Résultats : 1 texte(s)
Détail
Liste
1
p. 1769-1777
Mort de M. de la Faye, [titre d'après la table]
Mots clefs :
Beaux-arts, Étrangers, Mousquetaire, Ratification de traités, Négociations
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : Mort de M. de la Faye, [titre d'après la table]
Les beaux Arts viennent de faire une
grande perte en la perfone de Jean - François
Leriget de la Faye, Chevalier , Seigneur
de Condé &c. Secretaire du Cabinet du
Roy , l'un des Quarante de l'Académie
Françoiſe, mort à Paris le 11 Juillet , après
fix jours de maladie , dans la 57 ° année
de fon âge , extrêmement regretté par fes
amis,dont le nombre fait honneur à la mémoire
, par les gens de la plus haute distinction
, par les Etrangers et par le Peuple.
Il avoit été Moufquetaire , Lieutenant
dans le Régiment du Roy,Capitaine d'In-
G fanteric
1770 MERCURE DE FRANCE
fanterie dans le Régiment de Laffé , &
Gentilhomme, ordinaire chez le Roy.S.M.
l'avoit nommé fon Envoyé Extraordinaire
auprès de la République de Génes ; il
ayoit été auffi Sécretaire des Commande
mens de S. A. S. M. le Duc de Bourbon ,
qui l'a toujours honoré de ſon eſtime & de
fa confiance , Secretaire de la Maifon du
Roy & Secretaire de la Province de Bourgogne
. Il fe démit de ce dernier Secretariat
dans une circonftance qui lui fit honneur.
En 1713.il étoit au Congrès d'Utrecht,
chargé de diverfes commiffions. Ce fut lui
qui rapporta la ratification des Traitez au
Roy Louis XIV. Il paffa enfuite en Angleterre
, où il fut feul pendant fix mois
chargé des affaires de France, auprès de la
Reine Anne , de laquelle il eut plufieurs
Audiences particulieres. Il fut generalement
aimé & eftimé dans cette Cour. Et
en effet le caractere doux , fouple & infinuant
de M. de la Faye , étoit très- propre
aux Négociations.Jamais homme n'a paru
fi naturel , fi ouvert , ni avoir moins de
réſerve , & n'a mieux fçû en même tems
l'art de s'arrêter où il falloit , fans rien
emettre de tout ce que la dexterité fine &
déliée de la politique peut employer. Le
Roy lui avoit accordé une penfion de trois
mille livres pour les fervices,
En
JUILLET. 1731. 1771
En 1727. il fit le voyage d'Allemagne
par ordre du Duc de Bourbon , à qui il
étoit attaché depuis long- tems . Ce fut à
fon retour que ce Prince conclut fon mariage
avec la Princefle de Heffe- Rhinfelds,
que M. de la Faye avoit vûë à Rhombourg
en Bohéme .
Le 18. Aouft 17 : 9 . il préfenta ces Vers
à Madame la Ducheffe , pour celebrer fa
naiffance.
Allez , mes Vers , allez à la Princesse ,
Rendre mon hommage en ce jour :
Elle a d'Hébé la grace & la jeunesse ,
Minerve l'éclaira des dous de sa sagesse ,
Sa beauté ravit tout , & Paris & la Cour.
L'aimable douceur qu'elle allie
Aux devoirs , à la Dignité ,
Vous peut faire accueillir ; tout essent sa bonté,
Bien que , fans Apollon , la chanter foit folie ,
Dites , pour excuser votre témérité ,
Que si vous savez mal celebrer la beauté ,
Je me connois du moins en Princesse accomplie.
M. de la Faye joüissoit d'une assez bonne
santé , quoique d'une complexion délicate
; sobre , presqu'insensible au plaisir
de la Table. Il étoit d'une taille médiocre,
mais bien prise; le visage ouvert, le regard
Gij spiri1772
MERCURE DE FRANCE
\
spirituel et fin , accompagné d'un souris
agréable , l'air aisé , prévenant , vif et empressé.
