Résultats : 10 texte(s)
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1
p. 193
OPERA.
Début :
L'Académie royale de musique a donné le 3 Décembre la premiere représentation [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique, Opéra
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA .
'Académie royale de mufique a donné
le 3 Décembre la premiere repréfentation
de Thefee , qu'elle avoit executé à
Fontainebleau le 18 & le 21 Octobre. Comme
il a paru ici avec moins de magnificence
qu'à la Cour , on lui a fait un accueil trèsinférieur
à fon mérite ; cependant il attire
de nombreuſes affemblées , les Vendredis
fur- tout font très- beaux . Les Dimanches
font moins brillans : on ne le joue que ces
deux jours de la femaine. On a repris
les Elémens le Mardi & le Jeudi , pour
ne pas fatiguer le grand Opéra. Les de ce
mois on doit donner à fa place Daphnis &
Alcimadure , Paftorale Languedocienne
en trois actes , précédée d'un Prologue . Je
n'entrerai dans aucun détail de ces Opera ,
le dernier volume de Décembre a tout dit
fur ce fujer dans l'article des Spectacles de
Fontainebleau .
'Académie royale de mufique a donné
le 3 Décembre la premiere repréfentation
de Thefee , qu'elle avoit executé à
Fontainebleau le 18 & le 21 Octobre. Comme
il a paru ici avec moins de magnificence
qu'à la Cour , on lui a fait un accueil trèsinférieur
à fon mérite ; cependant il attire
de nombreuſes affemblées , les Vendredis
fur- tout font très- beaux . Les Dimanches
font moins brillans : on ne le joue que ces
deux jours de la femaine. On a repris
les Elémens le Mardi & le Jeudi , pour
ne pas fatiguer le grand Opéra. Les de ce
mois on doit donner à fa place Daphnis &
Alcimadure , Paftorale Languedocienne
en trois actes , précédée d'un Prologue . Je
n'entrerai dans aucun détail de ces Opera ,
le dernier volume de Décembre a tout dit
fur ce fujer dans l'article des Spectacles de
Fontainebleau .
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Résumé : OPERA.
L'Académie royale de musique a présenté 'Théée' à Paris le 3 décembre. Cet opéra, déjà joué à Fontainebleau, attire un public nombreux les vendredis et dimanches. Pour éviter la fatigue du public, 'Les Éléments' sont repris les mardis et jeudis. En décembre, 'Daphnis et Alcimadure' remplacera 'Théée'. Les détails sont dans l'article des Spectacles de Fontainebleau de décembre.
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2
p. 175
OPERA.
Début :
L'Académie royale de Musique a donné le 19 Janvier la premiere représentation [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
,
L'Académie royale de Mufique a donné
le 19 Janvier la premiere repréfentation
de Daphnis & Alcimadure
Paftorale languedocienne , en trois actes ,
précédée d'un prologue , intitulé les Jeux
Floraux. Les paroles & la Mufique font de
M. de Mondonville , qui réunit les deux
talens. Cer Opéra n'a pas moins de fuccèsà
la ville qu'il en a eu à la Cour : je parle
d'après la voix publique. On le joue trois
fois la femaine ; le Vendredi , le Dimanche
& le Mardi . On continue les Elémens le
Jeudi. Comme le fecond Mercure de Décembre
a fait un extrait détaillé d'Alcimadure
, j'y renvoie ceux qui feront curieux
de le lire.
,
L'Académie royale de Mufique a donné
le 19 Janvier la premiere repréfentation
de Daphnis & Alcimadure
Paftorale languedocienne , en trois actes ,
précédée d'un prologue , intitulé les Jeux
Floraux. Les paroles & la Mufique font de
M. de Mondonville , qui réunit les deux
talens. Cer Opéra n'a pas moins de fuccèsà
la ville qu'il en a eu à la Cour : je parle
d'après la voix publique. On le joue trois
fois la femaine ; le Vendredi , le Dimanche
& le Mardi . On continue les Elémens le
Jeudi. Comme le fecond Mercure de Décembre
a fait un extrait détaillé d'Alcimadure
, j'y renvoie ceux qui feront curieux
de le lire.
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Résumé : OPERA.
L'Académie royale de Musique a présenté le 19 janvier 'Daphnis et Alcimadure', une pastorale languedocienne en trois actes de M. de Mondonville. L'œuvre, précédée d'un prologue, a connu un succès égal à la ville et à la cour. Elle est jouée trois fois par semaine. Les représentations des 'Éléments' continuent le jeudi. Des détails supplémentaires sont disponibles dans le second Mercure de décembre.
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3
p. 159
OPERA.
Début :
L'Académie royale de musique continue Daphnis & Alcimadure les Vendredis [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
'Académie royale de mufique continue
& les Dimanches ; elle donne les Fragmens
les Mardis & les Jeudis , en attendant
la repriſe de Thefée , que l'indifpofition
de plufieurs acteurs a retardé .
'Académie royale de mufique continue
& les Dimanches ; elle donne les Fragmens
les Mardis & les Jeudis , en attendant
la repriſe de Thefée , que l'indifpofition
de plufieurs acteurs a retardé .
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4
p. 177
OPERA.
Début :
L'Académie royale de musique a fermé son théatre le 15 Mars par Castor & [...]
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
114
'Académie royale de mufique a fermé
L for theatre le 15 Mars par Caftor &
Pollux , Tragédie qu'elle a donnée trois
fois pour les acteurs. Elle avoit repréſenté
la veille Thefée qu'elle continuera après
Pâques.
114
'Académie royale de mufique a fermé
L for theatre le 15 Mars par Caftor &
Pollux , Tragédie qu'elle a donnée trois
fois pour les acteurs. Elle avoit repréſenté
la veille Thefée qu'elle continuera après
Pâques.
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5
p. 160-162
OPERA.
Début :
L'ACADÉMIE Royale de Musique a continué les représentations d'Iphigénie [...]
Mots clefs :
Académie royale de musique, Tragédie, Danseur
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
L'ACADÉMIE Royale de Mufique à
continué le repréfentations d'Iphigénie
les Dimanche , Mardi & Vendredi , &
les Fragmens les Jeudis. Le fieur VARIN
, bafle-taille , nouvellement arrivé
de Bordeaux, a débuté dans un des Actes
des Fragmens par le rôle de Neptune .
JANVIER. 1763 .
161
La voix de ce débutant paroît intéreffer
beaucoup les amateurs de ce Spectacle.
On la trouve belle, bien timbrée , d'une
qualité de fon agréable , jointe à la facilité
des agrémens du chant , & notamment
des plus belles cadences battues
de tout le volume de la voix .
On prépare fur ce Théâtre pour le
courant du préfent mois,un Opéra nouveau
, intitulé Polixène , Tragédie,Poëme
de M. JOLIVEAU , Secrétaire perpétuel
de l'Académie Royale de Mufique,
Mulique de M. DAUVERGNE.
Depuis l'abfence de M. VESTRIS ,
M. GARDEL a danſé , à chaque repréfentation
d'IPHIGENIE , la Chaconne
qui termine cet Opéra avec tant d'éclat.
Dès le premier jour il y eut les plus
grands applaudiffemens , & ils ont êté
chaque fois plus unanimes & plus mérités.
M. GARDEL ne copie point dans ce t
Entrée, & y met cependant tout le feu &
toute la jufteffe d'expreffion qu'on puiffe
defirer. On remarque particuliérement
dans le Couplet du Crefcendo une maniere
de pas précipités & enchaînés par
lefquels ce jeune Danfeur écrit exactement
aux yeux les notes de ce Coupler.
Il joint à cette fidelle & vive expreffion
162 MERCURE DE FRANCE .
dans tout le morceau , une légéreté facile
& un à-plomb furprenant , avec une
force qui laifferoit croire , à la fin de
cette Entrée , une des plus fortes & des
plus longues qu'on ait encore vu danfer
au Théâtre , qu'il fourniroit de fuite
une pareille carrière avec la même facilité.
L'ACADÉMIE Royale de Mufique à
continué le repréfentations d'Iphigénie
les Dimanche , Mardi & Vendredi , &
les Fragmens les Jeudis. Le fieur VARIN
, bafle-taille , nouvellement arrivé
de Bordeaux, a débuté dans un des Actes
des Fragmens par le rôle de Neptune .
JANVIER. 1763 .
161
La voix de ce débutant paroît intéreffer
beaucoup les amateurs de ce Spectacle.
On la trouve belle, bien timbrée , d'une
qualité de fon agréable , jointe à la facilité
des agrémens du chant , & notamment
des plus belles cadences battues
de tout le volume de la voix .
On prépare fur ce Théâtre pour le
courant du préfent mois,un Opéra nouveau
, intitulé Polixène , Tragédie,Poëme
de M. JOLIVEAU , Secrétaire perpétuel
de l'Académie Royale de Mufique,
Mulique de M. DAUVERGNE.
Depuis l'abfence de M. VESTRIS ,
M. GARDEL a danſé , à chaque repréfentation
d'IPHIGENIE , la Chaconne
qui termine cet Opéra avec tant d'éclat.
Dès le premier jour il y eut les plus
grands applaudiffemens , & ils ont êté
chaque fois plus unanimes & plus mérités.
M. GARDEL ne copie point dans ce t
Entrée, & y met cependant tout le feu &
toute la jufteffe d'expreffion qu'on puiffe
defirer. On remarque particuliérement
dans le Couplet du Crefcendo une maniere
de pas précipités & enchaînés par
lefquels ce jeune Danfeur écrit exactement
aux yeux les notes de ce Coupler.
Il joint à cette fidelle & vive expreffion
162 MERCURE DE FRANCE .
dans tout le morceau , une légéreté facile
& un à-plomb furprenant , avec une
force qui laifferoit croire , à la fin de
cette Entrée , une des plus fortes & des
plus longues qu'on ait encore vu danfer
au Théâtre , qu'il fourniroit de fuite
une pareille carrière avec la même facilité.
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Résumé : OPERA.
L'Académie Royale de Musique présente régulièrement 'Iphigénie' les dimanches, mardis et vendredis, ainsi que les 'Fragments' les jeudis. Le baryton Varin, nouvellement arrivé de Bordeaux, a interprété le rôle de Neptune dans les 'Fragments', impressionnant le public par sa voix belle, bien timbrée et agréable, ainsi que par sa maîtrise des agréments du chant. Pour janvier 1763, un nouvel opéra intitulé 'Polixène', une tragédie poétique de M. Joliveau et mise en musique par M. Dauvergne, est en préparation. En l'absence de M. Vestris, M. Gardel a dansé la chaconne finale d''Iphigénie', recevant des applaudissements unanimes. Gardel a su apporter feu et expression à sa performance, notamment dans le couplet du crescendo, où il a exécuté des pas précis et rapides, démontrant légèreté, aplomb et force.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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6
p. 141-147
OPERA.
Début :
L'ACADÉMIE Royale de Musique a donné le Mardi 11 du présent mois [...]
Mots clefs :
Ballets, Applaudissements, Temple, Machines cylindriques
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
L'ACADÉMIE Royale de Mufique
a donné le Mardi 11 du préfent mois
la premiere repréfentation de Polixène
Tragédie , Poëme de M. JOLIVEAU
Secrétaire perpétuel de l'Académie
Royale de Mufique. La Mulique de
M. DAUVERGNE , Maître de la Mufique
de la Chambre du Roi.
Cette première repréfentation a été
applaudie , & fur-tout aux deux derniers
Actes , avec beaucoup de vivacité.
Le temps ne nous permettant
pas de faire actuellement l'extrait du
Poëme
, nous nous réfervons à en
parler au Mercure de Février. Une
feule repréfentation n'a pu nousmettre
en état de donner des détails
bien circonftanciés fur les autres par142
MERCURE DE FRANCE.
ties , dont nous croyons que beaucoup
méritent l'attention du Public & fes
fuffrages. A l'égard de la Mufique , on
ne pourroit à -préfent qu'hafarder des
opinions indifcrettes , parce que devenue
plus favante de nos jours , & les
oreilles plus difficiles , cette partie exige
apparemment plus d'application , plus
de recherches qu'autrefois pour affeoir
le jugement du Public. Tout ce que
nous pouvons dire aujourd'hui , à cet
égard , eft qu'en général elle nous a
paru avoir affecté favorablement pour
l'Auteur , les Maîtres de l'Art que nous
avons confultés . Quelques airs de Ballet,
le chant & la ſymphonie de la Tempête
, plufieurs autres morceaux , mais
fur-tout la Mufique de la Jaloufie & de
fa fuite , qui remplit prefque tout le qua
triéme Acte , ont frappé déja le Public ,
& merité des applaudiffemens univerfels.
Une fort belle chaconne , travaillée
favamment , termine cet Opéra.
Nous n'avons que des éloges à rapporter
fur la compofition & l'exécution
des Ballets qui , chacun dans leur genre,
ont fait plaifir & ont été bien reçus. Celui
du plus grand effet eft le Ballet des
Suivans de la Jaloufie. Il eft d'un genre
nouveau de compofition. Les mouveJANVIER.
