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1
p. 1334-1339
Discours Latin du P. Porée, [titre d'après la table]
Début :
Le Reverend Pere Porée, Jesuite, prononça le neuf de Février, devant une illustre [...]
Mots clefs :
Révérend, Discours, Orateur, Critiques, Républiques des Lettres, Rhéteurs, Grammairiens
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texteReconnaissance textuelle : Discours Latin du P. Porée, [titre d'après la table]
Le Reverend Pere Porée , Jesuite , pro
nonça le neufde Février , devant une 11
lustre Assemblée un Discours Latin
fort éloquent sur les Critiques , dans le
College de Louis le Grand . L'Orateur
(a) L'Incrisalidano.
1. Vol. COR
JUIN. 1731. 133
convenant , qu'il y a aujourd'hui plus de
Critiques que d'Ouvrages à critiquer , et
que la licence de ceux qui se mêlent de
critiquer , a rendu la Critique aussi odieu
se que ses Auteurs , prétend néanmoins
qu'on ne doit pas proscrire de la Répu
blique des Lettres toute sorte de Critique,
mais qu'on doit seulement en corriger
les abus. Il partage donc son Discours , et
entreprend dans la premiere. Partie de
prouver la necessité de la Critique : dans
la seconde , il parle des qualitez d'un bon
Critique.
Par tout où il y a des procès , dit le
P. Porée , par tout où il se commet des
crimes , par tout où on entreprend d'in
troduire la licence , il faut des Juges
pour terminer ces procès , punir ces cri
mes et s'opposer à cette licence . Or tout
cela a lieu dans la Litterature . L'Orateur
laiffe peu de chose à dire sur les sujets
de querelle & de procès , qui divisent
les Gens de Lettres de toutes les sortes
Rhéteurs , Grammairiens , Philosophes ,
Géometres mêmes.. Desorte que tout ce
qu'il y a, ce semble, de plus propre à éclai
rer les Hommes & à les polir , devient
par l'abus qu'ils en font , une source de.
guerre et de discorde , & d'une guerre.
le plus souvent pleine de bassesse et de
I.Vol. mali
#336 MERCURE DE FRANCE
malignité. C'est pour terminer cette guerre
et décider ces procès , que le R. P. Po
rée croit les Gritiques nécessaires , sans
doute , comme le sont les Avocats pour
plaider et pour instruire l'Affaire dont le
Public seul est Juge sans appel . Que
fçait-on même s'il y auroit beaucoup de
procès dans la Litterature , supposé qu'il
n'y eut point de Critiques.
Le second chef des crimes Litteraires
eft bien traité. Que de fautes introduites
dans les Livres des Anciens par l'igno
rance ou la négligence des Libraires ou
des Copistes ! Quelle obligation n'a-t'on
donc pas aux Turnebes , aux Budées , aux
Murets , qui ont pris la peine de purger
ces Livres ? Quelle Chronologie aurions
nous , sans les Scaligers , les Ussers , les
Petaus ? La Céographie ne seroit qu'un
cahos , sans les Cluviers , les Briets , les
Samsons ? Et c'est le même de toutes les
autres parties de la Litterature . Le P.
Porée s'étend beaucoup sur les vols Litte
raires , que c'est aux Critiques de demas
Il s'en fait tous les jours plus qu'on:
quer.
ne pense. La diversité des langues en oc
casionne plusieurs. Souvent un Ami in
fidéle , dépositaire des Ecrits de son Ami
mort , se les attribuë , & c.
