avantagés que nous à cet égard. L'Afromie
a fleuri chez les Chinois dès le berceau
de leur empire : & quoique les annales
de la Chine ayent été endommagées
confidérablement par la tyrannie d'un Empereur
( 1 ) , il eft vrai néanmoins que le
feul Tchuntficou qui commence à l'an
722 avant Jeſus - Chrift , & finit à l'an
480 , contient trente - fix éclipfes de foleil .
En voilà certainement plus que tous les
livres des Grecs & des Romains ne nous
en ont tranfmis. Le dénombrement de ces
éclipfes fe trouve accompagné de la date
de l'année , du mois & de la note cyclique
du jour où chacune d'elles a parues ; mais
on n'a marqué ni l'heure , ni les minutes ,
ni la grandeur & la durée de chaque éclipfe.
Au refte elles font revêtues de toute
l'autorité poffible , parce qu'on fçait qu'il
y a eu de tout tems à la Chine un tribunal
d'Hiftoire , & que le calcul de chaque
éclipfe étoit remis au commencement de
(1 ) Chi-hoang - ti fondateur de la Dynaftie de
Thine. Son regne qui fut de 37 ans , commençe
l'an 246 avant Jeſus - Chriſt.
DECEMBRE . 1755. 167
l'année dans les archives de ce tribunal .
Je viens à M. N.
Pour fixer la date de l'expédition des
Argonautes , il eft obligé d'avoir recours
à un paffage d'Hipparque , qui porte en
fubftance , qu'Eudoxe fit paffer le colure des
équinoxes à travers la tête de la baleine , de
la croupe du belier , &c. Mais 1 ° . ce paffage
ne dit point fi le colure paffoit au centre
de la tête de la baleine & de la croupe
du belier , ce qu'il feroit important de fçavoir
avant que de paffer au calcul , & de
rien fixer. M. Newton avoue lui - même
que ces obfervations font imparfaites. ( 1 ) Si
ces obfervations font réellement imparfaites
, s'il eft libre de fuppofer que le colure
, au tems d'Eudoxe , paffoit plus ou
moins près du centre de la tête de la baleine
& de la croupe du belier , quelle
conféquence n'en tirera - t-on point contre
le fyftême adopté par M. Newton ? Le R.
P. Souciet a bien fait voir la prodigieufe
différence qui peut s'y trouver , lorsqu'il
fixe d'après ce même paffage d'Hipparque
une époque qui furpaffe de 533 ans celle
que donne M. Newton .
20. Je fuppofe avec M. Newton , qu'au
tems d'Eudoxe le colure des équinoxes
paffoit par le centre de la tête de la balei-
( 1 ) Newton , pag. 94,
168 MERCURE DE FRANCE.
ne , & c. quel rapport ceci aura - t - il avec
l'expédition des Argonautes ? M. N. va
nous l'apprendre. Il affure que Chiron le
Centaure fixa les colures dans l'ancienne
fphere aux mêmes lieux qu'Hipparque
nous dit qu'Eudoxe les avoit fuppofés plufieurs
fiecles après Chiron. M. Newton dit
de plus , qu'il femble que Chiron & Muſee
firent cettefphere pour l'ufage des Argonautes.
Je trouve que M. Newton a fagement
fait de ne point prendre ici le ton affirmatif.
En effet les raifons qu'il emploie à prouver
la conftruction & la deftination de cette
fphere font très foibles ; elles peuvent
même contribuer à établir un fentiment
tout oppofé. Il lui femble que cette ancienne
fphere a été faite pour l'ufage des
Argonautes , parce qu'il y rencontre des
noms qui ont rapport à leur expédition :
( 1 ) Les noms de belier d'or , le taureau aux
pieds d'airain dompté par Jaſon, les gemeaux
Caftor & Pollux , tous deux Argonautes , anprès
du cygne de Leda leur mere . Là étoient
repréſentés le navire Argo , & l'hydre ce dragon
fi vigilant ; enfuite la coupe de Médée ,
·
c. Je ne vois pas d'autre conféquence à
tirer de ceci , finon que cette fphere a été
faite certainement après l'expédition des
Argonautes. Ce n'eft donc point pour leur
(1) Newton , pag. 87.
ufage ,
DECEMBRE . 1755. 169
ufage , ni avant ou pendant leur expédition
qu'elle a été fabriquée ; il eft même
très -probable qu'elle ne l'a été qu'affez
long- tems après , & lorfque tous ces noms
furent devenus refpectables aux Grecs . Or
ils devinrent plus refpectables , à proportion
qu'ils furent envifagés dans un certain
dégré d'éloignement.
"
Cette réflexion qui feule détruit le ſyſtême
de M. N. réfulte naturellement de
l'examen de cette fphere . Elle n'a point
échappé à M. l'Abbé Bannier , puifqu'en
parlant de Chiron , ce fçavant Académicien
dit « De fçavoir maintenant dans
quel point du ciel il fixa les points des
équinoxes & des folftices , c'eft ce qui
eft inutile à mon fujet ; je laiffe cet article
à ceux qui ont attaqué ou défendu .
le célebre M. Mewton ( 1 ) , qui fait de ce
point le fondement de fa nouvelle chronologie.
