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Liste
1
p. 2213-2218
« Une Feüille volante imprimée à Marseille, nous apprend que sur la fin [...] »
Début :
Une Feüille volante imprimée à Marseille, nous apprend que sur la fin [...]
Mots clefs :
Feuille volante, Tragédie, Académie de Marseille, Collège de Vernon
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texteReconnaissance textuelle : « Une Feüille volante imprimée à Marseille, nous apprend que sur la fin [...] »
SPECTACLE S.
U fille ,nous apprend que fur la fin
Ne Feüille volante imprimée à Mar
du mois passé , on y representa avec beaucoup
de succès sur le Theatre du College
des PP. de l'Oratoire , la Tragedie de
Themistocle , dont l'Argument est exposé
au long dans la même feuille. Les Echevins
et tout le Corps de Ville assisterent à
ce Spectacle , auquel il y eût un concours
extraordinaire. Voici le Compliment qui
fut fait aux Echevins , pris du fonds du
sujet de la Piéce Tragique , et qui receut
de justes applaudissemens , sur tout dans
l'endroit qui regarde la nouvelle Academie
de Marseille.
Vous le sçavez , MESSIEURS , Mar
seille étoit sçavante & polie , lorsque le refte
desGaules n'étoit éclairé quepar le sçavoir bar
bare des Druïdes. Elle a déja repris cet ancien
éclat ; elle est devenue encore le séjour des
Lettres, une Société qui réunit tous les talens,
y met , pour ainsi dire , l'esprit en commun ,
& le travail particulier devient le profit general.
De là , nous verrons une succeffion de
génies
2214 MERCURE DE FRANCE
génies rares que la Capitale nous enviera ,
comme Rome en envia autrefois à nos Ancêtres.
De là, vos noms passeront avec les leurs,
à l'immortalité , et nos derniers Neveux admireront
tout ensemble et vos vertus et leurs
progrès.
Če Compliment fut prononcé par Louis
de Saint-Jacques, et l'Argument de la Tragédie
, récité par Pierre - Augustin Guis
Ecoliers d'élite , tous deux de Marseille.
du
Mr de Vernon , fort jolie Ville ,
Diocèse d'Evreux, ne se plaindront pas de
se trouver mal placez , si ensuite de ce
qui s'est passé à Marseille , nous rendons
aussi compte de ce qui les regarde en fait
de Spectacle. Voici l'Extrait d'une Lettre ,
écrite de cette Ville , le 25 Aoust.
Le College de Vernon est aujourd'hui
l'un des meilleurs et des plus florissans de
la Province de Normandie.
Le 22. Août on repréſenta fur le Theatre
de ce College , pour la distribution
des Prix , la Mort d'Antiochus , l'illuftre
Roy de Syrie , qui fit mourir les Maccabées
, fujet des plus tragiques , et tiré de
l'Ecriture Sainte.
Un fpectacle si touchant , et qui fut heureuſement
executé devant une nombreuſe
Affemblée , demandoit quelque chofe à
fa
SEPTEMBRE. 1731. 2215
fa fuite qui fût capable de divertir les Auditeurs
, et de les dédommager , pour ainsi
dire , des sentimens de terreur et de pitié
qui venoient de les émouvoir. On ne pouvoit
guere mieux y réussir qu'en représentant
, comme on fit , les Rufes des Ecoliers,
Comedie en trois Actes , de la compofition
de MM. Gautier et d'Orvilliers ,
dont voici un petit Extrait.
ACTE I. Tripolin , le plus espiegle des
Ecoliers , engage quatre ou cinq de ses
Compagnons à ne plus retourner au College
: il parle plaisamment des mauvais
traitemens des Regens ; les autres applaudissent
et se plaignent à leur tour . Pygron se
mocque de Filidor qu'il trouve allant porter
des liqueurs à son Regent pour en être
mieux traité, et l'engage à aller boire les liqueurs
avec deux ou trois de ses camarades.
ACTE II. Les Ecoliers se disent mutuellement
les tours qu'ils jouent à leurs Parens
pour attraper de l'argent. Tripolin
déclare à Brufcambille, que pour lui il fait
l'esprit folet pendant la nuit , et que ce
moyen lui donne lieu de voler, &c. Pigron
dit qu'ayant acheté un écu faux , et l'ayant
donné à garder à sa grand'mere , qui le
mit avec d'autres écus dans sa cassette , la
bonne femme lui avoit rendu un bon écu
au lieu du faux . Ils proposent ensuite de
joiier
2216 MERCURE DE FRANCE
jouer une partie de Lansquenet. Ils joüent
un moment , et sur un coup douteux ils
contestent , et se querellent en Ecoliers.
Un de leurs camarades vient fort essouflé
les avertir qu'on les cherche de tous
côtez , ce qui les fait tous disparoître.
ACTE III. & le plus comique. Deux
Ecoliers étant allé voler du fruit dans le
verger d'un Paysan , le disent à deux autres
qui ne manquent pas d'y aller. Guingan,
maître du Verger , les ayant surpris ,
s'empare du chapeau de Bruscambille , et
dit en jurant , qu'il ne le rendra qu'après
qu'on lui aura payé ses poires. Tripolin
s'écarte un moment pour consulter avec
Pigron sur les moyens de se tirer d'intrigue
, et d'attraper le Paysan . Voici comment
ils s'y prennent.
Ils reviennent en disputant fortement
l'un contre l'autre à qui aura un
mauvais bonnet qu'ils tiennent : Guingan
tâche de les mettre d'accord , et leur
dit qu'une pareille guenille ne vaut pas la
peine de disputer. Ils lui persuadent que
ce bonnet n'a point de prix , et qu'il rend
invisibles ceux qui le portent : ils le lui
prouvent en le mettant alternativement
sur leur tête et en s'esquivant adroitement,
ce qui fait un très plaisant jeu de Theatre.
Enfin ils prêtent le bonnet au Paysan qui
les
SEPTEMBRE. 1731 2217
les en prie , et qui rend le chapeau de Bruscambille
, se promettant de bien profiter
du temps qu'il possedera cet heureux bonnet.
Il le met sur sa tête et se croît invisi -
ble , les Ecoliers jurant qu'ils ne le voyent
pas , &c. Un Marquis paroît , auquel le
Paysan veut voler l'épée , croyant qu'il
n'en sera pas apperçû , mais il est chassé
et battu .
Tripolin rentre aussi-tôt sur la Scene
en riant du tour qu'il vient de jouer au
Paysan ; son pere qui le cherche arrive ,
le saisit et veut le conduire à St. L. Les
autres Ecoliers surviennent; ils sont si touchez
du péril où se trouve leur ami , qu'ils
jurent de rentrer dans leur devoir , de se
corriger , &c. C'est la fin de la Piéce ,
qui a fait beaucoup de plaisir.
M. de Guiry de Beaumont , Docteur de
Sorbonne , Chanoine de la Collegiale , et
Principal du College , a voulu lui -même
en faire le Prologue qui a été goûté des
Connoisseurs ; mais ce qui a été particu
lierement applaudi , c'eft un Compliment
que déclama , avec beaucoup de grace ,
en Vers de sa façon , un jeune Ecolier de
Troisiéme , et l'un des Acteurs de la Comedie.
Il est fils de M. d'Orvilliers ; c'est
à dire,fils de Maître . On ne mettra ici que
la fin de son Compliment , pour abreger
cet Extrait. H Avec
7218 MERCURE DE FRANCE
Avec quelque talent , beaucoup de hardiesse ,
Nous avons découvert tous nos tours de jeunesse,
Vous amuser étoit notre plus grand plaisir;
Des Acteurs de notre âge ont peine à réussir.
Mais si nous n'avons pû , Messieurs , vous satisfaire
,
'Applaudissez du moins au desir de vous plaire.
Le 13. de ce mois , les Comédiens
François remirent au Theatre la Tragede
Romulus de M. de la Motte , que le
Public revoit avec beaucoup de plaisir.
