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1743, 07-08
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MERCURE
DE FRANCE ,
DÉDIÉ AU ROT.
JUILLET. 1743 .
RICOLLIGIT
SPARGIT
"pillow
Chés
A PARIS ,
GUILLAUME CAVELIER
ruë S. Jacques.
La Veuve PISSOT , Quai de Conty ,
à la descente du Pont- Neuf.
JEAN DE NULLY , au Palais .
M. DCC. XLIII.
Avec Aprobation & Privilege du Roy,
THEN 7 YORK
PUBLIC LIBRARY
335240 ▲
VIS
A
ASTOR , LENOX AND
TILDEN FOUNDATIONS
150
ADRESSE génerale eft à Monfieur
,
>
à - vis la Comédie Françoife , à Paris . Ceux
qui pour leur commodité voudront remettre
leurs Paquets cachetés aux Libraires qui vendent
le Mercure , à Paris , peuvent je fervir.
de cette voye pour les faire tenir.
On prie très-inftamment , quand on adreffe
des Lettres on Paquets par la Pofte , d'avoir
foin d'en affranchir le port , comme cela s'eft
toujours pratiqué , afin d'épargner , à nous la
déplaifir de les rebuser , & à ceux qui les en
voyent , celui , non feulement de ne pas voir
paroître leurs Ouvrages , mais même de les
perdre , s'ils n'en ont pas gardé de copie.
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les Particuliers qui fouhaiteront
avoir le Mercure de France de la premiere
main, & plus promptement , n'auront qu'à
donner leurs adreſſes à M. Moreau , qui aura
foin de faire leurs Paquets fans perte de tems,
de les faire porter fur l'heure à la Pofte, qu
anx Meſſageries qu'on lui indiquera.
PAIX XXX, SOL
MERCURE
DE
FRANCE ,
DÉDIÉ AV
ROT
JUILLET. 1743.
**********.
PIECES
FUGITIVES,
en Vers & en Profe.
T
EPITRE
A
MERCURE
Oi, dons les talens & l'adreffe ;
Le mérite & l'agilité ,
Le brillant , la varieté ,
La compiaifance & la foupleffe ,
Ton mérite , tout à la fois ,
La préférence des Emplois
Ambaladeur & d'Emiffaire ,
A ij Da
1470 MERCURE DE FRANCE
De Courier , de Dépofitaire ,
D'Interpréte & de Confident
Des Dieux , des Amans & des Belles ;
Et de commun Correſpondant ,
Par qui , tour -à- tour , leurs nouvelles
Paffent , comme auffi , fort fouvent ,
Leurs démêlés & leurs querelles ;
Toi , dont les foins officieux ,
Les expédiens , les reffources ,
Te procurent cent & cent courſes ;
Qui te rendent fi précieux ;
Fils de Jupin , mon cher Mercure ,
Témoin des tourmens que j'endure ,
Apprends -moi donc quelq e fecret
Pour en informer ce que j'aime ,
Ou fais-moi ce plaifir toi- même ,
En te chargeant de mon Paquer.
Affés retenu par la crainte
De me voir refuſer ſecours ,
Las de tramer de tristes jours ,
Dans la réſerve & la contrainte ,
Je reconnois l'égarement ,
Et tout le faux pour un coeur tendre
De balancer le ſentiment
Avec la façon de le rendre
S'exprimer naturellement ;
Ne dire que ce que l'on penfe ;
JUILLET. 1743.
1473
De l'Amour ,
anciennement ,
C'étoit là toute l'éloquence ,
Tout l'art , tout le raffinement
Ces tems plus fages que le nôtre
Ne fouffrant pas que l'on foumîr
Le coeur au clinquant de l'efprit ,
Quittoient l'un en faveur de l'autre ;
Eh ! pourquoi faut- il qu'aujourd'hui
Nous penfions moins bien que nos Peres
Sous des figures menſongeres ,
Je ne donne point mon ennui'
Ni mes tranfports , ni mon martyre' ,
Ni mes peines ni mes langueurs ;
Jamais je ne laiffe au délire
Le foin de broyer ces couleurs.
Je les veux fimples , naturelles,
Et jufqu'aux moindres bagatelles ,
Je ne charge point mes Portraits ;
Je fuis ce que je veux paroître ,
Et je me fatte qu'à ces traits
On n'ofera me méconnoître.
Va donc , hâte-toi , fend les airs ;
Ta fçais qu'aux Amans véritables
Les délais font infupportables
A celle , qui forge mes fers ,
Fais lire & mon Ole & ces Vers ;
Confirme-lui ce que j'annonce ,
A iij
琛
☀ :72 MERCURE DE FRANCE
Et rapporte-m'en la réponſe ,
Le plutôt que tu le pourras ;
Sois fûr de ma reconnoiſſance ;
La meſure en eft l'importance
Du fervice que tu rendras ;
Que ne puis- je de ce meſſage
Te difpenfer & me faifir !
› Mais fi mon aveu mon langage
Peuvent jamais me reuffir ,
Je te promets & je m'engage
Chaque mois de te rendre hommage
Et te confacrer mon loifir,
Jufqu'à ce qu'au bon fens rebelle
La Rime le veüille affervir ,
Ou que le devoir me rappelle
Dans le voifinage du Mein ,
Sur les rives de la Mozelle ,
Sur le Danube ou fur le Rhin.
Mon
T ...
Le Chevalier de P......
ODE
A Mile T. A. D. M.
On état n'eft pas ordinaire ,
il eft tems de parler ;
Il en coûte trop pour fe aire
A qui ne fait diffimuler
Ma
JUILLET. 1743 1473
Ma paffion devient publique ;
Etre rêveur , mélancholique ,
Milantrope , inquiet , jaloux ,
Ne fe pas retrouver foi-même ,
N'eft- ce pas dire qu'on vous aime ,
Et que l'on n'aime plus que vous
*
Déja ce début vous étonne
Et vous ne vous attendez pas
Qu'une jeune plume crayonne
Des fentimens bien délicats ;
Trop ennemi du ton prophane ,
Je ne fçais point être l'organe
Des feux criminels d'Anteros ,
Ni dans mes Vers , comme Catule ,
Rendre un culte honteux , ridicule
A la Déelle de Paphos.
*
Du mérite feal idolâtre ,
Je ne prodigue point l'encens
A ce petit Efant folâtre ,
Qui ne regne que fur les fens ;
Mais ne croyez pas , je vous prie ,
Les noeuds formés par Uranie ,
Moins forts que ceux de Cupidon ;
Evadné même , en fa conduite ,
A j
Nour
1474 MERCURE DE FRANCE
Nous apprend que l'on les évite
-Plus ailément qu'on ne les rompt.
Après la premiere jeuneſſe ,
Libre de tout engagement ,
Qui m'auroit dit que la tendreffe
Put prendre auffi ſubitement ?
Il n'appartient qu'à vous , fans doute ,
De connoître & percer la route
Des coeurs obftinés , endurcis ;
Pour s'être cru moins acceffible ,
Le mien n'en eft que plus fenfible
Aux charmes dont il est épris.
*
L'éloignement , qui d'ordinaire ;
Rend le calme aux coeurs amoureux ,
Jufqu'ici n'a fait , au contraire ,
Qu'irriter encor plus mes feux ;
N'efperez donc pas que l'abſence.
Me rende à mon indépendance ,
Ou me livre à d'autres amours ;
Le pur eft fondé fur l'eftime ,
Et jamais celui , qui m'anime ,
N'aura de terme que mes jours.
*
Entre la crainte & l'eſpérance
Serai -je
JUILLET. 1743 . 1475
Serai- je long- tems partagé ?
Trop de réſerve & de prudence
Tiendroit beaucoup du préjugé ;
Pourquoi faut- il que la fageffe,
Par excès de délicateffe ,
Empêche un éclairciffement ?
Je l'apprehende & le defire ,
Mais l'incertitude eſt le pire ,
Et de tous les maux le plus grand,
Jeu du hazard & du caprice !
Un fimple accident me conduit ;
Famille , accueil , façons , hofpice ,
Maintien , propos , tout me féduit ;.
Les traits partent avec adreſſe ;
Je reçois celui qui me bleffe ,
Avant de l'avoir redouté ;
Et depuis , mon ame éperdue
Dans une feconde entrevûë™
Perd tout-à-fait fa liberté.
15
Avez-vous rien qui m'intereſſe >
Plus j'examine & plus je voi
De graces , d'attraits , de finefle ,
De ce certain je ne fçais quoi ;
Ce n'est pourtant pas à ces charmes
Que
1476 MERCURE DE FRANCE
Que je rends feulement les armes ;
Ce n'eft pas ce qui m'attendrit ,
Et je conviens que je préfere
L'enjoûment , le bon caractére
Et les agrémens de l'efprit.
*
Eft-il un deftin plus bizarre
Je pénetre dans l'avenir ,
Je voi les maux qu'il me prépare ,
Et ne fçaurois les prévenir ;
La froideur & l'indifference
M'annoncent affés par avance
Des tourmens encor ignorés ,
Mais non . 、、、、je n'en fuis plus le maître
Ni ne voudrois chercher à l'être
Des tran ports que vous m'inſpirez.-
*
De vos rigueurs , tendre victime >
Je demande un dernier effort ,
T ..... vous pouvez , fans crime ,
Décider tout haut de mon fort ;
Craignez vous d'être trop crédule ? >
Quel peut être le faux fcrupule
Qui me ravit jufqu'à l'eſpoir ?-
Ceffez du moins d'être muette ;
Prononcez , je vous le répere ;
C'eſt affés donner au devoir,
La
JUILLET. 1745. 1477
La Morale la plus auftére
Ne défend jamais le retour
Pour quiconque aime fans myftére ,
Et le confefle fans détour ;
La félicité pure , eft celle
Qui n'ait d'une ardeur mutuelle ;
Que ne fuit point le repentir ;
Un mot la peut rendre durable ,
Et l'attachement véritable
N'a rien dont on doive rougir.
*
Dans mes refpects toujours févére
Vous ne me verrez pas traiter
Les fermens comme une chimére ,
Que rien difpenfe de garder ;
Ainfidonc point de défiance
Sur mes égards , ma déference ,
Ni fur les douceurs de l'Hymen ;
Pour vous ce n'eft pas un Problême ;.
Et le Myrthe eft fair pour l'Emblême
De votre bonheur & du mien .
*
Je conviens auffi qu'à la lettre 3 ,
On ne peut trop déliberer ,
Loifqu'il s'agit de fe permettre
Un Lien qui doit toujɔurs durer.
Quoique cette Loi m'épouvante ,
Avis
L'affaire
1478 MERCURE DE FRANCE
L'affaire eft affés importante ,
Pour mériter réfléxion ,
Et je ne trouve pas à dire
Que l'on veuille , avant de ſouſcrire ,
Prendre confeil de la raifon.
*
Si cependant j'ofois paroître ,
Et me donner de petits foins ,
Le fort me ferviroit peut être ,
Lorfque j'y compterois le moins ;
Qui fçat i l'aveugle fortune ,
Laffe d'une plainte importune ,
N'aideroit pas à nous unir?
Mais quand j'en aurois le préfage ;
Ce n'est qu'avec votre fuffrage
Que je voudrois y parvenir.
*
Hélas ! que ne puis-je vous rendre
Ce que deux coeurs bien affortis
Trouvent de charmes à s'entendre ,
Et goûtent de plaifirs permis !
Plus d'obftacles , plus d'intervalle ;
Autre Procris , autre Céphale ,
Nouvelle Antigone , autre Hémon ;
Grands Dieux ! qu'il feroit agréable
D'ain fi réalifer la Fable
De Baucis & de Philémon
REPONSE
JUILLET. · 17437 1479
の
888
REPONSE de M. Néricault Destouches,
à la Lettre de M. le C. de C. du 28.
Mai
1743
J'Apprends avec
›
une joye inexprima
M. que mes Lettres contre les
Incrédules & les Libertins , commencent
à faire quelque impreffion fur vous , &
je ne defefpere pas de vous remettre enfin
dans la bonne voye , puifque vous me de
mandez de nouvelles Demonftrations contre
l'Incrédulité. J'avois abfolument abans
donné cette carriére , parce que des gens
exceffivement délicats , trouvent mauvais
que j'aye eû la hardieffe d'y courir , & prétendent
que cet effor me rend ridicule
mais vos inftances réiterées me forcent d'y
rentrer , & duffent les kieurs épuifer fur
moi leur piquante ironie , j'efluyerai volontiers
la honte d'en être l'ob , et , pourvú
que je puiffe acheter à ce prix , la confolation
d'avoir pû contribuer à vous faire
déferter un parti , qui vous entraînoit à
votre perte infaillible, en deshonorant
vos lumiéres , votre efprit & votre raiſon.
Je débute par un Axiôme inconteſtable.
Le voici..
480 MERCURE DE FRANCE
Il faut être aveugle , ou fou , ou enra
, pour ne pas croire en Dieu , & il
faut être exceffivement ignorant , ou exceffivement
vicieux , pour ne vouloir pas
croire en Jefus Chriſt.
Après la grace & la volonté , de Dieu
rien n'a plus contribué à l'établiffement &
au progrès de la Religion Chrétienne
que la beauté & la févérité de fa Morale.
Aujourd'hui c'eft cette Morale toute divine
, qui révolte les efprits fuperficiels &
incapables de réflexion.
Livrés à leurs paffions , ils ferment les
yeux à la lumiére
>
& ils aiment mieux
rifquer tout , que de fe contraindre
rin.
en
Pour mieux réſiſter à la Vérité , ils font
de leurs penchants vicieux un rempart contre
elle . Ils la méconnoiffent ils la rejettent
, ils la nient ; ils fe Attent d'être
parvenus à l'incrédulité . Ils croyent ne rien
croire .
,
L'exemple , les fociétés le ton de cequ'ils
appellent la bonne Compagnie , les
fortifient contre les fcrupules. La mode
de n'en avoir aucun , les féduit. La craine
d'être ridicules , les endurcit , & à la fin ,
ils fe chargent de tant de crimes
n'efperant plus de pouvoir les effacer , ils
, que
prennent
JUILLET.
1481 17433
ou que
Prennent le parti de croire qu'il n'y a point
de crime , parce qu'il n'y a point de Loi
celle qui les condamne , n'eft qu'une
fraude picufe , inventée uniquement pour
maintenir l'ordre , & pour mettre une forte
de frein à la cupidité & à la concupiſcence.
Ils ne reconnoiffent tout au plus qu'une
Loi Naturelle , qu'ils , interprêtent à leur
fa taifie & qu'ils fubordonnent à leurs
paffions dominantes .
Arrivés à ce point de dépravation , ils
regardent la Réligion Chrétienne comme
un joug infupportable , auquel il n'y a que
les fots qui puiffent fe foumettre , par- là
ils fe rendent abſolument incapables d'examiner
fi cette Réligion eft divine , conme
elle l'eft , ou fi elle ne l'eft pas , comme
ils le prétendent.
Leurs paffions ont prononcé fur cette ter
rible matiére , & leur raifon , trop affoiblie ,.
ne peur plus fe faire entendre contre leurs
paffions.
Elle a beau , quelque - fois , reprendre un
peu de vigueur , en ſe hazardant à leur repréfenter
le peril qu'ils courent. Ils la traittent
de folle & de pufillanime , qui s'eft
imbue des préjugés de l'enfance & de l'éducation
, & qui ne confeille rien que de
foible & de puérile.
A leur avis , les paffions font bien plus
judicieuses.
1482 MERCURE DE FRANCE
judicieufes. Elles ne confeillent que ce qui
fatte les fens , & ce n'eft que l'empire
des fens qui procure un folide bonheur.
Mais cette raifon , cette ame , cette penfée
, que deviendra-t'elle car enfin ils ne
peuvent fe cacher qu'ils raifonnent , & qu'il
faut mourir.
و
Ce qu'elle deviendra fe répondent ils
eux mêmes ? elle mourra comme le corps
Comme le corps ? Une fubftance qui
penfe eft- elle materielle pour fe diffoudre
? Pourquoi non ? Dieu n'a-t'il pas pû
faire une portion de matiére fi fubtile
qu'elle fût capable de concevoir , de déliberer
, de raifonner , de choifir ? Ils concluent
de fa toute Puiffance , qu'il l'a pû ,
& par le plus ridicule de tous les Sophif
mes , ils difent , s'il l'a pû , cela eft done
vrai , & par conféquent , mon ame mourra
avec mon corps. Tel eft le beau raifonne
ment des Déiftes & des Libertins.
Dieu , tout Puiffant qu'il eft , peut-il
faire une Montagne fans Vallée ? Peut- il
faire qu'une Partie foit plus grande que le
Tout? Non vraiment. Et comment vou
lez -vous donc , Mrs , que de l'étenduë il
ait extrait la penſée , à force de rafiner la
matiére ? Peut-on extraire une perfection
d'un fujet qui ne l'a pas & qui ne peut
abfolument l'avoir ? Çela eſt abfurde. Donc.
Votre
JUILLET. 1743 1483
totre ame ne peut jamais fe diffoudre . Donc
elle eft immortelle .
Si elle eft immortelle , que devient- elle
après votre mort ? Retourne t'elle à fon
Auteur , pour être jugée felon fes oeuvres ,
ou paffe t'elle en d'autres corps pour les
animer tour à tour à toute éternité ? c'eſt
l'un ou l'autre abfolument. Car enfin , ik
faut que cette ame qui ne fe diffout point ,
& qui doit abandonner ce corps , aille réfider
en quelque autre lieu.
Croyez - vous à la Metempsycofe ? Je vous
croi encore trop fenfes , pour donner dans
une opinion fi folles qu'à l'exception de
fon Inventeur & de fes Sectateurs , tous les
Siécles & tous les Philofophes ont rejettée
comme impertinente , & ont releguée dans
les Indes parmi des Peuples ftupides , grof
fiers , ignorans qui ne peuvent impofer
à des hommes inftruits & fenfés , & à des
Nations , qui ont confervé la faculté de penfer
plus fainement.
›
,
Mais enfin , fuppofons pour un feul mo
ment l'abfurde & l'impoffible. Je vous
accorde donc , fi vous l'exigez , que votre
ame fe promene de corps en corps . Mais
qu'y gagnez-vous ? felon votre fuppofition
même , elle fera toujours fujette à un Etre .
tout Puiffant qui l'a créée , qui doit s'être
réfervé le droit de la juger , & qui par
conféquent
484 MERCURE DE FRANCE
>
conféquent la punira rigoureufement , fi elle
a prévariqué. Car je vous défie de concevoir
un Dieu , fans concevoir un Etre auffi
jufte que puiffant. Attribuez -lui l'infinie
bonté vous le devez , mais il faut que
vous lui attribuyez en même - tems une jufrice
parfaite , auffi fevére qu'infaillible . Les
Difciples de Pythagore la reconnoiffoient , &
la faifoient agir en conféquence ; & par
conféquent ils craignoient des peines , &
ls efperoient des récompenfes , comme
une fuite néceffaire de leurs bonnes ou de
leurs mauvaiſes actions . Ils prêchoient la
vertu ; ils déclamorent contre le vice. Done
ils regardoient la vertu comme la fource
des biens à venir , & le vice comme fujet
aux plus terribles punitions. Donc le
Syfteme de la Métemplycofe , tout infenfe
qu'il eft , ne pourroit difpenfer les hommes
d'aimer le bien , & d'éviter le mal...
Et perfonne n'a jamais ignoré que faire le
bien , confifte à ne fuivre que les Loix de
la Juftice & de la Raifon , & que le mal
confifte à fe permettre ce qui leur eft contraire
, & ce qu'elles défendent : ainſi promenez
votre ame , tant qu'il vous plaira ;
elle eft innocente & pure , elle fera
récompenfée ; fi elle eft fouillée de crimes
& de vices elle fera feverement punie.
Quelles tristes réflexions pour les libertins
›
&
L
JUILLET.
17430 1483
& pour les voluptueux . Quoi donc ! ils
ne trouveront pas la moindre reſource
parmi les rêvéries même des Philofophes ,
qui puiffe les autorifer à être vicieux ou
méchants , & fouvent l'un & l'autre ? Ils
ne peuvent fe diffimuler que leur ame eſt
immortelle qu'elle a été créée par un
Dieu auffi jufte que bon , & qu'il fe réferve
à la punir , fi elle fe fouille de crimes .
De quel côté fe tourneront- ils pour éviter
cette punition ? Leur raiſon a beau s'étourdir
, & leurs paffions fe révolter ; la
volupté a beau les envelopper dans fes filets
, la confcience ne peut fe taire toujours
, elle s'éleve , elle s'inquiette , elle
crie de tems en tems ; & il n'y a que
le fracas du luxe , que le tumulte des
paffions , que la fureur du plaifir , qui
puiffent l'empêcher d'être écoutée , & rendre
fes cris inutiles. Helas ! ils ne le font
que trop fouvent fatiguée de lutrer en
vain , elle fe tait , elle s'endort , & les libertins
tombent enfin dans une affreufe
lethargic , qui ne fe diffippe qu'aux approches
de la mort , & qui même ſouvent
les accompagne jufqu'au tombeau .
Funefte effet de la révolte & de la va
nité ! Je dis de la vanité , car je connois
les libertins ; je les ai long - tems étudiés
& approfondis. L'orgueil , l'ambition & la
uvaiſe
1486 MERCURE DE FRANCE
mauvaiſe honte , ne font gueres moins I
caufe de leur dépravation & de leurs égaremens
, que le pernicieux attrait de la
volupté. Je pourrois entrer dans des détails
infinis , pour vous le prouver , & des
exemples fameux & frappants ne me manqueroient
pas , mais il ne s'agit pas ici de
faire une Satyre , & de m'attirer de nouveaux
ennemis ; il eft queftion de vous
prouver la vérité , fans chercher d'autreappui
qu'elle - même. L'ame de l'homme eſt
immortelle. Je viens de vous le démontrer
; & tout homme qui fait un légiti
me ufage de fa raifon , ne peut fe cacher.
cette vérité. Les pitoyables Argumens de
Lucrece ne peuvent lui porter la moindre
atteinte , & notre fiècle , tout per vers
qu'il eft , eft trop éclairé , pour donner dans
fes Sophifmes , fondés uniquement fur une
difpute de mots
& fur une fauffe définition
de l'ame. Il faut donc , comme je
vous l'ai déja dit , qu'après qu'elle eſt ſeparée
du corps , elle aille réfider ailleurs.
9
Paffe t'elle de corps en corps ? vous ne
pouvez plus d'outer que cette opinion ne
foit extravagante. Cette ame immortelle
retourne donc à fon Créateur , Créateur
infiniment jufte . Quelle terrible vérité !
S'il eft infiniment jufte , traitera - t'il l'ame
d'un fcelerat , comme celle d'un homme
་
qui
JUILLET. 1743 : 1487
qui a vecu dans l'innocence , ou qui s'eſt
repenti de fes égaremens ? cela ne peut
être. Je croirois plutôt que Dieu n'exiſte
pas ; il faut donc que l'ame du juſte ou
du penitent foit récompenfée , & que
l'ame du fcelerat ou de l'impénitent foit
punie. Les hommes plongés dans les plus
épaiffes ténebres de l'Idolatrie ont con
fervé cette idée de la Juftice divine . Point
de Dieu fans Juftice. Point de Juſtice fans
récompenfe pour les bons , & fans punition
pour les méchants.
>
Mais qu'eft- ce que le bon ? Qu'est- ce
que le méchant ?
Le bon , eft celui qui fuit les Commandemens
de Dieu .
Le méchant , eft celui qui ne les fuit
pas.
Et où font-ils ces Commandemens ? Qui
me les enfeignera ?
L'ancien & le nouveau Teftament. Les
Commandemens & les Traditions de l'Eglife.
,
Eh ! qui m'affurera. direz -vous , que
toutes ces fources , où vous voulez que
je puife les Loix que je dois fuivre , émanent
directement de Dieu ?
Qui vous l'affurera ? ce qu'il y a de plus
für fous le Soleil. Tout vous en fera garent
fi vous croyez les gens inftruits ;
1488 MERCURE DE FRANCE
›
ou fi vous prenez le foin de vous inftruire
par vous- même . Prenez , lifez , écoutez
bientôt vous ferez convaincus que Dieu
exiſte , que Dieu eft jufte , & qué fes
Loix font contenues dans les faintes Ecritures
, & dans les Traditions & les Com .
mandemens de l'Eglife . Mais je vous con
nois , orgueilleux , incrédules ; à moins que
Dieu ne faffe un miracle pour vous , jamais
vous n'aurez le courage ni la volon
té d'entreprendre ce falutaire examen . Votre
présomption , votre pareſſe vos paffions
s'y oppoferont toujours , fi Dieu n'a
pitié de vous. Un refpect humain , joint
>
tous ces obftacles , vous forcera de fermer
les yeux à la lumière , & vous ferez
affés fous pour vous expofer à être éternellement
malheureux , plutôt que de cou
rir le rifque de paroître foibles & ridicu
les aux yeux de cette bonne Compagnie ,
qui vous guide & qui vous impoſe , &
qui peut- être produira quelque jour de
faints pénitents , dont vous ne mériterez
pas de fuivre l'exemple. Que je vous plains,
& que vous me paroiffez ridicules par la
peur exceffive de le devenir !
La Religion Chrétienne eft fondée fur
des Principes & des Faits fi inconteftables ,
qu'un bon efprit , qui prend le foin de les
méditer & de les vérifier
pêcher de s'y rendre.
ne peut s'em-
L'empire
JUILLET . 1743. 1482
L'empire des paffions n'eft que trop puiffant
; je l'avoue , & je viens de le prouver
, mais l'empire de la vérité l'eft infiniment
plus. Les paffions nous entraînent
loin d'elle , & nous la font perdre de vûë ;
mais la raiſọn , notre plus cher interêt , le
bon fems , un peu de réflexion & d'attention
, nous rameneront infenfiblement vers
elle. Nous la craignons , nous la fuyons ,
nous allons quelquefois , jufqu'à fouhaiter
qu'elle n'éxifte pas ( car de quel excès , de
quelle extravagance les paffions ne fontelles
pas capables ? ) Mais fi une fois noust
commençons à l'entrevoir , nous nous fentons
comme forcés à défirer de la voir plus
clairement. Elle a de puiffants attraits qui
nous attirent , dès que nous parvenons
jufqu'à l'approcher ; plus nons l'envifageons,
plus nous la refpectons , plus elle reprend
fes droits fur nos coeurs ; & ces droits
qui nous paroiffent fi durs & fi gênants ,
deviennent pour nous un joug , auquel nous
nous accoûtumons avec foumiffion , d'abord ,
& enfuite , avec un plaifir inexprimable.
Voilà , M. ce que vous éprouverez bientôt
; je vous le prédis , pour peu que vous
perfiftiez à vouloir ouvrir les yeux à la
lumiére qui commence à vous frapper.
Comparez la vérité à l'erreur , fource de
votre révolte & de vos égaremens , vous
You
£490 MERCURE DE FRANCE
vous étonnerez que l'erreur ait pû vous
féduire , jufqu'au point de vous faire haïr ,
de vous faire craindre, de vous faire méprifer ,
de vous faire éviter la fource des vrais plaifirs,
des feuls plaifirs ,dignes d'une créature raifonnable
; difons plus , d'un honnête homme .
Car au fond , M. qu'eft ce qu'un Chrétien
? j'entends un bon Chrétien . C'eſt
vraiment l'honnête homme. Que prêche la
Morale Chrétienne d'aimer Dieu. Eft - il
rien de plus jufte ? & fon prochain comme
foi- même. Eft- il rien de plus raifonnable
, rien de plus capable de maintenir
l'ordre , la paix & la bonne foi ?
Si tous les hommes aimoien Dieu , ils
feroient tous leurs efforts pour ne le point
offenfer. Que de loüables actions réfulteroient
de ces efforts !
Si tous les hommes s'aimoient fincére
ment , quelle tranquillité , quelle douceur ,
quelle harmonie , regneroient dans le mon
de ! par conféquent quel feroit le bonheur
des hommes il égaleroit en cela
celui des Anges.
Qu'est-ce donc après tout , que la Réligion
Chrétienne exige de nous ? que nous
foyons affés juftes & affés raisonnables
pour nous rendre heureux dès ce monde .
ci. Car la Religion Chrétienne , bien pratiquée
, rameneroit , ou pour mieux dire,
feroit
JUILLET. 1743. 1491
feroit naître le Siécle d'or . Lifez les Actes
des Apôtres vous envierez le bonheur
& la joye ineffables que goûtoient leurs
Profelices , par l'amour & la charite qui
regnoient entr eux.
?
Mais & voici ce qui eft dmirable
) elle ne fe borne pas , cette Religion
Chrétienne , à vouloir nous rendre vraiment
heureux fur la Terre , en nous excitant
à pratiquer fa Morale fi fainte ,
fi conforme à nos vrais interêts ; pour
nous recompenfer de nous y être procurés
une folide félicité elle nous proinet
une félicité fans comparailon plus parfaite,
& qui ne finira jamais . Et nous n'aimerons
pas Dieu qui nous aime , jufqu'à nous
donner les moyens de nous rendre heureux
, pendant les tems , & pendant l'éternité
En vérité l'homme eft incompréhenfible.
Mais non. La caufe de fon aveuglement
& de fes erreurs n'eft que trop
facile à comprendre : c'eft le funefte effet
de l'égarement de fon premier Ancêtre.
Sans cette cauſe fi trifte & fi déplorable
d'où proviendroient nos injuftes dégoûts ?
Pourquoi des plaifirs faux & paffagers ,
nous feroient - ils abandonner nos vrais in
terêts ? Pourquoi ces plaifirs , fi peu dignes
de nous , & fi peu capables de nous
fatisfaire , nous paroîtroient- ils préférables
B
1492 MERCURE DEFRANCE
?
à des plaifirs infiniment plus réels ? Enfin ,
pourquoi ferions- nous fi infirmes & fi méchants
Notre premier Pere a pris le change
, & nous le prenons auffi . O déplorable
Adam que ta foibleffe nous coûte
de maux , & que tu nous a rendu de pitoyables
Créatures !
Mais prenez y garde , M ... cette juſte
réflexion prouve invinciblement la vérité
de la Religion Chrétienne . Où trouver ailleurs
la vraie cauſe du mal Moral & Phyfique
? Tous les Philofophes Payens l'ont
cherché vainement. Ils n'ont dit & penfé
que des abfurdités fur un fujet , fi incompréhensible
à tout homme , que Dieu n'a
pas éclairé par fa révélation.
Quelques impies , difons mieux , quelques
infenfés comme Manès & fes déteftables
Difciples , ont cru qu'ils avoient
coupé le noeud Gordien , en imaginant
deux Dieux , dont l'un infiniment bon ,
étoit le principe de tout bien , & l'autre
infiniment méchant , étoit le principe de
tout mal ; en forte que ces deux Etres
diamétralement oppofés , fe combattoient
fans ceffe , l'un pour faire notre bonheur ,
& l'autre pour nous rendre malheureux.
Mais quels Monftres que deux Etres
tout puiffants ! Quels Etres Chimériques !
Comment peut-il y avoir deux Infinis ?
Ne
JUILLET. 1743. 1493
Ne voilà- t'il pas une belle folution d'un
Problême inexplicable , fans la lumière de la
Révélation de cette Révélation divine
qui nous ouvre les yeux , & qui fatisfait
pleinement notre raiſon ?
,
Dieu forme l'homme pour le rendre heureux
pour toute l'éternité , ( deffein digne
d'un Etre infiniment bon ) fi un homme
n'abuſe pas de fa liberté , pour défobeir
à la Loi de fon Créateur : deffein digne
d'un Dicu infiniment jufte.
>
Quelle eft cette Loi qu'il lui impofe ?
Une Loi unique , dont l'obſervation n'eſt
nullement pénible . C'eft de ne jamais goûter
un fruit dont le Tout puiffant fui défend
l'ufage.
Il étoit bien jufte que Dieu donnât matiére
à fa Créature , de fignaler fon obeiffance
& fa foumiffion : c'étoit la moindre reconnoiffance
qu'elle dût à fon Créateur."
11 falloit bien qu'elle eût fans ceffe un moyen
de faire quelque effort fur elle- même ,
pour le conferver la joüiffance de fon bonheur.
teur
Mais l'homme , ingrat envers fon Créa
fe laiffe féduire par les pernicieux
confeils de fa femme , ou plutôt du Démon
qui l'avoit féduit elle - même ; & plein
d'une ambition funefte , qui le fait afpirer
à devenir égal au Tout-puiffant , il ofe
Bij enfin
1494 MERCURE DE FRANCE
enfin goûter le fruit défendu , & fe rend
indigne de tous les bienfaits , dont il avoit
été comblé par ce divin Maître , qui pour
le punir , comme il ne l'avoit que trop
mérité , le chaffe du Paradis terreftre , fejour
délicieux , & le condamne , lui & fa déplorable
pofterité , au travail , aux fouffrances
, aux maladies , à la mort . L'homme
eft maudit. Fatale malediction qui affujertit
fon ame aux mouvemens de la concupifcence
, & fon corps aux infirmités ! Malediction
terrible & trop méritée , qui condamne
cette ame & ce corps à fe féparer un
jour , & à rompre douloureufement les liens
qui devoient les unir éternellement ! La
nourriture qu'il doit déformais fe procurer
à la fueur de fon front , devient pour
lui un aliment néceffaire & funefte , qui
porte en foi le principe de la mort.
Voilà donc le Myſtére révelé . Voilà l'Enigme
du mal Moral & Phyfique , clairement
expliquée ; & fi clairement , que tou
te autre explication , n'eft qu'un amas confus
d'erreurs & de contradictions.
Et qui nous a donné cette explication ?
C'eft Dieu lui même , puifque c'eft luimême
qui a dicté à Moile le Livre Saint ,
qui nous apprend notre origine , & la terrible
caufe de nos malheurs. Livre faint
& le plus ancien qui nous foit connu &
que
JUILLET: 17430 1.495
que la Providence a faitpaffer de fiécle en fiécle
jufqu'au notre , pour confondre l'orgueil
des impies & des libertins , & pour leur faire
voir , s'ils veulent ouvrir les yeux , les fondemens
inébranlablesde laRéligion Chrétienne .
Ouvrez les votres , M. & ne differez plus.
Je vous en dis affés pour vous y exciter , &
pour vous indiquer la voye qu'ils doivent fuivre
& qui ne peut plus vous égarer . La Grace
commence à vous éclairer , à vous toucher ;
gardez -vous de lui refifter plus long-tems ;
peut-être vous feroit-elle fouftraite, en punition
de votre réſiſtance . Confültez de plus habiles
gens que moi. Ils ont de quoi détruire
tous vos doutes. Rien ne leur eft plus facile ,
fi vous fouhaitez de bonne foi que ces doutes
difparoiffent , & fe changent en une
certitude évidente . Pour moi , je me tiendrai
trop heureux , fi je puis vous avoir
conduit jufqu'à former ces voeux falutaires.
Mes foibles lumiéres ne fçauroient vous
conduire au- delà . Plût au Ciel qu'elle's
puffent égaler mon zéle ! Vous feriez bientôt
auffi perfuadé , que je le défire , de l'in
conteſtable vérité de la Réligion Chrétien
ne. Mais je me reconnois auffi incapable ,
qu'indigne de la défendre contre les impfes
& les libertins . Vous trouverez ailleurs
mille fources pures & fécondes , où
yous pourrez puifer cette vérité divine..
B iij Cherchez1496
MERCURE DE FRANCE
:
>
Cherchez les , M. elles s'offriront à vous :
frappez , on vous ouvrira demandez
priez , vous obtiendrez , vous ferez exaucé
,& vous vous appercevrez avec autantde
joye que de furpriſe , qu'un Prophane a
cû le bonheur de vous ouvrir une carriére
, feule digne d'un aufi honnête homme
que vous , & feule capable de vous
conduire à cette félicité parfaite , que vous
n'avez jamais pû trouver , que vous ne
goûterez jamais dans ce monde , qui vous
feduifoit , & qui ne fe préfente qu'à ceux
qui ont le courage de le fuir & de le mé
prifer. J'ai l'honneur d'être , M. &c.
A Fortoifean ce 26. Juin 1743 .
洗完
MELPO ME' N E.
ELEGIE.
Jufques àquand tes coups , inexorable fort ,
Doivent-ils m'accabler fans me donner la mort ?
Et ne m'eft- tu laiffée , origine immortelle ,
Que pour couvrir mes jours d'une honte éternelle ?
Get heureux tems n'eft plus , où docile à ma voix,
Le Mortel n'écoutoit , ne fuivoit que mes Loix;
Et dans un jufte point captivant fon génie ,
N'adoptoit point l'effor d'une aveugle manie.
A
JUILLET . 1497 1743.
À l'ardeur de rimer il ne m'immoloit pas.
Mes Loix & la raifon guidoient toujours fes pasi
Et jamais Melpomene , en Public exposée ,
De ce même Public ne devint la riſée .
Je triomphois alors. Chaque inftant , chaque jour ,
D'illuftres Courtifans embelliffoient ma Cour.
Mais , de ce fouvenir à jamais poffedée ,
Mon ame , ne sçauroit en fupporter l'idée ,
Et plus , j'ai vû ma gloire au faîte de l'honneur
Plus , mon état préfent augmente ma douleur .
Je ne me plaindrois point , fi la main qui m'acca
ble.,
Offroit à ma vengeace un Rival méprifable ;
Mais de tous mes Enfans , il eft le plus cheri .
Celui , qui fut toujours men plus cher favori ;
Le Goût , c'eft ce cruel qui détruit mon Empire
Et ce cher ennemi , que je n'oſe détruire ,
C'eftlui que j'idolâtre ; & c'eft lui dont la main
Enfonce avec fureur le poignard dans mon fein .
Ciel devois - je efperer une telle injuſtice . . . .
Non , de pareils forfaits , le Goût n'eſt point com
plice.
Il ne m'outrage point. Dans ces productions ,
Ou plutôt , cet amas de folles viſions ,
Dont le bon fens gémit , puis - je le reconnoître !
N'y vois-je pas plutôt cet impofteur , ce traître
Ce monftre * dont toujours par mille & mille traits ,
* Le mauvais Goût.
B iiij J'ai
1498 MERCURE DE FRANCE
J'ai tâché , mais en vain , d'étouffer le progrès ?
Mais ce n'eft pas affés d'infulter ma mifere ;
Le barbare a le front de m'appeller fa mere.
C'est moi même , dit-il , qui dirige les fons.
Si par fois , quelqu'Auteur , fidele à mes leçons;
De fon menfonge affreux dévoile l'impofture :
Il foutient , que tout change , & que de la Nature
Ces Révolutions entretiennent l'éclat ;
Qu'il n'en eft pas
du Goût , ainfi que d'un Etat :
Qu'un Etat , n'eft brillant qu'autant qu'il eft durable
,
Que l'effence du Goût , eft d'être variable
Qu'il dépend des faifons , ainfi que des climats :
Que ce qui plaît un jour , dans l'autre ne plaît
pas ;
Que Corneille viellit , que le tendre Racine
N'excite plus en nous une terreur divine :
Qu'il .... Arrête facril ge , épargne des Héros ,
Dot ta feule fureur a caufé tous les maux ;
Et fi ton impofture ufurpe les fuffrages ,
Ne ternis pas du moins leurs celeftes Ouvrages.
Refpe &te- les , Barbare , apprends que leurs Ecrits ,
A la Pofterité , dignes d'être tranfmis
Sont les feuls , qui du Goût foient les Dépofitaires .
Ils ne font pas formés fur des vapeurs légeres
Tel's , que ces avortons que ta fureur produit ,
Que l'erreur auto.ife , & la raifon détruit .
Apprends ,
JUILLET 1499 1743
Apprends , que ces Héros , que diffame ta haine
Sont les feuls Courtifans dignes de Melpomene.
Sur leur ruine , envain tu prétends t'établir ...
Non , tous tes faux brillans ne sçauroient m'ébloüir.
Simples dans leurs récits , naïfs dans leurs pein
tures ,
Il's ne s'égarent point dans de vaines figures.
Leur pinceau n'offre aux yeux que de nobles
objets .
Tant de charmes enfin vielliffent- ils jamais ?
Le tems peut il fur eux étendre ſon Empire ?
Peut-il les terraffer ? ah ! loin de les détruire ,
Le tems les fait marcher à l'immortalité ,
Et les met à l'abri de fa fatalité.
Mais s'ils font à couvert de fes traits redoutables ;
Pour tes enfans , Barbare , ils font inévitables .
Auffi prompt que l'éclair , le tems.vole pour eux.
Et comment pourroit- il tranſmettre à tes neveux
Ces frivoles efforts d'une Verve égarée ,
Où la fage raiſon n'eft jamais préféréc ,
Où le caprice feul , décide d'un Auteur´;
Où mes régles enfin cedent à ta fureur ?
Cependant il triomphe , & dans mon infortune ;
11. ne me reste plus qu'une plainte importune.
Je vois avec fureur les aveugles Mortels
Ace monftre odieux élever des Autels .
By
380240
C'en
1500 MERCURE DE FRANCE
C'en eft fait , à jamais , France je t'abandonne ;
Je cede à l'ennemi que ta fureur couronne.
Trifte & cruel retour de mes bontés pour toi !
Vainement contre lui tout te parle pour moi
Tu n'examines pont fi la main qui m'opprimee ,
M'ufurpe fans raifon un encens légitime.
La nouveauté t'entraîne : aveugle dans ton choix;
Je prétendrois envain faire entendre ma voix.
Par M. R. d'Aix.
********* ** *****
f
EXTRAIT d'une Lettre de M. W....
Prieur de Moulins en Puifaye , à M. le
C. D. L. R an fujet des Antiquités de
Corfeil , en Bretagne.
N fuivant le projet que j'ai fait , & que
ENE vous favorifez fi bien , M. de produire
les Monumens antiques , qui viennent à ma
connoiffance , pour en procurer l'explication
au Public , je vous envoye celui que vous reclamez
par la derniere lettre que vous m'avez
fait l'honneur de m'écrire le 3. Avril dernier
, & que j'ai retrouvé avec peine . C'eſt
une Epitaphe très ancienne fi je ne me
trompe , qui paroît mériter attention . Elle fe
trouve dans un Canton de la Haute Bretagne
, diftingué ar les reftes des Monumens
que
JUILLET.
ISOI 1743
que les Romains y ont érigés. L'Infcription ,
dont il s'agit , eft fur une Pierre , enclavée
dans un des Piliers duChoeur d'une Eglife Paroiffiale
, deffervie par des Chanoines Réguliers
, & qui eft un Bénéfice dépendant de
l'Abbaye de N. D. de Beaulieu , à trois lieuës
de Dinant. Le Lieu fe nomme Corfeüil. C'eft
un refte de Ville d'une affés grande étenduë, à
en juger par le grand nombre de fondemens
d'anciens Edifices , qui fe trouvent à une
diſtance confidérable de cette Eglife Paroiffiale.
Les Peuples qui habitent le Canton ,
s'appelloient anciennement Curiofolyta , terme
allés analogique à celui de Corfeuil.
La Pierre a environ trois pieds de hauteur,
fur un pied & demi de largeur , & femble
avoir été enchaffée dans un des Piliers des plus
proches de l'Autel , du côté de l'Epître , afin
qu'elle fût plutôt remarquée . Voici l'Infcription
copiée exactement fur l'original & dans
le même arrangement des Lignes & des
Lettres.
D. M. S.
SILICIA NAMGID
DE Do
Mo AERKA
EXIMIA PIETATE
FILIUM SECUTA
B vj Hic HIC
1502 MERCURE DE FRANCE
HIC SITA EST .
VIXIT AN. IXV.
CILIANUS VARus
,,, POSUIT.
La Dame, nommée fur le Monument, vivoit
vraisemblablement fous le Regne d'un
des premiers Céfars ; je penferois même fous
Jules. Cet Empereur a certainement fejourné
en Bretagne , & l'Hiftoire du Pays nous apprend
qu'il fit mourir les Sénateurs de l'ancienne
Vannes ; je ne fçais fur quel fondement
on affure que leurs corps furent enterrés
dans un Lieu Maritime , voifin de cette
derniere Ville , & dont j'ai vû le Plan , qui
fe nomme Lomariaker. Ce qui peut donner
lieu à cette Tradition , eft que l'on voit dans
cet Endroit un grand nombre de Pierres Sépulchrales
, qui paroiffent taillées exprès ,
d'une grandeur & d'une beauté remarquables
, & places à une certaine distance les
unes des autres.
J'ai vu à Corfeüil un refte de Thermes ,
ou Bains antiques , confiftant en une Loge
ou petite Chambre quarrée & découverte
enfoncée en terre de la hauteur de quatre
pieds ou environ , & au niveau du Terrein ,
qui peut avoir feize pieds de diametre. Les
murailles en font revêtues de petites Pierres
de deux couleurs differentes , larges & quar
réesJUILLET.
1743 .
ISO
rées . On y voit auffi un refte de l'Aqueduc
par lequel fe déchargeoient les Eaux des
Bains dans la Mer , qui baignoit autrefois le
Bas-Corfenil , Lieu que l'on nomme encore
aujourd'hui la Baye de Corfenil , quoique la
Mer en foit à préfent éloignée de deux lieuës.
Il eſt donc naturel de penſer , à la vûë de
ces antiquités , que le féjour que fit Jules-
Céfar dans la Contrée de Corfeuil , lorfqu'il
parcourut la plus grande partie des Gaules ,
donna lieu aux Monumens que je viens de
citer , & à d'autres qui fe trouvent répandus
dans le même Canton . Telles font les ruines
d'un Temple , élevé jadis de l'autre côté de
la Baye de Corfeuil , & féparé de cette Ville
par le Bras de Mer qui formoit la Baye . Ce
Temple eft rond dans fon contour extérieur ,
mais pentagone ou hexagone en dedans ( car
j'écris fur l'idée qui m'en refte , ayant manqué
d'en prendre les dimenfions fur le Lieu .)
Il regnoit tout au tour , à la hauteur d'environ
vingt pieds , une Corniche foutenue
par des Pilaftres .
Une autre preuve de la grandeur de
Fancienne Corfeuil , eft la quantité prodigeufe
de vieilles Biques employées aux
anciens Edifices , qui ont fervi depuis à conf
truire les nouveaux Remparts de S. Malo.
Et une preuve particuliere de l'ancienneté
de ce Licu , ce font les Médailles que l'on y
504 MERCURE DE FRANCE
a trouvées & que l'on y trouve journellement
de prefque tous les Empereurs du Haut
Empire , jufqu'à Poſthume , dont j'ai acquis
quelques - unes des meilleures.
La plus grande partie des Médailles trouvées
à Corfeuil , eft entre les mains d'un Préfident
à Mortier du Parlement de Bretagne ,
( M. de Robiens , fils , ) fort verſé dans l'Antiquité,
très -curieux & très riche en toutes fortes
de Monumens. Il eft poffeffeur entre autres
d'une petite Idole de Bronze , qui a l'index
de la droite pofé fur la bouche ; elle fut trouvée
à Corfeuil dans des terres , exprès, terres, remuées
pour y déterrer des Antiques .
Il est étonnant , M. que le P. Lobineau
dans fon Hiftoire de Bretagne , n'ait rien dit
de Corfeuil & de fes Antiquités. Il fait cependant
mention de trois Piliers , qui fe voyent
dans la Paroiffe de S. Meloir des Ondes , diftante
de Corfeüil d'une lieuë au plus , & il dit
que ces Monumens font un Mémorial d'un¸ ·
Sacrifice offert en ce Lieu par Victorin & par
fon armée.
Je reviens à l'Infcription , ou à l'Epitaphe ,
qui fait le principal fujet de ma Lettre , & je
perfe que ce qui doit réveiller la curiofité, &
exercer la fcience de Mrs les Antiquaires ,
c'est de fçavoir quelle eft cette SILICIA NAMGID,
de qui elle étoit temme, quel eft le fils
qui avoit précedé dans le Tombeau , de
quelle
JUILLET. 1743 1505
quelle Maifon elle étoit , &c. J'ai confulté
les Familles Confulaires de Fulvius Urfinus ,
& je n'ai point trouvé de Famille du nom
Aerka. Cilianus Varus cft encore un Perſonnage
bien inconnu pour moi , à moins qu'il
ne fût l'Epoux de Silicia ; ainfi je laiffe à des
yeux plus clairvoyans que les miens le foin
de percer ces antiques obfcurités , très - difpofé
à m'en rapporter au fentiment des Sçavans,
qui voudront bien expliquer l'Enigme
J'ai l'honneur d'être , &c.
