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1741, 11, 12, vol. 2
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MERCURE
DE
FRANCE ,
426081
DÉDIÉ AU
ROY.
NOVEMBRE . 1741 .
JURICOLLIGIT
SPARGI
7818*
DELAPI
LYON
Chés
Tapillan
A PARIS ,
1883
GUILLAUME CAVELIER ,
ruë S. Jacques .
La Veuve PISSOT , Quai de Conty ,
à la descente du Pont- Neuf.
JEAN DE NULLY , au Palais.
M. DCC. XLI.
Avec Aprobation & Privilege du Roy,
A V IS.
L'ADRESSE
'ADRESSE generale eft à
MOREAU , Commis au
Mercure , vis - à - vis la Comédie Frangoife
, à Paris. Ceux qui pour leur commodité
voudront remettre leurs Paquets cachetés
aux Libraires qui vendent le Mercure,
à Paris , peuvent fe fervir de cette voye
pour les faire tenir.
On prie très-inftamment , quand on adreſſe
des Lettres ou Paquets par la Pofte , d'avoir
foin d'en affranchir le Port , comme cela s'eft
toujours pratiqué , afin d'épargner , à nous
le déplaifir de les rebuter , & à ceux qui
les envoyent , celui , non -feulement de ne
pas voir paroître leurs Ouvrages , mais.
même de les perdre , s'ils n'en ont pas gardé
de copie.
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les Particuliers qui fouhaiteront
avoir le Mercure de France de la premiere
main , & plus promptement , n'auront
qu'à donner leurs adreſſes à M. Moreau,
qui aura foin de faire leurs Paquets fans
perie
perte de temps , & de les faire porter sur
l'heure à la Pofte , on aux Meffageries qu'on
lui indiquera.
PRIX XXX. SOLS.
DE
LA
MERCURE
DE FRANCE ,
DĚDIE AV ROT.
NOVEMBRE. 1741,
********************* **
PIECES FUGITIVES,
en Vers et en Prose.
EN VOI
De l'Ode qui fuit à M. de Beauval.
Ous, qu'ont toujours chéri les Mufes
& Thémis ,
Vous , dont l'aimable caractére ,
Guidé par le bon goût , les graces ,
l'art de plaire ,
Fait briller les talens , en vous feul reünis ,
Vous , qui fans foucis , fans envie ,
Paffez les jours de votre vie
THEQUE
LYON
*
189
A ij Dans
2342 MERCURE
DE FRANCE
Dans l'heureufe tranquillité ,
Et qui , loin de l'inquiétude ,
Des charmes d'une douce étude
Vous faites une volupté ;
Beauval , je cours encor aux rives du Permeſſe ;
De cet amuſement mon coeur eft trop
Apollon eft ma Déïté ,
Et dans la Cour enchantereffe ,
Aaté ;
Guidé par les tranfports d'une charmante yvreffe ,
Je cherche l'agrément & la varieté .
Tantôt de la vive jeuneffe
J'aime à dépeindre les ardeurs ;
Tantôt de l'auftere fagefle
Je chante les féveres moeurs ;
Souvent d'une folle allegreſſe
Je reffens toutes les douceurs ;
Souvent , de l'oifive moleſſe
J'aime à combattre les erreurs ;
Et je vais aujourd'hui , du Dieu de la tendreſſe,
Exprimer toutes les fureurs.
C'est ainsi que la Poëfie ,
Dans une aimable frenéſie ,
Par des fujets toujours nouveaux
Aime à varier fes Tableaux .
Heureux fi je puis dans ces rimes
Dépeindre vivement les peines & les maux
Que fouffrent toutes les Victimes
Da
NOVEMBRE. 1741 2343
Du Dieu qu'on adore à Paphos !
Et plus heureux encor , fi , cherchant à te plaire ,
Et feignant les tranfports du plus cruel tourment ,
Ma Mufe peut te fatisfaire
Et t'amufer un feul moment !
LES FUREURS DE L'AMOUR ,
ODE.
Ufuis - je ? malheureux ! quelle fureur m'irrite
De mes fens étonnés tout redouble l'effroi .
Mon coeur gémit , hélas ! du trouble qui l'agite
Subira- t'il toujours la Loi a
Dans l'excès des horreurs dont mon ame eſt atteinte .
Infenfé , furieux , je m'égare , je cours ;
Pour foulager mes maux , j'adreſſe au Ciel ma
plainte ;
Mes cris me font d'un vain fecours.
*
Je fuis l'Aftre du jour , fa clarté m'importune ;
Ce qu'il offre à mes yeux , & m'attrifte & me nuit;
Je cherche à me couvrir contre mon infortune
Des voiles fombres de la nuit.
*
Que me fert d'éviter l'éclat de la lumiere ,
Quand l'amour de mon coeur a banni le repos ?
A ij Le
1344 MERCURE DE FRANCE
Le fommeil ne peut plus fur ma foible paupiere
Verfer fes tranquiles pavots.
*
Raifon, délivre - moi ; mais envain je l'apelle ;
Chaque infant me replonge en un tourment nouveau
*;
Les tranfports de mon coeur fe font armés contre
elle ;
Ils en ont éteint le flambeau.
*
Sans efpoir de m'unir à la Beauté que j'aime ,
Ofort affreux ! je fens accroître mes défirs ;
Jaloux , défefperé , dans fa douleur extrême
Mon coeur éclate en vains foupirs .
*
Impitoyable Amour , je fuccombe à tes peines ;
Le trépas va bien- tôt terminer mes malheurs ;
C'eft payertrop long- tems le tribut de tes chaînes
Par les plus cruelles douleurs .
*
Tyran de tes Sujets , faut-il que tu raviffes
Le repos de nos coeurs par les plus noirs forfaits
Ne verrons - nous fans ceffe éclater tes caprices
Que dans les maux que tu nous fais
Par tes Traits enflâmés la fagelle étouffée ;
Abandonne
NOVEMBRE . 17417 2345
Abandonne un Mortel à toutes les horreurs ;
Ah ! faut- il , jufte Ciel ! qu'elle foit le trophée
Que l'on éleve à tes fureurs ?
*
Mais c'eftpeu qu'aux Humains tu déclares la guerre,
Aux Habitans des Cieux tu fçais donner des loix ,
Et les Dieux dans l'Olimpe ,armés de leur Tonnerre,
Redoutent encor ton Carquois.
*
Quand tu fus apellé par ces Maîtres fuprêmes
Pour joüir avec eux de l'immortalité ,
Tulesfoûmis, ingrat,& plus puiffant qu'eux- mêmes;
Tu troublas leur félicité .
*
Je vois leur Reine ( a) en proye à ta funeſte rage ,
Elle veut fe venger d'un infidele Epoux.
Contre l'Amant (6) chéri de ta Mere volage ,
J'entends les cris (c) d'un Dieu jaloux.
*
Fils de Latone , (d) arrête , eh quoi ! ta main cruelle
Immole à ta fureur & l'Amante & l'Amant !
Si le perfide Amour à te venger t'apelle ,
C'eft pour redoubler ton tourment.
( a ) Junon. (b) Adonis . ( c ) Mars . ( d ) Apollon:
Il aima Coronis , qui le quitta pour unjeune homme
nommé Ifchis ; de Dieu , pour ſe venger , les tua l'un
&l'autre d'un coup de fleche, & s'en repentit enfuite.
A Vengez
2346 MERCURE DE FRANCE
Vengez-vous , Immortels , & du féjour célefte
Banniffez un Tyran ; armez votre couroux
Eteignez fon flambeau , briſez fon Arc funefte ;
Faites fur lui tomber vos coups .
*
Qu'attendez- vous encore cet Enfant témeraîre
Ufurpe votre encens , en reçoit les honneurs ;
On vous offre fouvent un culte peu fincere
Il a le fien dans. tous les coeurs.
*
Mais d'un nouveau malheur mon ame eft menacée ;
J'entends mugir- les Eaux du boiiillant Phlegeton ,
Déja , (a ) Fils de Maya , ton puiffant Caducée
M'ouvre l'Empire de Pluton.
*
Ta rage , Dieu cruel , fera t'elle affouvie ?
Quoi ! tu me fuis encor au ténebreux féjour !
Et la faux du trépas , en terminant ma vie ,
N'a pas terminé mon amour ?
Sur les rives du Styx , je fens ton feu barbare' ;
Quelles horreurs! ô Ciel ! quels fuplices nouveaux!
Non , non les malheureux qu'enferme le Tartare
Ne fouffrent pas de fi grands maux .
(a) Mercure, c'étoit lui qui conduifoit les ames dans
les Enfers .
Quelle
NOVEMBRE . 1741 2347
Quelle foule de Morts à ton Char attachée ,
Malgré la Parque encor gémir fous ton pouvoir !
Contre un volage Amant , (a) la veuve de Sichée
Fait éclater fon défefpois.
2005
Phédre fent dans fon coeur un feu qui fe rallume,
Uu feu dont tu lanças le trait empoisonné ;
Rien n'arrête l'ardeur de l'amour qui confume
Procris (b) & la trifte Evadné (c).
3393
Plus malheureux que vous , Ombres infortunées ,
Mes cris vont augmenter l'horreur des fombres
bords ;
Au plus funefte amour vous fûtes condamnées ;
Il n'égaloit pas mes tranfports
*
Jouis , Fils de Vénus , du trouble de mon ame ;
Tu ne fçaurois, barbare, accroître mes malheurs
Ettes traits odieux éternifent ma fâme ,
Mon défefpair & mes douleurs.
Par M. B ** , dAix.
(a ) Didon . (b ) Procris conçut de lajaloufia de fon
Mari Céphale, & fe cacha dans un bois pour l'épierz
Céphale y vient chaffer &la tua , la prenant pour
une Bête fauvage . ( c ) Evadné aima fi éperdûment
fon Mari , qu'elle fe jetta dans le bucher où l'on bru
Lait fon corps.
A vi
DIS
2348 MERCURE DE FRANCE
DISCOURS fur le Sujet proposé par
l'Académie Françoife pour le Prix d'Eloquence
en 1741 . 1.
Non irrideas hominem in amaritudine anima , Ec◄
clefiaftique , ch . VII . V. XII.
Qu'il eft dû aux malheureux une forte de Reſpect.
I
L n'y a point d'Empire , fi floriffant qu'il
foit , où il n'y ait des infortunés . Il :n'y a
point d'Etat dont la fageffe du Gouvernement
puiffe mettre tous ceux qui le compofent
à l'abri des malheurs & des miferes de
la vie ; le Trône même , fi affermi qu'il foit,
n'eft point à couvert des afflictions. L'inégalité
qui regne dans la difference des conditions
n'eft point l'effet du hazard ; tout eft
reglé par une conduite & une oeconomie
que nos plaintes & nos murmures ne peuvent
changer , & le feul défaut de foumiffion
à de rels ordres , fuffit pour nous rendre
malheureux .
Les Riches & les Puiffans du fiécle ne
peuvent , fans injuftice , fe glorifier de leur
bonheur ; ils ne peuvent fans crainte fixer
leur coeur à la fplendeur de leur état ; s'ils
confiderent la fin pour laquelle ils font riches
NOVEMBRE. 1741. 2343
ches & puiffans , quelles plus juftes raifons.
pour eux de trembler car ils ne font ори-
lens que pour être de fages difpenfateurs ,
& ils ne font puiffans que pour être de tendres
protecteurs.
Etat à craindre , il eft vrai , lorfque la
grandeur , l'élevation ou lá profperité nous
ébloüiffent , & que nos paffions privent les
malheureux des reffources qu'ils efperent
trouver ! mais quels biens & quels avanta
ges n'en retirent pas les infortunés , s'ils font
affés heureux pour trouver des hommes
qui du fein de la grandeur & de l'abondance
, fçavent compatir aux miferes & aux
malheurs des membres fouffrans de la Societé
?

Ce n'eft pas feulement
à l'homme en pla
ce qu'il eft commandé de refpecter & de fecourir
les malheureux
, tous ceux qui compofent
la Societé doivent y prendre part du
moins en quelque chofe .
de
La Religion & l'humanité font de tous les
états ; chacun peut trouver dans toutes les
conditions des moyens marquer fork
zéle pour l'une , & les fentimens de fon
coeur pour l'autre .
S'enfler d'une profperité paffagere , c'eſt
n'en connoître ni l'inconftance , ni l'infta
bilité , & c'eft le fond de la préfomption
s'ocuper trop de fes malheurs , & les repat
A vi
93
fen
2350 MERCURE DE FRANCE
fer fans ceffe dans l'amertume de fon coeur ,
fans fe mettre en état d'en profiter , c'est défaut
de confiance & de foumiffion ; l'un
montre un fond d'orgueil , l'autre ajoûte la
révolte à fon infortune .
Ne point fecourir fon femblable , c'eſt
dureté de coeur & défaut de fentimens , infulter
à la mifere du pauvre par l'orgueil &
la fierté , c'eſt le comble de l'irréligion &
de l'inhumanité ; car la Religion & l'humanité
réclament des fecours en faveur du
malheureux ; c'eft Dieu qui afflige , & qui
humilie ; nous devons.honorer fes decrets
il ne punit que par juftice ou par miféricorde
: Refpectons la caufe & ne méprifons
point les effets .
Divifion. I. Partie. La Religion autorife &
commande le refpect que nous devons à
l'homme malheureux .
II. Partie. L'Humanité exige de nous des
fecours réels , en faveur des infortunés , ou
du moins un coeur compatiffant. Ne trompons
pas leur efpérance , puifque ces deux
moyens peuvent elever ou foûtenir l'hom
me fouffrant dans l'amertume de fon coeur.
1. Partie. C'eft du haut du Trône le plus
noble & le plus élevé de l'Univers ; que le
plus fage & le plus grand des Rois nous
découvre les fentimens de fon coeur tendie
& compatiffant pour les affligés : c'eft
le
NOVEMBRE . 1741. 2350
le plus puiffant & le plus riche Souveraine
qui fut jamais , qui , fans déroger à fa grandeur
, nous aprend à ne point contrifter le
coeur du malheureux , en ajoûtant à ſes miferes
par notre orgueil , notre fierté , & fouvent
par nos railleries , lors qu'il nous dit :
Non irrideas hominem in amaritudine anima ;
mais devions-nous attendre d'autres fentimens
d'un coeur formé pour regner , d'un
coeur créé par la fageffé, pour être le modéle
des Rois , le Protecteur d'un grand peuple ,
& qui devoit inftruire tous les hommes
d'un devoir auffi effentiel à la Societé , que
celui du respect & de la compaffion que
la Religion exige , & que l'humanité a droit
d'attendre en faveur des affligés ?
Il y a dans le fond du coeur de tous les
hommes des reffources inaltérables pour les
oprimés ; la Religion les fait naître , l'humanité
les fait agir ce font des motifs preffans
, aufquels ils font obligés de ne rien
refufer.
:
Les Peuples les mieux policés ont toujours
eû pour bafe & pour fondement le
foulagement des miférables , & il n'y a point
de Nation fi barbare & fi feroce qu'elle foit,"
qui n'ait mis au rang de la fageffe de fon
Gouvernement politique la commifération
pour le malheureux , parce que la Religion
& la nature parlent au fond de tous les
coeurs
2352. MERCURE DE FRANCE
coeurs , & qu'il y a des infortunés , par tout
où il y a des hommes.
Un coeur vraiment inftruit & pénétré des
préceptes de la Religion , ne contrifte point
par fon orgueil l'homme malheureux ; il ne
rebute point par fon abandon celui qui fouffre
, &' il ne le porte point au défefpoir par
fon infenfibilité & fa dureté ; car l'orgueil
ajoûte aux miferes des affligés , les délais &
P'oubli les découragent , & notre dureté les
prive des reffources qu'ils ont droit d'attendre.
La premiere Loi qui fut donnée aux hom
mes après l'amour de l'Etre Souverain , fut
l'amour du prochain , & par confequent
de l'homme affligé ; & fi quelque chofe peut
l'irriter dans fon état humiliant , n'eft - ce pas
l'orgueil & la fierté ?
Rien de plus capable de contrifter le malheureux
, que l'ambition & les maniéres impérieufes
des Riches , des Puiffans du fiécle,
& de tous ceux qui ne font point dans la
fouffrance ; l'un & l'autre prouvent les paffions
qui les font agir, car c'eft annoncer que
nous nous attribuons à nous -mêmes les bons
fuccès , que nous les faifons dépendre de
nos démarches ou de nos intrigues ; c'eſt
faire connoître que tel n'eft réduit dans l'état
qui afflige fon coeur , que parce qu'il n'a
ni les talens, ni le génie néceffaires pour ſe ti-
ICE
NOVEMBRE . 1741 2353

rer de la pouffiere , & qu'un tel homme ne
doit effuyer que des mépris : Mais, ô Profondeur
infinie de la perverfité du coeur
huniain" ! Peut - on juger plus injuftement
d'une caufe par les effets ? N'eft-ce pas le
Tout- Puiffant qui rend pauvre & qui enri
chit, Dominus ditat & pauperem facit ? N'eſtce
pas lui qui éleve & qui humilie ? fonbras
ne frape - t'il pas également l'homme de
bien,& comme l'homme d'iniquité? & peuton
fans témérité ne point refpecter l'homme
humilié , fans s'expoſer à infulter à un juſte
ou à un infortuné à nos yeux , qui par`` le
bon ufage des fouffrances de fon état , peut
participer à un bonheur immenfe , & qui
lui apartient dès ici - bas par tant de titres ?
Qu'il eft néceffaire qu'il y ait dans l'affli
gé un fond de Religion & d'efperance pour
ne point être jaloux de la profperité & del'abondance
! Mais fi cette confiance eft
trompée par nos délais , fa patience laflée
par nos refus , fa conftance découragée par
la dureté qui accompagne pour l'ordinaire
Populence , quels plus juftes fujets d'amertuines
pour lui ! Sa Religion s'affoiblit , fi
elle ne s'éteint , fon efperance s'éclipfe &
s'evanouit , fa confiance fe diffipe ; notre
oubli & notre negligence dans fa preffante
néceflité le découragent , & il n'y a pas loin
de fon état au défefpoir.
En
2354 MERCURE DE FRANCE
En vain la Philofophie fans la Religion
voudroit mettre l'homme au- deffus de luimême
; les raifonemens pouront bien pendant
quelque tems fufpendre , fes plaintes ,'
mais les refources fur lefquelles on compte,
ou qu'on a lieu d'attendre , venant à manquer
, les projets de fermeté fe changent en
foibleffe , le coeur eft deftitué de force , cette
prudence empruntée fe démafque , ce héroïfme
philofophique fait place à la défiance
, on montre & on s'aperçoit foi- même
qu'on eft homme.
Qu'il eft trifte d'aggraver par fes paffions
les douleurs des affligés , & qu'il efſt dur aux
malheureux de fe voir accablés par des hommes
qui de vroient les faire jouir des avanta
ges que la Religion leur donnoit lieu d'attendre
! Dans quelques fortes de malheurs où
ils foient plongés, évitons de leur faire effuyer
nos mépris .
Jl y a dans la Societé divers genres d'infortunés
; les uns font malheureux comme
par état & en naiffant ; d'autres par une fuite
des miféres qui font l'apanage du plus grand:
nombre , & d'autres enfin purement par leur
faute ; l'ambition , l'orgueil & l'intérêt qui
font les paffions qui font mouvoir tous les
hommes , ne manquent jamais de prétextes
pour fe difpenfer d'ailifter I affligé . " L'ambitieux
regarde le pauvre par état, comme deftiné
NOVEMBRE. 1741. 2355
tiné à le fervir , & comme fon eſclave .
L'orgueilleux , jaloux du bonheur de fa naiffance
ou de fa fortune , s'attribue les bons
fuccès , fe fçait bon gré des moyens bons ou
mauvais qu'il a employés pour s'élever à un
plus haut rang , ou pour fe tirer de la baffeffe
& de l'humiliation ; l'avare fe croit difpenfé
de partager fes richeffes avec celui qui n'eſt
devenu miférable , que parce qu'il a ourdi
lui-même la chaîne de fes malheurs. Mais
quelles que foient les caufes qui affligent &
accablent les hommes , en font- ils moins dignes
de nos foins & de nos attentions ? Les
motifs fpirituels ne doivent- ils pas nous faire
prendre part à leurs maux ? & leurs peines
quoique caufées fouvent par des raifons temporelles
, doivent- elles moins nous engager
à les refpecter en les fecourant ? ne devonsnous
pas méfurer nos bienfaits aux befoins
évidens fans en rechercher la caufe ? & n'eftce
pas ajoûter au malheur des affligés , & les
infulter, que de prétexter, lorfqu'il n'eft befoin
que d'employer des fecours que la Religion
nous prefcrit ?
Tous les differens maux qui frapent les
hommes ne font pas la même impreffion fur
tous les coeurs ; il y en a de plus difficiles à
toucher les uns que les autres , parce qu'on
ne regarde pas tous les évenemens de la vie
dans le même point de vûë ; car on ne peut
difcond
2356 MERCURE DE FRANCE
difconvenir que dans certains hommes il
faur de grands refforts pour les faire agir , &
remuer leurs coeurs ; à l'un il faut des
pour
renverfemens confidérables pour l'effrayer ,
des pertes éclatantes & des évenemens ruineux
pour le toucher , à l'autre il femble
qu'il foit néceffaire ,pour lui annoncer qu'il y
a des malheureux ( qu'il doit non feulement
plaindre , mais refpecter ) qu'il arrive des
calamités publiques , des incendies & des
naufrages , pour le forcer d'attendrir fon
coeur fur les milheurs évidens ; dans d'autres
moins à portée de voir les mifères de
près , il faut un récit des mifères pour réveiller
les fentimens de leur ame ; & leur
faire reffentir , quoique legerement , quelques
épines des grands maux qui déchirent
les infortunés ; moyens forcés , il eſt vrai ,
mais qui font néceffaires pour faire rendre
au malheureux la forte de refpect que la
Religion nous enfeigne ne pouvoir lui refufer.
Si l'orgueil & la fierté infultent de front
au malheureux , l'abandon que nous faifons
de lui n'ajoûte- t'il pas à fes miferes ?
Il faut bien peu connoître les afflictions
de la vie pour n'être point touché de l'état
déplorable où l'oubli & l'abandon précipitent
l'homme infortuné , & eft - il befoin que
la Religion foit comme forcée d'expofer à
nos
NOVEMBRE. 1741. 2357
1
nos yeux un leger tableau des maux dont
il eft accablé ? car fi nous entrons dans le
détail des befoins du plus grand nombre de
ceux qui compofent là Societé , fi nous faifons
le dénombrement des divers genres
d'afflictions qui réduiſent les hommes à ces
états fâcheux que nous déplorons , quoi de
plus capable de ranimer nos coeurs , & de
les porter à un légitime refpect pour les
malheureux ?
Si nous nous tranfportons en efprit dans
le fein d'une famille défolée , privée de tout
fecours , & de l'aliment même le plus fimple
, mais le plus néceffaire à la vie , nous
trouverons un Pere fouffrant par lui même ,
&gémiffant fur les preffans befoins d'une famille
déſolée ſous fes yeux ; fi dans le même
efprit nous entrons chés cette veuve languiffante
dans l'amertume de fon coeur , qui n'a
que des farmes & des gémiffemens à parta
ger avec des orphelins accablés des mêmes
miféres , nous la trouverons couverte d'infirmités
, foible & mourante par le défaut
d'alimens , dans la douleur , manquant de
remedes & des fecours fi néceffaires à fon
état ; fouvent même elle expire à nos yeux
fans pouffer la moindre plainte , & c'eſt à la
Religion feule qu'ellefaiffe le foin de venger
l'injure que nous lui faifons par notre
Dubli & notre abandon
L'orgueil
2358 MERCURE DE FRANCE
L'orgueil des hommes fuffiroit pour infulter
aux malheureux ; l'abandon & l'oubli
de leurs miféres peut encore les décourager,
mais notre infenfibilité & notre dureté ajoûtent
à leurs maux , les privant des réffources
qu'ils ont droit d'attendre .
Dans la Religion , où est le fond inépuifaq
ble de la charité tout réclame en faveur
des infortunés & des miférables . Les Etats
les mieux policés , & qui ont reglé leur
gouvernement fur un fondement auffi folide
, ont non-feulement réüffi à faire refpecter
les malheureux , mais ils ont travaillé
efficacement à l'agrandiffement de la République
ou à fa conſervation , en rendant aux
affligés les devoirs que la Religion prefcrit ,
& en ayant pour eux les foins & les attentions
que leur état affligeant a lieu d'efpérer
; c'eft pourquoi les hommes les plus éle
vés ont toûjours tâché de s'inftruire des véritables
befoins des indigens , fachant que l'i
gnorance volontaire fur un article auffi important
eft inexcufable ; car la mifere &
les larmes des infortunés percent juſqu'aux
Trônes les plus élevés , & elle y trouve fouvent
des reffources dont la bonne odeur &
le bon exemple font agir avec zéle ceux qui
font en état de fecourir les membres affligés
de la Societé .
Si nous étions réellement pénétrés du
défir
NOVEMBRE. 1741 2359
défir d'opérer le bien , nous ferions nos
efforts pour témoigner aux malheureux combien
nous fommes fenfibles à leur fituation
nous adoucirions leurs peines , en ayant du
moins pour eux les fentimens que la Religion
éxige , nous gouterions nous- mêmes, dès
ici -bas , le bonheur & l'avantage qu'il y a à
fecourir les miférables , & à ne point les irriter
par notre infenfibilité , puifqu'on doit
regarder comme heureux celui qui penſe attentivement
au pauvre & à l'affligé , Beatus
qui intelligit fuper egenum &pauperem. C'eſt
principalement aux riches du monde , & à
ceux qui font en état de fecourir les malheureux
, qu'il eft prefcrit de n'être point
orgueilleux , de ne point mettre leur confiance
dans des richeffes incertaines & périffables
, d'être bien-faifans pour se rendre
riches en bonnes oeuvres , & c'eft à tous
qu'il eft commandé de donner avec joye &
du fond du coeur , Hilarem enim datorem diligit
Deus . Eft- ce donc en vain qu'il eft commandé
de faire part de fes biens à ceux qui
en ont befoin , & cette obligation ne parlet'elle
pas au milieu de tous les coeurs ? Lê filence
extérieur des malheureux qui n'ofent
fe plaindre ouvertement du mauvais emploi
que les Riches font de leurs biens , quoi
qu'ils en ayent tant de fujets , condamne
tout à la fois notre orgueil & notre infenfibilité,
2360 MERCURE DE FRANCE
bilité. Mais fi le malheureux ne trouve pas
les fecours dont il s'étoit flaté , fi notre du
reté lui refufe ce qu'il attendoit avec confiance
, n'effuie - t'il jamais de paroles dures
& orgueilleufes , & n'ajoûtons nous pas à
la dureté le défaut de compaffion ? S'il ne
partage pas nos bienfaits , du moins ne le
contriftons point dans fon état par des réponfes
dédaigneufes & méprifantes. Mais fi
nous ne fommes pas affés généreux , pour
acquérir la félicité par un moyen auffi cher
à la Religion , que néceffaire à la Societé
que faut- il donc mettre en ufage pour nour
attendrir , & nous rendre attentifs fur les
mifères d'autrui ? Faut- il , pour nous rendre
fenfibles , nous conduire dans ces hofpices
facrés que la Religion & la Charité ont
édifiés , & qu'elles foutiennent pour le foulagement
des malheureux ? Nous y trouve .
rons l'affemblage de toutes les miferes de la
vie ; maladies de tout genre & de toutes
efpeces , plaves dangereufes & incurables ;
nous y verrons des hommes languiffans &
mourans, les uns conformés & ufés par
travaux rudes & pénibles , d'autres privés de:
l'ufage des membres , fans lefquels ils ne
peuvent fubfifter , & qu'ils ont peut-être
perdus ou à notre fervice , ou en prêtant
feur force & leur vigueur pour nous fauver
des maux qui nous menaçoient ; d'autres
des
enfin
NOVEMBRE. 1741. 2361
enfin prêts à confommer une vie pénible &
languiffante, après l'avoir, épuifée par des
fatigues & des fueurs dont nous étions nousmêmes
incapables ,fans lefquelles nous n'euf-
Gions pas fubfifté ; & quels qu'ils foient
la Religion ne nous rend -elle pas de tels
hommes chers à tous égards ?
- Mais fi cette même Religion nous con
duit encore dans ces fombres demeures def
tinées à commencer les fuplices préparés à
la punition des crimes , dans ces lieux qui
mettent la Societé à l'abri de la fureur des
méchans , qu'y apercevons- nous ? l'entrée
feule remplit d'effroi le coeur le plus calme ;
l'innocent y eft confondu avec le criminel.
jufqu'à ce que la verité ait prononcé : defcendons
plus bas , nous y verrons des cou
pables , il eft vrai , la honte & le crime , fur:
le front , des hommes pâles , livides , défigurés
, dans les fers & dans les liens , dénués
de vêtemens , réduits à la fimple nourriture
que les animaux domestiques refufent
le plus fouvent nous les verrons abandon
nés des hommes , privés de la lumiere du
Soleil & des douceurs de la Societé , réduits
même jufqu'à être tourmentés par les infcctes
les plus vils & les plus méprifables . Falloit-
il done , pour nous rendre fenfibles
expoſer à nos yeux une fi vive peinture des
maux que la Religion & la Societé ont tant
d'interêt
362 MERCURE DE FRANCE
d'intérêt de prévenir? Mais quelle que foit la
caufe du funefte état des malheureux , foyonsen
touchés , car ce font des hommes ; refpectons-
les , & tremblons ; nous partons au
milieu de nous la fource des mêmes miféres
s'ils n'euffent pas été abandonnés , dé-
Jaiffés, méprifés, lorfqu'ils vivoient au milieu
de nous , peut- être ne les verrions nous pas
réduits aux extrémités & aux fuites funeftes
que la mifére entraîne ordinairement après
elle , & fi par notre abandon , notre infenfibilité
& notre dureté , nous avons compofé
la chaîne & les liens de leur captivité , du
moins n'ajoûtons pas à leur douleur , en
leur refufant la forte de refpect qu'ils efperoient
trouver dans le fein de la Religion.
Et quels reproches n'a - t'elle pas droit de
nous faire , puifqu'ils ne périffent pour la
plupart que par notre faute ?
Quelles plaintes les malheureux ne pouroient-
ils pas nous adreffer , en ajoûtant à
leurs maux , non-feulement par l'orgueil ,
l'ambition , la dureté & linfenfibilité dont
nous les accablons ? mais encore s'ils envi
fageoient notre fafte, tant de biens prodigués
en dépenses exceffives , tant de richeffes confommées
; en vain , & un fuperflu fans bornes
; tous ces excès ne font - ils pas autant de
vols que nous faifons
aux pauvres & aux malheureux
; mais ils ne font point retentir pour
lors
NOVEMBRE. 1741. 2363
lors les juftes fujets de leurs plaintes , ils ne
fe plaignent que de la dureté de notre coeur,
& de l'injure que nous leur faifons par nos
paffions ; & s'ils font comme forcés d'expofer
à nos yeux les douleurs de leur état , ils
fe flatent que nous employerons en leur faveur
les moyens que la Religion n'a jamais
refufés au malheureux .
Le plus affligé & le plus abandonné de
tous les hommes nous doit être d'autant plus
précieux , qu'il eft plus malheureux ; plus il
eſt abattu, plus les fentimens de notre coeur
doivent agir en fa faveur : mais en géneral
la Religion autorife & commande la forte
de refpect qui eft dú aux malh ureux. Pour
remplir efficacement un précepte auffi glorieux
à la Religion qu'utile à la Societé , banniffons
des paflions qui ne peuvent qu'irriter
les infortunés : ne les contriftons point par
nos délais & notre abandon , & ne laiflons
point leur ame dans l'amertume par notre
inſenſibilité , c'eſt une partie des devoirs que
la Religion exige . Mais fi des motifs auffi
preffans ne peuvent nous faire agir , les malheureux
ne font- ils pas en droit d'employer
les moyens que l'humanité leur accorde? fi
nous fommes en état de répandre fur eux
nos bienfaits , rendons-leur des fervices réels
& effectifs ; & s'il n'eft pas en notre pouvoir
de les foulager dans leurs peines , ayons
B du
2364 MERCURE DE FRANCE
du moins pour eux un coeur tendre & compatiffant
, ce font des reffources qui apartiennent
aux malheureux , c'eft ce que l'humanité
infpire, & ce qu'ils font en droit d'é
xiger de nous ; & ils font affurés de les trou
ver dans un coeur qui a des fentimens.
,
9
II. Partie . L'homme eft né pour être heureux
, mais depuis fa chute il a partagé la
fatale fucceffion des miféres & des néceffités
de la vie. Tous les maux qui l'accablent
font les funeftes fuites de fon crime , & l'éxécution
de l'arrêt qui l'a exclus de fa premiere
felicité. Plus ces maux font grands
plus ils fui repréſentent fa propre mifére ;
s'ils font moindres ils lui font reconnoître
fa foibleffe , l'un & l'autre font également
dignes de compaffion. Tous les hommes
doivent prendre part aux maux des autres
, puifque ces miferes nous annoncent
ce que nous fommes , & de quoi nous fommes
menacés. On fait toujours fes efforts
non pour éviter un mal particulier , mais
en géneral ; pour n'être point malheureux ;
& ce défi de la félicité , qui eft né avec
l'homme , ne doit-il pas nous engager à
compatir aux miferes des autres , à proportion
de ce qu'ils font plus éloignés de ce
qu'ils regardent comme un bien? ne devonsnous
pas , par notre attention à les fecourir ,
les dédommager en quelque forte des biens
dont
NOVEMBRE. 1741. 2365
dont ils font privés ? & , puifque tous les
hommes ont perdu par leurs crimes le droit
qu'ils avoient à l'exemption de toutes les
miferes de la vie , combien devons- nous
être fenfibles à l'état de ceux qui ſemblent
réſervés à ſubir dans leurs perfonnes la juſte
condamnation prononcée contre tous ?
Il y a des affligés & des infortunés dans tous
les differens états qui compofent la Societé ;
mais il y a un genre de malheureux qui femble
exiger toute notre attention. La diverſité
des afflictions , les changemens fubits , les
révolutions , les difgraces , & toutes les calamités
ne tendent qu'à nous faire avoüer
l'équité du jugement porté contre nous , mais
quels que foient tous ces maux , ils ne nous
contriftent que parce qu'ils nous font fentir
la privation des biens fenfibles que notre
coeur défire , ou parce que ces mêmes malheurs
nous conduifent à la perte de la vie.
Si tous les hommes ne reffentent pas les
peines prononcées contre eux , & encouruës
par la même caufe , n'eft - ce pas pour donner
lieu à ceux qui font opulens & aifés de
fecourir les infortunés ? & ne doivent - ils pas
foulager ceux qui font réduits dans un état
que l'on fuit avec tant de foin ?
Les Juftes tombent dans les maux tempo ;
rels , & les méchans les évitent : l'un & l'autre
arrive très- fouvent ; car l'homme de bien
Bij n'a
2366 MERCURE DE FRANCE

n'a pas d'ordinaire tant de précaution pour
éviter les accidens de la vie que les méchans,
parce qu'il y a bien des moyens qu'il ne
croit pas pouvoir employer ; ennemi de la
fraude & de l'injuftice , l'homme intégre
préfere fon état humiliant & fouffrant à une
place plus élevée & plus commode mais
dont il fent toutes les obligations , & dans
laquelle la vertu trouve fouvent tant d'écueils.
Les méchans réüffiffent , il eft vrai :
mais auffi combien de fois les voyons- nous
retomber dans des maux encore plus grands
que ceux qu'ils avoient voulu éviter , &
quels que foient tous ces affligés , juftes ou
injuftes , fecourons- les , en imitant celui
qui a été doux & bienfaiſant à l'égard même
des incrédules & des méchans . Si les malheureux
ont la douleur de ne point trouver
de reffources par les motifs que la Religion
exige , la feule humanité doit leur fervir d'azyle
: ne peuvent - ils pas fe flater d'y trouver
des coeurs compatiffans ? ils l'efperent , mais
en tremblant , parce qu'il eft rare de voir
des hommes veritablement pénétrés des be
foins des indigens , ou qu'ils ont la douleur
d'éprouver que ceux- mêmes qui étoient , il
n'y a pas long- tems , réduits à la plus grande
mifere , oublient & leur état & ceux qu'ils
ont laiffés dans des malheurs dont ils font
fortis , & qu'ils ont peut-être reffentis dans
toute
NOVEMBRE . 1741. 2367
toute leur étenduë : ah ! ce n'eft point à de
tels hommes que le malheureux adreffe aujourd'hui
fes plaintes , elles font infructueufes
dans des coeurs qui devroient fuir la Societé
; & quoique la mifére foit un tableau
exposé à la vûë de tous les hommes , combien
s'en trouve - t'il qui daignent y jetter
feulement un regard de compaffion ? &
combien n'y a-t'il pas de prévaricateurs des
devoirs de l'humanité ?
Mais fi le malheureux a le bonheur de
s'adreffer à des coeurs en état , ou animés
du défir de faire le bien , s'il trouve des
hommes compatiffans à ſes miféres , qu'y at'il
de plus cher à la Societé ? car nos devoirs
envers les infortunés nous engagent à
quelque chofe de plus qu'à des difcours &
à de fimples paroles , fi nous le pouvons ;
ils demandent des fervices réels , & lorſque
où l'amour de notre repos , ou notre infenfibilité
ne bornest nos foins qu'à de fimples
fouhaits , c'eft une dureté & même une infulte
à la mifére de nos freres , couverte de
l'hypocryfie .
,
De tous les differens moyens de fecourir
les malheureux , & de leur marquer une
forte de refpect , l'humanité n'en préfente
point de plus efficaces , que de les fuftanter
de nos biens , les affifter de nos confeils , &
les tirer de l'opreffion , en les protegeant
B.iij contre
2368 MERCURE DE FRANCE
contre l'injuſtice ; car nos bienfaits adoucif
fent les amertumes de leur état fouffrant
nos. avis & nos confeils foulagent leurs
maux , & les voyes que nous employons
pour les défendre de la fureur des méchans ,
raniment leur confiance , & les foûtiennent
dans leur foibleſſe ..
Il n'eft pas difficile de trouver des fujets
d'étendre nos libéralités , ou de marquer
notre compaffion ; toutes les conditions &
tous les états en préfentent à nos yeux qui
font vraiment dignes d'exciter dans nos
coeurs tous les fentimens que l'humanité in
fpire. Les familles les plus opulentes en renferment
dans leur fein , & fouvent même
ce ne font pas les mieux fecourus.
Quel est l'état , fi floriffant qu'il foit , où il
n'y ait un grand nombre de ces hommes qui
ſemblent n'être réſervés qu'à fervir de victi
mes à la pauvreté, aux douleurs & aux afflic¬
tions ? les Villes & les Campagnes , les
Lieux les plus faints & les plus retirés, nous
montrent à chaque inftant nos devoirs en faveur
des infortunés. Ceux qui fouffrent la
nudité & la faim , pouffent des cris vers le
Ciel contre ces coeurs durs & inhumains ;
eft- ce à tort qu'ils accufent ceux qui répandent
en profufions & en excès , ce qui
leur fuffiroit dans leurs preffantes néceffités ?
ne leur enlevent-ils pas avec cruauté ce
qu'ils
NOVEMBRE. 1741 2369
qu'ils diffipent fans difcernement ? car n'eftce
pas infulter aux larines & aux gemif
femens des affligés , que de facrifier au luxe
& à la vanité , un fond qui leur apartient , &
qui eft leur vrai patrimoine ?
Rien de plus capable de confoler le malheureux
, que de commencer à le fecourir
de nos biens ; par ce moyen nous gagnons
tout à la fois fon coeur & fon affection , nous
effaçons peu à peu les traces & les fentimens
d'amertume , que la mifere avoit comme imprimés
dans fon ame , nous lui perfuadons
qu'il nous eft cher , que fa fituation nous
touche , & que nous nous intéreſſons à le
rendre plus heureux . L'homme eft fi foible,
qu'il faut peu
l'abattre &
pour
peu de chofe
le contrifter ; mais auffi un leger foulagement
, un bienfait aporté à tems , lui fait
comme oublier des jours encore plus longs
qu'il a paffés dans la fouffrance ; tant il eft
vrai , que tout ce qui peut le raprocher , de
fon premier état , qui eft la felicité , a de
force fur toutes les facultés de fon ame .
Pour rendre nos bienfaits plus utiles , il
faut les proportionner aux tems & aux befoins
de la Societé ; de fimples largeffes dans
des tems ordinaires , font à peine fuffifantes
aux mifères des pauvres , qui font toujours
trop grandes , mais dans des jours de calamités
& des faifons rudes & fâcheuses , nos ef-
Bij forts
2370 MERCURE DE FRANCE
forts doivent être redoublés, & quelque étendus
qu'ils nous paroiffent, croyons ne rien faire
de trop pour les malheureux , puifque le
nombre des infortunés eft fi grand , que ces
fecours font moins pour les mettre dans un
état plus aifé , que pour les empêcher totalement
de périr.
,
Il est vrai qu'il s'éleve fouvent dans la
Societé de ces ames généreufes , qui par une
feniibilité vraiment admirable , adouciffent
par leurs libéralités la mifére des indigens ,
en les proportionnant aux befoins évidens ;
loin de croire déroger à leur rang & à leur
état , ils entrent dans le détail immenfe des
befoins des malheureux , ils ne bornent pas
feulement leurs foins à fecourir ceux qui
font fous leurs yeux , mais, parfaitement inftruits
des maux qui accablent les infortunés
de la Societé , ils étendent leurs mains charitables
fur eux , & les affiftent par des bienfaits
de toute nature .
La grandeur & l'éclat qui les environne
les fait gemir à proportion des miferes dont
ils font inftruits ; leur abondance les effraye ,'
en voyant les maux qui défolent leurs femblables
, & ils fe font honneur d'être les
dépofitaires & les oeconomes des biens des
pauvres.
Les Princes & les Grands de la Terre ont
établi dans tous les tems des aziles pour les
malheureux ;
NOVEMBRE. 1741. 2371
malheureux ; c'eft une preuve vivante de la
forte de refpect dont ils ont été animés pour
des hommes qu'ils ont regardés , à jufte
titre , comme membres de la Societé , ou ,
comme ayant fervi à leur fubfiftance ou à
leur défenſe:
N'avons- nous pas la confolation de voir
fous nos yeux les riches monumens , que le
coeur vraiment chrétien & compatiffant d'un
Roy qui mérita réellement le nom de Grand,
érigea à l'humanité ? fi je m'arrête entr'autres
à cet Edifice , établi en faveur des Défenfeurs
de la Patrie , n'y trouverai - je pas tout
ce que la Religion prefcrit en faveur des
malheureux , & ce que l'humanité avoic
droit d'attendre d'une ame auffi genereufe?
:
Du plus loin que nous aprochions d'un
Lieu fi cher à la pieté , nous y apercevons
un Temple dont la magnificence annonce
dès les dehors , la majeſté du Dieu qu'on y
adore fi nous pénétrons dans l'intérieur
d'un fi refpectable Hofpice , nous admirons
le bel ordre , l'economie & les charitables
foins avec lefquels font traités ceux que les
fureurs de la guerre ont épargnés ; c'eſt dans
ce féjour de l'humanité & de la commifération
que ces cheres Victimes de la Patrie
& que ces généreux Défenfeurs des droits
de leur Souverain reçoivent avec profuſion
tout ce que la Religion & les fentimens na-
B v turels
2372 MERCURE DE FRANCE
turels ont établis en leur faveur, tout retentio
dans cette célebre Retraite , de la gloire de
celui en l'honneur duquel elle eft confacrée;
les pierres même annoncent tout à la fois
la grandeur d'ame & la magnificence du
Prince qui l'a érigée ; n'étoit- il donc pas
jufte de rendre à ces hommes courageux ,
au moins une portion des biens dont ils s'étoient
eux-mêmes fi généreufement dépoüillés
? ne devoient - ils pas être fecourus , affiftés
, protégés , après nous avoir rendus les
premiers ces fervices , au prix même de leur
fang ? Exemple de refpect pour les malheureux
, à jamais mémorable , puifqu'un fi noble
projet a jetté comme les fondemens de
pareils fecours pour l'humanité dans plufieurs
Royaumes.
Fuyez à jamais de la Societé , coeurs durs
& fans compaffion , fi la nature ne peut arracher
de vos mains avares ce que vous avez
lâchement refufé à la Religion , fi des exemples
d'humanité auffi généreux ne peuvent
vous rendre fenfibles ; mais dans quelle Region
vous retirerez - vous fans y trouver des
infortunés ? Peut- être helas ! que, déchûs de
votre premiere abondance , vous ferez vousmêmes
affes malheureux pour en augmenter
un jour le nombre ; il eft certain qu'il n'eft
pas donné à tous de répandre des . aumônes
& des libéralités dans le fein des pauvres ,
parce
NOVEMBRE . 1741 . 2373
parce que l'inégalité dans la diftribution des
richeffes ne met pas tous les hommes en état
de fatisfaire à ce devoir , & ne leur laiſſe que
la bonne volonté ; mais fr notre impuiffance
nous prive d'un tel avantage , nous pouvons
foulager les malheureux par nos avis & par
nos conſeils , c'eft un tréfor dont la plupart
font en poffeffion , quoiqu'en differens degrés.
fe
L'homme eft fi foible,que quelque élevé qu'il
paroiffe au-deffus des autres ,
il ne peut
fuffire à foi -même ; il eft né pour la Societé ,
& les divers befoins qui le lient aux autres ,
l'avertiffent qu'il ne peut fubfifter fans un
fecours mutuel .
De tous les differens Etats de la vie , il n'y
en a point qui éxige plus de confolation que
celui de l'homme humilié & fouffrant.Car fi je
me repréſente un homme pauvre & languiffant
, accablé d'ennuis & de chagrins , fans
patron , fans apui , fans protection , fouvent
même fans azyle que ne dois - je point met
tre en ufage pour foulever avec lui la chaîne
de fes malheurs? Pourquoi infulter à fa pauvreté
par l'orgueil & l'ambition ? pourquoi augmenter
fa langueur par notre dureté à lui refu
fer desfecours qu'il devroit trouver dans le fein
de l'humanité & n'est - ce pas ajoûter à fes
peines , que de lui remettre fans ceffe devant
les yeux qu'il eft peut- être lui - même
?
B vj
la
2374 MERCURE DE FRANCE

- la caufe d'un état fi trifte ? faut il parce qu'il
eft dans l'obfcurité , lui fermer l'entrée des
Tribunaux où la Juftice & l'Equité réclament
en fa faveur? pouvons -nous abandonner
fes intérêts parce qu'il n'eft pas en état de les
défendre n'est - ce pas le comble de l'injuftice
, non- feulement de ne point folliciter
en fa faveur , mais de le laiffer tomber &
de l'accabler parce qu'il eft foible & fans
apui ? & doit- il être oprimé parcequ'il manque
d'avis & de confeils ? Combien d'hommes
infortunés fe font portés aux derniers
excès du défefpoir , n'ayant pas trouvé dans
nos coeurs compatiffans les confolations qui
les auroient rapellés à eux- mêmes ? A quels
égaremens d'efprit ne fe font - ils ne fe font - ils pas livrés
faute de les avoir relevés ou foutenus dans
leur foibleffe par nos avis & nos confeils ?
combien même y en a-t'il encore de vivans
parmi nous ( quoique morts pour la Societé ,)
que peu de chofe , une parole à propos , un
confeil fage & falutaire auroient calmés , &
qui ne feroient pas réduits à un état qui fait
horreur à l'humanité ?
Mais il eft encore des infortunés d'une autre
efpece. Nous voyons un homme en place
, qui vient d'éprouver dans tous les points,
les révolutions attachées aux grandeurs humaines
; plus il étoit élevé , plus fa chute lui
eft fenfible; relevons le donc à proportion de
fon
NOVEMBRE. 1741 2379
fon humiliation ; ne le laiffons pás livré à fa
douleur , & fouvent même aux infultes de
ceux qui étoient au - deffous de lui . Ne
voyons - nous pas encore fous nos yeux la
fortune fe jouer d'une foule d'adorateurs ? elle
précipite l'un du fommet de l'abondance dans
le comble de la mifere ; elle flate les uns par
une efpérance trompeufe & un bonheur imaginaire
,d'autres paffent leurs jours en fouhaits
& en défirs , que cette trompeufe Divinité
ne fatisfait jamais ; & elle laiffe les uns & les
autres d'autant plus malheureux , qu'ils défiroient
avec plus d'ardeur les biens dont ils
font privés.
La Societé ne renferme - t'elle pas auffi dans
fon fein des amis ingrats & dénaturés ? ne
fommes- nous pas quelque fois trahis par celui
à qui nous avions donné notre confiance ?
nos projets ne font ils pas déconcertés par
celui que nous avions rendu le dépofitaire
de nos fecrets , & peut- être de notre fortu
ne ? Combien d'autres enfin n'ont - ils pas la
douleur de voir périr un Chef, l'honneur &
le foutien de fa famille ? ou ce Chef même
ne voit-il pas la mort fui enlever le fruit de fes
efpérances, fa confolation , & peut- être tou
te fa reffource ? A l'un, fon patron lui échape,
ou l'abandonne ; l'autre voit fes deffeins renverfés
, ou fa réputation offenfées qui peut
ne pas convenir que la vie eft une chaîne &
un
4376 MERCURE DE FRANCE
un tiſſu de malheurs? Et quels que foient tous
les affligés, n'exigent- t'ils pas toute notre attention
à les foulager & à les confoler ? Mais
ne nous bornons pås à adoucir leurs maux
par ces deux moyens ; fi nous fommes en
place , tirons-les de l'opreffion , & fauvonsles
de la fureur des méchans. Employons nos
bons offices pour ranimer leur confiance &
les fortifier dans leur abattement . Rien n'eft
plus en butte à l'injuftice des Riches & des
Puiffans du fiécle , que le pauvre & l'affligé ,
parce qu'il n'a d'ordinaire à opoſer à une telle
inhumanité que des plaintes infructueufes ,
& des larmes ftériles ; état réellement digne
de toute notre attention .
Le foin des malheureux eft comme indifpenfable
dans un Etat , car , qu'ils foient réduits
à l'indigence , ou par leur naiſſance
ou par les revers de la fortune , pourvû
qu'ils ne foient pas réduits dans l'impuiffance
d'agir , protégeons - les , & mettons - les en
état de fervir la Societé à proportion de leurs
differens talens ; car fi nous remontons aux
fiécles les plus reculés , nous verrons que les
premiers Légiflateurs,& ceux qui ont comme
tranfmis les loix à toute la Terre , ont tou-.
jours reclamé en faveur des malheureux ; ils
ont toûjours en pour fin de les tirer de l'opreffion
, & de les fauver de la-malice des
méchans.
Ce
NOVEMBRE . 17413
2377
Ce n'étoit qu'à regret que le Sénat, le plus
capable de gouverner qui fut jamais , puniffoit
du dernier fuplice les criminels dont la
vie auroit terni la fplendeur de la Républi
que : il croyoit devoir ſouftraire à la Societé ,
des hommes dont elle ne pouvoit attendre
aucun bien en les rendant à la vie ; mais ici
ce font des infortunés qu'il faut s'efforcer de
fauver de la fureur de leurs Concitoyens , ils
n'ont point offenfé la Societé , au contraire ,
la plupart fe font facrifiés pour elle , ils en
font rebutés & méprifés , & le pauvre & le
malheureux n'eft- il pas l'objet contre lequel
l'homme au- deffus des autres , exerce un
defpotifme érigé par l'orgueil , & que l'inhu
manité immole à fa vengeance ? trouve - t'il
facilement les moyens de faire entendre fes
plaintes , & fes miferes quoiqu'exposées à
nos yeux fuffifent- elles pour nous porter à les
protéger ? le défaut de tels fecours ne femble-
t'il pas promettre l'impunité à celui qui
l'oprime ? & le nom feul d'infortuné doit- il
porter avec foi un caractére qui lui ferme tou
te entrée pour fa défenſe ?
Mais qu'une telle conduite eft condamna
ble , & contraire à l'efprit de la Societé ! Les
Tribunaux ne font établis qu'en faveur des
infortunés , c'eft toûjours pour la défenfe
des oprimés que la Justice y fait retentir fes
Arrêts , & fi les hommes fe conduifoient
toujours
2378 MERCURE DE FRANCE
toûjours par les fentimens que la raiſon &
que l'humanité infpirent , ne feroient- ils pas
les protecteurs & les défenfeurs des malheureux
? n'eft-ce pas troubler l'ordre de la République
, & donner lieu à l'injuftice , que
d'ôter toute reffource de défenſe , & de traiter
fi rigoureuſement des hommes qui , pour
la plupart , font ceux auxquels l'Etat eft le
plus redevable ?
-
En effet ces hommes pour lefquels nous
fommes fi indiferens & fi durs , n'ont- ils pas
cultivé nos campagnes , receuilli & amaffé
avec des fueurs inexprimables ce qui fait notre
abondance ( & peut- être leur mifere ?) Les
uns ne fe font - ils pas mille fois expofés en
nous bâtiffant des demeures dont ils font euxmêmes
privés ? combien d'autres pour un
modique falaire n'ont ils pas épuifé leurs
corps par des veilles & des travaux accablans
, en nous préparant pour le jour ce qui
les privoit d'un repos dont ils avoient tant
de befoin ? ceux- ci n'ont- ils pas paffé leur vie
dans l'indigence & privés de tout , lorfqu'ils
s'épuifoient à nous difpofer les chofes les
plus indifpenfables à la vie ? lors même qu'ils
travailloient comme à regret aux objets de
notre orgueil & de notre ambition , qu'ils regardoient
avec raifon comme un fuperflu
condamnable ? Combien de commodités ne
nous ont- ils pas procurées par les differens
Arts
NOVEMBRE. 1741
2375

'Arts , dans le tems que nous employons à
notre luxe & à notre fenfualité ce qui auroit
fuffi à leurs néceffités ?
Enfin, ne font- ce pas les pauvres du fiécle ,
que nous avons apellés lorſqu'il étoit befoin
de nous fecourir & de nous fauver des évenemens
ruineux qui nous menaçoient? &
combien y en a-t'il , en nous prêtant leur force
, que nous avons eû la douleur de voir enfevelis
fous les ruines dont leur bras nous a
fauvés? & devons - nous avoir égard aux fins
qui les ont fait agir ? ne devons nous pas être
reconnoiffans à proportion des fervices qu'ils
nous ont rendus ? s'il y en a d'autres qui
ne nous ayent point encore obligés , mettonsles
en état d'agir en les retirant de la mifére ,
& des malheurs qui les empêchent de rendre
à la Societé les fervices dont ils peuvent être
capables.
Il eft néceffaire qu'il y ait dans un Etat des
hommes inférieurs & fubordonnés, mais il eft
toûjours honteux d'y trouver des malheureux
par notre faute . La vraye fageffe du
Gouvernement , eft de procurer à chaque
Membre de la Societé les douceurs & les
avantages qu'il efpere goûter dans le genre
de vie qu'il a choifi , car depuis l'homme en
place & élevé jufqu'à l'Artifan , ce qui dérange
l'ordre & le point de vue où on s'eft fixé ,
peut rendre malheureux . Il уа
des maux
réels
2380 MERCURE DE FRANCE
réels , & d'autres qui ne frapent que l'imagi
nation; mais tels qu'ils foient, en rendent- ils
T'homme moins malheureux? Il ne faut que
fe raprocher & fe mefurer fur l'humanité
pour réduire tous les hommes en quelque
forte au même niveau ; les maux évidents ne
font pas toûjours les plus fenfibles ; il y a des
miféres cachées qui portent au coeur les plus
mortelles atteintes .
Qu'il feroit trifte pour la Societé de voit
des hommes raiſonnables augmenter par leur
irréligion , & leur inhumanité le nombre des
infortunés ! il faut avoir bien peu reffenti
les mifères de la vie , ou y être bien infenfible
, pour ne pas faire un jufte paralelle
de la profperité & de l'adverfité , car quelle
eft la condition qui n'en ait partagé quelques
amertumes , ou qui puiffe fe croire à l'abri
des maux qui peuvent rendre malheureux?
Que les infortunés feroient à plaindre , fi
après avoir expofé une partie des maux qui
les affligent, ils ne recevoient pas la confolation
qu'ils efperent trouver dans des reffources
auffi preflantes que celles de la Religion
& de l'humanité ! mais à la vûë de moyens
auffi puiffans , ils fentent renaître leur efperance
, & femblent goûter par avance les
avantages & les bienfaits que vont répandre
fur eux ceux qui compofent une Societé
animée des devoirs , & du refpect pour les
malheureux
NOVEMBRE: 1741. 238 #
malheureux,tels que la Religion commande
& que l'humanité inſpire ,
Revenons à nous -mêmes & à notre propre
coeur ; ne privons point les malheureux
des fecours qu'ils attendent , & qu'ils ont
droit d'éxiger. Faifons taire nos paffions , affiftons
les infortunés , fecourons les miferables
, protégeons les oprimés enfin refpec
tons tous les malheureux ; la Religion nous
l'ordonne ; fecourons- les , l'humanité l'éxi
ge, & foyons tout à la fois fideles obferva
teurs de la Loi , & Membres dignes de la
Societé.
Priere à Jefus - Chriſt.
Source de toute Juftice qui êtes la récom
penfe de ceux qui font miféricordieux , les
préceptes que vous nous donnez dans la Re
ligion en faveur des infortunés , ne font - ils
pas fuffifans ? La Nature ne nous dicte - t'elle
pas nos devoirs, & ne reclâme - t'elle pas notre
compaffion pour eux ? cependant , Dieu de
toute confolation , les malheureux & les
affligés gémiffent de notre dureté ; notre infenfibilité
les décourage , & notre cruauté les
laiffe périr à nos yeux.Seigneur, changez nos
coeurs , & faites- nous réellement fentir nos
propres interêts , en nous occupant des befoins
des indigens. Vous ne ferez miféricor
de qu'à ceux qui l'auront exercée , & commc
382 MERCURE DE FRANCE
me vous vous fervirez envers nous de la mê
me meſure , faites-nous refpecter les malheureux
, puifque vous nous enfeignez que
leur état et heureux , & qu'ils feront confolés.
Rectifiez nos intentions dans nos bonnes
oeuvres,banniffez-en l'orgueil & l'amour
propre ; ranimez nos coeurs fur les mifères
de l'homme oprimé & fouffrant , & faites
que n'ayant tous qu'un coeur & qu'une ame
nous operions le bien par des motifs dont la
foi & la charité foient le principe & la fin.
Quo ufque cibabis nos pane lachrymarum ,
& potum dabis nobis in lachrymis in menfura ?
Pfal. LXXIX V. VI.
Par M. Etienne Carré , de Paris.
LE DEGOUT DE LA CHASSSE ,
A M. le Comte de Montmorency , Maréchal
de Camp , qui avoit voulu perfuader à
l'Auteur qu'il aimoit beaucoup cet Exercice.
ENvain méchant tireur fe tue & fe travaille ;
Il court & fe demene , & ne fait rien qui vaille .
Après avoir tiré quinze ou vingt coups au moins ,
Je m'en revins hier pour prix de tous mes foins
Chargé, comme Dieu fçait , d'une méchante Caille ..
Encor fi , bien laffé , fuant & morfondu ,
Avec
NOVEMBRE. 1741 2383
Avec tout mon pourpoint je me fuffe rendu ;
Mais quand bien déchiré, mes chauffes en(bredelles,)
Je les vois s'échaper de mes pauvres bretelles ,
Hélas ! je dis hélas ! à ce maudit métier
On achette bien cher un morceau de Gibier ;
Si l'on marche cent pas , un foffé vous arrête ,
Vous croyez d'un plein faut en occuper la crête ;
Point du tout. Et la Haye ? il vous la faut franchir
Ou bien demeurez-là. Voulez- vous en fortir ?
Or regardez un peu comme ici je m'efcrime ;
Je porte avec mes mains ma jambe fur la cime ,
Et d'épine en épine , allant tout en tremblant ,
De mon long je culbute & tombe en l'autre champ.
Pour comble d'agrément , d'honneur & de délices
Cent maudits piquerons dans la chair enfoncés ,
Sont des préfervatifs & des hôtes propices ,
Qui contre tout venant dans leurs poftes placés ,
D'un corps hétérogene , * & d'une tête utile ,
Empêchent les nouveaux d'y prendre domicile ,
Et font pour l'avenir autant de trous bouchés ;
Voilà comme on infulte aux pauvres trébuchés.
Mais , pour moi qui commence & he ſuis pas habile,
Quoi qu'on dife , ma foi , d'un plaiſir ſi Alateur ,
Pour le goûter en plein , faut être né Chaffeur.
Vous voudriez , Seigneur , avec telle marotte®,
Que ma peau devint crible , & mes feffes pelote ,
Corps de differente nature & qualité.
Ou
2384 MERCURE DE FRANCE
Où mille camions étroitement logés .
Fuffent titres d'honneur par Diane érigés ;
Et moi , je vous foûtiens dès la premiere épreuve,
( A moins que quelque diable ou le porte ou le
meuve , )
Qu'il n'eft qu'un chien de garde , ou maudit ais
grefin ,
Qui puifle en ce Pays rafler Lievre ou Lapin.
Par M. de la Soriniere , en Anjou.
EXTRAIT dune Lettre de M. Maillart 1
ancien Katonier de l'Odre des Avocats
M. l'Abbé Lebeuf , de l'Académie des Inf
criptions , & belles- Lettres , an fujet d'Ã◄
thies-fur- Orge.
V
Oici , mon très - cher Abbé , une dif
cuffion que vous aurez à faire dans vo
tre Notice du Diocèfe de Paris.
Notre Hiftoire , & celle des Pays -bas font
remplies des differends qui ont été entre nos
Rois, les Comtes de Flandres, & les Flamans.
Le 18. Août 13.04 . fe donna la Bataille de
Mons en Puele , où le Roy Philipe IV. dit
Bel, courut un grand rifque. De là, ce Prin
ce alla affiéger la Ville de Lille en Flandres
qui fut défendue par Philipe de Thiette , &
par Jean, Comte de Namur, deux fils puînés
de
NOVEMBRE. 1741 2385
de Guy, Comte de Flandres , qui étoit en pri
fon à Compiegne , où il déceda le
Mars 1304. vieux ftyle ; & fon fils aîné Robert
fut d'abord prifonnier à Bourge , puis à
Mont le Hery, puis au , Louvre à Paris.
Cette guerre fut arrêtée par l'entremise de
Jean , Duc de Brabant , dont les propofitions
furent rédigées en un Traité , daté du Camp
devant Lille , le jour de l'Exaltation de la Ste
Croix , 14. Septembre 1304.
Un des Articles portoit que les Flamans
payeroient au Roy une amande : pour l'exé
cution de ce Traité furent nommés 4. Arbitres
par le Roy , & 4. par les Flamans.
Ces Arbitres s'aflemblerent à Athies -fur-
Oringe , en Juin 1305. où ils conclurent un
Traité qui eft au Tréfor des Chartes du Roy,
au - deffus de la Ste Chapelle à Paris , au fecond
Coffre de Flandres , fecond Sac , No.8 .
Ce Traité fut ratifié à Paris , au mois de
Juillet 1305. par les trois Enfans du même
Guy , només Robert , Jean , & Philipe , auffię
bien que par les Flamans.
C'étoit aparamment pour tenir la main à la ·
confommation de cet ouvrage que le Roy
Philipe le Bel féjourna alors à Athies , où il
étoit le 17. Juin 1305 .
C'eft ce que m'aprend un Acte imprimé au
prémier Volume des Ordonnances Royaux ,
Edition de 1723. page 432. Mandement au
Prévô
2386 MERCURE DE FRANCE
Prévôt de Paris , touchant les Monnoyes ....
donné à Athies , le Jeudy après la Trinité notre
Seigneur , an de grace 1305 .
J'augure , que le mot Athies fignifioit ,
dans le Celtique, quelque habitation faite fur
le bord d'une Riviere .
Screkius. Indice 1. Atefis, pofterior fluvius;
la rive poſtérieure.
Je trouve cinq Athies en France , tous fitués
le long de quelques Rivieres , ou Ruiffeaux
.
Athies fur la Scarpe , à l'Orient d'Arras qui
eft dans le carré 1. 7. de ma Carte d'Artois ,
de 1741.
Athies , fur l'Amignon , au Midi de Peronne
, en Vermandois.
Athies , fur Marne , entre Châlons , &
Epernay , en Champagne.
Athies , fur Seine , près Bray , en Brie.
Athies , fur Orge , au Confluent de cette
petite Riviere dans la Seine , au Midi de
Paris .
C'eft cet Athies, que j'adopte pour le Lieu .
où s'eft fait le Traité du mois de Juin 1305 .
& qui trouvera fa place dans votre Notice ,
qui doit être fi utile au Diocèfe de Paris , &
qui fervira de modéle à tous les autres Diocefes.
. Enfin cette découverte éclaircit & cor
rige les Auteurs ſuivans,
Oudegherft ;
NOVEMBRE. 1741. 2387
Oudegherst , Chronique de Flandres, Chapitre
141. fol. 235. Edition de 1571.Ce futfait,
& conclu par lefd. 8. Arbitres à Achies -fur-
Orange , au mois de Juin 1305.
Buzelin , Annales Flandria feconde partie ,
Edition de 1624. page 3 24. Ac ne Flandri ,
has , aliafque confcripta Achiaci juxta Fluvium
Oringiam pacis leges fubire detractarent.
Galand , des Droits de la Couronne , fur la
Flandres , Lille, Douay , & Orchies , Edition.
de 1648. page 219. au fujet des 8. Arbitres.
Lefquels furent enfin ceux là mêmes , qui
avoient été nommés devant Lille , lefquels
s'affemblerent à Achies fur laRiviere d'Orange
, au mois de Juin 1305 .
Cette difcuffion , vous rapellera , que fans
Géographie, fans Chronologie , & fans Hiftoire
, on peut difficilement avoir la notion vé
ritable des anciens Titres. Ainfi M. je continue
à vous exhorter à fuivre votre maniere
de travailler fi inftructive , & fi utile pour le
Public,
C IMI
2388 MERCURE DE FRANCE
Feststeststtest :Stetstotetet
IMITATION de la XI. Ode du I
Livre d'Horace : Tu ne quafieris , &c.
Non, ne prétendez pas par des voeux repetés
Fléchir l'inexorable Parque ;
Ani , nos momens ſont comptés ,
Et le fatal Nocher de l'Infernale Barque ,
Miniftre d'un Deftin cruel ,
Sourd à notre frayeur plaintive ;
A marqué l'inftant éternel
Qui nous fera changer de Rive .
*
Pour fonder ce myſtere , en vain a- t'on recours
A la frivole Aftrologie ,
•Elle n'offre qu'un vain fecours ;
Mais , heureux d'ignorer le terme de la vie ,
Le Sage y trouve , pour ſouffrir ,
Une tranquille patience ,
Et lit ainfi dans l'avenir
Des yeux d'une douce efperance.
1
Soit donc que , favorable , à vos voeux Jupiter ,
Réſerve un long cercle d'années ,
Ou qu'aux bornes de cet Hyver
NOVEMBRE. 1741. 2389
1 ait fixé le cours de vos jeunes journées ,
Sçachez moderer vos défirs ;
Bûvez , ami , mais fans yvreſſe ;
Le tems fuit , goûtez les Plaifirs ,
Mais ceux que permet la fageffe.
Par M. A. Perrin, Ecolier de Rhéthorique;
Penfionnaire au College de Villefranche , en
Beaujolais.
SEANCE PUPLIQUE de l'Académie
Royale de Chirurgie , établiefous la protection
du Roy,tenuë le 30 Mai 1741. à laquelle a
préfidé M.de la Peyronie premier Chirurgien
de S. M.
R Quefnay Secretaire , déclara que
le M Prix propofe pour la préfente année
741. fur la Matiere des Réfolutifs n'avoit
Dint été adjugé : l'Académie , auffi attentive
contribuer à l'avancement de la Chirurgie
ans l'adminiſtration des Médicamens , qu'à
erfectionner cet Art dans fes Opérations
depuis quelques années , tiré de la Matie-
Médicale , les Sujets qu'elle a propofés
ur le Prix. Elle ne peut diffimuler que,fans
e profonde connoiffance des Médicamens,
des indications qui doivent en régler
Cij l'ufage
1
2390 MERCURE DE FRANCE
l'ufage , le Chirurgien le plus habile dans l'o
pération de la main ne pourroit traiter rég
lierement aucune Maladie , ni conduire fure
ment la Cure d'aucune Opération , fur tout
de ces Opérations , dont le fuccès dépend de
l'aplication de divers Remedes , qui doivent
être employés avec beaucoup de difcerne
ment.
Mais cette Science fi effentielle à la Ch
rurgie , & à laquelle fe borne la Cure de pr
que toutes les Maladies du reffort de la Me
decine , eft encore aujourd'hui fort imparfai
te quoique cultivée , & par les Méde
cins , & par les Chirurgiens , il faut avoüer
que cette partie de l'art de guerir , enviſagée
du côté de la pratique , n'a pas fait depuis
long- tems un progrès fort confidérable ; le
lumieres que la Phyfique desMixtes a pû nou
procurer jufqu'à préfent , n'ont pas répandu
un grand jour fur la Matiere Médicale , & cel
les qu'on a acquifes par la pratique , n'ont p
y fupléer ; l'expérience prefque toûjours équi
voque , nous inftruit rarement avec certitud
& avec précision de l'effet des remedes ;
faut que beaucoup de connoiffances de gen
res differens fe réuniffent à l'obfervation, po
que l'on puiffe démêler, dans les faits de
tique , la vérité, d'avec les aparences qui tre
pent tous les jours les Praticiens , ( je ne
pas fimplement les Praticiens les plus a
fon
Pr
ire
incde
en
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vie
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effets ,
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L'AC
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NOVEMBRE .
1741
2391
fommés , mais les
Praticiens
même le plus
nftruits )
lorfqu'ils ne
portent pas affés d'actention
à
éxaminer ces faits.
Il ne fuffit donc pas de
pratiquer la Médecine
, ou la
Chirurgie , pour
pouvoir déterminer
avec fûreté
l'efficacité des
Remedes ;
il faut pour
découvrir au jufte leurs
véritables
effets , avoir acquis bien des
connoiffances
, que le feul exercice de l'art de guerir
joint au génie , même le plus
pénétrant , ne
peut jamais nous donner."
,
L'Académie , attachée à cette vérité , a fenti
le befoin d'engager les
Chirurgiens à redoubler
leurs efforts , pour
perfectionner
leur Art dans une partie fi étenduë & fi importantes
le Prix qu'elle propofe tous les ans
lui a parû un des moyens les plus naturels
pour les exciter à y travailler avec plus d'émulation
; &
l'Académie qui ne perd point
de vûë un objet fi
intereffant , ne s'aplique
elle - même , avec moins d'ardeur à concourir
par fes propres travaux à la même fin.
Le Sujet que
l'Académie avoit propofé
pour le Prix de cette année , eft de détermi
ner les differentes efpeces de Remedes réfolutifs
leur maniere d'agir , & l'usage qu'on en doit
faire dans les Maladies
Chirurgicales.
pas
L'Académie ne s'eft pas flatée que les premieres
tentatives que l'on feroit fur un Sujet
auffi difficile ,
parvinffent au degré de per-
C iij fection
>
2392 MERCURE DE FRANCE
fection qu'elle défire ; cette matiere n'a été
traitée que fort obfcurément par les Anciens;,
la plupart des Modernes, qui ont entrepris de
Paprofondir & de l'expliquer , fe font contentés
de deviner , ils ne nous ont donné que
des opinions , ou des conjectures au lieu de
connoiffances , & on ne doit les confulter
qu'avec beaucoup de circonfpection ; tout
ce qu'il y a de connu fur ce Sujet , ſe réduit
prefque aux Remedes , tels qu'on a pû les découvrir
par l'expérience.
1
› Pour établir une Doctrine fûre & utile , il
faut faire des recherches , raffembler les connoiffances
de differens genres , qui doivent
concourir à la former ; ce travail eft très étendu
, il éxige beaucoup de fagacité , & de lumieres
pour réüffir , ainfi l'Académie n'a
point été furpriſe de ne point trouver affés de
folidité , de clarté & d'ordre dans les Mémoires
qu'elle a reçûs fur la matiere des Réfolutifs
, pour pouvoir adjuger le Prix : elle efpere
que ceux qui ont travaillé , connoîtront
mieux dans la fuite la difficulté du Sujet , &
qu'ils s'apliqueront davantage à acquerir les
connoiffances néceffaires pour fonder une
théorie, qui puiffe conduire fidelement dans
la pratique.
Depuis la derniere Affemblée publique ;
l'Académie a choifi pour Affociés & Corref
pondants ;
Régnicoles

S;
de
1-
e
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J
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Royau
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Chiru
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M.
deci
gie
Méd
NOVEMBRE. 1741
2393
Régnicoles .
M. Desbarbalieres , Docteur en Médecine
de la Faculté de Montpellier , Médecin des
Hopitaux Royaux , & Préfident des Tréforiers
de France , à la Rochelle.
M.Noël,Chirurgien Major de l'Hôtel- Dieu
d'Orleans
M. Jacquet , Docteur en Médecine , & Médecin
de l'Hôpital de Briançon.
M. Foucher , Docteur en Médecine , &
feffeur d'Anatomie à Lille , en Flandres.
M Charrault, Chirurgien Major des Hôpi
taux Royaux , à la Rochelle.

