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1711, 06 (2)
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MERCURE
GALANY
JUIN, 171
10
PLIO
ON
www
JUNI
NCY
A PARIS ,
M. DCCXI.
Avec Privilege du Roy.
MERGURE
GALANT :
Par le Sieur Du F ***
Mois
de
Juin
1711.
Le prix eft 30. fols relié en veau , &
25.fols, brochez
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLIT, au Livre
Royal, au bout du Pont S. Michel
du côté du Palais .
་ ་
PIRRE RIBOU , à l'Image S. Louis,
fur le Quay des Auguftins.
GILLES LAMESLE , à l'entrée de la rue
du Foin , du côté de la rue
Saint Jacques,
DE4d
MERCURE
GALANTTHOU
I. PARTIE
.
IBLIO
LITTERATURE
,
* I
LYON
1893
INIRIKIKI**** tikikikikik ta
PARALELLE BURLESQUE
Ou Differtation , ou Difcours qu'
on nommera comme on voudra
furHomere &Rabelais.
Croyez
-vous en vostre
•foy, qu'onques
Homere
I. A j
4 MERCURE
écrivant l'Illiade & l'Odyffée,
penfaft és allegories
lefquelles de luy ont calefrete
Plutarque , Heraclides,&
c... Si le croyez,
pourquoy ne croirez- vous
auffi merveilles occultes
dans ces miennesjoyeuses
& nouvelles chroniques ,
་ ་
combien qu'en les dictant
ny penfaffe non plus que
vous , qui par avanture
beuvez comme moy ;
car à la compofition de ce
Livreje ne perdis , n'emTAVO
AIK
I. PARTIE. OI
ployay onques plus ny autre
temps que celuy de ma
refection , fçavoir eft en
beuvant & mangeant
auffi eft-ce la jufte heure
d'écrire ces hautes matieres
& fciencesprofondes ,
comme bien fçavoit faire
Homere dont le laheur
fentoit plus le vin
que l'huile. Autant en dira
quelque Turlupin de
mes livres , ce que prendray
à gloire : car , o combien
l'odeur du vin eft
3. A iij
• MERCURE
plusfriandriant, priant,
plus celefte & delicieux
que l'huile. Mua
lui-
C'eft à peu prés dans ces
termes que Rabelais vers
l'an 1550.commença
même pourmoy, fans le
fçavoir , le paralelle que
je devois faire en 1781.
d'Homere & de luy. 1
Ces deux Autheurs
ont premierement cela
de commun , qu'ils êtoient
nez pour la Poëfie
; il ne manque à Ra1.
PARTIE
belais pour eftre grand
Poëte que d'avoir écrit
en Vers : fon Livre eft
un Pocine en Profe
quoy qu'il n'ait point dit
d'abord , Deeffe chante
Gargantua , & c. Ilprend
fa Lyre d'un air fimple
comme Homere ils
promettent
peu l'un &
Fautre , mais ils donnent
beaucoup
dans la fuite S
en commençant ce paralelle
, je promets peu
ainfi qu'Homere , il don
1 . A ij
8
MERCURE
ne beaucoup , & je ne
donneray prefque rien ;
il faut bien qu'il y ait
quelque difference entre
Homere & moy.
Avant que de comparer
les ouvrages de nos
deux Autheurs
,
comparons
la réputation de l'un
à celle de l'autre , comparons-
les pourtant fans
comparaifon , de peur
d'offenfer
quelqu'un 5-
refpectons - les comme
comme s'ils eftoient enI
PARTIE.
و
core en vie. En comparant
deux Poëtes , deux
11Avocats , deux Medecins
, même deux Magiftrats
, diray - je auſſi
deux Heros , l'on offenafe
au moins l'un des
ی گ چ
deux ; tout paralelle offenfe
l'homme , parcel
que chaque homime fe
croit unique en fon efpe-
´ce : appellons donc cecy
badinage plutoft que paralelle.
Le ton ferieux gâte10
MERCURE
roit tout Homere &
confors fe fâcheroient fi
j'empruntois la Lyre divine
pour chanter Rabelais
, mais Rabelais eft
bon Compagnon. Il me
prêtera bien fon ftile ,
même pour mettre Homere
au- deffus de luy.
Revenons à nos mou-
,, tons , diroit icy Maiftre
François , paralellifons
la haute & mirifique
renommée Homerien
"
„ ne , à la renommée RaI.
PARTIE.
belaifienne , de fon "
temps & du nôtre «
non moins grande en
dimention domina- «
10
tion & tyranie , quoique
Picholine au gré
d'aucuns , eu égard
aux pays & fujets qu'- "
elle domine & tyranni- “
fe : car reputation Ho- «
merienne regne & re- "
gna és cerveaux heroï- «
ques , fcientifiques ,
Philofophiques , Meta- "
phyfiques , Alchimi- «
Co
12 MERCURE
و د
miques & Cabalif
tiques , & Rabelai-
,, fienne , maniene regne
qu'és cerveaux joyeux
, des Pantagrueliftes
,, lequel mot de Panta
gruelifte feroit pour-
, tant par avanture
,, mieux & plus ſenſé-
,, ment fignificatif
, que
nul autre des grands
mots ci- deffus , fi l'on
, l'interpretoit
à force,
d'érudition
, & de
"
و و
,, han , han , comme on
1. PARTIE.
13.
<<
σε
fait aucuns mots grecs
Homeriens
, inintelli-
"
gibles aux bonnes “
gens non - érudits .
Mais je m'amuſe

trop a lanterner
& «
baguenauder
en di- “
greffions
; digreffions
"
autem font au Lecteur
"
ce que font au Voyageur
, landes arides ,
fabloneufes , & alterantes
, partant , vîte , “
alerte.... de hait , de
hait , doublons
le pas ,
44 MERGURE
courons au but , allons
au fait , id eft , buvons
و د
frais.
Ariftote n'a peut - eſtre
pas dit avant moy que
beauté de l'ouvrage fait
la
d'abord la réputation de
l'Auteur , & qu'enfuite la
réputation de l'Auteur
fait fouvent la beauté de
l'ouvrage ; les beautez réelles
qui font dans Rabelais
lui ont fans doute d'abord
acquis faréputation
,
mais enfuite
la réputation
1.
PARTIE. IS
a fait trouver dans fes ouvrages
bien des beautez
qui n'y font pas ; je n'ay
garde de croire qu'il en
foit ainfi du Poëte Grec ,
chut....laiffons parler un
homme plus hardi que
moy , c'eft Montagne.
Qu'un Autheur , dit - il ,
puiffe gagner cela d'attirer
& embefoigner aprés foy
la Pofterité , ce que non-
Teulement l'habileté , &
fuffifance , mais autant ou
plus la faveurfortuite du
16 MERCURE
Sujet & autres hafards
peuventgagner, qu'au demeurant
un Autheur fe
prefente ou par bêtife ou
par fineße , un peu obfcu
rement, & diverſement
ne luy chaille , nombre
d'efprits le belutant & fecouant
, en exprimeront
quantité de formes , ou
Jelon , ou à cofié , ou au
contraire de la fienne &
qui toutes luy feront hon
neur ; c'est ce qui afait va-
Loir plusieurs chofes de
1. PARTIE. 17
neant , qui a mis en credit
plufieurs anciens écrits,
les a chargez de toute forte
de bautez qu'on a voulu
une même chofe recevant
mille & mille , & autant
qu'il nous plaift d'images
& confiderations diverſes3
Eft - il poffible qu'Homere
ait dit tout ce qu'on luy
fait dire , & c.
Eft- il poffible auffi què
Rabelais ait penſé tout ce
qu'on luy fait penfer ?
Non fans doute , on a
I B
Juin 1711 .
18 MERCURE
voulu juftifier par des ap
plications fines & détournées
, plufieurs tirades infi
pides où tombent neceſſairement
ceux qui veulent
toûjours parler & toûjours
plaifanter ; quelque fond
de gayeté qu'on puiffe
avoir , on n'eft pas plaifant
:
toutes les fois qu'on plaifante
il faut pardonner
au plus agreable convive
deux turlupinades pour un
bon mot
Z
& au plus
grand Poëte deux penſées
PARTIE 19
fimplement communes ,
pour unefublimementfim
pas a
ple.Je ne parle
mere deà , diroit Rabe- “
lais , il eft en fes moin- "
dres lanternages fubli- "
mirifiquement entou- “
fiaſmé ; je le vois tout
embrafé & tout embrafant
d'un feu A- "
pollonien ; mais aprés f
tout il n'y a point de "
feu fans fumée , comme «
auffi n'y a-t-il point de "
fumée fans feu fumée “
1. Bij
20 MERCURE
"
» je nomme en ce dernier
», cas , réputation
odoran-
و ر
,,
te , comme fumée de
caffolette
, ou comme
vapeur de mufc & d'ambre
- gris delectant
les
,, bonnes & fortes teftes , -
,, mais enteftant
parfois
,, aucuns à teſte-foible , fi
,, aucunes
y a.
Je voulois donc dire
», par ce dicton de fu-
,, mée fans feu , que réputation
ne va point
fans merite , laquelle 23
PARTIE. 2
maxime les fabula- «
reurs anciens euffent «
«
9/1
=
ainfi allegorisée.
Réputation mariée à
Merite , a engendré Pré
vention && par aprés
Prevention
, Fille nee de
Reputation , a engendré
Ja Mere bien plus grande
& plus belle que n'eftoit
naturellement
, lors que
fut mariée à Merite.
Homere a environ
deux mille fix cens ans
de
réputation acquife
11 MERCURE
Rabelais n'en a qu'environ
cent foixante ;
Corneille n'en a qu'environ
cinquante : lequel
des trois doit l'emporter.
A juger feulement par
l'âge des réputations
c'eft peut - eltre la plus
jeune ; car plus une réputation
vieillit , plus elle
eftabforbée dans le vafte -
fein de la Prévention .
Vingt ou trente ans
aprés la mort d'un Autheur
c'eſt à peu prés
I.
PARTIE 29
la vraye diſtance ; c'eſt
le vray point de vûë ,
d'où je voudrois juger
de la réputation
.
En voyant Homere
à travers vingt - fix fiecles
imaginez - vous
voir de loin une femme
à travers un broüillard
épais ; quelqu'un qui en
feroit devenu amoureux
par ouir dire auroit beau
vous crier : voyez- vous
la délicateffe de ces
traits , la douce vivacité
24 MERCUR
de ces yeux , la nuance
imperceptible des lys &
des rofes de ce tein délicat
; mais fur tout remarquez
- bien ce je ne
fçay quoy , ces graces.
Hé morbleu
, répon
driez-vous à cet Amant
enthouſiaſiné , comment
voulez-vous que j'en juge
, à travers d'un tel
brouillard , il faudroit
que j'euffe les yeux d'un
Linx , ou ceux de l'A
mour.
Voyez
PARTIE
25
Voyez au contraire un
Autheur de trop prés ,
c'eft encore pis ; la réputation
d'un Autheur
vivant eft offufquée par
la jaloufie de fes contemporains
, par la cabale ,
on eftime même fes ouvrages
felon le credit qu
ila , felon fa qualité , fes
richeffes , fes moeurs ;
que fçai - je moy , mille
autres fujets de prévennous
tion par exemple ,
ne sçaurions nous imą “
Juin 1711. 1. C
24 MERCURE
giner qu'un hommeque
nous voyons de fi prés
foit fi grand homme
comment feroit-il divin,
nous le voyons boire &
manger avec nous , &
nous luy entendons fou
vent dire à table plus
de fottifes qu'à ce gros
1
yvrogne fimple & pefant
, qui parlant & beuvant
avec une égalité
merveilleuſe , ſoutient
beaucoup mieux l'idée
qu'on nous avoit donnée
APARTIET 27
deluy, que cet Auteur ne
foutient celle quer fes dis
vres nous avoient donnée
de l'élevation de fon ge
nienied zupyon aleuon
Revenons à noftre
point de vûë que je plavue
cerois environ vingt où
arente ans aprés la mort
d'un Autheur , afin que
dégagé des préventions
dont je viens de parler ,
on puiffe juger de toutes
les beautez de l'ouvrage
,
par rapport au gouft, aux
moeurs , aux uſages , aux
28 MERCURE
proprietez de la langue
& à cent autres circonf
tances qu'il eft effentiel
de bien fçavoir , pour
porter un jugement équitable
& de l'ouvrage
& de l'Auteur , mais fur
tout de l'Auteur ; car on
peut quelquefois juger
d'un ouvrage par l'ou
vrage feul , mais on ne
fçauroit juger du merite
d'un
Autheur que par
rapport
au fiecle
où il
vêcu.
Mais le fujet que je
1. PARTIE
Dhe
traite me méne plus loin
que je n'avois crû ; je
youlois parler feulement
dans ce mois- cy de la réputation
de nos deux
Autheurs , & de la prévention
qu'on a pour
eux. Réputation , Prévention
; c'eſt où je m'étois
borné. Quelles bornes
, grand Dieu ! le chapitre
de la Prévention
feule rempliroit mille
volumes à ne faire qu'un
petit article ſur chacun
1. Cij
40 MERCURE
des préjugez qui entrent
dans la compofition des
jugemens des hommes :
il pourra donc encore
dans la fuite
m'échaper
quelques traits non- envenimez
, contre la prévention
qu'on a pour les
Anciens ; & comme cer
te prévention pourroit
aller jufqu'à m'accufer
d'eftre prévenu pour
les Modernes , il faut
fe declarer. Je croy
donc que tout confideSE
PARTIE n
toute compenfó
Homme pour Homme ,
Aureur pour Auteur
Feſte pour Teſtes,
cien , Moderne , tout eft
Ant
àa peu
prés
égal
; parce
que les coeurs & les cerveaux
font à peu prés fa
briquez comme ils é-
2
toient jadis. A l'égard
d'Homere & de Rabelais
, je les crois chacun
dans leur genre grands
& excellens Autheurs
ceft affez dire pour Ra
1. Сін
32 MERCURE
belais , mais je crains
d'avoir trop peu o dit
en l'honneur d'Homere.
Ceux qui le diviniſent ,
* & qui font dévouez à
fon culte voudroient- ils
me forcer à l'adorer comme
ils font.
A ce propos il me foùvient
de ce que dit Rabelais
, non en fes livres
connus , mais en quelque
fien manufcrit. Croyezdonc
fi voulez que c'eft
baliverne pofthume du
I PARTIE 33
angrand
Balivernier
Maître
François
.
Unjour Panurge dans
un Caveau du Temple
fi renommé de la drve
Bouteille buvoit debout ,
& buvant avaloit , &
avalant fe délectoit , & fe
délectant chantoit : Hé
bon bon bon , que le Vin
eft bon , par ma foy j'en
veux boire: Or comme il
chantoit & beuvoit fur
ce ton , un Sacrificateur
zelé de l'antique & dive
7
14 MERGURE
Bouteille , s'avança rout
courroucé , vers Panurge,
fi qu'en fon courroux
il l'appella buveur profane
qu'eft- ce à dire ,
repliqua le Buveur moderne
: n'eſt point profane
qui bon Vin boit ,
qui bon Vin aime , &
qui bon Vin chante.
Non certes, dit le Sacrifi
cateur , mais tu bois de
D
bout , & c'eft mal - fait
car il faut boire à genoux
, tu chante fimpleI
PARTIE. **
thent que le Vin eft bon
il faut chanter qu'il eft
divin , car c'eft vin greca
Hé , que m'importe , dit
Panurge , vin Grec ou
Bourguignon , ny cel
luy- ci , ny celuy- là , ny
aucun Vin n'eft chofe
divine : non ce n'eft que
boiffon humaine, & pour
ce j'en boiray tout ce
qu'humain en peut boire
humainement , & ne le
boiray que debout , ou
affis à table , ou à che
I
36 MERGURE
val , car on boit aufli le
vin de cheval , mais
1
genoux on ne but onc
ques , & n'y boiray mie.
Alors le Sacrificateur
homine
gravement colerique
n'entendit point
raillerie , & à grands
coups de Tirfe voulut
faire agenouiller le bon
Panurge ; mais luy s'obftinoit
à boire debout ,
criant feulement
, Bon ,
bon , bon , vin pour moy
bon , bon me fuffit , bon
1. PARTIE 37
veut tout dire. O tu di- Golcrioit
le Saras
divin
crificateur , tu cn viendras
à mon mot ; divin
divin , crioit l'un en battant
: bon , bon , bon
crioit l'autre en buvant ;
en forte qu'entre ces
deux obftinez , ne pou
voit avenir , non plus
qu'aux Ecoles Ariftoteliciennes
aucune folu
tion raiſonnable . Devinez
qu'elle fut celle - cy.
A force de boire &
8 MERCURE
d'avoir bû , le vin manqua
à Panurge, qui pour
lors cria , comme c'eftoit
fa coûtume , dés que fa
bouteille eftoit vuide , il
cria , dis-je , du vin , du
vin : en force que le Sa
crificateur crut ouir divin,
divin , cette équi
voque Panurgienne finit
ainfi le debat au Temple
de la dive Bouteille , fans
quoy ces deux obftinez y
feroient encore , l'un à
battre & l'autre àboire.
I. PARTIET
#
Autant en pend
L'oeil à quiconque vous
dra crier en lifant Ho
mere ,beau , beau , beau,
admirable , fublime ; ce
n'eft rien dire fi l'on ng
.B
crie divin , divin.
Or aprés ce conte.bon
ou mauvais , felon le
Lecteur , adieu vous di
fent Homere & Rabe-
Jais jufqu'aux Calendes
Mercuriales du prochain
mois. Si pour lors defiriez
revoir Mercure pa
40 MERCURE
ralellifant , vous , aprés
avoir touffé un coup en
boirez trois ou quatre ;
enfuite beficles prendrez
, fi de beficles uſez ,
& alors lirez peut - eftre,
merveilles & peut- eftre
billevezées.
21. PARTIE, 41
CALCUL
Aftronomique.
On imprime à prefent
à la Haye un petit Livret
intitulé Calcul Aftrono
miquefur la diftance reciproque
de plufieurs E◄ -
clipfes on m'en envoye
un Extrait trop rempli
de calculs pour eftre pla
cé dans un Mercure ga
lant ; il eft toûjours bon
d'en avertir ceux qui
Juin 1711 . D
MERCURE
ont curieux de ces fors
tes de fciences on me
mande qu'on a fait de
ées calculs une applica
tion utile qu'on en peut
faire à la quantité de l'arr
née folaire , dont voicy
les Principes communs
marquez au commence
ment de l'Extrait.mp
Le Calendrier Julien
a commencé avant l'an
de grace , & c . ..polisə
L'ordre des Biffextes
y eft obfervé de quatre
1.
PARTIEN 43
ans en quatre ans fans
exception our ple 251
Le Calendrier Gregorien
a reformé le Julien
en mil cinq cens quatre
vingt-deux dista
La reformation a retranché
dix jours de cet
te année mil cinq cens
quatre-vingt-deux .
no?
a
Elle a fixé la durée
de l'Année Solaire à trois
eens foixante - cinq jours
cinq heures quaranteneuf
minutes.
HayX
1. Dij
44 MERCURE
Elle a déterminé qu'à
l'avenir toutes les centiémes
années ne feroient
plus biffextiles , fi ce n'eft
de quatre cens ans à quatre
cens ans.
Elle a reconnu le défaut
de correfpondance
qui fe rencontroit dans
le calendrier Julien entre
les mouvemens du Soleil
& de la Lune. K
De ce petit nombre
de principes il tiré des
confequences , pour les
.1
I PARTIE
45
calculs modernes par lefquels
on a prétendu déterminer
l'espace moyen
du mois fynodique lunaire
avec plus d'exactitude
que ne l'avoit fait
Jautrefois Meton l'Athenien
, en inventant le
Nombre d'or.
46 MERCURE
f
*********
OBSERVATIONS
fur les Fourmis.A
Ceux qui obfervent
la
nature
dans le deffein
d'écrire
& de fe faire
honneur
de leurs découvertes
, donnent
fouvenc
le merveilleux
pour
le
vray, & leurs imagina
tions
pour des obſerva
tions réelles.
T
J'ay plus de confian
se en ceux que la fimple ·
PARTIE 47
curiofité engage d'abord
à chercher le vray, & qui
frappez enfuite par le
merveilleux qu'ils y trou
C
vent, ne peuvent refifter
au defir d'en faire pare
Public 36
Celuy de qui je tiens
les remarques fuivantes
eft encore plus digne de
foy que ces derniers : car
le hafard feul luy a fair
faire ces découvertes , &
il n'avoit nulle envie de
les écrire ; ce n'eſt que
48 MERGURE
par complaifance pour
moy qu'il a employé à
ce petit ouvrage des heu
res qu'il employe ordinairement
à de plus hautes
études ; & c'eſt une
chofe étonnante qu'avec
tout le goût & toute la
vivacité d'efprit qu'on
puiffe avoir , il ait eu la
patience de faire des obfervations
fi exactes, i
*
I. PARTIE.
49
Les Fourmis.
Vous m'avez fait l'honneur
de m'écrire , Monfieur
, pour apprendre de
moy ce qu'un de mes amis
vous avoit desja dit de
obfervations quelques
que j'ay faites fur un des
plus petits infectes de la
nature , je voudrois pouvoir
fatisfaire entiere- mere
curiofité
par
une deſcription exacte,&,
pour ainfi dire ,
par l'anatomie
de ce petit animal ,
Juin 1711.
1 E
So MERCURE
vous parler de la maniere
dont les fourmis s'engendrent
, leurs differentes efpeces
, comme elles font
rangées dans leurs fourmillieres
, & mille autres
particularitez trés- curieufes
, dont je pourray un
jour vous faire part. Comme
je n'ay eu ni affez de
temps, ni d'affez bons microſcopes
pour conſiderer
exactement tout cela ,
Vous vous contenterez ,
s'il vous plaift , de ce que
je puis en dire aujour
d'huy , & de la promeffe
1.
PARTIE . SI
que je vous fais de vous en
dire un jour davantage ,
fi j'ay affez de loifir pour
en faire des nouvelles experiences
, aufquelles je
feray moins engagé par
ma curiofité particuliere
que par l'envie que j'ay
de vous faire plaiſir.
Je fis ces obfervations.
à la campagne , où je
paffay l'Efté fort folitairement
dans un lieu affez
trifte pour moy , il femble
que Dieu voulut me fufciter
la fourmy pour me réveiller
de la pareffe , com-
1 E ij
52 MERCURE
pagneinfeparable
de l'ennuy
, & me faire entendre
la voix de la Sageſſe qui
dit : vade adformicam opiger
Allez à la fourmy , paref .
feux. En effet elle merite
bien quelque attention
particuliere,puifque la Sageffe
en fait l'éloge , &
que telle curiofité peut
fervir à nous rendre meilleurs
, c'eft ainfi qu'en éxaminant
de prés les plus
petits ouvrages de la nature
on y découvre fans
ceffe de nouveaux motifs
d'admirer & de louer
I. PARTIE.
$3
Dieu , & on voit plus d'ordre
dans leur conduite , & ,
fi je l'ofe dire , de fujets
d'édification qu'on ne
trouve pas tousjours parmy
les hommes.
Dans une Chambre à
cofté de la mienne que
perfonne n'occupoit depuis
long- temps , il y avoit
à la feneftre une caiffe
avancée de deux pieds de
profondeur , propre à entretenir
des fleurs. Comme
il y avoit long - temps
qu'on n'avoit point cultivé
cette espece de parter-
E iij
54 MERCURE
re il s'eftoit couvert de
platrats , & de plufieurs
autres immondices détachées
du roit , & des murailles
, qui toutes reünies
enfemble avec cette terre
par l'eau qui y avoit eſté ,
formoient un terrain fterile
& fec ; d'ailleurs l'expofition
au midy , l'abry
du vent , & de la pluie , &
fur tout le voisinage d'un
grenier, rendoient cet endroit
un lieu de delice &
d'abondance à des fourmis
, c'eftoit - là auffi où
elles s'eftoient eſtablies en
1. PARTIE. SS
trois ou quatre fourmillieres
differentes ; fans
la mefme raidoute
par
fon
qui
nous
fait
baftir
des Villes en des lieux
fertiles & commodes ,
prés des fources & des
ruiffeaux.
L'envie que j'avois de
cultiver quelque fleur, me
fit examiner cet endroit ,
& je tranfplantay dans un
coin de cette caiffe , où la
terre eftoit meilleure , une
tulipe du jardin ; mais a
yant jetté les yeux fur les
fourmis que je vis occu-
I E iiij
56 MERCURE
pées fans relache à mille
petits foins differens , petits
par rapport à nous
mais tousjours tres-utiles,
? & de tres-grande importance
pour elles , je les
trouvay plus dignes de
ma curiofité que toutes
les fleurs du monde ; j'oftay
bien - toft ma tulipe
pour eftre l'admirateur &
Je reftaurateur
de cette
petite Republique ; voila
tout ce dont elles pouvoient
avoir befoin , car
pour leur police , & l'ordre
qui regne dans leur
1.
PARTIE. $7
focieté , il eft plus parfait
que celuy des Republiques
les mieux policées ,
ainfi elles n'auroient
craindre que quelque
nouveau Legiflateur qui
en vouluſt changer la forme.
Je m'occupay à leur
procurer toutes leurs petites
commoditez
, j'oftay
de cette caiffe ce qui pouvoit
leur nuire , & j'allois
fouveut vifiter mes fourmis
, & eftudier leurs
moindres actions . Comme
je me couchois fort
58 MERCURE
ૐa
tard j'allois les voir travailler
au clair de la Lune,
& je me fuis fouvent levé
la nuit pour examiner
leurs travaux , j'en voyois
tousjours quelques unes
aller & venir ça & hà , &
tousjours occupées, il femble
qu'il n'y ait point de
fommeil pour elles. Tout
le monde fçait que la fourmyfort
de fa fourmilliere ,
& expofe au Soleil le bled
qu'elle tenoit enfermé la
nuit ; ceux qui ont veu des
fourmillieres ont peu remarquer
aisément ces pe
I. PARTIE.
ע פ
tits tas de bled autour de
leurs trous.Ce qui m'efton
na d'abord c'est que mes
fourmis ne fortoient leur
bled que la nuit au clair
de la lune , & qu'elles l'enfermoient
le jour , ce qui
eftoit contraire à ce que
j'avois vû, & que je voyois
faire aux Fourmis des autres
endroits : J'en decouvris
bien- toft la caufe
c'eft qu'il y avoit affez
prez de la un pigeonier ,
que les pigeons , & les
oyfeaux feroient venus
manger leur bled fi elles
&
60 MERGURE
7
l'euffent expofé pendant
le jour, apparamment elles
avoient efté attrapées , &
j'en trouvois fouvent lorfque
j'y allois le matin .
Je les delivray bien tolt
de ces voleurs , en mettant
des
morceaux de papier
aubout d'un fil que le vent
faifoit jouer , & qui eftoient
attachez audeffus
de la feneftre , cela les
delivra des oiſeaux ; Pour
les pigeons comme ils vivenr
en focieté , dez que
je les eus chaffez plufieurs
fois de cet endroit ; &
I. PAR TIE. 61
qu'ils le virent plus frequenté
qu'auparavant , lls
furent tous bien - toftavertiş
qu'il ny avoit pas de
feureté pour eux à y aller.
Auffi je ne les vis jamais
depuis fe venir poſer ſur
cette caiffe : ce qu'il y a
d'admirable , & que je
n'oferois avancer , ny
peut- eftre mefme croire ,
fije n'en avois fait l'expe
rience , c'eft que les fourmis
connurent quelques
jours aprés qu'elles n'avoient
plus à craindre .
Elles commencerent à
62 MERCURE
eſtaller leur bled pendant
le jour je
remarquay
pourtant bien qu'elles
n'eftoient pas entierement
convaincues de leur
delivrance , car elles n'oferent
avanturer leurs
biens tout à coup , mais
peu à peu , d'abord en petite
quantité , & fans
beaucoup d'ordre , pour
eftre preftes à le rentrer
en cas de malheur , obfervant
, & faiſant ſentinelle
à l'entour Enfin
perfuadées qu'elles n'avoient
rien à craindre ,
*
;
I. PARTIE .
63
elles expoferent tout leur
bled au Soleil , preſque
tous les jours avec ordre,
& le renfermoient la nuit
en la maniere que je vais
raconter.
Le trou de la fourmil .
liere eft percé d'abord en
droite ligne de la profondeur
environ d'un demy
pouce , enfuite cela
defcend en ligne oblique
où elles ont fans doute
leur magazin que je croy
tout à fait diftingué de
l'endroit où elles fe repo
fent , & où elles mangent,
64 MERCURE
$
car il n'eft pas poffible
que la fourmy qui eft
propre , & rangée dans
fon menage , & qui jette
hors de fa fourmilliere
toutes les plus minces , &
les plus petites peaux qui
reftent du bled dont elle
fe nourrit , comme je l'ay
remarqué mille fois ; vouluft
remplir fon magazin ,
& fouiller fon bled de
toutes ces immondices.
Comme la Fourmi enferme
fon bled dans la
terre , & que le bled he
manqueroit pas d'y germer
,
I. PARTIE.
65
mer , puifque cela arrive
mefme dans les greniers
fi l'on n'a foin de le remuer,
elle pourvoit à cet
inconvenient , & avant de
ferrer fon bled dans là
fourmilliere , elle a foin .
d'en couper le germe
ainfi tout le bled qui a
efté dans une fourmilliere
ne fcauroit rien produire,
c'eftune experience qu'on
peut faire aisément , il fuf.
fit mefme de fes propres
yeux pour voir qu'il n'y
a plus de germe, Mais
quoyque ce germe ſoit
Juin 1711.
IF
66 MERCURE
coupé il y a encore un autre
inconvenient ; comme
tout ce qui ne produit
pas fe ramolit ou fe corrompt
dans le fein de la
terre , & d'ailleurs la nature
d'elle meſme tend
toûjours à l'accroiffement
& à la propagation , le
bled fentant l'humidité fe
gonfle , fe remplit d'humeur,
& ne feroit plus bon
pour nourrir la fourmy
qui le veut fec , & bien
apprefté de la mefme maniere
que nous ; la fourmy
par fon induftrie , &
a
1. PARTIE. 67 -
fon travail remedie à cet
inconvenient , & elle fait
tant par fes foins que le
bled fe conferve auffi fec,
& auffi pur dans fa fourmilliere
que nous le confervons
dans nos greniers
voicy donc comme elle
fi prend.
Elles raffemblent certaines
petites particules
de terre feche qu'elles
fortent tous les jours de
leur fourmilliere , & qu'elles
rangent . tout autour
pour la faire cuire au Soleil
, chacune en porte un
I
Fij
68 MERCURE
petit brin avec les pinces
, la pofe auprés de fon
trou 15 &2 va enfuite en
chercher autant , ainfi à
force d'affiduité , de tra
vail , & d'ouvriers , en
moins d'un quart d'heure
vous voyez entaffé autour
de ce trou une infinité de
petites parties de cette
terre feche , qui eſt celle
fur laquelle elles pofent
leur bled , & dont elles
le couvrent dans leur Magazin
, j'aivû qu'elles faifoient
ce manege preſque
tous les jours , pendant
I. PARTIE. 69
L'ardeur du Soleil , & lorf
que fur les trois ou qua
tre heures le Soleil une
donnoit plus fur cette feneftre,
comme la terre eftoit
chaude & bruflante ,
elles ne l'oftoient poinz
encore jufqu'à ceque l'hu
midité de l'ombre , & de
la muit commençoit tant
foit peu à fe faire fentir,
pour lors elles renfer -s
moient leur bled & leurs
particules de terre cuite.
Comme rien n'eft exempt
de cenfure , & que
quelqu'un pourroit bien
70 MERCURE
pouffer fa critique jufques
fur les fourmis , je croy
qu'il eft neceffaire icy de
la juftifier dans fa conduire
, & d'en faire voir la
fageffe , on pourroit dire
qu'il paroift ridicule que
la fourmi fe ferve de cette
terre feche qu'elle fait en
core cuire au Soleil avec
tant de peine ; pluſtoſt
que de fable , ou des brins
de pierre ou de brique . A
cela je reponds , qu'en
cette occafion rien
peut mieux convenir à la
Fourmi , que cette terre
ne
1. PARTIE . 7
cuite au Soleil . Car outre
que le bled fe gafte
fur le fable , & qu'un bled
dont le germe eft coupé,
& qui eft entamé fe rempliroit
de petites parties
graveleufes tres difficiles
àofter, & fe gafteroit bien
davantage , c'eft encore
que le fable eftant diviſé ,
& fe divifant toûjours en
des parties trop petites ,
les pinces des fourmis ne
font pas affez delicates
pour les raffembler ainſi
brin à brin , ce travail fe
roit bien plus penible
72 MERCURE
pour elles ; C'eft pourquoi
on voit rarement des
Fourmis , auprés de rivieres,
& dans un terrain fort
fablonneux.
Pour ce qui eft des petites
particules de brique ou
de pierre , la moindre hu
midité ne
manqueroit pas
de les joindre , d'en faire
une espece de maftic que
les fourmis ne pourroient
divifer , ce feroit un ouvrage
trop embarraſſant
pour elles , quand elles fe
feroient ainfi colées dans
leur fourmilliere elles ne
pourroient
I.
PARTIE. 71
pourroient plus en fortir
& cela en troubleroit l'arrangement.
Si la plufpart
de ces petits autheurs qui
fourmillent aujourd'huy
fe conduifoient
en tout ce
qu'ils font avec autant de
raifon & de fageffe que les
fourmis , il feroit glorieux
pour eux que l'on critiquaft
leurs ouvrages , &
qu'on les obligeaſt à les
juftifier.
Aprés que la fourmy a
ainfi forti de fa fourmilliere
, & exposé au Soleil
toutes ces particules de
Juin 1711. I G
74 MERGURE
terre feche , elle fort enfuite
fon bled de la mefme
maniere grain à grain ,
elle le range à l'entour de
cette terre , ainfi l'on voit
deux tas en rond autour
de leur trou , l'un de cette
terre feche , & l'autre de
bled ; & aprés qu'elles ont
forti & rangé tout leur
bled , elles fortent encore
un reite de cette terre feche
fur laquelle fans doure
leur bled eftoit eftendu ,
ce qui fait inferer trés - juftement
de quelle maniere
tout cela doit eftre ran-
I
I. PARTIE.
75
$
gé dans leur magafin.
Au refte la fourmy ne
fait cette manoeuvre que
quand le temps eft ferain ,
& le Soleil bien chaud ,
car perfonne ne fe connoift
mieux au temps que
la fourmy. Je remarquay
qu'un jour les Fourmis
ayant exposé leur bled au
Soleil à onze heures du
matin , elles l'ofterent contre
leur ordinaire avant
une heure aprés midy ,
lorfque le Soleil eftant
encore ardent , & le Ciel
fort ferain , il ne paroifſoit
I
Gij
76 MERCURE
aucune raifon d'une telle
conduite ; mais une demiheure
aprés le Ciel fe cou
vrit , & je vis tomber une

petite pluie , que la Fourmy
avoit bien mieux prévû
que l'Almanach deMilan
qui avoit prédit qu'il
ne pleuveroit pas jour- là.
Jay desja dit que ces
fourmis dont je prenois
foin , & qui avoient toute
mon attention , alloient
chercher du bled dans un
grenier à cofté duquel elles
s'eftoient eftablies : il
nly avoit pas actuelle,
1.
PARTIE. 77
>
mais ment du bled
comme il y autrefois
ilil y en avoit
en
avoit
cu
encore affez pour qu'elles
trouvaffent à glaner ;
j'allois fouvent les voir
faire dans ce grenier
comme il y avoit de vieux
bled , & qu'il n'eftoit pas
égalementbon, je remarquay
qu'elles ne prenoient
pas tout indifferemment,
& qu'elles choififfoient
le meilleur.
J'ay veu par plufieurs
experiences dont le détail
feroit trop long , que la
I Giij
78 MERGURE
fourmy ne fait gueres
provifion que de froment
quand elle en trouve , &
elle choifit tousjours le
plus beau ; mais elle eft
fage , & fçait s'accommoder
au temps , quand elle
n'a pas de froment , elle
prend du feigle , de l'avoi
ne , du millet , & mefme
des miettes de croute de
pain , mais rarement de
l'orge, il faut que la difette
foit grande , & qu'el
le n'ait pas trouvé d'autre
grain lorfqu'elle en apporte
dans fa fourmiliere.
1. PARTIE . 79
Comme je voulois eftre
-de plus prez témoin de
leur prévoyance , & de
leurs travaux , je mis un
petit tas de bled dans un
coin de cette chambre où
elles eftoient , qui n'eftoit
habitée de perfonne , &
afin qu'elles n'allaffent
plus en chercher dans ce
grenier en fermay la feneftre,
& en bouchay bien
les fentes
»
Cependant
comme rien ne pouvoit
les avertir du bled que
l'avois mis dans cette
chambre , & qu'elles n'en
Giiij
to MERCURE
pouvoient
deviner l'endroit
, car quoyque je leur
connoiffe beaucoup
de
genie je ne croy pas qu'il
y ait des forciers parmy
elles ; Je m'apperceus pendant
plufieurs jours de
leur embarras , & qu'elles
alloient chercher fort loin
leurs provifions , je les
laiffay quelque temps
dans cette peine , car je
voulois voir fi à force de
chercher elles feroient la
découverte du petic trefor
que j'avois caché pour
elles , & m'éclaircir fi la
TIPARTIE.
fourmy comme les autres
animaux pouvoit connoiftre
par l'odorat ce qui
Ifert à fa nourriture , & fi
fa veuë portoit affez loin
-pour le voir ; elles furent
painfi quelque lo temps
zmoins à leur aife , elles fe
donnoient bien de la peine
, je les voyois venir de
afort loin , & aller l'une
d'un cofté , l'autre d'un
bautre
chercher
quelque
sgrain
qu'elles
ne trou-
Voient pas toujours
, ou
qui ne fe trouvoit
pas là
leur gré aprés de pent32
MERCURE
bles & longues courſes; ce
qu'il y a de merveilleux
dans ces petits animaux ,
c'eft que leurs courfes
n'eftoient jamais inutiles,
pas une ne revenoit au
gifte fans apporter quel
que chofe , quand ce n'au
roit efté qu'un brin de
terre feche pour l'entretien
de leur bled: lorfqu'elles
n'avoient rien trouvé
de mieux , l'une portoit
un grain de froment , l'au
tre de feigle , d'avoine ,
enfin chacune ce qu'elle
peu trouver , mais il
avoit
1. PARTIE. 83
n'y en avoit prefque jamais
aucune qui revint les
mains vuides à la maifon,
& qui euft fait abfolu
ment un voyage inutile.
La feneftre fur laquel
le eftoient ces fourmis
donnoit fur un jardin , &
eftoit au fecond eftage
les unes alloient jufqu'au
bout de ce jardin , les autres
au cinquiéme eftage,
pour chercher à trouver
quelque grain ; c'eftoit un
penible voyage pour elles
, fur tout quand il falloit
revenir chargée d'un

84 MERCURE
grain de bled affez grost
qui doit eftre une charge
bien pefante à une fours
my , & tout autant qu'elle
en peut porter. Or pour
aller porter ce grain du
milieu du jardin à fa fourmilliere
elle mettoit environ
quatre heures ; ainfi
on peut fçavoir par là la
jufte mefure de fa force ,
& de fon infatigable ardeur
pour
le travail , &
affeurer qu'elle fait la
meſme choſe qu'un homme
, qui prefque tous les
jours feroit quatre lieuës
1
I. PAR
TIE .
à pied , portant fur fes épaules
un fardeau des plus
pefans qu'il puiffe porters
Il eft vray que la fourmy
traifne un peu fon fardeau
, & fe fatigue moins
quand elle eft fur un terrain
plat. Mais auffi qu'elle
peine n'eft ce pas pour
cette pauvre fourmy lors
qu'il faut monter ce grain
de bled au ſecond eſtage ,
grimpant tout le long
d'une muraille la tefte en
bas & le derriere en haut,
il auroit fallu la voir pour
juger de fon embarras
86 MERCURE
& la penible fituation où
elle eft en marchant ainfi
à reculons , les paufes
qu'elles font alors prefqu'à
tous les endroits
commodes qu'elles rencontrent
, font bien juger
de leur laffitude : j'en ay
veu ainfi de tres - embarafsées
, & qui ne pouvoient
abfolument en venir
à bout ; en ce cas elles
s'arreftent , & leurs compagnes
plus fortes , ou
moins fatiguées , aprés
avoir monté leur bled à
leur fourmilliere , defcen1.
PARTIE . 87
dent enfuite pour les aider
: lly en a que le poids
du fardeau entraifne , &
qui fur le point d'arriver
au but , tombent de fort
haut avec leur bled , quand
cela arrive elles ne laiffent
gueres échapper leur
grain , & fe trouvant en
bas avec luy le remontent
encore.
J'en ay veu un jour und
dés plus petites , qui avec
plus d'ardeur & de coura .
ge que de force , montoit
un grain de froment des
plus gros avec des efforts

38 MERCURE
incroyables ; eftant arri
vée enfin au bois de cette
caife avancée où eftoit la
fourmilliere, & fur le point
de finir une courſe fi peſe
prefnible
, pour trop
fer, trebucha avec fon fardeau
voila un contretemps
bien facheux , qui
auroit fait pefter un Philofophe.
Je vis à peu prés
Pendroit où elle eftoit
tombée , j'y defcendis , &
je la trouvay avec fon mefme
grain dans fes pinces,
qui alloit commencer à
grimper de nouveau comme
J. PARTIE 89
me fi de rien n'eftoit . Cela
luy arriva jufqu'à trois
fois , tantoft elle tomboit
au milieu de la courfe, tantoft
un peu plus haut , mais
elle ne quittoit jamais prife
, & ne fe rebutoit point;
à la fin les forces luy manquerent
, elle s'arrefta en
un endroit , & une autre
fourmy luy aida à porter
fon grain , qu'elle eftoit
bien mortifiée de ne poufans
voir porter feule ,
doute pour fe fignaler par
quelque chofe de grand ;
c'est peut- eftre ce qui l'a-
Juin 1711.
H
90 MERCURE
nimoit fi fort , car c'eſtoit
un grain de froment des
plus beaux & des plus gros
qu'une fourmy puiffe por
ter. Il y en a à qui le bled
échappe des pinces lors
qu'elles le montent , pour
lors elles fe précipitent
aprés leur proye & la re,
prennent pour la remonter
; que fi par malheur elles
ne trouvoient
pas le
grain qui leur eft ainſi échappé
, elles en cherchent
un autre ou quel,
que autre chofe , honteufes
de retourner
à leur
I. PARTIE
fourmilliere fans rien apporter
, c'est ce que j'ay
experimenté en leur of
tant le bled qu'elles cher
choient.
Toutes ces expe
riences font aisées à faire ;
fil'on a affez de patience,il
la faut bien moindre que
celle des fourmis , mais
peu de gens en font capables
.
Elles furent ainfi reduires
à chercher leur vie à
l'aventure depuis que
jeus fermé l'entrée de ce
grenier fi commode & fi
fertile pour elles ; enfin
Hij
92 MERGURE
comme fans mon fecours
elles n'euffent découvert
de long- temps les fonds
que j'avois eftablis pour
elles dans la chambre où
elles eftoient.
Pour voir jufqu'où pourvoit
aller leur genie je me
fervis d'un moyen qui me
reüffit , & qui pourra paroiftre
incroyable à ceux
qui n'ont jamis fait attention
que les animaux de
mefme efpeces qui forment
une focieté , font
plus raiſonnables que les
autres. Je pris donc une
L PARTIE.
93
des dlus groffes fourmis
que je jettay fur ce petit
ztas de froment : la crainte
de fe voir prife , & la joye
qu'elle eut d'eftre relafchée
, fit qu'elle ne fongea
qu'à s'enfuir , & qu'elsle
ne s'avifa pas de prenedre
du bled , mais elle le
remarqua bien , car eftant
*retournée à fa fourmil-
Here, une heure aprés toutes
mes fourmis furent
averties de cette provi
fion , & je les vis prefque
toutes aller charier le bled
que j'avois mis en cet en
94 MERCURE
: droit je laiffe à penſer ſi
l'on ne doit pas inferer de
là qu'elles ont une maniere
de ſe communiquer
entrelles ce qu'elles yeulent
s'apprendre , car il
n'eft pas poffible qu'une
heure ou deux aprés elles
euffent peu eftre autrement
averties du bled que
j'avois mis en cet endroits
elles n'allerent point enr
fuite en chercher ailleurs ,
& elles l'épuiferent bientoft
, deforte qu'il fallut
en remettre ce que je
faifois en petite quantité,
I PARTIE.
55
pour connoiftre la jufte
mefure de leur appetie où
de leur avarice énorme
car je ne doute point qu'-
elles ne faffent des provifions
pour l'hiver & pour
les temps facheux , l'Écri
ture nous l'enſeigne , mille
experiences le font
voir , & je ne crois pas
qu'on en ait jamis fait qui
montrent raifonnablement
le contraire . Fay
desja dit qu'il y avoit en
cet endroit trois fourmillieres
qui formoient com.
me trois Villes differen
96 MERCURE
tes , mais gouvernées felon
les mefmes loix , & où
l'on voyoit obferver à peu
prés le mefme ordre , &
les mefmes couftumes ; il
y avoit pourtant cette difference
les habitants
que
d'un endroit fembloient
avoir plus d'induftrie &
de genie que ceux des autres
les fourmis paroif
foient mieux rangées dans
cette fourmilliere , leur
bled eftoir plus beau , leurs
provifions plus abondantes
leur fourmilliere
mieux peuplée , & les Ci
toyens
1. PARTIE. 97
# toyens en eftoient plus
gros & plus forts , c'eftoitlala
principale & comme
la capitale des deux autres
; j'ay mefine remarqué
que ceux de cet endroit
eſtoient diſtinguez
la
A
des
autres & avoient
mefme quelque prééminence
fur eux .
Quoy que cette caiffe
où eftoient les fourmis
fuft ordinairement à l'abry
, il pleuvoit quelquefois
d'un certain vent qui
y portoit la pluye , cela
les incommodoit beau-
Juin 1711,
! I
S MERCURE
coup, car la fourmy craint
T'eau , & lorfqu'elles vont
Join chercher leur provifon
, & que la pluye les
furprend , elles s'arreftent
& le mettent à l'abry fous
quelque tuile ou ailleurs ,
& ne fortent qu'aprés la
pluye paffée. Les fourmis
de cette principale fourmilliere
fe fervoient d'un
merveilleux expedient
pour s'en garantir chez
elles ; il y avoit un petit
morceau d'ardoiſe plat
qu'elles traifnoient fur le
trou de leur fourmilliere
I
1.
PARTIE
. 99
lorfqu'elle
prévoyoient la
pluye , & l'en couvroient
prefque toutes les nuits ,
elles fe
mettoient plus de
cinquante aprés ce morceau
d'ardoife furtout les
plus groffes & les plus fortes
, & tiroient toutes également
avec un ordre
merveilleux , elles l'oftoient
enſuite le matin, &
rien n'eftoit plus curieux
que de voir cette petite
manoeuvre elles avoient
rendu le terrain įraboreux
autour de leur trou , de
forte que ce morceau
I lij
100 MERCURE
d'ardoife n'appuïoit poiné
à plat fur leur fourmil,
liere , & leur laiffoit un efpace
libre pour aller &
venir par deffous ; celles
des deux autres fourmillieres
ne reüfiffoient pas
fi bien à fe garantir de
l'eau , elles mettoient fur
leurs trous plufieurs pla-
Trats l'un fur l'autre , mais
la pluye les incommodoit
tousjours , & le lendemain
elles fe donnoient des
foins & des peines incroyables
pour reparer le
dommage des eaux : c'eſt
}
1. PARTIE. Iot
ce qui fait qu'on trouve fi
fouvent des fourmis fous
des tuiles où elles establif
fent leur fourmillieres
pour fe mettre à l'abry de
la pluye , mais les tuiles
couvrent tousjours leur
fourmilliere de maniere
que cela ne les embaraffe
en rien , & elles vont expofer
leur bled & leur
terre feche au Soleil au
dehors & à l'entour du
tuilé qui les couvre.
c'eft ce qu'on peut voir
tous les jours : je couvrois
les deux fourmillieres qui
I I iij
102 MERCURE
เห
ne pouvoient peut - eftre
fe donner du fecours d'elles
melmes , pour celles de
la fourmilliere principale
c'euft efté un charité mal
employée , elles eſtoient
affez grandes pour pouvoir
le mettre à l'abry.
P
Mr. de la Loubere Ambaffadeur
à Siam , dans la
Relation qu'il a donnée
au public , rapporte que
les
dans un canton de ce Royaume
, fujet à de grandes
inondations , toutes
fourmies en cet endroit
ne s'eftabliffent que fur
I. PARTIE. 10
les arbres , on ne voit
point ailleurs de fourmil
lieres elles les placent
affez haut pour eftre tous
jours au deffus des inondations.
Il feroit inutile
de rapporter icy tout ce
qu'en dit Mr. de la Loubere
, il n'y a qu'à lire la
Relation de Siam.
Voicy une experience
affez curieufe que je fis
fur le mefme terrain où
eſtoient mes trois fourmillieres
, j'entrepris dien
eftablir une quatriéme , &
je le fis de cette maniere.
I iiij
104 MERCURE
$
Dans le coin d'une espece
de terraffe affez éloignée
de là , je découvris sunet
fourmilliere
nombreuſe
en citoyens , & dont les
fourmis eftoient beau
coup plus groffes que rou
tes celles que j'avois desja
veuës , mais il s'en falloit
bien qu'elles fuffent fi riches
en bled , & fi bien
policées que mes fourmis ;
je fis d'abord un trou fur
cette caiffe qui avoit la
meline forme qu'un trou
de fourmilliere. Je jetray
là , pour ainfi dire, les fon
I. PARTIE fos
demens d'une nouvelle
Ville , je pris enfuite tou
tes les fourmis que je pus
de cette fourmilliere de la
terraffe , & les mis dans
une bouteille pour les verfer
à l'endroit où eftoient
mes trois fourmillieres , &
où je leur avois tracé le
plan d'une nouvelle maifon.
Comme il m'eftoit
impoffible de prendre
toutes celles qui y eftoient,
& que je ne voulois
pas que celles que je pre
noisyretournaffent , ce que
j'avois lieu de craindre
106 MERGURE
je detruifis leur ancienne
demeure , j'y jettay de
l'eau bouillante pour faire
mourir toutes celles qui
reftoient , & je renverlay
tout l'édifice , je répandis
enfuite toutes ces fourmis
dans le lieu où je voulois
les eftablir , mais pas une
ne voulut ſe tenir dans ce
nouveau trou , elles s'en
allerent & difparurent
toutes en moins de deux
heures , cela me fit per
dre efperance de faire une
quatriéme fourmilliere en
cet endroit .
I
PARTIE.
107
Deux ou trois jours a
prés ayant paffé par hafard
fur cette terraffe , je
fus tout furpris de voir la
fourmilliere que j'avois
renversée , reftablie avec
autant d'arrangement
que s'il n'y eftoit jamais
rien arrivé je m'obſtinay
pour lors à les chaffer
de cet endroit , & à les efta
blir auprés de mes trois
fourmillieres , je recommençay
donc ce que j'avois
desja fait , avec cette
difference que la feconde
fois je mis de la poudre ,
108 MERCURE
& du fouffre dans leur
trou , & fit jouer une pe
tite mine qui renverfa
tout , enfuite ayant porté
toutes les fourmis que j'a .
vois prifes , auprés de mes
trois fourmillieres dans
l'endroit deftiné. Comnie
il pleuvoit tres- fort pour
lors , & qu'il plut toute la
nuit , elles s'y refugierent
pendant tout ce temps , &
le matin lorſque la pluie
eut ceffé , la moitié & me
les trois quarts de mes
fourmis
décamperent
pour aller rétablir leur de1.
PARTIE . 109
meure ruinée , mais en
ayant trouvé apparemment
le dommage irrepa
rable à caufe de cette odeur
de fouffre & de pou
dre qu'elles deteftent , &
qui leur eft mortelle : elles
revinrent , & s'eftablirent
à l'endroit que je leur avois
tracé qu'elles accom
moderent à merveille , el
les eurent bien-toft fait
alliance avec leurs voifines
qui leur aiderent en
tout dans leurs travaux
exterieurs , car pour ceux
du dedans il n'y avoit qu'
.
110 MERCURE
8
elles qui s'en meflaffent
fuivant les loix inviolables
eftablies entre elles. and
Jamais une fourmy
n'entre dans une fourmilliere
étranger, elles ne frequentent
d'autre maiſon
que la leur ; fi une d'entre
elles vouloit hazarder
d'y entrer , elle en feroic
chaffée & feverement punie
; j'en ay fouvent pris
d'une fourmilliere que j'ai
fait entrer dans une autre
à coſté , mais elle en fortoit
bien vifte ayant à fes
trouffes deux ou trois
I. PARTIE.
*6
fourmis qui la pourſuivoient
vivement , je voulus
faire plufieurs fois ce
manege avec la même
fourmy , mais à la fin les
autres s'impatienterent ,
& la dechirerent par morla
ceaux jay fouvent fait
peur avec mes doigts à
une fourmy , & l'ay pourfuivie
jufqu'au prés d'une
autre fourmilliere que
fienne , lui fermant tous
les paffages par où elle
pouvoit aller à fon gifte ,
il eftoit naturel qu'elle fe
refugiaft où elles fe trou
112 MERCURE
voit alors , car il y a bien
des hommes qui ne rail
fonneroient pas tant &
qui fe jetteroient dans un
puits ou par une feneftre
pour éviter des affaffins
qui les pourfuivroient ,
mais pour la fourmy en
queſtion elle fe détour
noit d'un trou qui n'eftoit
pas le fien , & avoit tant
de peine à y entrer qu'elle
tentoit pluftor toutes
fortes de moyens les plus
difficiles , & ne le faifoit
qué dans la derniere extremité
, & quelquefois
meſme
1. PARTIE.
mefme elles aimoient
mieux fe laiffer prendre ,
c'eft une experience que
jay fouvent faite. Ainfi
c'eft une couftume inviolable
parmy elles de n'entrer
jamais dans la maifon
d'autruy elles n'exercent
point l'hofpitalité ,
mais d'ailleurs elles font
fort fecourables les unes
envers les autres & s'aident
dans tous leurs travaux
exterieurs , mais elles
pofent les fardeaux à la
porte & les laiffent entrer
à ceux de la maiſon...
Juin 1711. 1 K
114 MERCURE
Elles entretiennent end
tre elles un petit commer
ce , & l'on a tort de direq
que la fourmy n'eft pas
prefteufe , car j'ay veu quen
les fourmis fe preftoient
du grain. Elles font des
échanges , fe préviennent
par toutes fortes d'offices
mutuels , & je puis affeu-p
rer que fi j'avois eu affezd
de loifir & de patience
j'aurois remarqué une in- 1
finité de chofes plus admirables
& plus curieufes
que tout ce que je viens o
de dire par exemple la
I. PARTIE. It's
maniere dont elles fe prefe
tent & le rendent leurs
prefts , fi c'eft en la mef
me quantité , ou fi elles
n'exigent pas quelque ufure
, fi elles payent les
eftrangeres qu'elles em
ployent , & qui les aident
dans leurs travaux.Je croy
qu'il n'eft point impoffi
ble d'examiner toutes ces
chofes , & il feroit enfuite
bien curieux de voir leurs
maximes de Droit , peuteftre
en tirerions nous deb
grands avantages pour
noftre police , comme la
I Kij
6. MERCURE
Sageffe nous les propofe
pour modeles de nos
moeurs, orolono rieb
Elles n'ont point ' d'ennemis
qui aillent les at
taquer en corps d'armée ,
comme on le dit des abeilles
, tout ce qui les inquiet
te ce font les oifeaux qui
vont quelquefois manger
leur bled quand elles l'eftallent
au Soleil , mais elles
le tiennent enfermé
lorfqu'elles ont des voleurs
à craindre , on dit
mefme qu'il y a des oi
feaux qui les mangent ,
a
I. PARTIE . fy
mais c'eft ce que je n'ay
pas veu arriver en l'endroit
où eftoient mes
fourmis ; les petits vermiffeaux
& les vers de
terre les inquiettent auffi,
mais pour ceux la elles en
viennent aisément à bour,
& les chaffent de leur
fourmilliere lorfqu'il s'en
trouve , les traifnent , &
les tuent. J'ay remarqué
qu'elles fe puniffoient
& qu'elles chaftioient
cel'es qui fans doute a
voient manqué à leur deg
voir , & mefme elles en
118 MERCURE
tuoient quelquefois , ce
qui fe faifoit en fe mettant
trois ou quatre aprés
elles , l'une la tiroit d'un
cofté avec les pinces , l'au-p
tre d'un autre , & elles la
déchiroient ainfi d'ailleurs
on ne remarque
point de differens parmy
elles , ce qui me fait croire
qu'il faut , ou que leur
difcipline foit bien ſevere
pour entretenir un tel or
dre , ou qu'elles ayent
" bien l'efprit de l'ordre &
de focieté pour n'avoir
pas befoin d'une difcipli
ne fevere.
I. PARTIE.
Dans quelle Republi
que a - ton jamais remarqué
plus d'union , tout eft
commun parmy elles ce
qu'on n'a jamais vû nulle
part , les Abeilles dont on
raconte des chofes fi mer
veilleuſes ont chacune
leur petite celule dans
leur ruche , le miel qu'elles
y font leur eft propre ,
chacune en particuler s'en
nourrit , & a fa petite affaire
à part , tous les autres
animaux en font de
mefme , & s'arrachent fou
vent les uns aux autres
Yo MERCURE
leur portion ; chez les
fourmis il n'en eft pas
ainfi , parmy elles tous
les biens font communs ,
elles n'ont rien en propre ,
ce grain de bled que la
fourmy apporte chez elle
, fe met dans une maſ
fe commune , ce n'eft
point pour elle en particulier
c'eft pour toute la
communauté , l'intereft
commun & particulier
n'y font diftingués en
Fien ; jamais une fourmy
ne
travaille
pour elle feule
, elle travaille tousjours
pour
1. PARTIE 111
pour la focieté en rout co
qu'elle fait
Il ne fçauroit leurarriver
aucun facheux accident
que leur foin , & leur induftrie
ne repare , rien ne
les décourage , rien ne les
rebutte ; on n'a qu'a détruire
leur fourmilliere ,
& tout bouleverfer chez
elles , deux jours aprés
tout cft réparé , & rétably
dans le mefme ordre
fans qu'il y paroiffe la
moindrechofe , c'eft ce que
chacun peut voir tous les
jours , & experimenter
Juin 1711 .
I L
"
111 MERCURE
qu'il eft tres difficile de
fes chaffer de leur demeu
She
re quoyqu'on faffè fans
ch faire mourir les habi
tans ; car tant qu'il y en
reftera un petit nombre
elles ſe reftabliront tousjours.
D
el
Joubliois de vous dire,
Monſieur, que juſques icy
le
Mercure
a efté pour se
les un poifon mortel , &
que ceft le meilleur moyen
de les détruire ; jay
quelque reflource à leur
fournir fur cet Article
encore quelque temps , &
4 t
- ♣ PARTIE
vous entendrez peur eître
dire que j'ai racommode
fe Mercure avec les four-
20
EXTRAIT
Il nous eft venu des Pays
Eſtrangers un Receüil qui
comprend differents E
crits fur les affaires d'Allemagne
que peu de gens
TUS
entendent bien , mais fur
Jefquelles c'eft la mode
aujourd'hui de raifonner
fans les entendre ce recuil
contient des reflexions
Lij
12 MERCURE
Politiques fur la fituation
prefente d'Allemagne , &
desavis dont les Electeurs
& les autres Princes de
faire
l'Empire
pourront
ufage ficet imprimé leur
tombe entre les mains .
Ileft parlé du Teſtament
d'un Miniftre de
L'Empereurb Léopold le
quel y donnoit à ſon maiftre
pour affujettir l'Alle
magne à fa Maifon des
avis qui font à la portée
de tout le monde , & qui
ne fe reffentent pas des
1. PARTIE 2
rafinemens de Machiavel.
On y voir beaucoup plus
d'intention de mal faire
que de capacité. Depuis
Ja publication du Teſtament
Politique du Cardinal
de Richelieu qui s'eft
acquisirane d'effime dans
Je Public , bien des per
fonnes moins habiles que
luy ont voulu en compofer
auffi. cup Ro
Un des Ecrits du Recueil
dont je parle eſt une Lettre
touchant le Royaume
de Boheme , dans laquelle
on voit qu'elle a efté
Linj
116 MIERCURE
la deftinée de ce Royaume
fous les Rois de la
Maiſon de
Luxembourg ,
& des Jagellons , & d'Aptriche.
Ses Princes cont
-prétendu eftre héreditarres
& des Bohemiens
cont prétendu quals ef
toient electifs.J'ay'entendu
dire qu'on avoit des
Actes par lefquels il paroiffoit
que
Empereur
Rodolphe && l'Empereur
Mathias Roy de Boheme
de la Maifon d'Autriche
reconnoiffoientlesprétentions
des Bohemiens pour
I PARTIE. 117
n'eftre pas mal fondées ,
mais la Lettre n'en parle
point. On y voit que les
Bohemiens
pourroient
bien conteſter à l'Archiduc
le droit de prendre
feance dans le College
Electoral en qualité de
Roy de Boheme. 7
1103
L'autre Écrit qui eft le
fecond dans l'ordre de ce
Recueil où bn Fa renfer
ahé entre les deux dont
je viens de parler , paroift
Tres folide & tres fensé.
-Ony traite à fond la que
ftion i d'Empereur peut
128 MERCURE
mettre au Ban un Eſtar
de l'Empire avec le concours
du feul College des
Electeurs , fans en conful
ter le College des Princes
& le College des Villes
, fans faire l'application
de la queftion à aucun
; car l'article 28. de
la Capitulation Imperiale
femble dire que l'Empereur
peut le faire avec le
confentement préalable
des Electeurs ; mais l'Autheur
fait voir doctement
qu'elle ne peut eftre en
tendue ainfi La Capitu
SAUDAIM
I PARTIE. 129
lation Imperiale qui n'eſt
dreffée que par le College
des Electeurs , eft un Acte
par
fubordonné à ceux qui
ont eſté dreffez par les
trois Colleges , c'est à di
res par l'Empire entier.
Telle eft la Paix de Weftphalic
qui a efté mife
la Diere de 1654 , au nombré
des Conftitutions , de
L'Empire. Or cette Paix
parle du Ban des Eftats
de l'Empire cpaume d'une
matiere refervée aux Dietes.
Les Electeurs ne peu
vent donc en dreffant la
o MERCURE
Capitulation , s'arroger à
eux feuls le droit d'authorifer
un Ban par leur
concours qquuaannddotuoutt
l'Empire fe l'eft refervé,
Il eft facile de faire l'application
de cette que
ftion au cas où font les
Electeurs de Cologne &
de Baviere. La proclama
tion fulminée contre l'Electeur
de Cologne en
1706. & le Ban públié en
mefme temps contre l'Electeur
de Baviere furent
faits fans que l'Empereur
Jofeph cuft confulté les
1.
PARTIER
trois Colleges. L'affaire fe
pouvoit fe differer, & d'ail
10
leurs laDiete eftoit actuel.
lement fceante à Ratif
bonne. La proclamation
contre l'Electeur de Co-
231
91380
logne , ni la Sentence rendue
contre l'Electeur de
Baviere ne peut s'appeller
Ban , parce qu'il n'en a
point toutes les formes
comme on la prouvé clairement
par un petit imprimé
qui paroift il y a
quelques années . Ce dernier
Ecrit dont j'ay par
a paru auffi il y a deux
3 MERCURE
BIBLIUK
ans , or on donnera le
mois prochain d'autres
Remarqués
écrites fur
l'eftat preſent de l'Allemagne.
id om
HÈQUE
LYON
7813
*
DE
LL
THO
THEREE
tyon
MERCURE,
1
II. PARTIE.
AMUSEMENS.
2. Chanfons
nouvelles.
Qui
fe peuvent
chanter
feparément
, mais
elles font faites
pour
eftre placées
entre
DE
LA
2 A
$2 MERCURE ,
&
les trois Couplets
qu'on a donnez dans
le mois precedent.
On a mis icy en petit
caractere ces trois
Couplets avec les
deux Chanfons nouvelles
, dans l'ordre
où fe doit chanter le
tout enſemble.
1. Couplet.
LE vin nous fait parler & le
vin nous fait taire 3
"Le filence à longs traits s'avale
avec le vin ,

d
Pourront
chantera
la
gloire Des Tir cis.
de-
се
tems
Des Clo rús– de
ce
tems
Le
-
vin les faitai- mer, et l'amour les fait boire.
Gravé par
Barlion.
C
Le vin nous fait ai mer,
et l'amour nous fait
boire. Qu'on ait vu boire des amants C'est ce.
q'u'on ne sçauroit croire quandon
alù les Ro
mans; mais ceux qui liront notre histoire,

AIRGIOS
HET
b
boirea cet in grat dormeur,
boirea boireà boir'a
boir aboir'a boire, cet ingrat dormeur
7
Le vin
en
11
dort l'amour, etle vinle re veille.
a
X W
pique.
Le vin endort l'amour, etle vintere- veit-le Licidar
agi-té d'une amoureuse ardeur ne pouvoit s'endor
mir
sansviderla
bouteil
tentement.
le, Philisle rend heu
gay
W
reux
xildortildort sur son bonheur: A

II. PARTIE. 33
Et le caquetfe trouve au fond du
verre ,
Dés qu'on le voit on jaze comme
une commere
De la voifine & du voisin ,
De la coufine & du cousin,
Dugalant homme & du faquin ,
Et d'Alexandre & d'Arlequin ,
De Jupiter & de Catin.
Adieupudeur , adieu myftere ,
Vifte , vifte , vifte , pour me faire
taire ,
Rempliffez mon verre ,
On ne dit mot pendant qu'on boit ,
Le vin m'afaitparler & le vin
m'a fait taire.
1. CHANSON,
E vin endort l'a-
LE
mour, & le vin
le réveille.
2 A ij
4 MERCURE ,
Licidas agité d'une
moureuse ardeur ;
Ne pouvoit s'endormir
fans vuider la bou-
M
teille ,
Filis le rend heureux.
il dortfurfon bonheur.
A boire à cet ingrat dor
meur.
Le vin endort l'amour ,
& le vin le réveille.
L
1. Couplet,
E vin nous fait parler,& le
vin nous fait taire.
Lors qu'à table un (çavant s'ap
perçoit à propos
II. PARTIE.
Qu'un efprit naturel va le confondre
,
il n'y
S'il y repont par boire , il
peut mieux répondre.
Maisfi , buvant plus qu'il ne
faut,
Il veut prouver par de grands
mots
Que les modernes font des fots ,
Que les anciens font fans deffaut
,
Que tous les fecrets du treshaut
Sont developpez dans Homere ,
Vife , vifte , vifte , pour le faire
taire
Remplißezfon verre.
Qu'il a d'efprit pendant qu'il
boit ,
Le vin la faitparler & le vin
le fait taire .
* A iij
6 MERCURE ,
2. CHANSON.
L Amour nous fait
aimer, & l'amour,
nous fait boire.
Qu'on ait vi boire des
amans ,
C'est ce qu'on ne fçauroit
croire
Quand on a lú des Ro
mans :
Mais ceux qui liront
noftre Hiftoire
Pourront chanter à la
gloire
II PARTIE . 7
Des Tirfis de ce temps ,
Des Filis de ce temps ,
Le vin les fait aimer, &
l'amour les fait boire,
C
3. Couplet
.
IE vin nous fait parler, & le
vin nous fait taire .
En filence une prude à petits
coups boira:·
Mais fi vous rempliffez fouvent
fon verre,
La charité bien-toft émeut fa
bile amere :
Par zele pur elle dira ,
Qu'en mariage celle- là àfon mary
rien n'apporta ,
Que cependant
ce mari- là
2 A ïi į
8 MERCURE ,
Tient d'elle tout le bien qu'il as
Puifque parelle il le tira
D'un riche noble dont le pere.......
Vifte , vifte , vifte , pour la faire
taire ,
Rempliffez fon verre ,
On ne médit point quandon boit
Le vin l'a fait parler & le vin
l'a fait taire.
II. PARTIE.
XXXXXXXXX
LE MARIAGE
PAR INTEREST ,
LA
OU
FILLE
A L'ENCHERE .
UN
Une
N Pere avare , qui
ne penfoit qu'à
marier richement fa
fille , avoit déja rompu
plufieurs affaires , croyant
toûjours trouver
To MERCURE ,
un nouveau Gendre
plus riche que les premiers
; il retiroit fa parole
auffi facilement
qu'il l'avoit donnée , &
ce caractere
luy avoit
attiré
un ridicule
, que
quelques voifines ,jaloules
de la vertu de fa
fille , faifoient retomber
malignement fur
elle ; elles l'appelloient
la Fille à l'enchere. Ce
Pere ridicule difoit luimêine:
Ma fille eft à
II . PARTIE . 11
cent mil francs , elle ne
fortira pas de chez moy
à moins , mais je préfererai
celui qui en aura
cent cinquante. Il le
fit comme il le diſoit ,
car tout prêt à conclure
avec un jeune Marquis
dont fa Fille étoit aimée
& qu'elle aimoit ,
un Gentilhomme plus
riche vint mettre enchere
; & le pere luy
adjugea la fille , ce qui
fit imaginer au Mar12
MERCURE ,
quis defefperé un
moyen de retarder au
moins ce dernier mariage.
Perfuadé qu'il ne
s'agiffoit que de faire

paroiftreun nouvel encheriffeur
, il alla trouver
un de fes intimes
amis , cet ami s'appelloit
Damon , il étoit
tres- riche , & on le
connoiffoit pour tel ; le
Marquis le pria d'aller
faire des offres au pere
pour l'amufer & gaII.
PARTIE. 1 )
gner dutemps . Damon
rebuta d'abord fon ami ,
cette feinte ne lui convenoit
point , c'étoit un
: des plus honnêtes hommes
du monde : mais
l'autre étoit un des plus
vifs & des plus deraifonnables
Marquis de
la Ville : il preffe , il
conjure , il ſe deſeſpere.
Non , lui dit Damon ,
non , rien ne peut m'engager
à faire une telle
démarches
cependant
14 MERCURE ,
1
s'il ne s'agiffoit que de
faire connoiffance avec
ta maiftreffe, on dit que
c'eſt une des plus aimables
perfonnes du
monde , en luy difant
que je la trouve telle ,
je ne commettroispoint
ma fincerité : en un mot
fi le pere peut concevoir
quelque efperance
fur mon affiduité auprés
de fa fille, je la verrai,
à cela ne tienne, que
je ne te rende fervice :
II. PARTIE. 15
I
?
mais je t'avertis que fi
Fon me veut faire ex
pliquer, je parlerai fincerement.
Tout ce que
je puis faire pour toy,
c'eft d'éviter l'explica
tion . Le Marquis fe
contenta de ce qu'il
pouvoit exiger , & dés
le même jour Damon
fit connoiffance avec la
fille , & la vit enfuite
pedant quelques jours.
Lucie go c'étoit le
nom de cette charman16
MERCURE ,
te perfonne, Lucie étoit
d'une delicateffe fcrupuleuſe
fur tous les devoirs
, & quoyqu'elle
euft de l'inclination
C
pour le Marquis , elle
obéiffoit aveuglement
à fon pere ; cependant
elle avoit conçu
une averſion effroyable
pour le Gentilhomme
à qui elle étoit promife
en dernier lieu : elle
euft beaucoup mieux
aimé Damon, fi elle cuft
pa
II. PARTIE . 17
pa aimer quelqu'autre
que le Marquis , &
Damon de fon côté la
trouva fi belle , fi vertueufe
& fi affligée ,
qu'il fentit bientoft
pour elle une pitié fort
4
tendre , & cette tendreffe
augmentant de
jour en jour , il s'appergut
enfin qu'il étoit le
rival de fon amy. Je
croirois bien que malgré
fa probité , il ne
s'aperçut de cet amour
2 B
18 MERCURE ,
que le plus tard qu'il
put : mais enfin fe trouvant
à peu prés dans la
fituation où l'auteur
de Don Quixote met
l'ami du Curieux Impertinent
, & ne pouvant
plus fe cacher fon
amour à luy-même , il
crut ne devoir pas le
cacher à fon ami . Je ne a
veux plus voir Lucie ,
lui dit- il un jour , je
fuis trop honnête homme
pour vouloir m'en
II. PARTIE. 19
faire aimer, & je n'ai pas
le courage de fervirton
amour en la voyant . Le
Marquis , quoy qu'un
peu extravagant
d'ailleurs,
ne le fut pas affe
pour exiger de fon ami
jun fervicel fi dangereux
. Damon ceffa de
voir Lucie , & le pere
qui avoit déja fes vûës
fur lui , fatallarmé de
ne le plus voir : mais
la deftinée de ce pere
avare vouloit qu'il luy
2 Bij
20 MERCURE ,
vint coup fur coup des
offres toutes plus avantageufes
les unes que
les autres
nouvel
Voicy, un
encheriffeur
plus riche que les precedens
, c'étoit un Confeiller
de Province, qui
étoit devenu paffionnement
amoureux de
Lucie , chez une parente
où il l'avoit vûe
plufieurs fois . Abregeons
le récit des pourfuites
de cet amant , &
II. PARTIE 27
des chagrins qu'en eut
Lucie ; le pere fe détersmina
abfolument pour
celui- ci : voila les arti-
1 cles dreffez , & le Confeiller
affuré qu'il pof
federa bientôt la fille
Sadu monde la plus aimable
, & la plus fage
c'est ce qui le touchoit
davantage car il étoit
naturellement fort ja
loux .
Il eft bon de faire
sici attention fur la
22 MERCURE ,
fageffe de Lucie , &
fur la jaloufie du Confeiller,
pour mieux comprendre
la furpriſe où
-fut ce jaloux en trouvant
fur la table de fa
maitreffe une lettre dé.
cachetée cette lettre qu'-
il crut avoir déja droit
de lire luy parut être
d'un Cavalier fort amoureux
de Lucie , &
qui lui écrivoit d'un
file d'amant aimé. Ah,
ma obere Lucie , difoit
II. PARTIE, 23
la lettre , faut- il qu'un
trifte de voir nous fepare !
Que je fuis à plaindre ,
&que vous êtes à plaindre
vous - même d'être
facrifiée par un pere in-
?
juste à un homme que
vous ne pourrez jamais
aimer , à un incommode,
à un fâcheux .... en un
mot le Confeiller voit
qu'on parle de lui comme
s'il étoit déja mari ,
& qu'aparemment Lucie
eft de moitié du mé-
3303
24 MERCURE,
pris que ce rival témoi
gne pour lui; imaginezvous
l'effet d'une pareille
avanture fur un
jaloux .Cen'eft pas tout ,
la lettre marquoit que
le
Cavalier ne
manqueroit
pas de fe trouver à
onze heures du foir
chez Lucie pour la
confoler , & qu'il y ſeroit
reçû par la porte
d'un jardin , par où la
maiſon tenoit à une petite
rue écartée. Enfin
tout
II . PARTIE . 25
tout étoit fi bien circonftancié
dans la lettre ,
que le Confeiller refolut
d'atendre l'heure de
cerendez vous pour s'eclaircir
, avant que de
prendre la deſſus un parti
violent
digne
d'un
homme
tresvindicatif
, & qui n'avoit
d'autre
merite que celuy
d'être riche & amoureux
d'une perſonne
qui meritoit d'être
aimée,
2 C
26 MERCURE ,
Aprés avoir attendu
l'heure du rendez vous
avec impatience
, nôtre
jaloux fe trouve das
la petite ruë , par où
devoit arriver le Marquis
, car c'étoit luy qui
avoit écrit la Lettre ;
que vous dirai-je , l'heure
fonne , le Marquis
vient , on lui ouvre une
petite porte , on la referme
, & le jaloux reftant
au guet juſqu'au
matin , eut tout le loifir
II.
PARTIE . 27
de fe
convaincre que le
galand n'étoit pas entré
chez Lucie pour une
converſation paffagere ,
ce fut pendant ces heures
fi cruelles à paffer ,
qu'il medita contre Lucie
une vengeance inoüie
, voicy comment
2
il s'y prit.
On devoit figner le
contrat le lendemain
au foir , il fit preparer.
un fouper magnifique ,
& prit foin pendant le
2 C ij
is MERCURE ;
jour de raffembler tous
te la famille de Lucie ,
qui étoit nombreuſe ;
il y joignit quantité de
femmes qu'il choifit ex
prés les plus médifantes
qu'il pût , fans compter
les hommes , qui
font encore plus dangereux
que les femmes ,
parce qu'on les croit
moins médifans
.
Le foir venu le Confeiller
fit remettre la
fignature du Contrat
II. PARTIE . 29
aprés le fouper , & les
deux contractas furent
placez folemnellement
au bout de la table , le
repas fut fort ferieux ,
parce qu'on voyoit les
époux futurs fort taciturnes
, & enfin quand
on fut preft à fortir de
table , le Confeiller addreffa
la parole au Pere.
Monfieur , luy dir- il ,
en élevant la voix , afin
que toute l'affemblée
pût l'entendre : Je n'ai
2 C iij
30 MERCURE ,
jamais manqué de parole
à perfonne , c'eſt
#
pourquoy
j'ay voulu
avoir icy grand nombre
de témoins des juftes
raisons qui m'en
font
manquer pour la
premiere
fois.
Ce debut parut fingulier
à toute l'aſſemblée
, on fut curieux
d'entendre ce qu'alloit
prononcer ce grave Ju
ge de Province , tout le
monde fçait, continua →
II. PARTIE . 31
t -il , que vous avez
manqué de parole à
trois ou quatre Gendres
de fuite , vous m'en
manqueriez
aufli fans
doute s'il s'en preſentoit
un plus riche que
moy , vous me mépriferiez
, ainfi je fuis en
droit de mépriſer vôtre
fille , puifque j'en trouve
une plus fage qu'-
elle.
A ce difcours on crut
d'abord que le vin de
2 Çiiij
32 MERCURE
la Nôce avoit troublé
le cerveau du Confeiller
, le profond filencel
où l'on étoit , lui donna
le loifir de lire aux
convives la Lettre du
Marquis , & de circons
ftancier fi bien le rendez
- vous . nocturne
vengeanqu'alors
on ne l'accuſa
plus que d'avoir pouffé
trop loin la
ce , tous les parens de
cette fille def- honorée
baiffent
les yeux ou
II. PARTIE. 33
s'entre- regardent fans
ofer ouvrir la bouche ,
les uns s'affligent de
bonne foy , les autres
n'ofent rire encore de
ce qui réjouit leur maligniré
, ceux- cy feignent
de douter , afin
qu'on leur en aprenne
encor davantage, quelques-
uns excufent
, la
plûpart blâment , mais
prefque tous ont les
yeux fur Lucie , qui
devenue immobile , pâ
1
34 MERCURE ,
le & défaite eft prefte
à tomber en foibleffe.
Cependant le Confeiller
eft dé - ja bien
loin , il avoit médité
fon départ pour la Province
, une Chaife de
pofte l'attendoit , & il
étoit forti de la Sale
fans que perfonne eut
eu
le
tenir .
courage
de le re-
On alloit ſe ſeparer ,
& quelques- uns commençoient
à défiler lors
II. PARTIE. 35
qu'un nouveau fujet
d'attention les raffembla
tous : C'étoit le jeune
Marquis , autheur
de la Lettre , il avoit
vu partir ſon rival , &
feroit fans doute entié
triomphant , de l'avoir
fait fuïr par un coup de
fa tête , mais ayant appris
l'éclat que ce brutal
venoit de faire , il
accouroit pour réparer
l'honneur de fa Maîtreffe,
pendant que l'af
36 MERCURE ,
femblée étoit encor en
tiere ; il dit d'abord
pour juftifier
Lucie cè
qui étoit vray , c'eſt
que la connoiffant trop
fcrupuleuse pour en
trer dans fon projet il
avoit gagné fa femme
de chambre pour luy
aider à donner de violens
foupçons au Confeiller
jaloux ; en un
mot la Femme de
chambre à l'inſçû de fa
maiſtreſſe avoit joué le
II. PARTIE. 37
36
ftratagême de la lettre,
& fe doutant bien que
le Confeiller voudroit
approfondir la circon.
cftance du rendezvous ,
avoit introduit le Mar
quis par la petite porte
du jardin , mais il en
étoit forti à l'inftant
par la grande.
Aprés cette explication
le jeune Marquis
pour fe juftifier luymême
, s'écria , pardonnez
, belle Lucie , à l'a38
MERCURE ,
mour, & au defefpoir,je
fçavois bien continuat-
il , que mon rival eftoit
aflez jaloux pour
rompre l'affaire : mais
je ne le croyois pas aſſez
vindicatif pour la rompie
avec
clat.
Pendant tout ce dif-
Cours Lucie avoit paru
agitée hors d'ellemême
, & fa colere fut
prête d'éclater contre
ce Marquis extravagant,
qui l'avoit ficruelII
. PARTIE . 39.
·
lement , offenfée : mais
tout à coup on la vit
redevenir
tranquile
comme une perfonne
qui a pris fon party ;
les femmes feules font
capables de prendre à
l'inftant le bon pariy
quand elles ont l'eſprit
bon ; celles qui prenent
de mauvais partis les
prennent avec la même
vivacité , & c'eſt
- encore un avantage
qu'elles ont fur nous ;
40 MERCURE ,
car leurs fautes eſtant
moins reflechies que
celles des hommes, elles
font plus excufables.
Le Marquis aprés
avoir parlé à toute l'aſ
femblée , fe jetta aux
pieds de Lucie , bien
feur d'obtenir pardon
d'une perſonne qui luy
avoit avoué qu'elle l'aimoit
; il lui repreſenta
que la juftification la
plus authentique qu'u
ne fille put defirer , c'étoit
IN PARTIE . 41
toit que celui qui avoit
fait foupçonner fa vertu
prouvât en époufant
qu'il croyoit cette vertu
hors de foupçon.
Un murmure d'approbation
qui s'éleva
dans toute l'affemblée
marqua qu'on jugeoit
ce mariage neceffaire ;
la famille à l'inftant
exigea du pere qu'il y
confentit , & la joye
qu'il avoit de voir fa
fille juſtifiée , le rendit
a
2 D
42 MERCURE ,
en ce moment moins
avare qu'il n'avoit jamais
efté ; il fe tourna
vers fa fille , & luy dit
qu'il lui laiffoit le choix
de fa deſtinée .
Puifque vous avez
la bonté , répondit modeftement
Lucie , de
remettre à mon choix
la maniere de me juftifier
, je veux eftre juftifiée
le plus parfaitement
qu'il fe pourra 3
il eſt clair que le MarII.
PARTIE. 43
quis me juftifie en quelque
façon par fes offres;
car il eft rare qu'un
homme époufe volontiers
celle qu'il auroit
deshonorée : mais il eft
encore plus rare qu'une
fille refuſe de pareilles
offres de celui pour
qui elle auroit eu quelque
foibleffe , ainfi je
me crois plus parfaitement
juſtifiée en declarant
que je n'épouſerai
jamais un homme
2 D ij -
44 MERCURE ,
qui a efté capable de
facrifier ma reputation
à fon caprice.
Le Marquis fut confondu
par
la fermeté de
cette refolution , tout
le monde , & le pere
même la trouvant fenapprouvoit
le parſée
,
ti que Lucie
venoit
de
prendre
, lorfqu'on
vit
paroiftre
Damon
, qui
avoit
fuivi
le
Marquis
pour
voir
comment
fa
juftification
feroit
reIL
PARTIE. 45
C
1
ceuë , indigné de l'imprudence
de cet amy ,
voici comment il parla:
Puifque mon amy ,
dit- il à Lucie, a perdu
par fa faute les droits
qu'il avoit fur voſtre
coeur , je crois ne devoir
plus avoir d'égards
que pour voftre juftification
, vous ayez declaré
que vous choifiriez
la
plus parfaite de toutes ,
daignez
donc comparer
aux deux autres
46 MERCURE ,
celle que je vais vous
propofer.
Il eft rare , comme
vous l'avez dit , qu'on
faffe des offres telles
qu'en a fait le Marquis ;
il eft rare auffi qu'en pareil
cas une fille à marier
refufe de pareilles
offres : mais il eft fans
doute encore plus rare
qu'aprés l'éclat que
vient de faire ce Con-
-feiller , un homme
auffi riche que moy,
II. PARTIE. 47
qui paffe pour homme
fenfe , & qui fe pique
de delicateffe fur l'honneur
, prouve en offrant
de vous époufer qu'il
eft aflez feur de voſtre
vertu pour croire même
que vous oublierez
entierement le Marquis
.
Tout le monde fut
attentif à cette derniere
juftification , on attendoit
la decifion de
Lucie , oui , Monfieur ,
48 MERCURE,
dit - elle à Damon , me
croire capable d'oublîer
par eftime pour vous
un homme que j'ai eu
la foibleffe d'aimer c'eft
meriter mon coeur auffi-
bien que mon eftime.
Aprés avoir ainfi
parlé , Lucie tourna les
yeux vers fon pere qui
n'avoit garde d'oublier
en cette occafion que
Damon étoit le plus .
riche de tous ceux qui
s'é-

II. PARTIE. 45
s'étoient prefenté , excepté
le Confeiller
une joye unanime decida
pour Damon &
les plaintes du Marquis -
fe perdirent parmi les
applaudiffemens
*
de
toute l'affemblée.
Ceux qui foupçonneront
cette hiftoriette
d'avoir efté imaginée ,
diront que l'amour en
devoit faire le dénoument
, on pourroit leur
répondre qu'un dénoù-
2 E
50 MERCURE ,
ment fait par la raiſon,
eft encore plus beau
felon les moeurs , d'au
tant plus que le Mar,
quis a merité d'eftre
puni , il eft vray, qu'il
peut rester à Lucie
quelque tendreffe pour
Juy mais celle qui a
fcû facrifier cette tendreffe
, à l'eftime folide
qu'elle a pour Damon ,
fçaura bien achever ce
qu'elle a commencé ;
en tout cas c'eſt l'affaiII.
PARTIE, N
re de Lucie, fi l'hiftoire
eft veritable , & fi
elle eft feinte , c'eft l'affaire
de l'auteur , de répondre
à la critique
i qu'on pourroit faire de
fon dénoûment.
25
a a33
2 E ij
2 MERCURE ,
CONSEILS
Demandez dans le mois
dernier .
Que confeilleriez- vous à un
mary qui aime trop fa femme
pour s'en feparer , mais qui ne
Taime pas affez pour fouffrir
toutes fes impertinences.
CONSEIL
DE DOM
BROT
SUR L'AIR
Réveillez- vous Belle endormie.
S'
I femme
impertinente
& belle
II. PARTIE . 5)
Tu veux garder dans ta
maiſon ,
Deviens plus impertinent
qu'elle ,
Tu la mettras à la raifon,
CONSEIL ,
Par Madame la Marquife de...
fur le même Air.
M
ARY bizarre au
cerveau trouble,
Redoublant de mauvaiſe
humeur
Il faut qu'une femme redouble
De patience & de douceur.
2 Eiij
14 MERCURE ,
Ces deux anonimes ,
mary & femme , apparemment
puifqu'ils
m'ont envoyé les deux
Couplets fur le même
air me font fouvenir
par les differens cara-
&teres de leurs Confeils
de travailler à une Apologie
des femmes contre
les maris , & j'y travaillerai
de bon coeur,
car j'ay toûjours efté
perfuadé , qne dans les
démêlez domeftiques
,
II. PARTIE. ss
les maris ont ordinairement
plus de tort que
les femmes:
do 2 Confeil,
Que confeilleriez- vous d'un gou
teuxqui ne trouve du plaifirqu'à
boire , & qui ne fouffre que quand
il a bû.
SYYA
CONSEIL BACHIQUE.
Buvez & fouffrez.
L'INDOLENT.
Paffez - vous du plaiſir
pour vous exempter de la
douleur.co 2007 S
56 MERCURE
,
CONSEIL
d'accommodement.
Un peu
de
vin , un
peu
de
goute
, un
peu
de bien
,
un
peu
de
mal
, c'eſt
le
mieux
qu'on
puiſſe
avoir
en
ce
moude
.
L'YVROGNE.
Buvons tant que nous
ne fentions pas venir la
goute. I
LANONYME
Poliçon.
Je vous confeille de
boire
II . PARTIE. 57
boire tout , car quand
tout vôtre vin fera bû vous
n'en aurez pas la goute.
REFLEXIONS
du Voluptueux.
Pourquoy faut-il que la
douleur fuive le plaifir ,
j'aimerais mieux encore
que la goute me prit avant
que j'eufſe bû , l'efperance
du plaifir m'aide à fupporter
la douleur : mais mon
plaifir eft empoisonné
par
la crainte des douleurs qui
Mont le fuivre .
2 F
58 MERCURE,.
BUY THESE
On doit dire , in ving
mendacium , pluſtoſt que in
vino veritas.
Par Monfieur P....
Le menfonge eft dans le
vin , quand le vin eft dans
la cave du Cabaretier ,
.qui vous donne le vin
d'Orleans
en jurant que
c'eſt du vin de Champagne.
La verité eft dans le
vin , lorfqu'un bon Gentilhomme
de Brie vous don
ne le vin de fon crû , &
vous le donne pour tel :
II. PARTIE. 19
mais fon vin de Brie produit
le menfonge , quan
le convive complaifant lui
dit que le vin de fon crû
vaut du vin de Bourgogne.
SINVINO MENDACIUM.
Le menfonge eft dans
Voy
le vin .
ce menteurfournois
, un noir fouci .
Jos sole
ronge ,
60 MERCURE,
Il profane le jus divin ,
Il médite en buvant l'art
de faire un menfonge,
Il le trouvera dans les
vin.
On ne m'a pas envoyé
les moindres petits
vers fur les rimes
en ique & en ac , j'ef
perois en recevoir au
moins de quelque Auvergnac
II. PARTIE GD
ARTICLE
des Enigmes.
Parodie ou explication
de l'Enigme dont le
mot eft un Bouchon
de Bouteille , par la
Muſe naiſſante.
Pour remplir un goulot
vuide
Précaution m'a poſté
Prés d'un réduit ou prefide
L'agent de la volupté ,
Juin 1711.
2 F
61 MERCURE
Sans moy dans la Bouteille
où le bon vinrefide ,
Son ennemy l'air entreroit ,
Son plus pur efprit fortiroit
,
Si je ne gardois bien la porte
Un yvrogne brutal ,
tant induſtrieux ,
, pour-
De fon tire - bouchon , ufant
avec main forte ,
Me chaffe du goulot frais
& delicieux ,
Son fer me fait une bleffure;
Je cede , il faut enfin contenter
fon defir ,
Alors fi d'un grand vin le
petillant mumure .
II. PARTIE . 63
Suit le bruit que je fais ; ce
bruit de bon augure ,
"%%
Au fripon qui me force anonce
du plaifir .
ENVOY
Par M' Anceau.
Que l'efprit de Homme eſt
plaiſant ,
Un rien l'endort , ou le
réveille ,
Pour luy tout peut eſtre amulant
,
Juſqu'au bouchon d'une
bouteille,
Fij
64 MERCURE
ENVOY
Par Guillot le Penfif. \
Bouteille en main Guillot
fous une treille ,
L'efprit bouché , longtems
le mot chercha,
Mais fon efprit enfin le défloorboucha
Si tôt qu'il eut débouché fa
bouteille .
ENIGME ,
Par M L ***
Effet de la ſimple natura ,
II. PARTIE.
65
Et quelquefois fils du bazard,
Né fouvent dans le fein de
l'art
Mon pouvoir & mon prix
font tous deuxfans meſure.
Par moy l'oeil eft féduit , l'ef
pris eft enchanté :
Parmoy plus d'un deffant eſt
un deffaut aimable :
Et plus bizare qu'équitable ,
Je donne à la laideur lepasfur
la beauté.
S
Je fuis également à la Brune ,
à la Blonde :
Je fuis majestueux , delicat ,
Fij
66૪
MERCURE
fimple , ad oit ,
Jefuis du goût de tout le mondez
Mais ne m'a pas qui le voudroit.
Il n'est point fans moy d'art de
plaire :
Des efprits & des coeurs jefor-
Some les liens :
Les graces n'ont point d'autre
pere :
Et l'amour n'eut jamais d'autres
traits que les miens.
*
Des paffions , reffort habile ,
Je fais craindre , efperer ; je
fais aimer
hair :
11 PARTIE 67
De la fortune vray mobile
Je puis combler vos voeux ↑
je puis les trahir.

Pour me definir mieux qu'ajouterois-
je encore?
Mon nom ne m'explique pas
bien:
Mon eftre eft ce que l'on ignore,
Si l'on me connoiffoit , je ne ferois
plus rien.
ENIGME
.
Ou pefant
ou leger dans
mon individu
,
68
MERCURE
Art on nature me fabrique
,
Pefant , cuit aufour , ou
;
fondu ,
Je fers au Bourgeois magnifique
Leger, coupe,fec& batu,
Jefers à mulet & bourrique,
Pefant , rangé, bien fuf
pendu,
Je fers aux faifeurs de
Mufique ,
Leger , taillé , noircy ,
fendu,
II. PARTIE. 69
Je fers & Finance G
Pratique.
Pour donner le tems
aux Anonimmes des Provinces
de recevoir le
Mercure , de compoſer ,
&
d'envoyer des reponfes
, il faut faire durer
pendant plufieurs mois
les mêmes Queftions ,
Confeils, Thefes , Bouts,
rimez , &c. On y en
joindra toûjours quel
que nouvelle
.
70 MERCURE
"Thefe nouvelle.
Je foûtiens qu'il vaut
mieux aimer une laide
Femme qu'une belle .
Confeil.
Que confeilleriez-vous
à un Avare qui aimeroit
la bonne compagnie
, la bonne chere ,
le bon vin , & qui
auroit fa maiſon pour
priſon.
II.
PARTIE.
71
Noms , difcours , rebus
, & c . de ceux qui
ont deviné les deux Enigmes
du mois dernier
de celle- cy ,
l'Ame.
Le Chevalier Croc ,
l'ame attentive , a deviné
l'ame ; l'ame de l'Enigme
, c'eft le mot &
le mot c'eſt l'ame, la jeune
Sorciere de la vieille
ruë du
Temple.
92 MRGURE
Bouchon de Bouteille.
;
Le cou cou verd
Chon Chon l'explique à
Chonchette l'Eſpagnolette
: deux moyens
d'empécher le vin de
s'éventer ou le boucher
ou le boire la voix de
Bois floté du grand
Chantier.
::
L'Ignorant , la Brupto
, la Zinzoline.
I
MER CURE
III PARTIE.
AD
THEREE
PIECES FUGITIVES
52222252 : S252 525
ODE NOUVELLE
contre l'Esprit.
Source intariffable d'erreurs
Poifon qui corrompt la
droiture ,
Des fentimens de la nature,
Et la verité de nos coeurs.
Feu follet qui brilles pour
nuire ,
Juin 1711 .
3 A
LYON
2 MERCURE
1
Charme des mortels infen-
Lez ,
Efprit ; je viens icy détrui-
IC
Les Autels que l'on t'a dref
fcz ,
Er toy fatale Poefic
C'eſt luy fous un nom fpecicux
,
Qui nomma langage des
Dieux
,
Les accés de ta frenefic ;
Luy dont te vint l'autorité ;
D'aller confacrant le menfonge
,
Et de traitter de verité,
III. PARTIE. 3
La vainc illufion d'un fonge.
Encor fi telle qu'autrefois ,
Suivant pas à pas la nature ,
Dans une naïve peinture.
Tu chantois les prez & les
bois ,
Ou qu'au bon ficcle de Catulle
Simple dans tes exprelfions
Et de Virgile , & de Tibulle
Tufoupirois les paffions.
Mais non ; de quelque rime
rare ,
De pointes , de rafinémens ,
3. A ij
4 MERCURE
Tu cherches les vains orne
mens
Dont une coquette ſe pare,
Et fuivant les égaremens
D'une Mufe trop peu fenfée
,
>
Tu négliges les fentimens ;
Pour faire briller la penſée .
Tel ne chantoit au bord des
eaux ,
Du Mincius l'heureux Titire
Mais fimplement faiſoit redire
Le nom d'Amarille aux
échos ,
III. PARTIE. Y
Et les Naïades attentives
Quittoient leurs joncs &
leurs rofeaux
Pour venir danfer fur fes
rives
,
Aux doux fons de fes Chalumeaux
.
Efprit , tu féduis , on t'admire
;
Mais rarement on t'aimera
Ce qui feurement touchera
C'eft ce que le coeur nous
fait dire
C'eſt ce langage de nos
coeurs
3.
A iij
MERCURE
Qui faifit l'ame & qui l'agite
Et de faire couler nos pleurs
Tu n'auras jamais le meri
Laiffons ces frivoles fujets
Que tu nous donnes de
nous plaindre
Quand de toy l'on a tant à
craindre
Sur de plus importans objets.
Dans les chofes les plus facrées
Tu te plais à nous faire voir
Que plus elles font reverées
III. PARTIE.
7
A
Et plus y brille , ton pouvoir.
Dans la verité fimple & pu
Te
E JLC 15
D'une fainte Religion ,
Eft-il de
fuperftition
Dont tu n'y gliffe l'impofture.
Le moyen de te pardonner
Ce que tu veux tirer de gloire
00 1 1
De nous apprendre à raifonner
Quand il ne s'agit que de
croire.
Que de vaines diftinctions
3. A iiij
8 MERGURE
Que de varierez frivoles
Ont tiré des mêmes paroles
Les heretiques fictions
Combien le fubtil artifice
De Luther & de fes Docreurs
,
Aux gens fimples & fans
malice
A- t- il fait adopter d'erreurs.
Ton rafinement empoiſonne
Les plus faines opinions
Jamais tu n'as gueri perfonne
De fes cruelles paffions
HII. PARTIE.
Tu ne fais
qu'augmenter
nos vices
En multipliant nos defirs ,
Et des plus innocens plaifirs
Tu nous fais fouvent des
fupplices.
Demande aux hôtes de ces
bois
Si chez eux la loy de nature
N'eft pas plus prudente &
plus fûre
Pour leur faire faire un bon
choix ;
Que tes penetrantes lumicxes.
16 MERCURE
Non , les animaux amoureux
N'ont pas befoin dans leurs
tannieres
De ton beau féu pour eſtre
heureux .
C'eft toy d'où naiffent ces
caprices
Par où Venus foutient fa
Cour ,
Et cet attirail d'artifices
Dont tu fophiftiques l'Amour.
Les Pigeons & les Tourterelles
Sçavent fe plaire & s'enflam
mer.
III. PARTIE. II
Eft il quelque Ovide pour
elles
Qui fit jamais un Art d'aimer.
C'eft dans ce livre deteftable
Que paroift la corruption
Qui d'une fimple paffion
A fait un Art abominable.
Art dont nous vint en ſa fureur
Cemonftre de Coquetterie ,
Et ce mêtier faux & trompeur,
Qu'on appelle Galanterie.
Finiſſons ; inſenſiblement *
12 MERGURE
Jecede au charme qui m'entraîne
,
Et j'oublieray toute ma haine
Si j'écris encore un moment ,
Efprit que je hais , & qu'on
aime ,
Avec douleur je m'apperçois
Pour écrire contre toy même
,
Qu'on ne peut fe paffer de
toy.
III. PARTIE . 15
EPITRE EN VERS
Par M. V ......
Par tes confeils & ton
exemple
Ce que j'ay de vertus fut
trop bien cimenté ,
Cher P..... dans la pureté
Des innocens banquets du
Temple
De raifon & de fermeté.
J'ay fait une moiſſon trop
ample ,
Pour eftre jamais infecté
D'une fordide avidité ,
Quelle honte , bon Dieu ,
14 MERCURE
quel fcandalle en Parnaſſe
De voir un de fes Candidats
Employer la plume d'Ho .
race
A liquider un compte , à
dréffer des eftats !
J'ay vû , diroit Maror ,
failant la grimace ,
J'ay vû l'Eleve de Clio
Sedentem in felonio ;
en
Je l'ay vû calculer, nombrer,
chiffrer , rabattre ,
Et d'un produit au denier
quatre
Raifonner felon l'adgio .
Dure , dure plûtoft l'honorable
indigence ,
Dont j'ay fi long- tems effaïe.
III PARTIE. 15
Je fçay quel eft le prix d'une
honnefte opulence
Que fuit la joyeuſe inno-
2
cence ,
Et qu'un Philofophe étayé
Dans
peu de richeffe & d'ai
fance ,
Dans le chemin de fapience
Marche plus fermme de
moitié :
Mais j'aime mieux un fage.
à pié
Content de fon indépendance
;
Qu'un jufte indignement
noyé
Dans une fervile abondancc
,
6 - MERCURE
Quifacrifiant tout, honneur,
joye
, amitié
Au foin d'augmenter fa
finance ,
Eft luy même facrifié
A des biens dont il n'a ja
mais la joüiffance.
Nourri par Apollon , cultivé
par tes foins ,
Cher P. ne crains pas que je
me timpanife
Par l'odicufe convoitife •
D'un bien plus grand que
mes befoins:
D'une ame libre & dégagée
De préjugez contagieux ,
Une fortune un peu rangée,
Un
III.
PARTIE. 17
Un corps fain , un eſprit
joyeux ,
Et quelque Profe mêlangée
De Vers badins & ferieux ,
Me feront trouver l'apogée
De la felicité des Dieux.
C'est par ces maximes , qu'ignore
Tout Riche, Juif, Arabe ,
ou More ,
Que j'ay fçû plaire déslong
temps
A des Protecteurs que j'honore
,
Et c'eſt ainfi que je prétends
Trouver l'art de leur plaire
encore :
Juin
1711 .
3. B
18 MERCURE
C'eſt dans ce bon cfprit
Gaulois ,
Que le gentil Maitre François
Appelle Pantagruelifme ,
Qu'à Neuilly L. * & * nin
Puifent cet enjouëment
benin ,
Dont eft formé leur Atticifme.
EPIGRAMME.
Le traître Amour prit à Venus
la Mere
Certain bouquer pour donIII.
PARTIE. 19
ner à Pfiché
Puis dans les yeux de celle
qui m'eſt chere
S'enfuit tout droit fe croïant
bien caché :
Lors je luy dis : Te voilà
mal niché ,
Petit Garçon , cherche une
autre retraitte,
Celle du coeur fera bien plus
ſecrette.
Vrrayment , dit-il , Amy ,
c'eft m'obliger ;
Et pour payer ton amitié
diferette ,
C'eſt dans ton coeur que je
me veux loger.
33
Bij
50
MERCURE
ODE
A M D **.
Sur les affaires te fa
Famille.
Efprit né pour fervir d'exemple
Aux coeurs de la vertu touchez
Qui fans guide à pû de fon
Temple
Penetrer les fentiers cachez ,
Cher D ..... quelle inquiétude
Te fait une trifte habitude,
III. PARTIE. 21
Des chagrins & de la douleur
Et Miniftre de ton fuplice ,
Pourquoy par un fombre
capricc
Veux-tu feconder ton mal
heur.
Chaffe cet ennuy volontai
re
Qui tiens ton efprit dans les
fers
Et que dans une ame vulgaire
Jette l'épreuve des revers
Fais tefte au malheur qui
t'opprime
22 MERCURE
Qu'une efperance légiti
mme ,
Te muniffe contre le fort
L'air fifle,une horrible tempeſte
Aujourd'huy gronde fur ta
tefte
Demain tu feras dans le
port
Toujours la Mer n'eſt pas
en bute
Aux ravage des Aquillons
Toujours les torrens par
leur chûte
Ne défolent pas nos Va
lons 1

23. I. PARTIE.
Les difgraces défefperées
Et de nul efpoir temperées
Sont affreufes à foutenir
Mais leur charge eft moins
importune
Lorſqu'on gemit d'une' infortune
Qu'on eft au point de voir
finit

Un jour le trouble qui te
ronge
En un doux repos transformé
Ne fera plus pour toy qu'un
fonge
Que le réveil aura calmé
24 MERCURE
Efpere doncavec courage
Si le Pilote craint l'orage
Quand Neptune enchaine
les flots
L'efpoir du calme le raffure
Quand les vents & la nuë
obfcure
Glacent le coeur des Matelots.
Je fçay que l'homme le plus
fage
Par les difgraces combatu
Peut fouhaitter pour apanage
La Fortune aprés la Vertu
Mais dans un bonheur fans
mélange
Souvent
III.
PARTIE 25
Souvent cette vertu le change
En une honteufe langeur
Autour de l'aveugle richeffe
Marchent l'orgeül & la
rudeffe
Que fuit la dureté du coeur.
Non que ta fagcffe endor
mic
Au temps de tes profperitez
Eut befoin d'eftre r'afformie
Par de dures fatalitez
Ny que ta gloire peu fidelle
Juin 1711. 3. C
26 MERCURE
Eut jamais choisi pour modelle
Ge fol fuperbe , & tenebreux
Qui gonflé d'une fierté baffe
N'a jamais eu d'autres dif,
graces
Que de n'eftre point malheux
.
Mais files maux & la triſteffe
Nous font des fecours fuperflus
Quand des bornes de la fageffe
III.
PARTIE 27
Les biens ne nous font point
exclus
Ils nous font trouver plus
charmante
Noftre felicité prefente
Comparée au malheur paffé
Et leur influence tragique
Reveille un bonheur létar
gique
Que rien n'a jamais traverfé.
Ainfi que le cours des années
Se forme des jours & des
nuits
Le cercle de nos deſtinées
3 . Cij
28 MERCURE
Eft marqué de joye , & de
d'ennuys
Le Ciel par un ordre équitable
Rend l'un à l'autre prefirable
Et dans ces inégalitez
Souvent la fageffe fuprême
Sçait tirer noftre bonheur
même
Du fein de nos calamitez
Moy même à qui l'horreur
du vice
Jadis , non fans remerité
Chargea
la main encore nodevice
to
.&
III. PARTIE. 29
Du flambeau de la verité
Si contre mes rimes finceres
J'ay vû de honteux averfaires
Lancer tant de traits inouis ;
Loin de gemir de cet outrage
Peut eftre je dois à leur ra
ge
Tout le repos dont je jožis.
A force d'exciter ma bile
Eux- mêmes l'ont fçu corriger
J'ay veu qu'il cftoit plus facile
3. Ciij
30 MERCURE
De fouffrir , que de ſe van →
ger
Et tel dont ma verve orageufe
Pour prix de fa haine outrageufe
Eut fait un fujet de pitié
Puni par un mépris paisible
Me laiffe feulement fenfible
Aux charmes de ton amitié.
III. PARTIE .
31
***********
MALHEURS.
de l'homme.
Que l'homme eft bien durant
fa vie
Uu parfait miroir de douleurs
;
Dés qu'il refpire , il pleure ,
il crie ,
Et femble prévoir fes malheurs.
Dans l'enfance toûjours
des pleurs ,
Un Pedant porteur de trif
teffe ;
** MERCURE
Des Livres de toutes couleurs,
Des châtimens de toute
elpece.
L'ardente & fougueule
Jeuneffe
Le met encore en pire état ;
Des Creanciers , une Maîtreffe
,
Le tiraillent comme un Forcar
.
Dans l'âge mûr autre
combat ,
L'ambition le follicite ,
III. RARTIE
33
Richeffes , honneur , faux
éclat ,
Femme , famille , tout l'agite.
Vieux , on le méprife , on
l'évite ;
Mauvaiſe humeur , infirmiré
;
Toux , gravelle , goutte ,
pituite
Affiégent la caducité.
Il meurt enfin peu regreté ,
S'il n'attendoit un meilleur Etre
Dans une heureufe Eternité ,
Seroit ce la peine de naître !
34 MERCURE.
********************
EPIGRAMME.
S Oucis cuifans au partir
de Califte
Jà commençoient à me fuplicier
Quand Cupidon me voyant
pâle & trifte
Me dit : Amy,
pourquoy
te foucier ?
Lors
m'envoyant , pour me
folatier,
Tout fon correge , & celuy
de fa Mere ,
Songes plaifans & joyeuſe
chimere ,
III. PARTIE. 35
Qui m'enſeignant à raprocher
les temps ,
Me font jouir malgré l'ab :
fence amere
Des biens paffez & de ceux
que j'attends.
*********************
PLACET
à M **
Miniftre auffi fage qu'affable
,
Auffi genereux qu'équitable
,
Par qui le Dieu Plutus , qu'-
36 MERCURE
on avoit exilé ,
Va bien toft cftre rappellé :
Recevez ce Placet que má
main vous prefente ,
Er d'une dextre bien- faifante
Mettez au bas ces mots exquis
:
Soit fair airfi qu'il eft requis.
La Juftice vous le confeille ,
Par pitié pour le fupliant ;
On fçait que vous fçavez
accorder à merveille
Et l'intereft du Prince , &
celuy du Client ;
Mais peut- ête m'allez - vous
dire ,
Que j'en parle bien aifé ;
III. PARTIE. 37
W ment >
Et que ces mots qu'icy je
je vous preffe d'écrire ,
Ne fe prononcent pas toûjours
promptement ,
Sans doute, je fçay bien moi
toute la premiere ,
Qu'on me feroit telle priere,
Où je ne voudrois pas dire
en terme precis ;
Soit fait ainsi qu'il eſt requisi;
Au fexe feminin convient la
negative ;
Et quoy qu'à dire vrai , plus
d'une Belle icy
Ne fe ferve pas trop de la
prérogative ,
38 MERURE
L'ordre veut neanmoins que
cela foit ainfi.
Mais chez vous c'est tout le
contraire ,
Miniftre , tant qu'il vous
plaira ,
Quand noftre Sexe vous
priera ,
L'ordre veut parmi nous que
fans autre myſtere
Le Miniftre réponde ainfi
que le Marquis ,
Soit fait ainfi qu'il eft requis.
III. PARTIE. 39
* C********OOKHOOK
Epitaphe fur la mort
de Mr le Duc d'Albe.
Grand d'Elpagne , auffi
grand par ma haute naiffance
,
Que par mon grand courage
& par mon rare efprit ,
Sous ce marbre enfermé je
te parois petit ;
Lecteur vas t'informer de
mes grandeurs en France ,
Où le cruel deftin qui vouloit
m'abaiffer ,
N'y pouvant reüffir , me les
a fait laiffer.
40 MERCURE
SUITE DE LA BULLE
d'Or.
On aefté bien- affe de voir le
commencement de la Bulle
d'Or dans le dernier Mercure,
parce qu'alors elle ne couroit
pas encore la Ville ; quelqu'
un me blâmera fans doute d'en
donner la fuite, quand on en eft
déja ennuyé , mais eft-il plus
blåmable en certaines chofes ,
en harangues , par exemple ,
d'ennuyer en continuant , que
de ne point finir ce qu'on a
commencé .
On répondra . fi l'on veut , à
cecy comme à une question de
Mercure.
D'OR.
§ . I.
ARTICLE X.
Dela Monnoye.
N
Ous ordonnons de
le Roy
plus , que
de Boheme qui aprés nous
fuccedera à ce Royaume ,
pourra pendant fon Regne
faire battre Monnoye d'Or &
d'Argent en tous les endroits
& lieux de fon Royaume , ou
Terres en dépendantes qu'il
lui plaira & ordonnera dans
la forme & maniere juſqu'à
preſent obfervée dans ledit
Royaume, ainfi que de tout
temps il a été loiſible à
nos Predeceffeurs Rois de
Juin 1711 .
A
74.
BULLE
Boheme de faire , fuivant la
poffeflion continuelle qu'ils
ont de ce Droit , voulons &
ordonnons auffi par la prefente
Conftitution Imperiale &
Grace perpetuelle , que les
Rois de Boheme puiffent
acheter & acquerir des autres
Princes , Seigneurs , Comtes
& de toute autre Perfonne ,
des Chafteaux , Terres &
heritages , de quelque nature
qu'ils puiffent être ; en rece
voir en don & par engagement:
à condition qu'ils feront tenus
de les laiffer en la même nature
qu'ils les auront trouvez . Fiefs
comme Fiefs , Franc - aleu
comme tel , & c. En forte
toutes fois que les biens que
les Rois de Boheme auront
D'OR.
75
ainfi acquis ou reçû , & qu'ils
auront jugé à propos d'unir au
Royaume de Boheme , ils
feront obligez d'en payer les
redevances ordinaires & accoûtumées
qui en étoient dües
à l'Empire.
§. 2. Laquelle prefente
Conftruction & Grace , Nous
étendons auffi , en vertu de
nôtre prefente Loy Imperiale ,
à tous les Princes Electeurs ,
tant Ecclefiaftiques , que Seculiers
, & à leurs fucceffeurs
& legitimes Heritiers , aux
charges & conditions ci-deffus
prefcrites .
A ij
79
BULLE.
ARTICLE XI..
De l'Election des Princes
Electeurs.
§. I.
OR
Rdonnons auffi ,
que les Comtes ,
Barons , Nobles , Feudataires ,
Vaffaux , Officiers , Gens de
guerre , Citoyens , Bourgeois
& toutes autres Perfonnes , de
quelque Etat , Dignité & condition
qu'elles foient , qui
feront Sujets des Eglifes de
Cologne , Mayence & Tréves
ne devront ni ne pourront
l'avenir , comme ils n'ont pû
ni dû par le paffé , eftre citez ,
tirez , ni traduits hors le
D' O R. 7 %
Territoire , ni les termes &
limites de la Jurifdiction defdites
Eglifes & leurs dépen
dances , à l'inftance de quelque
Demandeur que ce foit ; ni
obligez de comparoiftre en
Juftice pardevant d'autres
Tribunaux & Juges , que
pardevant les Juges ordinaires
des Archevêques de Mayence,
de Tréves & de Cologne ,
comme nous trouvons que de
tout tems il a été ainfi obſervé.

§. 2. Et s'il arrivoit que
nonobftant noftre prefente
Conftitution , quelqu'un des
Sujets des Eglifes de Tréves ,
de Mayence & de Cologne ,
fût ajourné ou cité ( pout
quelque Caufe que ce foit ,
civile , criminelle ou mixte
A iij
78
BULLE
> ou autre Affaire ) pardevant
quelqu'autre Juge hors des
Territoires termes & limitest
defdites Eglifes ou d'aucunesd'icelles
, celui qui aura été
cité ne fera nullement tenu
de comparoiſtre ou de répondre
declarant la Citation ,
les Procedures & Sentences
interlocutoires ou définitives
rendues ou à rendre contre le
Défaillant , par tels Juges qui
feront hors du Reffort defdites
Eglifes , & tout ce qui s'en
feroit enfuivi par execution ou
autre attentat , nul & de nul
effet, b
~§. 3. A quoy nous ajoûtons
expreffement que les Comtes ,
Barons , Feudataires , Nobles ,
Vallaux , Officiers , Gens de
A
.
D'OR.
79
A
guerre , Citoyens , Paifans &
tous autres Sujets defdites
Eglifes , de quelque Etat ;
Dignité ou Condition qu'ils
foient , ne pourront pas appeller
des Procédures , Sentences
interlocutoires
&
définitives , ou Mandemens
defdits Archevefques & de
leurs Eglifes ou de leurs
Officiaux ou Juges Séculiers ,
non plus que des executions
faires ou à faire en confequence
contr'eux , dans la
Jurifdiction de l'Archevefque
ou defdits Officiaux , à quelqu'autre
Tribunal que ce foit ,
pendant que la Juſtice ne fera
point déniée aux Complai
gnans dans les Tribunaux
defdits Archevefques & de
·80 BULLE
leurs Officiaux ; Faifons défenfes
à tous autres Juges de
recevoir femblables Appellations
, & les declarations , nulles
& fans effet.
§ 4. Mais en cas de déni
de Juftice , Nous permettons
à tous les fuf- nommez à qui
la Juftice aura été déniée ,
d'appeller , non pas indifferemment
à tout autre Juge
ordinaire ou fubdelegué
mais immediatement au Tribunal
de la Cour Imperiale &
au Juge qui y préfidera alors ;
caffant & annullant toutes les
Procédures qui auront été faites
ailleurs , au préjudice de
cette Conftitution .
§. 5. Laquelle en vertu de
ôtre prefente Loi Imperiale,
D'OR. 8'r
Nous étendons auffi aux I
luftres Comte Palatin du
Rhin , Duc de Saxe & Marquis
de Brandebourg, Princes- Electeurs
Seculiers ' ou Laïques , &
à leurs Succeffeurs , Heritiers
& Sujets , enla même forme &
maniere que deffus .
ARTICLE XII
De l'Affemblée des Princes
Electeurs.
Aa nom de la fainte & in
divifible Trinité , & à noftre
plus grand bonheur. Ainfi
Soit - il.
C
7
HARLES IV . par la
grace de Dieu Empereur
82 BULLE
des Romains , toûjours Au
gufte & Roy de Bohême : à la
memaire perpetuelle de la
choſe.
§. 1. Parmi les divers foins
qui occupent continuellement
noftre efprit pour le bien
public , noftre Hauteffe Imperiale
a confideré que les
Princes Electeurs du faint Empire
qui en font les bazes
folides & les colonnes immobiles
, ne pouvant pas avoir
C
commodement communication
enſemble , à caufe de leur
trop grand éloignement les uns
des autres , il eft neceffaire
que pour le bien & le falut
de l'Empire ils s'affemblent
plus fouvent que de couftume
afin que comme ils font infor
D'OR. 83
mez des abus & defordres qui
regnent dans les Provinces qui
leur font connues , ils puiffent
en faire rapport & en conferer
enfemble , & avifer aux
moyens d'y apporter le remede
par leurs falutaires
confeils & leur fage prévoyance
.
"
§. 2. C'est pourquoi dans
noftre Cour folemnelle tenuë
par noftre Hauteffe à Nuremberg
, avec les Venerables
Princes Electeurs Ecclefiaftiques
, & les Illuftres Princes
Electeurs Séculiers , plufieurs
autres Princes & grands
Seigneurs , aprés une meure
deliberation avec les mefines
Princes Electeurs , de feur
avis , pour le bien & le falur
α
84 BULLE
commun ?' Nous avons jugé à
propos avec lefdits Princes
Electeurs , tant Ecclefiaftiqués
que Seculiers , d'ordonner
qu'à l'avenir les mefmes
Princes Electeurs s'affembleront
en Perfonne une fois l'an ;
en une de nos Villes Impériales
, quatre femaines confécutives
aprés la Fefte de
Pâques , & que pour la pre
fente année , au même temps
prochainement venant , il fera
celebré par Nous & les mêmes
Princes une Conference
Cour ou Affemblée de cette
forte en noftre Ville Imperiale
de Metz ; & lors , en l'un des
jours de la tenuë de ladite
Aſſemblée , il ſera par Nous
& de leur avis , nommé un
D'OR. 85
Hieu auquel ils auront à s'af
fembler l'année fuivante : Et
cette prefente Conftitution ne
durera que tant qu'il plaira à
Nous & à Eux ; & pendant
lieu Nous
quelle aura
prenons en noftre Protection
& Sauvegarde lesdits Princes
Electeurs , tant en venant en
noftre Cour qu'en yféjournant
& s'en retonrnant.
§S.. 3. Et afin que la négociation
& l'expédition des
Affaires communes concernant
le falut & le repos public ,
ne foient point retardées par
les feftins qui fe font ordinairementen
femblables Affemblées
; Nous ordonnons auffi
de leur confentement unanime
, que pendant lefdites
86 BULLE
Affemblées il ne fera loifible
à qui que ce foit de faire aucun
feftins general aux Princes ,
mais bien des repas particuliers
, qui n'apportent point.
d'empêchement à l'expeditiondes
affaires ; & cela mefme
avec moderation.
ARTICLE XIII.
De la revocation du Privilege.
Tatuons & déclarons
Saul, par noftre prefent
Edit Imperial , perpetuel &
irrevocable , que tous les
Priviléges & toutes Lettres de
Conceffion que Nous ou les
Empereurs & Rois des RoD'OR.
81
mains nos Predéceffeurs de
glorieufe mémoire , aurions
octroyez de noftre propre
mouvement ou d'une autre
maniere, fous quelques termes
que ce pût être , ou que Nous
ou nos Succeffeurs Empereurs
& Rois pourroient à l'avenir
accorder à qui que ce foit & de
quelque Etat , Préeminence ,
ou Condition qu'il foit ; même
aux Villes , Bourgs ou Communautez
de quelques lieux
des Droits que ce foit pour
Graces , Immunitez , Coûtumes
ou autre chofes , ne
pourront préjudicier ni déroger
aux Libertez , Jurifdictions
, Droits , Honneurs &
Seigneuries des Princes Electeurs
du faint Empire , Eccle
€8.8 BULLE
$ »
aftiques & Seculiers , ni
d'aucun d'eux , encore que
dans lefdits Priviléges &
lefdites Lettres accordées ,
comme dit eft , en faveur de
quelques Perfonnes que ce fait
& de quelque Préeminence ,"
Dignité & Etat qu'elles
foient , ou défdites Commúnautez
, il fut expreffément
porté qu'elles ne pourroient.
eftre revoquées , fi ce n'eſt
qu'en cas qu'on eût fpécialement
& de mot à mot inferé
dans tout le corps & contenu
defdites Lettres cette claufe
de non revocation ; lefquels
Priviléges & Lettres , entant
qu'ils préjudicient & dérogent
en quelques chofes aux Liber
tez , Jurifdictions , Droits ,"
D'OR.
82
Honneurs & Seigneuries def
dits Princes Electeurs ou
d'aucun , Nous avons , de
noftre certaine Science , pleine
Puiffance & Autorité Imperiale
revoquez & caffez ,
revoquons & caffons , entendons
& tenons pour revoquez
& caffez par ces Prefentes
ARTICLE XIV.
De ceux aufquels on ote les
biens Féodaux comme en
étant indignes
.
E
T dautant qu'en plu
fieurs lieux de l'Empire
les Vaffaux & Feudataires font
à contre-tems & malicieufe
B
Juin 1711.
BULLE.
"
ment une refignation ou defif
tement verbal des Fiefs qu'ils
tiennent de leurs Seigneurs ,
pour avoir lieu aprés ladite
refignation de les défier , &
de leur déclarer la guerre ; &
fous prétexte d'une hoftilité
ouverte pouvoir attaquer
envahir , occuper , & retenir
lefdits Fiefs & Terres au préjudice
des mêmes Seigneurs ;
Nous ordonnous , par cette
Conflitution perpétuelle , que
telles & femblables refigna
tions ou renonciations feront
reputées comme non faites , fi
elles ne font faites librement
& réellement , & fi les Seigneurs
ne font mis en poffeffion
corporelle & réelle defdits
Fiefs ; enforte que ces fai
D'OR. 91
2
feurs de défi ne troublent ja
d'au
mais ou par eux ou par
tres , & ne donnent confeil
faveur & affiftance à quelqu'-
un , pour troubler ou inquiéter
leurs Seigneurs dans les Fiefs
où Benefices qu'ils auront refignez
Voulons que ceux qui
feront le contraire & atta
queront leurs Seigneurs dans
leurs Benefices & Fiefs refig
nez ou non refignez , en quelque
maniére
A
que ce foit , ou
les troubleront ou endomma-™
geront , ou préteront confeil ,
aflftance ou faveur à ceux
qui commettront femblables
attentats , perdent en même
tems & par cela même lefdits
Fiefs & Benefices , & foient
déclarez infames , & mistaut
!
Bij
.92 BULLE
Ban de l'Empire , fans qu'ils
puiffent jamais rentrer , fous
quelque prétexte que ce foit,
dans lefdits Fief: & Benefices ,
& fans qu'on les leur puiffe
de nouveau en aucune maniére
conferer ; Déclarant que la
Conceffion ou l'Inveftiture
* qu'on leur en pourroit avoir
donné enfuite , contre la preefente
Conftitution , foit fans
aucun effet. Ordonnons en
dernier lieu , que ceux ou celui
qui oferont ou ofera agir
2frauduleufement contre leur
Seigneur ou fon Seigneur ,
& les iront attaquer de def
fein prémédité , fans avoir
fait ladite refignation ; foit
que le défi ait efté fait ou non
faits encourent par cela mê
D'OR. 63
1
me lefdites peines , en vertu¹
de la prefente Sanction .
ARTICLE XV.
Des Confpirations.
Nous
defapprouvons
auffi , condannons ,
* & de noftre certaine Science
déclarons nulles toutes Conf
pirations ; Conventicules , Societez
illicites ; détestées &
défenduës par les Loix dans
& hors dès Villes , entre Ville
& Ville , entre Particulier &
Particulier , entre Ville &
Particulier fous pretexte de
Parentés, de Bourgeoifie , ou
telles autre couleur qu'elle
- :
94 BULLE
puiffe eftre ; comme auſſi tous”
tes Confédérations & Pactes ,
& toutes Couftumes fur ce
introduites , que Nous tenons
plutoft pour corruption , lefquelles
les Villes ou Perfonnes
de quelque Dignité , Condition
ou Etat qu'elles puiffent
eftre , auroient fait jufqu'à
prefent , ou préfumeroient de
faire à l'avenir , foit entr'eux ,
foit avec d'autres , fans l'autorité
des Seigneurs dont ils
font Sujets , Officiers ou Serviteurs
, ou demeurant dans
leur Détroit , ces mêmes Seigneurs
n'étant pas nommément
exceptez , ainfi qu'elles
ont été deffenduës & caffées
par les facrées Loix des Di
vins Empereurs nos Predécef
D'OR.
95
par
feurs ; à l'exception toutefois
des Conféderations & Ligues
que l'on fçait avoir été faites
les Princes , les Villes & au
tres , pour la confervation de la
Paix générale des Provinces
& Pays entr'eux ; lefquelles
refervant fpecialement par
nôtre Déclaration , Nous ordonnons
qu'elles demeurent
dans leur force , & vigueur
jufques à ce que Nous trou
vions à propos d'en ordonner
autrement .
§. 2. Nous ordonnons que
tout Particulier qui ofera à
l'avenir faire des Ligues
Confpirations & Pactes de
cette forte , contre la difpofition
de cet Edit & de nôtre
ancienne Loi fur ce publiée ,
96
BULLE
.
2
outre la peine portée par la
même Loi , encourrera dés
lors la notte d'infamie & la
peine de l'amende de dix livres
d'or ; & que toute Ville
qui pareillement violera noftre
prefente Lor , encourera
auffi la peine de l'amende de
cent livres d'or , avec la perte
& privation de fes Priviléges
Imperiaux ; defquelles amendes
pécuniaires la moitié en
fera applicable au Fifc Imperial
, & l'autre au Seigneur du
Détroit , au préjudice duquel
lefdits ligues auront été faitesi -
D'OR.
97
ARTICLE XVI.
Des Phalburgers ou Gens déchûs
de leur Bourgoifie.
S. I.
•A
"
U refte , il Nous
a efté fouvent fait
plainte , que certains Bourgeois
& Sujets des Princes
Barons & autres cherchans
à fecouer le joug de leur fujétion
originaire , & même
par une entrepriſe téméraire ,
n'en tenant aucun compte , fe.
font recevoir Bourgeois d'autres
Villes , comme ils l'ont
fait plus fréquemment par le
paffe , & que nonobftant
qu'ils continuent de refider
Juin 1711 .
C
98
BULLE
en perfoune dans les Terres ,
Villes , Bourgs , & Villages
de leurs premiers Seigneurs ,
qu'ils ont ofé & ofent abandonner
par cette fraude , ils
prétendent jouir des Libertez
des Villes où par ce moyen
ils ont acquis le Droit de
Bourgeoisie & eftre par elles
protegez , lefquels Bourgeois
font vulgairement appelez en
Allemagne Phalburgers . Or
d'autant qu'il n'eft pas juſte
que quelqu'un profite de fon
dol & de fa fraude ; Nous
aprés avoir fur ce pris l'avis des
Princes Electeurs Ecclefiaftiques
& Séculiers , & de noftre
certaine Science , pleine Puiffance
& Autorité Imperiale ,
avons ordonné & ordonnons
par cette preſente Loi perpéD'OR.
99
tuelle & irrevocable , que lef
dits Bourgeois & Sujets qui fe
mocqueront ainfi de ceux fous
la fujétion defquels ils font ,
ne pouront de ce jour à l'avenir
dans toutes les Terres , Lieux !
& Provinces du faint Empire
, joüir en aucune façon
des Droits & libertez des Villes
où parune telle fraude ils
feferont ou fe font fait recevoir
jufqu'àprefent Bourgeois:
fi ce n'eft que fe transferant
réellement en perfonne dans
lefdites Villes pour y établir
un domicile actuel & y faire
une refidence continuelle
vraye & non feinte , ils y fubiffent
les Impofitions accoûtumées
& les charges municipa
les ; & fi quelques - uns y ont été
Cij
100 BULLE
reçûs ou le font à l'avenir , leur
reception fera reputée pour
nulle ; & les Reçûs , de quel
que Dignité , Condition &
Etat qu'ils foient , ne jouiront
en aucun cas & fous quelque
pretexte que ce foit , des
Droits & Libertez defdices
Villes , ce nonobftant quelconques
Droits & Priviléges
obtenus , & Coûtumes obfervées
en quelque temps que ce
foit lefquels en tant qu'ils
font contraire à nôtre preſente
Loi , Nous de noſtre certaine
Science , pleine Puiffance Imperiale
, les revoquons par
ces Prefentes , & ordonnons
qu'ils foient privez de toute
force & valeur.
§ . 2. A la referve & fans
DOR ΙΟΙ
>
des
prejudice à toûjours , tou.
chant ce que deffus
Droits que les Princes , Seigneurs
& autres Perfonnes
qui de cette maniére ont efté
ou feront à l'avenir abandon,
nez ont fur les perfonnes &
les biens de leurs Sujets qui
les abandonnent anfi ; &
pour ceux qui contre la difpofition
de nôtre prefente
Loi , ont ofé par le paffe , ou
oferont à l'avenir recevoir
kefdits Bourgeois & Sujets
d'autrui , fi ils ne les renvoient
abfolument dans un
mois aprés la publication à
eux faite des Prefentes , Nous
déclarons que toutes les fois
qu'ils tranfgrefferont nôtre
prefente Loi , ils encoureront
C iij
1102
BULLE
la peine de l'amande de cent
marcs d'or pur , dont la moitié
fera appliquable irremiffiblement
à notre Fifc, Imperial
, & l'autre aux Seigneurs
de ceux qui auront été ainfi
reçûs .
S. I.
A
ARTICLE XVII.
Des Défis.
N
Ous déclarons en
outre , que ceux
qui feignent d'avoir juſte raifon
de défier quelqu'un , l'auront
envoyé défier à contretems
, en des lieux où il n'a
pas fon domicile établi ; &
où il ne demeure pas ordiDOR.
103
hairement , ne pourront pas
avec honneur ravager fes
Terres , ni brûler fes Maifons,
ou par autres voyes endommager
fes Heritages.
§. 2. Et dautant qu'il n'eft
pas jufte que le dol & la fraude
foient profitables à perfonne
, Nous voulons & ordonnons
par cette preſente
Conftitution perpetuelle , que
les défis faits ou à faire à l'ave
nir de cette fotte , à quelques
Seigneurs ou autres Gens
que ce foient , avec lesquels
on auroit été en focieté , familiarité
ou honnête amitié
foit de nulle valeur ; & qu'il
ne foit nullement permis fous
pretexte de tel défi , d'outrapar
incendies ger quelqu'un par
C iiij
104
BULLE
pilleries & faccagemens
moins que le défi n'eût été
dénoncé publiquement pendant
trois jours naturels à la
perfonne même défiée
Ca
"
cu
dans le lieu de fon domicile
ordinaire & accoûtumé , &
que par Témoins fuffifans il
ne fut rendu témoignage de
cette dénonciation , Ordonnons
que quiconque ofera
défier & attaquer quelqu'un
en la maniére fufdite
coure dés lors la notte d'infamie
, comme s'il n'avoit eſté
fait aucun défi ; & qu'il foit
chaftié comme Traiftre par
tous Juges , fuivant la rigueur
des Loix.
en-
§. 3. Défendons & condamnons
auffi toute forte de
1
DQR
TOS
D 2010m .
guerres & de querelles in-
Juftes & pareillement les
incendies , les ravages & les
violences injuftes , les Péages
& Impofitions illicites & non
ufitées ; comme auffi les exactions
que l'on a coûtume de
faire pour les Sauf- conduits
& les Sauve - gardes que l'on
veut faire prendre par force
aux Gens ; & ce fur les peines
dont les faintes Loix ordonnent
que cefdits attentats
foient punis.
106 BULLE
Sa ARTICLE XVII Lo
Lettres d'Intimation.
A
Vous , Illuftre & Magnifique
Prince , Seigneur
, &c. Marquis de Branbourgi
Archichambellan du
Saint Empire Romain , noftre
Co - électeur & tres - cher Ami.
Nous vous intimons par ces
Prefentes l'Election du Roy des
Romains , qui pour caufes
raifonnables doit être faite inceffamment
, & vous appellons
Selon le devoir de noftre Charge
& la coûtume à ladite Election ;
afin que dans trois mois confécutifs
, à compter de tel jour , &c .
Vous ayez à venir par vous -
D'OR. 107
!
1
meme ,
>
ou par vos Ambaſſadears
ou Procureurs , foit un ou
piufieurs ayant Charge & Mandement
fuffifant , au lieu dû
felon la forme des Loix facrées
qui ont été fur ce faites , pour
-déliberer , traiter & convenir
avec les autres Princes vos &
nos Co - électeurs , de l'Election
d'un Roi des Romains , qui par
la grace
de Dieu fera aprés créé
Empereur ; & pour y demeurer
jufqu'à la confommation de cette
Election , & autrement faire &
procéder comme il eft exprimé
dans les Loix facrées fur ce
établies ; à faute de quoi Nous
procéderons finalement avec
- les autres Princes vos & nos Col'ordonne
électeurs fuivant que
Autorité defdites Loix no108
BULLE
nobftant voſtre abfence on celle
des Voftresll
"243.
ARTICLE XIX.
Forme de Procuration à don
ner par le Prince Electeur ,
qui envoyera fes Ambaffadeurs
à l'Election :
N
Ous N. par la grace de
Dieu , & c. du faint Em→
pire , &c. Sçavoirfaifons à tous
par ces Prefentes , Que comme.
pour des Caufes raisonnables.
L'on doit inceffamment procéder
à l'Election d'un Roi des Ro-.
mains , & que nous defirons ar
demment, ainfi que nous y oblige:
Phonneur & Etat du faint Em-.
D'ORA! 1099
pire , qu'il ne foit exposé à aucuns
éminens dangers ; Nous ,
ayant une ferme prefuafion &.
une confiance finguliere en la .
fidelite , fuffifance & prudence
de nos chers & bien - aimez tels,
&c. les avons fait , conftituek
& ordonnez comme nous les
faifons , conftituons & ordonnons
, avec tout droit maniére
& forme , le mieux & le
plus efficacement que nous pou
vons , nos veritables & légiti
mes Procureurs & Ambaſſadeurs
Spéciaux , eux ou chacun
d'eux folidairement , en forte
que la condition de celui qui occupera
ne foit pas meilleure
mais que ce qui aura efté commencé
par l'unfe puisse finir &
duement terminer par l'autre
101
BULLE
3 ce pour traiter par tout avec
les autres Princes nos Co - électeurs
, tant Ecclefiaftiques que
Séculiers , convenir avec eux &
conclure fur le choix d'une Pers
Sonne qui ait les qualitez propres
à eftre élu Roi des Ro-
"
mains
, & pour affifter aux-
Traitez qui fe feront fur l'Election
d'une telle Perfonne , &
y traiter& déliberer pour Nous
en noftre place & en noftre nom ,
comme aufli pour en noftre même
nom & place , nommer la même
Perfonne & confentir qu'elle
foit élue Roi des Romains , &
élevée au faint Empire , &
pourfairefur noftre propre con→→
fcience tout Serment qui feras
neceffaire , convenable & accoûtumé
, même pour en ce qui
DOR
concerne les chofes fufdites on
quelqu'une defdites chofes ,fubftituer
& revoquer folidairement
un autre ou d'autres Procureurs ,
&faire toutes & chacunes chofes
que feront neceffaires & utiles
à faire en ce qui concerne les
Affairesfufdites,jufqu'à la con-
Jommation des Traitez de cette
Nomination , Déliberation &
Election , ou telles autres femblables
, & auffi utiles & importantes
chofes , encore qu'elles ou
quelqu'une d'icelles , demandaf
fent un Mandement plus fpécial,
ou qu'ellesfuffent de plus grande
confequence & plus particuliére
que les fufdites le tout comme
nous pourrions faire nous - mêmes
,fi nous étions perfonnellement
prefent aux Négociations
;
1
II2 BULLE
نم
defdits Traitez Déliberation
Nomination & Election future,
ayant & voulant avoir
promettant fermement d'avoir
perpétuellement agréable &&pour
ratifié tout ce qui fera négocié ,
traité ou fait , ou de quelque
maniére ordonné dans les Affaires
fufdites , en quelqu'une
d'icelles par nos fufdits Procureurs
ou Ambaffadeurs ; comme
auffi par leurs fubdéléguez ,
ou par ceux qui feront fubftituez
par eux ou par quelqu'un
d'eux.
D'OR. 113
ARTICLE XX.
De l'union des Principautez
des Electeurs & des Droits
y annexez. ~
Au Nom de la fainte & indivi
fible Trinité, & à noftre plus
grand bonheur. Ainfiſoit- il.
CHAL
*
HALRLES IV. par la
grace de Dieu, Empereur
des Romains , toûjours Augufte
& Roi de Boheme ; à la
perpétuelle mémoire de la
chofe.

Comme toutes & chacunes
les Principautez en vertu
defquelles l'on fçait que les
Juin 1711.
D
114 IBULLE
2
-Princes Electeurs Seculiers
ont droit & voix en l'Election
edu Roi des Romains futur
Empereur , font tellement attachées
& inféparablement
aunies à ce Droit & aux Fonctions
, Dignitez & autres
Droits y appartenans & en
dépendans , que le Droit &
la Voix , l'Office & la Dignité
, & les autres Droits qui
appartiennent à chacune defdites
Principautez , ne peuvent
échoir qu'à celui qui
poffede notoirement la Principauté
avec la Terre , les
Vaffelages , Fiefs , Domaine's
& fes appartenances ; Nous
ordonnons par ce prefent Edit
Imperial , perpétuel & irrevocable
, qu'à l'avenir chaD'OR.
115
cune defdits Principautez demeurera
& fera fi étroitement
indivifiblement conjointe &.
unies avec la Voix d'Election ,
l'Office & toutes autres Dig-
>nitez, Droits & appartenances
anconcernant la Dignité Electorale
, que quiconque fera paifible
poffeffeur d'une defdites
Principautez , jouira auffi de
la libre & paisible poffeffion
du Droit , de la Voix de
POffice , de la Dignité & de
toutes autres appartenances
qui la concernent , & fera reputé
de tous vrai & legitme
Electeur ; & comme tel on
fer a tenu à l'inviter , & recevoir
& admettre & non
autres avec les autres Princes
Electeurs , en tout tem's
Dij
216 BULLE
& fans contradiction aucune
aux , Elections des Rois des
Romains , & à toutes les Actions
qui concerneront l'honneur
& le bien du faint Empire
, fans qu'aucune des chofes
fufdites , attendu qu'elles
font ou doivent être en aucun
tems divifée ou féparée l'une
l'autre, ou puiffe en Jugement
ou dehors être reputée féparément
ou évincée par
tence ; voulant que toute Audience
foit refufée à celui qui
demandera l'une fans l'autre ;
& que fi par furpriſe ou autrement
il l'obtenoit , & qu'ils
s'en enfuivift quelque Procédure
, Jugement , Sentence ,
ou quelqu'autre femblable attentat
contre noftre preſente
SenD'OR.
I7
Conftitution , le tout en tout ,
ce qui en pourroit émaner
en quelque façon que ce puſt
eftre , foit de nul effet actuel
lement nul .
zoda
ARTICLE XXI..
De l'ordre de la marche entre
les Archevêques.
S.
I ..
O
R dautant que
Nous avons fuffifamment
expliqué au commencement
de nos prefentes
Conftitutions Fordre de la
Séance que les Princes Electeurs
Ecclefiaftiques devoient
tenir au Confeil , à la Table
-& ailleurs , lorfque la Cour
118
BULLE
Imperiale fe tiendra , ou que
les Princes Electeurs feront
ci - aprés obligez de s'affembler
avec l'Empereur ou le
Roi des Romains , fur quoi
nous avons appris qu'il y avoit
eu par le paflé plufieurs difputes
; Nous avons auffi.crû
qu'il étoit expédient de prefcrire
l'ordre qui doit être par
eux obfervé aux Proceffions
& Marches publiques.
S. 2. C'est pourquoi Nous
ordonnons par ce prefent
Edit Imperial & perpétuel ,
que toutes les fois que dans
les Affemblées générales où
feront l'Empereur ou le Roi
des Romains & lefdits Princes
, l'Empereur ou le Roi des
Romains voudra fortir en puD'OR
blic & en cérémonie , & qu'il
fera porter devant lui les Ornemens
Imperiaux , l'Archevêque
de Tréves marchera
le premier & feul devant
l'Empereur ou le Roi en ligne
droite & diamétrale ; en forte
qu'entre l'Empereur ou le Roi
& lui , il n'y ait que les Prince
à qui il appartient de por
ter les Marques Imperiales
ou Royales.
§ . 3. Mais quand l'Empe
reur ou le Roi marchera fans
faire porter lefdits Marques ,
alors le même Archevêque
précédera l'Empereur ou le
Roi en la maniére fufdite , en
forte qu'il n'y ait abſolument
perfonne entr'eux ; les deux
-autres Archevêques Electeurs
120 BULLE
gardant dans lefdites Procef
fions chacun la place qui luy
a efté ci - deffus affignée pour
la Séance , felon la Province
en laquelle ils fe trouveront.
BEM
MERCURE
IV. PARTIE CON
$
1893
NOUVELLES
Nouvelles du Nord.
Les
Lettres du Palatin
de Kiowie du 19. Mars
dernier
portent qu'il s'etoit
avancé avec le fils
du Kan des
Tartares vers
Niemirow
capitale
de la Baffe Podo-
Juin 1711. 4 Α
& Braclaw
MERCURE
1
lie ; que ces deux
Places
s'étant
rendues
à l'approche
de leurs
Troupes
, ils
y avoient
fejourné
pendant
quelques
jours
qu'ayant
envoyé
un Party
dans la Haute
Podolie
il avoit
fait quelques
Pri
fonniers
par lefquels
on
avoit
appris
qu'il
y avoir
a Lifianka
un Corps
de
fix mille
Moscovites
; que
s'étant
mis
en marche
pour
les aller
ataquer
, les
les Mofcovites
étoient
venus
au devant
d'eux
; mais
qu'apres
quelque
refiftan
IV.
PARTIE. ;
3 ce ils avoient efté entierement
défaits que le
premier fruit de cette
Victoire avoit efté la reduction
de Lifianka .
Ces Lettres ajouſtene
que le fils du Kan en avoit
receu une de fon Pere par
elaquelle il lui donnoit a
vis qu'il s'eftoit rendu maiftree
des Villes de Solof
ка
Ka , de Luiny , & de Michaïlow
, les deux premieres
fituées fur la rivie
re d'Occa , & la derniere
fur le Tanais entre Mof
cou & Veronecz où eft
C
S
S
1
4 A ij
1 MERCURE
l'Arcenal
de Marine
du
Czar, & qu'il s'eftoitavancé
jufqu'à
huit lieues de
de Mofcou
.
A l'égard
du Grand-
Vizir
il eftoit
encore
cam .
pé avec
15000.
hommes
à Daoud
Pacha
d'où il devoit
partir
pour ſe rendre à Bender
qui eft le rendez-vous general
de cette Armée .Voi
cy un eftat des Troupes
dont elle doit eftre composée.
le
d'Avril
27.
IV. PARTIE.
S
Gavalerie.
Troupes des Bachas.
10170. hommes.
Zaims & Timariots .
17873+
4
Les quatre Cornettes des
Spahis.
17773.
Deli ou Enfants perdus.
2046 .
Totals 7862 .
Infanterie.
Janiffaires . 20000.
Gebegis ou Cuiraffiers.
10000
Topgis ou Canonniers .
7000.
Janiffaires du Caire . 3403 .
4
A iij
6 MERCURE
Bofniens & Albanois.
20000.
Pionniers. 132910400.
5
Total 61803.
L'Artillerie fera de oo .
pieces de canon , & de 30 .
mortiers.collatad
3
W
212
Les
Troupes pour
garde
des frontieres
ne
font point compriſes
dans
cet eftat non plus que les
Tartares , & les 40000.
hommes
deftinez
pour
l'Armée
Navale
dont voicy
auffi un eftat.
Vaiffeaux ou Sultanes
grandes & petites . - 18
IV. PARTIE.
Galleres. 21
Galliores à 24 rames. 40
Galliotes à 16. rames, no60
Felouques à 12. rames. 120
Baſtiments plats.100
Total 359
Les Galleres , les Galliotes
, & les autres petits
Baftiments , fortirent du
Port le 18. Avril pour fe
mettre à la rade .
On a appris par des
Lettres pofterieures que le
Palatin de Kiovie , & le
fils du Kan des Tartares ,
aprés avoir défait les 6000
Mofcovites dont on a par-
A iiij
4
8 MERCURE
lé , avoient avec la tefte de
leurs Troupes attaqué
Bialacerkiov
; mais qu'
prés y avoir donné trois
affauts , ils avoient efté
obligez de fe retirer en
attendant l'arrivée de
leur Artillerie.
Nouvelles de Flandre.
Le 11. Avril les Ennemis
entreprirent encore
de s'emparer du Pofte
d'Arleux ; mais ils furent
repouffez avec perte , ainfi
qu'ils l'avoient efté la pre
IV. PARTIE.
miere fois , quoyqu'il eu
fent amené du canon.
Le 12 & le 13. Mr le
Maréchal de Villars fit la
reveuë de l'Armée , & des
Troupes qui font aux en
virons d'Arras. aboutis
A Ypres le 28. Mai.
Mr le Comte d'Harling
partit Lundy s de ce mois
atrois heures aprés Midi avec
buit cens Grenadiers , Mrs de
Menou de Barbançon Colonels
, deux Lieutenants Colonels
un Lieutenant de
fo MERCURE
,
un
à un
Mineurs, & 24. Mineurs
avec une Charette d'Inftru
mens pourse rendre à l'Eclufe
Arlebec foutenue & gardée
par une Redoute
Moulin retranché
quart de lieue de Courtray
a deux de Menin , à fix de
Gand & à quatre de Bruges.
Ily arriva le 26. vers
Les heures du matin , &
5.
aprés avoir fait toutes fes
difpofitions il donna le fignal
pour ataquer la Redoute &
le Moulin. Ces deux Poftes
furent emportez aprés une
refiftance d'environ trois
*
IV. PARTIE. 11
1
quarts d'heure , fans cependant
avoir eu que fix foldats
tuez. Mr Bernard Liewtenant
Colonel dangereufe
ment bleffé , & deux Capitaines
bleffez legerement. Du
cofté des Ennemis , le Commandant
a efté bleſſé , & il
y a eu environ trente Soldats
tuez ou bleffez. Après avoir
affemblé les Prifonniers , les
Mineurs s'atacherent aux E
clufes , à la Redoute & au
Moulin , & leur travail
ayant efté achevé vers lesfept
heures dufoir , ils mirent le
feu aux Mines qui firent
?
~
MERCURE
tout l'effet qu'on en pouvoir
attendre. Mr le Comte de
Villars & Mr l'Intendant
en ont efté témoins oculaires ,
carpour couvrir la retraite de
Mr d'Harling l'on avoitfait
fortir le même jour 25. à buit
heures du foir feize cens Fufeliers
trois cens Dragons
commandez par Mr de Grimaldy
Maréchal de Camp ,
Mr de Crecy Brigadier
Mrs de Pertuis & de Noga
ret Colonels , & deux Lieutenants
Colonels dont jeftois
du nombre.
Nous arrivames à ArleIV.
PARTIE.
bee vers les fept heures du
matin , & nous nous mimes
en marche pour revenir vers
les huit heures du foir , &
marchafmes toute la nuit. Environs
Minuit , étant près
de Rouffelar par ou nous devions
paffer nous fumes avertis
que quatre mille chevaux
& deux mille Grena
diers en croupe étoient venus
pour nous couper , & qu'il
étoit forty en même temps
plufieurs Bataillons des Places
voisines , pour inveftir
Rouffelar pendant le temps
que nous devions nous y re14
MERCURE
pofer. Sur cet avis nous quit,
tames le chemin de Rouffelar
en nous jettantfur la droite.
Nous fimes tant de diligence
que nous arrivames icy Jans
avoir efté ataquez.
Nouvelles
d'Espagne.
*
Extrait d'une Lettre de
Sarragoffe du 3. May.
Laa Reine a toujours
quelques reffentimens de Fievre
; le Roy & le Prince
des Afturies font en parfaite
fanté.
IV . PARTIE. 15
Les preparatifs pour l'ouverture
de la Campagne fe
ront bien-toft achever les
Magafins de Mequinença ,
de Lerida , de Cervera
étant presque tout afait rem
plis , & toute l'Artillerie du
Royaume de Valence étant
arrivée à Tortoze. Mr le
Marquis de Valdecanas a
tendu les Qartiers des Trou
pes qu'il commande au deffus
de Balaguer , le long de la
Segre de Bragos afin de
Les faire fubfifter plus com→
modement. Deux mille Miqueletsfe
font foumis au Roy
16 MERCURE
>
fe font venus rendre avec
leurs armes.
Les Lettres de Madrid
du 12. du meſme mois portent
que l'Armée de Catalogne
devoit s'aſſembler
le 17 , au deçà de la Segre ,
& que le zo. elle devoit
eftre campée fous Lerida ;
& que Mr le Marquis de
Bay avoit affemblé celle
d'Eftremadure dés le 25.
Avril ; que le 29 .
il avoit
paſsé la Xevora ; que l'Artillerie
de cette Armée y
eftoit arrivée , & que plufieurs
Regiments avec un
grand
IV. PARTIE. 17
1:
grand nombre de Soldats
de recruë ; eftoient préfts
de la joindre.
Celles du 18. afsûrent
qu'on en avoit receu de
Saragolle qui marquoient
que la Reine eftantentierement
delivrée de la fievre
en devoit partir au
pluftoft pour revenir à
Madrid ou pour aller à
Logrono fur la frontiere
I de Navarre , où l'air eft
tres - bon , afin de reftablir
fa fanté , que le Gene
ral Stanhope avoit reglé
à Saragoffe ( avec Mr le
Juin 1711.
4 B
18 MERCURE
Marquis de Caftellar , un
Traité pour l'échange des
Officiers prifonniers ; que
celui pour l'échange des
Soldats n'eft pas encore
conclu ; que le Royaume
d'Arragon offroit de lever
à les dépends quatre Regiments
pour la garde des

frontieres , & pour fervir
d'eſcorte aux convois ;
que l'Armée d'Eftramadure
qui eftoit desja forte
de vingt - trois bataillons
& de quarante- neuf Elcadrons
, eftoit campée prés
du pont de Badajos ; que
IV. PARTIE 19
e
Mr le Marquis de Bay s'eftoit
avec la Cavalerie du
cofté de la riviere de Caya,
& aux environs de Campo
Mayor où elle fourageoit
les grains , ce qui
eftoit tres- prejudiciable
aux Portugais à caufe de
la difette qu'ils en ont , &
que l'Armée Portugaife
eftoit une partie à Eftremoz
, & le refte dans d'au
tres Places.
20 MERCURE
2 Lettre de Sarragoffe
abte du 25. Mai.
exa
100
Mrs le Marquis d'Aito
na , & le Comte d'Aguilar
ont eftéfaits Capitaines generaux.
Don Melchior de Portugal
ayant efté envoyé pour
donner la chaffe à une Trou
·pe de Volontaires qui faifoient
des courfes du cofté de Bal
baftro , on a fait pendre un
grand nombre , & diffipé le
reſte qui s'eſt ſauvé dans les
Montagnes. Les Gardes du
Corps qui font en Quartier
IV. PARTIE.21
dans le Royaume de Valence
avoient recu ordre defe mettre
en marche ; mais cet ordre a
eftéfufpendu , & on croit qu'
ils escorteront les Vivres , les
Munitions l'Artillerie
quifont à Tortore où ileft ar
rivé 24 pieces de gros Canon,
Les Troupes Françoifes qui
doiventjoindre les Espagnoles
* font entrées en Aragon , &
le Roy à nommé fix bataillons
»pour aller relever la garnifon
de Girone. L'Armée doit fe
mettre en marche le s . du mois
5.
prochain pour entrer en Cata
logne . Mr le Marquis de Bay
2z MERGURE
ཝཱ
fourage les grains des environs
d Elvas & de Campo-
Mayor des deux coſté de la
Caïa fans que les Portugais
faffent aucun mouvement pour
sy opofer. Il doit arriver icy
au premier jour un convoy
confiderable d'argent qui vient
de Cadiz. La fanté de la
Reine devient meilleure de
jour en jour , elle doit partir
le 7. du mois prochain à Corella
entre Calabarra & Tudela
ou l'air eft fort bon.
gry
IV. PARTIE. 2} .
Nouvelles de plufieurs
endroits.
Lettre de Marſeille
du 19. May.
Il a fait pendant deux
jours un vent de Sud- Ouest
tres violent Léquipage d'une
Barque de la Flote partie de
Vado pour Barcelone , qui eft
échouéé pres de Martigues
a raporté que cette Flotte
près avoir mis à la voile le
26. Avril étant efcortée par
une Efcadre de dix Vaiffeaux
14 MERCURE
commandée par par le Vicc-Ami.
ral Norris avoit efté repouffée
fur les Coffes de Genes par un
gros vent , pendant lequel on
avoit efté obligée , de jetter
environ deux cens cinquante
chevaux dans la Mer 3 qu
ayant enfuite remis à la voile
, elle avoit efté battu avant
bier d'une fi rude Tempefte
quetous les Vaiffeaux avoient
efté contraints de fe laiffer aller
au gré du vent qui les
pouffoit vers les Plages de
Foz , qui font tres dangereu-
Les particulierement du cofte
des bouches du Rhone.
D'autres
IV.
PARTIE. 25
D'autres Lettres qu'on
reçues depuis
portent
que cette Flote eftoit de
quatre - vingt Baftimens
chargez de bled & de prés
de fept mille hommes de
Troupes ; & qu'il eſt peri
un grand nombre de ces
Baftimens , felon le raport
des Equipages & des
Soldats de plufieurs Barques
qui ont abordé au
Port de Cette & à quelques
autres de la mefme
Cofte.
Celles de Naples du 28.
Avril
marquent qu'une
Juin 1711.
4 C
26 MERCURE
Tartane qui avoit demeu
ré quelque temps à Gagliari
, avoit rapporté que
la plufpart des baftimens
de ce Convoy y avoient
relaſché aprés avoir eſté
fort maltraitez
par une
tempefte qui les avoit ob
ligez de jetter en mer dixhuit
mille feptiers de
grains pour les allegir
& qu'une Tartane char
gée de draps pour habil
ler les troupes , eftoit allee
aborder à Palerme
, qua,
rante foldats Napolitains
qu'il y avoit deffus ayant
IV.
PARTIE.
27
1
forcé les
Matelots de les
ysconduire .PTF
conduire.PHOTOS
On a publié à Vienne
un Traité conclu avec les
Députez des
Confederez
de Hongrie le 29. Avril
au nom de
l'Empereur ,
quoyqu'il
fuft mort des
le
11:
Par ce Traité Sa
Majefté
Imperiale
comme
Roy de
Hongrie
pardonne au Prince Ragotzi
, le remet en pofefeffion
de tous les biens ,
luy accorde une retraite
pour luy , pour fes Enfans,
pour la Cour , & pour tous
4 Cij
18 MERCURET
(
fes Domestiques en Hongrie
, en Transilvanie , ou
ailleurs , où bon luy ſem
blera , à condition que
dans un temps limité il
évacuera des Places qui
font en fon pouvoir. Ce
Traité contient auflj une
"
Amniftie generale pour
tous les Hongrois & les
Tranfilvaniens de quelque
qualité & condition
qu'ils foient , avec une reftitution
generale de tous
leurs biens , foit qu'ils
ayentefté
confifquez
vendus , donnez , ou de
IV . PARTIE . 29
op
membrez , & mefme que
les veuves & les orphelins
jouirant de ceux dont
ils auroient deu heriter ;
que l'exercice de la Religion
fera permis en Hon
grie & vengTranfilvanie ,
fuivant les Loix de ce Royaume
que les Officiers
& les foldats beftrangers
-pourront le retirer où ils
jugeront à propos , & ceux
qui font domestiques , reafter
avec leurs Maiftres
2 & que les prifonniers de
guerre , de quelque qualisé
& condition qu'ils
C
Ciij
30 MERCURE
foient , jouiront de l'am
niſtie. Il he manque plus
à ce Traité que la ratification
& l'execution .
Suite des Nouvelles
Jandu Nord, dorty
On a redeu par la voye
de Vienne des Lettres de
Conftantinople du 4.
May,par lefquelles on apo
prend que le GrandoVifie
n'a deu fé mettre en mari
che que le 18: pour join.
dre le Roy de Suede k
Bender. Ces mefmes Let
IV. PARTIE I
3.
7
tres portent que le Kan
des Tartares eftoit de re
tour de la courſe qu'il at
voit faite jufques vers
Mofcou , qu'il avoit amené
un fort gros butin , &
vingt mille Mofcovites en
efclavage.
Le Czar eftoit encore
en Pologne au commen
cement du mois de Juin
où il attendoit le Roy Aud
gufte pour conferer avec
luy, ce Prince eſtant par
ti de Dreſde le 24. May
pour s'y rendre avec le
Prince Electoral fon fils ,
4 C iiij
32 MERCURE
le bruit avoit couru qu'ils
avoient efté enlevez fur la
route par une Troupe de
Polonois du parti du Roy
Stanislas. Cette nouvelle
merite confirmation ; mais
' ce qu'il y a de cetrain eft
" que le General Sinigielski
Polonois , qui avoit paſſé
en Pomeranie avec le Roy
Stanillas , s'eftoit avancé
avers les frontieres de Po-
*logne fur la route que tenoit
le Roy Augufte , où
il avoit défait le Regiment
d'Egftar Saxon , & pris
une grande partie des é
IV . PARTIE. 33
quipages de ce Prince que
ce Regiment efcortoit
ab oquoiT sag 169 swor
Suite des Nouvelles
allavood'EspagneDame
Le Roy & le Prince des
&Afturies doivent acompagner
la Reine à Corella , & on
travaille aux preparatifs
pour ce Voyage. Toutes les
~Troupes font en mouvement
~excepté celles de la Maifon
du Roy qui doivent partir
avers les 10, avec Monfieur
zide Vendôme. Le General
Staremberg n'a pas voulu ra-
+
34 MERCURE
B
tifier le Traité que le Gene
ral Stanhope avoit fait pour
échanger les Officiers Prifonniers
, s'excufant fur ce que
les Soldats periroient quand
il n'y auroit plus d'Officiers
pour prendre foin d'eux. Ce
General eft campé avec un
Corps de Troupes près d'1
gualada où il peut les faire
fubfifter plus commodement.
Nous avons appris que l'A
miral Norris avoit debarqués
Barcelone environ cinq
mille hommes de fept qu'il
avoit en partatant de Vado ,
le reſte ayant péri dans plu
2
*
IV, PARTIE. 3353.
fieurs Tempeftes quefa Flotte
effuyées dans le trajet , avec
la plus part des chevaux qu'
il avoit embarquez & beaucoupde
Munitions de bouche.
Le bruit court que l'Archiduc
veut profiter du retour de cet
te Flotte en Italie poury paffer
& de là à Vienne ;
mais que cet Amiral refuſe
de fe charger defa perfonne
fans en avoir auparavant
reçu un ordre de la Reine
Anne, cras
#
4
36 MERCURE
1
Suite des Nouvelles
£fio de Flandremo
tud mod of Adoo LabokI
Au Camp du Prieuré
S. Michel lez Arras
! , y le 15.
Jain.
ub.
Les Ennemis décamperent
hier à une heure
aprés Minuit , & marcherent
fur plufieurs Colonnes.
Ils pafferent la Scarpe
le matin entre Vitry
& Douay , & leurs Bagages
la mente
riviere au deffous de la
IV. PARTIE 37
mefme Ville , & le Canal
de la Deule à Auby & à
Dourge. Leur droite eſt à
Lievin à cofté de Lens fur
le Souchet , & leur Gauche
à Pont à - Saut fur la Deule
du cofté de Douay , le
Souchet & le Canal derriere
eux. Leurs Generaux
font à Lens. Le gros de
notre Armée marcha en
même temps par la même
hauteur pour joindre foixante
& huit Escadrons
qui eftoient vers la Somme
& que Mr le Marechal
avoit fait avancer
MERCURE
fur le Crinchon. Noftre
Droite eft à Biaché, noftre
Gauche à Montencourt
& nôtre Centre à Fampon
fur la Scarpe . Mr le
Marechal eft logé au
Prieuré , & fon Etat Major
Dau Fauxbourg d'Arras,
kuid
Les Lettres d'Holande
portent que l'Electeur de .
Brandebourg étoit arrivé
à la Haye le 6. Juin pour
folliciter les Etats Generaux
de terminer le diferent
qu'il a avec le Prince
de Nallaw Stathouder de
IV. PARTIE 39
Frife & de Groningue
concernant la fucceffion
dů Feu Prince d'Orange
Ce Prince , par fon Teftament
avoit inftitué le
Prince de Naffau fon Le-
Son
Che
gataire univerfel
Alteffe Electorale prétend
qu'il ne la pas pu ou dû
faire à fon préjudice comme
étant fon plus proche
parent en cette qualité
Elle s'eft mife en poffef
fion de tous les biens fi
tucz hors des Provinces
Unies. Le Prince de Naf
fau , à la prière des Hol
40 MERCURE
landois a nommé des
Commiffaires pour trayailler
avec Mr Hymmen
Commiffaire
de fon Al
telle Electorale aux
moyens de finir cette af
faire à l'amiable.
MORTS.
Mr le Marquis de Langeron
Lieutenant General
des Armées Navales
& Lieutenant de Roy en
baffe Bretagne , & Com- .
mandeur de l'Ordre de S.
Louis mourut le 28. du
mois
IV. PARTIE .
41
mois dernier d'une apoplexie
qui luy prit
Sceaux âgé de 6r. an .
Il y avaits 45. ans qu'il
eftoit au fervice du Roy's
fa premiere Campagne
fut au Siege de Candie ,
il s'eſt trouvé à dix fept
batailles navalles fans
compter les combats
particuliers où il con
mandoit de petites Efcadres
detachées il a déffendu
les Coftes de Bre
tagne , & a empeché la
defcente des Ennemis
Mr. l'Amiral luy a rendu
Fuin 1711. 4 D
F
com42
MERGURE
la in
juftice
de
croire
& de
dire
qu'il
avoit
fort
confi
tribué
au gain
de la¹
der niere
bataille
navalle
ou
il comandoit
l'arriere
gar
de. Le
Siége
de
Toulon
eft
trop
recent
pour
qu'il foit
neceffaire
d'en
par
ler
, l'Hiftoire
qui
en
a efté
imprimée
peut
four nir
de
memoire
de
cette
I
definiere
action
.
Entr'autres
qualités
pour
la Marine
il s'eftoit
diftin
gué dans
la conftruction
des Vaiffeaux
où ilexcelloit
. On ne dit rien de fa
IV PARTIE. 43
Maifon , elle eft affez donnue
dans le monde par
elle mefme , & par fes al ,&
liances.
Louis d'Harcourt , fils
d'HenryDuc d'Harcourt,
Pair & Maréchal de Fran
ce , Chevalier des Ondres
da Roy & c . mourut
le 30. May âgé de pans 4
& demi
.
Jacques
Malo
gneur de Ser. , la Motte ,
Sei-
Frauville & c. mourut fans
alliance le 31. May âgé de
32. ans. Il avoit efté reçu
Confeiller au Grand Confeil
en 1691,
44 MERCURE
Marie Talon veuve
de Daniel Voisin , Seigneur
du Pleffis du Bois,
Iverny , & c . Confeiller
d'Eftat ordinaire , mourut
le 31. May âgée de 81.
an. Elle laiffe une fille
unique qui eft veuve de
Chreftien François de la
Moignon Prefident på
Mortier. XIOM NOTI
Marie Anne Fontaine
des Montées , feconde
femme d'Eftienne d'Ali
gre Préfident à Mortier
mourut den couche le t
Juin âgée de 31 , an. La
IV. PARTIE. 45
V
fille dont elle étoit acouchée
& qui étoit uni
que, ne luy a furveſcu que
de quelques jours.Vagab
Meffire Jean - Bapti
fte Matthieu Molé de
Champlaftreux, Préfident
à Mortier , mourut d'apo
plexie les de ce mois ,
âgés de trente- fix ans &
trois mois , il eftoit fils de
Meffire Louis Molé auffi
Préfident à Mortier , &
de Dame Loüife Marie
Bérault , arriere petit fils
de Meffire Mattlrien Mo.
lél Garde des Sceaux de
* MERCURE 46
France , & Premier Préfi .
dent du Parlement , & le
Préfident cinquiéme
Mortier de pere en fils.
Heftoit veufde DameMa
rie Nicole de Gorlier de
Drouilly , de laquelle it
laiffe un fils & une fille.
Monfieur le Préfident
de Champlaftreux
beftoit
frere de Mr. Molé Abbe
de faint Riquier , & vde
Mr. le Chevalier Molé
Guidon.de . Gendarmed
rie , & de Dame Marie-
Loüife Molé veuve de
Mr. Talon Marquis
du
IV. PARTIE 47
Boulay Colonel du Regi
ment d'Orleanois. 5
Jean François Gilbert
Chevalier Seigneur de
Villaroy , Confeiller au
Parlement , mourut fans
alliance le 7. Juin âgé de
trente neuf ans, on
Don Antonio Martin
Alvarezade Toledo &
Beaumont , Enriquez , de
Rivera, Fernandez , Man
rique , Duc d'Albe & de
Huefcart , Comte de Le
ring de Salvatierra , &c.
Marquis de Coria , &c.
Conneſtable & Grand
48 MERCURE
Chaficellier de Navarre ,
Sommelier de Corps du
Roy d'Espagne & fon Ambaffadeur
en cette Cour ,
mourutiicy e, 28.1 May
a
dans fa 40 année , eftant
fort regreté à caufe de
fes grandes qualitez per
foncles , & duzele dont
it a donnéīdes preuves fignalées
pour le fervice de
Sa Majefté Catholique .
On en parlera plus amplement
le mois prochain
André Zaluski , Evê
que de Varmie ; Grand
Chancelier de Pologne ,
mourut
IV .
PARTIE . 49
mourut le premier May
17 âgé de 63. ans.
ile St Flemming , Ma
réchal de Camp Général
de l'Electeur de Brande
bourg , mourut à Berlin
lelo. May âgé de 87. ans .
Adam Antoine Grun
deman de Falckenberg
Confeillier d'Etat du feu
Empereur , & cy-devant
fous Maréchal de la Baffe
Autriche , mourut à Vien
ne le 25. May âgé de 87 .
alls.
Le Prince de Naffau
Adamar , Juge de la
Juin 1711 .
4
E
SPY
90 MERCURE
Chambre Imperialle de
Wetzlar , mourut le 27 .
May. Moh snobvadorÁ
Magdelaine Bouteroüe
veuve de Charles le Clere
de Leffeville , Chevalier
Seigneur d'Incourt &c.
Confeiller au Grand Confeil
, mourut le 11. Juin
âgée de 8z . ans.
Catherine le Clere Epoufe
de Nicolas ® Petit
d'Eſtigny , Chevalier de
Leudeville
& Confeiller
au Grand Confeil , mourut
le 14. Juin âgée de 60.
ans.
IV. PARTIE . r
Humbert Guillaume C.
de Precipiano & de Soye ,
Archevêque de Malines ,
Primat des Pays Bas
mourut à Bruxelle le 9.
Juin en fa 85. année. Il
avoit efté Chanoine &
Grand Doyen de Befan-
>
con , Plenipotentiaire
à la
Diete de Ratisbonne, Evêque
de Bruges pendant
fept ans , & Archevêque
de Malines pendant 21.
an .
E ij
32 MERGURE
MARIAGE S
3D gepaald of M not
Le Prince Emanuel de
Naffaw , Prince du S. Em
pire , premier Lieutenant
des Gardes du Corps Wall
lons du Roy d'Espagne
fils du feu Prince Fran
çois Defiré de Naffau
Prince du Saint Empire
Prince Souverain de Sieg
hen , Doyen des Cheva
liers de la Toifon d'or,
Et de N. Comteffe du
Pujet de la Ferre , Com
teffe du St Empire , épou
IV PARTIE. 3
fale 13. May Charlote de
Mailly de Nelle fille de
feu Mr le Marquis de
Nefle , & de Marie Comreffe
de Coligny.
Mr le Marquis de Nef
lb eftoit Maréchal des
Camps & des Armées
du Roy il fut au fiége
de Philifbourg. Les
Maifons de Naffau
de Mailly & de Coligny,
dont ces nouveaux Epoux
defcendent font fi an
ciennes , fi illuftres & fi
connues dans l'Europer
qu'on fe contentera de
E iij
$4 MERCURE
rapporter icy le temps ou
fe forma la branche de
Sieghen - Dillembourg
dont eft ce Prince de Naf
fau. Le Prince Guillaume
le Belgique eft deſcendu
de l'Empereur Adolphe
de Naffau elleu, canoni
quement par le fuffrage
des Electeurs le jour de
la faint Jean Baptifte 1292 .
& a continué juſqués à
Guillaume troifiéme Prince
d'Orange mort en Angleterre
en 1702 , dernier
malle de la premiere
branche de cette Maifon .
IV. PARTIE. ss
Sa mort a fait paffer le
droit d'aifneffe à la bran
che du Prince Emmanuel,
dont nous parlons.
Pour ne laiffer aucun dou
te de cette verité il ne
faut que remarquer que,
le Prince Guillaume né à
Dillembourg le 10. Avril
1489.de fon mariage avec
Julienne fille de Otho
Comte Deftolbourg , cut
Guillaume qui fut le pre
mier Prince d'Orange de
la Maifon de Naffau , &
le Prince Jean de Naffaus
le premier a fait la bran
E iiij
36 MERCURE
che des Princes d'Oran
ge, qui a fini par la mort
du Prince d'Orangeri &
le dernier a fait la bran
che de Naffau Sieghem
Dillemboug dont le Prin
ce Emmanuel defcendit
Le Prince Jean Comre
de Naffau dit le Vieux ,
époufa en premieres nỗ-
ces Elifabeth fille deGeor
ge Landgrave de Leuchtemberg
: enfecondes noces
Cunegonde fille de
Frideric troifiéme Elec
teur Palatin , & en troifié
mes Jeanne fille de Louis
IVI PARTIE. 7
Comte de Virgenſtein ; ddaiffa
en mourant huic
Brinces & onze Princeffes,
le Prinde Jean fon fils ail
né qui fut appellé le
Moux , continua fa pofterité,
il époufa en premie
Tasnôces Magdelaine fille
de Samuel Comte de
Valdeck , & en fecondes
noces Marguerite fille de
Jean Duc de Holltein
Sunderbourg. Il eut pour
fils du premier lit Jean dit
Je Jeune , qui épousa en
1618. Erneftine Princeffe
de Ligne Comteffe d'A58
MERCURE
remberg. De ce mariage
eft venu le Prince Jean
François - Defiré de Nafb
fau pere du Prince Em
manuel dont nous par
lons. shold
Cette
Famille
compte
"onze Ducs de Gueldres.o
Quatre Electeurs Ar
chevefques de Mayence.
Un Evefque de Liege
en 1230. qui fut affaffiné
par Theodoric du Prat &
laiffa foixante & cinq Enfans
pour fucceffeurs.
Un Archeveſque de
Cologne , en 1136. & un
Empereur
.
IV. PARTIE.
Les Maifons de Mailly
& de Coligny dont Ma
dame la Princeffe de Naf
fau eft fille , ne font pas
moins anciennes en no
bleſſe , ni moins relevées
en grandes alliances , depuis
l'an 1000. qu'Anfel
me de Mailly qui fut tué
au fiege de Lille en Flandres
en 1070. jufques à
aujourd'huy que Mr. le
Marquis de Mailly de
Nelle frere de Madame
la Princeffe de Naffau
Commandant la Gendarmerie
de France , fouftient
o MERCURE
avec éclat le nom de Mailly.
Il y avoit desja plu
fieurs alliances des Maip
fons de Mailly & de Colis
gny avec celle de Naffau,
Celles des Princes de Bergues
dont Adrien de Main
ly avoit épousé da fille }
celle de Bourbon , Mars
guerite de Mailly ayane
épousé le Comte de Roye
& de Roucy. Sa fille Eleonor
fut mariée à Louis de
Bourbon premier Prince
de Condé , Charlotte fa
fille époufa Guillaume de
Naſſau , la mere de MarIV.
PARTIE.
guerite deo Mailly eftoit
Loüile de Montmorancy
qui époufa en fecondes
noces Gafpard de Coli
gnya
19Cefare de Beaudean
Comte de Parabere , & de
Pardailhan Baron du Petic
Chafteau lez Rouvans ,
Seigneur de la Rouffeliereen
Poitou , & c . Brigadier
des Armées du Roy ,
fils d'Alexandre de Beaudean
, vivant , Comte de
Pardailhan
, & Marquis
de la Motte S. Heraye , &
de Jeanne Therefe de
&
62 1
MERCURE
Maijand , époufa le huit
de Juin Marie Magdelai
ne de la Vieuville , fille
de René François , Marl
quis de la Vieuville , Che
valier d'honeur de la feue
Reine , Gouverneur &
Lieutenant General pour
le Roy en Poitou & c. Et
de Marie Louiſe de la
Chauffée d'Arrets Dame
d'Atour de Madame la
Ducheffe de Berry , fille
de N.. de la Chauffée Sei
gneur d'Arets en Normandie.
La Naiffance de ces
IV. PARTIE. 63
2
deux nouveaux mariés
eftant affez connuë , je
yous diray feulement que
la Maifon de Beaudean
de Parabere eft une des
anciennes du Pays de Bigorre
, où elle poffedoir
avant l'an 1400. les terres
de Baudéan , de Courſean ,
& de Parabére , & les Baronies
d'Aux , & de Cler
mont en Pordéac.
Jean de Beaudean Comte
de Parabere Marquis
de la Mothe faint Heraye
Lieutenant General des
Armées du Roy & nom64
MERCURE
mé à l'Ordre du faint Ef
prit , & defigné par Bre
ver pour eftre Marefchaf
de France , mourut dans
un âge fort avancé fous
le regne de Louis treize?
Il fut marié avec Loüifel
de Gilliers veuve de Fran
cois de fainte Maure pere
de Charles de fainte Mau
re Duc de Montauzier
Gouverneur de feu Mon
feigneur le Dauphin ; &
il cut de ce Mariage Henry
de Baudean , Comte
de Parabere , Gouverneur
de Poitou , & Comandeur
$
des
IV. PARTIE. 65
des Ordres du Roy , &c.
grand pere du Comte de
Parabere d'aujourd'huy....
Et Charles de Beaudean
Seigneur de Neüilhan , &
Gouverneur de Niort
pere de Suzanne de Beau
dean , & d'Angelique de
Beaudean , mariée au
Comte de Froulay . Suzan
ne de Beaudean Dame
d'Honneur de la feuë Reine
, fut mariée au Duc de
Navailles Maréchal de
France , duquel mariage
font iffus Françoife de
Montault de Benac ma
4 F
Juin 1711 .
* MERCURE

riée à Charles de Lorrai
ne Duc d'Elbeuf duquef
mariage elle a eu feue
Madame la Ducheffe de
Mantouë. N... de Montault
de Benac mariée à
Mr le Marquis de Rotelin
, dont eft venu Mr le
Marquis de Rotelin . N
deMontault de Benac ma
riée à Mr le Marquis de
Pompadour , & de Laurieres
dont eft iffue Ma
dame la Marquife de
Courcillon Dame du Palais
de Me la Dauphine.
Mademoiſelle de la
IV. PARTIE. 67
Vieuville
aujourd'huy
Comteffe de Parabere eft
petite fille de Charles
Duc de la Vieuville Gouverneur
de Poitou , Che
valier d'Honneur de la
Reine Maréchal des
Camps, & Armées du Roy
qui eftoit fils de Charles
Duc de la Vieuville Miniftre
d'Etat , & Sur -Intendant
des Finances , qui
eut pour fille Lucréce
Françoiſe de la Vieuville ,
femme d'Ambroise
François Duc de Bour
nonville , Pere de Ma-
E ij
68 MERCURE
dame la Maréchalle Du
cheffe de Noailles amig
Le Marquis de la Vieuville
d'aujourd'huy a pour
frere Mr le Comte de
Viennecy devant Meftre
de Camp du regimenti di
Roy Cavallerie , & Mr le
Bailly de la Vieuville
Grand Croix de Malthe
Mr le Comte de Vienne
eft marié avec N... Mit
te de Chevriere , fille &
heritiere de Henry Mitte
de Chevriére Comte de
S. Chaumont, dont il a eu
Mr leMarquis de S. Chau
IV. PARTIE.
mont Colonel d'un Regiment
de Dragons.
-La ceremonie du Ma-

riage fut faite par M.l'Abbé
de la Vieuville Grand
Vicaire d'Agen frere de
lab mariée, pel qual ob
Lórs qu'on demanda
au Roy l'agrément de ce
mariage , Sa Majesté y
donna fon approbation
dans des termes qui font
beaucoup d'honneur aux
deux Maiſons des mariés .
& qui marquent qu'il eft
tres fatisfait de la manie
re dont Mr le Comte de
いば
MERCURE
Parabere l'a fervy , il a
toujours efté en Eſpagne
depuis le commencement
de cette Guerre , où il s'eft
diftingué en plufieurs occafions
, & entr'autres à
la bataille d'Almanza im
mediatement aprés las
quelle il fut fait Brigadier
feul par diftinction.
BENEFICES.
Le 23. May , veille de
la Pentecôte , le Roy donna
l'Abbaye de Sully a
Mr l'Abbé du Van Grand
IV.
PARTIE. 71
Vicaire de Tours .
en Celle de S. Ruf chef
d'Ordre , au Pere Rolin
Religieux dumême Ordre.
Saint Ruf Abbaye de
Valence en Dauphiné
, &
chef d'Ordre des Chanoines
reguliers de Saint
Auguftin , à Amalde , Odilon
, Ponce & Durand ,
.Prêtres de l'Egliſe d'Avignon
, qui obtinrent vers
l'an 1039. de Benoift leur
Evêque , les Eglifes de S.
Juft & de S. Rub , ou Roux
dans fon Dioceſe prés dela
Durance , de là leur Com172
MERCURE
!
munauté prit le nom de
S. Ruf. Depuis , ces Relt
gieux vinrent s'établir
prés de Valence dans l'iffer
Efparviere , où l'Abbé
Raimond avoit fait bâtir!
un fomptueux
Monafte !
reils y ont demeuré
jufqu'en 1562. que la fureur
des guerres Civiles a renversé
cet ouvrage . Is.
avoient un Prieuré dans
l'enceinte
des murailles
de la Ville de Valence
on en a fait le chef d'Or
dre aprés cette revolution
.
L'Abbé General sly eft
établi ,
IV.
PARTIE. 73
établi , & y a porté les
droits de l'autorité & de
la dignité du Monaftere
de l'ifle Expaviere , aveċ
le
confentement du Roy
Henry le Grand en 1660.
39. ou 40. Abbés Generaux
ont gouverné juf
qu'à nos jours cet ordre , il
a donné III. Papes à l'Egli
fe , Anaſtaffe IV. Adrien
IV. & Jules IL Il en eft
auffi forti trois Cardinaux
, Guillaume de Vergy
, Amidée d'Albert , &
Angelius où Angelique
de Grimoard de Grifac
Fuin 1711. 4 G
74 MERGURE
fondateur du College de
S. Ruf de Montpellier.
Celle de S. Sauveur de
Beaucaire , à Me de la
Fare , Religieufe de la
même Abbaye.
Sa Majesté avoir donné
auparavant celle de
S. Waft de Moreüil , Ordre
de S. Benoist , au Pere
de Heuffy Religieux
du même Ordre .
Beatrix de Lorraine
foeur de Madame la Princeffe
d'Epinoi , fille de
François Marie de Lor
Laine, Prince de l'illebon
IV. PARTIE . 75
$

ne , & d'Anne de Lorrai
ne fccur de Mr le Prince
de Vaudemont aefté
unaniment nommée Abbeffe
de Remiremont , &
de l'agrément de S. AR
Monfieur le Duc de Lorraine.
.
Cette Abbaye , qui eftoit
autrefois de l'Ordre de
S. Benoift fut fondée l'an
620. par S. Romeric. Elle
eft composée aujourd'huy
de Chanoineffes qui font
obligées de faire preuve
de quatre races deNoblef
fe , mais qui peuvent fe
Gij
76 MERCURE
marier, excepté l'Abbelle,
qui fous la Protection des
Ducs de Lorraine eft Dar
me fpirituelle & temporelle
de la Ville de Re
miremont. Cette Ville
dans l'enceinte de laquel
le eft l'Abbaye , Left fi
tuée ſur la Moſelle au pied
du Mont Vauge à une
lieue de la Franche - Comté.
Le Dimanche feptième
Juin on eut à la Cour & à
la Ville une grande allarme
, fur un accident qui
IV. PARTIE. 77
parut menacer d'une maladie
dangereufe , Son Al
teffe Sereniffime Mon
feigneur le Duc du Mai.
ne ; mais cette alarme
ceffa le lendemain & la
joye univerſelle qui parut
quand on aprit que cette
maladie n'auroit aucune
fuite , marque l'eftime &
la veneration que tous le
monde a pour ce Prince .
Affemblée du Clergé.
- Le 15. Juin , l'ouvertu
re de l'Affemblée ex-
G iij
MERCURE
traordinaire du Clergé
fe fit avec les même ceremonies
dont on a donné
le détail lorfque la prece
dente Affemblée s'eft teneue,
Voicy la Lifte des
Deputez du premier & du
fecond rang de chaque
Province , Cola lelletorn
Province de Paris.onál
Monfieur le Cardinal
de Noailles , Archevêquer
de Paris.
Province de Vienne .
Mr l'Archevêque de
Vienne.
Mr l'Abbé
Champier .
1
IV. PARTIE. 79
Province de Reims .
Mr l'Archevêque
de
Reims,
Mr l'Abbé deBufanval.
Province de Bordeaux.
Mr l'Archevêque
de
Bordeaux.
by.
Mr l'Abbé de Lucinge,
Province d'Alby.
Mr l'Archevêque d'Al-
Mr l'Abbé Crouzer.
Province de Toulouſe.
Mr l'Evêque deLavaur.
Mr l'Abbé de Grandmont
de Lanta.JAMA
G iij
So MERCURE
Province d'Aix.
Mr l'Evêque de Riez.
Mr l'Abbé de Valbelle.
Province d'Embrun.
Mr l'Evêque de Vence.
Mr l'Abbé Viala.
Province de Tours.
Mr l'Evefque de Leon.
Mr l'Abbé de Treffan.
Province de Narbonne.
Mr l'Evefque d'Agde.
Mr l'Abbé Trudene.
Province de Sens.
Mr l'Evefque d'Auxerre.
Mr l'Abbé de Vilnich.
IV. PARTIE.
ges
Province de Bourges.
Mr l'Evefque de Limo-
Mr l'Abbé Broffard.
Province d'Auch.
Mr l'Evefque de Conferans.
Mr l'Abbé le Mazuyer.
Province de Rouen.
Mr l'Evefque de Seez.
Mr l'Abbé de Bouville.
Province de Lyon."
Mr l'Evefque d'Autun .
Mr. l'Abbé de Chemé.
Province d' Arles.
Mr l'Archevefque d'Arles.
82 MERGURE
Mr l'Abbé de S. Andiol
Prefident
Monfieur le Cardinal de
Noailles.
Promoteur.
Mr l'Abbé de Broglie.
Secretaire.
Mr l'Abbé du Cambout.
Le 17. Mrs les Deputez
allerent faluer le Roy à
Marly. Ils furent conduits
par Mr des Granges Maiftre
des Ceremonies , &
prefentez par MrJe Comte
de Pontchartraifi Secretaire
d'Erat. MrAle Cardinal
de Noailles porta
IV. PARTIE 83
la parole ; Voicy un Extrait
du Difcours que Son
Eminence fit à Sa Majeſté
à Mr le Dauphin & à Me
la Dauphine.
AU ROY.
SIRE ,
Le Clergé de voſtre
Royaume ne fe laffera jamais
, de vous obeir , de
vous fervir & .. C'est rendre
à Cefar ce qui eft à Cefar ,
entrer dans les deffeins de
de vous aider à fon
&
Dieu
que de
tenir
une
guerre
dont
il n'a pas
14 MERGURE
voulu encore lafin ... Quand
V. M. a fait voir qu'elle
defiroit la procurer à quel
que prix que ce fuſt... Ce
deluge queforment les torrents
d'iniquité qui inonde toute la
terre , eft encore trop violent
pourpermettre à la colombe de
fortirde l'Arche , & de porter
aux hommes le rameau d'Olivier....
Mais en differant
la paix Dieu a voulu recompenfer
voftre foumiffion
à fes ordres , & pour
juſtifier voſtre conduite, &
pour juftifier mefme la
fienne , s'il eft permis de
IV. PARTIE. &
parler ainfi il reprend de
nouveau & avec plus de
force la defenfe de fa cau
fe que vous foutenez………,
Une efpece de miracle , a
relevé le Trofne de vostre pe
tit fils , & le rétablit non fur
lefable , maisfur lapiere ferme
qui foutient le Trofne des
rois , c'eft le zele & lafidélité
des Sujets.
Une protection de Dieu
fi vifible eft acordée nonfeulement
au genereux
&
pieux Roy voftre petit fils,
mais encore à la foy de V.
M.àfon zele conftant con
86 MERCURE
Tre les erreurs.... A fon
egalité parfaite à fa refignation
dans les pertes
les plus fenfibles.Et à tant
dautres vertus qui vous
attireront de plus en plus
cette protection que nous
demandons tous les jours
pour vous.
Nous joindrons à nos
veux tous les fecours & c.
Eglife ne veut fe referver
de biens temporels que pour
fournir au culte de Dieu ....
Et au foulagement des pauvres
; c'est les foulager que
les defendre des violences de
IV . PARTIE. 87
vos ennemis ... & c'estfoustenir
le vray culte que d'éloigner
d'un Royaume Gatholique
les berefies des differentes
Nations qui vous attaquent ..
... Plaife à ce grand Dieu ..
de nous rendre bientoft le calme
de vous accorder la
&
confolation de voir vos ſujets
heureux tranquilles , de
vous accorder des jours auffi
longs, auffi glorieux, & auffi
faints que nous le defirons.
88 MERCURE

A MONSEIGNEUR
LE DAUPHIN,
MONSEIGNEUR
Voicy le premier hommage
que le Clergé a l'honneur de
vous rendre enceremonie , mais
ce n'eſt pas le premierque chacun
de nous vous a rendu en
particulier , c ...
Quel bonheur pour
nous , & pour tout le
Royaume
de voir un
Prince né pour le gouverner
un jour , employer la
penetration & l'élevation
de
IV. PARTIE, 89
de fon efprit à fe convain
cre de cette grande verité,
que tant de Princes ignorent
, que le premier devoir
des Souverains eft de faire re
gner Dieu dans leurs Eftats ,
& c.
Que ne doit- on pas at
tendre de cet efprit de jufice
, de cet amour pour la
regle , ... de cette cha
rité ardente qui vous rend
fi fenfible à la mifere des
pauvres 3 & ... Enfin , de
offre attachementpour le Roy,
qui trouve ch vous un fils
aufli fqumis , auffi rendrë
Juin 1711. 4
H
. MERCURE
& auffi occupé du defir de
luy plaire que l'eftoit celuy
qu'il a perdu , & c
A MADAME
LA DAUPHINE
.
MADAME
on sites
Nous vous rendons au
jourd'huy pour la premiere
fois , nos tres humbles
hommages & avec un
fenfible plaifir quoyque
ce foit un fujet de douleur
qui nous le procure. No
ſtre caractere ne nous permet
1
IV.
PARTIE, 91
pas de louer en vous ce que
tout le monde y admire ....
Nous ne louerons que vostre
foy , c....la droiture de
vos intentions , la delicateffe,
la folidité de votre esprit ,
la bonté de vostre coeur , voftre
union avec unaugufte Epoux
&le foin que vous avez conjointement
avec luy de prolonheureusement
les jours de
Sa Majesté en luy faifant
trouver dans fa Famille toute
la douceur qui eft deuë à un fi
bon pere , & à un maiſtre ſi .
respectable.
ger
12 MERCURE
Le 18. Juin on fit dans
l'Eglife de l'Abbaye Royale
de Saint- Denis le Service
folemnel pour le repos
de l'Ame de feu Monſeigneur
le Dauphin. Onna
as pu encore me donner
détail de certe ceremonie
, ce fera pour le mois
prochain.
019
DE
LYON
1893

CICCIOPAY CIOC
TABLE
I. PARTI E.
LITTERAT URE.
PArallele burlesqued'Home
re & de Rabelais.
Calcul aftronomique.
Les Fourmis.
41
49.
Extrait furl'Allemagne. 123
II. PARTIE
AMUSEMENTS
Hiftoriette.
Enigmes
Questions , confeils , &c.
16
73
III. PARTIE
PIECES FUGITIVES.
Ode contre l'Esprit
I
Epiftre en Vers. 13
Malbeurs de l'homme 31
34
35
4.0
Epigramme.
Placet à Mr. ..
Suite de la Bulle d'Or.
* IV . PARTIE.
13000 1
NOUVELLESA

Nouvelles du Nord. I I
Nouvelles de Flandre.
Nouvelles d'Epargne.
Suite des Nouv. du Nord.
Suite des N. d'Espagne.
8
14
30
33
Suite des N. de Flandre.
36
Morts.
40
Mariager
Benefices 70%
Maladie de M. le Duc du
Maine.
Affemblée du Clergé.
Harangues du Clergé
Service pour Monfeigneur.
76
77
83
92
APPROBATIO
"Ay
lâu
LYON.
par ordre de
Monfeigneur
le Chançelier
le MercureGalant des
mois de May & de Juin .
A Paris ce 28. Juin 1711.
CAPON.
? ། \
et moy aussy
je lay

tu
aussy
bien
que
monsieu
Capon
, avec cette difference
quil men
men coute
te cing sols pour
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le