Je remarquerai feulement que
» le Calendrier de Chiron devoit avoir
d'autres noms pour la plupart des conftellations
, que ceux qui parurent dans
les Calendriers qui eurent cours dans la
fuite , puifque l'expédition des Argo-
» nautes s'y trouve marquée par plufieurs
traces ; il s'y trouve même des noms
"
( 1 ) Mémoires de l'Académie des Belles-Lettres,
to. ix , p. 95.
A. Feh H
170 MERCURE DE FRANCE.
"
qui la fuppofent faite , comme celui de
la coupe de Médée , & celui de Chiron
» lui-même. »
3. Si Chiron le Centaure fixa dans fa
fphere les colures aux mêmes lieux où
Eudoxe les fuppofa plufieurs fiecles après ,
il faut de nécellité avouer , ou qu'Eudoxe
n'a fait que copier Chiron , ou que l'un
de ces Aftronomes , & peut- être tous les
deux étoient de mauvais obfervateurs
auxquels on ne peut s'en rapporter en aucine
maniere,
Voilà cependant le pivot fur lequel M.
N. fait rouler fa nouvelle chronologie,
Eft -il étonnant qu'un fyftême bâti fur des
fondemens auffi mal affurés , ait trouvé
peu de partifans , malgré la célébrité de ce
grand homme ? Devoit - on par le refpect
dû à fa mémoire , ne pas attaquer une opinion
qui fronde les antiquités de toutes
les nations , & qui jette un vernis d'ignorance
, ou d'infidélité fur tous ceux qui
fe font mêlés d'écrire l'hiftoire.
Outre cette fixation de l'époque des
Argonautes , voici un fecond principe que
M. N. établit comme un point effentiel à
fa chronologie.
» Les Egyptiens eftimoient , dit-il ( 1 ) ,
» les regnes des Rois équivalens aux gé-
(1) Newton , pag. 53 .
1
DECEMBRE. 1755. 171
"
nérations des hommes : cependant trois
générations font cent aus , ainfi qu'on a
déja dit : Les Grecs & les Latins firent la
" même chofe , & c.
33
On voit par cet échantillon que je n'ai
point exageré en avançant que M. N. fappoit
toutes les hiftoires dans leurs fondemens.
Il fait entendre que ces nations ,
pour relever leur antiquité , ont allongé
les regnes de leurs Rois. Tout ce que M.
N. allegue pour foutenir cette accufation ,
eft contenu dans ce raifonnement . " (1)
» Selon le cours de la nature , les Rois
39 regnent , l'un portant l'autre , environ
18. ou 20 ans , chacun ; & fi on a des
exemples de ceux qui ont regné , l'un
» portant l'autre , 5 ou 6 années de plus ,
» on en a d'autres qui ont regné 5 ou 6
Dannées de moins ; 18 ou 20 ans font un
» juſte milieu .
Mais M. N. n'a-t- il pas penfé que ceci
ne pouvoit jamais être regardé comme
une regle générale ? Sur une très - longue
lifte des Rois il fe peut faire que le total
des regnes donnera à chacun d'eux environ
18 ou 20 ans. Que l'on prenne un
petit nombre de Rois , & qu'on évalue
leurs regnes , on verra qu'ils feront por-
( 1 ) Newton , pag. 54.
Hij
172 MERCURE DE FRANCE:
tés , ou beaucoup plus haut , ou infini
ment au - deffous.
M. N. cite lui- même quelques exemples
de ces regnes qui , comptés par portion
égale , vont les uns à 11 ans , les autres
à 22. Je joindrai ici cinq à fix exemples
pour
faire voir combien cette maniere
de compter
certaine.
les regnes eft arbitraire & in-
Les huit derniers Rois de France , depuis
François I , jufqu'à Louis XIV inclufivement
, ont regné 201 ans 3 mois & 10
à 12 jours , c'est pour chaque regne 25 ans
mois & quelques jours.
Les 18 premiers Empereurs de la Dynaftie
des Tcheou , ont regné 504 ans ;
c'eft pour chacun d'eux 28 ans.
Les 20 premiers Princes de Thfine , Dynaftie
collatérale de celle de Tcheou , ont
regné sos ans ; c'eft 25 ans 3 mois pour
chaque regne.
Les 20 premiers Rois de Lou , Dynaſtie
collatérale des deux précédentes , ont regné
également sos ans , ce qui donnera
pour chacun d'eux le même nombre de 25
ans & 3 mois.
Les 10 Rois d'Affyrie depuis Nabonaffar
jufqu'à Mefeffimordac , ont regné 67
ans ; ce n'eft pour chacun d'eux que 6 ans
$ mois & 6 jours ; & je comprends enco
DECEMBRE. 1755. 173
re dans ce calcul 10 ans d'interregne .
Les 10 Rois Lombards d'Italie , depuis
Odoacre jufqu'à Narfés , ont regné 91 ans
& I mois , c'eft pour chaque regne 9 ans
1 mois & quelques jours.
Qu'on calcule tous ces regnes , fuivant
l'hypothèſe de M. N. on aura à compter
fur le pied de 20 ans , 41 ans 3 mois de
moins pour les 8 derniers Rois de France ;
144 ans de moins pour les 18 Empereurs
de Tcheou ; 145 ans de moins pour les
Princes des Dynafties de Thfine & de Lou.