M.Goullard, Membre de la Societé Roya
e des Sciences de Montpellier, & Chirur
gien Juré de la même Ville .
M. Vacher , Correſpondant de l'Académie
Royale des Sciences , Démonftrateur en Ana-
Tomie , Chirurgien Major des Hôpitaux
Royaux de Bezançon , & Chirurgien Con
fultant des Armées du Roy.
Etrangers.
M. Beaumont , Chirurgien de la Perfonne
du Roy d'Efpagne , Démonftrateur Royal en
Chirurgie , & Membre de l'Académie Roya
le de Séville .
M.Molinelli, Docteur en Philofophie & Médecine
, Profeffeur en Médecine & Chirur
gie dans l'Univerfité de Boulogne , Premier
Médecin-Chirurgien en furvivance du grand
Cij
Hôpital
2394 MERCURE DE FRANCE
Hôpital de la Vie , & Affocié de l'Académic
de l'Inftitut des Sciences.
Après cette lecture , M. Morand prononça
P'Eloge de M. Amyand , Chirurgien du Roy
d'Angleterre , Membre de la Societé Royale
de Londres , & Affocié Etranger de l'Académie
Royale de Chirurgie , mort depuis la
Séance publique de l'année derniere . M. Morand
lût auffi des recherches Hiſtoriques fort
curieufes & très- intereffantes qu'il a fite
fur la Vie & fur les Ouvrages d'Habicot ,
lebre Chirurgien de Paris .
M. Hevin lût enfuite pour M. Petit la Def
cription d'un nouvel Elévatoire avec des réfléxions
fur ceux qui ont été mis en uſage,
jufqu'ici.
M. Petit , après avoir expofe plufieurs défauts
, que l'ufage lui a fait découvrir non
feulement dans l'Elévatoire. ordinaire , mais
encore dans la Griffe , ou pied de Griffon
dans le triploïde , avec , ou fans tire -fond, &
dans le tire - fond feul , explique la conftruction
du nouvel Elévatoire , par lequel il remédie
aux imperfections des differens inftrumens
dont nous venons de parler.
Cet Elévatoire eft compofe de deux parties
principales , fçavoir d'un Levier , & d'un
chevalet, qui lui fert d'apui; le Levier a environ
huit pouces de longueur fur quatre à cinq
lignes de largeur , & deux lignes dépaiffeur
ANCE
Académic
prononça
du Roy
é Royale
l'Acadéepuis
la
M. Moques
fort
a fite
Ecot,
la Def
des
réufage
ars dér
non
mais
iffon
,
d, &
trucil
reaftrupard'un
nvicing
eur

NOVEMBRE. 1741. 2395
il est tout droit , excepté vers l'extrémité ,
deftinée à faire la courte branche du Levier ,
où il y a une courbure , & où il eſt un peu
plus étroit , plus mince & plus aplati , pour
qu'il puiffe être plus facilement fous l'os
qu'on veut relever ; de plus ce bout eſt taillé
de plufieurs petites rainures tranfverſales ,
pour l'empêcher de gliffer & de s'échaper de
deffous l'os, auquel on l'aplique ; au contraire
le deffous de ce bout , & les bords qui le
terminent font arrondis & très - polis , afin
qu'ils ne puiffent bleffer la dure - mere.
L'autre bout de ce Levier , où la longue
branche eft emmanchée dans du bois exactement
poli, pour que la main qui le gouverne
n'en foit point incommodée . La furface de
deffous ce Levier eft percée de plufieurs trous,
dans le milieu de fa largeur , & fuivant fa
longueur , les trous qui font tarraudés , font
éloignés les uns des autres , de deux ou trois
lignes ; ils fervent à recevoir une vis qui borne
& fixe le point d'apui du Levier , & cette
vis peut également fe loger dans tous ces
differens trous ; ce qui procure la facilité
d'aprocher, ou d'éloigner l'apui de l'os qu'on
yeut relever.
La feconde partie & la plus effentielle de
cet Elévatoire , eſt un chevalet fur lequel le
Levier doit s'apuyer ; la partie de ce chevalet
qui s'aplique fur le crâne eft arcquée , afin
qu'il C v
2396 MERCURE DE FRANCE
S
qu'il n'apuye que par fes deux jambes, qui ont
beaucoup de furface , & que l'on garnit de
chamois , tant pour rendre l'apui du Levier
plus ftable , que pour empêcher qu'elles ne
faffent d'impreffion fur l'os qui les foûtient ;
enfin à la fommité du chevaler fe trouve la
vis dont on a parlé plus haut , elle s'engrene
dans un des trous qui font tarraudés fous le
Levier , & fert à l'aſſujettir au chevalet , de
maniere que le point d'apui ne puiffe varier ;
mais cet affujettiffement du Levier au cheva
let eft tel , que par le moyen d'une charniere
par laquelle la vis tient à la fommité du chevalet,
ce Levier peut fe mouvoir , & faire la
bafcule fur le chevalet , fans que celui-ci fuive
fes mouvemens.
On tire encore un avantage de la vis , c'eft
qu'en obfervant de ne la point faire entrer
jufqu'au fond du trou tarraudé , les pas qui
reftent donnent du jeu au Levier , & permettent
de le tourner à droit ou à gauche fur
fon apui comme fur un pivot , au moyen
de
quoi on peut placer ce Levier fous tous les
differens endroits de l'os qui ont befoin d'être
relevés , fans qu'on foit obligé pour cela
de changer fon apui de place.
Comme il y a des cas où il n'eft pas poffi
ble de placer le point d'apui fur les os découverts
, foit à raifon du grand fracas , ou
peu d'étendue de la playe , M. Petit a fair
du
conftruire
NOVEMBRE. 1741. 2397
conftruire un ſecond chevalet plus long &
plus élevé , afin que fes deux branches.
apuyent au de là des bords de la playe & des
chairs gonflées , de façon que l'on puiffe éxecuter
fans inconvenient tous les mouvemens
néceffaires pour relever les pieces d'os enfoncées..
Le fecond Mémoire qui fut lû , contenoit
l'obfervation d'une carnification de l'Os maxillaire
fuperieur gauche. Une jeune Dame
continuellement expofée par fon état aux injures
du temps , fentit tout- à - coup au côté
gauche du vifage une fraîcheur glaciale qui
fut fuivie d'un gonflement de la jouë , cette
maladie fit beaucoup de progrès dans l'efpace
de trois ans , les dents molaires fupérieures
du même côté devinrent douloureuſes &
branlantes , il en tomba trois en differens.
temps ; la joue devint monstrueuſe , il furvint
des douleurs vives & lancinantes , la
fraîcheur occupa tout le côté gauche de la
tête , enfin le vifage devint fort contrefait
la jouë , le côté du nés , & la levre fupérieure
étoient extrêmement tuméfiés , la bou
che étoit tournée du côté droit , une efpece:
de champignon d'une chair bluârre qui fortoit
de la bouche , débordoit de la groffeur
d'une olive ; M. de Garengeot fut confulté
il remarqua que ce champignon avoit for
principe dans les alveoles, des Dents, qui
étoient tombées , le côté gauche de la voure
C vj du
2398 MERCURE DE FRANCE
du palais étoit fort tuméfié , la partie infé
rieure & antérieure de l'Os maxillaire fupérieur
, carnifiée , toute la cavité de fon Sinus
étoit remplie de chairs carcinomatcuſes , l'Os
du nés du même côté commençoit auffi à fe
gonfler à & fe carnifier : la Cure de cette
maladie confiftoit dans l'extirpation de ces
chairs carcinomateuſes , M. de Garengeot en
emporta autant qu'il pût , avec le Biftouri ;
cette Opération fur fuivie d'une hémorragie
confidérable , qui cependant s'arrêta d'ellemême
. M. de Garengeot voulut détruire le
refte de ces chairs par le moyen du Cautere
actuel , la Malade ne put s'y réfoudre , il
eut recours aux Corrofifs , mais inutilement :
la longueur de la maladie détermina enfin la
Malade à fouffrir l'aplication du Cautere actuel,
toutes les chairs carcinomateufes furent
confommées par ce Remede que l'on apliqua
à differentes reprifes pendant l'efpace d'un
mois , on fe fervit enfuite de gargarifmes déterfifs
; le gonflement de la joue fe diffipa ,
la voute du palais fe rétablit prefque entièrement
dans fa formę naturelle , & la Malade
fut parfaitement guérie.
M. Soumain lût enfuite l'Hiftoire d'une
Opération Céfarienne qu'il fit à Paris le 11 .
Juin 1740.Ce Chirurgien fut apellé pour accoucher
une femme dans la rue Guene
gaud : il reconnut un vice de conformation
dans
239
LYON
DE
LA
VILLE
NOVEMBRE. 1741
dans les os du baffin , qui lui parut devr
rendre l'accouchement impoffible par 3
voyes naturelles ; cette mauvaiſe difpofition ,
& le fuccès qu'avoit eû l'Opération Céfarienne
dans quelques occafions où elle avoit
été pratiquée , déterminerent M. Soumain
pour cette opération , tout autre moyen paroiffant
infuffifant & même impraticable ;
cependant ne voulant point s'en tenir à fes
propres lumieres , il fit apeller en confultation
plufieurs de fes Confreres, qui furent du
même avis; enfin le Samedi 11. Juin , M. Soumain
fit l'Opération en préfence de Meffieurs
Bourgeois , Puzôs , Souchay , Verdier ,
Gervais , Jard , Grégoire , Chauvin , & Lafitte
; l'Enfant fut tiré vivant , il furvint une
hémorragie qui ne fut pas fort confidérable ,
& qui s'arrêta auffi- tôt que la Femme fut
délivréc , on fit à la playe du ventre trois
points de future entre coupée : il n'eſt
furvenu à la Malade aucun accident , tout
s'eft paffé comme dans les couches ordinaires,
elle a été parfaitement guérie le quarantiéme
jour de l'Operation , & elle jouit encore
aujourd'hui d'une fanté très parfaite .
Après ce récit , M. Foubert fit la lecture
d'une obfervation fur un Embryon, forti par
une crevaffe de la trompe , & tombé dans le
ventre: une jeune Dame fut faifie d'une violente
colique que l'on crût caufée par une
indi2400
MERCURE DE FRANCE
>
indigeftion , parce qu'elle lui étoit furvenuë
après avoir mangé des Huîtres , quoique fans.
excès ; cette Dame mariée depuis trois mois
fe croyoit groffe d'environ cinq femaines
elle avoit depuis ce tems de fréquens maux
de coeur & vomiffemens. Ce même jour elle
vomit à l'ordinaire , mais cet accident fut accompagné
& fuivi d'une grande foibleffe , &
d'un froid de glace univerfel ; M. Foubert
fut apellé , la Malade fe plaignoit d'une douleur
extrêmement vive au deffous de l'ombilic
, elle étoit fans poulx , d'une foibleffe
extrême , & elle mourut quelques momens.
après. M. Foubert curieux de découvrir la
caufe d'une mort fi prompte , fit l'ouverture,
du cadavre en préfence de trois Médecins ,
& de Monfieur Arrachart , Chirurgien Juré ;
on trouva environ trois pintes de fang coagulé
, épanché dans la capacité du ventre ; on
chercha la fource de cette hémorragie , on
aperçut la trompe gauche de la matrice tumefiée
confidérablement, ayant une crevaffe ,
en partie bouchée par un caillot de fang ,
d'où pendoit un pédicule à l'extrêmité duquel
étoit attachée une efpece de velfie , groffe
comme une noix mufcade , qui contenoit un
embryon bien forme, gros comme une mouche
à miel ; on ne trouva rien dans la matrice
, il y a lieu de préfumer , conclud Monfeur
Foubert , que l'embryon. s'étant engagé
NOVEMBRE. 1741. 2401
gongé
dans la trompe , avoit occafionné le
fement & la crevafle de cette partie ,
s'en étoit fuivi l'hémorragie & la mort.
d'ou
M. Simon termina la Seance par un Mé
moire Hiſtorique fur l'amputation , il rapporte
dans ce Mémoire les differens moyens.
dont on s'eft fervi pour faire cette Opération
depuis Celfe jufqu'a préfent, & il préfente les
Methodes des Anciens , & les changemens.
que les Modernes y ont faits..
Ce Mémoire eft divifé en deux parties ,
dans la premiére il examine les differentes
Méthodes de faire cette Opération , qui ont été
inventées , & pratiquées en differens tems ,
& les perfections que l'on y a ajoutées fucceffivement.
Dans la feconde il fait la defcription des
differens moyens qui ont été mis en ufagepour
arrêter l'hémorragie , qui eft une fuite
de l'amputation : il compare enfuite la Méthode
des Anciens avec celle des Modernes .
& il fait voir qu'en fuivant l'hiſtoire de cette
importante Opération , on doit convenir que
ee font les Chirurgiens , & principalement
les Chirurgiens de Paris qui l'ont fimplifiée ,
& rendue moins dangereufe ..
LA
2402 MERCURE DE FRANCE
LA ROSE ET L'EPINE ,
L
FABL E.
A Rofe un jour dit à l'Epine ,
D'un ton fier , d'une voix chagrine ,
Pourquoi de traits fi durs & fi piquans
Hériez- vous mes agrémens ?
Pourquoi me rendez - vous auftére & rebutante
Pourquoi par de vives douleurs ,
De ceux qui me trouvent charmante
Payer les flateuſes douceurs ?
Sans vous , j'aurois la Cour la plus brillante ;
Le Lys , le Jaſmin & l'OEillet ,
La Tubereufe & l'Amarante ,
Me céderoient tout l'honneur d'un Bouquet.
Lorfque je défens votre aproche ,
Reprit l'Epine , eh quoi ! ne préſervai je pas
Votre éclat , vos tendres apas ?
Méritai-je quelque reproche ,
En vous garantiffant bien fouvent du trépas ?
Si l'on vous touche moins , vous touchez d'avantage ;
L'Epine fait qu'on vous ménage ;
Je prolonge votre deſtin ,
J'écarte au plus quelque Amnant libertin ,
Quelqu'autre trop volage , ou peut-être de glace .
Celui
NOVEMBRE. 1741 2409
Je veux fixer chés elle votre Empire ;
Son air charmant , les yeux pleins de douceur
Scauront bien- tôt captiver votre coeur :
Mais croyez moi , c'eſt ſon moindre avantage
D'avoir reçû les graces en partage ;
Rien n'eft du prix de fon coeur généreux ,
De fa douceur , de fon efprit heureux .
Partez ; courez , l'honneur vous y convie
Entretenez les douceurs de fa vie.
Amour Hymen , trop contens à ce prix
Incontinent s'envolent vers Paris ,
Bien affûrés qu'en ce charmant azilę
Dans ce féjour en beautés fi fertile
Ils trouveroient ce fujet à remplir ,
L'immenfité de leur vafte défir .
Pas ne faillit , fur de fa réuffite
Le tendre Couple a trouvé fon vrai gîte ,
Et va bien-tôt par gentille union
Lier de coeur Thémire avec Damon.
Or jouiffez d'un fort fr plein de charmes ,
Tendres Amans ; l'Amour vous rend les armes ,
L'Amour badin , pour vous plein de douceurs ,
S'eft enchaîné lui -même avec vos coeurs.
F. F.
SUPLE
410 MERCURE DE FRANCE
St.stat- statistist st:stutis
SUPLEMENT à ce qui a été dis
dans le Mercure du mois de Juillet dernier.
au fujet de l'Etendart Turc , pris à la Levés
du Siege de Vienne &c.
V
Ous avez raifon , Monfieur , de croire
qu'il manque encore quelque chofe à
ce qui a été dit dans le Mercure de Juillet
dernier p . 1625 , au fujet du magnifique
Etendart Mahometan , que le Grand - Vizir
laiffa au pouvoir du Roy de Pologne , lorfqu'il
fût battu devant Vienne , & obligé de
lever le Siege de cette Ville. Votre curiofité
a excité la mienne , & a donné lieu à quelques
Recherches , qui m'ont apris ce que vous
allez lire.
Cet Etendart fût auffi tôt envoyé au Pape
Innocent XI . par le Roy de Pologne , qui
choifit pour cela l'illuftre JEAN CASIMIR
BENHOST , Abbé de Clara -Tombe & c. auquel
il donna la qualité de fon Envoyé Extraor
dinaire. Ce Prélat fit beaucoup de diligence ;
car dès le 29. Septembre, il eut l'honneur de
s'acquitter d'une fi glorieufe Commiffion.
Il harangua le Pape en Langue Latine, Son
Difcours fût extrêmement aplaudi , & on en
fit dans le tems la Traduction Françoife qui
Luit ,
TRE'SNOVEMBRE.
1741. 2411
TRE'S- SAINT PERE ,
» La coûtume de porter au-devant des
» Conquerans les Drapeaux remportés fur les
» Ennemiş , eft établie dès le tems des pre-
» miers Heros, afin que les acclamations des
و د
Peuples , ajoûtant un nouvel éclat à leurs
» actions , les faffe vivre dans le Temple de
» la Gloire ; & Monſeigneur , le très Clé-
» ment Roy de Pologne Jean III. ayant par
» la grandeur de fon courage combattu &
» vaincu , non pour fes intérêts particuliers,
» mais pour ceux de la République Chré-
» tienne ; & fa pieté envers Dieu , & fon
» zéle particulier envers Votre Sainteté , &
» envers votre S. Siege Apoftolique , ayant
» été de pair avec fa vartu guerriere , je mets
» avec un très-profond refpect , en qualité
» de fon Ambaffadeur aux pieds de Votre
» Sainteté ; le principal Etendart du formi-
» dable Empereur des Turcs , que la vertu
» de mon Maître leur a arraché au milieu
» de leur Armée , & dans le même tems le
plus grand Fafte de la Puiffance Ottomane .
" En effet , le Roy JEAN eft venu ,
» vû les Ennemis , il les a vaincus. Il eſt
» venu , dis - je , puifqu'il ett forri de fon
Royaume , où il a laiffé la Reine & fes
• Enfans. Il eft accouru tout à propos pour
» délivrer Vienne afliégée , & conferver
l'Empire. C'est à Votre Sainteté qu'on doit
03
"

il a
2412 MERCURE DE FRANCE
» le glorieux Voyage du Roy. Il a par- là
fignalé fon obéiffance au S. Siege , d'une
» maniere qui n'a point d'exemple dans tous
» les fiécles paffés .
ور
» Mon Roy vit d'un courage intrépide
» ces cruelles Armées du Turc , qui ménaçoient
tout le Monde Chrétien , à quoi
» Votre Sainteté avoit pourvû , ayant oposé
» à tant de cruels Ennemis ce feul Bouclier,
" après avoir reconnu par l'inſpiration du S.
Efprit , que Dieu avoit deſtiné ce Prince
» pour être le Défenfeur de la Religion
» Chrétienne .
ود
و و
39
par
» Enfin le Roy JE AN a vaincu , ayant
fon Bras foudroyé les Bataillons Otto-
» mans , & couvert le Champ de Bataille
» des Corps de ces Infideles .
و و
» Cette Victoire ternit les Lauriers de leurs
» Ancêtres , & ce grand Roy en rend Rome
triomphante. Il eft bien jufte qu'il en ufe
» ainfi , puifqu'il a gagné cette Bataille fous
» les aufpices de Votre Sainteté.
ود
» Vous avez vaincu tous deux , Votre
» Sainteté par fes Voeux & par les grandes
» fommes qu'Elle a données pour foûtenir
» cette Guerre fainte , & le Roy , par fon
Epée , & aux dépens de fon Sang.
"
" Que Votre Sainteté , Très-Saint Pere ;
» reçoive agréablement comme un ornement
» éternel de votre Pontificat , ce principal
» Etendart
NOVEMBRE. 1741. 2413
Etendart , remporté fur les Ennemis de la
» Foy , par votre vertu , & par celle de mon
Roy invincible , & faffe le Ciel que vous
en joüiffiez longues années.
"
39
****************
LES ADIEUX AUX MUSES,
ODE A. M. G.
Olympe Lympe , j'ai quitté cette Rive fleurie ,
Où ma raiſon badine aimoit à s'égarer ,
Et las de conſumer le plus beau de ma vie
Dans une folle rêverie ,
Dont je me laiffois enyvrer :
Aux doctes Nymphes d'Hypocrêne
Mon coeur trop prompt à fe livrer ,
Libre enfin des douceurs de fa premiere chaîne ,
Pour leurs frêles attraits ceffe de foûpirer.
*
Ah ! que j'ai payé trop cher la fource empoisonnée
Où j'apris à puifer d'infideles tréfors !
Et combien à regret ma raifon entraînée
A leur trifte joug condamnée ,
Fit-elle d'impuiffans efforts !
Cent fois d'une chaîne perfide
Je voulois rompre les accords ,
Dij Et
1414 MERCURE DE FRANCE
>
Et cent fois, malgré lui , mon coeurfoible & timide,
Formoit en foûpirant des noeuds encor plus forts.
*
'Ainfi , nâgeant toujours dans un doute ſtérile ,
De leurs Jeux criminels j'avalois le poiſon ,
Et quand je rapellois ma raifon trop facile ,
Dans l'inftant , à leur voix docile ,
Mon coeur démentoit ma raiſon ;
Ainfi je trouvois mille charmes
Dans un Art riche en trahison ;
Mais combien m'a couté de regrets & de larmes
L'avantage cruel d'un fi funeſte don !

C'est vous , Muſes , de qui la douce perfidie
Sur le vice à mes yeux tint le voile abattu ;
C'eft vous, enfin, c'est vous,par qui ma main hardie ,
A peine au printems de ma vie ,
Bleffa les yeux de la vertu ,
Contre vos coupables malices
C'est trop mollement combattu ;
Et c'eft trop fur l'Autel de vos lâches caprices
Brûler un fol encens qui ne leur eft
"
pas dû.
Olympe , c'en eft fait ; d'un aimable délire
Vous ne me verrez plus adorer les douceurs ,
Et je jette à vos pieds le Hautbois & la Lyre ,
Reftes
NOVEMBRE . 1741 241
Reftes du chimérique Empire
On m'enchaînerent les neuf Soeurs ;
Une nouvelle ardeur m'inſpire ;
J'abjure leurs vaines faveurs ,
Et je fens qu'en fecret déja mon coeur foupire
Pour un bien qui peut feul fuffire à tous les coeurs.
C'eft toi , vertu , c'eft toi , dont la douceur aimable
De mes foins déformais va faire le plus cher ;
C'est toi qui nous aprends le bonheur véritable ,
Dont la poffeffion durable
N'a rien de trompeur ni d'amer.
D'une obfcurité menfongere
Seule tu fçais nous allarmer ;
Peut- on te méconnoître à ces traits de lumiere
Et , lorsqu'on te connoît, peut - on ne pas t'aimer
*
Viens défiller mes yeux ; viens me rendre à moi
même ;
Je n'ai
que trop
ofé te braver hautement ;
Sans toi , fans le fecours de ta clarté fuprême .
Sur les douceurs de ce qu'on aime
Peut on s'apuyer fagement ?
Tel qu'une lueur paffagere ,
Qui s'évanouit en naiflant ,
Ou tel qu'au ſein des Eaux une vapeur légere
Loin de l'oeil qui la fuit, s'écoule en un moment.
Dij Ain
416 MERCURE DE FRANCE
Ainfi l'homme fuivant à travers le nuage
Une foible lueur qui trompe fa raiſon ,
Prend d'abord , fans vouloir confulter davantage
Contre ce qui lui fait ombrage ,
L'interêt de fa paſſion ;
Mais lorsqu'enfin elle eft paffée ,
Ceffe Aateufe illufion ,
Au mileu des débris de fa gloire éclipſée ;
Il meurt ; le charme ceffe ; on abhorre ſon nom.
*
Où font - ils , ces Romains , ces Héros qui parurent
Nés
pour charmer les coeurs & gagner des combats▸
Malgré tous les grands noms , tous les titres qu'il
eurent ,
Si nous admirons ce qu'ils furent ,
Nous plaignons ce qu'ils n'étoient pas ,
La fiére Maîtreffe du Monde ,
Rome , nourriffoit dans fes bras
Un Maître impérieux dont la douceur féconde
Enchaînoit ces vainqueurs par d'indignes apas .
*
Tout leur fembloit vertu , hormis la vertu même,
Et leurs propres défirs étant leurs Orateurs ,
L'un , dans la volupté mettoit le bien fuprême ;
L'autre , par un égal blafphême
L'établiffoit dans les honneurs ;
D'autres plus injuftes Arbitres,
>
Ofoieng
NOVEMBRE. 1741 2417
Ofoient , lâches ufurpateurs ,
Dépouiller la vertu de ſes plus nobles titres ,
Pour en parer le vice & fes noires horreurs .
*
Les voilà cependant ces Maîtres de la Terre ,
Qui croyoient avoir peu que d'avoir l'Univers ,
Ces Titans orgueilleux, qui bravoient le Tonnerre
Et de l'un à l'autre Hémiſphere
Enchaînoient la Terre & les Mers ;
Ainfi de ténebres durables
+
Leurs foibles yeux étoient couverts ,
Et toûjours indulgens , ces fortunés Coupables ,'
Du beau nom de vertu décoroient leurs travers.
*
Eh ! que nous refte - t'il de leur grandeur céleſte i
Une ombre vaine , un nom que l'âge a reſpecté ,
Le tems injurieux a détruit tout le refte
Et par une chute fuifefte ,
Le luxe a tout précipité ;
En vain leur orgueilleux délire
S'eft promis l'immortalité ;
L'écoulement fubit d'un fi fuperbe Empire
Frape encor les regards de la Pofterité.
*
Mais celui qui du vrai fait fa plus chere étude
Et cherche dans fon fein les folides plaifirs ,
Celui dont la vertu nourrit la folitude ,
D iiij
Heureus
418 MERCURE DE FRANCE

Heureux , fans autre inquiétude ,
Que de foûmettre les défirs ,
Il ne fe vit jamais , en proye
A de ftériles repentirs ,
Et fon coeur fans ennui , goûte une douce joye ,
Que n'alterent jamais la crainte & les foupirs.
*
C'eſt- là , c'eft - là le Phare & le flambeau viſible ,
Dont l'éclat immortel fixe nos yeux errans ,
C'eſt par- là , qu'aux plaifirs le coeur inacceſſible,
Dans un chemin rude & pénible
Sçait allurer nos pieds tremblans ;
Vous donc , qu'une vertu riante
Orne des traits les plus brillans ,
Olympe , ranimez mon ardeur languiffante ,
Et Loûtenez mes pas foibles & chancelans.
Ainfi, puiffe la main qui tient nos deſtinées ,
Prodiguant fes tréfors , pour vous toujours s'ouvrir,
Ainfi , puiffe un long cours de brillantes années
Combler ces Brebis fortunées ,
Qui font votre unique plaifir ,
Et qu'un jour on entende dire ,
Pour honorer mon fouvenir ,
Olympe aux foibles fons de fa naiffante Lyre
A daigné quelquefois amufer fon loifir .
Par M. G, F.
EXNOVEMBRE.
1741. 2419
EXTRAIT d'une Lettre de M. C.....
Avocat , écrite d'Aix en Provence le 3:
Octobre 1741. à M...... fur un Projet
d'Etabliffement d'une Académie des Belles-
Lettres Sciences & Arts dans cette Ville.
R le Blanc, Avocat Général, & le feul,
M comme vous fçavez , M. qui reinplie
aujourd'hui l'une des trois Charges du Parquet
, porta la parole le premier de ce mois,
à la rentrée du Parlement. C'eſt le premier
Difcours d'Apparat que ce jeune Magiftrat
ait prononcé. Le Public a toujours été prévenu
en fa faveur ; auffi a t'il rempli fon attente
avec beaucoup de fuccès. Il y traita
de l'attachement à fes Opinions dans les décifions.
Il dir que ce n'étoit là que la fuite
du Difcours fur l'usage de la raifon dans l'étude
du Droit , que le Grand Magiſtrac , à la
place duquel il fe trouve aujourd'hui , dont
la voix parloit au coeur , & qui excite encore
nos regrets , n'avoit pû finir l'année derniere.
Si M. le Blanc avoit à fon âge moins de capacité
, s'il avoit moins réülli , on auroit pû
le taxer de témerité , d'avoir entrepris de
finir ce que M. de Gaafridy avoit commen
cé : mais le fuccès a dû le juftifier pleine
D v ment ,
2420 MERCURE DE FRANCE
ment , & fon fujet a été rempli avec autant
d'éloquence , que de folidité .
M. le Premier Préſident harangua enſuite .
Son Difcours fur la Préfomption ne le cedoit
point à ceux du célebre M. du Vair , dont
il occupe fi dignement la place . On y reconnut
le Magiftrat , qui parle par fentimens,
& qui connoît l'homme , même dans les replis
les plus cachés de fon coeur. Il fit voir
en peu de mots , que la Préfomption qui
faifoit foûtenir une déciſion , n'étoit fouvent
qu'un effet de l'amour propre , qui ſeduit
& qui aveugle. Si je n'avois craint , M.
d'affoiblir par mes expreffions moins nobles,
la folidité de ces deux Difcours , je vous en
cûffe volontiers envoyé des Extraits , & je
ne doute point que la délicateffe de votre
goût n'en eût été fatisfaite.
C'est au fujet de ces mêmes Diſcours
que je prends la liberté , M. de vous faire
part d'une converfation qu'ils occafionnexent
, & que j'eus le même jour avec quelques
uns de mes amis. Il y fut queftion de
F'établiffement d'une Académie des Sciences
dans cette Ville , & nos regrets de ce que
nous n'en avons point de pareil dans cette
Capitale de la Province , furent unanimes.
On cita avec une jufte émulation tant de
moindres Villes qui s'en glorifient , & les
avantages qui leur en reviennent ; je crois
que
NOVEMBRE. 1741 . 2421
que vous ne ferez pas fâché que j'entre ici
un peu
dans le détail de notre entretien.
L'utilité & la neceffité d'un tel Etabliffe ,
ment furent d'abord les premiers motifs du
Projet on fixe par l'une les Sciences & les. :
Arts dans fa Patrie ; on lui procure par l'autre
des Sujets propres à les cultiver , & capables
par-là de la foûtenir & de la rendre
célebre. C'eſt par - là qu'après tant de fiécles
, l'ancienne Grece attire encore aujour¬
d'hui notre vénération .
Les Sciences & les Arts , une fois , pour
ainfi dire , naturalifés dans une Ville , auffi
confidérable que la nôtre , y feroient , fans
doute , cultivés avec la même ardeur dans.
tous les tems . Le profit y feroit für , & les
progrès certains . Sans parler du Parlement ,
de la Chambre des Comptes, de la Cour des
Aydes , & de la Sénéchauffée , l'Univerſité
& le Barreau fourniroient feuls des Sujets
pour les Sciences. Vous fçavez , au refte ,
que fi les Belles Lettres forment l'efprit ,
elles perfectionnent les moeurs ; le coeur gagne
toujours en les cultivant ; & quelle Societé
plus brillante & plus heureuſe en même
tems , que celle de divers hommes , qui
travaillent en commun à cultiver leurs talens ,
ou à en enrichir même ceux , auxquels la Nature
moins libérale , peut les avoir départis
avec moins de prodigalité !
D vj
Nous
2422 MERCURE DE FRANCE
Nous ne pûmes , M. entendre citer , fans
envie , tant de Villes qui fe glorifient d'avoir
des Etabliffemens Académiques.
Marſeille & Touloufe ne font , fans doute ,
pas plus fertiles que la nôtre en grands Génies:
leurs Académies fe foûtiennent avec
éclat pourroit- on craindre : que le fuccès fûtmoindre
à Aix , dont les habitans femblent
nés , fi j'ofe m'exprimer ainfi , pour les Scien
ces & pour les Arts ? Pourroit-on foupçonner
que l'Etabliſſement n'y
fût pasftable ?
L'utilité & la neceffité de l'Etabliffement:
d'une Académie femblent fe donner la main,
& l'une paroît inféparable de l'autre . L'accroiffement
des Sciences , la perfection des
Beaux Arts font les fruits qui en reviennent.
C'eft dans ces Ecoles , Temples vivans de
l'immortalité , que les hommes s'inftruifant
mutuellement par de falutaires leçons , & fe
communiquant entr'eux leurs lumieres particulieres
, les font réjaillir enfuite fur tous
ceux qui les environnent , ou qu'une heureufe
émulation peut attirer auprès d'eux ;
ceft - là que les Jeunes Gens trouvent des
Modéles à imiter , des Maîtres à fuivre ;
c'eft-là enfin que ceux qui travaillent font
couronnés , & reçoivent dans les tems la
jufte récompenfe , que leurs travaux ou leur
induſtrie ont méritée.
Qui mieux que vous peut le fçavoir , M
Combien
NOVEMBRE. 1741 2423
la
Combien de Sçavans , combien d'Artistes
ont été ravis à la ville d'Aix , fans que
memoire de leur fçavoir ou . de leur habileté
ait paffé à la pofterité ? Du moins , combien
y en a t'il eu , dont les grands talens
n'ont été & ne font aujourd'hui connus que
de peu de perfonnes Votre feule Famille
en fourniroit plus d'un exemple . Mes amis
citerent à ce fujet un bon nombre de Morts
illuftres ; plus grand encore eft celui des vivans
, dont les noms feuls rempliroient des
pages entieres , fi je ne craignois de bleffer
leur modeftie.
Ce n'est point une folle oftentation qui
nous engagea dans notre entretien à les parcourir.
S'il pût entrer parmi nous quelquevûë
particuliere , ce fut celle de l'amour de
la Patrie ; & nous nous glorifiâmes tous de
la voir réunir dans fon fein tant de Sujets excellens
dans tous les differens genres : Ora--
teurs , Hiſtoriens , Poëtes, Antiquaires , Philofophes
; Geometres , Médecins , Peintres ,
Sculpteurs ; tous les Arts & toutes les Sciences
en un mot , trouverent dans cette Ville-
& des hommes qui les poffedoient , & d'autres
qui étoient auffi propres à les acquérir
qu'a les perfectionner. C'eft en ce point , M.
qu'on fe plaignit plus anérement de votre
abfence. Il fut queftion de faire un Corps
de tous ces Membres. Mais quels moyens
pour
2424 MERCURE DE FRANCE
pour y parvenir ? Nous jettâmes unanime
ment les yeux fur vous , & nous vous en
regardâmes d'abord comme le Chef ; votre
amour pour les Sciences ne nous permit pas
de balancer notre détermination , & nous
crûmes que vous vous feriez gloire , nonfeulemenr
de réunir ces Membres , mais encore
de leur donner un azile.
Quel bonheur pour notre Ville,fi elle pouvoit
parvenir à raſſembler certains jours de
la femaine & dans un même Lieu , les Sçavans
qu'elle renferme ? Quelle gloire pourla
perfonne qui lui procureroit cet avantage ?
La Pofterité la plus reculée parlera de celle
des Richelieus, des Seguiers & c.L'Immortalité
eft le gage de la reconnoiffance , que les
Sciences doivent à leurs Protecteurs. Je ne
fçaurois douter , M. que vous ne vous prêtiez
à nos vuës , du moins que vous ne daigniez
y concourir. J'ofe même dire que
vous y êtes intéreffé par le rang que vous
tenez dans la République des Lettres , & que
vous ne pourriez voir fans envie , qu'un autre
que vous dans votre Patrie , pût fe glorifier
de l'exécution du Projet en queftion . On ſçait
que M. le Préfident du Vair l'avoit en en :
⚫ vûë au commencement du fiécle dernier ;
mais fa nomination à la Charge de Garde
des Sceaux l'ayant ravi à notre Ville , elle
eût encore le malheur de voir évanoüir ce
Projet. Si
NOVEMBRE. 1741 242
,
Si nos fçavans Compatriotes pouvoient
une fois trouver un Protecteur qui leur
donnât les moyens de fe réunir , il leur feroit
enfuite facile d'obtenir de la bonté du
Roy des Lettres , portant la permiffion de
faire des Statuts & de s'affembler & c. Je ne
doute pas même que
la Province en Corps
ne s'y intérellât , & qu'indépendamment des
Prix que le Corps de Ville , & beaucoup de
Particuliers dans la fuite , pourroient fonder,
elle ne fût la premiere , après avoir contribué
à fon érection , à fournir les moyens à
la Capitale , de récompenfer ceux dont les
Ouvrages mériteroient d'être couronnés. Un
intérêt particulier pourroit encore engager
l'Univerfité à y concourir , & elle n'en deviendroit
que plus célébre , fi la nouvelle
Académie tenoit fes Affemblées chés elle.
Pardonnez , M. au zele que j'ai pour
l'honneur de ma Patrie , le détail dans lequel
je viens d'entrer. Les Talens de tant
de Sçavans & d'Artiftes , qui font demeurés
prefque inconnus dans cette Ville , excitent
mes regrets pour le paffé , & me font
défirer pour l'avenir un Etabliflement auffi
durable que leur Memoire étoit digne de
l'être.
2
L'ES. A
426 MERCURE DE FRANCE
L'ESPRIT
CONTENTIEUX ,
ODE.
Oui , la difpute que cultive
Le futile effain des Pédans ,
De la raison qu'elle captive
Etouffe les plus beaux préſens..
Par elle , l'erreur obſtinée
S'anime en fa courſe effrenée ,
Plaît fous des dehors impofteurs
A fes fubterfuges fans nombre
Le faux çavoir prête fon ombre ,
La mauvaife fai , fes couleurs.
*
Quels coups pourroient de fon Empire
Saper les apuis dangereux ?
De fon impétueux délire
Par tout elle fouffle les feux.
Mégere , à l'efprit formidable ,
Sa chute la rend redoutable ,
Vaincuë , elle veut l'emporter.
>
Que le vrai retire fes charmes ,
L'éclairer , c'eft montrer des armes
Qui ne fervent qu'à l'irriter..
Mais
NOVEMBRE 1741 242%
Mais Dieux quelles Scénes bruyantes
S'ouvrent à mes fens interdits !
Des voix confules & perçantes ,
L'irritant éclat du mépris.
Le feu dans les yeux étincelles
Qui croiroit qu'une bagatelle
Allumât ces tranfports fougueux ?
Efprits que l'amour propre enyvre ,
Leur haîne eft ardente à pourfu.vre
Quiconque penfe autrement qu'eux.
*
Puiffent- ils , par un heureux Schifme
Renoncer aux lâches détours !
Jamais du ténebreux Sophifme
N'emprunter d'indignes fecours !
Voeux fuperflus ; le faux les guide
Ils écoutent la voix perfide ,
A fes Loix veulent s'affervir.
Leurs jours font voués aux menfonges ;
La moitié pour créer des fonges ,
Et l'autre pour les foûtenir .
*
Envifageons ce qui réſulte
De ces débats faftidieux ;
On finit par où l'on débute ,
Souvent par des traits odieux .
A travers de fçavantes files ,
D'argument
2428 MERCURE DE FRANCE
D'argumens embroüillés , ftériles ,
Par la nuit l'esprit eft guidé ;
Cercle où la vanité préfide ,
Je vois que chacun y décide ,
Et n'y vois rien de décidé .
*
Ici , l'ignorance envieufe
S'épuife en faux raisonnemens ,
Sous l'équivoque captieufe
Se forme des retranchemens ;
Là , déployant fon artifice ,
L'orgueil s'élance dans la lice ;
Quel chemin il va fe tracer !
Ciel ! quel contrafte involontaire !
Un Rival aide Adverfaire ,
Qui tâche de le terraffer.
*
Vous , dont le fatal caractére ,
Refpirant les vaines clameurs ,
D'un entretien calme & fincere
Ne le prête point aux douceurs ,
Envain votre fçavoir bizarre
Reprend , décide , contrecarre ,
Se croit en droit de tout ofer i
Cette aveugle foif de l'eftime ,
Quand l'orgueil fa croit légitime ,
Donne droit de vous méprifer
Le
NOVEMBRE. 1741 2429
Le Sage eft la leçon vivante
Sur qui nous devons nous regler ;
Sur fa conduite prévenante
La nôtre doit fe modeler :
Des autres balançant la Sphere ;
Il fçait ménager la lumiere ,
Aux leurs plier fes fentimens.
S'éleve-t'il quelque nuage
Habile , il diffipe l'orage ,
Et rapelle les agrémens.
*
Ennemi de la docte enfure
Qui s'occupe à creufer des riens ,
Il ne quitte point la Nature ,
Source des véritables biens ;
Ferme dans fon intelligence ,
Jamais une fauffe éloquence
N'ébranle fa folidité ;
Son efprit , quoique l'on difcute ;
Laiffe aux Sophiftes la difpute ,
A fon coeur la tranquillité.
*
Pourquoi s'aigrir , quand d'autres hommes
Careffent leurs opinions ?
Chacun , dans le tems où nous fommes ,
Encenfe fes préventions.
De nos liaisons pacifiques
Los
$430 MERCURE DE FRANCE
Les épanchemens fympatiques
N'ont rien qui ne doive engager.
L'erreur craint de fubir un terme ;
Mais , dans fes amitiés peu ferme ,
Le coeur ne cherche qu'à changer.
*
Voulons-nous indiquer la route ,
Qui fauve des égaremens ?
Des efprits noyés dans le doute
Changer , fixer les fentimens
Nulles cenfures pointilleufes ;
Mais que nos preuves lumineuſes
Verfent une douce clarté ;
N'allons pas courir à la gloire ;
Au- deffus d'eux par la victoire ,
Au- deffous par la vanité.
Gautier , Chanoine Régulier de la Congré
gation de N. Sauveur.
A Nancy le 23. Septembre 1741 .
LETTRE
NOVEMBRE . 1741. 243
LETTRE de M. Bellin Ingénieur de la
Marine , à M.... au Sujet d'une nouvelle
Carte de l'Ocean Oriental & c.
V
Oici , Monfieur , la Carte de l'Ocean
Oriental que vous fçavez depuis fi
long tems fur le chantier , & dont je vous
ai parlé plus d'une fois , que j'ai l'honneur de
vous envoyer. Elle eft enfin finie , & , qui
plus eft,gravée, ainfi elle ne tardera pas à paroître
dans le Public. Vous ne fçauriez croire
combien je fuis charmé d'en être quitte ;
mais en même tems je vous avouérai que je
tremble que malgré un fi long & un fi pénible
travail , nous ne foyons encore bien éloignés
de ce point de précision , fi néceffaire
pour les Cartes Hydrographiques, & auquel
le Dépôt des Cartes,Plans , & Journaux de la
Marine s'efforce aujourd'hui de les porter ;
cependant lorfque je penfe aux avantages
que ce Dépôt nous donne pour un pareil travail
, je ne puis m'empêcher d'avoir une certaine
confiance dans des ouvrages qui me
paroiffent porter fur une fuite de remarques
& d'obfervations dont on connoît toute la
certitude.
Je ne vous dirai rien fur l'état où nous
avons
432 MERCURE DE FRANCE
avons trouvé toute les Cartes Marines , lorf
que nous avons commencé d'en entrepren
dre la correction ; cette difcuffion me jetteroit
extrêmément loin , puifque toutes les
Nations de l'Europe fe font efforcées depuis
un fiécle d'en publier ,à l'envi les unes des
autres ; le nombre fur- tout de celles qui font
forties des mains des Anglois & des Hollandois
eft prodigieux , mais j'ai été très furpris
'd'en trouver fi peu de Françoiſes , & de les
trouver (a) fi mauvaiſes ; auffi lorfque j'y fais
réflexion , je ne puis comprendre pourquoi,
lorfque nous portons toutes les Sciences à un
dégré qui affûrement fait honneur à la Nation
, l'Hydrographie , cette Science fi nécef
faire & fi belle a été fi fort négligée; l'étude ,
il eſt vrai , en eſt dure & feche , elle eſt longue
& pénible , & demande des fecours qu'il
nieft pas toûjours facile d'avoir , mais fontce-
là des raifons, ou pour la méprifer, ou pour
n'ofer s'y livrer? Plus les difficultés font grandes
& plus il eft beau de chercher à les furmonter
, quand même on ne réuffiroit pas
autant qu'on le fouhaiteroit , ou qu'on s'en
feroit flaté.
Mais , fi d'un côté on voit avec plaiſir par
(a ) Il faut excepter les Cartes du Neptune Franpois
, où les Côtes de France fur l'Ocean font affés
bien détaillées , mais auxquelles cependant il y a
beaucoup de corrections effentielles à faire.
NOVEMBRE . 1741. 2433
le grand nombre de Cartes que les Anglois
& les Hollandois ont publiées , que ces
deux Nations n'ont point été épouvantées
des difficultés que l'étude de l'Hydrographie
nous préfente , on eft , d'un autre côté , fort
étonné du peu de progrès qu'elles y ont fait;
& quoique nous foyons obligés de nous fervir
aujourd'hui de leurs Cartes , j'oſe avancer
que ce n'eft point leur fçavoir , mais notre
ignorance qui nous y force ; car vous fçavez
auffi- bien & micux que moi , qu'il n'y a pas
une de celles fur lefquelles on navigue , qui
foit tant foit peu paffable. On trouve dans
toutes des erreurs en Latitude tantôt de 15.
tantôt de 30. minutes , & quelquefois même
d'un degré. Les Longitudes y font bien autrement
défectueufes , les differences vont
fouvent à deux , trois , quatre & même cinq
degrés : par conféquent les routes d'un Lieu
à un autre font entièrement fauffes ; deforte
qu'un Navigateur qui n'auroit d'autre connoiffance
des Lieux , que celles que lui fourni.
roient ces Cartes , fe trouveroit 'non feulement
exposé à manquer les endroits où il
voudroit aller ; mais ce qui eft de plus trifte ,
courroit les risques d'aller fe brifer fur des
Terres , dont il fe croiroit encore fort
éloigné..
Vous n'avez pas befoin M. que je vous ra
porte des exemples pour prouver une vérité ,
dont
2434 MERCURE DE FRANCE
'dont vos remarques & votre expérience vous
ont convaincu dans plus d'une occafion ;
mais fi vous m'en demandiez , je vous prierois
de jetter les yeux fur nos Cartes & fur
les Mémoires qui rendent compte des principales
Obfervations , fur lefquelles nous les
avons dreffés ; & de les comparer en mêmetems
avec les Cartes Angloifes & Hollandoifes
, dont elles font fi differentes. Quoique
je ne doute pas que vous ne l'ayez déja fait ,
je vais cependant vous citer un exemple que
j'ai actuellement fous les yeux & qui me paroît
bien fort.
Dans la grande Carte Angloife de l'Amérique
Septentrionale que M. Pople a publiée
à Londres , & qu'un de nos plus célebres
· Géographes a crû devoir copier , malgré le
grand nombre de fautes de toute efpece dont
elie eft remplie ; on trouve entre Cartagene
& Portobello 6. degrés de Longitude , cependant,
il n'y en a que quatre; ce qui eſt prouvé
les obfervations Aftronomiques qui ont
par
été fartes à Portobello par le P.Feuillée & par
M. Couplet le fils , & à Cartagene , par
Mrs Godin & Boughers : ainfi la Carte Angloife
& fa copie , qu'on a prétendu rendre
a l'ufage des Navigateurs , marquent 120.
lieues de chemin de Cartagene à Portobello
, tandis qu'il n'y a que 80. lieues au plus ;
une erreur de 40. lieuës fur une fi petite dif
tance
NOVEMBRE . 1741 2435
tance eft énorme ; & celle- là fur - tout eft
d'autant plus dangereufe pour lesNavigateurs,
qu'en partant de Cartagene , au lieu d'arriver
a Portobello , ils s'en trouveroient 40. lieuës
fous le Vent , Affalés dans un enfoncement
que la Côte fait en cet Endroit, dont il ne feroit
guere poffible qu'ils puffent fe retirer :
d'ailleurs toute cette Côte eft portée 15. minutes
trop Nord fur ces Cartes : mais je n'ai
point envie d'en faire ici l'examen , nous le
réfervons pour joindre à l'analyfe , qui accompagnera
la Carte du Golphe du Méxique
, & des Ifles de l'Amérique , à laquelle
nous travaillons préfentement au Dépôt . Revenons
à notre Carte des Mers des Indes
qu'infenfiblement j'allois perdre de vûë.
Nous avons donné le nom d'Ocean Orien
tal on Mers des Indes à cette Carte qui comprend
les Côtes d'Afrique , depuis le Cap
de Bonne Efperance, jufqu'à la Mer Rouge ,
& celles d'Afie depuis la Mer Rouge,jufqu'à
Canton dans la Chine , avec les Illes de Madagascar,
de France & de Bourbon, les Maldives
, Ceylan , Java , Sumutra &c.
Pour peu que vous l'examiniez , les diffe
rences confidérables qui s'y trouvent avec
tout ce qui a parû jufqu'ci , ne manqueront
pas de vous fraper; mais foyez perfuadé que je
n'ai rien fait fans preuve, & dont je ne puiffe
rendre compte; du moins je le crois ainfi ,
E Vous
2436 MERCURE DE FRANCE
vous en jugerez par le Mémoire que je joins
à cette Lettre , & que je vous prie d'examiner
à la rigueur ; vos Remarques ne peuvent
être que fort juftes ; d'ailleurs je puis vous
affûrer que je fuis toûjours prêt de me rendre
à la vérité connue , & à corriger les fautes
dans lesquelles je puis fort bien être tombé
, puifqu'il n'eft pas poffible d'être également
éclairé fur toutes les Parties.
Les Obfervations Aftronomiques qui ont
été faites par d'habiles Aftronômes pour déterminer
la Latitude & la Longitude de plu
fieurs Lieux d'Afie & d'Afrique , font la pre
miere baſe de notre Carte : ce font elles qui
marquent bien fenfiblement les erreurs de
toutes les autres , par exemple , vous trouve
rez fur la Carte Hollandoife de Pietergoos ,
Canton 116. degrés 20. minutes à l'Orient
du Méridien de Paris , & fur la Carte Angloife
de Thornton par les 104. degrés du
même Méridien . Cependant des Obfervations
Aftronomiques dont on connoît toute
la certitude , déterminent Canton à 110. de
grés 42. mínutes de Longitude. Anfi il y a
une difference de plus de 12. degrés entre
ces deux Cartes , dont l'une place Canton plus
de 100. lieuës trop loin de nous , & l'autre
100. lieues trop près.
La Pofition de Suez au fond de la Mer
Rouge n'y eft pas plus exacte , & elles y different
NOVEMBRE . 1741. 2437
ferent entre elles de 14. degrés en Longitude
, ce qui paroît prefque incroyable ; rien
néanmoins de plus aifé que de déterminer la
Pofition de Suez , à quelques minutes près ,
car on fçait que de Suez au Caire , il y a en
viron 20. lieuës , & que ces deux Places font
à peu près fous le même Paralelle, or on a une
Obfervation Aftronomique faite par M. de
Chazelles , Ingénieur de la Marine & de
l'Académie des Sciences , qui détermine la
Longitude du Caire à 29. degrés 35. minutes
à l'Orient de Paris , donc on peut con
clure celle de Suez,fans crainte d'erreur tant
foit peu confidérable .
Je pourrois difcuter de même tous les
Lieux fur lefquels il y a des Obſervations
Aftronomiques , & faire voir que ceux qui
ont dreffé les Cartes Angloiſes & Hollan
doifes , n'en ont point cû connoiffance , car
il n'eft pas naturel de penfer qu'ils ne les euffent
pas fuivies , s'ils les avoient connues ,
puifque c'eft le moyen le plus für pour déterminer
les Longitudes avec précifion ; il eft
vrai que les routes de Navigations peuvent
auffi nous les donner , mais il faut réunir
bien des circonftances,pour y trouver la précifion
néceffaite : tous les Navigateurs ne
font point également habiles , ni egalement
foigneux ; l'examen & la difcuffion de leurs
Journaux emporte bien du tems , & il n'eft
E ij pas
2438 MERCURE DE FRANCE
pas toûjours aifé de reconnoître le degré de
confiance qu'on peut avoir dans leurs opérations
; d'ailleurs on ne doit point décider fur
une feule route , c'eft au plus une conjecture
; ce n'eft que dans le grand nombre qu'il
faut chercher cet accord , d'où dépend la.
certitude des Inductions que l'on en tire par
raport aux Longitudes ; alors les routes de
Navigation fupléent aux Obfervations Aftronomiques
qui fe trouvent manquer , & le
font d'une maniere qui laiffe peu à défirer ,
vous en aller juger,
En dreffant la Carte des Indes je n'avois
que l'obfervation Aftronomique de Pontichery
pour affujettir la Côte de Coromandel
; deforte que je me trouvois fort embarraffé
pour la pofition du Gange : j'ai cû recours
aux Journaux & j'ai trouvé fix routes
de Pontichery à la pointe des Palmiers , par
des Navigateurs differens , qui s'accordoient
à donner le Nord Eft quart de Nord trois degrés
Eft environ 225. lieuës , d'où j'ai conclu
la Longitude de la pointe des Palmiers à 85,
degrés 15 minutes à l'Orient du Méridien
de Paris. Je n'avois pas alors connoiffance
de l'obfervation de l'Eclipfe de Lune qui
avoit été faite à Chandernagor, raportée dans
le Volume des Tranfactions Philofophiques,
contenant les années 1733. & 1734. & publié
ici en 1749. par laquelle la Longitude
dc
NOVEMBRE: 1741
2439
de cette place eft déterminée à 86. degrés 9 .
minutes 15. fecondes à l'Orient du Méridien
de Paris ; & comme on connoît affés
exactement la distance de Chandernagor à
la pointe des Palmiers , je me ferois par ce
moyen épargné la recherche & la difcuffion de
toutes ces routes, cependant je m'en fuis trouvé
bien dédommagé par la fatisfaction que
j'ai eûë de voir un raport de Longitude prefque
parfait, lorfque je fuis venu à comparer
le réfultat des routes avec l'obfervation Aftronomique
.
J'aurois ,M. bien d'autres remarques à faire
fur la Carte de l'Ocean Oriental & fur le
Mémoire qui l'accompagne ; on y trouve
pour ainfi dire à chaque pas un concours
d'obſervations differentes , qui fe réüniſſent
pour prouver la certitude & la néceffité de
nos corrections ; elles font fi confidérables
qu'elles méritent l'attention des Sçavans &
des Curieux , autant que celle des Navigateurs
, auxquels feuls les fruits d'un pareil
travail femblent être confacrés. Mais ce qu'on
vient de voir me paroît fuffifant pour une perfonne
auffi éclairée que vous & à qui ces matieres
font fi familieres.
J'ai l'honneur d'être & c.
E iij PARA
2440 MERCURE DE FRANCE
Just stetit sbobet it toot
PARAPHRASE du Pfeaume XCV.
Cantate Domino , &c .
CHantons , bénifons le Seigneur ;
Son bras vient en notre faveur´
De faire avec magnificence
Eclater fa Toute-Puiffance.
Lui feul eft notre force & notre Protecteur
Il eft notre Libérateur ;
Que fes louanges foient fans ceffe
Le feul fujet de nos chants d'allegreffe .
C'eft le Dieu que nous adorons ,
Et nous exalterons ſa gloire ;
C'eft le Dieu d'Ifraël , & nous annoncerons
Ses merveilles & fa victoire.
Comme un Guerrier , il s'eft armé pour nous
Son bras eft invincible , & le poids de fes coups
A détruit les Chars de l'armée :
De nos barbares ennemis ;
L'élite des Chefs de Memphis
Dans la Mer Rouge eft abîmée ,
Et fes gouffres profonds les ont tous engloutis.
Le Seigneur a lancé le feu de fa vengeance ,
Et comme des Rofeaux il les a dévorés ;
Pour fervir la fureur , & pour notre défenſe ,
Les flots de part & d'autre ont été refferrés ,
L'Onde
NOVEMBRE. 1741. ´2441′
L'Onde s'arrête , fe partage ,
&
Et dans le fein des Mers nous ouvre un für paffage.
Ils fe font écriés , armons- nous , armons- nous
Ce fecours leur eft inutile ,
Qu'ils périffent dans leur azile ,
Nous les exterminerons tous.
Mais le foufle de ta colere ,
Seigneur , réuniffant les flots ;
A renversé leur projet témeraire ;
Ils font comme du plomb tombés au fond des Eaux .
Seigneur , quelle puiſſance eſt égale à la vôtre ,
Où peut- on en trouver quelqu'autre
Digne des honneurs qu'on vous rend
Terrible , redoutable ,
Infiniment loüable ,
Vous n'operez rien que de grand.
Par M. de Morand , d'Arles.
EXTRAIT d'une Lettre écrite à M. le
Gendre de S. Aubin , le 19. Août 1741.
par M. J.
E viens , Monfieur , de parcourir la Table
de la troisième Édition qui paroît de
votre Traité de l'Opinions j'efperois y trouver
quelque mention de l'opinion de Daneche-
E iiij Mend2442
MERCURE DE FRANCE
Mend- Kan , dont il y a un Article dans le
Mercure d'Août 1740 page 1752. L'Auteur
de cet Article y a témoigné de la furprise ,
qu'elle eût pû vous échaper , même dans la
premiere Edition de votre Livre , tant elle
cft finguliere , propre à faire voir les emportemens
exceffifs de l'Esprit Philofophique ;
& les bifarres opinions qu'il eft capable d'enfanter
; & tant conféquemment elle a d'affinité
& d'analogie avec votre Ouvrage.
Cette idée confinée depuis 1674. dans un
bouquin en trois ou quatre lignes , vient de
donner figne de vie dans le Mercure , avec
l'éclat & le fignal, les plus capables de réveiller
l'attention des Sçavans en ce genre , c'eftà-
dire des plus profonds Philofophes.
Un certain goût de Métaphyfique , &
d'interêt pour votre Livre ; & quelque doute.
que cet Atticle ne foit pas venu à votre connoiffance,
m'engagent à vous donner ce mot
d'avis , afin que vous faffiez de ce fait , tel
ufage que bon vous femblera ; je voudrois
fort qu'il vous fût poffible , par le moyen
d'un Carton,de donner dans votre Livre place
à l'étonnant Paradoxe de Daneche - Mend-
Kan. J'ai l'honneur d'être & c.
Les mots de l'Enigme & des Logogryphes
du Mercure d'Octobre , font Baffinoire
Soleil & Minet. On trouve dans le premier
LogoNOVEMBRE
. 1741. 2443
Logogryphe , Oeil , Ifle , Lelio , Sol , Lie ;
Solle , Lis , Os , Io , Life , Soie , Oïe & Sel.
ENIGM E.
S Ans mé vanterplus qu'il n'eft néceffaire ;
Du beau Sexe , je fuis celle qui fçait mieux plaire ,
Et l'intérieur de mon corps
Plaît plus encor que les dehors ,
Quand l'art ingénieux d'une riche ſtructure
L'a paré d'une mignature.
Parmi les Gens de qualité ,
Comme par tout ailleurs , je fais quelque figure ;
Quoique de petite ftructure ,
Je tiens fort bien mop rang dans la Societé :
Si je ne fuis ni fenfible ni tendre
De mes Amans je contente l'ardeur ,
Pour eux je me laiffe répandre
Sans être moins en bonne odeur ;
Et quoiqu'à tous venans mon coeur ſe laiffe prendre,
Je ne rifque jamais de perdre mon honneur.
«****************
LOGOGRYPHE.
I je
difois de ma nature
Un mot , ou bien de ma figure ,
E v Après
2444 MERCURE DE FRANCE
Après les quatre premiers Vers ,
Mon mafque tomberoit aux yeux de l'Univers
Taifons - nous donc fur ma ftructure ,
Et ne parlons que de mon nom ;
Faifeurs de Logogryphe , à vous cette leçon.
De fept Lettres , que la derniere
Difparoiff: avec la premiere ,
L'U changeant de nature , on m'agite en parlant.
Dans les Jardins , je fuis un ornement ,
Si l'on ne veut m'ôter rien que les deux dernieres;
Que fi quelques mains meurtrieres
Venoient mon triple coeur ôter
Je deviens un Poiffon de Mer,
Si l'on veut me changer de face ,
Deux , trois , à bas , je fuis bon à certaine chaffe;
Faites un autre changement ,
Trois , cinq ôtés , fept de fix ait la place ,
Auffi - tôt , je fais inftrument.
Quatre, fept , cinq , & fix , deux Notes de Mufique.
Autre combinaiſon certaine & fans replique ,
Mon coeur , ôté, mes membres feront fix ,
Qu'en ce cas le dernier devienne quatrième ,
Alors , Lecteur , de fens raffis
Prends ma fyllabe penultiéme
Apres l'autre mets la s . pour prix de tes travaux
Tu trouveras un mets cheri de tes chevaux.
AUTRE
NOVEMBRE.
17412445
AUTR E.
LE&teur , je fuis certaine Ville
Où jadis fe tint un Concile .
Veux - tu me voir facilement ?
Voici comment :
Cherche-moi dans l'Arithmétique :
Deux de mes pieds fervent dans la Mufique :
Tranche mon Chef, tel a bien du bonheur ,
Qui de moi peut avoir un bon
Tranche mon Col , en tems de
payeur :
guerre
Je loge Princes , Ducs , & les Rois de la Terre : >
Tranche-moi tête & col , de moi fort un bon fruit;
Que l'homme par fes foins , ( moyennant Dieu )
produit :
Trois de mes pieds me font une Riviere :
Mets mon fecond pied le dernier ,
Je fuis ce qu'un Démon ne ceffe d'exercer :
Voici tout le mystére ,
si tu ne veux chercher un mot Latin ,
Doux , tendre & délicat : adieu jufqu'à demain,
Duchemin
R
E vj
NOU
2446 MERCURE DE FRANCE
sį į ƒ ƒ ƒ ƒ ƒ j s
NOUVELLES LITTERAIRES
DES BEAUX ARTS , &c.
E L'IMITATION DE JESUS CHRIST ,
Traduction nouvelle , ornée de Figures
en Taille- douce , 1. vol. 8 ° . à Paris ;
chés Antoine - François Savoye , Libraire, ruë
S. Jacques , à l'Esperance , M. DCC. XLI . pp.
612 .
Cet excellent Livre , qui eft au - deffus de
tous les Eloges , ne fçauroit être trop multiplié
, & au fentiment de M. de Lorme ,
Docteur de Sorbonne,qui a donné fon Aprobation
à cette nouvelle Traduction , elle
ne cede en rien à aucune de celles qui l'ont
précedée. Il lui trouve même au- deffus de
plufieurs cet avantage , que fans être trop
littérale , elle eft plus éloignée de la Paraphrafe
& du Commentaire . L'Auteur y parle
avec la même fimplicité , la même préciſion ,
la même onction que dans l'Original . Ses
fentimens y font ceux de la dévotion la plus
tendre & la plus affectueufe. Enfin, rien n'eſt
plus propre à les exciter dans les Lecteurs ,
que les Réfléxions , les Pratiques & les Prieres
qu'il a ajoûtées à chaque Chapitre.
Au reste , on n'a rien épargné en ce qu
concerne
NOVEMBRE. 1741 2447
concerne l'Art de l'Imprimerie , pout orner
cette nouvelle Edition , qu'on peut dire fur
paffer auffi en ce genre toutes celles qui ont
paru jufqu'à prefent ; Papier , Caracteres ;
Gravures, &c. tout y eft parfait . Le Public en
eft redevable au fieur Simon le Fils , qui
continue de fe diftinguer parmi ceux de fa
Profeffron , & qui s'eft chargé de l'Impreffion
& de toute la conduite de l'Ouvrage
dont il s'agit ici.
. On trouvera chés le même Libraire , nommé
dans le Frontispice , la même Imitation
en 1. vol. in - 12. & en 1. vol. in- 8 ° . avec
des Réfléxions , des Pratiques , & des Prieres
à la fin de chaque Chapitre ; & une Récapitulation
ou Analyfe à la fin de chaque
Livre , pour en rendre la lecture plus utile.
NOUVEAU TRAITE' D'ÉCRITURE , enri
chi de plufieurs Piéces gravées d'après le
Chef-d'oeuvre de feu M. Rollignol , Me
Ecrivain , & dédié à M. le Duc de Chartres.
Par le fieur Glachant, Me Ecrivain Juré , &
Eleve du fieur Roffignol , Brochure infol.
de 40. pages , ornée de 18. Planches gravées
par les ficurs Bailleul l'aîné & Aubin.
A Paris , chés Jean- Baptifte Claude Banche
, Quai des Auguftins , à S. Jean du
Defert.
DI'
2448 MERCURE DE FRANCE
DETAILS CURIEUX fur divers Sujets
de Littérature , Article premier . Le Plagiat.
Brochure de 67. pages. A Paris,chés Prault
pere , Quai de Gêvres , au Paradis , 1741 .
ARMORIAL General , ou Registres de La
Nobleffe de France , Regiftre fecond in fol.
2. vol. chés Prault le Pere , Quai de Gévres,
au Paradis , à Paris 1741. petite Brochure de
60. pages , fans l'Avertiffement que nous
avons cru devoir inférer ici .
nier ,
Le Public a été déja inftruit par un Avis
inféré dans le Mercure du mois d'Avril der-
, qu : le fecond Regiftre de l'Armorial
Général de France qui avoit dû être publié
au mois de Janvier , ne pouvoit paroître
qu'au mois de Mai , ou au commencement
du mois de Juin , parce que l'Ouvrage avoit
été arrêté dans le cours de l'impreffion par
plufieurs Familles diftinguées , qui ont défiré
avec empreffement d'être compriſes dans
ce Regiftre , & ainfi , qu'au lieu d'un jufte
Volume qu'il devoit faire , il feroit , comme
le premier , en deux Parties , à caufe des
augmentations confidérables qu'on y faifoit.
Mais comme les délais vont encore beaucoup
plus loin que le Juge d'Armes n'avoit
prévu , pour foutenir l'attente des Familles
intéreffées à la publication du nouveau Regiftre
, il a cru à propos de faire diftribuer
d'avance ,
NOVEMBRE . 1741 . 2449
d'avance , la Préface de fon Regiſtre , où
l'on a raffemblé tout ce qui a pû être dit
foit contre l'Ouvrage , foit en fa faveur , &
le Corps de la Nobleſſe verra en même tems
quels foins on prend pour mériter fon fuffrage
dans l'éxécution d'un Projet qu'elle a
elle même formé .
ABREGE' DE LA THEORIE CHYMIQUE
tiré des propres Ecrits de M. Boerhaave
par M. de la Métrie auquel on a joint le
Traité du Vertige , avec la Defcription d'une
Catalepfie hystérique , & .une Lettre à M.
Aftruc , dans laquelle on répond à la Critique
qu'il a faite d'une Differtation de l'Auteur
fur les Maladies Vénériennes , par le
même , à Paris , chés Lambert & Durand,
Libraires rue S. Jacques à S. Landry , à la
Sageffe & au Griffon , 1741. in 12.
>
PROJET DE SOUSCRIPTION d'une nouvelle
Edition de l'Hiftoire de Bretagne , compofée
fur Titres & fur les Auteurs Originaux ,
par Dom Guy Alexis Lobineau , Prêtre Religieux
Bénédictin de la Congrégation de S.
Maur , revûë & augmentée de 3. vol . & d'un
grand nombre de Planches en taille douce ,
par Dom Hyacinthe Morice Religieux de la
même Congrégation , en 5. vol . in fol. Le
prix de l'Ouvrage eft fixé pour les Soufcripteurs
2450 MERCURE DE FRANCE
teurs à 18 livres par Volume en feuilles. On
payera 9. livres préfentement pour le premier
Volume , & 18. livres en le retirant ;
fçavoir , 9. livres pour parfait payement du
premier Volume , & 9. livres à compte du
fecond , & ainfi de fuite , deforte qu'on ne
payera que 9. livres pour le cinquième Volume
. On foufcrira pour le prernier Volume
jufqu'en Décembre de cette année. Ceux qui
n'auront pas foufcrit , payeront 25. livres le
Volume en feuilles. A Paris , chés Charles
Ofmont , Libraire Imprimeur ruë S. Jacques
à l'Olivier.
. NOUVEAU TRAITE' D'ARITHME'TIQUE
DE MONTRE'E , auquel l'Auteur a joint un
Traité des Changes Etrangers , avec la maniere
de s'y perfectionner , & un autre de la
Tare & du Courtage que les Marchands
Banquiers prennent fur les Marchandiſes &
les Lettres de Change , dedié au Duc de
Gêvres , par M. Loifeau , Géometre , 1741 .
in 12.
EXPLICATION ABREGE'E des Coûtumes &
Cérémonies obfervées chés les Romains pour
faciliter l'intelligence des anciens Auteurs ,
Ouvrage écrit en Latin par M. Nieuport , &
traduit en François par M. l'Abbé ****
Paris , chés Jean Defaint , Libraire ruë S.
Jean de Beauvais , 1741. in 12.
HIS-
*
NOVEMBRE. 1741. 245 *
< HISTOIRE du Pontificat du Pape Innocent
11. par le R. P. Don Jean de Lannes ; JÍ.
Religieux Prêtre de l'Ordre de Citeaux , ancien
Profeffeur de Théologie , connû princi
palement par l'Hiftoire du Pontificat du Pape
Eugêne III. à Paris , chés Pierre Giffart ,
Libraire rue S. Jacques à Ste Therefe , 17412
in 12.
NOUVELLE EDITION des Réflexions Théo
logiques , Morales & Affectives fur les At
tributs de Dieu , en forme de Méditations
pour chaque jour du mois , par le R. P.
Avrillon , Religieux Minime , à Paris ches
la veuve Pierres , Libraire rue S. Jacques ,
vis-à vis S. Yves , à S. Ambroife , 1741. in
12. Cette nouvelle Edition eft beaucoup
plus ample & plus correcte que les précédentes
; elle a été revûë & corrigée par l'Auteur
& augmentée confidérablement.
On trouve chés Didot , Nyon fils & Barois
Libraires à Paris , Quai des Auguftins , Des
PREFACES DU COMMENTAIRE de M. Du
puy, fur les Libertez de l'Eglife Gallicane par
M. l'Abbé Lenglet du Fresnoy.
Livres nouveaux qui fe trouvent chés Ga
briël Martin , Libraire ruë S. Jacques.
CABASSUTII Theoria & Praxis Juris Cano
nisi,
´2452 ' MERCURE DE FRANCE
nici , cum notis Joannis Petri Gibert , in folio.
Imprimé à Poitiers.
TRAITE' de l'Orthographe Françoife en
forme de Dictionnaire , par le Sieur le Roy, in-
8. Imprimé à Poitiers.
EUVRES DE P & T. CORNEILLE . Nou
velle Edition en 11. Vol. in 12 .
CUVRES DE RACINE . Nouvelle Edition ,
en 2. Vol. in 12.
4
DEGRE' DU MERIDIEN en France déter
miné
Par la mfure de la Terre de M. Picard,
& par les Obfervations de M. M. de
Maupertuis , Clairaut , Camus , & le Monnier,
in 8°. avec Figures.
NOUVEAU DICTIONNAIRE de Cas de Conf
cience , de M. M. Delameth & Fromagean
2. vol. in-folio.
Le même Libraire diftribue le Catalogue
d'une Bibliothèque confidérable , qui doit fe
vendre à Lyon le 4. Décembre prochain . Ce
Catalogue eft fait avec foin. Ceux qui voudront
donner des Commiffions pour cette
Vente , pourront s'adreffer à ce Libraire .
ESSAIS ANATOMIQUES , contenant une
Description courte & exacte de toutes les
Parties qui entrent dans la Compofition du
Corps de l'Homme , avec la maniere de les
diffequer , par M. Lieutand , Confeiller du
Roy, Ton Profeffeur dans l'Univerfité d'Aix ,
de
NOVEMBRE.. 1741. - 2453
de la Societé Royale de Londres , & Correfpondant
de l'Académie Royale des Sciences
, Volume in- 8 ° avec Figures. A Paris
chés Huart , Libraire Imprimeur de Monfeigneur
le Dauphin , rue faint Jacques , à la
Juftice , & à Aix , chés David , Libraire-"
Imprimeur , 1742.
L'ordre que l'on a fuivi jufques à préfent
dans les Livres d'Anatomie eft bien different
, felon M. Lieutaud , de celui que l'Auteur
de la Nature a employé dans l'arrangement
des Pieces qui compofent la Machine
humaine , ce qui les rend d'un très - petit fecours
, lorsqu'on eft auprès des cadavres.
M. Lieutaud , qui dans les commencemens a
connu ces difficultés , a travaillé à les apfanir
, & paroît l'avoir fait dans l'Ouvrage que
nous annonçons. Il y a donné une Hiftoire
nouvelle & exacte des Parties qui compofent
le Corps de l'Homme , & a ajoûté aux
parties de cette Hiftoire la maniere de diffe
quer toutes les Pieces qui en font le Sujet
Il n'a rien negligé de tout ce qui peut veritablement
intéreffer ceux qui fe propofent d'étudier
à fond l'Anatomie ; il a renoncé aux
préjugés de l'autorité , & n'a donné pour vrai
que ce qu'il a obfervé plufieurs fois . Les defcriptions
qu'il a données,font toutes d'après
nature , & non d'après les Livres ; de forte
qu'il n'eſt pas étonnant qu'il ait pris une
autre
1454 MERCURE DE FRANCE
autre route. Celle qu'il a fuivie , paroît être
très-méthodique , elle eft fimple & aifée . Il
eft très- exact , lorfque la matiere qu'il traite
le demande , il évite d'entrer dans un grand
détail , lorfque ce détail lui a paru inutile.
On trouve dans ce Livre des changemensconfidérables
dans la maniere d'enſeigner
l'Anatomie , & des opinions nouvelles , relatives
à l'ufage des Parties ; fi ceux qui cons
noiffent la ſtructure du Corps de l'Homme,
ont le droit d'en expliquer les fonctions . il
doit être acquis à M. Lieutaud , qui travaille
depuis long- tems à l'Anatomie , & qui paż
roît la poffeder.
I fe vend à Paris dans la même Boutique
Abregé de toute la Médecine- Pratique nouvellement
réimprimée & fort augmentée en
7. volumes in - 12.
Ce Livre dont il y a eu deux Editions
précedentes à celle- ci , eft affés connu du
Public , pour n'être pas obligé den rien
dire ici dávantage .
CATALOGUE des Livres de la Bibliothé
que de feu M. Boullanger , Avocat en Parlement
, Confeiller du Roy , Expéditionnaire
de Cour de Rome & ancien Avocat au Confeil
, &c. La vente commencera le 8. Janvier
1742.depuis deux heures de relevée , juſqu'au
foir & continuera les jours fuivans , en fa
Maifon
NOVEMBRE , 1741 2459
Maifon rue des Rofiers , derriere le petit
Saint Antoine. Ce Catalogue fe diftribue
à Paris , chés Jacques Barois , fils , Librai
re, Quai des Auguftins , 1741. On diftri
buë chés le même Libraire la Table des Au
teurs du Catalogue de M. le Peletier des
Forts.
TRAITE HISTORIQUE & Pratique fur le
chant Eccléfiaftique , avec le Directoire qui
en contient les principes , & les regles fuivant
l'ufage préfent du Diocèfe de Paris &
autres , précédé d'une nouvelle Méthode
pour l'enfeigner & l'aprendre facilement ,
par M. l'Abbé Lebeuf, Chanoine & Sous
Chantre de l'Eglife Cathédrale d'Auxerre ;
à Paris , chés C. J. B. Hériffant , ruë neuve
Notre- Dame , aux trois Vertus , & Jean
Thomas Hériffant , ruë S. Jacques , à S.
Paul & à S. Hilaire , 1741. in octavo de
290 pages.
EXAMEN & REFUTATION des Leçons de
Phyfique , expliquées par M. de Molieres au
College Royal de France , par M. Sigorgne!
Volume in 12. de 45 2. pages fans les Propofitions
Préliminaires . A Paris , chés Jacques
Clonfier , ruë S. Jacques
INSTITUTIONS DE MEDECINE DE M.HER
MAN BOERHAAVE, expliquées par lui-même
dans
2456 MERCURE DE FRANCE
dans fes Leçons publiques , avec des Notes
de M. Haller , deux vol. in- 8 °. Le premier
1739. de 500. pages , le fecond 1740. dè
682. A Gottingen . L'Ouvrage eft en Latin.
ROLAND LE FURIEUX , Poëme Héroïque
de l'Ariofte , Traduction nouvelle , par
M. M ***. Ala Haye , chés Pierre Goffe ,
4. vol. in- 12 . 1741. Cette nouvelle Traduction
eft du Traducteur de la Jérufalem délivrée
du Taffe .
ESTAMPES NOUVELLES.
LA VIE CHAMPETRE , Tableau en hauteur
gravé avec beaucoup d'art par Mlle Elifab th Marlier
, Epoufe de M. Lépicier , d'après le Tableau de
M. Boucher , entierement peint dans le goût de
Benedetto Caftillon . Cette Eftampe , qui a l'Aprobation
des meilleurs Connoiffeurs fe vend chés M.
Lépicier , Graveur du Roy , au coin de l'Abreuvoir
du Quai des Orfévres: On y lit ces Vers au bas :
Le repos & l'Amour regnent dans ces aziles
Et font la fource des plaifirs ;
Le tumulte & la haîne habitent dans les Villes
Et font la fource des foupirs.
PORTRAIT de M. l'Abbé Caperonier , Profeffeur
au College Royal , gravé par M. Lépicier , Sécre
taire & Hiftoriographe de l'Académie Royale de
Peinture & Sculpture , d'après M. Aved . Demi Figure
affife , une main apuyée fur un Livre . Ce Portrait
peut être mis en paralelle avec les plus beaux
&
NOVEMBRE . 1741 . 2457
& les plus eftimés de notre tems . On le trouve à
ja même adreffe de Article précedent .
La fuite des Portraits des Rois de France , des
Grands Hommes , & des Perfonnes Illuftres dans
les Arts & dans les Sciences , continue de paroître
avec fuccès , chés Odieuvre , Marchand d'Eftampes ,
ruë d'Anjou ; il vient de mettre en vente ceux de
HUGUES , DIT CAPET , XXXV . Roy de France.
mort à Paris en 996. après 9. ans de Regne, deffiné
par A. Boizot, & gravé par J. G. Will ,
-
LOUIS ANTOINE , CARDINAL DE NOAILLES ,
Archevêque de Paris , né le 27. Mai 1651. mort le
Mai 1729. gravé par N. Pitau .
DUC Dĺ
FRANÇOIS - HENRI DE MONTMORENCY ,
LUXEMBOURG , Maréchal de France , né le 8. Jani
vier 1628. mort à Verfailles le 4. Juin 1695. peint
par H. Rigaud , & gravé par Tardieu , fils.
JEAN FRANÇOIS LALOUETTE , Maître de Mufique
& Beneficier de N. D. de Paris ,
mort le premier
Septembre
1728. âgé de 77. ans , peint par Ferdinand , & gravé par Tardieu , fils ,
*
Nous fommes priés de donner avis aux Curieux ,
qu'il y a actuellement 600. Médailles Antiques ,
Latines , à vendre , toutes Impériales , de grand
moyen , & petit Bronze . On s'adreſſera pour les
acquerir au R. Pere Claude Brulé , Religieux du
Tiers- Ordre de S.François ,au Couvent de Picpus de
cette Ville de Paris.
Le fieur le Rouge , Ingénieur Géographe du Roi ,
rue des Auguftins , vis -à- vis le panier fleuri , vient
de mettre au jour une nouvelle Carte particuliére
de l'Electorat de Hanover, en deux feuilles , où fe
trouvent les Camps actuels & les plans des principales
Villes de cette Province. Il donnera inceffamment
une nouvelle Carté particuliere de la Boheme
avec les plans des príncipales Ville de ce Royaume.
458 MERCURE DE FRANCE
?
Le fieur de Lavault , Directeur Général de la
Manufacture Royale de Méchanique établie au
Quartier Monmartre près S. Jofeph a inventé
un Moulin à bras que deux hommes font aller avec
beaucoup de facilité ; fur les épreuves qui en ont
été faites à l'Hôtel Royal des Invalides , par ordre
de M. le Marquis de Breteuil , Miniftre de la Guer
re, les 10 & 11 Octobre dernier , il a été conſtaté ,
en préfence de M. de la Courneuve , Lieutenant de
Roy , de tout l'Etat Major , du Commis général à
la diftribution du Pain , des Boulangers , & des
Meuniers de l'Hôtel , que ces Moulins s'échauf
foient moins que ceux dont on fe fert ordinaire
ment ; que la farine en étoit plus belle , & qu'ils
mouloient plus de trois boiffeaux de Bed par heu
on a fait du pain de cette même farine , qui
a été trouvé bon. Les Moulins à bras qu'on a fait
partir , fçavoir 60. pour l'armée d'Allemagne &
40. pour l'armée du Bas Rhin , font de la même
Manufacture,
res ;
MACHINE HIDRAULIQUE ;
pour le deffechement des Marais , l'arrose =
ment des Prairies , le curage des Foffées , l'é
puifement de l'eau des fouilles de Charbon ,
de terre , & de toutes fortes de Mines ,
pour tous les effets des Pompes fur Terre ,fur
Les Rivieres , fur Mer &c. Par feu M.
Dupuy , Maître des Requêtes honoraire, c.
نم
Lendre cette Machine , eft de raporter les
E compte le plus avantageux , qu'on puiffe
termes du Privilége que le Roy vient d'accorder à
Madame Dupuy , veuve de l'Auteur , & le jugement
infiniment exact & détaillé qu'en a porté l'Asadémie
Royale des Sciences.
Les
NOVEMBRE. 1741. 2459
23

"
Les termes du Privilége font que Madame Dupuy
poffédant le fecret de la Machine , » en a fait
conftruire plufieurs modéles en grand , pour en
mieux conftater l'utilité ; qu'en ayant remis un
deffein à l'Académie des Sciences , l'examen en
» a été fait avec la derniere exactitude & dans les
» plus grands détails ; & qu'il a été trouvé que
cette Pompe par fon produit , a de la fupériorité
fur les meilleures Pompes qui ayent paru jufqu'à
préfent , qu'elle peut s'établir par tout & à peu
de frais , & qu'enfin le Public pourra en tirer de
grands avantages foit pour le déffechement des
Marais , l'arrofement des Prairies , le curage des
Foffés , l'épuifement de l'eau des fouilles &c.
Les Rois font la vive image de Dieu . Leurs gracès
font des Actes de leur juftice ; mais ce font toujours
des graces & des effets de leur bonté. Les termes
fuivans émanent de ces deux fources auffi
royales que divines . Ils font tout propres à exciter
l'émulation , & à déveloper le génie des Inven-
93
teurs.
→ » Dans ces circonftances la Supliante & le feu
fieur Dupuy, fon mari , qui ont fait des dépenfes
mexceffives pour mettre cette Machine au point
»de perfection où elle eft , ne peut efpérer de s'indemnifer
d'une partie de ces dépenfes , que par
un Privilége pour la conftruction de cette Machi-
»> ne , parce que fi elle la livroit au Public fans aucun
avantage , elle perdroit en un moment tout
le fruit des travaux de fon mari & tout le bien
qu'elle y a facrifié .
30
Les Priviléges particuliers ne doivent pas être
» regardés de même oil , que les Priviléges généraux.
Ces derniers font toûjours onéreux . Mais
les premiers tournent réellement à l'avantage du
Public , puifqu'en excitant le génie , ils enrichif-
F femt
2460 MERCURE DE FRANCE
ם ג
50
fent la Nation des plus utiles découvertes. L'émulation
fe réfroidiroit bien - tôt , fi les Inven→
teurs des Arts n'efpéroient pas de trouver leur
avantage particulier dans ce qui doit faire celui
du Public. D'ailleurs il eft jufte qu'un homme
» qui a confacré les talens au bien de la focieté , recueille
le fruit de fes travaux. Des Priviléges de
»cette nature , ne peuvent faire de préjudice au
» Public .
37
33
ג כ
» L'Auteur d'une découverte peut la tenir cachée
fans injuftice . Ainfi il a droit , en la livrant,
» de ftipuler les avantages perfonnels ; d'autant plus
» qu'il ne force perfonne , à en faire ufage. De
» plus , ces fortes de Priviléges n'étant qu'à tems
»la découverte après l'expiration du Privilége ,
ceffe d'apartenir au particulier , & devient un
> bien général.
99
>
» Le Privilége que la Supliante demande , n'eft
pas un Privilége général. C'eft un Privilège par-
» ticulier pour fa Pompe , qui laiffe au Public toute
la liberté de s'en fervir , ou de ne s'en pas fervir.
A ces cauſes &c.
Le Privilége eft exclufif pour le tems de dix années
. Il porte défenſe de fa Majesté à toutes fortes
de perfonnes , de troubler la Dame Du-
» puy dans l'exploitation dudit Privilége , ni d'i
miter, contrefaire , vendre & débiter ladite Pompe
>>fans le confentement exprès & par écrit de la
» Dame Dupuy , à peine de confifcation , de 15000
» livres d'amendes , & de tous dépens , dommages
» & intérêts & c.
L'autorité du Roy fuffiroit bien pour conftater
la fupériorité de la Machine en queftion , d'autant
plus que l'Acte de cette autorité émane ici de fon
Confeil fuprême , & qu'il eft motivé , & fupofe le
jugement de l'Académie. Mais les hommes faits
pour
1
NOVEMBRE . 1741 2460
pour céder à l'autorité légitime , ne font que trop
jaloux d'entrer en raifonnement avec l'autorité même
& de ne vouloir fe rendre qu'à la raiſon & à
l'évidence.