Ce 3. Juillet. 1743 .
EPITRE
A Mile Des .... D. L, M. D. L. R.
Hemire , dont le goût fe reffent des douceurs.
De la Morale & de l'Erude ;
Qui plus que tout le refte , aimez la folitude ,
Mais qui n'en cueillez que les fleurs ;
Que faites - vous à la Campagne ?
Défolée à préfent du départ de Zéphir
Et de fon aimable Compagne ,
Quel charme a- t'elle à vous offrir
Contre les dégoûts qu'accompague
Себ
for MERCURE DE FRANCE
Cet Effein de fâcheux , prompts à s'y réünir ,
Ce cercle d'Importans , ennuyeux à mourir ,
Et fots jufqu'au vin de Champagne è
Comment pouvez-vous y tenir ,
Vous , de qui Moliere & Montagne
Occuperoient mieux le loiſir ?
Cependant bien loin de les fuir ,
Loin d'y perdre à les voir , votre enjoûment y
gagne ;.
I convertit tout en plaifir ;
Leurs erreurs font pour vous des Châteaux en Efpagne
;
C'est là votre fecret , en vain vous leur plaifez ;
Vous jouiffez des fots & vous les méprifez,
Faite pour vivre avec ce Monde
Qu'il faut voir par néceffité ,
Vous réfift z par la gayeté
Aux vins ennuis dont il abonde ;
Votre heureux naturel de tout tire du fruit ,
Du taux comme du vrai s'eft fait une habitude
De s'amufer partout , & de mettre à profit
Jufqu'à la folle inquiétude
D'une imbécille multitude
Qui vous entoure & qui vous fuit.
Oü . C'eſt le véritable efprit ,
Bien digne du nom de fageffe ,
Qui fe bornant au fentiment ,.
Bien
JUILLET. 1743 .
150%
Bien loin de la fombre trifteffe ,
Devient le plus bel ornement
D'une vive & tendre Jeunefle
Dont il annoblit l'enjoûment ,
Paros moins vertu qu'agrément ,
Raifon , moins que délicateffe ,
Et moins devoir qu'amuſement ;
Plaire au monde en le méprifant ,
Sans caprice , ni fans rudeffe ,
C'est tout , c'eſt cet accord charmant
De bon fens & de politeffe ,
Qui plus que beauté , voix , talent ,
Fait qu'à tous géneralement
Vous plaifez naturellement ,
Même aux fats de la fine efpece ,
Nommés Beau monde plaiſamment
Peuple fou qui vous fuit fans ceffe ,
Et toujours inutilement ;
Mais que , grace à votre fineffe ,
Qu'il foit fot , ou qu'il foit méchant ,
Vous renvoyez toujours content
De fa burlesque gentilleſſe
Ou de fon vain emportement.
Charmant ufage de la vie
Au-deffus des dépits de la Philoſophie !
Fi de ce Milantrope aigri ,
D'envie
508 MERCURE DE FRANCE
D'envie & de haine paitri ,
Qui toujours fur la controverfe ,
Et toujours feul de fon parti ,
Contre la Nature perverle
N'a qu'un argument & qu'un cri ,
Et dont la tête fe renverse ,
Pour le déclarer l'ennemi
D'un Monde , moins pervers que lui ,
Et fe rendre partie adverfe
De fon Juge & de fon appui.
Eh ! quoi , des fotifes d'autrui.
Faut -il tomber à la renverſe ?
Votre coeur n'eft point fait ainfi ;
Du Monde l'utile commerce
Le tient .fans qu'il foit affervi ,
Et fur cette Scéne diverfe
De faux , de caprice & d'ennui ,
Par l'épreuve plus affermi ,
Aucun trouble ne bouleverſe
Votre efprit libre , fimple , uni .
Enfin , s'il eft quelque traverfe
Dont il ne puiffe être à l'abri ,
En rire eft fon meilleur parti.
Contre ce Monde qui l'exerce ,
Qu'y faire ? C'eſt un étourdi
Qu'il faut que l'on flatte & qu'on berce ,
Pour avoir la paix avec lui .
L. M. D. S. S.
JUILLET. 1743. 1509
•
LETTRE de M. B. ** au fujet de celle
qui eft imprimée dans le Mercure de Mai
de cette année.
'Ai lû , Monfieur , dans votre Mercure
du mois de Mai dernier , une Lettre qui
vous a été adreffée au ſujet du Livre intitulé,
la Chronologie & la Topographie du nouveau
Bréviaire de Paris. Quoique je fois l'Auteur
de cet Ouvrage , & dès - là intereffé à en
prendre la défenſe , je ne prétends pas néan
moins le venger au préjudice de la raison. Je
ne me prévaudrai donc point des éloges dont
plufieurs perfonnes,affés connues dans la Ré
publique des Lettres , & qu'il me feroit facile
de nommer , ont bien voulu honorer à
mon infçû ce petit travail , & j'avouërai franchement
que je ne l'ai jamais cru moi - même
tout- à-fait exempt de fautes. Outre qu'il eft
peu d'Ouvrages , en quelque genre que ce
foit , où il ne refte rien à reprendre , il étoit
prefque impoffible que dans une Collection
telle que la mienne , remplie d'une fi grande
diverfité de faits , il n'échappât à l'égard de
quelques - uns certaines mépriſes. Tel eft principalement
le fort de ceux qui , comme moi ,
s'appliquent à des matiéres de Chronologie
& de Géographie. La varieté des fentimens
touchant
1510 MERCURE DE FRANCE
›
touchant ce qui a rapport à la connoiffance
des tems ; d'un autre côté l'éloignement des
Lieux,qui empêche que l'on en puiffe parler,
du moins de la plûpart , comme témoin oculaire
; voilà , ce me femble , les deux caufes
les plus ordinaires des erreurs fur les points
hiftoriques . Ce font ces raifons qui me mettent
aujourd'hui dans l'a néceffité de recourir
à l'indulgence ou plutôt à l'équité des Lecteurs.
Au refte, M. comme je n'ai eû en vûë
que leur feule utilité , loin de me fâcher
qu'on me faffe conr oître en quoi je pourrois
m'être trompé , je ferai fincérement obligé
aux perfonnes qui daigneront me faire part
là deffus de leurs lumières , & je tâcherai de
mettre à profit tous les avis qui me parɔî,
tront folidement appuyés :
Pour venir , M. à la lettre dont j'ai l'honneur
de vous parler , celui qui en eft l'Auteur,
trouvera bon , qu'après l'avoir remercié
des réflexions judicieufes qu'il m'a donné
occafion de faire touchant mon Livre , &
dont je n'ai pas manqué de faire ufage , j'entreprenne
de donner ici quelques éclairciffemens
fur les difficultés qu'il objecte. Voici
donc en peu de mots ce que je réponds fur
chacun des articles conteftés .
On prétend d'abord que je me fuis abuſe
fur deux Villages des environs de Paris , par
rapport à leur diſtance de cette Capitale
fçavoir
JUILLET. 17437 Isir
›
fçavoir , Clichy & Croiffy. A l'égard de ce
lui-ci , je confens de le mettre à trois petites
lieues de Paris , au lieu de deux que j'avois
marqué ( page 220. ) & cela d'autant mieux
que Croilly paroît être véritablement à une
lieuë en- deça de S. Germain en Laye , que
j'ai placé , felon la commune eftimation , à
quatre lieuës de Paris.
Pour ce qui eft de Clichy , j'ai peine à me
rendre au fentiment de ceux qui comptent
deux lieuës de Paris à ce Village. En effet ,
le Dictionnaire de la Martiniere, le plus moderne
de tous , & qui paffe pour l'un des plus
exacts , ne compte qu'une lieuë. D'ailleurs
Clichy eft certainement renfermé dans la
Banlieuë de Paris ; or qui ne fçait qu'une Ban
lieuë n'excede point ordinairement la longueur
d'une lieuë aux environs de la Ville ?
Remarquez de plus que Clichy n'eft
pas même
à l'extrêmité de la Banlieuë ; pour cela il
faudroit qu'il ne fût pas à environ un demi
quart de lieuë en deça de la Seine , qui fert
de borne à la Banlieuë de ce côté- là C'eſt
fur ces fondemens , qui m'ont parû aſſurés
que j'ai placé ( page 214. ) le Village dont il
s'agit , à une lieuë feulement de Paris; encore
je la crois bien petite.
On m'impute en fecond lieu , de trouver
trop facilement des Pourgs & même des Villes
où il n'y en a jamais eu le moidre veftige.
Les
512 MERCURE DE FRANCE
Les Lieux qu'on cite en particulier font Montmeillan
, Châlis , Clervaux , Prémontré . Parcourons
- les , & entrons dans le détail.
On veut que Montmeillan , auquel je
donne le nom de Bourg ( page 275. ) ne foit
qu'un fimple Village . Je le veux auffi , mais
à condition que le Montmeillan dont je parle,
fera ce Lieu que l'Auteur de la Lettre dit avoir
vû de fort près , & n'y avoir apperçû que
cinq ou fix maiſons , & qu'il reconnoît pour
une Paroiffe du Diocèfe de Paris. N'auroitil
point confondu lui -même ce petit Lieu
avec Montmeillan , qu'il dit avec raifon être
dans le Diocèse de Senlis , & auquel il ne
paroît pas refufer la qualité de Bourg ? Pour
moi , je ne vois qu'un Montmeillan , qui eft
effectivement dans le Diocèfe de Senlis ,
quoique je l'aye mis par mégarde dans le
Territoire de Paris . A l'égard de ce petit Village
, que notre Obfervateur appelle auffi
Montmeillan , c'eft , felon toutes les apparences
, S. Vit-fous - Montmeillan , Paroille du
Diocèfe de Paris , contigu de ce côté - là à
celui de Senlis.
Voici donc , tout bien cofideré , comment
je réforme l'endroit en queſtion . Sans reconnoître
qu'un Montmeillan , & fans même lui
ôter le nom de Bourg , je le déplace du Territoire
de Paris , & je le remets au Diocèſe
de Senlis. Après cela je détache le fait qui
fuit
JUILLET. 1743 .
1513
fuit la Defcription de Montmeillan, touchant
le Corps du Martyr S. Vit , & je transfere
ce même fait fous un nouvel article qui fera
S. Vit-fous-Montmeillan , dont j'ai parlé cideffus
. Par ce moyen , les chofes fe trouveront
rétablies dans leur ordre naturel. Paffons aux
autres articles .
Quand j'ai avancé ( page 209. ) que l'Ab .
baye de Châlis eft fituée dans un Bourg du
même nom , je ne l'ai nullement controuvé.
On peut voir le P. Baunier , Bénedictin
dans fon Recueil des Abbayes de France
imprimé à Paris en 1726. c'eft à la page 610.
Tome 2. c'eſt de lui que j'ai tiré ce qu'on me
reproche. Au refte , le principe qu'on allegue
contre ce Fait , me paroît trop general , & il
me femble qu'il n'eft point fans quelque exception,
C'eft , dit- on , que les Abbayes des
Bernardins ne font jamais fituées dans des
Bourgs . Si cela eft , la Martiniere fe trompe
dans fon Dictionnaire , lorfque parlant de
plufieurs Abbayes du même Ordre , il les
met dans des Bourgs . Voyez -y entre autres
Igny, en Champagne, la Ferté- fur- Grofne , en
Bourgogne , Gimont en Gafcogne. Si jamais
Abbaye de Bernardins n'eft fituée dans un
Bourg , ou près d'un Bourg ( car c'eſt la même
chofe dans le deffein de mon Livre )
comment n'a - t'on point formé de difpute
touchant Citeaux , Chef de tout l'Ordre des
Bernardins,
512 MERCURE DE FRANCE
Les Lieux qu'on cite en particulier font Montmeillan
, Châlis , Clervaux , Prémontré. Parcourons
- les , & entrons dans le détail.
On veut que Montmeillan , auquel je
donne le nom de Bourg ( page 275. ) ne foit
qu'un fimple Village. Je le veux auffi , mais
à condition que le Montmeillan dont je parle,
fera ce Lieu que l'Auteur de la Lettre dit avoir
vû de fort près , & n'y avoir apperçû que
cinq ou fix maiſons , & qu'il reconnoît pour
une Paroifle du Diocèfe de Paris . N'auroitil
point confondu lui -même ce petit Lieu
avec Montmeillan , qu'il dit avec raiſon être
dans le Diocèse de Senlis , & auquel il ne
paroît pas refufer la qualité de Bourg ? Pour
moi , je ne vois qu'un Montmeillan , qui eft
effectivement dans le Diocèfe de Senlis
quoique je l'aye mis par mégarde dans le
Territoire de Paris. A l'égard de ce petit Village
, que notre Obfervateur appelle auffi
Montmeillan , c'eſt , felon toutes les apparences
, S. Vit-fous - Montmeillan , Paroille du
Diocèfe de Paris , contigu de ce côté- là à
celui de Senlis .
Voici donc , tout bien cofideré , comment
je réforme l'endroit en queftion . Sans reconnoître
qu'un Montmeillan , & fans même lui
ôter le nom de Bourg , je le déplace du Territoire
de Paris , & je le remets au Diocèse
de Senlis . Après cela je détache le fait qui
fuic
JUILLET. 1743 . 1513
fuit la Defcription de Montmeillan, touchant
le Corps du Martyr S. Vit , & je transfere
ce même fait fous un nouvel article qui fera
S. Vit-fous-Montmeillan , dont j'ai parlé cideffus.
Par ce moyen , les chofes fe trouveront
rétablies dans leur ordre naturel. Paffons aux
autres articles .
¿
Quand j'ai avancé ( page 209.) que l'Abbaye
de Châlis eft fituée dans un Bourg du
même nom , je ne l'ai nullement controuvé.
On peut voir le P. Baunier , Benedictin
dans fon Recueil des Abbayes de France ,
imprimé à Paris en 1726. c'eft à la page 610.
Tome 2. c'eft de lui que j'ai tiré ce qu'on me
reproche. Au refte , le principe qu'on allegue
contre ce Fait , me paroît trop géneral , & il
me femble qu'il n'eft point fans quelque exception
. C'eft , dit - on , que les Abbayes des
Bernardins ne font jamais fituées dans des
Bourgs. Si cela eft , la Martiniere fe trompe
dans fon Dictionnaire , lorfque parlant de
plufieurs Abbayes du même Ordre , il les
met dans des Bourgs . Voyez -y entre autres
Igny,en Champagne, la Ferté -fur - Grofne, en
Bourgogne , Gimont en Gafcogne . Si jamais
Abbaye de Bernardins n'eft fituée dans un
Bourg , ou près d'un Bourg ( car c'eft la même
chofe dans le deffein de mon Livre )
comment n'a - t'on point formé de difpute
touchant Citeaux , Chef de tout l'Ordre des
Bernardins,
1514 MERCURE DE FRANCE
Bernardins , quoique je l'aye auffi qualifiée
Bourg & Abbaye, ( page 213 ? ) j'ai toujours
cru , & je le crois encore , que pour être en
droit de s'exprimer de la forte , il fuffit qu'il
y ait un Bourg & une Abbaye , voifins l'un
de l'autre , & portant le même nom , foit
que l'Abbaye ait donné fon nom au Bourg
qui en aft proche , foit qu'elle l'ait reçû ellemême
de ce Bourg. Je ne pense pas que ce
ſentiment doive paroître fingulier à perlonne.
Nonobftant ces raifons , je veux bien , pour
plus grande fûreté , retrancher le mot de
Bourg dans l'article particulier de Châlis.
J'en uferai volontiers de la même maniére
à l'égard de Prémontré. Ce ne fera neanmoins
qu'après avoir cité l'autorité de Baudrand
, fur laquelle je me fuis repofé. Voici
fes propres paroles fidellement traduites du
Latin : » Prémontré , dit- il , eft un Bourg de
» France ( Burgus Gallia ) dans la Province
» de Picardie, avec un Monaftére qui a don-
» né fon nom à l'Ordre de Prémontré , & où
» le Géneral de cet Ordre fait fa demeure.
Quant à Clervaux je ne puis y foufcrire avec
la même facilité. Cette Abbaye , troifiéme
fille de Câteaux , eft certainement accompagnée
d'une petite Ville , ou , fi l'on veut ,
d'un Bourg qui porte le même.nom , témoins
les Dictionnaires de Trévoux & de la Martiniere
, qui en parlent ainfi. Ces deux Lieux
ne
JUILLET. 1743 .
ne font féparés l'un de l'autre que par une
distance des plus petites . La Ville , comme je
l'appelle , n'a été formée qu'à la faveur du
célebre Monaftére & c'eft de lui qu'elle a emprunté
fon nom. On a donc pû , pour les
raifons déja alleguées , défigner Clairvaux ,
comme Ville & Abbaye . Je ne nie pas pour
cela que l'Abbaye de Clairvaux , confiderée:
dans fa propre enceinte, foit dans un lieu
plus folitaire. Venons à d'autres Chefs .
Je ne me dédis point non plus au fujet de
l'Eglife de S. Crêpin à Soiffons , & je foutiens
ce que j'en ai dit dans mon Livre. Je fçais
bien qu'il y a en cette Ville deux Eglifes du
nom de ce faint Martyr , l'une appellée faint
Crêpin le Grand , qui eft une Abbaye de Bénedictins
; l'autre nominée S. Crêpin en - Cage
, qui appartient aux Chanoines Réguliers.
Mais celle du fixiéme fiècle , dont je parle
page 388. & que je remarque ne plus fubfifter
aujourd'hui, eft une Eglife toute differente
des deux autres , defquelles je ne fais aucune
mention , non pas que je nie leur existence
actuelle , mais parce que le Bréviaire de Paris
n'en dit mot , non plus que les autres , fur
lefquels j'ai étendu mon travail. Quoique
certe Eglife du fixième fiécle ait porté le même
nom de S. Crêpin , elle ne repréſente
néanmoins ni l'Eglife des Bénédictins , ni
celle des Chanoines Réguliers , qu'on voi
5
1516- MERCURE DE FRANCE
à préfent. Bien loin de cela , on ne marque
nulle part en quel endroit de la Ville étoit
fituée notre ancienne Eglife. Et pour être
convaincu qu'elle n'étoit point la même
que les deux d'aujourd'hui , il n'y a qu'à
lire M Baillet dans la Vie de Saint Crêpin ,
au 25. Octobre , Num. 2. on voyoit à
» Soiffons , dit ce fçavant. Ecrivain , dans le
» fixième fiècle une Eglife bâtie en l'honneur
» de S. Crêpin & de S. Crêpinien ; & le Roi
Chilperic y fit enterrer fon fils aîné Chro-
" dobert. On parle , continuë- t'il , d'une au-
» tre Eglife ( remarquez ce mor ) bâtie fur
» leur Tombeau , & l'on croit que c'est ce
» qui a fervi de fondement a la conftruction
» de l'Abbaye de Bénédictins qu'on y a bâtie
depuis , & qui fe nomme S. Crêpin le
» Grand, pour être diftinguée d'une autre
» qui eft aux Chanoines Réguliers , & qui ſe
» nomme S. Crêpin- en - Cage. Tout ceci me
paroit clair & fans réplique .
ور
C'est donc inutilement qu'on m'oppoſe
Fexemple de l'Eglife Cathédrale de fainte
Croix d'Orleans , & celui de l'Eglife de faint
Paul de Paris , qui fembleroient me mettre
en contradiction avec moi - même , vû que ,
felon la remarque véritable de l'Obfervateur ,
je reconnois ces deux dernieres Eglifes pour
être les mêmes que celles d'autrefois , quoique
rebâties, en divers tems. Je dis , felon fa
remarque,
JUILLET. 1743. 1517
remarque car c'eft ce qu'il infinuë clairement
par les paroles dont il fe fert, Mais , ne
lui en déplaife , on ne peut rien conclure de
fon argument
, & la difparité eft vifible . L'Eglife
de fainte Croix & celle de S. Paul . ces
deux anciennes Eglifes , font cenfées ſubſiſter
par celles qu'on voit aujourd'hui fous le même
titre , & celles ci les r préfentent , quoique
les Bâtimens , qu'on voit aujourd'hui, ne
foient plus les mêmes , je le veux ; la premiere
ayant été édifiée par S. Euverte au quatrième
fiécle , & la feconde par S. Eloy au feptiéme
fiécle ; & s'étant écoulé depuis ces tems -là.
plus d'un millier d'années , ces deux Eglifes ,
dis-je , font cenfees encore fubfifter , parce
que , outre qu'elles portent le même nom
qu'autrefois , elles n'ont jamais changé de
place Il n'en eft pas de même de l'ancienne
Eglife de S. Crêpin à Soiffons ; il n'en paroît
plus aucun veftige certain , ainfi que je crois
l'avoir fuffisamment prouvé. Elle ne fubfilte
donc plus , & ne peut même en repréſenter
aucune aurre.
Il ne reste plus qu'à avouer ingénument
deux fautes que j'avois déja moi - même bienapperçûës
, & qui ne fe font gliffées dans .
l'Ouvrage que par un défaut d'attention
que l'Auteur de la Lettre veut bien lui même
regarder comme leger. La premiere eft
le Chef de S. Denis l'Areopagite , mis en
Cij deux
518 MERCURE DE FRANCE
deux Endroits , à Longpont ( page 256. ) &
à Pontigny ( page 293. ) Il faut effacer de ce
dernier Lieu l'article en queftion . La feconde
faute , qui paroît n'être que d'impreffion ,
confifte dans un feul chiffre qui a été mal
pofé. C'est à la page 408. dans l'article de
S. Jean de Falaiſe , tout à la fin. Au lieu de
l'an 1030. il faut lire l'an 1130. il n'y aura
plus alors de contradiction ni d'anachronisme.
Outre l'aveu de ces efpeces d'inadvertances
, l'amour propre ne m'empêchera point
d'avertir ici que l'Eglife de S. Marc à Veniſe
page 266. ) n'a point dû être qualifiée de
Patriarchale , mais feulement de Collégiale .
En effet l'Eglife Patriarchale de Venife porte
le nom de S. Pierre , au lieu que celle de
S. Marc n'eft que comme la Chapelle du Do.
ge , ornée cependant d'un Chapitre de Chanoines,
qui eft confidérable. Il eft bon de remarquer
auffi , en paffant, que le même article
de S. Marc eft un peu hors de fon rang , ей
égard à l'ordre alphébetique.
De tout ce qui vient d'être dit , il réfulte
qu'entre les Obfervations de M. A. D. P. il
y en a plufieurs auxquelles j'ai foufcrit avec
plaifir , & d'autres auxquelles je ne me fuis
point cru obligé de foufcrire. Comme j'aurois
tort de l'accufer d'aigreur ou de partialité à
mon égard , je me perfuade aifément qu'il ne
me fçaura point mauvais gré,fije ne défere pas
fans
JUILLET. 1743 : 1519
fans réserve à fes avis. Je n'ai fait que propofer
mes raifons , fans aucune intention d'oftenfer
per onne , & je déclare d'avance que
comme enfant de paix & ennemi de toute
difpute , je n'oppoferai que le tilence à toutes
les Critiques ( j'entends mal fondées , ) que
l'on pourroit faire déformais au fujet de mon
Ouvrage.
C'eft fur le pied de mes précédentes refléxions
qu'elt dreffé un petit Errata , que j'ai
ajoûté à la fin du Livre. C'eux qui fouhaiteront
le joindre aux Exemplaires dont ils
font déja pourvûs , ne manqueront pas de le
trouver chés l'Imprimeur , ruë neuve Notre-
Dame , aux trois Vertus.
Voila , M. tout ce que j'avois à vous marquer
la -deffus ; j'efpere que vous voudrez
bien , pour la juftice de ma caufe , en inftruire
le Public , en inférant ma Lettre dans
votre Journal. Je fuis , &c.
A Paris , le premier Juillet 1743.
C iij
LA
1520 MERCURE DE FRANCE
******** :*: *******
D
LA ROSE ,
CANTATE.
Ans les Lieux enchantés , une Rofe nouvelle
De l'amoureux Zéphire animoit les foupirs ;
Charmé de fes attraits , cet Amant auprès d'elle
Exprimoit par ces mots les plus tendres defirs .
C'eft votre Beauté qui m'engage ;
Vous m'enflâmez de mille ardeurs ;
A la plus charmante des fleurs
Mon coeur veut rendre un tendre hommage.
Vénus dans fa brillante Cour ,
Ne m'offre rien qui vous égale .
C'est par vous qu'au jeune Céphale
L'Aurore donne de l'amour.
C'est votre Beauté qui m'engage ;
Vous m'enflâmez de mille ardeurs ;
A la plus charmante des fleurs
Mon coeur veut rendre un tendre hommage.
Mais Zéphire bien - tôt dans un nouveau (éjour
S'envole , & fuit fon inconftance ;
Flatt
JUILLET . 1743 .
1522
Flatté de la douce eſpérance
De retrouver encor la Roſe à ſon retour.
Pour cueillir cette fleur aimable ,
Qu'attendois- tu , volage Amant ?
Efperois-tu que le moment
Te feroit toujours favorable
Pour cueillir cette fleur aimable ,
Qu'attendois - tu , volage Amant ?
Que vois-je ! quel épais nuage
Tout-à-coup obfcurcit les Cieux !
Qel bruit quels fifflemens ! ah ! quel affreux orage }
Le trouble regne dans ces Lieux .
Le bruit du Tonnerré
Fait trembler la Terre ;
Les Tyrans des Airs
Déclarent la guerre
A tout l'Univers .
Les Antres mugiffent ;
Les Monts retentiffent ;
Saifis de douleur ,
Les Mortels frémiffent
D'une jufte horreur.
Dans ces beaux Lieux , que l'orage déſole ;
La Rofe tombe & perd tous les appas.
Contens de leurs forfaits , les Miniftres d'Eole
Cij Ceffent
322 MERCURE DE FRANCE
Ceffent de troubler l'Air par d'horribles combats.
Le calme rappélie Zéphire ;
Il revient pour cueillir ... mais ô foins fuperflus !
C'eft en vain que fon coeur loupire
Cette fleur qu'il aimoit , cette Rofe n'eſt plus ,
Auprès d'un objet agréable
L'Amant qui pouffe des foupirs ,
Doit faifir l'inſtant favorable
Que l'Amour offre à fes defirs .
Quand ce Dieu charmant nous invite
A goûter les plus doux appas ,
Bienheureux celui qui profite
D'un moment , qui ne revient pas:
Auprès d'un objet agréable
L'Amant qui pouffe des foupirs ,
Doit faifir l'inftant favorable
Que l'Amour offre à fes défirs .
Par M. B ** d'Aix.
DISA
JUILLET. 1743-
1523
hhhhh:
DISSERTATION curieufe , où l'on
prouve que la Lune Pafchale n'est pas
celle de Mars , par A. F. Labeffe.
I uns difent mal à propos , que Pâques Left ban de fçavoir que quelquesvient
le premier Dimanche d'après la pleine
Lune de Mars. Il faudroit dire que
cette Fête arrive toujours le premier Dimanche
, qui fuit la pleine Lune , qui arrive
à l'Equinoxe
du Printems , fixé
par PE
glife au 2r. Mars . En effet le grand Dictionnaire
de l'Académie Françoife dit , en parlant
de Pâques , que cette Fête fe célebret
toujours , le premier Dimanche , qui fuit immédiatement
la pleine Lune de l'Equinoxe.
Comme cela regarde particuliérement
le
Comput Ecclefiaftique
, qui a fes Régles.
certaines , pour nous faire connoître toutes
les Fêtes mobiles , qui dépendent de celle
de Pâques , & que cette derniére depend
de la pleine Lune de l'Equinoxe , il eft:
évident que toutes les fois que le Nombre
d'or nous donne pour Epacte * qui
n'eſt d'aucun nombre , le premier de Jan
vier eft auffi le premier jour de la Lune
de Janvier ; car l'Epacte n'eft autre choſe:
CⓇ que
1524 MERCURE DE FRANCE
que l'âge de la Lune au commencement
de l'année , c'est à dire , au premier de Janvier
, ou au premier de Mars ; ainfi de
faire commencer l'année Lunaire au premier
de Janvier ou au premier de Mars , c'eft la
même chofe . Mais puifque notre année
Civile commence préfentement au premier
de Janvier , & que Jules Céfar en l'etabliffant
, attendit , pour la commencer
au premier de Janvier , parce qu'il étoit
nouvelle Lune précisément à minuit , afin de
faire commencer l'année Lunaire avec l'année
Solaire , de fo te qu'il eft à propos que
ce foit là qu'elles commencent : en effet
tous les Auteurs en font d'accord Ainfi
l'année Solaire commune étant de 365 .
jours , furpaffe l'année Lunaire commune de
11. jours , laquelle n'eft que de 354 jours s
ainti il y a communement 11. jours de
difference ; ces 11. jours font l'Epacte de
l'année , c'eft à - dire l'âge de la premiére
Lunaifon , au premier de Janvier. Effecti-
´vement le Bréviaire de Bourges dit : quand
la premiére Lunaifon s'acheve dans les
1. premiers jours de Janvier , l'année eft
Embolifrique , c'est à dire de 13. Lunes, attendu
qu'il reste encore après cette premiére
Luce finie , 34. jours dans l'année , qui
fuffisent pour faire 12. Lunaifons diftinctes.
Cela arrivera en 1747. qui aura pour
Epacte
JUILLET. 1743 1525
,
>
,
Epacte 18. ainfi la premiére Lunaiſon s'ag
chevera dans les 11. premiers jours de Jans
vier de l'année 1747. il reftera par conféquent
354. jours de cette année , qui feront
12. Lunaifons diftinctes ; où il faut
bien prendre garde que cette année étant
de 13. Lunes , il y en aura 2. de Décembre
, la premiére de 29. jours , qui
commencera le 3. de Novembre & finira
le premier de Décembre , & la feconde
de 30. jours , qui commencera le 2 .
de Décembre & qui finira le 31. du
même mois. Cela fait voir que les Lunes
font du mois où elles finiffent comme
le P. Clavius le prouve dans plufieurs de
fes Ouvrages , entr'autres dans le Chapitre
17. du Comput , & dans fon grand Ouvrage
de la Réformation du Calendrier ,
où il dit que la Lune eft toujours celle
du mois dans lequel elle finit In quo
completur , menfi lunatio detur ; afin qu'on
ne s'y trompe pas , il ajoute : In quo finitur
, menfi lunatio detur ; & il dit que cette
Régle eft reçuë de tous les Computiftes ;
Ita Computifte omnes. M. Blondel , de l'Académie
Royale des Sciences , & Maî
tre de Mathématique , dans fon excellent
Ouvrage , qui a pour Titre : l'Hiftoire du
Calendrier Romain , nous donne cette même
Régle du P. Clavius , dans la fecon-
C vj
de
1526 MERCURE DE FRANCE
que
, de Partie Ch. IV. page 136. où il dir
c'eſt l'ancienne maxime des Computiftes
, que chaque Lune appartient au mois.
où elle fe termine ; cela n'eft fufceptible d'aucune
équivoque ; en voici la caufe toute
claire , qui fe comprendra facilement par
une fuite d'années que je vais citer avec
leurs Epactes.
"
L'année Lunaire , commençant au premier
de Janvier , comme il arrivera en
1748. qui aura pour Epacte * qui marque.
qu'il n'y aura alors aucune difference de
l'année Lunaire fur la Solaire , attendu que
le 31. de Décembre de 1747. qui la précede
fera le dernier jour de la Lune &
de l'année lunaire ; & que par conféquent
l'année Lunaire , cette année , finira précifement
avec l'année Solaire , & que les
deux années recommençant au même jour
les jours du mois feront aufli les jours de
la Lune C'est ce qu'on peut voir dans
POidre des jours de tous les mois de l'année
, qu'on trouve au commencement de
tous les Bréviaires , où l'on découvre que
le premier de Janvier a pour Epacte * c'eſtdonc
là le premier jour de la premiére.
Lune de l'année , & étant tout au plus de
30. jours , cette Lune de Janvier l'an 1748 .
finira le 30. de ce même mois , qui eft
e plus tard que puifle jamais fe terminer
la
JUILLET. 1743. 1527
*
> >
la Lune de Janvier. Cette même Epacte fe retrouvant
encore le 31. de Janvier , nous fait
voir que c'eft là le premier jour de la feconde
Lune , qui n'ayant que 29. jours ,
finit le 28. de Février ; & on ne peut nier
que ce ne foit- là celle de Février. Cette
Épacte fe retrouvant encore le premier de
Mars , nous fait connoître que c'eft - là le
premier jour de la troifiéme Lune de l'année
, & étant de 30 jours , elle finit le
30. du mois & elle eft avec la plus
grande certitude , la Lune de Mars. Et
continuant toujours de fuite toutes autres
Lunes dans le même ordre , on verra aifément
qu'il faut néceffairement qu'elles finiffent
toutes dans les mois dont elles
doivent l'une après l'autre porter le nom.
Celle d'Avril , le 28. d'Avril ; celle de
Mai , le 28. de Mai ; celle de Juin , le
26. de Juin ; celle Juillet , le 26. de Juillet
; celle d'Août , le 24. d' Août ; celle de
Septembre , le 23. de Septembre ; celled'Octobre
, le 22. d'Octobre ; celle de
Novembre , le 21 de Novembre , & enfin ,
celle de Décembre , le 20. de Décembre..
Ainfi , les 12. mois Lunaires étant finis
le 20. de Décembre il reste 11. jours ,
que doit encore durer l'année Solaire , qui
eft précilement l'Epacte , dans fa plus grande
exactitude , c'eſt- à- dire , la difference
>
de
28 MERCURE DE FRANCE
de l'année Solaire , à la Lunaire ; ce qui!
fait voir que la Lune de Janvier rétrograde
cette année de 11. jours dans Décembre.
Le Comput Eccléfiaftique nous donne effectivement
11. pour Epacte de 1749. qui
fuit immediatement , & qui nous marque
le nombre des jours qu'aura la Lune au
premier de Janvier. Et continuant pour
l'année 1749. à compter du 21. de Décembre
dernier , où fe trouve encore la petite
* jufqu'à 30. on tombe fur le 19. de
Janvier , où doit finir la Lune de Janvier
de cette année , comptant de là jufqu'à
29. parce que les mois Lunaires font alternativement
de 30. & 29. jours , on 3༠ .
tombe fur le 17. de Février , où doit finir
la Lune de Févier , & comptant de - là jufqu'à
30. on tombe fur le 19. de Mars où
où doit finir la Lune de Mars. Comptant
de -là jufqu'à 29. on tombe fur le
d'Avril où doit finir la Lune d'Avril .
Comptant de-là jufqu'à 30. on tombe fur
le 17. de Mai de , où doit finir la Lune
de Mai. Comptant de-là jufqu'à 29. on
tombe fur le 15. Juin , où doit finir la
Lune de Juin. Comptant de-là jufqu'à
30. on tombe fur le 15. de Juillet , où
doit finit la Lune de Juillet. Comptant
de-là jufqu'à 29. on tombe fur le 13.
17.
d'Août ,
JUILLET. 1743.
1529
G
d'Août , où doit finir la Lune d'Août.
Comptant de-là jufqu'à 30. on tombe fur
le 12 de Septembre , où doit finir la Lune
de Septembre. Comptant de-là jufqu'à
29. on tombe fur le 11. d'Octobre
où doit finir la Lune d'Octobre . Comptant
de là jufqu'à 30 on tombe fur le 10. de
Novembre , où doit finir la Lune de Novembre.
Enfin comptant de là jufqu'à 29.
on tombe fur le 9. de Décembre où
doit finir la Lune de Décembre , & le der
nier mois de l'année Lunaire. On voit encore
ici que les 22. jours de Décembre
qui restent , nous donnent l'Epacte de l'année
fuivante 1750. & le nombre des jours
dont l'année Lunaire retrograde la Solaire
qui commence toujours le premier de
Janvier.
>
>
En effet , felon les Régles du Comput
Eccléfiaftique on trouve 22. pour l'E
pacte de 1750. & comptant du 10. 10. de
Décembre de l'année 1749. où a commencé
une nouvelle année Lunaire , jufqu'à
30. on tombe fur le 8. de Janvier ,
où a fini cette Lune , qui doit en porter le
nom . Recommençant à compter de là juf
qu'à 29. on tombe 2 °. fur le 6. de Février.
3 °. fur le 8. de Mars. 4°. fur le 6..
d'Avril. . fur le 6. de Mai . 6 ° . fur le
4. de Junin. 7° . fur le 4. de Juillet. 8 °.
fur
530 MERCURE DE FRANCE
fur le 2. d'Août. 9º. fur le 1. de Septembre
. 10. encore fur le 30. de Septembre.
11. fur le 30. d'Octobre . 12 °.
fur le 28 de Novembre. & 13º. fur le
28. de Décembre , où il faut bien remar
quer , que cette trei ziéme Lune donnant
fa fin le 28. de Décembre , l'année Solaire
n'étant point encore finie , cette année
fera de 13. Lunaifons qui porteront
chacune refpectivement le nom du mois
où elles finiront. Et il y en aura cette
année pareillement deux dans un même
mois , qui feront dans Septembre ; la premiére
de 30. jours , qui commençera le 3 .
d'Août , & qui finira le 1. de Septembre
; & la feconde de 29. jours , qui com
mencera le 2. de Septembre , & qui finira
le 30. du même mois ; & les trois jours
qui restent après cette treiziéme Lune finie
le 28. de Décembre jufqu'à la fin de l'année
, font l'Epacte de l'année 1751. qui
marque toujours le nombre des jours ,
dont l'année Lunaire retrograde la Solaire.
Si l'on continuoit pendant un Cycle Lunaire
, c'eſt à dire , depuis 1748. juſqu'à
1767. à compter toutes les Lunes dans le
même ordre , on verroit qu'il s'y trouverroit
dans les 19. ans , qui eft la révolution
du Nombre d'or , 7. années Em-
Bolifmiques , ou 7. Lunes Intercalaires ; &
cela
JUILLET. 1743 : 1537
*
cela les années 1751. 1754. 1757. 1759 .
1762. 1765. & 1767. qui aura également
pour Epacte comme l'année 1748. qui
eft 19. ans auparavant ; & il feroit aife
de voir la raifon de la diftribution du
Nombre d'or pendant les 19. ans ; mais
ce feroit entrer dans un trop grand détail
, qui d'ailleurs feroit inutile , ceci étant
fuffifant pour donner une idée du fujet.
Pour revenir à la Lune Pafchale que
le comumn veut être la Lune de Mars ,
voions fi elle le peut être. La Lune
de Mars ; fuivant le principe ci deffus ,
reçu de tous les Computites qui nous
ont précédé , devant finir en Mars , il eft
évident que cette Lune n'eft point la Pafchale
; car pour être la Lune Pafchale , il
faut de toute néceffité que fon 14. árri
ve après le 20. de Mars. Mais le 14. de
cette Lune de Mars , tombant auffi le 14.
du mois , nous voions qu'il précéde l'Equinoxe
du Printems de fix jours : cette
Lune n'eft donc jamais la Lune Paſchale :
car toutes les années dont j'ai fait mens
tion , auront pour Lune Pafchale celle d'Avril
où elles finiffent. Il eft impoffible
qu'une Lune dont le 14. arrive le 21. de
Mars , ou après , puiffe fe terminer en
Mars ; elle fe termine donc en Avril ,
celle-là eft la Lune Pafchale , qui doit être
&
appellé e
3532 MERCURE DE FRANCE
du
2
>
appellée Lune de l'Equinoxe , & non point
Lune de Mars. C'est ainsi qu'en parlent
M. M. de l'Académie Françoife , & ils ont
une grande raifon ; parce qu'en la nonimant
de même
on ne s'y peut jamais tromper
, quand même elle feroit du mois de
Mai comme il arriva en 1734 attenque
la Lune de l'Equinoxe ne peut
être appellée ainsi qu'elle ne tombe
pleine après le 20. de Mars. Or en 1734 .
la nouvelle Lune étoit le s. de Mars ,
qui en attribuant la Lune au mois dans
lequel elle commence , auroit été la Lune
de Mars ; ainfi puifque c'étoit la lune
dé Mars , fuivant l'opinion commune , &
que Pâques devant être dans cette Lune,
je demande pourquoi cette Lune n'a point
été la Pafchale ? c'est parce que fon 14.
eft arrivé au 19. de Mars , par confequent
avant le 21. qui eft l'Equinoxe . C'est pourquoi
elle n'a pu étre appellée Lune de
l'Equinoxe , ni Lune Pafchale. Et la fuivante
, qui étoit la Lune Pafchale , étoit
nouvelle le 4. Avril & comme fon 14 .
tomba au 18. du même mois , qui éto
un Dimanche , pour ne point judaïfer
il a fallu , fuivant la décision du Concile
de Nicée mettre Pâques au Dimanch:
fuivant 25. ainfi cette année , le commun
a cru , conime beaucoup d'autres
›
que
JUILLET. 1743
1533
que Pâques étoit dans la Lune de Mars ,
parce qu'il femble que cette Lune doit
être appellée la premiére Lune de l'année ,
peut-être à caufe que l'on comm nçoit
autrefois l'année à Pâques , ou que les
Juifs célébroient leurs Pâques le 14. de
la Lune de l'Equinoxe , ( c'eft par cette
raifon qu'il a été arrêté que toute Lune
qui arriveroit pleine avant le 21. Mars
feroit rejettée & ne feroit point Lune Pafchale
. ) Tout cela n'eft point une raiſon
pour dire que Pâques vient dans la Lune
de Mars ; car fi cela étoit , il auroit fal ·
lu dire en 1734. nouvelle Lune de Mars le
4. d'Avril , cela n'auroit il pas été de la
derniére abfurdité ? Elle n'auroit été ni
du mois où elle auroit commencée ni
de celui où elle auroit fini , & il auroit
été ridicule de dire que la Lune de
Mars eut fini cette année en Mai.
D'ailleurs fi la nouvelle Lune eut com.
mencé cette année le 6. de Mars au lieu
du s . elle auroit pû être la Lune Pafchale
; car en 1742. la nouvelle Lune Pafchale
étoit le 6. de Mars qui eft le plutôt
qu'elle peut être , fuivant le Calcul
Aftronomique , car fuivant les Tables Pafchales
, elle n'eft marquée qu'au 8. ) elle
étoit également le 6. de Janvier prefque
à la même heure , ce qui fait voir qu'il
importeroit
1534 MERCURE DE FRANCE
importeroit peu de faire commencer l'année
Lunaire au premier de Mars , au lieu
du premier de Janvier parce que le mê
me nombre des Epactes convient à l'un
comme à l'autre.
Quand on voudroit abfolument attribuer
la Lune au mois où elle commence
ce qui feroit contre toutes les régles
& le bon fens , attendu qu'il faudroit que
com .
l'année Solaire fut inferieure à l'année Lunaire
, Pâques ne viendroit pas toujours
dans la Lune de Mars : en voici une preuve
évidente exemple. Je fuppofe pous
un moment , que la nouvelle Lune Pafchale
de cette année 1743. étant nouvelle le
24. de Mars , foit tout le contraire de ce
que je dis , c'eft à - dire au lieu d'être cel
le d'Avril que ce foit celle de Mars
comme le Public le veut ; ainfi la Lune
Pafchale retrogradant tous les ans
muns , c'est-à- dire , ceux qui n'ont que
12. Lunaifons de 11. jours ou environ
l'année 1744. la nouvelle Lune Pafchale arrivera
le 14. de Mars , celle de l'année
1745. arrivera le 3. de Mars , qui ne fera
cependant point la Lune Pafchale , quand
bien même elle feroit Lune de Mars , à caufe
qu'elle arriveroit pleine avant l'Equinoxe ;
mais point du tout , ce ne fera que la
fuivante qui fera Lune Pafchale , qui tombera
JUILLET. 1743. 1535
bera pleine le Samedi 17. d'Avril , & le
lendemain 18. fera Pâques , & cette Lune
finiflant en Mai , fera du mois de Mai .
Enfin l'année fuivante 1746. la nouvelle
Lune Pafchale qui fera celle d'Avril , arrivera
le 22. de Mars , au lieu que l'année
précédente elle fera le 3. du mois de
Mars , & ne pourra point être Lune Paf
chale ; ainfi cette année au lieu que la
Lune retrograde , elle anticipe , à caufe
que l'année 1745. qui la précéde fera de
13. lunes , que l'on compte ordinairement
pour 384 jours. Et moyennant cette treiziéme
lune , les mois Lunaires fe rapro-:
chent des mois Solaires : autrement fi l'on
ne faifoit point de compte des jours qui
reftent après que l'année Lunaire eft finie
, les Lunes parcourreroient tous les mois.
de l'année en rétrogradant , de façon que
la Lune de Janvier commençant au premier
du mois , comme en 1748. commenceroit
la troifiéme année d'enfuite le
28. de Novembre ; l'année d'après le 17.
du même mois , & enfuite dans tous les
autres mois de l'année ; mais pour empêcher
cet inconvenient , quand le nombre
des jours. furpaffe 30. après que la
12. Lune eft finie on en fait une 13 .
qui s'appelle intercalaire comme fi l'on
difoit année Biffextile , qui fe fait la 4.
anné
"
1536 MERCURE DE FRANCE
année des 6. heures qui restent pour maintenir
l'Equinoxe en fa place ; ainfi il en eft
de même des Lunes pour maintenir les
mois Lunaires avec les Solaires , ou pour
égaler le cours du Soleil à celui de la
Lune.
on
›
Quoique cette Differtation ne foit qu'ébauchée
, attendu que le fujet eft fort abftrait
, fur tout pour ceux qui ne font point
verfés dans ces fortes de matiéres
prie les Curieux & les Sçavans de faire
voir , par une régle fûre & générale
files Lunes ne font point du mois
dans lequel elles finillent , comme il a été
démontré. Pour M M. de l'Obfervatoire
ils difent , que quand la Lune commence
avec le mois , elle eft de ce même mois ,
& par une conféquence néceflaire , toutes
les Lunes fuivantes doivent finir dans leurs
mois , attendu qu'elles leur font infé
rieures.
VERS pour le Portrait de Mlle Silvia ,
Attrice de la Comédie Italienne.
Brillante Rillante éleve de Thalie ,
Les jeux , les ris accompagnent fes pas ,
Et la fageffe , & la folie ,
Lui
JUILLET. 1537 1743
Lui doivent tour à tour leurs plus charmans appas
Elle connoît de l'art les beautés les plus vives ;
Elle fçait lui donner des loix ;
Sur tous les coeurs elle a des droits ,
Et les graces font les captives .
Laffichard.
LETTRE écrite de S. Pierre de la
Martinique , le 25. Avril 1743. par
M. Flameng , à M. du Bocage de Bleville
, au Havre de Grace.
U
,
Ne Truye de groffeur ordinaire ;
de fa premiére portée , mit bas le
2. Avril dernier dans une Etable de
ce Bourg , fix petits animaux domeſtiques
: de ce nombre , cinq fe font trouvés
de petits cochons ordinaires en tout
point , tels qu'ils ont coûtume de naître
fans la moindre ni la plus légere difference
, car ce n'en eft pas une , que quatre
foient tout à fait noirs , & le cinquième
prefque tout blanc ; jufques- là , il n'y a
rien de fort particulier , me direz vous ?
tout n'eft il pas dans l'ordre naturel ? j'en
conviens mais vous conviendrez avec
la même facilité , que les circonstances
fuivantes font fi extraordinaires
• que je
>
crois
538 MERCURE DE FRANCE
crois pouvoir avancer hardiment que
la Nature n'a encore rien produit de fi
étrange que le fixiéme des ces animaux :
il a le corps plus gros que fes freres ;
fi on peut les nommer tels , puifqu'ils
ne le font ni par l'efpéce , ni par aucun
autre endroit , de couleur bife , ou fi vous
voulez , de celle d'un bois de noyer brut
& non poli , fans poils , ni foyes , exceptés
quelques - uns fort clair femés fur les
jambes , & au -deffous de la machoire inférieure
fa queue eft entiérement femblable
à celle d'un gros Rat , ménuë par
conféquent , toujours en diminuant & fi .
niffant en pointe , noüeufe enfin , comme
celle de ces petits animaux ; celui ci , par
Parenthéfe , eft du genre féminin , & la
partic , qui le diftingue à cet égard , eft
la même que celle d'une Truye ordinaire
, & dans une égale pofition : ſes jambes
font affés femblables à celles des
petits cochons de lait , cependant un peu
plus plus groffes , fans être plus longues :
la corne de fes pieds , ou plutôt fes ongles
, font divifés en quatre parts bien diftinctes
, deux également grands au milieu ,
& deux plus courts & plus petits aux côtés
:: cette corne eft de couleur blanche &
prefque tranfparente , à peu près comme
la Nacre terne ; mais ce qui rend encore
cette
JUILLET. 1743 1539
maux >
cette partie plus fingulière , c'eft que l'extrémité
des ongles de fes quatre pieds , qui
font tout à fait plats , au lieu d'être recourbés
ou crochus en deffous , comme
ceux des Chiens , des Chats & autres anifont
au contraire recourbés en
deffus , & fe bouclent , pour ainfi - dire ,
comme des cheveux ; c'eft la comparaifon
la plus jufte que j'aye pû trouver
pour vous dépeindre exactement les ongles
de cet animal monftrueux ; mais
venons à fa tête , dont chaque partie peut
donner matiére aux plus fçavantes Differtations
; épuiſer , j'ofe le dire , en raiſonnemens
, les plus profonds Naturaliftes , &
digne à coup fûr , d'occuper une place
diftinguée dans les Mémoires curieux de
P'Académie des Sciences .
