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1
p. 12-21
EXTRAIT d'un Procés qui se poursuit au Conseil.
Début :
Roman, Gondol, & Lati, tous trois Officiers Mariniers du Département [...]
Mots clefs :
Vaisseau, Armateur, Anglais, Droit, Question, Action, Prisonniers, Guerre
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texteReconnaissance textuelle : EXTRAIT d'un Procés qui se poursuit au Conseil.
EXTRAIT
D'un Procésquisepoursuit
au Conjeil.
Roman,Gondol, & Lati,
tous trois Officiers Mariniers
du Département de
Toulon, s'embarquerent à
Marseille sur un Vaisseau
Marchand,
En saisant route vers le
Havre de Grace ils furent
attaquez & pris parunVaisseau
de
-
Guerre Anglois qui
lesconduisit à Baston; ils y
resterent ¡' quelque temps
gardez à vue.
Le 20. Décembre 1709,
on les embarqua dans un
autre vaisseau Marchand
qui partoit pour Londres,
ou bien il s'y embarquérent
de leur bon gré, car c'çft
là l'un des points que les
Avocats se disputent. Le fait
dont ils conviennent tous,
c'estqu'il y avoir sur le Vaisseau
dont il s'agit huit Anglois,
sçavoir leCapitaine,
un Capitaine passager, un
Pilote & cinq Matelots.
Nostrois prisonniers
conspirérent la mort des
deuxCapitaines & du Pilote,
chacun deux se
chargea detuersonhomme;
tous trois réunirent, & les
cinq Matelots voyantleurs
Chefs morts, se fourmirent
ànos troisFrançoisqui se
trouverent enfin maistres
du Vaisseau Anglois.
Avant que d'achever
le recit du fait on pouroit
faire une premiere question
curieuse sur l'action
de ces trois François :
Est-elle louable ou blâmable?
S'ils avoient esté prisonniers
sur leur parole,
leur action feroit sans
doute un crime énorme.
S'ils sont prisonniers
forcez & mal-traitez,
l'action change de nature
: celuy qui traite
cruellement un prisonnier
le met en droit de
tenter jusqu'aux voyes
cruelles pour se délivrer;
On leur allegue qu'ils
n'étoientpoint du tout
prisonniersen cette occasion,
s'estant engagez &
embarquezde bonne
volonté,&qu'étant à la
solde & même à la table
du Capitaine
,
leur
cntreprife a esté une trahison.
Ils prétendent que telles
circonstances peuvent
se rencontrer dans
pareille entreprise, quelle
ne seroitpas indigne
d'un Héros. La question
est donc de sçavoir si
l'action est heroïque ou
criminelle.
J'appuye beaucoup sur
cette premierequestion,
car ilme paroist que c'est
le principalfondement
de celle que je vais expliquer
en continuant le
recit du fait.
Ce fut le 10. de Janvier
1710, que ces trois François
se rendirent maîtresduVaisseau.
Ilsfaisoientroutevers
la France lors qu'ils rencontrerent
à la hauteur des Sorlingues
un Armateur de
Roscoff, Armateur François,
qui voyant un Vaisseau
de la Fabrique Angloise,
s'enréjouit comme
d'une capture qu'il pouvoit
faire.
Nos François de leur
costé se réjoüirent à Tafped:
duVaisseauFrançois, dont
ils esperoient du secours,&
se laissant aborder, se declarerenc
François & amis de
l'Armateur. Mais l'Armateur
voulut toujoûrsqu'ils
fussent-ennemis & Anglois
comme leur Vaisseau qu'il
vouloit gagner; en un mot
il s'en empara & jetta à terre
les François qui s'en étoient
emparez sur les Anglois.
La grande question c'est
de sçavoir à qui doit appartenir
ce Vaisseau. On a déja
jugé par provision qu'il
napparcenok a pas un
d'eux, parce que l'Armateur
n'ayant pas droit de conquerir
sur les François, sa
Commissiond'Armateur
est nulle à leur égard,& que
les François n'ayant point
du tout de Commission
n'ont pû le conquerir sur
les Anglois.
C'est pour revenir contre
ce Jugement de l'Amirauté
que les trois François ont
presenté Requeste, au Conseil.
Ils prétendent que le
Vaisseau leur apartienr par
le droit des gens comme le prix
d'une dEiion légitimé & glorieuse.
Ainsi, selon euxmesmes
la question se réduit
à sçavoir s'ils ont tué &
conquis de bonne guerre,
car mauvaise guerre ne peut
jamais établir qu'un mauvais
droit.
D'un Procésquisepoursuit
au Conjeil.
Roman,Gondol, & Lati,
tous trois Officiers Mariniers
du Département de
Toulon, s'embarquerent à
Marseille sur un Vaisseau
Marchand,
En saisant route vers le
Havre de Grace ils furent
attaquez & pris parunVaisseau
de
-
Guerre Anglois qui
lesconduisit à Baston; ils y
resterent ¡' quelque temps
gardez à vue.
Le 20. Décembre 1709,
on les embarqua dans un
autre vaisseau Marchand
qui partoit pour Londres,
ou bien il s'y embarquérent
de leur bon gré, car c'çft
là l'un des points que les
Avocats se disputent. Le fait
dont ils conviennent tous,
c'estqu'il y avoir sur le Vaisseau
dont il s'agit huit Anglois,
sçavoir leCapitaine,
un Capitaine passager, un
Pilote & cinq Matelots.
Nostrois prisonniers
conspirérent la mort des
deuxCapitaines & du Pilote,
chacun deux se
chargea detuersonhomme;
tous trois réunirent, & les
cinq Matelots voyantleurs
Chefs morts, se fourmirent
ànos troisFrançoisqui se
trouverent enfin maistres
du Vaisseau Anglois.
