Fichier
Nom du fichier
1712, 05
Taille
6.67 Mo
Format
Nombre de pages
317
Source
Lien vers la source
Année de téléchargement
Texte
Жидил
BIBLIOTHÈQUE :
" Las
engines "
SJ
60 -
CHANTILLY
1
MERCURE
GALANT.
ΜΑΥ , 1712,
NIN
A PARIS ,
M. DCCXII.
Avec Privilege du Roy.
MERCURE
GALANT.
Par le Sieur Du F ***
Mois
de
May
1712.
Le prix eft 30. fols relié en veau , &
25. fols , brochez
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLET, an Livre
Royal, au bout du Pont S. Michel
du côté du Palais .
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis ,
fur le Quay des Auguftins.
GILLES LAMESLE, à l'entrée de la ruë
du Foin, du côté de la ruë
Saint Jacques.
AvecApprobation,& Privilege du Foi.
MERCURE
GALAN T.
mmmmm
LA CONSTANCE
des femmes.
NE fille de condition
, nommée
Therefe , nous fervira
de
modele , non pas
A ij
4 MERCURE
pour ces conftances
heroïques
& prodigieufes
,
qu'on ne connoît gueres
que par tradition
mais
de celles qu'on peut vraifemblablement
attendre
d'une femme , & par
confequent d'un hom
me ; car les deux fexes
'n'ont rien à fe reprocher
là -deffus.
Therefe étoit charmante
de fa perfonne ,
trés-jeune , & fi peu experimentée
, qu'elle ne
GALANT.
རྒྱུན །
જે
connoiffoit encore l'amour
que par les Romans.
Elle fe fentoit une
fi grande difpofition à
la conftance , qu'elle difoit
quelquefois : Non ,
je ne veux jamais aimer,
la vie eft trop courte , une
conftance de foixante ans
ne feroit pas contentement
pour moy. En d'autres
momens elle faifoit reflexion
que puis qu'il
faloit aimer neceffairement
, il étoit bon de
A iij
6
MERCURE
commencer trés- jeune ,
afin de pouffer la conf
tance le plus loin qu'il
étoit poffible. Elle prit
ce dernier parti , & dés
le lendemain elle fut
épriſe du fils d'un Armateur
de faint Malo
Ce jeune homme devint
paffionnément amou
reux d'elle , & au boutde
quelque temps on.
parla de mariage. Le
parti parut bon à la mere
de Therefe : mais le jeurGALANT.
7
ne homme étant obligé
de fuivre fon pere , qui
faifoit une nouvelle
courſe en mer , ne put
obtenir fon confentemént
que pour le re-
Four. Cependant on convint
des articles , on ſe
donna des paroles d'hon
neur , & les amans s'en
donnerent de bien plus.
inviolables , ils fe jurerent
un amour éternel
L'Armateur promit de
revenir dans trois mois;
1
A iiij
& MERCURE
& le voila embarqué.
Quelle épreuve pour
Therefe ! De vaſtes mers
la feparent de fon amant :
mais cette feparation ne
fait que redoubler fon
amour , & les trois mois
d'abſence lui parurent fi
longs , qu'on peut bien
les lui compter pour
trois années de conftance.
Cependant elle la
pouffa plus loin ; car fon
amant ne revenant point
encore au bout de fix
GALANT.
autres mois , elle étoit fi
affligée , que fa mere n'ofa
lui parler d'un autre
parti qui fe prefentoit .
Elle eut beau lui infi
f
nuer que peut- être l'Armateur
ne reviendroit
jamais ; elle lui fit même
foupçonner que ce
vaiffeau avoit peri : mais
Therefe proteftoit une
fidelité égale pour fon
amant mort ou vif.
Un an entier s'étant
écoulé , & la mere & la
10 MERCURE
fille crurent réellement
que
l'Armateur ne reviendroit
jamais. On le
pleura comme mort pen
dant
quelques jours ; &
la mere , fans parler de
rien à fa fille , fit trou
yer , comme par hazard,
le fecond amant chez
une parente , où elle mena
fa fille C'étoit un
jeune Officier , fait pour
donner de l'amour , &
qui avoit tout l'efprit
poffible. Il étoit conve
GALANT . H
nu avec la mere qu'il faloit
prendre Thereſe par
fon foible . Il la loùa d'abord
fur le voeu qu'elle.
avoit fait de ne fe jamais.
marier après avoir perdu
ce qu'elle aimoit. Cette
converfation ne pouvoit
manquer de lui plaire ,
étant fi conforme aux
reſolutions qu'elle avoit
prifes. Elle retourna plu
fieurs fois chez fa parente
, où les exhortations
que cet Officier lui fit
IZ MERCURE
fur la conftance produi
firent
infenfiblement un
effet contraire , & elle
commença à raifonner
ainfi : Pour aimer bien
conftamment il faut être
aimé de même , & cet
homme - ci aẞureroit mi
conftance par la fienne ,f
jamais je pouvois l'aimer.
Un autre raifonncment
que lui fit cët ingenieux
amant acheva
de la determiner ; car il
GALANT .
13
Jui prouva qu'elle ne
pouvoit ſe vanter d'être
conftante fans avoir été
mariée , parce que le mariage
étoit la pierre de
touche de la conftance,
Therefe , qui tendoit
toûjours à la perfection
de cette vertu , & qui
ne pouvoit la poffeder
éminemment fans fe
marier, prefera pour cette
raifon feule l'amant
vivant à l'amant mort :
& peu de temps aprés
14 MERCURE
ce ſecond mariage fut
auffi avancé que l'avoit
été le premier : mais par
malheur il vint à l'Officier
un ordre de la Cour
pour aller en Flandres.
Il falut partir dans le
moment , paroles données
comme avec l'Armateur
, pareils fermens
entre Therefe & l'Officier
. Mais les chagrins
de l'abfence furent plus
violens ; car elle aimoit
celui - ci plus que l'auGALANT.
I
tre , ou , pour mieux di
te , l'amour qu'elle avoit
pour l'Officier lui perfuadoit
qu'elle n'avoit
jamais aimé l'Armateurs
car elle le croyoit incapable
de changer . Elle
changea pourtant , je ne
vous dirai point par
quels motifs mais , à
coup fûr , ce fut pour
parvenir encore a une
conftance plus parfaite ;
car fans cela elle n'en
auroit jamais aimé un
16. MERCURE
troifiéme. Celui-ci étoit
un Avocat , & la mere
conclut avec lui plus
promtement encore qu'-
avec les autres , craignant
qu'il ne lui échapât
; car il étoit trés -riche.
Le jour fut pris , les
articles furent dreffez :
mais il y avoit une fatalité
fur les mariages
de Therefe , il étoit écrit
qu'ils ne feroient jamais
qu'ébauchez , & celui-ci
fut interrompu comme
Vous
To
GALANT
. 17
Vous allez voir.
" L'Armateur étoit revenu
depuis quelque
temps : mais ayant appris
dans le voisinage
que fa maîtreffe aimoit
a
paffionnément l'Avocat ,
& n'ayant pas d'ailleurs
fort bien fait fes affaires
fur mer , il jugea à pro
pos de ne point paroître ,
& fe logea pourtant affez
proche de la maiſon
où le faifoient les conferences
pour le maria-
May 1712.
B
18 MERCURE
ge , qui fut enfin reſolu .
Le jour fut pris , on invita
les parens de part &
d'autre : l'affemblée étoit
grave , & Thereſe en
habit paré y charmoit
l'époux futur , dont elle
étoit auffi charmée ; ils fe
repaiffoient de regards ,
& de defirs , lors qu'on
vit entrer dans la falle
l'Officier , qui ne fe doutant
encore de rien , venoit
d'arriver en pofte
de l'armée. Il entre avec
GALANT. 19
la vivacité & les tranf
ports d'un jeune amant ;
& ne voyant que celle
qu'il aime, il court à elle.
Il la regardoit déja comme
fon épouſe , & va
l'embraffer. Il eft receu
avec la froideur que vous
pouvez vous imaginer ,
Therefe eft deconcertée:
l'époux futur ne l'eft
pas moins ,de voir qu'un
homme d'épée a de fi
grands privileges fur fa
femme cette familia
Bij
20 MERCURE
rité l'alarme. L'Officier
tranſporté ne prend garde
au defordre ni de l'un
ni de l'autre , & les yeux
fixes fut ce qu'il aime ,
il refte un moment immobile.
Une pacenta
priée entre dans cet inftant,
& va d'abord feliciter
les époux. A fon
difcours l'Officier revient
à lui elle conti
nuë , le voila prefque au
fait. Enfin la gravité de
l'affemblée & les come
GALANT 20
3%
plimens de la parente ne
finiffant point , lui expliquerent
fi nettement
de quoy il s'agiffoit , qu
il refta immobile enco
re : mais ce n'étoit plus
de plaifir. L'Armateur ,,
premier époux en datte ,
ayant appris à la porte
ce qui fe paffoit dans la
falle , y entra juftement
dans le temps que tous
ceux qui compofoient
cette affemblée muette
fe regardoient les uns
22
MERCURE
los autres .
L'Armateur
étoit un homme froid &
malin , une espece de la
rancune.
Thereſe ne ſçayoit
point fon retour ;
dés
qu'elle
l'apperçut ,
ce fut un
dernier coup de
maffue. Il
marcha froi
dement vers elle , & l'embraffant
auffi
comme é
poux , il lui tint des dif
cours à faire mourir l'Avocatde
jalousie, & l'Of
ficier de
defefpoir. Son
difcours fut
long ,
parce
GALANT: 23:
que perfonne
n'avoit
la
force de l'interrompre
.
L'Avocat & l'Officier
eurent le foifir de pren--
dre leur parti , & ce fut
celui du mépris pour
Thereſe. Voici par où
l'Armateur finit .
*!
Dans le voyage que
j'ai fait j'ai oui dire à un
Poëte Arabe , que la femme
eft femblable
à un ar
bre , & l'amour de la femme
aux feuilles de cet ar
bre. Elles naißent au prin--
24 MERCURE
temps ,fe foutiennent tout
l'été, tombent en automne.
L'arbre produit
bien des
feuilles le printemps
fuivant : mais ce
ne font plus les mêmes.
L'Arabe conclut de là que
la durée des feuilles eft la
durée naturelle de la constance
des femmes . Mon
fieur l'Officier & moy
nous avons eu chacun notreprintemps
notre été,
il est jufte que Monfieur
L-Avacas foit aimé de mê
me
GALANT . 25.
me jufqu'à la chûte des
fülles ; il n'a qu'à voir
s'il veut s'engager là- def
Sus.
Vous parlez fort bien,
dit enfuite l'Avocat :
mais l'Arabe a oublié de
dire
que
fi
dans le prin
temps même on met la coignée
dans le pied de l'arbre
, les feuilles fe fechent
avant l'automne . fecrain
drois que le mariage nefift
à peu près le même effet
de la coignée . Ainfi Ma
May 1712.
C
26 MERCURE
demoiselle Therese restera
, s'il lui plaît , fille toute
Ja vie : cette constance
étant la plus glorieuſe de
toutes , c'est celle qui convient
le mieux au defir
qu'elle a d'exceller dans
cette vertu.
Le Poëte Arabe ne
pouffe pas fi loin que nos
Poëtes les fictions fur les
amans conftans ; & je
croirois bien que la conſtance
merveilleufe dont
plufieurs Poëtes fe font
GALANT . 27
vantez dans leurs vers ,
n'a point paffé de leur
imagination jufques dás
leur coeur. Citons - en
quelque exemple , pour
prouver
que c'eft faire
injuſtice aux Dames de
les croire plus inconftantes
que les hommes.
Honoré Durfée , dans
fa preface du troifiéme
tome d'Aftrée , proteſte
à la riviere de Lignon
que le feu dont il brûla',
& qui donna naiffance
Cij
28 MERCURE
à ſon ouvrage , ne fut fi
conftant
que parce qu'il
fut pur , & qu'il ne laiſſa
jamais de noirceur aprés
la brûlure à pas une de
fes actions & de fes defirs
. Il ajoûte que la longueur
des années n'en
avoit point diminué l'ardeur
, & qu'il ne s'éteindroit
que fous la terre de
fon tombeau . Voila le
Poëte , voici l'homme.
Son neveu dit qu'il n'épouſa
Aftrée que par inGALAŃT
. 29
térêt , & pour ne pas
laiffer échaper ſes biens ;
qu'il s'en dégoûta bien
vîte aprés l'avoir époufée
, parce qu'elle
étoit mal
propre à
caufe de fes grands
chiens & c. qu'elle
exigeoit de lui des
tendreffes & des delicateſſes
d'amans ; qu'-
elle le tourmentoit continuellement
fur fes amourettes
étrangeres ;
qu'elle étoit idolâ-
C iii
30 MERCURE
tre de fa beauté , &
par confequent ridicule.
Tout cela l'obligea à la
quitter , & à fe retirer
à la Cour de Savoye,
Nous fommes inftruits
là- deffus par une tradi
tion certaine que Mon,
fieur Huet nous a con
fervée , & qu'il a tiréo
des neveux & amis
d'Honoré Durfé. Si la
tradition s'étoit confer
vée de la même maniere
à l'égard de la belle Lau,
J
GALANT .
31
re , nous verrions apparemment
quelque chofe
d'approchant
dans l'hif
toire de fes amours avec
Petrarque. Celui - ci ,
dans l'Epître où il fait le
recit de fa vie naturellement
& fimplement ,
dit que dégouté du ſejour
ennuyeux de la ville
d'Avignon , il s'étoit retiré
à Forge , attiré par
la beauté du lieu & de
fa fontaine ; que là il
avoit compofé tous les
Ciiii
32 MERCURE
Ouvrages , qua tam multa
fuerant , dit- il , ut ufque
ad hanc atatem
me exerceant
& defatigent . Ilne
parle point de Laure en
profe ; & quand il recite
au vrai l'hiftoire de
fa vie , de fon efprit &
de fon coeur , il paroît
que Laure étoit l'idole
de fon imagination
, &
le fantôme
qui la remuoit
& l'échauffoit
.
C'étoit
un fujet plûtôt
imaginé que fenti , ſur
1
GALANT . 33
lequel fa verve s'exerçoit.
L'auteur de ſa vie
nous en fournit une bonne
preuve , lors qu'il
nous affure que le Pape
Benoît XII. lui offrit
une difpenfe pour époufer
Laure , pour tenir
des Benefices étant marié
, & même pour en
poffeder de nouveaux :
offres que Plutarque
n'auroit pas refufé
comme
il le fit , s'il avoit eu
une paffion , je ne dis pas
34 MERCURE
auffi
extraordinaire que
celle qu'il chante , mais
feulement ordinaire &
veritable . Comment les
Poëtes que nous voyons
ne nous defabufent
- ils
point des anciens que
nous lifons ? La duperie
eft naturelle à l'homme.
La fiction la plus groffiere
& la plus découverte
gagne toûjours le
deffus à la longue , pourveu
qu'elle fçache ébloüir
l'imagination ; &
GALANT . 35
ceux qui ont écrit publiquement,
foit en vers ,
foit en profe , ne viendroient
pas à bout euxmêmes
de détromper le
monde de leurs fictions ,
s'ils revenoient fur terre
pour nous avertir bien
confcientieuſement qu'
ils n'avoient pas deſſein
de tromper le monde ,
mais feulement de l'amufer
& le divertir en
fe divertiffant eux- mêmes.
36 MERCURE
On a negligé au mois
de
Fevrier de
m'envoyer
un memoire qu'on m'avoit
promis , pour une
affemblée qui fe tient
tous les ans , & dont je
ne crois pas qu'on ait
encore fait le détail dans
aucun
Mercure , quoy
qu'elle foit auffi importante
par fon inftitution ,
que par les perfonnes illuftres
qui la
compofent
.
Le 25. Février , jour de
GALANT. 37
S. Mathias , la Faculté de
Droit fit une aſſemblée generale
à l'ordinaire , où ſe
trouverent M. le Cardinal
de Noailles , Doyen d'honneur
de la Faculté , & plufieurs
Confeillers d'Etat
tous Docteurs honoraires
de la même Faculté , pour
proceder à l'élection d'un
Doyen d'honneur
place de M. le Cardinal de
Noailles , dont le temps étoit
fini ; & de deux Docteurs
honoraires en la place
de Meffieurs le Pelletier,
Miniftre d'Etat , & le Caen
la
38
MERCURE
mus , Lieutenant Civil : &
on élut pour Doyen d'honneur
M. de Marillac, Doyen
du Confeil ; & pour Doc .
teurs honoraires Meffieurs
Dargouges Lieutenant Civil
, & l'Abbé Menguy
,
Confeiller- Clerc au Parlement
, & Chanoine de Nôtre-
Dame.
Il faut
obferver que cette
illuftre
Compagnie
eft
com ofée de fix Anteceffeurs
, ou Profeffeurs , qui
font le Corps de la Faculté,
à laquelle les Arrêts & Declarations
du Roy ont ajoû
GALANT.
39
té deux fortes de Docteurs
aggregez , dont douze font
Aggregez d'honneur , ou
Docteurs honoraires , qui
font ou Magiftrats , ou Ecclefiaftiques
conftituez en
dignité ; & douze Docteurs
aggregez de fonction ou
d'exercice. Les premiers
peuvent affiſter à toutes les
affemblées de la Faculté ,
+
même pour les élections
des Profeffeurs , Docteurs
honoraires & aggregez d'exercice
& pour les derniers
, ils n'y peuvent affiffter
qu'en nombre égal à
40 MERCURE
celui des Profeffeurs actuellement
regentans , la voix
conclufive refervée à celui
qui prefide .
Officiers un
Il y a
pour
Doyen
d'honneur
un
Doyen de charge ou de
fonction , un Syndic , un
Queſteur ou Receveur , &
un Cenfeur. Le Doyen
d'honneur
eft toûjours
un
Docteur
honoraire
confti
tué en dignité. Les autres
Charges
font exercées
par
les Profeffeurs
. Le Doyen
d'honneur
prefide
à toutes
les affemblées
où il fe trouve
,
GALANT. 41
ve , & en fon abfence le
Doyen de charge .
Tous les ans à la S. Mathias
la Faculté s'affemble
pour nommer les Officiers .
commence par le
On
Doyen d'honneur , qu'on
peut continuer deux ans
mais pas davantage : aprés
les deux ans on en élit un
autre du nombre des Docteurs
honoraires , comme
il a été obfervé ci- deffus .
Enfuite on paſſe à l'élection
des autres Officiers , qui
changent tous ce jour- là .
M. de Marillac , Doyen
May 1712.
D
42 MERCURE
du Confeil , Docteur hono
raire , fut élû Doyen d'hon
neur en la place de Monfieur
le Cardinal , qui l'avoit
été deux ans.
t.
MORTS.
Meffire Charles : Renouard
, Seigneur de Bevilliers
, &c. mourut fans
alliance le 27. Avril , âgé
de 95. ans.
* Dame Marie de Bailleul ,
qui avoit époufé le 28. Février
1644. Meffire François
GALANT.
43
de Brichanteau , Marquis
du Nangis , & avoit pris
une feconde alliance le S.
Octobre 1645. avec Meffire
Loüis Châlon du Blé , Marquis
d'Uxelles , Lieutenant
general des armées du Roy ,
& de fes Provinces de Bourgogne
, & Gouverneur de
Châlons fur Saone ( mort
en Août 1658. ) mourut le
29. Avril 1712. âgée de 87 !
ans , laiffant pour fils unique
, de fon fecond ma
riage , Meffire Nicolas du
Ble , Marquis d'Uxelles ,
Maréchal de France , Ple-
Dij
44
MERCURE
nipotentiaire pour la Paix ,
&c.
Elle étoit fille de Meffire
Nicolas de Bailleul ,
Baron de Châteaugontier ,
& c. Prefident à Mortier ,
Miniftre d'Etat , Surintendant
des Finances, & Chancelier
de la Reine Anne
d'Autriche ; & de Dame
Elifabeth Marie Mallier, fa
feconde femme.
La Maiſon de Bailleul
pretend tirer fon origine
d'Ecoffe , où a regné un
Prince de ce nom . N. de
Bailleul , grand Louvetier
GALANT.
45
de France fous Louis XIII .
étoit fils de Nicolas de Bailleul
, Baron de Châteaugontier
, Prefident à Mortier
du Parlement de Paris
, Miniftre d'Etat & Surintendant
des Finances , &
Chancelier de la Reine Me
re. Il a eu de Dame Elifabeth-
Marie de Maillier fa
feconde femme , fille d'un
Prefident aux Enquêtes ,
ladite défunte. La Maifon
de Brichanteau eft une des
plus anciennes & des plus
illuftres du Royaume , tant
par fes alliances , que par
46
MERCURE
dignitez & les grands Gou .
vernemens qui y ont été :
entr'autres un Brichanteau
fut nommé grand Amiral
de France fous Henry III .
La Maiſon du Blé eft une
des plus illuftres de la Bourgogne
.
Le
pere
du Mar
quis d'Uxelles , mary de
cette Dame , étoit Chevalier
des Ordres du Roy.
Meffire Charles de Com..
bault , Comte d'Auteuil ,
Chevalier de l'Ordre du
Roy , mourut le 30. Avril ,
âgé de 80. ans.
GALANT .
47
Dame Louiſe du Vau ;
épouse de Meffire Florent
d'Argouges , Maître des
Requêtes de l'Hôtel du
23. May ,
Roy , mourut le
âgé de 52. ans. M. d'Argouges
fon père
eft mort Confeiller
d'Eftat & au Confeil
Royal des Finances , aprés
avoir été premier Prefident
de Bretagne.
MARIAGE .
N. de Rochereau , Seigneur
de Hauteville , Confeiller
au Grand Confeil ,
48 MERCURE
fils de Meffire Denys de
Rochereau , Seigneur de
Hauteville , Confeiller au
Grand Confeil , & de Dame
Elizabeth Morel , a
épouſé le dix -ſept May N.
de la Michaudiere , fille du
feu Maître des Comptes ,
& de N. Grafſeteau .
J
Nou
GALANT.
Nouvelle de Flandres,
SHO
Le Prince Eugene artiva
de 25. à Tournay , où il a
mandé tous les Officiers
generaux pour tenir confeil
de guerre Les ennemis
font affemblez vers le Vvarde
, leur droite eft à Ferin ,
& leur gauche à Pequencourt
, & Douay derriere
eux. Les Anglois font campez
ſeparément à Pont à
Rache, en attendant le Duc
d'Ormond, Lestroupes des
alliez font à portée de ſe
May 1712 .
E
30
MERCURE
joindre , à la referve de celles
de l'Archiduc
qui ne
font pas encore arrivées.
Nôtre armée s'affemble
vers Oily pour camper en
front de bandiere : elle étoit
avant cela diſperſée de la
maniere fuivante .
-La cavalerie pour la com
modité des fourrages étoit
diftribuée depuis le Careler
jufqu'à Couturel , entre A
vefne-le- Comte & Dour
lans , ayant ordre de mar
cher au fignal de trois
coups de canon.boomOS
L'infanterié étoit cah-
A
I
GALANT.
tonnée dans les
villages
depuis Etrun fur l'Escaut ,
prés de
Bouchain , juſqu'à
Montenencourt : elle occupoit
tous les paffages de la
Senfée , de la Scarpe , & des
lignes qui font au - delà
d'Arras elle s'étend en
core juſqu'à Arras , afin de
s'opposer aux mouvemens
des
ennemis . Il y a eu plu
fieurs petits chocs , ou les
troupes du Roy ont toûjours
repouflé les ennemis .
Un parti de Huffars ayant
paſſé l'Eſcaut a été tout fait
priſonnier : un autre parti
Eij
$2
MERCURE
ennemi a été défait vers
Peronne.
Nouvelles d'Angleterre,
La Reine a nommé les
Officiers generaux qui ferviront
cette campagne en
Flandres ſous le Duc d'Or,
mond.
Le Sieur Henry Lumley
a été fait General de la ca ,
valerie. Lb quon
Le Comte d'Orkney General
de l'infanterie .
Le Sieur Charles Roffe
General des dragons.d ?
GALANT $3
Le Sieur Corneille Vood
& le Comte de Stairs Lieu!
tenans generaux de la cavalerie
.
Le Sieur Henry Vvithers
& Milord North & Grey
Lieutenans generaux
de
Kinfanterie .
Les Sieurs Kellum &
Charles Sibourg , Majors
generaux de la cavalerie .
Les Sieurs Gilbert Prim
rofe , Jofeph Sabine , Guillaume
Evans , & le Comte
d'Orrery , Majors generaux
de l'infanterie.
Les Sieurs Knapier, Pan-
E iij
34 MERCURE
ton , & Georges Preſton ,
Brigadiers de cavalerie.
Les Sieurs Richard Sutton
, Henry Durel , Ruffel ,
Henry Morifon , & Jean
Corbet , Brigadiers d'infanterie.
Les Generaux Palmes
Cadogan & Temple ne fer
viront pas cette campagne. ,
Le Duc d'Ormond par
aller s'embar
tit le 20.
pour
quer
à Greenwich
.
Le Chevalier Thomas
Hanmer s'eſt embarqué à,
Greenwich pour paffer en
Hollande.
GALANT SS
On dit qu'il eft chargé
d'une commiffion pour les
Erats Generaux .
Le Procureur General a
fair fçavoir au Duc de Marlborough
qu'il avoit ordre
de le pourfuivre à la Cour,
de l'Echiquier , pour l'obliger
à reftituer les deux &
demi pour cent qu'il a retenus
pendant dix ans fur la
paye des troupes étrangeres
, ce qu'on fait monter à
la fomme de quatre cent,
cinquante mille livres fterlins
, ou à prés de fept mil,
lions monnoye de France.
E iiij
56 MERCURE
Nouvelles
d'Espagne.
Le Roy a donné au Sieurdu
Caffe FOrdre de la Toifon
d'Or en
recompenfe
des fervices qu'il a rendus
en amenant le trefor des
gallions.
L'armée
d'Eftramadure
s'affemble aux environs de
Badajoz : elle eft composée
de trente - cinq bataillons
complers , & de foixante &
dix -
neuf'efcadrons , fans
comprendre les Gardes du
Corps , qui doivent la join
you
GALANT.
37
dre dans peu. On devoit en
faire la revue le 29. d'Avril ,
& la faire camper pour
commencer la campagne.
Les troupes de Catalogne
jouiffent d'une grande tranquilité.
Les lettres de Denia affurent
que le vaiffeau de
guerre qui fut pris il y a
quelque temps , qu'on di
foit être Anglois , eft Hollandois
, qu'il avoit échoué
für un banc en pourfuivant
deux bâtimens François ,
la portée du mouſquer du
château de Denia , d'où on.
$8 MERCURE
fit un fi grand feu de canon
, que le Capitaine fut
contraint de fe rendre avec
trois cent hommes.
fon équipage , compofé de
Nouvelles du Levant
i
Les lettres du Levang
confirment que les Turcs
font des preparatifs extraordinaires
de guerre ; &
quoy qu'ils ayent fait de
gros magaſins à Theffalonique
, ils en font encore
d'autres fort confiderables
à plufieurs endroits pour les
GALANT.
Troupes qui doivent marcher
le long du Danube
& qui doivent êtrẻ allem.
blées au commencement
du mois prochain : mais
on ne peut encore penetrer
quels font leurs deffeins
, ce qui donne beaucoup
d'inquietude.
60 MERCURE
LA FAUSSE VALEUR
Par M. l'Abbé Mommenet.
Ole qui vient de remporter le prix .
de Poelie des Jeux Floraux.
Qui pacis ineunt confilia , eos fequi--
tar gaudium: Prov. 12 .
PRinces , qu'une gloire
frivole
Anime à chercher les combats
,
Qu'attendez -vous de cette :
Idole ,
Qu'un vain nom aprés le
trépas ?
GALANT.
Ignorez - vous quelles mi
feres
Mars & Bellone fanguinaires
Traînent aprés leurs chars
poudreux ?
Queje vous plains , fi la na
{ sture : V
N'excite en vous aucun
murmure ,
Quand vous faites des mal
heureux !
#?
Loin du bruit des combats
terribles
Vigilans , au fein du repos ,
Cultivez les vertus paifibles ,
62 MERCURE
Elles forment les vrais He
ros.
Pourquoy faut- il que vôtré
épée
Dans le fang humain ſoit
trempée ,
.
Pour porter le nom de
vainqueur ?
Serez- vous moins couverts
de gloire ,
Si vous remportez la vićtoire
Sur les defirs de vôtre coeur?
De quel droit ce Grec qu'on
admire .
Enyvré de fes paffions ,
GALANT.
Alla til defoler l'Empire
Des plus tranquilles nations
?
Aprés cent combats homil
cides ,
Au gré de ſes defirs avides
C'étoit peu qu'un monde
foûmisdo
Auroit - il manqué d'exercice
,
S'il avoit fçû
compter le
vice e
Au nombre de fes ennemis?
Malgré les trompeuſes ma-
.ximes
64
MERCURE
De cent lâches adulateurs ,
Sous de beaux noms les plus
grands crimes
Nous cachent des ufurpa
teurs.
Pleins de l'orgueil qui les
dévore ,
Du couchant jufques à l'aucomb
or prore HeronA
On craint ces Rois ambi-
-tieux .
Sortieux
.
Dans leurs mains gronde le
antonnerre ,
Ce n'eft qu'en ravageant la
terre
Qu'ils ofent s'en croire les
Dieux.
À
GALANT. 65
A deux Tyrans de leur patrie
,
Soulez du plus beau fang
Romain,
Qui ne fçait que la flaterie
A prodigué le nom d'hu
main ?
Infenfez nous jugeons encore
De ces fantômes qu'elle a
doré
Par un faux éclat qui forz
prend.
Nous admirons fans retenue
,
Le Tyran échape à la vûë¸ ,
May 1712.
F.
66 MERCURE
On ne voit que le Conque
ranta
Ainfi de cette ardeur bru
tale
Que n'infpire point le devoir
Nôtre eftime aveugle & fatale
Accredite encor le pouvoir.
A l'afpect des villes en pou
dre ,
Des murs écrafez par la
foudre ,
En vain nos yeux font of
frayez.
Victimes d'un honneur bis
zarre
GALANT 67
Nous encenfons la main
barbare
Par qui ces murs font fou
droyez .
Il en eft peu
dont la
pru
dence
De concert avec la bonté
Renferme l'aveugle puif
fance
Dans les bornes de l'équi
τέ;
Qui forcez de prendre les
armes
Pefent & le sag & les larmes
Qu'un triomphe leur va
coûter,
Fij
68 MERCURE.
Et qui retenant leur cou-,
rage ;
Songent
à diffiper Forage
Avant qu'on l'entende écla
ter.
Jadis guidé par la fageffe
Salomon , l'amour des mortels
, rela
Condamna Forgüeilleufe
yvreffe el ens
A qui nous dreffons dés autels.
Sans s'armer d'un fer redoutable
, T
Content de fon coeuréqui
cable,
GALANT. 69F
Ses bienfaits étoient fes ex
ploits.
Il fut grand fans être terri↓
ble ,
Et ne ceffa d'être invincible.
Qu'en ceffant d'obferver less
loix.
N'eſt-il plus de ces regnes
calmes
Où les loix fervent de rem
parts
?
Oùl'on n'aime à cueillir desi
palmes
Que dans la lice des beaux)
ihearts ; mid s
Qu le commerce & l'abon
dance ,
79 MERCURE
Sources de la magnificen
ce ,
Du citoyen comblent les
voeux ;..
Où la justice revérée
Semble encor du regne:
d'Aftréé
Renouveller le temps heu
reux.
Rends nous cette vie innocente
,
Douce paix , montre à ces
guerriers
Que ton olive bienfaifante
Vaut bien leurs funeftes
lauriers.
GALANT 70:
Fais de la main de ta rivale,
Tomber cette torche fa
tale "
Dont tant de coeurs font
embrafez.
Toy feule en defarmant fa
rage
Effaceras la trifte image f
De tous les maux qu'elle a
caufez.....
Errata pour le Memoire des
Abeilles du Mercureprecedent.
Page 269 ligne 19. metteZ,
foient RAK , BL , SEM,
72 MERCURE
མ་
-
Sec. Page 270. ligne 8. mette
, qui coupe AR en A ,
&6. Page 276. l. 14. étant
1 , celui de , & c. Page 27
13. égale à AFG , les . Page
280.1.14, autour de A ,.
E , O. Ligne dern . autour de
B , D , F , puis qu'il . P. 284
LI EA , FG , AG , qui
P.285.. 11 minutes , ou de.
P. 287. 1.9 angles en A, E, F,
& c. chacun de 120 degrez
en. Ligne 13. rayons AB ,
AK , & c. Page 289. 1. prem.
coupant donc les arétes
d'un tuyau quarré. P. 292 .
lig. 1. & 2. BCML , EFPQ,
ABLK 2
GALANT. 73
ABLK , DEPN , AFQK ,
DCMV , & qui. Lig. 14.
l'exagone RFT de 120 .
Page 293. ligne prem, de l'angle
TFD lequel. Ligne 3 .
4. l'angle BFT droit ,
& de même FBS. Ainfi.
Ligne 11.65 & R 6 Page
297. 1. 8. Dodecaedre , &c.
Page 298 , ligne 2. Dodecae
dre.
$ 9750
DONS DU ROY,
Le Roy a donné l'Abbaye
de faint Paul , Ordre
des Premonftrez , Dioceſe
de Verdun , à M. de Meaux.
May 1712.
G
74
MERCURE
Cet Ordre tire fon origine
de celui de faint Benoît ,
qui fut fondé par l'Evêque
Alberon l'an 1136. qui leur
donna pour premier Abbé
Roger auquel fucceda
Theodoric , fils du Comte
de Salmes , l'ana141
L'Abbaye de fainte Croix
de Bordeaux , Ordre de S.
Benoît , à M. l'Abbé de Beringham.
Cette Abbaye a
été fondée par Clovis . Elle
étoit autrefois hors des
murs de la ville: ob oved
SoL'Abbaye de faint Mange,
Ordre de faint Auguf
GALANT.
75
tin , Dioceſe de Châlons
à M. l'Abbé du Cambout.
L'Abbaye de Chambre-
Fontaine , Ordre des Premonftrez
Diocele de
Meaux , à M. l'Abbe de
Brancas.
91790
L'Abbaye d'Herivaut
Ordre de faint Auguftin ,
Dioceſe de Paris, à M. l'Abbé
des Champs.
L'Abbaye de la Prée
Ordre de Cîteaux , Dioceſe
de Bourges , à M. l'Abbé
2
de
Valory.
sb
moa
L'Abbaye
de faint
¡ Sever
, Ordre
de fajin Benoît
-U!
la
Gij
76 MERCURE
Dioceſe de Tarbes , à M.
l'Abbé du Caſteja.
- L'Abbaye de Landtteveneek
, Ordre de faint Benoît
, Dioceſe de Quimper ,
à M. l'Abbé d'Argentrée
.
Cette Abbaye eft la plus
ancienne de l'Ordre , elle a
étéfondée par Grallon Roy
de
Bretagne.
L'Abbaye
de Fontaines
,
Ordre
de Citeaux
, Dioceſe
2.
de Tours à M. l'Abbé de
Baudry. On a donné le
nom de Fontaines à cette
Abbaye , à caufe de plufieurs
fontaines qui font
GALANT.
77
aux environs. Ce lieu étoit
rempli
de bois.
L'Abbaye
du Tronchet
,
Ordre
de faint Benoift
,
Dioceſe
de Dol , à M. l'Abbé
de Vaugenois
. Cette Abbaye
eft fituée dans la baſſe
Bretagne
. Alan , Senechal
de Dol , la fit bâtir l'an 1150.
L'Abbaye
de la Vanvaux
, Dioceſe
de Vannes
,
à M. l'Abbé
de Vauluyre
.
L'Abbaye
du Rivet , Or
dre de Cîteaux
, Diocefe
de
Vaft , à Dom Jean Benoist
Bernardin
.
L'Abbaye de fainte Croix
G iij
78
MERCURE
d'Apt , Ordre de Cîteaux ,
à Madame de Marnay de
la Baftie.
Meffire Pierre Rogier
du Crevy , nommé au mois
d'Avril à l'Evêché du Mans,
eft d'une ancienne Maiſon
de Bretagne , qui prouve
fa nobleffe de plus de fix
cent ans. 11It y avoit trois
branches de cette Maiſon :
Rogier de Villeneuve , Rogier
du Crevy , & Rogier
de Calac . La derniere fut
éteinte en 1630. par la mort
de Meffire Jean Rogier de
GALANT
79
Callac , Confeiller au Parlement
, mort fans enfans.
La premiere fe trouve é
teinte en 1675. par la mort
de Meffire Eugene Rogier ,
Comte de Villeneuve ,Marquis
de Kerveno , Baron de
Baud , &c . Prevôt & Grand
Maître des Ceremonies de
l'Ordre du Saint Efprit, qui
avoit époulé Anne de Gailleul
, fille du Comte de Gailleul
, niece & heritiere de
Meffire Pierre de Bourneuf
de Cucé , premier Prefi
dent du Parlement de Bretagne
aprés fon pere , fon
1+
G iiij
80 MERCURE
ayeul & fon bifayeul , revêtus
de la même Charge.
