Il faut avoüer, Madame,que cette lettre eſt d'un ſtile bien
coulant , &qu'on ne peut rien écrire de plus naturel : Les ex- preffions ne laiſſent pas d'en eſtre nobles ; nous y voyous beaucoup de choſes en peu de paroles , & dans une lettre preſque auſſi courte qu'un ſim- ple billet, nous remarquons les inquietudes que les perils oùle Roy s'expoſe tous les iours ,
produiſent dans le cœur de M.deS.Aignan ; nous ydécou- vrons l'excés de ſa tendreſſe
pour fon maiſtre,s'il eſt permis deparler ainſi : La rapiditédes Conquestes de ce Prince y eſt dépeinte , & nous yliſons un Panegyrique qui en fix lignes nous reprefente tout ce Mo- narque.QuelsAutheurs depro
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feſſion ,&quelsSçavans pourroient s'exprimer de la forte ,
s'ils avoient un pareil Ouvra- ge à faire ? La nature n'y par- leroit pas demême,les epithe- tes en rempliroient plus de la
moitié; les comparaiſons y re- gneroient , leur ſtile ſeroit
moins concis , & leurs expreffions trop relevées jointes à la profondeur de leurs penſées ,
répandroient en beaucoup d'endroits une obſcurité qui
arreſteroit peut - eſtre le Leteur plus d'une fois.