On lui avoit fait l'Opération de
I'Empiéme il y a près de 7 ans. Il n'avoit
point été marié , et ne laisse qu'une soeur ,
veuve du Marquis de Vesc , qui n'a point
d'enfans , et un neveu âgé de 19 ans , fils de
son frere aîné , mort Capitaine au Regiment
des Gardes Françoises. Le Roy vient
de lui accorder la Charge de Secretaire
du Cabinet.
M. de la Faye avoit beaucoup d'amour
et de goût pour les Arts , et il en étoit
l'Amateur et le Bienfaicteur. Il n'épargnoit
rien pour leur avancement et pour
en posseder les belles productions. Le prix
ne le rebutoit point quand il trouvoit
dans un Ouvrage le vrai , le beau et sur
tout le gracieux. La distinction de temps,
de païs , de grande ou foible réputation
d'un nom , ne faisoit aucune impression
sur lui ; en sorte qu'avec un choix exquis
et sans prévention pour les grands Maitres
d'Italie , il avoit fait une collection
considérable d'excellens Tableaux, la plupart
de moyenne grandeur , Flamands ,
François , &c. anciens et modernes ; en´
Estampes , Pierres gravées en creux et en
relief , bronze , figures et bas relief de
Marbre , Porcelaine ; ouvrage de la Chine
-
et
JUILLET. 1731 1773
•
et du Japon , &c . et on peut dire que ja→
mais aucun Cabinet n'a été si ouvert , ni
d'un accès si facile aux Curieux et aux
Gens de l'Art.
1
Nous ne disons rien des ornemens , de
la symetrie et de l'arrangement de ce Cabinet,
où l'art et le goût se faisoient admirer,
non plus que de sonCabinet de Livres ,
presque tous de Poësie et belles Lettres
précieux par le choix et d'une grande pro
preté.
A son goût pour la Peinture, etc. M.de
la Faye joignoit celui de la Poësie et de la
Musique ; il avoit l'oreille délicate , il expliquoit
fort bien les differentes sortes
d'harmonies, et les divers goûts de chants,
tant de France que d'Italie . Son talent favori
et son amour ardent pour les Vers a
assez paru dans les petits Poëmes que nous
avons de lui , qu'il récitoit si agréablement
et sans trop se faire prier, mais toutefois
sans se jetter , pour ainsi dire , à læ
tête car il étoit toujours le dernier à croire
qu'il eût fait quelque chose de bon . Il avoit
si peu d'amour propre qu'il recevoit avec
plaisir les corrections ; il en adoptoit même
trop légèrement.
M. de la Faye n'étoit pas sçavant profond
, aussi ne s'en piquoit- il nullement,
mais avec un esprit juste , beaucoup de
Giij saga
1774 MERCURE DE FRANCE
sagacité et une excellente mémoire ; il
avoit si bien sçû mettre à profit ses lcctures
et ses liaisons intimes avec les plus
beaux esprits de notre temps , qu'il avoit
acquis une connoissance telle, qu'aucunes
matieres, sur tout de Belles - Lettres, ne lui
étoient étrangeres.
Il avoit voyagé en Italie et dans les principales
Cours de l'Europe ; il s'y étoit acquis
l'estime et l'amitié de quantité de personnes
de considération dont il parloit les
Langues fort correctement et avec une extrême
facilité . Sa Maison étoit ouverte et
tres fréquentée par les Etrangers qui voyagent
en France , et qui ne le quittoient ja
mais sans marquer un déplaisir égal, à l'empressement
qu'ils avoient eu de le voir.
