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<36623738610010
<3662373861001(íQ
Bayer. Staatsbibliothek
If £ ^"'^ '



GALAKf 17
SWgrr, pour ainjt dise , par un
"(doublement de %e [e & de pieté
le l'infìdelité de t^ute 'ï*Euiope.
Ve soyons pas fwpns apres cela
un grand Roy persécuté pour
f Religion , ne trouve un a^ile,
7 un vangeur que dans le seul
^rince qui la protege, tíonorons
ws le plus Chreílicn des Rois
esprit Saint dont il est viftble-
•nt remply , ne nous eton-
*is plut ny du merveilleux de
délions qui se ressentent de U
je fié du Dieu qui le fait agirt
de l*immensité de 'Ja gloire ,>
ejì l'ouvrage du Ciel , parce
lie ejì une récompense de fin
rptenib. 1691. B
\ s Bayerísche
1 Staatsbibliothek
Múnchen
i8 MERCURE
7{ele. Mais f la pieté de Louis
éleve fa grandeur au dessus de
celle de tous les hommes , elle luy
donne encore cette moderation
Chretienne , qu'il efì luy-mefmc
au defus de fa grand'ur ; car il
e(l le seul que fa gloire ri éblouit
point. Comme il ne cherche qu'à
établir le regne de Dieu, il U
luy rapporte toute entiere , fy
voilà ce qui la consomme , parce
que Dieu fe plaifì à faire rejallir
avec plus d'ecíat^sur ce Prince
Çâelle ft) reconnoifsant la gloire
qu'il luy renvoye. Quelle foule*
quel enchaifnement 3 quelredou~
blemint continuel de prodiges fy
GALANT. 19
ete prosperites que sa vie ! On
voit les vertus * la grandeurs la
mafiftét la gloire de tous les He
ros réunies avec un nouveau
luflre cn luy seul t $f dam son
Royaume, la splendeur & la feli
cité de tous lesfìeclet, Envain une
jalouse fureur arme les Nations
contre luy. Il a cette glorieuse
conformité avec la Relighn qu'il
défend * que sa gloire devient
plus huilante par les efforts que
ses Ennemis font pour P obscur
cir. Sa felicite redouhle par celle
dont il fait jouir ses Sujets.
Comme l infidelité des Trincesa
souvent attiré des, calamite^ fur
B ij
ao MERCURE
les Peuples , la justice & la fi
delité de noftte pieux Monarque
Je répandent fur nous. Sa puis'
sance qui punit , qui defespere
nos Ennemis, nous protege * nous
comble de gloire. Les guerres font
un fleau pour eux feulements cy
pour nous seuls une source de
benediêlions & de triomphes.
Sous luy enfin tous les desordres
font abolis. Les Loix font aujjì
saintes que fa sagesse inspirée
de Dieu. On njoit regner en tout
temps &en tous lieux la vertu*
Vordre , la tranquillité , l 'abon
dance , & son %ele est le fonde
ment de la felicité publique.
GALANT. 2*
Quel avantage , quel bonheur
pour nous de vivre fous un tel
Roy ! Nos Autels retentissent
de nos aóíions de graces conti
nuelles , & de nos voeux tou
jours redoubles pour fa conser~
vation. Mais en mefme temps
ne devons nous pas redoubler no»
fire efiime pour le ^ele de la Re
ligion , seul principe de la gran
deur de et Royaume & de noflre
felicité f Quelle obligation pour
nous de profiter d'un exemple fi
rare & f puijsant , & de nous
rendre dignes par la d'un Prince
qui nous eíl fi cher & fi ne
cessaire !
42 MERCURE
Apres la lecture de ces deux
Ouvra ge.Sï M' de Boisquillon,
l'un des Academiciens de
Soiísons, leue un Panegyri
que du Roy , qu'il avoit ap
porté comme un tribut que
doit cette Academie à l" Aca
demie Françoise , qui a faic
association avec elle. Cela fait,
M' le Clerc qui a donné au
Public il y a déja longtemps
la traduction des .çinq pre
miers Chants de la Jerusalem
du Tasse , leut environ vingt
Strophes d'un de ceus qu'il
n'a point encore fait impri
mer , & l'on y trouva cc feu
GÁLANT.
agreable qu'on voit répandu
dans tour cc qui elt de luy.
Mr Perrault regala ensuite la
Compagnie d'une lecture de
son Poëme de la Patience de
Griíèlidis , qui fut faite par
Mr 1* Abbé de Lavau. Les
vives descriptions dont cc
Poème est plein luy atrircrent
beaucoup d'applaudiíTe*
mens , & tout lc monde sor
tit extrêmement satisfait de
cette Assemblée.
Je vous envoye une Lettre
fort curieuse,, qui vous ap
prendra plusieurs nouvelles
des Indes. Elle est d'un Pere
Jcsuite j qui se retira àPonti-
7
\
14- MERCURE
chcri aprés la révolution ar
rivée au Royaume de Siam.
Je vous ay appris son avanture
dans quelqu'une de mes
Lettres , & de quelle manicre
il y arriva.
A Ponticherile 19. Septembre 1690.
DEpais nojlrc retraite de
Siam nous nous sommes
etablis en cette Coíìe , en atten
dant que les choses changent de
face * ou que nous ayons paffage
à U Chine. Les Hollandoìs
nous ont fait sauvent de gran
des menaces , & ont employé
tous leurs efforts pour obtenir de
R.amf
GALANT. *rç
JUam-raja , fris du fameux Sevagi*
la permission de nous assie
ger. Si elle leur avoit eflé accor
dée , je doute qu'ils nous eussent
f>u faire autant de mal qu'ils
nous en veulent ; car je ne croy
p ai qu'ils ayent huit cens hom
mes , & nous en avons bien deux
cens renferme^ dans la Forte
resse. C'ejì affe^pour se mettre
d couvert d'un coup de main,;
mais pour soutenir un Siege de
lonorue haleine & le Canon*
fay peine a m imaginer que cela
Je puisse. Je n ay pas toujours de
meuré à Pontichery. Je fis un
petit voyage l*Efit dernier a $.
Sept. i6?u C
i6 MERCURE
Thomé $r a Madras. J'eflots
dans cette premiere Place lors
quenojìre Escadrey arriva , wVtant
retiré dix jours auparavant
de Madras , où l'on publia U
Guerre entre ïAngleterre la
France. le Gouverneurm avoit
fait avertir fous main qu'il
luy ejìoit venu des ordres de la
déclarer. Ainsi je m en aUay à
Saint Thomé. Nojhe Escadre
éirriva à la Cofle ptu de temps
Aprés , ce que nous apprifmes
plâtojì qu'on ne le fceut à Pontichery.
Ily avoit quelques jours
que Laurent Pit , Gouverneur I
de Paliacatte eíloit pajié jj>ardeGALANT,
27
*Oant Madras avec cinq Vais
seaux , lors que nous les vifmes
rebrousser chemins venir mc'úiller
fous la forteresse de Madras,
On Jceut bien-tojl la cause de
leur retour subit. Il leur vint
un avis de Ceylan de /' arrivée
de nosVaisseaux. Sans cet avis*
il eujlejlé pris avecfes Vaisseaux
qui cjïoient richement charges.
Il quittoit la FortercJJe de Pa~
liacatte dont il emportoit le Ca~
non toutes les richejjes , avec
toutes les familles qui avotent
eu ordre de Batavia de s'aller
élablirà Negpatanîìdont ce Lau~
rent Pit ejloit nommé Couver*
\
Cij
*8 MERCURE
neur. Si toíî qu'ils furent fou
laFortereJJe de Madras, ils pen
serent à débarquer ce qu'ils re
voient de plus precieux & tou
tes les Femmes , &a mettre leurs
iSlxvires en d<jfence.Les Anglois
Çre.nt lemefme. JVos gens demeu
rerent huit ou dix jours à Pontïchery
où ils avoient amené une
grojfe J^lute HolUndo'ife riche*
ment chargée qu'ils avoient prise
à Ceylan. Ils avoient pris de»
fuis un petit B triment tiollandoií
qu'ils habillerent vifte en
"ptulot pour venir à Madras,
i Moy defesperant que nos gensy
Òinjfint , je pris le chemin de
I
GALANT. 19
Pontichery le .23. Joujl çóurjy
arriver le jour de Saint Lents.
J'appris en chemin qu'ils aident
levé l' ancre pour aller à Madras *
ce qui me mortifia. Je rentontray
quarante ou cinquante Soldats
Anglois qui alloient en diligence
à Madras. Ils quittoient une
Longimar ,, Faâìurie nouvelle à
quatre lieues de Pontichery t
pour porter du renfort à ±%ia*
Aras qui en avoir grand besoins
n'ayant pas alors trois cens hom
mes dans une aujfi grande place
que Madras ïejì à prefent, jarrivay
à Pontichery a dix heures
du matin } ajfe^tojl pour dire la
C iij
30 MERCURE
tJMeffe. On avoit expose le S.
Sacrement ce jour- là qui devoit
esîre celuy du Combat. Nous
ne fufnes pas long-temps fans en
fçavoir le succès', qui quoy qu'il
nefur paf aujjì avantageux qu'on
le Çouhaitoiu fe trouva considera
ble. Le "Brûlot fut attaché à ÏJmiral
Hollandois ; mais comme
les Grapins nétoient faits que
de cercles de barriques , la Mer
estant goffe & le vent venant
de terre * tout cela ft qu 'il n eut
pas l'effit qu'on en efperoit. On
canonna rudement les on^e Vais
seaux qui effoient en ligne , ç^*
qui m voulurent jamais dérade r.
GALANT. 51
Nous n en avions que fix contre
un f grand nombre t soutenus
du feu de la Forteresse * qui avoit
plus de cent Canons qui battent
la "Rade. On ft un furieux feu
fans que nous ayons perdu que
sept ou huit hommes dans ce
fombat. Le Brûlot fut attaché
avec une intrepidite merveilleuse
par M1T>aubetvilUì Lieutenant
de Ad1 du Quefne , au travers
d'une grefle de coups de Canon t
& fans perdre aucun homme.
Le Dragon qui ejìoit presque
tntre les Vaisseaux Ennemis
U Forterejje, n eut aucun hommeblessé
ny tué. Jl tira pour fa
p MERCURE
part plus de quatre cens cinquantecoups
de Canon. Le lendemain
nos gens parurent encore , {0 dé
fierent les Ennemis qui n oserent
jamais sortir pour combattre , &
comme le vent eftoit de terre , ce
qui les empefchoit d'approcher à
leur fantaisie , & que d'ailleurs
ils e^oient en danger d'ejìre démajle^
, fans avoir de lieu pour
fie rem afier , on jugea plus à pro
pos de continuer fa route vers
'Bengale. On prit à la veu'è de
Aíadras un Vaisseau qui af>*
portoit des rafraifchijfemcns a
cette Ville , $ ils en firent échou
'èr un Angjoïs vers $engafem
. I
1
GALANT. &
Nous fèeusmes que les Ennemis'
avoient perdit beaucoup de mon*
àe , & qu'ils avoient tu pltt-
(teurs mats briseuy g? leurs Na
vires cribles de boulets. Cette
atìion a fait un grand éclat dans
les Indes. C'eftoit aujfì un projet
ajftl^ hardy que jtx Vais
seaux eujfent osé en aller atta
quer onT^c çrands fous une J*ortereffe..
Il y avoit alors vers
Aladras un des Generaux du
Afogol qui fut témoin de cette
aftion intrepide t & qui s'en re
tourna peu aprés à i*Armée de ce
Trince , qui ajjiege Gtngi ,prin-
GÌjjale Ville de Sevagi. Vous ne
!
34 MERCURE
jcaurie% croire avec quelle ejìtme
on parle icy des François, .
Vous l' apprendre1^ mieux que je
ne pourrois vous le dire , des te
moins oculaires , ainsi que tout
ce qui,s*ejì pafíé dans la fuite de
la Navigation de nojìrc Escadre.
Nos Vaisseaux qui partent in
cessamment ne me permettent pas
de vous en faire la Relation. Je
*uay feulement vous informer
des choses que je croy que vous
ne ferex pas faché de fçavoir de
plusieurs endroits des Indes. Com
me fécris avec grande precipi
tation , vous y fuppleere"^ , f0
mettre^ le tout en ordre.
!
V
GALANT, js
Now avens receu des Lettres
par terre , par lesquelles on ap
prend que la Teste efl encore à
Surate. L'aéhon de Madras a
ejlé feeuë en ces quaûers , & a
fait honneur à la Nation. Plufìturs
de la Loge Holiandoife
font en prison pour avoir toultt
fe revolter contre le Fiscal qui
avoit envoyé le Commissaire
Van-reyde. Leurs affaires vont
mal en Perse. Il y a eu de leurs
Vaisseaux arrefle^ , mais on n*en
fçait pas encore le détail.
Les Ar.glois souffrent beaucoup
a Bombain , a cause qu'ils n ont
point eu de Vaijfeaux d'Angle-

?6 MERCURE
terre. Le Vaiseau qui a eflê'
brûlé a Jnpuan par nojlre Es
cadre, leur a causé une grande
perte. Cette Ville fut ajjìegée l*m'
pafé pendant plufìeurs mois par
k Mogol. Ils tinrent bon , &
ont depuis fait leur paix avec ce
Prince aux conditions qu'il a
voulu.
Le Gouverneur D. Rodrigue
eíî mort à Goa , £<r Dom Mi- •
guel , Mejlre de Càmpra eflé mis
en fa place. On a arrejìé en cette
Ville- la un Vaijìeau Marchand
jánglois venant de la Chine y
pour reprefailles de ce que les
Anglois de Bombainfe font entm
;
I
GALANT. 37
fxreX^ des biens $ maisons de
quelques Portugais habitans de
ÌBombain , pour s en ejìre retires
du temps de la guerre, contre la
défense des Angloti* cjui mena-,
cent d'arrejìer tous les Vaisseaux
Portugais qu'ils rencontreront*
CeVaiJJeau ejì celuy fur lequel
esoient la Peres qui furent pris
à U Mtque. Nous venons d'ap~
prendre qu'il ejì arrive deux
Galions d'Europe à Çoa * f0
treize cens hommes avec plusieurs
AíiJfonnaireS ì& qu'un Jefuite
eft nommé à l'EveJcbé de Saint
Thom'e ; & pour rétablir un peu
cette ancienne Ville, il y a ordre
f MERCURE
a toits les Tortugniì rêpandus
tn dijjfercns endroits de la Cofte,
d'aller y faire leur demente.
VnVaiJJeau Danois qui ejl
revenu ces jours-cy à'Achem , <*
rapporté que les Prisonniers Fran
cois de Siam avoient ejìé élargis.
Il y ejl allé tant de zJHarchands
cette année , qu 'ils n'y ont pas
trouvé leur compte. Quelques-*
uns voyant cela font alle^*
partie à Merguy , f0 partie au
Pegu.
Eflant à Madras je pariay À
un François qui ejloit venu de
puis peu dcBatavia. Il m' entre
tint de quelque bro'ùillerie arrivée
/
s
!
I
GALANT*. $9
m ce canton. Un Déterminée
naturel du Pay^qui cfloit au feu
v'tce des Hollandais , s'efi mis à
la tejìe de deux ou trois cens
Détermine^ comme luy , qui ont
fait beaucoup de peine aux HoU
landois, avant ejuil leur ait eflc
pojjible de les réduire. Ils venoient
leur enlever des Corps de garde
avance^ autour deBatavia. Les
HoHandots ont envoyé deux ou
trois fois cinq à fix milU hom
mes , parmy lesquels il y avoit
cinq cens Européens ,pour forcer
les Rebelles dans leurs Forts . Ces
Détermine^ les ont fait tous fuir
jusques a deux fois , & en ont
te MHRCURE
tutft) blejjé plusieurs. Enfin an
_ les a défaits avec bien de la
seine , «fprw <twr perdu du
monde.
Vépouvante fut granàe l'an
pafié à Malaca , lors que l'Orifiame
avec les trois autres Bafli*
mens * & les Troupes du débris
de Siam , allerent vers Jun-
%/dam. Les Hollandais craignirentpour
Malaca , par laquelle
nous avions pafé quelques mois
auparavant , g? dont on avoit
veu le fort& le faible , fur tout
le peu de monde qu'il y avoit.
Dans cette crainte ils firent venir
dix Vaisseaux pour faire figures
GALANT. 41
ìar on ma assuré qu'il n'y avoit
pas cinquante hommes dans cha
cun. Ils n'oserent non plus en
voyer leurs Vaisseaux à Bengalet
& cela feulement à cause de
rOrifiame , ce qui efi une grande
marque de leur foi blesse .
Vous aure^ fceu d? queUe
maniere nos gens à la sortie de
JMkrguy tomberent au Tegu ;
qu'ils y moulurent faire des au-
*vres , & qu'on les arrêta prison*
niers avec un à? nos Teres T
nomme lePere Dejpanhac. On les
conduift t à A<va , du lieu où 0»
les aveit prìs Ce chemin de plus
de deux cens lieutSì efl terrible* .
Sept. ic$i.- D
4î M1RCURE
C'ejl un miracle comment ils cnt
pu reffler tous à ce penible voya
ge à travers les bois f0 les mon
tagnes affreuses, les torrens (fy
leu ruijfeaux qu'il leur jalloit
pajjer dans un temps froid. Ce
Pcre m écrit qu'ils en ont pajìé
quelquefois jusques à quarante
en un seul tour. Apres les avoir
menaces de la mort > on les a,
)u&eK, $ condamne^ à demeurer
prisonniers dans quelques Villa
ges quon ìcura ajjìgne^. Le Pere
a trois Villages peur prison. It
peut les parcourir, fy pas davan
tage. Par bonheur il y a la des
Chrefïiens qu 'il ajjijle j ains il
GALANT. 4?
s'occupe a les inílruìre fendant
son exil. Il a esté fort incommodé
des fatigues de ce voyage , il
en a une jambe estropiée. Un de
nos Peres , nommé le Pere du
Chats i alU l'an pastié d'icy à
Pegu , & jusques à Ava , four
loir et qu'il y avoit à faire pour
le delivrer. Il ne put avoir U
permijston de luy parler , 0- les
Tortugais noirs de ce pays- là
luy firent donner un ordre de U
part du Roy tde fe retirer.
Les Anglois avoient une belle
Faflurie à la Cofle de Girgeti >
44 MERCURE
c'ejì à dire entre Mafulipataom
& Bengale. Elle fut pillée Il an
pajfé par les Mores , ce qui leur
causa, une grande perte. On tuabeaucoup
des leurs, & leurs mar*
, chandfes jurent enlevées.
Çingy efí la Capitale $ la
principale Ville de Ram Raja ,•
jpils de Sevaçy, Elle efì située
dans des montagnes^ ['on m a
dit qu'elle ejl disposée de cette
forte. Trois montagnes qui font
un triangle fe joignent par des
murailles tres-fortes , renjefluës
de grosses tours ,. & fur chaque
montagne il y a un fort 9 f0
une Forterejje encore dans le mi-.
GALANT. 4y
Ijeu de /' enceinte , qu'on dit ejlre'
de p!as de deux lieuè's.ll yaiç
ft gtojjes pieces de Canon , que
lors qu'on les tire nous les enten
dons dijìinÛement d'icy * qùoy
qu'il y ait quinte lieues. Cette '
. Place ejl assiegée depuis cinq mois
par un des Çeneraux dû Mogol.-
On difoit ces jours- cy qu'il mattquoit
de fourage , & qu'il pour- -
roit hien lever le Siege. Il a pcH
de monde *& encore moim d'ar
gent. Il a vendu depuis peu aux
sfngfois une Forterejje jur le
bord de la Mer* à trois ou quatre
líeuè's- d'icy. Comme ils y ont
tres'peu de monde pouf la gajden4
« MERCURE
on dit qu'ils ont gyande peur de
nous j car fi on. vouloit mettie
deux cens hommes a terre , on
s'en rendroit maijìre À peu de
frais.
Voila ce que je vous puis man
der cette année de ces Pays- cy.
Nous attendons dans fort peu de
temps des Vaisseaux de la Chine,
dont néanmoins nous n avons
point encore de nouvelles.
Voicy l'Extrait d'une au
tre Lettre qui parle auífi de
l'action de Madras. Vous ne
ferez pas fâchée d'apprendre
Jes autres nouvelles qu'elle
contient.
GALANT. 47
Le 2. dt Juillet I6$Q. passant
par l'Ijle d'Ajouan> nous trou-
*vafmcs k la rade un Naître
jénglois de cinquante -quatre pieces
de Canon. Il essuya pendant
plus de fìx heures le feu de nofìre
Escadre s après quoy il fe
brûla. Un François qui fe fau~
nia, à la nage 3 nous rapporta que
ce Vaisseau avoit trois cens hom
mes qui ont presque tous pery ;
qu 'il s'appelìoit le grand jilhert ;
qu'il appartenoit à la Compagnie
jíngloifê t & qu 'il cfloït le seul
quelle enrayait aux Indes. Jp~
paremment fa charge ejìoit ri
che.
48* MERCURE
Le 19» du mefme mois , est
pajjant pari Isle de Ceilan, nous
y trouvafmes une Flûte HoU
landoife mouillée fort prêche de
terre y qui se rendit aux Chalou~
pes que Mh du Quefne ynoííre
Commandant y y envoya. Elie
feut valoir cinquante mille'écus>
Ensuite nous fìfmts route pour
Tontickery , 0- y arrivajmts
te ìz. Aoujì. Un peu de temps
apres noíîre arrivée , nous apprì~
nies qu'il y avoit plusieurs Havires
, tant An^.ois que Hol:an~
dois, mciiille^ fous la forteresse
de la Ville de Madras ^ui nous
attendoient quand nous pàfje-A
rions
GALANT. 49
Vío8í pour aller à Bengale, ce
qui nous ft prendre la resolution
de les aller attaquer.
Nous partifmes pour cet e^a
"àe Tonùcheri le 24. & arrivasmes
à Madras le zy. jour Saint
Louis. Nous y trouvafmes qua
torze Voiseaux , dont il n'y en
eut quon^e qui tirerent pendant
le combat que nous donnafmes.
Jl dura plus de trois heures , &
il y eut un fort gros feu de part
& d'autre , au sp- bien que de la
J^orterejfè. Nous nous retirafmes
ensuite , & allafmes mouiller
hors de la portée du Canon pour
nous raccommoder. C'eíî une
Scptemb. iípi. E
5o MERCURE
aóîion aujfì belle f0 aujjt hardie
que digne de Mv du Quefnc.
hî@m prismes le lendemain un
Vaisseau de peu de consequence
a leur veuë, fans qu'ils osassent
Je presenter pour le secourir.
Les Anglois , apr'es avoir pris
Jldarigalande , ajjìegerent au
mois d'Avril la Gardeloupe , a-t
vec une Ftote de quarante-Jtx
voiles * dont ily avoit dix Vais
seaux de guerre depuis quarante
jusqu'à cinquante-quatre pieces
de Canon. Le refie esíoit des
Barques & Brigantins , fur les
quels il y avoit trois mille cinq
cens hommes qui yfirent descente
GALANT, çi
'avec perte d'une partie de leur
monde. Le Siege dura prés d'un,
mois 3 M dìEragny , Gene
ral des Ijles ) y alla en personne
au mois de May avec huit Vais
seaux, dont ily en avoit quatre
de guerre de quarante pieces de
Qanon , & quatre *JMarchandjt
armc% depuis dix jusqu'à vingt>-
jìx s($f quelques "Barques , fur
lesquelles en avoit mis cinqua nte
hommes d'élite. II descendit à leur
tejìe au vent, de l'IJle , $ fit
lever le Siege , à la grande honte
des Ennemis, qui ejìoient beau
coup superieurs en Vaijseaux f$
<n Troupes.
E ij
f* MERCURE
Jc vous ay déja parlé plu
sieurs fois des Jeux Floraux,'
qui font si celebres à Tou
louse, & vous ay entretenue
de leur Institution. Mr de
Cironis-Baufort , Fils de M"
de Cironis , Sr de la Bastide,
President au Parlement de
Languedoc, un des plusbeaux
genies de son temps , aprés
avoir eu le Prix du Soucy
dans l'une des dernieres an
nees , vient encore de l'cmporter
; ce qui i'a fait rece
voir Juge Maintencur de cette
Illustre Academie. Voicy le
Chant Royal qu'il a fait , &
GALANT, u
iqui a esté trouvé digne de cc
Prix. Nc soyez pas surprise
de voir rimer Univers avec
Lauriers , & (guerriers. La pro
nonciation ordinaire de cette
Province , fait recevoir ces
rimes pour bonnes.
ROMULUS.
CHANT ROTA L.
AMOV R fait tout ceda à fa
douce puijfance ,
Il range sous ses loìx le Prince dr le
Pasteur.
il n est psintdc sagesse , il nestpoint
de prudence .
E iij
54. MERCURE
J>)m puise resister à ce charmant
Vainqueur.
Rotnt doit à l'Amfur sa naìsante
éclatante ,
Et de ss trais brulans la force sur
prenante
Soumit le coeur d'un Dieu qui ira.
voit les dangers ;
C'est peu que Mars Iny cede au mi'
lieu des Lauriers ;
Ilfaut qu'à ses destrs Rhée à L'en*
vy réfonde ,
Et quelle mette au jour , four regir
i'Vniveru
Le Heros- fondateur de TEmpìre
du Monde.
Vinjuste Amulius , de qui la vio
lence
Vu Trône des Albainì l'avíit fait
ravijscur,
GALANT. «
jDu jeune Romulus perfecutoit ïen
fance
Tour s'assurer le prix defa lâche fu
reur:
En vain il veut le perdre , & Us
efforts qu'il tente ,
Secondent mal fes voeux , & trom
pentson attente,
Ses desseins sont en butte i de tris
tes revers*
te Tibre fe refuse a fes desirs per
vers :
J>)uand un frêle Berceau , quiflote
au gré de l'Onde,
Conserve fur le bord des abîmes
ouverts
Le Hetos fondateur de l'Empíre
. du Monde.
fey du Ciel irrité U juste provi
dence ?
E iil)
56 MERCURE
Peur ton lâche forfait les-Dieux snt
de Phorreur ,
Toujours des innocens ils prennent
la défense ,
Cruel Amulius, tremble, &fremis de
peur.
Contre les coups certains de leur main
foudroyante
De tes vaîllans Soldats rardeur est
impuissante ;
Apres avoir forcé mille obstacles di
vers ,
Romulussoumetra les peuples les plus
fers,
Et renversant V. espoir où ta rage se
fotrde ,
Donnera pour modele aux plus fa
meux Guerriers
Le Heros fondateur de l'Empire
du Monde.
GALANT: T7
C'étoìt peu qu'exerçant une juste
vangeance ,
Romains triomphât deson persecuteur,
Pour élever encor sa gloire , & s*
'vaillance ,
Il saloitque de Rome ilfût le fonda
teur.
Apres avoir bâti cette Ville impor
tante
Contre luy vainement le Sabin , h
Veiente,
Soulevent , & Voisins , & Peuples
étrangers}
Comme un Fleuvegroffi du tribut des
Hivers ,
Ne trouve point de champs que son
ttrrent n'inonde ,
Tel paroît enfonçant leurs Escadrons
enthrs
Le Heros fondateur de l'Empire
du Monde.
î8 MERCURE ;
// n est rien qui ne f lie , & dons
la resistance ,
JRetarde unseul moment teffet dtsa ,
valeur.
Acron farson trépas en fait l'expe
rience ,
Et loin de L'abaijser, rehaujsesasplen
deur.
Enfin des Immortels la Troupe im+
patiente
Veut cter aux humains cette vert»
brillante ,
l'arbitre de U Terre , & la terreur
des Mers.
Tandis que ton entend par de di
vins concerts
Celebrerses exploits *sa sagesse pro
fonde ,
On voit au rang des Dieux , élevé -
dans les airs
. - J
,
GALANT. f$
Le Heros fondateur de l'Empire
du Monde.
À L L EGOR I E y ,
au Prince de Galles.
UN Prince infortuné , qu]unc
Ligue insolente
Fit exposer aux flots d'une MerJcumante
,
Par la main deLOVlS verra bientot
auxfers
Ses Ennemis vaincus , é1 de honte
couverts-
Et nous verrons fa vie en prdiges
seconde
Surpayer parfa gloire r Apres cent
maux souscris ,
Le Heros Fondateur de l'Empire
du Monde,
&> MERCURE
Cc Chant Royal estaccofrïpagné
de plusieurs autres Ou
vrages , que Mr de Cironis a
faic imprimer fous le titre du
Triomphe du Sottey , & qu'il a
dédiez à Mademoiselle de
CastclnaUj Fille de feu Mr Ic
Marquis de Castclnau, Mcstrc
de Camp d'un Regiment , ÔC
Gouverneur de Brest , Fils de
M' le Maréchal de Castelnau,
Capitaine gênerai des Armées
du Roy , & du costé de Ma
dame íà Mere , Petite- fille de
Mrle Maréchal Foucaut* Vi
ce-Amiral de France.
Les paroles que .vous allez
GALANT. 61
lire ont esté mises en chant ,
par M1 Hurel, qui. est dans
une haute réputation pour
bien montrer à jouer du
Jhuorbc , & à bien chanter.
AIR NOUVEAU.
l' Ame tendrement Lisette ,
Et javoij sceu l' engager,
cefendant cette Follette. .
Dtpuìs peu me veut changer.
Mais je fçwray m'en vanger.