Avant que d'achever
le recit du fait on pouroit
faire une premiere question
curieuse sur l'action
de ces trois François :
Est-elle louable ou blâmable?
S'ils avoient esté prisonniers
sur leur parole,
leur action feroit sans
doute un crime énorme.
S'ils sont prisonniers
forcez & mal-traitez,
l'action change de nature
: celuy qui traite
cruellement un prisonnier
le met en droit de
tenter jusqu'aux voyes
cruelles pour se délivrer;
On leur allegue qu'ils
n'étoientpoint du tout
prisonniersen cette occasion,
s'estant engagez &
embarquezde bonne
volonté,&qu'étant à la
solde & même à la table
du Capitaine
,
leur
cntreprife a esté une trahison.
Ils prétendent que telles
circonstances peuvent
se rencontrer dans
pareille entreprise, quelle
ne seroitpas indigne
d'un Héros. La question
est donc de sçavoir si
l'action est heroïque ou
criminelle.
J'appuye beaucoup sur
cette premierequestion,
car ilme paroist que c'est
le principalfondement
de celle que je vais expliquer
en continuant le
recit du fait.
Ce fut le 10. de Janvier
1710, que ces trois François
se rendirent maîtresduVaisseau.
Ilsfaisoientroutevers
la France lors qu'ils rencontrerent
à la hauteur des Sorlingues
un Armateur de
Roscoff, Armateur François,
qui voyant un Vaisseau
de la Fabrique Angloise,
s'enréjouit comme
d'une capture qu'il pouvoit
faire.
Nos François de leur
costé se réjoüirent à Tafped:
duVaisseauFrançois, dont
ils esperoient du secours,&
se laissant aborder, se declarerenc
François & amis de
l'Armateur. Mais l'Armateur
voulut toujoûrsqu'ils
fussent-ennemis & Anglois
comme leur Vaisseau qu'il
vouloit gagner; en un mot
il s'en empara & jetta à terre
les François qui s'en étoient
emparez sur les Anglois.
La grande question c'est
de sçavoir à qui doit appartenir
ce Vaisseau. On a déja
jugé par provision qu'il
napparcenok a pas un
d'eux, parce que l'Armateur
n'ayant pas droit de conquerir
sur les François, sa
Commissiond'Armateur
est nulle à leur égard,& que
les François n'ayant point
du tout de Commission
n'ont pû le conquerir sur
les Anglois.
C'est pour revenir contre
ce Jugement de l'Amirauté
que les trois François ont
presenté Requeste, au Conseil.
Ils prétendent que le
Vaisseau leur apartienr par
le droit des gens comme le prix
d'une dEiion légitimé & glorieuse.
Ainsi, selon euxmesmes
la question se réduit
à sçavoir s'ils ont tué &
conquis de bonne guerre,
car mauvaise guerre ne peut
jamais établir qu'un mauvais
droit.
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Résumé : EXTRAIT d'un Procés qui se poursuit au Conseil.
Le texte narre l'histoire de trois officiers mariniers français, Roman, Gondol et Lati, originaires de Toulon, qui s'embarquèrent à Marseille sur un vaisseau marchand à destination du Havre de Grâce. Capturés par un vaisseau de guerre anglais, ils furent conduits à Boston puis transférés à Londres le 20 décembre 1709. À bord du nouveau vaisseau, ils conspirèrent pour tuer les capitaines et le pilote anglais, prenant ainsi le contrôle du navire le 10 janvier 1710. Ils rencontrèrent ensuite un armateur français près des Sorlingues, qui, croyant le vaisseau anglais, s'en empara et les jeta à terre. La principale question juridique concerne la propriété du vaisseau. Les Français contestent un jugement de l'Amirauté, affirmant que le vaisseau leur appartient par le droit des gens, en tant que prix d'une action légitime. La controverse porte sur la légitimité de leurs actions et la nature de leur capture.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. [3]-35
LA CONSTANCE des femmes.
Début :
Une fille de condition, nommée Therese, nous servira de modele, [...]
Mots clefs :
Constance, Amant, Honoré d'Urfé, Fiction, Officier, Avocat, Jalousie, Armateur, Époux
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : LA CONSTANCE des femmes.
LA CONSTANCE
desfemmes.
NE fille de condition , nommée
Therefe ,nous fervira de modele , non pas
A ij
4 MERCURE
pour ces conftances heroïques & prodigieufes,
qu'on ne connoît gueres
que par tradition mais
de celles qu'on peut vraifemblablement attendre
d'une femme , & par
confequent d'un hom
me ; car les deux fexes
'n'ont rien àfe reprocher
là -deffus.
Therefe étoit charmante de fa perfonne ,
trés-jeune , & fi peu experimentée , qu'elle ne
GALANT.
རྒྱུན །
જે
connoiffoit encore l'amour que par les Romans. Elle fe fentoit une
fi grande difpofition à
la conftance , qu'elle difoit quelquefois : Non,
je ne veuxjamais aimer,
la vie eft trop courte , une
conftance defoixante ans
ne feroit pas contentement
pour moy. En d'autres
momens elle faifoit reflexion que puis qu'il
faloit aimer neceffairement , il étoit bon de
A iij
6
MERCURE
commencer trés- jeune ,
afin de pouffer la conf
tance le plus loin qu'il
étoit poffible. Elle prit
ce dernier parti , & dés
le lendemain elle fut
épriſe du fils d'un Armateur de faint Malo
Ce jeune homme devint
paffionnément amou
reux d'elle , & au boutde quelque temps on.
parla de mariage. Le
parti parut bon à la mere
de Therefe : mais le jeur-
GALANT. 7
ne homme étant obligé
de fuivre fon pere , qui
faifoit une nouvelle
courſe en mer , ne put
obtenir fon confentemént que pour le reFour. Cependant on convint des articles , on ſe
donna des paroles d'hon
neur , & les amans s'en
donnerent de bien plus.
inviolables , ils fe jurerent un amour éternel
L'Armateur promit de
revenir dans trois mois;
1
A iiij
& MERCURE
& le voila embarqué.
