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1714, 12 (Gallica)
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NOUVEAU MERCURE
A PARIS,
M. DCCXIV
jfvccPrivilège du f\,y.
M EJRClU RE
GALANT.
Par le Sieur Le Fevre.
Mois
de Decembre
1 7 14.
Le prix est 30 fois relié en
veau êff
15. fols, broché.
A PARIS,
Chez DANIEL JOLLET, au Livre
Royal, au bout du Pont S.Michel
du côté du Palais.
PIERRE RlBOU, à l'ImageS. Louis,
sur le Quay des Augustins.
Au Palais,PIERRE HUET, sur le
second Perron de la Sainte Chapelle
, auSoleil Levant.
uivteAprobationi&PrivilègeâuRw,
MERCURE
NOUVEAU.
'EST-CE pas une
chose étonnante,
Meilleurs. qu'on
mefafle sans cesse tant dobjettions)
que l'obligation
où je fuis d'y répondre me
jette tous les mois dans la
necessité de faire des Pre.
faces ? Pourquoy vous acharnez-
vous, me dit on.
avec tant de fureur sur un
tas de miserables pieces
dont on a fatigué la Cour
& la ville pendant les six
premiers mois de vôtre noviciat
? Les Auteurs vont Ce
déchaîner contre vous
Verdun va achever de se
rendre par faitementridicule
par les efforts d'éloquence
quil va faire poui
répondre pitoyablement
aux traits satyriques que
vous avez lancez sur lui
Lesecond Ptre des Captifs,
dont vous n'avez fait, ditesvousingenûment,
que
le quart de la critique, va
debiter contre vous un recueil
d'Epigrammes qu'il
promet à tout le monde. Et
l'Auteur du Vert- Galant
va vous jouer sur la scene
avec tant d'art & d'esprit,
que vous vous garderez
bien dorénavant de lui difputer
la gloire du brodequin
, qu'ilproteste ne ceder
à Adoliere, que parce qu'il est
venu avant lui. D'ailleurs il
faut que vous soyez bien
aveugle sur vos propres intérêts,
pour ne pas vous
imaginer les noms que ces
Meilleursvontvousdonner
dans toutes les ruelles. Ils
vont dire de vous ce que
vous avez au moins dit
d'eux; ils vont vous faire
passer pour un étourdi,pour
un temeraire : ils vont, en
un mot,décrier vôtre personne,
vos moeurs & vôtre
livre. Je peux convenir avec
vous., Meilleurs, de ce raisonnement.
sans être obligé
de convenir qu'ils ayent
raison, & c'est à vôtreéquité
que je m'en rapporte. Je
ne connoissois ni eux, ni
leurs ouvrages, quand j'ai
entrepris le grand rôle que
je joue à present. Vous m'avez
appris vous-même à les
connoître:vous m'avez enfin
avoué cent fois les uns
& les autres quevous achetiez
Verdun sans sçavoir
pourquoy, & que vous al-,
liez à ces dernieres Comédies
feulement par habitude.
J'aiétécurieux,malgré
la foy que je devois ajouter
à vos témoignages.J'ai lû
ce Journal de campagne,
& je me fuis ennuyé comme
vous à le lire. J'ai enfin
été à la Comedie,& je n'ai
pû voir ces farces, sans me
souvenir de cette Epigramme
de Godart sur le rombeau
de Moliere.
EPIGRAMME.
.Sous ce tombeau gissentPlante
C7* Terencey
Et cependant le seulMo re
y"git,
Dont le bel art réjouissoit la France.
Ilsfontpartis,&j'aipeu d'esperance
De les revoir, malgré tous nos
efforts.
j4h ! pour long-temps, pion
toute apparence,
Terence, Plaute, & Moliere
font morts.
Voila leurs étrennes.
Mais vous ,
Messieurs,
qui riez de ce ce caprice,
me garantirez-vous du ref
sentiment de ces redoutables
Auteurs? Ouiassurémenr,
& vous vous y connoissez
tous trop bien, pour
ne pas me répondre de leur
docilité. Cependant) malgré
ces boutades legéres ôc
très indifférentes, je ne
douce pas qu'il ne tienne
peut être aux gens que j attaque,
de m'obliger à me
dédire de tout ce qui par
leur faute peut m'être échapé
de desobligeant pour
eux.A Dieu ne plaise que
j'aye jamais songé à les ofsenser
au contraire, j'ai
porté auxspectacles où
leurs piecesm'ont invité,
un esprit de douceur &
d'humanité,susceptiblemême
de toutes les erreurs de
la complaisance : mais vos
revoltes continuelles m'ont
ouvert les yeux, & vous
m'avez en fin forcé d'avoüer
que je m'y connoissois
bien moins que vous.
En un mot, ce n'est qu'en
consequence de vos suffrages
que j'aitâché de rendre
justice aux uns & aux autres.
Détrompez moy maintenant
,si vous pouvez, sur
l'idée que j'ai conçue de
l'Operade Telemaque. Les
parolesm'ent ont paru belles
, & la musique, malgré
les prétendues ressemblances
qu'on y a trouvées,m'en
a paru magnifique. Détrompez
- moy ,
dis je
,
sur
cet article
; vous me verrez
aussitôt prêt a me soûmettre
à vos jugemens,s'il vous
plaît de ne pas cesserd'être
équitables. Enfin jevousai
vu, Meilleurs, aux premières
representations de cet
Opera, &je vous jure que
je n'aipoint écouté le penchant
naturel que j'ai à dire
du bien des Auteurs, pour
entendre alors vos suffrages
& vos applaudissementavec
plaisir. Je fuis presque persuadé
que Telemaque les
mérité par plus d'uneraison
je m'étendrai d'avantage
lur ce sujet dans un
autre endroit de ce Journal,
dont je vais,avecvôtre perminion,
reprendre lestile
ordinaire, pour vous faire
part des matieres qui doivent
servir pendant le cours
de ce mois à le remplir.
L'obligation où est tout
homme qui se mêle d'écrire
,
de conformer Ion
langage à la qualité des
choses qu'il raconte ,
est un
precepte pour moy, Ôc
m'engage à changer de tcn
soin mesure que les évenemens
donc j'ai à parler changent
de nature.J'ai pourtant bien
du regret que cette loy
mote la liberté de raisonner
à ma mode, & qu'elle
me contraigne de chercher
des termes magnifiques
pour exprimer dignement
la tragiqueavanture que
vous allez lire.
Je vous donnai le mois
passé
,
Messieurs, une description
nouvelle du Serrail
du Grand Seigneur. Un
Ambassadeur de France à
la Porte, qui sçait de ces
lieux,oùil a demeuré longtteemmppss,,
ttoouuttcceeqquu'oonn en
peut apprendre, l'a trouvée
si exacte & si bien circonstanciée,
quil m'a avoué
qu'il étoit étonné qu'on eût
pu arracher des choses si
rares du fond de cet impenetrable
Palais: mais il le
fut encore davantage au
récit de l'histoire nouvelle
que je vais vous raconter.
HISTOIRE.
A'Nna Favclla & Julio
Alexandro, des meilleures
familles de Tarente, ville
capitale de la Principauté
d'Otrantedans le Royaume
de Naples, furent enlevez
par un Corsaired'Alger9
deux jours avant celui que
leurs parens avoient choisi
pour les unir fous les loix
de l'hymen. Favella étoit la
plus belle fille de ce Royaume,
& la beauté d'Alexandro
n'avoir de comparable
à elle même que l'éclat des
charmes. de sa maîtresse.
Ces malheureux amans avoient
environ trente ans
a
à eux deux
,
lorsque six
Turcs déterminez,dont le
navire étoit caché derriere
le Cap fainte Marie, mirent
pied à terre, se jetterent
dans un bois fort épais qui
étoit à cent pas du rivage,
s'y enfoncerent temerairement,
& trouverent enfin
presque à la porte du Palais
de Favella, cette miserable
fille assîse sur le bord d'un
ruisseau,& se félicitant avec
son amant de l'esperance
de leur hymen prochain.
Une vieille matrone étoit
prés d'eux, lorsque ces traîtres
-
les surprirent, les saisirent,
les lierent
, & les
entraînerent dans leur chaloupe,
après avoir étranglé
la vieille, dont les cris pouvoient
attirer du monde à
leur secours.
Jamais Corsaire avide de
butin ne se flara mieux de
l'espoir d'une fortune éclatance,
que le cruel Muftapha,
à la vue des deux esclavesqueses
gens venoient
d'amener à son bord. Il fit
aussïtôt appareiller,mit toutes
ses voiles dehors, &cingla
vers l'Afrique. Un favorable
vent de Nordnordest
le rendit en deux jours
à Alger, où d'abord il mit
Favella entre les mains de
sa femme, & Alexandro
entre les esclaves dont il
esperoit de grosses rançons.
La beauté soûmet à son
empire les plus fiers courages,
& le coeur le plus barbare
n'est pas à l'épreuve
des traits de deux beaux
yeax. Mustapha soûpire
pour sa nouvelle esclave,
pendant que son épouse
brûle déjà pour le jeune
Napolitain, qu'elle.a malheureusement
vu atravers
une jalousie de son Serrail.
Les larmes de Favella;
latendrefle parfaite qu'elle
conferve à son amant, &
l'horreur qu'elle a pour son
tyran, n'empêcheroient pas
qu'elle ne fût bientôt la victime
d'une passion qui la
desespere,si l'amour n'alloit
pas employer jusquaux
voyes les plus cruelles pour
la dérober aux coups qui
la menacent. Mustapha ne
la quitte plus, le barbare ne
peur vivre unmoment sans
la voir.
Sbayna sa femme brûle
d'une égale ardeur pour
Alexandro, qu'elle a déja
trouvé le secret d'instruire
des desseins qu'elle a iur lui.
Alexandro, qui de de son
côté a resolu de tout risquer
pour brifer les fers de sa
maîtresse, les siens & ceux
de ses camarades, avec qui
il a tramé secretement une
conspiration, dont le succés
doit les affranchir des horreurs
de leur servitude,
promet à Sbayna de consentir
à tout ce qu'il lui
plaira, pourveu qu'ellel'introduife
de nuit dans sa
chambre. Cette femme n'e'
coute plus que sa passion
pour lui donner,& lui tenir
le lendemain, à latroisiéme
heure de la nuit, la parole
qu'il a la veille exigée d'elle.
Alexandro se rend à son
appartement, & lui dit,
après les premieres civilitez
: Je ne peux enfin vous
aimer, ni vous donner des
marques de mon amour,
belle Sbayna, à moins que
vous ne m'épousiez
: mais
vous ne pouvez m'épouser
tant que vous ferez la femme
d'un Turc. Ah cruel!
lui répondit-elle, quel reproche
me faites vous? At
-
il tenu à moy de ne pas
devenir la femme de Mustapha,
& fuis je la maîtresse
de ne la plus être? Ravie à
ma
,
famille malheureuse
dés mon enfance, arrachée
depuis douze ans des côtes
de la Pouille, où je reçus
le jour, après avoir été esclave
dans ce Serrail juc.
qu'au moment où le barbare
maître de ces lieux me
menaça de me donner la
mort si je lui refufoisma
maln,croyez-vous que mon
coeur ait jamais consenti au
sacrifice de ma timidité?
Non,charmanteSbayna,lui
dit Alexandre, non je ne le
croy pas: mais puisque vous
me preferez aux autres esclaves
qui sont ici; puisque
vous vous sentez assez de
courage pour m'entretenir
hardimét dans votre cham
bre, soyez genereuse jusqu'au
bout, ne perdez pas
un moment de temps, &
sacrifiez tout à l'heure ce
barbare époux à l'amour
que.v-ous avez pour moy.
Je
Je sçaique vôtre main
trembleroit à executer une
si grande attion, qu'elle
n'auroir pas allez de force
pourlui porterdes coups
mortels: mais j'exige de
vous feulement qu'elle condusse
la mienne. Montrezmoy
la chambre où il est
maintenant, & je vais à
l'instant m'immoler la victimeque
mon amour vous,
demande. A quoy, grand
Dieu, lui dit la tremblante
Sbayna, qui se vit embarquée
plus loin qu'elle n'a
voit compté de l'être ;
à
quoy,malheureux,allons,..,
nous nous exposer, sije
consens à ce que vous exigez
demoy? Mustapha effc
peut-être à prefènr dans le
lein de sa nouvelle esclave,
ou peut-être redoublet-il
ses efforts pour fléchir£&
rigueur. Dans quelabîme
effroyable de maux allonsnous,
dis je, nous precipiter,
si je fuis vos temeraires
desseins.i& qu'allonsnous
devenir, si je ne les fuis
pas?Ne craignez rien,reprit
Alexandro avec impetuofitcN*
i tous les esclaves de
4
mon quartier n'attendent
que mon signal pour nous
lervir au gré de nos intérêts
communs. Un renegat fidele,
s'il en cft, doit me
tenir à toute heure de nuit,
pendant trois jours, une
barque prête à partir. La
mer vient battre les murs
de ce jardin, & letrajet est
fort court d'ici jufquaux
lieux qui doivent nous servir
d'aziles. Venez donc,
lui dit-elle enfin, venez,
suivez-moy ; & puis qu'il
faut qu'il meure, ou que
nous perissons, je vais vous
montrer jusqua la place où
YÔcre main doit porter vos
coups.
Ils traversent aussitôt
courageusement
,
& sans
bruit., plusieurs petits colydors,
au bout desquels ils
entrent dans une chambre,
où, à la saveur de la clarté
de la Lune, ils trouvent un
homme &une femme nageant
dans le sang., & ren-
-
dant les derniers soupirs.
Le desesperé Alexandro ôc
re'ffrayeêf,bàyna. regardent
ces deux.vicl:-imes: d'un oeil
bien different. LeNapolitain
plonge un poignard
dans le corps du malheureux
Mustapha,pour mieux
s'assurer de sa mort, & se
jette sur le sein de son infortunés
maîtresse
,
qu'il
sent heureusement respirer
encore. Il embrasse en même
temps les genoux de
Sbayna, & la conjure de
lui donner des remedes, si
elle en a, pour rendre,s'il
est possible, la vie à cette
miserable esclave. Sbayna
entre dans un petitcabinet
où sont les eaux &: les baumes
que son mari avoit
coûtume de porter à la mer.
Elle choisit une liqueur
d'une vertu souveraine, &
en fait avaler quelques
gouttes à la mourante Favella,
qui ouvre enfin les
yeux en ioûpirant.Que voyje,
lui dir-elle un moment
après? quel Ange vous envoye
à mon secours, genereuse
Sbayna! Mais la mort
ne ma-t elle pas vangé des
fureurs de vôcreindigne
-époUX? Ciel!ajoura-t-elle
,
en se récriant, quel mortel
s'offre Ves regards? Est-
- ce vous Alexandra, que
je voy ?est,ce vous,mon
cher Alexandro?Oui, belle
& malheureuse Favella, lui
ditil en fondant en larmes,
c'est moy que vous voyez
le fer à la main, & prêc à
vous arracher de ces lieux.
Mais essayez de vous lever,
si vous pouvez. A quel endroit
êces vous blessée?vous ,
voila pleine de sang; elt- ce
du vôtre?est-ce decelui de
nôtre ennemi? Je ne croy
pas , reprit-elle, que mes
habits soient teintsdu mien;
6c si vous ne m'aviez heureusement
secouruë, je
pense que je n'allois mouflr,
queparce que mon
courage avoit épuisé mes
forces en défendant ma
vertu. -
Aprés avoir longtemps
combattu contre le
traître Mustapha, resoluë
de periravec mon innocence,
j'ai de deux coups
mortels percé son lâche
coeur,& enfin je fuis tombée
dans son fang, accablée
fous le poids de ma
vengeance.
Mais quel spectacle cruel
pour la jalouse Sbayna, de
voir ainsi rassemblez dans
1
la chambre de son époux
égorge ,
deux amans dont
la tendre reconnoissance
met un obstacle éternel à
ses desseins ! Elle n'a pas
néanmoins d'autre parti à
prendre, que celui de se
saisir de l'or & des pierreries
de Mustapha & des siennes,
& de les suivre. Cesprécautions
prises, Alexandro
court délivrer les esclaves
qui devoient se sauveravec
lui, & dans la compagnie
de tous ceux qui lui étoient
redevables de leur salut
il s'embarque dans le bâti-,
ment du renegat dont j'ai parlé.
L'Italie est l'objet de leur
voyage &de leurs voeux,
ils font des efforts incroyables
pour gagner feulement
la Sardaigne: mais la mer
& les vents qui leur sont
contraires les obligent à
doubler le Cap de Sulfence,
& les jettent enfin malgré
eux sur rIfle de S Pierre.
Les habitans de cette petite
Isle sont pour eux plus
inhumainsque les Turcs.
Dés que nos voyageurs
y eurent débarqué, plusieurs
de ces Insulaires s'assemblerent
autour d'eux,
dans le dessein de leur dérober
leurs meilleurs effets,
& de les obliger ensuite à
aller chercher ailleurs l'a.
zile qu'ils vouloient leur
refuser chez eux: mais un
vieux Marchand, qui avoit
beaucoup de credit dans
cette Isle
,
feignit de s'opposer
à l'execution de ce
dessein, pour les tromper
d'une maniere bien plus
cruelle. Il n'eut pas plûtôt
vû les dçux Italiennes &
Alexandro, qu'il ne songea
qu'au moyen de s'emparer
de leurs personnes &dè^
leur trésor. Il fut au devant
d'eux
)
il leur offrit obligeamment
sa maison
,
&
ses esclaves pour les servir,
& leur promit de leur faire
équiperun bâtiment pour
les renvoyer incessamment
dans leur patrie. Ces offres
furent accompagnées d'un
air de bonne foy & de
compassion dont ils furent
la dupe. Le traître avoit
juré leur perte ,& voici
comme il executa le projet
de sa perfidie.
: Ilmeua ces malheureux
chez lui ; où ils ne furenc
pas plûtôt entrez,que quatre
scelerats, qui servoient
tous les jours à les noirs
desseins, les mirent chacun
dans des petites chambres,
d'où ils ne purent plus
nise voir, ni s'entendre.
Aprés les avoir retenus l'espace
de trois mois dans
cette captivité, il se determina
à aller rendre une
visite au desesperé Alexandro
,
quilui dit d'abord
toutes les injures que la
rage & le desespoir lui mirent
à la bouche: mais le
Marchand l'interrompant,
lui dit qu'il avoit tort de se
plaindre; qu'il ne sçavoit
pas apparemment l'usage
du pays où il étoit ; qu'il
n'abordoit jamais d'étrangers
dans cette Isle, qu'on
ne les gardât au moins (ix
mois, & qu'on ne sçût parfaitement
qui ils étoient;
que d'ailleurs il y étoit arrivé
dans un bâtiment de
Batbarie commandépar
un renegat ; qu'un de ces
hommes sans foy avoit essayé
il yavoit quelques années
de livrer Mie aux
Turcs; & que depuis qu'on
avoir découvert cette horrible
conspiration, on avoit
obiervé de faire à tous les
étrangers que leur malheur
y jettoit,un traitement bien
plus rude encore que celui
qu'il avoir reçû delui; que
cependant,s'il vouloir lui
donner mille ducats d'or
en especes, ou la valeur de
cette sommeen pierreries,
non feulement il abregeroit
le terme de sa capti.
vité: mais qu'il allait à
l'heure même le faire conduire
dans un navire Napolitain
quiétoità la rade,
ôc qui devoit la nuit suivante
mettre à la voile pour
retourner à Naples; que
d'ailleurs il ne se mît point
en peine des femmes qui
étoient entréesavec lui
dans sa maison,puisque
selon , toutes les apparences,
il y avoit déja long-temps
quelles devoient être arri-
vées dans leur patrie, par -
la précautionqu'ilavoit euë
de les faire embarquer fecrettement
depuis deux
mois. A tout ce discours
le
le malheureux Alexandro
nesçut que repondre. Il
abandonna à ce traîtretout
ce qu'il avoit des pierreries
de Mustapha, &se hâta de
se faire conduire au vaisseau,
qui en effetétoit à la
rade.
On commençoit à appareiller
lors qu'il y arriva.
Le vent étoit favorable, on
mit à la voile, & le navire
partit. Pendant la nuit il se
trouvaa, cô1\ té'dd''un homme,
qu'il entendit soûpirer de
tempsen temps; & qui dit
enfin, après bien des gemissemens:
La malheureuse
ell pour jamais perduê!
- Si un miserable que ses
infortunes reduisent au desespoir,
lui dit Alexandro,
pouvoit vous aider à vous
consoler,ou meriter vôtre
confiance, je fuis prêt à
vous donner tous les secours
qui dépendront de
moy. Je vous avouê, lui
répondit l'autre,que je fuis
mortellementaffligé,&que
je plains infiniment le malheur
d'un jeune Italien à
qui je fuis redevable de la
liberté que j'avois perduë,
&: de la vie que j'allois perdreen
Alger, si soncourage
navoit pasbrisé nos
chaînes. Nous étions, ôc il
étoitcomme nous, chargé
1
de fers, lorsque la femme
de Mustapha nôtre patron,
qui l'avoit enlevé avec sa
maîtresse qu'il tenoit enfermée
dans son Serrail, devint
amoureuse de lui. Enfin
il a trouvé le secret de
persuader cette femme éprise
de sa beauté, il a égorgé
Mustapha, il a sauvé sa
maîtresse, il nous a délivrez
des fers où nous gcmissions,
ôc il seroit à present
le plqs heureux
-
des
hommes, au lieu qu'ilest,
dans quelqu'endroit qu'il
soit, le plus miserable, si le
mauvais temps ne nous
avoit pas jettez sur l'IsleS.