133 ans de plus pour les Rois d'Affyrie ,
109 ans environ de plus pour les 10 Rois
d'Italie.
On court donc rifque avec la méthode
de M. N. d'errer au point d'augmenter
ou de diminuer les regnes de plus de la
moitié.
Cependant avec cette méthode qu'il
s'eft faite , & l'époque de l'expédition des
Argonautes qu'il croit avoir prouvée d'une
maniere folide , M. Newton ne trouve
plus de difficulté dans la Chronologie
, parce qu'il fe réferve le droit d'ajouter
ou de retrancher aux anciennes
époques , felon que fon fyftême l'exigera .
N'eft-il pas fingulier , après de tels principes
, d'entendre monfieur Newton nous
avertir férieufement dans une introduc
Hiij
174 MERCURE DE FRANCE.
tion qui fe voit à la tête de ſon ouvrage ,
qu'il ne prétend pas porter l'exactitude
jufqu'à une année près ? « Je ne prétends
» pas porter l'exactitude jufqu'à une année
» près , dit - il ( 1 ) , il peut y avoir des
» erreurs de cinq , de dix , & quelquefois
de vingt ans ; mais cela ne va pas
plus loin ».
ע
Parcourons fon ouvrage , & voyons s'il
nous a tenu parole. « (2 ) L'Egypte fut
» d'abord partagée en différens petits
» royaumes comme les autres Etats , & ne
»forma que par dégrés une Monarchie ».
J'ofe affurer que ce fait eft totalement
faux : l'Egypte fut réunie d'abord fous
un feul Roi ; dans la fuite ce royaume fut
démembré , & devint le partage de plufieurs
Princes . Le Chevalier Marsham que
M. Newton paroît avoir confulté très-fouvent
, l'a jetté dans cette erreur ; en effet ,
Marsham dit dans un endroit , ( 3 ) Non
enim primis iftis temporibus , omnis Ægyptus
unius fuberat imperio , fed regiones diverſæ
diverfos habuerunt reges . M. N. a vu fans
doute ce paffage , mais il n'a pas pris garde
que Marsham dit ailleurs de Menès ,
premier Roi d'Egypte , qu'il commanda à
*
( 1 ) Introduction , p. 8. ( 2 ) Newton , p. 72 .
( 3 ) Chronicus Canon Egyptiacus . Edit . de Londres
, 1672. p. 23.
DECEMBRE. 1755. 173
Toute l'Egypte. ( 1 ) Nimirum ille Agyp-
10 omniprafuit. Les fils de Menès , après la
mort de leur pere , partagerent fon royaume
entr'eux. Ejus autem pofteri , diverfis potiti
Dynaftiis , illum communem omnium parentem
venerantur. Cette opinion n'eft
point particuliere au Chevalier Marsham ;
elle eft commune à tous les anciens Hiſtoriens
; & il ne faut que jetter un coup
d'oeil fur les différentes liftes des Rois d'Egypte
pour l'embraffer. Hérodote , Diodore
de Sicile , Eratofthenes , Manethon ,
Eufebe , Jule Africain , George le Syncelle
&c. voilà les garants fur l'autorité defquels
cette opinion eſt établie .
39
"( 2 ) Durant tout le tems que l'Egypte
fut partagée en plufieurs royaumes
>> on ne fçauroit , dit M. Newton , placer
» un Roi de toute l'Egypte , tel qu'étoit
Séfoftris ; il n'y a point d'Hiſtorien qui
le faffe plus moderne que Séfac : c'eſt
pourquoi ce Roi d'Egypte appellé Séfoftris
, eft le même que Séfac. Cette opi-
» nion n'eft point nouvelle ; Jofephe l'a infinuée
en affurant qu'Hérodote fe trom
»pe en attribuant les actions de Séfac à
» Séfoftris , & que la méprife vient feule-
>> ment du nom du Roi » .
(1 ) Idem. pag. 30. ( 2 ) Newton , p. 73.
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
Confondre les actions de deux Conqué
rans qui ont entr'elles de la reffemblance ,
attribuer à l'un ce que l'autre a fait , eft- celà
les identifier Hérodote a pu fe tromper
de la maniere que Jofephe le rapporte ,
mais jamais il n'a dit ou fait entendre que
Séfoftris & Séfac fuffent un feul & même
Prince. Ce n'est point non plus l'opinion
de Jofephe. Le fens de ce paffage deJofephe
eft , qu'Hérodote fe trompe en attribuant à
Séfoftris les actions de Séfac ; & c'eſt ainfi
que l'ont rendu les interpretes de cet Hiftorien
; M. N. lui-même ne l'a pas entendu
autrement ; mais ce qu'il ajoute , & que
la
méprise vient feulement du nom du Roi , eft
un commentaire qui ne fe voit pas dans le
texte de Jofephe. Ainfiloin d'infinuer que
Séfac foit le même que Séfoftris , Jofephe
fait entendre qu'ils font différens l'un de
l'autre. Au refte , M. Newton n'eft pas le
feul qui ait attribué cette erreur à Jofephe.
