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1
p. 189-214
Tout ce qui s'est passé au Seminaire des Missions Etrangeres, le jour que les Ambassadeurs y ont esté regalez, avec les cinq Harangues qui leur ont esté faites dans ce Seminaire. [titre d'après la table]
Début :
Les Ambassadeurs ayant témoigné plusieurs fois à Mr l'Abbé [...]
Mots clefs :
Séminaire des Missions étrangères, Ambassadeurs, Harangues, Séminaire, Roi de Siam, Admirer, Vrai dieu, Compliments, Joie, Personnes, Monde, Langue, Artus de Lionne, Abbé, Compliment, Hébreu, Hommes, Maison, Devoir, Mérite
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texteReconnaissance textuelle : Tout ce qui s'est passé au Seminaire des Missions Etrangeres, le jour que les Ambassadeurs y ont esté regalez, avec les cinq Harangues qui leur ont esté faites dans ce Seminaire. [titre d'après la table]
Les Ambaſſadeurs ayant
témoigné pluſieurs fois à M
l'Abbé de Lionne , & à r
de Brifacier, Superieur du Seminaire
des miſſions Eftrangeres
, le deſir qu'ils avoient
depuis longtemps de leur
rendre viſite dans leur mаі
fon, en fixerent enfin le jour
190 IV. P. du Voyage
au 10. Decembre . Comme le
premier Ambaſſadeur eſtoit
allé ce jour là ſeul avec M
Torf à Versailles , pour conferer
avec Mle Marquis de
Seignelay, on alla fur les trois
heures aprés midy, propoſer
aux deux autres de venir voir
la Maiſon des Incurables. Ils
répondirent ſans hefiter qu'ils
ne vouloient point ſe partager ce
jour-là , qu'ils ne fortiroient que
pour aller au Seminaire, o que
s'ils avoient ſuivy leur inclination
, ils ſe ſeroient acquittez
beaucoup pluſtoſt de ce devoir .
Si-tôt qu'on apprit qu'ils ardes
Amb . de Siam. 191
rivoient , on alla les recevoir
à la defcente de leur Carroffes
, & on les conduiſit dans
un lieu où M l'Abbé de
Choiſi leur preſenta du Thé
dans les petits Vaſes d'or &
d'argent , que M Conſtance
luy a donnez à Siam , & fit
brûler du bois d'Aquila qui
parfuma l'air enun moment.
Il eſtoit fix heures lorſque le
Premier Ambaſſadeur revint
de Verſailles ; il les trouva
en converſation avec M'PEvêque
Duc de Laon , qu'ils
avoient veu à la Fére où , ce
Prelat estoit allé exprés pour
192 IV.P.du Voyage
les ſaluer au retour de leur
Voyage deFlandre.M leMarquis
de Coeuvres ſon Frere,
qu'ils ſçavoient eſtre le beaufrere
deM l'Abbé deLionne,
eſtoit auſſi avec eux, ainſi que
-M¹ d'Aligre, Ms lesAbbez le
Pelletier & de Neſmond , les
Peres Couplet & Spinola Jefuîtes
, &quelques autres perſonnes
de merite que l'on
avoit eu ſoin d'inviter.
La converſation ayant eſté
interrompuë, il ſe fit d'abord
un peu de filence , & M² de
Brifacier accompagné des
Eccleſiaſtiques de fa maiſon,
prit
des Amb. de Siam. 193
prit cet intervalle pour faire
un compliment fort court ,
qui prepara l'eſprit des Ambaſſadeurs
à en entendre quatre
autres en diverſesLangues.
Voicy les termes de ce com
pliment.
MESSEIGNEVRS,
Vn meriteauſſi univerſel & auſſi
univerſellement reconnu que levôtre,
devroit estre publié en toutes for
tes de Langues , & nous souhaiterions
pouvoir aſſembler icy les differentes
Nations de l'Europe ,pour honorer
par leur bouche vôtre Grand
Roy dans vos Excellences , de mème
que ce puiſſant Prince a honoré
R
194 IV. P. duVoyage
à Siampar la deputation des divers
Peuples de l'Orient nôtre Incompaparable
Monarque dans la personne
defon Ambassadeur extraordinaire.
Mais fansformerde vains deſirs &
Sans rien emprunter des Royaumes
étrangers , fouffrez, Meffeigneurs ,
que plusieurs Prestres de cette Maifon
, qui vous vont complimenter
aprés moy ,se partagent entre eux
pour lover en plus d'une maniere
les talents& la conduiteque tout le
monde admire en vous , &qu'ils employent
ce que l'Hebreu a desçavant,
ce que leGrec a de poly , ce que le Latin
a de grave , & ce que le Siamois
doit avoir d'agréable à vôtre égard,
pour rendre Séparement & diverſement
à vos Eminentes qualitezles
profonds refpects qui leur font dûs ,
pour repondre à l'honneur de vôdes
Amb. de Siam. 195
tre visite , & aux marques de vos
bontez par les témoignages finceres
d'une estime & d'une reconnoiſſance
éternelle.
