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Liste
1
p. 167-175
ARCHITECTURE.
Début :
Si les hommes n'étoient pas aussi portés qu'ils le sont à se livrer dans leurs opinions [...]
Mots clefs :
Ordre architectural, Goût, Colonnade, Arts, Architecture, Roi, Esprit
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texteReconnaissance textuelle : ARCHITECTURE.
ARCHITECTURE .
pas
auffi portés
I les hommes n'étoient
qu'ils le font à fe livrer dans leurs opinions
à des excès toujours condamnables ,
s'ils n'autorifoient pas par des exemples
trop fouvent répétés ,à douter de l'équité de
leurs motifs , on ne pourroit leur conteſter
le droit honorable d'étendre leurs difcuffions
& leur critique fur les objets les plus
refpectables en tous genres : mais lorsqu'on
voit ( pour me reftreindre aux matieres de
goût ) qu'à peine a - t - on ofé ſubſtituer à
l'adoration d'Homere quelques recherches
fur de légers défauts , dont il eft certain
qu'il n'a pas dû être exempt , qu'auffi - tôt
on brife fes autels , on arrache fa couronne
, on méprife & on raille fes adorateurs ;
ne doit - on pas être porté à fouhaiter
qu'à l'exemple de Mahomet , on impoſe
un filence profond & mystérieux fur les
Divinités des fciences , des arts & du goût ?
Mais où fe trouvera le Légiflateur dont
la miſſion ſera affez généralement reconnue
, pour établir cette loi de prévoyance
que l'efprit impoferoit à l'efprit ? d'ailleurs,
ofer montrer de nos jours une pareille
168 MERCURE DE FRANCE.
méfiance , ne feroit- ce pas refufer à notre
fiécle ce titre refpectable de philofophe
dont il fe pare , & dont il efpere que la
postérité fera fon titre diftinctif ? Puifqu'il
en arbore l'étendart , il doit être louable
& permis aujourd'hui ou jamais de hazarder
quelques réflexions qui ont pour objet
un de ces chefs - d'oeuvres des arts faits pour
être adorés aveuglément dans un fiécle
d'enthouſiaſme & de préjugés ; mais faits
pour être difcutés dans un fiécle fage ,
éclairé , enfin dans un fiécle philofophe
comme le nôtre.
Il s'agit ici de la colonade & des projets
du rétabliſſement du Louvre.
Il est néceffaire d'établir premierement
les raifons pour lefquelles , fous le regne
de Louis XIV , les Architectes employés
à cet ouvrage ont pris pour le finir une
route différente de celle qu'avoient tenue
ceux qui l'avoient commencé.
En général , il est avantageux aux progrès
des connoiffances humaines , que les
efprits & les talens d'un fiécle profitent &
s'enrichiffent de ce que l'efprit & le talent
avoient amaffé déja de thréfors & de richeffes
; mais le profit feroit inconteſtablement
plus confidérable & plus rapide ,
fi les grands ouvrages & les vaftes projets
conduits & exécutés par la même main ,
qui
AVRIL. 11755. 1.69
qui en a tracé les efquiffes , nous offroient
plus fouvent les idées accomplies de ceux
qui les ont conçus . Il arrive malheureufement
que ces auteurs ont des jours plus
bornés que leur entreprife , & qu'après
eux on s'écarte toujours de leurs vûes , ou
bien que l'on abandonne leurs plans.
Il ne falloit pour finir l'édifice dont il
eft queftion , qu'ordonner aux Architectes
de fuivre ce qui étoit commencé , nous
aurions fous les yeux le plus fuperbe palais
de l'Europe. Louis XIV attribuant
aux artiftes les principes & les grands motifs
qui le faifoient agir , fit venir des pays
étrangers des hommes de réputation : tous
ceux qui étoient en France furent chargés
de travailler ; mais l'amour propre injufte
leur perfuada qu'il n'y avoit aucune
gloire à prétendre , s'ils fuivoient des idées
qu'ils n'auroient point créées.
