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1
p. 1098-1109
Discours sur la Comedie, &c. [titre d'après la table]
Début :
DISCOURS SUR LA COMEDIE, ou Traité Historique et Dogmatique des Jeux de [...]
Mots clefs :
Comédie, Ecriture Sainte, Antiquité ecclésiastique, Jeux de théâtre, Préface, Théologien, Réfutation, Divertissements comiques, Scolastiques, Danse des pantomimes
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texteReconnaissance textuelle : Discours sur la Comedie, &c. [titre d'après la table]
DISCOURS SUR LA COMEDIE , ou Traité
Historique et Dogmatique des Jeux de
Théatre , et autres Divertissemens Comiques
, soufferts ou condamnez depuis le
premier siécle de l'Eglise jusqu'à présent ,
avec un Discours sur les Piéces de Théatre
tirées de l'Ecriture - Sainte . in- 12.
360. pages , sans les Préfaces et la Table
des Matieres. Seconde édition , augmentée
de plus de la moitié . Par le R. P. Le Brun ,
Prêtre de l'Oratoire . A Paris , chez la
veuve Delaune , rae S. Jacques , à l'Empereur
, 1731. in- 12 . de 360 pages , sans
P'Epitre , la Préface et les Tables.
Ĉer Ouvrage avoit déja paru anonime
en 1694. sous ce titre : Discours sur la Comédie
, où l'on voit la Réponse au Théologien
qui la défend , avec l'Histoire du Théatre
, et les sentimens des Docteurs de l'Eglise
MAY. 1731. 1099
se , depuis le premier siécle jusqu'à présent .
C'étoient deux Discours prononcez par
le P. le Brun , au Seminaire de S. Magloire
, le 26 Avril , le 3 et le 7 Mai 1694.
par ordre de M. De Harlay , Archevêque
de Paris , à l'occasion de la Lettre du
P. Caffaro , qui parût à la tête du Théatre
de M. Boursault. Mais quoique le Public
eut bien reçû l'Ouvrage du Pere le
Brun , ce sçavant homme , peu content
de cette ébauche,pensa dès -lors à le perfectionner.
A mesure qu'il étudioit l'Antiquité
Ecclesiastique , il ramassoit ce qui
avoit quelque rapport aux Jeux de Theatre.
C'est ce qui a produit le Traité qu'on
donne aujourd'hui , à l'exception du premier
Discours , où il y a peu d'additions ;
les autres peuvent passer pour entierement
nouveaux par les augmentations considérables
dont ils sont enrichis , l'Auteur
ayant recueilli avec soin ce qu'il a trouvé
depuis Auguste jusqu'à Justinien . L'Editeur
nous apprend qu'il a lui- même inseré
quelques faits que le P. le Brun avoit
oublié , et qu'il a extrait tout ce qui se
trouve contre les divertissemens Comi
dans le Recueil de Rituels et de Statuts
Synodaux , que M. De Launoy a laissé
aux P P. Minimes de la Place Royale.
Le troisiéme Discours , sur les Piéces de
ques
Théa
1100 MERCURE DE FRANCE
Théatre tirées de l'Ecriture , n'avoit point
paru dans la premiere édition , ayant été
prononcé un an après. Il ne contribuë pas
à enrichir celle ci . Donnons une idée
de chacune des parties de cet Ouvrage
en exposant le plan que l'Editeur a
peu
suivi.
>
Après une Préface où l'Editeur rend
compte de plusieurs circonstances nécessaires
à l'intelligence de cet Ouvrage , on
trouve la rétractation que le P. Caffaro
fît de sa Lettre en faveur de la Comédie .
et qu'il envoya à M. De Harlay , dattéc
du 11 Mai 1694. et imprimée à Paris
dans la même année . Comme cette Piéce
est peu connue , et que d'ailleurs l'Ouvrage
du P. Caffaro a fait beaucoup de
bruit , il paroissoit avantageux à la République
des Lettres , et à la mémoire de ce
Theologien , de faire connoître par cette
rétractation et ce désaveu , le mépris qu'il
faisoit lui-même de cet Ouvrage. Et c'est
ce que l'Editeur a fait en la donnant ici
enLatin et enFrançois . Il y a joint une Lettre
du P. le Brun du 20 Mai 1694. dans
laquelle il marque à un de ses amis le
peu d'empressement qu'il avoit à faire
imprimer ses Discours , et où il parle de
la rétractation du P. Caffaro comme d'u
ne Piéce qui le remplit de consolation .
A
M.A Y.
1731 . 1101
l'EA
la suite de cette Letrre est une seconde
Préface , où l'on examine s'il faut , ou
que l'on ferme les Théatres , ouou que
glise cesse de condamner ceux qui les fréquentent
; car tel a été le but du P. le
Brun dans ses Discours de justifier la conduite
de l'Eglise en excommuniant les
Comédiens , et en tolérant ceux qui assistent
aux Spectacles. On y représente le
Théatre comme l'Ecole de l'impureté , la
nourriture des passions , l'assemblage des
ruses du Démon pour les réveiller , où les
yeux sont environnez d'objets séducteurs , les
oreilles ouvertes à des discours souvent obscenes
et toujours prophanes , qui infectent le
coeur et l'esprit.
Cette Préface commence ainsi : Il paroît
bizarre , que dans un Etat Chrétien , on
prêche et on écrive contre la Comédie , qu'on
déclare excommuniez ceux qui font profession
de monter sur le Théatre , et qu'unefoule
de Chrétiens ne laissent pas de s'assembler
presque tous les jours pour applaudir à ces
Excommuniez , & c. Elle est suivie de deux
Discours. Dans le premier , le P. le Brun
s'attache plus particulierement à répondre
à la Lettre du Theologien , défenseur
de la Comédie. Nous souhaitterions que
les bornes d'un Extrait nous permissent
de rapporter ici quelques traits qui fassent
1102 MERCURE DE FRANCE
sent connoître la solidité de cette réfutation.
Nous renvoyons au Livre même , où
le Lecteur verra avec plaisir le Theologien
, défenseur de la Comédie , refuté
en plusieurs endroits par ses propres paroles.
