Titre d'après la table
L'Opera Comique, Pieces nouvelles, &c.
Fait partie d'une livraison
Fait partie d'une section
Page de début
1816
Page de début dans la numérisation
371
Page de fin
1828
Page de fin dans la numérisation
383
Incipit
Le Lundy 28 Juillet, l'Opéra Comique donna la premiere Représentation
Texte
PECTACLE S.
E Lundy 28 Juillet , l'Opéra ComiLque donna la premiere Représenta
tion de deux petites Pieces nouvelles
précédées d'un Prologue, dont la premie
re Scene se passe entre l'Instinct et la Nature. Celle-ci rend compte des soins qu'elle se donne pour la Réconciliation des
sens. Il est aisé de comprendre que toures les idées de ce Prologue ont rapport
au Ballet des Sens, et au Procès des Sens
représenté à la Comédie Françoise. La
Scene de la Nature et de l'Instinct est interrompuë par l'Opinion qui vient féliciter la Nature sur le racommodement
qu'elle projette ; la Nature congédie fort
naturellement l'Opinion , quoiqu'elle se
prétende sa Collégue dans l'Empire de
Î'Univers , fondée sur le Proverbe Italien: L'Opinione Regina del Mondo.L'Instinct revient dès que l'Opinion est sortie.
Un Amour arrive pour exhorter la Nature à terminer le Procès des Sens. Après
quelques questions , elle lui demande qui
des deux Amours à la mode il aime le
mieux. ( On sçait que ces deux Amours
sont la Dule d'Angeville et la Due le Maure. )
A O UST. 1732. 1817
re. ) L'Amour répond par ce Couplet, sur
Pair : Deux beaux yeux n'ont qu'à parler.
Bon , moy , j'entens tous les jours,
Cent Discours ,
Sur ces deux aimables Amours.
Sans me sembler fort téméraire ,
Şur leur mérite , on ne peut rien régler ,
Car l'un n'a qu'à chanter pour plaire ,
Et l'autre n'a qu'à parler.
Le Prologue finit par un Ballet , composé des Sens , et de leur suite.
La premiere Piece , intitulée : Les In
terets de Village , se passe dans un Village.
Chaton , Manceau , Sécrétaire du deffunt
Bailli , paroît d'abord avec Gripant , Record et son Confident , à qui en expliquant sa situation et ses vûes , il apprend
qu'il s'apperçoit qu'il est aimé de la veuve du Bailli , mais qu'il aime Agate sa
Niéce , promise à Piérot. Primò , dit - il
je veux épouser Agate , et pour y parvenir ,
la brouiller avec Piérot. 2° . Je veux pour
jouir toujours des Revenans- bons du Bailliage , me servir de l'ascendant que j'ai sur
l'esprit de Me Triolet , ( c'est la veuve)
pour l'engager à remettre sa Charge à un imbécile qui se contente de n'en posseder que.
G Le
1818 MERCURE DE FRANCE
Le Titre, comme faisoit le deffunt. Gripant
lui demande à quel heureux imbécile il
donnera la préférence. Chaton propose
d'abord Piérot , qu'il détacheroit d'Agate, en lui inspirant l'ambition d'être Bailli ; ensuite il parle de Grosdos , riche Fermier , glorieux de Village , capable de ser- vir à ses desseins.
La Veuve paroît et tâche de s'expliquer avec Chaton , qui feint de ne pas entendre son galimatias passionné. Elle le
quitte , en appercevant Piérot. Chaton
fait accroire à Piérot que la Veuve a du
penchant pour lui , et songe à supplanter sa Niéce; il ébranle la fidélité de Piérot
en lui exagerant les prérogatives de la
Charge de Bailli. Piérot sort presqu'inconstant ; et sur le champ Chaton ins
truit Agate des inconstances de son Rival , et lui déclare en même temps son
amour. Agate méprise cette déclaration
et s'afflige de l'infidelité de Piérot. Chaton après son départ , s'applaudit du succès de son mensonge , et ne perd pas l'esperance , malgré la rigueur d'Agate . Grosdos paroît, Chaton gagne sa confiance par
des respects et des soumissions ; il lui mes
dans la tête de devenir Bailli ; Grosdos le
retient pour son Secretaire, comme avoit
fait Piérot. Chaton dit: Je tiens Grosdos
dans
AOUST. 1732. 1819
dans mesfilets; je choisirai entre Piérot et lui,
suivant les dispositions de Mme Triolet. Il
est question à present de l'amener à mon but.
