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Titre

RÉFLEXIONS sur l'explication Physique, donnée par M. Capperon, ancien Doyen de S. Maixent, de l'Akousmate d'Ansacq, inserée dans le Mercure de France, du mois d'Aoust 1731.

Titre d'après la table

Réfléxions sur l'explication de l'Akousmate d'Ansacq,

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1
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Incipit

Je n'aurois eu garde de hazarder une explication Physique de l'Akousmate

Texte
RÉFLEXIONS sur l'explication Physique
,
donnée
par M. Capperon , ancien
Doyen de S. Maixent , de lAkousmate
d'Ansacq , inserée dans le Mercure de
France , du mois d'Aoust 1731.
E n'aurois eu garde de hazarder une
explication Physique de l'Akousmate
d'Ansacq , si j'eusse sçu que dans le même
temps que j'écrivois , M. Capperon
avoit la plume à la main pour traiter la
la même matiere.Concourir avec une personne
qui a produit à la République des
Lettres , tant de coups de maître ; c'auroit
été assurément une témérité à un apprentif
Physicien. Mais puisque la chose est
faite
NOVEMBRE. 1731 .
2573
faite , j'ai tout lieu de m'en consoler par
l'union et la conformité de nos sentimens.
Nous confinons , en effet l'un et l'autre
le tintamare d'Ansacq dans une nuée 3
nous disons l'un et l'autre que la rarefaction
ou fermentation d'une matiere concentrée
dans quelque concavité de la nuée,
et qui forçant sa prison , frape les colomnes
d'air voisines , est la cause des sons ';
enfin nous faisons l'un et l'autre dépendre
la variété de ces sons des differentes
manieres dont cette matiere s'échapera de
l'endroit d'où elle sort.
Nos explications ne different donc que
dans le plus ou le moins d'étenduë; peutêtre
que ce sçavant Physicien a crû les
principes Physiques si intelligibles qu'il
étoit inutile de les éclaircir davantage
du moins en cela a- t- il jugé des autres par
lui- même ; peut-être aussi , plutôt par
une prolixité trop ordinaire aux jeunes
gens , que par necessité , ai - je conduit
trop loin mes réfléxions : C'est au Lecteur
à en juger.
Il me reste neanmoins quelques scrupules
sur l'explication de M. Capperon.
1º. Je confesse avec sincerité que je ne
comprens pas bien ce que c'est que fermentation
froide. J'ai toujours crû que la
chaleur étoit le principe de la fermentation
2574 MERCURE DE FRANCE
tion , et que la violence ou le peu de
sensibilité qu'on y éprouve , n'avoit d'autre
cause que la difference du dégré de
chaleur,
2º. La cause que donne M. Capperon
de la fermentation m'embarrasse.» La ma-
» tiere subtile ( dit- il ) agitant continuel-
» lement leurs parties grossieres , poreu-
» ses et tartareuses ( des liquides ) par ses
>> tourbillonemens , elles les pousse si vi-
» vement les uns contre les autres , que
les petites s'introduisent par ce moyen
» dans les pores des plus grossieres . Je
me suis persuadé jusqu'ici que
les parties
des fluides n'avoient point de pores , que
la fluidité ne consistoit que dans un ar.
rangement de parties tres - délicates , tresfléxibles
et un peu longues , toutes contigues
ou couchées les unes sur les autres ,
sans y être adherantes ; en sorte que la
matiere subtile ait passage entre chaque
partie.
3°. Ces termes de M. Capperon , qui
se trouvent à la page 1850. » Dans les va-
» peurs qui s'élevent en l'air , il y en a
» qui emportent avec elles quantité de
parties simplement terrestres , qui con-
» tiennent aussi de l'air , et quantité d'au
» tres parties purement salines . Ces termes
, dis-je , jettent dans mon esprit une
cer-
14
NOVEMBRE. 1731. 2575
certaine confusion sur la nature des vapeurs
et de l'air. Pour dissiper tous ces
scrupules et pour me desabuser de mes
erreurs Phylosophiques , je proposerai
trois réfléxions ; j'attens de la politesse.de
M. Capperon qu'il voudra bien se donner
la peine d'y répondre s'il les trouve rai
sonnables.
PREMIERE REFLEXION.
De l'idée que nous donne M. Cappeton
de la fermentation , naissent dans l'esprit
trois conséquences , que l'expérience
contredit également.
A
9
S'il s'y peut trouver des fermentations
froides , et qu'on puisse les attribuer aux
liqueurs et à presque tous les Corps que
nous voyons capables de fermentation ;
il s'ensuivra qu'en quelque situation que
soient ces corps et en toute saison , ils seront
capables de la même fermentation
et qu'ils devront conserver ce même dégré
de froid qu'ils ont hors de ces momens
de fermentation , parce qu'ils contiendront
en eux - mêmes , et toujours ,
leur ferment , qui sera indépendant de
toute autre cause , et que la matiere subtile
roulera sans interruption ou dans leurs
pores ou entre leurs parties. Premiere
consequence,
>
Si
2576 MERCURE DE FRANCE
Si la fermentation n'avoit pour cause
que l'agitation des parties , occasionnée
par la matiere subtile, cette agitation étant
continuelle , suivant le principe même de
M. Capperon , il s'ensuivroit que cette
fermentation arriveroit aussi-bien dans un
vin fait , &c. dans un vin nouveau ;
que
et qu'elle devroit être continuelle. Seconde
conséquence.
Enfin si tout l'effet de la matiere subtile
n'est qu'une injection , pour ainsi dire ,
des parties les plus fines dans les pores des
plus grossieres , il s'ensuivra une condensation
, une diminution de volume , sans
perte de substance ( cè qui est le contraire
de la fermentation ) , parce qu'un corps
remplit d'autant moins d'espace que ses