Pierre, ou nousavons trouvé
des Chrétiens mille fois
plus cruelsqueles barbares
d'Afrique.Enfinl'infortuné
Alexandro (c'est son nom)
est tombé avec sa maîtresse
ëe la veuve de Mustapha,
qu'il avoit emmenée, entre
les mains d'un traître Marchand
de cette Isle,qui
vendit il y a quelquesjours
la belle Favella
,
qu'Alexandro
adoroit, à un Juif
qui cherchoit par. toute
l'Europe des beautez destinées
aux plaisirs du Grand
Seigneur, & qui n'a pas
plutôt eu fait l'emplette de
<ell,ci , qu'il a mis à la
voile pour Constantinople.
Alexandro ne répondit
à ce discours que par un
cri effroyable. Le recit le
plus touchant d'un desespoir
affreux exprimeroit
mal l'excés de sa douleur.
Cependant son ami dans
ce moment le reconnaît
aux transports de sa rage; il s'efforce envain de le consoler
, l'esperance d'une
prompre mort est seu le capable
d'adoucir l'horreur
de sondesespoir:mais il y
a une espèce de contradiction
éternelle dans le fort
des malheureux, & le trépas
semble même être d'intelligence
avec l'étoile qui
les persecute
, pour leur re
fuser son cruel secours, lors
qu'ils n'aspirent qu'au bonheur
de perdre la vie.Tous
les perils,de la mers'éloignent
du navire qui le porte
, les vents & les flots lui
font favorables; & après
une heureuse & courte navigation,
la ville de Naples
le reçoit enfin dans son
port.
Alexandro conjureson
ami de ne pas l'abandonner
dans son malheur. Fernand
lui promet non seulement
de ne le pas quitter: mais
il lui offre tout son credit
& tout son bien pour courir
après sa maîtresse, s'il en esttemps encore. Quelle
i}ateu& proposition pour
un amant desesperé! Il n'envisage
ni les foins, ni les
peines infinies où va l'exposer
une entreprise donc
l'amour lui masque les dangers
& les obstacles. Il embrasse
son ami, il accepte
ses offres, & le presse de
travailler avec tant de diligence
à l'execution de ce
genereux dessein, qu'à pei-
; ne entré dans le port, il ne
songe qu'à en sortir. Un
vaisseaude Smyrne s'y trouve
heureusement tout prêt
à retourner dans le Levant.
Loccafion est belle;ils
s'ems'embarquent,
ils partent,
& en dix jours ils arrivent à
Smyrne, d'où une tartane
les porte à Constantinople.
Alexandro met alors tout
en usage pour apprendre
des pouvelles du navire où
étoit le Marchand Juif qui
lui a enlevé sa maîtresse; il
s'en informe enfin avec
tant de foin & d'adresse
qu'il , trouve sa maison. Il
lui, rend visite
,
il lui dit
qu'il feroit bien aise de negocier
avec lui, qu'il a de
fort belles pierreries dont
il l'accommodera, s'il vent
les acheter. Ilavoit en effet
toutes celles de Don Fernand,
qui étoit undes plus
riches Gentilshommes du
Royaume de Naples. Le
Juif lui donne jour pour
traiter avec lui: cependant
Alexandro l'engagera force
de caresses & d'amitié, à
lui donner des marques
d'une bienveillance singuliere.
Le jour qu'il devoit lui
montrer ses diamans étant
venu, le Napolitain se rend
& sa ma.ton; le Juif envoit
dtUx si beaux,qu'illuidit;
qu'il leprie de trouver bon
que sa femme, quis'y connoît
mieux que lui,les examine.
Il l'appelleaussitôt ;
elle vient, elle admire en
même temps, mais differemment
,
la beauté des
diamans, & celle du jeune
homme qui les veut vendre.
En voici un, dit elle,
un moment après les avoir
bien considerez
, que la
Sultane Zara achetera volontiers
;& celuici fera un
present fort agreable aux
yeux de l'Odalique Andraïda
:pour les autres, je
râcheray de les vendre dans
le Serail, où ils pourront
servir à parer cette jeune
fille que vous avez amenée
depuis peu, le jour qu'elle
aura le bonheur d'être presentée
au Sultan. A ce mot
Alexandre fremit de douleur
& de crainte : cepen-
-
dant il eut encore assez de
presenced'esprit pour cacher
le desordre de son
coeur. Seigneur, lui dit la
Juive, voulez-vous bien me
confier ces diamans pour
trois jours ? Mon mari va
vous donner pour vôtre sû.
reté une reconnoissancede
leur poids & de leur qualité
: a prés que je les aurai
montrez aux Dames du
Serail à qui ils peuvent
convenir, nous les estimerons,
& sur le champ nous
vous en donnerons la valeur.
Alcxandro, qui - sentir
que cette Juive lui pouvoir
être fort utile, accepta tout
ce qu'elle lui proposa. Cependant
le Juif lui-même
presque aussi charmé de sa)
douceur & de sa bonne mine
que sa femme l'étoit déja,
l'invita à dîner;à quoy
il consentit avec plaisir.
L'extreme confiance de
ces gens l'étonna, ou plûtôt
l'ébloüit à un tel point,
qu'il ne desespera pas de
pouvoir
,
à force d'industrie,
arracher peutêtre un
jour du Serail la maîtresse,
dont lescharmespouvoient
n'avoir pas encore eu le
malheur de s'y faire admirer.
Enfin il fè conduisit
avec tant de sagesse & de
discretion
, que le Juif &
sa femme le prierent de les
voir le plus souvent qu'il
pourroir. Sur cesentrefaites,
Zacharie ( c'étoit le
nom de ce Juif) reçut de (on
facteur de Cephalonie des
lettres
,
dans lesquelles il
lui mandoit qu'un navire
richement chargé, & dont
il étoït le principal armateur,
venoir d'arriver heureusementd'Egypte,
& que
sa presence étoit necessaire
pour faire l'évaluation des
interêtsdes Marchandsavec
quiil étoitassocié;qu'il
n'avoit pas de temps à perdre,
& qu'il luiconvenoit,
au reçû de ses lettres, de
s'embarquer dans le premier
bâtiment qui prendroit
la route de Cephalonie.
Zacharie, qui étoit depuis
long-temps dans l'ufage
de faire de pareilles
courses, se disposesur le
champ aparnr. Il envoye
au port, où au lieu d'un bâtiment,
on en trouve vingt
prêts à mettre à la voile
pour les Isles de l'Archipel;
& la nuit même il s'embarque
avec deux esclaves, qui
étoient les seuls hommes
qui le servoient dans sa
maison.
-
Le lendemain Alexandro,
qui ne sçavoit encore
rien de ce voyage, va chez
le Juif,où,à la place des
esclaves qu'il y avoir vûs la
veille, il voit une grande
fille qui lui ouvre la porte,
& qui le conduit dans l'appartement
de Joia, (c'est
ainsi que s'appelloit l'épouse
de Zacharie. ) Cette
femme, qui avoit environ
trente ans, avoit été parfaitement
belle, & l'étoit
bien encore assez pour tentertoutautre
homme qu'un
jeune Chrétien éprdûment
amoureux d'une fille
de sa Religion. L'étalage
où elle étoit lors qu'Alexandro
entra dans sa chambre,
ne sentoit point du tout la
Juive, Elle étoit assise sur un
riche tapis de Perse, les
jambes croisées à la mode
des Orientaux; elle avoit
le côté droit appuyé négligemment
sur des carreaux de velours cramoisi, son
caffé devant elle, & tenoit
à sa main le petit coffre où
étoient les diamans d'Alexandro.
Seigneur, lui ditelle
, un moment après que
la fille qui l'avoitintroduit
le fut retirée,asseyez-vous
sur cette efirade) & m'é..
coûtez.
Je sçai presque de quoy
l'amour est capable dans
tous les coeurs : je vous dirai
même plus,je sçai de quelle
maniéré a peu pres toutes
les differentes nations de
l'Europe traitent l'amour.
Estant il y a dix ans à
Amsterdam
,
qui est le lieu
de manaissance
,
j'y fus aimée
d'un Italien, d'un Alleman,
d'un Danois & d'un
François, tous Chrétiensy
& par un excès de malheurs,
dont le détail est
inutile ici, j'y épousaienfin
le Juif que vous avez vû.
Quoy qu'il en use fort bien
avecmûy, je me fuisrepentie
y
& me repentirai
de ce mariage tous les jours
de ma vie. L'avarice de mes
parens a formé les liens qui
m'accablent. Je suis Chrétienne
dans le fond du
cccur) & assèz riche maintenant
des largesses,des Dames
du Serailypour pouvoir
vivredefornfais partout ailleursqu'ici
commodémenr,
& même avec éclat, s'il est
vrai que le faste & le luxe
puissent contribuer à nous
rendre heureux. Enfin je
vous aime, & je vous croy,
si non assez tendre, du
moins assez genereux pour
faire un bon usage du (ècrctque
je vais vousronfier.
Il faut que vous soyez
mon libérateur
) que vous
m'arrachiez de Constantinople
, & que vous me fat
fiez incessamment passer en
Italie avec vous. Vous nous
avez plusieurs fois parlé de
»vôtre ami Don Fernand, le *
vous nous avez dit tant de
bien de lui, que je le croy
fort propreànous feconder
comme il faut dans l'entreprise
que je meditc. La fortune
m'a heureusèment dé.
fait de Zacharie, que ses affaires
retiendront au moins
deux moins dans l'Archipel
; je fuis maîtresse de ses
richesses & des miennes; je
vous en donnerai plusqu'il
ne vous en faudra pour
acheter unnavire équipé
des meilleurs matelots que
vous pourrez trouver: en
un mot vous prendrez ce
soin & toutes vos mesures
avec vôtreami, pendant
que je me disposerai de mon
côté à vous luivre lors qu'il
en fera temps. Je vous tromperois
, lui répondit Alexandro)
si j'acceprois avi-.
dement l'offre que vous me
faites, & si je ne payois pas
au moins d'un retour de
confiancelaconfianceaveç,
[laquelle vous m'avez declarévosintentions.
Je vais
vous dire un secret qui va
vous épouvanter, je vais
rvous demander une grâce
)dont vous allez frémir, ôc
qu'il faut quej'obtienne de
vous, ou que je meure.
Zicharie vôcre époux
achetail y a environ3. mois
d'un Marchand de l'Isle S.
Pierre, voisine de la Sar-.
daigne, une jeune fille du
Royaume de Naples, que
des Corsaires avoient enle.
vée quelque temps auparavant
, & que la fortune,
après bien des périls,avoic
enfin arrachée des mains
du Capitaine qui lavoir
prise, lors qu'en lé sauvant,
le bâtiment dans lequel elle
Croit>su,t., contraint par le
manmauvais
temps de relâc her
a l'Isle saint Pierre, où un
perfide Marchand l'invita
àaller se remettre dans sa
maison des fatigues de la
mer : mais dés qu'elle y
fut entrée
,
il la cooduifit
dans une chambre, où il
l'enferma, & la garda jufqu'au
jour qu'il la vendit à
vôtre époux. Cesse fille est
masoeur, & cette soeur m'eil
plus chere que tout ce que
trai de plus cher au monde.
Elle est à present malheureuse
dans le Serail du Sultan
,où vous avez la liberté
d'entrer lors qu'on vous y
mande,&l'on vous y mande
tous les jours. Parlez lui
de moy ,
donnez lui une
lettre de ma parc,& ne vous
rebutez pas d'entendre toutes
les proportions que je
vous ferai pour me faciliter
les moyens de la voir,
& de l'arracher de ce fejour
impenetrable. Grand
Dieu, lui die Joia, que me
proposèzvous?Vous imaginez
-vous à quoym'expoferoit
une pareille tentative
? & ignorez-vous que
si l'on avoicjamais le moindre(
oupçon que je pûffe
entrer dans une intelligence
si crimirielle,qu'au même
instant je ferois mise en
pieccs par les muets & les
noirs du Sérail? Pardonnez
, genereuseJoia, lui
dit Alexandro, pardonnez
l'extravagance de ces projets
à un malheureux, qui
n'a plus d'autre ressource
, que celle de mourir. Cependant
ma reconnoiflfance
n'auroit point de bornes si
: vous me serviez
,
& mon
desespoirva n'en plus avoir
si vous ne me servez pas.
Au lieu de sauver vôtre
soeur, lui répondit Joia, si
je m'embarque dans un
dessein si temeraire, ma
complaisance pour vous va
peut être la faire périr, 6c
nousperdre avec elle.Non,
Joia,luiditil,je ne vous en
presse plus, ne vous exposez
pas à de si terribles dangers
: mais souffrez que je
vous quitte, & laissez moy
aller m'entretenir ailleurs
dans l'excés de mon affliction,
de l'horreur de mon
infortune. Attendez, maleureux
)
attendez, lui ditelle;
je ne fçaurois me resoudre
à vous abandonner
dans l'état où vous êtes, je
risquerai quelque chose
pour vous, je verrai votre
ioeur, je lui parlerai de vous,
je lui donneraj même le
billet que vous lui voulez
écrire: mais après cela ne
me demandez rien davantage.
Alexandro se jetta
aussîtôt à ses genoux, les
embrassa,& arrosases mains
de ses larmes. Mais est-on,
reprit-elle.en le regardant
tendrement, si tendre &
si entreprenant pour une
soeur? Oui, Joia, susdit-ilJ
je ferois encore plus pour
elle si je le, pouvois, & il
ne tiendra qu'à vous, après
avoir tente tout pour moy,
d'essayer jusqu'où peut aller
ma reconnoissance, &
de voir en même temps
jufquoù va mon amour
pour vous, & ma tendresse
pour elle; A ImitantJoia*,
qui ne comprenoit pas le
sens équivoque de ces paroles
,
le mena dans le cabinet
de son mari, où il écrivit
ces mots à la belle &
malheureuse Favella.
La tendre & genereuse
foiay ma chere fcoeur, sensible
aux maux dont lejort m'accable,
mapromisenfin de vous
rendre ce billet, maigre cette
foule épouvantable d'horribles
espions qui vous environnent.
Reconnoissez à ces raits de ma
main tout le coeur d'un frere
defefperédel'état ou vous êtes,
& réponde -y si vous pouve%.
Je n'aurois pas tenté de
vous écrire, sien arrivant a
Conflantinople avec Don Fernand
, de qui j'ai appris ce
dernier trait de vos malheurs,
je n.aois passenti quelques
rayons d'esperance dans le fond
de mon coeur; C7*silasidelie
Soiaveut me seconder,jemourrai
bientôt, ou vous revenez
encore votrefrere AAlexandro.
Le lendemain, après la
féconde priere, un baltagi
fut ordonner à Joia,de la
part des Sultanes, de se
rendre à l'instant au Serail,
où elle fut aussitôtavec Ieî
diamans & la lettre d'Alexandro.
Dés qu'elle fut au milieu
de ces belles & malheureuses
reuses esclaves que leur
beauté condamne à une
éternelle captivité,elle songea
à les amuser de la vûë
de ses pierreries, pendant
qu'elle s'occupoit à détacher
de la foule la triste
Favella, qui comprit enfin
dans ses yeux qu'elle avoit
quelque chose à lui dire.
Ne me montrez - vous
rien à mon tour, lui ditelle,
& n'avez vous point
de bijoux pour moy comme
vous en avez pour ces belles
Odaliques ? J'en ai un
que je vous dessine, lui répondit
la Juive ; & ens'approchant
de son oreille: Il
y va, continua-t,-elle, de
vôtre vie, de celle de vôtre
frere & de la mienne, à le
recevoir d'unair si tranquile,
que vôtresurprise
ne trahisse pas mon secret.
Je suis, lui dit Favella, en
s'éloignant avec elle des autres
Dames, tellement accoutumée
aux plys, cruels,
matheurs, que je croy que
le plus grand lX le plus inopiné
changement. dans ma
Fortune
\-
cauteroic peu de
surpriseàmes sens. Recevez
donc, lui dit Joia,sans
émotion ce billet de vôtre
frere,lisez le en secret, &
surtout que personne ici ne
puisse jamais soupçonner
que vous en ayez reçu.
Un moment après, Favella
sortit de la salle où
étoient toutes ces femmes;
elle passa dans une chambre,
où elle lut son billet
sans témoins; & pour y
faire répons elle (e servit
d'un crayon qu'Alexandro
y avoit enfermé
,
& dont
elle écriyit ces mots sur le
dos du même billet.
Entreprenez tout pour moy;
mon cherfrere ; cependantménagezvôtre
vie, azme{-moy
toûjours, & nemeconsultez
sur rien.
-
Elle rentra aussitôt dans
le même endroit où elle
avoit laissé Joia, à qui elle
rendit secretement le billet
qu'elle venoit de recevoir
d'elle. Un moment aprés
Joia sortit du Serait, & retourna
dans sa maison, où
l'impatient A lexandro ne
manqua pas de se rendre
dés que lanuit fut venue.
Illui fut presenté par la même
fille qui l'avait introduit
la veille; & dés qu'il se vit
seul avec elle:Qu'avezvous
fait pour moy y
lui ditil?
avez-vous vû cette soeur
infortunée qui m'est si chere,
lui avez-vous parlé,
lui avez vous enfin donné
ma lettre? Oui, lui répondit-
elle avec tendresse, je
l'ai vûë,je lui ai parlé, elle
a reçu vôtre billet, en voici
la réponse. Alexandro
la lut avec mille transports,
& aprèsavoiradmiré en
lui-même la presence d'efprit
de sa fidelle &malheureuse
maîtresse
; me laisserez-
vous en si beau chemin
, genereuseJoia, lui
dit- il?n'entreprendrez-vous
rien davantage pour moy?
Exigez de ma reconnoissance
xtout ce que j'exige
de vôtre amour,rendons
nos intérêts égaux, & vous
me servirez jusqu'àlafin.
Que voûtez
- vous, cruel,
encore une sois, que voulezvous,
lui
ditelle?
Demain
à la même heure qu'il
est à present vous le sçaurez,
lui répondit Alexandro,&
je fuis sûr qu'en me
voyant vous approuverez
les moyens dont je pretens
me servir pour vous persuader.
Le reste de leur conversation
roula jusqau'au moment
qu'il fallut
le
separer,
sur les projets de leur fuite,&
sur les sermensqu'ils
se firent de s'aimer toûjours.
Dés qu'Alexandro fut
retourné chez lui, il conta
à Don Fernand tout ce qui
venoit de lui arriver. Il lui
demanda ensuite si l'habit
de femme Juive qu'il ravoit
prié d'acheter étoit
fait. Il est achevé, lui répondit
Fernand, & vous
pouvez mêmel'essayer:
mais si vous m'en croyez,
vous renoncerez à ce dessein,
& vous ne presserez
pas davantage Joia de s:lexfproesuexr
avec vous au plus afpéril
du monde. Cher
ami, lui dit-il, en essayant
ce fatal habit, j'en envisage
toute l'horréur : mais
mon desespoir n'écoute plus
les conseils de la raison: il
faut en un mot que je peride,
ou que je voye le
malheureux objet de mon
amour. Vous ne sortirez
pas, reprit Fernand, du Serail
du Grand Seigneur,
comme vous avez fait de
celui deMustapha;& si vous
aviez vu un spectacle horriblement
comique qu'on
represènta il y a quelque
tems das une des plus grandes
villes du monde,&qui
a pour titre, les Captifs,
mal imité des Captifs de
Plaute, quelque audacieux
que vous soyez, vous fremiriez
au recit des fupplices
dont on punit ici les
ravisseurs. Fernand en faisoit
l'étalage à son ami,
pour l'obliger à changer
de resolution
;
son courage
même iurpris de cetaffreux
dérail, commençoit
às'en ébranler, lorsque tout
à coup on entendit des cris
& des hurlemens épouvantables.
Toute la ville de
Constantinople parut au
milieu de la nuit remplie
d'habitans de tout sexe &
de tout âge, que la crainte
de la mort & la perte de
leurs biens obligeoient à
chercher partout un secours
que personne ne pouvoit
leur donner.
Le feu avoir pris malheureusement
,
il y avoit
prés de deux heures, au
Serail d'un Bacha, &-de
tousles côtez le vent en
avoir répandu les flâmes
avec tant dimpetuoGté,
que plus de mille maisons
en éraientdéjabrûlées. Le
desordre enfin commençoit
à devenir si general
qu'Alexand , ro pria son ami
de l'accompagner en habit
d'Arménien,pendant qu'il
étoit déguisé en Juive, jusqu'à
la maison de Joia,qui
n'était pas loin de la sienne.
Fernand y consentit, & se
rendit avec lui chez la
Juive, qu'ils trouverent
plus inquiere du fort de xson
amant, que du malheur de
la ville. Enfin elle l'avoit
déja demandé à toutes ses
femmes, & parlé à lui même
sans le reconnaître, lors
qu'aprés lui avoir obligeam
ment reproché quelestraits
de son visage s'effaçoient
aisément de son coeur, il
lui dit que le feu était au
Serail du Sultan ; qu'il la
conjuroit de profiter du desordre
pour s'y rendre avec
elle;qu'il ne faloit pas douter
que toutes les portes
n'en fussent ouvertes dans
un si grand peril; que d'ailleurs
elles ne seroient peutêtre
pas fermées pour elle;
& qu'en un mot ils y pourroient
entrer ensemble.
Joia, qui étoit, comme on
peut aisément le voir, presqueaussientreprenante
que
lui, le trouva si beau fous
cet habillement de femme,
& si bien déguisé, qu'elle
n'eut pas la force de lui rien
rufuser. Elle sortitenfin de
sa maison, où elle laissa
Don Fernand. Elle prit Alexandro
par la main,& sans
faire aucune mauvaise rencontre
elle arriva avec lui
au Serail du Grand Seigneur
,dont ils trouverent
en effet presque toutes les
portes ouvertes, parce que
le desordre y étoit encore
plus grand que dans aucun
quartier de la ville.
Ils y entrerent à travers
une foule incroyable d'eunuques,
de noirs, demuets,
& de femmes effrayées,
qu'ils trouvèrent dispersez
de tous les côtez & pêlemêle
avec des Prêtres de la
Loy, des Cadis & des Janissaires,
qui cherchoient
le Sultan pour le sauver, &
l'étendart de Mahomet,
pour le dérober à lafureur
desfiâmes.