Elle vient; je veux faire rompre la glace par
Gripant ; allons lui donner mes instructions.
que
Dans la Scene suivante , Janot qui survient , apprend à la Veuve qu'on parle
dans le Village de l'envie que Grosdos a
d'être Bailly. Piérot arrive , et dit crument à la Baillive , qu'il la sçait amou
reuse de lui ; elle le détrompe , et conçoit de violens soupçons au sujet de Chaton Piérot declare être la cause
de son erreur. Agate paroît quand sa tante a quitté Piérot. Il veut lui cacher sa
courte inconstance par des démonstrations de tendresse ; Agate le rebute ironiquement; Piérot se flare d'un prompt
retour. Il apperçoit Grosdos, et reste pour
le narguer ; Grosdos lui conseille de le
respecter comme un homme qui va être
bien-tôt Bailly; cette nouvelle fait changer de ton à Piérot , qui s'humilie devant
le prétendu oncle d'Agate. Grosdos dir
qu'il consultera sur ceci son Secretaire
Chaton. Ouais , dit Piérot à part ; Cha
ton par tout ! je crois que le fripon nous
trompe tous. Mme Triolet qui vient , sans
être apperçue , de surprendre Chatonaux,
pieds de sa niéce , arrive en fureur , et 292003 Gij Agate
1820 MERCURE DE FRANCE
Agate qui survient , l'augmente en se
plaignant des importunitez de ce fourbe ; ils prennent tous le parti de se ca- cher derriere des arbres , en voyant paroître Chaton et Gripant, que Piérot seul
aborde ; il les fait parler à cœur ouvert ,
sur tous leurs interêts differens. Ils sont
tous détrompez par celui qui les avoit
tous abusez ; la veuve dépitée épouse
Grosdos, et donne Agate à Piérot. Cha
ton et Gripant se retirent avec l'audace
de deux fripons , et le Village assemblé
vient féliciter le nouveau Bailly , et cele
brer les deux mariages par des Danses ,
qui forment le Divertissement.
La 2 Piéce , intitulée : L'Epreuve des
Fées, est composée de plusieurs Scenes
Episodiques , qui se passent dans une
Grotte, destinée à l'Epreuve des Fées. La
Récipiendaire y donne audience aux per- sonnages , destinez pour lui demander
graces des conseils; et c'est sur les
Réponses qu'elle fait , que les Fées cathées dans les Rochers de la Grotte , jugent de sa capacité , et la reconnoissent
Fée,à la fin de l'épreuve on la renvoye.
des et
Dans la 2de Scene , Bagatelius , Philosophe, vient demander à Finette , ( c'est la
jeune Fée qu'on éprouve ) la connoissanse de la verité. Finette, fatiguée de ses
doctes
AOUST. 1732 1811
*
doctes clabauderies , le dotie d'une extinction de voix , et le renvoye presque
muet.
Le second Client est Jacot , Paisan, qui
supplie la Fée de lui accorder le don d'être toujours autant aimé de sa femme ,
qu'il l'est présentement : Finette lui promet que son front sera toujours aussi res
pecté qu'il l'est. Il faut sçavoir que par le
recit de Jacot, et par l'éloge même qu'il
fait de sa chere moitié ,il prouve lui- même, sans s'en appercevoir qu'elle ne lui
est point du tout fidelle.
Après le départ du crédule Jacot , paroît unejolie femme , nommée Araminte ,
qui demande le rétablissement de la réputation d'une de ses bonnes amies , qu'une
jmprudence a un peu timpanisée ; la Fée
l'oblige à conter l'aventure de son amic.
Araminte avoue que cette amie a été surprise avec son amant par son mari, et dans la chaleur de sa narration elle se coupe ,
et fait connoître qu'elle est l'Héroïne du Roman.
