Titre
OBSERVATIONS sur la Méthode d'Accompagnement pour le Clavecin qui est en usage, & qu'on appelle Echelle ou Regle de l'Octave.
Titre d'après la table
Observations sur la Méthode d'Accompagnement &c.
Fait partie d'une livraison
Fait partie d'une section
Page de début
253
Page de début dans la numérisation
280
Page de fin
263
Page de fin dans la numérisation
290
Incipit
Les premiers élemens de la rgele de l'Octave consistent à donner aux
Texte
OBSERF ATIONS fur U Mé
thode d' Accompagnement four le Cla~,
vecin qui est en usage , & qu'on ap
pelle Echelle ou Règle de l'Ottave.
LEs premiers Siemens de la règle de
i' Octave consistent à donner aux
doigts des habitudes conformes aux ac
cords qu'elle prescrit Xur jes degrés xonscíutifs
d'un Mode.
Cette règle renferme quelque chose
de bon ; mais elle est tellement bornée,
qu'il faut dans Ja fuite y faire un nom
bre infini d'exceptions , que les Maîtres
se réservent d'enseigner, à mesure que
les cas s'en présentent.
Le détail de ces exceptions est prodi
gieux i la.connoiflance & la pratique en
font- remplies de difficultés presque in
surmontables , par la multiplicité des ac
cords , par la variation infinie de leurs
Accorhpagnemens , par la surprise où
jettent sans cesse les différentes formes
de succession dont chaque accord en
particulier est susceptible , & qui sont sou
vent contraires aux habitudes déja for
mées , par la confusion des règles fondaoiçntíks
syeç ççUes de gout , par le
154 MERCURE DE FRANCE,
vuide que l'harmonie y souffre le plus
íbuvent , par le peu de ressource que I'ot
reille y trouve pour se former aux. véri
tables progrès des sons , par l'assujetifsement
trop servile aux chifres souvent
fautifs , enfin par les fausses applications
auxquelles des règles de détail éc des ex
ceptions innombrables ne peuvent man
quer d'être sujettes.
La Règle de l'Octave, avec ses excep»
tions , contient 12. Accords dans cha
que Mode , dont yoici l'énumération ca
abrégé. • -
U Accord parfait , la 6e , la 6* ÔC 4 e,
la 7e , la petite 7e , la fausse 5e , la petite
6e , le Triton , la 7e superflue' , la $e su
perflue , la 2e , la 6e'& 5e, la $e com-
{úette , la 9e simple , la 4e , la 9e & 4e,
5ejía 2e superflue , la 7 e dimi
nuée , la 6e majeure avec la fausse j* , le
Triton avec la 5 e mineure, & la 7e super
flue avec la 6e mineure , fans parler de la
<?e doublée, ôc encore moins de la 6e
mineure avec la je majeure , que quelques-
iins ont introduit assez mal à pro
pos , de lâ 6* superflue , que le gont au.
torife depuis quelque tems , ni de la j«
supe-fliië avec la 4 e -, qui pourroit plu
tôt avoir lieu que les deux derniirs.
Chacun de ces accords a ses Accompagnemens
difterens , qui consistent en
FEVRÏEft. 1730. 35s
«leux ou trois intcrvalcs de plus que ceux
dont ces Accords portent le nom ; dtì
forte qu'à la vûë du chiffre , ou par le
moyen de quelques autres notions , il
faut fe représenter tous les intervales qui
composent l'Accord , & y porter incon^
tinent les doigts.
Chaque Accord a d'ailleurs trois faces'
ou permutations fur le Clavier ; & tel
qui connoît la première n'en est pas beau
coup plus avancé pour la seconde , nì
après celle-ci pour la troisième , quanc
à la pratique ; chacun des 2 2 . Accords
exprimés en produit donc trois differens
dans l'execution , ce qui fait k nombre
de 66*
Outre cela , il f a Ì4. Modes i & ft
l'on veut être en état d'accompagner
toute forte de Musique , ou de transpo
ser-,, il faut absolument fe procurer un©
connoiffance locale des 6 6. Accords précedens
dans chacun de ces Modes , car
tel «qui fçait toucher les Accords d'u»
Mode a encore bien à faire pour trouveç
ceux d'un autre j il faut donc multiplier
les tftf». Accords ci- dessus par 24. ce qui
fait le nombre de i584.fi ce n'est pour
ì'esprit , du moins pour' les doigts.