Ils furent enſuite compli
mentez en Hebreu au nom
des Penſionnaires du Seminaire
, & à la fin de chaque
compliment , on liſoit la traduction
Siamoiſe qui en a
voit eſté faite , partie par le
ſieur Antoine Pinto , Acolyte
du Seminaire de Siam , & partie
par le ſieur Gervaiſe , l'un
des Ecclefiaftiques François ,
que feu Me l'Eveſque d'Heliopolis
avoit menez avec luy
Rij
196 IV. P. du Voyage
dans fon dernier voyage aux
Indes. Voicy la traduction
de ce compliment Hebreu
en nôtre Langue.
MESSEIGNEVRS ,
Cette maison reçoit aujourd'huy un
honneur qu'elle n'eût jamais ofé efperer.
Elle est établie pour envoyer
des hommes Apostoliques dans les
Royaumes les plus éloignez, & c'est
ce qu'elle a toûjours fait depuis fon
établiſſement. Mais qu'elle dût recevoirjamais
trois Illuftres Ambaffadeurs
venus des extremitez de la
terre , c'est ce qu'elle apeine à croire ,
quand même elle le voit. Dans l'excez
delajoye qui la transporte , elle.
ne peut , Meſſeigneurs , que vous
des Amb. de Siam. 197
:
conjurer d'être tres-perfuadez de ſa
reconnoiſſance respectueuse , & de
Pardeur continuelle qu'elle a à prier
Le Dieu du Ciel & de la Terre , qu'il
ajoûte aux biens dont il a déja comblé
vos Excellences la parfaite connoiſſance
de celuy qui les leur afaits .
L'Hebreu fut ſuivy du
Grec , & on leur fit ce troifiéme
compliment au nom de
ceux qu'on éleve dans cette
Maiſon pour les Miſſions étrangeres
. Voicy comme il a
eſté rendu en nôtre Langue,
MESSEIGNEURS,
Entre toutes les Perſonnes qui de-
Riij
198 IV. P. du Voyage
meurent dans cetteMaison que vous
avezbien voulu honorer aujourd'hui
devotre prefence, nous croyons que
nul n'a reſſenti plus de joye quenous
qui y sommes pour nous rendre dignes
depoffer dans votre Païs,quand
nos Supericurs voudrontbien nous y
envoyer. Ce qui nousy porte , c'est le
defir de procurer au Royaume de
Siam qui a toutes les autres richeßes,
daseule qui luy manque , &fans laquelle
toutes les autres luy seroient
inutiles , c'est la connoiffance & l'aour
du vray Dieu, Createur du Ciel
& de la Terre ; & rien ne pourroit
nous donner plus de joye & d'efpevance
de réüſſir dans ce deffein que
toutes ces excellentes qualitez que
la France admire en vos perſonnes.
Cette douceur & cette affabilité que
Vous aveztémoignée envers tout le
des Amb. de Siam. 199
monde, ne nous laiſſe pas lieu de douter
que les Peuples de Siam ne reçoi
ventfavorablement ceux qui confacreront
leur vie & leurs travaux
pour leur porter les lumieres de l'Evangile
de I. C. & cette merveilleuſe
penetration d'esprit que vous
avez faitparoître en toutes fortes de
rencontres nous fait concevoir la facilité
, avec laquelle ces mêmes Peuplesse
laiſſeront perfuader des veritez
que nous deprons leur enfeigner.
Votre équité , vôtre modération
, vôtreſageſſe , &toutes vos autres
vertus jointes à celles- cy , nous
rempliſſent de veneration pour vos
Excellentces , aussi bien que de joye
en nous mêmes ; & nous portent
avec encore plus d'ardeur à demander
inceffamment au vray Dieu tout
puiſſant,&infinimentbon, de vous
>
Rimj
200 IV P. du Voyage
conferver toûjoursdans uneparfaite
Santé, de vous accorder un heureux
retour dans votre Patrie ,& la joye
de retrouver'le Roy de Siam comblé
d'un nouvel excés de gloire. Mais
fur tout, nous ne ceſſerons jamais de
demander à ce Dieu éternel , & qui
diſpoſe des coeurs des hommes comme
il luy plaiſt , qu'il vousfaffe la grace
dele connoître&de l'aimer ,&d'étre
éternellement comblez de joye
avec luy.
Aprés cela , ils furent com
plimentez en Latin au nom
des Eccleſiaſtiques du Seminaire
qui doivent partir avant
les Ambaſſadeurs. Comme la
Langue Latine eſt entenduë
preſque de tout le monde,j'ay
des Amb. de Siam. 201
crû devoir mettre ce compli
compil
ment tel qu'il a eſté pronon
cé.