Car fi dans noflre Village
Elle vient encor m'appeUer
Pour danser au boccage ,
Je n'yvoudray plus aller.
U MERCURE
La Piccc de Vers qui fuie
itn'a esté envoyée de Rouen,
Sc a esté faite fur cc qu*un
homme qui a beaucoup de
commerce avec les Muses a
fait Venir une fontaine dans
son Jardin. Vous en ttouverez
le tour aisé & spiri
tuel.
IDILLE.
DAmofl près d'une Fontaine ,
iotts des arbres toujours verts,
La, de ractnter Ja peine ,
En badinant dit ces Vers t
GALANT, 61
Habitante de cette Onde ,
Belle Naïade , croy moy ,
Tu fais du bruit dans le monde ,
Mais l'on fçait aJseT^pourquoy,
Une Nymphe jeune &sage
Ne doit point tant voyager ;
Jl est peusûr à ton âge * :
De se rire du danger.
Nous sçavons ce qu'on raconte
D'un jeune & galant Ruisseau ;
Il n est le seul qui t'en cente,
Maint autre à part au gâteau.
Les jeux , les Ris , le Zephire ,
Et les Fleurs te font la cour,
Est-il mal-aisé de dire
fil s'y glisse de l'amour f
«4 MERCURE
Tu crois pajser poursevere
En coulant dans ce Jardin ?
Chansons. Vair le flus austere
Souvent cache un coeur badin.
Le tien n'est que trop sensible,
Ilsoíipire â tous momens.
Selle Nymphe , est-il possible
gu'ilsoupiresans Amans ?
1
Damon se tut. La Naïade
Bien quesage s 'emporta ,
Etson Onde babillarde
Tour l'entendre s'arresta.
Ah ! c'est trop mefaire outrage ,
Impitoyable Berger.
Sçache quefay du courage ,
Et que je puis me vanger.
t Tu dis que mon coeursoupire
GALANT. 65
Mille ér mille fois le jour;
J>ue les Ris , & le Zephìre ,
Et les Jeux me font l' amour.
Lors que tu fers de vitfime
A cent coupables desrs ,
Voudroìs -tu me faire un crime
De ces innocens plaisirs ?
Ne chante donc pas ViBoite ,
Lors que ton peut faccabler }
Mais écoute mon Histoire t
Et puis tu pourras parler.
Connoìs-tu nette Fontaine ,
igui coule fur l' Helicon ,
Et qu'on appelle Hippocrene
Ah Royaume d'Jpollon ?
fejl mo)~ mefme. Mon voyage
Sefoil long à raconter.
Scptemb. 1691. F
U MERCURE ....
Suis-je encor cette volage ,
«9»/' s'en fait par tout conter ?
L'ffippocrene plaist aux Muses s
Aux Muses déplais Famour.
Cherche , cherche quelques ruses
Four fexcuser a ton tour.
Sè tu doutes de U chose r •
Iois de cette eaufuit ment,
Etfur ce gazon repose ,
Tuseras Poète â ïinstant.
Enfìn puis qu'il faut tout dire ?
Le Maistre de ce Vallon ,
DAPHNIS , que la France admire
Apprens que c'est Apollon.
Pour te punir , Ttmeraire j
Sans ceste tu souffriras s
Car toujours tu voudras plaire ,
0
GALANT é7
Et j<mais tu ne flairas.
L'ArrcJl parut bien fevefe
Aux Bocages d'alentour.
Darno» aime fa Bergere ,
Sans Itty donner de l' amour*
Bergers , fi vos Celimenes
yotu causent des soins jaloux »
N'alles sasfur les Fontaines
Decharger vojfre comoux.
Le Dimanche %%. de Juil
let, les Pcres Augustins de
Bordeaux commenccrent la
folemnité de la Canonisation
de S. Jean de Sahagun, dit de
Saint Facond , Religieux de
leur Ordre , & Patron de Sa
éS MERCURE
lamanquc. Cc Saint nâquiç
à Sahagun , Ville du Diocese
de Leòn cn Espagne 5 & fut
accordé aux prieres de son
Pcrc & de fa Mcre3 également
distinguez par leur vertu &
par leur naissance. II fut Camerier
de i'Evefque de Burgos
, qui le fit Prestre & Cha
noine de son Chapitre ; mais
cc Saint ayant renoncé à ce Be
nefice,, alla prendre l'habitde
S. A ugustin à Salamanquc, où
d'abord il se rendiraussi illufrre
par fes Predications que
par fesmiraclcs.il finit fa vie
par un poison lent que Iuy
GALANT: 69
donna une Dame desespcrée
de ce que le Saint avoic con-!
verty son Amant,& l'avoit re
tiré du commerce criminel
qu'il avoit avec elle depuis
quelques années. Les Cardi
naux Antonian & Baronius
marquent fa mort l'onzicmc
de Juin 1479. fous le Pontifi-j
cat de Xistc IV'. Le Pape Clc-j
ment VIII. le beatifia Tan
4601. & le Pape Alexandre
VIII. le canonisa le 18. No
vembre de Tannée derniere,'
L'ouvcrturc de cette íblemjniré
qui a duré huit jours,
se fit par une grande Procesno
MERCURE
fion qui partie de l'Egïidc
C athedrale Saint André,pouJ?
sc rendre dans celle des Au
gustins. Les Religieux portoient
dans cette Procession
deux Bannieres qui represen^
toient le Saint , & quelquesuncs
de ses principales ac
tions. Toutes les Paroisse»
marchoient eìiíuite , puis le ,
Chapitre de S. André , lc Par
lement & la Cour des Aides
en robes rouges , & les autres
Corps de Justice. ïls fc rendi
rent tous proccssionnellemenE
dans r Eglise, des Augustin*
<pi est une des plus belles de
GALANT. 7î
la Ville , & qui estoir magni*
fiquement ornée. M' l'Abbc
d'Arche, Doyen du Chapi
tre de S. André, y celebra la
Mefie, qui suc chantée par la
Musique. Chaque jour de la
semaine, un Ordre Religieux
y a esté en Procession , chan
ter la Messe, & prescher à son
lang laprésdmée.LcMercredy
, jour de S. Jacques , Mr
rArchevcfque de Bordeaux
l'y celebra, & y donna la
Communion aux Freres du
Convent , & à un Eres- grand
nombre de períonnes. Le
jour de l'Octavc , Mr l' Ab7i
MF.RCURE
bé de Constans , Doyen dii
Chapitre de S. Sevcrin, y dit
la grand' Messe, cjui fut chan
tée par la Musique de son
Eglise, & il y officia de mesme
à Vesprcs, accompagné de
tous les Chanoines de son
Corps. Ils y firent ensuite la
Procession du S. Sacrement,
dont le mesme Doyen donna
la benediction, qui fut suivie
immediatement aprés de l'élcvation
d'une Bannicre du
Saint , au milieu du Choeur
de l'Eghse, la meíme Musi
que chantant des Motets à
l'honneur du Saint , le Te
Deum
GALANT. 7?
T>eum Sí ÏExaudiat , avec
d'autres Pricres pour lc Roy ;
ce qui avoitcíté fait tous les
jours de la semaine s à chaque
benediction du S. Sacrement,
Le soir , les Jurats revcílus de
leurs robes de ceremonie * &
précedez par les trois Compa
gnies de leurs Hallebardiers,
de leurs Trompettes , Haut
bois & Enseignes , allerent
mettre lc feu au bûcher que
les Percs Augustins avoient
fait dresser dans la Place de
vant leur Convcnt , où les
cinq Compagnies du Qjarticr
, au nombre de huit cens
Septembre 1691. G
74. MERCURE
hommes fous les armes , s'ei
stoient rangées en Bataille.
A prés pluíìcurs décharges de -
la Moufqueteric , des Boètes,
& de quelques pieces de Ca
non , l'on fit jouer un Feu
d'artifice qui rcúflît parfaite*
ment , prniant qu'on entendoit
lcsTcomp—tes, les Haut--
bois, les Violons, les Tam
bours , les Musettes p & les
Fifres.
Quelques jours avant cetic
Solemnité , Mr l'Archevêquc
de Bordeaux avoit institue
dans son Diocese, l'adoration
perpetuelle du S. Sacrement >
GALANT. vs
pour la santé du Roy , & pour
Ja prosperité de ses armes.
Je vous envoye un D i (cours
<pi a esté fait à la ptiere de
M le Marquis d'O , par M1'
l'Abbé Dcíîandcs , Grand-
Archidiacre & Chanoine de
Treguicr, pour ['instruction
.des Jeunes Gentilshommes de
Brctagne.Ily a quelque temps
qu'il fut prononcé à Breít
aux Cadets de Marine.
^/J ESSIEVR5,
La Noblesse ejl un avantage
de la naìfjance * qui a eflé de
•j6 MERCURE
tout temps consideré , parce qu'elle
semble transmettre avec le sang
de belles inclinations & desfenûmens
genereux. L'éducation
que LOVIS LE gRJND
prend foin de faire donner aux
Gentilshommes, contribue beau
coup à élever leur esprit au dessus
de ceux du commun. La vertu de
leurs Ancefres j leurs belles ac
tions , le rang qu'ils tiennent
dans le monde , la reputation ,
le desr de la gloire , le chemin
qui leur efl ouvert aux grande s
choses , font autant d'éloquen's
Orateurs qui les avertirent de
ne rien faire qui les rende in>
GALANT. 77
,'Signes de ['honneur qu*iis ont
receu en sortant d'un sang fi di
stingué dans le monde, Galere
Maxime nous apprend que parmy
les Anciens ,- l'aifné de U
Famille chantoitfur le Luth des
airs à la louange de ses Ancêtres v
pour s'animer les uns $s les au
tres aux aóîions heroïques. Cet
invincible Machabée , dont l'Eeriture
Sainte fait l'éloge , ne
laijfa àps Enfans pour tout tes
tament que la gloire defes Aycux.
Mcmentote opcrum Parrum.
Le Comte Balta%ar, en riou* fai
sant le Portrait d'un parfait
homme de Cour , veut qu'il soit
G iij /
78 MHRCUR1
de qualité. Voglio adunquê
chc questo nostro Cortegiano
, sia nato nobik ,c di gcnerofa
familia , fy voicy U
raison qu'il en donne. Perche
k nobilita è quasi una chiara^
latfipa chc manifesta , e faveder
loperebuone e le maie,,
c 'ìccende esprona alla vitra.
La Noblesse efì comme un flam
beau qui fait remarquer les ac
tions bonnes ou mauvaises.; fy
un. Gentilhomme fe sent freffê
de suivre la vertu fy de fuir le
vice quí est toujours accompagné
de l'infamie.
Que le Ciel soit a jamais beny*
GALANT. 79
VAntiquité ne peut reprocher
aucune infamie à nos Chevaliers
Bretons. C'ejì un éloge singulier
pour ta 'Bretagne qui -a toujours
tjlé fdelie à ses Princes. Feus
sçave^ 3 Adejjieurs *que la qua
lité de Chevalier nejìoit pas hc-,
reditaire , fy n accompagnoit pas
les charges i il falloit la meriter
fy" l acquerir par les armes. Tous
les Nobles qui y prétendoient
sappelloient 'Bacheliers , ft) un
Banneret quiy afpiroit , s'appelloit
Damoiseau. Si ïe jïils d'un
Chevalier ejloit jusques a l'agt
de trente ans r fans aller a la
guerre , il ne pouvoit jamais
9 »ij
,8o MHUCURE ....
jouir du privilege des Cheval
Iters. Olivier de la Marche,
qui écrtvoit en l'an 144.0. parlant
des Gentilshommes de Bre
tagne j dit que ce font les Che*
valiers les plus sages , les plus
vaillants f0 les plus courtois
qu'on pujl rencontrer * fy nous,
lisons dans les Memoires de Cjdhtrt
de la Fayette , Maréchal
de France , Chambellan de
Charles Vil. qu'il ne connoijjoit,
point au monde de Nation plus
belliqueuse fy plus fdelie a son
Dieu fy ason Prince, que la sta
tion Bretonne. Ces deux illus
tres Hijloriens remarquent que
GALANT. St
ïe 'Bachelier qui fe preparoit pouf
eflre receu Chevalier , pajjoi?
toute la nuit en prieres dans l'E~
glife * & qu'au lever du Soleil
il entroit dans le Bain * pour luy
apprendre qu'à l'aveniril devoit
avoir la pureté de l'ame & du
corps. Apres cela * on l'habilloit
en homme de guerre ; ilJe mettoit
k genoux devant le Prince *,
& prestoit fur les Çaïnts Evan
giles le ferment de fidelite , puis
le Prince luy ceignoit l'épée , en
disant , Jc vous fais Cheva
lier , au nom du Pcrc , & du
fils & du Saint Esprir. Lors
qu'à la veille d'une Bataille les
8î MERCURE
Bacheliers demandoient pargract
ctejke faits Chevaliers , afin que
s*ils mouraient t on la enterrajl
comme tels , le Prince , ou
te General d'Armée, leur donnoit
trois coups de son épee , & aprés
le Combat , les Bacheliers qui sTí«
toient fignoles ejloient receus
Chevaliers^
Je m*aperçois i Messieurs >
que ce recit hijlorique anime te
sang genereux qui a coulé dans v
vos veines. Vous brûles du de
sir de le voir verser , pour mar
quer vojìre reconnoijfance au.
plus grand Roy de la Terre,
jentens que" vous dites qu'il efit
_ GALANT. 8?
glorieux de mourir ppur sa /^íiigion
t pour sa Patrie & pw
son Roy.'Les hlejjures qu'on re
pit dam íe service sont de vrais
titres de Mobleffe. Plagac pra
Regc intcr dimicandum cxecprae
, tot Historiarum vo*
lumina facitìnt r quot funf
cicatrices. Continues , Mesrt
fiems dans des jenttmtns fidi*
gnes de <vous. Continue^ de
prier pour U conservation de
LOVIS LE GRANT>>
qui ayant eu l'avantage de réu
nir fout le Troupeau squs, un
mefine Pafleur dans toute dé
tendue de son Royaume * mi 1
*4 MERCURE
donne lieu de rapporter icy ceì
belles paroles du Sauveur. Dico*
enim vobis quod multi Pro
phetie & Rcgcs volueruntviderc
quod vos vidctisj & non
viderunt. Cependant je démanderay
au Çiel qu'il dous comk\ç
de Jès benediólionSr
Gomme je ne vous fais
part d'aucunes Nouvelles que
quand elles font trcs-íeurcsr
& qu'il faut du temps pour
en apprendre le détail , je ne
vous ay point parlé de la,'
Gam pagne de Mr le Comte
dEstrécs, & du Bombardes
GALANT. «f
áncnt de Barcelone. Nos En
nemis n'estant pas en estât de
nous rendre la pareille , se
récrient sur cette maniere de
faire la guerre. Cependant il
n'y a rien qui ne soit dans
l'usage. Elle est mesme beau
coup plus douce que celle de
donner une Bataille à des En
nemis qui ne veulent point
entrer en lice , parce que ces
derniers íbnt òbîigezdceombactre,
& nc peuvent épar
gner leur sang , au lieu qu'il
est au pouvoir des Peuples
qu'on bombarde, de se ga
rantir , cn se rachetant de
96 MERCURE
tous les maux qui suivent trst
bombardement. Ainsi il est
lidiculc de se plaindre d'une
chose qu'on peut éviter , &
c'est accuser son Enncmy de
ce qu'il est le plus fort. Ceux
qui se déchaînent contre les
Bombardemens , les blimeroient
moins , s'ils estoient en
estât de se distinguer avec
autant de supcriorité. Rien
n'est plus dans les regles de
la guerre, & puis ^u'il y est
permis de surprendre ses En
nemis, & de les battre à son
avantagc, on ne peut avoir
,droit de blâmer cc qui se
GALANT. 87
fait ouvertement contre eux.
S'il y a quelque chose que
l'on doive condamner , c'est
la manicre dont les Ennemis
ont mis le feu à quelques
Magazins de Straíbourg,commc
je í*ay justifié dans ma
derniere Lettre, par le Procès
verbal de ce qui s'est passé
â la découverte du crime,
& à la punition du Crimi
nel.
Le 16. de Juin, Mr le Com
te d'Ettrées, Vice- Amiral de
Trance , estant party de la ra
de des Iílesd'Hieres, mouilla
le 8. Juillet devant Barcclo
88 MERCURE
nc , sans qu'il fust polEblc de
laisser tomber l'ancrc à l'endroit
qui avoit esté marqué,
tant le vent fc trouva frais,
Le lendemain , Mr de Pointis
ayant esté reconnoistre fort
prés de la Place les postes les
plus avantageux pour le des
sein qu'il avoir , y mit les
Galiotes à Bombes fans aucun
obstacle du costé des Enne
mis ,& le iô. les Chaloupes ,
qui avoient porté leurs ancres
fort tranquillement Àc tresgrand
matin , commenccrent
à tirer fur les huit heures.
Cinq ou six Batteries de la
GALANT. 8<?
^illc fircntjgrand feu , & 1c
vent ayant augmenté sa vio
lence vers Ic soir, la grosse
mer empescha les Galiotes de
continuer à tirer. La nuit , il
parut un fort grand feu causé
par les Bombes en difícrens
endroits de la Ville, fur tout>
auprés du Palais du Viccroy
, & la grande Eglise. Le
11. les Galiotes recommence
rent à tirer , & ayant ache
vé d'envoyer ce jour- là le
nombre des Bombes que l'on
avoit résolu d'employer au
bombardement de Barcelone,
on mit à la voile le u. pour
9o MF,R03RH
aller à Alicantç- fans aucuîì
dommage des coups de Ca
non que l'on essuya en se reti
rant , que d'un qui donna
dans !a Cairote de Mr de
Grandpré,où il tua un Mate
lot , & emporta la jambe
d'un Garde marine,
11 fut impossible à caufè
du calme & des vents con.
ttaires , de mouiller devanc
Alicante , plûtost que le zi.
du mesme mois-r maisl'Arméc
s'approcha beaucoup plus
prés de la Ville qu'elle n'avoir,
fait de Barcelone.. De ílx
Vaisseaux epi estoient à ía.
GALANT. 9i
rade , quatre mirent Pavillon
Genois, & un autre mit Pa
villon Venitien. Pourlc sixiè
me il n'en mit aucun II estoit
desarmé , & l'on íceut par les
Capitaines des cinq autres
qni vinrent à bord.qu'il estoit
Genois , & que les Espagnols
l'avoicnt arresté depuis plus
de dix -huit mois, comme
ayant esté trouvé chargé de
quelques Marchaudises de
contre- bande Ils confirme
rent ce qu'on avoit déja fecu,
que Papachin estoit à Malaga
avec cinq Vaiíïeaux & deux
J&ulots. L'on n'eut pas plu-,
H ij
?i MERCURE
rost mouillé que Mr dcPoin*
tis reccut ordre de Mr le
Comte d'Estrécs , d'aller reconnoistre
la Plage ; il y fie
jeteer les ancres des Galiotes
à la portée du Mousquet des
remparts de la Ville. Les En
nemis firent fort grand fcuy
& plusieurs coups porterent
dans les Chaloupes & dans les>
Gnliotes". Un éclat blessa Mr
de Grandprc fur la sienne.
Deux Matelots y furent aussi
blessez , ainsi que plusieurs
aunes dans celle de Mr Boiflier
, par les éclats d'un Ca~
non qui creva. Le soir, les
GALANT. 9j
Galiotes ayaíit esté ajustées,
& mises à un peu de distance,
afin de ne pas perdre un seul
Coup , les Bombes commen
ccrent à tirer, & fur le minuit
quoy, qu'on n'en eust encore
tiré qu'environ trois cens, on
vit le feu en tant d'endroits,
de la Ville, que l'embrascment
parut presque gênerai.
Le 2,3 pendant que l'on contirîuoit
à bombarder Alicante,.
M1 le Bailly de Noaillcs,
suivant les ordres qu'il avoic
reccus de M' le Comte d'Esrrécs
, envoya quarre Galcres
pour remorquer le Vaisseau
54 MERCURE
Genois au large. Non feule
ment il estoit desarmé com
me jc l ay dit* mais il avoit
ses Mars de hune bas. M' de
Pointis fut charge en mesinc
temps de faire brûler neuf
Barques qui estoient toiítcsa
terre à demy portée du ca
non d'une des portes de la
Ville. Des canots remplis de
feux d'artifice, les aborderent*
& ces canots étoient foûtenus
par six Chaloupes à Carcasfes,
dans lesquelles estoient des
Mousquetaires , & dont il y
en avoit trois qui portoient
chacun un canon. On disposa
GALANT. *
les Chaloupes cmrc les Bar
ques , & un grand retranche
ment des Ennemis , mais ny
leur grand nombre ny leur
fcu.continuei n'empêchcrent
point qu'on ne mist le feu aux
Barques. 11 n'y en eut neanrmoins
que cinq consumées
cncicrementxce qu'on impaJ
ta à la mauvaise quâliré d'une
partie des feux d'artifice qu'
on avoit esté obligé de faire
trop à la haste. 11 n'y eut
cn tout cela que deux hom
mes de blessez.Un vaisseau Lìvournoisqui
arriva cemesme
?£ MERCURE
jour à la rade d'Alicante > af.
scura qu'il avoit rencontre le
Comte d' Aguilar, General de
la Flote d'Espagnc,avcc dou
ze Vaisseaux Espagnols' qui
croifoient furie Cap de Saine
Vincent , attendant la Flotte
des Indes , & qu'il n'y avoit
que sept jours qu'il les y avoit
láiíîez. Le 25. six Bastimcns
ayant paru fort au large,
M' Gabaret fut détaché avec
quatre Fregates pour leur don
ner la chaste , & il revint le
2.7. fans avoir pû mefme les
découvrir. Cestoient deux
Hollandois& quatre Anglois
Marchands
GALANT. 97
Marchands qui venoient de
Gencs ôcâc Livourne , & qui
fur les signaux que J'onavoit
faic de terre , avoiient prom
ptement changé de route
lorsqu'ils avoient apperceu
l'Arméc du Roy, C'est cf
qu'on appr/t par des Bastì*
mens chargé d'eau pour ks
Galeres. M. le Comte d'Eftrécs
ayant resolu de faire, at
taquer un Mole qui est à Alicanre?
& qui s'avance tout
droit environ une toile dans
la Mer , jugea à propos 5 pour
favoriser cette entreprise , de
faire approcher les, Vaisseaux
Septemb. ifyr, I
58 MERCURE
ôc les Galères, afin que l'on canonnast
en mesme cemps que
les Galiotes jetteroient des
bombes. Mr de Pointis de
voie cependant mettre pied
à terre fur le Molc à la teste
des Bombardiers , & y faire ce
qu'il croiroit devoir entre
prendre suivant l'cstat où il
crouveroit les choses. C'est
ce qu'il executa le soir du z8.
II fut fuivy par deux Chalou
pes à canon , qu'il fit tirer
fur plusieurs gens qui estoient
fur le Molc , Lors qu'il fc vit
à la portée du mousquet. Ces
gens- là prirent la fuite , &T
GALANT. 99
Fon reconnut que les canons
de ce Mole qui ne tiroient
plus depuis quelques jours, en
avoient esté ostez , & qu'il n'y
avoit plus que les embrasu
res. Pendant ce temps , les
Espagnols redoublcrent le feu
qu'ils avoient fáit jusque là
de toutes lesbatteriesde leurs
remparts. Une des deux Cha
loupes qui en fut percée £c vit
en pcril de couler bas, & dans
l'autre il y eut un Lieutenant
& trois Matelots blessez. On
se contenta d'avoir ainsi canonnclcMolc,
& api es cela
on fit raproeber lej Galiotes
ioo MERCURE
qui tircrent encore prés de
trois cens bombes dans la
Ville On y en avoit déjatiré
deux mille, & deux cens car
casses ; ce qui la détruisit en
ticrement Le 29. à huit heu
res du matin , les Galiotes
ayant esté déja ramenées prés
des VaiíTcaux , la Fregate qui
estoit en Garde du costé de
T Ouest, fit signal qu'elle en
voyoit paroistre un grand
nombre ; ce qui obligea Mc
le Comte d'Estrécs, de faire
mettre aussi - tost toute la
Flote à laVoilc. Peu de temps
aprés, ceux qu'on avoit fait
GALANT. loi
monte* a,u bau^ des fyîasts,
décQuyfircn,t l'Arméc d*£lV
pagne. Elle, çstoit composée
de dix- scpíV^iíTeaux, de trois
Bruloçs, £>ç de deux Çalcrcs,
qui yçnojent vent arricre fur
celle de F:ance. Qnn'avoitp(i
l'apperceyoir de plus loin à
cause d'un grand brouillard
qui s'etloix levé le matin. La
mer esto.it grosse , il y avoir
Í>eu de yent , & à moins de
ouyoyer , il çstoit impofiiblc
dç fe dégager de l'enfoo.
ccrnxtu dans les, terres cù l'on
çstoit à cette rade. On prit les
Galeres, les GaJiotes,& les
i iij
»i MERCURE
Bastimens de charge à la re
morque pour les mettre au
vent , & pendant qu'on faiíbit
cecte manoeuvre , Mr le
Comte d'Estrées en courant
des bords , faiCoir ranger les
Vaisseaux en bataille. Lors
qu'on eut paré les Caps , les
Ennemis qu'on approchoit
par le bord que les nostres nc
pouv oient se dispenser de
courir , ne doutcrent poinc
que nous n'euíïìons dessein
de combattre , & les divers
mouví mens qu'ils firentjcontraires
à ceux qu'ils auroienc
dû faircjsirent connoître l'cm
GALANT. ïoj
haras où ils cstoient. L'inegalité
de forces ne permettant
point de hazarder lc combat,
puis que nous n'avions que
quatre Vaisseaux & cinq Fregares
contre dix sept gros
Vaisseaux , on se servit du
vent pour faire route vers
l'Est , afin de s'éloigner des
Ennemis. Lespetits Bastimens
furent aidez par les Galcres,
qui de remps en temps donnoientla
remorque aux Vais
seaux .autant quela mer, qui
estoit fort grosse , lc pouvoit
permettre. Les Vaisseaux Es
pagnols suivirent de loin les
I iiij
io4 MERCURE
nostrcfr, & aprés avoir tiré
quelques coup/ de Canon
pour des signaux , leurs feux
disparurent pendant la nuir,
& le jour estant venu, on nc
lesapperceut plus Le 30. Mr le
Comte dTìftrées tint conseil,
&c pendant qu'on déliberoîe
fur la resolution que Ton dcvoitprendre
, les Ennemis pa
rurent encore , mais assez élcignez.
Ilsavoient esté jus
que- là couverts de la terre 1c
long de laquelle ils estoienr.
(Jne bourasque qui s'estoic
élevée la nuit ayant contraint
les Galcres à se separer des
GALANT; ïoç
Baílimcns qu'elles remorquoient*
, cela leur poyvoit
donner moyen de rejoindre
nóstre Flotte , à cause qu'il
cn estoit demeuré quelquesuncs
derriere , qu'on vouloit
attendre , & particulicrement
une Galiote qui se trçuvoit
fore prés d'eux. Ce fut Mr
dcPointisque l'on comman
da pour aller la remorquer
avec Ion Vaisseau , qui étant
plus leger que les autres , pou
voit plus facilement fournir
à cette aíbion. Son ordre
estoit de ne la point laisser
tomber au pouvoir des Es
ioé MERCURE
pagnols j & de la couler plútoít
à fond , ou d'y mettre le
feu , scion qu'il fe trouveroît
f>relsé. On détacha deux Gaercs
pour le suivre , afin de
le remorquer luy-mcsme , s'il
arrivoit qu'il fust pris du
calme. Deux Galcres des En
nemis , suivies de trois Vais
seaux venoienr vent arriere ,
& estoient déja fort prés de la
Galiote> quand Mrdc Pointis
revira deflus , & ayant forcé
devoiles pour s'en approcher
|)lus promptement , il la prie
a la remorque , & la ramena
en peu de temps vers l'Ar-;
GALANT. ió7
Hiée. Cependant il la donna à
l'une des deux Galcres qui
l'avoierrt fuivy , afin d'atten
dre cricorc une Tartane qui
venoit apres , & une Chalòupc
chargée de l'Ecjuipagcv
d'un Vaisseau Marchand. Cc
Vaisseau l'avoit abandonnée ,
n'cfperant pas estre secouru,
& se trouvant au mesme dan
ger où s'estoit trouvée la Galiorc.
Le soir du 30. le vent
estant devenu plus frais , on
s'éloigna davantage des En
nemis , qui cesserent entie
rement de paroistre le 31. au
matin. On continua de faire
îo8 MERCURE
route vers l'Est , Ic long des
Ifles de Majorque du coste
de la ^arbaric. On peut dire
que la fierc contenance de
l' Armée du Roy, empescha
feule que les Ennemis n'enga
geassent le Combat > puis que
leur Avant garde qui alloit
tres-bien, l'auroit pû faire, si
elle eust fait force de voiles ;
mais quoy que supcrieurs de
beaucoup en nombre , ils
craignirent que le succès nc '
jeuf cn fust pas avantageux.
Les mouvemens de l'Europc
font fi grands, & elle est:
dans une situation si extraor
GALANT, la)
dinairc , qu'il ne faut pas s'é
tonner s'il sc trouve une infi
nité de personnes qui mettent
la main à la Plume pour en
parler. Je vous envoye une
Lettre fur ce sujet , dont jc
ne doute point que vous nc
Xoyez satisfaite.
iio MERCURE
LETTRE
DE MYLORD *****
Conseiller d'Etat en Angleterre,
A Mr LE COMTE
DE PORTLAND.