Quelle épreuve pour
Therefe! Devaſtes mers
la feparent defon amant:
mais cette feparation ne
fait que redoubler fon
amour, & les trois mois
d'abſence lui parurent fi
longs , qu'on peut bien
les lui compter pour
trois années de conftance. Cependant elle la
pouffa plus loin ; car fon
amant nerevenant point
encore au bout de fix
GALANT.
autres mois , elle étoit fi
affligée , quefa mere n'ofa lui parler d'un autre
parti qui fe prefentoit.
Elle eut beau lui infi f
nuer que peut- être l'Armateur ne reviendroit
jamais ; elle lui fit même foupçonner que ce
vaiffeau avoit peri : mais
Therefe proteftoit une
fidelité égale pour fon
amant mort ou vif.
Un an entier s'étant
écoulé, & la mere & la
10 MERCURE
fille crurent réellement
que l'Armateur ne reviendroit jamais. On le
pleura commemort pen
dant quelques jours; &
la mere, fans parler de
rien à fa fille , fit trou
yer, comme par hazard,
le fecond amant chez
uneparente , où ellemena fa fille C'étoit un
jeune Officier , fait pour
donner de l'amour , &
qui avoit tout l'efprit
poffible. Il étoit conve
GALANT. H
nu avec la mere qu'il faloit prendre Thereſe par
fon foible. Il la loùa d'abord fur le vœu qu'elle.
avoit fait de ne fe jamais.
marier après avoir perdu
ce qu'elle aimoit. Cette
converfation ne pouvoit
manquer de lui plaire ,
étant fi conforme aux
reſolutions qu'elle avoit
prifes. Elle retournaplu
fieurs fois chez fa parente , où les exhortations
que cet Officier lui fit
IZ MERCURE
fur la conftance produi
firent infenfiblement un
effet contraire , & elle
commença à raifonner
ainfi : Pour aimer bien
conftamment il faut être
aimé de même , & cet
homme- ci aẞureroit mi
conftance par la fienne ,f
jamais je pouvois l'aimer.
Un autre raifonncment que lui fit cët ingenieux amant acheva
de la determiner ; car il
GALANT.
13
Jui prouva qu'elle ne
pouvoit ſe vanter d'être
conftante fans avoir été
mariée, parce que le mariage étoit la pierre de
touche de la conftance,
Therefe , qui tendoit
toûjours à la perfection
de cette vertu , & qui
ne pouvoit la poffeder
éminemment fans fe
marier, prefera pour cette raifon feule l'amant
vivant à l'amant mort :
& peu de temps aprés
14 MERCURE
ce ſecond mariage fut
auffi avancé que l'avoit
été le premier: mais par
malheur il vint à l'Officier un ordre de la Cour
pour aller en Flandres.
Il falut partir dans le
moment , paroles données comme avec l'Armateur, pareils fermens
entre Therefe & l'Officier. Mais les chagrins
de l'abfence furent plus
violens ; car elle aimoit
celui - ci plus que l'au-
GALANT. I
tre , ou , pour mieux di
te, l'amour qu'elle avoit
pour l'Officier lui perfuadoit qu'elle n'avoit
jamais aimé l'Armateurs
car elle le croyoit incapable de changer. Elle
changea pourtant , je ne
vous dirai point par
quels motifs mais , à
coup fûr , ce fut pour
parvenir encore a une
conftance plus parfaite;
car fans cela elle n'en
auroit jamais aimé un
16. MERCURE
troifiéme. Celui-ci étoit
un Avocat , & la mere
conclut avec lui plus
promtement encore qu'-
avec les autres , craignant qu'il ne lui échapât ; car il étoit trés-riche. Le jourfut pris , les
articles furent dreffez :
mais il y avoit une fatalité fur les mariages
de Therefe , il étoit écrit
qu'ils ne feroient jamais
qu'ébauchez , & celui- ci
fut interrompu comme
Vous
To GALANT
. 17
Vous allez voir.
" L'Armateur étoit revenu depuis quelque
temps : mais ayant appris dans le voisinage
que fa maîtreffe aimoit
a
paffionnément l'Avocat,
& n'ayant pas d'ailleurs
fort bien fait fes affaires
fur mer , il jugea à pro
pos de nepoint paroître ,
& fe logea pourtant affez proche de la maiſon
où le faifoient les conferences pour le mariaMay 1712.
B
18 MERCURE
ge, qui fut enfin reſolu.
Le jour fut pris , on invita les parens de part &
d'autre : l'affemblée étoit
grave , & Thereſe en
habit paré y charmoit
l'époux futur, dont elle
étoit auffi charmée; ils fe
repaiffoient de regards ,
& de defirs , lors qu'on
vit entrer dans la falle
l'Officier , qui ne fe doutant encore de rien , venoit d'arriver en pofte
de l'armée. Il entre avec
GALANT. 19
la vivacité & les tranf
ports d'unjeune amant ;
& ne voyant que celle
qu'il aime, il court à elle.
