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p. 8-17
LETTRE sur une Médaille Antique d'argent.
Début :
Puisque je vous ai promis, Monsieur, de vous dire ce [...]
Mots clefs :
Médaille antique d'argent, Hercules Adsertor, Abbé de Rothelin, Galba, Suétone, Fortuna
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texteReconnaissance textuelle : LETTRE sur une Médaille Antique d'argent.
LETTRE sur une Médaille Antique
d'argent.
HERCULES ADSERTOR. La tête d'Hercule
represente un vieillard avec une longue
barbe en pointes et une couronne de Lau- rier. Et sur le revers TUNA. P. R.
une Divinité debout, dont on ne peut pas
bien distinguer les symboles , la Médaille
qui est fourée, étant gâtée en cet endroit.
Puisque le vous ai promis , Monsieur de vous dire ce que je pensois de cette Médaille qui est à Paris , dans le riche
Cabinet de M. l'Abbé de Rothelin , et
qui jusques icy peut passer pour être
unique ; je m'acquitte aujourd'hui de ma
parole par cette Lettre , où vous trou
verez mes conjectures sur cette Antique.
Je vous y propose, deux explications
l'une et l'autre a ses avantages et ses difficultez ; je me suis servi des premiers
et j'ai tâché de répondre aux autres. Je
re me flatte pas cependant d'avoir satisfait à tout , mais du moins ce que je vous
écris pourra donner envie à quelque autre plus habile de vous contenter sur ces
JANVIER. 1732.
et article , s'il vous prend envie de com
muniquer ma Lettre à vos amis.
La premiere explication , c'est que cette
Médaille peut fort bien se rapporter au
temps de la mort de Néron , et que sous
les traits d'un Hercule vieillard , ven
geur et protecteur de la liberté , on doit
reconnoître les traits de l'Empereur
Galba , qui , lors qu'il parvint à l'Empire
étoit âgé de 73 ans , et qui en délivrant
Rome d'un Prince qu'elle regardoit avec
justice , comme un Tyran , méritoit l'éloge qu'on donne icy au Dompteur des
Monstres , et dont , au rapport de l'Histoire , Julius-Vindex l'avoit déja flatté ,
lors qu'il l'engagea à prendre les Armes
Hortantis ut humanogeneri assemorem Ducemque se accommodaret.
Outre cette convenance , vous remar
querez , s'il vous plaît , que l'épithéte
d'ADSERTOR , Sur les Médailles , est contemporaine de Galba (a) , puis qu'elle se
trouve sur un grand Bronze ( b ) de Ves
pasien. S. P. Q. R. ADSERTORI LIBERTATIS PUBLICE , dans une Couronne de chêne.
Cette observation paroît legere , mais
elle ne le sera pas pour vous , Monsieur ,
qui sçayez de quel poids sont ces ressem-
(a )Dans la vie de Galba , n. 96
b) Le P. Hardouin, page 731, chap. 2.
B blances
to MERCURE DE FRANCE
blances sur les Médailles. Le grand prin
cipe des Antiquaires et le plus sûr étant
d'expliquer ces monumens les uns par les
autres. Le Titre d'Adsertor , au reste , est
tres- rare sur les Monnoyes ; et outre ces
deux cy , je n'en connois qu'une troisiéme où il se rencontre. J'aurai occasion de
la rapporter plus bas.
Le Revers , FORTUNA P. R. Car je ne
crois pas qu'on me conteste qu'il ne faille
ainsi restituer la légende,ceRevers, dis- je,
convient encore fort bien à l'époque que
je donne à la Médaille et à Galba en particulier, Premierement il ne faut qu'ouvrir
lesHistoriens, et faire quelque attention au
triste état où Rome se trouvoit réduite
par la tyrannie de Néron , pour se convaincre que le plus grand bonheur qui
pût arriver à l'Empire , étoit de se voir
délivré d'un tel Prince. Aussi on ne peut
exprimer la joïe que ressentit tout ce vaste Corps , quand il en apprit la mort.