Chacun des- 2 2. Accords primitifs a f*
tegle patticulicfc -, tant pour ce qui doic
ïe préceder, que pour ce qui doit le
C ù\ suivre
9 jtf MERCURE DE FRANCB;
suivre ; par exemple , il faut faire la pe*
tite 6 e pour descendre sur V Accord par
fait , sur 1* 7e ou sur la 4e , il ne faut
{dus faire que la 6e , sil?on descend sûr
a petite 6e , Si si l'on passe en montant
par les mêmes accords, tout change;
ce détail ne finit point. Comment la
mémoire , le jugement &c les doigts peuvent-
ils fur le champ , & tout à la_fois ,
suffire à tant de règles ?
On dira peut-être que la connoiíTance
-du Mode soulage l'Accompagnateur en
pareil cas , puisque la règle spécifie que
tel Accord se fait sur une telle Note du
Mode , en montant ou en 'descendant ;
mais si tant est quron eonnoisse le Modey
ne faut il pas découvrir aussi-tôt quel rang
y tient la Note présente , puis son Accord,
puis les DUz.es ou les- Bémols affectés à ce
Moie , 8c si eníìn on parvient à se rendre
tout cela présent dans la promtitude de
l'execlition , qu'a t'on gagné , si la Note
en question ne porte point l'Accord atta
ché au rang qu'elle tient dans le Mode ?
car , par exemple , au lieu de Y Accord
f>arfait au premier degré, aurrement dit
a Note tonitfnt-, il peut y avoir la 64&
5e , la 5e Sc 4*, la 4e & 3* , la :e Ott
la ?' superflu* , même avec la 6e mineure,
pareillement au lieu de la petite 6e au
deuxième degré , il peut se trouver la 7'
ou
F E V R î É R. ttltì. ìff
étì la 9e tk 4e , ainsi de tous les autre»
degrés , excepté le septième , appelle Nu*
te sensible. 11 faut donc ki bien des ex*
ceptions aux règles que l'on s'est efíbrc«
d'apprendre , & présumer encore que les
doigts accoutumés à n'enchaîner que dans
le mérae ordre leí Accords qu'elles ten*
ferment , prendront facilement la route
contraire que demandent toutes les suc
cessions différentes , dont chaque Accord
est susceptible.
Les chiffres , ajoutera- t'on j doivent
suppléer ici au deffaut de la règle ; mais*
peut-on s'assurer que le Compositeur les?
aura mis régulièrement par tout s & que
íe Copiste ou l'Imprimeur n'J' aura rietï
oublié. Oh a fait voir dans \t nouveau
sistême de Musique que le plus habile
Compositeur de notre siécle n'avoit pas
été exemt de méprise à cet égard ; & c'en,
est assez pour bannir la trop grande con
fiance dans les chiffres ; au reste , qu'estte
qu'une Méthode qui nous rend escla
ves des erreurs d'autrui , ne devroit-elltf
pas plutôt nous enseigner à les rectifier ;
niais bien loin de cela , dans quel em
barras ne met- elle pas l'AccompagnateUir
lorsqu'il n'y a point de chiffres ? le chant"
du Dessus lui indiquera-t'il les Accords?
fi ce chant , par exemple , fait la j* de
la Baffe , cette 3e pourra être accompa-
C iiij, gnéof
iÇS MERCURE 0E FRANCE;
gnéede la 4e , de la 5e , de la 6e , de I»
7e ou de la 9e ; or quelle raison de pré
férence pourra-t'il tirer d'une multiplicité
de règles !
D'ailleurs , on surcharge les comment
çans par le mélange de certaines règles
de gout avec celles de fond , fans penser
que celles -ci font la baze Ôc le modelé
de celles-là ,,& qu'elles seules peuvent
* former essentiellement l'oreille , procurée
aux doigts des habitudes générales ôc ré
gulières , & mettre dans l'esprit la cer
titude avec laquelle Poreille peut secon
der l'exeeution. Ces> règles de gout ne
font pas simplement les harpegemens-,
les fredons 5c te choix des faces , dont
quelque échantillon fait pour certaine*
personnes tout le mérite ôc rout le char
me de P Accompagnement. C'est fur-tout
la règle qui deffend deux Oílaves de fuite,,
desquelles on fait un monstre , Sc dònt la
prohibition , pour éviter une faute ima
ginaire , en fait commettre de véritables.