La feconde, branche fub.
fifte dans trois enfans de
Meffire François Rogier
du Crevy , Confeiller au
Parlement de Bretagne,
L'aîné s'appelle François-
Eugene Rogier , Comte du
Crevy , de Villeneuve , &
de la Chapelle. Le fecond,
Pierre Rogier ,nommé Evê
que du Mans , aprés avoir
été grand Archidiacre de
Rennes , enfuite Doyen &
grand Vicaire de Nantes,
En troifiéme lieu , leur four
GALANT.-
}
mariée en premieres noces
à feu Monfieur le Marquis
de Genonville du Pleffier ,
Gentilhomme de Picardie
trés- qualifié , dont elle a eu
une fille unique , mariée à
Monfieur de la Faluere ,
Prefident à Mortier au Parlement
de Bretagne , fils de
Monfieur de la Faluere ,premier
Prefident du même
Parlement : en fecondes noces
à Meffire Salomon de
la Tulaye , d'une ancienne
nobleffe de Bretagne , Procureur
General dans la
Chambre des Comptes de
82 MERCURE
cette Province. Depuis l'u
nion de la Bretagne avec la
France , il fe trouve plufieurs
Confeillers , deux
Procureurs Generaux , &
deux Prefidens à Mortier
du nom de Rogier dans ce
Parlement , où les meilleures
Maiſons n'ont pas fait
difficulté d'entrer.
Avant l'union de la Bretagne
avec la Couronne de
France , les Rogiers ſe font
diftinguez parmi les plus
nobles de leur Province ,
par les fervices qu'ils ont
rendus à leurs Souverains.
GALANT .
83
Il fe trouve en 1200. un Vi
ce -Chancelier de Bretagne
Jean Rogier , dont le fils
fut grand Chambellan , lè
petit-fils grand Maître des
Arbalettiers , qui répond au
Colonel general de l'infanterie
; plufieurs Miniftres
4
d'Etat , qu'on nommoit
alors Confeillers au Haut
Confeil , des Ducs , des Of
ficiers generaux d'armée.
Un Pierre Rogier eft marqué
dans l'hiftoire de de
Serres entre les plus illuftres
prifonniers dans la bataille
de Verneuil , du re84
MERCURE
gne de Charles feptiéme ;
& le voeu qu'il fit alors de
fonder une Meffe à perpetuité
dans l'Eglife des Carmes
de Ploërmel , ville fituée
à une lieuë du Crevy ,
y eft executé encore aujourd'hui
par
le Seigneur du
Crevy , château confiderable
érigé en Comté , annexé
à celui de Villeneuve ,
dont une partie de cette
ville Royale releve.
Cette famille eft alliée à
de grandes Maiſons , aux
Comtes de Poitou , Vicomtes
de Limoges & de
GALANT. 83
Comminges, aux Seigneurs
de Derval , de Lanniou
d'Avaugour , de Coaiquin ,
de Tintenniac , de Canillac
, de Rafilly , Defcartes ,
Ferrand , de Lambilly , de
Meneuf , dont il y a prefentement
un Prefident à
Mortier au Parlement de
Bretagne , Ferré de la Villéblanc
, de Villeblanche
du Halgouet , Foucault
Bonnier , dont il y en a trois
Prefidens à Mortier au Parlement
de Bretagne , de la
Grandville , &c. Cette Mar
fon porte pour armes , d'her86
MERCURE
mines au greflier de fable
lié de gueules. Le Seigneur
Comte du Crevy a épouſé
en premieres noces Catherine
Salieu de Chefdubois ,
fille d'un Confeiller au Parlement
, dont il a un fils
Capitaine de cavalerie au
regiment d'Orleans , âgé de
vingt ans, qui s'eft mis dans
le fervice à treize ans ; &
en fecondes noces Therefe
Champion de Cicé , foeur
de l'Evêque de Siam & de
la feue Marquife de Martel
, veuve du Marquis de
Martel , Lieutenat general
GALANT.. 87
des armées navales de fa
Majefté , qui ont l'honneur
d'être alliées aux Maifons
de Betune , de Lhoſpital ,
de Monteffon , &c.
ARTICLES
des Enigmes.
Parodie de l'Enigme du Mercure
dernier.
CHevelure je fuis ſouvent
entrelaffée
Avant qu'un peigne m'ait
88 MERCURE
de cent pointes percée ,
Avant
que le fer & le feu
Me gênant à leur tour
M'ayent miſe en état de
bien fervir l'amour.
La tête , lieu de ma naif-
....
fance ,
N'eft point par humains
habité ,
Pourtant on y raiſonne , on
y rêve , on y penfe.
Pourquoy donc n'ai -je pas
cette proprieté ?
X
Noms
GALANT. 89
Noms de ceux qui ont deviné
la Chevelure..
Louis le chauve ;, Marion
la mal peignée ; feu Madame
Voyelle , & feu Monfieur
Diphtongue J.
c'eft
pour eux qu'on fonne ; Je
me démêle , l'Abbé ratier ;
la belle Perruquiere
.
EN VOY.
Par M. Severe.
Votre Enigme à deux mots,
May 1712.
H
90 MERCURE
Mercure , ne vaut rien ;
Je la relis , je la reluque ,
Je vois qu'à Chevelure elle
convient fort bien :
Mais elle peut auffi convenir
à
perruque.
A l'égard de l'Enigme
lugubre qui eft donnée
dans le même mois , elle a
un défaut tout oppofé ; car
au lieu d'avoir deux mots
je crois qu'elle n'en a point
du tout.
Mercure
trouve que
Monfieur
Severe
peut
}
GALANT. *91
avoir raiſon ; car le mot
de Sepulcre ne convient
à cette Enigme que
parce qu'il n'y en a point
de plus convenable .
**********
ENIGME
nouvelle.
1
S1 måle ou femelle je
fuis,
Ceft ce qu'affirmer je ne
puis.
Simple , fans ornement
Hij
92
MERCURE
d'un nom male onm'appelle
:
Mais orné richement je
porte un nom femelle.
Commej'aiplus d'un nom,
j'ai bien plus d'un
employ ;
Male on me voit porter
fous moy
Une espece de longue mante
i
glißante Femelle legere
Je m'égarefouvent , quel
quefois je me perds
GALANT
93
Ermåle
fervant une Retne
,,
Une adorable
Souveraine ,
Je porte & fais porter fes
fers.
Femelle étant l'objet de
2 maint Seigneur &
Prince ;
Chacun d'eux me difpute
ainfi qu'une Province
: vincentova
En public le victorieux
De m'avoir et tout glocontiorieux
on t
En fecret fille vertuenfe
94 MERCURE
De m'avoir eft toute hon
teuſe.
Comme on m'a envoyé
beaucoup de réponfes
aux queftions de ce
mois- ci , dont j'ai mis
les meilleures en un autre
endroit de ce Mercure,
j'ai crû qu'on m'en
envoyeroit encor pour
le mois prochain fur les
mêmes , que je redonne
pour ce mois - ci ; non
par pareffe d'en trou
GALANT.
· ༡༨ 95
ver d'autres , ce n'eft
pas un grand travail :
mais parce qu'il faut au
moins deux mois pour
donner le loifir aux anonymes
des Provinces de
les compoſer , & de les
·
envoyer.
Premiere Question.
Si l'on doit preferer
dans un repas les grands
verres aux petits.
96 MERCURE
Seconde
question.
Si l'on peut haïr ce
qu'on a une fois bien aimé
.
Troifiéme Question.
S'il eft plus avantageux
à un homme dêtre
d'une grande taille
que d'une petite.
GALANT . 97
A Paris le 17. Avril 1712 .
Monfieur mon Confrere en
Apollon & en Thalie...
Je vous envoye enfon original
Espagnol la copie qui eft
tombée entre mes mains de la
Patente de Monfieur le Duc
de Vendofme. Je fçay que trop
bienque tous les gens de Lettres
font interesez à la gloire de ce
Prince ,pour douter un moment
du plaifir que vous avez d'en
bonorer voftre Livre.
banan sh
D'ailleurs par vous cette
May 1712. I
& MERCURE
grande avanture
Se répandra de toures
parts ;
Et qui pouvoit mieux que
Mercure
Publier la gloire de Mars.
Jeſuis Monfieur , voftre
· DON PHELIRE por la
gracia de Dios , Rey de
Caftilla , de Leon , Ara
gon , de las des Sicilias , de
Hierufalem , de Navarra ,
de Granada , de Toledo , de
Valencia , de Galicia , de
GALANT . 99
Acalorca , de Sevilla , da
Cerdeña , de Courdova
de Corzego , de Riuxcia ,
de Jaen , de las Alganves ,
de Algecira , de Gibraltar,
de las Iis de Canaria , de
las Indias Orientales , y Occi
cidentales , Illas , " Tierra
Firme dez Mar occeano
Archiduque de Archiduque
de Auftria , Duque de Bor
goña ,de Brabantey Milan ,
Conde de Abfpourg , da
Flandes , Tiroky Barzelow
na , Señor de Vircaya , yide
Molina, & c. Queriendo ma
nifeftar à noftro Primo &
I ij
100 MERCURE
Duque de Vendoline & reconocimento
que tenemos
de los feñalados fervicios ,
que nos hà echo , deſde que
le nombramos Generaliffimo
de nueftras Armas y que
las manda con elte caracter
en Eſpaña, Nemos jurgado
no poderle dar pruebas mas
evidentes de nueftra entera
fatisfaccion , fi no es concediendole
en nueftros Reynos
,y Eltados una calidad ,
y grado proporcionado à
todo lo que con fu relebante
, y acertada conducta hà
obrado para fu conſerba ,
GALANT. ror
cion ,y aun que por fu gran
Sangre , tenga mui baſtante
diftincion y pueda juſtifica
damente prerender todos
los honores , y precedencias,
que le fon debidans , noobftante
para comprobar aun
con demonftraciones de
mayor luftre la fingular eftimacion
que Sacemos de fu
perfona , y de fus fervicios .
Le hemos concedido , Da
mos , y concedemos por la
prefente , los honores , y
tratamento de Principe
de nueftra Sangre , querien
do , que como tal , y como
,
I
iij
19: MERCURI
de efta Clafle fea reconoci
do en todos los Reynos , y
Tierras de nueftro obediencia
, y que goce de todos la
honores , precedentias , pre
rogatibas , privilegios debi
dos , y pertenecientes à tan
eminente dignidad. Manda,
do , y ordenando à todos
los que eftàt debaſo de nuef
tra authoridad , le honren ,
y reconozcan en la referida
Calidad , por que affies nucfera
voluntad. Y la prefente
fe Loërà , publicarà , yregif
trarà en todos nuestros conceffos
, y Jurifdiciones fupeGALANT.
10g
riores para que nadie pretexte
caufa de ignorancia.
En cuyo teftimonio emos
mandado defpacharla preffente
, Firmada de nueftra
mano , fcellada.con nuestro
Sello fecreto , ý refrendada
de nueftro infraéfcripto Se
cretario de Eltado. Dada en
Madrid â veinte , y tres de
Março de mil ferecientas , y
doce. Firmada: Yo EL REY.
Ymas âbafo : D. Manuel de
Vadillo , y Velafco.
I iiij
104 MERCURE
Traduction de Patentes.
PHILIPPE par la grace
de Dieu , Roy de Caftille , de
Leon , & c. Voulant faire
connoistre à noftre Couſin
le Duc de Vendofme la réconnoiffance
que Nous avons
des fignalez fervices
qu'il nous a rendus , depuis
que nous l'avons nommé
Ġeneraliffime
de nos Armées
, & qu'il les commande
en cette qualité en Eſpagne
: nous avons crû ne pouvoir
mieux luy témoigner
GALANT. ros
nôtre fatisfaction, qu'en luy
accordant dans tous nos Etats
& Royaumes une qualité
& un rang proportion
né à tout ce qu'il a entrepris
& executé avec tant de fageffe
& de conduite pour
nous en affurer la confervation
; & quoy que ſa naiffance
luy donne toute forte
de diftinction , & qu'il puiffe
prétendre avec juftice tous
les honneurs & preſceances
qui luy font dûs ; cependant
pour donner encore
des marques plus éclaran
tes de l'eftime particuliere
•
106 MERCURE
que nous failons de fa perfonne
, & de l'importance
de fes fervices ; nous luy
avons donné & accordé
donnons & accordons par
ces Prefentes , le tang & les
honneurs de Prince de notre
Sang , voulant
que comme
tel , & en cette qualité
il
foit reconnu
dans tous les
Royaumes
& Terres de nô
tre obeïffance
, & jouiffe de
tous les honneurs
, prefceances
, prérogatives
& privile
ges qui font attachez
à une fi
éminente
dignité : Mandant
& ordonnant
à tous nos Su
GALANT , 107
jets de le reconnoître en cette
qualité : Car tel eft noftre
plaifir ;& les prefentes feront
enregistrées , lûës & publiées
dans tous nos Confeils &
Jurifdictions fuperieures ,
afin que perfonne n'en prés
tende cauſe d'ignorance. En
foy dequoy nous avons fair
expedier les Prefentes fr
gnées de noftre main , ſcellées
de noftre Sceau fecret
& contre fignées de noftret
Secretaire d'Etat. Donné à
Madrid le 23. Mars 1712
Signé , MOY LE ROY
& plus bas , Don Manuel
de Vadillo y Velasco.
*
108 MERCURE
RELATION.
Cette Campagne s'ouvre
affez favorablement , car
dans toutes les petites affaires
de guerre nous reüffiffons:
La derniere qui vient d'arriver
en Flanders le 27. du
mois dernier , merite bien
d'eftre detaillée un peu au
long , eftant des plus brillantes
& des plus vives , les
Troupes y ayant fait voir
plus de valeur que l'on n'en
auroit pâ efperer quoy qu'il
n'y eût que 36 , Carabiniers
GALANT. 109
contre cent Houffards , le
combat ayant duré plus de
deux heures en plaine. Mr
le Marquis de Mezieres allant
de fon quartier prés
d'Arras à Dourlens pour y
faire quelque mouvement
dont les troupes avoient les
ordres , ne prit avec luy que
40. Carabiniers pour l'ef
corter ; à deux licuës de là
quatre Carabiniers qui mar,
choient devant , virent quels
que chofe dans un petit bois
& allerent à la decouverte
lorfque tout à coup il fe debufqua
100. Houffards les
t
10 MERCURE
uns aprés les autres qui tiferent
fur les 4. Carabiniers,
enblefferent deux , en prireno
un , & l'autre vint dire cette
nouvelle à Mr de Muzierd
qui ayant déja vû ce qui
s'étoit paffé avoir dit fon
deffeint aux Carabiniers &
les nyit en bataille , marcha
aux Houffards qui vincent à
cux en pelorons , » kes:1367
Carabiniers qui rektoient ?
chargerent aveo rant de fer→
meté les Houffards , qu'ils
phierent & prirent la fuite à
plus de deux cent pas , puis
faifant de nouvelles difpou
•
GALANT. 11 #
fitions de leur Troupe , les
difperfants en trois bandes,
marcherent avec leurs cris
ordinaires : Mr de Meziere
voyant qu'ils venoient l'at
taquer de tous les côtez ,
ordonna dans le moment au
z. rang de faire un demitour
à droite pour leur faite tête:
& charger dés qu'ils arriveroient
, puis faifant revenip
rous enfemble , il leur ora
donna de ne ſe point debans
der pour quelque chofe que
ce für: cette petite troupe
fit des actions de valeur in
eroyable faifant encoreplica
112 MERGURE
les
Houffards & les ayant
obligé de fe difperfer jufqu'à
3. fois , les Houffards.
pour exciter les Carabiniers
,
Le debander , vinrent par
petits pelotons feparément.
les attaquer , mais ils ne s'ecartérent
pas un feul moment
& les repoufferent tou
jours avec la mefme vigueur
quoy qu'ils changeaffent
de
manuævre
jufqu'à 8, fois,
avec toujours pareil defavantage
eftant toujours batus
& mis en fuite ; les Houf
fards voyants une fi vigou-
Leufe fermeté
foutenue
GALANT . 113
d'une fi grande difcipline ,
fe mirent en bataille & vinrent
encore dans l'efperance
d'enfoncer les noftres , ils
firent leurs décharges de prés
à coup de pistolets & de
moufquetons ,puis ils s'avancerent
à coups de Sabres ,
mais ils furent toujours reçus
avec la meſme fermeté,
& Mr de Mezieres voyant
que c'eftoit la derniere at
taque qu'il avoit à foutenir
ayant des fiens bleffez , il
leur cria , courage Carabi
niers , vous avez eſté créez à
caufe des actions glorieuſes
May 1712. K
114 MERCURE
que vous fires à la bataille
de Fleurus , fouvenez - vous
en , & que l'on vous recon 、
noiffe toujours
pour ces
mefmes troupes invincibles
.
les carabiniets
criétent tous ;
nous mourons avec vous ,
yous cftes un brave General,
& donnerent fur les ennemis
avec une bravoure incro
yable & enfoncerent
les
Houffards
, quia pritent la
fuite , les Carabiniers les fui
virent en ordre jusqu'aux
hayes d'un Village où les
Houlards
fe difperferent
,
daiffants derriere eux 30. des
GALANT. 115.
leurs rucz fur la place , 3.
bleffez dont il y avoit un
Officier & plufieurs chevaux
Tucz. Mr de Meziere n'a cû
dans cette affaire qu'un Cárabinieritué
fur la place
onze bleffez dangereuſe
menty 5. Chevaux tuez &
douze bléſſez : le Cornére
quiché reçu trois bleffuros
dangereuſes, s'y eft fort difringué,
ayant eu deux che
vaux [tucz fous ! huy , l'un
defquels appartenoit à Mf
de Meziere le Capitaine
& le Lieutenant quaeq
auffi un cheval tulbushi
Jual nu équibb an
116 MERCURE
y ont auffi tres bien fait , il
n'y a pas un des Carabiniers
qui ne fe foit bien diſtingué
dans cette affaire ; Mr de
Meziere qui a auffi perdu
trois de fes chevaux , a fair
conduire fes bleffez & l'Of
ficier Houffard à Dourlans,
où il a raporté qu'il avoit vû
14. des fiens bleffez àda 4 .
attaque qu'ils avoient fait &
que l'on ne pouvoit donner
C
autant de louange à Mr de
Meziere qu'il en meritoit ,
eftant feur que s'il n'avoit
pas commandé ces Carabi
niers , ils ne leur en feroit
pas échapé un ſeul .
GALANT . 117
MADRIGAL.
Loin du rivage où naquit
mon amour N
AZile beureux de l'objet
que j'adore ,
A chaque inftantje m'y
promene encore
Tout me retrace un fi
charmant féjour.
Mon coeur confond & la
Loire & la Seine
D'un bois chery l'Image
douce & vaine
8 MERCURE
S'offre à mes yeux & la
nuit & le jour.
Je crois fans cess: y rencontrer
Ifmene
Ifmene , belas ! dans ce
fatal moment
Tout difparoift comme
( un enchantement ,
Et cebeaufonge augmente
encore ma peine.
L'Auteur de ce Madrigal
m'a envoyé un Egloge que
je ne puis donner que le
mois prochain.
GALANT . 119
Meffire François Molé
Maiftre des Requeftès , Ab
bé de Sainte Croix de Bordeaux
, mourut les. May
âgé de 87 , ans , il étoit le
dernier des enfans de Meffice
Mathieu Molé , Procureur
Genetal au Parlement, premier
Prefident & Garde des
Sceaux de France qui a rendu
de grands fervices à l'Eraty
& spendant toutes les
charges , n'a voulu d'autres
biens que celuy detailfor
fon nom & à fa famille
Thonneur d'une fidelité ins
violable pour fa Majefté
20 MERCURE
FRUIT NOUVEAU
Du mois de May.
Lettre
envoyée pour le
Mercure
Galant par la
Gazette
veridique
du Quartier
de la Place Maubert.
MONSIEUR ,
Je ne fçay fi l'avanture dont
je vous fais part , vaut la
peine qu'on la donne au public,
mais elle aura du moins pour
luy le merite des fruits nowvaux
, ce public court fouwent
aux fruits vers & nowwaux
, preferablement
aux
fruits
GALANT 127
fruits murs. Il s'agit icy de
fraifes nouvelles & peut eftre
des premieres qu'on ait vues
Paris cette année ; elles on
caufé dans mon quartier plú☺
fieursjalousies en unjour. La
Pomme de difcorde brouilla
trois Deeffe ; enfembles ces Frai?
fes ont brouillé trois ménages,
ne meritent- elles pas bien le
nom de Fraifes de difcorde.
Fraifes de difcorde
29715
Lundy dernier un jeune
amant accordé avec fa Mail
creffe , luy envoya une petie
May 1712 .
L
MERCURE
"
corbeille de Frailes précoffes
auffi fraîches & auſſi nouvelles
que leurs amours , &
qui furent reçuës de l'Accordée
avec autant de plaifir
que l'Accordé en avoit
cû à les acheter bien cher
ces Fraiſes étoient dans unc
petite corbeille garnie do
deurs . La more qui fut prefente
à l'ouverture de la
corbeille les trouva trop
vertes pour les mangeral luy
vint en penſée de s'en faire
benncur , ella referma bien
la corbeille , & l'envoya à
fan Avocat , qu'elle fçavoin
I
GALANT 123,
être hommede bonne chere,
perfuadée que ce feroit un
bon plat pour un friand.
Un laquais porte le prefens
qui fue receu par un autre
laquais parce que n'y l'Avocat
ny fa femme n'étoient
pour lors au logis.
L'Avocat avoit laiffé ce
jour là
par haſard la clef à
fon cabiner , le laquais y
porta la corbeille de Fraile
& la cacha meſme derriere
quelques livres fur une ta
blette; la femme étant rentrée
la premiere , paffoit
pardevant le cabinet pour
Lij
11 MERCURE
aller à fa chambre ; elle étoit
naturellement jaloufe & par
confequent tres curieufe des
affaires de fon mary , la clef
qu'elle vit au cabinet la tenta
d'y entrer, elle y fureta dans
tous les coins , & trouvant
•Corbeils
ne douta point
que fon mary n'eût acheté
les fraifes pour les envoyer
à certaine voisine dont elle
eftoit jaloufe . Elle regardoit l
cès fraifes avec fureur , &
remarqua un papier attaché
en dedans au couvercle de
la corbeille ; l'Accordée n'avoit
point remarqué ce paGALANT.
1
de fi
125
pier parce que les fleurs le
cachoient & auffi parce
que l'Amour
c
n'a
pas
bons yeux que la Jaloufic :
fur le papier ces Versétoient
écrits 05 al
aprovaɔsioluov
Recevez ces fruits du
Printemps
Le même Amour qui vous les
donne
En trouveroit pour vous
l'Hiver , l'Eté, l'Automne
Pendant cent
ans.11.
La femme de l'Avocat
refolut de verifier l'infidelité
Liij
26 MERCURE
2
de fon mary, elle écrivit
un billet fort tendre où elle
contrefit l'écriture des vers
•& demanda réponse à la
belle foupçonnée à qui elle
vouloit envoyer la corbeille,
mais n'ofant fe fier au laquais
de fon Mary qui
étoit l'unique de la maiſon,
elle alla chrzune de fes amics
à qui elle porta le tout &
la pria d'envoyer ce prefent
par un de fes Grifons , elle la
connoiffoit femmeà Grifons,
l'amie fe chargea d'envoyer
comme de la part de l'Avo-
Cat & d'avoir réponſe , mais
GALANT. 127
cela ne fut executé que vers
le foir , & elle garda la corbeille
dans un endroit où
elle fut trouvée par le mary
de cette derniere , pendant
qu'elle étoit allée jouer au
Lanfquenet , où elle perdit
tant qu'elle oublia la commiffion
dont elle s'eftoit
chargée & ne revint qu'à
deux heures aprés minuit ;
en fon abfence le mary jaloux
lut. & relut cent fois
les vers qu'il détacha exprés
de la corbeille pour les lire
plus à fon aifeen enrageant,
enfuite il tacha de le refon-
Liv
128 MERCURE
venir d'une certaine écriture
qui luy avoit paffée par les
mains ; celle des vers luy
paroiffoit toute femblable ,
il vouloit par là decouvrir
quel étoit le Galant de fa
femme ; ce jaloux étoit un
efpece d'Agioteur honora
ble qui s'étoit mis dans les
affaires.
cet
Le jeune Accordé de qui
eftoient les Vers avoit cu
quelque affaire avec
homme cy qui luy avoit
prefté de l'argent pour fon
mariage ; il vint fur le foir
le trouver pour en avoir enGALANT
129
core , & luy fit un billet , qui
luy retraça l'écriture des
Vers. Il eftoit vif & brutal ;
fitoft qu'il eut jetté les yeux
fur le billet , il le déchira de
rage, Lejeune homme à qui
on alloit compter, de l'argent
,fut fort furpris de voir
déchirer à belles dents un
billet qu'il venoit d'écrire,
demanda à l'Agioteur la raifon
d'une fureur fi fubite ;
celuy - cy eftoit emporté
mais la poltronnerie moderoit
fes emportemens . Nôtre
Amant eftoit homme
d'épée ; l'Agioteur fe con130
MERCURE
tenta de le regarder avec des
yeux de fureur , & de remettre
dans fon Bureau les fats
qu'il alloit compter , aprés
quoy il fortit de fon bureau ,
& noftre Emprunteur qui le
fuivoit ne put tirer de luy
que ce mot :Je ne prête point
d'argent à ceux qui le dépenfent
à acheter des fraifes nouvelles .
Le jeune homme ne comprit
point par quelle bizar .
rerie cet homme aprés avoir
voulu luy prêter de l'argent,
prenoit tout d'un coup la
refolution de ne luy en point
préter , parce qu'il avoit
GALANT. 131
acheté des fraifes. Que fait
à cet homme-là , difoit il en
Tuy même , que j'aye envoyé
desfraifes à mafemme. Il ne
raifonna pas davantage làdeffus
: il conclud feulement
que l'Agioreur eftoit fol ;
mais il eftoit encore plus
vindicatif qu'extravagant.
Il alla dans ce premier mouvement
trouver l'Accordée
& fa mere , & tout furieux
de jaloufie , il leur demanda
felles prétendoient conclurre
avec un homme qui
avoit une intrigue amoureufe
avec la femme ; & aprés
132 MERGURE
avoir dit du jeune homme
ce qu'il fçavoit & ce qu'il ne
fçavoit pas , il leur jetta les
Vers fur la table pour
convaincre de ce qu'il difoit,
& fortit un peu confolé de
s'eftre ainfi vengé.
les
La mere & la fille furent
convaincues par ce billet ,
elles en connoiffoient l'écriture
, & ne s'étoient point
aperçeuës qu'il fut dans la
corbeille , dont l'Agioteur
ne leur avoitpoint parlé n'allant
qu'à l'effentiel qui étoit
ce billet , noftre Acordée
fut fi frappée de ce coup
GALANT. 133
1.
qu'lle conjura fa mere de
rompre le mariage , & deffendit
dans fa colere qu'on'
laiffat entrer fón Amant
cé foir la , elle ne vouloit
aucun éclairciffement avec
luy , craignant d'eftre affez
foible pour luy pardonner
fi elle le voyoit op ʼn slug
Cette rupture ne pouvoit
pas avoir defuites comme on
peut fe l'imaginer , l'éclair ?
eiffement étoit facile : mais!
cela fit paffer une cruelle nuit
à l'Acordée , & l'Acordé ne
F'eut pas meilleure ; voila dés
ja l'une des brouilk ries cau
$ 34 MERGURE
fées par les fraifes . La femme,
de l'Avocat en atendant la
preuve qu'on ne luy avoit
promis que pour le lendemain
, ne laiffa pas de ſevenger
dés le foir par une que
relle d'Allemand qu'elle fit à
fon mary & ils pafferent la
nuit à quereller ; mais la
femme de noftre Agioreur
en fut quitte pour trois qu
quatre foufflets qui furent le
prelude de l'éclairciffement,
qu'il cut avec elle , & tout,
fe calmale lendemain par
un éclairciffement general ,
où l'on reconnut que les
GALANT ***
trois infidelitez pretenduës
n'avoient cité qu'un effet de
la circulation des fraifes
de difcorde.
de
M
Ce petit recit , Monfieur ,
auroit eu befoin d'eftre écrit,
jen'ay ny le loifiny le talent
d'écrire; priez donc les curieux
nouveautez de recevoir cellecy
comme une ébauche à plume
courante, qui vaudrait peuteftre
bien la peine que quelqu'un
voulut la mettre en vers
donnez la comme une tâche à
ceux qui vous envoyent: ordi
nairement des Paëfies de leur
façon & des réponſes à des
336 MERCURE
queftions , je propoferay ce petit
travail à un Poëte de mes amis ;
mais je ne vous promet rien ,
ainfi je ne vous confeille pas de
rjen prometre au publicfur cet
article.
Nouvelles
d'Allemagne .
L'Archiduca caffé la Regence
de l'Autriche infericu
re pour en établir une nouvelle
; le Comte Sigifmond-
Frederic de Kevenhiller en a
efté fait Prefident , ila nommé
un Vice- Prefident & quas
rante Conſeillers ; ce chan
GALANT. 437
gement a fait un grand nombre
de Mécontents , à caufe
que plufieurs perfonnes de
diftinction'en ont efté exi-
1
lées . Le Comte de Staremberg
demande de prompts
& puiffants fecours ; on travaille
à luy envoyer le plûtoft
qu'il fera poffible de
l'argent & des Troupes. Un
Courrier arrivé de Barcelon-
Inca rapporté que l'Archi-
-ducheffe leftoit entierement
guerie de fon indifpofiition ;
qu'elle attendoit avec impatience
l'Eſcadre fur laquelle
elle devoir s'embar-
May 1712.
M
+38 MERGURE
quer pour retourner à Vien
no. Les Lettres de Conftantinople
du 15 Mars affurent
que la guerre avoit cfté de
nouveau refoluë , à moins
que le Czar ne retiré toutes
Les Troupes de Pologne &
d'Ukraine
, qu'il n'accorde
au Roy de Suede un libre
paffage par la Pologne ; qu'il
ne le mêle plus des affaitesde
ce Royaume- là , & qu'il
-reſticuë à Sa Majeſté Sukdojfe
toutes les conqueſtes
qu'il
a faites. Comme on ne croit
pas que le Czar confente à
ces demandes
, les Turcs
CALANT. 139
font de grands preparatifs.
Ils ont encore envoyé de
grandes ſommes au Roy de
Suede qui fe tient preſt
marcher vers la Pologne le
15. de May avec toutes fes
Troupes , celles du Palatin
de Kiovie & un grand renfort
de Turcs & de Tarta
res entreroient en Ukraine
& en Mofcovic. Ces nouvelles
donnent beaucoup
d'inquietude , daurant qu'il
ya peu de Troupes en Hongric
, que les Places font en
mauvais cftat , qu'il y a un
grand nombre de Mécon
Mij
140 MERCURE
tens . Le Comte de Thaun
continuera cette . Campa
gne
1
de commander en Italic
les Troupes Auftrichiennes
l'Archiduc a nommé
pour commander fous luy
Je Comte de Thierheim qui
Le prepare à partir pour ce
pais là . Le depart de l'Archiduc
pour aller à Pref
bourg , avoit eflé fixé au
o de ce mois, mais on croit
qu'il fera differé jufqu'aprés
la Pentecofte à caufe que le
Danube eft débordé de nou .
veau ayant inondé la
campagne. On affure que
11
GALANT. 141
le Prince Ragotzi & le Comte
Berezini ont fait entendre
à la Cour Orromane que fi
selle leur donnoit un ſecours
mediocre , ils eftoient én
eftat de faire une puiffante
-diverfion .
Nouvelles d'Espagne. T
Le Roy a donné au Prince
de Mafferan , Pere du Marquis
de Crevecoeur , la Grandeffe
de la premiere Claffe
& à Don Franciſco Antonio
de Salcedo & Aguirré Corredigor
de Cordoue , le titre
de Caftille & la Surintendance
generale des revenus
142 MERCURE
du Roy en Andaloufic .
Le Roy a fait donner
quatre mille piftolles au Marquis
de Monteleon troifiéme
Plenipotentiaire de Sa Majesté
qui eft parti pour aller
à Paris joindre les deux autres
Plenipotentiaire accom
pagné du Duc d'Atri & de
plufieurs perfonnes de qualité
. On mande de Catalogne
que les Troupes du Roy y
joüiffent dune grande tran-
•quilité , que le Duc de Ven
dome fait la vifite des places
qui font fur les côtes du
Royaume de Valence &
GALANT . 143
qu'on attend fon arrivée en
Catalogne pour commencer
la Campagne , que les
Troupes Angloifes vendoient
tous leurs Equipages
- & n'attendent que les Vailfeaux
pour s'embarquer . On
mande d'Eftramadure que
l'Armée s'aflemble & qu'elle
doit camper le premier de
May en front de bandiere
tau voifinage de Badajoz au
nombre de trente- cinq baraillons
& de foizante oréize
Escadrons pour commencer
Ja Campagne. Onvécrit de
Valenceque le Duc de Vent
144 MERCURE
dome y étoit arrivé , où ila
été reçû avec des acclamations
extraordinaires , il a
logé au Palais de l'Archevefque
où il n'a refté que
deux jours étant allé demcurer
au Grao entre la Ville &
la mere . On mande de Cartagene
qu'on a vu paffer une
Elcadre Françoile commandée
par le fieur Caffart compofée
de douze Vaiffeaux de
guerre avec deux Galliotes
a bombes & quinze cens
hommes de débarquement
faifant voile vers le Détroit.
Les lettres de Cadix affurent
7
quel
GALANT. 145
que cette Escadre étoit entréé
dans le Port fans qu'on
fçût fon deffein , qu'il y
étoit auffi arrivé un Vaiffeau
Portugais pris du côté de
l'Ile de Madere avec cent
Francois prifonniers de
guerre qu'il amenoit à Lif
bonne. On mande de Ca-
17
talogne que les ennemis
avoient faits avancer quel
ques troupes vers Mequinenca
à l'embouchure de la
Segre pour empêcher la
navigation fur l'Ebro , mais
le Comte de Muret Lieute
nant general fe preparoit à
May 1712 .
N
146 MERCURE
les combattre . Les lettres
d'Eftramadure allurent que
dés le 25. d'Avril quelques
Regiments étoient campez
prés de Badajoz , que le refte
des troupes étoient en marche
pour les joindre , que
les Portugais s'affembloient
aux environs d Eftremoz .
On mande de Cadix qu'-
outre l'Eſcadre Francoife
commandée par le fieur,
Caffard qui étoit dans ce
port , il y en étoit encore
arrivé un autre dans les
ports de l'Ocean fans qu'on
pour quel deffein. fsut
GALANT 147
Nouvelles d'Angleterre.
12On a impofé une taxe
fur chaque feuille de parche
min ou papier qui feront
employées dans les Contrats
ou Actes qui fe feront dans
toute la grande Bretagne.
Une autre taxe fur chaque
feülle employée à la vente
des actions fur les fonds pug
blics que les acquereurs feront
tenus de payer. Une
fur les Feuilles de nouvelles
manufcrites ou imprimées.
Une fur les cartes & les
Nij
148 MERCURE
1
dez , & une fur les Cartons
d'Angleterre & Etrangers ,
qu'on levera ces taxes durant
trente deux ans Sa
Majefté Britannique a nom
mé dans fon Confeil le Duc
de Shrewsbury , Grand
Chambellan de la maifon
de fa Majefté pour eftre
Gouverneur du Comté de
Salop à la place du Comte
de Bradford.
Le Duc de Northumberland
, Gouverneur du
Comté de Berks , à la place
du Comte de Craven ."
1
Le Comte de Thaner ,
GALANT. 149
Gouverneur des Comtéz de
Cumberland & de Weftmorland
à la place du Comte
de Carlifle, en
Le Comte d'Avingdon ,
Gouverneur
du Comté
d'Oxford ,' à la place de Mylord
Marlbourough.
L'Evêque de Durham , à
la place du Comte de Scar
bourough, chu
10/0
Le Vicomte Cheyne ,
Gouverneur du Comté de
Buckingham à la place du
Comte de Bridgewater ,
Gendre de Milord Marl
bouroug
N iij
MERCURE 150
1
Tous ces Seigneurs font
fort attachez à l'Eglife Anglicane.
On confirme que la Reine
a envoyé ordre en Irlande
de caffer deux Regiments
dont les Soldats feront in
corporez en d'autres corps
que Sa Majesté a donné de
pareils ordres pour refor
mer une partie des troupes
qui font en Angleterre &
celles qui ont fervi à l'expedition
du Canada , afin de
rendre complettes les Gat
nifons des places d'Ecoffe au
lieu de Regiments Ecoffois
GALANT Ĵ
qui y font & qui doivent
venir en Angleterre.
Les lettres de Londres
affurent qu'il s'eft formé
une focieté de vingt - une
perfonnes de qualité &
riches pour favorifer les
fciences & les arts , en rel
compenfant & procurant
des emplois à ceux qui fe
diftingueront par leurs ou
vrages.
MARIAGE.
Mr le Marquis de Biffy
Brigadier, Meftre de Camp
Niiij.
52 MERGURE
de Cavalerie , fils de Mr le
Marquis de Biffy , Lieute
nant General des Armées du
Roy, Gouverneur d'Auxonne
, a épousé Mademoifelle
Chauvelin , fille de Mr
Chauvelin Confeiller d'Etat
Ordinaire.