La derniere Scene , mêlée de critique et
dé Jeu de Théatre , est remplie par un
Danseur , toujours occupé de son talent ,
et toujours sacrifiant aux Graces : Voici
des Morceaux du Panégirique qu'il fait
du Gracieux.
Giij Jai
1822 MERCURE DE FRANCE
J'ai pour le Gracieux une ardeur infinie ,
Je voue au Gracieux mes Jambes , mon Génie ;
Non , sans le Gracieux , je ne puis faire un Pás,
Il gouverne mes pieds , il balance * mes Bras ,
* , il me panche *, il me tourne Il me pousse
il m'arrête,
Il me tient le menton, quand il leve la tête ¿
Etcomme le Soleil est le flambeau des cieux
MonAstre , à moi mon Astre est ...
Pierot.
La Gargouillade.
Le Danseur.
Quoi?
Le Gracieux.
Croit- on qu'il ne me suit que dans les Bergeries▸
Je fais au bord du Stix minauder les Furies ,
Et lorsque l'on me voit figurer en Démon ,
On croit, au Masque près, voir danser Céladon.
Si je suis en Guérrier qui sort d'une Bataille ,
Si pour la tendre Alceste à Sciros je ferraille ,
Une grace me met monEpée à la main ,
Sous cent habits divers on me déguise en vain
Peste ! on me reconnoît toûjours.... Ah ! c'esɛ lui- même ,
C'est lui , dit- on, c'est lui ; que sa garce est ex- trême !
****** L'Axis différents,
Londres
AOUST. 1732.` 1823
Londres mevit un jour sous un habit oblong,
En Sacrificateur , dansant un Cotillon ,
Quel Tapage ce fut ! c'étoit pis qu'un Tonnerret
De ce Cottillon-là , les Gourmets d'Angleterre,
Se souviendront long- temps...
Finette.
Et nous aussi , ma foy !
Pierot , à la Gargouillarde.
Votre Gracieux est souvent berné , je croi,
La Gargoüillade.
Vous croicz mal , pourvu que l'on danse avec
grace ,
Nal contresens ne choque , il n'est rien qui ne
passe ;
Jamais on n'analise un divertissement ;
Ou n'y demande point ni pourquoi , ni com- ment ;
J
Qu'on mette à la Françoise un Peuple de laGrece
Que l'on Coiffe en Bichon une grande Prêtresse,
Que la Sirene prête à massacrer les gens ,
Se prépare à leur mort par des Ballets galans ,
Cela n'est-il pas bien , dés que cela.sçait plaire
Pour les autres talens ce Juge si sévere ,
Qui rejette à son gré Thalie et ses bons mots,
Houspille Melpomene, et nargue ses Héros ;
Ce Public qui par tout veut de la convenance
Apour la danse seule une entiere indulgence ;
?
2
Güij
1824 MERCURE DE FRANCE一个
Lss Romains les plus grands , par lui sont ab- batus
Dans sa conduite , il a blâmé jusqu'à Brutus ,
Mais il a vû, revû , sans chicaner l'idée ,
Danser des Tambourins aux filles de Judée.
Et dans le Ballet neuf, avant qu'il fut rogné ,
Recousu , recrépi , frisoté , tignoné ,
Devant Protésilas , sortant du sombre Empire.
Des Trépassez dansoient , on l'a vû sans en rire
Et sans imaginer aucune absurdité
Dans ces Morts qui sautoient pour un réssuscité,
Piérot.
Si l'on ne rioit pas , on en avoit envie ;
Mais on ne le pouvoit ; observez, je vous prie ,
Me disoit un Frater , me lavant le Menton >
Que les Os du Gosier sont placez de façon ,
Qu'on ne peut à la fois rire et baailler... la bou che ;
Tres-distincte à marquer quel sentiment nous touche ,
S'ouvre en long, quand on baaille, en large quand
on rit ;
Vous voiez , sans avoir autant que moi d'esprit
Que le large et le long... que le long et le large...
Ne peuvent exercer au même instant leur charge.
Piérot , Physicien !
Finette.
