Oeuvre commentée (1)
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p. 577-591
Arlequin Phaeton, &c. [titre d'après la table]
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ARLEQUIN PHAETON, Parodie, &c. par les mêmes Auteurs, et chez [...]
Mots clefs :
Parodie, Arlequin, Théâtre, Comédie, Soleil, Trône, Décoration, Scène
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texteReconnaissance textuelle : Arlequin Phaeton, &c. [titre d'après la table]
ARLEQUIN PHAETON , Parodie ,
&c. par les mêmes Auteurs , et chez le
même Libraire , 1731 .
Cette Piece fut donnée sur le Théatre
de l'Hôtel de Bourgogne le 22. Février
et très -favorablement reçûë du Public.
Le Théatre représente la Mer dans le
fond , Libie ouvre la Scene par ces Vers
parodiez , sur l'Air : Ici sont venus ex
personne.
Heureuse une ame indifferente !
Le bonheur dont j'étois contente ,
Le
378 MERCURE DE FRANCE
Ne me sera-t'il point rendu ?
Dans ces beaux lieux tout est paisible .
Helas ! que ne m'est -il possible ,
D'y trouver ce que j'ai perdu !
C'est un petit coeur ingenu ,
C'est un coeur sincere et fidele ,
Dont je n'avois plus de nouvelle.
Quand une fois l'Amour le prend ,
Jamais le traitre ne le rend.
- Théone s'étonne de voir Libie seule et
rêveuse ; celle-cy lui dit qu'elle vient rêver
aussi en ce lieu , et qu'il est à présumer
qu'elle aime ; oui , lui répond- elle ,
je n'en fais aucun mistere.
Il faut aimer pour éprouver ,
Le plaisir de rêver.
Avoüez , ajoûte- t'elle , que vous en te
nez aussi bien que moi ; sur le Chant de
Opera :
Le Fils de Jupiter vous aime.
Libie.
Je ne serois qu'à lui s'il n'étoit qu'à moi-même.
Vous êtes plus heureuse que moi , contiñue-
t'elle , le fils du Soleil vous plaît .
vous joüissez d'un plein repos. Toutes deux.
Ah !
MARS.
1731. 379
Ah! Madame Enroux ,
>
Que l'Amour est fou ,
Et qu'il fait de folles !
Ah ! Madame Enroux ,
Combien de paroles ,
Ici perdons nous ?
Phaeton arrive tout rêveur. Vous passez
sans me voir , lui dit Théone , craignez-
vous ma presence ? Non , répond- il,
je cherche la Reine , ma Mere. Le bon
enfant , dit Théone. Est - il deffendu de
chercher sa mere , ajoûte Phaeton ? Oui ;
c'est sa Maîtresse qu'il faut chercher.Voilà
une Maîtresse , reprend Phaeton , qui
m'embarrasse autant qu'une femme. Il
affecte beaucoup d'indifference , et voyant
venir sa mere , il dit sur l'Air de l'Opera.
La Reine tourne ici ses pas.
Théone.
C'est bien répondre ; allez , ne vous contraignez
pas.
A la quatriéme Scène , Climene arrive
qui demande à son fils le sujet de son
chagrin , il lui répond que le Roi va se
choisir un Gendre qui doit succeder au
Trône; qu'Epaphus en brigue l'honneur, et
quece sont là les motifs de sa tristesse. Il
no
580 MERCURE DE FRANCE.
ne faut pas être envieux , lui répond Cli.
mene , mais il y a une chose qui m'embarrasse
, ajoûte Phaeton . Le Soleil est
mon pere , n'est- ce pas ? Oüi vraiment ,
répart Climene. Phaeton chante sur l'Air
Vous avez bean faire la fiere.
Comment avez- vous pu faire
Pour engager votre foi
Et de vous ma chere mere
>
Que pensé notre bon Roi ?
Avez-vous passé pour neuve ,
Dans l'esprit de ce butord .
Climene.
Il m'a prise comme veuve.
Phaeton.
Mais le Soleil n'est
pas
mort.
Tout cela me chicanne ; taisez-vous
lui dit Climene , vous êtes un épilogueur.
Prothée va venir ici avec ses Moutons
er je veux le consulter sur ce qui vous
regarde ; retirez-vous. Prothée chante ;
Air de M. Mouret.