Viex hâcdomoquam nuncveftrâ
preſentiâfummoperè illuf
tratis, Viri Excellentiffimi, Siamum
vobiscum profecturi sunt , eandemquè
Claffem , vel fortè etiam eandemNavim
confcenfuri, precipuam
fibi hodiè , tùm erga Excellentias
veftras Reverentiam , tum pre cateris
latitiam exhibendam effe ar
bitrantur. Habent etenim in hodierno
, quo nos afficitis , honore , velut
pignus quoddam future veftra in
ipsos benignitatis : dulciffima converfationis
in via : fortiffime tuitionis
in Patria : ubique benevolentia
fingularis. Latantur autem
202 IV. P. du Voyage
maximè , cum mente pertractant,
jam-jamquepreripiunt, quam egregia,
quàm grandia de vobis vel invitis
, in Regno Siamensi poterunt
nuntiare ; palàm nempè faciendo
meritis extollendo laudibus quicquid
alioquin veftra modeftia reticuiffet
: fummam , quam apud nos
oftendiftis , ingenj magnitudinem,
-aquabilitatem animi, in tuendo Siamenfi
nomine dignitatem : ut fuiftis
in tractandis negotijs folertes ,
in extricandis difficultatibus dexteri,
in folvendis quæftionibus prudentes,
in reſponſis mille, velferid,
vel jocosè dandis , prout res poftulabat,
femperparatiffimi : ut noftis
denique vivere cum Optimatibus
comitèr , cum Plebeijs humaniter,
cum Regijs Ministris ſapienter, cum
Principibus dignè & magnifice, &
desAmb. de Siam. 203
(quod omnium fummum eft | LVDOVICI
MAGNI laudem &gratiam
demereri . Ita ut duobus tantum
Gens Siamensis & Gallica jam
inter se diſtare videantur , Patriâ
fcilicet &Religione ; quarum altera,
perfædus initum inter potentiffimos
Reges, deinceps communis erit,
altera verò ( faxit Deus Optimus
Maximus ) prorsus una.
M l'Abbé de Lionne finit
en Siamois, au nom des Ouvriers
Apoftoliques qui travaillent
à Siam , & dans les
Royaumes voiſins . Voicy ce
qu'il dit en certe Langue.
Vſqu'icy, MESSEIGNEVRS,
j'ay vû avec une extrême joie,
204 IV. P. du Voyage
L'empressement extraordinaire que
toute la France a fait paroître à vous
témoigner l'estime,le refpest l'admiration
qu'elle a pour le très-Puif-
Sant Roy, votre Maître, &pour vous
en particulier , qui foûtenez icy fi
excellemment faDignité. Voicy l'unique
occasion où j'aye pû mêler ma
voix aux applaudſſemens publics,&
vous marquer quelque chose de mes
Sentimensfur cesujet. l'ofe dire qu'ils
Surpaffint ceux de tout le reſte des
hommes; &pour en convenir, vous
n'avez qu'à faire reflexion aux vaifons
fingulieres & personnelles que
j'ay de parler ainsi. Les autres connoiſſent
à la verité le Roy de Siam ,
Sur ce que la Renommée a publiéde
fes grandes qualitez ; mais quoiqu'-
elle ait dit du rang éminent qu'il
tient entre tous les Princes de l'o-
4
desAmb. de Siam. 205
1
ment ,
vient , de la richeſſe de ſes tresors .
de la penetration étonnante deſon efprit,
de la ſageſſe de ſon Gouvernede
l'application infatigable
qu'ildonne aux affaires de son Etat,
deson difcernement &de son amour
pour le veritable merite , de cette
merveilleuse ardeur qu'il a de tout
connoître & de tout sçavoir, de cette
affabilité qui , sans rien diminuer
de sa grandeur , luy apprend à se
proportionner à toutle monde, &qui
attire chez lay ce prodigieux nom.
bre d'Etrangers ; & ce qui nous touche
de plus prés , de cette bontépar
ticuliere qu'il a pour les Ministres
du Vray Dieu ; tout cela, dis-je, quelque
grand qu'il soit , n'est- il pas
encore au deſſous de ce que découvrent
dansſa perſonne Royale, tous ceux qui
ont le bonheur de l'approcher , & ce
206 IV. P. du Voyage
que j'y ay découvert tant de fois
moy- même ? Il en est ainsi à proporsion
des jugemens avantageux que
l'on a portez icy de vos Excellences.
On a admiré , par exemple , & l'on
n'oubliera jamais la juſteſſe&lasubtilité
de vos reponses ; cependant on
na souvent connu que la moindre
partie de leur beautè , elles en perdoient
beaucoup dans le paſſage d'une
langue à l'autre , & moy-méme
j'avois une espece d'indignation de
me voir dans l'impoſſibilité de leur
donner tout leur agrément & toute
Leur force. On a admiré ce fond de
politeſſe , qui vous rend capables
d'entrer (i aiſement dans les manieres
particulieres de chaque Nation,
quelques differentes que toutes les
Nations foient entre elles. On a admiré
cette prodigieuse égalité d'ame
• des Amb de Siam. 207
& cette Paix qui ne se trouble jamais
de rien ; on a admiré enfin cent
autres qualitez excellentes qui éclatent
tous les jours dans vos perſonnes
; cependant ceux qui en ont
esté touchez, ne vous ont vû que
comme en paſſant; qu'auroit- ce esté,
s'ils avoient eu le moyen de vous
confiderer plus à loiſir&deplus près ?
