CAPRICE
amoureuxfait inpromptu par Mr... dans le
moment où commença
La dernieretempeftequi
fit tant de ravages
dans le mois de Decembre dernier.
Vents mutinez qui nous
faires la guerre ,
Et dont les tranſports fu
· rieux
Effrayent la nature, & font
paflir les Cieux j
Redoublez vos efforts , &
208 MERCURE
replongez la Terre
Dans le premier cahos dont
l'ont tirée les Dieux.
N'offrez à mes regards que
des objets funeftes :
Montagnes à mes yeux
abilmez dans les mers ;
Precipitez -vous Corps celeftes :
Soleil , embrafez l'Univers ,
De ces vaines fureurs je
n'ay plus rienà craindre,
Je perds l'objet de mon
amour :
Defefpoir, à qui feul je me
livre en ce jour ,
Eclatez , c'est trop vous
contraindre ,
GALANT. 209
contraindre ,
Tout tremble , tout perit ,
Dieux , quels mugiffements !
Je ne fuis pas feul miſerable ,
Tout partage mon trifte
fort ;
Dans l'eftat où je fuis quel
fpectacle agreable !
Qu'il m'eft doux de mourir ,
mais quoy l'affreuſe mort
Loin de moy fuit , inexora
ble ,
Et me refufe fon fecours.
Ah, fans pouvoir mourir ,
à tout moment j'expire !
Octobre. 1712. S
210 MERCURE
Ne reſpectes tu donc mes
jours
Que pour prolonger mon
martyre,
C'est trop , c'eſt trop languir , precipices affreux
Ouvrez-vous , recevez un
amant malheureux.
Mortels infortunez ! jevous
fuis.... qui m'arreſte ?
Mais quel calme desja vient
regner dans les airs :
Où font donc ces horreurs
qu'excitoit la tempefte ?
Quevois je , le Soleil éclai
re l'Univers ,
Les vents ont fufpendu
GALANT. 211
leur
rage ,
Et ferme fur fes fondements
La Terre ne craint plus
l'orage
Qui confondoit les Elements ;
La nature eftonnée a diffi.
pé fon trouble
Et reprend la tranquillité?
Et ma feule douleur redouble op
Quand tout ceffe d'eftre
agité.