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1711, 03
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A PARIS,
M.DCCXI.
Avec Privilège du Roy.
-
HERGURE'";,".;
.CALANT.
Par le Sieur Du F.
Mois
de Mars
1711.
Le prix est 30.sols relié en veau
25.sols, brochz
A PARIS,
Chez DANIEL JOLLET, au Livre
Royal, au bout du Pont S. Michel
du côté du Palais.
PIERRE RIBOU, à l'Image S. Louis,
sur le Quay des Augustins.
GILLES LÀMESLI, à l'entrée de la ruë
du Foin, du côté de la rue
"SuintJacques,
PREFACE.
L'Auteur de Radamiste
& Zenobie,
Tragedie nouvelle, m'en
avoir promis la critique,
& l'avoit en effet commencéede
bonne foi sans
se ménager lui-même ;
mais n'ayant pas le loisir
de la finir pource moisci,
ila trouvé bon qu'on
Inic dans le Mercure les
plusvivescritiquesqu'on
pourroitm'envoyer contre
ta piece; j'admire son
courage; il en faut encore
plus pour vouloir bien
s'exposèr à la censure des
autres que pour se censurer
soi-même, lescoups
qu'on se porte à soi-même
sont toûjours flattez
,
nostre mainmollit
malgré nostreresolution
l'on craint de se blesser,
ou du moins l'on ne
choisit point les en."
droits mortels, il n'y a
que les desesperez qui se
frappent de toutes leurs
forces,r)j) ; :Í >-: Quelqu'un dira que
FAuceurhe risquepas
beaucoup ens'exposant,
& qu'au milieudes applaudissemenspublics
on
est peusensible aux traits
d'une Cririqueparticuliere,
je crois au contraire
que la prosperité rend
les hommes plus sensibles
à la correction,en
les rendant plus orgueilleux.
Un Auteur humilié
par la chute de sa Piece,
passera condamnation
sur tout ce qu'onvoudra,
pourveu qu'on ait la
bonté de loüer quelque
chose dans son malheureux
Ouvrage; mais un
Auteur enflé d'un grand
succés, croit d'abord
qu'Apollon l'a couronné
Roy des autres Auteurs,
&: brûleroit de bon coeur
la main sacrilege qui
oseroit toucher à ses laurriieerrss..*
1<-•v- i
Monsieur deCrebillon
est d'uncaractere fort opposéàcelui-
là,&dans 1ebauche
qu'ilm'a fait voir
non -
feulement il convient
de tous les de/Tautsqu'on
trouve dans sa Pie 4
ce; mais il en faitremarquer
ausquels personne
n'avoit pensé. Profitons
doncde l'occasion, pour
mettre dans mon Mercure
la premiereCritique
de Theatreque j'aye osé
hasarder; on ne trouve
pas souvent des Auteurs
qui se presentent de bonnegrace;
prositons, abusons
même du bon elprit
de celuy -cy , attaquons
- le sans quartier;
portons le fer & le
feu dans sa Tragedie: il
ne faut point épargner
un Ouvrage dont les dé.
sauts ne sçauroient diminuer
la .> reputation:
il restera toujours dans
celuy-cy assez de beautez
hors d'atteinte, pour
faire avoüer au plus
grand nombre que Rhadamifte
estune excellente
Piece de Theatre.
Vousallez voir non
pas une Critique dans les
regles,mais quelques reflexions
que Mr
a faites en galant homme
,
sans flatterie & sans
aigreur; elles sont trescensées,
tres-fines,& noblement
écrites; ilseroit
à souhaiter qu'il eust
voulu faire une Critique
à fond de la Fable, de la
constitution & deJacouot
duite de cette Tragedie;
il nous en viendra peutestre
quelqu'une.
REFLEXIONS
DEM **
SurlaTragedie de Rhadamiste&
deZenobie.
Vous me demandez ,
Monficur
, une Critique
exaéte de la Tragedie de
Rhadamiste* j'ay fait en la
lisant quelques Reflexions
dont j'espere quevous voudrez
bien vous contenter.
L'exposition du sujet
me paroist tres simple
pour la quantité de faits
dont elle est necessaire-
-
ment chargée
,
le recit
de Zenobie ne larenferme
pas toute entiere
Rhadamiste , vient l'achever
au sécond Aéte
,
dans le
rccit qu'il fait à Hieron
de quelques circonstances
que Zenobie ne peut pas
sçavoir :
il estoit bien
difficile d'éviter l'inconvenient
des répetitions,
en introduisant sur la
Scene deux personnes qui
racontent les mêmes faits:
l'Autcury a merveilleusement
réüssi. Rhadamiste
ne par le qu'en passant de
ceux donc Zenobie a déja
instruit sa Considence, &
seulement pour entrer avec
nettetédans ce que le Spectateur
ne sçait pas encore s'il
a donné dans cette occasion
une marque de sonhabileté,
sa délicatesse ne me paroist
pas moins grande dans le
récit qu'il fait faire à Zenobie
descruautez de Rhadamiste;
cette-Princesse garde
tous les ménagemens qu'elle
doit aux manes de son
époux ,&quand l'ordrede
son Di scours la conduit àce
moment horrible de sa vie,
où aprés avoir esté poignardée
,
elle fut jettée dans
l'Araxe; on diroit qu'elle
l'interrompt exprés pour
laisser ignorer à sa Considente
que son époux est l'Auteur
ducoup le plus barbare
que l'Histoire ait jamais
raporté; je ne sçay si ces sinesses
de l'art ont également
rciiffi dans tous les tfprKs ;
mais j'ay cru y trouver la
main de maistre.
A 'peine Zenobie a fini
son récit, qu'Arsameparoist
sur le Theatre: ce Prince
amoureux de Zenobie ne
peut plus supporter son
absence
,
&sans l'ordre
de Pharasmane son pere il
arrive dans sa Cour : Pharasmane
également charmé
de la Princesse la furprcnd
avec son fils: c'est-là que
son caractere commence à
se découvrir, peu arraché à
sesenfans par les sentimens
de la nature, rival pour eux
aussi dangereux que le plus
cruel ennemy ,
grand d'ailleurs
par son courage
, par son ambition
, & par -Ces
succés contre les Romains,
dont il n'est pas moins cnncmy
que Mithridate ,c'estce
me semble un fort beau
caractere,j'auroisvoulu seulement,
le trouver dans son
intrigue aussi fourbe ,&
aussiperside qu'il l'est dans rHIHoire;cnessèt l'artifice
n'est pas un des moindres
traits qui l'y caracterisenr,
& c'est à cetrait si négligé
dans la pieçequePharasmanme
deveoit lna coiureonn.e d'Ar-
Le second ACtc est ouvert
par Rhadamiste qui
arrive à la Cour de son
perc donc il se flatequ'il
ne sera pas. reconnu;chargé
des volontez du Senat il
vient de sa part deffendreà
Pharasmane d'aspirer à la
Couronne d'Armenie, il
opofe en fort beaux termes
les motifs qui ont engagé
les Romains à le nommer
leur A01baffadeur,&.
lesraisons qui l'ont porté à
demander cet honneur:
on y voit cette haine si violence
contre son pere , cet
amour furieux pour objet un qu'il desespere de
revoir jamais; c'est-là que
paroissent ces projets affreux
de vangeance, ces remords
pour des crimes passez
,
l'ardeur qui l'entraîne à des
crimes nouveaux: en un
mot on y trouve déja tout
son caractere qui doit se
développer par les circonstances
ou l'Auteur le place
dans le cours de la Tragédie.
C'est sur ce caractère que
je doit insister davantage,
c'est dans le contraste qu'il
fait avec celuy de Zenobie,
que l'Auteur a pris les plus
grandes beautezde sa Piece,
& sij'y trouve quelle dcffaut,
c'est sur tout dans ce
caractere que je les auray
cherchez
:
il mérite donc
une attention particuliers
que je luy donneray après
des reflexions plus generales.
Me voicy maintenant à la
Scene de l'Ambassade, elle
est bien digne d'un Ambassadeur
Romain,& Corneille
n'a pasce me femblc
fait parler Flaminius à Nicomede
avec plus de noblesse
& de dignité ; la manière
dont Pharasmane reçoit cet
Ambassadeur ne céde en
rien àcelle dont Nicomede
reçoitFlaminius: il en beau )de voir Pharasmane reprimer
l'orgueil des Romains,
jurqu'à traiter de fanfarons
ces Maistres du monde;
quel domageque l'Ambassadeurd'Armenie
rompe un
Discours qui ne finit pas à
l'honneur du Senat, on
attend une Sceneoù la grandeur
des Romains & celle
de Pharasmane soit soutenue
par les differens traits
qui les caraéterisent, & le
Spectateur ne peut souffrir
qu'un homme tel quHicron,
luy ostele plaisir d'entendre
deux Héros qui contcftent
de la grandeur, &
qui l'établissen0t sur l'opposition
de leurs interests, & de
leurs maximes: c'estencela
sur tout que la Scene entre
Nicomede & Flaminius est
admirable, en tâchant à
l'envy de diminuer la grandeur
l'un de l'autre: ils
se montrent tous deux si
grands que la Scene finit
sans que le Speétareur puisse
decider lequell'emporte ,si
l'Ambassadeurd'Arménie
estoitnecessaire icy comme
on le prétend, c'est une
necessité bien fatale à cette
Scene si digne d'une plus
belle fin.
Dans le troisiémeActe
Arsame quineconnoist pas
Rhadamistepour son frere,
vient luy demander son secours
pour Zenobie contre
les fureurs de Pharafmane , l'amour qu'il a pour cette
Princesse fait faire à ce
Prince vertueux & fidelle,
une démarche qui paroist
estre un peu contre son devoir
, le plaisir que Rhadamistesepropose
derenverfer
les projets d'amour d'un
pere qu'il deteste
, & sans
doute son penchant à prendre
des partis extrêmes,lui
font accepter avec transport
les propositions de son frere;
la haine qu'il aconçeuë contre
Pharafmane
, va jusqu'à
vouloir soustraire à son autorité
Ar same que les sentimens
de la nature &de laprobiré
ornent aux dépens de
toute sa famille. Un projet si
dénaturé révol te cette amc
si bien née, & l'exemple de
vertu que donne Arfame cn5
cette occasion, réveille des
remords dans le coeur du
plus grand des scelerats
c'est ainsi qu'en détestant
l'horrible caractere de Rhadamiste
, on admire celuy
d'Arsame qui feroit de plus
vives impressions dans le
coeur des Spéculateurs, s'ils
n'estoient pas accoutûmez
par les horreurs de son frère
à des mouvemens d'un autre
ordre.
Je passe à la Scene de la
reconnoinance, c'estàmon
avis la situation du monde
a plus interessante, ces deux
personnes
personnes autrefois si chercs
l'une à l'autre, & que l'action
la plus affreuse avoit
séparez, sont par leur réünion
un Spectacle bien
touchant à toute l'Assemblée.
Zenobie à qui la vertu
ne permet pas de méconnoistre
son époux, & dont
le bon coeur sent même du
plaisir à le retrouver ,excite
les transports de Rhadamille
; illuy promet d'effacer
tous ses forfaits à force
de vertus; les promesses
accompagnées de larmes
& de transports trouvent
grace devant le Spectateur
qui croit aux sermens de
Rhadai-nifle,&qui souhaite
de les luy voir observer;
parce que ceux en qui il
place son interest ne doivent
ny ne peuvent luy est suspeas
; si le Spectateur est
dans la suite la dupe de
ces sermens,c'est qu'en effet
il n'y a personne quinefut
trompé aux sentimens tendres,&
délicats que Rhadamiste
y fait paroistre : en
s'interessant pour luy on
0a fait que suivre le coeur
deZenobie qui s'attendrit
au Discours de son époux
tout barbare qu'elle le connoist
: je ne sçaurois trop
dire combien cette Scene
m'a paru belle Lorsque
Rhadamiste exagere l'horreur
de ses crimes à Zenobie
qui les luy pardonne, il
marque qu'illent bien vivement
une generosité si heroïque
,
il ne se trouve dans
ce moment si coupable que
parce qu'il est plus sensible à
la vertu de Zenobie
,
lorsqu'il
prétend en diminuer
l'horreur en les rapportant
tous à son amour excessif
les dispositions sont dans,
cet instant si contraires à
celles d'un scelerat qu'il ne
croit même pas qu'on ait
pu lettreautantqu'il l'a été,
le Spectateur touché de
tant de délicatesse
,
cesse de
lui imputer ses fortfaits,&
commence à les regarder
c?
comme des circonstances
malheureuses qui serviront
à son Heroîme : voilà l'efset
de cet espece de délicatesse
raisonée: elle est d'autant
plusaudessus de la simplevivacité,
quel'esprit &
le coeur en partagent également
le plaisir. >
Dans le quatrièmeActe,
Arsame vient chercher
Zenobie, allarmé de sa froideur
il s'en plaint à elle en
en amant respecteux , Zenobie
qui croit devoir du
moins payer son amour par
un aveu necessaireàson repos
luiaprend qu'elleest Zenobic,
& que l'Ambassadeur
Romain est son époux
, c'est un trait de generosité,
bien digne de cette Princesse
mais si malreçu de Rhadamiste
qu'ilestprêtd'éclater
contre elle,& contre son
frere ; le Spectateur se repent
alors de s'être interessépourlui,
il envisage de
continuels malheurs pour
Zenobie ; & fâché de voir
tant de vertus livrées à des
fureurs qu'il n'espere plus
de voir finir, il retracte
pour ainsi dire la joye que
lui a donné sa reconnaissance
, & souhaite quequelque
heureuse circonstance les separe
pour toujours, la vertu
deZenobie tire un merveilleux
lustred'une circonstancc
si désagrable d'ailleurs
pour clic; sa fermeté
,
son
courage&l'amourdu devoir
éclate dans le parti qu'elle
prend de suivre son époux.
Ils partent enfin, & Pharasmane
bien-tost averti de
leur fuite, court&s'en van;..
ge dans le fang de Rhadamiste,
qui vient rendre son
dernier soupir entre les bras
de Zenobie au milieu de toute
sa famille, Pharafmanc
qui le reconnaît fremit du
coup qu'illuy a porté; l'ignorance
ne diminuë point
assez à son gré l'horreur de
son crime, & il paraît ce
me semble bien touché d'une
mort qu'il avait autrefois
ordonnée avec tant de
barbarie; il cft bien Pere
en ce moment pour ne l'avoir
encore jamais été
, &
cet homme sur qui lanature
avoit eu jusques làsipeu
de pouvoir me paraît du
moins se démentir un peu: Quant à Rhadamiste il
meurt comme il a vécu, d'abord
il craint de répandre
le fang de son pere, & préféréla
mort à l'horreur du
parricide, c'était son, bon
intervalle qui ne dure pas
long-temps, un moment
après il accable la douleur
de son Pere loin de la respecter
, on ne devinerait
pas qu'un Fils qui craint
moins la mort que le parricide
,deust outrager un Pere
qui semontre tel pour la
premiere fois, dans ces derniers
moments où la nature
& la vertu se produisent.
plus que dans tous les ail*
très.
Un pareil caractere est
bien plein de bizarrerie, c'est
ici le lieu d'examiner s'il
convient au Theatre, Rhadamistefait
lui même son
portrait en ces termes :
Et que (fay
- je Hieron
J
furieux
,
incertain,
Criminelsans penchant
, vertueuxsans
dessein.
Jouet infortuné de ma douleur
extrême,
Dans l'état oùjefuismeconnais-
jemoi même
Mon coeur de soinsdiverssans
cesse combatu,
Ennemi duforfaitsans aimer
la vertu,
D'un amour malheureux déplorablevictime
S'abandonne au remord sans
renoncer au crime ;
Je cede au repentir, mais sans
en profiter
Et je ne me connois que pour
me detefler,cec.
S'il est vray que Rhadamisteest
criminel sans penchant,
Zenobie le connaît
mal, ou ne lui rend pas justicc
quand elle dit.
Je l'avouerai
,
sensible à sa
tcndrcjje extrême,
Je mefis un devoird'yreport«•
dre de même,
Ignorantqu'en effetsous des dehors
heureux
On peut cacher au crime un
penchant dangereux.
D'ailleurs ses crimes sont
trop noirs& en trop grand
nombre pour les rapporter
tous à sa jalousie ou aux circonstances
où il s'est trouvé;
il me semble que la fureur
qui l'anime contre son pere,
& qui peut le conduire jusqu'au
parricide, marque
un scelerat bien déterminé.
Quoi qu'il en foit la continuité
& l'uniformité de ses
remords m'étonnent; je ne
puis comprendre qu'il soit
si peu fait au crime
,
après
en avoir fait de si noirs.
Que les plus fameux criminelsayant
eu quelque fois
des retours je n'en fuis pas
surpris, ils ne franchissent
point de certaines bornes,
sans quelque effort qu'ils
doivent sentir ; mais qu'ils
detestent uniformement les
crimes dont ils ont une longue
habitude, de telle sorte
que les remords les caracterisent;
c'est ce qui me paroist
incroyable.
J avoue que les remords
que l'Auteur donne à son
Heros fondent l'interêt
que nous prenons à la Scene
de la reconnaissance ; mais
celle de la jalousie qui la
suit de près n'apprent elle
pas au Spectateur que Rhadamiste
en un phrenetique
dangereux qui a successivement
de bons & de mauvais
intervalles,avec lequel il
faut perpétuellement de
compter, qui ne merite ny
attention ny creance ny
iDtcrefi) était-ce la peine
de bâtirpourdétruire si
promptement; & ne valoiril
pas mieux réduire le mcrite
de la reconnoissance au
merveilleux de la furprifc
que fait naître larencontre
impreveüe de deux person-
- nes que de grands interests
unissent ouséparent ,il faloit
donc ou faire voir les fruits
de tant de remords,ou en
retrancher le principe, on
auroit sçeu à quoys'en tenir
avec Rhadamiste & nous
l'aurions aimé ou haï sans
risquer d'en estre un moment
la dupe: Cleoparre
ne s'estoit pas signalée par
plus de forfaits que Rhadamiste,
leur ressamblance est
assez grande en ce point,
Corneille n'a eu garde de
luy donner des remords qui
ne pouvant estre le fruit
d'une vertu qu'elle avoit
absolument étouffée,n'auroit
esté que foiblesse dans
sonesprit & qu'inconstance
dans son coeur; loinqu'ils
eussent adouci son caractère
par raport au Spectateur;ils
luy auroient osté le merveilleux
attaché aux grands
crimes : cette détestable
constance qui brave les loix
est d'autant plus grande au
Theatre qu'elle inspire plus
d'horreur.
C'est pour cela que les remords
Infructueux de Rhadamiste
rendent son caractere
petit & peu digne du
Theatre, un homme qu'on
me represente le joüet des
plus noires fureurs, & des
plus beaux sentimens, qui
n'a pas la force de secouër
l'un ou l'autre joug, un
pareil caraétere est-il digne
de l'attention publique, &
n'estil pas aussi méprisable
dans ses remords, qu'il est
detestable dans ses crimes.
Jugez, Monsieur, par
ce que je viens de vous dire
combien le caraé1;ere de
Zenobie doit briller par
opposition à celuy de Rhadamiste
: on ne peut mettre
sur le Theatre plus de generosité
,
plus de constance,
& plus de toutes ces qualitez
qui forment une Heroïne,
j'aurais seulement souhaité
que son amour pour Arfame
eut esté plus vif, sa gloire
auroit esté plus grande à
le surmonter
, ce caractère
c11 d'ailleurs plein des plus
grandes beautez : j'admire
sur tout l'aveu qu'elle fait
de son amour pour Arsame
en presence de son époux:
j'aime avoir un Auteur de
nostre siecle faire revivre la
fage hardiesse du grand
Corneille,& sij'estime beaucoup
ce qu'il a fait, j'admire
encore plus ce qu'il est capable
de faire.
