LETTRE A DEXIAT
Dames pareBeuses,parfeu
I - Monsieur P. E sçai, Madame, avec
quelle austerité vous
pratiquez la Regle de vôtre
Bienheureute Paresse;
-& que pour tous les biens
du mondevous ne voudriez
pas violer le voeu de
faineantise que vous avez
fait entre mes mains, aussi
n'est-ce pas pour vous le
faire rompre que je vous
donne la fatigue de lire
celle-ci, mais feulement
pour vous délivrer de
quelques scrupules, dans
lesquels une paresse supersticieuse
comme la vôtre,
pourroit nous faire tomber.
Quoiqu'une bonne paresseuse
Ne connoisse point d'autre bitn
Capable de la rendre heureuse,
éluUee cceelluuiiddeenneefaire rriieenn,
Ellepeuttoutefois étant bien
à sonaise,
Gisant dans une bonne chaise,
Ou la tête sur son Chevet,
Permettre qu'un Galand la
cajoll e & la batJe,
Pourvû que le baiser soit
modejîe & discret,
Etquelecajoleur lui plaisi.
Quoique l'indolence&
la faineantise soient les
principales vertus de vôtre
tranquille profession,
néanmoins en toutesûreté
de paresse vous pouvez
recevoir des Billets doux
avec plaisir,les lire.
attention, les serrer avec
foin, pourvu que vous n'y
répondiez querarement,
Si cen'estlors, quelestile
vous plaît.
Jjhtqyque l'employ soit dfez
doux
Oelffans doutetrop entre.
prendre
Quede donner un ywde'Z;
vous,
Et si chargerencordufonçy
de s'y rendre:
Maissil'occasion vous vient
{ taster le poux
Innocemment s'entend,c'est
sotise entre nous
DeneJepasdonner lapeine
de la prendre.
Car je crois, Mesdames,
que vous sçavez que de
toutes les occasions qui
sont au monde,il n'y a
que celles de l'amour qui
ne sont point chauves, &
que cela futainsi ordonne
par l'amourmêmeenfaveurde
la paresse Ton1
ayeule maternelle, de peur
qu'elle & les siens ne filasent
privez du plaisir de
ces fortes d'occasions, s'il
y avoit tant de peineà les
prendre.
Aller au devant d'un Amant
Contrefaire la langoureuse,
Et minauder à tout moment
Pourparoître plusgratieuse,
C'est un métier assurement
Indigne d'une paresseuse:
Mais resister objljYJérnfnt
Aux douceurs d'une ame
amoureuse,
Et nevouloir passeulement
Consentir qu'on vous rende
heureuse;
Aimer mieux éternellement
Estreseule triste & réveuse,
Que suivre Id, pente joyeu- DDefonproperetempee~rarammeenntt,
Cette njie à mon jugement
E(ltôtoutardbiencnnuyevfe
Et trop penibleajjnrément
Pourunejeune paresseuse.
J'avouë que dans les
statuts de la pure nonchalance
il est expressement
défenduàtoutes celles
qui comme vous veulent
vivre ôc mourir sous
les douces loix d'une rigoureuseparesse,
de quelque
taille,beauté & condition
qu'elles puissent être,
d'avoir jamais dans tout le
cours de leur vie aucun
foin de leur ménage
, artache
pour leurs maris ou
inquiétude pour leurs ensans,
semblablement de
faire en quelque temps
que ce soit des visites de
devoir, de cérémonie ou
de parenté, brefde se mêler
d'autre chose dans le
mode que de ce qui se fera
entre les murailles de leur
chambre;cela n'empêche
pas toutefois qu'une veritable
faineante
,
sans enfreindre
son observance,
ne puisse se servir du privilege
accordé de tout
temps à lamolesse de ion
sexe..
S/. quelqu'un à son gré
vient luyfaire la cour Riennel'oblige alors d'être
fort rigoureuse.
Quand on ne fait rienque
l'amour
On n'jenet'siufofi moins pares-
Voila, Mesdames, les
scrupules qui auroient pû
assurément vous faire de
la peine, étant aussiparesseuses,
aussi jeunes & aussi
saines que vous l'êtes, si
la charité que l'on doit
avoir pour ceux de sa fcde
ne m'avoit fait sortir
de la profonde oysiveté
où je fuis pour accommoder
, suivant laveritable
explication des maximes
,- les plaisirs de vôtre âge
& les devoirs de vôtre
profession.Adieu,je m'endors,
ainsi soit de vous.