Le Roy a accordé à Mr
le Marquis de Biffy Brigadier
le Gouvernement des
Villes & Chafteau d'Auxonne
que poffede Mr fon pere
& que Mr de Biffy fon
grand pere Lieutenant general
des Armées de Sa
Majefté , Commandeur des
GALANT . 153
Ordres du Roy , & Commandeur
pour Sa Majesté
dans le Païs de Mets , Toul
& Verdun , avoit auſſi
poffedé .
Le fieur Grenan , Bourguignon
, Profeffeur de Seconde
au College d'Harcour
a fait une Ode latine à
la loüange du Vin de Bourgogne
; Mr Coffin Champenois
Profeffeur de Secon
de au College de Beauvais ,
répondit à l'Ode du fieur
Grenan, par une Ode pour la
défenſe du Vin de Bourgo.
gne,M' Duhamel Normand
154 MERCURE
Profeffeur de Rhetorique
au College des Graffins a
fait une Ode latine , fur le
Cidre en voicy la tra
duction .
LE CIDRE
ODE.
Qu'ellesfont ces voix
indifcrettes
Qui fe font entendre en
tous lieux ?
Quoy, Mufes deux fa
meux Poëtes
S'ofent quereller à vos
GALANT. 155
yeux ?
Pour quelfujet leurvaine
audace.
Allarme- t- elle du Par-
I
naffe
Lespacifiques Habitans?
Pour du Vin ? je le crois
à
peine
.
Quoy des buveurs de
L'Hippocrene
Le Vin feroit des combattans
?
Poëtes la Guerre eft
fatalle
156 MERGURE
Que caufe un vain entêtement
:
La faute entre vous est
égálle
Pareilfera le chaftiment.
Car, pourquoy par vos
Vers infignes VV
Louer fi hautement, vos
Vignes
Et blafmer les autres Liqueurs?
Comme fi Bourgogne &
Champagne
Seules du Pais de
Cocagne.
GALANT : 157
Renfermoient toutes les
douceurs.
Je veux bien que Bacchus
excite
Le phlegme d'un trop
froid rimeur
Et que
irrite
du Guerrier il
Quelques fois l'indolente
bumeur
Mais ce feu de peu de
durée
N'a qu'une ardeur accelerée
158 MERCURE
Qui naist & peris à la
fois
Et fi les deftins trop faciles
Laiffent vieillir ces imbecilles
La
goutte
Babois.
les met aux
23
Mais Pomone tes
Privileges
Signalent bien mieux ta
liqueur
Tu mets dans ceux que
tu
proteges
GALANT, 159
Un efpritfolide ,un grand
coeur
Témoins ces Heros dont
la gloire
Gravel au Temple de
memoire
Honore leur pofterité
Témoins les fçavans
dont la plume
Afçu par plus d'un beau
volume
S'acquerir
l'immortalité
.
Dieux , quelle Affemblée
éclatante
160 MERCURE
D'eloquens & braves
CeZars !
Mufe , leur nombre m'épouvante,
Sauvons
- nous , fuyons
les hazards.
Ce n'eft pas à mes foibles
rithmes
A tracer les vertus fublimes
De ces grands foutiens
des Etats
Et vouloirfans voix &
Jansforce
Suivre une fi flateuſe
GALANT. 161
amorce
C'eſt courir fans fer
aux combats
Vous chers favoris de
Pom one
Qui beuvez fon jus à
longs traits
Contents des biens qu'elle
vous donne
Pour vous le Vin eft fans
attraits Ne
Vous évitez ces fucs perfides
Qui rendent leurs beu-
May 1712. O
162 MERCURE
veurs stupides
Ou quirenversefaraifon ,
Et la liqueur traitreffe
& dure
Qui tranche & rompt.
mainte cointure
Eft pour vous un fatal
poifon.
Mais tels qu'une belle
Prairie
Qu'arrose un paisible
ruißeauties 20
Toujours verte toujours
fleurie Jackson is
TYM
JOIN
GALANT. 163
1.
N'offre rien aux yeux
que de beau,
Tels arrofez, du jus des
Pommes
Les Normand's entre
tous les hommes
Sontrobuftes &gracieux
Et grand gente en fa
2
courſe
Eft unfleuve qui dés la
fource
N'a rien eu que de
merveilleux
Ⓒ Cidre ! o celefte Ambroifie
O ij
164 MERCURE
Des dons que les Dieux
nous ont faits ,
Quinteßence
, Elixir de
vie ,
C'eft toy qui produis ces.
effets.
Poëtes , dans cette mer
d'ambre ,
Dans ce charmant fus
de Septembre ,
Voyez fe jouer les Saphirs
Dieux, quelle exhalaifon
divine
S'elevant de cettePifcine,
GALANT. 167
Mouille les ailes des Ze-
·
phirs.
Faut-il s'étonner fi la
Trouppe
Des Mufes , ces divines
Soeurs ,
Ayantgoûté de cette couppe...
En eftima tant les douceurs
,
Si de fon pays exilée
Elle enfut bien-toft con-
A folee , a
Ayantfait un plus digne
WM choixus
166 MERCURE
Enfin fi fa reconnoiffan
ce
Au Cidre donna lapuif
Cance
Que l'Hippocrene eut autrefois
?
學
Depuis cette heureuſe
arrivée
Le Cidre empreint d'un
feu divin
De la nature dépravée
Corrige le mauvais levain.
Dés-lors chez vous , belle
Neuftrie
GALANT. 167
Et la Sageße & Induf
trie
Trouverent un charmant
Séjour.
Et l'on voit de vos riches
plages
Sortir de tous rangs , de
tous ages con
Mille grands
hommes
chaque jour.
230
C'est ainsi, Deeße fincere's
Que vous répandez vos
faveurs
168 MERCURE
Sur chaque mortel qui
prefere
Voftre Fus aux autres liqueurs.
Loin defouffrir qu'aucun
des
vostres
Géde jamais la palme à
d'autres ,
leurs plus Vous comble
douxfouhaits .
Vous , qui méprifez nos
breuvages
,
Poëtes dans le vin pew
fages ,
Dorme , & n'écrivez
jamais.
-
GALANT. 169
RESPONSE
à la queſtion du Mercure
précedent.
Par Mr de Rau.....
Si on peut hair ce qu'on a une
fois bien aimé.
LEs Paffions font differentes
par leur nature , & à
l'égard de l'objet qui les
fait naiftre. Il y en a de
promptes & de paſſageres ,
dont l'effet eft violent ,
mais elles durent peu , &
ne laiffent prefque aucun
veftige dans l'ame de ceux
May 1712 .
P
170 MERCURE
quiles ont reffenties . L'ob
jet paffe , & l'idée s'en efface
d'abord, Telles font
la joye & la colere. Ces
paffions fe fuccedent les
unes aux autres , & un mef
me objet peut leur fournir
de matiere. Mais les paffions
fortes & de longue.
durée , faifant plus d'impreffion
fur noftre ame, y
laiffent un caractere & une
image de leur objet , qu'il
eft malaisé d'effacer. Telles
font la trifteffe & la
douleur , mais fur tout , l'a
mour & la haine.
1
GALANT . 171
Il eft certain encore que
toutes les paffions qui font
opposées , maiftrifent
rarement
le coeur de l'homme
à l'égard du mefme objer ;
car outre qu'il y en a tousjours
une qui eft dominante
, l'objet qui a frappé le
premier noftre imagination,
y laiffe tousjours quelque
obftacle à l'effet
la paffion contraire y veut
produire. Cet obftacle n'eft
autre chofe que l'habitude
de la paffion qui forme des
traces profondes
dans lefquelles
retombent
tousque
Pij
172 MERCURE
jours l'imagination quand
elle fe reprefente l'objet
qui les a tracées.
Si l'objet aimé nous offense ,
Nous a trahi , nous préfere
un rival
Par dépit , colere , on vangeance
,
Sans le hair nous luy voulons
du mal.
On ne le
par
peut haïr
antipathie . Quelque défaut
qu'on y découvre ,
quelque injure que nous
en resevions , il a tousjours
je ne çay quoy qui nous
GALANT. 173
porte vers luy , & qui nous
y attache malgré toutes les
violences que nous nous
faifons , dans le deffein de
nous en feparer .
Se vanger de l'objet qu'on aime,
C'eftfe vanger contrefoy- mefme.
Ecoutez ce que fait dire
le plus fçavant Interprete
de l'amour à la defolée
Ocone, lorfqu'elle voit Helene
entre les bras de Pâris.
Elle devoit fe vanger
de cet Infidelle . Cepen
dant
P iij
174 MERCURE
A cet indigne objet je perdis
patience ,
Je me frappay le fein , j'arrachay
mes cheveux,
Et tournay contre moy lafeve
re
vangeance
Quej'avois deftinée à l'objet de
mes voeux .
Tant il eft vray qu'on ne
peut hair ce qu'on a une
fois bien aimé , & qu'on
fe prend à foy- mefme de
l'injure qu'il nous a faite .
On fuppofe , en difant
tout cecy , qu'il s'agit d'un
veritable amour , & file
GALANT . 175
veritable amour vient d'un
certain rapport des efprits
de l'Amant & de l'objet
aimé , qui peut rompre cette
charmante harmonie ?
Si les chofes font dignes
d'eftre aimées , ce feroit
agir contre la raiſon que
de les haïr , & ces mouve .
mens eftant involontaires,
ne peuvent détruire l'amour,
Nous nous formons ordinairement
une image
odieufe de ce que nous
haïffons. Cette image nous
fuit par tout. Elle détruit
Piiij
176 MERCURE
dans noftre efprit toutes
fes belles qualitez , & tout
ce qu'il a d'aimable eſt
plus dans ce qu'elle aime
que dans ce qu'elle anime ,
comment pourroit - elle
quitter le lieu de fon repos
& de fa complaifance ?
Quoy qu'il en foit , il eſt
tousjours vray que l'amour
laiffe en nous ces traces
de l'objet aimé , qui non
feulement font capables de
fermer nos coeurs à la hai
ne , mais encore de rallu
mer une plus forte paffion
qu'auparavant ; & ce font
GALANT. 177
ces restes de l'amour qu'on
appelle un feu caché fous
la cendre .
Amant , c'est une chofe feure
Quand l'amour fait une bleffure
La marque en demeure tousjours
.
Eloignez vous d'Iris , abandonnez
Aminte
Implorez le divin fecours ,
Si voftre ame en eft bien at
teinte ,
Fuyez-les tant qu'il vous plaira
,
Famais de vostre coeur l'amour
ne fortira.
178 MERCURE
Quelques - uns
croyent
que la haine peut venir
d'un amour laffé , d'un
amour irrité ; mais en ce
cas on peut fouftenir
que
c'cft parce qu'on n'a jamais
bien aimé , & ainfi il
n'y a plus de Queſtion
refoudre
..
La colere eft une vapeur
qui peut offufquer
l'amour , mais qui ne peut
l'étouffer . Elle va quelquefois
jufqu'à ſe vanger ,
mais jamais juſqu'à le détruire.
Elle garde mefme
des mefures pour l'objet
"
GALANT . 179
aimé dans les plus grands
emportemens
, & c'eft ce
qui faifoit dire à Hipfipile
écrivant à Jafon qui l'abandonnoit
pour Mcdée .
Contre toy ma colere a fes bor
nes prefcrites ,
Elle t'euft épargné , non que tu
le merites ;
Mais quelque dureté qui regne
dans ton coeur ,
Ma bonté va plus loin encor
que ta rigueur.
Et qui eft l'Amant qui
ignore que toutes les coleres
en amour l'augmen
180 MERCURE
tent plus qu'elles ne le di
minuent , & qu'aprés une
rupture on s'aime fouvent
encore plus qu'on ne fai-
Loit auparavant ?
Ceux qui n'aiment gueres
, font lujets au dégouſt
& à linconftance , mais
ils ne vont pas jufqu'à la
haine . Pour haïr ce qu'on
a bien aimé , fi cela fe peut,
il faut aimer encore . Cette
efpece de haine vient d'un
trop violent amour . On
aime ce qu'on croit haïr ,
& tous ces emportements
ne font que de foibles marGALANT.
181
ques d'une fauffe haine .
Il y a eu des Amans
cruels & barbares , dont
l'amour s'eft changé en fu
reur ; mais c'eftoient moins
des Amans que des Bourreaux
. Mahomet II. ab
batit d'un coup de cimeterre
la tefte de fa Maif
treffe , mais l'ambition feule
luy fit faire ce grand fa
crifice . La haine n'y eut
point de , part , & fon coeur
paya cherement l'excez de
fa brutale vanité .
pourquoy citer Mahomet ?
Un Barbare eft - il capable
d'aimer ? Non, non , un ve-
Mais
182 MERCURE
ritable Amant aime tousjours
fa Maistreffe . Qu'elle
foit fiere , qu'elle foit inhumaine
, qu'elle foit infidelle
, elle eſt tousjours aimable
, il ne la fçauroit
haïr .
>
Mais enfin quelle apparence
de renverfer l'Idole
que nous avons adorée ,
d'abbattre l'Autel où nous
avons facrifié , d'arracher
de noftre coeur ce qui en
faifoit les delices ? Quel
chaftiment
doit attendre
de l'amour un infidelle qui
paffe de la legereté à l'inGALANT
. 183
gratitude & à la haine ? Je
conclus donc avec le Proverbe
, Qu'on ne peut hair
ce qu'on a une fois bien
aimé.
RESPONSES
à la feconde Queſtion du
Mercure précedent.
Si dans un repas on doit
préferer les grands Verres
aux petits .
Chanfon par Mr de Tr...
Verres grands & petits , font
dignes de louange ,
Il m'en faut des plus grands
184 MERCURE
pour me defalterer :
Quand je voy le buffet bien
garni de coulange ;
Mais quand j'ay peu de vin ,
vifte qu'on me les change
Fay recours aux petits pour le
faire durer
'AUTRE RESPONSE
par Madame la C....
On a bien moins de
plaifir en beuvant dans un
petit Verre , on ne boit
que du bout des lévres , à
peine le palais eft - il atteint
par quelques goutes ,
qu'il n'en reste plus pour
fucceder
1
GALANT . 185
fucceder à celles la ; &
quand le vin commence à
entrer dans le gofier , le
palais eft à fec . Mais en
beuvant dans un grand
Verre , je fens une traifnée
de plaifirs depuis les lévres
jufqu'au fond du gofier;
un petit Verre à pei
ne fatisfait - il un de mes
fens qui eft le gouft ; mais
dans un grand mon nez y
plonge , & mes yeux s'y
delectent. Je vois , je flaire,
& j'avale en beuvant , le
vin réjouit en mefme tems
le gouft , l'odorat & la
e -May 1712 .
186 MERCURE
veuë , voila trois fens aut
moins de fatisfaits ; car le
toucher ne laiffe pas d'avoir
la part au plaifir qu'on
a d'empoigner un grand
Verre , & peut- eftre que
Foüie peut jouir encore du
glou glou que forment les
rafades quand on les avale
à longs traits.
RESPONSE
par le bon Convive
Les petits Verres font jaſer
Dans le commerce de la table ,
Ils fervent à nous amuſer ,
Et c'est ce que le vin a de plus
GALANT. 187
agreable.
Boire à grands coups c'est
abuſer
D'une liqueurfi delectable.
AUTRE RESPONSE
par un Avare.
i J'aime mieux qu'on ne
boive chez moy que dans
de petits Verres , cela fait
qu'on n'en caffe point de
grands.
Qij
188 MERCURE
RESPONSES
aux Queſtions par le
mefme .
Premiere Queſtion.
Si l'on doit préferer dans
un repas les grands Verres
aux petits.
Un Yvrogne boiroit volontiers
au tonneau ,
Un vaste gobelet ne peut le
fatisfaire ;
Pour moy plus délicať, je croy
beaucoup mieux faire
Quand je vuide fouvent fans
cau ›
GALANT . 18
霰
Grande bouteille , & petit
Verre.
SECONDE QUESTION.
Si l'on peut haïr ce qu'on
a une fois bien aimé,
Refponſe.
Quand d'une trahifon la cou
pable noirceur
Vient arracher la tendresse
d'un
coeur ,
L'amour fait place à lafureur.
Pour un coeur delicat la maxime
eft certaine ,
A qui fceut bien aimer , il n'eft
point de retour ,
Et la mesure de l'amour
Fait la mesure de la haine,
190 MERCURE
PARODIE
de la feconde Enigme
du Mercure précedent ,
Par Madame de G...
Portefeuille contient
des threfors de fcience ,
Poëte, Docteur & Greffier,
Se plaifent à remplir fa
panfe :
Porte feuilles ouverts font
utiles en France ;
Portefeuilles fermez plai
fent à l'ufurier :
Car rareté d'argent leur
produit l'abondance ,
GALANT . 191
Le porte-feuille enfin porté
par l'écolier ,
Souftient les hommes de
finance.
Refponfe à la Queſtion ,
S'il eft plus avantageux à
un homme d'eftre d'une grande
taille
que d'une
petite .
Il n'est rien tel que les
grands hommes ,
Pour bien cueillir poires
&
pommes :
Pour cueillir fraiſes aux
bois vivent les plus petits .
Petits dépensent moins en
192 MERCURE
vivres , en habits ;
Et les grands en fouliers ,
la cauſe en eft abftraite ,
C'est qu'ils font moins de
pas dans une égale traite .
Ergo les plus petits battent
plus le pavé ,
Baguenaudiere haut élevé,
Dans un ſpectacle a l'avantage
,
Pendant que Ragotin enrage
;
Mais auffi Ragotin derrie
re un parapet ,
Sans faire le plongeon ;
craint bien moins le mouf
quer.
Reflexions
GALANT. 193
Reflexionsfur la maniere d'empefcher
l'eau d'entrer dans
Les caves
,
Par Mr Duguet qui a eſté
envoyé de la Cour dans
les ports de mer , pour des
découvertes hydrauliques ,
& qui eft auffi l'autheur
des machines accouſtiques
propres à faire entendre
ceux qui ont l'oüye dure.
Premierement , on fçait
que l'eau filtre à travers
des terres , & paffe par deffous
les fondements des
maifons pour entrer dans
May. 1712 .
R
194 MERCURE
les caves en cherchant fon
niveau. Ainfi lorſque l'on
veut deffecher une cave
avant l'écoulement de toutes
les eaux qui l'environnent
, on s'apperçoit qu'il
furvient autant d'eau dans
la cave que l'on en a retiré.
Aux caves où il n'entre
qu'environ un pied d'eau ,
il n'eft pas beſoin de
chercher d'autres moyens
pour les deffecher que
d'adjoufter du fable pour
hauffer leur niveau .
2. On peut empefcher
l'eau d'entrer dans les ca
GALANT. 195
ves malgré fes plus hautes
recreuës , en adjouſtant un
corps qui luy ferve de digue
, mais on rifqueroit de
faire une dépenſe inutile
fi l'on ne comptoit pas fur
l'effort de l'eau qui eft tousjours
proportionnée à fa
hauteur
perpendiculaire
& au diamettre de la bafe
de fon volume .
Suivant ce
principe receu
, il fera neceffaire
de
rendre le corps que l'on
adjouftera , pour
empefcher
l'eau
d'entrer
dans
une cave , affez pefant ou
Rij
196 MERCURE
affez bien retenu pour refifter
à la preffion que l'eau
luy fera par deffous ou par
les coftez pour l'enlever
ou pour le percer ; cette
preflion fera proportionnée
à la quantité d'eau qui
entreroit dans la cave pour
chercher fon niveau dans
les plus grandes recreuës ,
s'il n'y avoit point d'oppofition.
En une cave de trois
toifes de longueur fur quatre
de largeur , où il entreroit
fix pieds d'eau
on doit s'attendre que le
>
GALANT. 197
guc
corps qui ferviroit
de dià
une maffe d'eau pareille
, fouftiendroit le fardeau
de 816480. liv. fupposé
que le pied cube d'eau
des caves ne pefe que 70 .
livres.
La plus forte dépenſe
ne paffera pas la fomme de
cinquante livres par toife
quarrée .
Il eft de l'intereſt public
, auffi bien que des
proprietaires des maiſons
baſties ou à baftir , de prévenir
les accidens que peuvent
caufer les frequen-
R iij
198 MERCURE
tes innondations qui arrivent
à prefent , foit par
rapport à la ruine des fondements
de leurs maiſons ,
foit à caufe des mauvaiſes
exhalaifons des eaux qui
fe corrompent dans les caves
, qui peuvent empoifonner
l'air , & produire
des maladies contagieufes .
Les Eaux de T.....
MADAME ,
Les eaux de ce pays ont
cela de merveilleux qu'elGALANT.
199
les font également filutaires
à ceux qui font malades
, qui croyent l'eftre ,
ou qui veulent l'eſtre , ou
qui le feront un jour , ou
qui l'ont efté il y a longtemps
: ferieuſement c'eft
un des plus charmants remedes
qu'on puiffe prendre
, fur tout pour guerir
de l'ennuy & du chagrin.
Charmantes eaux ceux qui les
prennent ,
Dans leurs infirmitez doucement
s'entretiennent ,
Trouvant le remede fi bon
R iiij
200 MERCURE
Qu'une trop prompte guerifon
Les chagrineroit fort eux &
ceux qu'ils y menent.
On boit , on rit , on jafe , on
s'abftient de raiſon ,
De ferieux & de contrainte ,
Et d'inquietude & de crainte
Qui troubleroient des eaux
1 l'effet lenifiant ,
Tranquilifant , dulcifiant ;
Autour de la fontaine on voit
mainte Nayade ,
Qui dans fon negligé pare la
promenade
Et l'on trouveroit en ce lieu
Plus difficilement un visage
malade ,
GALANT. 201
Qu'un bon vifage à l'Hoſtel-
Dieu.
Comme j'estois furpris
de voir tous ces malades en
bonne fanté , je demandois
avec empreffement de quel
mal cette fontaine gueriffoit
; mais je n'en pus eftre
éclairci , car pour toute refponſe
, les uns me hauf
foient les épaules , les autres
me rioient au nez ; &
j'en ferois revenu tresmalinformé
, fans un honnefte
homme , qui me connoiffant
eftranger , me tira
à l'écart , & me dit , vous
202 MERCURE
avez raiſon , Mr , de vous
eftonner de tout ce que
Vous voyez icy ; c'eft un
myſtere , & quand je vous
l'auray revelé vous en ferez
voſtre profit fi vous
pouvez. Vous voyez dans
ce lieu , pourfuit- il,un refte
des enchantemens jadis fi
communs en ce pays ; c'eſt
en cet endroit qu'Amadis
& Oriane commencerent
autrefois leur mariage , &
pour conferver une memoire
éternelle des plaifirs
qu'ils prirent , l'Enchanteur
qui les aimoit a
GALANT. 203
donne à ces eaux une vertu
merveilleufe
.
Ces eaux portent au coeur
fi douces vapeurs ,
Qu'une belle en beuvant , mefme
fans qu'elle y penſe ;
Guerit en un moment de toutes
fes rigueurs ,
Et le galant de fa fouffrance.
Vous voyez bien , Me ,'
que fçachant cela , je n'avois
garde de fouffrir que
Mademoiſelle de R .... en
buft fans voftré ordonnance
, n'y ayant là perfonne
qui puft luy faire raifon
par un contrat. C'est pour-
1
204 MERCURE
quoy nous la tiraſmes
à
l'écart
au plus viſte , car
pour dire le vray , outre le
charme
de ces eaux dont
on nous avoit avertis , nous
jugeaſmes
mefme
A cent petites bagatelles
,
Qu'on nepeut dire , & qu'on
voit mieux
Que l'air qu'on refpire en ces
lieux ,
Eft fort mal fain pour les
pucelles.
Nous la menerons au
premier jour à Wintfon ,
lieu charmant où le bon
Roy Lifvard tient mainGALANT
. 205
tenant Cour pleniere. Elle
prétend luy demander un
don , qui eft le reſtabliſſement
de la Chevalerie
pour quelques jours . Elle
voudroit voir , mais feulement
par repreſentation ,
comme à l'Opera , comment
les Chevaliers des.
Courtois enlevoient les
Princeffes , & comment les
Amadis les délivroient.
Nous la menerons aujourd'huy
voir un beau chaf
teau fait & embelli par
Fées , pour le fejour ordinaire
des Graces` , & la
les
206 MERCURE
retraitte des plus tendres
amours ; plus beau fans
comparaison que la ...
de Niphée. Je ne vous diray
rien des dehors qui
font faits , comme il plaiſt
à Dieu , qui en fçait bien
plus que le grand decorateur
des jardins , qui vous
a donné un deffein
pour....
La nature en ce lieu de mille
"
attraits pourvenë ,
Se prefente auxyeux toute nuë,
Et pour fe mieux faire admirer
,
A negligé de fe parer..
GALANT. 207
Le Ciel eft
exempt de
nuages ,
S'il en paroift ils font
brillants ,
Et fervent
à former
des levants
, des couchants ;
Ou pour plaire Apollon prend
tous les
avantages ,
Un beau vert
peint les prez ,
les , cofteaux , les bocages
Tout vous enchante , & l'art
humain
Refpectant de fi beaux où -vrages
,
N'ofe pas y mettre la main.
Il a fallu
que Mademoifelle
de R ... fe contentaft
de ce fpectacle , car le bon
Roy Lifvart n'a rien fait
208 MERCURE
pour elle , & dans tout le
chemin que nous avons
fait nous n'avons pas encore
trouvé une feule aventure
, pas un feul pont , ny
une feule barriere deffenduë
; point de torts à redreffer
, ny de felons à punir
; enfin pas mefme le
le moindre Geant à combattre
, mais bien un petit
Pigmée qu'on nomme Cupidon
, & qui ne laiſſe pas
d'avoir une force gigantefque
; nous avons pourtant
veu quelques Demoifelles
en palefroi qu'on
rencontre
GALANT . 209
rencontre de temps en
temps à la chaffe , je n'aurois
jamais creu eftre dans
le Royaume de la Grande
Bretagne , tant j'y trouve
tout changé depuis le regne
du Roy ; o
entend plus parler de Veuves
ny d'Infantes enlevées.
Artus ; on n'y
Ce n'estpas qu'à l'amour moins
de belles s'addonnent :
Mais je ne fçais fi c'est que
l'on craint plus les loix ,
Ou ft c'est qu'aprefent les Demoiselles
donnent
Ce qu'on leur voloit autrefois.
May. 1712.
S
210 MERCURE
Quoy qu'il en foit nulle
ne fe plaint , & je les trouve
mille fois plus honneftes
que ces babillardes du
temps paffé qui crioient
comme des perduës , &
attiroient des quatre coins
du monde des Chevaliers
errans pour les venger des
gens qui leur avoient fait
plus d'honneur qu'elles ne
meritoient . Enfin , Madame
, ce pays eft fi beau &
fi
bon ,
que fi par
hafard
quelque
Magicien
, felon
l'ancienne
couftume
, m'y
retient
enchanté
pendant
GALANT. 211
'deux ou trois mille ans
je vous prie de ne me plaindre
point, & d'attendre patiemment
mon retour , &
fans
inquietude .
Cette Ville eft pour moy toute
pleine d'apas , and
Je n'y vois ny procez , ny luxe,
ny miferes
On y fonne tres peu , l'on n'y
travaille guerel, onin
Et l'ony fait de longs repas.
Grosup
S ij
212 MERCURE
LE TEMPLE
de l'Effronteric.
Cantate nouvelle.
Par Mr AUBOUYN.
JE me jette, en tremblanı,
sau pied de tes autels ,
Seule reffource des mor
tels ,
Reine de ces climats , utile
EFFRONTERIE :
Je te vouë aujourd'huy mes
foins & mon ardeur
>
Mais c'eſt en vain que je te
prie ,
On ne t'approche point ;
GALANT . 213
conduit par la pudeur.
Quel mortel icy fe prefente
,
Quel abord bruyant , quel
éclat !
La voix haute , l'ame coutente
...
Je le reconnois , c'eſt un
fat.
Suivons - le , j'entre , quels
myftetes ,
Quels fecrets inconnus fe
revelent
à moy !
Sageffe , modeftic , au bonheur
fi contraires
,
214 MERCURE
Loin de moy , loin vertus
vulgaires ;
On ne vous fouffre point
aux lieux où je me voy.
Une extreme confiance
Y regne dans les efprits :
L'orgueil & la fuffilance
A tout y donnent le prix .
La vanité fait le langage
,
Qu'on y debite avec hauteur
:
On n'y voit point d'obſcur
autheur
,
On n'y lit point de foible
ouvrage ;
Le plus fol's'y donne pour
fage ,
GALANT . 2i5
Le poltron pour homme
de coeur,
La fortune , aveugle Déeffe ,
Eft affife au milieu de ce
peuple impofteur :
De fon culte inconftant ,
fouveraine Preftreffe ,
L'Impudence , luy fçait
faire agréer fans ceffe
Quelque nouvel adorateur .
Rarement le merite au
premier rang s'efleve ,
De trop de retenuë on lë
voit combattu ;
A tout moment l'audace
216 MERCURE
enleve
Ce l'on doit à la vertu .
que
Par quels détours , quelle
baffeffe
Obtient- on ces honneurs ,
dont nos yeux font
déçus ?
Il faut fe déguifer fans
ceffe ,
Devorer mille affronts ,
effuyer cent refus :
Dans le mépris , cacher le
dépit qui nous preffe ...
Mais tu fremis , mon coeur,
au feul nom de mépris ,
Et tu ne voudrois pas du
bonheur
GALANT. 217
bonheur à ce prix.
Modeftie , ô vertu , qu'un
moment j'ay quittée
Pour ce vain éclat , que je
haïs ,
La Fortune avec ces bienfaits
Par tant de lafchetez feroit
trop achetée ,
Dans mon obſcurité je
rentre pour jamais .
CEREMONIES
funebres.
Le Mardy dixiéme May
fe fit à Noftre - Dame
Service de feu Monfei-
T
May 1712 .
218 MERCURE
gneur le Dauphin
, & de
feue Madame
la Dauphi
ne: je ne vous en feray icy
aucun détail parce que la
cérémonie
a efté toute pareille
à celle de S. Denys
.
A l'occafion
de cette ceremonie,
on donneicy
une
peinture plus exacte de la
decoration du Choeur de
faint Denys , qui a paru
affez belle pour meriter
qu'on reforme dans ce
Mercure- cy ce qu'on en
avoit dit dans l'autre .
En entrant dans le Choeur
faifoit face une grande reGALANT.
219
preſentation en forme de
baldaquin , eflevé de vingtcinq
à vingt- fix pieds fur
douze pieds de large , &
dix huit de long.
L'Eftrade formoit un
quarré long , dont les pans
eftoient coupez par des
piedeftaux , & fe terminoit
en eſcalier de cinq
marches , faifant un plan
ovale par les deux bouts.
Lefdits piedeftaux faifoient
reffaut & plan rond
fur lesquels eftoient quatre
courbes en forme de confoles
fort enlevées
, & qua-
Tij
220 MERCURE
tre grandes figures de mar
bre blanc au pied de chaque
confole fur les reffauts
des piedeſtaux , ces figures
reprefentoient
quatre
Vertus ; fçavoir la Reli
gion , la Charité , la Prudence
, & la Juſtice .
Toute l'Eftrade eftoit de
marbre noir veiné de
blanc , & de blanc veiné
de noir. Les piedeſtaux ornez
de mefme d'agraffes
& cartouches de bronze
doré les coftez de l'Eftrade
eftoient auffi ornez de
me dailles & trophez,
GALANT . 221.
A droite eftoit les Chiffres
de Monfeigneur le
Dauphin , & à gauche ceux
de Madame la Dauphine ,
de bronze doré fur du marbre.
Les confoles eftoient de
marbre blanc , & les corps
de porte or, qui formoient
des panneaux ornez de feftons
de laurier, portant des
chapiteaux Ioniques qui
couronnoient lesdites confoles.
Sur les premieres
courbes eftoient des Dauphins
, dont la queue couloit
le long des confoles ,
T iij
222 MERCURE
& portoient fur la tefte chacun
une girandole_ronde
en forme de vaſe qui
portoit beaucoup de lauriers.
Les confoles par le bas
formoient une grande volute
qui portoit une tefte
de Cherubim , les ailes levez
fur la tefte comme fi
elles fouftenoient les confoles
, & d'autres ailes en
forme d'agraphes qui embraffoient
les volutes , du
milieu defquelles partoit
de chaque cofté une grande
girandole à cinq brang
GALANT. 223
ches garnies de flambeaux.
Les confoles eftoient profilez
de petites branches
portant chacunes un lys
dans lequel eftoit un flambeau
qui faifoit une grande
lumiere .
Les confoles portoient
une corniche architrave de
marbre blanc orné de modillons
de bronze doré .
Ladite corniche eſtoit à
pans , & portoit un focle
de marbre de brayer d'où
partoit un doſme qui faifoit
mefme plan orné de
bandeaux & trophez d'or
T iiij
224 MERCURE
fur des fonds de marbre
blanc & noir.
Le focle dudit dofme faifoit
reffaut fur les pans , &
portoit quatre vafes de vermeil
tout à jour , d'où partoiết
quantité de lumieres.
Au deffus du doſme eftoit
un dez orné d'agraphes
en forme de confoles
qui portoit une couronne
de Dauphins en or.
Sur les quatre faces de la
corniche eftoit un grand
cartouche de bronze doré
orné de teftes de morts
& autres attributs ,
GALANT.
225
1
Lefdits
cartouches eftoient
couronnez d'une
groffe
girandole à
cinq
Branches
portant des lumieres
. 4
Au
deffous de la
corniche
entre les
confoles, pendoit
une pente en
broderie
d'or ,
enrichie de fleurs de
lys , de
Dauphins , & de
gros glands
d'or.
Le fond du dolme eftoit
noir
fleurdelylé d'or , &
d'une croix de
moire d'argent
.
Le
dedans des
confoles
formoit un
corps de mar
226 MERCURE
bre noir fleurdelisé d'or.
Dans le milieu de l'eftrade
, on avoit enlevé un
tombeau de porte d'or fur
un focle enrichi de confoles
qui fe terminoit par
des griffes qui portoient
fur le focle du cofté droit
les armes de Monseigneur
le Dauphin en relief, ornées
des colliers & couronnes
; & du cofté gauche les
armes de mefme de Madame
la Dauphine .
Sur les coftez de l'eftrade
, il y avoit une herſe en
vermeil , ornée de fleurs
GALANT. 227
de lys , & de branches qui
portoient quantité de flambeaux..
Lefdites herfes fe
terminoient par les bouts
par une groffe girandole
en forme d'agraffe qui portoit
plufieurs lumieres , &
une groffe fleur de lys qui
portoit auffi plufieurs lumieres
, deforte que cela
faifoit une clarté , & donnoit
un grand éclat au tombeau
.
Sur ledit tombeau on
avoit posé les deux cercuëils
fçavoir Monfeigneur
le Dauphin à droite,
>
228 MERCURE
de
& celuy de Madame la
Dauphine à gauche . Elle
eftoit couverte d'un poil
noir couvert d'une grande
croix de moire d'argent ,
& brodé d'hermine ; celuy
Monfeigneur le Dauphin
eftoit couvert de poële
de la Couronne , qui eft
de drap d'or , couvert de
deux grandes armes à droite,
de Monfeigneur le Dauphin
, & à gauche , deux de
Madame la Dauphine
brodé en or, avec une grande
croix de moire d'argent,
& bordé d'hermine , lequel
GALANT . 229
couvroit les deux corps.
Sur chaque corps eftoit
un manteau à la Royale de
velours violet , avec quatre
de fleurs de lys d'or ;
rangs
fur celuy
de
Monfeigneur
le Dauphin
eftoit
fon collier
de l'Ordre
& fa couronne
fur un carreau
couvert
d'un
crefpe
, & fur celuy
de Madame
la Dauphi
ne eftoit
fa couronne
couverte
de mefme
.
Au deffus eftoit un grand
pavillon à pans dorez , femé
par deffus de fleurs de
lys d'or.
230 MERCURE
Il y avoit autour unë
grande pente en broderie
d'or , où pendoient de gros
glands d'or.
Quatre grandes queuës
fortoient de deffous femées
de fleurs de lys d'or , &
doublées d'hermine retrouffée
en l'air par les quatre
coins avec un gros
noeud .
Dans le fond dudit pavillon
eftoit une grande
croix de moire d'argent ,
avec quatre grandes armes
dans les quatre coins.
Il y avoit deffus quatre
GALANT. 231
grands bouquets de plumes
noires & blanches.
Aux quatre coins du
corps eftoient quatre Heraults
d'armes & quatre
Gardes fous les armes , devant
eftoit le Roy d'armes
entre les deux Maiftres des
ceremonies.
En face eftoit l'Autel orné
de fes ornemens ordinaires
, qui eft d'or , garny
de trois groffes pierres prétieuſes.
Dans le milieu en
haur eftoit une grande
croix d'or émaillée , & garnie
auffi de tres- groffes
1
232 MERCURE
pierres
fines
.
Au deffus eftoit un grand
dais garni de pentes en
broderie d'or dedans & dehors
, garni de gros glands
d'or , dont le fond eftoit
garni d'une croix de moire
d'argent avec quatre grandes
armes , deux de Monfeigneur
le Dauphin , &
deux de Madame la Dauphine.
Aux deux coftez eftoient
deux grands rideaux noirs
fleurdelifez en or , doublez
d'hermine , retrouffez par
de grands cordons d'or
garnis
GALANT. 235
garnis de gros glands fur
deux pillaftres qui portoient
ledit dais ; il eftoit
femé par deffus de fleurs.
de lys d'or , & garni de ,
huit gros bouquets de plumes
blanches & noires.
