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1691, 05 (Lyon)
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Texte
me.
ExDonu
RP Claud. Frane. Mencurior
Loc. Jestl


MERCURE
VILLA
GALANT
DEDIE A MONSEIGNEUR
807156
LE DAUPHIN
Colleg. Lugd. A. Primil.
MAY
1691.
foc. Jeps cat.idc.
MILLE
IBLIOT
A LYON , LYON
Chez THOMAS AMAUE/RC
ruë Merciere au Mercure Galant.
M.DC. XCI..
Avec Privilege du RoyAvis
pourplacer les Figures,
'Air qui commence par,Ak
quemonfort est rigoureux,doit
regarder la page 45 .
Le Plan des attaques de Mons
doit regarder la page 108 .
L'Air qui commence par, Le
doux Printempsest enfin de retour .
c. doit regarder la page 239..
MERCURE
GALANT
FREQUE DELA
LYON
MAY 1691 . */
E
UOY que la flaterie
ait rendu les
loüanges fort communes
, & qu'il foit
vray que beaucoup de perſonnes
meritent d'en recevoir , il
eſt certain qu'il n'y a rien de
plus rare que d'avoir toutes les
qualitez qui doivent les attirer
, & que ceux qui en font
May 1691 . A
2 MERCURE
pas
dignes , ne le ſont ſouvent que
par des endroits particuliers
qui ne cachent pas le foible
qu'ils ont en beaucoup de choſes
La grande pieté ne ſe trouve
pas toujours avec la valeur .
La juſtice n'accompagne
* toujours la puiſſance , & la
Religion n'eſt pas toujours
unie à Politique. Je ne vous
dis point que le Roy merite
d'eſtre loüé par tous les endroits
qui regardent le grand
homme & l'honneſte homme
, tout le prouve juſques à
l'envie que ſes Ennemis luy
portent. Nous avons vu lec
mois dernier toutes les Muſes
occupées à luy applaudir
furla conqueſte de Mons , &
nous voyons ce mois - cy des
Deputez de Ierufalem traverfer
les mers & de grands Pays
GALANT . 3
pour venir luy rendre graces
de ceque ſa pieté a fait en
faveur de cette ſainte Cité.
Sa Majesté leur donna audien.
ce le 25. d'Avril dernier , & le
Pere Seraphin Belengier,Preſident
du Saint Sepulcre ,& Envoyé
de la Terre Sainte y fut
conduit par Mr le Marquis de
Torcy.Le Pere Rocheblanche,
Docteur de Paris , & Gardien
du Grand Convent des Cordeliers
de la même Ville , qui
le preſenta , dit auRoy que les
Religieux de la Terre Sainte
avoient député ce Pere , pour
rendre de leur part à Sa Majeſté
les tres humbles actions de
graces qui estoient deuës au
grand bien qu'elle leur avoit
procuré , en leur faiſant reſtituer
les Saints Lieux , & qu'il
avoit creu qu'il eſtoit de fon
A 2
4
MERCVRE
devoir en qualité de Gardien
de ſon Grand Convent de Paris
, dele preſenter à Sa Majeſté
, & de l'aſſurer en meſime
temps de la continuation de
leurs prieres pour la conſervation
de ſa Perſonne ſacrée .
Le Roy l'en ayant remercié
fort obligeamment , écouta
le Pere Belengier qui luy parla
en ces termes .
S
IRE ,
Cenefont passeulement les Reli.
gieux de Saint François qui font
obligez de remercier Vostre Majesté
desſoins qu'Elle a bien voulu prendre
de faire restituer à l'Eglise Ca.
tholique les facrez Trefors que les
Schismatiques luy avoient enlevez .
C'est l'Eglise Univerſelle qui doit
marquerfareconnoissance à vostre
1
GALANT.
5
Majesté ,puis qu'elle a trouvéfon
avantage dans cetteinfignefaveur,
qui est deuë à l'autorité de vostre
Auguste Nom , respecté de tout
L'Orient , Toutes vos actions , Sire ,
avoient fait admirer vostre re
ligion , voſtre valeur , & vostre
justice , mais il semble qu'il auroit
manqué quelque chose à la
grandeur de Voštre Majesté ,si
après avoir remply le monde de
Ja reputation ,
Heretiques defon Royaume , Elle
n'avoit abbatules Schifmatiques de
l'Orient. C'est la gloire que vostre
Maiestévient d'acquerir , en ban .
niſſant de la Terre- Sainte , &de
tous les Saints Lieux que J. C. a
consacrezparses Miracles , &par
Son Sang , ceux qui oſoient divi-
JerSaRobefans couture , je veux
dire , l'Eglise furle Calvaire mê
me , où les Soldats impies avoient
converty les
A 3
6 MERCVRE
respecté autrefois cette mesme Robe .
L'union que cettefacréeRobevepre-
Sente, & que vostre Majestévient
de conſerver , merite que toute l'Egliſe
luy offre,non pas les Tableaux
deſes victoires éclattates d'ailleurs,
mais les Images des Saints Lieux
qu'Elle a delivrezde l'esclavage ,
où ils gemiſſoient depuis tant d'années
ſous la tiranie du Schisme des
Grecs. Agréezdonc, Sire , les marques
& les monumens du triomphe
devôtre pieté, & daignezrecevoir
les prefens de ferufalem des mains
d'un Religieux quela Terre-Sainte
adéputé à Voštre Majesté. Il est
dépourveu , à la vérité,des talens
qu'il faudroit en cette occafion ,
mais puis quele Fils de Dieu a bien
voulu fairefervir la voix des Enfans
àſon triomphedans cette mefme
Ville , ce pauvre Religieux ofe
efperer que Vostre Majesté aura la
GALANT. 7
bontéde recevoirfavorablement la
respectueuse offrande que Ierufalem
luypreſente parson entremise,pour
honorer fon triomphe. C'est cette
Ierufalem que vostre Majesté
vient de delivrer heureusement ,
&c'est dans cette même Ville que
les Religieux Latins &les Catholiquesde
toutes les Nations du
monde demanderont sans cesse à
Dieu dans leursfacrifices&dans
leurs oraiſons les graces qui font
neceffaires à Votre Majesté pour
parvenir à la celeste lerufalem ,
qui devant estre la recompense
éternelle des Chreftiens , doit l'estre
principalement du Fils Aîné de
l'Eglise , qui la fait triompherfur
Laterre.
Le Pere Belengier ayanr
finy , le Roy le remercia ,&
luy dit qu'il estoit bien-aiſe que
4
A4
8 MERCVRE
les Religieux de Saint François
fuſſent en poffeffion des Lieux Saints
qu'ils avoient souhaitez depuisfi
longtems avec tant d'empreſſment..
Il ajoûta qu'il leur continueroit fa
protectionen downant fes ordres à
Son Ambassadeur afin qu'il fiſt en
Sorte qu'ils nefuſſent pas inquietez
dans cette poffeſſion , & qu'encore
que les choses ne fuſſent pas aussi
Seurs dans l'Orient qu'elles l'eſtount
en France , il eſperoit qu'elles le
Seroientà l'avenir beaucoup davan.
tagepar les foins qu'il prendroit d
les maintenir.
Ie ne doute point, Madame
que la juſteſſe de cette réponſe
ne vous touche autant qu'-
ellea fait tous ceux qui l'ont
entenduë . Le Pere Relengier
preſenta enfuireauRoy la figure
en relief de l'Eglise du
Saint Sepulchre . C'eſtoit un
GALANT..
و
travail de bois d'Olivier avec
des ornemens de nacre de Perles
. On y diftingue juſqu'aux
moindreschoſes qui ſe peuvent
voir dans cette Eglife . Ce preſent
fut accompagné d'une
grande Croixtres bien travail.
lée , & ornée auſſi de nacre de
Perles. Il preſenta enſuite àSa
Majesté un petit Diſcours qu'il
afait au ſujet de ſa députation
en France,& la fuppliade vouloir
bien ſe le faire lire , afin
qu'Elle viſt au long de quelle
maniere les choſes s'eſtoient
pallées , & les obſtacles qu'il
avoit fallu vaincre pour-don--
ner à cette affaire le ſuccés qu'
elle avoit eu. Le Roy receut
cetOuvrage avecſa bonté accoutumée.
Ce Pere y fait voir
d'abord que le Pays d'oùila eſté
envoyé, avoit toujours eſte un
As
MERCVRE
23
gage de l'amour que Dieu avoit
porté aux anciens Patriars
ches,&une recompenſe deleur
foy &de leur zele. Qu Abraham
n'eut pas plûtoſt pris la
reſolution d'immoler ſon Fils
pour obeir à l'ordre du Ciel
que Dieuluy promit qu'il l'établiroit,
luy& fes Defcendans
dans la Paleſtines que cette
promeſſe avoit eſté reiterée
àIſac ſon Fils , & à Iacob fon
Petit- fils ,& que les Juifs avoient
eſté en poffeffion de
cette Terre , tant qu'ils s'eſtoient
attachez à ſuivre les
traces de ces ſaints Patriarches
, mais qu'auſſi toſt qu'ils
s'en eſtoient éloignez , Dieu
les avoit chaſſez de cette facrée
Contrée , comme eſtant
indignes d'y habiter.,, & les
avoit releguez dans les terres
GALANT.
pour y
de leurs ennemis
,
éprouvertout ce que la captivité
a de plus rude. Que les
Chreſtiensavoient fuccedé au
bonheur qu'avoient eu les
Iuifs de participer à la promeſſe
que Dieu avoit faite à Abraham;
que depuisque I. C. en
répandat ſonSang precieux cut
jetté les fondemens du Chriftianiſme
dans la Ville de lerufalem
,il y avoiteu des Eveſques
& des Fidelles qui l'avoient
choiſie pour leur refidence; &
que l'Empereur Conſtantin
ayant embraffé la Religion
Chreſtienne , s'eſtoit fait un
honneur d'orner la ſainte Cité ,,
&de ſeconder les pieux def.
ſeins de Sainte Helene ſa Mere,
regardant ce lieu venerable
comme la portion la plus precieuſe
de ſes Eſtars , & com
A6
12 MER CVRE
mele fon dement le plus ſolide
de ſon Empire , puis qu'il avoit
eſté étably ſur le Tiône , &
s'eſtoit rendu le maiſtre de ſes
Ennemis par la ſeule Croix du
Sauveur. Que la pieté de ce
Prince n'ayant pas eſté imitée
de quelques uns de ſes Succefſeurs
, Deu leur avoit oſté
la fucceffion de la Terre-
Sainte , & les avoit avertis
de la ruine totale de leur
Empire par cette premiere,
marque de ſa vangeance . Que
les François s'eſtantmiseneſtat
de recouvrer ce qu'avoient
perdu, les Empereurs Grecs ,
avoient delivré Jerufalem de
l'eſclavage aprés une infinité
de dangers & que les Religieux
de S. François ayant eu l'avantage
d'eſtre choiſis pour estre
GALANT.
13:
les Gardiens des Saints Lieux,
y avoient chanté jour& nuit
les loüanges du Seigneur jufqu'en
mil fix cens quarante
que les Grecs Schifmatiques
curent affez de eredit à laCour
du Grand Seigneur pour s'en
emparer : que non ſeulement
ils y avoient donné le cours
libre àleurs fuperftitions & à
leurs cupiditez les plus cri
minelles , mais qu'ils y avoient .
ébloüyle Peuple par un faux
miracle , en ſuppoſant faufſement
toutes les années , qu'ils
yrecevoient le feu du Ciel le
Samedy Saint, afin d'entretenir
par cette fourberie leurs Se-
Aareurs dansleSchifme& dans
l'erreur , pendant que d'une
autre part ils avoient la rage de
ſe ſervir de ce Temple ſacré,
poury fulminerdes anathêmes
14
MERCVRE
& des imprécations contre
tous les Princes & les Peuples
Catholiques. Le Roy ſeul
ajoûte ce Pere dans le Diſcours
dont je vous faits un Extrait ,
touché de compaſſion pour le
malheur de Jerufalem , refolut
de l'en tirer , & fa picté ſecondée
de cette ſageſſe qui regne
dans toutes ſes actions ,prit des
meſures pour venir à bout
d'un deſſein ſi glorieux à un
Monarque Chreftien , & fi
convenable au Fils Aîné de
l'Eglife. Cependant les Grecs
foutenus des diverſes Nations
qui habitent les Saints Lieux ,
&qui quoy que diviſées dans
les Kits & dansles Coutumes ,.
ne laiſſent pas de s'unir à eux
toutes les fois qu'il s'agit de
ſe declarer contre l'Eglife ,
employerent pour ſe conferGALANT...
ver dans unepoſſeſſion ſi injuſte,
les violences & les moyens
criminels dont ils s'eſtoient
ſervis pour l'ufurper. Ceux
qui défendoient leurs intereſts
à la Porte , épuiſerent les
Particuliers par les groſſes ſom.
mes qu'ils leverent de toutes
parts , afin de gagner la Cour
du Grand Seigneur & de corrompre
les principaux Miniſtres
qui la compofent , &
voyant cette tentative fans
aucun ſuccés , ils eurent recours
aux impoſtures, juſques
à vouloir perfuader aux Mahometans
qu'il eſtoit de leur
intereſt de s'emparerdes Saints
Lieux , & d'enlever pour toujours
aux Chreftiens ce précieux
Sanctuaire aimant
mieuxle voir au pouvoir des
Turcs pour le profaner , qu'en
16 MERCVRE
,.un
celuy des Catholiques pourluy
rendrela veneration qui luy eſt
deuë , Il y avoit d'ailleurs de
grandes difficultez de la part
desTurcs , puis qu'il s'agiſſoit
d'obliger le Grand Seigneur
à caffer des Arreſts donnez à .
la Porte , & qu'il falloit qu'il
ôtaſt à ſes propres Sujets
bien dont ils joüiffoient par
la conceffion de fon Predecef
ſeur, cequi estoit affez difficile
dans une Couroule Prince eſt
fier naturellement , & fort jaloux
des Loix de ſon Etat. Le
Miniſtre de la Republique de
Hollande ſe tranſporta toutexprés
àAndrinople , où il fit
courir de fauſſes nouvelles.
pour faire valoir ſa Nation , &
décrier les François ; & afin de:
venir à bout de maintenir les ,
Schifmatiques dans leur ufar--
GALAN T.
17.
pation,il ſelia avec les Envoyez
de Valaquie ,de Moldavie,
de Mofcovie , & de pluſieurs
autres Princes de l'Europe,qui
s'affembloient tous les jours ſecretement
dans ſamaiſon , où
preſidoit le Patriarche Grec de
Ierufalem.Ils remuerent toutes
fortes de machines pour faire
entendre à la Porte le tort qu'-
elle ſe feroit fi elle accordoit la
Terre Sainte au Roy Tres-
Chreftien, ſans en retirer aucun
fruit, puis qu'elle ſe privoit
parlà d'un moyen de faire une
paix avantageuſe avec l'Empereur
, qui ne feroit point
difficulté de ceder quelques
Places en Hongrie , ſi on le
mettoit en poff ffion des Saints
Lieux. Il y avoit meſme des
Agens ſecrets de pluſieurs
Princes Catholiques qui ſe ſer
18 MERC VRE
voient de toute l'autorité de
leurs Maiſtres , quoy qu'apparemment
contre leur intention
pour empefcher que le Saint
Sepulchre du Sauveur ne fuft
retiré des mains des Schifma -
tiques ; mais enfin la voix de
Mrde Chaſteauneuf , Ambaf
fadeur de France foutenuë par
la grandeur de l'auguſte nom
du Roy,& par cette reputation
d'équité toujours infeparable
deſes deſſeins , détruifit tous,
les obſtacles qui s'eſtoient formez
pour empêcher le ſuccés
de celuy- cy. Aprés un long
examen , on vit clairement la
fauſſeté des Titres des Grecs .
Il y eut Arreſtautentique de la
Cour du Grand Seigneur , par
lequel il fut ordonné que les
Saints Lieux ſeroient reſtituez.
aux Religieux de Saint FranGALANT.
19
çois. La Porte donna ordre en
même temps au Capigi Alti
Palmak de les aller mettre en
poffeffion. Ils arriverent à
Yaffa le 22. de luin 1690. &
quoy que le Bacha de lerufalem
fuſt déja party pour aller joindre
à Damas la Caravane qu'il
devoit conduire à la Meque &
qu'il fuſt arrivé à Rama, à ſept
lieuës de lerufalem , il voulut
bien revenir ſur ſes pas
pour fatisfaire fans aucun retardement
aux ordres de Sa
Hauteſſe qui luy eſtoient.
adreſſez , & qui portoient de
mettre ces Religieux en pofſeſſion
de Bethleem , du Calvaire,
de la Pierre de l'Orction,
&du Saint Sepulchre. Dansce
deſſein ce Bacha partit de
Rama avec cent hommes à
cheval,qui eſt ſa ſuite ordinaire
,
20 MERCVRE
& ce fut avec cette eſcorte que
le Pere Belengier , & les autres
Religieux du meſme Ordre ,
entrerent dans Ierufalem . On
fit pluſieurs décharges de Canon
à l'entrée du Bacha . Les .
Principaux dela Ville allerent
au devant de luy , & toutes
les Femmes Catholiques s'avancerentjuſques
aux murailles.
Le 28 ils furent mis en
poſſeſſion du St Sepulchre , du
Calvaire , & de la Pierre de
l'Onction ; & le lendemain ,
le Bacha alla à Bethleem qui
eſt à deux lieues de lerufalem
, & leur remit la Grotte de
la Naiſſanceavecla grande Egliſe
& un lardın , aprés quoy
il partit pour aller joindre la
Caravane à Damas . Sur la fin
de cetteRelation , l'Auteur remarque
une choſe qu'on ne
GALANT. 21
S
,
5.
S
," ſçauroit affez admirer. Il dit
qu'il a fallu autrefois de puiffantes
Armées pour conquerir
Ierufalem ,& que le Roy n'aeu
1 beſoin que de ſa ſageſſe & de la
grandeur de ſon nom pour en
chaffer des Ufurpateurs,& pour
y rétablir les Catholiques .
Qu'ila eſté autrefois neceſſaire
que tout ce qu'il y avoit de
Princes dans l'Europe ſe joig.
niſſent aux François pour entreprendre
la conqueſte de la
Terre- Sainte ,& que ſouvent
leurs projets n'eſtoient pas
ſuivis d'une heureuſe exccution
,mais que S. M. avoit obtenu
enun moment parle reſpect
☐ qu'elle ainſpiré partoute la ter
re pour ſa Perſonne ſacrée , ce
qui avoit couté à ces grāds Heros
tant de ſang&tant de com
bats,quoi qu'ils n'cuſſent qu'un
22 MERCVRE
Ennemy à combattre , & que
le Roy cuſt à vaincre tout ce
qu'il y a preſque de Peuples
&de Puiſſances en Orient &
en Occident. Que c'eſtoit ce
qui avoit faitdire pluſieurs fois
à Mr de Chaſteauneuf , qui
agiſſoit à la Porte en qualité
d'Ambaſſadeur
que la poli- ,
tique la plus fine n'auroit pas
eſté capable de ſurmonter les
difficultez qui s'eſtoient offertes
, ſi le nom du Roy n'euſt
été auſſi redouté &auſſi reſpecté
qu'il eſt dans tout le monde , &
que ſans cela on n'auroit pû
réuſſir dans une affaire où les
hommes & l'enfer eſtoient de
concert pour empêcher cette
reſtitution ,
Aprés que le Pere Belengier
eut eu audiance de Sa Majeſté
, il fut conduit à celle de
3
GALANT. 23
Monſeigneurle Dauphin , auquel
il preſenta une grande
Figure du Saint Sepulchre ,
avec une grande Croix , & eut
l'honneur de luy parler en ces
termes .
M
ONSEIGNEUR,
Les Chrestiens de l'Eglise La.
rine eftant entrezpar la puissante
protection de LOVISLE
GRAND , dans la poffſſion des
Saints Lieux,que les Schifmatiques
leur avoient enlevez depuis tant
d'années ce neseroit pas en témoi
gner une reconnoissance entiere à
Sa Majesté, si elle ne s'étendoit à
vostre Royale Personne. Agréez ,
Monseigneur , que dans ces justes
Sentimensjevienne vous presenter
les hommages de la Terre-Sainteque
leplusgrand desRois vient de tirer
24
MERCVRE
desferspar lafeule autorité de fon
nom.Vous ſuivez , Monseigneur, le
grand Monarque dont vous tenez
la naiſſance , puis qu'on vous avû
poursuivre avec tant degloire les
Ennemis de la France& de la Religion.
L'Allemagne a déja reſſenty
l'effort de vostre bras victorieux .
Elle a vû tomber ses plus fermes
Remparts dans votre premiere
Campagne, & l'on vous vit autres
fois arrêter toutes les forces de
l'Empire avec des Troupes autant
inferieures en nombre , qu'elles font
Superieures en valeur ſous vostre
commandement . Heureux Pere ,
gut trouve en vous, Monseigneur un
(idigne Fils! Quelle conſolation pour
noſtre grand Monarque de vous voir
marcher ſur les gloricuſes traces qui
vous conduisent à l'immortalite !
Faſſe le Ciel que vous voyiez un
jour les trois auguſtes Princes que
VOUS
GALANT.
25
vous avez donnezà la France ,
s'ouvrir ainsi une route afſurée à la
gloire. Nous demanderons au Ciel
cettegrace, & nous ferons en mesme
temps des voeux pour la conſervation
de vostre Perſonne Royale ,qui
est autant respectée des Orientaux ,
qu'elle est cherie des François.
Ce Pere eut enſuite audience
de Monſeigneur le Duc de
Bourgogne , de Monſeigneur
le Ducd'Anjou , & de Monſeigneur
le Duc de Berry, & preſenta
à chacun de ces troisPrin.
ces une petite Figure du Saint
Sepulchre , & d'autres Devotions
des Saints Lieux .
On parle de plus en plus de
l'étonnement qu'a cauſe à
toute l'Europe la priſe de
Mons ,& de la conſternation
où elle a mis les Ennemis de la
May 1691 . B
26 MERCVRE
France . Il y a grande apparence
qu'ils ſe ſentiront long- temps
de la perte qu'ils viennent de
faire. Mr Capiſtron , à qui le
fuccés deTiridate a fait acquerir
tant de gloire cet Hiver , ne
s'eſt pas teû dans un temps où
tous ceux qui ont du talent
pour laPoëſie ſe ſont fait entendre
à l'envy les uns des autres.
Les Vers que vous allez lire
ſontde ſa façon.
**** さ********
SUR
LA PRISE
DE MONS.
ODE.
Muses, quittez le Parnales Courezauxplaines deMons
GALANT. 27
Joignez la force à la grace,
Dont vous ornez voschansons.
Quelle conqueste plus belle
Avoſtrevoix immortelle
Mars offre- t- ilà chanter ?
Portez en l'éclat fuperbe
Encor plus loin queMalherbe
N'a pû jamais le porter.
Cegrand Roy dont la prudence
Confond tousſes Envieux ,
Ce Roy que l'heureuse France.
Recentde lamain des Dieux,
Vient de rompre la barriere
Qui défendoit la frontiere
Du Belgefirenommé ;
Envainl'Europe s'aſſemble ,
Toutse diffipe , ou tout tremble ,
Désque LOVIS est armé.
L'Idole de l'Angleterre,
Tant craint des foibles Mortels ,
En nous declarant la guerre
S'estoit acquis des Antels.
B 2
28 MERCVRE
Le Rhin , l'Ibere , & leurs Princes
Pour inonder nos Provinces ,
Dépeuploient tous leurs Etats ;
Mon Roy , commeun autre Alcide
Contre un torrent fi rapide
Ne prépare que son bras.
Tel que dans la Thaſſalie
Iupiter du haut des Cieux
Sevangea de lafolie
DesTitans audacieux ;
Tel le Heros que je chante
Fait ſentirſa main pesante
Aceux qui l'ofent braver.
Mais s'ils luy rendent hommage,
Lamesme main lesfoulage,
Et s'empreſſe à lesſauver.
Tu viens d'éprouverſes armes,
Mons , éprouveſa bonté :
Son Empire plein de charm's
Fera ta felicité.
Tu vas retrouver la joye
GALANT... 29
Tuneferas plus la proye
Des avares Etrangerss
Et tu verras le naufrage
Despeuples du voisinage.
-A convert de leurs dangers,
Mais , belas! qucta conqueste
Nous a fait trembler de fois 1.
Que de perils pour la teſte
Du plus Auguste des Rois !
Chaque inſtant de la journée
Elle estoit abandonnée
Ad'infaillibles hazards ,
S'allant offrir la premiere
Ala foudre meurtriere
Qui grondoit de toutes parts..
Rois, ennemis defa gloire ,
Quittezd'injustes proiets
Dans lefein de la Victoire
f
LOVISſçait donner la Paix.
Qu' avez- vous qui vousſoutienne??
Qu'un prompt repentir préviene
B3
30
MERCVRE
Lahonte d'estre abatus ;
Aussi bien malgrél'envie
Que vous portezàsa vie.
Vous admirezſes vertus.
Voicy d'autres Vers d'un
genre toutdifferent. Ils regardentles
approches du Prince
d'Orange , & font de Mr Broffard
de Montancy , dont je
vous ay autrefois envoyé pluſieurs
Ouvrages que le public
a fort eſtimez . Il avoit ceffé
de travailler depuis huit ou
dix années , mais il n'y a point
de Muſes ſi endormies , qui ne
ſe reveillent au bruit des conqueſtes
ſurprenantes que vient
de faire le Roy..
GALANT.
31
STANCES IRREGULIERES,
Onepeut trop louer les peines
quefe donne
Le digne imitateur des vertus de
Montmout.
Auxplaisirs de la chaffe , auxtravaux
de Bellonne ,
Son Bidetse trouvepar tour.
Louismenace Mons , CastanagueA
lafievre,
Il recours à Naſſau par un billet
touchant
Ce Heros poursuivoit un Lieure
Ilrompitses chiensfurle champ
Des nombreux Alliez In Diette eft
1 troublée,
Ce contretemps les a Surpris.
Les François font grand tort à do
noble assemblée ,
B 4
32
MERCVRE
Dont les conſeils nesont pas encor
pris.
Tant de graves Seigneurs ont- ils
quitté leur Terre ,
Sont-ils venus fi loin pour ne rien
projetter?
Laiffez- les en repos faire un beau
plandeguerre ,
Pas unn'est reſolu d'en rien execu
ter.
Sefaut il affemblerpour regler,pour
refoudre
Ilssont prests , un Courrier n'a qu'à
les avertir :
Maislors qu'ilfera temps d'agir&
d'en decoudre ,
Leurs chevaux déferrez ne pourront
plus partir.
Cependant augrand trot le Statouderavance
GALANT..
33
En luy la Ligue & Mons ont mis
tout leur espoir.
On ne connoist pas saprudence,
Ce Brave n'y va quepour voir..
Lebruit defon trepas tuy fit ouvrir
les oreilles ,
A de nouveaux perils on voudroie
l'engager.
S'il croyoitson courage ilferoit des
merveilles ,
Maispar depit ilveutse menager..
ACharleroy jadisilent quelque dif
grace,
Ilfur auſſi contraint d'abandonners
Mastric..
Lors qu'il aurabien veu comme one
prendune Place,
Peut-estre une autrefois ilprendra
Limeric
Le. Flaman blâme àtort ceGeneral!
tranquille
B
34
MERCVRE
Déja pourſauver Mons il s'est mordu
les doigts .
Veut- on que pourla mesme Ville,
Ilsefaffe battre deux fois ?
Sans risquerfon honneurSans estre
temeraire ,
Il ira filoin qu'il pourra .
Faire lever le Siege est unegrosse
Suffit.il pas de voir tout ce qu'ony
affaire.
fera ?
Quelle gloirepour luy, lors quedans
l'Angleterre ,
Tout couvert de Lauriersfans avoir
combattu,
Pourapprendre aux Milorsle metier
de la Guerre ,
Ildira tout ce qu'ila veu !!