Les ordres du tres-Grand Roy de
Siam m'ont procure cét avantage ,
lorſqu'il a joint à tous les témoignages
de bonté qu'il m'avoit déja donnez
, celuy de ſouhaiter que je vous
accompagnaſſe en France . Vous y avez
ajouſté mille marques touchanres
de vôtre amitié , & la Nature
Seule qui inſpire à tous les hommes
la reconnoiſſance , suffiroit pour me
donner les fentimens les plus reſpectueux
pour votre Grand Prince,les
208 IV . P.du Voyage
plus tendres pour vos personnes , &
les plus Zelez pour votre Nation :
mais Dieu , dont la Providence conduit
tout avec une fageffe & une
bonte admirable, a pris foin luy-meme
de fortifier infiniment ces fentimens
dans mon coeur , en me confirmant
dans le defſſein de paſſer ma
vie avec vous, &de la consacrer à
vôtre ſervice, pour tâcher de contri
buer à vôtre bonheur eternel.
La lecture de tous ces
Complimens eftant finie , te
premier Ambaſſadeur dit ,
qu'ils estoient trés - obligez au
Seminaire des honneſtetez qu'il
leurfaifoit ; qu'ils luy donnoient
avec plaifir par leur viſite une
nouvelle marque de leur eftimes
des Amb. de Siam. 209
que le Roy leur Maistre , leur
avoit ordonné de prendre confiance
en ceux qui gouvernoient
cette Maison ; qu'ils rendroient
un compte exact à Sa Majesté,
des ſervices importans qu'ils recevoient
d'eux tous les jours depuis
leur arrivée à Paris ; qu'ils
n'avoient eſté en aucun lieuplus
volontiers que chez eux ; &que
s'ilspouvoient quelque jour dans
Ieur Pays donner à leurs Miffionnaires
des témoignages effectifs
de leur affection & de leur
reconnoiffance, ils le feroient avec
la plus grande joye du monde.
Apeine eut-il ceffé de par-
S
210 IV. P. du Voyage
/
ler, qu'on vint avertir que la
Table eſtoit ſervie . C'eſtoit
uneTable ovale à vingt couverts,
placez dans un Refectoire
qui estoit fort éclairé
de bougies. Le Repas fut un
Ambigu , où il y eut , pour
marque de distinction
double Service devant les
,
un
Ambaſſadeurs , & où l'abondance,
la delicateffe &la propreté
parurent également par
tout. La dépenſe en fut faite
par une Perſonne de pieté,
qui ayant appris l'honneur
que les Ambaſſadeurs vouloient
faire au Seminaire de
des Amb. de Siam . 211
le vifiter , & l'embarras où ſe
trouvoit le Superieur fur la
maniere de les recevoir ( parcequ'il
ne croyoit pas que
ſelon leurs idées il convinſt à
l'humilité de ſa profeffion,
ny à la pauvreté de ſa Maifon
, de faire un Repas qui
répondiſt à la grandeur de
leur caractere , & au merite
de leurs perſonnes ) le pri
de ne ſe mettre en peine de
rien , & fe chargea genereufement
de pourvoir à tout.
Chaque Ambaſſadeur & chaque
Mandarin avoit derriere
luy un Homme appliqué u-
Sij
212 IV. P. du Voyage
niquement à le ſervir , & on
donna de ſi bons ordres pour
tout le reſte, que tout ſe paffa
fans confufion & fans bruit.
Ainſi la tranquilité qui regna
toûjours , fit affez voir qu'on
eſtoit dans une Communauté
reglée. M¹ deBrifacier qui
n'ignoroit pas combien les
Ambaſſadeurs font choquez
des dépenses que font des
Preftres , jugea qu'il eſtoit à
propos de leur declarer de
bonne foy la chofe comme
elle eſtoit , & de leur dire,
pour les prévenir, en les conduiſant
au Refectoire,que s'ils
des Amb. de Siam. 213
trouvoient dans la Collation
qu'on leur alloit faire , quelque
forte de magnificence , ils n'en
devoient pas estre ſcandalisez
comme d'un excezcondamnable
dans une Maison Eccleſiaſtique,
mais qu ils devoient pluſtoſt l'agréer
comme un effet loüable du
Zele d'une Perſonne dont il n'avoit
pas crû devoir borner la generofité
dans une occafion, où il
ne penſoit pas qu'on pûst trop
faire pour eux. Pendant que
les Maiſtres estoient àTable,
on en ſervit une autre à fix
couverts , dans un lieu tout
proche , pour les Interpretes
274 IV. P. du Voyage
& les Secretaires . Les Gens
mangerent enfuite , & avant
dix heures les Ambaſſadeurs
ſe retirerent dans leur Hoſtel
avec de grandes marques de
fatisfaction .
témoigné pluſieurs fois à M
l'Abbé de Lionne , & à r
de Brifacier, Superieur du Seminaire
des miſſions Eftrangeres
, le deſir qu'ils avoient
depuis longtemps de leur
rendre viſite dans leur mаі
fon, en fixerent enfin le jour
190 IV. P. du Voyage
au 10. Decembre . Comme le
premier Ambaſſadeur eſtoit
allé ce jour là ſeul avec M
Torf à Versailles , pour conferer
avec Mle Marquis de
Seignelay, on alla fur les trois
heures aprés midy, propoſer
aux deux autres de venir voir
la Maiſon des Incurables. Ils
répondirent ſans hefiter qu'ils
ne vouloient point ſe partager ce
jour-là , qu'ils ne fortiroient que
pour aller au Seminaire, o que
s'ils avoient ſuivy leur inclination
, ils ſe ſeroient acquittez
beaucoup pluſtoſt de ce devoir .