Les principaux Personnages de cette Piéce
sont Romulus , Tatius , Proculus , Erfilie, et
ces rôles sont remplis par les S" Du Fresne,
Sarrazin , Le Grand , la Dlle Du Fresne ,
&c. Nous renvoyons pour l'Extrait de
ce Poëme au Mercure de Janvier 1722 .
page 96.
Le Lundi 17. les mêmes Comédiens
représenterent à la Cour la Comédie du
Misantrope , qui fut suivie des Folies-
Amoureufes.
U fille ,nous apprend que fur la fin
Ne Feüille volante imprimée à Mar
du mois passé , on y representa avec beaucoup
de succès sur le Theatre du College
des PP. de l'Oratoire , la Tragedie de
Themistocle , dont l'Argument est exposé
au long dans la même feuille. Les Echevins
et tout le Corps de Ville assisterent à
ce Spectacle , auquel il y eût un concours
extraordinaire. Voici le Compliment qui
fut fait aux Echevins , pris du fonds du
sujet de la Piéce Tragique , et qui receut
de justes applaudissemens , sur tout dans
l'endroit qui regarde la nouvelle Academie
de Marseille.
Vous le sçavez , MESSIEURS , Mar
seille étoit sçavante & polie , lorsque le refte
desGaules n'étoit éclairé quepar le sçavoir bar
bare des Druïdes. Elle a déja repris cet ancien
éclat ; elle est devenue encore le séjour des
Lettres, une Société qui réunit tous les talens,
y met , pour ainsi dire , l'esprit en commun ,
& le travail particulier devient le profit general.
De là , nous verrons une succeffion de
génies
2214 MERCURE DE FRANCE
génies rares que la Capitale nous enviera ,
comme Rome en envia autrefois à nos Ancêtres.
De là, vos noms passeront avec les leurs,
à l'immortalité , et nos derniers Neveux admireront
tout ensemble et vos vertus et leurs
progrès.
Če Compliment fut prononcé par Louis
de Saint-Jacques, et l'Argument de la Tragédie
, récité par Pierre - Augustin Guis
Ecoliers d'élite , tous deux de Marseille.
du
Mr de Vernon , fort jolie Ville ,
Diocèse d'Evreux, ne se plaindront pas de
se trouver mal placez , si ensuite de ce
qui s'est passé à Marseille , nous rendons
aussi compte de ce qui les regarde en fait
de Spectacle. Voici l'Extrait d'une Lettre ,
écrite de cette Ville , le 25 Aoust.
Le College de Vernon est aujourd'hui
l'un des meilleurs et des plus florissans de
la Province de Normandie.
Le 22. Août on repréſenta fur le Theatre
de ce College , pour la distribution
des Prix , la Mort d'Antiochus , l'illuftre
Roy de Syrie , qui fit mourir les Maccabées
, fujet des plus tragiques , et tiré de
l'Ecriture Sainte.
Un fpectacle si touchant , et qui fut heureuſement
executé devant une nombreuſe
Affemblée , demandoit quelque chofe à
fa
SEPTEMBRE. 1731. 2215
fa fuite qui fût capable de divertir les Auditeurs
, et de les dédommager , pour ainsi
dire , des sentimens de terreur et de pitié
qui venoient de les émouvoir. On ne pouvoit
guere mieux y réussir qu'en représentant
, comme on fit , les Rufes des Ecoliers,
Comedie en trois Actes , de la compofition
de MM. Gautier et d'Orvilliers ,
dont voici un petit Extrait.
ACTE I. Tripolin , le plus espiegle des
Ecoliers , engage quatre ou cinq de ses
Compagnons à ne plus retourner au College
: il parle plaisamment des mauvais
traitemens des Regens ; les autres applaudissent
et se plaignent à leur tour . Pygron se
mocque de Filidor qu'il trouve allant porter
des liqueurs à son Regent pour en être
mieux traité, et l'engage à aller boire les liqueurs
avec deux ou trois de ses camarades.
ACTE II. Les Ecoliers se disent mutuellement
les tours qu'ils jouent à leurs Parens
pour attraper de l'argent. Tripolin
déclare à Brufcambille, que pour lui il fait
l'esprit folet pendant la nuit , et que ce
moyen lui donne lieu de voler, &c. Pigron
dit qu'ayant acheté un écu faux , et l'ayant
donné à garder à sa grand'mere , qui le
mit avec d'autres écus dans sa cassette , la
bonne femme lui avoit rendu un bon écu
au lieu du faux . Ils proposent ensuite de
joiier
2216 MERCURE DE FRANCE
jouer une partie de Lansquenet. Ils joüent
un moment , et sur un coup douteux ils
contestent , et se querellent en Ecoliers.
Un de leurs camarades vient fort essouflé
les avertir qu'on les cherche de tous
côtez , ce qui les fait tous disparoître.
ACTE III. & le plus comique. Deux
Ecoliers étant allé voler du fruit dans le
verger d'un Paysan , le disent à deux autres
qui ne manquent pas d'y aller. Guingan,
maître du Verger , les ayant surpris ,
s'empare du chapeau de Bruscambille , et
dit en jurant , qu'il ne le rendra qu'après
qu'on lui aura payé ses poires. Tripolin
s'écarte un moment pour consulter avec
Pigron sur les moyens de se tirer d'intrigue
, et d'attraper le Paysan . Voici comment
ils s'y prennent.
Ils reviennent en disputant fortement
l'un contre l'autre à qui aura un
mauvais bonnet qu'ils tiennent : Guingan
tâche de les mettre d'accord , et leur
dit qu'une pareille guenille ne vaut pas la
peine de disputer. Ils lui persuadent que
ce bonnet n'a point de prix , et qu'il rend
invisibles ceux qui le portent : ils le lui
prouvent en le mettant alternativement
sur leur tête et en s'esquivant adroitement,
ce qui fait un très plaisant jeu de Theatre.
Enfin ils prêtent le bonnet au Paysan qui
les
SEPTEMBRE. 1731 2217
les en prie , et qui rend le chapeau de Bruscambille
, se promettant de bien profiter
du temps qu'il possedera cet heureux bonnet.
Il le met sur sa tête et se croît invisi -
ble , les Ecoliers jurant qu'ils ne le voyent
pas , &c. Un Marquis paroît , auquel le
Paysan veut voler l'épée , croyant qu'il
n'en sera pas apperçû , mais il est chassé
et battu .
Tripolin rentre aussi-tôt sur la Scene
en riant du tour qu'il vient de jouer au
Paysan ; son pere qui le cherche arrive ,
le saisit et veut le conduire à St. L. Les
autres Ecoliers surviennent; ils sont si touchez
du péril où se trouve leur ami , qu'ils
jurent de rentrer dans leur devoir , de se
corriger , &c. C'est la fin de la Piéce ,
qui a fait beaucoup de plaisir.
M. de Guiry de Beaumont , Docteur de
Sorbonne , Chanoine de la Collegiale , et
Principal du College , a voulu lui -même
en faire le Prologue qui a été goûté des
Connoisseurs ; mais ce qui a été particu
lierement applaudi , c'eft un Compliment
que déclama , avec beaucoup de grace ,
en Vers de sa façon , un jeune Ecolier de
Troisiéme , et l'un des Acteurs de la Comedie.
Il est fils de M. d'Orvilliers ; c'est
à dire,fils de Maître . On ne mettra ici que
la fin de son Compliment , pour abreger
cet Extrait. H Avec
7218 MERCURE DE FRANCE
Avec quelque talent , beaucoup de hardiesse ,
Nous avons découvert tous nos tours de jeunesse,
Vous amuser étoit notre plus grand plaisir;
Des Acteurs de notre âge ont peine à réussir.
Mais si nous n'avons pû , Messieurs , vous satisfaire
,
'Applaudissez du moins au desir de vous plaire.
Le 13. de ce mois , les Comédiens
François remirent au Theatre la Tragede
Romulus de M. de la Motte , que le
Public revoit avec beaucoup de plaisir.
Les principaux Personnages de cette Piéce
sont Romulus , Tatius , Proculus , Erfilie, et
ces rôles sont remplis par les S" Du Fresne,
Sarrazin , Le Grand , la Dlle Du Fresne ,
&c. Nous renvoyons pour l'Extrait de
ce Poëme au Mercure de Janvier 1722 .
page 96.