Adeò cuncta Provincia, dit(a)Aurelius Victor , omnisque Roma interitu ejus exultavit
ut plebs induta pileis manumissionum , tanquam savo exemto domino , triumpharet , ct
c'est ce qui nous est confirmé par les Médailles de Galba , où l'on voit : LIBERTAS
RESTITUTA FELICITAS PUBLICA FORTUNE
(a ) Epitome , 13,
REDUC
JANVIER. 1732. TI
REDUCI FELICITAS BONI EVENTUs; et autrès
Inscriptions semblables.
Pour ce qui regarde plus particulierement Galba , Suetone rapporte que cè
Prince étant encore jeune , songea une
nuit que la fortune lui disoit, que se trou
vant lasse , elle se reposoit sur sa porte ,
qu'il la fit entrer chez lui au plutôt , sinon qu'elle seroit enlevée par quelques
autres ; que s'étant réveillé là - dessus , et
ayant fait ouvrir son appartement , il
avoit effectivement trouvé une image de
bronze de cette Déesse , à qui depuis il
avoit toujours continué de rendre un culte particulier.Suétone place cette avanture parmi les pronostics qu'eut ce Prin
ce , qu'un jour il regneroit. Il n'est donc
pas surprenant que sur uneMédaille frappée pour lui , on ait representé cette mê
me Fortune, qui de protectrice de Galba , simple particulier , étoit devenuë par
son avénement à l'Empire , une Divinité
commune à tous les Romains. FORTUNA
P. R.
Il est inutile d'observer que le manquè
du nom du Prince sur la Médaille n'empêche pas qu'on ne la puisse donner à
Galba; puisque tous les Antiquaires lui en
attribuent plusieurs semblables ; telle est
(a) celle d'argent, que j'ai citée plus haut
(a )Le P. Hardoüin , pag. 728. ch. I
Bij E
12 MERCURE DE FRANCE
FELICITAS BONÍ EVENTUS , avec la tête de la
Félicité ; et au revers , deux mains , qui
tiennent un Caducée , P. R. PAX. Outre
qu'on peut ajouter que ces Médailles ont
été frappées à Rome , immédiatement
après la mort de Néron , dans le dans le temps
où Galba étant encore absent,on pouvoit
n'avoir aucun de ses portraits , et sur tout
ignorer quels titres il vouloit qu'on lui donnât sur la Monnoye.
"
Je viens à la seconde Explication :
M. Patin , dans son ( a ) Suétone , a fait
graver une Médaille d'argent , ou ďun
côté est la tête d'une femme voilée , au
devant de laquelle est une branche de
Laurier , et pour Légende : LIBERTAS RESTITUTA; au Revers,Mars debout , tenant
un Bouclier d'une main , er un Trophée
de l'autre, et ces lettres : MARS ADSERŢOR,
Cet Auteur , sans expliquer autrement la
Médaille , la place parmi celles que les
conjurez contre Jules César , firent
frapper après la mort de ce grand homme , comme des monumens de la liberté
qu'ils crurent avoir rendue à leur patrie,
Il seroit difficile de lui donner une autre Explication , et je ne doute point
que M. Vaillant dans son ouvrage des
Consulaires , n'en ait jugé de même. Or
(a) Page 63.
-
Vous
JANVIER.. 1732. 13
-
Yous conviendrez , M. que cette Médaille
et celle de M. l'Abbé de Rothelin , ont
entr'elles un grand rapport. En effet, quoi
de plus semblable que Mars et Hercule ,
fun comme l'autre , Vengeurs et Protecteurs de la liberté opprimée. ADSERTOR , les
autres Légendes de ces deux Médailles ne
vous disent elles pas la même chose ;
puisque le bonheur du peuple Romain
FORTUNA P. R. ne vient que de la liberté.
qui lui est rendue 2 LIBERTAS RESTITUTA ,
que l'une est l'effet , l'autre la cause ? ou
plutôt que toutes les deux sont produites
par la mort d'un Prince que des gens
accoutumez à vivre en République, pouvoient , avec quelque raison , regardes
comme un Tyran? Je ne m'arrêterai pas
à continuer ce Parallele , il est aisé de
conclure par le peu que j'en ai fait remarquer , que le même motifa fait battre les deux Médailles , et qu'elles sont
l'ouvrage des Meurtriers de Jules- César.