Le second Discours a six parties . Les
trois premieres comprennent l'Histoire
des Jeux de Théatre et autres Divertissemens
Comiques , soufferts ou condamnez
depuis Auguste jusqu'à l'extinction de
l'idolâtrie , au commencement du sixiéme
siècle. La quatriéme comprend le jugement
que les Auteurs , tant sacrés que
profanes ont porté sur les Spectacles , depuis
Auguste jusqu'à Justinien . La cinquiéme
Partie reprend l'Histoire des Jeux
de Théatre à l'extinction de l'idolâtrie , et
la continue jusqu'à la naissance des Scolastiques
; et la derniere comprend l'Histoire
des Jeux de Théatre , depuis les Scholastiques
, c'est-à- dire , depuis le milieu
du XIII . siécle jusqu'à nous.
Le second Discours est suivi d'une Lettre
, où le P. le Brun répond à quelques
difficultez qu'on lui avoit proposées . On
trouve ensuite le troisiéme Discours que
le P. le Brun prononça à S. Magloire en
1695. à l'occasion de la Judith de M. Boyer
de l'Académie Françoise. Il y examine s'il
F
MAY, 1731
1103
y a lieu d'approuver que les Piéces de
Théatre soient tirées de l'Ecriture Sainte.
Ce Discours est divisé en deux parties.
Dans la premiere , le P. le Brun fait voir
que l'Ecriture ne peut paroître sur le
Théatre sans être défigurée et alterée considerablement.
La seconde est employée
à prouver , que quand on feroit quelque
Tragédie où l'Ecriture - Sainte seroit conservée
dans toute sa force et toute sa pureté
, le Théatre des Comédiens ne seroit
point le lieu de les représenter.
,
L'Editeur a placé après ce Discours un
Mandement de M. Fléchier , Evêque de
Nismes , contre les Spectacles , adressé
aux Fideles de son Diocèse le 8 Septembre
1758. On trouve à la fin une Table
Alphabétique des Matieres contenues dans
cer Ouvrage.
On ne peut témoigner à l'Editeur trop
de reconnoissance du soin qu'il a bien
voulu prendre de réunir et de ramasser
des morceaux si précieux. Il est certain
que nous n'avons point encote vû d'ouvrage
plus complet et plus curieux sur
cette matiere ; et on peut dire qu'il fait
honneur à son Auteur , et qu'il répond
parfaitement à la réputation qu'il s'est acquise
d'ailleurs. Nous ne pouvons nous
empêcher de dire en passant que le P. le
Brun
1104 MERCURE DE FRANCE
Brun a refuté par avance le Discours d'un
Auteur récent , défenseur de la Comédie ,
dont nous avons parlé le mois passé. Cet
Auteur qui s'étoit proposé de réfuter
M. le Prince de Conty , M. Bossuet et
M. Nicole , ne les a frappez par aucuns
endroits ; et on remarque qu'il n'a fait ,
pour ainsi dire , que réchauffer et étendre
les raisons du Théologien Apologiste du
Theatre .
L'Editeur avertit le Public dans sa
Préfice qu'il a réservé l'Eloge Historique
du P. le Brun pour un autre Ouvrage du
même Auteur , qui est actuellement sous
presse , et qui a pour titre : Traité du discernement
des effets naturels d'avec ceux qui
ne le sont pas , avec l'Histoire critique des
pratiques superstitieuses qui ont séduit les
Peuples , et qui embarrassent les Sçavans.
Il ajoute qu'outre des augmentations considerables
l'Auteur a refondu entierement
son Ouvrage , et l'a rendu plus . méthodique.
Mais nos Lecteurs ne seroient peut- être
pas contens , si après avoir piqué leur
curiosité sur ce que cet Ouvrage contient
de singulier et de recherché , nous n'entrions
dans quelque détail . Pour les satisfaire
nous allons donner un peu plus
d'étendue à cet Extrait.
›
Dans
>
MAY. 1731. 1105
Dans la premiere partie de l'Histoire
des Jeux de Théatre , l'Auteur remarque
qu'on en vît de très- superbes sous Auguste.
Ce grand Prince les aimoit avec passion
, dit-il , et surtout assûre qu'il ne
dissimuloit pas cette foiblesse. Il inventa
lui- même des Jeux. Pausanias rapporte
au Livre VIII. qu'Auguste fut l'Auteur
de la Danse des Pantomimes , et M. de
Pontac dans les Notes sur la Chronique
d'Eusebe , dit que c'étoit là les Jeux Augustaux
, Ludi Augustales. Cet Empereur
établit quelques Loix touchant les Spectacles.
Il défendit aux jeunes gens de l'un
et de l'autre sexe d'aller à ceux qui se faisoient
la nuit , à moins que de proches
parens âgez ne les y menassent , et il empêcha
que les femmes assistassent jamais
aux Jeux des Athlétes , parce qu'ils combattoient
ordinairement nuds.
A l'égard des Comédiens , il leur prescrivit
des régles , et leur laissa une liberté
dont il ne souffrit pas qu'ils abusassent.
Dès qu'il sçut qu'un Acteur , nommé Stephanion
, avoit pour serviteur une femme
déguisée en garçon , il le fit foüetter par
les trois Théatres de la Ville , et le bannit.
Il ne désaprouvoit pas qu'on siflat les
Acteurs , car il en bannit un de Rome et
de toute l'Italie , pour avoir osé montrer
au
1106 MERCURE DE FRANCE
au doigt un des Spectateurs qui le sifloit,
et on sifloit souvent pour une seule faute
contre la cadence ou contre la quantité.
Quoique Néron ne s'appliquât presque
jamais à mettre l'ordre en aucun endroit,
il se trouva pourtant obligé de chasser
d'Italie tous les Histrions,après leur avoir
donné trop de liberté; mais il voulut aller
lui-même faire le Comédien et le Chantre
dans plusieurs Villes de la Grece, pour
faire paroitre sa belle voix . Il commença
par Naples , qui étoit une Ville Grecque ;
et revenant à Rome , il voulut se montrer
au Théatre. Le Senat , pour éviter l'infamie
dont il s'alloit flétrir , s'il étoit vû sur
la Scene , lui décerna le prix de Musique,
et celui d'Eloquence avant le commencement
des Jeux ; mais Néron prétendoit
l'emporter par son merite , et non pas par
la faveur du Sénat . Il monta donc sur la
Scene , où il récita un Poëme , après quoi
il joüa de la Lyre , obéït à toutes les loix
du Theatre , comme de ne se reposer , de
ne cracher , ni se moucher durant toute
Paction , fléchit un genou et salua l'Assemblée
, en attendant la Sentence des
Juges . Le Peuple , et sur tout les Etrangers
rougirent pour lui d'une telle infamie.