EA/F/iV, Mylofd, nous
sommes à la veille de voir
celuy que nous avons élevé à la
Royauté 7 aujjt bien Maijlre ab
solu de l'Irlande , qu'il l'efl de
venu de l' Angleterre & de /'£-
cosse * par les bons conseils que
nous luy avons donnees &
GALANT, ut
Í\uoy que la Ville de Limerick.
uy ait déjasait lever le Siege ,
il n'y a pas d'apparence que ce
refte de Tapiftes qui s'y efl re
tiré * puijse longtemps renfler a
une Armée , à laquelle rien ne
manque pour les attaquer. Ainsi
le 'voilà bien-toft libre de tous ces
égards &ména<£emens quilejìoit
obligé d'avoir d'un coflé pour les.
Loix d'Angleterre , & de l'autre
pour ce vain nom de Republique
& de Liberté, dont quelques-uns
de vos Bourguemeflresfont encore
Jt jaloux. Vous fçaveT quelle
contrainte cela luy a donné jus
qu'à prefent , & qu 'encore que
m MERCURE
nous autres t qui sommes dans fa
confidence* n'ayons^pas manqué
de bonne 'volonté pour luy éta
blir dés le commencement un
Touvoir despotique & arbitrai
re , mefme pour punir de haute
trahison ceux qui s'y oppoferoitntt
& nous en approprier la biens ;
neanmoins j'ay toujours dit avec
beaucoup dr raison, que tant que
les Papíjìes {0 les Serviteurs du
Roy Jacques , pojfderoient , eu
toute VIrlande , ou une partie*
il filloit bien fe garder de faire
connoijìre aux Anglois même
aux Hollandois , quel efl nofìre
veritable but ; çy vous 'VoyeT^
GALANT, n ?
aujourd'huy de quelle utilité a
efté U conseil que f ay donné, de
témoigner autant d'averfon four
le Gouvernement arbitraires que
pour la Religion Papijle ; caries
Tevples qui fe rebaissent de ces
démonflrations , & qui veulent
croire ce qui leur plaifl , ont /o#-'
purs ajouté plus de créance à ces
faux témoignages du prétendit
éloignement de ce Princ* , à ce
qu'il souhaite le plus ardemment,
quaux preuves effectives que le
Roy Jacques , £<r ceux qui Pont
précedé, leur ont toujours don
nées de la dtoiwre de leurs in
tentions. C'eft en effet cet aveu-
Scpï. 16SU K
n4 MERCURE
glcment qui les a empêches de
voir que ce p*fptge en jdhgleterre
, à* un Jï grand nombre de
Troupes Etrangeres* ne powvoit
avoir pour objet que l'aneantiffement
de leur liberté , $ l'établijpment
d'une autorité direéîe-*
ment contraire aux Loix aux
Constitutions du Royaume , fy
. qu'ils avoient toujours traitée de
titannique. C'efl cette préoccu
pation qui les a fait souffrir les
p^lf*ges, logemens & quartiers
d'hiver de ces Troupes de toutes
fortes de Nations , qu aucun Rojy
d'Angleterre riavoit osé intro
duire , quand mefme U les auGALANT,
iiy
toit payées à ses propres dé
pens , & qu elles n'auroient pas
ejlé a, charge au Toys. Vous
ave% veit qu'une entreprise ji
odieuse à la Nation , ne l'a pas
empefchfe de s'épuiser en dons
immenses , d'accorder au Roy
Guillaume en une feule Assem
blée de Parlement plus du dou
ble de ce qu'elle avoit donné au
Roy Charles II. a son Couron
nement , £<r au Roy Jacques k
son Avenement. Vous fçanje^
que nojìre Trince n a pas plutojì
tiré d'un Parlement tout ce ,
qu'il dejtroit , qu'il en a assem
blé ttn autre , qui l'a mu, en état
K ij
us MERCURE
par la continuation de fcs hberàliseT9
ou plutojl par une pro»
fusion énorme des biens du peu
ple , de répandre Yargent d'An
gleterre s non feulement en Ir
lande , mais aujjt en Flandre ft)
en tìollande , en Savoy e , en Ba
viere * à Vienne , g) jusqu'à
Constantinople, C'efl cet argent
qui a offusqué les yeux de la
plus grande partie des Puissances
de l 'Europe * & qui a fait reconnoijlre
l'Ufurpateur pour Roy
legitime, Qe sent les biens des
Angjois qui luy donnent les
moyens , non feulement de main~
tenir son ufutpation > mais aujjt
GALANT. 117
êe-se rendre Aiaijìre des Etats
Generaux des Provinces Unies ,
de tous les Pais- Bas Catholiques,
& enfin de toute l' Irlande^que nos
nnciens Rojalifles Jnglois consi
deraient comme un Caveçon ca
pable de ïempefcher de courir à
bride abatuë à une domination
fans bornes, C'ejl donc aujourd'huy
qu'on peut dire qu'il ejl le
Maifre absolu de la vie & des
biens úe tous ceux qui habitent
la Cfrande-Tìretagne , la Hol
lande f0 les Pah-Baf Catholi
ques ; qu 'il va jouir fans con*
iraìnte de la liberté de changer
les Loix $ la disposition du Couai8
MERCURE
vernement , aujjt bien dans le
spirituel que Jans le temporel ;
qu'il pourra fans aucune appre
hension déposer les Prélats , en
fubfìituer d1 autres à leur place >
mesme supprimer l* Episcopat pour
rehver les ^Presbyteriens , ou
abaijjer ceux -cy pour s'attirer
tEgltfe Anglicane , {0 enfin
affujettir entierement a fa Puis
sance , £7* les Ecclefiaftiques &
les Laïques. Une fera plus obli
gé dorénavant d* avoir égard aux
Deliberations des ParJemens,
{sautant quelles conviendront
a fis desseins ; cy fi quelquesuns
des Membres de ce Corps ,
GALANT. ii$
meÇme l'une ou l'autre des deux
Chambres* eíìoit ajje% osée pour
luy refuser ce qu'il' leur proposera,
il leur fera bien 'voir que le foin
.qu'il prend d'entretenir che% eux
vingt mille hommes de Troupes
Etrangeres , demande une obeis
sance aveugle à fes volontes &
que dans le partage qu'il a fait
pour l' avenir du Gouvernement,
il s'efl réservé pour luy seul le
pouvoir de commander defp'otiquement
, a eux la gloire d'o^
heir fans replique. Cependant les
Troupes Anglaises auront lafatif
faclion d'aller chercher au delà
des Mers les occasions £employer
no MERCURE
leurs biens & leurs vies pour le
service du Prince ; fy comme les
Troupes de voftrc Nation ont
beaucoup contribué che^ nous à
i'établijpment de fa Puissance
absolut' , les nojìres auront aujp
le plaisir de reduire tous vos Hourguemeflres
à la servitude , &
de Je consoler de la perle de noflre
Liberté & de nos Loix tpar lia*
neantijjlment de la voflre , &
par la ruine entiere de vojìre
Commerce & de veflre Républi
que. Pour nous , Milord , nous
devons diamant plus nous réjcuir
de ces deux grands évenements
que ce font les effets de nos
conseils,
GALANT. 121
íonseils f cf que nous devons
en attendre de grandes marques
de la reionnoijsance du Prince.
Je vous prie de me mander ce que
vous en penses, & de me croire,
SilaLctcrc que vous venez
de lire a satisfait vostre cu
riosité , j'cípcrc que ccllc qai
fuit, ne la remplira pas moins.
Ces Lettres devroient faire
ouvrir les yeux à bien des
gens , & les faire rentrer en
eux-mesracs; mais l'obstihation
à suivre un méchant
Party , pour n'avoir pas la
Seps, iìyu L
Hz MERCURE
honte de se démentir , est
quelquefois pire que Pavett-j
glemenc.
LETTRE DE Mr
Bourguemestre de Nuremberg ^
A Mr
Député ì la Diette de.Ratisbonne,
Par les Princes de.....
M
ONSIEVR,
Vous tnave% fait beaucoup
de plaisir de me donner part dit
bon Acheminement que mous
GALANT, tij
Ì)oye% à une prompte concluson
de U Paix entre ^Empereur &
les Turcs. Je vous assure que je
n'en aurois pas moins de joy&
que vous , jt je croyois que la fin
de la Çjuerre de Hongrie fijl ces
fer celle que nous avons furJe
Ttyin , & que nous pujjìons bientofl
jouir de la liberté du Com
merce , de tous les avantages
que l'entier rétablissement de U
tranquillite* publique apporte avec
foy i mais je vous avoue ,
Monsieur \ qu*il me pavoifl que
cette Paix nous éloigne beau
coup plus de celle qui nous dois
donner U repos , que nous ne l'ê
L ij
124 MERCURE
tfans au commencement de l&
Guerre , &je crains bien qu'elle
ne devienne beaucoup plus pe
rilleuse pour les Princes * Etats &
Vicies Libres de l'Empire qu'au
cune autre que nojìre patrie
commune ait jamais soutenue ;
car s'il n'ejìoit qucslion que de
defendre nos frontieres contre
la J>'rance , je croirais que toutes
les forces de l'Empereur $ de
l'JUmpirc jointes ensemble , Jeroient
d'autant plus suffisantes
que celles d'Espagne * d'Angle
terre & de Hollande donneront
d'ailleurs ajse% d'occupation aux
Francois jour les empescher dç
GALANT. ìif
faire de nouvelle s conquefles en
decà du Ttloin. Mais qui efl-ce
qui nous afeurera que la Cous
de Vienne bornera fes desseins à
une Paix raisonnable^ ft) quelle
preferera le repos de tout t Em
pire à son ambition ?
Nous apprenons déja que le
Comte Caraffa fait le t^daijìre
lion feulement dans le Milanais*
mais aujji dans toute l' Italie ;
qu 'il Va établir un Corfeil Aulique
a Milan , par lequel il fera
citer fous les pretendus Feudaj
taires de l' Empire ,r soit simples
Gentilshommes ou Princes Sou
verains : 0* qu'enfin tous les
L iij
né MFRCURE
.Etats d'Italie , fur lesquels defuis
plufiettrs fie clc s î Empereur
ne confervoit qu'une autorité
imaginaire \ <vont bien tùít de
venir fes tributaires * pour ne
s'eflre pas oppofc^dans le temps
qu 'ils le pouvoient >au passage de
fes Troupes dans leurs Pais , 01
aux violences' qu'elles ont cent*
mencé d'exercer contre ceux qui
ne font pas affi% forts peur leur
reftjler. Cet exemple ne nousfait*
il pas voir clairement le peril
qui kous menace , $ferons^nous
*(feX firnples pour croire que
l Empereur voudra la Paix dans
l'Empire , qumd il fe verra dé
GALANT. 127
tfa/rí de la Guerre contre les
Turcs f II aura une Armée de
soixante ou. quatre- 'vingt mille
hommes , toute composée de fes
propres Troupes . au milieu de
l'Allemagne j £r tout ce qu'il y
a d'Elctteurs de Princes qui
ont quelque Corps de Troupes à
leur solde , Je trouveront trop
heureux d'obtenir de bons quar
tiers d'Hiver pour les pouvoir
entretenir , fans qu*il leur en
coûte rien, Que fi quelqu'un
d'entre* eux plus éclairé que les
autres , £sr moins disposé à souf
frir l' aneantissement des àroits
libertes des Princes &
L iiij
n8 MERCURE
Etats de l'ëmpire , songe à prò-
•curer la Paix , comme le seul
moyen d*êviter l'ejclavaze de la
Maison d'Autriche , ne fierat-
elle pas en ejlat de ï accabler *
de le traiter de traître a la Pa
trie , de le faire mettre au Ban
de l Empire , f0 d'exercer contre
luy toutes les rigueurs , que les
artificieuses cabales des Minis
tres Imperiaux ont fait pronon*
cer a la Diette de Ratisbonne >:
contre ceux qui auront le moin
dre commerce avec nos Enne
mis f Ne nous sommes nous pas'
enz^uZ là * une Guerre
perpetuelle , ou au moins a l&
GALANT 129
faire durer , jusqu'à ce que la
Cour de Vienne ait opprimé nos
libertes , fy qurctte ait mis l'Al-
It magne dans un plus facheux
eftat quelle n a eflé fous Ferdi
nand IL au commencement de
l année iózS. lors qu'il n'y av,
cit plus que la Ville de Strat-
T^und , qui par le secours de la
Suede fit quelque rejìfìance aux
forces de ce Prince i Sera-uií
temps r quand nous ferons assu
jettis * d'avoir secours à U
France & a la Suede pour nous
tirer d'opprejjìon. I La premiere '
preferera peut-ejìre les avantages
grefens d'une Paix particuliere
i?o MERCURE
avec l'Empereur , à la confderation
du préjudice que luy pourroit
causer à l'avenir la puissance
absolue de la Maison d*Autri
che fur toute l*Allemagne t &
il faut encore moins esperer que
le Roy de Suc dé , qui a des en
gagement avec la Cour de sien
ne , & qui n'ose feulement lit
frejfer d'accepter fa Mediation *
fajje le moindre mouvement pour
suivre l''exemple de fes Trcdecejfeurs
, nous secourir dam
nos besoins.
Il est vray que ft cette bonne
irteììigence qui paroiíl ejlre aujourd'huy
entre luy & la Cou
GALANT. tj!
Tonne de Danemarc Je pouvoii
affermir , ces deux Puiffances
bien- unies ensemble auloient
â' autant moins de peine' à pro
curer le rétablissement de la Paix
dans l'Empire > qu'il ne s'y ejt
point fait de con quejìe ajfc^ con
siderable de part ny d'autre pour
y apporter de grands objìacles ,
& que les foins de ces deux Cou
ronna ejlant secondes en même
temps par lu Trinces de l'Em
pire * qui prêvoyent [es dange
reuses fuites de cette Guerre , on
trouveroit bien- tofl les moyens
de la faire pnir , ou au moins
e» penetreroit àffeT^ quelles font
tp MERCURE
les veuës des Amis $ Ennemis dt
l'Empire,pour prendre les mesures
les plus convenables à la conser
vation dtsPrmces fy Etat s qui U
composent. Mais que ce.beau pro
jet me semble éloigné de son exe
cution , tant par la défiance &
la jalouse qu 'il y a toíijours et*
entre les deux Couronnes du
J\sordt que par fa foins que pren
nent les Minières de YEmpe
reur * du Prince d'Orange , &
de tous leurs Adherans , de les
augmenter & de promettre toute
fatiïfatfion a l'une , pourveu
quelle p separe de l'autre h Qest
fe qui me jait craindre avee
GALANT. ijjf
faauceup de raison que ces deux
Rois ne Je laissent endormir* qu'ils
ne prennent la refolution d'agit
conjointement que lors que toute
l'yiOemagne fera au pouvoir de
{'Empereur * $ qu 'il n'y aura
pas un Etat de ÏEmpire qui ose
feulement demander secours pour
la conservation de ses droits (fts
libertes. Enfin , Monsieur * dans
l'ejiat où font aujour d'h uy les affaites
de nojìre Toys ? nom ne
devons pas moins apprehender
nos Amis que nos ennemis , &. -
ft voflre 4ffemblé£ qui a fermé
toutes les portes au retour de U
Paix , ne trouve quelque expeÏÏ4
MERCURE
Àient pour hs ouvrir , eUe pour
ra bien ejîre la derniere d'Alle
magne i ^ ensevelir avec elle
tout ce qui nous refle' de fran
chises , de prerogatives $ de
droits. Je fuis t &c.
Le j. de xc mois , jour de
ia Naissance du Roy , il Te fit
à Saine Germain en Laye un<
Ceremonie, où. les Habirans
firent paroistre pour Sa Ma
jesté tout lc zelc qu'on peut
souhaiter dans de ridelles Su
jets. Les Peres Recolcts , & les
Pcrcs Augustins Déchaussez
des Loges , pour donner plus
GALANT, là
d'éclat à ccrcc Ceremonie , sc
rendirent à dix heures dû ma.
tin a la Paroisse pour accom- .
pagner le Clergé. On fie en
suite une Procession generale,
qui fut suivie d'une Messe
íòlcmnellc ,quc Ton celebra,
& à laquelle Leurs Majcstcz
Britanniques aílìsterent, ainsi
qu'au Salut qui fut chanté
par la Musique du Roy. La
Messe achevée* on commen
ça le Te Deum, pendant le
quel on se rendir au lieu où
le Feu dejoye estoit préparé.
Ce fut le Roy d'Angleterre
qui l'alluma. Il en parut eni$
MERCURE
suite devant toutes les mai
sons, avec des Illuminations
aux fenestres qui durcrent
bien avant dans la nuit. Rien
fie manqua à cette Fcstc.
L'Eglise estoit superbement
décorée, & tendue de tresriches
Tapisseries. On remar
que que Louis le Grand est
le quatorzième Roy de Fran
ce qui a pris naissance à Saine
Germain. Ce pieux Monar
que n'a pas feulement fait
rebastir l'Eghfc de ce lieu qui
ïomboit en ruine , mais il a .
mcímc fait une donation per
petuelle pour i entretenir; cn
GALANT, ir?
jfeeonnoissanec de quoy l'Eglife
a fonde une Messe à
perpetuité, le cinquième jour
de chaque rnois. 11 y cut Ta(.
préfdînée un divertissement
composé par Mr le Maire,
Professeur des Humanitez à
S. Germain, & representé fur
le Théâtre de l'Hostclde la
Rochefoucaub.il estoit d'une
manicre nouvelle, & avoir
Íïour sujet, , La Coutume &
'Opinion détruites par des "Dis
cours en forme de Paradoxes*
On prononça six Discours ,
dans le premier & dans 1s
dernier desquels on fit entres
Septembre i6$i.
»?8 MERCURE
<dcs Eloges du Roy, qui re«
ceurenc de grands applaudis
se mens. Tous ceux qui tra*
vaillent fur une si belle & fi
abondance maticre , ne man
quent jamais de réuífir. AuíS
leur seroit - il difficile de nc
pas dire de belles choses,
quand ils n'auroient pas le
secours de l'Art & de i'Eloquenec.
La Fable qui fuit vous ap
prendra pourquoy l'Áurore
est Amie de T Amour. Lc
Berger de Flore en est l'Auteur
, & vous connoissez le
prix de ses Ouvrages par beau*
GALANT. 13*
coup d'autres que vous avez
deja veus de ía façon.
FABLE DU SOLEIL
& de l' Aurore.
LE Dieu du jour ,
Dont U grande ame ,
Touh dut lumière & de fime% . lv
A de fortspanchans fout CAmour,
Sesto.it laisè toucher aux affas d'un*
Belle,
Dont te teint frais & delicat \
Brilleit d'un blanc de lait & d'un
doua incarnat t
Et qui, bien que mortelle ,
Avoìt d'une Pallas, l'air, le fort, &
(éclat.
Ilfe fUifoit à soupirerfour elle*
Malgré le fort infortuné
Mij
x4o MERCURE
Pucelle
£>£'tl effijBtt de s'acquerir)
Ne demandoit rien qu 'à, courir ,•
Aimoit lit Chiffe , habitoit la Ca*
bane,
A'voit de la douceur , un grand fond
de bonté ,
Tout autant d'innocence enfin que de'
beauté ,
liais elle avoitauffifur l'Autel de
Fait ainsi queDiphné ,v<eu de wr~
Viant ì (ginité.
Ci Dieunigmroit pas cet incommode,
obstacle , '
Au succès de fa fanion.
C'étoit en éclairm ce celebreJpxtfaf/e,.,
GALANT. t4î
Qu'il s'ejìoit appereeu de son use*
étion.
Il avoit pourtant esperance
Que sa galanterie ejr /a perseverancé
Bourraient d'Amin te allumer lef
dejìrs ,
Et luy faire au devoir préférer les
plaisrs.
Ilffavoit bien aujji quelle efloitl'in*
• jujlìcc'
Bu difîein qu'il vouloit tenter ì
Mats y fermant les yeux , il prenois'
pour supplice
La gloire de sesurmonter ,
Et s'il previt le precipice ,
U le trouva f beau , qu'il s'yVOttk
lut j ester.
Rien donc ne le touchant s contme
ses amourettes ,
Aux pieds d' Aminte il mtttffit
ses grandeurs. ,
i4* MERCURE
fautos , comme Ph «bus fil luy contoit
fleurettes ,
Et luy disoit mille douceurs,
tantost * comme Appellon , il ohtrchoit
ses faveurs
Far le son de sa. lire , & par se»
chansonnettes ;
Et pour U divertir employois Us
neuf Soeurs-^
Avec Pega^e &ses courbettes >
Cu lafùivoit aux bois parmy d'autres
Chasseurs,
luis , comme Astre du jour , son
soin dans fa carriere
Estoit de l'éclairer de toutefa lumièrer
jsn de luy montrer ses brillantes
ardeurs >'
Et de tacher par cette btlle fiame
A bannir le froid de son ame.
Ce Dieu joua , tout un printemps-*
Ces officieux personnages
1
GALANT. r4?
Mais voyant qu'ilperdoitson temps,,
llse lassa de rendre tant d'hommages}
Etfa chaleur augmentant par sEj}éy
ll resolut de passer sans remise
De l:'amour souple & deux , a l'a~
mour emporte»-
La resolution n'en sut fias plutefí
prise *
J>)uc Cupâm quépioìt cet Amant
Ne dissira pas d'un moment ,
Suivant l' ordre rtceu , d'en avertit
fa Mcre.
Alors la Reine de Cithere
Ne souhaitoit rien tant que de pou*
voir vanger
Vaffront dont le Soleil avoit scetà
Ìoutrager ,
Affront le plus sanglant qu'en puisse
jamais faire,
Lors que jaloux d'elle & de
Mars
*
ï44 MERCURE :
II avoit en plein jour k cent fà^
cheux regard»
Exposé leur secret miflere*
Bile ouit donc L' avis queson Fils Ap'
portoit, ,
Avec tout le plaisir que tire U colere
De l 'espoir de sesatisfairt ,
Et dit àfan Ami ce qu'elle projettoit'
Four punir leur grand Adversaire,
ÌÙars approuva le dessein de Venut.
La Déesse part là^defsus ,
Se rend auprés d' Aminte , luyditï
belle Filles '
Ó Dieux , qtt'on voit en vous ie
graces , de vertus ?
^ue de nterite y brille?
J'en fuis chxrmêe * il faut les
conserver,
gi po-'r cela , voicy ce qu'ilfaut ob
server.
GALANT. i4j
iw« f» aimant u ûche *
s'adoucir.
Les effett trop certains deson ardeur
s exrrème
Sont de brûler , de hâler , de noircir.
Vojlre beauté vers luy nefi sas en
ajfurance ,
Et qui pis efit vojlre honneur encor
moins.
Indigne de la longue ejr sage rejìjlance
Jgui vous fait dédaigner Jts Joìns,
ll renonce à U patience ;
Et veut pour s'en vanger vousfaire
violence. ( d' À mi.
C'tfl Aminte , un avis & d'Amie &
Redoutez, son approche ,
Ayel^ pour luy le coeur de roche ,
Vous n'ave^ point de plus grand
tnnemy.
Scptemb. lCç>i. N
i4* MERCURE
Fuye^le , mais fuyant gardez-vtus
de vous rendre
Aux pieds de la Déejse oùse rendit
Daphné ,
Elle ne pourroit vtus defendre
Contre cet Amant déchaîné
Sans vous causer quelque facheux
esclandre
Dont vostre esprit sroìt long- temps
gène.
Donc au lieu de courir au Temple de
Diane.
Retirez, vous dans celuy deJunon.
Cette Reyne des Cieux n'entendpoint
' qu'en profane
Les endroits qui portent son nom.
Jusqu'au grand Jupiter tout craint
de luy déplaire ,
Son pouvoir n a point de pareil,
jl vjus tirera mieux d'affaire.
Amìnte écouta ce Conseil ;
GALANT. U7
S'est tint bien obligée a la belleDéeffe,
Et le suivit comme plein desagejsc.
Si'tôfl qu'elle voit le Soleil
Epatera sesjeux , & venir auprès
d'elle ,
La frayeur qu'elle a du danger,
Luyfait tourner le dos , rjr luy frétant
son aifle
Rend à fuir son fas plus leger.
Le Soleil vainement l'appelle ,
Elle court devant luy, rien fie peut
l'arrester.
Le Dieu craignant quelle n' échape
'Al* ardeur qui le pr(fftr & qu'il veut
contenter i
Ilfaut , dit, il , qu'au plùloft je l'attrape
,
Car Diane pourroit , pour me maríife
r ,
Comme Daphné , la changer en>
laurier-
N ij
i48 MERCURE
C'S mots fontsuivis de fa coursa
Uéls avant qiïil î atteigne t elle ga
gne un Autel
Ou,Junon recevoítun Culte solennels
Et la nommantson unique resourcc>
Bilese met avec devotion
Stus ft protection.
te Soleil transporté par l'amour qui
l'anime
Ne prend pas gxrâe au changement
de lieux,
ll oublie en [courant que les plus
grands dts Dieux
Ne choquent point Junon fans
crime ,
Et ce clairvoyant n 'a des yeux
j>>ite pour l' innocente viclime
Jï>v'il pretend immoler
Ju feu dont Ufe fent brûltu
GALANT. Hs>
En peu de temps ïayant atteinte*
Toute éperdue dr tremblante de
crainte ,
Jl l'ose prendre par le bras,
ta tire de C Autel , l'éloigne de trois
*w pas ,
Et malgé toute fa colere ,.
ìl ne luy cache point qu'il pretend
satisfaire
Sans refpeéldu saint lieu , fans de laj
d'un moment,
Son amoureux emportement.
Amlnte fe met en défense.
Jl en vient à la violence.
Elle demande k Junon du secours.
Jl s'en rit , & s efforce a, pouffer fes
amours
Auffi loin que son esperance.
n° MERCURE
La Déeseshrvient. Arrefleseremnt
Ce redoutable Amant,
Luy reprocheson insolence ,
Ses r» éprh, fin in confiance;
Et four l'en funir hautement,
Faisant de son supplice honneur à la
s*S<f*>
Elle transporte Aminte au celeÇe
sejour,
Luy donne le nom de Héese ,
La pUce à la porte dujour ,
Accrois st force & st Vitejse,
Et luy prescrit sa marche à son rc~
tour.
Puis redoublant encore
La fuischeur & l' éclat des roses &
des lys ,
£)ui la rendoient semblable à Flore,
Et dont le Dieu brillant esoit le plus
épris, ( Aurore.
Elle la change tnfn (n la brillante
GALANT, ift
S, '
iif/f/j sf/rf, regardant le Soleil*
Elle l»y dit raillant de sa souffran
ce,
Cette Belle a causé quelquefois ton
réveil >
Et deformais fa vigilance
Sfiltra tous les matins te tirer du
sommeil,
fe ne fôte pas fa presence ,
Jouis en librement 3 conte- luy ton
amour ,
Il tes permis de luy faire la cour.
Vois de combien d'attraits brille son
beau visage ,
En vis-tu jamais davantage ?
Mais , insolent , n 'espere pas
De joindre jamais tant d'appas,
Je veux te voir courir d'une course
éternelle ,
Téut brusant d'amour aprés elle.
N íiij
K2 MERCURE
Mais soisfur en courant que tu ftrdras
tes pas,
Jamais au grand jamais t tu ne l'at
traperai.
Çe quifut dit ,/e fait , le Soleil court
fànscejse
Aprés l' Aurore fa Maìstreste;
Mais son travail est vain , elle se rit
de luy ,
Sa course précede la sienne ,
Et pour luy causer plus d'ennuy,
ll n'est point de matin qu'elle ne se
souvienne
Du salutaire avis
£)ue luy donna la divine Cìprìs,
Et qu'en reconnoijfance elle ne contri
bué
Par une vertu qu'elle instué ,
A rendre heureux les Favoris
Et d'elle & de son Fils.
GALANT. «ï?
le Soleil qui le sçait en est plus mi
serable ,
Et le fer* tant qu'il fera Soleil.
Vexemple est grand, & fans pA~
reil.
Amis estait Histoire , soit Table,
Nous en tirons cette moralité ,
J>)uc ion doit s'abjlenir d'un amour
condamnable ,
Et ne pa4 offenser une Divinité
Dont la yuìjsance (st redoutable,
Et qui nous peut punir , toute uni
éternité.
II n'y a pètíònne qui n'ait
entendu parler du Combac
de Saint Godarr, & de la
gloire que les Armes de
France y ont acquise. La Vie
iT4 MERCURE
toire qu'elles remportcrent
ne fut point douteuse , elle
fut pleine & entierc, & ja
mais avantage remporté n'a
produit si promptement la
Paix cjuc fit la défaite des
Turcs, qui apprehendant les
fuites de la valeur Françoise ,
la conclurent presque auíïìtost
qu'ils eurent perdu la
Bataille. La bonté , la pieté,
& la gencrosité du Roy ayant
paru en cette occasion, puis
que Sa Majesté , pour l'interest
de la Religion , non
feulement voulut bien en
voyer des Troupes si loin.
GALANT, itf
jnais qu'Elie consentit mesme
que la jeune Noblesse la plus
distinguee de la Cour fìst
ce voyage, cette action doit
estre marquée dans l'Hisroire
> comme une de» celles
qui doivent faire le plus
d'honneur à la vie de ce Mo
narque , & c'est pour îa ren
dre immortelle qu'on a fait
fraper la Medaille , dont je
vous envoye le revers.