-
Zenobie àTiridates qu'il
avoit engagé dans son
parti;qu'ilsestoiententrezensemble
dans les
Etats de Mithridate;
que Mithridate indigné
entre son frere
, avoir
fait retombersur lefils le
crime dupere;que Mithridate
voulant détacher -
Tiridate du parti de
Pharasmane, avoit offert
à ce
Parthesafille deja
promije à Rhadamiste;
que cet Amant indigné
à
âfin tour avoit achevé
de défiler les Etats de
Mithridate qu'il en avoit
chaJJé; qu'enfùjrt
ayant forcéPollion a
luy livrer le malheureux
MithridAte, il l3avoit
faitmourir dans le temps
qu'ilpromettoitàZenovie
de la rétablir sur son
Throne pourvû qu'elle
voulutl'épouser
,
quelle
y avoit consenti dans cette
esperance ,
r/eftantpoint
instruite de ce meurtre,
qu'ensuite Rhadamiste
poursuivi de PharasmaneavoitpoignardeZenobie
~&l'avoit jettée dans
l'Araxe,~& avoitensuite
luy
-
même esté immolé
à la fureur de son pere
ce n'est pas tout ila
salu encoreque l'Auteur
aprit comment Zenobie
&Rhadamisteseretrouventenviechacunde
leur icossé& comment
Zenobie prise sur les
JHedes par Arsame a
este oemenéeien-lberit^
Voilà les faits qui
fondent laFable; voyons à prc[enrlci\in'téreft qui
doivent faire agir les
Personnages
j
Zenobie
aime ArjÁmt, elle hait
Pharafinane,tilt a un
refit depitiépour Rhadamific
,
elle alamort de
son pere àvanger. , la
memoire d)un époux: qui
l'apoignardéeà respecter
vuÀ,deteficr\ ilfaut où
quelle épouse Pharasmane
9
où quelle s'expose à
fort couroux,ellecraint
que Pharasmane ne Je
venged'ellesurson amant
elleà deplus des pretentionssur
l'Arménie, voi- *
là bien desaffaires pour
cette Princesse & pour le
spéctateur,cependant à
peine Rhadamiste paroît-
il sur la Scenequ'il
faut encore s'interesser à
la reconnaissance du ma-
~ry&de lafemme, à celle
du pere & dufils, & à
celle des deux freres. Il
n'y a point de fçayanc
Critique qui tenant son
Aristote en main n'eust
prédit lachute d'un Poimesicompliqué
;c'est cependant
cette multiplicité
d'interests qui fournit
tant de belles situations
ausquelles l'Aureur
doit succés extraordinaire
desa Piece.
J'admire avec quel arc
il a débrouillé son cahos;
en jettant tout l'embaras
de son sujet prefquc dans
un seulrécit;mais lecoup
de Maistre,c'estd'avoir
rendu ses plus belles Scenrs
presque indépendantes
de cous ces faits necessaires
seulement pour
fonder laPiece,maisdont
le Spectateur n'a pas befoin
pour en goûter les
beautés:parexemple dans
la Scene de la reconnoissance
,
dés qu'on [çait
que Rhad. a poignardé
sa femme
,
'& qu'ils se
croyent morts réciproquement,
cela suffit pour
goûter la beauté de cc
moment de surprise qui
fait unsi grand plaisir:
c'estainsi que par lafïm-f
plicité de chaque Scène
en particulier
,
il a Mrantilapiecedutortque
luy pouvoit faire un sujet
trop composé.
L'Auteur qui s'est bien
doutéqu'on ne trouveroit
pas vrai-semblable
que Rhadamiste fut inconnu
à Pharasimante &c
à Arsame,n'a pas épargné
l'art pour fonder cette
vrai-semblance; mais
elle ne s'apperçoit pas du
premier coup d'oeil, &
c'est un deffaut.
Rhadamiste, Arfame,
& Hieron,arrivent de
trois Provinces differentes
presque à la même
heure, dans le Palais de
Pharasmane où est Zenobie.
Cette rencontre
tient un peu du Roman.
Il y manque une espèce
de vrai-semblance, mais
si-tost qu'on voit tous
ces personnages en ac,"
tion ,il font tant de plai-
LÍir qu'ilsnoustransportentau-
dessusdesRcflexions,
Se quand on se
fent entraîner par le merveilleux
on regrette peu
levrai-semblable. u'~:•
- L'Auteur fait joüer à
merveille les quatre principaux
caracteres, de sa
piece, car quoy que celuy
de Rhadamiste ait
quelque affinité avec celui
de Pharasmane, en ce
qu'ils sont tous deux vicieux.
La différence des
leurs vices est aussi (ensible
, que celle qu'on remarque
entre la vertu de
Zenobie & celled'Arsanie,&
quand il oppose les
vices de Rhadamiste à la
vertu de Zenobie
,
& la
barbarie du pere à la vertu
du fils, c'est un contrafle
nouveau presque à
chaque Scene.
Jepense sur l'excellent
caractere deZenobie tout
ce qu'en a dit M** dans
sa reflexions. Quelques
personnes ont trouvé sa
vertu trop outree mais
comment en juger ?Personne
n'apûreglerencore
le point d'élévation
des vertus de Theatte,
Voudroit on une vertu
ordinaire qui, pour ainsî
dire, tenant encore à la
nature, fust toujours aux
prises avec la foiblesse humaine
? Cette sorte de
vertu est plus touchante;
mais une vertu surnaturelle
estplus admirable,
choisissez entre Racine
& Corneille.
<rç;J. M**aparfaitement
prouve que le caractere
de Rhadamiste n'efi:
point propre auTheatre,
parcequ'il est bizarement
composé de grands remords
& de grands crimes,
j'avoüë qu'on ne
peut s'interesser à un
tel homme, mais peutestre
que sans ses remords,
Rhadamiste eust
esté trop odieux pour
le Theatre, l'Autheur
sans doute
,
luy en a
donné, pour suspendre
de temps en temps la
haine& l'horreur que
son caractere inspire;mais
ces remords ne nous doivent
point interesser pour
luy, puisque la plûpart
font moins des retours de
vertuque les effets de son
amour pour Zenobie, &
loin de tenir compte à un
scelerat de ces fortes de
remords, on ne devroit
pasmême luy sçavoirgré
d'une belle action que
l'amour seul luy seroit
entreprendre, comme on
que l'Autheurmoins hati
dy qu'à son ordinaire,
n'aitosé franchir la bienseance
des moeurs paternelles
, pour achever ce
fier caractere comme il
l'avoit commencé.
Le caractere d'Arsame
ne paroistpas sibeau
dans sa première scene
que dans lasuite ,
l'amour
ne sçauroitl'excufer
d'avoir, abandonné
les lieuxcommis à ion
devoir.Dans la démarche
qu'il fait ensuite contre
son pere, l'amour affoiblit
encore sa yerir, mais
elle reprend vigueur dans
son entrevûë avec Rhadamiste,
il en fort plus
vertueux qu'il n'y étoit
entre.
Je suis charmé comme.
M** de la Scene de
l'Ambassade, & fâché
comme luy qu'Hieron
l'interrompe
,
d'autant
plus que Pharasmane
grand politique ne doit
pas donner Audience à
deux Ambassadeurs en
présencel'un de l'autre.
La Scenede la Jalousie
qui est encore plus belle
à mon gré, finit aucontraire
mieux qu'elle ne
commence, car Rhadamiste
ne doit point être
si étonné detrouver Arsame
avec Zenobie, il
ne doit être jaloux qu'au
moment qu'il voit son
secret revelé par sa femme.
Tout ce qu'elle dit
dans cette Scene me paroist
admirable d'un bout
à l'autre,& sur tout cet
endroit Vous ne connois
Jez> pas l'Epoux de Zenobie.
Quelle fait bien
sentir en ce moment!que
Rhadamisteest capable
de la poignarder une féconde
fois, qu'elle le
connoist pour tel, &
qu'envisageant tout le
peril, elle s'y expose par
devoir & par vertu; c'est
ce qui prepare parfa itement
ce beau Vers par
où elle finit: Maisj'ay
trop de vertu pour craindre
mon Epoux.
Quelques-uns de ceux
même qui ont admiré ce
grand trait, ontentendu
par le mot de vertu, Sagesse,
Fidelité conjugale;
peut-être parceque le mot
de vertu dansla bouche
d'une femme nous porte
d'abord àcette idée,mais
il est clair que le mot de
Vertu signifie en cet endroit,
courage & resolution
,
&: que le Vers où
il est placé n'est si beau
que parce qu'il renferme
toute l'idée que l'Auteur
nous a donné du caractere
de Zenobie.
Lorsque dans le V.
Acte on vient avertir
Pharasmane qu'on enleve
sa Maîtresse. Il ne devroit
point s'arrester à
parlerà Arsame, il doit
courir après leravisseur
:
c'est le premier mouvement
qu'il doit avoir
,
comme celuy d'Arsame
doit être de l'avertir qu'il
vatuerson fils.
-
A l'égard du dénouement,
il doit faire plaisir
en délivrant Zenobie
d'un jaloux furieux,&en
nous laissant entrevoir
qu'Arfame fera quelque
jour heureux.
Comme je ne me fuis
poinrengagé à faire une
Dissertation completce,
je passe encore plusieurs
beautez & peut - estre
quelques deffauts.
On en doit beaucoup
pardonner en faveur des
beauxvers, des pensees
vives, & des grands lèntimens,
& sur tout en
faveur de la difficulté des
Pieces de Theatre, dont
la plus parfaite efi, toujours
tres-defectueuse,
c'est dans ce genre d'écrire
qu'on ne doitpoint
chicaner un Auteur qui
a bien fait, sur ce qu'il
auroit pû mieux faire.
Je rapporte icy, non
comme une louange,
mais comme un simple
fait historique, à mettre
dans les registres du Parnaise,
qu'ily a eu deux
éditions de cctte Tragédieen
huitjours& que
sesrepresentations ayant
commencé long-temps
avant le Carnaval, elle
a franchi avec vigueur le
Carême entier, aparemment
qu'aprés Pâques,
nous ne la verrons expirer
que par le départ des
Officiers.
LIVRES NOUVEAUX.
TraductionenVers François
desfieorgttf'MS de
Vtrgille
,
OwvrageposthumedeMonsieur
DESEGRAISI
FeuMrdeSegrais, si
connu par sa belle traduction
de l'Eneïde,avoitaussi
traduit les Georgiques du
mesme Poëte, & n'ayant
pas eu le temps de les donner
au Public, il chargea
un de ses amis du soin de
les faire iniprimer, &dy
joindre une Préfacé dont
apparemment il avoit dreffé
le projet. Le Public attendoit
avec impatience,
que cet amy rendit ce
devoir à la memoiredecet
illustre deffunt; & onavoit
d'autant plus de sujet de
l'esperer
, que feu Mr de
Segrais regardoit sa traduétion
des Georgiques comme
son meilleur Ouvrage.
Cependant celuy qu'il avoit
chargédu soin de l'impression
l'a
refusée au Public
par des raisons qu'on
ne sçait point, & il y
a
apparencequ'on en auroit
esté privé encore longtemps
,
si un autre amy à
qui Mr de Segrais avoit
permis qu'il prit une copie
de sa traduction ne l'eust
donnée aujourd'huy. Chacun
sçait quel efl: le sujet
des Georgiques de Virgile.
Il y traite des occupations
dela vie pastorale.
Je chante les beautez de la.
blonde Ceres;
Sous quelastre
y
Àdeceney on
tourne lesguerets
;
Par quels accords la vigne

a
l'ormeau Se marie;
Lesoin qu'on a des boeufs
,
CT de la bergerie;
L'éparzne de l'abeille,&
l'artiste travail
qui change en miel les fleurs
sans ternir leur émail.
C'estainsi que Virgile
commence, & que l'habile
Traducteur rend la pensée.
Apres que le Poëre a invo-
.qué toures les Divinitez
champestres
,
il invoque
ainsidune maniéré fine &
ddicate, l'Empereur AuguHie
quiestoit sa grande
Divinité.
Et toy
y
car il rielf pas encor
permis de dire
Quelrang t'ejlde(line dans le
celeste Empire,
Cesar sot qu'ausalut de ta
noble Cité
Tu renfermes les sins de ta
Divinité,
Ou que le front orné du myrthe
de ta mere,
Arbitre des sisons
,
la terre
te revere,
Soit que mais*e de l'ijle eu
finit l'IVrivers
Seul tu fois des Nauchers irvvoquésur
les mers,
Et que Vainqueur des flots,
pour tefaireson gendre,
Thetisvienne à tes pieds tous
ses thresors répandre;
Soitqu'enfin préferant la demeure
des Dieux,
Nouveau signe des mois , tu
•regne•dans«les C•ieux,»&c. Victorieux Cesar, sécondé
mon ardeur,
Soulage d'un regard les soins
du laboureur ;;
Entre dans ma carriere , &
souffrant quon t'implore,
Sois Dieu dés maintenant
pour quiconque t'adore.
Quoyquetout lePoème
des Georgiques soit remply
de beautez ,
il faut
pourtant avouer que rien
n'approche de l'excellent
Epifodc que le Poëte a cousu
à son quatrième Livre:
c'est celuy du Pasteur Arisiée
qui voyant perir routes
ses Abeilles, eut recours
à sa mere Cyrene pour Ravoir
d'où venoit la catase
de cette desolation, & pour
apprendre les moyens de la
reparer. Là-dcifuslaNYIn.,
phe luy conseilla d'aller
trouver Prothée, & luy
apprit que pour éluder de
luy répondre, le Dieu Ce
changeroit en plusieurs sigures
,&: que pour l'epouventer,
il prendroit successivement
la forme d'un
Lion, d'un Serpent,&c;.
mais qu'il ne falloit
-
point
le laisser échapper juiques à
ce qu'il fut revenu en son
premier estat, & qu'alors
il luy apprendroit ce qui
causoit son malheur
,
elle
l'envoyaàce Dieu marin,
qui après avoir Joue tout
le manege dont elle luy
avoitparlé
,
luy apprit que
la cau se de son mal heur
estoit la mort d'Euridice
que son amour avoit cau- sée.
Ungrand crime des D ieux
t'attire la colere,
Du malheureux Orphée ayant
cause les, pleurs,
Lefort deson Epouse a fait
tesgrands malheurs.
Irrité de sa mort, il poursuit
tonsupplice, ibJ
C'étoit en tefuyant quesa chere
Euridice5
Pressoit lherbedes Prez
:J
e:3;
ne découvritpas,
Le venimeux Serpent autheur
deson trépas.
Le Poëte raconteensuite
comment Orphée tenta la
descente des enfers pour
obtenir de Pluton le retour
de sachere Euridice, &de
quelle sorte il charma les
ombres decetristeséjour,
qui dançoient au son de sa
Lyre.
Dans le fonds du tartare on
vîtjusques aux Furies
Avec tous leurs Serpens par
Orphée attendris. *
Ixionvitsa rouë arrester à sa
voix;
Cerbere donna treve àses tristes
aboix.
Déja s'en revenant avec fit
prisonniere,
Euridice avec luy marchoit
vers la lumiere.
'( Telle de Proserpine estoit la
dure loy)
Quand son amour trop vif
luyfitmanquer de foy.
Unregard imprudent (offens-e
pardonnable
Sijamais pardonnoit l'Enfer
inexorable)
Luyfit voir Euridice abismée
'-'. enUmity
Et de ses vains travauxy
remporter lefruit.
Tout le reste de l'Episode,
le deüild'Orphée,sa
retraite sur les montagnes
où il charmoit les Tigres
& les Ours; safin tragique;
tout celaest traduit avec
beaucoup de force & d'exactitude.
-,' Feu Mr de Segrais estoit
deCaën, ôcilyavôfc fait
sesestudes au College des
Jesuites.Il s'exerçadans la
jeunesse à faire des Vers
lyriques, des Chansons
>
& quelques petites Historiettes
pour se divertir avec
ses amis.Pendant cetempslà
Mr le Comte de Fiesque
ayantété éloigné de la
Cour,se retira à Caën ,
&
ayant connu là le jeune Segraisquin'avoit
alors que
dix-neufans, il le gousta
si fort qu'ille mena avec
luy lorsqu'ilfutrappellé.
Ce fut alors qu'il acheva
deseformer,& qu'il prit
le bon goust & la politesse
qui ont paru depuis dans
ses Ouvrages. Estantentré
auprés de Mademoiselle,
le loisir de S. Fargeau où
elle fut releguée luy donna
le temps de travailler à fa*
traduction de l'Eneïde.Mademoiselle
ayant eu quelquesujet
d'estremécontente
de luy
,
il se retira chez
Me de la Fayette
,
& ce
fut là où ilcomposa laPrincesse
de Cleves
,
Ouvrage
tant loüé ôc tant critiqué:
& Zaïde,Histoire Espagnole
qui peut passer pour
le chef-d'oeuvre des Romans
qui sontécrits dans
ce genre. Comme Me de
la Fayette & Mr de la Rochefoucault
estoient en
grande relation, chacun
sçait la part que ces deux
illustres personneseurentà
la compositiondeces deux
Romans,surtout de celuy
delaPrincesse de Cleves.
L'année 1662. il fut
reçu à l'Academie Françoise:
mais s'ennuyant du
sejour de Paris quiledissipoit
trop, il se retira en
Normandie où il épo sa
une riche heritiere la parente
, & trouvant l'Academie
de Caën sans protetlcur
depuis la mort de Mr
- de Matignon
,
il en receüillit
les membres chez
luy où il fit un appartement
fort propre pour y
tenir les Assemblées. Il eue
un differend avec le fameux
Bochart qui estoit
du mesme pays, au sujet
de l'Eneïde. Celuy cy ayant
dit qu'il n'estoit pas
difficile de prouver qu'Enée
n'avoit jamais esté en
Italie, ils se firent une espece
de désy: mais le sçavant
Protestant fit sur ce
su jet une.Dissertation si
remplie d'érudition
,
&
allegua
allegua tant dAuteurs inconnus
à *Mr de Segrais
,
qu'elle demeura sans réponse.
On peut avoir tout
l'cfprit du monde
, & ce
qu'on appelle une aimable
érudition
,
sans avoir approfondi
les matieres anciennes
comme Bochart,
& ce n'est pas mesme cette
forte de science qui compose
les talents Academiques.
La traduction de l'Eneïde
quoyque l'original ait perdu
beaucoup de .feJ graces entrefis
mains
,
surpasse de bien loin
tous les Poëmes que nos Ait':
teurs ont mis aujo-ur*'av<ec plus
de confiancequedesuccès, &
il se doit contenter d'avoir
mieux trouvéle genie de Virgile
que pas un de nos Auteurs.
Je louë l'application de Mr
de Segrais à connoistre ïefyrit
du Poëte danssa Prefaceautant
que dans la version
, &'
il me semblequ'il a bien réüjft
àjuger de tout excepté des caracteres.
Ainsi parloit feu
Mr de S. Evremond dans
ses reflexions sur nos Traducteurs,
& vous sçavez
quel juge c'estoit dans ces''
matieres queM.deSaint
Evrcmond. On pourroit
pourtant dire que son jugement
se ressent un peu
du chagrin qu'il avoit contre
le peu de merite du bon.
Enée,dont il fait dans la
suite une critique impitoyable.
C'estoit, selon luy,
un pauvre Heros dans le Paganisme
,
qui pourroit estre un
grand Saint chez les Chretiens,
& plus digne Fondateur
d'unOrdre qued'unEstat.
Quoyqu'il en soit Mr
de Segrais avoit fait pluro,
sieurs autresOuvrages qu'il
a laissezàun de ses amis
pour les faire imprimer. Il
, mourut le25.de Mars1701.
âgé de 76. ans, & regretté
de tous les honnestes gens
dont il faisoit les delices.
Ce Livre se vend à Paris
chez Jacques le Febvre
dans la Grande-Salle du
Palais.Jean Musier à la descente
du Pont-Neufà l'Olivier,
& Estienne Ganeau,
ruë S. Jacques., aux Armes
de Dombes. EXTRAIT.