Vespasien témoigna de l'horreur pour
les
MAY. 1731 . 1107
les Jeux des Gladiateurs. Il se plut à ceux
du Théatre , et de son tems les Pantomimes
étoient si fort à la mode , qu'on en
avoit aux funérailles , pour leur faire représenter
les actions de celui qu'on enterroit.
Domitien deffendit aux Danseurs et
Pantomimes de monter sur le Theatre.
Nerva les rétablit . Trajan les supprima
encore , mais on ne sçait pas s'ils furent
bannis des Théatres d'Orient ; on voit
seulement que cet Empereur fit bâtir un
Théatre à Antioche. Cette malheureuse
Ville , si passionnée pour les Spectacles ,
étoit souvent punie par les tremblemens
de terre qui la renversoient presque entierement.
Elle en souffrit un terrible sous
Trajan . En faisant rétablir la Ville , ce
Prince fit aussi rétablir les Théatres.
Adrien batit aussi un grand Théatre aurès
d'Antioche , à la Fontaine de Daphné.
Il avoit fait à cette Fontaine un grand Reservoir
d'eau, qu'on pouvoit voir du Théatre
; et il mit plusieurs Statues en l'honneur
des Naïades , c'est -à- dire des Nimphes
on Déesses de l'eau . Ce fut à ce Réservoir
que l'on s'avisa de faire nager des
femmes pour représenter les Naïades ; ce
que S. Chrysostome condamna avec tant
de zele et d'éloquence ,
HelioT108
MERCURE DE FRANCE
> Heliogabale fit lui - même le Comédien
et ne craignit pas de représenter des fables
avec des nuditez et des peintures deshonêtes
.Il honora les Comédiens, leur donna
des habits de soye , et en choisit un pour
être Prefet du Prétoire.
Alexandre Severe ôta aux Comédiens
les robes précieuses , et ne leur donna ni
or ni argent , mais tout au plus quelques
pieces de monnoye de cuivre. Ce Prince
ne souffrit jamais les divertissemens Sceniques
à sa table. Il aimoit pourtant les
Spectacles , mais sans y faire des largesses ;
il vouloit qu'on traitat toujours comme
des esclaves les Comédiens , et tous ceux
qui servoient aux plaisirs publics.
Les Comédiens eurent un puissant Protecteur
vers la fin du troisiéme siecle , dans
la personne de l'Empereur Carin , etc . Son
regne se distingua par la pompe avec laquelle
il celebra les Jeux Romains . Il y
avoit cent Joueurs de Flute qui s'accordoient
, autant de Sonneurs de Cors , cent
Chantres qui dansoient en même-tems
autant de personnes qui frapoient sur des
Cymbales ,mille Pantomimes et autant de
Luteurs . Le feu ayant pris à une toile
qu'il avoit fait tendre , consuma le Théatre,
que Diocletien fit ensuite rebâtir avec
plus de magnificence. Carin avoit fait venir
MAY. 1731. 1109
nir des Comédiens de tous côtés . Ceux qui
avoient travaillé aux décorations , les Luteurs
, les Histrions , et les Musiciens eurent
en present de l'or et de l'argent , et
des habits de soye .
Ce fut sous l'Empereur Maxime que
Gelasin , Comédien , fut martyrisé à Héliopolis
dans Phénicie . Il s'étoit jetté dans
un bain d'eau tiéde , pour tourner en ridicule
le Baptême des Chrétiens ; au sortir
du bain , il parut habillé de blanc. Alors
il refusa de faire le Comédien ; et adressant
la parole à tout le peuple , il s'écria
qu'il étoit Chrétien , qu'il avoit vu dans
ce bain la redoutable Majesté de Dieu , et
qu'il mourroit Chrétien . Tous les Spectateurs
saisis de fureur , monterent sur le
Théatre , et ayant pris Gelasin , ils le lapiderent.
Nous pourrons donner un second Extrait
de cet Ouvrage, pour ce qui regarde le Theatre
François.
Historique et Dogmatique des Jeux de
Théatre , et autres Divertissemens Comiques
, soufferts ou condamnez depuis le
premier siécle de l'Eglise jusqu'à présent ,
avec un Discours sur les Piéces de Théatre
tirées de l'Ecriture - Sainte . in- 12.
360. pages , sans les Préfaces et la Table
des Matieres. Seconde édition , augmentée
de plus de la moitié . Par le R. P. Le Brun ,
Prêtre de l'Oratoire . A Paris , chez la
veuve Delaune , rae S. Jacques , à l'Empereur
, 1731. in- 12 . de 360 pages , sans
P'Epitre , la Préface et les Tables.
Ĉer Ouvrage avoit déja paru anonime
en 1694. sous ce titre : Discours sur la Comédie
, où l'on voit la Réponse au Théologien
qui la défend , avec l'Histoire du Théatre
, et les sentimens des Docteurs de l'Eglise
MAY. 1731. 1099
se , depuis le premier siécle jusqu'à présent .
C'étoient deux Discours prononcez par
le P. le Brun , au Seminaire de S. Magloire
, le 26 Avril , le 3 et le 7 Mai 1694.
par ordre de M. De Harlay , Archevêque
de Paris , à l'occasion de la Lettre du
P. Caffaro , qui parût à la tête du Théatre
de M. Boursault. Mais quoique le Public
eut bien reçû l'Ouvrage du Pere le
Brun , ce sçavant homme , peu content
de cette ébauche,pensa dès -lors à le perfectionner.
A mesure qu'il étudioit l'Antiquité
Ecclesiastique , il ramassoit ce qui
avoit quelque rapport aux Jeux de Theatre.