Je vous ay souvent parle
deMrdc Saintot, Maistrc des
Ceremonies , &qui s'est tou
jours acquitté de tout ce qui
a regardé cette Charge ayeç
une si grande distinction. ïí
vient d'acheter avec I'agrétnent
du Roy , la moitié de
celle d'Introducteur des Am
bassadeurs , que M' de Bon
ne ùil avoir entierc , & l'on
est persuadé qu'il en templira
ies fonctions , de la rncímc
manicre qu'il a fait celle de
Maistrc des Ceremonies,, dont
Mr des Granges, qui a servy
Ic Roy íous M1 Colbcrt , &
fous Mr de Seignclay , a eu
l'agrérnent.
La Charge de Premier Pre
sident au Parlement de Nor
mandie, estant vacante depuis
GALANT. if7
la more de Mr de Faucon de
Ris , donc jc vous ay parle,
Mr Hcnnequm , Procureur
General au Grand- Conseils
en a cité pourveu. Le sçavoir,
la sagesse , la naiísancc , & U
pieté se trouvent dans cc
Magistrat. Il y a des titres de
noblesse dans fa Famille de
plus de trois cens ans. Elle
est originaire de Troyes est
Champagne, & a donne des
Officiers à toutes les Compa
gnies Superieures de Paris.
II y a eu de cette Famille
des Preíìdens au Mortier,"
ainsi qu'aux Enqucstcs > &
j58 ' MFRCURE
aux Requestcs du Palais, des
Maistrcs des Rcqucstcs , &
des Maistrcs des Comptes ,&
clic est alliée à un grand
nombre des meilleures Mai
sons du Royaume.
Pour répondre à cc que
vous me demandez touchant
l'opcration que Mr Tribouleau
a faite à Mr le Duc de
Vendofme , je vous diray ,
^Madame , qu'elle a esté tresheurcusc
, & que la con
stance de cc Prince a paru
digne d'admiration, puis qu'il
a souffert toutes les douleurs
qui font inévitables dans les
GALANT. i#
operations de cette nature ,
fans profcrer une feule paro
le, 6c fans faire le moindre
cry. Mais ce qu'il y a de re
marquable , & qui fait yoir
son courage & son zele pour
le service du Roy , c'est qu'on
vit couler fes larmes , lors
qu'on luy eut dit qu'il ne
pourroit aller à l'Arméc de
plus de íìx semaines.
Jc vous manday dans ma
Lettre d'Aoust de l'année
derniere avec combien d'applauíscment
Mr i'Abbé de
Pezane avoit fait le Panegy
rique de Saint Loiiis dans la
ïfo MERCURE
Chapelle du Louvre , devants
Mrs de i'Accadcmie Fran
çoise. Chacun demeura d'ac
cord que l'éloquencc luy é~
toit naturelle , & que les heu
reux talens qu'il avoit pour 1a
Chaire le meneroient loin, si
fa santé luy permectoit de ics
exercer. II l'avoit foiblc, &
tous les foins qu'on l'a obli
gé d'en prendre n'ayant pû la
rétablir, il eft mort au commcnccmenc
de ce mois , dans
une fort grande jeunesse *
laissant un exemple fort édi
fiant de resignation à la vo
lonté du souverain Maistrc.
GALANT. ìêi
La douceur de son esprit, la
pureté de ses moeurs , & son
exacte application à remplir
tous ses devoirs, le faisoienc
aimer de tout le monde. Il
estoit Fils de M1 le Marquis
de Pezanc, qui n'ayant pû
refuser toute sa tendresse à la
connoiísanee qu'il avoit de
fes bonnes qualitez , ressent
cette perte avec toute la dou
leur imaginable, (
Mrlc Bel , Premier Mede
cin de Madame & de Mon-
£eur le Duc de Chartres, est
mort aufíì depuis peu apres
%jne longue maladie, II a ve-
Septembre i6?u
jéi MERCURE
ritablcment paru Medecin,
puis qu'il s'est connu luymesme
, ayant declaré que ía
maladie estoit mortelle dans
un temps où il n'y avoit
qu'un homme éclairé en Me
decine qui en pust juger. La
certitude qu'il avoic de fa
mort prochaine a esté cause
qu'il s'y est preparé, & l'on a
peu vû de Medecins mouris
plus chrestiennemenc.
Le Dimanche pe de ce
mois , le Roy d'Angleterre
alla au Convent des Reli
gieuses de Chai Ilot , où il
entendit Vefprcs & la Prcdi
GALANT. ié?
cation du Pcrc Philbcrt de la
Doctrine Chrcsticunc. Ensui
te Sa Majesté accompagnée
de Mr l'Evescjuc Dax , de Mr
de Lauzun , & de plusieurs
Personnes de cjualité , sic
l'honncuraux Peres de cette
Congregation de venir à Pa
ris visiter leur Maison de
Saint Charles , où Elle recent
Ic Compliment du Pcrc Milliot,
leur General, à la teste de
fa Communauté , & aprés
avoir consideté la situation
de cette Maison , & sa belle
vcuè\ & s'estre promené dars
le jardin , elle voulut encore
O ii
j<?4 MERCURE
y souper & y coucher. CcíË
la premicre Communauté qui
aie eu cet avantage.
Comme il n'y a rien de
plus meprisable que la fausse
humilité, rien aussi ne tou
che plus que la vraye, & il est
avantageux de la bien connoistre
pour ne se pas laisser
eblouïr de ce qui ri en a que
que l'apparencc. Vous trou
verez les caracteres de Tune
& de l'autre vivement dé
peins dans le Discours que
vous allez lire. Il eít de Mr
Taisand, Tresorier de France
à Dijon a donc vous avez
GALANT. iéi
tant estimé la Lettre que je
vous ay envoyée íur l'Eter-*
ni ce
DE LA VRAYE
& de la fausse Humilité.
L'Homme n'a aucun sujet
d'avoir de l* orgueil , f0
toute sa presomption ne SI que
Jolie ; car fi un le considere dam
Jbn origine , il n'y a rien de plus
*vil ny de plus ahjet. Si on le
regarde dans fa naijfance *il n'y
a rien de plus fòible , ny cjui ait
f lus besoin desecours. Si on l'en
ï66 MERCURE
visage dans son enfance , y *~
t-il rien Àe plus pijet k l*igno
rance a l'erreur f Si dans fa
jeunesse , qu'y a- t-il de moins
raisonnable , de plus agité par la
'Violence des passions j de plus
preoccupé d 'un vain entêtement ?
Si dans l'age viril mefme , qu'y
a- t-il qui fente moins l'homme
que la, pluspart de fes aÛions f
Si on l' observe enfin dans fa
vieillesse , n'y voiucn pas ordi
nairement des infirmites & de*
foiblejfes d'esprit de corps ,
qui font pitié f Joignons à cela,
fa mort qui ejl remplie d'horreur;
fy qni fait connoijìre la misert
GALANT. 167
le neant de la nature humaine,
' Qependant le croiroìt-on ìCet
homme tout plein , tout environ
né de miseres , ne laijfe sas de
nourrir dans son coeur une tresgrande
vanité , en quoy il fe
trompe extrêmement s puis que
plus il efì vain , moins on l'eflime
t & qu'au contraire pour ar
river a la veritable grandeur
il faut necessairement s'humilier*
parce que ïhumilité porte avec
elle cet avantage , qu'elle sert à
élever ceux qui la pratiquent
sincerement.
Mais où troHverons-nous dtt
ïé8 MERCUKE
personnes véritablement hum2
hies ì II y a, fans doute des gens
qui ont lrair , l' apparence. ,
On diroit a les voir qu'ils font une
exaéîe profession d'humilité. Ils
font vejlus simplement * ils mar
chant avec modejìie , leur lan
gage n a rien que de soumis
de respectueux > mais quelle cer
titude avon<-nous qu'il n'y a
aucun fard mejlé dans ces beaux
dehors , que ces habits , ces pa
roles , & ces gefles ne font pas
concertes , f0 qu 'il n'y a point
d'ajft&ation ny de déguisement
dans ces marques exterieures
d%umilité f JSÍe revonnoijfonsnous
GALANT. ié9
nous pas à tout moment , que le
coeur de l'homme ejì impenetra
hle , qu'on ne peut s'ajjeurer de
la sincerité de Jes sentimens , fy
qu'il n'y a que Dieu seul qui
les connoijje ?
// semble que vous prétendiez
me dira quelqu'un , que ['humi
lité n'ejl qu'en idée t fy que nul
ne la met en pratique ? Quoy
donc í ny aura. -t -il point de
vraye humilité fur la terre f
Ce n est, pas ce que je veux
dire , car je ne doute point qu 'il
n y ait des personnes de toute
condition , fy de tout Jexe , qui
la pratiquent de tres-, bonnefoyt
Sept. i6pu P
rjo MERCURE
^ mais je dis que ces dmes choijtesl
& qui se dijlinguent par une
veritable humilité , sont fort rarcs
, & que dans un nombre
presque infiny , à peine trouvet-
on une personne de ce carac
tere. En effet „ parlons fans
deguisement. Voyons-nous beau
coup de gens s'acquitter exaóîement
de fous les devoirs d'une
parfaite humilité f Paroisse^ ,
qui que vous foye^, qui préten
de^ avoir atteint à cette vertu
sublime, on vous fera juflice , on
examinera voslre conduite , &
on la mettra en comparaison avec
ceUe du vray humble.
GALANT. T71
"De mefme que lors1 qu'on
*veut élever un Bafiirrient magni
fique t on commence par faire
des fondemens profends 9 pour le
mettre en feureté* & pour em
pêcher que son élevation ne cau
se fa ruine ; aìnjt quand on veut
elever dans son ame l' édifice spi
rituel des vertus sinceres <*r soli
des , il faut necessairement com
mencer par faire des fondations
profondes d'humilité. C*ejì pour
te la que celuy qui aspire à devenir
veritablement vertueux ,
fait fa principale étude d' acque
rir une vraye humilité. Il ne la
fait pas conjìjler dans les paroles
vjt MSRCURH
ny dans les oeuvres exterieures ;
mais il l!'imprime profondement
dans son coeur. Il ne luywhape
jamais rien qui tende k fe faire
honneur; f0 bien qu'il soit préft'
table aux antres hommes, &
qu'il ait de tres~grandes lumieres}
neanmoins comme elles luy font
connoijìre fa faiblesse -naturelle ,
£7* le rendent convaincu 4ìu il
ne pcut^rien de luymefme ,m7
rend un continuel hommages à
Dieu des grâces qu'il en reçoit,
il en attribué fidedellement toute
la gloire à ce veritable dispensa
teur de touò les biens & de tou
tes les perfections > & fe tenant
GALANT. I7J
firme dans l'humiíité , qu'il con
sidere comme son centre s il ne
s'ejlime point , il croit rì avoir
aucun merite , il fe persuade mcme
qu'il ejl sujet k beaucoup de
defauts ; & pendant que fa vertu
brille aux yeux du monde , il ejì »
presque le feu! qui ne la voit pas.
Tout éclairé qu'il efì , // ne pré'
fume rien de fes commencement,
ft) [es lumieres , au lieu de ïéblouir
, ne fervent qu'à luy [aire
mieux voir son neant. Il fe trou*
ve petit , quand il paroifì grand
aux jeux des autres, & il s'i~
magine quelquefois eflre digne de
mépris > quand on le comble de «
174 MERCURE
louanges & d*applaudijfemensl
Sa modestie ejì jt delicate , qu'il
a de la confusion de Je voir ho- '
noré par les hommes > fy rien ne
ìuy fait plus de peine dans la
conversation que de s'entendre
louer. Il se cache t mais fa vertu
le découvre ; il marchefans fuite
{0 fans équipage 3 mais cejì
ainsi qu'il triomphe de la vanité*
& on l'en ejìime encore plus. U
s'éleve aux choses du Ciel , dans
le mefme temps qu 'il tâche de
s'aneantir â autant qu'il peut,
fur la terre ; f0 [cachant qu'il
n'y a rien de plus propre a le
contenir dans l'humilité , que
GALANT. 17?
Timage de fa propre misere, il
se la remet sans ctffe devant les
jeux , & M considere ce qui luy
manque dans la vertu , évitant
de voir ce qui pourrait luy inspi
rer un secret contentement de ft
conduite. 'Bien loin de rechercher
les Emplois publics , il les fuit,
&fi lors qu'on les luy offre , il
les accepte , ['ambition n y &
jamais de part ; mais c'ejì tou*
jours par un pur effet de Ja com*
plaisance , ou de fa soumission.
Plus il est elevé j plus il s'humi
lie ; la gloire humaine ne le tou
che paSt & le vain éclat du
monde ne ïéblò'ùit point. Acca-
P iiij
i74 MERCtmi
%<Cv^, fi mHS V9idt9^, dv
mépris {0 d'injures , il les souf
frira, fans murmurer ç*r fans
fe plaindre ; // en rejjent mefme
de la joye , fy il fe croit rede
vable à ceux qui ïoffensent*
parce qu'ils luy donnent occafon
de souffrir pour D'itu. S'il fait
quelque faute , il .l' avoue de
de bonne foy > £<r cet aveu d'à**
yoirfailly qui conte tant a nojìre
orgueil , ne luy fait pointée pei
ne i parce que la connoijfance
qu'il a de la fragilité humainu
fait que rien ne luy paroijl plus
extravagant , que de vouloir la
dijjìmuler. Son humilité cjì égale
dans TàheWâàni l'aâîrc for
tuite , farce quil'fè ctott indigne
dès avantages qui1 fuy arrivent*
{$-xtytaWtontraire il croît me
riter toutes fortes de disgrâces.
Qùancr'tl rend quelque bon cfft*
Wúry 'mefe aucun motif hu
main ; ce rfefì jamais dans la
tycuè' d*en recevoir des remercì'
mens ny des récompenses , {0 il
h'a d'autrè but qu^de faire da
bien. Mettt\ à l'épreuvefa fòutnijjton
}vous connoijìre^ quelle
eft'rtkfliïelle & f*n* Art , vous
verres qu'il obeit fans peine ,
«o» feulement à quiconque a
droit de Jluj commander î mais
i78 MERCURE
aufií qu'il se soumet volontaire-,
ment à ses égaux , & wesme à
ses inferieurs. Il èfi dans une
continuelle défiance de luymesme
; // redoute mesme f pour
Ainsi parleuses meilleures nélions*
(y se reprefentant toujours son
néant* dans la crainte qu'il A
de manquer d'humilité , il par
vient enfin à cette éminente
vertu.
Sondes maintenant , tSf exa*
minez vojìre coeur; faites - cft
vous-mefime l 'anatomie; penetres
dans ses replis les plus secrets, &
voje^ fi vous vous reconncijse^
dans cttte peinture > £<r fi elle a
GALANT. 179
' bien de vofirc air. Ne diffmtt~
Ions rien. Avoues qu'elle repre
sente beaucoup de traits que
'vous n'ave^ pas. Je dis plus ;
peut-eílre que quand 'vous aure%
lieu le portrait ébauché du faux
humble , vous trowvere^ entre
vous O* Itty plus de rejjemblan*
Comme il ejl des Pierreries
faites par les mains de* hommes,
dont le faux brillant surprend
d'abord , paree qu'il imite en
quelque maniere celuy des Pier~
res pretieuses faites par les maiffí
. de la Nature 'T de mefme il ejl
une efpece d'humilité , qui n*éi8o
MERCURE
tant que l'ouvrage de l'artifice
humain ,& noyant que La fi
gure exterieure de la veritable
humilité* n'a qu'une fausse appa»
rence. L'orgucil ejl un poison
subtil (y penetrant qui sinjinuë
dans l'amc par toutes fortes d'en
droits. Ne balançons pas k le
dire encore. Plusieurs recherchent
l' image de l 'humilité , mais il y
en a fort peu qui recherchent
l' humilite mefme. Evitons à'y
eflre trompes, p nous pouvons;
il ejì des Impojleurs t il ejì des
Usurpateurs de ceîte'ïtierttt , je
veux dire , des orgu$nleux , qui
osent prendre l'air de gens veúy
íablement humbles pour soumet
tre les autfeW & pour mieux
cacher leur esprit altier & domi»
nant , qui fous le voile fpecieuxs
de la càuse de Ùieu > couvrent
leurs ìnterefls propres , fy exer^
cent secretement leurs passions ;
quì font confìjìer une partie de
leur vertu dans un visage au-
Jlerejffl^qui Jì tojl qu'ils croyent
sentir lè moindre mouvement de
dévotion , font pleins d'estime
pour eux - mefmes , fe priserent
àÏÏx' dutres ì fe persuadent qu'ils
les surpassent infiniment dans la
vertu * 0* s'imaginent ejìfe des
hommes parfaits. Ce n'etl donc
jSî mercure
sas djje% d'avoir l'image
tombre de ['humilité , il faut
pojseder ce qu'elle a de plus réel
& de plus solide , // faut que
le motif en soit pur. En effet* fì
cn nejì humble,, que parce qu'on
fe croit miserable , ou parce
qu'on se propose d'eflre loue de
son humilité > ces especes d'hu
milite^ font fans merite, & mcme
la seconde ejl criminelle ,
ejlant certain que le desr des
louanges détruit ce que l'on fait
de plus loiUble. <_Ainf ['humi
lité doit eflre purement volontai
re * ne dépendre en aucune ma
niere ny de la contrainte , ny
GALANT. i8?
àe ¥'amour propre , £sr pour con- >
r/pre ce raisonnement , t/
jpíts toujours vray de dire , <pe
cf luy qui efi humilié fera exal
té, mais Bien celuy qui s'hu
milie 'volontairement , par un
veritable amour qu'il a. pour
['humilité, cette exaltation ejìant
la récompense du merite de la
'volonté. On ne peut ajfe^élever
l 'excellence de l'humilite , < Ile fil
non feulement une grande vertu,
mais elle efl le sceau de toutes les
autres, car pins elle ce ne font
que des ombres (^f des figures
de vertus. Neanmoins cette
éminente vertu a cela de peril*
1*4 MERCdkfc
leux en foy , aujfi bien que tottâ
tes les autres, que far le mauvais
usage qu'on en fiait , elle engen
dre ['orgueil. On veut en appa
rence pajfer pour rien , & l'on
croit ejlre quelque chose, quoy
que l'on ne soit rien. On Je glo
rifie quelquefois du mépris de la
vaine gloire , @} ily a beaucoup
de vanité dans ce mépris affecté.
On s'applaudit en secret de rìe-
Jìre pas vain comme la plufpart
des autres, & il y a peut- ejlre
plus a redire dans cette satisfa
ction interieure, que dans une
vanité dédarée, parce qu'on re
vient pliítojì de ee qui se pajje
GALAWT.
aux yeux du Public r que de ce
qui efì caché dans le coeur ; eíT*
comme l'experience fais connoijlre
, que l'orgueil grojjìer qui ne
garde f oint de mesures , fi) qui
leve le masque , déplaift entie-
, rement , on s'etudie, on Je concer
te j on prend des biais dijfrens
pour le rendre moins insuppor
table. Sur ce fondement nous
nous- blâmons quelquefois nousmefmes
par une feinte hunúUth
pour diminuer la honte f0 ï op
probre qui fuiveut necessaire
ment la mauvaise conduite. Ncus
nous accusons mefme de plusieurs
defauts que nous ne croyons pas
Sept. ifyr. Q
06 MERCURE
avoir , afin de nous élever en
effet, en nous abaissant en appa
rence. Uorgueil qui regne dans
nojìre cxur , & qui se cache fous
le masque de ['humilité, nous en~
gage quelquefois à dire, que nous
sommes des méchans , dans la
pensée que cet aveu nous fera
paJfer pour des gens d'une vertu
extraoìdinaire. Meus recherchons
au dehors l'humilité , & nous la
detruisons au dedans; & une
marque évidente que l'orgueil
eíl ' oflre premier mobile , cejl
que les aflions que nous saisons
fur le champ, & fans reflexion,
démentent presque toujours- celles
GALANT. 187
que nous saisons avec abplica-*
tion & à loisir. Souvent par
une humilité píeine de fa^e , {0
qui a son principe dans ï'amour
propre > on fait honneur aux
autres pour en recevoir i on
leur rend du civilite^ , parce
qu'ils en font t on afin de ne
point pajjer pour sauvages , oit>
pour orgueilleux ; ^ien °iue
l'orgueil ait coutume de jciìer
toutes fortes de personnages , de
fe transformer en mille manieres
pour paroiflre tout autre qu'il
riefl,& pour arriver à fes fns>
il nejì jamais plus insolent ny
plus en ejlat de pouvoir trompe^
que quand il ose prendre l'air &
la figure de í'humilité. 1 // Jy a
de faux humbles qui voyant que
le mépris qu'ils femblenffaire
d'eux-mefmcs ne leur rêussit fM*
se relevent tout d'un cóUp , ÇîT
se font rendre rigoureusement
honneurs qu'ils s'imaginent leur
eílre dûs. "D'autres ont tin or
gueil habile , car ils font souples
& humbles avec ceux dont ils
ont besoin , ^fiers à Ngatd des
autres. Quelques -uns par unt
vanite finet & par une pure
hypocrisie , ne prennent quelque
fois les dernieres places , que
parce que les premieres leur ap
farùennentfa$$ contestation. ÎU
sont seurs q&ls ne.^a^ardent
rkn à laijfer entrevoir, çetje ap
parence de modestie , puis que
dans un moment la^mujtitude
va s'ouvrir ppur Jeur Uijser te
p#Jsage.< libre , quelle s'emprejfera
de les oter du méchant poste oh
ils- fe sent mis* & qu'elle les
portwa^j'il est necessaire , jusque
dans* le rapg qui est deu à leur
devotion. Ainst ce n'est qu'une
grimace i^çfs gens-là de ne pas
prendre d'abord le rang que tout
leur cede. Tlufìeurs font humU
lieZ, $f non pas humbles , car
pendant qu'ils gemissent feus le
i9o MERCURE
joug facheux de la pauvreté* &
des autres incommodite^ de U
lie, ils ne laijjent f as de conser
ver au dedans d'eux-mefmes une
secrete vanité dont rien ríefì cafable
de les guerir. Nous ne me
ntons rien pour nous voir humi
lies par quelque corfcélion ^cjue
nojìre orgueil ou nojìre impru->
dencenous attire ; $ comme cefí
une feujfe humilité que de Je
vanter d'ejìre humble , c'en efl
aujji une quand on refuse par un
principe d'orgueil , les Eloges ^
Ls honneurs , afin de faire croi
re q'i'on en efì digne par le peu
d'ejìime qu'il semble qu'on en
GALANT. i9i
fait. De me[me ['humilité exces
sive qui nous fait perdre le cou*
rage * & qui nous jette dans le
defespoir à la vem de nos ini
quite^ * efl fausse , parce que
Dieu qui permet que les person
nes les plus vertueuses tombent
dans le peché , pour les humilier,,
veut pourtant qu elles ejperent
toujours en fa misericorde. On
s'humilie follement , lors qu'on
fe propose d'acquerir du bien , ott
un honneur> temporel , çjr que
dans cette pensée on rend au*
hommes , par une ejpece d'Ido
latrie , des foumijjìons qui ne font
dettes qu'à Dieu. Vhumilité' qui
!
i92 MERCURE
»'c]9 que l'esfet d'une ignorance
Jìupide , de la bassesse du caur >
$ de la lâcheté, esì pareillement
fausse r parce que la vraye hu
milité suppose une connoijsance
suffisante four ne pas ignorer que
l humilité eíîant le fondement
de. toutes les vertus , comme l'orgueil
efl le principe de tous les
'vices , on do'u par consequent
apporter tous ses foins à la prati
quer. C'eíl pour cela quelle efî
a autant plus eílimable dans les
ftrsonnes élevées par leur esprit
& par leurs dignites, n'y ay ant
rien qui gagne plus les affec
tions, ny qui attire plus d'eslime
NT. 19?
respecl qu'une
humilité profonde , quand elle
esl jointe à un grand merite £r
À une grande autorité ; car il efl
certain que les grands ne font
jamais moins en danger de déchvir
de leur rang que quand ils
s'humilient : que plus ils fuyent
les honneurs &le$ applaudissemens
, plus les honneurs f0 les
applaudiffemens les suivent j
que la veritable gloire accom*
pagne toujours l'humilité ; au
lieu que l' orgueil , quoy que fen
de fur un merite extraordinaire j
çy fur les plus hautes dignite^
produit souvent U mépris, ft)
Sept, ifyu R
i<?4 MERCURE
toujours la haine. Enfin , ïhu
milité doit efire pleine $ sincere*
fy n avoir pour but que de plaire
a Dieu ; autrement ce n'ejl qu'u
ne ostentation , & une hypocri
sie indigne non feulement d'un
Chrepen , mais d'une personne
qui a quelque teinture & quel
ques fentimens d'honneur. Ily a
meÇme de la folie a ne fe proposfer
d'autìe fruit de son humilité,
que la louange &J.'approbation
des hommes à donner a f vil
prix une chose d'une fi grande
valeur , à fe repaiflre & à fe
contenter d'une fumée de vanité
pour tant de foins, tant de
contraintes.
GALANT. 197
O que vous ejìes heureuses >
Ames saintes t veritables modem
les de la parfaite humilité, &
qui ejíes particulierement cheries
de Jtfus-Ghrifl qui en ejl le PeS e ï
Vous qui semblables à des arbres
plante^ dans les vallons,^ charpx^
des meilleurs fruits , faites
de merveilleux progrés dans le
champ de la vertu t vom qui par
Hne sainte fierté , vous mettes
infiniment au dessus de la fausse
gloire en la foulant aux pieds.
Vous enfin qui en vous comptant
parmy les personnes fans merite
& dignes de reprobation , ac
querez le vray caractere des
R ij
voftre.imitatiom^ c£$^dwrablç
vertu , ^«i^/e ^ipjai^^j/c pn*
4 toutes les antresJ ^wfjtanf*
fious devenk ver'^ablçmeptt
grands par noíîre humilite l ^
, • Faisons donc nos efforts pouf
nous rendre agreables à Dieu^
par le mépris de nous- mefmes.
Soyons du moins aufft humbles
iïja weuë de nos da^le/nefis?*
que les Saints le font dans, leurs
vertus. Evitons la conduite de
yfejufle orgueilleux de l'EvangiU>
qui perdit tout le fruit de.fes
tonnes oeuvres, pour en avoir cflé
trop content , pour en avoir re
itrie ] 4aMf{ihctífcme' :& fetôé-
'rìftrWjffàhtof te Pecheur h'nmblt
qB^m^'fae&ftâìk de-fiì
ffàmiUM^P Vies' effaça toutes
& sortit du Temple pleinement
ytô:itn'fiflntféeht& le grand
four * se rétífr eh core plus aimt-
Mehî cette vertu admirable , qui
faroiffant ^tfr'ià^íijj^ *n
fHríkgè , e $% ìres-sublfmY ¥*-
leve toutes les autres iveite wèrtu
qui brille comme les Aílres'à»
K iij
!?8 MERCURE
milieu de la nuit , & que {'ob
scurité rend plus éclatante j cette
illufire 'vertu fous le manteau
de laquelle l'orgueil tâche de se
cacher , de peur de se rendre mé
prisable & odieux en se faisant
'voir ouvertement ; cette vertu
dont les ejfets font fi merveil
leux , que Ile change les hommes
en Anges , au lieu que l* orgueil
a autrefois change les Anges en
Demons ; cette vertu des gran*
des Ames ; cette vertu enfin dont
la sagesse efí inseparable , qui
efi le gage infaillible d'une vie
bienheureuse , eíl proprement U
vertu desChrestiens, & personne
GALANT , ip
ne l'a jamais porter fi loin qu'ils
ont fait. Ala verité on a vu des
Payens, qui dans la naissance &
les.premiers fieclej de l'Egìife,
ont ejfajé de contnfaire en et U,
aujjt'hkn qu'en heaucoup d'au
tres choses , ces hommes divin s ,
mais ils n'ont jamais ejié que de
faux copistes f$ de mêchans imi
tateurs. Leur humilité nefloit
qu'une vanité déguisée , dans la
veu'ê de s'attirer de la gloire, ils
ont mêlé l'orgueil du coeur avec
Vhumilité des lèvres ; f0 de ces
deux contraires ils ont fait un
assemblage monílrueux.
Seigneur , qui ave^ prononcé
R iiij
*o* MERCURE ;
l!W&$ffîiiutm&kf ,i@s*que celuy
qui s%Hná%tmfìferexalté i qui
nous ave% donné de continuelles
hçom ^humilité vofirt
Múffmoe. *ïptrivitjb& Vie ri &
par vojîre Mort , ne permettes
pas que nous nous perdions dans
me folie vanité t mais failf s, que
fettant les yeuxfur naftre néant?,
nous nous proposons pourmodeUe
ivostre humilité sainte t afmfie
nous ejìant aíaijse^fur ta ttrftt
nous jeiïijjìons dans le Ciel avec
Hious de la vraye exaltation que
vous ave% promise à ceux qui
vivent dans un esprit veritable*
ment humilié.
nìcre, de la premicre partie
d'un Livre, intitulé, Intro*
dffóìion à la fortification , que
le S1 de Fer avoir donné au
Public íl Vient de mmît au
jour la seconde partie de ce
grand Ouvrage. On y trou
ve , oommedans la premier©;
^vingt-cinq Plans, dont les
Fonifications,& les Situa tiora
font differentes. Voicy les
noms de tous ces Plans , qui
font tres-riches ew travaux' •
& wes- proprement gravez, &c
generalement de tout ee qu«
contient cet Ouvrage.