On fit donc différens projets qui occafionnerent
, comme aujourd'hui , des conteftations
fans nombre parmi les artiſtes ,
& des libelles fans fin de la part des critiques,
Il fut réfolu qu'on éleveroit la colonade
pour former l'entrée du Louvre , &
que l'on doubleroit l'aîle fur la riviere ,
pour loger le Roi plus commodément dans
cette partie. 200
Réfléchiffons fur le réfultat de tant de
H
170 MERCURE DE FRANCE .
difcuffions , d'obfervations , de critiques ,
& d'avis différens .
-Quel eft - il ? 'une façade de palais fans
croifées , dont l'ufage n'a pu fe faire deviner
depuis qu'elle eft bâtie , dont les
inconvéniens font fans hombre , & dont
la beauté déplacée a cependant un droit
trop jufte fur notre admiration pour qu'on
puiffe être foupçonné de le lui refufer.
L'Architecte , emporté par le defir de concevoir
& d'enfanter une production neuve
& grande , a-t- il donc regardé comme
pen intéreffant l'ufage qu'on feroit de fes
travaux ? quelle eft la deftination de la
magnifique colonade qu'il a placée au premier
étage de cette façade L'a- t- il faite
pour placer du monde à l'arrivée , ou à la
fortie du Roi L'a - t-il ornée pour le Roi
lui-inême dans les occafions où l'on auroit
donné des fêtes dans la place fur laquelle
elle devoit dominer ? Dans l'un ou dans
l'autre cas , n'eût-il pas été encore à defirer
que la colonade fe trouvât placée dans
le milieu , comme l'endroit le plus convenable
& le plus décent ? La fuppofez - vous
propre à faciliter la communication d'un
côté du palais à l'autre ? Alors pourquoi
cette interruption ménagée pour faire une
mauvaiſe arcade , dans laquelle fe voit une
Petite porte ? C'eft ainfi que les idées de
AVRIL. 1755. 171
grandeur & cet enthouſiaſme qui femblent
pour nous un état violent , ne font pas ว
l'abri d'un mêlange de grandes & de petites
productions. J'ajoûterai encore , c'eft
ainfi que la perfection abfolue exige que
l'imagination prenne toujours l'ordre d'une
fage & utile convenance , qui eft la bafe
des fciences , des arts & du goût.
ger par
Pallons maintenant à l'examen de la façade
, qui placée du côté de la rivière , eſt
celle que l'Architecte a eu intention de
deftiner à l'appartement du Roi. A en jul'entrée
dont nous venons de parler
, & par lės progrès que doit offrir la
magnificence d'un palais , quelle devroit.
être la riche décoration de cette aîle qu'un
grand Monarque avoit choifie pour fon
féjour ? Cependant , oubliant cette conve
nance fi jufte , ou bien épuifé par l'effort
qu'il vient de faire , l'Architecte ne préfente
à notre curiofité qu'un bâtiment
froid , décoré d'architecture en bas relief,
autrement dit de pilaftres fans colonnes ,
& fans auctin avant-corps qui interrompe
par des repos & par des maffes l'ennuyeufe
monotonie qui y regne.
Des Architectes qui n'étant pas gênés ,
ont été capables de commettre des fautes
auffi avérées , ne nous autorifent - ils pas à
examiner avec moins de fertile ce qui
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
a pu
les engager à décorer la Cour d'un
troifieme ordre , par préférence à l'attique
de l'ancien projet.
Je m'imagine que deux raifons font les
principales caufes de ce changement : le
defir d'innover , & les difficultés qu'ils
ont rencontrées en voulant exécuter l'attique
, après avoir fait les façades extérieures.