Bochart , Stillingfleet , Scaliger , Marsham,
Charpentier , & quelques autres l'ont cru
de même , ou plutôt fans examen , ils ſe
font copiés réciproquement. Sed pace dixerint
Virorum infignium , dit Perizonius , ( 1 )
omnes in eo errant , dùm hunc errorem Jofepho
tribuunt , qui longè aliud fenfit , & probè
fcivit diverfos fuiffe bos
reges. Perizonius
( 1 ) Perizonius dans fes
3, 5, 8.
origines facrées
DECEMBRE. 1755. 177
cite le palfage contefté. Περὶ & πλανήθεις
Ηρόδοτος τὰς πραξεις Σεσοςρει προσάπτει ,
qu'il traduit , & qu'il a raifon de traduire
ainfi : De
quo in errorem lapfus eft Herododum
ejus ( Sefak ) res geftas Sefoftridi
tribuit.
,
Mais que veut dire ce raifonnement de
M. Newton. Il n'y a point d'Historien qui
faffe Séfoftris plus moderne que Séfac , c'est
pourquoi ce Roi d'Egypte appellé Séfoftris , eft
le même que Séfac . Je demande fi cette maniere
de raiſonner ne revient point à celleci.
Il n'y a point d'Hiftorien qui faffe Hen .
ri IV. plus moderne que Louis XIV. donc
ce Roi de France appellé Henri IV . eft le
le même que Louis XIV. Comment les
Hiftoriens auroient- ils fait Séfoftris plus
moderne que Séfac , pendant qu'il l'a précédé
Je le répete , je penfe avec Usher &
Perizonius qu'on ne doit pas confondre
Séfoftris & Séfac. Pour s'en convaincre ,
il ne faut que jetter un coup d'oeil fur les
différentes liftes des Dynafties Egyptiennes.
Ces deux Princes y font marqués chacun
à fon rang , & diftingués par les années
de leur regne , par leur nom , & par
leurs actions .
Sefoftris y porte les noms de Séthos , Sefoofis
, Séthofis ; Séfac porte ceux de Séfonchofis
, Séfochris , Géfongofes ou Séfonchoris
, Séfenchofis. Hv
178 MERCURE DE FRANCE.
On convient que la finale is , ris , a été
ajoutée par les Grecs. Or dans Séfoftris
Sefoofis , Séthofis , Séthos , il faut convenir
avec M. Fourmont ( 1 ) l'aîné , que le
nom le mieux orthographié ou le moins
corrompu eft celui de Séthos . Le changement
du T , en TS , & en S, eft commun
chez les Orientaux : de maniere que les
uns pouvoient écrire Séthos , pendant que
d'autres prononçoient Setfos ou Séfos.
Quant aux différens noms de Séfac , le
plus corrompu eft celui de Gefongofes :
tous les autres , quoique altérés , ont les
trois lettres radicales qui compofent le
nom de Séfac. Le Noun ou l'N inférée, ne
doit point faire de peine , c'eſt encore un
ufage familier aux Orientaux , & M. Newton
en avertit lui- même lorfqu'il dit , « (2 )
» Sefonchofis & Séfac , ne different pas
plus que Memphis & Moph , qui font
deux noms de la même ville » .
"
Séfac foumit Jerufalem ; voilà tout ce
que l'Ecriture Sainte nous en dit : pourquoi
donc lui attribuer toutes les conquêtes
de Séfoftris ?
( 1 ) Réflexions Critiques , Tom. II . p. 156.
(2 ) Newton , p. 72.
Lafuite pour le mois prochain.
de M. Newton.
Cde la
Chronologie , & que cet oeil de OMME j'ai peu approfondi
l'étude
l'Hiftoire , graces à nos écrivains & à l'injure
des tems , eft couvert d'un nuage qui
nous en dérobe la clarté , mes opinions
pour ou contre M. Newton , ne peuvent
lui être ni favorables ni préjudiciables :
ainfi , Monfieur , je hazarde quelques reflexions
fur fa chronologie . Soyez perfuadé
le feul motif de vous obliger
m'a mis la plume à la main .
que
J'ai toujours penfé que l'Aftronomie
n'avoit été d'aucun fecours à l'Hiſtoire , &
cela pour deux raifons principales. 1 °.
Parce que nous ne fommes nullement furs
ni des Obfervateurs ni de la juſteſſe des
obfervations. 2 ° . Parce qu'il nous refte fi
peu de ces obfervations , qu'en les fuppo
166 MERCURE DE FRANCE.
1
fant très - exactes nous n'en ferions pas plus
avancés. Ce que je dis ici ne regarde que
les habitans de notre hémisphere. Les peuples
de la haute Afie font infiniment plus
avantagés que nous à cet égard. L'Afromie
a fleuri chez les Chinois dès le berceau
de leur empire : & quoique les annales
de la Chine ayent été endommagées
confidérablement par la tyrannie d'un Empereur
( 1 ) , il eft vrai néanmoins que le
feul Tchuntficou qui commence à l'an
722 avant Jeſus - Chrift , & finit à l'an
480 , contient trente - fix éclipfes de foleil .
En voilà certainement plus que tous les
livres des Grecs & des Romains ne nous
en ont tranfmis. Le dénombrement de ces
éclipfes fe trouve accompagné de la date
de l'année , du mois & de la note cyclique
du jour où chacune d'elles a parues ; mais
on n'a marqué ni l'heure , ni les minutes ,
ni la grandeur & la durée de chaque éclipfe.