Au milieude ce tumulte
inconcevable ilsdécouvrirent
enfin l'indifferente Favella,
quiregardoit d'unoeil
insensible tomber les vastes
édifices & les tours de ce.
Palais embrasé.
Que je suis heureux de
vous retrouver, ma chere
soeur, lui dit Alexandro,
en la prenant par la main!
Sauvez-vous avec nous,
hâtez-vous. Insolente, lui
dit à l'instant un noir qu'il
navoit pas apperçû, quel
inccreciprends- tu à cette
Odalique? Sçaistu qu'elle
est confiée à mes foins, &
qu'elle est chere au Grand
Seigneur? Tiens, miserable,
lui dit Alexandro, en
lui plongeant dans la gorge
un poignard qu'il avoir cachésoussarobe,
tiens, garde
de maintenant, si tu peux,
cette fille si chere aux plaisirs
de ton maître.
Deux autres noirs armez
accoururent par hazard au
lieu où se passoit cette sanglante
scene,& s'attacherent
au malheureux Alexandro,
pendant que d'un
côté on emmena Favella,
ôc que de l'autre la Juive
s'éclypsa. Neanmoins son
courage ne l'abandonna
point dans cette extremité,
où ils se trouverent heureusement
pour lui si voisins
des flâmes, qu'ils le quitterent
pour songerplus
promptement à leur. salut,
& lui facilitèrent par leur
fuite le moyen de sortir du
Serail comme il y étoit entré.
Il retourna chez la Juive,
qu'il trouva fondant en
larmes dans les bras de Don
Fernand. Vous pleurez sans
doute, leur dit-il,la perte
d'unmiserablc, trop malheureux
pour pouvoir trouver
la mort?J'aimanque
d'arracher du Seraill'infortunée
Favclla ! Je ne la reverrai
de ma vie! Est-il un
fort plus funeste que le
mien? Vous avez tant de
sujets de douleur, lui dit
Joia, que je ne vous propose
point de songer à vous en
consoler
,
mais seulement
de vous hâter tle fuir pour
jamais de ces lieux, où ilne
vous reste plus aucun espoir.
Hé bien, dit-il, sortons-
en donc, je trouverai
peut-être dans les abîmes
de la mer la fin de mes
malheurs.
Il
Fernand fè chargea alors
du foin d'acheter un navire
Vénitien qui étoit au
port, & que fà diligence
mit en moins de huit jours
prêt à mettre à la voile.
Il s'embarqua enfin, avec
Joia & son ami, dans le
dessein de profiter du premier
beau temps pour partir.
Ilscommençoient à louvoyer,
pour sortir à la faveur
d'un petit vent de terre,
du canal de la mer noire,
lorsque quelques matelots
apperçurent à la pointe du
jour, autour du vaisseau,
une espece de sac de cuir,
que l'eau portoit doucement
à la traîne du navire.
Ils descendirent aussitôt
dans la chaloupe, qu'ils
n'avoient pas encore mise
à bord,&ils ramerent vers
le sac, qu'ils pêcherent,
& qu'ils ouvrirent sur le
champ. Mais rien ne fut
égal à leur étonnement,
lors qu'au lieu de ce qu'ils
avoient esperé d'y trouver,
ils en tirerent une femme
mourante. Ils la portèrent
aussitôt dans le vaisseau
, où,je laiifc: à penser comme
elle fut reçûë.
Don Fernand
,
à qui on
la presenta, & qui la re.
connut d'abord pour la
belle Favella qu'il avoir vûë
en Alger, & sortir enfuice
de l'Isle faine Pierre pour
s'embarquer dans le navire
du Juif qui l'avoit menée
à Constantinople
,
lui fit
donner tous les secours
dont elle put avoir besoin
;
& à l'instant il passa dans
la chambre de l'inconsola.
ble Alexandro, à qui il fit
sentir autant qu'il put cet
'cxce's de son bonheur. Alexandro
courut en même
temps vers le lir de Fernand,
sur lequel reposoit alors ce
cher objet de toute sa ten
dresse, & que la genereuse
soin s'empressoit à servir de
toutson pouvoir.
v L'historien le plus habile
exprimeroit nuldes situations
si touchantes, & l'art
le plus delicat n'a que de
soiblespinceaux pour étaler
tous les mouvemens d'un
tableauaussirempli quecelui-
ci de félicité, d'amour,
d'esperance &. de joye.Ainsi
je prie le leéttur de me dispenser
moy-même du froid
détail de mes expressions,
pour le mener plutôt au
relie des évenemens de
cette histoire.
La fortune commence à
se declarer pour eux ,
les
vents leur deviennent favorables,
& pendant qu'ils
naviguent à pleines voiles,
Favella leur raconte la cause
de ce dernier malheur,
dont l'évenement heureux
la flate d'un bonheur infini.
Il vous souvient, dit-elle
à Alexandro
,,
des fatales
paroles que vous me dites
la premierenuit de cette
incendie, qui a duré trois
jours
jours entiers
,
& pendant
lesquels onze mille maisons
ont été brûlées à Constantinople.
J'étois alors environnée
d'esclaves que vous
ne voyiez point, ôc qui ne
me quittoient pas, parce
que cette même nuit on
m'avoitdestinée à l'honneur
de partager la couche
du Grand Seigneur. Deux
esclaves de cette troupe infâme
avoient entendu vos
paroles, & avoient vû le
noir égorgé à vos pieds.
Dans le même temps le1
reste de ces miserables
m'entraîna,& me mena
devant le Kislar jigd
,
qui
est le chef des eunuques,
à qui ils dirent tous d'une
voix, qu'un jeune homme
habillé en femme étoit entré
dans leSérail, dansle
dessein de m'en arracher;
qu'il avoit tué un de leurs
camarades, parce qu'il avoi-
compris, comme deux
autres qu'ilslui montrerent,
le sens des paroles que vous
m'aviezdites. LeKijlttr Aga
me fit aulïîtôe enfermer
dans une chambre noire,
où toutes les femmes &
tous les esclaves du Serail
me traitoient chaque jour
de chienne, d'infidelle, 6c
macabloientd'injures.Une
feule Italienne, dont je déplore
le malheur, venoit de
temps en temps me consoler,
& c'est par elle que j'ai
sçû quevous vous étiez sauvé,
& le nombre des maisons
quiont étébrûlées pendant
cet embrasement. Cette
nuit,deux heures avant
le jour, on m'atirée de ma
prison, on m'a fait sortir
du Serail par une porte qui
donne sur la mer, on m'a
misedans un petit esquif,
avec quatre hommes, qui
ont ramé environ pendant
une heure sur le canal de
la mer noire, & quiaprés:
m'avoir bien enfermée
dans le sac où vos matelots * m'ont trouvée, m'ont enfin
abandonnée à la merci des
flots.
Nous avons essuyé tant
demalheurs,belleFavella,
lui ditAlexandro, que la
fortune va peut-être se lasserde
nous persecuter.Qu'-
elle nous ramene feulement
àbonport dans nôtre patrie,
& si vous m'aimez
toûjours,vôtre main suffira
alors pour effacer jusqu'au
souvenir des maux qu'elle
nous a faits.
Cependant le vent favorable
rendl'art des pilotes
inutile, & en moins de huit
jours ils arrivent à Naples,
où ils descendent dans la
maison de Don Fernand,
qui reconnoît tant de vertus
dans la tendreJoia,
qu'illa fait consentir à Tepouser,
à la place d'A lexandro,
qu'un amour parfait
attache depuis longtemps
aux charmes de Favella.
- Pendant que tout se dispose
pour la ceremonie de
ces deux hymens, la veuve
de Mustapha, à qui la renommée
a appris l'arrivée
deces amansàNaples,leurs
noms & leurs avantures, se
fait porter en chaise chez
Don Fernand, à qui elle,
fait, aussi bien qu'à Alexandro
,àFavella,&àJoia
même qu'elle ne connoît
pas encore,toutes les caresses
dont elle peur saviser
; & après s'être confusémentquestionnez
les uns
& les autres sur tout ce qui
leurétoit arrivé depuis leur
separation dans l'isle saint
Pierre, Sbayna leur tint le
discours que voici.
Le Marchand qui nous
avoit fait sur le portl'accüeil
obligeant, dont je
croy que nous nous fouviendrons
le reste de nôtre
vie, me dit un jour,aprés
nous avoirenfermez dans
des chambres differentes,
qu'il vouloit me distinguer
du reste des malheureux
quiétoient dan; samaison
qu'ilme trouyoit assez belle
pour m'aimer, & Favella
tropbelle pour ne pas me,
riter d'être presentée au
GrandSeigneur ; que dés
qu'il l'auroit fait partir pour
Constantinople,il relâcheroit
Alexandro, aprés lui
avoir ôté cequ'il avoit des
pierreries de Mustapha,que
je lui avoisdonnées. J'eus
beau le traiter de perfide,
de traître& de scelerat, il
se moqua de mes injures,
& ne cessa de m'en faire,
jusqu'à ce qu'environ un
mois après qu'il eut renvoyé
Alexandro, un jeune
Italien, qu'il avoit quelque
temps auparavant traité à
peu prés comme nous, vint
avec un petit navire, sur
lequel il avoit soixante
hommes armez, faire une
descente dans l'Isle, suivi
depresque tout son monde.
Il entra aussitôt dans la
maison de nôtreexecrable
Marchand,qu'il massacra
avec une demi
-
douzaine
de satellites qui écoient les
complices de tous ses crimes.
Il pilla ses pierreries,
son or & son argent, il brisa
mes fers, il mit en liberté
une vingtaine de malheureux
& de malheureuses
qui gemissoient dans la mai
lort de ce scelerat. Enfin
il nousfit prendre lechemin
de son navire, oùnous
nous embarquâmes tous
avec lui; & aprésavoirainsi
pleinement satisfait sa van^
geance, il nous amena ici,
où, grace à mon étoile,je
fuis à la veille depoufer
monsecond liberateur.Que
cet aveu ne vous eronne
pas,Seigneur Alexandro;
l'amour avoit reglé l'ordre
de nos destins avant que
nous nous vissions. Le vôtre
devoit vous unir pour
toujours à celui devôtre
chere Favella.Joia devoit
renoncer au Judaïsme en
faveur du genereux Don
Fernand:& je devois enfin,
aprés bien desmalheurs, devenir l'épouse de celui
qui m'a le dernier donné
un nom si doux.
Ils convinrent alors entr'eux
de celebrer en un
même jour la ceremonie de
ces trois mariages, qui furent
accomplis, peu de
temps aprés
,
à la vûë de
toute la ville de Naples,
où, comblez de tous biens,
ils vivent maintenant dans
une union parfaite. ¥
-
Jecroy
,
Meilleurs,qu'il
est à propos de réveiller
l'indolenceoù peut vous
avoir jettez la longueur de
Thiftoire que vous venez,
de lire. Pour réunir dans
ce dessein
, comme c'eii
mon intention, si les nouvelles
du temps vous amusent,
lisez-les; si elles vous
ennuyent, passez-les.
• Decembre, dixième mois
de l'annéeRomaine, & le
dernier du Calendrier Grégorien,
fut autrefois fous
la protection de Vesta, &
consacré à Saturne. On celebroit
pendant ce mois les
Fêtes Saturnales: mais ce
temps n'est pas le nôtre,
&saufaux lecteurs à voir
à present s'ils approuveront
que nous y celebrions de
nouvelles Fêtes.
Dejcription du feu d'artifice
fait pour la réjoüissance de
la paix generale par Ades
fleurs les Magistrats de la
-
ville de Lille.
La machine represente le
Temple de la Paix,dressésur
lemodele de celui de Fanus. Ce
portique est en figure quarrée,
foféesur unebazeoctogonnea
quatre grands pans,& à
quatre moindres, dont vôtei
les inscriptions.
Inscription des quatregrands
pans.
Premiere inscription.
Ludovico Magno,
Urriufque forrunævictori,
Claufis belli portis,
• Pace
Conspirantibus foederatis
hostibus Compositâ,
-
PerdomitisGothalanis,
Assertâ Philippo Quinto
Hispaniâ,
Coloniæ ac Bavariæ Electorum
Dignitate vindicatâ,
Annos manentemque fortunam
Apprecatur.
F. P. Q J.
Seconde inscription.
Ludovico Magno,
Consummato feliciterduodecim
annorum bello.
Symbole.
Un éléphant chargé d'une
tOllY quiparoîtremplie desoldats.
Devise.
Et tantum tulit unus onus.
Luiseul a sçûporter un sir.
deausipesant.
Troisiéme inscription.
Ludovico Magno
Carolo Sexto Cæsare Galliæ
consiliato.
SymSymbole.
Le Soleil,sur qui un aiiJé'
élevé dans les airs attache ses
Y yeux.
Devise.
Implet amore sui.
Illui gagne le coeur, ilsçait
s'en faire aimer.
Quatrièmeinscription.
LudovicoMagno
Pacem æternambello profcripto
sancienti.
Symbole.
L'arc-en-ciel au-dessus de
l'arche de Noë aprés le deluge
Devise.
Nulla dies pacem hanc nec
foedera rumpet.
Une si belle paix n'aurajatnads
defin.
Inscriptions des quatre moin-
-
dres pans.
Ludovico Magno,
Barcenone auxiliaribus co^
piis expugnatâ. `
Symbole.
Les Geans de la Fable qui
paroissentensevelis fiusJeurl
montagnes.
.Devifi.
- En quò discordia cives
Perducir miseros. -
D'unpeuple peu soûmis voit*
lafintragique.
Secondeinscription.
LudovicoMagno,
Coloniæ ac Bavariæ Eleéto.
rum assertâ dignitate.
Symbole.
Le Soleil au milieudes gemeaux
du Zodiaque. 1 DenjiJe.
Fratribus æquat honorcm.
Tous deux egalement ont part
àce bonheur.
Troisiéme inscription.
In omniætate triumphanti.
Symbole. -
Un grand laurier tailléen
couronne.
Devise.
Primis sic crevit ab annis.
Le nombre deses ans égaleses
couronnes.
Quatrièmeinscription:
-
Ludovico Magno,
Compositis Rastadi acBadcnz
de.pace Germana
controversits.
-
0 Symbole.
Un Orloge à rouës. Devise.
Magnæmentis opus.
D'un esprit élevévoila le
grandouvrage.
Les Devises& lesInscriptions
sont du Pere de Lart).
Jesuite du College de Lille.
Les matieres dont il est
question
-
dans ces Devises
nous menent insensiblement
aux nouvelles. Celles
de Barcelonne
,
dont il y
estplus parlé que des autres
, vont en commencer
l'article.
Les dernieres lettres de
Catalogne portent quOH
commençoit à preparer
touteschoses pour le fîegc
de Mayorque,&. qu'on
croyoit que ce [roit pour
la fin deFévrier,ou au commencement
de Mars. On
écrit de Barcelone du 14.
quede huit bataillons François
qui y ètoient, quatre
en partirent le
1 3. pour retourner
en France;les4. autres
les suivront la semaine
prochaine, & feront remplacez
par un pareil nombre
de troupes Espagnoles.
Lesautres regimens Fran
çois qui ont servi en Espagne
doivent incessamment
:en sortir ; ôc voici un état
eiacaéet des tsroupe.s Jtf:pagno*
Estat des troupes Espagnoles
quiviennent en Lampourdan
pour relever les troupes
FrancotCes qui ont servi
aevant Barcelone.
Noms des regimens.
Infanterie. Bataillons,
Castilla. 2'f
Medina Sidonia. J..
.Fixo. J..
Guadalaxara. i.
1
G1
arNvarra. 2.. o::¡,.
rvilche. (
J.5
[Bafilicata. i. RSaboya.
z. g
Nalladolid.. i. SQAâhony9drag.
apied,hj S1
Infanterie.Bataillon^,
Sexro, dragons àpied.ù
Caflellar. i"
Cavalerie. Ejèadronsr
RozellonVicjo. 4. Ouribc.. 2,.
Ordenes Neubes. 3.
Vallejo. 3*
Jacn. J.
AESremnfentidtaarrgizoc. .lla. %1t..' 3*
GranadaVicjo. 3. Vendôme.. 3'
Ordenes Viejo.Ordenes Viejo. ; v ,»s;,, rArdouino. 2, - - */-
Granada fécond. 4• Marimon.•-"-
ar&.,.
Qua tiers.
Blanes.
Belver.
Castillon &Empourias.
S. Pierre Pescador.
Figuieres & Perelade.
Torroella.
Palafurgell & Pals.
Verges & Baillie.
Campredon ôc Villalonga.
Caldas & Vidreras.
Gironne.
S1Fêlai, Cassa, & Llagostera
Sc Esteve & Ruidarenas. ?.
Labisbal ôc Perettaillada.
Puycerda.
.It Olot.
Liste des troupes deFrance qui
servent aux environs de
Barcelonne, aux ordres de
M. d'sjeld.
Regimçns. Braillons.
La Marine.j. Auvergne. • z.
LaCouronne. t.
Anjou. i,
Sanfay. i.
BombardierSjfecondbai. u
Royalartillerie,je bat., 1, Beauvoir. 2t.
Bassigny. 2.
Qucrçy. - <1 it!
Ponthieu. 1;;
; ¡
Caftellas, Suiflc. 5
Courten, SuiÍfc. 3.
Oudctotjà present Cailus. 1.
Danois. 1. Tallerand
,
à presentMaulevrier.
-
-' 1.
Le commerce de Bar- 0)Celonne est maintenant fiL
ïbien rétabli, qu'ily a plus eencteens t bâtimens de diffenations
à present
xlans le port de cette ville.
Les Barcelonois ont fait
fcme deputation au Roy
pour lui moigner qu'ils
sont resolus d'exposer leurs
wies & leurs biens pour le
service de Sa Majesté Catholique,
ilsoffrent mcmi
de contribuer aux frais ne
cessaires pour reduire le
Màyorquains qui refusen
de se soûmettre aux con
ditions qu'on leur a offerkes.
iiern il' -"tor
<
:j; On écrit pc Stralsund
que la Reine, épouse ~d
Roy Stanislas, enétoit par
tie pour eer au Duché ~d
Deuxponts trouver son é
poux;que leRoy de ~Sued
.y devoitincessamment ar
river, & que leRoy d
Pologne devoir passerl'hy
ver à Dresde. L'ordinaire
suivant on eut avis que le
Roy de Suede étoit campé
à une lieuë de Tergovvist
Capitale de laValaquie;
qu'il y fejourneroit jusqu'au
retour d'un exprés qu'il sir
voit envoyéà Ion Resident
encetteCour, avec ordre
de faire ses excuses à l'Empereur,
sur ce qu'il ne lui
avoit pas écrit pour luidemander
passage dans Ces
Estats • qu'il avoit apprehendé,
faute d'être bien informé
de l'état present des
affaires,que sa lettrene fût
pas reçuë s'il ne donnoit à
Sa Majesté Impériale les ti.
tres convenables. Le Sieur
Sternhock rendit compte
de cette commission aux
Ministres de l'Empereur,
qui lui répondirent que Sa
Majesté Imperiale n'avoit
eu d'autres considerations
que celles de l'amitié, &
de la bonne intelligence
qu'ilvouloit entretenir avec
le Roy de Suede, lors qu'- elle lui avoitaccordé un
passage libre dans ses Etats;
qu'il pouvoit néanmoins
continuer sa route en toute
liberté, & le faire recevoir
partout comme il le jugeroit
à propos. Le Comte de
Vviltseck partit aussitôt
pour allerau devant de lui
aprés avoir preparé toutes
les choses necessaires pour
la reception de ce Prince,
depuis son entrée en Tranfilvanie
jusqu'à Lyntz dans
la haute Autriche, d'où il
arriva le 22. Novembre entre
trois & quatre heures
du matin, fous le nom d'un
Gentilhomme d'Holstein,
suivi seulement de trois
personnes. Il fut conduit aÚ
General du Ckair, qui le
reconnut aussitôt, qu'il eut
quitté une perruque noire
qu'il avoir prise àCronstad
en Transilvanie pour y
pouvoir passerincognito. 1Il
avoit fait en huit jours
plus de cent lieuës d'Allemagneen
poste; êc au lieu
des'exposer aprèsune si
longue course, il s'enferma
avec ses Generaux qui étoient
à Stralsund
) pour
s'informer parciculierement
de l'état de ses affaires.
Je ne parle point des
réjoüissancesqu'on y fit à
[on arrivée. Les Gazettes
m'épargnentsurce sujet le
foin d'entrer dans le détail
de la maniere dont ce Prince
a été reçû. On ajoûte
que l'im patience que ce
Prince avoit d'arriver dans
ses Estatsl'a fait passes à
Vienne & à Cassel sans y
être connu. Le Roy de Danemarck
& le Czar, que
le retour de ce Prince inquiere,
ont mis, l'un des
troupes en campagne, pour
aller renforcer les corps qui
gardent les passages de la
Trave -y& l'autre fair travailler
à la construction de
plusieurs vaisseaux, galeres
Ôc galiotes, & à dessein,à
ce qu'on dit, de retirer ses
troupes de Finlande, pour
être mieux en état de défendre
ses autres conquêtes.