Pour ne pas blesser ce prejugédes deux
Octaves de fuite , on fait retrancher celle
de la Basse dans presque tous les Accords
dissonans , d'où il arrive que si la Basse
parcourt successivement toutes les Notes
d'un même Accord , il faut à chacune de
ces Notes deux opérations , l'une de lé
ser lc doigt de l'Òctave , l'autre de remetus
FEVRIER. 1730. âyj
mettre celui qu'on a levé précédemment
si l'on ne veut en denuer Pharmonie ,
ce qui varie à tous momens les Accom
pagnement d'un même Accord , & le
présente sans cesse fous des dénominations
diffetentes; or quel retardement cela n'apporte-
t'il pas à la connoissance , 8c quel
préjudice n'est-ce pas pour Pexecution ?
car si les positions changent si fréquem
ment ,.& qu'en même-tems toutes les
faces du Clavier ne soient pas également
familières , il arrive souvent que les
doigts.fe refusent à l'accord qui doit suc
céder à un autre dans une certaine face ;
d'où l'on est obligé de faire aller la main
par sauts , & de la porter précipitamment
à l'endroic où la face est plus familière &
plus commode , ce qui ne se fait point
encore sans le désagrément de partager
continuellement sa- vue" entre le Pupitre
& le Clavier.
Le retranchement de l'Octave multiplie
un même accord jusqu'à cinq ou six , tant
pour l'esptit que pour les doigts , & la
forme de succession naturelle à cet Ac
cord est multipliée à proportion ; si cet
Accord en admet cinq ou six autres diffe- *
rens dans fa succession , ce sonr pour cha
cun autant de successions différentes fut
le Clavier , & autant de nouvelles règlesà-
observer ,.ce qui accable les doigts de
C y tan?
4<îo MERCURE DE FRANCE.' v
tant de positions , & de marches diffé
rentes , qu'il est impossible de ne s'y pas
tromper le plus souvent ; c'est une vérité
dont presque tous les amateurs , & mê
me plusieurs Maîtres peuvent rendre té»
moignage , pour peu qu'ils soient sincè
res. Combien de fois ont-ils senti en ac
compagnant certaines Musiques que leur»
règles , leurs connoiflances , leur oreille
même , Ôc leurs doigts se trouvoient ert
desfaut ?
On peut juger aisément de là que l'o*
reille , de concert avec Les doigts , fè
formeroit bfcn plus sûrement, Ôc s'accoutumeroit
bien plutôt à une successions
Uniforme d'accords qu'elle ne le peut fair$
à plusieurs successions , qui lui paroiflene:
différentes les unes des autres , Ôc qu'elfeprésente
même comme telles- à Pesprit ;
car suivant toutes les Méthodes d'Ac
compagnement qui ont paru jufqu'icr,:
nos Musiciens pratiquent comme diffé
rentes , plusieurs successions d'Accords*
qui dans le fond ne font qu'une , & ils
ont établi en conséquence plusieurs règles;
qui se réduisent toutes à une feule*, par
exemple, quand on dit que leTritan doit
être fauve de la 6e, la fausse 5e de 1a je
la 6e majeure- de la 8e ou de la 6e , lá 7e
/Stperfi 'f de la 8e , la ^'superflue de la-
4e,. & la z* superflue de la ^ consonantey
'*. -, tout
FEVRIER. 1730. 2Í-1
*>ut cela se réunie dans l'Accord de 1*
Note sensible qui doit être suivi de l'Ac
cord parfait de la Note tonique ; mais il
ne saur pas s'étonner du grand nombre de
règles instituées jusqu'à présent sur la
succession des Accords 5 le Muíicien que
le sentiment seul a conduit pendant si long
tems , n?en a décidé que relativement à
l'impression que les différentes dispositions*-
d'un même Accord faifoient fut son oreil
le ; la réunion de toutes ces successions'
en une feule pasloit la portée de cet or
gane.