S'iln'apassauvéMons,a.t onlieu
dejeplaindre?
GALANT.
35
C'est affezque la Ligue éviteonplus
grandmal,
Car lors que tout estoit àcraindre
Luyſeulàgaranti Noftre-Damede
Hall.
Mais d'ailleurs le combat cuft efte
difficile ;
Louis,de ce Heros redoutant la va
lour,
Fit tant que le François pour éviter
C
malheur ,
Entrapromptement dans la Ville..
PARALELLE DE CESAR
ET DU PRINCEDORANGE.
VEniràtemps , voir , &vaintre
Sur l'heure.
C'est ce qu'on dit du plus grand des
Guerriers..
Naſſau qui vole à de pareils law
riers..
Dece qu'il fit n'est pasfort en de
monre
B6
36 MER CURE
Ilen a fast prés de Mons les deux
tiers ,
Etferaplus peut estre avant qu'il
meure.
Quand Mars l'appelle iln'est pas
endormy ,
Malà propos on l'accuſe on le raille
De tout promettre & n'agir qu'à
demi .
Ah ! pour le coup on nedit rien qui
vaille ,
Ceftfur le pied de Cefar qu'iltravaille
,
Ilvient de mesme & voit fon En
nemy 3
Reste unseulpoint,degagner la bataille.
La piece qui ſuit & dont
Mrde Vinseſt l'Auteur , eft
d'un caractere tout different
des deux autres , & je fuls perm
fuadé que vous la lirez avec
plaifir..
GALANT .
37
1
L'INCREDULE .
NAſſau, Castanaga, Zeli,saxe,
Brandebourg ,
Baviere, Leopold , & mille autres
qu' Ausbourg
Avoitunis contre la France ...
En personne , ou par Députez ,
Dans un celebre Bourg s'estoient de
tous costez
Rendus pour prolonger leur jaloufe
Alliance .
Là, ces Liguez encor confus
Desfunestessuccés qu'cut Valdekà
Fleurus ,
Cherchoient d'une ardeur mutuelle
Lesmoyens feurs &les plusprompa
De reparer leur perte, & desevan.
gerd'elle
Là, dis je , au milieu des flacons
Ilsfefentoient plusfiers , ilsſignaloientleur
gele,..
Et drefſſoient , loin des coups , cents
projetsfanfarons
38
MERCVRE
4
Quandils apprirent la nouvelle
Que Bouflers inveſtiſſoit Mons..
Ah! dit Naffau tout en colere ,
Courrier , tu rêves , non, celanese
peut faire ,
Non , & l'on n'oferoit tenter de pareils
coups:
Quoy, dans lemesmetemps qu'icy
noussommes tous ,
Que nous deliberons , LOVIS auroit
l'audace
D'inſulter à nos yeux une si forte
Place?
Non, encore unefois , tu temocques
denous ,
Et tu devrois ſçavoir à quels perils
s'expose
Quiconque, ainsi que toy ,m'im.
pose.
Aces mots unſecond Courrier
Confirmeparferment le rapport dus
premier.
Quoy,Soutenir auffi ce conte ridicule?
GALANT. 39
Quoy m'imposer encor , reprit ces
Incredule?
Non,non , il n'en est rien. Qu'en
dites, vous , Meſſieurs .
Souffrirez - vous que l'on me iouë ,
Et ces deux francs Coquins que
troublent leurs frayeurs ,
Craignent-ils affez peu la rouë
Pour ofer ..... qu'on feroit heu.
reux
Si la gloire du Diademe
Pouvoitfouffrir quepar lug- même
Un Monarque fist tout , &qu'il se
paffast d'eux !
Mais qu'elle en gronde , ou non ,
n'importe
lenem'y fieray plus , & veux sous
bonne escorte ,
Eclaircirparmes yeux ce fait que
jecroisfaux,
Mais qui pourtant ,
livre
belas me
Sanssçavoir bien pourquoy, de terribles
affauts
40 MERCURE
Partons ; viſte , un cheval qu'on
s'empresſſeà mesuivre.
Parfes ordres donnez trente mille
Soldats
Vers Hall ferendent sur ses pas ,
Etde làſur une Echanguette
Naſſauvit avecſa Lunette ,..
Ainsi qu'on peut juger , plus qu'il
n'eust voulu voir.
Quoy ? de Louis le Grand l'épou--
vantablefoudre
Tomber Sur Mons , le mettre en :
poudre,
Et l'obliger enfin , reduit au defefpoir,
Deveniràgenoux implorerſa clemence!
)
Quel asp Et quel chagrin pour un
ambitieux ,
Quand il voit deſes propresyeux
Sa foibleffe ,fon impuiſſance ,
Etdans le meſme tempsfon Eunemy
vainqueur?
GALANT. 41
Muse,dis moyl'extravagance
Que pour loxs à Naſſan fitfairefa
douleur.
Trop vivement ſenſible àcedouble
malheur ,
Ils'en vange à l'instantsarsapauore
Lunette
Contre le mur à tour de bras
Cefougueux de dépit la jette,
Etfon verre innocent s'y brise en
mille éclats.
En cefacheux estat malheur à qui
l'approche;
Ils'en prend à qui n'en peut mais
Tour, juſques à Bantin, qui defon
coeurde roche
Seul a sceu se donner l'accès ,
Pâtit deſafureur; luy mesme ilſe
reproche
Den'estrevenu làſi viſte & de fi
loin ,
Quepour voir de plus prés ce qu'il
n'auroit pû croire
1
42
MERCVRE
Et quepour eftre le témoin
De la puiſſance&de la gloire
Duplus victorieux&duplusgrand
des Rois .
Quoy ,Sediſoit- il en Iny- mesme
C'estdonc en vain àſes exploits ,
Quepour mieux m'opposer i'usurpe
un Diadême ? Etats
Qu'avec tantdeperilsje quitte mes
Quei'arme contre luy plus de cent
Potentats ;
Et tout cela,pourquoy ? Pour effuyer
lahonte
Dont me couvre en ces lieux cette
Place qu'ildompte ,
Et qu'il prend en ſi peu de temps ?
Fuyons , partons en diligence ,
Deſes heureux fuccés laiſſons iouir
la France,
Et , puis que mes efforts font touiours
impuiſſans ,
Souffrons du moins que la prudence
Suspende de mon coeur les jaloux
mouvemens ..
GALAN Τ.. 43
Retournonssur nos pas , allons en
Hibernie
Aureste des Mutins faire sentir
monbras..
L'y réussiray mieux , LOVIS n'ysera
Pas ;
Il pourroit bien icy troubler ma tirannie
,
Et peut- estre la mettre àbas.
Sauvons - nous donc de ſa colore ,
Les Espagnols , les Allemans
Ne connoiffentque tropses coups,ce
qu'ilsçait faire ,
où la
Et ie leſçais à mes dépens ,
Courons , loin de ses yeux ,
gloire m'appelle ,
Allons Soumettre fous nos loix
Ce payssauvage & rebelle ,
Et quoy que Limerik m'ais fait
fwir une fois ,
Ne desesperons point
parquelque amorce
tentons
Defaire enfin fur luy ce que n'a
púlaforce...
:
44
MERCVRE
1
L'Irlandois feroit il moins duppe
quel' Anglois ?
F'en dois moins la conqueſte à mon
bras qu'à maruſe,
Et comme i'en ſçay le fuccés ,
Tout fin , qu'ilpuiſſe eſtre, iamais
Pourroit ileviterle iong qu'il me
refuse!
Marchons : mais ça , de bonnefoy
Nassau , que pretens tu ? dis moy.
Nesçais-tu pas qu'en Hibernie,
Saint .Rut depied ferme t'attend.
Et qu'en luy de LOVIS le Grand
Tu pourrois bien encor trouver l'heu
reuxgenie?
N'importe. perir pour perir ,
Repaſſons vifte en Angleterre ,
Etfi là comme icy lefort nousfait la
querre,
Sur leTrônedumoins on nous verra
mourir.
Partons. Auſſi-toft ce Monarque,
(La Ligue nomme ainſi ceBourgeois..
d'Amsterdam )
3
THEADE DE
-
LYON =
3
45
rque
(ches
rime
ir les
leur
Doufont
tefté
Bouf.
mente
de
AIR NOUVEAV .
AH, que monfort eftrigoureux
Mon Iris s'opposeà mes voeux
Quand je sporois trouver lafin de
ma souffrance.
ir.
gleterre
Itnousfaitla
moinson nous verra
*
Aussi- toft ce Monarque,
que nomme ainſi ce Bourgeois.
dAmsterdam ) .
GALANT.
45
Auſſi-tost , dit- je , ceTyran
Remonteàcheval,ferembarque
Et des perfides mains defes laſches
flatteurs ,
Sur ce Trône acquis par son crime
Va , douteux dufutur , recevoir les
honneurs ,
Qu'ils ne doivent enfin qu'à leur
Roy legitime..
Les paroles de l'Air nouveau
que je vous envoye ſont
de Mr de Meſſange , & ont eſté
miſes en chant par Mr du Bouf.
ſet,dont lareputationaugmente
de jour en jour.
AIR NOUVEAV.
a
AH,que moufort estrigoureux !
Mon Iris s'oppose àmes voeux
Quandjesporois trouver lafin de
ma souffrance.
46 MERCVRE
Amour, espoir, refus , rigueur.
Quelle cruelle intelligence ,
Vousjoint tous à la fois contre un
Senfible coeur !
Je vous ay fait partdans mes
autres Lettres de tout ce qui a
paru ſur les affaires du temps ,
&je continuë à ſatisfaire voſtre
curiofité ſur cette matiere,
en vous envoyant l'Ouvrage
qui ſuit.
LETTRE
D'un François refugié à la
Haye , àun nouveau Converty
des Cevenes .
E ne sçay pourquoy , mon cher
Amy, tu me demandes avec
tant d'empreſſement une Relation
de ce quej'ay pu penetrerdesDeliberations
du Prince d'Orange, avec
GALANT .
47
sant d'Electeurs &Princes de l'Empire
affemblezicy ; carje t'avoue
quequelque aveuglé que j'aye esté
jusqu'àpresent , par les emportemens
& lefaux zele de nos Mini-
Stres , je n'ay pu m'empescher de
reconnoiſtre icy des veritez qui ne
font que trop capables de nous
defabufer entierement des fauſſes
esperances que nous avions concevës
, que le concours de tant de
Princes si puiſſans , ne tendoit
qu'à nous rétablir par la force
dans tout ce que nostre désertion ,
& la trop opiniâtre resistance
qu'unfaux point d'honneur, plutost
que nostre pretendu motifde confcience,
nous aportez àfaire au defir
preffant que le Roy a toujours en de
procurer notrefalut,&de nous rendre
auffiheureux que le reste de fes
Suiers. Nous avous voulu nous trom.
per nous mesmes,&fans confiderer
48 MERCVRE
Patrie
,
quelle est la puissance de nostre
gouvernée par le plus
JageMonarque du monde , croire
que nous profiterions de la conjoncture
qui nous paroiſſoitsi favorabte
, d'une Ligue de la plus grande
partie de l'Europe conjurée contre
le France, pourforcerle Roy àfouf
frir ce qu'aucun Souverain , quelque
peu deforces qu'il ait, ne permet
iamais dansſes Etats à des Religions
contraires à la fienne. Enfin ,
cettegrande Assembléede laHaye
qui faisoit noſtre unique reſſource ,
&que nous confiderions comme les
Cieux ouverts pour nous , n'a fervi
qu'à nous faire voir qu'il faut
Prendre une meilleure voye , pour
nous tirer des précipices où nous
sommes tombez. Ces fecrettes
Conferences dont on a fait tant
de mistere à Vienne , à Madrid ,
en Angleterre ,& enfin par toute
l'Europe ,
GALANT.
49
l'Europe , & qui en devoient re.
gler le fort , deviennent le ſujet
des railleries les pluspiquantes qu'on
puiſſefaire contre la Ligue & contre
tous les Alliez. Mais à parler
franchement , je crois qu'on aura
tort quand on s'imaginera que le
Prince d'Orange alloit à la Haye
&qu'ily assembloit tant de Princes
pour deliberer ferieusementfur les
affaires communes. Ceux qui pretendent
le bien connoistre , & avic
lesquels tuſçais que j'ay unesecrete
correspondace, n'ontjamais cruque
laCoferencefûtproposée pour ce defe
Sein, mais bien, quesous cepretexte
ilvouloit attirer les Princes Etran.
gers , pour paroiſtre devant eux
avec cet éclat exterieur de Couronne
qu'ilaufurpée. C'estoit làson affaire
la plus importante , & il nefaut
pass'étonner s'il a mieux aimé que
la Scenede cette Comedie fust à la
May 1691 . C
بلا
50
MERCVRE
1
Hayeplutost qu'à Londres. Il eſtoit
bien-aise de leur faire voir cette
Republique autrefois ſifloriſſante,
quand elle estoit plus jalouſe deſa
liberté, soumise, à preſent rampante
, &faisant gloire de toutes les
baſſeſſes , pardonnables ſeulement
àdes Perſans &àdes Chinoisnourris
dans la ſervitude.
Je nesçaurois à ce sujet m'empêcherde
te dire la reflexion que
la lecture & le loiſir dans lequel je
fuis m'ont fait faire , quesi Cefar,
aprés uneguerre auffi glorieuse que
celle des Gaules , fut obligé d'entendre
au milieu de ſon triomphe
desſatyressanglantes , parce qu'il
estoit parmy un Peuple quidans une
Republique mouranteconfervoit en..
core quelque sentiment de liberté .
que ne devoit pas attendre le Prince
d'Orange des Hollandois , aprés
ladéfaite de leurs Armées de Terre
:
GALANT.
SI
& de Mer , & tant de malheurs
que son ambition leur a attirez ?
Mais comme ils font entierement
afſervis , ils ont au contraire épuisé
beurs bourses &leurs eſprits à des
Arcs de Triomphe , des Inscriptions,
des Deviſes , desHarangues,
desPoëmes , qui quoy que tous plus
impertinens les uns que les autres ,
avoient neanmoins unfens qui luy
estoit favorable ; car ils ont fait
connoistre aux Princes Confederez
combion il estoit Maistre de ce Peuple,
dont les Ancestres n'avoient
pas voulu obeir aux Rois d'Espagne,
dans le temps que les Princes
d'Orangeauroient estéfort honorez
d'avoir quelque Charge dans leur
Cour, bien loin de leur donner la
loy commefait celny cy , & de ne
pretendrepas mesmeles traiter d'égaux.
Ilacu aussi de grandes raiſons
C 2
52
MERCVRE
denepas faire venir ces Electeurs
&ces Princes de l'Empire en Angleterre
, où ils n'auroient pas veu
la mesme soumiſſion. Ils auroient
eſté témoins des inquietudes avec
lesquelles les Conneſtables & Sergensfont
en campagne & vifitent
lesmaiſons pour chercher des complices
de Mylord Preston , du Sr
Asthon , & des autres Serviteurs
du Roy. Ils auroientveu parlegrand
nombrede Prisonniers , &de Par
ticuliers élargis ſous caution ,&
parlesprocedures journalieres de la
Cour du Banc du Roy , qu'ily aplus
de mécontens qu'on ne leur dit, Ils
auroient connu que les diviſions des
Episcopaux & des Presbyteriens ,
qui font traitées ailleurs commedes
difputes de College , peuvent avoir
degrandes fuites & la disgrace
de lapluſpart de ceux qui ont le
plus contribué à mettrece Prince
GALANT .
53
Sur le Trône , leur pouvoit apprendre
quel fond l'on peut faire ſurſa
reconnoiſſance &son amitié. Enfin,
ceux qui ont veu autrefois l'Angle.
terre fi floriſſfante ſous ſes Rois legitimes
, auroient aisément reconnu
La difference de l'estat où elle estoit,
&de celuy où elle se trouve.Onamuse
les Alliez depuislong- temps
de ces grands Corps de Troupes avec
lesquels il devoit paſſer en Flandre,
Il avoit promis cinquante mille
bommes la premiere année del fon
ufurpation , ilſe reduit preſentement
à vingt mille , & il n'estoit
pas defon interest , qu'ils viſſent
que beaucoup de Regimens n'estoient
pas complets , la peine qu'ily avoit
à lever des Soldats pour les recruës ,
L'impoſſibilité des levées pour l'Irlan
de, les violences qui s'exercent pour
amaffer des Matelass , & encore
moins tous les mouvemes qu'il afait.
C3
34
MERCVRE
faire pour avoir de l'argent , obli
geantunMairePresbyterien à aller
de porte en porte, afin defairetrouver
deux cens mille livres sterlin à
emprunter dans le besoin preſſant
des affaires . Ils auroient eſte ſurpris
devoir des Membres du Parlement
citerſes favoris pour leurfairerendre
compte de l'argent qui luy a esté
accordé, & s'oppoſer aux penſions
qu'ilveut donner à ceux quifont le
mieux auprés deluy. Enfin ils anroient
apprisbien des choses qu'il a
un grand interest de leur cacher ,
furtout le mécontentementgeneral
de toute la Nation accablée de
taxes , la ruine du Commerce ,
la peine qu'ily a de gouverner un
Peuple inquiet , qui commenceà le
connoistre, Ajoûtous à cela que le
naturel avare du Prince d'Orange
luy a fait craindre de recevoir en
Angleterre desPrinces qu'il n'aurois
GALANT.
55
pûsediſpenſer dedéfrayer, ce qquu''iill
a êvité en lieu tiers.
En un mot , l'Assemblée dela
Haye est une affaire de pure oftentation
, &ilne luy estoit pas dif.
freile d'engager à ce voyage des
Princes qui luy ont obey aveuglement
en des chosesplus importantes
& comme ils fondoientfurluy leurs
principales esperances , il ne faut
pass'étonner s'ils y font accourusen
foule. Il vouloirfaire le Roy , & il
a plus fait en quelque maniereà
teur égard, puis que je doute que
l'Empereur faſſe autant connoistre
aux Electeurs, dans lamaniere dont
il les traite,l'élevation de fon rang
au deſſus du leur , que le Prince
d'Orange leur afait reffentir en cette
occafion la difference de leur dignité,
avec celle dont ilfepare.
Qui peut repondre que ce procedéneleur
ait pas laissé dans le
C4
56
MERCVRE
coeur des sentimens d'indignation
convenables à leur vang& à leur
naiſſance , d'autant plus que l'Electeurde
Brandebourg , qui s'estoit
flaté d'affurer àfon Frere,par l'appuy
du Prince d'Orange , la Charge
de Statouder de Hollande , n'a pê
obtenir ce qu'il defiroit; que le Duc
de Zell, qui pretendbeaucoup de
dédommagemens du grand nom.
bre de Troupes qu'ilafournies contre
La France depuis le comencement de
cette guerre,n'a pas obtenu toute la
Satisfaction qu'il esperoit. Jen'ay.
pu ſavoir quelsfont lessentimens ,
duLandgrave deHiffe- Caffel mais
pour l'Electeur de Baviere , ila
une ample matiere de chagrin ;
carcomme il s'estoitflaté duſouveram
Gouvernement des Pays bas ,
quoi que peu convenable das l'estat
où il est à present,à un Electeurdos
les Etais li éloignezde la Flandre
GALANT.
17
pourroient bien etre envahis par
fes Voisins dans le temps qu'il
veut aller conserver ceux d'un
Allie, ou plucost s'en rendre mai-
Stre luy mesme , il voit toutes ses
esperances renversées par la prise
de Mons , & ce Prince n'a pû
s'empêcher de dire en s'en retournant
, que le Prince d'Orange
eſtoicauſſi prudent à Hall qu'à
Limerik. Mais aprés avoir fait
mettre dans toutes les Nouvelles
de Hollande , qu'il avoit plus de
Troupes,de Vivres & de Munitions
qu'iln'en vouloit , on n'auroit
cru que cen'estoit que pour camper
Seurement à Hall, regarderfaire le
Roy pour sçavoircomment on prend
Les Villes ,& tâcher de faire fon
profit de fi belles leçons faites aux
dépens des Espagnols. Cet homme
dit il , qui pretendoit tout
fçavoir , & apprendre aux aus
pas
4
CS
58 MERCVRE
tres comment il s'y falloit prer
dre pour ruiner la France ,
apprend à la Chaffe que Mons
eſt inveſti ,pendant que la plufpart
desOfficiers de ſes Troupes
, au lieu d'eſtre à leurs Garnafons
, groſſiſſent ſa Cour à la
Haye ,& y dépenſent l'argent
des recruës. Il ſedonne,ajoûta
t- il, un grand mouvement pour
venir faire lever le Siege, parco
que l'habitude qu'il a de
lever ceux qu'il entreprend ,
luy fait croire qu'un Monar
que ,dont la ſageſſe prévoyante&
le courage intrepide, one
toujours contraint la fortune
àfaire réuſſir ſes deſſeins , affiege
des Villes pour ne les
pas prendre. Il tire de grandes
ſommes des Hollandois
&leur fait faire les derniers
efforts pour affembler denom .
GALANT. 59
:
breuſes Troupes,& quand il les
a, il attendque Mons ſoitpris
pour s'en retourner. Pendant
cetemps- là, le Duc de Savoye
quela ſeule bønne foy du Prince
d'Orange & des viſions fort
éloignées de ſes veritables intereſts
ont attiré dans la Ligue
, perd Valle Franche &
Nice avec tous les Chaſteaux ,
Citadelles & Forts qui en dépendent
, nonobſtart le grand
ſecours qu'on luy avoit promis
par Mer. Vous verrez peuteſtre
( dit encore cet Electeur).
qu'on luy envoyera des Troupes
quand il n'aura plus d'Eftats
à deffendre , & qu'ilfera
venu chercher un azile chezmoy
, ou à Vienne. Enfin
je t'avovë , mon cher Amy que
us grands évenemens arrivezdepuisla
mi-Mars,changent bien la
C 6
60 MERCVRE
face des affairesde l'Europe , qu'on
n'en a pas eu le moindreSoupçon durant
les Conferences de laHaye , &
parconfequentque tout ce qui s'y est
fait , aesté d'abord , ou se trouve
preſentement fort inutile...
Noussçaurons bien- tostqueltour
les panegiristes du Prince d'Orange...
donneront à unfuccéssimalheureux
S'il avoit esté en Angleterre , ils
n'auroient pas manqué de dire que
s'il eust esté en Flandre celaneferoit
pas arrivé. Ilne peut prefentement
s'en prendre qu'à luy - mesme. Il
comprend bien que les Alliez com.
mencent àse laſſer de la Guerre;
&coment n'enseroient ils pas las ,
perdant toûjours , & se voyant
moins avancez qu'ils n'estoientquand
il a commencé à prendre le
timon des affaires de la Ligue ? Ils:
leur a dit plusieurs fois aussi bien
qu'aux Anglois que cette Guerre
GALANT. 61
ne se faifois que pour parvenir,à
une Paix glorieuse. Ilspeuvent voir
qu'il prend un chemin fort écarté
poury réussir , puis que pour remet.
ire les choses en l'état où elles eftoient
seulement ily a un mois
ilfaudroit reprendre Mons,Nice &
Ville- Franche , qui ne se prennent
pas comme des Bicoques d'Irlande
qu'il leur fait tant waloir ,
quoyqueces Conquestes ne faſſent.
rien pour le bien de la cause commune.
Mais aussi peut estre il y
trouvera fon compte ; car fi tes
Alliez continuent à le confiderer
comme l'ame de leurs conseils , la
guerredurera long- temps , &c'est
là ce qu'ilsouhaite ,ſcachant bien
qu'il ne peut sefoûtenir que dans
ta confusion generale où il a mis
toute l'Europe pour ses interests
particuliers ,commeilne s'est élevé
quepar le renversement general de
A
62 MERCVRE
toutes les Loix. Voilà , mon cher
Amy,la disposition preſentede la
Ligue,far laquelle nous avons toûjoursfondé
toutes nos esperances,&
je t'aſſure qu'il n'y ena pas un de
ceux qui la compoſent,quiſeſoucie
en quelque maniere que cesoit denos
interests ; au contrairenoussommes
àcharge à tout le monde, onne nous
regarde que comme des traîtres à
nostre Patrie, qui nepourrons jamais
nousjustifier devant Dieu & devantleshommes
d'avoirpris lesArmes
contre nostre Roy ,& contre un
Monarque dont la ſage conduite
est respectée & admirée de toute
l'Europe , mesme de ſes Ennemis ;
contre un Maistreenfin quiſoubaite
également le bonheur de touw ſes
Suiets, & dont il faut croire que
lesdeſſeins plaisent à Dieu , puis
qu'il continue à donner à ses Armes
defifavorables fuccés. Ainfi
GALANT. 63
puis que Dieu t'a fait la grace de
demeurer dans l'obéiſſance d'un fi
grand Roy , & d'embraffer ſa Reli
gion ,jene tepuis donner d'autre
confeil que de cotinuer àlefervir&
àle fervirfidellement comme Dieu
le commande aussi bien dans nostre
Religion , que dans celle dont tu
fais à present profeſſion , & je
t'avoue que je ne sçaurois m'empêcher
d'envier le bonheur de ceux
qui exposent leur vie pour fon fervice,&
qui ont partàla gloire que
nostre Nation acquiert tous les jours.
fous un siglorieux Regne, l'ofemefme
te dire , que sij'ensuis cru,dans
peunous prendrons tous le mesme
party que toy , & nous tâcherons
de reparer nostre rebellion par des
fervices capables d'effacer nos
fautes dans l'esprit d'un si bon
Maistre.Adieu.
De laHaye 23. Avril 1691..
64 MERCVRE
Sn Le Samedy 5. de ce mois
Mr de Fontenelle fut receu à
l'Academie Françoiſe , & s'attira
de grands applaudiffemens
par le remerciement
qu'il y fit . Il dit d'abord que
fi jamais il avoit eſté capable
de ſe laiſſer ſurprendre aux
douces illufions de la vanne
il n'auroit pû s'en défendre
dans l'occaſion où il ſe trouvoit
s'il n'avoit confidere
qu'on avoit bien voulu luy
faire un merite de ce qu'il avoit
prouvé par ſa conduite qu'il
ſcavoit parfaitement le prix du
biéfait qu'il recevoit. Ilajoûta
qu'il ne pouvoit d'ailleurs ſe
cacher qu'il devoit l'honneur
qu'on luy avoit fait de l'admettre
dans un ſi celebre Corps
au bonheur de ſa naiſſance qui
le faiſoit tenirà un Nom qu'un
GALAN T. 65
illuſtre Mort avoit annobly
& qui estoit demeuré en veneration
dans la Compagnie
Tout le monde connut bien
qu'il vouloit parler du grand
Corneille , dont il fit l'Eloge en
peu de mots , auſſi bien que de
Mr de Villayer , Doyen du
Conſeil d'Etat , auquel il a fuccédé
dans la place qu'il avoit
lauffée vacante. Il paſſa de là
au grand ſpectacle qui devoit
le plus intereſſer toute l'Affemblée
, & parla de la conqueſte
de Mons , d'une maniere ſivive,
ſi fine ,& fi éloquente,qu'on
peut aſſurer que dans tout ce
qu'il en dit il y avoit preſque
autant de pensées que de paroles.
Son ſtile fut ferré & plein
de force , & aprés que la peinture
qu'il fit de la priſe de cette
importante Place , eut fait par
66 MERCVRE
11
1
roiſtre tout ce qu'elle avoit de
furprenant , iln'eeuutt pas depeine
à ſe faire croire lors qu'il
ajoûta , que ſi le grand Cardinal
de Richelieu , à qui l'Academie
Françoiſedevoit lebonheurde
ſon établiſſement , &
qui avoit commencé à travailleravec
de ſi grands fuccés à la
grandeurde la France, revenoit
au monde , il auroit peine à
s'imaginer que LOUIS LE
GRAND euſt pû l'élever à
un ſi hautdegré de gloire.
د
C'eſtoit à Mr l'Abbé Teſtu ,
comme Directeur de la Compagnie
, à répondre à ce Difcours
mais fon peu de ſanté
neluy permettant alors aucune
application , Mr de Corneille
quien eſtoit Chancelier , fut
obligé de parler au lieu de luy ,
cequi cauſoitquelque curiofité
GALANT.
67
parmy ceux qui compoſoient
l'Aſſemblée , puis qu'eſtant
Oncle de Mr de Fontenelle ,
la bien feance vouloit qu'il
cherchaſtun tour particulier
pour ſe diſpenſer de luydonner
des loüanges. Comme l'amitié
qui eſt entre nous me défend
devous rien dire à ſon avantage,
jeme contenterayde vous
faire part de ſa réponſe , telle
qu'ill'a prononcée , ainſi vous
en allez juger par vous mefme.
Voicy les termes dont il ſe ſery
vit.
MONSIEUR :
Noussommes traitez vous & moy
bien differemment dans le mesme
jour. L' Academie a besoin d'un digne
Sujet pour remplir le nombre
qui luy est prescrit parses Statuts
68 MERCVRE
Pleinede discernement , n'ayant en
venë que le ſeul merite , & dans
l'entiere liberté de ſes ſuffrages ,
elle vous choiſit pour vous donner ,
nonseulement une place dans fon
Corps, mais celle d'un Magistrat
éclairé , qui dans unenoble concur
rence ayant eu l'honneur d'estre declaré
Doyen du Conseil d'Estat par
lejugement mesme de Sa Majesté
faisoit fon plus grandplaisir defe
dérober àses importantes fonctions,
pour nous venir quelquefois faire
part deſes lumieres ; que pouvoitil
arriver de plus glorieux pour
vous?
Dansle mesme temps , cette mefme
Academie change d'Officiers
Selonfa coutume . Le Sort qui décide
de leur choix,n'auroit pu qu'estre
applaudy , s'il l'enst fait tomberfur
tout autre que sur moy , & quoy
qu'incapable de ſoûtenir le poids
GALANT. 69
qu'ilimpose , c'est moy qui le dois
porter. Il est vray qu'il a fait voir
Sa justice par l'illustre Directeur
qu'il nous a donné. Lajoye que chacundenous
en fit paroistre , luy marque
affez que le hazard n'avoitfait
que s'accommoder à nos souhaits ,&
jen'ensçaurois douter , vous ne le
puftes apprendre Sans vous. Sentir
auſſi toft flate de ce qui auroitſaiſi
le coeur le plus détaché de l'amour
propre. La qualité de Chef de la
Compagnie l'engageant dans lapla.
ce qu'il occupe , à vous repondre
pour Elle , il vous auroit esté doux
qu'un homme , dont l'éloquence s'est
fait admirer en tant d'actions publiques
, vous eust fait connoistre
fur quels sentimens d'estime pour
vous l'Academie s'est determinée à
Se declarer en voſtre faveur.
Son peu de santé l'ayant oblizéde
s'en reposer fur moy , vous
70
MER CURE
prive de cette gloire , & quand
le désir de repondre dignement à
T'honneur que j'ay de porter icy la
parole à son defaut , pourroit m'a
nimer affezpour me donner laforce
d'esprit qui me seroit neceſſaire
dans un (i glorieux poste , e que je
vous fuis mefermant la bouchefur
toutes les choses quiseroient trop à
voftre avantage,vous ne devez attendre
de moy qu'un épanchement
de coeur qui vousfaſſe voirla part
que je prens au bonheur qui vous
arrive , des sentimens& non
Louanges.
des
M'abandonnerai-je à ce qu'ils
m'inspirent ; La proximité du
Sang, la tendre amitié que j'ay
pour vous , l'âge, tout ſemble me le
permettre, & vous le devezfouffrir,
L'iray iuſques à vous donner des
conſeils. Au lieu de vous dire que
GALANT.
71
celuy quiasi bien fait parler les
Morts n'estoit pas indigne d'entrer
en commerce avec d'illustre
Vivans ; au lieu de vous applaudirfur
cet agréable arrangement
de differens Mondes dont vous
nous avez offert le ſpectacle , fur
cetArtfidifficile& qu'il me paroist
quele Public trouve en vous fi naturel,
de donner de l'agrément aux
matieres les plus feches,ie vous
diray que quelque gloire que vous
ayent acquiſe dés vos plus jeunes
annéesles talens qui vous distinquent
, vous devezles regarder,non
pas comme des dons affez forts de la
nature pour vous faire atteindre ,
Sans autre fecours que devous mefme,
à la perfection du merite que
je vous souhaite ; mais comme
d'heureuses dispositions qui vousy
peuvent conduire . Cherchez avec
Soin pour y parvenir les lumieres
72 MERCVRE
11
1
1
qui vous manquent;le choix qu'on
afait de vous , vous met en estat
de les puiſer dans leurfource.
En effet ,rien ne vous les peut
fournir fi abondamment que les
Conferences d'une Compagnie ,
où si vous m'en exceptez , vous
ne trouverez que de ces Genies
Sublimes à qui l'immortalité est
deuë. Tout ce qu'on peut acquerir
de connoiſſances utiles par les
belles Lettres , l'Eloquence , la Poë
fie , l'Art de bien traiter l'Histoire
ils le poſſedent dans le degré le plus
eminent , &quandun peu de pratique
vous aurafacilité les moyens
de connoistre à fond tout le merite
de ces celebres Modernes , peut estre
ferez vous autorisé, je ne dis pas
àles préferer , mais à ne les pas
trouver indignes d'estre comparez
auxAnciens. Cen'est pas que toute
juste que cette louange puisse estre
pour
GALANT.
73
pour eux,ils ne la regardet que com.
meune louange quine leur sçauroit
appartenir. Ilsne l'écoutent qu'avec
repugnance, & la veneration qui
eft deuë à ceux qui nous ont tracé la
voye dans le chemin de l'esprit , s'il
m'est permis de meſervirde ces termes
, prévaut en eux contre euxmesmes
, en faveur de ces grands
Hommes , dont les excellens Ouvra
ges toûjours admirez de toutes les
Nations ,ont passé jusquesà nous
malgré unnombre infiny d'années ,
commedes Originaux qu'on ne peut
trop estimer. Mais pourquoy nous
fera.t'ildéfendude croire que dans
lesArts&dans les Sciences lesModernes
puiſſent aller auffi tost ,&
mêmeplus loin que les Anciens, puis.
qu'il estcertain , en matiere de
ros , que toute l'Antiquité, cette
Antiquité si venerable , n'a rien
que l'on puiſſecomparerà celuy de
nostre Siecle?
May 1691.
D
He
MERCVRE
74
Quel amas de gloireſe preſente
vous Meſſieurs , à laſimpleidée
queje vous en donne N'entrons point
dans cette foule d'actions brillantes
dont l'éclat trop vifnepeut que nous
éblouir. N'examinons point tous ces
furprenansprodiges dont chaqueannée
defonregnese trouve marquée.
Les Cefars , les Alexandres ont be
foinque l'on rappelle tout ce qu'ils
ontfaitpendant leur viepourparoiſtre
dignesde leur reputation , mais
iln'en est pas de mesme de Louis le
Grand, Quand nous pourrions oubliercettelongueſuited'evenemens
merveillenx qui font l'effet d'une
intelligence incomprehensible, l'Herefie
détruite , la protection qu'il
donnefeul aux Rois opprimez, trois
Batailles gagnées encore depuis peu
dansune mesme Campagne ,ilnous
Suffiroit deregarder ce qu'il vient
defaire, pour demeurer convaincus
GALANT.
75
qu'il est le plus grand de tous les
hommes.
:
1
Seur des conquestes qu'ilvoudra
tenter, ily renonce pour donner la
paix à toute l'Europe. L'Envie en
fremit ; la jalousie qui ſaiſit de redoutables
Puiſſances , ne peutfouffrirletriomphe
que luy affure unefi
haute vertu, Sagrandenr les bleffe,
ilfaut l'affoiblir. Un nombre infiny
de Princes qui ne poffedent encore
leurs Etats queparce qu'ila dédai.
gnéde les attaquer , ofent oublier
ce qu'ils lay doivent pour entrer
dans une Ligue , où ils s'imaginent
que leursforcesjointesferont enestar
d'ébranler une Puiſſance qui a jusque-
lareſitéà tout. Queles Ennemis
de la Chreſtientéſe reſaiſiſſent
de tout un Royaume qu'ils n'ontperdu
que par cette Paix , qui a don
né lieux aux avantages qu'on a
remportezsur eux ,n'importe,il n'y
D 2
76 MERCURE
4
a rien qui nesoit àpreferer au cha
grin insuportable de voir le Roy
joüir defa gloire. Les Alliez fe refolvent
àprendre les armes ,&des
Princes Catholiques. l'Espagnemesme
que sasevere Inquifition rend
ft renommée sur fon exactitude à
punir les moindres fautes qui puif-
Sent bleſſer la Religion , ne font
point difficulté de renouveller la
guerre , pour appuyer les deſſeins
d'un Prince , à qui toutes les Religionsparoiſſent
indifferentes , pour
veu qu'il nuiſe àla veritable; d'un
Prince qui pourse placer au Trône
ofe violer les plusſaintes loix de la
nature,&qui nes'est rendu redou.
tablequ'à cauſe qu'il a trouvé autant
d'aveuglement dans ceux qui
l'élevent , qu'il a d'injustice dans
tous les projets qu'ilforme.
Voyons lesfruits de cette union ,
despertes continuelles , & tous les
GALANT..
77
jours des malheursà craindreplus
grands que ceux qu'ils ont déia
éprouvez. Il faut pourtant faire
un dernier effort , pour arrêter les
gemiſſemens des Peuples , à qui de
dures exactionsfont ouvrir lesyeux
Sur leur esclavage. On marque le
temps & le lieu d'une Affemblée..
Des Souverains , que la grandeur .
deleur caractere devroit retenir ,y
viennent de toutes parts rendrede
honteux hommages à ce témeraive
Ambitieux , que le crime a couronné
, & qui n'est au deſſus d'eux ,
qu'autant qu'ils ont bien voulu l'y
mettre. Illes entretient d'esperan
ces chimeriques. Leur formidable
puiſſance netrouvera rien qui luy
puiſſereſiſter. S'ils l'en ofent croire,
le Roy qui veut demeurer tranquille
ne sefait plus un plaisir d'aller ani
merſes Armées par sa presence , &
dés que le temps ſera venu d'entrer
D3
74 MERC VRE
campagne , ilsfont affurez de nous
accabler.
Il est vray queleRoygardebeau
coup de tranquillité ; mais qu'ils ne
s'y trompent pas. Son repos est agif-
Sant,fon calme l'emporte sur toute
l'inquietude de leur vigilance , &
La regle des ſaiſons n'est point une
regle pour ce qu'il luy plaîtde faire.
Nos Ennemis consument le tempsà
examiner ce qu'ils doivent entreprendre
, & Louis est prest d'execu
ter. Il n'a point fait de menaces
mais ſes ordres font donnez zil pare
Mons est inveſty,ses plusfores remparts
ne peuvent tenirenſapreſence
, & enpeu de jourssa priſe nous
delivre des alarmes où il nous iettoit
en s'exposant, Que de glorieuses
circonstances relevent cette conqueſte
C'estpeu qu'elle soit rapide ,
c'est peu qu'elle nenous coute aucune
GALANT. 75
perte qu'on puiſſe trouver confidera
ble. Ellesefait aux yeux mesmes
de ce Chefde tant de Ligues , qui
avoit uré laruine de la France. Il
devoit venir nous attaquer, on va
au devant de luy ; & il nesçauroit
défendre la plus importante Place
qu'on pouvoit ôteràsesAllie.z S'il
ofe approcher , c'est seulement pour
voir de plus prés l'heureux triomphedefon
auguste Ennemy.
Nos avantages neſontpasmoins
grands du coſté de l'Italie. Une des
Places qui vient d'y estre conquise,
avoit brave , il y a cent cinquante
ans , les efforts de deux Armées,
& dés la premiere attaque de nos
Troupes elle est contrainte de capituler.
Gloirepar tout pour le Roy !
Confufion partout pourſesEnnemis...
Ilsseretirent tout couverts de honte
; le Royreviens couronné par la
Victoire , & la Campagne s'ouvrira
3
D4
76 MERCVRE
dansſa ſaiſon. Quelles merveillesn'avons
nous pas lieu de croire
qu'elleproduira , quand nous voyons.
celles qui l'ont precedées .
Voilà, Messieurs , une brillante
matiere pour employer vos rares
talens. Vous avez une occafion bien
avantageuse de les fairevoir dans
toute leurforce ,ſipour- tant ilvous
eft poffible de trouver des expreſſions
qui répondent à la grandeur dis..
Sujet, Quelques soins que nous prenions
de chercher l'usagedetous les
mots de la Langue , nous ne sçaurions
nouscacher que les Actions du
Roy font au deſſus de toutesfortes de
termes: Nous croyons les grandes,
choses qu'il a faites ,parce que nos
yeux en ont esté les témoins , mais:
Sur le rapport que nous en ferons
quoy qu'imparfait quoy que foible,
quoy qu'infiniment au dessous
de ce que nous voudrons dire , la
و
GALANT .
77
pofteritė ne les croira passio
Vous nous aiderez de vos lar
mieres vous , Monficur que
l'Academiereçoit en ſocieté pour
le travail qu'elle a entrepris . Elle
pense avec plaisir que vous luy
Serez utile; je luy ay répondu de
voſtre zele, & j'espere que vos foins
à degager ma parole luy feront
connoistre qu'elle ne s'est point trom.
pée dansson choix. :
Ces deux Diſcours ayant eſté
prononcez , Mr Charpentier ,
Doyen , prit la parole & dit
que devant avoir l'honneur
de complimenter le Roy fur
fes nouvelles conqueſtes.comme
le plus ancien de la Com
pagnie , fi la modeſtie de Sa
Majesté ne luy euſt pas fait
refuſer toutes fortes de Harangues
, it alloit: lire ce qu'il
DS
18 MERCVRE
avoit préparé pour s'acquitter
d'un devoir fi glorieux. Vous
connoiſſez la beauté de fon
genie & ſa profonde érudi.
tion ,& il vous eſt aiſé de juger
par là des graces qu'il donne à
tout ce qui part de luy. Aprés
qu'il cutlû cette harangue , il
ditque le reſte dela Seance ayant
à eſtre employé , ſelon la
coutume , à la lecture des Ouvrages
de ceux de la Compagnie
qui en voudroient faire
part à l'Aſſemblée , il croyoit
qu'on ne ſeroit pas fachéd'entendre
une Epiſtre de l'illuſtre
Madame des Houlieres à Monſeigneur
le Duc de Bourgogne,
furles Conquestes du Roy,puis,
qu'outre un merite tout particulier
qui diftinguoit cette
Dame , elle avoit l'avantage
d'eſtre aſſociée à l'Academie
GALANT
793 P
d'Arles , & à celle de i Riconrati
de Padouë , & qu'ainſi ce ſeroit
une digne Academicienne qui
paroiſtroit parmyldes Academi .
ciens . La propoſition fut receuë
avec applaudiffement,&
l'Epiſtre de Madame des Hou-
/ lieres fut donnée à Mr l'Abbé
de Lavau , qui avoit déja
entre les mains quelques Ougraves
qu'il avoit bien voulu
fecharger de lire. Avant que
de commencer , il dit qu'il auroitbien
voulu contribuer à la
folemnité de cette journée , en
fa fant quelqueautre choſe que
de lire les Ouvrages desautres,
mais qu'il n'eſtoit pas aiſe de
bien parler de cequi faisoit l'étonnement
de l'Europe; que les
productions de tant de rares,
genies qui avoient paru jufque-
là,loin de frayer le che
D6
80 MERCVRE
min , le faifoient paroiſtre plus
difficile , & que meſmeille paroiſſoit
encore davantage aprés
les Diſcours qu'on venoit
d'entendre , far tout celuy de
Mr de Fontenelle , qui avoit
parlé de l'Auguſte Protecteur,
de la Compagnie , d'une maniere
qui faisoit connoiſtre
qu'il eſtoit déja parfaitement
inſtruit des devoirs d'un Academicien
, & qui donnoit de
grandes idées de ce qu'il ſçau--
roit faire à l'avenir ; que
Ouvrages estoient pleins d'un
agrement qui montroit la delicateſſe
de ſon eſprit , il avoit
de grands exemples dans ſa
Famille , & qu'il venoitdeleur
renouveller la memoire du
grand Corneille , fon Oncle ,
un des principaux ornemens
du fiecle & de l'Academie
さら
fifes
GALANT... 8
Françoiſe , generalement eſtimé
& honoré de toutes les Na
tions où il ſe trouve des gens.
qui aiment les Lettres. Il pour-,
fuivit en diſant , que ſicet excellent
homme ne nous man
quoit pas , il auroit bien ſceu
faire paſſer à la poſterité nôtre
incomparable Monarque , finon
tel qu'il eſt , au moins tel
qu'il eſt permis aux hommes
de le concevoir; que nous en
avionsde ſeurs garants dansles.
Heros des ſiecles paſſez , qu'il a
fait revivre d'une maniere ſi
glorieuse pour l'Antiquité , &
qu'il ſemble n'avoir ramenez
juſques à nous avec tout leur
éclat , que pour faire paroiſtre
encore davantage la gloire de
ſon Souverain. Mr l'Abbé de
Lavau dit encore , qu'il auroit.
en à parler des priſes de Mons,
د
82 MERCVRE
deVille- frache &de Nice ,mais
que connoiſſant par experience
combien il eſtoit difficile d'en
parler d'une maniere qui convirſt
à de fi grandes conqueſtes,
il croyoit devoir ſe retrancher
à ce qu'il avoit entendu
dire à un des plus grands Prelatsdu
monde que nos voix en
devoient eftre étoufées, qu'elles eftoient
trop foibles qu'ilfalloit laiſſer
agirnos coeurs & nostre joye , &
lever les mains au Ciel pourle remercier
de tant de prodiges: Ce
qu'il ajoûta , que la reputation
de ce Prelat n'avoit point de
bornes, & qu'on ne pouvoitle
connoiſtre ſans avoüer qu'il
eſtoit impoſſibled'occuperplus
dignemet le premier rangdans
l'Eglise de France c'eſt à dire ,
le ſecondde l'EgliſeUniverſelle,
fit nommer à tout le monde
GALANT.. 83;
1
Mr l'Archeveſque de Paris . Il
finit en diſant que puis qu'un
figrand homme , qui a feed fi
fouvent & fi excellemment
parler de fon Maiſtre & des é
venemens de fonRegne,faifoit
entendre qu'en cette derniere
occafion , le party du filence
eſtoità ſuivre ,& qu'il falloit
s'abandonner à la ioye , fouvent
plus éloquente que les
paroles c'eſtoit à luy plus
qu'à un autre de ſe conformer
à ce conſeil ; qu'il falloit attendre
que le Ciel , à qui l'on
ne pouvoit douter que Loüis .
leGrand ne fuſt precieux,don-
1 naſt de ces hommes merveil
leux,dont il luy plaiſt quelquefois
d'enrichir les fiecles , qui
ſçauroient peindre ce grand é
venement auſſi grandqu'ill'eſt,
&recueillir tout ce que fait
a
a
5
20
84 MERCVRE
& dit ce Roy invincible, pour
l'apprendre à nos Neveux
d'unemaniere qui puſt les perfuader
; Ouvrage qui n'apparrenoit
pas à des hommes or.
dinaires ,& d'autant plus difficile
, que depuis pluſieurs
années nous voyons des prodiges
ſe ſuccéder continuellement
les uns aux autres . Si
nousne les croyons qu'avec peine ,
continua- t - il , quoy que nous en
Soyons convaincus , que feront ceux
qui verront un jour tout d'un coup
tant de merveilles dans toute leur
étenduë ,Sansy avoir eſtépreparez
pardes exemples qui auroient på
les difpofer à croire ce que la valeur
la bonté,la magnificence,la juſtice,
la clemence,laſageſſe,la gloire
enfin , &plus que tout celala Reli
gion font executer chaque jour
Y
GALANT. 8
4
Louis,le plusgrand des Rois.
Aprés que Mr. de Lavau cut
parlé de cette force, il leut un
Ouvrage de Mr Boyer ſur la
priſe de Mons , une Lettre
familiere en Vers de Mr
Perrault,adreſſée à Mr le Prefident
Roſe, ſur les alarmes où
l'on eſtoit à Paris de ce que le
Roy s'expoſoit tous les jours,
pendantle Siege , & l'Epitre
auſſien Vers de Madame des .
Houlieres à Monfeigneur le
Duc de Bourgogne.MrleClerc
leut enſuite une Ode,qui estoit
la Paraphrafe d'un Pſeaume
for cette meſme conqueſte , &
Mr de Benferade finitla ſeance
par une Piece toute en quadrains
, dont chaque dernier
Vers , qui estoit ſeulement de
4. fillabes , faiſoit une cheute
tres - agreable. Je ne vous.
dis rien dela beauté de tous,
862 MERCVRE
ces Ouvrages , puis que vous
pourrez les lire bien toſt dans
un recueil que doit debiter
au premier jour le Sr Coi
gnard , Libraire de l'Academie.
Le Roy eſtant preſent au
Siege de Mons , où il a fouvent
expoſe ſa vie , chacun
amis toute fon attention
cette conqueſte , & cela eſt
cauſe que peu de perſonnes
Font écrit fur celle de Nice , &
qu'on n'a pas fait affez de reflexion
ſur les avantages qui
reviennent à la France par la
priſe de cette importantePlace
Ainfiil ne m'eſt tombé entre
les mains que l'Ouvrage que
vous allez lire. Il eſt de Monfieur
de Calvy , Juge Royal
de Graffe , dont vous connoifſez
le nom par d'autres Pieces
GALANT . 87
queje vousay déja envoyées
de luy . Celle- cy eſt adreſſée
à Mr de Gourdon , Aide de
Camp de Mr de Catinat
SUR LA PRISE DE NICE
ODE.
2
Use ce beau Fardin, les delia Mufee ces de Graff ,
Aveucouler cent fois uneſourcede
Vers.
Ce lieu paré de fleurs & d'arbres
toûjours verds ,
Ducelebre Godeanfut long-tempsle
Parnaffe.
C'eſt icy que chantant la gloire de
Sion , ( lion
Etnos Rois triomphans de la Rebel-
Ilſceut charmer toute la France
Fay qu'aujourd'huy ma voix puiffe
du mesme ton ,
Dufage Catinat celebrer la vaill
4
88 MERCVRE
ce. Et confondre l'orgueild'un nouveau
Phaeton .
A ce Prince aveuglé, lefameux temeraire
,
Qu'au fond de l'Eridan la foudre
enfevelit ,
Raniméparma voix avoitdejaprés.
dit
Les effroyables coups de LoVISens
colere.
Maisfourdàla raiſon ilméprisa laz
Paix,
Etfur luyſon orgueil a fait tomber
les traits ,
Dont il eût pû Sauversateste.
Funefic aveuglement ! ridicule fio.
reur !
Prince,ton repentir cut calme la
tempeste ,
Ton audace te livre à ton dernier
malheur .
tie
Déja de tes Etats la plus noble parGALANT..
89
Sous les Loix de LOVIS reſpireun
air plus doux ,
Etchaque jour partout où s'adreßët
fes coups fuivie
De triomphes nouveaux ſa valeur
Ville-franche vaincuë a veurendre
Jes Forts;
A peine ont- ils fait teste à nos
premiers efforts
Mont-Alban fuit leur destinée ,
Etfes Rampartsfiforts en leur étroit
contour,
Qui devoient ànos coups reſiſter une
année
Foibles, ne les ont puJoustenirtout
un jour
Nicefait voir encor de plus rares
Spectacles ,
De nos braves Guerriers prevenans
les exploits ,
Elle courtfefoumettre auplus puis
fant des Rois ,
१०
MERCVRE
}
Duſeul bruit de fon nom ordinaires
miracles.
Auxpieds de Catinatſes pâlesHabitans,
Admirant ſon courage &Sesfaits
éclatans,
Viennent implorerſa clemence.
Heureux d'avoirflechi le coeur de ce
Heros,
Mais plus heureux encorquefoumis
à la France
LOVI Sait pouriamais afſfuréleur
repos.
Mais que vois.ie d'icy ? quel bruit
viens - je d'entendre ?
Ilsembleque le Ciel tombe en éclats
divers.
Des nuages épais obfcureiſſent les
airs ,
Et la nuit dans le jour vientſesvoiles
épandre.
Muſe , qui ſans relâche attentive
auxcombats,
GALANT.
91
Vois tout cequi ſe paſſe aux plus
lointains Climats ,
2 Dis-moy quel est ce grand orage.
Mais l'air devient moinssombre,&
mesyeux penetrans
Découvrentfur ces Rois une efroyable
image ,
Etde Ramparts détruits,&de Soldatsmourans