Monsieur Cousin, Prefident
en la Cour des Monnoyes,
& l'un des quarante
de l'Academie Françoise
, a laissé en mourant à
l'Abbaye S. Victor, saBibliotheque
qui estoit nombreuse
,,
choisie, & dont il
avoit fait un excellent usage
durant sa vie. Il a fondé
dans la mesme Abbaye un
Discours Latin qui se fait
tous les ans par un Chanoine
de cette Abbaye. Mr
l'Abbé deLonguëil acquita
cette Fondation le 2 4.
Février jour de saint Matthias
, & fit un Discours
très-éloquent
,
& qui fut
prononcé avec beaucoup
de grace. Aprés avoir fait
unExordesur l'utilité des
Bibliotheques dans lequel
il fit entrer l'éloge des personnes
qui ont augmenté
celle de S. Victor
, ôcen
particulier celuy de Mr le
President Cousin. Il divisa
son Discours en deux propositions.
Il prouva dans la.
premiere que pour tirer ura
veritable fruit de ses estudes,
il ne falloiressentiellement
embrasser qu'un seul
genre de science dans lequel
il estoit plus à propos
d'exceller que d'estre mediocre
& superficiel en tout
genre, & il ajousta que
pour le choix on devoit
consulter sa vocation & ses
talents, sanstenter de forcer
la nature, & sans (a
rendre esclave du nom, du
rang & de la profession de
ses peres.
"I Dans la ic partie de son
Discours il donna des regles
particulieres pour Te-
Rude
, & prescrivit l'ordre
,la méthode, l'arangement
& les gradations, &
mesme les relaschementsqu'il
falloit observer en
travaillant. Il finitenexhortant
ceux qui se dessinoient
àl'estuded'enconsacrer
l'usage
,
& de s'ap-
- pliquer par preference aux
sujets qui pouvoient instruire
& édifier.
L'élegance du Latin,les
graces de
-
l'Orateur , & la
maniere ingenieuse avec
laquelleMr l'Abbé deLon-
,
guëil traita son su jet contribuèrentégalement
au
succez de son Discours.
II
IL PARTIE,
NOUVELLES.
Nouvellesd'Hollande.
TRADUCTION
d'unMemoire prekllté
aux Estats Generaux
par le Comte
ZinzendorfAmbassadeur
& Plenipotentiaire
de l'Empereur
àla Haye, le 18. Decembre
1710.
HAUTS ET PUISSANTS
SEIGNEURS,
Nous n'avons plus lieu
de douter dela malheureuse
fatalitéarrivée à l'Armée
du Roy Catholique, nonseulement
api es tour ce que
les Ennemis en ont publié,
mais encore aprés les avis
que j'en viens de recevoir
d'Italie& d'ailleurs. Ilya
plus detrois mois que les
Ministres de vos Hautes
Puissances tant à Vienne
qu'en Espagne ont dû vous
informer de ce que j'eus
l'honneur de vous dire à
mon arrivée par ordre de
Sa SacréeMajesté Imperiale,
que si l'on n'envoyoit
un puissant secours en Catalogne
& en Portugal,
pour d'un costé faire teste
aux Ennemis, & de l'autre
costé leur faire faire une
puissante diversion en Estramadoure
,
il étoit impossible
à Sa Majesté Catholique
de se maintenir
enCastille,où lesmalin-
A tentionnez ont toujours
estéen plus grand nombre.
Ce seroit maintenant
perdre temps que de l'employer
en reflexions sur le

paHTé lorsqu'il ne s'agit que
de mettre tout en usage
pour reparer le mal
J
s'ilcft
possible. Cependant je ne
sçaurois me dispenser de
vous faire observer trois
choses. La premiersest que
le Roy de Portugal a pris
prétexte
d'empêcherla jonction
de son Armée avec
celle du Roy d'Espagne
,
sur ce que depuis deux ans
on ne luy a pas envoyé
d'Hollande & d'Angleterre
les secours qu'on luy avoit
fait esperer ; que le
peu de troupes qu'il avoit
luy estoient necessaires
pour la deffense de son
Royaume ,
& qu'on ne
luy avoit pas mesme payé
les arrerages des subsides
quiluysontdûs.
Vos H. P. & la Reine
d'Angleterresavent mieux
que rnoy si les excuses &
les plaintes de la Cour de
Portugal sont justes : du
moins ileft certain que la
conduite quelle a tenuë a
cité tres-prejudiciable à la
cause commune.
- La seconde chose que
vous devez observer, est
qu'au mois d'Octobre Sa-
M. I. ayant donné ses ordres
pour faire marcher
trois Regiments de faCa^
valerie ou Hussars vers les.
coftctd-italle où ils devoient
estre embarquez:
pour Barcelone leur trajet
n^i esté retardé que faute
de Bastiments d'escorte ÔC:
detransports, quoyque les,
Ministres d'Angleterre ôc
d Hollande. enflentafTuré-
Sa M. I. que tout efrait.
prests avant que les Troupes
fussent arrivées au lieu.
destiné à leur embarquement.
La troisiéme observation
est que le Duc de Savoye
paroist se rebuter du
retardement qu'on aapporté
àluy payer les subsides
5
& que sur ce fondement
au lieu d'augmenter
ses Troupes ,-il a même
commencé à les diminuer.
Je laisse à la sagesse de vos
H. P. à faire les reflexions
qui conviennent à la remontrance
que j'ay l'honneur
de leur faire aujourd'huy.
Mais H. & P. S. ne songeonsaupassé
que pourremedier
promptemenr à de
plus grands maux qui menacent
la cause commune
pour l'avenir. Voussçavez
mieux que moy de quelle
consequence il e/1 pour
votre République en particulier
de continuer la guerre
en Espagne
, & de l'y
pouffer avec plus devi
gueurque paricpasTé.C'est
de la reduction de cetteMcparchie
à l'obéiissance da
la Maisond'Austriche que
dépend la conservation de
vostre chere liberté & le
repos de toute l'Europe. Les
conquestes faites sur l'Ennemy
dans les derniercs
campagnes feront pour
vous de foibles barrières,
si vous laissez le Duc d'Anjou
sur le trosned'Espagne.
L'objer principal de vos
H. P. de mesme que celuy
de tous les Hauts Alliez
doit estre presentement
d'envoyer incessamment
en Catalogne lessecours.
necessaires pour conserver
Barcelone ôc Girone. Le
secours ne sçauroitarriver
trop tost:, 6c ma crainte ell:
qu'il ne parce trop tard par lanégligencequ'ona euë
d'en faire la disposition.
Vous elles pour ainsi dire
, P. S.l'ame de la grande
alliance:l'Empereur convient
des grandes obliga.
tions que son auguste Maison
vous a, vous n'avez jamais
dû douter de fk parf-
Iliterccoiinoiffilice, & ce
n'est que par les heureux
succez de cette guerre que
vos H. P. doivent en attendre
les effets qui n'ontesté
retardez que par les troubles
d'Hongrie:mais comme
les rebelles sont sur le
point d'estre soumis par la
force victorieuse Impériale;
l'Empereur mon auguste
Maistre fera alors en
estat d'employer toutes [cs
forces contre l'Ennemy
commun ,
& de feconder
vivement les bonnes intentions
de ses chersAlliez
mieux qu'il n'a fait par le
passé.
C'est de vostre seul 1:.-
xemple H. & P. S. que dépendent
les resolutions du
Parlement de la Grande-
Bretagne pour les interests
de la cause commune,&
les efforts qu'on doitattendre
des Princes de l'Empire
interessez dansla &' engagez dans grandealliance.
Vos H. P. ne sçauroient
leuren donner un meilleur,
qu'en faisant embarquer
dés aujourd'huy si
celase pouvoit sept à huit
mille de leur meilleur Infanterie
pourallerà Barcelone
,
lesquels joints a- la
Cavalerie Imperiale qui
n'attend que des Vaisseaux
de transportsur les costes
d'Italie pourront conserver
les Places qui restent au
Roy Catholiqueenattendant
quede plus - grands
secours soient arrivez en Portugal.
Je fuis persuadéque la
Reine d'Angleterre n'apprendra
pas plustost que
vous avez pris certe prompte&
efficace resolution que
de son costé elle donnera
aussi des ordres pour envoyer
enEspagne un nombre
suffisant de Troupes&
de Vaisseaux capables de
restablir les affaires de la
causecommune & renverser
les esperances de l'Ennemy.
Cela ranimera le
coeur presque abattu du
Roy de Portugal, affermira
le Duc de Savoye dans
les interests de la grande
alliance
, & donnera de
l'émulation a tous les autres
Alliez.
J'espere H. & P. S. que
par vos promptes & efficaces
resolutions vous me
mettrez en estat en peu de
jours de depescher des
Courriers à l'Empereur Se
au Roy d'Espagne pour
confirmer ces deux augustes
Souverains dans l'idée
qu'ilsonttoujours euë de
la puissance de vostre Republique,&
de l'avantage
qu'il y'a d'estre comme ils
sont vos bons ôc fidels Alliez.
Sur ce je prie Dieu
J ôcc.•
Nouvelles du ISfcrd1
EXTRAIT
d'un Journal de Mr
Neuge-Baver, Envoyé
du Roy de Suede
à la Cour Otto-
+ mane.
A Confiantmople ce 18.
Décembre 1710.
Le
4. Novembre le
Cham des Tartares arriva
dans cette Ville.
Le 10. il eut audiance
du
duGrand-Seigneur.
Le ~i. on donna la paye
auxTroupes pour six mois.
Le18.& le19. le Grand-
Visir tint Conseil par ordre
duSultan, auquel les principaux
Ministres de saHautesse
assisterent. On y proposa
la demande du Roy
de Suede au sujet de son
escorte
,
& de la rupture
avec le Czar. Les sentimens
unanimes furent qu'il falloit
envoyer la Majesté
Suedoise dans les Etats,
& déclarer la guerre en
mesmetemps aux Moscovites,
vû qu'ils avoient
exercé plusieurs hostilitez
contre la Porre.
Le Grand Visir ayant
fait son rapport au Sultan,
Sa Hautesse fit assembler le
lendemain un grand Conseilau
Divan. Elleyfitappeller
les mesmesMinistres
que le Grand Visir avoit
convoqué le jour précedent
, sçavoir le Mufti
Sclictitar,Ali-Bacha ,-
,
Soliman-
Bacha, ou Kaimakan,
l'Aga des.Janiffaires,
Topei-Bacha, Capigi-Bachi,
le Tefterdar,le ReisEffendi
, le Mufti que le
Grand Visir Numan-Bachaavoit
déposé, & vingt
]Effendi,Cadis & Ulema,
c'est-à-dire
,
les Gens de
Lettres & de Loy. Ceux-cy
ayant réitéré ce qu'ils
avoient déclarés auConieil
du Grand-Visir,leSultan
y souscrivit
,
sur quoy le
22. la Guerre contre les
Moscovites fut publiée
dans toutes les Mosquées
ou Eglises
, avec une joye
& des acclamations incroyables
detout le peu ple.
Le 20.l'Admiral Giarum
Hadgia fut démis desa
charge,& l'on nomma
AteiMehemet Bacha pour
remplir sa place.
Le 21. le Grand-Visir
tint Conseil de Marine
assisté du CapitJn-Bacha,
& du nouvel Amiral, Si
l'on en doit croire des gens
graves ôc bien fenfez, la
Flotte Turque fera composée
de 80. Voiles, sçavoir
des Vaisseaux de Li.
gne, des Fregates, des Galeres,
& des petits Bastimens;
& l'on a ordonné
d'en faire encore construire
un grand nombrede cette
derniere sorte.Pour monter
cette Flotte on doit enrôller37000.
mil hommes.
Le nombre des Janissaires
Arnàates& Spahis fera de
120000. effectifs. Le Topei-
Bacha a ordre d'emmener
14000. hommes
pour servir l'Artillerie On
fait monter le nombre des
Tartaresà200000combattans.
Enfin le Moscovite
sera attaqué avec d'aussi
grandes forces que laPorte
ait jamais mis sur pied, ôc l'on dit mesme que les
Ottomans nesesontpoint
encore preparés à aucune
guerre avec autant d'efforts
qu'à celle-cy. tif;
Tout estant reglé &
disposé de la maniere susdite,
la guerre contre le
Moscovite en faveur du
Roy de Suede fut publiée 'e,
danscetteVille,&ensuite
dans toutes les autres de
i'Empire Ottoman.
*
Le 14, le Palatin de
Kiovie partit d'icy pour
Bender.
Le 25.le Prince de Moldavie
fut deposé de mesme
qu'Isus Bacha, Serasquier
de Bender ;c'estoient des
creatuues du Grand-Visir
Ali-Bachaqui vient d'être
deposé. A la plac<^lu Prin.
ce on a élevé Demetrius
Cantemir, adherant des
Tartares, & bon Suedois.
Le 26. le susdit Cham
des Tartares eut audiance
privée duGrand-Seigneur,
après quoyil prit congé de
SaHautesse.
Le 27. il partit conduit
jusques hors la Ville par le
premierVisir,& les principaux
Ministres
, aux acclamations
de tout le peuple.
Le 28. l'Ambassadeur
Moscovite ayant esté arresté,
oule mena aux Indiculis
ou les sept Tours
avec tous ses domestiques,
à l'exception de quatre valets
qui estoient des Livoniens.
Les meubles qu'on a
trouvé dans son Hostel ont
tous esté inventoriez &
scellez.
Le sieur Bonkoursky
Gentilhomme Polonois ,
,
Envoyé du Roy Auguste,
devoit
devoit estreaussi menéprisonnier
dans les septTours,
mais comme il s'est mis
fous nostre protection, j'ay
intercedé pour luy
, conjointementavec
le General
Ponjatourski.
D'autres Lettres beaucoup
plus recentesassurent
que les Tartares soutenus
par le Palatin de Kiovie,
font déja des mouvements
en Podolie; que six Batail-
Ions Saxons avoientrepassé
le Rhin pour retourner
dans leurs pays, & que les
Danois,&les Pru ssiens en
devoient faire autant.
Le Roy Auguste partit
de Leipsik le 1.Février
dpeour Dresden où la Diete
ses Estats qu'il avoit
convoquée pour le 6. devoitestreassembléecejourlà.
Ony a resolu de prendres
toutes les précautions
necessaires pour se mettre à
couvert de l'irruption des
Suedois.
Le 27. Janvier le Czar
partit en poste de Petersbourg
pour se rendre à
Moscou,& ensuiteàAzaf.
Avantson départ il avoit
dépesché plusieurs Courriers
porter les ordres pour
faire assembler des Troupes
sur la frontiere de l'Ukraine,
au-deçà & au-delà du
Boristhene
, & pour faire
travailler en grande diligence
à l'armement de sa
Flote.
L'Electeur de Brandebourg
a fait publier une
Ordonnance, par laquelle
il deffend à tous ses [ujets,
fous peine de lavie, de
forcir de fès Estats pour
aller s'establir ailleurs.
Voicy laListe desTroupesqui
doivent composer
l'Arméedestinée à maintenir
la neutralité dans la
Baffe-Allemagne.
Deux Regiments de Cavaleriede
l'Empereur.
Deux Bataillons & un
Escadron de l'Electeur Palatin.
Deux Bataillons&trois
Escadronsde l'Electeur de
Brandebourg.
Un Bataillonde Mayence.
UnBataillon du Landgrave
de Hesse Cassel.
Un Regiment de Cavalerie
du Duc de Mekelbourg
Swerin.
Deux Bataillons du Duc
d'Hanovre.
1 Un Bataillon du Duc
de Wolfembutel.
Un Bataillon de rEveque
de Munster.
Six Bataillons Anglois.
Et six Bataillons Hollandais,
ce qui fera en tout
environ quinze mille hommes.
L'Armée du General
Crassaw sera composée de
son Regiment de Dragons;
des Regiments de Mardefeldt
, de Marschal , de
quinzecent hommes chacun
, de deux autres Regiments
de Cavalerie de mille
hommes chacun ;
des---
Regiments d'Infanterie de
-
Schultz & de Stuart, de
douze cents hommes chacun
;
du Regiment de
Horne de dix-huit cents
hommes; de celuy d'Eckeblat
, de neufcents hommes,
ce qui faitplus de
treize mille hommes, sans
y comprendre les Troupes
destinées àla garde
-
des
Places ni les huit à dix mille
hommes qui doivent
venir le joindre deSuede.
Le Comte Sieniawski,
Grand General dela Couronne
de Pologne a refusé
aux Princes Dolhorouki&
Galiczen de faire entrer des
Troupes Moscovites dans
Kaminietz,Dubno, Brodi,
Leopol,&le Fort de
laTrinité.
Il yades Lettres du10.
Février, qui assurent que
l'Armée du General Crassawestoit
de plus de dixhuit
mille hommes ; sans
y comprendre les Troupes
qui devoient l'allerjoindre
deSuede,& qu'il n'attendoit
que les ordres pour
açir.
La nuit du 14.au 15.
Février, trois Compagnies
des Gardes à pied du Duc
d'Hanover,escaladerent la
Ville &: le Chasteau de
Pein. Le Chapitre de la Cathedrale
d'Hildesheim
dont , cette Place dépend
dépescha , un Courrier pour
en poster ses plaintes à
l'Empereur.
LeDuc deWolfembutel
s'est aussi emparé de Brakel,
d'Alefeld&deGrou,
de la dépendance du même
Chapitre; & d'autres
Troupes du Duc d'Hanover
se sont saisies de 11 Ville
mêmed'Hildesheim
fous prétexte que le Chapitre
n'avoit pas executé
une convention qu'il avoit
faite avec ce Duc, depuis
la mort du dernier Evêque
d'Hildesheim.
Les Lettres de Constantinople
du 8. Janvier, portent
qu'on n'y a jamais veu
de si grands préparatifs de
guerre; que les Turcs mestroient
en mer une Flote
de deux cens cinquante
voiles, sur laquelle on em^
barqueroit vingt mille
hommes; que le Grand-
Vizir alloit tous les jours
visiter les Magazins, l'Arcenal
,
& les Chantiers;
que tous les Bachas avoient
ordre de se rendre incessamment
au quartier d'assemblée,
àpeine de la vie,
& qu'il y en aura plus de
quatre-vingt qui amèneront
des Troupes nombreuses
qu'on avoit construit
quatre Ponts sur le
Danube, & que les Hospodars
deValaquie & deMoldavieavoiencordre
d'assembler
un grand nombre
de Chevaux & de Boeufs
pour voiturer les vivres 5c
tartillerie.
Nouvellesd'Espagne.
Lettre de Girone du ior
Février.
Laterreurquiregne iry
depuis la bataille-deVillaviciosa
a été changée enjojepar
tAmniftie que le Roy d'Espagne
a eu la bonté d'accorder
aux habitants,ainsi qu'à ceux
de tous les lieux qui rentreront
soussonobeïssance. Les Ennemis
pour exciter lesBourgeois
à prendre les armes ,
leur avoientfaitentendre
qu'ils ne
devoient esperer aucunpardon,
(7 que si nous nous rendions
maistres de la Place, ils seroient
tous punisseverement.
Ils ont esté trumpez agréablement
dans leur attente, & la
douceuravec laquelle on les a
traitez produit de bons effets.
Ceux que la crainte avoitobligez
de se refugier ailleurs reviennent
avec leursfamilles,
£*7° leurs meilleurs effetsqu'ils
anjoient emportez; & les habitants
de la plupartt des
Bourgs&Villages de la Viguerie
de Girone qui est fort
estenduë,~& quiestoient presque
deserts
,
rétournent aujjî
chezeux,ainsi que ceux de la
Plaine de Vich c- des Montagnes
-'
qui viennent prestet
serment defidélité
SURLAPRISE
de Girone.
Par Mr le D. de N.
ODE.
Mttfes,surla lyreéclatante,
Oif vous celebrezles vainqueurs,
Chantezlavaleur triomphante
D'un heros ami des neufSoeurs.
Mêlezvosfleurstousjours nouvelles
,
A ces couronnes immortelles,
Dont Mars ceintsonfront glorieux.