Il la regardoit déja comme fon épouſe , & va
l'embraffer. Il eft receu
avec la froideur quevous
pouvez vous imaginer ,
Therefe eft deconcertée: l'époux futur ne l'eft
pas moins , de voir qu'un
homme d'épée a de fi
grands privileges fur fa
femme cette familia
Bij
20 MERCURE
rité l'alarme. L'Officier
tranſporté ne prend garde au defordre ni de l'un
ni de l'autre , & les yeux
fixes fut ce qu'il aime ,
il refte un moment immobile. Une pacenta
priée entre dans cet inftant, & va d'abord feliciter les époux. A fon
difcours l'Officier revient à lui elle conti
nuë, le voila prefque au
fait. Enfin la gravité de
l'affemblée & les come
GALANT 20
3%
plimens de la parente ne
finiffant point , lui expliquerent fi nettement
de quoy il s'agiffoit , qu
il refta immobile enco
re : mais ce n'étoit plus
de plaifir. L'Armateur ,,
premier époux en datte ,
ayant appris à la porte
ce qui fe paffoit dans la
falle , y entra juftement
dans le temps que tous
ceux qui compofoient
cette affemblée muette
fe regardoient les uns
22 MERCURE
los autres.
L'Armateur
étoit un homme froid &
malin , une espece de la
rancune.
Thereſe ne ſçayoit point fon retour ;
dés qu'elle l'apperçut ,
cefut un dernier coup de
maffue. Il marcha froi
dement vers elle, & l'embraffant auffi comme é
poux , il lui tint des dif
cours à faire mourir l'Avocatdejalousie, & l'Of
ficier de defefpoir. Son
difcours fut long ,
parce
GALANT: 23:
que perfonne n'avoit la
force de l'interrompre.
L'Avocat & l'Officier
eurent le foifir de pren--
dre leur parti , & ce fut
celui du mépris pour
Thereſe. Voici par où
l'Armateur finit.
*!
Dans le voyage que
j'ai fait j'ai oui dire à un
Poëte Arabe, que lafemme eft femblable à un ar
bre, &l'amour de la femme auxfeuilles de cet ar
bre. Elles naißent auprin--
24 MERCURE
temps ,fefoutiennent tout
l'été, tombent en automne. L'arbre produit
bien des feuilles le printemps fuivant : mais ce
ne font plus les mêmes.
L'Arabe conclut de là que
la durée des feuilles eft la
durée naturelle de la constance des femmes. Mon
fieur l'Officier & moy
nous avons eu chacun notreprintemps notre été,
il est jufte que Monfieur
L-Avacas foit aimé de mê
me
GALANT. 25.
me jufqu'à la chûte des
fülles ; il n'a qu'à voir
s'il veut s'engager là- def
Sus.
Vous parlez fort bien,
dit enfuite l'Avocat :
mais l'Arabe a oublié de
dire que fi dans le prin
temps mêmeon met la coignée dans le pied de l'arbre , les feuilles fe fechent
avant l'automne. fecrain
drois que le mariage nefift
àpeu près le même effet
de la coignée. Ainfi Ma
May1712.
C
26 MERCURE
demoiselle Therese restera , s'illui plaît,fille toute
Ja vie : cette constance
étant la plus glorieuſe de
toutes , c'est celle qui convient le mieux au defir
qu'elle a d'exceller dans
cette vertu.
Le Poëte Arabe ne
pouffe pas fi loin que nos
Poëtes les fictions fur les
amans conftans ; & je
croirois bien que la conſtance merveilleufe dont
plufieurs Poëtes fe font
GALANT. 27
vantez dans leurs vers,
n'a point paffé de leur
imagination jufques dás
leur coeur. Citons - en
quelque exemple , pour
prouver que c'eft faire
injuſtice aux Dames de
les croire plus inconftantes que les hommes.
Honoré Durfée , dans
fa preface du troifiéme
tome d'Aftrée , proteſte
à la riviere de Lignon
que le feu dont il brûla',
& qui donna naiffance
Cij
28 MERCURE
à ſon ouvrage , ne fut fi
conftant que parce qu'il
fut pur, & qu'il ne laiſſa
jamais de noirceur aprés
la brûlure à pas une de
fes actions & de fes defirs. Il ajoûte que la longueur des années n'en
avoit point diminué l'ardeur, & qu'il ne s'éteindroit quefous la terre de
fon tombeau. Voila le
Poëte , voici l'homme.
Son neveu dit qu'il n'épouſa Aftrée que par in-
GALAŃT. 29
térêt , & pour ne pas
laiffer échaper ſes biens ;
qu'il s'en dégoûta bien
vîte aprés l'avoir époufée , parce qu'elle étoit mal propre à
caufe de fes grands
chiens & c. qu'elle
exigeoit de lui des
tendreffes & des delicateſſes d'amans ; qu'-
elle le tourmentoit continuellement fur fes amourettes étrangeres ;
qu'elle étoit idolâC iii
30 MERCURE
tre de fa beauté , &
par confequent ridicule.
Tout cela l'obligea à la
quitter , & à fe retirer
à la Cour de Savoye,
Nous fommes inftruits
là-deffus par une tradi
tion certaine que Mon,
fieur Huet nous a con
fervée , & qu'il a tiréo
des neveux & amis
d'Honoré Durfé. Si la
tradition s'étoit confer
vée de la même maniere
à l'égard de la belle Lau,
J
GALANT. 31
re, nous verrions apparemment quelque chofe
d'approchant dans l'hif
toire de fes amours avec
Petrarque. Celui - ci ,
dans l'Epître où il fait le
recit de fa vie naturellement & fimplement ,
dit que dégouté du ſejour ennuyeux dela ville
d'Avignon , il s'étoit retiré à Forge , attiré par
la beauté du lieu & de
fa fontaine ; que là il
avoit compofé tous les
Ciiii
32 MERCURE
Ouvrages , quatam multa
fuerant , dit-il , ut ufque
ad hanc atatem me exerceant & defatigent. Ilne
parle point de Laure en
profe ; & quand il recite au vrai l'hiftoire de
fa vie , de fon efprit &
de fon coeur , il paroît
que Laure étoit l'idole
de fon imagination , &
le fantôme qui la remuoit & l'échauffoit.