C'est toy , Chasteau superbe , orguilleuses
murailles;
C'est dans ces Bastions que des coups
Surprenans
Mefont ouirle bruit de ces globes
tonnans,
Qui dans leursflancs d'airain portent
cent funerailles ,
Fiers encord'avoirpu refifter autre.
fois
Aux Ottomans unis avecque les
François ,
Tute vantois d'estre invincible ,
92 MERCVRE
Queles plus grands Guerriers t'attaqueroient
envain ,
Et qu'à tous leurs efforts toujours
inacceffible
Ilfalloit pour te vaincre un effort
plusqu'humain.
Levoicy's Catinat que jamais ne
repousse
dompté ,
L'Ennemy le plus fort&leplus ine
Va de tes murs hautains abattre la
Et vangerpleinement Anguien , &
fierté,
Barberouffe,
Leurcoeurparut encor dans lesplus
grands hazards ,
Aprés deux mois entiers,ferme dans
tesRamparts
Tu vis leur Flote diſparoiſtre ;
D'un tel évenementjesçay qu'on t'a
flatte ;
Mais,croy moi,danstroisjours Louis
Seraton Maistre ,
Ce
GALANT. 97
Cequ'attaqueson bras est bien- toft
emporté, ۱۳
Sous tonvaſteDonjon d'unseulcoup
de tonnerre,
Telqueceux dont leCielterraſſales
Titans ,
Il vient d'enſevelir tes plus fort's
Combattans ,
Et inſque dans son centreàfait.
trembler la terre.
Des plusfunestes coups aſſailli jour
&nuit ,
Tu te verras bien-toft en pouffiere
(réduit,
Malgré tafourcilleuse affiette,
Catinat ſous ses pieds foulera tes
Rochers.
Et l'incroyable bruit de fa valeur
parfaite
Va comme une merveille étonner
l'Univers.
May 1691. E
១៩ MERC VRE
Aupied d'un Roc affreux l'invincible
Alexandre
Vit la Nature mesme arreſter ſes
exploits.
Et cequen'avoitpûl'effort de tant
de Rois ,
Sur ce Rocher horrible on ofal'entreprendre.
Si Maistre de la Terre il veut vaincre
les Cieux ,
Qu'il vole , disoient - ils ,&s'éleve
en ces lieux ;
Nous luy cederons la victoire.
Que produisit enfin ce ridicule or-
९ gueil ?
lymonta vainqueur & s'y couvrie
degloire,
Et l'infolent barbarey trouva fon
cercucil .
200
Tel ſera le destin decette Place
TE
LYON
#1893
GALANT.
DE
Malgré tousses efforts, déjasLLON
gions
Rénverſent à lafois soldats &
ſtions.
Tout s'ouvre, tout se rend à leur
ardour guerriere.
Déjafon Deffenseur duhaut defes
Remparts
Vient demander la paix , &fait de
toutes parts.
Ceßerſa vaineresistance.
Bien tost , Superbes Murs vous ,
vous pourrez vanter ,
Appuyezde LOUIS &des bras de
la France ,
Quejamais Enneminevous pourra
dompter.
Délà, commeun torrent quejamais
rien n'arrest ,
Catinat prendsa route , & triom.
phe enchemin.
F
E 2
100 MERCVRE
Déja tombe àses pieds tout l'orgueil
deTurin ,
Etfon malheureux Prince àlafuite
s'appreſte ;
Mais les Nimphes du PôSe couronnent
defleurs ,
Etdiſent en dansant que deformais
leurspleurs
Ne groffiront plus leur domaine.
Tous nos mauxſontpaſſez , l'invincible
LOVIS.
Veut que nosflots heureux , comme
ceuxdela Seine ,
Ne reconnoiſſent plus que l'Empire
des Lys .
Cher&fameux Gourdon , quemesme
dés l'enfance.
LesMuſes ontcentfois couronnéde
Laurier ,
Et qui dans les bazards intrepide
Guerrier ,
GALANT.
Fais aux Plaines de Nice admirer
ta vaillance ,
Auſage Catinat,ce genereux Vainqueur
,
Que lesçavoir éleve autant que la
valeur ,
Montreces marquesde mon zele.
Maisſi tu veux des Vers dignes de
Sesexploits .
Faisnous encoreouir cette voiximmortelle,
Dont tuſçais celebrer les triomphes
desRois.
Voicy d'autres Vers de Mr
Craifé , Procureur du Roy de
l'Amirauté de Dieppe , pour
Monfieur le Comte de Touloufe.
Ce jeune Prince meritebien
qu'on parle de luy. Il s'eſt trouvé
au Siege de Mons,& a monté
la Tranchée à la teſtede fon
Regiment , ce que perſonne
Ε. 3
1,02 MERCVRE
n'avoitjamais fait dans un âge
fi peu avancé.
SUR LA CAMPAGNE
de Monfieur le Comte de
Toulouſe , Grand Amiral
de France , à la priſe de
Mons.
S
EPITRE AUX MUSES.
Dyez bien de retour ,
la Campagne.
Muses de
Quemon grand Amiralvient d'ouvrirfur
l'Espagne,
Mais de grace , pourquoy l'expofer
aux hazards .
Avant qu'il ait atteint l'âge defuivre
Mars?
Nous direz - vous de luy , qu'en des
Ames bien nées ,
La valeur n'attend poins le nombre
des années ?
GALANT.
Du moins ilfaut laforce,&jamais
N'a produit les Heros avant leur
la fierté
puberté.
On les admire bienen tous leurs
exercices
Mais l'Etat n'enreçoit encoreau.
cuns ſervices .
Quel est donc i'Ascendant de fes
faits inours ?
Ce Prince, c'esttout dire , est Fils
du Grand LOVIS.
Il'estnépourla Guerre, ois ſonpremier
prelude
Est d'estre à la Tranchée aussi tost
qu'à l'Eſtude.
Il previent vos Leçons , il n'est point
enrepos .
Ilmarche il court , il vole au chemindesHeros
.
Ilfait voir un esprit au deſſus de
Son âge.
E4
104
MERCVRE
Ilfefent animédu plusferme couraze,
Et tandis qu'il apprend lecoursde
l'Univers ,
Qu'il s'instruit dansla Carteàvoguerfur
les Mers ,
Impatient qu'il est du métier de la
Guerre,
Avant qu'armer fur l'onde , il
commandefur Terre.
Ayant ſcen quele Roy part pour
affiger Mons ,
Quand la Ligue d'Ausbourg dort
enſes Garnisons,
Il bruſle du defir de voir former ce
Siege.
Il obtient d'y venir par un pur pric
vilege ,
Son équipage est prest , il part avee
ta Cour ,
Les Muses avec luy fortent de leur
Sejour
GALANT.
105
Quoy! les Muses au Camp àvoir
prendre une Place !
Regardent elles Mons comme leur
Montparnaffe?
L'un& l'autre , il est vray , font
couverts de lauriers ,
Mais la Ville de Mons n'en offre
qu'aux Guerriers.
Cetteville quifert de rempartà
Bruxelle ,
Etquiſevante d'estre en Siege la
Pucelle ,
eftde tant de côtezinvestie àlafois.
Qu'ilsemble que la terre àproduit
des François..
Les Lignesfont en ordre , on ouvre
la Tranchée,
Où malgréles perils lagloire est re-
4 cherchée
Le Roy viſite tout , il montre aux
Generaux
Lespostes qu'ilfaut bastre, ou premi
dre par affauts
1
E
106 MERCVRE
Les Princes de l'Armée imitantce
Monarque,
Veulent braver la mortfur les postes
qu'il marque ;
Apeine illesretient , tant leur aus
guste Sang
Faitvoir qu'ils ont le coeur aufſſibausque
le rang.
Toulouſe eſtant de your vient d'un
air intrepide
Pour monter la Tranchéevùlagloireleguide;
Son Regiment lefuit avecla mesme
ardeur.
Vous, Mufes , dont lesſoins tendent -
àſa grandeur,
Nepublierezvous pas qu'ils'estfait
une feſte ,
D'entendre les Canons foudroyerfur
Ja tefte,
Les balles des mousquets,fifter,gref
Lerfureux ,
D'aller durant la nuit à la lucur de...
fewx
GALANT. 107
:
Soutenir le travail , en avancer la
course ,
Etde voirruiffeler le ſang comme
uneſource ,
D'affronter les dangerspar tout fon
Regiment ,
Qui ne le voit agir qu'avec étonne-
(ment ?
Jamais Prince àson âge eft il devenu
Maistre?
Jamais dans la Tranchée ena t'on
veu paroiſtre
Avec tant de jeunesse& tant de
fermeté,
Et Jamais pourra- t- il eftre un jourimité?
Ce Prince auroit voulu paffer la nuit
entiere,
Mais un ordrefecret fait borner fa
carriere.
C'eſt aſſez pourſçavoirfi ce jeunes
Amirat
108 MERCVRE
Craindroit une Bataille , où lecom.
bat naval..
LeRoy quifut charmé de voir fa
bonne mine,
Par ceſeul coup d'eſſaypour d'autre
ledeſtine ;
Etpuisque Mons rendu vous rend
vostreHeros,
Muses,fous ſes Lauriers achevez
vos travaUX
Le Siege deMons a fait tane
de bruit , que j'ay cru devoir
vous en envoyer le Plan. On
en a fait une infinité mais.
comme pour ſatisfaire l'impa-.
tience du Public , ils ont eſté
gravezavant qu'on cuſt pris la
Place , on n'en voit aucun qui
ne ſoitdéfectueux .Ainfije puis
affurer que celuy cy eſt le ſeal
parfait; auſſi n'a- t-il eſté levé
qu'apres le Siege finy. Ceux
1
1109
conions
s'apqu'il
i ont
ablic.
treseun
trait
vers
vra-
THEQUE DELAVIL
LYON
*
sun
des
ons ..
suela
'OUS:
pas
n le
elle
lela
De
Soeur de l'Imperatrice & des
IC
C
L
P
15

