Oeuvre commentée (2)
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1
p. 2492-2494
Le Triomphe de l'Interêt, Extrait, [titre d'après la table]
Début :
Le 8. de ce mois, les Comédiens Italiens donnerent la premiere Représentation d'une Comédie [...]
Mots clefs :
Comédiens-Italiens, Comédie, Théâtre
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texteReconnaissance textuelle : Le Triomphe de l'Interêt, Extrait, [titre d'après la table]
Le 8. de ce mois , les Comédiens Italiens donnerent
la premiere Repréfentation d'une Comédie
nouvelle en Vers libres , en un Acte , avec quelques
Vaudevilles & un Divertiffement de M. Mouret
, intitulée , Le Triomphe de l'interêt. Le
fonds de la Piéce confifte en ceci : l'Interêt ,
qu'on perfonifie , s'applaudit en préſence de Mereure
du crédit & du pouvoir qu'il a en France.
Mercure lui apprend que l'Honneur ,ſon ennemi
irréconciliable , fe prépare à l'attaquer , & qu'il
a réfolu de lui faire une vive guerre. L'Interêt
frappé de cette nouvelle , fort à l'inftant pour raf
fembler toutes fes troupes & fe mettre en état.
de repouffer les efforts de fon ennemi. Maïs
auparavant il prie Mercure de vouloir bien donner
audiance en fa place à tous ceux qui viendront
dans fon Palais pour le confulter ou lui
demander quelque grace. La premiere perfonne
qui paroît eft Fanchon , Grifette qui n'a rien ,
petite brune qui veut faire fortune ; elle demande
à Mercure un protecteur qui lui aide à
débuter fur la Scene Françoife. M. Jacquin , riche
Caiffier , ſe préfente ; & comme il aime beau--
coup , le chant , il détermine Fanchon pour le
Théatre de l'Opera , & lui donne auffi tôt des
diamans pour la parer. Cette Scene eft mêlée de
Vaudevilles & d'Airs férieux .
Un vieux Soldat vient enfuite , & demande un
emploi de finance que Mercure lui accorde. Arlequin
, au contraire , qui vient après , ne demande
rien , & déclare qu'il eft neutre entre l'Interêt
& l'Honneur , c'est - à- dire , qu'il n'eft partifan
ni de l'un ni de l'autre , & que fa fantaific
eft ſon ſeul guide ; c'eft là qu'il dit ce Vers heureux
:
L'interet eft Normand & l'Honneur eft Gafcon.
C'eft
NOVEMBRE. 1730. 2493
C'eft en vain que Mercure veut l'attirer au
parti de l'Interêt ; Arlequin le regarde comme
un fuborneur qui pourroit le corrompre , &
s'enfuit.
M. Jacquin & Fanchon reviennent , mais auf
brouillés qu'ils étoient bien enſemble peu de tems
auparavant. Le fujet de la brouillerie eft que
Fanchon ne veut point rendre les diamans que
M. Jacquin foutient lui avoir prêtés & non donnés.
Mercure juge en faveur de Fanchon . Après
ces Scenes diverſes , l'Interêt revient fur le Théatre
, & dit qu'il a inventé un ftratagême pour
confondre fon Ennemi , & lui enlever tous fes
partifans ; il fait la revue de fes Troupes ; l'Honneur
paroît , & en fait autant ; mais fur le point
de combatre on tire le rideau , & l'Interêt fait
paroître aux yeux des Soldats de l'Honneur des
Fleuves d'or & d'argent , des Cafcades de perles
& de diamans , & enfin leur étale toutes les richeffes.
A cet afpect tous les Soldats de l'Honneur
défertent , & paffent du côté de l'Interé : qui
celebre fon Triomphe par un magnifique Diver 、
tiffement.