Noaille iJJu d'unsang illustre
Vient <£ajoufler un nouveau
Inftre
A la gloire deses Ayeux.
Impatient an jourcelebre
Oui doitaffermirungrand Roy,
Je le voisprés des bords de Ebrs
Où sa valeurseme l'effroy.
Il marche;il attaque GitoneJ
Et déjasafoudre qui tonne,
Frappe ces orgueilleux remparts,
Pour lesalut de l'Iberie
,
Prodiguedesa belle vie
Il , vole au milieu des hazards.
En v~sin des rochers formidables,
Oui sembloient braverJupiter, *
Surses bataillons indomptables
Fontpleuvoir la flame ~& lefer.
En vainsous cent formes terribles,
Ces boulevars inaccessibles
da*nIsl y a des Autheurs qui croyent oue c'est
cette partie de TEipacrac
, que les
Geants furent foudroyez.
Presentent le trouble & la mort.
Jcane héros
)
quelle barriere
Pourroit de ton ardeurguerriere
Arrester le nobletransport ?
Gironesansestreeffrayée
Voittombersessuperbes Tours,
presque abatuë &foudroyée
Elle espere & combat tousjours.
A te resister obstinée
Elle croit desa destinée
Reculer les momens prescrits.
Elle osedeses mains rebelles
Former des barrieres nouvelles,
Etfaireun murdeses débris.
Mais qu'apperçoy-je ? lavictoire
Prête à volersous tes Drapeaux
Voit le fort jaloux de ta gloire,
Liguer&les vents èj- les eaux.
Le
Le Terdébordédansla plaine,
Oppose à l'ardeur qui t'entraine
Des monts liquides ~&lfottans.
Maisanimépar lesobstacles,
Tu flan par de nouveaux miracles,
Triompherdu fort &- dît tems.
Tu commandes,&tes cohortei
Promptes à marcher surtespas,
Franchisent ces murs & ceîportes,
Que viens defoudroyerton bras'.
Victime de sa resistance ,
Girone, qui craint ta vengeance,
Reconnoiftsa temerité.
Arrefle vainqueurmagnanime;
Elle cede au feu qui t'anime,
N'écouteplus quetabonté.
Elleadissipélesalarmes,
Où s'abandonnaient les vaincu<r,
Surpris dupouvoirde tesarmes ,
De tes hontezils sont confus.
Tel on vit ton illustrePere,
De[amantsajuste colere,
Charmer ceux qu'ilavoitsoumis.
Làmesme,ou tu cours à lagloire
,
Le plus douxfruit de sa victoire
Fut d'épargnerses ennemis.
Fils genereux que l'onadmire,
Et dans la Guerre & dans la
Paix.
Soustiendel'IberiqueEmpire,
Quels feront un jour tes hauts
faits!
Formesurdesages maximes,
Deses connoissances sublimes,
Minerve instruitsit ta valeur.
EnnaissantfameuxCapitaine,
Une entreprisesihautaine
Est l'essaydetonjeunecoeur.
Remplis tes grandes destinées
Quiferontpajlir le Germain,
Leprélude de tes années
En estleprésage certain.
Nous te verrons avec Vendosme
Dans l'un &dans, l'autreRoyaume
Rappeller la Paix, d- les Jeux.
Gironeà Philippefourmise,
Garantitla haute entreprise,
Qui nous promet des jours heureux.
L.MAUMENE T.
Ivos Troupes ont ejlemijcs
dans de bons Quartiers de rafraichissement
qui s'estendent
fortavant dans la Plaine. On
travaille icy avec beaucoup de
diligence a. remplir de grands
Magasins j
Girone devant
-nOM servirde Place d'Armes
pour aller en avant; mais ce -
ne feraqu'aprèsque lesTroupesse
serontreposées, ~&que
tous lesMagasinsserontbien
fournis.
D'autres Lettrés portent
qu'on avoit trouvé dans
cettePlace cinquante pieces
de canon de bronze,
plusieurs de fer, soixante
& dix milliers de poudre,
& une grande quantité de
provisions ; que les Troupes
Espagnoles ont pris à
discretion la Ville & le
Chasteau de Morella, sur
les confins du Royaume de
Valence &: de la Catalogne,
Graus
,
Benavari, &
le Chasteau de Miravet ;
& quelles avoient reduit à
l'obéïssance tout le Pays de
Ribagorça ; qu'on .avait
trouvé dans Morella sept
pieces de canon , quatre
Mortiers, cent barils de
poudre, quatre cent bonlets,
vingt-cinq caisses de
balles de fusils, trois cent
cinquanteFusils ouMousquets
,
des Bombes
, &
plusieursautresattirails de
guerre ;- que Mr le Maiv
quis de Valdecanas,aprés
avoir c18Ifé les Ennemis
detout le Pays de Ribagorça
, avoit passéla Ribagorçana&
défait dans la Conca
de Trems quinze cent
Miquelets quivouloient
s'opposer à son passage.
Que Mr de Vendosme
avoit donné les ordres pour
préparer toutes les clioÍès"
necessaires à un siege, &
qu'il devoit partir au plustost
pour aller joindre l'armée
où les recruës arrivoient
de toutes parts;
qu'on levoit plusieurs Regiments
nouveaux dont
l'un portera le nom de Piemont
& l'autre celuy de
Sicile; que Mr le Comte
d'Aguilar avoit donné les
ordres pour faire faire soixante
mille habits, un pareil
nombre de paires de
Souliers, autant de Bas &:
deChapeaux,&le double
de Chemises 6c de Cravates
; ôcque les Eglises, les
Communautez , - ôc les
Grands, faisoient à l'envides
dons gratuits à sa MajestéCatholique.
'-.
Du Camp de Viillalva
le II. Février.
Tes deuxtiers de nostre
Armée doit poejjer la Segre le-
15.au Pont de Leridasous les1
ordres de Mr le Marquis de
Valdecanas&de Mrle Com-
, te Makoni ;~& Mr le Chevalier
dé Croix pdjjera cette
mt/me Riviere-,3 lÉbro, ~&
la
la Cincaproche de Mccpiincnçapouraller
camper à la Granca
; le16.à Torre de Segre
> d'où il continuera sa marche
jusquà Montblanc où il éstablirasa
droite;sagauche joindrala
droite de Mrde Vttldecanas
dont la gauche qui sera
à Igualada fera à portée dese
joindre à la droite de Mr le
Duc de Noailles. Dans cette
situation nous ferons maistres
desdeuxtiers de la Catalogne,
Fragment d'une autre
Lettre.
Les
Troupes du Royen
s'approchant de Balaguere ont
déterminé la garnison à l'abandonnersur
les quatre heures.
On a trouvé dans Balaguere
quelques munitions, ~&
huit Canons avec deux Mortiers.
On a pris de cette Garnisonenviron
deux cent hommes
qui se répandoient dans le
pays. Ily a quelques Lettres
quiportentque l'Archiduchefse
estembarquée.
Dons du Roy d'EJpagrje* Le Roy d'Espagnea -
donné laToisonaMr le
Comte d'Estaire, de l'illustre
Maison de Montmorency,
& à Mr de Beaufremont
de l'illustreMaison
de ce nom. Il est frere de
feu'rvfr le Marquis de Liftenoy
,
tué dans Aire au
dernier siege.
Le Roy d'Espagne a fait
le Prince de San Buono,
qui est depuis huitans son
Ambassadeur àVenise
,
Grand d'Espagne de la
premiere classe, en consideration
de sa fidelité de
de ses services, ARTICLE
des Morts.
DonDiegoMesiaPhilippe
de Gusman ,
Marquis
de Leganez,Grand
d'Espagne,&c.est mortà
Paris le 28.Février 1711.
Don Joseph de Linas,
Archevêque de Taragone,
cy-devant General de l'Or-
1 dre de la Mercy
,
est mort
à Barcelone.L'Archiducl'y
avoit fait conduire, &confisquertous
ses biens àcause
de sa perseverance de fidélité
pour Philippe V. Il
a donné des marques de
zele pour son Roy legitime
jusqu'au dernier jour
de sa vie. Il a ordonné que
soncorps feroit transporté
àSaragosse,où il avoitfait
bastir un magnifiqueMonastere
& fondé une Bibliotheque
publique.-
REMARQUES.
Tarragone, Ville d'Espagne,
dans la Principauté
de Catalogne, en Latin
Tarraco. Elleest à 15. lieuës
de Tortose, à 18. de Barcelone,
entre l'une & l'autre
Ville, & située sur le penchant
d'une colline jusqu'au
bord de la mer, où
estson port, quin'est bon
que pour les Barques, à
cause de quelques rochers
où de plus gros Bastiments
pourroient se briser. Les
Espagnols l'appellent Pucelle,
& disent qu'ellen'a
jamais estéprise. On tient
quecette Ville aesté bastie
par les Scipions) qui y hrent
faire divers ouvrages
pour sa défense. -
Le DucdeMedinaCeli
est mort dans le Chasteau
de Navarins. Il avoit esté
Ambassadeur à Rome,&
Viceroy de Naples.
Louis, Marquis d'Estrade
,
fils du feu Maréchal
d'Estrade
,
Commandeur
des Ordres du Roy, mourut
leôcsa
Mairie de Bordeaux a esté
donnée au Comte d'Estrade
,
son fils, Lieutenant
General des Armées du
Roy. Iiiij
Le Prince François- Marie
de Medicis, frere du
Grand Duc de Toscane,
né le
15. Novembre1660.
qui avoir esténommé Cardinal
le2. Septem bre 1686.
s'estoit trouvé à l'entrée du
Roy d'Espagneà Naples,
avoir accompagnéSaMajeftéCatholiquejufquaFinal
avec les Galeres de Toscane
en 1702. avoit esté nommé
Protecteur des Affaires
de France & d'Espagne à
Rome en 1703. avoir remis
le Chapeau de Cardinal,
le 19. Juin 1702. de ayoit
épousé le Juillet suivant
la Princesse Eleonore de
Gonzague-Guastalle mourut
le 3. Février 17IL d'une
hydropisie de poulmon
sans laisser de posterité. ,
Le Baron de Smettau , Envoyé &Pleniporentiaire
de rbledlciir de Brandebourg
auprès des Estats
Generaux, mourut a la
Haye le
5. Février. Il y avoit
dix-neufans qu'il estoit
en Hollande
, avec
la qualité d'Envoye, & il
avoit esté nommé Plenipotentiaire
il y a quelques
années.
Mr le Comte Gentilé,
cy-devant Envoyé de la
Republiquede Genes a la
Cour de France, mourut à
Genes le 2. Février.Ilestoit
d'une des plus anciennes
Maisons dela Republique.
Pierre Kanfotte, General
des Chanoines Réguliers
de Sainte Croix, est
mort à Huy en Flandres
le 15. de Février dernier.
REMAR QUES.
Ce fut le bienheureux
Théodore de Celles, Chanoine
de la grande Eglise
deLiégequi renouvella cet
Ordre en Allemagne. Il
choisit pour ce sujet un
endroit fort élevé dans un
Fauxbourg d'Huy, appelle
Clair-lieu, où il y avoit autrefoisune
Chapelle de S.
Thibaut. Cet Ordre dont
le premier Instituteur eftsaint
Gurriace, qui trouva
la sainte Croix par le commandement
de sainte Helene
mere du Grand Constantin
, ayant été renouvellé
& approuvé fous Innocent
III. au Concile de
Latran, futconfirmé en
1248. fousla Régle de S.
Augustin
, par le Pape Innocent
IV. au Concile de
Lyon en France. Sainte
Odile estlaPatrone de tout
l'Ordre. Le Chef& le premier
Conyent ef\_à Huy,
& le Général a coustume
d'y faire ordinairement sa
résidence.
Frederic-Guillaume Ket-
1er, Duc de Curlande &
de Semigall, &c. ayant
estéattaqué d'un fievre
chaude en retournant dans
sesEstats mourut le 20. de
Février de cette année1711.
Il avoit épousé le 13. Novembre
1710. la Princesse
Anne, fille unique du Czar
Jean, Grand Ducde Moscovie
5
& niece du Czar
Pierre, aujourd'huy regnant.
Le PrinceFerdinand
de Curlande, son oncle
qui , a embrassélaReligion
Catholique depuis quelquesannées,
a pris possession
de ses Essars. à quoy
le Czar ne veut pas consentir,
ne luy voulant accorder
que la qualité d'Administrateur
jusqu'à ce que l'on
fçachc si la Duchesse de
Curlande, sa niece, est enceinte.
REMARQUES.
La Curlande ou Courlande,
est une Province de
Pologne dans la Livonie.
Elle appartenoit autrefois
aux Chevaliers de Livonie,
qui l'avoient conquise sur
les Idolatres:mais Gottar
de Keder, dernier Grand-
Maistre de cet Ordre, ayant
embrasse l'heresie de
Luther,s'empara de ce Pays
dont il fit hommage à Sigismond-
Auguste, Roy de
Pologne, auquel il ceda
tous les droits qu'avoit eu
son Ordre, à condition
qu'il porteroit le titre de
Duc de Curlande
,
& que
ses descendants luy succederoient
,
après en avoir
reçu l'investiture des Rois
de Pologne, ce qui a duré
jusqu'à present. Les Villes
principales de ce Duché
sontGoldingen
,
& Windau,
qui est le lieu ordinaire
de la residence des Ducs.
Le P. N. Frassen
,
Cordelier
,
siconnu par plusieurs
Ouvrages de pieté &
d'érudition, est mort dans
le Grand Couvent deParis,
gé de 91.ans, après avoir
paffé par toutes les dignitez
de son Ordre. Le Pere
Frassen avoit une grande
connoissance des affaires
Ecclesiastiques, sur tout
pour ce qui regarde les Ordres
Religieux;aussî Son
E. Monseigneur le Cardinal
de Noailles l'avoit souvent
employé à ces fortes
d'affaires
,
dont il s'estoit
toujours acquitte au contentement
tentement de tout le monde.
Il étotc d'une simplicite
ôc d'une modestie admirabIe,
affable, doux, honneste
, ce qui luy attiroit l'estime
& l'amitié de tous
ceux qui le connoissoient.
Eustache le Noble, Baron
de S. Georges, ancien
Procureur General au Parlement
de Metz, mourut
à Paris le 3. Février1711.
âgé de 68. ans. Le grand
nombre de ses Ouvrages,
fait voir l'estenduë de son
esprit& sa grande facilité
a écrire.
REMARQUES.
Il a fait une traduction
des Pseaumes avec de petites
reflexions sur chaque
verset,&iljoignit àcetOuvrage
un autre de mesme
goust ;c'cfi: l'esprit de David,
& le dégoust du monde
: mais son talent estoit
d'écrire des Nouvelles, 6c
de petites Histoires particulières
; il a fait aussi plusieursPasquinadespendant
le temps de la derniere
guerre & les commencements
de celle-cy. On a de
luy encore plusieurs autres
Ouvrages, la Grote des
Fables,sesContes & Fables,
ses Voyages de Chaudray
,
& de Falaise, le Gagetouché,
Ildegerte.,Zulima,Abramulé,
lafausseComtesse
d'Isambert, Mylord Courtenayou
les amours d'Elisabeth,
Reined'Angleterre;
le Chevalier Balchazar,
l'histoire d'Hollande, la
conjuration des Pazzi, rfo
pe, les deux Arlequins, le
Sceau enlevé,& plusieurs
Nouvelles Afriquaines »
ainsi que pluheurs autres
Entretiens policiq es & Satyriques
: mais son meilleur
Ouvrage dans ce genre
est son Ecole du Monde.
Son stile estoic vif, hardy,
& figuré, mais dur & neg1igé
MARIAGES.
François
- Armand-
Loüis de Vignerod du Ples-
(j¡s
,
Duc de Fronsac
,
fils
d'Armand-Jean de Vignerod
du Plessis, Duc de Richelieu
, Pair de France,
Chevalier des Ordres du
Roy,&c. &: d'Anne Marguerite
d'Acigné,aépousé
le 12. de ce mois Anne-
Catherine de Noailles, fille
de feu Jean-François ,
Marquis de noailles Lieutenant
General au Gouvernement
d'Auvergne, & de
MargueriteTherese Rouil- lédeMeslay,aujourd'huy
troisiéme femme du Duc
deRichelieu.
Remarquessur le Duché
de Fronsac.
Fronfae
,
appelle par
les Latins Fronciacum Francum
ou Franciacum ,
est un
Bourg avec un vieux Chasleau
en Guienne litue irur
une Montagne fort escarpée,
anezpres de la Dordogne
,
à cent lieuës de
Bourdeaux. Aimoin ôc
Eghinart parlent de Fronsac
,&di[ent que Charlemagne
y fit bastir uneForteresse.
Il fut érigé en EXuché
par Henry IV. en Janvier
1598. Ce Duché passa
dans la Maison de Louis
II. Prince deCondé par
son mariage avec Claude
de Maillé,Duchesse de
Fronsac,Marquise deBrezé
>
& depuis il est venu au
Duc de Richelieu dont son
fils unique porte le nom.
Marc-Antoine Front de
Beaupoil de Saint Aulaire,
Comte de Lanmarie,
Grand-Echanson de France
,
fils defeu Louis de
Beaupoil de Saint Aulaire,
Grand-Echanson de France,
& Lieutenant des Gendarmes
de La Reine, mort
à Cazal-majorle22. Juillet
1701. servant fous Mr
de Vendosme en Italie,
epousale 12. Mars 1711.
Neret, fille de seuJean-
Pierre Neret de la Ravoire,
Seigneur de Beaurepaire
,
&c. Grand-Audiancier de
France, & Tresorierneral
de la Marine. Louis
de Beaupoilavoitépousé
Jeanne-Marie Perrault,
Dame de Milly en Gastinois
, &c. Feu Monsieur
de la Ravoire avoit épouser
se Anne de Valieres.
» François Foucault, Marquis
de S. Germain Beaupré
, Gouverneur de la
Hauce & Basse Marche,
épousale 11. Mars 1711.
Anne-Bonne Doublet de
Persan,fille de Nicolas
Poublet,Seigneur de Persan,
Conseiller au Parlement,
& de Bonne-Ursüle
Garnier de Salins. Mrle
Marquis de Saint Germain
Beaupré
, pere de l'Epoux,
avoit le Gouvernement de
la Marche.Le Roy l'a donné
au fils, & a donné la
survivance au pere. ':
Gilles-Marie Maupeou
d'Abiege,Maigre des Rcqueues,
fils de Gilles Mauprou,
Seigneur d'Abtege,
Maistredes Requestes Honoraire
,&. de
Guillemainde Courchamps,
aépousé
fille d'André Jubert,
Seigneur de Bouviles,Conseillier
d'Eltat ordinaire,&
de la foeur de Mr Desmarets,
Controlleur General
des Fin-ances.
GillesHuet,d'une ancienne
Famille de la Ville
de Bric, a épousé se-j. de
Février,Anne-Magdelaine
Richelet
9
fille unique de
feu Pierre CesarRichclet,
Avocat en Parlement, si
connu parmy les Sçavants
par un grand nombre
d'Ouvrages qu'il a donnez
au Public.
REMARQUES.
Ilest Auteur de la vie
des Poëtes François
, OuvragequeMr
L. adonné
au Public depuis quelques
années, d'une manie..
, re plus complere que celuy
deMr Richeler. Nous a
vons du meme Au:heur
un nouveau Dictionnaire
de Rimes * ;un Livre intituléla
Florinc; un Recueil
de Letres de différents
Aureurs, qu'il fit imprimer
en 1689. pour servir de
modèles dans les différents
genres E piftolaires. C'est
dans les remarques sur ces
Lettres qu'il porta son jugement
sur celles de Bussy,
de feu Mr Arnauld d'Andilly,
du Chevalier d'Herbelot,
de Conrart, &c.
Celui de sesOuvrages qui
luy a attiré plus de repu ration
c'est sonDictionnaire
dela Langue Françoise ou
il a meslé beaucoup delitterature
& plusieursétymologies.
Il a si,it d'autres.