202 MERCURE
PLANS.
De Pignerol.
D- Vcrue.
V EU E
De Veruc.
PLANS.
De Vcrccil.
De la Forteresse de Montmclian.
VEUE.
De Moncmelun, du costé
de la Perousc.
P L A N.
De Coni.
VEUE.
Du Chasteau de Miolans , en
Savoyc.
GALANT. 205
PLANS.
• De la Ville de Nice.
De la Ville de Geneve.
De la Ville, Chasteau & Ci
tadelle de Cazal.
De la Forteresse de Huningue.
De la Ville de Landau. *
De la Ville de Coblentz , &
& du Chasteau d'Armanstin.
De la ForrereíTe de Mont-
Royal.
De la Ville de Calais.
De la Ville de Berg - Saint-
Vinox.
De la Ville de Dinant.
De la -Villísn&iSfoadcltasáe?
Jultefsb isribio'i îkì r:ovr& •
De la Ville de Stetein. j f
De Ville de Vismats:,
De la Ville de Kaminicz,
vieille Forteresse , & Chxstcau
neuf. t< a?v- ì ~a
Jaraais personne avant le
SrdcFer n'avoit fait rant de
dépense pour enrichir le Pu
blic d'un auísi grand nombra
de Plans, Le Cartouche qui
renferme le Titre de ect Ou
vrage est tres - curieux:: , &
marque l'esprit & l'invention
de 1* Auteur , puis que
tous ceux qui ont rendu leu»
GALANTM *óf
noms rccaÊitìlndaBfcs.pour
avoir fait fortifier derPlaccs,1
y cienncncécs BUris qui re
presentent les manicres de
fortifier dont chacun d'eux
s'est scrvy;Qír,voit aussi dans
oc Livre la Plaine de Weill;
avec le Campement qut Mon-j
seigneur Ic Dauphin y fit
l'annéc derniere. On fçàit
que cc Prince y demeura huit
jours pour attendre les Enne
mis , qui n'oscrent paroistre
devant: hiyu>- ôjjíw
; viíc^S1 de Fer donnera átt
premier jour une Carte tresbelle
& tresKparticulicrc des
io6 MERCURE
Pays-bas . & du Bas- Rhin.
Mc Arlor , Medecin de la
Faculté de Montpclier, qui
depuis longtemps exerce la
Medecine à Paris avec beau
coup de distinction , & de
capacité, & qui s'est acquis
l'cstime de la Cour , & du
Public , vient d'ettre nommé
Premier Medecin de Mada
me, à la place de M le Bel,
dont je vous ay appris la
mort. Leurs Alresscs Royales
Monsieur & Madame tstoienc
persuadez de la profonde éru
dition de M Arlotdans i'Arc
qu'il professe, puis qu'avant
GALANT. 207
cc choix iis luy .avoient con
fié Ic soin de la santé de Mon-j
sieur Ic Duc de Chartres,
layant nommé pour demeit*
rcr à V Armée avec cc Prince.
Il y a quelques années que cc
fameux Medecin avoit esté
honoré d'un Brevet de Pre
mier Medecin de Son Altesse
Royale Mademoiselle , &
Monsieur l'avoit retenu de
puis pour son Medecin or
dinaire. Feu Mr le Bel * qui
connoissoit à fond sa capa
cité, avoit souvent parlé a-r
vantageuscmcntdcluy àLcurs
Aiteíìcs Royales, & avoit dit
<
àc8 MERCURE
a Madame qu'il nc connoifsoit
poinr de Sujet plus capa
ble de remplir fa place, cn
cas qu'il vinst à deceder. Cet
te Princesse s'en est ressouve
nue i Sc ayant nommé Mr
Arlót pour son premier Me*
decin , pendant son absence ,
ôh peut aisément juger que
son seul merite a brigué pour
luy. Toute la Cour deMadàme
a témoigné bcafucoup de
joyt de le voir élevé dans un
si beau postet
*uo<Çj£àcs plus fameux PëH>
tres d'Italie , & donc le Pin
ceau ne faisoic voir que des
GALANT. 205
Chefs, d'oeuvres , lors qu'il
s'agissoit de peindre des fruits,
fut prié par un Scignenr Ita
lien , distingué par une nais
sance fort illustre , & par de
fort grands emplois, de luy
faire un Tableau qui répon-
* dist pleinement a la réputa
tion qu'il avoit d'estre le pre
mier homme du monde pour
ces fortes d'Ouvrages. Jamais
le Peintre n'eut plus d'envie
de bien faire , & ne réussit
plus heureusement $ & pour
mieux remplir son Tableau
& n'y rien laifísr à desirer,,
il y mêia de plusieurs fortes
Septemb, i6$i. S
2jo MERCURE
de fruits, de maniere qu'on
y vit ceux que produisent les
premicres chaleurs de l'Esté,
avec ceux qui n'achavent de
meurir que fur la fin de l'Automne.
La beauté de ce Ta
bleau sit du bruit, les Curieux
álicrent le voir avec empres- .
sement , & il receut les applaudiíTcmcns
qu'il meritoic-
"Ênsin il fut porté chez Ic
Seigneur Italien qui avoit or
donné de le faire. II s'écria
dés qu'il l'eut consideré un
moment , que le Peintre eíioit
m ignorant > qu'il ne vouloit
point de son Tableau, quilebo*
GALANT. 211
quoit le ion sens, & qu'il efloit
entierement contre lavray-semblance.
Il dit enfin , que le
Peintre avoit uny ce que la Na
ture avoir separé y & qu'il ejìoit
ridicule de voir avec des fruits
d'Esté ì de ceux qui ne se man
gent quenHiver.Lcs Connoisseurs
n'ayant pas esté de son
sentiment , & le Tableau
ayant esté cherement vendu,
le Peintre se consola du mau
vais goust du Seigneur Ro
main, je croy que vous l'avcz
meilleur , & que vous vou
drez bien lire en Automne,
des Vers qui ont esté faits
m MERCURE
fur le Pdi^cfn^ lif Jbnt ifs
Mr de Vinv <te>nt lêS'Ouvrages
ont toujours esté gelncralement
applaudis^,^
L E ^P%í^ ^#^ P S.
De la Nature ^ Wë^amvn?
poUr tûíisM^^es.
Sur ec <pe le »Pjrrïiteffipr*ííl
- plus sujet au^Suïsijns^ &
autres maladicstt> ^ujjvlcs
autres Saisons de Tannée.
,,,(\',ï;* ta.
P Oursu oy faut-U que U Na
ture v,, , * .
Empoisonne tousses presetís ì
champs t
Ses Jeux , ses RÍsu,yís Pleurs ,/is
% ipifêaux ,Ja vmiare ; •;. ï
/w* taimable Printemps
fait briUtr '7* N Sitèiï dtmt clarté
Et , plut doux que jamais , aux plai"
j^>/w Jcmble rajeuntr le Monde ,
Ì?í* tant de maux divers soit enfin fi
i'fecondèrì'- 'louí.t t«.XiVZ
Tarie,, nom diras- tu , qu'avec pi»
de raison
Chacun parois surpris de ces ejsefs.
Bizarres , '
# f/*'<w en gàuster
les douceurs
ai4 MERCURE
Sans dans le mefme temps essuyer
les rigueurs 4
Des fluxions ej> des catharres.
Si par la tu nous mets hors d'état d'en
jouir,
A qmy nom fervent donc tes appas
& tes charmes ?
Ofiroìton s en réjouir ,
Et les voit' on , helas ! fans chagrin,
fans alarmes?
LA NATFRE.
jf'ay souvent écouté les plaintes
que tu fais y
Et je .fuis moy-mefmt étonnée
Jgue le plus beau temps de l'année
2ìvattire contre moy que murmures
secrets.
Cependant quelle ingratitude,
Jguel Caprice , quelle habitude
Trend-on de tous ses maux d'accufer
mes prefinsï
GALANT 21%
Si voue autres Morte/s , plus mode
res plus sages ,
En fiifìez, de meilleurs usages ',
V-ous serie^plus reconnoiJJ'ans ,
Et vous verrie^ bien tojí qne ce n'est
sas leur faute.
Voflre desordre seul vous este
Le goust de ces plaistrs où tendent
tous vos voeux ,
Et vous auriez, toujours des Prin
temps plus heureux
Si vous en jottïjjicz, avec la tempe
rance
Jjltie uous ordonne la prudence :
Mais à peine ay-jt enfin satisfait vos
souhaits
Jï>ue vous en faites des excés,
Jì>ui des douces humeurs alterant
[harmonie ,
De la Bile aujjì-tof excitent la furie.
Combien peu d'entre-vous menagent
comme il faut ,
216 MERCt^l ,
Le temperé',. I'humide > m le fmi*
ou le chaud f ( donne
C4r totts fct temps que je vous
Sont & charmans , & bons. Dans
celuy de l'Autonne
Sans de mes fruits nouveaux crain
dre la crudité
Votfs en mangez, en abondance.
Et de là vient la defaillance
De celuy que déja fEsté
far ses grandes chaleurs oyait dehu
lité.
Pendant cette saison brûlante
loin de vous rafrai/chir , vota beuvez,
à longs traits «- , v,
N!i>0 vin pur , pourveû qu'il soit
frais ,
Et vostre soif impatiente
Ne peut se donner le loisir
J> 'attendre au msins qu'une Ser--
vante
? Ait
GALANT. 217
Ait apporté de l'eau , seule rafmis
chiffknte ,
Et quiseule peut l' adoucir.
Hais bien-tofl , malgré vous , unt .
ardeur de poitrine , .
- A cette eau qu'on fujoit vous forci
-. de courir *
Etsouvent à la Medecìue.
Lors que C'Hyver , le temps des
Jeux i
Des Bals , & de la bonne chere
Couvre tout l'ZJnivtrs de ses fri*
mats affreux , s;
Et cheT^ vous , prés du \fett vous
retient , vous resserre f „
Dites , n'en sortes-vous jamais ?
Le Bal a pour vous trop d'attraits,
t La table , dr le jeu trop de charmes
Four du mal qui les fuit vouscaufif
des a/larmes. _
Vous y paffz, toutes les nuits ,
Scptemb. Nípi. T
!
2i8 MERCURE
p/ ce mal , pire que mes fruits À;
gue la Kofe nouvelle", & que U *
. Canicule;
Ce mal, dis-je , que fait U perte d»
repos , t
« friand morceau qu'on ronge,
jusqu'aux os ,
Vous échauffe le sang, vous consume
^ , ' ■ d" wmw brûle. .
. ' J)e la cette abondance d'eau
gui s'amafîe dans le cerveau >•
gui par le rude froid trop long*
temps retenue , ,;
Et qui par consequent aigrie & cor*
rompue ,
Des que ce froid cejse au Fri/t~
temps
Distille en fluxions comme une, êpaijfe
nue
gue le Soleil dijfout parses rayons
ardenr. .'.'"•*
GALANT. 219
. fauuìl donc s'étonner , st cette eau
vient a fondre
Jjhtand il darde ses premiers
traits ?
Jguoy , d'an moins funestefnccés3
• Vous menageant st peu , pouvie%-
votts vous répondre , -,
Et vos prodigieux & dijferens exces
, .„
Nefujfìfènt-ils pas enfin pour vous
confondre ?
sr - DAM 0 N.
Mais st Con veut t'en croire ,
adieu tous les plaisirs i '\\
llfaudra, desormais s'en priver, s'en .
i défaire *
Et <f n'en Stùïque trop fevere
Chacun ferme son coeur à l'instinéf ,
aux destrs ,
\ ^} nostre plus tendre en
fance
T ij
stó MERCURE
Nous font en leur faveur sentir
leur violence.
Nous naissons Avec ces penchans ;
Vers tout ce qui flatte les (èns.
On se lai(se entraifner en dépit de
soy-mefme.
On croit mesme quand on les aime
Jpit'on ne fuit que tes propres
loix ;
Áinst quand on les voit , on leur
ouvre la porte ,
JE/ dans íardeur qui nous y porte
On n'est embarrasé qu'au choix.
Comment pouvoir combattre une pen
te st forte ? v
Cependant quelque né que l'on soit
avec eu k, (les regarde,
Comme des Ennemis tu veus qu'on
Et qu'en cela plus malhenreux
J>)ue les Bestes , contre-eux on soit
toujours en gardeì
GALANT. 221
LA NATFRE.
Ah ! si vous en ufiex. comme les
. Animaux ,
Me verroit-on reduite a répondre a
, .vos plaintes ,
Et feriez-vous sitjrts à tant de di
vers maux
Dont ,plus indiscrets qu'eux vous
sentez, les atteintes ?
Des plaisirs cjue je donne ils usent
comme Usaut ,
Ils ne vont point pendant % le
Affronter , comme vous, fardente Ca
nicule ,
Et se cachant pour lors du Soleil qui
,',v,,1,,i»W/ brûle, Vl
Attendent pour fòrtitqu'ii' soitsous
, yJ'hori^enX c, „.., ;/
Mais l' homme qui se croît fi fige
Vesl-tl au fond , & quel
Tiij
222 MERCURE
Levoit-on tous les jours faire de f* •
* - > raison ?
La tient- il moins de moy que cetu
douce pente
J>)u'il dit avoir four les plaisirs ?
J>>ue ne j'en sert-il donc , s'il se fin
des dej/rs
Jgue la Nature bien-faifantt
Luy donne , ejr donne mtfme À sinsensible
plante ?
Airijì ,sans desormais murmurer con
tre moy,
" J%*'t* ne s'en prenne plus qu'i
fiy.
Vous-mesmes, au retour des Zephirs
dr de Flore , ' * v"
Corrompez, ces plaisirs qu'il donnoit
autrefois ,
Et qu'il vous donneroit encore.
Si, mains fous , vous vouliez, suivre
mes sages loix 9
GALANT. zi%
' - Et quitter cette intemperancey
Jgue ne connut jamais le Monde en
son enfance.
' Contens de la smplicite ,
Vu lait, du fruit, & de l'eau pure,
J$>ue gratuitement leur donnoit la
Nature ,
Les bomm+s par la volupté
£)ui n osait pas encor leur montrer
ses amorces ,
H'ajftiblijsoient point lors leur •vìgueur,&
leurs forces,
Et jouijsoient toujours d*une pleine
< santé.
Mais /ors Que leur cupidité -{ ,
Tira l'or du sein de la terre ,
Çe metail à son tour leur declara la
guerre,
JEt fourse vanger d'eux leur inspira
soudain K .'• , ;,
la haine de U sobre table ,
T mj
224
f.t cet amour fatal qui
fstln.
Du necejsiirc au delectable ,
Seduits par ses attraits , ils nestrent
qu'un pas,
Etbien-tost dégoûtes de futile lai
tage , , .
Composerent a leur dommage
Ds ragâuts differera leurs splendides
repas. , •
De là cette humeur indigeste
Jïuì cause leurs vapeurs , qui stulc
leur en reste , v.
Et qui détruisant leur chaleur %^
Les réduit à telle langueur,
Jj>u'aprés une débauche faite
Il faut en dépit d'eux , venir à la
diette. ,T ^ ^ *
Voila ce qu'à produit l'avide soif de
ter.
Trop heureux , trop heureux encor
GALANT. ir\
^uand àJt bon marché le gourmand
en est quitte ,
Car comme de ses biens il veut
Tirer tout le plaifìr qu'il feut,
Cette hnmeur a /<* longue & s'en
flamme , & s'irrite ,
Et , trompé par cet appetit
Jj)ue luy donne souvent cette ard.ur
étrangere ,
De nouveau l'imprudent , à peine
hors du lit , -
Oìt ïamfii; fi* ™*l . cfyrcbé U
bonne chere.
Jj)u'en peut il arriver ? L* rechutet
& la mort.
Apres cela , Damon tveis, dis-moy
fifay tortt >.
Etf l'on peutfans injujfice
M'imputer aujourd'huyfa gourmande
avarice.
ii6 MERCURE
Je ne te parle point de ces feins de~
varans
v «4^ Ve donnent petits ejrgtands
Four , plus haut qu'elle n'ejl, élever
leur fortune.
Jgfrois & trop longue , & peutestre
importune ,
Si M vos pajjions faffûts
En vain m' étendre icy fur la cathegorie.
Chacun fait quels sont ceux de U
• iinafe furíe , ' ' vr^ ,' >
Et toutes tour à tour , & souvint à
c la fois
En vous ajfoiblijsant áhrcgent vojtre
vie.
Usez, mieux , en un mot , de mes
dons dijserens ,
Soyez, sobres * reglez, comme dans
les vieux temps f
Attendez, avec patience
CALANT, m
' La maturité de mes fruits* , ,.
Et joignes le reps des nuits
. AJa discrete vigilance
Jgjfe de tous les Mortels exige enfin
le jour;
Ahrs je promets à mon tour
De les guerir de la foiblejse
Dont fi mal à propos Usse plaignent
sans cejse ,
Et, devenus par la plus sains, plus
*\ •, vigoureux ,
J'espere , tjr mesme je suis seurc
Jçue da mâiïx qui á'&ì'deun fmrr
roitnt tombersur eux
lis n'accuseront plus l'innocente Na
ture.
Lc 15. du mois pafíe, jour
de la Festc de S. Louis , M'
Cipicrrc . dont lc nom vous
2 2.8 MERCURE
est connû par la belle Lettre
que je vous ay envoyée de
luy fur rOpinion , fit le Pa
negyrique de ce saint Roy,
dans rÊglise de S. Louis des
Carmes DcschauíTcz de Bor
deaux. Ces paroles du Píeaumc
130. qui luy servirent de
texte, Domine , non est exaltatum
cor mettm, neque etati
junt òcuti mcî , ìuj wOîìrîcrcnc
lieu de montrer dans son
Discours, que S. Louis avoic
esté parfaitement humble
dans les grandeurs de la terrç^.
& merveilicuíement grand
dans les disgrâces du monde.
^GALANT. 119
Apres avoir fait voir dans
son premier point, dans quel
le élevation ce Monarque se
trouvoic , il continua en disant
: Ams aimé de Çes Sujets,
craint de ses Ennemis , grand
aux yeux de toute la terre , ce
Trince ne se glorifia point de
tant de grandeur , ($s tout remply
qtttl efloit de gloire , il ge
regarda personne avec plus de
fierte. Il consderoit saCvu;onne
comme un poids dont la divine
Providence avoit voulu le char
ger. Leclat dont il se voyoit en
vironné dônnoit à son coeur des
senùmens, d'une humilité toute
extraordinaire. Toujours apposé
a?o MERCURE
à luy-mefme , il fuyait une
gloire qui àttgmentoit en luy
tous les jours. Il fuyoìt les
grandeurs qui l'accompagnoient
far t oui , f0 avec toute la
puijptnce de la Royauté* il en
êvitoit les embarras. Que s'il
ejloit obligé de sortir de fa re
traite pour paroifíre furson "Trô
ne , 'il recherchait dans cette
pompe £7* dans cette majefìé, les
abaijfemens £7* les humiliations
de la, Croix s les charmes qui fuivent
la Souveraineté n'eurent
jamais le pouvoir de toucher son
coeur i ft) par un goufl merveil
leux * il ne trouva de verita
bles plaisrs que parmy les au
GALANT. 2$i
stmtc% , f$s les oeuvres de pieté
$ de misericorde. ' Eníuitc il
fie la peinture des faux at
traits qui suivent Pambition,1
& ayant montré qu'il estoit
comme impossible que ceux
qui en sont remplis, ne fistent
réflexion au moins une fois
pendant leur vie, fur la va
nité des choses du monde}
Cependant , ajoûta-t-il, on ne
laijfe pas de voir encore de nos
jours des hommes qui recherchent
la grandeur comme leur felicité,
ils ne fe soucient point d*esire
criminels , pournjeu qu'ils paroijfent
éleves. Ils montent fur
.ajè MERCURE
'4e Trône par l'ufurpation > ils
gouvernent par l'tnjufîice, ils
commandent par la force. Ils
regnent en violant toutes fortes
de /droits , fans épargner ny le
sang, ny la Religion* ny U
charité. Apres que cet ambitieux*
cet Usurpateur aura acquis une
Couronne , & qu'il fe fera ren
du Maiíîre absolu de plusieurs
, Royaumes , quejï-ce- coiffera f
Songe-t-il qu'il laijjerà'^ìfo*
Etrangers ces richesses qu'il* 4-
rètaJJe avec tant de peihe , $f que
U fepulchre doit eflre fa demture
pendant tous les âges f Songe- t^H
que de toute fa gloire il nc rejìera
GALANT.
tout au plus qu'un nom odieux À
la posterité , par les maux qu'il a
fait souffrir injustement t Lors
que l'homme a esté élevé dans
les honneurs , il ne l'd point
compris. Il s'est conduit comme
les Brutes qui font fans intelli
gence {0 fans raison , & il leur
est devenu semblable. Et hom O
eùm in honore esse r, ft)c Dans
le second Point il Parla des
disgrâces de S Louis d'une
manicre fort pathetique , &
ayant fait voir comment ce
Prince, d'un grand Capitaine
& d'un grand Roy , cílok de-
Venu un grand Saint.cn faisant
S pimbre i6fù Y
î u MERCURE -
servir ícs mcsmes qualitez qui
fontleHcros) pour former lc
Saine , il fir en ces termes un
paralellc de la pieté de Louis
le Grand avec celle de Saints s
Loiiis. Que me refte- t- H , Meffeurs
, fìnon à vous faire voir
que le Trône de ce saint Roy ejl
remply par le plus digne Succes
seur quil pouvoit avoir , par un
Succejjeur tel que le demanderait
Saint Louis luy-mefme i, enfin
par Louis le Grand ,, qui ne
regne que pour prendre pin de
jaire regner le Sauveur du
monde f Animé du meÇmt %els
pour U gloire de Dieu , < de U .

GALANT: 2^
mefme charité pour le prochain,
il envoye aux extrémite^ du
Abonde des Mijftonna'Ues , pour
convertir des Rois $f des Peuples
presque inconnus. Il obtient par
son credit la restitution des Saints-
Lieux entre les mains des Re//-
gieux Latins; il bannit l'Herefie
de son Royaume ; il redrejfe les
Eglises démolies ; il' en baflit de
nouvelles; il arrefíe les. Duels y
il punit l'injujìice , protege les
opprime^, soutient ceux qui font
dans son alliance , reçoit les Rois
exiles * combat pour cux,
contre l'usurpation & la tiràn--
nie. Enfn il y a tánt de confor-
V ij
MERCURE,
mité dans le regne: de cet Au~
gujie Monarque avec le regne
de Saint Louist cjite 'f ose dire que
Dieu , qui a donné à l'un (§f à
l'autre , le mefme coeur & le mémé
Trône i leu r a deftiné au$ la,
mefme Couronne fy la mejme
gloire.
Madame la Presidente de UBaroirc
mourut íur la fin du
mois dernier. Mr lc President
son Mary estant fort connus
je ne vous parleray que de
la Défunte. Elle n'en a poinc
*u d'Enfans, & laííîe de
grands biens auíquels il a
V
I
beaucoup de parc à caufe des
avantages considcrables qu «
elle luy a faits par leur Con^
trac de mariage. SesHeriticrs
font Mr de MardiUy , Mada
me fa Soeur , Femme de Mr
lc Marquis de la Tcrricrc , duv
nom de Charcton, cy devant
Veuve de MrdeCrcil , Maistre
des Rcqu estes MeCfoévalier,
Veuve d un Coníçillej
au Grand- Conseil, connue
par ses grandes charitez crw
vers les Pauvres des Provin-:*'
cesii dont elle est la Trefô«;J
ricre , recevant toutes les au
mônes qui sc donnent à Paris
a38 MERCURE
pour les Pauvres de la cam
pagne. Us sont Cousins &
Cousines Germaines de ectte
Dame dont je vous apprens
la mort. Elle estoit Veuve
d'un Conseiller de Paris avanc
qu'elle íe remariait avee M*
îc President de la Baròire.
Madame de Sourdis, Ab*
bessc de Beaulieu , prés de
Compiegne , est morte au íî.
Elle estoit d'une Maison fore
ancienne , & Jacques Descoubleau
, Seigneur de Sour-i
dis , estoit Chambelan de
François I. II y a eu des Che
valiers des Ordres du Roy de .
GALANT, z^f
cette Maiíon, des Gouver
neurs d'Orleans, de Char
les, de Blois & d'Amboise,
des Lieutenans Generaux des
Armées du Roy , des Evesques
& des Cardinaux.
Mr de Montsaulnin , Mar
quis de Montai • Capitaine
de,Cavalerie, mourut à Lan
dau en Allemagne,- le ti. du
iBÒic dernier , avec des sentimens
tres - Chresticns. Il
avoit d abord embrassé Ic
party de TEglise, & joùissoic
d«> plus de vingt-cinq mille
livres de rente , que la crainte
qu'il avoit de ne pas faire son
24° MERCURE
salut avec ces revenus que
luy donneient ses Benefices >
luy sic sacrifier. 11 résolut de
IcrfirleRoy dans ses Armées,
& de marcher fur les traces
de Mr le Comte de Montai
son Pcre , Chevalier des Or
dres de Sa Majesté, Lieute
nant General de (es Camps
&' Armées , & Gouverneur
de Mont • Royal , dont les
actions intrepides & pleines
. de valeur íont eonnues de
toute l'Europe, & particuliè
rement celle de son entrée
dans Charle-Rov ,au mois de
Dccembrc 1671. Il estoit alors
Gouverneur
GALANT. 241
Gouverneur de ectte Place , &
en estoit sorty pat ordre du
Roy, pour aller secourir.Ton 4
gres que le Prince d'Orange
avoit investy , avec les Ar
mées d'Espagne & de Hol
lande. M'dcMontal entra dans
la Place , & en fie lever lc Sie^
ge. Lc Prince d'Orange tour*
naauíTi-tost ícs armes contre
Charlcroy, croyant que l'absence
du Gouverneur feroit
réussir son entreprise; mais
ion étonnement ne fut ,pas
petit de voir le mesme Mr de
Montai se faire jour au, tra
vers de son Camp avec cin-
Septemb. 1691. X
24i MFRCURE
quante Maistrcs feulement l
ôc rentrer dans Charlcroy
malgré ses blessures , & les
Troupes qui s'opposcrent à
son passage. Il défendit ccttc^ j
Place avec tant de vigueur & '
de courage, qu'il en fit encore
lever le Siège.
La Famille de M S de Montsaulnin
de Montai tire son ori
gine d'un Milord Anglois,qui
ayant esté disgracié du Roy
sonMailtre,íc retira en France
il y a plusieurs sicclos. U y fut
bien rcceu,& s établit dansle
Pmphiné avec plusieurs de
ses Énfans , qui prirent tous
, GALANT. 24î
ic party de la guerre. Mr de
Montai porte de gueules aux
trois Leopards d'or couronne?,
f ose X. I w fir l'autre. Le Fils
de Mr de Montai , dont je
vous apprens la mort , est le
trfoiíìéme de ses Enfans tuez
dans le service. 11 y en avoit
un Capitaine dans son Regi
ment , qui fut tué en Flandre,
par un Party des Ennemi».
Mr le Marquis de Montai
qui vient de déceder a laiísé
trois Garçons en bas âge J
& un Neveu qui porte íbh
nom , ce qui donne lieu d'esperer
qu'un nom íì fameux
X ij
Z44 MERCURE .
sc conservera longtemps dans
son éclat. Le courage est fi
naturel dans cette Famille,
qu'on remarque qu'un de
leurs Anccstrcs maternel ,
nomme Sebastien de Rabatin
, Chevalier de l'Ordre
de S- Michel , fit une action
fi remarquable , que l'actc ca
est demeuré dans l'Histoire.
II attaqua luy seul , & tua
dans la Forest de Fontaine
bleau, íbuslercgne de Char
les IX. une Beste monstrueuse
qui devoroit les hom mes , &
éc dont le Tableau fc voit
'encore aujourd'huy dans une
GALANT. 24-ï
des Galeries de ce Ghasteau.
! M1 de la Haye , Docteur de
la Maison de Sorbonne, Cha
noine & Doyen de TEglisc
Cathedrale de Noyon, mou
rut Dimanche dernier. Mr
l'Evesque de "Noyon a nom
mé à ion Canonicat Mr l' Ab
bé d'Estourmelles du Fretoy.
Le Doyenné est à l'élection
du Chapitre.
Lc Roy a donné une place
de Conseiller d'honneur au
Parlement à Mr de Maupeoi
President de la Premicre d
Ènquestcs , qui a remis 1»
Charge de President à soi\
X iij
i±6 MERCURE
Fils, Conseiller de la Quatriè
me des Enquestcs, receu déja à
la survivance de la Charge de
President. Sa Majesté a aufïï
donné une pension de cinq
mille, livres à Mr de Harlay >
Conseiller d'Etat, Gendre de
Mr le Chancelier.