Piered
AOUS T. 1732. 1825
Piérot.
Ouy, c'est le long qui fait
Que l'on ne rioit pas dans le nouveau Ballet.
Finette.
A la danse s'entend ; car à la Poësie
On rioit volontiers ; et quand Laodamie ,
Déplorant les malheurs de la viduité ,
Faisant sentir combien peze la chasteté
Sur le malheureux corps d'une veuve oppressée ,
t
Aux pieds d'une Statue ardamment carressée ,
De son époux deffunt alloit chercher l'ardeur ,
On disoit fy; c'est mal rappeller son Buveur.
Il réve !
Le Danseur.
Je descens sur un Port de Provence ;
De-là , tout en dansant je vois toute la France
Je me rens à Paris pour connoître le goût
D'un Peuple que j'entens préconiser par tout.
J'y trouve dans la danse un tumulte effroiable !
Chacun m'y yeut compter qu'un sujet admi-
›
rable ;
L'un pour le Gracieux , et l'autre pour le vif ,
Fait de ces deux talens un injuste tarif.
Deux Prodiges dansans que chacun idolâtre ,
Partageoient sans débat l'Empire du Théatre ,
I GY Mais
1826 MERCURE DE FRANCE
Mais on les désunit , et sur le moindre mot
L'une passe la Mer , l'autre court à Chaillot.
Leur départ nous allarme, et les Partis glapissents
De Doctes heurlemens les Caffez retentissent ;
Et dans l'Opéra même un Braillard à nos yeux,
Décide sans quartier ; loüangeur furieux ,
Au talent qu'il réprouve il déclare la guerre ;
Le Balcon s'en émeut , il trouble le parterre ,
Son souffle impur s'aigrit , l'air en est infecté ,
Le Flot qui l'apporta, recule épouvanté.
On implore aussi-tôt mon avis , on m'entoure
On fait silence, et moi, je répons cette Loure,&c
A
Le Danseur livré à son Entousiasme , se
met à danser, oublie ce qu'il venoit demander à la Fée , et sort en redoublant
ses Lazis de danse. Cet Acte est terminé
par une Fête champêtre , exécutée par des
Jardiniers et des Jardinieres , et par un
Vaudeville , qui termine la Piéce. En voiey quelques couplets :
Dans une fille bien apprise
J'aime une modeste rougeur ;
Le vermillon de la Cerise
Vaut-il celui de la pudeur ?
L'Amant avant son mariage
Est aussi sucré qu'un Brugnon:
Est-1
AOUST 173 . 1827
Est-il mari ? dans son ménage
Il est plus aigre qu'un Citron.
Barbons , Coquets , de bon sens vuides,
Cessez vos soupirs ennuyeux :
Jamais la neffle avec ses rides
Ne flata le goût et les yeux.
An Public.
Le bruit qui nous plaît davantage ,
Messieurs , quand nous ouvrons le bec ,
C'est sûrement votre suffrage ,
Mangerons-nous notre pain sec.
(
On trouvera l'Air notté au bas de la
Chanson.
Le 19 Aoust , le même Opéra Comique donna deux Piéces nouvelles , d'un
Acte chacune ; la premiere , intitulée :
La Lanterne Véridique, précédée d'un Prologue qui a pour titre : Le Réveil de POpera Comique. La seconde , Le Rival de
lui-même. Celle- ci est jouée par les Petits
Comédiens , qu'on a vûs avec plaisir ,
l'année passée à la même Foire S.Laurent.
Cette Piéce est encore précédée d'un Prologue , intitulé : Le Parterre Merveilleux.
Tous ces nouveaux Divertissemens ont été
G vj reçus
1828 MERCURE DE FRANCE
receus favorablement du public. On en
parlera plus au long.
Le Mercredi 13. de ce mois , les Comédiens François donnerent la premiere
Représentation de Zaire. Cette Piece fut
beaucoup critiquée , et encore plus applaudie. Nous entrions icy dans l'exposition , et les autres détails de ce Poëme ,
mais l'Auteur lui même nous dispense
de ce soin dans la Lettre qu'on va lire. Il
est inutile de faire sentir combien le Lecteur y gagnera ; nous y gagnons aussi ,
quoique l'illustre Poëte , en prodigant sa
modestie , ait trop pcu ménagé la nôtre.