Son extrême affabilité , sa modestie et sa
simplicité rendoient son commerce tresaimable;
il sembloit apporter dans les conversations
, dans les disputes - même, quelque
chose de doux , qui concilioit , et qui
en donnant du mouvement à l'esprit , y
mettoit beaucoup d'agrément; ce qui faisoit
trouver dans ceux qui l'écoutoient des
ressources d'esprit qu'ils n'auroient peutêtre
pas euës sans ce secours . D'ailleurs ,
amusant délicat agréable ; plaisant
dans ces récits , et jamais aux dépens
de personne
, même dans les occa
> >
sions
JUILLET. 1731. 1775
sions où il est quelquefois permis de se
donner un peu de liberté . Dans sa jeunes
se, un peu volage ; mais toujours ami solide
, constant et genereux ; sensible aux
malheurs des affligez , et secourable aux
nécessiteux,
Jamais homme ne fut plus ennemi da
faste et des airs guindez et importans. Il
les méprisoit souverainement dans les autres
, mais il les supportoit patiamment,
sans dire ou témoigner rien de désobligeant
; car le fond de son caractere étoit
d'être continuellement appliqué à détourner
ce qui pouvoit faire de la peine à quelqu'un
, ou à prévenir ce qui pouvoit lui
faire plaisir.
Il s'énonçoit naturellement et toujours
en bons termes , et il avoit l'art de glisser
à propos dans la conversation , selon le
caractere des personnes , des matieres con.
venables et toujours variées par quelque
chose d'ingénieux , de piquant et de guai.
Il n'est pas surprenant qu'avec ces qualitez
, une humeur égale , et un esprit enjoüé
, M. de la Faye fût souhaité dans le
commerce du monde ; aussi l'aimoit-il
beaucoup. Il sembloit être né plus préci
sément que les autres hommes pour la
société , et je ne sçai si on ne pourroit pas
le regarder comme un modele à cet égard.
Gilij Au
1776 MERCURE DE FRANCE
Au reste , il ne parloit jamais de lui que
pour faire sentir qu'il se plaçoit toujours
au dessous des autres , et presque toujours
à la derniere place , lors même que personne
n'auroit pû lui disputer la premiere.
Il ne connoissoit presque point d'inferieur
, pas même dans son Domestique.
Nos sensibles regrets , fondez sur quelques
liaisons d'amitié , ont peut être donné
trop d'étendue à cet article ; nous le terminerons
par ce trait remarquable de feu
M. l'Abbé de la Grange-Trianer , Chanoine
de N. D. l'homme peut- être le plus
poli de notre siecle , et l'esprit le plus fin
et le plus délié : il disoit que si pour donner
une idée juste et avantageuse du caractere
gracieux et poli des François , il
falloit choisir parmi nous un homme propre
à voyager dans les Païs Etrangers; le
choix devoit tomber sur M. de la Faye.
Il n'est donc plus cet homme aimable
Qui sçavoit allier un génie agréable ,
Aux plus pures clartez de la droite raison !
Cet ami tendre et sécourable ,
Ce Poëte comblé des faveurs d'Apollon !
Grands Dieux ! la Parque inéxorable
A déployé sur luy, ses funestes rigueurs ;
Et vous l'avez permis ! mais la douleur m'a ccable
.
Non
JUILLET. 173T. 1777
Non , non , le Ciel est équitable
La Faye vit encore ; il vit dans tous les coeurs.
Amoris triste Monumentum.
Par l'Abbé de Neuville.
Voici d'autres Vers d'un excellent
Poëte , qui nous sont tombés entre les:
mains, et qui caracterisent bien celui qui
donne lieu à cet Article .
Je vois le cas dont j'étois desireux ;
Malgré l'envie et sa triste rancune ,
Je vois enfin le vrai merite heureux ,
Et ne manquant de recompense aucune ::
La Faye a joye , amis , santé , pecune.
Or désormais gens à plume ou pinceau ,
Avisez-y , quand peindrez la Fortune :
Elle y voit clair , peignez - là sans bandeau..
grande perte en la perfone de Jean - François
Leriget de la Faye, Chevalier , Seigneur
de Condé &c. Secretaire du Cabinet du
Roy , l'un des Quarante de l'Académie
Françoiſe, mort à Paris le 11 Juillet , après
fix jours de maladie , dans la 57 ° année
de fon âge , extrêmement regretté par fes
amis,dont le nombre fait honneur à la mémoire
, par les gens de la plus haute distinction
, par les Etrangers et par le Peuple.