Jugeons à préfent de la validité de ces
deux motifs : le premier fi général & fi
fouvent ennemi du bien , n'a pas befoin
d'une longue difcuffion . Les innovations
particulieres telles que celles - ci , ne faiſant
jamais partie d'un plan général , ont prefque
toujours l'air déplacé.
Cependant il étoit néceffaire de montrer
fa capacité : fuivre ce qui étoit commencé
, c'étoit , ou paroître plagiaire , ou
montrer un génie peu capable de reffource
& d'invention : d'ailleurs , par rapport
au dehors , qui ne peut entrer en comparaifon
avec le dedans , il falloit fe réfoudre
à fupprimer les dômes , les pavillons ,
les combles. Si l'on exécute ces retranchemens
, & fi l'on place ce feul attique , ne
paroîtra- t- il pas qu'on a cherché à appauvrir
un édifice que le projet d'un grand
Roi eft d'enrichir & d'orner ? Pourquoi
dirent- ils , cédant à toute la folidité de ces
raifons , ne formons - nous pas un troifieme
:I
AVRIL.
1755. 173
ordre qui , par fa nouveauté , fera briller
nos talens , & par fa richeffe fera conforme
au deffein de celui qui nous emploie ?
L'invention n'eft pas une déeffe docile ,
elle refuſe fouvent fes faveurs à ceux qui
les defirent . On eut beau propofer des prix
à celui qui ajoûteroit un nouvel ordre à
ceux que le caprice a fi fouvent défigurés ,
& que le bon goût a toujours rétablis ; if
ne fe trouva pas de Callimachus , & l'on
fe vit contraint de fe fervir d'une de ces
productions , dont la nouveauté fait le feut
mérite , & qu'on fe garderoit bien d'adopter
aujourd'hui.
Mais en fuppofant même que cet ordre
fût digne d'être joint à ceux que le
difcernement de tant de frécles nous a
tranfmis , feroit- il bien placé , & rendroit
il l'effet qu'on s'eft propofé ?
J'ofe répondre que non . On a eu deffein
fans doute , en fupprimant les pavillons ,
les dômes & les combles , qui ne peuvent
fubfifter relativement au dehors , de trouver
quelque chofe qui réparât cette perte.
Mais en établiffant ce troifieme ordre
dans toute l'étendue de l'édifice , tout le
bâtiment fe trouvera alors couronné à la
même hauteur & de niveau ; au lieu qu'en
confervant l'attique dans les ailes , en ádmettant
le troiſieme ordre dans les pavil-
Hiij
174 MERCURE DE FRANCE .
lons des milieux , en décorant le deffus 'de
l'attique dans les quatre pavillons des angles
, cette cour intérieure préfentera une
décoration , dont le jeu détruira cette uniformité
dont l'architecture doit autant fe
garantir que les autres productions des arts.
Il feroit aifé de développer ces réflexions
& de prouver que ce projet eft celui qui
convient mieux à l'entiere perfection , fi
defirée d'un des plus beaux monumens de
la nation. Un nombre infini d'inconvéniens
dans les partis différens qu'on peut
prendre, me fourniroit une matiere qui deviendroit
infenfiblement trop abondante.
Je fouhaite feulement qu'on fe repréfente
l'effet que produira l'ordre françois exécu
té dans les petits avant- corps du milieu des
aîles , où s'en trouve à préfent le modele
en maffe. Qui pourra fupporter l'exceffive
hauteur de ces avant - corps , comparée à
leur largeur , puifqu'ils font déja trop
hauts , en y employant même l'attique.
Au refte , je ne prétens pas juftifier
abfolument l'attique des défauts qu'on
peut lui imputer ; furchargé d'ornemens ,
décoré de figures & de trophées d'une
proportion trop forte , il ne peut foutenir
fes droits avec avantage que contre
un adverfaire dont la caufe eft infiniment
moins favorable que la fienne .