E Lundy 28 Juillet , l'Opéra ComiLque donna la premiere Représenta
tion de deux petites Pieces nouvelles
précédées d'un Prologue, dont la premie
re Scene se passe entre l'Instinct et la Nature. Celle-ci rend compte des soins qu'elle se donne pour la Réconciliation des
sens. Il est aisé de comprendre que toures les idées de ce Prologue ont rapport
au Ballet des Sens, et au Procès des Sens
représenté à la Comédie Françoise. La
Scene de la Nature et de l'Instinct est interrompuë par l'Opinion qui vient féliciter la Nature sur le racommodement
qu'elle projette ; la Nature congédie fort
naturellement l'Opinion , quoiqu'elle se
prétende sa Collégue dans l'Empire de
Î'Univers , fondée sur le Proverbe Italien: L'Opinione Regina del Mondo.L'Instinct revient dès que l'Opinion est sortie.
Un Amour arrive pour exhorter la Nature à terminer le Procès des Sens. Après
quelques questions , elle lui demande qui
des deux Amours à la mode il aime le
mieux. ( On sçait que ces deux Amours
sont la Dule d'Angeville et la Due le Maure. )
A O UST. 1732. 1817
re. ) L'Amour répond par ce Couplet, sur
Pair : Deux beaux yeux n'ont qu'à parler.
Bon , moy , j'entens tous les jours,
Cent Discours ,
Sur ces deux aimables Amours.
Sans me sembler fort téméraire ,
Şur leur mérite , on ne peut rien régler ,
Car l'un n'a qu'à chanter pour plaire ,
Et l'autre n'a qu'à parler.
Le Prologue finit par un Ballet , composé des Sens , et de leur suite.
La premiere Piece , intitulée : Les In
terets de Village , se passe dans un Village.
Chaton , Manceau , Sécrétaire du deffunt
Bailli , paroît d'abord avec Gripant , Record et son Confident , à qui en expliquant sa situation et ses vûes , il apprend
qu'il s'apperçoit qu'il est aimé de la veuve du Bailli , mais qu'il aime Agate sa
Niéce , promise à Piérot. Primò , dit - il
je veux épouser Agate , et pour y parvenir ,
la brouiller avec Piérot. 2° . Je veux pour
jouir toujours des Revenans- bons du Bailliage , me servir de l'ascendant que j'ai sur
l'esprit de Me Triolet , ( c'est la veuve)
pour l'engager à remettre sa Charge à un imbécile qui se contente de n'en posseder que.
G Le
1818 MERCURE DE FRANCE
Le Titre, comme faisoit le deffunt. Gripant
lui demande à quel heureux imbécile il
donnera la préférence. Chaton propose
d'abord Piérot , qu'il détacheroit d'Agate, en lui inspirant l'ambition d'être Bailli ; ensuite il parle de Grosdos , riche Fermier , glorieux de Village , capable de ser- vir à ses desseins.
La Veuve paroît et tâche de s'expliquer avec Chaton , qui feint de ne pas entendre son galimatias passionné. Elle le
quitte , en appercevant Piérot. Chaton
fait accroire à Piérot que la Veuve a du
penchant pour lui , et songe à supplanter sa Niéce; il ébranle la fidélité de Piérot
en lui exagerant les prérogatives de la
Charge de Bailli. Piérot sort presqu'inconstant ; et sur le champ Chaton ins
truit Agate des inconstances de son Rival , et lui déclare en même temps son
amour. Agate méprise cette déclaration
et s'afflige de l'infidelité de Piérot. Chaton après son départ , s'applaudit du succès de son mensonge , et ne perd pas l'esperance , malgré la rigueur d'Agate . Grosdos paroît, Chaton gagne sa confiance par
des respects et des soumissions ; il lui mes
dans la tête de devenir Bailli ; Grosdos le
retient pour son Secretaire, comme avoit
fait Piérot. Chaton dit: Je tiens Grosdos
dans
AOUST. 1732. 1819
dans mesfilets; je choisirai entre Piérot et lui,
suivant les dispositions de Mme Triolet. Il
est question à present de l'amener à mon but.