1763. 143
.
mens rapides , croifés fans confufion ,
& les figures irrégulières y produiſent in
génieufement l'image de ce qu'on veut
repréfenter. Les fieurs LAVAL , D'AUBERVAL
& les Demoifelles ALLARD ,
LYONOIS & PESLIN forment divers
pas . Les talens , la force & l'agilité
des Sujets que nous venons de nommer
, ne doivent pas laiffer douter de
l'impreffion qu'ils font fur les fpectateurs.
Mlle LANI danfe feule au troifiéme
Acte , à la tête des Prêtreffes du JUNON.
Les airs & les danfes de cette Entrée
font d'un genre très - agréable , & que le
Public a paru goûter. M. GARDEL
dont nous avons parlé au précédent
Vol. remplit une grande partie de la
chaconne dans le nouvel Opéra. Il n'y
mérite & n'y reçoit pas moins d'applaudiffemens
que dans la chaconne d'Iphigénie.
En rendant juſtice très-exactement
aux grands talens de ce jeune Danfeur ,
le Public femble mettre une forte de
complaifance à faire recueillir le fruit
d'une affiduité au fervice , que les Sujets
attachés à un Spectacle ne devroient
jamais facrifier à aucune confidération ,
& notamment dans les temps où les
Théâtres font le plus fréquentés. Mlle
144 MERCURE DE FRANCE.
VESTRIS danfe au premier Acte en
pas de deux avec M. GARDEL. M.
COMPIONI danfe dans ce même Acte.
Il y a long- temps qu'on n'avoit vu
un Opéra d'un fpectacle auffi éclatant.
Les habits & les Décorations font prèfqu'entiérement
à neuf. Il y a plufieurs
choſes affez réguliérement dans le coftume
des Anciens , fi ce n'eft quelques
erreurs facilement adoptées de nos jours
d'après la confufion que fait le vulgaire
des anciens Grecs & des Grecs moder
nes ; quoique les habillemens , coëffures
& autres ufages de ces derniers
n'ayent aucun rapport avec ceux des
autres ; ainfi voit-on fouvent fur nos
théâtres des repréfentations informes de
la cour d'un Sultan pour celles des anciens
Peuples de la Gréce . On a été furpris
auffi de voir à l'ouverture d'un Temple
intérieur le feu facré fur un autel ,
gardé par des Prêtreffes , attendu que
c'eft l'indication fpéciale des Temples
de VESTA ; au lieu qu'en cette occafion
il faudroit au premier coup d'oeil
reconnoître un Temple de JUNON. A
cela près & d'autres petites chofes ,
comme les habits de quelques pas feuls ,
qui n'ont aucun caractère , & c, cet Opéra
eft mis avec le plus grand foin.
Dans
JANVIER . 1762 . 145
›
Dans la repréſentation de cet Opéra
, on a fait un pas vers l'illufion fi néceffaire
au Théâtre ; il mérite d'être
remarqué. Au fort des plus violens orages
, la toile d'Horifon étant fixe , n'offroit
jamais qu'un ciel pur & ferein ,
tel qu'il convenoit aux autres circonf-,
tances de l'action des Poëmes. A la
tempête du fecond Acte de celui - ci
cette toile d'Horifon , tournant apparemment
fur des machines cylindriques
& d'une maniere imperceptible , fait
fuccéder au ciel ferein , des nuages qui
montent du bas de l'Horifon & occupent
tout ce qu'on voyoit de clair
fans qu'il y ait par ce moyen fubftitution
d'une toile à une autre . De même ,
au moment du calme , ces nuages paroiffent
fe perdre dans le haut du Théâtre
, & la partie claire du ciel paroît fe
découvrir du même point d'où l'on a
vû s'élever les nuages ; enforte que la
Nature eft parfaitement imitée dans un
de fes plus grands effets. M. GIRAULD
qui a inventé & fait éxécuter cette ingénieuſe
machine , doit laiffer efpérer
aux Amateurs, qu'il appliquera fes talens
& fon génie à perfectionner l'imitation
des flots & de l'ondulation des eaux :
cette partie étant encore une des cho-
II. Vol. G
146 MERCURE DE FRANCE.
८
2
fes imparfaite fur nos Théâtres &
dont la repréfentation feroit néanmoins
très-fatisfaifante. ( d ) C'eft auffi de la
compofition & fur les deffeins du
même M. GIRAULT , qu'eft éxécuté
dans cet Opéra , le Palais de Pirrhus ,
au quatriéme Acte. Cette Décoration
dans le meilleur genre de l'antique , eft
d'une très- belle architecture ; les détails
en font choifis & diftribués felon
les grands principes de cet art & d'un
très- bon goût : l'ordonnance en eft grande
& officieufe à la perspective. Des
Percés en colonades , dont les points
d'optique font ménagés avec art , étendent
le Théâtre à la vue , fort
loin de fes bornes . La diftribution de
la lumiere eft d'un très -bon effet &
fâvament pittorefque ; en un mot nous
croyons pouvoir dire que depuis la fameufe
Décoration du Palais de Ninus
par le Chevalier Servandoni , on a peu
(d ) M. GIRAULD eft le même nommé dans
l'Art . des Spectacles de la Cour avec M. ARNOULT
, auquel il a fuccédé à l'Académie Royale
de Mufique , où M. ARNOULT s'étoit fait , ainfi
qu'aux Théâti es du Roi , une très -grande & trèsjufte
réputation par plusieurs machines qui font
encore célébres . M. GIRAULD prouve au Public,
qu'il achevera ce qu'avoit heureufement com
mencé fon Prédéceffeur , pour la perfection de
cétre parrie.
JANVIER. 1763.
147
vû à l'Opéra de plus belle Décoration
d'architecture que celle- ci.
Le tombeau d'Achille au cinquiéme
Acte , eft encore une Décoration diftinguée
dont l'effet eft très -agréable
quoiqu'elle conferve le genre propre à
fa deftination. Les autres ont quelques
parties de neuf & toutes en ont l'éclat.
Chacune mériteroit même en particulier
des éloges fur la
convenance avec
les fites de l'action.
1
? Avant de finir cet Article
nous devons
faire obſerver que les Rôles font
très-bien éxécutés . Le Public entendit
avec fatisfaction , à la premiere repréfentation
, la voix de Mlle ARNOULD
entierement rétablie ; & malgré l'indifpofition
momentanée de celle de M.
GELIN , on fut fatisfait des efforts qu'il
fit pour rendre le Rôle de Pirrhus ,
le principal de cette Tragédie .
L'ACADÉMIE Royale de Mufique
a donné le Mardi 11 du préfent mois
la premiere repréfentation de Polixène
Tragédie , Poëme de M. JOLIVEAU
Secrétaire perpétuel de l'Académie
Royale de Mufique. La Mulique de
M. DAUVERGNE , Maître de la Mufique
de la Chambre du Roi.
Cette première repréfentation a été
applaudie , & fur-tout aux deux derniers
Actes , avec beaucoup de vivacité.
Le temps ne nous permettant
pas de faire actuellement l'extrait du
Poëme
, nous nous réfervons à en
parler au Mercure de Février. Une
feule repréfentation n'a pu nousmettre
en état de donner des détails
bien circonftanciés fur les autres par142
MERCURE DE FRANCE.
ties , dont nous croyons que beaucoup
méritent l'attention du Public & fes
fuffrages. A l'égard de la Mufique , on
ne pourroit à -préfent qu'hafarder des
opinions indifcrettes , parce que devenue
plus favante de nos jours , & les
oreilles plus difficiles , cette partie exige
apparemment plus d'application , plus
de recherches qu'autrefois pour affeoir
le jugement du Public. Tout ce que
nous pouvons dire aujourd'hui , à cet
égard , eft qu'en général elle nous a
paru avoir affecté favorablement pour
l'Auteur , les Maîtres de l'Art que nous
avons confultés . Quelques airs de Ballet,
le chant & la ſymphonie de la Tempête
, plufieurs autres morceaux , mais
fur-tout la Mufique de la Jaloufie & de
fa fuite , qui remplit prefque tout le qua
triéme Acte , ont frappé déja le Public ,
& merité des applaudiffemens univerfels.
Une fort belle chaconne , travaillée
favamment , termine cet Opéra.
Nous n'avons que des éloges à rapporter
fur la compofition & l'exécution
des Ballets qui , chacun dans leur genre,
ont fait plaifir & ont été bien reçus. Celui
du plus grand effet eft le Ballet des
Suivans de la Jaloufie. Il eft d'un genre
nouveau de compofition. Les mouveJANVIER.
1763. 143
.
mens rapides , croifés fans confufion ,
& les figures irrégulières y produiſent in
génieufement l'image de ce qu'on veut
repréfenter. Les fieurs LAVAL , D'AUBERVAL
& les Demoifelles ALLARD ,
LYONOIS & PESLIN forment divers
pas . Les talens , la force & l'agilité
des Sujets que nous venons de nommer
, ne doivent pas laiffer douter de
l'impreffion qu'ils font fur les fpectateurs.
Mlle LANI danfe feule au troifiéme
Acte , à la tête des Prêtreffes du JUNON.
Les airs & les danfes de cette Entrée
font d'un genre très - agréable , & que le
Public a paru goûter. M. GARDEL
dont nous avons parlé au précédent
Vol. remplit une grande partie de la
chaconne dans le nouvel Opéra. Il n'y
mérite & n'y reçoit pas moins d'applaudiffemens
que dans la chaconne d'Iphigénie.
En rendant juſtice très-exactement
aux grands talens de ce jeune Danfeur ,
le Public femble mettre une forte de
complaifance à faire recueillir le fruit
d'une affiduité au fervice , que les Sujets
attachés à un Spectacle ne devroient
jamais facrifier à aucune confidération ,
& notamment dans les temps où les
Théâtres font le plus fréquentés. Mlle
144 MERCURE DE FRANCE.
VESTRIS danfe au premier Acte en
pas de deux avec M. GARDEL. M.
COMPIONI danfe dans ce même Acte.
Il y a long- temps qu'on n'avoit vu
un Opéra d'un fpectacle auffi éclatant.
Les habits & les Décorations font prèfqu'entiérement
à neuf. Il y a plufieurs
choſes affez réguliérement dans le coftume
des Anciens , fi ce n'eft quelques
erreurs facilement adoptées de nos jours
d'après la confufion que fait le vulgaire
des anciens Grecs & des Grecs moder
nes ; quoique les habillemens , coëffures
& autres ufages de ces derniers
n'ayent aucun rapport avec ceux des
autres ; ainfi voit-on fouvent fur nos
théâtres des repréfentations informes de
la cour d'un Sultan pour celles des anciens
Peuples de la Gréce . On a été furpris
auffi de voir à l'ouverture d'un Temple
intérieur le feu facré fur un autel ,
gardé par des Prêtreffes , attendu que
c'eft l'indication fpéciale des Temples
de VESTA ; au lieu qu'en cette occafion
il faudroit au premier coup d'oeil
reconnoître un Temple de JUNON. A
cela près & d'autres petites chofes ,
comme les habits de quelques pas feuls ,
qui n'ont aucun caractère , & c, cet Opéra
eft mis avec le plus grand foin.
Dans
JANVIER . 1762 . 145
›
Dans la repréſentation de cet Opéra
, on a fait un pas vers l'illufion fi néceffaire
au Théâtre ; il mérite d'être
remarqué. Au fort des plus violens orages
, la toile d'Horifon étant fixe , n'offroit
jamais qu'un ciel pur & ferein ,
tel qu'il convenoit aux autres circonf-,
tances de l'action des Poëmes. A la
tempête du fecond Acte de celui - ci
cette toile d'Horifon , tournant apparemment
fur des machines cylindriques
& d'une maniere imperceptible , fait
fuccéder au ciel ferein , des nuages qui
montent du bas de l'Horifon & occupent
tout ce qu'on voyoit de clair
fans qu'il y ait par ce moyen fubftitution
d'une toile à une autre . De même ,
au moment du calme , ces nuages paroiffent
fe perdre dans le haut du Théâtre
, & la partie claire du ciel paroît fe
découvrir du même point d'où l'on a
vû s'élever les nuages ; enforte que la
Nature eft parfaitement imitée dans un
de fes plus grands effets. M. GIRAULD
qui a inventé & fait éxécuter cette ingénieuſe
machine , doit laiffer efpérer
aux Amateurs, qu'il appliquera fes talens
& fon génie à perfectionner l'imitation
des flots & de l'ondulation des eaux :
cette partie étant encore une des cho-
II. Vol. G
146 MERCURE DE FRANCE.
८
2
fes imparfaite fur nos Théâtres &
dont la repréfentation feroit néanmoins
très-fatisfaifante. ( d ) C'eft auffi de la
compofition & fur les deffeins du
même M. GIRAULT , qu'eft éxécuté
dans cet Opéra , le Palais de Pirrhus ,
au quatriéme Acte. Cette Décoration
dans le meilleur genre de l'antique , eft
d'une très- belle architecture ; les détails
en font choifis & diftribués felon
les grands principes de cet art & d'un
très- bon goût : l'ordonnance en eft grande
& officieufe à la perspective. Des
Percés en colonades , dont les points
d'optique font ménagés avec art , étendent
le Théâtre à la vue , fort
loin de fes bornes . La diftribution de
la lumiere eft d'un très -bon effet &
fâvament pittorefque ; en un mot nous
croyons pouvoir dire que depuis la fameufe
Décoration du Palais de Ninus
par le Chevalier Servandoni , on a peu
(d ) M. GIRAULD eft le même nommé dans
l'Art . des Spectacles de la Cour avec M. ARNOULT
, auquel il a fuccédé à l'Académie Royale
de Mufique , où M. ARNOULT s'étoit fait , ainfi
qu'aux Théâti es du Roi , une très -grande & trèsjufte
réputation par plusieurs machines qui font
encore célébres . M. GIRAULD prouve au Public,
qu'il achevera ce qu'avoit heureufement com
mencé fon Prédéceffeur , pour la perfection de
cétre parrie.