Le Lundi 17. les mêmes Comédiens
représenterent à la Cour la Comédie du
Misantrope , qui fut suivie des Folies-
Amoureufes.
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Résumé : « Une Feüille volante imprimée à Marseille, nous apprend que sur la fin [...] »
En septembre 1731, la tragédie 'Themistocle' a été représentée avec succès au théâtre du Collège des Pères de l'Oratoire à Marseille. Cette représentation a attiré un public nombreux, y compris les échevins et le corps de ville. Louis de Saint-Jacques a adressé un compliment aux échevins, mettant en avant l'antique savoir de Marseille et son renouveau intellectuel grâce à une société réunissant divers talents. Pierre-Augustin Guis a récité l'argument de la tragédie. À Vernon, le Collège, l'un des meilleurs de Normandie, a organisé une représentation pour la distribution des prix. La tragédie 'La Mort d'Antiochus' a été suivie de la comédie 'Les Ruses des Écoliers'. Cette comédie, en trois actes, a été composée par MM. Gautier et d'Orvilliers et a diverti le public après la tragédie. Le spectacle a été complété par un prologue du Docteur de Sorbonne M. de Guiry de Beaumont et un compliment en vers d'un jeune écolier, fils de M. d'Orvilliers. À Paris, les comédiens français ont repris la tragédie 'Romulus' de M. de la Motte et la comédie 'Le Misantrope' suivie des 'Folies Amoureuses'.
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2
p. 2218-2222
Mort du Sr. de la Thorilliere &c. [titre d'après la table]
Début :
Le Theatre François vient de faire une très-grande perte en la personne de Pierre [...]
Mots clefs :
Troupe de Molière, Amoureuses comiques, Manigances, Fourberies
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mort du Sr. de la Thorilliere &c. [titre d'après la table]
Le Theatre François vient de faire une
très-grande perte en la personne de Pierre
le Noir de la THORILLIERE , mort à Paris le
18. de ce mois , dans la 75. année de son
âge , aprés avoir reçû tous ses Sacremens.
Il étoit fort aimé du Public , qui vraisemblaSEPTEMBR.
E . 1731. 2219
>
semblablement le regretera long - temps ;
c'étoit le seul qui restoit de la Troupe de
Moliere . Il étoit frere de Louise et Therese
le Noir , épouses des feu sieurs Baron et
Dancourt toutes deux mortes depuis
quelques années. Le Public garde encore
un précieux souvenir de la derniere , qui
jusqu'à l'âge de 60. ans , avoit conservé
les airs enfantins et les graces de la jeunesse
dans les rôles d'Amoureuses comiques,
avec une finesse , un naturel et une
noblesse admirable.
Le sieur de la Thorilliere avoit joué d'abord
dans le Tragique les rôles d'Oreste §
de Bajazet , &c. et les Amoureux Comiques;
mais en 1693. après la mort de J. B.
Siret Raifin , le plus excellent Comique
de la Scene Françoise , dont Moliere avoit
cultivé les heureux talens , il lui succeda
dans la plus grande partie de ses rôles , et
l'on peut dire qu'aprés l'inimitable Acteur
dont on vient de parler , le sieur de la
Thorilliere étoit le meilleur Comédieu
dans son genre de tous ceux que Moliere
avoit formés : aucun n'a si bien réussi , ni
si bien attrapé , et avec tant de graces et
de finesses naïves , les manigances , les
fourberies , les manieres et le ridicule d'un
Valet.
Il étoit d'une taille médiocre, mais très-
Hij bien
2220 MERCURE DE FRANCE
bien prise , dansant très bien et de bonne
grace ; le visage ouvert et gracieux , de
beaux yeux et le regard agréable , vif et
expressif; la voix legere , pleine et sonore,
Son jeu étoit plein d'action et d'un badinage
aimable et gay , sans être trivial : un
mouvement , une attitude , un geste , un
souris , un clin d'oeil , tout parloit en lui;
il animoit tout , sans sortir de l'esprit de
son rôle et de son vrai caractere. Ses heureux
talens et une longue pratique lui
avoient acquis cette perfection et la grande
réputation dont il a joüi ; car peu d'Acteurs
peuvent se vanter d'avoir été autant
et si constamment cheris du Public . Cependant
dans sa jeunesse , il chargeoit et
outroit un peu ses caracteres , pour plaire
au bas Parterre , qui l'accabloit d'applau
dissemens écueil fatal pour un Comédien
, qui naturellement au moins aussi vain
que les autres hommes,se prévient de son
merite sur de tels suffrages, sans compter
encore les fades complimens faits d'aprés
pareils juges ; en sorte que non seulenient
il se croit sans défaut , mais encore arrivé
au comble de la perfection ; tandis que
les gens sensez qui ont quelques lumieres
et du goût , haussent les épaules de yoir
applaudir une déclamation entierement
hors de la bienséance et du vrai , et qui
manque
SEPTEMBRE. 173. 22it
manque totalement de vrai- semblance et
de naturel .
Qu'on nous passe cette petite digres
sion à l'occasion de l'excellent Acteur que
nous regrettons avec tout le Public. " II
étoit fils de N. le Noir de la Thorilliere ,
mort il y a plus de 60. ans , très-gracieux
Comédien , quoique d'une taille médiocre
; sur tout il avoit de beaux yeux et de
belles dents. Il excelloit dans les rôles de
Roy et de Paysan . Il avoit été , dit- on ,
Officier de Cavalerie , et succeda à Juvenen
de la Fleur , fameux Comédien qui joüa
d'original le rôle d'Acomat , dans la Tragedie
de Bajazet.
Le sieur de la Thorilliere dansoit avec
beaucoup de grace et de legereté, et chantoit
fort agréablement . Il étoit bon convive
et aimoit la table quelquefois avec excès.
Le plaisir qu'il avoit fait à la Cour et à la
Ville , avoit été récompensé par une pension
de 1200. liv. que le Roy lui avoit accordée
, dont il jouissoit depuis dix ans.
Le 6. l'Académie Royale de Musique ,
reprit l'Opera de Phaeton , et redonna
Les Festes Venitiennes le 28. On répete
Amadis de Gaule , qu'on doit donner au
commencement d'Octobre.
Le 18. Août dernier , le Roy par Arrêt
de son Conseil du même jour , a ac-
Hij corde
2222 MERCURE DE FRANCE
cordé le Privilege de l'Académie Royale
du Musique au sieur le Comte , qu'avoit
ci-devant le sieur Gruer.
très-grande perte en la personne de Pierre
le Noir de la THORILLIERE , mort à Paris le
18. de ce mois , dans la 75. année de son
âge , aprés avoir reçû tous ses Sacremens.
Il étoit fort aimé du Public , qui vraisemblaSEPTEMBR.
E . 1731. 2219
>
semblablement le regretera long - temps ;
c'étoit le seul qui restoit de la Troupe de
Moliere . Il étoit frere de Louise et Therese
le Noir , épouses des feu sieurs Baron et
Dancourt toutes deux mortes depuis
quelques années. Le Public garde encore
un précieux souvenir de la derniere , qui
jusqu'à l'âge de 60. ans , avoit conservé
les airs enfantins et les graces de la jeunesse
dans les rôles d'Amoureuses comiques,
avec une finesse , un naturel et une
noblesse admirable.
Le sieur de la Thorilliere avoit joué d'abord
dans le Tragique les rôles d'Oreste §
de Bajazet , &c. et les Amoureux Comiques;
mais en 1693. après la mort de J. B.
Siret Raifin , le plus excellent Comique
de la Scene Françoise , dont Moliere avoit
cultivé les heureux talens , il lui succeda
dans la plus grande partie de ses rôles , et
l'on peut dire qu'aprés l'inimitable Acteur
dont on vient de parler , le sieur de la
Thorilliere étoit le meilleur Comédieu
dans son genre de tous ceux que Moliere
avoit formés : aucun n'a si bien réussi , ni
si bien attrapé , et avec tant de graces et
de finesses naïves , les manigances , les
fourberies , les manieres et le ridicule d'un
Valet.