Heureux qui peut sur les bords de la Seine ,
Se promener sans rien risquer ;
Heureux ceux que l'espoir d'une amoureuse an
baine ,
Ne force point à s'embarquer.
Dangere
ZWA
NOVUM
BRENNITATS
DUX
ANDEGAVENS NATUS
XXXAUGUSTI
M DCC XXX
PIGNUS
B
MARS.
581
1731.
Dangereux en est le voyage :
Jeunes Amans , craignez l'orage ,
Qui vous fait quelquefois ,
Faire nauffrage ,
A Javelle , au Port à Langlois,
Prothée s'endort. Climene dit à sea
frere Triton , qu'il faut l'obliger à s'expliquer
sur le sort de Phaeton . Triton
sur l'Air, A nos voix unissez vos Hautbois.
Bondissez ,
Petits Agneaux , paisser
Sur ces Rivages ;
Vous, Oiseaux ,
Vous , Chalumeaux ,
Et vous , murmure des Eaux ,
Vous , Feuillages ,
Vous , Ombrages ,
Vous , badins Zéphirs ,
Qui rimez à plaisirs ,
Vous , charmans Bocages ,
Vous , tendres desirs ,
Amoureux Soupirs ,
Et Sornettes
Qu'on a faites ,
Depuis si long-temps ,
Qu'on remet tous les ans ,
Dans les Chansonnettes ,
Remplissez nos Chants.
H Prothée
$82 MERCURE DE FRANCE
Prothée s'éveille , en disant qu'il est -eharmé
de cette Musique , mais que son
Troupeau s'égare , et qu'il ne peut rester
davantage; Triton et ses Suivans l'arrêtent
; il se change successivement en Arbre
, en Asne et en Cochon , en vendeur
de Ptisanne , et en pluye de feu ; ensuite
il paroît sous sa forme ordinaire , et se
voyant obligé de parler , il chante ce qui
suit , sur l'Air de l'Opera.
Puisque vous le voulez , je romprai le silence ,
Le sort de Phaeton se découvre à mes yeux :
Dieux ! que d'argent ; quel monde, ô Dieux !
Il ne doit son succés heureux ,
Qu'à sa magnificence , &c .
Phaeton demande à Climene , dans la
septiéme Scene , ce qu'a dit Prothée ; que
vous mourrez bientôt , lui répond Climene.
Adieu , mon fils , j'espere que
l'amour de Théone l'emportera sur l'ambition
. Phaeton chante sur l'Air , Je suis
Mousquetaire , moi.
He! quoi ! ma mere au besoin m'abandonne.
Climene.
Théone à votre foi.
Phaeton.
Je n'en veux plus ; la gloire me talonne ;
J'aime mieux être Roi.
Climene.
MARS. 1731. 583
Climene.
Mais vous mourrez, si vous montez au Trône.
Phaeton en pleurant.
Je veux la Couronne ,
Moi ,
Je veux la Couronne.
Dans la Scene suivante , Epaphus dít
à Libie , que le Roi vient de lui donner
son congé , et qu'un autre la possedera.
Ils chantent le Duo suivant sur
l'Air , Vendôme.
Que mon sort seroit doux ,
Si je passois avec vous ,
La vie , la vie.
Merops , suivi des Rois Tributaires ,
déclare qu'il a fait choix de Phaeton pour
lui succeder , et qu'il lui accorde Libie.
Il chante sur l'Air , du Mirliton.
De ma fille qu'il demande ;
Volontiers je lui fais don ;
De tous côtez qu'on entende ,
Retentir cent fois le nom ,
Du grand Phaeton ,
Mirliton , mirlitaine ,
Du grand Phaeton , ton , ton.
Après les Chants et les Danses , Théo-
Hij
84 MERCURE DE FRANCE.
ne arrive , et fait des reproches à Phaeton
sur son infidelité. Elle chante sur l'Air ,
La charmante Catin me desespere.
Vous aimez la Princesse à la folie ,
Et votre coeur perfide enfin m'oublie
Oui , l'Amour vous transporte ,
Et vous livre à ses appas.
Phaeton.
Non , le diable m'emporte ,
L'Amour ne s'en mêle pas , la , la :
Je n'épouse que ses ducats.