Au reste , il n'y a presque pas une de"
ces dernieres règles de détail qui ne soit
fausse en cettains cas , puisque si les intervales
de Triton, de fau/se 5e , de 6e ma*
je ure , de 3 e rnajf.ure & de 7 e superflue' t
se trouvent dans un autre Accord que
dans le sensible , comme il arrive trèssouvent
, tantôt ils font consonans , tan--
rôt de dissonances majeures ilv deviennentdissonances
mineures , & tantôt ils font
diflonans fans être foumiïà la succession;
déterminée en premier lieu. Que devien*
fient alors les susdites règles , &c dequoi
fers encore leur multiplicité ? Tel qui
entreprendra de contester ces vérités ne
scra pas Musicien , ou se perdra dans des
distinctions frivoles & dans des éxeep"
tions- fans fin»
.. Gvj; om
ZSi MERCURE DE FRANCE."
On pourroit rapporter plusieurs autreí
exemples des difsererís cas où ces régies
échouent; mais pour achever de prouver
combien elles font vagues , & même pré
judiciables , il suffira de Pexception qu'il
faut faire à l'égard du Triton , qui selon sa
regle,doit être sauvé de la 6e en montant,
&qui selon d'autres règles que l'experience
oblige de suivre à préfent.rcste furie mêmedegré
pour former la 8e , la }e , la 6e ou.
la 5e ; ne voilà Vil pas un conflit de rè
gles opposées ? & ne font- elles pas réci
proquement sujettes à de "fausses applir
cations, vâ que l'une peut se présenter às
Tesprit ^lorsqu'il est question de l'autre?
Cette Méthode , si l'on peut qualifiée
ainsi un amas confus de règles , ne sembleroit
pas un labirinte , & ne rebuteroit
pas tant de personnes de l'Accompagnement
, si elle, étoit plus instructive du.
fond ; cependant on ne doit pas nier qu'il
ne foie possible de posséder entièrement
toutes les regles-du détail & toutes leurs
exceptions , d'en faite la juste applica
tion , & de les mettre en pratique fur les
I58 4. Accords , dont elle exige la conaoissànce.
Mais quel tems &c quels tra
vaux ne faut-il pas pour cela ? D'ailleurs
quelle confusion pour l'esprit ! quelle
charge à la mémoire , & même quel
•bstacle à la précision de l'exeCution ì
FEVRIER; t7yoï *<f?
On donnera dans le Mercure prochai*
le Plan d'une nouvelle Méthode fur le
même sujet.
thode d' Accompagnement four le Cla~,
vecin qui est en usage , & qu'on ap
pelle Echelle ou Règle de l'Ottave.
LEs premiers Siemens de la règle de
i' Octave consistent à donner aux
doigts des habitudes conformes aux ac
cords qu'elle prescrit Xur jes degrés xonscíutifs
d'un Mode.
Cette règle renferme quelque chose
de bon ; mais elle est tellement bornée,
qu'il faut dans Ja fuite y faire un nom
bre infini d'exceptions , que les Maîtres
se réservent d'enseigner, à mesure que
les cas s'en présentent.
Le détail de ces exceptions est prodi
gieux i la.connoiflance & la pratique en
font- remplies de difficultés presque in
surmontables , par la multiplicité des ac
cords , par la variation infinie de leurs
Accorhpagnemens , par la surprise où
jettent sans cesse les différentes formes
de succession dont chaque accord en
particulier est susceptible , & qui sont sou
vent contraires aux habitudes déja for
mées , par la confusion des règles fondaoiçntíks
syeç ççUes de gout , par le
154 MERCURE DE FRANCE,
vuide que l'harmonie y souffre le plus
íbuvent , par le peu de ressource que I'ot
reille y trouve pour se former aux. véri
tables progrès des sons , par l'assujetifsement
trop servile aux chifres souvent
fautifs , enfin par les fausses applications
auxquelles des règles de détail éc des ex
ceptions innombrables ne peuvent man
quer d'être sujettes.