Il étoit d'une taille médiocre, mais très-
Hij bien
2220 MERCURE DE FRANCE
bien prise , dansant très bien et de bonne
grace ; le visage ouvert et gracieux , de
beaux yeux et le regard agréable , vif et
expressif; la voix legere , pleine et sonore,
Son jeu étoit plein d'action et d'un badinage
aimable et gay , sans être trivial : un
mouvement , une attitude , un geste , un
souris , un clin d'oeil , tout parloit en lui;
il animoit tout , sans sortir de l'esprit de
son rôle et de son vrai caractere. Ses heureux
talens et une longue pratique lui
avoient acquis cette perfection et la grande
réputation dont il a joüi ; car peu d'Acteurs
peuvent se vanter d'avoir été autant
et si constamment cheris du Public . Cependant
dans sa jeunesse , il chargeoit et
outroit un peu ses caracteres , pour plaire
au bas Parterre , qui l'accabloit d'applau
dissemens écueil fatal pour un Comédien
, qui naturellement au moins aussi vain
que les autres hommes,se prévient de son
merite sur de tels suffrages, sans compter
encore les fades complimens faits d'aprés
pareils juges ; en sorte que non seulenient
il se croit sans défaut , mais encore arrivé
au comble de la perfection ; tandis que
les gens sensez qui ont quelques lumieres
et du goût , haussent les épaules de yoir
applaudir une déclamation entierement
hors de la bienséance et du vrai , et qui
manque
SEPTEMBRE. 173. 22it
manque totalement de vrai- semblance et
de naturel .
Qu'on nous passe cette petite digres
sion à l'occasion de l'excellent Acteur que
nous regrettons avec tout le Public. " II
étoit fils de N. le Noir de la Thorilliere ,
mort il y a plus de 60. ans , très-gracieux
Comédien , quoique d'une taille médiocre
; sur tout il avoit de beaux yeux et de
belles dents. Il excelloit dans les rôles de
Roy et de Paysan . Il avoit été , dit- on ,
Officier de Cavalerie , et succeda à Juvenen
de la Fleur , fameux Comédien qui joüa
d'original le rôle d'Acomat , dans la Tragedie
de Bajazet.
Le sieur de la Thorilliere dansoit avec
beaucoup de grace et de legereté, et chantoit
fort agréablement . Il étoit bon convive
et aimoit la table quelquefois avec excès.
Le plaisir qu'il avoit fait à la Cour et à la
Ville , avoit été récompensé par une pension
de 1200. liv. que le Roy lui avoit accordée
, dont il jouissoit depuis dix ans.
Le 6. l'Académie Royale de Musique ,
reprit l'Opera de Phaeton , et redonna
Les Festes Venitiennes le 28. On répete
Amadis de Gaule , qu'on doit donner au
commencement d'Octobre.
Le 18. Août dernier , le Roy par Arrêt
de son Conseil du même jour , a ac-
Hij corde
2222 MERCURE DE FRANCE
cordé le Privilege de l'Académie Royale
du Musique au sieur le Comte , qu'avoit
ci-devant le sieur Gruer.
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Résumé : Mort du Sr. de la Thorilliere &c. [titre d'après la table]
Pierre le Noir de la Thorillière, acteur renommé, est décédé à Paris le 18 septembre 1731 à l'âge de 75 ans, après avoir reçu les sacrements. Il était le dernier survivant de la troupe de Molière et le frère de Louise et Thérèse le Noir, épouses des défunts sieurs Baron et Dancourt. Thérèse était connue pour ses rôles d'amoureuses comiques et conservait des grâces juvéniles jusqu'à 60 ans. La Thorillière a d'abord interprété des rôles tragiques comme Oreste et Bajazet, ainsi que des rôles comiques. En 1693, après la mort de Jean-Baptiste Siret Raffin, il lui a succédé dans la plupart de ses rôles et est devenu l'un des meilleurs comédiens dans le genre formé par Molière, excellant particulièrement dans les rôles de valets. Physiquement, il avait une taille moyenne mais bien proportionnée, dansait avec grâce et possédait un visage ouvert et gracieux avec de beaux yeux expressifs. Sa voix était légère, pleine et sonore. Son jeu était plein d'action et de badinage aimable, sans jamais sortir de l'esprit de son rôle. Malgré une jeunesse marquée par des excès pour plaire au public, il a acquis une grande réputation et une perfection reconnue. Il était le fils de Nicolas le Noir de la Thorillière, comédien gracieux et Officier de Cavalerie, qui avait succédé à Juvenal de la Fleur. Pierre le Noir de la Thorillière dansait et chantait agréablement, aimait la bonne table et recevait une pension de 1200 livres accordée par le roi depuis dix ans.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 2222-2223
L'Amante difficile, Comedie nouvelle. [titre d'après la table]
Début :
Le 23. Août, les Comédiens Italiens joüerent l'Amante difficile, Comédie de [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Comédie, Divertissements
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : L'Amante difficile, Comedie nouvelle. [titre d'après la table]
Le 23. Août , les Comédiens Italiens
joüerent l'Amante difficile , Comédie de
M. de la Motte , en Prose et en cinq
Actes , avec trois Divertissemens mis en
Musique par M. Mouret. Le Canevas de
cette Piéce avoit été donné par M. de la
Motte aux Comédiens Italiens à leur premiere
nouveauté ; ils l'executerent en 1716
en Italien avec beaucoup de succès , sans
en avoir fait une seule répetition , et seulement
aprés avoir écouté avec beaucoup
d'attention le sujet bien détaillé par le
sieur Lelio. Le plaisir que fit le gros de
P'action ( quoi que le détail se sentit bien
de l'impromptu ) persuada à M. de la
Motte , que les Scenes écrites avec soin
ne feroient qu'augmenter l'agrément du
Sujet. Il y a répandu beaucoup d'esprit et
'de sentiment.. L'action est bien conduite
et interessante ; et elle le seroit encoredavantage
, si les Scenes entre les Valets :
qui sont trop épisodiques et trop boufonnes
, ne l'interrompoient et ne l'avilissoient
même un peu . La De Silvia jouë
dans la perfection le rôle de l'Amantedifficile
: elle en a rendu les differens déguis
SEPTEMBRE . 1731. 2223
.
guisemens dans leur vrai caractere , et fur
tout le personnage de Gascon , avec toutes
les graces et la vivacité qui lui sont propres.
joüerent l'Amante difficile , Comédie de
M. de la Motte , en Prose et en cinq
Actes , avec trois Divertissemens mis en
Musique par M. Mouret. Le Canevas de
cette Piéce avoit été donné par M. de la
Motte aux Comédiens Italiens à leur premiere
nouveauté ; ils l'executerent en 1716
en Italien avec beaucoup de succès , sans
en avoir fait une seule répetition , et seulement
aprés avoir écouté avec beaucoup
d'attention le sujet bien détaillé par le
sieur Lelio. Le plaisir que fit le gros de
P'action ( quoi que le détail se sentit bien
de l'impromptu ) persuada à M. de la
Motte , que les Scenes écrites avec soin
ne feroient qu'augmenter l'agrément du
Sujet. Il y a répandu beaucoup d'esprit et
'de sentiment.. L'action est bien conduite
et interessante ; et elle le seroit encoredavantage
, si les Scenes entre les Valets :
qui sont trop épisodiques et trop boufonnes
, ne l'interrompoient et ne l'avilissoient
même un peu . La De Silvia jouë
dans la perfection le rôle de l'Amantedifficile
: elle en a rendu les differens déguis
SEPTEMBRE . 1731. 2223
.
guisemens dans leur vrai caractere , et fur
tout le personnage de Gascon , avec toutes
les graces et la vivacité qui lui sont propres.