Theone se retire en pleurant. Phaeton
va rendre hommage à la Déesse Isis , et
se persuade qu'elle le recevra à merveille ,
puisqu'elle est la mere de son Rival ;
mais lorsqu'il veut entrer , une Furie
sort du Temple pour l'épouvanter , &c .
Epaphus en sort , et lui demande ce qu'il
prétend ? Epaphus sur l'Air , Ami , ne
parlons plus de guerre. ·
Votre attente sera trompée ,
Phaeton ;
Ca, commençons
Par ôter chacun notre épée ,
En bons poltrons.
Ils ôtent leurs épées ; Phaeton continuë :
Voilà nos mesures bien prises ,
Et
MARS . 1731.
Et nous pouvons ,
Nous dire toutes les sottises ,
Que nous voudrons.
Sçavez- vous bien que Jupiter est mon
Pere , lui dit Epaphus ; et qu'est- ce que
cela me fait ; le Soleil est le mien , répond
Phaeton . Epaphus : Air , Oniche , ouiche ,
et ouida.
Le grand Jupiter est mon Pere ,
Tout le monde sçait cela ,
Pour vous on ne vous connoît guere.
Phaeton.
Le Soleil est mon Papa.
Ah , ah ,
Epaphus.
ah.
Votre Mere vous dit cela ,
Mais elle triche .
Quiche , ouiche ,
Et ouida.
Ils reprennent leurs épées à la fin de la
Scene , et se font de grandes réverences .
Phaeton en pleurant dit à Climene , qui
entre :
Ah ! ma mere ,
A ce que dit Epaphus ,
bis,
Le Soleil n'est pas mon pere.
Ah ! ma mere. bis.
Hiij Quelle
586 MERCURE DE FRANCE
Quelle insolence , s'écrie Climene. Phaeton
chante sur l'Air : A la Foire , à la
Courtille.
Qu'ici votre coeur s'explique :
Confondrons-nous les jaloux ?
La chose est problématique ,
Car on trompe tant d'Epoux !
Dites ma mere ,
N'auriez-vous point , entre nous ,
Trompé mon pere.
Climene lui assure que le Soleil est son
pere. Vous n'en douterez plus , petit incrédule
, ajoûte-t'elle , voilà une voiture qu'il
vous envoye pour vous conduire à son
Palais. Un vent emporte Phaeton sur
ses épaules. Phaeton : Air , des Fraises.
Mon triomphe éclatera ,
De l'un à l'autre Pole.
Climene.
Partez , mon fils.
Phaeton.
M'y voilà.
Je vole , je vole.
Le Théatre change à la quatorzieme
Scene , et représente le Palais du Soleil ;
cette décoration est une des plus brillantes
MARS.
1731. $87
tes qu'on ait encore vûë sur le Théatre
de l'Hôtel de Bourgogne . Le Soleil représenté
par Trivelin , paroît assis sur
un Trône éclatant ; les heures du jour
forment un Divertissement très -gracieux,,
dont M. Mouret a composé la Musique ; .
Phaeton arrive dans le Palais..
Le Soleil l'embrasse , en lui disant qu'il
le reconnoît pour son fils. Phaston : Air
Marote fait bien la fiere.
Puisqu'il m'est permis , mon pere ,
De vous appeller ainsi ,
Faites donc taire ,
Le témeraire ,
Qui dit que ma mere
En a menti.
Le Soleil.
Quelle langue de vipere !
Que le monde est perverti !
biss
Tu n'as , mon fils , qu'à me demander tout
ce que tu voudras , je te l'accorderai , continue
le Soleil.
J'en jure par le Stix , effroïable serment ,
Que ne pourroit pas même enfraindre un Bas
Normand.
Phaeton : Air , Diogene en son tonneaus .
Dans votre beau chariot :
Hiiij Le
588 MERCURE DE FRANCE
Le Soleil.
4
Oh ! oh !
Phaeton.
De l'Orient jusqu'à l'Ourse ,
Je voudrois bien au grand trot :
Le Soleil.
Oh ! oh !
Phaeton.
Faire une petite course.
Le Soleil.
Diablezot ;
L'entreprise est trop témeraire.
Phacton.