le Siege finy. Ceux
4
GALANT. 109
qui n'ont pas une entiere connoiſſance
des Fortifications
aurontpeut- eſtre peine às'appercevoirde
ladifference qu'il
yade ce Plan à ceux qui ont
eſtédonnez d'abord au Public..
Cependant il ne faut que trespeu
de choſe pour faire un
grand changement , &un trait
trop droit ou trop de travers
peut faire croire qu'un Ouvrage
défend ou ne défend pas un
autre Ouvrage , & ainſi des
autres partiesdes fortifications ..
C'eſt pourquoy , encore quela
difference du Plan que je vous
envoye ne ſoit peut eſtre pas
bien ſenſible aux yeux , en le
conferant à ceux du Siege, elle
ne laſſe pas d'eſtre grande.
Vous ſcavezlemariagede la
Princeffe Elizabeth Palatine ,
Soeur de l'Imperatrice & des
110 MERCVRE
Reines d'Eſpagne & de Porturgal
, avec le Prince lacques ,
Filsainé du Roy de Pologne...
Elle arriva le Samedy 24. de
Mars à Belveder , où la Reine
la vitincognito dans l'Eglife. En .
fuite elle alla deſcendre à lafdovva
, en la maiſon du-grand
Maréchal de la Couronne, par
qui elle fut receuë , & traitée
magnifiquement à fouper. Le
lendemain Dimanche , le Roy ,
la Reine , les Senateurs & les
Dames de la Cour allerent l'y
viſiter , ainſi que le Prince
Jacques quis'y rendit accompagné
des deux Generaux de
Pologne & de Lituanie , & de
quantité de Nobleſſe. Elle fit
ſon entrée à V Varſovie le foir
de ce meſme jour , à la clarté
des flambeaux , & fut complimentée
par les Magiftrars...
GALANT. tre
Tous les Corps des Métiers &
lės Soldats , tant cenx que les
Senateurs avoient amenez ,..
que les milices Royales ,
eſtoient ſous les armes avec
leurs Drapeaux , depuis les
Faux-bourgs juſqu'àVVialdovva
, qui en eſt à une petite
demilieuë : Les Armeniens
s'eſtoient habillez fort proprement
à la Turque ,& pluſieurs
d'entre eux parurent à la ma.
niere des Mores . Les Marchands
de Nation Allemande ,
au nombre de cent cinquantemontoient
des chevaux de prix
&fort bien dreffez . Les Princeſſes
venoient aprés euxdans
pluſieursCarroffes , puis quan
tité de Magnats, les Generaux
delaCouronne & de Lituanie?
Et enfin le prince Jacques
ayant un chapeau garny d'un
bouquet de plumes blanches
112 MERCVRE
Il avoit un manteau blanc en
broderie d'or , & autour de
luy eſtoient ſes Huſſards Torrantzes
, veſtus de tres belles
peaux de Leopard. La Princeſſe
Elizabeth , malgré l'obſcurité
de la nuit , ne laiſſoit pas de
briller à la lueur des flabeaux,
par la richeſſe de ſes habits.
Tous les Officiers de leurs Majeſtez
Polonoiſes , la Milice &
autres, étoient habillez de neuf..
Aprés qu'on eut traverſé la
Ville , les deux jeunes Princes
receurent cette Princeſſe à la
porte de l'Egliſe de S. Iean &
la conduifirent devant le Maîare
Autel par deſſus de riches
tapis. Elle y trouvale Roy &
la Reine qui luy firent comme
une ſeconde reception. Le Te
Deum fut chanté aprés quoy le
Cardinal Radziev vski fit la ce
GALANT.
113
remonie de la Benediction Nuptiale.
Cela eſtant fait , cette
auguſte Compagnie paſſa par
uneGalerie murée à la Chambredes
Senateurs , où le Feſtin
eſtoit préparé . Le Royalla s'affeoir
àtable ſous un richeDais
ayant le Nonce du Pape à fa
gauche. La Reine avoit auſſi
la Princeſſe à coſté d'elle, mais
un peuplus bas , & le Prince
Jacques eſtoit aſſis à un des
coins de la table.Le Repas finy,
leRoydanſa ,& toute la Cour
joüit de pluſieurs autres diver.
tiſſemens,Hy avoitun échafaue
ouTheatre pour lesComediens
Polonois ,un autre pour les
François ,& un troifiéme pour
les Allemans . Les trois jours
ſuivans ſe paſſerent de la même
forte en feſtes , & les Prefens
furent faits avant qu'on
14
MER CURE
ſe miſt à table. Le leudy 29 .
àl'entrée de la nuit , il y eut
un beau feu d'artifice ſur deux
grandes Barques longues , qu'-
ilsappellent: VVitinnes , bien
liées & attachées l'une à l'autre.
Le Lundy. 2. d'Avril , le
Cardinal Radzievvzki traita
magnifiquementtoute la Cour,
& ces meſmes réjoüiſſances
ayant eſté continuées encore
quelquesjours , fürent terminées
aprés les Eeſtes par de
grands Feſtins.
On a eu des nouvelles de
Conſtantinople du 4. Février ,
qui marquent que Mr de Chateauneuf
, Ambatladeur de
Sa Majesté , avoit fait demander
, il y avoit peu de iours,audience
au Capitan Pacha , qu'il
n'avoit point encore veu depuis
ſon arrivée à la Porte ,
&à qui Son Excellence avoit
:
GALANT.
115
une Lettre à rendre de la part
duRoy. La fonction du Capitan
Pacha s'étend fur tout
ce qui concerne la Marine , &
il eſt à cet égard auſſi abſolu , &
autſi indépendant que le Viſir
l'eſt dans toutes les affaires de
l'Etat . Vous avez oüy parler de
la ceremonie du Caftan . C'eſt
une eſpece de Chape à man.
ches pendantes , quiſe donne
parleGrand Seigneur , & par
tous les Miniſtres au nom de Sa
Hauteffe , aux perſonnes qui
meritent d'eſtre favorisées de
quelque distinction. La contu-/
me atoujours étéde donner ces
Caftans fur la fin de l'audien
ce , & dans le moment qu'on
prend congé ; & comme entre
les Turcs cet ornement ne ſe
preſente que par un fuperieur
fon inferieur ,& que celuy
116 MERCVRE
qui eſt d'un rang plus élevé
neſe leve point au départ de
celuy qui eſt dans une moindre
dignité , il n'y a point d'exemples
parmy eux quele Caftan
ſe ſoitjamais pris que debout
, ny que celuy de la part
dequi il ſe donne , ſoit jamais
levé dans cemoment.Lors que
que les Princes Chreſtiens
commencerent à envoyer des
Miniſtres à la Porte Ottomane,
les Turcs creurent qu'ils ne
pouvoient rien faire de plus
obligeant pour ces Miniſtres ,
quedepratiquer à leur égard
une ceremonie fi avantageufe
& fi recherchée dans l'Empire
Turc;&les Miniftres Etrangers
de leur coſté s'y foumirent
, comme à une des plus
éclatantes marques d'honneur
qu'ils puſſent recevoir. Feu Mr
GALANT. 117
Girardin a eſté le premier des
Ambaſſadeurs , devant qui les,
Miniſtres de la Porte ſe ſoient
levez dans une pareille occafion
,& ce fut dans une viſite
qu'ilrendit au Caimakan , qu'il
ſemit enpoſſeſſion de ce privilege.
Ilen rendit un eenſuite au
Capitan Pacha,& obtintde luy
le même honneur ſur l'exéple
du Caimakan , & furla remontrace
des Truchemens, qui luy
dirent que c'eſtoit l'uſage. Cependant
les choſes ayant changéde
face dans l'Empire Turc,
&le Caimakan ayant eſté dépoſé,
celuy qui luy fucceda ne
ſe contenta pas de refufer abſolumentde
ſe conformer à cet
égard à l'exemple de ſon predeceſſeur
, il fit encore des reproches
au Capitan Pacha de
ne s'eſtre pas oppoſé à cette in
118. MERCVRE
novation mais ; il n'eſtoit plus
temps . Mr Girardin eſtoit en
poffefion , & il aima mieux ne
pointavoir d'audience de luy ,
que de déroger au droit qu'il
s'eſtoit acquis . Quant au Capitant
Pacha , il fit venir le plus
ancien des Truchemens de
France , & luy fit de tres aigres
plaintes de l'avoir trompé , en
luy faiſant commettre une faute
confiderable. Voila l'eſtat où
eſtoient les choſes, quand Mr
l'Ambaſſadeur arriva à Conftantinople
. Vous ſçavez ce qui
s'eſt paſſé touchant cette matiere
entre ſon Excellence & le
Caimakan d'aujourd'huy. Ce
Miniſtre conſentit à ſe lever ,
mais ce fut aprés beaucoup de
difficultez . C'eſt pourquoy Mr
l'Ambaffadeur réſolut dés lors
de faire expliquer les choſes fi
GALANT .
119
clairement à la premiere occafion
, que l'on ne fuſt plus en
droit à l'avenir de luy former
là deſſus aucune conteſtation,
non plus qu'à ſes Succeſſeurs .
Il ne pouvoit ſe preſenter de
conjoncture plus favorable
pour cela que celle de l'audience
du Capitan Pacha . Il luyenveya
donc ſes Truchemens
pour convenir ſur ce fait , & le :
Capitan Pacha qui ſe trouve
eſtre le mefme à qui on avoit
autrefois faitdes réprimandes
fur la facilité . qu'il avoiteuëà
condeſcendre aux demandes
de Mr Girardin , declara fans :
balancer , qu'il eſtoit ſerviteur
de Mr Ambaſſadeur qu'il
fouhaiteroitde tout ſon coeur
luy pouvoir donner des marques
de ſon eſtime & de fon
amitié mais , qu'il avoit eſté
,
1
120 MERCVRE
"
repris pour avoir accordé les
mêmes choses qu'exigeoit Son
Excellence , que les Truchemenseux
meſmes qui luy par -
loient de ſa part, ſçavoient bien
qu'il s'eſtoit plaintà eux de la
mauvaiſe démarche où ils l'avoient
engagé ſur ce ſujet en
faveur du deffunt Ambaſſadeur
de France, & qu'eſtantdirectement
contre la Loy des Mufulmans
de ſe lever pour des
Ginours, ( ce motveut dire Infidelles
, ) il pouvoit d'autant
moins y conſentir , que le Viſir
d'aujourd'huy eſt l'homme du
monde le mieux inſtruit & le
plus ſcrupuleux ſur les affaires
qui touchent la Religion. Les
Truchemens propoſerent un
expedient qu'ils vinrent communiquer
à Mr l'Ambaſſadeur;
mais Mr de Châteauneuf ne
voulut
GALANT. TAE
-
voulut point l'accepter parce
qu'il vit de quelle importance.
il eſtoit de ſe relâcher de la
moindre maniere dans une pareille
conjoncture , où il eſtoic
autoriſé par des exemples perſonnels
, où il ne pouvoit fouffrir
aucune modification qui
ne paruſt une retractation du
paſſe ; outre qu'il luy ſembla
d'unedangereuſeconſequence
de faire connoiſtre aux Turcst
qu'ilne demandoit pastoujours
des choſes juſtes , & qu'on pou-
'voit quelquefois ſe diſpenſer
dele ſatisfaire ſur ſes prétentions.
La difficulté fut donc
portéeau Viſir , & du Vifir au
Muphti, pendant qu'on tâchoit
autant qu'on pouvoit de la part
des Turcs , par le moyen des
Truchemens , qui eſtant mariez
àCoſtantinople,ont un dé-
May 1691 . F
122 MERCVRE
voüemét entier à ceux qui ont
en main le Gouvernement , de
réduire Son Excellence à quelque
accommodement; mais enfin
Mr l'Ambaſſadeur eſtant
fondé en raiſonstres fortes, &
fur tout fur la grandeur de ſon
Maître ,& fur la differece qu'on
ne pouvoit mettre que par là
entre le traitement qu'on faifoit
aux Ambaſſadeurs des autres
Princes Chreſtiens , & celuy
que l'on devoit à l'Empereur
des François , il leur
oſta toute eſperance d'ébranler
ſa fermeté , en forte qu'on
luy envoya dire qu'il pouvoit
aller à cette audience , & que
les honneurs qu'il defiroit luy
feroient rendus . L'execution
répondit pleinement à lapromeſſe.
Le premier Officier de
la Mer aprés le Pacha vint
GALANT .
123
recevoir Son Excellence à cin.
quante pas du Palais du Pacha
La Pacha ſe leva ſans façon &
fans aucune marque de contrainte,&
ſe tint deboutjuſqu'à
ce que Mr l'Ambaſſadeur euſt
pris ſon Cafia,& aprés l'audiece
le même Officier qui l'avoit
reçû,le vint recoduirejuſqu'au
même endroit où il l'avoiteſté
rencontrer à fon arrivée . Tous
les Etrangers qui avoient ſceu
la conteſtation,ne manquerent
pas de ſe trouver là , pour en
voirl'iſſue , & on leur vit faire
des ſignes d'étonnement &
d'admiration à l'action du CapitanPacha.
Lesgrands Articles deGuerte
qui ont remply mes dernieres
Lettres m'ayant empêché
de vous apprendre la mort de
pluſieurs perſonnes confiderables
, je ne vous ay point patlé
F 2
124
MERCVRE
1
de celle de Madame la Ducheſſe
de Povvis,Gouvernante
de Monfieur le Prince de Galles
, arrivée à St Germain en
Laye le 21. Mars dernier. Si ce
n'eſt point une nouvelle pour
vous , du moins ce que j'ay à
vous en dire ſera nouveau pour
beaucoup de gens , & pourra
même ſervir à l'Hiſtoire
d'Angleterre . Cette Dame
eſtoit Fille d'Edoüard de Sommerſet,
Marquis de VVorceſtre
deſcendant de lean de Gand ,
Duc de Lancastre , Fils d'Edoüard
II I. Roy d'Angleterre,
par ſa troiſième Femme. Ses
Anceſtres furent ſurnommez
Beaufort , d'un Chaſteau en
Anjou où ils nâquirent. Il eſtoit
au Duc de Lancastre,& faiſoit
partie de la dot de Blanche
d'Artois , Reine de Navarre ,
GALANT.
125
mariée au premier Duc de
Lancastre . Madamela Duchefſede
Povvis fut élevée par ſon
grand Pere Marquisde Vorceftre
, qui ayant eu l'honneur de
ſouſtenir le dernieren Angleterre
les intereſts duKoyCharles
I. dans ſon Château de
Ragland , mourut en 1646 .
prifonnierd'Etatdu Parlement
rebelle. Aprés ſa mort elle fut
menée à Nivelle en Brabant
poury eſtremicuxélevée dans
la ReligionCatholique,& enfin
elle épouſaGuillaume Herbert
Duc de Povvis , Pair & grand
Chambellan d'Angletterre , de
Tilluſtre Famille des Herbert
de Pembrock , iſſue d'un Fils
naturel de Henry I. Roy d'Angleterre
, Fils de Guillaumele
Conquerant.A fon mariage elle
vendit juſqu'à ſon Collier de
F. 3
126 MERCVRE
:
Perles pour ſecourir ſon Pere
alors prifonnier , & dépoüillé
de tous ſes biens par les Revol.
tez . Une charité parfaite animoit
toutes ſes actions , & elle
en a donné pluſieurs fois des
marques; meſme àdes perſonnes
de qui elle avoit receu de:
ſenſibles déplaiſirs.Entreautres
un deſes Parens s'eſtant rendu,
Proteftant,&luy ayant fait une
tres grande injustice par le
moyen de ſa Religion , elle
ne l'eut pas pluſtoſt appris ,
qu'au lieu de chercher à s'en.
vanger , elle fonda une Meſſe:
pour tous les jours , afin de
demander à Dieu ſa converfion.
Elle avoit une égalité &
une fermeté d'eſprit extraor- .
dinaire, une tres - grande peneuation,&
une ſurprenante haGALANT.
127
bileté pour les affaires les plus
épineuſes. Auſſi ſoûtint elle
avec tout l'éclat poſſible , tant
en prefence du Conſeil privé
que devant les Commiſſaires
du Parlement , les intereſts des
Seigneurs Catholiques detenus
prifonniers à la Tourde
Londres , dont ſon mary eſtoit
l'un des plus confiderables ,durantla
perſecution qui s'éleva
en Angleterre il y a treize ans ,
de forte que les Chefs de cette
faction , pour empêcher les
ſecours qu'elle donnoit à ces
Seigneurs fufciterent un ſcele.
rat nommé d'Angerfield , qui
produifit pluſieurs Chefs d'accuſation
contre elle .On la cita
devantle Conſeil privé le jour
meſme de la Touſſaint 1678 .
fans luy avoir fait la moindre
intimatiõdu ſujetqui l'y faiſoit
F 4
128 MERCURE
appeller. On luy preſenta des
accufations en grand nombre
fouftenuës par ferment , & l'on
exigea ſa réponſe ſur le champ.
Elle ne fut point déconcertée ,
&fit connoistre avec tant d'eſprit
la fauffeté & l'artifice des
acculations , quele Conſeil ſe
vit obligé de luy en rendre témoignage
,& de la remettre en
iberté. Peu de temps aprés , la
Faction ayant pris de nouvelles
forces , elle fut enfermée dans
Ja Tour de Londres , ſansqu'on
luy permiſt de ſe juſtifier qu'au
bout d'un an. Elle en fortit lors
qu'on le croyoitle moins,Dieu
ayant permis queles luges prevenus
& gagnez rejetterent le
Cahierdes accuſations intentées
contre un Proteſtant , ſous
pretexte qu'il n'y avoit qu'un
ſeul témoin. Surce meſme fonGALANT.
129
dement ils ne purent s'empêcher
de rejetter auſſi le Cahier
des accuſations produites contre
Madame de Povvis &de la
mettreen liberté , parce qu'il
n'y avoit auffi contre ellequ'un
ſeul témoin à quoy ils n'avoient
pas fait reflexion , quand ils
s'étoient ſervis de ce moyen
pour ſauver le Seigneur Proteſtant.
Elle ſupporta ſa priſon
avec une grande conſtance , &
ſe faifoit une joyede n'en ſortir
que pour porter ſa teſte ſur un
Echaffaut , & meriter pour fa
Religion la couronne du Martire.
Mr de Povvis ſon mary
pafla cinq ans en priſon dans la
mefme attente , & avec la mefme
refignation. Elle vint en
France pour laiſſer écouler ces
temps orageux , & fe retira à à
Bourgesincognite avec une par--
E
130
MERCVRE
tie de ſa Famille . Quoy qu'elle
n'y fuſt pas d'abord reconnue,
la pratique des vertus qu'elle
ne put cacher comme fon nom
pendant un an , la fit regarder
comme une perſonne qu'on ne
pouvoit affez eſtimer. Elle
cherchoit en tout la gloire de
Dieu , parloittres peu &toujours
fort à propos , ſouſtenoit
fon rang fans faſte , & accompagnoit
toutes ſes actions d'un
air de grandeur , & d'une douceuradmirable.
Elle frequentoit
rarement la Cour , mais
cela n'a pas empêché que leurs
Majeſtez Britanniques ayant à
confier le Prince de Galles
aux foins d'une Gouvernante,
ne l'ayent choiſie pour ce
glorieux employ. Elle s'eſt acquitée
de ce devoir avec une
affiduité telle qu'on pouvoit
4
GALANT.
131
l'attendre d'une perſonne de
cette vertu , n'ayant accepté
cette Charge que pour faire
ſon ſalut par un attachement ſi
inviolable , qu'elle n'a jamais
voulu quitter d'un moment le
jeune Prince , ny le perdre de
vûë , quoy que cette affiduité
luy fuft fort contraire par le
préjudice qu'en recevoir ſa.
ſanté.Aprésavoir vêcu ſi chreſtiennement
, elle eſt morte
âgée de cinquante- fix ans ,
tres- regretée de leurs Majeſtez
Britanniques , de toutes les
perſonnes de leur Cour , & de
toutes celles dont elle estoit
connue à la Cour de France
le Royluy-meſme ayant rendu
témoignage de l'eſtime qu'il
faiſoir de ſa pieté , de ſon eſprit
&de ſa ſageſſe. De ſon mariage
font fortis Mr le Marquis de
2
F6
132
MERCVRE
Montgommery, & cing Filles,
ſçavoir , Marie , mariée à Milord
Vicomte de Montaigu ;
Françoiſe , à Milord Marquis
de Sufolck,Anne à Milord Vicomte
de Carington , & Lucie
& Vvenefrede qui ne ſont
point encore mariées . Le Frere
de feu Madame la Ducheſſe de
Povvis , qui eſt Duc & Pair du
Royaume d'Angleterre , porte
âpreſent le titre de Duc de
Beaufort. Les Armesdela Maifon
de Sommerſet ſont écartelées
de France&d'Angleterreàla bordure
composée de gueules & d'argent
;& la Maiſon de Povvis
porte , party d'azur & de gueules
à trois Lions d'argent , dont deux
enface&un en pointe brochantfur
T'azur &le gueules. On a fait une
fort belle Elegie ſur cette mort,
mais ſa longueur , & les autres
:
:

GALANT.
133
1
Vers dont j'ay àvous faire pare
fur les conqueſtes du Roy , ne
me permettent point dela mettreicy.
Le 17. du mois paſſé , Madame
Dumbarton , femme de
Mr de Douglas , Milord d'Ecoffe
, & Commandeur de
l'Ordre de Saint André , mourut
à SaintGermain en Laye ,
aprés avoir receu tous ſes Sacremens
par les mains de Mr
l'Abbéde Converſet , Curé &
Prieur de ce lieu , avec toutes
les marques d'une grande pieté
&d'une entiere refignation à
Ja volonté de Dieu, en preſence
du Roy & de la Reine de la
grande Bretagne. Le lendemain
dix huit, leCorps , aprés
les devoirs rendus en l'Egliſe
Parroiffiale , fut tranſporté à
Paris; enl'Eglife de SaintGere.
"
1341
MERCVRE
7
۱
main Deſprez , pour y eſtre
inhumé dans une tres - belle:
Chapelle qui a eſté fondée par
les Anceſtres de Mr de Douglas ..
Ce corps eſtoit dans unCaroſſe:
de deüil attelé de ſix Chevaux,
accompagné de deux Eccleſiaſtiques
, & ſuivy d'un autre
Carroſſe de la Reine de la grande
Bretagne , où eſtoient Mr
l'Abbé de Converſet,Mrl'Abbé
Coigtenton , Predicateur ordinaire
du Roy d'Angleterre , &
de pluſieursGentilshommes.Le
Convoy arriva fur les 9.heures
ſoir à l'Abbaye , à la clarté de
quantité, de Flambeaux . Le
Pere Sou- pricur en Chape,avec :
un Diacre , un ſous-Diacre &
des Chapiers , vint recevoir le
Corps à, la, porte , eſtant à la
teſte de plus de ſoixante Religieux,
tous avec des Cierges ...
GALANT.
133
Mr l'Abbé de Converſet avec:
un Surplis & une Etole le preſenta
par un éloquent diſcours
qu'il fit en Latin ; fur l'illuſtre
Naiſſance de Milord Dumbar
ton ,ſur la pietéde ſes Anceſtres.
&fur leur fidelité inviolable
au ſervice de leurs Rois. Ily repreſenta
auſſi les grandes vertus
de la Défunte , entre leſqueles
avoittoujours paru une ſinguliere
pieté , qu'elle avoit fait
éclater encore plus particulierementdans
tout le cours de ſa
maladie , qui ayant eſtélongue
& facheuſe , luy avoit fourny
la matiere d'une admirable pa.
tience . Le Pere Sou-Prieurluy
répondit pareillementen Latin
parun excellent difcours où il
s'étendit auſſi ſur les Eloges de
la Famille illustre de Milord :
Dumbarton , & fur fon merite
136 MERCVRE
perſonnel , & il le finitten res
merciant Mr de Converſet du
preſent qu'il faifoit à l'Egliſede
Saint Germain des prez , &
n'oubliantpasles louanges qu'il
devoit aux vertus de la Défun- ..
Enfuite le Corps fut porté au
Choeur , où l'on chantales Veſpres
des Morts , & delà en la
Chapelle, avec toutes les pompes
& les honneurs que l'on
eſtoit obligé de rendre à une
perſonne deſa qualité .
Madame Deſtouches , Femme
d'une vertu exemplaire ,
eſtoitmorte peu de jours auparavant.
Elle s'appelloit Elizabeth
Talon & avoit le
Germain ſur Mr Talon , prefident
à Mortier au parlement
de paris , ey devant premier.or
AvocatGeneral comme fur la
Mare de Mr Phelypcaux de
GALANT.
137
, Controlleur
2
Pontchartrain
General,Miniſtre & Secretaire
d'Estat , qui s'appelloit Talon
&de meſme ſur feu Mr de Beſons
Conſeiller d'Eftat , Pere de
Mr de Befons , Intendant en
Guienne , de Mr de Befons ,
Meſtre de Camp &Brigadier
des Armées du Roy , & de Mr
l'Eveſque d'Aire. Ele eſtoit
alliée à Meſſieurs Bignon , à
Meſſieurs de la Houſſaye , &
àla pluſpart des plus confiderables
Familles de la Robe.Elle
avoit épousé en premieres
noces Julien de Lombart SeigneurDeſgardesde
la Famille
desde Lombart, d'une ancienne
Nobleſſe de Bourgogne ,
dont il y a eu un Grand Ecuyer
de Charles Duc de Bourgogne
tué au Siege de Nancy , Cette -
- Dame a laiſſe deux Garçons
1
138 MERCVRE
de ſon premier mariage.L'aiſne
eſt Secretaire des Commandemens
de S. A.S. Monfieur le
prince ,& ſa ſageſſe n'eſt pas
moins connuë que ſon eſprit .
Le ſeconda eſté quinze ans
dans le ſervice , & a épousé depuis
peu de tems Dame Marie
Madeleine Danglure ,Fille de
feu Loüis Saladın Baron d'Anglure
, mort Gouverneur du
haut- palatinat , & ayant un
Regiment d'Infanterie , & un
de Cavalerie pour le Service
duDuc de Baviere . Ce Baron
d'Anglure eſtoit de la Maiſon
d'Anglure, originaire deChampagne
, dont l'un des Anceſtres
contemporain de S.Loüis,rempota
un grand avantage outre-
Merfur un Chef des Sarrafins,
nommé Saladin , ce qui donna:
GALANT .
139
Heu aux Seigneurs d'Anglure
ſes Deſcendans , d'ajouſter le
nom de Saladin à celuy
d'Anglure ..
Mr de Villette , Gouverneur
de la Citadelle de Nancy , eſt
auſſi mort depuis quelquetemps.
C'eſtoit un homme
d'une qualité diſtinguée dans
le Pays Chartrain ,& qui s'êtoit
acquis de la réputation
dans le ſervice. Il avoit épousé
Dame Marie Madeleine de
Villiers , d'une des meilleures
&des plus anciennes Familles
de Paris,qui a remply des Char.
ges honorables dans l'Epée &
dans la Robe ,& qui est encore
aujourd'huy fort diftinguée
dans la Chambre desComptes .
Madame de Villette eſt Soeur
de Mri'Abbé de Villiers , que
ſes Predications n'ont pas ren..
140 2 MERCVRE
du moins celebre,que le talent
d'écrire également bien en
Profe & en Vers , comme vous
en avez pû juger par l'excellent
Poëme de L'Artde prefcher , &
par les Reflexions sur les defauts
d'autruy,& comme on en pourra
juger encore bien-toſt par
d'autres Ouvrages qu'on dit
qu'il eſt ſur le point de donner
au Public, cetAbbé employant
àla compoſition desLivres touiours
ageables & utiles,le temps
que le travail de la Chaire
luy peut laiſſer libre...
Jajoûte àces morts celle de
MrGobelin, Aumônier du Roy
Abbé Commendataire de No.
ſtre- Dame de Coëthaloüan . Il
eſtoit Superieur de la Maiſon
Royale de S. Loüis à S.Cir.Cet
employ fait ſon éloge. Il n'y
avoit qu'un homme d'une tres-
24
GALAN T.
141
grande distinction & d'une
picté éprouvée , qui puſt en
eſtrepourveu .
Toutes ces morts ont eſté
ſuivies de cellede Mr de Faucon
de Ris , Premier preſident
au parlement de Normandie .
Il eſt mort à Roüen , âgé de
quarante- sept ans . Je parlay
amplement de lay quand il fut
nommé pour cette importante
Charge,& je vous appris qu'il
eſtoit le quatrième de cette
Famillequi l'ait poſſedée .
Il me reſte à vous parler
d'une pertetres - cõfiderable que
les Capucins ont faite en la
perſonne du Pere Bonaventure
de Recanati , Predicateur du
Pape. Il eſt mort âgé de ſoixante
& ſeize ans , au Convent de
Rome le 14. de Mars,parmy les
larmes & les ſoupirs de tous
3
142
MERCVRE
Religieux , qui ne purent prefque
chanter pendant ſes Funerailles
,tant ils regrettoient
amerement cet excellent homme
, qui eſtoit l'exemple &
l'ornement de tout l'Ordre . Il
avoit cinquante cinq années
deReligion,pendant leſquelles
fon rare merite l'avoit élevé
aux premieres Charges , ayant
eſté pluſieurs fois Provincial de
la Province de la Marche
d'Ancone , vingt- cinq ans de
ſuite Définiteur General , &
deux fois Procurer & Vicaire
General. Il a fait paroiſtre dans
tous ces emplois,une prudence
consommée , une penetration
& une force d'eſprit merveilleuſe
, & un zele ardent &
infatigable pour toutes les ob .
ſervances regulieres , où il ne
manquoit jamais de ſetrouver
GALANT.
143
le premier , eſtant d'ailleursle
plus doux,& le plus affable de
tous les hommes , bien- faiſant,
extrémement charitable , d'une
humeur & d'une conduite
toujours égale & reglée ,
quoy qu'il fuſt pour ſa perfonne
fort auſtere , humble
, pauvre & qu'il euſt
un entier détachement de toutesles
choſes de la terre. De.
ſi belles qualitez luy avoient
acquis l'eſtime & l'affection
particuliere des perſonnes les
plus qualifiées,qui ne le quittoient
jamais qu'avec une extréme
fatisfaction. Il avoit un
profond ſçavoir , un grand
fond de picté,une conversation
ſpirituelle & aisée , & des manieres
auffi douces qu'engageantes;
mais ce qui ſur tout
l'a rendu fameux & recom
14
144 MERCURE
1
mandable , c'eſt le talent merveilleux
qu'il avoit pour la
Predication . En effet, il a para
avec tant d'éclat , & avec un
applaudiſſement ſi univerſel ,
dans les plus celebres Chaires
de l'Estat Eccleſiaſtique , qu'il
paſſoit ſans contredit pour le
premier Predicateur de toute
l'Italie , & peut- eſtre de toute
l'Europe. Il eſtoit infiniment
éloquent , fort patctique , &
plein de l'onction du S. Eſprit
ne déguiſant jamais la verité ,
& prêchant hautement les
plus ſeveres maximes de l'Evangile.
Auſſi avoit il eſté
choiſi pour eſtre Predicateur
du Pape. C'eſt un employ
qu'il a exercé luy ſeul pendant
l'eſpace de 18. années avec le
plus grand fuccés , & l'approbation
des Souverains
Pontifes
GALANT.
145
Pontifes Clement X. & Innocent
XI. de tous les Cardinaux
, & de tout ce qu'il y a
de perſonnes diftinguées dans
Rome. Il avoit encore l'honneur
d'eſtre Qualificateur du
SaintOffice , & d'avoir entrée
dans les Conſeils les plus ſecrets
du Saint Siege. Ces 'glorieux
emplois l'ont empêché de condeſcendreaux
voeux de tous les
Capucins qui ont eu deſſein de
l'élire pour leur General , ce
qu'ils auroient fait , ſi pour
s'oppoſer à ſon élection , il n'avoit
employé l'autorité de Sa
Sainteté . Il n'a pû neanmoins
impoſer ſilence à la voix publique
, qui l'a mis plus d'une
fois au nombre des Cardinaux;
mais ſa modeſtie &l'eſtime fin.
gultere qu'il faiſoit de fon habit
& de ſa profeſſion , l'ont fait
May 1691.
G
146 MERCVRE
constamment renoncer à cette
éminente dignité.
Le plaiſir que vous me témoignez
avoir pris à lire les
divers Ouvrages que je vous
ay envoyez ſur la derniere
Conqueſte du Roy , m'oblige
à vous faire part de ceux qui
me reſtent.
*** ***
SUR LA PRISE DE MONS.
L
Ors que LOVIS , fuivy de fes
Troupes fidelles ,
Jette dans Mons leperil & l'effroy
Le finGuillaumefonge àfoy ,
Et vole au fecours de Bruxelles.
QuandBruxellesbien toſt preſte à
changerde Roy ,
Verra camper Louis au pieds deſes
murailles ,
GALANT.
147
Lefin Guillaume , ennemydes Ba.
tailles ,
Ivafecourir Charleroy .
Heros chargé d'une triple Couronne
Quine te coutarien , qu'un de ces
attentats
Que l'équité Britannique pardonne
Aux heureux Scelerats,
DignePatrondeMeffieurs les Etats
Dis nous unpeucommentraiſonne
Quiconque vante ou tateste, outon
bras. A
Maistre dans l'artd'éviter les com.
bats,
Tuprens les Villes qu'on te donne,
Et défens tres bien en perſonne
Celles que l'on n'attaque pas.
F'ay conquis, diras zu , plus viſte
qu'un tonnerre
Trois ... Alte là, rapide Conque.
rant.
G 2
148 MERCVRE
!
Si chaque Regionſemblable à l'Angleterre,
Se rendoit au premier Tiran
Qui daigheroit leur declarer la
guerre,
Un Courrier ne voudroit qu'un an
PourSubjuguer toute la terre,
MADRIGAL.
BEſſus le verreen main défaisoit
Alexandre;
Ainfifaisoit Guillaume,&les Princesdu
Rhin.
Atable ils renverſoient Peronne&
Saint Quentin ;
Cependant à leurs yeux Mons est
reduit en cendre. هرگ
Ce coup devroit bien leur apprendre
Amettre un peu d'eau dans leur
win. ,
GALANT.. 149
T
1
SONNET.
On Heros va finir la guerre ;
Voy le bonheur dont tu jouis ,
France , quandtu te réjouis
✓MalgréleTirand'Angleterre..
Nostre Monarqueest untonnerre,
Etſes exploitsfont inouïs ;
Devant l'invincible LOVIS
Les plus forts murs tombent par
terre.
Les Ennemisde cegrandRoy
Luy cedent par un juste effroy ,
Etfont vaincusdés qu'on lenomme,
A voir ce qu'ilfait en tout liew,
Louis est au deſſus de l'homme ,
Et c'estle Chef d'oeuvre de Dien,
LINIERE .
QUADRAΙΝ.
MEs voeux fons exaucez , Louis
a la Victoire ,
7
G3
150
MERCVRE
Monscede àfavaleur dont le Ciel
àprisfoin.
Peut - estre eust il manqué quelque
choseàsa gloire,
Si l'injuste Naſſau n'en eustesté témoin.
SONNE T.
De l'Europe liguée excufons.
l'ignorance ,
Avant que nous cufſſions l'Europefur
les bras ;
Nous n'avions point connu les forces
dela France ,
Loüis mesme , Louis ne les connoiffost
pas.
Brandebourg, tu l'as dit ſur la vai
ne esperance
Quiflattoit dans Ausbourg vingt
jaloux Potentats ,
Qu'ilait du nom de Grand ſur
tous la préference ,
Si Louis de ce coup ſe tire
d'embarras,
GALANT.
151
S'en est- ilſcentirer ? Nicen'estplus
que poudre .
L'Italie a tremblé de ce ſeul coup
de foudre ,
Mons l'imprenable Mons brûle dans
Sesmarais.
Naſſaune s'approcha que pour se
mieux convaincre ,
Que rien n'est feur pour luy que la
Fuiteou la Paix
Soit que LOVIS lecherche , ou qu'il
foitlas de vaincre..
Le P. Mourgues Jeſuite ,Profeſſeur
Royal deMathema Toulouſe.
TRADUCTION
d'une Epigramme Latine,
Sur la Chaſſe du Roy , & celle
du Prince d'Orange .
NAſſauchaſſe , & fuivant une:
Mente legere
G4
152 MERCVRE
Lafontientparson bras , l'anime
parſavoix;
LOVIS plus grand Chaſſeur, d'une
audace guerriere
Grimpant rochers & mons met sa
proye aux abois.
Leur travail est égal,mais leurpriſe
inégale.
Naffau courant dans un vallon.
Avecfa nombreuſe cabale ,
Prend un Lievre timide ,& LOVIS
un Lion.
L'Abbé Saurin.
AUROY.
SONNET.
E nesçay plus d'éloge à ta Gloire
immortelle ,
Lesauguſtes vertus volent de toutes
parts ;
La Victoire à ton grè plante fes
Etandars ,
GALANT.
153
Elle tefuit par tout où ton ardeur
t'appelle.
Tes Rivauxfont à bout , ta conque
ſte nouvelle
Où Mons a veu ton bras foudroyer
SesRemparts,
Fait trembler les Lions , l'Aigle &
les Leoparts ,
Qu'a trompez d'un Tiran l'audacecriminelle.
Onte prend pour un Mars,qui Mai.
tre du Destin ,
Par un enchainement de prodiges
Sansfin ,
Au milieu des dangers n'en fents
point les allarmes ,
De qui tout l'Univers doit reverer
les loix ,
Quand on voit contre toy toute l'Eu
rope en armes ,
G
154.
MERCVRE
Ne pouvoir arreſter le cours de tess
Explois.
LE ROUGE . Secr.duRoy ...
AU ROY.
EPIGRAME .
penſe au bonheurde
Quand on pens
ce puissant Empire ,
L'esprit remplyde Philisbourg ,
Et de Cazal& de Strasbourg ,
Et de Nice& de Mons , voicy ce
qu'on peut dire.
La Victoire a fixéſon Trône dans
tonfein
Pour l'éclatde ton Diadème ,
Mille vertus chez toyse tiennent..
parlamain ,
Ettes triomphes tout de mesme
Lemeſine.
AUTRE.
Ndemande pourquoy Guillau
me
Eſtvenudans les Pays-bass.
Quipeut l'avoir contraintà quitter
LonRoyaume
GALANT.
155
Aumilieu de tant d'embarras?
Il est venu pour voir l'Armée
De nostre invincibte Louis ,
Dont l'équitableRenommée
Publioit tous les jours les exploits
inouis.
ODE.
Vous, qui trop loinde
la France..
N'estes pasaffez beureux
Pourvivreſous la puiſſance
D'un Roy grand&genereux.
Indiens , Chinois ,Tartares ,
Peuples Chrestiens ,& Barbares
Apprenezsesfaits nouveaux .
Et vous , Nil , Eufrate , & Gange
Pour ouir comme ilse vange ,
Calmezle bruit devos eaux .
Par un profond artifice
Et desmoyensinouis ,
Cent Princes pour l'injustice
Sont armez contre Louis ;;
Mais luyſeul que le Cielguide ,
Oppose un coeur intrepide
D
GG
156 MERCVRE
Aleur complot moustrueux ,
Et du formidable orage
Sa ſageſſe &son courage
Rejettent l'effet fur eux .
Tel ſouvent dansles tempssombres
Le Soleil vient à nos jeux
chaßerdevant luy les ombres
Qui cachoient l'azur des Cieux.
Tel un Lion de Bizerte ,
Quivoit armeràſa perte
Les vagabonds Africains ,
Coursfur euxfans qu'il s'étonne .
Etparles moris qu'il leur donne
Eshape fier de leurs mains.
Dés que le mois des alarmes
Eut faitfondreles glaçons ,
Mon Roycouvre de Gendarmes
Tous les champs d'autours de Mons.
En grand Maistre de la guerre
Ils'en approche& leferre
D'une forest d'Etendarts ;
Et tandis qu'il le visite
GALANT:
1577
Son vaillant Fils qui l'imite
Lefuit comme un autre Mars.
Famais,Architecte habile
Ne laiſſa moins de defauts ,,
1.
Etne mit mieux une Ville
A l'épreuve des affauts.
Au pieds du mur qui l'aſſure
Lafavorable Nature
Fait tourner l'eau d'un marais:
Et ceux que le fiecle antique
Vit de bitume &de Brique .......
Nefurent pasplus épais.
L'Ibere au Cielpeu fidelle
Ala honte denos jours,
D'un Peuple impie& rebelle
Avoit cherché lesecours ;
D'uneGarnisonnombreuse
Laforte Placeorgueilleuses
Rit de ſe voir affieger ,
Etfa trop longue infolence
Forceun Roy plein de clemence
Anela plusménager...
158 MER CURE
Le Monarque quimesure
Ses deffeinsàsa grandeur ,
Veut contraindre la Nature
Aseconderſa valeur.
Nouvel& grand Alexandre ,
Son pouvoir ofe entreprendre
De changer les Elemens ;
Sur le profond marescage
Il s'affermit un paſſage ,
Et des eaux il fait des champs.
Mons entend bien toſt ia foudre
Qui gronde en diverſes parts,
Et chaque jour met en poudre
Quelqueendroit de fes remparts.
L'air eſt plein d'ardentes balles ..
Et deBombes plusfatales
Que le Cheval des Troyens...
Chacun des coups qui les jette
Eft une triſte Comete
Pour la vie&pour les biens..
Ainsi quelquefois Mesfine
GALANT.
159
Voit du baut d'un montfameux
Defcendre pourfaruine
Un cruel torrent defeux .
Un toit tombe, unse consume,
Et du quartier qui s'allume.
En vaintoutle Peuplefuit ;
Aux lieux qu'il prend pour azile
La flâme encor plus agile
Ledevance&le poursuit..
LePrince que plus d'un crime
Amis sur le Trône Anglois
ASecourir Mons anime
L'Espagnol ,le Hollandois ;
Mais s'il preffe & s'il s'avance ,,
C'est une vaine apparence
Dont il les tient éblouis ;
Ilfait , quoy qu'il diffimule ,
Quèles Monstres plus qu'Hercule:
Doivent redouter Louis.
Enfin la Ville obstinèe
N'afait que de vains efforts;,
Dedans, elle est fulminée ..
160 MERCVRE
Et preſte à forcer , dehors.
Par lefort qui la menace
Le Soldat qui perd l'audace...
Sefoumet au grand Vainqueur ;;
Tout Mons àfespiedsſe jette
Et beniffant sadéfaite ,
Rend moins les clefs que le coeur...
2
Cependant mon Roy foudroye
Loin de là d'autresremparts ,
Villes & Chasteaux , tout ploye
Sous fes heureux Etendarts.
Des Ennemis de la France .
Les projets pleins d'inſolence
En l'airfont évanouis
Et l'on voit par nos conquestes
Que leur Ligue avec ceni teftes
Amoins debras que LOVIS.:
SONNET.
T
Remble, Espagne,à l'aspect du
plusgrandRoy dumonde ,
Quiſçait vaincre enCefartes Suiets
indomptez
Leurs Forts dés qu'il paroist font
d'abord emportez
A
GALAN T. 16μ .
1
Etfon nom seulfera le mesme effet
fur l'Onde.
TuSentiraspar toutsa valeur fans
Seconde ,
Qui prend en peu de jours tes plus
fortes Citez,
Malgré tant de Guerriers par la
peur arreſtez
Qui n'ofent l'approcher lors quefon
foudregronde.

