Titre
ODE SUR LA PAIX.
Titre d'après la table
ΟDE sur la Paix.
Fait partie d'une livraison
Fait partie d'une section
Page de début
s. p.
Page de début dans la numérisation
228
Page de fin
11
Page de fin dans la numérisation
234
Incipit
UN léger Tourbillon, prémices des orages, A peine de Cérès fait courber les épis,
Texte
ODE SUR LA PAIX .
UN léger Tourbillon , prémices des orages ,
A peine de Cérès fait courber les épis ,
Qu'il vole fur les mers éveiller les naufrages
Et les flots affoupis.
C'eft ainfi que voilant fa funefte origine ,
La Guèrre , qui dans l'ombre alluma fes fambeaux
,
II. Vol. A iij
6 MERCURE DE FRANCE .
Vint changer tout-à- coup nos Palais en ruine ,
Et la Tèrre en tombeaux.
J'aivuMars, jeཏུ མl'ai vû, des fommets du Rodope ,
Précipiter fon char & les courfiers fougueux ;
Je t'ai vue , ô Bellone ! épouvanter l'Europe
Detes cris belliqueux .
Ah ! périffe le jour où la Sprée infultante ,
Pareille à ces torrens échappés de l'Etna ,
Vint choquer fa rivale , éperdue & tremblante ,
Aux rochers de Pyrna . *
*
Depuis ce jour fanglant , ô que de jours funeftes
Ont épuifé fur nous leurs tragiques horreurs ,
Les crimes , les revers , les vengeances céleſtes ,
Et nos propres fureurs.
Organe de la Mort , la trompette éffrayante
Appelloit aux combats & la Tèrre & les Mers ;
Et l'Amérique a vû l'Europe foudroyante
Tonner dans les déferts.
Alors furent changés en glaives homicides
Le foc de Triptolème & la faulx de Cérès :
Aux yeux du Laboureur le char des Euménides
Sillonna les guérêts.
Sept fois l'Eté brûlant , fept ois l'humide
tomne ,
* Invafion en Saxe.
JANVIER. 1763. 7
Sept fois le fombre Hyver entouré de glaçons ,
Vit l'affreufe Atropos faire aux champs de Bellone
D'éffroyablesmoillons.
Eh ! pourquoi de la Mort précipiter les aîles ?
La tombe eſt-elle encor trop loin de nos berceaux ?
Malheureux ! eft- ce à nous que les Parques cruelles
Ont remis leurs ciſeaux ?
Mortel , que veut ce glaive en tes mains fanguinaires
?
Menace-t-il le fein des Tigres dévorans ?
Quoi ! l'Homme égorge l'Homme , affaffins mercenaires
Vendus aux Conquérans !
O fainte Humanité ! quel fpectacle fauvage
Offre à tes yeux en pleurs ce Globe malheureux ,
Tous ces fleuves de fang , ces plaines de carnage,
Et ces piéges de feux !
Sans doute Néméfis , en fes profondes nues ,
Accumulant fur nous les orages du Sort ,
Lança de toutes parts ces fléches inconnues
Au carquois de la Mort.
Affez & trop long- temps ont roulé fur nos têtes
Tous ces globes de fer qui brifent les remparts ;
Trop long- temps ont regné les homicides fêtes ,
Les jeux fanglans de Mars.
A iv
8 MERCURE DE FRANCE .
Que ces Bouches de feux ouvertes au carnage ,
Que ces Monftres d'airain fe taifent pour jamais ;
Ou grondent fans fureur , expiant leur ravage ,
Aux fêtes de la Paix .
Telle après les éclats d'un horrible tonnèrre ,
Sur les reftes grondans d'un nuage enflammé ,
La bienfaiſante Iris vient apprendre à la Tèrre
Que l'Olympe eft calmé.
Rois , enfans des Dieux , imitez leur clémence !
Un thrône bienfaiſant eft rival des autels :
Etouffez des combats la fatale femence ,
Epargnez les Mortels.
Paſteurs des Nations que le Ciel vous confie ,
Quittez ce titre augufte , ou rendez-nous heureux ;
Mais l'orgueil des Héros fouvent nous facrifie
A fes coupables voeux.
Zh !qui peut envier une palme fragile ,
S'il faut , pour la cueillir , enfanglanter fes mains ?
LOUIS , ton coeur préfére à fon éclat ſtérile
Le bonheur des Humains.
Ton Miniftre fidéle , & que Minerve inſpire ,
Va réparer de Mars les finiftres revers ;
Le moment qui rendra la Paix à ton Empire,
La rend à l'Univers .
JANVIER. 1763 . 9
Quel Mécène nouveau , jaloux de ſa mémoire ,
Raffermira des Arts les autels chancelans ?
CHOISEUL , ce fera toi ; tout Amant de la Gloire
Eft Ami des Talens.
O PAIX , divine Paix fi long-temps implorée ,
Prends du haut de l'Olympe un favorable éffor !
Et fur le front fanglant de l'Europe éplorée ,
Fixe tes aîles d'or !