L'Académie Royale ayant été priée par Madame
Dupuy de nommer des Commiffaires pour examiner
ladite Machine , & d'en faire leur raport pour avoir
l'avis de la Compagnie , les Commillaires nommés ,
c'est-à- dire , Meffieurs Nicole , Camus de Fouchy
, fe font tranfportés chés ladite Dame , ruë
Tranfnonain dans le Marais , & après avoir mefuré
, jaugé & calculé.tout l'extérieur de la Machine
dans fon repos , ils fe font enfuite rendus fort atténtifs
au jeu extérieur , & ils ont trouvé par des
expériences répétées & combinées , que cette Machine
mue par quatre hommes médiocrement forts
& adroits , a donné un muid d'eau en moins de 20.
fecondes , que par l'action de deux hommes de
même caractére le muid a été rempli en 70. fecondes
, & qu'enfin les quatre hommes fufdits , en une
minute & demie , ont élevé à la hauteur de 16.
pieds , 4. muids & 4. cinquièmes , c'eſt - à - dire ,
près des muids.
Après l'examen de cet extérieur que tout le monde
peut voir , Meffieurs les Commiffaires ont pro
cedé à l'examen de l'intérieur , dont c'eft à eux de
juger. En conféquence de cet examen , ils déclarent
eux-mêmes qu'ils font en état de faire à l'Académie
un raport exact de la conftruction extérieure & intérieure
dont- ils rendent compte. Ce compte eft en effet
jufte & précis . C'eft la defcription des piéces intérieures
qui conftituent le Méchaniſm: & le caractériſent.
Cet intérieur combiné avec l'extérieur , & la
Machine combinée avec le Méchaniſme , ont fair
juger à ces Meffieurs 12. Que la Machine eft nou-
Fij
velle
2462 MERCURE DE FRANCE
velle & de l'invention de M. Dupuy , & qu'elle n'
doit point être censée la même que celle de Ramelli•
28. Qu'elle a l'avantage fur la Pompe des Vaiſſeaux
& fur d'autres Pompes qui ont eu des éloges de l'Académie.
39. Qu'elle eft très - bonne , que fon
produit eft au moins auffi grand que celui d'aucune
Pompe qui ait été préfentée à l'Académie ,
» qu'elle doit être eftimée par fa fimplicité , & par
l'avantage qu'elle a de pouvoir être établie par
tout à peu de frais , n'étant que de bois doublé de
plomb. "
Tel eft le raport de Meffieurs les Commiffaires
en conféquence duquel raport , l'Académie a jugé
prefque dans les mêmes termes, que la Machine en
queftion avoit toute la bonté dans fon jeu , toute la
fécondité dans fon produit , toute la fimplicité dans
fa ftructure , toute la commodité dans ſon établiſſe- ,
ment , enfin tout le peu de frais dans fon ufage que
Meffieurs les Commiffaires y avoient reconnus .
+ C'eſt au Public de jouir d'un fi grand bien , confacré
à fon fervice par la mort même de fon illuftre
Auteur , dans la pourfuite des travaux qui ont
fait éclater la perfection de fon Ouvrage. Mais perfection
inutile , travaux infructueux , découverte ,
comme tant d'autres , enfevelie avec fon Auteur ,
fi l'illuftre veuve de M. Dupuy , dépofitaire intelli-.
gente du fecret , ne l'eût confacré elle-même à l'efpéce
d'immortalité , qu'elle a décernée avec tant
de zéle à la gloire de fon époux .
Il a été parlé de cette Machine dans le Mercure
des mois de Septembre & Octobre 1738. Aujour
d'hui on nous prie d'annoncer le Privilége du Roy ,
fur la bonté, & la fupériorité de cette Machine , fur
toutes celles de l'Hidraulique , & de l'ufage qu'on
peut en faire pour la Marine , attendu fon peu de
volume , & le peu de frais pour fa construction .
Le
NOVEMBRE . 1741. 2463
Le Sieur Denielles , ancien Chirurgien de l'Hôtel
de Ville de Paris , donne avis au Public , qu'il poffede
deux Remedes immanquables pour guerit radicalement
les maladies Lepreufes , Dartreufes &
fcrofuleufes. Il guerit la Lepre & les Dartres les
plus incurables par la tranfpiration , les felles , &
les urines ; par ces évacuations il détruit la caufe
intérieure & extérieure , en purifiant ainfi le vice
lepreux & dartreux, qui eft dans le fang : en quinze
jours toutes les parties galleufes du corps font deffechées
& nétoyées,& les démangeaifons que l'on a
fenties font auffi diffipées , & en fix femaines on eft
gueri , faus craindre aucun accident , ni retour. En
1713. il a gueri un Avocat de Province , Lepreux
de tout fon corps , à la réferve du vifage & des
mains. Cette Lepre étoit fi inveterée , qu'il l'avoit
des l'âge de deux ans , cependant il fut guéri
en fix femaines. En 1736. feu M. Maréchal , Premier
Chirurgien du Roi , chés qui le fieur Denielles
a demeuré , lui adreffa un Magiftrat , qui avoit
un mafque de Dartres fur fon vifage , & aux deux
bras ; il fut guéri en trente neuf jours . Le fieur Denielles,
compofe une très - bonne Pommade pour les
Dartres récentes , qu'il vend depuis trente fols jufqu'à
fix livres le pot. A l'égard des Ecroüelles qui
viennent fous la gorge , il les guérit par un Fondant
, gros comme un grain de poivre , que l'on
prend tous les jours jufqu'à parfaite guerifon , fans
alterer le temperament du Malade ; il ne convient
pas aux Pulmoniques. Il en a guéri avec une once ,
le plus a été avec deux onces & demie.On peut envoyer
par la pofte le Kemede . On le vend trente
livres P'once ; il eft en état de faire voir tous les
Malades qu'il a gueris , foit Lepreux , Dartreux , oa
Ecrouelleux, les perfonnes qui lui écriront , auront
la bonté de lui faire un détail de la maladie , depuis
Fij
for
2464 ME RCURE DE FRANCE
fon commencement , l'âge , le fexe , & la qualité
, d'affranchir leurs lettres & de les adreffer
à M. Denielles , ancien Chirurgien de l'Hôtel
de Ville, rue du Monceau S. Gervais, au Roy d'Efpagne
à Paris.
****************
CHANSON A BOIRE.
AH ! qui peut exprimer les maux
Que m'a faits l'injufte Climene !
#
La nuit , le jour , point de repos ;
Je portois en tous lieux mon amoureuſe peine ;
Grace aux Dieux , c'en eft fait , je vais me dégager;
L'Automne vient briſer ma chaîne ,
Bacchus prend fur lui le foin de me venger
Des rigueurs de mon inhumaine.
MUSETTE.
LIvrons - nous à la tendreffe ,
N'écoutons que nos défirs ;
La faifon de la jeuneffe
Eft la faifon des plaifirs.
*
Aimons , tout nous y convie
Formons des liens charmans ;
Les vrais plaifirs de la vie
Ne font que pour les Amans.
SPEC
BIBLIC
ce Monologue , adreire a la
fide dans ce Temple..
LYON
VILL
Fij
RAI
V2413
I
piamurs de la vie
Ne font que pour les Amans.
SPEC
NOVEMBRE. 1741. 2465
TestAASAA:AAAAAat
SPECTACLES.
E 31. du mois dernier , l'Académie
Royale de Mufique , qui continue tou
jours les Repréfentations de l'Opera d'Alcione
, en retrancha le Prologue , & donna
après le cinquiéme Acte de la même Piéce ',
un nouveau Divertiffement qui a pour titre
le Temple de Gnide , Paftorale en un Acte ,
dont voici en peu de mots le Sujet.
Quoique cette Paftorale , dont les paroles
font de M. du Bellis, foit ecrite avec foin, &
que le ftyle en foit très -lyrique , elle n'a pas
eû le fuccès qu'on s'en étoit promis , par la
raifon qu'il n'y a prefque point d'action ; elle
auroit pû être réduite en neuf ou dix Vers ,
qui auroient été plus que fuffifans pour
préparer la Fête qui les fuit ; il s'agit feule ,
ment dans ce Poëme de diftribuer le prix de
la Beauté , à celle qui le mérite le mieux , &
ce prix doit être d'autant plus glorieux , que
c'eft la Déeffe même de la Beauté qui le doit
adjuger. Voici en quoi confifte le peu d'ac
tion , qui a été inférée dans cette Paftorale .
La Scéne eft dans un Temple confacré à
Venus : une Bergere apellée Thémire , chante
ce Monologue , adreffé à la Déeffe , qui préfide
dans ce Temple.
Fij Non
2466 MERCURE DE FRANCE
Non , je n'afpire point au prix de la Beauté ;
C'eft
pour un bien plus doux , Venus , que je t'implore
;
Je borne ma félicité
A plaire au Berger que j'adore .
Je crains que mes foibles attraits
Sur fon coeur quelque jour ne perdent leur puif
fance ;
Exauce les voeux que je fais ;
Affûre moi de fa conftance.
Thémire fe retire & fe cache voyant aprocher
Hilas, qui eft ce même Berger, dont el
le vient de parler.
Hilas , fe croyant feul , invoque à fon tour
Venus , par ce Monologue.
Déeffe des Amours qu'en ce Temple on révere ,
Accepte l'hommage fincere
Du Mortel le plus Amoureux ;
Thémire , tu le ſçais , eſt l'objet qui m'engage ;
Quand je fais mon bonheur de vivre dans fee
noeuds ,
Epargne à mon amour le tourment rigoureux
De voir jamais fon coeur volage.
Thémire s'aproche d'Hilas qui ne doute
point qu'elle ne l'ait entendu ; ils fe confirment
réciproquement dans les fentimens
qu'ils viennent de faire paroître , par ce
Duo,
Divine
NOVEMBRE . 1741 2467
Divine Reine des Amours ,
Tu vois l'excès de notre zele
Déeffe , termine mes jours ,
Si je trahis jamais notre ardeur mutuelle.
Le Choeur de Bergers & de Bergeres
chante :
Regne fur nous , Divine Souveraine ;
Au gré de nos défirs , difpofe de nos coeurs ;
Le foin de mériter tes charmantes faveurs
Du bout de l'Univers près de toi nous amene .
Venus vient honorer cette Fête de fa prés
fence , fuivie des trois Graces.
Cette Déeffe après avoir témoigné fa recon
noiffance pour les hommages qu'on lui rend
dans fon Temple , s'exprime ainfi .
Faites
regner ici vos charmes les plus doux ,
Plaiſirs , qui volez fur mes traces ;
Jeunes Beautés , uniffez -vous aux Graces;
Cet honneur n'eft permis qu'à vous. "
Venus donne le Prix de la Beauté à Thê
míre ; voici comment elle s'explique .
C'en eft fait , je vois la Mortelle
Qui fixe le choix de Venus ;
Thémire , en ta faveur , je ne balance plus ;
Graces , courronnez cette Belle .
Elle ajoûte , en faveur d'Hilas :
2468 MERCURE DE FRANCE
1
Quand je couronne tes apas ,
Je voudrois rendre encor ton ame plus contente ;
Mais Venus même ne peut pas 1
Rendre Hilas plus épris , Thémire plus charmante.
La Dlle Chevalier , qui a fait le rôle de
Venus , s'en eft parfaitement acquitée , elle
brille beaucoup par la beauté de fa voix &
par celle de fes cadences .
Entre les differentes Danfes de la Paftorale
, le Pas de trois des Graces a été parfaitement
bien executé par les Dlles le Breton ,
Fremicourt & le Duc. La Dile Fel , dont
l'heureux talent fe perfectionne tous les jours,
a chanté une Cantate Italienne avec toutes
les graces qui conviennent à ce genre de
Mufique. Cet agréable divertiffement a été
terminé par les Caractéres de la Danfe , que
la Dlle Cochois a exécutés avec autant de
legereté que de préciſion.
Le 14. Novembre , la même Académie remit
au Théatre la Paftorale Héroïque d'Iffé ,
qui n'avoit pas été reprife depuis le mois de
Novembre 1733- Cette Piéce , dont le Poëme
eft de feu M. de la Mothe , de l'Académie
Françoife , & la Muſique de M. Deftouches,
Sur Intendant de la Mufique du Roy , a toûjours
été re të avec de grands aplaudiffemens,
toutes les fois qu'elle a été remiſe au Théa
tre ; la repréſentation d'aujourd'hui eft des
plus
NOVEMBRE. 1741. 2469.
plus brillantes ; la Dlle le Maure y chante le
même rolle d'Iffe , qu'elle avoir joüé à la
précedente reprife ; celui de Doris eft rempli
par la Dlle Fel ; les fieurs le Page & Albert
jouent les rolles d'Apollon de Pan &
d'Hilas. Les Divertiffemens compofés par
le fieur Dupré , ont été trouvés variés , trèsbien
deffinés , & convenables aux differens
caractéres de la Piéce , & parfaitement bien
executés par les meilleurs Sujets de l'Académie.
La même Académie remit au Théatre. le
23. le Ballet Héroïque de l'Empire de l'Amour
, qui avoit été donné au mois de Mai
dernier , & qu'on doit donner les Jeudis.
B
⚫ Nous avons donné l'Extrait de la Paftorale
d'iffé, très - circonftancié , dans le premier Volume
de Décembre 1733. pag. 2679.
Le 6. Novembre , les Comédiens François
donnerent la premiere repréfentation
d'une Tragédie nouvelle , qui a pour titre,
Antoine & Cléopatre , de la compofition de
M. Boitel , & fon premier Ouvrage de
Théatre ; les deux premiers rolles de la
Piéce , d'Antoine & de Cléopatre , font joués
par le fieur Grandval , & par la Dlle Gauffin;
le 18.on en donna la fixiéme & derniere
repréſentation , après laquelle , l'Auteur
trouva à propos de retirer la Piéce.
F vj Lc
2470 MERCURE DE FRANCE
Le 13. Novembre , les Comédiens Ita
liens repréſenterent la Comédie d'Arlequin
Enfant , Statue & Perroquet , dont le principal
perfonnage fut joué par le fieur . Carlin,
nouvel Arlequin ,avec l'aplaudiffement du
Public. Le Prince de Condé honora cette
Piéce de fa préfence , laquelle eft ornée de
trois Divertiffemens ; la Matelote , les En
fans Jardiniers , & le Badinage , executés
par la Dlle Roland , par les deux Enfans du
fieur Poitiers , & par les autres Danfeurs de
la Troupe , dont on a déja parlé avec éloge.
NOUVELLES ETRANGERES.
TURQUI E.
Na apris de Conftantinople du 9. Septembre
O dernier ,que les difficulter qui efardo,en
xécution du dernier Traité , conclu à Bellegrade entre
le Grand Seigneur & le Czar , ayant été levées ,
le Grand Vifir & le Géneral Romanzoff , Ambaſſadeur
Extraordinaire de S. M. Cz . fignerent le 8. le
premier , au nom de Sa Hauteffe , & le fecond , au
nom du Czar , une Convention , laquelle contient
trois Articles .
Il a été reglé par cette Convention, que le Grand
Seigneur , voulant affermir la paix & la rendre folide
, accordera au Czar & à fes Succeffeurs , ainfi
que Sa Hauteffe en eft convenue par le douzième
Article du Traité de Bellegrade,le Titre d'Empereur
dans
NOVEMBRE. 1741 247
-
dans tous les Actes de Negociation , qui feront faits
entre les deux Puiffances ; que fuivant ce qui a été
ftipulé par le feptiéme article du même Traité , on
rendra de part & d'autre tous les Efclaves faits dans
la derniere guerre , à l'exception de ceux qui fe
feront faits Chrétiens dans les Etats du Czar , ou
qui auront embraffé le Mahometifme dans les Etats
du Grand Seigneur que les deux Puiflances auront
foin , chacune de leur côté , de faire remettre en
liberté , Lans aucun délai & fans rançon , tous ceux
qui feront demeurés fideles à leur Religion , &
qu'elles enverront pour cet effet dans toutes les
Villes & dans tous les Lieux de leur dépendance ,
des perfonnes chargées des ordres les plus pofitifs ,
pour faire publier & exécuter leurs intentions à cer
égard ; que pour le bien & l'avantage des deux
Etats,Afoph fera entierement démoli, qu'on enverra
de part & d'autre des gens pour y travailler auffitôt
qu'ils y feroient arrivés, & que cette démolition
ne pourra être differée fous aucun prétexte .
a
Après que cette Convention eut été fignée , on fit
l'échange des Actes refpectifs en préfence du Mufty
, des Vifirs du Banc , des deux Cadileskers & de
tous les Pachas qui fe trouverent à Conftantinople. ,
Le Grand Vifir & l'Ambaffadeur fe complimenterent
enfuite fur la fignature de la Convention , &
ils fe promirent réciproquement qu'ils ne négli
geroient rien pour affermir la bonne intelligence
entre la Porte & la Cour de Ruffie . Avant que le
Géneral Romanzoff fe retirât , le Grand Vifir lui .
fit préfent d'une Peliffe de Martre Zibeline , & il fit
diftribuer d'autres Pelifles très - belles à Mrs Cagnoni
& Wifniakow , Confeillers de l'Ambaffade , &.
à tous les Mofcovites qui avoient accompagné
l'Ambaladeur à l'audience .
Le même jour , le Géneral Romanzoff dépêcha
2472 MERCURE DE FRANCE
un courier à la Princeffe Régente de Mofcovie
pour lui porter la Convention fignée par le Grand
Vific.
RUSSIE.
O qui ont été faite prifonniers dans le Sunbas
N aprend de Petersbourg , que les Suedois
de Willmanftrand , y ont été conduits , & qu'il y a
parmi eux plufieurs Officiers.
Le Major General Wrangel eft refté à Wybourg,
parce que fes bleffares ne lui out pas permis de fe
rendre à Petersbourg.
La Princeffe Régente a reçû une Relation plus
circonftanciée de ce Combat , que le Feldt Maréchal
Leicy lui a envoyée par le Major Keyth , neveu
du Géneral de ce nom , & felon cette derniere
Relation , la perte des Mofcovites eft beaucoup plus
confidérable qu'on ne l'avoit crû .
On a apris que la Flotte du Roy de Suede , la
quelle croifor depuis quelque tems à la hauteur du
Port de Petersbourg , s'étoit retirée.
Sur Pavis que plufieurs Vaiffeaux de cette Flotte
avoient fait volle vers Archangel dans le deffein
d'attaquer l'Efcadre qui en devoit partir fous les
ordres du Contre Amiral Brehdal , pour se rendre
à Petersbourg , le Czar a mandé à ce Contre- Amiral
de ne point fortir du Port
Les Officiers Suedois qui ont été faits prifonniers
dans le Combat de Willmanftrand , font logés
chés les principaux Seigneurs de la Cour , auxquel,
la Princeffe Régente a recommandé d'en
avoir foin, & il leur eft permis de fe promener fans,
gardes dans la Ville . Ils ont tous été admis à rendre
leurs refpect à la Princeffe R gente , & M. de
Schepelewaréchal de la Cour , les a traités à dî
ner , par ordre du Czar.
1
Le
NOVEMBRE. 1741. 2473
Le Géneral Keyth , qui commande l'armée de
S. M. Cz. en Finlande, pendant l'abſence du Feldt-
Maréchal Lefcy , a envoyé le 4 du mois dernier à
la Princeffe Régente le détail ſuivant.
Le 30. Septembre dernier , un détachement de
Dragons des troupes Mofcovites s'avança jufqu'à
Welioke , pour fourager dans le Pays ennemi, & il
revint le foir au Camp avec une allés grande quanti➡
té de fourage.
pu
le
On aprit le même jour par un déferteur Suedois ,
que le Comte Leuwenhaupt , Géneral en Chef de
P'Armée du Roy de Suede , avoit fait marcher un
détachement , tant pour obferver les mouvemens
des Troupes Mofcovites , que pour couvrir le pofte
de Welioke , où il avoit mis 250. hommes, & que
depuis il avoit envoyé deux Compagnies de Dragons
& cent Soldats des Galeres de S. M. Suedoife,
pour renforcer ce détachement , lequel avoit rompont
qui étoit fur la petite riviere de Welioke.
Sur cet avis le Géneral Keyth donna ordre à
M. Cofurin , Lieutenant Colonel du Régiment de
Dragons d'Ingermanie , qu'il détacha avec cent
Grenadiers à cheval , 150. Huffards & un pareil
nombre de Cofaques du Tanais , de paffer cette riviere
dans un endroit où elle eft guéable , & d'attaquer
le détachement des ennemis, Le Lieutenant
Colonel Boschitz fut détaché en même- tems avec
200. Dragons & so. Huffards , pour attaquer ce
détachement d'un autre côté .
"
M. Cofturin étant arrivé le 2. du mois dernier à
fept heures du matin fur le bord de la riviere de
Welioke , il trouva le détachement des ennemis
qui s'étoit pofté à l'autre côté de cette riviere , pour
lui en difpter le paffage . Ce détachement foûting
pendant quelque tems avec beaucoup de valeur le
feu des troupes commandées par M. Cofturio , mais
les
1474 MERCURE DE FRANCE
4
les Suedois ayant été avertis que 200 Dragons &
so. Huffards avoient paffé la riviere en un autre
endroit , pour les prendre en flanc , ils fe retirerent
du côté de Friederichsham.
Le Confeil de guerre a ordonné depuis , qu'on transférât
à Moſcow les Officiers Suedois qui ont été faits
prifonniers à Willmanftrand ; ils y auront la même
Liberté dont ils ont joui à Petersbourg , & ils feront
logés chés les principales perfonnes de la Ville.
SUEDE.
Lesparticularités du Combat du s.
E Roy n'avoit apris que fort imparfaitement
nier par la premiere Relation . S. M. S. en a reçû.
une plus exacte par le Comte de Leuwenhaupt
Géueral en Chef de fes troupes , lequel s'eft fait
inftruire depuis fon arrivée en Finlande , de toutes
les circonstances de cette affaire ; voici le détail que.
contient cette nouvelle Relation .
>
Le Baron de Wrangel , Major General , qui
commandoit un Corps de troupes de 2800. hommes,
& qui étoit campé avec ce Corps à neuf lieuës
de Willmanftrand , petit Bourg fans fortifications
& entouré fimplement d'un follé & d'un rempart ,
garni de quatorze piéces de canon , ayant apris
que le Feldt- Maréchal Lefay marchoit avec 16000 .
Mofcovites du côté de ce Bourg , il s'avança à trois.
quarts de lieuë de Willmanftrand , afin de défendre
ce pofte. Ce Major General rangea fes troupes
en bataille dans une plaine fituée entre deux Lacs
pour ne point être envelopé par les Mofcovites , & -
il attendit les ennemis , qui marchant fur trois lignes
, l'attaquerent à deux heures après midi , en.
faifant un feu très vif d'artillerie & de moufqueterie
. Il défendit qu'on tirar un feul coup juſqu'à ce
qu'ils.
NOVEMBRE . 1741 2475
qu'ils fe fuffent aprochés , & lorfqu'ils ne furent
qu'à trente pas , il fit faire une décharge génerale
qui abattit des rangs entiers . Auffi- tôt les Suedois
marcherent , l'Infanterie la bayonnette au bout du
fufil , & la Cavalerie l'épée à la main , ils enfoncerent
les deux premieres lignes de l'ennemi , & s'étant
rendus maîtres de fon artillerie , ils auroient
pû la tourner contre lui , s'ils avoient eû aflés de
monde pour s'en fervir .
Animés par cet avantage , ils fe diſpoſoient à
renverſe la troifiéme ligne , mais les Mofcovites
ayant été joints pendant le Combat par deux des
Régimens des Gardes à pied du Czar , ils fe rallierent
derriere cette Ligne , qui fe trouva alors affés
forte , non feulement pour réfifter aux efforts des
Suedois , mais encore pour les repouffer Une fi grande
ardeur avoit emporté ceux - ci , qu'ils s'étoient avancés
au - delà du terrain apuyé par les deux Lacs qui
couvroient leurs flancs , & ils furent envelopés . Ils
fe défendirent alors avec autant de valeur qu'ils en
avoient marqué en attaquant , & après avoir confumé
leurs bales , il fe fervirent de celles de leurs
camarades qui avoient été tués . Leurs efforts eurent
un fi heureux fuccès , qu'ils trouverent le
moyen de fe faire jour au travers des ennemis , &
de fe retirer dans Willmanftrand , après avoir combattu
jufqu'à huit heures du foir. Ils fe mirent en
bataille fur le rempart & étant réfolus de fe défendre
jufqu'à la derniere extremité , ils firent un fi
grand feu für les troupes qui les avoient pourfuivis
, que les foffés fe trouverent prefque comblés
de corps morts.
Cependant les ennemis étant fi fupérieurs en
nombre , les Suedois ne purent les empêcher d'entrer
dans le Bourg , & ils l'abandonnerent pour fe
retirer dans une Iſle voiûine . Le Feldt- Maréchal
Lefcy
2476 MERCURE DE FRANCE
> Lefcy fit mettre le feu au Bourg & les Suedois
comptoient qu'il les attaqueroit encore le
lendemain , orfqu'ils aprirent que ce Géneral ,
qui a été bleflé , ayant reçû avis que le Géneral Bodenbroeck
, dès qu'il avoit été informé que le Major
General Wrangel , don : il étoit éloigné de dixhuit
lieuës , étoit aux mains avec les Mofcovites ,
s'etoit mis en marche pour le fecourir , il étoit retourné
avec précipitation for fes pas , ne fe donnant
pas même le tems d'enterrer fes morts , ni d'enlever
le peu d'artillerie qui étoit à Willmanftrand ,
d'où il n'a emmené que deux pièces de canon . La
per e de Suedois ne monte qu'à mille hommes ,
felon le raport de quelques prifonniers qu . fe font
échapés des mains des Mofcovites , les Offi ir des
ennemis avoüent qu'ils en ont perdu 30. tant
dans le Combat que dans l'attaque du Bourg, On
ne fçait pas encore au jufte les Officiers Suedois de
marque qui ont été tués ou faits prifonniers ; on
fçait feulement que du nombre des derniers font le
Baron de Wrangel , qui commandoit , & le Conte
de Wafabork, Lieutenant Colonel. M. de Bildſtein,
Colonel , & M. de Brandebourg , Lieutenant Colonel
, ont été tués.
&
Le Comte de Leuvenhaupt , Géneral en Chef de
l'armée Suedoife , a mandé au Roy que les troupes
de S. M. étoient campées fous Uhrani , entre Abo
& Friederichsham , & qu'après le Combat de Willmanftrand
, l'armée du Czar avoit ruiné en fe retirant
tout le Pays qui eft entre Willmanftrand &
Wybourg.
Će Géneral a mandé en même- tems qu'il avoit
fait marcher quelques détachemens , qui s'étoient
avancés fors près de cette derniere Place , fans rencontrer
un feul parti des ennemis.
Les troupes témoignent une grande impatience
de
NOVEMBRE . 1741. 2477
de rencontrer les Mofcovites , pour pouvoir fe venger
de l'avantage remporté par ces derniers près de
-Willmanftrand .
On a reçû avis de Finlande , que le 2. du mois
dernier , un détachement des troupes du Roy avoit
été attaqué fur le bord de la riviere de Welioke par
´un détachement de l'armée Mofcovite , lequel
étant fort fupérieur en nombre , l'avoit obligé d'abandonner
le pofte qu'il occupoit.
On a apris en même tems , que plufieurs partis ;
qui avoient été détachés par le Géneral Leuwenhaupt
, pour aller reconnoître les ennemis , étoient
retournés au Camp le 25. Septembre dernier , &
que quelques prifonniers qu'ils ont faits , avoient
affûré que le Géneral Keyth devoit bien - tôt faire.
entrer en quartiers d'hyver les troupes qui étoient
fous fes ordres.
Le 30. la Cavalerie
Suedoife
alla
faire
un fourage
dans
le Pays
ennemi
, fans
trouver
la moindre
opofition
de la part
des Mofcovites
.
L'armée du Roy a des vivres en abondance , &
les Payfans de tous les Villages voifins , même ceux
de quelques Villages qui apartiennent au Czar , en
portent une grande quantité.
Plufieurs des habitans de ces derniers Villages ſe
font retirés fur les Terres de la domination du Roy
avec leurs effets & leurs beftiaux , & ils témoignent
beaucoup de zéle pour le fuccès des armes de
S. M.
Le Comte de Leuwenhaupt , pour garantir les
troupes du froid , leur a fait conftruire des efpeces
de Cazernes , qui font enfoncées à moitié dans In
terre , & dans lefquelles on peut faire du feu.
ALLA
478 MERCURE DE FRANCE
O
ALLEMAGNE.
Na apris de Presbourg du 30. du mois dernier
, que les troupes Françoiſes & Bavaroiſes,
qui font dans la Haute - Autriche , s'étoient remiſes
en marche , pour s'aprocher de Vienne , & que le
Comte de Kevenhuller , qui y commande , continuoit
de prendre toutes les précautions néceffaires .
pour mettre la Place en état de faire une longue
réfiſtance. 7000 hommes travaillent aux nouveaux
ouvrages que la Reine a ordonné d'ajoûter aux
Fortifications , & l'on a conftruit un grand nombre
de Saïques , pour s'en fervir fur le Danube .
Les Lettres reçûës de la Haute -Autriche portent
que l'Electeur de Baviere en avoit convoqué
les Etats , & qu'ils ont dû´s'affembler le 2. de ce
mois pour
le reconnoître en qualité de Souverain .
On a apris de Vienne du 7. du mois dernier que
les Régimens d'Infanterie de Molck , de Bareith &
de Waldeck , & un Régiment de Croates , qui
étoient campés dans les environs de cette Ville ,
Y font entrés , pour y demeurer en garniſon .
La Ville a levé à fes dépens un nouveau Régiment
, qui portera le nom du Régiment des Gardes
de la Ville , & à qui la Reine a accordé les
mêmes prérogatives qu'aux Régimens de fes troupes
. Ce Régiment montera la garde dans tous les
poftes , alternativement avec ceux de la garniſon .
Le 4. du mois dernier , cinq Compagnies de
Rafciens arriverent à Vienne , & elles furent fuivies
le 6. par deux autres . Deux Compagnies de
Huffards , qui ont été levées dans le District de
Raab , fe rendirent auffi le.s. en cette Ville. Les
unes & les autres devoient aller occuper divers poftes
le long du Danube , pour obferver les mouvemens
des troupes de l'Electeur de Baviere.
NOVEMBRE. 1741 2479 :
On a raffemblé les Gardes des Chaffes & les
Payfans qui ont la réputation de tirer avec plus
d'adreffe , & l'on en a formé un Régiment. Les
nouveaux ouvrages qu'on ajoûte aux fortifications ,
font fort avancés .
Un Trompette de l'armée de l'Electeur de Baviere
arriva à Vienne d'Ips le 7. du mois dernier , &
il remit au Comte de Kevenhuller des lettres que
ce Géneral envoya aufli - tôt à la Reine . S. M. dépêcha
le lendemain un courier au Comte de Kevenhuller
, pour lui faire fçavoir ſes intentions au
fujet de ce que ces lettres contenoient , & le même
jour , le Comte de Kevenhuller renvoya le Trompette
à l'Electeur de Baviere.
ce On mande de Lintz , du de 9.
mois , que,
l'armée de l'Electeur de Baviere , qui étoit partie du
Camp près de cette Ville le 22. du mois dernier
paffa l'Ens fur trois ponts le premier de ce. mois ;
qu'elle a marché enfuite à Erla , d'où elle eft allée
le 3. camper à Strimberg ; qu'elle s'eft avan
cée le s. à Ambfteten , & qu'elle s'eft renduë à Ips
le 6. & le 7 .
Le Comte de Saxe , qui étoit arrivé à Ens le 19 .
du mois dernier, avec les troupes Françoiſes qui ont
marché fous les ordres , fut détaché le premier de
ce mois avec huit Compagnies de Grenadiers ,
deux Régimens de Dragons , un de Huffards &
quatre Compagnies Franches , pour éloigner quelques
détachemens des ennemis poftés le long du
Danube. Le Comte de Saxe s'avança ce jour là jufqu'à
Ambfteten , après avoir obligé les détache
mens des ennemis de fe retirer , & après leur avoir
fait prifonniers quelques Dragons & Huffards.
L'Electeur de Baviere retourna à Lintz le premier,
& il y trouva la divifion des troupes Françoi-
Les commandée par le Comte de Segur , arrivée de
la
2480 MERCURE DE FRANCE
la veille , & qui avoit eû ordre d'y attendre ce
Prince , lequel reçût le lendemain le Serment de
Fidelité des Etats de la Haute-Autriche. L'Electeur
en habit de cérémonie , fortit du Château vers les
onze heures , & ayant monté à cheval , il fe rendit
à la grande Eglife , étant précédé du Grand Maréchal
de la Haute Autriche , qui portoit devant lui'
l'Epée nuë. L'Electeur étoit accompagné de fes
Grands Officiers & de ceux des Etats de la Haute-
Autriche , lefquels avoient les marques de leurs Dignités
; ce Prince étoit fuivi de fes Gardes du
Corps , & les rues qu'il traverfa pour aller à l'Egli
fe , étoient bordées d'une haye formée par le Régiment
des Gardes & par quelques Compagnies de
Grenadiers. L'Electeur après avoir affitté à la grande
Mefle , retourna au Château dans le même ordre
obfervé lorsqu'il en étoit forti , & il reçût le
ferment de fidelité du Clergé , de la Nobleffe , de
la Bourgeoifie & des Députés des Villes de la Haute-
Autriche. On chanta enfuite le Te Deum dans la
Chapelle du Château , au bruit de trois falves de
l'artillerie & de plufieurs décharges de moufqueterie
, & après le Te Deum , il y eut un grand repas,
dans lequel l'Electeur , qui étoit feul à fa table , fut
fervi par lesOfficiers des Etats de la Haute - Autriche.
Ce Prince partit de Lintz le 4. pour retourner à
l'armée , avec la divifion des troupes Françoiſes
qui y étoit.
On a reçû avis d'Opperſdorff du 3. du mois dernier
, que le Comte de Neuperg ayant été informé
que le 27. & le 28. du mois dernier l'armée
du Roy de Pruffe avoit paffé la riviere de Neiff , il
quitta le camp de Neuntz , & qu'il alla camper à
Öpperſdorff , afin d'être à portée de couvrir la Mo¬
ravie.
S. M. Pr. qui avoit établi le 28 , fon camp à Pellitz
,
NOVEMBRE. 1741. 248
litz , fe remit en marche le lendemain , pour s'a➡
procher de Franckenberg , & le Comte de Neuperg
ayant envoyé un Corps confidérable de Huffards
, de Croates & de Pandoures , fous les ordres
du Baron de Trips , pour inquieter les ennemis , le
Lieutenant Colonel Marwitz , que ce Baron détacha
avec 200. Huffards & quelques Pandoures ,
pour les reconnoître , attaqua le fabre à la main un
de leurs détachemens , qu'il rencontra à l'entrée
d'un bois , & il le mit en déroute . On a fait aux
Pruffiens en cette occafion 41. prifonniers , du
nombre defquels eft un Lieutenant de Huilards.

Le premier Octobré , les ennemis firent un nouveau
mouvement , qui donna lieu de croire qu'ils
avoient deffein de s'aprocher de la Ville de Neiff,
mais la grande abondance de pluye avoit rendu
les chemins tellement impratiquables , que le Roy de
Pruffe n'ayant pu faire avancer fon artillerie , il fut
obligé de retourner dans fon camp . Ce Prince pafla
3. du mois dernier l'Oder , & il alla camper dans
les environs d'Oppelen.
le
On mande de Breflaw du 15. du mois dernier
que l'armée Pruffienne s'eft avancée entre Friedland
& Neustadt , près de l'endroit où la riviere de
Brundnitz fe jette dans l'Oder , & que le Roy de
Pruffe a fait occuper Oppelen par un détachement
de fes
troupes.
Le Comte de Neuperg , qui a craint d'être attaqué
par S. M. Pr quitta le 7. le camp d'Opperrff
, & il s'eft retiré du côté de Willhemftal avec
troupes qu'il commande . les
Le Roy de Pruffe ayant réfolu de fe faire prêter
ferment de Fidelité par les Etats de la Bafle Silefie
, S. M. Pr. fixé cette cérémonie au 31 du mois
dernier , & elle a fait publier une Lettre Circulaire
, adreffée aux Etats , laquelle porte que comme
482 MERCURE DE FRANCE
il a plû à Dieu de bénir les armes qu'elle a prifes
pour le faire reftituer plufieurs Principautés qui lui
apartiennent par droit de fucceffion , & comme
avec la Protection Divine elle a eû le bonheur de
s'emparer de toute la Baffe Silefie , depuis la Principauté
de Croffen jufqu'à la riviere de Neiff , eny
comprenant les Principautés de Munsterberg & de
Grotkau , il ne lui refte plus pour s'affermir dans
cette Province , qu'à fe faire rendre hommage par
les Vaffaux & Sujets qui en dépendent , qu'elle a
choifi la Ville de Breflaw pour cette cérémonie , &
qu'elle ordonne à tous les Princes & Etats , rele
vans du Duché de la Baffe Silefie ou des Principautés
de Munſterberg & de Grotkau , de s'y rendre
deux jours avant celui qu'elle a fixé pour la preſtation
de ferment ; que fi quelques uns d'eux refufent
de comparoître , foit en perfonne , foit par
Députés munis de pleins pouvoirs , à l'affemblée
des Etats folemnellement convoqués , ils feront
regardés comme des Vaffaux & Sujets défobeiffans ;
qu'on procedera contre eux , conformément à
POrdonnance publiée le 30. Septembre dernier ,
dans le camp de Reichenbach , & qu'ils fubiront
les peines portées par les Difpofitions du Droit
Commun ; qu'il fuffira que les Princes , Prélats ,
Comtes & Barons , envoyent chacun deux Députés
; que les autres Etats feront obligés d'en envoyer
quatre , & que pour ce qui regarde les Villes
, il faudra que leurs Députations foient com
pofées de leurs Syndics & de deux de leurs plu
anciens Magiftrats.
La Reine a envoyé ordre au Comte de Neuperg ,
d'abandonner la Silefie , & l'on prétend que l'armée
commandée par ce Général ſe rendra dans les environs
de Vienne.
Les nouveaux ouvrages qu'on ajoûte aux fortifications
NOVEMBRE . 1741 . 2483
tifications de cette Ville avancent beaucoup , &
l'on a déjà commencé à y placer les batteries.
En conféquence des ordres de la Reine , les Régimens
de Huffards de Czacky & de Peſtwarmagay
partirent de Jagerfdorff ie 9. du mois dernier , ¡e´9.
pour fe rendre dans le Royaume de Boheme. Le
même jour & le jour fuivant , les piéces de campagne
, qu'on avoit diftribuées à chaque Régiment ,
furent conduites au Parc d'Artillerie.
1500. hommes de la garnifon de Neiff fortireut
de cette Place le 11. & ils allerent joindre Parmée ;
ils avoient avec eux cinq canons & quarante chariots
chargés de munitions.
Le 12. on continua de faire fortir des troupes de
laVille de Neiff, où il n'eft resté que 1000. hommes
en garnifon, & une partie des munitions de guerre
& de bouche , qui y étoient dans les magafins .
L'armée quitra le 14. le camp de Grieff qu'elle
occupoit depuis quelques jours , & ayant marché
fans s'arrêter , elle arriva le 6. du mois dernier à
Grobendorff , d'où elle fe rendit le lendemain dans
les environs de cette Ville.
On mande de Francfort du 29. du mois dernier ,
que le Baron de Schomberg , Premier Amballadeur
du Roy de Pologne , Electeur de Saxe , a déclaré
aux Ambaſſadeurs qui réfident à Francfort de la
part des autres Electeurs , que S. M. Pol. étoit d'avis
, ainfi que les Electeurs de Baviere & de Cologne
, l'Electeur Palatin & le Roy de Pruffe , qu'on
fufpendît à la prochaine Election de l'Empereur , le
Suffrage de Boheme , mais qu'on devoit convenir
que cette fufpenfion ne feroit d'aucune conféquence
pour l'avenir ; qu'elle ne porteroit aucun préju
dice , ni au College Electoral en général , ni à
aucun Electeur en particulier , & qu'on fe feroit
toûjours une loi inviolable de fuivre ce qui eft pref
G crit
2484 MERCURE DE FRANCE
·
crit par la Bulle d'Or & par les Conftitutions de
PEmpire.
Al'occafion de cette Déclaration , le Baron Hillebrand
de Brandau , Miniftre de la Reine de Hongrie
, a fait une nouvelle . Proteftation , laquelle
porte que cette Princefie ne peut confentir de fe
laiſler priver de l'exercice de la Dignité Electorale
attachée à la Couronne de Boheme , & qu'elle eft
déterminée à s'opofer de tout fon pouvoir à une
décifion fi contraire aux droits qu'elle prétend lu
apartenir.
Le Maréchal de Belle -Ifle a notifié au Direc
toire de Mayence fon caractére d'Ambaſſadeur Extraordinaire
& Plénipotentiare du Roy de France
auprès de la Diette , & les Magiftrats de cette Ville
lui ont envoyé les préfens accoûtumés .

Le 26. du inois dernier , tous les Ambaffadeurs
des Electeurs s'affemblerent à l'Hôtel de Ville ,
ils tinrent leur première conférence au fujet de l'Election
de l'Empereur.
On mande de Francfort du 12 de ce mois , que
le Maréchal de Belle - Ifle , Ambaſſadeur Extraordi
naire & Plénipotentiaire du Roy de France auprès
de la Diette , qui doit fe tenir pour l'Election d'un
Empereur , rendit le 1o. fa premiere vifite publique
à l'Electeur de Mayence , & que la marche ſe fit
dans l'ordre fuivant.
. Deux caroffes à fix chevaux ; quatre Coureurs ,
marchant de front ; la livrée de l'Ambaſſadeur ; fes
Pages , précedés de leur Gouverneur , un Ecuyer &
huit Gentilshommes ; le caroffe dans lequel étoit
l'Ambaffadeur , & aux deux portieres duquel marchoient
le Capitaine & le Lieutenant de fes Gardes,
Plufieurs Heyduques fuivoient le caroffe de l'Ambaffadeur
, & la marche étoit fermée par deux casoffes
à fix chevaux , remplis par les François qui
font
NOVEMBRE . 1741 . 2485
à Francfort. Tous les Gentilshommes & les domestiques
, qui précedoient le caroffe du Maréchal
de Belle- Ifle , étoient à pied , & cet Ambaſſadeur
étoit en manteau , le Colier de l'Ordre du S. Efprit
pardeffus.
En arrivant au Palais du Compoſtel , qu'occupe
l'Electeur de Mayence , il trouva dans la Place visà
- vis ce Palais , la grande Garde fous les armes , laquelle
battit aux champs , & dont les Officiers le
faluerent de l'Efponton , à la porte du Palais un détachement
de Dragons ; dans la Cour , les Gardes
de l'Electeur en haye , le moufqueton fur le bras ,
& au pied de l'escalier les Pages & la livrée de l'Electeur.
Le Maréchal de Belle- Ifle fut reçû à la defcente
du caroffe par ce Prince , qui étoit en habit de céremonie
, & pendant qu'ils fe complimenterent, les
Gentilshommes de leur fuite & leurs Pages allerent
fe ranger en haye , ceux - ci dans la Sale des
Gardes , & les autres dans la Sale fuivante : la troi
fiéme Sale étoit occupée par les Prélats & les Chanoines
du Chapitre de Mayence .
L'Electeur ayant conduit le Maréchal de Belle-
Ile à l'escalier , ils fe couvrirent , & ils le monterent
de front , l'Ambaffadeur ayant la droite &
l'Electeur lui donnant le pas aux portes. Après
qu'ils eurent traverfé la Sale des Gardes & celle où
étoient leurs Gentilshommes , ils fe découvrirent
pour traverfer celle où étoient les Prélats & les Chanoines
de Mayence. Lorfque le Maréchal de Belle-
Ifle fut entré avec l'Electeur dans la Sale d'audience
, on en ferma les portes , & ils fe placerent visà-
vis l'un de l'autre dans deux fauteuils qui étoient
fous le Dais. Pendant la vifite , qui dura un quart
d'heure , ils demeurerent couverts ; l'Electeur donna
à l'Ambaffadeur le titre d'Excellence & l'Am-
Gij baffadeu
2486 MERCURE DE FRANCE
baffadeur donna à l'Electeur celui d'Alteffe Electo.
rale . L'Electeur reconduifit enfuite le Maréchal de
Belle Ifle jufqu'à fon caroffe , & il ne remonta l'efcalier
qu'après qu'il cut vû partir cet Ambaſſadeur.
LETTRES Patentes du Roy, données à l'Electeur
de Baviere , pour commander les
Troupes de France en Allemagne.
OUIS , par la Grace de Dieu , & c. notre très-
Lcher &ame Frerede Coufin P'Electeur de Ba
viere , nous ayant requis de lui accorder les fecours
néceffaires pour prévenir les Entrepriſes des ennemis
qui l'environnent , & dont les difpofitions tendent
à s'opofer par la force à la pourfuite qu'il ne
peut fe difpenfer de faire des droits légitimes de fa
Maiſon , nous nous fommes portés d'autant plus
volontiers à faire pafler dans fes Etats notre Armée
auxiliaire , que nous fommes nous- mêmes intereffés
à le fou enir. Pour ces caufes , nous l'avons
conftitué notre Lieutenant Géneral pour reprefenter
notre Perfonne en notre Armée d'Allemagne ,
avec plein- pouvoir & autorité de commander à tou
tes les Troupes , tant d'Infanterie que de Cavalerie ,
Françoife & Etrangere , dont notre Armée fera
compofée , leur ordonner ce qu'elles auront à fai¬
re , & les employer partout où befoin fera , s'opofer
aux entreprifes des ennemis communs , entrer
même , s'il en eft befoin , dans leurs Pays , y affieger
& faire battre les Villes , Places & Châteaux ,
les emporter de force , & les prendre à compofition ,
leur livrer bataille , rencontres , efcarmouches , &
faire tous autres Actes & Exploits de guerre , faire
faire les Montres & Revûes de nos Gens de guerre
par lesCommiflaires ordinaires de nosGuerres, commander
à tous nos Officiers d'Artillerie & des Vivres,
étant
NOVEMBRE. 1741 2487
2
étant dans notre Armée , &c . Si donnons en Man™
dement à nos amés & féaux Lieutenans Géneraux
&c. Données à Verſailles le 20. Août 1741. Signées
LOUIS. Et fcellées . Et plus bas : Par le Roy.
BRETEUIL.
On a apris de Munich , que l'Electeur de Baviere
avant que de fe mettre à la tête de fes Troupes
fait publier le Manifefte fuivant .
MANIFESTE de l'Electeur
de Baviere,
'Europe entiere eft inftruite des droits incontef
tables de la Séreniffime Maifon de BAVIERE
fur plufieurs des Royaumes & Etats que poffedoit
le feu Empereur CHARLES VI . Et l'Electeur de
BAVIBRE ne pourroit , fans manquer effentiellement
à ce qu'il doit à fa Maiſon , & à ce qu'il fe doit
à lui même , abandonner ou négliger des prétentions
auffi juftes que celles qu'il forme fur la fucceffion
Autrichienne.
Ce n'est qu'avec regret , que malgré fon amour
naturel & conftant pour la paix, il fe voit forcé par
les hauteurs & l'obftination de la Cour de Vienne,
à recourir à des moyens plus efficaces de fe faire
rendre la justice qui lui eft due.
Ce n'eft ni par efprit de conquête , ni par des
vues d'ambition , qu'il fort des bornes de la modération
,dont jufqu'ici il ne s'étoit point encore écarté;
& l'obligation indifpenfable où il eft de reclamer
le patrimoine de fa Maifon , ainfi que l'héritage à
lui dévolu , forme le feul motif de la réfolution
qu'il prend d'employer au maintien de fon honneur,&
à la confervation de fes droits, toutes les forces
& toute la reffource que la Providence Divine
lui a ménagées.
G iij Un e
2488 MERCURE DE FRANCE
Une récapitulation fimple & fuccincte des faits
& des moyens amplement déduits dans le dernier
Mémoire , ne laiffera à ceux ,
fous les yeux de qui
cet ouvrage n'a point encore paffé , aucun doute
fur la légitimit des prétentions de Son Alteffe Electorale
, & fur Paprobation qu'on ne peut refufer à
fes démarches .
Les Pays Autrichiens relevoient anciennement du
Duché de Baviere , auquel ils étoient incorporés ,
& formoient un patrimoine des Ducs de ce nom ,
lorfque la mort de Frederic le Bellel'queux, dernier Duc
de la Branche Bavaroife , qui regnoit en Autriche
fit auffi- tôt paroître nombre de Concurrens."
>
des
Quoique de tous ceux qui fe mirent au rang
Prétendans , les mieux fondes fuflent fans contredit
les Ducs de Baviere , ils ne furent pas les plus
heureux , & ne purent empêcher qu'avec la fuite
des tems , le Roy Ottocare de Boheme n'emportât fur
eux les avantages de la poffeffion.
Ottocare ayant été expulfé de l'Autriche par l'Empereur
Rodolphe de Habsbourg , qui devoit fon élevation
au Trône Impérial à la nomination de Louis
le Sévere , Duc de Baviere , en qui les autres Electeurs
avoient compromis , les Ducs de Baviere le
fatoient que ce Pays conquis fur l'ufurpateur , leur
feroit reftitué ; mais Rodolphe préfera d'en inveſtir
fes propres fils , manquant en cette occafion aux
devoirs les plus effentiels de la juftice & de la reconnoiffance
, & ne laiffant aux Ducs de Baviere d'autre
voye que celle des proteftations .
C'eft ainfi que Rodolphe , qui tenoit fon autorité
de la préference que Louis le Sévere lui avoit don
née en le proclamant Empereur , s'eft fervi contre
fon propre Bienfaicteur de cette même autorité pour
dépouiller la Maiſon de Baviere de fon ancien bien
patrimonial , & la fruftrer encore du bénefice des
donations
NOVEMBRE 1741 2485
donation à elle faites par le Duc Conradin de Suabe,
donations néanmoins que lui & les autres Electeurs ,
ainfi que quelques Etats de l'Empire , avoient peu
auparavant confirmées par differens Actes des plus
autentiques
Tant d'injuftices autorifoient les Ducs de Baviere
à mettre les armes à la main , pour fe procurer par
la force ce qu'ils n'avoient pû obtenir de gré ; mais
Rodolphe qui avoit adroitement prévenu & gagné
les Princes de l'Empire , auxquels il avoit fçû d'ailleurs
infpirer de la jaloufie contre la Maifon de Baviere
, s'étoit rendu trop puillant pour qu'on entre .
prit de l'attaquer fi légèrement , de façon que ces
Ducs , après avoir protefté en pleine Diéte , n'eurent
d'autre parti à prendre que de remettre à des
conjonctures plus favorables la pourſuite de leurs
droits.
L'Empereur Ferdinand I. qui par des arrange
mens convenus entre lui & fon frere Charles V.
étoit devenu le maître de tous les Etats Autrichiens
fitués en Allemagne , & qui avoit encore acquis du
Chef de la Reine Anne fon Epouſe les Royaumes
de Hongrie & de Bohême , fentit que pour foûtenir
la grandeur de fa Maiſon, & pourvoir à la tranquillité
de fes Sujets , il convenoit d'établir dans fa
famille un ordre de fucceffion qui y eût force de
loi perpétuelle , & d'y intéreffer en même- tems la
Maifon de Baviere , afin qu'elle acquiefçât d'autant
plus volontiers à ce que les Archiducs continuaffent
la poffeffion des Etats Autrichiens.
Ce fut dans cette vûe qu'en 1543. & 1547. il fit
un Teftament & un Codicile , par lefquels il ordonna
, qu'au défaut d'héritiers Mâles , la fucceffion
pafleroit à fa fille aînée l'Archiducheffe Anne ,
Epoule d'Albert V. Duc de Baviere , & Mere de
Guillaume V. Trifayeul de l'Electeur actuellement
regnant G iiij
Cette
2490 MERCURE DE FRANCE
Cette fille Aînée étoit donc l'héritière fubftitués.
au défaut des Deſcendans Mâles , & tranfmettoit
par conféquent tous les droits à fa poſtérité .
Quelque folemnelles & quelque préciſes que fuffent
les difpofitions de Ferdinand I. il jugea qu'il
ne pouvoit prendre trop de précautions pour affûrer
encore par de nouveaux titres les avantages de
la fubftitution qu'il avoit établie en faveur de fa
fille Aînée. C'est pourquoi par le Contrat de mariage
conclu en 1546. entre ledit Albert V. & l'Archiducheffe
Anne , il fut fpécialement ftatué , que
cette Princeffe renonceroit en faveur des Mâles à
toute fucceffion tant paternelle que maternelle ,
mais qu'au défaut de Defcendance mafculine , elle
& fa poftérité hériteroient des Royaumes de Hongrie
& de Bohême , ainfi que des Etats d'Autriche
& des Pays qui en dépendent. L'Acte de renonciation
figné en conféquence par l'Archiducheffe
Anne contient les mêmes claufes & les mêmes
réſerves.
Après toutes ces difpofitions , la Maifon de Baviere
ne pouvoit que redoubler fon attachement
envers celle d'Autriche , dont arrivant l'extinction
des Mâles , elle étoit devenue l'héritiere : auffi at-
on vû du depuis les Electeurs de Baviere facrifier
fouvent leurs propres intérêts à la confervation de
ceux des Archiducs , ainfi qu'il eſt à voir par le récit
des traits fuivans.
L'Empereur Mathias étant mort , il dépendoit
de Maximilien de Baviere d'accepter la Couronne
Impériale , laquelle lui étoit offerte par la pluralité
des Electeurs. Ferdinand fecond , qui briguoit cette
dignité , fe tranfporta lui- même à Munich , & pria
Maximilien de lui être favorable . Maximilien fe
laiffa aller à ſes inſtances , & au lieu de profiter des
fuffrages qu'on lui préfentoit , il contribua plus
qu'aucun
NOVEMBRE . 2491 1741
qu'aucun autre Prince à l'élection qui fut faite de
Ferdinand II. Dans la faite des tems il lui a encore
fait une avance d'une fomme de treize Millions , du
payement defquels Ferdinand II. a fçû , fans débourfer
une obole , fe dégager par la ceffion du
Haut-Palatinat , qui étoit fans cela un ancien Patrimoine
de la Maiſon .
Maximilien a pareillement été d'un grand fe
cours à Ferdinand III . envers lequel il s'eft fi généreulement
comporté , que pendant que les Suédois
ravageoient fon Pays , il employoit ailleurs
fes Troupes , & expofoit fa vie pour le fervice de
la Maifon d'Autriche. L'Electeur Ferdinand Marie
a commis un acte de générofité à peu près femblable
à celui de Maximilien , car plufieurs Electeurs
lui ayant , après la mort de Ferdinand , offert leurs
voix préférablement à Leopold , pour lequel ils n'étoient
nullement inclinés , non feulement il ne fe
prêta point à ces offres , mais il contribua lui -même
par fes bons offices à mettre la Couronne fur la
tête de cet Archiduc .
Beaucoup de perfonnes encore vivantes rendront
témoignage à la mémoire de Maximilien Emmanuel
, que cet Electeur à la tête de fon armée a concouru
à délivrer Vienne du fiége que les Turcs en
avoient formé , & qu'après ce fiége il a fait cinq
Campagnes confécutives , pendant lesquelles il a
paffé la Save , aidé à remporter la victoire de Gran ,
& mis Belgrade & autres villes fous l'obéiflance de
la Maifon d'Autriche . Suivant l'exacte fupputation
qui a été faite de ce qu'il en a coûté à la Baviere ſeule
, non compris trente mille hommes qu'elle a perdus
, les débourlés de cette guerre ſe font montés à
trente- deux millions de florins du Rhin & quoique
Leopold n'auroit pu moins faire que d'indem
nifer l'Electeur de frais auffi immenfes , il n'a pas
G v
>
feule12492
MERCURE DE FRANCE
7
feulement daigné lui offrir le moindre dédomma
gement.
Après que la guerre de Hongrie eut été terminée,
& que dans celle qui précéda le Traité de
Ryfwick , l'Empereur fe vit obligé de tourner fes
forces du côté du Rhin , il n'eft pas d'inftances ,
ni de promeffes flateufes qu'il ne fit à Maximilien ,.
pour qu'il lui plût continuer fes fecours . L'Electeur
y déféra , & s'il fe rendit utile , ce ne fut qu'après
s'être épuifé & en hommes & en argent. Il n'y a
perfonne qui ne juge que les avantages que la Maifon
de Baviere a réciproquement reçûs , ont été
proportionnés à tant de fervices effentiels & figralés
: mais non ; jamais il n'a été queftion d'aucune
reconnoiffance ; & fi la Maiſon d'Autriche , toutes
les fois qu'elle s'eft vûë dans la néceffité d'implorer
de l'affiftance , s'eft répandue en belles paroles ,
il femble qu'elle ne l'ait fait que pour ſe donner le
plaifir de n'en tenir aucune.
Lorfque L'Electeur Maximilien Emmanuel pour
défendre la liberté des Princes & Etats de l'Empi
re , qu'on vouloit entraîner malgré eux dans une
guerre qui ne les regardoit point , fut forcé de prendre
les armes , il n'y a pas de perfécutions que la
Maifon d'Autriche ne mît en ufage pour l'opprimer,
& empêcher fon retour en Allemagne ; mais le
Ciel ne s'eft point rendu favorable à des vûës auffi
pru chrétiennes , & l'Electeur a eu la confolation
de rentrer dans fes Etats à la grande fatisfaction de
fes Sujets , qui pendant fon abfence avoient fouffert
toutes les calamités d'une guerre , dont ils reffentent
encore les funeftes fuites.
Un an avant ce retour , fçavoir en 1713. Charles
VI. affembla fes principaux Miniftres , & leur
communiqua les Actes des partages , ainfi que le
Pacte de fucceffion au fujet de la Couronne d'Efpagne
NOVEMBRE . 1741 . 2493
le cas
gne , convenu entre les Empereurs Leopold , Jofeph
& lui. En conféquence il déclara qu'en vertu de
ces conventions , non- feulement la fucceffion aux
Royaumes , Etats & Pays héréditaires de la Maiſon
d'Autriche lui apartenoit de droit , mais que dans
où il mourroit fans délaiffer de Defcendans
mâles , cette même fucceffion , fuivant la régle de
primogéniture & d'indivifibilité établie dans fa
Maifon , feroit dévoluë d'abord aux Archiducheffes
fes filles , après elles aux Archiduchelles Jofephines
, enfin aux Archiducheffes Leopoldines , & ainfi
en remontant toujours de Ligne en Ligne .
Il ordonna enfuite l'enrégiftrement de la Déclaration
qu'il venoit de faire ; & c'eft ce fimple enrégiftrement
relatif à un Pacte , qui ne concerne que
la fucceffion d'Espagne , & dans lequel il n'eft fait
nulle mention des filles , qu'on a voulu faire paffer
pour Sanction- Pragmatique , quoiqu'il n'en eût
ni la forme ni la réalité.
Ce n'étoit point affés pour Charles VI. d'avoir
ainfi manifefté fes intentions & fes volontés , & d'avoir
cherché à intervertir l'ordre de fucceffion établi
par Ferdinand I. Son point effentiel étoit d'en
affûrer l'exécution . Ne pouvant ignorer les droits
inconteftables de la Maifon de Baviere , & prévoyant
les mouvemens que cette Maiſon ne manqueroit
pas de fe donner pour empêcher l'effet de
la prétendue Sanction- Pragmatique , lorfque le cas
de l'ouverture de la fucceffion Autrichienne exifteroit
, il n'eft pas de moyens qu'il n'ait imaginés
pour la mettre hors d'état de traverfer fes idées &
Tes projets.
Il jugea que l'expédient le plus fûr , pour donner
à fon ouvrage quelque folidité , étoit de lui
procurer des garants . Dans cette vûe il s'adreffa à
differentes Cours : mais perfuadé que fes follicita-
G vj
tions
2494 MERCURE DE FRANCE
tions à cet égard n'auroient d'effet qu'autan
qu'il les coloreroit des aparences de l'équité , il
fit infinuer par tout , tant de vive voix que par
écrit.
1. Que la Sanction , dont il demandoit la garantie
, ayant été ainfi concertée entre les Empereurs
fes prédéceffeurs , & par lui enfuite acceptée ,
devoit être regardée comme un Pacte fucceffoire
irrévocable .
2. Que l'ordre de fucceffion , tel qu'il étoit réglé
en vertu de ce Pacte & de cette Sanction , ne
renfermoit rien qui ne fût exactement conforme
aux anciens Priviléges , Conftitutions & Uſages de
la Maifon Archiducale.
3. Que les Electeurs de Saxe & de Baviere , feules
ou principales Parties intereffées à attaquer la
Pragmatique- Sanction , en reconnoiffoient tellement
la validité & la juſtice , qu'ils l'avoient aprouvée
& confirmée par les actes les plus folmnels.
4. Enfin , que cet ordre de fucceffion ne portoit
à qui que ce fût aucune forte de préjudice .
Il étoit bien difficile que les Puiffances , qui ont
pris fur elles la garantie de cette Sanction , ne fe
laiffaflent furprendre par des aflûrances aufi formelles
, données par un Prince dont on penfoit
trop avantageulement , pour le foupçonner de
vouloir en impofer fur une matiére auffi importante
: cependant , pour peu qu'on examine de près les
quatre points qui ont formé la bafe de cette Sanction
, on n'en trouvera aucun de fondé , & qui ne
fouffre une jufte contradiction . En effet :
1. Les Empereurs Leopold , Jofeph & Charles
n'ont jamais réglé entr'eux , touchant leurs Etats
d'Allemagne , rien qui concerne la fucceffion féminine
au défaut des Defcendans mâles ; du moins
jufqu'ici n'a-t'il rien tranſpiré qui y ait raport ; &
en
NOVEMBRE. 1741 2495
En tout cas ce Réglement , s'il exiftoit , ne pour
roit -il déroger aux difpofitions antérieurement
faites.
2. C'eſt à tort qu'on avance , que l'ordre de fucceffion
établi dans la Pragmatique eft conforme
aux anciens Ufages & Privileges de la Maifon de
Habsbourg , puifque les Priviléges & Ulages antérieurs
au tems , où cette Maiſon a envahi l'Autriche
, ne peuvent regarder que les Ducs de Baviere.
Pour conftater cete vérité , il fuffit de fe rapeller
que Frederic Barberouffe , de qui eft émané le premier
Privilége , dont les fuivans n'ont été que la
confirmation , ne l'accorda qu'à Henri Jafamergott,
Duc de Baviere- Autriche , pour l'indemnifer de la
perte du Duché de Baviere ; indemnité à laquelle
Ja Maifon de Habsbourg n'a eu certainement aucu
ne part . Si fous l'expreffion générique de Privilé
ges , Charles V. a auffi compris les difpofitions tef
tamentaires , on n'en fçait aucune , qui ( à l'exception
de celles de Ferdinand I. ) contienne ,
quant aux filles , le moindre Réglement au fujet de
la fucceffion aux Pays Héréditaires d'Autriche , au
cas que les Mâles dé cette Maiſon viennent à manquer.
Quant aux ufages poftérieurs à ces premiers
tems , bien loin d'avoir autorifé la primogéniture
& l'indivifibilité par raport aux filles , ils ne les ont
pas même adınifes pour les Mâles , ainfi que le démontrent
clairement tous les partages fucceffivement
faits entre les Archiducs d'Autriche , à commencer
depuis Rodolphe I. juſqu'à Ferdinand.
3. Il est également faux , que Son Alteffe Electorale
de Baviere ait jamais accepté la Pragmatique ,
n'ayant à l'occafion de fon Mariage reconnu autre
chofe , finon l'ordre dans lequel PArchiducheffe
fon Epoule le trouve placée , ce qui ne peut être
regardé
2496 MERCURE DE FRANCE
regardé que comme une aprobation de ce qui avoit
raport aux droits perfonnels de cette Princeffe , &
nullement à ceux acquis à la Maiſon par des Titres
plus anciens de forte que c'eft à tort que la Cour
de Vienne a tâché d'infinuer par tout que l'Electeur
s'étoit déporté de fes prétentions. Qui pourra fe
perfuader que pour une dot de cent mille florins , il
ait abandonné les droits fur des Royaumes & des
Etats entiers ? Qui croira qu'il ait foufcrit à un déport
général & illimité , tandis que la Cour de
Vienne même ne lui a jamais rien propofé que de
connexe avec l'alliance dont on traitoit alors , &
que cette Cour étoit trop éclairée pour ne pas fçavoir
, que toute la Maiſon fe trouvant intéreffée
dans les Subftitutions réglées par l'Empereur Ferdinand
, c'étoit avec toute la Maiſon qu'il eût fallu
négocier cette affaire ?
4. Il n'eft pas que la Sanction , dite Pragmatique,
ne porte aucun préjudice aux droits du Tiers , puifque
ceux de l'Electeur de Baviere fouffriroient une
atteinte effentielle & irréparable , fi cet ordre de
fucceffion pouvoit fubfifter.
L'Electeur de Baviere a été fi peu difpofé à confentir
à la garantie de la Pragmatique , que pour
mettre les droits à couvert , & démontrer en même
tems à tous les Princes & Etats de l'Empire les fuites
dangereufes auxquelles ils s'expoferoient , s'ils
fe chargeoient de cette garantie , il fit préfenter à la
Diéte fon Votum , contenant :
Que l'Empereur ayant précédemment fait pluheurs
Traités , fans confulter les Etats de l'Empire,
il étoit aifé de voir que ce Prince n'avoit recours à
eux , que dans le cas où il avoit un befoin preffant
de leur fuffrage & de leur coopération ; mais qu'il
les négligeoit abfolument dans les utres circonftances,
où cependant leur autorité & acceffion n'étoient
NOVEMBRE. 1741 2497
toient pas moins néceffaires fuivant les Loix & les
Conftitutions Germaniques.
Que contre la teneur des Capitulations , qui défendoient
à l'Empereur d'engager l'Empire dans
aucune guerre , l'Empire fe trouveroit cependant
obligé par cette garantie à foûtenir le poids de toutes
les guerres que l'Empereur entreprendroit.
Que l'on a vu en differentes occafions l'Empereur
attaqué en Hongrie , en Italie & dans les
Pays-Bas , fans que l'Empire fe foit laiffé induire à
époufer la querelle .
Que plufieurs des Etats de la Maiſon d'Autriche
étant fitués hors de l'Allemagne , cette garantie
mettroit l'Empire dans le cas d'envoyer au loin les
Troupes deftinées à fa propre défenſe.
Que la garantie une fois obtenue des Etats de
l'Empire, on exigeroit qu'ils entretînffent conftam.
ment fur pied des Troupes prêtes à foutenir les engagemens
contractés .
Que les Etats Autrichiens fitués en Allemagne
étant liés à l'Empire par un lien commun & féodal
, en vertu duquel le Corps entier doit , confor
mément aux Conftitutions générales , prendre la
défenfe de chacun de fes Membres , la garantie devenoit
naturelle , & n'avoit par conféquent pas befoin
d'être prématurément follicitée .
Que la fécurité où cette garantie mettroit l'Empereur
par raport à fes poffeffions , l'empêcheroit
de fortifier ou de garnir convenablement fes Places
frontieres : ce qui rendroit l'état de l'Allemagne
beaucoup plus dangereux & plus expofé.
1
Que l'Empire fe chargeant de la garantie de la
Pragmatique , devenoit l'Ennemi néceffaire de
tous ceux de la Mailon d'Autriche & fe priveroit
ainfi à jamais des fonctions de Médiateur .
Enfin que l'Empire s'engageant fans néceffité ,
s'aflu2498
MERCURE DE FRANCE
's'affujettiroit à une fervitude continuelle , & fe dé
pouilleroit des priviléges précieux de fa liberté.
Quelque importantes que fuffent ces Obfervations
, les Puiffances garantes qui n'avoient nul interêt
perfonnel pour s'opofer à l'introduction , ou à
l'acceptation de la Pragmatique , n'ont point exigé
qu'on leur donnât la preuve de tous les faits & motifs
contenus en cette Sanction . Elles fe font pleinement
livrées à la bonne foi , & quoiqu'à l'adjonction
de plufieurs autres Etats , l'Electeur fit
voir par ce Votum tous les inconvéniens dans lef
quels l'Empire s'engageroit , & en même tems tous
les avantages qu'il perdroit s'il fe chargeoit de la
garantie , cela n'a pas empêché que la pluralité des
voix ( prévenues par de faux expofés qui rendroient
toujours le réſultat non- valable ) ne l'emportât fur
les autres ; mais la régle du Droit public eft , que
dans les cas où il s'agit des droits du Tiers & où les
matiéres font contentieufes ou contradictoires , la
pluralité ne fuffit point ; il faut une unanimité . Les
Archiducs d'Autriche ont eux - mêmes foûtenu certe
maxime en la Diéte de l'an 1665. lorfque le Chapitre
de Bamberg y propofa fes griefs ”, qu'à la vérité
les Etats pouvoient délibérer , mais qu'il ne
leur étoit pas permis de déroger aux droits du
Tiers ( a ).
Chaque Cour a fes principes & fes régles de politique
, qui fe perpétuent dans les Maifons , & qui
fe tranfmettent aux Succeffeurs. Les fyftêmes que
des confeils pernicieux ont infpirés aux derniers
Empereurs , ont été de s'attacher par tous les
moyens poffibles à affoiblir la Maifon de Baviere ,
quoiqu'alliée à celle d'Autriche par feize mariages
(a ) Quod quidem Status poffint deliberare , fed non
poffint jus Tertii tollere.
differens
VILLE
NOVEMBRE. 1741 2493 LYON
differens , ou du moins à empêcher que cette Mai * /81
fon n'acquit trop de crédit & de confidération. Co
fyftême étoit parfaitement afforti aux vûës fecrettes
de la Maifon d'Auriche , qui penfant , ou à établir
en Allemagne une Monarchie abfolue , ou à rendre
la Couronne Impériale héréditaire , ou à refférer
dans les bornes les plus étroites les droits éminents
& la ſupériorité territoriale des Princes , craignoit
de trouver en fon chemin les Ducs de Baviere , qui
ont été de tout tems des Défenfeurs zélés & fidéles
de la Liberté Germanique.
Aucun Empereur n'avoit affecté auffi ouverte
ment & auffi conftamment que Charles VI. de faire
ufage de cette dangereufe politique . Sa jaloufie
avoit même dégénéré en inimitié , & quoiqu'il ait
eu de fréquentes occafions de marquer à la Maiſon
de Baviere la reconnoiffance qu'il auroit dû avoir
des fecours importans qu'il en avoit reçûs , il a
toujours employé fon autorité à traverser les deffeins
de cette Maiſon , & à lui nuire en tout ce qui
a dépendu de lui .
Ce qu'il a fait au fujet du Duché de la Mirandole
& du Marquifat de Concorde , eft l'effet de l'injuftice
la plus criante. L'Empereur & l'Empire le trouvoient
par les
comptes qui en furent arrêtés , redevables
à Maximilien de plufieurs millions , que cet
Electeur avoit avancés & débourfés pour les frais
de la guerre. Pour amortir une dette auffi confidérable
, l'Empereur Ferdinand III . ne trouva pas de
meilleur expédient que d'en traiter avec Maximi
lien , & de lui promettre l'expectative au Duché &
Marquifat fus mentionnés , ce qui fut ainfi accepté
& exécuté fuivant les Lettres d'Inveftiture de l'an
1638. Cette expectative accordée à Maximilien de
Baviere a été renouvellée par des Diplômes des
Empereurs fubféquens , & n'eft pas moins , que
quantité
1500 MERCURE DE FRANCE
quantité d'autres , cenfée avoir été confirmée par la
derniére Capitulation : cependant , Sa Majesté Impériale
défunte , fans avoir égard à des droits ac-.
quis , non feulement pour fervices rendus , mais
même à titre des plus onéreux , ne s'eft fait aucun
fcrupule d'aliéner ces deux Etats , ne daignant pas
même confulter la Maifon de Baviere , quoique la
Partie la plus intéreffée (a).
Son aigreur n'augmenta pas pea , lorfque l'Electeur
s'opofa dans la Diéte de Ratisbonne à la ga
rantie de la Sanction Pragmatique . Ce fut alors
que Sa Majesté Impériale , dévelopant les deffeins
qu'elle avoit formés d'anéantir les prétentions &
fes droits de l'Electeur , follicita les garants de fa
Pragmatique de fe charger de cette garantie , nommément
contre la Maifon de Baviere. On ofe ici
apeller en témoignage de la vérité de ce qu'on
avance , les Puiffances à qui cette demande fut fai-
(a) Quod cum inter Cameram noftram Imperialem
Aulicam Sereniffimum Maximilianum Comitem
Palatinum Rheni , ac utriufque Bavaria Ducem ,
S.
R. I. Archidapiferum Principem Electoralem , Confanguineum
& Affinem noftrum chariffimum tractatus
Super pratentionibus Dilectionis Sua ex caufa expen-
Jarum , in ufus noftrorum & Sacri Romani Imperis
exercituum factarum , aliifque nominibus aliàs , ac
nunc quoque noviter intentatis , inftituto , inter alia
ad adaquandas , penitufque folidandas rationes propo
fitum fuerit , ut Nos dicta Dilectioni Sua , ejufque
Defcendentibus ligitimis mafculis , &c. gratiam expectativam
ad fucceffionem in Ducatu Mirandola &
Marchionatu Concordia jure feudi , ac à nobis & S.
R. I dependentibus fub certis modo & conditionibus,
prout in capitulationibus dicti tractatus pluribus expreffum
eft , largiemur ; Nos , f te i
NOVEMBRE. 1741 . 2502
te ;
mais l'Electeur de Baviere a la confolation de
n'en connoître aucune qui ait eu la complaifance de
prêter l'oreille à une propofition auffi peu raifonnable
, & auffi indécente .
Son Altele Electorale ne diffimulera pas les inquié
tudes fecrétes , que lui euffent caufé les garanties
obtenues par Charles VI. fi elle ne fe fût toûjours
flattée que les Puiffances qui les ont accordées , fe
croiroient elles- mêmes libres de leurs engagemens,
lorfqu'elles feroient exactement informées de la
juftice de fes droits.