La Règle de l'Octave, avec ses excep»
tions , contient 12. Accords dans cha
que Mode , dont yoici l'énumération ca
abrégé. • -
U Accord parfait , la 6e , la 6* ÔC 4 e,
la 7e , la petite 7e , la fausse 5e , la petite
6e , le Triton , la 7e superflue' , la $e su
perflue , la 2e , la 6e'& 5e, la $e com-
{úette , la 9e simple , la 4e , la 9e & 4e,
5ejía 2e superflue , la 7 e dimi
nuée , la 6e majeure avec la fausse j* , le
Triton avec la 5 e mineure, & la 7e super
flue avec la 6e mineure , fans parler de la
<?e doublée, ôc encore moins de la 6e
mineure avec la je majeure , que quelques-
iins ont introduit assez mal à pro
pos , de lâ 6* superflue , que le gont au.
torife depuis quelque tems , ni de la j«
supe-fliië avec la 4 e -, qui pourroit plu
tôt avoir lieu que les deux derniirs.
Chacun de ces accords a ses Accompagnemens
difterens , qui consistent en
FEVRÏEft. 1730. 35s
«leux ou trois intcrvalcs de plus que ceux
dont ces Accords portent le nom ; dtì
forte qu'à la vûë du chiffre , ou par le
moyen de quelques autres notions , il
faut fe représenter tous les intervales qui
composent l'Accord , & y porter incon^
tinent les doigts.
Chaque Accord a d'ailleurs trois faces'
ou permutations fur le Clavier ; & tel
qui connoît la première n'en est pas beau
coup plus avancé pour la seconde , nì
après celle-ci pour la troisième , quanc
à la pratique ; chacun des 2 2 . Accords
exprimés en produit donc trois differens
dans l'execution , ce qui fait k nombre
de 66*
Outre cela , il f a Ì4. Modes i & ft
l'on veut être en état d'accompagner
toute forte de Musique , ou de transpo
ser-,, il faut absolument fe procurer un©
connoiffance locale des 6 6. Accords précedens
dans chacun de ces Modes , car
tel «qui fçait toucher les Accords d'u»
Mode a encore bien à faire pour trouveç
ceux d'un autre j il faut donc multiplier
les tftf». Accords ci- dessus par 24. ce qui
fait le nombre de i584.fi ce n'est pour
ì'esprit , du moins pour' les doigts.
Chacun des- 2 2. Accords primitifs a f*
tegle patticulicfc -, tant pour ce qui doic
ïe préceder, que pour ce qui doit le
C ù\ suivre
9 jtf MERCURE DE FRANCB;
suivre ; par exemple , il faut faire la pe*
tite 6 e pour descendre sur V Accord par
fait , sur 1* 7e ou sur la 4e , il ne faut
{dus faire que la 6e , sil?on descend sûr
a petite 6e , Si si l'on passe en montant
par les mêmes accords, tout change;
ce détail ne finit point. Comment la
mémoire , le jugement &c les doigts peuvent-
ils fur le champ , & tout à la_fois ,
suffire à tant de règles ?
On dira peut-être que la connoiíTance
-du Mode soulage l'Accompagnateur en
pareil cas , puisque la règle spécifie que
tel Accord se fait sur une telle Note du
Mode , en montant ou en 'descendant ;
mais si tant est quron eonnoisse le Modey
ne faut il pas découvrir aussi-tôt quel rang
y tient la Note présente , puis son Accord,
puis les DUz.es ou les- Bémols affectés à ce
Moie , 8c si eníìn on parvient à se rendre
tout cela présent dans la promtitude de
l'execlition , qu'a t'on gagné , si la Note
en question ne porte point l'Accord atta
ché au rang qu'elle tient dans le Mode ?
car , par exemple , au lieu de Y Accord
f>arfait au premier degré, aurrement dit
a Note tonitfnt-, il peut y avoir la 64&
5e , la 5e Sc 4*, la 4e & 3* , la :e Ott
la ?' superflu* , même avec la 6e mineure,
pareillement au lieu de la petite 6e au
deuxième degré , il peut se trouver la 7'
ou
F E V R î É R. ttltì. ìff
étì la 9e tk 4e , ainsi de tous les autre»
degrés , excepté le septième , appelle Nu*
te sensible. 11 faut donc ki bien des ex*
ceptions aux règles que l'on s'est efíbrc«
d'apprendre , & présumer encore que les
doigts accoutumés à n'enchaîner que dans
le mérae ordre leí Accords qu'elles ten*
ferment , prendront facilement la route
contraire que demandent toutes les suc
cessions différentes , dont chaque Accord
est susceptible.
