L'ADORATION DES MAGES .
J
POEM E.
E chante les saints Rois qui des bords de l'Asie
,
Vinrent à Bethéem adorer le Messie ,
Et qui par
leur respects , leur amour et leur foy ,
Furent marquez du Sceau de la nouvelle loy.
!
O toi , divin rayon qui leur servit de guide
Esprit , qui rassuras leur démarche timide ,
Tu peus seul mé guider dans un si grand dessein,
Sans ton secours ma voix s'éforceroit en vain ,
Source de verité prête - moi ton langage ,
Que chacun dans mes vers admire ton ouvrage
Ce jour , cet heureux jour si long- tems attendu
Ne tient plus des humains le bonheur suspendu ,
Les Chantres immortels des celebrès portiques ,
Du Redempteur qui naît entonnent des Cantiques
L'Univers attentif applaudit aux Concerts
Dont la sainte harmonie éclate dans les airs.
Tout anonce sa gloire, et qui peut méconnoître ,
Le Sauveur d'Israël que la terre voit naître ?
Trois Rois , chéris du Dieu , qui répand ses
bienfaits ,
'Aperçoivent , ravis , le signal de la paix ,
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E iij Es
2582 MERCURE DE FRANCE
Et par l'heureux secours d'un brillant caractere
Pénétrent le secret de l'auguste Myftere.
Le germe de la foy qui fructifie en eux ,
Les assure dèslors du succès de leurs veux ,
Et versant dans leurs coeurs une allégresse extrême,
Soumet à leur devoir , l'orgueil du diadême ,
Ils partent de ces bords , que d'un oeil tout rian
Embell it le Soleil , sorti de l'Orient ;
Le rayon répandu sous la voute azurée
Vient tracer à leurs yeux une route assurée,
Déja Sion les voit , cherchant le nouveau né ,
Rassembler autour d'eux , un grand peuple éton
né ,
Ils parlent et soudain Jérusalem se trouble ,
D'Herode , soupçonneux , l'épouvante redouble ;
Il consulte , effrayé , les Docteurs de la Loy ,
Mais leur réponse encore augmente son effroy ;
Et reveille en son coeur sa fureur homicide.
Le traitre cependant , sous un dehors perfide ,
Voit les Mages , s'informe , et cachant dans son
sein ,
Du plus noir attentat , le barbare dessein
Béthléem, leur dit - il , est l'endrolt où l'on pense.
Que le CHRIST des Hébreux peut avoir pris naissance
,
Allez lui rendre hommage , Hérode avec sa Cour,
Pour l'aller adorer , attend votre retour.
Cet Ennemi juré , de la race chérie ,
ComNOVEMBRE.
1731. 258 ž
Comme un loup ravissant , qu'anime la furie
Dans son piége bien - tôt croit tenir cet enfant ,,
Immolê sous les coups d'un Couteau triom
phant.
Ministre des enfers , ton esperance est vaine ;
Celui qui s'est soumis à la nature humaine ,
Est le Fils du Tres- haut , le même dont la voix "
Commande à l'Univers , et fait trembler les Rois
Son Berceau ne craint rien de tes mains criminelles
,
Un Chérubin le garde à l'ombre de ses aîles,
L'horreur d'un tel complot a fait pâlir les
cieux.
Hâtez - vous , sages Rois , d'abandonner ces
lieux ,
De vos pieds chancelans secouez la poussiere ;
Le rayon éclipsé , redonne sa lumiere.
Les Mages transportez d'amour et de plaisir ,
Découvrent le séjour , objet de leur désir .
Le celeste flambeau sur Béthléem s'arrête:
Son éclat est fixé sur une humble retraite ,
Là, se montre à leurs yeux l'enfant emmailloté
Entouré des rayons de sa divinité ;
Quel spectacle admirable ? Eh! quelle main puissante
Fait agir à l'instant la grace triomphante !
Leur coeur est devenu le
rampart de la foy ;
Les Mages transportez reconnoissent leur Roy ;
Et du Verbe fait chair , l'éclatante victoire ,
E iiij Et 1
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Couronne l'Eternel d'une nouvelle gloire ,
Ces zélez courtisans ; ces illustres rivaux ,
Changez par l'Esprit Saint en des hommes nouveaux
,
Vont répandre chez eux la semence feconde ,
Qui doit de ses erreurs purifier le monde ;
Les Gentils au vrai Dieu consacrent leurs Autels ,
Entraînent avec eux le reste des mortels ;
Le Très- Haut s'applaudit , et pour prix de leur
zelę ,
Dans les Cieux leur prépare une Palme immortelle
.