On m'a fait une objection qui mérite
d'être examinée ; à sçavoir , qu'on vois
bien la part que Mars peut avoir dans la
mort de Jules- César. C'étoit à ce Dieu
que les Romains devoient leur origine et
les interêts de ce peuple étoient les fiens 'mais pour Hercule , on ne voit rien de
semblable et il s'en falloit beaucoup
Biij que
"
14 MERCURE DE FRANCE
que ce Dieu jouat à Rome un aussi grand
rôle que Mars; ainsi nulle comparaison
à faire des Médailles , qui portent l'image de l'un , avec celles qui portent la
tête de l'autre.
apJe réponds à cela , 1 ° . que les Pontifes
Romains , c'est-à- dire , ceux à qui il
partenoit de prononcer sur tout ce qui
regardoit les Dieux , ne faisoient de Mars
et d'Hercule qu'une même Divinité. C'est-
( a ) Macrobe qui nous l'apprend : Quia·
is Deus , dit cet Auteur , en parlant du
dernier , et apud Pontifices idem qui et.
Mars habetur.
2º. A ne regarder Hercule que comme
une Divinité distincte et séparée , on ne
peut disconvenir qu'il ne fut tres- considérable à Rome. Son culte plus ancien,
que cette Ville , avoit commencé en Italie du vivant de ce Héros ; les Romains
Pavoient réçu en s'établissant , et on peut
juger de son étendue par le grand nom..
bre deTemples et de Statues qui lui étoient conservez. P. Victor nous en a laissé le
dénombrement ; mais ce qui fait le plus à
notre sujet , c'est que les premieres Monnoyes que firent fraprer les Romains , et
qui portoient une Proie de Vaisseau
empreinte d'un côté , paroissent égale-.
(a) Saturn. lib. 3. cap. 12.
ment
JANVIER. 1732.
ment de l'autre , avec la tête d'Hercule
comme avec celles de Janus et de Mars
d'où il est aisé d'inférer qu'il falloit que
ce Dieu fut une des Divinitez protectrices de Rome.
·
-
3. Un autre motifpeut avoir enga
gé les Monétaires à mettre la tête d'Her
cule sur cette Médaille. On sçait combien
ce Dieu étoit honoré à Corinthe. (a)Pau,
sanias et les Médailles nous en font foy ;
peut être par l'image de ce Dieu a
t- on voulu marquer l'origine que Brutus tiroit de cette Ville ; par Tarquin
Pancien , de la fille duquel il descendoit.
Ma conjecture se trouve appuyée par
(b ) M. Beger , dans l'explication qu'il a
donnée d'une Medaille du Cabinet det
Brandebourg , où l'on voit d'un côté une
tête couverte d'un Casque , derriere la
quelle est une massuë; et au Revers , ce
mot , ROMANO, étoit écrit sous une Louve qui allaicte deux enfans. Il n'en a pas
fallu davantage à cet Auteur , que cette
massuë , pour lui faire soupçonner que la
tête casquée étoit celle d'un des Tar
quins précisément , parce que ces Princes
venoient de Corinthe,et qu'Hercule, dont
la massuë est le symbole , étoit un des
(a ) Lib. 20
(b )Tom. 1. pag. 33.80 B. iiij Dieux
16 MERCURE DE FRANCE
Dieux Tutelaires de cette Ville. Si cette
observation a lieu , voilà l'état de la Médaille que nous examinons tout- à- fair
determiné. Elle est consulaire, et doit être
placée avec celles de la famille de Junia.
Au reste , cette Medaille , pour le dire en
passant, peut servir à determiner la leçond'une autre , de la famille de Sicinia , oùl'on lit FORT. P. R. ( a ) que Fulvius Ursi- nus , aussi- bien que M. Patin,qui n'a rien
changé à cet endroit , explique par FORTITUDO P. R. et qu'il faut lire avec (b )
M. Spanheim, FORTUNA P.R. Comme dans
la Médaille de M. de Rothelin.