Si l'amour & l'intercst n'avcugloient-
point la pluspart
de ceux qu'on voit tous les
jours donner si facilement
dans le mariage , il en est peu
que cet engagement n'étonnast
, & qui en consultant
leur raison n'en regardassent
•les fuites avec la mesme
"S
GALANT?.,', 247 ^
írayeur qu'elles ont causée à
un Cavalier dont je vais vous
apprendre l'avanture. 11 ctoit
né avçe tous les avanta
ges qui font réuíîìr auprés des
Femmes. Tout plaisoit dans
fa personne , & il avoit ua
esprit insinuants qui luy donnoit
l'arr de faire croire tout
cc qu'il vouloir persuader. U
ne d i soit rien qui ne fust
accompagné d'un enjoue
ment merveilleux , & cet
enjouement estant fin & de
licat , il eust este difficile de
sennuyer avec luy. Joignez;
•à. cela une grande eomplai-
X iuj
a48 MERCURE
íàncc qui lc rendoit toujours
prcst à faire toutes fortes de
parties. Ainsi on lc fouhairoit
par touc, & il estoit peu
de jolies Dames qui ne le
îrouvaíTcnt d'un agreable
commerce. Comme il cn
estoit reccu aísez favorable
ment , il passoit pour hom
me à bonne fortune , & à
juger de luy par les appa
rences , ce ncltoit pas tou
jours inutilement quai foupiroit.
Parmy tant de bon»
nes qualitez , il ne laiflbit pas
d'avoir un fort grand defaut.
Son coeur estoit naturelle
GALANT. 249
ment sensible aux charmes de
la beauté , mais fa constance
ne se trouvoit point à l'cpreuve
des faveurs , & il étoit
extrêmement dangereux
de s'écarter avfduy dií che
min étroit de la sagesse. Si
Jc relâchement luy plaisoit
d'abord , il estoit bien-tost
suivy du dégoust , ,8c ce dé
goust ne manquoit jamais de
produire la rupture. Cepen
dant la galanterie estant fa
passion dominante, il s'abandonnoit
à son panchanr avec
Q peu de réserve , que quoy
qu'il se sentist incapable d'un
attachemenr
réc, il ne pouvoic s'empesehcr
d'entrer dans des commenecmens
de paffion avec touc
ce qu'il voyoitdc beiies per
sonnes ; & comme selon Ic
plus ou le moins d'obstacle
qu'il trouvoit à estre écouté
d'une maniere qui: le fatisfiíl
, Rengagement qu'il prenoit
estoit plus fort ou plus
foible , il se mettoit quelque
fois dans des embarras fi
grands par les déclarations
que son amour l'obligcoit à
faire , que ce n'estoit pas fans
peine qu'il obrenoic des ií\
GALANT: o*!
wrcsscz qu'on luy voulust
bien rendre fà parole, Tanc
qu'il voyoic celle dont il sc
sentoit touché «il luy estoie
impossible de s'en détacher ,
pourveu qu'elle affectait, d'ê
tre indifferente t & dans i'envic
de luy faire dire qu'elle
le croyoit digne d'estre aimé,
fi les asseuranecs du plus ten
dre amour ne la pouvoient
obliger à luy laisser voir que
son coeur avoir receu les im
pressions qu'il avoit tâché d'y
faire , il ne faifoic point dif
ficulté de parler de mariage.
C'cstoit là la fin de fa pa£
ta MERCURE
íìon. Ildcmcuroit alors deux
jours fans la voir , & fa raison
dont il reprenoit l'ufage , Iuy
representantes suites fâcheu
ses d une liaison qui nc finis,
soit que par la mort , il en
estoit tellement épouvanté ,
qu'il n'y avoit point d'amour
qui tinst contre les chagrins
qu'il s'en figuroit insepara
bles. Cc genre de yjc, qu'il
menoit depuis dix ou douze
années , ayant fait connoistre
tout son caractere x on nc lc
regardoit plus que comme
un homme simplement ga
lant * & dont les plus fortes
GALANT, m
protestations nc devoient avoir
rien de solide. On ne
laissoit pas de le recevoir avec
plaisir dans tous les lieux où
il les faisoit , quoy qu'on fust
persuadé qu'il les oublioit sitost
qu'il les avoit faites ; &
aprés plusieurs intrigucsjdonc
il s'estoit toûjours tiré à son
avantage , il s'embarqua en
fin si avant qu'il perdit la tra
montane , & fut fur Ic point
de faire naufrage. Un Amy
qu'il estoit allé voir à la cam
pagne , luy proposa d'aller
passer quelques jours chez une
Dame d'unfortgrand mcrite,
2T4 MERCURE
qui n'étoit éloignée de
«juc de trois ou quatre lie
éc qu'il vouloit luy faire connoistre.
Cette Dame meriroit
bien par son esprit & par ses
manicres qu'on l'allaíl cher
cher encore plus loin. Son
honnesteté gagnoit le caur
de tous ceux qui la voyoienr,
& ce qui fut un grand char
me pour le Cavalier, elle ávoit
une Fille toute aimable ,
& dont la beauté estoit auílì
vive que touchante. La partie
fc sir. Ils allcrent chez la
Dame, & ils en surent receus
de la maniere du monde la
GALANT. 2??
plus obligeante. Le Cavalier
ne manqua pas à estre frappé
d'abord des agrémens de la
Fille. Il luy conta des dou
ceurs , Ôc il le fie dés le len
demain avee de fi grandes
marques d'une vcritable pas
sion , que la Dame qui s'en
appcrccuc demanda à son
Amy quel homme s'estoit,
& s'il n'avoìt point d'engar
gement qui deuil empescher
quon nc 1 écoutai!: • Cet Amy
luy répondit qu'il avoit beau
coup de bien que du costé
de la fortune ,t íà Fille auroic
peine à rencontrer micHx 5
ME :
mais que s'il estoit facile à
une jolie personne de luy
donner de l'amour, les refle
xions l'en gucriííoient dés
qu'on luy laissqit le temps de
se reconnoistre, &quc íì elle
vouloic l'engagcr d'une ma
nicre à le mettre hors d'eílac
de s'en dédire , il falloit qu'en
se montrant presque toujours
à ses yeux , elle flst agir touc
ce qu'elle avoit de charmes ,
comme fans aucune envie de
luy en faire sentir lc pouvoir;
que rien ne le piquoic tant
qu'une indifference qui n'eust
ny'rudeífc ny mépris , & que
GALANT, vn
sur tour pn devoir presser l 'ef
fet des asscuranecs qu îl pourroit
donner , fans souffrir qu'il
s'éloignast , estant certain
que s'il ccííòit une fois de
Voir , il ne tiendroit rien de
ce qu'il auroit promis. La
Belle ayant reccu ces instruc
tions par la- bouche de ía
Mcrc t trouva beaucoup de
facilité à s'en servir. Ellccstoic
naturellement indiffcrente, &
íàraifonluy avoit appris, auCli
bien qu'au Cavalier , que le
Mariage estoit un engage
ment rcrriblc. Ainsi elle ne
s'y resoì voit que parce qu'eU
258, MERCURE
le n a voit point assez de bien
pour vivre toujours dansl'indcpendancc.
Les Amoursfcmbloient
répandus fur son vi
sage , & Ton application à
n'oublier rien de ce qui pouvoit
en augmenter le brillant,
donna tant d'amour au Ca
valier , que tout son coeur se
montroit dans ses regards j.
mais plus il s'abandonnoit à
íà passion, plus la belle étoit
reservée dans ses manicres.
Une fierté digne d'elle rehaufíbit
l'éclat de fa beauté ,
& l'adresse qu'elle avoitàdctouncr
le discours , lors qu'il
GALANT. 2í9
fc faisoit tomber fur Icj sentimens
qu'elle estoir capable
d'inspirer aux plus insensi
bles , luy faisoit ehercher a-
- vec plus d'ardeur les occa
sions de l'aíîurcr qu'il n'avoit
jamais rien vû de si charmant
qu'elle. Elle écoutoit tout
cela comme n'y faisant nulle
attention. Au contraire , clic
sembloít plûtost rejetter les
choses fla reuses qu'il luy dirsoit
, que prendre plaisir à lesentendre.
Cependant à force
de voir, & de là trouver pett
susceptible des impressions
qu'il avoit fait prendre à
z6o MERCURE
quantité d'autres, il en devint
amoureux si éperduement ,
que les declarations qu'il luy
faiíbit nc l'ayant pû obliger
à laiíTer voir un coeur sensi
ble , il nc fut plus maistrcdc
fa passion. Ainsi entraîné par
fa violence, & nc pouvant
résister à l'impctuosité de ses
desirs, il luy demanda si clic
pourroit se résoudre à l'époufcr.
La Belle engagée à luy
donner une réponse précise,
luy dit d'un grand scrieux,
mais accompagné d'un air
honneste ,quc quand ía Merc
auroit fait un choix pour elle,
GALANT, %a
clic sçavoit que rien ne la pouvoit
dispenler de se confor
mer à ses volontez. Il eut
beau presser pour apprendre
d'elle fí íbn coeur nc souffriroit
point de l'obeissance où
il la voyoit fi prête ; il nç
pût rien obtenir de plus, &
fut contraint de s'adresser à
laMerc^qui pour l'ennamer
encore davantage , luy de-;
manda quelques jours pour
aviser aux moyens de retirer
la parole qu'elle suppoía avoir
donnée en quelque façon à
un Gentilhomme, qui s estoit
dcclaré depuis longtemps.
m MERCURE,.
la menace d'un Rival fut tm
motif fort pressant |>our por
ter le Cavalier à ne garder
|»ius aucun pouvoir fur luy-
Hiòfmc. Non feulement il pria
la Dame de luy épargner 1c
desespoir où il tomberoit si
ïbn bonheur eftoit incertaim
s mais il força son Amy d'agir
auprés d'elle pour l'cngagcr
à entrer dans son party , préfcrablcmcnr
à ce qu'il pouv
voie avoir de Rivaux. La Da
rne qui airivoit par là à fes
fins , feignoit de fc laisser ar
racher con me par force îc
«©nfemement qu'on luy deGALANT
^
mandoit, à condition qu'on
, fcroic ífi mariage sans aucun
retardement, afin que quand
Ic Gentilhomme viendroit*
iì n'eust à faire que des plain
tes inutiles fur lesquelles clic
rrouveroit moyen de le satis
faire. Le Cavalier ft montra
charmé de ce triomphe > &
ce fut alors qu'on prit foin
plus que jamais de le bien
garder à veuë > de peur qu'il
ne fìst ícs reflexions aecoûr
tumées i si on Pabandonnoit
à luy-mesme. LaMcre & la
Fille ne le quittoient presque
point pendant touc le jour w
*
,
iH MHRCURE
& son Amy qu'on faisoit cou^
cher dans la meímc chambre,
paflbit une partie de la nuit à
l'entrctenir des bcautez de fa
Maistrcfle. On envoya à Pa
ris pour la dispense des Banc%
& le C ontrat fur signé des
Parties intcressées. Les choses
fc trouvant en ect cstat, le Ca
valier fe flata d'avoir le plaisir
de faire dire à la Belle que son
amour la touchoit -, mais clic
affecta toujours la mesme re
serve , & tout cc qu'il en
obtint i cc fur que lobeissance
qu'il luy voyoit rendre aux
^olontezdc sa Merc, íuffisoit
pour
GALANT.. t6ï
pouf luy répondre de ratta
chement qu'elle auroit à son
Revoir , quand elle ícroit sá
Fe'EDrôe. ' .Le jour fut choìíi
pour le mariage , & la nuit
qui préceda éc grand jeur*
\ç Cavalier ne pûc s'emp^êèhec
4e pouffer., quelques foupiars;, •
dont (Ton Amy ne lay wòwlut
point demander la. cause.MaU
gré tout l'em pire, que soct
amour xwoit pris íur luy, il
lie put bannir «k ía pensée
le duE. esclavage où il elícit
prest de s'assujettir. Cepen
dant rl: aivoir esté trop ioirí
pour estre eá estât de recules
Sept. \6?\ Z
MERCURE
Lc nouvcaà brillant ' qu'il re
marqua dans la Belle qui s'e»
toit parée à son avantage,le sic
aller à l'Eglise avec une ferme*
té qu'il ne croyoit pas pouvoir
démentir. II ne put pourtant
la soutenir jusqu'au bout.
Tout ce qu'il y a de fâcheux
& d'incommode idans lc ma
riage s'offrit à íes yeux tout
à lar fois. Il en fremit, chan
gea de couleur, & íc iaiíTanc
aller fur un siege , il eut une
veritable défaillance. Il our
vcoit les yeux de temps en
temps > & les refermoit pres
que auílì tost i de sorte qu'-r
ayant esté plus d'une heurc
fans revenir tout- à fait à luy,
on fut obligé de le porter
chez la Dame , où le frisson
l'ayant pris , il eut une fièvre
violente. II se mit au lit, &
quelques remedes que l'on
employast , il y demeura plus
de trois semaines. Lorsqu'il
se vit assez bien pour n'avoir
plus que des forces à repren
dre, il pria la Dame de . luy
vouloir accorder une audien
ce particulicre en presence de
son Amy. Ce fut pour luy
ávoûer que son mal n'estoiG
venu que des frayeurs que le
Z ij
%6?> MERCURE v -,
mariage Ivíy avoiç causées
que cpnnoiffant qu'il n'y pquvoit
estre heureux, ay rpîi4fe
fa Fille heureuse , iL luy. ©£-
froic tous les avantages qu'
elle pourroit souhaiter pour
le laisser à luyrmcXmP.i que
quoy qu'il sc. défendist 4 'ac
cepter shonneur qu'on luy
vouloir faire en la. luy don
nant pour Femme, il lajunoU
toujours avec tant de foçee,
que ce luy seroit un véritable
supplice s'il la voyoit entre
les bras d'un Rival , & queíì
elle se sentoit capable de re
noncer comme luy àse.maùcj?
0ALANT. 269
Jamais, íl eÏÏôit. pi^cft de iuy
donnés lin* Terre de dix mille
sécûs\ fc 'cofiténíaht du seul
plaisir d'cstre son plus vcrita
ble Arny. L' offre parut fore
avàn rageuse à la Demoiselle,
qui n'ayant point de tenta
tion pour un Màry, n'eut
aucunè repugnance a acce
pter la condition. Oh rendit
nul le Côhtrât de mariages
& l'on en sic un de donaífofii
dans toutes les formes. Le
Cavalier est ravi d'avoir dans
la Belle une Amie pleine d'es
prit, & dont la sagesse est
connue de tout lc mendej &
a7o MERCUBJ§ '
la Belle si reservée pour lamour
, ne fait point difficulté
de s'expliquer avec luy fur
l'amitie.
Nous voyons tous les jours
des Chef - dloeuv.res. de l'ij|-
vention des hçnirnes^ jl fti
vient de paroistre un nouT
veau. Voicy de quelle maniè
re en parlent jes y.çritablcs
Extrait dès registres
de l' Academie Royale 1
des Sciences.
1E premier de ce mou, l'A~
\cademie ayant eílé invi
tée d'aller voir une Machine in
ventée par les Heurs Duquet (&f
le Geret , a trouvé que cejìoit
une Chaire roulante à quatre
rouës , montée fur un Brancart.
Elle prenoit son mouvement par
le poids d'un homme debout ,
placé fur le derriere de ladite
Chaire a la place d'un Laquais ,
lequel se balançant tantojì fur
nn pied , 0, tantojì fur l'autre .
Z iiij
ST» MERCURE
jùijoit aller cette Chaire, avec
deux hommes dedans , d'une teìîe
aiiteffiidans les allées d!unjardin,
qu'on avoit seine à la Juivre.
Elle taurnoit fort court en tous
sens , selon que ceux qui efloient
dedans vouloient la détourner r
par le moyen d'un, petit timon
ou gouvernait* fort lever {0. aisé
À manier. Cette Machine a eflê
trouvée fort ingenieuse , facilt
dam son usage , f$ simple dans
Ja composition ; & en cette con-'
Jïderation , la Compagnie leur a
donné la prefente attestation *ce
quatre Aoujì mil fx cens quatre»
'vingt- onT^e. > * ;
GALANT.
L • II faut remarquer que cette
Chaise fait toutes les fon
ctions dont il est parlé dans
cette attestation , fans au
cuns ressorts que ceux qu'-
tm y* met pour la suspendre*.
Ceux qui voudront avoir de
ces Chaises, s'adrerîeront dans
lìílc , chez lc Sr de Gerct , où
chez le Sr Duquet , rue de la-
Vicil le- Draperie , â iTmagî
S. Joseph. On ne les vendra
truc deux cens livres^ Outré
qu'elles peuvent servir à se
promener dans un Parc, elles
font encore propres à rouler
fur lc pavé , & montent me *
»74 MERCURE
me d'un pied par toise i#tcr
Ja même charge ; ce qui se vit
à Versailles, fur la fin du mois
d' A oust , où une de ces Chai
ses monta depuis la premiere
grille du Chasteau jusques à
la Chapelle , & fit ensuite cin
quante tours dans la court.
Comme il se trouve des in
credules qui n'ajoutent foy
qu'à ce qu'ils ^nt vû , ©n a
mis une de ces Chaises dans
un grand terrain , où on ia
peut voir courir, & faire tout
ce que- jc viens de marquer.
C'est dans l'Ifle Nostre Dame,
vis à vis de Saint Louis. On
GJti*ANTM m
donnera une entiere liberté
de sc promener dedans à ceux
qui le souhaiteront, i u -\" 1
Je vous disql y a deux mois
que le Pere Placide , Geo-,
graphe du Roy ,devoit don-i
ncr au mois d' Aoust une nou«
vellc Carte de Hongrie ; il a
tenu parole , puis que cette
Cane paroist depuis quelque
temps ; son étendue fait voie
qu'elle est d'une grande uti
lité. Elle comprend les sept
principales Provinces' du
Royanmc de Hongrie , qui
font , la Hongrie , la Traníilvanic
, l'EsclaYonie,la Croa.
efí MER CURÉ ^ .
fié * la Daimatic , la Bosnie ;
& la Servie , avtc u-fte j>aíttó
de la Valaquie ; ainsi On y
peut voir les tóiarchesdei Ar
mées Imperiales > Turques^
& Venitiennes. Les Cor/fins
du costé d'Allemagne k 6: d'I
talie , n'y font pas oubliez
puis que Ton y5 trouve preí*
que toute la haute Allema
gne", & lainoicié du Golfedd
Venise. L'êxa&itude-'avec la4
quelle l'Anrcur a rcu les Re
lations , Ôc les Histoires d d
Hongrie, Iuy ont fouíny plù-í
íìt'urs remarques Géographi
ques qui se co-nnòïíscnt ptté
txALANT- ïjf
îai situation de plusieurs Ugfeej
& par ía disposition des RU
yieres , &; d.c quelques ,Iflc»
du Danube,. Ccijtc Carte çsb
disposée de maniere, que bien
qu'elle sqit trcs-ample , elle
renferme feule , ce que l'on)
f>e fça,uroit trouver que dans
plusieurs. Elle cít neanmoins
fort agreable , parce que l'on
y découvre d'uja íeul coup
d'oeil , non feulement toutes
les differentes parçiçs des Pro
vinces i mais encore pâree
que ia beauté de la graveure,
fai,t que les plus petits noms
j'y lisent 5 & s'y trouvent frns
peine. La netteté & l'exactó
tude de cëttè Carte ne doi
vent pas surprendre , puis
que le Pere Placide est Beau-"
frerc de feu M1 du Val Geo
graphe ordinaire du Roy j
qui avoic pris un foin par
ticulier d'en faire son Eleve.'
L'csprit de Tcconoïssance a
fait travailler ce Pere à mct~
tre les oeuvres de feu Mc du
Val dans l'ordre qu'on a píi
les voir en II a employé
depuis ce temps- là ses heures
de loisir aux Cartes qu'il a
données au Public , je dis (es
heures de loisir , puis qu'il
-GALANT t>jj
remplie avec distinction tous
les emplois ^dc son Ministe
re, & tous • les devoirs de
fa profession. ; La Carte de
Hongrie , ^ont je vous viens
de parler , se vend chez la
Veuve du Sr du Val , fur le
Quay de l'Horlogc du Palais,
au Grand Loiiis , où l'on
trouve les Cartes de Flandre ,
de Savoyc, & de Piemont,' du
Pcre Placide.
Mc le Duc dcMedina SU.
donia ayant resolu d'aíïïegcr
Pratz de Mollo , qui est la
Place la plus avancée du
j^oussiU^o , fit marcher soiì
Armée , aprés avoir marqué
par des discours remplis de
vanité â qu'ils estoìc fcur da
Temportec en peu d'heures^
& pnt des quartiers aux en
virons de la Place. M' le Duc
fie Noailles ayant appris [9
dessein de ce General , refoluE
de marcher aux Ennemis &
de -les combattre ; mais en
ayant esté avertis , ils ne ju
gcrent pa$ à propos de 1 at
tendre , & levcrent le Siege
avec beaucoup de precipita
tion. Leurs Quartiers estant
fort éloignez les uns des au
. GALANT. 281 •
fres, ils craignoient qu'on ne
leur cn cnlevast qUeïqu'un i
& apprehenderent meímc
pour leur Cánon. Ils décamr
perent fort à propos , puis
que Mr tìe Wôailles n'entre
prend rien qu'il n'ait pris dé
Justes mesures.
J'ay peu de choses à vous
mander 'd'Allemagne , leà
chaleurs excessives ayarit caíasé
salit de maladies dans lç»
deux Armées , qu'elles ne Ci
font pas trouvées en estât de
rien entreprendre ; cependant
la nostre a eu l'avantaee de
yivre pendant toute la Cam-
SejJtemb. ifyi* A a
a8z ME3,
ppgnc aux,, dépens <jes Estr
nçmis . tant en deçà qu'en
delà du Rhin ; de prendre de
bons Châteaux & de petites
Villes f.fâj'âp tirer quelques
contribution?, kes Allemans
pnt eu beaucoup plus de Ma
lades que nous , parce qu'ils
font moins accoutumez aux
grandes chaleurs , & il leur
cn est beaucoup plus mort i
parce qu'ils, n'ont pas d'Hô
pitaux comme nous , & que
l'on a peu de foin de leurs
Malades. ., f . ^ u
Noílre Armée décampa
de ^cycï le jour de Saint
s a8j
loiiis à la pointe du jour.
On y eust demeuré plus long
temps si l'air y cust esté mejlr
leur. On vint camper à Ebcistein.
La situation du
Camp estoit aflez belle , la
droite regardoit la Montagne
du-cofté de Kuppcnheim. On
estoit campé íur deux lignes.
Les quartiers estant moins
ferrez en ce camp-là , & les
eaux estant meilleures , il y
eut beaucoup moins de Ma*
lades. 11 y avoir u ne petits
Ville à deux lieues du Camp
nommée Gcrnspach , dont la
Carnison a toujours incom:
A a ij
484 WìtH'CURÏ ,
mode les partis du Fòrf-Leiiisy
& M' lc Maréchal de Lorg<í
abprebend&nt qu'elle n'm-î
quictast nos Fourageurî, com
mande Mr lc Prince de Conty
pour ralkrinvcstir avec rmìfè
Chevaux , & environ deu*
mille Fantasins1. j Ce Prince
estant party la nuit , fe trouvá
âu petit jour à une Redoute
qui estoit à demye lieue de
fe Ville. On latraquà d'abord
, & l'on- y fit prison*
fïiers dix Soldats , & un Ser
gent. On alla en fuite fc po
ster proche de k Ville, , où
l'on attendit les ordres de M*
GALANT 28?
le Maréchal. La Ville* estoit
revêtue d'un Foísé avec une
forte palissade ì de manieré
qu'il falloìc du Canon pour
k prendre. Mr de Dourlad
estoit sur la hauteur aved
«quatre mille hommes , ce quî
fut cause que Ton commanda
Mr de la Ffefíllierc avec du
Canoni & de rinfanteric pour
servir dans Cette expedition',
quoy que Lieutenant Gene
ral j fous les ordres de Mr le
Prince de Conty. A peine
fut- il arrivé qu'on envoya un
Tambour pour sommer la
Place , mais il ne s'y trouva
iU MF.RCiml
que quèlques Habitant li
Garnison qui estoit de neuf
cens hommes , en estant sortic
un'jour avant qu'on arrivast
devant la Place. Ainsi
on se rendit Maistrc du Châ
teau & de la Ville sans tirer
un sful coup. La Ville estoit
pleine defourages ,de grains-,
& de vin. Le feu y prit quel
que-temps aprés , & se ré
pandit avec tant de violence
que Ton ne put sauver une
seule maison. Rien n'est plus
honteux pour les Allemans
que d'avoir abandonné cette
Place fans tirer un seul coup*
©JlfcAKT. 287
rayant }a .gorge de la Mon
tagne pour retraite , & quatre
miIJc hommes fur la hauteur
pour les íoûteniT. t.,..,
Jt,e premier Septembre ï'Arméc
quitta son Camp pour
aller à Bhil qui est un gros
Bourg La Cavalerie fut cam
pée du costé de Bade fur deux
lignes distantes de deux por
tées, de Mousquet l'une de
l'autre. L'Infanteríe fut cam
pée à un quart de lieue audessus
de Bhil. Les Carabi
niers couvrirent le Camp du
costé d'Qberktrch ,& les Dra
gons furent postez au bas dç,
la Montagne.
298 MIRsCÙKE
Les Saxons ont souvenir
fnanqué de vivres pendtò
èette Campagne, & les Impes
riaux n'ayant pas voulu leur
donner de fourages dans des
temps qu'ils en avoient uû
extrême besoin > Mr de Saxe
fíc piller une petite Ville qui
Iuy en refusoit , & ses Trou*
pes b brûlcrent ensuite Cette
action a beaucoup augmenté
íes diffcrends qui estoient en
tre M1 de Saxe , & Mr de Caprara
, & qui ont tant fait de
bruit.
Nollre Infanterie partit le
7,au mâtin du Camp deBhil,
GALANT. 2 89
& vint camper à Kircn , où.
eïle séjourna le huitième. La
Cavalerie sc rendit en un jour
à Veloffe 3 où i'Isifanteric la
joignit Ic Dimanche matin.
On necroyoit pas y séjour-
• ricr long- temps à cause de
l'éau qui y manquoit , les
Paysans ayant détourné la
Riviere au pied des Mon
tagnes. On y remedia pròmp*
t'emcnr > mais ce ne fut pas
íans peine < car ils avoient fait
.quantité de trous & d'élevations
qu'il f.illut remplir , 8c
ápplanir. Le fourage fut tresrare
durant ce temps- là > cc-
Septemb. 1691* B b
MERCURE
pendant on trouva quelques^
meulles de foin dans les Bois
qui firent subsister' l' Armée
jusques au Jcudy troisième.
Elle décampa ce jour- là > &
vint à une lieue" par delà Ofr
fembourg à un petit Village
qui est au pied de la monta
gne. On y apperecut en arri
vant un Camp des Ennemis
qui estoic fur la Montagne ,
environ.à une lieue' dunostre.
Le 14. l' Armée vint cam
per à Lohr. C'est une petite
Ville fort jolie, où les équi
pages font tres- bien logez,
& mcCmcs fort au large. C'est
ainsi que l'on sc promene dans
le Pays Enncmy , & que les
Troupes du Roy y vivenç j
n ayant pendant toute laCam-
-^agne' trouvé aucuns Corps
qdí leur ayent disputé les
postes où elles ont voulu
. ' ,•* v * , * ut
camper. ï :
Je vous envoye dequoy
satisfaire vostre curiofìcé tou
chant le Combat donné ení
tre l'Arméc Impcriale , &
les Troupes du Grand -Sei
gneur.
B b ij
i9z MÉRèURË ;
un umhbiéesì
COPIE D'UNE LETTRE
Ecrite par ìe Prince Louis
de Baden à Sa Majesté Irr£»
periale , dactéc à Salenkc*
meh lcz4. Aoust i6^u
J Envoye à Vostre JMajesté
imperiale par le Comte de
Durheimb , quatorze Etendart ,
qui ont esté pris aux Ennemis,
jay de'ja fait fçavoir à Vostre
Majesté , par le Prince de Vau*
demont , comme aprés un long
&• sarclant eombat, le Ciel s'est
declaré pour vos armes. J^puis
t
dire que jamai} on n'a combats
avec plus de valeur ny de bror
mure qu'ont fait tous les Offi
ciers generaux & subalternes
de cette Armee. Il ny a pas
ett un 'Bataillon , ny un Esca
dron , qui n'ait ejìé plusieurs
fois a la charge. Le Mar
chai gênerai de Dunevald ) le
Comte de Souches* le Comte &
Stirum;w le Lieutenant gênerai
de Barfus , s'y font dijìingue^
d'une maniere à ne rien laisser à
dire au dessus d'eux.ll me fetoit
difficile de faire un détail parti'
culier de tout «ce qui s'efi pafîé
danj íff/f {fgtçdc. fournée A ^ '
°" ' 1 * B b iij
294 MERCURE
laisse au Torteur d'en rendre
compte de bouche k V. M. I.
Il s'esì luy-mesme beaucoup dis
tingue ; ft) comme il a eflé fres»
que toujours prés de moy .naît
ra mieux remarqué les choses.
Je ne fçay pas encore au mray
1+ perte des Ennemis. Les Pri
sonniers m'afseurent que de dix
mille janissaires de tres-bonnes
Troupes , peu en font échape^ ì
que beaucoup de leurs Officiers
y ont ejìé tue^. Tout leur Camp
eíîûit remply de chevaux & de
corps morts. Tous les Rafciens qui
se sont sauves de Belgrade
viennent de m assurer que iA%*
GARANT. 2^
des Janissaires & le Sera^kjer
doivent ejìre demeure^ fur la
place i & mesme que le bruit ejl
s parmy leurs Troupes V que le
Grand Vìfir y a ejìè tue.