JANVIER. 1763.
147
vû à l'Opéra de plus belle Décoration
d'architecture que celle- ci.
Le tombeau d'Achille au cinquiéme
Acte , eft encore une Décoration diftinguée
dont l'effet eft très -agréable
quoiqu'elle conferve le genre propre à
fa deftination. Les autres ont quelques
parties de neuf & toutes en ont l'éclat.
Chacune mériteroit même en particulier
des éloges fur la
convenance avec
les fites de l'action.
1
? Avant de finir cet Article
nous devons
faire obſerver que les Rôles font
très-bien éxécutés . Le Public entendit
avec fatisfaction , à la premiere repréfentation
, la voix de Mlle ARNOULD
entierement rétablie ; & malgré l'indifpofition
momentanée de celle de M.
GELIN , on fut fatisfait des efforts qu'il
fit pour rendre le Rôle de Pirrhus ,
le principal de cette Tragédie .
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Résumé : OPERA.
Le 11 janvier 1763, l'Académie Royale de Musique a présenté la première représentation de l'opéra 'Polixène', une tragédie poétique écrite par M. Joliveau, secrétaire perpétuel de l'Académie Royale de Musique. La musique a été composée par M. Dauvergne, maître de la musique de la Chambre du Roi. Cette première représentation a été bien accueillie, notamment les deux derniers actes, qui ont suscité beaucoup d'enthousiasme. En raison du manque de temps, le texte complet du poème n'a pas pu être extrait, mais une discussion plus approfondie est prévue pour le Mercure de février. La musique, bien que difficile à juger en raison des goûts modernes, a généralement été bien reçue. Plusieurs morceaux, notamment la musique de la jalousie et de la fuite dans le troisième acte, ainsi qu'une chaconne finale, ont été particulièrement appréciés. Les ballets ont également été bien exécutés, avec des mouvements rapides et des figures irrégulières. Les danseurs mentionnés incluent les sieurs Laval, d'Auberval et les demoiselles Allard, Lyonnois et Peslin. Mlle Lani a dansé seule au troisième acte, et M. Gardel a été particulièrement remarqué pour son interprétation de la chaconne. Les costumes et les décorations étaient nouveaux et soignés, bien que quelques erreurs historiques aient été notées. L'opéra a également innové en utilisant une toile d'horizon tournante pour imiter les effets naturels, comme les tempêtes et les calmes. M. Girauld, l'inventeur de cette machine, a également conçu le palais de Pirrhus au quatrième acte, une décoration architecturale remarquable. Le tombeau d'Achille au cinquième acte a également été souligné pour son effet agréable. Les rôles ont été bien exécutés, avec une mention spéciale pour Mlle Arnould et M. Gelin.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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7
p. 156-176
OPERA. EXTRAIT DE POLIXENE, Tragédie de M. JOLIVEAU, Secrétaire perpétuel de l'Académie Royale de Musique, mise en Musique par M. DAUVERGNE, Maître de Musique de la Chambre du ROI.
Début :
PERSONNAGES. ACTEURS. PIRRHUS, fils d'Achille, M. Gelin. TELEPHE, prince des Mysiens. [...]
Mots clefs :
Pirrhus, Polixene, Hecube, Amour, Dieux, Cœur, Fureur, Reproche
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texteReconnaissance textuelle : OPERA. EXTRAIT DE POLIXENE, Tragédie de M. JOLIVEAU, Secrétaire perpétuel de l'Académie Royale de Musique, mise en Musique par M. DAUVERGNE, Maître de Musique de la Chambre du ROI.
OPERA.
EXTRAIT DE POLIXENE ,
Tragédie de M. JOLIVEAU , Secrétaire
perpétuel de l'Académie Royale
de Mufique , mife en Mufique par
M. DAUVERGNE , Maître de Mufique
de la Chambre du Ro1.
PERSONNAGES.
PIRRHUS , fils d'Achille ,
TELEPHE , Prince des Myfiens.
HECUBE , Veuve de PRIAM ,
POLIXENE , fille d'HECUBE &
de PRIAM ,
JUNON
ACTEURS.
M. Geline
M. Pillot
Mlle Chevalier.
Mile Arnoud
THETIS , Mlle Rozet
LA GRANDE- PRESTRESSE DE
JUNON , Mlle Riviere,
LE GRAND-PRESTRE D'ACHILLE , M. Joli.
UN THESSALIEN ,
L'OMBRE D'ACHILLE ,
UNE TROYENNE ,
UNE THESSALIENNE ,
M. Durand.
LA JALOUSIE ,
LE DESESPOIR ,
LA
FUREUR ,
MlleBernard.
M. Larrivée.
M. Joli.
M. Muguet
FEVRIER. 1763. 157
Au premier Acte , la Scène eft dans
une Place publique de la Ville de LARRISSE
, ornée pour le triomphe de
PIRRHUS.
TELEPHE , en interrogeant PIRRHUS
fur ce qui peut troubler fon coeur ,
lorfque tout concourt à le faire jouir
d'un deftin heureux apprend qu'il
aime POLIXENE , & qu'il eft fon rival.
C'eft dans l'horreur de la deftruction
de Troye que PIRRHUS a conçu
cette funefte paffion. Il amenoit Po-
LIXENE dans fes Etats ; mais un orage
a féparé fes vaiffeaux de ceux qui la
conduifoient. TELEPHE , fans découvrir
fes feux s'efforce en vain de
combattre la paffion de PIRRHUS . La
cérémonie du triomphe de ce dernier interrompt
leur dialogue . Les Peuples &
les Guerriers. Theffaliens conduisent des
Captifs Troyens enchaînés ; ils chantent
les louanges de PIRRHUS. Ce Roi fait
ôter les fers aux Troyens , en diſant
»De ces Captifs qu'on détache les chaînes ;
» lls en ont trop fenti le poids:
>
» Que leurs coeurs connoiffent mes loir
Par les bienfaits & non pas par les peines.
Auffi-tôt , pour prix de leur liberté
158 MERCURE DE FRANCE.
ces Captifs témoignent leur reconnoiffance
en danfant , & fe joignent aux
Sujets de PIRRHUS pour célébrer fa
bonté. La Paix & l'Amour ont leur
part des éloges. On entend un bruit
finiftre ; c'eft JUNON qui du haut des
airs reproche à PIRRHUS un amour qui
l'offenfe. Elle menace les TROYENS ,
qu'elle pourfuit, & PIRRHUS lui- même,
des plus terribles traits de fa vengeance .
PIRRHUS qui n'envifage qu'un
avenir funefte , prie TELEPHE de ne
le pas abandonner. PIRRHUS fe plaint
qu'il éprouve feul la févérité des Dieux ;
il fait l'énumération des autres Héros
de la Gréce que l'on laiffe paiſiblement
emmener leurs Captives & en ufer
à leur volonté. Sur quoi l'intrépide
TÉLÉPHE l'encourage en ces termes.
,
» Eh bien , il faut braver l'orage :
» C'eft dans les grands revers que brille un grand
›› courage .
L'un & l'autre s'excitent à braver la
colère de JUNON.
Dans le deuxiéme A&te , la Scéne
eft au bord de la mer près des murs de
LARRISSE.
FEVRIER . 1763. 159
PIRRHUS vient prier la Mer de l'engloutir
, puifqu'il eft féparé de POLIXENE.
Soit par un accident naturel , foit
pour répondre à l'apoftrophe de PIRRHUS
, la Mer qui étoit calme commence
à s'agiter : PIRRRUS , par des
vers qui coupent la fymphonie , remarque
toutes les gradations de la
tempête qu'elle peint. Il craint que Po-
LIXENE n'en foit la victime. Sa crainte
redouble en appercevant des Vaiffeaux
prêts à périr. Il invoque THETIS : &
THETIS paroît ; tout eft bientôt calmé.
Elle fait une légére reprimande à fon
fils fur l'indifcrétion de fes feux. En lui
promettant de lui rendre fa Maîtreffe ,
elle l'avertit néanmoins de défarmer la
fureur de JUNON , parce que fon pou
voir limité ne pourroit le défendre contre
cette Déeffe .
PIRRHUS , qui n'eft occupé que de
fa paffion , exprime ainfi les premiers
mouvemens de fa joie , en quittant la
Scène :
» Je vais donc revoir POLIXENB ,
> Courons au- devant de ſes pas.
>> Si mon amour triomphe de ſa haine ,
>> Le courroux de Junon ne m'épouvante pas.
Des MATELOTS Theffaliens , échap
160 MERCURE DE FRANCE.
pés du naufrage forment un Divertiffement.
POLIXENE les fuivoit, elle arrive
à la fin de cette Scène. Les MATELOTS
& furtout les MATELOTES chantent
les douceurs de l'Amour. POLIXENE
dont cela aigrit la fituation , les fait écar
ter. Reftée feule , elle s'avoue & fe reproche
amérement le penchant qu'elle
éprouve pour PIRRHUS ; elle craint
qu'il ne life fa foibleffe à travers de fes
pleurs. Elle s'arme fi bien contre cette
foibleffe que dans la Scène qui fuit entre
elle & PIRRHUS , elle l'accable de
duretés , & finit par le prier de la laiffer
feule . HECUBE , échappée du même
naufrage , apparemment dans un autre
vaiffeau que celui qui portoit fa fille
furvient en ce moment. POLIXENE
vole dans fes bras. HECUBE apperçoit
PIRRHUS , le deftructeur de toute
fa Famille ; elle en frémit.
PIRRHUS à HECUBE.
» Ah ! voyez en PIRRHUS un Prince moins cou-
» pable.
HECUBE
» Je ne puis voir qu'un Vainqueur implacable ,
Dont l'afpect. eft pour moi plus cruel que la
» mort,
» O Dieux , pourquoi ce même orage,
» Qui m'a fait échouer ſur ce fatal rivage
» N'a t-il pas terminé mon fort?
FEVRIER. 1763.
161
POLIXENE veut la calmer , & en même
temps l'Amour , ingénieux à faifir
tous les pretexte , fe cache en elle fous le
motif de la piété filiale , pour implorer
PIRRHUS ; maisHECUBE s'en irrite.Ainfi
eftétabli dans cette Scène le caractère
altier de cette femme dont les Poëtes
ont toujours peint le défefpoir avec
les traits de la fureur. PIRRHUS néanmoins
ne répond à tant d'injures que
par ces vers adreffés à HECUBE.
>> Adoucir vos deftins , c'eft mon premier devoir:
» Oui , mon coeur n'en connoît plus d'autre.
» Ordonnez dans ces lieux , foumis à mon pou-
>> voir ;
» Tout mon bonheur dépend du vôtre.
HECUBE eft peu touchée d'une
proteftation auffi obligeante. POLIXENE
l'invite à goûter les douceurs de
l'efpoir elles joignent leurs voix pour
invoquer les Dieux.
Le troifiéme A&te commence dans
le Veftibule d'un Temple de Junon.
La Mufique peint un tremblement
de Terre. TELEPHE , feul alors fur la
Scène , annonce qu'à ce fléau fe joint
celui de la contagion.
162 MERCURE DE FRANCE.
» Un fouffe empoifonné , miniftre du trépas ,
» Moiffonne , à chaque inſtant , de nouvelles vic-
» times , &c .
Il craint que POLIXENE ne fuccombe
à ce danger ; il court pour la chercher
& pour l'en préferver. Il eft arrêté
par HECUBE qui connoît & approuve
fes feux . Elle lui préfente PIRRHUS
comme l'objet qui attire la colère
des Dieux ; elle veut engager cet
ami à l'immoler. Il en frémit. Sur quoi
HECUBE lui dit :
"
" · • ·
Il peut vous en punir.
S'il pénétre vos voeux ,
TELEPHE..