Voilà , M. à peu près tout ce que j'avois à dire; il ne me reste plus qu'un mot
à ajouter , et qui encore ne regarde que
la Médaille , sans rien ôter aux explications. Par les vestiges qui restent des Lettres effacées par la rouille , il paroît qu'il
y en avoit plus que le mot de FORTUNA
P. R. n'en comprend , et il s'agit d'y suppléer. Je crois qu'on ne le peut mieuxfaire que par l'Epithete de BONA , qui a
été donnée sur les Médailles à d'autres Divinitez du même rang. ( c) BON. EVENT.
(a )Famil. Rom. 263.
(b) De Usu et Pras. Num. pag. 575.
(c) Med. de lafamille Scribonia,
BONA
JANVIER 17320- 57
(a ) BONÆ SPEI. (b) BONO GENIO IMP. et àla
fortune , elle-même sous Gallien , BONE
FORTUNÆ. Outre que vous sçavez mieux
que moi que,dès le temps de la Républi- que , cette Divinité étoit adorée dans le
Ĉapitole , sous le nom de favorable : Boni
eventus , et Bona fortune simulacra in Capi».
tolio. Pline , liv. 36. cap. 5.
Je suis , Monsieur , &c..
( a ) Med. de Pescen. Nigers.
(b) Med. de Maximin d'Aza...
AOrleans „ ce 5 , Oct. 1731 ..
d'argent.
HERCULES ADSERTOR. La tête d'Hercule
represente un vieillard avec une longue
barbe en pointes et une couronne de Lau- rier. Et sur le revers TUNA. P. R.
une Divinité debout, dont on ne peut pas
bien distinguer les symboles , la Médaille
qui est fourée, étant gâtée en cet endroit.
Puisque le vous ai promis , Monsieur de vous dire ce que je pensois de cette Médaille qui est à Paris , dans le riche
Cabinet de M. l'Abbé de Rothelin , et
qui jusques icy peut passer pour être
unique ; je m'acquitte aujourd'hui de ma
parole par cette Lettre , où vous trou
verez mes conjectures sur cette Antique.
Je vous y propose, deux explications
l'une et l'autre a ses avantages et ses difficultez ; je me suis servi des premiers
et j'ai tâché de répondre aux autres. Je
re me flatte pas cependant d'avoir satisfait à tout , mais du moins ce que je vous
écris pourra donner envie à quelque autre plus habile de vous contenter sur ces
JANVIER. 1732.
et article , s'il vous prend envie de com
muniquer ma Lettre à vos amis.
La premiere explication , c'est que cette
Médaille peut fort bien se rapporter au
temps de la mort de Néron , et que sous
les traits d'un Hercule vieillard , ven
geur et protecteur de la liberté , on doit
reconnoître les traits de l'Empereur
Galba , qui , lors qu'il parvint à l'Empire
étoit âgé de 73 ans , et qui en délivrant
Rome d'un Prince qu'elle regardoit avec
justice , comme un Tyran , méritoit l'éloge qu'on donne icy au Dompteur des
Monstres , et dont , au rapport de l'Histoire , Julius-Vindex l'avoit déja flatté ,
lors qu'il l'engagea à prendre les Armes
Hortantis ut humanogeneri assemorem Ducemque se accommodaret.
Outre cette convenance , vous remar
querez , s'il vous plaît , que l'épithéte
d'ADSERTOR , Sur les Médailles , est contemporaine de Galba (a) , puis qu'elle se
trouve sur un grand Bronze ( b ) de Ves
pasien. S. P. Q. R. ADSERTORI LIBERTATIS PUBLICE , dans une Couronne de chêne.
Cette observation paroît legere , mais
elle ne le sera pas pour vous , Monsieur ,
qui sçayez de quel poids sont ces ressem-
(a )Dans la vie de Galba , n. 96
b) Le P. Hardouin, page 731, chap. 2.