Cette tête est un peu moins longue que
la hure ordinaire d'un petit cochon qui
vient de naître ; le devant eft un peu enfoncé
; le front releve néanmoins , à рец
près comme celui d'un petit Dogue ; du
milieu du front , fort une Trompe de la
longueur de deux pouces ou environ , &
de la groffeur du petit doigt , prefqu'auf
fi groffe dans fon extrémité que dans fa
naillance cette Trompe qui eft exactement
conforme à celle d'un Elephant , occupe
quafi soute la furface de la partie
D gauche
540 MERCURE DE FRANCE
,
1
gauche du front de l'animal , & eft tant
foit peu penchée fur le côté , comme celle
d'un Elephant : elle porte de même
dans fon extrémité , une efpéce de Bourrelet
, & une ouverture enfin , dans fon
milieu , d'une forme triangulaire imparfaite
& colorée que vous dirai-je de plus ?
c'eft parfaitement le front & la Trompe
d'un Elephant ; j'en parle avec certitude ;
j'en ai vû un autrefois à Marſeille , & je
tiens en main pour plus grande fûreté
le Dictionnaire de la Bible du R. P. Dom
Calmet où se trouvent , comme vous
fçavez , plufieurs de ces animaux formidables
, exactement repréfentés. Au deffous
de cette Trompe entre le mufeau & le
front , eft dans un milieu fort exact ,
une feule prunelle livide contenant des
particules d'un fang extravafé , d'un gris
Tale ou plutôt bleuâtre , groffe au moins,
comme un oeuf de Pigeon , qui femble
toute fois renfermer fous le même cryftallin
, deux prunelles égales & de la grandeur
ordinaire de celles des petits cochons
de cet âge ; enfin dans la partie inférieure
de cette même groffe prunelle , au travers
de ce cryftallin , on apperçoit une figure
de bouche , formée par deux levres
colorées , ce qui donne à cette partie quelque
forte de reffemblance avec la face que
les
JUILLET. 1743
1541
?
›
Les bonnes gens croient appercevoir dans
l'orbite de la Lune en fon plein : au refte ,
il faudroit diflequer cette prunelle &
l'on y trouveroit immanquablement des
particularités naturelles , peut être plus furprenantes
que tout ce que je détaille ici ;
jufques-là , vous voiez , M. que ce Monftre
eft un petit Elephant Cyclope , ajoute
l'Auteur de la Lettre ! fes oreilles font
tout à fait applaties & collées fur le derriére
de la tête de la grandeur & de
la forme , à peu près d'une feuille de lierre
, un peu plus grande ; à l'égard de leur
fituation elle eft dans l'ordre naturel .
Pour fon muzeau , fon groüin , fa gueule
ou fa bouche ( car on ne fçait comment
dénommer cette partie ) voici à peu près
comme elle eft conftruite. La machoire fupérieure
eft plus courte que l'inférieure , de
quatre à cinq lignes , fort pointuë , n'ayant
qu'une dent à fon extrémité , déja fort
dure & fort groffe ; & pour plus grande
fingularité la levre de cette machoire
porte fur fon extrémité , une forme de petite
corne , mollaffe , prefque diaphane , de
deux ou trois lignes au plus de longueur
& plantée ou fituée , à peu près comme
les Voyageurs nous dépeignent celle que
les Rinoceros portént fur leurs nez la
machoire inférieure eft un peu plus álon-
Dij gée
›
>
1
1542 MERCURE DE FRANCE
gée & arrondie par fon extrémité , formant
ce qu'on appelle communement un
menton de galoche , avec trois dents menuës
de chaque côté vers l'extrémité de
la machoire , feparées également entr'elles ,
& d'ailleurs affés reffemblantes à celles
d'un poiffon , du poids de quatre à cinq
livres. Si j'avois pû parvenir à avoir en
ma poffeffion cet étrange animal , je me
ferois fait un devoir de vous l'adreffer
le mieux conditionné qu'il m'eût été poffible
ce qui me confole , c'eft que je
viens d'apprendre que Mrs Antheaumé l'ont
acheté de la bonne femme , à qui appartient
la Truye qui l'a mis bas ; l'un de
ces Mrs dont vous connoiffez au moins
le nom , étant vos Compatriotes , doit
paffer inceffamment en France , & comme
je penfe qu'il ne manquera pas de l'y porter,
ou de l'y envoyer , il vous fera fort aifé
de le voir & de l'examiner à loifir , puifqu'il
abordera au Havre je ne fuis point
affés Anatomifte , cependant . j'ofe me
flater , que s'il eft bien confervé Vous
trouverez ma rélation exacte
>
pour
fatisfaire votre curiofité & la mienne
j'euffe fouhaité qu'un habile homme l'eût
fur le champ diffequé , & m'eût mis à
même de vous apprendre fi les parties internes
de cet animal ont auffi quelque
choſe
JUILLET.
1743. 1543-
chofe de fingulier , ou fi elles font fimplement
comme celles des cochons ordinaires
. Il ne s'eft fait entendre par aucun
cri , & n'a vécu que quelques heures ,
tant parce que fa gueule , toujours entr'ouverte
, fa langue épaiffe & arondie ,
& fortant enfin du côté gauche , de la
longueur d'un pouce ou environ ne lúi
laiffoit pas la liberté de prendre le pis
de fa meré , que parce qu'on l'a extrémement
tracaffé , & que la Truye même
qui l'a mis bas , ne vouloit en aucune fa
çon le fouffrir auprès d'elle : je penfe même
qu'il n'eut pas été prudent de le lui livrer ;
elle l'auroit peut- être dévoré : fi ce détail
, quoique long , peut vous faire quelque
plaifir , j'en ferai très- aife , &c. Vous
pouvez même , fi vous le trouvez bon
me citer comme une perfonne incapable
d'en impofer. Au furplus , je ne ferai pas
le feul , parmi tant de gens qui l'ont vû .,
qui en écrirai en France ; le Navire qui
vous porte cette Lettre , en portera plufieurs
d'autres, où il en fera fait mention, &c.
Je fuis , & c.
D iij RE
1544 MERCURE DE FRANCE
akkkkkkkkkkkkkk
REPONSE à la Queftion du Mercure
d'Octobre 1742. lequel de deux Amans
doit être plus flatté , de celui qui fait la fortune
de fa Maîtreffe en l'époufant ou de celui
qui la tient d'elle ?
LE plaifir de donner l'emporte
Sur le plaifir de recevoir ;
Ce dernier après lui traîne toujours l'escorte .
Des foins reconnoiffans & du trifte devoir.
Il fait naître l'inquiétude
Dans un coeur vraiment délicat ;
Il y feme l'horreur de paffer pour ingrat ,
Où l'importun foupçon qu'on prenne pour étude
Les effets de fa gratitude.
En géneral , voilà les traits
Qui font qu'au fein de l'indigence
L'homme qui fent*, l'homme qui penfe ,
Même en les défirant , redoute les bienfaits ;
Et dans la douleur qui l'affiége ,
Les confidere comme un piége ,
Que bien fouvent la vaniré ,
Sous des dehors trompeurs , tend à fa libertê,
Détaillons maintenant la chofe ,
Et voyons fi ce qu'on propofe
Peut fournir quelque exception.
Non ,
JUILLET. 1743 .
1542
Non , fi j'en crois mon inclination ,
Car , felon moi , la volupté fuprêmeˆ
Eft de combler de biens l'objet qu'on aime.
Quel plaifir , en effet , plus doux & plus flatteur
Que de pouvoir fe redire à foi-même ,
Mes bienfaits font garants de ce que fent mon coeur
Je ne décide pas qu'il n'eft point de douceur
A tenir d'une femme aimable & génereufe ,.
Un aifance qui peut ajoûter au bonheur,
Je m'en fais au contraire un portrait enchanteur}
Mais cette aifance eft ſouvent dangereuſe ;
Et nuit à la félicité
De celui qui d'abord peut en être enchanté.
Ses foins , quoique toujours dictés par la tendreffe
N'ont qu'à paroître un inftant moins preffants ,
Ils ne font bien-tôt plus que foins reconnoiſſants
Il a beau protefter de fa délicateffe ,
Un coeur qui des foupçons goûte la trifte yvreffe
Nous juge fans nous écouter.
Trop heureux mille fois , fi dans cette détreffe a
Le reproche honteux ne vient point éclatter ↓
Car je connois un peu les Belles ,
Et foit dit feulement ici pour badiner ,
1
Souvent fans trop examiner ,
J
Soit par des plaintes éternelles ,
Soit à force de foupçonner
છે
CO
La vérité des feux dont nous brulons pour elles ;
D iiij
En
#546 MERCURE DE FRANCE
En cherchant à nous ramener ,
Elles nous rendent infideles .
L'homme , un peu moins fujet à ces folles erreurs ,
Ne cherche point à fe créer des peines ,
Qui dégenerent en aigreurs.
Si fes bienfaits donnent des chaînes ,
Il fçait les adoucir par mille traits flateurs ,
Et ces traits font l'oubli des biens qu'un amour
tendre
Pour fon feul plaifir fçait reprendre..
Ainfi donc tout bien compaffé ,
Je finis & conclus comme j'ai commencé.
J. D. F.
XXXXXXXXXXXXX ** X*
DISCOURS fur l'Etude des Mathématiques ,
où l'on effaye d'établir que les Enfans font
capables de s'y appliquer. Par M. DE LA
CHAPELLE. Brochure in - 12 . A Paris ,
chés Prault, Pere & Fils , & le Clerc , 1743 .
N remarque que les jeunes gens recueillent
très- peu de fruit de l'étude
'des Mathématiques . La coûtume que l'on
prend ordinairement , pour une bonne
raifon , veut que l'on commence à s'y appliquer
à 16. ou 18. ans ; mais à cet age les
paffions occupent beaucoup plus que les reflexions
;
JUILLET. 1743. 1547
flexions ; il faut d'ailleurs un tems confidé
rable pour plier fon efprit à cette préciſion ,
à cette exactitude fcrupuleufe , que deman
dent les Mathématiques , & on croit que
l'on en fçait bien affés , après les avoir étu
diées une année pendant d'affés courts in
tervalles .
Cette confidération a déterminé M. de la
Chapelle à examiner fi les Enfans , qui ont
tout le tems de cultiver leur efprit , ne fes
roient pas capables de recevoir les idées Ma-)
thématiques , & fur tout celles de la Géo
métrie.
Soutenu de l'expérience , que fon étas
lui fournit fouvent, il ofe avancer que de
toutes les Sciences , les Mathématiques Elémentaires
font le plus à la portée des En
fans.
En effet, prefque toutes les connoiffances
par où l'on commence à inftruire les Enfans,
en fuppofent d'autres que l'on renvoye à un
âge plus mur , enforte que ce qu'ils ap
prennent n'eft reçû dans leur efprit , pour
ainfi- dire , que par leur crédulité.
Mais en ouvrant les yeux pour la premiere
fois , ils tombent fur les Elémens , fur les
premiers Principes de la Géométrie , on ne
voit d'abord que des lignes , des furfaces ;
des corps qui font , comme l'on fçait , l'ob
jet de la Géométric .
D v L'Auteur
1548 MERCURE DE FRANCE
-L'Auteur fait un très-grand ufage de ce
fait inconteftable : » Les fens , font donc
» en Géométrie nos premiers Maîtres , & ils
» confervent une grande autorité dans toute
la fuite de nos raifonnèmens.
Il fait enfuite remarquer l'extrême curiofité
qui agite l'efprit des Enfans , la mobilité qui
les pouffe aux Opérations méchaniques à la
Géométrie ayant le double avantage de frapper
vivement par les figures qu'elle offre , &
d'amufer par celles qu'elle fait conftruire ,réü
nit tout ce qui eft capable d'exciter l'attention
des Enfans ; d'autant plus que nous
» fommes naturellement portés à compter &
» à mefurer , le feul inftinct nous mene - là .
» Des Enfans prennent ils la largeur d'un
chemin La perpendiculaire eft la ligne
» qu'ils cherchent ; ils n'en fçavent pas le
nom mais le nom ne fait rien aux idées )
» ils ne veulent pas qu'elle biaife ; ils ont
» grand foin que celui qui eft à l'autre bout
de la corde foit bien de face avec le premier
; ils font de la Géométrie fans le fça-
» voir.
Il n'en eft pas ainfi des Belles - Lettres ; elles
font le fiuit de la plus fine attention & de
l'experience la plus confommée » au lieu
" qu'Euclide peut être étudié à fix ans ;: on
a à cet âge des yeux & des mains,
JUILLET. 1743 *- 1549
Il eſt donc convenable de commencer l'éducation
par les Mathématiques, qui ne fuppofent
aucune expérience , aucun raifonnement,&
de la continuer & finir par les Belles-
Lettres , qui n'en fuppofent jamais trop.
On le doit d'autant plus,que les Enfans oppofent
beaucoup moins d'obstacles de ce
côté-là que, les perfonnes un peu plus faites.
Il y a lieu de croire qu'on fera content des
raifons qu'en apporte l'Auteur , on peut les
voir dans le Difcours même ; qui intereffe
la Societé ; il eft d'ailleurs affés curieux de
fçavoir comment on établit cette efpece de
Paradoxe .
I Lluf
BOUQUET
A. M. d'H*****
Lluftre Ami , voici ta Fête.
Qu'Apollon , pour me fecourir ,
De Lierre couronne ta tête ;
Je n'ai que des voeux à t'offrir ;
Accepte-les. Ton nom eft Pierre ;
Ton Patron tient la Clef des Cieux ,
Coffre fort des biens précieux ,
Qu'on ne trouve point fur la Terre.
Il a fon lot ; garde le tien
Devj
腐趣
sso MERCURE DE FRANCE
En attendant la jouiffance
Des tréfors mis en la puiflance ,
Et promis à tout bon Chrétien .
Quant au préſent , de ton partage
On peut tirer quelque avantage .
Horace , ton Maître & le mien ,
'Auteur à Morale très-ſage ,
Place l'or au-deffous du rien ,
Si l'on n'en fait un bon uſage ;
C'eſt à quoi tu ne manques pas,
Tu fais voir par mainte largeffe ,
Que son or n'eſt point dans le cas ,
Qui deshonore la richeffe ;
J'en inftruis quiconque m'entend
A ce témoignage éclattant ;
Si tel , plus têtu qu'une Mule ,
Doute encor d'un fait fi conftant ,
Pour mieux convaincre l'incrédule ,
Voici ma réponſe experto ,
Lui dis-je , crede Roberto.
Par l'Abbé Pellegrin
LET
JUILLET.
1743.
LETTRE de M. l'Abbé L. au R. P. D.
Timothée Veyrel , Prieur de S. Euronl en
Normandie au fujet des Ouvrages de Gui
Aretin, avec quelques Remarques en faveur
de la mémoire de ce célebre Muficien.
>
Ous poffedez , M. R. P. dans votre
Abbaye un Manufcrit complet des
Euvres de Gui Aretin , fçavant Muſicien du
commencement de l'onzième fiécle ; & en
cela vous êtes plus riche que les Bibliothéques
qui n'en ont que des fragmens , par le
moyen defquels on ne peut connoître qu'imparfaitement
cet Auteur. Le tems eft venu ,
ce me femble , de rendre les Ouvrages de ce
grand Muficien plus communs qu'ils ne le
font , & je fuis perfuadé que dès-lors que je
vous aurai exposé ce qui a été écrit depuis
peu contre la mémoire de ce Religieux , vous
voudrez bien prendre la peine de vous faire
inftruire de ce qui eft confervé à la Bibliothéque
du Roi, des OEuvres Musicales de Gui ;
pour y fournir ce qui y manque , afin que les
Curieux de Paris puiffent y avoir recours
dans le befoin.
Vous n'aurez peut-être connu le nouveau
Livre de M. Rouffeau , intitulé : Differtation
Sur
552 MERCURE DE FRANCE
fur la Mufique moderne , que par l'Extrait
qu'en donnent les Journaux. Le grand nombre
fe fera repofé , quant au Systême de la
maniere de chiffrer le Chant , fur ce que l'évenement
& la fuite du tems pourront en
apprendre.Mais je ne croi pas qu'aucun Journaliſte
ait rapporté les propres termes de M.
Rouffeau.. » Il n'eft pas aifé , dit- il , page 2 .
" de fçavoir précisément en quel état étoit la
Mufique , quand Gui d'Arezze s'avifa de
fupprimer tous les caractéres que l'on y
employoit , pour leur fubftituer les Notes
qui font en ufage aujourd'hui. Ce qu'il y a
» de vraisemblable , eft que les premiers caractéres
étoient les mêmes avec lefquels
» les anciens Grecs exprimoient cette Mufi-
» que merveilleuse , de laquelle , quoiqu'on
"
33
לכ
en dife , la nôtre n'approchera jamais, quant
» à fes effets , & ce qu'il y a de fûr , c'eft que
» Gui rendit un fort mauvais fervice à la Mu-
» fique ; & qu'il eft fâcheux pour nous qu'il
» n'ait pas trouvé en fon chemin des Mufi-
» ciens auffi indociles que ceux d'aujourd'hui.
Plus bas , il s'étonne qu'on ne faffe pas au
jourd'hui pour la perfection de la Mufique
ce ¡ue Gui d' Arezze a fait pour la gâter.
Il ne paroît que M.Rouffeau n'a pas connû.
fuffifamment Gui Aretin avant que d'entre
prendre d'en parler. Il auroit pû fe mettre au
fait de la fituation où étoit l'art d'écrire le
Chant
JUILLET 1743. 1553
Chant avant le tems de ce Religieux , en
confultant le Livre de votre Confrere Dom
Jacques le Clercq , imprimé à Paris ,
in 4.
en 1673. mais s'il a négligé de citer mêmele
petit Livre du Pere Souhaitty , Cordelier, je
fuis plus étonné qu'il ait ignoré que Dom le
Clercq a fait graver des morceaux de Chant
notés , fuivant l'uſage obfervé avant le fiécle
de Gui Aretin , par le moyen de quels on voit
qu'à la vérité les fept premieres lettres de
Alphabet Latin ont fervi à defigner les fons
dans le Chant Romain , mais qu'il y avoit en
même- tems des Notes de différentes fo : mesqu'on
plaçoit fur les paroles , à des diftances.
arbitraires. Les lettres a , b, c , d, e, f g, étoient
les fept noms des fons ; les Notes quarrées
ou en équerre ou à queue, ou un fimple trait
de plume tiré perpendiculairement , ou bien
finiffant en croffe , avec des points entremêlés
étoient les Notes de ces fiécles , fans ligues
ni fans clefs . Ainfi un même fon , qui:
revenoit de tems en tems , étoit placé à la
fantaifie du Noteur ou Notateur , de maniere
que des Ecoliers à qui on avoit fait
chanter les fons de la Gamme a, b ,c, d, e , f, g
par intervalles disjoints , ne fçavoient plus à
quoi s'en tenir, & il étoit néceffaire à tout moment
que le Maître les remît en chemin , &
retraçât à leur mémoire, que tel figne devoit
produire le fon b , celui- ci le fon d , cet
autre
1554 MERCURE DE FRANCE
autre le fon f. Par exemple , fur l'Introït Sta²
tuit , leur ayant dit. que le premier fon étoit
le fon d , ils voyoient confufément que le fon
fuivant devoit être plus aigu , mais ils ne fçavoyent
pas de combien il devoit l'être , ni
s'il falloit du d. proceder au g. ou à l'a. Il
falloit que le Maître prît la peine de
prononcer toujours la lettre de la Note qui
en indiquoit le fon , de la faire fonner ou de
la voix ou fur fon Monocorde , Inftrument
alors fort ufité , où la touche des fons
étoient marquée par le moyen des bandes de
differentes couleurs , alternativement. Si le
Maître s'en difpenfoit , tout à coup les Ecoliers
fortoient de leur chemin. Si pour s'éxempter
cette peine , il écrivoit les lettres fous
les Notes , ou s'il fe contentoit d'employer
les fept lettres fur le Texte , les Ecoliers
avoient , à la vérité , des guides devant eux ,
mais c'étoient encore des guides muers, pour
ainfi-dire, & qui ne repréfentoient qu'obſcu
rément le fon dont la fignification leur étoit
attachée .
Que fit Gui Aretin ? Ce grand Maître , à
force de travailler à infinuer & inculquer le
Chant à la mémoire des jeunes Moines de
Pompofe , s'apperçût qu'ils le retenoient plus
aifément en voyant où il plaçoit fon doigt
fur le Monocorde , pour former chaque fon
de la Gamme , qu'il vouloit qu'ils rendiffent
confor
JUILLET.. 1743. 1555
conformément aux Notes de la Piéce de
Chant qui étoit à exécuter. Il conclut de - là,
que l'imagination des Ecoliers feroit beaucoup
foulagée & même invariablement fixée ,
fi fur chaque fyllabe du Texte à chanter , il
repréfentoit le Monocorde , au moins par
extrait. Ainfi par exemple pour l'In-
,
troit Statuit , il imagina de figurer d'abord
Stapuis
puis
tu it , & ainfi du refte.
C'eſt ainfi que fe forma ce qu'on appella depuis,
une portée ou une pattée de la longueur
d'une ligne de paroles , par le moyen des
differentes repréſentations de la touche du
Monocorde, jointes & réunies enſemble. On
lui donna depuis le nom d'échelle , à cauſe
de la reffemblance .
Dès- lors , on put , hardiment fe fervir des
termes clairs de monter & de defcendre , de
chant haut , de chant bas , au lieu qu'auparavant
on n'employoit que les termes obfcurs de
chant aigu , de chant grave , aller dans l'aigu,
aller dans le grave:
A mesure que cette clarté devint fenfible ,
elle fit plaifir aux gens portés pour le progrès
des Sciences , & elle défola ceux qui
apparemment auroient été bien aifes
Chant fût refté difficile à apprendre , foit afin
d'être regardés comme des Maîtres néceſſaique
le
res ,
556 MERCURE DE FRANCE
&
}
res , foit afin de mériter plus long tems l'ho
noraire dû à leurs peines . Je ne vous apprendrai
rien de nouveau , M. R. P. vous êtes à
la fource. Mais qu'il me foit permis de faire
ufage de ce que Dom le Clercq , & depuis.
lui , Dom Mabillon ont publié d'après votre
Manufcrit.
Ce ne fut pas en ce que Gui Aretin enfei
gna à commencer l'octave par le fon C , faifant
fuivre ainfi les fignes en montant , c d
e, f, g, a, b, c, qu'il rendit la Science du Chant
Grégorien ( alors qualifié Mufique ) plus aifée
à apprendre ; il contrevint en cela à l'étymologie
du mot de Gamme , qui étoit venuë
de ce que le G, fe trouvoit au haut des fept let
tres , quand la plus baffe ou la plus graveé toit
la lettre a ; ce qui faifoit alors a , b , c , d , e ,
f, g. Ce ne fut pas non plus de ce qu'il ima
gina de donner de nouveaux noms aux tons fignifiés
précédemment par , c, d, e,f,g,a,fçavoir,
ut , ré, mi, fa, fol, la , lefquels noms il prit au
commencement de chaque hemiftiche de la
premiere Strophe d'Ut queant laxis. Mais la
facilité vint de ce que fur chaque fyllabe de
la parole , ceux qui chantoient , voyoient à
quel dégré ou à quel étage , pour ainfi- dire, ils
devoient porter leur voix: car il retint l'uſage
des trois lettres anciennes , fçavoir , la lettre
C, qu'il plaça au commencement de la corde
où il vouloit qu'on fit fonner ce qu'il appel
loit
JUILLET. 1743-
1557
loit ut ; la lettre F , qu'il plaça au commencement
de la corde où il vouloit qu'on fit fonnerfa,
c'est ce qu'on a depuis appellé les Clefs
du Chant , & enfin la lettre b , qui étoit deftinée
dans certains cas à être placée dans le
degré immédiatement inférieur à la corde c ,
pour fignifier que de cette corde c à la corde
b, l'intervalle étoit d'un ton. J'avouerai cependant
qu'il reftoit une chofe à defirer dans
les nouveaux noms que Gui Aretin donnoit
aux fons de la Gamme. On fait naturellement
fept fons confécutifs , jufqu'à ce qu'on attei
gne le huitième , appellé communément
Octave. Gui ne jugea à propos d'employer
que fix noms; il en reftoit un à fuppléer, & ce
fut en quoi peut- être les ennemis de ce Religieux
auroient été mieux fondés à combattre
fa Méthode , comme infuffifante . Mais je me
doute que fi on examinoit exactement fes
Ouvrages , on verroit qu'il ne fe contentoit
pas de ces fix fyllabes ut re mi fa fol la , &
qu'il y en avoit une feptiéme qu'il faifoit prononcer
be, dont le figne étoit out . Ainf
voici quelle étoit l'Octave de Gui Aretin :
tre mifa fol la bent.
Quelques - uns de ceux, qui remarquerent
que les quatre fons d'enhaut , ne font proportionellement
pris , que la repetition des
quatre fons d'en bas,ne voulant retenir aucun
nom tiré d'une des fept premieres lettres feules
dc
1558 MERCURE DE FRANCE
.
de l'alphabet , s'aviferent de propofer , com
me plus convenable , lorfqu'il y auroit , par
exemple , felon notre ufage actuel , cette
progreffion à faire ,,
ut re mifa fol la fi ut re mi ,
s'aviferent , dis-je , de propofer de chanter ;
ut re mifa fel la mifa fol la.
Ce fut ce qu'on appella chanter par les
muances ,,
parce qu'avant que de retrouver
le fon huitiéme ou octave , on reprènoit
, pour fignifier des fons qui la rendiffent
complette , des noms déja employés une
fois ces repetitions de noms avec muance
ou changement de fon , étoient très - incommodes
, & cependant elles fubfifterent
jufqu'à ce qu'un particulier vainquie
L'entêtement qu'on avoit de ne pas donner
le nom de beau feptiéme fon
&
vint à bout d'éliminer la répetition de la
fyllabe mi , en lui fubftituant la fyllabe fi.
Mais j'en reviens à dire , que tout cela
n'a pas dû être imputé à Gui Aretin , qui
fourniffant fix. noms nouveaux & confervant
le feptiéme , donnoit de quoi fatisfaire
les commençans . Il ne reftoit rien
que de clair dans fon Syftême , parce que
Le feptiémede fes fons étoit figuré ou ou
,
, felon le different fon qu'il convenoit de
former dans l'intervalle du la à l'ut. L'échelle
qui regnoit fur la parole d'un côté
dc
1
1
JUILLET . 1743..
1559
,
de la page à l'autre , fut un foulagement
admirable. Le Chant Grégorien fut appris
en peu de tems par les enfans de Choeur de
l'Eglife d'Arrezzo , & un petit enfant en fçût
plus en un mois que les vieillards les plus
âgés de tous les autres Pays . ( a ) En effet
quand même un Chantre cût vecu cent
ans il n'auroit pû encore au bout du
fiécle fe tirer lui tout feul d'une Antienne
( b ) Le Pape Jean XX . ayant
oui parler de ce prodige , fit venir à Rome
le Moine Gui , avec l'Antiphonier noté
à fa maniére , pour s'affûrer lui même
de la vérité. Ce Souverain Pontife s'étant
fait expliquer les nouvelles régles par l'Auteur
même, & ayant un peu refléchi deffus ,
prit l'Antiphonier , fit l'effai fur un Verfet
qui étoit nouveau pour lui : il le chanta
fans faute , & l'apprit à l'heure même
( a ) Ecclefia ( Aretina ) etiam pueri in modulandi
ftudio perfectos aliorum quarunque locorum superant
fenes. Guido Ep . ad Theodald. Ep. Aret .
Quidam eorum imitatione chorda & noftrarum notarum
uju exercitati ante unius menfis fpatiun invifes
inaudites cantus ita primo intu tu indubitanter
cantabant , ut maximum ſpectaculum plurimis
praberent. Ibid.
( b) Maximè dolui de noftris cantoribus qui etfi
centum annis in canendi ftudio perfeverent , numquam
tamen vel minimam Antiphonam per fe valent ef
ferre. Ibid.
560 MERCURE DE FRANCE
en préfence du Réligieux . ( c ) Si c'eſt- là
rendre unfort mauvais fervice à la Mufique
, fi c'eft - là gâter l'Art d'enfeigner le
Chant , je ne fçais pas comment il falloit
qu'il s'y prit , pour réüffir au goût de
M. Rouffeau.
Il est vrai que ces témoignages nous font
tranfmis par l'Auteur même ; mais ne convenoit-
il pas qu'il fe défendit contre fes
émules que la jaloufie animoit plutôt qu'un
zéle véritable , felon qu'il fut facile de s'en
appercevoir ? Auffi arriva- t'il que ces adverfaires
voyant le progrès immenfe que
fit le nouveau fecret de peindre le Chant
& de l'apprendre
n'oferent rien écrire
contre Gui , à qui ils ſe virent obligés de
laiffer le champ libre.
J'allois finir ici cette Lettre , M. R. P.
lorfqu'un de vos Confreres , qui vifite affi
dûment tous les Manufcrits du Berry ,
pour donner l'Hiftoire de cette Province ,
a eu la bonté de me faire part de quelques
Extraits plus amples des Ouvra-
( c) Pontifex noftrum velut quoddam prodigium
revolvens Antiphonardum , prafixasque ruminans regulas
, non prius deftitit , aut de loco in quo fedebat
abceffit , donec unum verficulum inauditum voti
compos edifceret , ut quod vix credebat in aliis , tam
fubitò in fe recognofceret . Guido Ep. ad Michaël.
Annal. Bened. T. IV. P. 324.
ges
JUILLET. 1743 . 1561
,
ges du même Aretin fur un Manufcrit
confervé dans l'Abbaye de Chezalbenoît,
Je fuis perfuadé que vous ayez déja ceci
dans la collection qui eft parmi les Manufcrits
de S. Evroul . Je ne vous prie d'y
faire attention , qu'afin de nous confirmer
de plus en plus dans le fentiment que
Gui Aretin rendit un très - grand fervice à
l'Eglife & à tous les Chantres en inventant
une nouvelle maniére claire & aifée
, de noter le Chant. La connoiffance de
cette Science étoit fi obfcure & fi embrouillée
, que Gui fe vit obligé de dire
que de fon tems les Chantres » étoient
les plus infenfés ou les plus à plaindre
» de tous les hommes. ( a ) Dans tous les
» Arts communement, dit-il , on en apprend
» plus de foi- même que les Maîtres n'en ont
» enfeigné . Les enfans ayant appris à lire le >>
( a ) Temporibus noftris fuper omnes homines fatui
funt cantores. In omni enim arte plura funt valdè
qua fenfu noftro cognofcimus quam que à magiſtro
didicimus. Perfecto enim folo Pfalterio , omnium li,
brorum lectiones cognofcunt pueruli ; & agricultura
fcientiam fubitò intelligunt ruftici . Qui enim
unam vincam putare , unam arbusculam inferere
unum afinum onerare cognovit , ficut in in uno faeit
, in omnibus fimiliter , aut etiam meliùs facit &
non dubitat. Miferabiles autem cantores eorumque
difcipuli , etiamfi per centum annos quotidie decantent
, nunquam per fe fine magiftro vel parvulam
cantabunt Antiphonam , c.
* Plautier
562 MERCURE DE FRANCE
» Pfcautier
>>
›
lifent après cela feuls tou-
>> tes fortes de Livres . Les Payfans apde
tems les travaux de
prennent en peu
la Campagne. Quand ils fçavent railler
" une Vigne , planter ou enter un Arbre ;
charger une Bête , ils fe réglent fur ce
» qu'ils ont fait une fois , pour le faire tou-
» jours de même , & quelquefois encore
>> mieux ; & ils font fürs de réuffir. Mais
» pour ce qui eft des miferables Chantres
» & de leurs Difciples , quand même ils
>> chanteroient tous les jours pendant cent
>> ans jamais ils ne feront en état de
>> chanter d'eux - mêmes , & fans le fecours
» du Maître , la moindre petite Antienne...
» Et ce qui eft plus fatal , c'est que plu-
» fieurs Clercs & Moines , voyant qu'ils
» perdent leur tems , en eflayant d'appren-
» dre à chanter négligent l'affiftance à
» l'Office Divin. En effet , ajoute - t'il , lorf-
» qu'on l'entend célébrer , il femble qu'on
» voye des gens difputer les uns contre
les autres ; à peine deux voix font-
» elles à l'unifon , le Difciple ne s'accor-
» de ni avec fon Maître , ni avec fon Condifciple.
La maniere de noter , inventée
Dar Aretin , remédia à tout cela ; le Chant
Grégorien , qui étoit la principale Mufi
que de ces tems là , fut appris facilement
, & fut chanté à l'unifon fans dif
cordance
,
JUILLET. 1743. 1563
ce
cordance & même avec goût : & ce fût
cette facilité qui fit naître tous les rafinemens
qu'on trouva depuis . Que M. Rouffeau
ait donc la bonté d'effacer de fon
Livre , que Gui Aretin rendit un fort mauvais
fervice à la Mfique , & qu'il eſt à
propos de faire pour fa Perfection ,
que Gui d'Arezze a fait pour la gater.
Enfin , que ce même Gui apprit aux hommes
à chanter difficilement. Toutes ces Propofitions
étant tauffes , ne peuvent que
défigurer un Livre, où l'Auteur fait profeffion
de vouloir dire la vérité l'expérience fit
voir évidemment que le Chant étoit devenu
infiniment plus aifé à apprendre par
fa méthode , que par les précédentes : c'eft
le feul Fait que j'ai entrepris de prouver ,
& qui me proît très bien établi par les
témoignages tirés des Ouvrages du tems
même de l'invention . Cette méthode continuera
, & acquerrera de nouvelles perfections
avec le tems. Loin qu'elle perde
de fon mérite , je fuis témoin qu'un fçavant
Magiftrat de Paris a encheri, deffus en donnant
des noms aux onze femitons qui font
entre l'ut inférieur à l'ut fupérieur , c'eftà-
dire , qu'outre les noms de re mi fa fol
la fi , il a admis les trois fyllabes mafi fa ,
de l'Antiphonier de Paris , auxquelles il
en a joint deux de fa façon , l'un pour l'ut
E dicze .
1564 MERCURE DE FRANCE
dièze , & l'autre pour le fol dièze . Ces
multiplications de noms , qui font fi légitimes
, que j'ai fi fort fouhaittés , & qui ferviroient
fi utilement à s'entendre clairement
les uns les autres , lorfqu'on parle
de tranfpofitions de Chant , font bien oppofées
à la prétendue fimplification que
M. Rouffeau propofe. L'idée qui m'eft venuë
de peindre aux yeux des enfans qui com
mencent à apprendre le chant, les diftances.
réelles des cordes de l'ancienne échelle d'Aretin
, & que j'ai communiquée au Pablic
il y a deux ans , n'y eft pas moins
oppofée. Ainfi , M. R, P. vous voyez que
je fuis intereffé à foutenir ce que j'ai imaginé
pour la plus grande facilité de ceux qui
feront ufage de l'echelle d'Aretin . J'accorderai
bien que les chiffres 1.2. 3 4.5.6.7.
reffemblent à ces fept premiéres lettres de
l'Alphabet Latin abcdefg , & c'est parce
qu'elles ne leur reffemblent que trop , que
je prétends que l'une des méthodes n'eft
pas plus commode que l'autre , pour enfeigner
le Chant d'une maniére claire
palpable , & intelligible aux enfans qui
commencent , & qui font , pour ainfi dire
à la Croix de par Dieu de la Mufique,
Comme donc l'ufage d'employer feulement
les fept premiéres lettres de l'Alphabet
Latin , a été reprouvé pour fon infuffifance,
JUILLET. 1743 1565:
218
ce , il y a tout licu de craindre que l'em
ploi des fept premiers chiffres n'ait le même
fort; il en fera de ce feptiéme , comme des Notes
de Tiron , qu'on employe pour écrire
en abregé , & écrire auffi vite que l'Orateur
qui prononçoit un Difcours : on s'en
fervira pour épargner le papier , pour éviter
de former un Volume de ce qui peut
être cont nu en quelques, pages ; pour envoyer
aufli beaucoup auth d'airs notés dans une
fimple Lettre. On en agira ainfi de Maître
à Maître , mais non de Maître à écolier
, & je ne croirai jamais qu'il ſe trouve
des écoliers , qui n'ayant aucune teinture
de Chant , & qui étant abfolument neufs
dans cet Art , apprennent facilement à
chanter fimplement par 1. 2.3.4 5.6.7.
fans échelle ; ou s'il s'en trouve , je foutiens
que ces enfans autoient appris encore beau
coup plus facilement par la méthode
de l'Echelle de Gui Aretin , telle qu'elle
a été perfectionnée jufques ici , & qu'elle
pourra l'être encore par la fuite.
Il ne me reste plus , M. R. P, qu'à vous
demander , fi votie Manufcri de Gui Are
tin , eit aufli riche en Figures , que celui
que je viens de découvrir à Chezalbenoît
; c'est-à-dire , fi on y trouve des
Figures de Joueurs de toute forte d'Inf
trumens , à commencer par de petites clo-
E ij
ches ,
1566 MERCURE DE FRANCE
>
ches , & qui font qualifiés Percuffionales
Tenfibiles Inflatiles , &c. Cela eft affés
digne d'attention dans le Manufcrit de
Chezalbenoît , que l'on dit être du XI.
ou XII . fiécle. En même tems , fouffrez
que je vous prie de faire examiner , fi en
quelque endroit de votre Exemplaire , Gui
eft appellé Guide Augens Aretinus , comme
le Pere de Montfaucon l'appelle dans
les Tables de fon Ouvrage , intitulé Bibliotheca
Bibliothecarum . II peut fe faire qu'il y
ait eu un Guido Augenfis qui ait écrit fur la
Mufique , & que la reflemblance du nom foit
caufe que des deux on n'en aura fait qu'un .
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Paris , ce 30 Juin , 1743-
VERS préſentés à Madame ***
le jour de fa Fête.
Serois - je offrir à vos charmes
Des Vers qu'a dictés le refpect ?
: Ofons d'ua coeur trop circonfpect
Ecartons les vaines alarmes .
Un innocent amuſement
Ne fçauroit offenfer les Graces
Ni
JUILLET. 174317 $ 567
Ni la Vertu qui fur les traces
Vous voit marcher fi conftamment.
J'eufle pû faire une Couronne
De Jafmin , de Refes , de Lys ,
Mais leurs attraits font avilis :
Déja le Peuple s'en couronne.
Les couleurs dont Flore fe peint ,
Seroient auprès de votre teint ,
Ce qu'eft l'ombre auprès de l'Aurore,
Que ne puis-je mieux peindre encore
La beauté , qu'en fécret j'adore ;
Pour rendre hommage à vos apas ,
Orner cette heureuſe journée !
Amours , & vous fruits d'Hymenée ,
Hâtez- vous de la célébrer :
Hatez-vous , aimable Jeuneffe ,
Tout vous invite à vous livrer.
Avec tranfport à l'allegreffe
Aux Jeux uniffant Paction
Bientôt vos pas avec adreſſe ,
Portés fur les airs d'Amphion
Banniront l'oifive parefle ,
Que fuit l'odieufe trifteffe.
ENVOI
Madame , ma témerité
Ne mérite point d'indulgence.
È iij J'ai
1568 MERCURE DE FRANCE
J'ai peint avec haïveté
Ce qu'il falloit admirer en filence :
Au témeraire impofez penitence ,
Il fe foumet à votre volonté.
178
Par J. J. B. D. L. V.
7654 9
On a dû expliquer les mots des Enigmes
& des Logogryphes du Mercure de
Juin premier Volume Par
la Cloche
Silentium , le Portefeuille , & la Grace. On
trouve dans le premier Logogryphe , Fen ,
Lire , Vie , If, Fort , Oeuil , Port , Or.
Dans le fecond , Race , Rage , Age , Grec
Ut , Car , Arc , Cage , & Gâre.
:
( V
Les mots de l'Enigme & du Logogryphe
du fecond Volume , font le Tournebroche
& Cartouche. On trouve dans le
Logogryphe, Cachet, Torche , Cloche, Arche,
Char toucher Art ,
>
Couche.
Ruche Roc &
و
ENIGM E.
Ous fommes plufieurs foeurs , à peu près de
N même âge ;
Dans deux rangs differens , mais d'un femblable
ufage ;
Nous
JUILLET. 1743 1560
maiſon ,
Nous avons en naiffant un Palais
pour
Qu'on pourroit mieux nommer une étroite priſon .
Il faut nous y forcer , pour qu'une de nous forte ,
Quoique cent tois le jour on nous ouvre la porte ,
J
AUTRE.
E pafferai toujours pour choſe inanimée ;
Dans mon corps cependant une ame eft enfermée .
Quoique tout à fait creux , Lecteur, j'ai des boyaux,
Mais , differens des animaux ,
C'eft en dehors que je les porte ;
Pour finir en deux mots, j'ai la voix douce & forte,
Par Mlle .... d Arras.
#
JE
LOGOGRYPHE.
E fuis Grec d'origine , & le bruit de won nom
Exciteroit l'attention
De l'homme le plus flegmatique .
D'un habile Ecrivain l'Ouvrage Dramatique ,
Dès l'abord , cher Lecteur , me préfente à tes yeux.
En vain à me trouver cependant on s'applique ,
Si l'on n'apporte pas un regard curieux .
Des membres de mon corps le nombre épouvantable
Produit une foule innombrable
D'Etres grands & petits , d'objets tous differens ,
E j Qui,
1570 MERCURE DE FRANCE
Qui,tour à tour , courent des premiers rangs
Occuper à l'envi la place.
J'obſerve en commençant la liquide furface ;
Deux des quatre Elémens , de nos corps les appuis.
Par 10. 6. 12. 5. facilement je puis
Du plaintif Bucheron fatisfaire l'envie.
Cette Divinité , qui pour fauver la vie
Des fureurs d'un mari jaloux ,
Avec fon fils fe noya de courroux
Au milieu de l'onde Thébaine ,
Dès l'inftant paroît ſur la Scéne .
Combine encore un peu , tu trouveras foudain
Dans 1. 2. 12. 10. 9. 6. 7. 15. enfin
Celle qui lui donna naiſſance ;
Et retranchant 6. 7. fi tu mets 5. d'abord ,
Tu verras ce Mortel , enfant de l'ignorance ,
Qui fous un Capuchon , & d'un foûmis abord ,
S'en vient des champs nous prôner l'indigence,
Qu'il éprouve en fon trifte fort.
Prens 9. 3. 18. 6. & 7. tu vois paroître
Jadis le Chef & l'intrépide Maître
D'une noble Expédition .
Mais c'est trop m'arrêter , Lecteur, car j'enviſage
De Cain contre Abel l'infâme paffion ,
De la Divinité la reffemblante image ,
Et l'inhumaine trahiſon.
Ce que l'Eglife en certains tems ordonne ;
Ce
JUILLET. 1171 17437
Ce que la charité nous prône ;
Ce que l'homme de bien pourfuit avec raiſon ;
De plus , ce qu'avec foin cherche un vrai Philoſo
phe ;
Un Mont fouvent en feu ; trois nombres ; une étoffes
Un jour anéanti , l'ornement d'un Prélat ;
Deux arbres , & da tems les deux difpenfatrices
Un des Juges d'Enfer ; le Maître d'un Etat ;
Des grands Seigneurs les plus cheres délices
Le Mortel qui d'un Roi s'imagine l'égal ;
Le Conducteur des Juifs ; des Turcs le grand Pro
phéte ;
Un grave Hiftorien , moderne , impartial ;
Un autre , né Latin , de-même qu'un Poëte ,
D'Affuerus l'Epoufe ; un Péché capital ;
La plus vile bête de fomme ;
Un des deux Fondateurs de l'ancienne Rome;
Un Pere de l'Eglife , enfin un animal' ,
Beaucoup amateur du fromage,
Mais ; t'entretenir davantage ,
N'est-ce pas, cher Lecteur , pure indifcrétion
Je borne donc ici le pompeux étalage
Des objets infinis de ma combinaiſon.
Gavory, de Toulon
I v NOU
1572 MERCURE DE FRANCE
NOUVELLES LITTERAIRES ,
DES BEAUX ARTS, &c.
ROJET d'une nouvelle Edition de l'Hif
met , Abbé de Senones.
La plus grande partie des Exemplaires de
l'Hiftoire de Lorraine , compofée par le R. P.
Dom Auguftin Calmet , pour lors Abbé de
S. Leopold de Nancy , imprimée en 1728 en
quatre Volumes in-folio, par feu J.B. Cuffon ,
étant deja diftribuée , le Public informé que
dans cette premiere Edition il y a eû plufieurs
chofes omifes ou retranchées , a ſouhaité
qu'on en donnât une nouvelle, revûë, corrigée
& augmentée.
Pour fatisfaire au defir du Public , l'Auteur
a pris la réfolution de faire réimprimer
inceffamment fon Hiftoire , & d'y joindre
plufieurs nouvelles Découvertes, diverfes Corrections
quelques Differtations , quantité de
Pieces , de Notes , & de Morceaux curieux, qui
l'enrichiront confidérablement , & la rendront
beaucoup plus ample & plus parfaite
que la premiere.
7
Voici les principales Piéces qu'on fe propofe
de faire entrer dans cette réimpreffion .
1º.
JUILLET. 1743-
5573
1º. Trois ou quatre cent Piéces ou Titres
nouveaux , avec des Notes Littérales & Hif
toriques , fans compter un très- grand nom
bre d'autres Notes de même nature , qui
étoient deftinées à éclaircir les endroits obfcurs
des Actes & des Titres de la premiere
Edition , & qui n'ont pû être imprimées , à
caufe de la groffeur des Volumes.
Sept nouvelles Differtations ; fçavoir :
2º. Differtations fur les Monnoyes de
Lorraine.
3. Differtations fur la Nobleffe de Lor
raine.
: 4. Differtations fur les grands Chemins de
Lorraine.
5. Sur les Seigneurs avoüés des Eglifes.
6. Differtation fur l'origine des Dixmes &
des Revenus Eccléfiaftiques.
7. Sur l'ancienne Jurifprudence de Lor
raine.
8. Sur la Généalogie de faint Arnould ;
Evêque de Metz.
9. Remarques fur le tems & les autres
circonftances de la fondation des Abbayes
de Vôges.
10. Une bonne partie du Poëme ou du
Roman intitulé , Garin le Loherans , dont
on fera connoître l'Auteur , le deffein & le
caractére .
11 Ilias Lotharingica , Piéce en Vers fut
E vj
les
1574 MERCURE DE FRANCE
les malheurs de la Lorraine, après les Gueres
du Duc Charles IV.
12. La Vie du Duc Antoine par Hercu
fanus , Chanoine de S Diey , plus exacte &
plus étendue que celle qui a été imprimée
dans la premiere Edition.
13. Les Statuts Synodaux de M. Bertrand
de la Tour , Evêque de Toul en 1359.
14. Les Statuts Synodaux de M. Liebaut
de Cufance , Evêque de Verdun , de l'an
1401 .