C'est ce qui a produit le Traité qu'on
donne aujourd'hui , à l'exception du premier
Discours , où il y a peu d'additions ;
les autres peuvent passer pour entierement
nouveaux par les augmentations considérables
dont ils sont enrichis , l'Auteur
ayant recueilli avec soin ce qu'il a trouvé
depuis Auguste jusqu'à Justinien . L'Editeur
nous apprend qu'il a lui- même inseré
quelques faits que le P. le Brun avoit
oublié , et qu'il a extrait tout ce qui se
trouve contre les divertissemens Comi
dans le Recueil de Rituels et de Statuts
Synodaux , que M. De Launoy a laissé
aux P P. Minimes de la Place Royale.
Le troisiéme Discours , sur les Piéces de
ques
Théa
1100 MERCURE DE FRANCE
Théatre tirées de l'Ecriture , n'avoit point
paru dans la premiere édition , ayant été
prononcé un an après. Il ne contribuë pas
à enrichir celle ci . Donnons une idée
de chacune des parties de cet Ouvrage
en exposant le plan que l'Editeur a
peu
suivi.
>
Après une Préface où l'Editeur rend
compte de plusieurs circonstances nécessaires
à l'intelligence de cet Ouvrage , on
trouve la rétractation que le P. Caffaro
fît de sa Lettre en faveur de la Comédie .
et qu'il envoya à M. De Harlay , dattéc
du 11 Mai 1694. et imprimée à Paris
dans la même année . Comme cette Piéce
est peu connue , et que d'ailleurs l'Ouvrage
du P. Caffaro a fait beaucoup de
bruit , il paroissoit avantageux à la République
des Lettres , et à la mémoire de ce
Theologien , de faire connoître par cette
rétractation et ce désaveu , le mépris qu'il
faisoit lui-même de cet Ouvrage. Et c'est
ce que l'Editeur a fait en la donnant ici
enLatin et enFrançois . Il y a joint une Lettre
du P. le Brun du 20 Mai 1694. dans
laquelle il marque à un de ses amis le
peu d'empressement qu'il avoit à faire
imprimer ses Discours , et où il parle de
la rétractation du P. Caffaro comme d'u
ne Piéce qui le remplit de consolation .
A
M.A Y.
1731 . 1101
l'EA
la suite de cette Letrre est une seconde
Préface , où l'on examine s'il faut , ou
que l'on ferme les Théatres , ouou que
glise cesse de condamner ceux qui les fréquentent
; car tel a été le but du P. le
Brun dans ses Discours de justifier la conduite
de l'Eglise en excommuniant les
Comédiens , et en tolérant ceux qui assistent
aux Spectacles. On y représente le
Théatre comme l'Ecole de l'impureté , la
nourriture des passions , l'assemblage des
ruses du Démon pour les réveiller , où les
yeux sont environnez d'objets séducteurs , les
oreilles ouvertes à des discours souvent obscenes
et toujours prophanes , qui infectent le
coeur et l'esprit.
Cette Préface commence ainsi : Il paroît
bizarre , que dans un Etat Chrétien , on
prêche et on écrive contre la Comédie , qu'on
déclare excommuniez ceux qui font profession
de monter sur le Théatre , et qu'unefoule
de Chrétiens ne laissent pas de s'assembler
presque tous les jours pour applaudir à ces
Excommuniez , & c. Elle est suivie de deux
Discours. Dans le premier , le P. le Brun
s'attache plus particulierement à répondre
à la Lettre du Theologien , défenseur
de la Comédie. Nous souhaitterions que
les bornes d'un Extrait nous permissent
de rapporter ici quelques traits qui fassent
1102 MERCURE DE FRANCE
sent connoître la solidité de cette réfutation.
Nous renvoyons au Livre même , où
le Lecteur verra avec plaisir le Theologien
, défenseur de la Comédie , refuté
en plusieurs endroits par ses propres paroles.
Le second Discours a six parties . Les
trois premieres comprennent l'Histoire
des Jeux de Théatre et autres Divertissemens
Comiques , soufferts ou condamnez
depuis Auguste jusqu'à l'extinction de
l'idolâtrie , au commencement du sixiéme
siècle. La quatriéme comprend le jugement
que les Auteurs , tant sacrés que
profanes ont porté sur les Spectacles , depuis
Auguste jusqu'à Justinien . La cinquiéme
Partie reprend l'Histoire des Jeux
de Théatre à l'extinction de l'idolâtrie , et
la continue jusqu'à la naissance des Scolastiques
; et la derniere comprend l'Histoire
des Jeux de Théatre , depuis les Scholastiques
, c'est-à- dire , depuis le milieu
du XIII . siécle jusqu'à nous.
Le second Discours est suivi d'une Lettre
, où le P. le Brun répond à quelques
difficultez qu'on lui avoit proposées . On
trouve ensuite le troisiéme Discours que
le P. le Brun prononça à S. Magloire en
1695. à l'occasion de la Judith de M. Boyer
de l'Académie Françoise. Il y examine s'il
F
MAY, 1731
1103
y a lieu d'approuver que les Piéces de
Théatre soient tirées de l'Ecriture Sainte.
Ce Discours est divisé en deux parties.
Dans la premiere , le P. le Brun fait voir
que l'Ecriture ne peut paroître sur le
Théatre sans être défigurée et alterée considerablement.
La seconde est employée
à prouver , que quand on feroit quelque
Tragédie où l'Ecriture - Sainte seroit conservée
dans toute sa force et toute sa pureté
, le Théatre des Comédiens ne seroit
point le lieu de les représenter.
,
L'Editeur a placé après ce Discours un
Mandement de M. Fléchier , Evêque de
Nismes , contre les Spectacles , adressé
aux Fideles de son Diocèse le 8 Septembre
1758. On trouve à la fin une Table
Alphabétique des Matieres contenues dans
cer Ouvrage.
On ne peut témoigner à l'Editeur trop
de reconnoissance du soin qu'il a bien
voulu prendre de réunir et de ramasser
des morceaux si précieux. Il est certain
que nous n'avons point encote vû d'ouvrage
plus complet et plus curieux sur
cette matiere ; et on peut dire qu'il fait
honneur à son Auteur , et qu'il répond
parfaitement à la réputation qu'il s'est acquise
d'ailleurs. Nous ne pouvons nous
empêcher de dire en passant que le P. le
Brun
1104 MERCURE DE FRANCE
Brun a refuté par avance le Discours d'un
Auteur récent , défenseur de la Comédie ,
dont nous avons parlé le mois passé. Cet
Auteur qui s'étoit proposé de réfuter
M. le Prince de Conty , M. Bossuet et
M. Nicole , ne les a frappez par aucuns
endroits ; et on remarque qu'il n'a fait ,
pour ainsi dire , que réchauffer et étendre
les raisons du Théologien Apologiste du
Theatre .