B blances
to MERCURE DE FRANCE
blances sur les Médailles. Le grand prin
cipe des Antiquaires et le plus sûr étant
d'expliquer ces monumens les uns par les
autres. Le Titre d'Adsertor , au reste , est
tres- rare sur les Monnoyes ; et outre ces
deux cy , je n'en connois qu'une troisiéme où il se rencontre. J'aurai occasion de
la rapporter plus bas.
Le Revers , FORTUNA P. R. Car je ne
crois pas qu'on me conteste qu'il ne faille
ainsi restituer la légende,ceRevers, dis- je,
convient encore fort bien à l'époque que
je donne à la Médaille et à Galba en particulier, Premierement il ne faut qu'ouvrir
lesHistoriens, et faire quelque attention au
triste état où Rome se trouvoit réduite
par la tyrannie de Néron , pour se convaincre que le plus grand bonheur qui
pût arriver à l'Empire , étoit de se voir
délivré d'un tel Prince. Aussi on ne peut
exprimer la joïe que ressentit tout ce vaste Corps , quand il en apprit la mort.
Adeò cuncta Provincia, dit(a)Aurelius Victor , omnisque Roma interitu ejus exultavit
ut plebs induta pileis manumissionum , tanquam savo exemto domino , triumpharet , ct
c'est ce qui nous est confirmé par les Médailles de Galba , où l'on voit : LIBERTAS
RESTITUTA FELICITAS PUBLICA FORTUNE
(a ) Epitome , 13,
REDUC
JANVIER. 1732. TI
REDUCI FELICITAS BONI EVENTUs; et autrès
Inscriptions semblables.
Pour ce qui regarde plus particulierement Galba , Suetone rapporte que cè
Prince étant encore jeune , songea une
nuit que la fortune lui disoit, que se trou
vant lasse , elle se reposoit sur sa porte ,
qu'il la fit entrer chez lui au plutôt , sinon qu'elle seroit enlevée par quelques
autres ; que s'étant réveillé là - dessus , et
ayant fait ouvrir son appartement , il
avoit effectivement trouvé une image de
bronze de cette Déesse , à qui depuis il
avoit toujours continué de rendre un culte particulier.Suétone place cette avanture parmi les pronostics qu'eut ce Prin
ce , qu'un jour il regneroit. Il n'est donc
pas surprenant que sur uneMédaille frappée pour lui , on ait representé cette mê
me Fortune, qui de protectrice de Galba , simple particulier , étoit devenuë par
son avénement à l'Empire , une Divinité
commune à tous les Romains. FORTUNA
P. R.
Il est inutile d'observer que le manquè
du nom du Prince sur la Médaille n'empêche pas qu'on ne la puisse donner à
Galba; puisque tous les Antiquaires lui en
attribuent plusieurs semblables ; telle est
(a) celle d'argent, que j'ai citée plus haut
(a )Le P. Hardoüin , pag. 728. ch. I
Bij E
12 MERCURE DE FRANCE
FELICITAS BONÍ EVENTUS , avec la tête de la
Félicité ; et au revers , deux mains , qui
tiennent un Caducée , P. R. PAX. Outre
qu'on peut ajouter que ces Médailles ont
été frappées à Rome , immédiatement
après la mort de Néron , dans le dans le temps
où Galba étant encore absent,on pouvoit
n'avoir aucun de ses portraits , et sur tout
ignorer quels titres il vouloit qu'on lui donnât sur la Monnoye.
"
Je viens à la seconde Explication :
M. Patin , dans son ( a ) Suétone , a fait
graver une Médaille d'argent , ou ďun
côté est la tête d'une femme voilée , au
devant de laquelle est une branche de
Laurier , et pour Légende : LIBERTAS RESTITUTA; au Revers,Mars debout , tenant
un Bouclier d'une main , er un Trophée
de l'autre, et ces lettres : MARS ADSERŢOR,
Cet Auteur , sans expliquer autrement la
Médaille , la place parmi celles que les
conjurez contre Jules César , firent
frapper après la mort de ce grand homme , comme des monumens de la liberté
qu'ils crurent avoir rendue à leur patrie,
Il seroit difficile de lui donner une autre Explication , et je ne doute point
que M. Vaillant dans son ouvrage des
Consulaires , n'en ait jugé de même. Or
(a) Page 63.