Il avoit été Moufquetaire , Lieutenant
dans le Régiment du Roy,Capitaine d'In-
G fanteric
1770 MERCURE DE FRANCE
fanterie dans le Régiment de Laffé , &
Gentilhomme, ordinaire chez le Roy.S.M.
l'avoit nommé fon Envoyé Extraordinaire
auprès de la République de Génes ; il
ayoit été auffi Sécretaire des Commande
mens de S. A. S. M. le Duc de Bourbon ,
qui l'a toujours honoré de ſon eſtime & de
fa confiance , Secretaire de la Maifon du
Roy & Secretaire de la Province de Bourgogne
. Il fe démit de ce dernier Secretariat
dans une circonftance qui lui fit honneur.
En 1713.il étoit au Congrès d'Utrecht,
chargé de diverfes commiffions. Ce fut lui
qui rapporta la ratification des Traitez au
Roy Louis XIV. Il paffa enfuite en Angleterre
, où il fut feul pendant fix mois
chargé des affaires de France, auprès de la
Reine Anne , de laquelle il eut plufieurs
Audiences particulieres. Il fut generalement
aimé & eftimé dans cette Cour. Et
en effet le caractere doux , fouple & infinuant
de M. de la Faye , étoit très- propre
aux Négociations.Jamais homme n'a paru
fi naturel , fi ouvert , ni avoir moins de
réſerve , & n'a mieux fçû en même tems
l'art de s'arrêter où il falloit , fans rien
emettre de tout ce que la dexterité fine &
déliée de la politique peut employer. Le
Roy lui avoit accordé une penfion de trois
mille livres pour les fervices,
En
JUILLET. 1731. 1771
En 1727. il fit le voyage d'Allemagne
par ordre du Duc de Bourbon , à qui il
étoit attaché depuis long- tems . Ce fut à
fon retour que ce Prince conclut fon mariage
avec la Princefle de Heffe- Rhinfelds,
que M. de la Faye avoit vûë à Rhombourg
en Bohéme .
Le 18. Aouft 17 : 9 . il préfenta ces Vers
à Madame la Ducheffe , pour celebrer fa
naiffance.
Allez , mes Vers , allez à la Princesse ,
Rendre mon hommage en ce jour :
Elle a d'Hébé la grace & la jeunesse ,
Minerve l'éclaira des dous de sa sagesse ,
Sa beauté ravit tout , & Paris & la Cour.
L'aimable douceur qu'elle allie
Aux devoirs , à la Dignité ,
Vous peut faire accueillir ; tout essent sa bonté,
Bien que , fans Apollon , la chanter foit folie ,
Dites , pour excuser votre témérité ,
Que si vous savez mal celebrer la beauté ,
Je me connois du moins en Princesse accomplie.
M. de la Faye joüissoit d'une assez bonne
santé , quoique d'une complexion délicate
; sobre , presqu'insensible au plaisir
de la Table. Il étoit d'une taille médiocre,
mais bien prise; le visage ouvert, le regard
Gij spiri1772
MERCURE DE FRANCE
\
spirituel et fin , accompagné d'un souris
agréable , l'air aisé , prévenant , vif et empressé.
On lui avoit fait l'Opération de
I'Empiéme il y a près de 7 ans. Il n'avoit
point été marié , et ne laisse qu'une soeur ,
veuve du Marquis de Vesc , qui n'a point
d'enfans , et un neveu âgé de 19 ans , fils de
son frere aîné , mort Capitaine au Regiment
des Gardes Françoises. Le Roy vient
de lui accorder la Charge de Secretaire
du Cabinet.
M. de la Faye avoit beaucoup d'amour
et de goût pour les Arts , et il en étoit
l'Amateur et le Bienfaicteur. Il n'épargnoit
rien pour leur avancement et pour
en posseder les belles productions. Le prix
ne le rebutoit point quand il trouvoit
dans un Ouvrage le vrai , le beau et sur
tout le gracieux. La distinction de temps,
de païs , de grande ou foible réputation
d'un nom , ne faisoit aucune impression
sur lui ; en sorte qu'avec un choix exquis
et sans prévention pour les grands Maitres
d'Italie , il avoit fait une collection
considérable d'excellens Tableaux, la plupart
de moyenne grandeur , Flamands ,
François , &c. anciens et modernes ; en´
Estampes , Pierres gravées en creux et en
relief , bronze , figures et bas relief de
Marbre , Porcelaine ; ouvrage de la Chine
-
et
JUILLET. 1731 1773
•
et du Japon , &c . et on peut dire que ja→
mais aucun Cabinet n'a été si ouvert , ni
d'un accès si facile aux Curieux et aux
Gens de l'Art.