L'Editeur avertit le Public dans sa
Préfice qu'il a réservé l'Eloge Historique
du P. le Brun pour un autre Ouvrage du
même Auteur , qui est actuellement sous
presse , et qui a pour titre : Traité du discernement
des effets naturels d'avec ceux qui
ne le sont pas , avec l'Histoire critique des
pratiques superstitieuses qui ont séduit les
Peuples , et qui embarrassent les Sçavans.
Il ajoute qu'outre des augmentations considerables
l'Auteur a refondu entierement
son Ouvrage , et l'a rendu plus . méthodique.
Mais nos Lecteurs ne seroient peut- être
pas contens , si après avoir piqué leur
curiosité sur ce que cet Ouvrage contient
de singulier et de recherché , nous n'entrions
dans quelque détail . Pour les satisfaire
nous allons donner un peu plus
d'étendue à cet Extrait.
›
Dans
>
MAY. 1731. 1105
Dans la premiere partie de l'Histoire
des Jeux de Théatre , l'Auteur remarque
qu'on en vît de très- superbes sous Auguste.
Ce grand Prince les aimoit avec passion
, dit-il , et surtout assûre qu'il ne
dissimuloit pas cette foiblesse. Il inventa
lui- même des Jeux. Pausanias rapporte
au Livre VIII. qu'Auguste fut l'Auteur
de la Danse des Pantomimes , et M. de
Pontac dans les Notes sur la Chronique
d'Eusebe , dit que c'étoit là les Jeux Augustaux
, Ludi Augustales. Cet Empereur
établit quelques Loix touchant les Spectacles.
Il défendit aux jeunes gens de l'un
et de l'autre sexe d'aller à ceux qui se faisoient
la nuit , à moins que de proches
parens âgez ne les y menassent , et il empêcha
que les femmes assistassent jamais
aux Jeux des Athlétes , parce qu'ils combattoient
ordinairement nuds.
A l'égard des Comédiens , il leur prescrivit
des régles , et leur laissa une liberté
dont il ne souffrit pas qu'ils abusassent.
Dès qu'il sçut qu'un Acteur , nommé Stephanion
, avoit pour serviteur une femme
déguisée en garçon , il le fit foüetter par
les trois Théatres de la Ville , et le bannit.
Il ne désaprouvoit pas qu'on siflat les
Acteurs , car il en bannit un de Rome et
de toute l'Italie , pour avoir osé montrer
au
1106 MERCURE DE FRANCE
au doigt un des Spectateurs qui le sifloit,
et on sifloit souvent pour une seule faute
contre la cadence ou contre la quantité.
Quoique Néron ne s'appliquât presque
jamais à mettre l'ordre en aucun endroit,
il se trouva pourtant obligé de chasser
d'Italie tous les Histrions,après leur avoir
donné trop de liberté; mais il voulut aller
lui-même faire le Comédien et le Chantre
dans plusieurs Villes de la Grece, pour
faire paroitre sa belle voix . Il commença
par Naples , qui étoit une Ville Grecque ;
et revenant à Rome , il voulut se montrer
au Théatre. Le Senat , pour éviter l'infamie
dont il s'alloit flétrir , s'il étoit vû sur
la Scene , lui décerna le prix de Musique,
et celui d'Eloquence avant le commencement
des Jeux ; mais Néron prétendoit
l'emporter par son merite , et non pas par
la faveur du Sénat . Il monta donc sur la
Scene , où il récita un Poëme , après quoi
il joüa de la Lyre , obéït à toutes les loix
du Theatre , comme de ne se reposer , de
ne cracher , ni se moucher durant toute
Paction , fléchit un genou et salua l'Assemblée
, en attendant la Sentence des
Juges . Le Peuple , et sur tout les Etrangers
rougirent pour lui d'une telle infamie.
Vespasien témoigna de l'horreur pour
les
MAY. 1731 . 1107
les Jeux des Gladiateurs. Il se plut à ceux
du Théatre , et de son tems les Pantomimes
étoient si fort à la mode , qu'on en
avoit aux funérailles , pour leur faire représenter
les actions de celui qu'on enterroit.
Domitien deffendit aux Danseurs et
Pantomimes de monter sur le Theatre.
Nerva les rétablit . Trajan les supprima
encore , mais on ne sçait pas s'ils furent
bannis des Théatres d'Orient ; on voit
seulement que cet Empereur fit bâtir un
Théatre à Antioche. Cette malheureuse
Ville , si passionnée pour les Spectacles ,
étoit souvent punie par les tremblemens
de terre qui la renversoient presque entierement.
Elle en souffrit un terrible sous
Trajan . En faisant rétablir la Ville , ce
Prince fit aussi rétablir les Théatres.
Adrien batit aussi un grand Théatre aurès
d'Antioche , à la Fontaine de Daphné.
Il avoit fait à cette Fontaine un grand Reservoir
d'eau, qu'on pouvoit voir du Théatre
; et il mit plusieurs Statues en l'honneur
des Naïades , c'est -à- dire des Nimphes
on Déesses de l'eau . Ce fut à ce Réservoir
que l'on s'avisa de faire nager des
femmes pour représenter les Naïades ; ce
que S. Chrysostome condamna avec tant
de zele et d'éloquence ,
HelioT108
MERCURE DE FRANCE
> Heliogabale fit lui - même le Comédien
et ne craignit pas de représenter des fables
avec des nuditez et des peintures deshonêtes
.Il honora les Comédiens, leur donna
des habits de soye , et en choisit un pour
être Prefet du Prétoire.
Alexandre Severe ôta aux Comédiens
les robes précieuses , et ne leur donna ni
or ni argent , mais tout au plus quelques
pieces de monnoye de cuivre. Ce Prince
ne souffrit jamais les divertissemens Sceniques
à sa table. Il aimoit pourtant les
Spectacles , mais sans y faire des largesses ;
il vouloit qu'on traitat toujours comme
des esclaves les Comédiens , et tous ceux
qui servoient aux plaisirs publics.