Ouvrages qui ne sont pas
imprimez, comme un Dictionnaire
burlesque & latyrique)
& une Grammaire
Françoisè & Poétique
que Mr Huet son gendre
se prepare de donner au
Public.
Feu MrRicheletestoit
fils de JeanRichelet, Seigneur
de Signi, & petit-fils
-
de Nicolas Richelet,célébre
parmi les Autheurs d&
son temps, par quantitéde
bons Ouvrages: c'estluy-i
qui a commenté les Oeuvres
de Ronsard. Vi '£rru<
INONDATIONS,
Inondation de Gencve.
L,-Le degel & la fonte
des neigesfirent enfler de
forre la petite riviere d'Aire
,
& luy donnèrent un
cours si rapide,que le 12.
du mois de Février elle fit
rétrograderle Rhone dans
le Lac, & fit tourner à contre
sens
,
pendant tour un
jour, les roues. desMoulins
àc< des, machines qui
fervent aux Fontaines publiques
, ce qu'on navoit
jamais vü.
Le Rhônedevint sienflé
par le concours de plufleurs
rivieres qui s'y jettent
yqu'à l'endro où il
se joint avec la Saône, il
tenoitune demi-tieuë:mais
ce qui en de plus remarquable,
c'est qu'il traversentleLac
de Geneve dans
toute sa longueur, sans se
meiler à ses eaux, tant l'impetuosité
avec laquelle il y
entroit étoit grande. Un
pareil événementn'auroitil
pas donné lieu à la Fable
du Fleuve Acis quiestant
devenu amoureux de lix
Nymphe Galatée, alla la
chercher jusques dans la
Sicile, sans mesler ses eaux
à celles de la mer.
De Lyon.
Jer/âfondu Rhône é5 de
la Saône a Lyon le 13. Février,veilledeS.
Ad-attkias ,dans la
Placea'ppellee Confort.
La veille de la Feste
de S, Matth ieu, aprés mi^
nuit, le Rhône avec la Saone
furent entièrement dé-
:bordez, contre les effetsordinaires
dece fleuve & cte
cette riviere qui ne grossissent
que dans l'intervalle
dequelquesjours. Le lit du
premier,qui termine la
Ville de Lyon du cofté de
la Province de D,1Uphiné'j;
& celuy de la Saône qui
couleau milieu de 11Ville,
-se joignirent dans la Place
L
,.
de Bellecour & celle de
Confort,avec une si orande
abondance d'eau, q"c
toute la partie de cette Ville
qui le trouve entre ces'
deux Places jusques dans la
ruë Merciere
,
fut si fort
inondée que toutes les maisons
ne purent plus se communiquer
que par bateaux.
On na pas de peine à concevoir
le desordre que cela
a causé dans tout ce quartier
par l'interruption du
commerce,&c le demcnagement
des boutiques ou
plusieurs marchandises furent
mouillez Les Eglises
desJacobins,des Celestins,
& de la Charité en ont le
plus souffert. Le vieux Alsenal
qui est voisin de la
Saone a elle presque tout
inondé.Heureusementtoute
l'Artillerie & les munitions
de guerre avoient esté
transportées depuis peu
d'années dans le nouvel
Arsenal basty par les soins
deMr le Maréchal de villeroy
,
nostre Gouverneur.
Le Pont de bois de Bellecour
a esté presque tout
emporté, ainsi que quantité
de maisons du Fauxbourg
de la Guillotiere.
Cequ'il ya de remarquable
, c'est qu'on a observé
par une Inscription gravée
sur une Pyramide bastie
detemps immémorialdans
le milieu de la Place de
Confort, que le Rhône &
la Saone ne s'estôient pas
joints dans cette Place depuis
l'an 1554.&.cjue par
les mesures de la hauteur
où l'eau monta alors., on a
vérifié que cette demiere
inondationasurpassel'autre
d un pied & demy.
A l'égard de Paris
,
il
ny a pas eu d'effets fort
extraor dinaires. L'inondation
& l'eau n'a esté qu'à
trois pieds & demi prés du.
marbre qu'ona mis dans le
Cloistre des Celeitins,pour
marquerla hauteur del'eau
en Février1658 J'attendois
des remarque sur les ravages
qu'a faitlaLoire, je ne
les aurayque pour le mois
prochain.
Ceremonie faiteparl*Electîeurde
Cologne.
Le Serenissïme Electeur
du S.Empire Romain,
Joseph-Clement
,
Archevesque
de Cologne, Legat
né du S. Siege Apostolique
&c. célébra à Paris
pontifie,lement le c. Février
1711. sa millième
Messe
,
suivant un usage
pieux observé parmy les
Trelats d'Allemagne. Pour
cet effetayant envoyé un
de ses Officiers prier de sa
part Mgr le Cardinal de
Noailles d'avoir agreable
que pour cette célébration
ce Prince put officier pontisicalement
dans son Dioccfc,
sois Eminencerépondit
que Son A. S. pouvoit
disposerde toute son autorité
qu'elle luy remettoit
avec un extrêmeplailîr.
L'Eglisè du Val de Grâce
ayantesté choisie,SonA.
S.s'yrenditJe?.de Février,
ê~ aprèsavoir salué 1-Ab
beuea ion parloir,ilentra
dans l'Eglisesuinvi d'ungrand
nombre d'Ecclesiastiques,
& de sesOfficiers,
8c estantmonté sur un
throne préparé du cofté de
l'Evangile
,
il futrevestu
de ses habits Pontificaux,
& celebra la Messe chantée
par la Musiquesous la conduite
du Sieur Beauregard,
Maistre de la Musique de
la Chapelle de ce Prince.
On remarqua trois choses
singulieres danscette Mes-
Cej la premicre c'est qu'après
la Communion
, Son
A S. entonna le Te Deum
qui futcontinué par la
Musique ; la leçonde que
pendantque l'Electeurdonnoit
les bencd ¡¿lions,l'ACo.
filiant cria à haute voix,
humiliâte njos ad benediftiomm
;
la troisiéme & la plus,
remarquable
,
& qu'on
croyoit ne s'observer qu à
l'exaltation du SaintPere,
c'est qu'après la Messe le
Prince estant remonte sur
le throne revestu pontificalement,
le Prestre assistant
lfuilyacéducollédel'Epiûréi.
fdi-t à h~aute voix ad\ multos
mulos annos & s'estant a..
vance à trois reprises
,
il
allaluy baiser la main, &
recevoir sa bénédiction,cc
que firent aussi tous ceux
de sa Cour Aprés la Messe
Son A. S. alla du costé de
la grille où reposent les
coeurs de la Reine & de Me
la Dauphine, sasoeur, où
il fit sa priere pour le repos
de leurs ames. -
Histoiregenerale de la Fonderie
des Lettres 0* de tlmprimerie,
par P IERRE COT,
Fondeur, 0* Imprimeur-Libraire
ordinaire de l'Academic
Royale des Inscriptions -C
Médailles. Volumein4°. que
l'on doit mettre incessamment
fous la Presse
,
à Paris.
L'Ouvrage est divisé
en trois Parties.
1#ON traite dans la
premiere
de l'origine de l'Ecriture,
& de Tes progrez.
-Aprés avoir parlé des Caracteres
dont les hommes
se sont servis dans les premiers
temps, on en donne
des Tables expliquées,
tant des Caracteres symboliquesdequelques
Peuples,
que des alphabetiques
des autres Nations.
En traitant de l'établissement
de plus anciennes
Bibliotheques,&des Maü'ufçtirs
dont elles étoient
composées, on examine
ce qui peut servir à juger
de ancienneté de ces
Manuscrits. Cela conduit
à ce qui regarde la méchanique
de l'ancienne
Librairie des Grecs, & des
Romains
,
les Ecrivains
ou Copistes des Livres
ausquels les Imprimeurs
ont succedé.
,
2. Laseconde Partiea
pourobjet la Méchanique
de la Fonderie des Caracteres,
& celle de l'Imprimerie
L'on y décrit de
quelle maniere, & quand
4
ces deux Arcs ont été inventez.
L'on y parlede la
Gravûre ou
taille
des Poinçons
de Lettres en acier,
des Matrices en cuivre,&
des Moules pour fondre
les Lettres. Les differens
Caracteres que l'on aemployé,
& que l'on employe
actuellement dansl'impression
des Livres, s'y
trouventplacez chacun
dans leurordre, avi-f- 'v
"Histoire;Onduplique en
passant la manierede graver
sur le cuivre, à l'Eadforte,
au Burin; d'imprimer
en Taille douce.Celle
; degraver sur le Bois, ou de buriner sur les Métaux
}n'y'efi: pas oubliée non
plus que la maniere d'imprimer
des Chinois. Enfin
l'ony joint des remarques sur la Compoficioiy-du
Métal des Lettressonduës:
surlesCaracteres de
Plainchant&deMusique:
sur lesfiguresd'Astrono-
^mie;les Signes de Chymie,
& de Medecine: sur les
Notes des Jurisconsultes,
& sur les Abbreviations
anciennes. 3. La troisiéme Partie
regarde uniquement le travail
de l'Imprimerie, c'està
dire, les dispositions necessaires
pour l'ornement
des Ouvrages:Lafigure des
différentes Impositions:
Les Marques dont les Auteurs
se servent pour corriger
les Epreuves: La maniere
de composer l'Encre.
La description de la
-
Presse, des CalTes. & de
plusieurs autres Ustanciles
f
qui concernent le faitde
l'Imprimerie. L'on donne
une idée de ce que les plus
habiles Fondeurs en Lettres
,
de Imprimeurs ont
fait de plus excellent en
chaque genre de Caraél:e..
re. L'on y fait connoître
ceux qui se font distinguez
par la beauté ou la correction
de leurs Ouvrages,
par leurs sçavoir dans les
belles Lettres, & dans let
recherches d'Antiquité.
L'on y voit avec quel foin
les Papes, les Empereurs,
& les Roisontsoûtenu
l'Imprimerie, & les dépenses
qu'ils yont faites. L'on
y traite de l'Approbation
des Livres, des Marques
des Libraires, des Privileges,
& de tout cequi y a
rapport. L'on donne une
Lifte generale de toutes les
Villes où il y a eu des
Livres imprimez; & l'on
finir par un Dictionnaire
des Termes propres aux
Arts de la Fonderie des
Lettres, de l'Imprimerie,
& de la Librairie,& aux
autres Arts qui en dépendent.
Cet Ouvrage est
prest à metre sous la Prêt
se,& il y aura plus de 100.
Planches.
IIIe PARTIE
DU MERCURE.
HISTORIETTES
& autres Amusemens.
JUGEMENT du
Procés de la petitefille
à deuxmeres
,
dont
j'aiparlédansle Mercure
de Novembre.
De Lion ce 20 Fevrier.
'i Ilseroitinutiledevous
envoyer un dispositifennuïeux
de la Sentenceren
duë au sujet de la petite
fille à deux meres ,
suffit
de vous dire que la mere
mariéea estéreceuë à
prouver les faits par elle
articulezauprocés ;sçavoirquelle
avoit esté
grosse
,
quelle avoit à
laitél'enfant,&c. mais
par provision l'enfant a
estéremis entre les mains
de la merefille, qui le reclamoit,
& cela termine
le procés ; parce que la
mere mariée ditqu'ellen'a
pas le moyen depoursuivre,
& l'on Ifllit dans
la Ville, qu'outre qu'elle
riapas de preuvessuffisantes,
le pere qui estoit
si curieux d'avoir ligneé,,
n'aplusdegoustpourun
enfantéquivoque;&ainsi
l'on croit que leschoses
en demeureront là : au
reste
, vous m'avcZ-J demandé
avec instance les
particularitéssecrettesde
ce que vous appcfteZ-J dans
vostre Mercure. La circonfiance
la plus étcnante
de toute l'Histoire
,
l'on a vû la timide
Angelique cacher
en tremblant les suites de
son mariage secret, &on
la voit à present reclamer
publiquement le témoin
desa faute. Ellenecraint
plus de publier sa honte;
ce changement ne paroît
pas vrai-semblable, &c.
Je vous envoye, MonsieuryUsratjonssecrettes
qui rendentcet éclat vraipmblahLs,
y vousajufie-,
rez ces vevïtez^ak refle de
l'Histoire. Jesuis, &c.
FIN
De l'Histoire de Cleonte
& d*Angclique*
Angeliquenavoit aucunes eu aucunes nnoouuvveelllleess de ffbann
cherCleonte,depuis qu'el
le l'avoit vû partir pour
aller obtenir de son pere
la permission d'achever
ce mariage dont le commencement
avoitesté
trop précipité; Cleonte
en partant de Lion estoit
rempli d'amour & de
reconnoissance ; mais
tout cela se refroidit un
peu sur les chemins ; il y
a cent lieuës de Lion à
Paris, peu de jeunes
Cleontes peuvent porter
Ci loin un violent
amour sans en rien perdre
, &surtout un amour
heureux, celui-ci
aimoit pourtant encore
Angelique en arrivant à
Paris J mais il y trouva
son pere mort, il salut
heriter de cent mil écus ;
il fut sioccupé du plaisir
&de soins de cette grosse
succession,quiln'eut pas
leloisirde penser davantageàAngelique.
-
Aprés un oubli de quelques
années --;. Cleonte
tombamalade de la maladiedontil
mourut,&
avant sa more un de ses
amis lui aprit qu'il estoit
ressé à la pauvre Angélique
un gage vivant de
l'amour qu'elle avoiteu
pour lui ; il eftoiç honneste
homme à l'inconscontance
prés, & de plus
il alloitmourir ; il écrivitde
sa mainune espece
de Testament,par lequel
il époufoit Angelique
,
en laissant vingt mille
livres, dont la mere joüira
jusqu'a la majorité de
l'enfant, & de plus, une
forte pension à la mere
sa vie durant.
Cleonte mourut ensuite,
& surcette nouvelle,
Angelique fut agitée de
divers mouvemens,elle
apprend que son cher
Cleonte est mort ; mais
elle lavoit cru inconstant;
c'est encore pis
pour une femme; joignez
à cela le mariage posthume
qui reparc son
honneur, elle doit estre
un peu consolée ; quoi
qu'il en fair, ces raisons
l'ont obligée à reclamer
la petite fille, & à faire
cet éclat qui ne paroissoit
pas vrai-semblable dans
une fille sage & modèle.
CHANSON
contre le Caffé.
Sur le même Air des
Bourgeois de Chastres
&deMont-l'hery.
f]¡ucUe bigarre verve
M'avoirdoncéchauffe?
En dépit de Minervefay
chantéle Caffe:
Les Dieux ont rebute
Cette boijonbrûlante ;,
L'amertume qu'elle a
la, la,
Nfpeut quecheZj Pluton
don, don,
Meriterqu'on la chante,
Dansles enfers Orfée
Entrantfortaltéré,
Grogonnemal coefée,
apportaleCaffé;
LeChantrej~ Voyant la liqueur noire,
Que medonnez-vous là ?
la, lae
Pour chanter la chanson,
don, don,
C'est du vinqu'ilfaut
boire.
Vive lefeu bachique
Qui nous rend tous
Joyeux;
Cassémélancolique!
Le tien ejl dangereux,
Cyeji unfeu tenebreux,
Feunoir, &feufansfame,
Sournois il nous rendra
la, la,
C'estunfumeuxcharbon,
don,don,
Qui nous noircira l'âme.
Ilprendsurlanature.
Plus d'un Docteur l'a
dità
On paye avec ujure
Ce qu'il donne à crédit,
Oncroitquil nousfournit
Espritsen abondance;
Mais dans ces moments
là>
la la}
C'est nostre proprefond,
donydon,
Que le traistredepense.
Lesçavant Hipocrate
Ditquecette liqueur
Enresserrant larate
oJe la belle humeur,
Auxenvirons du coeur
Dissipant la tendresse
Detous ces quartiers là
la,la,
En cbassantCupidon)
don, don,
Il bannitl'allagresse,
Lorsque Bachuspropice
M'atroublé le cerrveltu,
Le Caffè parmalice
Vient tirerle rideau,
Jevoyoois tout en beau
Cette liqueur cruelle,
Parla vertu qu'elle a
la,la,
Réveillant maraifln,
don,don,
Mafaitpester contr' lle.
Celuyqui s'habituë
Au breuvage enfumé
Quandfin heure est venue
Ce/Je d'estre animé
D'un imbecile ila
Le langage& la mine
Le Casséseul pourra,
la,la,
Decestupide oiJOn,
don, don,
Remonter la machine.
Il .,-,- excite la bile ;" '!
Etson activités,
Rend lafemmeindocile
Avec malignit'e*t--.
LtiDémoriâù Caffe,
S'e'tabhjfanten France,
Femellesrassembla
l&y l&y
Entrelies ce Demon
don, don,
Souffla la médisance.
Ilcftde ce breuvage
Ainsiquedesamours,
Toujours on en dit rage
Etl'on en prend toujours;
Tel tout haut les blâma
Quitoutbas leurfitgrâce.
pour vousprouvercela,',' la,la,
De ce CafféDemon,
don9dony
Je vaisprendre unetasse.
Jedemande encor quartier
aux Anonimes jusqu'aumoisprochain,
en
faveur du Recueil de
Poèïîes qui occupe la place
des Articles burlesques,
Bouts-rimez,Ques
tions, Se autres badinages,
dont je tâcheray de,
varier les especes, quand
jen'auray point depieces
plus serieuses pour
remplir ma tâche;
Article des Enigmes.
LescroisEnigmes ,:: du LestroisEnigmesdu
moispassé sonttoutes
trois sur le même mot:
ce mqt estjc^^
:., nh ;'; ;)
Explication de la premiere
Enigme, parMla
M. de *** '1 i-v ,(. ,.
Dansle coeur des jeunes
," Amans -
VnJàng bouillant&vif
causel'amourextrême,
C*elî cette vivacitémême
Qui rend les Amans inccqonjnfajnlsa.
ns.
Les Explications des
deux,suivantes sont de
MI*R«ocli s'agitelesvaisseaux
surmer&surterre&,
Ici v-aiïeauveut dire artere
E N V OY.
Dans les Héros lesang
faitlafranchevaleur,
Dans l'Heroïne il fait
l'honneur
Du Poëte rampantainsi
qu'uneTortuë ,
C'est lesang quifait l&
froideur;
C'estaussiparlesangque;
lesublimeAutheur
Cnomumee u*n A-iglepercela- perc'e
Explicationdela troi--
liérne Enigme.
C-lefl-pour faire du ping
que lepainsepétrit,
Cefangagitavecl'espritj.
C'cft lefang,quifaitune
bessey
Et s*ilrieftpasl'amoury*
illemetdansla teste.
Apropos de cette Enig.>,,
me,ilmesouvient davoir
entendu racontes
un faitpeu plaisant, mais
rres - veritable.
Un jeune Anglois qui
logeoitclans une Auberge
du Fauxbourg Saint
Germain
,
devint éperduëment
amoureuxde la
fille de son Hoste. Elle
estoit tres-belle,&l'Anglois
luy sir des offres à
proporrion desa beauté;
mais cette fierehostesse,
foit par vertu ,
foit par
ambition ne voulut
entendre parler que de
mariage ; le pere de ce
jeune
jeune Anglois, estoie
homme à le desheriter
s'il eut voulu contenter
sa passion à ce prix,l'Hôtesse
n'en vouloit pourtant
rien rabattre,nostre
Amant desesperé tomba
dangereusement malade.
On fit plusieursconsultations,
où Monsieur
Gucnaut fameux Medecin
de ce temps-là,n'eut
pas de peine à prouver à
ses Confreres,qu'il faloit
d'abord seigner & rafraîchir,
&C qu'il teudroit
ensuite rafraîchir & seigner
; car, disoit-il, je
connois les deux maladies
de mon malade,elle
sont toutes deux dans le
sang. Ce(H'amour&: la
fiévre ; enfin nostre Amant
fut livreàl'opinion
de Monsieur Guenaut ,
qui par dix ou douze seignées
consecutives, osta
de ses veines non-seulement
l'amour & la ~cvre
,
mais encore la vie,
ou peu s'en salut, car on
le crut mort; cependant
il en revint, parce que
les Medecins &r le Chirurgienl'abandonnerent.