AVRILIS 1755. 175
4
De plus , tout changement dans cet ouvrage
confacré par la vénération publique ,
paroîtra toujours un crime à ceux qui ,
veulent jouir du plaifir de blâmer , fans
prendre la jufte peine d'approfondir & de
s'éclairer. Mais fi la critique fondée concourt
à l'avantage des arts qu'elle éclaire ,
& à la réputation durable des artiſtes
qu'elle applaudit , ces murmures paffagers
rien n'autorife , ne doivent jamais
fufpendre des réfolutions que la raifon
& le goût d'accord ont approuvées.
pas
auffi portés
I les hommes n'étoient
qu'ils le font à fe livrer dans leurs opinions
à des excès toujours condamnables ,
s'ils n'autorifoient pas par des exemples
trop fouvent répétés ,à douter de l'équité de
leurs motifs , on ne pourroit leur conteſter
le droit honorable d'étendre leurs difcuffions
& leur critique fur les objets les plus
refpectables en tous genres : mais lorsqu'on
voit ( pour me reftreindre aux matieres de
goût ) qu'à peine a - t - on ofé ſubſtituer à
l'adoration d'Homere quelques recherches
fur de légers défauts , dont il eft certain
qu'il n'a pas dû être exempt , qu'auffi - tôt
on brife fes autels , on arrache fa couronne
, on méprife & on raille fes adorateurs ;
ne doit - on pas être porté à fouhaiter
qu'à l'exemple de Mahomet , on impoſe
un filence profond & mystérieux fur les
Divinités des fciences , des arts & du goût ?
Mais où fe trouvera le Légiflateur dont
la miſſion ſera affez généralement reconnue
, pour établir cette loi de prévoyance
que l'efprit impoferoit à l'efprit ? d'ailleurs,
ofer montrer de nos jours une pareille
168 MERCURE DE FRANCE.
méfiance , ne feroit- ce pas refufer à notre
fiécle ce titre refpectable de philofophe
dont il fe pare , & dont il efpere que la
postérité fera fon titre diftinctif ? Puifqu'il
en arbore l'étendart , il doit être louable
& permis aujourd'hui ou jamais de hazarder
quelques réflexions qui ont pour objet
un de ces chefs - d'oeuvres des arts faits pour
être adorés aveuglément dans un fiécle
d'enthouſiaſme & de préjugés ; mais faits
pour être difcutés dans un fiécle fage ,
éclairé , enfin dans un fiécle philofophe
comme le nôtre.
Il s'agit ici de la colonade & des projets
du rétabliſſement du Louvre.
Il est néceffaire d'établir premierement
les raifons pour lefquelles , fous le regne
de Louis XIV , les Architectes employés
à cet ouvrage ont pris pour le finir une
route différente de celle qu'avoient tenue
ceux qui l'avoient commencé.
En général , il est avantageux aux progrès
des connoiffances humaines , que les
efprits & les talens d'un fiécle profitent &
s'enrichiffent de ce que l'efprit & le talent
avoient amaffé déja de thréfors & de richeffes
; mais le profit feroit inconteſtablement
plus confidérable & plus rapide ,
fi les grands ouvrages & les vaftes projets
conduits & exécutés par la même main ,
qui
AVRIL. 11755. 1.69
qui en a tracé les efquiffes , nous offroient
plus fouvent les idées accomplies de ceux
qui les ont conçus . Il arrive malheureufement
que ces auteurs ont des jours plus
bornés que leur entreprife , & qu'après
eux on s'écarte toujours de leurs vûes , ou
bien que l'on abandonne leurs plans.
Il ne falloit pour finir l'édifice dont il
eft queftion , qu'ordonner aux Architectes
de fuivre ce qui étoit commencé , nous
aurions fous les yeux le plus fuperbe palais
de l'Europe. Louis XIV attribuant
aux artiftes les principes & les grands motifs
qui le faifoient agir , fit venir des pays
étrangers des hommes de réputation : tous
ceux qui étoient en France furent chargés
de travailler ; mais l'amour propre injufte
leur perfuada qu'il n'y avoit aucune
gloire à prétendre , s'ils fuivoient des idées
qu'ils n'auroient point créées.
