LOGOGRYPHE.
' Habite également la Campagne et la Ville ;
Au Peuple comme au Grand je suis toujours utile,
En tout tems , en toute saison ,
L'on a besoin de moi dedans une maison.
Ma figure au dehors n'a rien que d'agréable ,
Aux Palais les plus beaux j'ajoute un ornement ;
Mais hélas ! au- dedans je suis méconnoissable ,
Je n'ai rien que d'affreux sous ce déguisement.
En vain certaines gens assez connus en France ,
Travaillent tous les ans à me purifier ,
Je les charge d'ordure au lieu de récompense ,
Et je reviens toujours à mon état premier.
Etes - vous curieux de sçavoir ma figure ?
J'ay
A O UST.
1731. 1939
J'ai deux pieds , sans pouvoir marcher ,
Un Manteau qui fait ma parure ,
Un coeur assez facile à se laisser toucher ,
Quoique de sa nature il soit dur , insensible ;
On trouve auprès de lui quelque soulagement ;
Mais n'en usez jamais qu'avec ménagement ,
Car vous pourriez bruler d'une flâme nuisible.
Si mon nom vous est inconnu ,
Sous ce détour énigmatique ,
Servons-nous de l'Arithmétique , ?
Pour voir ce qui dans moi peut être contenu.
Huit lettres forment ma substance ;
Un, deux, trois , quatre, cinq , étant pris à la fois;
Je ne recule ni n'avance ,
Chacun pourtant me suit , Peuples , Princes et
Rois ;
Quatre, cinq, trois , je suis un terme de tendresse,
Dont se sert un Amant qui parle à sa Maitresse .
Un , deux , cinq , trois et six , quelle félicité ,
Si chacun m'imitoit dans ma fidelité!
Quatre avant cinq laissé , je suis d'un grand ser
vice ,
Dans les Airs anciens et nouveaux.
Six avec sept , ma place est entre deux flambeaux
Sur le penchant d'un précipice.
A six , cinq , un , ajoûtez trois ,
Ville et Comté près de Provence ,
Dont on vit riompher un Maréchal de Frances
E iiij
Sous
1940 MERCURE DE FRANCE
Sous le plus grand de tous les Rois.
Quatre , cinq , six et trois , tantôt je suis severe ,
Tantôt de la douceur je tiens le caractere ;
Dans un sens different , l'on voit au Champ de
Mars ,
Quels effets je produits sous les plus hauts Remparts.
Six, cinq , un, sept et huit , Ville ancienne d'Asie.
Qui condamna jadis une horrible heresie..
Un, trois , six, joints à huit , on connoîtra d'abord
Un celeste repas dont parle l'Ecriture
Auquel participa l'Auteur de la Nature ,
Le jour qui préceda sa mort.
Un , cinq, quatre avec trois , sur toutes les Mon
tagnes ,
Sur les lieux élevez je tiens le plus haut rang ,
Moyse étoit sur moi quand il vit les Campagnes
De la Terre de Canaam.
Un, deux, trois, six et huit , je suis très- necessaire
Pour construction de Vaisseaux ,
Et quoique dans les bois j'habite d'ordinaire,
Je me conservé au fond des eaux.
Si l'on me laisse en paix vivre dans ma Patrie ,
Je porte un excellent régal ,
Pour le plus immonde animal.
En bien d'autres façons ma substance varie ;
Mais, ces traits suffisant pour montrer qui je suis ,
Lecteur , je ne veux point augmenter vos ennuis.
Ch. Degoëlles , Chantre et Chanoine de
D. de la Faïere.