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Résumé : L'Amante difficile, Comedie nouvelle. [titre d'après la table]
Le 23 août, les Comédiens Italiens ont interprété 'L'Amante difficile', une comédie en prose et en cinq actes écrite par M. de la Motte. La pièce incluait trois divertissements musicaux composés par M. Mouret. Le canevas de cette œuvre avait été donné par M. de la Motte aux Comédiens Italiens lors de leur première nouveauté en 1716, qu'ils avaient jouée en italien avec succès après une préparation rapide. La pièce est riche en esprit et en sentiment, avec une action bien conduite et intéressante. Cependant, les scènes entre les valets sont trop épisodiques et bouffonnes, interrompant et avilissant légèrement l'action. La comédienne De Silvia a interprété à la perfection le rôle de l'Amante difficile, rendant les différents déguisements avec toutes les grâces et la vivacité nécessaires, notamment le personnage de Gascon.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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4
p. 2223-2226
Le Je ne sçai quoy ? Comedie nouvelle. [titre d'après la table]
Début :
Le 12. Septembre , les mêmes Comédiens représenterent pour la premiere fois [...]
Mots clefs :
Pièce en vers libres, Éloquence, Déesse des Amours, Critique
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Le Je ne sçai quoy ? Comedie nouvelle. [titre d'après la table]
Le 12. Septembre , les mêmes Comédiens
représenterent pour la premiere fois
le Je ne sçai quoi , Piece en Vers libres
et en un Acte, ornée d'un Divertissement.
Cette Piece attire tous les jours un concours
extraordinaire ; elle est generalement
applaudie ; en voici un Extrait assez
succinct ; Nous le donnons Scene
par Scene
, pour ne nous point écarter
de l'ordre que l'Auteur y a mis ; elle est
de Mr. de Boissy , qui a déja brillé sur ce
Theatre par le Triomphe de l'Interêt.
.
Le Theatre réprésente un lieu champê
tre , où le Je ne sçai quoi s'est retiré. Venus
ouvre la Scene avec Momus ; elle se
plaint de la retraite du Je ne sçai quoi ,
qu'elle voudroit bien rappeller dans Paris
, où elle fait son séjour Momus lur
fait entendre qu'elle l'a perdu par sa
faute.
Apollon qui survient , fait les mêmes
plaintes que Venus , et Momus lui fait à
peu près la même réponse ; il les laisse
tous deux déliberer sur les mesures qu'ils
prendront pour tirer le Je ne sçai quoi
du desert qui le dérobe aux yeux de
tout le monde , et fait entendre qu'il va
Hiiij
ten-
د
2224 MERCURE DE FRANCE
tenter de son côté une entreprise si glorieuse.
Le Je ne sçai quoi , Genie représenté
par Arlequin, sort de son antre 5 Apollon
et Venus n'oublient rien pour l'engager ;
l'un déploye toute son éloquence , et
l'autre étale tous ses appas ; mais ils n'avancent
rien ; le Je ne sçai quoi les renvoye
très - mécontens , en leur disant
qu'ils s'éloignent trop de la Nature , que
la Déesse des Amours est trop fardée , et
que le Dieu des beaux Esprits est forcé
dans toutes ses productions .
Une Dame se présente au Je ne sçai
quoi , le genie lui demande son nom ;
il est très surpris d'apprendre que c'est
le Public en cornette . Ce Public femelle
lui dit que son Frere , qui est le Public
masculin , lui cede en sentiment et en
goût , et que ce sont les Dames qui font
le succès,sur- tout des Pieces de Theatre ;
après une Critique très- vive et très- bien
vérsifiée , le Public Feminin se flate que
le Je ne sçai quoi se rendra à ses pressantes
sollicitations : le genie lui demande .
du temps pour s'y déterminer , et en attendant
qu'il ait pris sa derniere resolu
tion , illui conseille de se raprocher un
peu plus de la Nature et sur tout de
boire un peu moins de Vin de Grave.
>
Cette
SEPTEMBRE . 1731. 2225
•
Cette Scene est celle qui fait le plus
de plaisir aux connoisseurs ; celle qui la
suit fait plus rire le Peuple ; c'est une
imitation de la Scene du Maître à chanter
et du Maître à danser des Fêtes Veni
tiennes de l'Opera . Le Sr. Theveneau y met
le Comique qu'on y peut souhaitter , er
la Dlle Thomassin toute la legereté et toute
la vivacité que son Rôle demande, Le Je
ne sçai quoi n'est satisfait ni de l'un ni
de l'autre ; le Chanteur lui paroît trop
manieré , et la Danseuse saute trop haut
pour une femme.
Nous ne nous arrêtons pas à deux Sce
nes , dont l'une est entre un petit Maître
et un Suisse , le Je ne sçai quoi les
renvoye , en disant au premier qu'il
cherche trop à plaire , et au dernier qu'il
ne plaît pas assez . L'autre Scene est d'un
Géometre , qui prétend mésurer le Je ne
sçai quoi au Compas : on l'a retranchée
à la seconde réprésentation
La derniere Scene est entre une Calotine
et le Je ne sçai quoi . Ils se trouvent si
bien faits l'un pour l'autre , qu'ils forrent
la résolution de ne se jamais quit
ter ; Momus qui a envoyé la Calotine
vient s'applaudir de l'heureux succès de
son projet il confirme cette nouvelle
alliance , et en fait célébrer la Fête par
Hv La
2226 MERCURE DE FRANCE
le Regiment de la Calotte. Voici le couplet
du Vaudeville , qui a fait le plus
de plaisir.
'Aujourd'huy l'Opera nous frappe ;
Demain les Comédiens
Après-demain on nous attrape
Par les moindres petits riens..
Que la Marotte
Passe soudain
De main en main ,.
Que la Calotte
Couvre la Tête falote
Du genre humain.
Toute la Musique de cette Piece , qui
est très -ingenieuse et très- bien caracterisée
, est de M. Mouret.
Le 18. les mêmes Comédiens joüerentà
la Cour la Comédie dont on vient de
parler. Cette Piéce n'a pas moins été goûtée
à la Cour qu'à la Ville , où elle attire
encore tous les jours de nombreuses Assemblées
à l'Hôtel de Bourgogne. L'Auteur
promet de donner encore quelques
Scenes nouvelles , dont nous rendrons.
compte.
représenterent pour la premiere fois
le Je ne sçai quoi , Piece en Vers libres
et en un Acte, ornée d'un Divertissement.
Cette Piece attire tous les jours un concours
extraordinaire ; elle est generalement
applaudie ; en voici un Extrait assez
succinct ; Nous le donnons Scene
par Scene
, pour ne nous point écarter
de l'ordre que l'Auteur y a mis ; elle est
de Mr. de Boissy , qui a déja brillé sur ce
Theatre par le Triomphe de l'Interêt.
.
Le Theatre réprésente un lieu champê
tre , où le Je ne sçai quoi s'est retiré. Venus
ouvre la Scene avec Momus ; elle se
plaint de la retraite du Je ne sçai quoi ,
qu'elle voudroit bien rappeller dans Paris
, où elle fait son séjour Momus lur
fait entendre qu'elle l'a perdu par sa
faute.
Apollon qui survient , fait les mêmes
plaintes que Venus , et Momus lui fait à
peu près la même réponse ; il les laisse
tous deux déliberer sur les mesures qu'ils
prendront pour tirer le Je ne sçai quoi
du desert qui le dérobe aux yeux de
tout le monde , et fait entendre qu'il va
Hiiij
ten-
د
2224 MERCURE DE FRANCE
tenter de son côté une entreprise si glorieuse.
Le Je ne sçai quoi , Genie représenté
par Arlequin, sort de son antre 5 Apollon
et Venus n'oublient rien pour l'engager ;
l'un déploye toute son éloquence , et
l'autre étale tous ses appas ; mais ils n'avancent
rien ; le Je ne sçai quoi les renvoye
très - mécontens , en leur disant
qu'ils s'éloignent trop de la Nature , que
la Déesse des Amours est trop fardée , et
que le Dieu des beaux Esprits est forcé
dans toutes ses productions .