» Non , il eft magnanime.
HECUBE.
L'Amour jaloux eft toujours furieux.
TELEPH E.
Pirrhus eft un héros , il détefte le crime.
HECUBE lui rappelle en vain les
maux que PIRRHUS a faits à fa Patrie
à fa famille , & la mort que
PRIAM a reçue de fa main . TELEPHE ,
FEVRIER. 1763. 163
conftant dans fes principes , perfifte
dans fa réfiftance.
» La Victoire , ( dit-il , ) fouvent peut rendre
impitoyable ;
JJ
» Mais jamais d'un forfait je ne ferai coupable.
>
HECUBE , dans fa fureur , accufe
TELEPHE de lâcheté , elle trouvera
dit -elle, un autre bras pour la venger.
TELEPHE eft allarmé du danger où elle
va s'expofer ; mais cette femme violente
ne peut être détournée de fon
projet.
TELEPHE rend compte à POLIXENE
qui furvient , de la propofition barbare
que fa mère lui a faite. POLIXENE
en eft éffrayée pour PIRRHUS . Elle
ne peut diffimuler combien elle craint
l'effet du complot qu'HECUBE a formé.
Quoiqu'elle marque toute fa terreur
fur le danger qui menace fa mère
l'Amour jaloux éclaire TELEPHE fur
l'intérêt le plus fenfible pour POLIXENE.
Il lui déclare ouvertement fes foupçons.
Vous tremblez pour PIRRHUS , plus que pour
>>une mère .
164 MERCURE DE FRANCE.
POLIXENE veut s'en défendre ; mais
ce Prince , qui foutient toujours fon
caractère , calme ainfi les allarmes de
POLIXÉNE.
» Non , non , ( lui dit-i! ) ne craignez rien de
» mon amour extrême ;
>> Fe cours vous fatisfaire aux dépens de moi-
›› même :
Oui , je vais vous prouver que ce coeur ver-
>> tueux
Peut-être méritoit un fort moins malheureux.
POLIXENE, à elle- même , fe reproche
de n'avoir pu cacher des feux qu'elle
n'auroit jamais dû reffentir. Dans ce
moment les portes du Temple s'ouvrent,
& tout fe difpofe pour le facrifice qu'on
doit offrir à JUNON. Après les invocations
& les danfes religieufes des Prêtreffes
, interrompues par les cris doufoureux
des Peuples frappés de la contagion
, PIRRHUS vient lui-même invoquer
pour fes Peuples infortunés . La
Grande-Prêtreffe veut y joindre fes prières
; mais elle eft tout-à - coup faifie
d'un enthoufiafme prophétique , dont
les derniers vers contiennent l'Arrêt de
POLIXENE.
FEVRIER . 1763. 165
» Si vous voulez fléchir fa haine ,
Sur le tombeau d'ACHILLE immolez Po-
» LIXENE.
Les Prêtreffes rentrent. PIRRHUS
eft accablé de ce fatal oracle : les Peuples
généreux de LARISSE , tout fouffrans
qu'ils font , en murmurent . PIRRHUS
termine l'Acte en proteſtant qu'il
ne fouffrira pas que POLIXENE fubiffe
un fort auffi rigoureux.
Le quatrième Acte fe paffe dans le
Palais de PIRRHUS.
HECUBE n'a pû engager perfonne à
fervir fes deffeins
fanguinaires : elle en
eft furieuſe ; elle fe confole un moment
par un fentiment de courage.
» Ceſſons de vains regrets , je me reſte à moi-
» même.
Elle continue cependant à s'exciter à
la vengeance : elle fe promet de faire
du Palais un lieu d'horreur & de larmes
, fans s'expliquer fur les moyens .
POLIXENE vient apprendre en tremblant
à fa mère ce que l'Oracle a prononcé.
HECUBE dont la fureur fe
,
"
166 MERCURE DE FRANCE.
,
tourne alors contre JUNON. après
quelques imprécations contre les Dieux ,
promet à fa fille qu'elle ne périra pas.
TELEPHE peut , dit- elle , fauver fes
jours ; il a des Vaiffeaux & des Soldats
au rivage : elle va implorer fon
fecours.
POLIXENE , dans la fituation alors
de la fille de JEPHTE , n'eft pas d'abord
réfignée auffi modeftement : elle
ofe demander aux Dieux de quoi elle
eft coupable ? Mais bientôt elle fe reprend
.
ود
•
Je me plains du courroux du Ciel ,
» Quand je nourris un feu trop condamnable ! ..
Une réflexion tendre fuit ce repentir.
» Ah ! qui peut efpérer un fort plus favorable ,
» Si l'amour feul rend un coeur criminel ?
Les Peuples de Larriffe , moins généreux
par réfléxion , que dans le moment
qu'ils ont entendu prononcer la
mort de POLIXENE , demandent avec
rébellion que le facrifice s'achève .
PIRRHUS vient l'annoncerà POLIXENE;
celle-ci les plaint & les excufe : mais PIRRHUS
, dont le courage opiniâtre , ainfi
FEVRIER. 1763. 167
eſt
que l'acier , fe durcit fous les coups ,
PIRRHUS menace fes Peuples & JUNON
elle-même qu'il préviendra leur fureur.
Le moyen fur lequel il fe fonde
un paffage inconnu par lequel il peut la
faire échapper la nuit , conduite par fa
garde & par un Officier fidéle. POLIXENE
ne veut pas fuir fans fa mère .
PIRRHUS l'avoit prévu , tout eft difpofé
pour qu'elles partent enfemble.
POLIXENE qui n'a plus rien à ménager
, ne peut retenir une légère éffuion
de fa tendreffe pour PIRRHUS
dans le remerciment qu'elle lui fait .
POLIXENE à PIRRHUS.
» Plus vous vous montrez généreux ,
« Et plus je crains pour vous la colère des Dieux.
PIRRHUS.
» Quand POLIXENE à mon fort s'intéreſſe ,
» Pirrhus eft trop heureux.
» Le péril croît , craignez un Peuple furieux .
POLIXENE , àpart , en s'en allant.
» Qu'il en coûte à mon coeur pour cacher fa
> tendreſſe !
PIRRHUS s'applaudiffant déja du
fuccès de fon ftratagême , eft arrêté
168 MERCURE DE FRANCE.
par une main invifible . Il voit fortir de
Terre la JALOUSIE le DESESPOIR ,
la FUREUR & toute leur Suite . C'eſt ce
qui forme le Ballet dont nous avons
rendu compte dans le précédent Mercure
en parlant de la repréſentation de
cet Opéra.
PIRRHUS eft perfécuté par les flambeaux
de cette Troupe infernale ; le
poifon paffe dans fon coeur , il eft menacé
d'éprouver tous les tourmens qui
peuvent déchirer une âme , & la JALOUSIE
, laffe enfin de fa perfécution ,
finit la Scène avec lui comme ZORAÏ-
DE avec NINUS dans Pirame & Thibé.
ככ
LA JALOUSIE , à Pirrhus.
Téléphe adore Polixène ;
» Il eft prêt à te la ravir .
PIRRHUS fe difpofe à exhaler toute
la violence de la funefte paffion
qu'on vient de lui infpirer. TELEPHE
paroît , il fupporte d'abord les reproches
de fon ami ; TELEPHE a les forces
& la fermeté de la vertu ; il en accable
PIRRHUS à fon tour ; & celuici
, malgré les efforts de la JALOUSIE,
fecondée de la rage & du DÉSESPOIR,
céde auffitôt à ce pouvoir , & finit par
confier
FEVRIER . 1763. 169
confier fa maîtreffe à cet ami pour af
furer fa fuite , quoiqu'il le connoiffe
alors pour fon rival.
Dans le cinquième Acte le Théâtre
repréfente un Monument élevé aux Mánes
d'Achille. Un Autel eftfur le devant.
PIRRHUS eft feul , il s'applaudit d'avoir
pu triompher de lui-même ; il ne
fent pas moins ce qu'il lui en coûte. Il
termine fon Monologue par cette invocation
aux Mânes d'Achille.
» Mânes facrés , Ombre que je révére ,
» Et vous , Dieux tout-puiffans ! calmez votre
» colère ,
» Si l'Amour fit mon crime , hélas ! ce même
» Amour
» Met le comble à mes maux , & vous venge en
›› ce jour.
HECUBE vient apprendre à PIRRHUS
la mort de TELEPHE. Elle infulte
aux regrets fincères de ce Prince ,
en lui imputant la fin tragique de fon
ami. Elle prétend que c'eft lui -même
qui a guidé les affaffins dans les fentiers
obfcurs qui conduifoient au rivage.
PIRHUS , indigné , reprend en ce
moment la noble fierté d'où l'Amour
H
170 MERCURE DE FRANCE .
l'avoit fait defcendre dans tout le
cours de l'action , & répond à HECUBE.
>> Dieux , quelle horreur! qui , moi , quand , pour
>>fauver vos jours ,
» J'immolois jufqu'à ma tendreſſe !
» Quand , bravant de Junon la haine vengereffe ,
» Des maux de mes Sujets j'éternifois le cours !
HECUBE ne fe rend point ; elle perfifte
dans fes reproches injurieux . PIRRHUS
, dont la patience eft épuisée ,
lui dit enfin :
» C'en eft trop, je voulois aux dépens de ma vie ,
» Arracher votre fille à la mort :
» Mais , qu'elle vive ....ou qu'on la faerifie ....
» PIRRHUS l'abandonne à fon fort.
;
HECUBE , alors change de ton &
devient fuppliante , pour engager PIRRHUS
à fauver les jours de fa fille
mais c'eft en vain , PIRRHUS eft devenu
inexorable : la furieuſe HECUBE
apperçoit en ce moment POLIXENE ,
entre les mains des Sacrificateurs . &
ornée des funeftes guirlandes dont on
paroit les victimes . Elle ne fe contient
plus : elle tire un poignard de deffous fon
vêtement & le léve fur PIRRHUS . POFEVRIER.
1763. 171
LIXENE s'élance entre - deux & arrache
le poignard des mains d'HECUBE
en difant :
» Je frémis :
HECUBE.
» C'eft POLIXENT
» Qui vient défarmer ma fureur. "
POLIXEN E.
>>J'ai laiffé voir le fecret de mon coeur ;
» Si je mérite votre haine ,
» Bientôt ma mort ....
PIRRHUS .
Non plutôt qu'en ce jour
» Et la flamme & le fer dévaſtent ce féjour.
Le Grand- Prêtre reclame contre cet
irréligieux attentat de PIRHHUS, Ce
Prince animé par la déclaration de Po-
LIXENE , s'opiniâtre davantage contre
l'ordre des Dieux . Loin d'en être puni ,
le Monument s'ouvre . L'Ombre d'Achille
paroît , pour annoncer à PIRRHUS
le fort le plus flatteur.
»Pirrhus , au deftin le plus doux ,
»Le Ciel vous permet de prétendre :
» THÉTIS a de JUNON défarmé le courroux.
PIRRHUS remercie ; l'Ombre porte
fa bienfaifante attention jufqu'à or-
Hij
172 MERCURE DE FRANCE
donner elle-même la fête de ce grand
jour,
PIRRHUS demande l'aveu de Po-
LIXENE , qui à fon tour follicite celui
de fa mère. La cruelle HECUBE s'adoucit.
Les Guerriers & les Peuples
viennent célébrer l'hymen de PIRRHUS
& de POLIXENE,
OBSERVATIONS fur le Poëme
de POLIXENE.
Le Sujet que l'Auteur a choifi pour le premier
effai de fa Muſe avoit été traité plufieurs fois au
Théâtre Lyrique , mais toujours fans fuccès.
On ne peut refuſer à ce nouveau Poëme une
conduite raiſonnée , une action bien liée & des
Scènes affez réguliérement filées. Cependant il a
été l'objet de quelques cenfures , tant verbales ,
qu'imprimées dans des Ecrits publics . Nous altons
chercher à les réfumer & à les difcuter
par une critique impartiale , moins en faveur de
l'Auteur , qui fans doute le défendroit mieux luimême
, que pour l'intérêt de l'art dramatique
qui ne peut que gagner à ces fortes de difcuffions
, attendu qu'il n'y a pas encore de Poëtique
bien arrêtée pour ce genre de Poëmes.