Hé bien ! je n'irai , mon cher
Que de Paris à Chaillot :
Le Soleil.
Oh ! oh ! oh !
perc
Vous tomberez comme un sot.
Phacton lui dit qu'il ne peut plus s'en
dédire , pui qu'il a juré par le Seix enfin
le Soleil consent qu'il conduise son char;
Phaeton sort en s'applaudissant de son
bonheur.
Le Théatre change ; le Soleil paroît à
la
MARS. 1731. 589
la 15. Scene. Climene , Merops et leur,
suite chantent sur l'Air de l'Opera :
Que tout chante , que tout réponde &c.
Climene continuë sur l'Air : Oh reguingué
!
Mon fils éclaire ses jaloux ;
C'est lui qui brille aux yeux de tous.
Merops.
Par quel Courier le sçavez -vous ?
Pour moi je ne sçaurois le croire.
Climene.
On l'a vu de l'Observatoire.
Theone arrive en pleurs , et annonce à
Climene et à Merops que son pere Prothée
lui a dit que Phacton alloit périr ; aussitôt
des flammes se répandent dans les airs .
Phaeton paroît dans le Char du Soleil ;
Jupiter descend , et le foudroye en chantant
::
Malheureux , quel dégat tu fais !
On ne pourra plus boire au frais ;
Culbute , culbute à jamais..
Phaeton trébuche avec son Char ; co
qui finit la Parodie.
Le Palais du Soleil dans la décoration
Hv dont
590 MERCURE DE FRANCE
dont nous avons parlé , est en general d'un
ordre composite , et construit sur un
nombre de magnifiques colonnes isolées et
de pilastres , faisant corps avec les mêmes
colonnes , élevées sur des piédestaux ,
qui supportent entre elles les saillies d'une
riche corniche architravée , sur laquelle
s'éleve le plafond ceintré , désignant sur
les cotés un nombre d'arcades ornées de
bas- reliefs allegoriques et historiques. Au
bas des arcades , immédiatement sur la
corniche on voit de grandes consoles
qui soutiennent des festons de laurier et
d'olivier. Au milieu du plafond est un
percé en rond , qui découvre un Altique ,
où les Signes du Zodiaque sont représentés.
>
Dans le fond est un Salon de forme circulaire
, terminé en coupole , sous laquelle
est placé le Trône du Soleil , élevé de
plusieurs dégrés . Sur le devant il y a une
balustrade ornée de riches tapis avec
deux Grouppes de Génies tenant les Attributs
du Soleil .
ر
La partie du devant du Palais représente
une Gallerie en colonnes et pilastres
qui soutiennent les arcades. Dans les
trumeaux , sur des Piédestaux , sont placées
les Statuës du Soltice d'Eté et l'Equinoxe
du Printems sur des nuées ; le Soltice
d'Hyver et l'Equinoxe de l'Automne
sont sur le devant. Tous
MARS. 1731. 591
1
Tous les ornemens de l'Edifice , comme
Colonnes , Chapiteaux , Base , Piédestaux
, Corniche , Plafond et les Figures
sont en or , et toutes les parties ausquelles
sont adossées les Pilastres qui tiennent
aux corps solides et arrieres - corps , sont
en argent. On avoit placé des panneaux
de lapis aux frises de la Corniche , au
Plafond et aux Piédestaux qui portoient
les Figures et bas - reliefs simboliques , Trophées
et autres Attributs du Soleil . Les
Colonnes jusqu'au tiers de leur hauteur'
étoient enrichies par quantité de pierreries
de diverses couleurs , éclatantes , ainsi
que toutes les autres parties de l'Architecture
.
Cette ingénieuse et brillante décoration
est de M. Le Maire , qui en a donné
plusieurs que le Public a applaudies .
&c. par les mêmes Auteurs , et chez le
même Libraire , 1731 .
Cette Piece fut donnée sur le Théatre
de l'Hôtel de Bourgogne le 22. Février
et très -favorablement reçûë du Public.
Le Théatre représente la Mer dans le
fond , Libie ouvre la Scene par ces Vers
parodiez , sur l'Air : Ici sont venus ex
personne.
Heureuse une ame indifferente !
Le bonheur dont j'étois contente ,
Le
378 MERCURE DE FRANCE
Ne me sera-t'il point rendu ?