C'étoit un fujet plûtôt
imaginé que fenti , ſur
1
GALANT. 33
lequel fa verve s'exerçoit. L'auteur de ſa vie
nous en fournit une bonne preuve , lors qu'il
nous affure que le Pape
Benoît XII. lui offrit
une difpenfe pourépoufer Laure , pour tenir
des Benefices étant marié , & même pour en
poffeder de nouveaux :
offres que Plutarque
n'auroit pas refufé comme il le fit , s'il avoit eu
une paffion , je ne dis pas
34 MERCURE
auffi extraordinaire que
celle qu'il chante , mais
feulement ordinaire &
veritable. Comment les
Poëtes que nous voyons
ne nous defabufent - ils
point des anciens que
nous lifons ? La duperie
eft naturelle à l'homme.
La fiction la plus groffiere & la plus découverte gagne toûjours le
deffus à la longue , pourveu qu'elle fçache ébloüir l'imagination ; &
GALANT. 35
ceux qui ont écrit publiquement, foit en vers,
foit en profe , ne viendroient pas à bout euxmêmes de détromper le
monde de leurs fictions ,
s'ils revenoient fur terre
pour nous avertir bien
confcientieuſement qu'
ils n'avoient pas deſſein
de tromper le monde ,
mais feulement de l'amufer & le divertir en
fe divertiffant eux- mêmes.
desfemmes.
NE fille de condition , nommée
Therefe ,nous fervira de modele , non pas
A ij
4 MERCURE
pour ces conftances heroïques & prodigieufes,
qu'on ne connoît gueres
que par tradition mais
de celles qu'on peut vraifemblablement attendre
d'une femme , & par
confequent d'un hom
me ; car les deux fexes
'n'ont rien àfe reprocher
là -deffus.
Therefe étoit charmante de fa perfonne ,
trés-jeune , & fi peu experimentée , qu'elle ne
GALANT.
རྒྱུན །
જે
connoiffoit encore l'amour que par les Romans. Elle fe fentoit une
fi grande difpofition à
la conftance , qu'elle difoit quelquefois : Non,
je ne veuxjamais aimer,
la vie eft trop courte , une
conftance defoixante ans
ne feroit pas contentement
pour moy. En d'autres
momens elle faifoit reflexion que puis qu'il
faloit aimer neceffairement , il étoit bon de
A iij
6
MERCURE
commencer trés- jeune ,
afin de pouffer la conf
tance le plus loin qu'il
étoit poffible. Elle prit
ce dernier parti , & dés
le lendemain elle fut
épriſe du fils d'un Armateur de faint Malo
Ce jeune homme devint
paffionnément amou
reux d'elle , & au boutde quelque temps on.
parla de mariage. Le
parti parut bon à la mere
de Therefe : mais le jeur-
GALANT. 7
ne homme étant obligé
de fuivre fon pere , qui
faifoit une nouvelle
courſe en mer , ne put
obtenir fon confentemént que pour le reFour. Cependant on convint des articles , on ſe
donna des paroles d'hon
neur , & les amans s'en
donnerent de bien plus.
inviolables , ils fe jurerent un amour éternel
L'Armateur promit de
revenir dans trois mois;
1
A iiij
& MERCURE
& le voila embarqué.
Quelle épreuve pour
Therefe! Devaſtes mers
la feparent defon amant:
mais cette feparation ne
fait que redoubler fon
amour, & les trois mois
d'abſence lui parurent fi
longs , qu'on peut bien
les lui compter pour
trois années de conftance. Cependant elle la
pouffa plus loin ; car fon
amant nerevenant point
encore au bout de fix
GALANT.
autres mois , elle étoit fi
affligée , quefa mere n'ofa lui parler d'un autre
parti qui fe prefentoit.
Elle eut beau lui infi f
nuer que peut- être l'Armateur ne reviendroit
jamais ; elle lui fit même foupçonner que ce
vaiffeau avoit peri : mais
Therefe proteftoit une
fidelité égale pour fon
amant mort ou vif.
Un an entier s'étant
écoulé, & la mere & la
10 MERCURE
fille crurent réellement
que l'Armateur ne reviendroit jamais. On le
pleura commemort pen
dant quelques jours; &
la mere, fans parler de
rien à fa fille , fit trou
yer, comme par hazard,
le fecond amant chez
uneparente , où ellemena fa fille C'étoit un
jeune Officier , fait pour
donner de l'amour , &
qui avoit tout l'efprit
poffible. Il étoit conve
GALANT. H
nu avec la mere qu'il faloit prendre Thereſe par
fon foible. Il la loùa d'abord fur le vœu qu'elle.
avoit fait de ne fe jamais.
marier après avoir perdu
ce qu'elle aimoit. Cette
converfation ne pouvoit
manquer de lui plaire ,
étant fi conforme aux
reſolutions qu'elle avoit
prifes. Elle retournaplu
fieurs fois chez fa parente , où les exhortations
que cet Officier lui fit
IZ MERCURE
fur la conftance produi
firent infenfiblement un
effet contraire , & elle
commença à raifonner
ainfi : Pour aimer bien
conftamment il faut être
aimé de même , & cet
homme- ci aẞureroit mi
conftance par la fienne ,f
jamais je pouvois l'aimer.
Un autre raifonncment que lui fit cët ingenieux amant acheva
de la determiner ; car il
GALANT.
13
Jui prouva qu'elle ne
pouvoit ſe vanter d'être
conftante fans avoir été
mariée, parce que le mariage étoit la pierre de
touche de la conftance,
Therefe , qui tendoit
toûjours à la perfection
de cette vertu , & qui
ne pouvoit la poffeder
éminemment fans fe
marier, prefera pour cette raifon feule l'amant
vivant à l'amant mort :
& peu de temps aprés
14 MERCURE
ce ſecond mariage fut
auffi avancé que l'avoit
été le premier: mais par
malheur il vint à l'Officier un ordre de la Cour
pour aller en Flandres.