Cette Piéce a été genéralement applaudie . Il y
a long- tems qu'on n'a vu un concours fi prodigieux
de fpectateurs , & un fuccès fi plein , fi parfait
& fi foutenu. On y trouve beancoup d'efprit
& de fel , une verfification aiſée & élegante ,
& même des ménagemens , car Fanchon ne prétend
avoir gagné les diamans que par les Récitatifs
& les Arietes , & M. Jacquin en convient
de bonne foi. On doit imprimer cette Piéce
lorfqu'elle paroîtra , nous en pourrons donner
un Extrait plus étendu. L'Auteur eft M. Du
Caftre d'Aurigny , âgé de 18. ans , qui à l'age
de 16. a donné au Public un Abregé de l'Hifsoire
de France , imprimé à Paris , chez Le Gras,
&
,
2494 MERCURE DE FRANCE
& qui eft eftimée. Il a donné cet Eté au Théatre
François la Comédie intitulée : La Tragédie en
Profe , ou la Tragédie extravagante , petite
Piéce bien écrite , comme nous l'avons dit alors,
mais qui n'a eu qu'un fuccès médiocre. Enfin il
fera paroître le mois prochain une Hiſtoire Galante
& Héroïque , intitulée Les Avantures d'Ariftée
de Telafie en 2. vol . chez là Veuve
Guillaume. La même Libraire vendra fa Comédie
en même -tems.
la premiere Repréfentation d'une Comédie
nouvelle en Vers libres , en un Acte , avec quelques
Vaudevilles & un Divertiffement de M. Mouret
, intitulée , Le Triomphe de l'interêt. Le
fonds de la Piéce confifte en ceci : l'Interêt ,
qu'on perfonifie , s'applaudit en préſence de Mereure
du crédit & du pouvoir qu'il a en France.
Mercure lui apprend que l'Honneur ,ſon ennemi
irréconciliable , fe prépare à l'attaquer , & qu'il
a réfolu de lui faire une vive guerre. L'Interêt
frappé de cette nouvelle , fort à l'inftant pour raf
fembler toutes fes troupes & fe mettre en état.
de repouffer les efforts de fon ennemi. Maïs
auparavant il prie Mercure de vouloir bien donner
audiance en fa place à tous ceux qui viendront
dans fon Palais pour le confulter ou lui
demander quelque grace. La premiere perfonne
qui paroît eft Fanchon , Grifette qui n'a rien ,
petite brune qui veut faire fortune ; elle demande
à Mercure un protecteur qui lui aide à
débuter fur la Scene Françoife. M. Jacquin , riche
Caiffier , ſe préfente ; & comme il aime beau--
coup , le chant , il détermine Fanchon pour le
Théatre de l'Opera , & lui donne auffi tôt des
diamans pour la parer. Cette Scene eft mêlée de
Vaudevilles & d'Airs férieux .
Un vieux Soldat vient enfuite , & demande un
emploi de finance que Mercure lui accorde. Arlequin
, au contraire , qui vient après , ne demande
rien , & déclare qu'il eft neutre entre l'Interêt
& l'Honneur , c'est - à- dire , qu'il n'eft partifan
ni de l'un ni de l'autre , & que fa fantaific
eft ſon ſeul guide ; c'eft là qu'il dit ce Vers heureux
:
L'interet eft Normand & l'Honneur eft Gafcon.
C'eft
NOVEMBRE. 1730. 2493
C'eft en vain que Mercure veut l'attirer au
parti de l'Interêt ; Arlequin le regarde comme
un fuborneur qui pourroit le corrompre , &
s'enfuit.
M. Jacquin & Fanchon reviennent , mais auf
brouillés qu'ils étoient bien enſemble peu de tems
auparavant. Le fujet de la brouillerie eft que
Fanchon ne veut point rendre les diamans que
M. Jacquin foutient lui avoir prêtés & non donnés.
Mercure juge en faveur de Fanchon . Après
ces Scenes diverſes , l'Interêt revient fur le Théatre
, & dit qu'il a inventé un ftratagême pour
confondre fon Ennemi , & lui enlever tous fes
partifans ; il fait la revue de fes Troupes ; l'Honneur
paroît , & en fait autant ; mais fur le point
de combatre on tire le rideau , & l'Interêt fait
paroître aux yeux des Soldats de l'Honneur des
Fleuves d'or & d'argent , des Cafcades de perles
& de diamans , & enfin leur étale toutes les richeffes.
A cet afpect tous les Soldats de l'Honneur
défertent , & paffent du côté de l'Interé : qui
celebre fon Triomphe par un magnifique Diver 、
tiffement.