Dans ces beaux lieux tout est paisible .
Helas ! que ne m'est -il possible ,
D'y trouver ce que j'ai perdu !
C'est un petit coeur ingenu ,
C'est un coeur sincere et fidele ,
Dont je n'avois plus de nouvelle.
Quand une fois l'Amour le prend ,
Jamais le traitre ne le rend.
- Théone s'étonne de voir Libie seule et
rêveuse ; celle-cy lui dit qu'elle vient rêver
aussi en ce lieu , et qu'il est à présumer
qu'elle aime ; oui , lui répond- elle ,
je n'en fais aucun mistere.
Il faut aimer pour éprouver ,
Le plaisir de rêver.
Avoüez , ajoûte- t'elle , que vous en te
nez aussi bien que moi ; sur le Chant de
Opera :
Le Fils de Jupiter vous aime.
Libie.
Je ne serois qu'à lui s'il n'étoit qu'à moi-même.
Vous êtes plus heureuse que moi , contiñue-
t'elle , le fils du Soleil vous plaît .
vous joüissez d'un plein repos. Toutes deux.
Ah !
MARS.
1731. 379
Ah! Madame Enroux ,
>
Que l'Amour est fou ,
Et qu'il fait de folles !
Ah ! Madame Enroux ,
Combien de paroles ,
Ici perdons nous ?
Phaeton arrive tout rêveur. Vous passez
sans me voir , lui dit Théone , craignez-
vous ma presence ? Non , répond- il,
je cherche la Reine , ma Mere. Le bon
enfant , dit Théone. Est - il deffendu de
chercher sa mere , ajoûte Phaeton ? Oui ;
c'est sa Maîtresse qu'il faut chercher.Voilà
une Maîtresse , reprend Phaeton , qui
m'embarrasse autant qu'une femme. Il
affecte beaucoup d'indifference , et voyant
venir sa mere , il dit sur l'Air de l'Opera.
La Reine tourne ici ses pas.
Théone.
C'est bien répondre ; allez , ne vous contraignez
pas.
A la quatriéme Scène , Climene arrive
qui demande à son fils le sujet de son
chagrin , il lui répond que le Roi va se
choisir un Gendre qui doit succeder au
Trône; qu'Epaphus en brigue l'honneur, et
quece sont là les motifs de sa tristesse. Il
no
580 MERCURE DE FRANCE.
ne faut pas être envieux , lui répond Cli.
mene , mais il y a une chose qui m'embarrasse
, ajoûte Phaeton . Le Soleil est
mon pere , n'est- ce pas ? Oüi vraiment ,
répart Climene. Phaeton chante sur l'Air
Vous avez bean faire la fiere.
Comment avez- vous pu faire
Pour engager votre foi
Et de vous ma chere mere
>
Que pensé notre bon Roi ?
Avez-vous passé pour neuve ,
Dans l'esprit de ce butord .
Climene.
Il m'a prise comme veuve.
Phaeton.
Mais le Soleil n'est
pas
mort.
Tout cela me chicanne ; taisez-vous
lui dit Climene , vous êtes un épilogueur.
Prothée va venir ici avec ses Moutons
er je veux le consulter sur ce qui vous
regarde ; retirez-vous. Prothée chante ;
Air de M. Mouret.
Heureux qui peut sur les bords de la Seine ,
Se promener sans rien risquer ;
Heureux ceux que l'espoir d'une amoureuse an
baine ,
Ne force point à s'embarquer.
Dangere
ZWA
NOVUM
BRENNITATS
DUX
ANDEGAVENS NATUS
XXXAUGUSTI
M DCC XXX
PIGNUS
B
MARS.
581
1731.
Dangereux en est le voyage :
Jeunes Amans , craignez l'orage ,
Qui vous fait quelquefois ,
Faire nauffrage ,
A Javelle , au Port à Langlois,
Prothée s'endort. Climene dit à sea
frere Triton , qu'il faut l'obliger à s'expliquer
sur le sort de Phaeton . Triton
sur l'Air, A nos voix unissez vos Hautbois.