Si-tôt qu'on apprit qu'ils ardes
Amb . de Siam. 191
rivoient , on alla les recevoir
à la defcente de leur Carroffes
, & on les conduiſit dans
un lieu où M l'Abbé de
Choiſi leur preſenta du Thé
dans les petits Vaſes d'or &
d'argent , que M Conſtance
luy a donnez à Siam , & fit
brûler du bois d'Aquila qui
parfuma l'air enun moment.
Il eſtoit fix heures lorſque le
Premier Ambaſſadeur revint
de Verſailles ; il les trouva
en converſation avec M'PEvêque
Duc de Laon , qu'ils
avoient veu à la Fére où , ce
Prelat estoit allé exprés pour
192 IV.P.du Voyage
les ſaluer au retour de leur
Voyage deFlandre.M leMarquis
de Coeuvres ſon Frere,
qu'ils ſçavoient eſtre le beaufrere
deM l'Abbé deLionne,
eſtoit auſſi avec eux, ainſi que
-M¹ d'Aligre, Ms lesAbbez le
Pelletier & de Neſmond , les
Peres Couplet & Spinola Jefuîtes
, &quelques autres perſonnes
de merite que l'on
avoit eu ſoin d'inviter.
La converſation ayant eſté
interrompuë, il ſe fit d'abord
un peu de filence , & M² de
Brifacier accompagné des
Eccleſiaſtiques de fa maiſon,
prit
des Amb. de Siam. 193
prit cet intervalle pour faire
un compliment fort court ,
qui prepara l'eſprit des Ambaſſadeurs
à en entendre quatre
autres en diverſesLangues.
Voicy les termes de ce com
pliment.
MESSEIGNEVRS,
Vn meriteauſſi univerſel & auſſi
univerſellement reconnu que levôtre,
devroit estre publié en toutes for
tes de Langues , & nous souhaiterions
pouvoir aſſembler icy les differentes
Nations de l'Europe ,pour honorer
par leur bouche vôtre Grand
Roy dans vos Excellences , de mème
que ce puiſſant Prince a honoré
R
194 IV. P. duVoyage
à Siampar la deputation des divers
Peuples de l'Orient nôtre Incompaparable
Monarque dans la personne
defon Ambassadeur extraordinaire.
Mais fansformerde vains deſirs &
Sans rien emprunter des Royaumes
étrangers , fouffrez, Meffeigneurs ,
que plusieurs Prestres de cette Maifon
, qui vous vont complimenter
aprés moy ,se partagent entre eux
pour lover en plus d'une maniere
les talents& la conduiteque tout le
monde admire en vous , &qu'ils employent
ce que l'Hebreu a desçavant,
ce que leGrec a de poly , ce que le Latin
a de grave , & ce que le Siamois
doit avoir d'agréable à vôtre égard,
pour rendre Séparement & diverſement
à vos Eminentes qualitezles
profonds refpects qui leur font dûs ,
pour repondre à l'honneur de vôdes
Amb. de Siam. 195
tre visite , & aux marques de vos
bontez par les témoignages finceres
d'une estime & d'une reconnoiſſance
éternelle.
Ils furent enſuite compli
mentez en Hebreu au nom
des Penſionnaires du Seminaire
, & à la fin de chaque
compliment , on liſoit la traduction
Siamoiſe qui en a
voit eſté faite , partie par le
ſieur Antoine Pinto , Acolyte
du Seminaire de Siam , & partie
par le ſieur Gervaiſe , l'un
des Ecclefiaftiques François ,
que feu Me l'Eveſque d'Heliopolis
avoit menez avec luy
Rij
196 IV. P. du Voyage
dans fon dernier voyage aux
Indes. Voicy la traduction
de ce compliment Hebreu
en nôtre Langue.
MESSEIGNEVRS ,
Cette maison reçoit aujourd'huy un
honneur qu'elle n'eût jamais ofé efperer.
Elle est établie pour envoyer
des hommes Apostoliques dans les
Royaumes les plus éloignez, & c'est
ce qu'elle a toûjours fait depuis fon
établiſſement. Mais qu'elle dût recevoirjamais
trois Illuftres Ambaffadeurs
venus des extremitez de la
terre , c'est ce qu'elle apeine à croire ,
quand même elle le voit. Dans l'excez
delajoye qui la transporte , elle.
ne peut , Meſſeigneurs , que vous
des Amb. de Siam. 197
:
conjurer d'être tres-perfuadez de ſa
reconnoiſſance respectueuse , & de
Pardeur continuelle qu'elle a à prier
Le Dieu du Ciel & de la Terre , qu'il
ajoûte aux biens dont il a déja comblé
vos Excellences la parfaite connoiſſance
de celuy qui les leur afaits .