Elle vient; je veux faire rompre la glace par
Gripant ; allons lui donner mes instructions.
que
Dans la Scene suivante , Janot qui survient , apprend à la Veuve qu'on parle
dans le Village de l'envie que Grosdos a
d'être Bailly. Piérot arrive , et dit crument à la Baillive , qu'il la sçait amou
reuse de lui ; elle le détrompe , et conçoit de violens soupçons au sujet de Chaton Piérot declare être la cause
de son erreur. Agate paroît quand sa tante a quitté Piérot. Il veut lui cacher sa
courte inconstance par des démonstrations de tendresse ; Agate le rebute ironiquement; Piérot se flare d'un prompt
retour. Il apperçoit Grosdos, et reste pour
le narguer ; Grosdos lui conseille de le
respecter comme un homme qui va être
bien-tôt Bailly; cette nouvelle fait changer de ton à Piérot , qui s'humilie devant
le prétendu oncle d'Agate. Grosdos dir
qu'il consultera sur ceci son Secretaire
Chaton. Ouais , dit Piérot à part ; Cha
ton par tout ! je crois que le fripon nous
trompe tous. Mme Triolet qui vient , sans
être apperçue , de surprendre Chatonaux,
pieds de sa niéce , arrive en fureur , et 292003 Gij Agate
1820 MERCURE DE FRANCE
Agate qui survient , l'augmente en se
plaignant des importunitez de ce fourbe ; ils prennent tous le parti de se ca- cher derriere des arbres , en voyant paroître Chaton et Gripant, que Piérot seul
aborde ; il les fait parler à cœur ouvert ,
sur tous leurs interêts differens. Ils sont
tous détrompez par celui qui les avoit
tous abusez ; la veuve dépitée épouse
Grosdos, et donne Agate à Piérot. Cha
ton et Gripant se retirent avec l'audace
de deux fripons , et le Village assemblé
vient féliciter le nouveau Bailly , et cele
brer les deux mariages par des Danses ,
qui forment le Divertissement.
La 2 Piéce , intitulée : L'Epreuve des
Fées, est composée de plusieurs Scenes
Episodiques , qui se passent dans une
Grotte, destinée à l'Epreuve des Fées. La
Récipiendaire y donne audience aux per- sonnages , destinez pour lui demander
graces des conseils; et c'est sur les
Réponses qu'elle fait , que les Fées cathées dans les Rochers de la Grotte , jugent de sa capacité , et la reconnoissent
Fée,à la fin de l'épreuve on la renvoye.
des et
Dans la 2de Scene , Bagatelius , Philosophe, vient demander à Finette , ( c'est la
jeune Fée qu'on éprouve ) la connoissanse de la verité. Finette, fatiguée de ses
doctes
AOUST. 1732 1811
*
doctes clabauderies , le dotie d'une extinction de voix , et le renvoye presque
muet.
Le second Client est Jacot , Paisan, qui
supplie la Fée de lui accorder le don d'être toujours autant aimé de sa femme ,
qu'il l'est présentement : Finette lui promet que son front sera toujours aussi res
pecté qu'il l'est. Il faut sçavoir que par le
recit de Jacot, et par l'éloge même qu'il
fait de sa chere moitié ,il prouve lui- même, sans s'en appercevoir qu'elle ne lui
est point du tout fidelle.
Après le départ du crédule Jacot , paroît unejolie femme , nommée Araminte ,
qui demande le rétablissement de la réputation d'une de ses bonnes amies , qu'une
jmprudence a un peu timpanisée ; la Fée
l'oblige à conter l'aventure de son amic.
Araminte avoue que cette amie a été surprise avec son amant par son mari, et dans la chaleur de sa narration elle se coupe ,
et fait connoître qu'elle est l'Héroïne du Roman.
La derniere Scene , mêlée de critique et
dé Jeu de Théatre , est remplie par un
Danseur , toujours occupé de son talent ,
et toujours sacrifiant aux Graces : Voici
des Morceaux du Panégirique qu'il fait
du Gracieux.