Il falut partir dans le
moment , paroles données comme avec l'Armateur, pareils fermens
entre Therefe & l'Officier. Mais les chagrins
de l'abfence furent plus
violens ; car elle aimoit
celui - ci plus que l'au-
GALANT. I
tre , ou , pour mieux di
te, l'amour qu'elle avoit
pour l'Officier lui perfuadoit qu'elle n'avoit
jamais aimé l'Armateurs
car elle le croyoit incapable de changer. Elle
changea pourtant , je ne
vous dirai point par
quels motifs mais , à
coup fûr , ce fut pour
parvenir encore a une
conftance plus parfaite;
car fans cela elle n'en
auroit jamais aimé un
16. MERCURE
troifiéme. Celui-ci étoit
un Avocat , & la mere
conclut avec lui plus
promtement encore qu'-
avec les autres , craignant qu'il ne lui échapât ; car il étoit trés-riche. Le jourfut pris , les
articles furent dreffez :
mais il y avoit une fatalité fur les mariages
de Therefe , il étoit écrit
qu'ils ne feroient jamais
qu'ébauchez , & celui- ci
fut interrompu comme
Vous
To GALANT
. 17
Vous allez voir.
" L'Armateur étoit revenu depuis quelque
temps : mais ayant appris dans le voisinage
que fa maîtreffe aimoit
a
paffionnément l'Avocat,
& n'ayant pas d'ailleurs
fort bien fait fes affaires
fur mer , il jugea à pro
pos de nepoint paroître ,
& fe logea pourtant affez proche de la maiſon
où le faifoient les conferences pour le mariaMay 1712.
B
18 MERCURE
ge, qui fut enfin reſolu.
Le jour fut pris , on invita les parens de part &
d'autre : l'affemblée étoit
grave , & Thereſe en
habit paré y charmoit
l'époux futur, dont elle
étoit auffi charmée; ils fe
repaiffoient de regards ,
& de defirs , lors qu'on
vit entrer dans la falle
l'Officier , qui ne fe doutant encore de rien , venoit d'arriver en pofte
de l'armée. Il entre avec
GALANT. 19
la vivacité & les tranf
ports d'unjeune amant ;
& ne voyant que celle
qu'il aime, il court à elle.
Il la regardoit déja comme fon épouſe , & va
l'embraffer. Il eft receu
avec la froideur quevous
pouvez vous imaginer ,
Therefe eft deconcertée: l'époux futur ne l'eft
pas moins , de voir qu'un
homme d'épée a de fi
grands privileges fur fa
femme cette familia
Bij
20 MERCURE
rité l'alarme. L'Officier
tranſporté ne prend garde au defordre ni de l'un
ni de l'autre , & les yeux
fixes fut ce qu'il aime ,
il refte un moment immobile. Une pacenta
priée entre dans cet inftant, & va d'abord feliciter les époux. A fon
difcours l'Officier revient à lui elle conti
nuë, le voila prefque au
fait. Enfin la gravité de
l'affemblée & les come
GALANT 20
3%
plimens de la parente ne
finiffant point , lui expliquerent fi nettement
de quoy il s'agiffoit , qu
il refta immobile enco
re : mais ce n'étoit plus
de plaifir. L'Armateur ,,
premier époux en datte ,
ayant appris à la porte
ce qui fe paffoit dans la
falle , y entra juftement
dans le temps que tous
ceux qui compofoient
cette affemblée muette
fe regardoient les uns
22 MERCURE
los autres.
L'Armateur
étoit un homme froid &
malin , une espece de la
rancune.
Thereſe ne ſçayoit point fon retour ;
dés qu'elle l'apperçut ,
cefut un dernier coup de
maffue. Il marcha froi
dement vers elle, & l'embraffant auffi comme é
poux , il lui tint des dif
cours à faire mourir l'Avocatdejalousie, & l'Of
ficier de defefpoir. Son
difcours fut long ,
parce
GALANT: 23:
que perfonne n'avoit la
force de l'interrompre.
L'Avocat & l'Officier
eurent le foifir de pren--
dre leur parti , & ce fut
celui du mépris pour
Thereſe. Voici par où
l'Armateur finit.
*!
Dans le voyage que
j'ai fait j'ai oui dire à un
Poëte Arabe, que lafemme eft femblable à un ar
bre, &l'amour de la femme auxfeuilles de cet ar
bre. Elles naißent auprin--
24 MERCURE
temps ,fefoutiennent tout
l'été, tombent en automne. L'arbre produit
bien des feuilles le printemps fuivant : mais ce
ne font plus les mêmes.
L'Arabe conclut de là que
la durée des feuilles eft la
durée naturelle de la constance des femmes. Mon
fieur l'Officier & moy
nous avons eu chacun notreprintemps notre été,
il est jufte que Monfieur
L-Avacas foit aimé de mê
me
GALANT. 25.
me jufqu'à la chûte des
fülles ; il n'a qu'à voir
s'il veut s'engager là- def
Sus.
Vous parlez fort bien,
dit enfuite l'Avocat :
mais l'Arabe a oublié de
dire que fi dans le prin
temps mêmeon met la coignée dans le pied de l'arbre , les feuilles fe fechent
avant l'automne. fecrain
drois que le mariage nefift
àpeu près le même effet
de la coignée. Ainfi Ma
May1712.
C
26 MERCURE
demoiselle Therese restera , s'illui plaît,fille toute
Ja vie : cette constance
étant la plus glorieuſe de
toutes , c'est celle qui convient le mieux au defir
qu'elle a d'exceller dans
cette vertu.