L'Hebreu fut ſuivy du
Grec , & on leur fit ce troifiéme
compliment au nom de
ceux qu'on éleve dans cette
Maiſon pour les Miſſions étrangeres
. Voicy comme il a
eſté rendu en nôtre Langue,
MESSEIGNEURS,
Entre toutes les Perſonnes qui de-
Riij
198 IV. P. du Voyage
meurent dans cetteMaison que vous
avezbien voulu honorer aujourd'hui
devotre prefence, nous croyons que
nul n'a reſſenti plus de joye quenous
qui y sommes pour nous rendre dignes
depoffer dans votre Païs,quand
nos Supericurs voudrontbien nous y
envoyer. Ce qui nousy porte , c'est le
defir de procurer au Royaume de
Siam qui a toutes les autres richeßes,
daseule qui luy manque , &fans laquelle
toutes les autres luy seroient
inutiles , c'est la connoiffance & l'aour
du vray Dieu, Createur du Ciel
& de la Terre ; & rien ne pourroit
nous donner plus de joye & d'efpevance
de réüſſir dans ce deffein que
toutes ces excellentes qualitez que
la France admire en vos perſonnes.
Cette douceur & cette affabilité que
Vous aveztémoignée envers tout le
des Amb. de Siam. 199
monde, ne nous laiſſe pas lieu de douter
que les Peuples de Siam ne reçoi
ventfavorablement ceux qui confacreront
leur vie & leurs travaux
pour leur porter les lumieres de l'Evangile
de I. C. & cette merveilleuſe
penetration d'esprit que vous
avez faitparoître en toutes fortes de
rencontres nous fait concevoir la facilité
, avec laquelle ces mêmes Peuplesse
laiſſeront perfuader des veritez
que nous deprons leur enfeigner.
Votre équité , vôtre modération
, vôtreſageſſe , &toutes vos autres
vertus jointes à celles- cy , nous
rempliſſent de veneration pour vos
Excellentces , aussi bien que de joye
en nous mêmes ; & nous portent
avec encore plus d'ardeur à demander
inceffamment au vray Dieu tout
puiſſant,&infinimentbon, de vous
>
Rimj
200 IV P. du Voyage
conferver toûjoursdans uneparfaite
Santé, de vous accorder un heureux
retour dans votre Patrie ,& la joye
de retrouver'le Roy de Siam comblé
d'un nouvel excés de gloire. Mais
fur tout, nous ne ceſſerons jamais de
demander à ce Dieu éternel , & qui
diſpoſe des coeurs des hommes comme
il luy plaiſt , qu'il vousfaffe la grace
dele connoître&de l'aimer ,&d'étre
éternellement comblez de joye
avec luy.
Aprés cela , ils furent com
plimentez en Latin au nom
des Eccleſiaſtiques du Seminaire
qui doivent partir avant
les Ambaſſadeurs. Comme la
Langue Latine eſt entenduë
preſque de tout le monde,j'ay
des Amb. de Siam. 201
crû devoir mettre ce compli
compil
ment tel qu'il a eſté pronon
cé.
Viex hâcdomoquam nuncveftrâ
preſentiâfummoperè illuf
tratis, Viri Excellentiffimi, Siamum
vobiscum profecturi sunt , eandemquè
Claffem , vel fortè etiam eandemNavim
confcenfuri, precipuam
fibi hodiè , tùm erga Excellentias
veftras Reverentiam , tum pre cateris
latitiam exhibendam effe ar
bitrantur. Habent etenim in hodierno
, quo nos afficitis , honore , velut
pignus quoddam future veftra in
ipsos benignitatis : dulciffima converfationis
in via : fortiffime tuitionis
in Patria : ubique benevolentia
fingularis. Latantur autem
202 IV. P. du Voyage
maximè , cum mente pertractant,
jam-jamquepreripiunt, quam egregia,
quàm grandia de vobis vel invitis
, in Regno Siamensi poterunt
nuntiare ; palàm nempè faciendo
meritis extollendo laudibus quicquid
alioquin veftra modeftia reticuiffet
: fummam , quam apud nos
oftendiftis , ingenj magnitudinem,
-aquabilitatem animi, in tuendo Siamenfi
nomine dignitatem : ut fuiftis
in tractandis negotijs folertes ,
in extricandis difficultatibus dexteri,
in folvendis quæftionibus prudentes,
in reſponſis mille, velferid,
vel jocosè dandis , prout res poftulabat,
femperparatiffimi : ut noftis
denique vivere cum Optimatibus
comitèr , cum Plebeijs humaniter,
cum Regijs Ministris ſapienter, cum
Principibus dignè & magnifice, &
desAmb. de Siam. 203
(quod omnium fummum eft | LVDOVICI
MAGNI laudem &gratiam
demereri . Ita ut duobus tantum
Gens Siamensis & Gallica jam
inter se diſtare videantur , Patriâ
fcilicet &Religione ; quarum altera,
perfædus initum inter potentiffimos
Reges, deinceps communis erit,
altera verò ( faxit Deus Optimus
Maximus ) prorsus una.
M l'Abbé de Lionne finit
en Siamois, au nom des Ouvriers
Apoftoliques qui travaillent
à Siam , & dans les
Royaumes voiſins . Voicy ce
qu'il dit en certe Langue.