En convenant que la fable de ce Drame eft
bien foutenue , on reproche d'abord qu'elle eft
contraire à ce que nous fçavons tous fur PIRRHUS
&fur POLIXENE. A cet égard le reproche
tombe de lui - même , fi cela a fervi à traiter
plus heureufement ce Sujet qu'il ne l'avoit été
auparavant, Il feroit dangereux néanmoins que
FEVRIER. 1763. 173
ces exemples fe multipliaffent , & qu'on y fût encouragé
par des fuccès ; car il eft des bornes aux
licences les plus étendues dans les Arts. On permet
au Peintre d'Hiftoire d'orner ſes ſujets , de
les modifier même à fon avantage ; mais on
ne lui pardonneroit pas de nous repréſenter les
grands traits hiſtoriques ou poëtiques d'une manière
trop oppofée à la connoiffance générale des
faits. On ne doit pas s'arrêter davantage aux inimitiés
des Pères de PIRRHUS & de TELEPHE
ni au paffage de ce dernier , de la Troade en Europe
pour retourner en Myfie. Il n'eft pas hors
du cours naturel des événemens & fur-tour
entre les héros , de voir une amitié très-étroite
entre les enfans d'ennemis irréconciliables. Quant
au voyage de TELEPHE , on ne voit pas quel eft
l'inconvénient de faire prendre le plus long à un
héros d'Opéra , lorsque cela peut être utile à la
conftitution d'un bon Poëme.
>
Il eft des queſtions plus importantes fur les
caractères des perfonnages & fur quelques parties
de la conduite de ce Poëme . 1º . Sur les caractères.
Le perfonnage fubordonné ( TELEPHE )
paroît , dit-on , fait pour être le plus intéreffant ,
parce qu'il eft le plus eftimable. En effet , ce caractère
, qui eft très- bien foutenu , a tous les avantages
de la vertu & du véritable courage , fans
en avoir le fafte , & il ſe manifefte dans tout le
drame , non par un vain étalage des maximes ,
mais par des actions dignes de toucher tous les
coeurs honnêtes. Cependant c'eſt le feul des perfonnages
véritablement malheureux dans le cours
de l'action , & le feul qui périffe à fon dénoûment.
A cela nous croyons que l'Auteur pourroit
répondre , qu'on eft obligé fouvent de mettre
le principal mobile de l'action dans les perfonf
H iij
174 MERCURE DE FRANCE.
nages fubordonnés , plutôt que dans les perfor
wages principaux. Que fi quelquefois la fcélérarelle
de ces feconds perfonnages eſt néceffaire au
mouvement de l'action & à l'intérêt des perſon ·
nagesprincipaux , lorfqu'ils font vertueux; d'autres
fois , par des moyens contraires , c'eſt la vertu de
ces perfonnages fubfidiaires qui fert à mettre dans
des fituations plus intéreffantes des caractères
mêlés de vices & de foibleffes , lefquels ne font
pas les moins propres à l'intérêt théâtral , &
prèfque toujours plus que les caractères entiérement
vertueux. De la première eſpéce font ici
les caractéres de PIRRHUS & de POLIXENÉ .
L'Auteur a donc dû les conftituer ainfi pour
remplir fon objet. Mais à l'égard de POLIXENE ,
fi l'on demande comment a-t- elle pû fe prendre
d'un penchant fi tendre & fi invincible pour un
Prince dont le premier aſpect ne lui a offert qu'un
vainqueur implacable , le fer & le feu à la main ,
ravageant fa Patrie , maflacrant tous les fiens
& particuliérement fon père , ce qui eſt ſpécialement
énoncé dans le Drame? Comment , malgré
la clémence de l'Ombre d'ACHILLE , cet
autre ennemi furieux de fa famille , comment ,
dit-on encore , peut- elle conſentir à recevoir une
main encore fumante d'un fang fi cher & fi refpectable
pour elle ? A cela nous convenons que
fi l'on ne confultoit que les moeurs & la nature
pour ces fortes de Poëmes , il feroit peut- être affez
difficile de répondre.
Quant à la conduite , il nous paroît que le
reproche qu'on fait à PIRRHUS de faire refter
TELEPHE avec lui , lorſqu'il eſt menacé par Ju-
NON n'eft pas auffi bien fondé que les autres.
Non feulement on fent bien que l'Auteur
avoit befoin de TELEPHE pour le fil de fon
FEVRIER . 1763. 175
fût
pas
action mais il a trouvé par - là , le moyen
de préfenter une vérité morale , bien importante
, contre les prétendus efprits-forts ,
qui cherchent toujours à affocier autant qu'ils
peuvent des complices contre le Ciel , & qui
femblent ne réunir leurs forces contre fes décrets
que pour mieux laiffer voir leur foibleſſe.
Il est peut- être vrai , comme on l'a remar
qué , que la colere des Dieux vengeurs n'y eft
pas peinte fous des couleurs bien redoutables.
Mais indépendamment du befoin qu'il y avoit
pour la marche de l'action que PIRRHUS ne
arrêté par un pouvoir irréfiftible dans la
paffion ; d'autre part , les Dieux font-ils moins
véritablement repréſentés par la rigueur des
châtimens que par les effets de leur clémence ?
Ce qui femble un peu plus difficile à concilier
eft l'appareil terrible & tous les efforts de la ALOUSIE
en perfonne avec la RAGE , le DESESPOIR
& tout l'Enfer déchaîné , pour verfer leur
fatal poifon dans le coeur de PIRRHUS , avec le
peu d'effet que cela produir fur lui , par la facilité
que TELEPHE trouve l'inftant d'après à le
calmer , & le confentement qu'il apporte à lui
remettre fa Maitreffe entre les mains. Paffant
aux détails , nous répondrons à ceux qui demanderoient
dans ce Poëme plus de Madrigaux
, plus de ces phrafes qui développent lesfentimens
du coeur ou les fentimens de l'efprit , que
le courage d'avoir fçû fe paffer de ces brillans
Lecours , en mérite d'autant plus d'éloges dans
un temps où l'on fait de ces frivoles Beautés
un abus , que les mêmes Critiques , qui les régrettent
davantage en cette occafion , condamnent
avec austérité dans tous les ouvrages modernes.
Peut-être eft- ce par un même motif , que
H iv
176 MERCURE DE FRANCE.
l'Auteur a dédaigné les négligences de ftyle , les
enjambemens de vers , & les répétitions des confonnes
dures dans un même vers , & qui fonnent mal
à l'oreille. La facilité d'éviter ce que la critique
reproche à cette égard , doit laiffer croire que
l'Auteur a facrifié volontiers cette molle & facile
délicateffe à l'énergie du fens & à l'éxactitude
du Dialogue lorfqu'il à crû qu'elle auroit
pû y mettre obftack .
On continue cet Opéra trois jours
de la femaine . N'étant pas informés ,
lorfque nous avons rendu compte de
la premiere repréſentation , que le Ballet
de la Jaloufie au quatriéme Acte
étoit de la compofition de M. de LAVAL
, nous avons obmis alors de faire
mention de cette circonftance .
Le Jeudi 20 Janvier on a remis les
Fêtes Grecques & Romaines , Ballet ,
pour le continuer les Jeudis fuivans . Le
Public a paru très-fatisfait de revoir cet
Opéra.
EXTRAIT DE POLIXENE ,
Tragédie de M. JOLIVEAU , Secrétaire
perpétuel de l'Académie Royale
de Mufique , mife en Mufique par
M. DAUVERGNE , Maître de Mufique
de la Chambre du Ro1.
PERSONNAGES.
PIRRHUS , fils d'Achille ,
TELEPHE , Prince des Myfiens.
HECUBE , Veuve de PRIAM ,
POLIXENE , fille d'HECUBE &
de PRIAM ,
JUNON
ACTEURS.
M. Geline
M. Pillot
Mlle Chevalier.
Mile Arnoud
THETIS , Mlle Rozet
LA GRANDE- PRESTRESSE DE
JUNON , Mlle Riviere,
LE GRAND-PRESTRE D'ACHILLE , M. Joli.
UN THESSALIEN ,
L'OMBRE D'ACHILLE ,
UNE TROYENNE ,
UNE THESSALIENNE ,
M. Durand.
LA JALOUSIE ,
LE DESESPOIR ,
LA
FUREUR ,
MlleBernard.
M. Larrivée.
M. Joli.
M. Muguet
FEVRIER. 1763. 157
Au premier Acte , la Scène eft dans
une Place publique de la Ville de LARRISSE
, ornée pour le triomphe de
PIRRHUS.
TELEPHE , en interrogeant PIRRHUS
fur ce qui peut troubler fon coeur ,
lorfque tout concourt à le faire jouir
d'un deftin heureux apprend qu'il
aime POLIXENE , & qu'il eft fon rival.
C'eft dans l'horreur de la deftruction
de Troye que PIRRHUS a conçu
cette funefte paffion. Il amenoit Po-
LIXENE dans fes Etats ; mais un orage
a féparé fes vaiffeaux de ceux qui la
conduifoient. TELEPHE , fans découvrir
fes feux s'efforce en vain de
combattre la paffion de PIRRHUS . La
cérémonie du triomphe de ce dernier interrompt
leur dialogue . Les Peuples &
les Guerriers. Theffaliens conduisent des
Captifs Troyens enchaînés ; ils chantent
les louanges de PIRRHUS. Ce Roi fait
ôter les fers aux Troyens , en diſant
»De ces Captifs qu'on détache les chaînes ;
» lls en ont trop fenti le poids:
>
» Que leurs coeurs connoiffent mes loir
Par les bienfaits & non pas par les peines.
Auffi-tôt , pour prix de leur liberté
158 MERCURE DE FRANCE.
ces Captifs témoignent leur reconnoiffance
en danfant , & fe joignent aux
Sujets de PIRRHUS pour célébrer fa
bonté. La Paix & l'Amour ont leur
part des éloges. On entend un bruit
finiftre ; c'eft JUNON qui du haut des
airs reproche à PIRRHUS un amour qui
l'offenfe. Elle menace les TROYENS ,
qu'elle pourfuit, & PIRRHUS lui- même,
des plus terribles traits de fa vengeance .
PIRRHUS qui n'envifage qu'un
avenir funefte , prie TELEPHE de ne
le pas abandonner. PIRRHUS fe plaint
qu'il éprouve feul la févérité des Dieux ;
il fait l'énumération des autres Héros
de la Gréce que l'on laiffe paiſiblement
emmener leurs Captives & en ufer
à leur volonté. Sur quoi l'intrépide
TÉLÉPHE l'encourage en ces termes.
,
» Eh bien , il faut braver l'orage :
» C'eft dans les grands revers que brille un grand
›› courage .
L'un & l'autre s'excitent à braver la
colère de JUNON.
Dans le deuxiéme A&te , la Scéne
eft au bord de la mer près des murs de
LARRISSE.
FEVRIER . 1763. 159
PIRRHUS vient prier la Mer de l'engloutir
, puifqu'il eft féparé de POLIXENE.
Soit par un accident naturel , foit
pour répondre à l'apoftrophe de PIRRHUS
, la Mer qui étoit calme commence
à s'agiter : PIRRRUS , par des
vers qui coupent la fymphonie , remarque
toutes les gradations de la
tempête qu'elle peint. Il craint que Po-
LIXENE n'en foit la victime. Sa crainte
redouble en appercevant des Vaiffeaux
prêts à périr. Il invoque THETIS : &
THETIS paroît ; tout eft bientôt calmé.
Elle fait une légére reprimande à fon
fils fur l'indifcrétion de fes feux. En lui
promettant de lui rendre fa Maîtreffe ,
elle l'avertit néanmoins de défarmer la
fureur de JUNON , parce que fon pou
voir limité ne pourroit le défendre contre
cette Déeffe .
PIRRHUS , qui n'eft occupé que de
fa paffion , exprime ainfi les premiers
mouvemens de fa joie , en quittant la
Scène :
» Je vais donc revoir POLIXENB ,
> Courons au- devant de ſes pas.
>> Si mon amour triomphe de ſa haine ,
>> Le courroux de Junon ne m'épouvante pas.
Des MATELOTS Theffaliens , échap
160 MERCURE DE FRANCE.
pés du naufrage forment un Divertiffement.
POLIXENE les fuivoit, elle arrive
à la fin de cette Scène. Les MATELOTS
& furtout les MATELOTES chantent
les douceurs de l'Amour. POLIXENE
dont cela aigrit la fituation , les fait écar
ter. Reftée feule , elle s'avoue & fe reproche
amérement le penchant qu'elle
éprouve pour PIRRHUS ; elle craint
qu'il ne life fa foibleffe à travers de fes
pleurs. Elle s'arme fi bien contre cette
foibleffe que dans la Scène qui fuit entre
elle & PIRRHUS , elle l'accable de
duretés , & finit par le prier de la laiffer
feule . HECUBE , échappée du même
naufrage , apparemment dans un autre
vaiffeau que celui qui portoit fa fille
furvient en ce moment. POLIXENE
vole dans fes bras. HECUBE apperçoit
PIRRHUS , le deftructeur de toute
fa Famille ; elle en frémit.
PIRRHUS à HECUBE.
» Ah ! voyez en PIRRHUS un Prince moins cou-
» pable.
HECUBE
» Je ne puis voir qu'un Vainqueur implacable ,
Dont l'afpect. eft pour moi plus cruel que la
» mort,
» O Dieux , pourquoi ce même orage,
» Qui m'a fait échouer ſur ce fatal rivage
» N'a t-il pas terminé mon fort?
FEVRIER. 1763.