-
Vous
JANVIER.. 1732. 13
-
Yous conviendrez , M. que cette Médaille
et celle de M. l'Abbé de Rothelin , ont
entr'elles un grand rapport. En effet, quoi
de plus semblable que Mars et Hercule ,
fun comme l'autre , Vengeurs et Protecteurs de la liberté opprimée. ADSERTOR , les
autres Légendes de ces deux Médailles ne
vous disent elles pas la même chose ;
puisque le bonheur du peuple Romain
FORTUNA P. R. ne vient que de la liberté.
qui lui est rendue 2 LIBERTAS RESTITUTA ,
que l'une est l'effet , l'autre la cause ? ou
plutôt que toutes les deux sont produites
par la mort d'un Prince que des gens
accoutumez à vivre en République, pouvoient , avec quelque raison , regardes
comme un Tyran? Je ne m'arrêterai pas
à continuer ce Parallele , il est aisé de
conclure par le peu que j'en ai fait remarquer , que le même motifa fait battre les deux Médailles , et qu'elles sont
l'ouvrage des Meurtriers de Jules- César.
On m'a fait une objection qui mérite
d'être examinée ; à sçavoir , qu'on vois
bien la part que Mars peut avoir dans la
mort de Jules- César. C'étoit à ce Dieu
que les Romains devoient leur origine et
les interêts de ce peuple étoient les fiens 'mais pour Hercule , on ne voit rien de
semblable et il s'en falloit beaucoup
Biij que
"
14 MERCURE DE FRANCE
que ce Dieu jouat à Rome un aussi grand
rôle que Mars; ainsi nulle comparaison
à faire des Médailles , qui portent l'image de l'un , avec celles qui portent la
tête de l'autre.
apJe réponds à cela , 1 ° . que les Pontifes
Romains , c'est-à- dire , ceux à qui il
partenoit de prononcer sur tout ce qui
regardoit les Dieux , ne faisoient de Mars
et d'Hercule qu'une même Divinité. C'est-
( a ) Macrobe qui nous l'apprend : Quia·
is Deus , dit cet Auteur , en parlant du
dernier , et apud Pontifices idem qui et.
Mars habetur.
2º. A ne regarder Hercule que comme
une Divinité distincte et séparée , on ne
peut disconvenir qu'il ne fut tres- considérable à Rome. Son culte plus ancien,
que cette Ville , avoit commencé en Italie du vivant de ce Héros ; les Romains
Pavoient réçu en s'établissant , et on peut
juger de son étendue par le grand nom..
bre deTemples et de Statues qui lui étoient conservez. P. Victor nous en a laissé le
dénombrement ; mais ce qui fait le plus à
notre sujet , c'est que les premieres Monnoyes que firent fraprer les Romains , et
qui portoient une Proie de Vaisseau
empreinte d'un côté , paroissent égale-.
(a) Saturn. lib. 3. cap. 12.
ment
JANVIER. 1732.
ment de l'autre , avec la tête d'Hercule
comme avec celles de Janus et de Mars
d'où il est aisé d'inférer qu'il falloit que
ce Dieu fut une des Divinitez protectrices de Rome.
·
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3. Un autre motifpeut avoir enga
gé les Monétaires à mettre la tête d'Her
cule sur cette Médaille. On sçait combien
ce Dieu étoit honoré à Corinthe. (a)Pau,
sanias et les Médailles nous en font foy ;
peut être par l'image de ce Dieu a
t- on voulu marquer l'origine que Brutus tiroit de cette Ville ; par Tarquin
Pancien , de la fille duquel il descendoit.
