CHANSON.
M Aman , vous me dites fans ceffe
De ne point aimer de Berger ;
J'en connois affez le danger ,
Pour vaincre en moi cette foibleffe :
Mon coeur foupire près d'Hylas ;
Mais , Maman , je ne l'aime pas.
De fleurs il orne ma houlette
Moi j'en décore fon chapeau ;
Si j'ai quelque ruban nouveau ,
Je cours en parer fa mufette :
C'eft pour lui feul que j'en fais cas ;
Mais , Maman , je ne l'aime pás.
Où ce Berger ne peut pas être ,
J'ai l'air ou diftrait , ou rêveur ;
J'éprouve une douce langueur
Si -tôt que je le vois paroître.
Je veux fuir , il retient mes pas ;
Mais , Maman , je ne l'aime pas.
£1.
72 MERCURE DE FRANCE.
Pour vous obéir je l'évite ;
Mais lorsque malgré moi mon chien
Conduit mon troupeau vers le fien ,
Il rêve , je refte interdite :
Je rougis de notre embarras ;
Mais , Maman , je ne l'aime pas .
Il me prend la main , il foupire ;
Moi , pour fuivre en tout vos leçons ,
J'éloigne auffi-tôt mes moutons ;
Mais pendant que je me retire ,
Je regarde s'il fuit mes pas ;
Mais , Maman , je ne l'aime pas.
33
J'ai mille chofes à lui dire
Les jours que je ne le vois point ;
Et quand nous fommes fans témoin ,
Ma voix fur mes levres expire,
Dieux que ce filence a d'appas !
Mais , Maman , je ne l'aime pas.
O Life , quelle erreur extrême !
Vos yeux , votre air , tout vous dément ;
Et vous aimez aſſurément ....
Oui , fi c'est ainsi que l'on aime.
L'Amour me tenoit dans fes lacs ;
Mais , Maman , je n'y penfois pas.
Me ....