Pendant ce temps là,on
avoit écrit au pere la eause
de cette maladie,&il
arriva de Londres dans
laresolution de consentir
à ce mariageextravagant,
plustost que de perdre
son fils unique.
Ille trouva mourant
&la premiere chose qu'il
fit pour le rappeller à la
vie, ce futde lui prometre
labelle Hostesse
en mariage ; mais comme
la passiondu jeune
homme n'estoit fondée
que sur la beauté, les
idées vives des charmes
de l'Hostesse s'estoient
dissipées avec son sang;
elles revinrent pourtant
avec le fang nouveau
qu'il faisoit, mais àmélure
que sa santé se fortisioit
, le pere voyoit
moins de necessité à ce
mariage,enfin il ne craignit
plus de s'y opposer
entièrement.
Si la passion de ce fils
eut esté aussi violente
qu'avant sa maladie
,
il
eut fallu rappeller Monsieur
Guenaut pour la lui
oster par de nouvelles faignées
, ou le marier pour
l'empêcher de retomber
malade;mais cette paC"
sion n'estant presqueplus
qu'un simple souvenir ,
laraison& le perefurent
les plus forts; il renonça
à la belle Hostesse; &
cela fait voirquel'amour,
sur tout celui qui n'est
fondé que sur la beauté,
effc entièrement dans le
fang, & que si la transfusion
que quelques Médecins
ont cru possible
,
ne peut guerir de la vieillesse
, au moins elle peut
guérir de l'amour
CAPRICE
d'une femme jalouse sur tEnigme.
Torrens impetueux qui
, ", cours après toi-même,
Et qui ce fuis toi meme auflî*
Tâtantlepoux
AsonEpoux,
La jeune Aminte
Fit cetteplainte,
Tonsangsefuit
Etsepoursuit,
Son cours l'entraîne
De veine en veine ;
Ainsile cours
De tes amours
Cherinfidelle,
De belle en belle
T'entraînera , Quellesera
Pour lors ma rage.
Nonjesuissage.
Tremble pourtant
En uninstant,
La vertu change,
Femmese vange ;
Maisnonjamais
Pourtantsimais
Tu m'aime encore,
Moijet'adore;
Pourquoi vouloir
Déjàprévoir
Et l'inconstance
Et la vengeance.
ylrivera
Ce qu'ilpourrliQ
NOMS
de ceux qui ont deviné
les Enigmes.
L'oedipelatin ruë de
l'Université ; l'inconnude
vostre connoissance,
Gingouifcan,'7jejlees devine
toutes, je ne m'en corrigerai
jamais : la belle
blonde aimée du beau
brunbrun,,jejelelessaauurrooiiss devinées
toutes trois, s'il y
enavoit eu qu'une: fang
premier ,
fang sécond,
sangtroisiéme; faites
saigner le Mercure il a
trop de sang,routine me
tient lieu d'esprit, le pénetrant
badaud
9-
Alcidalis
&- Zelida,franc oison,
l'Hemoragiste,trois
fois le sang deviné par
Monsieur Sanguin
j
la
Lanterniste
,
la pucelle
Enigmatique, le decisif
de la ruë des Boucheries,
Colostele claire voyante
de la ruë des Boucheries,
Thamirifté.
QuoiqueThamiriste
devine toutes les Enigmes,
il n'a pas deviné
celles-ci:l'Imprimeurn'a
pas laissé de mettre Tha.
miriste; il m'a dit pour
raison
,
je le mets toûjours
depuis trente ans, j'ai cru que vous l'aviez
oublié, car il faut bien
qu'ilysoit.
ENIGME
du mois.
Naturelle dans ma parure,
Etbizare dans macoëf-,
fure;
J'ai la peau douce & le
tein brun,
Voici ce quej'ai de commun
Avec unebellepersonne.
Sijenefuispoint tendre
9 helasonm'abandonne;
Mais pour tel qui desire
ardemmentde mavoir,
Je commence à devenir
bonne
Lorsqueje me dispose à
ne plus rien valoir,
Quoi que j'eusse refolu
de ne parler encore
dans ce mois-ci
,
ni de
Questions, ni d'Anonimes,
ni d'autres Amusemens,
& de les remettre
au mois prochain, jen'ai
pû refuser à une Dame
d'une grande distinction,
d'ungoûtinfini, &d'un
mente extraordinaire,de
placer ici des questions
quelles m'aenvoyées:
ne croyez pas que cette
Dame soit la mesme, qui
aesté la Dulcinée de
mon Prédecesseur,pendant
quarante ans) &
pour laquelle il avoir
écrittrois ou quatre
cens Volumes sans l'avoir
jamais vue ; celleci
estplusvisible & plus
abfoluë5 jen'oseluy clcG
obéïr.
QUESTION.
S'il vaudroit mieux ne
point voir celle qu'on
aime,que de la voir indifférente
à nostre Amour.
II,QUESTION.
Jusqu'à quel âge l'Amour
doit l'emporter sur
la Raison;cest-à-dire à
quel âge on doit commencer
d'aimer
-
fagemène.
III. QUESTION.
S'il est raisonnable
de haïr celle qui nous a
charlué, quand elle nous
méprise.
IV. QUESTION.
Lequel estle moins fâcheux
d'aimer une periorïne
dont le coeur est
déjà touché d'une autre
passion, ou une dont le
acoevur eost iincrap.able d'en
V.QUESTION.
S'il vaut mieux estre;
aimé, que d'estre aimable.
CHANSON
sur leCaffe.
Sur l'Air, Réveillez-vous,
-
belle endormie. Divin caffé, tous les Poètes,
Chaque jour routent tes
bienfaits
;
-
Mais pourquoi par des Chansonnettes
).VeVl/ttent-ils point tes attraits?
Je veux romprel'ingrat silence
Des hostes du SacréVallon>
Fais parler ma reconnaissance,
Et vient meservird'Apollon.
Tu sçais animer l'éloquence
,
Tu frais reveillerles esprits
5 Etsouvent ta vive influence
produit le feu de nos écrits.
si la migraine ose paroistre
Avec son funeste bandeau ;
C'estpartoiquejevoisrenaistre
L'heureufl paix dans mon cerveau,
Tout danstoijusqu'a la fumée,
Produit des effets merveilleux
Jesens cette nuë embaumée;
Fortifer mes foibles yeux.
Loin d'ici lejus que Pomone,
EtBachus vient nousprésenter ;
La raison que le Cassé donne,
Ils ne Peuvent que nous l'oster.
DisparoissezLiqueursbruslantes
c!0! portez l'incendie au Cæltr:
Du Cassé les forces plus lentes
N'ont qu'une benigne chaleur,
Tous les jours l'Aurore nouvelle
Me verra cette coupe en main,
Par ce jusla Parque cruelle
sçaura respectermondessein,
L'on m'aenvoyé des
Chansons sur le Café,
dequoi occuper la moitié
d'un Mercure
,
je
crains d'en avoirdéjà
trop mis5mais cestla
mode à present de chanter
le Café,&à Paris la
mode justifie tous lesexcés,
encore si l'on m'en
avoit envoyé quelqu'une.
sur le Thé, ou sur le
Chocolat, jaurois pû diversifier
; mais il en est
des liqueurs comme des
hommes
,
quand quelqu'un
est à la mode on
ne parle point de tous
les autres.
A propos on m'envoyc
un Sonnet pour remplir
un vuide;je n'ay pas le loisir
dem'informer s'il est
ancien ou nouveau. Il me
paroissjoly. Qujmporte^
la date n'y fait rien.
SONNET
d'un Solitaire.
PaJer quelques heures à
lire,
Estmon plus doux amusement
Je mefais un plaisirdécrire
Et non pas un attachement.
Jeperds legoustde la Satire,
L'Art de loüer maligne-*
à* ment
Cede ausecret depouvoir
dire
Des veritez, obligeam-,
ment*
J'aime la vertu sans rudejjes
J'aime le plaisirsans molkjjew
J'aime la vie & n'en.
crainspas lafin.
HISTORIETTE
presque toute veritable.
Dans
une Ville de
Province, deux Dames
voisines se haîffoient)
parce que leurs caracteres
estoientopposez.L'une
que j'appelleray Cephise,
estoitjeune, enjouée
,
tres-vertueuse
mais trop vive , pour s'ajf
sujettir aux bienseances
qui doivent accompagner
la vertu.
,
L'autre Dame avoit
au contraire tant de delicatesse
sur ces bienfeait
ces,qu'elle eut, en un
besoin, sacrifié la vertu
même à la vanité de paroistre
plus scrupuleuse
que les voisines. C'estoit
en médisantde leur conduite
qu'elle donnoit de
l'éclat à la tienne, &
Cephise estoit celle de les
voisines qu'elle attaquoit
le plus cruellement par
sess medisances.
Cephise avoit épousé
depuis peu de temps un
fort galant homme, qui
charmé de son enjouement
,&Cperliiadé de sa
vertu, ne la contraignoit
en rien: maisDorimene
qui dominoit dans toutes
les maifbm où l'on
vouloit bien la souffrir
faisoit des remontrances
sèveres non-seulement
à la femme sur les petites
imprudences qui luy échappoient,
mais encore
au mary sur ce qu'il donnoit
trop de liberté à sa
femme.
Les remontrances que
Dorimenefaisoit à cette
jeune personne la piquoient
encore plus que
tout le mal qu'elle pouvoit
dire d'elle. Unjour
elle pensoit à s'en venger
, lorsquune Couturièrequi
les habilloittoutes
deux vint luy conter
pour la réjouir une nouvveelllleeintrigue
d'un Cavalierarrivé
dans la Ville
depuis quelques jours.
Lisette
)
c'estoit le nom
de la Couturiere, ne
manquoit pas d'esprit
& elle estoit à peu prés
de l'humeur de Cephise.
Cellede Dorimeneluy
déplaisoit fort. Dorimene
payoit avec chagrin,
& <jueïeloit volontiers
ses ouvrières:deplus.,
elle avoit souvent ennuyé
Lisette du recit de
les bonnes avions
,
elle
en faisoitl'élogeà ses donieftiques-
ii-iefi-ilc,quand
elle ne sçavoit plus à qui
les conter.
Dorimene estoit veuvedepuis
unan,&assez
richepouravoir plû à un
jeune Avanturier , qui
avoit feint pour elle une
belle passion. Cette severeveuve
l'avoit rebuté
pendant quelques jours,
mais enfin le trouvant à
son gré elle luyavoit fait
eipqrerquelle l'epouse
-JOit quand les deux années
de fou veuvage femoient
accomplies:cependantelle
ne vouloit
paspermettre qu'il la vit
ayant ce temps- là à
moins que ce ne fut
tres-secretement.
-
CCfat,a peu preset
que Lisette raconta àCeptriCb
ellevenoit de rapprendre
d'une femme
qui avoit ménagé chez
„nHeJila campagne cette
avanture au Cavalier. --
Cephise mena promener
Lisette avec elle
pour avoir le loisir de le
faire redire vingt fois la
mesme croie ; elle ne
pouvoit se lasser de l'entendre,
ni croirecequ'elle
entendoit. Mais lorsqu'elle
en fut bien persuadée,
elle ne respira
plus que le plaisir de [e
venger en se rejoüissant.
Cette jeune folatre imagine
cent plaisanteries à
faire sur l'intrigue de la
veuve,ilfalloitensçavoir
des circonstances plus
particulières ,&CLifctte
à qui Cephise fit esperer
recompense, promit
de suivre de prés cette
affaire.Ellesétoient dans
un jardin ouvert pour
les honnestes gens de la
Ville, elles [e promenoient
dans une allée détournée,
Cephise estoit
veituë tres -
négligemment
,
& enveloppée
dans une echarpe noire
;Lisètte qui estoit
ce jour-là fort ajustée,
luy dit en riant,Madame,
si tout le monde
ne se connoissoit pas
dans une petite Ville,
son me seroit peut-estre
l'honneur de me prendre
pour vostreMaistres
se. Cephise ne fit point
d'attention à ce discours,
parce qu'elle examinoit
un jeune homme fort
bienfait qu'elle ne connoissoit
point pourestre
de la Ville. Lisetteestoit
trés-jolie. Ce Cavalier
qui cherchoit avanture,
avoit envie de l'aborder.
Dés que Cephise l'eut
fait remarquer à Lisette,
t:llc le. reconnut pour
l'Amant de Dorimene,
-carelle l'avoit vu entrer
un jour chez cette Dame
,comme elle en sortoit.
Cephise qui avoit
l'imagination vive,forma
son projet dans le
moment ,
elle le communique
à Lisette qui
enchérit encore sur l'idée
de Cephise : enfin
aprés avoir fait quelques
tours d'allée tousjours
suivies de l'Avanturier,
elles se placèrent sur un
banc,où il vintaussitost
s'asseoir à cofté de Lisette.
Après quelques regards
de part & d'autre,
leCavalier luy adres
sa la parole: la fortune,
luy dit-il, m'est bien favorable
!quel bonheurà
un hommeestranger
dans cette Ville, d'y
trouver d'abord cequ'il
y a de plus aimable. Lisette
répondit à cette galanterie
d'une maniéré à
s'en attirer une seconde
& la conversation dura,
autant qu'il fallut pour
faire consentir Lisette
avec bienseance à l'offre
qu'il luy fit de la remener
à son logis, ce quelle
n'auroit pas souffert,
disoit-elle, si son mary
n'eust pas esté absent :
elle luy fit ensuite le portrait
d'un mary haïssable.
Elle prit enfin avec
luy le nom & le rôlle de
Cephise
,
pendant que
Çephise la suivoit respectueusementcommeune
fille de chambre
,
& ils
arrivèrent ainsi au logis
de Cephise. Le Cavalier
tout occupé des charmes
de celle qu'il conduisoit,
arriva à la porte sans s'estre
encor apperçu qu'il
citait dans la ruë de Dorimene;
il fut estonné de
se trouver à portéed'en
direvû, mais heureusement
il estoit fort tart.
Il avoit demandé permission
à Lisette de la
venir voir le lendemain:
elle luy permit, à condition
qu'il y viendrait
à la mesme heure sur la
brune, car, disoit-elle,
j'ay une voiline trés-médisante,
& je ferois perduë
si elle voyoit entrer
un jeune homme chez
moyen l'absencedemon
mary. Vous jugez bien
que cette précaution de
Lisetteplus fort au Cavalier.
Il estoit ravi de
faire connoissanceavec
cette jeune beautépour
se dédommager de sa
complaisance interessée
pour la veuve, maisil.
estoit dangereux de la
rendre jalouse. Il fut
donc charméde l'air mysterieux
stericux dont Lisettè
commençoit à lier merce; com- il 111crce ; il la ttrroouuvvooiitt
charmante, il en avoit
esté bien reçu. Elle pouvoit
à la verité luy parroistre
suspecte ducofté
de la regularité, mais
celle de Dorimene estoit
si triste, qu'un tel contraste
leréjoüissoit; il aimoit
la varieté.Enfinil
sseerreetitriaracchheezzlluuyyfoforrtt
content de sa soirée.
Dés qu'il fut parti ;
Cephise éclata derire.
N'ay-je pas bien jolie
mon rôle,luy dit Lisette
; à merveille repartit
Cephise. Tu coucheras
icy ce [air, il ne manquera
pas demain de revenir;
tu prendras mon
plus bel habit, & moy
qui luis pour luy ta fille
de chambre, je l'introduiray
dans mon appartement
où tu le recevras.
Mon mary ne reviendra
que dans deuxjours, Se
pour lors nostre projet
ièra en estat de pouvoir
luy estre communiquée.
Cephise avoit sa vengeance
en teste, &C de
plus ces fortes d'amusements
estoient du goust
d'une jeune folastre
qui sans faire , aucune reflexion
surlaconsequence
des choses, se reposoit
sur l'innocence de les intentions.
Nostre Galand ne manqua
pas de revenir le lendemain,
enveloppe dans
unmanteau,de peurque
Dorimene ne put le reconnoistre
en cas qu'elle
l'apperçeust
,
& il ne
pouvoit pas manquer
d'estre apperçu de celle
dont la plus agreable occupationestoit
d'expier
les actions de sa voisine.
L'heure de la visite,
la circonstance du mary
absent
,
&C l'air mysterieux
dont on introduisit
sans lumiere nostre
homme à bonne fortune
luyfirent croire que ce
Galand estoit pour Cephise.
Elle en eut autant
de joye que si ç'eutesté
pourelle.Que! plaisirde
pouvoir perdre de réputation
sa voisine
,
quand
il luy en prendroit fantaisse.
A l'égard de nostre
Amant, il fut surpris de
voir Lisette 11 richement
vestuë, & dans un appartement
magnifique.
Elle ajousta à cela une
fierté si adroitement ménagée,
qu'elle le rendit
des ce soir-là veritablement
amoureux,&c'est
ce qu'on vouloit pour
tirer de luy des particularitez
qui puisent prouver
la galanterie de la
veuve. Toute l'entrevûë
du lendemain fut employée
par Lisette à faire
esperer des faveurs au
Galant s'il vouloit sacrifier
Dorimene. On luy
permettoit bien ce feindre
de l'aimer
,
& ., de
donner ses soins à celle
qui pouvoit faire sa fortune
,
mais on vouloit
avoir le coeur & la confiance.
En un mot Lisette
fit tant que le Cavalier
promit dapporterle lendemain
des Lettres passionnées
de Dorimene;
c'est tout ce qu'on souhaitoit.
On ne vouloit
disoit-on, , que les lire &
les luy rendre dans le
moment.
Les choses en estoient
là lorsqu'un contre-tems
fascheux pensa tout gaster.
Le mary enarrivant
de la campagne estoit
descendu decarossechez
un amyquil'yavoit mené.
Il revenoit seul chez
luylorsqu'il vit un jeune
homme entrer sous une
porte, prendre dans le
plus beau tems du monde
un manteau que luy
apportoit un Laquais,
& oster un plumet qui
estoit
estoit à ion chapeau.
Cet air de mystere à
l'heure qu'ilestoit, donna
de la curiosité au
mary ; il fuit de loin;
il observe, & voyant
qu'on entre dans sa ruë,
qui estoit aussi celle de
Dorimene
,
il pense
d'abord à elle; ce feroit
une plaisante avanture
,
disoit-il en luymesme,
si ce Galand-cy
estoit sur le conte de nostrevoisine.
Quellesur-
2prise, quand il voit qu'il
estsurlesien. On entre
chez sa femme ; ilapperçoit,
malgrél'obscurité,
une espece de fille de
chambre qui introduit
le Cavalier &referme la
porte. Il l'ouvre doucement
avec son passe-partout;
le Galand a déja
gagné un petit degré; il
le fuit au bruit; monte
aprés luy jusqu'à une
garderobe de l'appar-
-tement de sa femme.
Il a avoüé depuis que
malgré la confiance qu'il
avoit en elle, il fut si vivement
frappé de jalousie
qu'il ne se possedoit
plus. Cephise en habit
de fille de chambre aprés
avoir fait entrer le Cavalier
dans le cabinet
où l'attendoit Lisette
, entendit marcher derriere
elle. Elle court au
bruit & repousse rudement
son mary sans feavoirquic'estoit.
Ilvoyoit
à la lueur des bougies
qui étoient dans ce cabinet
dont la porte estoit
restée entrouverte: que
voyoit-il, justeciel, celle
qu'il croyoit sa femme
par l'habit, se laissoit baiserlamain
par ce Cavalier.