Tes mains de l'Océan nous ouvrent les barrières ;
Ces Pins navigateurs , amis des Matelots ,
Vont deſcendre à ta voix de leurs forêts altières ,
Pour traverser les flots.
Par les noeuds du Commerce embraſſe les deux
Mondes ;
Et des climats de l'Inde aux rives du Boetis ,
Guide nos pavillons fur les vagues profondes
De l'immenfe Thétis.
Tes regards ont calmé l'orageuſe Angleterre ;
Les Peuples du Soleil , enfans des vaſtes Eaux ,
Ne verront plus fortir & la foudre & la guèrre
Des flancs de ſes vaiffeaux.
Aux deux Mondes rivaux donne un juſte équilibre,
Rends les Peuples heureux & les Rois citoyens :
Exile tous les maux ; le bonheur d'être libce
Eft le premier des biens.
1
A v
10 MERCURE DE FRANCE.
Eh ! peux-tu , fans pitié voir un or tyrannique
De l'Africain fervile acheter les malheurs?
L'Humanité qu'outrage un abus politique
Te préfente fes pleurs.
Des enfans du Niger affranchis le rivage ;
De la Nature entin ofe venger les droits :
Fais que l'Humanité , briſant leur esclavage ,
Signe aux Traités des Rois .
L'Univers te rappelle , aimable Fugitive ;
Enchaîne la Difcorde aux Autels dé Janus :
Brife les noirs Cyprès , & joins ta douce olive
Aux myrthes de Vénus .
De pampres & de fleurs tu couronnes la Tèrre ;
Les Bergers conduiront leurs paifibles troupeaux ,
Où Mars tendit fes camps , où grondoit fon tonnèrre
,
Où flottoient fes drapeaux.
O que
de fils rendus à leurs mères tremblantes !
Que d'époufes en pleurs reverront leurs époux ,
* M. de Montefquieu , ce Légiflateur de l'Humanité
, dit au fujet de la Traite des Négres :
» Ne viendrait il pas dans la tête des Princes
» d'Europe qui font entr'eux tant de conven-
> tions , d'en faire une générale en faveur de la
>> miféricorde & de la pitié ? Liv . 15. chap . 5. de
"Efprit des Loix.
JANVIER. 1763 . II
Et ne pâliront plus aux nouvelles fanglantes
De Bellone en courroux !
Ta fouris & de Mars domptant la fière audace
Tu vois fuir les combats devant tes yeux fereins
Ton afpect fait tomber la guèrre & la menace
Du front des Souverains.
Ainfi , quand les Zéphyrs , fur leur aile fleurie ,
Raménent l'Alcyon , doux efpoir des Nochers ,
Le flot grondant s'appaife , & roule fans furie
Du fommet des rochers.
UN léger Tourbillon , prémices des orages ,
A peine de Cérès fait courber les épis ,
Qu'il vole fur les mers éveiller les naufrages
Et les flots affoupis.
C'eft ainfi que voilant fa funefte origine ,
La Guèrre , qui dans l'ombre alluma fes fambeaux
,
II. Vol. A iij
6 MERCURE DE FRANCE .
Vint changer tout-à- coup nos Palais en ruine ,
Et la Tèrre en tombeaux.
J'aivuMars, jeཏུ མl'ai vû, des fommets du Rodope ,
Précipiter fon char & les courfiers fougueux ;
Je t'ai vue , ô Bellone ! épouvanter l'Europe
Detes cris belliqueux .
Ah ! périffe le jour où la Sprée infultante ,
Pareille à ces torrens échappés de l'Etna ,
Vint choquer fa rivale , éperdue & tremblante ,
Aux rochers de Pyrna . *
*
Depuis ce jour fanglant , ô que de jours funeftes
Ont épuifé fur nous leurs tragiques horreurs ,
Les crimes , les revers , les vengeances céleſtes ,
Et nos propres fureurs.
Organe de la Mort , la trompette éffrayante
Appelloit aux combats & la Tèrre & les Mers ;
Et l'Amérique a vû l'Europe foudroyante
Tonner dans les déferts.
Alors furent changés en glaives homicides
Le foc de Triptolème & la faulx de Cérès :
Aux yeux du Laboureur le char des Euménides
Sillonna les guérêts.
Sept fois l'Eté brûlant , fept ois l'humide
tomne ,
* Invafion en Saxe.
JANVIER. 1763. 7
Sept fois le fombre Hyver entouré de glaçons ,
Vit l'affreufe Atropos faire aux champs de Bellone
D'éffroyablesmoillons.
Eh ! pourquoi de la Mort précipiter les aîles ?
La tombe eſt-elle encor trop loin de nos berceaux ?
Malheureux ! eft- ce à nous que les Parques cruelles
Ont remis leurs ciſeaux ?
Mortel , que veut ce glaive en tes mains fanguinaires
?
Menace-t-il le fein des Tigres dévorans ?
Quoi ! l'Homme égorge l'Homme , affaffins mercenaires
Vendus aux Conquérans !