La troisiéme raison de la néceffité des
1. Vol .
Cri
JUIN. 1731. 1337
Critiques , est prise de la licence que se
donnent des demi-Sçavans d'altérer les
Sciences , sous pretexte de les enrichir ,
de les réduire , de les embellir , de les per
fectionner. Rien n'eft plus éloquent ni
plus judicieux que le Morceau , où l'O
rateur , rappellant la Coutume des Ro
mains , qui dans le tems orageux , aver
tissoient les Consuls de veiller que la Ré
publique ne souffrit aucun dommage
avertit dans les mêmes termes , les Cri
tiques de veiller que la Théologie , la
Philosophie , l'Histoire , les Mathéma
tiques , les Belles-Lettres , ne souffrent
aucun dommage de la part des demi-Sça
vans. Il est fâcheux que la République
Litteraire , n'ait pas ses Critiques auto
risez comme la République Romaine avoit
ses Consuls , & qu'une foule de Censeurs
sans aveu , plus ennemis des Auteurs que
des Ouvrages , plus malíns à reprendre ,
que judicieux à corriger , puissent pren
dre pour eux un Avertissement que le
P. Porée n'addresse qu'à des Critiques .
sçavans , prudens , & pleins de probité ,,
tels qu'il les caractérise dans la seconde
partie de son Discours.
25
Aujourd'hui tout homme qui se sent in
capable d'écrire sur aucun sujet, et qui vent
pourtant écrire , prend le parti de la Criti
L. Vol. que
T338 MERCURE DE FRANCE
que. Carpour affirmer,il faut avouer quet
que chose ; pour nier il suffit de ne rien sça
voir. On ne sçauroit traiter un sujet , mais
on scait suivre un Auteur qui l'a traité; on
sçait aboyer après lui , le mordre et le dé
chirer. Le sage Orateur croit-il persuader
quelqu'un , lorsqu'il exige d'un Critique,
une science immense , une vaste érudi
tion , une connoissance éxacte de toutes.
choses un Critique a renoncé à être
sçavant , & un véritable
communément si critique .
sçavant
n'est pas
.
La science ne suffit pas ; un Critique a
besoin de beaucoup de prudence , de dis
cernement de sagacité pour porter un
jugement sain, juste etdéfinitif. Mais sur
tout la probité est absolument necessaire
à un Critique. Celui que l'amitié séduit
ou que la haine emporte , ne sçauroit être
un Juge sain & éclairé. C'est pourtant- là
ce qui décide de la plupart des Critiques ,
et l'envie en est ordinairement le premier
mobile ; mais le Public qui est le Juge
Souverain en dernier ressort , et des Criti
ques , et des Ouvrages critiqués , fait et
rend justice aux uns & aux autres , et une
passion tropvive n'impose qu'à celui qui
en est atteint, et tout au plus à ceux qui en
sont complices. Toute critique que la
cabale a dictée , rentre bien- tôt dans le
L. Vol.
néant
,
JUIN. 1731. 1339
néant , d'où elle est à peine sortie , et laisse
en possession de l'immortalité , l'Ouvrage
& l'Auteur qu'elle avoit attaqué avec plus
de véhemence qué de force et de sagesse.
3
Le R. P. Porée dévoilé tous les arti
fices que l'envie , la haine , la partialité
les préjugez inspirent à des Critiques qui
n'ont pas toute la bonne foi que la Pro
bité inspire, et que la Religion exige avec
rigueur. Ilse déclare avec force contre un
Livre assez moderne , qui est effective
ment très- dangereux ; & d'autant plus
dangereux , que l'Auteur ne semble s'y
piquer de probité , que pour porter des
coups plus assurés à la Religion , d'im
partialité , que pour décrier tous les par
tis sans en excepter le bon , de discer
nement que pour rejetter tout , de non
crédulité que pour établir l'incrédulité.
L'Orateur en bon Critique loie ce que
cet Ouvrage a de bon , en blâmant`ce
qu'il a de mauvais.
.
:
On imprime chez Laisnel au. Chef
S. Jean rue S. Jacques , un Livre inti
tulé : Analyse de la Dissertation de M. Mo
rand sur la Taille au haut Appareil , ou Re
ponse aux Reflexions Anatomistes de M.
Rameau sur cet Ouvrage , in 8 °. par M. le
Cat.
nonça le neufde Février , devant une 11
lustre Assemblée un Discours Latin
fort éloquent sur les Critiques , dans le
College de Louis le Grand . L'Orateur
(a) L'Incrisalidano.