Au refte elles font revêtues de toute
l'autorité poffible , parce qu'on fçait qu'il
y a eu de tout tems à la Chine un tribunal
d'Hiftoire , & que le calcul de chaque
éclipfe étoit remis au commencement de
(1 ) Chi-hoang - ti fondateur de la Dynaftie de
Thine. Son regne qui fut de 37 ans , commençe
l'an 246 avant Jeſus - Chriſt.
DECEMBRE . 1755. 167
l'année dans les archives de ce tribunal .
Je viens à M. N.
Pour fixer la date de l'expédition des
Argonautes , il eft obligé d'avoir recours
à un paffage d'Hipparque , qui porte en
fubftance , qu'Eudoxe fit paffer le colure des
équinoxes à travers la tête de la baleine , de
la croupe du belier , &c. Mais 1 ° . ce paffage
ne dit point fi le colure paffoit au centre
de la tête de la baleine & de la croupe
du belier , ce qu'il feroit important de fçavoir
avant que de paffer au calcul , & de
rien fixer. M. Newton avoue lui - même
que ces obfervations font imparfaites. ( 1 ) Si
ces obfervations font réellement imparfaites
, s'il eft libre de fuppofer que le colure
, au tems d'Eudoxe , paffoit plus ou
moins près du centre de la tête de la baleine
& de la croupe du belier , quelle
conféquence n'en tirera - t-on point contre
le fyftême adopté par M. Newton ? Le R.
P. Souciet a bien fait voir la prodigieufe
différence qui peut s'y trouver , lorsqu'il
fixe d'après ce même paffage d'Hipparque
une époque qui furpaffe de 533 ans celle
que donne M. Newton .
20. Je fuppofe avec M. Newton , qu'au
tems d'Eudoxe le colure des équinoxes
paffoit par le centre de la tête de la balei-
( 1 ) Newton , pag. 94,
168 MERCURE DE FRANCE.
ne , & c. quel rapport ceci aura - t - il avec
l'expédition des Argonautes ? M. N. va
nous l'apprendre. Il affure que Chiron le
Centaure fixa les colures dans l'ancienne
fphere aux mêmes lieux qu'Hipparque
nous dit qu'Eudoxe les avoit fuppofés plufieurs
fiecles après Chiron. M. Newton dit
de plus , qu'il femble que Chiron & Muſee
firent cettefphere pour l'ufage des Argonautes.
Je trouve que M. Newton a fagement
fait de ne point prendre ici le ton affirmatif.
En effet les raifons qu'il emploie à prouver
la conftruction & la deftination de cette
fphere font très foibles ; elles peuvent
même contribuer à établir un fentiment
tout oppofé. Il lui femble que cette ancienne
fphere a été faite pour l'ufage des
Argonautes , parce qu'il y rencontre des
noms qui ont rapport à leur expédition :
( 1 ) Les noms de belier d'or , le taureau aux
pieds d'airain dompté par Jaſon, les gemeaux
Caftor & Pollux , tous deux Argonautes , anprès
du cygne de Leda leur mere . Là étoient
repréſentés le navire Argo , & l'hydre ce dragon
fi vigilant ; enfuite la coupe de Médée ,
·
c. Je ne vois pas d'autre conféquence à
tirer de ceci , finon que cette fphere a été
faite certainement après l'expédition des
Argonautes. Ce n'eft donc point pour leur
(1) Newton , pag. 87.
ufage ,
DECEMBRE . 1755. 169
ufage , ni avant ou pendant leur expédition
qu'elle a été fabriquée ; il eft même
très -probable qu'elle ne l'a été qu'affez
long- tems après , & lorfque tous ces noms
furent devenus refpectables aux Grecs . Or
ils devinrent plus refpectables , à proportion
qu'ils furent envifagés dans un certain
dégré d'éloignement.
"
Cette réflexion qui feule détruit le ſyſtême
de M. N. réfulte naturellement de
l'examen de cette fphere . Elle n'a point
échappé à M. l'Abbé Bannier , puifqu'en
parlant de Chiron , ce fçavant Académicien
dit « De fçavoir maintenant dans
quel point du ciel il fixa les points des
équinoxes & des folftices , c'eft ce qui
eft inutile à mon fujet ; je laiffe cet article
à ceux qui ont attaqué ou défendu .
le célebre M. Mewton ( 1 ) , qui fait de ce
point le fondement de fa nouvelle chronologie.
Je remarquerai feulement que
» le Calendrier de Chiron devoit avoir
d'autres noms pour la plupart des conftellations
, que ceux qui parurent dans
les Calendriers qui eurent cours dans la
fuite , puifque l'expédition des Argo-
» nautes s'y trouve marquée par plufieurs
traces ; il s'y trouve même des noms
"
( 1 ) Mémoires de l'Académie des Belles-Lettres,
to. ix , p. 95.