Le Prince de Moscovie son
fils est allé passer leCarnaval
à Venise.
r' Le 22. Novembre le Sieur
Stanhope Secretaire d'Estat,&
Milord Cobham,
Envoyez de la Grande Bretagne
, arriverentà Vienne,
& le mêmejour Monsieur
Stanhope eut une audience
particuliere de l'Em
pereur. )
Le dix dumois passé la
paix concluë avec les Estats
Generaux des Provinces
Unies fut publiée à Madrid
avec les folemnitez accoûtumées,
& l'on envoya
en même temps ordre de la
publier dans toutes les villes
du Royaume. La maison
de la Reine étoit déjà
partie pour aller attendre
Sa Majesté sur la frontiere
de la Navarre, sur l'avis
que l'on avoit eu que cette
Princesseétoit arrivée lé
27.OctobreàMarseille; qu'-
elle avoit de là passé à Aix,à
Arles & àMontpellier, où
elle étoitarrive
vembre; qu'elle s'y étoit reposée
le 8. & qu'elle en devoit
partir le 9. pour continuer
sa route versToulouse;
qu'elle étoit reçûë avec tous
les honneurs possibles dans
tous les lieux où elle passoit,
& regalée magnifiquement
par les foins de M.le Duc de
Roquelaure,Commandant
de la Province du Languedoc;
qu'elle étoitarrivée le
19. à Toulouse, qu'elle devoit
en partir le 21. se rendre
en six journées à Tarbes;&
que la Reine d'Espagne
Douairiereétoitpartie le 18.
de Bayonne,pour aller visiter
la nouvelle Reine sa niece;
qu'enfin le Roy d'Espagne
sedisposoità partir luimême
pour aller la recevoir
au PalaisdeGuadalazara.
Sa Maj. Cath. anomme
l'Evêque de Gironda
Controlleur general des Finances,
Don Manuel Badillo
pourles affaires ecclesiastiques
;
le Marquis de
Grimaldo Secretaire universel
des dépêches étrangeres
; Don Miguel Fernandes
Durand pour les affaires
de la guerre; Don
Bernardo Tinagero pour
celles de la marine;& Don
Joseph Patino pour les finances
des Indes Occidentales.
Le mariagede Don Alexandro
Lanti, neveu de
Madame la Princesse des
UrGns, a été conclu avec
la filledu Comte de Pliego
,
& la ceremonie s'en
est faite au Palais le 28. du
mois passe, enpresence de
S. M. Ils doivent aller demeurer
au Palais du Buen-
Retiro. La mariée a été faite
Dame d'honneur de la
Reine avec úx mille piaftres
d'appointement.
Toutes lesGazettes font
mention dans l'article de
Londres, de la distribution
des Charges que S. M. B. a
faite en faveur de ceux
qu'il lui a plû enrevêtir.
C'est un chapitre sur lequel
on ne peut dire que ce que
l'on trouve imprimé partout
, & dont les lecteurs
pourront, s'ils le jugentà
pr pos, s'instruireamplement
dans toutes les Gazettes,
où ils en trouveront
un détail suffisant. Il n'en est
pas de même d'un Manifestedu
Pretendant, qui a
été depuis peu imprimé
dans la fuite des nouvelles
d'Amsterdam, & que je ne.
donne ici que parce que je
ne le croy pas dans le$
mains de tout le monde, ;,
MANIFESTE.
Jacques troisiéme, par
la grace de Dieu Roy de la
GranGrande
Bretagne, deFrance
& d'Irlande, Défenseur
de la Fpy;&c. à tous Rois;
Princes &Potentats ëc -à
tous nos bien amezsujets,
Salut. ': ':
Dans une conjoncture
aussi extraordinaire ôc aussi
importante, ou nôtre droit
hereditaire à la Couronne
dAngleterre est trés-injustement
violé, &: où même
lesPrinces Souverains de
l'Europe font si fortement
interessez,nousne pouvons
demeurer dans le silence,
sansmanquer à ce qui nous
gestadrûd, e&.àce qui les re-
Tout le monde sçait que
dans la révolution de l'ànnée
1688. la Monarchie Angloise
a été renversée, &
qu'on acommencé a y
jetter lesfondemensd'un
Gouvernement Républicain,
par le pouvoir Youverain
que le peuple s'est antribué
lors qu'il s'est assemblé
sans aucune autorité,
qu'il s'estérigé en Parlement
, & qu'il s'est arrogé
le droit de deposer &delire
ses Rois, contre les loix
fondamentales du pays, &
au mépris des sermens les
plus solemnels dont les
Chrétiens soient capables
d'être liez. Onne peut aussi
ignorer ce que le feu Roy
nôtre pere,de glorieuse memoire,
a souffert par cette
injuste & violente révolution.
Après sa mort, la fuccession
aux Couronnes que
le Prince d'Orange avoit
usurpées nous étant acquise
legitimementsuivant les
loix fondamentales de rEf..
tat, nous reclamâmes nos
droits par nôtre Declaration
scellée de nôtre grand
sceau, en datte du oao.
bre1701, & aussitôt qu'il
plut à la divine Providence
denousmettre en état d'entreprendre
de les recouyrer,
nous y fîmes toutes
nos diligences & nos justes
efforts, sans qu'il ait, rien
manqué de nôtrepartd'où
l'on nous ait pû imputer le
mauvais succés decette expedition.
jii
Ayant appris ensuite que
l'on negocioit la paix, &c
quedansle traité qui étoit
surle pointd'en êtreco clu
on n'avoit eu aucun égard
à nos droits, nous publiâmes
nôtre protestation, datée
de fainr Germain en
Laye le 25. Avril 1712. de la
maniere la plus solemnelle
& la plus autentique que
l'état où nous étions alors
put nous le permettre; soûtenant
nôtre droit incontestable
à nos Couronnes, &
protestant contre tout ce
qui pourroit être stipulé
dans ledit traité à nôtre préjudice.
1. Quoyque nous ayons été
depuis ce temps-là obligé
de sortir de France, pour
nous retirer dans un pays
plus éloigné, nous n'avons
pas perdu de vûë nosRoyaumes
& nos peuples, persuadez
que tôt ou tard il plaira
à Dieu de nous faire rendre
justice, & de ramener nos
sujets à l'obeïssance qu'ils
nous doivent, en nous rétablissant
sur le trône de
nos peres; & nous n'avons
enfin cessé d'esperer que,
malgré la revolte declarée
des uns, & l'engagement
forcé des autres, le Dieu
des lumieres leur ouvriroit
les yeux, & les convaincroit
non feulement de l'injustice
évidente qui nous est
faite &à la Couronne, mais
encore des dangereuses
consequences qui en refultent
contreux-mêmes. Ce
n'est pas nôtre intérêt seul
qui nous fait agir;l'amour
naturel & inalterable que
nous avons pour nôtre peuple
est tel, que comme
nous n'avons pû voir sans
douleur leur sang & leurs
tresors prodiguez dans la
derniere guerre, en opposition
à nôtre droit indubirable;
aussi nous ne pouvons
queressentir une extreme
affliction de ce qu'ils
se trouvent exposez à être
assujettis à un pouvoir arbitraire,
& à devenirla
proye des écrangers. -'!",
,
-
Outre que l'Electeur de
Brunsvvick est un des plus
éloignez de tous les parens
que nous avons,& par consequent
un des derniers de
ceux qui peuvent, aprés
nous, pretendre à nos Couronnes
; ilest d'ailleurs évident
que rien n'est plus
coucontraire
aux maximes de
l'Angleterre, que d'avoir
établi avec tant d'injustice
la succession dans la Maison
d'un Prince qui est étranger,
puissant, & si absolu
dans ses Estats, qu'il
n'y a jamais expérimenté la
moindre contradiction de
la part de ses su jets: Prince
qui n'a aucune connoissance
de nos loix, de nos
coûtumes, de nos maniéres,
de nôtre langue; qui
de plus est soûtenu d'une
armée nombreuse de ses
propres sujets, appuyé dc.
l'assistance qu'un Estatvoifin
est obligéde lui donner
quand ille requetra, 3c favorisé
de plusieursmilliers
d'étrangers refugiez en Angleterre
depuis plus de
trente ans, qui lui seront
dévoüez en toutes occafions.
De plus,que peuvent envisager
nos sujets, si ce n'est
des guerres & des divisions
infinies qui s'ensuivront ne
cessairement du renversement
d'une loy aussî sacrée
& aussi fondamentale que

l'est cell? du droit hereditaire,
lequ el jusqu'ici s'étoit
toûjours maintenu contre
les usurpations même
qui avoient eu les plus
grands succés,quelque longues
qu'elles eussentété,
le gouvernement n'ayant
pû subsister en repos jusqu'à
ce qu'il eûc été remis
sur ses anciens & solides
fondemens >
Que si l'on veut encore
Considerer le grand nombre
de ceux dont les droits,
après nous & avant la Maison
d'Hanover, sont aussi
clairs & aussi indubitables
que les nôtres même, ne
doit on pas penser qu'ils ne
manqueront ni de volonté,
nide puissace pour les faire
valoir chacun à leur tour,
& pour susciter une guerre
éternelle contre nos Royaumes,
qui ne manquerajamais
d'être accompagnée
d'une guerre civile, qui
sera la fuite inévitable des
divisions intestines dont ils
sont agirez?
Il n'est rien don- c de plus
évident, que nos peuples ne
sçauroient joüir d'une paix
& d'une félicité durable:.,;
qu'en rétablissant la succession
dans la ligne directe,
& en nous rappellant,comme
étant l'heritier immediat
& légitime,&le seul
Anglois de naissance qui
reste de la Famille Royale.
C'est à quoy nous nous étions
attendu, par la raison
que c'est le veritable interêt
de la Grande Bretagne,
& que nous avions lieu d'esperer
qu'une nation, qui ne
manque ni de sagesse ni de
prudence, pourvoiroit dans
une si belle occasion à sa
sûreté par nôtrerétablissement,
que nous aimions
mieux devoir à sa bonne
volontéqu'à l'évenement
d'une guerre, dont la justice
à nôtre égard n'auroit
pû nous consoler des malheurs
qu'elle causeroit ànos
Royaumes.
Mais pourquoy risquer
tons ces malheurs, quand
on a-sçû, ouqu'au moins
on a bien pu sçavoir dans
toute la nation, les assurances
reïterées & irrevocablesquenousavons
données,
signées de nôtre main,
que dés qu'ilplairoità Dieu
de nous rétablir sur le trône,
les loix du pays seroient
la regle de nôtre gouvernement,
que nous accorderions
une amnistie generale
à nos sujets de tout ce
qui a été fait contre les
loix, & que nous donnerions
toute la sûreté & la
Satisfaction qu'ils pourroient
desirer pour la conservation
de leurReligion,
de leurs droits, liberrez ô(
proprietez.
Cependant toutes ces
avances de nôtre part n'ont
servi de rien; car après le
decés de la Princesse nôtre
soeur, donc les bonnes intentions
en nôtre faveur,
qui nous étoient connues,
& avoientcausé nôtreinaction
pendant ces dernieres
années, n'ont pû être effectuées
par la surprise de
sa mort; il est arrivé, contre
notre attente, que nos
peu ples, au lieu de profiter
de la favorable occasion de
tout remettre dans l'ordre,
& de concourir au veritable
interêt du Royaume
, en
nous rendant justice, & se
la faisantà eux-mêmes, ont
immédiatement proclamé
pour leur Roy un Prince
étranger à nôtre préjudice,
contre les loix fondamentales
du droit hereditaire de
la Courône,que nul aéte ne
sauroit justement abroger.
L'injustice & la violence
étant donc ainsi venuë à
son comble, nous avons crû
qu'il étoit de nôtre devoir,
de nôtre honneur, & d'une
indispensable obligation,
parrapport à ce que nous
devonsànous-même
)
à
nôtreposterité & à nos peuples
, d'employer tous nos
efforts pour soûtenir nos
droits de la meilleure maniere
qu'il nous seroit possible.
C'est pourquoy, sur
le premier avis qui nous fut
donné de l'état des choses,
nous partîmes de nôtre residence
ordinaire, pour
nous transporter en quelque
lieu de nos Estats, dans
le dessein de nous mettre à
la tête de ceuxde nos fideles
sujets qui étoient disposez
à soûtenir nos droits,
& à s'opposer avec nous
contre toute forte d'invasion
étrangere : mais voulant
passer au travers de la
France pour nous aller embarquer
, non seulement
toute assistance nous y a
été refusée, à raison des engagemens
qu'on en avoit
pris dans le dernier traité
de paix;mais on s'y est même
opposéànôtre passage,
tellement que nous avons étéobligez de retourner
en Lorraine.
Dans un contretemps si
affligeant, & au mil eu des
obstacles que nous avons
rencontrez de toutes parts,
nôtre consolation est que
nous avons au moins fait ce
que nous avons pu pour parvenir
à nos justes fins,& que
sur cela nous n'avons rien
à nous reprocher: mais
commenôtre cause est ccild
de la justice même, nous
esperons que la Providence,
quand il en fera temps,
nous donnera les moyens
de la soûtenir
; que Dieu
touchera enfin les coeurs de
nos sujets d'un véritable repentir
de l'injure criante
qu'ils nous ont faite, &
qu'il les excitera à rentrer
dans leur devoir.
Que si les affaires demeurent
dans une si mauvaise
situation,tousles Princes
& Pocentats qui sont à
present en paix,ne doiventils
pas faire de serieuses reflexions
sur l'exemple dangereux
qu'ils ont devant les
yeux, & sur ce que plusieursd'entr'eux
ont à craindre
de l'union des forces de
l'Angleterre avec celles des
Estats de FEtecceur d'Hanover,
dont le pouvoir exorbitant
ne s'accorde gueres
avec la balance de l'Europe,
pour laquelle ils ont combattu
toute cette derniere
guerre.C'est donc avec
justice, conformément
à leurs véritables interêts,
que nous demandons, pour
le recouvrement de nôtre
droit, leur assistance, que
leur honneur au111 bien que
leur interêt les obligent de
nous accorder autant qu'il
-
leur fera possible.
Au reste, dans cette triste
conjoncture où tout nou
manque, ce qui ne peur
nous être ôté, c'est la liberté
avec laquelle nous
declarons à la face de toute
la terre, que comme nôtre
droit eïl inalienable,
aussi sommes nous resolu
,
avec l'aide de Dieu, de ne
jamais nous en départir
qu'avec la vie.
C'est pourquoy nous protestons
encore solemnellement
par ces presentes, ôc
de la maniere la plus forte
qui nous est possible
, contre
toute forte d'injustice
quelconque faite contre
nous, nos legitimes héritiers
ou successeurs
; nous
reservant & conservant,
par ces presentessignées de
nôtre main, & scellées de
nôtre grand sceau, tous nos
droits & pretentions, qui
demeurent & demeureront
dans leur pleine force
: de
clarantque ci aprés nous ne
croirons pas être relpofllables
devant Dieu, ni devant
les hommes, déroutes
les pernicieuses confe 4 quences que cette nouvelle
usurpation de nos Couronnes
pourroir attirer sur nos
sujers & sur toute la Chrétienté.
Donné à nôtreCour
à Plombieres le vingt-neuviéme
jour d'Août mil [epc
cent
cent quatorze, & de nôtre
Regne le treiziéme.
t
* Des lettres de Londres
du I 5. de cemois, portent
qu'on Continuoit à faire des
changemens dans les charges
& emplois; & quoy
qu'ils ne soient pas achevez,
on parle déja de déposer
quelqu'un de ceux -
que le nouveau Roy a nommez
,entr'autres le Comtede
Notingham, President
du Conseil Privé,
& son frere, que l'on soup.
çonne de favoriser le parti
du Pretendant.
On avoit publié un projet
pour mettre une taxe
sur les fonds publics: mais
on ne croit pas que le Parlement
l'approuve, à cause
dqiute cela ruïneroit le créde
la nation, & decourageroit
les étrangers d'envoyer
leur argent, & même
de le retirer; ce qui feroit
baisser considerablement
le prix des actions
) & feroit cause qu'à l'avenir
les fonds que l'on accorderoit
au Roy ne feroient pas
remplis.
On arrêta la semaine pasfée
un nommé Oncale, qui
s'embarquoit pour France,
on l'a mené en prison
; on
l'accuse d'avoirenrôlé du
monde pour le service du
Pretendant.
Lesoir du 10. on amena
sqeuraotnotrze prisonniers, qui
condamnez à mort.
Les lettres de Venise portent
que les préparatifs extraordinaires
des Turcs par
mer ôc par terre alarment
fort les Venitiens & les
Malthois,qui prennent toutes
leurs précautions pour
se mettre à couvert des irruptions
de cette énorme
puissance.
On mande dePlaisence
du mois de Novembre dernier
,que Leurs Altesses Se.
renissimes M. le Duc & M9
la Duchesse de Parme ont
couru grand risque de fc
noyer dans le Stiron,qui
est un torrent voisin du
bourg de saint Dominique
, qui s'étoit debordé
avec tant d'impetuosité
,
que les carosses où étoient
Leurs A. S. ont été envelopez
dans ce débordement,
dont elles n'ont échapé
que par un miracle.
On a fait a leur retour à
Parme des prières & des
réjoüissances pour le salut
de Leurs A. S.
Le dernier du mois passé
Monsieur l'Abbé de Villeroy
fut sacré Archevêque
de Lyon, par les mains du
Cardinal de Rohan, assisté
des Evêques de Noyon &
de Limoges: cette cere.
monie se fit dansl'Eglise
de la Maison Prosesse des
Jesuites.
Le premier de ce mois
M. l'Archevêque de Lyon
prêta fermenr de fidelité
eMntre laes mralinys du.Roy à
Le ij. du passé Monsieur
l'Abbé deTrudaine fut sacré
Evêque de Senlis dans
l'Eglise des Religieuses de
fainte ElisabethM. le Cardinal
de Rohan en fit la
ceremonie, assistédes Evêques
de Noyon & de Séez.
Le 29. il prêta ferment
de fidelité à Marly entre
les mains du Roy.-à'
Le Roy a donné au Comte
du Luc une pension de
huit mille livres, & lui a
accordé la survivance de
ses Charges & de son Gouvernement
pour ses enfans.
M. le Comte de Croissy,
frere de M. le Marquis le
Torcy
, a éténommé pour
aller enambassade aupres
du Roy de Suede;& M. le
Marquis de Sommery en
Baviere.
L'Electeur de Cologne
donna le. un regal magnifique
au Prince Royal
de Saxe, au son des cymbales
& destrompettes. On
continuë d'emballer les bagages
de cet Electeur, qui
doit retourner incessamment
dans ses Estats.
Le 18. de ce mois Meffleurs
les Princes de Soubize
ôc d'Epinoy prirent
seance au Parlement en
qualité de Ducs & Pairs.
Je
Je cherche à profiter de
tOUt, Moeurs
j pour vous
amuler J&je ne refuse aucune
des chosesfinguheres qui
tiennent à ma connoifîjnce
des Pays Etrangers, dunôtre,
&de ceux des Lettres &de la
Galanterie. Il n'a tenu qu'à
vous de lire les Nouvelles
Etrangères
,
celles decePayscy
auront leur tour, voyons
donc maintenant ,
s'il vous
plaifl:, ce qui Ce pasle dans ce-
*luy des Mufes.
Je ne doute pas que le caquet
de ces babillardesn'ait depuis
long temps étourdi vos oreilles
,
j'apprehende même que
ce que j'ay à vous conter de
leurs demieres a
ffaires ne vous
ennuyé , non par la qualité
,
mais par la quantitédes choses
que j'ay à vous en dire. Au
reste la lecture decette Histoire
divertira ceux qui aiment
la Poësie,ceuxqui ne l'aiment
pas ,
la paieront.Voicy à bon
compte de quoy il s'agit.
On remet sur le tapis une
des plus jolies querelles du
siecle paffè:on fatt deS-Sonnets
à l'imitation de ceux qui furent
faits pour la belle manucure
,
quelques uns pretendent
que ceux des modernes
effacent ceuxdeVoiture & de
Malleville ;mais ceux quiconfervent
encore un précieux
fouvcnir des ouvrages de cc
temps-là, soutiennent qu'ils
n'en approchent pas.
Pour moy ,
Mcffieurs
,
je
ne pretends5que vous donner
un abrège historique d'une
Diflertauon tcavanie que M.
de Ménagé écrira M. Courar
son amy, sur l'origine des
Sonnets pour la belle Matineuse
:& à la fin de cet extrait,
les derniers Sonnets qui onc
cflé faits sur le même sujet.
Je ne trouve point, dit-il
( p cequi est remarquable) que les
PoètesGrecs ajentcomparél'Auffc
3 ou le Soleil
J
àune belle
personne que l'on rencontre à la
pointe du jour. Le premier des
autres Poètes qui s'tjlfervy de
cette comparatfon l' le veux dire
lepremierde ceux qui font nenus
a ma connoiPance, efiun certain
Quintus Catulus Et comme
il vivoitsur la fin de la RépubliqueRomaine
a
c'est-.dJre dans
leseele d'or de la Latinité) il a
trés-noblement exprimé cette penfée
dans les beaux yers qu'ilfit
pour le Ccmedien Roscius
J (7
que Ciceron nous a conftruedam
ison Livre de la Nature des
Dieux.
Conftiteramexorientem
Auroramforte falutans,
Cum subito a Læva Rofcius
cxorltur.
Pace mihi liceat, cælefies,
dicere vestra.,
Mortalis visus est pulchrior
eífe Dea.
Je.ne fçaurois me recoudre a
evous expliquer
ce Latin, le juis
trop dzfiret)& trop pare/Jeux
>
pour le faire.Aprés ce Quintm
CatulHS.) un antre Poète Latin
dont le nom nous est inconnu
e a
heureusement employé lA même
pensée dans ses Vers.
Occurris cum manemihi,
-, nl purioripspâ
- Luce nova exorcris ; lux
mea, dispeream
Quod Ci no£te venis, (jam
-
vero ignofcite Divi) -
Talis ab occiduis hefperus
exit aquis.
Ceux qui voudront prendre
la peme de lirelaDissertation de
4u. de Ménagé ,y verrontson
sentiment fut ces quatre Vers
qu'on trouvera parfaitement traduits
dans les deux Tercets du
premier Sonnet de M. de Mal.
leviHe.
Les Poetes Italiens ont trd..
duit enfutte en leur Lanzut1)Bpigramme
dr Catulus. Pétrarque
qui tient le premierrang parmy
eux la traduite de la forte.
SONETTO.