On fit donc différens projets qui occafionnerent
, comme aujourd'hui , des conteftations
fans nombre parmi les artiſtes ,
& des libelles fans fin de la part des critiques,
Il fut réfolu qu'on éleveroit la colonade
pour former l'entrée du Louvre , &
que l'on doubleroit l'aîle fur la riviere ,
pour loger le Roi plus commodément dans
cette partie. 200
Réfléchiffons fur le réfultat de tant de
H
170 MERCURE DE FRANCE .
difcuffions , d'obfervations , de critiques ,
& d'avis différens .
-Quel eft - il ? 'une façade de palais fans
croifées , dont l'ufage n'a pu fe faire deviner
depuis qu'elle eft bâtie , dont les
inconvéniens font fans hombre , & dont
la beauté déplacée a cependant un droit
trop jufte fur notre admiration pour qu'on
puiffe être foupçonné de le lui refufer.
L'Architecte , emporté par le defir de concevoir
& d'enfanter une production neuve
& grande , a-t- il donc regardé comme
pen intéreffant l'ufage qu'on feroit de fes
travaux ? quelle eft la deftination de la
magnifique colonade qu'il a placée au premier
étage de cette façade L'a- t- il faite
pour placer du monde à l'arrivée , ou à la
fortie du Roi L'a - t-il ornée pour le Roi
lui-inême dans les occafions où l'on auroit
donné des fêtes dans la place fur laquelle
elle devoit dominer ? Dans l'un ou dans
l'autre cas , n'eût-il pas été encore à defirer
que la colonade fe trouvât placée dans
le milieu , comme l'endroit le plus convenable
& le plus décent ? La fuppofez - vous
propre à faciliter la communication d'un
côté du palais à l'autre ? Alors pourquoi
cette interruption ménagée pour faire une
mauvaiſe arcade , dans laquelle fe voit une
Petite porte ? C'eft ainfi que les idées de
AVRIL. 1755. 171
grandeur & cet enthouſiaſme qui femblent
pour nous un état violent , ne font pas ว
l'abri d'un mêlange de grandes & de petites
productions. J'ajoûterai encore , c'eft
ainfi que la perfection abfolue exige que
l'imagination prenne toujours l'ordre d'une
fage & utile convenance , qui eft la bafe
des fciences , des arts & du goût.
ger par
Pallons maintenant à l'examen de la façade
, qui placée du côté de la rivière , eſt
celle que l'Architecte a eu intention de
deftiner à l'appartement du Roi. A en jul'entrée
dont nous venons de parler
, & par lės progrès que doit offrir la
magnificence d'un palais , quelle devroit.
être la riche décoration de cette aîle qu'un
grand Monarque avoit choifie pour fon
féjour ? Cependant , oubliant cette conve
nance fi jufte , ou bien épuifé par l'effort
qu'il vient de faire , l'Architecte ne préfente
à notre curiofité qu'un bâtiment
froid , décoré d'architecture en bas relief,
autrement dit de pilaftres fans colonnes ,
& fans auctin avant-corps qui interrompe
par des repos & par des maffes l'ennuyeufe
monotonie qui y regne.
Des Architectes qui n'étant pas gênés ,
ont été capables de commettre des fautes
auffi avérées , ne nous autorifent - ils pas à
examiner avec moins de fertile ce qui
Hij
172 MERCURE DE FRANCE.
a pu
les engager à décorer la Cour d'un
troifieme ordre , par préférence à l'attique
de l'ancien projet.
Je m'imagine que deux raifons font les
principales caufes de ce changement : le
defir d'innover , & les difficultés qu'ils
ont rencontrées en voulant exécuter l'attique
, après avoir fait les façades extérieures.