Le Poëte Arabe ne
pouffe pas fi loin que nos
Poëtes les fictions fur les
amans conftans ; & je
croirois bien que la conſtance merveilleufe dont
plufieurs Poëtes fe font
GALANT. 27
vantez dans leurs vers,
n'a point paffé de leur
imagination jufques dás
leur coeur. Citons - en
quelque exemple , pour
prouver que c'eft faire
injuſtice aux Dames de
les croire plus inconftantes que les hommes.
Honoré Durfée , dans
fa preface du troifiéme
tome d'Aftrée , proteſte
à la riviere de Lignon
que le feu dont il brûla',
& qui donna naiffance
Cij
28 MERCURE
à ſon ouvrage , ne fut fi
conftant que parce qu'il
fut pur, & qu'il ne laiſſa
jamais de noirceur aprés
la brûlure à pas une de
fes actions & de fes defirs. Il ajoûte que la longueur des années n'en
avoit point diminué l'ardeur, & qu'il ne s'éteindroit quefous la terre de
fon tombeau. Voila le
Poëte , voici l'homme.
Son neveu dit qu'il n'épouſa Aftrée que par in-
GALAŃT. 29
térêt , & pour ne pas
laiffer échaper ſes biens ;
qu'il s'en dégoûta bien
vîte aprés l'avoir époufée , parce qu'elle étoit mal propre à
caufe de fes grands
chiens & c. qu'elle
exigeoit de lui des
tendreffes & des delicateſſes d'amans ; qu'-
elle le tourmentoit continuellement fur fes amourettes étrangeres ;
qu'elle étoit idolâC iii
30 MERCURE
tre de fa beauté , &
par confequent ridicule.
Tout cela l'obligea à la
quitter , & à fe retirer
à la Cour de Savoye,
Nous fommes inftruits
là-deffus par une tradi
tion certaine que Mon,
fieur Huet nous a con
fervée , & qu'il a tiréo
des neveux & amis
d'Honoré Durfé. Si la
tradition s'étoit confer
vée de la même maniere
à l'égard de la belle Lau,
J
GALANT. 31
re, nous verrions apparemment quelque chofe
d'approchant dans l'hif
toire de fes amours avec
Petrarque. Celui - ci ,
dans l'Epître où il fait le
recit de fa vie naturellement & fimplement ,
dit que dégouté du ſejour ennuyeux dela ville
d'Avignon , il s'étoit retiré à Forge , attiré par
la beauté du lieu & de
fa fontaine ; que là il
avoit compofé tous les
Ciiii
32 MERCURE
Ouvrages , quatam multa
fuerant , dit-il , ut ufque
ad hanc atatem me exerceant & defatigent. Ilne
parle point de Laure en
profe ; & quand il recite au vrai l'hiftoire de
fa vie , de fon efprit &
de fon coeur , il paroît
que Laure étoit l'idole
de fon imagination , &
le fantôme qui la remuoit & l'échauffoit.
C'étoit un fujet plûtôt
imaginé que fenti , ſur
1
GALANT. 33
lequel fa verve s'exerçoit. L'auteur de ſa vie
nous en fournit une bonne preuve , lors qu'il
nous affure que le Pape
Benoît XII. lui offrit
une difpenfe pourépoufer Laure , pour tenir
des Benefices étant marié , & même pour en
poffeder de nouveaux :
offres que Plutarque
n'auroit pas refufé comme il le fit , s'il avoit eu
une paffion , je ne dis pas
34 MERCURE
auffi extraordinaire que
celle qu'il chante , mais
feulement ordinaire &
veritable. Comment les
Poëtes que nous voyons
ne nous defabufent - ils
point des anciens que
nous lifons ? La duperie
eft naturelle à l'homme.
La fiction la plus groffiere & la plus découverte gagne toûjours le
deffus à la longue , pourveu qu'elle fçache ébloüir l'imagination ; &
GALANT. 35
ceux qui ont écrit publiquement, foit en vers,
foit en profe , ne viendroient pas à bout euxmêmes de détromper le
monde de leurs fictions ,
s'ils revenoient fur terre
pour nous avertir bien
confcientieuſement qu'
ils n'avoient pas deſſein
de tromper le monde ,
mais feulement de l'amufer & le divertir en
fe divertiffant eux- mêmes.
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Résumé : LA CONSTANCE des femmes.
Le texte relate l'histoire de Thérèse, une jeune femme charmante et inexpérimentée, connue pour sa constance en amour. Initialement, après avoir lu les Romains, Thérèse se sent disposée à la constance et affirme ne jamais vouloir aimer, estimant que la vie est trop courte. Cependant, elle change d'avis et décide de commencer à aimer jeune pour prolonger cette constance. Elle tombe amoureuse du fils d'un armateur de Saint-Malo, qui doit partir en mer. Malgré la séparation, Thérèse reste fidèle et attend son retour. Après un an, sa mère tente de la marier à un officier, mais Thérèse résiste. Elle finit par accepter de se marier avec l'officier, mais celui-ci doit partir en Flandres. Thérèse change à nouveau d'avis et se prépare à épouser un avocat. À ce moment-là, l'armateur revient, interrompant le mariage. L'armateur, froid et malin, compare les femmes à un arbre dont les feuilles tombent en automne, symbolisant la fin de la constance. L'avocat et l'officier, jaloux et déçus, quittent Thérèse. Le texte se conclut par une réflexion sur la constance en amour, soulignant que les poètes exagèrent souvent cette vertu.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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3
p. 208-209
De BAYONNE, le 16 Septembre.
Début :
On apprend par un Vaisseau arrivé à Saint Ander que des six [...]
Mots clefs :
Vaisseaux, Marchand, Marquis, Ennemis, Combat naval, Capitaines, Cargaison, Artillerie, Armateur
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texteReconnaissance textuelle : De BAYONNE, le 16 Septembre.