15. On pourra auffi réimprimer , fi le
Public le fouhaite , la Nanceide de Pierre
de Blarû , Chanoine de S. Diey ; Poëme
Héroïque , concernant la Guerre du Duc
René II. contre Charles le Hardi Duc de
Bourgogne. Cet Ouvrage eft devenu fort
rare.
16. Le Poëme de Laurent Pillart ou Pil
tadius , auffi Chanoine de S. Diey , fur la
Guerre du Duc Antoine contre les Payfans
Luthériens d'Allemagne , revoltés en 1525.
Ouvrage extrêmement rare.
17. Mémoire Manufcrit fur la Ville de
Nancy.
18. Mémoire fur la décadence de la Mai
fon d'Apremont.
19. Memoires de Forget , Médecin du Duc
Charles IV.
20. Mémoires de M. le Baron d'Hennequin.
21.
JUILLET . 1743. 1578
21. Voyage de M. de Maillane , envoyé
de la part du Duc Charles III. vers le Roi
d'Angleterre.
22. Remarques de M. l'Abbé de Riguet ,
Grand Prévôt de S. Diey , fur les anciens
Titres de cette Eglife.
23. Un Poëme fur le fiége de la Motte ;
intitulé , Mota emota.
24. Une nouvelle Differtation fur l'origine
de la Maifon de Lorraine , que l'Auteur veut
faire deſcendre des anciens Ducs Bénéficiers
de Lorraine , depuis Renier , qui vivoit en
906. ou 907. jufqu'à Gerard d'Alface , qui
commença à regner en 1048 .
25. Réfléxions critiques fur le nouveau
Syftême du R. P. Marquart Hergotte , Bénénedictin
de S. Blaife dans la Forêt noire ,
touchant la Généalogie de la Maiſon de
Hafbourg , ou de la Maifon d'Autriche.
26. Remarques fur la Maifon d'Egefheim
, par rapport à la fondation de l'Ab
baye d'Altrof
27. Interrogatoire prêté par François de
Rofieres au fujet de fon Livre intitulé ,
Stemmata Lotharingia , avec les Piéces qui
ont rapport à cette affaire .
28. Le Dialogue de Jean & de Lud' , Sécrétaires
du Duc René II . fur les affaires de
leur tems.
29. Lifte des Hommes Illuftres , qui fe
fong
1576 MERCURE DE FRANCE
font diftingués en Lorraine & dans les trois
Evêchés , tant en matiere de Littérature
que des Beaux Arts , avec le Titre de leurs
Ouvrages & un Abrégé de leur Vie .
30. Plufieurs Additions faites à la Lifte
des Auteurs qui ont écrit fur l'Hiftoire de
Lorraine , déja imprimée dans la premiere
Edition.
31. Grand nombre de nouvelles Liftes
d'Abbés , oubliés ou omis dans la premiere
Edition ; comme auffi quelques Additions
à la Lifte des Evêques de Trêves , Toul ,
Metz & Verdun.
32. Le Plan de l'Eglife Cathédrale de
Verdun & des Edifices adjacens.
33. Un des plus beaux côtés de l'Eglife
Cathédrale de Metz .
34. Hiftoire de l'Univerfité de Pont - à-
Mouffon, écrite en Latin par le P. Abram,
Jefuite.
35. Diverſes Médailles & Monnoyes, tant
anciennes que modernes concernant la
Lorraine.
>
36. Les Antiquités qui fe trouvent à Framont
, à Léomont , à Vaudemont , à Toul ,
à Metz , & c . le tout gravé en Tailles - Douces
, avec des explications Hiftoriques.
37. Les Généalogies des Maifons d'Apre
mont , du Deuilly , du Chatellet , de Lenon-
Court , de Nancey , de Rofieres , de Ligniville ,
JUILLET. 1743. 1577
de Haraucourt , des Comtes de Ligny , de
Toul , de Sarbuck , &c . 1
38. Des Remarques nouvelles fur les Maifons
de Bayon , de Dafbourg ou Dabo , de
Caftres , de Sarverden , de Couffey , de
Paroye , & c.
39. Quelques Ecrits fur la mouvance du
Barrois.
40. Enfin , on fe propofe d'écrire l'Hiftoire
du Régne du Duc LEOPOLD I. de
glorieufe mémoire , & celle de la Ceffion
de la Lorraine faite en 1737. par le Duc
François III. aujourd'hui Grand Duc de
Tofcane .
On invite les Curieux d'envoyer à l'Auteur
ce qu'ils croiront propre à illuftrer l'Ouvrage
& à lui dire leur avis fur ce qu'il pourra ajoûter
ou corriger dans le Plan qu'il leur propoſe ,
fous promeffe de faire honneur à ceux qui voudront
bien l'aider dans l'exécution de ce Projet..
Antoine Lefeure Imprimeur ordinaire
du Roi à Nancy , qui s'eft chargé de cette
nouvelle Edition , la donnera au Public
par voye de Soufcription en fix Tomes
in-folio.
,
Chacun des fix Tomes!, fera de huit cent
Pages , de caractéres pareils à ceux du Projet
, & de même Papier.
Il fournira un Tome tous les fix mois.
Le prix de la Soufcription fera de foixante
dix
78 MERCURE DE FRANCE.
dix-huit Livres , au cours de France pour
lesfix Tomes en feuilles , & ceux qui voudront
fouferire , payeront.
SÇAVOIR , en fouſcrivant ,
En recevant le premier Tome ,
En recevant le ſecond
En recevant le troifiéme
En recevant le quatrième ,
En recevant le cinquième ,
Rien pour le dernier
18. liv.
12.
12.
12.
12.
12.
Total , 78. liv.
Le prix fera de cent livres , au même cours,
pour ceux qui n'auront pas foufcrit.
On a ouvert les Soufcriptions le premier
Mai , & on ne pourra plus foufcrire au dermier
Septembre de la préfente année 1743 .
Noms des Villes où l'on pourra foufcrire.
EN LORRAINE .A Nancy, chés l'Imprimeur ,
qui fera honneur aux Lettres de ceux qui
voudront foufcrire. On pourra auffi s'adreſſer
à tous les Imprimeurs & Libraires de cette
Province.
EN FRANCE. A Paris , chés Lemercier
Imprimeur , & de Hanfy, Marchand Libraire.
A Lyon, chés les Freres Bruyfei , Imprimeurs,
& la veuve Journel , Marchand Libraire. A
Ramën , chés Boisjourin , Marchand Libraire.
A Meaux, chés l'Imprimeur de M. l'Evêque .
A
JUILLET. 1743. 1579
A Rheims , chés Delaitre , Pere & Fils , Imprimeurs.
A Chaalons , chés Begin , Marchand
Libraire. A Strasbourg , chés Doulfecker ,
Marchand Libraire. A Troyes , ch's Oudot ,
Imprimeur. A Besançon , chés Charmet ,.
Marchand Libraire, A Dijon , chés Defay ,
Imprimeur Libraire. A Langres , chés Dre-
Marchand Libraire.
von ,
EN HOLLANDE , A Amfterdam, chés Chatelain
, Marchand Libraire. A la Haye , chés
Jean Neaulme , Marchand Libraire . A An
vers , chés Verdufen , Imprimeur
AUX PAYS - BAS. A Bruxelles, chés Frifck
Imprimeur , & Devos , Marchand Libraire.
A Louvain, chés Van- Overbeke, Imprimeur.
A Mons , chés Migeot , Imprimeur. A Namur
, chés Hinne , Imprimeur. A Gand
chés Ser anders , Imprimeur. A Lille , chés
la veuve Danel, Marchand Libraire A Liége,
chés Kinft , Imprimeur. A Luxembourg, chés
Chevalier , Imprimeur.
EN ALLEMAGNE . A Vienne, chés Briffau',
Marchand Libraire . A Francfort , chés Varentrap.
A Ratisbonne, chés Petit, Imprimeur.
A Leipzic , chés J. Gottl , Imprimeur. A Cologne,
chés Roderique, Imprimeur. A Tréves,
chés l'Imprimeur de M. l'Archevêque. A
Colmar , chés Petit , Imprimeur.
EN SUISSE. A Bafle , chés Brandemuler. A
Genève , chés Cramer & les Freres Philibert.
LEÇONS
1580 MERCURE DE FRANCE
LEÇONS DE PHYSIQUE , contenant les Elemens
de la Phyfique , déterminés par les
feules Loix des Méchaniques , expliquées au
College Roval , par M. l'Abbé Jofeph Privat
de Moliéres , Profeffeur au College
Royal de France , Affocié de l'Académie
Royale des Sciences , & de la Société de
Londres 4. Volumes in- 12 . 12. livres.
LEÇONS DE MATHEMATIQUES , par le
même. Volume in 12. 3. livres.
ELE'MENS DE GEOMETRIE , par le même.
Volume in- 12. 2. liv. 10. fols , à
Paris chés la Veuve Brocas , ruë S. Jacques
, au Chef S. Jean ; les Freres Guerin
, rue S. Jacques , à S. Thomas d'A
quin ; Jean Defaint , ruë S. Jean de Beau .
vais , & Claude Jombert , Quai des Auguſtins.
,
Ces Ouvrages font géneralement eftimés
des Sçavans ; ils font , fur tout utiles
pour les Colléges , & on les enfeigne non
feulement dans plufieurs Univerfités du
Royaume , mais encore dans les Pays Etrangers.
On les a affichés de nouveau , pour
indiquer les Libraires chés qui ils fe vendront
dans la fuite , parce que M. l'Abbé
de Moliéres les débitoit lui-même de
fon vivant.
Nou
JUILLET.
1743. 1581
و
& NOUVEAUX ELE'MENS D'ALGEBRE
de la Geometrie , reduite à fes vrais Principes
, dédiés à M. d'Argenfon , Miniftre
& Sécretaire d'Etat au Département de la
Guerre , par M. laife , Maître de Mathématiques
, à Paris , chés Antoine Boudet ,
Imprimeur- Libraire , rue S. Jacques , 1743-
in-4° . de 293 pages , fans l'Epître dédi
catoire , la Préface & les Figures.
La premiére Partie de cet Ouvrage contient
les Principes de l'Arithmétique & de
l'Algébre. La feconde traite des Elémens
de la Géometrie ; l'Auteur y employe la
méthode Géometrique des anciens , & l'élegance
& la clarté des modernes ; tout
y eft démontré par Lignes & par Figures ;
le Cercle n'y eft point changé en Poligone
regulier d'une infinité de côtés ; la
Sphère y eft confiderée comme Sphére ,
& non comme un Poliedre infini ; il ex .
clud toute démonftration par Algébre &
par les Indivifibles ; cet Ouvrage eft en
cela bien different de ceux , qui paroiffent
depuis long- tems fur la même matiére ;
la parfaite evidence s'y rencontre par tout.
EXPERIENCES PHYSIQUES fur la maniére
de rendre l'Eau de la Mer potable ;
fur la maniére de conferver l'Eau douce
le Bifcuit & le Bled , & fur la maniére
de
# 82 MERCURE DE FRANCE
de faler les Animaux , lues dans les Affemblées
de la Société Royale de Londres
par M. Hales , Docteur en Théologie , &
de la Société Royale . Ouvrage extrémement
utile pour la Marine . On trouve à
la fin une Table méthodique des Expériences
de l'Analyfe de l'Air , du même
Auteur , à Paris , chés Rollin , Fils , Quai
des Auguftins , 1741. Volume in- 12 , de
plus de 300. pages.
INTRODUCTION A LA CHYMIE , accompagnée
de deux Traités , l'un fur le Sel
des Métaux , & l'autre fur le Soufre Ano
din du Vitriol , par M. G. Rothe , Médécin
de Leipfix , avec une Analyle rai
fonnée de l'Antimoine & un Traité fur
les Teintures Antimoniales , par M. Meuder
, Docteur en Médécine , traduits de
l'Allemand , par J. L. Clanfier , Médécin
de Paris. A Paris , chés les Freres Guerin
, rue S. Jacques. Tome in- 12 . 174F.
HISTOIRE DE CICERON tirée de fes
Ecrits & des Monumens de fon fiécle >
avec les preuves & des éclairciffemens ; 4.
Volumes in- 12. Tome premier de 360
pages , fans un Avertiffement & une Préface.
Le fecond de 385. Le troifiéme de
346. & le quatrième de 406. A Paris ,
chés
JUILLET.
1743. 1585
à la
chés Didot , Quai des Auguſtins
Bible d'or.
MONTE'SUMA , ou Fernand Cortez ;
Tragédie de M. Dryden , célébre Poëte
Anglois , & traduite par l'Abbé D. B,
Brochure in- 8°. Prix 24. fols . A Paris
chés Jean Lefclapart , rue S. André des
Arts , Vis-à- vis la rue Pavée , à l'Espé
rance couronnée , & chés Lefclapart Fils
Quai de Conty , entre la ruë de Nevers
& la rue Guénegaud , à l'Espérance , 1743 ,
On trouve à la tête de cette Brochure 1
l'Argument qu'on va lire.
›
Montéfuma , Roi du Mexique , étoit
célébre dans le Nouveau Monde par fon
habileté dans la Guerre & dans le Gou
vernement. Alfyre , Reine de Taxalla , en
devint éperdûment amoureufe : fuivant la
Coûtume du Pays , elle fit les plus ten .
dres avances envers Montéfuma celui- ci
n'y répondit que par fes outrages & par
fes mépris. L'amour d'Alfyre fe changea
bientôt en fureur. Elle époufa Traxallan
Général de fes armées , à condition qu'il
attaqueroit le Royaume du Mexique , &
ne conclûroit jamais la paix avec Montéfuma.
Traxallan jura mille fois la mort de
l'ennemi d'Alfyre , mais la Victoire ne
devoit pas fe déclarer en fa faveur. Son
armée
1584 MERCURE DE FRANCE
armée fut entiérement défaite ; il fut lui
même mis à mort par Montéfuma , & ce
Conquérant après s'être délivré d'Alfyre ,
affervit entiérement le Royaume des Traxallains.
Les Vaincus s'efforcerent bientôt
de fecouer le joug. Tandis que la guerre
étoit déclarée entre les deux Koyaums ,
Cortez envoyé par Charles - Quint , arrive
avec des troupes Eſpagnoles fur les Côtes
du Mexique. Il profite de la divifion des Indiens
, fe joint aux Traxallains , attaque l'armée
de Montéfuma , remporte fur lui la Victoire
, & le force de fe renfermer dans fa
Capitale avec fon armée . Cortez l'alliége
dans cette Ville , & par des prodiges de
waleur , force fes ennemis à fe rendre.
ои
3
ALMANACH CHRONOLOGIQUE ,
véritable connoiffance des tems pour l'année
1743. contenant les évenemens les plus
remarquables , les Princes & Princeffes ,
le Clergé , les Confeils du Roi , le Département
de M M. les Secretaires d'Etat ,
la Lifte de M M. les Officiers du Parlement
, Chambre des Comptes , Bureau des
Finances , & autres Juftices de la Ville
de Dijon avec les principaux Officiers
des Bailliages de cette Province & leurs
dépendances ; les noms des Premiers Préfidens
Procureurs & Avocats Géneraux
>
de
JUILLET. 1743.- 1585
de tous les Parlemens de France , les Edits
Lettres Patentes & Arrêts du Confeil'
avec une Supputation exacte du lever &
du coucher du Soleil , un Tarif de toute
forte d'interêts & de comptes , &c . Par
M. AIBA , à Dijon. Chés Arnaud J. B.
Auger Imprimeur Libraire du Roi , du
Parlement , de M. l'Evêque & du Collége.
Nous n'avions pas encore eû connoif
fance de cet Almanach , qui a été donné
au Public pour la première fois en 1741. 11
eft dans le goût de l'Almanach Royal de
Paris , & fon Volume eft à peu près égal ;
il y a feulement entr'eux cette difference ,
que l'Almanach Royal eft d'un ufage plus
univerfel , au lieu que celui - ci eft principalement
à l'ufage de la Province de
Bourgogne ; il contient beaucoup de chofes
curieufes & utiles , entr'autres :
1. A côté de chaque jour du mois ,
il marque les évenemens les plus mémo
rables arrivés ce jour - là , de même
dans les Hpéhémérides.
que
20. Des Remarques fur les differens Mé
ridiens comparés à celui de Dijon.
3°. Un Journal du Parlement de Dijon ,
où on diftingue les differentes Audiences
entr'autres , les Audiences appellées de Mife
ricordiâ , qui font les quatre Séances que
la
1586 MERCURE DE FRANCE
la Cour va tenir pour les Prifonniers la veille
des Kameaux , de l'Affomption , de faint
Simon S. Jude , & de S. Thomas.
4°. Plufieurs Liftes des Officiers du Parlement
de Bourgogne , des Avocats & des
Procureurs au même Parlement ; des Officiers
de la Chancellerie , de ceux de la
Table de Marbre, de la Chambre des Comptes
, du Bureau des Finances , les Comptables
de ce Bureau , la Chambre des Elus
Généraux du Duché de Bourgogne , les
Maires qui y ont entrée , les Receveurs
de la Province , l'Univerfité de Dijon , les
Officiers des Bailliages , Chancellerie &
Préfidial de Dijon ; une Lifte des Lieux
qui dépendent de cette Chancellerie pour
le Siége principal de Dijon , la Maîtriſe
des Eaux & Forêts , la Mairie , les Officiers
de la Milice Bourgeoife ceux de la
Juftice Confulaire : les Maréchauffées de
Bourgogne & de Breffe , les Officiers de
la Monnoye , ceux des Juftices particuliéres
de Dijon & des Juftices Seigneuiales
de la Province , avec les Lieux qui
font de leur reffort ; une Lifte des 18 .
Notaires de Dijon , où l'on marque à chacun
le nom de fon Prédéceffeur , ou de
celui à qui il avoit fuccedé , & le nom
des Notaires décédés depuis long tems ,
dont les minutes font dans les Archives
des
JUILLET . ` 1743 .
1587
des Notaires de Dijon,avec les dates du tems
où commencent & finiffent ces minutes ;
ce qui feroit bon à ajouter dans l'Almanach
Royal , une Lifte des Officiers
des Bailliages & Chancelleries de la Province
, avec les Lieux qui en dépendent ;
les Gouverneurs des Provinces & Places
de Bourgogne & Breffe. Les Officiers
de l'Intendance & tous les Subdélégués
de l'Intendant ; les differens Bureaux pour
les Droits du Roi , la Maîtriſe particuliére
d'Avalon ; l'Académie des Sciences
de Dijon.
5 °. Un Tarif pour liquider les Rentes
à toute forte d'interêt.
6°. Une Lifte des Foires de la Provin
ce de Bourgogne.
7°. Un Mémoire inftructif fur les me
fures ufitées dans la Province pour les grains ,
vins , aunage , poids , chemins , terres .
8°. Une Chronologie des Papes .
9º. Une Chronologie des Conciles.
10. Ce qui concerne le Clergé , & par
ticuliérement celui de la Province de Bourgogne
, l'Evêché , les Collégiales , les Cu
res , les Officiaux de l'Evêché de Dijon
la Chambre des Pauvres.
11º. Les Souverains & Principaux Prin
ces de l'Europe .
Enfin un Extrait des Ordonnances , Edits ,
F Déclarations
rjs8 MERCURE DE FRANCE
Déclarations & Arrêts intervenus pendant
les années 1741. & 1742. concernant la
Province de Bourgogne.
Lyon & quelques autres Villes avoient
déja de femblables Almanacks , qui leus
font propres.
DISSERTATION fur un Temple Octogo
ne, & plufieurs Bas - Reliefs, trouvés à Ceftas ,
lefquels défignent des Fêtes de Cibele
une Initiation à fes Myftéres , & un Sacrifice
qu'on lui a offert , enrichie de figu .
res en taille Douce & des Notes curieufes
, par
M.
PAbbé
Jaubert
, C.
D.
C.
à
Bordeaux
chés Jean - Baptiste Lacornée
Imprimeur de la Cour du Parlement ;
rue S. Jâmes , vis - à - vis la ruë de Gourgue.
Volume de 189. pages , fans l'Epître
dédicatoire • 1743. & à Paris , chés
Théodore Debanfy , Libraire fur le Pont
au Change , à S. Nicolas.
HISTORIA GENEALOGICA da Cafa Real
Portugmeza , &c . c'est - à - dire , Hiftoire Gé
néalogique de la Maifon Royale de Portugal
, depuis fon origine jufqu'à préfent ,
où font marquées les Maifons Illuftres
qui tirent leur origine des Rois & des
Ducs de la Maifon de Bragance , juftifiée par
des Autorités & par des Monumens inconteftables
JUILLET. 1743 1589
conteftables , & dédiée au Roi Don Jean
V. par le R. P. Dom Antoine Cajetan de
Soufa , Clerc Régulier , & de l'Académie
Royale. Sept Volumes in- 4°. Tome 1. à
Lifbonne , chés Jofeph Antoine de Sylva ,
Imprimeur de l'Académie Royale , 1735 .
DISCOURS prononcés dans l'Académie
Françoife le Jeudi 16. Mai 1743. à
la Reception de M. L'EVEQUE DE BAYEUX.
Brochure in-4°. A Paris , de l'Imprimerie
de Jean Baptifte Coignard , Imprimeur.
du Roi de l'Académie Françoife.
M
ONSIEUR L'EVEQUE DE BAYEUX
ayant été élû par Meffieurs de l'Académie
Françoiſe à la place de feu S. E. M.
LE CARDINAL DE FLEURY , y vint prendre
féance le Jeudi 16. Mai 1743. & prononça
avec beaucoup d'éloquence & de
dignité un Difcours qui fut univerſellement
applaudi , & qu'il faudroit rappor
ter en entier , pour n'en omettre rien de
confidérable . On en jugera par ce trait ,
qui termine l'un des plus beaux Eloges
qui ayent été faits de M. LE CARDINAL DE
FLEURY :
» Je finis , MESSIEURS , par un trait qui
>>>fuffireit feul pour fon Eloge; c'eft que le Roi
Fij
» 2
1590 MERCURE DE FRANCE
а * a eû pour lui une eftime fi folide & fi
» conftante , que rien n'a jamais pû l'affoi-
>> blir , ( cependant que ne tentent point
» l'envie & la jaloufie , contre un homme
» élevé dans une auffi grande place ! ) &
» ne peut- on pas dire , que fi M. LE CAR-
» DINAL DE FLEURY a été le feul Miniftre
» qui ait eû un crédit auffi inébranlable ,
c'cft que le Roi eft le feul Prince , qui
» ait été auffi inacceffible à la furprife & à la
» prévention ?
13
Qu'il eft beau , MESSIEURS , de voir
notre Roi , prendre un de fes Sujets pour
fon ami ; avoir pour lui toute la ten-
» dreffe , toute la confiance , toute la gé-
» nérosité de l'amitié la plus parfaite ;
» pleurer fa mort avec la fenfibilité du
» coeur le plus tendre ; honorer fa mé-
» moire par des Eloges immortaliſer fa
» reconnoiffance envers lui , par les Monu-
» mens les plus auguftes & les plus dura-
» bles , & ne fe fervir de fa grandeur , que
» pour relever d'avantage par la Majesté
» du Trône , les fentimens de fa bonté &
» de fon humanité !
,
>> Que maître de lui - même , il modére
» jufqu'à la paffion de la gloire , paſſion
» ordinairement abfoluë fur l'ame des Sou-
» verains , & que l'interêt de fes Peuples
» décide feul de la guerre ou de la paix.
* Qua
JUILLET 1743 1991
>
» Que dans le cabinet il faffe voir à fes
» Miniftres une élevation de génie , une
» étenduë de connoiffances , qui nous apprend
, qu'il fe fuffifoit à lui-même pour
>> nous gouverner.
» Ces merveilles , MESSIEURS , excitent no-
» tre admiration, mais ells n'intereffent point
» autant notre coeur. C'eft dans le coeur du
Roi qu'eft établi le fondement de la feli-
» cité publique ; & quelle confolation pour
»fes Peuples , d'y voir des fentimens qui
répondent auffi fûrement de leur bonheur !
M. de Moncrif , en qualité de Directeur
, répondit au Difcours de M. L'EVEQUE
DE BAYEUX , & dit de très - belles
chofes. Nous n'en pouvons gueres rapporter
que le commencement , pour ne point
exceder certaines bornes.
MONSIEUR ,
» Vous n'avez pû l'ignorer , un fuffra-
» ge unanime vous a déféré la Place que
» vous occupez aujourd'hui , & vous de-
» mandez à quel titre vous la rempliffez a
" Le Difcours où vous venez de nous ex-
>> pofer vos craintes , prouve lui -même com-
» bien elles font peu fondées ; & ce n'eft pas
naffés pour vous raffurer? Nous n'en fom mes
>> pas furpris ;MONSIEUR ; la modeftie est une
» vertu qu'on ne trouve ordinairement que
» dans ceux qui ont de vrais facrifices à lui
« faire: F iij k Mieux
592 MERCURE DE FRANCE
» Mieux inftruite que vous- même , ou
» du moins plus frappée des motifs qui
> l'ont engagée à vous adopter , l'Acadé-
» mie attendoit avec impatience ce jour ,
» où elle a la liberté de s'applaudir pu-
» bliquement de l'acquifition qu'elle a
» faire.
"> Eclairée par fon propre interêt fur le
» mérite destiné à lui appartenir , pouvoit-
» elle ignorer cet amour que vous avez
» toujours marqué pour les Lettres , ce
» zéle ingenieux à faifir toutes les occa
» fions de les favorifer ? Une Académie
"
"
›
(a ) où l'émulation éteinte laiffoit lan-
» guir les talens , n'a - t'elle pas repris fous
» vos yeux une nouvelle vie ? Comme fon
» établiffement fut l'ouvrage d'un de nos
plus célebres Prédéceffeurs ( b ) elle
» avoit attiré nos regards dans fes diver-
» ſes fortunes : nous regrettions fa gloire
» paflée , fans prévoir que le renouvelle-
» ment de cette même gloire ajoûteroit
» un jour à la notre . C'eft un avantage
» que vous nous procurez. Vous pouviez
» vous contenter du titre éclatant de Ref
» taurateur , & nous voions avec une extrême
reconnoiffance , que vous ne l'avez
( a ) L'Académie de Caën.
( b ) M. de Segrais .
regardé
JUILLET. 1743 1593
regardé que comme un moyen de plus ,
d'acquerir ici le rang de Citoyen.
» Ouvrir des tréfors Littéraires à quicon-
» que veut s'inftruire ; engager ceux qui
» font inftruits ; à fe communiquer leurs
» connoiffances , & à developper leurs talens
, c'eft encourager les efprits , fans
» doute ; mais les guider en même tems
» dans les differentes routes qu'ils peuvent
» prendre leur faire fentir combien l'efprit
de méthode eft indifpenfable ; quels
» font certains défauts qui , fans violer les
» régles , ôtent cependant ce qui fait le
fuccès des Ouvrages , parce que le goût
» s'y trouve bleffé , c'eft avancer le progrès
» de l'efprit méme , & c'est ce que vous
» avez fait dans cette Académie , qui vous
» doit fon nouveau luftre. Elle conferve
précieufement les Difcours que vous y
» avez prononcés. Vous y expofiez les
principes de la véritable Eloquence ;
quel moyen plus fûr de les accréditer !
» Vous donniez à la fois les régles & les
» exemples.
19
Fiiij DIS
1594 MERCURE DE FRANCE
DISCOURS prononcé par M. Borde
Président de l'Académie des Beaux - Arts de
Lyon , à l'ouverture de l'Affemblée publique
du 9. Mai 1743 .
MESSIEURS ,
Les Académies en géneral ont pour objet
le bien & les avantages de la Societé ; mais
celles dont l'établiffement porté tout entier
fur les fecours néceffaires aux Arts , & qu'ils
ne fçauroient trouver ailleurs , ont un objet
fans doute , plus rapproché des befoins indif
penfables des hommes.
Le Tableau de la vie humaine met néceffairement
fous les yeux le prix des Sciences
& des Arts. L'inftant qui condamna l'homme
à mourir , fut le même qui l'affujettit au travail
; de - là cette multitude de befoins , de
difficultés & d'obftacles ; de - là l'ignorance
même des fecours que la Nature lui avoit
préparés; dans ce premier état, la Terre femble
lui refufer fes tréfors. L'eau ne lui fait voir
que des abîmes immenfes ; le feu ne lui préfente
qu'un Elément dangereux ; l'Air fous un
voile tranfparent , lui cache les plus mortels
poifons ; ces Globes immenfes fufpendus
dans les Cieux , lui femblent prêts à fe détacher
, & par leurs differens Phénomenes lui
annoncer tous les malheurs.
Tel
JUILLET. 1743 1595
Tel eft l'état de l'homme livré aux fuites
funeftes de fa condamnation; mais voyons - le
guidé par une Loi moins févere .
La néceffité bien- tôt induftrieuſe lui ouvre
les yeux ; fes nouvelles lumieres préfentent
des fecours à fes premiers befoins; le tems les
multiplie ; les lumieres deviennent plus vives
, les connoiffances augmentent , & enfin
les Arts fuccedent à l'ignorance.
Le Phyficien placé dans le centre des opé
rations de la Nature , devient en quelque
forte le protecteur de la vie. En vain Nature
fe dérobe , il l'épie , il la pourfuit , & fa
conſtance lui arrache le voile mystérieux qui
la couvre ; les Elémens aident à fon triomphe
, l'Anatomie lui ouvre le tréfor méchantque
du corps humain , la Botanique lui offre
les précieufes dépouilles des Plantes , des
Fruits & des Fleurs. La Chymie lui préfenté
les Huiles & les Sels cachés dans le fein des
Minéraux , préfens dignes des fes foins , &
d'heureuſes refſources pour les infirmités hue
maines . Tout ce qui exifte fait l'objet de fes
recherches : le plus petit Infecte préfente à
fes regards , plus intereffés que curieux , un
méchanifme qui l'étonne , un arrangement
de parties , des organes fimples , des mouve
mens combinés & variés à l'infini ; des applications
heureuſes fuccedent à fes recherches;
il fait ufage de tout , & fage imitateus de la
Fv Nature,
1596 MERCURE DE FRANCE
Nature , il la force de lui céder fes droits.
L'Aftronome porte fes regards dans les
Cieux. Le nombre , la grandeur , la diſtance
& les diverfes révolutions de fes maffes roulantes
font comptés & méfurés ; il rapproche
l'immenfité des Cieux , & préfente à
la Terre étonnée; les objets de fes préjugés
de fes terreurs & de fes préfages chimériques;
tout eft prévû & annoncé , Eclipfes , Cométes
, Aurores Boréales ; l'ordre eft entretenu
dans la fucceffion du tems, & il ne refte
plus à l'homme qu'à admirer avec refpect ,
mais fans crainte , l'ordre invariable & natu's
rel des mouvemens céleftes .
La Navigation lui ouvre le fein des Mers ;
fes Tables , fes Ephémérides, fes Calculs, fes
Inftrumens , y conduisent le Pilote .
La Géographie lui fait des chemins & des
routes dans les Terres ; la correfpondance de
fes obfervations établit & fixe la diftance des
unes aux autres , & marque la pofition exacte
des Lieux ; des bafes mefurées & des triangles
calculés , tracent la courbure du Globe ;
maître , pour ainfi dire, du Monde entier , il
affigne à chaque Puiffance l'étenduë de fon
Domaine , il donne des bornes à l'Océan ,
& Créateur d'un Monde racourci , il pré
fente aux yeux du Voyageur & du Curieux
un Tableau fidele des Terres des
Mers, des Rochers dangereux qu'elles renferment.
,
JUILLET. 1743- 1597
ferment. Tableau qui fatisfait infiniment l'imagination
, & lui donne cette fécurité fi
néceffaire au commerce des hommes.
Le Méchanicien , Miniftre puiffant de la
Nature, augmente , diminuë & détruit , à fon
gré , la réfiftance des corps , guide , regle &
détermine la viteffe de leurs mouvemens
multiplie à l'infini la force des hommes & des
animaux , & contraint les Elémens à recon
noître fes loix .
La Terre eft forcée de s'ouvrir, fes entrailles
font dépouillées des Métaux & des Minéraux
; fa fuperficie eft accablée fous le
poids immenfe des Bâtimens, fes Montagnes
gémiffent fous la chute de leurs vaftes Forêts ,
& fes Rochers font brifés pour tirer de leurs
ruines des amas prodigieux de matériaux de
toute efpece ; fes Plaines font déchirées , pour
mettre en mouvement les fels qu'elles renferment
, & en arracher les productions néceffaires
à la nourriture ; fes Eaux font forcées
de monter fur le fommet des Montagnes
; fes Fleuves refferrés dans de juftes limites
& fes valons creufés en canaux pour
la communication des Mers ; l'Eau , l'Air &
le Feu , deviennent les agens d'une infinité
de machines , & foumis à des loix juftes &
bien digérées , aident aux differens befoins
de la vie.
Le Géométre enfin, guidé,conduit par la véri
F vj
;
4598 MERCURE DE FRANCE
té , vient répandre la lumiere , communiquer
l'efprit de découverte , reconnoître la nature
des mouvemens , en déterminer la quantité,
les réduire fous les loix d'un Calcul méthodi
que ; examiner les differens rapports d'une
grandeur à une autre , la chute des corps, les
prodigieufes combinaiſons des nombres , en
un mot , affocier fes principes à la pratique
de tous les Arts.
Voilà , Meffieurs , le Plan de nos Etudes &
de nos occupations ; telle eft notre tâche ;
elle eft belle , elle eft noble , mais eft - elle
fans difficultés ? Des Etudes fauvages & épineufes
, des Calculs abftraits , des Obferva
tions fatigantes , des Expériences fans nombre,
des nouveautés reconnues bonnes & fouvent
mal reçûës affoibliroient peut - être notre
zéle , fi l'utilité de nos foins ne prêtoit des
forces à l'émulation , fi le Public éclairé ne
venoit l'animer & la foûtenir en adoptant
nos travaux, en les regardant comme fon propre
bien, & en fe prêtant fincerement à l'envie
que nous avons de lui être utile , plutôt qu'à
celle de lui plaire.
Que ne m'eft- il permis , Meffieurs , de préfenter
au Public , qui nous fait l'honneur
d'affifter à nos Séances , vos derniers Ouvrages
Académiques dans leur état naturel ? il
y trouveroit , fans doute , le bon & l'utile
qui les caractérife . En voici cependant quelques
Extraits L'ART
JUILLET . 1743 1599
L'ART de fortifier la mémoire.
Le R. P. Tolomas , Auteur de cette Differtation
, a recueilli avec foin les regles de cet
Art , qui nous ont été confervées par Ciceron
& par Quintillien ; la nature & les proprietés
de la mémoire ont occupé les plus céle
bres Philofophes , cependant il ne paroît pas
qu'on ait acquis de grandes connoiffances
fur cette matiere ; d'ailleurs il importe peu
de connoître la ftructure des organes de la
mémoire , pourvû que leur jeu foit aifé &
jufte F'Art peut , fans doute , beaucoup y
contribuer, & c'eft -là l'objet de la Differtation.
OBSERVATIONS für le Cabestan de
M. Maffoteau de S. Vincent , dont il eſt
parlé dans le Journal de Trévoux du mois
de Septembre 1742.
,
M. Delorme , Auteur de ces Obfervations ;
examine en Méchanicien exact , les avantages
annoncés de ce nouveau Cabeftan ; il
découvre bien tôt l'illufion d'un appareil de
roues qui doivent doubler & fa force & fa
viteffe . Les principes qui amenent la démont
tration du contraire , font fi évidens , qu'il
faut que M. Maffotteau n'ait pas bien calculé
ou n'ait point calculé du tout ; fon Cabeftan
eft donc réduit par les Obfervations de M.
Delorme , à ne produire que le quart de Veffet
600 MERCURE DE FRANCE
fet des Cabeftans ordinaires . Ces Obfervations
ne font pas feulement critiques , elles
font appercevoir la nouveauté de l'invention
& les applications utiles qu'on en pourroit
faire. Combién , en effet , d'inventions & de
machines n'ont pas rempli l'objet de leur
conſtruction , mais qui tombées dans des
mains plus heureufes ou plus habiles , font
devenues une fource d'utilités !
DISCOURS fur le Neuf, dans les productions
du Génie.
M. Bouillond , après avoir donné dans ce
Difcours une définition de ce qu'on appelle
Neuf dans les Ouvrages de l'efprit , s'attache
à faire voir combien les Sciences Phyfiques
& les Arts font plus fufceptibles de ce genre
de nouveauté, que les Belles - Lettres ; il préfente
avec ordre les progrès étonnans de la
Phyfique moderne , de- là il vient aux Arts ;
il les voit s'enrichir continuellement de nouveautés
utiles & intereffantes à la Societé.
Cette gradation de découvertes & de nouveautés
dans les Sciences & dans les Arts
préfentent tout- à- la fois les differentes vûës
de l'efprit humain , qui font prefque infinies
& l'admirable fécondité de la Nature.
MEMOIRE fervant d'explication à pluſieurs
Machines propres à l'Artillerie.
M. Grollier de Servieres poffede un tréfor
• ineſtimaJUILLET.
1743. IGO
ineftimable d'inventions & de Machines
de feu M. fon Ayeul ; celles qu'il nous préfente
dans ce Mémoire , paroiffent extrê
mement fimples dans leur conftruction &
dans leurs ufagés , & propres a faciliter con
fidérablement les travaux de l'Artillerie ; elles
nous ont été préfentées de main de Maître.
PROJET de Recherches fur la caufe
du Bled nielé.
M. de Ruolz a pris dans la Phyfique un
fujet d'autant plus important qu'il ne paroît
point avoir été l'objet des recherches de ceux
qui ont écrit fur l'Agriculture, ni de ceux qui
par état y confacrent leur vie. Le Bled noirci
fur plante , les caufes de cette corruption
préfentent à l'Auteur de ces Recherches un
vafte champ de raifonnemens & d'expérien
ces, où le tems , les circonftances & les déran
gemens des faifons , doivent entrer néceſſairement
. Son zéle pour le bien public , nous
elt un fûr garand de fes promeffes à cet égard .
OBSERVATIONS Météorologiques de
Dannée 1742. par le R P. Beraud , faites
dans cette Ville , & comparées avec celles de
Toulon , qui nous ont été envoyées par le
R. P. du Chatelard , l'un de nos Académiciens
Affociés , celles de M. Boeuf, Con
feiller au Parlement d'Aix.
Leréfultat de ces Obfervations comparées ,
nous
1602 MERCURE DE FRANCE
que
nous apprend que le froid de Provence a été
moins grand que celui de Lyon de 5. degrés
& demi au Termometre de M. de Reaumur,
& la chaleur moins grande de 8. degrés.
Nous apprenons encore par ces Obfervations,
les hauteurs du Barometre , obfervées
dans ces differentes Villes , s'accordent toutes
affés exactement, relativement à la difference
de hauteur des Lieux au deffus du niveau
de la Mer ; nous voyons done que le Barometre
fur la fin de Décembre & dans le
commencement de Janvier , eft parvenu aux
deux termes extrêmes de fa marche , ce qui
n'arrive que très-rarement. On a auffi appris
que dans le tems de la plus baffe defcente
du Mercure dans les Barometres , un vent
de Sud impétueux fit foulever les Eaux de la
Mer & les porta bien avant dans la Camarques
& la plus grande élevation du Mercure fut
pour ainsi dire, l'époque des maladiesfâcheufes
qui ont affligé toute l'Europe pendant le
cours de cet hyver .
Ces efpeces d'Obfervations , foigneufement
recueillies , contribueront à répandre
des connoiffances & des lumieres fur la nature
des vents , fur leurs caufes & fur les va
riations & intempéries de l'air. Il ne faut
point fe laffer d'obferver.
MEMOIRE
JUILLET. 1743. 1601
MEMOIRE fur l'Optique , confideré par
rapport à la vifion & aux Télescopes
Microfcopes & autres Verres,qui fervent à
conferver & à aider la vûe,
>
,
M. Beffen confidere dans cet Ouvrage les.
rayons de lumiere & les couleurs qui en refultent
, comme un effet naturel de leurs differens
arrangemens , & non comme un effet
des differentes teintes qu'ils ont prises en
paffant à travers des corps colorés ; il appuye
ce fentiment fur des Experiences , & en fait
des applications utiles.
MEMOIREfur l'Arithmétique.
M. l'Abbé du Gaibi s'eft propofé dans ce
Mémoire un moyen nouveau de faire la divifion
, l'extraction de la racine quarrée , &
de la racine cubique. Il a conftruit, à l'ufage
de ces opérations des tables qui en donnent
le réfultat , pour tous les nombres naturels,
depuis l'unité jufques à 10000. Il y propoſe
encore un moyen d'additionner toutes efpeces
de fractions , & de divifer des lignes en
parties quelconques , avec le fecours de
quelques échelles & du compas.
C'eft ainfi que les Sciences prêtent des
commodités à de certains ufages de pratique,
& mettent l'Art qu'elles traitent à la
portée de tout le Monde.
MEMOIRE
604 MERCURE DE FRANCE
MEMOIRE fur la Phifiologie.
M. Colomb donne une explication détaillée
des parties folides , & des differens
fluides qui compofent le corps humain
d'où il eft évident que fes fonctions ne dépendent
pas feulement de la ftructure des
parties folides , tant internes qu'externes ;
mais encore du cours des efprits animaux
portés avec le fang dans toutes les parties
folides , & qu'ainfi leur action doit être rés
ciproque.
MEMOIRE fur la Théorie des forces cena
tralles des Aftres , dont les apcides ne font
pasfixes.
M. Mathon de la Cour s'eft propofé cet
Ouvrage pour fervir de Commentaire à la
premiere partie de la Section 9. du premier
Livre de Newton . Il s'eft efforcé de le mettre
à la portée des moins avancés en Géo
métrie.
La Géométrie , dépouillée avec Art de ce
'qu'elle peut avoir d'abſtrait & de difficile
ne manquera jamais de plaire ; fes principes
& fes vérités appliqués à la Phyfique , feront
les guides fûrs de fes découvertes.
THEORIE pratique des Ponts volans
faifant leur trajet fur un centre de mouvement
.
M.
JUILLET. 1743 1605
M. Delorme donne dans ce Mémoire une
Méthode fimple pour déterminer & pour
reconnoître le centre de mouvement fur la
furface de l'eau. Une ancre pour tenir fûrement
le bac , des fupports propres à tenir le
cordage & l'empêcher de fubmerger ; un
mât mobile pour l'abaiffer , l'élever & en
tranfporter le point de traction , & la conftruction
de bac la plus convenable
préfentent chacun en particulier des defcriptions
raifonnées de la nouveauté de
leurs conftructions & de leurs ufages . Ce
Mémoire eft terminé par une explication
Théorique de la manoeuvre de ces Ponts
volans , dans leur trajet des conftructions
fimples , des manoeuvres aifées & fûres font
ordinairement les objets d'une méchanique
exacte & fcrupuleuſe.
DISSERTATION générale fur les diver
fes maniéres de mesurer les Vaiſſeaux ronds,
appellés communement Tonneaux.
Le R. P. Grégoire , l'un de nos Académi
ciens affociés , a eu pour objet dans cette
Differtation de faciliter au Public le jaugeage
des Tonneaux , en lui préfentant une
nouvelle jauge fimple dans la pratique ;
promte dans l'opération , & exacte dans fon
réfultat ; trois conditions évidemment néceffaires
, & qui font parfaitement remplies
par
606 MERCURE DE FRANCE
par la nouvelle jauge . Il falloit à l'Auteur
pour parvenir à ce point de précision , un
examen févere , & une exacte difcuffron des
bonnes & mauvaifes qualités des diverſes
jauges employées dans le mefurage Public ;
c'eft auf une des parties confidérables de
cet Ouvrage .
MEMOIRE fur les enveloppes générales du
corps humain.
M. Colomb , après une explication détaillée
des differentes enveloppes du corps humain
, fait voir que le tiffu eft percé d'une
infinité de petites ouvertures que l'on nomme
pores , pour donner paffage à la matiére
de la tranfpiration , & à celle des fueurs.
Les évacuations fenfibles ou non fenfibles
font ordinairement les caufes de la fanté ;
eu de la maladie . Elles ne fçauroient être
fupprimées fans danger , ni confidérablement
augmentées fans un grand affoibliffement
du corps animal.
DISSERTATION fur plufieurs anciens
Temples, comparés avec nos Eglifes modernes.
M. de la Monce , Auteur de cette Differ
tation , ne met pas feulement nos Eglifes
modernes en parallele avec les anciens Tem>
ples , tels que celui de Jupiter Capitolin , &
celui de la Paix dans l'ancienne Rome ; il
fait
JUILLET. 1743. 1607
fait plus , il leur donne une entiere préférence
, fondée fur un détail des belles proportions
& des bonnes régles de l'Architecture
obfervées dans ces Eglifes . Les Anciens
étoient plus flattés de la richeffe & de la
décoration de leurs Temples , que du bon
goût & de la Nobleffe de l'exécution . M. de
la Monce finit cette Differtation ', par une
defcription du Temple de Salomon ; fes
remarques fur cet Edifice l'ont conduit néceffairement
à éclaircir plufieurs endroits de
l'Ecriture , qui ont du rapport avec les cérémonies
qui s'obfervoient dans ce Temple .
C'eft ainfi que tous les divers genres d'Etude
fe prêtent mutuellement des connoiffances
inftructives , utiles , ou fimplement
curieufes.
DISCOURS fur les Questions ou Problèmes
de maximis & minimis.
M. l'Abbé de Valernod a tâché d'éclaircir
dans ce Difcours , plufieurs endroits des
grands Maîtres , fur cette matiere. Il préfente
une Méthode fimple pour réfoudre une infinité
de Queſtions ; il l'applique à la folution
de deux Problèmes très-utiles. Le premier a
pour objet la viteffe que doit avoir une
roue de Moulin , pour recevoir de la pare
du courant qui la meut , la plus grande
quantité de mouvement ; c'eft - à- dire , que
le
1608 MERCURE DE FRANCE
le produit de fa viteffe , par la force avec
laquelle elle eft müe , foit le plus grand de
tous les produits poffibles . On trouve par la
folution de ce Problème , que la viteffe de
la roue , prife au centre de gravité de ſes
aubes, doit être le tiers de celle du courant,
dans l'état d'équilibre.
Le fecond Problème a pour objet , de
trouver l'angle d'inclinaifon des aîles d'un
Moulin à vent fur leur axe , pour recevoir
du vent , la plus grande impreffion poffible.
Le principe qui résulte de cette folution, eft de
former l'inclinaifon de l'aîle par rapport à l'axe,
fur un angle de 55. degrés un peu moins.
Des applications auffi utiles font connoître
évidemment l'importance de cette méthode
, puifqu'elle eft la feule qui puiffe découvrir
folidement des vérités auffi cachées.
MEMOIRE fur les organes , fervans à la
digeftion.
Ce Mémoire donné par M. Colomb , préfente
des détails intereffans ; les organes de
la digeftion y font expliqués avec ordres la
matiere alimentaire changée en chile , le
chile obligé de paffer par une infinité de
conduits , pour être porté dans la maffe du
fang , & y travailler à la fanguification ; ces
détails nous font plus admirer ce méchanif
me , qu'ils ne nous le font comprendre .
MEMOIRE
JUILLET. 1743 . 1609
MEMOIRE fur la dilatation du Mercure
dans le Thermométre.
M. Chriftin nous y préfente une nouvelle
découverte qu'il doit à une longue fuite de
raiſonnemens & d'expériences qu'il a faits
fur les diverfes conftructions des Thermomètres
, foit ceux d'efprit de vin , foit ceux
de Mercure ; il donne la préférence à ces
derniers . Une expérience raifonnée , fimple
& délicate,fur la dilatabilité du Mercure, lui
a fait connoître qu'une quantité de Mercure,
condenſée par le froid de la glace pilée ,
& enfuite dilatée par la chaleur de l'eau
bouillante , formoit dans ces deux états , des
volumes , qui étoient entr'eux , comme 66.
à 67. & qu'un volume de 6600. parties condenfées
, eft devenu , par la dilatation , un
volume de 6700. parties.
La difference 100. de la condenſation à la
dilatation , eft le nombre de dégrés qu'il
donne à l'Echelle d'un nouveau Thermomètre
de Mercure , entre ces deux points .
Ce nombre fe trouve avantageux , pour la
précifion des obfervations .