- Voicy la Lifte que f envoye ",
àV. M. I. des Aéorts&'Blefiz
'de ses Troupes i que je n'écris
qu'avec beaucoup de douleur;
mais le feu a esté f extraordi
naire j les Infidelles se sont
défendtts avec tant de vigueur ,
que tout le monde avoué que ce
fieft que par un miracle que les
armes de. V. M. ont remporte
une Jt grande vïêíoire. Je sou
haite qu'avant là fin de la Cam-
Bb iiij
z96 MERCURE
pagne Dieu me donne la grâce
de battre encore vos Ennemis ,
çy remporter fur eux nj'tÛoire >
pour l' augmentation de la gloire
des armes de vojìre Maison , &
pour tacher d'acquerir la bien
veillance çjt* l'approhation de -
Vofre Afajejlé Imperiale , {0c.
LISTE DES MORTS
& Blessez de l'Armée Im
pcriale , dans la Bataille
donnée au dessus de Salchkemen
,lc ip. Aoust 1691.
MORTS. - n
Le Duc de HolJlHn , le Comte
i
GALANT. 297
.de Kaunit% , le Comte de Buquoy
* le Comte de Peting^Ojjt'
ciers generaux.
Dans I Infanterie.
Le Comte Richard de Starcmberg
, (e Major Jnngerman le
Major Groner, le Major Hifck.,
le Major Mayr ; quinte Capi
taines , Jíx Lieutenans , huit
Enseignes , & Ojfìchrs
subalternes Soldats de divers
ReiTimens. *
° LES BLESSEZ. \
Le Comte de Souches, General
de l*Artille rie ; le Çomte Guido
de Staremberg , Major gênerai ;
le Prince d'Aremberg, Ces trois
Géneraux font morts de leurs
blejj#res,hicr & aujourd'huy z^.
Aouft.
Le Comte Corbelìy , (jeneral
major ; le Prince Charles deVaudemont
, legerement ; le Comte
Zacco , Colonel 'Bavarois ; le
Comte Htnry de Staremberg i
le Baron cfElmpt fie Marquis
de Majfler , le Comte d'Herberjìein
Je BaronWin\Ahoìfen *
le M<ijor Wtlprat, le 'Baron
Lohen ; trete- trois Capitaines ,
trente-cinq Lieutenant, dix-huit
Enseignes , $ iffz. bai Officiers
$ Soldats.
GALANT. 259
Morts dans la Cavalerie.
Le Comte TLerini ; le Comte
Maulium ; le 'Baron fían de
Vert ; le Major Permeidingen :
huit Capitaines , dou^e Lieute
nants trois Cornettes * £<r $66.
Maréchaux des logis ou Cava
liers.
Blessez dans la Cavalerie.
Le 'Baron Reitler , le Qomte
de Hocnems , le Comte de Marcin
, le Baron d'Oharife , le
Major Portenavv , le Major
J>ifcher ifei^e Capitaine*, vingt
Lteutenans , vingt & un Cor- '
mues , un Aumofnier , & pfo,
- bas Officiers ou Cavaliers, .,
?oo MERCUR
Morts des Troupes à
debourg.
Le Colonel Heim , le Lieute
nant Colonel de Kalchsein ; trois
Capitaines , trots Lieutenant >
fe^t Cornettes, trois Enseignes t
deux Mjudans , & f2*
dats ou Çavaliers.
Blessez des Brandebourg.
- Le Lieutenant Colonel Sidou,
le Lieutenant Colonel Blambenfent
y le Major Ruchat ; dix
Capitaines.quatorze Lieutenant,
^dix Cornettes ou Enseignas t &
jof. Soldats ouCavaliers. ' , ;[
. Morts, de l'ArtilleiicImp..
L 'Ingenieur fong ; 4o0#
GALANT^1 toi
Officiers ou Canonniers , feï^c
Valets tsr trente chevaux.
Blessez de l' Artillerie.
Le Major de l'Artillerie ferner;
un Capitaine t un Lieute
nant* un Commissaire ì & un
Adjudant , quinte Canonniers\m
quarante chevaux.
Artillerie de Brandebourg.
Dix Commijptires , Canon
niers , ou autres , tue% ou blcjfe^,
La plufpart des Hl ffe^ font
morts depuis la Bataille.
Dénombrement fait par un
Prisonnier Turc , des Offi
ciers qu'il a reconnus morts.
Le Grand Chambellan du
3oz MERCURE
premier Vifr ; /í ^ C*»N
ramante ; dix sept Aga ou Oj/Tciers
des Jani(fairts, outre pîuficurs
morts qui paroiffìicnt ejlrc
gens de qualité, que ce Prison
nier a dit ng pal connoifire. La .
perte des Ennemis peut efìre de
ttou^e à quinte mille hommes ,
& le bruit s'ef répandu dans
l'Armée quelle efloit de plus de
vingt-cinq mille ; ce que je n ay
pas voulu empêcher de publier,
parce que cela anime les Soldats,
j aliens les renforts de Troupes
que fay demande^ à Vojìre
sjïîajejîé Imperiale % &c.
Louis de Baden.
GALANT
Cette Lettre fait voir que les Im
periaux ont perdu prés de. dix mille',
hommes dans ce Combat; & com
me dans toutes les occasions , où
ils ont eu du desavantage , le temps
a fait connoistre qu'ils ont toujours
caché une partie de leúrs, pertes ,
il y a lieu de croire .qu'ils déguisent
la verité , de crainte que leurs Al
liez ne les preíîent de s'accommo
der avec la France; C'est pourquoy
en diminuant le nombre de leurs
morts , dans le dernier Combat ,
ils ont augmenté la perte des Turcs
dont il estoit impossible qu'ils pus
sent alors sçavoir la verité Le
Prince de Bade n'assure point dans
la Lettre que vous venez de lire ,
que le Grand Visir soit mort 5 mais
il rapporte feulement ce qu'ont
dit fur cet article , des Prisonniers
£>4 MERCURE.
échappez de Belgrade 5 ce qui ne
ptòuve rien , ces sortes de gens ,
ne disant ordinairement que ce qui
fait plaifîr , parce qu'ils sont mieux
reçus, 8C souvent regalez. Les Let
tres &la Gazette de Venise mar
quent que ce premier Ministre s'est
sáuvé dans un Bois , &c d'autres
Lettres portent que l'Armée qui a
combattu contre le Prince de Bade
n'estoit qu'un détachement où ce
Ministre n'estoit pas. Quant aux
n'ombre des Turcs qu'on veut a*;. *
voir esté tuez dans ce Combat , il
est ridicule de dire qu'on l'a remar
qué fur le champ de Bataille , puis
que les Corps du grand nombre des
Imperiaux qui ont pery dans ce
Combat estoient mefiez avec ceux
dès Turcs qui y ont perdu la vie.
Cé n'est point en voyant leurs
tîALANT. w
morts dans lc Champ de Bataille
que les Imperiaux en ont reconnu
lc nombre , mais par les Etats qui
çn ont esté faits aprés les Reveuës i
ce qui fait que l'on ne peut parler
fì-tost avec certitude de la perte
des Turcs. & que l'on ne peut dou
ter que les Imperiaux n'ayent au
moins perdu et qui est marqué dans
la Lettre du Prince de Bade. Ce
qu'U y a de constant , c'est que
le Champ de Bataille est demeuré
aux Morts , que les Turcs íont
retournez dansieurs premiers retranchemens
, & que les ImperiauXjContrel'usage
des Vainqueurs,
ont reculé au lieu d'avancer. J'ay
beaucoup de choses à vous dire
touchant ce Combat , que je fuis
obligé de remettre au mois pro
chain, .<;'.,,, . • i
•t Septembre 1691. C c
3o6 MERCURE
..i' Enigme du mois passé estoit
fur la Grenouille. Je vous envoye,
une partie des noms de ceux qui.
l'ont devinée , je dis une partie ;
parce que les autres l'ont expli
quée fous des noms qui ne meri
tent pa,s d'avoir place dans ma Let
tre. , ; - , m , m
Mrs Arnaudet , Avocat en Par- -
lement , &c l'un des Echevins de
Niort j Birault , Abbé de Nouíieks
j Chanury Entrepreneur des
Fortifications de la Rochelle de
k Prairie d'Orleans ; C; Hutuge
de ïx mefme Ville } Bonnard de
l'Hostel du Quesnoy, Place Royale;
Castcinau de Bayonne j le joly Curé
de S. Lubjn > le trop fidelle Amanc
vangé de ía perfide Maistresse de
la Cité 5 le Gentilhomme Cour
tisan du Cardinal le Moine > Belier.
GALANT. 307
<le S. Maurice de Senlis j le grand
Chasseur de Collange 5 Gervais
l'honneste homme ; le Chevalier
Portalet , Commifíaire des Trou
pes ,• rinconstant rendu captif , ou
l' Amant de libelle í Tranie du Pont
au Change j Baudouin, du mesme
lieu 5 Perret de Seigurets j le Che«
valier Santic de Morlaix j le Pere
de la Jeunesse de Chasteaudun j
de Jumeaux de la mesme Ville 5 le
Comte de Quermens , &c Cochçpin.
Mlles Marie Rajice 5 Louison,
rue Vieille-Drapperie ; Antoinette
&c Marie Belier 5 Anne Charles.,-
Marianele "Geay ,dela ruë du Se
pulcre j la belle Jardiniere du Fauxbourg
íaint Antoine j les trois Ber
geres fans Bergers , du Q^ay de la
Tournelle 5 la sainte Famille du
jnesme Quay ; la belle Bergeie de
Cc ij
Pannecau 5 l'aimabîe Soeur de M.
le Curé de DroiíTy proche 5oissons;
l'aimable Blomde } la belle Vernon
de Luxembourg, & la Reíïuícitée
du tnesme lieu ; les neuf Muses de
Lanruel ,• la Belle, de lâ rué" Quer-
- jean j la Dameau trésor caché , %C
son fidelle Epoux * le parfait Mo
dele de l'amour conjugal , de la
; rue-neuve íaint Eustache , 8c l'Indolente
à l'Anagrame , Reyne d»
Haz,ard* de la mesme rue. •
Je vous ay autrefois envoyé un
Voulume entier , par lequel vous
avez pû apprendre le cas qu'on
faisoit des Enigmes chez les An
ciens > 6c que les Rois quittoiem
leurs Etats pour en alter expliquer
chez les Rois leurs Voiíìns j c'est
delà qu'est venu Pusage d'exposer
tous les ans au Colegc de Louis le
GALANT. 509
Grand des Tableaux qui en repçel
sentent. Chacun est bien reçû pour
les expliquer , &c ceux cjui en rrouvent
le -vray sens gagnent le Ta
bleau i celuy de la Rhethorique re-
" présentoir cette année la Benedic
tion d'Isaac que surprit Jacob par
r par la pieuse adresse de sa Mcrc,
au lieu d'Esaii l'aisné , qui avoit
t droit de se la promettre. On ex
pliqua cette Enigme sur.Ax Mode , &C
sur le Masque. Le veritable sens
'x estoit le £)ui fro quo. Le Fils de
M. de Raymond , Fermier Gene-
' tal des Fermes du Roy , qui la donnoit
, patla fur ce sujet avec beau
coup d'agrément 6c de presence
d?esprit. Voicy dequoy exercer le
vostre &c celuy de vos Amis.
jio MERCURE
.v ENIGME.
,.,).',. \ .
, . - .,
1 i Ncor qut je ne fois qtiunesimyP
t pie femelle ,
fay de la force aux bras auffrbien
* , . qu'en mon cors s ;
On dit que je fuis bonne & belle,
Mais ilfaut craindre mes efforts.
J'ay beaucoup d'ennemis fur la terre
& fur l'onde ,
J>>hì parlent toujours mal de moy,
JBt cependant je fais plaisir à tout le
monde ,: . 1
Sans mefme en excepter le Roy.
Jguand on fçait par experience
Veffet de ma vertu , mes bonnes
qualites,
GALANT. ?it
On vient avec toute assurance
Úe confier mille beaute?,
^ s -
ixours fans pieds ,je dors fans
yeux, . . . I
v Medecine , & i' embellis la
\s l'Mfme , & monte
(es Cieuvi i
nuis selon que l'on
je vous envoyc
uct d'AbbeviHe.
es en chant par
eau , Organiste du
College Royal d£ Navarre.
-
fia MERCURE
AIR NOUVEAU;
A Teste d'une riche Cour
(N'a point de charme
* touchent, * <
Tarmy l'ccl*t& le gran
Nos tendres amours s)1
C'est dans les ombres )
Trouve la fn de Jìj
Je viens à l'Ar 'mbrt ,
dont je fuis persua/ /atten
dez les particulai : impa
tience. Je croy : iriofité
trouvera de quoy se iarìsraire, puis
que la Relation *uc je vous en
voye a esté faite $ar une períonne
qui joint à la plus haute naissance
une intrepidité digne de son sang ,
S: une parfaite connoiíTance du
métier
GALANT. 3i|
métier de la guerre. Voicy les pro
pres termes dont ce Prince s'est .
Tervy.
. A Tournay ce 20, Septembre 1691.
1E nions diray que le 17. vers
les huit heures du matin, M1,
de Luxembourg fut certain que
les Ennemis avoient non feule
ment décamperais qu'ils efioient
alle% à Leu^e. Sur cela nous '
commençâmes à marcher. Comme
Adcle Maréchal aioit eu la pré
caution de faire accommoder tous
. les chemins ,. nom arri<vafwes ce
jour- là à Renay. Le lendemain
18, la difficulté des chemins (y du
Pays nous obligea de rejettes
Sept. i6}i* D d
?u MERCUR.E
presque toutes nos colonnes da
coflé de ï Escaut ,c'efî a dire que
nojïrc aijle gauche alla pajjerà
Pontarone -, ainjt tout ce qu'on
put faire fut de camper la gauche
k rPotte , & la droite à tíerinest
à la reserve de l'aïjle droite de
Qavalerie, premiere & seconde
ligne, de neuf Escadrons que
• commanioit M* de Viìlars , &
de la Refervet avec quoy M" de
Luxembourg alla paffer U Ronc
à Bergnau , en intention d'aller
chercher , je croy , plus en avant,
un pofle qui luy convins: , &
qui tinflles Ennemis en bride fur
les courses qu'ils auroient ptt faire
GALANT. ^
du cojié de l'Escaut vers Mortaigne.
filous allafmes d'abord
examiner un poíie dont on avoit
parlé ,<pi tfloitde mettre lagau»
che vers Annuin , ft) passant
par le Moulin de Forefi , s'éten
dre jusqua Velaines. Ce pofie ne
parut point bon à M1 de Lu
xembourg , ainsi il tourna du côté
du Mont de U Trinité , ffi alla
camper quafi fous Tournay , fur
trois ou quatre lignes. :•
Les Ennemis efioient cAmpel^
a Leu^e. De cette manìere ils
avaient letir gauche fur Leuçe ,
$f leur droite à Lecatoire , le
ruisseau de Leu%e fur leur gau-
Dd ij
?iá MERCURE ,
che , $f celuy de Blçfiuy der*
riere eux , lesquels fe vont joindie
à Ligne , {0 quoy qu'ils
soient fort petits , ne laissent pas
d'être tres- malaises à passer par
les marais qui regnent fur leurs
bords; ainsi vous voytTí bien
qu'ils ejloient de maniere que
pour déboucher de leur Camp il
falloit repasser ces ruisseaux * ce
qui efl toujours une affaire de
licate pour de grosses Armées qui
ne font pas fort eloignées les unes
des autres.
Le ip. Mc de Luxembourg , qui
par tous les avis qu'il recevoit*&
par ce qu'ilfçavoit par luy-méme>
GALANT, m
Je doutoit bien que les Ennemis
devoient marcher ce jour- là avec
leur Corps qu'ils aident icy ,
faisant en tout soixante & dix
Escadrons , esperant que ji les
Ennemis avoient marché du coté
d'Jth ou de celuy de Cambron ,
il trouveroit qu'ils auroient à
demy pa fée les ruijjeaux dont je
viens de parler qu'il battroit
à coup feur tout ce qu'il trouveroit
en deçà, & que jt les En
nemis n avoitnt. point marche t
il feroit demeuré du cojìê d'Antonin
, dans des pojìes quil contioijfoit
, £7* dans lesquels il auroit
fait venir le rejlede son Ar-
Dd iij
jìS MERCURE
mie le soir : ains cette entreprise
ne couroit d'atitre hasard que
celuy de battre les EnnemUtCom?
me il ejl arrivé.
Dés le soir du 18. en arrivant
icy il détacha Mx de Marstliy
avec quatre cens Chevaux, moi
tié de la Maison du Koy , &*
l'autre de Cavalerie -legere , au
quel il ordonna de s'approcher le
plus pris qu'il pourroit du Camp
des Ennemis ,& de luy mander
a tous momens de* nouvelles.
Le if. Mx de Luxembourg
commença a marcher , ayant fait
passer, devant luy le Qorps de
M1 de Viliars , tenant le chemin
GALANT. 319
de Leufe-i & laijfant Antonin
fur nojìre droite. Quand nous fusmes
environ à moitié chemin, M*
le Marechal eut de s avis eertains
par Marfilly , & par tons les
gens du Pays , qui luy confirme
rent cjue les Ennemis avoient
décampé deux heures avant le
jour , & alloientdu coftéde Çam.
hon. Cela détermina M1 le Ma
réchal à presser Ça marche, crai
gnant qu'ils né fussent tcus paj-
Jè% le mijfcau de Blequi* ou qu'il
nenrefìaft Jt peu en deça -> que
cela ne valufl pas la peine d'y
avoir rejìé.
En approchant de la hauteur de
D d iiij
?zo MERCURE
Leufeì tyantLeus** notre gaucher
M* de Villars qui avoit réjoint
Aí: de Marcilly , manda qu'il
<voyoit plusieurs troupes des En
nemis en Bataille prés de luy,
zJ?klT le Maréchal luy envoya
dire en toute diligence qu'il n'engageajl
rien qu'il ne fufì arrivés
& y pouffa dans le mefme temps
luy-meÇme. Dés qu'il y fut , il
vit ejfeiïivcmcnt une ligne des
Ennemis de quatorze où quinte
Escadrons qui ejìoit leur arrieregarde
; cela ejlant un peu trop
jort pour le Corps de M1 de
Villars , il jugea a propos à'at
tendre que les Gardes du Roy
GALANT. jìì
fassent arrive^ , & envoya à
toute jambe leur dire qu'ils mar
chassent le plus diligemment qu'ils
pourroient. Ils arriverent lien-'
toft , n estant pas éloigne^ de
plus de deux mille pas. Dés qu'ils
furent vtnus , Mx de Lu
xembourg les mit en bataille
dans un terrain qui nous esloit
f@rt favorable ; parce que nous
le remplissons avec un nombre
pareil à cìluy des Ennemis.
de Luxembourg mit fur la droite
dans des hayes qui lafermoient,
les deux Regimens du Roy &
de Tefé , & mit à la gauche de
la Maison du Roy , les trois Ef>
>
3i2 MERCURE
cadrons de Merinviìle. Il at~
tendit un peu la Çendarmtrie
qu'il fit meure en seconde ligne ,
dés quelle fut arrivée avec la
Brigade de Choad. On a fceu
que ses Ennemis crurent en
voyant les Troupes de M1 de
Vdlars i que cefloit M1 de Besons
avec le Corps qu'il com
mande fous Mons ; mais comme
ils virent former nojìre ligne, &
qu'ils reconnurent les ìjardes du
Corps , ils virent bien qu'ils s'étoient
trompe^. Cependant fcaihant
le tour que nous avions
fait , que nous ejìions par»
tìs le ij. à dix heurts du matin
GALANT. $2?
de LeJJirta , ils n'imaginerent pas
que nom pujjtons efire là le ip.à
midytavec un Corps aujji conside
rable que celuy que nous avions ,
ce qui fut cause qu'ils firent repas
ser le plus diligemment qu'ils pu
rent toute leur aifle gauche > pre
miere f$] seconde ligne, qui ne fai
sait que d'dchever de pajjer de
l'autre costé du Ruisseau de Blequi.
A mesure qu'ils arrivoient
ils formaient des lignes derriere
cette Arriere-garde* & firent a~
cancer les cinq Bataillons qu'ils
Aboient laisses fur le Ruisseau
de Blequi pour leur Arriere-gar
de, dans des hajes & des maz
5*4 MERCURE
rais qui efloient fur leur gauche ,
qui je trouverent opposes aux
deux Regimens de Dragons que
nous avions fur noftre droite.
Bien que nojìre aise gauche de
deux lignes que menoit Mx Rose
fujl encore un peu loin en solomne
; Mx le Maréchal voyant
que cela grcfjìjfoit , $r quil leur
donnoit le temps- de former des
lignes a leur atfe , crut que le
temps ejìoit venu de charger.
Jl fit ébranler la ligne des Gar
des du Corps qui s'approcha fort
prés des Ennemis , lesquels ayant
une petite Ravine devant eux
les attendirent fort fierement ,
GALANT. 32,5
& leur firent la décharge à bout
pointant. Les Gardes du Corps
la receurent avec leur fierté or^
dinaire , & voyant qu'ils ne
s'en alloient point , ils pajferent
ce petit Ravin fe mefierent
avec les Ennemis , qui je crày
ne les auroient pas attendus , f
le fajfage du petit Ravin n'a-it
mit un peu dérange les Esca
drons des Gardes du Corps. £ette
charge-là de l'aveu de tous ceux
qui y efioient , fut une des plus
If elle s qu'on air jamais vtu'ê , &
digne de la s^iiifon lu Roy. Les
Ennemis plierent , f0 Us Gardes
du Roy Us poujfant t trouverent
326 MERCURE
d'autres Escadrons Ennemis qui
$efoient formes derriere leurs
lignes qu'ils chargerent , £7* cul
buterent à mesure qu'ils Us trounoient
; mais comme en pouf
fant toujours vers le Ruisseau
de Lacatoire , <Jbt de Luxem
bourg i)it que les Ennemis a-
*vóicnt encore beaucoup de Trou
pes en ordre , il ft faire alte 4
la liaison du Roy , & la fit
remettre en ligne , apres quoy
pour finir l' affaire , il fit passer
la seconde ligne , ceB à dire , U
Gendarmerie , {0 la Brigade de
Ckoad, dans les intercales delx
liaison du Roy. Dés quellefut
GALANT. 327
fafée il leur ordonna la, charge
des Troupes quelle avoit de
vant elle. On ne peut s'y pre-.
fenter plus fierement ; mais les
Ennemis n en userent pas comme
à la premiere charge , & aprés
avoir fait leur décharge s'enfui
rent. La (gendarmerie les pouffa
jusqu'à la petite portée du Mous
quet de- ligne. c#/r de Luxem
bourg qui voyoit leur Infanterie
fur la hauteur de l'autre cojìé,
qui arrivoit & qu'ils commençoient
à en faire defendre dam
le fonds , leur ordonna de ne
pas s'engager plus loin , ne vou
lant pas que ce jour-là les En^
MERCURE
nemis eussent le plaisir de dirè
qu'aucune de nos Troupes fe fujl
retirée en desordre. Apres cela
M le Maréchal voyant que
leur Armée commençoit à paroiftre
fur la hauteur de l'autre
cojìé , ($f que du noflre il ne
rejìoit plus que quatre ou cinq
Troupes des Ennemis de soixante
& dix Escadrons qu'ils avoient
fait passer , qui avoìent le
cu dans les hayes où s'ejloient
retire^ les cinq 'Bataillons d'Ar'
riere-garde , commença à prendre
le party de se retirer au petit
pOS ,ce qui fut executéfans que
pas un des Ennemis ofajl repas
GALANT. ?z9
ferle Ruisseau. Les cinq Troupes
mefmes dont je 'viens de parler ,
ayant pafSé le défilé avant que
nous eujfions commencé à nous
retirer , nous demeurafmes fur le
Champ de Bataille une heure
plus , pour retirer les Morts ft}
Us Blesses
J'avois oublié de vous dire
que nos deux Regimens de Dra^
gons ejearmoucherent toujours
avec ces cinq ^Bataillons , ç£*
les amuserent pendant toute l'ac* •
tion * ce qui fit du bien a nofire
aifle droite , qui attrait un pett
páty Jans cela.
Scptemb. 169 r. E e
&o MERCURE
Mille 3 & mille circonstances ren
dent ce Combat glorieux , rant
pour les Troupes en gênerai , que
pour les particuliers , qui ont faic
des actions de valeur , Se d'intre
pidité dont on a peu veu d'exem
ples. Quant au General il a faic
paroistre tout ce qu'on peut sou
haiter dans un grand Capitaine,
&c il y a dans l'action qu'il a en
treprise de 1 intrepidité > de la pru
dence , de l'activité , & un certain
sçavoir faire , accompagné d'unmanege
qu'il faic naturellement ,
& qui pourroit embarrasser les plus
grands Capitaines. Les Ennemis
avoient toûjours pris de si grandes
mesures pour' éviter le Combat ,
Jors qu'ils estoient prés de luy ,
qu'il resolut . de les surprendre Sc
de les y . engager , lors que leur
GALANT, w
Camp en estoit à cinq licuës. II en
est venu à bout , ce qui ne se pouvoit
faire sans estre aussi actif que
fçavant dans le mestier de- la Guer
re. 11 fit courir le bruit estant à
Tournáy , qu'il avpjt fait avancer
la Cavalerie qui l'áccompagnoit ,
dans la pensée qu'il avoit que les
Ennemis vouloient passer l'Escaut
entre Tournay &r Condé , 8c l'on
avoit retenu les eaux de ces deux
Places , comme si on en eust esté
persuadé. II fit publier en mesme
temps que toute l' Armée devoit
suivre. La nuit du 1 8. au 19. il fit
faire des Ponts , 8c fit ensuite de
fausses marches. Cette belle ma
noeuvre engagea les Ennemis au
Combat , & fut cause que mefrnes
en voyant ce General Sc ses Trou
pes , ils ne crurent point en estre
B íj
??i MERCURE
si proches. Leurs Bagages estoienr
à couvert, & il ne leur restoir que.
quatorze Escadrons , qu'ils pou» •
voient retirer , & ils auroient ren
du par là toute la diligence de M.
de Luxembourg inutile ,• mlis estanc
persuadez qu'ils ne pouvoiént avoir
Jjfji faire à ce General ny à la Maison
du Roy ,ils crurent qu'ils auroient
bon marché des Troupes qui o- .
íoicnt rester devant eux ; ils en
firent mesme repasser de nouvelles, A
croyant les accabler par le nombre. ^
Pendant ce temps il en arrivoit à
M- de Luxembourg qui les mettoit
en Bataille à mesure qu'elles arri«
voient. Les Ennemis ne pouvant
plus s'en dedire , rirent venir touc
ce qu'ils avoient de Cavalerie à
portée de s'avancer , & ils avoient
formé prés de quatre lignes , ayant
GALANT. 3n
•que- M. de Luxembourg eust aise z
de Troupes pour une íeconde Li4"
gne. Ce General fit engager -le
combat, fans attendre celles qui'
le suivoient , parce que s'il eust
tardé plus longtemps , route l' Ar
mée ennemie dont il paroiíîoit '
déja quelque Infanterie, st'aùroÌB$
pas manqué d'avancer. Monsieur le
Duc de Chartres s'estoit mis d'à -
bord à la teste des Gardes du
Corps , &c ptétendoit y_ combatre,
8c M. de Luxembourg fut obligé*
de se servir de son autorité de
General p©ur faire rerirèr ce Prin
ce : cependant il ne laifía pas .«de
donner fur* la fin du combat avec
Monsieur le Duc du'Mayne , &
d'aller à la charge avec des Esca
drons qui vinrent se raííer , pour
enfoncer la derniere Ligne des En,».'
ÎÎ4 MERCURE
nemis ; ainsi cc Prince êuc part 1
|a Victoire , te quoy qu'il ne se fust
encere jamais trouvé dans k peril,
il le regarda de sang froid , mais U
fie paroistre beaucoup de chaleur
à la poursuite des Ennemis. Jamais
il ne s'est vû une intrepidité pa
reille à celle de nos Troupes qui
ont combatu. Vingt -deux Esca
drons en -avoient soixante & dou
ze à combattre : je dis vingt- deux ,
parce qu'il y en avoir six qui estoint
occupez contre cinq Bataillons qui
estoient dans des hayes. Ainsi l'on
peut dire que les Ennemis estoient
plus de trois contre un Ils avoient
outre cela de ^Infanterie fur leurs
aiílcs , &: dans un bois derriere enx*
St de plus , ils estoient couverts
d'un ruisseau , qui leur donnoit le
temps de tirer fans estre inquiete*
..... GALANT,
pendant que nos gens eûoient oc
cupez à le passer , ce qui les déran-
- geoit un peu. Cc grand nombre
d'avantages que lesEnnemis avoient
fur eux ne les étonna point , 8c le
íàbre à la main ils allerent au pas
aux Ennemis , au lieu de reprendre
halaine , parce qu'ils eftoient venus
fort viste.
On peut dire que la Maison dtt
Roy a non seulement combattu avec
valeur dans cette occafion ,
mais mesmes avec dignité , ayant
trop meprisé l'interest pour mettre
pied à terre , pour dépouiller les
Morts : elle laissa le Champ de Ba
taille aux Troupes , qui ne purent
arriver assez- tost pour avoir parc
à la gloire , quoy qu'elles fussent
venues avec une extrême vitesse.