Il estoit si troublé
qu'il crut encore voir
plus qu'il ne voyoit. Il
resta immobile d'estonnement
& de douleur,
car ce n'estoit pas un
mary emporté. Sa femme
qui le reconnut dans
ce moment, fit un éclat
de rirecomme une petite
fole quelle estoit ;
elle l'elnbraife en luy disant
tout bas de ne pas
faire de bruit. Il commence
à lareconnoistre,
& cela redouble son
embarras. Sa femme
l'embrasse d'uncosté,il
croit la voir de l'autre
avec celuy qui le deshonore
: enfin elle l'entraisne
dehors en achevant
de le détromper
& folaftrant tousjours
avec luy
, ne sçauriezvous,
luy dit-elle, voir
tranquillement vostre
femmeavec sonGaland?
je vous ay pris en flagrant
delit de jalousie,
jene vous pardonneray
qu'àune condition,c'est
que vousm'aiderez àme
venger des aigres remontrances
que Dorimene
me fait tous les
jours, je veux luyen faire
de mieuxfondées.
Elle luy explique son
projet où le mary charmé
de s'estre trompé,
entra de tout son coeur.
Elle luy dit que lisette
devoit tirer ce incline
soir du Cavalier
,
des
Lettres de la veuve ,
& -
qu'ellealloitvoir à quoy
en estoient les choses,
Pendant ce temps-là,
continua-t-elle
,
allez
disposesDorimene a venùtantost
souperavec
nous. Allez
, je vous envoyeray
avertir quand
nostre Avantuiersera
parti : maisgardez-vous
derientémoignerencore
a Dorimene , ce a- table queje veux me ré:
jouir,enbûvant à sesinclinations
,
& nous la
confondronsau dessert,
en presence de quelques,
amies qui depuis vostre.
départ viennent tous les,
loirs.fouper-,avec moy
pour me consoler de v«
stre absence.
Lemaryalla dans ce
moment chezDorimene
qui fut ravie de le
voir de retour. Après les
premiers compliments,
la conversation devint
agreable; raillerie fine
de part & d'autre, chacun
avoit son point de
veuë;l'unestoit fort par
tout ce qu'ilsçavoit, &
l'autresorte aussi par les
choses
;
qu'elle croyoit
sçavoir elle attaque le
mary sur la confiance
1
aveugle quil avoit en la
femme; effectivement
luy disoit-elle d'un ton
doucereux & malin,il
est des vertus si solides
qu'elles se conservent
mesme au milieu de la
coquetterielaplus enjouée
; comme il en est,
repliqua-t-il, desi fragiles
qu'ellesne peuvent le
conserverà l'abri de la
prudence laplus austere.
Aprés plusieurs traits
dont les derniersestoient
tousjours les plusvifs, il
en échapa au mary quelqu'un
si piquant, que la
veuve pour ss'eenn venger
lascha un mot sur ce
qu'elleavoit vû en son
absence.Le mary feignit
d'en estre allarmé? &C la
conjura trés-serieusementdesexpliquer.
La
prude feignant de son
costé d'estre fafchée d'en
avoir trop dit, je vous
tairois le reste, continuat-
elle
,
si je pouvoisen
conscience vous cacher
un desordre que vous
pourrez empescher. Plus
la charitable veuve taschoit
de prouver aumary
son deshonneur,plus
il feignoit d'entreren fureur
contre sa femme
y il imagina sur l'heure
ce que vous allez, voir,
&commençaain/î fOli
jeu. Ah Madame! s'écria-
t-il tout-à-coup
,
comme s'ileust esté penetré
de douleur, ne
m'abandonnez pas en
cette occasion, vous venez
de merendre un service
de véritable amie,
enm'apprenant que je
fuis le plus malheureux
hommedumonde, achevez
la bonne oeuvre que
vous avez commencé, il
s'agit de corriger ma
semis-le., de la convertir
& non pas de la perdre,
je ne veux point éclatet,
je ne me possederoispas
allez II j'allois seul luy
parler, suivez-moy Madame,
ayez la charité de
me suivre
,
& de luy
faire pour moy une correction
si terrible, que
lahonte&: le dépit qu'elle
en aura la rende sage
à l'avenir,il est sur qu'elle
vous craint plus que
moy, vous la verrez joumise
&confonduë par la
haute idée qu'elle a de
vostre caractère.
-
La veuve charmée de
se voir tant d'autorité sur
son ennemie triomphoit
par avance, & suivit
nostre faux jaloux qui
l'amena chez luy dans le
moment. Il entra le premier
, la priant de rester
dans une salle baffe, &C
courut avertir sa femme
du nouveau desseinqu'il
avoit conceu.Deuxmots
la mirent au fait, & il
revint aussi-tost vers Dorimene
, comme troublé
, comme agité d'une
rage qu'il vouloit modérer
par raison. Ah ma
2r;j
chere Dame, s'écriat-
il en l'embrassant presque
, ayez pitié de moy,
le Galand estlà haut avec
ma femme. Il reste
un rrîoment comme eltourdy
du coup, & feignant
ensuite de reprendre
courage: mais
,
luy
dit-il, le Ciel fait tout
pour le mieux ; c'est
peut-estre un bien pour
moyde pouvoir surprendre
ainsi ma femme,
pour l'humilierdavantage,
tage , pour la convaincre
, pour la confondre ;
montons par ce petit degré.
Ils montèrent ensemble
dans la garderobe
dont nous avons parlé,
& d'où la bonne Dame
apperçutd'abord ion
Amant. Elle crut le
tromper le mary la tenant
par le bras l'entrainoit
tousjours vers la
chambre où estoit la lumiere.
Elle reconnoift le
traistre un frisson la
prend; elle reste immobile.
Le hazard fit
encore pour l'accabler
davantage, que le Cavalier
voulant enfin tirer
de Lisette les faveurs
quelleluylaissoit esperer,
redoubloit à haute
voix ses ferments d'amour
pour elle, & de
mépris pour sa veuve.
Oüy
,
disoit-il d'un ton
passionné
,
oiiy
,
charmante
Cephise, je meprise
allez Dorimene
pour ne la jamais voir sielle
ne me faisoit pas ma
fortune. Cependant le
mary malin luy disoit:il
n'aime que ma femme
,
vous l'entendez: ne fuisje
pas le plus malheureux
de tous les maris. Il
l'entrainoit
'-;
tousjours
vers la chambre
,
Dorimenemalgré
sa douteux
, ne laissoit pas d'estre
un peu consolée pan
celle du mary, & par la
confufîou qu'allait avoir
son ennemie : mais cette
petite consolation s'évanoüit
dés qu'elle eut apperçu
la Couturière dans
les habits de Cephisè, &
Cephile elle-mesme entrer
avec deux ou trois
amies. Le Cavalier gagnela
porte, &laveuve
reste accablée de honte
& de douleur: à peine
a-t-elle la force defuir;le
mary ,
la femme & les,
amies la reconduisirent
chez elle avec les railleries
les plus piquantes,
luy conseillant de ne se
niellerjamais de faire
des reprimandes à plus
sage qu'elle.
On dit que la veuve
n'en fut pasquitte pour
cette avanie,&que TAvanturier
tousjours aimable,
quoyqu'infidele,
trouva le moyen de se
raccommoder. Elle eust
la foiblesse de l'épouser
dans une autre Ville, où
elle fut contrainte d'aller
habiter, parce que
les railleries & les vaudevilles
la chasserent de
celle où cette Histoire
s'est passé. On dit mesme
quece jeune ingrat
l'ayant fort maltraitée
aprés quelques mois
-
de
mariage, elle plaide encore
à present pour parvenir
à séparation.
SUPPLEMENT,
On ajouste un Supplement
à la fin de tous
les Mercures pour y placer
les Nouvelles qui
viennent aprés l'impres
flan: on mettra seulement
deux mots de ces
Nouvelles dont on fera
le détail dans le mois suivant.
te Roy d'Espagne a faitune
promotion de Maréchaux
deCamp& de Brigadiers.
-
Mare'chaux DE CAMP.
M. le Marquis de villa-.
-
tuerce.
Don Antonio Marin.
D. Antoniodel Castillo.
D. Pedro AriésdeOsores
D PatricioLaules.
M.le Vicomte d'Autresal.
M. le Comte de Rivieres..
Don Joseph de Chaves. ;
D.
D. Loüisde Cordoua.
D. FabricioRufo.
M. le Marquis de Palavicini
Mr le Baron de Huart.
Mrle Chevalier du Bas.
Don Marcos d'Araziel.
D. Francisco Ribadeo.
D Francisco Ybanes.
D. Antonio Piñatelli.
BRIGADIERS.
Don Diego Gonsales.
Mr le Comte de Gomiecourt.
D. Juan de Zercçeda.
D. Liberato Espinosa.
D. Felix d'Aragon.
D. Lope de Oses.
D. Nicolas San Séverine.
D. Joseph Vallejo.
Mr leComte de Melun.
Don Francisco de Evoli.
D. Fernando Costanzo.
D. Antonio deGusman.
D. Carlos de Arizaga.
Mr le Marquis deTorre-
Mayor.
Don Juan d'Aranda.
D. Loüis d' Apante.
D.Pedro Rubio.
Mr le Comte de Salvatierra.
Nouvelles à*EJpagne.
Lanuit du23. au24.
de Février, la Garnison de
Balaguer consistant en
deux Bataillons, abandonna
cette place après avoir
fait fauter une partie des
fortifications. M. le Marquis
deValdecañas qui cftoit
campé aux environs
& qui se disposoit à l'atta-,
quer, envoya incontinent
un détachement pour se
saisir des portes,& plusieurs
partis à la poursuite de la
Garnison. Le lendemain
ses Troupes entrerent dans
la Ville, où l'on trouva
h it pieces de Canon, deux
Mortiers,& des munitions,
&les Troupes qui avoient
poursuivi la Garnison ont
ramené deux cens Prisonniers.
1
Il y a des Lettres qui
portent qu'il y a de grandes
divisions à Barcelone;
que l'Archiduc ne s'y trouvant
point en Ceureté,.chcr..
choit les moyens de pouvoir
en sortir pour se retirer
en Italie; mais que les
Espagnols rebelles s'opposoient
à son dessein.
NOUVELLES
de Constantinople.
Les Lettres de Constantinople
du 4. Février portent
qu'on y avoit publié
l'ordre du Grand Seigneur
en forme de Manifeste
,
pour justifier la déclaration
de guerre contre les
Moscovites ; que l'Armée
qui fera commandée par
le Grand-Visir fera de plus
de deux cens mille hom
nies, sans y comprendre les
Tartares
,
donc le Kan eltoit
sorti de la Crimée, &
avoitpassè le Boristhene.
MORTS.
Nicolas Boileau sieur
Despreaux
,
l'un des quarante
de l'Académie Françoise
,
est mort sans alliance
le15. Mars 1711. âgé de
73. ans 4. mois. On en parlera
plus au long dans le
mois prochain.
MessireClaude deChotseus,
premier Maréchal de
France, Chevalier des Ordresdu
Roy, Gouverneur
delaVille & Citadelle de
Valenciennes, mourut le
15. Mars. Il estoit dans sa
soixante & dixhuitiéme
année. On en parlera au
mois prochain.
J.
RenéeBouthillierde
Chavigny,veuve de Jean
de Beuzelin
,
Chevalier
Seigneur de Bosmelet, Baron
d'Aufray
,
Seigneur de
Toste
, &c. Président à
Mortier au Parlement de
Normandie, est morte le
20. Mars17 H. âgée de 70.
ans, laissant pour fille unique
Anne-Marie de Beuzelin,
qui a épousé le
1 8.Juin
1698. Henry Jacques du
Caumont,Ducde la Force
)
Pair de France, &c.
Antoine Charles-Louis
Comte de Boufflers, Gouverneur
General de Flandres
>
Colonel d'un Regiment
d'Infanterie,filsaisné
de Louis François Duc
de Boufflers,Pair & Maréchal
de France, Chevalier
des Ordresdu Roy ôc de la
Toison d'Or, Capitaine
des Gardes du Corps de Sa
Majesté
, est mort le 22..
Mars IiII. âgé de 14. ans
3.mois.
MargueriteAngélique
deBethune,,Abbesse de S.
Pierre de R heims,est morte
âgée de 85. ans. Elle
estoitfille defeuMr le Duc
d'Orval, premier Ecuyer
de la Reine Mere
)
& il y
avoit soixante ans qu'elleestoit
Abbesse.
Donsfaitsparle Roy.
Sa Majesté a donné le
Gouvernement de Valenciennes,
vacant par la mort
de MrleMaréchal deChoiseul,
àMr le Chevalier de
Luxembourg; &celuy de
Langrcs à Mr le Chevalier
dePezeux. 'tJ.
Le Roy adonné l'Abbaye
du Port-Royal de Paris
àMe de Montperoux,
Abbesse du Paraclet d'Amiens;
& cette derniereà
Me le Vergeur de Saint
Souplet - Religieuse du
mesme Ordre.
A Peronne ce 25. Mars
1711.
MONSIEUR, :1; Vousserezbienaise defça-
'Voir le détail de la nouvelle
trahison découverte à Peronne.
Un nomméJourdain dit
la Mothe vint à Peronne en
qualitédegarde; ily demeura
quelquetemps: enfin ilyépousa
une fille. Cet homme fust
révoquéde sa Commission peu
de temps aprésson mariage off
nesçachant plus que faire, il
proposa àMrle Major de Peronne
de le fairePartisans,
(7promit de faire des captures.
lienfitfaire uneesse£li~
vement depuis peu de jours.
Vonapprit par un Courier
dqéupeislcjhaéudoeituMnpradretyRfoenrttiiedree
Doüayous le commandement
de Mrle ColonelBaptiste. Ce
Baptiste estoit arcompagne de
trois personnes des environs de
Peronne, qui luyavoientpromis
de leur faire brusler les
magasins de fourrages quisont
icy. Une heure aprèsson a reçeu
un autre Courier de Mr
de Vieuxpont qui commande
dans Cambray qui apportoit le
mesmeavis, & ajoustoit qu'il
alloit faire sortir des Parjts
de Cambraypourtascher de
tombersur ces gens-là.Dans le
temps que l'on a reçu ces a'Vi;>
ce Lamotheestoit à Peronne
*
&yavoitintroduit des estran.
gers pour examiner tejlat dela
place, & prendre lesmesures
convenables pour leurdessein.
Le lendemain
ce la Mothe
parti de Peronne à lapointe
du jour poursi rendre au
rendez-vous qui luy avoit
esté donné, &où il devoit recevoirun
Cheval que le Gouverneur
deD OÜtry luienvoyoit.
Il se rendit ducostê Darleu
où il trouva le nomméle Suisse
païsan lui luy amena le
Cheval qu on luy avoit promis,
C luy dit que Mr Baptiste
avecsaTrouppe lesuivoit
de près. Dans ce temps il a
perçu un de nos Partis qui
estoient tous Grenadiers deGrederAllemand;
croyant que c'é.
toit le PartydeBaptiste ilse
jetta dans nostre Party, &
demanda d'abord où estoitMrr
Baptisse: le Commandantluy
repondit il est derriere, il DA
arriver,entrons dans ce bois.
Quant ily fust on l'arresta
Aussî-bien que le Suijje, £T
d'abord il dit jefuis un homme
perdu. Onle conduisit a
Cambray & le lendemain a
Arras,ou le xi. de ce mois il
sufl déclaré atteint & convaincu
de haute trahison pour
avoirvoulu livrer la,Villede
Peronne aux Ennemis &y
Avoir introduit des personnes
ennemiespourexaminer l'estat
de la Place : pour reparation
dse que ilfustcondamne à estre
rompuvif, un quartd'heure
après estranglé
, &son corps
porté à Peronnepour estre coupe
en 4. pièces & exposésur
les portes de la Ville yce qui
vient d'estreexecuté. On luy
a aussidonné la question ordinaire
& extraordinaire pour
connoistre ses complices.L'intention
de ce malheureux estoit
dintroduire dans Peronnt une
trentaine de Personnes &les
faire loger dans trente Cabarets
différents
)
qui devoient
tous mettre le feu dans leurs
Cabarets lamesmenuità une
mesme heure & pendant
quonauroit esté occupe aux
feux
,
introduire du monde
dans la Ville &s'en emparer.
Il ne luy auroitpoint eslèsaelle
de livrer la Ville
, parce
que nous arvons icy unegrosse
Garnison
,
maisils auroient
brusé toute la Ville, ou du
moins nos magasins.
OEUVRES
OEUVRES
DEMrP**.
Pour Me Pelissary
,
a
qui on fit payer trois
,zfillions de taxe en
1681.
Neregrettezpoint,Uranie,
L'état ouvous avez cilé
Ce n'etf pas lai prosperité
Qui fait tousjours lebonheur
de la vie,
Et bien souvent l'adversité
Dont tost ou tard elle est
suivie, : -. N'enleve aux malheureux
qu'ellea persecucez,
Que ce qui fournissoit de
matiereà l'envie
Et met le reste en sureté.
La fortune a nos voeux a la - finexorable,
Au rang de fès mignonsà
peine nous a mis,
Qu'un traitement sifavorable
,
Du reste des mortels nous
fait des ennemis,
Chacun d'eux contrenous
s'irrite,
Et cette foule de jaloux
Ne fonge qu'à vanger sur
nous
L'affront que cette aveugle
a fait à leur merite;
Ainsi,loin de nous réjoüir
Des faveurs que sur nous il
luy plaist
de
répandre,
Nous commençons lors à
comprendre,(dre
Que la peine de les deffen-
Passeleplaisird'en joüir.
Il faut du bien dans la jeunesse
Pour fournir à tous les plaisirs,
Mais l'âge qui la suit & fait
nostre sagessè,
Fait aussi qu'on se passe aisémentderichesse
En affoiblissant nos desirs
Peu dechose fait l'opulence
Decette tranquille saison
Quand la nature & la rarson
Reglenc sepulesennostsreedéOn
ne voit jamais l'indigence
Troubler la paix de la maison.
Oubliez pour tousjours votre
tristeavanture,
Au lieu de tous ces biens
qu'on vient de vous ôter
Faites vous désormais une
richessesure,
Et vous accou stumez à ne
rien souhaiter.
Vous croiriez,dites-vous,
vostre fort supportable ,
Si vos seuls interests fatsoient
vostre douleur.
Et vous n'estes inconsolable
.: Qu'àcause que vostre malheur,
Fait perdre à vosenfansun
destin agréable
Ne permettez jamais que
cette illusion
D'un nouveau chagrin
vous accable,
Cette innocenteaffection,
N'est rien qu'un prétexte
honorable
Dont pour nous tourmearer
sesertl'ambition.
Donnez à vos enfans ce
qu'une mere fage
Peut encor leur donner
quand elle atout perdu.
En leur laissant pour heritage
L'exemple de vostre vertu
Apprenez-leur qu'un gros
partage
N'est pas ce qui fournit de
solidesplaisirs
Il est simal-aisé d'en faire
1 - un bonusage
Qu'ua si dangereuxavantage
Ne doit estre jamais l'objet
de leurs desirs,
AVIS
à une jeune personne entrant
dans le monde.
J'ay des conseils à vous
donner;
- Ce n'cil pas le moyen de
plaire,
Iris on ne divertit guere
Quand on ne fait que raisonner
:
Aussi )'a.u:rois gardé sagement
lesilence,
Où vous n'auriez de moi
que de vaines chansons,
Si
Si je n'avois connu qu'une
heureusenaissance
Avoit dans vostre coeur prévenu
mes leçons,
Souffrez donc que ces vers
aident à vous conduire
Dans cet âge charmant
dont vous allez joüir;
Assez d'autres sans moivoudront
vous réjouir;
Mais peu se chargeront du
foin de vous instruire.
Commencez aujourd'hui le
cours
D'une longue fuite d'annecs,
Esperez en croissant d'heureuses
destinées,
Et qu'une belle humeur anime
vos beaux jours,
Ilsiedmalà quinze ans d'être
triste & réveuse
Mais n'acordez à vos desirs,
Si vous avez dessein d'estre
long temps heureuse,
Que ce que la nature a d'innocens
plaisirs;
Vous n'avez pas besoin Iris
que je m'arreste
A vous montrer quelle est
cette severe Loi
Qui vous ordonne d'estre
honnestes
Le fang dont vons sortez
le fera mieux que moi,
Cet ordre souverain n'admet
point dedispenses,
Et l'honneur en est si jaloux,
Que sur les moindres aparences
Ce Juge rigoureux prononce
contre nous.