Bondissez ,
Petits Agneaux , paisser
Sur ces Rivages ;
Vous, Oiseaux ,
Vous , Chalumeaux ,
Et vous , murmure des Eaux ,
Vous , Feuillages ,
Vous , Ombrages ,
Vous , badins Zéphirs ,
Qui rimez à plaisirs ,
Vous , charmans Bocages ,
Vous , tendres desirs ,
Amoureux Soupirs ,
Et Sornettes
Qu'on a faites ,
Depuis si long-temps ,
Qu'on remet tous les ans ,
Dans les Chansonnettes ,
Remplissez nos Chants.
H Prothée
$82 MERCURE DE FRANCE
Prothée s'éveille , en disant qu'il est -eharmé
de cette Musique , mais que son
Troupeau s'égare , et qu'il ne peut rester
davantage; Triton et ses Suivans l'arrêtent
; il se change successivement en Arbre
, en Asne et en Cochon , en vendeur
de Ptisanne , et en pluye de feu ; ensuite
il paroît sous sa forme ordinaire , et se
voyant obligé de parler , il chante ce qui
suit , sur l'Air de l'Opera.
Puisque vous le voulez , je romprai le silence ,
Le sort de Phaeton se découvre à mes yeux :
Dieux ! que d'argent ; quel monde, ô Dieux !
Il ne doit son succés heureux ,
Qu'à sa magnificence , &c .
Phaeton demande à Climene , dans la
septiéme Scene , ce qu'a dit Prothée ; que
vous mourrez bientôt , lui répond Climene.
Adieu , mon fils , j'espere que
l'amour de Théone l'emportera sur l'ambition
. Phaeton chante sur l'Air , Je suis
Mousquetaire , moi.
He! quoi ! ma mere au besoin m'abandonne.
Climene.
Théone à votre foi.
Phaeton.
Je n'en veux plus ; la gloire me talonne ;
J'aime mieux être Roi.
Climene.
MARS. 1731. 583
Climene.
Mais vous mourrez, si vous montez au Trône.
Phaeton en pleurant.
Je veux la Couronne ,
Moi ,
Je veux la Couronne.
Dans la Scene suivante , Epaphus dít
à Libie , que le Roi vient de lui donner
son congé , et qu'un autre la possedera.
Ils chantent le Duo suivant sur
l'Air , Vendôme.
Que mon sort seroit doux ,
Si je passois avec vous ,
La vie , la vie.
Merops , suivi des Rois Tributaires ,
déclare qu'il a fait choix de Phaeton pour
lui succeder , et qu'il lui accorde Libie.
Il chante sur l'Air , du Mirliton.
De ma fille qu'il demande ;
Volontiers je lui fais don ;
De tous côtez qu'on entende ,
Retentir cent fois le nom ,
Du grand Phaeton ,
Mirliton , mirlitaine ,
Du grand Phaeton , ton , ton.
Après les Chants et les Danses , Théo-
Hij
84 MERCURE DE FRANCE.
ne arrive , et fait des reproches à Phaeton
sur son infidelité. Elle chante sur l'Air ,
La charmante Catin me desespere.
Vous aimez la Princesse à la folie ,
Et votre coeur perfide enfin m'oublie
Oui , l'Amour vous transporte ,
Et vous livre à ses appas.
Phaeton.
Non , le diable m'emporte ,
L'Amour ne s'en mêle pas , la , la :
Je n'épouse que ses ducats.
Theone se retire en pleurant. Phaeton
va rendre hommage à la Déesse Isis , et
se persuade qu'elle le recevra à merveille ,
puisqu'elle est la mere de son Rival ;
mais lorsqu'il veut entrer , une Furie
sort du Temple pour l'épouvanter , &c .
Epaphus en sort , et lui demande ce qu'il
prétend ? Epaphus sur l'Air , Ami , ne
parlons plus de guerre. ·
Votre attente sera trompée ,
Phaeton ;
Ca, commençons
Par ôter chacun notre épée ,
En bons poltrons.
Ils ôtent leurs épées ; Phaeton continuë :
Voilà nos mesures bien prises ,
Et
MARS . 1731.
Et nous pouvons ,
Nous dire toutes les sottises ,
Que nous voudrons.
Sçavez- vous bien que Jupiter est mon
Pere , lui dit Epaphus ; et qu'est- ce que
cela me fait ; le Soleil est le mien , répond
Phaeton . Epaphus : Air , Oniche , ouiche ,
et ouida.