Les Comédiens eurent un puissant Protecteur
vers la fin du troisiéme siecle , dans
la personne de l'Empereur Carin , etc . Son
regne se distingua par la pompe avec laquelle
il celebra les Jeux Romains . Il y
avoit cent Joueurs de Flute qui s'accordoient
, autant de Sonneurs de Cors , cent
Chantres qui dansoient en même-tems
autant de personnes qui frapoient sur des
Cymbales ,mille Pantomimes et autant de
Luteurs . Le feu ayant pris à une toile
qu'il avoit fait tendre , consuma le Théatre,
que Diocletien fit ensuite rebâtir avec
plus de magnificence. Carin avoit fait venir
MAY. 1731. 1109
nir des Comédiens de tous côtés . Ceux qui
avoient travaillé aux décorations , les Luteurs
, les Histrions , et les Musiciens eurent
en present de l'or et de l'argent , et
des habits de soye .
Ce fut sous l'Empereur Maxime que
Gelasin , Comédien , fut martyrisé à Héliopolis
dans Phénicie . Il s'étoit jetté dans
un bain d'eau tiéde , pour tourner en ridicule
le Baptême des Chrétiens ; au sortir
du bain , il parut habillé de blanc. Alors
il refusa de faire le Comédien ; et adressant
la parole à tout le peuple , il s'écria
qu'il étoit Chrétien , qu'il avoit vu dans
ce bain la redoutable Majesté de Dieu , et
qu'il mourroit Chrétien . Tous les Spectateurs
saisis de fureur , monterent sur le
Théatre , et ayant pris Gelasin , ils le lapiderent.
Nous pourrons donner un second Extrait
de cet Ouvrage, pour ce qui regarde le Theatre
François.
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Résumé : Discours sur la Comedie, &c. [titre d'après la table]
Le texte présente une œuvre intitulée 'Discours sur la Comédie, ou Traité Historique et Dogmatique des Jeux de Théâtre, et autres Divertissements Comiques', écrite par le Père Le Brun, prêtre de l'Oratoire. Publiée en 1731, cette seconde édition augmentée d'un ouvrage initialement paru anonymement en 1694, explore l'histoire et les jugements des jeux de théâtre depuis le premier siècle de l'Église jusqu'au XVIIIe siècle. Le livre, composé de 360 pages, est structuré en plusieurs parties : une préface, la rétractation du Père Caffaro, une lettre de Le Brun, et deux discours. En 1694, à la demande de l'archevêque de Paris, M. De Harlay, Le Brun a prononcé deux discours au Séminaire de Saint-Magloire en réponse à une lettre du Père Caffaro défendant la comédie. Insatisfait de cette première version, Le Brun a perfectionné son ouvrage en étudiant l'antiquité ecclésiastique et en recueillant des informations sur les jeux de théâtre depuis Auguste jusqu'à Justinien. L'éditeur a ajouté des faits oubliés par Le Brun et des extraits de recueils de rituels et de statuts synodaux. Le premier discours répond à la lettre d'un théologien défenseur de la comédie. Le second discours, en six parties, couvre l'histoire des jeux de théâtre depuis Auguste jusqu'au XVIIIe siècle, ainsi que les jugements des auteurs sacrés et profanes sur les spectacles. Un troisième discours, prononcé en 1695, examine l'opportunité de représenter des pièces de théâtre tirées de l'Écriture Sainte. Le texte mentionne également plusieurs empereurs romains et leurs relations avec les spectacles théâtraux, tels qu'Auguste, Néron, Vespasien, Domitien, Trajan, Adrien, Héliogabale, Alexandre Sévère, et Carin. Chaque empereur est décrit en fonction de son attitude envers les jeux de théâtre, allant de l'approbation à la répression. Par exemple, Carin avait fait venir des comédiens de divers endroits et leur avait offert des présents d'or, d'argent et des habits de soie. Sous l'empereur Maxime, le comédien Gelasin fut martyrisé à Héliopolis en Phénicie pour avoir affirmé sa foi chrétienne après une mise en scène moqueuse du baptême. Le texte se conclut par un mandement de l'évêque de Nîmes contre les spectacles et une table alphabétique des matières.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 2150-2155
RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
Début :
Puisque j'ay osé m'introduire dans la République des Lettres, je dois comme [...]
Mots clefs :
Républiques des Lettres, Tribunal de la critique, Journal de Trévoux, Réfutation, Géométrie
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texteReconnaissance textuelle : RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
RE'PONSE du P. Romuald le Muët
Religieux de la Charité , à M. le Monnier.
Puisque j'ay osé m'introduire dans la
République des Lettres , je dois comme
bon Citoyen , me soûmettre à la Jurisdiction
qui s'y trouve établie dès son
commencement. C'est le tribunal de la
Critique , dont la puissance est soûtenuë
de l'autorité du Droit Public.
Les
SEPTEMBRE. 1731. 21ST
114
,
Les sentimens d'estime que j'ay pour la
saine Critique , peuvent persuader d'a
bord M. le Monnier , que j'ay vû avec
plaisir dans le Journal de Trevoux du
mois de Mars 1731. la réfutation qu'il a
faite de mon petit ouvrage sur la Quadrature
du Cercle la Duplication da
Cube et la Trisection de l'Angle ; mais
quelque soit mon respect pour sa personne
, et mon estime pour la Critique ,
je ne pense pas qu'il doive en inferer que
je sois disposé à me soûmettre aux loix
qu'il me préscrit , et que je me déporte
de ma methode simple et nouvelle,s'il veut,
mais exacte , mais solide , de diviser les
360. degrez de la circonference du Cercle
en vingt- deux parties , dont vingt et
une étant de seize degrez vingt - deux minutes
chacune , laissent seize degrez dixhuit
minutes pour la vingt - deuxième
qui est une difference de quatre minutes
moins que les autres , laquelle fait connoître
qu'elle est la portion que le Polygone
circonscrit de 360 , côtez , a de plus
que la circonférence du Cercle de 360 .
degrez , et qu'elle donne ainsi le dévelopement
entier de la solution parfaite du
fameux Problême de la Quadrature du
Cercle , en donnant le vrai rapport du
Diametre, 114. degrez 34. m. à la circonference
E iiij
2152 MERCURE DE FRANCE
•
ference du Cercle de 360. degrez , qui est
celui de sept à vingt- deux moins quelque
chose , lequel quelque chose , l'on voit
enfin ici , fixé à quatre minutes , à quoi
se doivent aussi fixer les difficultez que
M. le Monnier essaye inutilement d'y
opposer .