Vſqu'icy, MESSEIGNEVRS,
j'ay vû avec une extrême joie,
204 IV. P. du Voyage
L'empressement extraordinaire que
toute la France a fait paroître à vous
témoigner l'estime,le refpest l'admiration
qu'elle a pour le très-Puif-
Sant Roy, votre Maître, &pour vous
en particulier , qui foûtenez icy fi
excellemment faDignité. Voicy l'unique
occasion où j'aye pû mêler ma
voix aux applaudſſemens publics,&
vous marquer quelque chose de mes
Sentimensfur cesujet. l'ofe dire qu'ils
Surpaffint ceux de tout le reſte des
hommes; &pour en convenir, vous
n'avez qu'à faire reflexion aux vaifons
fingulieres & personnelles que
j'ay de parler ainsi. Les autres connoiſſent
à la verité le Roy de Siam ,
Sur ce que la Renommée a publiéde
fes grandes qualitez ; mais quoiqu'-
elle ait dit du rang éminent qu'il
tient entre tous les Princes de l'o-
4
desAmb. de Siam. 205
1
ment ,
vient , de la richeſſe de ſes tresors .
de la penetration étonnante deſon efprit,
de la ſageſſe de ſon Gouvernede
l'application infatigable
qu'ildonne aux affaires de son Etat,
deson difcernement &de son amour
pour le veritable merite , de cette
merveilleuse ardeur qu'il a de tout
connoître & de tout sçavoir, de cette
affabilité qui , sans rien diminuer
de sa grandeur , luy apprend à se
proportionner à toutle monde, &qui
attire chez lay ce prodigieux nom.
bre d'Etrangers ; & ce qui nous touche
de plus prés , de cette bontépar
ticuliere qu'il a pour les Ministres
du Vray Dieu ; tout cela, dis-je, quelque
grand qu'il soit , n'est- il pas
encore au deſſous de ce que découvrent
dansſa perſonne Royale, tous ceux qui
ont le bonheur de l'approcher , & ce
206 IV. P. du Voyage
que j'y ay découvert tant de fois
moy- même ? Il en est ainsi à proporsion
des jugemens avantageux que
l'on a portez icy de vos Excellences.
On a admiré , par exemple , & l'on
n'oubliera jamais la juſteſſe&lasubtilité
de vos reponses ; cependant on
na souvent connu que la moindre
partie de leur beautè , elles en perdoient
beaucoup dans le paſſage d'une
langue à l'autre , & moy-méme
j'avois une espece d'indignation de
me voir dans l'impoſſibilité de leur
donner tout leur agrément & toute
Leur force. On a admiré ce fond de
politeſſe , qui vous rend capables
d'entrer (i aiſement dans les manieres
particulieres de chaque Nation,
quelques differentes que toutes les
Nations foient entre elles. On a admiré
cette prodigieuse égalité d'ame
• des Amb de Siam. 207
& cette Paix qui ne se trouble jamais
de rien ; on a admiré enfin cent
autres qualitez excellentes qui éclatent
tous les jours dans vos perſonnes
; cependant ceux qui en ont
esté touchez, ne vous ont vû que
comme en paſſant; qu'auroit- ce esté,
s'ils avoient eu le moyen de vous
confiderer plus à loiſir&deplus près ?
Les ordres du tres-Grand Roy de
Siam m'ont procure cét avantage ,
lorſqu'il a joint à tous les témoignages
de bonté qu'il m'avoit déja donnez
, celuy de ſouhaiter que je vous
accompagnaſſe en France . Vous y avez
ajouſté mille marques touchanres
de vôtre amitié , & la Nature
Seule qui inſpire à tous les hommes
la reconnoiſſance , suffiroit pour me
donner les fentimens les plus reſpectueux
pour votre Grand Prince,les
208 IV . P.du Voyage
plus tendres pour vos personnes , &
les plus Zelez pour votre Nation :
mais Dieu , dont la Providence conduit
tout avec une fageffe & une
bonte admirable, a pris foin luy-meme
de fortifier infiniment ces fentimens
dans mon coeur , en me confirmant
dans le defſſein de paſſer ma
vie avec vous, &de la consacrer à
vôtre ſervice, pour tâcher de contri
buer à vôtre bonheur eternel.
La lecture de tous ces
Complimens eftant finie , te
premier Ambaſſadeur dit ,
qu'ils estoient trés - obligez au
Seminaire des honneſtetez qu'il
leurfaifoit ; qu'ils luy donnoient
avec plaifir par leur viſite une
nouvelle marque de leur eftimes
des Amb. de Siam. 209
que le Roy leur Maistre , leur
avoit ordonné de prendre confiance
en ceux qui gouvernoient
cette Maison ; qu'ils rendroient
un compte exact à Sa Majesté,
des ſervices importans qu'ils recevoient
d'eux tous les jours depuis
leur arrivée à Paris ; qu'ils
n'avoient eſté en aucun lieuplus
volontiers que chez eux ; &que
s'ilspouvoient quelque jour dans
Ieur Pays donner à leurs Miffionnaires
des témoignages effectifs
de leur affection & de leur
reconnoiffance, ils le feroient avec
la plus grande joye du monde.