Politique au mépris de ta Religions
Quifouffres l'Hereſie& la rebellion
Contre unRoy Tres - Chrêtien,contre
toy- mesme , Espagne ,
Après ces lâchetezne merites.18 pas
Qu'ilvienne conquerir la prochaine
Campagne ,
Cequite reste encore à perdre aux
Pays-bas?
162 MERCURE

MADRIGAL.
Vand on Sçait que LOVIS a
formé le deſſein
De donner un combat ou de prendre
une Ville ,
L'heureux fuccez en est certain,
Ille veut, c'eſt aſſez,pour lay tout est
facile....
Va tail affieger Mons ? Mons en
vain se deffend.
Cette importante Place en quinze
iour; se rend
C'est ce que l'avenir à peine pourra
croire.
Il l'auroit mesme encor conquiſe en
moins de jours ,
Mais Sçachantque Naſſau marche
poursonsecours,
Et promet aux Flamans une pleine
Victoire ,
Pour confondre l'orgueilde cet ambiticax
GALANT. 163
Ce Monarque l'attend , & prend
Monsàses yeux.
Du Four ; du Havre de Grace.
EPIGRAMME ..
Conquerir Seul l'Empire des
deux Mers,
Pouvoir mettre en Campagne en
tout temps des armées ,
Renverſer Mons , reduire les Val
lées,
C'estainsiqu'onserend Maistre de
l'Univers.
DE LAISTRE Avoc . au Parlement
AVTRE.
APrés tant de Forts emporà.
tez
Les Villes en tous lieux à ſerendre
Sont preftes
Rien ne peut plus, GrandRoy , rem
tardertes Conquestes ,
Nos Ennemis font demontez .
Le mêmes.
1 164 MERCVRE
+
i
4
Lapriſe de Mons eſtant non
foulement glorieuſe au Roy
par elle même , mais encore
par les circonstances dont elle
a eſté accompagnée , les réjoniſſances
qu'on en a faites
par toutes les Villes du Royaume
, ont eſté extraordinaires
& en fi grand nombre , qu'à
peine un Volume entier les
renfermeroit ſi je n'en vous
lois oublier aucune . ainſi je
me contenteray ce mois- cy
de vous parler d'amiens & de
Bonrdeaux , & ce que je vous
en diray vous fera connoiſtre
queles peuples n'ont rien épargné
pour ſignaler la joye qu'ils
ont euëde cette grande cons
queſte.
Le Dimanche 6. de ce mois
deux Compagnies de Bourgeois
privilegiez d'Amiens
GALANT.
165
monterentdes ſept heures du
matin à la grande place de la
Ville , & demeurerent armez
pour garder le feu d'artifice
qu'avoient fait dreſſer Mrs
Chocqueule Premier , & Firmin
Dehen , Durieux , Lorel ,
le Févre du Caſtel
,
&de
Pontrevé , Echevins. A dix
heures , deux autres Compagnies
de Bourgeois privilegiez
monterent auſſi en armes devant
l'Hôtel de Ville , où le
Buchereſtoit preparé. Unmoment
aprés, quinze Efcouades
priſes des quinze Compagnies
de Bourgeots , s'affembleront
à la Place d'Armes, cha
cune avant fon Enfeigne& fon
Tambour, & elles furent conduites
par les Chefs des Efcouades
à la grande Place , où
elles déplierent leurs Enfei
166 MERCUR E
gnes aux feneftres des Maifons
, & y demeurerent à la
garde. Il y monta une Brigade
de Cavalerie du Regiment
Loëmaria. A midy , la groſſe
Cloche du Béfroy commença
à ſonner en branle & continua
le reſte du jour à differentes
repriſes , à quoy tous
tes les Cloches de la Cathedrale
répondirent auſſi toſt.
Sur les trois heures , les Officiers
du prefidial entrerent au
Choeur de cette Eglife , &y
prirent place à la droite des
hautes Chaires , ayant à leur
teſte Mr de Verville Lieutenant
de Roy. Mrs les premier
& Echevins y entrerent peu
aprés , precedez de leurs Offi .
ciers de Ville & de leurs Sergens
à Maſſe . Ils ſe placerent
aux autres Chaires de la gau
GALANT. 167
che, & leurs Sergens & Officiers
ſur un petit Banc. LeTe
Deum , que chanta une excellente
Muſique dela Cathedrale
, fut commencé au brait
du Canon de la Citadelle , de
toutes les Cloches , de quinze
Trompettes , & de vingt Tambours
qui estoient aux voutes
&qui faifoientune harmonie
fort guerriere. Le tout finit par
mille cris redoublez de Vive
leRoy Ensuite Mr les Premier
& Echevins allerent en Corps
viſiter la grande Place , où
tout leur parut en fort bon
ordre. Mr Chauvelin , Intendant
de la province , ayant
donné à midy un fort beau
repas à un grand nombre de
Perfonnes confiderables , donnale
foir un fort beau ſoupé
auxDames . Sur les neufheu
168 MER CVRE
1
1
!
;
1
res , Mr de Verville , Lieutenant
de Roy, s'eſtant rendu à
l'Hôtel de Ville, mit le feu au
Bucher avec Mrle Premier ſuivideMrsles
Echevins,au bruit
du, Canon , des Trompetes ,
des Tambours, & desHaubois
Une heure aprés , ils ſe rendirent
à la grande Place , où ils
ſçavoient que Mr Chauvelin
eſtoit arrivé avec les Dames ,
pour voir jouer le Feu d'Artifice
, & où ils trouverent les
Bourgeois armez rangez en
haye . Cette Place éclairée
d'une infinité de lumieres que
l'on avoit préparées das ce defſein
. Celuy du Feu eſtoit un
Portique d'Ordre Corinthien
à quatre Façades. Sur la plateforme
eſtoit élevée une Statuë
de Jupiter qui lançoit des foudres
ſur une Ville. On liſoit ces
mots ſur le piedestal ,
Fulminat,
GALANT. 169
Fulminat , ecce ruunt Montes.
D'un foul coup de Tonnerreil abbat
3 les Montagnes.
Chaque Façade eſtoit ornée
des Armes du Roy , de Trophées
, d'Inſcriptions , & de
Deviſes . Autourde la friſe qui.
eſtoit ſemée de Fleurs de Lys ,
on avoit dépeint des Bombesen
feu & des Boulets rouges,& far
chacune des quatre Clefs du
Portique, on voyoit entre deux.
Feſtonsles Armes de Mrle Duc
d'Elbeuf , Gouverneur de la
Province , celles de Mr de Bar,
Gouverneur d'Amiens , celles
de Mr Chauvelin , & celles de
la Ville.On liſoit cette Infcrip
tion dans la premiere Façade .
fur un Cartouche qui eſtoitau
deſſus du Portique. Ludovico
Magno , quod Montes , Urbem
aggeribus , cuniculis , ipfo fuu in-
May 1691 .
H
170
MERCVRE
acceffam, pertinaci quindecim dierum
obfidione perdomuit. C'eſt à
dire ,Al'honneur de LOUIS LE
GRAND , qui aprés un Siege
de quinze jours a pris Mons, Ville
inaccessible, tant par la situation
du lieu queparfes fortifications.
Deux Deviſes accompagnoient
cette Inſcription.L'une
repreſentoit les Geants accablez
ſous les Montagnes , avec
ces paroles.
Suafubmolegernunt.
Onles voit accablez fous leurs propres
ruines..
Laſeconde eſtoit une haute
Montagne frappée du Tonnerre,&
ces mots d'Horace.
Feriuntque ſummos fulmina
Montes.
Lafoudre bat toujours les plus
hautes montagnes.
On liſoit cette autre Inf
15
**
GALANT.
171
cription dans le Cartouche de
la ſeconde. façade. Ludovico
Magno, quodMontes, arcemHif-
Panerum munitiffimam , in Gallorum
propugnaculum inexpugnabile
commutavit.C'eſt àdire,Al'honneurde
LouisleGrand,quideMons
Place autrefoisfi avantageuseaux
Espagnols , en afait pourles Françoisun
Boulevart imprenable. Les
deux Deviſes eſtoient , l'une
uneCitadelle miſe en cendres.
Quod adverfa Iovi.
Pourquoy contrele Ciel s'eftoitelle
élevée?
Et l'autre une Bombe , qui en
ſe crevant , renverſe tout ce
qui luy eſt oppoſe , Fit viavi.
Malgré la resistance elle s'owa
vreun chemin.
Le Cartouche de la troifiéme
façade avoit pour Inſcription.
Ludovico Mazno , quod Fæderat
H 2
172 MERCVRE
torum copias abſeſſis Montibus
auxilium Arauficano duciferentes,
fruftrà adpugnam laceffivit. C'eſt
àdire. A l'honneur de Louis le
Grand , de ce qu'ila pris la Villede
Mons , à la veuë des Troupes des
Alliez qui estoient venues pour la
fecourirſous la conduite du Frince
d'Orange ,fans qu'ilait pû les attirerau
combat . Ces deux Deviſes
eſtoient aux coſtez de l'Infcription
. La premiere , unCoq
qui fait fuir un Lion de deſſus
unemontagne. Propiora pericula
terrent.
Ledangerest trop prés pour n'en
avoirpaspear.
La feconde repreſentoit le
Feu follet qui s'enfuit devant
ceux qui le poursuivent. Fugit
illefequentes.
Pour l'obligerà fuir il suffit de
leſuivre.
On liſoit cette quatrième
GALANT.
173

Inſcription fur le Cartouche
de la derniere façade. Ludovico
Magno , quod Montibus continuo
igne perruptis , cives , refctis corum
ad ficiis , clementiâmagis quàm
fortitudine fecit. C'eſt à dire . A
La gloire de Louis le Grand , de ce
qu'aprés avoir preſque ruinéla Ville
deMonspar un feu continuel, il a
voulu , en rétabliſſant les maisons
des Citoyens , s'en faire plûtoſt ain
mer parfaclemence , que s'enfaire
craindreparlaforce...
Les Deviſesde cette derniere
Inſcription eſtoient un Soleil
agreable au deſſus d'une prairie
émaillée de fleurs , avec
ces paroles d'Horace. Informes
byemes reducit Jupiter, idem Submovet..
S'il amene l'hyver , il nous rend
lebeautemps.
L'autre Deviſe faifoit voir la
H3
174
MERCVRE
fameuſe Lance d'Achille, dont
la playe de Thelephe fut guerie
, & on y liſoit ces mots ,
Quafecit vulnera,Sanat.
Si j'ay sceu vous bleffer , je
Sçauray vousquerir.
Tout cet Ouvrage eſtoit de
prés de trente pieds de haut
fur dix huit de large , chargé
d'une infinité de fuſées & d'artifice
de toutes manieres .
Après un grand bruit que firentles
Tambours , les Trom
pettes , les Hautbois , & le Canon
que l'on avoit préparé ſur
lagrande Place, & une décharge
generale de tous les Bourgeoisarmez
, on tira foixante
fuſées volantes , & un Dragon
eſtat party d'une maifon voiſine
, alla allumer le feu d'artifice
qui joüa avec beaucoup d'ordre
pendant une heure ,& finit
GALANT.
175
par une nouvelle décharge de
Mouſqueterie. Il fut d'autant
plus confiderable , qu'on y tira
plus de huit mille fuſées , &
cing mille petards . Tous les
Bourgeois firent des feux devant
leurs maiſons , & les réjoüiſſances
continuerent toute
la nuit..
Elles ſe firent le même jour
àBordeaux pour cette meſme
Conqueſte. Aprés qu'elles eurent
eſté annoncées le matin
par le Canon , au bruit des
Tambours & des Fifres , les
Compagnies qui ſont au nom
bre de trente fix , allerent ſe
ranger en tres-bel ordredevant
l'Hoſtel de Ville ,& le Parle .
mentſerendit en robes rouges
à l'Egliſe Cathedrale de Saint
André, La Cour des Aides s'y
trouva pareillement , avec les
H 4
1
176 MERCVRE
Treſoriers & les Jurats Gouverneurs
de la Ville , Mr de
Sourdis , Commandant pour le
Roys'yeſtant auſſi rendu accompagné
de quantité de Nobleffe
. Mr l'Archeveſque de
Bordeaux entonna le Te Deum
quifut chanté par une excellente
Muſique , de la compoſition
de Sieur Morar. Cette Ceremonie
achevée ,M.deSourdis,
ſuivy deſesGardes & de ceux
de la Ville ; & accompagné des
Iurats , alla à l'Hôtel de Ville où
il étoit attendu par les Compagnies.
Il mit le feu au Bucher,
au bruit de la Mouſqueterie
qu'il trouva tresbelle. Il y avoit
plus de dix mille hommes fort
leftes , & les Compagnies eftoient
marquées par differentes
livrées . Celle de Mr des
Chaſterons estoit de plus de
GALANT. 177
cinq cens hommes. Toutes ces
Troupes ayant defilé , Mr de
Sourdis ſe retira dans fon Hôtel
où il donna un magnifique
repas à un fort grand nombre
de perſonnes qual fiées de l'un
&de l'autre ſexe. Mr le premier
Preſident du Parlement ,
& Mr de Sadiraut , premier
Preſident à la Cour des Aides ,
donnerentauſſi de fort fomptueux
repas à pluſieursDames .
Il y eatle foir des illuminations .
par toute la Ville , & cetteFeſte
finit par une ſalve generale
de toute l'Artillerie & Moufqueterie
de la Ville& des Forts.
Pluſieurs Fontaines de Vin avoient
coulé tout le jour..
Sur la fin du mois paffé , la
Compagnie des Maiſtres Chirurgiens
Jurez de Paris fic
chanter dans l'Eglife de Saings
H
178 MERCVRE
Coſme une Meſſe ſolemnelle
pour la ſantéde Sa Majesté, &
pourla profperité de ſesArmes.
Tous les Particuliers y aſſiſterent
, ce qui édifia beaucoup .
ungrand concours de peuple
qui s'y eſtoit rendu pour avoir.
partà cetteCeremonie. Ie puis
vous dire à l'avantage de la
mefme Compagnie , qu'on a
entierement lieu d'eſtre ſatisfait
de ſa regularité à s'acquiterdes
exercices Anatomiques
fondez par feu Mr Bienaiſe.Mr
Chevalier, ſiconnu par ſesDiffections
publiques , a fait cet
hiverleCours Anatomique.li a
eu le plaiſir, de voir au nombre
de ſes Auditeurs, ce qu'il y a de
plus diſtingué de SçavansCurieux
dans la Magistrature &
dans la kobe .
La pluſpart des choses qui
GALANT.
179
arrivent , ſemblent ſe regler
par le hazard , tant elles ſe font
pardes cauſes éloignées de ce
qu'on auroit préveu. VnCavalier
plein d'eſprit , & ayant
mille belles qualitez , fe fit aimer
d'une jeune Demoiselle ,..
qui trouva en luy tout ce qui
pouvoit meriter ſon choix. Elle
dépendoit d'un Pere un peu
difficile à gouverner , & qui
eſtant naturellement avare ,,
n'eſtoit pas d'humeur à ſe réfoudre
aifément à luy faire
quelque avance qui fuſt affez :
forte pour diminuer ſon revenu.
Il ne laiſſoit pas de l'aimerr
fort tendrement , & lorsqu'ili
ent ſçeu que le Cavalier luyw
touchoit le coeur , comme ill
avoitlieu d'eſtre contentde fona
bien , il ne voulut point lacha--
griner, en s'oppoſant à ſa pafi
H16
180 MERCVRE
1
ſion , mais tout ce qu'on put
obtenir de luy , ce fut qu'il feroit
les frais de la Noce , tant
pour les habirs , que pour quelques
meubles , & qu'aprés ſa
mort , ſa Fille partageroit fa
ſucceſſion avec ſes autres enfans,
qui estoient au nombre de
trois . Le Cavalier qui aimoit
la Belle , ſe fuſt reſolu à la prendre
pour ſes droits , fi-elle cuſt
voulu yconſentir, mais s'eſtant
flatée qu'avec le tempsſes Amis
viendroient à bout de ſon.
Pere , elle trouva à propos de
ne rien précipiter , & empêcha
fon Amant de ſe relâcher
fur les propoſitions qu'il avoit
faites. Son panchant. eſtoit
pour la dépenſe, & elle voyoit
qu'avec le ſeul bien du Cavalier
, on auroit peine à fournir
à celle que fon inclination la
GALANT. 181
portoit à faire . Ainſi les choſes
farent traifnées en longueurs
&il ſe paſſa deux ou trois mois
fans que l'on fongeaſt à rien,
conclurre . Pendant ce temps ,
le Cavalier s'eſtant rencontré
avec des Dames auprés de qui
brilloit un Marquis par beaucoup
de chofes dites hardiment
mais avec peu de bon ſens
s'aviſa de l'entreprendre , & la
pouffa d'une maniere fi vive ,
qu'il en demeura déconcertés
Le hazard voulut que s'eſtang
trouvez enſemble en d'autres
viſites ,le Marquis fut encore
pouffé par le Cavalier qui bat,
toit à froid , & qui relevoίε
admirablement une
fans pourtant rien dire de defobligeant
. Ce fut un ſecond,
outrage qu'il ne put luy pardonner.
Il refolut d'en tirer .
fottife
182 MERCVRE
vangeance à quelque prix.que
ce fuft , & ayant appris l'amour
que le Cavalier avoic
pour la Belle,& qu'il eſtoit preſte
de l'épouſer , il ſe miten teſte
de luy ôter ſa Maiſtreſſe , en
allantla demander pour luy à
fon Pere. Ileſton extremement
riche , & d'une naiſſance fort
confiderable . Ainfiil ne douta
point qu'en ſe déclarant il ne
fuſt tres bien receu. La choſe
arriva comme il l'avoit eſperé....
Le Pere trouva dans ce party
des avantages figrands pour ſa
Fille , que craignant de rebuter
le Marquis , s'il le traitoit
comme il avoir fait le Cavalier
, il convint de luy donner
une Terre de quatre mille
livres de rente. Le Marquis de
fon coſté le laiſſa le maiſtre
des articles du Contrat,& vous
GALANT.. 183
jugez bien qu'il n'oublia pas
les intereſts de fa Fille .La choſe
eſtoitarreſtée quand elle en
cutle premieravis .Les aſſurances
qu'elle avoit données au
Cavalierjointes aux ſentimens
de ſon coeur , qui luy eſtoient
favorables la jetterentdans un
embaras terrible , mais enfin
l'ambition l'emporta,& commc.
la volonté de fon Pere luy fervoitd'excuſe,
aprés avoit eſſuyée
quelques reproches , elle ſceut
fibien luy faire entendre raifon
, qu'il fut contraint d'avoüer
qu'il l'aimeroit peu , s'il !
luy faiſoit perdre une ſi haute
fortune. Ilcutmeſme la diſcretion
deluy cacher le peu d'eſtime
qu'il avoit pour le Marquis,
&prit congé d'elle pour aller
faire un voyage de deux ou
trois mois , afin de s'épargner .
184 MERCVRE
le chagrin d'eſtre le témoins
d'un mariage qui le privoit de
ce qu'il aimoit le plus. Il ſe fit
en peu de jours , & la Belle à
quile Marquis n'épargna rien
pour la mettre dans l'éclat où
elle ſouhaitoit d'eſtre , aprés
luy avoir fait faire beaucoup
de dépenfes inutiles , uſa du
pouvoir qu'elle avoit fur luy
pour en obtenir encore une
Croix de Diamans. Elleluyen
fit de telles inſtances qu'il fut
obligé de la promettre , & comme
elle estoit fort impatiente
dans tous ſes defirs , un mois
qu'il differa à la fatisfaire luy
parut un Siecle. Enfin pour luy
mettre l'eſprit en repos , & fe
délivrer de ſes importunitez ,
il la mena chez cinq ou fix-
Joüailliers qui neluy monſtrerent
rienoù il ne trouvaſt des >
GALANT. 185
defauts conſiderables. L'un'
d'eux luy dit que s'il vouloit
attendre dix ou douze jours il
acheveroitde mettre en oeuvre
des Diamans forts nets & fort
bien choiſis ; & qu'il feroit
contentde la Croix, mais qu'il
la vendroit cinq cens Louis ,
ſans en pouvoir rien rabattre.
LeMarquis ne témoigna aucun
empreſſement de la voir à
cauſe du prix , mais la Damele
priade la vouloir apporter chez
elle , & pendant ce temps ſes
carreſſes redoublées diſpoſerent
le Marquis à luy faire ce
preſent. Le louaillier vint , la.
Croix fut trouvée toute charmante
, & on lay compta les
cinq cens Louis en preſence de
deux ou trois Femmes que le
hazard avoit amenées chez
elle . Sa joye fut grande de fe
186 MER CURE
voir parée d'un fi beau Bijou ,
&cette nouvelle marque d'amour
que luy avoit donnée ſon
Mary , l'obligea à prendre de
luytousles foins poſſibles dans
une fafcheuſe maladie dont il
fut ſurpris peu de jours aprés
Les Medecins n'y purenttrouver
aucun remede , & quand
ils luy eurent dit qu'il devoit
fonger à ſes affaires , il pria la
Dame,ſielle vouloit qu'il mouruſt
content , de ne luy pas refuſer
une choſe qu'il vouloir
luydemander.Ladouleur faufſe
ou veritable qui fournittoujours
des larmes aux Femmes
dans ces fortes d'occaſions, luy
en fitverſer en abendance ,&
ce ne futqu'en pouſſant mille
fanglots qu'elle l'aſſcura qu'il
obtiendroit tout. Alors il expliqua
ſa priere qui ſe reduifit
GALANT. 187
à la Promeſſe qu'il exigea d'elle
, de n'epouſer point le Cavalier.
Il la reïtera pluſieurs fois,
sant cette affaire luy tenoit au
coeur, & ce furent les dernieres
paroles qu'il pût prononcer.
Sa mortluy fit pouffer tous les
cris qui font ordinaires dans.
la perte d'un Mary. Elle pleura
s'affligea , & dit à tous ceux
qui luy parlerentde ſe reſigner
àla volonté de Dieu , que rien
ne ſeroit jamais capable de la
conſoler , mais auſſi toſt qu'-
elle eût eu le temps de ſe recueillir
affez pour faire refle-
'xion, qu'elle demeuroit une
riche Veuve , elle trouva à
propos d'eſtre moderée dans
ſadouleur &ſe rendit aux १
conſeilsde ſes Amies qui ne
furent point d'avis qu'elle ſe
gaſtaſt le teint , en continuant
188 MERCVRE
de pleurer un Mort qu'elle ne
pouvoit reſſuſciter. Le Cavalier
à qui on manda cette
nouvelle, revint promptement
luy faire ſes complimens . Elle
lesreceut comme d'un Amy
qu'elle ſçavoit qui l'aimoit
toujours , & le pria de la voir
fort rarement pour fermer la
bouche àla médiſance. Il crut
qu'il neluy déplairoit pas s'il
ſe diſpenſoit de luy obeïr , &
n'ayant pû s'empeſcher
d'autres viſites de luy expliquerles
ſentimens de fon coeur,.
elle l'arreſta en lay apprenant
ce que fon Mazy l'avoit engagée
à luy promettre. Le Cavalier
ſurprisde cet incident ,
lay demanda fi elle a voit oublié
qu'il n'avoit tenu qu'à elle
qu'il ne l'cuſt épousée ſans aucun
bien , & s'il eſtoit juſte
en
GALANT. 189
qu'aprés s'eſtre arraché à luymeſme
pour la laiſſer en eſtat
dejouïr de ſa fortune , elle ne
fuſt point touchée de ce qu'il
avoit ſouffert,quand elle estoit
en pouvoir de diſpoſer d'ellemeſme
. La Dame luy répondit
qu'elle ſe ſentoitlemême coeur
mais que tant de monde avoit
ouy la priere que ſon Maryluy
avoit faite en mourant , que ce
feroit l'offencer dans le tombeau
, & s'expoſer à la raillerie
publique , que de n'executer
pas ſa derniere volonté . Il tâ
chaen vain de faire parler l'Amour
, la Dame n'écouta rien ,
&d'autres converſations qu'il
eut avec elle fur cette meſme
matiere , ne la purent obliger
à changer de ſentiment. Cependantil
arriva une choſe qui
produiſit un effet bizarre , que
190
MERCURE
i
le dépitde la Dame rendit heureux
pour l'un & pour l'autre .
Une de ſes meilleures Amies
qui devoitaller au Bal,luy vint
emprunter ſaCroix, & comme
elle en loüoit la beauté, unOrfévre
qui estoit preſent , & qui
apportoit de petits flambeaux
de Cabinet qu'on luy avoit
commandez , prit cetteCroix
qu'il entendoit tant vanter ,
& aprés l'avoir examinée , il
dit que le travail en eſtoit
fort beau , & que ſi ony avoit
employé de bons Diamans ,
elle vaudroit tout au moins
deux mille écus. LaDame luy
répondit qu'il falloit que les
faux Diamans fuſſent bien
chers , puis qu'on avoit payé
de ceux qu'il voyoit cinq cens
Louis d'or en ſapreſence. L'Orfévre
perſiſta à dire fi affirGALANT.
191
mativement , & d'un ſi grand
ferieux que tous ces Diamans
estoient faux , qu'elle commença
à s'étonner. Il fallut
pourtant pour la convaincre
envoyer chercher deux ou
trois autres Orfèvres , qui ne
luy laiſſerent aucun doute qu'.
ellen'euſt eſté trompée. Elle
alla fur l'heure chez le Joüaillier
qui avoit vendu la Croix , &
ne l'avant point trouvé , elle
demanda ſa Femme,qui ſe con-
Doiffant en Diamans , ſoutint
que ſon Mary ne pouvoit avoir
vendu cetteCroix pour bonne.
La Dame qui ne ſe put contenir
parce qu'elle avoit eſté
témoin de l'argent donné , dit
que c'eſtoit un fripon & un
voleur , & que s'il ne luy rapportoit
les cinq cens Loüis
qu'il avoit receus , il enten-
1
192
MERCVRE
droit parler d'elle d'une maniere
qui aſſurément ne luy
plairoit pas . Le loüaillier de
?
retour , ayant ſceu la Scene qui
s'eſtoit jouée , dit qu'il étoit
refolu d'attendre qu'on le pouffaſt
, & qu'il eſtoit juſte que
l'éclat qu'on avoit fait , fuſt
reparé par un autre éclat. Le
lendemain on vint luy faire un
meſſage , pour l'obliger d'aller
voir la Dame , & il répondit
qu'aprés les injures quieſtoient
échapées , il ne parleroit que
dansles formes ſur ſon accuſation
. Deux jours aprés il luy
fut fignifié par un exploit de
Sergent , qu'il euſt à venir ſe
défendre fur la Croix de Diamans.
Il parut devant le luge,&
non ſeulement il tomba d'accord
qu'ils estoient faux , mais
il avoüa qu'il avoit touché la
ſomme
GALANT. 193
1
ſomme qu'on luy demandoit.
LaDame commençoit à s'applaudir
d'avoir gain entier de
cauſe , lors qu'il fit voir un
Billetde lamain de ſon Mary ,
portant que quoy que le loüaillier
cuſt receu de luy cinq
cens Louis d'or pour cette
Croix devant deux ou trois
témoins , la verité eſtoit qu'il
les luyavoit rendus , & avoit
eſté ſeulement payé des faux
Diamans , ſuivant le prix
dont ils eſtoient convenus.
La Dame fut au deſeſpoirde
cette avanture qui ayant
fort éclaté , parce qu'elle avoit
conté la choſe à tous ſes Amis
fit connoiſtre à tout le monde
la tromperie qu'on luy avoit
faite. Elle ne la put pardonner
à ſon Mary , & pour s'en
vanger , elle proteſta qu'elle
May 1691.
,
I
194
MERCVRE
ſe tenoit dégagée de la parole
qu'il avoit voulu qu'elle luy
donnaſt de ne point épouſer
le Cavalier. On luy remontra
que les choſes qu'on promettoit
aux Mourans devoient
eſtre inviolables , & que le
Marquis pouvoit fortir du
tombeau pour luy venir faire
des reproches de ſon infidelité.
Elle répondit qu'elle eftoit
Femme à ne pas s'épouvanter
; que s'il s'aviſoit de
lay apparoiſtre pour luy dire
ce qu'il auroit fur le coeur,
elle ſçavoit ce qu'elle avoit à
répondre , & que quand ce ne
feroit que par curioſité , elle
noüeroit volontiers converſation
avec un Mort. Il y avoit
environ dix mois qu'elle étoit
Veuve , & fans vouloir écourer
perſonne , lors que l'année
GALANT .
195
de ſon deuil fut expirée , elle
ſe donne au Cavalier , à qui
elleapporta un fort gros douaire
, & la jouiſſance de la Terre
que ſon Pere luy avoit cedée
en la mariant avec le Marquis.
2
Les grandes Nouvelles qui
rempliſſent mes Lettres depuis
quelques temps , m'ont empefché
de vous dire que Mr le
Boults a eſté receu Conſeiller
au Parlement de Paris . Il y a
prés de deux mois que cette
reception ſe fit . Il fut diſtribué
auſſi toſt en la Troiſiéme des
Enquestes dont eſt ſortydepuis
peu Mrle Boults de Chaumot ,
pourmonter à la Grand Chambre.
Cejeune Conſeiller eſt Fils
unique de Mr le Boults , Maiſtre
des Requeſtes. Madame
ſa Mere eſt Fille de feu Mrle
I 2
196 MERCVRE