Le grand Jupiter est mon Pere ,
Tout le monde sçait cela ,
Pour vous on ne vous connoît guere.
Phaeton.
Le Soleil est mon Papa.
Ah , ah ,
Epaphus.
ah.
Votre Mere vous dit cela ,
Mais elle triche .
Quiche , ouiche ,
Et ouida.
Ils reprennent leurs épées à la fin de la
Scene , et se font de grandes réverences .
Phaeton en pleurant dit à Climene , qui
entre :
Ah ! ma mere ,
A ce que dit Epaphus ,
bis,
Le Soleil n'est pas mon pere.
Ah ! ma mere. bis.
Hiij Quelle
586 MERCURE DE FRANCE
Quelle insolence , s'écrie Climene. Phaeton
chante sur l'Air : A la Foire , à la
Courtille.
Qu'ici votre coeur s'explique :
Confondrons-nous les jaloux ?
La chose est problématique ,
Car on trompe tant d'Epoux !
Dites ma mere ,
N'auriez-vous point , entre nous ,
Trompé mon pere.
Climene lui assure que le Soleil est son
pere. Vous n'en douterez plus , petit incrédule
, ajoûte-t'elle , voilà une voiture qu'il
vous envoye pour vous conduire à son
Palais. Un vent emporte Phaeton sur
ses épaules. Phaeton : Air , des Fraises.
Mon triomphe éclatera ,
De l'un à l'autre Pole.
Climene.
Partez , mon fils.
Phaeton.
M'y voilà.
Je vole , je vole.
Le Théatre change à la quatorzieme
Scene , et représente le Palais du Soleil ;
cette décoration est une des plus brillantes
MARS.
1731. $87
tes qu'on ait encore vûë sur le Théatre
de l'Hôtel de Bourgogne . Le Soleil représenté
par Trivelin , paroît assis sur
un Trône éclatant ; les heures du jour
forment un Divertissement très -gracieux,,
dont M. Mouret a composé la Musique ; .
Phaeton arrive dans le Palais..
Le Soleil l'embrasse , en lui disant qu'il
le reconnoît pour son fils. Phaston : Air
Marote fait bien la fiere.
Puisqu'il m'est permis , mon pere ,
De vous appeller ainsi ,
Faites donc taire ,
Le témeraire ,
Qui dit que ma mere
En a menti.
Le Soleil.
Quelle langue de vipere !
Que le monde est perverti !
biss
Tu n'as , mon fils , qu'à me demander tout
ce que tu voudras , je te l'accorderai , continue
le Soleil.
J'en jure par le Stix , effroïable serment ,
Que ne pourroit pas même enfraindre un Bas
Normand.
Phaeton : Air , Diogene en son tonneaus .
Dans votre beau chariot :
Hiiij Le
588 MERCURE DE FRANCE
Le Soleil.
4
Oh ! oh !
Phaeton.
De l'Orient jusqu'à l'Ourse ,
Je voudrois bien au grand trot :
Le Soleil.
Oh ! oh !
Phaeton.
Faire une petite course.
Le Soleil.
Diablezot ;
L'entreprise est trop témeraire.
Phacton.
Hé bien ! je n'irai , mon cher
Que de Paris à Chaillot :
Le Soleil.
Oh ! oh ! oh !
perc
Vous tomberez comme un sot.
Phacton lui dit qu'il ne peut plus s'en
dédire , pui qu'il a juré par le Seix enfin
le Soleil consent qu'il conduise son char;
Phaeton sort en s'applaudissant de son
bonheur.
Le Théatre change ; le Soleil paroît à
la
MARS. 1731. 589
la 15. Scene. Climene , Merops et leur,
suite chantent sur l'Air de l'Opera :
Que tout chante , que tout réponde &c.
Climene continuë sur l'Air : Oh reguingué
!
Mon fils éclaire ses jaloux ;
C'est lui qui brille aux yeux de tous.
Merops.
Par quel Courier le sçavez -vous ?
Pour moi je ne sçaurois le croire.
Climene.
On l'a vu de l'Observatoire.
Theone arrive en pleurs , et annonce à
Climene et à Merops que son pere Prothée
lui a dit que Phacton alloit périr ; aussitôt
des flammes se répandent dans les airs .