O fainte Humanité ! quel fpectacle fauvage
Offre à tes yeux en pleurs ce Globe malheureux ,
Tous ces fleuves de fang , ces plaines de carnage,
Et ces piéges de feux !
Sans doute Néméfis , en fes profondes nues ,
Accumulant fur nous les orages du Sort ,
Lança de toutes parts ces fléches inconnues
Au carquois de la Mort.
Affez & trop long- temps ont roulé fur nos têtes
Tous ces globes de fer qui brifent les remparts ;
Trop long- temps ont regné les homicides fêtes ,
Les jeux fanglans de Mars.
A iv
8 MERCURE DE FRANCE .
Que ces Bouches de feux ouvertes au carnage ,
Que ces Monftres d'airain fe taifent pour jamais ;
Ou grondent fans fureur , expiant leur ravage ,
Aux fêtes de la Paix .
Telle après les éclats d'un horrible tonnèrre ,
Sur les reftes grondans d'un nuage enflammé ,
La bienfaiſante Iris vient apprendre à la Tèrre
Que l'Olympe eft calmé.
Rois , enfans des Dieux , imitez leur clémence !
Un thrône bienfaiſant eft rival des autels :
Etouffez des combats la fatale femence ,
Epargnez les Mortels.
Paſteurs des Nations que le Ciel vous confie ,
Quittez ce titre augufte , ou rendez-nous heureux ;
Mais l'orgueil des Héros fouvent nous facrifie
A fes coupables voeux.
Zh !qui peut envier une palme fragile ,
S'il faut , pour la cueillir , enfanglanter fes mains ?
LOUIS , ton coeur préfére à fon éclat ſtérile
Le bonheur des Humains.
Ton Miniftre fidéle , & que Minerve inſpire ,
Va réparer de Mars les finiftres revers ;
Le moment qui rendra la Paix à ton Empire,
La rend à l'Univers .
JANVIER. 1763 . 9
Quel Mécène nouveau , jaloux de ſa mémoire ,
Raffermira des Arts les autels chancelans ?
CHOISEUL , ce fera toi ; tout Amant de la Gloire
Eft Ami des Talens.
O PAIX , divine Paix fi long-temps implorée ,
Prends du haut de l'Olympe un favorable éffor !
Et fur le front fanglant de l'Europe éplorée ,
Fixe tes aîles d'or !
Tes mains de l'Océan nous ouvrent les barrières ;
Ces Pins navigateurs , amis des Matelots ,
Vont deſcendre à ta voix de leurs forêts altières ,
Pour traverser les flots.
Par les noeuds du Commerce embraſſe les deux
Mondes ;
Et des climats de l'Inde aux rives du Boetis ,
Guide nos pavillons fur les vagues profondes
De l'immenfe Thétis.
Tes regards ont calmé l'orageuſe Angleterre ;
Les Peuples du Soleil , enfans des vaſtes Eaux ,
Ne verront plus fortir & la foudre & la guèrre
Des flancs de ſes vaiffeaux.
Aux deux Mondes rivaux donne un juſte équilibre,
Rends les Peuples heureux & les Rois citoyens :
Exile tous les maux ; le bonheur d'être libce
Eft le premier des biens.
1
A v
10 MERCURE DE FRANCE.
Eh ! peux-tu , fans pitié voir un or tyrannique
De l'Africain fervile acheter les malheurs?
L'Humanité qu'outrage un abus politique
Te préfente fes pleurs.
Des enfans du Niger affranchis le rivage ;
De la Nature entin ofe venger les droits :
Fais que l'Humanité , briſant leur esclavage ,
Signe aux Traités des Rois .
L'Univers te rappelle , aimable Fugitive ;
Enchaîne la Difcorde aux Autels dé Janus :
Brife les noirs Cyprès , & joins ta douce olive
Aux myrthes de Vénus .
De pampres & de fleurs tu couronnes la Tèrre ;
Les Bergers conduiront leurs paifibles troupeaux ,
Où Mars tendit fes camps , où grondoit fon tonnèrre
,
Où flottoient fes drapeaux.
O que
de fils rendus à leurs mères tremblantes !
Que d'époufes en pleurs reverront leurs époux ,
* M. de Montefquieu , ce Légiflateur de l'Humanité
, dit au fujet de la Traite des Négres :
» Ne viendrait il pas dans la tête des Princes
» d'Europe qui font entr'eux tant de conven-
> tions , d'en faire une générale en faveur de la
>> miféricorde & de la pitié ? Liv . 15. chap . 5. de
"Efprit des Loix.
JANVIER. 1763 . II
Et ne pâliront plus aux nouvelles fanglantes
De Bellone en courroux !
Ta fouris & de Mars domptant la fière audace
Tu vois fuir les combats devant tes yeux fereins
Ton afpect fait tomber la guèrre & la menace
Du front des Souverains.
Ainfi , quand les Zéphyrs , fur leur aile fleurie ,
Raménent l'Alcyon , doux efpoir des Nochers ,
Le flot grondant s'appaife , & roule fans furie
Du fommet des rochers.
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Genre littéraire
Domaine