Lefdits pillaftres eftoient
d'or , qui portoient chacun
deux medailles, où eftoient.
en haut celles de Monfeigneur
le Dauphin , & en
bas celles de Madame la
Dauphine , le champeſtoit
femé de fleurs de lys , &
chaque medaille portoit
une girandole à cinq bran,
May. 1712. V
234 MERCURE
ches . Aux deux coftez eftoient
deux grandes piramides
en or , avec un fond
de mofaïque de fleurs de
lys , qui portoient chacune
une grande arme de Monfeigneur
le Dauphin , au
bas defquels eftoient une
grande girandole à plufieurs
branches
, & quantité
de branches qui portoient
des lumieres.
A la pointe de la piramide
eftoit une groffe fleur
de lys , qui portoit une
groffe girandole à cinq
branches.
GALANT . 235
Au deffus eftoit un architrave
doré qui regnoit
tout autour du Choeur avec
un lay de velours ſemé de
fleurs de lys , de larmes , de
Dauphins , & de croix blanches
, qui eftoient attachez
à une grande corniche dorée
qui regnoit autour de
l'Eglife qui formoit une
frife.
Sur les pentes & rideaux
eftoient les armes , en haut
de Monſeigneur le Dauphin
, & en bas fur les rideaux
, celles de Madame
la Dauphine le tout brodé
en or, Vij
236 MERCURE
Le tour du Choeur eftoit
tout garni de noir jufqu'
aux vitraux . Au deffus des
ftates eftoit un lay d'hermine
par feftons , qui re
gnoit autour du Choeur
fur lequel , de diſtance en
diſtance , eftoient les chiffres
de Monfeigneur & de
Madame la Dauphine dans
des medailles dorées .
Au deffus du lay d'hermine
eftoit un lay de velours
femé de fleurs de lys ,
de larmes , de Dauphins ,
& de croix blanches , qui
eftoit attaché à une corni
GALANT. 237
che , qui portoit des girandoles
à cinq branches , &
tout le long eftoient des
fleurs de lys garnies de lumieres.
Au deffus eftoient fix arcades
de chaque colté , &
deux dans le Jubé , dans
lefquels eftoient des amphitheatres
, où eftoient
placez des gens de quali
té. Ladite décoration eftoit
composée de quatorze
arcades , avec des pillaftres :
de vingt pieds de haut fur
quatre pieds de large , de ›
marbre blanc , avec des
238 MERCURE
panneaux dans les milieux ,
de marbre pal or , avec des
moulures
d'or . Ils portoient
chacun une grande
medaille où eſtoient reprefentées
treize Vertus , à la
gloire du Prince & de la
Princeffe , le tour en or.
Les Vertus eftoient la
Foy chreftienne , la Picté ,
l'acte vertueux , Defirs envers
Dicu , Juftice invioli :
ble , Commandement fur
foy - melme , Sageffe humaine
, Concorde , Concorde
conjugale , Gloire
des Princes , Egalité , BienGALANT.
239
veillance , & Amour de la
patrie , ils portoient chacunes
une grande girandole
de plufieurs lumieres.
Au bas de chaque pilaf
tre eftoit un fcabellon doré
, qui portoit une girandole
à cinq branches .
-
Et au deffus des pilaftres
regnoit un architrave doré
, qui portoit le ſecond
lay de velours qui fermoit
une frife , fur laquelle eftoient
femées des fleurs de
lys , des Dauphins, des larmes,
& des croix , attachée
à la grande corniche qui re240
MERCURE
gnoit à l'entour du Choeur,
dorée, qui portoit au deffus
au droit des pilaftres un›
couronnement en forme
de medaille fur un focle de
marbre blanc , enrichi de:
feftons & de chiffres de
Monſeigneur , & de Madame
la Dauphine alternativement
, & le long de ladite
corniche eftoient des :
fleurs de lys & lys garnis
de lumieres. Les pilaftres;
fe terminoient fous l'ar--
chitrave par une agraffe en
forme de confole , qui portoit
une grande girandole .
Dans
GALANT. 241
Dans les angles de l'Autel
& du Jubé eftoient deux
pilaftres chacuns , qui faifoient
retour , fçavoir ceux
de l'Autel eftoient comme
ceux qui portoient le
grand Dais , & ceux du
Jubé portoient feulement.
chacun une medaille où
eftoit un chiffre de Monfeigneur
le Dauphin , & de
Madame la Dauphine , attaché
à des feftons de
feuilles , le tout en or.
Au milieu de chaque arcade
, eftoit , fçavoir aux
deux premieres du cofté.
May, 17120 X
242 MERCURE
de l'Autel , une grande arme
de Monfeigneur le
Dauphin fort ellevée ſouftenue
par deux Renommées,
enrichies de trophez
de bronze doré , au deffous
defquels eftoient deux
grands rideaux noirs ſemez
de fleurs de lys , &
doublez d'hermine retrouſſez
en feftons fur les
deux arriere-corps , & au
bas des armes pendoit une
cheute defdits rideaux , ſemez
de fleurs de lys , &
doublez d'hermine .
Au bas defdites armes
GALANT . 243
pendoit à chacune une
grande medaille en or , où
eftoient reprefentées, dans
une, la pureté , & dans l'autre
, la Religion , & au bas
une girandole à pluſieurs
branches.
Aux deux fecondes arcades
eftoit un grand pavillon
de relief fort eflevé ,
couronné d'une couronne
de Dauphin , avec des pentes
en broderie d'or , où
pendoient de gros glands ,
au deffous defquels fortoient
deux grands rideaux
retrouſſez par feftons ſur
$
X ij .
244 MERCURE
les deux arriere. corps , fe
mez auffi de fleurs de lys ,
& doublez d'hermine .
Au deffous deſdits pavillons
eftoient de grandes
armes de Madame la Dauphine
, garnies de palmes
& de lauriers , & fouftenuës
par deux Anges , au
bas defquels eftoient à cha
cun deux girandoles à plu--
fieurs branches , le tout de
bronze doré .
Au deffous des armes
cftoit un timpan bas de
marbre blanc , & les mouleures
d'or , qui fervoient
GALANT . 245
comme d'appuy , où eftoit
repreſentée une groffe tefte
de mort avec les attributs
, & des feftons de cyprez
, le fond defdits timpans
eftoit femé de larmes
d'argent fur un fond de
marbre noir , & tout le refte
en or.
Ils portoient au deffus un
vafe en forme de lampe
antique avec deux groffes
lumieres , & eftoient lesdits
timpans profilez de branches
de lumieres en grand
nombre.
༡
Aux deux troifiémes ar-
X iij
246 MERCURE
cades eftoit de meſme eflevée
fort haut une
grande
arme , d'où fortoient de
grands rideaux retrouffez ,
au bas defquels eftoit un
grand timpan de marbre
blanc avec des mouleures
d'or , où eftoit un chiffre
de Monſeigneur le Dauphin
, & de Madame la
Dauphine , entrelaffé avec
des lauriers & des palmes ,
fouftenu par deux enfans
qui pleuroient , & qui eftoient
entrelaffez de feftons
de cyprez , & deux
gros Dauphins fur les pro-
X
GALANT. 247
fils defdits timpans , fur
leſquels eftoient attachées
des branches qui portoient
des lumieres , & au deffus
eftoit une groffe fleur de
lys , qui portoit une lumie+
les autres.
re plus forte que
Aux deux coftez eſtoient
deux vafes qui portoient
de mefme deux lumieres
plus fortes que les autres .
Aux quatrièmes arcades
recommençoient
les pavillons
avec les armes de
Madame la Dauphine
comme cy devant , & aux
cinquièmes , des armes de
X iiij
248 MERCURE
Monſeigneur le Dauphin ,
de mefme qu'au troiſième .
Au fixiéme des
pavillons
les armes de Madame la
Dauphine , & aux deux
feptièmes au deffus du Jubé
, les armes de Monfeigneur
le Dauphin , ellevés
comme les autres avec des
rideaux retrouffez fans timpans
deffous à cauſe de la
mufique.
Devant le Jubé eftoit
une balustrade de marbre
blanc veiné , dans le milieu
de laquelle eftoient les
chiffres de
Monfeigneur le
E
GALANT . 249
Dauphin , avec des trophez.
Les balustrades eftoient
dorées fort richement.,
Service folemnel à Notre Da
me de Paris. j
Le dix de ce mois on fit
dans l'Eglife Metropolitai
ne un Service folemnel
pour Monſeigneur le Dauphin
, & Madame la Dauphine.
Le Cardinal de
Noailles Archevefque de
Paris officia , & le Pere
Gaillard Jefuite prononça
l'Oraifon funebre. Mon250
MERCURE
feigneur le Duc de Berry ,
Madame la Ducheffe de
Berry , Monfieur le Duc
d'Orleans , Monfieur le
Comte de Charolois , Mademoiſelle
de Bourbon ,
& Mademoiſelle de Charolois
, eftoient les Princes
& Princeffes du dueil , &
ils allerent à l'offrande chacun
felon fon rang , conduits
alternativement par
le Marquis de Dreux Maiftre
des ceremonies .
Le Parlement , la Chambre
des Comptes , la Cour
des Aydes , l'Univerfité &
GALANT. 251
le Corps de Ville y affifterent
, ayant efté invitez par
ordre du Roy.
La ceremonie faite Monfieur
le Cardinal de Noailles
eut l'honneur de donner
à difner dans l'Archevefché
à Monfeigneur le
Duc de Berry , à Madame
la Ducheffe de Berry , accompagnez
de Monfieur
'le Duc d'Orleans , de Monfieur
le Comte de Charolois
, de Mademoiſelle de
Bourbon , & de Mademoifelle
de Charolois : le repas
fut magnifique , & fort
252 MERCURE
bien fervi , les Princes &
les Princeffes en furent fort
contents , il y eut auffi plufieurs
tables fervies pour
les Seigneurs , & principaux
Officiers de leur
fuite.
Enfin Monfieur le Cardinal
de Noailles agit en
cette occafion , comme il
agit en toutes felon fon
caractere. On fçait qu'il
eft auffi noble & auffi magnifique
pour les autres ,
qu'il eft fimple & modefte
en ce qui ne regarde que
La
perfonne.
319
GALANT . 253
pour
On a celebré le fept de
ce mois , un Service folemnel
dans l'Eglife du College
de Louis Le Grand ,
Monteigneur le Dauphin
& Madame la Dauphine
; le Pere Sanadon ,
un des Profeffeurs de Rhetorique
, prononça le foir
l'Eloge funebre en latin ,
avec beaucoup de fatisfaction
de toute l'affemblée ,
?
compofée de plufieurs Prélats
& autres perfonnes de
diſtinction , la Salle eftoit
éclairée de quantité de lumieres,&
ornée de devifes.
254 MERCURE
MORTS.
Le 22. d'Avril dernier
mourut icy haut & puiſſant
& Religieux Seigneur Frere
Jacques de Noailles ,
Bailly , Grand Croix de
l'Ordre de faint Jean de
Jerufalem , Commandeur
des Commanderies de S.
Thomas de Trinquetaille
en Provence , & de la Croix
en Brie , & Ambaffadeur ;
de Malthe pres Sa Majeſté,
il eftoit fils de feu Monfieur
le Duc de Noailles ,
frere de feu Monfieur le
GALANT . 255
Marefchal de Noailles ,
frere de Monfieur le Cardinal
de Noailles Archevefque
de Paris , & de Monfieur
l'Evefque Comte de
Chalons , Pair de France.
L'ancienneté de cette Maifon
eft fi connue à la Cour,
& dans tout le Royaume ,'
qu'il feroit inutile de vous
en faire un détail ; je me
contenteray de vous dire
que celuy dont je parle ,
eftoit né en Octobre 1653 .
qu'il fut fait Chevalier de
Malthe en tres bas âge ,
Madame la Ducheffe fa
2
256 MERCURE
mere eftant bien aife d'a
voir un de les fils dans cet
Ordre , dont Aloph de Vignacourt
fon grand Oncle
, avoit efté Grand Mailtre
, place où elle a veu depuis
Adrien de Vignacourt
fon oncle , Prédeceffeur de
celuy qui regne aujourd'huy
; le jeune Chevalier ,
aprés avoir fait les caravannes
, fe trouvant accou
ftumé à la mer , fut deſtiné
à ce fervice par Monfieur
le Duc fon Pere . Il fut fait
Capitaine de Vaiffeau ;
enfuite il eut la Charge
de
GALANT. 257
de Lieutenant General
Galeres de France des
qu'il a exercée pendant
vingt cinq Campagnes ,
ayant commandé les Galeres
du Roy en cette qualité
par tout où elles ont
eu ordre d'aller , à Alger ,
au bombardement de Gennes
, à la priſe de Barcelonne
, où il mit pied à terre
, & monta la tranchée
en qualité de Lieutenant
General des armées de fa
Majefté ; & enfin par tout
ailleurs où elles ont fervi
jufqu'en 1704. que Mr le
May 1712.
Y
258 MERCURE
Bailly de Hautefeuille Ambaffadeur
de Malthe eftant
décedé , fa Majefté trouva
bon que Monfieur le Bailly
de Noailles acceptaſt cette
Ambaffade que fon Ordre
luy propofoit, & qu'il a gardée
juſqu'à ſa mort.
Il fut enterré le lendemain
de fon deceds , dans
la Chapelle que la Maiſon
de Noailles a en l'Eglife
de Noftre - Dame , & Meffieurs
de Malthe firent celebrer
pour luy le 7. May
fuivant un Service folemnel
dans leur Egliſe du
GALANT . 259
Temple , où tous les Commandeurs
& Chevaliers af
fifterent avec Monfieur le
Cardinal de Noailles , &
les Seigneurs & Dames de
fa famille.
PROMOTION
de Cardinaux.
Le 18. le Pape a remply
les dix huit places vacantes
dans le Sacré College ;
fçavoir , les onze faits fuivans
, & il en a retenu ſept
in
petto,
Y ij
260 MERCURE
MESSIEURS
Davia.
Cufani.
Piaffa , Nonce à Vienne.
Zondedari.
De Rohan , Evefque de
Strasbourg , pour la
.. France.
Acuna de Afeide , pour le
Portugal
.
,
Scofembach Evefque
d'Olmuts , pour Vienne.
Prioli , Auditeur de Rote ,
pour Venife.
Tolames , Jefuite.
Thomafi , Theatin .
Caffini , Capucin , Prédi
GALANT. 261
cateur du Palais Apoftolique.
Les fept retenus in petto
font :
Celuy pour l'Espagne , &
les trois du Palais ; fçavoir
:
Corradini , Miniftre de la
Chambre.
Pico , Majordome .
Oriaghi , Secretaire de la
Chambre
. Ces quatre
font feurs .
L'Abbé de Polignac eſt
le cinquième
felon toute
apparence
, l'Evefque de
Barcelonne
le fixiéme .
262 MERCURE
Mr Buffi Nonce de Pologne
le ſeptiéme .
Un pareil article merite
bien qu'on l'eftende
beaucoup mais je reçois
cette Lettre fur la fin de
l'impreffion du Mercure ;
je vous donne toujours cecy
comme nouvelle fraifche
, ce qui n'empefchera
pas que pour le Mercure
prochain je ne recherche
avec foin des memoires
curieux fur les perfonnes.
illuftres qui ont eſté nommées
, & fi je puis quelque
érudition fur les élections
GALANT. 263
des
Cardinaux en
general
.
Monfieur l'Abbé de Vauginnois
, dont on a desja
parlé , a eu de Sa Majeſté
l'Abbaye de Noftre- Dame
du
Tronchet en Bretagne,
Dioceſe de Dol , Ordre de
faint Benoift.
Monfieur l'Abbé de Vauginnois
eft de la famille
de Fyot , une des plus anciennes
du Parlement de
Bourgogne , fils de Monfieur
de Vauginnois Préſident
aux Requeſtes du Pa264
MERCURE
lais à Dijon neveu d'un
Abbé de fon nom , ancien
Aumofnier du Roy , Confeiller
d'honneur en ce Parlement
, & Abbé de faint
Eftienne de Dijon , & neveu
auffi de Monfieur le
Marquis de Mimeure, Marechal
des Camps & Armées
du Roy , qui a eſté
Gentilhomme de la Chambre
, & Menin de feu Monfeigneur
le Dauphin.
GALANT. 265.
Extrait d'une Lettre de M.
Galiczon , Evêque d'Aga
thople , Coadjuteur de
Babylone , à M.....
A Teflis ce 3. Août 1711,
MONSIEUR ,
J'ai eu l'honneur de vous
écrire vers le 15. Juin à nôtre
débarquement de la
Mer noire , en un lieu où
rade appellée Arkaval , dans
le Bachalie ou Gouverne-
MANY
7
266 MERCURE
ment de Calfikais , qui faifoit
une partie de l'ancien
Royaume de Georgie , de
laquelle les Turcs ont prefque
banni la Religion
Chrétienne à force d'impôts
& d'avanies qu'ils ont
exercez fur les habitans.
Nous avons été obligez de
prendre cette route pour
paffer en Perfe ; & le 16. Juin
au matin nous montâmes
fur de méchans chevaux du
pays avec leurs bats , conduits
par des Turcs , dont
un particulier , qui étoit
leur Mouffa , penfa , fur les
1
GALANT. 267.
deux heures aprés midi, fur
une coline entre des bois ,
tuer M. Richard d'une grof
fe pierre , & nous faire affaffiner
par tous ces infide
les. Il n'y a que les hommes
& les chevaux
du pays qui
puiffent
paffer par les montagnes
affreufes
, les bois
entrecoupez
, les torrens , &
les routes eſcarpées
par lef
quelles
ces gens - là nous
menerent
pendant
plu
fieurs jours. Nous arrivâmes
enfin à Calfikais
le
Mercredi
, Nos caracteres
n'étoient
point connus
, &
1
Zij
268 MERCURE
nous paſſions comme de
pauvres Marchands François
; ce qui nous avoit obligez
de laiffer tout à Conftantinople,
principalement
nos livres & breviaires.
A nôtre arrivée à Calfikais
, quantité d'Armeniens
Catholiques en avoient rencontré
deux de nôtre troupe
, qui , quoique Schiſmatiques
, nous avoient été
d'un grand fecours dans
plufieurs occafions dangereuſes
. Dans une prairie un
Douannier vifita nos har-
Jes , & nous contraignit de
GALANT. 269
lui donner dix piaftres ,
quoique nous n'euffions
rien qu'à nôtre uſage . Enfuite
ces Armeniens nous
menerent à un endroit prés
les murailles , où nôtre gui-.
de nous étoit allé prendre
un logement chez une pauvre
veuve , afin que nous
ne fuffions point obligez de
paroître dans la ville. Nôtre
guide nous avoit fait
faire des prefens que nous
avions achetez à la femme
& au fils du Bacha , qu'il
leur étoit allé porter fur la
"
route à une maiſon de cam-
Z iij .
270 MERCURE
ई
pagne , & dont il tira une
lettre de recommandation
pour le Muffalem qui commandoit
dans l'abſence du
Bacha. Cette lettre , nôtre
ferment , & nôtre bojour
dy , les prefens que nôtre
guide nous fit auffi faire au
Doüannier, au Muffalem &
au Soubachi , n'empêcherent
pas tous ces gens - là de
nous avanizer étrangement
, & principalement le
Muffalem , qui aprés avoir
reçû nos prefens nous prit
pour des efpions , & crut
volontiers les Armeniens.
GALANT. 271
Schifmatiques, qui ne manquerent
pas d'aller lui dire
que nous voulions paffer
en Georgie pour nous rendre
chez les Mofcovites ,
& que nôtre deffein étoit
d'exciter à la revolte les
Armeniens Catholiques ,
qui font à Calfikais au nombre
d'environ foixante familles.
Nous fûmes gardez
à vûë , on nous retint nôtre
ferment & nôtre bojourdy,
on nous voulut obliger
d'attendre le retour du Bacha
; enfin on ne nous laiffa
paffer qu'à force d'argent ,
Z iiij
272 MERCURE
& fi on eût découvert qui
nous étions , jamais nous
n'euffions paffé.
Nous partîmes la nuit du
.
28. au 29. à minuit : mais
comme nous montions à
cheval , il vint deux Janiffaires
le coûteau tiré fur
nous , que nous ne pûmes
appailer qu'avec de l'ar
gent.
Le 30. fête de faint Paul ,
nous entrâmes fur les ter-.
res de Georgie , qui eſt un
pays Chrétien dépendant
du Roy de Perfe . La joye
que nous eûmes de retrou
1.
GALANT.
273
ver la Croix dans le che-.
min , des Eglifes Chrétiennes
en chaque village , &
des habitans tous Chré-.
tiens , nous remit un peu de
nos fatigues. Nous arrivâmes
le 2. de Juillet à Teflis ,
Capitale de Georgie , où
les Peres Capucins Italiens,
qui vinrent avec beaucoup
de Catholiques au devant
de nous , nous menerent loger
rchez eux. Ils étoient ra-.
vis d'y voir un Evêque Latin
, n'y en ayant jamais eu
depuis foixante ans qu'ils .
font établis. Ils m'ont fait
274 MERCURE
officier le Dimanche cinq
Juillet , & le Vendredi fuivant
, aufquels ils folemnifent
la Nativité de faint
Jean- Baptifte & la fête de
faint Pierre & faint Paul ,
felon le vieux Calendrier
qu'ils fuivent avec les Georgiens
& Armeniens.
Ils m'ont mené faluer le
Prince de Georgie , qui
commande à la place de
fon frere , qui eft Generaliffime
du Roy de Perfe au
fiege de la fortereſſe de
Candahar , qu'il eſt allé reprendre
vers le Mogol. J'ai
GALANT. 275
vû aufli ſon autre frere , &
plufieurs perfonnes de la
famille Royale , tous Chrétiens
, & qui nous demandent
des nouvelles des guerres
de la Chrétienté. Ils furent
affligez de la mort de
l'Empereur , dont la nouvelle
vint à
Conftantinople
à nôtre départ .
On a preffé plufieurs fois
le Prince qui commande
de fe faire Mahometan :
mais il eft toûjours demeuré
ferme , offrant de quitter
plûtôt le commandement
que la Religion Chrétien
$
276 MERCURE
ne , & s'excufant auprés du
Roy de Perfe fur un voeu
particulier qu'il avoit fait
de la profeffer toûjours. Le
nom de ce Prince eft Vak--
tank..
C'eft une chofe confolante
de voir qu'un pays
auffi refferré que la Geor--
gie par les Infideles , s'eft
toûjours confervé dans le
Chriftianifme depuis que
les Perfans l'ont fubjugué..
On compte à Teflis treize:
Eglifes Georgiennes , &
neufArmeniennes , & celle:
des Peres Capucins , qui eſt:
GALANT. 277
affez grande & tous les jours
remplie de Catholiques. Il
y a dans la Citadelle , qui
eft vafte, fept Eglifes Georgiennes
mais comme les
Mahometans feuls y de
meurent , ils les ont profanées.
Ils y ont feulement
deux Molquées , & deux
dans la ville , mais fans minarets
ou tours pour appeller
à leurs prieres ; au
lieu que nous entendons de
côté & d'autre les cloches
des Chrétiens , qui ont de
grands clochers ou tours
de pierres fur une partie de
278 MERCURE
leurs Eglifes. Les Georgiens
le difent defcendus
des Iberiens venus d'Efpagne.
J'ai vu officier le 11. Juillet
leur Catholicos , qui à
fous lui cinquante - deux
Archevêques
ou Evêques .
Il y avoit trois Archevêques
.
& neuf Prêtres qui celebroient
la Meſſe avec lui :
le refte du Clergé y ſervoit
& les Chantres laïques
ayant un Prêtre ou Religieux
à leur tête , faifoient
une fymphonie affez grave
dans la nef à côté gauche.
GALANT.
279
Le Prince ayant fçûla veille
que je devois aller voir of
ficier le Catholicos , qui eſt
fon frere , avoit donné ordre
que j'y euffe toute la
fatisfaction que je pourrois
defirer.
Ma plus grande peine à
Teflis a été d'entendre à
mon arrivée les plaintes
des Miffionnaires fur le pitoyable
état de leur Mif
fion : ils me dirent qu'à peine
M. Michel , Envoyé du
Roy à la Cour de Perfe , où
il leur avoit obtenu & à toutes
les Miffions plufieurs
a
280 MERCURE
commandemens favora
bles , étoit forti du Royaume,
que la perfecution avoit
recommencé. Les Armeniens
vinrent affieger l'Eglife
& la maifon des Peres
, qu'ils vouloient tuer :
ne pouvant y reuſfir , ils allerent
piller dix-huit maifons
des Catholiques , & en
battirent pluſieurs , qu'ils
laifferent comme morts
fans qu'on en pût avoir juſtice
.
1
Les Armeniens font venus
pour fermer la porte
de l'Eglife des Peres de Te-
Alis .
GALANT. 281
>
Alis & celle de Gori en
Georgie , qui n'attend que
le moment de l'être , comme
le font déja celles de
Gangia , de Chamoké , &
de Tauris.
Celle de Gangia fouffre
depuis ce temps - là une fi
cruelle perfecution , que le
Superieur a été mis plufieurs
fois fous le bâton , & avanizé
de trés- groſſe ſomme.
Enfin l'ayant été encore depuis
peu , il a été obligé de
s'enfuir vers la Mofcovie ,
& fon compagnon à Teflis,
où il fe refugia en ma pre-
·May 1712.
A a
282
MERCURE
fence chez les Peres..
La Miffion de Tauris ,
poffedée par les Reverends
Peres Capucins de la Province
de Touraine , aprés
plufieurs perfecutions , fut
fermée le 11. Janvier , en
forte que les Peres font demeurez
fans communica
tion & fans fecours ; & j'ap
prends que le Patriarche
veut donner le dernier coup
aux Miffions , & chaffer en
tierement les Miffionnaires
. Ce Patriarche a tellement
le deffus , que dans le
Ragan ou écrit qu'il a obGALANT.
283
tenu , il eſt marqué que fi
le
Patriarche ne voulant pas
qu'ils reftent dans les lieux
où ils font , & qui font fpecifiez
, comme Hifpahan ,
Jutpha , Hamadan , Chiras
, Tauris , Gangia , Chamaquiés
, Teflis, & tous autres
qui font dans le Royaume,
& s'il a deffem d'acheter
leurs maiſons , il pourra les
faire vendre fuivant l'efti
mation du Juge de la ville.
Le Prince de Teflis m'a
donné mille marques d'affection
; il m'a donné un
repas à fa maiſon de plai-
A a ij
284 MERCURE
fance avec
avec quantité de ,
Prelats & Seigneurs de ſa
Cour , & m'a fait preſent
d'un cheval , & c. V. S.
SHQIP
Cette Lettre eft trés- -
curieufe , en ce qu'elle
fait voir naïvement l'é
tat où eft à preſent le
Chriftianifme
dans ces
pays- là , d'où l'on reçoit
peu de nouvelles auffi
certaines que celles - ci .
GALANT 2835
********
PIECE NOUVELLE
LA VIOLETTE.
JE . fus jadis une Nymphe
affez belle
Pour charmer Apollon &
n'attirer les voeux : ... ^.
Mais aux loix du devoir je
fus affez fidelle
Pour demeurer toûjours infenfible
à fes feux.. a
Exilé du fejour celefte
Il paiffoit les troupeaux du
riche époux d'Alceſte.
Comme Berger , l'Amour
286 MERCURE
eut des droits fur fon
coeur ;
Et comme Dieu , fon rang
& fa naiffance
Lui donnoient trop de confiance
Pour cacher long - temps
tofon ardeur.
'Aux champs Theffaliens fi
j'allois chercher Flore ,
Je n'y trouvois que lui :
Je le fuis dans les bois , Dia
ne que j'implore
Y devient mon appui.
Evitez , me dit- elle , évitez
·les
montagnes ,
Evitez les vaftes campa
gnes ,
GALANT.
287
Ces lieux font trop ouverts
aux regards d'Apollon .
A ces mots tremblante ,
certaine ,
in-
Je croyois me cacher au
bord d'une fontaine ,
Dans un buiffon épais , dans
le creux d'un vallon ,
Afiles fûrs , s'il eût été pof
fible
D'en trouver contre un tel
Amant ,
De l'un de ſes tranſports
portant le châtiment ,
Periffent les attraits qui
l'ont rendu fenfible ,
M'écriai- je , Diane , exauce
288 MERCURE
mes fouhaits ,
Je quitte fans regret ma
blancheur éclatante ,
D'un voile prefque noir
j'obfcurcis mes attraits ,
Et modefte & rampante
Je tombe vers la terre , &
deviens une fleur.f
A Diane j'en fuis plus chere,,
La vertu dont je garde en
cor le caractere
M'a confervé ma douce
odeur ::
C'eft à ce titre que j'efpere
Chez toy , fage Uranie , un
favorable accueil .
Si modefte au milieu de tout
ces
GALANT . 289
ce qui peut faire
Le fujet du plus juſte orgüeil
,
Aux applaudiffemens ton
coeur fçait fe fouftraire ;
Si l'Amour te trouva moins.
fevere que moy ,
C'eſt que la vertu même
en demandant ta foy ,
Anima les ardeurs de qui
vouloit te plaire...!
Mais à tes côtez j'apperçoy
L'Amant qui cauſe ma colere
:
Que dis- je ? ce n'eſt plus le
Berger temeraire ,
C'eft le Dieu tutelaire
May 1712.
Bb
190 MERCURE
Des fages , des fçavans qu'il
range
fous ta loy.
Il ne cherche plus à feduire
Quiconque voudra l'écou
ter ;
S'il veut charmer, c'eft pour
inftruire ,
De tes fages leçons il a fçû
profiter.
Nouvelles de Flandres.
Les armées de Flandres
ſont aſſez tranquilles
de part & d'autre ; ce
qu'on attribue à la diGALANT.
291
1 ne
fette de fourrages , & à
ce que toutes les troupes
n'étoient point encore .
arrivées. Les regimens
de cuiraffiers de Lobkovvitz
& de fainte Croix,
qui font la tête des troupes
Auftrichiennes ,
partirent que le 9. de ce
mois des environs de
Bruxelles , où elles ont
fejourné, étant fatiguées
de leur longue marche
& du mauvais temps.
Ceux qui la fuivent n'é-
Bb ij
292 MERCURE
tant gueres en meilleur
état , fejournent
auffi
prés la même ville . On
ne croit pas qu'elles puiſ
fent joindre l'armée avant
le vingt - cinq du
mois . holandish
Le Duc d'Ormond
partit le neuf de Gand
pour l'armée . Les lettres
de Lifle & de Tournay
affurent que les Anglois
étoient encore campeż
à Bailieu que le Prince
Eugene n'est parti de
GALANT 293
Tournay , pour aller
joindre l'armée , que le
dix. ch
:
On écrit de Bouchain ,
que l'armée des Alliez
étoit toûjours tranquille
neanmoins on croit
qu'elle ſe mettra bientôt
en mouvement , à
caufe que l'artillerie &
les munitions y font arrivées
, & que le reſte
des troupes de l'Electeur
Palatin & de l'Archiduc
doivent joindre
B biij
294
MERCURE
avant la fin de ce mois .
On mande d'Arras ,
望
qu'on continuë de voiturer
en cette ville des
farines , de l'avoine , &
du fourrage fec. L'armée
du Roy occupe tou
jours les mêmes poftes
le long de l'Efcaut , de
la Senfée , & de la Scarpe.
Le Maréchal de Villars
a fait faire deux éclufes
à Cambray : l'une
pour remplir les foffez
de l'eau de l'Escaut ; l'auGALANT.
295
tre pour retenir l'eau de
cette riviere , qui innonde
& fe répand des deux
côtez un quart de lieuë
au- deffus de la ville .
On écrit de Tournay,
que le Duc d'Ormond a
affifté aux confeils de
guerre qui s'y font tenus.
Il a fait la revuë
des troupes Angloiſes
,
qui campoient
entre Baifieu
, fur le chemin de
Tournay à Lifle , d'où
elles allerent le 19 join-
Bb iiij
296 MERCURE
dre la grande armée
qui eft toujours campée
à la Vvarde & à Lieu
faint Amand , prés de
Bouchain . Le Prince
Eugene , le Duc d'Ormond
, & les autres Generaux
s'y rendirent le
vingt.
On écrit d'Ypres, qu'-
un detachement
de la
garniſon a battu quelques
partis des ennemis ,
dont l'un conduifoit
à
leur armée un grand
GALANT 297
nombre de beftiaux ,
qu'on leur a enlevez.
Les lettres d'Utrecht
affurent qu'il n'y a point
eu d'affemblée generale
le trente Avril , ni le
quatre de ce mois , à
caufe que les Plenipotentiaires
de France n'avoient
point receu d'inftructions
pour répondre
aux demandes fpecifiques
des Alliez.
Le Sieur Menager eut
le vingt- neuf une con298
MERCURE
ference particuliere avec
le Sieur Buis , l'un des
Plenipotentiaires
Provinces Unies .
des
Le Maréchal d'Uxelles
eut une autre conference
avec le Comte de
Sinzendorf, Plenipotentiaire
de l'Archiduc.
Le Comte de la Corfana
, fecond Plenipotentiaire
de l'Archiduc ,
fe rendit à Utrecht le 5 ,
où les Miniftres des deux
partis fe vifitent freGALANT
. 299
quemment. Il y a eu des
conferences entre ceux
des Alliez mais il n'y
en a point eu de generale
le quatre , le fept ,
& le onze. On croit qu'-
il n'y en aura point jufqu'à
ce que les Plenipotentiaires
de France
ayent receu de nouveaux
ordres .
Les lettres d'Utrecht
affurent qu'il n'y a point.
eu de conference generale
le quatorze , ni le
300 MERCURE
dix - huit , à cause que
les Plenipotentiaires
de
France n'avoient point
encore receu de nouveaux
ordres .
Nouvelles de Paris.
Le vingt-deux de ce
mois l'Abbé Fagon fut
facré Evefque de Lombez
dans la Chapelle de
l'Archevefché , par le
Cardinal de Noailles ,
Archevefque de Paris ,
GALANT . 301
qui eut pour Affiftans
l'ancien Evefque
de
Condom
, & l'Evefque
de Saint Omer.
On a eu avis que le
Capitaine Bournonville
ayant paffé le Rhin avco
deux cent cinquante
hommes des compagnies
franches du Brigadier
la Croix , étoit tombé la
nuit du trente Avrildans
la V veteravie , fur le
quartier de cinqe regimens
de l'Archiduc, qu'il
302 MERCURE
avoit mis en un trésgrand
defordre , y en
ayant eu dans la ſurpriſe
pluſieurs tuez & bleſſez ;
& qu'il s'étoit retiré avec
environ · foixante
chevaux
, avec une perte
peu confiderable ,
n'ayant eu en cette occaſion
qu'un homme tué
& quelques bleffez .
Le vingt - quatre on
celebra un Service folemnel
à la Sainte Chapelle
du Palais pour
GALANT. 303 ,
Monſeigneur le Dauphin
& Madame la Dauphine
. L'Abbé de Champigny
, Treſorier de cette
Eglife , officia pontificalement
. Le Pere de
la Rue Jefuite prononçar
l'Oraifon funebre. La
Chambre
des Comptes
.
y affifta en Corps .
Nouvelles extraites de
plufieurs
Lettres.
Les lettres de Lon304
MERCURE
dres portent qu'un vaiffeau
Anglois arrivé de
Moca , chargé de caffé ,
a raporté que le vaiſſeau '
le Godolfin avoit été pris
a :1x Indes Orientales par
les François , & que l'Oxford
qui appartenoit à
pluſieurs particuliers ,
s'étoit brifé contre des
rochers.
La Diligence Galley ,
armée en courſe , étant
arrivée de Naples dans la
Tamife , chargée d'huile
&
GALANT . 305
& d'autres marchandifes
, perit le dix : le feu
s'y étant pris par accident
, la fit fauter. On a
eu le temps de fauver
l'équipage.
FIN.
May 1712.
Cc
TABLE.
L ▲ conftance des femmes ,
page 3 .
Memoire pour une Aſſemblée
de
Droit ,
Morts ,
Mariage,
36
42
47
Nouvelles de Flandres , 49
Nouvelles
d'Angleterre , sz
56
Nouvelles
d'Espagne ,
Nouvelles du Levant , 58
La fauffe Valeur,
60
Errata pour le Memoire des
TABLE.
Abeilles du Mercure pre
cedent , C 71.
Dons du Roy , 73
Articles des Enigmes , 87
Noms de ceux qui ont deviné
la Chevelure , 89
Enigme nouvelle , 91
Questions , 95
Patentes Espagnoles , 98
Relation ,
Madrigal,
Traduction des Patentes , 104
Fruit nouveau du mois de
108
117
May,
120
Fraifes de difcorde ,
121
Nouvelles ,
136
Ode fur le Cidre, SI
Ccij
TABLE.
Réponse à la question du Mer
cure precedent ,
Autre réponse ,
169
184
Réponses aux questions , 188
Parodie de la feconde Enigme
du Mercure precedent ,
190
Reflexions fur la maniere
d'empêcher l'eau d'entrer
dans les caves ,
Les Eaux de T.
193
198
Le Temple de l'Effronterie ,
3 212
Ceremonies funebres , 217
Extrait d'une Lettre de Monfieur
GalicZon , Evêque
d'Agathople, & Coadju
TABLE.
teur de Babylone , à M.
265
Piece nouvelle
285
Nouvelles de Flandres , 290
Nouvelles de Paris ,
300
Nouvelles extraites de plufieurs
lettres , 303
A
Fin de la Table.