Les chiffres , ajoutera- t'on j doivent
suppléer ici au deffaut de la règle ; mais*
peut-on s'assurer que le Compositeur les?
aura mis régulièrement par tout s & que
íe Copiste ou l'Imprimeur n'J' aura rietï
oublié. Oh a fait voir dans \t nouveau
sistême de Musique que le plus habile
Compositeur de notre siécle n'avoit pas
été exemt de méprise à cet égard ; & c'en,
est assez pour bannir la trop grande con
fiance dans les chiffres ; au reste , qu'estte
qu'une Méthode qui nous rend escla
ves des erreurs d'autrui , ne devroit-elltf
pas plutôt nous enseigner à les rectifier ;
niais bien loin de cela , dans quel em
barras ne met- elle pas l'AccompagnateUir
lorsqu'il n'y a point de chiffres ? le chant"
du Dessus lui indiquera-t'il les Accords?
fi ce chant , par exemple , fait la j* de
la Baffe , cette 3e pourra être accompa-
C iiij, gnéof
iÇS MERCURE 0E FRANCE;
gnéede la 4e , de la 5e , de la 6e , de I»
7e ou de la 9e ; or quelle raison de pré
férence pourra-t'il tirer d'une multiplicité
de règles !
D'ailleurs , on surcharge les comment
çans par le mélange de certaines règles
de gout avec celles de fond , fans penser
que celles -ci font la baze Ôc le modelé
de celles-là ,,& qu'elles seules peuvent
* former essentiellement l'oreille , procurée
aux doigts des habitudes générales ôc ré
gulières , & mettre dans l'esprit la cer
titude avec laquelle Poreille peut secon
der l'exeeution. Ces> règles de gout ne
font pas simplement les harpegemens-,
les fredons 5c te choix des faces , dont
quelque échantillon fait pour certaine*
personnes tout le mérite ôc rout le char
me de P Accompagnement. C'est fur-tout
la règle qui deffend deux Oílaves de fuite,,
desquelles on fait un monstre , Sc dònt la
prohibition , pour éviter une faute ima
ginaire , en fait commettre de véritables.
Pour ne pas blesser ce prejugédes deux
Octaves de fuite , on fait retrancher celle
de la Basse dans presque tous les Accords
dissonans , d'où il arrive que si la Basse
parcourt successivement toutes les Notes
d'un même Accord , il faut à chacune de
ces Notes deux opérations , l'une de lé
ser lc doigt de l'Òctave , l'autre de remetus
FEVRIER. 1730. âyj
mettre celui qu'on a levé précédemment
si l'on ne veut en denuer Pharmonie ,
ce qui varie à tous momens les Accom
pagnement d'un même Accord , & le
présente sans cesse fous des dénominations
diffetentes; or quel retardement cela n'apporte-
t'il pas à la connoissance , 8c quel
préjudice n'est-ce pas pour Pexecution ?
car si les positions changent si fréquem
ment ,.& qu'en même-tems toutes les
faces du Clavier ne soient pas également
familières , il arrive souvent que les
doigts.fe refusent à l'accord qui doit suc
céder à un autre dans une certaine face ;
d'où l'on est obligé de faire aller la main
par sauts , & de la porter précipitamment
à l'endroic où la face est plus familière &
plus commode , ce qui ne se fait point
encore sans le désagrément de partager
continuellement sa- vue" entre le Pupitre
& le Clavier.
Le retranchement de l'Octave multiplie
un même accord jusqu'à cinq ou six , tant
pour l'esptit que pour les doigts , & la
forme de succession naturelle à cet Ac
cord est multipliée à proportion ; si cet
Accord en admet cinq ou six autres diffe- *
rens dans fa succession , ce sonr pour cha
cun autant de successions différentes fut
le Clavier , & autant de nouvelles règlesà-
observer ,.ce qui accable les doigts de
C y tan?
4<îo MERCURE DE FRANCE.' v
tant de positions , & de marches diffé
rentes , qu'il est impossible de ne s'y pas
tromper le plus souvent ; c'est une vérité
dont presque tous les amateurs , & mê
me plusieurs Maîtres peuvent rendre té»
moignage , pour peu qu'ils soient sincè
res. Combien de fois ont-ils senti en ac
compagnant certaines Musiques que leur»
règles , leurs connoiflances , leur oreille
même , Ôc leurs doigts se trouvoient ert
desfaut ?