Ceux qui feront reflexiojci fur ce
qui s'est passé dans cette Igrande
Maison du Roy est venue de cinq
lieues battre I'aifle gauche des En
nemis de cinquante- six Escadrons ,
cresque tous Allemans, & de leur
meilleure Cavalerie , toutes íeurs
vieilles Gardes , ic quatre toaistres
choisis par chaque Compagnie de
leur aisle droite , Sc qu'aprés avoir
íttit cette action , elle s'est retirée
en ordre de Bataille , & est allée
coucher au mesme lieu d'où elle
estoit partie ; de sotte qu'on eust die
qu'elle revenoit de queîque Reveue.
II ne s'est jamais fait une si
grande action avec un si grand sang
froid , & jamais Troupes n'ont
combatu avec tant d'ordre , n'ont
si bien conservé leurs rangs , Sc
ne se sont tenues si ferrées, & si
remarqueront que 1á
cllcs
elles ont esté obligées à quelques
raliemens pour avoir souffert en al-,
lant tropsouvent à la charge contre
les meímes Corps , elles les ont
fjits fans perdre du terrain , 8c*à«"
la porrée du pistolet des Ennemis*
L'exercice que le Roy a de tous
temps fait faire à les Troupes 5 est.
càute qu'elles font tous les mauyemensde
Guerreavecune vitefe,
§C;4me adresse inconcevables , èc
qu'elles se rallient dç mesme,, II fut
pUis aisé aux Ennemis de se rallier
sans courir de risques, parce qu'ayar t
plusieurs lignes, ils fe railloient der
rière avec plus de feureté & de
loisir. Un de nos Escadrons dans
ía chaleur du Combat , ayant pa*
netré au miiieu des leurs , il fii face
de tous collez , te se retira glcrieusement
i rnáis ust Escadron d^s En*
Septemb. ifyu F f
\
I
i
rtcrriis estant entré parm^ îèi rrîofV
rres , disparut àussi-tost fans s'estro
retire , 8c fut entierement 'dëFait. "
M- le Comte de la Mothe estant
à la teste d'un Escadron , & faisant
face aux. Ennemis , un autre vitítP
attaquer en flanc j il fit faire la còìivcrsion
, chargea en teste cet Es
cadron , 8C l'enfonça. Oh rapporte
qa'ayant veu que l'Efcadron qui
le venoit prendre en flanc estoit
encore loin , il' dit qu'il fallait tou
jours expedier celuy qu'il' avoit et
face , & qu'il auroit assez, de temps
pour aller au devant de celuy qui le
venoit attaquer, II n'y a point eu
d'Escadron de la Maison du Roy
cftii n'ait au moins eu affaire à deux
des Ennemis , & les Gendarmes,
8c Chevaux Lcgers de la Garde se
sont vûs attaquez en face, enijueuc
.1 .
i
i
S£ en flanc. M. de Trainel , avec
quarante Maistres , alla charger un
Escadron des Grenadiers de Nas
sau , &í il eut son habit tout percé
de coups, ÍA- le Comte de Somery
qui l'accompagnoit , fit voir qu'il
eíioit auflì brave qu'intelligent dans
son mestier. Un Officier Ennemy
vint à M. le Prince' de Bòurnohvílle
qui estoit à la teste des Gen
darmes pour luy casser lá reste d'un
coup de pistolet , mais son coup
ayant manqué jee Prince le tua de
deux coups d'épée. Un Gendarme
fit le Comte de Lippe prisonnier/
c'est le seul qu'on ait voulu faíre
dans ce Corps ; on auroit esté trrp
embarrassé, si on avoit écouté tous
ceux qui se vouloient rendre. Les'
Grenadiers à Cheval qui n'éstoienc
que soixante &c sept., ont défait
Ff ij
34o MERCEfttS
quatre Escadrons lHm apréíL&9fr<b
K pris quatre Etendards} & j£&qgiment
de Mcrinville une paire de
I imbales. Un Garde du Roy sc
iant seul saie jour au milieu des
Ennemis , alla reprendre un Eten
dard qu'ils avoient emporté
s'en resaisit , aprés avoit tué celuy
qui le portoit. Un autre estant en
tré dans un Escadron Ennemy , &
ayant pris un Etendard , l'apporta
à un Officier qui luy dit de le gar
der i mais il répondit qu'il avrit
autre chose à faire , & qu'il falleit
qu'il retournâjl au Combat. Vous a*
vez otfy parler d'une action qui meïheroit
des louanges du cafté de
l'inttepidiré , si le motif qui Vf fait
entreprendre n'en ostoit point tout
le merite Dans le temps de la pre
miere décharge, un Garde du Duc
&Ûïltí<Mâ i st. par conséquent du
Prínté d'Orarige , puis que ce Duc
líàs^ commande , bien monté , &c
avec un air fort resolu , vint à tou
tes jambes le pistolet à la main , &c
Tepee pendue à son bras se jetter
«ans la troupe de M. de Luxem
bourg , qui estoit de dix ou douze
personnes, Si il approcha assez prés
de ce Duc pour recevoir quelques
coUps de canne qui luy firent man
quer son entreprise. II fut aufïï-tost
; pífrcé decoups. Je ne vous ay point
parlé des Officiers Generaux qui
íervoient dans cette action. M. le
Duc de Choifeuil estoit à l'aifle
droite, & M. Danger à la gauche.
J ïì y avoir soixante &c dix Escadrons
en marche pour cette expedition. .11
est à croire que si toutes nos Troupes
fuflenr arrivées , Bc que leur nom
' Ffiij
'K?.VT"" '"*' k'"* a ,
auroienc esté accablez,sans que notís
eussions fait la perte que nous 4-
yons foufferte. X,es Ennemis au
roienc tort de publier encore que
|4- cíe Luxembourg a toujours é-
:yr^é iè Combat , ií h'aufjBiP'tìîls
pris tant de précautions , 8t fáit
rien reproché, quand fine feroirpás
venu de fi, loin ppur les attaques,
Bt qu'a prés estre arrivé il auroit
évité le combat , ses forces estant
íì inégales. Je finis par Mr de Marçilly,
Enseigne des Gardes du Corps,
dont je vous ay déja parlé en conimençant.
La manoeuvre qu'il fit
toute la matinée a beaucoup contri
bué au succès de Tentreprile de Mt
de Luxembourg , quia si glprieuse
.çh.a ailçzpxé.s des £nne«ùs pour en-
.tendre' batus la generale.dáns leiy;
jCaftip , fie il n'en estoit qu'à unepor-
.uûe de Çarabine quand Mr le Maré
chal avança avec lès Corps de Ça va-
Jcrie qui a voient pû le suivre. Qn
peut dire que Mr de Marcilly a don-
,ué debons avis., fur leíqucls on a pas
de juûes rne£uies.,8c qi^ajnsi il a con-
.trihué àlagloire de cette Journée,
pai ses avis, par son bras, 8c par
•son sa«g , puis qu'il a esté dange
rsjSttserjpcnt bkflé , aptes avoir rent
vcr£é cinq Escadrons des Ennemis
avec cent cinquante Gardes du Roy.
Enfin il a lié faction avec intelli
gence , 6c "l'a foutemê avec valeur
à la ttAe de ion Détachement.
Vous devez estre satisfaiiie de rooy,
puis que je 'Vi^hì íevoye une belle
F f iiïj
«Kdarion , àjaqaclle j'ay JoUnitôiites
les circonstances reinarqt&bles
qui lont dans la plus grande, partie
de cellts qui ont esté envoyées. Ce
n'est pas encore tout ce que vous
souhaitez, &c je fuis persuadé que
vous attendez ce qui suit. .*:Cl
"ETAT DES OFFICIERS,
Gardes* Gendarmes, Chevauxlegers
& Grenadiers du Roy .
morts * blejse% & perdus le /y.
Septembre ifyì. fris de Lèu^e,
en chargeant /'' Arriere-garde
des Ennemis* ,
COMPAGNIE DE NO AILLES
Mr de Vignau , Lieutenant, blessé
au genouil.
Mr de S. Viance, Ljfutenant, blcsîe
d'une contusion dans Faine.
«Mr de Lanson , Exempt, bleíïê'de
?~lcàtwt coups.
Mr de Vacquevil , Exempt, morr.
MrdeVincé, Brigadier, blessé à
mort , & deux autres Brigadiers
blessez. •
Dix-neuf Gardes morts, Ssquaránr,
Jsuit blessez , dont il y en a dix à
mort-
COMPAGNIE DE DURAS:
^Mr de, Marcilly , Enseigne , biesté
' à la jambe, .
Mr de Chaseron , Enseigne, bleflé
legeremenrau cou-de-pied.
D'Avignon , Enseigne , bleflé à la
gorge t£ à répaule,^pieddemis,
.t * éc ion cheval tué. ...
MrleChév.de la Chaise, Exempt
& Aide-Major, mort de sa bles
sure.
Mr le Chev. de Clermont, Exempr,
fort bleflé.
De U Fiste , ïxempt ^ m^itj
De Pruioes, 'Exempt, mort,. ,{/(
Du Condras , Exempt , blef^M1 .
Tracy f Exempt , bleffé.
De Roquebrune, Brigadier, à mort.
Du Bout-du-bois, Brigadier,. ble-íîé.
^ Çharancy , Brig. une confusion,./.
Deícoray , Sous-Brig. legerement.
Mr de Clermont &c de Grillon ,
lcuxs djevaux tuezv .
Vingt Gardes morts, soixantç bles
sez & 4. perdus, Sc ií chevaux-
£omça.gnit de Luxtmhourg..^
Mr de Neuchelle , Lieuf. mort-j^
Mr de Vilaine, Enseigne, bseffé,
Mr de lambre , Exempt blefié.
Mr de Brtsál, Exempt, fort blessé.
jMr delaTomelle, Exempt, tué.
Mrde<5uery , Exempt , blessé.. $4
Mr de Parifbntaine, Exempt, bseffé
legerement. .. .
\
Mr de la Oppe', Brigadier, more.
Mi de Ronval, perdu.
Mrs Faillis, j
^ Sous - Brigadiers'»
blessez , dont deux
a mort.
Guigniar,
yernaux ,
Darmandry,
Vingt- neuf Gardes morts, soixante
n ;& trois Mefiez, dont il y en a sei?e •
à mort,- les autres legerement, $c
1 neuf perdus. 23.cheyaux.
Compagnie de Lorge-
Mr de la Trocric,. Lieutenant, mort.
Mr de Renon vilUc , Lieut. blefljé.
Mr de Monpipau , prison, ou mort.
Mr de Laval , Enseigne , bjeflé d'41-
,«e contusion à la jambe,
ly^jç de Laffurancé, Exempt 8ç Aie
Major, fort bleflé.
Mr áçBusca , Exempt, prisonnier.
- Mr de Broflé , Exempt, mort.
Mr de Manné , Exempt , blessé- de
deux coups.
Le Bouvier, Soùs-Érîgadiers, '
De Conniet, dont Ife Sethilt elí
Rouar. forcbleíïé.
Vingt-deux Gardes morts, soixante
& trois blessez , dotit il y en à seize
à mort >& le reste legerement! "
Un Trompette mort.
Mr Danger, Lieutenant generál,tué.
Mr de la Valletce , Maréchal de
de Camp , blessé.
Le Chevalier de la Valicre , Beaufrere
de Mr de Choiteul,à more
de ttoîs coups.
MrdeToiras, Brigadier, tué.
Mrde Choiscul, un cheval tué sous
luy , 5c foulé aux pieds des che
vaux.
Mr de Villevrar , Cap. des Gardes
de Mrde Luxembourg, blessé.
Mr de Cheneville,£nfeigne;bleffé.
MrdeGaudrah,
,r, Gendarmerie.
Mr áe Rqihelin , Enscigge' /ípqrt
de quatre coups.
Mr de la Berange, Maréchal des
Lpgis .legerement blefle. .',
Blandin St Rochemont, Brigadiers,
perdus. ; ì. •
La Chataigneraye, Brig. fortbleíïé,
Du Plessis , Brigadier , tue.
Fermanel &: d'Hautault , Sous-Bri
gadiers , fort bleffez.
Le Tellier. Porte Jìtendard f Uié.
m o rts. :
Saint Aubin. Despernaille^ ,
Catenville. Baillevel.
Ginrondelle. Montfabré.
Aber. Du Lâche. , fV
Boisconteau. Qninsaque.
Danpierre. LaMote.
La Bastine. La Baine.
MÍROJfcB
Cauíbnniefr Maisonnée^ y. sud sJ
Royan , Trompette. .rfotarn3
B LÉSIEZ Á MORT.
Chateneroyi Brigadier. ,, „ .jy*
Dardeville , Sous-Brigadier. fi «; ■
Du Plessis-Charité, Sous- Brigadkr-M.
Roncheray. Jotìvalíe. .;.,./» y*
Pefzefipire, Veaudarme.
Dexfort. Du Coudray.
Brofíardiere. Tredavîd,
Bea u vais , fils. Boífrondct.
DuBosel. Perrost de Salis. £
Vilíambert. PleíTvs -Constant:
Canet. Ponier. , . . -
Du Bled. Mareniat.
Poroeret. Cronniere.
Chaffenay. Doucet.
Bacerolle. . Du Forches.
Bois-Vignaux. Theuville.
Condonniers. Bbngars.
La Jolloye. LicfeydeVignaux.
garant: g*
La Grange. Rinabardiere.
Franchon. Frodill.es*
Chevattx-Legers. „
M. de la Mothe , Sous- Lieutenant,
bleíîé legerement.
M . Varin , Maréchal des Logis-,
&C Ayde Major, mort. t
Mrs*Dargent, Fontenay , de Neufville
&c Montrival , Mareschaux
des Logis , blessez , lc premier à r
mort.
Quatre Brigadiers blessez , dont
trois dangereusement. , 7
Trois Sous-Brigadiers , blessez.
Premiere Brigade.
M« de Sainte Marie- Long- pré >
bleílez.
La Vaguerie. De Co»ir.:
De Marmont. De Chaííeville..
De la Foffe Montreuil .
De la Coche. Saint Victor.
De Ligncryoicj lifcfriïMWShsCt
Seconde Brigade.
De Hautefeuille. De Fourrier., 7
"*s ." Tnifiéme Brigade, Vr<* f
De Donteuil , Fils de M- de Brcrnoy,
Sous- Brigadier. .;,>.)J .,Q\
De Saineville. De Vasajjg. 3q
tfc Surdon. * De S. Victors
Des Landes. .-
Quatrième Brigade. , , fA
De Jechars. DuBellestrc.
De Kigncgot.. ú\ . tl 9Q
Le Comte de la Mothe , Com
mandant , d'un coup de pistolet
à la cuisse. , ,.
PREMIERE BRIGADE.
Bfejsez.
De Chaînant , Brigadier , à mort.
Du H-imel , à mort.
Du Tijlet , le bras caste.
De Citt'àucre , sort bleflé.
Seconde Brigade.
De Many, Sous- Brigadier, à mort.
De Nexion, Sous-Bngadier , une
contusion. . *
De Lefíart , Sous- Aide-Major,
.De Laumenv.
De Penoúillác. ' H,x 7
Basthonville , à morr.
Du Mafrant , fort blessé.
'troisieme Brigade.
De la Pomerel .Brigadier , à more.
De Vaugicourt y Sous-Brigadier,
•»*' ,fort bleflé.
De Fulmont.
Dacquet , à morr.
De Genners, la main câílie.. X
Le Comte de Louvigny.
De la Thuillerie , fort blessé.
De la Hbussaye.
De Rouvray , l'épaule cassée.
Septemb. 1691. G g
ia main.
£ht&tnéme Brigade. 5
Du Marais ,, brigadier, uç cçup de
íabte. .jH'tii •
De Logné, Brigadier, a mort.
Des Loges, à mort.
De Lauleorj , à mort. ^ ttì
Boileau , le bras cassé, & à morr, '
Dalancourt, le bras cassés ,
De la Bellautiere. .. w
Bailsy, de plusieurs coups. ,,
Foniain &c Damiette, de contusions.
Cinquante-sept chevaux morts.
Grenadiers a cheval.
Mi de Riotor , Capitaine- Lieute
nant , à mort.
Mr de Mondesir,Lieurenant,blesst.
2Vîr le Chevalier de Riotor, SousGALANT.
35T
LieutenairfÇ&asTïlessé.
yn Sergent, 8c vingt ou vingt (
. Grenadiers tuez ou blesse?.
Regimtnt de Mcrinville,
Castillì, Major , mort.
Le Marquis de B rene, Capitaine,
mort.
Fongrefolles , Capitaine , mort.
Dix Lieutenans 8c Cornettes,moro
ou blessez.
Cinquante Cavaliers mons , ou
blessez. *
Dragons da Roy.
Le Chevalier* de Jans ,, Capitaine.
Cinquante Dragons morts ou Liesfez.
Dragons de Tese.
Plainedal -, Capitaine , mort.
Deux Lieutenan s blessez.
Soixante Dragons morts , ou bles
sez.
9 g >j
p6 imxxiME
: i II est impossible qucparmyHarsi
grand nombre de noms.,îíiln&iï'cn
trcuvc beaucoup de défigurez pour
avoir esté mal écrits; qu'il n'y en
ait d'oubliez , &: d'autres marquez
dans des Corps qui doivent estrs
dans d'autres. 11 n'y a rien de furprenant
à cela , &c la mesme chose
arrive toujours en de pareilles oc
casions. Aprés un si grand nombre
de morts &deblelTez dans un com
bat oû nous avons gagné une plei-
• ne Victoire , vous ne doutez pas
que la perte des Ennemis ne .lait,
beaucoup plus considerable que? la
ncstre. On apprend de jour en jour
quelle est plus grande que l'on
n'avoit cru d'abord , èc l'on a íceu
que nos Morts 8c nos B lestez ayant
esté retirez du Champ de bataille,
il y est resté plus de quinze. xens
raoxttte ljicitombre des Bleíïez est
nencorc plusgrand ,• & j'ay lû dans
u-nc Lewre cVune personne digne
ide f«y , que cinq cens Cavaliers ,
;oaus blessez par derriere j s'estoient
«etirez à Ath , & que le Gouver
neur; les avoit traitez de lâches qui
jsùestoient laissez blesser cn fuyant.
D'autres Lettres assurent" que toute
Ja Cavalerie ennemie , chagrine
au dernier point d'avoir este batuë,
Sù n'osant se montrer , s'est entiè
rement debandée , 8c que la pluspart
des AHemans font retournez
en leur Pays. II n'y a que trois à
quatre cens Prisonniers , parce que
:¥on n'a point fait de quartier. On
a > pris quarante Etendards , 8C
quelques paires de Timbales. Plus
on lit de. Relations de cette action,
plus on d'écouvre qu'elle est glo
3$ MERCURE
rieuse aux Armes du Roy
Maison de Sa Majesté. Le terrain
qui estoit encre ies Ennemis, tScnos
Troupes estoii tout rçmply de
foflez , qu'il falloit palier , ôc dans
kíquels il tomboit quelques da*-
valiers en les sáfetant. Ce danger
efíuyè r ils se trouvoient exposee
à un aurre , puis qu'Us estoient d'a
bord portez dans ses premiers rangs
des Ennemis , qui ne leur laifíoient
pas le temps de se reconnoiftre*
La pluspart avoient déja essuyé des
décharges des Ennemis qu'ils faiíoienc
de la longueur du Fossé,
Sc l'on peut dire qu'ils tiroiènr nos
Troupes au blanc. A mesure qu'on
désailoic Ictus Escadrons , il en
renaiíïoir d'autres. Gn a esté fort
long-temps mefié fans qu'aucun de
nos Escadrons ait reculé d'un seul
G*LANT. ' m
pas , & ceíuy qui a dit que la Maij^
n dp Roy nne Citadelle
háwte , a parié fort juste.
. Quand les Ennemis voulurent
^ttitter leur Camp pour marcher
vers Leuze , parce que nous estions
tjop proche d'eux , & qu'ils apprehendoient
le Combat , qu'ils nous
aceusoient de fuir , ils laiíîerent
plufìçursTambours dans leur Camp
pour battre la Çenerale long-temps
aprés leur départ ; mais M. de Luxeraboutg
beaucoup plus habile que
tous leurs Géneraux , n'a pas laiíïc
de les couper. Ils se consolerent
d'abord par l'avanrage du terrain ,
par celuyd'estre ttois contre un,
fans compter cinq Bataillons d'In
fanterie. Ces avantages les enga- .
gerent d'abord à faire bonne con
tenance , ils fe mirent dans le meil-
kur ordre qu'ils purtrit , & 'potîr
servir à la sois de toutes* lents
atmés , leurs Cavaliers dáns plu
sieurs de leurs rangs , avoient al
ternativement le íabrc & lc pisto
let à la main.
î Le io. Mr 1* Abbé Riqueti dittrne
Messe solemnelle dans lc Camp ,
pour remercier Dieu de i'avantage
remporté fur les ennemis de son
. Eglise. Tous les Officiers generaux
- y assistèrent 5 avec autant de pieté
qu'ils avoient fait paroître de va
leur le jour précedent.
On vient d'apprendre que le Prin
ce de Nassau qui commandoir l'Arrière-
garde des Ennemis , a esté tué
au premier choc. -
« ' Le Combat s'appellera le Combat
de la Caîtoire , quoy qu'il se soit
donne dans U Plaine de Leuze: H
a esté
GALANT, tfi
a esté ainsi decidé , parce qu'on a
pouffé les Enncmmis jusques au ruis
seau de la Cattoire.
Pendant qu'on battoir les Enne
mis ea Flandre , Mr de Bousiers les
poussoir d'un autre costé , ôc a
mené battant le General Flemming
depuis Rochefòrt jusques à Marche
en Famine. II a toujours fuy ,bien
qu'il fust superieur en Troupes. La
perte des Ennemis a esté d'environ
trois cens hommes : mais cette
Lettre est déja chargée de tant de
détails, que je me trouve obligé de
remettre celuy-cy à un autre temps.
< L'Armée de Piedmont est cam
pée àuprés de Salnces , qu elle cou
vre. Les vivres abondent dans son
Camp, pendant que l'Armée du
Duc de Savoye man que de toutes
choses dans son propre Piys , où
Septembre i6$i. H h
tfì MERCURE
elle s'est trouvée deux ou trois fois
fans pain. L'arraée de M. de Caunat
est campée de manieré , que
les Ennemis n'osent i 'attaquer,
voyant le risque qu'ils courent d etre
batus. Ils avoient envoyé un
Corps considerable dans la Vallée
d'Aoust qui s'y estoit retranché i
mais M- de Monbriflbn ayant este
avec cent hommes feulement pour
le débusquer , fit battre ses Tam
bours à la Françoise , à la Dra
gonne , Sc a la Suisse ; ce qui
épouvanta tellement les Ennemis,
que croyant avoir une Armée à
combattre , ils abandonnerent leurs
retranchemens. On y entra , on
prit tout ce qui s'y trouva, & l'on
y mit le feu. : ce qui a rompu £0>n:
cette Campagne le dessein que les
Ennemis avoient formé de çe côtélà.
GALANT. &
On assure qu'il y a du desordre
en Espagne ; il s'est rhefrae répandu
un bruit que le Roy est mort, mais
ce bruit a couru si souvent^, qu'on
ne doit pas facilement y ajouter
foy. Cependant on écrit que le
Duc de Medina Sidonia est allé
vers Madrid avec l' Armée de Ca
talogne. Si cette nouvelle se trouve
veritable, il faut que les remuemens
íoient considerables à Ma
drid. \
La Flote Angloise essuya urie
grande tempeste lej6.de ce moisj
quatre de les plus gros Vaisseaux
ont fait naufrage : sçavoir un de
quatre-vingt-dix picces de Canon,
sc les trois autres depuis soixante
jusqu'à quatre-vingt. II ne s'est sau
vé que dix- huit personnes de ces
quatre Vaisseaux * & les Anglois
Hh ij
3*4 MERCURE
ont perdu plus de quinze cens Ma
telots. On n'a point de nouvel
les de seize autres Vaisseaux, &c
tout le reste de la Flote est fore
délabré, ayant beaucoup souffert.
II y a des nouvelles qui portent
que les Turcs ont pris un grand
Convoy aux Imperiaux.
Monsieur le Duc de Chartres est
de retour de fa premiere Campa
gne , qu'il a finie glorieusement.
Ce Prince a visité quelques Places
frontieres , & il a receu par tout les
honneurs dû"s à fa naissance- On
luy a donné à Dunxerque le diver
tissement d'un combat naval.
MrdeGuiscarest de retour à Dî
nant avec un fort grand Butin , d'u
ne course qu'il a faite , pour soumet»
tre aux Contributions des lieux qui
GALANT. &
n'en avoient point encore payé,
& dont il a arnené quantité d'Ota
ges. II pafla la Sambre &c Ja Meuse
pour cette expedition, en presence
de dix mille des Alliez. II a brûlé
vingt -six Villages , jusques à trois
lieuës de Mastríc &c de Liege,
n'ayant avec Iuy que cinq cens
Dragons. II a envoyé dire aux
Habitans des environs de Namur ,
qu'il les traiteroit de mesme , s'ils
differoient à contribuer. Je fuis ,
Madame , vostre , &c.
A Par/s ce 50. SefUtnfot 169 u
AVIS.
On donnera íe if. Octobre f&
V I. Entretien en forme de Pafqui-
Hh iij
?&s MERCURE
nades fur ks Affaires du Temps,
On ne le trouvera pas tout-à-fait
selon le plan qu'on a marqué dans
la fin du V. parée qu'il y auroit des
actions de la vie du Prince d'Oran
ge transposées , & qu'on a jugé à
propos de la donner de fuite. On
y verra l'histoire des premieres an
nées de ce Prince , dont aucun Ecri
vain n'a parlé > cc qui joint à .quan
tité de faits constansqui regardent
ce remps-là , rendra cet Entretien
aussi curieux qu'agreable»
Page 3^7, ligne -r4. m Heu cTAntonin
, lisez, d'Antovin.
On trouvera beaucoup de fautes
dans la Relation du Combat , cau
ses par les Copistes.
TA B L E
lT} Relude , contenant tout ce qui s'efí
JL ptjsc à l' Academie Françoiseje
jour de la Veste de saint Louis
Lettre , contenant des nouvelles de
phsteurs endroits des Indes, xj
Jeux Floraux. s2
idi/le. 62
Feste celebrée à Bordeaux. dy
Discours prononcé à. Brest. 7/
Détail de la Campagne de M. le
Comte d'Estrées. 2+
Lettre d'un Milord , Conseiller d' EUt
en Angleterre > à M. le Comte
de Porteland* 11»
Lettre d'un Bourguemestre de Nurem
berg , à un député de la Diette de
RAtisbonne. tu
TABLE.
Ceremonie & réjoùijsances faites
Saint Germain en Laye le jour de
la naissance du Roy. 134
Table du Soleil & de L'Aurore.
Charges. rjS
Operation faite k M. le Duc de Vcndofme.
zjS
Morts. JS9
Convents visttez, par le Roy d*An
gleterre, lél
Beau discours de la vraye ejr de la
fausse humilité. iâj
Introduction à la Fortification*, 101
M- Arlot est nommé premier Medecin
de Madame. 206
, Le Printemps , Dialogue, 20S
Éloge de Saint Louis prononcé à Bor
deaux. XX'/
Autre article de Morts. 1.96
Charges dr Pensons données par le
£oy~ 14s
TABLE.
r
Histoire. 248
Extrait des Registres de £Academie
Royale des Sciences. ,> 271
Nouvelle Carte de Hongrie. 2js
Levée du Siege de Pratz, àeMollo. 249
Nouvelles d'Allemagne. 2S1
Lettres touchant le Combat donné
entre les Imperiaux &Us Tures, 291
Article des Énigmes. 360
Grand détail du Combat donné en
Flandre , avec la .Liste generale
des Morts & des Blestiz,. 312
Nouvelles de l' Armée commandée
far Mr de Bousiers. j6r
Nouvelles de Piedmont, 3É1
Nouvelles d'Espagne. 36$
Nouvelles de la Flote Angíoi/è. 363
Retour de Mr le Duc de Chartres. 3 64
Coursefaite far M. de Gui/car, dans ,
le Pays ennemy* 364
Avis* jgj
Avis pourplacer les Figures. |
L'Air qui commence par tJaime
tendrement Lisette , doit regar
der îa page 6l.
La Medaille doit regarder la pa
ge IS5-
L'Air qui commence par , Lt
Fejfe d'une riche Cour , doit regar
der la page 3U.
í
Extrdit du Privilege du Rty.
PAR Grâce & Privilège du Roy, donné *
Chavillc, leit. Iuillet 16S3. Signé, Par
le Roy en son Conseil , Iunquiek.es, II est
permis au Sieur Danneau, Ecuyer, Sieur
Devixc, de continuer de faire imprimer.vendre
& debiter le Livre intitulé, MHRCURE
GALANT, contenant plusieurs Relations,
Histoires , te generalement tout ce qui dé
pend dudit Livres par tel Imprime ur qu'il
voudra choisir , Et dèfenses font faites à tous
Imprimeurs & Libraires , 6c tous autres de
faire imprimer, vendre & debiter ledit Livre,
ny graver aucunes Planches servant à l'orne.
ment d'iccluy, ny me sine de le donner à
lire, pendant le temps Sc espace de dix année?
entières , le tout à peine de six mille livre,
/á'amtnde contre les Contreveuans, ainsi qaç
plus au long il est porté efdites Lettres.
Registré fur le Livre de la Communauté,
aux charges & conditions portées, lc 14.
Septembre 1 6S{ . Signe Ahgox, Syndic.
Ledit Sieur Divìze* a cedé son droit da
present Privilège à Michel Guerout , Li
braire , pour en joùr suivant l'accord fait
■Btre-cM.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le