Depuis Zero , point de la congélation ;
les nombres expriment , en defcendant, les
dégrés de froid , plus grands que celui de la
glace , & depuis le terme 100. point de la
dilatation , les nombres marquent en montant
,
1610 MERCURE DE FRANCE
tant , les dégrés de chaleur , qui excede celle
de l'eau bouillante .
7
M. Cazati , dont l'induftrieuſe pratique
dans les Ouvrages de cette espéce nous
eft parfaitement connue , a prêté fes mains à
cetre expérience . Elle a été faite de quatre
manieres differentes , avec diferens volumes
, differens calibres & differens Mercures
, qui ont toujours donné le même
réfultat.
M. Chriftin a fait remarquer que l'on peut
tirer plufieurs avantages de cette découveite
; entre autres , celle de pouvoir conftruire
les Thermomètres de Mercure , par
le moyen de l'eau bouillante , fans le lecours
de la congélation ; & réciproquement avec
de la glace , fans la chaleur de l'eau boüillante
.
M. Chriftin fe croît donc bien fondé d'a
vancer que cet Inftrument eft porté a fon
point de perfection , puifque ce n'eft pas
feulement un à peu près , comme il femble
qu'on devroit s'en contenter en matiere de
Phyfique ; mais une vérité prefque aufli démontrée
que celles de Géométrie .
Les Difcours qui doivent remplir cette
préf nte Séance , font
Le Mémoire de M. Beffen , fur la conftruction
des Etangs , matiere affés interreflante,
La
•
JUILLET. 1743 1611
Le Mémoire de M. l'Abbé du Gaibi , fur
la conftruction & les ufages de deux inftrumens
de fon invention , pour tracer avec fa
cilité des Cadrans Solaires .
Et le Difcours du R. P. Tolomas , fur l'invention
de la poudre à canon , dont il croît
pouvoir faire remonter l'époque à des fiés
cles plus reculés .
MORTS DE PERSONNES ILLUSTRES.
LETTRE de M…………. écrite de Genève le
22. Juin 1743. à M. le C. D. L. R. fur la
mort de Jacques - Antoine Arlaud , habile
Peintre de Genève.
E fçais M. que vous avez connu autrefois
à Paris M. Arlaud , Peintre fort célebre
en miniature ; il ma fouvent parlé de
vous comme d'un de fes amis , dont il fai
foit beaucoup de cas. J'ai à vous apprendre
`aujourd'hui la mort : nous l'avons perdu il y
a environ un mois : Il s'eft affés diftingué
dans fon Art , pour mériter une place dans
votre Mercure ; lié avec lui depuis plus de
quarante ans , je puis vous fournir quelques
particularités de fa vie & de fes Ouvrages.
Jacques- Antoine Arlaud étoit né à Ge
néve le 18. Mai 1668. il fit fort exactement
fes premieres études jufqu'à l'âge de 16. ou
17. ans ; il les auroit continuées s'il y avoie
G cû
612 MERCURE DE FRANCE
eû un peu plus de bien dans fa famille . Il
chercha donc à s'occuper plus utilement , &
fe tourna du côté de la Peinture , pour laquelle
il fe fentoit de l'inclination & de la
difpofition. On jugera aifément que c'étoit
là la vocation , quand on fçaura qu'il n'a appris
à deffiner que pendant deux mois , &
que pour la Peinture il n'a point eû d'autre
maître que lui- même .
A vingt ans , fe s'entant déja affés fort
pour le Portrait , il partit pour Paris. Pendant
le jour il peignoit , pour avoir dequoi
fubfifter , & pendant une partie de la nuit iļ
deffinoit , pour fe fortifier dans une partie fi
effentielle à un Peintre.
Son talent pour la miniature fe dévelop
pa avec une rapidité furprenante. Dans l'efpace
de peu d'années il fe fit une grande réputation
, & il effaça bientôt tous ceux qui
Te mêloient de ce genre de Peinture . Germain
Brice , dit de lui dans fa Defcription
de Paris , qu'il réüſſit ſi bien dans les Portraits
en miniature , qu'aucun autre Maître ne le
lui peut difputer en ce genre.
Outre la fineffe & la délicateſſe de fon
Pinceau , outre la beauté du Coloris , en
quoi il a excellé , on trouvoit encore dans
fa miniature une force extraordinaite . Feu
M. le Duc d'Orleans Régent , bon juge fur
Ces matiéres, a dit plus d'une fois , les Pein
tres
JUILLET. 1743 1613
tres en ce genre n'ont fait jufqu'ici que des
Images ; Arlaud leur a appris à faire des
1ortraits fa miniature s'ex, rime auffifortement
que la Peinture à huile.
Ses Portraits étoient très - reffemblans ;
mais il avoit encore l'art d'exprimer le caractére
& les qualités de l'ame de la perfonne
qu'il peignoit , étant d'ailleurs très
bon phifionomiſte.
La réputation de M. Arlaud parvint bientôt
jufqu'au Roi Louis XIV . qui voulut
le connoître & voir de fes Ouvrages . Ce
grand Prince , qui aimoit les Arts & les
Sciences , & qui avoit une attention parti
culiere à les favorifer , lui accorda une audience
très gracicule dans fon Cabinet , &
témoigna la fatisfaction qu'il avoit de voir
Les Ouvrages.
Je reviens à M. le Duc d'Orleans ; il ne
fe contenta pas de louer M. Arlaud ; on
fçait que ce Prince avoit beaucoup de goût
pour les beaux Arts , & fur tout pour la
Peinture. I deffinoit très-bien , & manioit
même quelquefois le Pinceau . Il trouva à propos
de s'attacher M. Arlaud , pour l'avoir
lous fa main ; il lui donna même un appartement
dans fon Château de S. Cloud , où
ce Prince exerçoit la Peinture fous les yeux
de M. Arlaud , qu'il appeloit fon Maître .
Le Prince trouvoit que nôtre Genévois
Gij enteng
A614 MERCURE DE FRANCE
entendoit fon Art foncierement , qu'il er
connoiffoit les véritables principes , & qu'il
étoit auffi fort pour la Théorie que pour la
pratique .
MADAME , Princeffe Palatine , Mere du
Régent , affectionnoit auffi beaucoup notre
Peintre . Elle s'eft tojours déclarée ſa géné
reufe Protectrice . En 1718 , elle lui donna
fon Portrait en grand , avec une riche bord
dure. Il la légué par fon Teftament à la Bibliothéque
publique de Genéve , avec d'au
tres beaux morceaux de Peinture .
En 1721. M. Arlaud fit le voyage d'Angleterre
; MADAME eut la bonté de le recommander
à la Princeffe de Galles , morte
dans la fuite Reine d'Angleterre , Cette recommandation
, jointe aux Ouvrages qu'il
produifit , le firent recevoir d'une maniere
diftinguée dans cette Cour. Il en rapporta
plufieurs Médailles d'or qui ont été mifes
dans la Bibliothèque de Genéve.
Notre Peintre ne fe bornoit pas au Por
trait , & il s'élevoit de tems en teras jufqu'à
'Hiftoire , quoique ce foit le propre de la
Peinture à huile . Nous avons de lui la Famille
Sainte , un des plus grands morceaux
qu'on voye en miniature .
On a auffi de lui une Magdeleine , a peu
peu près de la même, grandeur , repréfentée
dans le commencement de fa converfion, &
qui
JUILLET. 1743 1615
qui eft auffi d'une grande beauté. J'étois à
Paris quand il termina cet Ouvrage fur une
grande feuille de velin ; il me marqua quelque
regret de n'avoir pas mis au bas de cette
feuille quelque légende convenable au fujet.
M. l'Abbé de Longuerue , qui étoit fort de:
fes amis , lui confeilla en ma préfence de
mettre en beaux caracteres ces paroles du
Miferere , Seigneur créez en moi un coeur
pur ; formez de nouveau au dedans de moi
un efprit rempli de droiture , &c.
Ces deux Ouvrages fe confervent dans la
Bibliothèque de Genéve.
Mais le morceau qui lui a fait le plus
d'honneur , c'eft fa fameufe Leda , Ouvrage
autli fingulier que féducteur ; permettez mok
de vous en rappeller ici l'Hiftoire en peu
de mots. M. Arlaud ayant trouvé à Paris
dans le Cabinet de M. Cromelin , un Bas
Relief original du célebre Michel- Ange
Buonarotti , eut envie de le copier au crayon
noir pour fa propre étude , mais ce fimple
crayon acquerant tous les jours de nouvelles
perfections & paroiffant aux yeux avoir autant
de relief que l'original , M. Arlaud
redoubla fes foins & fon application , pour le
mettre dans l'état admirable où il eft au
jourd'hui , faifant abfolument fous l'oeil du
fpectateur & même à une très - petite dif
tance , le même effet que l'Original en mar-
G iij bre ;
1616 MERCURE DE FRANCE
bre; il employa pour cet effet , principalement
l'encre de la Chine & bien d'autres
couleurs légerement pointillées , avec une
délicateffe & un art inimitables , enforte que
la fimple vûë ne peut pas diffipet l'erreur du
Spectateur ; il faut abfolument que la main
& le toucher le convainquent , pour n'être
pas feduit.
Nos connoiffeurs difent que ce qui fait le
caractere diftintif de cet Ouvrage , c'eft
que le clair obfcur y eft employé avec une
fublime intelligence , ainfi que la diftribution
enchantereffe des jours & des ombres
ce qui rend les Figures tout a fait faillantes
, d'où réfalte l'illufion des Sens. Tout
Paris admira la Leda , & on l'alloit voir
avec empreffement dans le Cabinet de M.
Arlaud : On ma affûré même qu'un Seigneur
François en avoit offert juſqu'à douze
cent piftoles , mais quoique les parties fuffent
d'accord & le tableau livré , le
marché n'eut pas lieu. M. Arlaud reprit
fon tableau , & on lui donna quatre où cinq
cent piftoles de dédommagement.
,
M. Arlaud quitta Paris en 1730. après un
féjour de quarante années & porta dans
fon Pays environ 40. mille ecus qu'il avoit
gagnés ; il emporta auffi quantité de tableaux
des bons Auteurs anciens & modernes , &
'oublia pas fa chere Leda.-
On
JUILLET. 1743: 1617
On n'a appris qu'après fa mort le facrifice
qu'il fit de cet Ouvrage fi cheri , dont le
fujet lui parut trop libre , & il l'étoit en
effet ; par principe de confcience il le mit
en piéces. Quelques curieux en confervent
encore cherement des fragmens , mais ce
qui aidera beaucoup à conferver la mémoire
qui
de ce fameux crayon , c'eft le Portrait de
M. Arlaud peint à Paris , par le célebre N.
de Largilliere , fon ami. Il l'a peint de grandeur
naturelle , affis , le crayon à la main ·
travaillant à fa Leda.
Une circonstance que je ne veux pas oublier
, c'eft que le Grand Duc de Tofcane
avoit fait une grande collection de Portraits
des plus illuftres Peintres faits par eux -mêmes ;
ce Prince fouhaita d'avoir celui de M. Arlaud
, & le lui fit demander en 1736. M.
Arlaud flaté de l'honneur qu'on lui faifoit
expédia promptement ce Portrait & l'envoya
au Grand Duc qui le fit placer dans la fameuſe
Galerie de fon Palais parmi les autres grands
Peintres de la collection dont on a parlé .
Le Grand Duc lui marqua fa reconnoillance
par une très belle Médaille d'or qu'il lui envoya
; on la conferve auffi dans la Bibliothéque
de Genéve , à laquelle M. Arlaud la
léguée par fon Teftament , avec plufieurs
autres Tableaux , plufieurs Portefeuilles
d'Estampes , & quantité de livres rares &
curieux.
Ģ iiij
M.
1618 MERCURE DE FRANCE
M. Arlaud avoit la réputation bien établie
d'homme de probité ; il avoit les moeurs douces
& fort réglées , il étoit charitable & bon
ami ; il mourut prefque fubitement dans a
Maifon deCampagne auprès de Genéve ,le 25 .
Mai dernier , dans la 75. année de fon âge
n'ayant jamais été marié . Je fuis M. &c.
ESTAMPES NOUVELLES.
>
Deux nouvelles Eftampes en hauteur , dont
T'une eft intitulée le Menage , & l'autre la
Maitreffe d'Ecole ; la premiere eft caractérifée
par un vieux homme allis , & par une
affés belle femme aflife vis - à - vis de lui ;
leurs habits , leurs meubles , quelques potzeries
& uftenfiles répandus fur le plancher
, expriment une grande indigence ; on
Noit dans l'autre , une femme affife tenant un
livre ouvert fur fes genoux , un enfant de
bout devant elle , avec un jeune garçon &
une petite fille un peu plus loin . Ces deux
morceaux , qui font d'une naïveté & d'une
fimplicité admirables , font fort goûtés des
connoiffeurs ; ils font de la compofition de
M. Pierre , gravés à l'eau forte par C. S. &
terminés au burin par le fieur Feffard , chés
lequel ces Eftampes fe vendent dans le
Cloître S. Germain de l'Auxerrois.
Le fieur etit , Graveur , ruë S. Jacques à
la
JUILLET. 1743 1619
fa couronne d'Epines , près la rue des Mathurins
, qui continuë de graver la fuite des
Portraits des Hommes Illuftres du feu fieur
Defrochers , Graveur du Roi , vient de met.
tre au jour les Portraits fuivans.
MARIE - THERESE Reine de Hongrie ;
gravée d'après le Tableau original de M. de
Maïtens que M. Gundel , chargé des affaire
de Sa Majefté Hongroise à la Cour de
France , à confié au fieur Petit.
FRANÇOIS - ETIENNE DE LORRAINE
Grand Duc de Tofcane , gravé d'après le
Tableau qui eft dans le Cabinet de M. le
Marquis de Stainville , Envoyé de fon Al
teffe Royale à la Cour de France .
JEANNE DE FRANCE , premiere femme du
Roi Louis XII . En 1498. fon mariage fut
déclaré nul ; fa pieté la porta à inftituer l'Ordre
de l'Annonciade dans la Ville de Bourges
, où elle mourut en odeur de Sainteté
l'an 1504. Elle a été Beatifiée cette année
1743. On lit ces Vers au bas.
Sur fon front eft gravé l'augufte caractére ,
Du Dieu, quelle a toujours aimé comme ſon Pere
Elle invite fon fexe à fuivre la ferveur
En fondant un Saint Monaftére ,
Pour les Epoufes du Sauveur.
MLLE NINON L'ENCLOS , célebre par fa
Gy beauté
1620 MERCURE DE FRANCE
f
beauté & par fon efprit , née à Paris , & morte
le 17.Octobre 1705. âgée de 90. ans ; les Vers
qu'on lit au bas font de M. de S. Evremont.
L'indulgente & fage Nature
A formé la belle Ninon ,
De la volupté d'Epicure ,
Et de la vertu de Caton.
Le fieur le Menu de S. Philbert , fait gra
ver actuellement fa cinquième Cantatille
qui a pour titre l'Etincelle , qui fera inceffament
fuivie d'une fixieme , intitulée les
mans , & d'un Livre de principes de Mufique
, très - court & très facile . Nous
croyons faire plaifir aux Amateurs de cet
Art de leur annoncer les Ouvrages de cet
Auteur , puifqu'ils ont été fatisfaits de ce
qu'il a donné précedemment.
Le fieur Rofa , Chirurgien Hernicre , demeurant
ruë S. André dès- Arcs au Bandage
couronné , près le Pont S. Michel , continuë
de donner des preuves de fon habileté
pour la guerifon des defcentes de toute
efpece .
Ses Bandages font des meilleurs qui fe
affent & font très commodes & trèslegers.
On peut verifier ces Faits , fi l'on
yeut s'adreffer aux perfonnes qu'il a guerics
JUILLET. 1743. 1611
ries depuis peu , & qui ont bien voulu
pour l'utilité publique , que leurs noms
paruffent. Il y en a trois qui demeurent
dans la rue des Canettes , Fauxboug Saint
Germain : le fieur Bizot Tourneur : une
Dlle de 18. ans , chés Doffeville , Cordonnier
, laquelle eft venue au monde avec
une defcente du côté droit un enfant,
nommé Tallard , âgé de 8. ans , qui en a
cû une à 4 ans au côté gauche. Les autres
font le nommé Duchâtelet , demeurant
au marché de Biffy , près de la Gril
le : Hachette , Cordonnier dans la ruë de
la Joüaillerie , du côté de l'Apport Paris
: le fieur Roüel , Poulaillier , Quai de la
Volaille , gueri d'une Defcente des deux
côtés avec laquelle il étoit né , & un
garçon Boucher , de la petite Boucherie ;
Fauxbourg S. Germain , chés le fieur Du
pont , Boucher ; tous ont été gueris radi
calement & en peu de tems.
,
Le fieur Rofa recevra en penfion chés
lui les jeunes gens attaqués de Defcentes ,
& s'engagera a les guerir fans retour , en
moins de 6. mois , fi elles font fufceptibles
de guerifon ; les perfonnes qui font éloignées
, pourront , en affranchiffant le port
des Lettres ou Paquets , lui envoyer la
meſure de leurs corps , & nommer le côté
de la Defcente ; il leur procurera une
parfaite guérison,
G vj
La
1622 MERCURE DE FRANCE
commerce ,
La veuve Bailly renouvelle au Public
fes affûrances , qu'elle n'a point quitté fon
& que les véritables Savon
nettes de pure crème de Savon , dont elle
feule a le Secret , fe diftribuent toujours.
chés elle , rue du petit Lion , à l'Image S.
Nicolas , proche la rue Françoiſe , Quartier
de la Comédie Italienne.
17
Q
AIR.
Ue mon fort eft digne d'envie !
Je vois couronner mes ardeurs ;
Tircis , l'heureux Tircis eft cher à fa Silvie ,
Mais un cruel poiſon eft caché fous ces fleurs ;
On doit te craindre ,Amour jufques dans tes faveurs,
Dans les tranfports dont mon ame eft ravie.
Du plaifir d'être aimé je vais perdre la vie ;
Qu'auroient fait de plus tes rigueurs ?
Par M. Campan , O. D. L. R.
VAUDEVILLE du Divertiffement de
la Comédie de l'ifle fauvage.
DUU bel efprit au vrai génie ,
Du tintamare à l'harmonie ,
De la fuffifance au fçavoir ;
Quoique
A
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY.
ABTOR, LENOX AND
TILDEN
FOUNDATIONS.
NAN
f
T
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY.
ASTOR, LENOX AND
TILDEN
FOUNDATIONS.
Du tintamare a l'harmonie 2
De la fuffifance au ſçavoir ;
Quoique
JUILLET.
1623 1743 .
que la brigue emporte la balance ,
C'eft la difference
Du blanc au noir
*
Pendant le jour , la jeune Life
Pleure un Mari comme Artemife ,
Mais vers le foir un tendre Amant
fa contrainte en tapinois la venge ,
Et la veuve change
Du noir au blanc.
*
Quelle eft modefte, cette fille ,
Qui le matin fort de la grille ,>
Et qui devient femme le foir !
lendemain quel ton , quelle arrogance ,
C'eft , & c.
Près d'une Agnès, qu'il veut furprendre,
Un petit Maître eft foumis , tendre
D'un rien il fe fait un devoir ,
pauvre dupe eft elle en fa puiffance
C'eft , & c .
*
Climene fort de fa toilette ;
Elle eft d'une beauté parfaite 5
Elle a confulté fon Miroir
Qu'on
24 MERCURE DE FRANCE
Qu'on la furprenne avant fa prévoyance ,
C'eft , & c.
*
Doux , prévenant , plein de tendreffe ,
L'Amant veut vous prouver fans ceffe
Le plaifir qu'il goûte à vous voir ;
L'Hymen arrive , ah ! quelle diffonnance !
C'eft , &c.
*
Une Blonde avoit mon fuffrage ,
Mais de fes fers je me dégage ,
Une Brune obtient le mouchoir.
Qui m'a conduit à pareille inconftance ?
C'eft , & c.
*
Quand j'apperçois venir ma mere ;
Je prends un air froi & févere ;
Du doigt j'impofe à mon Amant ,
Sommes-nous feuls ; l'Amour fe récompenfe ?
C'est la difference
Du noir au blanc .
*
L'Amour & l'Hymen pour leur gloire
Se font difputés ma victoire ;
Ils m'ont chacun fait un préſent ;
Epoux muet , Amant plein d'eloquence ;
C'ef
JUILLET. 1743 1821
C'eft la difference
Du noir au blanc .
Dans nos jeux la fombre critique
Cherche à noircir Piéce & Mufique;
L'Auteur , l'Acteur , tout s'en reffent ;
Mais du Public la flatteufe indulgence
Fait tourner la chance
Du noir au blanc.
&&
SPECTACLES
.
Académie Royale de Mufique , qui
و
cès les répréfentations du Baller des Indes
Galantes , y ajouta le 16. une quatrième
Entrée qui a pour titre les Sauvages , la
quelle a été reçuë auffi favorablement
que lorsqu'elle fut ajoutée au même Ballet
en Mars 1736. On peut en voir l'Extrait
qui en a été donné dans le Mercure de
Mars de la même année
, pag. 534.
Le 8. Juillet , les Comédiens François
repréſenterent une Comédie nouvelle en
trois Actes , précédée d'un Prologue , &
ferminée par un Divertiffement . Cette Piéce
116 MERCURE DE FRANCE.
ce a pour titre l'Ile Sauvage ; elle eft de
l'Auteur de l'Oracle & du Silphe , deux
Comédies qui ont eû beaucoup de fuccès
fur les Théatres François & Italien .
On peut dire que cette premiere repréfentation
ne fut rien moins que pailible ,
& qué la Piéce fut jugée tumultueufement .
par le Parterre , fans l'avoir entenduë. La
feconde & la troifiéme repréfentation qu'on
en donna , furent écoutées paffiblement ,
fans trouble & fans cabale . Le Public
rendit juſtice à cet Ouvrage , qui eft ingenieufement
compofé , très- bien écrit &
parfaitement repréfenté. L'indifpofition du
Sieur Grandval empéche qu'on n'en continue
les repréſentations ; quand on les reprendra
nous nous mettrons en état d'en
donner l'Extrait .
Le 31. les mêmes Comédiens repréfenterent
la Tragédie d'Electre , dans laquelle
le fieur Roffelois , nouvel Acteur
repréſenta le Rolle de Palamede , avec applaudiffement
, & celui de Nicodeme dans
la petite Piéce du Deül ; le même Acteur
avoit deja debuté fur le même Théatre
au mois de Mai 1738. où il avoit repréfenté
le Rolle de Mithridate. Il avoit encore
joué au mois d'Octobre fuivant , à Fond
tainebleau le Rolle de Neoptoleme , dans
La Tragedie de Pyrrhus.
Le
JUILLET. ` 1743. 1627
Le 2. les Comédiens Italiens donnerent
la premiere repréfentation d'une Comédie
nouvelle en Vers & en trois Actes , qui
a pour titre les Petits Maîtres , de laquelle
on pourra parler plus au long.
Le 15. les mêmes Comédiens donnerent
une Piéce nouvelle Italienne , en
4. Actes , qui a pour titre , Arlequin &
Scapin , Magiciens par hazard , laquelle
été reçûë favorablement & a attiré de:
nombreuſes affemblées à l'Hôtel de Bourgogne
, par le Jeu continuel des deux
excellens Acteurs Arlequin & Scapin , que
le Public voit toujours avec plaifir. Ils
entreprennent dans cette Piéce de devenir
les Rivaux de leurs Maîtres , & d'enlever
leurs Maîtreffes mais ayant manqué
leur coup , ils quittent la Ville & fe retirent
dans un Bois , avec chacun un fufil
, dans le deffein d'y vivre de leur
chaffe. Au premier coup que tire Arlequin
, il voit tomber d'un Arbre , à fes pieds
un Livre , ou efpece de Grimoire , lequel
contient tous les fecrets de la Magie
ils ouvrent ce Livre & auffitôt
trois Diablotins , ou Génies viennent
leur offrir tout ce qu'ils demanderont.
Ces Génies font ce qu'ils fouhaitent.
Tantôt Scapin , tantôt Arlequin , munis
du Grimoire , font diverfes niches à leurs
,
Maîtres
1628 MERCURE DE FRANCE
ras
>
>
avec
Maîtres. Arlequin fe trouvant en prifon ,
pendant que Scapin a le Livre , il fe voit
prêt à être condamné à mort . Scapin revient
avec le Grimoire , le tire d'embarle
fait difparoître aux yeux de
fes Juges , & enlever par deux Diables
dans une Chaife à porteurs. Enfin
l'or qu'ils ont reçus des Génies , ils pren--
nent la réfolution de demander pardonà
leurs Maîtres , & de bruler le Grimoire.
La Piéce eft terminée par un morceau
d'Artifice des plus ingenieux , placé
dans le fond du Théatre , compofé de
Soleils de Lunes , d'Etoiles , d'un Globe
de Fufées croifées , de Chutes d'eau ,
de Croix de Malthe , & de tout ce qu'on
peut préfenter aux yeux des Spectateurs
de plus merveilleux & de plus fingulier
en ce genre , fans compter l'exécution qui
eft parfaite , & géneralement applaudie . Les
fieurs Ruggieri , Freres , Italiens , natifs de
la Ville de Bulogne , Eleves du fameux
Longi , qui a eté le premier Inventeur de
toutes fortes de Feux d'Artifices , font les
Auteurs de celui dont on vient de parler.
,
›
Le 27. les mêmes Comédiens repréfenterent
une autre Piéce nouvelle Italienne
en deux Actes , intitulée les Soldats , qui
n'a point été goûtée : elle fut précédée de
l'Epreuve , petite Piece de M. de Marivaux ,
&
•
JUILLET. 1743 1629.
›
& fuivie du Silphe , Comédie en un Actes
repréſentée avec fuccès le 5. Février der
nier. On a joint à cette Piéce un Diver
tiffement de chants & de danfes très
bien exécuté par les Acteurs de la Trou
pe. Les paroles du Divertiffement font du
fieur Favart , la Mufique du fieur Blaiſe
& la Compofition du Ballet du fieur Deshayes
. On peut voir dans le Mercure de
Mars dernier , pag. 537. ce qui a été dic
au fujet de cette Piéce .
Le premier Juillet , l'Opera Comique ;
fous la direction d'un nouvel Entrepreneur
, fit l'ouverture de fon Théatre à la.
Foire S. Laurent . On y repréfenta une Piéce
nouvelle d'un Acte , en Vaudevilles ,
précédée d'un Prologue , intitulée le Siége
de Cythere , avec des Intermedes de chants
& de danfes , laquelle fut très bien exécutée
& applaudie du Public ; elle fut fuivie
d'une autre petite Piéce en un Acte ,
intitulée le Coq du Village , jouée pour
la clôture du Théatre à la derniere Foire
S. Germain le 6. Avril dernier. La Dlle
Cheret , connuë fous le nom de la Petite
Tante , qui avoit joué le Rolle de Pier
rot , qui eft le principal de la Piéce , a
repréſenté le même Rolle à cette repriſe ,
avec les mêmes applaudiffemens.
La
2
1630 MERCURE DE FRANCE
Le
13.
,
13. on remit au Théatre une Piéce
d'un Acte , en Vaudevilles , de la Compofition
de Mrs le S. ** & Dor. ** in
titulée la Reine du Baroftan , laquelle
avoit été repréfentée en 1730. fous la direction
du fieur Pontau , fur un Theatre
qu'il avoit fait conftruire dans un Jeu de
Paume de la rue de Buffy. Le fieur Hamoche
, connu depuis long tems pour un
excellent Acteur Comique , y jouoit le
Rolle de Pierrot , avec un applaudiffement
géneral . Ce même Acteur vient de reparoître
aujourd'hui jouant fon même Rolle
& dans la même Piéce avec les mêmes
applaudiffemens dont le Public l'avoit deja
honoré , il fit un compliment qui fut
très-bien reçû ; il chanta après un nombre
de Vaudevilles fans fuite & interrompus
, dans le goût burlesque de Scarron,
ce qu'on appelle communément un otpourri
; il fut terminé par un Air Italien
que le même Acteur chanta , jouant de
la Guittarre , d'une manière tout a fait comiques.
On repréfenta enfuite le Coq du Village
dont on vient de parler ; la Dile
Lany , cadette , danfa les nouveaux Caractéres
de la Danfe , avec toute l'intelligence
& la précision poffibles.
Le 24. la Dlle Puviguée , nouvelle Danfeufe
JUILLET. 1743. 163r
feufe , âgée de fept ans , danfa feule une
Entrée avec toutes les graces & la vivacité
pollibles ; elle fut géneralement ap
plaudie.
Le 30. on remit au Théatre une Piéce
d'un Acte , en Vaudevilles avec des Divertif
femens , qui a pour titre , les jeunes Mariés
, laquelle avoit été donnée dans fa
nouveauté à l'ouverture de la Foire Saint
Laurent 1740. L'Auteur y a fait quelques
changemens qui ont été goûtés du
Public.
On croit devoir avertir que le nouvel
Entrepreneur de ce Jeu , a fait quelques
changemens très - convenables dans la Salle
de ce Spectacle ; il a fait conftruire un
nouveau Parterre dans la même pofition ,
où font les Parterres des autres Théatres
de Paris , où toutes fortes d'honnêtes gens ,
Bourgeois & autres , peuvent être placés
fans crainte d'y être confondus avec les
gens de Livrée le Roi ayant défendu
par fon Ordonnance du 17. Juin dernier
, aux Laquais & aux autres gens de
Livrées d'entrer à l'avenir fous auçun
prétexte , même en payant , au Spectacle
de l'Opera Comique comme cela fe
pratique pour tous les autres Théatres de
Paris.
,
On a conftruit auffi un nouvel Ama
phitéatr
1632 MERCURE DE FRANCE
phiteatre contigu au Parterre , où l'on eſt
placé beaucoup plus commodément que
dans l'ancien Parquet.
*********** *****
NOUVELLES ETRANGERES .
TURQUIE.
Na appris de Conftantinople , que
les trou
Erzerum, pour s'oppofer aux entrepriſes de Thamas
Kouli - Kan ; que la Flotte deftinée pour la Mer
Noire , fe difpofoit à mettre à la voile , & que le
Grand Seigneur avoit ordonné d'embarquer fur
quelques - uns des Bâtimens de cette Flotte cent
piéces de canon, de douze livres de bale, qui avoient
été fondues nouvellement à Topkana .
On a appris depuis , que l'on continuoit avec toute
la diligence poffible les préparatifs de guerre , pour
s'opposer aux entreprifes de Thamas Kouli- Kan ,
qu'on dit s'être avancé à Amadan avec une armée
nombreufe , & qui paroît être dans le deffein de
former le Siége de Bagdad .
RUSSIE.
N mande de Pétersbourg , que le 6. du mois
dernier, le Sénat avoit envoyé ordre au Comte
de Munich , fils de celui qui eft exilé en Sibérie , de
fe retirer à Wologda avec toute fa famille ; de ne
mener avec lui aucun domestique étranger , & que
ce Comte feroit déja parti pour s'y rendre, fi la Czagine
ne lui avoit permis de differer fon départ jufqu'après
JUILLET. 17439 1635
qu'après les couches de la Comtelle fon épouſe . Les
biens que S. M.Cz. lui avoit laiffés après la difgrace
de fon pere , ont été confifqués , & cette Princeffe
ne lui accorde qu'une Pention de 1000. Roubles
pour fa fubfiftance.
SUEDE,
N apprend de Stockolm du 21 du mois ders
nier , que le Colonel Palmſtruck , à la tête
de 150. Suedois , a défait dans la Bothnie Occiden
tale un détachement d'Infanterie , de Dragons & de
Huffards , des troupes de la Czarine.
L'équipage d'un Vaiffeau , venu des Côtes de
Finlande , a rapporté que le 31. Mai dernier , les
Galeres Ruffiennes , commandées Par le Géneral
Keyth , avoient attaqué celles de Suede , qui font
fous les ordres du Vice - Amiral Falkengren , & que
les unes & les autres s'étoient canonnées & bombardées
pendant plufieurs heures avec beaucoup de
vivacité.
On appris de Pétersbourg , que S. M. Cz. & le
Roi de Pologne , Electeur de Saxe , avoient ronou
vellé le Traité conclu entre la Ruffie & la Pologne
fous le Regne de la feuë Czarine.
Le 30. du mois dernier , le Lieutenant Colonel
Lingen arriva à Stockolm d'Abo , d'où il a été dépêché
au Roi par les Barons de Cederncreutz & de
Nolcken, pour informer S. M. que le 27. du même
mois les articles préliminaires de la paix entre la
Suede & la Ruffie avoient été fignés par les Miniftres
Plénipotentiaires des deux Puiffances , lefquels
étoient convenus, qu'en attendant la conclufion d'un
Traité définitif , on cefferoit de part & d'autre lès
actes d'hoſtilité. Cette nouvelle , qui fut publiée le
lendemain
434 MERCURE DE FRANCE
lendemain au bruit des timbales & des trompettes
, a caufé une joye génerale.
La Suede s'eft engagée par les articles prélimimaires
de l'accommodement , de ceder à la Ruffie la
partie de la Finlande , qui eft de l'autre côté de la
riviere de Kymen, & la Fortereffe de Miflot avec le
territoire qui en dépend , & on affure que la Ruffic
reftituera à la Suede la Bothnie, la Province de Nyland
& la Carélie Suedoife , avec les diſtricts d'Abo,
de Biornebourg & de Tavafthus.
S. M. a envoyé ordre à les Géneraux de faire
rentrer les troupes dans leurs quartiers & aux Galeres
, de revenir dans le Port de Stockolm , pour y
être défarmées.
Le Roi , accompagné du Sénat , fe rendit le 3. de
ce mois à l'Affemblée des Etats , & S. M. s'étant
placée fur fon Trône , les Etats élurent unanimement
Frederic Adolphe , Prince de Hoftein , Evêque
de Lubec , pour fucceder à la Couronne . Ce
Prince fut proclamé le 4. en cette qua ité avec les
céremonies accoûtumées en pareille occafion , & le
même jour , on fit partir deux couriers , P'un
lui
pour
porter la nouvelle de fon Election , & l'autre
pour remettre aux Miniftres Plénipotentiaires du
Roi la Ratification des articles préliminaires de paix
fignée par S. M.
Les Commiffaires établis par les Etats du Royaume
, pour juger les Géneraux qui ont été arrêtés ,
prononcerent le premier de ce mos la Sentence
du Comte de Leuwenhaupt , qui a été condamné
à avoir la tête tranchée , & dont les biens ont été
confifqués.
La Sentence , qui avoit été prononcée il y a quel
que tems par les mêmes Commiffaires contre le
Géneral Buddenbroeck , a été confirmée par la
Diette.
ALLB
JUILLET. 1743- 164
O
ALLEMAGNE.
N apprend de Vienne du 22. du mois dernier,
que le Colonel Buckow , fecond Adjudant du
Prince Charles de Lorraine , arriva le 12. de Parmée
commandée par ce Prince , lequel l'a dépêché
pour porter à l'Impératrice Douairiere la nouvelle
de la prife de Friedberg. On a fçu par cet Officier ,
que la garnison de ce Château , compofée de 83 .
Officiers & de 1226. Soldats , avoit été faite pri
fonniere de guerre.
les trou-
On mande du 30. du mois dernier , que
pes Françoiſes , qui étoient en Baviere , étant dé➡
campées des environs d'Ingolstadt , fe font raflemblées
à Donawert , & que le 26. du même mois ,
le Corps de réſerve , commandé par le Prince de
Conty , qui a fous fes ordres le Marquis du Chayla,
Lieutenant Géneral , & les Marquis d'Argouges &
de Rambure , Maréchaux de Camp , le remit en
marche pour s'approcher du Neckre. Ce Corps de
réferve eft compofé de la Brigade des Vaifleaux Infanterie,
de la Brigade de Cavalerie de Choiſeul , &
des Régimens de Dragons d'Orleans & de Vibraye .
Le reste de l'armée a pris la même route en quatre
Divifions , dont la premiere , compofée des Brigades
d'Infanterie de Champagne , de Royal & de
la Couronne ; des Brigades de Cavalerie de Chepy
& de la Peroule , & du Régiment Colonel Géneral
des Dragons , partit le 27. Cette Divifion eft commandée
par le Marquis de Clermont Gallerande
lequel a fous fes ordres le Comte de Monteflon ,
Lieutenant Géneral ; les Marquis de Chaferon & du
Chafteler , le Prince de Pons , le Marquis de Langerön
, le Marquis de Maupeou & le Comte de la Luzerne
, Maréchaux de Camp.
La feconde Divifion , laquelle décampa le 28 .
H eft
1626 MERCURE DE FRANCE
La feconde Divifion , laquelle décampa le 20
eft compofée des Brigades d'Infanterie de Bourbonnois
, de Lyonnois & de la Saarre ; de celles de Cavalerie
de Coffé & de Fitzjames , & elle eft commandée
par M. de Louvigny , qui a fous lui le-
Comte de Danois , Lieutenant Géneral, le Duc de
Boutteville , le Marquis de Caraman , le Comte de
Clermont Tonnerre , le Comte de Rupelmonde ,
le Comte de Mauroy & le Duc de Briffac , Maré-,
chaux de Camp..
Elle fut fuivie le 29. par la troifiéme Diviſion , à
la tête de laquelle font M. de Lutteaux , le Marquis
du Cayla & le Comte de Coigny , Lieutenans Gé
neraux ; le Marquis de Brun , le Comte de Rieux ,
le Marquis de Brezé , le Comte de Fontaine Martel ,
le Marquis d'Hautefort & le Comte d'Harcourt ,
Maréchaux de Camp , & qui eft compoſée des Brigades
de Normandie , de Poitou & de Bretagne ,
Infanterie ; de deux Brigades de Cavalerie & du
Régiment de Dragons de la Reine.
La quatrième & derniere Divifion marcha le 30.
fous les ordres de M. Phelippes , du Comte de Baviére
& du Prince de Montauban , Lieutenans Gé❤
neraux , & des Marquis de Refuge , de Beranger ,
de la Ravoye , de Monconfeil , d'Armentieres , du
Comte de Biffy & du Prince des deux Ponts , Ma
réchaux de Camp. Dans cette Divifion , font les
Brigades d'Infanterie de Picardie , de Bouzols , de
Montmorin & d'Alface ; celles de Nugent , de Rofen
& de Cruffol , Cavalerie , & les Régimens de
Dragons de fainte Mefme & de Lillebonne .
Le rendez- vous de ces troupes étoit à Wimpfen ,
& la route qu'elles ont dû fuivre , étoit à Oppinguen,
à Norling, à Bopfinguen , à Neuhim, à Thann ,
à Hall , à Stingen & à Hoentheim.
On a appris de Francfort que l'Empereur y étoit
arrivé d'Ausbourg le 28. du mois dernier.
T
JUILLET. 1745 1627
M
Selon les lettres reçûes de Bavière», le Comté de
纂
Kevenhuller y a fait publier de la part de la Reine
de Hongrie une Déclaration , portant que tous les
habitans des Villes , Bourgs & Villages de cet blecrorat
, lefquels le foumettront volontairement aux
troupes de cette Princeffe , & qui fe tiendront tran
quilles dans les lieux de leur demeure , feront nonfeulement
traités avec douceur , mais encore qu'on
feur fournira des grains & les beftiaux dont ils aut
ront befoin , pour cultiver leurs terres ; & qu'on
ufera des dernieres rigueurs de la guerre contre
-ceux qui attaqueront les troupes de S. M. H.
19. Ces lettres ajoûtent que le du mois dernier ,
ile General Nadafti s'étoit mis en marche du Camp
de Geiffenfeldt avec un Corps de 2300. hommes de
Cavalerie Hongroife , pour s'avancer vers le Mein ,
& pour aller joindre l'armée des Alliés , que le
Colonel Pichel étoit parti du même Camp avec le
Corps d'Artillerie , pour diriger les opérations du
Siége de Braunau , qu'on avoit conduit de Palla
devant cette Place douze piéces de gros canon ,
pour la battre en breche ; que le 18. on avoit tra
vaillé à les mettre en batterie , & que les20. elles
avoient commencé à tirer .
On aprend de Stockolm , que le bruit y couroit
que les Miniftres Plénipotentiaires , qui afliitent au
Congrez d'Abo de la part de la Czarine & du Roi
de Suéde , y avoient figué la Convention Prélimi
naire d'un Armistice entre les troupes des deux
Puiffances .
On a appris du Camp de Selingeftatt du 30, da
mois dernier , que le Comte de Stairs ayant quitté
celui de Hoefcht , qui eft au - deffous de Francfort ,
& ayant fait marcher le 17. & le 18. fur le Hauté
Mein les troupes qu'il commande , le Maréchal de-
Noailles partit de Geraw avec l'armée du Roi , &
Hij qu'il
1628 MERCURE DE FRANCE
qu'il arriva en trois jours dans la Plaine vis- à vis
Afchaffembourg , dont les Alliés avoient été à
portée de s'empater , parce que cette Ville étoit de
leur côté.
Les deux armées étant campées en préfence Pune
de l'autre , le Mein entre deux , le Maréchal de
Noailles , après avoir placé deux Brigades vis - à- vis
de Pont de pierre d'Afchaffembourg , fit occuper fur
le Haut & fur le Bas Mein differens poftes , pour
ter aux Alliés les moyens de faire arriver des fubtances
dans leur Camp . Cette pofition de l'armée
du Roi produifit l'effet qu'on en attendoit , & le Comte
de Stairs ayant reconnu qu'il lui étoit impoffible
de refter plus long tems dans fon Camp , lequel
étoit appuyé par la droite au Village de Kleimoftheim
, & par la gauche à Afchaffembourg , il fe
mit en mouvement la nuit du 26. au 27. pour marcher
fur Hanaw.
Le Maréchal de Noailles , qui en fut averti à une
heure après minuit , monta à cheval , & ayant donné
l'ordre pour que les troupes du Roi ſe tinſſent
prêtes à marcher , il alla reconnoître les mouvemens
des Alliés qu'il vit en marche fur deux Colonnes.
Il revint à Selingeftatt, où il y avoit deux Ponts,
fur lefquels il fit paffer le Mein aux trois Brigades
d'Infanterie d'Auvergne , de Touraine & d'Orleans,
qui furent jointes peu de tems après par laBrigade des
Gardes Françoifes & par celle de Noailles . Pendant
que l'Infanterie paffa le Mein far le Pont de Selingeftatt
, 11. Efcadrons -de Cavalerie, 21. de Dragons
& 6. de Huffards , pafferent la même Riviere aux
qués qui y avoient été reconnus .
Ces troupes étant arrivées au de- là du Mein , le
Maréchal de Noailles plaça une Brigade d'Infanterie
fur le bord du Mein dans un Village qui fermoit
fa droite ; il appuya ſa gauche à un bois , &
la
JUILLET. 1743 1629.
la Cavalerie ayant occupé le centre , la Plaine fe
trouva entierement fermée .
Le Maréchal de Noailles , après avoir fait cette
premiere difpofition , repaffa le Mein , pour donner
fes ordres aux troupes auxquelles il n'avoit pas fait
paffer la Riviere , & pour obferver les mouvemens
des Alliés. Il découvrit qu'aulieu de continuer leur
marche , ils le formoient fur plufieurs Lignes compofées
alternativement , fans aucun intervalle, d'Infanterie
& de Cavalerie , & que les troupes du Roi
s'avançoient au de- là du Village d'Ettingen par un
défilé formé par un Ravin , fur lequel il n'y avoit
qu'un feul Pont. Le Maréchal de Noailles fe porta
aufli tôt au Village d'Ettingen , mais les cinq Brigades
d'Infanterie & une partie de la Cavalerie
ayant déja paflé le défilé , & ces troupes le trouvant
fort près de l'armée des Alliés , qui étoit en bataille,
le Maréchal de Noailles ne s'occupa qu'à faire la
meilleure difpofition que le terrain permettoit .
Les troupes du Roi effuyerent , fans tirer , le feu
de la Moulqueterie des Alliés , & elles les attaquerent
trois fois , mais elles ne purent rompre leur
première Ligne , laquelle étoit foutenue par deux
autres , appuyées au Mein & à des bois qu'on ne
pouvoit tourner.
Le Maréchal de Noailles s'étant déterminé par
cette raiſon & par celle de la fuperiorité du nombre
des Alliés fur celui des troupes du Roi , à faire ceffer
l'attaque , nos troupes repafferent le défilé en
très-bon ordre , & elles retournerent camper à Selingeftatt
.
Dans ce combat, qui a duré plus de trois heures,
& pendant lequel le feu des Alliés a été auffi vif que
continuel , les François ont eû environ 600 , hommes
de tués & 1200. de bleffés , dont un grand
nombre l'a été légerement. Les Alliés y ont perdu
H iij environ
1630 MERCURE DE FRANCE
ehviron sooo . hommes , dont In plus grande partie
a été tuée par notre artillerie , & on leur a pris trois
pieces de canon & quelques Etendarts.
* Pendant la nuit , le Comte de Stairs ſe mit en
marche pour le rendre à Hanaw , & il s'eft retiré
avec tant de précipitation, qu'il alaiffé fur le champ
de bataille deux piécés de canon, & 600. bleffés que··
le Maréchal de Noailles a fait tranſporter dans nos
Hôpitaux , où on en prend beaucoup de foin .
Les principaux Officiers que nous avons perdus
dans cet e action , font le Duc de Rochechouart , le
Comte de Sabran , & le Marquis de Fleury le Marquis
de Chabannes Marioles & le Marquis de Vandüil
, Lieutenans des Gardes du Corps ; de la Ro
chejaquelin' , de Quiffelin , le Chevalier de Roncherolles
& de Vandeuil , Exempts ; les Marquis
de Wargemont & de Meffey , Officiers de la Com
pagnie des Gendarmes ; le Coigneux Officier de
la Compagnie des Chevau- Legers , le Comte de .
Coedlogon , Enfigne de la feconde Compagnie des
Moufquetaires , MsPinon , le Marquis de Langey;
Boucoiran , Boiffon . , Charpentier & d'Averolles ,
Capitaines au Régiment des Gardes Françoires .
Les principaux Officiers bleflés , font le Comte
d'Eu , le Duc d'Harcourt , le Duc de Boufflers , le-
Comte de Beuvron ; Mrs de Cherifey, des Cajeul,&
de Montgibaut , Lieutenans des Gardes du Corps ;
de Beaumont, Enfeigne ; le Baron d'Ordrė,Mrs d'Andelau
, d'Efpinchal , de Poi , de Chalabre de Mo--
rinval , de Maneville , de Blaru , d'Anger , de Verceil
de Saint Chamant , de Sept Maifons , de Levignan
de Vogue, H tier & d'Arnianville , Exempts
des Gardes du Corps , és Marquis de S. Chamant
& de Merinville Officiers de la Compagnie des
Gendarmes , le Comte de Marigoane , Sous- Lieufenant
de la Compagne des Chevaus Eegers , le
2.
Marquis
JUILLET.17430 1631
Marquis de Chabannes , Cornette de la feconde.
Compagnie des Moufquetaires ; Mrs de Gault & de
Combes , Lieutenans des Grenadiers à cheval ; le
Marquis de Bourdeilles , le Comte de Biron , le
Vicomte de Coetlogon , les Marquis de Guftine , de
Maupeou , de Vaubecourt , de Balleroy , Colonels
d'Infanterie , M. de Chabot la. Serre , Mestre de
Camp de Cavalerie , & Mrs de S. Maurice , de Soupire
, de S. Aubin & de Chambon , Capitaines au
Régiment des Gardes Françoiſes.
On a appris de Lintz , que la Reine de Hongrie
y avoit reçu le 25. du mois dernier l'hommage des
Etais de la Haute Autriche , & qu'elle avoit confir
mé à cette occafion les priviléges des habitans de
·cette Province . S. M. H. a accordé le pardon à plufieurs
perfonnes, qui avoient été arrêtées pour avoir
montré de l'attachement aux interêts de l'Empereur ,
On mande de Wimphem , que 2000. Huflards
ont fait prifonniers les malades qui fuivoient l'armée
du Maréchal de Broglie , & les Soldats qui
-leur fervoient d'escorte.
Les avis reçûs de Bavière portent que l'Empeseur
étoit convenu d'une fufpenfion d'armes avec
la Reine de Hongrie.