Fuyez dans vos discours l'enslure
& la bassesse ;
Qu'ainsi qu'en vos habits
rien n' y soit affeâë)
Qu'une noble simplicité
En fasse l'ornement, la grace
& la richesse,
Celles dont la temerité
-
De ces termessçavans pare
leur éloquence,
Au lieu de montrer leur
science,
Nefontvoir
que leur vanité.
Evitezla plaisanterie,
Dont les traits médisans
percent jusques au coeur,
Et pour réjoüir l'Auditeur
Ne faites point deraillerie,
Aux dépens de vostre pudeur
,
Si les paroles prononcées
Sont les images des pensées,
Voyez sans vous flater d'un
traitement trop doux.
Qu'une severe contenance,
Ne condamnejamais lamodeste
licence,
Des propos que vous entendrez,
Aux bons mots que l'on dit
joignez plûtost les vostres ;
Mais faites quand vous en
direz
, Que les gens dont vous rail-
- lerez
Puissent rire comme les autres.
Qui souffre l'assiduité,
De l'amant que fait sa beauté,
En vain auprés de lui veut
passer pour cruelle;
Un homme qui se voidd'une
femme écouté
A droit de tout esperer d'elle.
N'acoutumez point voitre
coeur
Seduit par la vertu de l'objet
- qui le tente
-
A s'atendrir par la douceur,
Même d'une amitié qui peut
estre innocente.
L'honneur dansce commerce
ctf fort mal assuré,
Ne vous y laissez pas surprendre
,
Un ami si sage & si tendre
Est bien plus dangereux qu'un
amant declaré,
Je ne deffendspas à la prude
De prendre un peu de foin de
ce qu'elle a d'atraits ;
Ce seroit une ingratitude
De négliger les dons que le
--
Ciel nous a faits;
Mais si vous prétendez qu'on
vous estime fage,
Aprenez que le trop de foin
De conserver cet avantage,
Est un infaillible témoin,
Qui montre qu'on en fait
quelque galantusage.
Il ne faut point chercher à
voir
Les interests cachez d'une intrigue
secrerte;
Quand on est curieu se, &
qu'on veut tout sçavoir,
On est seurement indiscret-
: te,
Si le secret vous est malgré
vous revelé,
Cachez le,s'il se peut,avecun
tel silence,
Même
Même à celui dont l'imprudence
Vous en a fait la confidence,
Qiril doute quelquefois s'il
vous en a parlé.
Lamode;est un tiran dont
rien ne nous délivre,
A son bizaicgoût il faut s'acommoder
;
Mais fous les folles Loix étant
forcé de vivre,
Le fage n'est jamais le premier
à les (uivrey
Ni le dernier à les garder.
POVRune Damequi
avoit demandé des
Versà lauteur.
Cesse charmante Iris,cesse
desouhaiter
Des vers qu'Apollon me refuse,
Et n'espere pas que ma Muse
Puisse à present te contenter;
Je ne fuis plus,quoi que ell
faÍfc:J
Ce que j'estois dans mes
beaux jours,
Quand à la suite dcsAmours
Je badinois avec les Grâces.
C'est alors que j'aurois chan-
Tousles charmes de ta beau- té,; Sur un ton si doux&si
tendre, ; :
Que ton coeur par tes sens
t.. fc laiss-antémouvoir
Auroit presque autant pris
de plaisir à m'entendre, "E
- Que mes yeux en ont à te
-
voir. :.
Cet heureux tempsn'estplus
excuse ma foiblesse ;
Tout ce que je puis faire en
l'estat où je suis,
C'est de combatre les ennuis
Qjc trînee avec soi la vieil- - lcflc5
Mon esprit plus timide&
mon corps plus pesant
Me font voir toute ma misere*,
Je pleurele passé, je me
plains du present,
Et l'avenir me desespere.
Non,non,puisque les cheveux
gris
Ont fait füÍr les jeux & les
ris;
Il ne faut pas que je tennuye
Quelagrément trouveroistu?
A m'entendre prêcher d'un
: ton de Jeremie, ,J
Qu'il n'est aucun plaisir sur
lafinde lavie, fl
Que celui d'avoir bien vécu.
Cependant, c'estce que je
pense,
Ce que chacun pense à son
tout,
- Ce que toi-même enfin tu
penserasunjour;
Heureuse si tu peut m'cJi
croire par avance,
Et si dés aujourd'huy faisant
quelques efforts;
Un sentiment si salutaire
T'arrache àdes plaisirs qui ne
dureront guere
Pour t'épargner de longs
remords.
SVR le recouvrement
delasantédu Roy.
Nous n'avons qu'à nous
réjouir,
La fanté de Louis cfi: enfin
rétablie;
Nous pouvons seurement
jouir
Des plaisirs innocents d'une
tranquile vie.
C<ontre nostre repos on a beau conspirer,
Observer la paix ou l'enfraindre,
Lui vivant, que pouvons
nous craindre?
Ou que nos Ennemis peu-
- vent ils esperer.
Malgré leurpolitique &
malgré leurpuissance
Nousverrons leurs desseins
sansdanger & sans peur,
Ou ipréllcnusr par sa
; prui- dence, Ou confondus par sa valeur.
En vainiçontre Louis l'Aigle
se fera suivre;
De tous les Partisans armez,
pour l'insulter,
Nous n'avons rien à rcdouter
Que le malheur de lui furvivre.
Aujourd'hui que le Ciel a
voulu nous cüir
Et délivrer nos jours d'une
telle disgrace;
C'est à tort que l'on s'embarasse
De cous ces vains projets qui
vontsévanoüir,
Quoi que toute l'Europe
fafle,
Nous n'avons qu'à nous rc*
joüir.
Sur la retraite de Mrde
Heureux qui se trouvant
trop foible & trop tenté
Du monde, enfin se déba- rasse ;
Heureux qui plein de cha-
Pourservir
Pour servir ssoonnprochain y
conferve sa place
Differens dans leur i veuë égaux
en piècej L'un cfpere tout de la grace,
L'autre apréhende tout de
sa fragilité.
Ce monde que Dieu mémo
cxclud de son partage,
N'est pas le monde qu'il a fait;
C'estiocemqurenl'heoimnmiepimpiiftc
ajoute à cet ouvrage, Qui fait que son auteur le
condamne&le haitj
Observez feulement le peu
qu'il vous ordonne,
Et sanscesse lebénissant,
Usez de son présent, mais
tel qu'il vous le donne
à
'r
Etvousn'aurez plus rien qui
ne soit innocent.
Croistu que le plaisir qu'en
toute la nature
Le premier Estre a répandu,
Soit un piege qu'il a tendu
Poursurprendre sacréature,
Nonnon, tous ces biens
que tu vois,
Te viennent d'une main &
: trop bonne &trop sage,
Et s'il en est quelqu'undont
les divines Loix
Ne te permettent pas l'u.
sage ;
Examine le bien, ce plaisir
prétendu,
Dontl'appa, tâche à te seduire,
Et tu verras ingrat qu'il ne
t'est deffendu,
Que parce qu'il te pourroit
nuire.
Sans les Loix & l'heureux
secours
Quelles te fournissentsans
cette ;
Comment avec tant de foiblesse
Pourrois-tu conserver &tes
biens & tes jours, :
Exposé chaque instant à mille
& mille injures;
Rien ne rassureroit ton coeur
1 - épouvanté,
Et ces justes decrets contre
qui tu murmures
Font taplus grande seuteté?
Voudrois tu que la Providence
Eut reglé l'Univers au gré
de tessouhaits,
Et qu'en le comblant de
bienfaits,
Dieu t'eut encor soustrait à
à sonobéissance?
Quelle étrange societé
Pormeroient entre nous l'crregr&
I'Injuitlcc.,
Si l'homme indépendant
n'avoit que soncaprice,
Pour conduire savolonté.
POUR Mademoifellc
C**
",
La Beauté mit tout en usage,
Et sa main liberaleépuisa
ses trésors
Quand elle for,ma vostre
corps, Et les traits devostrevisage,
Le Printemps lui presta ses
roses& seslys;
La jeunesse fournit & les
Jeux & les Ris,
Et les Graces croyant faire;
encor davantage,
Avant que de s'en désaisir
Voulurent avoir le plaisir
„ D'animer un si bel ouvra-
-
ge.
On diroit que l'Amour pour
regner dans vos yeux, --
Quitte le sejour d'Amathonte,
Il- Cent beautez dont Paris
estoit si glorieux
N'y paroissent plus qu'à
leur honte,
Et estvousseule enfin que
l'on suit en tous lieux,
TelleVénus sortant de
l'onde
Parut autrefois dans le monde,
Et se fit adorer des Hommes
& des Dieux.
Mais répondez moi, je vous
prie.
Cette beauté
,
l'objet de
tant de jalousie,
Qu'on ne peut voir sans
l'admirer,
Où les veux même de l'en-
4 vie
Ne trouvent rien à censurer,
Croyezvous que ce foitun
bien sidesirable,
Et ne craignez-vous point
de ne l'avoir receu,
Que pour voir un heureux
coupable
Triompher devostre vertu?
Non,les folles Amours vous
trouveront cruelle.
Un Epoux fcul tendre& fidelle
Disposera de vostre coeur
Vousaimez encor plus
l'honneur,
Que vous ne cherissez la
gloired'estre belle;
Jeune Iris ne sçavez vous
pas,
Que malgré toure sa sagesse
Il en coûta cher à Lucrecc
D'estre néeavec tant d'appas.
De pareilles faveurs sont
souvent dangereuses
Le Ciel dans , les p resents
qu'ilfait,
Ne donne pas tout à souhait,
)
Et lesgrandesbeautez sont
rarement heureuses,
Leurs charmes inconstans
passent commeles fleurs,
Et vous trouverez que l'Histoire
Qui , nous vante tant leur
mémoire
,
Finit presque toûjours en
pleurant leurs malheurs.
Vous verrez à vos pieds le
rqndrcr
ne foulle d'Amans cmpressez
& fourmis,
Qi/oft a de peine à se dessendre
-- Detant d'aimablesennemis,
Il est. des momens de foiblesse
Ou la nature peut tomber,
Oncourt risque de succomber
Quand on est obligé de combatre
sans ce(Te.
Malgré tous les plaisirs on
vous peut engager ,
Une beauté qui charme, & laCour&laVille,
J'en connois plus demille ;,
Prestes avec vous de changer;
Qui quel que soit enfin le
.- fortqui vous menace
Prendroiçnt volonticrs le
danger ,
Ec voudroient estre à vostre
place.
Sur le chagrin d'une
Dame.
D'où peut venir vostre
tristesse,
On voit encor sur vostre
teint
Le même fard dont la jeunesse
Dans vos plus beaux jours
l'avoit peint,
Avecassez d'égards la fortune
vous traite
Tout le monde vous fait la
cour
S'il est quelqu'autre bien
que vostre coeur souhaite,
On vous l'a dit cent fois,&
je vous le répete,
Il ne tiendra pas à l'Amour
Que vous ne soyez satis-
- faite.
joüissez enpaix desdouceurs,
Que vous promettent tous
vos charmes,
Et laissez la plainte & les
larmes
A ceux qui souffrent vos rigueurs.
Un jour viendra que la vieillesse
Enlevera tous nos plaisirs,
Sans laisser à nostre foiblesse,
Quela honte de nos desirs;
Quand nous aurons vieilly
sans faire aucun usage
Des biens mis sur nostre
passage :
Ce fera vainement que pour
nous soustenir,
Nous voudrons appeler la
raison ànostre aide,
Contre
Contre tous les chagrins
d'un sitriste avenir;
Iris il n'estpoint de remede
Qu'unagréablesouvenir.
Bannissez donc cet humeur
noire,
Et goustant les plaisirs présens,
Faites quelque galante Histoire,
Dont quelque jour vostre
mémoite,
Puisse réjoüir vos vieux
ans.
EPITHALAME
nouvelle
POUR Monsieur le
Comte de Chastillon,
Mademoiselle Voy-
,
fin.
Quclle merveille on voit
dans ce sejour?
On y confond Hymen avec
l'Amour.
Jadis rivaux, ces Dieux en
mainte plage
Se molestoient par four bes
& combats;
Oncqucsne fut entre Rome
& Carthage
Tant de discord ;mais enfin
leurs débats
Sont terminez à commun
avantage.
Plus d'un Epoux me dénira
le cas:
Tout Mécreant se taira s'il
en sage,
Secrets chagr ins en fait de
Mariage
A Confidens ne se révèlent
pas;
Car Confidens en font souventusage,
Ddij
Qui des Conjoints augmente
l'Altercas.
Sous plus d'un coic les Amours
font fracas;
On n'entend pas crier à chaque
étage
, Quelle merveille on voit
dans ce séjour!
On y confond Hymen avec
Amour.
Ces Dieux d'accord ont
broüllé leur bagage,
Les deux enfans de ladite
Cypris
Ne seront plus connus à
l'équipage.
Quand guerroyoient ensemble
au temps jadis,
Non moins divers en leurs
faits qu'en leurs dits,
L'un serieux & quelquefois
sauvage,
Cherchant son aise & n'ufant
que de Lis;
Bien emplumez, l'autre
escorté des Ris,
Peu façonnier
)
aimant le
ba)dinage,
A fin Duvet préferant verd
Tapis,
Qui les eut cru gens de
mêmelignage, Irtgnage ?
Mais à presentquecesnouveaux
amis
Chez Chastillon ne font plus
qu'un Ménage,
Quelle merveille on voit
dans ce séjour?
On y confond Hymen avec
Amour.
Le jeune objet que ces Rivaux
engage
As'entr'aimer, porte coups
si chéris,
Que Scythe n'est qui ne s'en
trouve épris,
Tost ne devint un tendre
Abencerrage.
Dieux:quelle Feste ! ô nô ces
,
deThetis,
Vous n'en citiezqu'une imparfaite
Image;
Discorde ici n'excitera d'orage
Si pomme d',or s'y jette comme
prix
De la Beauté :
besoin nest
de Paris ;
Amour
,
Hymen,vous en
ferez hommage
Aux yeux charmans qui
vous ont réunis,
Et cet Arrestapprouvé par
Thecis
, Censé fera statut d'Areopage.
Que de beaux jours cet
heureux jour présage!
Vostre union console maint s
Maris,
Qui routes fois n'y trouveront
je gage,
Profit aucun enchantez & - surpris,
-
Ils vont par tout redire au
voisinage,
Quelle merveille on voit en » ce séjour!
On y confond Hymen avec
Amour.
Ou'en s'acordant ces Dieux
font digne ouvrage?
Guerrier aimable autant que
genereux,
De leur Traité Chastillon
estlegage;
Pas ne pouvoient avoir pltis
noble ôtage,
Il est issu de ces Princes f-,>
meux,
Que Loire vit jadis sur [on
rivage
Regner dans, Blois leur scal
pour héritage,
Comtes puissantsdont Cadcts
valeureux,
Gueldre ôc Bretagne eurent
pour appanage Seul rejetton du f,ang do
tant de Preux;
Aux Souverains de la Seine
&duTage,
Il est lié par cent illustres
noeuds.
Biensoûtiendra par faits
chevalureux
De ces grands noms le brillantassemblage
, Et bien sçauralaisser dignes
Neveux.
Or donc Epoux ne tardez
davantage,
Plus ne vous faut de cortège
facheux,
Cupidon seul vous servira
de Page;
Allez d'Hymenvanger l'antiqueoutrage
, Rétablissezla gloire de ses
feux,.
Et rassurez qui craint son
esclavage
,
Si que Mortels préconisant
entr'eux,
Vos coeurs constans, bien
que toûjours heureux,
Cent & cent fois repetent
cc langage,
Quelle merveille on voit
dans ce sejour!
On yconfond Hymenavec
Amour.
Charles Chastillon
,
Duc
deBretagne l'an 1341. IL
fils de Guy, 1e. du nom, Comte de Blois,&de Marguerite
de Valois, soeur du
Roy Philippe de Valois.
„ Jean deChastillon Duc de
Gueldre
,
l'an
1 372.. 1 r'
fils de Louis Ie. du nom, Comte de Blois,&deJeanne
de Hainaut..
Par Gaucher de Chastillon,
Ve. dunom ,Comte
de Porccau, &Connestable
Livresnouveaux
Traductionenve,rsfrançois,i
Nouvellesd'Hollande349.
Nouvelles dIt Nord,64^
Nouvellesdefpagne
>
83,
odesir la prijè de Gironne, f 6.
Du CavmprdeiVeillarlua, le 11. Fe- j96,
Fragment d'une autre Lettre , 98.
DonsduRoyd'Espagne, 99,
ArticledesMorts:1 100.
RemarquesJ 101, 106 ?11 &
114-
Mariages, 116,
TABLE.
Remarques,11
Remarques, 1130
Inondations, 116.
Ceremonie faite par VElefteur
deCologne, 1 3 -.
fiijloire generale de la Fonderie
des Lettres & de l'Imprimerie,
parPierre Cot, 137.
fiijloriettes& autres Amufepiens
,
Ilî*
Çhanjon contre k Cassé. 135,
Hifloriettepresque toute véritable,
193*
Suplément, *49»
foèjies deMrP.
Pour une Dame qui avoit deman.
dé des Vers à l'Auteur, 1j1.
SN' le recouvrement de la fante
duRoyy 25S.
Sur la retraite de 1^. de s98.
Pour Mademoiselle de 3°3.
<& de le faire vendre & débiter par tout
nôtre Royaume,pendant le temps de trois
années consecutives à compter du jour de
la datte des Presentes
;
Faisons défenses à
toutes sortes de personnes de quelque qualité
& condition qu'elles soient d'en introduire
d'Impressions Etrangères en aucun lieu
de nôtre obéïssance
,
& à tous Imprimeurs
Libraires ,
,
& Colporteurs
,
& tous autres
de faire Imprimer, vendre, & débiter,&
contrefaire ledit Livre, ni Graver aucunes
Planches servant à l'ornement d'icelui,
ni même de le donner à lire pendant ledit
temps sous quelque pretéxte que ce soit,
sans la permission expresse
,
& par écrit
dudit Exposant
, ou de ceux qui auront
droit de lui, à peine de confiscation des
Exemplaires contrefaits ; de six mil livres
d'amende contre chacun des contrevenants, dont un tiers à l'Hôtel Dieu de Paris, un
tiers au Dénonciateur
,
& l'autre tiers audit
Exposant
, & de tous dépens dommages&
interests à la charge que ces Presentes seront
enregistrées tout au long sur le Re-
CTiftrc de laCommunauté desImprimeurs
Se Libraires de Paris, & ce dans trois mois.
du jour&datte d'icelles; que l'impressîon
dudit Livre sera faite dans nôtre Royaume,
& non ailleurs, & ce conformémentaux
Reglemens de la Librairie; & qu'avant de
l'exposeren vente, il eu fera mis deux Èxeui"
plâares dans nôtre Bibliothèque publique
undans celle de nôtre Château duLouvre,
& un dans celle de nôtre très-cher & féal
Chevalier Chancelier de France, le Sieur
PHELIPPEAUX, Comte dePontchartrain,
Commandeur de nos Ordres, le tout
à peine de nullitédesdites Presentes
,
du
contenu desquelles
,
Vous MANDONS, &
enjoignons de faire jouir & userledit sieur
Exposant
, ou ses ayant cause
pleinement
& paisiblement sans souffrir qu'il leur soit
causé aucun trouble, ou empêchement.
Voulons qu'à la copie des Presentes qui fera
Imprimée au commencement,
ou àla
fin dudit Livre, soit tenue pour bien, &
duëment signifiée
,
& qu'aux Copies collationnées
par l'un de nos amez & seaux
Coseillers & Secretaires foy soit ajoûtée
comme à l'original. Commandons au Premier
nôtre HuissierouSergent de fairepour
l'exécution des Presentes tous Actes requis,
& necessaires sans .autres permissions,nonobstant
Clameur de Haro, Chartre Normande
, & Lettres à ce contraires:
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le