Jugeons à préfent de la validité de ces
deux motifs : le premier fi général & fi
fouvent ennemi du bien , n'a pas befoin
d'une longue difcuffion . Les innovations
particulieres telles que celles - ci , ne faiſant
jamais partie d'un plan général , ont prefque
toujours l'air déplacé.
Cependant il étoit néceffaire de montrer
fa capacité : fuivre ce qui étoit commencé
, c'étoit , ou paroître plagiaire , ou
montrer un génie peu capable de reffource
& d'invention : d'ailleurs , par rapport
au dehors , qui ne peut entrer en comparaifon
avec le dedans , il falloit fe réfoudre
à fupprimer les dômes , les pavillons ,
les combles. Si l'on exécute ces retranchemens
, & fi l'on place ce feul attique , ne
paroîtra- t- il pas qu'on a cherché à appauvrir
un édifice que le projet d'un grand
Roi eft d'enrichir & d'orner ? Pourquoi
dirent- ils , cédant à toute la folidité de ces
raifons , ne formons - nous pas un troifieme
:I
AVRIL.
1755. 173
ordre qui , par fa nouveauté , fera briller
nos talens , & par fa richeffe fera conforme
au deffein de celui qui nous emploie ?
L'invention n'eft pas une déeffe docile ,
elle refuſe fouvent fes faveurs à ceux qui
les defirent . On eut beau propofer des prix
à celui qui ajoûteroit un nouvel ordre à
ceux que le caprice a fi fouvent défigurés ,
& que le bon goût a toujours rétablis ; if
ne fe trouva pas de Callimachus , & l'on
fe vit contraint de fe fervir d'une de ces
productions , dont la nouveauté fait le feut
mérite , & qu'on fe garderoit bien d'adopter
aujourd'hui.
Mais en fuppofant même que cet ordre
fût digne d'être joint à ceux que le
difcernement de tant de frécles nous a
tranfmis , feroit- il bien placé , & rendroit
il l'effet qu'on s'eft propofé ?
J'ofe répondre que non . On a eu deffein
fans doute , en fupprimant les pavillons ,
les dômes & les combles , qui ne peuvent
fubfifter relativement au dehors , de trouver
quelque chofe qui réparât cette perte.
Mais en établiffant ce troifieme ordre
dans toute l'étendue de l'édifice , tout le
bâtiment fe trouvera alors couronné à la
même hauteur & de niveau ; au lieu qu'en
confervant l'attique dans les ailes , en ádmettant
le troiſieme ordre dans les pavil-
Hiij
174 MERCURE DE FRANCE .
lons des milieux , en décorant le deffus 'de
l'attique dans les quatre pavillons des angles
, cette cour intérieure préfentera une
décoration , dont le jeu détruira cette uniformité
dont l'architecture doit autant fe
garantir que les autres productions des arts.
Il feroit aifé de développer ces réflexions
& de prouver que ce projet eft celui qui
convient mieux à l'entiere perfection , fi
defirée d'un des plus beaux monumens de
la nation. Un nombre infini d'inconvéniens
dans les partis différens qu'on peut
prendre, me fourniroit une matiere qui deviendroit
infenfiblement trop abondante.
Je fouhaite feulement qu'on fe repréfente
l'effet que produira l'ordre françois exécu
té dans les petits avant- corps du milieu des
aîles , où s'en trouve à préfent le modele
en maffe. Qui pourra fupporter l'exceffive
hauteur de ces avant - corps , comparée à
leur largeur , puifqu'ils font déja trop
hauts , en y employant même l'attique.
Au refte , je ne prétens pas juftifier
abfolument l'attique des défauts qu'on
peut lui imputer ; furchargé d'ornemens ,
décoré de figures & de trophées d'une
proportion trop forte , il ne peut foutenir
fes droits avec avantage que contre
un adverfaire dont la caufe eft infiniment
moins favorable que la fienne .