II Cantarnovo,elpianger
degliAugelli
In s'ul di fanno risentir le
valli"
E'l mormorar dé liquida
h*
Criftalli
Giu per lucidi, frefchi rivi
I e Snelli.
Quella ch' a neve il volco
y
oro i Capelli;
Nel cui amor non sur mai
Inganni, ne falli;
Destami al suon de gli amorosi
balli,
Percinando al fuo Vecchio
i bianchi velli.
Cod mifueglio a falutar
l'Aurora)
?£*I fol ch' e feco: e più
Valero
,
ond' 10 fui
Ncprimi anniabhagliato
e fono ancora. r
I Gli ò veduci alcun giotno
ambedui
Levarfi. infiemc: e'n un
J > punco,e'n u'nora:
Que! far le Scelle, e questo
fparir lui.
dnnilal Caro si celebre par
ses Lettres, que Montagne prefere
à toutes les Italiennes
, &
que M. Chapelain compare a
celles des anciens Latins, en afait
ceSonnet.;
SONETfTO.
Eran l'aertranquillo, e
l'onde chiare:
Sospirava favonio,e fuggia
Clori:
L'alma Ciprigna inanzi a i
primi'albori
Ridendo empia d'amor la
terra éI mare.
La ruggiadosa Aurora in
Ciel più rare
Facea Ie Stelle: e dipiù
beicolori
Sparse le Nubi, e i monti :
Usciagiàfuori
Febo, qual più lucente in
Delso appare.
Quando altra Aurora un
più vezzofo ostello
?ApeiTe ; e lampeggio sereno
e puro
II sol, che solm'abbaglia
e mi disace.
Volsimi: e'n contro a lei
mi parue oscuro
( Santi lumi del Ciel cort
vostra pace)
L'oriente,chedinanzi era sibello.
J'oJeajjeunr après M. Je
Menage, que ce Sonnet est admirable
pour la beauté des Vers e je fuIS, comme Luy
,
fort de
l'avis du Caporaly qui le trouvi
le plus beau de tous ceux du
Caro.
AntonioFrancsco Rainerioa
Gentilhomme Milanois
,
Secretaire
du CardinalVerulano, &
depuis de Pierre- LotityFaméfe
voulut , à l'imitation du CAfO dont
ilestoit contemporain, & amy,
particulierys'egayt sur la même
matiere.Ilfit ce Sonnet qui nei
laiss pM d'estrefort beau, quoi-,
qu'il le soit moins que celuy du
Caro.
SONETTO.
Era tranquilloil mar : le
selveeiprati
Scoprian le pompe sue,
sior ,frondial Cielo.
E la Notte s'engia squarciando
il velo
,
E sproriando i cavaisoschi
2>C alati.
Scvotea l'Aurora dacapegli
aurati
Perle d'un vivo trasparente
gielo:
E già rotava il Dio che
nacque in Delo
Raggi da i Liti Eoi ricchi
odorati.
Quando ecco doccidente
un più bel fole :
Spuntò gli incontro
, serenando
il giorno,
Et impallidiô I'Orientale
Imago.
Velocissime luci eterne e
sole,
(Con vostra pace) il mio
bel visoadorno
Parve ancor più di voilucente
e vago.
Marcello (jiovancttt a fait
aussideuxMadrigaux sur la
pensée de Catulus, mais je renvoyé
à la d ssertation deMonsieur
Menage ceux qui feront curieux
de les lire, nonseulement parce
que voilà déjaassez d'Itl,!ien,
mais parce qu'ils ne font pas
comparables au Sonnet du Caro,
ny à ceux du Raïnerio.
LesPoëtes François ont aussi
traduit l'EpigrammedeCatulus
à l'exemple des Poètes Italiens;
le premier qui l'a traduit, fut
Olivier de Magny
) qui vivoit
fous Henry 11.C, sousCharles
IX. Vùcjsa traduttion.
SONNET.
J'étois tout prest à fa*
luër l'Aurore
Que je voyois de l'Orient
sortir -
Et de ses fleurs largement
Aux Prez, aux Champs ,
aux Montagnes encore:
Quant tout à coup la
beauté que j'adore,
Vint de ses rays, ces clartezamortir,
Et moy craintif en glace
convertir,
convertir,
Puis aussi-tost en feu qui
me devore.
Pardonnez-moy, divin
flambeau des Cieux,
Si par mes Vers j'ose dire
en ceslieux
La vérité d'un fait qui
vous importe.
Uncorps mortel
,
bien
quilvienne d'en haut,
Nous a semblé plus reluisant,
&chaut
Que n'a de vous la lu.
miere plus forte.-
jiprés Olivier degAfagny
Monsieur de Meziriac, qui étoit
un des plus Sçavans hommes de
l'autreliècle,eun des plus dignes
sujets de l'Academie FraYJfoift,
imita de la forte l'Epigramme de
Catu'us, ou le Sonnet du Caro,
ou tous les deux ensemble.
SONNET.
Vous levant si matin,
vous troublez tout le
monde,
Vous faites que le jour
chasse trop-tôtla nuit.
Et que d'un pas hâté chaque
Etoile s'enfuit
Pensant que le Soleil sorte
déjà de Tonde.
Aussi voyant l'éclat de
cette tresseblonde,
Et la vive clarté que ce
bel oeil produit,
Qui ne diroit soudain
c'cft le Soleil qui luitt ;
Et va recommencer sa
course vagabonde.
L'Aurore qui venoit
d'un visage riant 1
En volonté d'ouvrir les
portes d'Orient,
Dans le litde Tithon est
presque retournée.
-
Voyez comme de hon^
te elle a le teint vermeil,
Et change de couleur,
tant elle est étonnée,
Croyant de se lever plus
tard que le Soleil.
Depuis, Monsieur dl."Ba/zltc
ayant lu le Sonnet du Caro
avec
plaisir, &souhaitant de le voir
en nostre langue, pria Monsieur.
de Voiture de le traduire
Monsieur de Voiture fen excusà
d'abordsursaparesse; mais
enfin sa paresse ceda à la passion
qu'il avoit de plaire à Monsieu
de Balzac, gr il luy envoya ce
Sonnet.
Des portes du matin l'Amante
de Cephale
Ses roses épandoit dans le
milieu des airs.,
Et jettoit sur les Cieux
nouvellement ouverts
Ces traits d'or & d'azur
qu'en naissantelleétale :
QuandlaNymphedivine
à mon repos fatale
Apparut, &briiia de tant
d'attraits divers,
Qu'il sembloit qu'elle seule
éclairoit l'Univers,
Et remplissoitdefeux la
rive Orientale.
Le Soleil se hâtant pour
la gloire des Cieux,
Vint opposer saflamme à
l'éclat de sesyeux,
Etprit tous les rayons donc
l'Olympe se dore.
L'onde, la terre, & l'air
Valluinoiencàlencour :
Mais auprès de Philis on le
prit pour l'Aurore,
Et l'on crût que Philis étoit
l'astre du jour.
Ce Sonnet estsi beau que M.
de AiAilevillejaloux desabeauté
voulut aussiimiter celuy du
Caro: Et comme il avoit l'tf
prit fécond,au lieu d'un Sonnet,
il en fit trois, & tous trois si
bons
, que le moins bon semble
meilleur que les deux Italiens ensèmble.
Les voicy tous trois.
SONNET:
Le silence regnoit sur la
terre, &sur l'onder
L'air devenoit serain
,
ô£
l'Olympe vermeil:
Et l'amoureux Zephir affranchy
du sommeil
Ressuscitoit les fleurs d'une
haleine feconde.
L'Aurore déployoit l'or.
de sa tresse blonde , -
Et semois de rubis le che-
- min du Soleil.
- Enfla
Enfin ce Dieu venoit au
plus grand appareil
Qui! soit jamais venu pour
éclairer le monde.
Quand la jeune Philis au
visage riant,
Sortant de son Palais> plus
clair que l'Orient
Fit voir une lumière &
plus vive,& plus
belle.
Sacréflambeau du jour
n'en soyez point jaloux,
Vous parûtes alors aussi
peu devant elle
Que les feux de la nuit
avoient fait devant vous.
AVTRE.
La nuit seretiroit dans (a
grotteprofonde: les oyseaux commen
çoient leur ramage
charmant:
Zephirese levoit
,
& les
fleurs ranimanc
Parfumoit d'un doux air la
Campagne feconde.
L'Aurore en cheveux d'oq~
Ce faisoit voir au monde.
Belle,comme elle estoit ,
aux yeux de son amant:
Et d'un feu tout nouveau
le soleil s'animant
Dans un char de rubis sortoit
du sein de l'onde.
Mais lorsqu'en cette pompe
ilmontoit dans les
Cieux,
Amarante parut, &; du
feu de Ces yeux
Fit de l'Olympe ardent
étinceler la voute.
L'air fut tout embrazé
de lès rayons divers;
Et voyant tant déclat, on
ne fut plus en doute
Quidu soleil
, ou d'elle,
eclairoit l'Univers.
AVTRE.
L'Etoile de Venus si
brillante,&si belle
nnonçoit à nos yeux la
naissànce du jour.
Zephire embrassoit Flore,
& soupirantd'amour
Baisoit de son beau seinla
fraîcheur éternelle.
L'Aurore alloit chassant
les ombres devant elle
Et peignoit d'ieçarnat le
celeste séjour. -
Et l'astre souverain revenant
à son tour.
Jettoit un nouveau feu
dans sa course nouvelle.
Quand Philis se levant
avecque le soleil
Dépoüilla l'Orient de tout
cet appareil,
Etdeclair qu'il estoit, le
fit devenir Combre.
Pardon,sacré flambeau
de la terre , & des
Cieux,
Sitost quelle parut, taclarté
fut une ombre,
Et l'on ne connut plus de
soleil que ses yeux.
Cestrois Sonnets sont fort
beaux ; ily a cependant braucoup
de ebops à dire contre les Vers.
Aprés M. de Voiture
, CT
Jlf deMalleville
,
M. Tristan
& plusieurs autres en firent à
l'envy sur lemêmesujet. VoifJ
celuy de M. Triflan,
SONNET.
L'Amance de Cephale
entre-ouvroir la barrière
Par où le Dieu du jour
monte sur l'horison,
lie pour illuminer la plus
belle faison,
Déjà ce clair nambeau
commençoit sa carriere.
Quand la Nymphe qui
tnienitemorneam,e prison- prifon-
Et de qui les appàs font
sans comparaison,
En un pompeux habit sortant
de sa maison,
A cetastrebrillantopposa
sa lumiere.
Le soleil sarreftant devant
cette beauté
Se trouva tout confus de
voir que sa clarté
Cedoic au viféclat del'objet
que j'adore.
Et tandis que de honte il
estoit tout vermeil,
En verfanr quelques pleurs
il passa pour l'Aurore,
Et Philis en riant passa
pour le Soleil.
En voicy un autre dont f~~
tcur eSl inconnu.
Au point qu'en tressès
d'or l'Auroreéchevelée
Venoit d'un front serein
nous annoncer le jour,
Et qu'aux yeux des humains,
joyeux de son
retour
Elle avoit sarichesse, & sa
pompéetalée:
UneNymphe,en beauté
denulle autre égalée,
Ou plustoll qu'une Nymphe
, un jeune astre
d'amour,
Se levant éclairât tous les
lieux d'alentour,
Par la fraîcheur de l'air
dans les champs appellée.
L'Aurore qui venoit de'
poindre dans les Cieux,
Sur ce brillant objetayant
jetté lesyeux,
Pallit d'étonnement d'une
si belle montre.
Et le trouble effaçant
sonvisageriant,
Pensa que le soleil venoit
à sa rencontre,
Et crût avoir failly la route
d'Orient-
Il s'en faut beaucoup que ce
Sonnet ne foit parfait; mais je
riay pas defan
, ny nefûts obligé
d'en faire la critique. 1
Avant ceux de M. de Voiture
, & de M. de Malleville
M. , de Rampalle avoit fait ce
Madrigalsurle mêmesujet..
MADRIGAL.
L'Aurore en ses plus
beaux habits
Ouvroit d'une clef de rubis
Le portail d'où le jour
commence sa carriere,
Et la terre admirait le
Soleil qui lafuit,
Triomphant des feux de
la nuit,
Monté sur un Char de
lumiere:
Quand*Philis parut à
(on tour
Plus belle que TAftre du
jour,
Devant qui la nuit (ombre
avoit plié (es voiles.
Ec (es yeux qui brilloient
d'unéclat non pareil,
Firent même affront au
Soleil
Qu'il venoit de faire aux
Etoiles.
Ce Madrigal rietfpas bon.
M de Vnture, quelque
temps avant que à*avoirfaitson
Sonnetpour cette belle quian levé
du Soleil fut prise pour le
Soleil en avoït fait.un autre
pour une autre belle, qui ayant
paru dans unJardin
,
alors que le
, Soleil se-coucboit, fut prise pour
Aurore. Ce Sonneteifaujjtune
ejpece d'imitation de ctluy du
Caro.
SONNET.
Sous un habit de fleurs
la Nymphe que j'adore.,
L'autre foir apparut si
abrillante en ces lieux, l'éclat de son teint
& celuy de ses yeux
Tout le monde la prit pour
': la naissanteAurore.
La terre enla voyant fit
mille fleurs éclore!
L'air fut par-tout remplis
de chants melodieux,
Et les feux de la nuit pallirent
dans les Cieux,
Et crurent que le jour rccommençoit
encore.
Le Soleil qui tomboit
dans lesen de Thecis,
Rallumant tout à coup ses
rayons amortis
Fit tourner ses chevaux
pour aller après elle.
Et l'Empire des flots ne
l'eut sçûretenir:
Mais la regardant mieux,
& la voyant si belle,
Ilse cacha fous londe, 6c
n'osa revenir.
Long-temps auparavant Brnardino
Rota avoit fait un Sonnetsur
le même sujetpour Porcia
Capecesafemme: Ceux qui
'Vcmdron
voudront le voir, le trouveront
dans la Dissertation de M. de
Menage.
A l'imitation de ce dernier
Sonnet de M. de Voiture, plusieurs
personnes en firent d'autres
sur la même pensée. En voiçy
un de M. Trifiant.
SONNET.
Sur la fin de son cours
le Soleil COlnmeilloit :
Et déja ses coursiers aboN
doientla marine, 4 Quand Elise passa dans un
Char qui brilloit
De la feule splendeur de
sa beauté divine.
Mille appas éclatans qui
font un nouveau jour,
Et qui (ont couronnez
d'une grace immorcelle,
Les rayons de la gloire,
& les feux de l'amour
Ebloiiiffoient les yeux, &
bruloienc avec elle.
Je regardois coucher le
.>.-
bel astre des Cieux,
Lorsque ce grand éclat me
>
vint frapper les yeux,,
j
Et de cet accident ma raisonfut
surprise.
Mon desordre fut grand.,
jene le cele pas, "! Voyant baisser le jour
>
Se
rencontrant Elise,
Je crus que le soleil revenoit
surCes pas.-
En uoicy un ANtre de M.-
Ubbé Ttflu. soIVNEIr.
Le bel astre du jour (c
retiroit fous l'onde,/ -
Traîné pompeusement sur
un Char de saphirs.
Et déjà Ton fentoic
mille petits Zephirs,
Qui venoient moderer
son ardeur sans fécondé.
En vain pour arrêter sa
course vagabonde,
Nous pouffions vers le Ciel
mille & mille fbupirs.
Par l'ordre
-
des destins
malgrétous nos desîrs,
Nous allions voir finir le
plus beau jour du
monde>
Quand l'aimable Philis
vint paroistre en ces
lieux,
Et jetta tant de traits, tant
d'éclats de ses yeux,
Que l'Universbrilla d'une
flamme nouvelle.
On vit sans le Soleil
recomitîëûcerle jour y
Et la terre luiflt d'une
nclarté si belle, ne fit plus de voeux
- pour hâter son retour.
Vous venezde lire, Mltf,Curst
fresque tous les Sonnets qui ont
estéfaitspourla belleMatineufe;
juez maintenantsi lesModernes
les effacent3 & si le Caffé du
Mont-Parnasse, où trente beaux
ejprits ont contribue à la compojîtion
des deuic Sonnetsde M.
D***n'onipas faitau moins
pour l'honneur de nofireSiecle3
ce que Aîejjtcurs de Voiture &
de1jpour la.
rfoire du leur.
- ù -
SONNET.
Le Pere des Saisons sur
un Chardelumiere,
Rassemblant tout l'éclat
de l'immortelle Cour,
Fournissoit dans les Cieux
sa brillante carrière,
Ses courtiers hanniflants
fouflfoient au loin lejoùr :
Quand tout à coup des
mois l'inégale courriere
Veutobscurcir sa gloire,,
& regner à [Qn tour;
Entre Phoebus& nous se
plaçant tout entiere,
Elle couvre d'horreur le
terrestre séjour.
Les Enfers ne font pas
plus affreux ny plus
sombres
Les mortels étonnezse pa-
, rurent desombres,
Le voile de la nuit se dé-
4 ploya dans l'air.
Alors pour dissiper ces
funestes allarmes,
Iris de ses beaux yeux étala
tous les charmes :
Qui croira le prodige! On
n'en vit pas plus clair.
Vous comprenez bien Me-
Jteursy dans quel esprit ce Sonnet
« ejlefait, e vous mavoù'etc%
ut;
que l'Iris de M. L)aurait
eu bien de l'avantagesur la Philis
deMdeVoiture, siser beaux
yeux aboient effacé l'Atirore3fait
pâlirle Soleil, c,dissîpé l'éclipse:
mais cette belle Matineuse eût
beau étaler tous sescharmes,
pour rendre la lumiere au monde,
on n'en vit pas plus clair.
Parmi les Sonnets quej'ay ti.
ré de la Difstation de M. de
Menace,ily en a deux de M.
de Voiture
, un pour une belle,
qui, au levé du Soleilfut prise
pour le Soleil, fjr l'autre, qui,
le foir fut prise pour l'Aurore.
Ces deux Sonnets furent éralementfaits
à l'imitation de celuy
duCaro.En voicy encoreun moderne,&
dans le goût du dernier
deM.Voiture;mais ilsemble
avoir estéplustostfait à limita..
tion des quatres Vers Latins de
Quintus Catulus, qu'à l'imi.
tation du Caro. -
SONNET.
Sur de riches Coteaux
où la jeune Pomone
Du aConquerant de l'In-'
de aime àflater l'espoir,
a BéchLK.
Quand les heures fermoient
les barrieres du
soir,
Et qu'au sein de Thetis
dormoit b l'amant d'Ocnone.
Le rChafleur del'Ath.
mos est enchanté de voir
La d tenebreuse Soeur du
beau Fils de Latone,
Qui sur son Char d'argent
d'Etoiles se couronne,
b Pha!bus c Endimion. d Diane.
Du e Frere de la Mort fécondantlepouvoir,
Le silencecouvroit la
terre de iesrrules, :
Les Amans se livroicnt;
auxsongesinfideles,
::r;Yapupiffas¡r,vÓtsre-;
?griôîèntsurtous lesyeux.
Diane à son Berger vint
marquersa tendresse,
!La Déesse en ses bras devint
plus queDéesse,
Et le mortel heureux çrûa
estreau rang des Dieux.
e Morphée,
Pour vous,Messieurs, qui
n'aimez pasles Vers, je vous
exceptcdu nombre de ceux
que cette Dissertation n'aura
pas ennuyé. & jem'imagine:
Qu'à present les Sonnets
voussortent par les yeux.
t^laisjdullîez vous bailler
j':l!qu?à demainou de dépit
envoyer promener le Mercure
& son Auteur, j'ay encore
des Vers à vous donner, &
peut estre encore d'autres
après ceux làPréludonsàbon
compte.
SonJ'ttfc Sérénissime Madarru
U'DhcbrfTc deVendôme ,
envoyail y a quelques joursà
M.dePalapra,du Gibierde
sa maisisond'Anet. M.de Palapra
reconnoissant des bontt'r.
de cette Princesse
, jugea à propos
de lu.) rendre present pour
present;£7* après avoir longtemps
cherché dans sa tesse
quelque chose qui convint a son
yiltejje - il crut que rien ne luy
feroit plus agréable que le Ron.
deau que voiyc.
KO NDEA V
Que de Gibiers Se que
de volatilles
Ont vû perir l'espoir de
leurs familles:
Mon croc chargé des
dépouilles d'Anet
Va parfumer ma table
d'un fumet
Plus odorant que Truffes
& Morilles.
Ce Gibier vaut trente
cochons de lait,
Je n'ay le gour de l'aîné
fait Cadet,
Qui mieux aima se gorger
de lentilles
Que de Gibie,rs.
Vos dons pour moy sont
plus doux que pastilles,
Par tout j'en parle enlettresapollilles
Et j'ay l'Esprit si. plein de
ce bien fait,
Qua l'Opera de mon aray
Danchet,
Je mécriay, voyant toutes,
ces filles, Que de Gibiers.
Puisqueje fuis entrainda
vous parler de PoëG:, pprouvez,
Messieurs,que je concinuë
ce que j'ayà vous en dire, &
que je vous tienne du moins
parole au sujet de l'Opera de
Telemaque, dont je vous ay
promis l'examen dans maPréface.
Cinq ou six reprerentations
m'ont mieux instruit de
ce que le Public en penle &'
Voflre curiosité aura plus lieu
d'estre satisfaite. Je vais d'abord
vous exposer le jugement
du public en simple Historien
,
après quoy je feray
le commentateur. Ce fera à
vous à me faire connoistre si
je dois continuer un metier si,
décrié dans Mathanafius. Le
jugement avantageux qu'on
a porté du Poëme ne s'est
point dementi
,
& tout le
monde le met au dessus de la
M'uficjuc. C'est peur estre la
première fois qu'on a fait cet
honneur à laPoésie
, en fait
d'Opera,on n'en a pas moins
esté injuste par le paLTé, & (ay
toujoursesté lui pris qu'il se
trouva des Auteurs en reputation
qui daignassent travailler
à ces fortes d'ouvrages,veu
le danger où ils s'exposoient
de se degrader.