Cette Piéce a été genéralement applaudie . Il y
a long- tems qu'on n'a vu un concours fi prodigieux
de fpectateurs , & un fuccès fi plein , fi parfait
& fi foutenu. On y trouve beancoup d'efprit
& de fel , une verfification aiſée & élegante ,
& même des ménagemens , car Fanchon ne prétend
avoir gagné les diamans que par les Récitatifs
& les Arietes , & M. Jacquin en convient
de bonne foi. On doit imprimer cette Piéce
lorfqu'elle paroîtra , nous en pourrons donner
un Extrait plus étendu. L'Auteur eft M. Du
Caftre d'Aurigny , âgé de 18. ans , qui à l'age
de 16. a donné au Public un Abregé de l'Hifsoire
de France , imprimé à Paris , chez Le Gras,
&
,
2494 MERCURE DE FRANCE
& qui eft eftimée. Il a donné cet Eté au Théatre
François la Comédie intitulée : La Tragédie en
Profe , ou la Tragédie extravagante , petite
Piéce bien écrite , comme nous l'avons dit alors,
mais qui n'a eu qu'un fuccès médiocre. Enfin il
fera paroître le mois prochain une Hiſtoire Galante
& Héroïque , intitulée Les Avantures d'Ariftée
de Telafie en 2. vol . chez là Veuve
Guillaume. La même Libraire vendra fa Comédie
en même -tems.
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Résumé : Le Triomphe de l'Interêt, Extrait, [titre d'après la table]
Le 8 novembre 1730, les Comédiens Italiens ont présenté 'Le Triomphe de l'intérêt', une comédie en vers libres écrite par M. Mouret. La pièce met en scène l'Interêt personnifié, qui se félicite de son influence en France. Mercure informe l'Interêt que l'Honneur, son ennemi, se prépare à l'attaquer. L'Interêt rassemble ses troupes et demande à Mercure d'accorder audience à ceux qui viennent le consulter. Plusieurs personnages apparaissent, dont Fanchon, une jeune femme désirant faire fortune au théâtre, aidée par M. Jacquin, un riche cafetier amoureux du chant. Un vieux soldat obtient un emploi de finance, tandis qu'Arlequin déclare sa neutralité entre l'Interêt et l'Honneur. Fanchon et M. Jacquin se disputent à propos de diamants prêtés, et Mercure tranche en faveur de Fanchon. L'Interêt révèle un stratagème pour séduire les partisans de l'Honneur en leur montrant des richesses, entraînant la défection des soldats de l'Honneur. La pièce a été acclamée par le public et a connu un succès durable. L'auteur, M. Du Castre d'Aurigny, est un jeune homme de 18 ans ayant déjà publié un abrégé de l'histoire de France et une comédie intitulée 'La Tragédie en Prose'. Il prépare également une 'Histoire Galante & Héroïque' intitulée 'Les Aventures d'Aristée de Télasie'.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 301-306
Le Triomphe de l'Interêt, Comedie, [titre d'après la table]
Début :
LE TRIOMPHE DE L'INTEREST, Comedie. Cette Piece paroît imprimée in [...]
Mots clefs :
Comédie, Intérêt, Honneur, Mercure, Arlequin, Théâtre
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texteReconnaissance textuelle : Le Triomphe de l'Interêt, Comedie, [titre d'après la table]
LE TRIOMPHE DE L'INTEREST ,
Comedie . Cette Piece paroît imprimée
in 12. de 48. pages , sans nom d'Auteur ,
de Ville , ni de Libraire.
Le succès qu'elle a eu doit avoir excité
la curiosité du Public , et c'est pour la satisfaire
que nous allons en donner ici
quelques fragmens ; nous nous en tiendrons
aux Scenes dont on a permis la
representation , et dont nous avons déja
dit quelque chose en donnant l'Argument
de la Piece.
