LOGOGRYPΗ Ε.
Οn n'eſt pas, pour porter lemême nom, parent;
Dans une foire il eſt des ânes , plus de cent ,
Qui s'appellent Martin & qui ne ſont pas freres :
Mais ce ne font pas là , dira-t- on , vos affaires .
Soit, je viens donc à mon objet
Et pafle tout de tuite au fait.
Nous ſommes deux qui nous nommons de
même :
L'une , de petitefle extrême ,
Quel'art imagina pour ſoulager l'ennui ,
Eſt fort à la mode aujourd'hui ;
Elle enrichit les uns des dépouilles des autres ;
Et rendant ces derniers plus gueux que les Apôtres
,
Elle les fait aller , ſans âne, ni cheval ,
Sur un triſte grabat mourir à l'Hôpital.
Pour moi d'humeur à cela bien contraire ,
Etd'un tout autre caractere ,
Şans vider le gouflet , j'orne & remplis l'esprit
De quiconque pour guide auprès de lui me prit.
:
Cvj
60 MERCURE DE FRANCE.
Et quand tous deux nous ſommes face à face ,
Jele fais voyager ſans fortir de ſa place ,
Et lui fais parcourir d'immenſes régions ,
Différentes de moeurs & de religions .
Mais foyons debon compte , & fans faire la fiere ,
Je conviens qu'avec la premiere ,
Ayant même origine , elle & moi ſommes foeurs
Qu'au berceau nous avons eu les mêmes Auteurs :
Mais nos emplois ont wis bien de la différence
Entre nous deux ; j'ai donné dans la ſcience ,
Et ma petite foeur dans la frivolité ,
Dans les hafards & la futilité.
Cinq pieds font toute ma machine :
Mais tu me tiens déjà , Lecteur , je m'imagine.
Je t'offre une arme en uſage autrefois ;
Un certain animal qui me ronge par fois ;
Ce qui très-aifément s'apperçoit ſur la neige ;
Liaiſon du diſcours qu'on apprend au College;
Synonyme d'eſpece ; & morceau dans le corps ,
Qui , lorſqu'il s'enfle , empêche d'aller fort.
ARennes Par M. de L. G.