Pour cet effet, elle demanda à la Cour de Vienne
communication du Teftament de Ferdinand I.
mais toutes les démarches pour obtenir cette communication
ayant été inutiles , elle s'adreſſa à la
Cour de France , & Sa Majesté Très - Chrétienne ,
voulut bien lui accorder fes bons offices : on doit
avoir à Vienne les Lettres , que le Cardinal de
Fleury écrivit à cette occafion à l'Empereur . Cependant
quelque preffantes & quelque réitérées que
fuffent les inftances de l'Electeur , & quoique la
Cour de Vienne ne pût point ignorer que des Titres
communs tels que le Teftament en queftion ,
ne peuvent fe refufer fans injuftice , il ne fut pas
poffible à Son Alteffe Electorale d'obtenir ce qu'elle
demandoit . La Cour de Vienne craignoit aparemment
que la production du Teftament de Fer
dinand I. n'opérât la deftruction de la Pragmatique
de Charles KI.
L'Electeur auroit pû fe flater , qu'après avoir
lors de la derniere guerre de Hongrie , généreufe
ment fourni à l'Empereur dans le fort de les malheurs
un Corps confidérable de Troupes auxiliaires
, il trouveroit en ce Prince quelque réciprocité
de complaifance & de bonne volonté , & que S.
M. I. éclairée par le contenu des documens qui
*
fondent
2502 MERCURE DE FRANCE
fondent les droits de la Maifon de Baviere , fe prê
teroit à une conciliation amiable de leurs intérêts
tefpectifs ; S. A. E. n'a ceffé de faire dans cette ef
pérance , mais toujours inutilement , toutes les
avances les plus propres à faire impreffion fur un
efprit & un coeur moins prévenus que ne l'avoit
Charles VI. qui dans le tems même que les débris
des Troupes Bavaroiles facrifiées à fon fervice ,
n'étoient pas encore de retour , non feulement refufa
à l'Electeur une fimple recommandation au
Chapitre d'Augsbourg pour le Duc Theodore fon
frere , mais ordonna en outre à fes Miniftres à Ro
me & à Augsbourg de batrer en tout les vûës de la
Maifon de Baviere , à laquelle cependant il avoit
des obligations fi récentes . Ce n'étoit pas aflés que
l'Electeur fe vit ainfi contrecarré par tout ; il fuffifoit
d'être ou de fes Amis , ou de fes Créatures
pour avoir le mêine fort à fubir .
Telles étoient les difpofitions de cet Empereur
lorfque la Volonté Divine Papella à l'éternité.
Après la mort , l'Electeur fit renouveller fes demandes
par le Comte de la Perouse , fon Miniftre à
Vienne , auquel on a enfin délivré une expédition
du Teftament de Ferdinand I. Mais parce que ,
pour faciliter les recherches à faire , ce Miniftre
avoit fourni une note qui ne fervoit qu'à indiquer
en gros les difpofitions que le Teftament contenoit
à peu près , & dont on ne pouvoit à Munich fçavoir
la teneur au jufte , la Cour de Vienne a feint
de prendre cette note pour le texte même , dont
Son Altele Electorale prétendoit faire ufage ; & fur
cette fuppofition, auffi imaginaire qu'injurieufe , elle
a répandu dans des Refcrits circulaires , que l'Electeur
de Baviere établiſſoit ſes droits fur une Copie
falfifiée.
Tous ceux qui ont lû ces Refcrits , auront jugé
fans
NOVEMBRE: 1741 : 2503
fans peine , qu'il falloit que cette Cour fût extrê
mément dépourvûë de bonnes raisons à alléguer ,
puifque fes principaux moyens n'ont foulé que
des faits calomnieux .
fur
Il eft notoire , avec quelle précipitation affectée
la Grande Ducheffe de Toſcane s'eft mife en poffeffion
de la fucceffion Autrichienne , dans le tems
où l'Electeur ne penfoit point à en venir à aucunes
voyes de fait , & où il vouloit de préference , qu'avant
que de faire valoir fes prétentions , toutes les
Cours fuflent pleinement inftruites de leur légitimité
; mais la Cour de Vienne ne s'eft point contentée
d'avoir par cet empreffement à s'affûrer du
poffeffoire , fait violence aux droits de l'Electeur ;
elle ne s'eft point contentée de l'avoir offenfé en le
taxant de fe fervir de piéces faufles ou fupplées , elle
ne s'eft point contentée de s'être , pour ainfi dire
, rendue Aggreffeur par l'efpece d'hoftilité
qu'elle a commife , en demandant nommément
contre lui la garantie de la Pragmatique- Sanction ,
elle a voulu encore mettre le comble à ces griefs ,
en fe fervant de tous les artifices imaginables pour
s'attirer le Public , & particuliérement ceux des
Miniftres des Cours Etrangeres , qu'elle voyoit inclinés
pour la jufte caufe , s'entend pour les intérêts
de Son Alteffe Electorale.
L'Electeur n'a point à fe reprocher d'avoir fuivi
un exemple fi condamnable , & il s'eft-jufqu'à ce
moment renfermé dans les bornes de la plus grande
retenue ; mais la Cour de Vienne , bien loin d'être
touchée de cette modération , ne l'a attribuée qu'à
foibleffe , & a regardé l'inaction de l'Electeur ,
comme une impuiffance réelle d'agir par la voye
des armes , ou comme un effet de la crainte de attirer
autant d'ennemis , que la Sanction- Pragmatique
avoit de garants.
ou
L'Electeur
2504 MERCURE DE FRANCE
L'Electeur eft bien éloigné de penfer ainfi , & il
plus de confiance dans l'équité des Puiffances garantes
, que la Grande Ducheffe ne doit & ne peut
en avoir dans la folidité des engagemens qu'elles
ont contractés avec le feu Empereur. En effet fousenir
que ces Puiffances fe foient déclarées contre
des droits qu'elles igno oient , & dont on a eu foin
de leur cacher non - ſeulement la force & l'étendue
mais même l'exiſtence , c'eft bleffer ouvertement
leur droiture & leur probité . Ainfi , bien loin de les
redouter comme ennemis , l'Electeur de Baviere fe
promet de trouver en elles des Protecteurs , eſpefant
qu'indignées du procédé de Charles I. qui en
leur cachant les droits de la Maifon de Baviere , a
furpris leur religion , elles ne balanceront point à
prendre un parti opofé à celui auquel la Grande
Duchefle s'attendoit.
2
L'Electeur a embraffé la réſolution invariable de
ne jamais abandonner fes prétentions ; il fe rendroit
refponfable devant Dieu , & s'expoferoit aux juftes
reproches de toute fa Maifon , s'il étoit capable
d'oublier fes devoirs dans une occafion auffi eflentielle
& dans une ſituation auffi intéreſſante que celle
où il fe trouve , puifqu'il a en même tems fon
honneur & fa gloire à foutenir , & les intérêts de fa
Maifon à défendre .
30
Il peut avec fondement alleguer en fa faveur l'un
des paflages du Manitefte de l'Empereur Leopold, ou
il eft dit : Aucune perfonne, foit Roy, foit Membre
de la Famille Royale , foit Peuple , ne doit
ni ne peut fous prétexte quelconque , enlever
malgré lui à celui qui refte de la Famille , un
» droit qui lui eft dévolu par des premieres conentions
, & lui ôter des efperances qui lui font
-acquifes par fa naiffance . (a ) Si donc l'Electeur ,
(a) Cuicunque fuperftiti ex familia delatum ex pri-
29
tant .
NOVEMBRE : 1741: 2505
tant en fa qualité d'Héritier de l'Archiducheffe Anne
, que comme Deſcendant des anciens Poffeffeurs
de l'Autriche , a des droits acquis par fa naiflance
s'il en a d'affûrés par des Actes & des conventions
particulieres , il eft dans le cas de pouvoir ( même
à plus jufte titre ) tenir un langage fembable à celui
de Leopold ; & que pourra répondre la Cour de
Vienne , quand on le fert contre elle des mêmes
principes que ceux qu'elle a ci-devant avances ?
De plus longs délais ne feroient qu'affermir la
Grande Ducheffe de Tofcane dans l'injufte poffef
ſion où elle s'eft mife ; & comme elle ne reconnoît
aucun Tribunal autorifé pour terminer les differends
dont il s'agit , on ne peur que prendre contre elle
des partis extrêmes & violens. L'Electeur le voir
donc indifpenfablement obligé d'avoir recours au
glaive dont la Juftice Divine , ainfi que le Droit na
turel & des Gens, lui permettent de s'armer , pour
forcer cette Princeffe à un défiitement auquel les
voyes de la douceur & de la négociation ne fçauroient
la déterminer .
La Couronne de France ayant contracté avec les
Prédeceffeurs de l'Electeur de Baviere des engagemens
, qui ont encore toute leur vigueur , & en
ayant de particuliers avec l'Electeur aujourd'hui res
gnant , dont l'exécution a été renvoyée au tems de
l'extinction de la Maifon d'Autriche , l'Electeur a
imploré avec confiance , & a même obtenu de l'amitié
& de la juftice du Roy Très-Chrétien les
fecours & fon puiffant apui .
Il ne s'attend pas moins à l'affiftance du Corps
ma conventione jus , vel quafitam jam ex nativitate
fpem illi invito a nemine five Rege , vel alio familia
Regia membro , five Populo , quacunque ratione auferri
debere aut poffe,
?
Germa
506 MERCURE DE FRANCE
Germanique , dont fa Maiſon a toujours été un des
plus fermes foutiens , & il fe promet que les Etats
de l'Empire héfiteront d'autant moins à lui donner
la préference fur une Maifon étrangere , que jamais
ils n'ont hefité à l'accorder à ceux dont les droits
étoient auffi évidens que les fiens.
Il affûre que foit comme l'un des Vicaires , foit
comme Membre de l'Empire , il ne permettra jamais
rien qui puiffe donner atteinte aux Conftitutions
& aux Privileges des Etats de l'Allemagne ; il
fe déclarera au contraire ennemi de tous ceux qui
entreprendront de les combattre , & afin d'obvier à
tout ſujet de plaintes , il fera tenir une diſcipline fi
exacte , & prendra des mefures fi juftes , que les
Cercles dans lefquels la guerre pourroit le porter ,
ne s'aperçevront de la préfence de fon Armée ,
que par le bon ordre qui y fera oblervé.
Il compre pareillement que les Habitans des
Royaumes & Etats , qui reconnoiffoient ci-devant
la Souveraineté de Ferdinand I. reconnoîtront aujourdhui
celle de l'Héritier légitime que cet Empereur
leur a destiné , & que ces Peuples revenus des
erreurs dans lesquelles on a fçû jufqu'ici les entretenir
, fe rendront à la juftice , en fe livrant avec
affection à une domination , qu'ils trouveront pour
le moins auffi douce que pouvoit l'être celle de la
Maifon de Habsbourg. C'est moins en Maître qu'en
Pere, que l'Electeur fe propofe de les gouverner ; &
s'il réuffit à régner fur eux , il demeurera toujours
indécis , fi la fatisfaction de les voir les Sujets égalera
celle qu'il fe procurera , en leur faifant gouter
tous les avantages d'une heureufe fujettion.
Ceux au contraire , qui , foit par un entêtement
mal placé , foit par trop de condefcendance aux
perfuafions des Partifans de la Cour de Vienne ,
foit par des vûës d'intérêt particulier , auront formé
NOVEMBRE. 1741. 2507
thé une vaine réſiſtance au progrès des armes de
l'Electeur , ne pourront que s'en prendre à eux - mêmes
, s'ils le voient affujettis à des difgraces & des
calamités , qu'il dépendoit deux d'éviter.
Enfin S. A. E. pour prévenir tout prétexte , ou
toute raifon de plaintes , & empêcher qu'il ne foit
commis aucun excès , a pris d'avance toutes les mefures
néceffaires , fe flatant en même tems qu'aucun
des Etats de l'Empire ne refufera à fes Troupes
foit propres , foit auxiliaires , non plus qu'à
celles de fes Alliés , les paffages qui lui feront indifpenfables
, après néanmoins , qu'au préalable elle
en aura dûment fait la réquifition , & aux offres
d'acquitter exactement tout ce qui pourra être fourni
pour la ſubſiſtance defdites Troupes. Cette demande
ne tend à rien qui ne foit conforme aux
Conftitutions de l'Empire , & que les Princes ne fe
doivent mutuellement , l'Electeur en a lui- même
donné un exemple affés récent , lorsqu'à la réquifition
de Charles VI, il a permis en dernier lieu aux
Troupes Mofcovites de paffer par fes Etats.
Il ne reste plus à Son Alteffe Electorale , que
d'implorer l'affiftance du Tout-Puiffant , pour qu'il
lui plaife répandre fur fes armes une bénédiction
efficace , qu'après qu'elles lui auront procuré une
pleine fatisfaction , l'on voye un calme général fuccéder
promptement aux troubles de la guerre , &
que toute l'Allemagne puiffe jouir tranquillement
des douceurs d'une paix folide & conſtante .
ON
PORTUGA L.
N mande de Lisbonne du 28. Septembre dernier
, qu'un des Vaiffeaux de guerre partis
pour Goa, en revint le 15. du même mois , & que
Pon a apris par l'équipage de ce Bâtiment , qu'un
H Corps
2508 MERCURE DE FRANCE
Corps confidérable d'Indiens étoit campé dans les
environs de cette Place ; que des détachemens de
ce Corps faifoient des courfes jufques fous le canon
de la Ville , & enlevoient toutes les provifions
qu'on y portoit de la Campagne , & que les Indiens
avoient armé plufieurs Barques, avec lefque!
les ils troubloient la navigation des Portugais le
long des Côtes.
ESPAGNE.
3
N mande de Madrid du 3. de ce mois , que
PArmateur François Barrera prit le 8. du mois
dernier fur la Côte du Royaume de Portugal le
Brigantin Anglois les deux Freres , qui revenoit de .
Terre - Neuve , & qui alloit à Oporto .
L'Armateur Don Louis Oliver ayant rencontré
le 19. Septembre précedent vers le 40. degré de
Latitude Septentrionale un Vaiffeau Anglois de
14. canons , & du port de 200. tonneaux , qui alloit
de Londres à Gibraltar , où il portoit de la Farine
, du Biſcuit & des Salines , il alla à l'abordage
& il s'empara de ce Bâtiment après un combat
de trois heures , dans lequel il fut bleffé.
Les lettres de Lisbonne , portent qu'un Armateur
Anglois ayant enlevé fous le canon de Porto deux
Vaiffeaux Marchands , apartenans à des François
le Commandant de la Place avoit fait tirer fur lui ,
& qu'il avoit retenu prifonnier le Lieutenant de cet
Armateur , qui étoit venu à terre.
Les Efpagnols fe font emparés des Vaiſſeaux Marchands
Anglois, le Guillaume , le Georges & Henry,
la Dépêche, la Fortune , l'Elizabet , l'Union, le Cefar,
le Roefbuck & le Betty.
Le Roy , pour récompenfer les fervices de Don
Sebaftien de Eslaba , Viceroy de la nouvelle Grenade
NOVEMBRE. 1741. 2509
nade , lequel s'eft fi fort diftingué en défendant
Cartagene , l'a déclaré Capitaine Géneral de fes
armées.
Don Melchior de Navarrette , Lieutenant de Roy
de Cartagene , a été nommé en même - tems Brigadier
des Armées de S. M. & Don Charles Desnaux
qui a fait les fonctions d'Ingénieur en Chef
dans la Piace pendant le Siége , a obtenu une place
de Directeur des Ingénieurs .
Selon les derniers avis reçûs de Saint Sébaſtien ,
l'Armateur Don François de Larrea , Commandant
la Frégate la Notre- Dame du Mont Carmel , lequel
fit voile de ce l'ort le 18. Septembre dernier , rencontra
le 23. vers le 45 degré de Latitude Septentrionale
à la hauteur de Belle - Ifle , un Vaiffeau de
guerre Anglois , de 60. canons , qui lui donna la
chaffe depuis huit heures du matin juſqu'à la nuit.
Quelques jours après le même Armateur a fait
fur les ennemis quatre prifes , dont les deux premieres
font les Brigantins l'Irlande & la Sara ,
chargés , l'un de Salines , & l'autre de godron . Les
deux autres Bâtimens , dont il s'eft emparé , font le
Vaiffeau l'Amerique , qui revenoit de la nouvelle
Angleterre & fur lequel il y avoit une grande quantité
de ris & d'eau de vie , & un Vaiffeau de 130j
tonneaux , dont la charge confiftoit en tabac & en
poil de Caftor .
L
NAPLES.
Es avis de Naples du 19. du mois dernier, por
tent que l'Ambaffadeur du Grand Seigneur eut
le 18. fa premiere audience du Roy , & qu'il y fut
conduit par le Prince de Belmonte , Premier Gend
tilhomme de la Chambre de S. M. & par le Marquis
Aquaviva , Introducteur des Ambaffadeurs, qui
Hij étoient
2510 MERCURE DE FRANCE
étoient allés le prendre en fon Palais avec les carof
fes du Roy & de la Reine ; la marche fe fir dans
l'ordre fuivant .
Une Compagnie du Régiment de Dragons du
Roy , & une des Grenadiers à cheval de la Garde
de S. M. le caroffe de l'Introducteur des Ambaſſa
deurs , ceux des Premiers Gentilshommes de la
Chambre , les Chatirs ou Valets de pied de l'Ambaffadeur
; fix de fes Chevaux de Selle , couverts de
magnifiques caparaçons & conduits chacun par un
Palfrenier ; fes Officiers , fes Pages , fes Agas & fon
Ecuyer ; les préfens que Sa Hauteffe a envoyés à
S. M. le Kiaya de l'Ambaſſadeur & le Sécretaire de
l'Ambaflade.
L'Ambaffadeur étoit à cheval , ayant à fa droite
le Prince de Belmonte & à fa gauche le Marquis
Aquaviva , & il étoit fuivi des caroffes du Roy &
de la Reine. La marche étoit fermée par une Compagnie
de Carabiniers & par une du Régiment de
Dragons de la Reine . Plufieurs Régimens d'Infanterie
étoient en haye fous les armes dans les ruës
par lefquelles l'Ambaffadeur paffa , & de diftance
on avoit placé des détachemens de Cavalerie. Dans
la grande Place vis- à - vis le Palais , étoient un Efcadron
des Gardes du Corps , deux Compagnies
du Régiment des Gardes à pied , & quelques Compagnies
d'autres Régimens d'Infanterie , rangés en
bataille.
Lorfque l'Ambaffadeur fur arrivé au Palais , il
fut reçû au bas de l'efcalier par le Majordôme de
femaine du Roy , & dans la Sale des Gardes du
Corps , qui étoient en haye fous les armes , par
Don Celio Caraffe, Capitaine des Gardes du Corps,
lequel l'accompagna jufqu'à la Sale d'audience , où
le Roy étoit affis fur fon Trône .
S. M. portoit un habit à la Françoiſe , avec des
boutons
NOVEMBRE. 1741. 2518
boutons de diamans , de rubis & d'émeraudes . Derriere
le fauteuil du Roy , étoient le Duc de Sora ,
Premier Gentilhomme de la Chambre , & le Prince
d'Avellino, Capitaine des Gardes du Corps.Les Dames
de la Cour étoient placées fur des gradins autour
de la Sale , & les Miniftres étoient aux deux
côtés du Trône , ainfi que les Seigneurs & les principaux
Officiers du Roy . S. M. ôta fon chapeau
lorfque l'Ambaffadeur entra , & elle fe leva , lorfqu'il
lui préfenta la lettre du Grand Seigneur . Le
Roy répondit en Italien au compliment de l'Ambaffadeur
, & il fe leva une feconde fois , lorſque
ce Miniftre fe retira.
L'Ambaffadeur fut conduit à l'audience de la
Reine par le Marquis Aquaviva , & la Premiere Dame
d'honneur de la Reine reçut ce Miniftre à la
porte de la premiere antichambre de l'apartement
de S. M. 3
Les principaux préfens que le Grand Seigneur a
envoyés au Roy , confiftent en des armes , garnies
de diamans ; un grand nombre de très - belles perles
Orientales ; des étoffes magnifiquement brodées;
plufieurs bijoux , travaillés avec beaucoup d'art , &
diverfes cariofités de Turquie & d'Egypte.
L'Ambaffadeur du Grand Seigneur vifita le 23.
Septembre dernier le Château Saint Elme , l'Arfenal
& le Port de Naples , & alla enfuite voir la
Maiſon des Chartreux.
O
ITALIE
N aprend de Rome , que le Pape a confenti
que l'Infant Cardinal poffedât l'Archevêché
de Séville en même- tems que celui de Tolede .
Sa Sainteté a déclaré que quoiqu'elle fût difpofée
à traites le Cardinal Cofcia avec autant d'indulgen-
Hiij
Ge
2512 MERCURE DE FRANCE
ce que le cas pouvoit le permettre , elle avoit cru
devoir fuivre l'avis de la Congrégation , qui a décidé
que l'Archevêché de Benevent ne pouvoit être
rendu à ce Cardinal,
On a apris du 30.du mois de Sept.dernier, que le
Comte d'Oettingen, Envoyé Extraordinaire de l'Elécteur
de Baviere, eut le 24. fa premiere audien.e du
Pape , & qu'il remit à Sa Sainteté un Mémoire, dans
lequel l'Electeur de Baviere expofe les raifons qui”
l'ont déterminé à déclarer la guerre à la Reine de
Hongrie.
GENES ET ISLE DE CORSE.
Es dernieres lettres de l'Ife de Corfe , portent
Lqu'on n'y avoit pas encore reçu le nouveau
Reglement que la République devoit y faire publier,
& qu'il y feroit porté par M. Padouani . Elles ajoûtent
que l'Autorité feroit partagée à l'avenir dans
cette Ifle entre deux Commiffaires Géneraux , qui
commanderoient, l'un dans le plat Pays , & l'autre
au- delà des Montagnes , & que le nouveau Commiffaire
Géneral feroit le Sénateur Venerolo.
La République a ordonné aux Pieves de donner
par un Acte Juridique leurs procurations aux Peres
du Commun , pour prêter en leur nom un nouveau
Serment de fidelité .
Les lettres de la Baftie , marquent qu'il y arrivoit
tous les jours un grand nombre de Corfes qui avoient
été exilés , & qui , profitant de l'Amniftie génerale
que la République leur a accordée , retournoient
hés eux.
GRAN
NOVEMBRE 1741 2511
GRANDE BRETAGNE.
N mande de Londres , qu'un Armateur Efpagnol
, qui s'éto it emparé du Vaiſſeau Marchand
le Sally , à la hauteur de Saint Auguftin ,
ayant été rencontré par le Vaiffeau de guerre le
Phenix , ce Vaiffeau lui a enlevé fa prife.
On a apris le 19. du mois dernier , par les équipages
de deux Vaiffeaux arrivés de la Jamaïque à
Liverpool le 15. que le 16. Août dernier , on y
avoit reçû avis par le Brulot le Strumbolo , que l'Amiral
Vernon avoit fait une defcente dans l'ile
de Cuba, & qu'il s'y étoit emparé de la petite Ville
d'Aguanto Anna , fituée à 25. milles de Sant -Jago ,
& où il y a environ 350. maiſons .
Les mêmes équipages ont raporté que le Chevalier
Chaloner Ogle , qui a fait voile de la Jamaïque
pour l'ile de Cuba avec l'Amiral Vernon ,
s'étoit féparé de cet Amiral quelques jours après
que les Anglois y ont fait leur defcente , & qu'il
étoit allé avec fix Vaiffeaux de guerre en tenter une
aux Caracques .
Le Vaiffeau de guerre le Winchelsea , croifant
à l'embouchure du Detroit de Gibraltar fur la Côte
d'Afrique , & le Capitaine ayant fait ôter fou Pavillon
, deux Armateurs Efpagnols , qui prirent ce
Vaiffeau pour un Vaiffeau marchand , lui donnerent
la chaffe , mais ayant reconnu leur mépriſe
Jorfqu'ils fe furent aprochés de ce Bâtiment à la
portée du Canon , ils prirent la fuite de differens
côtés .
Lé Capitaine Holcombe qui commandoit le
Vaiffeau de guerre le Winchelsea , pourſuivit celui
qu'il pouvoit joindre plus facilement , & qui étoit
un Brigantin de deux canons , de huit pierriers &
H iiij de
2514 MERCURE DE FRANCE
de 46. hommes d'équipage , & l'ayant obligé de fe
rendre , il le conduifit à Gibraltar .
On a apris de Rhodes Ifland, que le Vaiffeau la
Revanche avoit enlevé à la hauteur de Bonica un
Bâtiment Espagnol , dont la charge eſt eſtimée
14000. livres Sterlings . Celle du Vaiffeau de Regiftre
, qui a été pris depuis peu par le Vaiffeau de
guerre le Succès , eft fi confidérable , que le Capitaine
Thompfon , qui commande le Succès , aura
40000. livres Sterlings pour fa part de cette prife ,
que la part de chaque, Matelot montera à plus &
de roo.
Un Vaiffeau de guerre Anglois s'eft emparé du
Vaiffeau Efpagnol la Justice , qui revenoit de la
Havane , & dont la charge eft eftimée 250000 .
Piaftres.
On a reçu avis par des lettres de la Nouvelle Angleterre
, que l'Armateur Fox , Commandant le
Vaiffeau la Revanche , avoit conduit à Newport
dans le Rhodes Ifland une prife Eſpagnole qu'il
avoit faite fur la Côte des Caracques .
Deux Armateurs Eſpagnols ont été pris dans les
environs du Havre de Grace.
Les Efpagnols fe font emparés des Vaiffeaux marchands
la Nouvelle Hampfire , l'Entreprise , le Hannach
, & d'une Chaloupe de Glaſgow.
HOLLANDE ET PAYS - BAS.
Es derniers avis reçûs de la Haye du 17. de ce
mois ,portent que les Etats Generaux17.dece
blerent le 15. pour déliberer fur un Mémoire qui
leur a été préſenté par le Marquis de Fenelon
Ambaffadeur du Roy de France , & dans lequel il
eft expofé que S. M. T. C. a été informée qu'il fe
repand de toutes parts des copies d'un Traité ,
qu'on
NOVEMBRE. 1741 . 2575
qu'on prétend avoir été figné le 18. Mai dernier.
& ratifié le 3. du mois fuivant , entre Elle & l'Electeur
de Baviere , & qui contient divers articles :
malignement fabriqués , principalement par raport
aux conquêtes qu'on fupofe que le Roy Très Chré
tien voudroit faire tant dans les Pays -Bas , que dans
l'Empire , & pour faire entendre que l'union de S.,
M. T. C. avec l'Electeur de Baviere avoit pour objet
l'accroiffement de la puiffance de la France ; que
les premiers avis que le Roy Très - Chrétien en a
réçûs , lui ont donné lieu de juger que cer écrit a
été compofé en Hollande , ou que du moins les
premieres copies y ont été diftribuées , & que ceux.
qui en font les auteurs , voudront vraisemblablement
le faire imprimer , pour le répandre plus facilement
dans le public , dans la vûë d'infpirer de
la défiance des deffeins de S. M. T. C. & de ce:
qu'Elle entreprend avec autant de zéle que de défintéreffement
le foûtien de fes Alliés , pour & pour
le plus grand avantage de l'Empire ; que S. M. T.
C. a ordonné à fon Ambaffadeur , de prévenir les
Etats Géneraux fur cette écrit , & de les affûrer que:
ce prétendu Traité étant une fauffeté & une impofture
complette , le Roy Très- Chrétien De doute
pas que leurs Hautes Puiffances ne prennent une
entiere confiance dans la Déclaration que l'Ambaf
fadeur fait en fon nom , & qu'en conféquence elles
ne veuillent bien , fur la réquifition qui leur en eft
faite , donner les ordres les plus précis , pour qu'un
écrit fi fcandaleux & auffi contraire aux intentions,
de S. M. T. C. qu'à la parfaite harmonie qu'elle
defire de conferver avec l'Empire & avec les Etats
Géneraux ne puiffe être imprimé dans les Etats de
la Domination de la République , ou pour le faire:
fuprimer dans la forme la plus authentique:
Ce Mémoire ayant été lû dans l'Affenblée des
Etats H W
516 MERCURE DE FRANCE
Etats Généraux , il y a été arrêté qu'il feroit infer
dans le Regiſtre des Etats,qu'on en enverroit des copies
aux Etats des Provinces refpectives , lefquels
feroient requis de donner ordre dans leurs Provinces
, que ce Traité fupofé n'y foit point imprimé ,
& en cas qu'il le fut déja , que les exemplaires en
fuffent retirés & fuprimés , & qu'on fit des recherches
, autant qu'il feroit poffible , pour en décou
vrir les auteurs , afin que s'ils font découverts , 11
foit procedé contre eux fuivant toute la rigueur des
Loix ; qu'on donneroit part de cette réfolution à
l'Ambaffadeur du Roy Très - Chrétien , en lui témoignant
qu'il n'étoit point venu à la connoiffance
de leurs Hautes Puiffances , que ce prétendu Traité
eût été composé dans ces Pays , ou que les premieres
copies y euffent été diftribuées ; qu'en cas que
cela fût arrivé , ce feroit entierement contre leurs
intentions ; que fur les affûrances contenues dans
le Mémoire préfenté par le Marquis de Fenelon ,
elles regardoient ce prétendu Traité , comme une
piéce fauffe & une impofture , & qu'avec une pleine
confiance elles acquiefcoient à ce que le Marquis
de Fenelon leur a déclaré , & elles fe repofoient
volontiers fur les marques que S. M. T. C.
donne de fon intention & du défir qu'elle a de confetver
une bonne harmonie , tant avec l'Empire
qu'avec la République , & que l'extrait de cette réfolution
feroit remis au Marquis de Fenelon par
M. de Byemont , Agent des Etats Géneraux .
XXXXXXXXXXX XXXXXXXXXXX
MORT'S DES PAYS ETRANGERS.
E 30. Septembre , D. Ginez Fernandez de
Portugal- Caftro , Comte de Lemos, de Caftro, de
Villalva , & d'Andrada ; Duc de Tautifano , Grand
d'Espagne ,
NOVEMBRE . 1741. 2517
Efpagne, Chevalier de l'Ordre de la Toifon d'Or,
Gentilhomme de laChambre de S.M.Cath.ci - devant
General des Galeres de Naples , Viceroy de Sardaigne
, & premier Capitaine des Gardes du Corps ,
dans lesquels Emplois, & autres qu'il avoit remplis,
il avoit toûjours donné des marques de fon zéle
pour le fervice du Roy, mourut à Madrid à l'âge de
75. ans , étant veuf fans enfans de Dona Catherine-
Marie de Silva , & Mendoza , fille de D. Georges-
Marie de Silva . & Mendoza , Duc de Paftrane , &
de l'Infantado , & de D. Marie de Haro , & Guzman .
Il l'avoit épousée le 8. Septembre 1687. & elle
mourut le 18. Janvier 1727. dans la 58. année de
fon âge. Le Comte de Lemos, qui étoit fils aîné de
D. Pierre-Antoine Ferdinand de Portugal Caftro ,
Comte de Caftro , de Lemos , d'Andrada & de Villalva
, Marquis de Sarria , Duc de Taurifano , Viceroy
du Perou , mort en 1678. & de Dona Anne de
Borgia de Gandie , étoit Chef , & le dernier mâle
d'une Branche cadette des Ducs de Bragance.
Le 15. Octobre , Marie- Anne - Françoile , née
Ducheffe de Saxe Lawembourg , veuve en dernieres
nôces depuis le 9. Juillet 1737. de Jean Gafton de
Médicis , dernier de fa Mailon , Grand Duc de Tofcane
, avec lequel elle avoit été mariée le 2. Juillet
1697. & dont elle n'a point eû d'enfans , mourut
au Château de Reichstadt , en Boheme , où elle
avoit fixé fa réfidence actuelle depuis plufieurs années.
Cette Princeffe , qui étoit âgée de 69. ans ,
4. mois & 2. jours , étant née le 13. Juin 1672 .
avoit été mariée en premieres néces le 20. Octobre
1690. avec Philipe - Guillaume Duc de Baviere ,
Comte Palatin du Rhin , de la Branche Electorale
de Neubourg , mort le 10. Avril 1693. duquel elle
a laiffé une fille unique , qui eft Marie- Anne Caroline
de Baviere , Comtefle Palatine du Rhin ,

née
Hvj le
2518 MERCURE DE FRANCE

le 30. Janvier 1693. & mariée le s . Février 1719
avec Ferdinand Marie , Duc de Baviere , Géneral
de l'Artillerie de l'Empire frere de l'Electeur
Duc de Baviere , actuellement regnant ,
& duquel elle eft demeurée veuve avec un fils &
une fille, le 9. Decembre 17 ; 8. La Grande Ducheffe
de Tofcane qui vient de mourir , étoit fille aînée
de Jules- François , dernier Duc de Saxe Lawembourg
, de fa Race , mort à Reichſtadt , en Boheme,
le 29. Septembre 1689. & d'Hedwige Augufte de
Baviere , Comteffe Palatine du Rhin , à Sultzbach
morte le 29. Octobre 1681 .
FRANCE.
NOUVELLES DE LA COUR, DE PARIS , &C
E 31. du mois derniér , veille de la Fête
de tous lems oSaiisnts , la Reine communia
par les mains de l'Abbé d'Alegre , fon Aumônier
en quartier .
Le même jour , le Roy & la Reine , accompagnés
de Monfeigneu le Dauphin & de
Madame , affifterent dans la Chapelle du
Château de Verſailies aux premieres Vêpres.
de la Fête , qui furent chantées par la Mufique
, & auxquelles l'Evêque de Bayonne ,
nommé à l'Archevêché d'Arles , officia ..
>
Le premier de ce mois , jour de la Fête
leurs Majeftés , accompagnées comme la
veille,
NOVEMBRE . 1741 2519
veille, entendirent la Grand -Meffe , célébrée
pontificalement par le même Prélat.
L'aprés- midi , le Roy & la Reine , accom4
pagnés de Monfeigneur le Dauphin & de
Madame , affifterent au Sermon du Pere
Fleury , de la Compagnie de Jefus , & enfuite
aux Vêpres , auxquelles le même Prélat
officia. Leurs Majeftés entendirent auffi les
Vêpres des Morts.
>
Le Roy a donné le Régiment Irlandois
dont le feu Lord Dillon étoit Colonel , au
Comte Dillon, fon frere , Colonel Réformé,
& Major de ce Régiment..
Le 13. de ce mois l'ouverture du Parle
ment fe fit avec les Cérémonies accoûtu
mées par une Mcffe folemnelle , célébrée
dans la Chapelle de la Gand'Sale du Palais ,
par l'Abbé de Chamron , Tréforier de la
Sainte Chapelle , & à laquelle M. le Péletier
, Premier Préfident , & les Chambres
affifterent..
Le premier Novembre , Fête de la Touffaint
, le Concert Spirituel du Château des
Tuilleries commença par le De profundis ,
Motet à grand Choeur de M. de la Lande,
lequel fut fuivi d'un double Quatuor , Symphonie
du fieur de Blanville , & du petit
Motet à voix feule , Exultate jufti , du fieur
Cordelet.
2520 MERCURE DE FRANCE
Cordelet. Le fieur Marcel le cadet , Ordinai
re de la Mufiquè de l'Electeur de Baviere ,
exécuta fur le Violon une Sonnate de fa compofition,
qui fut aplaudie. La Segnora Monza,
Actrice de l'Opera de Londres , chanta
deux Airs Italiens . Le fieur Gravines , âgé
feulement de 13. ans , exécuta , accompagné
de toute la Symphonie , le Printems de Vivaldi
, avec beaucoup de précision . Le Concert
fut terminé par un Motet à grand Chou
du fieur de Boismortiers.
Le 4. Novembre , il y eut Concert chés la
Reine. M. de Blamont , Sur- Intendant de la
Mufique du Roy , fit chanter le troifiéme Acte
de fon Ballet Héroïque des Caractéres de
l'Amour , intitulé , l'Amour Fidele . Les prin
cipaux rôles furent remplis par la Dlle la Lande
, & par les fieurs Benoît , Dubourg & le
Begue. Le fieur Poirier chanta dans le Divertiffement
l'Ariette , Regnez Jeux & Plaifirs ;
&c. du même Auteur.
Le 6. la Reine entendit le Divertiffement
composé par le même Auteur , à l'occaſion
du Mariage de Madaine de France , qui a
pour titre les Hefperides ; les rôles furent
rendus par les mêmes Sujets , & par la Dlle
Mathieu ; la Dlle Deſchamps chanta plufieurs
Airs détachés du même Divertiffement, avec.
beaucoup de préciſion,
Le
NOVEMBRE. 1741 2521
Le 13. le 18. & le 20. on concerta devant
la Reine l'Opera d'Héfione , de M. Campra ,
dont les differens rôles furent joués par les
Dlles de Romainville , la Lande & de Saint
Marc ; cette derniere vient d'être reçûë à la
Mufique du Roy , elle eft niece de la Dlle
Chape , célebre & ancienne Muficienne du
Roy. Le rôle d'Anchife fut chanté par le fieur
de la Garde , reçû depuis peu à la Mufique
du Roy.
Le 25. & le 27. M. de Blamont fit exécu
ter fon Opera d'Endimion , dont les principaux
rôles furent remplis par les mêmes Sujets
qu'on vient de nommer.
Le 7. Novembre ; les Comédiens François
repréſenterent à la Cour la Comédie de l'A
vare & la Sérenade ; le fieur de Bonneval ,
nouveau Comédien , joüa le rôle d'Harpagon
, dans la premiere Piéce .
Le 9. le Cid & l'Eté des Coquettes ; le fieur
Dangeville Montfleury , joüa le rôle du Cid.
Le 14. le Curieux Impertinent , & les Folies
Amoureufes ; la Dlle Bercaville joüa dans
les deux Piéces les rôles de Suivante.
Les 16. la Tragédie d'Héraclius , & le Ma
ri Retrouvé ; le fieur Paulin , nouveau Comédien
, joüa le rôle de Phocas dans la premiere
Piéce .
Le 21. l'Enfant Prodigue , & la Pupille.
La
2522 MERCURE DE FRANCE
2
Le 23- Zaïre , & la petite Piéce du Dédit.
Le 28. l'Homme à Bonnes Fortunes , & l'Etourderie.
Le 8. Novembre , les Comédiens Italiens
repréſenterent auffi à la Cour , le Défi d'Ar
lequin de Scapin , Piéce Italienne en trois
Actes , après laquelle on exécuta le Divertiffement
de la Coquette , & celui des Enfans:
Jardiniers, que la Reine n'avoit point encore
vûs ; ils exécuterent leur Pantomime, au gré
de S. M. & de toute la Cour.
Le is . ils jouerent le Faucon , & les Mafcarades
Amoureuſes.
Le 22. Arlequin must par crainte , Comédie
Italienne , qui fut fuivie de la petite Piéce
la Rufe d'Amour , & des Divertiffemens , les
Payfans Italiens , & les Enfans Jardiniers.
Le 29. les Fées , & les Enfans Trouvés ,
Parodie de Zaire.
2
Le 12. de ce mois , la Troupe des Petits
Comédiens Hollandois , qu'on a vûs avec
plaifir à la derniere Foire S. Laurent , fur
mandée pour aller à la Cour où ils firent
differens tours de foupleffe & d'autres exercices
comiques, en préſence de Monfeigneur
le Dauphin & de Mefdames de France ; ils.
terminerent leur Divertiffement par une Pantomime
, parfaitement bien executée , au gréda
NOVEMBRE. 1741 2523
de Monfeigneur le Dauphin , de Mesdames ,
& de toute leur Cour.
L'Armée de l'Electeur de Baviere , qui s'étoit
raffemblée à Ips le 6. & le 7. du mois
dernier , y refta jufqu'au 15. que la gauche
de cette armée en décampa pour aller à Erlap
, d'où le lendemain elle fe rendit à Melk.
La droite fit le même mouvement le 16. &
le 17. Le Comte d'Aubigné , Lieutenant Géneral
, avoit été détaché de l'armée le 13 :
avec -la Brigade de la Marine , le Régiment
Royal des Carabiniers , deux de Dragons &
un de Huffards , pour occuper ce Camp. Le
Comte de Mortaigne , Maréchal Général des
Logis de l'armée , s'avança le 12. avec un détachement
juſqu'à S. Polten , & il en chaffa
un Corps d'environ mille Huflards , dont le
Commandant a été fait prifonnier. Le Comte
de Mortaigne a reçû en cette occafion une
legere bleffure au- deffous de l'oeil .
La
Colonne des
troupes,
du Roy
, qui ont
paffé
le Rhin
à Spire
dans
le mois
de Septembre
dernier
, & qui
étoit
compofée
de
trois
divifions
, commandées
par le Marquis
de Gaffion
, par le Marquis
de Clermont-
Tonnerre
, & par le Comte
du Cayla
, Lieutenans
Géneraux
, arriva
à Amberg
le 16. le
18. & le 20. du mois
dernier
. L'autre
Colonne
, qui a marché
fous
les ordres
du Com
24 MERCURE DE FRANCE
te de Polaftron , Lieutenant Géneral , & de
Mrs de la Gervafais & de la Tour , Maré
chaux de Camp , arriva à Lawingen le 9. le
10. & le 12 .
Lc 14. du mois dernier , le Comte d'Aubigné
, Lieutenant Géneral , s'établit à Saint
Polten , avec les troupes qui avoient été détachées
fous fes ordres du Camp d'Ips .
Le Comte de Mortaigne marcha le 18.
avec un détachement de 800. hommes à
Mautern , & il en chaffa la garnifon , quoiqu'elle
fût foûtenue par cinq Saïques armées.
;
Le lendemain , les troupes Bavaroifes parti
rent de Melck , & elles camperent le 20. à
Mautern celles du Roy , qui font dans la
même armée , ne quitterent le Camp de
Melck le
que 20. pour
fe rendre le lendemain
à Saint Polten.
Les troupes de l'Electeur de Baviere , qui
étoient campées à Mautern depuis le 20. du
mois dernier , y pafferent le Danube le 24. &
-elles ont marché vers la Boheme , fous les ordres
du Maréchal de Terring, Le Géneral
Minutzy y entra le 21. par Wald- unick
& il s'eft avancé en quatre marches jufqu'à
Klodrau , près de Pilfen , où il a dû être
joint par les deux Colonnes des troupes du
Roy , qui ont paffé le Rhin au mois de Sep.
tembre , pour ſe rendre à Amberg & à
Lawingen,
'
NOVEMBRE.
1741. 2525
Le 23. le Comte de Mortaigne fut détaché
du Camp de Saint Polten , avec un Corps de
Cavalerie d'environ mille hommes, & il pouffa
les ennemis au delà de Capell ; il leur a
fait quelques prifonniers , & il a ramené des
ôtages pour la fûreté du payement des contributions
demandées dans la Baffe- Autriche.
Une partie des troupes Françoifes , qui
étoient à Saint Polten , s'eft repliée le 25 fur
Sierning , & elle fe difpofoit à remonter le
Danube juſqu'à la riviere d'Ens.
L'armée du Roy, commandée par le Ma
réchal de Maillebois , commença le 28. du
mois dernier à fe féparer , & les troupes qui
la compofoient , font allés prendre leurs quartiers
dans le Pays de Juliers , dans l'Electo
rat de Cologne & dans les Evêchés de Weft,
phalie.
Une partie des troupes du Roy , campées
à Saint Polten , ayant quitté ce Camp le 25 .
du mois dernier , pour fe rendre à Sierning ,
& pour remonter le Danube juſqu'à la riviere
d'Ens , le refte de ces troupes eft parti du
même Camp depuis le 25. jufqu'au 30. &
s'eft replié fur l'Ens .
Le 29. au matin , la Brigade de Navarre
fe difpofant à paffer de la gauche à la droite
de Saint Polten , pour joindre les troupes
avec lesquelles elle a fait l'arriere -garde , fut
inveſtie par un Corps d'environ 5oo . Rafciens
,
2526 MERCURE DE FRANCE
ciens , qui après quelques efcarmouches , fe
retirerent , dès qu'ils virent un détachement
du Régiment de Dragons d'Armenonville
qui s'avançoit pour foutenir cette Infanterie .
Le premier de ce mois , la même Brigade
de Navarre fut inquietée dans fa marche , fur
la chauffée qui eft le long du Danube , auprès
de Melck , par un détachement de Pandoures
, que cinq Saïques avoient débarqués
dans une Ifle voifine de cette chauffée , mais
les Grenadiers de la Brigade s'étant jettés à
l'eau pour aller attaquer les Pandoures , ces
derniers furent forcés de regagner leurs Saïques
, lefquelles effuyerent , en defcendant
le Danube , le feu de huit Compagnies de
Grenadiers , & des Carabiniers , poftés dans
l'Abbaye de Melck.
› Le 2. les Rafciens , au nombre de 600.
tenterent de difputer au campement le paffage
d'un défilé au - delà du ruiffeau d'Erlaph
mais le feu des Grenadiers les obligea de fe
retirer avec tant de précipitation , qu'il ne
fut pas poffible de les pourfuivre. Il n'y a eû
dans ces trois occafions qu'un Caporal du
Régiment de Navarre de tué ; les Rafciens
y ont perdu plufieurs Soldats & principalement
de ceux qui étoient fur leurs Saïques.
Le pont fur lequel les troupes de l'Electeur
de Baviere out paffé le Danube le 24. du
mois dernier à Mautern , a été remonté jufqu'à
NOVEMBRE . 1741. 2527

qu'à Malhaufen , où le paffage des troupes
du Roy , pour ſe rendre en Boheme , a dû ſe
faire par Freyftatt & par Budeweis .
M. du Brocard , Brigadier , qui commande
l'artillerie , s'eft établi dès le 26. du mois
dernier dans ce dernier endroit avec un Corps
de troupes , & le 29. il a fait avancer un détachement
jufqu'à Tein , pour s'emparer des
Bateaux qui étoient fur la Moldaw.
Les troupes du Roy , qui ont marché par
le Haut-Palatinat , font arrivées à Pilfen depuis
le 2. jufqu'au 6. de ce mois , & elles y
ont apris que le Prince de Lobkowitz s'é
toit retiré avec le Corps de troupes qu'il
commande , au- delà de Prague .
Le 3. de ce mois , l'Electeur de Baviere a
paffé le Danube à Mathaufen , avec un Corps
de Cavalerie , pour fe rendre par Freyſtatt à
Budeweis . Les troupes de ce Prince , qui
étoient parties de Crems le 24. du mois dernier
, fe font avancées à Tabord. Le Marquis
de Leuville a laiffé le Comte de Segur fur
l'Ens , avec un Corps de troupes , pour garder
les poftes de la Haute - Autriche , & il
s'eft mis en marche le 8 , de ce mois fur deux
colonnes , pour faire la même route que les
troupes Bavaroifes. Le Marquis de Gaffion
eft parti de Pilfen le 7. avec une partie des
troupes qu'il commande , pour fe rendre, à
Rockitzan ; le refte de ces troupes a dû le
fuivre
528 MERCURE DE FRANCE
fuivre le lendemain fous les ordres du Mar
quis de Clermont- Tonnerre , & ces troupes
marcheront ainfi jufqu'à Bernaun , qui eſt à
fix lieues de Prague,
EXTRAITS de quelques Lettres , Attef
tations , c. au fujet du remede du Sieur
Arnoult contre l'Apoplexie , &c.
D
>
E Soleure le 17. Juin 1741. Notre Gouver
neur M. de Molandin , fut attaqué hier matin
d'apoplexie , le prompt fecours que M. le Brigadier
du Vigier lui a donné d'un fachet , l'a tiré d'affaire ,
graces à Dieu , il eft à préfent hors de danger
ayant recouvré la parole & la connoiffance ; ce
Brigadier vous prie inftamment de m'envoyer par
le premier Courier , à mon adreffe à Huningde
Huit Sachets du fieur Arnoult , avec les Imprimés
fignés de la main , pour la confervation de notre
illuftre Malade . Cette Lettre eft écrite à M. Guldeman
, Banquier à Paris , que des deux Boules ; à
la fin de la Lettre , on lit ce qui fuit.
M. de Molandin , ancien Gouverneur de Neufchatel
, Confeiller d'Etat des Ville & Canton de
Soleure en Suiffe . Ce fait eft confirmé par Mad . de
Molandin , fuivant fa Lettre du 10. Juillet écrite
à M. Guldeman , dont voici les termes : » M. du
Vigier m'a dit que c'eft par vous qu'il a fait venir
le remede fpécifique contre l'apoplexie du fieur
» Arnoult ; M. de Molandin s’en eſt ſi bien trouvé
» dans fon malheureux accident, que tout le monde
» en veut avoir ; ayez la bonté d'en joindre huit à
» mes commiffions , figné , Creder de Molandin , »
M. le Comte , Directeur & Tréforier Géneral des
vivres de la Marine à Toulon , par la Lettre du 28 .
Mai
NOVEMBRE 1741. 2529
May 1741. marque au fieur Arnoult qu'il a fait pré
fent d'un de fes Sachets à M. Jofeph Imbert , Gardien
du Bureaudes Armemens du Port de Toulon
lequel dans le tems qu'on lui mit le spécifique étoit
entierement perclas du bras droit, & que deux jours
après , il eut l'ufage libre de ce bras , dont il fe fert
aujourd'hui parfaitement bien.
M. le Fevre l'aîné , Négociant à Lille , par fa
Lettre du 9. Octobre , marque au fieur Arnoult
qu'il a donné un de fes Sachets à une perfonne
dans une attaque d'apoplexie , laquelle s'en eft fervie
avec fuccès , & que depuis neuf mois elle n'a eu
aucune rechute . Qu'une autre perfonne depuis
8. à 9. mois , ne bougeoit de fon lit par la fuite
d'une appoplexie , perclufe d'un côté ; mais que
par l'ufage de ce remède , elle fe porte à préfent
rès-bien , allant à la Melle tous les jours , & c.
M. Habert, de la Maifon & Societé de Sorbonne,
Recteur de Komagne , Paroiffe près de Fougeres ,
en Bretagne , M. Marthenot , Prêtre Archidiacre
de la Cathédrale , & Promoteur Géneral du Diocèfe
de Langres , & M. du Perrey , Négociant à Caen ,
par leurs Certificats en bonne forme , atteftent leur
guérifon , prompte & durable dans pareilles atta
ques par l'ufage du même remede.
M. Defchamps Jouault , Avocat au Parlement de
Rouen , attefte auffi en bonne forme , que la Dlle
Catherine Marchandel , fon Epoufe , eut le 8. de
Mai 1733. une attaque d'apoplexie , qui lui ôta la
parole pendant 14.jours entiers, ayant fait inutilement
toutes fortes de remedes ; qu'on eut enfin recours
au fpécifique du fieur Arnoult , dont l'uſage lui a
rendu une parfaite fanté , ajoutant que depuis huit
ans qu'elle en fert , il ne lui eft arrivé aucun acci
dent , ni le moindre fymptôme.
M. Brayer , Garde des Decrets du Châtelet de
Paris,
2530 MERCURE DE FRANCE
Paris , certifie que M. l'Abbé Chevre , fon amni ,
demeurant à Hauvilliers , en Champagne , tomba il
y a fix ans en apoplexie , dont il a été guéri , & enfuite
préfervé par l'ufage du même remede ; mais
qu'ayant difcontinué cet ufage , fon Sachet ne pouvant
plus fervir , étant entierement conſommé par
les fueurs, & ne reftant plus que l'envelope , il vient
d'effuyer depuis huit jours deux attaques nouvelles ,
ce qui l'oblige de demander promptement ce même
remede . M Brayer , joint à fon Certificat , qu'ayant
été lui - même attaqué d'apoplexie , il y a environ
fept mois , de quoi M. Pouffe , Médecin de la Faculté
de Paris a eu connoiffance , on lui fit faire
ufage de ce remede , lequel fit fi bien fon effet , que
depuis il ne lui eft pas arrivé le moindre accident.
Ce Certificat eft daté du 14. Octobre 1741 .
i
M. Alard , Marchand à Pontorfon, en Baffe Nor
mandie , marque que le Curé de Veffey , pour le
quel il avoit fait venir un de ces Sachets , après une
attaque d'apoplexie arrivée en l'année 1733. ayant
fait ufage de ce remede , il le porte à préfent trèsbien
, fans qu'il lui foit arrivé le moindre accident
depuis.
Meffieurs François & Thomas Vaſtel , de la
Ville de Rouen , Infpecteurs dans les Affaires du
Roy dans la même Ville , certifient avoir été guéris
des & d'étourdiffemens dont ils étoient attaqués
, par l'aplication du même Sachet , après
avoir fait inutilement tous les remedes ordinaires .
vapeurs
Enfin , l'éloge que le Cardinal de Polignac a fait
de ce Spécifique dans l'Académie des Belles - Lettres ,
& les témoignages qu'il a bien voulu rendre des
heureux effets qu'en ont éprouvés plufieurs Seigneurs
de fes parens & de fes amis , fans compter plufieurs
Médecins & Chirurgiens , qui témoins des effets
certains du Sachet , en aprouvent & confeillent même
NOVEMBRE. 1741 . 2531
ime l'ufage ; tout cela ajoute à la véridicité de tous
les Certificats ci - deffus .
Mais quoique le remede dont le fieur Arnoult ,
Marchand Droguifte à Paris , rue des cinq Diamans
,eft le feul poffeffeur , fe diftribue depuis plus
de 40, années , fans aucun reproche , au contraire ,
avec l'aplaudiffement du public, cependant les plaintes
réitérées de quantité de perfonnes qui ont été
trompées par des gens qui contrefont fon'Spécifique ,
& qui ont donné lieu à de fâcheux accidens , tant
Paris qu'à Rouen , & ailleurs , le fieur Arnoult
pour le bien & la fûreté du public , répete que fon
remede ne fe diftribuë que chés lui , qu'il ne commet
perfonne pour le débiter ailleurs , qu'il n'en
donne pas un feul fans qu'il foit accompagné d'un
Imprimé figné de lui , & enfin , fans enregistrer les
noms , qualités & demeures de ceux pour lesquels
on les deſtine ,
**************************
POUQUET préſenté à fon Eminence M. la
Cardinal DE FLEURY, le 30.Novembre,
jour de S. André.
ARGUMENT.
Ugufte fut , fans contredit , un des plus grands
AEmpereursRomains, il fut adoré de les peus.
la
ples , tant par fa douceur & fes vertus , que par
fageffe avec laquelle il les gouvernoit ; Mecêne fut
fon ami , fon premier Minitre , fon confeil ; l'Auteur
a crû ne pouvoir mieux faire que de comparer
à Mecêne S. E. puifque dans le fage Monarque
qu'il a fi dignement formé , nous retrouvons un
Augufte .
Le Peuple François s'empreffe de célebrer un fi
beaujour par fes Chants & par fes Danfes.
I
2532 MERCURE DE FRANCE
Un Plebeien , chante .
Du plus fage des Rois Interprete fidele
Mecêne de nos jours , daigne écouter nos chants ,
Nous venons t'exprimer nos tendres fentimens ,
D'un regard favorable aprouve notre zéle .
Le Choeur de Plébeïens repete ces quatre Vers.
Un autre Plébeien,
LOUIS , des Héros le modéle
Fait le bonheur de nos climâts ;
>
Tu joüis avec lui de la gloire immortelle
D'affûrer à nos coeurs un deftin plein d'apas.
Autre Plebeien.
La Difcorde s'envole à l'afpect du Tonnerre
Qu'en de fi fages mains le Monarque a remis ;
En faisant la Paix ou la Guerre ,
Tu fais trembler fes Ennemis.
Autre Plebeien.
Des graces qu'en ces Lieux Mécêne nous difpenfe ,
Célebrons les attraits ;
Que notre reconnoiffance
Egale , s'il fe peut , les biens qu'il nous a faits.
Choeur de Plébeiens .
De fes vertus rempliffons notre Hiſtoire ;
Vous , Déefle , aux cent voix, publiez fes bienfaits
Et que fon nom au Temple de Mémoire ,
Comme au fond de nos cours, foit gravé pour jamais
Ant
NOVEMBRE. 1741. 2533
Autre Plébeien.
Cet aimable Empire
Nous offre mille douceurs
L'air qu'on y reſpire
Enchante nos coeurs.
Sans foins , fans allarmes ,
Nous vivons fous d'heureufes Loix
Ce bonheur plein de charmes ,
x ;
Nous le devons au plus parfait des Rois.
Deux Plébeiens.
Que le Deſtin à nos voeux favorable ,
Conſerve de Mécêne à jamais les beaux jours !
Quel bien eft plus défirable
Que d'en voir prolonger le cours .
1. Un Plebeien.
Favoris d'Apollon confacrez fa mémoire ;
Chantez notre félicité ;
Témoins de fa gloire ,
Volez , à ſon exemple , à l'immortalité .
Choeur de Plebeiens.
Favoris d'Apollon , & c.
La Mufique eft de la compofition de M. l'Abbé
Madin , Maitre de la Chapelle du Roy , & les Patoles
ont de M. Bailly , Garde des Tableaux du
Louv.e.
1 ij MORTS
2534 MERCURE DE FRANCE
ƒ ƒ ƒ å åå å ž į į
MORTS , NAISSANCES.
E .... Août Gabriel de Chouly , Seigneur de
Permangle ,en
des Armées du Roy , & Gouverneur du Fort Louis
du Rhin , mourut , âgé de 78. ans. Il avoit été dabordCapitaine
dans leRégiment Dauphin Infanterie,
Il obtint en 1696. un des so. nouveaux Régimens
d'Infanterie , qui furent mis alors fur pied , & qui
furent réformés après la Paix de Ryfwick. Il eut en
1703. un autre Régiment d'Infanterie , ci -devant
Saulieu , & il fut fait fucceffivement Brigadier le
10. Fevrier 1704. Chevalier de l'Ordre Militaire
de S. Louis en 1705. Maréchal de Camp le 18.
Nov. 1708. & Lieutenant Géneral le premier Fev!
1719. Le Gouvernement du Fort- Louis du Rhin lui
fut donné en 1712. Il avoit été marié au mois de
Juin de la même année , avec Marguerite Ancel des
Granges , veuve d'Adrien - Antoine d'Auvergne de
Saint Mars , Gouverneur & Grand- Bailly de Sens ,
Sous -Lieutenant de la Compagnie des Gendarmes
d'Anjou , mort le 13 Novembre 1703. & fille de
Michel Ancel des Granges , Confeiller- Sécretaire
du Roy & de fes Finances , & Maître des Céremonies
de France , & de Marie - Anne Defnos . Il n'em
laiffe point d'enfans.
Le 18. Dlle Marie - Louife - Marguerite , fille de
Bertrand Céfar , Chef du nom & Armes du Guefclin
, Seigneur de la Roberie de Cranhac , & de
Montmartin , Meftre de Camp de Cavalerie , Chevalier
de l'Ordre Militaire de S. Louis , Premier
Gentilhomme de la Chambre du Duc d'Orléans ,
de D. Marguerite Bofc , Dame du Palais de la
Reine
NOVEMBRE . 1741. 2535
Reine Douairiere d'Eſpagne , mourut âgée de 9. ans
7. mois
Le 29. Charles de Rochechouart , Alarquis de
Monpipeau , Baron du Cheret , Brigadier des Armées
du Roy, du 6. Octobre 1723. ci - devant Meftre
de Camp Lieutenant du Régiment de Condé ,
Cavalerie , & auparavant Capitaine dans le Régiment
du Maine , auffi Cavalerie , mourut à Paris ,
âgé d'environ 7. ans , & fans avoir été marié ,
ainfi en lui finit la Branche des Seigneurs Marquis
de Monpipeau , dans l'Orléanois , fortie de celles
des Ducs de Mortemart. Le Défunt avoit pour frere
Jean-Leonor de Rochechouart , apellé le Comte
de Monpipeau , & Capitaine de Vaifleaux du
Roy , qui fervoit fur l'Efcadre qui fut envoyée
l'année derniere en Amérique , fous les ordres du
feu Marquis d'Antin , & qui mourut fur fon bord
le 19 Mars dernier en revenant en France . Ces
deux freres étoient enfans de Charles de Rochechouart
, Marquis de Monpipeau , Baron du Cheret
, Lieutenant des Gardes du Corps du Roy , qui
fut perdu le 19. Septembre 1891. au Combat de
Leuze , en Flandres , à l'âge de 38. ans , & de Michelle
Aubry , morte le 2. Novembre 1719.
>
Le premier Septembre , Eugene- Pierre de Surbeck
, Seigneur de Garlande , Brigadier des Armées
du Roy , de la Promotion du premier Mars 1738 .
Chevalier de l'Ordre Militaire de S. Louis , & Capitaine
Lieutenant , Commandant la Compagnie
Génerale du Régiment des Gardes Suiffes , mourut
à Bagneux , près de Paris , dans la 65. année de
fon âge. Il étoit fils de feu Jean-Jacques de Surbeck ,
Lieutenant Géneral des Armées du Roy, Inspecteur
d'Infanterie , & Colonel d'un Régiment d'Infanterie
Suife , mort le 4. Mai 1714. & il étoit veuf depuis
1725. de . de Guiry , fille aînée de Louis
I iij
de
2436 MERCURE DE FRANCE
de Guiry , Seigneur de Noncourt , & de la Ronciére
, Lieutenant General de la Province d'Aunis
& Gouverneur des Tours , Port , Havre , & Chaŝnes
de la Rochelle , & de Marie de Malezieu .
Le 2. Henry - joseph , Comte de Caylus , Brigadier
des Armées du Roy , de la Promotion du premier
Août 1734 ci- devant Colonel d'un Régiment
d'Infanterie , réformé en 1714. après la paix d'Urrecht
, mourut à Paris âgé de 60. ans
Le 6. Pierre Mangot , Seigneur de Danzay , Confeiller
au Grand - Confeil , où il avoit été reçû
le 16. Juin 1714. mourut âgé de 60. ans . Il étoit
fils de Pierre Mangot , Secretaire du Roy , & de
Marie de Lutz , & avoit époufé Marie - Elizabeth
Jouye , de laquelle il laile to enfans.
Anne Brocard , Epofe du nommé Braſley
Huiffier à Cheval au Châtelet de Paris , Greffier
Notaire & Tabellion de Charenton , eft morte à
Vandeuvre , en Champagne , près Bar - für Aube ,
d'un coup de Soleil le 6 Septembre dernier , âgée
de 102. ans , 3 mois, & quelques jours,
Le 8. Dame Marie- Catherine le Jongleur de Remilly
, veuve depuis le mois d'Avril 1730. de François
de Paris , Brigadier des Armées du Roy , &
ancien Capitaine au Régiment des Gardes Françoi
fes , avec lequel elle avoit été mariée le 9. Mai
1707 mourut à Paris âgée de 48. ans fans laiffer
d'enfans . Elle étoit fille de Charles le Jougleur,Seigneur
de Jonville , & de Ponthierry en partie , &
de Catherine de Roujoux.
Le 9. Dame Pauline Felix de Mailly de Néelle ,
Epoufe de Jean- Baptifte - Hubert- Felix de Vintimille
, des Comtes de Marfeille du Luc , Baron
d'Ollioules , & de S. Nazaire , Meftre de Camp
d'un Régiment de Cavalerie , portant fon nom
avec lequel elle avoit été mariée le 27. Septembre
1739.
NOVEMBRE . 1741. 2537
739. ainfi qu'on l'a raporté dans le Mercure de
Novembre fuivant , page 27 10. mourut à Verfail→
es au commencement de la 30. année de fon âge ,
étant née au mois d'Août 1712. Elle laiffe un file
né le z . du même mois de Septembre.
Le ro. Claude de Cabanes , Provençal , Evêque
de Gap en Dauphiné , mourut dans fon Diocèle . II
avoit d'abord été Vicaire de Philipe de Cabanes
fon frere aîné Guré de la Paroiffe du S. Efprit
dans la Ville d'Aix , en Provence, Depuis , il fut
Official & Vicaire Géneral de l'Archevêque d'Aix ,
& ayant été nommé au mois de Novembre 1738.
à l'Évêché de Gap , Suffragant d'Aix , il fut facré le
9. Août 1739. & il prêta ferment de fidelité entre
les mains du Roy à Verſailles le 23. Septembre
fuivant.
Le même jour , Claude - Henry- Eugene de Vaudrey,
Moufquetaire de la feconde Compagnie de la Garde
ordinaire du Roy , fils unique de Claude-Antoine-
Eugene , Cointe de Vaudrey , Seigneur de Beveuges
, dans le Comté de Bourgogne , Lieutenant
Géneral des Armées du Roy , Infpecteur Géneralde
Cavalerie & de Dragons , Commandant en Alface
, actuellement employé dans l'Armée du Roy
en Allemagne , & de D. Marie - Gabrielle de Blitterfwick
de Moneley , mourut à Paris âgé de 14. à
Is. ans.
Le 12. François Sevin , Senonois , Prieur Commandataire
du Prieuré de l'Enfourchure , Ordre de
Grandmont , Diocèfe de Sens , Penfionnaire de
l'Académie Royale des Infcriptions & Belles- Lettres
, & Garde des Manufcrits de la Bibliothéque
du Roy , mourut à l'Hôtel de cette Bibliothéque
âgé de 60. ans . Il avoit été reçû à l'Académie des
Infcriptions , d'abord en qualité d'Eleve en 1711.Il
en fut fait Affocié en 17 14. & Penfionnaire en 1726.
I iiij
L'Ab
2538 MERCURE DE FRANCE
L'Abbaye de Notre-Dame de la Frenade , Ordre de
Citeaux , Diocèfe de Saintes , luï fut donnée au
mois de Décembre 1731. mais il s'en démit en
1733. après avoir obtenu une penfion de 1500. liv .
fur celle de 3. Taurin d'Evreux ; il fut fait Garde
de la Bibliothéque du Roy à la place de feu Louis
de Targny au mois de Mai 1737.
Le 13. Dame Félicité de Milani de Cornillon ,
fille d'un défunt Préfident à Mortier du Parlement
de Provence , & Epoufe de Benigne le Ragois
, Marquis de Bretonvilliers , Maréchal des
Camps & Armées du Roy , & Lieutenant pour
S. M. au Gouvernement de la Ville , Prevôté &
Vicomté de Paris , ci - devant Mestre de Camp du
Régiment Dauphin , Cavalerie , avec lequel elle
avoit été mariée au mois d'Avril 1717. mourut à
Paris âgée de 44. ans . laiffant un fils & deux files ,
dont l'une mourut le 17. du même mois de Septembre
, & le fils eft mort quelques jours après à
l'Armée .
Le 14. Charles Rollin , né à Paris , & baptifé en
la Paroiffe de S. Jean en Greve , Profeffeur d'Eloquence
au College Royal , Affocié Véteran de l'Académie
Royale des Infcriptions & Belles Lettres ,
dans laquelle il avoit été admis en 1701. ancien
Recteur de l'Univerfité de Paris , ci - devant Princi .
pal du College de Beauvais , où il avoit profeffé la
Philofophie , mourut à Paris dans la 81. année de
fon âge , s'étant rendu célebre par les excellens
Ouvrages dont il a enrichi le Public. Il fut inhumé
le is . à S. Etienne du Mont fa Paroiffe , avec l'aſfiftance
de l'Univerfité en Corps , & un grand
concours de toutes fortes de perfonnes .
Nous avons reçû depuis peu un Mémoire , qui
porte que Dame Marie - Anne d'Aubuſſon , veuve de
Philibert , Comte de S. Julien , Seigneur de la Rochette
3
NOVEMBRE. 1741. 2539
thette , premier Baron de la Province de la Marche
, mourut au Château de la Rochette , dans la
haute Marche le 15. Septembre 1740. dans la 92 .
année de fon âge , cette datte de 1740. eft peut- être
une faute de Copifte : mais fi elle eft jufte , l'on a
attendu bien tard à rendre cette mort publique . Le
même Mémoire porte que cette Dame étoit fille de
Jean-Georges d'Aubuffon , Marquis de Savignac ,
Capitaine de so. hommes d'armes , & de Catherine
de S. Chamans , qui avoient été mariés le 20. Novembre
1620. Dans la Généalogie de la Maiſon
d'Aubuffon , raportée dans l'Hiftoire des Grands
Officiers de la Couronne , tom . 5. à l'article des
Seigneurs de Savignac , fortie des Seigneurs de
Villac & de Miremont , pag. 357. le mariage de
Jean-Georges d'Aubuffon avec Catherine de S.Chamans
, eft daté du 20. Novembre 1635. & pag. 358 .
le mariage de la Comteffe de S. Julien eft daté de
1686. & elle eft dite fille de Jean-Jacques d'Aubulfon
Seigneur de Savignac , & de Marie de Montboiffier
, mariés en 1670. Suivant cette Généalogie
, la Comteffe de S. Julien eft petite fille & non
fille de Jean- Georges ; mais fi l'âge qu'on lui donne
, eft conforme à la vérité , elle ne peut être fille
que de Jean Georges. Quoiqu'il en foit , cette
Dame étoit mere de feu Jacques , apellé le Marquis
de S. Julien , Seigneur de la Rochette , mort
le premier Août 1734, ayant laiffé de fon mariage
avec Marie - Anne de Chovigny de Blot , 4. enfans ,
qui font Jean-Marie de S. Julien , Lieutenant dans
le Régiment Royal Piémont Cavalerie ; Paul
de S. Julien , Chanoine , & Comte de Brioude ;
Amable de S. Julien , Chevalier de l'Ordre de S.
Jean de Jerufalem , Lieutenant dans le Régiment
d'Enguien ; & Marie - Anne de S. Julien , mariée
avec ... de Carteron , Seigneur de la Peyroufe ,
& de Beaulieu , en Berri. Iv Le
2540 MERCURE DE FRANCE
Le 16 Dame Barbe de Lenard , veuve depuis le
24. Mai 1736. de Charles Comte de Skelton ,
Lord Anglois , Maréchal des Camps & Armées du
Roy, & Grand- Croix de l'Ordre Royal & Militaire
de S. Louis , mourut à Paris , âgée d'environ
67. ans .
Le 19. Antonin Armand de Belfunce , Marquis
de Castelmoron , grand Sénéchal & Gouverneur des
Païs d'Agenois & Condomois , grand Louvetier de
France , & Capitaine Lieutenant de la Compagnie
des Gendarmes Bourguignons depuis le 22. Janvier
1735. & auparavant Sous- Lieutenant de celle des
Gendarmes d'Orleans , mourut à Liége dans la 25 .
année de fon âge , étant né le premier Mai 1716.
Il laifle un fils unique en bas âge de fon mariage
avec Dame Charlotte- Alexandrine Sublet d'Heudicourt
, que l'on a raporté dans le Mercure de Juin
1736. fecond vol . pag. 1471. On a annoncé la mort
du Marquis de Caftelmoron , fon pere , dans le
Mercure d'Avril 1739. pag. 819.
Le 25. Louis Marquis d'Eftourmel , Maréchal de
Camp des Armées du Roy, de la Promotion du 18.
Octobre 1734. qui étoit employé en cette qualité
dans l'Armée commandée par le Maréchal de Maillebois
, mourut à Nuys , dans l'Electorat de Cologne
, âgé d'environ 56. ans , fans avoir été marié.
Il avoit été ci - devant Metre de Camp , Lieutenant
du Régiment de Toulouſe Cavalerie , par commiffion
du 27. Mars 1714. & il avoit été fait Brigadier
le 20. Février 734. Il étoit fils aîné de Louis d'Eftourmel
, Marquis ' Eftourmel , Vicomte de Foüillay
, Seigneur & Baron de Capy , Suzanne , Frize ,
& c. & de Dame Marie im e de Hautefort de
Montignac. I afle pour freres , Lous - Marie
d'Eftourmet , Abbé de N. 1) . de Serry , Ordre de
Prém . Dioc. d'Amiens , du mois d'Août 1725 .
NOVEMBRE . 1741 254*
>
Conftantin- Louis d'Eſtourmel Chevalier Commandeur
de l'Ordre de S. Jean de Jerufalem , Capitaine
de Vaiffeaux , qui commandoit un des quatre
Vaiffeaux François , qui foutinrent un. rude
combat contre fix Vaiffeaux Anglois fur la Côte de
S. Domingue la nuit du 18. au 19. Janvier dernier ,
& un autre , Chevalier de Malthe , Major, du Régiment
de Penthievre , ci-devant Touloufe , Cavalerie.
Le 26. Dame Elizabeth - Loüiſe Marie Dubreüil
veuve depuis le 4. Mars 1738. de Louis- Augufte
Duché des Tournelles , Fermier Géneral des Fermes
unies du Roy , & autrefois Capitaine dans le
Régiment de la Couronne , Infanterie , avec lequel
elle avoit été mariée le 31. Juillet 1700. mourut à
Paffy en Brie chés Jean -Baptifte Duché , Seigneur
de ce Lieu, fon beau- frere, Chevalier d'honneur du
Bureau des Finances de la Rochelle , âgée de 81.
ans , & fans enfans. Elle étoit fille d'Euftache Marie
, Seigneur du Breüil , vivant Gouverneur des
Ville & Citadelle de Mircour , & Bailly de la Pros
vince de Vofges , en Loraine , & de Dame Anne-
Marie Henriette de Pourret .
Le 29. Anne Sabine Ollivier de Senozan , Epoule
de Charles - François - Chriftian de Montmorency-
Luxembourg , Prince de Tingry , Comte de Luxe ,
Colonel du Régiment de Touraine , & Brigadier
des Armées du Roy , avec lequel elle avoit été mariée
le 4. Octobre 1730. mourut à Paris âgée de
27. ans , laiffant Pauline- Anne de Montmorency
de Tingry , fille unique , âgée de 7. ans . On a ra
porté la mort du pere de la Princeffe de Tingry
dans le Mercure de Juillet 1740 , pag . 1668 .
Le même jour , Henri Charles Dagueffeau ,
Seigneur de Plainmon , fecond Avocat Géneral du
Parlement de Paris ,reçû à cette Charge le 25. Juin
Ivj 1736
2542 MERCURE DE FRANCE
1736. & auparavant Avocat du Roy au Châtelet ;
quatriéme fils de Henri - François Dagueffeau
Chancelier & Carde des Sceaux de France , Commandeur
des Ordres du Roy , & de défunte Dame
Anne le Févre d'Ormeffon , mourut à l'Hôtel de la
Chancellerie à Paris , âgé de 28. ans 2. mois , étant
né le 31. Juillet 1713 .
fa
Le 2. Octobre , Bernard Pajot , Baron de Fraucé
, mourut dans la 83. année de fon âge. Il laiffe
de Dame Marguerite de Rutant ,
veuve , d'une
Noble & ancienne Famille de Loraine , diftinguée
par leurs Charges à la Cour de Loraine , Chriftophe
Bernard. Pajot . Le Défunt étoit Oncle de Mrs
Pajor d'Onzembray &c . de Mrs. Pajot du Bouchet,
de M. Pheilipe Lieutenant Géneral des Armées du
Roy , & de la Dame Marquife de Faronville fa
foeur.
Le 8...... Camus des Touches , Sous - Lieutenant
au Régiment des Gardes Françoifes , dans lequel
il fervoit dequis 1733. mourut à Paris , âgé
d'environ 21. ans . Il étoit fils unique de feu Michel
Camus des Touches , Brigadier des Armées
du Roy , Chevalier de l'Ordre Militaire de S.
Louis , Controlleur Géneral de l'Artillerie de France
, & auparavant Colonel du kégiment de Coftentin
mort le 25. Mai 1731. & de D...... Mirey , fa
veuve.
Le 10. Jules de Pas , Comte de Feuquieres , ci - devant
Lieutenant Géneral au Gouvernement de la
Province , Comté , & Evêché de Toul , & Colonel
d'un Régiment d'Infanterie peti vieux Corps , portant
fon nom , dont il ſe démit en 1697. mourut à
Paris , dans la 87. année de fon âge . Il étoit 5. fils
d'Ifaac de Pas , Marquis de Feuquieres , Lieutenant
Géneral des Armées du Roy , Confeiller d'Etat
Ordinaire d'Epée , Gouverneur des Ville , Citadell
e
NOVEMBRE. 1741 2543
delle de Verdun , Lieutenant Géneral de Province
& Evêché de Toul , ancien Viceroy de l'Amérique
, Envoyé Extraordinaire vers plufieurs Princes
d'Allemagne , Ambaſſadeur en Suede pendant 10 .
ans , & mort le 6. Mars 1688. étant Ambaffadeur
Extraordinaire en Eſpagne , & d'Anne Louiſe de
Grammont , morte le 21. Septembre 1666. Le
Comte de Feuquieres avoit été marié le premier
Mai 1696.avec Catherine - Marguerite Mignard , fille
de feu Pierre Mignard , Premier Peintre du Roy,
Directeur des Manufactures Royales des Meubles
de la Couronne , Directeur , & Chancelier de l'Académie
Royale de Peinture , & Sculpture , mort
le 19. Mai 1695. & d'Anne Aularia. Il la laiffe
veuve , & fans enfans.
Le 15 Pierre Poterat , de Troyes en Champagne
, Confeiller au Grand Confeil , où il avoit été
reçû le 17. Fevrier 1720. mourut en fa Terre de
Monchy S. Eloy en Picardie , qu'il avoit acquife
en 1740 âgé d'environ 61. ans . Il avoit été marié
au mois de Fevrier 1728. avec une fille de feu Jacques-
Michel Levy , Receveur & Payeur des Gages
des Officiers de la Chambre des Comptes de
Paris.
Le... Octobre Germain Pierre Roland, de Rheims
en Champagne , Seigneur de Voyfe , Moinville , & c.
Préfident Honoraire au Parlement de Paris , mou
rut dans fes Terres , dans un âge avancé , fans en..
fans de feuë D. Marie Genevieve Bourard , fa femme,
morte le 26. Decembre 1734. Il avoit été réçû
d'abord Confeiller & Commiffare en la premiere
Chambre des Requêtes du Palais le 19 Janvier
1691. & enfuite Préfident en la même Chambre
le . Janvier 1709. Il s'étoit démis de cet Offce
en 1734.après l'avoir exercé pendant 25.ans avec
la réputation de Juge très- éclairé, & fort integre. Il
étoit
2544 MERCURE DE FRANCE
étoit fils de Jean- Baptifte Roland , Confeiller au
Parlement de Metz , Grand Maître des Eaux &
Forêts de France , au Département du même Parlement
, & Fermier Géneral des Fermes unies du
Roy , mort le 26. Novembre 1688. & de feue Catherine
Clozier.
Le 20. Dlle Gabrielle de Meſgrigny , fille de Jean-
François de Mefgrigny , Marquis de Vandeuvres ,
Baron de Couchoy , Seigneur de Montmartin
Grand Ecuier Trenchant , & Porte Cornette blanche
de France , mort au mois de Fevrier 1685. &
de D. Françoife - Henriette du Mefail- Simon , Dame
de Baujeu , & de Neuilly , fa premiere femme ,
mourut à Paris , dans un âge fort avancé , laiffant
pour héritiers Claude Leon le Bouthillier de Chavigny
, apellé le Marquis de Bouthillier & Louis
Leon le Bouthillier de Chavigny , apellé le Comte
de Baujeu. , fes Neveux , enfans de Jacques Leon les
Bouthillier de Chavigny , Marquis de Baujeu , Seigneur
d'Argy . Michery , Giffy les Nobles , mort,
Confeiller Honoraire du Parlement de Paris , le 2 .
Novembre 1712. & de Franço fe- Louiſe de Mefgrigny
, morte le 15. Janvier 1729 .
Le 26. Claude - Charles Hatte de Chevilly , Chevalier
de l'Ordre Militaire de S. Louis , Brigadier
des Armées du Roy , du premier Fevrier 1719. &
ancien Capitaine au Régiment des Gardes Françoifes
, mourut à Paris âgé d'environ 58. ans fans pof.
térité . Il étoit entré dans le Régiment des Gardes en
1702.où après avoir parlé fucceffivement par les Grades
d'Enteigne , de Sous- Lieutenant , & de Lieutenant,
il ob int en 1706. une Compagnie qu'il commanda.
jufqu'au commencement de 1726. qu'il fe retira
du service , ayant é é récompenfé par le Roy d'une
penfion de 20 o . livres . Il étoit fils aîné de feu
Claude Hatte de Chevilly , Seigneur de Grigny fur
Orge,
NOVEMBRE. 1741. 2549 .
·
Orge , Lieutenant Géneral des Armées du Roy ',
mort âgé de 79. ans le 25. Septembre 1722. & de
Jeanne Marguerite Bellote. Il avoit épousé 10. au
mois de Decembre 1711. D. Catherine Turgot de
S. Clair , dont on a raporté la mort dans le Mercure
de Juin 1737. vol . p. page 1231. Il s'étoit remarié
depuis avec D ... des Champs .

Le 29. Balthazar Gibert , d'Aix en Provence , an➡
cien Recteur , & ancien Syndic de l'Univerfité de
Paris , ancien Profeffeur de Rhethorique au College
Mazarin à Paris , places dans lesquelles il s'étoit
acquis une grande réputation , mourut à Regennes,
Maifon de Campagne de l'Evêque d'Auxerre, dans
un âge fort avancé . Il étoit Coufin de Jean- Pierre
Gibert , Célebre & profond Canonifte , mort le 2.
Décembre 1736. à l'âge de 76. ans , dont l'Eloge
fut publié par le P. Bougerel , fon Compatriote
dans une lettre du 10. Fevrier 1737. adreffée à
fon Coufin qui vient de mouris .
Le... Octobre Soeur Marie- Anne- Françoise de Se-.
gur , Abeffe de l'Abbaïe de N. D. du Val de Giff, O.
S. B. D. de Paris , mourut dans ce Monaftere ; dans
la 144. année de fon âge , étant née le 24. Decembre
1697. Elle avoit été non mée Coadjutrice de
cette Abbaie le 2. Mars 17 19. & elle en étoit devenuë
Titulaire , le 28. Novembre 1733. par la mort.
de Dame Anne- Eleonore - Marie de Bethune d'Or-
.val . Elle étoit fille du feu Marquis de Segur , dont
on a raporté la mort dans le Mercure de Juin
1737. vol . 2. p . 1457.
Vers la fin d'Octobre , Jerome- François Lefcuyer
, Comte de Meuret , Seigneur de Troiffy ,
Nanteuil , Mais , Violaine , Launoy les Crouas ,
& partie d'acy de Balagny , Courcelles , & Ba
gneux , & du Fief Lefcuyer , Lieutenant General
des Armées du Roy , Chevalier Grand-Croix de
P'Ordre
2546 MERCURE DE FRANCE
l'Ordre Royal & Militaire de S. Louis , mourut à ſa
Terre deMuret dans le Soiffonnois ,âgé de près de 80.
ans. Il avoit commencé à fervir en 1683. en qualité
d'Aide de Camp du Comte d'Auvergne , au Siége
de Courtray. Depuis il fut fucceffivement Lieutenant
dans le Régiment Dauphin en 1686. Capitaine
dans le même Régiment en 1689. Colonel du
nouveau Régiment d'Albigeois en 1692. puis de
celui de Beauvifis la même année , Brigadier le 29.
Janvier 1702. Maréchal de Camp le 26. Octobre
1704. Chevalier de l'Ordre de S. Louis en 1705 .
Commandeur du même Ordre , avec 4000. livres
de penfion , au mois de Decembre 1707. & enfin
Lieutenant Géneral le 29. Mars 1710. Il obtint la
Grand- Croix de l'Ordre de S. Louis le 18. Avril
1721. & le Gouvernement de Thionville le premier
Octobre 1731. Il fe démit de ce Gouvernement
au mois de Juin 1733. & fut recompenfé d'une
Penfion de 8000. livres . Il étoit fils de Jerôme
Lefcuyer , Comte de Muret , Meftre de Camp d'un
Régiment de Cavalerie , tué à la bataille de Senef le
11. Août 1674. & de D. Françoiſe de Boullene de S.
Remy, & il avoit époufé Louiſe Agnès Aubert ,
fille
de Simon Aubert , de la Province de Limofin , Capitaine
dans le Régiment d'Anjou , & de Catherine
Barbade de Mefiéres. Il en laiffe Louis Jerôme Lefcuyer
, Marquis de Muret , fils unique , âgé d'environ
19. ans .
Le 31. Dom.... Roquevert , Abbé & Géneral de
1Ordre de Prémontré , élû à cette Dignité le 25.
Janvier dernier, mourut dans fon Abbaïe de S.Jean-
Baptifte , Chef Lieu de fon Ordre , Diocéfe de
Laon Il étoit auparavant Abbé de l'Abbaie de Claire-
Fontaine en Tierache , Diocèfe de Soiffons , & Curé
de Villerscotterets , depuis le mois de Décembre
1724.
Le
NOVEMBRE . 1741. 2547
Le 1 Novembre, D. Marie- Anne Nobler, Epoufe
de Pierre - François de Maiffat , Seigneur de Lovéville
& de Malvoifire , Confeiller Honoraire en
la Grand- Chambre du Parlement de Paris , avec
lequel elle avoit été mariée le 19. Janvier 1706.
mourut âgée d'environ 5. ans , laiffant entr'autres
enfans, Pierre - François de Maiffat, reçû Conſeiller
au Parlement de Paris , à la premiere Chambre des
Enquêtes , le 8. Décembre 1730. La défunte étoit
fille de feu Charles- François Noblet , Confeiller
Sécretaire du Roi, MaiſonCouronne de France, & de
fes Finances , Greffier en Chef de la Chambre des
Comptes de Paris , & de Marie - Anne Contenot.
Le 2. Pierre Defponty , Seigneur du Freſnoy ;
Maréchal des Camps , & Armées du Roy ,
Cheva
lier de l'Ordre Militaire de S. Louis , & Gouver→
neur du Fort Barrault en Dauphiné fur la frontiére
de Savoye , mourut à Paris âgé de 82. ans , fans
avoir été marié. Il étoit entré dans le Régiment des
Gardes Françoiſes en 1687. où il fut fucceffivement
Enfeigne , Sous - Lieutenant , Lieutenant en 1689 .
Capitaine en 1693. & enfin Lieutenant Colonel le
20. Octobre 1723. Il eut la Croix de S. Louis en
1704. & fut fait Brigadier le 26. Octobre de la même
année , & Maréchal de Camp le 8. Mars 1718 .
Le Gouvernement du Fort Barrault , lui ayant été
donné au mois de Janvier 1730. il quitta alors la
Lieutenance Colonelle des Gardes Françoifes. Il
étoit fecond fils de Michel Defpouty , vivant Confeiller
Sécretaire du Roy , & de fes Finances , &
Payeur des Rentes de l'Hôtel de Ville de Paris ,
de Marie des Bordes.

