LES SAISONS ,
CANT ATE
A mettre en Musique. ·
Quand l'Air , le Feu ; la Terre et l'Onde , -
Furent débrouillez du cahos ;
Vertumne regna seul dans l'Empire du Monde ,
Durant cet âge heureux du premier des Métaux.
Mais lorsque le Dieu du Tonnerre ,
Eat détrôné son pere , on lui ravit ses droits.
Cérés , Bacchus , l'Hyver , par une horrible =
guerre ,
Renverserent toutes ses Loix.
Et bien-tôt ses couleurs ne parerent la Terre ,
Qu'en ce temps où l'Amour vient vuider son
Carquois.
I.Vol
DECEMBRE. 1732. 2725
Air.
Ah ! sans ce malheur déplorable ,
Que les Mortels seroient heureux !
Le doux Printemps seroit durable ,
L'Amour n'éteindroit point ses feux ;
Du Dieu que chante Philoméle ,
Dans ses mélodieux Concerts ,
Tous les cœurs pourroient ainsi qu'elle ,
Jusqu'au tombeau porter les fers..
Ah ! &c. .
Récitatif.
Mais quoi ! Vertumine fuit,le tendre Amour s'enga vole ;
Philoméle gémit en traversant les Airs ,
Et les brulans Sujets d'Eole ,
Embrasent déja l'Univers ,
L'abondante Cérés regne dans les Campagnes;
De ses dons précieux l'or brille en nos Vallons ,
Et l'espoir d'en jouir , de l'Hôte des Montagnes s
Va faire celui des Sillons.
Air..
Imitons sa sage prudence ,
Après les plaisirs du Printemps,
Pensons à ceux de l'abondance ;
S'ils sont moins doux , ils sont constans.
Que tout encense la Déesse ,
1. Vol. Qui
2726 MERCURE DE FRANCE
Qui vient nous donner de beaux jours ,
Quand a disparu la jeunesse ,
Sur l'aîle des tendres Amours.
Imitons , &c.
Récitatif.
Dieux ! quel nouveau spectacle à mes yeux se
présente !
Je vois tous les Côteaux de la Pourpre couverts ;
Cérés fait place au Dieu dont la Liqueur char mante,
Fait les plaisirs de l'Univers.
Pomone vient mêler ses fruits à la vendange ;
Tout charme l'espoir des Buveurs ;
Le Thyrre est triomphant , et le vainqueur
Gange ,
Reçoit aussi l'encens des cœurs.
Aire
Livrons-nous à la douce yvresse,
De son agréable boisson ;
Elle éteint le mal qui nous presse ,
En submergeant notre raison.
Dans cette Liqueur immortelle,
On trouve la felicité,
L'Amour est perfide , infidelle ;
Bacchus seul est la verité.
Livrons , &c.
1. Vol.
Rici
DECEMBRE. 1732. 2727.
Récitatif.
Mais hélas ! l'Hyver vient ravager la Nature ,
Sur un Trône éclatant de nege et de glaçons ,
It déja nos Forêts ont perdu leur parure ,
Par le souffle des Aquillons.
Tout tremble à son aspect terrible ;
Les seuls plaisirs n'en sont point allarmez ;
Plus sa rigueur devient sensible ,
Plus des Mortels ils sont aimez.
Air.
L'Hyver,quoiqu'un Dieu redoutable,
Brille à mes yeux de mille attraits ,
En ce qu'il est inséparable ,
Des Jeux , des Ris et de la Paix ;
Son regne est celui des délices ;
·
Chacun peut sans soins , sans travaux ;
Avoir part aux doux sacrifices ,
Qu'il exige de ses Rivaux.
L'Hyver , &c.