161
POLIXENE veut la calmer , & en même
temps l'Amour , ingénieux à faifir
tous les pretexte , fe cache en elle fous le
motif de la piété filiale , pour implorer
PIRRHUS ; maisHECUBE s'en irrite.Ainfi
eftétabli dans cette Scène le caractère
altier de cette femme dont les Poëtes
ont toujours peint le défefpoir avec
les traits de la fureur. PIRRHUS néanmoins
ne répond à tant d'injures que
par ces vers adreffés à HECUBE.
>> Adoucir vos deftins , c'eft mon premier devoir:
» Oui , mon coeur n'en connoît plus d'autre.
» Ordonnez dans ces lieux , foumis à mon pou-
>> voir ;
» Tout mon bonheur dépend du vôtre.
HECUBE eft peu touchée d'une
proteftation auffi obligeante. POLIXENE
l'invite à goûter les douceurs de
l'efpoir elles joignent leurs voix pour
invoquer les Dieux.
Le troifiéme A&te commence dans
le Veftibule d'un Temple de Junon.
La Mufique peint un tremblement
de Terre. TELEPHE , feul alors fur la
Scène , annonce qu'à ce fléau fe joint
celui de la contagion.
162 MERCURE DE FRANCE.
» Un fouffe empoifonné , miniftre du trépas ,
» Moiffonne , à chaque inſtant , de nouvelles vic-
» times , &c .
Il craint que POLIXENE ne fuccombe
à ce danger ; il court pour la chercher
& pour l'en préferver. Il eft arrêté
par HECUBE qui connoît & approuve
fes feux . Elle lui préfente PIRRHUS
comme l'objet qui attire la colère
des Dieux ; elle veut engager cet
ami à l'immoler. Il en frémit. Sur quoi
HECUBE lui dit :
"
" · • ·
Il peut vous en punir.
S'il pénétre vos voeux ,
TELEPHE..
» Non , il eft magnanime.
HECUBE.
L'Amour jaloux eft toujours furieux.
TELEPH E.
Pirrhus eft un héros , il détefte le crime.
HECUBE lui rappelle en vain les
maux que PIRRHUS a faits à fa Patrie
à fa famille , & la mort que
PRIAM a reçue de fa main . TELEPHE ,
FEVRIER. 1763. 163
conftant dans fes principes , perfifte
dans fa réfiftance.
» La Victoire , ( dit-il , ) fouvent peut rendre
impitoyable ;
JJ
» Mais jamais d'un forfait je ne ferai coupable.
>
HECUBE , dans fa fureur , accufe
TELEPHE de lâcheté , elle trouvera
dit -elle, un autre bras pour la venger.
TELEPHE eft allarmé du danger où elle
va s'expofer ; mais cette femme violente
ne peut être détournée de fon
projet.
TELEPHE rend compte à POLIXENE
qui furvient , de la propofition barbare
que fa mère lui a faite. POLIXENE
en eft éffrayée pour PIRRHUS . Elle
ne peut diffimuler combien elle craint
l'effet du complot qu'HECUBE a formé.
Quoiqu'elle marque toute fa terreur
fur le danger qui menace fa mère
l'Amour jaloux éclaire TELEPHE fur
l'intérêt le plus fenfible pour POLIXENE.
Il lui déclare ouvertement fes foupçons.
Vous tremblez pour PIRRHUS , plus que pour
>>une mère .
164 MERCURE DE FRANCE.
POLIXENE veut s'en défendre ; mais
ce Prince , qui foutient toujours fon
caractère , calme ainfi les allarmes de
POLIXÉNE.
» Non , non , ( lui dit-i! ) ne craignez rien de
» mon amour extrême ;
>> Fe cours vous fatisfaire aux dépens de moi-
›› même :
Oui , je vais vous prouver que ce coeur ver-
>> tueux
Peut-être méritoit un fort moins malheureux.
POLIXENE, à elle- même , fe reproche
de n'avoir pu cacher des feux qu'elle
n'auroit jamais dû reffentir. Dans ce
moment les portes du Temple s'ouvrent,
& tout fe difpofe pour le facrifice qu'on
doit offrir à JUNON. Après les invocations
& les danfes religieufes des Prêtreffes
, interrompues par les cris doufoureux
des Peuples frappés de la contagion
, PIRRHUS vient lui-même invoquer
pour fes Peuples infortunés . La
Grande-Prêtreffe veut y joindre fes prières
; mais elle eft tout-à - coup faifie
d'un enthoufiafme prophétique , dont
les derniers vers contiennent l'Arrêt de
POLIXENE.
FEVRIER . 1763. 165
» Si vous voulez fléchir fa haine ,
Sur le tombeau d'ACHILLE immolez Po-
» LIXENE.
Les Prêtreffes rentrent. PIRRHUS
eft accablé de ce fatal oracle : les Peuples
généreux de LARISSE , tout fouffrans
qu'ils font , en murmurent . PIRRHUS
termine l'Acte en proteſtant qu'il
ne fouffrira pas que POLIXENE fubiffe
un fort auffi rigoureux.
Le quatrième Acte fe paffe dans le
Palais de PIRRHUS.
HECUBE n'a pû engager perfonne à
fervir fes deffeins
fanguinaires : elle en
eft furieuſe ; elle fe confole un moment
par un fentiment de courage.
» Ceſſons de vains regrets , je me reſte à moi-
» même.
Elle continue cependant à s'exciter à
la vengeance : elle fe promet de faire
du Palais un lieu d'horreur & de larmes
, fans s'expliquer fur les moyens .
POLIXENE vient apprendre en tremblant
à fa mère ce que l'Oracle a prononcé.
HECUBE dont la fureur fe
,
"
166 MERCURE DE FRANCE.
,
tourne alors contre JUNON. après
quelques imprécations contre les Dieux ,
promet à fa fille qu'elle ne périra pas.
TELEPHE peut , dit- elle , fauver fes
jours ; il a des Vaiffeaux & des Soldats
au rivage : elle va implorer fon
fecours.
POLIXENE , dans la fituation alors
de la fille de JEPHTE , n'eft pas d'abord
réfignée auffi modeftement : elle
ofe demander aux Dieux de quoi elle
eft coupable ? Mais bientôt elle fe reprend
.
ود
•
Je me plains du courroux du Ciel ,
» Quand je nourris un feu trop condamnable ! ..
Une réflexion tendre fuit ce repentir.
» Ah ! qui peut efpérer un fort plus favorable ,
» Si l'amour feul rend un coeur criminel ?
Les Peuples de Larriffe , moins généreux
par réfléxion , que dans le moment
qu'ils ont entendu prononcer la
mort de POLIXENE , demandent avec
rébellion que le facrifice s'achève .
PIRRHUS vient l'annoncerà POLIXENE;
celle-ci les plaint & les excufe : mais PIRRHUS
, dont le courage opiniâtre , ainfi
FEVRIER. 1763. 167
eſt
que l'acier , fe durcit fous les coups ,
PIRRHUS menace fes Peuples & JUNON
elle-même qu'il préviendra leur fureur.
Le moyen fur lequel il fe fonde
un paffage inconnu par lequel il peut la
faire échapper la nuit , conduite par fa
garde & par un Officier fidéle. POLIXENE
ne veut pas fuir fans fa mère .
PIRRHUS l'avoit prévu , tout eft difpofé
pour qu'elles partent enfemble.
POLIXENE qui n'a plus rien à ménager
, ne peut retenir une légère éffuion
de fa tendreffe pour PIRRHUS
dans le remerciment qu'elle lui fait .
POLIXENE à PIRRHUS.
» Plus vous vous montrez généreux ,
« Et plus je crains pour vous la colère des Dieux.
PIRRHUS.
» Quand POLIXENE à mon fort s'intéreſſe ,
» Pirrhus eft trop heureux.
» Le péril croît , craignez un Peuple furieux .
POLIXENE , àpart , en s'en allant.
» Qu'il en coûte à mon coeur pour cacher fa
> tendreſſe !
PIRRHUS s'applaudiffant déja du
fuccès de fon ftratagême , eft arrêté
168 MERCURE DE FRANCE.
par une main invifible . Il voit fortir de
Terre la JALOUSIE le DESESPOIR ,
la FUREUR & toute leur Suite . C'eſt ce
qui forme le Ballet dont nous avons
rendu compte dans le précédent Mercure
en parlant de la repréſentation de
cet Opéra.
PIRRHUS eft perfécuté par les flambeaux
de cette Troupe infernale ; le
poifon paffe dans fon coeur , il eft menacé
d'éprouver tous les tourmens qui
peuvent déchirer une âme , & la JALOUSIE
, laffe enfin de fa perfécution ,
finit la Scène avec lui comme ZORAÏ-
DE avec NINUS dans Pirame & Thibé.
ככ
LA JALOUSIE , à Pirrhus.
Téléphe adore Polixène ;
» Il eft prêt à te la ravir .
PIRRHUS fe difpofe à exhaler toute
la violence de la funefte paffion
qu'on vient de lui infpirer. TELEPHE
paroît , il fupporte d'abord les reproches
de fon ami ; TELEPHE a les forces
& la fermeté de la vertu ; il en accable
PIRRHUS à fon tour ; & celuici
, malgré les efforts de la JALOUSIE,
fecondée de la rage & du DÉSESPOIR,
céde auffitôt à ce pouvoir , & finit par
confier
FEVRIER . 1763. 169
confier fa maîtreffe à cet ami pour af
furer fa fuite , quoiqu'il le connoiffe
alors pour fon rival.
Dans le cinquième Acte le Théâtre
repréfente un Monument élevé aux Mánes
d'Achille. Un Autel eftfur le devant.
PIRRHUS eft feul , il s'applaudit d'avoir
pu triompher de lui-même ; il ne
fent pas moins ce qu'il lui en coûte. Il
termine fon Monologue par cette invocation
aux Mânes d'Achille.
» Mânes facrés , Ombre que je révére ,
» Et vous , Dieux tout-puiffans ! calmez votre
» colère ,
» Si l'Amour fit mon crime , hélas ! ce même
» Amour
» Met le comble à mes maux , & vous venge en
›› ce jour.
HECUBE vient apprendre à PIRRHUS
la mort de TELEPHE. Elle infulte
aux regrets fincères de ce Prince ,
en lui imputant la fin tragique de fon
ami. Elle prétend que c'eft lui -même
qui a guidé les affaffins dans les fentiers
obfcurs qui conduifoient au rivage.
PIRHUS , indigné , reprend en ce
moment la noble fierté d'où l'Amour
H
170 MERCURE DE FRANCE .
l'avoit fait defcendre dans tout le
cours de l'action , & répond à HECUBE.
>> Dieux , quelle horreur! qui , moi , quand , pour
>>fauver vos jours ,
» J'immolois jufqu'à ma tendreſſe !
» Quand , bravant de Junon la haine vengereffe ,
» Des maux de mes Sujets j'éternifois le cours !
HECUBE ne fe rend point ; elle perfifte
dans fes reproches injurieux . PIRRHUS
, dont la patience eft épuisée ,
lui dit enfin :
» C'en eft trop, je voulois aux dépens de ma vie ,
» Arracher votre fille à la mort :
» Mais , qu'elle vive ....ou qu'on la faerifie ....
» PIRRHUS l'abandonne à fon fort.
;
HECUBE , alors change de ton &
devient fuppliante , pour engager PIRRHUS
à fauver les jours de fa fille
mais c'eft en vain , PIRRHUS eft devenu
inexorable : la furieuſe HECUBE
apperçoit en ce moment POLIXENE ,
entre les mains des Sacrificateurs . &
ornée des funeftes guirlandes dont on
paroit les victimes . Elle ne fe contient
plus : elle tire un poignard de deffous fon
vêtement & le léve fur PIRRHUS . POFEVRIER.
1763. 171
LIXENE s'élance entre - deux & arrache
le poignard des mains d'HECUBE
en difant :
» Je frémis :
HECUBE.
» C'eft POLIXENT
» Qui vient défarmer ma fureur. "
POLIXEN E.
>>J'ai laiffé voir le fecret de mon coeur ;
» Si je mérite votre haine ,
» Bientôt ma mort ....
PIRRHUS .
Non plutôt qu'en ce jour
» Et la flamme & le fer dévaſtent ce féjour.
Le Grand- Prêtre reclame contre cet
irréligieux attentat de PIRHHUS, Ce
Prince animé par la déclaration de Po-
LIXENE , s'opiniâtre davantage contre
l'ordre des Dieux . Loin d'en être puni ,
le Monument s'ouvre . L'Ombre d'Achille
paroît , pour annoncer à PIRRHUS
le fort le plus flatteur.
»Pirrhus , au deftin le plus doux ,
»Le Ciel vous permet de prétendre :
» THÉTIS a de JUNON défarmé le courroux.