BIBLIOTHÈQUE :
" Las
engines "
SJ
60 -
CHANTILLY
1
MERCURE
GALANT.
ΜΑΥ , 1712,
NIN
A PARIS ,
M. DCCXII.
Avec Privilege du Roy.
MERCURE
GALANT.
Par le Sieur Du F ***
Mois
de
May
1712.
Le prix eft 30. fols relié en veau , &
25. fols , brochez
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLET, an Livre
Royal, au bout du Pont S. Michel
du côté du Palais .
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis ,
fur le Quay des Auguftins.
GILLES LAMESLE, à l'entrée de la ruë
du Foin, du côté de la ruë
Saint Jacques.
AvecApprobation,& Privilege du Foi.
MERCURE
GALAN T.
mmmmm
LA CONSTANCE
des femmes.
NE fille de condition
, nommée
Therefe , nous fervira
de
modele , non pas
A ij
4 MERCURE
pour ces conftances
heroïques
& prodigieufes
,
qu'on ne connoît gueres
que par tradition
mais
de celles qu'on peut vraifemblablement
attendre
d'une femme , & par
confequent d'un hom
me ; car les deux fexes
'n'ont rien à fe reprocher
là -deffus.
Therefe étoit charmante
de fa perfonne ,
trés-jeune , & fi peu experimentée
, qu'elle ne
GALANT.
རྒྱུན །
જે
connoiffoit encore l'amour
que par les Romans.
Elle fe fentoit une
fi grande difpofition à
la conftance , qu'elle difoit
quelquefois : Non ,
je ne veux jamais aimer,
la vie eft trop courte , une
conftance de foixante ans
ne feroit pas contentement
pour moy. En d'autres
momens elle faifoit reflexion
que puis qu'il
faloit aimer neceffairement
, il étoit bon de
A iij
6
MERCURE
commencer trés- jeune ,
afin de pouffer la conf
tance le plus loin qu'il
étoit poffible. Elle prit
ce dernier parti , & dés
le lendemain elle fut
épriſe du fils d'un Armateur
de faint Malo
Ce jeune homme devint
paffionnément amou
reux d'elle , & au boutde
quelque temps on.
parla de mariage. Le
parti parut bon à la mere
de Therefe : mais le jeurGALANT.
7
ne homme étant obligé
de fuivre fon pere , qui
faifoit une nouvelle
courſe en mer , ne put
obtenir fon confentemént
que pour le re-
Four. Cependant on convint
des articles , on ſe
donna des paroles d'hon
neur , & les amans s'en
donnerent de bien plus.
inviolables , ils fe jurerent
un amour éternel
L'Armateur promit de
revenir dans trois mois;
1
A iiij
& MERCURE
& le voila embarqué.
Quelle épreuve pour
Therefe ! De vaſtes mers
la feparent de fon amant :
mais cette feparation ne
fait que redoubler fon
amour , & les trois mois
d'abſence lui parurent fi
longs , qu'on peut bien
les lui compter pour
trois années de conftance.
Cependant elle la
pouffa plus loin ; car fon
amant ne revenant point
encore au bout de fix
GALANT.
autres mois , elle étoit fi
affligée , que fa mere n'ofa
lui parler d'un autre
parti qui fe prefentoit .
Elle eut beau lui infi
f
nuer que peut- être l'Armateur
ne reviendroit
jamais ; elle lui fit même
foupçonner que ce
vaiffeau avoit peri : mais
Therefe proteftoit une
fidelité égale pour fon
amant mort ou vif.
Un an entier s'étant
écoulé , & la mere & la
10 MERCURE
fille crurent réellement
que
l'Armateur ne reviendroit
jamais. On le
pleura comme mort pen
dant
quelques jours ; &
la mere , fans parler de
rien à fa fille , fit trou
yer , comme par hazard,
le fecond amant chez
une parente , où elle mena
fa fille C'étoit un
jeune Officier , fait pour
donner de l'amour , &
qui avoit tout l'efprit
poffible. Il étoit conve
GALANT . H
nu avec la mere qu'il faloit
prendre Thereſe par
fon foible . Il la loùa d'abord
fur le voeu qu'elle.
avoit fait de ne fe jamais.
marier après avoir perdu
ce qu'elle aimoit. Cette
converfation ne pouvoit
manquer de lui plaire ,
étant fi conforme aux
reſolutions qu'elle avoit
prifes. Elle retourna plu
fieurs fois chez fa parente
, où les exhortations
que cet Officier lui fit
IZ MERCURE
fur la conftance produi
firent
infenfiblement un
effet contraire , & elle
commença à raifonner
ainfi : Pour aimer bien
conftamment il faut être
aimé de même , & cet
homme - ci aẞureroit mi
conftance par la fienne ,f
jamais je pouvois l'aimer.
Un autre raifonncment
que lui fit cët ingenieux
amant acheva
de la determiner ; car il
GALANT .
13
Jui prouva qu'elle ne
pouvoit ſe vanter d'être
conftante fans avoir été
mariée , parce que le mariage
étoit la pierre de
touche de la conftance,
Therefe , qui tendoit
toûjours à la perfection
de cette vertu , & qui
ne pouvoit la poffeder
éminemment fans fe
marier, prefera pour cette
raifon feule l'amant
vivant à l'amant mort :
& peu de temps aprés
14 MERCURE
ce ſecond mariage fut
auffi avancé que l'avoit
été le premier : mais par
malheur il vint à l'Officier
un ordre de la Cour
pour aller en Flandres.
Il falut partir dans le
moment , paroles données
comme avec l'Armateur
, pareils fermens
entre Therefe & l'Officier
. Mais les chagrins
de l'abfence furent plus
violens ; car elle aimoit
celui - ci plus que l'auGALANT.
I
tre , ou , pour mieux di
te , l'amour qu'elle avoit
pour l'Officier lui perfuadoit
qu'elle n'avoit
jamais aimé l'Armateurs
car elle le croyoit incapable
de changer . Elle
changea pourtant , je ne
vous dirai point par
quels motifs mais , à
coup fûr , ce fut pour
parvenir encore a une
conftance plus parfaite ;
car fans cela elle n'en
auroit jamais aimé un
16. MERCURE
troifiéme. Celui-ci étoit
un Avocat , & la mere
conclut avec lui plus
promtement encore qu'-
avec les autres , craignant
qu'il ne lui échapât
; car il étoit trés -riche.
Le jour fut pris , les
articles furent dreffez :
mais il y avoit une fatalité
fur les mariages
de Therefe , il étoit écrit
qu'ils ne feroient jamais
qu'ébauchez , & celui-ci
fut interrompu comme
Vous
To
GALANT
. 17
Vous allez voir.
" L'Armateur étoit revenu
depuis quelque
temps : mais ayant appris
dans le voisinage
que fa maîtreffe aimoit
a
paffionnément l'Avocat ,
& n'ayant pas d'ailleurs
fort bien fait fes affaires
fur mer , il jugea à pro
pos de ne point paroître ,
& fe logea pourtant affez
proche de la maiſon
où le faifoient les conferences
pour le maria-
May 1712.
B
18 MERCURE
ge , qui fut enfin reſolu .
Le jour fut pris , on invita
les parens de part &
d'autre : l'affemblée étoit
grave , & Thereſe en
habit paré y charmoit
l'époux futur , dont elle
étoit auffi charmée ; ils fe
repaiffoient de regards ,
& de defirs , lors qu'on
vit entrer dans la falle
l'Officier , qui ne fe doutant
encore de rien , venoit
d'arriver en pofte
de l'armée. Il entre avec
GALANT. 19
la vivacité & les tranf
ports d'un jeune amant ;
& ne voyant que celle
qu'il aime, il court à elle.
Il la regardoit déja comme
fon épouſe , & va
l'embraffer. Il eft receu
avec la froideur que vous
pouvez vous imaginer ,
Therefe eft deconcertée:
l'époux futur ne l'eft
pas moins ,de voir qu'un
homme d'épée a de fi
grands privileges fur fa
femme cette familia
Bij
20 MERCURE
rité l'alarme. L'Officier
tranſporté ne prend garde
au defordre ni de l'un
ni de l'autre , & les yeux
fixes fut ce qu'il aime ,
il refte un moment immobile.
Une pacenta
priée entre dans cet inftant,
& va d'abord feliciter
les époux. A fon
difcours l'Officier revient
à lui elle conti
nuë , le voila prefque au
fait. Enfin la gravité de
l'affemblée & les come
GALANT 20
3%
plimens de la parente ne
finiffant point , lui expliquerent
fi nettement
de quoy il s'agiffoit , qu
il refta immobile enco
re : mais ce n'étoit plus
de plaifir. L'Armateur ,,
premier époux en datte ,
ayant appris à la porte
ce qui fe paffoit dans la
falle , y entra juftement
dans le temps que tous
ceux qui compofoient
cette affemblée muette
fe regardoient les uns
22
MERCURE
los autres .
L'Armateur
étoit un homme froid &
malin , une espece de la
rancune.
Thereſe ne ſçayoit
point fon retour ;
dés
qu'elle
l'apperçut ,
ce fut un
dernier coup de
maffue. Il
marcha froi
dement vers elle , & l'embraffant
auffi
comme é
poux , il lui tint des dif
cours à faire mourir l'Avocatde
jalousie, & l'Of
ficier de
defefpoir. Son
difcours fut
long ,
parce
GALANT: 23:
que perfonne
n'avoit
la
force de l'interrompre
.
L'Avocat & l'Officier
eurent le foifir de pren--
dre leur parti , & ce fut
celui du mépris pour
Thereſe. Voici par où
l'Armateur finit .
*!
Dans le voyage que
j'ai fait j'ai oui dire à un
Poëte Arabe , que la femme
eft femblable
à un ar
bre , & l'amour de la femme
aux feuilles de cet ar
bre. Elles naißent au prin--
24 MERCURE
temps ,fe foutiennent tout
l'été, tombent en automne.
L'arbre produit
bien des
feuilles le printemps
fuivant : mais ce
ne font plus les mêmes.
L'Arabe conclut de là que
la durée des feuilles eft la
durée naturelle de la constance
des femmes . Mon
fieur l'Officier & moy
nous avons eu chacun notreprintemps
notre été,
il est jufte que Monfieur
L-Avacas foit aimé de mê
me
GALANT . 25.
me jufqu'à la chûte des
fülles ; il n'a qu'à voir
s'il veut s'engager là- def
Sus.
Vous parlez fort bien,
dit enfuite l'Avocat :
mais l'Arabe a oublié de
dire
que
fi
dans le prin
temps même on met la coignée
dans le pied de l'arbre
, les feuilles fe fechent
avant l'automne . fecrain
drois que le mariage nefift
à peu près le même effet
de la coignée . Ainfi Ma
May 1712.
C
26 MERCURE
demoiselle Therese restera
, s'il lui plaît , fille toute
Ja vie : cette constance
étant la plus glorieuſe de
toutes , c'est celle qui convient
le mieux au defir
qu'elle a d'exceller dans
cette vertu.
Le Poëte Arabe ne
pouffe pas fi loin que nos
Poëtes les fictions fur les
amans conftans ; & je
croirois bien que la conſtance
merveilleufe dont
plufieurs Poëtes fe font
GALANT . 27
vantez dans leurs vers ,
n'a point paffé de leur
imagination jufques dás
leur coeur. Citons - en
quelque exemple , pour
prouver
que c'eft faire
injuſtice aux Dames de
les croire plus inconftantes
que les hommes.
Honoré Durfée , dans
fa preface du troifiéme
tome d'Aftrée , proteſte
à la riviere de Lignon
que le feu dont il brûla',
& qui donna naiffance
Cij
28 MERCURE
à ſon ouvrage , ne fut fi
conftant
que parce qu'il
fut pur , & qu'il ne laiſſa
jamais de noirceur aprés
la brûlure à pas une de
fes actions & de fes defirs
. Il ajoûte que la longueur
des années n'en
avoit point diminué l'ardeur
, & qu'il ne s'éteindroit
que fous la terre de
fon tombeau . Voila le
Poëte , voici l'homme.
Son neveu dit qu'il n'épouſa
Aftrée que par inGALAŃT
. 29
térêt , & pour ne pas
laiffer échaper ſes biens ;
qu'il s'en dégoûta bien
vîte aprés l'avoir époufée
, parce qu'elle
étoit mal
propre à
caufe de fes grands
chiens & c. qu'elle
exigeoit de lui des
tendreffes & des delicateſſes
d'amans ; qu'-
elle le tourmentoit continuellement
fur fes amourettes
étrangeres ;
qu'elle étoit idolâ-
C iii
30 MERCURE
tre de fa beauté , &
par confequent ridicule.
Tout cela l'obligea à la
quitter , & à fe retirer
à la Cour de Savoye,
Nous fommes inftruits
là- deffus par une tradi
tion certaine que Mon,
fieur Huet nous a con
fervée , & qu'il a tiréo
des neveux & amis
d'Honoré Durfé. Si la
tradition s'étoit confer
vée de la même maniere
à l'égard de la belle Lau,
J
GALANT .
31
re , nous verrions apparemment
quelque chofe
d'approchant
dans l'hif
toire de fes amours avec
Petrarque. Celui - ci ,
dans l'Epître où il fait le
recit de fa vie naturellement
& fimplement ,
dit que dégouté du ſejour
ennuyeux de la ville
d'Avignon , il s'étoit retiré
à Forge , attiré par
la beauté du lieu & de
fa fontaine ; que là il
avoit compofé tous les
Ciiii
32 MERCURE
Ouvrages , qua tam multa
fuerant , dit- il , ut ufque
ad hanc atatem
me exerceant
& defatigent . Ilne
parle point de Laure en
profe ; & quand il recite
au vrai l'hiftoire de
fa vie , de fon efprit &
de fon coeur , il paroît
que Laure étoit l'idole
de fon imagination
, &
le fantôme
qui la remuoit
& l'échauffoit
.
C'étoit
un fujet plûtôt
imaginé que fenti , ſur
1
GALANT . 33
lequel fa verve s'exerçoit.
L'auteur de ſa vie
nous en fournit une bonne
preuve , lors qu'il
nous affure que le Pape
Benoît XII. lui offrit
une difpenfe pour époufer
Laure , pour tenir
des Benefices étant marié
, & même pour en
poffeder de nouveaux :
offres que Plutarque
n'auroit pas refufé
comme
il le fit , s'il avoit eu
une paffion , je ne dis pas
34 MERCURE
auffi
extraordinaire que
celle qu'il chante , mais
feulement ordinaire &
veritable . Comment les
Poëtes que nous voyons
ne nous defabufent
- ils
point des anciens que
nous lifons ? La duperie
eft naturelle à l'homme.
La fiction la plus groffiere
& la plus découverte
gagne toûjours le
deffus à la longue , pourveu
qu'elle fçache ébloüir
l'imagination ; &
GALANT . 35
ceux qui ont écrit publiquement,
foit en vers ,
foit en profe , ne viendroient
pas à bout euxmêmes
de détromper le
monde de leurs fictions ,
s'ils revenoient fur terre
pour nous avertir bien
confcientieuſement qu'
ils n'avoient pas deſſein
de tromper le monde ,
mais feulement de l'amufer
& le divertir en
fe divertiffant eux- mêmes.
36 MERCURE
On a negligé au mois
de
Fevrier de
m'envoyer
un memoire qu'on m'avoit
promis , pour une
affemblée qui fe tient
tous les ans , & dont je
ne crois pas qu'on ait
encore fait le détail dans
aucun
Mercure , quoy
qu'elle foit auffi importante
par fon inftitution ,
que par les perfonnes illuftres
qui la
compofent
.
Le 25. Février , jour de
GALANT. 37
S. Mathias , la Faculté de
Droit fit une aſſemblée generale
à l'ordinaire , où ſe
trouverent M. le Cardinal
de Noailles , Doyen d'honneur
de la Faculté , & plufieurs
Confeillers d'Etat
tous Docteurs honoraires
de la même Faculté , pour
proceder à l'élection d'un
Doyen d'honneur
place de M. le Cardinal de
Noailles , dont le temps étoit
fini ; & de deux Docteurs
honoraires en la place
de Meffieurs le Pelletier,
Miniftre d'Etat , & le Caen
la
38
MERCURE
mus , Lieutenant Civil : &
on élut pour Doyen d'honneur
M. de Marillac, Doyen
du Confeil ; & pour Doc .
teurs honoraires Meffieurs
Dargouges Lieutenant Civil
, & l'Abbé Menguy
,
Confeiller- Clerc au Parlement
, & Chanoine de Nôtre-
Dame.
Il faut
obferver que cette
illuftre
Compagnie
eft
com ofée de fix Anteceffeurs
, ou Profeffeurs , qui
font le Corps de la Faculté,
à laquelle les Arrêts & Declarations
du Roy ont ajoû
GALANT.
39
té deux fortes de Docteurs
aggregez , dont douze font
Aggregez d'honneur , ou
Docteurs honoraires , qui
font ou Magiftrats , ou Ecclefiaftiques
conftituez en
dignité ; & douze Docteurs
aggregez de fonction ou
d'exercice. Les premiers
peuvent affiſter à toutes les
affemblées de la Faculté ,
+
même pour les élections
des Profeffeurs , Docteurs
honoraires & aggregez d'exercice
& pour les derniers
, ils n'y peuvent affiffter
qu'en nombre égal à
40 MERCURE
celui des Profeffeurs actuellement
regentans , la voix
conclufive refervée à celui
qui prefide .
Officiers un
Il y a
pour
Doyen
d'honneur
un
Doyen de charge ou de
fonction , un Syndic , un
Queſteur ou Receveur , &
un Cenfeur. Le Doyen
d'honneur
eft toûjours
un
Docteur
honoraire
confti
tué en dignité. Les autres
Charges
font exercées
par
les Profeffeurs
. Le Doyen
d'honneur
prefide
à toutes
les affemblées
où il fe trouve
,
GALANT. 41
ve , & en fon abfence le
Doyen de charge .
Tous les ans à la S. Mathias
la Faculté s'affemble
pour nommer les Officiers .
commence par le
On
Doyen d'honneur , qu'on
peut continuer deux ans
mais pas davantage : aprés
les deux ans on en élit un
autre du nombre des Docteurs
honoraires , comme
il a été obfervé ci- deffus .
Enfuite on paſſe à l'élection
des autres Officiers , qui
changent tous ce jour- là .
M. de Marillac , Doyen
May 1712.
D
42 MERCURE
du Confeil , Docteur hono
raire , fut élû Doyen d'hon
neur en la place de Monfieur
le Cardinal , qui l'avoit
été deux ans.
t.
MORTS.
Meffire Charles : Renouard
, Seigneur de Bevilliers
, &c. mourut fans
alliance le 27. Avril , âgé
de 95. ans.
* Dame Marie de Bailleul ,
qui avoit époufé le 28. Février
1644. Meffire François
GALANT.
43
de Brichanteau , Marquis
du Nangis , & avoit pris
une feconde alliance le S.
Octobre 1645. avec Meffire
Loüis Châlon du Blé , Marquis
d'Uxelles , Lieutenant
general des armées du Roy ,
& de fes Provinces de Bourgogne
, & Gouverneur de
Châlons fur Saone ( mort
en Août 1658. ) mourut le
29. Avril 1712. âgée de 87 !
ans , laiffant pour fils unique
, de fon fecond ma
riage , Meffire Nicolas du
Ble , Marquis d'Uxelles ,
Maréchal de France , Ple-
Dij
44
MERCURE
nipotentiaire pour la Paix ,
&c.
Elle étoit fille de Meffire
Nicolas de Bailleul ,
Baron de Châteaugontier ,
& c. Prefident à Mortier ,
Miniftre d'Etat , Surintendant
des Finances, & Chancelier
de la Reine Anne
d'Autriche ; & de Dame
Elifabeth Marie Mallier, fa
feconde femme.
La Maiſon de Bailleul
pretend tirer fon origine
d'Ecoffe , où a regné un
Prince de ce nom . N. de
Bailleul , grand Louvetier
GALANT.
45
de France fous Louis XIII .
étoit fils de Nicolas de Bailleul
, Baron de Châteaugontier
, Prefident à Mortier
du Parlement de Paris
, Miniftre d'Etat & Surintendant
des Finances , &
Chancelier de la Reine Me
re. Il a eu de Dame Elifabeth-
Marie de Maillier fa
feconde femme , fille d'un
Prefident aux Enquêtes ,
ladite défunte. La Maifon
de Brichanteau eft une des
plus anciennes & des plus
illuftres du Royaume , tant
par fes alliances , que par
46
MERCURE
dignitez & les grands Gou .
vernemens qui y ont été :
entr'autres un Brichanteau
fut nommé grand Amiral
de France fous Henry III .
La Maiſon du Blé eft une
des plus illuftres de la Bourgogne
.
Le
pere
du Mar
quis d'Uxelles , mary de
cette Dame , étoit Chevalier
des Ordres du Roy.
Meffire Charles de Com..
bault , Comte d'Auteuil ,
Chevalier de l'Ordre du
Roy , mourut le 30. Avril ,
âgé de 80. ans.
GALANT .
47
Dame Louiſe du Vau ;
épouse de Meffire Florent
d'Argouges , Maître des
Requêtes de l'Hôtel du
23. May ,
Roy , mourut le
âgé de 52. ans. M. d'Argouges
fon père
eft mort Confeiller
d'Eftat & au Confeil
Royal des Finances , aprés
avoir été premier Prefident
de Bretagne.
MARIAGE .
N. de Rochereau , Seigneur
de Hauteville , Confeiller
au Grand Confeil ,
48 MERCURE
fils de Meffire Denys de
Rochereau , Seigneur de
Hauteville , Confeiller au
Grand Confeil , & de Dame
Elizabeth Morel , a
épouſé le dix -ſept May N.
de la Michaudiere , fille du
feu Maître des Comptes ,
& de N. Grafſeteau .
J
Nou
GALANT.
Nouvelle de Flandres,
SHO
Le Prince Eugene artiva
de 25. à Tournay , où il a
mandé tous les Officiers
generaux pour tenir confeil
de guerre Les ennemis
font affemblez vers le Vvarde
, leur droite eft à Ferin ,
& leur gauche à Pequencourt
, & Douay derriere
eux. Les Anglois font campez
ſeparément à Pont à
Rache, en attendant le Duc
d'Ormond, Lestroupes des
alliez font à portée de ſe
May 1712 .
E
30
MERCURE
joindre , à la referve de celles
de l'Archiduc
qui ne
font pas encore arrivées.
Nôtre armée s'affemble
vers Oily pour camper en
front de bandiere : elle étoit
avant cela diſperſée de la
maniere fuivante .
-La cavalerie pour la com
modité des fourrages étoit
diftribuée depuis le Careler
jufqu'à Couturel , entre A
vefne-le- Comte & Dour
lans , ayant ordre de mar
cher au fignal de trois
coups de canon.boomOS
L'infanterié étoit cah-
A
I
GALANT.
tonnée dans les
villages
depuis Etrun fur l'Escaut ,
prés de
Bouchain , juſqu'à
Montenencourt : elle occupoit
tous les paffages de la
Senfée , de la Scarpe , & des
lignes qui font au - delà
d'Arras elle s'étend en
core juſqu'à Arras , afin de
s'opposer aux mouvemens
des
ennemis . Il y a eu plu
fieurs petits chocs , ou les
troupes du Roy ont toûjours
repouflé les ennemis .
Un parti de Huffars ayant
paſſé l'Eſcaut a été tout fait
priſonnier : un autre parti
Eij
$2
MERCURE
ennemi a été défait vers
Peronne.
Nouvelles d'Angleterre,
La Reine a nommé les
Officiers generaux qui ferviront
cette campagne en
Flandres ſous le Duc d'Or,
mond.
Le Sieur Henry Lumley
a été fait General de la ca ,
valerie. Lb quon
Le Comte d'Orkney General
de l'infanterie .
Le Sieur Charles Roffe
General des dragons.d ?
GALANT $3
Le Sieur Corneille Vood
& le Comte de Stairs Lieu!
tenans generaux de la cavalerie
.
Le Sieur Henry Vvithers
& Milord North & Grey
Lieutenans generaux
de
Kinfanterie .
Les Sieurs Kellum &
Charles Sibourg , Majors
generaux de la cavalerie .
Les Sieurs Gilbert Prim
rofe , Jofeph Sabine , Guillaume
Evans , & le Comte
d'Orrery , Majors generaux
de l'infanterie.
Les Sieurs Knapier, Pan-
E iij
34 MERCURE
ton , & Georges Preſton ,
Brigadiers de cavalerie.
Les Sieurs Richard Sutton
, Henry Durel , Ruffel ,
Henry Morifon , & Jean
Corbet , Brigadiers d'infanterie.
Les Generaux Palmes
Cadogan & Temple ne fer
viront pas cette campagne. ,
Le Duc d'Ormond par
aller s'embar
tit le 20.
pour
quer
à Greenwich
.
Le Chevalier Thomas
Hanmer s'eſt embarqué à,
Greenwich pour paffer en
Hollande.
GALANT SS
On dit qu'il eft chargé
d'une commiffion pour les
Erats Generaux .
Le Procureur General a
fair fçavoir au Duc de Marlborough
qu'il avoit ordre
de le pourfuivre à la Cour,
de l'Echiquier , pour l'obliger
à reftituer les deux &
demi pour cent qu'il a retenus
pendant dix ans fur la
paye des troupes étrangeres
, ce qu'on fait monter à
la fomme de quatre cent,
cinquante mille livres fterlins
, ou à prés de fept mil,
lions monnoye de France.
E iiij
56 MERCURE
Nouvelles
d'Espagne.
Le Roy a donné au Sieurdu
Caffe FOrdre de la Toifon
d'Or en
recompenfe
des fervices qu'il a rendus
en amenant le trefor des
gallions.
L'armée
d'Eftramadure
s'affemble aux environs de
Badajoz : elle eft composée
de trente - cinq bataillons
complers , & de foixante &
dix -
neuf'efcadrons , fans
comprendre les Gardes du
Corps , qui doivent la join
you
GALANT.
37
dre dans peu. On devoit en
faire la revue le 29. d'Avril ,
& la faire camper pour
commencer la campagne.
Les troupes de Catalogne
jouiffent d'une grande tranquilité.
Les lettres de Denia affurent
que le vaiffeau de
guerre qui fut pris il y a
quelque temps , qu'on di
foit être Anglois , eft Hollandois
, qu'il avoit échoué
für un banc en pourfuivant
deux bâtimens François ,
la portée du mouſquer du
château de Denia , d'où on.
$8 MERCURE
fit un fi grand feu de canon
, que le Capitaine fut
contraint de fe rendre avec
trois cent hommes.
fon équipage , compofé de
Nouvelles du Levant
i
Les lettres du Levang
confirment que les Turcs
font des preparatifs extraordinaires
de guerre ; &
quoy qu'ils ayent fait de
gros magaſins à Theffalonique
, ils en font encore
d'autres fort confiderables
à plufieurs endroits pour les
GALANT.
Troupes qui doivent marcher
le long du Danube
& qui doivent êtrẻ allem.
blées au commencement
du mois prochain : mais
on ne peut encore penetrer
quels font leurs deffeins
, ce qui donne beaucoup
d'inquietude.
60 MERCURE
LA FAUSSE VALEUR
Par M. l'Abbé Mommenet.
Ole qui vient de remporter le prix .
de Poelie des Jeux Floraux.
Qui pacis ineunt confilia , eos fequi--
tar gaudium: Prov. 12 .
PRinces , qu'une gloire
frivole
Anime à chercher les combats
,
Qu'attendez -vous de cette :
Idole ,
Qu'un vain nom aprés le
trépas ?
GALANT.
Ignorez - vous quelles mi
feres
Mars & Bellone fanguinaires
Traînent aprés leurs chars
poudreux ?
Queje vous plains , fi la na
{ sture : V
N'excite en vous aucun
murmure ,
Quand vous faites des mal
heureux !
#?
Loin du bruit des combats
terribles
Vigilans , au fein du repos ,
Cultivez les vertus paifibles ,
62 MERCURE
Elles forment les vrais He
ros.
Pourquoy faut- il que vôtré
épée
Dans le fang humain ſoit
trempée ,
.
Pour porter le nom de
vainqueur ?
Serez- vous moins couverts
de gloire ,
Si vous remportez la vićtoire
Sur les defirs de vôtre coeur?
De quel droit ce Grec qu'on
admire .
Enyvré de fes paffions ,
GALANT.
Alla til defoler l'Empire
Des plus tranquilles nations
?
Aprés cent combats homil
cides ,
Au gré de ſes defirs avides
C'étoit peu qu'un monde
foûmisdo
Auroit - il manqué d'exercice
,
S'il avoit fçû
compter le
vice e
Au nombre de fes ennemis?
Malgré les trompeuſes ma-
.ximes
64
MERCURE
De cent lâches adulateurs ,
Sous de beaux noms les plus
grands crimes
Nous cachent des ufurpa
teurs.
Pleins de l'orgueil qui les
dévore ,
Du couchant jufques à l'aucomb
or prore HeronA
On craint ces Rois ambi-
-tieux .
Sortieux
.
Dans leurs mains gronde le
antonnerre ,
Ce n'eft qu'en ravageant la
terre
Qu'ils ofent s'en croire les
Dieux.
À
GALANT. 65
A deux Tyrans de leur patrie
,
Soulez du plus beau fang
Romain,
Qui ne fçait que la flaterie
A prodigué le nom d'hu
main ?
Infenfez nous jugeons encore
De ces fantômes qu'elle a
doré
Par un faux éclat qui forz
prend.
Nous admirons fans retenue
,
Le Tyran échape à la vûë¸ ,
May 1712.
F.
66 MERCURE
On ne voit que le Conque
ranta
Ainfi de cette ardeur bru
tale
Que n'infpire point le devoir
Nôtre eftime aveugle & fatale
Accredite encor le pouvoir.
A l'afpect des villes en pou
dre ,
Des murs écrafez par la
foudre ,
En vain nos yeux font of
frayez.
Victimes d'un honneur bis
zarre
GALANT 67
Nous encenfons la main
barbare
Par qui ces murs font fou
droyez .
Il en eft peu
dont la
pru
dence
De concert avec la bonté
Renferme l'aveugle puif
fance
Dans les bornes de l'équi
τέ;
Qui forcez de prendre les
armes
Pefent & le sag & les larmes
Qu'un triomphe leur va
coûter,
Fij
68 MERCURE.
Et qui retenant leur cou-,
rage ;
Songent
à diffiper Forage
Avant qu'on l'entende écla
ter.
Jadis guidé par la fageffe
Salomon , l'amour des mortels
, rela
Condamna Forgüeilleufe
yvreffe el ens
A qui nous dreffons dés autels.
Sans s'armer d'un fer redoutable
, T
Content de fon coeuréqui
cable,
GALANT. 69F
Ses bienfaits étoient fes ex
ploits.
Il fut grand fans être terri↓
ble ,
Et ne ceffa d'être invincible.
Qu'en ceffant d'obferver less
loix.
N'eſt-il plus de ces regnes
calmes
Où les loix fervent de rem
parts
?
Oùl'on n'aime à cueillir desi
palmes
Que dans la lice des beaux)
ihearts ; mid s
Qu le commerce & l'abon
dance ,
79 MERCURE
Sources de la magnificen
ce ,
Du citoyen comblent les
voeux ;..
Où la justice revérée
Semble encor du regne:
d'Aftréé
Renouveller le temps heu
reux.
Rends nous cette vie innocente
,
Douce paix , montre à ces
guerriers
Que ton olive bienfaifante
Vaut bien leurs funeftes
lauriers.
GALANT 70:
Fais de la main de ta rivale,
Tomber cette torche fa
tale "
Dont tant de coeurs font
embrafez.
Toy feule en defarmant fa
rage
Effaceras la trifte image f
De tous les maux qu'elle a
caufez.....
Errata pour le Memoire des
Abeilles du Mercureprecedent.
Page 269 ligne 19. metteZ,
foient RAK , BL , SEM,
72 MERCURE
མ་
-
Sec. Page 270. ligne 8. mette
, qui coupe AR en A ,
&6. Page 276. l. 14. étant
1 , celui de , & c. Page 27
13. égale à AFG , les . Page
280.1.14, autour de A ,.
E , O. Ligne dern . autour de
B , D , F , puis qu'il . P. 284
LI EA , FG , AG , qui
P.285.. 11 minutes , ou de.
P. 287. 1.9 angles en A, E, F,
& c. chacun de 120 degrez
en. Ligne 13. rayons AB ,
AK , & c. Page 289. 1. prem.
coupant donc les arétes
d'un tuyau quarré. P. 292 .
lig. 1. & 2. BCML , EFPQ,
ABLK 2
GALANT. 73
ABLK , DEPN , AFQK ,
DCMV , & qui. Lig. 14.
l'exagone RFT de 120 .
Page 293. ligne prem, de l'angle
TFD lequel. Ligne 3 .
4. l'angle BFT droit ,
& de même FBS. Ainfi.
Ligne 11.65 & R 6 Page
297. 1. 8. Dodecaedre , &c.
Page 298 , ligne 2. Dodecae
dre.
$ 9750
DONS DU ROY,
Le Roy a donné l'Abbaye
de faint Paul , Ordre
des Premonftrez , Dioceſe
de Verdun , à M. de Meaux.
May 1712.
G
74
MERCURE
Cet Ordre tire fon origine
de celui de faint Benoît ,
qui fut fondé par l'Evêque
Alberon l'an 1136. qui leur
donna pour premier Abbé
Roger auquel fucceda
Theodoric , fils du Comte
de Salmes , l'ana141
L'Abbaye de fainte Croix
de Bordeaux , Ordre de S.
Benoît , à M. l'Abbé de Beringham.
Cette Abbaye a
été fondée par Clovis . Elle
étoit autrefois hors des
murs de la ville: ob oved
SoL'Abbaye de faint Mange,
Ordre de faint Auguf
GALANT.
75
tin , Dioceſe de Châlons
à M. l'Abbé du Cambout.
L'Abbaye de Chambre-
Fontaine , Ordre des Premonftrez
Diocele de
Meaux , à M. l'Abbe de
Brancas.
91790
L'Abbaye d'Herivaut
Ordre de faint Auguftin ,
Dioceſe de Paris, à M. l'Abbé
des Champs.
L'Abbaye de la Prée
Ordre de Cîteaux , Dioceſe
de Bourges , à M. l'Abbé
2
de
Valory.
sb
moa
L'Abbaye
de faint
¡ Sever
, Ordre
de fajin Benoît
-U!
la
Gij
76 MERCURE
Dioceſe de Tarbes , à M.
l'Abbé du Caſteja.
- L'Abbaye de Landtteveneek
, Ordre de faint Benoît
, Dioceſe de Quimper ,
à M. l'Abbé d'Argentrée
.
Cette Abbaye eft la plus
ancienne de l'Ordre , elle a
étéfondée par Grallon Roy
de
Bretagne.
L'Abbaye
de Fontaines
,
Ordre
de Citeaux
, Dioceſe
2.
de Tours à M. l'Abbé de
Baudry. On a donné le
nom de Fontaines à cette
Abbaye , à caufe de plufieurs
fontaines qui font
GALANT.
77
aux environs. Ce lieu étoit
rempli
de bois.
L'Abbaye
du Tronchet
,
Ordre
de faint Benoift
,
Dioceſe
de Dol , à M. l'Abbé
de Vaugenois
. Cette Abbaye
eft fituée dans la baſſe
Bretagne
. Alan , Senechal
de Dol , la fit bâtir l'an 1150.
L'Abbaye
de la Vanvaux
, Dioceſe
de Vannes
,
à M. l'Abbé
de Vauluyre
.
L'Abbaye
du Rivet , Or
dre de Cîteaux
, Diocefe
de
Vaft , à Dom Jean Benoist
Bernardin
.
L'Abbaye de fainte Croix
G iij
78
MERCURE
d'Apt , Ordre de Cîteaux ,
à Madame de Marnay de
la Baftie.
Meffire Pierre Rogier
du Crevy , nommé au mois
d'Avril à l'Evêché du Mans,
eft d'une ancienne Maiſon
de Bretagne , qui prouve
fa nobleffe de plus de fix
cent ans. 11It y avoit trois
branches de cette Maiſon :
Rogier de Villeneuve , Rogier
du Crevy , & Rogier
de Calac . La derniere fut
éteinte en 1630. par la mort
de Meffire Jean Rogier de
GALANT
79
Callac , Confeiller au Parlement
, mort fans enfans.
La premiere fe trouve é
teinte en 1675. par la mort
de Meffire Eugene Rogier ,
Comte de Villeneuve ,Marquis
de Kerveno , Baron de
Baud , &c . Prevôt & Grand
Maître des Ceremonies de
l'Ordre du Saint Efprit, qui
avoit époulé Anne de Gailleul
, fille du Comte de Gailleul
, niece & heritiere de
Meffire Pierre de Bourneuf
de Cucé , premier Prefi
dent du Parlement de Bretagne
aprés fon pere , fon
1+
G iiij
80 MERCURE
ayeul & fon bifayeul , revêtus
de la même Charge.