Je neveux pasicy diminuer
la gloire de M. Pellegrin ;
mais comme il y auroit de
l'injusticeà l'élever sur les ruïnes
de la réputation de M.
Destouhes, te tacheray de
rendre au Poëte & au Musicien
, ce qui leur appartient.
Celasupposé, permettez moy
de vau) faire part de mes réflexions.
Il ya plus d'un an que la
réputation du Poëme de Telemaque
est établie : plusieurs
lectures qui en avaient esté
faites devant des personnes de
goût avoient si rapidement
emporté les suffrages
, que la
critique n'a osé luter contre
~letotrent.
L'impression qui a paru huit
jours avant la premiere répresensation
,n'a fait que justifier
les partisans de cette Piece.
Quel parti restoitil à prendre
aux Censeurs, si non de fronder
la Musique. On peut comparer
cettemauditeengeance,
au Medecin de Pourceaugnac
à quiilfautunmalade. VoalàJ
si jene metrompe, la premiere
causede l'orage qui s'elî
-
élevé contre la Musique de
Telemaque
, en voicy la seconde
: la qualité d'Inspecteur
General de l'Académie
Royale,deMusique dont le
Roy a honore M. Destouches
luy a fait presque autant de
jalouxqu'il y a de Musiciens,
la plûpart de ces Messieurs,
montrent à chanter, en fautil
d'avantage pour donner le
ton à la critique. Les écoliers
& les écolieres décident sur la
foy de leurs maistres & toutes
ces décisions réünies décreditent
pour quelque temps les
meilleurs ouvrages.
Mais me dira-t on ,
est ce
assez de diredu mal d'un Ol'e..
ra pourestrecrû,n'enfaut-il
pas détailler les défauts & les
prouver.-
Je répons à cela qu'il n'en
estpas tout à fait de la Musique
comme de la Poë~he
,
les
Musiciens n'ontd'ordinaire
queleur Musique en partage
ils ne se piquent guere d'un
rayonnement ciaâ& suivi
,
& comme il est établi qu'ils
n'ont pas ce don d'éloquence
persuasive dont les Poëtes
sont plus à portée d'estre partagez
, on n'exige pas qu'ils
appuyentce qu'ils avancent,
& on aime mieux les en croire
sur leur parole, que d'essuyer
de leur part des preuves mal
errangées& peu concluantes.
De fortequ'il suffis àun Musicien
de due qu'un Opera ne
luyplaistpas, pour empêc her
trente personnes àqui il a fait
plaisir de faire un aVtU fincerc
de l'effet qu'il a produit sureux
Cependant comme il faut du
moins quelques raisons vagues
pour appuyer lamedisance
,
on faille un fauxair de ressemblance,
pourrépandre dans le
monde que tout est pillé ; on
ne convient des bons morceaux
que pour dire qu'ils
pourroient estre meilleurs;si
.l'Asseur ou l'Actrice sont
enrhumez, on dit que le recitarifestfroid
,
& quoy que le
bon l'emporte de beaucoup
sur le mauvais ,on s'attache
au dernier, sans tenir compte
du premier, n'yeut il qu'un
dtflur pourtrente beautcz.
Voila à peu prés ce qui s'efl:
passédans les premieres repfetentations
de Telemaque ;
j'apprends que la cabalecommenceàse
dissipper& que la
verité se fait jour à travers les
nuages. Je ne douce point que
cela ne vous fasse autant de
plaisir qu'à moy ; vous avez
tousjours aimé qu'on rendit
justice au merite & j'ose
vous
vousaflurcrqueMïDestoûches
en a & qu'il n'ea- pas
comme la plupart des Musiciens
qui n'ont que la note
pour tout talent. Ila du sentiment,
des entrailles,& du
goût. Isse
,
Amadis de Grece,
& Callhyroé nous l'avoient
déjaprouvé & Telemaque va
achever de nous en convaincre.
Aprés la Critique & les
Eloges de la Musique & de la
Poësie
,
donc je croy vou¡:
avoir assez entretenu ,permettez-
moy, Messieurs , de
vous demander lamêmeindifserence
, ou pluroitlamême
attention pour le Chapitre des
morts que vous allez lire. Si
vous n'y trouvez pas ce langadgaens&
cette liberté qui font
lesautres,c'est parce que
jecroy qu'on nes'est fait une
loy raisonnable d'en parler
serieusement,que pour rendre
du moins aux morts ce
qui leur est dû
, & que pour
disposer l'esprit du lecteur à
recevoir plus agréablement les
Pieces qui fuivcnt ordinairement
cet article.Telaestésije
je ne me trompe l'intention
du fondateur du Mercure Galant
y
si non c'est la mienne.
MORTS.
Alexandre BenoistStanislas
Sobieski ,dit le Prince Alexandre
de Pologne, Chevalier
de l'Ordre du S. Esprit
,
donc
il receut le Collier à Rome te
19. Décembre 1700. en l'Eglise
de S. Loüis des mains du
Prince de Monaco Ambassadeur
de France, mourut àRo*
me le ie. Novembre sans
estremarié. Il estoit né le 6.
Septembre 1677. fils de Jeart
Sobieski successivement Pet~i.
General & Grand Maréchal;
de la Couronne en j665.
Grand Général du Royaume
en1667 éluRoydePologne
le 11. May 1674. couronné
le2. Février1676. faitChevalier
de l'Ordre du S. Efpric
la même année , ,
& mort à
Varsovie le 17. Juin 1696.
âgé de 72.. ans, & de Marie-
Casimirede la Grange d'Arquien
qu'il avoit épousé étant
veuve de Jean Prince de Zamoski,
& fille d'Henry de la
Grange,Marquis d'Arquien,
Capitaine, & Colonel des
Gardes SuissesdePhilippesde
France, Duc d'Orléans, Chevalier
des Ordres du Roy, puis
Cardinal, & de Françoise de
.la Chartre. Le Prince Alexandre
qui vient de mouriravoir
pour frere aîné
,
Jacques-
Loüis Henry Sobieski, dit le
Prince Jacques de Pologne né
en 1677. Chevalier dela Toison
d'or
,
marié le 10.Février
1691. avec Hedwige-ElisabethAmelie
de Baviere
,
fille
dePhilippes GuillaumeComte
Palatin du Rhin,Electeur
de Baviere, & deNeut bourg,
& d'Elizabeth
- Amélie de
Hcfle d'Armstat, delaquelle
il a des enfans, & pour puiné,
Constantin-Philippes Uladislas
Sobièski
,
dit le Prince
Constantin de Pologne) né le
I. May 1680. Chevalier de
l'Ordre du S. Esprit, dont il
receut le Collierenmême
temps que son frere non marié
,
& pour soeur Therefe-
CasimireSobièskinée le 3.
Mars 1676. mariée le iS-,
Aoust 1694. avec Maximilien
Marie Ele£frur Duc de
Baviere à presentvivant Le
Roy de Pologne leur pere
estoit fils de JacquesSobieski
Castelande Cracovie J:AJ
bassadeur Extraordinairede la
Couronne de Pologne aupr és
du Sultan Osman Empereur
des Turcs, mort en 1646. &-
de Zolkiewiski
,
fille de
Stanislas Zolkiewiski, Grand
Chancelier )& Grand General
de la Couronne,tué à l'âge de
73. ans à la guerre contre les
Turcs le 6. Oétobre: 1620.
Dame Marie- Anne Mitte
de Chcvrieres de S. Chaumont
, Epouse de Messire
Charles- Emmanuël de laVieuville,
Comtede VicMe,mou<
rue le22. Novembre 1714.
âgéede 51. ans, laissant pour
fils leMarquisde S. Chaumont
Colonel d'un Regiment de
Dragon,elle étoit filledHenry
Mitte de Chevr-icrcs.Comte
deS.Chaumont,&dcchar-,
lorc Susanne de Grammont,.
& petite-fille de Melchior
Mitte de Miolans Marquis;
de S. Chaumont,Seigneur de
Chevrieres,Chevalier de1Ordre
du Saint Esprit,Ambafladcur
Extraordinaire à Rome ,1
& d'Isabeau de Tournon
, arriéré petite fille de Jacques
Mute, Seigneur de Chevrieles;
aulE Chevalier deJOrdre
duS. JEf~pnc. Licutc:naI)JGe7..
ncrail.
neral au Gouvernement de
Lyonnois d'où sa Maison
étoit originaire
,
& de Gabriele
Dame de S. Chaumonc
sa premiere femme. M. le
Comte de Vienne son mary
est frere de M. le Marquis de
la Vieuville,cy-devant Chevalier
d'Honneur dela Reine,
puis de Madame laDauphine,
& Gouverneur des Provinces
du Haut & Bas Poitou, & de
feu M. le Bailly de la Vieuville,
Ambassadeur de la Religion
de Malthe en France,
dont je vous appris la mort
dans mon dernier Journal.
, Dame Anne de Longue-
Val, veuve de Messire Henry
de Saint Ncdfoire
,
Marquis
de SaintNoctaire & de Chatcauneuf,
vicomtedel'Estrange
,
Lieutenant de Roy du
Haut Poitou
, mourut le 28.
Novembre 1714 âgée- de 71.
ans, ayant eu de son mariage
pour fille unique Dame Loiïifc
Therese de S. Nc£bire
,
femme
de Louis de Crussol d'Uzés
,
Marquis de Florensac
,
morte le 2. Juillet1705.àl''âge
de 3 3. ans, laissant un fils
&une fille. La MaisondeLongueval
est une des plus anciennes,
& des mieux alliées
de la Province de Picardie,&
connue dans les premiers
temps fous lenom de leChien:
pour celle de S. Nectaire,elle
est originaire de la Province
d'Auvergne,& une des plus
illustres du Royaume par son
ancienneté
, par ses alliances,
& par les dignirez dont elle a
étédecorée, comme on le
peut voir dans l'Histoire des
GrandsOfficiers dela Couronne
auChapitre desMaréchaux
de France, où la Genealogie
en est rapportée tout au long.
Dame Marguerite de Ramboüillet,
Epouse de Messire
Charles de Nocé, Chevalier
Seigneur de Fontenay,& de,
la Chapelle
,
& auparavant
veuve de Messire Guillaume
Scott, Chevalier Seigneur de
la Mezangere, Boschervilles,
& Conseillerau Parlement de
Roüen ,mourut le 30. Novembre
âgée de 57. ans. La
Famille de Ramboüillet est
connuë à Paris pour avoir
donnéplusieurs Sccreraires du
Roy;celle de Nocé est originaire
de Normandie,& d'une,
noblesse distinguée
,
& cdlc;
de Scott est connuë à Roüen
pour avoir donnéplusieurs
Conseillers,& des Présidents
à Mortier au Parlement de
Normandie.
a
Dame Marguerire Rollot,
veuve de Messire Loüis Doublet
,
Trésorier General des
Maison
,
& Finances de feu
Monsieur le Duc d'Orleans,
Frcre unique duRoy, mourut
le 5. Dembreâgée de 77.
ans, laissant pour fils unique
M Doubler, aussi Tresorier
General de la Maison& Finances
de M. le Duc d'Orléans,
puis Secreraire de Ces Commandernens,
marié en 1698,
avec N. le Gendre, soeur
de Madame Crozat
, & fille
de François le Gendre, Fer.
mier General,&Secrétaire du
Roy ,& de Margueritele
Roux. Madame Doublet qui
vient de mourir estoit fille de
Nicolas Rollot, Secretaire du
Roy,& Commisdel'Epargne;
& de Claude Boutault;& M.
Doublet son mary estoit oncle
de M. de Perfàn Confcil-
1er au Parlement
,
de M. de
Croüy
,
Maistre des Requestes,&
de Madame de Barillon
femme du Maistre des Requêtes
de ce nom , tous trois en£
ms de Nicolas Doublet, Seigneur
de Persan, Secretaire,
du Roy & Fermier General , fils de Nicolas Doublet,Avocat
au Parlement, originaire
de Champagne.
M'ais, aprés, toutes lesMorts
que vous veçez Je lire, • Pourquoy donc, Mesdames
,Mesdemoiselles ,Messieurs
y
personne ne se mariet-
il ce mois-cy
,
est-ce parce
qu'une Muse charmante me
fit prefenr il y a quatre jours
d'uneEpit halame magnifique;
si c'est un tour que vous luy
voulez joüer
, tant pis pou^
vous:pour moy si vous con-r
noissiez monhumeur, vous
verriez ( mariez-vous, ou ne
vous mariez pas) que cette
piece ne vieillira pas dans mes
mains, & que bon gré, malgré
vous la lirez, ou vous la
fauterez. En voicy la preuve.
EPITHALAME.
Hymen que ton triomphe
efibeau>
L'amour allume ton flambeau
» Voit;fends laceleplaine
Suivy d'une riante Cour
Qui[oitdignedecegrand
jour.
Daphnés'unit a Celiment,
Etl%hymen s'unit à lamour.
DoctesNymphes tktHypocrene
Vnijfezyvou* à votre tour,
Pour chantercette double
chaîne.
Hymen que ton triomphe
el beau,
L'amour allume tonstambeau.
Du fond dts bois Pécha
semprejfe
Arepeterces doux concerts;
Dans ta gloire tout J'interesse,
Tout s'unit , tout cbdqtç"
sans cesse;
Hymen qte ton triomphe
estbeau,
L'mour allumetonstambeau.
Mais quelcry frappe mon
oreille!
Cest la discorde au coeur
jaloux,
Qui danssonantrese reveiUey
jiu bruit d'un triomphe Jl
doUX- Quoj!furieufia échevelée,
E1llepvieenlt slaénseej.tre ap-
Hymen bannit -là de tes
yeux5
PréviensJe* projetsodieux
PTuesçaliséque'au,x noces de
Elle divisa tous les Dieux;
Crains le noirpoisonqu'elle
exhale;;
Mais tu reponds à mes
souhaits,
'Et laDiscordepourjamais
Rentre dans la nuit infernale.
Hymen que ton triomphe
estbeau,
L'amour allume tonjlltrpbeau*
C'en estfait, jevois qu'il
s'allume
En faveur d'un couple
charmant ;
JCledliamiesne dans un moment. ou<vas'égarerma
Mait où va J'égarer wa
-
plume?
Arrêtons, c'estaller trop
loin ,
Ne penetronspas un mystere
Dontl'aimable Dieu de
Cythere °..
Prétend être leseuletémoin.
Heureux Epoux, couplesidellesi
Goûtezsesdouceurs à loiflr>

VniJ d'unechaîneéternelle ifitrvâtrc pluscher dejir:
Pu;îîez, - vous Avoir le
plaisir
- De la trouver toujours
nouvelle.
H)mcn q ue ion triomphe
estbeau,
L'amourallume ton jtlrrJbeau*
Js me souviens à propos » ide vous avoir donné au commencement
de ce Mercure,
une Histoire si serieuse
, que
[outc:smes reflexions faites )
j'ay resolu devous dedommager
de la me* lancolie où elle
pouvou vous avoir jetté
, par
un tissu continuel de bagatelles,
dela façon de ceux qui aiment
à badiner, & de la
mienne.
Que les partisans de M de
la Bruyere disent à pre sent que
le Mercure eil tout de bon,
au dessous de rien; je leur repondray
que cela n'est pas
vray ,& qu au contraire) il cft
bon, s'il vous amu se Ceux
qui voudront estre instruits sur
unautre ton,n'auront qu'à
chercher un autre Précepteur.
Pour moyjevous avoue de
bonne foy que je ne fais pas
mon Livre pources Sçavans,
Dont on lit dans les jeux, le
[APe de leur nom.
Mais pourles honnestes
gens qui n'aiment pas à s'ennuyer.
nuyer. Pourvû qu'ils se dit.
vertissent à le lire, comme je
me divertis à le faire, nous ferons
tous contents. Je vais,
par exemple
, vous conter,
Mellieurs, une Histoirevraye
& originale,qui ne plaira pas
à tout le monde,mais qui me
plaît,quelque triste & quelque
extraor dinairequ'elle soit,
parce qu'elle est du nombre
decelles que je recherche avec
le plus de soin.
Il y a environ quinze jours,
plus ou moins, je nem'en embarrasse
pas, aussi -
bien le
temps nefait, rien à la ebofe,,
il y a ,
dis- je,environ quinze
jours, qu'un jeune homme
natif d'ArrasarrivaàParispar
le Carrosse de voiture.
Le Fauxbourg S. Germain,
où il se fit conduire avec sa
valize
,
fut le quartier où il
prit l'Auberge que son conducteur
jugea à propos de luy
choisir. En y entrant ,
il demanda
à souper,&ilsoupa)
il fc coucha ensuite
,
comme
de raison :uneheureaprèss'etre
couché, ilse trouva mal,
mais si mal, qu'après avoir
baillé, iottpire
y
& râllé toute
là nuir, le matin une 1ervante
Je l'Auberge passant devant
la porte de sa chambre, comprit,
au bruit qu'elley entendu
,
qu'apparemment ce pauvre
jeune homme estoit malade
; elle y entra ,
& le vit
dans un estat si pitoyable , qu'elle cria au secours : à Cet
cris,l'hostesse les hostes, lesvoisins,
&les Chirurgiensaccoururent
; mais ils arrivèrent
trop tard,& le malade expira.
j Un Etranger , de l'âgeà
peu prés du deffunt, qui demeuroit
danslamême Auberge
, & que le bruit qu'il avoir
entendu,avoit attiré dans la
chambre du more, aussi bien
qu'un tas de personnes qui y
croient inutiles comme luy,
foüilla adroitementdans la valizedu
Flamand trepasse, dont
il tira un paquet de papiers
qu'il alla liredanssachambre,
La lecture ck ces papiers luy
apprit que le jeune homme
estoit d'une bonne famille
d'Arras ; qu'il avoir à Paris
une tante qu'il n'avoir jamaisveuë
; que cette tante estoit
une fort jolie femme ,&tresaimée
d'un Capitaine d'Infanterie
de laGarnison d'Atras
même ; que ce CplCnc,amyJ
du deffunt
,
l'avoit prié avant
de partir de se charger d'une
Lettre, & qu'illuy avoir promis
de la luy remettre en mains
propres. La Lettre estoit tendre,
& le Cavalier qui l'avoit
écrite, prioit avec instance la
Dame de se rendre précisément
un certain jour,a certaine
heure, au rendez-vous
qu'il luy marquoit.
L'indiscret jeune homme
qui avoir découvert tout ce
mystere, part sur le champ de
l'Auberge
, avec la Lettre de
l'Officier bien recathetée.Il va
chez la Dame à qui elle étoi$
adressée; il parleàunDomestique
par qui ilse fait annoncer
pour le neveu de Madame.
Sous ce beau nom, le même
Doméstique l'introduir dansla
chambre de sa maitresse , qui court aussitost à luy le*
bras ouverts, pour embrasser
ce cher neveu; mais loin de
recevoir sescatressess'illuydit
sur le champ d'un tonessroyable,&
enle reculant ,arrestez
ma Tante,ne me touchezpas?
écoutez moy seulement ? je
n'ay pas voulu partir pour
l'autre monde
,
sans vous
avoit donnéla Lettre d.e.M.
de. que vous aimez. Je vous
la donne;voilà ma commission
faite. Au reste je suis arrivé
hier au soir à. Paris
,
j'ay
descendu à telle Auberge , j'y aysoupé,j'y ay couché
je m'y suis trouvé mal cette
nuit, je fuis mort ce matin
& l'on m'attend à present
pour m'enterrer. Adieu ma
Tante
,
adieu.
La tante effrayée de la*
vision , sepâme,&le mort
s'enva. Peu de temps après
cependant elle revient de son
cvanoiiiflcrnent;auffi~îoft elle
envoyé à l'Auberge de son
neveu. sçavoir s'il estoit vray
qu'il fut mort. Le valet chargé
de cette commissions'informe
de tout à la lettre; &
sa déposition se trouve en tout
si conforme à celle du deffunc
que sur le champ Madame sa
tante en meure elle-même.
Faites vos reflexions sur
cette avanture, Meilleurs , si vous le jugezàpropos,pour
moytantque j'auray de pareilles
Histoires à vous conter,
je ne perdray pas mon temps
à faire les miennes. En voicy
encore une qui n'est peuc-estre
pas moinssinguliereque celle
qllC1
quevous venez de Inc.
Deuxfemmesenceintesqui
estoienten route,& quifaifoienr
un même voyage par
le carrosse de voiture ,arriverent
ils y a quelques années
dans une Ville ou Village de
France,dont je ne sçay pas
le nom; là elles se trouvèrent
toutes deux prestes d'accoucher.
On envoya aussitost
chercher la femmedu
lieu ,& dés qu'ellefutarrivée,
elles accoucherent La Sagefemme
mit pat malheur indifferemment
les deux enfans auprès
du feu, à costé l'un de
l'autre. Cette besogne faite,
elle est obligée,faute de domestiques
de descendre dans la
cuisine du cabaret pour aller
chercher quelque chose donc
elle a besoin pour ces femmes
malades. A son retour elle
trouve un des enfants morts,
& malheureusement elle ne
sçait pas, ou elle a oublié laquelle
de ces deux femmes est
la mere de celuy qui reste.
Auffieofi grande contention
entre les accouchées, ny l'une
ny l'autre ne veut ettre la mere
du more ,elles se font apporter
tour à tour l'enfant vivant,
& à force de bons & de mauvais
raisonnements ,chacune
d'elles se perfuadc qu'elle en
estlamere. Enfinaumilieu de
leur embarras, elles conclüent
qu'ellesn'ont pas de meilleur
moyen pour vuider leur querelle
, que celuy d'adopter
toutes deux le même enfant,
elles le font baptiser sous leurs
noms, & sous le nom de leurs
marys ,
l'un desquels meurt
quelques années aprés cette
adoption, & laisse en mourant
àce fils bienheureux ce qu'il
peut luy laisser de son bien.