Ma conjecture se trouve appuyée par
(b ) M. Beger , dans l'explication qu'il a
donnée d'une Medaille du Cabinet det
Brandebourg , où l'on voit d'un côté une
tête couverte d'un Casque , derriere la
quelle est une massuë; et au Revers , ce
mot , ROMANO, étoit écrit sous une Louve qui allaicte deux enfans. Il n'en a pas
fallu davantage à cet Auteur , que cette
massuë , pour lui faire soupçonner que la
tête casquée étoit celle d'un des Tar
quins précisément , parce que ces Princes
venoient de Corinthe,et qu'Hercule, dont
la massuë est le symbole , étoit un des
(a ) Lib. 20
(b )Tom. 1. pag. 33.80 B. iiij Dieux
16 MERCURE DE FRANCE
Dieux Tutelaires de cette Ville. Si cette
observation a lieu , voilà l'état de la Médaille que nous examinons tout- à- fair
determiné. Elle est consulaire, et doit être
placée avec celles de la famille de Junia.
Au reste , cette Medaille , pour le dire en
passant, peut servir à determiner la leçond'une autre , de la famille de Sicinia , oùl'on lit FORT. P. R. ( a ) que Fulvius Ursi- nus , aussi- bien que M. Patin,qui n'a rien
changé à cet endroit , explique par FORTITUDO P. R. et qu'il faut lire avec (b )
M. Spanheim, FORTUNA P.R. Comme dans
la Médaille de M. de Rothelin.
Voilà , M. à peu près tout ce que j'avois à dire; il ne me reste plus qu'un mot
à ajouter , et qui encore ne regarde que
la Médaille , sans rien ôter aux explications. Par les vestiges qui restent des Lettres effacées par la rouille , il paroît qu'il
y en avoit plus que le mot de FORTUNA
P. R. n'en comprend , et il s'agit d'y suppléer. Je crois qu'on ne le peut mieuxfaire que par l'Epithete de BONA , qui a
été donnée sur les Médailles à d'autres Divinitez du même rang. ( c) BON. EVENT.
(a )Famil. Rom. 263.
(b) De Usu et Pras. Num. pag. 575.
(c) Med. de lafamille Scribonia,
BONA
JANVIER 17320- 57
(a ) BONÆ SPEI. (b) BONO GENIO IMP. et àla
fortune , elle-même sous Gallien , BONE
FORTUNÆ. Outre que vous sçavez mieux
que moi que,dès le temps de la Républi- que , cette Divinité étoit adorée dans le
Ĉapitole , sous le nom de favorable : Boni
eventus , et Bona fortune simulacra in Capi».
tolio. Pline , liv. 36. cap. 5.
Je suis , Monsieur , &c..
( a ) Med. de Pescen. Nigers.
(b) Med. de Maximin d'Aza...
AOrleans „ ce 5 , Oct. 1731 ..
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Résumé : LETTRE sur une Médaille Antique d'argent.
La lettre examine une médaille antique en argent conservée par l'Abbé de Rothelin à Paris. Cette médaille présente Hercule sur l'avers et une divinité sur le revers. L'auteur propose deux interprétations possibles pour cette médaille. La première explication suggère que la médaille date de la mort de Néron et représente Galba, empereur de 73 ans, sous les traits d'Hercule. Galba est perçu comme un vengeur et protecteur de la liberté, ayant libéré Rome de Néron. L'épithète 'ADSERTOR' sur la médaille est contemporaine de Galba et apparaît également sur un bronze de Vespasien. Le revers, 'FORTUNA P. R.', est approprié pour cette période, symbolisant la joie de Rome après la mort de Néron. La seconde explication, avancée par M. Patin, situe la médaille parmi celles frappées après la mort de Jules César par les conjurés, célébrant la liberté retrouvée. La médaille de M. Patin montre Mars, protecteur de la liberté, et présente des similitudes avec celle de l'Abbé de Rothelin. L'auteur répond à une objection en expliquant que les Romains considéraient Mars et Hercule comme une même divinité, Hercule étant également une divinité protectrice de Rome. L'auteur conclut en proposant de compléter les lettres effacées sur la médaille par l'épithète 'BONA', comme sur d'autres médailles similaires. La lettre est datée de janvier 1732.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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