Comme le fond de cette Comédie est
tel qu'on le voit dans la plupart des Pieces
à Scenes détachées , il ne nous sera
pas difficile d'en donner une idée en
peu de mots . Il s'agit d'un Combat entre
l'Interêt et l'Honneur ; après plu-.
sieurs Scenes où l'Interêt se trouve toujours
le plus fort , si l'on en excepte une
où Arlequin ne tient ni pour l'un ni pour
l'autre des deux Concurrens ; l'Honneur
suivi de ses Soldats , vient attaquer le
Palais de l'Interêt , et ne menace pas
moins que de le réduire en cendres ; mais,
E ij l'Interêt
302 MERCURE DE FRANCE.
Interêt n'a pas plutôt fait briller ses
trésors aux yeux de ses Ennemis , qu'ils
viennent tous se ranger sous ses Drapeaux
. Voilà le Plan de la Piece ; en veici
Î'Accessoire dans quelques Traits. La Comedie
commence par ce Monologue de
Mercure :
C'est ici le Palais que l'Interêt habite ,
Cette Idole du siecle , à qui tout se soumet .
Qui fonde son pouvoir sur l'équité proscrite ,
De tant de passions , le mobile secret ,
L'ame du monde enfin , et la source maudite ,
De tout le mal qui s'y commet.
Que ces lambris dorez et que ces murs durables ,
Que tous ces Marbres que voilà ,
Ont écrasé de miserables ,
Pour bien loger ce Monstre- là ! &c.
La seconde Scene est entre Mercure et
l'Interêt. Ce dernier est vétù en riche
Financier il prie Mercure de le loüer ,
Mercure prend le ton ironique , que l'interêt
reçoit comme de veritables louanges
, ce qu'il fait connoître par cet hémistiche
:
On ne peut mieux louer ,
A quoi Mercure répond avec plus de
sincerité :
N'en
FEVRIER. 1731. 303
N'en soyez pas plus vain ;
Car mon encens critique.
Fait moins votre Panegyrique ,
Que le procès du genre humain.
L'Interêt porte l'audace jusqu'à choisir.
Mercure pour son
ainsi :
Substitut ; il s'exprime
Toi cependant , ici tu n'as qu'à recevoir ,
Les Mortels qui viendront réverer mon pouvoir,
Et me demander quelque grace ;
Sers-moi de Substitut et remplit bien ma place .
Une jeune personne vient consulter
Pinterêt sur des vûës de fortune dont
elle s'est fait un Plan ; Mercure lui fait
connoître son nouvel emploi de premier
Commis de l'Interêt , par ces Vers :
Je le double ; et dans cette affaire ,
Mercure seul vous conduira ,
Comme Introducteur ordinaire ,
Des Princesses de l'Opera.
Cette Scene est si vive , qu'on ne s'ap
perçoit pas de sa longueurs nous n'en
citerons qu'une tirade de Fanchon , c'est
le nom de la jeune personne qui veut
faire fortune au Théatre en tout bien
et tout honneur. Elle se regarde déja com
E iiij me
304 MERCURE DE FRANCE
me une Actrice du premier ordre. Elle
s'exprime ainsi :
Au Théatie , quelles délices !
Sans cesse je reçoi des applaudissemens ,
Dans les Foyers , des complimens
Et sans oublier les Coulisses ,
Où l'on me conte cent douceurs.
Vous êtes , me dit l'un , la Reine des Actrices ,
Et vous enlevez tous les coeurs.
'Ah ! vous m'avez percé jusques au fond de l'ame ,
Ajoûte un autre tout en pleurs ;
Fanchon , unique objet de mes vives ardeurs , -
Vous m'atendrissez trop , finissez , je me pâme ,
S'écrie un petit Maître , en ces instans flateurs.
Grands Dieux ! quand elle songe à ce bonheur
extrême ,
Peu s'en faut que Fanchon ne se pâme ellemême.
Nous passons sous silence toutes les
Scenes qui n'ont pas fait beaucoup de
plaisir , celles de M. Faquin ne sont pas
de ce nombre ; mais comme elles sont
dans le goût de l'Opera Comiqué , et
qu'elles doivent beaucoup de leur agrément
au chant , nous les supprimons , de
peur qu'elles ne perdent de leur prix à
la simple lecture .
Nous finirons par quelques traits de
la Scene entre Mercure et Arlequin. Voici
le
FEVRIER. 1731. 305
le caractere que l'Auteur a donné à ce
charmant Héros du Théatre Italien ; c'est
Arlequin même qui parle :
Je suis un homme comme un autre :
Je bois , je mange , je dors bien ;
Je vis de peu de chose et n'ai souci de rien.