1
Nous ne disons rien des ornemens , de
la symetrie et de l'arrangement de ce Cabinet,
où l'art et le goût se faisoient admirer,
non plus que de sonCabinet de Livres ,
presque tous de Poësie et belles Lettres
précieux par le choix et d'une grande pro
preté.
A son goût pour la Peinture, etc. M.de
la Faye joignoit celui de la Poësie et de la
Musique ; il avoit l'oreille délicate , il expliquoit
fort bien les differentes sortes
d'harmonies, et les divers goûts de chants,
tant de France que d'Italie . Son talent favori
et son amour ardent pour les Vers a
assez paru dans les petits Poëmes que nous
avons de lui , qu'il récitoit si agréablement
et sans trop se faire prier, mais toutefois
sans se jetter , pour ainsi dire , à læ
tête car il étoit toujours le dernier à croire
qu'il eût fait quelque chose de bon . Il avoit
si peu d'amour propre qu'il recevoit avec
plaisir les corrections ; il en adoptoit même
trop légèrement.
M. de la Faye n'étoit pas sçavant profond
, aussi ne s'en piquoit- il nullement,
mais avec un esprit juste , beaucoup de
Giij saga
1774 MERCURE DE FRANCE
sagacité et une excellente mémoire ; il
avoit si bien sçû mettre à profit ses lcctures
et ses liaisons intimes avec les plus
beaux esprits de notre temps , qu'il avoit
acquis une connoissance telle, qu'aucunes
matieres, sur tout de Belles - Lettres, ne lui
étoient étrangeres.
Il avoit voyagé en Italie et dans les principales
Cours de l'Europe ; il s'y étoit acquis
l'estime et l'amitié de quantité de personnes
de considération dont il parloit les
Langues fort correctement et avec une extrême
facilité . Sa Maison étoit ouverte et
tres fréquentée par les Etrangers qui voyagent
en France , et qui ne le quittoient ja
mais sans marquer un déplaisir égal, à l'empressement
qu'ils avoient eu de le voir.
Son extrême affabilité , sa modestie et sa
simplicité rendoient son commerce tresaimable;
il sembloit apporter dans les conversations
, dans les disputes - même, quelque
chose de doux , qui concilioit , et qui
en donnant du mouvement à l'esprit , y
mettoit beaucoup d'agrément; ce qui faisoit
trouver dans ceux qui l'écoutoient des
ressources d'esprit qu'ils n'auroient peutêtre
pas euës sans ce secours . D'ailleurs ,
amusant délicat agréable ; plaisant
dans ces récits , et jamais aux dépens
de personne
, même dans les occa
> >
sions
JUILLET. 1731. 1775
sions où il est quelquefois permis de se
donner un peu de liberté . Dans sa jeunes
se, un peu volage ; mais toujours ami solide
, constant et genereux ; sensible aux
malheurs des affligez , et secourable aux
nécessiteux,
Jamais homme ne fut plus ennemi da
faste et des airs guindez et importans. Il
les méprisoit souverainement dans les autres
, mais il les supportoit patiamment,
sans dire ou témoigner rien de désobligeant
; car le fond de son caractere étoit
d'être continuellement appliqué à détourner
ce qui pouvoit faire de la peine à quelqu'un
, ou à prévenir ce qui pouvoit lui
faire plaisir.
Il s'énonçoit naturellement et toujours
en bons termes , et il avoit l'art de glisser
à propos dans la conversation , selon le
caractere des personnes , des matieres con.
venables et toujours variées par quelque
chose d'ingénieux , de piquant et de guai.