Giij Jai
1822 MERCURE DE FRANCE
J'ai pour le Gracieux une ardeur infinie ,
Je voue au Gracieux mes Jambes , mon Génie ;
Non , sans le Gracieux , je ne puis faire un Pás,
Il gouverne mes pieds , il balance * mes Bras ,
* , il me panche *, il me tourne Il me pousse
il m'arrête,
Il me tient le menton, quand il leve la tête ¿
Etcomme le Soleil est le flambeau des cieux
MonAstre , à moi mon Astre est ...
Pierot.
La Gargouillade.
Le Danseur.
Quoi?
Le Gracieux.
Croit- on qu'il ne me suit que dans les Bergeries▸
Je fais au bord du Stix minauder les Furies ,
Et lorsque l'on me voit figurer en Démon ,
On croit, au Masque près, voir danser Céladon.
Si je suis en Guérrier qui sort d'une Bataille ,
Si pour la tendre Alceste à Sciros je ferraille ,
Une grace me met monEpée à la main ,
Sous cent habits divers on me déguise en vain
Peste ! on me reconnoît toûjours.... Ah ! c'esɛ lui- même ,
C'est lui , dit- on, c'est lui ; que sa garce est ex- trême !
****** L'Axis différents,
Londres
AOUST. 1732.` 1823
Londres mevit un jour sous un habit oblong,
En Sacrificateur , dansant un Cotillon ,
Quel Tapage ce fut ! c'étoit pis qu'un Tonnerret
De ce Cottillon-là , les Gourmets d'Angleterre,
Se souviendront long- temps...
Finette.
Et nous aussi , ma foy !
Pierot , à la Gargouillarde.
Votre Gracieux est souvent berné , je croi,
La Gargoüillade.
Vous croicz mal , pourvu que l'on danse avec
grace ,
Nal contresens ne choque , il n'est rien qui ne
passe ;
Jamais on n'analise un divertissement ;
Ou n'y demande point ni pourquoi , ni com- ment ;
J
Qu'on mette à la Françoise un Peuple de laGrece
Que l'on Coiffe en Bichon une grande Prêtresse,
Que la Sirene prête à massacrer les gens ,
Se prépare à leur mort par des Ballets galans ,
Cela n'est-il pas bien , dés que cela.sçait plaire
Pour les autres talens ce Juge si sévere ,
Qui rejette à son gré Thalie et ses bons mots,
Houspille Melpomene, et nargue ses Héros ;
Ce Public qui par tout veut de la convenance
Apour la danse seule une entiere indulgence ;
?
2
Güij
1824 MERCURE DE FRANCE一个
Lss Romains les plus grands , par lui sont ab- batus
Dans sa conduite , il a blâmé jusqu'à Brutus ,
Mais il a vû, revû , sans chicaner l'idée ,
Danser des Tambourins aux filles de Judée.
Et dans le Ballet neuf, avant qu'il fut rogné ,
Recousu , recrépi , frisoté , tignoné ,
Devant Protésilas , sortant du sombre Empire.
Des Trépassez dansoient , on l'a vû sans en rire
Et sans imaginer aucune absurdité
Dans ces Morts qui sautoient pour un réssuscité,
Piérot.
Si l'on ne rioit pas , on en avoit envie ;
Mais on ne le pouvoit ; observez, je vous prie ,
Me disoit un Frater , me lavant le Menton >
Que les Os du Gosier sont placez de façon ,
Qu'on ne peut à la fois rire et baailler... la bou che ;
Tres-distincte à marquer quel sentiment nous touche ,
S'ouvre en long, quand on baaille, en large quand
on rit ;
Vous voiez , sans avoir autant que moi d'esprit
Que le large et le long... que le long et le large...
Ne peuvent exercer au même instant leur charge.
Piérot , Physicien !
Finette.
Piered
AOUS T. 1732. 1825
Piérot.
Ouy, c'est le long qui fait
Que l'on ne rioit pas dans le nouveau Ballet.
Finette.