La feconde, branche fub.
fifte dans trois enfans de
Meffire François Rogier
du Crevy , Confeiller au
Parlement de Bretagne,
L'aîné s'appelle François-
Eugene Rogier , Comte du
Crevy , de Villeneuve , &
de la Chapelle. Le fecond,
Pierre Rogier ,nommé Evê
que du Mans , aprés avoir
été grand Archidiacre de
Rennes , enfuite Doyen &
grand Vicaire de Nantes,
En troifiéme lieu , leur four
GALANT.-
}
mariée en premieres noces
à feu Monfieur le Marquis
de Genonville du Pleffier ,
Gentilhomme de Picardie
trés- qualifié , dont elle a eu
une fille unique , mariée à
Monfieur de la Faluere ,
Prefident à Mortier au Parlement
de Bretagne , fils de
Monfieur de la Faluere ,premier
Prefident du même
Parlement : en fecondes noces
à Meffire Salomon de
la Tulaye , d'une ancienne
nobleffe de Bretagne , Procureur
General dans la
Chambre des Comptes de
82 MERCURE
cette Province. Depuis l'u
nion de la Bretagne avec la
France , il fe trouve plufieurs
Confeillers , deux
Procureurs Generaux , &
deux Prefidens à Mortier
du nom de Rogier dans ce
Parlement , où les meilleures
Maiſons n'ont pas fait
difficulté d'entrer.
Avant l'union de la Bretagne
avec la Couronne de
France , les Rogiers ſe font
diftinguez parmi les plus
nobles de leur Province ,
par les fervices qu'ils ont
rendus à leurs Souverains.
GALANT .
83
Il fe trouve en 1200. un Vi
ce -Chancelier de Bretagne
Jean Rogier , dont le fils
fut grand Chambellan , lè
petit-fils grand Maître des
Arbalettiers , qui répond au
Colonel general de l'infanterie
; plufieurs Miniftres
4
d'Etat , qu'on nommoit
alors Confeillers au Haut
Confeil , des Ducs , des Of
ficiers generaux d'armée.
Un Pierre Rogier eft marqué
dans l'hiftoire de de
Serres entre les plus illuftres
prifonniers dans la bataille
de Verneuil , du re84
MERCURE
gne de Charles feptiéme ;
& le voeu qu'il fit alors de
fonder une Meffe à perpetuité
dans l'Eglife des Carmes
de Ploërmel , ville fituée
à une lieuë du Crevy ,
y eft executé encore aujourd'hui
par
le Seigneur du
Crevy , château confiderable
érigé en Comté , annexé
à celui de Villeneuve ,
dont une partie de cette
ville Royale releve.
Cette famille eft alliée à
de grandes Maiſons , aux
Comtes de Poitou , Vicomtes
de Limoges & de
GALANT. 83
Comminges, aux Seigneurs
de Derval , de Lanniou
d'Avaugour , de Coaiquin ,
de Tintenniac , de Canillac
, de Rafilly , Defcartes ,
Ferrand , de Lambilly , de
Meneuf , dont il y a prefentement
un Prefident à
Mortier au Parlement de
Bretagne , Ferré de la Villéblanc
, de Villeblanche
du Halgouet , Foucault
Bonnier , dont il y en a trois
Prefidens à Mortier au Parlement
de Bretagne , de la
Grandville , &c. Cette Mar
fon porte pour armes , d'her86
MERCURE
mines au greflier de fable
lié de gueules. Le Seigneur
Comte du Crevy a épouſé
en premieres noces Catherine
Salieu de Chefdubois ,
fille d'un Confeiller au Parlement
, dont il a un fils
Capitaine de cavalerie au
regiment d'Orleans , âgé de
vingt ans, qui s'eft mis dans
le fervice à treize ans ; &
en fecondes noces Therefe
Champion de Cicé , foeur
de l'Evêque de Siam & de
la feue Marquife de Martel
, veuve du Marquis de
Martel , Lieutenat general
GALANT.. 87
des armées navales de fa
Majefté , qui ont l'honneur
d'être alliées aux Maifons
de Betune , de Lhoſpital ,
de Monteffon , &c.
ARTICLES
des Enigmes.
Parodie de l'Enigme du Mercure
dernier.
CHevelure je fuis ſouvent
entrelaffée
Avant qu'un peigne m'ait
88 MERCURE
de cent pointes percée ,
Avant
que le fer & le feu
Me gênant à leur tour
M'ayent miſe en état de
bien fervir l'amour.
La tête , lieu de ma naif-
....
fance ,
N'eft point par humains
habité ,
Pourtant on y raiſonne , on
y rêve , on y penfe.
Pourquoy donc n'ai -je pas
cette proprieté ?
X
Noms
GALANT. 89
Noms de ceux qui ont deviné
la Chevelure..
Louis le chauve ;, Marion
la mal peignée ; feu Madame
Voyelle , & feu Monfieur
Diphtongue J.
c'eft
pour eux qu'on fonne ; Je
me démêle , l'Abbé ratier ;
la belle Perruquiere
.
EN VOY.
Par M. Severe.
Votre Enigme à deux mots,
May 1712.
H
90 MERCURE
Mercure , ne vaut rien ;
Je la relis , je la reluque ,
Je vois qu'à Chevelure elle
convient fort bien :
Mais elle peut auffi convenir
à
perruque.
A l'égard de l'Enigme
lugubre qui eft donnée
dans le même mois , elle a
un défaut tout oppofé ; car
au lieu d'avoir deux mots
je crois qu'elle n'en a point
du tout.
Mercure
trouve que
Monfieur
Severe
peut
}
GALANT. *91
avoir raiſon ; car le mot
de Sepulcre ne convient
à cette Enigme que
parce qu'il n'y en a point
de plus convenable .
**********
ENIGME
nouvelle.
1
S1 måle ou femelle je
fuis,
Ceft ce qu'affirmer je ne
puis.
Simple , fans ornement
Hij
92
MERCURE
d'un nom male onm'appelle
:
Mais orné richement je
porte un nom femelle.
Commej'aiplus d'un nom,
j'ai bien plus d'un
employ ;
Male on me voit porter
fous moy
Une espece de longue mante
i
glißante Femelle legere
Je m'égarefouvent , quel
quefois je me perds
GALANT
93
Ermåle
fervant une Retne
,,
Une adorable
Souveraine ,
Je porte & fais porter fes
fers.
Femelle étant l'objet de
2 maint Seigneur &
Prince ;
Chacun d'eux me difpute
ainfi qu'une Province
: vincentova
En public le victorieux
De m'avoir et tout glocontiorieux
on t
En fecret fille vertuenfe
94 MERCURE
De m'avoir eft toute hon
teuſe.
Comme on m'a envoyé
beaucoup de réponfes
aux queftions de ce
mois- ci , dont j'ai mis
les meilleures en un autre
endroit de ce Mercure,
j'ai crû qu'on m'en
envoyeroit encor pour
le mois prochain fur les
mêmes , que je redonne
pour ce mois - ci ; non
par pareffe d'en trou
GALANT.
· ༡༨ 95
ver d'autres , ce n'eft
pas un grand travail :
mais parce qu'il faut au
moins deux mois pour
donner le loifir aux anonymes
des Provinces de
les compoſer , & de les
·
envoyer.
Premiere Question.
Si l'on doit preferer
dans un repas les grands
verres aux petits.
96 MERCURE
Seconde
question.
Si l'on peut haïr ce
qu'on a une fois bien aimé
.
Troifiéme Question.
S'il eft plus avantageux
à un homme dêtre
d'une grande taille
que d'une petite.
GALANT . 97
A Paris le 17. Avril 1712 .
Monfieur mon Confrere en
Apollon & en Thalie...
Je vous envoye enfon original
Espagnol la copie qui eft
tombée entre mes mains de la
Patente de Monfieur le Duc
de Vendofme. Je fçay que trop
bienque tous les gens de Lettres
font interesez à la gloire de ce
Prince ,pour douter un moment
du plaifir que vous avez d'en
bonorer voftre Livre.
banan sh
D'ailleurs par vous cette
May 1712. I
& MERCURE
grande avanture
Se répandra de toures
parts ;
Et qui pouvoit mieux que
Mercure
Publier la gloire de Mars.
Jeſuis Monfieur , voftre
· DON PHELIRE por la
gracia de Dios , Rey de
Caftilla , de Leon , Ara
gon , de las des Sicilias , de
Hierufalem , de Navarra ,
de Granada , de Toledo , de
Valencia , de Galicia , de
GALANT . 99
Acalorca , de Sevilla , da
Cerdeña , de Courdova
de Corzego , de Riuxcia ,
de Jaen , de las Alganves ,
de Algecira , de Gibraltar,
de las Iis de Canaria , de
las Indias Orientales , y Occi
cidentales , Illas , " Tierra
Firme dez Mar occeano
Archiduque de Archiduque
de Auftria , Duque de Bor
goña ,de Brabantey Milan ,
Conde de Abfpourg , da
Flandes , Tiroky Barzelow
na , Señor de Vircaya , yide
Molina, & c. Queriendo ma
nifeftar à noftro Primo &
I ij
100 MERCURE
Duque de Vendoline & reconocimento
que tenemos
de los feñalados fervicios ,
que nos hà echo , deſde que
le nombramos Generaliffimo
de nueftras Armas y que
las manda con elte caracter
en Eſpaña, Nemos jurgado
no poderle dar pruebas mas
evidentes de nueftra entera
fatisfaccion , fi no es concediendole
en nueftros Reynos
,y Eltados una calidad ,
y grado proporcionado à
todo lo que con fu relebante
, y acertada conducta hà
obrado para fu conſerba ,
GALANT. ror
cion ,y aun que por fu gran
Sangre , tenga mui baſtante
diftincion y pueda juſtifica
damente prerender todos
los honores , y precedencias,
que le fon debidans , noobftante
para comprobar aun
con demonftraciones de
mayor luftre la fingular eftimacion
que Sacemos de fu
perfona , y de fus fervicios .
Le hemos concedido , Da
mos , y concedemos por la
prefente , los honores , y
tratamento de Principe
de nueftra Sangre , querien
do , que como tal , y como
,
I
iij
19: MERCURI
de efta Clafle fea reconoci
do en todos los Reynos , y
Tierras de nueftro obediencia
, y que goce de todos la
honores , precedentias , pre
rogatibas , privilegios debi
dos , y pertenecientes à tan
eminente dignidad. Manda,
do , y ordenando à todos
los que eftàt debaſo de nuef
tra authoridad , le honren ,
y reconozcan en la referida
Calidad , por que affies nucfera
voluntad. Y la prefente
fe Loërà , publicarà , yregif
trarà en todos nuestros conceffos
, y Jurifdiciones fupeGALANT.
10g
riores para que nadie pretexte
caufa de ignorancia.
En cuyo teftimonio emos
mandado defpacharla preffente
, Firmada de nueftra
mano , fcellada.con nuestro
Sello fecreto , ý refrendada
de nueftro infraéfcripto Se
cretario de Eltado. Dada en
Madrid â veinte , y tres de
Março de mil ferecientas , y
doce. Firmada: Yo EL REY.
Ymas âbafo : D. Manuel de
Vadillo , y Velafco.
I iiij
104 MERCURE
Traduction de Patentes.
PHILIPPE par la grace
de Dieu , Roy de Caftille , de
Leon , & c. Voulant faire
connoistre à noftre Couſin
le Duc de Vendofme la réconnoiffance
que Nous avons
des fignalez fervices
qu'il nous a rendus , depuis
que nous l'avons nommé
Ġeneraliffime
de nos Armées
, & qu'il les commande
en cette qualité en Eſpagne
: nous avons crû ne pouvoir
mieux luy témoigner
GALANT. ros
nôtre fatisfaction, qu'en luy
accordant dans tous nos Etats
& Royaumes une qualité
& un rang proportion
né à tout ce qu'il a entrepris
& executé avec tant de fageffe
& de conduite pour
nous en affurer la confervation
; & quoy que ſa naiffance
luy donne toute forte
de diftinction , & qu'il puiffe
prétendre avec juftice tous
les honneurs & preſceances
qui luy font dûs ; cependant
pour donner encore
des marques plus éclaran
tes de l'eftime particuliere
•
106 MERCURE
que nous failons de fa perfonne
, & de l'importance
de fes fervices ; nous luy
avons donné & accordé
donnons & accordons par
ces Prefentes , le tang & les
honneurs de Prince de notre
Sang , voulant
que comme
tel , & en cette qualité
il
foit reconnu
dans tous les
Royaumes
& Terres de nô
tre obeïffance
, & jouiffe de
tous les honneurs
, prefceances
, prérogatives
& privile
ges qui font attachez
à une fi
éminente
dignité : Mandant
& ordonnant
à tous nos Su
GALANT , 107
jets de le reconnoître en cette
qualité : Car tel eft noftre
plaifir ;& les prefentes feront
enregistrées , lûës & publiées
dans tous nos Confeils &
Jurifdictions fuperieures ,
afin que perfonne n'en prés
tende cauſe d'ignorance. En
foy dequoy nous avons fair
expedier les Prefentes fr
gnées de noftre main , ſcellées
de noftre Sceau fecret
& contre fignées de noftret
Secretaire d'Etat. Donné à
Madrid le 23. Mars 1712
Signé , MOY LE ROY
& plus bas , Don Manuel
de Vadillo y Velasco.
*
108 MERCURE
RELATION.
Cette Campagne s'ouvre
affez favorablement , car
dans toutes les petites affaires
de guerre nous reüffiffons:
La derniere qui vient d'arriver
en Flanders le 27. du
mois dernier , merite bien
d'eftre detaillée un peu au
long , eftant des plus brillantes
& des plus vives , les
Troupes y ayant fait voir
plus de valeur que l'on n'en
auroit pâ efperer quoy qu'il
n'y eût que 36 , Carabiniers
GALANT. 109
contre cent Houffards , le
combat ayant duré plus de
deux heures en plaine. Mr
le Marquis de Mezieres allant
de fon quartier prés
d'Arras à Dourlens pour y
faire quelque mouvement
dont les troupes avoient les
ordres , ne prit avec luy que
40. Carabiniers pour l'ef
corter ; à deux licuës de là
quatre Carabiniers qui mar,
choient devant , virent quels
que chofe dans un petit bois
& allerent à la decouverte
lorfque tout à coup il fe debufqua
100. Houffards les
t
10 MERCURE
uns aprés les autres qui tiferent
fur les 4. Carabiniers,
enblefferent deux , en prireno
un , & l'autre vint dire cette
nouvelle à Mr de Muzierd
qui ayant déja vû ce qui
s'étoit paffé avoir dit fon
deffeint aux Carabiniers &
les nyit en bataille , marcha
aux Houffards qui vincent à
cux en pelorons , » kes:1367
Carabiniers qui rektoient ?
chargerent aveo rant de fer→
meté les Houffards , qu'ils
phierent & prirent la fuite à
plus de deux cent pas , puis
faifant de nouvelles difpou
•
GALANT. 11 #
fitions de leur Troupe , les
difperfants en trois bandes,
marcherent avec leurs cris
ordinaires : Mr de Meziere
voyant qu'ils venoient l'at
taquer de tous les côtez ,
ordonna dans le moment au
z. rang de faire un demitour
à droite pour leur faite tête:
& charger dés qu'ils arriveroient
, puis faifant revenip
rous enfemble , il leur ora
donna de ne ſe point debans
der pour quelque chofe que
ce für: cette petite troupe
fit des actions de valeur in
eroyable faifant encoreplica
112 MERGURE
les
Houffards & les ayant
obligé de fe difperfer jufqu'à
3. fois , les Houffards.
pour exciter les Carabiniers
,
Le debander , vinrent par
petits pelotons feparément.
les attaquer , mais ils ne s'ecartérent
pas un feul moment
& les repoufferent tou
jours avec la mefme vigueur
quoy qu'ils changeaffent
de
manuævre
jufqu'à 8, fois,
avec toujours pareil defavantage
eftant toujours batus
& mis en fuite ; les Houf
fards voyants une fi vigou-
Leufe fermeté
foutenue
GALANT . 113
d'une fi grande difcipline ,
fe mirent en bataille & vinrent
encore dans l'efperance
d'enfoncer les noftres , ils
firent leurs décharges de prés
à coup de pistolets & de
moufquetons ,puis ils s'avancerent
à coups de Sabres ,
mais ils furent toujours reçus
avec la meſme fermeté,
& Mr de Mezieres voyant
que c'eftoit la derniere at
taque qu'il avoit à foutenir
ayant des fiens bleffez , il
leur cria , courage Carabi
niers , vous avez eſté créez à
caufe des actions glorieuſes
May 1712. K
114 MERCURE
que vous fires à la bataille
de Fleurus , fouvenez - vous
en , & que l'on vous recon 、
noiffe toujours
pour ces
mefmes troupes invincibles
.
les carabiniets
criétent tous ;
nous mourons avec vous ,
yous cftes un brave General,
& donnerent fur les ennemis
avec une bravoure incro
yable & enfoncerent
les
Houffards
, quia pritent la
fuite , les Carabiniers les fui
virent en ordre jusqu'aux
hayes d'un Village où les
Houlards
fe difperferent
,
daiffants derriere eux 30. des
GALANT. 115.
leurs rucz fur la place , 3.
bleffez dont il y avoit un
Officier & plufieurs chevaux
Tucz. Mr de Meziere n'a cû
dans cette affaire qu'un Cárabinieritué
fur la place
onze bleffez dangereuſe
menty 5. Chevaux tuez &
douze bléſſez : le Cornére
quiché reçu trois bleffuros
dangereuſes, s'y eft fort difringué,
ayant eu deux che
vaux [tucz fous ! huy , l'un
defquels appartenoit à Mf
de Meziere le Capitaine
& le Lieutenant quaeq
auffi un cheval tulbushi
Jual nu équibb an
116 MERCURE
y ont auffi tres bien fait , il
n'y a pas un des Carabiniers
qui ne fe foit bien diſtingué
dans cette affaire ; Mr de
Meziere qui a auffi perdu
trois de fes chevaux , a fair
conduire fes bleffez & l'Of
ficier Houffard à Dourlans,
où il a raporté qu'il avoit vû
14. des fiens bleffez àda 4 .
attaque qu'ils avoient fait &
que l'on ne pouvoit donner
C
autant de louange à Mr de
Meziere qu'il en meritoit ,
eftant feur que s'il n'avoit
pas commandé ces Carabi
niers , ils ne leur en feroit
pas échapé un ſeul .
GALANT . 117
MADRIGAL.
Loin du rivage où naquit
mon amour N
AZile beureux de l'objet
que j'adore ,
A chaque inftantje m'y
promene encore
Tout me retrace un fi
charmant féjour.
Mon coeur confond & la
Loire & la Seine
D'un bois chery l'Image
douce & vaine
8 MERCURE
S'offre à mes yeux & la
nuit & le jour.
Je crois fans cess: y rencontrer
Ifmene
Ifmene , belas ! dans ce
fatal moment
Tout difparoift comme
( un enchantement ,
Et cebeaufonge augmente
encore ma peine.
L'Auteur de ce Madrigal
m'a envoyé un Egloge que
je ne puis donner que le
mois prochain.
GALANT . 119
Meffire François Molé
Maiftre des Requeftès , Ab
bé de Sainte Croix de Bordeaux
, mourut les. May
âgé de 87 , ans , il étoit le
dernier des enfans de Meffice
Mathieu Molé , Procureur
Genetal au Parlement, premier
Prefident & Garde des
Sceaux de France qui a rendu
de grands fervices à l'Eraty
& spendant toutes les
charges , n'a voulu d'autres
biens que celuy detailfor
fon nom & à fa famille
Thonneur d'une fidelité ins
violable pour fa Majefté
20 MERCURE
FRUIT NOUVEAU
Du mois de May.
Lettre
envoyée pour le
Mercure
Galant par la
Gazette
veridique
du Quartier
de la Place Maubert.
MONSIEUR ,
Je ne fçay fi l'avanture dont
je vous fais part , vaut la
peine qu'on la donne au public,
mais elle aura du moins pour
luy le merite des fruits nowvaux
, ce public court fouwent
aux fruits vers & nowwaux
, preferablement
aux
fruits
GALANT 127
fruits murs. Il s'agit icy de
fraifes nouvelles & peut eftre
des premieres qu'on ait vues
Paris cette année ; elles on
caufé dans mon quartier plú☺
fieursjalousies en unjour. La
Pomme de difcorde brouilla
trois Deeffe ; enfembles ces Frai?
fes ont brouillé trois ménages,
ne meritent- elles pas bien le
nom de Fraifes de difcorde.
Fraifes de difcorde
29715
Lundy dernier un jeune
amant accordé avec fa Mail
creffe , luy envoya une petie
May 1712 .
L
MERCURE
"
corbeille de Frailes précoffes
auffi fraîches & auſſi nouvelles
que leurs amours , &
qui furent reçuës de l'Accordée
avec autant de plaifir
que l'Accordé en avoit
cû à les acheter bien cher
ces Fraiſes étoient dans unc
petite corbeille garnie do
deurs . La more qui fut prefente
à l'ouverture de la
corbeille les trouva trop
vertes pour les mangeral luy
vint en penſée de s'en faire
benncur , ella referma bien
la corbeille , & l'envoya à
fan Avocat , qu'elle fçavoin
I
GALANT 123,
être hommede bonne chere,
perfuadée que ce feroit un
bon plat pour un friand.
Un laquais porte le prefens
qui fue receu par un autre
laquais parce que n'y l'Avocat
ny fa femme n'étoient
pour lors au logis.
L'Avocat avoit laiffé ce
jour là
par haſard la clef à
fon cabiner , le laquais y
porta la corbeille de Fraile
& la cacha meſme derriere
quelques livres fur une ta
blette; la femme étant rentrée
la premiere , paffoit
pardevant le cabinet pour
Lij
11 MERCURE
aller à fa chambre ; elle étoit
naturellement jaloufe & par
confequent tres curieufe des
affaires de fon mary , la clef
qu'elle vit au cabinet la tenta
d'y entrer, elle y fureta dans
tous les coins , & trouvant
•Corbeils
ne douta point
que fon mary n'eût acheté
les fraifes pour les envoyer
à certaine voisine dont elle
eftoit jaloufe . Elle regardoit l
cès fraifes avec fureur , &
remarqua un papier attaché
en dedans au couvercle de
la corbeille ; l'Accordée n'avoit
point remarqué ce paGALANT.
1
de fi
125
pier parce que les fleurs le
cachoient & auffi parce
que l'Amour
c
n'a
pas
bons yeux que la Jaloufic :
fur le papier ces Versétoient
écrits 05 al
aprovaɔsioluov
Recevez ces fruits du
Printemps
Le même Amour qui vous les
donne
En trouveroit pour vous
l'Hiver , l'Eté, l'Automne
Pendant cent
ans.11.
La femme de l'Avocat
refolut de verifier l'infidelité
Liij
26 MERCURE
2
de fon mary, elle écrivit
un billet fort tendre où elle
contrefit l'écriture des vers
•& demanda réponse à la
belle foupçonnée à qui elle
vouloit envoyer la corbeille,
mais n'ofant fe fier au laquais
de fon Mary qui
étoit l'unique de la maiſon,
elle alla chrzune de fes amics
à qui elle porta le tout &
la pria d'envoyer ce prefent
par un de fes Grifons , elle la
connoiffoit femmeà Grifons,
l'amie fe chargea d'envoyer
comme de la part de l'Avo-
Cat & d'avoir réponſe , mais
GALANT. 127
cela ne fut executé que vers
le foir , & elle garda la corbeille
dans un endroit où
elle fut trouvée par le mary
de cette derniere , pendant
qu'elle étoit allée jouer au
Lanfquenet , où elle perdit
tant qu'elle oublia la commiffion
dont elle s'eftoit
chargée & ne revint qu'à
deux heures aprés minuit ;
en fon abfence le mary jaloux
lut. & relut cent fois
les vers qu'il détacha exprés
de la corbeille pour les lire
plus à fon aifeen enrageant,
enfuite il tacha de le refon-
Liv
128 MERCURE
venir d'une certaine écriture
qui luy avoit paffée par les
mains ; celle des vers luy
paroiffoit toute femblable ,
il vouloit par là decouvrir
quel étoit le Galant de fa
femme ; ce jaloux étoit un
efpece d'Agioteur honora
ble qui s'étoit mis dans les
affaires.
cet
Le jeune Accordé de qui
eftoient les Vers avoit cu
quelque affaire avec
homme cy qui luy avoit
prefté de l'argent pour fon
mariage ; il vint fur le foir
le trouver pour en avoir enGALANT
129
core , & luy fit un billet , qui
luy retraça l'écriture des
Vers. Il eftoit vif & brutal ;
fitoft qu'il eut jetté les yeux
fur le billet , il le déchira de
rage, Lejeune homme à qui
on alloit compter, de l'argent
,fut fort furpris de voir
déchirer à belles dents un
billet qu'il venoit d'écrire,
demanda à l'Agioteur la raifon
d'une fureur fi fubite ;
celuy - cy eftoit emporté
mais la poltronnerie moderoit
fes emportemens . Nôtre
Amant eftoit homme
d'épée ; l'Agioteur fe con130
MERCURE
tenta de le regarder avec des
yeux de fureur , & de remettre
dans fon Bureau les fats
qu'il alloit compter , aprés
quoy il fortit de fon bureau ,
& noftre Emprunteur qui le
fuivoit ne put tirer de luy
que ce mot :Je ne prête point
d'argent à ceux qui le dépenfent
à acheter des fraifes nouvelles .
Le jeune homme ne comprit
point par quelle bizar .
rerie cet homme aprés avoir
voulu luy prêter de l'argent,
prenoit tout d'un coup la
refolution de ne luy en point
préter , parce qu'il avoit
GALANT. 131
acheté des fraifes. Que fait
à cet homme-là , difoit il en
Tuy même , que j'aye envoyé
desfraifes à mafemme. Il ne
raifonna pas davantage làdeffus
: il conclud feulement
que l'Agioreur eftoit fol ;
mais il eftoit encore plus
vindicatif qu'extravagant.
Il alla dans ce premier mouvement
trouver l'Accordée
& fa mere , & tout furieux
de jaloufie , il leur demanda
felles prétendoient conclurre
avec un homme qui
avoit une intrigue amoureufe
avec la femme ; & aprés
132 MERGURE
avoir dit du jeune homme
ce qu'il fçavoit & ce qu'il ne
fçavoit pas , il leur jetta les
Vers fur la table pour
convaincre de ce qu'il difoit,
& fortit un peu confolé de
s'eftre ainfi vengé.
les
La mere & la fille furent
convaincues par ce billet ,
elles en connoiffoient l'écriture
, & ne s'étoient point
aperçeuës qu'il fut dans la
corbeille , dont l'Agioteur
ne leur avoitpoint parlé n'allant
qu'à l'effentiel qui étoit
ce billet , noftre Acordée
fut fi frappée de ce coup
GALANT. 133
1.
qu'lle conjura fa mere de
rompre le mariage , & deffendit
dans fa colere qu'on'
laiffat entrer fón Amant
cé foir la , elle ne vouloit
aucun éclairciffement avec
luy , craignant d'eftre affez
foible pour luy pardonner
fi elle le voyoit op ʼn slug
Cette rupture ne pouvoit
pas avoir defuites comme on
peut fe l'imaginer , l'éclair ?
eiffement étoit facile : mais!
cela fit paffer une cruelle nuit
à l'Acordée , & l'Acordé ne
F'eut pas meilleure ; voila dés
ja l'une des brouilk ries cau
$ 34 MERGURE
fées par les fraifes . La femme,
de l'Avocat en atendant la
preuve qu'on ne luy avoit
promis que pour le lendemain
, ne laiffa pas de ſevenger
dés le foir par une que
relle d'Allemand qu'elle fit à
fon mary & ils pafferent la
nuit à quereller ; mais la
femme de noftre Agioreur
en fut quitte pour trois qu
quatre foufflets qui furent le
prelude de l'éclairciffement,
qu'il cut avec elle , & tout,
fe calmale lendemain par
un éclairciffement general ,
où l'on reconnut que les
GALANT ***
trois infidelitez pretenduës
n'avoient cité qu'un effet de
la circulation des fraifes
de difcorde.
de
M
Ce petit recit , Monfieur ,
auroit eu befoin d'eftre écrit,
jen'ay ny le loifiny le talent
d'écrire; priez donc les curieux
nouveautez de recevoir cellecy
comme une ébauche à plume
courante, qui vaudrait peuteftre
bien la peine que quelqu'un
voulut la mettre en vers
donnez la comme une tâche à
ceux qui vous envoyent: ordi
nairement des Paëfies de leur
façon & des réponſes à des
336 MERCURE
queftions , je propoferay ce petit
travail à un Poëte de mes amis ;
mais je ne vous promet rien ,
ainfi je ne vous confeille pas de
rjen prometre au publicfur cet
article.
Nouvelles
d'Allemagne .
L'Archiduca caffé la Regence
de l'Autriche infericu
re pour en établir une nouvelle
; le Comte Sigifmond-
Frederic de Kevenhiller en a
efté fait Prefident , ila nommé
un Vice- Prefident & quas
rante Conſeillers ; ce chan
GALANT. 437
gement a fait un grand nombre
de Mécontents , à caufe
que plufieurs perfonnes de
diftinction'en ont efté exi-
1
lées . Le Comte de Staremberg
demande de prompts
& puiffants fecours ; on travaille
à luy envoyer le plûtoft
qu'il fera poffible de
l'argent & des Troupes. Un
Courrier arrivé de Barcelon-
Inca rapporté que l'Archi-
-ducheffe leftoit entierement
guerie de fon indifpofiition ;
qu'elle attendoit avec impatience
l'Eſcadre fur laquelle
elle devoir s'embar-
May 1712.
M
+38 MERGURE
quer pour retourner à Vien
no. Les Lettres de Conftantinople
du 15 Mars affurent
que la guerre avoit cfté de
nouveau refoluë , à moins
que le Czar ne retiré toutes
Les Troupes de Pologne &
d'Ukraine
, qu'il n'accorde
au Roy de Suede un libre
paffage par la Pologne ; qu'il
ne le mêle plus des affaitesde
ce Royaume- là , & qu'il
-reſticuë à Sa Majeſté Sukdojfe
toutes les conqueſtes
qu'il
a faites. Comme on ne croit
pas que le Czar confente à
ces demandes
, les Turcs
CALANT. 139
font de grands preparatifs.
Ils ont encore envoyé de
grandes ſommes au Roy de
Suede qui fe tient preſt
marcher vers la Pologne le
15. de May avec toutes fes
Troupes , celles du Palatin
de Kiovie & un grand renfort
de Turcs & de Tarta
res entreroient en Ukraine
& en Mofcovic. Ces nouvelles
donnent beaucoup
d'inquietude , daurant qu'il
ya peu de Troupes en Hongric
, que les Places font en
mauvais cftat , qu'il y a un
grand nombre de Mécon
Mij
140 MERCURE
tens . Le Comte de Thaun
continuera cette . Campa
gne
1
de commander en Italic
les Troupes Auftrichiennes
l'Archiduc a nommé
pour commander fous luy
Je Comte de Thierheim qui
Le prepare à partir pour ce
pais là . Le depart de l'Archiduc
pour aller à Pref
bourg , avoit eflé fixé au
o de ce mois, mais on croit
qu'il fera differé jufqu'aprés
la Pentecofte à caufe que le
Danube eft débordé de nou .
veau ayant inondé la
campagne. On affure que
11
GALANT. 141
le Prince Ragotzi & le Comte
Berezini ont fait entendre
à la Cour Orromane que fi
selle leur donnoit un ſecours
mediocre , ils eftoient én
eftat de faire une puiffante
-diverfion .
Nouvelles d'Espagne. T
Le Roy a donné au Prince
de Mafferan , Pere du Marquis
de Crevecoeur , la Grandeffe
de la premiere Claffe
& à Don Franciſco Antonio
de Salcedo & Aguirré Corredigor
de Cordoue , le titre
de Caftille & la Surintendance
generale des revenus
142 MERCURE
du Roy en Andaloufic .
Le Roy a fait donner
quatre mille piftolles au Marquis
de Monteleon troifiéme
Plenipotentiaire de Sa Majesté
qui eft parti pour aller
à Paris joindre les deux autres
Plenipotentiaire accom
pagné du Duc d'Atri & de
plufieurs perfonnes de qualité
. On mande de Catalogne
que les Troupes du Roy y
joüiffent dune grande tran-
•quilité , que le Duc de Ven
dome fait la vifite des places
qui font fur les côtes du
Royaume de Valence &
GALANT . 143
qu'on attend fon arrivée en
Catalogne pour commencer
la Campagne , que les
Troupes Angloifes vendoient
tous leurs Equipages
- & n'attendent que les Vailfeaux
pour s'embarquer . On
mande d'Eftramadure que
l'Armée s'aflemble & qu'elle
doit camper le premier de
May en front de bandiere
tau voifinage de Badajoz au
nombre de trente- cinq baraillons
& de foizante oréize
Escadrons pour commencer
Ja Campagne. Onvécrit de
Valenceque le Duc de Vent
144 MERCURE
dome y étoit arrivé , où ila
été reçû avec des acclamations
extraordinaires , il a
logé au Palais de l'Archevefque
où il n'a refté que
deux jours étant allé demcurer
au Grao entre la Ville &
la mere . On mande de Cartagene
qu'on a vu paffer une
Elcadre Françoile commandée
par le fieur Caffart compofée
de douze Vaiffeaux de
guerre avec deux Galliotes
a bombes & quinze cens
hommes de débarquement
faifant voile vers le Détroit.
Les lettres de Cadix affurent
7
quel
GALANT. 145
que cette Escadre étoit entréé
dans le Port fans qu'on
fçût fon deffein , qu'il y
étoit auffi arrivé un Vaiffeau
Portugais pris du côté de
l'Ile de Madere avec cent
Francois prifonniers de
guerre qu'il amenoit à Lif
bonne. On mande de Ca-
17
talogne que les ennemis
avoient faits avancer quel
ques troupes vers Mequinenca
à l'embouchure de la
Segre pour empêcher la
navigation fur l'Ebro , mais
le Comte de Muret Lieute
nant general fe preparoit à
May 1712 .
N
146 MERCURE
les combattre . Les lettres
d'Eftramadure allurent que
dés le 25. d'Avril quelques
Regiments étoient campez
prés de Badajoz , que le refte
des troupes étoient en marche
pour les joindre , que
les Portugais s'affembloient
aux environs d Eftremoz .
On mande de Cadix qu'-
outre l'Eſcadre Francoife
commandée par le fieur,
Caffard qui étoit dans ce
port , il y en étoit encore
arrivé un autre dans les
ports de l'Ocean fans qu'on
pour quel deffein. fsut
GALANT 147
Nouvelles d'Angleterre.
12On a impofé une taxe
fur chaque feuille de parche
min ou papier qui feront
employées dans les Contrats
ou Actes qui fe feront dans
toute la grande Bretagne.
Une autre taxe fur chaque
feülle employée à la vente
des actions fur les fonds pug
blics que les acquereurs feront
tenus de payer. Une
fur les Feuilles de nouvelles
manufcrites ou imprimées.
Une fur les cartes & les
Nij
148 MERCURE
1
dez , & une fur les Cartons
d'Angleterre & Etrangers ,
qu'on levera ces taxes durant
trente deux ans Sa
Majefté Britannique a nom
mé dans fon Confeil le Duc
de Shrewsbury , Grand
Chambellan de la maifon
de fa Majefté pour eftre
Gouverneur du Comté de
Salop à la place du Comte
de Bradford.
Le Duc de Northumberland
, Gouverneur du
Comté de Berks , à la place
du Comte de Craven ."
1
Le Comte de Thaner ,
GALANT. 149
Gouverneur des Comtéz de
Cumberland & de Weftmorland
à la place du Comte
de Carlifle, en
Le Comte d'Avingdon ,
Gouverneur
du Comté
d'Oxford ,' à la place de Mylord
Marlbourough.
L'Evêque de Durham , à
la place du Comte de Scar
bourough, chu
10/0
Le Vicomte Cheyne ,
Gouverneur du Comté de
Buckingham à la place du
Comte de Bridgewater ,
Gendre de Milord Marl
bouroug
N iij
MERCURE 150
1
Tous ces Seigneurs font
fort attachez à l'Eglife Anglicane.
On confirme que la Reine
a envoyé ordre en Irlande
de caffer deux Regiments
dont les Soldats feront in
corporez en d'autres corps
que Sa Majesté a donné de
pareils ordres pour refor
mer une partie des troupes
qui font en Angleterre &
celles qui ont fervi à l'expedition
du Canada , afin de
rendre complettes les Gat
nifons des places d'Ecoffe au
lieu de Regiments Ecoffois
GALANT Ĵ
qui y font & qui doivent
venir en Angleterre.
Les lettres de Londres
affurent qu'il s'eft formé
une focieté de vingt - une
perfonnes de qualité &
riches pour favorifer les
fciences & les arts , en rel
compenfant & procurant
des emplois à ceux qui fe
diftingueront par leurs ou
vrages.
MARIAGE.
Mr le Marquis de Biffy
Brigadier, Meftre de Camp
Niiij.
52 MERGURE
de Cavalerie , fils de Mr le
Marquis de Biffy , Lieute
nant General des Armées du
Roy, Gouverneur d'Auxonne
, a épousé Mademoifelle
Chauvelin , fille de Mr
Chauvelin Confeiller d'Etat
Ordinaire.
Le Roy a accordé à Mr
le Marquis de Biffy Brigadier
le Gouvernement des
Villes & Chafteau d'Auxonne
que poffede Mr fon pere
& que Mr de Biffy fon
grand pere Lieutenant general
des Armées de Sa
Majefté , Commandeur des
GALANT . 153
Ordres du Roy , & Commandeur
pour Sa Majesté
dans le Païs de Mets , Toul
& Verdun , avoit auſſi
poffedé .