A. Feh H
170 MERCURE DE FRANCE.
"
qui la fuppofent faite , comme celui de
la coupe de Médée , & celui de Chiron
» lui-même. »
3. Si Chiron le Centaure fixa dans fa
fphere les colures aux mêmes lieux où
Eudoxe les fuppofa plufieurs fiecles après ,
il faut de nécellité avouer , ou qu'Eudoxe
n'a fait que copier Chiron , ou que l'un
de ces Aftronomes , & peut- être tous les
deux étoient de mauvais obfervateurs
auxquels on ne peut s'en rapporter en aucine
maniere,
Voilà cependant le pivot fur lequel M.
N. fait rouler fa nouvelle chronologie,
Eft -il étonnant qu'un fyftême bâti fur des
fondemens auffi mal affurés , ait trouvé
peu de partifans , malgré la célébrité de ce
grand homme ? Devoit - on par le refpect
dû à fa mémoire , ne pas attaquer une opinion
qui fronde les antiquités de toutes
les nations , & qui jette un vernis d'ignorance
, ou d'infidélité fur tous ceux qui
fe font mêlés d'écrire l'hiftoire.
Outre cette fixation de l'époque des
Argonautes , voici un fecond principe que
M. N. établit comme un point effentiel à
fa chronologie.
» Les Egyptiens eftimoient , dit-il ( 1 ) ,
» les regnes des Rois équivalens aux gé-
(1) Newton , pag. 53 .
1
DECEMBRE. 1755. 171
"
nérations des hommes : cependant trois
générations font cent aus , ainfi qu'on a
déja dit : Les Grecs & les Latins firent la
" même chofe , & c.
33
On voit par cet échantillon que je n'ai
point exageré en avançant que M. N. fappoit
toutes les hiftoires dans leurs fondemens.
Il fait entendre que ces nations ,
pour relever leur antiquité , ont allongé
les regnes de leurs Rois. Tout ce que M.
N. allegue pour foutenir cette accufation ,
eft contenu dans ce raifonnement . " (1)
» Selon le cours de la nature , les Rois
39 regnent , l'un portant l'autre , environ
18. ou 20 ans , chacun ; & fi on a des
exemples de ceux qui ont regné , l'un
» portant l'autre , 5 ou 6 années de plus ,
» on en a d'autres qui ont regné 5 ou 6
Dannées de moins ; 18 ou 20 ans font un
» juſte milieu .
Mais M. N. n'a-t- il pas penfé que ceci
ne pouvoit jamais être regardé comme
une regle générale ? Sur une très - longue
lifte des Rois il fe peut faire que le total
des regnes donnera à chacun d'eux environ
18 ou 20 ans. Que l'on prenne un
petit nombre de Rois , & qu'on évalue
leurs regnes , on verra qu'ils feront por-
( 1 ) Newton , pag. 54.
Hij
172 MERCURE DE FRANCE:
tés , ou beaucoup plus haut , ou infini
ment au - deffous.
M. N. cite lui- même quelques exemples
de ces regnes qui , comptés par portion
égale , vont les uns à 11 ans , les autres
à 22. Je joindrai ici cinq à fix exemples
pour
faire voir combien cette maniere
de compter
certaine.
les regnes eft arbitraire & in-
Les huit derniers Rois de France , depuis
François I , jufqu'à Louis XIV inclufivement
, ont regné 201 ans 3 mois & 10
à 12 jours , c'est pour chaque regne 25 ans
mois & quelques jours.
Les 18 premiers Empereurs de la Dynaftie
des Tcheou , ont regné 504 ans ;
c'eft pour chacun d'eux 28 ans.
Les 20 premiers Princes de Thfine , Dynaftie
collatérale de celle de Tcheou , ont
regné sos ans ; c'eft 25 ans 3 mois pour
chaque regne.
Les 20 premiers Rois de Lou , Dynaſtie
collatérale des deux précédentes , ont regné
également sos ans , ce qui donnera
pour chacun d'eux le même nombre de 25
ans & 3 mois.
Les 10 Rois d'Affyrie depuis Nabonaffar
jufqu'à Mefeffimordac , ont regné 67
ans ; ce n'eft pour chacun d'eux que 6 ans
$ mois & 6 jours ; & je comprends enco
DECEMBRE. 1755. 173
re dans ce calcul 10 ans d'interregne .
Les 10 Rois Lombards d'Italie , depuis
Odoacre jufqu'à Narfés , ont regné 91 ans
& I mois , c'eft pour chaque regne 9 ans
1 mois & quelques jours.
Qu'on calcule tous ces regnes , fuivant
l'hypothèſe de M. N. on aura à compter
fur le pied de 20 ans , 41 ans 3 mois de
moins pour les 8 derniers Rois de France ;
144 ans de moins pour les 18 Empereurs
de Tcheou ; 145 ans de moins pour les
Princes des Dynafties de Thfine & de Lou.
133 ans de plus pour les Rois d'Affyrie ,
109 ans environ de plus pour les 10 Rois
d'Italie.
On court donc rifque avec la méthode
de M. N. d'errer au point d'augmenter
ou de diminuer les regnes de plus de la
moitié.
Cependant avec cette méthode qu'il
s'eft faite , & l'époque de l'expédition des
Argonautes qu'il croit avoir prouvée d'une
maniere folide , M. Newton ne trouve
plus de difficulté dans la Chronologie
, parce qu'il fe réferve le droit d'ajouter
ou de retrancher aux anciennes
époques , felon que fon fyftême l'exigera .