Une Dame se présente au Je ne sçai
quoi , le genie lui demande son nom ;
il est très surpris d'apprendre que c'est
le Public en cornette . Ce Public femelle
lui dit que son Frere , qui est le Public
masculin , lui cede en sentiment et en
goût , et que ce sont les Dames qui font
le succès,sur- tout des Pieces de Theatre ;
après une Critique très- vive et très- bien
vérsifiée , le Public Feminin se flate que
le Je ne sçai quoi se rendra à ses pressantes
sollicitations : le genie lui demande .
du temps pour s'y déterminer , et en attendant
qu'il ait pris sa derniere resolu
tion , illui conseille de se raprocher un
peu plus de la Nature et sur tout de
boire un peu moins de Vin de Grave.
>
Cette
SEPTEMBRE . 1731. 2225
•
Cette Scene est celle qui fait le plus
de plaisir aux connoisseurs ; celle qui la
suit fait plus rire le Peuple ; c'est une
imitation de la Scene du Maître à chanter
et du Maître à danser des Fêtes Veni
tiennes de l'Opera . Le Sr. Theveneau y met
le Comique qu'on y peut souhaitter , er
la Dlle Thomassin toute la legereté et toute
la vivacité que son Rôle demande, Le Je
ne sçai quoi n'est satisfait ni de l'un ni
de l'autre ; le Chanteur lui paroît trop
manieré , et la Danseuse saute trop haut
pour une femme.
Nous ne nous arrêtons pas à deux Sce
nes , dont l'une est entre un petit Maître
et un Suisse , le Je ne sçai quoi les
renvoye , en disant au premier qu'il
cherche trop à plaire , et au dernier qu'il
ne plaît pas assez . L'autre Scene est d'un
Géometre , qui prétend mésurer le Je ne
sçai quoi au Compas : on l'a retranchée
à la seconde réprésentation
La derniere Scene est entre une Calotine
et le Je ne sçai quoi . Ils se trouvent si
bien faits l'un pour l'autre , qu'ils forrent
la résolution de ne se jamais quit
ter ; Momus qui a envoyé la Calotine
vient s'applaudir de l'heureux succès de
son projet il confirme cette nouvelle
alliance , et en fait célébrer la Fête par
Hv La
2226 MERCURE DE FRANCE
le Regiment de la Calotte. Voici le couplet
du Vaudeville , qui a fait le plus
de plaisir.
'Aujourd'huy l'Opera nous frappe ;
Demain les Comédiens
Après-demain on nous attrape
Par les moindres petits riens..
Que la Marotte
Passe soudain
De main en main ,.
Que la Calotte
Couvre la Tête falote
Du genre humain.
Toute la Musique de cette Piece , qui
est très -ingenieuse et très- bien caracterisée
, est de M. Mouret.
Le 18. les mêmes Comédiens joüerentà
la Cour la Comédie dont on vient de
parler. Cette Piéce n'a pas moins été goûtée
à la Cour qu'à la Ville , où elle attire
encore tous les jours de nombreuses Assemblées
à l'Hôtel de Bourgogne. L'Auteur
promet de donner encore quelques
Scenes nouvelles , dont nous rendrons.
compte.
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Résumé : Le Je ne sçai quoy ? Comedie nouvelle. [titre d'après la table]
Le 12 septembre, la pièce 'Le Je ne sçai quoi' fut représentée pour la première fois par les comédiens. Écrite par Monsieur de Boissy, cette œuvre en vers libres et en un acte, accompagnée d'un divertissement, connut un succès immédiat et attira un public nombreux chaque jour. La pièce se déroule dans un lieu champêtre où le 'Je ne sçai quoi', incarné par Arlequin, s'est retiré. Vénus, Apollon et Momus tentent de le ramener à Paris, mais Arlequin refuse, jugeant ces divinités trop éloignées de la nature. Une Dame, représentant le public féminin, affirme que les femmes déterminent le succès des pièces de théâtre. Le 'Je ne sçai quoi' lui demande du temps pour réfléchir et lui conseille de se rapprocher davantage de la nature. Une scène appréciée du peuple imite celle du Maître à chanter et du Maître à danser des Fêtes vénitiennes de l'Opéra. Cependant, le 'Je ne sçai quoi' n'est satisfait ni par le chanteur ni par la danseuse. D'autres personnages, comme un petit maître, un Suisse et un géomètre, sont également renvoyés par le 'Je ne sçai quoi'. Dans la dernière scène, une Calotine et le 'Je ne sçai quoi' décident de ne jamais se quitter. Momus célèbre cette alliance, confirmée par le Régiment de la Calotte. La musique de la pièce, très ingénieuse et bien caractérisée, est de Monsieur Mouret. Le 18 septembre, la pièce fut jouée à la Cour, où elle fut également très appréciée. L'auteur prévoit d'ajouter de nouvelles scènes à l'œuvre.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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5
p. 2226-2235
Les Eveillez de Poissi et les petits Comediens. Autres Pieces nouvelles. [titre d'après la table]
Début :
Le 27. Août, l'Opera Comique donna la premiere Représentation de deux petites [...]
Mots clefs :
Foire, Danse, Chevalier, Tragédie, Enfants comédiens, Danseurs pantomimes anglais
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Les Eveillez de Poissi et les petits Comediens. Autres Pieces nouvelles. [titre d'après la table]
Le 27. Août , l'Opera Comique donna
la premiere Représentation de deux petites .
Piéces
SEPTEMBRE . 1731. 2227
Pièces nouvelles , d'un'Acte chacune, avec
des Divertissemens. La premiere a pour titre
les Eveillez de Poiffi, et l'autre, les petits
Comédiens, ou la Tante dupée. Les rôles
de cette derniere Piéce sont joüez par
des Enfans , dont le plus âgé n'a pas treize
ans ; ils sont très-applaudis par de nombreuses
Assemblées que cette singularité
attire à la Foire S. Laurent pour voir ce
spectacle , aussi singulier qu'agréable . Il y
a dans le Divertissement un Enfant âgé
de quatre ans seulement, qui danse et parodie
avec beaucoup de grace et de justesse:
la danse du Sabotier , executée aux Foires
précedentes par le sieur Nivelon , fameux
Danseur pour ces sortes de caracteres. Ce
Divertissement est terminé par un très -joli
Balet, quireprésente en Scenes muettes et
dansantes , le Jugement de Pâris , et qui est
executé par les excellens Danseurs Pantomimes
dont on a déja parlé. La D Groi
gnet , nouvelle Danseuse , s'y est aussi dis-´
tinguée par differentes danses , executées :
avec beaucoup de vivacité. Voici un Extrait
de la Piéce.
La Scene se passe dans une Maison de
Campagne auprès de Tours , où se trouve
le Chevalier , ami de la Dame du lieu ,.
appellée Jule , laquelle devant donner
une Fête , avoit mandé une Troupe de
H vj Comé
2228 MERCURE DE FRANCE
Comédiens de Campagne . Dans le tempsqu'ils
étoient dans une vive impatience de
voir paroître cette Troupe pour représenter
la Tragédie d'Iphigenie , qu'on
avoit demandée ; un Domestique vient
annoncer le désastre arrivé en chemin à
cette Troupe. La Rancune * qui en est le
Chef, arrive un moment après un bras en
écharpe et un emplatre à la joüe , et s'adressant
à Julie et au Chevalier , leur dit :
Jamais nous ne goutons de parfaite allegresse ;
Nos plus heureux succès sont mêlez de tristesse
Madame,je comptoís que ma Troupe aujourd'hui,
De ce charmant séjour viendroit chasser l'ennui,
Chacun s'étoit flatté de la douce esperance ,
D'étaler à vos yeux son Art et sa Science ,
Mais un malheur subit a trahi nos desirs ,
Renversé notre espoir et détruis vos plaisirs ;-
Nous avions presque fait les trois quarts
voyage ,
Et nous voyons déja le Clocher du Village ,
Quand un maudit Chasseur que le Ciel en couroux
,
Pour punir nos forfaits fit approcher de nous ,
Vit un Oiseau perché sur la branche d'un Hêtre ;
Sa main dans le moment met la mainau Salpêtre,
Il apprête , il ajuste , et d'un coup effrayant ,
Pait voler dans les airs le métal fondroyant.