A la danse s'entend ; car à la Poësie
On rioit volontiers ; et quand Laodamie ,
Déplorant les malheurs de la viduité ,
Faisant sentir combien peze la chasteté
Sur le malheureux corps d'une veuve oppressée ,
t
Aux pieds d'une Statue ardamment carressée ,
De son époux deffunt alloit chercher l'ardeur ,
On disoit fy; c'est mal rappeller son Buveur.
Il réve !
Le Danseur.
Je descens sur un Port de Provence ;
De-là , tout en dansant je vois toute la France
Je me rens à Paris pour connoître le goût
D'un Peuple que j'entens préconiser par tout.
J'y trouve dans la danse un tumulte effroiable !
Chacun m'y yeut compter qu'un sujet admi-
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rable ;
L'un pour le Gracieux , et l'autre pour le vif ,
Fait de ces deux talens un injuste tarif.
Deux Prodiges dansans que chacun idolâtre ,
Partageoient sans débat l'Empire du Théatre ,
I GY Mais
1826 MERCURE DE FRANCE
Mais on les désunit , et sur le moindre mot
L'une passe la Mer , l'autre court à Chaillot.
Leur départ nous allarme, et les Partis glapissents
De Doctes heurlemens les Caffez retentissent ;
Et dans l'Opéra même un Braillard à nos yeux,
Décide sans quartier ; loüangeur furieux ,
Au talent qu'il réprouve il déclare la guerre ;
Le Balcon s'en émeut , il trouble le parterre ,
Son souffle impur s'aigrit , l'air en est infecté ,
Le Flot qui l'apporta, recule épouvanté.
On implore aussi-tôt mon avis , on m'entoure
On fait silence, et moi, je répons cette Loure,&c
A
Le Danseur livré à son Entousiasme , se
met à danser, oublie ce qu'il venoit demander à la Fée , et sort en redoublant
ses Lazis de danse. Cet Acte est terminé
par une Fête champêtre , exécutée par des
Jardiniers et des Jardinieres , et par un
Vaudeville , qui termine la Piéce. En voiey quelques couplets :
Dans une fille bien apprise
J'aime une modeste rougeur ;
Le vermillon de la Cerise
Vaut-il celui de la pudeur ?
L'Amant avant son mariage
Est aussi sucré qu'un Brugnon:
Est-1
AOUST 173 . 1827
Est-il mari ? dans son ménage
Il est plus aigre qu'un Citron.
Barbons , Coquets , de bon sens vuides,
Cessez vos soupirs ennuyeux :
Jamais la neffle avec ses rides
Ne flata le goût et les yeux.
An Public.
Le bruit qui nous plaît davantage ,
Messieurs , quand nous ouvrons le bec ,
C'est sûrement votre suffrage ,
Mangerons-nous notre pain sec.
(
On trouvera l'Air notté au bas de la
Chanson.
Le 19 Aoust , le même Opéra Comique donna deux Piéces nouvelles , d'un
Acte chacune ; la premiere , intitulée :
La Lanterne Véridique, précédée d'un Prologue qui a pour titre : Le Réveil de POpera Comique. La seconde , Le Rival de
lui-même. Celle- ci est jouée par les Petits
Comédiens , qu'on a vûs avec plaisir ,
l'année passée à la même Foire S.Laurent.
Cette Piéce est encore précédée d'un Prologue , intitulé : Le Parterre Merveilleux.
Tous ces nouveaux Divertissemens ont été
G vj reçus
1828 MERCURE DE FRANCE
receus favorablement du public. On en
parlera plus au long.
Le Mercredi 13. de ce mois , les Comédiens François donnerent la premiere
Représentation de Zaire. Cette Piece fut
beaucoup critiquée , et encore plus applaudie. Nous entrions icy dans l'exposition , et les autres détails de ce Poëme ,
mais l'Auteur lui même nous dispense
de ce soin dans la Lettre qu'on va lire. Il
est inutile de faire sentir combien le Lecteur y gagnera ; nous y gagnons aussi ,
quoique l'illustre Poëte , en prodigant sa
modestie , ait trop pcu ménagé la nôtre.
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Mots clefs
Domaine