&
Le . Etienne Hallée , Seigneur de la Baronnie
de la Mothe S. Jean Chevalier de l'Ordre
de S. Michel depuis 1720 Confeiller Sécretaire du
Roy Honoraire Maiſon Couronne de France & de
fes
2548 MERCURE DE FRANCE
fes Finances , ci- devant pemier Commis du Grand-
Comptant du Tréfor Royal , mourut à Paris,âgé de
77. ans 3. mois . Il avoit eu de Françoiſe Lazure ,
fa premiere femme , morte le 25 Fevrier 1703 .
Jacques Etienne Hallée , Confeiller au Grand Confeil
, mort le zo . Mars 1740. fans pofterité , & Marie-
Franço fe Hallée , mariée le ... Fevrier 1713 .
avec Pieire André , Maître Ordinaire en la Chambre
des Comptes & morte le 19. Mars 1721. âgée
de 30 ans , laiffant 2. filles mariées à Mrs Por
lier de Rubelles , & Noblet de Romery , Confeillers
au Parlement de Paris. De fa feconde femme
Marguerite Elizabeth Bigor , il laiſſe Hallée, fieur
de Dairval ,fils unique, reçû Confeiller au Grand- Confeil
le 2. Mai 1736. & marié le 13. Août 1737. avecla
fille de Chriftophe - Joſeph Pajot , Maître Honoraire
de la Chambre des Comptes de Paris .
Le 8. Etienne de Clugny , Baron de Nuis-fur- Armançon
, Seigneur de Tharot , Reglois , la Roche,
Villers les hauts , Mereüil , Bragelonne , Confeiller
Honoraire au Parlement de Bourgogne , par Lettres
du 11. Août 1716. regiſtrées le premier Decembre
fuivant en coonntfideration de 27. années de
fervices , mourut à Dijon , dans la 78. année de fon
âge , étant né le 18. Mars 1664. Il étoit fils aîné
de Jacques de Clugny , Seigneur de Pancy , Confeiller
du Roy en fes Confeils , Lieutenant General
du Bailliage de Dijon , mort le 4. Octobre
1684. & de D. Jeanne Filsjean de Marlion Il avoit
été marié par Contrat du 14. Juin 1688. avec D.
Chriftine le Foul , Dame de Pralay , morte le 26.
Mars 1738. Il laiffe de ce mariage Marc Antoine
de Clugny , né le 4. Avril 1689. Prêtre , Doyen &
Chanoine de l'Eglife Collégiale de S. Denis de,
Vergy , & Confeiller Clerc au Parlement de Bourogne
, où il a été reçû le 7. Juin 1712. & Etieng
ne
NOVEMBRE. 1741 2549
ne de Clugny , Baron de Nuis fur - Armançon , né
le 18 Juillet 1691. & reçû Confeiller au même
Parlement de Bourgogne le 28. Avril 1716. Celuici
a été marié le 10 Mai 1724. avec D. Claire Ode
Gilbert de Voifins , fille de Pierre Gilbert de Voifins
, Comte de Crapado , & de Lohéac , Commandant
pour le Roy en l'Ile de la Guadeloupe
, & de D. Claire Chriſtine du Lyon de Poinfon .
Il a de ce mariage 2. fils & une fille. La Famille de
Clugny eft Noble & ancienne , originaire de la Vil.
le d'Autun en Bourgogne , elle a donné depuis plus
de 3. fiécles un grand nombre de perfonnes d'un
mérite diftingué dans l'Eglife , dans la Robe , &
dans l'Epée. Un des plus Illuftres , eft Ferri de Clugny
, Chancelier de l'Ordre de la Toifon d'Or le
5. Septembre 1473. Evêque de Tournay la même
année & nommé Cardinal Prêtre , du Titre de S:
Vital par Sixte 4. Pape en 1480. mort à Rome le 7 .
Octobre 1483. & enterré dans l'Eglife de Sainte
Marie du Peuple V. Clugny dans le Dictionaire
Hift. Edit . de Bafle de 1731. le Suplément du même
Dictionaire Hift . Edit.de Paris de 1735. & le fecond
vol. de l'Hift.de Bourgogne par D. Planchet. P. 2954
Le 9. D. Barbe Gérard , veuve depuis le 9. Mai
1732. de René Joüenne , Seigneur d'Efgrigny , du
Mefnil , la Fontenelle , de Fontenay , S. Pere ,
d'Hervilly , & Beauval , ancien Intendant des Armées
du Roy en Irlande , en Catalogne , & en
Lombardie , & auparavant Capitaine au Régiment
de la Couronne , avec lequel elle avoit été mariée
le 17. Fevrier 1681. mourut à Paris , âgée de 82.
ans . Elle étoit fille de Didier Gérard , Commiffaire
Géneral des Poudres , & Salpêtres dans la Génera
lité de Metz , Seigneur de Louvemout , & de
Champneville , & de Marie Geoffroy , & elle laiffe
pour enfans Jean- René Jouenne d'Efgrigny , Sieur
d'Herville,
350 MERCURE DE FRANCE
d'Herville Capitaine dans le Régiment Commiffai
Te Géneral de la Cavalerie , marié avec Anne- Marie
le Febvre ; Barbe Didier Joüenne d'Efgrigny
femme de François Gedeon de Giffart , Seigneur
Chatelain d'Haneucourt , Gargneville , Nangiport ,
& Percheville ; & Marie - Anne Jouenne d'Efgrigny
, veuve de Louis le Tyran , Comte de Villers,
Capitaine dans le Régiment du Roy , tué au Combat
de Parme le 29. Juin 1734. Elle avoit eû pour
fils aîné Jean -René Jouenne d'Efgrigny , Chevalier
de l'Ordre Militaire de S. Louis , Brigadier des Armées
du Roy , & Colonel du Régiment de Forêts ,
mort le 3 Fevrier 1734. âgé d'environ 51. ans ,
laiffant un fils de Marie Quántin , fa femme.
Le 12 , Dame Marie Catherine Chardon , Epouſe
de Charles- Jofeph de Lefpine , Seigneur de Grainville
, Confeiller au Parlement de Paris , de la quatriéme
Chambre des Enquêtes , avec lequel elle
ávoit été mariée le 17. Mars 1722. mourut en fon
Château de Grainville , âgée d'environ 45. ans , laiffant
trois fils & une fille. La défunte étoit fille de
feu Victor Chardon , Tréforier , Payeur des gages
des Officiers du Parlement de Paris , mort le 16,
Septembre 1722. & de Jeanne le Breton .
Nous avons apris par une Lettre qui nous a été
écrite de Chinon , en date du to. du préſent mois
d'Octobre, que le 5. du précedent , les cérémonies du
Baptême furent fupléées dans la Chapelle du Château
de Deftilly , près de Chinon en Touraine ,
Louis Marc Antoine , né & ondoyé le 15. Mai
1740. fils aîné de Marc- René - Alexis de Valory ,
Chevalier Seigneur Châtelain de Deftilly , du Clufeau
, de Vindelle , de Brantaume , de Fromentieres
, de la Plante - Chefnaye , &c. & de Dame Gabrielle-
Elizabeth des efcotais de Chantilly , fon
Epouse. Le Parain a été René- Louis de Voyer de
Paulmy
NOVEMBRE. 1741 2554
Paulmy , Marquis d'Argenfon , Vicomte de Mouze,
Confeiller d'Etat ordinaire , Grand - Croix ,
Chancelier
, & Garde des Sceaux de l'Ordre Royal &
Militaire de S. Louis , Chancelier,Garde des Sceaux,
Chef du Confeil , & Sur-Intendant des Maiſons ,
Domaines & Finances de S. A.Ş le Duc d'Or
leans , Premier Prince du Sang , oncle à la mode de
Bretagne , de l'enfant du côté paternel . La maraine
a été Dame Louife- Elizabeth de Layal-Montmorency
, fon ayeule maternelle ,veuve de Michel
Seraphin des Elcotais , Chevalier Seigneur de
Chantilly , Princeffe de Courcelles , près de Chaunay
, en Anjou , & d'Armillé , Paroiffe de Neüille-
Pont -Pierre , en Touraine ; cette Dame eft foeur de
Claude Rolland de Layal- Montmorency , Seigneur
de Valon , Lieutenant Géneral des Armées du Roy,
Gouverneur de Philippeville , & actuellement Com
mandant dans le Païs Meffin . La Maiſon de Valory
', qui eft d'une ancienne nobleffe , eft originaire
de Florence , où elle a rempli les premieres Charges
de la République ; elle eſt établie en France dès
le commencement du 15. fiecle ; la Généalogie en
eft imprimée dans le Dictionnaire de Moreri , Edit .
de 1715. & 1732. La Maifon des Efcotais , originaire
d'Anjou , & établie depuis près d'un fiecle en
Touraine , eft auffi d'ancienne nobleffe ; les Anna❤
les d'Anjou , par Jean de Bourdigné , raportent
qu'en 1384. le Seigneur des Efcotais fut du nom,
bre des Gentilshommes de cette Province , qui accompagnerent
le Duc d'Anjou dans fon expédition
contre les Anglois en Guienne & en Gascogne ; &
qu'en 1442. Macé des Efcotais fe trouva avec plu
heurs autres Gentilshommes à la défaite des An-
* Le Pere du Baptifé a eû poure mere Antoinette
Catherine defoyer de Paulmy d'Argenfon, Tante du
Parain.
glois
2552 MERCURE DE FRANCE
glois à S. Denis d'Anjou . Cette Maiſon a donné
plufieurs Chevaliers à l'Ordre de S. Jean de Jerufalem.
Ses Armes font d'argent à trois quinte-feüilles
de gueules.
EXTRAIT d'une Lettre de Kalcum , Armée de
la Meufe , par M. le Comte de Vauban , Sous
Lieutenant des Chevau- Legers de la Reine , à l'oc
cafion d'un Article inferé dans le Mercure du mois
de Juin dernier , page 1254, au sujet de la Mort de
M. de Rothe,Lieutenant Géneral desArmées du Roy.
Je ne puis ignorer que la défenſe de la Ville de
» Bethune , dont M. Dupuy-Vauban , mon Pere
étoit Gouverneur , a roulé fur lui feul ; il eft vrai
» que M. de Rothe y étoit à fes ordres , & qu'il y
»fervit avec diftinction , mais il ne fit qu'exécuter
» ceux qu'il recevoit de feu mon Pere, qui jou floit
alors d'une fanté parfaite , & qui vaqua fans re-
» lâche à tous les foins de la défenſe de la Place.Les
Amis de M. de Rothe feroient défaprouvés par
» lui- même , s'il étoit vivant , s'ils difoient le con-
» traire ; cet Officier diftingué avoit affés d'Actions
brillantes pardevers lui , fondées fur la vérité ,
fans lui en attribuer qui apartiennent à d'autres.
Je vous prie de voir là - deffus l'Auteur du Mercu
re , afin qu'il prenne la peine de mettre un mor
» dans le prochain Journal, pour rectifier cette méprife
, & pour rendre juftice à la mémoire de feu
33
50
mon Pere .
Nous donnerons deux Volumes du Mercure
le mois prochain , afin de pouvoir inferer les
Piéces
que n'ont pû trouver place dans le cou→
rant de l'année.
TABLE .
P
TABLE.
IECES FUGITIVES. Ode à M. de Beauval , Les
Fureurs de l'Amour , 2345
Difcours fur le Sujet proposé par l'Acad . Franç.2348
Le Dégoût de la Chaffe ,
Extrait de Lettre de M. Maillart à M. Lebeuf , 2384
2382
Imitation de la XI . Ode d'Horace , 2388
La Rofe & l'Epine , Fable ,
Séance publique de l'Acad . de Chirurgie , 2389
2402
Sacrifice à Bacchus , Pierre gravée , & c.
Epithalame Allégorique ,
Suplément au fujet de l'Etendart Turc , pris à la le-
2404
2407
vée du Siége de Vienne , 2410
Adieux aux Mufes , Ode à M. A. M. G. 2413
Extrait d'une Lettre d'Aix au ſujet d'une Acad. 2419
L'Esprit Contentieux , Ode , 2426
Lettre au fujet d'une nouvelle Carte de l'Ocean
Oriental 2431
Paraphrafe du Pleaume XCV. 2440
Extrait d'une Lettre à M. de S. Aubin , 2441
Enigme , Logogryphes , & c . 2443
NOUVELLES LITTERAIRES DES BEAUX - ARTS ,
& c. Imitation de J. C. 2446
Nouveau Traité d'Ecriture , 2447
Détails fur divers Sufets de Littérature , 2448
Armorial General de la Noblefle de France , ibid.
Abregé de la Théorie Chimique ,
2449
Projet de Soufcript . de l'Hiftoire de Bretagne, ibid.
Nouveau Traité d'Arithmétique , 2450
Explic. des Coûtum . & Cérem. chés les Rom . ibid.
Hiftoire du Pontificat du Pape Innocent II. 2451
Nouv. Edit, des Refléxions Théologiques, &c. ibid.
Préf. du Com. de M. Dupuy fur l'EglifeGallic . ibid.
Livres nouveaux chés G. Martin ,
Effais Anatomiques
,
ibid.
2452
Catalogue
Catalogue des Livres de M. Boullanger ;
Traité Hift. fur le Chant Ecclefiaftique
2454
2455
Examen & Refutation des Leçons de Phyfique, ibid.
Inftitutions de Médecine , ibid.
Roland le Furieux , Poëme Héroïque , 2456
Estampes nouvelles , 2456
Nouvelles Cartes du fieur le Rouge 2457
Moulin à bras nouvellement inventé , 2458
Machine Hidraulique pour le deffechement des Marais
ibid,
Maladies Lepreufes , Remede du Sr Denielles, 2463
Chanfon notée 2464
Spectacles.Extr . d'un nouv . Divertiff.à l'Opera, 2465
Ifé , Paftorale , remife au Théatre , 2468
Antoine & Cléopatre,Trag.nouv . au Th. Franç.2469
Nouv. Etrangeres, Turquie, Ruffie , Suede , & c . 2470
Vifite du Marechal de Belle-Ifle à l'Electeur de
Mayence , 2484
Lettres Patentes du Roy à l'Electeur de Baviere ,pour
comm. les troupes de France en Allemagne, 2486
Manifefte du même Electeur , 2487
Portugal , Efpagne , Naples , Italie , &c . 2507
Morts des Pays Etrangers , 2516
France , Nouvelles de la Cour , de Paris , &c. 2518
Extr.de Let.au fujet du Remede du Sr Arnoult , 1528
Bouquet à S. E M. le Cardinal de Fleury ,
Morts , Naiffances ,
Errata d'Août.
2531
2534-
Aage 1722. ligne 8. coupant la Pierre même ,
Plifex 372.ligne
Errata d'Octobre.
PAge 2202. ligne 3. du bas , également , lifex
élégamment.
La Pierre gravée doit regarder la page
La Chanjon notée , la page
2404
2464
MERCURE
DE
FRANCE ,
DEDIE AU
ROT.
DECEMBRE. 1741 .
SECOND VOLUME.
RICOLLAGIT
SPARGIT
Chés
A PARIS ,
GUILLAUME CAVELIER ;
ruë S. Jacques.
La Veuve PISSOT , Quai de Conty ,
à la descente du Pont- Neuf.
JEAN DE NULLY , au Palais,
M. DCC . XLI.
Avec Aprobation & Privilege du
L
AV I S..
' ADRESSE generale eft à
Monfieur MOREAU , Commis au-
Mercure , vis - à - vis la Comédie Frangoife
, à Paris. Ceux qui pour leur commodité
voudront remettre leurs Paquets cachetés
aux Libraires qui vendent le Mercure,
à Paris , peuvent fe fervir de cette voye
pour les faire tenir.
On prie très-inftamment , quand on adreſſe
des Lettres ou Paquets par la Pofte , d'avoir
foin d'en affranchir le Port , comme cela s'eft
toujours pratiqué , afin d'épargner , à nous
le déplaifir de les rebuter , & à ceux qui
les envoyent , celui , non -feulement de ne
pas voir paroître leurs Ouvrages , mais
même de les perdre , s'ils n'en ont pas gardé
de copie.
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les Particuliers qui fouhaiteront
avoir le Mercure de France de la premiere
main , & plus promptement , n'auront
qu'à donner leurs adreffes à M. Morean
qui aura foin de faire leurs Paquets fans
perte de temps , & de les faire porter sur
L'heure à la Pofte , ou aux Meffageries qu'on
lui indiquera.
PRIX XXX. SOLS.
MERCURE
DE FRANCE ,
DÉDIÉ AV ROT.
DECEMBRE . 1741
****
PIECES FUGITIVES ,
en Vers et en Prose.
L'USAGE DE LA VIE ,
EPITRE
A M. Grégoire , d'Avignon .
Oi , que les doux Plaifirs , les Graces
& les Jeux ,
Parés de mille fleurs , accompagnent
fan's ceffe
Et qui dans l'âge mûr conferves tous les feux
De la plus aimable jeuneſſe ;
11. Vol. A ij Espriq
2772 MERCURE DE FRANCE.
Efprit fage , éclairé par la délicateſſe
Du bon goût & de l'agrément ;
C'eft à toi que mon coeur s'adreſſe ,
Connois en tout le fentiment.
La vie eft un bien peu durable
Pourquoi donc la livrer à des foucis cuifans
C'est être ennemi du bon fens
Que vouloir le nourrir dans un fort déplorable.
Attiré par l'avidité
De nâger dans le fein d'une injufte opulence ,
Licidas fe bannit de la Societé ;
Son coeur, à s'enrichir bornant fa complaifance,
Sacrifie à fa vanité
Son repos & fon innocence
.
La fortune à fes yeux brille de mille apas ;
Croit - il avoir trouvé le bonheur de fa vie ?
Qu'il fe trompe ! il ne peut contenter fon envie
Et tout l'or du Pérou ne lui fuffiroit pas.
Infenfible aux périls de Neptune & d'Eole ,
L'avide Nautonnier va braver mille morts ;
Enyvré d'un eſpoir frivole ,
Il dépouille de leurs tréfors
Les Rivages lointains , où le leve l'Aurore.
Tout femble contenter fes voeux ,
Et la fortune, qu'il adore ,
Va pour toujours le rendre heureux ;
Mais
DECEMBRE. 1741 2773
ais quels mugiffemens troublent l'Onde perfide ?
La Neffe brife , éclatte ; il meurt ; ah ! quelle horreur
!
Et la Déeffe qui le guide ,
S'envole & va féduire encor quelqu'autre coeur
Patient , doucereux , habile en flaterie ,
Cléon auprès des Grands paffe fes tristes jours ,
Et de fon art trompeur empruntant le fecours ,
Il rampe à leurs genoux , il importune , il prie.
C'eft vainement qu'il croit par ces foibles détours
Que leur ame foit attendrie ;
Non , leur cruelle barbarie
Va l'abandonner pour toujours.
A travers la route infinie
De l'obfcur Dédale des Loix ,
Damon , conduit par fon Génie ,
De Thémis débrouille les droits ;
Acette étude ingrate il confacre fon âge ;
Il vieillit , par la Parque il eft bien - tôt vaincu .
Faut- il le dire il n'a que le trifte avantage
De mourir fans avoir vécu .
Ainfi du préjugé les invincibles chaînes
Gouvernent les foibles Mortels .
Ainfi malgré les foins , les foucis & les peines ;
A la Fortune feule on dreffe des Autels .
O. Déeffe que je détefte ,
A iij Je
2774 MERCURE DE FRANCE
Je vois l'encens pour toi bruler de toutes parts ,
Et feul j'éloigne mes regards
De ton Idole trop funefte .
D'une douce & tranquille paix
Au
Les charmes ont fçû me féduire.
Loin de moi tout ce qui peut nuire
repos dont mon coeur adore les attraits &
Loin de moi cette inquiétude
Qui de ce Monde entier dirige le fracas
Loin de moi les cruels débats
Que fait naître l'incertitude
De poffeder ce qu'on n'a pas ;
A des foins bien plus doux je borne mon étude
Le coeur d'un tendre ami fait ma béatitude
Et c'eft de tous les biens le feul dont je fais cas.
L'amitié feule m'intereffe ;
Pour cette adorable Maîtreffe
Ah ! qu'il eft doux de ſoupirer !
Pour chanter ſes plaifirs , je livre ma jeuneffe
Aux Mufes , qui parfois daignerent m'inspirer ;
Dans les Bois charmans du Permeffe
Avec elles je vais chercher à m'égarer ;
Ma main y cueillera fans ceffe
Ces fleurs dont Apollon étale la richeſſe ,
Et dont il aime à fe parer.
L'Amour , ce Tyran de nos ames ,
Ce Dieu , Maître des autres Dieux ,
No
DECEMBRE. 1741 2778
le fera plus en moi naître ces vives Alâmes
Qu'y caufa trop fouvent l'éclat de deux beaux yeux.
Mon coeur trop tendre & trop fenfible ,
Se rendit à fes douces Loix ,
Et ce fut par un coup terrible
Qu'il voulut me bleffer des traits de fon Carquois;
Amoureux , languiffant dans un trifte esclavage ,
Je n'eus pour fruit de mon hommage
Qu'injurieux dédains & qu'infidelité;
Je fuis ce Dieu que je redoute ,
Et fçais trop bien ce qu'il en coûte
Pour foupirer après une ingratte Beauté.
L'agréable félicité
Du charmant repos que je goûte ,
M'a fait reconnoître la route
Qui conduit à la vérité ,
Et qu'aux yeux des Humains cache la vanité.
Aiofi , joüiffant de la vie ,
J'attends fans crainte & fans envie ,
Que le coup , qui foûmet par un deftin égal
Et la houlette & la Couronne ,
Me frape, & pour toujours me livre & m'abandonne
Aux Loix du Monarque Infernal .
Par M. B ** ¸ďAix.
A iiij
LETTRE
2776 MERCURE DE FRANCE
LETTRE de M. L'Abbé ** à M. lo
Prieur de ****fur l'Offrande de Glace ,
qui fe fait dans l'Eglife Métropolitaine de
befançon,le troifiéme jour du mois d'Août,&
fur d'autres Ufages finguliers de cette Eglife.
A fatisfaction que vous avez eue , M. la
bonté de me témoigner fur la Lettre que
j'eûs l'honneur de vous écrire au mois de
Mai dernier , au fujer de la Cérémonie des
30. deniers , que l'Eglife de Befançon obferve
le Mercredi de la Semaine Sainte &
l'invitation que vous m'avez réïterée de vous
inftruire de ce qu'il y a de plus curieux dans
les pratiques de cette ancienne Eglife , m'engagent
à vous faire part d'une autre Cérémonie
, qui convient fort à la faifon où elle
fe pratique , & qui m'a paru affés finguliere
pour exciter votre curiofité . C'eft une Offrande
de Glace qu'on y fait le 3. du mois
d'Août , jour auquel on célébre la Fête de
l'Invention des Reliques de Saint Etienne.
Voici de quelle maniére.
Les Habitans de Vellerot , Village à quelque
diftance de la fameufe Grote , apellée
la Glacière , ( 1 ) parce qu'en été comme en
(1) On trouve une Description curieuse de cette
Caverne dans l'Hiftore du Comté de Bourgogne ,
publiée par M. Dunod de Charnage , liv. 4. p . 463 .
hyver ,
'
DECEMBRE. 1741 , 2777
hyver , il s'y forme de la Glace, font obligés
d'aporter chaque année par eux- mêmes , ou
par un Député , à l'Eglife Métropolitaine de
Befançon , pour la Grand Meffe du même
jour , un morceau de Glace de cinq ou fix
livres.
1
Lorfque le Choeur chante l'Offertoire , l'un
de ces Villageois , ou leur Député , portant
cette Glace fur un Baffin d'argent , qu'on lui
fournit à la Sacriftie de cette Eglife , étant
nuds pieds & tenant un flambeau , entre au
Choeur par la grande porte , précédé des Bedeaux
& du Marguillier, ( 2 ) & va fe mettre au
bas des dégrés de l'Autel au côté de l'Epitre ,
où , étant à genoux , il préfente la Glace au
Célébrant , qui la bénit , récitant une Oraifon
fort longue , compofée à ce sujet , après
quoi le Villageois remet la Glace au Marguillier
, fait une révérence à l'Autel & fe
retire. Pendant que l'on continue la Meſſe
le Marguillier porte cette Glace dans la Sacriftie
, & la coupe en petits morceaux.
Après la Communion du Célébrant , les
Clercs de Sacriftie en préfentent aux Chanoines
& à tous ceux du Choeur.
a
Telle eft la Cérémonie de la Glace , fur
(2 ) Dans PEglife Métropolitaine de Befançon , la
Marguillier eft un Prêtre du nombre des Chapelains ,
qui fait l'Office de Sacriftain , & de Maitre des
Cérémonies .
Av
1
l'origine
2778 MERCURE DE FRANCE
l'origine de laquelle je vous dirai ce que je
fçais de plus vrai femblable , après vous avoir
expliqué ce que l'on en a crû à Besançon
pendant plufieurs Siècles.
Depuis un tems immémorial on avoit imaginé
fur cette pratique une Hiftoire peu honorable
aux Habitans de Vellerot ; on difoit
que cette Offrande étoit une peine ou amende
honorable envers l'Eglife de Saint Etienne
de Besançon , ( 1 ) à laquelle ces Habitans
avoient été autrefois condamnés pour réparation
de l'affaffinat commis en la perfonne d'un
Chanoine de Befançon leur Seigneur ,
duquel
ils avoient été complices ; que celui
qui devoit offrir cette Glace devoit s'y préfenter
la corde au col , les pieds nuds , revêtû
feulement de fa chemife & de fon hautde-
chauffe , portant un flambeau allumé.
Ce qui avoit donné quelque aparence de
(1 ) Avant le dernier Siége de Besançon , qui arriva
en 1674. il y avoit en cette Ville deux Eglifes
deffervies par le même Chapitre, depuis l'union qui enfut
faite en 1252.Je crois qu'elles étoient l'une& l'autre ori.
ginairement Métropolitaines , comme il y avoit à Rome
originairement cinq Patriarchates . Celle qui étoit fous
e Titre de Saint Etienne , où fe faifoit la Cérémonie
dont il eft ici queftion , ayant été incendiée pendant le
Siégefut entiérement démolie avec le Cloître des Chanoines
pour la construction de la Citadelle . L'autre
qu eftfous l'invocation de Saint Jean l'Evangelifte ,
qui fub fte encore , eft celle où sefait préfentement
L'Offrande de la Glace.
vérité
DECEMBRE . 1741. 2779
vérité à cette Hiftoire , c'eft que depuis longtems
, & notamment jufqu'en 1733. celui
qui offroit la Glace s'y préfentoit dans cet extérieur
, à la réferve qu'il n'avoit pas la corde
au col ; & quand il portoit un habit &
qu'il étoit chauffé , le Marguillier ne manquoit
jamais de lui faire quitter dans la Sacriftie
, fes bas , fes fouliers & fon habit, juſqu'à
la chemife & haut de-chauffe , ce qui
joint au flambeau ardent , donnoit de cette
Cérémonie l'idée d'une amende honorable
fur tout à ceux qui ignoroient que les Offrandes
qui fe portent à l'Autel, s'y font com-
· munément felon l'ancien ufage avec un
Cierge ou un flambeau allumé , comme on
l'obſerve encore à la préſentation du Pain
beni , aux Offrandes pour les Morts , &
femblables. Auffi celui qui étoit chargé de
faire l'oblation fe trouvoit tellement frapé
de cette idée , que quand il entroit au
Choeur de l'Eglife Métropolitaine , on lui
voyoit la confuſion peinte fur le vifage , ce
qui lui donnoit plutôt l'air d'un patient que
l'on conduifoit au fuplice , que d'un homme
qui alloit faire un acte de Réligion. Et ce
qui augmentoit fa peine & fa honte , c'étoit
de fe voir ainfi donné en fpectacle , à la multitude
de peuple que la curiofité attiroit
dans l'Eglife , qui le plus fouvent rioient &
affectoient de lui dire , quand il paffoit de la
A vi Sacriftic
2780 MERCURE DE FRANCE
Sacriftie àl'Autel. Il doit avoir la corde att
coû. Les gens de fon Village ont tué un Chanoine
&c.
C'eft pour ces raifons que les Villageois ,
laffés de jouer un tel perfonage , refuſerent
d'offrir la Glace en 1733. Cela donna lieu
à des recherches dans les Archives de l'Eglife
Métropolitaine , pour découvrir l'origine
& le fondement de cet ufage. On trouva
par d'anciens Actes de reconnoiffance , &
même par un Jugement d'un Official de
l'Archidiacre de Befançon , que cette Offrande
étoit une redevance envers l'Eglife
de Saint Etienne , dont étoient chargés
les Habitans de Vellerot , en qualité de Tenanciers
d'un Meix , fitué en ce licu , apellé
le Meix Maillard. Sur cela , Mrs du Chapitre
voulant conferver les anciens Ufages &
les Droits acquis à leur Eglife , firent affigner
aux Requêtes du Palais les Poffeffeurs de ce
Meix à l'effet d'y être condamnés à offrir la
Glace le 3. du mois d'Août, comme ils y font
tenus par l'ufage , par leur qualité de Tenanciers
du même Meix , en vertu des Actes de
reconnoiffance faite par leurs devanciers &
par le Jugement dont il eft parlé ci - devant.
Mais pour éloigner de cette Cérémonic
tout ce qui pouvoit donner occafion au tu
multe & aux irréverences pendant le Service
Divin , & ce qui caufoit de la peine aux
gens
DECEMBRE. 1741 278
gens de Vellerot par une Requéte d'emploi
, on leur déclara que , quoique le Chapitre
de Befançon fût bien fondé à prétendre
que celui qui offriroit la Glace eût les pieds
nuds & ne fût revétu que de fa chemife & de
fon haut - de chauffe ,comme il s'étoit toujours
pratiqué , on conſentoit néanmoins , qu'il fût
habillé le plus décemment qu'il pourroit ,
pourvû toutefois qu'il portât un flambeau allumé
, & que la Glace fût préfentée fur un
baffin d'argent , qu'on continueroit de lui
fournir comme auparavant. Mais la condition
du flambeau ardent continuant de choquer
ces Païfans , ils ont perfifté jufqu'à préfent
dans le refus d'offrir la Glace ; & l'Inf
tance qui a été commencée là - deffus eft encore
indécife , à raifon de divers incidents
qu'ils ont formés dans le deffein d'éloigner
leur condamnation , & de fe décharger entiérement
de cette redevance.
J'ai dit ci - devant,M. que ce qui avoit donné
lieu à l'Hiftoire de l'amende honorable ,
c'étoit que celui qui offroit la Glace la préfentoit
depuis un tems immémorial, n'ayant que
fa chemiſe & fon haut de chauffe, étant nuds
pieds , & tenant un flambeau allumé . Or
voici comment je penſe que cet uſage s'étoit
introduit. Anciennement les poffeffeurs du,
Meix Maillard n'étoient pas feulement obli
gés d'aporter à l'Eglife de Befançon un morceau
2782 MERCURE DE FRANCE
ceau de Glace de 5. ou 6. livres , comme ils faifoient
dans les derniers tems ; mais encore ils
en devoient une voiture . Cette obligation eſt
marquée dans le Nécrologe de l'Eglife Métropolitaine
, duquel on lit encore à Prime chaque
année le 2. du mois d'Août l'Article fuivant.
Habitantes in loco de Vellerot hac die
tenentur cum curru Glaciem àfe advectam offerre
Ecclefia in Miſſafolemni , nudis pedibus,
ardentem ferentes facem , fub poenâ ipfo facto
incurrendafolvendae per eos fingulos emendae
à Domino Officiali impofita.
Et comme il eft ordinaire aux gens de la
campagne , lorfqu'ils conduifent des voitures
, fur tout en été , d'être fans autres habits
que leur chemife & haut- de - chauffe , le plus
fouvent même d'être nuds pieds ; ce qui eft
un refte de l'ancienne coutûme , que plufieurs
Ordres Religieux retiennent encore ;
cette voiture de Glace qui étoit deftinée pour
l'ufage du Clergé , comme je le dirai bientôt
, & comme il paroît par la diftribution
qu'on lui en fait encore étoit offerte à l'Eglife
par les Habitans de Vellerot , dans le
même équipage qu'ils l'avoient conduite à
S. Etienne. Ils en préfentoient un morceau à
'Autel ; parce que c'étoit autrefois la coutûme
d'y offrir ce que l'on deftinoit au Service
Divin & à l'ufage des Miniftres ; foit peutêtre
aufli en reconnoiffance de la Seigneuric
de
DECEMBRE. 1741. 2783
de l'Eglife Métropolitaine , dont ils font fu
jets main- mortables. Ils portoient enfin un
flambeau allumé pour la même raifon qu'on
en porte encore à l'Offrande qui fe fait à la
Meffe des Morts , à la préfentation du Painbeni
, & femblables.
Maintenant on demande qui auroit pû
donner lieu à qualifier cette Oblation d'amende
honorable . On ne peut douter que
ce n'ayent été les Jugements portés autrefois
contre ces Habitans , lefquels les condamnoient
à des amendes pécuniaires pour
n'avoir pas fatisfait à leur obligation en ce
point. Tel fut celui que rendit contre eux en
1554. l'Official de l'Archidiacre de Befançon
, qui les condamna à vingt livres d'amende
pour ne s'être pas acquité de ce devoir
pendant deux années , laquelle amende
fut employée à faire le Tableau du Chorus
qui eft encore dans le Choeur de l'Eglife
Métropolitaine , au dos duquel il eft écrit
en carecteres Gothiques de ce tems - là . Pour
perpetuelle mémoire , le préfent Tableau eft fais
de l'amende payée par ceux de Vellerot , qu'ils
doivent chacun an le tiers d'Août de la Glace
à l'Eglife de Saint Etienne de Besançon ; & ce
pour non avoir aporté ladite Glace au jour que
deffus és ans mil quaire cent quarante- neuf &
mil quatre cent cinquante.
Pour ce qui eft de l'affaffinat du Chanoine,
fur
2784 MERCURE DE FRANCE
fur lequel on fait rouler la prétenduë Amende
honorable , je ne fçais pas ce qui auroit pû
y donner lieu. Peut- être y a t - il eû en
effet quelque Chanoine de tué en ce Payslà
, au tems qu'on condamna à l'amende dont
je viens de parler , ceux de Velleros . Si ce Fait
avoit quelque chofe de réel , il ne feroit pas
difficile de comprendre comment cette Hiftoire
auroit pû avoir cours dans le Public.
On fçait par expérience qu'un Fait le plus
fimple eft pour l'ordinaire raconté en un
même endroit par differentes perfonnes en
cent diverſes manieres , & prefque toujours
accompagné de circonftances fabuleufes .
Mais ce qui eft ici de plus important ,
eft , ce me femble , de fçavoir à quelle fin
on avoit anciennement chargé les Poffeffeurs
du Meix Maillard d'une redevance
de Glace .
Sur cela voici ce que je crois, Comme l'Eglife
de Befançon poffedoit déja au Iv.
fiécle une portion très- conſiderable des Reliques
de S. Etienne , que Theodofe le Jeune,
Empereur d'Occident, y avoit envoyée ,
pour être déposée dans la fuperbe Bafilique
bâtie en cette Ville peu de tems auparavant,
on avoit pour ces précieufes Reliques , &
même pour cette Eglife , la plus profonde
vénération. Les Empereurs & les Princes y
faifoient des dons & des liberalités extraordinaires.
DECEMBRE . 1741. 2785
dinaires. Les Etrangers y venoient en foule
de toutes parts implorer l'affiftance Divine
dans leurs befoins , par l'interceffion du faint
Martyr. Dans la fuite , il arriva que la Fête de
l'Invention de fes Reliques ayant été fixée
au 3. du mois d'Août , pour la célebrer avec
toute la folemnité poffible , on s'y préparoit
par une Mémoire du Saint , que l'on faifoit
chaque jour dans l'Office divin . Elle commençoit
au 13 de Juillet , ( 1 ) & on la continuoit
même après la Fête de l'Invention ,'
jufqu'au 23. du mois d'Août. Outre cela ,
la coûtume du Clergé étoit de jeûner la veille
de la folemnité . ( 2 ) Les Laïcs obſervoient
auffi ce jeûne par dévotion. Depuis les premieres
Vêpres jufqu'à la Meffe , il y avoit à
S.Etienne Laus perennis, ce qui ne s'obfervoit
pas le 26. du mois de Decembre , quoique
ce foit le jour auquel on en célebre le Mar-
(1 ) Le 13. du mois de Tuillet étoit le jour auquel
on reçût à Besançon le Bras de S. Etienne . Cefut au
mêmejour qu'arriva le fameux Miracle du fang qui
coula en abondance du grand Os de ce Bras , quoique
Sec , lorfque Célidonius , alors Archevêque de Befançon
, voulut le partager avec des tenailles pour en diftribuer
aux Evêques de France , qui s'étoient rendus
en cette Ville pour affifter à la réception de la Relique.
Ils furent les témoins oculaires de ce Prodige , auffibien
qu'ungrand nombre d'autres perfonnes diftinguées.
(2) Voyez l'ancien Ordinaire de Besançon , dans
le I. volume de l'Hiftoire des Sequanois , page xlviij .
tyre
2786 MERCURE DE FRANCE
tyre ; ce qui marque la diftinction qu'on
faifoit ici de ces deux Fêtes . Non - feulement
tout le Clergé de laVille devoit affifter à l'Office
de ce jour là, dès les premieres Vêpres , mais
encore certains Abbés , Prieurs & Députés
de Chapitres affés éloignés de la Ville.
Or la coûtume des premiers fiécles de
l'Eglife , de faire des Feftins aux Fêtes des
Martyrs , ( 1 ) ſubſiſtant peut-être encore en
quelque forte , à la fin de la Meffe qui étoit
celebrée par M. l'Archevêque de Besançon
on invitoit à dîner tout le Clergé ; & comme
au mois d'Août les chaleurs font ordinairement
exceffives , le vin qu'on fervoit
au Repas étoit rafraîchi par la Glace que les
Tenanciers du Meix - Maillard devoient
aporter de la Glaciere , de laquelle ils font
voifins. Dans la fuite ces Repas ayant ceffé
pour en conferver quelque veftige , de même
que de la redevance , on fe contenta d'exiger
de ceux de Vellerot qu'ils en aportaffent
feulement un morceau de cinq ou fix livres
& qu'ils l'offriffent à l'Autel comme par
le paffé .
·
Voilà , M. tout ce que je puis vous dire
préfentement fur cette pratique ; vous m'obligerez
beaucoup de me faire part des réflexions
que vous ne manquerez pas d'y fai-
>
(1 ) Voyez les Mours des Chrétiens par M. l'Abbé
Fleury , page 207.
IC.
DECEMBRE. 1741. 2787
e. Mais je ne fçais fi vous penſerez fur la
deftination que j'ai dit que l'on faifoit de
cette Glace , comme une Perfonne de mérite
avec laquelle j'eus fur cela un entretien
il y a quelque tems. Lui ayant dit que j'étois
très- porté à croire qu'elle étoit employée au
rafraîchiffement du vin qu'on bûvoit au Repas
qui fe donnoit au Clergé de Befançon
à S. Etienne , & que je ne voyois pas à quel
autre ufage on auroit pû s'en fervir , elle me
répondit qu'il n'étoit pas vrai - femblable, que
dans les derniers fiécles , où régnoit la plus
grande fimplicité , on eût porté la fenfualité
& la délicateffe jufqu'au point de ſe ſervir
de Glace pour rafraîchir le vin. Mais je lui
repartis , que de boire à la glace , ce n'étoit
pas toujours une marque de fenfualité & de
délicateffe , quand cela fe faifoit rarement,'
& au tems des grandes chaleurs , comme
font celles du mois d'Août ; que cela ne ref
fentoit guére plus la délicateffe & la fenfua
lité , que ce qui fe pratiquoit anciennement
à Rome le jour de Pâques & dans d'autres
Fêtes , fous les anciens Papes , auxquels le
premier Ordre Romain dit qu'on fervoit des
vins étrangers , auffi -bien qu'au Clergé qui
mangeoit avec eux . Defcendunt Primates Eccles
fia ad accubita, invitante Notario Vicedomno,
bibunt ter , de Gracco femel , de Pactis femel
, de Procoma femel. Poftquam biberins
omnes
2788 MERCURE DE FRANCE
omnes Presbyteri , &c. ( 1 ) Qu'on pourroit at
tribuer de femblables motifs à S. Gregoire
le Grand , qui faifoit fervir des Confitures &
d'autres douceurs dans les Repas qu'il dondoit
quelquefois aux Perfonnes de confideration;
( 2 ) & encore à ce qui eft raporté dans
la Vie de S. Udalric , Evêque d'Aufbourgg ,
( 3 ) qu'à la fin du dîner qu'il prenoit avec
fes Chanoines & fon Clergé le jour de Pâques
, il fe réjouiffoit avec eux par la Symphonie
qu'un nombre extraordinaire de Mucifiens
venoient donner dans la Sale de l'Evêché
Au refte , j'ai lû très - attentivement
tous les Actes qui concernent cette Offrande
, mais je n'en ai rien pû tirer qui faffe
connoître à quoi l'on employoit veritablement
cette Glace.
Avant que de finir ma Lettre , j'ai crû devoir
vous informer d'une autre Pratique qui
s'obſerve aux Marines de la même Fête dans
1'Eglife Métropolitaine. Je vous ai dit cidevant
que certains Abbés , Prieurs & Chanoines
devoient fe rendre à S. Etienne pour
célebrer l'Office de l'Invention des Reliques
de ce Saint. Ce qui eft remarquable ,
c'eft qu'ils n'y étoient pas préfens de corps
feulement , mais chacun d'eux y remplitfoit
( 1 ) Ordo Rom . 1. in Mufeo Italico , page 38 .
( 2 ) Tomaffin , Tome 3. page 1245•
(3) In ejus vita , C. 4 .
quelque
DECEMBRE. 1741. 2789
quelque fonction. Un Chanoine de S. Michel
de Salins lifoit la premiere Leçon de
l'Office de la nuit ; la feconde étoit lûë
par un
Chanoine de S. Anatoile ; le Prieur de Lonsle-
Saulnier lifoit la fixiéme ; celui de Monthier-
Haute-Pierre lifoit la feptiéme ; l'Abbé
de Goailles, proche Salins , lifoit la huitième,
& M. l'Archevêque la neuvième . Mais depuis
long-tems l'Abbé & les Prieurs ne s'y
trouvent plus. Cependant pour empêcher en
quelque forte la preſcription de cet ufage , on
obferve chaque année de les apeller à haute
voix de cette maniere, Après le cinquième
Répons, le premier Chorifte fe leve , ſe tourne
vers l'Officiant , qui eft ordinairement un
Dignitaire , & dit à haute voix : Prior de
Lacdone debet fextam Lectionem , fi adfit , legat
; fin autem accufo ejus contumaciam &
peto actum ; à quoi l'Officiant répond : Deserno.
Le même Chorifte apelle fucceffivement
, & avec la même formule :
le Prieur de Monthier & l'Abbé de Goailles.
Des Chanoines qui fe trouvent tout
prêts au Jubé , lifent ces Leçons à leur défaut.
A la verité il n'y a point d'Actuaire
pour donner Acte de la non- comparution
de ces Abfens , mais je ne doute pas qu'autrefois
on n'en fît venir. Ceci fait voir combien
on a toûjours été attentif dans les Ca
thédrales pour la confervation de cette forte
>
de
2790 MERCURE DE FRANCE
de Droits , au nombre defquels on doit mettre
l'obligation de quelques Chapitres , Abbayes
, Prieurés , &c. de venir dans la Cathédrale
à certaines Fêtes principales de l'année,
furtout à celle du Patron , affiſter à l'Office ,
en reconnoiffance de la fupériorité de cette
Eglife fur les autres du Diocèfe, & de la fubordination,
ou même de la dépendance de celles-
ci à l'égard de l'Eglife Matrice.Mais depuis
quelque tems , on s'aperçoit qu'on n'a plus
ici cette même attention pour la confervazion
de ces précieux reftes de l'antiquité ; &
les perfonnes qui ont quelque zéle pour les
anciens ufages, voyent avec un véritable déplaifir
ces pieufes coûtumes s'abolir infenfiblement.
Pour moi , je regrette toujours
l'ancienne pratique où étoient ci devant les
Collegiales de Befançon d'affifter les Fêtes
Pontificales à la Meſſe que M. l'Archevêque
célebre dans fa Cathédrale , & même d'y
venir propter honorem & reverentiam Ecclefia
Cathedralis , à toutes les anciennes Fêtes
folemnelles , quoique ce ne fût qu'un Digni
taire , ou un Chanoine qui officiât ; l'Eglife
Cathédrale à fon tour honorant de fa préfence
ces Eglifes inférieures , en affiftant à la Meſſe
Je jour de la Fête de leurs Patrons. Vous fçavez
, M. que l'Eglife Primatiale de Lyon , les
Collegiales de cette Ville , & encore d'autres
Cathédrales , obfervent foigneufement cette

ancienne
DECEMBRE. 1741. 2791
ancienne difcipline. On y voit ici un tel
attachement , que quand le Chapitre d'une
Collegiale n'avoit pû venir à la Métropolitaine
pour quelque caufe néceffaire , il envoyoit
à M. l'Archevêque & au Chapitre
Métropolitain des Députés pour en dire les
raifons. J'ai vu d'anciens Actes qui en font
foi. Il n'y a plus que l'Eglife Collegiale de
S. Paul qui ait retenu quelque légere trace
de cet ufage : cependant cette pratique refpectable
montroit l'étroite union de la Mere
avec fes Filles. Elle étoit , felon le Concile
de Cologne de 1536. un veftige de l'ancien
ne pieté des Fidéles , qui alloient fe réunir à
leur Evêque comme au centre de leur unité ;
& felon nos anciens Statuts Synodaux , ( 1 )
pour recevoir de fes mains la Communion &
la Bénédiction Epifcopale.Vous n'ignorez pas
auffi , M. que c'étoit autrefois un devoir
pour tous les Fidéles de vifiter au moins une
fois l'année l'Eglife Cathédrale de leur Dio
cèfe , les Evêques Suffragans n'étant pas dif.
penfes de cette obligation , & que même on
donnoit pour pénitence d'y fatisfaire pendant
cinq ou fept années. (2 ) Cette même pratique
rapelloit encore le fouvenir de l'ufage
(1) Statut. Synodal. Bifunt. an. 1575. de Minif
tris cantuum , fol . 167 .
(2) Orderic Vital. pag. 5520
ancien
1792 MERCURE DE FRANCE
ancien où étoit le Clergé de la Cathédrale ,
d'aller faire l'Office dans les autres Eglifes de
La Ville & des Fauxbourgs au jour de la Fête
de leur Patron , avant que l'on y eût établi
un Clergé , ce qui eft bien marqué dans
l'ancien Ordinaire de Befançon.
Mais quoique ces pieux ufages ayent pref
qu'entierement ceffé dans le Clergé , ils fe
font confervés au moins en quelque chofe
parmi le Peuple.
En effet , nous voyons encore qu'à Noël,
à Pâques , &c. nos Vignerons & autres Artifans
, dont la plus grande partie réfide à
l'autre bout de la Ville , ont grand foin
d'aller en ces jours à la Métropolitaine affifter
à la Meffe folemnelle ; ce qui ne vient
certainement que de la coûtume où étoient
leurs Ancêtres d'y aller à la fuite du Clergé
de l'Eglife Collegiale de Ste Marie Magdeleine,
qui eft leur Paroiffe ; de laquelle coutume
ils ont herité de pere en fils.
Je ne dois pourtant pas omettre qu'aux
jours des Rogations les Collegiales fe réüniffent
encore au Chapitre Métropolitain
pour les Proceffions que ces Eglifes font
enfemble & feules dans la Ville , aucun autre
Corps Ecclefiaftique n'ayant le droit de
les faire en public ces jours - là . Qu'au jour de
La Fête de S. Jean l'Evangeliſte , qui eſt le
premier Patron de la Cathédrale , les Curés
DECEMBRE . 1741. 2793
& les Chapelains des Eglifes Paroiffiales de
la Ville ne manquent point d'y aller à Matines
, où les Curés chantent l'Invitatoire &
les Leçons , & les Chapelains les Répons.
Surquoi il eft à remarquer qu'en 1450. M.
Pierre Donzel , Curé d'une des plus confiderables
Paroiffes de Befançon pour y avoir
manqué , fut condamné en dix livres d'amende,
qu'il fe foumit de payer.Qu'en 15 14.
Jacques d'Ozel , Curé de N. Dame de Juſſan-
Montier, fut condamné à So. fols
pour le
même manquement. Je vous dirai encore
que le Jeudi- Saint , vingt - trois Curés , tant
de la Ville que des Villages voifins , doivent
y venir pour la Bénédiction des faintes Huiles
, avec les Députés des Eglifes Collégiales
de S. Paul & de Ste M. Magdeleine , à
peine de trois livres Etevenans. ( 1 ) Qu'enfin .
les. Benedictins de Befançon y vont procef
fionnellement le Dimanche des Rameaux
pour répondre la Meffe qui eft celebrée par
(1 ) Parmi les Priviléges dont l'Eglife de S. Etienne
fut illuftrée,l'Empereur Charles le Chauve lui avoit
accordé celui de battre Monnoye , laquelle étoit frapée
aux Armes de cette Eglife. Ces Armes étient la figu
re d'un bras avec la main , dont le pouce , l'index
Le troifiéme doigt étoient étendus , & les deux autres
pliés ; elles repréfentoient le Reliquaire d'or en forme
de bras , où eft renfermé l'un des Os de S. Etienne.
On apelloit cette Monnoye Moneta Stephanienfis ,
d'où eft venu l'expreffion de Monnoye Etevenante .
11. Vol. B le
2794 MERCURE DE FRANCE
le Chanoine Semainier de la Métropolitaine
, à laquelle affiftent les autres Chanoines
, qui occupent feuls les hautes Chaires
du Choeur. Mais on s'eft encore relâché envers
ces Réguliers fur l'obligation où ils
étoient il n'y a pas bien long tems d'y venir
en Aubes , & d'y refter en cet habit pendant
la Melle .
Je ne regrette pas moins la pieufe & an
cienne coûtume où étoit le Clergé de Befançon
, particulierement les Chapitres , de fe
rendre mutuellement les derniers devoirs
en affiftant aux obfeques les uns des autres.
J'efpere vous envoyer un jour la Relation
exacte de cette pratique , & de ce qui en
refte encore .
J'avois deffein de vous parler auffi d'une
Colation que le Clergé de la Métropolitaine
prenoit dans le Choeur pendant le troifiéme
Nocturne des Matines de la Fête de l'Invention
de S. Etienne , que l'on chantoit
dès la veille environ les quatre heures du
foir, laquelle Colation fut fuprimée en 1733 .
cet Office ayant été renvoyé au matin , à
l'heure ordinaire. Mais j'ai apris il n'y a que
quelques jours qu'on avoit déja publié làdeffus
une Differtation qui a été inferée dans
le Mercure de France il y a , dit - on , dix
ou douze ans. Je n'ai pas vû cette Piéce .
Sur ce que l'on m'en a dit, je crois que l'Auteur
DECEMBRE. 1741. 2795
teur n'aura pas rencontré jufte fur l'origine
qu'il lui donne , furtout s'il n'a pas vû nos
anciens Ordinaires. Si j'ai occafion de la lire,
Faurai foin de vous marquer les réflexions
que j'y aurai faites.
Je finis par une autre Redevance qui n'eſt
pas moins finguliere que celle de la Glace.
C'eft une voiture de petits Joncs verds , que
des Habitans d'un Village apellé Auxon-
Deffus , à deux lieues de Befançon , doivent
conduire à la Métropolitaine le 4. du mois
d'Août pour la Grand'- Meſſe . On ne les offre
pas à l'Autel comme la Glace , mais on en
fait de petits faifceaux que le Célebrant bénit
à la Sacriftie pendant Tierce. On les diftribue
enfuite aux Chanoines , aux Chapelains
& aux Chantres , qui les portent à la Proceffion
Clauftrale de ce jour en forme de
Palmes. Quelques recherches que j'aye faites
fur cette coûtume , je n'ai pû encore découvrir
ce qui y a donné lieu . Je fuis avec
respect , &c.
A Befançon le 1. Septembre 1741 .
Bij
LE
2796 MERCURE DE FRANCE
LE SINGE SATYRIQUE
D
FABLE.
Ans une Forêt du Cap Verd
Un Singe étoit , malin par excellence ,
Critique outré , dont l'âpre médifance
Trouvoit toujours tout de travers ;
Du Paon le fuperbe plumage
Ne lui fembloit qu'un foible atour ,
Qu'un ornement de baffe- cour ;
De Philomele le ramage
Etoit un langoureux faucet ,
Et le babil du Perroquet
Un fort ennuyeux voifinage ;
L'Aigle , un butor , un groffier perſonnage i
Le blanc du Cigne étoit un blanc d'aprêt ;
Maître Renard un fourbe infigne ;
La Tourterelle , une prude maligne ,
Le beau Phénix , un laideron de près i
Il traitoit l'Ours de franc Corfaire ;
Sur le courage même attaquoit les Lions ;
Apelloit les Tigres Gafcons ;
Sur le gros dos du Dromadaire
Difoit cent quolibets bouffons.
Lui
DECEMBRE. 1741. 2797
Lui feul , heureuſe Créature ,
Enfant gâté de Madame Nature ;
Croyoit avoir toutes perfections .
Un jour ce Héros en malice
Alla donner dans un paneau ;
Il apelle les Animaux
Dont il implore le ſervice ;
Au bruit chacun accourt & rit ;
Allons, M. le bel efprit,
Qui fçavez fi bien contrefaire ,
Lui dit-on , tirez-vous d'affaire ...
Maître Singeot humilié ,
Au Renard jadis fon Confrere
De leur ancienne amitié
Voulut réchauffer la mémoire ,
Par le profit ou par la gloire ;
Vous prenez , lui dit l'autre , un inutile foin
Pour rapeller l'amitié violée ;
Ne cherchez plus d'amis dans toute l'affemblée ;
Un Satyrique n'en a point.
Blaife Chanoine , à Dijon.
B iij PANE2798
MERCURE DE FRANCE
į į ƒ į į į į į
శ్రీ శ్రీ
PANEGYRIQUE DE S. LOUIS ,
prononcé à l'Académie Françoife le 25.
Août M. DCC . XLI . par M. l'Abbé ARTAUD ,
Chanoine de l'Eglife Royale de S. Louis
du Louvre , Brochure in 4° . de 32. pages.
A Paris , de l'Imprimerie de J.B. Coignard.
E Difcours , dont la lecture ne peut
C que juftifier la fatisfaction avec laquelle
il a été écouté , eft compofé avec tant d'ordre
, tant d'élegance , d'une maniere fi folide
, & fi bien foutenue , qu'il peut être regardé
comme une des plus belles Pieces qui
ayent paru en ce genre : il a pour Texte ces
paroles du 17. Chap . du Deuteronome .
Difcat timere ..... Deum ... & cuftodire
que in lege præcepta funt , nec elevetur cor
ejus in fuperbiam fuper Fratres fuos , ut longo
tempore regnet ipfe & Filii ejus : Paroles qui
n'ont peut- être jamais été mieux apliquées
& plus heureufement , que dans l'augufte
fujet dont il s'agit ici . L'Òrateur en a d'abord
tiré dans fon Exorde cette importante
moraie.
>>

Quelque indépendans que foient les
» Souverains de toute Puiffance fur la terre ,
» rien ne doit leur faire oublier qu'il eft un
» plus grand Maître dans le Ciel . Ils regnent
» fur
BIBLIO
LYON
ALLE
DECEMBRE . 1741 .
" fur les Peuples ; le Dieu Fort , le Dieu
" Puiffant regne fur les Rois. Il a établi l'au-
" torité & la fubordination , pour entretenir
» l'ordre & la regle ; mais comme tout def
» cend de ce Principe,tout y remonte ; l'égalité
» reprend fes droits parmi les hommes , dès
» qu'il s'agit de Dieu ; & à fon égard , depuis
» le Berger jufqu'au Monarque
» fujet .
2
toute CUB
ON
» Les Rois vivent donc fous l'empire de
» Dieu , & ils ne font au-deffus des autres
» hommes , ils ne font Rois que pour la fé-
» licité des Peuples . Placés entre le Ciel &
» la Terre , ils doivent également veiller aux
» interêts de l'un & à la tranquillité de l'au-
» tre : ils font faits pour rendre leurs Sujets
» heureux ; & à mefure qu'ils s'empreffent
» d'y réuffir , ils fe rendent eux- mêmes di-
» gnes de l'être .
Après avoir fait une aplication pompeufe
du Texte à S. Louis , & après avoir établi
que ces idées majeftueufes de Diadême & de
Couronne ne prefentent à la faine raiſon
& à la Religion qu'un grand éclat & un
grand fardeau , l'Auteur diviſe ainfi fon Dif-
Cours :
DE
» S. LOUIS a maintenu tout l'éclat de la
» Royauté , en reglant fa conduite fur l'inte-
» rêt de la gloire de Dieu, par qui les Monar-
>> ques regnent.
B iiij » Il
1800 MERCURE DE FRANCE
» Il a foutenu tout le poids de la Royauté,
>> en fe dévoüant tout entier au bien de s
» Peuples confiés à fes foins , fource inépui-
» fable de louanges , partage de ce Dif
>> cours. "
Il eſt fâcheux pour nous , il l'eft auffi
pour ceux qui ne font pas à portée de lire
ce Panegyrique , que nos bornes ne nous
permettent pas d'en faire un long Extrait.
On jugera de fa beauté & du rare talent de
l'Auteur , par quelques traits que nous ne
pouvons nous difpenfer de raporter , ou du
moins d'effleurer.
PREMIERE PARTIE.
Dans la premiere Partie , après avoir décrit
avec autant d'énergie que de fublimité , la
conformité que les Rois ont avec Dieu , dont
ils tiennent la place fur la terre , l'Orateur
ajoute : " Mais ce raport augufte , à quoi
» fert- il qu'à leur condamnation , s'ils def-
» honorent en eux l'image du Très Haut par
> leur conduite ?
>>
>>
Qu'il eft difficile , Meffieurs , de ne
>> la pas deshonorer , dans une fituation fi
dangereufe , par les éoutils dont on eft en-
» vironné , fi terrible dans l'ufage de l'au-
» torité dont on eft revêtu , fi redoutable
» par les difgraces même auxquelles on eft
» expofé ! Trois objets qui doivent faire
.. trembler
>
DECEMBRE. 1741.
2851
>>
» trembler tous les Rois , mais que S. Louis
fçût admirablement tourner à fon avan-
» tage & à fa fanctification , en fe précau-
» tionnant contre les écueils du Trône par
" tout ce que la vertu a de plus parfaits en
>> confacrant l'autorité du Trône au bien de
l'Eglife & de la Religion ; en foûtenant
" avec dignité & avec conftance les plus
» grands revers qu'on puifle éprouver für le
» Trône .... Vous fçavez combien cft con-
» tagieux pour les Grands l'air qu'on refpire
» à la Cour : combien plus l'eft il pour le
>> Prince lui-même ? L'abondance y entre-
» tient la molleffe ; le fafte & les honneurs
» y nourriffent l'orgueil ; l'oifiveté y accré-
≫dite la licence; les jeux yfoutiennent la diffipation
; le foin de plaire y forme les hypocrites
; le défir d'être préferé y fufcire les
» jaloux. On ne préfente le vice aux yeux du
» Monarque que fous les couleurs les plus
» aimables ; on en voile la difformité par les
> exemples les plus féduifans : on ne lui laiffe
>>
pas ignorer , même dans la faifon la plus
» tendre , qu'il eft le Maître , & qu'être le
>> Maître , c'eft ne devoir rien fe refufer : la
» liberté de pouvoir tout le porte naturel-
» lement à tout ofer & à tout entreprendre ;
» & dans l'affûrance que les autres ont fans
» ceffe befoin de lui , comment rougiroit-il
» auprés d'eux de fes défauts & de fes foi-
B v » bleffes ?
2802 MERCURE DE FRANCE
"
» bleffes ? Ce que l'indépendance fuggere
l'impunité le foûtient. Dangers au - dedans,
> dangers au dehors , tout concourt à la per-
» te de celui pour la félicité de qui il femble
que tout refpire .. ... Sur quel Trône
» donc croira -t'on poffible de trouver des
>> Saints ?
··
Il décrit enfuite avec quelle fainte induftrie
S. Louis opofa à ces dangers l'innocence
, le recueillement , la ferveur , l'humilité;
& afin que le monde ne puiffe pas traiter
de foibleffe la religieufe conduite du faint
Monarque , il ajoûte : » Jamais Roy ne fut
» peut-être plus jaloux de la majefté de fon
» Sceptre, jamais Roy ne s'en prévalut moins :
» fon humilité n'étoit pas en lui une vertu
» qui dégradât le Maître , & qui enhardît le
Sujet fi elle le confondoit avec fes Peu-
» ples dans l'exercice des devoirs chrétiens ,
» elle l'élevoit au - deffus des autres Rois de
» la terre par la fublimité de fes motifs ; elle
» l'eût porté à defcendre du Trône , & non
» à en négliger les droits .
33
Quel exemple fameux ne nous en donna-
» t'il pas lorfqu'il s'agit de défendre les in-
» terêts de la Puiffance féculiere contre les
» entreprifes de la Puiffance Ecclefiaftique ?
» Des Prélats indifcrets avoient franchi les
>> bornes de leur autorité au préjudice de
» celle du Prince . Soutenus dans leurs pré-
» tentions
DECEMBRE. 1741 . 2803
>>
» tentions par une Cour d'autant plus ref-
» pectable , que fon veritable pouvoir eft
plus facré & plus légitime , ils fe com-
» portoient d'une maniere à faire craindre
» pour l'indépendance de nos Rois , fous
» le prétexte du refpect qu'on doit à l'Eglife .
» Une humilité mal entenduë eût laiflé Louis
» dans l'inaction ; elle nous eût privé de cette
» preuve ad nirable de la vénération qu'on
» peut & qu'on doit avoir pour le Pere
commun des Fidéles , dans le tems mê-
» me qu'on eft obligé de combattre des
» droits prétendus , qui pourroient donner
» atteinte au pouvoir fuprême des Souve-
>> rains ; & loin que la Religion pût être
» bleffée de la fermeté du Prince Chrétien ,
» elle y retrouvoit fon veritable efprit , elle
» en tiroit fon plus beau luftre.
» L'indépendance de leur Couronne eſt
» une prérogative que les Rois ne tiennent
» que de Dieu , & qu'ils ne doivent facrifier
» qu'à lui. La Couronne elle - même eſt un
bien que LOUIS vouloit offrir à ce Maî-
>> tre fouverain des Monarques ; & afin
» que l'offrande fût plus entiere , plus no-
» ble , plus digne de lui être préſentée
» il étoit fans ceffe en garde contre tout ce
» qui auroit pû l'avilir. Un don fi précieux
» feroit devenu indigne d'être offert à Dieu ,
» s'il eût perdu quelque chofe de fon éclat
» dans les mains du Prince . B vj L'O2804
MERCURE DE FRANCE
L'Orateur Chrétien raporte enfuite l'uſage
que S. Louis faifoit de fon autorité en
faveur de la Religion ; & après avoir fait
un détail extrêmement fage de l'affaire d´s
Albigeois , & du zéle du faint Roy à maintenir
la Foi , & à faire régner les bonnes
moeurs , il décrit ainfi , & avec un feu admirable
, la premiere Croifade du Saint .
>>
"7
>
» Mais quel nouveau zéle s'empare du
» coeur de Louis , & à quoi va t'il employer
» la force de fes armes ? Sera- cc pour aggran-
» dir fes Etats , & porter en Conquérant le
» fer & le feu dans le Patrimoine d'autrui ?
» Fauffe fageffe du monde , tu n'euffes pas
manqué d'aplaudir à fon courage , s'il
» n'eût armé que pour humilier fes voilins
» ou pour rendre fa puiflance redoutable.
Mais doit-on s'attendre à te voir aprouver
» des guerres auxquelles la Religion peut
» avoir quelque part ? Eh quoi ! l'Arche
» fainte eft entre les mains des Philiftins ; le
» Sarrazin , après avoir ravagé l'Eſpagne &
» étonné l'Afrique , profane impunément
>> les Lieux confacrés par la préfence de J.C.
» Le fang des Chrétiens eft tous les jours en
» proie à la fureur des Infidéles ; eft ce le
» Maître , le Maître légitime qui défole
Jerufalem , qui fait frémir la Grece , &
qui répand jufques fur nos Frontieres la
"confternation ? N'eft- ce pas au contraire
l'Ufurpateur
20
1
DECEMBRE. 1741 2859
>>
>>
" l'Ufurpateur qui porte partout le glaive &
" le carnage , qui du Lieu même arrofé du
Sang de J. C. menace tout l'Empire Chré-
" tien ; & qui fous l'Etendart du Croiffant,
" en veut également & à notre Religion , & à
nos perfonnes ? Comment la pieté de Louis
» n'en eût- elle pas été allarmée ? Ah ! s'écriet'il
, je tirerai mes freres de l'opreffion , &
» le Sanctuaire de l'infamie : Vindicabo ita-
» que gentem meam & fanita. ( 1. Machab.
» ch. 13. V. 6. ) Déja tour fe prépare à aller
» délivrer la Paleſtine de fes Tyrans...
» & malgré les élemens conjurés & la difperfion
de nos Vaiffeaux , Damiette s'offre
» à nos yeux , il ne s'agit plus que de la
» forcer ; de- là dépend tout le fuccès de
» l'entrepriſe...
>>
» Louis aborde le premier. Impatient
» d'arriver , il s'élance au milieu des eaux ;
>> il marche à travers mille dards. ... On le
» fuit ; le Sarrazin déconcerté , plie : le com-
» bat eft furieux , & la perte des Chrétiens
» n'eft prefque pas fenfible.
L'Article des difgraces de S. Louis eft
parfait. » Politique Mondaine , ( s'écrie ici
l'Orateur Chrétien ) tu ne comptes , pour
» l'ordinaire , le mérite de tes Héros , que
»par leurs exploits militaires ; & couvrant
fouvent le Capitaine des Lauriers , que le
Soldat
ور
2806 MERCURE DE FRANCE
» Soldat feul a mérités , tu ne fais dépendre
» la gloire que de la bizarerie des événe-
. و ر
ود
>
mens. La Religion forme des Héros d'une
»autre efpéce ; elle ne les rend fouveraine-
" ment grands qu'à force de les rendre fou-
» verainement malheureux : c'eſt l'élévation
» des fentimens qui fait le grand homme
» & non le fuccès des entrepriſes. Rien ne
" nous apartient véritablement que ce qui
»part de notre coeur , & le triomphe , que
» nous ne partageons avec perfonne , eft
» fans contredit le plus glorieux . Mais ,
Meffieurs , Louis devoit- il s'attendre à ce
» nouveau genre d'Héroïfme ? Maître de
» Damiette , il vient d'ouvrir une magnifi-
» que carriere à fon courage & à fes vaftes
projets en trois jours il remporte deux
victoires , & fa valeur lui en prépare de
» nouvelles .... Que dis - je , grand Dieu ! &
quels font vos deffeins ? tout change de
» face....Nous fommes vaincus , & quand le
» S. Monarque rallieroit fes troupes ... attaqueroit
de toutes parts le Sarrazin , quel
» fuccès pourroit - il en attendre ? Il en a af-
» fés fait pour fignaler fa valeur ; le Ciel
"peut à préfent éprouver fa fidelité & fa
99
""
<<
وو
» conftance .
L'Auteur fait ici un détail au fi magnifique
que touchant de la captivité de S. Louis
& de fa fermeté : puis il ajoûte : » Avec des
>> preuves
DECEMBRE . 1741 2807
preuves d'une valeur fi étonnante d'un cô™
» té , & de l'autre avec tant de conſtance &
» de force dans les difgraces , que lui man-
» quoit- il , pour être mis à côté de ces Hé-
"ros que l'antiquité a le plus célebrés ? Je
» ne crains pas de le dire à la honte du coeur
»humain , il ne lui manquoit que des foi-
"bleffes . Monde corrompu & ennemi de la
"pieté , tu ferois plus difpofé à admirer dans
"Louis le Guerrier intrépide , le coeur fer-
❞ me & inébranlable , fi tu n'y voyois le Saint:
"un Héros dont la conduite condamne les
»paffions folles qui te féduifent , n'eſt
و د
»
pas le tien mais la Religion
ne connoît
point ce mélange
odieux
de vertus
& de foi- » bleffes
: les Guerriers
qu'elle
aime fçavent remporter
toutes fortes de Victoires
: plus »grands
lorfqu'ils
triomphent
de leurs pen- » chans
& d'eux mêmes
, que lorfqu'ils
bri- »fent des remparts
; melior
eft.... qui domina- »'tur animo fuo , expugnatore
Urbium
. Prov.
ch . 16: v. 32.
22
Qu'on lui parle de fa liberté & qu'on ne
» veuille la lui accorder qu'à des conditions
indignes de lui ; un Roy de France ne fe
» met point à prix ... Que des Parricides , les
» mains teintes du fang de leur Monarque ,
» viennent dans la tente de Louis , fe li-
» vrer à de nouveaux excès ; fa préfence les
»étonne , fon intrepidité les déconcerte ; la
>> fureus
2808 MERCURE DE FRANCE
»fureur fe change en admiration , l'admira
>> tion en refpect ; ils aprochent de lui avec
>> autant de retenuë que s'il étoit leur Souve
» rain ; & par un charme fecret que la vertu
feule infpire , ils projettent de le placer fur
» le Trône de leur Soudan. Un fi grand.
» homme ne leur paroît fait que pour re-
»gner ; & fila Religion feule les empêche
» de le prendre pour Maître , ils auroient
>> honte d'infulter à fes malheurs , & de le
tenir plus long- tems dans les fers . LOUIS
» dicte lui -même les Articles du Traité : ch ;
"chofe remarquable ! il éxige de ces Babares
» des furetés de leur parole , & il ne donne
>> d'autre garant de la fienne , que fa droiture
» & fa bonne foi .
SECONDE PARTIE.
La feconde Partie n'offre pas de moindres
beautés que la premiere.
» Il n'en eft pas des vertus des Rois com-
» me de celles des autres hommes. Chargés
» de veiller au repos & au bonheur des Peu-
» ples , toute leur conduite doit répondre à
»l'ordre & au bien Public ... S. Louis af-
`» fûra la tranquillité de fes Peuples par une
courageuse défenſe , il en ménagea les in
» térêts par un efprit d'équité & de juſtice ,
» il en prévint les befoins par l'étenduë de
fa charité.
33
Que
DECEMBRE. 1741. 2809
"
و ر
»
Que de traits marqués au coin du vrai
beau ! vous en allez juger. L'Auteur reprend
toute la vie de S. Louis , & commençant
par les guerres que le bien de fes Sujets lui
fit entreprendre , il dit : " Quel raport le
» courage du Guerrier peut - il avoir avec
» l'héroïfme du Chrétien? Et cette Chaire
" deftinée à exalter la fainteté , devroit - elle
» retentir d'une foule d'exploits qui ne pré-
» fentent que fang & que carnage ? Oui ,
Meffieurs , le tumulte des armes n'a rien
» de contraire à la folide pieté , quand c'eft
» le devoir qui l'excite : qui ne fçait que la
paix dépend fouvent du pouvoir qu'on a
de faire la guerre ; que l'Art Militaire eft
» la fcience des Rois , & que le courage qui
» devient crime quand il dégénere en fu-
» reur , eft vertu , dès qu'il fe trouve animé
"par un motif auffi légitime & auffi puiffant
» que celui de la confervation des Sujets ? ...
» Ah ! c'eft alors qu'animé d'un faint zéle
» Louis s'écrie avec ces Rois dont il eſt parlé
» dans l'Ecriture : Combattons pour notre
Peuple , & prenons le glaive contre lui ;
» verfons quelques gouttes de fang , pour
empêcher qu'il n'en coule des ruiffeaux :
» nous ne pouvons conferver la vie de nos
» Sujets , qu'en faifant marcher devant nous
»l'Etendart de la Mort , Pugnemus pro populo
noftro... 2. Reg. c. 10. v. 12.
» Qu'on
ود
33
1810 MERCURE DE FRANCE
» Qu'on ne s'imagine donc pas que
la fainteté
foit incompatible avec le glaive. Non
non , le Monarque manqueroit à fon de-
" voir s'il refufoit de tirer l'épée contre les
$
Ennemis de l'Etat , où contre des Peuples.
» défobéiffans ; & les Sujets enhardis à fe
» détruire , deviendroient les victimes de ſa
» modération : auffi étoit- ce la pieté qui ani-
" moit Louis autant que la valeur , & l'a-
" mour pour les fiens combattit peut- être
»plus efficacement que fon bras.
Il releve enfuite le foin de S. Louis à défendre
fes Peuples des armes des Anglois
de la cruauté du Soldat , de la tyrannie des
Grands & de la fureur du duel. » Ce monf-
;
tre , dit-il , eft d'autant plus dangereux ,
» qu'il doit fa naiſfance à une faufe bravou
» re , & d'autant plus difficile à détruire
qu'il eft apuyé dans le monde du préjugé
impofant de l'honneur ; cette fureur aveugle
regnoit fans bornes parce qu'elle regnoit
»fans contradiction ; quoi qu'elle fût con-
» traire à la raifon elle n'étoit pas contre les
Loix; fi elles ne lui avoient pas donné l'être,
"
ود
elles en autorifoient le motif & en mainte-
» noient l'ufage & c.
""
Quel autre genre de Victoire , LOUIS
" avoit - il à remporter , & quel Ennemi de
» fes Peuples lui reftoit -il à vaincre ? Quel
»Ennemi ! fa valeur même , fon goût , fon
>> penchant
DECEMBRE. 1741. 2811
ود
"
" penchant pour les armes . Eh ! qu'eût fer-
» vi à fes Sujets , qu'il eût été tant de fois
» Victorieux , fi l'amour de la gloire l'eût
porté à vouloir cueillir tous les jours. de
» nouveaux lauriers , & à marquer tous les
âges de fon Regne par des Triomphes ?
" Non , Meffieurs , non , le Chrétien l'em-
»porte ici fur le Capitaine ; & quelque beau
qu'il paroiffe à notre Héros de combattre
» & de vaincre , touché du bien public ik
»lui paroît encore plus beau de faire la
" paix... La Juſtice eſt d'autant plus la vertu
» des Rois qu'il n'apartient qu'à ces Maîtres
du monde de la faire regner... Rapellerai-
» je fes fages Ordonnances , connues fous-
» le nom d'Etabliffemens de S. LOUIS , Ouvrage
d'autant plus digne de fon difcerne-
» ment & de fa pieré , qu'il fimplifioit la Jurifprudence
, & en prévenoit les abus ?
"
»
L'Auteur après avoir donné une grande
idée de l'équité de S. Louis , & après avoir
dit qu'elle faifoit le repos de l'Europe , & la
Loi de fes Monarques , ajoûte : » Auſſi de-
» vint il leurArbitre , & fa déciſion fut fouvent
préferée aux Traités les plus folemnels
39
" & c.
Delà par une comparaiſon , auffi heureuſe
que jufte , de ce Regne à celui fous lequel
nous vivons , il continuë ainſi : » Ai - je vou-
» lu décrire ici , Meffieurs , les merveilles
» du
2812 MERCURE DE FRANCE
» du Regne de S. Louis , ou celles de nos
»jours ? La Nation la plus enviée , eſt de-
» venue la Nation la plus refpectée , & la
plus digne de l'eftime de fes Rivaux : dans
" un Miniftere, qui embraffe toutes les affai-
"res de l'Europe , on voit regner la bonnet
»foi , l'équité , l'amour du bien & de la ju
»tice , toutes les vertus qui forment le grand-
» homme & le véritable Chrétien. Nous
fommes ainfi en état de faire la Loi aux
»autres Nations par l'élévation de nos fen-
» timens , encore plus que par la force de
»nos armes : fi nous n'avons pû parvenir
» à vaincre leur jaloufie , du moins avons-
» nous calmé mille fois leur crainte & leur
inquiétude.
ور
Ce qui concerne la bonté de S. Louis ,
n'eſt pas moins admirable que tout le ref
te: » Il n'ignoroit pas que le Prince eft le
» Miniftre de Dieu fur les hommes , & que
»la plus noble & la principale fonction de la
»Royauté, eft de les favorifer dans le bien:
» Dei enim Minifter eft tibi in bonum. Rom.
» 13. 4. La bonté eft unc vertu encore plus
>> honorable aux Rois que la valeur. Celle-
» ci leur attire des lauriers , dont les Sujets
>> ont fouvent lieu de gémir ; la bonté eft
»une fource intariffable de biens , fans au-
>> cun mélange de maux ; elle eft plus méri-
>> toire pour le Prince, parce qu'elle est toute
>>
perfonDECEMBRE
. 1741.
2813
perfonnelle , & d'autant plus digne d'élo-
» ges , que loin d'augmenter la pompe ex-
» térieure du Trône , elle en modére , en
faveur des Peuples , la magnificence &
» l'éclat.
Après avoir raporté tout ce que le zéle de
S. LOUIS lui fuggera , pour le foulagement
de fes Peuples , l'Auteur dit : Et comment
>>LOUIS eût-il été infenfible aux befoins
» de fes fideles Sujets , lui qui avoit accordé
>> jufqu'à trois fois le pardon à des Rebelles ;
» & qui n'avoit opofé au criminel attentat
» du Prince des affaffins , que la clémence ,
» & la génerofité ?
>> Que pensez- vous , Meffieurs , de l'amour
des François pour un tel Maître ? Jamais
>> Prince ne fut plus aimé , & vous le fçavez
» la conquête des coeurs eft préférable à celle
des Empires : c'eft l'autorité qui fait les
Rois , mais c'est l'affection des Peuples qui
" prouve qu'ils font dignes de l'être, Saint
» Louis n'avoit pas befoin d'employer la
» fierté du commandement pour s'attirer l'o-
» béïffance ; l'amour du devoir ne laiffoit
" rien à faire à la crainte du châtiment . N'en
foyez par furpris ; le Peuple , aveugle fur
» prefque tout le refte , ne manque guere
la reconnoiffance envers fes Souverains ;
» accoûtumé à les refpecter , lors même
>> qu'ils menaçent & qu'ils puniffent , il les
à
» adore,
2814 MERCURE DE FRANCE
» adore , pour ainfi dire , dans la diftribu-
»tion des graces.
Mais finiffons , crainte de fuccomber à la
tentation d'allonger cet extrait , ou plutôt
de l'orner par de nouvelles beautés , dont ce
Panegyrique eft rempli.
" Louis meurt ; mais ne peut-on pas di-
» re en quelque forte , qu'il vécut encore
après la mort par fes bienfaits ? Quelles le-
» çons importantes ne fit- il pas à l'héritier de
»fa Couronne , pour la conduite & la feli-
» cité de fes Peuples ? A ces traits , Meffieurs,
vous vous rapellez fans doute LOUIS LE
» GRAND , & vous vous reffouvenez dans
» ce moment de l'admirable inſtruction que
» ce Prince fit à celui qui eft affis fur fon
» Trône : Mon Fils, vous allez regner, fongez
» que votre bonheur dépend d'être foumis à
»Dieu , & du foin que vous aurez d'aimer &
»de foulager vos Peuples. Principes qui
» avoient conduit S. Lo u is dans cet état de
» perfection , dans lequel l'ont repréſenté les
paroles de mon Texte. Difcat timere...
Deum & cuftodire,& c. Deut. ch . 17. & qui
>> font encore la fource de la profperité dont
» ce Royaume jouit , & de la Grandeur du
» Monarque qui nous gouverne , Monarque
qui regne fur nos coeurs avec encore,plus
d'empire que fur nos perfonnes , & qui
» fait renouveller parmi nous le beau Regne
≫ do
>>
D
39
DECEMBRE. 1741 . 2815
» de S. Louis , fans nous expofer aux mê
» mes difgraces : Monarque dont le Gouver-
» nement eft fi vifiblement marqué au coin
» de la vérité & de la juftice , & dont les
» vertus Royales , que nous voyons renaître
» dans l'Augufte Héritier de fa Couronne , an
» noncent à nos voeux une longue fucceffion
» de bonheur & de gloire: Monarque enfin...
» Mais , Meffieurs , il n'apartient qu'à vous
» de le louer dignement ; les grands Sujets
>> font réservés aux grands Hommes . Puiffe
» la France ne porter jamais d'autre joug , &
» le Sang Royal nè s'éteindre , que lorfque
» le fon de cette majestueufe Trompette qui
»> nous raſſemblera tous , annoncera la fin
» des Empires , & l'anéantiſſement de l'U
> nivers !
*
l'au-
» Vos talens , Meffieurs , vous rapro-
>> chent , en un fens , des Rois de la Terre ;
» vous êtes par l'efprit ce qu'ils font par
» torité ; ils triomphent de l'indocilité par
» la force des armes , vous triomphez de l'i-
» gnorance par la force de la parole ; ils
»font les Maîtres du Monde , vous en êtes
» les Oracles. Mais pour les Sçavans , com
» me pour les Rois , il n'eft rien d'eſtimable
>> ni de folide que la fainteté être faint &
fçavant , c'eft vivre en même tems , &
» pour la gloire de Dieu & pour l'honneur
* Meffieurs de l'Académie.
>>
:
» de
2616 MERCURE DE FRANCE
» de l'humanité : c'eft fe rendre ici - bas digne
» du refpect , & des hommages des hom-
» mes , & mériter dans le Ciel cette Cou-
>> ronne immortelle refervée aux Juſtes.
A M. L'ABBE' GOUJET ,
Surfa Bibliothéque Françoife.
Contre Ontre un rimeur plein d'une folle audace ;
Sçavant Abbé , je gageai l'autre jour
Que vos écrits au Delphien féjour
Jà vous mettoient à la premiere place.
Notre rimeur vous loüoit à ſon tour ,
Bien admiroit , dévoroit votre Hiftoire ;
Mais le Superbe , enyvré de fa gloire ,
Au premier rang ne voyoit rien que lui.
Lifez mes Vers , c'eft plaifir fans ennui ;
Il eft jugé que rime efface Profe.
Lors Apollon confulté fur la chofe ,
Tout entendu prononça cet Arrêt.
Notre Féal , vos Vers ont en partage
Les agrémens , c'eft leur unique objet :
Inftruire & plaire eft un double avantage ;
Et c'eft le lot de notre ami Goujet.
Par M. Bret, de l'Académie de Dijon
PRODECEMBRE
. 1741 2817
***:
PROGRAMME DE CHIRURGIE.
R Arnaud , Chirurgien Juré , Chirur-
Mgien Herniaire de l'Hôtel- Dieu , & Dépar
monftrateur Royal en furvivance , uniquement
occupé de la partie de la Chirurgie qui concerne
les Hernies, dites communément Defcentes
, fe propofe de faire chés lui un Cours
complet de ces Maladies , dans lequel feront
compris tous les points de théorie & de pratique
qui y ont raport , comme on le verra
la diftribution fuivante de fes Leçons .
Quoiqu'il ne doive les commencer qu'au
mois d'Août de l'Année prochaine 1742. il
a crû devoir les annoncer dès à préfent , afin
que les Etrangers puiffent en avoir connoiffance
avant le mois de Juillet prochain , dans
le courant duquel mois ceux qui voudront
y affifter , auront foin de fe faire infcrire paz
M. Arnaud ; fon deffein étant de fe borner à
un petit nombre de perfonnes qui feront plus
à portée de s'inftruire du Manuel des Opérations
qui conviennent à ces maladies . Sa de
meure eft rue du Four , Paroiffe S. Eustache à
Paris.
PREMIERE LEÇON.
L'Hiftoire des Hernies , dans laquelle on
verra depuis quel tems ces maladies font con
ĮI. Vol.
C nuës

2818 MERCURE DE FRANCE
nuës ; l'ordre chronologique des Auteurs qui
en ont écrit , des Méthodes qu'ils ont fuivi
pour leur traitement , les progrès de la Chi
rurgie de ce fiécle fur ces maladies.
2. Démonftration Anatomique du dérangement
des Parties , tant contenantes que contenuës,
qui concourent à former les Hernies.
3. Le géneral de ces maladies , leurs differences,
leurs caufes génerales & particulieres.
4. Les Hernies ordinaires ; fçavoir , celles
du nombril , celles des aînes , la Hernie crurale
, & celles qui arrivent aux differentes
parties antérieures du ventre .
5. Les Hernies rares & fingulieres , telles
que font les Hernies formées par la fortie de
l'eftomach , celles qui viennent aux régions
lombaires , les Hernies qui fe font par le trou
ovale , & celles qui fe font dans le vagin.
6. La Hernie crurale en particulier , fes
differentes efpeces , fes fignes , les procedés
differens qu'il faut tenir dans les Opérations
qui leur conviennent ; remarques importantes
fur cette espece de Hernie.
7. Démonſtration de toutes les efpeces de
Hernies fur des Sujets vivans.
8. Les accidens des Hernies en géneral ,
en particulier de l'étranglement de l'inteftin ,
fes differences , fes caufes , fes fymptômes &
fes fignes.
9. La réduction par le Taxis des parties
étranDECEMBRE.
1741 2819
étranglées ; cas où il convient de tenter ce
moyen , précautions néceffaires à cet égard ;
cas où il faut éviter de réduire les parties par
cette Opération , raifons qui y déterminent.
10. Accidens qui furviennent après la réduction
des Hernies par le Taxis ; précautions
à prendre après cette Opération , pour
éviter ces accidens ; moyens d'y remedier
lorſqu'on n'a pas pû s'en garantir.
11. Les étranglemens extraordinaires
fçavoir , ceux quifont formés par le fac herniaire
, leurs differences , leurs cauſes , leurs
fymptômes & leurs fignes ; moyens d'y remedier
, procedés differens dans les Opérations
qui leur conviennent .
12. Les étranglemens formés par l'Epiploon,
par l'interpofition des parties entre les mufcles,
par l'inteftin même, par des playes dans
l'intérieur du ventre, par celles du diaphragme
& par des adhérences particulieres de certaines
parties, qui font des ponts, des arcades
& des pertuis , qui étranglent les boyaux.
13. Les étranglemens caufés par des corps
étrangers,comme des os de differens animaux,
des noyaux & d'autres matieres dures & fpongieufes
, ou par des poches vermineufes, & c.
14. Les tems d'operer ; cas où il faut opé
rer promptement , cas où l'on peut differer
les Opérations.
15. Les Hernies avec pourriture, differens
degrés de pourriture.
C 16.
2820 MERCURE DE FRANCE
16. Moyens differens que l'Opération par
l'Inftrument tranchant fournit pour remedier
aux Hernies avec pourriture.
17. Les Hernies avec adhérences ; differences
des adhérences , leurs cauſes , leurs
fymptômes , leurs fignes.
18. Moyens de remedier aux Hernies avec
adhérences par l'Opération du Taxis, précautions
à prendre pour parvenir à cette fin.
19. Opérations qui conviennent à l'adhérence
glutineufe , & à l'adhérence fibreuſe .
20. Opérations qui conviennent à l'adhérence
charnue & à l'adhérence fongueuſe.
21. L'Epiplocele fans étranglement , ou
avec étranglement ; Epiploceles fchireufes
carcinomateuses , fupurées , &c. moyens d'y
remedier.
22. Le Volvulus ; fes effets , differentes pafhions
iliaques , expliquées fuivant leurs caufes.
23. Les Opérations qui conviennent à toutes
les efpeces de Hernies avec accidens.
24. Attentions convenables après les Opérations
; manieres de panfer differentes , fuivant
les differens cas qui fe préfentent pen
dant ou après l'Opération , les cas où il faut
fe fervir de la tente , de la pelotte , du bourdonet
& de la canule , raifons de préference
des uns ou des autres ; cas où il faut rejetter
tous ces moyens.