Apeine eut-il ceffé de par-
S
210 IV. P. du Voyage
/
ler, qu'on vint avertir que la
Table eſtoit ſervie . C'eſtoit
uneTable ovale à vingt couverts,
placez dans un Refectoire
qui estoit fort éclairé
de bougies. Le Repas fut un
Ambigu , où il y eut , pour
marque de distinction
double Service devant les
,
un
Ambaſſadeurs , & où l'abondance,
la delicateffe &la propreté
parurent également par
tout. La dépenſe en fut faite
par une Perſonne de pieté,
qui ayant appris l'honneur
que les Ambaſſadeurs vouloient
faire au Seminaire de
des Amb. de Siam . 211
le vifiter , & l'embarras où ſe
trouvoit le Superieur fur la
maniere de les recevoir ( parcequ'il
ne croyoit pas que
ſelon leurs idées il convinſt à
l'humilité de ſa profeffion,
ny à la pauvreté de ſa Maifon
, de faire un Repas qui
répondiſt à la grandeur de
leur caractere , & au merite
de leurs perſonnes ) le pri
de ne ſe mettre en peine de
rien , & fe chargea genereufement
de pourvoir à tout.
Chaque Ambaſſadeur & chaque
Mandarin avoit derriere
luy un Homme appliqué u-
Sij
212 IV. P. du Voyage
niquement à le ſervir , & on
donna de ſi bons ordres pour
tout le reſte, que tout ſe paffa
fans confufion & fans bruit.
Ainſi la tranquilité qui regna
toûjours , fit affez voir qu'on
eſtoit dans une Communauté
reglée. M¹ deBrifacier qui
n'ignoroit pas combien les
Ambaſſadeurs font choquez
des dépenses que font des
Preftres , jugea qu'il eſtoit à
propos de leur declarer de
bonne foy la chofe comme
elle eſtoit , & de leur dire,
pour les prévenir, en les conduiſant
au Refectoire,que s'ils
des Amb. de Siam. 213
trouvoient dans la Collation
qu'on leur alloit faire , quelque
forte de magnificence , ils n'en
devoient pas estre ſcandalisez
comme d'un excezcondamnable
dans une Maison Eccleſiaſtique,
mais qu ils devoient pluſtoſt l'agréer
comme un effet loüable du
Zele d'une Perſonne dont il n'avoit
pas crû devoir borner la generofité
dans une occafion, où il
ne penſoit pas qu'on pûst trop
faire pour eux. Pendant que
les Maiſtres estoient àTable,
on en ſervit une autre à fix
couverts , dans un lieu tout
proche , pour les Interpretes
274 IV. P. du Voyage
& les Secretaires . Les Gens
mangerent enfuite , & avant
dix heures les Ambaſſadeurs
ſe retirerent dans leur Hoſtel
avec de grandes marques de
fatisfaction .
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Résumé : Tout ce qui s'est passé au Seminaire des Missions Etrangeres, le jour que les Ambassadeurs y ont esté regalez, avec les cinq Harangues qui leur ont esté faites dans ce Seminaire. [titre d'après la table]
Le 10 décembre, les ambassadeurs de Siam visitèrent le Séminaire des Missions Étrangères. Initialement, ils souhaitaient rencontrer l'abbé de Lionne et M. de Brifacier, mais ces derniers étaient occupés à Versailles. À leur retour, les ambassadeurs furent accueillis par l'abbé de Choisi, qui leur offrit du thé et brûla du bois d'Aquila pour parfumer l'air. Ils rencontrèrent également plusieurs personnalités, dont le duc de Laon et le marquis de Coeuvres. M. de Brifacier, accompagné d'ecclésiastiques, prononça un compliment préparatoire, suivi de compliments en hébreu, grec, latin et siamois. Chaque compliment soulignait l'honneur de recevoir les ambassadeurs et exprimait des vœux de santé et de succès pour leur mission. Le compliment en latin fut prononcé en entier, tandis que les autres furent traduits en siamois par Antoine Pinto et Gervaise. L'abbé de Lionne conclut en siamois, exprimant la joie de la France et son admiration pour le roi de Siam et les ambassadeurs. Il souligna les qualités exceptionnelles des ambassadeurs et leur capacité à représenter dignement leur roi. Les ambassadeurs exprimèrent leur gratitude pour l'accueil et les honneurs reçus, promettant de rendre compte au roi de Siam des services rendus par le Séminaire. Lors du repas, les missionnaires témoignèrent de leur affection et de leur reconnaissance. La table, ovale et pouvant accueillir vingt convives, était placée dans un réfectoire bien éclairé. Le repas, qualifié d'ambigu, se distinguait par un double service pour les ambassadeurs et se caractérisait par son abondance, sa délicatesse et sa propreté. La dépense fut prise en charge par une personne pieuse, qui avait appris la visite des ambassadeurs et l'embarras du supérieur du séminaire concernant la manière de les recevoir. Chaque ambassadeur et mandarin avait un serviteur dédié, et tout se déroula sans confusion ni bruit, démontrant l'ordre de la communauté. Monsieur de Brifacier expliqua aux ambassadeurs que la magnificence du repas était due à la générosité d'une personne et non à un excès condamnable. Pendant que les maîtres étaient à table, un autre repas fut servi aux interprètes et secrétaires. Les ambassadeurs se retirèrent satisfaits avant dix heures.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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