Mercure lui demande s'il a beaucoup
de joye ? Il lui répond :
J'en ai ma fourniture ,
Et de la bonne et de la pure ,
Car je la tiens de la premiere main.
Mercure.
Au sein de l'indigence , eh ! qui vous la procure
Arlequin.
Belle demande ! La Nature.
Elle m'a bâti de façon ,
Que tout me fait plaisir et rien ne m'inquiete
Je me passe de peu dans ma condition ;
Et je jouis d'une santé parfaite ;
Je puis me dire le garçon ,
De la meilleure pâte , en un mot , qu'elle ait faite..
Mercure lui offrant le choix de l'Inte
rêt ou de l'Honneur , après un Portrait
fidele qu'il lui en a fait ; il lui répond
Ex
quil
305 MERCURE DE FRANCE
qu'il ne veut ni de l'un ni de l'autre ;
Voici la raison laconique qu'il en donne.
L'Interêt est Normand , et l'Honneur est Gas-→
con.
Comedie . Cette Piece paroît imprimée
in 12. de 48. pages , sans nom d'Auteur ,
de Ville , ni de Libraire.
Le succès qu'elle a eu doit avoir excité
la curiosité du Public , et c'est pour la satisfaire
que nous allons en donner ici
quelques fragmens ; nous nous en tiendrons
aux Scenes dont on a permis la
representation , et dont nous avons déja
dit quelque chose en donnant l'Argument
de la Piece.
Comme le fond de cette Comédie est
tel qu'on le voit dans la plupart des Pieces
à Scenes détachées , il ne nous sera
pas difficile d'en donner une idée en
peu de mots . Il s'agit d'un Combat entre
l'Interêt et l'Honneur ; après plu-.
sieurs Scenes où l'Interêt se trouve toujours
le plus fort , si l'on en excepte une
où Arlequin ne tient ni pour l'un ni pour
l'autre des deux Concurrens ; l'Honneur
suivi de ses Soldats , vient attaquer le
Palais de l'Interêt , et ne menace pas
moins que de le réduire en cendres ; mais,
E ij l'Interêt
302 MERCURE DE FRANCE.
Interêt n'a pas plutôt fait briller ses
trésors aux yeux de ses Ennemis , qu'ils
viennent tous se ranger sous ses Drapeaux
. Voilà le Plan de la Piece ; en veici
Î'Accessoire dans quelques Traits. La Comedie
commence par ce Monologue de
Mercure :
C'est ici le Palais que l'Interêt habite ,
Cette Idole du siecle , à qui tout se soumet .
Qui fonde son pouvoir sur l'équité proscrite ,
De tant de passions , le mobile secret ,
L'ame du monde enfin , et la source maudite ,
De tout le mal qui s'y commet.
Que ces lambris dorez et que ces murs durables ,
Que tous ces Marbres que voilà ,
Ont écrasé de miserables ,
Pour bien loger ce Monstre- là ! &c.
La seconde Scene est entre Mercure et
l'Interêt. Ce dernier est vétù en riche
Financier il prie Mercure de le loüer ,
Mercure prend le ton ironique , que l'interêt
reçoit comme de veritables louanges
, ce qu'il fait connoître par cet hémistiche
:
On ne peut mieux louer ,
A quoi Mercure répond avec plus de
sincerité :
N'en
FEVRIER. 1731. 303
N'en soyez pas plus vain ;
Car mon encens critique.
Fait moins votre Panegyrique ,
Que le procès du genre humain.
L'Interêt porte l'audace jusqu'à choisir.
Mercure pour son
ainsi :
Substitut ; il s'exprime
Toi cependant , ici tu n'as qu'à recevoir ,
Les Mortels qui viendront réverer mon pouvoir,
Et me demander quelque grace ;
Sers-moi de Substitut et remplit bien ma place .
Une jeune personne vient consulter
Pinterêt sur des vûës de fortune dont
elle s'est fait un Plan ; Mercure lui fait
connoître son nouvel emploi de premier
Commis de l'Interêt , par ces Vers :
Je le double ; et dans cette affaire ,
Mercure seul vous conduira ,
Comme Introducteur ordinaire ,
Des Princesses de l'Opera.