25. Les Opérations des Anciens pour les
Hernies habituelles.
26.
DECEMBRE. 1741 . 2821
26. Explication phyfique de la ductilité du
fer , que l'on doit employer pour la compofition
des Bandages ; façon de le bien forger ;
maniere de tourner les Bandages .
27.Démonftration de tous les differens Bandages
qui fervent à contenir les Defcentes .
28. Critique judicieufe & exacte des mauvais
Bandages , dont l'empirifme s'efforce
d'introduire l'ufage , par la voye des Journaux
& des Gazettes .
29. Aplication fur des Sujets vivans des
Bandages de toutes efpeces , apropriés à chaque
efpece de Defcente.
30. Poffibilité de la guérifon des Hernies ;
explication du méchanifme que la Nature
employe pour ces guérifons ; imitation de la
Nature par l'Art.
31. Remedes géneraux convenables pour
le foulagement ou pour la guérifon des Hernies.
32. Compofitions de Remedes particuliers
, & les plus recherchés pour ces maladies.
33. Les Hernies de la Veffie , leurs differences,
leurs cauſes, leurs fymptômes & leurs
fignes particuliers.
34. L'Hydrocele , fes differences , fes
caufes , fes accidens , fes fignes , moyens de
la traiter ou de la guérir par Pharmacie &
par Chirurgie.
Ciij 35.
2822 MERCURE DE FRANCE
35. Le Tefticule non defcendu, le Varicele;
le Sarcocele, le Pneumatocele, Remedes apropriés
à ces maladies , Opérations qui y con-
Viennent.
36. Les Hernies de la matrice, fon renversement,
fon relâchement, moyens d'y remedier.
37. Les maladies qui ont raport au dérangement
de la matrice & du vagin , comme
engorgement , duretés fchireufes & carcinomateufes
, ulceres , & particulierement les
fleurs blanches ; avec les moyens les plus méthodiques
de guérir ces peites défagréables
& fâcheufes.
38. Démonftration particuliere des Inftrumens
qui fervent aux Opérations convenables
aux Hernies avec accidens , & des Inftrumens
dont fe fervoient les Anciens pour les
Hernies habituelles.
39. 40. Ces dernieres Séances feront employées
à faire confulter ceux qui auront affifté
au Cours,fur les Sujets les plus importans
qu'ils auront remarqués dans les differentes
Leçons qui leur auront été faites.
Le Cours finira par une Differtation curieufe
& intereffante fur les Hermaphrodites.
La derniere demie heure de chaque Leçon ,'
qui durera deux heures , fera employée à repondre
aux objections que chacun jugera à
propos de faire fur les points qui auront été
expliqués.
LES
DECEMBRE . 1741. 2823
LES GRIFFES DU CHAT ,
Amufer ent Poëtique , à M. Desforges
Maillard , par le Solitaire Ambroise.
Toi , qui penfes fi joliment
Et qui fçais t'exprimer fi délicatement
Maillard , fouffre qu'un Solitaire
D'un Poëtique Monaftere
Vienne à ta Mufe offrir fes Vers ,
A cette Mufe agréable & poupine ,
Avec qui la raiſon badine ,
Et qui fe plaît aux tendres Airs.
Chés elle on ne voit point la rime
Avec des tons d'un ennuyeux fublime
Aller étourdir le Lecteur.
Belle image de la Nature ,
C'eſt une eau criſtalline & pure
Qui ſe gliffe aisément dans l'efprit , dans le coeur.
Ma Mufe ne fait de naître ,
que
Elle n'a point de tels apas ,
Mais ayant réfolu de te prendre pour Maître ,
A l'avenir que n'aura - t'elle pas ?
Elle a déja tenté de fuivre fon modele ;
Mais y réüffit-elle bien ?
Quoi qu'il en foit , la copie infidele
C iiij
A
1824 MERCURE DE FRANCE
A fon original ne gâta jamais rien .
Finis ton compliment après cette Sentence ,
Ma Mufe , & venons - en à la narration .
Daigne prêter attention ,
Desforges , j'ai touffé , j'ai craché, je commence.
Au tems que les bêtes parloient ,
Dit un ancien Roman , deux animaux vivoient
Dans la maifon d'un même Maître ;
L'un s'apelloit Cricrit , Chat de profeffion ;
L'autre étoit Singe , & fe nommoit Mion ;
Jamais fous même toît peut- être
On n'avoit va fi differente humeur.
La mouftache bien étirée ,
Cricrit dans fa robe fourée
Marchoit toujours en grave Sénateur;
Son ombre redoutable inſpiroit la terreur
Aux Rats de toute la contrée ;
Au contraire Mion avoit un air ailé ,
Il étoit jeune & du bel âge
Où l'on aime le badinage ,
Où l'on peut être impunément rufé.
Cent fois de Cricrit l'air fauvage
Et
pour
Par notre Singe fut gauffé.
Dans ces momens le grave Sire
Se rengorgeoit d'un air bigot ,
ne pas
Sourioit
, & ne diſoit
mot.
donner encore à rire ,
C'étoit
DECEMBRE 1741 2825
C'étoit pourtant avoir trop de prudence ;
Lorſqu'avec un railleur on garde le filence ,
Il va bien- tôt à l'indifcrétion ;
Envers lui fi vous êtes bon ,
A votre égard il devient pire ;
Cette jufte refléxion
Convient à ce que je vais dire.
Mion un jour fit cuire des Marons ;
C'étoit un rôt pour les deux Compagnons.
Cricrit , felon fon ordinaire ,
Autour du feu ne fe tourmentoit guere ,
Et laiffoit tout faire à Mion.
En attendant du rôt la parfaite cuiffon ,
Mion rioit de fon air debonnaire ,
Et de fa voix magiftrale & févere.
Ami
pourtant , ajoûta le railleur ,
Je t'eftime beaucoup , malgré la raillerie ,
Et toujours de mon tendre coeur
Tu confervas la plus chere partie .
A ce fuave compliment
Cricrit répondant gravement ,
Tire une patte douce , à Mion la préſente
Pour garant d'amitié conftante.
Singe , foyez poli , traitez -la doucement ;
Il le fera , n'en doutez nullement.
dit - il , belle pate , ma mie ,
Belle
pate ,
Cher gage de notre union ,
C v Pour2826
MERCURE DE FRANCE
Pourrois- tu de ce feu tirer quelque Maron ?
A l'inftant il l'éprouve... au diable l'autre crie;
Six fois on l'entend miauler ,
Il fait cinq ou fix fauts en l'air ,
Et fuivant le courroux dont fon ame eſt ſaiſie ,
D'un coup de pate
Du mufeau
il enleve un lambeau
De fon infolent Camarade.
Le Singe eft étourdi de ce coup vigoureux.
Il n'eft rien en effet qui foit plus rigoureux
Que de voir tout - à- coup fon nés en marmelade ;
Mais que vois-je ? déja notre Singe en fureur
Au Chat a déclaré la guerre ;
L'un contre l'autre exerce fa valeur ;
Et l'un par l'autre eft renversé par terre .
Courage, nouveaux champions ,
Vrais Emules des Mirmidons ,
Entre vous deux diſputez la victoire ;
De part & d'autre on voit courir la gloire ,
On voit mille actions d'un héroïque coeur ;
A la valeur fe joint la rage ,
Griffes & dents , tour eft mis en ufage ;
Enfin j'aperçois le vainqueur.
Mion fait mordre la pouffiere
Au Chat qu'il étouffe fous lui ,
Et fi Mion le veut , Cricrit voit aujourd'hui
Son heure fatale & derniere,
Afis
DECEMBRE. 1741. 2827
Afin pourtant que la défaite entiere
Refte profondément gravée en fon eſprit ,
Au malheureux il arrache
Les ongles & la mouftache.
Ah ! quel affront ! infortuné Cricrit ;
Les Chats te pourront-ils croire encor de leur race !
Et Ratapon , ce Chef des Rats ,
Qui te croyoit le plus brave des Chats ,
De ta douleur va fe mocquer en face.
Fuis , vas cacher dans le fond des Forêts
Le deshonneur de ta défaite ,
Et dans une obſcure retraite ,
Te nouriffant de tes regrets ,
Tu verras tes griffes recroître ,
Et ta moustache reparoître.
L'affront qu'il t'avoit fait au ſujet des Marons
Méritoit bien ta répartie ;
Mais le monde eft rempli de tant de fanfarons ,
Qui pour autrui de fiel ont la langue pêtrie ,
Qui ſe ſentant forts & puiffants ,
Veulent feuls attaquer les gens ,
Sans que contre eux on fe récrie ;
Vas donc , & fi jamais tu veux à l'avenir
Dans le grand Monde revenir
Cherche plus fûre compagnie.
>
Cvj LET2828
MERCURE DE FRANCE
hhhhhhtt ***
LETTRE écrite à M. L. L. B. au fujet du
Canton de Landevenec , en Bretagne.
V
Ous nous avez fait part , M. dans le
Mercure d'Avril 1738. d'un endroit de
la Vie manufcrite de Saint Guingalois, Abbé
de Landevenec , au Pays de Cornouaille ,
dans lequel l'Auteur affûre qu'il y avoit un
petit Canton de terre à ce Landenevec où
l'on ne mouroit point ; qu'on y vieilliſſoit
feulement , & que les Religieux ennuyés de
vivre trop long tems , firent transferer le Monaftere
dans un endroit plus proche de la
Mer , où ils moururent fuivant le cours ordinaire
de la Nature .
>
C'eft grand dommage que l'on ait oublié
la fituation d'un Canton fi falutaire : fi on
étoit affés heureux pour le reconnoître , &
qu'il eût en effet la proprieté de rendre fes
habitans immortels il feroit fans doute
bien peuplé ; on y viendroit de toutes parts ;
il ne fuffiroit pas pour contenir tous ceux
qui voudroient y demeurer ; il n'y auroit
guere de fes habitans qui s'ennuyaflent de
vivre , & qui fongeaflent à changer de demeure
, comme les premiers Religieux de
Landevencc.
Auffi
DECEMBRE .
2829
1741 .
Auffi M. avez vous invité M. Desforges-
Maillard à nous découvrir ce Canton fortuné,
& cela m'a paru fi intéreffant que j'efperois
qu'il nous viendroit du même Pays quelque
éclairciffement fur ce fujet : cependant
jufqu'ici on n'en a point de nouvelles.
Je m'étois imaginé que l'immortalité prétendue
dont parle votre Hiftorien , n'étoit
fondée que fur quelque allufion que l'on
auroit faite à l'étimologie du nom de l'Abbaye
, que Landevenec en langage Celtique
ou bas Breton fignifioit peut-être une terre
immortelle ou toujours vivante , pour dire
une terre qui raporteroit tous les ans fans fe
repofer : en effet Lande, en Langage Celtique
fignific terre , mais la fuite ne répond pas à
l'idée que j'avois eû , car ayant confulté le
Dictionaire François Celtique ou Françoisbas
- Breton , compofé par le P. F. Gregoire
de Roftrenen , Prêtre & Prédicateur Capucin
, imprimé à Rennes en 1732. j'ai trouvé
que Land ou Lant fignifie Eglife ; que Teven
fignific Côte de la Mer ; & que le mot
entier Landevenecq , qui eft un mot compofé
& le même que le nom de notre Abbaye
, fignifie une Eglife ou Abbaye en Lieu
expofé au Soleil près de la Mer. En effet
l'Abbaye de Landevenec eft fituée au bord
de la Baye de Breft, au Sud- Ouest de la Mer.
Il fe pourroit faire que le lieu où auroit
d'abord
2830 MERCURE DE FRANCE
d'abord été bâtie cette Abbaye , fut dans
une meilleure expofition ; que l'on y vécût
plus long-tems qu'ailleurs , & que cela eût
donné lieu à votre Hiftorien de dire qu'on
n'y mouroit point.
Mais on ne trouve aucun veftige de la
prétenduë tranflation de cette Abbaye' : on
trouve au contraire qu'elle fut fondée fur le
bord de la Mer dans le même Lieu où elle
eft à préfent , par Wallon ou Grallon Comte
de Cornouaille l'an 405. Epoque bien antérieure
à celle que vous donnez à l'Hiftoire
de Saint Guingualois , qui ne vous paroît que
du neuvième Siècle : ceux qui demeuroient
dans cette Abbaye dans les premiers tems
de fa fondation , n'étoient pas plus immortels
que ceux qui leur ont fuccedé , puifqu'on
y voit encore le tombeau du Fondateur,
que Saint Guingualois & Saint Guenaut,
qui furent les deux premiers Abbés de cette
Abbaye, y moururent, & qu'on y a confervé
leurs Reliques jufqu'au tems des guerres des
Normans , où le corps de Saint Guingualois
fut porté au Monaftere de Blandin à Gand
& celui de Saint Guenaut à Corbeil.
On me fçauroit fans doute meilleur gré fi
j'avois découvert le Canton dont parle votre
Hiftorien , mais l'honneur d'une telle découverte
apartient aux perlonnes du Pays ; ce
n'eft pas d'aujourd'hui que les hommes fe
font
DECEMBRE. 1741. 2834
font flaté de pareilles idées. Nous lifons
dans l'Hiftoire ancienne que des Bergers
d'Arcadie s'imaginant qu'on ne mouroit dans
leur Pays qu'à caufe de quelque intemperie
de l'air , & qu'il y avoit d'autres Pays où l'on
ne mouroit point , en parcoururent pluheurs
, & s'arrêterent enfin en Egypte : la
beauté du Pays & fa fertilité leur fit croire
qu'on ne devoit point y mourir , mais ils furent
bien-tôt détrompés par les Piramides &
les autres Monumens , dont les Inſcriptions
& les Hieroglifes leur aprirent que c'étoit la
Sepulture des perfonnes les plus diftinguées
qui étoient mortes dans ce même pays.
Ce que votre Hiftorien dit de l'ancien
Landevenec pourroit être fondé fur quelque
jeu de mots , femblable à celui que j'ai entendu
faire fur une des rues de la Ville de
Rheims , qu'on apelle la rue des Immortels.
Un Archevêque de cette Ville paſſant un
jour dans cette ruë , s'étonna que portant un
fi beau nom , elle fût une des moins peuplées
de la ville , & demanda l'origine de ce
nom fingulier , on lui dit qu'elle venoit de
ce que cette ruë n'eft habitée que par des
gens fi pauvres , que dès qu'ils font malades
ils vont à l'Hôtel Dieu , enforte que communément
on ne voit mourir perfonne dans
cette ruë.
C'est donc bien inutilement que l'on chercheroit
2832 MERCURE DE FRANCE
cheroit ces Pays fabuleux où l'on ne meurt
point ; mais on pourroit du moins s'attacher
à connoître quels font les Pays où l'air eft le
plus pur & où les hommes vivent le plus
long- tems ; car il eft conftant qu'il y a des
Pays où les hommes vivent bien plus que,
dans d'autres , & il fe pourroit faire qu'il y
cût en Bretagne quelque petit Canton , où
l'air fût meilleur que dans le refte de la Province
, & que votre Hiftorien auroit fondé
là-deffus ce qu'il dit de Landevenec.
Il y a une petite Province de France , dont
l'air eft marécageux & froid , où l'on ne vit
communément que 40. ou 50. ans , comme
ailleurs on vit 70. ou 80. ans . On a auffi remarqué
que dans les Pays froids , les hommes
vivent plus long tems que dans les Pays
chauds . M. Rudbecks , Profeffeur en l'Univerfité
d'Upfale , dit dans fon Atlantica que
dans les Regiftres de 12. Paroifles de Suede
des 73. premieres années du fiécle précedent
on avoit trouvé des actes baptiftaires &
mortuaires qui juftifioient qu'il y avoit eû
232. perfonnes dont la moins âgée avoit vécu
90. ans , d'autres étoient parvenues juſqu'à
140. & deux dont l'une avoit vécu 156. ans,
l'autte 240. ans & avoit vû juſqu'à la ſeptiéme
génération .
On a regardé dans le tems ce récit.comme
fabuleux , cependant nous avons des
exemples
DECEMBRE. 1741 2833
exemples certains de gens qui ont vécu prefque
autant. On a raporté dans le Mercure de
Mars 1741. la mort d'une femme décedée à
Paris , qui avoit vécu 134 ans. Dans le Mercure
du mois de Stepembre dernier , on rapelle
l'exemple de Thomas Par qui mourut à
Londres âgé de 152. ans ; ces faits ont été
bien averés.
Joan. Ravifius Textor p. 171 v° . de fon
Officina,raporte une foule d'exemples de perfonnes
, autres que les Patriarches , qui ont
vêcu 100. 120. 150 ans , même quelquesunes
jufqu'à 400. ans .
On a auffi raporté dans un Mercure du
mois de Septembre 1687. tom . 1. qu'il avoit
paffé depuis peu à Venife un homme qui fe
difoit âgé de 400. ans , il montroit fon
portrait qu'il difoit avoir été fait par le
Titien ; mais cette preuve ne parut pas
fuffifante ; car le Titien étoit né en 1477. &
eft mort en 1576. Il n'y avoit alors que trois
ans depuis fon décès ; le point étoit donc
de fçavoir quel âge avoit cet homme lorfque
l'on avoit fait fon portrait ; d'ailleurs
étoit-il certain que ce portrait fût du Titien ,
& que ce fût le portrait de celui qui fe l'attribuoit
? ce pouvoit être le portrait de quelque
perfonne qui lui reſſembloit ; auffi ſon
âge fut- il contefté & avec raiſon . Je crois
donc, M. que pour nous confoler de n'avoir
P
1834 MERCURE DE FRANCE
pû trouver l'ancien Landevenec , nous de
vons nous contenter des exemples précedens
de gens qui ont vécu jufqu'à 150. ans &
plus. J'ai l'honneur d'être &c .

A Paris le 4. Decembre 1741 .
VERS envoyés à M. Madin par M. B.... aut
Sujet du Bouquet preſené à S. E. M le
Cardinal DE FLEURY , le 30. Novembre
1741 .
M Adin , que tu fçais bien par tes tendres accords
Du coeur & de l'eſprit émouvoir les refforts !
Tes tours brillants , heureux , tes aimables faillies
N'apartiennent qu'à ces génies
Qu'Apollon fauve de l'oubli.
Dans tes divins tranfports , dans tes nobles idées ,
Qui foutenus de l'Art dirigent tes penſées ,
On croit entendre encore & Lalande & Lully.
SUPLEMENT
DECEMBRE . 1741. 2835
SUPLEMENT à ce qui a été dit dans le
Mercure de Septembre dernier , au Sujet de
l'Ordre des Chartreux . LETTRE de M..
D. L. R. au R. P. M. Texte Dominicain.
E fçavois bien , M. R. P. que vous aplaudiríez
à l'Eloge du Saint Ordre des Chartreux
, que j'ai raporté à la fin de mes petites
obfervations fur votre Differtation imprimée
dans le Mercure de Juin dernier , & à ce
que j'ai ajoûté du mien à cer Eloge , mais je
ne m'attendois pas à une espece de critique
fur ce même fujet , fi on peut donner ce
nom à ce que la profonde humilité , & l'extrême
modeftie de nos aimables Solitaires
de la Chartreuse de Paris , leur ont infpiré de
me dire , après avoir lû l'Eloge en queftion,
Vous en jugerez , M. R. P. par les termes d'une
Lettre que je reçûs peu de jours après du
Vénerable D. Á. L. M. mon Ami particulier,
& que vous connoiffez.
» Nous avons lû avec édification tout ce
» que vous avez inferé dans le dernier Mer-
» cure à la loüange de notre Ordre: vous avez
>> vous même rencheri , en ajoûtant ce que
>> l'eftime que vous avez pour nous vous a
» inſpiré de publier. Nous ne fçaurions trop
rendre
2836 MERCURE DE FRANCE
»
»rendre graces à Dieu des bénédictions qu'il
>> repand fur nous : mais n'en avez - vous point
trop dit ? Car de quelque édification que
>> nous foyons aux Gens du Monde , nous
>> nous fentons bien indignes des Eloges que
>> nous venons de lire , & nous aurions une
» extrême répugnance à ratifier tous les Arti-
>> cles qui font contenus dans les deux pages
de votre Livre .
» Le R. Boniface Fevrier , que vous citez
» à la fin , ne s'apelle point parmi nous Fe-
» vrier , mais Ferrier . Il étoit frere de Saint
»Vincent Ferrier , recommandable par fa
» fcience & par fa pieté.
J'ai bien remercié,M R. P. notre reſpectable
Ami de fon avertiffement fur la faute
qui s'eft effectivement gliffée en écrivant le
nom de cet Illuftre Géneral , d'après un manufcrit
affés difficile à lire ; mais la faute eft
déja réparée , & le fera encore mieux avant
que je finiffe cette Lettre .
Comme je la deftine toute à m'entretenir
avec vous fur ce même Ordre que nous aimons
également, je commencerai après avoir
parlé des Chartreux en genéral , de vous parler
des CHARTREUSES ; car vous fçavez qu'il y
a auffi des Religieufes de ce nom & de cet
Inftitut , ce que bien des gens ignorent , &
encore plus les prérogatives fingulieres qui
lui font attachées : voici d'abord , M. R. P.
pour
DECEMBRE . 1741 2837
Pour entamer la matiére , un Mémoire tiré
des Archives de l'Archevêché de Lyon , lequel
me fut envoyé dans le tems ; vous le
trouverez également curieux & édifiant.
SACRE de fept Religieufes fait en même tems,
Ceremonie qui ne fe pratique que dans le
Monaftere de Filles de l'Ordre des Chartreux
.
Au commencement de l'année 1709. M.
Claude de Saint George , Comte & Archevêque
de Lyon , fe tranfporta à Salettes en
Dauphiné , Monaftere de Filles de l'Ordre
des Chartreux , fitué dans la partie de fon
-Diocèfe , qui eft dans le Dauphiné , pour y
facrer fept Religieufes. C'eft une Céremonie
particuliere aux Religieufes de cet Ordre
, & qu'on ne pratique à leur égard qu'après
fept ou huit années de Profeffion. Cette
Cerémonie eft fort belle & doit toûjours
être faite par un Evêque ; on attend pour la
faire qu'il y ait plufieurs Religieufes , qui
foient dans le cas requis . Il y en a eû en dernier
lieu fept de facrées , parmi lesquelles
s'eft trouvée Madame de Mailla , fille de M.
Je Comte de Mailla , Chef de l'Illuſtre Maifon
de Moyria , dont M. le Chevalier de
Châtillon, Brigadier des Armées du Roy , &
Colonel des Carabiniers , eft auffi ; & Madame
Broffart , de la Ville de Bourg en Breffe.
Au
838 MERCURE DE FRANCE
Au milieu de la Céremonie il faut faire un
Difcours , auquel ce Prélat ne s'attendoit
pas , parce qu'on ne l'avertit , qu'à un endroit
du Céremonial , qu'il y étoit porté que
l'Evêque Officiant devoit faire un Difcours
aux Religieufes , fur ce qui donnoit lieu à la
Céremonic ; M. l'Archevêque le fit fur le
champ avec beaucoup de dignité & donc
tion.
On met aux Religieuſes que l'on facre
l'Etole & le Manipule , & on leur donne le
droit de chanter l'Epître à la Meffe ; on leur
met des couronnes fur la tête , & on fait
d'autres Céremonies toutes très - édifiantes ,
& qui portent avec elles de précieux veſtiges
d'antiquité , & des preuves que ces Religieufes
repondent aux Diaconiſtes ou Diaconeffes
des premiers Siècles de l'Eglife , établies
par les Apôtres.
Au commencement,elles ne faifoient Profeffion
qu'à l'âge de 60. ans, en recevant avec le
Voile la Bénédiction de l'Evêque par l'impofition
des mains , ce qui n'étoit cependant
à leur égard qu'une pieufe cérémonie , &
non un Ordre . Le Concile de Calcedoine
fixa depuis leur âge à 40. ans . Elles étoient
principalement établies pour rendre ſervice
aux perfonnes de leur fexe . On les préfentoit
, de même que les Religieufes dont il
eft ici queftion , à l'Evêque devant le Sanctuaire
DECEMBRE.
1741. 2839
tuaire , ayant un petit manteau couvrant le
col & les épaules , qu'on nomme Maſorium;
& après la Priere , qui commence par
ces mots , La grace de Dien , la nouvelle
Confacrée fait une inclination de tête fans
fléchir le genoüil.
L'Evêque lui impoſe enſuite les mains , &
fait la Priere ordinaire . Cette céremonie fe
fait encore aujourd'hui dans l'Eglife de Milan
, où il y a des Matrones qu'on nomme
Vetulones , qui portent du pain & du vin
pour le Sacrifice à l'Offertoire de la Meffe ,
laquelle on chante felon le Rite Ambrofien..
M. l'Archevêque de Lyon avoit été prié de
faire cette céremonie par le R. P. Dom de
la Tournelle , aujourd'hui Prieur de la Chartreuſe
de Seillon , près de Bourg , dont le
frere a époufé Mlle de Chemé , niece de ce
Prélat. Il y fut accompagné d'un grand nombre
d'Eccléfiaftiques de fon Clergé , entr'au
tres de M. le Comte de Chemé fon neveu.
L'Archevêque, avec toute la fuite, fut régalé
magnifiquement par la Communauté de Salettes
, qui lui préfenta divers ouvrages de
la façon des Religieufes, qu'il reçut très gracieuſement.
Je voudrois bien, M. R. P. pouvoir à cette
occaſion ajoûter ici quelque chofe au fujet
des Religieufes Chartreufe . J'ai fait quelques
recherches à cette intention , j'ai auffi confulté
840 MERCURE DE FRANCE
fulté nos Amis de la Chartreufe ; mais att
bout de ces recherches , je ne trouve point
leur origine , ou l'époque certaine de leur
Inftitution. Il paroît cependant que le premier
Monaftere de Chartreufes a été fondé du
vivant du Bienheureux Guigues V. General
de l'Ordre ; car dans le dénombrement des
Maiſons de cet Ordre , qui eft inferé à la fin
des Statuts imprimés fous le V. Géneral Dom
François Dignoy l'an 1150. on trouve le
Monaftere des Religieufes Chartreufes de
Bertaud, fondé en l'année 1116. lequel ne
fubfifte plus, non plus que ceux de Prebaïon,
de Polette , de Souribes , de Ramiere , ou
Ramires , de Pervalon , & de Sallobrand
auffi fondés pour des Chartreuſes. Ce dernier
étoit fitué en Provence , Diocèse de
Frejus , & avoit eû pour Fondateur l'an
1320. Elies de Villeneuve, Grand Maître des
Chevaliers de Rhodes : Ste Rofaline, fa foeur,
s'y fit Religieufe , & y fut inhumée . Son
corps s'eft confervé fans aucune corruption
jufqu'à préfent. Il eft en la poffeffion des
Religieux de l'Etroite Obfervance de S.François
, à qui ce Monaftere a été cedé dans le
xv. fiécle.
Je me fouviens , M. R. P. d'avoir vû dans
ma jeuneſſe une très belle Figure en cire de
cette illuftre & fainte Fille , de grandeur naturelle,
& d'une fort bonne main, dans la Bibliothéque
DECEMBRE. 1741. 2841
bliothéque de la Chartreufe de Marfeille ,
placée dans une niche , ordinairement fermée
, laquelle avoit été faite & aportée par
les foins du V. D. Cofter , alors Prieur de
cette Chartreuse , & Vititeur , lequel conjointement
avec Dom Jean - Baptifte Berger ,
Parifien, ci-devant Prieur à Marseille , puis à
Villeneuve d'Avignon , & Vifiteur , a jetté
les premiers fondemens des Bâtimens , continués
par leurs foins , & depuis achevés, qui
rendent aujourd'hui cette Chartreuse , l'une
des plus confiderables . du Royaume. Vous
en pouvez juger , M.R. P. par le Frontispice
de l'Eglife , dont on m'a depuis peu envoyé
le Plan , que j'ai eu l'honneur de vous
communiquer.

Je crois que cette belle Eglife doit fon
entiere perfection au V. Dom N. Venier
qui étoit Prieur ,lorfque je partis pour la Paleftine
, & à qui je dédiai mon Voyage particulier
du Mont- Liban , que je lui préfentai
à mon retour. Je ne dois pas oublier que
cette Eglife & les principaux Edifices , ont
été conftruits fur les Deffeins du fameux
Pierre Puget de Marſeille , auffi grand Architecte
, que bon Peintre , & excellent Sculpteur.
us!

Revenons , s'il vous plaît , à nos Religieu-
Les Chartreufes, defquelles il n'y a plus préfentement
que cinq Monafteres , dont voici
XII. Vol. D les
2842 MERCURE DE FRANCE
les noms. 1. Premol , à deux lieuës de Grenoble
, fondé l'an 1234. par Béatrix de
Montferrat , époufe du Dauphin André.
2. Melun , dans le Fauffigny , en Savoye ,
Diocèse de Geneve , fondé en 1288. 3. Salette
, fur le bord du Rhône , dans la Baronie
de la Tour , fondé par le Dauphin Humbert
I. Anne , fon époufe , & Jean , leur fils,
l'an 1299. Marie de Viennois , auffi leur
fille , s'y fit Religieufe , & en fut Prieure .
4. Gofné, Diocèle d'Arras , fondé par l'Evê
que Thierri Heriffon en 1308. 5. Et Bruges,
fondé en 1344.
J'omets , M. R. P. les anciennes Obfervances
& la Difcipline de ces Religieufes ,
auffi incertainement connues que leur origine
, pour vous dire qu'aujourd'hui toutes les
Chartreufes fe conforment en toutes chofes
aux Religieux de ce faint Ordre , tant pour
POffice Divin , les Rits & les Céremonies
de l'Eglife , que les abftinences, les jeûnes , le
filence & les autres auftérités , excepté
qu'elles mangent toujours en commun foir
& matin , & jamais en particulier.
Avant le Concile de Trente, elles faifoient
Profeffion à l'âge de 12. ans , & alloient au
Spatiément avec les Chartreux , leurs Directeurs
, & les Convers. Le nombre des Reli
gieufes étoit fixé dans chaque Maifon . Elles
me prenoient point de dot , & ne recevoiens
DECEMBRE. 1741. 2843
de Filles qu'autant que les revenus de la
Maifon fuffifoient à leur entretien ; mais préfentement
elles reçoivent des dots , ne forrent
plus de leur clôture pour aller au Spatiement
, & ne font point Profellion avant l'âge
dė 16. ans.
Comme les Chartreux ont toujours confervé
les anciennes pratiques de l'Eglife , les
Religieufes de cet Ordre ont auffi confervé
jufqu'à préfent l'ancienne Confecration
des Vierges qui fe fait en la maniere prefcrite
dans les anciens Pontificaux: elles ne la
reçoivent qu'à l'âge de 25 ans , confervant
toujours le Voile blanc jufqu'à ce tems là.
Cette Confecration fe fait par l'Evêque , qui
leur donne l'Etole , le Manipule & le Voile
noir , le Manipule s'attache au bras droit , &
l'Evêque en leur donnant cette Etole & ce
Manipule , prononce les mêmes paroles
qu'il dit à l'Ordination des Diacres & des
Soudiacres. Elles portent ces ornemens le
jour de leur Confecration , & à leur Année
de Jubilé , c'eft adire , quand elles ont so.
ans de Religion , & on les enterre avec les
mêmes ornemens.
Les Prieures & les Religieufes promettent
obéillance au Chapitre General de l'Ordre
& font obligées d'y envoyer tous les ans une
Lett reou Acte de leur promeffe d'obéiffance .
Outre cela , les Prieures font tenues d'obéir
Dij aux
2844 MERCURE DE FRANCE
Peres Vicaires, c'eſt - à dire, aux Directeurs de
leurs Maifons,mais les Religieufes & les Soeurs
Converfes promettent feulement obéillance à
la Prieure,quoique les unes & les autres faffent
leur Profeffion en la préſence du Vicaire, en le
nommant avec la Prieure , & qu'elles foient
obligées de lui obéir en toutes chofes , qui
font licites & raisonnables.
eux
}
Les Monafteres de ces Religieufes ont
leurs termes ou limites , auffi bien que
ceux des Religieux , au - delà defquels les
derniers Statuts défendent aux Vicaires &
aux Pricures , de, ces Monafteres de Filles ,
d'envoyer les Religieux qui demeurent chés
fans la permiffion du Chapitre Géneral.
Il y a ordinairement quatre ou cinq Religieux
, tant Prêtres que Convers , qui demeurent
avec le Vicaire des Religieufes.
S'il n'y a pas au refte un plus grand nombre
de Monafteres de Chartreufes , on doit l'attribuer
à la défenfe qui fut faite par les nouveaux
Statuts colligés par le Géneral D. Guil-
Jaume Rainaldi , l'an 1368. d'en recevoir
l'avenir , ou d'en incorporer à l'Ordre ceux qui
fubfiftoient alors étant aparemment à charge
aux Religieux . Cette défenfe fut encore inferée
dans la nouvelle Collection des Statuts
faite par le Géneral D. Bernard Garaffe , qui
fut publiée l'an 1581. lefquels Statuts font
préfentement en ufage dans l'Ordre, & ont
été
DECEMBRE. 1741.
2845
été confirmés par le Pape Innocent XI .
L'habillement de ces Religieufes confifte
en une Robe de drap bland liée d'une
Ceinture pareille à celle des Religienx , auffr
bien que la Cuculle ou Scapulaire , ayane
des bandes à côté. Ce qu'elles ont de particulier
, c'est qu'elles portent un Manteau
blanc . Leurs Voiles & leurs Guimpes fontfemblables
à ceux des autres Religieufes!
Elles ne parlent jamais aux Perfonnes fécu
lieres , fi proches parentes qu'elles puiffene
être que le Voile baiffé , & accompagnées
de la Prieure , ou d'une ou de deux autres
Religieufes. Quoiqu'elles doivent fe conformer
en toutes chofes aux Obfervances des
Religieux , on a néanmoins égard à la foi
bleffe de leur fexe ,per modérant principalement
la rigidité du filence , & la demeure
des Celultes.
Si le V. Pere Géneral Dom. Innocent Maf
fon avoit continué d'écrire les Annales de
fon Ordre , nous ferions mieux inftruits fur
l'origine des Religieufes Chartreufes , & fur
tour ce qui peut les regarder : il avoit pris làdeffus
un engagement particulier dans le premier
Volume de ces Annales qu'il publia en
l'année 1687 dont il y a eu ch 1703 une fe
conde édition . L'Auteur qui a écrit l'Hif
toire des Ordres Monaftiques Religieux &
Militaires , n'a donc pû dire que pou de
Diij chofe Cop &
2846 MERCURE DE FRANCE
chofe au fujer de ces Religieufes dans fot
v11. Tome, s'étant , dit- il , înutilement adreſſe
pour cela aux Religieux du même Ordre , qui
gardent un grandfilence fur tout ce qui les
regarde.
Je puis , M. R. P. dire à peu près la même
chofe des inftructions que j'ai demandées :
fur ce même fujet, lefquelles ne contiennent
que ce que vous allez voir , extrait d'une
Lettre qui m'a été écrite depuis peu de la
Chartreufe de Paris.
Il n'y a en tour que cinq Maifons , nous
étant expreffément défendu d'en introdui-
>> re d'autres à l'avenir , comme étant contraires
à la tranquillité. Héremitique de
>> notre Ordre. Ces Religieufes Solitaires
>> font les mêmes Voeux que nous , elles portent
le même Habit elles ont le même
» Chant , les mêmes aufterités , & le même
genre de vie , excepté qu'elles ne fortent
» point de leurs Monafteres , comme nous
» faifons tous les Lundis , pour aller au Spatiément.
Elles font les feules confacrées Dia-
>> coneffes ; il faut pour cela qu'elles ayent
» atteint l'âge de 25 ans , & comme il faut
» que l'Evêque Diocefain fe tranfporte à leur
» Maifon pour la Ceremonie de la Confé-
» cration , qui eft en tout femblable à celle
» des Hommes , on attend qu'il y en ait plu
» feurs qui foient dans le cas pour que l'Evê-
L » que
DECEMBRE. 1741 : 2847
>>
que
faffe toute l'Ordination dans un même
jour. Une Chartreuſe n'eft point contente
qu'elle n'ait été confacrée Diaconeffe : elle
" conferve précieuſement dans fa Celulle tous
» les ornemens qui lui ont fervi ce jour-là
» fçavoir , la Couronne , l'Etole , le Mani-
» pule , le Cierge , &c.
» Pour ce qui eft de D. Boniface Ferrier,
» notre xxvI . Géneral , il n'eft guere poffi-
» ble de vous en faire un long détail : on
» fçait qu'il entra parmi nous à l'âge de 41 .
» ans , en 1395. & qu'après fix ans de Pro-
» feffion, il fut élû Géneral le 2 3. Juin 1402 .
» Sa mort eft fixée au 27. Avril 1419. Voici
» ce qu'on a gravé au bas de fon Portrait
» dans la Carte Hiftorique des Géneraux de
>> notre Ordre.
XXVI . GEN. Bonifacius Ferrarii Hifpanus
Valenti. & S. Vincentii Ferrarii Germanus
Doctoris Gradum Ilerde adeptus , non femel
Magiftratum Valentia geffit . Miffus etiam ad
Regem folemnis. Deinde Carthus. factus
Profeffus Domus Porta Cali , 1402. Prior
Carthufia eligitur magnus Zelator Ordinis
multa fcripfit. Biblia patrio idiomate tranftulit.
Prafuit, VIII . Ann.
5 Cette Infeription porte comme vous
voyez , M. R. P. que ce pieux General ne
l'a été que pendant huit années. L'Auteur
Dij que
2848 MERCURE DE FRANCE
que j'ai cité ci- devant , & qui le nomme
Boniface Ferrier de Valois , nous aprend
qu'à l'occafion du grand Schifme d'Occident,
où l'Eglife partagée reconnut deux Papes ,
l'Ordre des Chartreux cut auffi deux Géneraux,
mais qu'après le Concile de Pife, tenu en
1410. comme toute l'Eglife réunie reconnut
pour fon feul Chef ALEXANDRE V. l'Ordre ,
dont nous parlons , fe réunit auffi , & après
l'édifiante renonciation de Dom Boniface
Ferrier , & de Dom Etienne Mâcon , tous
les Chartreux élûrent unanimement pour
Géneral , Dom Jean de Griffomont , Saxon
Prieur de la Chartreufe de Paris , ce qui rétablit
l'union dans ce faint Ordre .
Je comprens au refte parfaitement , M.
R. P. que ce faint Religieux étoit frere puifné
de S. Vincent Ferrier , Dominicain , Auteur
de la loüable coûtume de réciter l'AVE
MARIA au commencement des Sermons
comme vous l'avez prouvé dans une Differtation
imprimée dans le premier Volume du
Mercure de Juin 1735. au fujet d'un ancien
Jetton , dont la Légende eft , AVE MARIA
GRACIA PLENA autour d'un Ecuſſon à trois
Fleurs de Lys d'or fur un Champ d'Azur , réduite
à ce nombre myfterieux dans les Armes
de France , en l'honneur de la Sainte
Trinité , par le Roy Charles V. comme vous
Pavez démontré par la Charte de Fondation
du
DECEMBRE. 1741 2849
du Monaftere des Celeftins de la Ville de
Mantc dans leMercure de Mars 1740.Charte
dont vous avez fait l'heureufe découverte
fur le Lieu pour l'inftruction du Public , qui
fçaura à l'avenir que les Armes de France à
trois Fleurs de Lys , tirent leur origine d'um
Monument de pieté digne d'un Roy Très
Chrétien .
En finiffant , permettez -moi , M. R. P. der
relever ici la méprife qui eft échapée à l'Aus
teur de l'Hiftoire des Ordres Monaftiques,&c.-
lequel en parlantT.V11 . Part.5. Chas 2.de cet
illuftre Géneral , frere de S. Vincent Ferrier
le nomme , comme je l'ai déja dit , Boniface
Ferrier deValois. Il doit paroître extraordinai
re qu'un Espagnol porte un nom,ou furnom,,
tout- à- fait François , tel que celui de Valois
C'eft fans doute pour avoir mal lû , & en
core plus mal traduit le Lieu de fa naiffance,,
qui eft la Ville de Valence, en Efpagne, com--
me le difent les Hiftoriens Latins, & comme
porte l'Infcription dont il eft ci - devant parlé..
Bonifacius Ferrarii Hifpanus Valentinus, &c..
Je fuis avec refpect , M. R. P. &c.
A Paris le to. Décembre 1TAI!
D. Y. RES.
4850 MERCURE DE FRANCE
REFLEXIONS fur le peu d'attachement
qu'on doit avoir à la vie. Par M. de Pfal
Gentilhomme Angevin .
1.J E
Evdois un tribut à la Parque
J'y fonge fans m'épouvanter ,
Et d'un oeil fec je vois la Barque
Qui chés les Morts me doit porter.
2. Oüi , cheò ami , ſouvent j'y penſe
Et ris de l'erreur des Humains ,
Qui , follémënt , de opulence
Font leur bonheur ; que je les plains !
4. S'il eft un bonheur , il, confifte:
A me fuffire , à me paffer
Des biens dont l'Eternel m'affifté
Peu foucieux d'en entaffer.
Etre fans dette & fans litige ,
Et l'unique but où je tends ,
Et l'indigence ne m'afflige
Pour moi , ni pour mes defcendansi.
5. Vous qu'attache un Monde fragile ,
Quelle illufion vous féduit ?
Au plus brillant jour qui fe file
Succede une éternelle nuit,
DECEMBRE. 1741 , 2851
6. N'être plus depuis mille années
Ou venir de fubir le fort ,
Ce font les mêmes deſtinées
Pour les deux qu'a ravis la mort.
7. Une éternité commencée 141
Depuis le cours de deux mille ans
Eft à juste titre, censée
Commencer depuis deux inftans.
8. Que fervent donc cinq à fix luſtress
De plus accordés à nos voeux ?
A mourir plus ou moins illuftres
Et trop fouvent moins vertueux.
9. Je ne parle point d'un Dédaler :
De foins , de procès , d'embarras ,
Qu'à nos yeux ce bas Monde étale ,
Et qui nous fuit jufqu'au trépas..
JG
7
10. Je tais les maux de Phymenée,
Quand les noeuds en font mal formés , q
Et ceux qu'enfante une lignée
Qui vous hait & que vous aimezier
11. Perd- on une époufe fidèlle ,
De nos jours la félicité nos dit
G'eft une douleur éternelleb
Qui fuocede à la volupté,
D> vj
18,2
52 MERCURE DE FRANCE :
12. Ses vertus faifoient vos délices ,
Vous en étiez l'Adorateur ,
Elle n'eft plus, & vos fuplices.
Naiffent de ce même bonheur.
13. Du Célibar la folitude
Voit fur les pas marcher l'Ennuis,
L'Amour toujours par habitude ,
Mene Pimpofture avec lui.
14. Je fuprime les maladies
Où l'homme eft fujer tant qu'il vit
Les démences & les folies
affervit.. Où le Deftin nous af
15. Komets nos ténebreux ſyſtêmes ,
Et la nuit fombre où nous vivons ,
Jufqu'à nous ignorer nous- mêmes
Tant qu'ici- bas nous exiftons...
16. Telle eft de ces Lieux la peinture ;
Qui peut donc t'attacher , Mortel ?
Parcours à ton gré la Nature ,
Et m'y découvre un bien réel.:
17. Que l'équité ſoit notre guide
Par nos bienfaits comptons nos jours
Qu'Atropos enfuite décide
Stils doivent être longs au courts..
13
!
D'Angers le 23. Novembre 17413
C
DECEMBRE. 1741. 2893
QUESTION IMPORTANTE,
Fugée au Parlement. de Paris.
" UN
Ne mari & une femme fe font fait
une donation univerfelle réciproque
par contrat de mariage , en faveur du fur-
» vivant , avec pouvoir à l'un & à l'autre de
difpofer d'une fomme qui eft fixée . Faute
» de difpofition , cette fomme apartiendrat'elle
au conjoint furvivant , ou à l'heritier
» du prédecedé ?.
FATT
Par contrat de mariage du 4. Fevrier 1728 .
paflé entre François Bouillerot & Françoiſe
Raffard , il eft dit que ils fe fontfait , &fort
donation entrevifs , mutuelle , égale & réciproque
en la meilleure.forme que donation puiffe
avoir lien , fans efperance de la pouvoir par
la fuite révoquer directement ni indirectement ,
pour quelque caufe & prétention que ce foit, de
tous & chacuns les biens , meubles & immeubles
qui fe trouveront apartenir au premier, mourant
defdits futurs époux aujour de fon décès ,
àquelque fomme qu'ils fe trouvent monter 3.pour
par le furvivant d'eux faire jouir & diſpoſer
defdits
12844 MERCURE DE FRANCE
defdits biens du jour du décès du premier mou
rant , en pleine proprieté , comme bon luifemblera
, & de chofe à lui apartenante : à la re
ferve néanmoins de la part du futur époux de
Lafomme de 6000. liv . & de celle de la future
de la fomme de 5000 liv.dont ils entendent , chaeun
à leur égard avoir liberté de difpofer foit
par donation , teftament on autrement , en fa
veur de qui bon leur femblera , fous condition
expreffe de part d'autre , que lesdites fommes
dont les futurs époux fe réfervent la difpofition
, ne pourront être exigibles, prétendues ou
-demandées , foir pár leur heritiers naturels ou
telles autres perfonnes en faveur defquelles lefdites
difpofitions pourroient être faires , qu'après
le décés du furvivant des futurs époux..
qui en aura lajouiſance fa vie durant.
O
Le mari eft decedé le premier , fans avoir
difpof des 6000. 1. dont il s'étoit réfervé la
liberté de difpofer . Sa veuve s'eft miſe en
poffeffion de tous les biens & en a joui paifiblement
juſqu'à fon décès.
Après -fon décès le fieur Bouillerot frere du
défunt mari , a demandé au fieur Raffart héritier
de la défunte, la reftitution des 6000l.dont
le défunt s'étoit réfervé la liberté de difpofer.
-Par Sentence contradictoire du Châtelet
dù 24. Mai 1740. le fieur Bouillerot fut débouté
de fa demande.
Le fieur Bouillerot en interjetta apel , ce
qui
.
DECEMBRE. 1741. 2855
qui fit la matière d'une Inftance apointée en
la Grand-Chambre au raport de M. l'Abbé
Boucher.
On difoit pour l'apellant , que fuivant la
Loi fi mulier. cod. de jure dot. & la Loi fecundum.
C. de Contrah . & comm . ftip. la femme
s'étant refervée la faculté de tefter de moitié
de fa dot , & ne l'ayant point fait , c'est l'hé
ritier qui en profite ; que M. d'Olive liv. 3-
ch. 28. affûre que telfe eft la Jurifprudence
du Droit écrit , & qu'en toutes donations la
referve faite par le donateur apartient à fon
héritier..
Des conjoints ne peuvent s'avantager depuis
le mariage : or ne feroit- ce pas donner
atteinte à cette maxime , que d'accorder au
furvivant la réſerve dont le prédecedé n'auroit
pas difpofé ? Il arriveroit tous les jours
qu'un mari. &cune femme pour fe gratifier
Fun l'autre ne difpoferoicnt point , & par
là on retomberoit indirectement dans l'inconvenient
que l'on a voulu éviter.
Les Articles 22. & 23. de la Coutûme
d'Auvergne , affûrent dans ce cas les biens.
refervés aux héritiers du donateur. Tel eft le
fentiment de Dumoulin , de Ricard , de
Dupleffis.
C'eft auffi ce qui a été jugé par deux Arrêts,
l'un du 3 Avril 1648.raporté par Ricard
des donat. part. 3. cb. 1. n. 22. l'autre du 12 .
Août
1858 MERGURE DE FRANCE
Août 1678. raporté au Journal des Audiences..
i
L'Ordonnance du mois de Fevrier 1731 .
concernant les Donations dont l'Article 18 .
paroît contraire à cette Jurifprudence , eft
une Loi nouvelle qui ne peut avoir d'effet
rétroactif , ni par conféquent être apliquée à
ane Donation antérieure à cette Ordonmance!
}
De la part de l'intimé,au contraire on fou
tenoit que
les 6000, 1. apartenoient à l'héritier
du Donataire, ce que l'on établiffoit par deux
propofitions.
La premiere que la faculté ftipulée dans un
contrat de mariage de pouvoir difpofer d'une
certaine fomme, eft une condition & non ur
retranchement réel de la Donation..
Pour l'établir, on difoit que les contrats de
mariage font fufceptibles de toutes fortes de
claufes , pourvu qu'elles ne foient contraires
ni au bien public, ni aux bonnes moeurs : on
a toûjours regardé d'un ceil favorable les Do
nations mutuelles entre conjoints , & il y a
une grande difference entre ces Donations &
celles faites entré étrangers ,
La Coûtume de Bourbonnois, Art. 219. &
celle d'Auvergne, Article 25. permettent de
donner & retenir dans les Donations
faites entre conjoints par contrat de masiage.
Sement
DECEMBRE. 1741 2857
Semen , Commentateur de la Coûtume de
Bourbonnois ,& Bafmaiſon ſur celle d'Auverdécident
que ce qui a été réservé apartient
à l'héritier du Donataire.
gne ,
Les Auteurs & les Arrêts opofés par l'a
pellant font dans le cas de Donations faites
entre étrangers, ou entre conjoints , mais hors
-le contract de mariage.
En effet, Dumoulin fur l'Article 160. de la
C. de Paris , Auzanet art. 273. décident la
queftion en faveur de l'héritier du Donataire ,
& elle a été ainfi jugée par Arrêt du 20. Mai
1692. raporté au Journal des Audiences.
L'Ordonnance des Donations dont la dif
pofition eft conforme à cette Jurifprudence ,
n'eft point à cet égard introductive d'un
droit nouveau ; quand la Donation eft hors
le contrat de mariage ; elle veut que l'héri
tier. du Donateur profite feul de la réferve ;
mais fi la Donation eft entre conjoints & par
contrat de mariage , l'Ordonnance déclare
que c'eft l'héritier du Donataire qui profite.
de la réſerve ; diftinction qui eft fondée ſur
la faveur desDonations faites entre conjoints
par contrat de mariage
La feconde propofition de l'intimé étoit ↓
que les termes du contrat de mariage ne
permettoient pas de douter que l'intention
des conjoints en faifant cette réferve , avoit
été que l'héritier du Donataire en profitât
dans
1858 MERCURE DE FRANCE
dans le cas où le Donateur n'en auroit pas
difpofé.
La Donation eft de tous les biens apartenans
au prémourant au jour de fon décès.
Les 6000. I. en queftion faifoient partie des
biens du prédecedé: donc ils étoient compris
dans la Donation.
Lorſque les conjoints ont dit que les héritiers
naturels ou autres perfonnes , en faveur
de qui ils auroient difpofé de la réſerve , ne
pourroient la repérer qu'après le déceds du
furvivant , ils n'ont pas entendu que leurs
héritiers naturels fuffent indiftinctement propriétaires
de la réſerve , mais feulement dans
le cas où il y en auroit une difpofition à leur
profit, & que le furvivant en auroit l'ufufruit,
même en cas de difpofition , foit au profit des
héritiers naturels ou d'autres perfonnes.
Par Arrêt du 2. Septembre 1741. la Sen
rence du Châtelet a été confirmée . Ce qui juge
que dans les Donations faites entre conjoints
par contrat de mariage , la réſerve
apartient au Donataire ou à ſon héritier, lorfque
le Donateur n'en a pas difpofé.
ENIGME
DECEMBRE. 1741 .
ENIGM E.
Je fais de genre feminin
E
Belle ou laide , Lecteur , il ne t'importe guere
Je vais te parler fans miftere.
Prefque jamais je ne fuis dans ta main ,
Car l'indigence accompagné mon pere,
Et communément la mifere
Suit celui dont ma roüe exerce le deftin.
Il me pourfuit , & la richeffe
Par moi vient rarement terminer la détreffe.
Parfois pourtant , quand dans ces lieux
Où brillent les préfens de Flore ,
De rofes & d'aillets fon travail me décore ;
De mon fein il s'éleve un parfum gracieux ,
Qui lui fait un plaifir , même digne des Dieux.
Quand on me voit dans la Reine des Villes
J'offre à fes habitans des reffources utiles
2
Qui pour le goût flatent leur paffion ;
Et le mortel qui me fuit avec peine
Affés Couvent crie à perte d'haleine ,
Pour attirer l'occafion .
Homme ,ton fort me fait compaffion.
C'en eft affés , Lecteur , & je fuis trop commune
Four être encor voilée à ton eſprit :
-L
2880 MERCURE DE FRANCE
Si tu ne me tiens pas , tu chercheras fans fruit
Car je ne fuis pas la fortune .
Par M. Laffichard.
4
LOGO GRTPHE
L Ecteur , on me fait pour aprendre
Ce que l'on ne fçait point du tout.
Si tu défires me comprendre ,
J'ai douze pieds , prends- les de bout en bout,
Tu trouveras de quoi remplir ta bourſe ;
Un droit que paye le paffant :
Un Officier du Roy : fûre reffource
Lo:fque tu te vois fans argent ::
Un endroit poiffonneux : ce qu'on met fur la
table ;
Celui qui fait ce qui couvre ta peau :
Un mouvement peu charitable ;
C
Un fubtil animal , beaucoup plus laid que beau ;
Je te produis encor un homme ,
Tel que la Grece en porta ſept .
Chofe qu'on aime fort ; fruit meilleur que la
Pomme
Ce dont manque un ftupide , adieu , Lecteur c'eft
fait.
Bar M. Duchemin,
NOUS
DECEMBRE. 1741. 2861
NOUVELLES LITTERAIRES
DES BEAUX - ARTS, &c.
E GOUVERNEMENT ADMIRABLE , ou la
République des Abeilles , & lesmoyens
d'en tirer une grande utilité.
Gens virtutis , belli , pacis , laborifque perita
, nefcia quietis.
NOUVELLE EDITION vue, corrigée, e
augmentée confidérablement . Par M. J. S.1-
MON, Avocat en Parlement & Cenfeur
Royal. Avec plufieurs Planches & Figures en
taille douce, 1. vol. in - 12 . de 390. pages. A
Paris,ches Thibouft, Imprimeur du Roy , Place
de Cambrai, à la Renommée. M. DCCXLII.
Si on a jamais joint l'utile à l'agréable , on
peut dire qquuee c'eft dans l'ouvrage dont il
s'agit ici Ouvrage auquel le Public a fait
tout l'accueil & rendu toute la juftice qu'il
méritoit, la premiere fois qu'il a été imprimé
enHollande. L'Auteur acrû devoir lui pprroouver
& la reconnoiffance , & fon inclination
à le fervit utilement, en lui en procurant une
feconde Edition , plus exacte & plus correcte
que la premiere . Il l'a revuc, corrigée &
augmentée confidérablement de fes réfle
xians, & de fes recherches conformes auk
idées
862 MERCURE DE FRANCE
idées de Virgile, qu'il a foin de raporter pour
apuyer les fiennes. Il l'a enfin ornée de plu
fieurs Planches & Figures en taille - douce ,
fort bien gravées, néceffaires pour donner au
Lecteur une parfaite intelligence de ce Traité.
Il eft dedié à M. Languet de Gergy , Curé
de Saint Sulpice, & accompagné d'un Avertiffement
& d'une Préface , où il n'y a rien
d'inutile , & où tout eft digne d'une particuliere
attention.
Il paroît depuis peu deux Catalogues curieux
imprimés à Paris rue S. Jacques chés
Jacques Guerin, l'un eft un Catalogue des Livres,
pour la plûpart, des plus rares de laBiblio
théque du feu Maréchal d'Eftrées, qui avoient
été retirés de la vente qui s'en faifoit à l'Hôzel
de Louvois , rue de Richelieu , dans un
tems où tout le monde étoit à la campagne ,
& d'une grande quantité d'autres excellens
Livres, qui, dans la précipitation avec laquel
de le premier Catalogue avoit été fait , n'y
avoient , pû être inferés : l'autre Catalogue
eft celui des Eftampes choifies que ce Seigneur
avoit adquifes avec une trés- grande
recherche & un goût exquis ; on trouvera
dans ce dernier Catalogue une courte def
eription d'un Atlas formé de plus de 8000 .
Cartes Géographiques & Topographiques ,
mirées de toutes parts , & méthodiquemeric
arrangées ,
DECEMBRE. 1741. 2863
tems ,
arrangées , par Pays , par Royaumes , Etats.
& Provinces , dans foixante huit grands
porte-feuilles fuivis : ce recueil que ce Seigneur
regardoit comme néceſſaire à fon Etat
de Géneral , & de Politique, lui avoit coûté un
des foins , & des dépenfes confidérables.
On vendra outre cela , tout ce qui refte
des Médailles antiques & modernes , &
de Tableaux de Grand - Maîtres qui n'ont
point été expofés dans les ventes précedentes
. Cette vente fe fera à la Sale des Grands
Auguftins pour la commodité du Public ,
& commencera le 10. Janvier prochain
742.
LA CLEF des Pfeaumes , ou l'occafion
précife à laquelle ils ont été composés pour en
faciliter l'intelligence . Brochure in- 12 . à Paris
, chés J. B. Lamefle, pere, ruë de la vieille
Bouclcrie, à la Minerve , 1741 pp. 17.
MAXIMES & Réflexions Morales , traduites
de l'Anglois , avec une Traduction nouvelle
en Vers de l'Eſſai fur l'homme , de M.
Pope , par l'Auteur des Dons de Latone , à
Paris chés Ganeau , Libraire ruë Saint Jacques.
LE NOUVEAU PARFAIT MARE'CHAL , OU
à connoiffance génerale & univerfelle du
Cheval
2864 MERCURE DE FRANCE
I
Cheval , divifé en fix Traités. Le premier
traite de fa conftruction , le ſecond du Harras
, le troifiéme de l'Ecuyer & du harnois ,
le quatrième du Chirurgien & des Opérations
, le cinquième du Maréchal Ferrant , &
le fixiéme de l'Apoticaire ou des Remedes ,
avec un Dictionaire des Termes de Cavalerie
, le tout enrichi de 49. Figures en Taille
douce , par M. de Garfault , ci - devant Capitaine
en furvivance du Harras du Roy. Volu
me in-4 . chés le même Libraire & Compagnie.
COMPARAISONS MORALES , traduites de
l'Anglois , en Vers François , avec l'Amour
trompé. Brochure de 25. pages , chés le même
Libraire , par l'Auteur des Dons de Latone.
PETIT DICTIONAIRE FRANÇOIS , dont
l'ortographe eft prouvée par principes ; utile
à ceux qui lifent & qui écrivent, par M.Jacquier,
prix cinquante fols relié. 1. vol . in- 12.
de 474 pages, à Paris chés le Gras au Palais
la veuve Piffot, Quai de Conti , Briaſſon, ruë
Saint Jacques , & Chaubert , Quai des Auguftins.
M. Jacquier qui a déja publié plufieurs Ouvrages
utiles fur la Grammaire & fur l'Ortographe
Françoife , continue dans celui- ci de
nous
DECEMBRE. 1741. 2865
nous donner des preuves de fa capacité fur
cette matiére , & de fon zéle envers le Public
, furtout à l'égard des perfonnes qui
n'entendent que la Langue Françoife ; nous
exhortons ceux qui fe trouvent dans le
& qui veulent parler , lire & écrire correctement
, de faire ufage de ce Dictionaire , &
de lire avant toutes chofes la Préface inſtruc
tive & fenfée , qui eſt à la tête.
TRAITE' de la crûë des meubles au- deffus
de leur prifée , dans lequel on explique fon
origine & celle du Parifis des meubles , les
Pays où la crûe a lieu , leur differens ufages
fur fa quotité , quels meubles y font fujets ,
quelles perfonnes en doivent tenir compte ,
& plufieurs autres Queſtions qui naiffent de
cette matiére . Par M. Boucher d'Argis , Avocat
au Parlement. A Paris au Palais , chés
Bernard Brunet, fils, 1741. vol . in- 12, de 420.
pages.
Les Queſtions, auxquelles la crûë des meubles
donne lieu , fe préfentent dans tous les
Partages de fucceffion ,Comptes de Communauté,
de Tutele , de Don mutuel , & autres
cas femblables. Souvent on alloüe , ou on
conteſte la crûë mal à propos , faute de connoître
les principes de cette matiére , qui
jufqu'ici n'avoit encore été traitée par aucun
Auteur.
II. Vol. E
2866 MERCURE DE FRANCE
On confond fouvent le Parifis des meubles
avec la crûe , cependant ce n'eft pas toûjours
la même chofe ; la crûe eft le genre , & le
Parifis une de fes efpeces . Le Parifis en géneral
fe prend pour toute augmentation du
quart en fus. Ce qui vient de ce que autrefois
la monnoye furnommée Parifis, qui étoit
frapée à Paris , valoit un quart en-fus , plus
que la monnoye apellée Tournois , que l'on
fabriquoit à Tours.
La crûe des meubles eft communément
d'un quart au deffus de la prifée portée
par l'inventaire , c'eft ce qui lui a fait
donner le nom de Parifis . Mais ce nom ne lui
convient pas toûjours ; car elle n'eft pas partout
du quart en fus : en quelques Endroits ,
elle n'eft que du demi Parifis , en d'autres,
de trois fols pour livre ; fa quotité dépend
de l'ufage des Lieux .
C'est pourquoi on a examiné quels font les
Pays où la crûe a lieu , & les progrès de la
Jurifprudence fur cette matiére. La crûë a
lieu dans la plus grande partie du Royaume ,
& principalement dans les Pays coutumiers ;
il y a cependant quelques coutumes où elle
n'eft point admife , comme celle d'Artois ,
celle de Blois & c. Ce qui donne lieu à une
Queſtion mixte des plus difficiles, qui eft de
fçavoir quelle Loi doit régler la crûë ; fi
c'eft la Loi du Lieu , où le défunt eft décedé ,
DECEMBRE. 1741 2867
1
fi c'eft celle de chaque Lieu où il fe trouve
des meubles, ou fi c'eſt celle du Lieu où réfident
les Officiers qui ont fait l'Inventaire , ou
enfin fi c'eft la Loi du Lieu où les meubles
font inventories,
Il eft auffi important de diftinguer les differentes
formes de prifées , celles qui font à
bas prix , d'avec celles qui font à jufte valeur
ou reputées telles ; les meubles qui font.
fujets à crûë , de ceux qui en font exempts :
c'eft à quoi fouvent on ne fait pas attention;
la plupart des Praticiens ne connoiffent pour
être de ce genre que la yaiffelle d'argent ; il
y a cependant plufieurs autres fortes de meubles
, qui ne font point fujets à crûë , tels '
que les meubles qui ont dû être confervés en
nature , cux qui ont une valeur certaine
comme les gros fruits , le fel , les glaces , &
autres femblables.
Toutes fortes de perſonnes qui font chargées
de meubles inventories , ne font pas
obligées de tenir compte de la crûë : ce fuplément
de valeur eft une efpece de dédommagement
, qui n'eft dû que par ceux qui
n'ont pas fait vendre les meubles périffables ,
ou qui ne repréfentent pas en nature & en
bon état ceux qu'ils étoient obligés de conferver.
Pour mieux expliquer les cas dans lefquels
la crûe a lieu , on a examiné la Queftion
par raport à tous ceux qui ſe trouvent
chargés E ij
2868 MERCURE DE FRANCE

chargés de meubles inventoriés , tels que
font les Tuteurs , Curateurs & autres Adminiftrateurs
, le furvivant des conjoints , le
Donataire mutuel , les Héritiers , Légataires ,
Exécuteurs teftamentaires , Curateurs aux
biens vacans, les Gardiens , Sequeftres, Commiffaires
& c.
L'Auteur a auffi examiné fi ceux qui n'ont
pas fait vendre les meubles , ou qui ne les repréfentent
pas , en font toûjours quittes pour
tenir compte de la prifée avec la crûë ; en
quel cas & de quel jours les interêts en font
dûs ; il a raporté les Arrêts qui ont jugé quelque
Queftion du reffort de cette matiére ; &
ce que les Commentateurs des Coutûmes en
ont dit; il en a même réfuté quelques - uns
qui ont attefté des ufages qui n'ont jamais
été observés .
Enfin on trouvera à la fuite de ce Traité
un Extrait des Ordonnances , Edits , Déclarations
, & autres Réglemens concernans la
forme des Pfifées,
TRAITE ou Differtations fur plufieurs
matiéres Féodales , tant pour le Pays' Coûtumier
que pour les Pays de Droit Ecrit ,
troifiéme partie , contenant 1 ° . les Obfervations
fur le Démembremenr & Jeu de Fief
pour toutes les Coûtumes , autres que la
Coûtume de Paris & les femblables. 2 °.
Une
DECEMBRE . 1741. 2869.
Une Differtation fur le Parage , foit légal, foit
conventionnel. 3 °. Les Obfervations fur les
Droits de Quint & de Lods & Ventes de tous
Contrats qui peuvent les produire Par M.
Germain-Antoine Guyot , Avocat au Parlement
, à Paris , chés Saugrain , fils , Grand-
Sale du Palais 1741. volume in-4° . de 634%
pages.
Nous avons donné l'Extrait de la premiere
partie de cet Ouvrage dans le Mercure de
Novembre 1739. & celle de la feconde partie
dans celui de Janvier 1740. La troifiémě
partie qui vient de paroître depuis quelques
jours , eft compofée comme les précedentes ,
de plufieurs Traités particuliers ou Differtations
détachées , fur differentes parties de la
matiére des Fiefs, que l'Auteur donne au Public
à mesure qu'elles fe trouvent prêtes ,
fans s'affujettir à aucun ordre pour l'Edition
de ces differens Traités. Le ftile de cette troifiéme
partie eft auifi le même que celui des
précedentes.
La premiere Differtation eft fur le Démembrement
& Jeu de Fief; l'Auteur en
avoit déja parlé dans la premiere partie de
fon Ouvrage , mais feulement par raport à la
Coûtume de Paris ; c'eft pourquoi il reprend
ici la même matiére & la traite par raport
aux autres Coûtumes , après quelques Obfervations
fur le Démembrement & Jeu de
E iij Fict
"
2870 MERCURE DE FRANCE
Fief en géneral ; l'Auteur entre dans le détail
des difpofitions des differentes Coûtumes à
ce fujet , & les difcute chacune en particulier
, ainfi que ce que leurs Commentateurs
& autres Auteurs en ont dit.
La feconde Differtation eft fur les Parages .
L'Auteur ,après en avoir donné une idée génerale
, diftingue le Parage légal du conven .
tionnel, & explique comment l'un & l'autre fe
conftitue , entre quelles fortes de perfonnes ,
quels font leurs effets , leur durée , & quels
droits peuvent être dûs pour la vente des
portions des cadets , foit pendant le Parage ,
foit après que le Parage eft fini.
.
La troifiéme Differtation eft fur les Droits
de Quint & de Lods & Ventes . M. Guyot fait
l'énumeration de toutes les Ventes & Contrats
équipollens à vente , qui peuvent donner
lieu à ces Droits .
Il a mis à la fin de ce volume une addition
au Traité de la Réunion , compris dans
le premier volume , & au Traité du Relief,
compris dans le fecond. Ce qui l'a engagé à
faire l'addition qui a raport au premier volume,
eft celle que M. Auroux des Pommiers ,
Auteur du Commentaire fur la Coûtume de
Bourbonnois a fait à fon Commentaire , dans
lequel il a combattu l'opinion de M. Guyot
fur l'Article 388. de la Coûtume de Bour
bonnois M. Guyot répond dans fon addition
DECEMBRE . 1741 2871
tion à celle de M. des Pommiers ; à l'égard
de celle qui concerne le Traité du Relief,
elle a pour objet de rectifier une citation.
d'Arrêt & de difcuter trois Actes de notorieté
, donnés Par les Officiers du Bailliage
de Mantes au fujet du Droit de Relief dans
leur Coûtume.
NOUVEAUX TRAITE'S DE TRIGONOME"-
TRIE rectiligne & fphérique , démontrés
par une Méthode nouvelle & plus facile
que celle que l'on a employée jufqu'à préfent,
accompagnés de Tables des Sinus Tangentes
& Sécantes en parties réelles , des Logarithmes
des nombres naturels depuis l'unité
jufqu'à vingt- mille , & des Logarithmes
des Sinus & des Tangentes mifes dans l'ordre
le plus naturel & le plus commode . Ouvrage
utile à ceux qui veulent étudier l'Aftronomie
, la Géographie , la Navigation , &
les autres parties des Mathématiques , qui
dépendent de la Géométrie des folides ; avec
un Traité de Gnomonique ; dans lequel on
aplique le calcul des deux Trigonométries à
la conftruction des Cadrans Solaires , fuivi
d'une Table des Angles horaires pour les Cadrans
horizontaux & verticaux , & de plufieurs
autres Tables utiles dans la Gnomonique.
Le tout enrichi de Figures gravées en
taille douce . Dediés à Mrs de l'Académie
E iiij. Royale
2872 MERCURE DE FRANCE
Royale des Sciences , par M. Déparcieux ,
Maître de Mathematiques. Volume in 4°. A
Paris , chés Hipolite- Louis Guerin , & Jacques
Guerin , Libraires , rue Saint Jacques ,
à Saint Thomas d'Aquin , 174L.
HISTOIRE DES EMPIRES ET DES RE'PUBLIQUES
, depuis le Déluge jufqu'à J. C. où
l'on voit dans celle d'Egypte & d'Afie la
liaifon de l'Hiftoire Sainte avec la Profane ,
& dans celle de la Gréce le raport de la Fable
avec l'Hiftoire , par M. l'Abbé Guyon.
Tome VII . les Seleucides , in 12. de 533. pages
; à Paris , chés H. L. Guerin , & autres
Libraires , 1741 .
EXAMEN ET REFUTATION des Leçons de
Phyfique , expliquées par M. de Molieres au
College Royal de France , par M. Sigorgne.
A Paris , chés Jacques Cloufier , rue Saint
Jacques 1741. un volume in 12. pag. 452 .
fans les Propofitions préliminaires .
RE'PONSE aux principales objections contenues
dans l'Examen des Leçons de Phyfique
de M. l'Abbé de Molieres , en forme de
Lettres à M. Sigorne . A Paris , chés Jacques
Clonfier , 1741. in 12. Premiere Lettre
de 54 pages. La feconde de 72.
PENSE'ES
DECEMBRE. 1741. 2873
PENSE'ES SUR DIVERS SUJETS DE MORALE
, par le R. P. Avrillon , Religieux Minime
, avec un Avertiſſement , contenant un
abregé de la Vie de l'Auteur , & le Catalogue
de fes Ouvrages , à Paris , chés D. A.
Pierres , Libraire , rue Saint Jacques , vis - àvis
Saint Yves , à Saint Ambroife . Volume
in 12. de 664. pages , fans l'Avertiffement ,
1741 .
,
LE SIXIEME & dernier volume in-fol de la
nouvelle Edition du grand Dictionaire Géographique
, Hiftorique & Critique , par M.
de la Martiniere étant achevé , fe délivre actuellement
chés le Mercier & Boudet , Libraires
, rue Saint Jacques ; les promeſſes du
projet , qui en a été publié , lorfqu'on commença
cette Edition , ont été remplies & audelà.
Dans l'Edition Originale , il y a plufieurs
renvois , ou qui ne fe trouvent pas fous l'ortographe
indiquée , ou qui , faute d'avoir été
remplis , ne fe trouvent point du tout ; mais
dans celle - ci on a rendu conforme l'ortographe
des mots , qui étoient écrits differemment
aux lieux renvoyés. A l'égard des
Articles renvoyés , qui manquoient abfolument,
quand ils ont parû de conféquence,ils
ont été ajoûtés. C'est ainsi qu'on a fait en forte
qu'il ne fe trouve point dans cette Edi-
Ev tion
J
2874 MERCURE DE FRANCE
tion des inéxactitudes qui déroutent & impatientent
le Lecteur . Les corrections &
augmentations qui ont été fournies depuis la
publication du projet , ont été affés confidérables
pour former un volume entier de plus
qu'on n'avoit compté . Il fuffira de déclarer
d'oùfont venues ces corrections & augmenta
tions ,pour en faire concevoir iune dée avantageufe
. Les R. R. P. P. Sanadon & Charlevoix
, Jefuites , Mrs du Lignon & Abauzil ,
deux Sçavans Réfidens en Suiffe , qui ont fait
de tout tems , leur plaifir & leur étude de la
Géographie , & M. l'Abbé Lebeuf, de l'Académie
Royale des Belles - Lettres , y ont la
principale part ; on a reçû quantité de Mémoires
de deffus les Lieux , & on a fçû profiter
pour l'Article de Paris , de l'avantage d'y
êtresil a été refondu jufqu'à le rendre mécon-
´noiffable. Pour l'exacte defcription des Maifons
Royales , on a été aidé par M. Gabriel ,
premier Architecte du Roy , qui en a communiqué
les Plans , Verfailles entre - autres ,
fur lequel article , on n'a point craint de s'étendre
, eft décrit de maniere qu'on en pourroit
lever le Plan. On promet enfin que , s'il
arrive que dans la fuite il en paroiffe une Edition
plus ample, il fera donné un Suplement
en faveur de ceux qui feroient fournis de
cette Edition , Le prix des fix volumes reliés;
eft de cinquante écus.
AVIS
DECEMBRE. 1741 , 2875
Avis pour l'Hiftoire des Hommes Illuftres
de la France , par M. d'Auvigny , Brochure
de 12 pages. A Paris , ches le Gras ,
Grand' - Sale du Palais à l'L couronnée : 1741 .
L'Auteur prie ceux qui auront des Mémoires
à lui fournir , de les lui adreffer. Il demoure
ruë Neuve des Petits Champs , près
La Porte du Palais Royal .
,
SUITE DE LA DESCRIPTION des Maladies
Veneriennes , où l'on trouve l'infuffifance
des fumigations avec un Traité fur les Maladies
, apellées Fleurs Planches , & une Réponfe
à la Critique de M. Aftruc , par M. Dibon
, Chirurgien Ordinaire du Roy , dans.
fa Compagnie des Cent Suifles. A Paris ,
chés la veuve Piffot , Quai de Conti , à la
Croix d'Or. 1741. Vol. in- 12. 374. pages.
LES AMUSEMENS DU COEUR ET DE
L'ESPRIT , Ouvrage Périodique , Tome X. fe
vend à Paris chés la veuve Piffot , Quai de
Conti ; & chés Antoine-Urbain Coutelier ,
Quai des Auguftins , près la rue Gît -le - Coeur,,
1741. in - 12 . d'une très belle impreffion , &
fur du papier fin. Le prix eft de so . fils em
blanc , & de 3. livres relié.
La diverfité des Piéces de ce nouveau Toeft
égale à celle des précedens. On a
donné , page 409. & fuiv . un Difcours fous:
me ,
·
E. vj, la
2876 MERCURE DE FRANCE
le titre de Caprices Litteraires, qui auroit pû
fervir de Préface , l'Auteur paroiffant dans
le deffein de réformer en partie le plan des
Amuſemens. Le Texte de ce premier Difcours
eſt emprunté de Perfe .
Quo didiciffe nifi hoc fermentum , & quæ fimul
intus
Innata eft , rupto jecore exierit caprificus
A quoi bon amaffer des connoiffances , fi le
fçavoir qui nous enfle , & l'amour propre qui
germe en même tems , ne rompent les digues de
la modeftie pour se produire au debors ?
Voici le commentaire de cette Sentence
génerale.
» La paffion d'écrire devenue fi contagieu-
"fe & fi univerfelle , a fans contredit fa
fource dans ce penchant à nous communi-
" quer , que nous aportons en naiffant , &
» qui eft le premier lien de la focieté . Elle
» s'eft fortifiée parmi les hommes , à meſure
» que l'efprit humain , en combinant fes diverfes
idées , & en modifiant toutes fes
perceptions , s'eft fait un art de penſer ,
d'imaginer , de raiſonner.
»
و " La Nature , en donnant à l'homme un
» defir infatiable de fçavoir , lui en infpire
» bientôt un autre , qui eft de produire ce
qu'il fçait ; & le fentiment de nos con-
» noiffances , dont l'amour propre eft infépa-
»
»rable 2
DECEMBRE. 1741 2877
rable , eft , comme s'exprime Perfe , un le
» vain qui fermente & nous enfle au point
» qu'il ne faut pas un effort médiocre pour
" réfifter à la demangeaifon d'écrire. Čette
>> incontinence d'efprit a fait de tout tems
» les mêmes progrès que la curiofité , & elle
" eft plus vive, à mefure ou qu'on fçait plus ,
» ou qu'on croit plus fçavoir. De - là , cette
» activité & ce prodigieux concours d'Ecri
ע
vains en tout genres , & de- là tout hom-
» me qui penfe , veut qu'on fçache qu'il a
penfe ...... Un de nos plus célebres Ecri-
» vains ( M. Nicole ) apelloit les Bibliothé-
» ques , les magazins de: fantaifies humaines.
» Cette ingénieufe définition , qui n'est pour-
» tant pas d'un Sceptique , revient au para-
» doxe de Saint- Evremont : Que plus on voit
» de Livres fur une matiere , plus il faut
juger qu'on n'y entend rien .
Ici l'Auteur fait la critique des Philofophes
& de la Philofophie , de la Médecine , &c.
· Page 413. » Si des Sciences trop abſtraites
» ou trop incertaines , je paffe à la Littera-
» ture , j'y trouve les mêmes inconveniens.
» Je vois l'étude de l'Antiquité auffi remplie
d'incertitude , fans ceffe partager les Sça-
» vans, qui n'écrivent tous, que pour contre-
» dire & pour être contredits. Ce font, com-
» me les Phyficicns , des gens qui marchent
» à tâtons, & qui au milieu des ténèbres, dif
»
» putent
2878 MERCURE DE FRANCE
» putent de la bonté de leur vûë. Où l'Aus
teur de ce Difcour a-t'il pris que tous les Sçavans
n'écrivent que pour contredire & être contredits
? N'en connoît -il point qui n'écrivent
que pour inftruire & pour être inftruits euxmêmes
, qui ne cherchent que la vérité , &
qui ne s'occupent qu'à la faire connoître ?
L'Hiftoire , à force d'être remaniée
» m'offre preſqu'autant de problêmes que de
» faits. Ici , par fa trop grande fechereffe ,
» elle effleure à peine mon imagination , &
» ne fait que gliffer fur ma mémoire . Là, trop
» diffufc & mal digerée , elle m'endort par
» fes reflexions , où fixant toute mon attention
fur la fagacité de l'Ecrivain , elle me
>> rend diftrait fur les Faits .
» Dans tous les autres genres , c'est- à- dire
» dans toute cette étendue des Lettres qui
>> embraffe l'Eloquence , la Poëfie , le Théa-
» tre , &c. à confidérer combien aujourd'hui
» Tiers - Etat
pullule le Tiers Etat Auteur , on diroit que
» les talens de l'efprit , comme une forte de
>> Profeffion publique , font abandonnés par-
>> mi nous au premier venu. Quel déborde
» ment de toutes parts ! Je vois des batail-
» lons d'Auteurs, comme les Soldats de Cad-
» mus , fortir tout à coup de la pouffiere ,
>> entrevoir le jour & s'y replonger, pour faire
place à de nouveaux qui n'auroient , fans
n doute , jamais écrit , fi d'autres n'euffent
» penfé
DECEMBRE. 1741 2879
>> penſé avant eux , & dont la moitié encore
» ne fait que copier ou traveſtir l'autre ....
Notre Auteur ne fait pas fa cour à fon
fiécle , & il faut croire , qu'il fait toutes
les exceptions que les Grands Hommes
d'aujourd'hui méritent , & qu'il ne confond
pas l'or avec l'oripeau. Il continue
fur le même ton qui peut- être n'eft pas férieux
.
وو
» peu
"
Ainfi , dit- il , quand , tout examiné , on
» voit enfin à quoi aboutit la prétenduë fertilité
, dont on fait honneur à notre fiècle ,
s'en faut que l'on n'envie à la fimplicité
de nos premiers âges , l'heureufe oifi-
» veté qu'on leur reproche ... Que tous ces
» Ecrits dont le mêlange inconcevable eft
» l'Hiftoire de l'efprit humain , font un fpec-
» tacle intéreffant pour un ignorant Philofo-
•phe ! ... Qu'il eft fingulier de confiderer
une partie du genre humain livrée à la paf-
» fion d'écrire , s'empreffer de prouver à l'autre
à quel point elle eft raifonnable & partagée
des facultés de l'entendement , natu-
» relles ou acquifes ! Qu'il eft plaifant de
» voir un homme penfer tous les jours à la
» tâche, & rêver méthodiquement pour nous
» donner une Hiſtoire fuivie des opérations
» de fon cerveau , & le Journal curieux de
fes perceptions !
»
"
23
Page 417. Un homme fait un Livre &
» le
2880 MERCURE DE FRANCE
"
و د
&
» le publie . . . . Un autre homme le lit ,
» cette lecture lui donne auffi - tôt des idées ...
» C'en eft affés pour lui faire naître l'envie
» d'être Auteur à fon tour ; & bien - tôt cet
» homme , échauffé par l'émulation ou par la
»jaloufie , conçoit le deffein d'un Ouvrage ;
» il prend la plume & l'exécute . Son Livre
» en trouvant des Lecteurs, en va faire éclore
plufieurs autres , & perpetuer ce déchaî-
» nement dins plus d'une génération . Le dé-
» fir de l'imitation eft le premier inftinct de
» l'homme c'eft peut être auffi ce qui fait
>>
ود
"
qu'il y a fi peu d'Originaux . Mais enfin tel
» en eft l'effet ; un Ouvrage en enfante un
» autre , & cela va à l'infini .... En lifant
l'imagination agit encore plus que le juge-
» ment , & quand une fois nos facultés font
excitées à un certain point , plus de repos,
» il faut céder à la démangeaifon d'écrire .
» C'est un Taon qui s'attache à nous & qui
» nous laiffe un vif éguillon . Voilà com-
» me cette agiffante paffion nous gagne tous
» infenfiblement
. Votre efprit dévelope le
mien , & une idée m'en fuggere mille ; je
» veux m'effayer auffi bien que vous , ou fi
» je ne veux point hazarder mes grands talens
" dans le mêine genre,ni faire les frais de l'in-
و ر
و د
vention , je vais me faire valoir à vos dépens,
» c'est à dire par vos propres Ouvrages ; je
?? vais me tourner à la critique , & vous m'al-
» lez
DECEMBRE. 1741 288 F
lez voir bien-tôt , éclairé peut - être par vos
» fautes mêmes , cenfurer fort à mon aife ce
» que je n'euffe point été capable de faire.
L'Auteur parle enfuite du progrès des Lettres
chés les Romains & chés les François ;.
il paffe de- là aux differens Journaux . Le Public
décidera s'il entre ou non de la partialité
dans le Jugement qu'il en porte. Ce Difcours
finit par l'expofition d'un deffein Lit
teraire.
>
L'Editeur de ce Tome , a fait réïmprimer la
.Batrachomiomachie d'Homere
traduite en
Vers François par feu M. Boivin le cadet ; &
le Poëme des Cerifes renversées , de Mlle
Cheron. Il y a 25. ans que la fortune de ces
deux Morceaux eft faite : Vatum decus immortale.
Une petite Piécé de Vers de M. le Chevalier
de Neufville Montador , à M. le Comte
de Varc de Liéville , nous a parû digne d'être
tranfcrite. Ce font des Etrennes intitulées ;
. LE PORTE - FEUILLE .
CEE préfent- ci n'eft de groſſe valuë ,
Je le fçais bien , & n'oferois , ma foi ,
L'offrir , mon cher , à tout autre qu'à toi.
Mais la Fortune , en Maîtreffe abſoluë ,
Fait un Index de pous foibles Humains ,
Que fon caprice en deux parts diftribuë.
Les
2882 MERCURE / DE FRANCE
Les biens, les maux tout fe trouve en fes mains ,
Et fon tarif à chacun attribuë
Ces chofes là , fans trop d'égalité ,
Selon le lieu qu'on tient dans fon Regiſtre.
Or , je ne fçais quelle fitalité
A mis mon nom dans la claffe finiftre ;
Advient de - là l'impoffibilité
Où je me vois de fignaler mon zéle
Pour un ami génereux & fidele .
Mais , comme aux dons le coeur met tout le prix ,
De celui- ci tu ne feras furpris , r
Car je le fais gage de ma conftance .
Il est encor quelqu'autre circonftance ;
Ecoute & vois combien je te chéris .
Loin de celer que j'ai fait quelqu'uſage
De cet étui dont je te fais. hommage ,,
Loin qu'il en foit plus digne de mépris ,
Tu dois , ami , l'en prifer davantage.
Seul confident des plus tendres Ecrits
Greffe fecret des plaifirs de mon ame
J'y confervois les preuves de la flâme
De deux Objets dont mon coeur fut épris.
Oui , c'eſt cela que je te facrifie ,
Un néceffaire , un tréfor des Amans.
Je fuis difcret , je te le notifie ;
>
Sans quoi verrois que les poulets charmans
Qu'il renfermoit , font de telle mature ,
Que l'on en peut offrir la couverture
'
DECEMBRE. 1741 2883
Et que c'eft presque excès d'honnêteté .
Pour toi , bien- tôt verras de tout côté
Pareils Ecrits , tant en Rime qu'en Proſe ,
S'y raffembler , au moins c'est une chofe
Que je defire avec fincerité ,
Tu peux m'en croire . Oui , que chaque journée
Par ton efprit une Belle enchaînée
A tes fuccès en joigne de nouveaux !
Qu'en ton chemin jamais aucuns Rivaux
N'ofent paroître ! ils fervent à la gloire ,
Il est bien vrai , mais non pas au repos.
Ils font encor bien plus hors de propos ,
Quand il s'agit d'emporter la victoire
Près d'un objet que par goût & raiſon
On veut unir à foi par l'hymenée.
Auffi je vois que celle deſtinée
Afoûtenir ton antique Maiſon ,
Digne de toi ... mais je fuis un Oifon ;
Tout louangeur eft marchand de poiſon ,
Et mon ami fort fombrement l'accueille.
Revenons- en à notre Portefeuille ;
Aux jolis Vers , à ces tendres poulets ,
Dont jai parlé , tu mêleras , beau Sire ,
En bonne Profe autres certains billets
Qu'un débiteur eft obligé d'écrire.
Ainfi fur toi tu pourras raſſembler
Les interêts du coeur & de la bourfe
2884 MERCURE DE FRANCE
Et quand l'ennui viendra pour t'affubler ,
Tu trouveras une double refource
Dans cet étui que je te fais porter,
De tes plaifirs il fera le Regiftre ;
En quelque forte , il fera le Miniftre
De ta finance , & j'oſe me fater
Que chaque fois qu'il faudra feüilleter
Papier galant ou papier de Grimoire ,
J'occuperai place dans ta mémoire .
Il y a encore dans ce Volume une Epitre
Philofophique qui part de la même main.
Elle eft remplie de fages maximes , de reflexions
confolantes contre les adverfités , &
peut fournir des reffources pour fouffrir avec
conftance les maladies du corps.
M. le Chevalier de Neufville a donné de
plus , la fuite de fes Deux Soeurs Rivales, Hiftoire
commencée dans le Tome 9 il y a inferé
, par forme d'Epiſode , des inftructions
pour une jeune perfonne expofée dans le
monde à la contagion du vice.
Nous indiquerons feulement une Comédie
nouvelle , page 169. fous le titre de Minos
ou l'Empire Souterrain; il faut lire dans le
Recueil la Chronologie de l'Iliade d'Homere;
l'Effai de Traduction des Bucoliques de Virgile ;
Les Minutes amufantes , & quantité de Piéces
détachées, en Profe & en Vers, que nous ne
pouvons
DECEMBRE. 1741. 2885
Pouvons ni abreger ni tranfcrire. On en lit
vec plaifir plufieurs qui font l'Ouvrage de
quelques Dames .
La Traduction fuivante de l'Ode d'Horace
, Diffugere nives , finira notre Extrait. On
ne fçait pas précisément à qui elle apartient,
ayant été attribuée à diverfes Muſes.
La neige a diſparû ; bien- tôt par la verdure
Ces Côteaux feront embellis .
La Terre ouvre ſon ſein & change de parure ;
Les Fleuves coulent dans leurs lits.
X
Les Nymphes de retour, les Graces toutes nuës ,
Au fon des Airs reglent leurs pas .
Chaque faifon nous dit , nous fommes revenuës ,
Vos beaux jours ne reviendront pas.
*
Le Printems fuit P'Hyver, l'Eté prévient l'Automne ,
Et l'un par l'autre eft réparé .
L'ame , qui nous foûtient , ne ranime perſonne
Quand le corps en eſt ſéparé .
*
Alors on n'eft plus rien . Tullus , Ancus , Enée ,
Ont fubi le même deftin .
Et qui fçait fi pour lui la prochaine journée
Fera luire un nouveau matin ?
Pendant
2886 MERCURE DE FRANCE !
Pendant qu'il t'eft permis , avant l'heure fatale ;
Donne à qui t'a le plus aimé.
Le feul que peut choquer ton humeur libérale ,
C'eft ton fucceffeur affamé.
*
A la mort quand Minos t'aura par
Condamné fouverainement ,
fa Sentence
Il n'eft point de rang , d'éloquence
Qui te tire du Monument.
Diane en vain tâcha que fon chafte Hypolite
Lui fût rendu par les Enfers ;
Et Théfée , arrivé fur le bord du Cocyte ,
Laiffa fon ami dans les fers .
Il nous refte à rendre compte du XI. To
me de ces Amuſemens . Nous le ferons dans
un des prochains Journaux . Les deux Libraires
indiqués vendent les Corps complets tout
reliés très - proprement , fur le pied d'un écu
de trois livres chaque Volume .
CALENDRIER MERIDIEN , ou l'Art de tracer
une Ligne Meridienne avec une extrême
facilité , pour regler les Pendules & les
Montres , fuivant le mouvement du Soleil ,
à Paris , chés Philipe - Nicolas Lottin , Imprimeur
-Libraire , rue Saint Jacques , proche
Saint Yves , à la Verité , 1741. avec
l'aprobation de M. Callini.
DECEMBRE. 1741. 2887
Si cet Ouvrage n'étoit qu'un fimple Calendrier
, il paroîtroit un peu tard , mais
comme le Calendrier en eft la moindre partie
, & que c'eft un, Traité qui contient differentes
Méthodes pour tracer facilement une,
Ligne Meridienne , & qui aprend à regler les,
Pendules & les Montres avec une grande jufteffe
, il ne pouvoit manquer d'être bien reçu
en quelque tems de l'année qu'il eût parû.
par
)
le
Cet Ouvrage eft divifé en deux parties ,
dans la premiere , on commence par donner
la maniere de tracer une Ligne Meridienne
fur l'apui d'une fenêtre , enfuite on montre à
en tracer une fur le plancher d'une fale . On
donne encore une Ligne Meridienne
moyen d'une corde tenduë ; on ajoûte la
maniere d'en tracer une fur un mur à plomb;
enfin on y aprend à placer un quart de cercle
dans le plan du Meridien , & à obſerver
l'heure , la minutte , & la feconde du paſſage
du Soleil , de la Lune & des Etoiles , par
le Meridien .
Dans la feconde partie , on enfeigne
P'Art de regler les Pendules & les Montres ,
fur le mouvement du Soleil , avec une Table
qui marque tous les jours où il y a deux minutes
de difference , entre le Soleil & une
Horloge bien reglée.
On y trouve auffi la maniere de regler les
Horloges par le moyen des Etoiles fixes , &
on
2888 MERCURE DE FRANCE
on finit par un abregé des principales Obſer*
*vations Aftronomiques qu'on peut faire avec
les Lunettes & les Teleſcopes de réflexion .
Cet Ouvrage ne peut qu'être fort utile. Il
eft écrit avec beaucoup d'ordre & de clarté ;
on y dit beaucoup de chofes en peu de mots,
& il eft d'autant plus avantageux au Public ,
qu'il eft intéreffant pour tout le monde , de
pouvoir fe procurer une jufte meſure du tems.
LA NOUVELLE TRADUCTION de Tite-
Live , dont on a annoncé le premier volume
dans le Mercure du mois de Mai dernier , fe
continue avec beaucoup de fuccès. M l'Abbé
Brunet, Auteur de cet important Ouvrage,
vient de donner au Public le fecond & le .
croifiéme volume , qui contiennent la premiere
Décade de Tite Livre dans fon entier.
Il les a prélentés au commencement de çe
mois au Roy , à la Reine & à Monſeigneur
le Dauphin, auquel cette Traduction eſt dédiée
.On juge par cette fuite que l'Auteur ne
perd point de vue les engagemens 'qu'il a
pris avec le Public, & qu'il s'aplique de plus
en plus à mériter fon fuffrage .
REPLIQUE à M. de Molieres , on Demonftration
Phyfico- Mathematique de l'impoffibilité
, & de l'infuffifance des Tourbillons . Par
M. Sigorne, 1. vol . in 8. de 190. pag. A Paris,
ebés Jacques Cloufier , rue S.Jacques , à l'Ecu
WE EMSHER. 1741 . M.
DECEMBRE . 1741. 2889
M. Auroux Defpommiers , connu par fon
Commentaire fur la Coûtume du Bourbonnois,
vient de donner au Public, un Ouvrage
fur la Religion, qui a pour titre, TRAITE 'fur
la neceffité de s'inftruire de la verité de la Religion
, & fur les moyens de s'en affûrer &c .
Cet Ouvrage imprimé à Paris , chés Pau
lus du Mefnil , 1. vol. in - 12 . de 263. pages,'
eft divifé en deux parties ; dans la premiere ,
l'Auteur prouve la neceffité de s'inftruire de
la verité de fa Religion , il donne les moyens
de s'en affûrer , & il fait voir l'ufage que l'on
doit faire de fa raifon, en matiere de Religion .'
Dans la feconde , il expofe la Foi de l'Eglife
, fur le Miftere de l'Incarnation & la
Divinité de JESUS -CHRIST. Il concilie la foi'
de ce Miftere avec la raifon , & il prouve
contre les Deïftes , que l'adoration de JESUS-
CHRIST , dirigée par la Foi de l'Egliſe
ňe renferme aucune idolatrie .
La premiere partie eft divifee en fept chapitres.
Dans le premier , on fait fentir l'imprudence
de la plupart des hommes , qui
avec une legereté fans égale , & fans aucun
difcernement, fuivent & embraffent une Religion
, fur le fimple témoignage de leurs pa
rens , & de leurs Docteurs , fans avoir examiné
les caracteres de verité , dont ce témoignage
eft revétu .
3
Dans les chapitres , fecond , & troifiéme ,
11, Vol. F l'Auteur 4
2890 MERCURE
DE FRANCE
l'Auteur expofe les conteftations
d'entre les
Catholiques
& les Proteftans , fur la voie
que Dieu a établi pour connoître la véritable
Religion : & après avoir raporté les raifons
des uns & des autres , il fait voir que
les deux partis conviennent
de la neceffité
de quelque examen en fait de Religion , &
que c'eft la raison qui nous conduit à la foi.
>
Il diftingue trois fortes d'examens , un
examen d'attention , de difcuffion , & de
préciſion ; il explique ces differentes fortes
d'examens
& il obferve que l'examen
de précifion eft effectivement
impoffible , non- feulement dans les matieres de Religion
, mais encore dans celles de Morale
de Pratique , & même dans les vérités naturelles
; quant à celui de difcuffion , que les
fimples , & les ignorans en font incapables ,
& qu'il ne peut regarder que les Sçavans ,
& les Théologiens
; d'où l'on conclut , que
dans l'obligation où font les fimples & les
ignorans de s'inftruire & d'examiner
ils
ne font tenus qu'à un examen d'attention &
de fimple aplication .
Ce qu'il importe de fçavoir , dit l'Auteur ,
c'eft furquoi doit tomber l'examen d'attention
, ou de difcuffion ; ce qu'on doit examiner
, & à quoi il faut faire attention ', pour
parvenir à la certitude de la foi , & pour
pour s'af
fûrer de la verité de fa Religion.
De
DECEMBRE . 1741. 2891
De quelque manière que la certitude de la
foi , & la connoiffance de la verité de la Religion
fe forme en nous , il eft certain , felon
notre Auteur , que cela ne fe fait pas ,
fans
que la grace
de
Dieu
n'intervienne
, &
fans l'opération du Saint Efprit , qui excite
l'ame naturellement pareſſeuſe , à la recherche
de la verité qui diffipe les préjugés qui
rendoient la verité impénetrable ; . qui rend
l'efprit plus attentif aux caractéres de veri
té; qui fert à conduire ces caractéres , afin
qu'ils frapent l'efprit , & qu'ils faffent une
profonde impreffion fur lui ; cela paroît fûr
& certain : mais ce n'eft pas ce dont il s'agit
ici , dit il , ce qui eft en queſtion , c'eſt de
fçavoir comment un Chrétien peut parvenir
, à la certitude de fa foi , & s'affûrer de
la verité de la religion. On cherche un
moyen für pour cela , un moyen qui puiffe
perfuader, & raffûrer contre le péril & l'illufion
& un moyen qui foit proportionné aux
plus petits efprits.
C'est ce même moyen qui eft expliqué ,
prouvé & établi dans les Chapitres 4. & 5.
dans lefquels on connoît l'ufage que l'on
doit faire de fa raifon par raport aux mistéres
; & où l'Auteur prouve que la raiſon a
fon ufage , & fon mérite dans la foi , comme
elle a fes bornes , & que toute foumiffion
a fes regles , foit du côté de l'autorité
Fij fur
2892 MERCURE DE FRANCE
fur laquelle elle eft apuyée , foit du côté des
chofes que l'on veut faire croire , foit du cô
té des motifs dont on fe fert pour nous porter
à croire.
Dans les Chapitres 6. & 7. on explique
la maniere de raffûrer un fidele contre l'objection
la plus forte des ennemis de la Religion
Chrétienne , tirée de la contradiction
aparente des mifteres ; on défaprouve la méthode
dont fe fert Abbadie , pour prouver .
la Divinité de JESUS - CHRIST, On en fait con◄
noître l'inconvenient , on donne le moyen
de l'éviter , & on fait fentir la neceffité où
l'on eft pour affermir la foi du fidele , d'écarter
des mifteres l'abfurde , & le contradic
toire , de diftinguer dans les mifteres l'incompréhensible
d'avec le contradictoire ,
& de prouver avec les Théologiens Catholiques
, que les mifteres font au-deffus de la
raifon , mais non contre la raiſon ,
Il faut , dit l'Auteur , prouver , & s'affûrer
, à l'égard du Miftere de l'Incarnation ,
par exemple , que la Foi de l'Eglife touchant
ce miftere , ne renferme aucune contradic
tion , ni rien de contraire à la raifon , & que
le culte que l'on rend à JESUS - CHRIST ,
quand il eft dirigé felon la Foi de l'Eglife
ne forme aucune idolatrie .
Tant qu'on n'écartera pas de ce miftere ;
l'abfurde , le contradictoire & le péril de l'idolatrie
,
DECEMBRE. 1741. 2893
3
dolatrie , qu'il reftera dans l'ame du fidele
quelque fujet de crainte à cet égard , fa foi
fera toûjours chancelante , cette foi diminuera
, & les preuves de la révelation s'affoibliront
dans fon efprit , à mesure que fa
crainte augmentera. --
re ,
C'est ce qui a engagé l'Auteur d'expofer
dans fa pureté la Foi de l'Eglife fur le Miftere
de l'Incarnation , & la Divinité de JESUSCHRIST
, puifée dans l'Ecriture , les Décifions
des Conciles , & les Ecrits des Peres
de l'Eglife ; de faire voir enfin que ce Miftequoiqu'infiniment
élevé au deffus des
lumieres de la raiſon , ne renferme rien de
choquant; que la Foi de l'Eglife fur ce Miftere
ne contient rien de contraire à la raiſon
& de prouver contre les Déïftes , que l'adoration
que l'on rend à JESUS CHRIST dirigée
par la Foi de l'Eglife , ne forme aucune
idolatrie ; qu'il y a une fùreté entiere à la lui
rendre, & une neceffité de le faire , puifque,
fans craindre l'idolatrie , on évite l'impieté
qui confifte à refufer à JESUS - CHRIST , le
culte qui lui eft dû ; tout cela fait la matiére
de la feconde partie de l'ouvrage , & dés
chapitres qui la compofent.
On y trouve d'ailleurs la foi de la primitive
Eglife fur la Divinité de JESUS - CHRIST
très bien établie ; une Hiftoire abregée des
anciens & nouveaux Hérétiques , qui ont
Fiij atta2894
MERCURE DE FRANCE.
attaqué la Foi de l'Eglife fur le Miftere de
l'Incarnation , de leurs erreurs , & de leurs
condamnations , des obfervations enfin juſ
tes , & inftructives fur le culte & l'adoration.
Le même Auteur annonce & promet dans
fon avertiffement , une expofition de la Foi
de l'Eglife fur toutes les matiéres de Religion
, dégagée des difputes de l'Ecole , &
conciliée avec la raifon , qui eft la fuite de
l'Ouvrage dont nous venons de parler .
SUITE du nouveau Recueil des Edits ,
Déclarations , Lettres Patentes , Arrêts &
Reglemens de S. M. lefquels ont été enregiftrés
au Parlement de Rouen. Enfemble
des Arrêts & Reglemens & autres de ladite
Cour , le tout depuis l'année 1717. jufqu'en
1726. avec deux tables , l'une chronologique
par années , & l'autre alphabétique par
fujets & matiéres. A Rouen , chés J. B. Le-
Songne 1741. un vol . ix-4° .
C'eft le quatriéme tome de ce Recueil ,
dont le premier volume commence à l'année
1660.
On a publié depuis peu à Rome le premier
volume d'un des plus beaux Ouvrages en
genre d'Antiquités Grecques & Romaines ,
qu'on ait encore vû ; en voici le titre : Del
Mufeo Capitolino Tomo 1. contenente Immagini
di
DECEMBRE. 1741 . 2895
di Vomini illuftri Roma , 1741. Si vende alla
Galcografia Camerale al piede di marmo. Con
Tavole XC. in fol. Le recueil entier formera.
4. ou 5. volumes. Le premier contient les
portraits des Perfonnes illuftres , le fecond
fera pour les têtes des Empereurs & des Impératrices
, le troifiéme pour les Statuës , le
quatrième pour les bas- reliefs , & le cinquiéme
contiendra les marbres & les diverfes
autres Antiquités , qui auroient pû reſtèr
hors de leur rang,
DE LA NAVIGATION DU TIBRE , Ouvrage
où l'on fait voir par des témoignages autentiques
, & non fufpects que dans les tems
pallés ce Fleuve a été navigable dès fa
fource , & qu'on peut aujourd'hui le rendre
encore tel , & le remonter , du moins de
"puis Orte jufques à Ponte nuovo , & que plu
fieurs des Rivieres qui s'y jettent , particulierement
le Chiaggio , la Paglia , la Nera
& le Teveroh , les quatre principales de
ces Rivieres étoient de même navigables.
On a joint auffi à cet Ouvrage trois Differtations
, l'une fur les caufes des débordemens
du Tibre , l'autre fur les remedes
qu'on y peut aporter , & la troifiéme fur les
moyens de prévenir les inondations caufées
par les eaux de la Chiana , & que l'Auteur
eu d'autres ont imaginés. Ce Livre , écrit en
Fiiij Italien,
2896 MERCURE DE FRANCE
Italien , eft dédié au Pape regnant Benoît
XIV. Par Lione Pafcoli , 1740. in -4° . de
87. pages , à Rome , chés Antonio Roffi, auprès
de l'Eglife de la Rotonde.
DISCOURS DE SAINT ZENON , Evêque de
Verone , mis au jour pour la premiere fois
par Pierre & Jerôme Ballerini, freres & Prêtres
de Verone . Petit in folio de 432. pages ,
à Verone chés Auguftin Carattoni 1739.
EXPLICATION ABREGE'E des Coûtumes
& Cérémonics obfervées chés les Romains ,
pour faciliter l'intelligence des anciens Auteurs
, Ouvrage écrit en Latin par M. de
Nieuport , traduit par M. l'Abbé *** A Paris
, chés Jean Defaint , Libraire , ruë Saint
Jean de Beauvais , 1741. in 12 de 414. pages
, compris la Table des matieres , qui eft
très-ample.
DISSERTATIONS SUR HOMERE , prononcées
dans le College de Florence par Ange-
Marie Riccio , Profeffeur en Langue Grecque
, auxquelles fort joints les Difcours du
même , faits à l'occafion de l'ouverture des
Claffes , in-4 . A Florence , 1740. de l'Imprimerie
de Cajetan Albizini , de 340. pages
, fans la Préface , l'Epitre Dédicatoire &
I'Index , qui font de 44. pages. L'Ouvrage est
en Latin.
HISDECEMBRE.
2897
1741 .
3
HISTOIRE ABREGE'E DE LA MAISON Palatine
, par M. l'Abbé Schannat , à Francfort ,
chés François Varrentrapp , 1740. in - 8 °.
REMARQUES d'un Seigneur Polonois , fur
l'Histoire de Charles XII . Roy de Suede
par M. de Voltaire , à la Haye , chés Adrien
Moetjens , 1741. in - 12 . de 186. pages , fans
la Préface de l'Editeur."
JOURNAL DU REGNE DE HENRY IV . Roy
de France & de Navarre , par M. Pierre de
l'Etoile , Grand Audiencier en la Chancellerie
de Paris , avec des Remarques Hiftoriques
& Politiques du Chevalier C. B. A. &
plufieurs Piéces Hiftoriques du même tems.
Quatre Volumes in- 4° . Le premier de soz.
pages , le fecond de 587. le troifiéme de
552. & le quatrième de 584. A la Haye ,
chés les Freres Vaillant , 1741.
MONUMENS TYPOGRAPHIQUES , ou Recueil
des Ouvrages faits fur l'origine & les
progès de l'Imprimerie , fur fon utilité , fes
avantages & fes abus , publiés & mis en ordre
par Jean- Chriftian Wolfius , Profeffeur
de l'Univerſité de Hambourg . A Hambourg,
aux dépens de Chriftian Herold , en 1940.
in-8 °.Deux Volumes , dont le premier eft de
1104. pages , fans compter les 112. qui con-
F v tiennent
2898 MERCURE DE FRANCE
tiennent l'Epitre Dédicatoire , l'Avis au Lecteur
, la Table des Traités , & deux Index
particuliers. Le fecond Volume eft de 1232 .
pages , non compris les trois Index qui fe
trouvent à la fin , & qui forment 90. autres
pages , non chiffrées. L'Ouvrage eft en Latin.
LIVRES Etrangers arrivés depuis peu à Paris
, chés Briaffon , Libraire , rue Saint Jacques
, à la Science , & àl'Ange Gardien.
Differtations fur la Cataracte & le Glaucome,
par M.deWolhoufe. 8 ° . Francfort. 1717 .
POLYDORI VERGILII de rerum inventoribus
eum collectaneis variorum 18. Argent. 1613.
Anti- Machiavellus , feu Commentaria de Regno
bene adminiftrando , contra librum Machiavelli
de Principe 12. Argentor. 1630.
Elémens de la Langue Allemande , par M.
de la Pierre. 8 °. Strasb. 1741.
Pharmacopea Argentoratenfis. Fol. Arg.
1725. Hiftoire Univerfelle facrée & profane
depuis le commencement du Monde , jufqu'à
nos jours , par le P. Calmet. 4 °. 7. vol.
Strasb. 1735. à 1741 .
J. D. Bernoulli Hydrodinamica five de viribus
& motibusfluidorum 4 ° . cum Fig. Argent.
1738.
1713 .
Ejufdem , ars conjectandi. 4°. Bafileæ.
Les Mathématiques à l'ufage des Officiers ,
par
DECEMBRE. 1741 .
OTHE
2899
par Herteinſtein. 4° . 2. volum. Fig. Strasb.
1737.
#
7893
Joh. Henr. Boëclerus de fcriptoribus gracis
latinis ab Homero ad facul. XVI. 8°.
Ulr. Obrechti Academica. Argent . 4°.
1704.
Traité fur l'Acier d'Alface ou l'Art de convertir
le Fer forgé en Acier. 8°. Fig. Strasb.
1737.
Jo. Schilteri Scriptores rerum Germanicarum
à Carolo magno ad Frid. III. Fol . Argentorati
. 1704.
Ejufdem Thefaurus antiquitatum Teutonicarum
cum notis J. C. Simonis . Fol. 3. vol.
Vlma. 1738.
B. S. Struvii rerum Germanicarum fcriptores
cum gloffario & locis Parallelis.Fol. 3.vol.
Argent. 1717 .
Traité des Tribunaux de Judicature , ou
Examen de ce que la Religion exige des Juges
, des Plaideurs , &c. par M. Roque. 4°.
Bafle. 1740.
Acta Eruditorum anni 1740. 4 ° . Lipfiæ.
Deſcription de la Ville de Lyon. 8° . Lyon,
1741 .
Actes Eccléfiaftiques & Civils des Synodes
Nationaux des Eglifes réformées , par
M. Aymon. 4°.2. vol. La Haye 1710.
Jo . Saens de Aguirre Synopfis Conciliorum
utriufque Hifpania 12. Roma 1695.
F vj
Christ.
2900 MERCURE DE FRANCE
Chrift . Adolphi Differtationes Medica. 4°.
Noberga. 1727.
Ebauche de la Religion naturelle , par Wollafton
, traduit de l'Anglois . 4°. La Haye.
1728.
Job. Mart.ab Ebermayer Thefaurus Gemmarum
ex editione J. J. Bayeri. Fol. Fig. Norib.
1720.
Ejufdem Capita Deorum & virorum Illuftrium
cum obfervationibus Erh. Reufchii.
Fol. Fig. Norib. 1721 .
Henr. Cope Demonftratio Medico - Practisa
pronofticorum Hippocratis. 8°. Dublini .
1736.
Corpus Poëtarum Latinorum, Fol. 2. vol.
Londini
. 1721 .
Canfonnette anachreontiche di Lindoro
Elateo paftore Arcade . 8 ° . Firenfe 1723 ..
Les Céfars de l'Empereur Julien , traduits
du Grec , avec des notes , par M. de Spanheim
, avec des Figures de Picart. 4° . Amſt.
1728.
Connoiffance de l'Ame par l'Ecriture Sain¬
te , par Teftas. 8 ° . 2. vol . Londres. 1727.
Confolarions contre les frayeurs de la
mort , par Drelincourt 8 ° . 2. volum. Amft.
1724.
Hiftoire naturelle des Infectes , felon leur
métamorphofes naturelles , par Goedart. 8 ° .
3. vol. Fig. La Haye.
Hiftoria
DECEMBRE. 1741. 2901
Hiftoria Philofophica de ideis veterum & recentiorum
Philofophorum. 8 °. Auguftæ vind .
1733 .
Job. Humelius de Podagra. 8 ° . Budiffe.
1738.
Fac. Laderchi acta Martyrum vindicata.
Fel. 4. vol. Romæ. 1723.
Jo. Jac. Koethen Principia quadam Metaphyfica
Wolfiana variis obfervationibus illuftrata.
8°. Col. Allob . 1737 .
Mémoires du 18. ficcle, par Lamberty , 4
13. & 14. Amst. 1741 .
-Des troubles arrivés en Suiffe à l'occafion
du Confenfus. 8 ° . Amft. 1726.
Pet. Ant. Michelotti de feparatione fluidorum
in corpore animali & J.D. Bernoulli dif
fertationes dua 4° . Venet . 1721 .
Les Euvres de M. de Corbinelli , ou Extraits
des plus beaux Ouvrages des plus célébres
Poëtes. 12. 5. vol . Amft . 1681 .
Penfées & réfléxions pieufes traduites de
l'Anglois de M. Beveridge 12. 2. vol . Amft.
1731.
La Phyfique facrée ou Hiftoire naturelle
de la Bible , traduite de l'Allemand de J.
Scheuchzer . Fol. 8. vol. avec 750. Fig. Amft.
1732. 1739.
Préfervatif contre l'incrédulité & le libertinage
, en trois Lettres Paftorales de M.
l'Evêque de Londres , traduites par Lemoine.
8°. La Haye. 1732 .
Prieres
2902 MERCURE DE FRANCE
Prieres & Méditations choifies , avec quelques
Poëfies Chrétiennes, par Chevreau. 16.
La Haye. 1715 .
Menologium græcorum , gr. & latine . Fol .
3. vol. cum Fig. Urbini 1727.
Méthode pour dreffer les Chevaux , par le
Marquis de Newclaftel. Fol. Fig. Londres.
1737.
Hiftoire Métallique des XVII . Provinces-
Unies des Pays - Bas , traduite du Hollandois
de Gerard Van Loon . Fol . 5. vol . Fig. La
Haye. 1732.
-
De la Conquête de la Floride , Ouvrage
traduit de l'Eſpagnol , par P. Richelet . 8°.
2. vol . Fig. Leyde 1731 .
Memoires Politiques , amufants & fatyriques
, par M. D. B. 8 °. 3. vol . Fig. 1736.
Jod. Lominii Obfervationes Medicinales 8 ° .
Amft. 1738.
Herm. Boerhaavi Methodus medendi. 8 °.
Londini.
- Ejufdem Opufcula omnia . 4°. Haga comit.
1738.
- Ejufdem Praxis Medica five commentarius
in aphorifmos & Hiftoria Plantarum. 12.
7. vol. Londini 1738.
Manilii Aftronomicon cum notis Bentlei . 4:
Londini. 1739.
Ab. Peritzol Itinera mundi gr. & latine. 4°.
cum notis. Oxonii . 1691 .
Voyages
DECEMBRE. 2903 1741
Voyages des R. R. Peres Tachard & autres
à Siam. 12. 3. vol. Hol. Fig. 1689. &
1707.
Hiftoire de Marguerite de Valois. 12. 3 .
vol. La Haye. 1739 .
Le Dictionaire des Paffagers , Allem. Fr.
& Fr. Allemand , par Frich. 8 °. 2. vol. Lipfic.
1739.
Che. Cellarii Notitia orbis antiqui five Geographia
cum tabulis & notis , Jo . Conf. Schwartz.
4. 2. vol . Lipfiæ. 1731 .
Sexti Empirici Opera grace & latin. cum
notis. Jo. al. Fabritii , Fol. Lipfiæ . 1728 .
Aug. Frid. Walteri defignatio Plantarum
horti fui. 8°. cum Fig. Lipfia . 1735.
Guil. Cave Cartophylax Ecclefiafticus cum
additionibus Colomefii. 8 °. Lipfiæ. 1687.
M. Jo. Dav. Schreiberi Hortulus gracus
continens eruditiones gracas . 8°. Lipfiæ . 1710 .
Ephr. Prætorii Athena Gedanenfes. 8°.
Lipfiæ 1713.
Jo. Her. Fufternau defiderata Medica. 8 .
Lipfiæ. 1727.
Jo. G. Walchii Hiftoria critica Lingua Lati
ne. 8°. Lipfix. 1729.
Dan. Maichelii Introductio ad hiftoriam litterariam
8 °. Cantab. 1721.
Ath. Schiada arcana Bibliotheca fynodalis
& Typographica mofcuenfis 8 °. Lipfix. 1724.
M. Crufius de fcriptis ineditis. 4°. Lipfiæ..
1728. *
Libanii