1. Vol. COR
JUIN. 1731. 133
convenant , qu'il y a aujourd'hui plus de
Critiques que d'Ouvrages à critiquer , et
que la licence de ceux qui se mêlent de
critiquer , a rendu la Critique aussi odieu
se que ses Auteurs , prétend néanmoins
qu'on ne doit pas proscrire de la Répu
blique des Lettres toute sorte de Critique,
mais qu'on doit seulement en corriger
les abus. Il partage donc son Discours , et
entreprend dans la premiere. Partie de
prouver la necessité de la Critique : dans
la seconde , il parle des qualitez d'un bon
Critique.
Par tout où il y a des procès , dit le
P. Porée , par tout où il se commet des
crimes , par tout où on entreprend d'in
troduire la licence , il faut des Juges
pour terminer ces procès , punir ces cri
mes et s'opposer à cette licence . Or tout
cela a lieu dans la Litterature . L'Orateur
laiffe peu de chose à dire sur les sujets
de querelle & de procès , qui divisent
les Gens de Lettres de toutes les sortes
Rhéteurs , Grammairiens , Philosophes ,
Géometres mêmes.. Desorte que tout ce
qu'il y a, ce semble, de plus propre à éclai
rer les Hommes & à les polir , devient
par l'abus qu'ils en font , une source de.
guerre et de discorde , & d'une guerre.
le plus souvent pleine de bassesse et de
I.Vol. mali
#336 MERCURE DE FRANCE
malignité. C'est pour terminer cette guerre
et décider ces procès , que le R. P. Po
rée croit les Gritiques nécessaires , sans
doute , comme le sont les Avocats pour
plaider et pour instruire l'Affaire dont le
Public seul est Juge sans appel . Que
fçait-on même s'il y auroit beaucoup de
procès dans la Litterature , supposé qu'il
n'y eut point de Critiques.
Le second chef des crimes Litteraires
eft bien traité. Que de fautes introduites
dans les Livres des Anciens par l'igno
rance ou la négligence des Libraires ou
des Copistes ! Quelle obligation n'a-t'on
donc pas aux Turnebes , aux Budées , aux
Murets , qui ont pris la peine de purger
ces Livres ? Quelle Chronologie aurions
nous , sans les Scaligers , les Ussers , les
Petaus ? La Céographie ne seroit qu'un
cahos , sans les Cluviers , les Briets , les
Samsons ? Et c'est le même de toutes les
autres parties de la Litterature . Le P.
Porée s'étend beaucoup sur les vols Litte
raires , que c'est aux Critiques de demas
Il s'en fait tous les jours plus qu'on:
quer.
ne pense. La diversité des langues en oc
casionne plusieurs. Souvent un Ami in
fidéle , dépositaire des Ecrits de son Ami
mort , se les attribuë , & c.
La troisiéme raison de la néceffité des
1. Vol .
Cri
JUIN. 1731. 1337
Critiques , est prise de la licence que se
donnent des demi-Sçavans d'altérer les
Sciences , sous pretexte de les enrichir ,
de les réduire , de les embellir , de les per
fectionner. Rien n'eft plus éloquent ni
plus judicieux que le Morceau , où l'O
rateur , rappellant la Coutume des Ro
mains , qui dans le tems orageux , aver
tissoient les Consuls de veiller que la Ré
publique ne souffrit aucun dommage
avertit dans les mêmes termes , les Cri
tiques de veiller que la Théologie , la
Philosophie , l'Histoire , les Mathéma
tiques , les Belles-Lettres , ne souffrent
aucun dommage de la part des demi-Sça
vans. Il est fâcheux que la République
Litteraire , n'ait pas ses Critiques auto
risez comme la République Romaine avoit
ses Consuls , & qu'une foule de Censeurs
sans aveu , plus ennemis des Auteurs que
des Ouvrages , plus malíns à reprendre ,
que judicieux à corriger , puissent pren
dre pour eux un Avertissement que le
P. Porée n'addresse qu'à des Critiques .
sçavans , prudens , & pleins de probité ,,
tels qu'il les caractérise dans la seconde
partie de son Discours.