A l'égard de ce que j'ay dit que la Géometrie
simple est la seule réelle , la seule
solide , quoi qu'en puisse dire M. le Monnier
, en faveur des sections coniques , et
même de la Géometrie de l'infini , il ne
peut disconvenir sans se commettre un
peu , que ce qu'il y a de plus utile et de
plus dans l'usage , n'excede point le ressort
de la Géometrie simple , et que ce
qu'on y a imaginé de plus par la nouvelle
Algébre , cet art ingenieux , speculatif
et séduisant , qui parle aux yeux , et fait
taire la bouche , ne sont que des traits ,
que des figures symboliques qui ne servent
gueres plus qu'à irriter la curiosité
et à amuser l'esprit en effet n'est- ce pas
dans la plus haute sublimité de son intelligence
, à laquelle ses éleves puissent par
venir , qu'elle leur apprend à démontrer
que deux et deux , à quelques égards
ne font pas quatre ? Grande preuve
de sa
solidité et de son utilité ! Ce n'est pas que
je méprise ces connoissances , au contraire,
:
>
IG
SEPTEMBRE. 1731. 2153
je reconnois qu'elles ne m'ont amusé que
trop agréablement , et peut-être trop souvent;
mais je voudrois qu'on ne les encherit
point au- dessus de la valeur que le sçavant
P. Castel leur a si judicieusement
assignée dans son excellent livre de Mathématique
universelle.
C'est sincerement avec peine que je me
trouve obligé de dire que M. le Monnier
n'a pû parvenir à connoître , quelque effort
qu'il paroisse avoir fait que cinquante-
sept fois 57. degrez 17. m. valent
3265. degrez9.m. , et que dix-sept fois 17 .
m. valent quatre degrez quarante- neuf minutes
, qui font la somme totale 3269 .
degrez 58. m. J'admire comment il a squ
trouver des secondes où il ne s'agit que
de primes , je veux dire que de minutes .
N'y a-t-il point encore sujet de s'étonner
que M. le Monnier me propose de
comparer des nombres à des nombres
pour la Duplication du Cube , lui qui
doit sçavoir , que comme la Duplication
du quarré est impossible en nombre et
possible en ligne , de même la Duplication
du Cube ne se peut faire en nombre
et peut se faire en ligne , en trouvant deux
lignes moyennes proportionnelles entre
une et deux ? Quoique jusqu'à present
on ait cherché inutilement ces movennes
proportionnelles par la Géometrie
simple , E v
2154 MERCURE DE FRANCE
simple ; je crois cependant les avoir
trouvées par ce proċedé ici . Soit la ligne
A
ر
B
1
,
C D
E
" divisée en B en deux parties égales
pour faire une et deux , comme on le
verra dans la suite et chacune moitié
subdivisée en deux autres qui fassent quatre
parties égales . Alors prenant la seconde
moitié de la ligne AB , pour le côté
d'un quarré , soit sa diagonale , conduite
en C , et que D marque la moitié de la
ligne BE ; car en procedant ainsi , il est
indubitable que AB : AC AD : AE. Et
par conséquent que ces quatre lignes sont
en proportion Géometrique et continuellement
proportionnelles
, desquelles AC
et AD sont les deux moyennes. Et comme
il est démontré depuis long- temps , que
la premiere est la racine cubique du Cube
deux , il s'ensuit que la ligne AC est le
côté du Cube double du Cube de AB ,
d'où l'on doit indubitablement conclure
que la solution du célebre Problême de la
Duplication du Cube est enfin trouvée.
Quant àl'operation de la Trisection de
l'Angle , M. le Monnier peut continuer
à la faire ; les difficultez en sont levées ;
il n'a plus de Paralogisme à craindre
ayant autant de sagacité et de pénetra
tion que je lui en crois .
>
Voici
SEPTEMBRE . 1731. 2155
Voici donc bien démontrées les solutions
tant désirées et presque inesperées
de ces anciens Apores , la Quadrature du
Cercle , la Duplication du Cube et la
Trisection de l'Angle par la Géometrie
simple , sans le secours des sections Coniques
, ni de la Géometrie de l'infini ,
dont les operations ne sont point si lumi
neuses , qu'elles ne laissent quelque doute.
Religieux de la Charité , à M. le Monnier.
Puisque j'ay osé m'introduire dans la
République des Lettres , je dois comme
bon Citoyen , me soûmettre à la Jurisdiction
qui s'y trouve établie dès son
commencement. C'est le tribunal de la
Critique , dont la puissance est soûtenuë
de l'autorité du Droit Public.
Les
SEPTEMBRE. 1731. 21ST
114
,
Les sentimens d'estime que j'ay pour la
saine Critique , peuvent persuader d'a
bord M. le Monnier , que j'ay vû avec
plaisir dans le Journal de Trevoux du
mois de Mars 1731. la réfutation qu'il a
faite de mon petit ouvrage sur la Quadrature
du Cercle la Duplication da
Cube et la Trisection de l'Angle ; mais
quelque soit mon respect pour sa personne
, et mon estime pour la Critique ,
je ne pense pas qu'il doive en inferer que
je sois disposé à me soûmettre aux loix
qu'il me préscrit , et que je me déporte
de ma methode simple et nouvelle,s'il veut,
mais exacte , mais solide , de diviser les
360. degrez de la circonference du Cercle
en vingt- deux parties , dont vingt et
une étant de seize degrez vingt - deux minutes
chacune , laissent seize degrez dixhuit
minutes pour la vingt - deuxième
qui est une difference de quatre minutes
moins que les autres , laquelle fait connoître
qu'elle est la portion que le Polygone
circonscrit de 360 , côtez , a de plus
que la circonférence du Cercle de 360 .
degrez , et qu'elle donne ainsi le dévelopement
entier de la solution parfaite du
fameux Problême de la Quadrature du
Cercle , en donnant le vrai rapport du
Diametre, 114. degrez 34. m. à la circonference
E iiij
2152 MERCURE DE FRANCE
•
ference du Cercle de 360. degrez , qui est
celui de sept à vingt- deux moins quelque
chose , lequel quelque chose , l'on voit
enfin ici , fixé à quatre minutes , à quoi
se doivent aussi fixer les difficultez que
M. le Monnier essaye inutilement d'y
opposer .