Cette Scene est si vive , qu'on ne s'ap
perçoit pas de sa longueurs nous n'en
citerons qu'une tirade de Fanchon , c'est
le nom de la jeune personne qui veut
faire fortune au Théatre en tout bien
et tout honneur. Elle se regarde déja com
E iiij me
304 MERCURE DE FRANCE
me une Actrice du premier ordre. Elle
s'exprime ainsi :
Au Théatie , quelles délices !
Sans cesse je reçoi des applaudissemens ,
Dans les Foyers , des complimens
Et sans oublier les Coulisses ,
Où l'on me conte cent douceurs.
Vous êtes , me dit l'un , la Reine des Actrices ,
Et vous enlevez tous les coeurs.
'Ah ! vous m'avez percé jusques au fond de l'ame ,
Ajoûte un autre tout en pleurs ;
Fanchon , unique objet de mes vives ardeurs , -
Vous m'atendrissez trop , finissez , je me pâme ,
S'écrie un petit Maître , en ces instans flateurs.
Grands Dieux ! quand elle songe à ce bonheur
extrême ,
Peu s'en faut que Fanchon ne se pâme ellemême.
Nous passons sous silence toutes les
Scenes qui n'ont pas fait beaucoup de
plaisir , celles de M. Faquin ne sont pas
de ce nombre ; mais comme elles sont
dans le goût de l'Opera Comiqué , et
qu'elles doivent beaucoup de leur agrément
au chant , nous les supprimons , de
peur qu'elles ne perdent de leur prix à
la simple lecture .
Nous finirons par quelques traits de
la Scene entre Mercure et Arlequin. Voici
le
FEVRIER. 1731. 305
le caractere que l'Auteur a donné à ce
charmant Héros du Théatre Italien ; c'est
Arlequin même qui parle :
Je suis un homme comme un autre :
Je bois , je mange , je dors bien ;
Je vis de peu de chose et n'ai souci de rien.
Mercure lui demande s'il a beaucoup
de joye ? Il lui répond :
J'en ai ma fourniture ,
Et de la bonne et de la pure ,
Car je la tiens de la premiere main.
Mercure.
Au sein de l'indigence , eh ! qui vous la procure
Arlequin.
Belle demande ! La Nature.
Elle m'a bâti de façon ,
Que tout me fait plaisir et rien ne m'inquiete
Je me passe de peu dans ma condition ;
Et je jouis d'une santé parfaite ;
Je puis me dire le garçon ,
De la meilleure pâte , en un mot , qu'elle ait faite..
Mercure lui offrant le choix de l'Inte
rêt ou de l'Honneur , après un Portrait
fidele qu'il lui en a fait ; il lui répond
Ex
quil
305 MERCURE DE FRANCE
qu'il ne veut ni de l'un ni de l'autre ;
Voici la raison laconique qu'il en donne.
L'Interêt est Normand , et l'Honneur est Gas-→
con.
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Résumé : Le Triomphe de l'Interêt, Comedie, [titre d'après la table]
La pièce 'Le Triomphe de l'Intérêt' est une comédie imprimée en 12 pages de 48 lignes chacune, sans mention d'auteur, de ville ou de libraire. Elle a connu un succès notable, suscitant la curiosité du public. La comédie explore le conflit entre l'Intérêt et l'Honneur, avec plusieurs scènes où l'Intérêt domine. Une scène particulière montre Arlequin refusant de choisir entre les deux. La pièce commence par un monologue de Mercure, qui décrit l'Intérêt comme une idole du siècle, source de nombreux maux. Dans la deuxième scène, l'Intérêt, vêtu en riche financier, demande à Mercure de le louer. Mercure répond ironiquement, soulignant que l'Intérêt corrompt l'humanité. Une jeune personne, Fanchon, consulte l'Intérêt pour des projets de fortune. Mercure, désormais commis de l'Intérêt, guide Fanchon dans ses ambitions théâtrales. Fanchon rêve de devenir une actrice célèbre et de recevoir des compliments. La pièce inclut également des scènes supprimées pour éviter de perdre leur agrément à la lecture. Une scène notable est celle entre Mercure et Arlequin, où ce dernier déclare se contenter de peu et jouir d'une santé parfaite, refusant de choisir entre l'Intérêt et l'Honneur.
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