Peu detemps aprèsl'autre pere
meurt auilj.Sc Lut ce même enfane
son héritieruniver sel. Les
parents du dernier pere s'opposent
à l'execution duTestament,
& disent pour leurs raisons
qu'un homme ne fçauroit
avoir deux peres; que puis-+
qu'il a héritédu bien de l'un
,
il n'a rien à pretendre au bien
de l'autre ;mais l'heritier qui
n'est pas fâché de cette duplicité,
dit au contraire, que
Monsieur un tel mort il y a
quelques années a pû luy laisser
son bien fous tel titre quiluy
a plû; & que le dernier est son
pere.Voilà ou en est le procé:4
je ne sçay qu'elle en fera la
décision;mais je croy que les
Loix n'ont pas prévû ces évenemens.
En attendantqu'on
en fasse sur ce sujet
, nous
chanterons si vous voulez la
Chanson suivante.
ODE ANACREONTIQUE.
Maudit fait le m.,r:el
aVâre
Qui de la terre tira l'or,
Et lejour où le fort barbare
Luy montra ce fatal
tresor.
Avant ce jour la plus
severe
Cedoit à de tendres langueurs,
Il nefalloit qu'aimerpour
plaire,
Les coeurs estoient le prix
descoeurs*
Soupirs,transports, arleursfidelles
C'en estfait n'esperezplus
rien,
L'or est leseul maistre des
belles,
Il vous a voile vostre btt/n.
Avantcejour,&c.
faire aimer,
Me, résoudre à fairefortune.
j'aime autant ne pins
m'enflamer.
Avant ce jour, c~r.
Des Chansons aux Enigmes,
jecroy qu'il n'y a qu'un
pas à faire.
Je vous l'ay bien dit le mois
passé, Messieurs, que la guerre
ne manqueroit pas de se déclarer
entre M. Anceau & M.
Dumoulin
,
pourvû que les
traits n'en retombent pas sur
irioy
,
je ne m'en ~loucie guere.
Si cependant elle séchauffe
plusque deraison,je m'offre
à estre le médiateur de leur
paix. En attendant le succés
.de cetteavanture , voyons
comment M. Dumoulin se
vange de l'envoy de M. Anceau.
Tout le monde n'est pas
obligéderêver,
Legenie 1estsouvent fort
mal avec l'adresse,
Et ïort doit aider la
fltblefft
ee gens dont l'ignorance
ejl sac le à prouver.
Or îoy, quiviensm'insulter
dans tes rimes,
Anceau, veux-tu sçavoir.
pourquoy
Tu trouvesitotmes Enigmes
, Cest que j'ay travaille
pour toy.
Mais puisque j'en HJis au
chapitre des Enigmes
, avant
d'enproposer de nouvelles,
j'ay sur cet article quelque
chose à dire pour ma justification.
J::l<lY que la premiere du
mois passé cftou bonne, &
l'autre mauvaise ; mais ce n'est
ma faute que par la complaisancequej'ay
euë pour Madame
de N. qui l'a faite & qui
m'a pri-flfé malgré moy de
m'en dire l'auteur : je l'ay fair,
& je me garderois bien de par,
ler decette avanture, si, lorsque
jeluyay dit après toutle
monde, qu'elle nevaloit rien,
elle ne s'estoit pas mocquée
de moy, & ne s'en mocquoit
pas encore. Auresteson
Enigme ressemble à une poire
comme à un moulin à vent.
Le mot de la première est
l'Armée, les noms de ceux qui
les ont deviné,font, la belle,
& charmante Manon ,qui
mangeroir bien une orange.
les Amours de l'illustreMademoiselle**
,
l'A mant d'une
des quatre brunesde la terrasse
de Luxembourg
,
de l'Eslclache
le jeune, la Maitresse à
Follette, le solitaire Quémine,
& M. de Bonneval
, & son
Iris.
M. P. m'a envoyé ces Vers
sur le mot de la premiere E-j
nigme avec l'Enigme qui les
suit.
EN V O Y.
Iris ayant revélongtemps
DelapremiereEnigme en
vain cherchoit h sens.
Sapénétration en etoitallarmee
:
Ellejettede Livre, en tombant
il s'ouvrit3
Elleyporte lesjeux, &
d'abord elie lit
Sur lefeüillet le mot d'Armée.
ENIGME.
Quoyquejefois unmets
dontp rsonne netaste,
On a besoin de moy dans
de certains repas :
Tous lesanson m'ysert en
paste,
Onsçaitbien quejyfitts>
maisjen'y paroispas.
On me cherche , on me
trouve, & souvent
avecpeine:
Un seul alors de tous,
rend la nchcrche vaine,
Prend, un titre pompeux,
maissifragile, helas!
Qj£a peine a-til le temps
d'engonflerlesappas.
Un de mes amism'a donné
cette autre Enigme qu'ila dérobé
à un des siens. Celuy qui en
cft l'Auteur est de Villeneuve
d'Avignon;c'est un homme
de Lettre, connu non seulement
par un Journal qu'il a
fait des nouvelles de l'ordre
de laboisson ; mais encore par
plusieurs autres ouvrages desprit.
AUTRE.
La guerre a pour moy
desappas,
Ellefait ma plus chere
env,e.,
Aufort desplus rudes combats,
Sous les coups jamais je
neplie,
Et je fais aprés mon
trépas,
Plus de bruit que pendant
ma rvJe.
Des
Des Enigmespassons aux
Phenomenes. Cet article est
admira ble pour les Phisiciens,
&je fuis ravi qu'on me l'ait
envoyé, puisque cela me donne
lieu de mettre dans mon
Journal quelque chose qui foie
digne de leurs raisonnements.
Voicy ce qu'on me mande
de Berne du 9,. Novembre
dernier.
Il y a deux Montagnes fi/n,
les frontières de Berne & de
Vallais qui se touchent, dont
l'une s'appelle Cheville appartenant
aux Vallefans
)
& l'autre
Anzeinde située dans la
Jurisdiction de Berne. Il y a
entre ces deux Montagnes
une source, de laquelle sortent
deux rivieres, l'une nommée
Lavançon, passe par le
Bourg de Bex, Pays de Berne,
l'autre appellée Luzerne,traverse
le Pays de Vallais. La
Cime de la Montagne de
Cheville consiste dans un
oeher fort élevée fort dur.
, Le Dimanche23. Septembrc
,l'on entendit un grand
bruit souterrain sur la Montagne
de Cheville, qui saugmenta
le lendemain, ôc qui
continua pendant 24. heures,
avec une telle vehemence ,
que l'on croyoit entendre la
décharge de gros canons. Ensuite
l'on vit sortirdela Montagne
une fuméeépaisse
,
&
une flammeclaire,aprés quoy
la Cime de la Montagne fauta
& couvrir une grande quantité
de bétail & plusieurs
maisons, & boucha la rivière
de Luzerne, ensorte qu'on
n'en pu plus trouver une goute.
D'oùl'on conjecture ,
que cette Montagne est remplie
de mines de souffre & de
poix. On l'a fut visiter paf
des hommes
, qui assurent
qu'il ne seroit pas possible de
comprendre l'effet de cette
secousse
,
si l'on n'avoit pas
connu auparavant la situation
du lieu. L'on mande du
z 3. du passé
, que le bruit & le
mouvement continuent toûjours.
De Berne le 10. Novembre
, 1 7 14.
Le premier de ce mois un
très-grand rocher de la Montagne
de Cheville
,
où font
les limites de Berne & de
Vallais
,
se fendit & tomba
dans la Vallée avec quantité
de souffre, de bois, & de
poussiere ,quicouvroient soixante
journaux de pâturage
y &dumonde & du becad,appartenants
aux Vallefans. Le
torrent appellé Lizerne fut
bouché pendant trois jurs.
& il se fit ensuite une ouverture
entre le rocher & un bois,
au travers d'une petite Montagne,&
le torrent entraina
des ar bres de sapin de deux
toises dépaisseur. Les Montagnes
de Bex n'ont pas eu
grand dOffilnagc:) tous les
rochers estant tombez dans les
terres de Vallais,où il y a eu
dix huit personnes tuées, &
trois de blessés : une femme
se trouva enterrée jusques aux
épaules, & deux autres eurent
leurs habits brulez:ces femmes
virent tout,& estantassez:
éloignées,elles ne crurent pas
que la poussiere put les bruler.
L'on entendit encore Lundy
dernier un grand coup, & l'on
vit sortir une fumée noire
& rouge,& la formation de
deux étangs.
Je ne suis pas le maistrede
satisfairel'empressement que
vous me marquez, Mcffleurs,
pour les Pieces dEloquence
que leurs Auteurs, quelques
belles qu'elles soient,&malgré
les applaudissemens qu'elles
ont receuës de tous ceux
qui les ont entendu prononcer,
n'aiment souvent pas &
rendre publiques. S'il ne tenoit
qu'à moy de vousen faire part.
jecroy querien ne seroit plus.
capable de contenter parfaitement
vostrecuriosité que le
Discours que MonsieurChauvelin
Avocat General fit dans
le Parlement, le 26. Novembre
dernier, surlaréputation
des Avocats, j'enay entendu
de quelques uns de ses Auditeurs
,
& lû des fragmens dans
une Gazette de Hollande,
dont je croy qu'iln'approuveroit
pas la peine qu'on prendroitde
les imiter. Je ferois
prcfquedans le même embarras
au sujet de la Harangue de
M. Herault Avocat du Roy
du ChaHelct
,
si un de mes
amis n'avoir pas pris le soin
d'en ramasser exactement les
morceaux que vous allez lire.
C'est un present qu'il m'a fait,
& certainement un present
que je cioy vous fiirc.
Lq
- Le but que M Hérault s'est
proposé dans leDiscours qu'il
a fait aux Avocats à la
rentréeduChastelet, a été de
leur faireper suader que les
qualitez du coeur sont preferables
à celles de l'esprit. Loin,
dit-il
,
de trop donner à lagloire
qui vient de l'esprit, asseurons
aux quatitë-Z du coeur la préférence
cruellesmeritent,&faisons
voir qu'ellessontplusessentielles
à l'Avocat que celles de
l'esprit, L'Orateur, continuët-
il un peu plus loin, doitestre
bonneste homme,éloquent mais
laprobitéfait le fond de sonÇAraclure9léloquence
n'en estpour
ainsidire, que le colori : laprobité
demandesespremierssoins,l'art
de bien dire ne demande que les
seconds. Oratot, dit Qiùntilien,
vir bonus, diccndi peritus.
'Vous en conviendrez bientost,
ajoutet-il,mouseflestnousosons
le dire, necessaires aux Âdagiftrats.
Le Juge fait jar -vous ce
qu'il ne peutfaire parluy-mêm
parvous, il demasque Les fourbes
qui miennent par des dehors
trompeurssurprendre son équité,
en surprenant sa compassion. Par
vous àtravers un amas confus
de circonstances embroüillées, il
VA reconnoistre& delivrerl'innocence
opprimée par L'imposture ;
cessparvous qu'il fuit la chicane
dans tous sesdétours, vous
luy montrez laverité, c'està luy
4e la vanger. Qui réussira le
mieux dans ses fonctions si importantes
e sihonorables? qui
remplira mieux l'attente duju'ie?
ou l'Avocat habile, sans probité,
ou l'Avocat honneste homme.
Le premier aveuglé par l'inttrrft
ou séduitpar lA presomption,
entreprendra la deffense
des causes les plus injustes,se
fiant trop à luy-même
)
ilaura
trop peu d'application pour les
autres, plus il fera éloquent,
plus il sera dangereux; aux lumieres
pures qui éclairent, il mêlera
un faux brillant quiébloüit,
sascience luy fourniradespécieusesraisons
pourparer le mensonge
, e[on industrie luy mettraen
mains des Armespourcombattre
la justice; il puisera dans
son esprit millemoyens capcieux,
mille détours peu fnceres: icy il
donnera de belles couleurs à la
cupidité, il mettra l'innocence
dans un faux jour, nul scrupule
d'imposer aux Magistrats, de calomnier
ses Parties
,
de trahir
mêmesesClients, Que d'intrigues.
Car de q'/cry ne peut pas
estre capable un Avocatavec un
bel esprit,sansunboncoeur,avec
beaucoup de lumieres, & peu
de probité ; en un mot qui est
habilesans estre honneste homme.
Au contraire} dit il, dans un
autre endroit,à la loüange
d'un Avocat honneste homme;)
le 7,t,:e instruit d'une cau/e
parun Avocat, qui avec unesprit
mediocre
,
joint une vertu
qui ne l'estpas
,
qui à lavérité,
a moins d'éloquence
,
mais plus
de bonnefoy, habile, non pas au*
tant qu'on peut le fouhaitter
mais , autant qu'on peut lesouhaitter
honneste homme : comme iln'apas un grandfonds d'érudition,
il a la Justice pour fin
,
-& lasagesse pourconseil, comme
c'est la droiture de son coeur
quifaitcelledeson esprit,son
ejprit ne porte jamais de jaufies
lumieres dansson coeur,scrupuleux
surtout, il chercheplustost à
assurer le repos de sa conscience
> qu'à se preparer l'honneur d'une
victoire,il neselaisse ni êmouvoirpar
l'autorité, ni entraîner
par une compajjion aveugle qui
n'envisage dans la misere, que la
miseremême
,
il ne prêteson se
cours à l*ajftgéque lorsqu'ilmerite
JtJlre secouru, il ne prend fous
sa protectionl'opprimé, que, quandilreconnoît injuste lapuissancequi
l'accable
, & par-là
digneenfin de la corfiance du Juge
,
leJuge avec luy marche en
seureté, e dans le cabosd'une
cause que la cupiditéavoit pris
Juin d'cmiarrajpr
,
il ne craint
p us qu'on ne-luidéguise,ou qu'on
ne luy supprime ses faits
,
qu'en
ne substitüe la vrery-jemblance
àla vérité* au*^ A. développerlesens
dela Loy ,on ne luy
en corrompe le texte, qu'au lieu
d'éclairersonesprit,on ne s'applique
à surprendreson coeur
y
ilse
repose enfinsur l'attention exacte
de l'Orateur qui l'empêche dese
tromper luy-même
,
&"'sur la
bonne fojy qui luyfait ignorer
l'artfuneste de tromper les autres
Sil'on estconduitpar la droiture
de [on coeur on cft toûjours
habile à conduire les autres par
les routes de la sagesse
, on sçait
tout dans une science où le coeur
tfl le Maistre qui instruit.
- En parlant de l'Avocat
sans probité ,le coeuryàic- il,
ria quetrop d'empiresur l'esprit ,
la raison devroit le conduire
,
cefl le qui domine la raison
,
il
la réduit en servitude 9il ne luy
permet plusd'ecouter la fag.fl"
qui luyferoitconnaître la JuJtice
&la venté,ilfautquel'esprit
malgré luy
,
pense comme le coeur
sent
3& si le coeur est esclave de
quelque p-tflion
,
il faut que la
raison pour estreécoutée apprenne
le langage de cette pajjion..„
L'Avocat bonneste homme ne se
Laissè gdgnerrry intimider; il ne
craint d'avoir pour ennemis que
la verité, insensible aux plus
touchantes prieres
,
rien ne le
frappe que lajustice, nen ne luy
est recommandable que la juflicey
& s'il en estoit besoin,illa défendroit
contre le Juge même.
S'il manque de brillant pouf
surprendre ,il ne manque point de
force pour convaincre. En un
mot la vérité sur les lévres de
l'honneste homme
,
fait aimer fait triompher la justice; , &jamais
la justice nese trouve parluy
la victime de l'interest.
Le Client
, les Parties
) tout
l'Etat t'si interessé à la probité
de l'avocat f7 il ne faut pas
croire que lorsqu'ils'acquitte de Jses fw.ihcns illefcrvf.jmim
j que les guerriers qui repoussent
loin de nos frontières
, ceux qui
qui les attaquent. L'Etat poffe
dans ses entrailles des ennemis
plus dangereux,&plus remuans
que toutes les Puissances.liguées
au dehors : ne parlons même plus
d'ennemis étrangers, aujourd'huy
que lasagesse du Roy
, nous a
rendu la Paix,sans qu'il luy en
ait coûté tout ce que son amour
poursonpeuple,estoitprestde luy
sacrifier,aujourd'huy que ce
Monarque grand dans l'une (7
l'autrefortune,saisissant le moment
heureuxquesa pieté avoit
obtenu du Ciel, a changé une
»chanqé partie de nos ennemis en alliez
ZeleK
, & réduit l'autre par la
forcede ses armes, aujourd'huy
qu'illeur donne en Vainqueur,
flauPasixéque'ils.luy avoient re- -- - Enfin
,
conclut-il dans la
premiere partie de son discours
,gorieufe profession
,
dans
laquelle rien ne borne l'honneur
deservir l'Etat,ou pendant la
guerre on a l'avantage de faire
goûter par la jufhc,: ,
les fruits
de la Paix
, ou pendant la Paix
on a la gloire de receüillir les
Lauriers qui viennentseconfondre
avec les Palmes.
Dins la feconde partie, Ce
n'estpasassez
,
d-ir-il
, que ïAvocat
, avec lesqualitez du fcèar
soitplusutile auxJuges &au
Public
)
qu'avec les qualitéK de
l'esprit
)
il estencore plus utile à
luy-même.
Qu'il estaiséde concevoir ce
que la renommée en aura bien-
10ft public,ce que sa réputation
luy procurera de confiance, ce que
la confiance luy attirera de nouveaux
Clients ; l'on verra les
innocens & les opprimez s' empresser
également après luy
,
sa
maison devenirfréquentée comme
un Temple,ses décision,écoutées,
& receuës comme des Oracles.
Ila lecoeurcompatisant;qui efi
la veuve ,
quifont les orphelins,
quifin' les malheureux qui nese
trouvent inlt:rcft:Ài)/voirpour
Patron. Il rft incapable detromper
,
les grands & les petits se
croiront donc également enseureté
:1
en le rendant l'arbitre de leur
fortune , & vous ne le 'Vrre:{
descendre du Barreau, que pour
venir exercer chek luy une Magisl
ature domestiqued'autant
plus florissante qu'elle n'aura
pour titre que la venu même.
Nepensez pas d'ailleurs
, que
pour devenir homme privéildevienne
pour cela homme moins
nea/Jalre à la République,sa
tniijon n'ctf plus assiegéé des
plaideurs, mais son cabinet tfl
l'école de la vertu , on s'yassemble
en foule pour s'y instruire ,
les jeunes le prennent pour leur
maistre
,
les autresse le choisissent
pour leurconseil,tousont en luy
la même confiance; c'est la vertu
& la probité qui l'ont formé,
peut-on suivre de plusfideles
guides. Qu'elleexcuse pourroitapporter
l'Orateur,si les qualitez
essentielles luy manquoient
puisque lafacilitédeles acquérir
ëgaie encore la necessite de les
posseder.
Quant aux Procureurs.
manquent ils descience, lesJuges
peuventysuppléer par leurs
lumieres; mais lorjq^ils manquent
de probité ; les Juges ne
peuventysuppléerpar If ur vertu.
Perfectionnez vostre coeur, il cft
le centre des passions quand on le
neglige
; il est leprincipe detoutes
Usvertus.quand on le cuItivr.
Enfin voicy comme il conclur,
Pourquoy dans la societé cru/le,
'L'eZ vous qu'onsevante sisouvent
d'avoir un bon coeur, gr si
rarement d'avoir un bel esprit;
l'amourproprey trouvesoncompte
; c'cft qu'en sepiquant du bon
coeur, on oublie rien pour son
éloge,au heu qu'ensepiquantseulement
du bel esprit
, on laisse
mille
mille défauts à soupçonner:en
un mot. ( crl'::{ nous) le bon coeur
est tout à lafois ce quisoutient
la dignité de l'Avocat,£ ce qui
fait le plus grandmetite du
Procureur.
Siles bons ouvra ges ne
faisoient pas eux mêmes l'éloge
de leurs Auteurs; & si les
applaudissemens d'un particulier
comme moy,dont sans
douce les suffi ages leur font
indifférents pouvoient a joûter
quelque chose à leur mente ,
je m'imagme bien les termes
qu'il faudroit employer pour
en parler dignement ; mais
j'aurois trop de peine à les
trouver.
Il n'en est pas tout à fait de
même de l'extrait d'une Harangue
que j'ay reccu deNancy
le 12. de ce mois,elle est
tournée d'une manière bien
differente; mais aussi bien plus
rare.
Au moment que les Troupes
Françoises eurent évacué
Nancy, les Bourgeois se disposerent
à faire une magnifique
entrée le jour que L. A. R.
y rentreroient ;mais la Cour
dessendit ces préparatifs
,
&
cette dépense, & elle y entra
comme si une absence de 12.
ans,n'eûtétéqu'une prome- -
nade ; cependant le Sieur
Louis de Mongeron Gouverneur
desSalines de Rosieres,
ne voulant pas perdre tout le
fruit du compliment qu'il
avoit preparé, l'a fait imprimer
en [cpt pages d'un grand
inquarto, Envoicy une partie
sur laquelle on peut juger de
la vivacitéd'esprit, de l'éloquence
,
du sel, & du zele de
ce Gouverneur.
A SON ALTESSE ROYALE.
Monseigneuryle Ciel estcontent
des maux que nous avons
souffertail est temps d'effater de
nostre idée l'image de
ce triste
spectacle qui parut à nos yeux ilyatantost douzeans
, poury.
mettre à la placecelle de la glorieuseentrée
que V. A.R.t¡;II'
faire dans laCapitale desesEtats.