2904 MERCURE DE FRANCE
Libanii Epiftola cum verfione & notis. Jo.
Chr. Wolfii. 8°. Lipfiæ. 1711 .
Th. Sig. Brayer de Nummis Romanis in agro
Pruffico repertis. 4°. Lipfiæ. 1722 .
Nic. Kederi nummus aureus cã perrarus
Othuinum , &c. 4°. Lipfiæ. 1722 .
-
-Ejufdem de Nummis Runicis. 4°. Lipfiæ.
1704.
Ejufdem de Argento Runis feu litteris
gothicis infignito 4. Lipfiæ. 1703 .
Ejufdem Indagatin Nummorum in Hibernia
cuforum & catalogus nummorum Anglo-
Saxonic- Danorum. 4. Lipfiæ . 1708 .
Ejufdem Nummi aliquot ex argento
prefaniiffi. 4. Lipfix. 1706.
Jo. Bur. Menkenius de Charlataneria eruditorum
cum notis varior . & Epiftola Stadei de
circumforanea litteratorum vanitate & notis ,
&c. 8°. Amft. 1727.
M. Jo. Jarckii Hiftoria Academiarum eruditarum
Italia & earum catalogus. 8 °. Lipfiæ.
1727.
Jo. Vinc. Gravinæ origines Juris Civilis &
alia opera. 4° . Lipfiæ. 1737.
Corpus juris civilis cum notis . Dyon . Gothofredi
& alior. Fol. 2. vol Lipfiæ. 1740.
Jo. Georg. Eccardi Corpus hiftoric. medii
avi , five fcriptores à Carolo Mag. ad finem
faculi XV. Fol. 2. vol . Lipfiæ. 1723.
Hiftoire de Bourgogne , par D. Planchet ,
Bénédictin . Fol . tom. 2. Dijon 1741 .
DECEMBRE. 1741. 2905
.
Le même Libraire a imprimé nouvellement
les Mémoires des Hommes Illuftres dans
la République des Lettres, avec un Catalogue
raifonné de leurs Ouvrages , par le R. P. Niceron
, Barnabite. tome 42. in- 12.
Nous avons reçu de Hollande le Profpe-
Elus de l'Edition d'un des plus importans
Ouvrages qui puiffent enrichir la République
des Lettres. C'eft le fieur de Hondt , Libraire
à la Haye , qui en a formé l'entrepriſe,
& qui a fait traduire en François le Profpe-
Etus , compofé d'abord en Latin. Voici cette
Traduction telle qu'elle eft imprimée à côté
du Texte Latin , & qui nous a paru exacte .
Le célebre JEAN GEORGES GRAVIUS , dont
le nom & la folide érudition font fi connus
dans le monde fçavant , après avoir mis au
jour le Tréfor des Antiquités Romaines en
XII. Volumes in folio , avoit réfolu d'y ajouter
une autre Collection , qui n'auroit été
ni moins belle , ni moins excellente en fon
genre que la premiere , fçavoir celle des
Antiquites & des Hiftoires d'Italie , afin de
réunir , pour ainfi dire , par ce moyen ,
le
refte du Corps au Chef, c'cft- à- dire , les au
tres Villes d'Italie à celle de Rome, leur Capitale
; à - peu-près de la même maniere
qu'on voit cette Maîtreffe du Monde , & la
fertile Italie , jointes enfemble dans les Denicrs
2906 MERCURE DE FRANCE

>
niers de Mucius Cordus , & de Fufius Calenus
, qui furent frapés après que la guerre
de la Ligue Italique eût été terminée à l'avantage
des Romains. Car ce grand homme
avoit bien compris que les affaires de Rome
& celles de l'Italie , foir pour la paix , foit
pour la guerre , de même que leurs ufages,
& ceremonies tant facrées que prophanes
étoient fi étroitement liées enfemble , que
la connoiffance des unes dépendoit néceffairement
de celle des autres. Il jugeoit encore
avec beaucoup de raifon , qu'on ne
liroit pas avec moins de plaifir & d'utilité les
chofes qui s'étoient paflées dans ces Pays - là
fur le déclin de l'Empire Romain , que celles
qui y étoient arrivées lorfque cet Empire étoit
dans fon plus grand luftre. En effet , l'Italie
a toujours été expofée à de grandes guerres ,
& fujette en tout tems à de fréquentes révolutions.
Ainfi on n'a pû ni dû ignorer
les faits ou les changemens un peu confiderables
, qui ont intereffé dans chaque fiécle
les Contrées ou les Villes qui compofoient
cette belle Province , qui a commandé pendant
fi long- tems au refte de l'Univers.
Ces raifons engagerent l'illuftre GRævius,
tout âgé qu'il étoit , à entreprendre ce bel
& magnifique Ouvrage , qui devoit s'imprimer
aux dépens de Pierre van der Aa ,
braire à Leyde , auquel la République des
Li
Lettres
DECEMBRE . 1741. 2907
Lettres fera perpetuellement redevable de
quantité de belles & excellentes Collections
qu'il a données au Public , & qui ne demandoient
pas moins de conftance dans l'exécution
, que de courage dans l'entrepriſe.
Après avoir donc fait venir de toutes parts
avec beaucoup de foins & de dépenses, les Livres
rares & curieux , néceffaires pour une
fi utile entrepriſe , on publia d'abord les fix
premiers Volumes de ce Tréfor ; mais avant
leur publication , le docte Gravius , confumé
d'années & de travaux , ayant gloricu
fement fini fa carriere , ne put jouir du fruit
de fon travail . Ainfi l'illuftre Jacques Perizonius
remplit avec plaifir fa place , & confacra
par une très-fçavante Préface ces fix
premiers Volumes à l'immortalité & à l'uſage
des Gens de Lettres, Mais ce fçavant homme
ayant pareillement été enlevé du monde
affés peu de tems après , au grand regret de
tous les honnêtes gens , un troifiéme Sçavant
voulut bien entrer dans la même carriere
, & fe charger de continuer l'Ouvrage
commencé. C'eft Pierre Burman dont je
veux parler. Son efprit vif & penetrant ,
fa diligence infatigable , fa profonde érudition
acquife par un travail affidû de plufieurs
années , font trop connus de tout le monde
pour avoir besoin de nos éloges . Ce fut
donc lui qui mit au jour tous les Volumes
1968 MERCURE DE FRANCE
mes fuivans de cet ample Trefor d'Antiquités
d'Italie , & qui acheva heureufement enfin
cet ouvrage immenfe , qu'il eut foin d'orner
des Préfaces néceffaires.
On prétend que la Sicile fut autrefois feparée
du Continent de l'Italie par la violence
des ondes ; mais les Sçavans ont toujours
jugé qu'on ne pouvoit feparer les Hiftoires
& les Antiquités qui concernent cette Ifle
de celles qui concernent l'Italie . La Sicile à
toujours été très- fertile en évenemens remarquables
, à compter même depuis les fiécles
fabuleux jufqu'au nôtre , & les Antiquités
ont tant de raport avec celles de Rome &
de toute l'Italie , qu'on ne peut les en fe
parer , fans faire un grand tort à l'Histoire
& au progrès des Belles - Lettres . C'est pourquoi
, après qu'on eut raffemblé avec foin
les meilleurs Livres , & les Ouvrages les plus
rares des Auteurs qui ont écrit avec autant de
fcience que de jugement fur les affaires & les
Antiquités de cette Ifle , on ajouta un nouveau
Tréfor des Antiquités de Sicile , à celui
des Antiquités d'Italie , & Pierre Burman l'enrichit
de fort belles Préfaces de fa façon . Sigebert
Havercamp , connu d'ailleurs par les
fçavans Ouvrages qu'il a donnés au Public ,
n'a pas peu contribué de fa part à perfectionner
le Tréfor dont il s'agit. Čar nous fommes
bien informés que Pierre van der Aa, a profité
DECEMBRE. 1741. 2909
fité de fes avis , & même qu'il s'eft fervi de
fon travail , particulierement pour ce dernier
Ouvrage. D'ailleurs , c'eft ce que prouvent
affés ce grand nombre d'Opufcules, traduits
en Latin & enrichis de fes Notes , qui font
inferés pour la plupart dans ce Tréfor ,& quelques-
uns dans celui des Antiquités d'Italie.
Tels font , par exemple , les Defcriptions
de l'ancienne Syracufe , & des Médailles de
cette Ville , faites par Mirabella & par Bo
nanni ; & principalement la Sicilia Numifmatica
de Philipe Paruta à laquelle
ce fçavant Profeffeur a joint un Commentaire
rempli d'érudition . Mais nous ne citerons
pas un plus grand nombre d'Auteurs fur ce
fujet ; car nous ne voulons pas donner ici ,
une lifte des Ecrivains dont les Ouvrages
font contenus dans ces Tréførs , vû qu'on en
a publié des Catalogues particuliers , & que
cet Ouvrage qui eft imprimé depuis quel
ques années , le trouve à prefent dans plu
fieurs Bibliothéques publiques , & même,
dans celles de quelques Particuliers. Nous
ajoutons ici avec raifon ces paroles , & même
dans celles de quelques Particuliers ; car
Pierre van der Aa ayant été contraint de
mettre ces Tréſors à un prix fort haut , à caufe
des travaux & des frais confiderables qu'avoit
coûté cet Ouvrage immenſe , bien des
gens fe trouverent obligés , malgré eux , de
fe
1
2910 MERCURE DE FRANCE
fe paffer de ces Tréfors , pour ne pas trop
épuifer leurs bourfes.
Il nous a donc paru que nous rendrions un
grand fervice au Public,fi nous facilitions aux
Sçavans , & furtout à ceux dont les revenus
font modiques , le moyen de fe pourvoir de
ces excellens Tréfors des Antiquités d'Italie
de Sicile , dont nous poffedons aujourd'hui
les Exemplaires. Comme nous n'avons
pas trouvé de meilleur expedient pour
arriver à ce but, que de baiffer confiderablement
le prix de ce grand ouvrage , & de le
diminuer même prefque de la moitié , nous
avons pris la réfolution de délivrer , pendant
un certain tems, les Exemplaires de cet Ouvrage
pour une fomme très - modique .
Če Tréfor entier , tant d'Italie que de Sicile
, eft compris en quarante- cinq Volumes,
dont le prix a été fixé par P. van der Aa, de
la maniere qui s'enfuit :
Les quarante -cinq Volumes ont été vendus
en petit papier , • 44 fl. en grand papier
580 A. Mais pour les raifons
ci deffus énoncées
,
nous en diminuons
confiderablement
le prix,
& le réduifons
prefque
à la moitié
: de forte que depuis
ce jour juſqu'au
1. Avril de l'an- née prochaine
1742. & non pour un plus long terme , nous délivrerons
les Exemplai- res pour
le prix qu'on
va marquer
:
Les
DECEMBRE. 1741. 2911
Les quarante cinq Volumes en petit papier,
-
pour
... 250 A.
350 A. Par raport
à ceux
qui font déja pourvûs
des fix premiers
Volumes
, qui ont été im
primés
après
la mort
de M. Gravius
, avec la
Préface
de M. Perizonius
, ils pourront
acquerir
les xxxix
. Volumes
qui fuivent
en petit papier
, pour
en grand
papier
, pour
en grand papier , pour
,
210 A.
·
310 A.
Mais après le terme indiqué , c'eft- à-dire,
après le i . Avril de l'année 1742 , cet Ouvrage
fera vendu ,
Les XLV. Volumes en petit papier , 400 fl.
en grand papier , • 540 Al. Les xxxIx. Vol, en petit papier
, 350 A.
en grand papier , 480 fl.
Ainfi jufqu'au 1. Avril de l'année prochaine
1742. on pourra fe pourvoir des Volumes
de ces Trefors pour le prix marqué
ci-deffus. Ils fe trouvent ;
A Amfterdam , chés François l'Honoré &
Fils , Waesbergen , Werftein & Smith , Schonten
, Wor & Onder de Linden.
A Leyden, chés Luchtmans & Van der Aaj
A Utrecht , chés Broedelet.
A Harlingen , chés Van der Plaats.
A Leeuwarden , chés Van Dejel.
A la Haye , chés De Hondt.
AS.
2912 MERCURE DE FRANCE
1
1
ASSEMBLEE PUBLIQUE
de l'Académie Royale des Belles- Lettres
de Marſeille.
L
E 25. Août dernier , jour de la Fête de
S. Louis , l'Académie des Belles -Lettres
de Marfeille , tint , fuivant la coûtume , fon
Affemblée publique pour la diftribution du
Prix.
M. de Gerin , Lieutenant Géneral de l'Amirauté
, ouvrit la Séance en qualité de Di
recteur , par le Difcours fuivant .
MESSIEURS , il eft fi ordinaire à ceux qui
affiftent à la plupart des actions publiques , de n'y
aporter qu'un efprit de curiofité , que ceux qui y
préfident ne fçauroient trop faire fentir l'utilite qui
en est l'objet. Plufieurs ufages , fagement établis ,
infenfiblement regardés comme indifferens , enfuite
comme frivoles , fe font enfin perdus, fans doute
pour avoir négligé d'en déveloper les avantages &
dexhorter les hommes à les recueillir. L'idée que
j'ai de cette Affemblée m'autorile à n'ufer d'une pareille
précaution que fort légerement , & à n'en
ufer même que par raport à la place que j'ai l'honneur
d'occuper.
Le motif qui nous affemble tous les ans en ce
jour , eft d'exciter ou d'entretenir l'émulation . Les
differens Jeux inftitués autrefois , quoique moins
utiles en eux-mêmes pour la plupart , n'avoient pas
d'autre objet. On y couronnoit le vainqueur aux
yeux de fes Rivaux & du Public. Nous le parons de
même aujourd'hui du Laurier dont nous fommes
les Dépofitaires , & la noble jaloufie doit être encore
DECEMBRE. 1741. 2913
core plus excitée par l'impartialité , qui diſpenſe
cette Couronne.
>
L'Antiquité en inventa pour tous les genres de
mérite : aucune cependant ne fut plus utile que la
Couronne Litteraire , je n'en excepte pas même
celles que l'on confacra aux differens Exploits militaires.
L'ambition outrée de ces hommes , nés
pour préparer des malheurs à l'Univers , ufurpa les
hennes. La force ou l'adreffe du corps en valut aux
Athletes . Le talent d'amufer l'oifiveté , ou de nourtir
la malignité , en attira à quelques Comédiens ;
mais les Couronnes déférées aux Gens de Lettres
produisirent des Héros , des Orateurs , des Legifla
teurs , des Politiques , qui rendirent leur République
formidable à toute la Terre. Celle qu'on déčerna
à Démofthene & à Ciceron , en fait affés fertir
l'utilité , & peut encore prouver qu'un homme
Lettré de plus ou de moins à la tête des affaires
décide fouvent de la deftinée d'un Etat . Puiffe la
Couronne que nous décernons tous les ans , devenir
auffi utile ! Les Emulateurs qui y afpirent , doivent
ofer l'efperer. Il y a toujours dans le monde , fi je
puis m'exprimer ainfi , les mêmes femences d'efprit
qui ne ceffent d'y circuler , & que l'étude des Lettres
fixe , nourrit & fait germer dans les Sujets qui
les cultivent, Ce germe fécond , fi propre , en fe
dévelopant , à produire des hommes illuftres , ne
doit pas être fterile dans notre climat. La vivacité,
le feu qu'on nous reproche prefque , fi capable de
forcer les défirs , eft la plus prochaine difpofition
aux grands fuccès.
Le vulgaire s'imagine que les Lettres ſe réduiſent
à Part de tourner délicatement une phraſe ou un
Vers , mais pour peu qu'on foit inftruit , on n'ignore
pas qu'elles préparent & forment aux vertus
civiles , morales & militaires . Les exemples qui per-
II Vol. G fuadent
2914 MERCURE DE FRANCE
udent toujours mieux que les reflexions , & dont
1'Hiftoile abonde , ne prouvent - ils pas qu'un Etat
eft redevable aux Lettres & aux Sciences de fes
moeurs , de fa politeffe , de fa fplendeur & de ſa félicité
? Elles fupléent les années , l'expérience , la
naiflance. Elles ouvrent, fortifient , poliffent la Raifon
, qui feule nous rend meilleurs & conféquemment
heureux Elles transforment des Citoyens or
dinaires en des hommes diftingués , dont les vertus
& les lumieres influent enfuite fur tous les Corps
de l'Etat. Elles rectifient les qualités du coeur , 'elles
perfectionnent les talens de l'efprit , elles annobliffent
les dons de la Nature , elles illuftrent enfin les
prefens de la Fortune. Que d'avantages ne laifle
pas apercevoir ce détail , quelque léger qu'il foit !
Que de motifs preffans , pour faire naître & ranimer
dans tous les coeurs une paffion fi néceffaire à
Phomme & à la Societé ! Que feroit ce donc fi ,Difpenfateurs
des Couronnes Litteraires , fi.admis dans
le Sanctuaire des Mufes , & engagés à leur attirer
des hommages , nous qui compofons ici leur Cour
& en quelque forte leur famille , nous ofions les
négliger?
Mais mon deffein eft de laiffer feulement entrevoir
l'utilité de cette Affemblée , du Prix qu'on y
décerne & des Lettres que nous cultivons . Ces matieres
ont été fi fouvent & fi bien traitées , qu'il me
fuffit de reveiller l'impreffion que d'excellens Ouvrages
ont déja fait fur l'efprit de ceux qui m'honorent
de leur attention .
Sans doute qu'ils fe rapelleront ici tout ce que
dût autrefois aux Sciences la célebre Marſeille . La
nouvelle n'eut - elle rien à ajoûter à cet ancien luf
tre , doit être touchée de voir fes Citoyens ramener
les Mufes dans fon fein . Pourroit - elle être
infenfible au mérite 'Litteraire de ſes Enfans ? Si ce
fentiment
DECEMBRE. 1741. 2915
fentiment , qui devient en elle un amour propre ,
avoit befoin d'être fortifié par l'impreffion de l'e
#emple , en est - il de plus marqué , de F us brillant,
de plus preffant que celui que lui offrent d'illuftres
voilins ? Rapellons les fiécles paflés , portons nos
regards fur Toulouſe , elle va fixer notre attention.
Auffi fameufe par fon inclination pour les Lettres
& pour les Arts , que par les Exploits militaires ,
elle fait éclore les plus utiles femences du favoir
& recueille les plus précieufes étincelles du génie
échapées aux ténebres des fiécles barbares. Animée
´d'un zele éclairé , elle invite , elle attire les Troubadours
, les favorife , les excite par des jeux qui
femblent ne conferver le nom & l'éclat des anciena
Jeux Floraux , que pour rapeller le triomphe que
la fageffe de la Poële remporte fur la licence des
moeurs ; perfuadée que c'eft fixer les vertus dans
une Ville , que d'y fixer les Lettres , elle leur fonde
un azile que les Talens Litteraires foûtiennent
depuis le treiziéme fiécle , & que tous les âges ref
pecteront , parce qu'il porte fur des fondement
immortels , je veux dire fur l'efprit & fur le geniet
Une Héroïne Litteraire, moins flatée des avantages
de fa naiſſance & de fa beauté , que de fon amour
pour les Mufes , les dote de fa fucceffion , & rend
fon héritage auffi durable que fa gloire , en le tranf
formant en Gouronnes , contacrées à leurs Nourrikons
; enfin un koy, qui mérite tous nos éloges ,
vient puifer dans le célebre Sanctuaire d'Apollon ,
établi à Touloufe , le goût des Sciences , comme le
tréfor le plus propre à enrichir fes Etats . Ce Spectacle
frapant qu'offre l'Hiftoire , fi intérellant pour
les Mufes , doit nous être toujours nouveau ; que
dis-je ? Il n'a jamais ceffé , il dure encore. L'éclat
de cette autre Athenes , loin de s'être affoibli de
puis tant de fiécles , brille chaque jour davantage ;
Gij ic
2916 MERCURE DE FRANCE
-
le zele des Citoyens l'entretient ; ils ſe font de la
culture & du progrès des Lettres un intérêt public
& perfonnel , & datent la Fête de leur Nation du
jour où ils triomphent. Nous devions à cette Académie
, ornement fi digne de fa Province , un témoignage
folemnel de nos fentimens ; nous faififfons
avec empreffement l'occafion de le lui rendre.
Elle a eu la politeffe d'avojier qu'elle forma fon goût
fur celui de nos Ayeux Académiques , & nous
avoüons volontiers qu'à notre tour nous profitons
de celui qui regne dans fes Ouvrages . Nous ne négligerons
rien pour entretenir entre les deux Compagnies
une union d'eftime & de tendreffe , auffi
fateufe qu'utile ; nous y fommes même intereffés ;
quel moyen plus affûré aurions- nous , pour foûtenir
l'éclat d'un établiffement , Ouvrage d'un Héros,
l'honneur de fon fiécle , la reffource de la France ,
la terreur de nos ennemis & l'étonnement de l'Eu
rope ?
Ce Héros , toujours heureux , parce qu'il fut fage
, & toujours fage , quoiqu'il fût heureux , qui ne
combattit jamais fans raincre , & qui ne ceffa de
vaincre que pour triompher dans les Traités , pour
qui l'admiration renaît dès qu'on le nomme , & qui
dans l'âge extrême , ſembla revivre par fa valeur ,
pour s'affûrer l'immortalité en mourant entre les
bras de la Victoire , la Nature ayant alors fufpendu
fes loix pour celui en faveur de qui la Fortune inconftante
avoit toujours fixé les fiennes ; Villars enfin
, Fondateur de notre Académie , lui a laiffé ce
Laurier renaiffant , dont on le vit fi fouvent couronner
d'illuftres vainqueurs dans le premier Temple
d'Apollon. Effayons , Mrs , de tromper , ou du
moins d'adoucir nos regrets immortels. Ce Héros ,
qui ne vivoit que pour la gloire de la France , ne
ceffe pas de lui être utile, quoiqu'il ne foit plus. Les
homme's
DECEMBRE. 1741. 2917
hommes vulgaires meurent tout entiers , mais Villars
n'eft pas abfolument perdu pour nous. Il fe ranime
pour la Pofterité ; ſes actions font des Eleves
à l'Héroïfme ; le Prix qu'il a fondé en forme pour
les Lettres , & par ce double avantage le fçavoir lui
doit prefque autant que l'Etat . Les Mufes s'attendoient
à cette attention de fa part . Les merveilles
de fa vie leur avoient fourni une ample matiere ; il
lui reftoit à exciter leurs chants par des Couronnes
dignes d'elles & de lui .
Pour nous, que pouvons-nous faire de moins que
de jetter fur l'Urne fatale qui renferme fa cendre ,
des fleurs qu'il nous aprit à cultiver ? Tout autre les
choifitoit mieux que moi , & fa réputation y perdroit
moins. Mais quel que fût l'hommage , il feroit
toujours au- deffous du Héros , comme l'encens
qu'on offre à la Divinité . Les fentimens qu'on a
pour les Grands Hommes après leur mort , font une
espece de Religion . Le filence de l'admiration les
loue mieux que tout ce qu'on pourroit dire . Je me
borne donc à défirer que la feconde vie que lui
doivent nos Muſes , immortalife cette Académie
pour immortalifer notre reconnoiffance . Que le
Fils , précieux refte de fou Sang , notre Protecteur,
le foit auffi long - tems que nous le défirons , & que
le Ciel ne nous en donne jamais que du même nom
& du même mérite !
On lût enfuite l'Ode qui a remporté le Prix , dont
le Sujet eft la Providence. Elle eft du R. P. Arcere ,
de l'Oratoire , Profeffeur des Belles - Lettres . Cette
Ode mérite de tenir ici fa place.
LA PROVIDENCE.
Uel Spectacle étonnant ! de ta bonté féconde ,
Grand Dieu, les tréfors font ouverts .
G iij
De
2918 MERCURE DE FRANCE

De la nuit du Cahos tu fais fortir le Monde ;
Ta voix enfante l'Univers .
La Terte offre à mes yeux fes richeffes naiffantes
Et l'Empire des Eaux fes vagues écumantes ;
Des Cieux j'admire la fplendeur.
Les feux étincelans de la célefte voûte
Me retracent déja dans leur immenſe route
Une image de ta grandeur.
*
Cette Scéne à mes yeux va bien- tôt difparoître ;
L'abîme s'ouvre devant moi .
L'Univers fe diffout ... O toi , qui l'as fait naître¿
Il ne peut durer que par toi.
Je le vois chancelant par fa propre foibleffe ,
Si ton bras tout puiffant ne le foûtient fans ceffe
Il périt à chaque moment.
Viens , opofe à fa perte un falutaire obſtacle ,
Et pour le conferver prolonge le miracle
Que ta main fit en le formant.
*
Un ordre merveilleux regne dans la Nature =
Non , d'infenfibles Elémens
N'entretiendront jamais ce bel ordre , qui dure
Depuis la naiffance des tems .
La matiere fe meut , & je vois ce Prothée
Prendre, quitter, reprendre une forme empruntée.
Qui produit tant d'effets divers ?
Dc
DECEMBRE. 2919 1741
De ces combinaiſons je recherche les caufes
Et mon efprit retrouve en ces métamorphofes
Le Dieu qui forma l'Univers,
*
L'ombre fuit , & déja la rive Orientale
De l'Aurore a reçû les pleurs ;
La lumiere naiffante à mes regards étale
. L'éclat des plus vives couleurs .
J'adore .en la voyant , ia Sagelle immortelle
Qui par ce don brillant rend la Terre fi belle ;
A fa fuite marche le bruit ;
Elle vient du fommeil bannir la douce yvreſſe ;
Tout s'anime : Bien- tôt de leur active adrefle
Les Mortels goûteront le fruit .
*
Ah ! c'eft toi que j'admire en ta marche rapide ,
Globe ardent , Globe lumineux,
Tu fends les airs ; dis-moi quelle eft la " main qui
guide
Le cours de tes utiles feux ?
Quel compas a tracé ta conftante carriere ?
Tu voles , tu répands une active lumiere ,
Gage des céleftes faveurs.
D'un verd , ami des yeux , la Terre fe couronne';:
Les trésors de l'Eté , les préfens de l'Automne ,
Du Printems remplacent les fleurs.
*
G. iiij
Mais
2920 MERCURE DE FRANCE
Mais quelle affreufe nuit partout répand ſes ombres ?
Les vents frémiffent dans les airs ;
Le Tonnerre fe forme ,
& des nuages fombres
Sortent les foudres , les éclairs ....
Tout va périr, Grand Dieu ! Qu'ai - je dit téméraire
Tu vas faire couler une Onde falutaire
Du fein de ces noirs tourbillons.
Mille & mille ruiffeaux s'épanchent à ma vûë ,
Er fortant avec bruit des prifons de la nuë ,
Ils enrichiffent nos fillons .
*
Orgueilleux Océan , toi dont l'Onde fi fiere
Frape la rive en frémiſſant ,
Arrête , un peu de fable eft l'unique barriere
Que t'opofe le Tout- Puiffant.
Déja toin de nos bords une mobile maffe
Jouet des Aquilons , fend l'humide ſurface ,
Et parcourt cent divers Climats .
Vafte Mer, vents fougueux, fervez la Providence ;
Par vous aux Nations fa fagefle diſpenſe
Les Richeffes qu'elles n'ont pas.
*
Tout change autour de moi . Le Théatre du monde
Offre des plaifirs , des douleurs .
J'aperçois chaque jour une Scéne féconde
En brillans fuccès , en malheurs .
Est- ce un deftin aveugle , ou le pouvoir des Aftres ,
Qui
DECEMBRE . ` 1741 . 2921
Qui regle le bonheur, qui regle les défaftres ,
Et fait naître ces changemens ?
De ces effets divers la cauſe m'eft connue ,
Un Dieu préside à tout ; c'eft fon doigt qui remu
Les refforts des Evenemens.
*
Il tire l'indigent du fein de la pouffiere ;
De l'Innocent il rompt les fers.
Sa juftice humilie une ame trop altiere ,
Et la livre à d'affreux revers .
Arbitre des Etats qu'il enleve ou qu'il donne ,
A tous les Souverains, quand il renverse un Trône
Il fait des leçons de terreur ,
Et quand il veut punir des Nations perfides ,
Il arme les Humains ; leurs glaives homicides
Sont l'inftrument de fa fureur.
܀
Du bien de tes Enfans , aimable & tendre Pere
Tu fais le plus doux de tes foins
Tu confultes , Seigneur , touché de leur mifere
Et ton amour , & leurs befoins.
Un Ennemi cruel contre moi ſe déchaîne :
Que peuvent les tranfports d'une impuiffante hainet
Contre lui tu combats pour moi..
Accablé de mes maux , ta bonté me délivre ,
Auteur de l'Univers , c'eft toi qui me fais vivre :
Gv Je
2922 MERCURE DE FRANCE
Je ne dois vivre que pour toi.
Eft mihi fida comes provida cura Dei.
Coftabadii , Aquitani , Epigram.
1
M. de Gueydan , Préfident du Parlement de Provence
, ci- devant Avocat Géneral , ayant été élû
Académicien Affocié , à la place de feu M. l'Abbé
Pagy, prono ça un Difcours également éloquent.
& modefte fur fon Election , auquel M. le Direc
teur répondit dignement.
M. Cary lût enfuite un Difcours fur les Paffions
lequel a été envoyé à l'Académie Françoise pour
le Tribut annuel qui lui eft dû par celle de Marfeille.
M. du Lard lût une Piéce de Poëfie fur l'Origine
du Phénix
M. de Gueydan lût un Difcours (ur les avantages
de la railon.
Et M. de Robineau termina la Séance par la lec
ture d'une Fable de fa façon , intitulée le Cor de
Chaffe & le Flageole .
Nous aurions fouhaité donner ici à cette occafion
, la Gravûre de la belle Médaille du Maréchal
de Villars , frapée exprès & en or , pour le
Prix qu'il a fondé & que l'Académie difti ibue tous
les ans , mais cela n'eft que differé , & nous y fatisferons
dès que nous aurons /vû la Médaille par
aous-mêmes , & que nous aurons reçu quelques
éclairciffemens qui nous manquent fur ce fujet.
On a apris de Bordeaux , que M. Kun , Profef
feur en Mathématique à Dantzick , a remporté la
prix de l'année derniere , par une belle Differtation
, fur l'origine des Fontaines des Rivieres ,
que l'on trouve à Bordeaux ches le fieur Brun, I'm→
primeur & Libraire de l'Académie.
On
DECEMBRE. 1741. 2923
On mande de Rome que la nouvelle Académie
de l'Hiftoire Eccléfiaftique a tenu la prémiere Affemblée
, dont le Pere Jofeph Orfi , Sécrétaire de
la Congrégation de l'Index , & l'un des Académiciens
, fit l'ouverture par un Difcours fort Elo-
.quent.
Le Pape a établi une autre Académie dont S. S..
a nommé Sécrétaire le Pere Thomas Sergio , Confulteur
du Saint Office , & cette Académie fera
chargée de faire des recherches fur la Liturgie..
M. de Vellerot , Confeiller au Parlement de Be→
zançon , nous a fait l'honneur de nous écrire pour
nous aprendre qu'il a été foûtenu avec beaucoup d'éclat
& avec tout le fuccès poffible , dans le Couvent
des Cordeliers de l'ancienne Obeſervance , une
Thefe de Théologie par un jeune Chanoine de
cette Ville . Elle étoit dédiée à S. E. M. le Cardinal
de Tencin , dont on voyoit le Portrait fons un
Dais magnifique. Toutes les Compagnies de la
Ville affifterent en Corps à cet Acte , qui fut des
plus brillans , & où il y eut un concours extraordinaire
, fur tout d'Eccléfiaftiques & de Religieux
de tous les Ordres & c.
ESTAMPES NOUVELLEST
La fuite des Portraits des Rois de France ,' des
Grands Hommes & des Perfonnes Illuftres dans
les Arts & dans les Sciences , continuë de paroître
avec fuccès , chés Odieuvre , Marchand d'Eſtampes ,
ruë d'Anjou ; il vient de mettre en vente ceux de
ན་
ROBERT XXXVI. Roy de France , mort à Me-
Jule 20. Juillet 1031. après 35. ans´ de Regne' ,
def né par Boizot , & gravé par Fiquet .
LOUIS SERVIN , reçû Avocat Géneral au Parle
G vi men
2924 MERCURE DE FRANCE
ment en 1589. mort fubitement aux pieds de Louis
XIII. tenant fon Lit de Juftice le 28. Juin 1627.
EXTRAIT des Regiftres du Confeil d'Etat.
S
Ur la Requête préſentée au Roy en fon Confeil
par Jacques Gautier, contenant que Sa Majeſté ,
par Arrêt de fon Confeil du 12. Novembre 1737. a
permis au fieur le Blond & ceux qui lui feroient
dopnés pour Adjoints , d'exercer feuls pendant l'efpace
de 20. années exclufivement à toutes perfonnes,
l'Art d'imprimer les Tableaux avec trois Planches
, & par autre Arrêt du premier Avril 1738. Sa
Majefté , en ordonnant l'exécution du précédent ,
auroit ordonné que le fieur le Blond feroit tenu de
travailler à fon Art d'imprimer les Tableaux en préfence
des fieurs Dufay , de l'Académie des Sciences
& Intendant du Jardin Royal ; Duhamel , auflì d'e
l'Académie des Sciences ; Gautier de Montdorge ,
Maître de la Chambre aux Deniers , & de la Dile
Baffeporte , reçûë en furvivance pour la place de
Deffinateur au Jardin Royal , qui lui avoient été
donnés pour Adjoints , au défir de l'Arrêt du 12
Novembre 1737. & qu'il leur déclareroit tous les
fecrets & la pratique de fon Art,mais que le fieur le
Blond eft décedé au bout de deux annnées , fans
avoir prefque fait aucun ufage de ce Privilege ; en
forte que quoique Sa Majesté ait parû dans le deffein
d'introduire cet Art, dans le Royaume , en accordant
le Privilege au Sr le Blond , il n'a pas néanmoins
eú le fuccès qu'on en pouvoit attendre , au
moyen du décès du Sr le Blond, auquel le Privilege,
étoit perfonnel , & eft ceffé par fon décès , & comme
le Supliant poffede le même Secret, qui eft trèsintéreffant,
fur tout pour l'Anatomie, la Botanique &
l'Hiftoire Naturelle ,il défireroit d'exercer cet Art, fi
Sa
DECEMBRE . 1741. 2925
Sa Majefté veut bien lui accorder le Privilege . A ces
Caufes , requeroit le Sr Gautier , qu'il plût à S. M,
lui accorder le Privilege exclufif d'exercer pendant
trente années l'Art d'imprimer les Tableaux avec
trois Planches , avec faculté de choisir tel Affocié
qu'il jugera à propos , pour l'admettre à fon travail,
& trois Adjoints , dont le choix fera confirmé par
8. M. & qu'en cas qu'il vienne à décéder avant l'expiration
des 30. années , le Privilege apartiendra à
Marie Anne Maureau , fon Epoufe & à leurs Enfans
nés & à naître , conjointement avec Gaſpard Gau
tier ,fon frere , & au furvivant d'eux , pour le tems
qui en reftera à expirer : Vû lad. Requête , oui le
raport du Sr Orry , Confeiller d'Etat & Ordinaire
au Confeil Royal,Controlleur Géneral des Finances .
Le Roy en fon Confeil , ayant aucunement égard
à lad . requête a permis & permet à Jacques Gautier
d'exercer pendant l'espace de 30. années, à compter
de la date du préfent Arrêt , l'Art d'imprimer
les Tableaux avec trois Planches. Fait S. M. défenfes
à toutes perfonnes de quelque qualité & condition
qu'elles foient , de le troubler , fous quelque
prétexte que ce puiffe être , directement ou indirectement,
à peine de tous dépens, dommages & intérêts.
Fait au Confeil d'Etat du Roy , tenu à Verſailles le
5. Septembre 1741.Collationné . Signé,DEVOUGNY
Le Roy ayant accordé le Privilege qu'on vient.
de lire au Sr Gautier , de Marfeille , on donne avis
aux Curieux qu'il a mis en vente vingt & un Mor
ceaux de Gravure ou Eftampes coloriées ; voici la
Lifte des differens Sujets , avec leur grandeur & le
prix de chacun.
Diogene , avec les amis , d'après un Tableau de
Salvator Rofa , du Cabinet du Marquis de Broglio,
grandeur de toile de 15. Prix 4. livres.
Demosthene
2926 MERCURE DE FRANCE
Demofthene , reflechiffant fur la vie de l'homme ;
d'après le même Peintre ; Pendant au précedent ,
même grandeur. Prix 4. liv.
Une Vierge & la Sainte Famille , d'après le Ca
rache , grandeur de toile de 8. Prix 2. liv.
Portrait de M. Dufreny , Poëte , d'après M. Coy
pel , du Cabinet de M. de C. même grandeur.
Prix 2. liv.
Une Suzanne les Vieillards , dans un Jardin ,
d'après M. de Troye , grandeur de toile de 6. Prix
I. liv. 10. fols.
Bethzabée , fortant du bain , d'après le même ,
Pendant au précedent , même grandeur , Prix
1. liv. 10. fols .
Deuxjeunes Enfans , comme Nature , d'après le
Correge , du Cabinet de M. le Marquis de Broglio ,
même grandeur. Prix r. liv . 10. fols.
Un vieux Chimiste , dans fon Laboratoire , d'après
Albert Durer , du Cabinet de M. de la Moſſon , même
grandeur. Prix 1. liv . 10. fols.
Une tête d'Anatomie , où on voit la démonftra
rion de tous les mufcles de la tête & de la face .
peinte & gravée par l'Auteur , même grandeur.
Prix 1. liv . 10. fols .
Une Tulipe , d'après Nature , par l'Auteur , mê
me grandeur. Prix 1. liv. 10. folsa
Un Payfage , repréſentant des Ruines & Figures
de M. de la Joue, grandeur de toile de 4. Prix 1. liv.
Un Tableau , repréſentant des Prunes dans un
Baffin , même grandeur. Prix 1. liv .
Autre repréfentant des Pêches , tous les deux
par l'Auteur , même grandeur , Pendant au préce
dent Prix 1. liv .
Le Portrait du Pape regnant par l'Auteur , moitié
de la grandeur d'une toile de 4. Prix 10. fols.
Le Portrait de M. le Cardinal de Fleury , d'après
M..
DECEMBRE. 1741
1741. 1927
M. Rigault , du Cabinet de M. l'Abbé Briffart , mê
me grandeur Prix 10. fols.
Une Tête de S. Pierre , d'après Lebourdon , même
grandeur Prix 10 fols.
Une Tête d'Anatomie , en petit , où on voit l'ex
plication en Latin des mufcles & des parties qui
compofent la face , même grandeur . Prix 10. fols.
Femme Flamande , coupant des oignons , d'après
M. Girardow , du Cabinet de M. de la Moffon , même
grandeur. Prix 10. fols.
Un Papillon , pour l'Hiftoire Naturelle , du mê
me Cabinet , même grandeur. Prix to. fols.
Une Coquille Turbinite , nommée Drap d'or, auffi
pour l'Hiftoire Naturelle , du même Cabinet , moitié
de la grandeur ci - deffus. Prix 5. fols.
Un Efcargot , du même Cabinet , même grandeur..
Prix S fols.
Le prix que l'on donnera pour l'accommodage de
chaque Eftampe , c'eft- à- dire , pour les coller furt
toile , les tendre fur un Chaffis , & les vernir, de toutes
les differentes grandeurs , eft expliqué ci -après.-
Toile de 15. 1. liv 10. fols.
Toile de 8.
15. fols.
Toile de 6.
Toile de 4.
12. fols,
8. fols.
f.fols
.
Moitié de 4.
Quart de 4.
3. fols.
L'Auteur
demeure
rue S. Honoré , vis- à-vis les
Peres de l'Oratoire
, chés M. le Bon , au troifiéme
fur le devant. Afin que le Public ne foit pas trompé ,
avertit qu'il les débite lui- même , & qu'aucun
autre
ne les livrera dans Paris .
Sans entrer dans un plus grand détail du progrès
de cet Art & de fon utilité pour l'Hiftoire Naturel-
Je fur laquelle nous efperons nous rendre dans le
Mercure prochain , d'une maniere encore plus fatisfalfante,
2928 MERCURE DE FRANCE
tisfaisante , nous nous contenterons d'expofer ici
aux yeux du Public un Echantillon d'une Coquille,
imprimée avec les couleurs , & nous réservons à
donner enfuite quelques Morceaux encore plus détaillés
& plus finguliers..
On continue de vendre chés les R. P. Auguftins ,
près la Place des Victoires les Cartes de feu le R. Pere
Placide , Géographe ordinaire du Roy , fçavoir :
Le Royaume de Siam & fa Deſcription , deux
feuilles .
Les Poftes de Paris aux Pays Errangers, une feüille .
La France , quatre feuilles .
Le Portugal , une feuille.
La Catalogne , deux feuilles.
Les dix fept Provinces des Pays - Bas , une feuille .
Les Province-Unies des Pays - Bas , deux feuilles ,
Le Comté de Flandres , une feuille.
La Savoye , une feuille .
Le Piémont & le Montferrat , deux feuilles.
Le Cours du Pô , cinq feuilles .
Le Cours du Danube deux feuilles & demie.
L'Allemagne , une feuille.
On vient de Publier une Carte particuliere de la
Moravie , avec les Plans des principaux Poftes de
cette Province . Le Théatre de la Guerre en Allemagne
, pendant les Campagnes de 1733. 34. &
35. en 80. Planches avec des Difcours & des Tables
pour les Campements, &c. prix 30. liv . On les
vend chés le fieur le Rouge , Ingénieur Géographe
du Roy , rue des Grands Anguftins vis - à - vis le
Panier fleury.
Le Public eft averti , que l'Orvietan de Contugi;
connû depuis fi long- tems, fe diftribue toujours en
fon même Bureau , à la defcente du Pont-neuf au
coin

DE
L
VILLE
THEQUE
BLIO
LYON
#1893
DECEMBRE. 1741. 2929
*
.
Coin de la ruë Dauphine , à l'Enseigne du Soleil
d'or ; cct Orvietan dont il a le fecret , & qui eft gés
neralement aprouvé par les bons effets , contre
toutes les Maladies venimeufes & Peftilentielles ,
opere radicalement la guerifon de ceux qui en fourt
attaqués ; c'eft fans contredit le meilleur contrepoifon
qui ait encore parû jufqu'ici ; on l'employe
avec grand fuccès dans les Fievres malignes , petites
Veroles , Scorbut & autres Maladies de ce genre
; pris à jeun de la groffeur d'une feve , il guerit
les maux d'eftomach les plus inveterés ; il eſt abfo
lument néceffaire pour la confervation des Beftiaux
, Chevaux & autres Animaux qui fe feroient
repus de mauvais pâturages ; l'experience & l'uſage
qu'on fait de ce Remede depuis 150. ans , en prouve
la bonté . Il a toujours été diſtribué par les fieurs
Contugi de peres en fils : Mrs les Officiers & les
Etrangers qui voudront en avoir , tant pour eux
que pour leurs équipages , s'adrefferont au même
Bureau , & on leur fournira la maniere de s'en fervir
, foit en poudre foit en liquide.
** ****
SPECTACLES.
'Académie Royale de Mulique continue
les repréſentations de la Paftorale
Héroïque d'e , que le Public ne fe laffe
pas de voir. La Dlle le Maure jouë toujours
le premier rolle avec de très - grands
aplaudiffemens .
On donne auffi le Ballet des Fêtes Grecques
1930 MERCURE DE FRANCE
1
ques Romaines tous les Jeudis , dans le
quel la Dlle Camargo , dont on a déja parlé
repréſente Terpficore , dans le Prologue ; elle
eft géneralement aplaudie par la legereté
& la varieté de fes pas .
NOUVELLES ETRANGERES.
RUSSIE,
Na apris de Petersbourg du 13 , du mois der
nier , que la Prince le Rézente avoit reçû un
courier de Wybourg qui lui avoit raporté qu'un
détachement des troupes du Roy de Suede avoit
tenté une defcente dans les environs de cette Place,
mais que les Mofcovites avoient repouffé les
ennemis.
M. de Beftuchef, ci - devant Miniftre d'Etat &
du Cabinet , lequel avoit été arrêté à l'occafion de
F'affaire du Comte Erneſt Biron , & qui depuis qu'il
a été remis en liberté , avoit été envoyé à une de
fes Terres , a été rapellé de fon éxil , & la Pinceffe
Régente l'ayant fait affûrer que le Czar lui
rendoit la bienveillance , lui a fait donner mille
Roubles pour les dépenfes de fon voyage.
Cette Princeffe a dépêché un courier à M. de
Beftuchef qui a été Miniftre du Czar à Stockholm,
& qui eft frere de celui qui a été Miniſtre du Cabinet
, pour lui donner ordre de fe rendre à Dreſde
en qualité de Miniftre de S M. Cz .
Les derniers avis reçûs de Wybourg , portent que-
P'Arteman Jefremoff , à la têt: de 400. Colaques &
d'un
DECEMBRE. 1741 2931
P'un pareil nombre de Calmouques , ayant fait une
courfe dans le Pays ennemi , avoit pillé quelques
Villages , qu'il avoit brûlé toutes les provifions de
bled & de foin des habitans , & qu'ayant rencontré
une troupes de Payfans qui avoient voulu lui diſputer
le paffage d'un defilé , il en avoit tué 60. fair
80. prifonniers , & avoit enlevé un grand nombre
de chevaux & de beftiaux .
On mande de Petersbourg du 6. du mois dernier ,
que l'évenement qui vient de placer la Princeffe
Elizabeth Petrowna fur le Trône de la Ruffie , s'eft
paffé fans aucune effufion de fang & fans aucun tumulte
, & que cette affaire a été entierement con
duite par les Grenadiers des Régimens des Gardes.
Sept d'entre eux allerent le . entre onze heures
& minuit offir leurs fervices à la Princeffe Elizabeth
Petrowna pour la faire déclarer Czarine , &
cette Princeffe s'étant mife à leur tête , fans héfiter
, elle ſe rendit aux Cafernes , où elle trouva le
refte des Grénadiers , que fa préfence détermina
fur le champ à fuivre l'exemple de leurs camarades ;
plufieurs détachemens furent envoyés en même.
tems par les ordres , pour arrêter tous les Etrangers
qui avoient part au Gouvernement , & la Princeffe
ayant pris avec elle un autre détachement de
Grenadiers , elle marcha au Palais d'hyver , où l'on
s'affûra de la perfonne du Czar & de celle de la
Princeffe Régente , ainfi que du Prince Antoine
Ulrich de Brunſwick Bevern & de la jeune Prineffe
foeur du Czar. La Princeffe Elizabeth Petrowna
retourna enfuite chés elle , & tous les Ordres
de l'Etat s'étant affemblés dans fon Palais , ils furent
unanimement d'avis que les dernieres volontés
du Czar Pierre I. n'avoient point été exécutées;
que la mort de ce Prince avoit été fuivie d'un
grand nombre d'injuftices & de violences ; que
quelques
2932 MERCURE DE FRANCE
quelques- uns de ceux qui avoient été chargés de la
principale adminiftration des affaires , avoient fait
contracter par la Moſcovie divers engagemens trèspréjudiciables
aux interêts de la Nation ; que les
Finances étoient épuifées par les guerres qu'on
avoit entreprifes depuis quelques années ; qu'il
étoit abfolument néceffaire de remédier à ces
maux, & qu'on ne pouvoit les faire ceffer qu'en fe
conformant à la difpofition Teftamentaire , par laquelle
le Czar Pierre I. avoit ordonné que fi le
Czar fon petit fils mouroit fans enfans , la Princeffe
Elizabeth Petrowna fuccedât à ce jeune Prince . Ils
fuplierent en même tems cette Princeffe , de vouloir
fatisfaire à leurs défirs & à ceux de toute la Nation
, en montant fur le Trône , & cette Princeffe
ayant reçû d'eux le ferment de fidelité , elle fut
proclamée le 6 au matin Czarine & Souveraine de
ja Ruffie à la tête des Régimens des Gardes & des
autres troupes de la garniſon , qui étoient fous les
armes .
Une fi grande révolution a été conduite avec
tant de prudence & exécutée avec tant de promptitude
, qu'à fix heures du matin l'affaire étoit entierement
terminée. Auffitôt après que les Etats eûrent
prêté ferment de fidelité à la Czarine , on conduifit
la Princeffe Régente & le Prince Antoine Ulrich
de Brunſwick Bevern au Palais d'Eté , & la
Czarine les fit affûrer qu'on auroit pour eux tous
les égards dûs̟ a leur naiffance .
Le Comte d'Ofterman fut arrêté prefque dans le
même tems qu'il venoit d'être averti que les Grénadiers
avoient pris les armes ; & un détachement
confidérable des Gardes ayant été envoyé pour occuper
toutes les avenues du quartier de Wafili Of
trow , dans lequel eft le Palais du Comte de Munich
, on fe faifit de ce Feldt Maréchal. Deux Offciere
DECEMBRE. 1741 2933
diers Géneraux fe rendirent le 6. à huit heures di
matin par ordre de la Czarine chés lui , & ils y
refterent pendant plus de deux heures . Vers les onze
heures , on vit partir du Palais du Comte de Mu
nich quelques voitures fermées , fous l'escorte d'un
détachement de Dragons , & depuis on a fçû qu'el
les avoient pris la route de la Forterefle de Schlieffelbourg
, & qu'on conduifoit à cette Fortereffe le
Comte de Munich. Le Comte d'Ofterman & le Baron
de Mengden y furent auffi conduits , & ces
Seigneurs furent dépouillés , ainfi que le Feldt Maréchal
de Munich, des marques des Ordres dont ils
étoient revêtus .
On a publié une Déclaration , par laquelle la
Czarine annonce à fes Sujets , que plufieurs personnes
ayant adminiftré depuis la mort de la feuë
Czarine les affaires publiques d'une maniere fi peu
convenable , qu'il s'en eft fuivi beaucoup de troubles
& d'inconveniens , tant au dedans qu'au dehors
, & qu'il auroit pû même par la fuite en reful
ter de plus grands maux pour la Nation , les Etats
Eccléfiaftiques & Seculiers , & en particulier les
Régimens des Gardes , ont crû devoir inviter la
plus proche héritiere du Trône , à accepter la Couronne
, afin de prévenir par ce moyen tous les malheurs
qu'on avoit à craindre ; qu'en conféquence
de cette invitation , & pour condescendre aux
voeux unanimes de tous fes fideles Sujets , elle a
Confenti de prendre poffeffion d'un Trône qui lui
apartient par le droit de la naiffance ; que les raifons
, qui l'ont déterminée à prendre ce parti , fe
ront déduites plus amplement dans une autre Déclaration
qui paroîtra bientôt , & qu'en attendant ,
elle a voulu donner part de cet evenement à fes Sujets
, afin qu'ils lui prêtent le ferment de fidelité.
On a apris depuis , que la facilité avec laquelle
P'entreprife
2934 MERCURE DE FRANCE
l'entrepriſe qui a mis la Czarine en poffeffion de
Trône a été exécutée , eft d'autant plus furprenante
, que la Princeffe de Brunfwik Bevein avoit recu
avis de differens endroits , qu'il ſe formoit un
parti pour changer la face du Gouvernement de la
Ruffie.Ces avis lui avoient été confirmés le 5.de ce
mois par une Lettre écrite de Breflaw , & la Princefle
Elizabeth Petrowna étant allée le foir lui rendre
vifite , la Princeffe Régente quitta une partie
de jeu qu'elle avoit commencée , & elle fit entrer
la Princeffe Elizabeth Petrowna dans ſon cabinet ,
pour avoir avec elle une entretien particulier , par
lequel elle efperoit de découvrir fi cette Princeffe
avoir quelque part au projet qui fe tramoit. Le pen
d'embarras que montra la Princeffe , en repondant
aux queftions de la Princeffe de Brunfwick Bevern,
diffipa entierement les premiers foupçons , que
ceux qui gouvernoient , avoient conçus à fon fujet.
La Princeffe Régente , perfuadée que la Princefle
Elizabeth étoit fort éloignée de penſer à s'affûrer
la Couronne , la laiffa tranquillement retourner à
fon Palais , & ne fe mit pas même en peine de faire
éclairer fes démarches.
La précaution que cette derniere Princeſſe avoir
prife depuis quelque tems , d'affecter de ne ſe mêler
d'aucune affaire , & de n'avoir en aparence aucun
confident , qui par fon crédit ou par fon rang
pût exciter la défiance du Gouvernement , contribua
beaucoup à calmer les inquietudes de la Régente.
Lorfque celle- ci a été arrêtée , elle a paru d'abord
craindre qu'on n'eut deffein d'attenter à fes
jours , mais fon aprehenfion étoit d'autant moins
fondée , que le foin de fa confervation & celle du
jeune Prince , fon fils , avoit été l'un des principaux
objets de l'attention de la Czarine , qui n'ignorant
DECEMBRE. 1741 2935
gnorant pas que les Régimens des Gardes étoient
fort irrités contre ceux qui gouvernoient , avoit
exigé , en montant à l'apartement de la Régente ,
que les Grenadiers qui l'acccompagnoient , s'engageaffent
par ferment à refpecter la vie de cette Princeffe.
S. M. Cz . la raffûra bientôt par la douceur
avec laquelle elle lui parla en lui annonçant ſa difgrace
, & elle lui promit qu'on auroit pour elle
tous les égards dûs à la naiffance . Elle n'en a pas
ufé moins génereufement envers le fils qu'à l'égard
de la mere ; auffitôt qu'elle fut entrée dans la
chambre du Czar , pour s'affûrer de la perfonne
elle prit dans fes bras ce jeune Prince qui dormoit
profondément , elle le baifa avec tendreffe , & ele
recommanda qu'on eût attention d'empêcher qu'il
ne fût exposé à d'autre malheur que celui de
dre le Trône .
per-
Depuis qu'elle y eft placée , non feulement elle a
continué de prendre le même intérêt à ce Prince ,
mais encore elle a permis à la Princeffe & au Prince
de Brunfwick Bevern , de fe retirer avec lui en
Allemagne , & ils partirent le 12. pour y retourner.
Outie 30000. Roubles dont M. Hoffman , Maréchal
des Logis de la Cour , a été chargé pour les
défrayer fur la route , la Czarine a fait délivrer à
cet Ófficier une fomme confidérable , pour la remettre
à la Princeffe de Bevern , lorfque cette Princeffe
feroit arrivée fur la Frontiere de Pruffe , on
on l'a conduit avec le Prince , fon époux , le Prince
, fon fils , & la Princeffe , fa fille , fous une fûre
garde dont le Commandant a ordre de ne laiffer
parler à perfonne le Prince & la Princeffe de
Bevern .
Le Prince Louis Erneft eft encore à Petersbourg ,
& la Czarine lui a fait dire qu'elle lui laiſſoit la liberté
1936 MERCURE DE FRANCE
berté d'y demeurer autant de tems qu'il le jugeroit
à propos, & qu'il pouvoit continuer de fe fervir des
équipages & des Chevaux des Ecuries du Palais.
S. M. Cz. ne paroît pas auffi difpofée à ufer d'in
dulgence pour le Comte d'Cfterman & pour le
Feldt Maréchal de Munich , qu'à oublier les fujets
qu'elle prétend avoir de fe plaindre de la Princeſſe
de Bevern. On recherche la conduite de ce Comte
& de ce Feldt Maréchal depuis la mort du Czar
Pierre I. & l'on prétend qu'il y a contre eux plufieurs
chefs d'accufation très graves.
Plus de trente perfonnes , qui occupoient des
charges ou des emplois confidérables , & qu'on
prétend avoir participé à plufieurs démarches ou
deffeins condamnables dont on acule ces deux Seigneurs
, ont été arrêtées & conduites à la Fortereffe
de Schlieffelbourg , & de ce nombre font
de Comte Michel de Golowkin , le Comte de
Lowenwolde , & M. de Streschneff , gendre du
Comte d'Ofterman . L'une des principales aecufations
qu'on forme contre eux , eft d'etre
entrés dans le projet que le Comte d'Ofterman
avoit formé de faire reconnoître la Princelle Régente
pour Souveraine de la Ruffie. Le Comte
d'Ofterman s'étoit déterminé a avoir recours à ce
dernier moyen , pour écarter plus fûrement du
Trône la Czarine , & il défiroit d'autant plus de
réuffir , qu'il lui revenoit de toutes parts , & furtout
des Pays Etrangers , que les Mofcovites , mécontens
d'ailleurs de la dureté de leur Gouverne
ment , ne voyoient qu'avec peine fur le Trône un
Prince âgé feulement de dix fept mois , dont l'enfance
leur faifoit craindre plufieurs malheurs qui ne
font que trop ordinairement les fuites d'une longne
minorité.
Les amis du Comte Michel de Golowkin affûrent
1-
DECEMBRE . 1741
2937
rent qu'il ne s'eft prêté aux vúës du Comte d'Ofterman
, que pour éviter de s'en faire un ennemi &
de fe rendre fufpect à la Régente. Ils efperent aufli
qu'en cette confidération & pour récompenfer les
fervices que le Comte Alexandre de Golowkin ,
Ambaffadeur Extraordinaire de la Czarine auprès
de la République de Hollande , a rendus à l'Etat ,
S. M. Cz. fera grace à un Miniftre , auquel ils prétendent
qu'on ne peut reprocher , que d'avoir manqué
de fermeté.
La Czarine a été complimentée ſur ſon avene
ment au Trône par tous les Miniftres Etrangers qui
refident à Petersbourg , & eile a refolu de fe rendre
à Moskow dans le mois de Fevrier prochain , pour
s'y faire couronner,