Preſident Charreton , qui s'eſt
acquistantd'eſtime dans lePar.
lement. Je vous ay parlé déja
pluſieurs fois de ces deux Familles,&
vous ſçavez que celle
des le Boults eſt une des plus
puiſſantes de la Robe , comme
celle de Charreton en eſt une
desplus anciennes.Mr leBoults
qui vientd'eſtre receu Conſeiller
, eſt fortbien fait de ſa per->
ſonne , a beaucoup d'eſprit , &
tout cequ'il fait donne lieu de
croire qu'il marchera dignement
fur les traces de Mr le
Preſident fon
: Grandpere.
Charreton
Mr le Comte d'Eſtrades a
épousé depuis peu Mademoiſelle
le Normand. Le nom d'Eſtrades
eſt ſi fameux , &
connu, que je ne pourrois vous
en riendire que vous ne ſceuffiez.
GALANT. 197
1
Mr de Surlaube , Colonel
d'urn Regiment Etranger , &
Brigadier des Armées du Roy
épouſa Mademoiselle de Sainte
Maure dans le méme temps.
C'eſt un homme tres -bien fait,
&qui s'eſtacquis beaucoup de
reputation dans le ſervice. Mar
demoiselle de Sainte Maure eſt
Soeur de Mr le Marquis de
Sainte Maure , l'un des Menins.
de Monseigneur , & Niece de
feu Mr le Duc de Montaufier ;
maisquoy qu'elle foit, fort conſiderable
par ſa naiſſance , elle
l'eſt encore plus par ſabeauté&
parſonmerite.
Madame la Ducheſſe de
Humieres eſt accouchée.Vous
ſçaurez de quel Enfant en liſant.
ce Madrigal ..
Noftrejeune Duchesse ,
Pour qui tout s'intereſſe
I 3
198 MERCURE
Vient , dit-on ,d'accoucher.
Dequoy ? C'est d'une Fille.
Qu'importe,& pourquoy s'en facher
Dans l'Arsenal,dans la Bastille?
Ie ne puis le dißimuler ,
La douleur en est fort legere.
Qu'elle ait la beauté deSa Mere,
On a dequoyse conſoler.
Mr le Comte de Provane,
Député du Senat de Nice , cut
ces derniers jours audience de
Sa Majesté , & il luy fit en Italien
le compliment que vous.
allez lire .
SIRE,
A piedi di V. M. alla quale
reftarebbe dovuto il Vaffallaggio
dell' Univerſo intiero , reco tutti
quelli attestati diſottomiſſione e di
fedeltà, che in parcolare può restar
in obligo di tributarle ilſuo Senato
residente nellaſottomeſſaſua Città
GALANT.
199
2

diNizza, Senato che per dignatione
di V. M. fi trova lasciatosupremo
qual era e Città che havendo
ricevuto dalla Vittoria il nome
non bà mai più triomfato , che
quando s'é data per vinta alla
M.V. non sòſe à ciò più aftretta,
ò dal timore delle armi fuesempre
vittorioſe , ò dall' amore , che anche
i Sudditi di Prencipi nemiciè
ftranieri non poſſono che tributare
all' eroiche vittà del più grande ,
e delpiu augustodi tutti i Potentiati;
Senatoe Citta in ſomma ,
chehanno nonfolo motivo di conſo-
Larſi , mà di gloriarsi d'effer paſſati
dal dominio di Prencipicheſempre
fperimentarono buoni , fotto l'ottimo
de Reggi , & ilmaffimo de Monarchi.
Per tanto , ficuro che all'ombra
di fi felice e defiderabile dominio
goderanno l'unoe l'altra un fecolo
d'oro , nonmiresta cheà nome de
1
L 4
200 MERCVRE
fuo Senatoper cui parlo ,protestare
alla M. V. degniſſimo Figlio efucceffore
dichi hebbe , emerito il
Sopranome di giusto , che nella
adminiftratione della giuftitia
procurerà con ogni maggior zelo
& applicatione poſſibile , di merisareil
fuffraggio della sua regia
approvatione ,&di non contrave
mire alla regula piu infalibile che vi
fii di ben oprave, con prender per
norma leſuesempre giuſtiſſime ope.
rationi.
Vous voyez , Madame , qua
les nouveaux Sujets de Sa
Majesté , quelque douce domination
qu'ils ayent éprouvée
ſous leurs premiers Maiſtres
, proteſtent qu'ils n'ont
pas ſeulement ſujet de ſeconfoler
, mais encore de ſe glo..
rifier de ſe voir ſous l'obeif.
fance du meilleur &du plus
GALANT. 201
grand de tous les Monarques ,
& que Nice , quoy qu'elle ait
receu fon nom de la Victoire
, parce qu'en effet Niceeſt un
mot Grec qui fignifie Victoire ,
Nice , dis - je , declare qu'elle
croit d'avoir jamais remporté
un plus grand triomphe , qu'-
en ſe confeſſant vaincuë par
le Roy. Mr le Comte de Provane
ayant finy ſes proteſtations
de ſoumſſion & de fidelité
de la part du Senat , Sa
Majeſté luy demasa s'il ſçavoit
parler François , à quoyil ré
pondit , Ouy , Sire , je parle Fran
çois avec un coeur bien François
croyant que le Roy luy de
mandoit oſa ſoumiſſion eſtait
fincere...
Vous devez avoir appris par
les Nouvelles publiques , que:
le St Jean Ashton ayant eſtéz
2
201 MERCVRE
arreſté avec Milord Preſton ,
dans un Baſtiment où ils s'eſtoient
mis pour paſſeren Frace,
fut executé à mort au commencementde
Février dernier,,
& qu'il mourut avec unegrande
fermeté , proteſtant qu'il
avoit la fatisfaction de n'avoir
aucun crime à ſe reprocher, &
d'avoir reglé toutes ſes actions
de telle ſorte , qu'on n'y pou
voit rien trouver qui ne fuſt
conforme à ſon devoir , aux
Loix du Royaume , & à fes
fermens. La crainte qu'il eut
qu'eſtant au lieu du fupplice
on ne luy permiſt pas de parler
auſſi longtemps qu'il euſt pû le
fouhaiter, fut cauſe qu'il donna
au Sherif un écrit qu'il avoit
dreſſé pour eſtre publiés
aprés ſa mort. On l'a fupprimé
autant qu'on a pû en
GALANT. 203
Angleterre. Cependant il en
a couru quelques copies ,&
il a eſté traduit en ces termes
en noſtre Langue...
M
HEQUE
(
YON
*
1893

Onfieur le Sherif
Après avoir obſervé que la cou
tume defaire des discoursfur le lien
de l'execution , n'estoit pas toujours
Suivie des ſuccès qu'on s'en estoit
promis , estimant qu'ilvaloit beaucoup
mieux employer mes derniers
momens en devotion , pour me dif..
poferàla Sainte Communion de mon
Dieu , j'ay preparéce Papier pour
lemettre entre vos mains , afin que
vous le faffiez imprimer &publier
aprés ma mort , parce que si vous
ne le faites pas , j'en ay laissé des
Originaux à de mes Amis qui
prendront ſoin d'executer en cela
ma derniere volonté , afin qu'ilsoist
&publier
Li 66
204
MERCVRE
un témoinàtoute la Terre, nonseu
lement de mon innocence , mais en
core dema foy & de ma croyan
се-
Quant à ma Religion ; je pro..
teste& declare que je meurs par
lagracede Dieu dans la foy dans
laquelle j'ay esté baptisé ;sçavoircelledel'Eglife
Anglicane,dans la
Communion de laquelle n'ayant
jamais douté de mon falut par les
merites de mon Sauveur , je mesuis
toujours crûheureux& en seurerés
I'ay reglélecoursde ma vie & de
mes actionssurle principe defa
doctrine , autrefois si estimée ,&
preſentement dans un si grand
mépris. Ie me suis cru par ma
religion indispensablement obligé
de confiderer mon legitime Prince
Souverain , quelques maximes
qu'il ait pratiquées quel--
ques principes qu'il puiſſe avoir
GALANT
20.F
!
1
cas , comme le vice-Regent de
Diem, duquel ila receu tout fon
pouvoir, & qui n'est comptable qu'à
luyſeul ; &ayant toujours esté ford
tement perfuadé que c'estoit agir
contre les Loix de Dieu , de l'Eglise
&dece Royaume , que de prendre
lesArmes contre luy, quand mesme
ilferoit coupable de mauvaiſe ad..
ministration , ou sur quelque autre.
pretexte que ce puisse estre ,je
mours aujourd'huy, dans cette
croyance ,& je veux que toute la
Terre enfait informée .
Mais comme i'ay encore des
obligations plus particulieres au
Roy mon maistre , duquel i ' ay recen
pluſieurs faveurssignalées pendant
Seize années que i'ay eu l'honneur
de lefervir, la reconnoissance ,me
commandoit aussi bien que mon
devoir& ma religion ,de luy rendxe
taut lesſervices dont ie pouvoiss
eftre capable..
206 MERCVRE
Lors que l'ay fait aussi les
confiderations que nous estions ses
Suiets , que nous avions folemnel.
lement reconnu l'obeiſſance que nous
l'avions confirméepar des fermens
defidelité plusieurs fois reiterez,
que la maniere avec laquelle Sa
Maiesté avoit esté traitée aprés
l'arrivée du Prince d'Orange , ef
toit cruelle , severe , &fi ie l'ofe
dire , iniuste , & que toutes les
nouvelles mètodes de rétablir la
Nation n'avoient Servy iusques à
preſent qu'à la rendre plus mifera .
ble, plus pauvre &plus exposée
aux Ennemis Estrangers , &que la
Religion que nous avions cru pre-.
Server estoit preſentement en plus
grand danger d'estre détruite qu'au
paravant , l'ay creu que la meil
leure&la plusfeurevoyepour pre
venir les maux & les malbears
preſts de tomber furnous ,& pour
GALANT..
207
-1
Sauver la Nation d'une totale def.
truction , estoit de rappeller nostre
Souverain , qui comme un bon Pere
de la patrie,malgré tous les mau
vais traitemens qu'on luy afaits &
les iniures qu'ilafouffertes,conſerve
un amour & une tendresse na
turelle pour son Peuple , & ie
fuis fi éloignéde regretter la perse
de mavie, quesi j'en avois mille ..
i'aimerois mieux les facrifier toutes
, que de ceſſfer de travailler par
toutes fortes de moyens iuftes &
honnestes à l'avancement d'une fo
bonne & fineceſſaire entreprise,&
ie conſeille&Suplie tous mes Coma
patriotes , depenserferieusement à
leursdevoirs,& deretourner à leur
obeiſſance , avant que les ſeveres
Iugemensde Dieu les previennent
pour leur pariure& leur rebellion.
Maiscertainement le bien & l'in
tereſt dela Nationſeparé de toute
208 MERCVRE
-
!
1
autre confideration , les convaincra
dans peu de la neceſſuéde le faire.
Après avoir ainsi franchement
declaré mes principes ,ie ſçay que
L'onrépondraquei'ay agyfelon eux,
& confequemment que je suis à
preſent condamné avec iustice;mais
en avoüant mesme le preiugézie nie
formellement la conſequence; car
quelques inclinations que i aye euës,
&quelques actionsque t'ayc iamais.
faites , ie declare neanmoins que
iefuis innocent. Lefait est cepen
dant qu'on n'apaslaisse de me condamner
à mort. I'en appelle aux.
Iuges mesmes , pour dire fi dans
mon iugement ils ont eu la moindre
preuve que i'aye eu la connoiſſance
d'un foul Article contenu dans les
Rapiers,mais les lugesont creu avoirn
despreſomptionsfuffisantes pour me.
declarer coupable quoy que l'on
mait afſuré que ie ſuis le premier
GALANT. 209
qui ait iamais été condamné pour
crime de haute trahison sur des
preſomptions toutes nuës &fur de
Simples soupçons ,&le tout contre
L'opinion de Milord Cokes,& autres
eminens Docteurs de la Loy. La
parfaiteconnoiffance que i'avois de
mon innocence, quant aux accufations
&chargesportées contre moy,
fut cequim'arma d'une telle af-
Searance, queiosay bien hazarder
mavieſur le Iugement des douze
premiers Iurez qu'on me deſtina ,
Sans enrecuferun ſeul ; mais quoy
queiayedeiuftesraiſons deplaintes.
pourles chargesfeveres données con
tre moy par les luges , & pour les
mauvais traitemens que i' ay receus,
Sansvouloirfaire mention des manieres
violentes dont on m'atraité,
des ruſes dont on s'est fervy pour
éloigner des personnes capables.
que j'avois choisies pour veillex
۱
210 MERCVRE
!
à mes interests , & du refus que
l'on m'a fait de donner copie des
charges &informations contremoy
malgré tout cela; comme i'espere
pardon&mifericorde de Dieu, par
lamesmeraiſonje le prie de tout
mon coeur qu'il leur pardonne,&je
leurpardonneaufficommeàtousmes
ennemis&à tout le monde , même
aux Iurez, qui pour me détruire
ont exposé leurs ames d'unemaniere
fi épouvantable&fi contraire à la
justice. Mais que la volonté de
Dieuſoit accomplie. Ie me remets
entierement entre les mains defa
mifericorde , & je me repoſeſur les
merites de mon divin Sauveur, Ie
me jette & m'abandonne entre fes
mains , comme entre les mains de
mon Createur, dont la parole est
immuable , & dans le ſein duquel
vespere & i'attens ma réfurre-
Etion...
GALANT . 211
Beniffez , protegez, & fortifiez
& Seigneur Dieu mon bon Roy
& gracieux Maistre. Faites que
dansson temps lavertu,la bonté&
L'innocence de laReine ma Mai-
Streffe, faffent rougir tousfes enne.
mis , & impofent filence aux noires
calomnies. Rendezcette Princesse&
cette Natioheureuses dans le Prince
de Galles , lequet par des preuves
incontestables & indubitables ie
Sçay estre fon Fils. Rétabliſſez
les tous deux dans leurs iuftes droits,
lors que voſtre divine Providencele
iugera à propos , d'une maniere &
fur un fondement qu'ils puiſſent
établir & foutenir l'Eglise An.
glicane,& lafaire refleurir,nonobf
tant lesflêtriſſures qu'elle areceues
depuis peu par les prévarications
deses Enfans. Pardonnez , para
donnez, ô Seigneur , à tous mes
Ensemis ; beniffez mes Amis
212 MERCURE
1
SoyezleSupport de machere Epouse
affligée&de mes pauvres jeunes.
Enfans. Soyez,Seigneur l'Epoux de
L'une ,& le Pere des autres. Pour
l'amour d'eux seulement i'aurois
foubaitè devivre encore ; maispardonnez-
moy.cesouhait, ô mon Dieu
& recevez mon ame dans vostre
Gloire éternelle. Amen Signé
JEAN ASHTON.
Tous les Livres dont la le-
Aure donne du plaiſir , ne font
pastoujours auſſi utiles qu'ils
font agréables .C'eſt ce qui doit
faire eſtimer celuy qui paroiſt
depuis peu ſous le titre Desdefordres
du leu , puis qu'il eſt auſſi
profitableque divertiſſant. On
yvoit les malheurs que le leu
cauſe parmy les Princes , les
Eccleſiaſtiques , les Courtiſans
les Gens de guerre , les Magiſwats
,les Femmes , les jeunes, S
GALANT.
213
gens , & les Vieillards , & ces
defordres ſont prouvez par des
exemples des malheurs arrivez
pour le leu à toutes ces fortes
de perſonnes.Ainſi l'on peutdire
que ceLivre eſt composé d'une
infinité de petites hiſtoires
qui divertiſſent en inſtruiſant,
& qui donnent de l'horreur
pour une paſſion ſa condamnable.
Il ſe vend chez le Sr Michalet
, Imprimeur du Roy ,
ruë Saint Jacques , à l'Image S.
Paul.Onle trouve auſſi chez le
Sr Amaulry à Lyon .
Aprés vous avoir parlé plu
fleursfoisde la Loterie de Mr
Thuret, il eſt juſte que je vous
apprenne qui ſont ceux que la
fortune a favoriſez. Vous remarquerez
dans la Liſte des
nomsque je vous envoye , des
effets de ſabizarrerie ordinaire
214 MERCVRE
puis que la pluſpart de ceux
qui ont eu des Lots , n'avoient
que tres - peu de Billets , & que
telagagné plus de deux mille
livres pour trois Billets , lors
que ceux qui avoient part à
deux ou trois cens , n'en ont
eu aucunde noir.
I. Lot , à Mr l'Evêque de
Bayonne une Pendule à repetitions
ſur ſon pied en maniere
de ſcabelon , dans lequel il
y a un Barometre marquant
les differens changemens des
temps ſur un Cadran , le tout
enrichy d'ornemens de bron.
ze doré. Sa Boëtte eſtoit ſous
fon nom de 25. Billets , numero908
.
2. Lot , àMr de la Doüye ,
Receveur des Decimes à Senlis
, une Pendule à ſeconde
fonnant les quarts,ſurſon pied
)
GALANT .
215
:
en forme de ſcabelon enrichy
d'ornemens de Bronze doré,Sa
Boëte eſtoit ſous ſon nom de
trois Billets ,Dumero 1795 .
3.Lot, à Madame du Sel chez
Mr Paillot Secretaite du koy,
une bague à diamant blanc
ſous le nom de l'Hermine , 6.
billets nº.1270 .
4. Lot , à Madame Taunier,
une Pendule à ſeconde à repetitions
dans une boëte , & fur
un pied d'Ebene,garnis d'ornemens
de Bronze doré , ſous le
nom de Timbale , 3. Billets ,
n°. 856 .
5. Lot , à Mademoiselle Menestrel
une Bague de Diamans
couleur de roſe, ſous fon nom,
5. billets , n°. 2851 .
6. Lot , 15. & 37. à S. A.R.
Monfieur , une Bague de Diamans,
une Bariere de Diamans ,
& une Montre à boëte d'or ,
216 MER CURE
!

ſous le nom de Monfieur , 125.
billets , n° 226-
7. Lot , à Mr Guiné d'Artelles,
Conſeiller au Parlement,
une Pendule ſonnante allant
fix Semaines , ſous le nomde
Mathias , 7. Billets , nº. 878 .
8. Lot, à Mr Hennin Conſeillerau
Parlement , une Pendule
allant quinze jours , fur
une Conſole dorée ſous le
nom de la Bonne , 3. billets
n. 1282 .
9. Lot , à Madame la Lieutenante
Civile , une Pendule
àquarts & repetitions , fous
fon nom , 9. billets , no. 1148 .
10. Lot, à Madamede laBonardiere
, chez Madame la
Marquise de Beuvron , une
Pendule à repetitions , ſur une
conſole dorée , ſous le nom du
Compere , 5. billets , nº. 1894 .