On a appris du Camp de Steinheim du 12. de ce
mois , que le Comte de Stairs ayant fait marcher le
28. du mois dermier à la pointe du jour , l'armée
qu'il commande , pour fe rendre à Hanaw , il cam
pa ce jour-là dans les environs de cette Ville ; qu'il
s'avança le lendemain à Enckheim fous Bergen ,
entre Hanaw & Francfort , & qu'il envoya
camp fur la Nied , à Wiebel & à Grunauw , dif
ferens Corps de troupes , lefquels le porterent le 3.
de ce mois du côté de Hoefcht.
de ce
Le Maréchal de Noailles , qui étoit resté depuis
le 27. du mois dernier à Séliugeftatt , en decampa
Hij le
1532 MERCURE DE FRANCE
le 2. de ce mois , pour ſe rendre à Steinheim , où
étoit plus à portée d'obſerver les mouvemens de
l'armée des Alliés . Il y apprit le . que le Comte de
Stairs avoit porté une partie affés confidérable de
fes troupes du côté de Felhenheim , pendant qu'il
en raffembloit d'autres à Hoefcht , & fur cet avis
il fit partir le même jour le Marquis de Montal ,
Lieutenant Géneral , avec les trois Brigades d'Infanterie
, du Roi , Dauphin , & des Irlandois ; les Brigades
de Cavalerie des Cuiraffiers & des Carabiniers
; la Brigade du Meftre de Camp General de
Dragons ; les deux Régimens de Huffards de Berchiny
& d'Esterhazy , avec vingt piéces de canon ,
& il lui dona ordre d'aller camper avec ces troupes
dans la Plaine d'Offembach. Ce Géneral fit
avancer en même tems à Sprinlingen , fous les ordres
du Chevalier d'Apcher , Maréchal de Camp ,
les Régimens de Cavalerie Royal Allemand , &
Royal & le Régiment de Dragons de Surgeres.
Le Maréchal de Noailles a laiffé l'armée Françoife
dans cette pofition jufqu'au 12. de ce mois au matin
, qu'il a pris le parti de le rapprocher du Rhin.
La Reine de Hongrie a nommé le Prince de
Lobckowitz , pour commander fes troupes en Italie
, à la place du Comte de Traus.
On a appris de Baviére , que les troupes Bavaroifes
, qui étoient en garnifon dans Braunaw , ont
capitulé .
On mande de Hambourg du 12. de ce mois , qu'il
y arriva le 9. de Stockolm un courier , par lequel
l'Evêque de Lubeck a appris qu'il avoit été élû pour
fucceder à la Couronne de Suéde.
Selon les avis de Suabe la premiere Colonne de
l'armée , commandée par le Prince Charles de Lorraine
, pafla le 8 de ce mois au matin le Danube ;
elle fut fuivie le même jour après midi par la fe
conde
JUILLET. 1743. 1633
conde Colonne , & le lendemain par la troifiéme
On mande de Braunaw , que les Troupes Impé
riales , qui y étoient en garnifon , en étoient fortie
le 4.de ce mois , conformément à la Capitulatio
dont le Gouverneur de la Place eft convenu avec le
Commandant des troupes Autrichiennes , qui em
ont formé le Siége .
Les mêmes avis portent que le Comte de Sec
kendorf ayant envoyé le Comte, Rambaldi au Ba
ron de Berencklau , pour traiter de l'évacuation de
Straubingen avec ce Géneral , ce dernier avoit fait
réponse qu'il ne pouvoit entrer en aucune négocia
tion à ce fujet , fans la participation du Prince
Charles de Lorraine .
On a appris de Studgard , que les trois Colonnes
de l'armée commandée par ce Prince , ont dû arri
ver le 18. de ce mois fur le bord du Neckre.
ESPAGN, L.
N apprend de Madrid du 2. de ce mois , que
l'Intendant de Marine de Malaga a mandé au
Roi , qu'un Pacquetbot Anglois , commandé par le
Capitaine Davidfon, avoit été pris dans les environs
d'Alhucemas par l'Armateur François Marie Valenzula
, & que les Armateurs Don Jofeph Vila
& Sebaftien de Morales , avoient enlevé fur la Côte
de Barberia , à la hauteur de l'Ile d'Alboran,les deux
Vaiffeaux la Marie & le Guillaume Marie.
Deux autres Bâtimens de le même Nation , nommés
le Succés & la Charmante Galiotte , ont été
conduits au Port de Bayona , par l'Armateur François
Barrera , qui s'en eft rendu maître fur la Côte
de Portugal.
On a appris de Guarnizo , que la Frégate le
Royal Biscayen, armée en courfe par Don François
Hv Larrera 2
1634 MERCURE DE FRANCE
Larrea, eft rentrée dans la Riviere de Santander avec
le Vai..cau Anglois le Suift , dont elle s'eft emparée
dans les environs du Cap de Clare.
Les Armateurs Eſpagnols ont encore pris depuis
peu les Valleaux la Vierge , t Efperance , l'Aigle ,
le Guillaume , Agréable , le Henry , le Glocester , le
Jofeph , le Loyal , le Betfey , & le Profit.
Deux Armateurs Efpagnols out brulé fur la Côte
d'Afrique les Vaifleaux le Cap Coart, l'Aigle de Rhodes
ifland & le S. Jacques , ils le font rendu maîtres
des Vailleaux la Reine de Hongrie & le Worcester ,
& ils on obligé le Vaiffeau d'Hironde.le , d'aller
échouer fur la ôte. •
Un autre Armateur Espagnol s'eft emparé du
Vaiffeau le Succés , commandé par le Capitaine
Gibſon.
•
Le Gouverneur de Porto Cavallo a mandé au
Roi, que le Chef d'Efcadre Knowles, n'ayant point
été découragé par le mauvais fuccès qu'il avoit
éprouvé à l'attaque de la Guerra avoit remis à la
voile de Caraçao le 31. Mars dernier avec onze
Vaiffe aux de guerre de l'Efca fie Ang oile
qu'il commande , une Galiotte à Bombes , deur Bâtimens
de transport , & quatre autres Vaifleaux ,
qu'il a contraint les Hollandois de ui fournir , contre
les intentions & les ordres des Erats Géneraux ,
& qu'étant arrivé le 26. du mois d'Avril dans les
environs de Porto Cavallo , il avoit jetté l'ancre à
'Eft de cette Place fous les Quais de Barbara ; qu'il
avoit fait avancer deux Vaifleaux , pour tâcher de
démonter deux batteries l'une de douze & l'autre
de fept canons placées à la pointe baile du côté
oppofé au Château , mais que ces Vaifteaux , quoique
tirant de revers fur ces batteries ne leur avoient
caufé aucun dommage que fur le foir toutes les
troupes de débarquement , qui étoient fur les Vaiffeaux
JUILLET. 1743. 1635
feaux de l'Escadre ennemie , étoient defcendues a
terre , & qu'elles avoient attaqué les troupes Efpa
gnoles qui gardoient les batteries ; que les Anglois,
malgré la vivacité de leur feu, avoient été mis en dé,
route , qu'ils avoient regagné précipitamment leurs
chaloupes ,& que les Espagnols en avoient tué ungrand
nombre,en les pourſuivant;que le 4. du mois de Mai,
le Chef d'Efcadre Knoulles avoit fait canonner en
même tems le Château, les deux batteries de la poine.
te baffe , & trois autres batteries que les Espagnols
avoient établies fur le rivage ; que le feu des Anglois
avoit duré depuis midi, jufqu'à neuf heures du
foir, mais que la plupart de leurs Vaiffeaux avoient été
fi maltraités qu'ils avoient été obligés de fe retirer,&
que leur Efcadre n'étant plus en état de former auçu- /
ne entréprile , avoit repris la route de la Jamaïque ,
Les Espagnols ont pris les Vailleaux Marchands
la Fourmy , le Lyon & le Gibraltar.
O
ITALIE.
N apprend de Venife , que l'on a fenti à Palerme
& à Catanea , une fecouffe de tremble "
ment de terre , qui a caufé à ces deux Villes un
dominage confidérable .
GENES ET ISLE DE COR SE.
N mande de Genes , que M. Giuſtiniani eſt
enfin arrivé à la Baftie , & que depuis le r2 .
du mois dernier qu'il y eft débarqué, il ne s'y étoit
rendu perfonne de la Campagne , à caufe des défenfes
rigoureufes que les Chefs des Rebelles leug
ont faites d'entretenir aucun commerce avec les
Genois .
1
Les Rebelles ont réfolu de ne commettre aucune
hoſtilité contre la République ni contre les Infu
H vj laires
1637 MERCURE DE FRANCE
laires qui lui font demeurés fidéles , à moins qu'ils
n'en fuffent attaqués ; ils n'ont jamais paru fi unis
qu'ils le font préfentement ; ils obéiffent aveuglément
à leurs Chefs , lefquels ont fait pafler par les
armes un habitant de Roftino , convaincu de vol &
d'aflaffinat , & ont fait brûler la maifon d'un autre,
coupable des mêmes crimes.
Le 21. du mois dernier , la Ducheffe de Modéne
reçût de France un courier , dont les dépêches
Pont déterminée à partir inceflamment pour s'y
rendre , & la République lui ayant accordé une
Galére pour la tranfporter à Maifeille , cette Princeffe
n'attendoit plus qu'un tems favorable pour
s'embarquer.
Une Barque fur laquelle étoient douze Forçats
avec deux Bonevoglies , un Algouzin & quatre
foldats , ayant mis à la voile pour aller chercher
du Left à la Plage de S Pierre d'Arena , les For
Cats fe font foulevés , & ayant jetté à la Mer ceux
de l'équipage qui ont voulu leur faire réfiftance
ils le font réfugiés à bord d'un. Vaiffeau de guerre
Anglois , dont le Capitaine a refufé de les rendre ,
prétendant qu'ils devoient jouir de la protection ,
du Pavillon de la Grande Bretagne.
>
Le Senat envoya le 20. du mois dernier des Députés
à M. de Jonville , Envoyé Extraordinaire du
Roi de France , pour faire des excuſes à ce Miniftre
, de la violence commife par des Sbiires , lef
quels avoient tenté d'enlever un priſonnier qui s'é- -
toit fauvé dans l'Hôtel de cet Envoyé & pour
l'aflurer que ces Sbirres avoient été condamnés à
fix nois de prifon , & que leur Officier avoit été
caffé .
M. Giuſtiniani a mandé au Senat que peu de
jours après fon arrivée à la Baftie il avoit adreflé à
toutes les Piéves une Lettre Circulaire , par la
quelle
JUILLET. 1743.1837
quelle il les exhortoit à envoyer leurs Députés
pour lui déclarer leurs prétentions , & que par la
même Lettre il leur avoit fait efperer que la Répu
blique , pourvû qu'ils fuflent véritablement difpo-.
fés à demeurer fous fon obéillance , leur accorde
roit tout ce qu'ils demanderoient de jufte & de
raifonnable , que les Députés de plufieurs Piéves
s'étoient déja rendus à la Baftie , & que l'Evêque
Mariotti étoit de ce nombre.
1
On a appris de Calvi que les Rebelles , qui s'é
toient allemblés dans les environs de Campoloro ,
s'étoient déterminés , auffitôt qu'ils ont été infor
més du débarquement de M. Gruftiniani , de s'avancer
a Cazinca , afin d'être plus à portée de
traiter avec ce Commiffaire Géneral.
>
Les avis de Lombardie marquent que deux Régimens
d'Infanterie & deux de Cavalerie des
troupes Pien ontoifes qui font dans les Duchés de
Parme & de Plaifance , s'étoient mis en marche
par ordre du Roi de Sardaigne , pour retourner
dans le Piémont .
•
t
On a appris qu'il y a eu dans le Duché de Plaifance
un Ouragan fi terrible , que plufieurs maifons
ont été renversées , & que la plupart des ar
bres ont été abbatus. Cet accident ajetté dans une
extrême confternation les peuples de ce Duché ,
Jefquels craignent de ne pouvoir continuer de
payer les 6000 florins , qu'ils font obligés de :
fournir tous les mois , pour fubvenir aux dépenfes
de la guerre.
On mande de la Baftie, que les Rebelles ont dû
tenir le 14 de ce mois une Affemblée génerale , &
qu'ils avoient répondu à l'Officier Génois qui leur :
avoit été envoyé par M Giuftiniani , Commiffaire
Géneral de la République qu'ils avoient expofé
leurs prétentions au feu Marquis Spinola : que c'é
3
Loit
1638 MERCURE DE FRANCE
toit à M. Giuftiniani à déclarer ce que la Républi
blique vouloit leur accorder , & que lorsqu'ils en
feroient inftruits , ils examineroient , fi les condi
tions qui leur feroient propolées , pourroient leur
convenir.
O
GRANDE - BRETAGNE.
N mande de Londres du 4 de ce mois qu'il
y arriva le 3. de l'armée fur le Mein un courier
dépêché par le Lord Carteret , pour informer
les seigneurs Régens du Royaume , que le 27. du
mois dernier , il y avoit eû une action très vive
entre cette armée & une partie des troupes Françoiſes
, commandées par le Maréchal de Noailles ;
fuivant les dépêches de ce courier , il paroît que
P'armée des Alliés , quoiqu'elle s'attribuë lavantage
de ce combat , a fait une perte beaucoup plus
confidérable que celle de S. M. T. C. & qu'elle a
été obligée en fe retirant vers Hanaw , de laiffer
fes bleffés fur le champ de bataille , & fes malades
dans le cimp qu'elle a abandouné .
Le Duc de Cumberland a eû la jambe percée
d'une bale; le Duc d'Aremberg , Géneral en Chef
des troupes Autrichiennes , a été auffi bleflé d'un
coup de feu , le Lord Clayton , Brigadier Général
au fervice du Roi , a été tué ; le Baron d'Illan & le
Comte de Monroy , Lieutenans G néraux dans les
troupes Hanoveriennes , ont reçû plufieurs bleffures
, & le Régiment Anglois de Ligonier a beau
coup fouffert , ainfi que plufieues au res , particulierement
ceux de Ligne & de Stirum , des trou--
pes de la Reine de Hongrie , les batteries que ·les
François avoient établies fur le bord du Mein
ayant été fervies avec la plus grande vivacité , & le
canon ayant tué beaucoup de monde..
L'Equi-
"
JUILLET.
17431639
L'Equipage d'un Bâtiment , revenu de Port Ma
hon , a rapporté que la Galiotte armée en courfe
par le Capitaine Smith s'étoit emparéé d'un
Vaiffeau Elpagnol , chargé de vin , de cochenille'
& de bois de Campeche.
On a appris par un Bâtiment arrivant de la nou
velle Yorck , qu'un Brigantin de la même Nation
fur lequel il y avoit des munitions de guerre defti
nées pour la Guerra , avoit été pris par le Vaiffeau
de guerre te Lancefton , ainfi que deux autres Bâti
l'un de 300. tonneaux , & l'autre de 2500
dont la charge confiftoit en argent , en cochenille
& en cuirs .
mens ,
Depuis l'arrivée du courier par lequel on a ap
pris l'action du 27: du mois dernier , on en a reçû
un autre qui a apporté une Rélation de ce com →
bat , laquelle contient les particularités fuivantes.
Le Roi ayant été informé le 26. que le Maréchal
de Noailles fe propofoit d'empêcher la jonc
tion de l'armée des Alliés avec les huit Bataillons
qui étoient venus de Hanover , pour la renforcer
& avec le Corps de troupes Heffoifes , qui eft
fous les ordres du Prince Georges de Heffe , S. M.
manda à ce Prince de s'arrêter p ès de Hanaw , &
elle réfolur de faire rapprocher fon armée de celle
du Roi Très-Chrétien .
de
Dès que le Maréchal de Noailles eut reçû avis
le ce mouvement , il fir marcher le long de Mein
vers Se ingeftatt l'armée qu'il tommande , & il fir
paffer la Riviere fur deux Ponts à cinq Brigales
d'Infanterie , pendant que 19. Efcadrons la paflerent
à gué . L'artillerie qu'il avoit placée fur le
bord du Mein , ayant commencé vers les dix heu
res du matin , à tirer fur l'armée des Alliés , qu'elle
bitoit en flanc , le Roi ordonna d'établir auff
quelques batteries , & les troupes des Alliés s'étant
avancées
1640 MERCURE DE FRANCE
avancées malgré la vivacité du feur de l'artille sie
des François , elles arriverent à un bois , derrière
lequel les 25. Bataillons & les 29. Efcadrons.
auxquels le Maréchal de Noailles avoit fait patfer
le Mein , s'étoient rangés en bataille.
L'Armée des Alliés fe forma fur plufieurs Lignes
fans aucun inter compofées alternativement
valle , d'Infanterie & de Cavalerie , & elles s'éten
dirent devant le front des troupes Françoiles , autant
que le terrain pouvoit le permettre . Les trou
pes de la Reine de Hongrie occupoient le centre
Paîle droite étoit formée par les troupes Angloifes ,
& celles de Hanover étoient à l'aile gauche , &
ces differentes troupes avoient avec elles leur artillerie.
Les François elluyerent , fans tirer , le feu de
la Moufqueterie des Alliés , & ils les attaquerent
trois fois. Dans la premiere attaque , la Cavalerie
de la Maifon du Roi Très - Chrétien chargea avec
une extrême valeur les troupes Autrichiennes &
elle les fit d'abord plier , mais ces troupes fe rallierent
en peu de tems , & elles foutinrent tous les
efforts que cette Cavalerie fit pour les enfoncer.
•
Le Maréchal de Noailles voyant que les Fran
çois pouvoient d'autant moins efperer de rompre
la premiere Ligne des Alliés , que ceux - ci étoient
fort fupérieurs en nombre il fe détermina à faire
teffer l'attaque , & le Corps de troupes Françoi
fes , qui avoit pallé le Mein , retourna au camp de
Selingeftatt , le Maréchal de Noailles ayant laiffè
à Aich ffembourg le détachement par lequel il
avoir fait occuper ce pofte avan : le combat.
La nuit fuivante , l'armée des Alliés décampa
pour le retirer fou Hanaw , & n'ayant pas ailés
de chariots pour tranſporter tous fes bleilés , elle
a été obligée d'en laiffer environ 600. ſur le champ
de bataille .
Les
JUILLET. 1743 164
Les François affûrent n'avoir eu que 600. hom
mes de tués & 1200. de bleffés . La perre des Alliés
eft beaucoup plus confidérable , & l'on prétend
qu'elle monte au moins à sooo . hommes.
Outre le Duc de Cumberland , le Duc d'Arem→
berg , le Baron d'Ifin & le Comte de Monroy , il
y a cû plufieurs autres Officiers de diftinction de
bleffés , & le Géneral Ligonier , les Majors Géné
raux Honey wood & Johnſon , le Brigadier Général
Hafck , le Colonel Peers & le fils du Comte de
Monroy , font de ce nombre
La bleffure du Duc de Cumberland , qui a eût le
gras de la ambe percé d'une balle , n'eft pas re-.
gardée comme dangereufe , mais on craint que
celle du Duc d'Aremberg , auquel on a tiré une
balle qui lui étoit restée dans l'épaule y ne foit
pas fitot guérie.
Le Roi a été pendant tout le tems de l'action ;
à la tête des troupes Angloifes , & étant defcendu
de cheval , il s'eft porté avec la plus grande intrépidité
dans les endroits où il y avoit le plus de
péril.
Les Vaiffeaux de guerre le Biddefort & la Lime, qui
étoient allés croifer dans la Manche,font rentrés dans :
le Port de Plymouth , où le Vaiffeau l'Aldborough
s'eft rendu de Liverpool , & le premier y a conduir a
une prife Espagnole , à bord de laquelle il y avoit
un grand nombre de barils de poudre.
ly
On a appris de lá Jamaïque , que les Vaiffeaux
de guerre le Gowey , le Reppon & l'Aventure , ont
enlevé plufieurs Batimens Efpagnols , parmi lef-:
quels eft le Vaiffeau le Saint Joseph Elias el Defsdero
, de foo. tonneaux , qui alloit de Cadix à la
Vera Cruz , & dont on dir que la charge eſt eſti- :
mée 100000. livres fterlings.
On mande des laes fous le vent , que deux Ac«
mateurs
1
1642 MERCURE DE FRANCE
•
mateurs Espagnols avoient été conduits à Saint
Kits , & que le Vaiffeau , de guerre le Southfea-
Cafle s'étoit emparé d'un autre Armateur de la
même Nation , de vingt canons & de 140. hommes
d'équipage.
>
Les Vaiffeaux de guerre , le Pembroke , la Prife
de Pembroke & le Garland font arrivés aux
Dunes , ayant fous leur convoi plufieurs Bâ: imens
entr'autres le Vaiffeau de Reg : fire Le
Saint Rofaire , qui a été pris & conduit à Gibraltar
, par le Vaiffeau le Romney,
Un Vaiffeau de guerre Anglois a coulé à fond
dans les environs du Cap de Gat , un Armateur
Efpagnol , de 20. Canons & de 150. hommes
d'équipage.
O
HOLLANDE ET PAYS-BAS.
$
N mande de la Haye du 19. de ce mois
que la Biette de l'Empire a écrit aux Etats
Généraux une Lettre , laquelle porte que l'Empereur
, par un effet du zéle louable dont il
eft animé pour le bien Public , a non -feulement
fait connoître fes difpofitions pour la Paix
mais encore a fouhaité que l'Empire , conjointement
avec les autres Puiffances qui feront invitées
, contribuât par fa médiation & par fes,
bons offices , à terminer les differends de S. M. I.
& de la Reine de Hongrie ; que les Electeurs ,
Princes & Etats de l'Empire , fe fentent d'autant
plus obligés de travailler à procurer un accommodement.
entre ces deux Puiffances , qu'ils
fçavent combien la Paix eft néceffaire à l'Al-
1 magne & à toute l'Europe ; qu'ayant exami
né cette affaire dans leurs déliberations particu-,
liéres , & ayant pelé mûrement toutes les cir
conftances
JUILLET. 1743 1.6.43
conftances , ils ont pris unanimement , dès le
17. du mois de Mai dernier , la reſolution demployer
tous les moyens qui dépenatoient d'eux ,
pour retablir la tranquillité en Allemagne , & de
fe charger de la médiation entre l'Empereur &
la Reine de Hongrie , moyennant le concours
du Roi de la Grande Bretagne & des Etats Gé
néraux , & une affurance fuffifante , de la part
des deux Puiffances engagées dans la guerre ,
les pour l'acceptation de cette médiation ; que
preuves éclatantes , qu'en plufieurs occafions les
Etats Généraux ont données de leur affection
pour le Corps Germanique , ne laiffent point
hieu à la Diette de douter qu'ils n'ayent pour
agréable la communication qu'on leur fait fur
ane matiére fi importante ; que le Corps Germanique
les prie de vouloir bien lui faire fçavoir
s'ils veulent être Médiateurs conjointement
avec l'Empire , & que dans ce cas , les Electeurs
, Princes & Etats de l'Empire , ne man◄
queront pas de faire de leur côté tout ce qu
féra poffible & convenable dans les conjonctu
fes préfentes , pour faire réüffir la Médiation.
Le 15. de ce mois , le Comte de Sintzheim
Miniftre Plénipotentiaite de l'Empereur auprès
de la République de Hollande , donna part aux
Etats Généraux de l'Armistice conclu par les Comtes
de Seckendorf & de Kevenhuller.
le
Les Régimens Anglois de Rothe & de Ho
ward , & celui des Montagnards , arriverent le
10. du mois dernier à Bruxelles , & le lendealler
main ils continuerent leur route > pour
par commandée joindre l'armée des Alliés ,
Comte de Stairs . 400. Chariots chargés d'habits
& de plufieurs autres chofes néceflaires aux
troupes dont cette armée eft compoſée, marchent
avec ces Régimens,
1644 MERCURE DE FRANCE
> Le dernier courier qui eft arrivé de Hanaw
, a rapportté que le Duc d'Aremberg éroit
hors de danger , & qu'on efperoit qu'il feroit
bientôt rétabli de fa bleflure.
Le 8 de ce mois le Baron de Reischach ,
Envoyé Extraordinaire de la Reine de Hongrie ,
communiqua au Préfident de l'Affemblée des
Etats Généraux quelques dépêches qu'il avoit
reçues de Vienne le même jour par un courier
extraordinaire & par lefquelles il appris
que la Reine de Hongrie n'avoit poire voulu
fatifier l'Armiſtice dont le Conte de Kevenbul-
Jer étoit convenu conditionellement avec le Comte
de Seckendorf , jufqu'à ce qu'elle fut inftruite
des intentions de fes Alliés .
,
Toutes les roupes que la République a confenti
de fournir à la Reine de Hongrie , feront
affemblées le deux du mois prochain à
Doësbourg , & le jour fuivant elles marcheront
vers Munfter , où elles feront reçues par
les Comm ffaires de S. M H Le Comte Maurice
de Naffau , qui les commande en chef , a
pris le 26 de ce mois la route d'Arnhem , avee
Je Baron de Ginkel , un des Generaux
doivent fervir fous fes Ordres.
, qui
FRANCE
JUILLET. 1743 164
FRANCE ,
NOUVELLES DE LA COUR , DE PARIS , &C
1
E 2. de ce mois , le Prince de Grim
berghen , Ambaffadeur Extraordinaire
de l'Empereur
eut une audience particu
liere du Roi , && iill y fut conduit par le
Chevalier de Saintot , Introducteur des Ambaffadeurs.
La Charge de Premier Gentilhomme de
la Chambre qu'avoit le Duc de Rochechouart
, qui a été tué au Combat , donné
près du Mein le 27. de ce mois , a
été accordée par le Roi au Fils de ce
Duc.
Un courier dépêché de Stockholm le
5. de ce mois par le Marquis de Lanmary
, & arrivé à Verfailles le 17. a apporté
la nouvelle de la conclufion de la
Paix entre la Ruffie & la Suéde , & de
l'Election faite unanimement pour fucceder
au Trône de Suéde , de l'Evêque de
Lubeck , lequel a été proclamé le 4.
On ne fait pas encore le détail des
conditions
1646 MERCURE DE FRANCE
> conditions de la Paix & on a feulement
appris que par les Articles Préliminaires
du Traité , la Suéde eft convenuë
de ceder à la Ruffie le Gouvernement de
Kimengor , jufqu'à la premiere branche de
la Riviere de Kimen , du côté de la Suéde
, ainsi que la Fortereffe de Miflot , &
fon territoire , qui eft d'environ deux lieuës .
Le Roi a quitté le 11. de ce mois le
deüil que S. M. avoit pris le 20. du mois
dernier pour la mort de la Ducheſſe Doüairiere
de Bourbon.
Le Roi a fait Maréchaux de Camp , le
Duc de Chartres & le Duc de Penthié
vre , & S. M. a nommé Brigadier M. de
Cremille Maréchal des Logis de l'armée
du Roi , commandée par le Maréchal de
Noailles.
›
M. Boucher , Intendant de la Généralité
de Bourdeaux ayant demandé au
Roi la permiffion de revenir , S. M. a
nommé , pour lui fuccéder , M. de Tourny
,Intendant de la Géneralité de Limoges ,
lequel eft remplacé par M de la Chataigneraye
, Maître des Requêtes.
Le Roi a donné la place de Confeiller
d'Etat
JUILLET. 1743 . 1647
>
' Etat , vacante par la mort de M. de Vaſtan ,
. M. de la Galaifiere Maître des Recuêtes
& Intendant en Lorraine , & celle
e Confeiller d'Honneur au Parlement
u'avoit M. de Cramaille , à M. de Feriol
Argental , Confeiller au Parlement,
>
Les troupes Françoifes qui étoient en
3aviére fous les ordres du Maréchal de
Froglie étant retournées à Dona wert ,
lles en repartirent le 26. du mois derier
& les jours fuivans
, pour aller à
Vimphen fur le Nekre. Ces troupes y font
arrivées fucceffivement par divifions , & le
. de ce mois , elles s'y font trouvées enerement
raffemblées. Le Maréchal de Brolie
s'eft rendu à Wimphén , à la tête de
troificme divifion , & il en eft parti le
9. après avoir remis le Commandement
ae l'armée au Comte de Saxe. Ce Lieu
tenant Géneral commandera fous les orres
du Maréchal de Noailles toutes ces
Troupes , qui fe font mifes en marche ;
pour aller à Spire.
BENEFICES DONNE'S.
L'Abbaye de S. Georges des Bois , Orre
de S. Auguftin , Diocèfe du Mans
vacante par le decès du dernier Titulaire , à
M. Lefevre de Megrigny , Acolythe du Diocèfe
de Paris.
1648 MERCURE DE FRANCE
,
Celle de la Reole Ordre de S. Be
noit , Diocèfe de Tarbes , vacante par le
decès de M. de S. Marfault de Chateillaillon,
à M. de Beaupoil de S. Aulaire , Prêtre ,
Vicaire Géneral de Tarbes.
Celle de Sandras , Ordre de S. Be
noir , Diocèfe d'Alais , vacante par la mort
de M. de Maniban , Archevêque de Bordeaux
, à M. l'Abbé Hardoin , Prédica,
teur de S. M.
Celle de S. Pierre d'Auxerre , Ordre de
S. Auguſtin , à M. l'Abbé de Boucoiran ,
( Jofeph de Calviere ) frere de feu M. de
Boucoiran , Capitaine au Regiment des
Gardes Françoiles , tué au Combat donné
près du Mein le 27. du mois dernier.
Le Prieuré de S. Blaife du Houx , dans
la Paroiffe de Supille , Diocèfe du Mans ,
vacant par le decès de M. Chevalier , à
M. Froger.
Le 31. de ce mois Monfeigneur le
Dauphin alla voir l'Hôtel des Invalides
pour la premiere fois ; ce Prince y arrriva
vers les cinq heures après midi & entra
par la porte du Dôme , du côté de la
Campagne; M. le Comte d'Argenfon, Minif
tre de la Guerre , avec le Gouverneur de
PHôtel , & un détachement des foldats qui
étoient fous les armes , le reçûrent à la
porte, Le
JUILLET . 17437 1649
Le Curé des Invalides , accompagné de
fon Clergé , lui préfenta l'Eau benite &
le harangua. Ce Prince a été gardé fuivant
P'ufage par les Invalides mêmes , & dans
la vifite qu'il a faite dans toutes les
parties de l'Hôtel , il a éte fuivi par une
garde de bas Officiers,
,
Tous les Invalides qui étoient en prifon
furent rélâchés par ordre de Monfeigneur
le Dauphin , qui ordonna auffi
d'en faire rentrer plufieurs dans l'Hôtel qui
en avoient été chaffés pour differens fujets.
Monfeigneur le Dauphin qui avoit été
chargé d'annoncer de la part du Roi , au
Gouverneur , que S. M. lui donnoit 4000.
livres de penfion fur l'Ordre de S. Louis,
& la Croix de S. Louis au Major , leur
fit part de ces graces avec beaucoup de
bonté. On fit trois falves de l'Artillerie
des Invalides. Ce Prince fortit de l'Hôtel
par la grande porte , traverfa la Cour , les
foldats Invalides étant fous les armes ; il
fe rendit à l'Hôtel de Chaſtillon , chés M.
le Duc de Chaftillon fon Gouveneur , où
il foupa à une table de quinze Couverts ,
Il y eût trois autres tables , fçavoir une
pour les Officiers des Gardes du Corps ,
une pour les Gardes du Corps , & une
autre pour les Pages , fans compter tous
les gens de Livrée du Roi auxquels on donna
auffi à fouper.
I U
1650 MERCURE DE FRANCE
Il y eut une tres - belle illumination dāns
Le Jardin de cet Hôtel & un Feu d'Artifice
. Monfeigneur le Dauphin parut fort
content de ce brillant Spectacle. Il partit
de l'Hôtel de Chaftillon vers les 11. heures
; il rendit une Vifite à Madame la Ducheffe
d'Orleans qui étoit à Chaillot , chés
laquelle la Reine foupoit ce Prince y
refta une demie heure , & de là il retourha
à Verfailles.
Le 31. Juillet , la Reine accompagnée
des Officiers de fa Maiſon & des Dames
de fa Cour , arriva fur les fept heures du
foir au Monaftére de Chaillor , où S. M.
vit d'abord S. A. R. Madame la Ducheffe
d'Orleans , & eut une converfation avec
cette Princeffe dans les Bofquets du Jardin.
La Reine alla enfuite vifiter le Convent
,
& à fon retour elle entra avec S. A. R.
dans un Cabinet de verdure , où l'on fervit
des Glaces . Sur les huit heures & demie
, S. M. & S. A. R. fe mirent à table
; le Souper dura jufqu'à dix heures
; il y eût plufieurs autres tables fervies
avec la même profufion & la même
délicateffe , & quantité de toutes fortes de
rafraichiffemens. Vers les 11. heures , Monfeigneur
le Dauphin , qui au retour de l'Hôtel
des Invalides , avoit foupé chés M. le
Duc
JUILLET. · 1743. 1655
•
Duc de Chaftillon , entra dans le Salon
Ce Prince , après avoir embraffé S. A. R
refta environ une demie heure, & retourna
enfuite à Verfailles , S. A R.
étoit accompagnée de la Ducheffe de
Modéne & de la Princeffe de Mo ' éne
;
fa fille aînée . La Reine joüa enfuite au
Jeu de Cavagnote , & retourna à Verfailles
vers les trois heures du matin..
Le premier , le 6. le 8. & le 10. Juil
let il y eût Concert chés la Reine
M. de Blamont , Sur - Intendant de la Mufique
du Roi en femeftre , fit chanter le
Ballet des Fêtes Venitiennes , dont les principaux
rolles furent parfaitement bien exécutés
par les Dlles Lalande , Romainville
& Deschamps , & par les fieurs d'Angerville
, Dubourg & Poirier .
Le 13. le 17. & le 20. M. Royer fit
concerter devant la Reine fon dernier Bal
let du Pouvoir de l'Amour , lequel fut exécuté
au mieux , & fit beaucoup de plaifir
à toute la Cour ; les principaux rolles
furent remplis par les Dlles Fel & Mathieu
, & par les fieurs Benoît & Jelyot ,
& par les autres fujets qu'on vient de
nommer.
Le 22. le 24. & le 27. la Reine entendit
le Ballet de l'Europe Galante ; la
I ij Dile
1852 MERCURE DE FRANCE
Dlle Romainville remplit le rolle de
Roxane , les autres furent chantés par les
mêmes fujets.
EXTRAIT d'une Lettre , écrite de Troyes
au fujet de l'Election d'un Maire.
M
Pré-
Onfieur Remond , Ecuyer , ancien
Confeiller aux Bailliage & Siége
.
,
y
fidial de Troyes , & Confeiller de Ville ,
dans l'Election qui fe fit le 11. Juin dernier
à la Maifon de Ville fut nommé
Maire , & réunit tous les fuffrages ; il
a peu d'exemples d'une Election auffi unanime
; un Choix auffi généralement -applaudi
, juftifie celui que M. le Pelletier
de Beaupré , Intendant de la Province de
Champagne fit de fa perfonne , en le nommant
fon Subdelgué au mois de Mai 1741 .
Le nouveau Maire qui fut installé le 27.
Juin avec les cérémonies ufitées avec
un concours extraordinaire de peuple , qui
témoigna par fes acclamations réiterées
la joye dont il étoit penetré , donna le 9,
Juillet , dans la grande Salle de la Maifon
de Ville un fuperbe Souper ; il y eût
deux tables de trente Couverts , fervies
avec autant de profufion que de délica
teffe ; les vins les plus exquis , & les lie
queurs les plus rares y furent diftribués
abondamment ; on admira fur tout l'or
dre
JUILLET 1743 165$
are & l'arrangement des Deflerts , dont le
goût ne fut pas moins fatisfait que le
coup d'oeil.
MORTS ET NAISSANCÈS.
L
E 29. Juin , M. François- Honoré de
Maniban de Cafaubon , Archevêque de
Bordeaux & Abbé de l'Abbaye de Sandras
O. S. B. Diocèfe d'Alais , mourut fans fon
Diocèfe . Il fut nommé à l'Abbaye de Sandras
le: 15. Août 1712. Il fut fait au mois de
Juillet 1714. Vicaire Géneral du Diocèfe de
Touloufe & Grand Archidiacre. Il fut nommé
Evêque de Mirepoix le 8. Janvier 1721 .
fut facré & prêta ferment de fidelité entre les
mains du Roi, le11 . Novembre de la même
année. Il fut nommé le ... Octobre 1729.
à l'Archevêché de Bordeaux , & prêta ferment
de fidelité au Roi le 11. Avril 1730 .
Il étoit fils de François Lancelot de Maniban
de Cafaubon , Confeiller au Parlement de
Toulouſe , & de D. & Coufin germain de
M. Gafpard-Jofeph de Maniban , Marquis
de Maniban & de Campagne , Baron de
Cafaubon & de Bufca , aujourd'hui Premier
Préfident du Parlement de Toulouſe , depuis
le 9. Octobre 1721. qui de fon mariage avec
I iij
D.
1654 MERCURE DE FRANCE
D. Jeanne-Chriftine de Lamoignon Blancmefnil,
n'a que deux filles ; fçavoir Made. la-
Marquife de Malaufe Bourbon , & Made. la
Marquife de Livry Sanguin ; la famille de
Maniban connuë autrefois fous le nom de la
Baffa , eft noble & Originaire du Pays d'Armagnac
; & elle porte pour Armes ,
d'Azur à deux bourdons de Pelerin , d'or
paffés en fautoir , les pointes baffes , &
accompagnés en chef d'un Croiffant d'or , &
en pointe de trois larmes d'argent , pofées ,
une à chaque flanc , & l'autre en pointe.
Le 11. Juillet , M. Nicolas Havetel , Seigneur
de Vauciennes , le Camoy , la Chapotte
& c . Prêtre Chanoine & Grand Archicre
de l'Eglife Cathédrale de Châlons , en
Champagne , & Grand Vicaire du Diocèfe
mourut à Epernay , âgé de plus de 80. ans
au grand regret de tous les Pauvres , dont
il étoit le pere ; il étoit fils de Claude Havetel
, Ecuyer Seigneur de Vauciennes , Préfident
des Tréforiers de France à Châlons
& de Dlle Catherine Maillet ; il avoit pour
frere M. de Vauciennes , fous Lieutenant au
Régiment des Gardes Françoiſes en 1687%
par la mort du quel fans alliance , il étoit devenu
l'héritier de fa famille , & pour foeur
Catherine Havetel , mariée le 7. Juin 1695 .
avec Antoine Mathieu Vidard , Chevalier
Seigneur de S. Clair , Lieutenant au . Régiment
JUILLET. 1655 1743
ment des Gardes Françoiſes , puis Lieutenant
de Roi en Champagne au Département de
Reims , dont elle fut la premiere femme &
mere d'André- Claude- Amable Vidard , Seigneur
de S. Clair , Meftre de Camp de Cavalerie
, Exempt des Gardes du Corps , Che
valier de S. Louis & Lieutenant de Roi en
Champagne , & Louis- Antoine Vidard de S.
Clair , Seigneur de Vauciennes , auffi Meſtre
de Camp de Cavalerie , Exempt des Gardes
du Corps & Chevalier de l'Ordre Militaire
de S. Louis . Le corps de l'Abbé de Vauciennes
, qui donne lieu à cet article , fut
tranfporté le lendemin 12. Juillet en fon
Château de Vauciennes , à une lieue d'Epernay
, pour y être inhumé dans la Chapelle
de fa famille .
·
Le 12. Meffire Jacques- Benigne Boffuet
ancien Evêque de Troyes , depuis 1718
& Abbé de Saint Lucien de Beauvais
depuis le 12 Avril 1704 , mourut à Paris
,
âgé de 82 ans ; il étoit neveu de M.
Jacques Benigne Boffuet , Evêque de
Meaux , l'un des plus fçavans Prélats qui
ayent paru dans l'Eglife , mort à Paris le
12 Avril 1704 ; il étoit fils d'Antoine Boffuet
Maître des Requêtes ordinaire de
l'Hôtel du Roi , mort le 29 Janvier
1699 , & de Dame Renée - Gaureau du
Mont , & il avoit pour frere aîné Louis ,
I iiij Boffuet ,
*
1656 MERCURE DE FRANCE
i
,
Mat- Boffuet , Seigneur d'Azû-les- Cofne
tre des Requêtes ordinaires de l'Hôtel du
Roi , mort le.... laiffant de fon mariage avec
Dame Marguerite de la Briffe , Demoiselle
Marguerite Benigne Boffuer fille unique
mariée à l'âge de 19 ans , le 21 Mai 1722 .
avec Louis- Antoine de la Roche-Fontenilles
, Marquis de Rambures & de Fontenilles
, & morte fans enfans le 25. Octo
bre 1728 .
,
,
Le .... Juillet , M. Jean Mathias Barthetemy
de Grammont de Lanta , Evêque de Perpignan
, facré le 26. Mai 1726. Abbé de
Calers , O. C. Diocèfe de Rieux , depuis
1717. de Nôtre-Dame d'Arles , Ó. S. B.
Diocèse de Perpignan , depuis 1723. & de
la Réale dans la Ville de Perpignan , depuis
1725. mourut dans fon Diocèfe , âgé dess .
ans ; il étoit fils puîné de Jacques - Barthele
my de Grammont , Baron de Lanta , & de
D. Catherine de Riquet , foeur de M. de
Riquet , Préfident à Mortier au Parlement
de Touloufe , & de feu M. le Comte de
Caraman , Lieutenant Géneral des Armées
du Roi , la famille de Barthelemy Grammont
Originaire d'Avergne , & de puis tranf
plantée , il y a environ 200. ans , à Touloufe
, & où elle eft regardée comme l'une des
premieres du Parlement , porte pour Armes
d'Azur à trois bandes d'or
Le
JUILLET. 1743. 1657
avec
Le 17. M. Paul -Eftienne Defmaretz dé
Cramaille , Confeiller au Parlement de Paris
, reçû le 20 Février 1714 , puis Confeiller
d'honneur au même Parlement
depuis le .... Janvier 1738 , mourut à Pas
ris âgé de 5 ans & fans être marié ; il
étoit frere de D. Henriette- Magdelaine Def
maretz mariée le 20 Fevrier 1702 ,
Charles d'Angennes , Marquis de Poigny !
Colonel du Régiment Royal de la Ma
rine & Brigadier des Armées du Roi , tué
à la Bataille de Malplaquet , le ir
Septembre 1709 ; il étoit fils de M. Jean-
Baptifte Defmaretz de Vaubourg , Sire &
Baron de Cramailles , mort Sous - Doyen
des Confeillers d'Etat & Privé du Roi , le
26 Avril 1740. & de Dame Marie- Magdeleine
-Voifin de la Noiray , morte le 9
Mai 1711. M. de Cramailles étoitcoufingermain
de M. le Maréchal de Maillebois
, & la Généalogie de fa famille fera
rapportée dans le Supplément à l'Hiftoire
des Grands Officiers de la Couronne
auquel on travaille actuellement.
Le 20. M. Felix Aubery , Chevalier
Marquis de Vaftan , Baron de Vieuxpont ,
Confeiller d'Etat , Prevôt des Marchands
de la Ville de Paris y mourut dans la
cinquante - deuxième année de fon âge.
étoit fils aîné de M. Jean- Aubery ,
I v Chevalier
1658 MERCURE DE FRANCE
.
Chevalier Marquis de Vaftan , Villeneuve
fous Barillon , Baron de Cernieres , Confeiller
du Roi en fes Confeils , Licutenant
pour le Roi au Gouvernement de
P'Orléanois & Pays Blaifois , & de feue
Dame Magdeline Louite de Bailleul , ayant
pour frere M. Jean Baptifte- Louis Aubery
de Vaftan , Chevalier non- Profés de l'Ordre
de S. Jean de Jerufalem , Capitaine
au Régiment des Gardes Françoifes , &
pour foeurs Dame Marie- Catherine- Louife
Aubery de Vaftan veuve de M. Jean-
Anne Aubery Chevalier Comte de S.
Ines , Seigeur de Trilport & de S. Vaubourg
, & Dame Marie-Jeanne Aubery de
Vaftan , veuve de M. Armand de Be
thune , Comte d'Orval , Seigneur & Prince
Souverain de Boisbelle & d'Enrichemont.
>
,
Il avoit épo fe en premieres nôces
Damoifelie Thérefe Fontaine fille de
Claude Fontaine Ecuver Confeiller Sécrétaire
du Roi , Maiſon Couronne de
France & de fs Finances , & de Dame
Louife- Jeanne de Gondre court, fon épouse:
Il avoit eu de ce mariage Dame Marthe-
Antoinette Aubery de Vaftan , mariée en
1732 , à M. Jean Louis Portail , Confeilfer
du Roi en tous fes Confeils , Préfident
du Parlement de Paris , feul fils de
feu
JUILLET. 1745. $659
feu M. Portail , premier Préfident du même
Parlement , & en fecondes nôces , Damoi
felle Marie - Renée le Mairat , fille de M.
Jean-Louis le Mairat , Confeiller du Roi
en fes Confeils , Maître des Requêtes Honoraire
de fon Hôtel & de Dame Renée
Ballet , fon épouſe.
11 refte de ce dernier mariage deux fils
& une fille ; il avoit été fucceffivement
Avocat du Roi au Châtelet de Paris en
1715 , Confeiller au Parlement en 1716
Maître des Requêtes en 1718 .
Il fût nommé Intendanr du Hainaut en
-1723 & de la Généralité de Caën en
1727 ; Prevôt des Marchands de la Ville
2
de Paris en 1740 , & Confeiller
d'Etag
au mois de Mars dernier.
Il a rempli ces différentes p'aces en
homme qui les méritoit , & s'y eft rendu
recommandable par un attachement inviolable
à fes devoirs , un amour conftant
pour la Juftice , & une fupériorité de ta
lens , qui le rendoit digne des plus grands
employs.
Une fimplicité noble , un génie élevé ,
des connoiffances étendues un caractére
bien faifant étoient joints en lui à la
plus haute vertu .
L'eftime générale qu'il s'étoit acquife par
tant de rares qualités , & les regrets fin-
I vj
ceres
660 MERCURE DE FRANCE
ceres des Grands & du Peuple , juftifient
affés cet éloge .
Le 20 Mai dernier , Dame Anne Ma
rie -Jeanne Dupuis , époufe de Meffire Louis-
Alexandre de Savary , Seigneur de Saint-
Juft &c. Confeiller du Roi en fes Confeils
, grand Maître des Eaux & Forêts de
France au Département de Normandie
& mariée le 10 Septembre de l'année
derniére , accoucha d'un fils , fon premier
enfant , qui fût ondoyé le même jour ; le 9
Juin fuivant , les cérémonies du Baptême
furent fupplées , en l'Eglife de Saint Germain
de l'Auxerrois fa Paroiffe , à cet
enfant qui fut nommé fur les Fonds
Charles- Louis. Le Parain a été Meffire ...
de Savary , Seigneur du Tronc &c . Abbé
de Beaulieu , Diocèfe de Langres , Doyen
& Vicaire Général d'Evreux , fon oncle
paternel. La Maraine , Dame Marie - Anne
l'Epinau , veuve de M.Charles- Ruau Dutronchot
, Chevalier de l'Ordre de faint
Michel , fa bifayeule maternele.
Le 21 Juin dernier , Dame Elifabeth-
Maric Dupuis , époufe de Meffire Louis-
Léon de Bouthillier Chauvigny , Comte
de Beaujeu Baron de Lorme &c. &
mariée le 14 Août de l'année derniere ,
accoucha d'un fils , fon premier enfant
qui fut baptifé en l'Eglife de S. Euſtache
La
JUILLET. 1743- 1661
fa Paroille
•
& nommé fur les Fonds de
Baptême Charles -Léon .
Vi-
Le Parain a été M. Claude-Léon de
Bouthillier de Chauvigny , Marquis de
Vandeuvre , des Hayes d'Angylon
comte de Rhodes , Brigadier & c. fon oncle
paternel , la Maraine a été Dame Marie-
Anne l'Epinau , veuve de M. Charles - Ruau
Dutronchot , Chevalier de l'Ordre de S. Michel
, fa bifaycule maternelle.
******** :X :XXXXX **
ARRETS NOTABLES.
RDONNANCE du Roi du ro
Juillet, portant augmentation de 36000.
hommes de Milice , dont la teneur fuit
Sa Majefté jugeant néceffaire pour le bien
de fon fervice, d'augmenter de 36000. hom
mes le corps de Milices , elle en a fait dreffer
de répartition fur les Provinces & Générali→
rés du Royaume , & en conféquence , elle a
ordonné & ordonne ce qui fuit.