Il n'est pas surprenant qu'avec ces qualitez
, une humeur égale , et un esprit enjoüé
, M. de la Faye fût souhaité dans le
commerce du monde ; aussi l'aimoit-il
beaucoup. Il sembloit être né plus préci
sément que les autres hommes pour la
société , et je ne sçai si on ne pourroit pas
le regarder comme un modele à cet égard.
Gilij Au
1776 MERCURE DE FRANCE
Au reste , il ne parloit jamais de lui que
pour faire sentir qu'il se plaçoit toujours
au dessous des autres , et presque toujours
à la derniere place , lors même que personne
n'auroit pû lui disputer la premiere.
Il ne connoissoit presque point d'inferieur
, pas même dans son Domestique.
Nos sensibles regrets , fondez sur quelques
liaisons d'amitié , ont peut être donné
trop d'étendue à cet article ; nous le terminerons
par ce trait remarquable de feu
M. l'Abbé de la Grange-Trianer , Chanoine
de N. D. l'homme peut- être le plus
poli de notre siecle , et l'esprit le plus fin
et le plus délié : il disoit que si pour donner
une idée juste et avantageuse du caractere
gracieux et poli des François , il
falloit choisir parmi nous un homme propre
à voyager dans les Païs Etrangers; le
choix devoit tomber sur M. de la Faye.
Il n'est donc plus cet homme aimable
Qui sçavoit allier un génie agréable ,
Aux plus pures clartez de la droite raison !
Cet ami tendre et sécourable ,
Ce Poëte comblé des faveurs d'Apollon !
Grands Dieux ! la Parque inéxorable
A déployé sur luy, ses funestes rigueurs ;
Et vous l'avez permis ! mais la douleur m'a ccable
.
Non
JUILLET. 173T. 1777
Non , non , le Ciel est équitable
La Faye vit encore ; il vit dans tous les coeurs.
Amoris triste Monumentum.
Par l'Abbé de Neuville.
Voici d'autres Vers d'un excellent
Poëte , qui nous sont tombés entre les:
mains, et qui caracterisent bien celui qui
donne lieu à cet Article .
Je vois le cas dont j'étois desireux ;
Malgré l'envie et sa triste rancune ,
Je vois enfin le vrai merite heureux ,
Et ne manquant de recompense aucune ::
La Faye a joye , amis , santé , pecune.
Or désormais gens à plume ou pinceau ,
Avisez-y , quand peindrez la Fortune :
Elle y voit clair , peignez - là sans bandeau..
Fermer
Résumé : Mort de M. de la Faye, [titre d'après la table]
Jean-François Leriget de la Faye, Chevalier et Seigneur de Condé, est décédé à Paris le 11 juillet à l'âge de 57 ans après six jours de maladie. Secrétaire du Cabinet du Roi et membre des Quarante de l'Académie Française, il était très regretté par ses amis, les personnes de haute distinction, les étrangers et le peuple. De la Faye a occupé divers postes militaires et diplomatiques, notamment celui d'Envoyé Extraordinaire auprès de la République de Gênes et de Secrétaire des Commandements du Duc de Bourbon. En 1713, il a participé au Congrès d'Utrecht et a rapporté la ratification des traités au Roi Louis XIV. Il a également été chargé des affaires de France en Angleterre auprès de la Reine Anne. En 1727, il a effectué un voyage en Allemagne pour le Duc de Bourbon. De la Faye était connu pour son caractère doux, souple et insinuant, idéal pour les négociations. Il a reçu une pension de trois mille livres pour ses services. Il était amateur et bienfaiteur des arts, possédant une collection considérable de tableaux, estampes, pierres gravées, bronzes et porcelaines. Il avait un goût prononcé pour la poésie et la musique, et était apprécié pour son esprit juste et sa mémoire excellente. De la Faye était également connu pour son affabilité, sa modestie et sa simplicité, rendant son commerce très aimable. Il était ennemi du faste et des airs importants, préférant toujours se placer en dessous des autres. Son décès a été profondément regretté, et il est décrit comme un modèle de sociabilité et de politesse.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Fermer