AVRILIS 1755. 175
4
De plus , tout changement dans cet ouvrage
confacré par la vénération publique ,
paroîtra toujours un crime à ceux qui ,
veulent jouir du plaifir de blâmer , fans
prendre la jufte peine d'approfondir & de
s'éclairer. Mais fi la critique fondée concourt
à l'avantage des arts qu'elle éclaire ,
& à la réputation durable des artiſtes
qu'elle applaudit , ces murmures paffagers
rien n'autorife , ne doivent jamais
fufpendre des réfolutions que la raifon
& le goût d'accord ont approuvées.
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Résumé : ARCHITECTURE.
Le texte aborde les excès critiques en matière d'architecture et de goût, en prenant l'exemple de l'adoration d'Homère. L'auteur suggère qu'il est permis de discuter des chefs-d'œuvre des arts dans un siècle philosophe comme le sien, notamment en ce qui concerne la colonnade et les projets de rétablissement du Louvre. Sous le règne de Louis XIV, les architectes chargés de terminer le Louvre ont pris une direction différente de celle de leurs prédécesseurs. L'auteur souligne l'avantage de tirer profit des acquis des siècles précédents, mais note que des ouvrages exécutés par la même main offriraient des idées plus accomplies. Louis XIV fit venir des architectes étrangers et français pour travailler au Louvre. Cependant, l'amour-propre des architectes les poussa à proposer des projets différents, entraînant des contestations et des critiques. Il fut décidé d'élever la colonnade pour l'entrée du Louvre et de doubler l'aile sur la rivière pour loger le roi plus commodément. L'auteur critique la façade du palais sans croisées, dont l'usage n'est pas clair et présente de nombreux inconvénients. Il questionne la destination de la colonnade et son placement, ainsi que la façade côté rivière, destinée à l'appartement du roi, qu'il trouve froide et monotone. Les architectes ont choisi de décorer la cour d'un troisième ordre plutôt que l'attique de l'ancien projet, principalement par le désir d'innovation et les difficultés rencontrées. L'auteur juge ces motifs peu valables et critique la nouveauté de l'ordre architectural choisi, qui ne semble pas bien placé et ne produit pas l'effet souhaité. Il conclut en souhaitant que les décisions soient prises en accord avec la raison et le goût, et non influencées par des critiques superficielles.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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2
p. 175-176
MANUFACTURES.
Début :
Comme l'article des Nouvelles littéraires s'est trouvé rempli, nous avons [...]
Mots clefs :
Commerce des laines, Laine, Manufactures
Afficher :
texteReconnaissance textuelle : MANUFACTURES.
MANUFACTURES.
Omme l'article des Nouvelles litté
Cairess eft trouvé remplis nous avons
cru pouvoir inférer dans celui des arts ce
précis d'un mémoire fur les laines , où
l'on examine , 1°. quelles font les différentes
qualités des laines propres aux manu
factures de France 2. fi on ne pourroit
pas fe paffer de laines étrangeres ; com
ment on pourroit perfectionner la quali
té , & augmenter la qualité de nos laines.