N'eft-il pas fingulier , après de tels principes
, d'entendre monfieur Newton nous
avertir férieufement dans une introduc
Hiij
174 MERCURE DE FRANCE.
tion qui fe voit à la tête de ſon ouvrage ,
qu'il ne prétend pas porter l'exactitude
jufqu'à une année près ? « Je ne prétends
» pas porter l'exactitude jufqu'à une année
» près , dit - il ( 1 ) , il peut y avoir des
» erreurs de cinq , de dix , & quelquefois
de vingt ans ; mais cela ne va pas
plus loin ».
ע
Parcourons fon ouvrage , & voyons s'il
nous a tenu parole. « (2 ) L'Egypte fut
» d'abord partagée en différens petits
» royaumes comme les autres Etats , & ne
»forma que par dégrés une Monarchie ».
J'ofe affurer que ce fait eft totalement
faux : l'Egypte fut réunie d'abord fous
un feul Roi ; dans la fuite ce royaume fut
démembré , & devint le partage de plufieurs
Princes . Le Chevalier Marsham que
M. Newton paroît avoir confulté très-fouvent
, l'a jetté dans cette erreur ; en effet ,
Marsham dit dans un endroit , ( 3 ) Non
enim primis iftis temporibus , omnis Ægyptus
unius fuberat imperio , fed regiones diverſæ
diverfos habuerunt reges . M. N. a vu fans
doute ce paffage , mais il n'a pas pris garde
que Marsham dit ailleurs de Menès ,
premier Roi d'Egypte , qu'il commanda à
*
( 1 ) Introduction , p. 8. ( 2 ) Newton , p. 72 .
( 3 ) Chronicus Canon Egyptiacus . Edit . de Londres
, 1672. p. 23.
DECEMBRE. 1755. 173
Toute l'Egypte. ( 1 ) Nimirum ille Agyp-
10 omniprafuit. Les fils de Menès , après la
mort de leur pere , partagerent fon royaume
entr'eux. Ejus autem pofteri , diverfis potiti
Dynaftiis , illum communem omnium parentem
venerantur. Cette opinion n'eft
point particuliere au Chevalier Marsham ;
elle eft commune à tous les anciens Hiſtoriens
; & il ne faut que jetter un coup
d'oeil fur les différentes liftes des Rois d'Egypte
pour l'embraffer. Hérodote , Diodore
de Sicile , Eratofthenes , Manethon ,
Eufebe , Jule Africain , George le Syncelle
&c. voilà les garants fur l'autorité defquels
cette opinion eſt établie .
39
"( 2 ) Durant tout le tems que l'Egypte
fut partagée en plufieurs royaumes
>> on ne fçauroit , dit M. Newton , placer
» un Roi de toute l'Egypte , tel qu'étoit
Séfoftris ; il n'y a point d'Hiſtorien qui
le faffe plus moderne que Séfac : c'eſt
pourquoi ce Roi d'Egypte appellé Séfoftris
, eft le même que Séfac. Cette opi-
» nion n'eft point nouvelle ; Jofephe l'a infinuée
en affurant qu'Hérodote fe trom
»pe en attribuant les actions de Séfac à
» Séfoftris , & que la méprife vient feule-
>> ment du nom du Roi » .
(1 ) Idem. pag. 30. ( 2 ) Newton , p. 73.
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
Confondre les actions de deux Conqué
rans qui ont entr'elles de la reffemblance ,
attribuer à l'un ce que l'autre a fait , eft- celà
les identifier Hérodote a pu fe tromper
de la maniere que Jofephe le rapporte ,
mais jamais il n'a dit ou fait entendre que
Séfoftris & Séfac fuffent un feul & même
Prince. Ce n'est point non plus l'opinion
de Jofephe. Le fens de ce paffage deJofephe
eft , qu'Hérodote fe trompe en attribuant à
Séfoftris les actions de Séfac ; & c'eſt ainfi
que l'ont rendu les interpretes de cet Hiftorien
; M. N. lui-même ne l'a pas entendu
autrement ; mais ce qu'il ajoute , & que
la
méprise vient feulement du nom du Roi , eft
un commentaire qui ne fe voit pas dans le
texte de Jofephe. Ainfiloin d'infinuer que
Séfac foit le même que Séfoftris , Jofephe
fait entendre qu'ils font différens l'un de
l'autre. Au refte , M. Newton n'eft pas le
feul qui ait attribué cette erreur à Jofephe.
Bochart , Stillingfleet , Scaliger , Marsham,
Charpentier , & quelques autres l'ont cru
de même , ou plutôt fans examen , ils ſe
font copiés réciproquement. Sed pace dixerint
Virorum infignium , dit Perizonius , ( 1 )
omnes in eo errant , dùm hunc errorem Jofepho
tribuunt , qui longè aliud fenfit , & probè
fcivit diverfos fuiffe bos
reges. Perizonius
( 1 ) Perizonius dans fes
3, 5, 8.
origines facrées
DECEMBRE. 1755. 177
cite le palfage contefté. Περὶ & πλανήθεις
Ηρόδοτος τὰς πραξεις Σεσοςρει προσάπτει ,
qu'il traduit , & qu'il a raifon de traduire
ainfi : De
quo in errorem lapfus eft Herododum
ejus ( Sefak ) res geftas Sefoftridi
tribuit.