Il ne nous estoit pas permis de
nous léjouir dans le temps decette
funeste division qui regnoit pour
lors entre les deuxplus grands
Princes de l'Europe
,
ausquels
V. A. R. ift attachée par les
noeuds lesplus étroits de l'amour
ey du sang ? quelleaffiction,
Jlrfonftigneuf
, pour des sujets
qui vous aiment a l'adoration;
& qui ont tant de raisonsd'être.
dans ces sentimens. Par bonheur
le temps de ces divisions efi
passé, le Seigneurs'estsouvenu
de Je) misericordes
,
ila tourné le
coeur des Roys qui esloit en ses
mains, £<r il a eu la bonté de
fairesuccederàtant de maux dont
la guerre estoit cause
, une Paix
fi/zdeJqui selon toutes les apparences
x 1JAfaire tous les biens dfa
monde
Après cela
,
Monseigneur ilestbonde voir dequels , maux
nous nous plaignons
,
de quels
biens nous nousflattons. y,A. R.
n'a eu de part a ces troubles
, qu'autant que son bon coeur en 4
bien voulu prendre pour déplorer
lafataleconjoncture qui armoit
l'une contre l'autre ces deux mêmesPuissancesquiluy
appartiennent
d< si prés. Du reste tout a
toujoursétépaisibledanssesEtats,
les greniers riy ont jamais manqué,
& les peuples n'ont jamais
été dansl'extrêmebesoin.Laseule
chose qui rendait nôtre frlicite
moins parfaite,estoit de voit
que la necessité de ces divisions
ôtoitàV.A. R. la liberté de
disposer absolument d'une petite
partie de son domaine
;, encore
étoit-il à son choix de donner ces
bornes à sa puissance qui n'en a
point; heureusement cet obstacle
vient d'estre levé,£c'est ce qui
cause aujourd'huynostre joye
y .& cequifait lejustesujetde nus
admirations.
Dans un autre endroit l'Orateur voulant loüer foa,,
Souverain, sur ce qu'il a preferé
la neutralité aux engagements
de la guerre,s'énon
ce delàforte.
Mais je fuis suri&j? ne
crains point de mentir, sij'ose
dire que le tendre amour que
V.A. R.. a toujours conservé
poursaPatrie,&poursessujets,
a été uniquement, ce qui la determiné
à m'embrasseraucunparty
, & a demeurer dans tinACtion,
au milieu de tant de mouvements.
Pendant que nous sommes
dans lesPays Etrangers, il n'en
coutera pas davantage d'y rester
quelques quarts d'heure
de plus, pouryvoirenpassant
les debris & les ruines du Poid
de Daiikcrque.dont. les Ga
zâtes*.
zettes )
le Mercure &Verdun
ont pris le foin de publier la
demolition
,
qui a tellement
affligé un homme d'esprit de
cette Ville ,qu'il m'en a envoyé
des marques de sa douleur
en Vers Latins, que les
Dames liront asseurement
avec beaucoup de plaisir.Pour
moy je les trouve fort beaux.
CI;,fiibus armatis celebris
Dunkerka per orbem
Urbs invicta Mari, nonruituracadit.
Tristem jure doles portus
Dunkerkaruinam,
Sed Gemis incaffum
,
numina
• Jaeva tinunr.:
Portum Neprunus p1osuit borealibus
qs,
ycPunkçrk.i maris sola ma- ': i' neret hera.
Abnuit Imperium Domina^
(çpccntriq rotus,
Jacturam portus Jupiter ipse
jubet.
fit Carrbagopotens armis,
hinc asmula Romæ
Bello rivalem perdere Ro, ma
cupit
Dunkerkæ nequeunt hostes
spectare Trophæ
Funditus , ut pereat cuncta
movere volunt,
Vincerc conantur pugnis navahbus
Angli,
At fruftra quasrunt sternere
pacisope,
Omnibus illustrem populis te
gloria fecit,
Perniciemque tuam Gloria
summa parie.
Quid cibinobilius, quam tali
occurnbere-fato.
Si DunKetKa-labbe,Gallia pacc
Beat.
Parlons maintenant, s'il
vous plaist
,
d'autre chose;
mais il faut que je fois au bouc
de mes trasitions
,
puisque
je n'en trouve point pour la
Piece qu'on va lire, c'est peurestre
aussi parce qu'elle n'anul
rapport avec celle qui la precede
Le 18. de ce mois M, de
l'Escorailles surreçû dans rEglise
de l'Abbaye de S. Germain
des Prez,Chevaller de S.
Lazare par M le Marquis de
Dangeau Grand Maistre de
cet Ordre
,
dont voicy les
Obligations & les Statues.
PRINCIPALES
ObligationsdesChevaliers,
desEcclesiastiques &des Freres
Servans de l'Ordre Royal,
Hofpira/irr,(CfMzlitaire de
Nostre-Damede MontCarmel,
&r de S. Lazare
,
suis.
vant les Bulles des Papes, e
les Statuts de lOrdre.
On est obligé d'aller à la
Guerre contre les ennemis de
la Foy
,
& de la Religion Catholique
,
lorsqu'il en commandé
par le Roy ou le Grand
Maistre.
On doit garderrHospitalité
envers les pauvres lépreux.
Ou doit dire tous les jours
le petit Office de Nostre-Dame
à l'usagc de l'Ordre,ou
la Couronne de la Vierge.
On doit faire abstinence de
viande tous les Mecredis de
chaque Semaine
, & entendre
la Messe tous les Samedis.
On doit se consesser
, &
'COMMunicr les Festes de la
Vierge, & particulièrement
le jour de NostreDame de
Mont Carmel.
On ne peut Cemarier que
deux fois, & l'on peut épouser
"und des deux sois une veuve.
On est obligé de porter une
Croix d'or aux Emaux de
l'Ordre, attachéeàunCordon
amarante,& les Frères Servans
une Médaille aux mêmes
Emaux, attachée à une chaîne)
& sans rubans.
Un des principaux Privileges
de l'Ordre cil que les
les Chevaliers & Freres,quoique
mariez & non tonsurez,
peuvent avoir, & tenir des
Pensions sur toute sorte de
Benefices à l'exception des
Cures, iufTIa mille Ducars
d'or de la Chambre ApdnÓ
lique, évaluez environ à fijc
mil livres monnoye de France.
Ces Devoirs &Obligations
n'engagent point les Chevaliers,
les Ecclesiastiques
J.
&
Jes Frères Servans sur peine
de péché mortel
,
le Grand-
Maistre les en peut dispenser.
M. d'Escorailles est d'une
Maison des plus anciennes &
des mieux a lliées de la Province
d'Auvergne,dont estoit
feuë Madame la Duchesse de
Foncange.
Jaurois eslé bien fâché. de
n'avoir point de Mariages ce
Mois- cy ,
mais on vient heureusement
de men apporter
deux trop considerables pour
n'en pas faire honneur à mon
Journal,
MARIAGES.
Messire Loüis - Vincent
de Goesbriand, Marquis de
Goësbriand ,a épousé le
». Damoifellc Marie Rosalie de
Chastillon, soeur. puînée de
Mademoiselle de Chastillon;
dont je vous appris il y a quelques
mois le mariage avec M.
le Comte de Bacqueville du.
nom de Boyvin & fille de
McffircAlcXJ Henry, Marquis
de Chastillon,Chevalier
des Ordres du Roy,cy- devant
Premier Gentilhomme
de la Chambre de S A. R. M.
Duc d'Orleans, & de Dame
Marie Rosalie de Broüilly de
Piennes
,
soeur de Madame
la Duchesse d'Aumont.
L'HistoireGenealogique de
la Maison de Chastillon ayant
estédonnée au Public par le
célébré André du Chesne, en
un Volume in folio, & se
, trouvant encore rapportée
dans la nouvelle Histoire des
grands Officiers de la Couronnc
par le sieur du Fourny
on fc contentera de dire icy
que cette Maison & celle de
Montmorency ne le cedent à
aucune Maison du Royaume
pour l'ancienncté,Ja grandeur
desalliances, & qu'elles les surpassent
toutes sans contredit
par le lustre & grandes Charges
de la Couronne qu'elles
ont possedées de tout temps,
Mzssic Alexis Magdelaine
RosaliedeCh.stillon, Comte
de Chastillon, Colonel d'un
Regiment de Dragons, de
son nom,Brigadier General
des Armées du Roy, Grand
Bailly de Haguenau, & CommissaireGeneral
de laCavalcric
Legerede France, Gendre de
Monsieur le ChancelierVoisin
, & coufin germain de
Mesdames de Bacqueville &
de Gosbriand, est le seul
mallereliant de cette Illustre
Maison.
M. le Marquis de Goësbriand
qui vient de se marier;
est fils de Messire Louis Vincent,
Marquis de Goësbiand
en Bretagne, Chevalier des
Or dres du Roy, & Lieutenant
General de ses Armées; & de
Dume Maric-MagdelaineD.f
marctz, fille de M. Desmatetz,
Controlleur General des Finances
de France,& Ministre
dErat, petit fils d Yves de
Goësbriand
,
Seigneur dudit
lieu, Chevalier de l'Ordre du
Roy, Gouverneur du Château
Torô en Bretagne, encore
vivant, & de Dame FrançoiseGabriele
de Kerguesay
Dame de Erodon, de Kergoumar
,
de Kermorvan
,
de
Belle-Isle
,
& Vicomtesse de
Troboder, & arriere petit-fils
dePierre de Goësbriand, Sei- , gneur dt Kergrech, &de Marie
Simon Dame de Penenqucr,
lequel Pierre estoit fils
puîné de François de Goësbriand
, Seigneur de Goësbriand
,Chevalier de l'Ordre,
du Roy, Gentilhomme ordinaire
de sa Chambre
,
& de
Renée de la Maizeliere
,
&
petit filsd'Yves,Seigneur de
Goesbriand
,
Chevalier de
l'Ordre du Roy,institué Capitaine
& Gouverneur de la
Ville de Morlaix par Lettres
du u. Août 1558. sortid'une
Maison connuë en Bretagne
depuis plus de 400. ans,
& distinguée par les alliances
& par ses services.
-
François
-
Emmanuel de
Crufibt,Comte de Lestrange
& Baron de Privas, &c. a
épousé le 17 Decembre Damoiselle
Marguerite Colbert
& Villacerf sa cousine, fille
de Messire Pierre Gilbert Colbert
,
Marquis de Villacerf
,
Premier Maistre d'Hostel de
Madame la Dauphine
,
& de
Damoiselle Marie Magdelaine
de S. Nt£biire de Brinon.
La Famille deColbert est originaire
dela VilledeRheims ;
elle est distinguée par Ces grandesalliances,
par quatre grands
Ministres qu'elle a donné à la
France,& parun grand nombre
d'OfficiersGeneraux des
Armées du Roy dontplusiurs
ont esté tuez pour le
service de Sa Majesté.
M. le Comte de Lestrange
qui vient de se marier ,
est
coufin germain de Messire
JeanCharles de Crussol, Duc
d'Uzés, Premier Pair de France,
& fils de Messire Loüis de
Crussol
,
Marquis de Florensac,
Maréchaldes Camps &
Armées du Roy
,
& Menin
de feu Monseigneur le Dauphin&
de feuëMarie-Loüise
Therese de Saint Nectaile
re Lestrange. La Maison de
Crussol l'une des plus anciennes
& des plus illustres
du Royaume,tant par ses alliancesavec
les premieresMaifons
du Royaume, que par
les grandes Charges & les
grandes Terres qu'elle a possedées,
a pris son nom de la
Terre deCrussol située sur le
Rhône en Vivaris
,
qu'elle
possededetemsimmemorial :
le Vicomté d'Uzés fut érigé
enDuché l'an1565.&enPairie
en 1572. en faveur d'An
coine Comte de Crussol,Seir
gneur deLevis&deFlorensac,
Chevalier de l'Ordre du Roy , Conseiller au Conseil Privé,
Capitaine de 50. Hommes
dArmes des Ordres du Roy,.
Chevalier d'Honneur de la
Reine Catherine de Medicis
par la mort duquel sans ensans
ilpassa à Jacques deCrusfol
son frere puîné renommé
alors sous le nom du Seigneur
d'Assier, & il est le trisayeul
de M. leDuc d'Uzés d'à present
,
& de M. le Cointe*de
Florenfac, qui a donné lieuà
cet Article. Voyez pourlaGenealogie
de cette Maison
# l'Histoire des grands Officiers
de la Couronne par M. du
Fourny.
Le nombre des Festes qui
sont à la fin de ce mois m'a
tellemetc preci pité l impression
de ceJournal,quejen'ay
p:& été le maistred'y faire
entrer d'une maniere convenable
réiIJ quiregardeson
Eminence Monseigneur le
Cardinald'Estrées,qui moiinn
le18. ny celuy de Madamel'aOomtefft
de Brionne
morte le>.. que je reprendray
le mois prochaih.
LeMercuredérogeroitau
:ritte de Galant qat; luy est
affecté depuistant d'années,
si celuy qui en estl'Auteur
en commençoit une, sans
faire au moins un Compliment
à ses Lecteurs.
Voicy donc le mien Messieurs,
Mesdames&Mesde- moiTelles.v
Qje le Ciel multiplie àjamaisles
Ans & la Gloire de
nostre incomparable Roy.
Qu'ilconserve toûjours les
Princes & Princesses de sa
Royale Maison,qu'il vous
donne des jours longs& heureux
&àj»oy le loisir de
Vous prçieniet<SUCQIQ cinq
ou six cens Mercures,ce que
je feray volontiers, sivous jugez
à propos d'orner les Anti-
Chambres de vosBibliotheques,
de la suite de mes Ouvrages,
si le malinvouloir de
la fortune prompte à me
joüer souvent de méchants
tours,nem'escamote pas vos
suffrages, ou si quelque Géant
ne s'oppose pas à l'intention
que j'ay de vous amuser longtemps.
1 Supposé cependant que je
ne continuë pas àle faire, ce
qui est àlaveillede m'arriver,
je croy que mon devoir &
ma conscience m'ordonnent
d'encourager sur cette matière
ceux qui pourroient s'en
charger aprés moy. Elle est
premièrement inépuisablepar
la quantité prodigieu se de
mauvaises Pieces que l'Auteur
du Mercure Galantreçoit
tous les jours, & dont il peut
choisir & tirer duffidamment
de circonstances, pour em- plir son
-
Volume tous les
mois. En donnant cet avis
à TICS successeurs, je leur conspeailslfeajiuts,
t&emj'eanrtycseoquuvecjnetani'mayé
mieux confirmes risques de
parler à mes dépens, que
corriger & dépouiller avec
une peine infinie, des Fragmens
des ouvrages des autres.
Secondement,qu'il se garde
bien de critiquer les pieces.
de Theatre, ny les Livres
courants, ourre qu'on luy
dira que ce n'est pas l'affaire
du Mercure, on luy ferî
encore entendre que tous les
Auteurs exigent à present
l'impunité de leurs sotises,
& qu'enfin le refus de ses applaudissemenspeut
l'exposer
quelque fois à se faire des
ennemis considerables. Pour
-
moy de l humeur donc je
fuis, je sens, que si; l'on me
pressoit de louer tels & tels,
je répond rois tout net à cette
tyrannie:.Q!!,'on me remeneaux
carrierrs.
Troisiémement, qu'il ne
soit ny remeraire Nouveliste,
ny Jurisconsulte impertinent.
0 Quatrièmement, qu'il obfcrve
mieux que moy, qui ne
fuis encore qu'un Novice, les
bien- séances & les égards qu'il
doit au Public, & qu'il songe
que ce Public voit à sa teste
tant-de grands, personnages,
qu'ilne doit pas les révoltée
par
par ces discours qui fervent
à amuser le peuple.
v
Cinquièmement qu'il ne
parle pas de luy
)
à beaucoup
près, autant que j'ay parlé
de moy..
A ces conditions qu'il invente,
qu'il mente, qu'il
louë à outrance, on luy pardonnera
tout. Mais qu'il n'oublie
pas de changer lc- Titre
de son Livre, qui sous le nom
de Mercure ne luy produira
jamais rien: En voicy la
preuve.
Un particulier fut jadis chez
un Sculpteur pour acheter des
Statues qu'il destinoit à orner
son Jardin, En y entrant,il
vie celles de Jupiter& de
Junon qui luy ~pûrenc. Auditoit
il demanda au Scul pteur
combien illes vouait vendre.
Comment, dit le Sculpteur,
vous marchandez là les deux
plus belles Statues quisoient
dans mes Attrliers, je ne peus
pas vous les donner à moins
de tant;la somme prodigieuse.
étonna tellement le Marchand
qu'il luy ditqu'il n'envouloit
point; mais de celle de Mercure,
ajoûra-t il combien en
voulez vous: nous n'aurons
pas de dificrent sur cet article,
reprit leSculpteur. Vous mat.
chandezJupiter & Junon,
Tundt le Maistre, & l'autre
jçft la Femme. & la Soeur du
Maistre des Dieux; achetez
les pour le juste prix que je
vousen demande, &je vous
donneray Mercure par dessus
le marché.
Mercure eûtestéestimé
autant que Jupiter, s'il eût
porte un aussibeaunom.
J'ay dit, en attendant que
je sçache de vous, au commencement
de cette année,
s'il vous plaist, que je continue
ce Journal; je suis, avec un
très-profond respect Messieurs,
Mesdames&Mesdemoselles,
Vostre tres- humble
& trèsobeïssant Serviteur
Mercure.
AVIS.
Le Sieur Varin, dont j'aydé
japarlé,acertainementdes Secrets
admirables contre la Goute, ParA>-
lisie
y
Sciatiques Rhumatismes
goûteux,Migraine f*r Attires
Aîaux.* Ila auJF un Remede
specifique pour guérirlesAnimaux
des Maladiescontagieuses.
Il demeure rue Tictonne,cbe.-( le
SieurLambertA Perruquier,
1 *
AUTRE.
Mademoiselle de Rezé ayant
la PermissiondeMrleLieutenant
Generalde Police, (y l'approbation
des Doéleurs en M.decinr de
la Facultéde Paris, donne un Remedecomposédesimples,
quigU(.e
rit &preferye de la Goute d'une
maniéréfortaidée &sans aucun
danger. Ledit Rentede purge par.
les crachats & les urines tous les
sucs aigres,salez & acerbes qui
sontcontre nature & qui coulans
sur les articulations les blessent:
Ilfortifie leurs fibres& les rétablis
dans leur état naturel: Il efi
encorepropre aux écroüelles, Rhu.
matismes dr maladies provenant
d'obstruction. Elleguérit aussiàvec
un Baume specifique tous les maux
de Dents pour toujours,quelques
gâtées qu'ellessoient,lesconserve,
&affermitcelles qui branlent gueril
les ulceres qui viennent dans le
nez,y legencives &ailleurs ydijjipe.
hUTneur feorbutique,(jrc.Elle a
des Boutons compofîz, pourlesfluxions,
maux de tefièrmigrainè^ (J.
-
qui preservent du mauvais aJlr ;
Unepoudre qui blanchit les dents;
Elleguéritayee une Eau,lesDartres
vives &farineuses,Boutons,Rougeurs,
Taches& Rousseurs sans re",
tour. Lesdits Remedes si gardent
tant que l'on veut, & peuventse
tranfpûTterpar tout. Elle demeureà
Paris,rue de la Comedie,chez un
Epigrammede Goclart. 8
Htstoire tragique
,
tendreyVrayr,
&pewvtt&y-semblable.if
DiscoursJurl'origine dumois. 108
Description duFeu d'artificefait
four laréjoiiijfance de la Paix
generale par les Magistrats
delaViUekLisle. Ho
Nouvelles de Catalogne.liy
NwvellcsdeStrMfund.. 12.4
Nouvelles de Madrid.131
Nouvelles deLondres.135 Manifeste.136
Nouvelles de Paris.169
Extrait historiqued'une Diffirtation
de M. de Menagesur
les Sonnets pour la belle marineuse.
16$
Sonnet de Petrar". 175
Sonnetd'Annibal Caro. 178
Sonnet de Raïnerio. 181
Sonnet d'Olivier de Mag,r;".
184
Sonnetdr M. de Mez:.i,iac. 186
Sonnet de M. de Voiture. r82
Trois Sonnets de M. de Malle*
ville* ipi
Sonnet de M..TrifttUl. is>f
Sonnet d'un Inconnu.201
Madrigal de M. de Rampalle.
- 104 lttrt Sonnet de M. de Voiture.
zo6
Sonnet de M.Tristan.209
Sonnetde M. l'AbbéTestu.211
Sonnet moderne de M. D. C.
t,14
Autre du même Auteur. 2.1 &
Rondeau de M.de Palapra à Son
Altesse Serenissime Madame
laDuchesse deVandôme. 222.
Examende l'Opéra de TtLemaque.
z1j
Morts. 5$
Epithalame accompagnéd'un joli
prélude, & d'une transition
forttouchante. V4?
Histoire originalequ'onlira peut-
,
estre.
-
2.J.
Histoire singuliere qu'on ne lira
peut estrepas.265
Ode Anacreontique,Chanson.
1
169
Chapitre admirable des Enigmes.
272.
Phenomêne, tremblement de ietre,
& chûte de la Montagne
de Cheville dans le platpays
y
de Luzerne.281
Extrait d'un Discourséloquent
que M. Herault, Avocat dis
RoyduChastelet
, aprononcé
dans la Grande Chambre de
cette Cour le 22.Octobre dernier.
28?
Autre extrait d'une Harangue
admirableprononcéeàS AR.
Monseigneur le Duc de Lorraine
le. de ce mois.306
Fers Latins sur la Démolition du
Port de Dunkerque
,
dont
l'Auteur donnera peut-estre la
traduction en Vers François.
31z.
Principales Obligations des Chevaliers
,
des Ecclesiastiques,
& des Freres Servants de
l'OrdreRoyal, Hospitalier
te7 Militaire de Nôtre-Dame
de Mont Carmel
, ~& de S.
la"{re
,
suivant les Bulles
des Papes, C7 les Statuts de
l'Ordre. 317
Mariages.
- 311
Lettre de l'Auteur au Public.
331
Avis. 34a
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le