Elle a envoyé ordre à M. Heinfon , fon Refident
à Hambourg , d'aller à Kiell donner part au Duc
de Holtein- Gottorp de la revolution qui vient
d'arriver , & l'on dit qu'elle a deffein d'engager ce
Prince à paffer à Petersbourg quelque tems chaque
année.
Cette Princeffe a non feulement déclaré le Prince
de Heffe Hombourg Feldt- Maréchal Géneral de
fes armées , mais encore elle l'a mis à la tête de
tous les Confeils , & le Confeil du Cabinet eft
compofé du Feldt Maréchal Lefcy , du Prince Czerkasky,
de M. de Bestuchef, qui avoit été arrêté par
ordre du Czar , en même tems que le Comte Erneft
Biron , ci- devant Régent de Mofcovie , du
Comte de Gallowin , du Géneral Ufchakow , du
Knés Kourakin , du Knés Narefckin & de M. de
Trubeskoy , Procureur Géneral.
Le Feldt Maréchal Dolgoroucky a été rapellé
de fon exil , ainfi que la Princeffe Catherine Dolgoroucky
, qui avoit été fiancée au Czar Pierre II.
& les deux Knés Dolgoroucky , freres du Feldt
II. Vol. H Maréchal
2938 MERCURE DE FRANCE
Maréchal , lefquels à la fin du Regne de la feuë
Czarine , ont été condamnés à avoir la langue
coupée.
2
S. M. Cz. a envoyé ordre de traiter en Prince le
Comte Erneft Biron , ci- devant Duc de Curlande
de ne plus le tenir renfermé , & même de lui laiffer
prendre le plaifir de la chaffe , pourvû qu'on
eût foin de le garder à vûë , & on croit qu'elle fera
revenir les Comtes Charles & Guſtave , freres de ce
Comte.
ALLEMAGNE,
N mande de Vienne du 16. du mois dernier,
qu'on y reçut de Peterfbourg le même jour
l'importante nouvelle du détrônement du Czar , &
de l'élevation de la Princeffe Elizabeth Petrowna fur
le Trône de Ruffie.
Ces Dépêches marquent que le Prince de Heffe-
Hombourg , qui a fçû tellement gagner la confiance
& l'affection des troupes Mofcovites , qu'elles l'apellent
leur Pere, a eu la principale part à cette grande
révolution. Elles ajoutent que fept Grenadiers étant
enſemble , l'un d'eux après s'être beaucoup étendu
fur les fujets que les Mofcovites avoient de fe plaindre
de leur Gouvernement , avoit perfuadé à fes
camarades de tenter un coup d'éclat en faveur de la
Princeffe Elizabeth Petrowna ; qu'ils s'éto ent rerdus
chés cette Princeffe , qui avoit accepté leurs
offres ; que l'ayant conduite aux Cafernes , ils
avoient entraîné dans leur parti foixante autres
Grenadiers ; qu'en peu de tems il s'en étoit joint
quatre cent à ces foixante-fept ; que dès que la
Princeffe Régente avoit été avertie de l'affemblée
des Grenadiers , elle avoit voulu prendre des mefures
pour en prévenir les fuites , mais qu'elle s'étoit
DECEMBRE. 1741. 2939
Toit aperçue bien-tôt que les ordres n'étoient plus
écoutés ; que les Grenadiers avoient inveſti le Palais
; qu'on avoit arrêté le Czar , la Princeffe Régente,
& le Prince Antoine Ulrich de Beveren, ainſ
que tous les principaux Officiers attachés à leur
parti ; que le plus grand nombre des Seigneurs & des
Officiers Géneraux s'étoient rendus chés la Princeffe
Elizabeth Petrovna , & l'avoient reconnuë
pour Souveraine de la Ruffie , & que le r exemple
avoit été fuivi par toutes les troupes de la Gar
nifon de Petersbourg.
On a apris de Hambourg du 25. du mois deraier
, que depuis l'arrivée du courier par lequel
M. Heinſon , Réfident de Mofcovie en cette Ville,
a reçû avis que le 6. la Princeffe Elizabeth Pe
trowna avoit été proclamée Czarine , il est venu de
Petersbourg plufieurs Lettres qui confirment que les
Mofcovites témoignent une joye inexprimable , de
vivre fous les loix d'une Princeffe , qui par la prudence
& la fermeté qu'elle a montrées dans les circonftances
délicates où elle s'eft trouvée depuis la
mort du Czar , fon Pere , & par l'habileté avec laquelle
elle s'eft conduite dans la révolution qui
vient de la placer fur le Trône , a fait connoître
qu'elle eft digne de porter la Couronne de fes Ancêtres.
Ces Lettres ajoutent que la Czarine , en confidération
du zéle que le Prince de Heffe-Hombourg a fait
paroître pour les interêts, l'avoit nommé Feldt -Ma
réchal Géneral de fes Armées , & qu'elle avoit
pourvû de la Charge de Grand Chancelier , M.Chiczasky,
auquel elle avoit donné ordre de mander à
tous les Miniftres dans les Cours Etrangeres, d'y déclarer
que les Etats de Ruffie n'ayant pu fouffrir plus
long-tems que le Pouvoir Souverain reftât entre les
mains de ceux qui depuis la mort du Czar Pierre I.
Hij s'en
2940 MERCURE DE FRANCE
s'en étoient emparés par une longue fuite de violences
, & par le peu de fermeté des Miniftres que
ce Prince avoit chargés de l'exécution de fes dernieres
volontés , ils l'avoient engagée à ufer des
droits que lui donnoient fa naiffance & le Teftament
du Czar , ſon Pere , & à ſe faire reconnoître
pour Souveraine de la Ruffic ; qu'elle efperoit que
la plupart des Puiflances de l'Europe, verroient avec
plaifir fon avenement au Trône , & que de fon
côté , non feulement elle étoit difpofée à entretenir
avec elles la bonne intelligence déja établie , mais
même qu'elle chercheroit tous les moyens de l'augmenter
, s'il étoit poffible .
Les mêmes avis portent que le bruit couroit à
Petersbourg , que le Prince de Heffe- Hombourg,
par ordre de la Czarine , avoit dépêché un courier
au Comte de Leuwenhaupt, qui commande l'armée
du Roy de Suede en Finlande , & qu'il y avoit dans
le Paquet de ce courier une Lettre que le Prince de
Heffe-Hombourg prioit le Comte de Leuwenhaupt
de faire tenir fur le champ à S. M. Suedoife ; ce
qui faifoit préfumer que la guerre entre la Ruffie
& la Suede ne tarderoit pas à être terminée .
On mande de Vienne qu'un Parti des troupes Saxonnes
qui étoit entré en Moravie , pour y lever
des contributions , s'étoit efuite retiré ..
On a apris en même tems que le Grand Duc avoit
établi fon quartier géneral à Wittinga , & qu'il faifoit
fortifier avec toute la diligence poffible la petite
Ville de Budweifl , dont il avoit renforcé confiderablement
la garnifon, & que le Prince de Lobckowitz
avoit fait occuper le pofte de Kattenberg par un
détachement des troupes qu'il commande.
Selón plufieurs Lettres écrites de Drefde , le Roy
de Pologne , Electeur de Saxe , a conclu avec le
Roy de Pruffe un Traité , par lequel les deux Puiffances
DECEMBRE. 1741 2941
fances fe garantiffent mutuellement la poffeffion de
leurs Etats en Allemagne.
Il a fait à Vienne un froid fi exceffif , qu'on a
trouvé quelques Sentinelles mortes dans leurs poftes.
Les derniers avis reçus de Prague le 23. de ce
mois,portent qu'en conféquence des Lettres Patentes
que
l'Electeur de Baviere avoit adreffées aux Etats
du Royaume de Boheme , pour les convoquer , &
qui étoient datées du 7. les Etats fe font affemblés,
& que le 19. ils ont rendu leur hommage à ce
Prince , qu'ils ont reconnu pour Roy de Boheme.
que
Avant cette Céremonie , le Chancelier de l'Electeur
fit un Diſcours , dans lequel il leur répeta les
mêmes affûrances que l'Electeur leur avoit données
dans les Lettres de convocation , & il leur dit
ce Prince , pour maintenir fes juftes droits , avoit
été obligé de fe rendre en perfonne dans ce Royaume
, pour en prendre poffeffion , comme d'un
Royaume hereditaire qui lui étoit échû par l'extinction
des mâles de la Maiſon d'Autriche en la perfonne
du feu Empereur Charles VI. que comme la
Cour de Vienne avoit non feulement rejetté avec
hauteur toutes les voyes de négociation , mais encore
s'étoit opofée à toutes les prétentions de l'Electeur
avec une violence infoutenable , ce Prince
s'étoit vû dans la néceffité d'employer fes forces &
celles de fes Alliés , pour s'emparer de ce Royaume
; que l'Electeur avoit depuis long- tems fait connoître
les titres & les raifons qui fervoient de fondemens
à fes prétentions ; qu'ainfi il étoit dans une
parfaite confiance que les Etats de ce Royaume
n'entreprendroient jamais , par quelque moyen &
fous quelque prétexte que ce pût être , d'en révo
quer la validité en doute , & qu'ils voyoient avec
joye la protection qu'il avoit plû à la Bonté Divine
d'accorder à la juftice de fes armes.
Hij L'Ar1942
MERCURE DE FRANCE
L'Archevêque de Prague répondit au nom des
Etats , qu'ils étoient difpofés à obéir en tout à l'ELecteur
, comme à leur Souverain légitime , qu'ils
promettoient de lui garder la fidelité la plus parfaite
, & qu'ils fe feroient toujours une loi inviolable
de mériter fa bienveillance Royale par leur fidelité
& par leur foumiffion..
PRUSSE.
Na aprisàBerlin le 16. de ce mois porde
courier arrivé de Francfort , que l'Election
l'Empereur avoit été fixée au 24. du mois pro
chain . 、
ESPAGNE.
ONmande deMadrid dayon s'eft moirée de
la Frégate le Mars Bifcayen , s'eft emparée de
deux Vaiffeaux Anglois qui faifoient voile pour Londres
, & qui venoient , l'un de San-Remo , fur la
Côte de l'Etat de Genes , & l'autre de l'Ile d'Antigue.
On a reçu avis de Toulon , que la Galere la Solitaire
, qui y a relâché , & qui eſt l'une des fix Ga-
Jeres que le Roy a envoyées en Italie, avoit pris le
14. du mois dernier dans le Golfe de Leon un
Vaiffeau Algerien monté de huit canons & de 22 .
pierriers , fur lequel il y avoit 90. hommes d'équipage.
On a trouvé à bord de ce Bâtiment onze Efclaves
Chrétiens , auxquels on a rendu la liberté.
Un Vaiffeau Efpagnol ayant été attaqué près d'Oran
par un Corfaire du Royaume de Maroc , l'Equipage
de ce Vaiffeau eft allé à l'abordage , & il a
obligé le Corfaire de fe rendre , après un combat
dans lequel il n'y a eu du côté des Espagnols que
deux hommes de tués & huit de bleffés .
GENIS
DECEMBRE 1741. 2943
O
GENES ET ISLE DE CORSE.
N mande de la Baftie du 6. de ce mois , qu'un
Courier qui venoit de Bonifacio pour porter
des Lettres au Marquis Spinola , avoit été volé &
dépoüillé dans les environs de Fiumorbo , & que
trois voleurs avoient arrêté à une demie lieuë de la
Baftie deux jeunes gens qui en étoient fortis pour
aller à la chaffe , & qu'ils leur avoient pris leurs armes
& leurs habits . On a trouvé deux autres chaffeurs
tués du côté de Biguglia , & l'on n'a encore
pûr découvrir les auteurs de cet affaffinat .
Un nommé Caffori , dont la maiſon a été brûlée
par accident , s'eft perfuadé que le feu y avoit été
mis par ordre du Marquis Spinola , & il eft forti
de la Baſtie pour aller fe joindre à d'autres mécontens
qui fe font répandus dans l'Ifle , pour effayer
de déterminer le peuple à une nouvelle révolte . Le
frere d'un des Bandits qui fe font rendus fameux
par les brigandages qu'ils ont commis pendant un
long- tems dans les environs de Lento , a affaffiné
depuis peu celui qui a tué ce Bandit , & l'affaffin
s'en étant enfui , on a brulé fa maiſon.
On a apris de Piedmont , que le Roy de Sardaigne
avoit envoyé ordre à tous fes Miniftres auprès
des Puiffances Etrangeres , de diftribuer de fa part
dans les Cours où ils réfident , un Mémoire intitulé,
Déduction des Droits de la Maifon Royale de Savoye
fur le Duché de Milan.
Les mêmes Lettres portent , que les deux corps
de troupes que ce Prince avoit fait avancer fur la
Frontiere de fes Etats , du côté du Milanez , s'étoient
réunis en un feul corps , & qu'ils formoient
une armée de 25000. hommes.
Hiiij
GRANDE
2944 MERCURE DE FRANCE
GRANDE BRETAGNE.
Na apris de Londres du 14. de ce mois , que
fuivant une Lifte qui paroît depuis quelque
tems dans le Public , le Roy a 245. Vaiffeaux ; fçavoir
, fept de 100. canons, quatorze de 90. dix - fept
de 80. vingt-quatre de 70. trente- un de 60. trentequatre
de so. un de 26. & cent dix-fept autres
tant Frégates que Brulots , Galiottes à bombes ,
Chaloupes de guerre & Vaiffeaux d'Hôpital .
Les derniers avis reçus de la Jamaïque portent
que l'Amiral Vernon après avoir reconnu qu'il ne
pourroit former avec fuccès une entrepriſe contre
San-Jago , étoit retourné au Havre de Cumberland
avec la Flotte qui eft fous fes ordres , & qu'on
croyoit qu'il fe retireroit dans peu de la Côte de
l'Ile de Cuba .
Les Vaiffeaux de guerre le Weimouth & l'Auguſte,
fe font rendus maîtres , le premier , d'un Vaiffeau
Efpagnol qui revenoit de la Havane , & dont la
charge eft eftimée 29000. livres fterlings , & le fecond
, d'un Armateur de la même Nation , lequel
avoit 20. canons & 130. hommes d'équipage.
Les Espagnols ont enlevé les Vaiffeaux Marchands
le Vernon , l'Ecureuil , la Ste Marie , & le Betty.
On a apris depuis que la Chambre des Communes
ayant fait fçavoir au Roy qu'elle avoit élû le
Sr Arthur Ownflow pour Orateur , le Roy ſe rendit
le 1 5.de ce mois à la Chambre des Pairs, & que S.M.
ayant mandé la Chambre des Communes , fit le
Difcours fuivant .
MYLORDS ET MESSIEURS. C'est toujours une grande
fatisfaction pour moi de voir mon Parlement affemblé,
mais ce m'en eft une particuliere dans le tems
préfent , vi que la conjoncture des affaires me rend
ves confeils votre affistance néceffaires , & qu'à
Poccafion
DECEMBRE. 1741 2945
Poccafion des elections des nouveaux Députés qui
compofent la Chambre des Communes , je pourrois connoitre
plus parfaitement les fentimens & les difpofitions
de mon Peuple par fes Repréſentans , lefquels ont
été elus dans une circonftance qui a été fuivie d'une
grande varieté d'incidens de la derniere importance ,
& qui tiennent dans la plus grande attente , & durant
le cours de la guerre dans laquelle nous sommes
engagés contre la Couronne d'Espagne , guerre en ellemême
jufte & néceffaire , que je n'ai declarée que par
les confeils réiterés des deux Chambres du Parlement >
qu'elles m'ont recommandé de foutenir de toutes
mes forces , fur tout en Amérique , ce qui a fait le
principal objet de mes foins . Ainfi , je ne doute pas que
vous ne foyez venus à cette affemblée ,très convaincus de
tout ce qu'exige la fituation préfente des affaires ,
préparés à me donner les confeils qui feront les plus
conformes à l'honneur & au veritable interét de ma
Couronne de mes Royaumes . Il eft impoffible que
vous n'ayez fait toute l'attention que vous devez faire
aux dangers preffans qui menacent l'Europe , plus
particulierement les Etats du Continent , qui prétendront
s'opofer & refifter aux Puiſſances formidables
qui fe font confederées pour renverfer ou du moins pour
abaiffer la Maifon d'Autriche Nous avons communiqué
à notre dernier Parlement les craintes que nous
avions à ce sujet , & les deux Chambres , portées d'inclination
à marquer combien elles étoient fenfibles aux
difficultés qui étoient furvenues par raport à la fucceffion
des Etats dufeu Empereur , prirent les réfo!utions
les plus fortes en faveur de la Reine de Hongrie ,
afin de maintenir la Pragmatique Sanction , & de
conferver la Balance du Pouvoir , la tranquillité &
la liberté de l'Europe. Si d'autres Puiffances , qui
avoient contracté les mêmes obligations que moi ,
avoient répondu à notre jufte attente , & avoient fa
Hv tisfait
2946 MERCURE DE FRANCE
tisfait auxpromeffes qu'elles avoient fi folemnellement
données , le foutien de la cauſe commune auroit rencontré
beaucoup moins d'obftacles . Selon l'avis de
mon Parlement je me fuis efforcé , depuis la mort du
feu Empereur , defoûtenir la Maifon d'Autriche. J'ai
tâché par les moyens les plus prompts les plus convenables
, d'engager d'autres Puiffances , dont les
obligations étoient femblables aux miennes , & qui
m'étoient unies par l'interêt commun , à prendre de
concert avec moi des mesures telles qu'une circonftance
fi importante &fi critique le requeroit , & lorsqu'il
m'a parû que les voyes de conciliation étoient néceffaires
, j'ai fait enforte de procurer des accommodemens
entre les Princes dont l'union auroit été le moyen
le plus efficace pour prévenir les malheurs qui font arrivés
, la meilleure fûreté pour l'interêt & l'avantage
des Parties qui étoient en differend. Quoique tous
mes efforts n'ayent pas eû jufqu'à préfent l'effet defiré,
je nepuis qu'efperer qu'un jufte fentiment du danger
géneral & prochain produira des difpofitions plus favorables
dans les Confeils des autres Nations . Dans
sette fituation , il nous convient de nous mettre en état
de profiter de toutes les occafions qui se présenteront
pour maintenir la liberté de l'Europe , & pour affifter
& défendre nos Amis & nos Alliés , ainfi que l'exigence
des cas & la fituation des affaires le demanderont,
pour rendre inutiles toutes les entrepriſes
qu'on pourroit former contre moi mes Etats , ou
Cont re les Puiffances que nous sommes obligés par honneur
par interêt , de foûtenir.
MESSIEURS DE LA CHAMBRE DES COMMUNES,
J'ai ordonné qu'on vous remit les Etats des dépenfes
pour l'année prochaine , & je do's vous prier de m'accorder
les fubfides qu'exige la fituation des affaires.
Vous pouvez être affûrés qu'ils feront employés exaṭ-
tement aux uſages pour lesquels vous les donnerez .
MYLORES

DECEMBRE 1741. 2947
MYLORDS ET MESSIEURS ,
Pendant tout
le cours de mon Regne , j'ai reçû tant de preuves de
l'affection
de mes Parlemens
pour ma Personne
&
pour mon Gouvernement
, & de leur zéle pour le bien
de la Patrie & pour le foutien de la Caufe Commu
queje compte fortement dans la conjoncture préfentefar
la continuation de ces loüables fentimens . Il
n'y ajamais eû de tems , dans lequel votre unanimité
, votre ardeur votre diligence , ayent été plus néeffaires
, qu'elles le font à préfent pour repondre aux
grands objets que je vous propofe . l'agirai de mon côté
: efforcez-vous du vôtre, de montrer par vos procédés
par vos réfolutions , que vous en êtes auffi fincerement
justement touchés , que leur importance le
demande.
La Chambre des Pairs préfenta le lendemain à S.
M. une Adreffe laquelle porte » que les Pairs de la
» Grande Bretagne , affemblés en Parlement , prient
כ כ
le Roy de leur permettre de le remercier très-
» humblement de fa gracieuſe Harangue , & de lur
» témoigner la joye vive & fincere qu'ils ont de
» fon heureux retour en Angleterre ; que la guerre
»jufte & néceffaire , dans laquelle le Roy eft engagé
contre la Couronne d'Eſpagne , eſt d'une fi
grande importance au Commerce , à la Navigation
& à l'avantage de les Sujets , que l'attention
» de S. M. à les affurer qu'elle employe tous fes
» efforts à foûtenir cette guerre , excite en eux la
plus parfaite reconnoiffance , & qu'ils efperent
que Dieu répandra tellement fa bénédiction fur
» les armes du Roy , qu'elles auront un fuccès égal
» à la juftice de fa caufe , & aux fouhaits ardents
de fes Peuples ; que S. M, a fi vivement repréfenté
les dangers prochains dont l'Europe eft menacée
, que la Chambre des Pairs ne peut s'empê-
» cher d'y donner toute fon attention , & d'être
"
H vj
fenfi2948
MERCURE DE FRANCE
» fenfiblement touchée des fuites fâcheufes qu'on a
lieu de craindre des entrepriſes formées pour di-
» minuer la puiſſance de la Maiſon d'Autriche ; que
» tous les Seigneurs qui compofent cette Chambre ,
→ rendent au Roy de très -finceres actions de gra-
» ces du défir qu'il paroît avoir de recevoir & de
» fuivre les avis de fon Parlement ; que la confiance
de S. M. dans la fidelité & dans l'affection de
» fon Peuple , eft parfaitement bien fondée , & que
ales Pairs de la Grande Bretagne peuvent affùrer
le Roy , qu'ils ne manqueront pas d'examiner
» avec l'attention la plus ferieufe les affaires im-
»portantes fur lesquelles il leur propofe de déliberer
; qu'ils font convaincus que l'unanimité , le
zéle & la diligence , font abfolûment néceffaires
»dans la conjoncture préfente , & qu'ils concoureront
avec ardeur à toutes les méfures qu'il conviendra
de prendre pour foûtenir les interêts da
» Roy , pour défendre la liberté de l'Europe , &
pour fecourir les Alliés de la Grande Bretagne ;
» que comme leur fidelité & leur affection pour le
»Roy ont des principes invariables pour fonde-
» ment , S. M. doit attendre d'eux un zéle conftant
» & inviolable , & qu'ils s'efforceront toujours ,
» aux dépens de tout ce qu'ils ont de plus cher , de
conferver le Trône à fa Maifon , & de maintenir
» le Gouvernement préfent , de la continuation duquel
dépendent la fûreté de la Réligion Proteftan-
» te , & la Liberté de la Grande Bretagne.
Le Roy répondit à cette Adreffe . Je vous remercie des
marques que vous me donnez de votre fidelité & de
votre reconnoiffance. Le zèle que vous faites paroître
pour ma défenfe , pour la confervation de la liberté
de l'Europe , & pour l'interêt de mes Alliés , me donne
une très-grande fatisfaction . Vous pouvez compter
fur les égards que j'aurai conftamment pour les avis de
топ
DECEMBRE. 1741 2949
mon Parlement , & vous devez être perfuadés que je
ferai toujours attaché inviolablement aux interêts de
ma Couronne des mes Royaumes,
Le Vaiffeau de guerre le Rupert , commandé par
le Capitaine Ambrofe a pris un Vaiffeau Eſpagnol ,
armé en courfe , qui étoit monté de 24. canons &
de 20. pierriers , & fur lequel il y avoit 187. hommes
d'équipage.
La Chambre des Communes fe rendit le 21. du
mois dernier au Palais de Saint James , & elle préfenta
au Roy fon Adreffe , dans laquelle après avoir
demandé la permiffion de lui témoigner la joye que
le retour de S. M. cauſe à fes Sujets , la Chambre
affûre le Roy » que les dangers auffi grands que
"prochains , dont l'Europe eft menacée dans la fi-
» tuation préfente des affaires , ont été repréſentés
» par S. M. à fon Parlement , avec des fentimens fi
» paternels , avec tant de confiance en fes Sujets ,
& avec des marques d'un fi grand zéle pour le
»Bien géneral , que tous les Anglois bien inten-
» tionnés ne peuvent fe difpenfer de reffentir la plus
» vive reconnoiffance pour les bontés du Roy ; que
» lorfque les importantes affaires , fur lesquelles le
Roy propofe au Parlement de déliberer , feront
» renvoyées à la Chambre , tous les Députés , dont
» elle eft compofée , s'emprefferont de donner à S.
M. des avis tels qu'on doit en attendre de fujets
» auffi devoués que fideles ; que la Chambre étant
parfaitement difpofée à concourir à toutes les
» vûës du Roy , elle accordera à S. M. des fubfi-
» des fuffifans pour la mettre en état , non ſeule-
» ment de foûtenir fes Amis & fes Alliés , mais
» encore de s'opofer aux entrepriſes qu'on pour-
> roit former contre les Puiffances qui s'uniront
» dans le deffein de prendre des mesures pour maintenir
l'équilibre & pour conferver la liberté de
» l'Europe .
" On
2950 MERCURE DE FRANCE
On a reçû avis de l'Amerique , que cinq Vaiffeaux
commandés par les Capitaines Howard , Roul ,
Phoenix , Mongommery , & Michel , avoient été
pris par les Espagnols & conduits à la Havane.
La Chaloupe de guerre le Grampus s'eft emparée
d'un Vaiffeau Efpagnol dans les environs de Viana ,
fur les Côtes de Portugal .
HOLLANDE ET PAYS - BAS .
O
N mande de la Haye du 29. du mois dernier
que le 25. M. Elfacker , Miniftre de l'EIccteur
de Baviere , fit fçavoir au Préſident de l'Affemblée
des Etats Generaux , que le 16. les Etats
du Royaume de Boheme avoient rendu hommage
à ce Prince , & l'avoient reconnu pour leur Souverain.
Le 24. le Comte de Golewkin , Ambaffadeur de
la Czarine , fe rendit à l'Affemblée des Etats Géneraux
, & après leur avoir fait part de la proclamation
de cette Princeffe , il les affùra qu'elle étoit
dans la réfolution de conferver une étroite union
avec la République .
Selon les dernieres depêches que ce Miniſtre á
reçûës de Petersbourg , tout y eft actuellement dans
une parfaite tranquillité , & la Czarine eft occupée
à chercher les moyens de faire oublier à fes Sujets
par un Regne heureux & paisible les intrigues , les
défiances & les craintes qui ont troublé leur repos
depuis quelques années .
Ces depêches affurent que S. M. Cz . a refolu dé
n'employer à l'avenir que des Mofcovites dans fes
Confeils & dans fes armées , mais que cependant
les Ecrangers qui par leur capacité & par l'impor
tance de leurs fervices meriteront quelque diftincsion
, conferveront leurs emplois .
DECEMBRE. 1741: 2950
Il eft confirmé par les mêmes lettres que le 6. du
mois dernier , la Comtefle de Munich avoit été
conduite à la Fortereffe de Schlieffelbourg avec le
Feldt Maréchal fon époux , le Comte de Munich
leur fils qui étoit Grand- Maître de la Maiſon du
Czar , & plufieurs autres perfonnes de leur famille ;
qu'on avoit mis le fcelle fur tous leurs effers , &
que les papiers du Feldt Maréchal avoient été portés
au Palais .
Ces avis ajoûtent que la Czarine avoit déclaré
qu'elle fe rendroit dans peu à Mofcow , pour s'y
faire couronner & qu'on croyoit qu'elle accorderoit
au Prince & à la Princeffe de BrunfwickBeveren
la permiffion de fe retirer en Allemagne
MORT DES PAYS ETRANGERS.
U
mourut à Sto-
Lrique Eleonor Reine de Suede ,
ckolm le 5. de ce mois âgée de 53. ans , ro.
mois & 18. jours , étant née le 23. Janvier 1688.
Cette Princeffe étoit fille de Charles XI . Roy de
Suede , mort le 15. Avril 1697. & d'Ulrique Eleonor
; fille de Frederic III . Roy de Dannemarck ; &
par la mort la Branche de la Maiſon Palatine , dont
étoient les trois derniers Rois de Suede , Guftave
Adolphe , Charles XI . & Charles XII . eft éteinte .
La Reine avoit été mariée le 4. Avril 1715.au Roy,
qui étoit alors Prince Héréditaire de Caffel . Le 18 .
Fevrier 1719. elle avoit fuccedé à Charles XII .
fon frere , tué au Siége de Friederichfall en Norwege
, & le 4. Avril 1720. elle fit proclamer Roy
le Prince fon époux , ' qui fut couronné le 3. Mai de la
même année . Les grandes qualités que poffedoit la
Reine , la font également regretter du Roy & de
tous les Ordres du Royaume, FRAN2952
MERCURE DE FRANCE
****************
FRANCE.
NOUVELLES DE LA COUR , DE PARIS , &C :
E 24. de ce mois , veille de la Fête de la
Nativité de N.S.de Roy & la Reine accompagnés
de Monfeigneur le Dauphin & de
Madame , entendirent les premieres Vêpres,
qui furent chantées par la Mufique , & auxquelles
l'Evêque de Seez officia .
Leurs Majeftés accompagnées de même ;
affifterent à l'Office de la nuit , & entendiacnt
trois Meffes à minuit .
Le 25. jour de la Fête , le Roy & la Reine
accompagnés de Monfeigneur le Dauphin
& de Madame , affifterent à la Grand ' Meffe
, célébrée pontificalement par l'Evêque de
Seez. Laprès- midi , leurs Majeſtés entendirent
le Sermon du P. Fleury , de la Compagnie
de Jefus , & enfuite les Vêpres , auxquelles
le même Prélat officia. Ce Sermon
finit à peu près en ces termes , » Grands du
» Monde ,brifez l'orgueil des paffions contre
>> l'humilité de ce Berceau .
>> Ne femble -t'il pas , SIRE , que c'eft au-
» près de ce modefte Berceau que vous avez
formé votre coeur ? Fut-il jamais plus . de
>> grandeur & moins de fafte., plus de majef-
» cé
DECEMBRE . 1741. 2953
» té, & en même tems plus de douceur, plus
» de pouvoir & plus de modération ?
» L'Italie vous a vû conquerir des Provin
» ces , & ceder vos conquêtes , gagner des
» batailles & donner la paix , vaincre vos en→
»nemis & les fervir comme des Alliés. L'AI-
>> lemagne vous voit aujourd'hui montrer
>> des armes , non pour faire la guerre , mais
» pour affûrer la paix , déployer vos forces ,
> non pour envahir des Villes & des Etats ,
» mais pour en êtré le vainqueur fans en vou-
» loir être le maître, par un défintereffement
» qu'il nous eft permis de louer à la face des
» Autels . '
» Tel que nous vous voyons au-dehors
»pour la tranquillité de l'Europe , tel vous
» êtes , SIRE , pour le bonheur de vos Su-
» jets dans l'interieur de votre Royaume &
» dans le fein de votre Maifon , partout juste
>> & debonnaire. 1
23
>> Vous y montrez toujours un de ces ca-
» ractéres heureux , j'ai prefque dit de ces
» bons coeurs, que célebre le Saint Eſprit, &
» qui ajoûtent un nouvel éclat au Diadéme .
»Votre fervice eft doux & facile ; jamais
d'impatience ni d'humeur ; pas une parole ,
» un regard où le Souverain ne paroiffe gra-
>> cieux , ou bienfaifant , le meilleur comme
» le plus grand de tous les Maîtres , auffi en
» fut- il jamais de plus refpecté fur la Terre
» & de plus favorifé du Ciel?
» Par
2954 MER CURE DE FRANCE
» Parmi la révolution des Empires , vous
>> lui devez , SIRE , un Regne tranquille juf-
" ques
dans votre minorité , & toujours
>> heureux , un peuple fidele , une Cour fou
» mife , une Famille Royale digne de toute
>> votre tendreffe , vous lui devez une Reine
» ornée de toutes les vertus , un Fils , le
prodige
de fon âge , des Princeffes deftinées à
» porter votre gloire dans les Cours , à les
» fanctifier par leurs exemples , & à faire ef-
»perer à Votre Majefté la fixième généra-
»tion promife aux Souverains qui font re-
" gner Dieu dans leurs Etats.
>>
) )
Rendez donc , SIRE , vos hommages au
» Berceau du Maître magnifique d'où vien-
» nent les faveurs & les profperités , c'eft le
» Dieu de la Clémence & de la Paix ; par lui
» vous êtes le Pere de la France & le pacifi-
> cateur de l'Europe ; il eft le Dieu des Em-
>>pires ; par lui vous êtes placé fur le Trône
>> le plus glorieux , c'eft le Dieu des armées ,
» vous lui devez vos victoires ; c'eſt le maî-
>> tre des coeurs , il vous a donné la confiance
des Potentats , & par là , il a mis , en
» quelque forte , en vos mains la deftinée
>> des Couronnes .
SIRE ,
>> Dieu vous fait trop de graces , Sire ,
»pour ne pas montrer à l'Univers que par
» votre pieté vous êtes le plus Chrétien des
» Rois , comme il vous voit le plus puiffant
& le plus heureux .
Le
DECEMBRE. 1741. 295¶
l'Evê- Le 27. pendant la Meſſe du Roy ,
que de Bayonne , qui avoit été facré le 24
par l'Archevêque de Tours , prêta ferment
de fidelité entre les mains de S. M.
On a apris de Petersbourg par un Courier
depêché au Prince de Cantemir , que le 6.
Decembre , la Princeffe Elifabeth Petrowna ,
fille du Czar Pierre I. avoit été proclamée
Czarine & reconnue Souveraine de toute
la Ruffie.
Le 30. de ce mois , l'Abbé de Rohans
Ventadour fut reçû dans l'Académie Fran-
Coife à la place vacante par la mort du Duc
de la Tremoille , & il parla avec autant de
dignité que d'éloquence. L'ancien Evêque
de Mirepoix , Precepteur de Monfeigneur le
Dauphin , & Directeur de l'Académie , lui
repondit par un très- beau Difcours.
Mars
Louis François Damas Marquis d'An-
Lezy, Colonel du Régiment de Nice Infanterie
, par Commiffion du 9. Avril 1724. &
Brigadier des Armées du Roy ,
du 15 .
1740. premier Gentilhomme de la Chambre
du Prince de Condé , vient d'être nom
mé par le Roy, pour être Gouverneur de ce
Prince , qui eft entré dans fa 6. année le 91
Août dernier. La Maiſon de Damas , origi
1
naire
2958 MERCURE DE FRANCE
naire du Pays de Foretz , eft trop connue
tant par fon ancienneté , que par fes Illuftra
tions , pour qu'il foit befoin d'en parler ici ,
outre qu'on en trouve la Généalogie imprimée
dans plufieurs Ouvrages , entr'actres
dans Imhoff , & dans le Dictionaire hiſtorique
, mais fur tout dans l'Hiftoire des Grands-
Officiers de la Couronne , au Chapitre des
Grands- Maîtres de France , tome 8. page
317. où elle eſt amplement déduite . On en
remonte la filiation jufqu'au XI . Siècle , elle a
formé un grand nombre de Branches , dont
plufieurs fubfiftent encore aujourd'hui. Le
Marquis d'Anlezi eft fils de Nicolas - François
Damas , Marquis d'Anlezi , Capitaine de
Cavalerie dans le Régiment de Saint Pouange
, & Meftre de Camp de Cavalerie , tué
1707. près de Dourlac à l'attaque du
paffage de Wittemberg, & de Marie -Magdeleine
de Vaux , morte le 3. Fevrier 1712.
Il a épousé Marie - Elizabeth de Ferrero , fille
de feu Jean- Baptifte de Ferrero , Seigneur
de Saint Laurent , Lieutenant Géneral des
Armées du Roy , & Colonel du Régiment
de Nice , & de Marie - Françoife de Sauvion.
Le Comte de Polaftron s'eft avancé avec
le corps de troupes qu'il commande , juſqu'à
Jenikaw & Willimow , d'où il a chaffe
les
DECEMBRE . 1741. 2957
les ennemis auxquels il a enlevé un convoj
de farines & de fourages. Les troupes Saxonnes
fe font étendues fur la gauche pour border
la Sazawa depuis Kalfow jufqu'à Tentchbrod
& Przimil. Le Prince Leopold d'An
halt a paffé l'Elbe à Pardubitz , avec dix Bataillons
& quinze Efcadrons des troupes du
Roy de Pruffe , pour s'avancer fur la Frontiere
de la Moravie , du côté de Landferon.
Le Comte d'Aubigné , après s'être établi à
Pifcek & fur la Votava , a détaché le Comte
de Mortaigne , pour s'emparer du Château
de Fravenberg , fitué fur le Moldaw ;
à une lieuë au- deffous de Budweis . Le Comte
de Mortaigne y arriva le 9. & y ayant prévenu
les ennemis , il les attaqua & les força
de repaffer le pont qui eft fous le Château ,
dans lequel il a mis garnifon. La Brigade de
la Marine s'eft mife en marche pour aller
renforcer ce Corps. On a cantonné des troupes
autour de la Ville d'Egra , pour la tenir
bloquée pendant l'hyver , & elles font commandées
par le Comte d'Eftrées.
Le Comte de Segur ayant eû avis que le
General Palfi raffembloit des troupes pour
tenter de pénetrer dans la Haute- Autriche , a
fait les difpofitions néceffaires pour ſe mettre
en état de lui difputer le paffage de la Riviere
d'Ens .
Le 9. de ce mois , le Comte de Clare ,
Maréchal
958 MERCURE DE FRANCE
faids & par
Maréchal de Camp , lequel avoit été chargé
du rétabliffement d'un pont fur une Riviere,
étant inquieté dans ce travail par des Huf
des Pandoures qui s'étoient établis
dans quelques maifons fur l'autre bord ,
ily fit paffer dans des bâteaux deux Compagnies
de Grénadiers avec trente Dragons &
un piquet de so. hommes , commandés
M. du Breuil , Capitaine d'une Compagnie
de Grénadiers du Régiment Royal des Vaiffeaux
; le détachement chargea les ennemis
avec fuccès , & après leur avoir enlevé quatre
piéces de canon , il les chaffa de la Redoute
qui étoit à la tête du pont , & dont ils
'étoient emparés.
par
*******************
MORTS.
E 23. Novembre D. Marie - Agathe Defvieux
Lepoule de Pierre de Fremont du Mazy, Préfident
à la feconde Chambre des Euquêtes du Parlement
de Paris , avec lequel elle avoit été mariée
au mois de Fevrier 1738. mourut âgée de 19. ans
6. mois , laiſſant des enfans. Elle étoit fille de feu
Louis- Philipe Defvieux, Ecuyer, Fermier Géneral des
Fermes du Roy , mort le 13. Decembre 1735. &
de D. Magdeleine Bonne le Coufturier , fa veuve.
Le 25. D. Anne-Marie- Magdeleine de Canouville
, D. de Grofménil , Beauchamp , Criquetot ,
Gremonville,&c. veuve en premieres nôces de Robert
DECEMBRE.
1741 2959
bert le Roux , Baron d'Efneval , Vidame de Normandie
, Sire de Pavilly , & d'Acquiny , Châtelain
de Cambremont , & du Pieffis- Jourdain , Seigneur
de Bedal , Vironvey , la Métairie , Ambaffadeur
pour le Roy en Portugal , & en Pologne , & ancien
Confeiller au Parlement de Normandie mort à
Grodnau en Pologne , le 8. Fevrier 1693. & en
fecondes nôces de Charles- François de Montholon ,
Seigneur d'Aubervilliers , premier Préfident du
Parlement de Normandie , avec lequel elie avoit
été mariée le 5. Janvier 1700. & dont elle refta
veuve le 9. Juin 1703. mourut à Paris , âgée d'enfon
72 , ans . Elle étoit fille d'Adrien de Canouville,
Seigneur de Grofménil , & d'Elizabeth Bretel
Marquise de Grémonville. Elle avoit eû de fon premier
mariage Claude- Robert le Roux , Baron d'Efneval
, Vidame de Normandie , Préfident au Parlement
de Rouen , & Claude- Adrien le Roux d'Efneval
, Chevalier de Malthe , & de fon ſecond mariage
un fils mort en bas âge.
Le 28. Louis- François de Mornay , ancien Evêque
de Québec en Caanda , Prieur Commandataire
du Prieuré de Saint Juft d'Arbois , O. S. B.
D. de Befançon , mourut à Paris . Il étoit dans la
78. année de fon âge . Il étoit Religieux de l'Ordre
des Capucins , Définiteur , & Gardien du Couvent
de Meudon , lorsqu'il fut nommé au mois de
Juin 1713. Coadjuteur de Quebec ; & l'Evêché
Titulaire d'Eumenie in partibus ayant été propofé
pour lui à Rome , avec cette Coadjutorerie le 17.
Janvier 1714. il fut facré le 22. Avril fuivant à Paris
dans l'Eglife du Couvent de fon Ordre rue Saint
Honoré , par le Cardinal de Rohan , Evêque de
Strasbourg , affifté des Evêques de Viviers & de
Lavaur ; & le 19. Mai de la même année , il prêta
Cerment de fidelité entre les mains du Roy . Il devint
296 MERCURE DE FRANCE
vint Titulaire de l'Evêché de Quebec , par la mort
de Jean Baptifte de la Croix d.: Chevriers de Saint
Vallier , fon prédeceffeur , le 26. Decembre 1727.
Il s'en démit en 1733. fans y avoir été , & obtint
en même tems le Prieuré d'Arbois. Il étoit fils puíné
de Charles de Mornay , Seigneur du Mefnil-
Terribus , Capitaine de Cavalerie , qui eût la jambe
fracaffée à la Bataille de Rocroy en 1643. & d'Anne
du Quefnel de Ponchon ; la Généalogie de la
Maifon de Mornay eft raportée dans lHiftoire des
Grands-Officiers de la Couronne à l'Article des
Chanceliers de France to . 6. p . 279.
Le même jour D. Marie-Anne Bazin , épouſe de
Guillaume de la Boiffiére , Seigneur de Chambors
de l'Académie Royale des Infcriptions , & Belles-
Lettres , autrefois Capitaine dans le Régiment Colonel
Géneral de la Cavalerie , avec lequel elle
avoit été mariée le 17. Janvier 1696. mourut en
fon Château de Chambors près de Gifors , âgée de
75. ans , & fans enfans . Elle étoit fille de Maurice
Bazin , Auditeur en la Chambre des Comptes de
Paris , mort le 3. Août 1699. & de Marie de Lo-
Avril 1702.
gaes ,
morte le 4.
Le s. Decembre Charles- Jofeph Robert , Comte
de Lignerac , Grand Bailli , Lieutenant Géneral , &
Commandant pour le Roy au Gouvernement du
Haut Pays d'Auvergne , Mestre de Camp de Cavalerie
, & ci-devant Enfeigne de la Compagnie des
Gendarmes de la Garde ordinaire du Roy , dont il
avoit éré d'abord Guidon , mourut à Paris , âgé de
31. ans. On a raporté la mort de la Marquife de
Lignerac , ſa mere , dans le Mercure d'Avril dernier
, page 832. où l'on a marqué fon mariage
avec Marie- Françoife de Broglio , de laquelle il a
eu Charles François- Marie- Robert de Lignerac ,
mé le 13. Septembre 1737.
Le
DECEMBRE . 1741 2961
Le 6. Elizabeth de la Vergne de Treffan , veuve en
premieres nôces fans enfans de Jean - Paul de Gourdon
de Genouillac , Comte de Vaillac , Baron de
Genouillac , de Gourdon , Soucirat , Rheillac ,
Reilhagues , la Barriére , Seigneur de Montferrand,
premier Baron de Guyenne , Chevalier des Ordres
du Roy , Lieutenant Géneral de fes Armées , premier
Ecuyer, & Capitaine des Gardes Françoiſes du
Corps de Philipe , fils de France , Duc d'Orleans &
enfuite Chevalier d'honneur de Charlotte Eliza
beth de Baviere , Ducheffe d'Orleans , mort le 18 .
Janvier 1681. avec lequel elle avoit été mariée le
6. Août 1676. & en fecondes nôces de Charles de
ła Mothe Houdancourt , Marquis de Brinvilliers
dit la Mothe , Seigneur du Fayel , Lieutenant Géneral
des Armées du Roy , ancien Capitaine fous
Lieutenant de la Compagnie des Gendarmes de fa
Garde ordinaire , Chevalier de l'Ordre Militaire de
Saint Louis , & Gouverneur de Bergue Saint Vinox
, Grand d'Espagne , avec lequel elle avoit été
mariée le 14. Mars. 1687. & dont elle refta veuve
le 24. Mars 1728. mourut à Paris , âgée de 88. à
89. ans. Les nouvelles publiques portent qu'elle
étoit dans la 99. année de ſon âge , mais fuivant
l'acte de fon premier mariage de l'an 1676. elle
n'avoit alors que 23. ans. Cette Dame ; qui étoit
fille de François de la Vergne , Marquis de Treffan,
& de Louiſe de Montegnard , & foeur de feu Louis
de la Vergne de Treffan , Archevêque de Rouen ,
ancien Chanoine , & Comte de Lion , laiffe de
fon fecond mariage Louis Charles , Marquis de la
Mothe-Houdancourt , Grand d'Espagne , Lieutenant
-General des Armées du Roy . du 18. Octobre
1734. & Gouverneur de Salins dans le Comté de
Bourgogne , depuis le mois de Septembre 1738. &
qui eft marié du 4. Juillet 1714. avec Théreſe Luf
II. Vol. I tell
2962 MERCURE DE FRANCE
telle de Courbon , fille unique & héritière de feu
Eutrope- Alexandre de Courbon , Marquis de la
Roche-Courbon , & de feüe Marie d'Angennes. Il
ne refte de ce mariage qu'une fille unique , non
encore mariée .
Le.... Decembre Anne François de Paris , Seigneur
de la Brofle , de Monceaux , de Neuilly ,
Préfident Honoraire en la Chambre des Comptes
de Paris , mourut en fon Château de la Broffe.
près de Montereau-Faut-Yonne âgé de 81. ans. Il
avoit été d'abord reçû Confeiller au Parlement de
Metz , le 3. Avril 1686. & enfuite Préfident en la
Chambre des Compres le . Mars 1689. Il s'en démit
en 1739 après 49 ans d'exercice. Il étoit fils
aîné de François de Paris . Seigneur de la Broffe ,
Monceaux , Neuilly , Guerchy , auffi Préfident en
la même Chambre des Comptes , mort le 15. Fevrier
1695 âgé de 77. ans , & de Marie du Fos ,
morte le 17 Octobre 1705. Il avoit épousé Angelique
- Thérele Collin , veuve de Philipe - Jerome
de Chefnel Marquis de Meuxen Saintonge , Seigneur
de Ponceaux , Camp Remy , & Ruiel en
Beauvoifis , &c. Meftre de Camp du Régiment Colonel
General de la Cavalerie légere de France , &
fille de Céfar Collin , Seigneur de Liancourt , & de
Leffart , Confeiller- sécretaire du Roy, Maiſon Cou
ronne de France & de fes Finances , & l'un des Fermiers
Généraux des Fermes unies de S. M. & de
Geneviève le Scellier . Elle mourut le 21. Juillet
1722. Il laiffe d'elle Anne- Céfar - François de Paris
de la Broffe , Marquis de Monceaux , Seigneur
de Camp-Remy , Préfident en la Chambre des
Comptes & reçû en cette Charge en furvivance de
fan pere
le ro. Juillet 1719. admis au Service par
fa demiffion en 1739. & auparavant Confeiller au
Parlement de Paris ou il avoit été reçû le 6. Mai
4716.
*
.. I Le
DECEMBRE. 1741
2963
Le 8 François du Puy , Marquis de Montbrun
Gentilhomme de la Chambre du Duc d'Orleans ,
mourut à Paris , âgé de 48. ans . Il étoit de l'illuftre
& ancienne Ma fon du Puy de Montbrun , en
Dauphiné, dont Gui Allard a donné l'Histoire Génealogique
au Public en 1682. & fis de Jean du
Puy de Montbrun , Marquis dé Villefra che , Seigueur
de Beauregard , de Meynnans , & c. & de
D. Marie- Marguerite de Friefen , vulgairement
de Frife , Allemande , foeur de Jean Henri , Conte
de Friefen , Maréchal de Camp Géneral des Armées
de l'Empereur , & General de l'Artillerie Impériale
, qui foutint le Siége de Landau en 1703 .
contre le feu Maréchal de Tallard , & qui mourut
le 25. Août 1706. Le Marquis de Montbrun ,
vient de mourir , avoit été marié le 10. Juillet
qui
1725. avec Anne le Breft fille de feu Barthelemy
le Breft , Ecuyer Confeiller du Roy , Tréforier
General des Fortifications de France & de Marie
Tardif Il en a eu des enfans . Il y a deux autres
Branches de cette Maiſon , l'une de Dupuy Rochefort
, en Dauphiné , & l'autre de Dupuy S. André
Montmejan , en Rouergue.
Le 11. D Françoife- Ifabeau - Angelique - Jeanne
Emé de Marcieu , époufe de François de Manify ,
Comte de Ferriére , Lieutenant de Roy de la Province
de Dauphiné , mourut à Paris , âgée de 24.
ans.
Le... Jean Louis de la Bourdonnaye , Evêque &
Seigneur de S. Pol , Comte de Leon en Baffe Bretagne,
Docteur en Théologie de la Faculté de Paris ,
du 20. Janvier 1695 , mourut dans fon Diocèſe.
dans la 76. année de fon âge , & la 40. de fon Epifcopat.
Il étoit Vicaire General du Diocèle de Nantes
, larfqu'il fut nommé le Octobre
31.
' Evêché de Saint Pol, Il fut facré le 23. Avril
à
I ij
1701
1702.
2964 MERCURE DE FRANCE
1702. dans l'Eglife du Noviciat des Jefuites à Paris,
par l'Evêque de Viviers , affifté des Evêques de
Quebec , & de Sarlat ; il affifta aux affemblées gé➡
nezales du Clergé de France , de 1710. & de 1711.
en qualité de Deputé de la Province de Tours , &
étant Deputé des Etats de Bretagne pour le Clergé,
il harangua le Roy à Verfailles à la tête de la Deputation
le 27. Janvier 1732. Il étoit frere puiné.
'Yves Marie de la Bourdonnaye , Seigneur Comte
de Couetyon , Gaffilly , Confeiller d'Etat ordinaire
,mort retiré aux Camaldules le 28. Août 1726 .
fous deux fils de Louis de la Bourdonnaye , Seigacur
Comte de Couetyon , Confeiller & Commif
faire aux Requêtes du Parlement de Bretagne , &
de Louis le Trefle,
i
Le D .... Françoife Faudel, ci - devant Gouvernante
des enfans du feu Duc du Maine , veuve depuis le
4. Mai 1727. de Nicolas de Malezieu , Seigneur de
Chaftenay , Chancelier de la Souveraineté de Dombes
, Chef des Confeils du feu Duc du Maine, Souverain
de Dombes , Secretaire de fes Commandemens,
Sécretaire Géneral des Suiffes & Grifons , l'un
des 40. de l'Académie Françoife , & Honoraire de
l'Académie Royale des Sciences , mourut à fa Terre
de Chaftenay , près de Sceaux , âgé de 91. ans.
Elle étoit fille de Pierre Faudel , Seigneur de Favereffes
, qui mourut à Sainte Menehoud le 11. Seprembre
1707. dans la 102 année de fon âge . Elle
a eu entr'autres enfans , Nicolas de Malezieu , Evêque
de Lavaur depuis 1713. & Abbé Commandafaire
de l'Abbaye de Moreilles , O. Cit . D. de la
Rochelle depuis 1692. Pierre de Malezieu , Seigneur
de Chaftenay , & des Tournelles , Lieutenant
General de l'Artillerie de France , Maréchal
de Camp des Armées du Roy , du premier Aqûr
1734. & Secrétaire Géneral des Suifles & Grifons,
depuis
DECEMBRE. 1741. 2965
depuis 1727. Un troifieme fils Capitaine dans le
Régiment des Carabiniers ; Elizabeth de Malezieu ,
yeuve de Claude des Rioux , Comte de Meffini
Premier Président du Parlement , & Intendant de
la Souveraineté de Dombes , mort le 9. Novembre
1712. âgé de 39. ans , & Marie de Malezieu ,
époufe de Louis de Guiry , Seigneur de Noncourt,
& de la Ronciere , Meftre de Camp de Cavalerie ,
ancien Exempt des Gardes du Corps du Roy ,
Lieutenant General de la Province d'Aulnis , Ville
& Gouvernement de la Rochelle , & autres Lieux
en dépendants , & Gouverneur des Tours , Port ,
Havre , & Chaîne de la Rochelle.
Le 21. D. Bernard de Montfaucon , de la Maiſon
de la Roquetaillade au Diocèle d'Alet en Languedoc
, Benedictin de la Congrégation de S. Maur ,
Honoraire de l'Académie Royale des Infcriptions ,
& Belles Lettres , depuis 1719. & qui s'étoit rendu
celebre par un grand rombre d'Ouvrages d'érudition
, mourut à Paris , dans l'Abbaye de Saint Germain
des Prés , dans la 88. année de fon âge , & la
66. de fa profeffion , ayant fait fés voeux le 13 .
Mai 1676. Son Eloge eft raporté dans le Dictionaire
Hiftorique de Moreri ; Edit de 1725. & 1732 .
on trouve plufieurs corrections , & des additions
confidérables à cet Article dans le Suplément
du même Dictionaire de 1735 .
Le 26. Bertarnd Céfar du Guefclin , Chef du nom
& Armes de fa Maifon , Seigneur de la Roberie , de
Cranhac & de Montmartin , Chevalier de l'Ordre Militaire
de S. Louis , Meftre de Camp de Cavalerie ,
& ci- devant Capitaine dans le Régiment du Roy.
Infanterie , premier Gentilhomme de la Chambre
du Duc d'Orleans depuis le mois de Janvier 1740.
& auparavant l'un de fes Gentilshommes Chambellans
, mourut à Paris en fon apartement du Palais
I iij Royal ,
2966 MERCURE DE FRANCE
Royal , dans la 48. année de fon âge , étant né le
12. Novembre 1694. Il étoit fils aîné de feu Berrand
Charles -Baptiste du Guefclin , Seigneur de la
Roberie , qui avoit été Capitaine de Dragons dans
le Régiment de Bretagne , mort en 1710. & de
feue D. Renée Gouret de Cranhac . Il avoit été marié
deux fois , la premiere au mois d'Octobre 1713 .
avec Elizabeth- Angelique Dreux , fille de Thomas
Dreux , Marquis de Brezé , Baron de Berrie ,
&c . Grand Maitre des Ceremonies de France ,
Lieutenant General des Armées du Roy , & Gouverneur
de Loudun , & de D Catherine - Angelique
Chamillart ; elle mourut le 19. Oct. 1724. dans la
23. année de fon âge , en couches d'un enfant
mâle , qui n'a pas vécu ; & 2 ° le 9. Fevrier 1728 .
avec Marguerite Bofc , feçonde fille de Jean- Baptifte
Bofc Seigneur de Soucarriere , Procureur Genera!
du Roy en la Cour des Aydes de Paris Secré
taire de la Chambre & du Cabinet de S. M. Commandeur
, Chancelier & Garde des Sceaux des Ordres
de N..D. du Montcarmel & de Saint Lazare
de Jérufalem , & de feue D. Fra çoiſe le Gendre.
Il a eu plufieurs enfans de ce mariage , dont il
ne refte qu'un fils & une fille , fçavoir Bertrand
Jofeph du Guefclin , né le 24 Mars , & Marie
- Louife- Marguerite du Guefclin , née le 18. Août
dernier , âgée de 9 ans 7. mois . Le Marquis da
Guetclin , qui vient de mourir , étoit frere de Bertran
Baptifte-René du Guefclin , Evêque de Cahors
, facré le 15. Octobre dernier .
1
ARRESTS
DECEMBRE. 1741 2967
****************
ARRETS NOTABLES.
*
ED
DIT DU ROY , portant création de huit
cent vingt mille livres de Rentes viageres fur
l'Hôtel de Ville de Paris , donné au mois d'Octobre
1741. regiftré en Parlement le f . Decembre
fuivant , par lequel S. M. ordonne l'exécution des
VIII. Articles contenus audit Edit ; fçavoir :
ART. I. Que par les Commiflaires de notre Confeil
, qui feront par Nous députés , il foit vendu &
& aliené à nos chers & bien amés les Prevôt des
Marchands & Echevins de notre bonne Ville de
Paris , huit cent vingt mille livres actuelles & effectives
de Rentes viageres , à prendre fur tous les
deniers provenans de nos Droits d'Aydes & Gabelles
, & cinq groffes Fermes , lefquels Nous affectons
, obligeons & hypotequons par preference à la
partie de notre Tréfor Royal au payement des arrerages
defdites Rentes.
II. Les conftitutions particulieres desdites Rentes
, qui ne pourront être moindres de cinquante livres
de jouillance actuelle , feront faites par lefdits
Prevôt des Marchands & Echevins à ceux qui en auront
porté les Capitaux en notre Tréfor Royal, pour
en jouir , foit fur leur tête , foit fur celles de
toutes autres perſonnes que bon leur femblera ; &
les Contrats feront paffés pardevant tels Notaires
que les acquereurs voudront choifir , qui feront te
nus de leur délivrer lefdits Contrats fans frais , &
auxquels il fera par Nous pourvû d'un falaire raifonnable.
III. Il fera fait fept Claffes differentes defdites
Rentes viageres , fuivant la difference des âges des
I j Rentiers
2968 MERCURE DE FRANCE
0
Rentiers. La premiere , de vingt mille livres de
rente depuis vingt ans accomplis jufqu'à trente ans ,
dont les arrérages feront payés à raifon du denier
treize. La deuxième , de foixante - dix mille livres,
depuis trente ans jufqu'à quarante , à raiſon du denier
douze. La troifiéme , de cent trente mille livres,
depuis quarante ans jufqu'à cinquante , à raiſon du
denier onze . La quatrième , de trois cent mille livres
, depuis cinquante ans jufqu'à foixante , à raifon
du denier dix . La cinquième , de cent cinquante
mille liv. depuis foixante ans jufqu'à foixante - cinq, à
raifon du denier neuf. La fixiéme , de quatre-vingtdix
mille livres , depuis foixante- cinq ans jufqu'à
foixante -dix , à raison du denier huit . Et la feptiéme
, de foixante mille livres , depuis foixante- dix
ans & au-deſſus, à raifon du denier lept ; & à cet effet
ceux qui acquereront defdites Rentes , feront terus
de juftifier de leur âge par des Extraits Baptiftaires,
ou autres Actes équipolens , fuivant & conformémément
à ce qui a été prefcrit ci -devant en pareil
cas.
IV. S'il arrivoit que quelqu'un des Acquereurs
defdites Rentes , fur un faux Certificat , ou par une
fupofition de nom , fe fit comprendre dans une
Claffe plus avancée en âge que celle où il doit être,
voulons que fa Rente demeure éteinte & fuprimée ,
& qu'il foit condamné en fix mille livres d'amende,
aplicable un tiers au Dénonciateur , & les deux
autres tiers à notre profit ; même qu'il foit procedé
contre lui comme fauffaire , fuivant la rigueur
des Ordonnances , fans qu'il puiffe être rétabli
fous quelque prétexte que ce foit : Permettons néanmoins
aux Rentiers de faire réformer , lors de la
paffation des Contrats , les erreurs qui pourroient
s'être gliffées à ce fujet dans les Quittances qui leur
feront délivrées par le Garde de notre Tréfor Royal.
Y.
DECEMBRE. 1741 : 2969
V. Les Acquereurs defdites Rentes recevront
les arrerages des trois mois du Quartier courant
en quelque tems d'icelui qu'ils acquierent , dont la
dépenfe fera paffée & allouée fans difficulté dans les
comptes des Payeurs ; & feront les arrerages payés
jufqu'au jour du decès de chacun des Rentiers ,
après quoi lefdites Rentes demeureront éteintes à
notre profit : mais les arrérages jufqu'au jour du
décès apartiendront à leurs veuves ,
heritiers ou
ayant cauſes , & leur feront payés fans difficulté .
VI. Les Etrangers non naturalifés , même ceux
qui feront demeurans hors notre Royaume , Pays,
Terres & Seigneuries de notre obéiffance , pourront
acquerir & poffeder les Rentes viageres créées
par le préfent Edit , ainfi que nos propres Sujets ,
& ils en jouiront avec tous les privileges qui leur
ont été accordés pour les autres Rentes dudit Hôtel
de Ville par l'Edit du mois de Décembre 1674.
& autres fubfequens .
VII. Et pour d'autant plus favorifer les Acquereurs
defdites Rentes viageres , voulons que les
arrérages , à quelques fommes qu'ils puiffent monter
, ne puiffent être faifis , fous quelque prétexte
que ce foit , pas même pour nos propres affaires
& en outre que les Rentes qui feront acquifes par
les Etrangers , foient exemptes de toutes Lettres
de marque & de repréfailles , pour quelque caufe
que cè foit.
VIII. Voulons au furplus que les arrerages
defdites Rentes viageres foient payés par les Payeurs
des . Rentes de l'Hôtel de Ville de fix en fix
mois , en la même forme & maniere que les autres
Rentes viageres , & conformément aux differens
Reglemens qui ont été faits pour la police
defdites Rentes , & notamment par notre Déclaration
du 27 Décembre 1727. & par l'Arrêt rendu
en notre Confeil d'Etat le 23. Avril 1737. &c .
"
2970 MERCURE DE FRANCE
AUTRE du 17. portant Réglement fur le Commerce
que les François font dans les Echelles de
Morée & d'Albanie , par lequel S. M. ordonne
l'exécution des trois Articles contenus audit Arrêt.
AUTRE du 24. qui ordonne qu'en payant par les
Cautions de Jacques Forceville , Adjudicataire géneral
des Fermes unies & du Tabac , par chacune année,
tant que le Dixiéme aura lieu , la fomme de deux
cent trente mille livres , par forme d'abonnement ,
lefdites Cautions feront la retenue du Dixiéme fur
les parties de leurs frais de régie qui peuvent y être
fujettes , & fur les apointemens de leurs Commis.
AUTRE du 31. qui proroge pour dix années l'exemption
de tous droits d'Entrée , accordée par celui
du 30. Septembre 1732. fur les denrées & marchandiſes
venant de la Loüifianne .
AUTRE du premier Novembre , concernant la
levée du Dixiéme dans la Ville de Paris , au bas
duquel , font les noms & demeures des Receveurs.
particuliers du Dixićme .
AUTRE du fept , qui ordonne qu'il fera ar
rêté par les fieurs Intendans & Commiffaires dé
partis dans les Provinces & Généralités du Royaume
, des rolles du Dixiéme , en attendant ceux qui
doivent être arrêtés au Confeil ; & que lefdits rolles
feront exécutés felon leur forme & teneur , tant
à l'égard de ceux qui auront fourni leurs déclarations
conformément à l'Article XI , de ladite Décla-
Lation , que de ceux qui feront en demeure de le
faire
AUTRE du même jour , qui ordonne que les Prépofés
DECEMBRE. 1741. 297!
T
pofés par les fieurs Commiffaires départis pour le
recouvrement du Dixiéme , feront tenus de faire
leurs diligences contre les dénommés dans les rolles
, & d'en payer le montant de quartier en quartier
, à peine d'y être contraints en leur nom , &
que lefdits Prépofés durant leur geftion , feront
taxés d'office fans pouvoir être augmentés , &
exempts de collecte , tutelle , curatelle , nomination
à icelle , de la folidité , & de la milice , tant
pour eux , que pour un de leurs enfans .
TABLE.
PIECES FUGITIVES. L'ufage de la vie,
2775
Lettre de M. l'Ab ... fur une Offrande de glace à
l'Eglife de Befançon 2776
2796
Le Singe Satyrique , Fable ,
Panégyrique de S. Louis , prononcé le jour de la
Fête du Saint , 2798
A M. l'Ab. Goujet fur la Bibliot . Françoiſe , 2816
Programme de Chirurgie , par M. Arnaud , 287
Les Griffes du Chat , Amuſement Poëtique , 2823
Lettre écrite au ſujet du Canton de Landevenec en
Bretagne ,
2828
2835
Vers envoyés à M.Madin au fujet d'unBouquer , 28 ; 4
Suplément au fujet de l'Ordre des Chartreux & des
Chartreufes
Reflexions fur le peu d'attache à vie , 2850
Queftion importante , jugée au Parlem.de Paris 2853
Enigmes , Logogryphes ,
1859
NOUVELLES LITTERAIRES DES BEAUX- ARTS , &c.,
Le Gouvernement des Abeilles Nouv . Edit. 2863
Catalogue des Livres & Eftampes du feu Maréchal
d'Entrées
,
2862
Le
La Clef des Pfeaumes ; 2863
Ibid.
Maximes & Reflexions morales, trad.de l'Angl.ibid.
Le nouveau Parfait Maréchal ,
Comparaifons Morales ,
4
2864
Petit Dictionaire François , ou Principes de l'Ortographe
,
ibid.
Traité de la Cruë des Meubles au--deflus de leur
prifée ,
Nouveaux Traités des Trigonométrie ,
Hiftoire des Empires & des Républiques ,
2865
2871
3872
Examen & Réfutation des Leçons de Phifique, ibid.
Réponse aux Objections des mêmes Leçons , ibid.
Penfées fur divers Sujets de Morale , 2873
Sixiéme & dernier vol . du Diction . Géograph. ibid.
Avis pour l'Hiftoire des Hommes Illuftres , 2875
Suite de la Defcript. des Maladies Véneriennes ,ibid .
Les Amuſemens de Coeur & de l'Eſprit ,
Calendrier Méridien ,
Réplique à M. de Molieres , &c.
ibid.
2887
ibid.
Traité fur la néceffité de s'inftruire de la vérité de
la Religion , 2889
Suite du Recueil d'Edits , Déclarations , & c . 2894
Antiquités Grecques & Romaines ,
De la Navigation du Tibre ,
Difcours d'un Evêque de Verone ,
ibid.
2899
2896
Explication des Coûtumes & Cérémonies chés les
Romains ,
ibid.
Differtation fur Homere , ibid.
Hiftoire de la Maifon Palatine , 2897
Journal du Regne de Henry IV.
ibid.
Monumens Typographiques , ibid.
Livres Etrangers chés Briaffon , 2898
Nouveau Profpectus reçû de Hollande , 2905
Académie de Marſeille , 2912
Theſe foûtenue à Besançon , 2923
Eftampes nouvelles . ibid.
Privilege , Eftampes Coloriées , 2924
Vente
Vente de Cartes chés les PP . Auguftins de la Place
des Victoires ,
L'Orvietan de Contugi ,
Spectacles ,
2928
ibid.
2929
Nouvelles Etrangeres, Ruffie, Allemagne , & c . 9230
Morts des Pays Etrangers ,
2952
France, Nouvelles de la Cour, de Paris , & c. 2953
M. l'Abbé de Rohan - Vantadour , reçû à l'Académie
Françoiſe ,
2956
La Princeffe Elizabeth Petrowna , proclamée Czarine
, ibid.
Le Marquis d'Anlezy , nommé Gouverneur du
Prince de Condé ,
Morts ,
Arrêts Notables ,
Table de ce Volume.
Errata du premier Volume de Decembre
Table Génerale de l'année 1741 .
ibid.
2959
2969
Errata du premier Volume de Decembre.
Age 2606. Note omife au bas de la Fable de
M. Richer , au mot, un Apologue heureux ,& c .
Monfeigneur le Dauphin a fait écrire cette derniere
Fable en Lettres d'or , & l'a fait placer dans fon
Apartement à Versailles.
P. 2693. ligne 7. Perrin , lifez , Ferrein.
P. 2711. 1. 7. du bas , dans , 1. à.
P. 2746. 1. 7. du bas , Echevins , l . des Echevins .
Fantes à corriger dans l'article de la Généalogie
de la Maifon de Groffolles de Flamarens.
Page 2755 : ligne 20. Lois XIII . lifez , Louis XIII .
Ibid. ligne 22. il époufa l'an 1609. Françoife d'Albret
, premiere femme de Charles de Lorraine ,
Comte de Marfan, lifez , il épousa l'an 1609 .
Françoife d'Albret , tante de Marie d'Albret ,
premiere femme
premiere femme de Charles de Lorraine, Comte
de Marfan.
Page 2756. ligne 26. mort , life , eft mort.
Derniere ligne de cette page, & premiere & feconde
ligne de la fuivante , François Agefilan de
Groffolles, Premier Maître d'Hôtel de Monfieur,
Philipe de France , Frere unique de Louis XIV.
lifez , François Agefilan de Groffolles , Comte de
Flamarens , Premier Maître d'Hôtel de Monfieur,
Philipe Fils de France , Frere unique du Roy
Louis XIV . ·
Page 2757 ligne z. & 3. il avoit épousé Marie- Gabrielle
le Tellier,fille de Jacques le Tellier, lifez,
il avoit épousé Marie-Gabrielle le Tillier, fille de
Jacques le Tillier.
Où eft écrit Grofolles , lifez , Groffolles.
Dans les derniers Exemplaires qui ont été débités
du premier Volume de Decembre , ees fautes d'impreffion
ont été corrigées par le moyen d'un Carton qu'on
Ja mis dès qu'on s'en eft aperçu.
TABLE
TABLE GENERALE
De l'Année 1741 .
A Cadémie Françoife
A.
144. 2096. 2692
770. 1178 Des Sciences ,
Des Belles - Lettres ,
Des Jeux Floraux
De Sonions ,
144. 771. 2104: 2691
2260
*
771
De Lion ,
De Bordeaux ,
De Pau ,
De Dijon ,
D'Arras ,
1183
De la Rochelle 145. 1853
2258.2922
1870
354. 532.2358
557
-D'Aix ,
2419%
De Villefranche ,
2264
De Chirurgie , 989. 2389
De Marfeille , 2912
De Lisbonne , 354
-De Rome , 2923
Armorial
Alcione , Parodie ,
Ambroife ( Lettres de S. )
Ame , où elle exerce fes fonctions ;
Amuſemens du Coeur & de l'Esprit ,
Antiquités , 2404. De France ,
Antoine & Cléopatre , Tragédie
Arlequin muet par crainte , Comédie ,
Arlequin & Scapin Voleurs , Comédie ,
Arlequin Prince par hazard ,
2
2303
328
2143
330. 963 .
1824. 2875
1805
2469
789
1012
Comédie , 2075
76.6
Arrêts
TABLE
Arrêts , 4. 77. 226. 661. 898. 1507. 1736. 2002 ′
2852
Artillerie ( Méchaniſme de l' } 1406
Athies-fur-Orge , 2384
Avocat ( fur la Profeffion de l' ) 1104
B.
Bajazet I. Tragédie ,
Banier ( Antoine )
Baffin de Neptune ,
B Acha d'Alger ( le ) Opera Comique ,
1883
137
Bal de Paffy ( le ) Comédie ,
1881
2759
165
Bayard ( le Chevalier ) 749
Bayle ,
866
Bazin ( J. Baptifte ) 936
Belle orgueilleufe ( la ) Comédie , 1881
Befançon ( Ufages de l'Eglife de ) 2776
Biblia Sacra , 1812
Bibliotheque Germanique ,
518.723
-Françoiſe , 2231
Bieria > 1671
Boire à la fanté , 1768.
Bouquets , 1572. 1715. 2531. 2590.
Bouts-Rimés , 105.719.1123. 2015
Bureau Typographique , 50. 60. 304. 2152. 26.11.
Affé ,
Cafrerie Carrie
Calendrier Méridien ,
Cantates ,
C,
1965
336
2886
25. 311. 1368.
Carcaffonne , 1168. Hiftoire de cette Ville , 1632
Carnification , dé l'Os Maxillaire 2397
Cartes Géographiques , 995. 2050. 2280, 2431 .
Caufes Célebres
.2457. 2700. 2928
2242
Céremonie
DES MATIERES.
Céremonie Ecélefiaftique
?
Chartes de la Tour de Londres ,
1490
510
Chartreux , 1946. 2835
Chaftellain ( Georges ) 555
Châtelet ( Maifon du ) 1163.2123
Châtillon (Jeanne de ) 1358. 1938
Chercheufe d'efprit ( la ) Opéra Comique , 371
Chirurgie ,
2817
Chronogrames ,
2249
College Royal ,
2694 .
Connétablie ,
Courge ,
Communauté des Avocats & des Procureurs ,
Coûtumes d'Orleans , 740. D'Artois ,
26
707
236
1171
Critique ,
Croix de J. C.
422
454. 1704. 2651
D.
Anfeurs de Corde , 335
Défi d'Arlequin & de Scapin , Comédie , 791
Deidier ( OEuvres de l'Abbé )
Dent OEilliere ,
Defcentes ,
1399
67
570
Deſcription des Deffeins des grands Maîtres d'Italie
, & c.
Deucalion & Pirrha , Comédie ,
114
370. 581
Dictionaire de Trévoux , 1631. 1813. Hiftorique
de France , 2668. De la Martiniere , 2873
Difcours , 1845. 1986. 2348. 2569
Differtations fur l'Hiftoire Eccléfiaftique & Civile
de Paris ,
Divorce d'Arlequin & d'Argentine, Comédie, 1012
Dominique ( S. ) •
957
925
TABLE
E
E.
Cho da Public ( l' ) Comédie ,
Elegie ,
588. 781
761
Elémens d'Aftronomie & Géographie à l'ufage des
Négocians ,
Elevatoire ,
Embarras du choix ( l' ) Comédie
Embry on tombé dans le ventre
Empire 'de l'Amour ( 1 ) Ballet ,
>
742
2394
2707
2399
1430
Enigmes , 108. 325. 508; 721. 939. 1161. 137@►
1608. 1793. 2017. 2227. 2443 , 2666. 2819
Epigramme ,
Epiftolaire ( le genre )
Epitaphes , 168. De Paris ,
Epitalames
100
1441
1173.2179
2407. 2649
Epitres en Vers , 41. 222 473. 489. 166. 674.
1321. 1327. 1357. If12. 1728. 1756. 2771.
Imitée d'Horace ,
Efchiquier
83
433
Effais fur l'Hiftoire des Belles - Lettres , 138. Anatomiques
, 2452
Eftampes , 359. 567. 775. 991. 1192. 1421. 1645 .
1871. 2047, 2279 ′ 2456. 2695 2923
1625 2410 tendart Turc ,
Etrennes , 72. 322. 432. 481. 496. 704
Examen des Leçons de Phyfique de Molieres , 733
F.
Ables , 48. 74. 342. 488. 111. 1136, 1750)
Fables , 74. 2402. 2634. 1749
Fer , mis dans le Charbon ,
Feu d'artifice ,
Flux & Reflux ,
Fourberies de Scapin ( les ) Comédie ,
Franc ( Martin )
2796
1765
2111
283
1655
552
France
DES MATIERES.
France Equinoxiale ( Hiftoire de la ) 1639
François I. Comment il perdit l'Empire ,.
G.
338
1
GAgeure
Ageure ( la ) Comédie , 175. 370
Galilée ( Empire de )
928
Genas ( M. de ) très-âgé ) 1325
Généalogies Hiftoriques , 2: 185
Géographie Méthodique , 563. 1514. 2174. 2682
Glofaire de Ducange 1567
Gourdon Jean Henri Lombard de ) 1075
1099
248
730
2235
H.
H
Arangue ,
491
2203
Goût ( le mauvais ) 670. Le bon ,
Grefe ,
Guerre ( Hiftoire de la )
Guide Ha monique ,
Hennuyer ( Jean )
Hiftoire Sainte, 748. Des Empires , 522. De Louis
le Grand , De Bourgogne , 1804 .
525.
de la France ,
Horlogerie ,
Dille ,
Jettons ,
I.
Littéraire
749. 1795.26 35
1195. 1559. 1640 , 2701
1935
164
Imagination , ce que lui doivent les Sciences &
les Arts ,
Imprimerie ,
Inondation
Inſertion ,
>
Inftitutions Phyfiques ,
Joigny ,
Journal des Sçavans ,
Ifota de Rimini ,
Iffé , Opera a
153
142. 175
2647
1748
1274
941
2676
2010
2705
? L
TABLE
L
Lafage,
Acus Niger ,
Landevenec ,
Lazare ( Relique de S. )
Leçons gratuites ,
L.
1730
120
2828.
678
2044
Lettres de M. Deftouches, 256.1138 . 1330. 1580.
A une Amie , 443. Sur les Maladies , 1401
Logogryphes , 108. 326. 508. 721. 939. 1162 .
1371. 1609. 1793. 2028. 2228. 2443.2667 .
2860
M.
Machine pourbattre la meſure, 89. Pour moudre
, 2458. Hidraulique ' ,
Madrigal ,
Maladies Véneriennes ,
Malaval ,
2458
338
111
887. 1131
A
Manifefte de l'Empereur de la Chine , 208. De l'Electeur
de Baviere , 2487
Marine ancienne ,
18533
Marracci ( Louis )
1613
Méchanique génerale , 1373
Médailles , 360. 506.773 . 991. 1124. 2010
Mélanide , Comédie , 1011. 1202. 1874. Critiquée,
1213. 1603
Méridienne ,
Mervefin ( Jofeph )
350
1070
Méthode pour aprendre à lire , 949
Michaut ( Pierre ) 533
Moquet ( Jean ) 1314
Montmorenci ( Anne de )
1917
Mufeo Capitolino ,
2894
Mufaum Florentinum , 757
NA
DES MATIERES.
N
N
Iceron ( le P. )
Nitetis , Opera ,
1813. 1839. 2030
793. 1001
Noms latinifés , 846
Normandie ( Haute ) 482. 873 • 1555. 3134 • 2558
Des. Le premier jour de l'An , 1. L'Univers ,
57. A M. M. Bourdelin & Bouvart , 64. .Au
P. Porée , 168. Le Triomphe de la vérité , 203 .
1982. Au Président L ... 299. Le Jeu , 417. Les
Douceurs de la Poëfie , 439. Sur la Mort du P.
Porée , 657. Caprice, 885. Sur la Mort de Rouffeau
, 1033.2177 . 2631. Le Printems , 1101. Les
Livres Saints , 1271. 1950. A la M. de S. G ...
1310. Au D. d'Orleans , 1458. Le Jugement
dernier , 1485. Le Vrai Bonheur , 1546. La Solitude
, 1566. Poëfie Linique , 1699. Nicolao Petro
Gueret , 1746. Sur la Naiſſance de l'Auteur ,
1765. Le Labourage , 1789. La Religion Chrétienne
, 1867. La Profanation des Eglifes , 1998 .
Louis XIV . 2127. Empire de la Coutume , 2138.
L'Athéïſme , 2219. Sacrée , 2274. Les Fureurs
de l'Amour , 2341. Adieux aux Mufes ; 2413 .
L'Esprit contentieux, 2426. Le Vrai Mérite , 2566
La Providence , 2917
Imitées des Pfeaumes , 102. 160. 469. 631 .
713.933 . 1959. 2440 2555
Imitées d'Horace 2 865. 1504. 1763. 2184
Opera ( Génie de l' ) 1856. Leure de Méhemet
Oifeaux de paffage ,
Effendi ,
Opération Céfarienne ,
Opinion ( Traité de l' )
Oracles ( les ) Parodie ,
Ordonnances de nos Rois ,
2388.2885
475
2600
2398
1627.2441
2707
2237
Origine
TABLE
Origine des Arts & des Sciences ,
Os ( réunion des fractures des .)
Offervazioni Letterarie ,
Almiſte ,
P.
P Panegyrique de S. Louis ,
Panormitanus
Perpignan ,
Pierre ( Remede contre la ) 344. Taille ,
Pigmalion , Comédie ,
Poëte nouveau ,
Poëtique ( Differtation fur la )
Politique de Bâcon ,
Pompes ,
Pontevez ( de )
Prévôt ( Françoiſe )
Prince fans Terre .
Pleaumes de David ,
Puits extraordinaire ,
Q
Ueftion ,
R.
R.
-734
987
1834
2594
2798
2608
2197
1716
174. 365
2702
1093
527
1426
1077
2122
.470
2239
89.1529
73
• Défenfe de cette Lettre ,
Raphael
1078
I 18
Recueil de Piéces d'Hiftoire & de Litterature , 726
Reflexions fur l'Opera ,
953
Religion ( néceffité de s'inftruire de la vérité de
la )
2889
Remerville de S. Quintin ( François )
Rodogune , Tragédie ,
107 1
313
Rondeau ,
1233
Roricon
-2188
Rouffeau ( J. Baptifte ) L
2816.2252
Rubens , 119
S
DES MATIERES.
Atire ,
SA Seche , Seche , Poiffon ,
S.
Silvie , Tragédie d'un Acte ,
1862
150 .
1881
Sonnet ,
897
Stances ,
871. 1913
T.
Ableaux , 2049. 2284 Allégoriques , 498
Tactique ( Hiftoire de la )
1593
Teatro alla morda , 1840
Telegone , Tragédie , 2059
Temple de Gnidele Ballet 2465
Thevenard ( Gabriel - Vincent } 2120
Thomaffin , Graveur , 568
Tournemine ( René- Joſeph )
Trainel >
2030
718
Traité du Chant Eccléfiaftique , 122. De la Cruë
des Meubles , 2865. Sur plufieurs Matieres Féodales
,
Tremblement de Terre ,
Tréfor des Antiquités Romaines ,
Turban du Mufti ,
V.
2868
1225
2905
2593
Ers . Les Mouches , 13. Alcibiade , 45. A M.
▼Rigaud , 2 ; 4. A. Benoit XIV. 449. Sur le Vin,
>
493. Au Maréchal de Bellifle , 497. A la Dlle
le Maure , 793. 1010 2073. Convalescence
616. A Mlle Defchamps , 822 A M. Roy , 823 .
Sur la Mort de M. d'Eftampes , 830. L'Interêt
banni du Parnaffe , 843. Maifon de Campagne
910. A M. de Brancas , 923. Paraphaſe du Cantique
de Moyfe , 1057. Au Cardinal de Fleury ,
1158. Funérailles d'une Puce . 1523. Abjuration
de la Satyre , 1538. Le Bel Efprit & la Nature
, 1589. Au Duc de Nevers, 1601. Au Prince
de
TABLE DES MATIERES.
de Rohan , 1733. Remerciment , 1753 Sur la
Mort de Roullan 1760. Les Spectacles , modernes
, 1844. Le Dôme de Coutance, 1954. Sur
La Mort d'une Chienne , 2008. Eioge de M. de
Fontenelle 2102. La Bibliotheque du Roy ,
2105. Le Papillon 2150. Le Dégoût de la Chaffe
, 2382. A M le Monnier , 2658. A M. Chardin
, 2698. A l'Abbé Goujat , 2816 Les Griffes
du Chat , 2823. A M. Madin , 2834. Sur le peu
d'attache à la vie , 2850. Le Portefeuille ,
2881
Vieilleffe extraordinaire, 626. 627.815.1241.1260.
1325.1466 1676. 1689. 1694. 2053.2114.
2536.2759. 2832
Vindicatif génereux ( le ) Comédie ,
Virgile ,
Voyages ,
Zodiaque,
La Coquille gravée doit regarder la page
BIBLLIG
THE
LELA
LYON
*/
893*
VILLE
2073
140
1314
634
2928
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le