25
Aujourd'hui tout homme qui se sent in
capable d'écrire sur aucun sujet, et qui vent
pourtant écrire , prend le parti de la Criti
L. Vol. que
T338 MERCURE DE FRANCE
que. Carpour affirmer,il faut avouer quet
que chose ; pour nier il suffit de ne rien sça
voir. On ne sçauroit traiter un sujet , mais
on scait suivre un Auteur qui l'a traité; on
sçait aboyer après lui , le mordre et le dé
chirer. Le sage Orateur croit-il persuader
quelqu'un , lorsqu'il exige d'un Critique,
une science immense , une vaste érudi
tion , une connoissance éxacte de toutes.
choses un Critique a renoncé à être
sçavant , & un véritable
communément si critique .
sçavant
n'est pas
.
La science ne suffit pas ; un Critique a
besoin de beaucoup de prudence , de dis
cernement de sagacité pour porter un
jugement sain, juste etdéfinitif. Mais sur
tout la probité est absolument necessaire
à un Critique. Celui que l'amitié séduit
ou que la haine emporte , ne sçauroit être
un Juge sain & éclairé. C'est pourtant- là
ce qui décide de la plupart des Critiques ,
et l'envie en est ordinairement le premier
mobile ; mais le Public qui est le Juge
Souverain en dernier ressort , et des Criti
ques , et des Ouvrages critiqués , fait et
rend justice aux uns & aux autres , et une
passion tropvive n'impose qu'à celui qui
en est atteint, et tout au plus à ceux qui en
sont complices. Toute critique que la
cabale a dictée , rentre bien- tôt dans le
L. Vol.
néant
,
JUIN. 1731. 1339
néant , d'où elle est à peine sortie , et laisse
en possession de l'immortalité , l'Ouvrage
& l'Auteur qu'elle avoit attaqué avec plus
de véhemence qué de force et de sagesse.
3
Le R. P. Porée dévoilé tous les arti
fices que l'envie , la haine , la partialité
les préjugez inspirent à des Critiques qui
n'ont pas toute la bonne foi que la Pro
bité inspire, et que la Religion exige avec
rigueur. Ilse déclare avec force contre un
Livre assez moderne , qui est effective
ment très- dangereux ; & d'autant plus
dangereux , que l'Auteur ne semble s'y
piquer de probité , que pour porter des
coups plus assurés à la Religion , d'im
partialité , que pour décrier tous les par
tis sans en excepter le bon , de discer
nement que pour rejetter tout , de non
crédulité que pour établir l'incrédulité.
L'Orateur en bon Critique loie ce que
cet Ouvrage a de bon , en blâmant`ce
qu'il a de mauvais.
.
:
On imprime chez Laisnel au. Chef
S. Jean rue S. Jacques , un Livre inti
tulé : Analyse de la Dissertation de M. Mo
rand sur la Taille au haut Appareil , ou Re
ponse aux Reflexions Anatomistes de M.
Rameau sur cet Ouvrage , in 8 °. par M. le
Cat.
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Résumé : Discours Latin du P. Porée, [titre d'après la table]
Le 9 février, le Père Porée, jésuite, prononça un discours en latin au Collège de Louis le Grand, abordant les critiques littéraires. Il souligna la nécessité de la critique tout en dénonçant ses abus potentiels. Le discours se structurait en deux parties : la première justifiait l'importance de la critique, tandis que la seconde décrivait les qualités requises pour être un bon critique. Le Père Porée expliqua que la critique est indispensable pour régler les querelles et les procès dans le monde littéraire, où les disputes entre rhéteurs, grammairiens, philosophes et géomètres sont fréquentes. Il compara les critiques aux juges et aux avocats, essentiels pour instruire et décider les affaires littéraires. Il mentionna également les erreurs introduites dans les livres anciens par l'ignorance ou la négligence des libraires et des copistes, soulignant l'importance des critiques comme Turnèbe, Budée et Muret qui ont corrigé ces erreurs. Il aborda aussi les vols littéraires et la licence prise par les demi-savants d'altérer les sciences. Pour être un bon critique, le Père Porée insista sur la nécessité de la prudence, du discernement et de la probité. Il dénonça les critiques motivées par l'envie ou la haine, affirmant que le public, en dernier ressort, rend justice aux critiques et aux ouvrages critiqués. Il se déclara contre un livre moderne dangereux, critiquant son manque de probité et d'impartialité.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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