Le titre fenl annonce la divifion de tout
J'ouvrage. Le mémoite eft précédé d'un
avertiffement , dans lequel on prévient
qu'il doit fa naiffance au zele de M. le
Duc de Chaulnes pour l'avancement des
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
L'académie
arts , & que les trois questions qu'on y difcute
, ont été propofées par l'Académie
d'Amiens , pour le fujet du prix de 1754
On finit ce prélude par prévenir ceux qui
prennent quelqu'intérêt au commerce desi
laines , de ne pas acquérir le même ouvrage
imprimé à Amiens ; l'édition de cette
ville ayant été faite à l'infeu & fans la
participation de l'auteur qui a préfidé à
celle- ci , & l'a augmentée d'obfervations ,
& rectifié le ftyle dans tous les endroits où
il étoit défectueux.usb.copa o ibon said
Le commerce des laines eft un des objets
les plus importans qui puiffent occuper
fe
gouvernement. L'accroiffement du nombre
de nos manufactures , & la multipli
cation des métiers rendant chaque jour
plus rares les laines de la meilleure efpéce
, c'eft rendre fervice à la patrie que
de s'étudier aux moyens de perfectionner
celles que nous avons , & d'en augmenter
la quantité. La recherche de ces moyens
occupe principalement l'auteur de ce mé4
moire ; & nous penfons qu'il procéde avec
l'ordre & la clarté dont cette queftion in
portante étoit fufceptible ; que l'ouvrage
eft bienfait , & que la lecture n'en fera pas
moins agréable qu'utile. Il fe vend à Paris
, chez Guillyn , Libraire , quai des Au
guftins , au Lys d'or.1755.5
Omme l'article des Nouvelles litté
Cairess eft trouvé remplis nous avons
cru pouvoir inférer dans celui des arts ce
précis d'un mémoire fur les laines , où
l'on examine , 1°. quelles font les différentes
qualités des laines propres aux manu
factures de France 2. fi on ne pourroit
pas fe paffer de laines étrangeres ; com
ment on pourroit perfectionner la quali
té , & augmenter la qualité de nos laines.
Le titre fenl annonce la divifion de tout
J'ouvrage. Le mémoite eft précédé d'un
avertiffement , dans lequel on prévient
qu'il doit fa naiffance au zele de M. le
Duc de Chaulnes pour l'avancement des
Hiv
176 MERCURE DE FRANCE.
L'académie
arts , & que les trois questions qu'on y difcute
, ont été propofées par l'Académie
d'Amiens , pour le fujet du prix de 1754
On finit ce prélude par prévenir ceux qui
prennent quelqu'intérêt au commerce desi
laines , de ne pas acquérir le même ouvrage
imprimé à Amiens ; l'édition de cette
ville ayant été faite à l'infeu & fans la
participation de l'auteur qui a préfidé à
celle- ci , & l'a augmentée d'obfervations ,
& rectifié le ftyle dans tous les endroits où
il étoit défectueux.usb.copa o ibon said
Le commerce des laines eft un des objets
les plus importans qui puiffent occuper
fe
gouvernement. L'accroiffement du nombre
de nos manufactures , & la multipli
cation des métiers rendant chaque jour
plus rares les laines de la meilleure efpéce
, c'eft rendre fervice à la patrie que
de s'étudier aux moyens de perfectionner
celles que nous avons , & d'en augmenter
la quantité. La recherche de ces moyens
occupe principalement l'auteur de ce mé4
moire ; & nous penfons qu'il procéde avec
l'ordre & la clarté dont cette queftion in
portante étoit fufceptible ; que l'ouvrage
eft bienfait , & que la lecture n'en fera pas
moins agréable qu'utile. Il fe vend à Paris
, chez Guillyn , Libraire , quai des Au
guftins , au Lys d'or.1755.5
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Résumé : MANUFACTURES.
Le texte présente un mémoire sur les laines, publié dans les Nouvelles littéraires, qui examine les différentes qualités des laines adaptées aux manufactures françaises et explore la possibilité de se passer de laines étrangères. Ce mémoire, divisé en trois questions proposées par l'Académie d'Amiens pour le prix de 1754, est motivé par le zèle du Duc de Chaulnes pour l'avancement des arts. Il met en garde contre l'achat de l'édition d'Amiens, réalisée sans la participation de l'auteur. Le commerce des laines est considéré comme crucial pour le gouvernement en raison de l'accroissement des manufactures et de la rareté des laines de bonne qualité. L'auteur s'efforce de trouver des moyens pour améliorer et augmenter la production de laines françaises. Le texte conclut en soulignant que l'ouvrage est bien structuré, clair et utile, et est disponible à Paris chez Guillyn, libraire.
Généré par Mistral AI et susceptible de contenir des erreurs.
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