Le Sr Drouin. qui joue très - bien ce Rôle
La
SEPTEMBRE. 1731. 2229
La terre s'en émeut , les Antres en gémissent ,
De nos Coursiers fringants tous les crins se he
rissent ;
La terreur les saisit , et de colere ardens ,
Soudain nous les voyons prendre le mords aux:
dents ;
Du Guide consterné la voix foible et tremblante;
Tâche en vain d'arrêter leur fougue violente
La voiture entraînée au gré de leur fureur ,
Va donner contre un Roc d'une énorme gros
seur ;
L'essieu crie et se rompt ::ô ! spectacle terrible !
Capable d'attendrir l'ame la moins sensible..
Dans un Marais bourbeux Ragotin renversé ,
Et dans ses brodequins lui- même embarrassé ,
Après avoir long-temps dans un confus mélange,
De Livres , de paquets , de poussiere et de fange ,
Lutté contre la mort , la fortune et les Dieux ,
Reste à la fin sans force et périt à nos yeux.
J'ai vû , Seigneur , j'ai vâles ronces degoutantes,
Porter de ce Heros les dépouilles sanglantes ;
Comme lui maint Acteur dans le sang est baigné,
Et c'est moi que le sort a le plus épargné.
Julie plaint beaucoup la situation de
ce Comédien et de sa Troupe , mais elle
veut l'obliger à jouer la Tragédie d'Iphigenie.
Le Chevalier y joint ses instances,
oni , dit- il , et chante sur l'Air de la Palisse
est mort .
2230 MERCURE DE FRANCE
Le Chevalier..
Vous là jouerez ......
Le Comédien..
Eh ! comment:
Satisfaire votre envie ?
Peut- être dans ce moment
On trépane Iphigenie.
Si vous voyez dans quel état est Aga
memnon ( continue le Comédien ) et
chante sur l'Air : Que dans l'amoureux
mystere.
Pouvons-nous sur le Théatre ,
Mettre un Roy tout fracassé
Achille porte un emplâtre ,..
Ulisse a le bras cassé ;
De notre Orquestre ,
Le Pupitre s'est brisé
Sur Clytemnestre ..
,,
Ce contre- temps engage la Rancune
à proposer de faire jouer une petite Trou
pe composée de sa Famille , qui s'est trouvée
heureusement dans une autre Voitu
re ; Julie et le Chevalier acceptent ceparti
. Le Comédien demande au Public
quelque indulgence pour cette Troupe
naissante.
SEPTEMBRE 1731. 2238
naissante , et chante sur l'Air : Ici je fonde
une Abbaye.
S'ils n'ont pas l'honneur de vous plaire ,,
Epargnez-les , c'est moi , Messieurs ,
Qui doit porter votre colere ;
J'ai fait la Piece et les Acteurs.
Les Enfans . Comédiens joüent ensuite
une petite Piece ingénieusement composée
et proportionnée à leur âge. Elle est
intitulée la Niece vengée , ou la Double
Surprise ; elle est de la composition de
M. Panard , la Musique est de M. Gillier :
voicy quelques Couplets du Vaudeville..
Fulie.
Par l'âge ni par la grandeur ;
Ne jugeons jamais d'un Acteur ;
Ceux-cy dont je suis satisfaite ,
Font voir que pour être amusants,
Les petits , tourelourirette ,
Valent bien les grands.
De la bravoure des Soldats ,
La taille ne décide pas ;
Bien souvent , lorsque la Trompette
Appelle au feu les Combattans ,
Les Petits, & c..
Les
2232 MERCURE DE FRANCE
Les Vers sublimes et pompeux ,
Deviennent souvent ennuyeux ;
Ceux d'une simple Chansonnette ,
Quelquefois sont vifs et picquants ;
Les Petits , & c..
La Foire dans ses plus beaux jours ,
Ne vit jamais un tel concours ;
L'aspect de la Salle complette ,
Me fait chanter , ô ! l'heureux temps !!
Les Petits , tourelourirette ,
Font venir les Grands.
Le Petit Sabottier.
Quoique je ne sois qu'un nabot ,
Je sçai remuer le sabot ;
Ma danse est encore imparfaite ,
Mais j'espere qu'en peu de temps ,.
Mes petons , tourelourirette ,
Vaudront bien les grands..
La Petite Tante.
Ha! que nous nous croirons heureux ,
Si l'on est content de nos Jeux ;
Et qu'avec moi chacun repete ,
Ces mots , pour nous si ravissans ;
Les Petits , tourelourirette ,
Valent bien les grands,
Un
SEPTEMBRE. 1731. 2233
Un petit Crispin.
Que mon destin seroit charmant ,
Si le Spectateur en sortant ,
Disoit d'une ame satisfaite ,
Crispin me plaît , il est brillant ;
Ce Petit , tourelourirette ,
En vaut bien un grand.
Le 18. Septembre , le même Opera Comique
fut mandé pour aller jouer à la
Cour. Il représenta devant la Reine ,
l'Acte de Strasbourg , Piece jouée au commencement
de la Foire S. Laurent , dans
lequel la Dite le Grand , habillée en homme
, fait beaucoup de plaisir ; ensuite la
Piece des Petits Comédiens , dont on vient
de parler , et la danse du Petit Sabotier
qui plut infiniment. Ce Divertissement
fut terminé par le premier Ballet executé
par les Danseurs Anglois Pantomimes
dont on a parlé . S. M. parut très - satisfaite
de ce Divertissement , par la singu→
larité de ces Petits Comédiens qui jouerent
avec beaucoup de hardiesse et d'intelligence.
Le 20. l'Opera Comique donna le premiere
Représentation d'une Piece nouvelle
en un Acte , qui a pour titre : le
Temple du Sommeil , suivie de celle des
Petits Comédiens , et du premier Ballet de
Danseurs Pantomimes Anglois .
la premiere Représentation de deux petites .
Piéces
SEPTEMBRE . 1731. 2227
Pièces nouvelles , d'un'Acte chacune, avec
des Divertissemens. La premiere a pour titre
les Eveillez de Poiffi, et l'autre, les petits
Comédiens, ou la Tante dupée. Les rôles
de cette derniere Piéce sont joüez par
des Enfans , dont le plus âgé n'a pas treize
ans ; ils sont très-applaudis par de nombreuses
Assemblées que cette singularité
attire à la Foire S. Laurent pour voir ce
spectacle , aussi singulier qu'agréable . Il y
a dans le Divertissement un Enfant âgé
de quatre ans seulement, qui danse et parodie
avec beaucoup de grace et de justesse:
la danse du Sabotier , executée aux Foires
précedentes par le sieur Nivelon , fameux
Danseur pour ces sortes de caracteres. Ce
Divertissement est terminé par un très -joli
Balet, quireprésente en Scenes muettes et
dansantes , le Jugement de Pâris , et qui est
executé par les excellens Danseurs Pantomimes
dont on a déja parlé. La D Groi
gnet , nouvelle Danseuse , s'y est aussi dis-´
tinguée par differentes danses , executées :
avec beaucoup de vivacité. Voici un Extrait
de la Piéce.
La Scene se passe dans une Maison de
Campagne auprès de Tours , où se trouve
le Chevalier , ami de la Dame du lieu ,.
appellée Jule , laquelle devant donner
une Fête , avoit mandé une Troupe de
H vj Comé
2228 MERCURE DE FRANCE
Comédiens de Campagne . Dans le tempsqu'ils
étoient dans une vive impatience de
voir paroître cette Troupe pour représenter
la Tragédie d'Iphigenie , qu'on
avoit demandée ; un Domestique vient
annoncer le désastre arrivé en chemin à
cette Troupe. La Rancune * qui en est le
Chef, arrive un moment après un bras en
écharpe et un emplatre à la joüe , et s'adressant
à Julie et au Chevalier , leur dit :
Jamais nous ne goutons de parfaite allegresse ;
Nos plus heureux succès sont mêlez de tristesse
Madame,je comptoís que ma Troupe aujourd'hui,
De ce charmant séjour viendroit chasser l'ennui,
Chacun s'étoit flatté de la douce esperance ,
D'étaler à vos yeux son Art et sa Science ,
Mais un malheur subit a trahi nos desirs ,
Renversé notre espoir et détruis vos plaisirs ;-
Nous avions presque fait les trois quarts
voyage ,
Et nous voyons déja le Clocher du Village ,
Quand un maudit Chasseur que le Ciel en couroux
,
Pour punir nos forfaits fit approcher de nous ,
Vit un Oiseau perché sur la branche d'un Hêtre ;
Sa main dans le moment met la mainau Salpêtre,
Il apprête , il ajuste , et d'un coup effrayant ,
Pait voler dans les airs le métal fondroyant.