De BAYONNE , le 16 Septembre.
On apprend par un Vaiffeau arrivé à Saint Ander
que des fix Vaiffeaux partis de Bordeaux ,
trois font arrivés dans le fleuve Saint Laurent ,
favoir ; le Marchand , le Marquis de Malaufe &
le Bienfaifant. Ils ont atterré dans la Baye des
Chaleurs avec fix prifes qu'ils avoient faites dans
OCTOBRE. 1760. 206-
ce fleuve fur les Anglois. Cinq Vaiffeaux de guerre
ennemis les ont pourfuivis jufques dans ce port,
Les Capitaines de ces trois VaiffeauxMarchands ,
ont fait la plus belle manoeuvre ; ils ont mis à
terre prèfque tous leurs Canons ; ils ont conftruit
à la hate une efpéce de fort d'où ils ont tiré fur
les Vaiffeaux Anglois ; ils en ont coulé un à fond
ils ont eu le tems de mettre à terre leur Car
gaifon , & l'on ne doute pas qu'ils n'ayent fait
paffer à Montréal les munitions & les fubfiftancés
qui étoient deftinées pour cette place. Ils ont
enfuite mis le feu à leurs trois Vailleaux & aux
fix qu'ils avoient pris , afin qu'ils ne tombaſſent
point entre les mains des Anglois.
Le Marquis de Vaudreuil , ayant formé le projet
d'une expédition fur le fleuve Saint Laurent ,
a chargé le fieur Minville l'aîné , Armateur de ce
port , de l'exécuter . Cet Armateur a paffé hardiment
avec fon Vaiffeau fous le fort de Quebec
de l'Artillerie duquel il a effuyé tout le feu , &
dont il a été fort endommagé; cela ne l'a pas em
pêché de remplir fon objet ; il a pris dans ce
fleuve quatorze Vaifleaux Anglois pleins de munitions
pour Quebec ; il les a conduits un peu plus
haut que la Baye des Chaleurs , & après en avoir
fait décharger toutes les Cargaifons qu'il a fair
tranfporter à Montréal , il les a brulés ainfi que
fon Vaiffeau , pour 'qu'ils ne devinflent pas la
proie des ennemis.
On affure que la recolte a été abondante dans
le Territoire de Montréal , & que nous fommes
en état de nous y foutenir long-tems contre les
Anglois,
On apprend par un Vaiffeau arrivé à Saint Ander
que des fix Vaiffeaux partis de Bordeaux ,
trois font arrivés dans le fleuve Saint Laurent ,
favoir ; le Marchand , le Marquis de Malaufe &
le Bienfaifant. Ils ont atterré dans la Baye des
Chaleurs avec fix prifes qu'ils avoient faites dans
OCTOBRE. 1760. 206-
ce fleuve fur les Anglois. Cinq Vaiffeaux de guerre
ennemis les ont pourfuivis jufques dans ce port,
Les Capitaines de ces trois VaiffeauxMarchands ,
ont fait la plus belle manoeuvre ; ils ont mis à
terre prèfque tous leurs Canons ; ils ont conftruit
à la hate une efpéce de fort d'où ils ont tiré fur
les Vaiffeaux Anglois ; ils en ont coulé un à fond
ils ont eu le tems de mettre à terre leur Car
gaifon , & l'on ne doute pas qu'ils n'ayent fait
paffer à Montréal les munitions & les fubfiftancés
qui étoient deftinées pour cette place. Ils ont
enfuite mis le feu à leurs trois Vailleaux & aux
fix qu'ils avoient pris , afin qu'ils ne tombaſſent
point entre les mains des Anglois.
Le Marquis de Vaudreuil , ayant formé le projet
d'une expédition fur le fleuve Saint Laurent ,
a chargé le fieur Minville l'aîné , Armateur de ce
port , de l'exécuter . Cet Armateur a paffé hardiment
avec fon Vaiffeau fous le fort de Quebec
de l'Artillerie duquel il a effuyé tout le feu , &
dont il a été fort endommagé; cela ne l'a pas em
pêché de remplir fon objet ; il a pris dans ce
fleuve quatorze Vaifleaux Anglois pleins de munitions
pour Quebec ; il les a conduits un peu plus
haut que la Baye des Chaleurs , & après en avoir
fait décharger toutes les Cargaifons qu'il a fair
tranfporter à Montréal , il les a brulés ainfi que
fon Vaiffeau , pour 'qu'ils ne devinflent pas la
proie des ennemis.
On affure que la recolte a été abondante dans
le Territoire de Montréal , & que nous fommes
en état de nous y foutenir long-tems contre les
Anglois,
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Résumé : De BAYONNE, le 16 Septembre.
Le 16 septembre, trois vaisseaux français, le Marchand, le Marquis de Malaufe et le Bienfaifant, ont atteint le fleuve Saint-Laurent après avoir capturé six navires anglais. Ils ont accosté dans la Baie des Chaleurs, où cinq vaisseaux de guerre ennemis les poursuivaient. Les capitaines ont débarqué leurs canons et construit une fortification pour repousser les Anglais, coulant un vaisseau ennemi et mettant leur cargaison à terre, probablement à Montréal. Pour éviter la capture, ils ont incendié leurs vaisseaux. Parallèlement, le Marquis de Vaudreuil a organisé une expédition sur le fleuve Saint-Laurent. L'armateur Minville l'aîné a mené cette mission, capturant quatorze vaisseaux anglais chargés de munitions pour Québec. Il a conduit ces vaisseaux au-delà de la Baie des Chaleurs, déchargé les cargaisons à Montréal, et incendié les navires, y compris le sien. Enfin, la récolte dans le territoire de Montréal a été abondante, permettant de soutenir une longue résistance contre les Anglais.
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