PIRRHUS remercie ; l'Ombre porte
fa bienfaifante attention jufqu'à or-
Hij
172 MERCURE DE FRANCE
donner elle-même la fête de ce grand
jour,
PIRRHUS demande l'aveu de Po-
LIXENE , qui à fon tour follicite celui
de fa mère. La cruelle HECUBE s'adoucit.
Les Guerriers & les Peuples
viennent célébrer l'hymen de PIRRHUS
& de POLIXENE,
OBSERVATIONS fur le Poëme
de POLIXENE.
Le Sujet que l'Auteur a choifi pour le premier
effai de fa Muſe avoit été traité plufieurs fois au
Théâtre Lyrique , mais toujours fans fuccès.
On ne peut refuſer à ce nouveau Poëme une
conduite raiſonnée , une action bien liée & des
Scènes affez réguliérement filées. Cependant il a
été l'objet de quelques cenfures , tant verbales ,
qu'imprimées dans des Ecrits publics . Nous altons
chercher à les réfumer & à les difcuter
par une critique impartiale , moins en faveur de
l'Auteur , qui fans doute le défendroit mieux luimême
, que pour l'intérêt de l'art dramatique
qui ne peut que gagner à ces fortes de difcuffions
, attendu qu'il n'y a pas encore de Poëtique
bien arrêtée pour ce genre de Poëmes.
En convenant que la fable de ce Drame eft
bien foutenue , on reproche d'abord qu'elle eft
contraire à ce que nous fçavons tous fur PIRRHUS
&fur POLIXENE. A cet égard le reproche
tombe de lui - même , fi cela a fervi à traiter
plus heureufement ce Sujet qu'il ne l'avoit été
auparavant, Il feroit dangereux néanmoins que
FEVRIER. 1763. 173
ces exemples fe multipliaffent , & qu'on y fût encouragé
par des fuccès ; car il eft des bornes aux
licences les plus étendues dans les Arts. On permet
au Peintre d'Hiftoire d'orner ſes ſujets , de
les modifier même à fon avantage ; mais on
ne lui pardonneroit pas de nous repréſenter les
grands traits hiſtoriques ou poëtiques d'une manière
trop oppofée à la connoiffance générale des
faits. On ne doit pas s'arrêter davantage aux inimitiés
des Pères de PIRRHUS & de TELEPHE
ni au paffage de ce dernier , de la Troade en Europe
pour retourner en Myfie. Il n'eft pas hors
du cours naturel des événemens & fur-tour
entre les héros , de voir une amitié très-étroite
entre les enfans d'ennemis irréconciliables. Quant
au voyage de TELEPHE , on ne voit pas quel eft
l'inconvénient de faire prendre le plus long à un
héros d'Opéra , lorsque cela peut être utile à la
conftitution d'un bon Poëme.
>
Il eft des queſtions plus importantes fur les
caractères des perfonnages & fur quelques parties
de la conduite de ce Poëme . 1º . Sur les caractères.
Le perfonnage fubordonné ( TELEPHE )
paroît , dit-on , fait pour être le plus intéreffant ,
parce qu'il eft le plus eftimable. En effet , ce caractère
, qui eft très- bien foutenu , a tous les avantages
de la vertu & du véritable courage , fans
en avoir le fafte , & il ſe manifefte dans tout le
drame , non par un vain étalage des maximes ,
mais par des actions dignes de toucher tous les
coeurs honnêtes. Cependant c'eſt le feul des perfonnages
véritablement malheureux dans le cours
de l'action , & le feul qui périffe à fon dénoûment.
A cela nous croyons que l'Auteur pourroit
répondre , qu'on eft obligé fouvent de mettre
le principal mobile de l'action dans les perfonf
H iij
174 MERCURE DE FRANCE.
nages fubordonnés , plutôt que dans les perfor
wages principaux. Que fi quelquefois la fcélérarelle
de ces feconds perfonnages eſt néceffaire au
mouvement de l'action & à l'intérêt des perſon ·
nagesprincipaux , lorfqu'ils font vertueux; d'autres
fois , par des moyens contraires , c'eſt la vertu de
ces perfonnages fubfidiaires qui fert à mettre dans
des fituations plus intéreffantes des caractères
mêlés de vices & de foibleffes , lefquels ne font
pas les moins propres à l'intérêt théâtral , &
prèfque toujours plus que les caractères entiérement
vertueux. De la première eſpéce font ici
les caractéres de PIRRHUS & de POLIXENÉ .
L'Auteur a donc dû les conftituer ainfi pour
remplir fon objet. Mais à l'égard de POLIXENE ,
fi l'on demande comment a-t- elle pû fe prendre
d'un penchant fi tendre & fi invincible pour un
Prince dont le premier aſpect ne lui a offert qu'un
vainqueur implacable , le fer & le feu à la main ,
ravageant fa Patrie , maflacrant tous les fiens
& particuliérement fon père , ce qui eſt ſpécialement
énoncé dans le Drame? Comment , malgré
la clémence de l'Ombre d'ACHILLE , cet
autre ennemi furieux de fa famille , comment ,
dit-on encore , peut- elle conſentir à recevoir une
main encore fumante d'un fang fi cher & fi refpectable
pour elle ? A cela nous convenons que
fi l'on ne confultoit que les moeurs & la nature
pour ces fortes de Poëmes , il feroit peut- être affez
difficile de répondre.
Quant à la conduite , il nous paroît que le
reproche qu'on fait à PIRRHUS de faire refter
TELEPHE avec lui , lorſqu'il eſt menacé par Ju-
NON n'eft pas auffi bien fondé que les autres.
Non feulement on fent bien que l'Auteur
avoit befoin de TELEPHE pour le fil de fon
FEVRIER . 1763. 175
fût
pas
action mais il a trouvé par - là , le moyen
de préfenter une vérité morale , bien importante
, contre les prétendus efprits-forts ,
qui cherchent toujours à affocier autant qu'ils
peuvent des complices contre le Ciel , & qui
femblent ne réunir leurs forces contre fes décrets
que pour mieux laiffer voir leur foibleſſe.
Il est peut- être vrai , comme on l'a remar
qué , que la colere des Dieux vengeurs n'y eft
pas peinte fous des couleurs bien redoutables.
Mais indépendamment du befoin qu'il y avoit
pour la marche de l'action que PIRRHUS ne
arrêté par un pouvoir irréfiftible dans la
paffion ; d'autre part , les Dieux font-ils moins
véritablement repréſentés par la rigueur des
châtimens que par les effets de leur clémence ?
Ce qui femble un peu plus difficile à concilier
eft l'appareil terrible & tous les efforts de la ALOUSIE
en perfonne avec la RAGE , le DESESPOIR
& tout l'Enfer déchaîné , pour verfer leur
fatal poifon dans le coeur de PIRRHUS , avec le
peu d'effet que cela produir fur lui , par la facilité
que TELEPHE trouve l'inftant d'après à le
calmer , & le confentement qu'il apporte à lui
remettre fa Maitreffe entre les mains. Paffant
aux détails , nous répondrons à ceux qui demanderoient
dans ce Poëme plus de Madrigaux
, plus de ces phrafes qui développent lesfentimens
du coeur ou les fentimens de l'efprit , que
le courage d'avoir fçû fe paffer de ces brillans
Lecours , en mérite d'autant plus d'éloges dans
un temps où l'on fait de ces frivoles Beautés
un abus , que les mêmes Critiques , qui les régrettent
davantage en cette occafion , condamnent
avec austérité dans tous les ouvrages modernes.
Peut-être eft- ce par un même motif , que
H iv
176 MERCURE DE FRANCE.
l'Auteur a dédaigné les négligences de ftyle , les
enjambemens de vers , & les répétitions des confonnes
dures dans un même vers , & qui fonnent mal
à l'oreille. La facilité d'éviter ce que la critique
reproche à cette égard , doit laiffer croire que
l'Auteur a facrifié volontiers cette molle & facile
délicateffe à l'énergie du fens & à l'éxactitude
du Dialogue lorfqu'il à crû qu'elle auroit
pû y mettre obftack .
On continue cet Opéra trois jours
de la femaine . N'étant pas informés ,
lorfque nous avons rendu compte de
la premiere repréſentation , que le Ballet
de la Jaloufie au quatriéme Acte
étoit de la compofition de M. de LAVAL
, nous avons obmis alors de faire
mention de cette circonftance .
Le Jeudi 20 Janvier on a remis les
Fêtes Grecques & Romaines , Ballet ,
pour le continuer les Jeudis fuivans . Le
Public a paru très-fatisfait de revoir cet
Opéra.
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Résumé : OPERA. EXTRAIT DE POLIXENE, Tragédie de M. JOLIVEAU, Secrétaire perpétuel de l'Académie Royale de Musique, mise en Musique par M. DAUVERGNE, Maître de Musique de la Chambre du ROI.
L'opéra 'Polixène' est une tragédie écrite par M. Joliveau et mise en musique par M. Dauvergne. L'action se déroule à Larisse et implique plusieurs personnages, dont Pirrhus, fils d'Achille, Télèphe, prince des Myciens, Hécube, veuve de Priam, et Polixène, fille d'Hécube et de Priam. Au premier acte, Pirrhus révèle à Télèphe son amour pour Polixène et son intention de l'emmener dans ses États. Un orage sépare leurs vaisseaux, et Télèphe tente sans succès de combattre la passion de Pirrhus. Lors du triomphe de Pirrhus, les captifs troyens sont libérés et célèbrent sa bonté. Junon apparaît et menace Pirrhus et les Troyens de sa vengeance. Au deuxième acte, Pirrhus prie la mer de l'engloutir après avoir été séparé de Polixène. Thétis apparaît, calme la tempête et promet de rendre Polixène à Pirrhus tout en l'avertissant de la colère de Junon. Polixène arrive et avoue son amour pour Pirrhus, mais elle le repousse. Hécube accuse Pirrhus de la destruction de sa famille, mais Pirrhus exprime son désir de les protéger. Au troisième acte, Télèphe apprend qu'une contagion frappe Larisse et craint pour la vie de Polixène. Hécube tente de le convaincre de tuer Pirrhus, mais Télèphe refuse. Polixène découvre le complot d'Hécube et exprime sa peur pour Pirrhus. Un oracle annonce que Polixène doit être sacrifiée sur le tombeau d'Achille pour apaiser Junon, mais Pirrhus refuse de la sacrifier. Au quatrième acte, Hécube décide de sauver Polixène en implorant l'aide de Télèphe. Pirrhus annonce à Polixène qu'il la fera échapper. La Jalousie, le Désespoir et la Fureur tourmentent Pirrhus, mais Télèphe accepte de l'aider à fuir malgré sa passion pour Polixène. Au cinquième acte, Pirrhus se réjouit d'avoir triomphé de ses passions et invoque les mânes d'Achille. Hécube annonce la mort de Télèphe, mais les détails de cette mort ne sont pas précisés. Pirrhus et Polixène se marient malgré les objections initiales d'Hécube. L'ombre d'Achille apparaît pour annoncer un destin favorable à Pirrhus. Le poème est critiqué pour ses divergences avec les faits historiques connus sur Pirrhus et Polixène, mais il est loué pour sa conduite raisonnée et ses scènes bien structurées. Les critiques soulignent également la complexité des caractères et la nécessité des actions des personnages subordonnés pour le développement de l'action.
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8
p. 178-180
OPÉRA.
Début :
L'ACADÉMIE Royale de Musique a continué Titon & l'Aurore, (ainsi que [...]
Mots clefs :
Théâtre, Académie, Usage
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texteReconnaissance textuelle : OPÉRA.
OPERA.
L'ACADÉMIE Royale de Mufique a
continué Titon & l'Aurore , ( ainfi que
les Fêtes Grecques & Romaines les
Jeudi , jufques à la clôture de fon
Théâtre , laquelle s'eft faite cette année
, le Samedi 19 Mars , pour le com- le.compte
de l'Académie , & non pour les Acteurs
, comme il étoit d'ufage. Ceux- ci
ont penfé qu'il feroit plus utile au produit
du Bene-fit vulgairement nommé
Capitation , de donner quelques BALS
à la rentrée ; ils ont indiqué le premier
pour le 12 du préfent mois d'Avril.
M. MUGUET , dont nous avons précédemment
parlé à l'occafion de l'Ariette
du Dieu des Coeurs , a chanté le
rôle entier de Titon , dans lequel il a
été applaudi avec juſtice.
M. DUPAR , jeune Hautecontre
d'une figure & d'une taille avantageufe
pour le Théâtre , a débuté par un MorAVRIL.
1763. 179
ceau détaché. Les Connoiffeurs font
très-contens de la qualité de cette voix
qu'ils comparent même à celles dont la
mémoire eft célébre . Ils trouvent dans
ce Sujet le véritable caractère du fon
de Hautecontre joint à l'aptitude des
agrémens éffentiels dans le chant. Lorfqu'un
peu plus d'expérience & d'ufage
aura mis M. DUPAR en état d'être
mieux connu du Public , nous le ferons
nous-mêmes d'en rendre un compte
plus exact.