Phaeton paroît dans le Char du Soleil ;
Jupiter descend , et le foudroye en chantant
::
Malheureux , quel dégat tu fais !
On ne pourra plus boire au frais ;
Culbute , culbute à jamais..
Phaeton trébuche avec son Char ; co
qui finit la Parodie.
Le Palais du Soleil dans la décoration
Hv dont
590 MERCURE DE FRANCE
dont nous avons parlé , est en general d'un
ordre composite , et construit sur un
nombre de magnifiques colonnes isolées et
de pilastres , faisant corps avec les mêmes
colonnes , élevées sur des piédestaux ,
qui supportent entre elles les saillies d'une
riche corniche architravée , sur laquelle
s'éleve le plafond ceintré , désignant sur
les cotés un nombre d'arcades ornées de
bas- reliefs allegoriques et historiques. Au
bas des arcades , immédiatement sur la
corniche on voit de grandes consoles
qui soutiennent des festons de laurier et
d'olivier. Au milieu du plafond est un
percé en rond , qui découvre un Altique ,
où les Signes du Zodiaque sont représentés.
>
Dans le fond est un Salon de forme circulaire
, terminé en coupole , sous laquelle
est placé le Trône du Soleil , élevé de
plusieurs dégrés . Sur le devant il y a une
balustrade ornée de riches tapis avec
deux Grouppes de Génies tenant les Attributs
du Soleil .
ر
La partie du devant du Palais représente
une Gallerie en colonnes et pilastres
qui soutiennent les arcades. Dans les
trumeaux , sur des Piédestaux , sont placées
les Statuës du Soltice d'Eté et l'Equinoxe
du Printems sur des nuées ; le Soltice
d'Hyver et l'Equinoxe de l'Automne
sont sur le devant. Tous
MARS. 1731. 591
1
Tous les ornemens de l'Edifice , comme
Colonnes , Chapiteaux , Base , Piédestaux
, Corniche , Plafond et les Figures
sont en or , et toutes les parties ausquelles
sont adossées les Pilastres qui tiennent
aux corps solides et arrieres - corps , sont
en argent. On avoit placé des panneaux
de lapis aux frises de la Corniche , au
Plafond et aux Piédestaux qui portoient
les Figures et bas - reliefs simboliques , Trophées
et autres Attributs du Soleil . Les
Colonnes jusqu'au tiers de leur hauteur'
étoient enrichies par quantité de pierreries
de diverses couleurs , éclatantes , ainsi
que toutes les autres parties de l'Architecture
.
Cette ingénieuse et brillante décoration
est de M. Le Maire , qui en a donné
plusieurs que le Public a applaudies .
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Résumé : Arlequin Phaeton, &c. [titre d'après la table]
La pièce 'Arlequin Phaéton' est une parodie jouée au Théâtre de l'Hôtel de Bourgogne le 22 février 1731, qui a été bien accueillie par le public. L'intrigue se concentre sur Phaéton, fils du Soleil, et ses interactions avec plusieurs personnages, notamment Libie, Théone, Climène et Épaphus. L'histoire commence avec Libie, qui exprime son chagrin et son amour perdu. Théone la rejoint et elles discutent de leurs amours respectives. Phaéton arrive et cherche sa mère, Climène, qui lui révèle que le roi Merops l'a choisi comme successeur et lui accorde Libie. Théone, jalouse, reproche à Phaéton son infidélité. Phaéton, ambitieux, souhaite la couronne et ignore les avertissements de Climène sur les dangers de monter sur le trône. Il se rend au temple d'Isis mais est effrayé par une Furie. Épaphus, rival de Phaéton, le défie, mais leur duel tourne en ridicule. Climène confirme à Phaéton que le Soleil est bien son père et lui envoie une voiture pour le conduire au palais du Soleil. Après avoir été reconnu par le Soleil, Phaéton demande à conduire son char. Malgré les avertissements du Soleil, Phaéton insiste et sort triomphant. La pièce se conclut par la chute de Phaéton, foudroyé par Jupiter après avoir causé des dégâts avec le char du Soleil. La décoration du palais du Soleil est décrite comme somptueuse, avec des éléments architecturaux et décoratifs riches et symboliques.
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