Lot,
GALANT ! 117
Tr. Lot , à Monfieur leDuc
deChartros une Pendule -portativeà
quarts & à repetitions
fous ſon nomag billets , no
-12 Lot, àMr Courtin Maure
des Requestes , une Pendule ,
à quinze jours fur une confolede
marqueterie , ſous le nom
de Sans repos, 7. billets ., nº.
1689.10 stanabad seda niq
13. Lot, àMr Doſmont,Efcuyer
de Madame de Seignelay
, une Pendule à un mois
fonnante,ſous fon nom , quatre
billets , D. 1500.o
14. Lot , à Madame la Marqu
quiſe de Givry ,une Montre
ſonnante à boëte d'or à pendule
, ſous le nomde Mrd'Heauville
13. billets n° 726.
13. Lot .....
16. Lot, à Mr Langlois, Precepteur
de Mrl'Abbé d'Auver-
May 691. K
218 MERCVRE
gne, un eſtay de poche remply
de neuf pieces garnies d'or ,
ſous le nomde PattedeLoup ,
3.bill 2000.00
:
17. Lot , à une Societé de 61.
Perſonnes , une Croix deDiamansavecfon
coulant , ſous le
nomde Manon Sauvage , 483 .
billets.
18. Lot , à Mademoiselle du
Pin, chez Madamela Marquiſe
del Givry,une Pendule marquant
le quantiéme du mois
fous fon nom , 3. bill. 0.996.
Los, à MrCroquoiſon,
Architecte, une Montrela Pendule
àboëte d'or , ſous le nom
de l'Esperance , 3. billets ,
uzoi Lot, àMnde Gourville,
uneMontre d'or à ſpendule ,
fous ſon nom, 25. bil. n. 788 .
21. Lot, à Mride la Terriere,
GALANTA 2
uneMontreàboëte d'or à Pendule,
ſous le nom de lean de
Lignon, 7 billism.884. anot
22. Lot , à Mr Adam de chez
Mrle Ducide Chevreuſe une
Montre d'or à Pendule , ſous
le nomdeMais , 7 billon 1358.
23. Lot , à Madamela Comteſſe
deNancrée , une paire de
boucles d'oreilles de Diaman's
fous le nom de Madame de
Mortemart , billets n. 134.
24. Lot , àun Laquais de Me
Felix, un Collierde perles fous
le nom de Icannot, 54 billets ,
25. Lot , à Mrodes Forges,
une paire de boutons de diamans
, ſous lenom de Marianne,
16 billées, pihmon ol
26. Lớt , à Mademoifelte
Benier une Montre d'or à
Pendule, ſous le nom d'Hen
riettedeMeaux , 3. billets , n.
2110. K2
220 MERCVRE
1
$
27 Lot , à Mr l'Abbé du
Tron , une Bague de diamans,
ſous le nom de la Guimbarde
billets , n, 7
8. Lot à Mademoiselle
Hebert , une Montre d'or à
Pendule , ſous fon nom, 6
billers, n. 294716101.5
30 Lot , àMr l'Abbé Gouf
fault, cy devant Conſeiller au
Parlement; unc Monttead'or
à Pendale , ſous fon nom .
billets 0.2288.00 1
22031. Lot, à Mr le Marquis de
Château- neuf, une boucle de
diamans , ſous fon nom:25.
billets,1.323. t
32. Lot, Mr deBerquegny .
une boucle de diamans , ſous
lenomdes trois Rois, 6. billets,
23670M
33. Lot , à Mr Chauvin de
chez Mr Mignard , une Mon-

21
GALANT. 221
tre ſonnante à boëte d'or , ſous
lenom deAl pinfelicedel tempo ,
9.billets n. 147-
34 Lot , à Mr Caffiny de
FAcademie des Sciences , une
bague de diamans couleur de
roſe, ſous le nom de Genevia
ve de Laiſtre , 7. billets , n.
2153 .
35. Lot , à Mr Rodor , Capitaine
de Carabiniers , une
boucle de diamans , 3. billets .
36. Lot, àMrdeBellou, une
Croix de Diamans ſous fon
nom, 7. billets , n . 200.
38. Lor , àMr des Elfarts, une
Croix de Diamans avec ſon
coulant ,ſous le nom de , Tout
noir , 3. billets , n . 1836 .
040. & 49.Lot , à Madame de
la Clos , deux Montres à boë
tes d'or , ſous le nom de Charles
Chambellain , 26. billets
..165..
K 3
222 MERCVRE
th 1
i 41. Lot , à Mr de Marmande,
une Montre à boëte d'or , ſous
le nom de Geneviève , trois
billets , n . 774. L
42. Lot, à Mr Boutard und
paire de Boutons de Diamans ,
ſous le nom du Chevalier de
la Table ronde , 12.billets,
2. 1856 .
43. Lot , à Mr Herbin, chez
Mr le Roy dans le Temple ,
fous fon nom , une Coupe de
Vermeil doré couverte , 26 .
billets , 1.2520.
44. Lot, à un Laquais deMr
le Marquis d'Effiat , une Montre
à boëte d'or , trois billets.
45. Lot , à Mr de S. Nizier
du Tour , une Montre à boëte
d'or, & un Etuy garny
cuëillere , d'une fourchette &
d'un couteau de Vermeil dos
ré , ſous le nom de S. Diſvier
d'une
GALANTI
24230
Grammont, trois bill.n. 2211.
46. Lot , à Mr Maſſelinde la
Monnoye , une Montre à boë
ted'or , ſous le nomde la belle
Marthe, 3.bil. n. 1960.
4
47. Lot, àMr Lonvert , chez
Mr Octave , une Bague de
Diamans, trois billets . ch
so.& sa.à Monfeigneur,une
Bague de Rubis & une Montres
à boëte d'or , too. billets .
53. Lot , àMe Robert , Con--
ſeiller au Parlement,ane Montre
à boëte d'or , fous le nom
de , Tout au hazard , trois bil-
54. Lot , à Mr Gayot une
Montre à boëte d'or , ſous le
nom de Coriolan 7. billets
5. Lot, àMr de Laitre,une
Montre à boëte d'or trois
billets...
-
K4
124 MERCVRE
56. Lot à Mr l'Abbé du Pin,
une Montre à boëte d'or , ſous
fon nom , trois billets .
58. Lot , à Mademoiselle de,
Canchy , une Montre à boëte
d'or ,fous fon nom , 3,bill-
59. Lot,àMr Prou,Sculpteur
du Roy , une Montre àboëte
d'or , ſous le nom de Maric
Jeanne Prou , 3. billets . Il reſte
4. Lots àdiſtribueratedE
On me donne une copie du ,
Compliment que Mr Charpentier
, Doyen de l'Academie
Françoiſe , avoit préparé pour,
le Roy,& je vous l'envoye,afin
de vous avancer par la le plaifir
que vous recevrez de cette le-
Aure , le recueil que doit debiter
le ſieur Coignard,nedevant
eſtre en vente que dans quelques
jours.id
GALANT
225
SIRE, ८
Vostre Majesté revient victo
rieuse d'une entreprise qui ieste
là conſternationparmy vos Ennemis,
qui comble dejoye vosfidelles Suiets,
que les Nations éloignées n'apprendront
qu'avec étonnement , que la
Pofterité trouvera presque incroga
ble. Vous partez , Sire , devant le
temps , où l'Ecriture. Sainte dit que
les Rois ont accoutumé d'aller à la
guerre. Vous mettez vos Armées en
Campagne dans lafaiſon la plus
rude de toute l'année ; mais vostre
prévoyancefait naiſtre la fertilite
dansles Deferts , & vos Soldarss
trouvent de quoy subsister abon
damment dans les Terres des Ennemis
, où ils ont peine à subsister
eux mêmes. Tant de Princes coniusrez
contre Poftre Maieftene fo
226 MERCVRE
1-
font assemblez que pour ſuivre
le Char de vostre Triomphe. La
Multitude ,le Faste , la Dignité
de ces Testes couronnées , n'ont
Servi qu'à rendre vostre Conque..
ſte plus éclatante. Tandis qu'ils
tienent des Conſeils où la Lalousie a
plusdepare que la Prudence , Votre
Majesté attaque àleur venëla plus
importante de leurs Places , & la
Soumet enmoins detemps, que d'autres
n'en auroient confumé aux
préparatifs du Siege. Par là vous
rompez toutes les mesures qu'ils
avoient priſes , &vous les mettez
hors d'eftat d'enprendre de nouvel
les. Dans ce defordre univerſel de
leurs affaires , ils proposent des
remedes dont ils apprehendent l'u-
Sage ,& celuy qui préſide à leurs
deliberations, n'a osés'approcher du
foudre vangeur , dont il redoute...
la iustice. Cen'est point , Sire , dans
GALANT 227
l'Histoire qu'il faut chercher un
evenement pareil à celuy cy. En
quel fiecle , en quelle partie du
Monde trouvera - t - on un Roy
qui aitfoutenu luy seul l'effort de
tous les autres Potentats ,&qui les
ait vaincus , non point ſeparément,
mais tous ensemble , & dans leur
proprePays ? Ie m'imagine voirle
Iupiter d'Homere ,contre qui tous
les autres Dieux sefont unis
pour troubler la tranquillité de fon
Empire. Aprés leur avoir reprochéla
vanité de leur deffein
il leur fait voir par experience
que fa force est inébranlable , &
tandis qu'ils tirent contre luy, pour
donner quelque ficousse à l'immo
bilité defon Trône, illes enleve tous
avec leglobe de la terre & de la
mer,rantil est vray que lasuprême
vertun'arien à redouter du nombre
Vaftremoderation, Sire,nes'offensera
K6
228 MERCVRE
线
point,fije le copare à celuy que toute
l'Antiquitéa reconnu pour lefouverain
des Dieux,&fi je compare
aux autres Divinitez , tant de
Puiſſances unies contre la vostre. Le
langage duvray Dieu que nous adorons
, & devant qui vostre
Majestéſeproſterne tous les jours,
nerefuse point ce titre aux Rois,
qu'il a établis ſur la terre, le l'ay
dit , vous eſtes des Dieux ,&
les Enfansdu Tres haut. C'est
ainsi que s'explique l'Oracle Esernel,&
c'est ce qui m'a donné la
liberté d'appliquer cette Image
mistericuse du Cielfabuleux,àla
veritédes merveilles que nous vo
yons. Avecvosfeulesforces , Sire,vous
diffipez cette fameuse Ligue qui a
moins cu pour objet d'arrêter lepro--
grés des armes de VotreMajesté,que
des'oppofer à l'avancement de la
Religion Catholique. Lafumée du ,
GALANT. 2293
puits de l' Abime s'est élevée dans
L'air, &l'a obfcurcy. Elle a caché
le Soleilà une partie des hommes ,
&ce qu'ily a de plus surprenant ,
c'est que les deux branches de la
Maison d'sustriche, cette Maison
qui a tirétant d'avantages du titre
de Catholiques , se font laißées
aveugler à ces tenebres fatates ,&
n'ont point cu de repugnance à s'engager
dans un party,où l'on fuit des
maximes fi opposées à celles qui
ont fait l'établiſſementde leurgran
deur& de leur gloire. On a micux
aimé introduire les Ennemis de la
Foy dans des Villes Catholiques, que
de restituer àVostre Majesté lepa
trimoine deſes Enfans, mais enfin
Dieu a prononcéfar ce grandDif
ferend. Ils'est expliqué par vos Vi.
Etoires ,& tant d'avantages remportez
en diversendroits ont esté la
récompense de vostre picté & de
1
230
MERCVRE
voſtre justice ; de vostre picté, Sire
pour avoir relevé tant d'Autels ,
rebâti tant d'Eglises , & renversé
jusqu'aux plus creux fondemens les
Temples d'un culte étranger, de vôtre
justice , pour avoir tendu les
bras à un Roy traby & perfecuté
parses Suicts , & par ses propres
Enfans , & avoir esté te ſeul Mo.
narque de la Chreſtienté qui n'avezpû
souffrir qu'il fust dépouillé
de ſes Royaumes , parcequ'il atrop
deferveur pour la puretéde l'ancienne
Religion deſes Peres,&trop
d'averſion pour l'impieté des Sectes.
nouvelles. Iln'en faut pas douter ,
Sire , Dieu couronnera l'ouvragede
fa Providence ,&ne laiſſera point
imparfaits les deſſeins qu'il vous
ainspirez poursagloire& pourle
bonheurde tout le Genre humain.
Vaus le venez d'éprouver. Ila marchéàla
testedevosArméeszilafaia
2
GALANT 231
au
fuir les Rois en vôtre presence, il a
humilié devant vous les Superbes
de la Terre ; il a bristles portes
d'airain & les verroux d'acier, & a
accomply de nouveau en voftrePer-
Sonnefacrée, ces grandes & magnifiques
promeffes qu'il fit
trefoispar son Prophete,à un Roy
qu'il avoit choisi pour finir l'oppreſſion
de fon Peuple , & l'affranchir
du joug d'un Usurpateur.
L'Academie Françoise
Sire, qui s'occupe toute entiere de
lagrandeur de vos actions beroëques
, voit bien qu'elle n'a pas affez
de Palmes ny de Lauriers pour offrir
à Vostre Majesté , qu'elle n'a
affez de voix pour
Louanges. Mais si l'impuiſſance
d'égaler la nobleſſe deſonſujet , la
retient en deçà de la perfection ,
elle ose du moins se promettre que
personnene pourra egalerſes efforts,
ny aller au delà defon zele , pour
apas
chanter vos
132 MERCVRE
i
i
celebrer lagloire de vostre Nom,
pour consacrer à l'immortalité less
miraculeux Evenemens de vostre
Regne...
Voicy les noms de ceux qui
ontexpliqué l'Enigmedu mois
pallé ſur la Ligneàpescher , qui
en eſtoitle vray ſens . Mrs le
Comte de Gaſſion : Thomas
Maistre de Penfions du Fauxbourg
Saint Antoine : Rigault:
Piquel , Commis des Poſtes de
Vannes en Bretagne : Saint
Arran le jeune : Hartier de la
ruë de Richelieu: Richard de
laruč Saint Martin : Maleſcot,
Officier de l'Election de Blois :
des Chaſteliers du meſmelieu:
Henry Auguste Bachelet : André
Marcel , ruë Saint Martin :
Guillarmay de la meſme rue :
Cefar Teffier& fon Epouſe de
larue anxOurs: le petit Papa
GALANT
133號
du Hamel du Palais de Neptune
& fon Epouſe , Gaillardin ,
de la Roche : du Buiſſon , & de
laRoche, tous deux de Roüen:
S. Martel , Fils , de Befiers
les intimes voiſins Drouhin :
Brunet , & Oudin , Curez de
Saint And'heux , Rouvray &
Cuffi les Forges en Bourgogne:
Bouhon : le pere Steger de
Hoſtel de Ville d'Abbeville ,
& ſa Femme : Couerer de Vila
liers , Commis aux Aides :Ican
Noel : Antoine Richer , & l'Aimé
de Loüiſe Favé de la rue S.
Martin :C. Hutuge d'Orleans:
la Spirituelle Solitaire à la ban
denoire du Faux bourg S. Severe
, & fon, Ipfeparable : Bu
quet d'Amonville de la rue des
Prouvaites : l'aimable Mariane
de la rue Saint Honoré : Verdute
: Gobert de la rue des
234 MERCURE
1
1
1
deux Boules : Couvreur& fon
Epouſede la rue Saint Martin
Jacques proche Montargis :
MarcelDenizer de la rueSale
Martin , la jolie& belle Lifette
Richerde la mesme rue : l'aid
mable Marie André Denizer
leCurede Taux , fon aimable
freur , & teur meilleur Amy
l'Abbé d'Archangely , Aumofnierdu
Parlement de Mets : le
tendre Bergerde la rueRenard
le Commis du mary content ,
&la Charmante blonde ; l'Amant
paffionné en aparence
d'Evreux,leCadet Fillout, &
fon FrerelOfficier de Falaiſe ,
Gueretdu mesme lieu: l'aimable
Bourru de la Croix de Fer
dela portedeParis : la Nerliere
& fon camarade : Davoist
l'Amantpaſſionné , & le Suiffe
Penſionnaire , tous de Caën ::
GALANT
235
le Beau blond du coin de la rue
des Bourdonnois : le Chanoine
de Saint Gobert: le Facheux
de la ruedela vieilleMonnoye
l'Amant trop attaché à la belle
inconſtante: le grand Tervo.
bal , & fon Amy Labouter
le grand Goliat & fon aimable
petite Venus : L'inconſtantde
la Croix: l'Adonis des belles du
quartierdu Temple & fon Amy
le gros indifferent : l'agreable
enchantée , & la charmante
brune , tous trois de Dreux : le
Chaſſeur fecret de la belle foreſt
de la Samaritaine , mis
Mefdemoiselles Le Févre de
Rennes:Du Four de l'Hôtel de
Bennehard de Blois,& ſes filles:
Deschamps l'aifnée de Picpuces
: Marie & Antoinette Bellier
: les deux ſpirituelles de la
Communauté de Saint Roc: la
236 MERCVRE
1
Camuſe de la ruë Serpente : les
deux inſeparables Demoiselles
de Beyne & Buirette : ruë du
Pot d'Etain de Soiffons , & la
ſage Eleonor de Piquepuce :
Thereſe Joly , ruë: S. Honoré :
Helene Pinay de Beaumont le
Vicomte : l'aymable Maillard,
ruë S. Luc d'Angers : la charmante
Marie rue Villedot , &
ſon cher Joſeph: la trop aimable
Marguerite Eve d'Eſpone
&ſes deux fooeurs Babct &Catos,
tue S.Honoré,la charmante
Goton Poulet , &l'amy fidelle :
les aimables foeurs , rue de la
Tabletèrie l'infortunée fille
du Chevalier de la Roche verte
de l'iſle Noſtre Dame : la ſçavante
Modeſte de Blois les
deux fpirituelles foeurs , du
Venitien : la belle Iphigenic
de la rue Sainte Avoye , &
GALANT .
237
fon Achille : la charmante
VauquerdeBlois ,& ſon amant
malgré elle : l'aimable Angeli
que M. de la Place Dauphine :
la toute aimable Marguerite
Boſier de la rue du Temple , la
Charmante brune des environs
du bois d'Orval : la belle brune
du chapeau couronné du pont
au Chang : la tonte fpirituelle,
au nom d'un poiſſon , : le fugitif
dela captivité d'Egipte de la
Raquette: la devote enjouéede
Montargis : l'incomparable la
Maſerier de Caën:la charmante
Marote,rueHamou.fon cher
amant , & la grande Colinette
de la mefme Ville ; la groffe
Bourgeoiſe de la chaſſe Royale
du Pontau Change, la Controlleuſe
de la rue Saint Antoine,&
ſa chere & trop inſenfible
confine dela rue des Ma238
MERCVRE
thurins .On fuprime beaucoup
denomsparleur trop de bizar
resie.A
: La nouvelle Enigme que je
vous envoye , pourra donner
à rêver à vos Amics
1
ENIGME.
D'une troupe d'honneſtes
Soeurs,
Dont chacun reçoit desfaveurs ,
Sans que la médiſance engronde,
Latrois , lafeconde, &lacing,
Formentdeaxchoses dans le monde,
Qui gagnent la raifon aussi bien
quel'instinct place
Dans ces deux choses, la Jeuneſſe,
Sans que j'en veuille exclure bo
Picilleſſes boldi
Trouve de merveilleux attraits.
ce
*
*
mem
*
1808
239
lefire
emi.
Four,
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vous
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Qui
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Tro
GALANT.
239

Elle s'y plaist , les aime , & defire
Jans ceffe
Qu'elles ne finiſſentjamais.
3
Il faut pourtant,pour percer lemiftere,
-Quetuſyaches,mon cher Lecteur,
Que l'une & l'autre faus bonheng
Ne font qu'ennuy , que plainte,&
inj quemiferee.51
Iccroy que vous ferez ſatisfaire
du Printemps dont vous
allez lire les paroles.
VAIR NOUVEAUVA
E doux Printempsosoft enffin de
Accompagné des Zephirs & de
Elone
Lajeune Beautéquej'adore
Commence à goûter mon amour.
240 MERCVRE
6
Je voy bien qu'à m'aimer son anse
Sedispose
Son coeur devient reconnoiſfans ,
Puisqu'elle mesme en rougiſſant
M'en a déja dit quetque chose
Les deux Vaiſſeaux Hollandois
qui furent pris le mois
paſſe, par ceux qui de la Mediterranée
, ſont venus joindre
noſtre Flote dans l'Ocean, ſont
de 30.& de 36. pieces de Canon.
Mr Bidaut auroit pû les
prendre l'un & l'autre, s'il avoit
voulu,mais comme il eſtoit plus
'avancé que les Vaiſſeaux avec
leſquels il faiſoit route, il laiſſa
le Vaiſſeau Hollandois qui ſe
trouva leplus prés de luy,parce
qu'il paroiſſoit beaucoup plus
petit , à Mr Cougoulin qui le
ſuivoit , & pourſuivit le plus
éloigné , qui pouvoit échaper,
&
GALANT. 241
&qui paroiſſoit beaucoup plus
gros.Il l'atteignit,& le Hollancois
luy tira trois coupsdeCanon
àballe à la portéedu piſtolet,
ſans que Mr Bidaut vouluſt
riſpoſter , pour ne pas tuer des
gens qui n'eſtoient pas en eſtat
de luy faire refiſtance,
Le retourdu Prince d'Orange
à la Haye fait voir la mauvaiſe
ſituation où font les pro.
jets des Alliez . Il avoit refolu
avant le Siege de Mons , de
faire un tour en Irlande, & de
tâcher a y rétablir les affaires ,
quiy vont fort mal , avant que
devenircommander en Flandre;
mais la priſe de Mons ayant
rompu toutes ſes meſures ,&
déconcerté la Ligue , il a eſté
obligé de revenir ſur ſes pas ,
les Princes Confederez luy
ayant fait declarer qu'ils n'en-
May 1691. L
242 MERCVRE
voyeroient point leurs Troupes
s'il nerevenoit au pluſtoſt :
de forte que craignant que la
Ligue ne ſe démembraſt , il a
abandonné le deſſein qu'il
avoit de paſſer en Irlande, & a
quitté l'Angleterre,quoy qu'il
ait tout à aprehenderdu grand
nombrede mécontens qui s'y
trouvent , & qu'il s'attire en
choquant & favoriſant tour à
tour les partis les plus puiſſans.
Six Armateurs de Dunker
queeſtant fortis de cette mê.
me Ville le 23.de ce mois ,
rencontrerent environ trente
Vaiſſeaux Marchands Anglois
eſcortez par une Fregate auſſi
Angloiſe , de vingt quatre
pieces de Canon. Ils l'attaque .
rent ,& la prirent fans aucune
pertede leur coſté. Le Capicainede
cetteFregate futbleſſe
GALANT.
243
encetteoccafion , & les Vaif
ſeaux Marchands furent pris
à la veuë de trente Vaiſſeaux
de guerre Anglois , qui me
naçoientdepuis longtemps de
prendre tout ce qui fortiroit de
Dunkerque. Ces Vaiſſeaux/
Marchandsalloient chargez de
Plomb , d Etain's de Poudre &
d'Etoffes .
Les Vaiſſeaux & les Galeres
qui compofent l'ArméeNavale
du Roy furla Mediterrannée ,
font en Mer depuis quelques
jours , mais le ſecret eſtantaujourd'huy
l'ame du Conſeil du
Roy , on n'apprendles deſſeins
de Sa Majeſte , que lorsque les
Troupes font arrivées au lieu
où elles doivent agir..
Toutes nos Armées de terre
fonten mouvement ,& je ſuis
perfuadé qu'à l'heure que je
L2
244
MERCVRE
vous écris , elles ont commencé
à executer les ordres du Roy ..
Quand jepourrois entrer dans
quelque detail,je le reſerverois
pour le mois prochain , afin de
vousdonner de ſuite tout ce
qui ſe ſera paſſé à l'ouverture
de cette Campagne .
Vous auriez eu ce mois-cy
un Dialogue de l'Auteur deceluy
de Mercure & de Caron
que je vous envoyay le mois
dernier , & que vous avez
lû avectant de plaiſir , ſi je ne
l'avois point receu trop tard. le
le referve pour le mois prochain,
& fuis , Madame ,& c :
AVIS
LeSieur Amaulry donnera le
15.de Iuin un Ouvrage auffi
curieux , qu'ilfera à bou compte
, puis quecoûtera que
ſept ſols .
LYON
*
1893*
E
L
TABLE ..
Prelude
I
Remerciement fait au Roy , par
Le Pere Belangier, President de la
Terre-Sainte. 4
Diverſes particularitez touchant
les Saints Lieux , 7
Complimentfait àMonseigneur le
Dauphin par le mesme Pere. 22.
Ode de M.Capistron fur la prise de
Mons. 26
Stances regulieres fur lemêmeſuiet
par M.Broſſard de Montaney.31
Faralelle de Cefar&du Prince d'O
range, par le même... 35
L'Incredule.
37
Lettre d'un François refugié à la
37
Haye, à un nouveau Converty des
Cevenes. 46
Reception deM.de Fontenelle à l'A
TABLE .
2
cademie Françoise,& tout ce qui
s'est passé en cette occasion. 64.
Odefur la prisedeNice. 87
Epiſtre aux Musessur la Campagne
de Monfieur le Comte de Toulou-
IOL Se, Amiral de France.
Ceremonies obfervées au mariage
du Prince Jacques de Pologne 109
Nouvelles de Constantinople. 114
Morts. 123
Madrigaux , Sonnets Quadrins ,
Odes&Epigrammesfur la prise
146
Réjouiſſances faites fur lemême
deMons..
Sujet dans les principales Villes du
Royaume. 164
Meffe folemnelle chantée pour la
Santé de S. M. &la prosperitéde
Ses arines. 177
Histoire. 179
M. le Boults est receu Conseiller au
Parlement ,
Mariages..
}
195
196
TABLE.
Madrigalfurles Couches de Me la
Ducheffe deHumieres.. 197
Compliment fait au Roy par M.le
Comte de Provane,Député du
Senat de Nice. 198
Ecrit dreſſe par le Sieur lean Ashton
executéen Angleterre , pour estre
publiéaprés fa mort. 201
Les defordres du jeu , 212
Nems de tous ceux quiont gagnédes
Lotsàla Lotteriede M.Turet, 213
Complimentfait pourle RoyparM.
Charpentierde l'Academie Françoise
, 225
Enigme , 238
Prise de deux Vaiſſeaux par M.
Bidaut , 240
Arrivée du Prince d'Orange à la
Haye, 241
Nouvelles de Domkerque , 242
Fin de la Table.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le