ART. I. Il fera levé dans les Provinces
& Géneralités du Royaume , conformément
à l'état de répartition qui fera joint à la prés
fente Ordonnance, 36000. hommes de nou
velle Milice , lefquels feront répartis par
Intendaas defd . Provinces & Generalités , par
les
préference
1662 MERCURE DE FRANCE
préference fur les Villes , & fubfidiairement
fur les Paroiffes du plat- Pays , eû égard au
nombre de feux ou de familles dont elles
feront composées,& tiré au fort entre tous les
garçons demeurant actuellement dans lefd .
Villes & Paroiffes , de l'âge de 16, ans & au
deffus jufqu'à 40. de taille de cinq pieds au
moins , & de force convenable à fervir.
II. Les jeunes gens mariés , de l'âge de
vingt ans & au - deffous ayant la taille & les
qualités ci - deffus prefcrites , feront aſſu
jettis à tirer au fort concurremment avec les
garçons, fans qu'aucun puiffe en être diſpenſé
pour quelque caufe & fous quelque prétexte
que ce foit ; & à leur défaut le fort fera tiré
entre tous les hommes mariés , de l'âge de
40. ans & au- deffous.
III . Ordonne S.M. auxd. garçons ou hommes
mariés , qui fe trouveront dans le cas de
tirer au fort , de comparoître pardevant le
Commiffaire chargé de la levée , le jour qui
aura été indiqué pour tirer , à peine d'être
déclarés Miliciens , & contraints de fervir à
la place de ceux à qui le fort fera échu .
IV. S. M. voulant que lad. Milice foit affemblée
du 15. Octobre prochain au premier
Novembre fuivant au plus taid , tous ceux
à qui le fort fera échu ou qui auront été
déclarés Miliciens pour caufe d'abfence ,
feront tenus de fe rendre dans ledit tems
aux
JUILLET 1743 1669
aux Lieux de l'affemblée , à peine des ga
léres perpétuelles.
V. Le ſervice defdits Miliciens fera de
fix années , & ils ne pourront s'abfenter ,
fans congé , de la troupe dont ils feront
à peine d'être pourſuivis & punis de mort
comme déferteurs , fuivant la rigueur des
Ordonnances.
- VI. Entend S. M. que jufqu'an jour de
l'affemblée , ceux des Miliciens qui feront
journaliers , foient employés par les Paroiffes
, par préférence à tous autres habitans
, & en cas qu'ils aillent travailler
dans les Paroiffes voifines , leur enjoint
S. M. d'en avertir les Officiers des Com
munautés , de leur déclarer le Lieu où ils
fe rendront , & de fe trouver à l'affemblée
dans le tems ordonné fous les peines
portées par l'Article IV. de la préſente
Ordonnance.
VII. Conformément à l'Article VIII. de
l'Ordonnance du 12. Novembre 1733. dont
S. M. a jugé à propos de renouveller les
difpofitions , tout Milicien qui aura fervi
pour fa Paroiffe le tems de fix années ,
ne pourra être impofé à la Taille perfons
nelle ou induſtrielle que deux années
après l'expiration de fon fervice , pour fes
biens propres , ou pour ceux qui lui viendront
du chef de fa femme , s'il fe ma
rie
1664 MERCURE DE FRANCE
rie dans le cours defdites deux années
& dans le cas où ledit Milicien prendra ,
pendant ledit tems , des Fermes ou Explotations
étrangeres , il fera pour raifon
d'icelles , taxé d'office modérément par les
Intendans dans la Province pour laquelle
il aura fervi. Ordonne S. M. que le Mi
licien qui fe trouvera marié lorfqu'il mar
chera pour fa Paroiffe , foit diminué de
dix livres fur fa quote perfonnelle pour
chacune de fes années de fervice. Veut au
furplus S. M. que les peres defdits Miliciens
foient exempts de Collecte pendant
que leurs enfans ferviront à ladite Mili-
& que pendant ledit tems leurs quo
tes de Taille ne puiffent être augmentées
par les Collecteurs .
ce ,
VIII. Lors de l'affemblée defdits Mili
ciens , il leur fera fourni par les Paroif
fes , un bon Chapeau bordé en argent faux ,
avec les autres parties de l'habillement
& l'argent reglé par l'Article XII. de l'Or
donnance du 12. Novembre 1733 .
IX. Veut au furplus S. M. que fes Or
donnances précédentes auxquel les Elle n'en
tend déroger, qu'à l'égard de ce qui fe trous
vera de contraire à la préfente , foient
exécutées felon leur forme & teneur. Mande
& ordonne S. M. aux Gouverneurs & fes
Lieutenans Generaux en fes Provinces , aux
Intendans
JUILLET . 1745. 1665
Intendans defdites Provinces , de s'employer
chacun à fon égard , & felon qu'il leur eft
prefcrit , à l'exacte obfervation & exécution
de la préfente Ordonnance . Ordonne
auffi S. M. aux Gouverneurs de fes Villes
& Places , à tous Baillis , Sénéchaux
Prévôts , Juges , leurs Lieutenans & autres
fes Officiers qu'il appartiendra , de tenir
la main à ladite exécution . Fait à Verfailles
, le 10. Juillet 1743. figné LOUIS
Et plus bas M. P. DE VOYER D'ARGENSON .
ETAT contenant la répartition de 36000.
hommes de Milice , qui doivent être fournis
par les Villes & fubfidiairement par
tes Paroiffes du plat- Pays des Provinces
& Generalités du Royaume , en exécution
de l'Ordonnance du 10. Juillet 1743..
La Generalité de Paris fournira 2160.
hommes .
La Generalité de Soiffons fournira 1080.
hommes.
I
La Géneralité d'Amiens fournira 1080.
hommes .
La Generalité de Rouen fournira 1800.
hommes.
La Géneralité de Caën fournira 1080.
hommes.
La Géneralité d'Alençon fournira 1440
hommes.
La
1666 MERCURE DE FRANCE
La Géneralité de Châlons fournirà 1800 .
hommes.
Le Département du Duché de Bourgogne
fournira 180c . hommes.
La Géneralité d'Orléans fournira 1440.
hommes .
La Generalité de Moulins fournira 720.
hommes.
La Géneralité de Tours fournira 1440.
hommes.
La Province de Bretagne fournira 25201
hommes.
La Géneralité de Poitiers fournira 1080.
hommes.
La Géneralité de Limoges fournira 720.
hommes.
La Géneralité de Riom fournira 7201
hommes .
La Géneralité de Lyon fournira 720.
hommes.
-
La Generalité de Grénoble fournira 720
hommes.
La Provence fournira 720. hommes.
La Géneralité de Montauban fournira
1080. hommes.
La Géneralité d'Aufch fournira 1080:
hommes.
La Géneralité de Bordeaux fournira 2160.
hommes.
La Generalité de Bourges fournira 720.
hommes,
JUILLET. 1743- 1667
Le Comté de Bourgogne fournira 1800 .
hommes.
La Province de Languedoc fournira 2520 .
hommes .
La Géneralité de la Rochelle fournira 360 .
hommes.
La Province d'Artois fournira 720. hommes.
Le Département des trois Evêchés fournira
900. hommes.
La Province d'Alface fournira 900. hom;.
mes .
La Province de Flandre c& elle du Hay
nault fourniront 720. hommes.
TOTAL 36000. hommes
J
APRO ATION.
'Ai lû par ordre de Monſeigneur le Chancelier,
le Mercure de France du mois de Juillet , & j'ai
cru qu'on pouvoit en permettre l'impreffion. A Pa
ris , le premier Août 1743 .
HARDIO N.
TABL E.
P
IECES FUGITIVES . Epitre à Mercure , & Ode
à Mlle *** 1469
Réponse de M. Néricault Deftouches à la Lettre du
28. Mai , touchant la Religion Chrétienne, 1475
Melpomene , Elégie , 1496
Extrait de Lettre fur les Antiquités de Corfeuil , en
Bretagne ,
Epitre en Vers à Mlle Des ...
1500
1509
Lettre au fujet de la Chronologie & la Topographie
du nouveau Bréviaire de Paris ,
La Rofe Cantate ,
1509
1520
Differtation où l'on prouve que la Lune Pafchale
n'eft pas celle de Mars , 7523
Vers pour le Portrait de Mlle Silvia , 1536
Lettre fur un animal extraordinaire , 7137
Réponse en Vers à la Queftion propofée dans le
Mercure d'Octobre dernier , 3544
Difcours fur l'Etude des Mathématiques , 3546
Bouquet à M. d’H *** 1549
Lettre fur les Ouvrages de Gui Aretin , Muficien
155x
1566 Vers à Mad . *** , le jour de fa Fête ,
Explication des Enigmes & des Logogryphes des
Mercures de Juin premier & fecond Volume ,
Enigmes & Logogryphe ,
1568
Ibid
NOUVELLES LITTERAIRES , DES BEAUX ARTS,
&c. Projet d'une nouvelle Edition de l'Hiftoire
de Lora ne ,
OEuvres de M. l'Abbé Privat de Moliéres ,
Nouveaux Flemens d'Algébre ,
Introduction à la Chymie ,
Hiftoire de Ciceron
Montéfuma , Tragédie ,
Almanach
Chronologique ,
157%
1580
1581
1582
ibid.
1583
1584
Differ
Differtation fur un Temple octogone ,
Hiftoire de la Maifon de Portugal ,
1588
ibid.
Difcours prononcés dans l'Académie Françoife , à
la Réception de l'Evêque de Bayeux , 1589
Difcours prononcés à l'Académie des Beaux- Arts
de Lyon ,
Morts de Perfonnes Illuftres ,
Eftampes nouvelles
Remede pour les Defcentes >
Chanfon notée & Vaudeville ,
1594
1611
16 : 8
1620
1622
Spectacles , 1625
Nouvelles Etrangeres , Turquie ,
1632
Ruffie ,
ibid.
Suede ,
1633
Allemagne ,
1635
Espagne ,
1633
Italie ,
1635
Genes & Ile de Corfe , ibid.
Grande Bretagne , 1638
Hollande & Pays- Bas , 1642
France , Nouvelles de la Cour , de Paris , & c. 1645
Bénéfices donnés , 1647
Monfeigneur le Dauphin va aux Invalides , 1648
La Reine và voir Mad. la Ducheffe d'Orleans à
Chaillot
Concerts chés la Reine ,
Extrait de Lettre fur l'Election d'un Maire ,
Morts & Naiffances ,
Arrêts Notables , I
1650
1651
1652
1653
1661
P
Errata du premier Volume de Juin,
Age 1088. ligne premiere , Deſcription de la
Haute Normandie , lifez du Pays de Cotentin .
P. 1089. 1. 12. & fuivantes , 1. de cette maniere le
chiffres
... chiffres Chronologiques , 1346. 1364. 1418
P. 1228. 1. 21. Farancourt , l . Favancourt.
Même page , 1. 21. fon fils , 1. à ſon fils.
P. 1242. 1. 5. du bas , de Bades . I. de Budes.
P. 12 50. 1. 26. confultez la Généalogie , & c . I.
confultez l'Hiftoire de la Maiſon Caraffe par Aldimari
, 3. vol . in-fol.
P. 1251. Maître des Requêtes Honoraire , ajoû–
tez , & Confeiller d'Etat Ordinaire .
P. 1253. 1. 15. & 16 , deux mille livres , l. mille
livres.
Errata di fecond Volume de Juin.
Age 1360. ligne 4. du bas , Chaulieu , lifez
de Chaulieu . Page
P. 1432. l. 18. D D. MANSAT , . D D. MANSART.
P. 1444. l. 11. d'Anjou , l. à Angers,
Ibid. 1. 20. e Simonn , l . Simonne.
P
Fautes à corriger dans ce Livre.
Age premiere , ligne 13. ton mérite , liſex
t'ont mérité.
P. 1473 . 1: 20. Efant , . Enfant .
P. 1476. l1.. 1177.. otez la virgule après rigueurs.
P. 1482. . . & 6. penfée , l. penfée.
P. 1485. 1. 3. refource , l . reffource.
P. 1489. 1. 19. nons , 1. nous.
P. 1492. l. 14. cherché , l. cherchée.
P. 1496. 1. 21. m'eft , l . m'es.
P. 1497. 1. 2. otez la virgule apris forfaits.
P 1498. 1. 16, viellit , . vieillit.
P. 1499. l. 12. vielliffent , l . vieillient.
P.
P. Isco . 1. 6. m'opprimee , 1. m'opprime.
P. 1502. 1. 6. du bas . Chambre quarrée &c.
1. parfaitement quarrée & profonde du rez de
chauffée , juſqu'à fon fol , d'environ 4. pieds .
P. 1512. 1. 2. Clervaux , l . Clairvaux .
P.
1514. 1. 25, Clervaux
, 1. Clairvaux
.
P. 1520. 1. 4. les , l. des.
P. 1528. 1. 21. où , otez ce mot.
P. 129. 1. derniere , Junin , . Juin.
Pp 1531. 1. 2, cela , ajoutez, pendant.
P. 1533. l. 18. commencée , 1. commencé,
P. 1538. L. 10. & 11. exceptés , 1. excepté.
P. 1541. 1. 1o. Lettré , l . Lettre ;
Ibid. 1. 14, grande , l. grandes.
P.
1543. 1. 2 . du bas , d'autres , l . autres .
P. 1544. 1. 14. Où , l. Ou ,
P. 1546. 1. 1. reprendre , l. repandre.
P. 1549. 1. 9. là que , l. là , que
Ibid. 1. 11. on , l ; on
Ibid. 1. 12. même ; l. même ,
P. 1550. 1. 15. mentend , l . m'entend
Ibid. 1. 16. éclattant ; 1 , éclatant ,
P. 1553. 1. 6. je , je ne .
P. 1554. 1 . étoient
13. > 1. étoit.
P. 1556. l. 17. gravectoit , l. grave étoit.
P. 1559. 1. 25. Spatiun. 1. Spatium .
P. 1563. 1. 7. du bas , encheri , deffus 1. encheri
deflus ,
P. 1567. l . 10. & 11. du bas , livrer. l . livrer ,
l'allegreffe . Pallegreffe.
P. 1568.1, 12. oeuil . 1. oeil.
1. l'enrichiront
P.
1572. 1. 23. l'lenrichiront
P. 1574. 1. 2. Gueres
, 1. Guerres
.
P. 1581.
1. 6. laife 1. Blaife .
P. 1593. l. 6. inftruits ; l . inſtruits ,
P. 1596. 1. 8. etonnée ; l. etonnée ,
P. 1599, 1. 9. aequis 1. acquis,
поп
P. 1613. 1. 6. étoient très reffemblans . I. étoient
non feulement très- reffemblans.
Ibtd. 1. 2. du bas appeloit . . appelloit.
P. 1614. 1. 11. la . l. là.
P. 1615. 1. 3. du bas , fous 1. à .
P. 1616. 1. 11. diftintif . L. diftinctif.
1. 9. affaire . 1. affaires
P.
1619.
Ibid. 1. 24. otez la virgule après caractére
P. 1620. 1. 20. dès . 1. des
P. 1621. 1. 5. Fauxboug. 1. Fauxbourg
P. 1622. 1. 16. mettez une virgule après ravie
P. 1628. 1. 23. Bulogne. 1. Bologne
1.
P. 1630. l . 24. & 25. comiques , 1. comique ,
P. 1633. 1. 22. & 23. ronouvellé . 1. renouvellé
Ibid. 1. 27. Cedemcreutz. 1. Cederncreutz
Ibid. 1. 28. Noleken. 1. Nolcken
Ibid. 1. 32. du . 1. d'un.
P. 1634. 1. 5. du bas confifqués. 1. confiſqués
MERCURE
DE FRANCE .
DÉDIÉ
AU
ROI ,
AOUST
1743.
Che
ACOLLIGIT
SPARGITE
A PARIS ,
GUILLAUME
ruë S, Jacques.
CAVELIER ,
La Veuve PISSOT , Quai de Conty,
à la defcente du Pont-Neuf.
JEAN DE NULLY , au Palais .
M. DCC, XLIII
Avec Approbation & Privilege du R
AVIS.
L
ADRESSE générale eft à Monfieur
MOREAU , Commis au Mercure ,
vis - à- vis la Comédie Françoife , à Paris.
Ceux qui pour leur commodité voudront remettre
leurs Paquets cachetés aux Libraires qui
vendent le Mercure à Paris , peuvent ſe ſervir
de cette voye pour les faire tenir.
On prie très-inftamment , quand on adreſſe
des Lettres on Paquets par la Pofte , d'avoir
foin d'en affranchir le Port , comme cela s'eft
toujours pratiqué , afin d'épargner , à nous
Le déplaifir de les rebuter , & à ceux qui
les envoyent , celui , non - feulement de ne
pas voir paroître leurs Ouvrages , mais
même de les perdre , s'ils n'en ont pas gardé
de copie.
*
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les Particuliers qui fouhaiteront
avoir le Mercure de France de la premiere
main , & plus promptement , n'auront
quà donner leurs adreffes à M. Moreau
qui aura foin de faire leurs Paquets fans
perte de temps , de les faire porter fur
Pheure à la Pofte , ou aux Meffageries qu'on
Ini indiquera.
PRIX XXX, SOLS
MERCURE
DE FRANCE .
DÉDIÉ AU
ROI.
AOUST 1743 .
PIECES FUGITIVES
1
en Vers & en Profe.
IDILE.
L'AMOUR vaincu par la Raifon.
D
Igne fujet des voeux des Bergers d'Ar
cadie ,
Philis dans la forêt porta la réverie ;
L'Amour y conduifit autrefois fon Berger;
A ij
Philis
1684 MERCURE DE FRANCE.
Philis craint , & Philis aime encor le danger.
Que ne peux-tu , Berger , y revenir comme elle
Ah ! Philis , trop d'amour n'a fait qu'un infidelle.
L'ingrat ne chérit plus l'objet qui l'a charmé ;
Meris feroit conftant , s'il étoit moins aimé.
Elle implore Venus ; mais Venus , peu fidelle ,
Ne protegea jamais que qui change comme elle.
Philis vit fes moutons errer fur un coteau ;
Si Philis n'eut aimé , trop fortuné
troupeau ,
Vous brouteriez encor le floriffant Citiſe !
Ses yeux , libres alors , vous gardoient de ſurpriſe:
Mais tout change en aimant ; vous êtes malheureux
L'Amour de tous les maux eft le plus dangereux.
Revenez , dit Philis , heureufe indifference ;
Mes malheurs ne font dûs qu'à votre longue abſence,
L'Amour , ce Dieu cruel que fuivent les ennuis ,
A fait de nos beaux jours les plus ameres nuits ;
Et, vous aimable joug , Raifon , brifez mes chaî
nes ;
Les douceurs de l'Amour ne valent pas vos peines.
La Raifon , à ces mots ,fe préfente à fes yeux,
L'Amour l'avoit bannie autrefois de ces lieux.
Ce Dieu ne fut jamais ami de la Sageffe .
Philis , dít la Raiſon , quelle est votre foibleffe ?
Fuyez , fuyez l'Amour ; fes traits font dangereux ;
Les plaifirs font trompeurs , & l'Amour l'eft comine
eux .
Rappellez les vertus de votre ſage mere ;
Joignez
AOUST. 1743 . 1685
Joignez à fes leçons ſon exemple ſevere ;
De l'Amour , difoit- elle , évitez les dangers ;
Gardez-vous moins des loups , Philis , que des Bergers
.
Inutile leçon le coeur change avec l'âge.
Pouvez -vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage
Voyez-vous ce troupeau , qui preffant fon retour ,
Semble de tous fes maux accufer votre amour ?
Votre chien fuit le loup , & le loup en furie
Approche impunément de votre bergerie.
›
Yos agneaux n'aiment plus à bondir dans les
prés ,
Et le boeuf à regret fillonne vos guerets.
Dans le miroir des eaux regardez votre image ;
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage
L'Amour a fait pâlir vos roſes & vos lis ;
Philis , tout parle en vous de l'amour de Philis ;
Vous voyiez autrefois avec indifference
Les Bergers à vos chants accommoder leur danfe .
Fuyons , leur difiez -vous , tout amoureux fouci.
Mais les tems font changés , & votre coeur auffi .
Vous êtiez affès belle , en étant affés ſage ;
Pouvez- vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage ?
Meris fait vos plaiſirs , ou plûtôt vos malheurs ;
L'Amour n'aura jamais que de fauffes douceurs.
Dans le bois , Philomele à peine raffurée ,
A iij Vous
1686 MERCURE DE FRANCE.
Vous dit jufqu'à quel point l'Amour porta Terée
Elle n'aima jamais ; douce félicité !
Mais l'Amour abufa de fa crédulité.
Le plus difcret Amant n'eft jamais affés fage .
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage ?
Combien de fois Meris , redoxblant fes foupirs ,
Vous montra du danger dans fes moindres de
firs?
Rappellez -vous d'Echo le rigoureux fupplice ;
Autrefois elle aima le dangereux Narciffe.
Trop épris de lui-même , il eft fourd à fes pleurs
Echo , fidéle Echo , tu n'as que fes rigueurs !
Il n'eft point de beauté que le tems ne ravage : 1
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage >
Le tems flêtrit la roſe ; il flêtrit nos beaux jours ;
La beauté plaît un tems ; la vertu plaît toujours.
De vos charmes naiflans innocente victime ,
Ignorez -vous encor que l'Amour est un crime ?
Philis , méfiez - vous d'un Berger complaiſant ;
Un ennemi qui plaît eft toujours trop puiffant.
La beauté fans vertu n'eft qu'un frêle avantage :
Pouvez - vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage
Heureux le jeune coeur , qui fage en fes plaifirs ,
Dans la feule Raiſon a puiſé ſes défirs !
Il goûtera les fruits que produit l'innocence ;
Les plaifirs ne font faits que pour l'indifference.
Un
AOUST. 1743 . 1687
Qu'un coeur foit fans amour , il fera fans ennui
Il est toujours content , s'il eft content de lui.
Ma fille , vous pleurez . Meris eft un volage .
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage ?
Ennuyé de fervir une même beauté ,
Dans des liens nouveaux Meris eft arrêté .
La
pomme qu'il jetta contre la jeune Ifmene ,
Ne m'a que trop inftruit de fa nouvelle chaîne ;
C'étoit là le fignal de quelque rendez - vous ;
Laiffez-lui ce volage , il n'eft pas fait pour vous.
Mettez au rang des biens le defir d'être fage :
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage !
La Raifon par ces mots triomphant à fon tour ,
Emut Philis , & prit la place de l'Amour.
Par M. Roffignol.
A iiij
ORAISON
1688 MERCURE DE FRANCE.
-s és és és és és és -és és és ésis
ORAISON FUNEBRE
De S. E. M. le Cardinal de FLEURY ,
Miniftre d'Etat, &c. prononcée au Service
faitpar ordre du Roi , dans l'Eglife de Paris
le 25. May 1743. Par le R. P. DE NEUVILLE
, de la Compagnie de JESUS , imprimée
à Paris chés J. B. Coignard & les Frères
Guerin, ruë S. Jacques 1743. avec Approbation
& Privilege du Roi . vol . in- 4° .grand
papier , pages 78.
'Orateur a pris pour fon texte ces paro-
L'Orateurs Proverbes , Bears
homo qui invenit fapientiam ....... longitudo
dierum in dextera ejus , & infiniftrâ illius divitie
, gloria. Via ejus , via pulchra , &
omnesfemita illius pacifica , qu'il traduit ainfi :
» Heureux l'homme qui a trouvé la fagcffe !
>> ..... elle a la longueur des jours dans fa
droite , & dans fa gauche les richeffes &
» la gloire. Ses voies font belles ; tous les
»fentiers font pleins de paix.
» L'avenir s'étoit-il dévoilé aux yeux de
» Salomon ? ( dit le Pere de Neuville ) Dans
» ce portrait du Sage qu'il vient de tracer ,
» ne reconnoiffez - vous pas le Sage que nous
»regrettons , fes deffeins pacifiques , fes
» titres , fes dignités , fes honneurs , la
n longue
AOUST . 1743 . 1689
longue durée & la conftante profpérité de
»fes jours ?
Après avoir donné une idée générale des
caractéres de la véritable fageffe & des biens
folides qu'elle procure , le P. de Neuville
fait fentir combien les exemples en font
rares , & dit que la Providence en a fourni
unmodéle accompli dans la perfonne de fen
M. le Cardinal de Fleury.
Il divife enfuite fon Difcours en trois
parties.
Dans la premiere , il fait voir que M. le
Cardinal de Fleury étoit parvenu aux honneurs
par fon mérite & par fes fervices ;
dans la feconde partie , qu'il s'y eft foutenu
par fes talens , & dans la troifiéme , qu'il a
illuftré les honneurs par fes vertas.
En parlant de fon élévation , l'Orateur
demande fi ce fut un de ces hommes qu'une
heureuſe occafion , ane circonstance imprévûë
, que l'activité de l'ambition empreffée
& hardie à précipiter le moment de la fortune
, place tout à coup à la tête de l'Empire
, étonné de les voir franchir d'un feul
pas
l'immenfité de la diftance , & paroître au
bout de la carrière avant que de l'avoir parcourue
? .... Fut-il un de ces hommes dont
l'ambition profonde & diffimulée forme le
tiffu , nouë le fil de fes intrigues à l'ombre
& dans le filence , s'enveloppe dans un cer-
A v cle
1690 MERCURE DE FRANCÉ.
cle de projets obfcurs , de manoeuvres igno
rées ? ...... Regardera-t'on fon élévation
comme un effet du hafard , le hafard , mor
vuide , inventé par l'ignorance , pour cacher
fa honte , adopté par l'impiété , pour
fe défendre contre la raifon , employé par
la malignité timide & politique , pour cenfurer
fans péril le choix du Prince ?
Un mérite connu , eftimé , éprouvé , fut
le principe de l'élévation du Cardinal de
Fleury ; on n'y voit point de voiles ni de
nuages ; une dignité prépare à une autre
dignité; on voit fon élévation croître par
degrés , avertir la jaloufie , lui donner le
tems de fe précautionner , & lui ôter l'efpérance
de réuffir.
Le P. de Neuville fait en cet endroit un
portrait naturel des intrigues de la Cour , &
de la fageffe avec laquelle l'Abbé de Fleury
s'y conduifit , fagelle qui le fit élever à l'Epifcopat.
Il reprefente l'Evêque de Frejus , uniquement
occupé du foin de fon Diocèfe , oublier
dans les montagnes de la Provence fes
talens , qui deviennent inutiles. L'occasion
les demande ; il les retrouve.
Le Duc de Savoye , après avoir vû fa Capitale
, prête à tomber fous nos armes , devenir
par une révolution imprevûë le terme
fatal de nos triomphes sentraîné par le cours
de
AOUST. 1743 . 1691
de nos difgraces & de fes profpérités , pénetre
dans nos Provinces.. Comment l'Evêque
de Frejus fe comportera- t'il dans une
pofition fi délicate ? ne craignez ni les imprudences
d'une fermeté trop auftere , ni les
baffeffes d'une rampante & timide politique.
Guidé par la fageffe , il portera au Duc de
Savoye le tribut de vénération & de complaifance
que l'on doit à tous les Trônes ;
fidéle à fon Maître , il ne déshonorera point
le nom François par de lâches hommages
rendus à la fortune. Ses attentions refpectueufes
lui attirent les regards & la bonté du
Prince : une noble liberté lui concilie fon
eftime : il refufe de fe dire fujer , & il n'eſt
point traité en ennemi ; il défarme la Victoire
, fans fe foumettre au Vainqueur. .. .. 11
fignale fon zéle pour fon Roi , & fauve fon
Peuple des fureurs de la Guerre.
Louis XIV. avoit vû paffer comme l'on
bre fa nombreuſe poſtérité : ſeul dans fes Palais
immenfes , il femble ſe ſurvivre à luimême:
fes yeux,prêts à fe fermer,n'apperçoivent
à la place de tant de fleurs moiffonnées
dans leur Printems , qu'une fleur à peine
écloſe ..... Nouveau Joas , unique refte du
fang de David , arraché au débris de fon
augufte Maifon..... O fi du moins il pouvoit
, par fes leçons & par fes exemples , le
former dans le grand art de regner ; mais
A vj
le
1692 MERCURE DE FRANCE.
le tems coule ; il penfe donc à fe remplacer
auprès de fon fucceffeur. Sur qui tombera
le choix de ce Prince , vieilli dans la connoiffance
des hommes , de ce Prince dont le
choix des Boffuet & des Fenelon avoit prouvé
les lumiéres ? il appelle l'Evêque de Frejus
; il lui remet les deſtinées de fon fang &
de fon Royaume.
. Ici l'Orateur voudroit terminer fon Dif
cours. Le fuffrage du Pere , & les vertus du
Fils : Louis XIV. & Louis XV. Avoir mérisé
la confiance de ce Roi qui fit la gloire de la
France , avoir élevé à la France ce Roi qui
en fait le bonheur : entreprendre d'ajouter
à cet éloge , ne feroit- ce pas d'affoiblir ?
En effet , file plus heureux effort de l'ef
prit humain eft de former un autre efprit ,
que fera-ce d'élever un Prince né pour le
Trône ? Le P. de Neuville fait ici l'énumé
ration de toutes les grandes qualités que doit
avoir celui à qui eft confiée l'éducation d'un
Prince ; mais s'il eft fi difficile d'élever un
Prince né pour le Trône , qu'est - ce qu'élever
un Prince déja Roi ? Un enfant que le
Trône attend , n'ignore pas qu'il a un Maî
tre : un enfant qui occupe le Trône , ignore-
t'il qu'il eft Roi ? Je ne fçais quel cri du
coeur l'avertit de fa grandeur ; il la fent
avant que de la connoître. Trop prompte
élevation d'un Prince , à quels périls n'expofezAOUST.
1743 .
pour re-
Lez-vous pas fa vertu ? Quel efprit réunira
affés de lumières , de fageffe...
prendre fon Roi fans lui déplaire , pour le
contredire fans l'irriter , concilier la fermeté
avec la complaifance , l'autorité avec le
refpect , le ton de Maître avec la foumiffion
de Sujet ? A ce portrait chacun nomme l'Evêque
de Frejus , &c.
Dans la feconde partie , le P. de Neuville
fait voir que quelque difficile qu'il foit
d'arriver aux premiers Emplois avec l'eftime
& l'applaudiffement des Peuples , il eſt
encore plus difficile d'y foutenir , que d'y
aporter une grande réputation ; le Cardinal
de Fleury honoré de la confiance du Roi ,
juftifie le choix du Prince par les talens les
plus utiles & les plus néceffaires au bonheur
de l'Etat.
Notre Orateur admire dans le Cardinal
de Fleury fa pénétration & la jufteffe de fon
efprit , fa facilité à dicter les dépêches les
plus importantes , la fidélité de fa înémoire,
ce calme & cette tranquillité d'efprit que
rien ne pouvoit alterer . Vit-on jamais en lui ,
dit-il , cet air de recueillement trifte & farouche
, partage des hommes bornés , qui
font toujours à leurs penfées ; à quelque
inftant que vous aprochiez du Cardinal de
Fleury , fi vous ne cherchez que l'ami , le
citoyen ; le Ministre , l'homme d'Etat a
difparu .
De1694
MERCURE DE FRANCE.
De-là cette force , cette vigueur conftante
& inalterable de l'efprit & de la fanté.
De-là ce fecret impénétrable ; de- là cette
variété infinie de connoiffances,Commerce,
Finance , Guerre , Marine , Juftice , Religion
, Fonctions & prérogatives des Charges
, droits du Prince & du Peuple. Qui
fçut mieux que lui difcuter les differens
interêts des Princes : l'Ambaffadeur arrivé
à Versailles , doure en quelque façon , s'il
a quitté Rome , Vienne , Londres , Madrid
; s'il parle à un des Miniftres de for
Prince , ou au Miniftre du Roi auprès duquel
on l'envoye .
A tant de talens de l'efprit & du génie
ajoûtez les talens de raifon pure & éclairée,
de vraie & faine politique ; ce talent fans
lequel les autres ne font rien , celui de les
employer & de les rendre utiles à la Patrie.
Quel Miniftre fe montra jamais fi dévoué
à la félicité publique à peine le Roi a-t'il
déclaré qu'il veut gouverner lui - même fon
Royaume par les confeils de l'Evêque de
Frejus ; l'efprit de douceur & de modération
préfide à la deftinée de l'Empire & à
la fortune du Citoyen. Les anciennes dettes
de l'Etat font acquittées ; la confiance
renaît ; l'argent circule ; nulle variation
dans les monnoyes ; cet article fi délicat ,
l'objet de tant de remontrances , de voeux ,
de
AOUST. 1743 . 1695
.
de défirs , qu'on avoit prefque ceffé de fouhaiter
, parce qu'on n'ofoit l'efperer , dans
le cours de tant d'années , dans des conjonc
tures fi critiques, ne fouffre aucune atteinte.
...
Le Cardinal de Fleury n'enviera point
à des Miniftres avides de réputation , l'a
vantage de fe fignaler par des projets tumul
tueux d'imiter ces torrens , ces incendies
, qui laiffent le fouvenir de leur paffage
dans les débris & les ruines des Empires ;
on l'a dit ; heureufe la nation dont les faftes.
n'amuferont point par le récit des fanglantes
révolutions ! L'Orateur rapelle ici combien
le Cardinal de Fleury fe donna de
foins & de mouvemens pour entretenir
une longue paix ; il rappelle auffi cerre époque
glorieufe pour la France , le Congrès
de Soiffons , où le Cardinal de Fleury fembloit
préfider ,comme chef du Sénat de l'Europe.
Lorfque la Providence permet que la
paix , que l'Orateur appelle la fanté de l'Etat,
enfante tout-à-coup les fureurs de la guerre,
Louis ordonne , le Cardinal de Fleury
met en mouvement les forces du Royaume :
déja le Rhin & le Pô coulent fous nos loix ;
deux batailles gagnées en Italie; mais la moderation
du vainqueur arrête la victoire
dans fon cours le plus rapide ; l'Europe pacifiée
rentre dans le calme & le filence ; les
impôts
1696 MERCURE DE FRANCE,
impôts difparoiffent ; la France oublieroit
qu'elle fut obligée de combattre , fi la gloire
& le frait de fes victoires ne lui en rapelloient
le fouvenir.
La Maifon d'Autriche alloit périr avant
fon Chef , fi le Cardinal de Fleury n'eût
dicté un traité f fage , que l'un y trouve le
prix de fes travaux & de fes triomphes , &
l'autre trouve dans la paix des avantages
propres à le confoler des difgraces de la
guerre. Dieu jufte ! ( s'écrie l'Orateur Chrétien
) ... vous voyez cette Maifon échappée
au naufrage , enorgueillie de quelques fuccès
, entreprendre de nous forcer à regretter
notre générofité , à nous repentir de l'avoir
mise en état d'oublier nos bienfaits :
confondez , puniffez ... mon coeur forme
des voeux plus dignes d'être entendus dans
le fanctuaire .... Seigneur , commandez
aux vents & aux fots ; le calme fuccedera
à la tempête ; que les Puiffances ennemies
fe fouviennent que dans leurs malheurs
la France fut leur reffource . Non ,
qu'elles l'oublient. Le fouvenir des dif
graces paffées irrite l'orgueil , & la jalonhe
ne pardonne point les fervices , lorfqu'ils
montrent tant de force & de pouvoir.
Un Miniftre guidé par ces grandes vûës
d'une politique lage & vertueufe , n'auroitpas
démenti tous ces principes , s'il avoit il
négligé
AOUST. 1743 . 1697
négligé les interêts de la Religion ? &c. Le
P. de Neuville s'eft beaucoup étendu fur cet
article , que nous fommes obligés d'abreger.
Dans la troifiéme partie , l'Orateur réfute
cette injufte perfuafion où l'on eft , que la
vertu foutient mal les honneurs, les dignités.
Après avoir vû le génie , les talens , les
ſervices du Cardinal de Fleury , qu'on étudie
fes vertus ; fes moeurs , les manieres
changerent - elles avec fa fortune ? La faveur
, ordinairement fi fiére , fi méprifante ,
ne perdit-elle pas avec lui fes hauteurs , fon
fafte , fon empire ?
Doux , modefte , prévenant , d'un accès
facile , d'une humeur toujours égale , libre
d'interêt & de cupidité ; s'il fut des momens
où il fouhaita d'être riche , ce fut pour foulager
les malheureux. Le P. de Neuville
fait connoître chacune de ces vertus en particulier.
Le Cardinal de Fleury touche enfin à fes
derniers momens. Son Roi vient lui donner
les dernieres marques de fon eſtime ,
& les larmes qu'il répand font la gloire du
Monarque , & l'éloge du Miniftre.
Enfin le Pere de Neuville rend compte
des difpofitions édifiantes dans lesquelles
eft mort le Cardinal , & prend de là occafion
de faire plufieurs réflexions Chrétiennes
& folides , fur le peu de durée des grandeurs
1698 MERCURE DE FRANCE.
deurs humaines , qui paffent comme l'ombre.
PARAPHRASE
De ces deux Vers latins :
· Donec eris felix multos numerabis amicos ;
Tempora fifuerint nubila , folus eris.
DAinon , quand les Deftins propices
Nous font jouir en fûreté ,
Dans le port trompeur des délices ,
D'une douce félicité ,
Nous voyons le long du rivage
Grand nombre de parens , d'amis & de flateurs
S'empreffer de nous rendre hominage ,
Et fe difputer l'avantage
D'être nos zélés ferviteurs ;
Sans ceffe leur cohorte avide
Court où l'abondance réfide ,
Par des foubaits renouvellés
Marquer l'intérêt qui les guide ;
Empreffement , foins redoublés ;
Dans tout enfin leur coeur confpire
A marquer ce que leur infpire
La plus honteufe lâcheté ,
Plûtôt que la fincerité.
Mais auffi-tôt qu'un vent contraire
Nous
AOUST. 1743 . 1699
Nous prépare l'horreur d'un trait capricieux ,
Nous
voyons
ralentir les foins ambitieux
De cette troupe mercénaire.
Que vois-je ! un coup foudain nous confond dans
les flots !
De tant d'amis un refte charitable
Voudra-t'il nous prêter une main fecourable ,
Du moins compatir à nos maux ?
Hélas ! un gouffre épouvantable
Ne va laiffer bientôt à nos regards confus ,
Que mille regrets fuperflus ,
Que nous poufferons feuls dans un fort déplorable.
Brun Sie Catherine , Eleve Ecrivain du Roi.
M
.....
LETTRE DE M.
I
Ecrite à M. D. L. R. au fujet de GUI DE
LA TOUR , Evêque de Clermont , fous le
Regne de S. Louis.
L me femble , Monfieur , que vous n'avez
encore rien dit dans votre Journal
du Livre des Illuftres de l'Ordre de S. Dominique
, publié depuis quelques mois par
le R. P. Touro , Religieux du même Ordre.
J'attendois que vous en euffiez parlé , pour
vous propofer quelques doutes fur un de
ces Illuftres. C'eft Gui de la Tour , qui fut
Evêque de Clermont au XIII . fiécie.
Dom
1700 MERCURE DE FRANCE,
Dom Denis de Sainte Marthe , fous les
yeux duquel a été redigé le Catalogue des
Evêques de Clermont , contenu dans le fecond
Tome de l'Ouvrage intitulé , Gallia
Chriftiana , ne peut croire que S. Loüis ait
demandé l'Epifcopat pour ce Dominiquain.
Il nous apprend qu'il avoit été élû, fans même
qu'on eut demandé à la Cour la permiffion
de proceder à l'Election , & que la Rei
ne Blanche refufa , pour cette raifon , de
lui quitter la Regale ; cependant un peu
après,il conjecture que cette Reine employa
fes prieres , pour faire valider l'Election du
jeune Gui , lequel , felon l'opinion de ces
derniers tems , n'étoit âgé que de 17. à 18.
ans. Mais le fçavant Bénédictin ne peut
s'empêcher d'ajouter aufli -tôt ces paroles :
Certe mirum eft Beatum Philippum Berruyer
banc Electionem ratam habuiffe contra Canomes.
Il veut parler du faint Archevêque de
Bourges , qui étoit le Métropolitain de Clermont.
Je ne blâme point le P. Touron , de
n'avoir pas trop infifté fur les Obfervations
de Dom de Sainte Marthe ; il n'avoit pas
deffein de compofer une Hiftoire Critique.
Mais à prefent que l'Eloge de Gui de la
Tour eft entre les mains de tout le monde ,
il ne peut pas trouver mauvais que les Lecteurs
lui communiquent leurs remarques ,
& qu'ils le prient d'éclaircir leurs doutes .
11
AOUST, 1743 1701
Il m'en eft venu un touchant l'âge de 17. à
18. ans , que les Dominiquains donnent à
ce Gui de la Tour , élû Evêque de Clermont
en 1250. Eft-il bien certain qu'il n'eût
que cet age-là ? A- t'on des témoignages du
tems , qui le certifient , ou qui le faffent
néceffairement conclure ? S'il en eft parlé
dans les Regiftres du Tréfor des Chartes ,
où le nouveau Gallia Chriftiana dit qu'il eft
fait mention du Droit de Régale ; fi l'obſtacle
de l'âge eft levé par quelque Acte du
tems , ou au moins s'il eft certifié , que
quoiqu'on pût y avoir égard , on paffa par
deffus , pour lors je n'aurai rien à dire,
Mais n'a-t'il pas auffi pû arriver que les
Ecrivains Dominiquains des moyens ou des
`derniers tems , Auteurs d'Infcriptions affés
récentes , ayent pris un Gui de la Tour pour
un autre de même nom ?
Je trouve en effet que dès l'an 1240 , il
y avoit à Lyon un Archidiacre , nommé
Gui de la Tour, Il ne feroit pas étonnant que
cet Archidiacre eût embraffé l'Ordre de S.
Dominique entre l'an 1240. & 1250 , &
qu'il eût été élû Evêque , âgé de 35. à 40.
ans. On a trop d'exemples de Dignités & de
Chanoines de Cathédrales , faits Domini
quains du tems de S. Louis , pour douter
de la poffibilité. Si le P. Touron fouhaite
recourir à la preuve qu'il y eut à Lyon un
Archi1702
MERCURE DE FRANCE.
·
Archidiacre , nommé Gui de la Tour , il la
trouvera dans l'Hiftoire des Archevêques de
cette Métropole , donnée par Severt , à la
page 268. L'Acte commence ainfi : Nos Arnoudus
Decanus , Capitulum Lugduni & Guido
de Turre , Archidiaconus Lugdunenfis , de
cujus Patronatu eft Ecclefia Sancti R. Lugd.
& finit en ces termes : Datum anno Domini
1240. Menfe Decembri. Je ne crois pas qu'on
puiffe confondre cet Archidiacre avec un
Perſonnage du même nom , qui n'auroit eu ,
dix ans après que l'âge de 17. ans , puifqu'il
en réfulteroit que l'Eglife de Lyon auroit
eu un Archidiacre , qui n'étoit que dans la
huitième année de fon âge.
•
Ainfi il faut diftinguer ces deux Gui de
la Tour, & avouer qu'il a pu fe faire , que
le premier foit entré chés les Dominiquains,
( en quoi le dernier auroit fuivi fon exem
ple ) & que comme il étoit au fait du Gouvernement
d'un Diocèfe , par fon ancienne
qualité d'Archidiacre , il ait été choisi pour
remplir le Siége de Clermont. Ceci à au
moins plus d'apparence que n'en a l'Election
d'un jeune Dominiquain de 17. à 18. ans ,
pour gouverner en qualité d'Evêque ce vafte
Diocèfe' , laquelle Election n'eft atteſtée
clairement que par une Infcription , ajoûtéc
au-deffous d'un Tableau ou d'une Peinture
affés moderne , telle qu'on en trouve affés
fou
AOUST. 1743. 1701
fouvent dans les Eglifes ou dans les Cloîtres
des Dominiquains & d'autres Religieux .
A la bonne heure qu'on trouve fon nom
ans des Actes de l'an 1250. 1251. & fuivans
, concernant le Temporel de l'Evêché
de Clermont , cela peut s'accommoder avec
le jeune âge d'un Prélat , qui jouit de fon
temporel , fans être facré. Mais que peut dire
le P. Touron de la Tranflation folemnelle
, que le même Gui fit le 16 Novembre
1253. du corps de S. Ceran ; Evêque de Paris
, du Tombeau dans une Châfe en l'Eglife
de Sainte Geneviève de Paris , dont
on a l'Acte avec fon fceau ? J'ai de la peine
à croire que cette Abbaye de Chanoines
Réguliers ait employé pour une telle Cérémonie
un Evêque qui n'auroit eu que 20 .
& qui n'auroit pas encore été facré ;
car je regarde comme une Fable ce que l'on
dit , fçavoir que Pierre de Colle medio , Archevêque
de Rouen , l'avoit facré , puifque
dès l'an 1245. il y avoit à Rouen un autre
Archevêque . Le P. Touron ne trouvera
point dans le Breviaire de Paris le fait de la
Tranflation que je lui rapporte , parce qu'on
ne l'a découvert que depuis peu , mais il en
aura l'éclairciffement , quand il voudra , à
Sainte Geneviève , & on efpere que les fufures
Editions du Bréviaire de Paris n'omettront
point ce qui regarde le culte de ce faint
Evêque de Paris.
ans ,
J'ai
1704 MERCURE DE FRANCE;
J'ai eu la curiofité de confulter le troifiéme
, le quatrième , le cinquiéme & le fixié
me Tomes de Gallia Chriftiana , croyant
y trouver dans les Additions , dont les Auteurs
enrichiffent ces Volumes , par forme
de Supplément aux Tomes précédens , quelque
chofe qui favorisât mon fentiment , outre
ce que Dom Denis de Sainte Marthe a
écrit , pour porter fes Lecteurs à fufpendre
leur jugement , mais mes recherches ont été
inutiles , quant à ce point. J'ai feulement été
convaincu par mes yeux que le P. Touron
s'en eft rapporté, fur un autre article qui regarde
le même Evêque , à ce que Dom de
Sainte Marthe avoit écrit d'abord dans le
corps de l'Ouvrage du fecond Tome ,
Col. 279. Conftat hunc Antiftitem fuiffe in
Ecclefia Cathedrali fepultum , S'il eut confulté
les Préliminaires du quatriéme Tome ,
Col. 26 , il y auroit lû que depuis l'impreffion
du fecond Volume , on avoit averti
Dom de Sainte Marthe ou fes Collegues
qu'il y avoit dans le Sanctuaire de l'Eglife
de Saint Martin du Bourg d'Ouzoir , Dio .
cèſe d'Auxerre , une Tombe , fur laquelle ,
avant que le tems eut un peu effacé les caractéres
, on lifoit : Hic jacet D. D. Guido
de Turre , quondam Epifcopus Claromont , &
qu'on y appercevoit encore actuellement
des traits de cette Infcription , avec la figure
d'un
AOUST : 1743 . 1705
d'un Evêque. On doit en conclure que Gui
fut inhumé en ce Lieu , & que fi fon corps
eft aujourd'hui dans la Cathédrale de Clermont
, c'eft qu'il y a été porté depuis. Les
Auteurs de Gallia Chriftiana ont trouvé ce
Monument d'autant plus propre à
prouver
que Gui de la Tour mourut à Ouzoir & y
fut inhumé , que cette circonftance s'accorde
très-bien avec le Teftament de ce Prélat, qui
eft datté du même lieu d'Ouzoir au Diocèfe
d'Auxerre, le jeudi , lendemain des Cendres
1285. Nous ignorons fi Gui avoit quelques
parens demeurans dans ce Bourg, On fçait
feulement qu'il eft fur le bord de la grande
route de l'Auvergne à Paris. Il y a toute
apparence que la maladie obligea l'Evêque
de Clermont , qui alloir à Paris , ou qui en
revenoit , à s'alliter en ce Lieu , & à y écrire
fes derniéres difpofitions . Il le fit le premier
jour de Mars , qui étoit le Jeudi , lendemain
des Cendres, & mourut le 4º . Dimanche
du Carême , qui étoit le 24 du même
mois. C'eſt au moins le jour qu'on célé
broit autrefois fon Anniverfaire dans l'Eglife
de Clermont, Il m'eft venu de ce Payslà
l'Extrait d'un Registre ou Livre in fº ,
qui eft dans la Chambre de la Pointerolle de
la Cathédrale , dans lequel font écrits les
Anniverfaires & Livraifons , fondés dans
cette Eglife , On y lit au 23 Mars : Anniverfaire
B
1706 MERCURE DE FRANCE.
niverfaire du Reverend Pere en Dieu Monfeigneur
Meffire Guy de la Tour Evefque. Par ce
ij livres, Et au 1er Juillet : Eodem die fit
memoria Domini Guidonis de la Tour , pro .
quo fit libratio panis & vini per Receptorem
Horarum. Je croirois que cette feconde commémoration
feroit celle du fecond enterrement
de cet Evêque , c'eft-à-dire , quand fes
os rapportés d'Ouſoir, furent inhumés dans
fa Cathédrale. Je fuis & c .