Le fieur Grenan , Bourguignon
, Profeffeur de Seconde
au College d'Harcour
a fait une Ode latine à
la loüange du Vin de Bourgogne
; Mr Coffin Champenois
Profeffeur de Secon
de au College de Beauvais ,
répondit à l'Ode du fieur
Grenan, par une Ode pour la
défenſe du Vin de Bourgo.
gne,M' Duhamel Normand
154 MERCURE
Profeffeur de Rhetorique
au College des Graffins a
fait une Ode latine , fur le
Cidre en voicy la tra
duction .
LE CIDRE
ODE.
Qu'ellesfont ces voix
indifcrettes
Qui fe font entendre en
tous lieux ?
Quoy, Mufes deux fa
meux Poëtes
S'ofent quereller à vos
GALANT. 155
yeux ?
Pour quelfujet leurvaine
audace.
Allarme- t- elle du Par-
I
naffe
Lespacifiques Habitans?
Pour du Vin ? je le crois
à
peine
.
Quoy des buveurs de
L'Hippocrene
Le Vin feroit des combattans
?
Poëtes la Guerre eft
fatalle
156 MERGURE
Que caufe un vain entêtement
:
La faute entre vous est
égálle
Pareilfera le chaftiment.
Car, pourquoy par vos
Vers infignes VV
Louer fi hautement, vos
Vignes
Et blafmer les autres Liqueurs?
Comme fi Bourgogne &
Champagne
Seules du Pais de
Cocagne.
GALANT : 157
Renfermoient toutes les
douceurs.
Je veux bien que Bacchus
excite
Le phlegme d'un trop
froid rimeur
Et que
irrite
du Guerrier il
Quelques fois l'indolente
bumeur
Mais ce feu de peu de
durée
N'a qu'une ardeur accelerée
158 MERCURE
Qui naist & peris à la
fois
Et fi les deftins trop faciles
Laiffent vieillir ces imbecilles
La
goutte
Babois.
les met aux
23
Mais Pomone tes
Privileges
Signalent bien mieux ta
liqueur
Tu mets dans ceux que
tu
proteges
GALANT, 159
Un efpritfolide ,un grand
coeur
Témoins ces Heros dont
la gloire
Gravel au Temple de
memoire
Honore leur pofterité
Témoins les fçavans
dont la plume
Afçu par plus d'un beau
volume
S'acquerir
l'immortalité
.
Dieux , quelle Affemblée
éclatante
160 MERCURE
D'eloquens & braves
CeZars !
Mufe , leur nombre m'épouvante,
Sauvons
- nous , fuyons
les hazards.
Ce n'eft pas à mes foibles
rithmes
A tracer les vertus fublimes
De ces grands foutiens
des Etats
Et vouloirfans voix &
Jansforce
Suivre une fi flateuſe
GALANT. 161
amorce
C'eſt courir fans fer
aux combats
Vous chers favoris de
Pom one
Qui beuvez fon jus à
longs traits
Contents des biens qu'elle
vous donne
Pour vous le Vin eft fans
attraits Ne
Vous évitez ces fucs perfides
Qui rendent leurs beu-
May 1712. O
162 MERCURE
veurs stupides
Ou quirenversefaraifon ,
Et la liqueur traitreffe
& dure
Qui tranche & rompt.
mainte cointure
Eft pour vous un fatal
poifon.
Mais tels qu'une belle
Prairie
Qu'arrose un paisible
ruißeauties 20
Toujours verte toujours
fleurie Jackson is
TYM
JOIN
GALANT. 163
1.
N'offre rien aux yeux
que de beau,
Tels arrofez, du jus des
Pommes
Les Normand's entre
tous les hommes
Sontrobuftes &gracieux
Et grand gente en fa
2
courſe
Eft unfleuve qui dés la
fource
N'a rien eu que de
merveilleux
Ⓒ Cidre ! o celefte Ambroifie
O ij
164 MERCURE
Des dons que les Dieux
nous ont faits ,
Quinteßence
, Elixir de
vie ,
C'eft toy qui produis ces.
effets.
Poëtes , dans cette mer
d'ambre ,
Dans ce charmant fus
de Septembre ,
Voyez fe jouer les Saphirs
Dieux, quelle exhalaifon
divine
S'elevant de cettePifcine,
GALANT. 167
Mouille les ailes des Ze-
·
phirs.
Faut-il s'étonner fi la
Trouppe
Des Mufes , ces divines
Soeurs ,
Ayantgoûté de cette couppe...
En eftima tant les douceurs
,
Si de fon pays exilée
Elle enfut bien-toft con-
A folee , a
Ayantfait un plus digne
WM choixus
166 MERCURE
Enfin fi fa reconnoiffan
ce
Au Cidre donna lapuif
Cance
Que l'Hippocrene eut autrefois
?
學
Depuis cette heureuſe
arrivée
Le Cidre empreint d'un
feu divin
De la nature dépravée
Corrige le mauvais levain.
Dés-lors chez vous , belle
Neuftrie
GALANT. 167
Et la Sageße & Induf
trie
Trouverent un charmant
Séjour.
Et l'on voit de vos riches
plages
Sortir de tous rangs , de
tous ages con
Mille grands
hommes
chaque jour.
230
C'est ainsi, Deeße fincere's
Que vous répandez vos
faveurs
168 MERCURE
Sur chaque mortel qui
prefere
Voftre Fus aux autres liqueurs.
Loin defouffrir qu'aucun
des
vostres
Géde jamais la palme à
d'autres ,
leurs plus Vous comble
douxfouhaits .
Vous , qui méprifez nos
breuvages
,
Poëtes dans le vin pew
fages ,
Dorme , & n'écrivez
jamais.
-
GALANT. 169
RESPONSE
à la queſtion du Mercure
précedent.
Par Mr de Rau.....
Si on peut hair ce qu'on a une
fois bien aimé.
LEs Paffions font differentes
par leur nature , & à
l'égard de l'objet qui les
fait naiftre. Il y en a de
promptes & de paſſageres ,
dont l'effet eft violent ,
mais elles durent peu , &
ne laiffent prefque aucun
veftige dans l'ame de ceux
May 1712 .
P
170 MERCURE
quiles ont reffenties . L'ob
jet paffe , & l'idée s'en efface
d'abord, Telles font
la joye & la colere. Ces
paffions fe fuccedent les
unes aux autres , & un mef
me objet peut leur fournir
de matiere. Mais les paffions
fortes & de longue.
durée , faifant plus d'impreffion
fur noftre ame, y
laiffent un caractere & une
image de leur objet , qu'il
eft malaisé d'effacer. Telles
font la trifteffe & la
douleur , mais fur tout , l'a
mour & la haine.
1
GALANT . 171
Il eft certain encore que
toutes les paffions qui font
opposées , maiftrifent
rarement
le coeur de l'homme
à l'égard du mefme objer ;
car outre qu'il y en a tousjours
une qui eft dominante
, l'objet qui a frappé le
premier noftre imagination,
y laiffe tousjours quelque
obftacle à l'effet
la paffion contraire y veut
produire. Cet obftacle n'eft
autre chofe que l'habitude
de la paffion qui forme des
traces profondes
dans lefquelles
retombent
tousque
Pij
172 MERCURE
jours l'imagination quand
elle fe reprefente l'objet
qui les a tracées.
Si l'objet aimé nous offense ,
Nous a trahi , nous préfere
un rival
Par dépit , colere , on vangeance
,
Sans le hair nous luy voulons
du mal.
On ne le
par
peut haïr
antipathie . Quelque défaut
qu'on y découvre ,
quelque injure que nous
en resevions , il a tousjours
je ne çay quoy qui nous
GALANT. 173
porte vers luy , & qui nous
y attache malgré toutes les
violences que nous nous
faifons , dans le deffein de
nous en feparer .
Se vanger de l'objet qu'on aime,
C'eftfe vanger contrefoy- mefme.
Ecoutez ce que fait dire
le plus fçavant Interprete
de l'amour à la defolée
Ocone, lorfqu'elle voit Helene
entre les bras de Pâris.
Elle devoit fe vanger
de cet Infidelle . Cepen
dant
P iij
174 MERCURE
A cet indigne objet je perdis
patience ,
Je me frappay le fein , j'arrachay
mes cheveux,
Et tournay contre moy lafeve
re
vangeance
Quej'avois deftinée à l'objet de
mes voeux .
Tant il eft vray qu'on ne
peut hair ce qu'on a une
fois bien aimé , & qu'on
fe prend à foy- mefme de
l'injure qu'il nous a faite .
On fuppofe , en difant
tout cecy , qu'il s'agit d'un
veritable amour , & file
GALANT . 175
veritable amour vient d'un
certain rapport des efprits
de l'Amant & de l'objet
aimé , qui peut rompre cette
charmante harmonie ?
Si les chofes font dignes
d'eftre aimées , ce feroit
agir contre la raiſon que
de les haïr , & ces mouve .
mens eftant involontaires,
ne peuvent détruire l'amour,
Nous nous formons ordinairement
une image
odieufe de ce que nous
haïffons. Cette image nous
fuit par tout. Elle détruit
Piiij
176 MERCURE
dans noftre efprit toutes
fes belles qualitez , & tout
ce qu'il a d'aimable eſt
plus dans ce qu'elle aime
que dans ce qu'elle anime ,
comment pourroit - elle
quitter le lieu de fon repos
& de fa complaifance ?
Quoy qu'il en foit , il eſt
tousjours vray que l'amour
laiffe en nous ces traces
de l'objet aimé , qui non
feulement font capables de
fermer nos coeurs à la hai
ne , mais encore de rallu
mer une plus forte paffion
qu'auparavant ; & ce font
GALANT. 177
ces restes de l'amour qu'on
appelle un feu caché fous
la cendre .
Amant , c'est une chofe feure
Quand l'amour fait une bleffure
La marque en demeure tousjours
.
Eloignez vous d'Iris , abandonnez
Aminte
Implorez le divin fecours ,
Si voftre ame en eft bien at
teinte ,
Fuyez-les tant qu'il vous plaira
,
Famais de vostre coeur l'amour
ne fortira.
178 MERCURE
Quelques - uns
croyent
que la haine peut venir
d'un amour laffé , d'un
amour irrité ; mais en ce
cas on peut fouftenir
que
c'cft parce qu'on n'a jamais
bien aimé , & ainfi il
n'y a plus de Queſtion
refoudre
..
La colere eft une vapeur
qui peut offufquer
l'amour , mais qui ne peut
l'étouffer . Elle va quelquefois
jufqu'à ſe vanger ,
mais jamais juſqu'à le détruire.
Elle garde mefme
des mefures pour l'objet
"
GALANT . 179
aimé dans les plus grands
emportemens
, & c'eft ce
qui faifoit dire à Hipfipile
écrivant à Jafon qui l'abandonnoit
pour Mcdée .
Contre toy ma colere a fes bor
nes prefcrites ,
Elle t'euft épargné , non que tu
le merites ;
Mais quelque dureté qui regne
dans ton coeur ,
Ma bonté va plus loin encor
que ta rigueur.
Et qui eft l'Amant qui
ignore que toutes les coleres
en amour l'augmen
180 MERCURE
tent plus qu'elles ne le di
minuent , & qu'aprés une
rupture on s'aime fouvent
encore plus qu'on ne fai-
Loit auparavant ?
Ceux qui n'aiment gueres
, font lujets au dégouſt
& à linconftance , mais
ils ne vont pas jufqu'à la
haine . Pour haïr ce qu'on
a bien aimé , fi cela fe peut,
il faut aimer encore . Cette
efpece de haine vient d'un
trop violent amour . On
aime ce qu'on croit haïr ,
& tous ces emportements
ne font que de foibles marGALANT.
181
ques d'une fauffe haine .
Il y a eu des Amans
cruels & barbares , dont
l'amour s'eft changé en fu
reur ; mais c'eftoient moins
des Amans que des Bourreaux
. Mahomet II. ab
batit d'un coup de cimeterre
la tefte de fa Maif
treffe , mais l'ambition feule
luy fit faire ce grand fa
crifice . La haine n'y eut
point de , part , & fon coeur
paya cherement l'excez de
fa brutale vanité .
pourquoy citer Mahomet ?
Un Barbare eft - il capable
d'aimer ? Non, non , un ve-
Mais
182 MERCURE
ritable Amant aime tousjours
fa Maistreffe . Qu'elle
foit fiere , qu'elle foit inhumaine
, qu'elle foit infidelle
, elle eſt tousjours aimable
, il ne la fçauroit
haïr .
>
Mais enfin quelle apparence
de renverfer l'Idole
que nous avons adorée ,
d'abbattre l'Autel où nous
avons facrifié , d'arracher
de noftre coeur ce qui en
faifoit les delices ? Quel
chaftiment
doit attendre
de l'amour un infidelle qui
paffe de la legereté à l'inGALANT
. 183
gratitude & à la haine ? Je
conclus donc avec le Proverbe
, Qu'on ne peut hair
ce qu'on a une fois bien
aimé.
RESPONSES
à la feconde Queſtion du
Mercure précedent.
Si dans un repas on doit
préferer les grands Verres
aux petits .
Chanfon par Mr de Tr...
Verres grands & petits , font
dignes de louange ,
Il m'en faut des plus grands
184 MERCURE
pour me defalterer :
Quand je voy le buffet bien
garni de coulange ;
Mais quand j'ay peu de vin ,
vifte qu'on me les change
Fay recours aux petits pour le
faire durer
'AUTRE RESPONSE
par Madame la C....
On a bien moins de
plaifir en beuvant dans un
petit Verre , on ne boit
que du bout des lévres , à
peine le palais eft - il atteint
par quelques goutes ,
qu'il n'en reste plus pour
fucceder
1
GALANT . 185
fucceder à celles la ; &
quand le vin commence à
entrer dans le gofier , le
palais eft à fec . Mais en
beuvant dans un grand
Verre , je fens une traifnée
de plaifirs depuis les lévres
jufqu'au fond du gofier;
un petit Verre à pei
ne fatisfait - il un de mes
fens qui eft le gouft ; mais
dans un grand mon nez y
plonge , & mes yeux s'y
delectent. Je vois , je flaire,
& j'avale en beuvant , le
vin réjouit en mefme tems
le gouft , l'odorat & la
e -May 1712 .
186 MERCURE
veuë , voila trois fens aut
moins de fatisfaits ; car le
toucher ne laiffe pas d'avoir
la part au plaifir qu'on
a d'empoigner un grand
Verre , & peut- eftre que
Foüie peut jouir encore du
glou glou que forment les
rafades quand on les avale
à longs traits.
RESPONSE
par le bon Convive
Les petits Verres font jaſer
Dans le commerce de la table ,
Ils fervent à nous amuſer ,
Et c'est ce que le vin a de plus
GALANT. 187
agreable.
Boire à grands coups c'est
abuſer
D'une liqueurfi delectable.
AUTRE RESPONSE
par un Avare.
i J'aime mieux qu'on ne
boive chez moy que dans
de petits Verres , cela fait
qu'on n'en caffe point de
grands.
Qij
188 MERCURE
RESPONSES
aux Queſtions par le
mefme .
Premiere Queſtion.
Si l'on doit préferer dans
un repas les grands Verres
aux petits.
Un Yvrogne boiroit volontiers
au tonneau ,
Un vaste gobelet ne peut le
fatisfaire ;
Pour moy plus délicať, je croy
beaucoup mieux faire
Quand je vuide fouvent fans
cau ›
GALANT . 18
霰
Grande bouteille , & petit
Verre.
SECONDE QUESTION.
Si l'on peut haïr ce qu'on
a une fois bien aimé,
Refponſe.
Quand d'une trahifon la cou
pable noirceur
Vient arracher la tendresse
d'un
coeur ,
L'amour fait place à lafureur.
Pour un coeur delicat la maxime
eft certaine ,
A qui fceut bien aimer , il n'eft
point de retour ,
Et la mesure de l'amour
Fait la mesure de la haine,
190 MERCURE
PARODIE
de la feconde Enigme
du Mercure précedent ,
Par Madame de G...
Portefeuille contient
des threfors de fcience ,
Poëte, Docteur & Greffier,
Se plaifent à remplir fa
panfe :
Porte feuilles ouverts font
utiles en France ;
Portefeuilles fermez plai
fent à l'ufurier :
Car rareté d'argent leur
produit l'abondance ,
GALANT . 191
Le porte-feuille enfin porté
par l'écolier ,
Souftient les hommes de
finance.
Refponfe à la Queſtion ,
S'il eft plus avantageux à
un homme d'eftre d'une grande
taille
que d'une
petite .
Il n'est rien tel que les
grands hommes ,
Pour bien cueillir poires
&
pommes :
Pour cueillir fraiſes aux
bois vivent les plus petits .
Petits dépensent moins en
192 MERCURE
vivres , en habits ;
Et les grands en fouliers ,
la cauſe en eft abftraite ,
C'est qu'ils font moins de
pas dans une égale traite .
Ergo les plus petits battent
plus le pavé ,
Baguenaudiere haut élevé,
Dans un ſpectacle a l'avantage
,
Pendant que Ragotin enrage
;
Mais auffi Ragotin derrie
re un parapet ,
Sans faire le plongeon ;
craint bien moins le mouf
quer.
Reflexions
GALANT. 193
Reflexionsfur la maniere d'empefcher
l'eau d'entrer dans
Les caves
,
Par Mr Duguet qui a eſté
envoyé de la Cour dans
les ports de mer , pour des
découvertes hydrauliques ,
& qui eft auffi l'autheur
des machines accouſtiques
propres à faire entendre
ceux qui ont l'oüye dure.
Premierement , on fçait
que l'eau filtre à travers
des terres , & paffe par deffous
les fondements des
maifons pour entrer dans
May. 1712 .
R
194 MERCURE
les caves en cherchant fon
niveau. Ainfi lorſque l'on
veut deffecher une cave
avant l'écoulement de toutes
les eaux qui l'environnent
, on s'apperçoit qu'il
furvient autant d'eau dans
la cave que l'on en a retiré.
Aux caves où il n'entre
qu'environ un pied d'eau ,
il n'eft pas beſoin de
chercher d'autres moyens
pour les deffecher que
d'adjoufter du fable pour
hauffer leur niveau .
2. On peut empefcher
l'eau d'entrer dans les ca
GALANT. 195
ves malgré fes plus hautes
recreuës , en adjouſtant un
corps qui luy ferve de digue
, mais on rifqueroit de
faire une dépenſe inutile
fi l'on ne comptoit pas fur
l'effort de l'eau qui eft tousjours
proportionnée à fa
hauteur
perpendiculaire
& au diamettre de la bafe
de fon volume .
Suivant ce
principe receu
, il fera neceffaire
de
rendre le corps que l'on
adjouftera , pour
empefcher
l'eau
d'entrer
dans
une cave , affez pefant ou
Rij
196 MERCURE
affez bien retenu pour refifter
à la preffion que l'eau
luy fera par deffous ou par
les coftez pour l'enlever
ou pour le percer ; cette
preflion fera proportionnée
à la quantité d'eau qui
entreroit dans la cave pour
chercher fon niveau dans
les plus grandes recreuës ,
s'il n'y avoit point d'oppofition.
En une cave de trois
toifes de longueur fur quatre
de largeur , où il entreroit
fix pieds d'eau
on doit s'attendre que le
>
GALANT. 197
guc
corps qui ferviroit
de dià
une maffe d'eau pareille
, fouftiendroit le fardeau
de 816480. liv. fupposé
que le pied cube d'eau
des caves ne pefe que 70 .
livres.
La plus forte dépenſe
ne paffera pas la fomme de
cinquante livres par toife
quarrée .
Il eft de l'intereſt public
, auffi bien que des
proprietaires des maiſons
baſties ou à baftir , de prévenir
les accidens que peuvent
caufer les frequen-
R iij
198 MERCURE
tes innondations qui arrivent
à prefent , foit par
rapport à la ruine des fondements
de leurs maiſons ,
foit à caufe des mauvaiſes
exhalaifons des eaux qui
fe corrompent dans les caves
, qui peuvent empoifonner
l'air , & produire
des maladies contagieufes .
Les Eaux de T.....
MADAME ,
Les eaux de ce pays ont
cela de merveilleux qu'elGALANT.
199
les font également filutaires
à ceux qui font malades
, qui croyent l'eftre ,
ou qui veulent l'eſtre , ou
qui le feront un jour , ou
qui l'ont efté il y a longtemps
: ferieuſement c'eft
un des plus charmants remedes
qu'on puiffe prendre
, fur tout pour guerir
de l'ennuy & du chagrin.
Charmantes eaux ceux qui les
prennent ,
Dans leurs infirmitez doucement
s'entretiennent ,
Trouvant le remede fi bon
R iiij
200 MERCURE
Qu'une trop prompte guerifon
Les chagrineroit fort eux &
ceux qu'ils y menent.
On boit , on rit , on jafe , on
s'abftient de raiſon ,
De ferieux & de contrainte ,
Et d'inquietude & de crainte
Qui troubleroient des eaux
1 l'effet lenifiant ,
Tranquilifant , dulcifiant ;
Autour de la fontaine on voit
mainte Nayade ,
Qui dans fon negligé pare la
promenade
Et l'on trouveroit en ce lieu
Plus difficilement un visage
malade ,
GALANT. 201
Qu'un bon vifage à l'Hoſtel-
Dieu.
Comme j'estois furpris
de voir tous ces malades en
bonne fanté , je demandois
avec empreffement de quel
mal cette fontaine gueriffoit
; mais je n'en pus eftre
éclairci , car pour toute refponſe
, les uns me hauf
foient les épaules , les autres
me rioient au nez ; &
j'en ferois revenu tresmalinformé
, fans un honnefte
homme , qui me connoiffant
eftranger , me tira
à l'écart , & me dit , vous
202 MERCURE
avez raiſon , Mr , de vous
eftonner de tout ce que
Vous voyez icy ; c'eft un
myſtere , & quand je vous
l'auray revelé vous en ferez
voſtre profit fi vous
pouvez. Vous voyez dans
ce lieu , pourfuit- il,un refte
des enchantemens jadis fi
communs en ce pays ; c'eſt
en cet endroit qu'Amadis
& Oriane commencerent
autrefois leur mariage , &
pour conferver une memoire
éternelle des plaifirs
qu'ils prirent , l'Enchanteur
qui les aimoit a
GALANT. 203
donne à ces eaux une vertu
merveilleufe
.
Ces eaux portent au coeur
fi douces vapeurs ,
Qu'une belle en beuvant , mefme
fans qu'elle y penſe ;
Guerit en un moment de toutes
fes rigueurs ,
Et le galant de fa fouffrance.
Vous voyez bien , Me ,'
que fçachant cela , je n'avois
garde de fouffrir que
Mademoiſelle de R .... en
buft fans voftré ordonnance
, n'y ayant là perfonne
qui puft luy faire raifon
par un contrat. C'est pour-
1
204 MERCURE
quoy nous la tiraſmes
à
l'écart
au plus viſte , car
pour dire le vray , outre le
charme
de ces eaux dont
on nous avoit avertis , nous
jugeaſmes
mefme
A cent petites bagatelles
,
Qu'on nepeut dire , & qu'on
voit mieux
Que l'air qu'on refpire en ces
lieux ,
Eft fort mal fain pour les
pucelles.
Nous la menerons au
premier jour à Wintfon ,
lieu charmant où le bon
Roy Lifvard tient mainGALANT
. 205
tenant Cour pleniere. Elle
prétend luy demander un
don , qui eft le reſtabliſſement
de la Chevalerie
pour quelques jours . Elle
voudroit voir , mais feulement
par repreſentation ,
comme à l'Opera , comment
les Chevaliers des.
Courtois enlevoient les
Princeffes , & comment les
Amadis les délivroient.
Nous la menerons aujourd'huy
voir un beau chaf
teau fait & embelli par
Fées , pour le fejour ordinaire
des Graces` , & la
les
206 MERCURE
retraitte des plus tendres
amours ; plus beau fans
comparaison que la ...
de Niphée. Je ne vous diray
rien des dehors qui
font faits , comme il plaiſt
à Dieu , qui en fçait bien
plus que le grand decorateur
des jardins , qui vous
a donné un deffein
pour....
La nature en ce lieu de mille
"
attraits pourvenë ,
Se prefente auxyeux toute nuë,
Et pour fe mieux faire admirer
,
A negligé de fe parer..
GALANT. 207
Le Ciel eft
exempt de
nuages ,
S'il en paroift ils font
brillants ,
Et fervent
à former
des levants
, des couchants ;
Ou pour plaire Apollon prend
tous les
avantages ,
Un beau vert
peint les prez ,
les , cofteaux , les bocages
Tout vous enchante , & l'art
humain
Refpectant de fi beaux où -vrages
,
N'ofe pas y mettre la main.
Il a fallu
que Mademoifelle
de R ... fe contentaft
de ce fpectacle , car le bon
Roy Lifvart n'a rien fait
208 MERCURE
pour elle , & dans tout le
chemin que nous avons
fait nous n'avons pas encore
trouvé une feule aventure
, pas un feul pont , ny
une feule barriere deffenduë
; point de torts à redreffer
, ny de felons à punir
; enfin pas mefme le
le moindre Geant à combattre
, mais bien un petit
Pigmée qu'on nomme Cupidon
, & qui ne laiſſe pas
d'avoir une force gigantefque
; nous avons pourtant
veu quelques Demoifelles
en palefroi qu'on
rencontre
GALANT . 209
rencontre de temps en
temps à la chaffe , je n'aurois
jamais creu eftre dans
le Royaume de la Grande
Bretagne , tant j'y trouve
tout changé depuis le regne
du Roy ; o
entend plus parler de Veuves
ny d'Infantes enlevées.
Artus ; on n'y
Ce n'estpas qu'à l'amour moins
de belles s'addonnent :
Mais je ne fçais fi c'est que
l'on craint plus les loix ,
Ou ft c'est qu'aprefent les Demoiselles
donnent
Ce qu'on leur voloit autrefois.
May. 1712.
S
210 MERCURE
Quoy qu'il en foit nulle
ne fe plaint , & je les trouve
mille fois plus honneftes
que ces babillardes du
temps paffé qui crioient
comme des perduës , &
attiroient des quatre coins
du monde des Chevaliers
errans pour les venger des
gens qui leur avoient fait
plus d'honneur qu'elles ne
meritoient . Enfin , Madame
, ce pays eft fi beau &
fi
bon ,
que fi par
hafard
quelque
Magicien
, felon
l'ancienne
couftume
, m'y
retient
enchanté
pendant
GALANT. 211
'deux ou trois mille ans
je vous prie de ne me plaindre
point, & d'attendre patiemment
mon retour , &
fans
inquietude .
Cette Ville eft pour moy toute
pleine d'apas , and
Je n'y vois ny procez , ny luxe,
ny miferes
On y fonne tres peu , l'on n'y
travaille guerel, onin
Et l'ony fait de longs repas.
Grosup
S ij
212 MERCURE
LE TEMPLE
de l'Effronteric.
Cantate nouvelle.
Par Mr AUBOUYN.
JE me jette, en tremblanı,
sau pied de tes autels ,
Seule reffource des mor
tels ,
Reine de ces climats , utile
EFFRONTERIE :
Je te vouë aujourd'huy mes
foins & mon ardeur
>
Mais c'eſt en vain que je te
prie ,
On ne t'approche point ;
GALANT . 213
conduit par la pudeur.
Quel mortel icy fe prefente
,
Quel abord bruyant , quel
éclat !
La voix haute , l'ame coutente
...
Je le reconnois , c'eſt un
fat.
Suivons - le , j'entre , quels
myftetes ,
Quels fecrets inconnus fe
revelent
à moy !
Sageffe , modeftic , au bonheur
fi contraires
,
214 MERCURE
Loin de moy , loin vertus
vulgaires ;
On ne vous fouffre point
aux lieux où je me voy.
Une extreme confiance
Y regne dans les efprits :
L'orgueil & la fuffilance
A tout y donnent le prix .
La vanité fait le langage
,
Qu'on y debite avec hauteur
:
On n'y voit point d'obſcur
autheur
,
On n'y lit point de foible
ouvrage ;
Le plus fol's'y donne pour
fage ,
GALANT . 2i5
Le poltron pour homme
de coeur,
La fortune , aveugle Déeffe ,
Eft affife au milieu de ce
peuple impofteur :
De fon culte inconftant ,
fouveraine Preftreffe ,
L'Impudence , luy fçait
faire agréer fans ceffe
Quelque nouvel adorateur .
Rarement le merite au
premier rang s'efleve ,
De trop de retenuë on lë
voit combattu ;
A tout moment l'audace
216 MERCURE
enleve
Ce l'on doit à la vertu .
que
Par quels détours , quelle
baffeffe
Obtient- on ces honneurs ,
dont nos yeux font
déçus ?
Il faut fe déguifer fans
ceffe ,
Devorer mille affronts ,
effuyer cent refus :
Dans le mépris , cacher le
dépit qui nous preffe ...
Mais tu fremis , mon coeur,
au feul nom de mépris ,
Et tu ne voudrois pas du
bonheur
GALANT. 217
bonheur à ce prix.
Modeftie , ô vertu , qu'un
moment j'ay quittée
Pour ce vain éclat , que je
haïs ,
La Fortune avec ces bienfaits
Par tant de lafchetez feroit
trop achetée ,
Dans mon obſcurité je
rentre pour jamais .
CEREMONIES
funebres.
Le Mardy dixiéme May
fe fit à Noftre - Dame
Service de feu Monfei-
T
May 1712 .
218 MERCURE
gneur le Dauphin
, & de
feue Madame
la Dauphi
ne: je ne vous en feray icy
aucun détail parce que la
cérémonie
a efté toute pareille
à celle de S. Denys
.
A l'occafion
de cette ceremonie,
on donneicy
une
peinture plus exacte de la
decoration du Choeur de
faint Denys , qui a paru
affez belle pour meriter
qu'on reforme dans ce
Mercure- cy ce qu'on en
avoit dit dans l'autre .
En entrant dans le Choeur
faifoit face une grande reGALANT.
219
preſentation en forme de
baldaquin , eflevé de vingtcinq
à vingt- fix pieds fur
douze pieds de large , &
dix huit de long.
L'Eftrade formoit un
quarré long , dont les pans
eftoient coupez par des
piedeftaux , & fe terminoit
en eſcalier de cinq
marches , faifant un plan
ovale par les deux bouts.
Lefdits piedeftaux faifoient
reffaut & plan rond
fur lesquels eftoient quatre
courbes en forme de confoles
fort enlevées
, & qua-
Tij
220 MERCURE
tre grandes figures de mar
bre blanc au pied de chaque
confole fur les reffauts
des piedeſtaux , ces figures
reprefentoient
quatre
Vertus ; fçavoir la Reli
gion , la Charité , la Prudence
, & la Juſtice .
Toute l'Eftrade eftoit de
marbre noir veiné de
blanc , & de blanc veiné
de noir. Les piedeſtaux ornez
de mefme d'agraffes
& cartouches de bronze
doré les coftez de l'Eftrade
eftoient auffi ornez de
me dailles & trophez,
GALANT . 221.
A droite eftoit les Chiffres
de Monfeigneur le
Dauphin , & à gauche ceux
de Madame la Dauphine ,
de bronze doré fur du marbre.
Les confoles eftoient de
marbre blanc , & les corps
de porte or, qui formoient
des panneaux ornez de feftons
de laurier, portant des
chapiteaux Ioniques qui
couronnoient lesdites confoles.
Sur les premieres
courbes eftoient des Dauphins
, dont la queue couloit
le long des confoles ,
T iij
222 MERCURE
& portoient fur la tefte chacun
une girandole_ronde
en forme de vaſe qui
portoit beaucoup de lauriers.
Les confoles par le bas
formoient une grande volute
qui portoit une tefte
de Cherubim , les ailes levez
fur la tefte comme fi
elles fouftenoient les confoles
, & d'autres ailes en
forme d'agraphes qui embraffoient
les volutes , du
milieu defquelles partoit
de chaque cofté une grande
girandole à cinq brang
GALANT. 223
ches garnies de flambeaux.
Les confoles eftoient profilez
de petites branches
portant chacunes un lys
dans lequel eftoit un flambeau
qui faifoit une grande
lumiere .
Les confoles portoient
une corniche architrave de
marbre blanc orné de modillons
de bronze doré .
Ladite corniche eſtoit à
pans , & portoit un focle
de marbre de brayer d'où
partoit un doſme qui faifoit
mefme plan orné de
bandeaux & trophez d'or
T iiij
224 MERCURE
fur des fonds de marbre
blanc & noir.
Le focle dudit dofme faifoit
reffaut fur les pans , &
portoit quatre vafes de vermeil
tout à jour , d'où partoiết
quantité de lumieres.
Au deffus du doſme eftoit
un dez orné d'agraphes
en forme de confoles
qui portoit une couronne
de Dauphins en or.
Sur les quatre faces de la
corniche eftoit un grand
cartouche de bronze doré
orné de teftes de morts
& autres attributs ,
GALANT.
225
1
Lefdits
cartouches eftoient
couronnez d'une
groffe
girandole à
cinq
Branches
portant des lumieres
. 4
Au
deffous de la
corniche
entre les
confoles, pendoit
une pente en
broderie
d'or ,
enrichie de fleurs de
lys , de
Dauphins , & de
gros glands
d'or.
Le fond du dolme eftoit
noir
fleurdelylé d'or , &
d'une croix de
moire d'argent
.
Le
dedans des
confoles
formoit un
corps de mar
226 MERCURE
bre noir fleurdelisé d'or.
Dans le milieu de l'eftrade
, on avoit enlevé un
tombeau de porte d'or fur
un focle enrichi de confoles
qui fe terminoit par
des griffes qui portoient
fur le focle du cofté droit
les armes de Monseigneur
le Dauphin en relief, ornées
des colliers & couronnes
; & du cofté gauche les
armes de mefme de Madame
la Dauphine .
Sur les coftez de l'eftrade
, il y avoit une herſe en
vermeil , ornée de fleurs
GALANT. 227
de lys , & de branches qui
portoient quantité de flambeaux..
Lefdites herfes fe
terminoient par les bouts
par une groffe girandole
en forme d'agraffe qui portoit
plufieurs lumieres , &
une groffe fleur de lys qui
portoit auffi plufieurs lumieres
, deforte que cela
faifoit une clarté , & donnoit
un grand éclat au tombeau
.
Sur ledit tombeau on
avoit posé les deux cercuëils
fçavoir Monfeigneur
le Dauphin à droite,
>
228 MERCURE
de
& celuy de Madame la
Dauphine à gauche . Elle
eftoit couverte d'un poil
noir couvert d'une grande
croix de moire d'argent ,
& brodé d'hermine ; celuy
Monfeigneur le Dauphin
eftoit couvert de poële
de la Couronne , qui eft
de drap d'or , couvert de
deux grandes armes à droite,
de Monfeigneur le Dauphin
, & à gauche , deux de
Madame la Dauphine
brodé en or, avec une grande
croix de moire d'argent,
& bordé d'hermine , lequel
GALANT . 229
couvroit les deux corps.
Sur chaque corps eftoit
un manteau à la Royale de
velours violet , avec quatre
de fleurs de lys d'or ;
rangs
fur celuy
de
Monfeigneur
le Dauphin
eftoit
fon collier
de l'Ordre
& fa couronne
fur un carreau
couvert
d'un
crefpe
, & fur celuy
de Madame
la Dauphi
ne eftoit
fa couronne
couverte
de mefme
.
Au deffus eftoit un grand
pavillon à pans dorez , femé
par deffus de fleurs de
lys d'or.
230 MERCURE
Il y avoit autour unë
grande pente en broderie
d'or , où pendoient de gros
glands d'or.
Quatre grandes queuës
fortoient de deffous femées
de fleurs de lys d'or , &
doublées d'hermine retrouffée
en l'air par les quatre
coins avec un gros
noeud .
Dans le fond dudit pavillon
eftoit une grande
croix de moire d'argent ,
avec quatre grandes armes
dans les quatre coins.
Il y avoit deffus quatre
GALANT. 231
grands bouquets de plumes
noires & blanches.
Aux quatre coins du
corps eftoient quatre Heraults
d'armes & quatre
Gardes fous les armes , devant
eftoit le Roy d'armes
entre les deux Maiftres des
ceremonies.
En face eftoit l'Autel orné
de fes ornemens ordinaires
, qui eft d'or , garny
de trois groffes pierres prétieuſes.
Dans le milieu en
haur eftoit une grande
croix d'or émaillée , & garnie
auffi de tres- groffes
1
232 MERCURE
pierres
fines
.
Au deffus eftoit un grand
dais garni de pentes en
broderie d'or dedans & dehors
, garni de gros glands
d'or , dont le fond eftoit
garni d'une croix de moire
d'argent avec quatre grandes
armes , deux de Monfeigneur
le Dauphin , &
deux de Madame la Dauphine.
Aux deux coftez eftoient
deux grands rideaux noirs
fleurdelifez en or , doublez
d'hermine , retrouffez par
de grands cordons d'or
garnis
GALANT. 235
garnis de gros glands fur
deux pillaftres qui portoient
ledit dais ; il eftoit
femé par deffus de fleurs.
de lys d'or , & garni de ,
huit gros bouquets de plumes
blanches & noires.