Le Sr Drouin. qui joue très - bien ce Rôle
La
SEPTEMBRE. 1731. 2229
La terre s'en émeut , les Antres en gémissent ,
De nos Coursiers fringants tous les crins se he
rissent ;
La terreur les saisit , et de colere ardens ,
Soudain nous les voyons prendre le mords aux:
dents ;
Du Guide consterné la voix foible et tremblante;
Tâche en vain d'arrêter leur fougue violente
La voiture entraînée au gré de leur fureur ,
Va donner contre un Roc d'une énorme gros
seur ;
L'essieu crie et se rompt ::ô ! spectacle terrible !
Capable d'attendrir l'ame la moins sensible..
Dans un Marais bourbeux Ragotin renversé ,
Et dans ses brodequins lui- même embarrassé ,
Après avoir long-temps dans un confus mélange,
De Livres , de paquets , de poussiere et de fange ,
Lutté contre la mort , la fortune et les Dieux ,
Reste à la fin sans force et périt à nos yeux.
J'ai vû , Seigneur , j'ai vâles ronces degoutantes,
Porter de ce Heros les dépouilles sanglantes ;
Comme lui maint Acteur dans le sang est baigné,
Et c'est moi que le sort a le plus épargné.
Julie plaint beaucoup la situation de
ce Comédien et de sa Troupe , mais elle
veut l'obliger à jouer la Tragédie d'Iphigenie.
Le Chevalier y joint ses instances,
oni , dit- il , et chante sur l'Air de la Palisse
est mort .
2230 MERCURE DE FRANCE
Le Chevalier..
Vous là jouerez ......
Le Comédien..
Eh ! comment:
Satisfaire votre envie ?
Peut- être dans ce moment
On trépane Iphigenie.
Si vous voyez dans quel état est Aga
memnon ( continue le Comédien ) et
chante sur l'Air : Que dans l'amoureux
mystere.
Pouvons-nous sur le Théatre ,
Mettre un Roy tout fracassé
Achille porte un emplâtre ,..
Ulisse a le bras cassé ;
De notre Orquestre ,
Le Pupitre s'est brisé
Sur Clytemnestre ..
,,
Ce contre- temps engage la Rancune
à proposer de faire jouer une petite Trou
pe composée de sa Famille , qui s'est trouvée
heureusement dans une autre Voitu
re ; Julie et le Chevalier acceptent ceparti
. Le Comédien demande au Public
quelque indulgence pour cette Troupe
naissante.
SEPTEMBRE 1731. 2238
naissante , et chante sur l'Air : Ici je fonde
une Abbaye.
S'ils n'ont pas l'honneur de vous plaire ,,
Epargnez-les , c'est moi , Messieurs ,
Qui doit porter votre colere ;
J'ai fait la Piece et les Acteurs.
Les Enfans . Comédiens joüent ensuite
une petite Piece ingénieusement composée
et proportionnée à leur âge. Elle est
intitulée la Niece vengée , ou la Double
Surprise ; elle est de la composition de
M. Panard , la Musique est de M. Gillier :
voicy quelques Couplets du Vaudeville..
Fulie.
Par l'âge ni par la grandeur ;
Ne jugeons jamais d'un Acteur ;
Ceux-cy dont je suis satisfaite ,
Font voir que pour être amusants,
Les petits , tourelourirette ,
Valent bien les grands.
De la bravoure des Soldats ,
La taille ne décide pas ;
Bien souvent , lorsque la Trompette
Appelle au feu les Combattans ,
Les Petits, & c..
Les
2232 MERCURE DE FRANCE
Les Vers sublimes et pompeux ,
Deviennent souvent ennuyeux ;
Ceux d'une simple Chansonnette ,
Quelquefois sont vifs et picquants ;
Les Petits , & c..
La Foire dans ses plus beaux jours ,
Ne vit jamais un tel concours ;
L'aspect de la Salle complette ,
Me fait chanter , ô ! l'heureux temps !!
Les Petits , tourelourirette ,
Font venir les Grands.
Le Petit Sabottier.
Quoique je ne sois qu'un nabot ,
Je sçai remuer le sabot ;
Ma danse est encore imparfaite ,
Mais j'espere qu'en peu de temps ,.
Mes petons , tourelourirette ,
Vaudront bien les grands..
La Petite Tante.
Ha! que nous nous croirons heureux ,
Si l'on est content de nos Jeux ;
Et qu'avec moi chacun repete ,
Ces mots , pour nous si ravissans ;
Les Petits , tourelourirette ,
Valent bien les grands,
Un
SEPTEMBRE. 1731. 2233
Un petit Crispin.
Que mon destin seroit charmant ,
Si le Spectateur en sortant ,
Disoit d'une ame satisfaite ,
Crispin me plaît , il est brillant ;
Ce Petit , tourelourirette ,
En vaut bien un grand.
Le 18. Septembre , le même Opera Comique
fut mandé pour aller jouer à la
Cour. Il représenta devant la Reine ,
l'Acte de Strasbourg , Piece jouée au commencement
de la Foire S. Laurent , dans
lequel la Dite le Grand , habillée en homme
, fait beaucoup de plaisir ; ensuite la
Piece des Petits Comédiens , dont on vient
de parler , et la danse du Petit Sabotier
qui plut infiniment. Ce Divertissement
fut terminé par le premier Ballet executé
par les Danseurs Anglois Pantomimes
dont on a parlé . S. M. parut très - satisfaite
de ce Divertissement , par la singu→
larité de ces Petits Comédiens qui jouerent
avec beaucoup de hardiesse et d'intelligence.
Le 20. l'Opera Comique donna le premiere
Représentation d'une Piece nouvelle
en un Acte , qui a pour titre : le
Temple du Sommeil , suivie de celle des
Petits Comédiens , et du premier Ballet de
Danseurs Pantomimes Anglois .
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Résumé : Les Eveillez de Poissi et les petits Comediens. Autres Pieces nouvelles. [titre d'après la table]
Le 27 août 1731, l'Opéra Comique a présenté deux pièces en un acte, accompagnées de divertissements. Les pièces, intitulées 'Les Éveillez de Poiffi' et 'Les petits Comédiens, ou la Tante dupée', ont été interprétées par des enfants dont le plus âgé n'avait pas treize ans. Ces représentations ont attiré une foule nombreuse à la Foire Saint-Laurent, notamment grâce à la présence d'un enfant de quatre ans qui dansait et parodiait avec grâce. La pièce 'Les petits Comédiens' se déroule dans une maison de campagne près de Tours. Julie, la dame du lieu, et son ami le Chevalier attendent une troupe de comédiens pour représenter la tragédie d'Iphigénie. Cependant, un domestique annonce un accident ayant causé la mort de plusieurs comédiens. La Rancune, chef de la troupe, arrive blessé et raconte l'accident. Julie et le Chevalier insistent pour que la pièce soit jouée malgré tout. La Rancune propose alors une troupe composée de sa famille, qui joue une pièce intitulée 'La Nièce vengée, ou la Double Surprise'. Le 18 septembre, l'Opéra Comique a été invité à la cour pour représenter 'L'Acte de Strasbourg', 'Les petits Comédiens', et la danse du Petit Sabotier, suivie d'un ballet exécuté par des danseurs anglais. La reine a été très satisfaite de ces représentations. Le 20 septembre, l'Opéra Comique a présenté une nouvelle pièce en un acte, 'Le Temple du Sommeil', suivie de 'Les petits Comédiens' et d'un ballet de danseurs anglais.
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