,
Mais que veut dire ce raifonnement de
M. Newton. Il n'y a point d'Historien qui
faffe Séfoftris plus moderne que Séfac , c'est
pourquoi ce Roi d'Egypte appellé Séfoftris , eft
le même que Séfac . Je demande fi cette maniere
de raiſonner ne revient point à celleci.
Il n'y a point d'Hiftorien qui faffe Hen .
ri IV. plus moderne que Louis XIV. donc
ce Roi de France appellé Henri IV . eft le
le même que Louis XIV. Comment les
Hiftoriens auroient- ils fait Séfoftris plus
moderne que Séfac , pendant qu'il l'a précédé
Je le répete , je penfe avec Usher &
Perizonius qu'on ne doit pas confondre
Séfoftris & Séfac. Pour s'en convaincre ,
il ne faut que jetter un coup d'oeil fur les
différentes liftes des Dynafties Egyptiennes.
Ces deux Princes y font marqués chacun
à fon rang , & diftingués par les années
de leur regne , par leur nom , & par
leurs actions .
Sefoftris y porte les noms de Séthos , Sefoofis
, Séthofis ; Séfac porte ceux de Séfonchofis
, Séfochris , Géfongofes ou Séfonchoris
, Séfenchofis. Hv
178 MERCURE DE FRANCE.
On convient que la finale is , ris , a été
ajoutée par les Grecs. Or dans Séfoftris
Sefoofis , Séthofis , Séthos , il faut convenir
avec M. Fourmont ( 1 ) l'aîné , que le
nom le mieux orthographié ou le moins
corrompu eft celui de Séthos . Le changement
du T , en TS , & en S, eft commun
chez les Orientaux : de maniere que les
uns pouvoient écrire Séthos , pendant que
d'autres prononçoient Setfos ou Séfos.
Quant aux différens noms de Séfac , le
plus corrompu eft celui de Gefongofes :
tous les autres , quoique altérés , ont les
trois lettres radicales qui compofent le
nom de Séfac. Le Noun ou l'N inférée, ne
doit point faire de peine , c'eſt encore un
ufage familier aux Orientaux , & M. Newton
en avertit lui- même lorfqu'il dit , « (2 )
» Sefonchofis & Séfac , ne different pas
plus que Memphis & Moph , qui font
deux noms de la même ville » .
"
Séfac foumit Jerufalem ; voilà tout ce
que l'Ecriture Sainte nous en dit : pourquoi
donc lui attribuer toutes les conquêtes
de Séfoftris ?
( 1 ) Réflexions Critiques , Tom. II . p. 156.
(2 ) Newton , p. 72.
Lafuite pour le mois prochain.
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Résumé : Lettre de M. L. R. Desh. P. R. sur la Chronologie de M. Newton.
L'auteur de la lettre, M. L. R. Desh. P. R., examine la chronologie proposée par Isaac Newton, soulignant les difficultés liées à l'obscurité de l'histoire due aux écrits endommagés par le temps. Il note que l'astronomie n'a pas significativement éclairci les événements historiques en raison de l'incertitude et de la rareté des observations. Par exemple, les annales chinoises des éclipses solaires manquent de précisions sur l'heure et la durée. L'auteur critique la méthode de Newton pour fixer la date de l'expédition des Argonautes, basée sur des observations astronomiques imparfaites. Il mentionne que le Père Souciet a proposé une date différente, mettant en lumière les incohérences. Il conteste également l'idée que les anciens astronomes, comme Chiron, aient pu créer des sphères célestes pour les Argonautes, arguant que ces sphères ont probablement été fabriquées bien après l'expédition. L'auteur remet en question la méthode de Newton pour estimer la durée des règnes des rois, notant que cette méthode est arbitraire et peut conduire à des erreurs significatives. Il cite plusieurs exemples de règnes royaux pour illustrer cette variabilité. Enfin, il critique Newton pour avoir affirmé que l'Égypte était initialement divisée en petits royaumes, alors que les historiens anciens s'accordent à dire que l'Égypte était unifiée sous un seul roi dès le début. Le texte discute également de la distinction entre Séfoftris et Séfac, deux princes égyptiens mentionnés par différents historiens. Joseph ne considère pas Séfoftris et Séfac comme une seule et même personne, contrairement à Hérodote. Plusieurs interprètes, dont Newton, Bochart, Stillingfleet, Scaliger, Marsham et Charpentier, ont attribué cette erreur à Joseph, mais Perizonius conteste cette interprétation. Selon Perizonius, Joseph a clairement distingué les deux rois. Séfoftris et Séfac sont marqués différemment dans les listes des dynasties égyptiennes par leurs noms, leurs années de règne et leurs actions. Séfoftris porte les noms de Séthos, Sefoofis, Séthofis, tandis que Séfac porte ceux de Séfonchofis, Séfochris, Géfongofes ou Séfonchoris. Le texte mentionne également que la finale 'is' ou 'ris' a été ajoutée par les Grecs et que le nom le mieux orthographié pour Séfoftris est Séthos. Enfin, le texte critique l'attribution des conquêtes de Séfoftris à Séfac, soulignant que l'Écriture Sainte ne mentionne que la soumission de Jérusalem par Séfac.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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