pores sont plus serrez , ses intervalles
plus remplis par ses propres parties ; c'est
ainsi qu'une livre de laine à un volume
plus considerable qu'une livre d'or. Troisiéme
conséquence.
SECONDE REFLEXION.
Pour éviter ces trois inconvéniens , il
> me semble qu'on peut assigner trois causes
de la fermentation .
1º. Un mouvement circulaire trop violent
de la matiere subtile , occasionné par
un corps étranger ; précipitation qui ne
1
lui
NOVEMBRE. 1731. 2577
lui permet plus de glisser par ses corps
ordinaires , mais qui la chasse avec confusion
sur la surface même des parties ;
d'où il arrive que secondée par les globules
du second élement qu'elle a frappées ,
elle souleve , émousse , rompt ces parties,
entraîne avec elles toutes celles dont elle
peut se charger , qu'elle écarte ou pousse
au dehors toutes les parties qui lui résistent.
De-là les boüllons , de là le bruit , la
fumée , le tarissement. De-là l'admirable
fermentation du lait et de toutes les autres
liquides , dont les parties grasses et branchues
résistent à l'effort de ces matieres.
De -là la difference de saveur des liqueurs
qui ont boüilli , d'avec les crues , & c.
2. Un entrelassement de parties grasses
et branchuës avec les globules du second
élement, qui en enferme ou en retrécit
les interstices , et précipite par là le
mouvement de la matiere subtile ; précipitation
qui ébranle ces Globules, Ces Globules
frappez unissent leur action avec
celle de la matiere subtile , ils soulevent
ensemble ces parties grasses , les brisent,
chassent au dehors ou précipitent en bas
par leur mouvement orbiculaire les plus
grossieres , qui s'opposoient à leurs passages
,et leur action sera d'autant plus prompre
et plus sensible que l'espace sera plus
E rem- .
2578 MERCURE DE FRANCE
rempli , que les passages seront plus serrez
par ces parties grasses , et qu'elles mêmes
seront plus facilement ébranlées et
moins poreuses . De- là cette fermentation
ne doit durer qu'autant que cet obstacle
subsistera, De-là la douceur de toutes les
liqueurs nouvelles ; de- là leur dégré de
chaleur dans le tems de la fermentation
de -là plus elles ont bouilli , plus elles sont
claires , plus elles sont belles , meilleures
elles sont , et moins ily a de lie , &c,
3º. L'activité de la matiere subtile , qui
poussée par un corps étranger , détache
peu à peu les parties les plus Aéxibles d'un
corps solide , les brise , les émousse , entraine
avec elles les plus déliées , pousse ,
souleve,écarte les autres ; et son action reçoit
son dégré de vélocité , de la maniere
dont le corps étranger agit surelle.En sor,
te même que si ce corps étranger agit trop
violemment , elle enleve les parties les plus
legeres;et chassant les autres les unes dans
les autres , elle condense le corps et le fait
durcir. Tellé est la fermentation qui arrive
dans la pâte de certains fromages. Delà
il est aisé de concevoir pourquoi ces
fermentations sont plus promptes et plus
violentes l'été que l'hyver ; de-la dans
cette derniere saison cès fermentations
n'arriveroient pas , si l'on n'échauffoit la
pâte
NOVEMBRE. 1731 . 2579
pâte , si l'on ne mettoit les fromages dans
une cave chaude , & c.
Je crois,en un mot , qu'on peut par ces
trois causes donner une raison probable
de tous les phénoménes que nous voyons
dans la fermentation , sans qu'il en puisse
résulter aucune absurdité.
que
TROISIEME REFLEXION.
Les Philosophes entendent par ces termes
: Vapeur , Exhalaison , une grande
quantité de Molecules , de petites parties ,
le plus souvent insensibles , qui s'élevent
jusqu'à une hauteur indéterminée. Il est
facile de se convaincre qu'il s'en détache
de toutes sortes de corps , quoiqu'il y ait ,
des corps qui en fournissent de plus faci-)
les à se lier et à s'acrocher. Il n'est question
de
sçavoir comment ces particules s'élevent
, ce qui n'est pas fort difficile à
comprendre , quand on est persuadé
les matieres du premier et du second élement
( et sur tout la premiere ) passent
avec rapidité et continuellement dans les
pores ou intervalles de quelque corps que
ce soit ; or il est impossible qu'en passant
ainsi , ces matieres n'ébranlent,, ne détachent
et n'enlevent avec elles quelques petites
parties , qui ne pourront être plus
grosses ou plutôt même que d'un moin-
Eij dre
que
2580 MERCURE DE FRANCE
dre volume que celles qui les détachent,
Il ne faut réfléchir sur le tarissement
que
de tous les fluides , sur l'alteration de tous
les corps, pour n'en pouvoir douter. Delà
les nuées , de- là le tonnerre et tout son
tintamare , en y joignant mes principes sur
la fermentation .
De cette derniere réfléxion on doit nécessairement
conclure que les parties qui
composent ce qu'on appelle Vapeurs, sont
trop fines pour être poreuses, et pour pou :
voir par conséquent contenir de l'air ,
qu'elles sont elles -mêmes enlevées et contenuës
; d'où il suit qu'elles ne peuvent
enlever une quantité de parties qui contiennent
de l'air , comme le prétend M.
Capperon.
Telles sont les réfléxions dans lesquel
les l'ouvrage de M. Capperon m'a engagé.
Ces réfléxions n'ayant d'autre but
que de m'instruire , d'éclaircir la verité
et de profiter des grandes lumieres de ce
Sçavant, Je l'en fais volontiers le juge,
Lalonat de Soulàines,
Signature

Laloüat de Soulaines,

Collectivité
Faux
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Soumis par eljorfg le