Lefdits pillaftres eftoient
d'or , qui portoient chacun
deux medailles, où eftoient.
en haut celles de Monfeigneur
le Dauphin , & en
bas celles de Madame la
Dauphine , le champeſtoit
femé de fleurs de lys , &
chaque medaille portoit
une girandole à cinq bran,
May. 1712. V
234 MERCURE
ches . Aux deux coftez eftoient
deux grandes piramides
en or , avec un fond
de mofaïque de fleurs de
lys , qui portoient chacune
une grande arme de Monfeigneur
le Dauphin , au
bas defquels eftoient une
grande girandole à plufieurs
branches
, & quantité
de branches qui portoient
des lumieres.
A la pointe de la piramide
eftoit une groffe fleur
de lys , qui portoit une
groffe girandole à cinq
branches.
GALANT . 235
Au deffus eftoit un architrave
doré qui regnoit
tout autour du Choeur avec
un lay de velours ſemé de
fleurs de lys , de larmes , de
Dauphins , & de croix blanches
, qui eftoient attachez
à une grande corniche dorée
qui regnoit autour de
l'Eglife qui formoit une
frife.
Sur les pentes & rideaux
eftoient les armes , en haut
de Monſeigneur le Dauphin
, & en bas fur les rideaux
, celles de Madame
la Dauphine le tout brodé
en or, Vij
236 MERCURE
Le tour du Choeur eftoit
tout garni de noir jufqu'
aux vitraux . Au deffus des
ftates eftoit un lay d'hermine
par feftons , qui re
gnoit autour du Choeur
fur lequel , de diſtance en
diſtance , eftoient les chiffres
de Monfeigneur & de
Madame la Dauphine dans
des medailles dorées .
Au deffus du lay d'hermine
eftoit un lay de velours
femé de fleurs de lys ,
de larmes , de Dauphins ,
& de croix blanches , qui
eftoit attaché à une corni
GALANT. 237
che , qui portoit des girandoles
à cinq branches , &
tout le long eftoient des
fleurs de lys garnies de lumieres.
Au deffus eftoient fix arcades
de chaque colté , &
deux dans le Jubé , dans
lefquels eftoient des amphitheatres
, où eftoient
placez des gens de quali
té. Ladite décoration eftoit
composée de quatorze
arcades , avec des pillaftres :
de vingt pieds de haut fur
quatre pieds de large , de ›
marbre blanc , avec des
238 MERCURE
panneaux dans les milieux ,
de marbre pal or , avec des
moulures
d'or . Ils portoient
chacun une grande
medaille où eſtoient reprefentées
treize Vertus , à la
gloire du Prince & de la
Princeffe , le tour en or.
Les Vertus eftoient la
Foy chreftienne , la Picté ,
l'acte vertueux , Defirs envers
Dicu , Juftice invioli :
ble , Commandement fur
foy - melme , Sageffe humaine
, Concorde , Concorde
conjugale , Gloire
des Princes , Egalité , BienGALANT.
239
veillance , & Amour de la
patrie , ils portoient chacunes
une grande girandole
de plufieurs lumieres.
Au bas de chaque pilaf
tre eftoit un fcabellon doré
, qui portoit une girandole
à cinq branches .
-
Et au deffus des pilaftres
regnoit un architrave doré
, qui portoit le ſecond
lay de velours qui fermoit
une frife , fur laquelle eftoient
femées des fleurs de
lys , des Dauphins, des larmes,
& des croix , attachée
à la grande corniche qui re240
MERCURE
gnoit à l'entour du Choeur,
dorée, qui portoit au deffus
au droit des pilaftres un›
couronnement en forme
de medaille fur un focle de
marbre blanc , enrichi de:
feftons & de chiffres de
Monſeigneur , & de Madame
la Dauphine alternativement
, & le long de ladite
corniche eftoient des :
fleurs de lys & lys garnis
de lumieres. Les pilaftres;
fe terminoient fous l'ar--
chitrave par une agraffe en
forme de confole , qui portoit
une grande girandole .
Dans
GALANT. 241
Dans les angles de l'Autel
& du Jubé eftoient deux
pilaftres chacuns , qui faifoient
retour , fçavoir ceux
de l'Autel eftoient comme
ceux qui portoient le
grand Dais , & ceux du
Jubé portoient feulement.
chacun une medaille où
eftoit un chiffre de Monfeigneur
le Dauphin , & de
Madame la Dauphine , attaché
à des feftons de
feuilles , le tout en or.
Au milieu de chaque arcade
, eftoit , fçavoir aux
deux premieres du cofté.
May, 17120 X
242 MERCURE
de l'Autel , une grande arme
de Monfeigneur le
Dauphin fort ellevée ſouftenue
par deux Renommées,
enrichies de trophez
de bronze doré , au deffous
defquels eftoient deux
grands rideaux noirs ſemez
de fleurs de lys , &
doublez d'hermine retrouſſez
en feftons fur les
deux arriere-corps , & au
bas des armes pendoit une
cheute defdits rideaux , ſemez
de fleurs de lys , &
doublez d'hermine .
Au bas defdites armes
GALANT . 243
pendoit à chacune une
grande medaille en or , où
eftoient reprefentées, dans
une, la pureté , & dans l'autre
, la Religion , & au bas
une girandole à pluſieurs
branches.
Aux deux fecondes arcades
eftoit un grand pavillon
de relief fort eflevé ,
couronné d'une couronne
de Dauphin , avec des pentes
en broderie d'or , où
pendoient de gros glands ,
au deffous defquels fortoient
deux grands rideaux
retrouſſez par feftons ſur
$
X ij .
244 MERCURE
les deux arriere. corps , fe
mez auffi de fleurs de lys ,
& doublez d'hermine .
Au deffous deſdits pavillons
eftoient de grandes
armes de Madame la Dauphine
, garnies de palmes
& de lauriers , & fouftenuës
par deux Anges , au
bas defquels eftoient à cha
cun deux girandoles à plu--
fieurs branches , le tout de
bronze doré .
Au deffous des armes
cftoit un timpan bas de
marbre blanc , & les mouleures
d'or , qui fervoient
GALANT . 245
comme d'appuy , où eftoit
repreſentée une groffe tefte
de mort avec les attributs
, & des feftons de cyprez
, le fond defdits timpans
eftoit femé de larmes
d'argent fur un fond de
marbre noir , & tout le refte
en or.
Ils portoient au deffus un
vafe en forme de lampe
antique avec deux groffes
lumieres , & eftoient lesdits
timpans profilez de branches
de lumieres en grand
nombre.
༡
Aux deux troifiémes ar-
X iij
246 MERCURE
cades eftoit de meſme eflevée
fort haut une
grande
arme , d'où fortoient de
grands rideaux retrouffez ,
au bas defquels eftoit un
grand timpan de marbre
blanc avec des mouleures
d'or , où eftoit un chiffre
de Monſeigneur le Dauphin
, & de Madame la
Dauphine , entrelaffé avec
des lauriers & des palmes ,
fouftenu par deux enfans
qui pleuroient , & qui eftoient
entrelaffez de feftons
de cyprez , & deux
gros Dauphins fur les pro-
X
GALANT. 247
fils defdits timpans , fur
leſquels eftoient attachées
des branches qui portoient
des lumieres , & au deffus
eftoit une groffe fleur de
lys , qui portoit une lumie+
les autres.
re plus forte que
Aux deux coftez eſtoient
deux vafes qui portoient
de mefme deux lumieres
plus fortes que les autres .
Aux quatrièmes arcades
recommençoient
les pavillons
avec les armes de
Madame la Dauphine
comme cy devant , & aux
cinquièmes , des armes de
X iiij
248 MERCURE
Monſeigneur le Dauphin ,
de mefme qu'au troiſième .
Au fixiéme des
pavillons
les armes de Madame la
Dauphine , & aux deux
feptièmes au deffus du Jubé
, les armes de Monfeigneur
le Dauphin , ellevés
comme les autres avec des
rideaux retrouffez fans timpans
deffous à cauſe de la
mufique.
Devant le Jubé eftoit
une balustrade de marbre
blanc veiné , dans le milieu
de laquelle eftoient les
chiffres de
Monfeigneur le
E
GALANT . 249
Dauphin , avec des trophez.
Les balustrades eftoient
dorées fort richement.,
Service folemnel à Notre Da
me de Paris. j
Le dix de ce mois on fit
dans l'Eglife Metropolitai
ne un Service folemnel
pour Monſeigneur le Dauphin
, & Madame la Dauphine.
Le Cardinal de
Noailles Archevefque de
Paris officia , & le Pere
Gaillard Jefuite prononça
l'Oraifon funebre. Mon250
MERCURE
feigneur le Duc de Berry ,
Madame la Ducheffe de
Berry , Monfieur le Duc
d'Orleans , Monfieur le
Comte de Charolois , Mademoiſelle
de Bourbon ,
& Mademoiſelle de Charolois
, eftoient les Princes
& Princeffes du dueil , &
ils allerent à l'offrande chacun
felon fon rang , conduits
alternativement par
le Marquis de Dreux Maiftre
des ceremonies .
Le Parlement , la Chambre
des Comptes , la Cour
des Aydes , l'Univerfité &
GALANT. 251
le Corps de Ville y affifterent
, ayant efté invitez par
ordre du Roy.
La ceremonie faite Monfieur
le Cardinal de Noailles
eut l'honneur de donner
à difner dans l'Archevefché
à Monfeigneur le
Duc de Berry , à Madame
la Ducheffe de Berry , accompagnez
de Monfieur
'le Duc d'Orleans , de Monfieur
le Comte de Charolois
, de Mademoiſelle de
Bourbon , & de Mademoifelle
de Charolois : le repas
fut magnifique , & fort
252 MERCURE
bien fervi , les Princes &
les Princeffes en furent fort
contents , il y eut auffi plufieurs
tables fervies pour
les Seigneurs , & principaux
Officiers de leur
fuite.
Enfin Monfieur le Cardinal
de Noailles agit en
cette occafion , comme il
agit en toutes felon fon
caractere. On fçait qu'il
eft auffi noble & auffi magnifique
pour les autres ,
qu'il eft fimple & modefte
en ce qui ne regarde que
La
perfonne.
319
GALANT . 253
pour
On a celebré le fept de
ce mois , un Service folemnel
dans l'Eglife du College
de Louis Le Grand ,
Monteigneur le Dauphin
& Madame la Dauphine
; le Pere Sanadon ,
un des Profeffeurs de Rhetorique
, prononça le foir
l'Eloge funebre en latin ,
avec beaucoup de fatisfaction
de toute l'affemblée ,
?
compofée de plufieurs Prélats
& autres perfonnes de
diſtinction , la Salle eftoit
éclairée de quantité de lumieres,&
ornée de devifes.
254 MERCURE
MORTS.
Le 22. d'Avril dernier
mourut icy haut & puiſſant
& Religieux Seigneur Frere
Jacques de Noailles ,
Bailly , Grand Croix de
l'Ordre de faint Jean de
Jerufalem , Commandeur
des Commanderies de S.
Thomas de Trinquetaille
en Provence , & de la Croix
en Brie , & Ambaffadeur ;
de Malthe pres Sa Majeſté,
il eftoit fils de feu Monfieur
le Duc de Noailles ,
frere de feu Monfieur le
GALANT . 255
Marefchal de Noailles ,
frere de Monfieur le Cardinal
de Noailles Archevefque
de Paris , & de Monfieur
l'Evefque Comte de
Chalons , Pair de France.
L'ancienneté de cette Maifon
eft fi connue à la Cour,
& dans tout le Royaume ,'
qu'il feroit inutile de vous
en faire un détail ; je me
contenteray de vous dire
que celuy dont je parle ,
eftoit né en Octobre 1653 .
qu'il fut fait Chevalier de
Malthe en tres bas âge ,
Madame la Ducheffe fa
2
256 MERCURE
mere eftant bien aife d'a
voir un de les fils dans cet
Ordre , dont Aloph de Vignacourt
fon grand Oncle
, avoit efté Grand Mailtre
, place où elle a veu depuis
Adrien de Vignacourt
fon oncle , Prédeceffeur de
celuy qui regne aujourd'huy
; le jeune Chevalier ,
aprés avoir fait les caravannes
, fe trouvant accou
ftumé à la mer , fut deſtiné
à ce fervice par Monfieur
le Duc fon Pere . Il fut fait
Capitaine de Vaiffeau ;
enfuite il eut la Charge
de
GALANT. 257
de Lieutenant General
Galeres de France des
qu'il a exercée pendant
vingt cinq Campagnes ,
ayant commandé les Galeres
du Roy en cette qualité
par tout où elles ont
eu ordre d'aller , à Alger ,
au bombardement de Gennes
, à la priſe de Barcelonne
, où il mit pied à terre
, & monta la tranchée
en qualité de Lieutenant
General des armées de fa
Majefté ; & enfin par tout
ailleurs où elles ont fervi
jufqu'en 1704. que Mr le
May 1712.
Y
258 MERCURE
Bailly de Hautefeuille Ambaffadeur
de Malthe eftant
décedé , fa Majefté trouva
bon que Monfieur le Bailly
de Noailles acceptaſt cette
Ambaffade que fon Ordre
luy propofoit, & qu'il a gardée
juſqu'à ſa mort.
Il fut enterré le lendemain
de fon deceds , dans
la Chapelle que la Maiſon
de Noailles a en l'Eglife
de Noftre - Dame , & Meffieurs
de Malthe firent celebrer
pour luy le 7. May
fuivant un Service folemnel
dans leur Egliſe du
GALANT . 259
Temple , où tous les Commandeurs
& Chevaliers af
fifterent avec Monfieur le
Cardinal de Noailles , &
les Seigneurs & Dames de
fa famille.
PROMOTION
de Cardinaux.
Le 18. le Pape a remply
les dix huit places vacantes
dans le Sacré College ;
fçavoir , les onze faits fuivans
, & il en a retenu ſept
in
petto,
Y ij
260 MERCURE
MESSIEURS
Davia.
Cufani.
Piaffa , Nonce à Vienne.
Zondedari.
De Rohan , Evefque de
Strasbourg , pour la
.. France.
Acuna de Afeide , pour le
Portugal
.
,
Scofembach Evefque
d'Olmuts , pour Vienne.
Prioli , Auditeur de Rote ,
pour Venife.
Tolames , Jefuite.
Thomafi , Theatin .
Caffini , Capucin , Prédi
GALANT. 261
cateur du Palais Apoftolique.
Les fept retenus in petto
font :
Celuy pour l'Espagne , &
les trois du Palais ; fçavoir
:
Corradini , Miniftre de la
Chambre.
Pico , Majordome .
Oriaghi , Secretaire de la
Chambre
. Ces quatre
font feurs .
L'Abbé de Polignac eſt
le cinquième
felon toute
apparence
, l'Evefque de
Barcelonne
le fixiéme .
262 MERCURE
Mr Buffi Nonce de Pologne
le ſeptiéme .
Un pareil article merite
bien qu'on l'eftende
beaucoup mais je reçois
cette Lettre fur la fin de
l'impreffion du Mercure ;
je vous donne toujours cecy
comme nouvelle fraifche
, ce qui n'empefchera
pas que pour le Mercure
prochain je ne recherche
avec foin des memoires
curieux fur les perfonnes.
illuftres qui ont eſté nommées
, & fi je puis quelque
érudition fur les élections
GALANT. 263
des
Cardinaux en
general
.
Monfieur l'Abbé de Vauginnois
, dont on a desja
parlé , a eu de Sa Majeſté
l'Abbaye de Noftre- Dame
du
Tronchet en Bretagne,
Dioceſe de Dol , Ordre de
faint Benoift.
Monfieur l'Abbé de Vauginnois
eft de la famille
de Fyot , une des plus anciennes
du Parlement de
Bourgogne , fils de Monfieur
de Vauginnois Préſident
aux Requeſtes du Pa264
MERCURE
lais à Dijon neveu d'un
Abbé de fon nom , ancien
Aumofnier du Roy , Confeiller
d'honneur en ce Parlement
, & Abbé de faint
Eftienne de Dijon , & neveu
auffi de Monfieur le
Marquis de Mimeure, Marechal
des Camps & Armées
du Roy , qui a eſté
Gentilhomme de la Chambre
, & Menin de feu Monfeigneur
le Dauphin.
GALANT. 265.
Extrait d'une Lettre de M.
Galiczon , Evêque d'Aga
thople , Coadjuteur de
Babylone , à M.....
A Teflis ce 3. Août 1711,
MONSIEUR ,
J'ai eu l'honneur de vous
écrire vers le 15. Juin à nôtre
débarquement de la
Mer noire , en un lieu où
rade appellée Arkaval , dans
le Bachalie ou Gouverne-
MANY
7
266 MERCURE
ment de Calfikais , qui faifoit
une partie de l'ancien
Royaume de Georgie , de
laquelle les Turcs ont prefque
banni la Religion
Chrétienne à force d'impôts
& d'avanies qu'ils ont
exercez fur les habitans.
Nous avons été obligez de
prendre cette route pour
paffer en Perfe ; & le 16. Juin
au matin nous montâmes
fur de méchans chevaux du
pays avec leurs bats , conduits
par des Turcs , dont
un particulier , qui étoit
leur Mouffa , penfa , fur les
1
GALANT. 267.
deux heures aprés midi, fur
une coline entre des bois ,
tuer M. Richard d'une grof
fe pierre , & nous faire affaffiner
par tous ces infide
les. Il n'y a que les hommes
& les chevaux
du pays qui
puiffent
paffer par les montagnes
affreufes
, les bois
entrecoupez
, les torrens , &
les routes eſcarpées
par lef
quelles
ces gens - là nous
menerent
pendant
plu
fieurs jours. Nous arrivâmes
enfin à Calfikais
le
Mercredi
, Nos caracteres
n'étoient
point connus
, &
1
Zij
268 MERCURE
nous paſſions comme de
pauvres Marchands François
; ce qui nous avoit obligez
de laiffer tout à Conftantinople,
principalement
nos livres & breviaires.
A nôtre arrivée à Calfikais
, quantité d'Armeniens
Catholiques en avoient rencontré
deux de nôtre troupe
, qui , quoique Schiſmatiques
, nous avoient été
d'un grand fecours dans
plufieurs occafions dangereuſes
. Dans une prairie un
Douannier vifita nos har-
Jes , & nous contraignit de
GALANT. 269
lui donner dix piaftres ,
quoique nous n'euffions
rien qu'à nôtre uſage . Enfuite
ces Armeniens nous
menerent à un endroit prés
les murailles , où nôtre gui-.
de nous étoit allé prendre
un logement chez une pauvre
veuve , afin que nous
ne fuffions point obligez de
paroître dans la ville. Nôtre
guide nous avoit fait
faire des prefens que nous
avions achetez à la femme
& au fils du Bacha , qu'il
leur étoit allé porter fur la
"
route à une maiſon de cam-
Z iij .
270 MERCURE
ई
pagne , & dont il tira une
lettre de recommandation
pour le Muffalem qui commandoit
dans l'abſence du
Bacha. Cette lettre , nôtre
ferment , & nôtre bojour
dy , les prefens que nôtre
guide nous fit auffi faire au
Doüannier, au Muffalem &
au Soubachi , n'empêcherent
pas tous ces gens - là de
nous avanizer étrangement
, & principalement le
Muffalem , qui aprés avoir
reçû nos prefens nous prit
pour des efpions , & crut
volontiers les Armeniens.
GALANT. 271
Schifmatiques, qui ne manquerent
pas d'aller lui dire
que nous voulions paffer
en Georgie pour nous rendre
chez les Mofcovites ,
& que nôtre deffein étoit
d'exciter à la revolte les
Armeniens Catholiques ,
qui font à Calfikais au nombre
d'environ foixante familles.
Nous fûmes gardez
à vûë , on nous retint nôtre
ferment & nôtre bojourdy,
on nous voulut obliger
d'attendre le retour du Bacha
; enfin on ne nous laiffa
paffer qu'à force d'argent ,
Z iiij
272 MERCURE
& fi on eût découvert qui
nous étions , jamais nous
n'euffions paffé.
Nous partîmes la nuit du
.
28. au 29. à minuit : mais
comme nous montions à
cheval , il vint deux Janiffaires
le coûteau tiré fur
nous , que nous ne pûmes
appailer qu'avec de l'ar
gent.
Le 30. fête de faint Paul ,
nous entrâmes fur les ter-.
res de Georgie , qui eſt un
pays Chrétien dépendant
du Roy de Perfe . La joye
que nous eûmes de retrou
1.
GALANT.
273
ver la Croix dans le che-.
min , des Eglifes Chrétiennes
en chaque village , &
des habitans tous Chré-.
tiens , nous remit un peu de
nos fatigues. Nous arrivâmes
le 2. de Juillet à Teflis ,
Capitale de Georgie , où
les Peres Capucins Italiens,
qui vinrent avec beaucoup
de Catholiques au devant
de nous , nous menerent loger
rchez eux. Ils étoient ra-.
vis d'y voir un Evêque Latin
, n'y en ayant jamais eu
depuis foixante ans qu'ils .
font établis. Ils m'ont fait
274 MERCURE
officier le Dimanche cinq
Juillet , & le Vendredi fuivant
, aufquels ils folemnifent
la Nativité de faint
Jean- Baptifte & la fête de
faint Pierre & faint Paul ,
felon le vieux Calendrier
qu'ils fuivent avec les Georgiens
& Armeniens.
Ils m'ont mené faluer le
Prince de Georgie , qui
commande à la place de
fon frere , qui eft Generaliffime
du Roy de Perfe au
fiege de la fortereſſe de
Candahar , qu'il eſt allé reprendre
vers le Mogol. J'ai
GALANT. 275
vû aufli ſon autre frere , &
plufieurs perfonnes de la
famille Royale , tous Chrétiens
, & qui nous demandent
des nouvelles des guerres
de la Chrétienté. Ils furent
affligez de la mort de
l'Empereur , dont la nouvelle
vint à
Conftantinople
à nôtre départ .
On a preffé plufieurs fois
le Prince qui commande
de fe faire Mahometan :
mais il eft toûjours demeuré
ferme , offrant de quitter
plûtôt le commandement
que la Religion Chrétien
$
276 MERCURE
ne , & s'excufant auprés du
Roy de Perfe fur un voeu
particulier qu'il avoit fait
de la profeffer toûjours. Le
nom de ce Prince eft Vak--
tank..
C'eft une chofe confolante
de voir qu'un pays
auffi refferré que la Geor--
gie par les Infideles , s'eft
toûjours confervé dans le
Chriftianifme depuis que
les Perfans l'ont fubjugué..
On compte à Teflis treize:
Eglifes Georgiennes , &
neufArmeniennes , & celle:
des Peres Capucins , qui eſt:
GALANT. 277
affez grande & tous les jours
remplie de Catholiques. Il
y a dans la Citadelle , qui
eft vafte, fept Eglifes Georgiennes
mais comme les
Mahometans feuls y de
meurent , ils les ont profanées.
Ils y ont feulement
deux Molquées , & deux
dans la ville , mais fans minarets
ou tours pour appeller
à leurs prieres ; au
lieu que nous entendons de
côté & d'autre les cloches
des Chrétiens , qui ont de
grands clochers ou tours
de pierres fur une partie de
278 MERCURE
leurs Eglifes. Les Georgiens
le difent defcendus
des Iberiens venus d'Efpagne.
J'ai vu officier le 11. Juillet
leur Catholicos , qui à
fous lui cinquante - deux
Archevêques
ou Evêques .
Il y avoit trois Archevêques
.
& neuf Prêtres qui celebroient
la Meſſe avec lui :
le refte du Clergé y ſervoit
& les Chantres laïques
ayant un Prêtre ou Religieux
à leur tête , faifoient
une fymphonie affez grave
dans la nef à côté gauche.
GALANT.
279
Le Prince ayant fçûla veille
que je devois aller voir of
ficier le Catholicos , qui eſt
fon frere , avoit donné ordre
que j'y euffe toute la
fatisfaction que je pourrois
defirer.
Ma plus grande peine à
Teflis a été d'entendre à
mon arrivée les plaintes
des Miffionnaires fur le pitoyable
état de leur Mif
fion : ils me dirent qu'à peine
M. Michel , Envoyé du
Roy à la Cour de Perfe , où
il leur avoit obtenu & à toutes
les Miffions plufieurs
a
280 MERCURE
commandemens favora
bles , étoit forti du Royaume,
que la perfecution avoit
recommencé. Les Armeniens
vinrent affieger l'Eglife
& la maifon des Peres
, qu'ils vouloient tuer :
ne pouvant y reuſfir , ils allerent
piller dix-huit maifons
des Catholiques , & en
battirent pluſieurs , qu'ils
laifferent comme morts
fans qu'on en pût avoir juſtice
.
1
Les Armeniens font venus
pour fermer la porte
de l'Eglife des Peres de Te-
Alis .
GALANT. 281
>
Alis & celle de Gori en
Georgie , qui n'attend que
le moment de l'être , comme
le font déja celles de
Gangia , de Chamoké , &
de Tauris.
Celle de Gangia fouffre
depuis ce temps - là une fi
cruelle perfecution , que le
Superieur a été mis plufieurs
fois fous le bâton , & avanizé
de trés- groſſe ſomme.
Enfin l'ayant été encore depuis
peu , il a été obligé de
s'enfuir vers la Mofcovie ,
& fon compagnon à Teflis,
où il fe refugia en ma pre-
·May 1712.
A a
282
MERCURE
fence chez les Peres..
La Miffion de Tauris ,
poffedée par les Reverends
Peres Capucins de la Province
de Touraine , aprés
plufieurs perfecutions , fut
fermée le 11. Janvier , en
forte que les Peres font demeurez
fans communica
tion & fans fecours ; & j'ap
prends que le Patriarche
veut donner le dernier coup
aux Miffions , & chaffer en
tierement les Miffionnaires
. Ce Patriarche a tellement
le deffus , que dans le
Ragan ou écrit qu'il a obGALANT.
283
tenu , il eſt marqué que fi
le
Patriarche ne voulant pas
qu'ils reftent dans les lieux
où ils font , & qui font fpecifiez
, comme Hifpahan ,
Jutpha , Hamadan , Chiras
, Tauris , Gangia , Chamaquiés
, Teflis, & tous autres
qui font dans le Royaume,
& s'il a deffem d'acheter
leurs maiſons , il pourra les
faire vendre fuivant l'efti
mation du Juge de la ville.
Le Prince de Teflis m'a
donné mille marques d'affection
; il m'a donné un
repas à fa maiſon de plai-
A a ij
284 MERCURE
fance avec
avec quantité de ,
Prelats & Seigneurs de ſa
Cour , & m'a fait preſent
d'un cheval , & c. V. S.
SHQIP
Cette Lettre eft trés- -
curieufe , en ce qu'elle
fait voir naïvement l'é
tat où eft à preſent le
Chriftianifme
dans ces
pays- là , d'où l'on reçoit
peu de nouvelles auffi
certaines que celles - ci .
GALANT 2835
********
PIECE NOUVELLE
LA VIOLETTE.
JE . fus jadis une Nymphe
affez belle
Pour charmer Apollon &
n'attirer les voeux : ... ^.
Mais aux loix du devoir je
fus affez fidelle
Pour demeurer toûjours infenfible
à fes feux.. a
Exilé du fejour celefte
Il paiffoit les troupeaux du
riche époux d'Alceſte.
Comme Berger , l'Amour
286 MERCURE
eut des droits fur fon
coeur ;
Et comme Dieu , fon rang
& fa naiffance
Lui donnoient trop de confiance
Pour cacher long - temps
tofon ardeur.
'Aux champs Theffaliens fi
j'allois chercher Flore ,
Je n'y trouvois que lui :
Je le fuis dans les bois , Dia
ne que j'implore
Y devient mon appui.
Evitez , me dit- elle , évitez
·les
montagnes ,
Evitez les vaftes campa
gnes ,
GALANT.
287
Ces lieux font trop ouverts
aux regards d'Apollon .
A ces mots tremblante ,
certaine ,
in-
Je croyois me cacher au
bord d'une fontaine ,
Dans un buiffon épais , dans
le creux d'un vallon ,
Afiles fûrs , s'il eût été pof
fible
D'en trouver contre un tel
Amant ,
De l'un de ſes tranſports
portant le châtiment ,
Periffent les attraits qui
l'ont rendu fenfible ,
M'écriai- je , Diane , exauce
288 MERCURE
mes fouhaits ,
Je quitte fans regret ma
blancheur éclatante ,
D'un voile prefque noir
j'obfcurcis mes attraits ,
Et modefte & rampante
Je tombe vers la terre , &
deviens une fleur.f
A Diane j'en fuis plus chere,,
La vertu dont je garde en
cor le caractere
M'a confervé ma douce
odeur ::
C'eft à ce titre que j'efpere
Chez toy , fage Uranie , un
favorable accueil .
Si modefte au milieu de tout
ces
GALANT . 289
ce qui peut faire
Le fujet du plus juſte orgüeil
,
Aux applaudiffemens ton
coeur fçait fe fouftraire ;
Si l'Amour te trouva moins.
fevere que moy ,
C'eſt que la vertu même
en demandant ta foy ,
Anima les ardeurs de qui
vouloit te plaire...!
Mais à tes côtez j'apperçoy
L'Amant qui cauſe ma colere
:
Que dis- je ? ce n'eſt plus le
Berger temeraire ,
C'eft le Dieu tutelaire
May 1712.
Bb
190 MERCURE
Des fages , des fçavans qu'il
range
fous ta loy.
Il ne cherche plus à feduire
Quiconque voudra l'écou
ter ;
S'il veut charmer, c'eft pour
inftruire ,
De tes fages leçons il a fçû
profiter.
Nouvelles de Flandres.
Les armées de Flandres
ſont aſſez tranquilles
de part & d'autre ; ce
qu'on attribue à la diGALANT.
291
1 ne
fette de fourrages , & à
ce que toutes les troupes
n'étoient point encore .
arrivées. Les regimens
de cuiraffiers de Lobkovvitz
& de fainte Croix,
qui font la tête des troupes
Auftrichiennes ,
partirent que le 9. de ce
mois des environs de
Bruxelles , où elles ont
fejourné, étant fatiguées
de leur longue marche
& du mauvais temps.
Ceux qui la fuivent n'é-
Bb ij
292 MERCURE
tant gueres en meilleur
état , fejournent
auffi
prés la même ville . On
ne croit pas qu'elles puiſ
fent joindre l'armée avant
le vingt - cinq du
mois . holandish
Le Duc d'Ormond
partit le neuf de Gand
pour l'armée . Les lettres
de Lifle & de Tournay
affurent que les Anglois
étoient encore campeż
à Bailieu que le Prince
Eugene n'est parti de
GALANT 293
Tournay , pour aller
joindre l'armée , que le
dix. ch
:
On écrit de Bouchain ,
que l'armée des Alliez
étoit toûjours tranquille
neanmoins on croit
qu'elle ſe mettra bientôt
en mouvement , à
caufe que l'artillerie &
les munitions y font arrivées
, & que le reſte
des troupes de l'Electeur
Palatin & de l'Archiduc
doivent joindre
B biij
294
MERCURE
avant la fin de ce mois .
On mande d'Arras ,
望
qu'on continuë de voiturer
en cette ville des
farines , de l'avoine , &
du fourrage fec. L'armée
du Roy occupe tou
jours les mêmes poftes
le long de l'Efcaut , de
la Senfée , & de la Scarpe.
Le Maréchal de Villars
a fait faire deux éclufes
à Cambray : l'une
pour remplir les foffez
de l'eau de l'Escaut ; l'auGALANT.
295
tre pour retenir l'eau de
cette riviere , qui innonde
& fe répand des deux
côtez un quart de lieuë
au- deffus de la ville .
On écrit de Tournay,
que le Duc d'Ormond a
affifté aux confeils de
guerre qui s'y font tenus.
Il a fait la revuë
des troupes Angloiſes
,
qui campoient
entre Baifieu
, fur le chemin de
Tournay à Lifle , d'où
elles allerent le 19 join-
Bb iiij
296 MERCURE
dre la grande armée
qui eft toujours campée
à la Vvarde & à Lieu
faint Amand , prés de
Bouchain . Le Prince
Eugene , le Duc d'Ormond
, & les autres Generaux
s'y rendirent le
vingt.
On écrit d'Ypres, qu'-
un detachement
de la
garniſon a battu quelques
partis des ennemis ,
dont l'un conduifoit
à
leur armée un grand
GALANT 297
nombre de beftiaux ,
qu'on leur a enlevez.
Les lettres d'Utrecht
affurent qu'il n'y a point
eu d'affemblée generale
le trente Avril , ni le
quatre de ce mois , à
caufe que les Plenipotentiaires
de France n'avoient
point receu d'inftructions
pour répondre
aux demandes fpecifiques
des Alliez.
Le Sieur Menager eut
le vingt- neuf une con298
MERCURE
ference particuliere avec
le Sieur Buis , l'un des
Plenipotentiaires
Provinces Unies .
des
Le Maréchal d'Uxelles
eut une autre conference
avec le Comte de
Sinzendorf, Plenipotentiaire
de l'Archiduc.
Le Comte de la Corfana
, fecond Plenipotentiaire
de l'Archiduc ,
fe rendit à Utrecht le 5 ,
où les Miniftres des deux
partis fe vifitent freGALANT
. 299
quemment. Il y a eu des
conferences entre ceux
des Alliez mais il n'y
en a point eu de generale
le quatre , le fept ,
& le onze. On croit qu'-
il n'y en aura point jufqu'à
ce que les Plenipotentiaires
de France
ayent receu de nouveaux
ordres .
Les lettres d'Utrecht
affurent qu'il n'y a point.
eu de conference generale
le quatorze , ni le
300 MERCURE
dix - huit , à cause que
les Plenipotentiaires
de
France n'avoient point
encore receu de nouveaux
ordres .
Nouvelles de Paris.
Le vingt-deux de ce
mois l'Abbé Fagon fut
facré Evefque de Lombez
dans la Chapelle de
l'Archevefché , par le
Cardinal de Noailles ,
Archevefque de Paris ,
GALANT . 301
qui eut pour Affiftans
l'ancien Evefque
de
Condom
, & l'Evefque
de Saint Omer.
On a eu avis que le
Capitaine Bournonville
ayant paffé le Rhin avco
deux cent cinquante
hommes des compagnies
franches du Brigadier
la Croix , étoit tombé la
nuit du trente Avrildans
la V veteravie , fur le
quartier de cinqe regimens
de l'Archiduc, qu'il
302 MERCURE
avoit mis en un trésgrand
defordre , y en
ayant eu dans la ſurpriſe
pluſieurs tuez & bleſſez ;
& qu'il s'étoit retiré avec
environ · foixante
chevaux
, avec une perte
peu confiderable ,
n'ayant eu en cette occaſion
qu'un homme tué
& quelques bleffez .
Le vingt - quatre on
celebra un Service folemnel
à la Sainte Chapelle
du Palais pour
GALANT. 303 ,
Monſeigneur le Dauphin
& Madame la Dauphine
. L'Abbé de Champigny
, Treſorier de cette
Eglife , officia pontificalement
. Le Pere de
la Rue Jefuite prononçar
l'Oraifon funebre. La
Chambre
des Comptes
.
y affifta en Corps .
Nouvelles extraites de
plufieurs
Lettres.
Les lettres de Lon304
MERCURE
dres portent qu'un vaiffeau
Anglois arrivé de
Moca , chargé de caffé ,
a raporté que le vaiſſeau '
le Godolfin avoit été pris
a :1x Indes Orientales par
les François , & que l'Oxford
qui appartenoit à
pluſieurs particuliers ,
s'étoit brifé contre des
rochers.
La Diligence Galley ,
armée en courſe , étant
arrivée de Naples dans la
Tamife , chargée d'huile
&
GALANT . 305
& d'autres marchandifes
, perit le dix : le feu
s'y étant pris par accident
, la fit fauter. On a
eu le temps de fauver
l'équipage.
FIN.
May 1712.
Cc
TABLE.
L ▲ conftance des femmes ,
page 3 .
Memoire pour une Aſſemblée
de
Droit ,
Morts ,
Mariage,
36
42
47
Nouvelles de Flandres , 49
Nouvelles
d'Angleterre , sz
56
Nouvelles
d'Espagne ,
Nouvelles du Levant , 58
La fauffe Valeur,
60
Errata pour le Memoire des
TABLE.
Abeilles du Mercure pre
cedent , C 71.
Dons du Roy , 73
Articles des Enigmes , 87
Noms de ceux qui ont deviné
la Chevelure , 89
Enigme nouvelle , 91
Questions , 95
Patentes Espagnoles , 98
Relation ,
Madrigal,
Traduction des Patentes , 104
Fruit nouveau du mois de
108
117
May,
120
Fraifes de difcorde ,
121
Nouvelles ,
136
Ode fur le Cidre, SI
Ccij
TABLE.
Réponse à la question du Mer
cure precedent ,
Autre réponse ,
169
184
Réponses aux questions , 188
Parodie de la feconde Enigme
du Mercure precedent ,
190
Reflexions fur la maniere
d'empêcher l'eau d'entrer
dans les caves ,
Les Eaux de T.
193
198
Le Temple de l'Effronterie ,
3 212
Ceremonies funebres , 217
Extrait d'une Lettre de Monfieur
GalicZon , Evêque
d'Agathople, & Coadju
TABLE.
teur de Babylone , à M.
265
Piece nouvelle
285
Nouvelles de Flandres , 290
Nouvelles de Paris ,
300
Nouvelles extraites de plufieurs
lettres , 303
A
Fin de la Table.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères