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1710, 11 (2)
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MERCURE
GALANT
LYON
#
1893*
UNI
WIN
NIN
A PARIS ,
M. DCCX.
Avec Privilege du Roy.
MERCURE
GALANT
.
Par le Sieur Du F ***
Mois
de Novembre
1710.
Le prix eft 30. fols relié en veau ,
25. fols , brochez.
A PARIS ,
&
Chez DANIEL JOLLET , au Livre
Royal, au bout du Pont S. Michel
du côté du Palais.
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis,
fur le Quay des Auguftins.
GILLES LAMESLE ,à l'entrée de la rue
du Foin , du côté de la ruë
Saint Jacques.
MERCURE
GALANTU
EPITRE
aux Anonimes.
LYON
1893
DE
'AY receu les voftres
Ja
VILLE
fur mes premiers Mercures
, c'eft-à- dire plus
de fix cents Lettres depuis
trois mois. Quand
j'aurois le loifir de ré-
A ij .
4 MERCURE
pondre à toutes , la plûpart
font Anonimes ; à
qui pourrois - je adreffer
les miennes ? J'adreffe celle-
cy à Mercure , qui la
fera tenir à tous ceux
qui voudront me faire
l'honneur de la fire , je
voudrois y pouvoir mettre
des compliments pour
ceux qui m'ont complimenté
, de l'abondance
de coeur pour ceux qui
m'ont parlé fincerement, "
de
l'affection pour ceux
GALANT.
qui m'afectionnent ; j'embraffe
ceux qui m'embraffent
, j'honore ceux
que je n'ofe embraſſer
& j'ay pour tous ceux
qui m'ont écrit , cette efpece
de veneration qu'on
doit à ceux qui portent
la parole pour le public ;
mais je dois un profond
refpect au merite d'une
Anonime d'un haut rang
qui a daigné s'amuſer à
répondre , incognito , à
une de mes queſtions, je
A iij
6 MERCURE
dois ignorer reſpectueufement
l'honneur
que
de
telles attentions font à
mon Mercure , c'eft ce
qui me determine
à mettre
dans la fuite à la fin
de chaque volume , un
article de réponſes qué
j'appelleray , Réponses
aux Anonimes.
Je joüiray par là du privilege
que donne le mafque
dans les bals , où les
particuliers familiariſent
avec les Princes, je maf
GALANT. 7
queray mes réponſes
quand elles ne devront
eltre entendues que de
ceux qui m'auront écrit.
Et j'entretiendray ainfi
difcretement
un commerce
de Lettres avec
le public dont je fuis le
tres- humble , tres- obéif
fant ferviteur , Mercure.
Pour établir ce commerce
de Lettres fi avantageux
pour moy, voicy
la forme que je donne
ay à mes réponſes ; je
10 MERCURE
mettray à la tefte de chaque
petit article les noms
fuppofez
qu'ou aura pris
au bas des Lettres Anonimes
, chacun s'y reconnoiſtra
par là & par l'endroit
de fa Lettre auquel
je répondray.
RE' PONSE
à l'Amant Poëte.
Je vous envoje ( me
dit l'Amant Poëte ) un
portrait en vers de laplus
belle perfonne de Paris ;
je crois les vers bons
4
GALANT
mais j'enfuis l'autheur
je crois qu'une fi belle
peintureferaplaifir, mais
je fuis amant , &c.
REPONSE.
Les Autheurs mêmes
trouveront Vos vers
bons , mais à moins que
d'eftre amant on trouvera
le portrait de cette
beauté un peu trop étendu.
Donnez- vous le plai
fir de retravailler encore
un ouvrage qui vous occupe
fi agreablement , &
TO MERCURE
C
vôtre portrait plaira comme
ceux des grands Peintres
à ceux mêmes qui
n'en connoiffent point
la reffemblance.
REPONSE
à l'Inconnu
de Lyon.
que
L'Inconnu ..... Si vous
vousfervez des Memoires
je vous ay envoyezfur le pracés
de la petite fille àdeux meres;
ilfaut paffer difcretement l'exemple
de Pater eft queni
nuptiæ demonftrant.
Réponse . Vous verrez dans
GALANT. IT
ce Volume- cy voſtre avanture
des deux mercs ; mais
j'ay évité la circonſtance de
& c...je perdrois cent bons
mots pour éviter une indif
cretion , & de plus , l'exemple
ne conclut point. Car à
l'égard de l'enfant à deux
peres , la Loy decide Pater eft
quem nuptiæ demonftrant....
mais elle ne dit point que
Mater eft quam matrona demonftrat.
Voyez la page 202 .
Quelques - unes de ces réponſes
pourront eftre obfcures
ou indifferentes à ceux
qui n'en auront pas la clef ;
12 MERCURE
mais je les prie de me paffer
cet Article en faveur de ceux
qui travaillent pour le public
en m'envoyant
des
Memoires.
La varieté des ſujets , des
caracteres , des ftiles , des arrangemens
, fait quelquefois
l'agrément d'un Livre , mais
il cft impoffible que ce qui
fait plaifir à l'un, n'ennuye &
ne déplaiſe à pluſieurs autres.
Je feray trop heureux
fi chacun peut trouver icy
quelqu'endroit qui le dédommage
de s'eftre ennuyé
dans tout le refte du Livre,
GALANT. 13
ACADEMIE
Royale des Sciences.
Le Mécredy 12.Novem
bre Meffieurs de l'Academic
Royale desSciences tinrent
leur Affemblée publique
, ainfi qu'ils ont coutume
de faire tous les ans ,
aprés la Saint Martin .
Mr Caffini fit l'ouverture
de l'Affemblée par la lecture
d'un Difcours fur le
flux & le reflux de la Mer.
Aprés Mr Caffini , Mr
de Reaumur en lut un furla
B
* 4 MERCURE
nouvelle découverte de la
foye des Araignées.
Mr Mery en lut enfuite
un fur les Moules des Rivieres
& des Etangs .
1
Et Mr Hombert finit
l'Affemblée par unDifcours
fur les Vegetations Metalliques.
Vous allez voir icy l'Extrait
d'un de ces Difcours,
en attendant les autres que
j'efpere vous donner dans
les mois prochains.
Pour mettre le Public au
fait du Difcours de Mr de
Reaumur , il eft neceffaire
GALANT . 15
1
de luy donner une idée de
la Differtation que Mr Bon
a fait fur les Araignées,
EXTRAIT
de la differtationfur l'u
tilitéde lafoye des Araignées
parMr Bon,
Affocié Honoraire de
la Societe Royale des
Sciences , & Premier
Prefident enfurvivance
de la Cour des Com
30
ptes de Montpellier.
On fera
furpris d'ap-
Bij
MERCURE
3
prendre que les Araignées
fone une foye auffi belle ;
auffi forte , & auffi luftréc
que la foye ordinaire. La
prévention où l'on eft con
tre un Infecte auffi commun
que meprifé , eſt cauſe que
le Public a ignoré jufqu'icy
toute l'utilité qu'on pouvoir
en tirer ; & comment l'auroit-
il feulement foupçonné.
Celle de la foye fi
confiderable, a demeuré inconnue
& negligée longtemps
aprés la découverte.
Ce fut dans l'Ile de Cos que
Pamphilia, fille de Platis , trouGALANDI
NZ
va la premiere l'invention
de la mettre en oeuvre ; cette
découverte fut bientoft
connue chez les Romains .
On leur aporta de la foye
du Pays des Seres, où les vers
qui la font croiffent natu
rellement . Bien loin de pro
fiter d'une nouveauté fi utile
ils ne purent jamais le perfuader
que ces vers produi
fiffent des fils auffi beaux &
auffi pretieux , & tirerent fur
cela mille conjectures chimeriques.
Leur ignorance
jointe à leur pareffe , rendit
pendant plufieurs ficcles la
Biij
18 MERCURE
+
foye d'une rareté & d'une
chereté fi extraordinaire ,
qu'on la vendoit au poids.
de l'or. Vopifcus affure que
l'Empereur Aurelien refu
fa par cette raifon à l'Im
peratrice fa femme, un habit
de foye qu'elle lui demandoit
avec beaucoup
d'empreffement. Cette rareté
dura fort long- temps ,
& nous devons la maniere
d'élever les vers à foye à
des Moines qui en aporterent
des oeufs en Grece fous le
Regne de l'Empereur Juftinien.
Nous l'apprenons de
GALANTM
+
Godefroy dans fes Notes
fur la Loy premiere au Code
Livre quatriéme. Qua res
venire non poffunt , & la Loy
Emptori 37. d'Ulpien paragraphe
premier au 21. Livre
du Digefte , affure que lc
prix de la foye eftoit égal
à celui des Perles.
La France n'a profité que
bien tard de cette décou
sverte , puifqu'Henry
II.
porta aux Noces de fa fille
& de fa four , les premiers
bas de foye qu'on cut veu
dans le Royaume. C'eſt à
fes foins & à ceux de fes
20. MERCURE
Succeffeurs que nous devons
l'établiffement des Manu-
2
factures de Tours & der
Lyon , qui ont rendu les
Etoffes de foye fi communes.
& c.
Enfuite Mr Bon fait ob.
ferver,que les moindres découvertes
avoient fouvent
donné lieu à des établiffements
confiderables , par
exemple, dit-il.
L'ingenieufe fable d'Arachné
, ne fait elle pas bien
voir que c'eſt aux Araignéesà
qui l'on doit les premieres
idées d'ourdir les toiles,
GALANT 21
& de tendre des Filets aux
animaux ; ainſi l'utilité confrante
que j'affure qu'on en
peut tirer , les fera fans dou
te regarder dans la fuite
comme les Vers à foye &
les Abeilles , qui font de
Lous les Infectes les plus ne
ceffaires & les plus admirables
dans leurs ouvrages.....
Mr Bon fait enfuite plu
fieurs Obfervations fur les
differentes efpeces d'Araignées
, & dit qu'on les diftingue
par le nombre & par
l'arangement de leurs yeux ,
les unes en ayant fix , les au12
MERGURE
tres hurt , les autres dix ,
rangez differemment fur le
fommet de la tefte ; & qu'on
voit ces yeux fans aucun fecours;
mais beaucoup mieux
avce celui de la Loupe ........
En parlant des Mainellons
de ces Infectes , il fait obferver
une Mechanique fort
Singuliere dont les Araignées
fe fervent lorfqu'elles veulent
paffer d'un lieu à un au
rre. Elles fe pendent perpendiculairement
à un fil ; tournant
enſuite la teſte du côté
du vent , elles en lancent
pluſicurs de leurs Anus , qui
GALANT. 22
co
partent comme des traits
& fi par hazard le vent qui
les allonge les cole contre
quelque corps folide ,
qu'elles fentent par la refiftance
qu'elles trouvent en
les tirant de temps en temps
avec leurs pattes , elles fe fervent
de
cette
pour aller à l'endroit où ces
fils fe trouvent attachez
mais fi ces fils ne rencontrent
rien à quoy ils puiffent
fe prendre , elles.continuent
toûjours à les cacher jufqu'à
ce que leur grande lon
gueur , & la force avec la
espece de pont
14 MERCURE
quelle le vent les pouffe &
les agite , furmontant l'é
quilibre de leurs corps , elles
fe fentent fortement tirer.
Alors rompant le premier
fil qui les tenoit fufpendues,
elles fe laiffent emporter au
gré du vent , & voltigent
fur le dos,les pattes étendues;
c'eft de ces deux manieres
qu'elles traverfent les che
mins , les rues & les plus -
grandes Rivieres , &c…………….
Il s'étend enfuite fur la
qualité des foyes & fur la
maniere de les fabriquer ; il
conclud
GALANT. 25
conclud
que les
Araignées
fourniffent beaucoup plus
que les Vers à foye ; marque
toutes les experiences qu'il
a faites,tant pour leur nourriture
, que pour l'oeconomic
du fruit qu'on en pourra
tirer.
Il a joint à cela l'execu
tion;il a envoyé des mitaines
& des bas à l'Academie
Royale des Sciences qui les
vit avec plaifir. Comme elle
cherche d'abord dans les
nouvelles découvertes ce
qui peut contribuer à l'utilité
publique , elle chargea
C
26 MERCURE
Mr de Reaumur de faire les
Obfervations là - deffus, non
pas fur la poffibilité de l'établiffement
; Mr Bon l'avoit
demontré d'une manicre
auffi certaine que curieufe
; mais pour examiner fi
les frais des Manufactures .
n'emporteroient pas le profit
qu'on en tireroit en un
mot pour compenfer & pefer
en toutes chofes fi l'on
devoit préferer lesAraignées
aux Vers à foye.
Mr de Reaumur, aprés avoir
donné à Mr Bon tous
les éloges que les vrais SçaGALANT.
27
vants fe devroient toûjours,
donner les uns aux autres ,
continua le difcours dont
je vais vous donner un Excrait
.
10
EXTRAIT
du difcours de Mr de
Reaumur.
Il convint d'abord avec
Mr Bon , que la nourriture
la plus ordinaire des Arai
gnées , c'eft la Mouche
mais il fit remarquer que
quand on pourroit prendre
facilement toutes les Mou-
Cij
18 MERCURE
ches qu'on voit , il y en au
roit à peine affez dans tout
le Royaume pour nourrir
affez d'Araignées pour faire
une quantité de foye un peu
confiderable.
Ayant enfuite obfervé
que les Araignées mangent
également les autres Infectes
qui s'embaraffent dans
leurs toiles.
Il ne s'agit plus , dit - il , que
de trouver une efpece d'Infecte,
dont on pût avoir.com
modement autant qu'on
voudroit. Les feuls vers de
terre me parurent avoir cet
GALANT. 29
avantage; il y en a des quantitez
prodigieufes ; les Jardins
, les Champs en font
remplis:il n'y a perfonne qui
n'ait remarqué qu'aprés des
nuits pluvieufes , les Allées
des Jardins font couvertes
de divers petitsmonceaux de
terre de figure ronde , &
tournez en fpirales. Ils cachent
autant de trous par
lefquels font fortis les vers
de terre pendant la nuit. Il
n'eft aufli rien de plus facile
que d'avoir de ces infectes,
pourvû qu'on aille les chercher
pendant la nuit avec
Ciij
30 MERCURE
1
une chandelle , obfervant
feulement d'y aller dans des
temps qui n'ont pas efté
precedez d'une longue fé
chereffe . A la verité je n'avois
jamais trouvé de vers
de terre dans les toiles , ni
dans les trous d'Araignées
,
mais ces infectes rampant
fur la terre , & ayant affez
de force & de pefanteur
il cftoit également impoffible
qu'ils fe fuffent jettez
dans ces filets & dans ces
trous , & que les Araignées
lès y cuffent tranfportez .
Il me parut qu'il n'y avoit
GALANT. 3r
point de nourriture dont
je duffe me promettre davantage.
Le fuccés ne trompa
pas mon attente . Ayant
donc renfermé dans des
boetes plufieurs groffes Araignées
de diverfes efpeces
qui avoient paffé l'Hyver
car il y en a qui vivent
je leur
plufieurs années
donnay des morceaux de
Vers , & les confervay
en
vie par ce moyen
.
Il ne m'auroit pas ſuffi
pour me perfuader que cette
nourriture eftoit convenable
aux Araignées , de
C iiij
32 MERCURE
les avoir veu vivre pendant
plufieurs mois aprés la leur
avoir donnée. Une experienque
j'avois faite autrefois
in'auroit laiffé un doute tresbien
fondé . J'avois gardé
une Araignée de maiſon en
vie pendant plus de trois
mois fans lui donner aucune
nourriture. On fçait
d'ailleurs que les petites Araignées
qui éclofent dans
le mois de Septembre vivent
environ huit ou neuf
mois fans manger . Mais
comme j'avois renfermé ces
Araignées dans des boetes
GALANT. 33'
que j'avois couvertes de
verre , j'obſervois aisément
fi elles s'attachoient à la
nourriture que je leur avois
donnée , & je les voyois attaquer
les morceaux de vers
qu'on fçait fe remuer malgré
leur féparation du refte
du corps , comme on les
voit attaquer les Infectes à
qui il reste encore quelque
force aprés s'eftre laiffez
prendre dans leurs filets . Les
divers mouvements de ces
morceaux de vers excitoienr
ces Infectes de proye. Dailleurs
elles confervoient leur
34 MERGURE
groffeur & leur vivacité , ce
qui n'arrivoit point à celles
que je laiffois fans nourriture.
Enfin ce qui eſt plus
deciſif , pluſieurs firent des
coques , dans lesquelles plufieurs
ceufs eftoient renfer
mez.
Je tentay enfuite diverfes
fortes de viandes pour voir
fi elles ne feroient pas également
propres à les nourrir ,
car quelque commodes
que
foient les Vers la viande
l'auroit efté davantage
!!
mais je vis qu'elles ne la recherchoient
point , & que
>
GALANT. 35
for fqu'elles la rencontroient
elles s'apliquoient rarement
deffus , parce que le naturel
feroce des Araignées veut
eſtre excité pas des animaux
vivans.
J'imaginay cependant une
autre nourriture qui fuplée
peut- eftre à cet avantage par
le goût exquis que les Araignées
y trouvent . Les jeunes
Araignées qui ne font que
d'abandonner leur coques le
preferent à toutes autres.
Je ne l'employai qu'à
caufe du raport qu'il me
parut avoir avec la chair
6 MERCURE
tendre & molle des infectes
que les Araignées fuccent
; elle confifte dans cette
fubftance molle qui remplit
les plumes des jeunes oyfeaux
avant qu'elles foient
venues à leur parfait accroiffement
.
On a remarqué fans doute
, que lorsqu'on arrache
de ces jeunes plumes , elles
font fanglantes par le bout
& que le tuyau eft mol . Alors
ceux qui fe feront de plus.
donné la peine de preffer ce
tuyau , ou de le diffequer
l'auront
trouvé remply
GALANT. 37
d'une fubftance tendre , &
garny d'un grand nombre
de petits Vaiffeaux qui laiffent
échaper du fang lorfqu'on
les coupe. Après avoir
árraché de ces plumes à de
jeunes Pigeons ou à des
vieux aufquels j'avois ofté
quelque temps auparavant
les groffes plumes de la
queue & des ailes , je les divifay
en divers petits mor
ceaux d'un ligne ou d'une
demie ligne de longueur
je donnay ces petits mor
ceaux aux Araignées , qui
en accomoderent , les jeu38
MERGURE
nes Araignées fur tout
j'entends celles que j'avois
gardées dans leurs coques ,
& qui les avoient abandon .
nées depuis peu, fembloient
les préferer à toute autre
nourriture .J'en voyois quel
ques fois cinq ou fix aſſem
blées fur un même petit .
morceau de plume que chacune
fucçoit du cofté où il
avoit cfté coupé.
Jufqu'icy tot femble,
aller à merveilles pour les
Araignées ; voicy des nourritures
fimples , dont il femble
qu'il eftoit feulement
GALANT. 3.2.
queftion. Peut eftre en trou
verat on d'autres auffi - commode
, même parmy les
Infectes , pendant qu'on fe
ferviroit de celles là qui ne
font pas plus difficiles à trouver
que les feuilles deMeurier
qu'on donne aux vers , & qui
ont quelque chofe de plus
commode . On peut les avoir
fans aucun foin & dans
tous les Pays , fans craindre
pour elles les plus rudes Hyvers.
Les Rotiffeurs fourtité
de ces jeunes plumes, cù
l'on en auroit de refte en
ent
une
grande
quan40
MERCURE
pas
nourriffant des poulets ou
des pigeons , aufquels on
les arracheroit de temps en
temps , & qui n'en feroient
moins leurs oeufs & leurs
petits , comme je l'ay experimenté
; mais nous allons
voir qu'il y aura beaucoup
à decompter lorfqu'il s'agira
d'élever affez d'Araignées
pour fournir de foye des
Manufactures.
D'abord que les jeunes
Araignées abandonnent la
foye qui les envelopoit
elles paroiffent parfaitement
d'acord ; elles travaillent de
GALANT. 41
1
concert à une même toile ;
les unes étendent de nouveaux
fils fur ceux que les
autres avoient déja fournis;
mais cette parfaite union
ne dure pas long-temps. Je
diftribuay en differentes
boëtes quatre à cinq mille
Araignées , aufquelles j'avois
veu abandonner leurs
coques ; j'en mis deux où
trois cens dans de certaines
boëtes , dans d'autres cent
ou cinquante ou même
moins. Ces boëtes avoient
à peu prés la longueur d'une
carte à jouer , & la largeur
D
"
42 MERCURE
d'une femblable carte ;
c'eftoit un affez grand ef
pace pour de fi petits animaux
; même j'avois obfervé
qu'elles s'attachoient au
verre qui couvroit ces boëres
. Je leur avois fait à chacune
une ouverture à une
ligne de diftance de ce verre,
par laquelle je faifois entrer
une carte qui eftoit appuyée
fur la largeur de la boete ; cette
carte bouchoit affez exactement
l'ouverture pour
empêcher les Araignées de
s'échaper. C'eft fur cette
carteque je mettois la nour
CALANT. 43
riture que j'avois trouvé
leur eftre propre. Je la pofois
ainfi prés de la ſurface
interieure de la boëte ou
du verre , afin que les Araignées
fuffent plus proches
de cette nourriture , & afin
que celles qui eftoient au
fond de la boëte , ou fur
fes coftez , puffent venir la
chercher. J'avois eu la précaution
de lui faire faire un
grand nombre de trous. On
pouvoit par ce moyen donner
à manger à beaucoup
d'Araignées en peu de
temps . On les voyoit les
44 MERCURE
premiers jours chercher cette
nourriture avec empreffe
ment, plufieurs s'attachoient
au même morceau de plume.
:
3 .
Mais leur naturel feroce
fe déclara les plus groffes
& les plus fortes prirent
gouft à manger les
plus petites & les plus foibles
; chaque fois que je les
regardois , j'en voyois une
petite qui eftoit devenuë la
proye d'une un peu plus
groffe , & au bout de quelque
temps àpeine m'en refGALANT.
45
ta til une ou deux dans
chaque
boëte.
Je fçavois bien que les
groffes Araignées ſe battent
quelques fois lorfqu'elles fo
rencontrent ; mais il y avoit
quelque apparence qu'eſtant
élevées enfemble , elles pourroient
venir plus fociables ,
comme nous voyons que les
Poulets , les Dindons élevez
dans une même Baffecourt
vivent fort bien enfemble
, quoi qu'ils faffent .
guerre aux nouveaux venus
jufqu'à les tuer. Les
groffes Araignées même, ſe
la
46 MERCURE
mangent beaucoup moins
les unes les autres que les
petites , foit parce qu'elles
ont bien moins befoin de
ou qu'eftant
nourriture
plus pefantes elles aiment
moins à fe remuer. C'eſt
aparemment que cette inclination
qu'elles ont à fe manger
mutuellement , eft partie
caufe de ce qu'il y a fi
peu d'Araignées
à proportion
de ce qu'il devroit y en
avoir , faifant une quantité
d'oeufs auffi
qu'elles en font.
prodigieufe
Je fçay bien qu'il y a di
GALANT 47
verfes fortes d'infectes qui
les mangent. Pline parle de
quelques efpeces de Frelons
& de Lezards qui s'en nourriffent.
J'ay veu de petits Le
zards en atraper avec beau
coup d'adreffe ; mais malgré
cela je crois que nous en '
verrions incomparablement
davantage fi elles ne fe man
geoient point.
Il ne fembleroit donc ref
ter d'autre party à prendre
fi l'on vouloit élever des Araignées
qu'à les loger fe
parement ; on pouroit par
exemple avoir des boetes
48 MERCURE
divifées en plufieurs petits
compartimens où l'on formeroit
plufieurs Cellules , &
je l'ay fait comme cela ; mais
de donner à manger à chacune
de fes Araignées feparement
cela engageroit à des
dépenfes peu proportion
néesau profit qu'on en pourroit
tirer. On pourroit en venir
là fi nous n'avions la foye
des Vers d'une maniere infiniment
plus commode.
Je fçay qu'on pouroit
trouver des moyens d'abreger
cette maniere de leur
donner à manger , & j'en
ay
GALANT 45
ay même imaginé quelques
uns où l'on employe
roit beaucoup moins de
temps qu'on en mer à donner
la nourriture aux Vers ,
La neceffité où l'on cft
de diftribuer les Araignées
dans des Cellules feparées ,
jette encore dans un nouvel
embarras qui ne diminuë
pas peu l'avantage qu'elles
ont fur les Vers du cofté
de leur fecondité , car pour
profiter de cet avantage ,
faur pouvoir garder un
grand nombre d'oeufs qui
ayent efté fecondez par l'ac
E
il
so MERCURE
couplement , & pour cela
il faut mettre neceffaire,
ment des Araignées enfemble.
Je fçay bien qu'il eft un
temps oùil fe doit faire chez
ces Infectes une douce fermentation
qui leur ofte leur
ferocité naturelle , & qu'on
pourroit alors les mettre enfemble
fans aucun rifque ;
mais comment connoiftre
préciſement ce temps qui
doir préceder de peu celui
où elles ont envie de faire
leurs oeufs . Il feroit aifé à
trouver fi elles les faifoient
peu prés dans le toutes à
GALANT SI
même temps. Mais il y a
plufieurs mois de difference
entre le temps que les unes
pondent , de celui où les autres
pondent à leur tour .
La fecondité des Araignées
eft prodigieufe , comme
Mr Bon l'a parfaitement
obfervé ; mais aprés tout les
Vers font feconds de refte
quand on fuppoferoit qu'ils
ne font qu'environ cent
ceufs , defquels à peine qua
rante donnent des vers qui
faffent leurs coques , au lieu
que les Araignées font 6.
à 700. oeufs , quoy que j'aye
Eij
32 MERCURE
remarqué dans tous les Vers
que j'ay élevez de faire une
exacte comparaifon de leur
foye avec celle des Araignées,
ayent toûjours donné
au moins 3. à 400. oeufs . Il
cft aifé de voir qu'on peut
multiplier le nombre des
Vers autant qu'on le voudra ,
cela dépendoit feulement
de la quantité de leurs oeufs ,
il n'en faut d'autre preuve
que la quantité de foye qu'ils
fourniffent aujourd'huy à
l'Europe , où il n'y avoit
autre fois aucuns Vers . Il
feroit donc aifé avec le
GALANT. $ 3
temps d'avoir des quantitez
de Vers qui furpaff.ffent autant
ce que nous en avons
à prefent , que ce que nous
en avons , furpaffe le petit
nombre d'oeufs qu'on apor
ta d'Orient en Europe ;mais
c'eſt qu'il eft neceffaire de
les loger ,foigner , nourrir,
ce qui fait qu'on n'en éleve
pas davantage , parce qu'en
augmentant la quantité de
la foye, on en diminuëroit le
prix, & les foins qu'on prend
pour élever les Vers ne feroient
plus payez affez cher .
Il femble jufqu'icy que

E iij
$4 MERCURE
les Vers l'emportent beau
coup fur les Araignées par
la facilité qu'on a à les éle
ver, & par confequent qu'on
doit peu fe promettre de la
nouvelle foye , fi elle n'a
quelque avantage fur l'an
cienne
, foit par fa beauté
ou fa force, ou par la quan
tité qu'on en peut tirer ;
c'est ce que nous allons examiner
dans le deuxième article.
apa
Comme toutes les efpeces
tre en oeuvre ,
d'Araignées ne donnent pas
une foye qu'on puiffe met.
& que celles
CALANT 35
·
qui fourniffent cette foye la
filent feulement pour former
les coques qui envelo
pent leurs oeufs , il m'a paru
neceffaire de donner une
idée generale des diverfes
efpeces d'Araignées aufquelles
on peut ramener toutes
les autres , & de la differente
maniere dont les coques de
ces differentes efpeces font
faites , afin de faire connoître
celles dont on peut ti
rer de la foye dans le Royaume.
&c.
Mr de Reaumur dit que
Mr Bon avoit diſtingué les
E
iiij
56 MERCURE
Araignées en deux cipeces
principales, fçavoir les Araignées
à jambes longues , &
les Araignées à jambes courtes
, & que c'eftoit la derniere
qui fourniffoit la nouvelle
foye. Il fit un grand détail
de toutes les efpeces d'Araignées
comptifes dans ces
deux pricipales , & expliqua
celles dont on pourroit tirer
de la foye , & celles qui
n'en donnent point. Il expliqua
auffi la maniere dont
chaque efpece d'Araignées
faifoient leurs coques , &
dit qu'on pourroit avoir des
GALANT 37
foves d Araignees plus diffe
rentes par leur couleur na→
turelle , que ne l'eft celle des
Vers qui eft toûjours aurore
ou blanche , au lieu que les
coques d'Araignées en donneroient
de jaune , de blanche
, de grife , d'un fort
beau bleu celefte , & d'un
beau brun caffe ; mais que
les Araignées qui donnent
la foye couleur de caffé étoient
rares , & qu'il n'en
avoit rencontré que dans
quelques champs de Genets,
où il avoit auffi trouvé de
leurs coques , dont la foic
38 MERCURE
eftont tres -forte & ues - belle;
que ces coques eftoient faites
d'une maniere differente
de toutes les autres coques
d'Araignées dont il avoit
parlé. &c . .
Il dit enfuite , que les Arai
gnées faifoient leurs oeufs ,
ou la faye qui les enveloppe
dans plufieurs mois de l'année
, non feulement dans les
feuls mois d'Aouft & de Septembre,
qui eft le feul temps
que Mr Bon donne pour cela
; mais auffi dans le mois
de May & les fuivants ; que
les Araignées filoient deux
GALANT . 59
fortes de fiis , dont les uns
fervent à ourdir les toilles
qu'elles tendent aux Infectes
, & les autres à enveloper
leurs oeufs , & que ces fils
ne differoient entr'eux que
par le plus ou le moins de
force ; ce qu'il expliqua de
cette maniere.
Je fuppofe qu'on fçait que
les Araignées ont auprés de
leur Anus divers mamellons
quifont autant defilieres dans
lefquelles fe moule la liqueur
qui doit devenir de la foye
lorfqu'elle fe fera féchée
aprés en eftre fortic. Les
20. MERCURE
Araignees dont il s'agit icy;
c'eft à dire celles donti foye
eft propre aux ouvrages
ont fix de ces mamellons ,
dont quatre font tres icnfibles
, mais les deux autres le
font moins , & on ne les
diftingue pas aifément fans
le fecours de la Loupe . Ces
deux petits mamellons font
pofez chacun proche de la
baze des deux gros qui font
les plus prés de l'Anus , Chacun
de ces fix mainellons
fenfibles font compofez
eux mêmes de divers petits
mamellons ou filieres infenGALANT
6
fibles ; c'est dequoy on eſt
aifément perfuadé , fi cependant
on preffe avec deux
des doigts d'une même main
le ventre d'une Araignée
pour obliger la liqueur de
couler de ces mamellons
on appliquera le doigt fur
l'un d'eux , & qu'on le preffe.
doucement on en tire plufieurs
fils diftinctement ſeparez
les uns des autres dés
leur fortie , qui par confequent
avoient paffé par dif
ferents trous . Ces fils font
trop fins pour qu'on puiffe
les compter tous d'une ma
62 MERCURE
niere ſeure ; mais ce que je
fçai de certain ; c'eft que j'en
ay pû fouvent compter
plus de fix à fept . On tire
plus ou moins de ces fils
d'un même mamellon fi
l'on applique le doigt plus
fortement , ou fur une plus
grande partie de ce mamel-
Lon. Anfiil eft aifé à prefent
de comprendre comment
les Araignées font des fils
plus ou moins gros quand
il leur plaift , car non feulement
, lorfqu'avant de commencer
à filer , elles appliquent
contre quelques corps
GALANT. 63
plus ou moins des mamellons
fenfibles de leur Anus ;
mais felon qu'elles appli
quent plus fortement , ou
une plus grande partie , de
chacun de ces mamellons ,
elles font des fils compofez
d'un plus grand nombre
d'autres fils & par confequents
plus forts & plus
gros.
Il doit y avoir environ
dix- huit fois plus de fils, qui
compofent un des fils des
Coques qu'il n'y en a dans
ceux des Toiles , fi la quantité
des fils qui compoſent
64 MERCURE
les uns & les autres, elt pro
portionnée à leur force , car
ayant collé un poids de deux
grains à un fil de toile , il l'a
ordinairement foûtenu fans .
rompre
, & s'eft ordinairement
rompu
lorfque
j'y en
ay attaché
un de trois
grains , au lieu que les fils
de coque foûtiennent
environ
trente fix grains ; mais
ils fe caffent lorfqu'on
les
charge
d'un plus grand
poids.
Mais fi les fils des co
ques des Araignées font plus
forts que les fils des Toiles ,
GALANT &s.
ils font auffi plus foibles que
ceux des coques de Vers ,
quoy que dans une moindre
proportion . La force des
fils que je devidois de deffus
ces dernieres coques a efté
ordinairement jufqu'à foûtenir
un poids de deux gros
& demi . Ainfi la force d'un
fil de coque d'Araignée eft
à celle d'un fil de coque de
Vers environ comme un
cinq , & c'eſt peut - eftre
encore là un des endroits
par lefquels l'ancienne foye
pourroit avoir quelque a
vantage fur la nouvelle ..
F
66 MERCURE
A la verité chaque fil de
coque d'Araignée cft à peu
prés moins gros qu'un
fil de foye dans la même
proportion qu'il cft plus
foible ; mais cela ne compenſe
pas entierement ce
defavantage , car il eft plus
difficile de joindre enſemble
plufieurs brins , car fans
compter que c'est une peine
de plus , il est toujours à
craindre que les fils ne tirent
pas tous également , & par
conféquent que leur affem.
blage n'air pas la fomme
des forces que chaque fil au
GALAND 67
roit feparément . Cette multiplicité
de brins qui compolent
chaque filode foye
Araignée pour le faireauffi
gros qu'un fil de foye de
Vers , contribue peut -être
en partie à rendre les ouvra
ges faits de cette foye moins
luftrez que ceux de la foye de
Vers ,car leur luftre eft effectivement
moins beau , com
me un fçavant Academicien
le remarqua lorfque les Mitaines
furent apportées à
l'Academie
; ce qu'on appelle
luftre dans une étoffe ne
nic paroiffant proven ir
Fij
68 MERGURE
que de ce qu'elle refléchit
plus de lumiere colorée d'une
certaine façon qu'une
autro étoffe qui paroift de
même couleur . Plus un brin
de foye auta donc de petits
vuides qu'un autre brin de
foye , moins il paroîtra luf
tré , car il refléchira moins
de lumiere. Or ces petits vuides
feront évidemment
en
plus grand nombre dans un
fil compofé luy - même de
plufieurs fils differens & réellement
féparez
, que dans
a celuy qui reftant de même
groffeur n'eft point compoGALANT
6
fé de differens brins ,les par
tics de la liqueur vifqueufe
quide compofenteſtant
fans doute appliquées plus
aifément les unes proche
> des autres devant ſe toucher
en plus d'endroits que divers
fils réellement réparez .
Ainfi en fuppofant que chaque
fil de foye d'Araignée
n'eft pas plus luftré naturelelement
qu'un fil de foye de
Vers , il eft clair que lors
qu'on aura joint cinq de ces
fils pour en compofer un austre
de même groffeur que
left le fil de Vers naturelle
7070
MERCURE
ment , que ce fil compofé &
l'ouvrage qu'on en formera
paroiftront moins luftrez
que le fil de foye de Vers ,
& l'ouvrage qui en fera
formé.
Cecy feroit vray en
fupofant , comme je viens
de le dire, que le fil fimple
d'Araignée eft naturellement
auffi luftré qu'un fil
fimple de foye ; mais cette
Lupofition même feroit
peut - etre trop favorable
à la foye d'Araignée , car
on peut remarquer que les
fils les plus crefpez ont
GALANT . 74
moins de luftre que ceux
qui le font moins. Auff
voyons nous que la laine ,
dont chaque brin eft natu
rellement plus crefpé qu'un
brin de foye , eft auffi
moins luftrée , fi chaque
brin de foye d'Araignée
eft naturellement plus crê→
pé qu'un brin de foye de
Vers , il doit donc auffi
avoir moins de luftre , &
c'eſt ce qui eft cres- aifé à
obferver. Il n'eft gueres.
plus dificile de trouver la
raifon pour laquelle ces
fils font plus crefpez que?
72 MERCURE
les autres. La maniere dont
ils font devidez les uns & les
autres en eft apparemment
la caufe ; car on conçoit
d'abord qu'en devidanc
des fils d'une maniere lâche
on laiffe la liberté au reffort
de toutes les petites parties
qui les compofent, d'agir de
toutes leurs forces pour
les plier ou les frifer en plu
fieurs fens differents , au
lieu qu'en devidant ces fils
d'une maniere plus ferrée ,
comme font les Vers , on
empêche l'action du reffort
de ces petites parties . Le
reffort
GALANT 7%
reffort luy même s'ufe dans
cette fituation violente
ou du moins il s'affoiblit.
On demeurera plus volon
tiers d'accord de cecy lors
que l'on fera attention que
les premiers fils de coques
des Vers à foye , qui font
eux-mêmes entortillez autour
de la coque d'une maniere
lâche font bien moins
beaux , & moins luftrez , que
ceux qui forment le corps
de la coque , & qui font
devidez d'une maniere tresferrée.
Quand on
s'apperçoit
G
44 MERCURE
qu'il n'y a eu que deux des
mamellons qui ayent fourny
des fils pour en faire un
de toile d'Araignée
& que
chacun de ces mamellons
qui fourniffent eux mêmes
un fil compofé de plufieurs
autres en auroient fourny
un fimple , les fils de toile
eftant dix huit fois plus
foibles qu'un fil de coque ,
ce dernier fil que nous avons
dit cftre environ cinq fois
plus petit qu'un de foye de
Vers , devroic eftre compofé
de trente fix brins au
moins. Peut eftre que cetre
CALANT . 73
reflexion pourra fervir à
foutenir l'imagination lors
qu'elle tâche à comprendre
la prodigieufe diviſibilité dè
la matiere , car qu'elle doit
cftre la petiteffe d'un fil
que les yeux pourtant aperçoivent
& qui n'eſt pas plus
gros que la cent quatrevingriéme
partie d'un fil
de foye fimple , lequel fil de
foye fimple n'eft luy même
que la deux centiéme partie
d'un fil de foye telle qu'on
s'en fert pour coudré , car
j'ayfouvent divifé ces brins
de foye en deux cent fils oû
Gij
76 MERCURE
à peu pres ; de forte qu'un
brin de foye d'Araignée de
la groffeur d'un brin de
foye dont on fe fert pour
coudre feroit réelement
compofe d'environ trente
fix mil fils , & on pouroit
le divifer actuellement
en
mille.
Mais enfin venons au
dernier point effentiel , c'eſtà-
dire voyons quel raport
a la quantité de foye que
chaque Araignée donne
par an , avec celle qu'on
tire des Vers à foye. J'ay
pefé avec grand foin diver¬
GALANT. 77
fes coques de Vers ; jay
trouvé que les plu les plus fortes ,
c'eſt- à - dire , l'ouvrage d'une
année d'un Vers ,
pefoiene
quatre grains , & que les
plus foibles en péfoient plus
de trois , de forte qu'en prenant
la livre de feize onces
il faut du moins 2 304. Vers ,
pour avoir une livre de foye.
Lorsqu'on porte des habits
de foye , on ne s'avife gueres
de penfer que plufieurs mille
Vers ont travaillé toute
leur vie pour en fournir la
matiere.
J'ay pefé avec le même
G iij
78 MERCURE
foin un grand nombre de
coques d'Araignées , & j'ay
toujours trouvé qu'il en
falloit environ quatre des
plus groffes pour égaler le
poids d'une de Vers , &
donner
qu'elles pefoient chacune
environ un grain , de forte
qu'il faudroit quatre des
plus groffes Araignées pour
aurant de fove
qu'un Vers , s'il n'y avoit
pas plus de déchet fur la
foye des uns que fur cella
des autres , mais le déchet
des coques d'Araignées
,
les diminuë de plus des deux
GALANT 79
tiers , puifque de 13. onces
de foye fale , Mr Bon n'en
a retiré que quatre de foye
Aette , ce qui cauſe ce dé
chet dans les coques d'Araignées
, eft qu'on les peſe
remplies de toutes les coques
des oeufs des petites Araignéesavant
qu'elles fuffenc
éclofes , & de diverfes ordudures
qui fe trouvent mêlées
parmi la foye. Celles des
Vers n'ont point un pareil
décher , ou il eft fi pecit
qu'on pent le compenfer
en prenant feulement le déehet
de la foye des Arais
Giiij
88 MERCURE
gnées aux deux tiers .
Or nous venons de voir
que le poids d'une coque
d'Araignée avant d'eftre
nettoyée eft au poids , d'une
coqué de Vers à foye comme
1. eft à 4. ainfi cftant
néttoyée , fon poids fera au
poids de celle -cy comme 1.
eft à 12. Il faudroit donc
déja 12. des plus groffes
Araignées pour donner autant
de foye qu'un Vers.
Mais chaque Vers fait
une coque , parce que les
leurs pour fe metamorpho
fer, au lieu que les Araignées
GALANT. sr
ne faifant les leurs que
pour envelopper leurs ceufs,
ils n'y a que les Araignées
femelles qui en faffent
d'où il s'enfuit que fi on
fupofe que l'on a autant
d'Araignées femelles que
de maſles , ce qui doit artiver
à peu prés , 24. des
plus groffes Araignées , ne
donneront pas plus de ſove
qu'un feul Vers.
Il faudroit donc environ
´55296 . Araignées des plus
groffes pour avoir une livre
de foye , lefquelles Araiegnées
il auroit cfté neceffaire
31 MERGURE
de nourrir feparement pendant
plufieurs mois , d'où
Fon voit combien il eft à
craindre que la foye qu'on
en retireroit n'engageaft
dans des dépenfes peu proportionnées
à ſa valeur , puis
qu'elle couteroit 24 , fois
autant que celle des Vers ,
fi l'on fuppofoit mefme
qu'on n'eſt pas obligé de
mettre les Araignées fepa
rement , & que chaque
Araignée n'occuperoit pas
plus de place qu'un Vers ,
ce qui feroit auffi une fupo,
fition fauffe , car il faut leur
GALANT. 83
en donner affez à chacune
afin qu'elles puiffent faire
leurs roiles. Mais fi on
vouloit entrer dans le détail
du calcul des frais qu'elles
couteroient eftant obligé de
les nourrir feparement , &
de leur donner des espaces
affez grands pour les loger
chacune commodement ,
en verra d'une maniere tres
claire que la foye des Arais
gnée , coufteroit incompa
rablement plus que celle des
Vers.
Qu'on ne croye pas , au
vefte , que tout ce que j'ay
34 MERGURE
dit ne regarde que les Arai
gnées d'une groffeur com
mune , car fi on vouloit fçavoir
ce que donnent de foye
celles qu'on trouve communement
dans les Jardins de
ce Pays , & qui paroiffent
tres groffes , on verroit qu'il
en faut 12. de celle cy pour
avoir autant de foye qu'on
en retire d'une des coques
de celles dont j'ay parlé ,
& que 288. ne donneroient
que le même poids de foye
que fournit une feule coque
de Vers , par confequent
qu'à peine 663552. AtaiGALANT.
85
gnées pourroient faire une
livre de foye.
On aura fans doute regret
de ce qu'il nous reſte
fi
peu d'efperance de profiter
d'une découverte fi ingenicule.
Aprés tout il y a
peut-eftre encore quelque
refource. Il pourra le faire
que l'on trouve des Araignées
plus groffes que celles
que nous voyons commu
nement dans le Royaume.
Il est déja certain , par le
raport de tous les Voya
geurs , que celles de l'Amerique
le font beaucoup plus
86 MERGURE
que les noftres , d'où il
femble auffi qu'elles de
vroient donner plus de foye.
Les Vers , qui , quoy qu'originaires
de Pays éloignez
ont fi fort peuplé en Europe,
nous aideroient même à
efperer que les Araignées de
l'Amerique , pourroient vivre
dans ceux - cy . Quoy
qu'il en foit , il faut experimenter
; c'eft la feule voye
de découvrir des chofes
curieufes & utiles . Je né
negligeray rien de ce qui
peut avoir raport à la recherche
dont il s'agit icy , dans
CALANT 8+
Jaquelle fi l'on découvré
jamais quelque chofe d'utile,
la premiere gloire en fera
due à Mr Bon.
MARIAGES.
Mr le Marquis de Poyane
, a époufé l'une des filles
de Mr Martin Fermier ge
neral. Elles font quatre
fours ; l'aînée a époufé Mr
de Bouville Intendant à
Alençon ; la feconde , Mr
Chauvelin Intendant à
Tours , la troifiéme , Mr de
Bethune, Mrle Marquis de
88 MERCURE
Poyane , eft de la Maifon
de Bailens , fils , petit fils ,
& arriere petit fils de Che
valiers du Saint Eſprit . Sa
mere eftoit fille du Comte :
de Pordeac Baffabat..
Il y a eu unBaffabat Moufquetaire
du Roy , vers l'année
1681. qui eftoit d'une
force prodigieufe
, & fur
tout du poignet
; voicy
quelques unes des experiences
qu'il fit de fes forces.
Un jour un malheu
reux Breteur & filou
l'ayant infulté , & luy
GALANT . 89
difant qu'ils fe rencontreroient
l'épée à la main
Mr de Baffabat , d'une
bravoure éprouvée, & ne
voulant pas fe commettre
avec un tel maraut
luy dit d'un grand fens
froid , je feray ravy d'avoir
l'honneur de vous
rencontrer ; mais j'efpere
que vous m'attaquerez
car je fuis obfervateur
regulier des ordres du
Roy. L'autre , faiſant le
fierabras , & jurant le
H
90 MERCURE
nom de Dieu , luy dit ,
oüy je vous attaqueray
avant qu'ilfoit peu. Vous
me le promettez , luy dit
froidement Mr de Baffabat
; luy prefentant la
main , touchez donc là ,
l'autre mit la main dans
la fienne , & celuy - cy
la luy ferra fi forts, qu'il
luy caffale bras en deux:
F'autre qui faifant des cris
effroyables Mt de Baffabat
luy dit froidement ;
vous me ferez avertis
GALANT 91
;
quand vous ferez en
eftat de manier l'épée .
20Une autrefois Mr de
Baffabat, pour fe réjouir,
entra chez un Maréchal ,
comme
pour faire ferrer
fon cheval , & regardant
un fer nouvellement
forgé
, luy dit : Il me paroiſt
que ton fer eft bien aigre;
d'eft le meilleur fer du
monde , reprit le Maréchal
; luy de fang froid ,
prit le fer avec les deux
mains & le caffa en deux
A
Hij
&
92 MERCURE
comme s'il eut efté de
verre. Ce Maréchal crut
qu'il eftoit forcier parce
quedans le moment,il luy
ayoit entendu dire tout
bas quelques paroles. Mr
de Baffabat enfuite luy
dit de luy forger un fer
pour fon cheval ; le Maréchal
obéit en tremblant
, & dans l'un de
ces intervales où ce Maréchal
aprés avoir forgé
fon fer fur l'enclume f
.
retourne pour le porte
C
CALANT. ›
au feu avec fa pince , Mr
deBaffabat enleva & mit
fous fon manteau l'encluvme
& le patin , c'eſt- àdire
ce qu'à peine quatre
hommes. auroient pû
remuer. Le Maréchal
fe retourne avec precipitation
pour battre le
fer pendant qui eftoit
chaud. Imaginez vous
la furpriſe ne trouvant
plus fon enclume & le
fens froid de Mr de
Baffabat qui la tenant
94 MERCURE
fous fon manteau cachée,.
luy difoit qu'un démon
Feftoit venu enlever par
la cheminée qu'il l'avoit
vů vûde fes propresyeux;
ce fut pour le coup que
le Maréchal le crut forcier.
Mr de Baffabat l'inf
truifit par pitié des paroles
qu'il faloit prononcer
en mettant la tefte
dans la cheminée pour
rappeller le diable & fon
enclume. Et remit adroit
tement l'enclume à fa
GALANT 95
place pendant que le
Maréchal faifoit fon
évocation .
Claude François Formier ,
Seigneur de Montagny ,
Confeiller au Parlement ,
époufale 30. Octobre , N...
de Bar fille de N... de Bar,,
Secretaire du Roy.
Mr le Comte de Vaillac ,
fils de Gourdon de Genouillac
, Comte de Vaillac
épousé une niéce de feu Mr
de Saint Gelais , Maréchal
de Camp tué à Valcourt
la mere de la nouvelle épou
96 MERCURE
fe , eftoit la Roche - fou
cault.
MORTS.
La Princeffe Charlote Fe
licité deBrunfwik Hanover,
mourut le 26 Septembre;elle
fut mariée le 18. Novembre
1695. avec Renault d'Eft
Duc de Modene. Elle eftoit
fecur aînée de Guillemine
Amelie de Brunfwik- Hano
ver , à préfent Imperatrice ;
niéce de Madame la Prineeffe
, & coufine germaine
de Madame .
Elle eftoit fille de Madame
GALANT 97
dame la Ducheffe Doüairiere
d'Hanover , foeur de.
Madame la Princeffe , & de
Madame la Princeffe de
Salms , qui avoient toutes
trois pour Mere,Madame la
Princeffe Palatine.
Jean d'Aligre Commandeur
de Malthe , mourut
le 13. Octobre âgé de 27 .
ans. Il eftoit fils d'Eftienne
d'Aligre , Chancelier de
France , dont le pere eftoit
auffi Chancelier de France .
Mr le Commandeur de
Modene , du furnom de
Raymond , en Provence , eſt
I
98 MERCURE
mort d'une pleurefie , słuól
Il eftoit de la même race
que feu Mr le Comte de
Modene qui a écrit l'Hiftor
re de feu Mr le Duc de Guife
fur la Révolution de Naples,
Catherine Alfoncine de
Renty , Epouse de Claude
Comte de Choifcul , Maré
chal de France , & Chevalier
des Ordres du Roy, mourur
le 17. Octobre en fa Terre
de la Roue , âgée de 74. ans,
Marie Françoiſe de Soüillac
, épouse de Jean George
de Nupees, Prefident à Mor
tier au Parlement de Tou-
THEQUE
BIBLIO
THE
LYON
འའ
A
CALANT.
DELA
VILLE
LYON
louſe , eft morte dans u
ge affez peu avancé. E
eftoit fille de feu MMtrullee
Marquis de Chaftillon ,Chef
de la Branche de Souillac du
Bourg , Lieutenant General
des Armées du Roy & de la
Province de Rouffillon
Gouverneur de Perpignan.
Elle eftoit foeur de François
Louis Jean-Baptifte de Souillac
, Marquis de Chaſtillon ,
Colonel d'un Regiment de
Dragons.
Madame de Ravetot eft
morte à fon Chateau de
Bas, au Pays de Caux . Elle
Tij
100 MERCURE
avoit époufé Mr de Rave
tot , d'une des premieres &
plus anciennes Maifons du
Pays de Caux.
Sa mere eftoit foeur de
feu Monfieur le Maréchal de
Grammont , Madame de
Ravetot eftoit fille de Mr le
Marquis de Perthuis.
BENEFICES.
Le Roy a donné l'Ab
baye de Flaran,à Mr l'Abbé
de Monchan .
Celle du Palais , à Mr
l'Abbé de la Deveze. Il y a
CALANT OF
un Bourg nommé Palais ,
fitué à quatre licués de la
Ville de Nantes , & renommé
pour avoir donné la
nailfance au fameux Pierre
Abelard , Precepteur &enfaire
Mary de la Belle He
loife , niéce de Fulbert, Cha
noine de Noftre- Dame.
Celle de Nifors , de l'Or
drede Cifteaux , à Mr l'Abbés
Ollé. Cette Abbayc
appellée autrement Béniſſons
Dieu , eft dans le Diocefe de
Comminges , & elle fut fondée
en 1213.07
Celle d' Arouaife , au Pre-
I iij
102 MERCURE
d'Ambrine. Il y a un Bourg
de ce nom , fitué entre Bapaume
& Perone.
TITES.
Celle de Landeve
ou
Landevenech
, au Pere de
Vau. Elle eft de l'Ordre de S.
Benoift , & dans le Diocefe
de Quimpercorentin
.
POESIES.
Je n'ay pas voulu placer
ces Bouts rimez cy dans le
Mercure du mois paffé ,
parce qu'il y en avoit déja
trop , & que je placeray
toûjours les Ouvrages des
GALANT 103
autres préferablement aux
miens as Sabi
PETITE EGLOGUE
fur des Bouts- rimez .
Fay prés de cent Brebis ,
Life n'en a que trente
Je n'ay que dix Agneaux
Fen'ay
& Life en a quarente
Elle tefuit, Amour , fon
Troupeau cefle tien
te méprife moy , tu ne-
Fe
glige
le
mien
I iiij
104 MERCURE
Ca comptons mes Moutons
; je n'en vois que
.cinquante
Amour , voilà tes tours.
ah! Life en a foixante
Quoi donc de mes Troupeaux
veux tugroffir le
fien
Mes Moutons
amoureux
fe vontréduire à rien
Mais reprenons les miens
elle en a bien feptante
GALANT. 105
Cherchons ,comptons
.
Dieux! j'en voisplus de
SIRUPEE nonante
Ilne m'en refle plus , tu
bien
m'oftes tout mon
Amour prens donc encor
te Berger le Chien
MADRIGAL
de feu Mr Lainais.
Le tendre
Appellesaujour
de ces jeuxfivantez
106 MERCURE
a
Qu 'Athenes furfes bords
confacroit à Neptune ,
Fit au fortir de l'Onde
éclater cent beautez ,
Et prenant un trait de
chacune
Ilfit defa Venus le Por
trait Immortel.
Helas ! s'il avoit veula
divine Martel
Il n'en auroit employé
qu'une.
GALANT. 107
LAJOYE
à Madame B ..
Parmi les Dieux
que
Fable vere
la
Mon portrait ne fe trou
we
pas
La Joye eft vive & fi
legere
Qu'aux pinceaux les plus
prompts échapent fes
appas.
Cependant mon pouvoir'
n'estpoint imaginaire
To MERCURE
CesDieuxficelebre font
tous aneantis ,
Je leur ay furvecú. Ce
tempscym'eft contraire
Il m'ofte des amis , il me
change , il m'altere,
Mes hommagesfont ralentis
,
A toute autre qu'à vous
Climene ,
Il faudroit decliner mon
nom
Mais vous me remetrez
fanspeines
GALANT. 100
Je vous quittefipeu, même
avec la raison ,
Vous m'avez mife en
liaifon ,
Chez lesfillesjefuisgênée,
La feinte, l'air concerté,
My tient en captivité ,
PourlePays d'Hymenée,
Lay-je jamais habité ?
Ce n'est qu'un lieu de
paffage,
Hymen lespremiersjours
mefera bon vifage ,
Et nous en reftonsla . Vive
l'heureux
veuvage,
110 MERCURE
Des plaifirs lefeul appa
nage ,
Afyle de la liberté ,
Precieux
avantage ,
Dont les Dieux font exclus
par l'Immortalité
.
Furons
nous donc , veuve
aimable,
Une alliance durable
Aunomdes ris, desjeux,
tant danfans,que chantans
,
Ceux dujour , de la nuit,
ceux du bald
table,
CALAND
Car j'en tiens prés de
vous un cortege in -
nombrable
,
Vous en avez pour tous
les temps ,
Je garderay la porte &
veilleray fans ceffe
Pour empêcher l'ennuy
d'entrer , a
Sous quelque forme qu'il
ads sparoiffey and
De Prudes du quartier
cherchant à cenfurer ,
De compteurs de triftes
nouvelles ,
112 MERCURE
Gens en deuil pour tout
l'Univers ,
Ou
d'Auteurs empreſſez
de reciter le
Vers
Ou de ces vieilles Damoifelles
Qui trouvent fi groffier le
Jiecle d'aujourd'huy ,
Sous ces mafques divers
nous connoiftrons l'ennuy,
Nous le ferons bien fuir.
L'Amour ,l'Amour
lui-même ,
S'ilprenoit un airferieux,
GALANT. 113
,
Un ton languiffant &
blême ,
Un ton trop imperieux
A voftre avis le traiterions
nous mieux ?
Apropos de joye, il faut
encore en dire un mot.
ARTICLE
Burlefque.
Le fçavant Hipocrates
a dit , dit-on, car ce n'eft
que par oui- dire que je
K
114 MERCURE
fçai ce qu'Hipocrates, a
dit , fupofez donc qu'Hipocrates
ait dit qu'on
doit une fois le mois s'enyvrer
pour la fanté du
corps ; un fage Philofophe
ne pourroit - il point
dire auffi , que pour la
fanté de l'efprit il faut
extravaguer une fois par
mois. Non , l'on ne doit:
jamais perdre la raiſon de
vue ; mais on peut la laiffer
repofer. Elle a beſoins.
de repos, & chez les Sa
GALANT. 113
#
ges fur tout ; plus l'on eft
fage , plus la raifon travaille
, plus elle fatigue.
Je crois que rien n'eft
meilleur pour procurer
du repos à la raison que
le Burleſque , car elle ne
fe mefle point de cette
façon depenfer.Tâchons
donc de rire un peu pendant
que la raifon repofe
; mais rions innocemment
, cela fe peut. Il y
a des plaifanteries
qui ne
bleffent point les moeurs
K. ij
116. MERCURE
quoi qu'elles bleſſent lè
bon fens. Je voudrois.
bien en pouvoir écrire
de celles -là
car j'en ay
promis un Chapitre tous
les mois ; mais contentez
vous d'une chanfon
dans ce genre là , car je
n'ay eu que huit jours de
temps pour remplir ma
tâche.
THEAL
VIBLIO
LYO
1893
BE
SA
M
Tu rèlu ,turelu ,ture lu.re
lure ,voila
*
ma chan
XX
son dans un re- pas
Trop d'esprit
en
man -geant
XX W
X
fait tort ana ture ,Un profond raisonneur nedigere
pas :
::3
же
Un sçavant
par sa ture lure Sur des mots ré
A.
x

*
gle sa rai son ;Mais tout cequ'on enpeut con -clure ,
X
*
Tu relure
cast
ma chanson
.Mais tout cequ'on
x
*• enpeut conclure ,Ture lure c'est ma chanson .
ILLD
NC.
GALANT. 11
**** ***
CHANSON
Burlefque & Morale.
BURLESQUE.
Ture lu ture lu ture lure
lure
Voila ma Chanfon dans
in Repas ,
Trop d'efprit en mangeantfaittort
à
nature.
Un profond raisonneur.
ne digere pas.
18 MERCURE
MORALE.
Un Sçavant parfa turė
A lure O'M
Sur des mots regle la raifon
Mais tout ce qu'on en
peut conclure , oc
Turelure , c'est ma chan-
Velsfon.Son an
BURLESQUE.
En tapinois quand les
nuits font brunes,
Au Jardin ma femme
vrstvafans moy ;
Maisfans doute elley va
pourcueillirdes prunes,
GALANT 119
Elle-même le dit , & moy
3s je la croy.
MORALE
.
O! credulité defirable ,
Ceux qui te blâmentfont
Whalesfots sets
Croyons jufques à l'incroyable
,
Qui nous procure du reposs
BURLESQUE
Faifons tant , tant , tant
detope & tingue,
Que Bacchus augmente
mon Trefor
120 MERCURE
Quandj'ay bû , mon oeil
trouble à peine diftingue
Si mes fols , mes deniers
font de cuivre ou d'or.
MORALE .
Que ce trouble heureux
puiffeencoreĄ
Me cacher le Monde &
fon train ;
Ilfaut qu'unfage Turogne
ignore
Tout le mal que fait fon
prochain.
BURLESQUE
.
Au Tric- trac petit coup
defefpere
GALANT. 121
Parlesgrands coups nous
nous enfilons ,
Fay le Dé malheureux
tout coup m'eftcontraire;
Fay le Vin plus beureux ,
tous coups me font bons.
MORALE .
Pour nous recréer , dit le
Sage,
Uniffons lesfeux & les
Ris ,
Les jeux unis avec la
rage
Sont pourtant nos jeux
favoris.
122 MERGURE
BURLESQUE.
Tictocchoceftbon àcoups.
de
verre ,
A coups de moufquet il
n'eft pas fain ;
Ce Guerrier eft mort brave
, on le met en terre ;
Ce Buveur eft mortyore;
ilboira demain.
MORALE.
Lucifer , d'affreufe memoire
,
Dans nos coeurs
grava
de fa main,
GALANT. 123
Que les humains mettroient
leur gloire
A détruire le genre
main.
bu-
BURLESQUE.
Plus je bois & plus ma
femme crie ;
Mais plus elle crie &
plusje bois:
Trop crier & trop boire
abrege la vie:
·Faifons tant qu'elle ou
moyfoyons aux abois.
Lij
24 MERCURE
MORALE.
Deux époux , dit un
grand Oracle ,
Tout-à-coup deviendront
heureux
Quand deux époux par
un miracle
Pourront devenir veufs
tous deux.
GALANT. 125
AUTRES
BOUTS RIMEZ
Du Mercure précedent
, remplis par Mr
d'Aub***
trente
Je teplaifois Iris à vingtcinq
ans , à
Tu m'as fouffert encor
•même jusqu'à quarente
Pourquelques ans de plus
quelcaprice eft le tien
Tu reprends donc ton
coeur & tu me rends
le mien
Lij
126 MERCURE
Je te Içais quarente ans ,
je n'en ay que cinquante
Tu devrois bien m'aimer
du moins jusqu'à
foixante .
L'âge paffe , dit-tu , l'on
veutjouirdu
fien
Dequoi jouiras - tu , ta
beauté vient à rien
Faifons mieux, par raifon
, prévenons les
Leptante
Soyonsfimples Amis ; on
peut l'eftre à nonante
Une amitiéfolide à tout
âge eftun
bien
GALANT 127
Soyons auffi conftants
qu'un Aveugle &Son
chien
LET TRE
de Florence.
A Florence , ce 4. Octobre
1710.
Le premier de ce mois Mr
le Comte de Gergi Lanquet
Envoyé Extraordinaire de Sa
Majefté Tres- Chreftienne en
cette Cour , fit fon Entrée publique
, & fut vers les 4. heures
à l'Audience du Grand Duc
qui le recent avec toutes les
Liij .
128 MERCURE
marques d'eftime denës à fon
caractere & à fon merite . Il
eftoit parti l'aprés -midy d'une
maifon deplaisance qu'il aprife
à deux mille de Florence,
fe rendit au Palais du Marquis
Nicolo Ridolfi , qu'il a
choisi pour fa demeure dans
cette Ville. Il fut receu à la
a
defcente de fa chaife , par ce
Marquis accompagnéé par une
partie defes parens , &enfuite
conduit dans fon
appartement ,
de
Mr le Comte de Gergy, mon➡
où il fut regalé d'une tres- belle
Mufique ,fuivie de quantité
rafraichiffements.
GALANT. 129 .
ta enfuite dans fon premier ca
roffe , accompagné du Bailly
Lorencey , chargé par interim
det affaires du Roy, Gentil-
-homme de la Chambre du Prince
François Marie. Ce premier
caroffe paffe pour un des plus
beaux qu'on ait vú depuis longtemps
dans aucune Cour d'Ita
lie. Dans le fecond qui ne cedoit
prefque en rien au premier
eftoient Mrs de Riancourt &
Maillet , le premier Conful à
Livourne ; & le fecond , cydevant
Conful en Egipte . Les
troifiéme & quatriéme caroffes
eftoient remplis d'OfficiersFran
Liiij
130 MERCURE
çois & Efpagnols & de ceux
de la Maifon de cet Envoyé.
L'on peut affurer que jamais
Miniftre n'a paru dans cette
Cour avec plus d'éclat & de
magnificence que celui -ci.
Mrle Comte de Gergy qui
eft Gentilhomme ordinaire de
la Chambre de Sa Majesté eſt
forty d'une ancienne famille
de Bourgogne , dont le nom eft
Languet ; ce qui eft de particulier
, eft qu'un de cès ancêtres
nommé Hubert Languet ,
Miniftre d'Augufte , Electeur
de Saxe , ayant efté envoyépar
ee Prince dans plufieurs Cours
GALANT . 132 .
principalement de l'Europe ,
en France pendant le Regne de
la Reine Catherine de Medicis
; il eut en 1570. fa premiere
Audience de cette Princeffe
, à pareiljour que celui- cy
l'a euë de Cofme de Medicis à
prefent Grand Duc.
Mr le Comte de Gergy &
eftéprécedemment envoyé en diverfes
Cours d'Allemagne , &
en dernier lieu vers Mr le
Duc de Mantouë.
LIVRES NOUVEAUX.
Il paroift un Livre intitulé
Hiftoire du Dauphiné , où
132 MERGURE
fe trouve l'Hutoire des
Dauphins , & plufieurs faits
Hiftoriques ; diverſes particularitez
fur les ufages
du Dauphiné & fur les
familles , tirez des Origi
naux , avec les Genealogies
des plus illuftres Maifons de
ce Pays- là , & une Carte
Geographique ; orné de figures.
Par Mr de Valbonnay
, premier Preſident de
la Chambre des Comptes
de Grenoble.
Ce Livre eft in folio , & fc
vend à Paris , chez Imbert de
Bats, rue S. Jacques, àl'Ima
GALANT. 133
ge S. Benoit , le prix eft de
Is. livres relié en veau. .
Il paroift auff depuis peu
un Livre intitulé , Paraphrafe
fur le Livre de l'Ecclefiaftique ,
par Monfieur Ménard, Prieur
d'Aubort.
Pour donner quelque idée
de ce Livre , je vais rapporter
icy quelques endroits de
la Preface.
L'Ecclefiaftique a efté déclaré
Livre canonique de l'Ecriture
Sainte. Le troifiéme
Concile de Carthage , dans
le Canon 42. le decret d'Eugene
IV. dans l'inftruction
donnée aux Armeniens à
134. MERCURE
Florence aufli toit aprés ; le
le Concile , où fe fit l'union.
des Grecs , reçu de toute
l'Eglife unanimement ; le
Concile de Trente dans la
quatrième Seffion , en ont
fait par leur déciſion un Article
de Foy , &c...
On ne doute point main,
tenant que Jefus , fils de
Sirach, n'en foit l'Auteur, &
que ce ne foit celuy qui
eftoit petit fils ou arriere
petit fils de Jefus ou de Jofué
fouverain Pontife des Juifs,
qui revint de la captivité de
Babylone avec Zorobabel.
GALANT . 135
a
Quelques uns ont voulu
dire que ce Jefus eftoit un
des feptante- deux Interpretes
que Prolomée Philadelphe
Roy d'Egypte fit venir
de Jerufalem à Alexandrie
pour traduire en Grec la
Bible Hebraïque, & en faire
un des plus beaux ornemens
de cette fameufe Bibliote
que , qui felon Aulugelle
cftoit compofée de feptcents
mille Volumes ; du
moins il eſt ſeur qu'il vivoit
en ce temps là , & que fon
nom fe trouve parmi ceux
de ces illuftres Traducteurs .
136 MERCURE
Quoi qu'il en foit il compola
ce Livre en Hebreu ,
qui eftoit fa langue naturelle.
S. Jerôme affure, dans
fa Préface du Livre des Proverbes
de Salomon , qu'il en
a veu un exemplaire ; mais
cet exemplaire ne fe trouve
plus , & nous l'avons feulement
en grec & en latin , &c ...
Quoi que le ftile de ce Lipre
foit dur , les fujets qui
y font traitez , font d'une
utilité merveilleuſe ; c'eſt
une Morale complette ; on
y apprend tous les princide
la veritable fageffe pcs
GALANT. 137
tous les devoirs de la Religion
, & tous ceux de la
vie civile ; tout ce qu'on
doit à Dieu ; tout ce qu'on
doit à fon prochain ; tout
ce qu'on fe doit à foy même.
La pratique de toutes les
vertus depuis les plus grandes
jufqu'aux plus petites ,
depuis celles qui nous portent
à Dieu & qui contribuent
à noftre falut , jufqu'à
celles qui ne font que
purement politiques ou
oeconomiques.
On y voit par tout des
Sentences qui renferment
M
138 MERCURE
1
en peu de mots tout ce qu'il
ya de plus effentiel dans la
Doctrine des moeurs ; des
exhortations qui preffent le
Lecteur , qui le touchent &
qui le perfuadent ; des exemples
qui l'animent , ou qui
le confondent , & de ces
vrais éloges qui font les récompenfes
de la vertu , &
qui le perfuadent. & c . ...
Comme cet Auteur ne
fe contente pas de donner
les preceptes de fageſſe à
ceux qu'il inftruit , & qu'il
veut encore leur fournir des
exemples pour leur faire fuiGALANT.
139
pour modevre
par une fainte émulation
les regles qu'il leur preſcrit ;
il en tire d'excellens de l'Ectiture
fainte;il leur propofe
les plus grands hommes du
Peuple de Dieu
les , & en les leur propofane
il en fait le Panegyrique
avec
tant d'éloqence
, que jamais
ces Patriarches & ces
Prophetes fi renommez dans
l'ancienne Loy , ne furent
louez plus magnifiquement,
ni plus veritablement qu'ils
le font icy. Ce font des
Portraits en grand , mais ce
font des Portraits fideles ;
leurs vertus y font mifes
140 MERGURE
dans tout leur jour ;
leur Religion y eft reprefentée
avec tout l'éclat de
leur zele ; leur courage avec
tout la fermeté de leur coeur;
leur magnificence avec tout
ce qu'elle avoit de plus pompeux
& de plus riche ; & leur
qualitez heroïques avec tou
tes les circonftances qui peu
vent relever la beauté de
leurs grandes actions. Il y
ramene ces fameux conducteurs
du Peuple de Dieu
ces illuftres deffenfeurs d'If
raël , ces grands Sacrificateurs
du Seigneur. Il y fait
voit les graces que ces grands
GALANT 140
Hommes & ces grandsSaints
ont receus du Ciel , & c . .. .
Voicy quelques unes des
Maximes dont ce Livre eft
rempli .
Le caractere de la vraie
charité c'eft d'eftre vive &
prévenante ; mais quoi
qu'elle doive eftre prompte
elle ne doit pas être aveuglée;
il ne faut pas qu'elle fe conduife
feulement par les lu .
mieres de la foy ; mais encore
par celles de la raifon ; il
faut qu'elle peſe , qu'elle
confulte , qu'elle examine
ordinairement ce qu'elle fait
de peur de favorifer le cri142
MERCURE
me au préjudice de l'innocence.
Le faux ami eft plus vif
que le veritable , car l'intereft
qu'il a de tromper l'anime
plus que la fimple amitié
n'anime ordinairement .
Humiliez-vous , mais ne
ne vous aviliffez pas ; Thumilité
prudente & moderée
, nous éleve.en nous
abaiffant ; mais celui qui s'abaiffe
plus bas qu'il ne doit ,
s'attire du mépris & le merite.
Ne cachez point par
cet excés d'humilité les talens
que vous avez receus ;
quand on peut eftre utile
GALANT. 143
pas par
aux autres , il ne faut
pareffe fe perfuader qu'on
n'eft bon à rien .
Si quelque grand Scigneur
vous convie à fa table
, ne foyez nitrop libre,
ni trop retenu ; trop de li
berté marque peu de refpect
, mais trop de retenue
marque peude confiance . Un
jufte milieu vous fera aimer
des Grands ; c'eft à dire de
ceux qui ont l'ame grande
& le don du difcernement .
Le menfonge eft le premier
de tous les defordres ,
& le plus grand de tous les
maux , puifqu'il eft oppofé
44 MERCURE
directement à la verité , qui
eft le fouverain bien .
Celui qui ment s'anéantit ,
carrien ne fubfifte que par la
verité ; & qui détruit la veri
té , le détruit foi - même
puifque l'homme n'exiſte en
Dieu qu'autant qu'il eft
vray ; c'eft à - dire qu'autant
qu'il aime la verité.
Ce Livre eft in octavo, &
fe vend à Paris , chez Daniel
Jollet , au bout du Pont S.
Michel , du cofté du Marché
neuf , au Livre Royal ;
le prix eft de 3. liv. 10. fols
relié en veau.
GALANT. 148
PROCEZ
D'UNE PETITE FILLE
reclamée par deux meres ."
+ Ce Procez fe pourfuit
prefentement à
Lyons mais je pren
dray l'hiftoire de plus
loin , car on vient de
m'envoyer des Memoi
res fecrets fur l'origine
de cette Avanture..
N
146 MERCURE
Ce font les amours
d'un jeune Lyonnois
& d'une jeune Lyonnoife.
Je tairay le nom
de ces deux Amants
Thiftoire eft
pourtant
publique. Tout Lyon
les connoift , toute la
Ville les nomme ; je ne
les nommeray point
je veux eftre plus difcret
qu'une Ville entiere
. Leurs noms de
galanterie feront , fi
GALANT 247
vous voulez , Cleonte
& Angelique ; & fans
sien changer au fond
de l'Avanture , je déguiferay
feulement les
noms , & les qualitez
des principaux Acteurs.
!
Angelique & Cleonte
fe
rencontrerent par
hazard dans uneAffemblée.
Angelique
fille
fage & modefte regar
da tant Cleonte dés la
Nij
148 MERCURE
premiere
fois , que dés
la feconde elle n'ofoit
plus le regarder
; mais
Cleonte
moins timide
fixa fi tendrement
fes
yeux fur elle qu'il en
devint paffionnement
amoureux .
Si Angelique eft bru
ne ou blonde, fi Cleonte
a beaucoup d'efpriti
ou s'il en a peu je n'en
fcay rien . On ne m'a
s fait le dérailadel
pas
GALANT, 142
leurs perfections ; mais
j'ay ſçu qu'ils s'entr'aimerent
comme s'ils
euffent efté
parfaits,
Cleonte trouva un
jour l'occafion de parler
en particulier à Angelique
; d'abord il luy
fit une declaration
d'amour
à la françoiſe , &
fans
s'amufer à luy apprendre
qu'il l'aimoit ,,
il commença par luy,
jurer qu'il l'aimeroit
a
N iij
150 MERCURE
toute fa vie ; mais Angelique
le conjura de
ne la point aimer, parce
que des raifons
ac famille
l'empefcheroient
de pouvoirjamais cftre
à luy.
Que je fuis malheu
reux s'écria Cleonte ,
un Pere avare que j'ay
m'empefchera
auffi
d'eftre à vous . Ils fe
conterent
l'un à l'autre
toutes les raifons de faGALANT
mille qui s'oppofoient
à leur union , & là def .
fus ils refolurent tresprudemment
de ne fe
plus voir. Angelique
s'en alloit, mais par un
excez de prudence elle
revint fur fes pas pour
défendre à Cleonte de
penfer jamais à elle.
Ouy , dit- elle , pour
voftre repos je vous de
fends de maimer. Que
vous eftes cruelle ! s'é-
Ninj
* MERCURE
cria Cleonte , de foup
çonner feulement que
je puiffe vous obeir §
ah ! me défendre de
vous aimer c'eft me
prouver que vous ane
m'aimez gueres . Enfui
te il fe plaignit de fon
malheur en des termes
fi tendres, fi paffionnez
qu'Angelique en foupira
, & luy dit en
voulant fuir , he bien
Cleonte aimez moy
GALANUM TE
donci mais je vous det
fends de ma voir ja
mais. Cleonte l'arreſtej
fe jette à fes genoux , fa
defefpere ; vous aimer
fans vous voir 1, wous
voulez
donc que je
meure
. Helas
! luy répond-
elle
( croyant
déja le voir mourant
helas voyez
moy dancs
mais ne me parlez
plus
de voftre
amour. Autre
defefpoir
autres
me→
4 MERCURE
naces de mourir . He
bien ( dit Angelique
toute troublée ) vous
me parlerez done; mais
que perfonne n'en fçache
rien , car fi j'y con
fens , c'eft dans l'efperance
qu'il arrivera
quelque changement
dans nos affaires . Il en
arrivera fans doute , reprit
Cleontes mon amour
m'en affure.py
lls fe quitterent dans
GALANT. ks
Felperance de pouvoir
obtenir par leurs foins
le confentementinde
leurs parents , & fe virent
plufieurs fois pour
fe rendre compte des
facilitez qu'ils fe fla
toient d'avoir trouvées.
Cependant les
obftacles eftoient tousjours
les mefmes ; ils ne
diminuoient qu'à leurs
yeux ; mais ils fe les
diminuoient l'un à l'au
6 MERCURE
tre à mesure que le defir
de les furmonter
augmentoit dans tous
les deux. En un mot
leur amour les aveugla
4 fort qu'en peu de
jours toutes les difficul
tez difparurent. Ils fe
perfuaderent ferme
ment que rien ne pou
voit plus s'opposer à
leur Mariage, & qu'ils :
n'avoient contre eux
qu'un peu de temps à
a
CALANT. 157
attendre . Ils remirent
donc les formalitez à
ce temps- la ; mais dés ce
mefme jour la foy de
Mariage fut donnée reciproquement
. UnAn
neau fut mis au doigt
de l'Epoufe , & tous
deux convaincus que
lafoy mutuelle & Panneau
nuptial fuffifoient
, tous deux enfin
dans l'aveuglement &
dans la bonne foy s'i358
MERCURE
maginerent eftre affez
mariez pour pouvoir
s'affurer qu'ils lef
toient.
Le Pere de Cleonte
eftoit pour lors à Paris.
Son confentement of
toit neceffaire , & nos
la
Epoux eftoient convenus
que c'eftoit par
qu'il falloit commencer.
Ainfi Cleonte refolut
de partir au pluftoft
. Les adieux furent
GALANT 159
plus tendres que triftes
, parce que Cleonte
eftoit feur, difoit - il ,
de rapporter le confen
tement de fon pere. Il
ne quittoit Angelique
que pour aller s'aflurer
le bonheur de paſſer a
vec elle le refte de fa
vie. Il part enfin , &
laiffe Angelique fort
trifte de fon départ ,
maistres perfuadée
que le mariage fe con
60 MERCURE
firmeroit à fon retour.
Quelques femaines
s'écoulerent : Angelique
entre la trifteffe &
l'efperance n'eftoit pas
tant a plaindre qu'elle
le fut dans la fuite. Les
reflexions commence.
rent à la troubler elle
envifage fa faute , elle
en a honte , mais elle
fe flate que cette honte
fera tous jours ignorée,
ne fe doutant point jufques-

CALANT
ques-là qu'elle portoit
dans fon ſein une preu→
ve qu'on ne peut tenir
cachée qu'environ huit
ou neuf mois . Elle ne
connoiffoit encore qu's
une partie du mal qu'
elle avoit fait : ainfielle
n'en eſtoit qu'à demi
repentante. Ses regrets
eftoient moderez par
un fouvenir agreable ;
les regrets finceres, ne
luy vinrent qu'avec les
162 MERCURE
maux de coeur.lanch
Imaginez - vous fes
allarmes & fa douleurs
joignez à cela l'abſence
de fon Amant : elle
n'en recevoit aucunes
nouvelles ; elle fe crut
oubliée , trahie , abandonnée.
A qui s'en
plaindre à qui fe confier
dans une fituation.
fi cruelle ? elle ne trou+
ve de foulagement
que
dans fes larmes. Laif
GALANT
fons- la pleurer à loifir
pendant que nous parleronse
des autres perfonnes
qui ont part à
cette avanture .
25 Une femme de bien,
avoit épousé depuis
quelques années un
bon Bourgeois fort cu
ricux d'avoir lignée
& fort mal intentionné
pour fes heritiers
collateraux.Cette femme
que je nommeray
O ij
64 MERCURE
Dorimene , va faire icy
un perſonnage tout op
posé sa celuy d'Ange
lique.
Dorimene avoit le
malheur d'eftre fterile,
& c'est ce qui la defef
peroit , car cette fterilité
la faifoit prefque
hair de fon Mary.Le
bon Bourgeois qui fo
préparoit pour lors à
faire un long voyage ,
eftoit au defefpoir de
2
GALANT
partir fanss eſtre affuré
unc heritier. Un foir
qu'il rentrait chez luy
trifte & réveur, ſa femme
qui avoit médité
tout le jour la maniere
dont elle le recevroit ,
attend le moment qu'il
rentre dans fa chambre,
courtà luy.comme
une femme tranfportée
de joye , ſe jette à fon
colen criant d'une voix
entrecoupée , shonne
MERCURE
nouvelle mon cherMa
ry ! bonne nouvelle !
j'ay tant de joye que je
ne puis parler. Quelle
joye ? dit le Mary , de
quoy s'agit-il ? Elle , au
lieu de répondre , recule
quelques pas com
me une femme qui
chancelle , & fe laiffe
tomber fur un fauteuil
en feignant de s'éva
nouir. Le bon homme
allarmé s'empreffe à la
CALANT 167
faire revenir elle re-
¿
vient un peu , le regarde
tendrement , & luy
dit d'une voix foible
ah mon cher mary
voicy la troifiéme fois
que je m'évanouis depuis
ce matin , & cc
font ces évanouiffe
ments qui font ma
joye. Elle recommence
à l'embraffer : nouvelle
joye ; nouveaux tranf
ports. Eftes-vous folle?
a
63 MERCURE
dit le Mary.
sepete repliqua la fem-
Je
vous
le
me , ce font ces évanoüiffements
& ces
maux de coeur qui me
charment , car ils confirment
les doutes que
j'ay depuis quelque
temps . Ouy mon cher
Mary , je crois qu'enfin
je fuis en eftat de vous
donner un gage vivant
de ma tendreffe conjugale.
Ah Ciel ! s'écrie
le
CALANT. 169
le bon Bourgeois , quoy
yous feriez enceinte ?
eft- il poffible ? Elle ju-
Te qu'elle le croit . Il
embraffe à fon tour celle
qu'il croit feconde ;
il est plus charmé qu'-
elle ne feignoit de l'eftre.
Ce n'eft plus entr'eux
que tranſports ,
que larmes de joye
feintes & veritables .
En un mot depuis ce
moment juſqu'à ſon
P
170 MERCURE
départ elle joua cette
alternative
de joye &
d'évanouiffement
. Et
il partit convaincu qu '
il trouveroit à fon retour
le fils aifné de plufieurs
autres qu'elle luy
promit en luy difant
adieu .
Dés que le Mary fut
parti , Dorimene
ne
s'occupa
plus que du
foin de paroiftre
groffe
aux yeux de ſes voiliGALANT.
171
nes & de terminer
cette groffeffe comme
fi elle euft efté veritable.
Pour cela il falloit
un Enfant d'emprunt ;
il falloit confier fon
deffein à quelqu'un qui
puft l'aider. Elle fut
trouver une Sage- femme
qui avoit été autrefois
fa Servante , femme
habile , inventive ,
une intriguante enfin ,
qui s'appelloit Nerine.
P ij
172 MERCURE
Aprés avoir promis
une groffe recompenfe
à cette Nerine , Dorimene
luy dit en deux
mots que fon deffein
eftoit de donner un fils
à fon Mary.
Nerine pleine de zele
commence à luy faire
l'éloge du plus difcret
de tous les jeunes
Lyonnois qu'elle connoifloit.
Dorimene l'in-
CA
terrompt
avec colere,
GALANT. 173
Eftes- vous folle ne
me connoiſſez - vous
pas ? Je vous connois
de refte , dit Nerine ;
mais pour faire plaifir à
fon Mary , une honne-
Ae femme ne pourroitelle
pas ... Taifez-
Vous Nerine. Mais
comment faire donc
Madame Comment
faire ? reprit Dorimene
, je vais vous expliquer
mon deffein
.
Piij
174 MERCURE
Dorimene & Nerf
ne curent enfemble une
converfation fort
longue. Pour conclure
en deux mots , qu'il
falloit chercher dans la
Ville quelque femme
ou fille qui craigniſtau
tant de paroistre Mere
que Dorimene fouhaitoit
de l'eftre, afin qu'-
elle vouluft bien luy
ceder fon droit de maternité.
bumul ons
GALANT its
Pendant que noftre
intriguante va chercher
cet enfant de hazard
chez les plus jolies
perfonnes de la
Ville , quoy que cela fe
trouve auffi chez les
plus laides , Dorimene
commence à jouer tou
tes les affectations &
les grimaces d'une premiere
groffeffe. Propofe-
t-on a Dorimene
une Promenade , elle
Piiit
176 MERCURE
l'accepteroit , dit- elles
mais la difficulté c'eft
la voiture. Le Caroffe
la blefferoit ; la Chaifeà
Porteurs luy fouleve
le coeur ; elle a peur c
Batteau à pied on fait
des faux pas , le plus
feur eft de refter chez
elle ; mais elle craint
d'y donner à jouer. Les
grimaces & les contorfions
des Joueurs luy
font horreur ; elle ne
GALANT. 11
veut voir que des femmes
gracieuſes & de
beaux hommes . Poing
de Spectacles , fur tout
ni Comedies ni Opera;
elle accoucheroit d'un
Neptune ou d'un Arle
quin. Elle fe reduit
donc au plaifir de la
bonne.chere elle s'y
dedommage en fe jettant
fur les plus friands
morceaux. Elle les ar
rache à fes voifins de
18 MERCURE
Table : tout permis ,
dit- elle , c'eft une envie
de femme groffe ; elle
veut manger de tout ce
qu'elle voit , & dire
tout ce qui luy vient
en pensée , jufqu'à des
médifances , de crainte
que fon Enfant n'en
foit marqué
. Spinatr
Parmy toutes ces
feintes , elle n'oublie
pas la principale ; il
faut figurer par la ceinGALANT
. 19
Elle applique ture
fous un large Corcet
un Couffinet de fatin
bien matelaffé femblable
à ceux dont les femmes
maigres ſe font des
hanches majestueuses.
Dorimene s'en garnit ,
& prend foin d'angmenterde
mois en mois
cette groffeffe de cotton
. En un mot elle
joüe fon rolle fi naturellement
que les plus
+
18 MERCURE
fins y. font trompez
.
Retournons
à la pauvre
Angelique qui
prend autant de peine
à cacher les défauts de
La taille , que celle- cy
en prend pour gafter la
fienne.
Angelique eftoit à
peu prés ſur ſon ſeptiéme
mois lorfqu'elle fut
contrainte par une mere
imperieufe qu'elle.
avoit d'aller avec elle
:
GALANT. 187
vifiter une voifine , &
cette voifine , eftoit juftement
Dorimene.
Cette Mere d'Angelique
eftoit fcrupuleufe
fur le ceremonial des
Elle en devoit
Vilte
une à Dorimene ; elle
veut abſolument que
fa fille l'accompagne
dans ce devoir indifpenfable.
Angelique obeit
, & les voila chez
Dorimene où plufieurs
18 MERGURE
*
autres voifinessef
toient affemblées.
Angelique fouffre &
gemit de le voir empri-
Tonnée dans un habit
ferieux ; fon corps
la ferre cruellement
quoyqu'il
foit laffé
bien lafche.Elle fetient
droite & fe guinde en
hauteur pour tenir
moins de place en largeur.
Dorimene au conGALANT
. 185
traire eftale fa
grofleffe
avec
oftentation
, bien
fon aife , fans
ceinture
, fa Robbe
ouverte
à
deux
battans , appuyant
nonchalem
ment fes deux bras
croifez fur l'honorable
fardeau dont chacuh
la
felicite.
Quel creve
coeur pour Angelique !
quel contrafte ! Helas !
dit- elle en elle- meſme ,
que cette femme eft
84 MERCURE
Leureuse de pouvoir
ainfi faire gloire de ce
qui fera ma honte , f
l'on s'en apperçoit .
-La Sage-femme ef
toit pour lors dans la
chambre de Dorimene
qui affectoit de la tenir
prés d'elle de peur d'accident.
Dés
qu'Angelique
avoit paru cette
rusée avoit remarqué
fa taille renforcée
&
Contrainte
, fa démarche
GALANT 185
the pefante & embarraffée
: il n'en falloit pas
davantage pour donner
des foupçons à une
connoiffeuſe. Elle obferve
de plus un viſage
affligé & maigri dont
les traits salongent .
Angelique s'apperçoit
qu'on l'examine ; elle
eft troublée , il n'en
faut pas davantage
pour mettre Nerine au
fait. Cette intriguante
Q
186 MERCURE
s'approche de Dorime→
ne , & luy dit à Forcille
: voila une fille qui
a bien la mine d'avoir
de trop de ce qui
vous manque. move nupi
Angeliqua la voyant
parler bas ne douta
plus du jugement
qu'on faifoit d'elle , &
pour furcroift
de malheur
quelqu'un
s’avifa
de dire à Dorimene
qu'elle eftoit en de bonGALANT.
187
nes mains d'avoir Nerine
pour Sage- femme .
Au một de Sage - fem
me Angelique paflit
comme un Criminel
qui voit fon Juge. La
Mere crut qu'elle ſe
trouvoit mal , Nerine
officieufe courut la fecourir
par avance , &
c'eft ce qui acheva de
la troubler. Dés que la
Sage-femme a mis la
main fur elle fe croit à
Q ij
88- MERCURE
terme ; la peur la taifit,
elle tombe en foibleffe.
On la porte ſur un lit
dans une chambre voifine
où fous prétexte de
la laffer repofer , fa
Mere & les autres femmes
qui avoient aidé à
la faire revenir de fa
foibleffe , la laifferent
feule avec Nerine.
Ce fut là le premier
moment de bonheur
pour Angelique depuis
GALANT 184
Je départ de fon Amant ,
car Nerine , aprés tou
tes les façons que vous
pouvez vous imagi
ner, luy fit tout avouer,
devint fa Confidente ,
& luy promit de la tirer
d'affaire fans que fa
Mere mefme puft s'en
appercevoir . En effet,
depuis ce jour-là Nerine
& Angelique prirent
fecretement des
melures. Angelique a
50 MERCURE
voit une Tante qu'elle
aimoit fort;elle refolut
de luy confier fon fe
cret . Cette Tante avoit
une Maifon de Campagne
fort prés de la
Ville, Ainfiquand Netine
jugea qu'il eftoit
temps, la Tante obtint
de la Mere que fa fille
iroit paffer quelques
jours avec elle à la cam
pagne.
Ce fut là qu'Angeli
GALANT.
que , par le fecours de
Nerine , fe debaraffa de
ce qui pouvoit nuire à
fa reputation . Elle retourna
bientoft aprés à
la Ville où elle parut
plus belle , plus fraif
che , & plus fille que
jamais, įšalai
Voicy où commen
ce le fujet du Procez .
La Tante & la Niéce ,
à la follicitation de Ne
rine ,
convinrent qu
MERCURE
elle fe chargeroit de
l'Enfant qu'elle promit
par un Billet de reprefenter
toutes les fois
que l'amour maternel
d'Angelique la prefferoit
de voir en fecret
cette petite fille , car
c'en eftoit une , & qui
parfaite- reſſembloit
ment à fa Mere.
Nerine part avec la
petite fille , & court
d'abord chez Dorimeno
CALANT. $ 98
t
Requi n'attendoit que
Pheure d'accoucher de
l'Enfant d'Angelique
.
Elle s'eftoit mife depuis
quelques jours au
lit , où plufieurs voifines
la venoient voir.
Les témoins luy ef
toient neceffaires afin
qu'on ne puft dans la
fuite luy chicaner la
proprieté de l'Enfant
qui alloit paroiftre. H
falloit donc que ces
R
194 MERCURE
voifines viffent & ne
viffent pas ; c'eft ce qui
l'embaraffoit ; car elles
eſtoient trop curieuſes
& trop empreffées à la
fecourir. Il eftoit difficile
d'éluder leurs curiofitez
indifcretes. A
D'un autre côté Nerine
eftoit arrivée avec
l'Enfant par une petite
ruë deftournée où donnoit
un Jardin de la
mailon . Elle gagna par
CALANT . 195
an degré dérobé une
Garderobe où elle laifla
Enfant. Cette Garderobe
donnoit dans la
*
ruelle du lit de Dorimene
, Nerine entra
feule dans la chambre
& donna le ſignal.Auffi
-toft Dorimene pria
les voifines de la laiffer
repofer.Elles s'éloignerenttoutes
jufqu'à l'au
tre bout de la chambre
, & bien dit Dori-
Rij
196 MERCURE
mene impatienter , à
quoy en fommes nous.
Tout va bien répond
tout bas Nerine ; nous
avons tiré d'affaire noftre
pauvre fille encein
te , & je vais vous faire
acoucher
de l'Enfant
de cette fille - là.ziy
Pendant qu'elles
par
loient bas de la maniere
dont elles alloient
jouer des gobelets l'En
fant quis'ennuyoit feul
GALANT. 197
dans la Garderobe le
mit à crier comme un
Enfant déja né ; les voifines
entendirent ces
cris prématurez , &
tout eftoit perdu fi Dorimene
n'euft eu la prefence
d'efprit de couvrir
les cris de l'Enfant
par les fiens. Nerine
crioit auffi
, courage
,
Madame ,
courage , &
cela fit un chorus
ра-
reil à celuy que firent
Riij
198 MERCURE
jadis les Corybantes
pour cacher a Saturne
les cris du jeune Jupi
ter.
Dans ce moment
Nerine efcamota fisadroitement
l'Enfant
que l'ayant gliffé fur le
bord du lit , elle l'en
tira comme s'il fuft ve
nu de plus loin , & le fit
voir à ces connoiffeu les
qui s'eſtoient avancées.
Elles admirerent fa
THEQUE
GALANT .
beauté
, le trouvant
pourtant un peu trop
fort pour fon áge . Ne
rine leur figne que la
malade avoit un grand
mal de tefte . Elles for
DE
LA
*
77q
་་
tirent doucement fur
la pointe du pied en
attendant le Baptefme
qui fe fit le lendemain
folemnellement .
Voilà un Enfantbien
vrayfemblablement
establi dans la fa-
R iiij
200 MERCURE
mille deDorimene.Ily
fut élevé pendant quel
que temps fans qu'An+
gelique fceut que c'è,
ftoit le fien. On ne m'a
point dit comment el
le en fut inftruice; mais
faites
attention icy à
la
circonſtance la plus
eftonnante de toute
l'hiftoire. Vous avez
veu la timide Angelique
cacher en tremblant
les fuites de fon
CALANT.
mariage fecret , & on
la voit à prefent reclamer
publiquement
le
témoin de fa faute . El
le ne craint plus de publier
fa honte : cechangement
ne paroist pas
vrayfemblable ; c'eft
eependant un fait publico
, & qui , comine
j'ay dit , fait à prefent à
Lion le fujet d'un
grand Procez. L'Avo
cat dit que l'amour ma262
MERCURE
ternel feul l'a déterminée
à faire un tel éclat ;
mais elle a eu des rai-
* fons particulieres
que
je ne puis encore reveler
au public , quand le
Procez fera jugé , il
me fera permis de dire
ce que je fçai de ce dénouement
, qui ne roule
encore à Lyon , que
fur la déclaration de la
Sage-femme.ALM
GALANT : 263
ACADE MIE
Royale des Médailles
-ist
Infcriptions
.
Le Vendredy 14 ,
Meffieurs de l'Acadé
mie Royale des Médailles
& Infcriptions
tinrent leur Affemblée ·
publique à l'ordinaire
dans la Semaine de la
S. Martin .
Mr l'Abbé de Boiffy
ouvrit l'Aſſemblée par
104 MERCURE
la lecture d'un Dif
cours fur les Expiations
.
Mr l'Abbé Couture
en lut enfuite un fur
le Souper des Romains.
Et Mr l'Abbé Simon
en lut un fur les Préfa
ges .
Extrait du Difcours de
Mr l'Abbé de Boify .
Mr l'Abbé de Boif
fy marque dans le com
GALANT. 291
mencement de fon Di
cours , l'importance &
l'ancienneté des expias
tions , & prouve que les
plus anciens Autheurs
de la Theologie Payenne
, ont reconnu cette
Providence divine , qui
recompenfe le bien &
punit le mal , & que
dans tous les temps on
avoit cru les expiations
du crime , une Loy indifpenfable
de cette
266 MERCURE
Providence. Il montre
labus que les Payens
faifoient de cette Loy ,
en immolant des Victimes
humaines , Sat
crifices cruels , dit- il
dans lesquels on offençoit
la nature , en voulant reverer
les Dieux , & c. .
Enfuite aprés avoir
exposé cette verité conftante,
qu'avant la Loy
de Moïie , levray Dieu
avoit cftabli les SacriGALANT
. 207
fices . Il fait voir l'abus
que la fuperftition en
a fait par degrez.DA
Voicy ce qu'il rapporte
d'Hefiode fur la
punition des crimes &
la neceffité des Expia
tions .
Hefiode , dit-il , dans fa
Theogonie raconte que la
Nuit enfanta les cruelles
Parques Clotho , Lachefis,
& Atropos , fatales difpenfatrices
du bien & du mal,
dont la feverité s'attachant
308 MERCURE
à pourfuivre le crime , le
punit également dans les
hommes & dans les Dieux,
& dont la colere ne s'appaiſe
qu'après avoir frappé
les criminels.Il ajoute que
la Nuit eut encore pour
fille , Nemefis , Deefle fi
redoutable aux malheureux
mortels que les Grecs
ont auffi connuë fous les
noms de Rhamnufienne , &
d'Adraftée , & que les Romains
qui ne luy avoient
point donné de nom propre
en leur Langue , n'ont
pas laifle de reverer dans
le
GALANT. 209
7
in
fe Capitole , fuivant le témoignage
de Pline. Plutarque
qui luy donne pour
auteurs de fa naiffance , Ju
piter & la Neceffité , nous
la reprefente placée dans
un lieu fort élevé d'où elle
ordonne des chaftiments
pour tous les crimes . Point
de Scelerat que la force ou
Fadreffe puiffe fouftiaire à
fa pourfuite. Trois autres
Déeffes luy fervent de Miniftres
, & font employées
à l'execution de fes ordres;
l'une prompte & legere appellée
Panée , s'attache aux
S
20 MERCURE
coupables qui dés cette vie
font condamnez à des peines
corporelles ; elle eft
moins cruelle que les autres
, & laiffe mefine paffer
des fautes legeres , qui fembleroient
demander quel
que forte d'expiation Ceux
dont les mauvaiſes habitudes
font plus difficiles à
corriger , tombent aprés
leur mort entre les mains
de Dicée , la feconde de ces
Divinitez vengereffes . A
l'égard des Criminels les
plus endurcis , aprés avoir
efté repoullez par Dicée,
GALANT. 217
fls font livrez à la fureur
d'Erenys , plus implacable
que les deux autres . Elle
les pourfuit fans relaſche ,
& aprés les avoir fait longtemps
errer dans la douleur
& dans l'affliction , les précipite
dans un abyfme affreux
, & c .
25 M. l'Abbé de Boiffy
tire de cette allegorie ,
& de plufieurs autres
paffages auffi anciens ,
cette verité crue dans
tous les temps , que les
S ij
212 MERCURE
Dieux punifloient les
crimes , & qu'ils ſe laiffoient
flechir par les
Expiations .
Il obferve de plus que les
Philofophes , & fur tout
les Pythagoriciens , fe propofoient
dans l'expiation
une fin beaucoup plus no
ble & plus élevée. , al boys b
Leur Purification cele- ,
bre dans l'Antiquité , fous
le nom de kadaroys avoient
quelque rapport à ce que
nos Myftiques appellent la
vie Purgative. Elles eftoient
GALANT. 213
diftinguées en differents
degrez par le moyen defquels
ils prétendoient que
l'ame degagée de toutes
les foüil eures qu'elle avoit
contractée par fon union
avec la Matiere eftoit re- reftablie
dans toute la pureté
de fa premiere origine ; de
forte qu'aprés ſa feparation
d'avec le corps , elle parvenoit
enfin à eftre déïfiée,
C'eſt ainſi que s'exprime
un de ces Philofophes dans
les Vers dorez attribuez
communement
à Pythago
re
114 MERCURE
Et quand ton Ame fe-

patée de ton Corps , fera
parvenue dans la region
de l'air le plus pur , tu de
viendras un immortel , in
corruptible . Mais ce n'eft
pas icy le lieu d'examiner
cette opinion que nous refervons
à developper dans
la fuite , & c.
M. l'Abbé de Boiffy
paffe de là à un détail
tres curieux , des diffeles
rents
termes que le
Grecs & les Romains
appliquoient
aux Sa
GALANT 2
crifices
expiatoires .
tion remarque enfuite que la
furnom de Februata chez
les Sabins , & chez les Romains
celuy de Februlis ,
parce que tous les ans dans
la Fefte des Lupercales ; on
faifoit l'expiation de la
Ville de Rome , par cette
raifon ce jour le nommoit
Februatus. C'eft dela au
rapport
de Varron
& de
Feftus que le mois de Fevrier
à tiré fon nom d'au
tant que cette ceremonie
fe pratiquoit pendant ce
26 MERCURE
mois ; Pline Liv. 15. ch.19.
fait mention de Venus Cluar
cina de l'ancien mot cluere
purifier.
Cette exactitude à fpecifier
les noms des Dieux
paffoit pour un point telle
ment important dans la
Theologie Payenne , qu'on
fa poulloit jufqu'au fcrupule
, & qu'on croyoi n'y
pouvoir manquer fans encourir
leur indignation.
C'est ce qu'on peut voir
dans le Philebus de Platon.
Un des Perfonnages de ce
Dialogue avoit avancé que
la
GADANT . 0217
la Déeffe que l'on appelloit
communement
Venus ,
pouvoiteftre nommée plus
proprement & plus veritablenient
la Volupté : Ma
crainte eft exceſſive , répond
Socrate , lorsqu'il s'agit de
donner des noms aux Dieux ,
ainfi puifqu'il a plû à cette
Déeffe de fe faire appeller
Venus ,je parleray d'elle fous le
nom qu'elle aime le mieux.
Les Anciens apprehen
doient tellement d'omettre
ce nom favori de chaque
Divinité qu'ils chargeoient
leurs invocations de tous
Τ
218 MERCURE
ceux dont ils pouvoient
s'avifer, c'eft ce qu'on peut
aisément remarquer dans
plufpart des Hymnes
la
anciennes qui ne font le
plus fouvent qu'un tiſſu de
furnoms & d'épithetes .
Ainfi Catulle aprés avoir
invoqué Diane de differentes
manieres ; Soyez reverée
, luy dit - il , fous tel
nom qu'il vous plaira deprendre.
Ainfi dans le Poëme
feculaire d'Horace, ce Poëre
s'adreffe à la mefme
Déeffe en ces termes : Favorable
Hithyie , ou Lucine
GALANT.
219
com
foit que vous
choififfiez ce nom,
foit que vous luy
preferiez
celuy de
Déeffe qui
préfide
aux Noces
Quelquefois au lieu de
demander aux Dieux quel
nom leur eftoit le plus a
greable , on fe
contentoit
de mettre au pluriel un de
ceux qu'ils portoient, comme
pour embraſſer par la
toute la Divinité , & ne
rien oublier de fes attributs
. C'eft en ce fens que
l'oracle des Sybilles a dit :
Aprés les Parques ilfaut appaifer
les Hithyies par des Sa-
Tij
220 MERCURE
crifices comme il eft convena-
Anos venal bup slots
Enfuite M. l'Abbé de
25000 , 10
Boiſly donne aprés les
anciens,au terme d'Expiation
, une fignification
plus étendues , &
dit : 45mut 2
Qu'ils fe fervoient des
mots expiare & luftrare
non feulement par rapport
aux crimes ; mais encore à
l'égard de tout ce qu ils regardoient
comme là' ſuite
ou l'effet de ces meſmes
crimes. Ainfi expier te
?
GALANT. 221
fignifioit fouvent autre
chofe que faire certains
actes de Religion dans la
vue d'éloigner quelques
malheurs foit qu'on les reffentit
actuellement , foit
que l'on en fuſt ſeulement
menace par des prodiges
ou par d'autres fignes , &c .
Ce n'eftoient pas
ent pas feulement
les particuliers qui
avoient befoin d'expiation,
des Villes toutes entieres .
Le croyoient obligées d'y
ayoir recours. La plufpart
Tiij
222 MERGURE
2
d'entr'elles avoient un jour
fixe pour cette Ceremonie
que l'on renouvelloit tous
les ans . Elle fe faifoit à
Rome le s . de Février. Le
Sacrifice fe nommoit Am
burbale ou Amburbium , lelon
Servius , & les Victimes
que l'on y employoit
Amburbiales , au rapport de
Feftus.
2119.
On la celebroit à Athenes
le 6. du mois Thargelion
, qui répondoit à celuy
d'Avril. C'eft Diogene
Laerce qui nous en afſure
dans la vie de Socrate.ca
GALANT . 223
Chez les Romains , aprés
le dénombrement
des
Citoyens , qui fut inſtitué
par Servius Tullius , il y
avoit une Expiation
fomefolemnelle
le
pour tout peuple
, & parce qu'elle fe faifoit
tous les cinq ans , c'eſt
du mot luftrare , expier ,
que cet efpace de temps a
pris le nom de Luftrum.
Dans les Jeux Seculaires ,
qui comme l'on fçait fe
celebroient tous les 10 .
ans , la pompe commençoit
tousjours par une Expiation
generale , & les
Tij.
214 MERCURE
Preftres diftribuoient tout
ce quieftoit neceffaire pour
la pratiquera upisT 29m
Mais avec ces Feftes dé
terminées à certains jours
fixes , on ordonnoit en certaines
occafions des Expiations
extraordinaires. Ainfi
, ſelon le témoignage de
Denis d'Halicarnaffe , la
Ville de Rome for purifiée
aprés que les Tarquins en
eurent efté chaffez . Selon
le mefme Autheur , elle le
fur encore neuf ans aprés
au fujet du meurtre d'un
grand nombre deCitoyens,
GADANI. **
qui avoient efté tuez en
voulant reſtablir les mess
mes Tarquins & quoy!
qu'une juſte neceffité l'euft
fait commettré , le Senat
arreſta neanmoins que tout
le Peuple feroit expiés
d'autant que fans cette prés
caution il ne leur euft pas
efté permis d'approcher
des Autels , & de faire les
Sacrifices ordinaires, 231q5
Ce n'eftoit pas feule.
ment fur les Villes entieres
omboient les Expia
ions .Elles s'exerçoient ene
core fur certains particu
que
216 MERCURE
liers qu'on jugeoit devoir
eftre purifiez, Lorsqu'on
pratiquoit ces Ceremonies
à l'égard des Carrefours ,
on les nommoit Compitalia,
&c.
Les Atheniens purifioient
auffi les Theatres &
les lieux où fe tenoient les
Affemblées publiques .
Chez les Romains dou
ze perfonnes nommées Fratres
Arvales , purifioient la
Campagne au mois de
May , & les Expiations qui
ne tomboient que fur les
GALANT . 227
perfonnes eftoient ou publiques
ou particulieres .
as. Les Expiations du premier
genre font celles dont
on ufoit dans les Armées.
On les expioit ordinairement
avant & aprés le
combat.
La premiere de ces Expiations
fe faifoit pour prevenir
les malheurs que le forr
des armes pouvoit faire
apprehender l'autre eftoit
deftinée pour fe purifier du
carnage qu'on avoit fait
dans l'action , & pour appaifer
les Manes de ceux
228 MERGURE
qui y avoient efté tuez , &
toutes les deux eftoient appellées
Armiluftriuməclisdə
Quand aux Purifications
particulieres , elles eftoient
d'un reffort beaucoup plus
eſtendu, puiſqu'il n'y avoit
ni Nôces ni Funerailles qui
n'y fuffent également affu
jetties. Mais la fuperfti
tion des Anciens nes'arreftoit
pas à ces actions communes.
Elle multiplioit tel
lement à leurs yeux les ob
jets de frayeur , qu'ils s'imur
ginoient voir à tous mag ·
nents la Nature foulevée
CALANT 2*
fe declarer contre eux , &
less Elements irritez fe dé
chaifner pour declarer la
guerre au genre humain de
la part des Dieux . Un Oráge
imprévu , la chute de la
Foudre , le debordement
des Rivieres ne fe faifoient
pas craindre feulement
pour les dommages
réels
qu'ils caufoient , ils paffoient
pour autant de pre
fages de malheurs encore
plus redoutables
.
Theophrafte
en faisant le
Portrait d'un Superſtitieux,
dit que les vapeurs d'un
<
230 MERCURE
Songe , la rencontre d'une
Belette , ou le cris d'une
Sourish, troublent l'efprit
d'un homme timide , &
l'arreftent tout court au
milieu de fa courfe & de
ſes projets , be any betaal
Ecoutons Ariftophanes
.
Qu'un Tremblement de
Terte fe fafle fentir , dit ce
Comique , qu'un feu de
mauvaife augure brille tout
à coup dans l'air , qu'une
Belette vienne à paffer dans
le lieu de l'Affemblée publique,
ne fe feparera- t- elle
pas à l'inftant , & c . ......
CALANT 23T*
Dans le temps qu'on fai
foit l'élection de Fabius
Maximus à la dignité de
Dictateur , & de C. Flaminius
à celle de General de
la Cavalerie , on entendit
le cris d'une Souris , & c'en
fut affez , au rapport de
Valere Maxime , pour obliger
ces Magiftrats à ſe dépofer.
A l'égard des Songes ,
Plutarque nous fait une
vive peinture de cette fuperftition
. Le fommeil ,
dit ce Philofophe , fait oud
blier aux Efclaves la dureté
32 MERCURI
de leurs Maitres . Iladoueit
les peines des malheureux
enchaifnez dans une
prifon . Il donne du relafche
à la douleur la plus
vive sitout s'abandonne à
fes charmes , & la fuperftition
feule y cft infenfi
ble. Elle agite ceux qu'elle
captive jufques dans le fein
du repos , & leur fufcite
dest vifions terribles de
Monftres & de Furies,
Tourmentez de ces cruel,
les chimeres ils ne peuvent
ceffer de les craindre , lors
mefme qu'ils fon éveillez ,
&
GALANT 233
&0
pour fe delivrer d'un
fupplice que leur credulité
feule leur fair fouffrir, ils
achetent à grand frais le
fecours des Devins. Si vous
apprehendez l'effet de quel
que vifiony leur crient ces
Charlatans ,vfi vous eftes
pourfuivis par Hecate la
terreftre , appellez la Vicil
le qui paiftrit voftre pain ,
plongez-vous dans la Mer
& tenez -vous affis à terre
tout le longd'un jour , &c.
anol ,Sibritano ao ob -Tas
Aprés avoir parlé de
V
234 MERGURE
l'Expiation des homicides
, Mr l'Abbé de
Boiffy en rapporté dans
un feul point d'hiſtoire
les circonftances les
plus effentielles. ent
Jaſon , chef des Argo
nautes , aprés avoir enlevé
la Toifon d'or avecMedée,
fut pourfuivi par les Peuples
de Colchos comman
dez par le jeune Abſyrte ,
frere de cette Princeffe . Les
Grecs , qui s'eftoient reti-

CALANT. ± 33
rez dans une des Bouches
du Danube , prés d'estre
accablez par le nombre
deliberoient déja de livrer
Medée , pour obtenir le
paffage qui leur étoit fermé
lors que cette Princeffe
des tira d'embarras
par cette
rufe. Elle envoya de ma
gnifiques preſens à ſon fre,
re . Elle luy fit dire qu'on
Femmenoit contre fon gré,
& luy propofa de fe rendre
feul vers le foir dans
une Ifle voifine , l'affurant
qu'elle s'y trouveroit feule
de fon cofté , & qu'elle
V ij
‹ MERCURE
vouloit retourner avec luy
Colchos aprés avoir tire
la Toifon d'entre les mainp
des Grecs Abfyrre Nine
imprudemment au pren
dez-vous où il croyoit ne
rencontrer que fa fours ;
mais Jafon qui s'y leftois
caché de concert avec elle,
attaqua tour a couple jounePrince
qui n'eſt out point
fur fes gardes , & lẻ của
fans beaucoup de peine, b
Auffi toft il coupe les extremitez
de ce Cadavre , il
leche trois fois le fang qui
en fortoit , & obferverde
GALLANIM **
le cracher trois fois felon
la coutume des Meurtriers
qui pretendoient s'expter)
ainsi que de remarque alb
Poëte à quoy le Scoliafte
ajoute que l'ufage des A
falhas eftoit de s'attacher
au colyles extremiēz du
Corps de ceux al qu'ils
avoient maffácrez : Aprés
cette action fanglante , Ja
fon & Medée fe hafterent
de regagner leur Vaiſſeau,
& les Argonautes ayant
furpris quelques Bafti
mens de Colchos , fe fau
Nerentsà la faveur de da
238 MERGURE
nuit, Ils aborderent dans
Ille d'Acca , oùsJaſon &
Medée prirent terre pour
fe faire expier spar Circé
qui en eftoit Souveraine.
Cetre PrinceffeSoeur d'Ae
tes , & Tante de Medée
les reçut avec bonté fans les
connoiftre , & voulut en
vain les faire affeoir . L'un
& l'autre fans proferer une
feule parole , & tenant les
yeux baiffez , s'avancerent
promptement
jufqu'au
foyer , felon la coutume
des Suppliants , & s'y tinrent
allis aprés que Jafon
GALANT. 239
euft fiché en terre l'épée
dont il avoit tué Abſyrte,
Leur filence & leur fituá,
tion firent aisément com
prendre à Circé qu'ils eftoient
fugitifs & coupables
de quelque homicide,
Alors , continue le Poëte ,
touchée de refpect pour
Jupiter protecteur des Sup
pliants belle ordonne les
apprefts du Sacrifice. On
apporte d'abord un petit
Cochon qui retroit encore,
elle l'égorge , elle fromte de
fon fang les mains dé Ja
fon & de Medée , & fait
240 MERCURE
des Libations en invoquant
Jupiter Expiateur. Enfuite,
ayant fait jetter dehors par
fes femmes les reftes du
Sacrifice elle brufle fur
l'Autel des Gafteaux pais
tris de Farine , de Sel &e .
d'Eau
cette action de Prieres pro
pres à fechir la colere des
cruelles Eumenides , foit
qu'ils euffent trempé leurs
&
accompagne
mains dans un fang étran
ger , foit qu'ils les euffent
fouillées du meurtre d'un
de leurs Citoyens ou de
leursproches
Dés
GALANT. 241
Dés que ces Ceremonies
furent achevées , Circé
ignorant encore le fort & le
nom de fes hoftes , les fit
affeoir fur des fieges magnifiques
, & leur demanda
qui ils eftoient , d'où
is venoient , & quel fujet
les avoit engagez d'imploter
fon fecours . Medée
qu'elle fouhaittoit fur tout
d'entendre parler n'eut
pas pluftoft levé la teſte
qu'elle fe fit reconnoiſtre
fes yeux brillant d'un éclat
particulier à la famille
d'Eetes fils du Soleil , puis
X
242 MERCURE
s'exprimant en la langue
de Colchos , elle fe juftifia
d'une voix timide , rejer
tant fur de mauvais confeils
tout ce qu'elle avoit
fait , & paffant legerement,
fur la mort d'Abfyrre.Mais
Circé n'en comprit pas
moins toute l'atrocité de
fes forfaits. Malheureuſe
Princeffe s'écria - t - elle
dont la fuite n'eft pas,
moins indecente que criminelle
comment éviterez
vous la fureur d'Æetes
, qui pour venger la
mort de fon fils vous pourGALANT.
243
fuivra fans doute jufqu'au
fond de la Grece ? Pour
moy , dont vous avez imploré
la protection en état
de fuppliante , je m'abſtiendray
de rien entreprendre
contre vous ; mais n'attendez
point que j'approuve
ni vos deffeins ni voſtre
fuite, & que je vous donne
azile dans ce Palais non
plus qu'à l'inconnu que
vous fuivez contre le gré
de voſtre Pere . Aces mots,
Medée toute tremblante
& fondant en larmes , fut
emmenée par Jafon avec
X ij
144
MERGURE
lequel
elle rejoignit
les Argonautes
, &c. 4. 56.3001574
Le foyer
eftoit
auffi un
azile facré
chez les Romains
; car felon Plutarque
,
Coriolan
qui avoit
eſté
banni
de fon Pays , contraint
de chercher
un azile
chez Tullus
Aufidius
,
le plus
confiderable
des
& fon ennemi es .
4
particulier
, prit en entrant
chez luy le party de s'affeoir
prés du foyer où il
demeura
fans, parler
&
fans fe découvrir
la tefte
& le vifage , ce qui eſt aſ
GALANT . 245
fez conforme à la contenance
de Medée chez Cir
cé . flus an fis paveld
On pourroit eftre furpris
de voir dans ces exemples
d'illuftres malheureux
fe jetter entre les
bras de leurs ennemis mefmes
, mais ils eſtoient trop
feures du refpect qu'on
avoit de leur temps pour
le droit des fuppliants que
les plus fcelerars euffent à
peine ofé violer ; fentiments
louables , fur lef
quels on afans doute formé
se Proverbe qui fait tant
*
X
iij
246 MERGURE
d'honneur aux moeurs de
Antiquité , Res eft facra
mifer.
On a vu dans la purification
de Jafon & de Medée
, que les reftes du Sacrifices
avoient efté jettez
dehors, & c'eft ce qui s'obfervoit
fcrupuleufement
dans toutes les Expiations,
tant à l'égard des Victimesque
des autres Offrandes.
Agamemnon , dans le I.
de l'Iliade , commande de
purifier l'Armée , enfuite
dequoy l'on jette dans la
Mer les reftes du Sacrifice.
CALANT. 247
Les
Egyptiens , aux rapport
d'Herodote veirdoient
aux Grecs
prevenus
apparemment
contre leur
Religion , la teſte de la
Victime immolée , où s'ils
ne trouvoient point de ces
Marchands Etrangers , ils
la jettoient dans le Nil
en prononçant ces paro-
·les Puiffent tomber fur
cette tefte , les malheurs qui
menacent l'Egypte où celuy
qui fait ce Sacrifice.
Surquoy l'on doit remar-
Aquer que c'eftoit tousjours
dans la Mer , dans les Fleu
X
iiij
248 MERCURE
Y
ves où dans les Ruiffeaux
qu'on enfeveliffoit autant
qu'il eftoit poffible , ces
reftes de teftes . Pour ceux
qui eftoient trop eloignez
des eaux ils fe contentoient
de les faire porter
dans les Carrefours ; on
s'abftenoit encore en jettant
ces reftes , de regarder
derriere foy , de peur d'attirer
en les voyant
malheurs qu'on le figu
roit y eſtre attachez.
Il y avoit une forte
d'expiation de l'homicide
bien plus commode &
les
GALANT. 249
plus facile que les autres ;
elle confiftoit à fe laver
fimplement dans un Eau
courante. Elle avoit cfté
pratiquée dés les premiershecles
, fur tout par les
Grecs qui la tranfmirent
aux Latins.
On employoit fur tout,
cette derniere efpece de
Purification en fortant des
Batailles . Achille à foin
de fe purifier à Milet dans
une Source d'eau courante
aprés avoir tué Strambellus
Roy des Leleges.
Anée , au II . Livre de
10 MERCURE
PEneïdé , affure qu'il ne
luy eft pas permis de fe
charger des Statues des
Dieux jufqu'à ce qu'il fe
foit expie par cette Ceremonie
.
Horace aprés avoir tué
fa Soeur fut expié de la
maniere que les Loix le
preferivoient pour les
alors
meurtres involontaires. Les
Preftres éleverent
deux Autels , l'un à Junon
Infpectrice des Soeurs , &
Fautre à un Dieu ou Genie
du Pays , que les Romains
ont appellé Janus , & ont
GALANT. 25r
furnommé Curiace , du
nom de ces Albains infortunez
qu'Horace avoit tuez
en deffendant fa Patrie.
Lors que les Sacrifices &
les Expiations
furent achevées
, on fit enfin paffer
Horace fous le joug couftume
pratiquée par les
Romains à l'égard des enenemis
qui fe rendoient
à
difcretion. Tite - Live, qui
fait à peu prés le mefme
dérail , ajoufte feulement
que l'expiation
fe fit aux
dépens du Public ; qu'on
couvrit
la tefte d'Horace
152 MERCURE
lorfqu'il paffa fous le joug
& que la pratique des Ce +
remonies qu'on avoit ob
fervées à fon égard fut
tranfmife à fa famille com
me une espece d'heritage .
Je voudrois bien don
ner au Public de petites
Differtation's fur les
nouveautez de nos
Theatres mais je :
crains de bleffer la fin
cerité, ou les Autheurs.
S'ils
vouloient m'en
voyer eux-mefmes un
GALANT #51
nota des deffauts de
leurs pieces , dont ils
me permettroient de
parler , je fournirois
moy mes remarques
fur les beautez qu'elles
contiennent , & cela
feroit une vraye critique.
J'attends le confentement
par écrit du
premier
Autheur
de
bonne foy qui voudra
bien
convenir que
fa
piece à des deffauts , &
434 MERCURE
qu'il a cela de commun
avec Corneille , Moliere
, Racine , & Quir
naut.
GALANT: 259
BOUTS RIMEZ
DONNEZ
DANS LE MERCURE
PRECEDENT .
Remplis par l'Amanijaloux,
Tu fus jadis pour moy
conftante
Tourterelle
Pour moy feul je te vis
douce
comme
un • Mouton
Mais ton coeur plus leger
que n'est
un · Haneton
E MERCURE
Tetransforme à mes yeux
en volage
Hirondelle .
Mon indigne rival an
ne7
de..... Perroquet
Guindant fur fon vieux
corps fa tefte
de . Linote
Quand je veux t'approcher
entre fes
dents ....marmote
Hveutfaire le Dogue
అ&
GALANT. 25%
ε5 ce n'est
qu'un .... Roquet.
De ce Singe l'hymen te
fait donc
la La .... Guenuche
Il eft
puiffant
Seigneur ,
dit-it, brides
à ... Veaux
Il doit au
Maquignon fes
deux
maigres .. Chevaux
Et s'épargnant le vin
boit
moins
que
258 MERCURE
ta ....... Peruche
SaTable , luy nourri , ne
peutnourrir
fon........
Chat
Che luy Merles rotia
paffent
pour... Gelinotes
Mange- t- ildesGougeons,
il les
nomme . Barbotes.
Tu le crois riche enfin il eft
gueux
comme
un .... Rat
GALANT. 239

Prés d'un gros Boeuf ,
Amant d'une
jeune .... Geniffe
Il
s'entremet , il rampe ,
∙il
porte
le
.
Poulet
A la porte du riche il
garde
le .
mulet
A la fortune il court
mais à
pas.. d'Ecreviffe
.
Y ij
160 MERCURE
Il fait pour tout métier
tirer
la ....Beccaffine
Tu m'as quitté
pourtant
pourplumerie
)
ce
... Pigeon
Mais
telle
en fes filets
croit prendre
un ... Efturgeon
Qui n'y trouve à la fin
qu'une
maigre .. Sardine.
GALANT. G
BOUTSRIMEZ
LES QUATRE
SAISON S.
LE PRINTEMPS.
Le
Ramier
bequetant la
tendre
La
TourtereHe
Ra Bergere
diftraite
égarant
fon..... Mouton
Et la Terre en Amour
formant
le ...... Hanctom
262 MERCURE
Defignent le Printemps
qu'annonçoit
Hirondelle.
L'ESTE
Quad l'Efté fait jafer le
frilleux
Perroquet
La chaleur rends muets
Roffignol
ε5
Linote
Le Foureurfans travail
dort comme
une ... Marmote
Et la Bourgeoife auMail
GALANT . 263
fait baigner
fon.
Roquet.
L'AUTOMNE.
Je vois la noix nouvelle
amufer
la .... Guenuche
L'Homme va s'amuser à
boire vins
nou veaux
Et Phebus s'éloignant
fait tourner
fes..... Chevaux
Vers les climats bruflants
d'où nous vient
3
264 MERCURE
la Peruche
L'HYVER.
L'Hyver qui dans Paris
fait beriſſer
le Chat
T fait venir du Mans
Plaideurs
... Gelinotes
L'Officiery mangeant &5
Perdrix
Barbotes
Par mille autres plaifirs ,
devient gueux comme
un
Rat.
BOUTS
GALANT. 257.
BOUTSRIMEZ
HEROIQUES
ET
CHAMPESTRE S.
Lauriers
Guerriers
.Mufette
Lifette
Cefars
Etendars
Houlette
Folette
258 MERCURE
intrepidite
immortalité
ramages
.bocages,
On a demandé enquoy
font differentes
la jaloufie d'un Mary ,
& la jaloufie d'un Amant
.
REPONSE.
Par Mr de Gi *
LA jaloufie des Amants
dure moins que
GALANT. 259
celle des Maris , carun
Amant eft gueri de ſa
jaloufie en ceffant d'aimer
; mais un Mary ne
peut fe guerir de fa jaloufie
qu'en ceffant d'eftre
jaloux ,
REPONSE .
Par le Marquis de * *
La jaloufe fureur anime
les Efpoux ,
L'Amant eft accablé de
C
fes Soupçonsjaloux;
Zij
160 MERCURE
Sur fa femme un Mary
cherche à punire
l'offense
Et l'Amant fur luymeſme
exerce fa
vengeance,
REPONSE.
Par Me de **
Les
Amants font
plus fols dans leur jaloufie
que les Maris ,
car l'Amant jaloux époufe
quelques fois ;
GALANT . 261 .
mais le Mary jaloux ſe
demarieroit s'il pouvoit.
Les Maris font fols
de fouffrir
fi impatiemment
un mal qu'ils ne
peuvent empefcher
; &
les Amants font fols
de s'affliger
d'un mal
dont ils peuvent fe delivrer.
Z iij
262 MERCURE
REPONSE.
Par Mr de Chen ...
La jaloufie des Maris
eft plus foupçon
neufe;celle desAmants
eft plus capricieuſe.
Les jaloufies des Ma
ris font fouvent mieux
fondées que celle des
Amants ; & par confequent
celles
des Amants
font plus bizarres
& plus injuftes , car
GALANT . 263
il cft plus vray-femblable
, vertu à part , qu'-
uneMaiftreffe foit fidelle
qu'une Femme.
REPONSE.
Par M. de la M. A
Souvent la jaloufie
efteint l'amour des
Maris , & ne fait au
contraire qu'augmenter
celuy des Amants .
LeursCoeursfont des brafiers
ardents
Z iiij
164 MERCURE
Ferrez -y de l'eaufans rien
craindre ;
Mais l'Amour d'un Epoux
resemble aux
·feux mourants
Qu'une goutte d'eaupent
efteindre.
REPONSE.
Par Licidas.
La jalouſie des Amants
eft ordinairement
plus delicate , &
plus difcrette: celle des
GALANT. 269
Maris eft plus groffiere
& plus brutale; elle
eft gravée par des rides.
fur leur front; celle des
Amants
refpectucux
n'eft gravée que dans
leur coeur.
REPONSE.
Par M. P **
*
De
l'Amant au
Mary',
voicy la
difference ,
Dans leur jaloufe extravagance
266 MERGURE
L'un eft jaloux de fon .
bonneur ,
L'autre eft jaloux
droits du coeur.
REPONSE.
Par M. des **
des
L
à
La
jaloufie en
general
n'eft plus
gueres
la mode ni dans les Amants
ni dans les Mafis
.
Les Amants font a
preſent fi vifs dans leur
GALANT. 267
pourſuite , & fi inconftants
dans leur bonheur
, qu'ils n'ont pas
le temps d'eftre jaloux
A l'égard des Maris
s'il y en a beaucoup
qui le foyent , il y en
a peu qui le paroif
fent.
Si l'Epoux inquiet n'ofe
plus le paroifire , -
C'est qu'il eftparmy nous
Honteux d'eftre jaloux
268 MERCURE
Et qu'il n'eft plus honteux
d'avoirfujet de l'eftre. "
On n'a pas eu le loifir
en huit jours de ré
pondre à cette Quef
tion. Je vous donne
ray le mois prochain
le refte des répontes
qu'on m'envoyera .
Nouvelles Questions.
Pour donner cccafion
à des réponſes
convenables
au mois
GALANT. 269
prochain qui tombera
dans les Etrennes , voicy
deux Queſtions fur
les mots de donner &
de recevoir,
Premiere Question;
On demande fi
dans le Monde on donne
plus qu'on ne reçoit.
Seconde Queftion .
On demande le
296 MERCURE
quel eft le plus ancien
à l'égard de chaque
homme en particulier,
de donner ou de recevoir.
Cettefeconde Queftion
eft énigmatique , il n'y a
qu'une réponse jufte à faire
: c'est ce qu'il faut deviner.
Troisieme Question
S'il eft
plus
genereux
de donner que de
recevoir.
GALANT. 17t
NOUVELLES
d'Espagne,
Du Camp Royalde Cafa
Texadale 2. Novembre.
LE Roy
reçut il y a
deux jours
un Courrier
deMr
le Duc de Noailles
qui luy
mandoit
qu'il
entreroit
le 10 .
en Catalogne
, & hier il regut
avis quel' Archiduc
avoit
quitté
fon Camp
du Pardo
;
qu'il
avoit
marché
à Pinto
& qu'il avoit
paffe le Tage à
Aranjuez
où (on armée
eftoit
campée
.
MERCURE
de
L'Armée du Roy groffit de
jour en jour. Tous les Magazins
fontfaits à Talavera
la Veja , & à Talavera de la
Reyna. Mr. l'Evefque de
Murcie a envoyé à Sa Majefté
Catholique , un grand
nombre de Chariots chargez
degrains , & toutes les Villes
d'Andaloufie s'efforcent à
l'envi pour donner des marde
leur zele ; les unes envoyent
de groffes fommes ,
d'autres des chevaux tout équipez
mais prefque toutes
de l'argent, & des vivres.
Un Party ennemi de cent
quatre- vingt
ques
GALANT 273.
quatre- vingt Cavaliers , qui
avoit esté envoyé pour s'in-
Former de noftre fituation , a
efté défait par Mr le Marquis
de Lançarote.
LeRebelle Ferrer a voulufe
venger de ce que les habitans
de Corella avoient rafé fa
maifon , ayant affemble à Sa
ragoffe environ mille hommes
tant Fantafins que Cavaliers,
ilfe mit en marche pour tafcher
de nouveau de ferendre maifre
de Corella. Mais les babitans
de cette Ville , de Tu
dela & des autres lieux des
environs
, s'eftant joint aux
A a
274 MERCURE
Troupes , avec lefquelles ils
avoient auparavant chaffé les
ennemis , marcherent au devant
de luy , le chargerent ſt
vivement , qu'il fut obligé de
fe retirer aprés avoir perdu
prés de cent cinquante hommes.
Deux Regimens de Dra
gons , & un détachement des
troupes de Navarre , ont recu
ordre de s'avancerpour empefcher
les courfes des Partis
Ennemis. Les Deferteurs qui
viennent en affez grand nom
bre ,
affurent que
l'Armée de
Archiduc eft fort diminuée.
parce que la trop grande licen
GALANT. 275
du
ce que les Generaux donnent
aux foldats , les excitant àſe
difperfer pourpiller , ily en a
un grand nombre d'affommez
par les peuples , qui ne laiffent
paffer que ceux quiſe difent
Catholiques Deferteurs.
Le bruit qui s'eftoit répanque
l'Archiduc avoit fait
fortir toutes les Dames de Madrid
dans le deffein de donner
cette Capitale au pillage , s'eft
trouvéfaux. Peut- eftre que
refus que les habitans ont fait
de porter leurs armes à la Ca
Za del Campo, les apréservez.
Ce qu'il y a de certain , c'est
le
A a ij
276 MERCURE
que ce Prince eft fort irrité
contre eux , on affure meſme
qu'il a dit que s'il peut deve
nir leur Maiffre abfolu , ilen
fera une Colonie.
Mr de Valejo a enlevé.
aux Ennemis un Convoy de
provifions , & défait deux
cens chevaux qui l'eſcortoient.
Il pleut icy depuis dix jours ;
mais heureuſement le terrain
eft une espece de gravier qui
ne tourne pas aifement en
boue ; en forte que nous n'en
ferons pas incommodez dans
les marches.
D'autres Lettres du 8.
GALANT . 277
portent que l'Archiduc avoit
fait enlever à Madrid
deux mille chevaux pour
remonter fa Cavalerie , &
que quelques maifons avoient
efté pillées que les
Miquelets avoient voulu
s'emparer de Segorbe , anciennement
Sagunte , dans
le Royaume de Valence ;
mais qu'ils avoient effé repouffez
avec perte de cent
foixante hommes ; que le
Roy d'Espagne ayant apr
pris la marche des Enne
mis , avoit détaché fept
mille chevaux pour les fui
278 MERCURE
vre , & pour charger leur
arriere Garde sils pou
voient la joindre.
ARTICLE
des Enigmes
Le mot de la gran
de Enigme
du mois
dernier ; c'eft le Coche,
Voicy les noms de
ceux qui l'ont devinée
,
car je ne veux rien rel
trancher
des anciens
Amufements
du PuGALANT
, 279
blic. J'ay vû des gens
de bon efprit
condamner
ces liftes de noms
badins &
pueriles »
mais j'ay vu auffi des
gens de bon efprit s'amufer
à les lire.Je veux a
croire que ceux qui me
les envoyent font auffi
cenfez que ceux qui les
condamneront &
puis qu'ils prennent
plaifir à les imaginer
bien ridicules , je puis
280 MERCURE
fans deroger au bon
fens mettre icy les plus
extravagants qu'on
pourra m'envoyer.
ENVOY
du nom de l'Enigme.
Caroffe de voiture , ouy
c'est le
motje
croy
Mon
nom
d'Enigme
c'eft
la Roche
;
Sur
le Regiftre
écrivezmoy
,
Carje retiens ma place au
Coche.
Noms
GALANT. 281 .
Noms, Dictons, Rebus ,
de ceux qui ont deviné
l'Enigme du Coche.
La petite Emerillonée
de la rue des Ho-
ز
driettes ; le Beau Tenebreux
; le Coche
part , belle Hermione ;
vous avez oublié que
la Ville du Coche n'eft
point pavée quoy que
le , pavé l'incommode
beaucoup ; l'Esprit mal
Bb
282 MERCURE
leché de la rue aux
Ours ; la belle negligée
à laPortiere du Coche
; le Hurlubrelu l'a
devinée fans y taſcher;
les Infeparables du
quartier la Ville du
Coche; les Fauxbourgs
font dans le Magafin ;
touche Cocher tu auras
pour boire ; le Solitaire
de Blois ;
GALANT. 283
ENIGM E.
La belle Alix rebute
parfierté
Tous fes Amants
, jusqu'à
celuy qu'elle
aime ;
Et
confumant autruypar
fa beauté,
Par fa vertu fe confume
elle-mefme.
DansfonLogis elle revint
unfoir
Penfant tousjours à fon
trifte devoir:
Bb ij
284 MERCURE
Moyfans penfer a rien ,
ce qu'on ne pourra
croire
,
J'attendois fon retour caché
dans un Armoire.
Elle entre en révant fans
・me voir,
Et dansfonfauteuil vient
s'affeoir.
"Qu'on m'allume du feu ,
dit- elle , & que l'on
forte.
On allume , on la laiſſe ,
& l'on ferme fa porte .
GALANT . 285
Pour
adoucir les
maux
elle
s'affoupi foit
Tandisqu'unfeu na ant
fur mon ame agiffoit ;
Deja me contenir n'eftpas
chofefacile ;
Agité , petillant , tout
mon corpsfremiffoit ,
Ne pouvant m'exprimer,
j'emprunte icy lefile
De Malherbe ou deTheophile
,
Pour vous découvrir qui
·
je fuis ,
Bb
iij
286 MERCURE
En vous le cachant fije
puis.
Je brufle pour une inhu
maine
Qui dompte parfiertéfon
penchant amoureux.
Quoyqu'elle ne foit pas
infenfible à mes feux
Elle est infenfible à ma
peine.
O vous jeunes Amants
trop vifs dans vos
transports ,
Prés d'elle vous ferez
GALANT. 287
d'inutiles
efforts ;
Vous ferez
comme
moy
victimes de vos
flammes
:
Plaignons enfemble noftre
fort
La vivacité de nos
Ames
Ne fert qu'à nous donner
pluspromptement la
mort.
Bb iiij
188 MERCURE
Capitulation
de la Ville
d'Aire.
La Ville d'Aire a capi
tulé le 10. & la Garnifon en
eſt ſortie le 12. ainſi que du
Fort S. François , pour eftre
conduite à S. Omer.
La deffenfe de cette place
merite bien une relation
particuliere ; on aura des
Memoires exacts pour en
faire un Journal qu'on
donnera le mois prochain ;
en attendant voicy l'Etat
GALANT. 289
des troupes qui font forties
de cette place..
Etat de la Garnifon
d'Aire.
Monfieur le
Marquis
de Goefbriant Comman
dant .
Mr le Comte d'Eftrade
Marefchal de Camp.
Mr de Liftenois Maref
chal de Camp.
Mr de Grimaldi
Brigadier.
Mr de Büeil
Brigadier.
290 MERCURE
M. de Curfi , Brigadier.
Mr de Flavacour
Brigadier.
Mr le Gé Gouverneur,
Mr de Capeftan Lieutenant
de Roy.
Mr
Major.
Mr de Robelin , Inge
nieur en chef.
4. Mr de Valiere , Commandant
l'Artillerie.
Etat des Regiments.
Büeil
#aillons .
Greder Suiffe
2. BaGALANT.
297
Du Fort
Provence 2 .
La Reine 2. Mr
Doudancour Colonel.
Aunis
z. Mr le
1. au
Marquis de Lyonne.
Mauriel .
fort S.
François,
Brancas .
Liftenois Dragons . 3 .
Escadrons.
Belabre , Dragons
3. Efcadrons.
Flavacour
cadron.
1. EL
291 MERGURE
Extrait d'une Lettre de
Lille du 17. Novembre.
Le
Prince
Eugene arriva
avant hier icy, quoyqu'on
ne l'attendift
pas ;
noftre
Artillerie
& nos
gros Equipages
ont campé
hier depuis
le Bourdin
jufqu'à
cette Ville, & toute
l'Armée
doit venir
camper
aujourd
huy dans la
Plaine. On ne délivre point
le fourage
, ce qui cauſe de
grands
defordres
. La Cavalerie
eft en affez bon eftat,
GALANT . 293
mais l'Infanterie eft entierement
ruinée . Les troubles
augmentent en Angleterre
, ce qui nous inquiette
fort par le retarde
ment que cela donnera aux
Finance. La Reine Anne
a ordonné à Mylord Duc ,
d'y paffer incetfamment .
Le Prince Eugene va à Cologne
d'où il fe rendra à
Vienne .
Extrait d'une autre Lettre
de Lille du 20 .
Toute
oute noftre Armée
294 MERCURE
eft enfin paffée après avoir
ruiné & pillé tout le Pays ;
les Eglifes n'en ont pas eſté
exemptes. Plufieurs Partis
de France ont fait de gros
butin ; un entr'autres a pris
un Officier avec deux mille
Louis d'or ; & hier un
autre Parti a pris un Offi
cier dans un Caroffe à fix
chevaux avec neuf cens
Loüis . On nous a pris auffi
plufieurs Colonels.
Ily a toûjours un petit .
Corps de troupes campé à
S. Venant pour efcorter
l'Artillerie du Siege d'Aire
GALANT : 295
que l'on charge fur la Lys .
Le Prince Eugene & Milord
Duc font partis hier
pour la Haye.
Suite des Nouvelles
d'Espagne.
A
Vittoria le 13.
Novembre.
Depuis
epuis
ma derniere
, on
afçu que les Ennemis eftoient
tousjours à Val de Moro , qui
n'eft qu'à 4. lieues de Madrid,
qu'ils avoient mis
hommes dans Tolede ,
4000 .
296 MERCURE
qu'ils l'alloient fortifier.
Par leCourrier qui arriva
hier icy, on a appris que lesEnnemis
vendoient le bois, lecharbon
& les autres chofes qu'ils
avoient amaffées à Madrid ,
obligeant mefme les Bourgeois
à les acheter ; ce qui a fait
dire qu'ils ne veulent pas garderMadrid
ni refter à Tolede;
mais on ne peutpas encore eftre
long tempsfans fçavoir la refolution
qu'ilsprendront quand
ils fçauront que la tefte des
Troupes que le Roy envoye à
fon petit Fils entre actuelle .
ment en Rouffillon , & que le
tout
GALANT. 297
toutyfera le 20. de ce mois
de maniere queMrde Noailtes
agira dans peu de jours.
On ne peut rien comprendre
aux deffeins des Ennemis
ni à leurs vues , le Roy d'Ef
pagne ayant actuellement plus
de vingt mille hommes ,
eftant bien plusfort en Cavaterie
que les Ennemis , ce q
le met en eftat d'enlever les
vivres des Ennemis de quelque
part qu'ils veulent les tirer.
Mr de Noailles entrant
en Catalogne avec 53. Batailtons
3. Efcadrons , eft en
eftat de tout entreprendre. En
Cc
298 MERCURE
fin nous fommes àla veille de
quelques grande action , &
peut- eftre de la decifion de ton
te cette grande affaire.
De Vittoria le 14 .
Novembre.
LA La Reine a reçu un
Courrier du Roy, qui luy
écrit qu'il avoit fait la revûë
de fon armée, qui confifte
en feize mille cinq
cens hommes d'Infanterie,
& onze mille cinq cens
chevaux , fans compter les
GALANT . 299
tambours & les
trompettes
; l'Archiduc
le fortifie
toûjours
à Tolede
, & l'on
ne peut encore
pénetrer
fes
deffeins .
L'ouverture du Parlement
fe fit le 12 , de ce
mois lendemain de la
S. Martin , avec les Ceremonies
ordinaires . La Meſ
fe qu'on appelle Meffe Rou
ge , à caufe que tous les
Préfidents & les Confeil-
Jers y affiftent en Robes
Rouges , fut celebrée par
Me l'Evefque de Chartres.
Cc ij
300 MERCURE

Meffieurs eftant entrez
dans la Grand'Chambre ,
Mr. l'Avocat General fit un
Difcours fur l'Eloquence.
Mr le Premier Préfident
parlà enfuite fur la Probité
& le défintereffement
neceffaires aux Avocats.
J'efpere vous donner au
mois prochain une idée
plus eftenduë de ces Difcours
, auffi bien que
ceux qu'on a prononcez le
jour des Mercuriales.
de
On ne vous parle point
encore des Charges de la
CALANT . 301,
Maiſon de Monſeigneur le
Duc de Berry ; on attend
qu'elles foient toutes remplies
pour en donner une
Lifte.
LYON
FIN
DE
302 MERCURE
A VIS .
On
donnera a préfent
les Mercures
les
premiers
jours
des
mois , trés regulierement.
Ily aura tous les mois
à la fin de chaque Mercure
, un Afticle des
Nouvelles
les plus reffentes
, afin qu'on ait
au moins dans celleslà
, l'agrement de la
GALANT. 300
nouveauté , qu'on ne
peut avoir dans celles
qu'on a recueillies dans
le cours du mois, Cela
produira fans doute
quelques fautes d'Impreſſion
, car dans les
Impreffions precipitées
,on n'a pas le temps .
de corriger exactement
les Epreuves .
On avertit que ceux
qui enverront des Lettres
fans en avoir af
AT
104 MERGURE
franchi leport, ne trouveront
point dans le
Mercure les Articles
qu'ils auront envoyez ,
parce qu'on ne peut recevoir
que les Lettres
qui font franches .
Ceux qui enverront
des Memoires
, n'auront
qu'à les adreffer
au Bureau du Mercure
Galant ruë S. Thomas
du Louvre,
TABLE
305
TABLE
LEttre aux
Anonymes. 3
Académie Royale des Sciences.
13
Mariages,
Morts.
89
96
Benefices.
· Poëfies. "
Article Burlefque.
100
ΤΟ Σ
113
Chanfon Burlefque & Morale.
117
Bouts Rime
Lettre de Florence.
Livres nouveaux.
F25
127
13F
Procez d'une petitefille reclamée
par deux Meres. 145
306
Académie Royale desMédailles
& Infcriptions.
Digreſſion.
Bouts Rimez
Avis
203
252
255
30
APPROBATION:
J'Ay lûpar ordre de Mon.
feigneur leChancellier le
Mercure Galant des mois
de Septembre & Octobre ,
& celuy du mois de Novembre
. A Paris ce 27.
Novembre 1710. CAPON.
PRIVILEGE DU ROY.
LOU
OUIS par la grace de Dieu , Roy de
France & de Navarre : A nos amez
& feaux Confeillers les gens tenants nos
Cours de Parlements , Maîtres des Requêtes
ordinaires de notre Hôtel , Grand Confeil ,
Prevôt de Paris , Baillifs , Sénéchaux , leurs
Lieutenants Civils , & autres nos Jufticiers
& Officiers qu'il appartiendra , SALUT.
Ayant choifi-Notre tres- cher , & bien amé
CHARLES DU FRESNY , Sieur de
Riviere , Nôtre Valet de Chambre ordinaire
; pour continuer de faire le Recueil
de plufieurs nouvelles , Relations , & Hiftoires
; & le faire imprimer fous le titre
de Mercure Galant ; il Nous a trés-hurablement
fait fupplier de lui vouloir accorder
nos Lettres de Privilege fur ce néceffaires.
CES CAUSES Nous lui avons permis & per
mettons , par ces Prefentes , de faire Impri-
A
mer le Livre intitulé LE MERCURE
GALANT , Contenant plufieurs Nouvelles
, Relations , Hiftoires , & generalement
tout ce qui dépend dudit Livre , & qu'on
a coutume d'y mettre depuis trente ans
en telle forme , marge , caractere , & autant
de fois que bon lui femblera par tel Immeur
& Libraire qu'il voudra choir
de le faire vendre & débiter par tour
nôtre Royaume , pendant le temps de trois
années confecutives à compter du jour de
la datte des Prefentes ; Faifons défenſes à
toutes fortes de perfonnes de quelque qua
lité & condition qu'elles foient d'en introduire
d'Impreffions Erangeres en aucun lièų
de nôtre obéiflance , & à tous Imprimeurs ,
Libraires , & Colporteurs , & tous autres
de faire Imprimer , vendre , & débiter , &
contrefaire ledit Livre , ni Graver aucu
nes Planches fervant à l'ornement d'icelui,
ni même de le donner à lire pendant ledit
temps fous quelque pretexte que ce foit,
fans la permiffion expreffe , & par écrit
dudit Expofant , ou de ceux qui auront
droit de lui , à peine de confifcation des
Exemplaires contrefaits ; de fix mil livres
d'amende contre chacun des contrevenants ,
dont un tiers à l'Hôtel Dieu de Paris ,.um
țiers au Dénonciateur , & l'autre tiers audit
Expofant , & de tous dépens dommages &
interefts à la charge que ces Prefentes fe
Font enregistrées tout au long fur le Regiftre
de la Communauté des Imprimeurs
& Libraires de Paris , & ce dans trois mois
du jour & datte d'icelles ; que l'impreffion
dudit Livre fera faite dans nôtre Royaume,
& non ailleurs , & ce conformément aux
Reglemens de la Librairie ; & qu'avant de
L'expofer en vente, il en fera mis deux Exem
->
>
Plaires dans notre Bibliotheque publique .
undans celle de nôtre Château du Louvre,
&un dans celle de nôtre trés- cher & féal
Chevalier Chancelier de France , le Sieur
PHILIPPE AUX , Comte de Pontchartrain
, Commandeur de nos Ordres , le tout
à peine de nullité defdites Prefentes , du
contenu defquelles , Vous MANDONS , &
enjoignons de faire jouir & ufer ledit fieur
Expofant , ou fes ayant caufe , pleinement
& paifiblement fans fouffrir qu'il leur foit
caufé aucun trouble ou empêchement.
Voulons qu'à la copie des Prefentes qui fe
sa Imprimée au commencement ou àla
fin dudit Livre , foit tenue pour bien , &
duement fignifiée , & qu'aux Capies col
lationnées par l'un de nos amez & feaux
Confeillers & Secretaires foy foit ajoûtée
comme à l'original. Commandons auPre
mier nôtre Huiffier ou Sergent de faire pour
l'execution des Prefentes tous Actes requis
& neceffaires fans autres permiffions , nonobftant
Clameur de Haro , Chartre Nor
.mande & Lettres à ce contraires : CAR
tel eft nôtre plaifir. DON NE' à Verſailles
le trente-uniéme jour d'Août , l'an de grace
mil fept cent dix , & de nôtte Regne le foixante
huit. Par le Roy en fon Confeil. Si
gné , DE VANOLLES.
>
ཎཱ
Regiftré fur le Regiftre num. 3. de la
Communauté des Imprimeurs & Libraires
de Paris , page 63. num . 36. conformément
aux Reglements , & notamment à l'Ar→
reft du 13. Août 1703. A Paris , ce 2. Septembre
1710. Signé , P. DI LAUNAYD
Syndic.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le