On peut juger aisément de là que l'o*
reille , de concert avec Les doigts , fè
formeroit bfcn plus sûrement, Ôc s'accoutumeroit
bien plutôt à une successions
Uniforme d'accords qu'elle ne le peut fair$
à plusieurs successions , qui lui paroiflene:
différentes les unes des autres , Ôc qu'elfeprésente
même comme telles- à Pesprit ;
car suivant toutes les Méthodes d'Ac
compagnement qui ont paru jufqu'icr,:
nos Musiciens pratiquent comme diffé
rentes , plusieurs successions d'Accords*
qui dans le fond ne font qu'une , & ils
ont établi en conséquence plusieurs règles;
qui se réduisent toutes à une feule*, par
exemple, quand on dit que leTritan doit
être fauve de la 6e, la fausse 5e de 1a je
la 6e majeure- de la 8e ou de la 6e , lá 7e
/Stperfi 'f de la 8e , la ^'superflue de la-
4e,. & la z* superflue de la ^ consonantey
'*. -, tout
FEVRIER. 1730. 2Í-1
*>ut cela se réunie dans l'Accord de 1*
Note sensible qui doit être suivi de l'Ac
cord parfait de la Note tonique ; mais il
ne saur pas s'étonner du grand nombre de
règles instituées jusqu'à présent sur la
succession des Accords 5 le Muíicien que
le sentiment seul a conduit pendant si long
tems , n?en a décidé que relativement à
l'impression que les différentes dispositions*-
d'un même Accord faifoient fut son oreil
le ; la réunion de toutes ces successions'
en une feule pasloit la portée de cet or
gane.
Au reste , il n'y a presque pas une de"
ces dernieres règles de détail qui ne soit
fausse en cettains cas , puisque si les intervales
de Triton, de fau/se 5e , de 6e ma*
je ure , de 3 e rnajf.ure & de 7 e superflue' t
se trouvent dans un autre Accord que
dans le sensible , comme il arrive trèssouvent
, tantôt ils font consonans , tan--
rôt de dissonances majeures ilv deviennentdissonances
mineures , & tantôt ils font
diflonans fans être foumiïà la succession;
déterminée en premier lieu. Que devien*
fient alors les susdites règles , &c dequoi
fers encore leur multiplicité ? Tel qui
entreprendra de contester ces vérités ne
scra pas Musicien , ou se perdra dans des
distinctions frivoles & dans des éxeep"
tions- fans fin»
.. Gvj; om
ZSi MERCURE DE FRANCE."
On pourroit rapporter plusieurs autreí
exemples des difsererís cas où ces régies
échouent; mais pour achever de prouver
combien elles font vagues , & même pré
judiciables , il suffira de Pexception qu'il
faut faire à l'égard du Triton , qui selon sa
regle,doit être sauvé de la 6e en montant,
&qui selon d'autres règles que l'experience
oblige de suivre à préfent.rcste furie mêmedegré
pour former la 8e , la }e , la 6e ou.
la 5e ; ne voilà Vil pas un conflit de rè
gles opposées ? & ne font- elles pas réci
proquement sujettes à de "fausses applir
cations, vâ que l'une peut se présenter às
Tesprit ^lorsqu'il est question de l'autre?
Cette Méthode , si l'on peut qualifiée
ainsi un amas confus de règles , ne sembleroit
pas un labirinte , & ne rebuteroit
pas tant de personnes de l'Accompagnement
, si elle, étoit plus instructive du.
fond ; cependant on ne doit pas nier qu'il
ne foie possible de posséder entièrement
toutes les regles-du détail & toutes leurs
exceptions , d'en faite la juste applica
tion , & de les mettre en pratique fur les
I58 4. Accords , dont elle exige la conaoissànce.
Mais quel tems &c quels tra
vaux ne faut-il pas pour cela ? D'ailleurs
quelle confusion pour l'esprit ! quelle
charge à la mémoire , & même quel
•bstacle à la précision de l'exeCution ì
FEVRIER; t7yoï *<f?
On donnera dans le Mercure prochai*
le Plan d'une nouvelle Méthode fur le
même sujet.
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Domaine