Mlle DUPLAN , jeune Sujet de l'Académie
, a eu occafion de paroître
quelquefois , & de faire entendre un
très-beau corps de voix , avec une difpofition
très-favorable à l'expreffion
d'un fentiment vif & des paffions les
plus fortes.
La figure de cette jeune Perfonne eft
heureufement coupée , & fpécialement
pour le genre d'expreffion auquel elle
paroît portée.
Les reprefentations des Jeudis , comme
nous l'avons déja fait remarquer ,
ont été une école très - avantageufe ,
tant pour former les jeunes Sujets de
ce Théâtre , que pour faire développer,
par l'ufage , les talens de quelques autres
qui n'ont pas de fréquentes occa
· ༄
Hvi
180 MERCURE DE FRANCE.
fions de fervir , & par conféquent d'être
connus du Public .
N. B. M. GELIOTE , dont nous.
avions indiqué la retraite du Théâtre
après les représentations de TITON &
L'AURORE , ne s'eft retiré qu'en 1754,
à la clôture du Théâtre , après les re- .
préfentations d'une remife de CASTOR
& POLLUX. Ce qui avoit induit en
erreur à cet égard , c'est qu'en effet il devoit
quitter après l'Opéra de TITON
& qu'il fut engagé à refterencore une
année
L'ACADÉMIE Royale de Mufique a
continué Titon & l'Aurore , ( ainfi que
les Fêtes Grecques & Romaines les
Jeudi , jufques à la clôture de fon
Théâtre , laquelle s'eft faite cette année
, le Samedi 19 Mars , pour le com- le.compte
de l'Académie , & non pour les Acteurs
, comme il étoit d'ufage. Ceux- ci
ont penfé qu'il feroit plus utile au produit
du Bene-fit vulgairement nommé
Capitation , de donner quelques BALS
à la rentrée ; ils ont indiqué le premier
pour le 12 du préfent mois d'Avril.
M. MUGUET , dont nous avons précédemment
parlé à l'occafion de l'Ariette
du Dieu des Coeurs , a chanté le
rôle entier de Titon , dans lequel il a
été applaudi avec juſtice.
M. DUPAR , jeune Hautecontre
d'une figure & d'une taille avantageufe
pour le Théâtre , a débuté par un MorAVRIL.
1763. 179
ceau détaché. Les Connoiffeurs font
très-contens de la qualité de cette voix
qu'ils comparent même à celles dont la
mémoire eft célébre . Ils trouvent dans
ce Sujet le véritable caractère du fon
de Hautecontre joint à l'aptitude des
agrémens éffentiels dans le chant. Lorfqu'un
peu plus d'expérience & d'ufage
aura mis M. DUPAR en état d'être
mieux connu du Public , nous le ferons
nous-mêmes d'en rendre un compte
plus exact.
Mlle DUPLAN , jeune Sujet de l'Académie
, a eu occafion de paroître
quelquefois , & de faire entendre un
très-beau corps de voix , avec une difpofition
très-favorable à l'expreffion
d'un fentiment vif & des paffions les
plus fortes.
La figure de cette jeune Perfonne eft
heureufement coupée , & fpécialement
pour le genre d'expreffion auquel elle
paroît portée.
Les reprefentations des Jeudis , comme
nous l'avons déja fait remarquer ,
ont été une école très - avantageufe ,
tant pour former les jeunes Sujets de
ce Théâtre , que pour faire développer,
par l'ufage , les talens de quelques autres
qui n'ont pas de fréquentes occa
· ༄
Hvi
180 MERCURE DE FRANCE.
fions de fervir , & par conféquent d'être
connus du Public .
N. B. M. GELIOTE , dont nous.
avions indiqué la retraite du Théâtre
après les représentations de TITON &
L'AURORE , ne s'eft retiré qu'en 1754,
à la clôture du Théâtre , après les re- .
préfentations d'une remife de CASTOR
& POLLUX. Ce qui avoit induit en
erreur à cet égard , c'est qu'en effet il devoit
quitter après l'Opéra de TITON
& qu'il fut engagé à refterencore une
année
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Résumé : OPÉRA.
En 1763, la saison de l'Académie Royale de Musique s'est achevée le 19 mars, avec une clôture bénéficiant à l'Académie plutôt qu'aux acteurs. Ces derniers ont proposé d'organiser des bals à partir du 12 avril. M. Muguet a interprété Titon dans l'opéra 'Titon & l'Aurore' et a été acclamé. M. Dupar, un jeune haute-contre, a fait ses débuts avec succès, impressionnant par la qualité de sa voix. Mlle Duplan, une jeune artiste de l'Académie, a également montré un beau timbre vocal et une grande expressivité. Les représentations du jeudi ont servi de formation pour les jeunes talents, permettant de développer les compétences de certains artistes moins fréquemment sur scène. Une note précise que M. Geliote s'est retiré du théâtre en 1754, après les représentations de 'Castor & Pollux', et non après 'Titon & l'Aurore'.
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9
p. 173-174
OPERA.
Début :
LA Salle de l'Opéra, comprise dans l'incendie qui a consumé (le Mercredi [...]
Mots clefs :
Salle, Académie royale de musique, État, Incendie
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texteReconnaissance textuelle : OPERA.
OPERA.
LA Salle de l'Opéra , compriſe dans
l'incendie qui a confumé ( le Mercredi
6 de ce mois ) quelques parties des Bâtimens
du Palais Royal , ayant été
totalement détruite par la violence
des flammes , en moins d'un quart
d'heure , l'Académie Royale de Mufique
n'a pu reprendre le cours de fes repréfentations
dans le temps accoutumé.
Cependant, l'attention du Gouvernement
pour tout ce qui peut intéreffer le
Public , n'a pas laiffé un moment d'incertitude
fur le fort d'un Spectacle auffi
néceffaire à l'amufement des Citoyens,
H iij
174 MERCURE DE FRANCE,
que convenable à la fplendeur de la Ca
pitale . Dès le lendemain de l'embrâſement
, M. le Comte de S. Florentin , Miniftre
& Secrétaire d'Etat , adreffa aux
fieurs Rebel & Francoeur , Directeurs de
cette Académie , des ordres par écrit à
l'effet d'affurer les Sujets qui la compofent
, de la continuité de leur état , en
enjoignant à chacun d'eux de ne fe pas
écarter , & d'être prêts à reprendre l'exercice
de leurs talens inceffamment ,
dans le lieu qui aura été déterminé ,
en attendant qu'on ait pris les mefures
& les moyens convenables pour la
conftruction d'une nouvelle Salle.
LA Salle de l'Opéra , compriſe dans
l'incendie qui a confumé ( le Mercredi
6 de ce mois ) quelques parties des Bâtimens
du Palais Royal , ayant été
totalement détruite par la violence
des flammes , en moins d'un quart
d'heure , l'Académie Royale de Mufique
n'a pu reprendre le cours de fes repréfentations
dans le temps accoutumé.
Cependant, l'attention du Gouvernement
pour tout ce qui peut intéreffer le
Public , n'a pas laiffé un moment d'incertitude
fur le fort d'un Spectacle auffi
néceffaire à l'amufement des Citoyens,
H iij
174 MERCURE DE FRANCE,
que convenable à la fplendeur de la Ca
pitale . Dès le lendemain de l'embrâſement
, M. le Comte de S. Florentin , Miniftre
& Secrétaire d'Etat , adreffa aux
fieurs Rebel & Francoeur , Directeurs de
cette Académie , des ordres par écrit à
l'effet d'affurer les Sujets qui la compofent
, de la continuité de leur état , en
enjoignant à chacun d'eux de ne fe pas
écarter , & d'être prêts à reprendre l'exercice
de leurs talens inceffamment ,
dans le lieu qui aura été déterminé ,
en attendant qu'on ait pris les mefures
& les moyens convenables pour la
conftruction d'une nouvelle Salle.
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Résumé : OPERA.
Le 6 mai, un incendie a ravagé la Salle de l'Opéra du Palais Royal en moins de quinze minutes, empêchant l'Académie Royale de Musique de reprendre ses représentations à la date prévue. Le gouvernement, reconnaissant l'importance de ce spectacle pour le divertissement des citoyens et la splendeur de la capitale, a réagi promptement. Le lendemain, le Comte de Saint-Florentin, Ministre et Secrétaire d'État, a envoyé des instructions écrites aux directeurs de l'Académie, Rebel et Francoeur, leur ordonnant de maintenir la disponibilité des membres pour reprendre les activités dès qu'un nouveau lieu serait trouvé, en attendant la construction d'une nouvelle salle.
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10
p. 222-223
SUPPLÉMENT A L'ART. DE L'OPÉRA.
Début :
On ne peut trop se hâter d'annoncer aux Amateurs de ce Spectacle, [...]
Mots clefs :
Spectacle, Satisfaction, Public, Théâtre, Modération, Gestes, Sujets, Scène
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : SUPPLÉMENT A L'ART. DE L'OPÉRA.
Supplément a l’Aht, de l’Opera.
On ne peut trop fe hâter d’annoncer aux Amateurs de ce Spedacle , l’efpoir le mieux fondé qu’il y ait eu depuis longtemps de remplir , à la (aûsfaftion du Public , les principaux tôles de Haurecontre.
Le Jeudi, premier de ce mois, ( Mars) M. La Gros , qui n'avoit chanté ni représenté fur aucun Théâtre > a débute par le rôle de Titon. Sa voix > bien timbrée & delà plus agréable qualité , flé- xib* , touchante & Icgcrea fait le plus grand plai- fir.La manière dont il a chanté prouve qu’il eft déjà confommé dans la mu tique. On ne peut avoir plus de précifion & de juftelle 5 011 ne peut, même ap-ès un long éxercice , articuler plus nettement , prononcer plus correctement, & mieux jca.idcr' ks paroles. Sa figure eft agréable &
MAR S. 1764. 224
h taille'forc théâtrale. Une Cage modération de geftes, a (auvé (on début dos difgraces de prcfque cous ceux qui parodient pour la piemicre fois. 11 y a tout lieu d’elpérer de ce Sujet,qu’il ne s’abandonnera pas aux ridicules & furieux coups debras, I on peur s exprimer ai nu , donc il ne crouveroïc que trop de modèles fur cette Scène. On peuc déjà prélTentir aufli , par la fenlibilitc de fa voix» celle de Ion âme. Telles font les b?ureuf.*s difpofi- tions d’un calent qu’on ne peuc devoir qu’a la Nature , mais qu’il ell nécelfaire que i’An & la J pratique mettent en auvre.
On ne peut trop fe hâter d’annoncer aux Amateurs de ce Spedacle , l’efpoir le mieux fondé qu’il y ait eu depuis longtemps de remplir , à la (aûsfaftion du Public , les principaux tôles de Haurecontre.
Le Jeudi, premier de ce mois, ( Mars) M. La Gros , qui n'avoit chanté ni représenté fur aucun Théâtre > a débute par le rôle de Titon. Sa voix > bien timbrée & delà plus agréable qualité , flé- xib* , touchante & Icgcrea fait le plus grand plai- fir.La manière dont il a chanté prouve qu’il eft déjà confommé dans la mu tique. On ne peut avoir plus de précifion & de juftelle 5 011 ne peut, même ap-ès un long éxercice , articuler plus nettement , prononcer plus correctement, & mieux jca.idcr' ks paroles. Sa figure eft agréable &
MAR S. 1764. 224
h taille'forc théâtrale. Une Cage modération de geftes, a (auvé (on début dos difgraces de prcfque cous ceux qui parodient pour la piemicre fois. 11 y a tout lieu d’elpérer de ce Sujet,qu’il ne s’abandonnera pas aux ridicules & furieux coups debras, I on peur s exprimer ai nu , donc il ne crouveroïc que trop de modèles fur cette Scène. On peuc déjà prélTentir aufli , par la fenlibilitc de fa voix» celle de Ion âme. Telles font les b?ureuf.*s difpofi- tions d’un calent qu’on ne peuc devoir qu’a la Nature , mais qu’il ell nécelfaire que i’An & la J pratique mettent en auvre.
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Résumé : SUPPLÉMENT A L'ART. DE L'OPÉRA.
Le document annonce la prochaine représentation de l'opéra 'Haurecontre' et exprime l'espoir de satisfaire le public grâce à la distribution des rôles principaux. Le 1er mars 1764, M. La Gros, un débutant, a interprété le rôle de Titon. Sa voix, bien timbrée et agréable, a été saluée pour sa flexibilité, sa touche et sa légèreté, démontrant une maîtrise de la musique. Sa prononciation et son articulation des paroles étaient précises et correctes. Physiquement, il possède une figure agréable et une taille adaptée à la scène. Sa modération dans les gestes a évité les erreurs courantes chez les débutants. On espère qu'il ne succombera pas aux excès gestuels souvent observés sur scène. Sa voix sensible laisse présager une âme sensible. Ces qualités, naturelles, doivent être développées par l'art et la pratique.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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