A l'égard de ce que j'ay dit que la Géometrie
simple est la seule réelle , la seule
solide , quoi qu'en puisse dire M. le Monnier
, en faveur des sections coniques , et
même de la Géometrie de l'infini , il ne
peut disconvenir sans se commettre un
peu , que ce qu'il y a de plus utile et de
plus dans l'usage , n'excede point le ressort
de la Géometrie simple , et que ce
qu'on y a imaginé de plus par la nouvelle
Algébre , cet art ingenieux , speculatif
et séduisant , qui parle aux yeux , et fait
taire la bouche , ne sont que des traits ,
que des figures symboliques qui ne servent
gueres plus qu'à irriter la curiosité
et à amuser l'esprit en effet n'est- ce pas
dans la plus haute sublimité de son intelligence
, à laquelle ses éleves puissent par
venir , qu'elle leur apprend à démontrer
que deux et deux , à quelques égards
ne font pas quatre ? Grande preuve
de sa
solidité et de son utilité ! Ce n'est pas que
je méprise ces connoissances , au contraire,
:
>
IG
SEPTEMBRE. 1731. 2153
je reconnois qu'elles ne m'ont amusé que
trop agréablement , et peut-être trop souvent;
mais je voudrois qu'on ne les encherit
point au- dessus de la valeur que le sçavant
P. Castel leur a si judicieusement
assignée dans son excellent livre de Mathématique
universelle.
C'est sincerement avec peine que je me
trouve obligé de dire que M. le Monnier
n'a pû parvenir à connoître , quelque effort
qu'il paroisse avoir fait que cinquante-
sept fois 57. degrez 17. m. valent
3265. degrez9.m. , et que dix-sept fois 17 .
m. valent quatre degrez quarante- neuf minutes
, qui font la somme totale 3269 .
degrez 58. m. J'admire comment il a squ
trouver des secondes où il ne s'agit que
de primes , je veux dire que de minutes .
N'y a-t-il point encore sujet de s'étonner
que M. le Monnier me propose de
comparer des nombres à des nombres
pour la Duplication du Cube , lui qui
doit sçavoir , que comme la Duplication
du quarré est impossible en nombre et
possible en ligne , de même la Duplication
du Cube ne se peut faire en nombre
et peut se faire en ligne , en trouvant deux
lignes moyennes proportionnelles entre
une et deux ? Quoique jusqu'à present
on ait cherché inutilement ces movennes
proportionnelles par la Géometrie
simple , E v
2154 MERCURE DE FRANCE
simple ; je crois cependant les avoir
trouvées par ce proċedé ici . Soit la ligne
A
ر
B
1
,
C D
E
" divisée en B en deux parties égales
pour faire une et deux , comme on le
verra dans la suite et chacune moitié
subdivisée en deux autres qui fassent quatre
parties égales . Alors prenant la seconde
moitié de la ligne AB , pour le côté
d'un quarré , soit sa diagonale , conduite
en C , et que D marque la moitié de la
ligne BE ; car en procedant ainsi , il est
indubitable que AB : AC AD : AE. Et
par conséquent que ces quatre lignes sont
en proportion Géometrique et continuellement
proportionnelles
, desquelles AC
et AD sont les deux moyennes. Et comme
il est démontré depuis long- temps , que
la premiere est la racine cubique du Cube
deux , il s'ensuit que la ligne AC est le
côté du Cube double du Cube de AB ,
d'où l'on doit indubitablement conclure
que la solution du célebre Problême de la
Duplication du Cube est enfin trouvée.
Quant àl'operation de la Trisection de
l'Angle , M. le Monnier peut continuer
à la faire ; les difficultez en sont levées ;
il n'a plus de Paralogisme à craindre
ayant autant de sagacité et de pénetra
tion que je lui en crois .
>
Voici
SEPTEMBRE . 1731. 2155
Voici donc bien démontrées les solutions
tant désirées et presque inesperées
de ces anciens Apores , la Quadrature du
Cercle , la Duplication du Cube et la
Trisection de l'Angle par la Géometrie
simple , sans le secours des sections Coniques
, ni de la Géometrie de l'infini ,
dont les operations ne sont point si lumi
neuses , qu'elles ne laissent quelque doute.
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Résumé : RÉPONSE du P. Romuald le Muët, Religieux de la Charité, à M. le Monnier.
Le Père Romuald le Muët, religieux de la Charité, répond à M. le Monnier après que ce dernier ait critiqué son ouvrage sur la quadrature du cercle, la duplication du cube et la trisection de l'angle. Le Père Romuald exprime son respect pour la critique mais refuse de se soumettre aux lois que M. le Monnier lui prescrit. Il défend sa méthode de division des 360 degrés de la circonférence du cercle en vingt-deux parties, affirmant que cette méthode permet de résoudre le problème de la quadrature du cercle en déterminant le rapport entre le diamètre et la circonférence. Le Père Romuald soutient que la géométrie simple est la seule réelle et solide, contrairement aux sections coniques et à la géométrie de l'infini, qu'il considère comme des artifices symboliques. Il reconnaît l'utilité de ces connaissances mais les juge surévaluées. Il critique également M. le Monnier pour ses erreurs de calcul, notamment dans la duplication du cube, et affirme avoir trouvé une solution en utilisant la géométrie simple. Il explique que la duplication du cube peut se faire en ligne en trouvant deux lignes moyennes proportionnelles entre une et deux. Le Père Romuald conclut que les solutions aux problèmes de la quadrature du cercle, de la duplication du cube et de la trisection de l'angle sont démontrées par la géométrie simple, sans recours aux sections coniques ou à la géométrie de l'infini.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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