A Paris , ce 20 Juillet 1743 .
EPITRE
De M. d'Arnaud à Mademoifelle de B *
T
U veux donc jeune , belle & fçavante Uranie ,
Aux leçons de Reftaut foumettre ton efprit :
Quoi , n'eft- ce point affés que la Philofophie
De fon faux éclat l'ait féduit ?
Faut-il encor que ton génie ,
Ce géant qui parcourt l'univers à fon gré ,
Efclave de la fimétrie ,
Dans un cercle de mots languiffant , refferré ,
Ne foit plus qu'un enfant timide ,
Corps de l'efprit d'autrui fans ceffe pénétré ,
Qui de la main des yeux s'attachant à fon guide ;
Ne marche que d'un pas tremblant & meſure ?
Eaut
AOUST. 1743 . 1757
Faut - il , dis-je , que cette prude ,
Cette monotone Beauté ,
L'ennuyeufe grammaire , au maintien concerté
Penfant , parlant , faifant tout par étude ,
Ayant un grand défaut , la, régularité ,
Afervifle aux langueurs de l'uniformité ,
Aujoug des régles , joug fans doute le plus rude ¿
Ce défordre expreffif , cette vivacité ,
Qui naiffant de la liberté ,
Languit, meurt dans la fervitude ,
Et ne fe reproduit que par la nouveauté ?
Le moyen d'être aimable avec l'exactitude
Le grand art, l'art de plaire eft la variété ,
Et cet art eft à toi res yeux l'ont inventé ;
Crois-moi , de tes difcours bannis toute im pofture
Dois tu craindre la vérité ?
N'es -tu pas de ces traits l'image la plus pure
Avec la négligence , on aime la Nature .
L'heureux défaut c'eft la fimplicité ;
Les graces n'ont jamais recherché la parure ;
Emprunte leurs atours , elles ont la beauté ;
Ne point voiler la nudité ,
C'eſt expoſer toujours la même belle ;
Le fentiment fait place à la réfléxion ;
La laiffer deviner par un adroit foupçou ,
C'est la multiplier en la rendant nouvelle ,
Et réveiller le goût , plus sûr que la raiſon ;
Oma chere Uranie , imite ce modelle ;
вії.
3
Cache
1708 MERCURE DE FRANCE;
Cache à l'oeil curieux les fublimes refforts
Qui font de ton efprit mouvoir le vaſte corps.
Dans tes difcours fans fard que ton ame étincelle
Penfer , fentir , voilà l'étude digne d'elle ,
Ou fi tu veux apprendre un jargon enchanteur ,
Qui mieux que le François touche fon auditeur ?
Des froids Grammairiens laiſſe là les harangues ;
Dis feulement un j'aime avec ardeur ;
Sçache parler le langage du coeur
Et tu fçauras toutes les Langues,
2
DISSERTATION
Sur le Système des Petits Tourbillons ;
Dmontrer la fauffeté de leurs principes,
Etruire les opinions des autres , déc'eft
le fruit de quelques années d'étude ;
mais trouver un Syftême qui faffe le monde
du cahos , qui s'accorde avec toutes les
expériences ; que l'Architecte lui- même
fous le canon du rempart repouffe tous les
traits des affaillans , voilà le chef d'oeuvre
où l'efprit humain ne pourra jamais atteindre.
La difficulté qu'il y a de réuffir dans un fi
noble deffein , excita Deſcartes & Newton
à y travailler ; ces grands hommes l'ont fait
avec
AOUST. 1743 . 1709
avec un fuccès prefque égal ; le commun
de nos Philofophes prétend néanmoins
qu'aucun n'eft encore venu à bout de fon
entrepriſe. M. de Moliéres cependant mérite
la loüange d'avoir fait quelques efforts
pour répandre le goût de la Phyfique . Il
a fait voir les loix du Méchaniſme parmi les
Phyficiens. Mais fon Syftême , tout ingénieux
qu'il eft , ne laiffe pas de fouffrir bien
des difficultés...
Premierement , les deux principes de
Mouvement , fur lefquels roule principale
ment le Systême , font abfolument faux. Le
premier , eft qu'un mobile pouffé par deux
forces,dont les directions forment entr'elles
un angle , doit parcourir uniformément
la diagonale d'un parallelograme , dont les
côtés feront en raifon des forces , de forte
cependant que ce mobile ne mettra pas plus
de tems à décrire la diagonale , ( qui fera
par exemple l'hypotenufe d'un ifocele ) qu'il
en eût mis à parcourir un des côtés.
La feconde régle , eft que fi un globe mû
d'un mouvement uniforme , tomboit obliquement
fur un plan inébranlable , & que
la force, avant la percuffion , fût repréſentée
par le finus total , la force avec laquelle il
frapperoit le plan , feroit exprimée par le
finus de l'angle de l'incidence , celle qu'il
perdroit par le finus verfe , & celle qu'il
B iij
confer1710
MERCURE DE FRANCE.
conferveroit après la percuffion par le finus
de l'angle du complément. Or il eft facile
de démontrer la fauffeté de l'un & de l'autre
principe.
1 °. Suppofons que le globe a foit pouffé
par des forces égales diamétralement oppofées
qu'arrivera - t'il? le mobile s'arrê
tera. Pourquoi ? parce que la force qui eft
du côté de l'Orient ; par exemple , s'exerce
toute entiere à fupporter les efforts de la
force qui eft du côté de l'Occident ; il en eſt
de même de l'autre vice versâ.
2º . Ce principe pofé , fi l'angle qui eft
formé par les deux directions , eft extrémement
aigu , l'action des deux forces fe
peri
dra toute dans leur vifus ; il ne reſtera
qu'une très - petite partie qui agira fur le
mobile. Par conféquent , fi l'angle formé
par les côtés du parallelograme eft infiniment
petit , le globe a ne doit parcourir
qu'une partie infiniment petite dans la diagonale.
Si au contraire l'angle formé par les directions
, a 18. degrés , moins quelques
fecondes , alors les forces ne feront prefque
point oppofées ; elles agiront donc toutes
deux contre le mobile , qui , n'ayant point
de force par lui-même pour réfifter à cette
double action , décrira une ligne plus granque
la diagonale ; en effet il n'y a que
de
quel
AOUST. 1743 . 1711
quelques fecondes qui empêchent que les
deux forces ne s'exercent toutes fur le mobile.
Or fi elles agiffoient toutes deux contre
le globe , il parcourreroit un espace plus
grand que la diagonale , puifqu'il décrifoit
les deux côtés d'un parallelograme ,
qui , felon tous les Géométres , font plus
grands que la diagonale. D'où il fuit , que
des mobiles pouffes par des forces, dont les
directions forment entr'elles des angles ,
parcourreront des efpaces qui feront en raifon
de l'oppofition de ces mêmes forces.
Dans la feconde régle , & dans tout le
Systême , on fuppofe une décompofition
de forces , dont nous parlerons ci - après :
mais ce qui frappe d'abord , c'eſt que le
globe , qui tombe obliquement fur un plan
inébranlable , ne perde de fa force felon
le finus verfe , & que celle qu'il retient
après fa percuffion , foit exprimée par le finus
de l'angle du complément.
que
Il eft vrai que fi le globe, en tombant fur
le plan immobile , eût fuivi la ligne perpendiculaire
, il auroit dû perdre tout fon
mouvement. Si le même globe eût décrit
une ligne parallele au plan , il l'eût entiétément
confervé ; donc felon les Partifans du
Syftême , la ligne oblique étant compofée
de la parallele & de la perpendiculaire , il
Biiiji doit
1
1
1712 MERCURE DE FRANCE.
doit perdre une partie du mouvement , &
.conferver l'autre.
fi
Le finus total n'étant qu'un rayon , eft
égal au finus de l'incidence , & au finus
verfe , qui joints enfemble , donnent un
autre rayon du même cercle ; par conféquent,
pour connoître la force que le mobile garde
après la percuffion , on retranche d'abord
du finus total une ligne égale au finus dur
complément , felon lequel le globe ne touche
point le plan inébranlable , le reste du
finus total fera égal au finus verſe. Le mo
bile conferve de fon mouvement , felon le
finus du complément , puifque felon ce finus
, il ne touche pas le plan ; il faut donc
qu'il en perde , felon le finus verfe ; car ce
finus , avec celui du complément , eft égal
au finus total.
Mais raifonnons felon les principes du
Systême ; & pour fixer l'imagination , il
faudra fuppofer que la ligne que fuivra
le globe en tombant fur le plan , fera la diagonale
d'un quarré parfait. Cette ligne tient
le milieu entre la perpendiculaire & l'hori-
-zontale ; le globe doit conferver le mouvement
repréfenté par la ligne horizontale.
puifqu'en fuivant cette direction , il décrit
une ligne parallele au plan, fans le toucher.
Mais auffi il perd toute fa force , exprimée
par la ligne perpendiculaire. En effet , dans
le
AOUST. 1743 . 1713
le fyfteme , un corps qui tomberoit perpendiculairement
fur un autre infiniment
plus grand , lui communiqueroit tout fon
mouvement. Or le plan immobile eft le
corps en queftion , puiſqu'il réfifte autant à
l'action du globe , que le corps, infiniment
plus grand. Le mobile doit donc perdre de
fon mouvement , comme la moitié du finus
total , & en conferver , comme l'autre . Or
la moitié du finus total eft plus grande que
le finus verfe , & l'autre moitié plus petite
que le finus du complément. Donc , dans le
cas particulier , le globe ne doit pas perdre
de fon mouvement felon le finus verfe , &
en conferver felon le finus du complément.
En fecond lieu , M. de Moliéres demande,
pour former fon monde , que Dieu air créé
une matiere homogéne , qu'il ait divifée en
grands tourbillons , qui renfermeront d'autres
tourbillons. Ceux- ci en contiendront
d'autres ; en un mot , il demande autant de
tourbillons que l'on en aura befoin pour
expliquer les Phénomenes.
Quelle idée préfente à l'efprit cette multitude
de tourbillons , renfermés les uns
dans les autres ? Plufieurs Philofophes ont
cru la matiere divifible à l'infini ; mais perfonne,
avant M. de Moliéres , ne l'a affirmé
divifée. Les Tourbillons du troifiéme Elément
, comme on le verra dans la fuite , ont
By pour
1714 MERCURE DE FRANCE.
pour points ceux du fecond Elément , qui
ont pour leurs côtés infiniment petits ceux
du premier Elément : or un cercle a une
infinité de ces côtés infiniment.petits . Voilà
donc une partie de matiére qui eft divifée
actu à l'infini.
Il me femble voir un Général qui auroit
80 , 000 , 000 , 000 , 0000 , 000 , de Soldats
à ranger en bataille ; chaque Soldat en
contiendroit environ 20 , 000 , 000 , 000
chacun de ces petits hommes formés , felon
l'idée de Guliver , en renfermeroit autant
d'autres,infiniment plus petits que lui . Ceuxci
en
contiendroient encore de plus petits ,
& ainfi du refte . Je crois qu'avec cette multitude
infinie d'hommes, de Pygmées , d'Homoncules
, le Général feroit fort embarraffé,
Voilà ce qui doit arriver àl'Auteur des Tourbillons
; l'application fe préfente d'elle- même
. Mais avant que de les mettre en campagne
, examinons leur force centrifuge &
centrale .
Si l'on croit l'Auteur du Systême , un
mobile qui décrira une circonference d'un
mouvement uniforme , doit frapper cette
circonference en tous fes points , felon la
direction d'une ligne perpendiculaire à la
tangente. Pour démontrer cette Propofi
tion , il faut fuppofer deux lignes qui for
ment un angle oblique. Ces deux lignes.
peuvent
AOUST. 1743 . 1715
peuvent être regardées comme deux côtés
infiniment petits du poligone que le mobile
décrit. Si l'on produit un de ces côtés infiniment
petits , pour avoir la tangente, le
globe qui paffera de l'autre côté infiniment
petit,à celui-là, en fuivant une ligne oblique,
doit frapper la circonférence felon la direc
tion d'une ligne perpendiculaire tirée depuis
l'extrémité fupérieure de la ligne oblique,
jufqu'au côté infiniment petit prolongé.
La raifon eft que ce globe doit frapper la
circonférence , comme s'il tomboit fur un
plan . Or s'il tomboit fur un plan , en fuivant
une ligne oblique , il frapperoit le plan fe
lon la direction d'une ligne perpendiculaire.
La ligne oblique tenant le milieu entre
l'horizontale & la perpendiculaire , elle
peut être fans contredit décomposée en
deux lignes differentes ; mais que la force
repréfentée par cette ligne , fe décompoſe
en deux , qui , priſes enfemble , foient plus
grandes queleur fomme : voilà un paradoxe,
que l'on n'établira jamais. Suppofons que
cette ligne oblique foit la diagonale d'un
quarré ; un des côtés perpendiculaires du
quarré , doit repréfenter la direction de la
ligne perpendiculaire à la tangente ; mais
comme la ligne oblique eft moyenne entre
la perpendiculaire & l'horizontale , il faut
donc décompoſer le refte de la ligne obli-
Bvj que
1716 MERCURE DE FRANCE.
que en une autre ligne horizontalê du quar
ré. Voilà donc une force repréfentée par
l'hipoténufe d'un triangle ifocèle décompo
fée en deux côtés du même triangle. L'hipoténufe
, qui , felon tous les Géométres , eft
incommenfurable aux deux côtés du triangle
, leur doit donc être égale. L'axiome
d'Archimede , qui dit , que deux côtés d'un
triangle font plus grands qu'un troifiéme ,
feroit donc abfolument faux , quoique la
vérité en foit démontrée dans la Géométrie
Elémentaire.
Un autre principe qui a de grandes utili
tés dans le Systême , c'eft que les cercles
étant égaux , les forces centrifuges font
comme les quarrés des viteffes , parce que
le globe , qui a le double de viteffe , décrit
deux fois fon cercle , lorfque l'autre ne le
parcourt qu'une fois , & chaque coup doit
être double de l'autre , puifque la vitelle
eft double. Il a donc de la force centrifuge
, comme 4 , qui eft le quarré de 2 , ou
de la viteffe exprimée par ce nombre.
Si l'on calcule exactement toutes ces forces
, on y verra quelque petite difference.
Le mobile qui a de la viteffe , comme 2 ,
frappe deux fois chaque point de fa circonference
, lorfque l'autre , qui n'a de la viteffe
que comme un , ne frappe qu'une fois
les côtés infiniment petits de fon cercle,
Chaque
AOUST. 1743 . 1717
Chaque coup eft double ; il a donc dans
fes chocs de la force comme 4. Il parcourt
deux fois fon cercle , égal au cercle de l'autre
; voilà de la force comme 2 , qui , ajoûté
à 4 , donne 6 ; qui , de l'aveu de tout le
monde , n'eft point le quarré de la viteffe
exprimée par 2. D'où il fuit que , dans le Syf
tême , les forces centrifuges de deux globes
qui fe meuvent dans les circonferences de
deux cercles differens , ne font pas entr'elles
comme les quarrés des viteffes divifés par
leurs rayons , puifque ce n'eft qu'un corollaire
de la précédente . Paffons à la force
centrale .
Dans un tourbillon fphérique , fi l'on
confidere un globule qui tourne autour du
centre de la fphére , ce globule , felon l'Auteur
du Systême , frappera le globule fupérieur
avec une certaine force, que l'on nomme
force centrale ; & dont la direction fera
le rayon de la fphére , qui paffera par le centre
de ce globule. Il faut remarquer , que la
force centrale n'eft pas réellement diftinguée
de la force centrifuge , dont elle n'eſt
qu'une décompofition , qui , dans le Syſtême
, fe doit faire felon les loix du mouvement
oblique. Mais qu'il me foit permis
de remarquer que n'y ayant point d'oblicité
, il ne doit pas non plus y avoir de force
centrale.
En
1716 MERCURE DE FRANCE.
que en une autre ligne horizontale du quar
ré. Voilà donc une force repréfentée par
l'hipoténufe d'un triangle ifocèle décompo
fée en deux côtés du même triangle. L'hipoténufe
, qui , felon tous les Géométres , eft
incommenfurable aux deux côtés du triangle
, leur doit donc être égale. L'axiome
d'Archimede , qui dit , que deux côtés d'un
triangle font plus grands qu'un troifiéme ,
feroit donc abfolument faux , quoique la
vérité en foit démontrée dans la Géométrie
Elémentaire.
Un autre principe qui a de grandes utili
tés dans le Système , c'eft que les cercles
étant égaux , les forces centrifuges font
comme les quarrés des viteffes , parce que
le globe , qui a le double de viteffe , décrir
deux fois fon cercle , lorfque l'autre ne
parcourt qu'une fois , & chaque coup d
être double de l'autre , puife
eft double. Il a donc de 1
fuge , comme 4 , qui eft le
de la viteffe exn
ces
Si l'on
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ROMEXOUST. 1743 1717
1719
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It égale
de l'EChaque
coup eft double ; il a donc dans cercle
fes chocs dela force comme 4. Ilparcourt
deux fois fon cercle , égal au cercle de l'alu glo
tre ; voilà de la force comme 2 , qui , ac
té à 4 , donne 6; qui , de l'aveu de toute
monde ,n'eft point le quarré de la vite
exprimée par 2. D'où il fuit que dans le que,dans leyf
tême , les forces centrifuges
de deuxgoes
qui fe meuvent dans les circonferences
de
deux cercles differens , ne fontpasserelles
comme les quarrés des vinelles divifés par
leurs rayons , puifque ce n'est qu'un co
rollaire de la précédente
. Pafons à lafor ce centrale .
e centri
ces prin
droient
'y auroit
preuve :
une line
vient
ge dans les
La
grave.
e par
conféquent,
Dans un tourbillon fphérique , filon
it cette ligne , confidere un globale qui tourneautourde tendance
vers
centre de lafphere, ce globule ,felon l'Au
teur du Syfteme, frappera le globalefape tendit au cen
rieur avec unecertaine force, queloans fa chute fuime
force centrale, & dont
Jent
lafphere,qo
bale.Ilfar
n'eft
KCCCCDCE
pedition
'axe de la Terre.
t tomber perpens
tous les cercles
La force centrifu de 9
fe des circonfp
....
tourne auprèxe qe ǝ
nité de fois la 8
fe meut fous l'Exe de 9
urellement 4 p....
force ce дәрәжеде ә
H18 18
e de sb sxe de 9
+ 0.04-
18 MERCURE DE FRANCE.
En effet le globule , qui tournera dans un
des petits cercles auprès des poles , frappera
la circonference , en fuivant une ligne , dont
la direction fera perpendiculaire à la tangente.
On ne peut donc pas dire qu'il frappe
le globule fupérieur felon une direction
oblique. Pour cela il faudroit que le rayon
qui paffe par le centre du globule , & qui
aboutit au centre du cercle qu'il décrit , für
oblique au point de l'autre globule fur lequel
il tombe : or il n'y eft point oblique ,
puifqu'il ne fait avec le point ni angle ob
us , ni angle aigu ; car ces angles ne fe forment
que par la differente pofition d'une ligne
fur une autre , & non pas fur un point ,
qui n'eft que la continuation du rayon du
petit cercle. D'ailleurs je ne comprens pas
comment , dans les principes du Syftême ,
on peut former un Tourbillon fphérique.
Je viens de démontrer qu'il y a égale réfifrance
auprès des poles & de l'Equateur , puifque
j'ai fait voir qu'il n'eft point de force
centrale. On nous a repréfenté jufqu'ici
une matiére qui tourne avec égale viteffe autour
d'un axe. Cela pofé , j'apperçois un
tourbillon cilindrique ; mais le fphérique
me paroît une chimére.
On nous dir que dans un tourbillon
fphérique , la force centrale d'un globule
qui tourne auprès des poles , eft à la force
centri
AOUST. 1743 . 1719
centrifuge comme le rayon du petit cercle
qu'il décrit , eft au rayon de la fphére. On
ajoûte encore que la force centrale du glo
bule qui tourne auprès des poles , eft égale
à celle de celui qui parcourt le cercle de l'Equateur,
& que ce dernier a une force centri
fuge égaleà fa force centrale . De tous ces prin
cipesileft facile de démontrer qu'il n'y auroit
que fousl'Equateur que les graves tendroient
au centre de la Terre. En voici la preuve :
1° . La gravité , felon le Syftême , ne vient
que de l'excès de force centrifuge dans les
parties qui environnent le corps grave. La
force centrifuge eft repréfentée par une li
gne perpendiculaire à l'axe. Par conféquent,
le grave , qui dans fa chûte fuit cette ligne ,
tombe fur l'axe , fans aucune tendance vers
le centre .
2º. Pour que le corps grave tendît au cen
tre de la Terre , il devroit dans fa chûre fuivre
une ligne oblique à l'axe de la Terre.
Or, dans le Systême, il doit tomber perpendiculairement
à l'axe , dans tous les cercles ,
excepté fous l'Equateur . La force centrifuge
croiffant en raifon inverfe des circonféren
ces , celle du globe qui tourne auprès des
poles , furpaffe une infinité de fois la force
centrifuge de celui qui fe meut fous l'Equa
teur. Il doit donc naturellement fuivre plû
tôt la direction de la force centrifuge , que
celle
1720 MERCURE DE FRANCE
celle de la force centrale , puifqu'un mo
bile fuit toujours la plus forte impreffion.
Par conséquent il doit tomber perpendiculairement
à l'axe de la Terre.
3º. Accordons à M. de Moliéres , que le
corps grave doive obéir à la force centrale
centripete dans fa chûte; le globe de la Terre
a environ 3000.lieues de diamètre, par conféquent
fon rayon eft de 1500. lieuës . Suppofons
un grave qui tourne dans un cercle
éloigné du pole de 100. lieuës , la direction
de la force centripete s'exprimera par
une ligne parallele au rayon de la fphére terreftre
, & qui doit aboutir à un plan , qui ,
dans le Syftême tient lieu de tangente à la
couche fphérique. Cette ligne parallele ,qui
repréfente la force centrale , fe terminera au
centre du petit cercle éloigné du pole de
100. lieuës , avec le rayon duquel elle fera
un angle aigu. Si donc le mobile obéit à la
force centripete , fa chûte & fon cours fe
termineront au lieu où finit la ligne qui repréfente
la direction de la force centrale ,
c'eft-à-dire , au centre du petit cercle éloigné
du pole de 100. lieuës . Il faudroit donc
que le mobile roulât environ 1400. lieuës
pour arriver au centre de la Terre. Il eſt
évident que ce feroit plutôt un jeu qu'une
explication de Phyfique.
M. de Moliéres qui s'eft fait une loi d'admettre
AOUST. 1743 . 1728
mettre les Obfervations de Newton , & de
les expliquer par une fimple caufe , que l'on
nomme impulfion , a démontré , comme l'illuftre
Anglois l'avoit prouvé par fes expériences
, que la force centrale croiffoit en
raifon inverfe du quarré des diftances , &
que dans un tourbillon fphérique , où les
forces font en équilibre , les viteffes étoient
entre elles , en raifon inverfe des racines
quarrées des rayons.
Pour que la propofition fût vraie , il faudroit
que la viteffe de la couche inférieure
fût à celle de la couche fupérieure , comme
4 eft à 2 , fuppofé que les diftances du centre
fuffent 4 & 16. Or cela implique , felon
les loix du mouvement répandues dans le
fyftême. On nous fait d'abord entendre que
fi ur globe parfaitement dur a plus de vitelle
qu'un autre qu'il rencontre , & qui fe meut
felon la même ligne , il doit lui communiquer
de fon excès de viteffe , en raison des
maffes , de forte qu'enfuite , ne faifant qu'un
même corps , ils fuivent une même détermination
or la couche inférieure , eft à la
couche fupérieure ,comme le globe parfaitement
dur , qui en rencontre un autre qui a
moins de viteffe . Par conféquent , elle doit
lui en communiquer en raifon des malfes.
Ce raifonnement , tout fimple qu'il eft , dérange
bien les idées du fyftême , & démon1722
MERCURE DE FRANCE,
tre affés la contradiction des principes qu'il
eft impoffible d'accorder avec la loi aftronomique
de Kepler.
Si un tourbillon a plus de force centrale
qu'un autre , il doit lui arracher des couches
, jufqu'à ce qu'ils foient en équilibre ;
ce qui doit bientôt arriver , felon M. de
Moliéres. Si cela eft , dans quel tourbillon
doit tourner la matiére enlevée ? fi c'eſt dans
le tourbillon qui l'a enlevé , qui remplira
fa place dans celui dont elle a été enlevée ?
Elle ne peut fe mouvoir dans le tourbillon
dont elle a été enlevée , puifqu'elle n'y eſt
-plus. Peut-être , dira-t'on , que la matiére
qui eft entre les efpaces du tourbillon , fuccéde
à la couche enlevée . Mais cette matiére
n'a par elle aucun mouvement ; il faudroit
donc la faire tourner autour d'un centre particulier
& d'un centre commun. Car il eft à
remarquer que dans le fyftême , chaque
point eft devenu un petit tourbillon , qui a
un mouvement autour de fon centre , & un
autre autour du centre commun , parce que
le grand tourbillon feroit d'abord diffipé.
Semblable à plufieurs oeufs que l'on remuë
dans un creufet , un inftant après on ne voit
qu'un corps liquide fans figure d'oeuf.
Quoique l'on ait ôté des couches fphériques
aux tourbillons , ils confervent toujours
le même nom . Ce qui revient au même
2
AOUST. 1743. 1723
me, que fi Defcartes , après avoir écarné
fes cubes par leurs frottemens , les comprenoit
encore fous le nom de parties cubiques .
Il s'agit maintenant de fçavoir fi l'on peut
faire marcher ces tourbillons , & s'ils peuvent
nous former une Planette .
On nous fait entendre d'abord que l'équilibre
troublé entre les tourbillons , peut
fe reftituer peu à peu , de forte qu'il paffe
continuellement de la matiere d'un tourbillon
à l'autre. Comment accorder cette
propofition avec un principe du fyfteme
qui dit que , toute matiere qui n'eft point
grave , ne réfifte point à la divifion de fes
parties? De-là vient que les Planettes , ces
corps fi immenfes , qui ont une viteffe qui
paffe les bornes de notre imagination , ne
trouvent aucune réfiftance dans l'Ether : d'où
il fuit que la matiére Ethérée eft toujours en
équilibre.
Or les tourbillons , avant que l'équilibre
fût troublé , n'étoient autre chofe que la
matiére Ethérée ; n'étant chargés d'aucuns
globules durs , ils n'avoient ni denfité , ni
gravité , mais femblables à l'Ether , ils confervoient
une égale force centrifuge.
Les particules qui paffent d'un tourbillon
à l'autre , peuvent fe rencontrer avec des
déterminations égales , & diamétralement
oppofées alors elles perdent de leur mou
vement
1724 MERCURE DE FRANCE:
vement de corrotation ; elles font pouffées
au centre du tourbillon , ayant moins de
force centrifuge. Preffées de tout côté , elles
prennent une figure fphérique , & forment
des globules durs aux centres des tourbillons
de different ordre.
Pourquoi ces particules defcendroientelles
aux centres des tourbillons ? il eſt vrai
qu'après avoir perdu leur mouvement autour
de leur propre centre , elles ne font
plus en équilibre avec la matiére qui les environne
; d'où il faut conclurre que cette
matiére doit les enlever , femblable à l'air
qui mis en mouvement , balaye les vapeurs,
& les exhalaifons qu'il rencontre. D'ailleurs,
on nous a dir qu'un tourbillon plus fort
qu'un autre , doit lui enlever des couches
fphériques ; pourquoi donc la même chofe
n'arriveroit-elle pas à l'égard d'une matiére
qui aura perdu fon mouvement de corrotation
?
Suppofé que ces parties defcendent au
centre , je ne je ne vois pas quelle peut être la
caufe qui en fera des globules durs . Si c'eft
l'excès de force centrifuge dans les parties
qui l'environnent , comme M. de Moliéres
le prétend , la matiére contenue entre les
efpaces des tourbillons , doit avoir de la
gravité , puifqu'elle eft environnée de toutbillons
qui ont un mouvement de corrota
tion
AOUST. 1749 .
1725
tion , une force centrale , une force centrifuge
dont elle eft dépourvûë . Elle doit donc
tomber dans le centre de quelque tourbillon
, car effentiellement tout corps grave
tend à un centre. Qui eft- ce qui remplacera
cette matiére? ce ne peut pas être des tourbillons
, autrement on multiplieroit les intervalles
qu'ils laiffent entre eux . Si c'eft de
la matiére , elle fera pareillement un corps
grave ; il faut donc admettre des vacuoles
entre les tourbillons , ce qui ne s'accommode
pas avec le fyftême du plein.
Nous avons vû des tourbillons de differens
ordres , chargés de globules durs , les
uns plus , les autres moins ; les tourbillons
ayant perdu de leur facilité de tourner autour
de leur propre axe , ont été comprimés
par ceux qui les entouroient. Or un tas
de tourbillons preffé par le fluide qui l'environne
, doit nous donner , dit-on , un
corps opaque , denſe , ſolide , tel qu'eſt la
Terre.
Mais l'Auteur auroit- il voulu lui-même
habiterune pareille Planette ? j'en doute fort;
il feroit à craindre que l'Architecte refusât
de loger fous le toit qu'il auroit conſtruit.
L'équilibre , quand même il auroit pû être
troublé , fe feroit rétabli en moins de trois
minutes , puifque la force des tourbillons
vainqueurs , diminuë en raifon inverſe du
quarré
1726 MERCURE DE FRANCE.
quarré des rayons ; la force des vaincus au
contraire augmente en même raiſon. Eft-il
donc poflible qu'en fi peu de tems il foit
tombé une multitude de globules durs , affés
confidérable, pour former la Terre, les Mers ,
le Soleil , les Planettes , les Etoiles, le Monde
entier ?
Après avoir formé la Planette , M. de
Moliéres compofe fon Atmoſphére du troifiéme
Elément. Pour entendre cette propofition
, il eſt à remarquer , que les grands
tourbillons répondent aux tourbillons de
Defcartes, les grands tourbillons fe divifent
immédiatement en tourbillons, femblables
à la matiére globuleufe ; de-là vient
qu'on les appelle tourbillons du fecond Element
, qui ont pour points d'autres petits
tourbillons qui équivalent à la matiére fubtile
, & que l'on nomme tourbillons du
mier Elément.
pre-
Les tourbillons du fecond Elément , qui
n'avoient pas tant de globules durs que ceux
qui formoient la Planette, & qui par conféquent
étoient les plus éloignés du centre ,
s'arrangérent enfuite autour de ce corps opaque.
C'est ce qui forme la matiére du troifiéme
Elément. D'où il fuit que les tourbillons
les plus grands , & les plus chargés de
globules , font les plus proches de la Terre.
Ceux qui font les plus petits , & qui one
plus
AOUST. 1743 . 1727
plus de force centrale , en font les plus éloignés.
Voilà donc les principes de l'équilibre
, qu'on nous avoit établis avec tant de
foins , renverfés de fond en comble.
Je bornerai là mes obfervations fur un
fyftême que j'ai défendu il y a quelques
mois , avec toute l'ardeur d'un écolier qui
foutient un fentiment. Il m'en a coûté
pour
me défaire de mes préjugés ; mais la vérité
éxigeoit de moil'hommage que je lui ai rendu
, & m'a fait connoître que , fouvent il y
a bien loin de la Géométrie , aux régles que
garde la Nature.
>
Le fyftême, quoiqu'impliqué, eft un chefd'oeuvre
d'imagination , quifera vivre éternellement
fon Auteur. L'air , les fluides , la
lumiére , les météores , l'activité du feu
les phoſphores , la variété des corps . &
prefque tous les phénoménes s'expliquent
heureuſement par les tourbillons . En leur
donnant une force centrale particuliére , &
& une autre commune , ils font incomparablement
plus forts que ceux des Cartéfiens
. Je crois donc qu'il feroit à propos dans
la Phyfique , d'admettre des petits tourbillons
, fans chercher leur origine, Le progrès
furprenant d'une incendie ; des témoins oculaires
, qui ont vû la formation du tonnerre,
les fermentations , les vents qui , dans leur
furie , déracinent les arbres , les fluides , &
plufieurs
1728 MERCURE DE FRANCE .
plufieurs phénoménes paroiffent en démontrer
l'éxiftence.
>
Mais fi l'on admet les principes du fyſtème
, il feroit à craindre que tout notre tourbillon
ne fût abſorbé par le tourbillon voiſin ,
ce qui arriveroit , s'il tomboit fur le Soleil
une fi grande quantité de matiére du fecond
Elément , que cet Aftre ne pût les difliper.
Peut-être qu'avec nos maiſons , nos champs
notre air même , nous nous trouverions
tranfplantés dans d'autres plages. Nous aurions
d'autres lieux , un nouveau Soleil, &
pendant la nuit de nouveaux points de vûë.
Peut-être auffi que perfonne ne fouffriroit
de ce dérangement , à l'exception des Aftronômes
qui feroient , forcés d'oublier ce
qu'ils avoient appris , & de jetter d'autres
fondemens de leur Art. Auffi eft-il à craindre
que le fyftême ne faffe fortune chés
pas
eux.
LACOSTE
A Dijon le 2. Avril 1743 .
$25252
$252
TRADUC
AOUST. 1743 . 1729
25252525252252
TRADUCTION
Dé l'Ode XXIII. d'Anacréon , fur les
Richeffes.
S1 for faifoit durer la vie ,
Je bornerois mes foins & ma plus forte envie
A me munir de grands tréfors ,
Afin que quand la Parque avide
Viendroit me menacer de fa faux homicide ,
Ce tribut m'exemptât d'aller aux fombres bords ;
Mais , puifque la cruelle eft fourde à nos promefles,
Et que les plus grandes Richeffès
Ne fçauroient adoucir la rigueur de fes loix ,
D'en amafler je n'ai que faire.
Bacchus , & le Fils de Cythere
Déterminent mon fage choix ,
Et peuvent feuls me fatisfaire,
C JEU
1730 MERCURE DE FRANCE.
JEU de longue Paume , & célébres Parties
janées. Extrait d'une Lettre écrite de Dourdan
le 27 Juin 1743 .
ON a conftruit ici depuis peu un Jeu de
longue Paume , dans les foffés qui régnent
le long des murs de la Ville ; il remplit
l'efpace qui eft entre les deux Tours
& eft fermé d'un côté par ces murs , & de
l'autre par une paliffade de charmille , &
par une allée de tilleuls , plantés fur le revers
du foffé. Entre les tilleuls & l'extrémité
du revers , eft un efpace de huit ou dix
pieds, couvert d'un beau gafon ; c'eft de-là
que les fpectateurs , fans courir aucun rifque,
décident, par leur filence , ou par leurs
acclamations , du mérite des Joueurs .
Le bruit de l'établiffement de ce Jeu s'eft
répandu dans le Pays ; les Dourdanois s'y
font faits une réputation , qui a allarmé les
Villes voifines ; celle d'Etampes , qui a toujours
été en poffeffion de l'emporter fur les
autres , a tremblé pour fa gloire. Son émulation
a été excitée , & a paru par un défi ,
qui fut auffi tôt accepté. La partie fut fixée
la veille du jour de S. Jean , 23. de ce
mois. Les Joueurs de Dourdan ont parfaitement
PAOUST. 1743 . 1731
ment foutenu l'idée qu'ils avoient donnée
de leur adreffe ; on étoit convenu de joüer
deux parties , qu'ils gagnérent , malgré les
efforts & l'habileté de leurs adverfaires ;
chaque partie étoit de quinze louis d'or.
Mr d'Etampes demanderent auffi -tôt leur
revanche , on la leur accorda. La premiere
partie s'étoit faite à Dourdan , la revanche
fut donnée à Etampes , où Mr de Dourdan
fe rendirent le lendemain ; ceux - ci
avoient déja gagné la premiere partie , &
trois jeux fur la feconde, quand l'un de leurs
meilleurs Joiieurs , le fameux Boiſemon , le
trouva incommodé ; Mrs d'Etampes , qui
s'en apperçurent , propoférent poliment de
remettre la partie ; mais Mrs de Dourdan
affés flattés de leur premier fuccès , & charmés
de trouver l'occafion de confoler Mr
d'Etampes de leur perte , refuferent cette
propofitions on continua , & la partie fut
terminée à l'avantage de Mrs d'Etampes .
Il ne faut pas oublier de vous dire , que
la premiere partie avoit attiré à Dourdan
une partie de la Nobleffe des environs
beaucoup de Damès des Châteaux voifins
& de la Ville d'Etampes. On avoit dreffé
des tentes pour elles , on en avoit auſſi
dreffé pour les rafraîchiffemens . Il n'y eut
ni difpute , ni confufion ; il y avoit des Juges
nommés, décider des coups , entre
Cij
pour
les
1732 MERCURE DE FRANCE:
les Joueurs , & des Gardes de M. le Duc
d'Orléans , pour contenir le peuple , & em
pêcher le defordre, La partie dura depuis
deux heures après midi jufqu'à fepts il y
eut dans la Ville plufieurs foupers , où furent
priés les Dames & les Mrs , que la
curiofité avoit attirés,
Après le fouper , on retourna au Jeu de
Paulme ; Mrs de Dourdan avoient fait illuminer
les tilleuls , les tentes & le gafon, du
côté du mur de la Ville , lequel étoit auffi
garni de lampions. On avoit élevé des
Echafauts de diftance en diftance , pour pla
cer des Joueurs d'inftrumens. A chaqué extrémité
du Jeu, étoit un feu d'artifice , qui
fut très-bien exécuté, Les vainqueurs , ou
bliant leur victoire , firent oublier aux vaincus
leur perte , & les uns & les autres ne
s'occuperent plus que de leurs plaifirs , qui
furent prolongés juſqu'au jour. On danfa
le reste de la nuit,
VERS
AOUST. 17437
1733
VERS
A Mademoiſelle Gauffin.
Pour ébaucher tes traits , adorable Gaufſſin ;
Agité d'une tendre yvreffe ,
-
J'implorois le fecours des Nymphes du Permeffe ;
Lorſque l'Amour,fans doute,inftruit de mon deffein,
Parut , & m'arracha le pinceau de la main ,
Les yeux étincelans d'un courroux légitime :
C'est bien à toi , dit-il , d'entreprendre un Portrait
Dont un efprit rare & fublime
Ne pourroit expofer qu'un crayon imparfait.
Dans cet objet flatteur reconnois mon ouvrage ,
Propagatrice de mes feux ,
Du coeur le plus farouche elle enléve l'hommage ,
Et fixe des mortels les foupirs & les voeux ;
Va , crois-moi , jeune téméraire ,
N'épaife point ta verve en fades complimens
J'entrevois qu'une ardeur fincére
Excite en toi des tranfports fi charmans :
Mais apprens qu'aimer & fe taire ,
Forma toujours des vrais amans
Le rare & brillant caractere.
GAUD **
Cüj
OBSERV
.
1734 MERCURE DE FRANCE.
OBSERVATIONS
De M. L. fur l'Abregé de la Vie des
Evêques de Coutance.
fuffire
L'idée que M. Frigot a donné du Livre
intitulé : Abregé de la Vie des Evêques
de Coutance , ne m'ayant pas paru
pour l'inftruction de la plupart des Lecteurs,
j'ai cru , Monfieur , devoir lire ce Livre , dans
le deffein d'y obferver ce qui me paroîtroit
de plus curieux.
Il contient véritablement dans fa petiteſſe
beaucoup de faits , qui feront plaifir à ceux qui
entreprendront l'Hiftoire généraleduRoïaume.
J'aime furtout la naïveté avec laquelle .
l'Auteur dir, que le Catalogue des Evêques
de Coutance ne remonte pas plus haut que
S. Ereptiole , qu'il croit avoir été Difciple
de S. Germain d'Auxerre. Mais je fuis un
peu étonné , que fur la fin de la vie de S.
Agathée, qu'il qualific de quatorziéme Evê
que de ce Siége , il falfe obferver qu'il y a eu
quatorze Saints Evêques , confécutivement
affis fur le Siége de Coutance ; & qu'il ajoute
tout de fuite. Il n'y a gueres d'autres Egli-
Les en France , qui puiffent fe glorifier du même
bonneur. M.Frigot, adoptant lamême penfée,
femble
AOUST. 1743. 1735
femble enchérir deffus , car après avoir an
noncé S. Ereptiole, comme premier Evêque
établi à Coutance en 430. Il eft remarquable,
dit - il , que les treize Evêques fuivans , font,
comme ce premier Apôtre, autant de Saints reconnus
par l'Eglife .
Quand ces quatorze Evêques feroient reconnus
pourSaints par l'Eglife,il y auroit plufieurs
autres Siéges Epifcopaux dans les Gaules
, qui pourroient produire un nombre
bien fupérieur en Saints Evêques à celui de
l'Eglife de Coutance . Sans fortir de la Gaule
Celtique , nous avons les Eglifes de Lyon
& de Vienne , & celles d'Auxerre & du
Mans ; dans l'Aquitaine , celles de Bourges
& de Clermont ; dans la Belgique, celles de
Tréves & de Metz . Mais pourquoi M.
Rouault , Auteur de l'Hiftoire des Evêques
de Coutance , donne - t'il libéralement à
quatorze Evêques confécutivement le titre
de Saints, pendant que tous les Calendriers
de fon Diocèfe , même le dernier de 1741 ,
n'en admettent que deux , fçavoir, S. Lo &
S. Rumphaire ? Si Dufauffay en a canoniſé
d'autres dans fon Martyrologe , fon autorité
n'a pas encore été admifedans l'Eglife.Ni Dufauffay,
ni d'anciennes Liftes ne fuffifent pas,
pour multiplier ainfi le nombre des Saints
Evêques , & pour s'en prévaloir contre ſes
voifins. Il faut une tradition de culte atteſ-
C iiij
téc
1736
MERCURE DE
FRANCE.
tée
par des
Martyrologes de
l'ancien tems ,
on par de vieux
Calendriers. Or c'eft ce qui
ne fe trouve pas à
Coutance ,
quoique ce fort
dans cette Ville , ou dans fon
Diocèſe , que
les Saints
prétendus
devroient avoir été ho
norés.
Sans
attribuer à
l'Eglife de
Coutance
un plus grand
nombre
d'Evêques , qu’-
elle n'en a de
reconnus
authentiquement
Saints,
M.Rouault ,a dûfe
contenter de faire
l'éloge du
Côtentin , comme da Lieu de
la
retraite de
plufieurs
Solitaires ou Religieux
, dont on
célébre la Fête , & c'eſt une
gloire qu'on ne peut lui refufer. Mais comme
la
qualification de Saint ne lui
coûte
rien , il en a fait une
abondante
diftribution.
Il ne s'eft pas
contenté de la
donner à un
grand
nombre
d'Evêques de
Coutance ; il
en fait auffi part , p. 70. à
Cyprien de Bourdeaux
, à
Licinius de
Tours ,
quoique leurs
Eglifes ne les
reconnoiffent
M.
Frigot , qui paroît avoir goûté,
préfé- pas comme
tels.
rablement aux autres Vies des
Evêques de
Coutance , celle de
Géoffroy , ou
Geffroy
`de
Mombray ,
devroit
rendre à cette occafion
un
fervice
effentiel à
l'Eglife
Cathédra
le. Ce feroit
d'engager
quelqu'un de faire
deffiner le
dehors & le
dedans de cette Eglife
, de
maniere qu'on pût juger de
l'Architecture,
fans être obligé de fe
tranfporter fut
Les
AOUST. 1743 . 4737
les Lieux.Tous ceux qui ont vû cet édifice
affurent qu'il eft très - beau & très - délicatement
travaillé , c'eft tout ce qu'ils en peuvent
dire , mais ils ne peuvent juger de fon
antiquité. Or , c'est ce qui paroît meriter ,
d'être éclairci , pour fermer la bouche à ceux
qui trouvent un efpéce de contrariété , &
d'oppofition entre la date de l'édifice, & la
maniere dont on la dit exécutée.
+
Il refte en France plufieurs Eglifes , qu'on
fçait sûrement bâties dans l'onziéme fiècle
& qui toutes font d'une ftructure groffiére
& maffive . Celles du douzième fiécle , qui
font en plus grand nombre , font un peu
moins baffes moins fombres & moins
groffiéres. Pourquoi donc celle de Coutance
fera - t'elle admirable pour fa délicateffe >
fa clarté , & c Cependant pourquoi ferat'elle
plus ancienne pour l'édifice ,, que la
Cathédrale de Paris , de Rouen , de Reims ?
On prétend que ces deux chofes ne peuvent
s'allier enfemble , fçavoir l'ancienneté & la
délicateffe .
Commeje n'ai pas vû l'Eglife de Coutan
ce , je ne puis en parler par comparaifon ,
avec celle de S. Denis , par exemple , de S.
Cüen de Roüen , avec la Cathédrale d'Amiens
, ou l'Eglife de Royaumont , toutes
belles Eglifes , mais un deffein fidéle peut y
fuppléer , car on ne peut en juger affés fai-
Cv nement
1738 MERCURE DE FRANCE,
nement , par ce qui eft repréfenté au frontifpice
du nouveau Breviaire : fi ce deffein
eft difficile à exécuter , je me contente volontiers
, pour le préfent, du témoignage d'un
Auteur du x1 . ou du x11 . fiécle , qui certifiera
, que le bon Evêque Geffroy , étant près
de mourir , fe fit porter fous la lanterne du
Choeur , où joyeux de voir un fi grand ouvrage
confommé , il prononça le Cantique
Nunc dimittis , &c. reçut enfuite au même
lieu les derniers Sacremens , & y mourut.
M. Rouault , cite à la fin de l'article , où il
rapporte ces faits , l'autorité d'Orderic
Vital , qui n'en dit rien. Ainfi , le fait
refte à prouver , & peut - être n'en trouvera-
t'on jamais d'autre preuve, qu'une tradition
, qu'on débite aujourd'hui , & queje
crois un peu altérée.
Un autre article , qui peut fouffrir difficulté
de la part des Lecteurs, inftruits de l'antiquité
des rites , confifte dans la remarque
de M. Rouault , fur le Cardinal Gilles Defchamps
, Evêque de Coutance , mort en
1413. Il fut le premier , dit -il , à introduire
en France lapienfe coûtume de jetter de l'eaubénite
fur les tombeaux , après y avoir dit Libera
, De profundis , & fini les Oraifons , en
difant Requiefcat in pace. On conferve encore
en original , dans l'Eglife de Coutance &
de Rouen , l'acte de l'inflitution de cette céré
manic,
| AOUST. 1743. 11 1739
90
monie,qui s'eft introduite dans tout le Royaume.
Cette remarque eft importante , en ce
qu'elle fixe le tems de l'inftitution d'une cérémonie.
Mais , eſt - elle bien appuyée ? C'eſt
ce qui pourroit le décider , fi on nous donnoit
l'article du Teftament , où cet ufage eft
prefcrit. Jufqu'à ce qu'il foit produir , on
pourra toujours douter que le Cardinal Gilles
s'y défigne comme le premier Inſtituteur
de cette cérémonie. En effet , de ce que,
pent-être , il aura ordonné & détaillé ce rit
en entier pour fon anniverfaire , il ne s'enfuit
pas de-là , qu'on ne le pratiquoit pas en
d'autres occafions , par exemple aux funéaux
ˇfunérailles
. Un particulier met dans fon Teftament
Volo quod in die obitus mei , &c. il n'en
faut pas conclure , qu'il eft le premier qui
demande telle ou telle chofe ; il faut feulement
inférer de-là , que ce qu'il demande
ne le fait pas toujours , mais quelquefois
feulement , & lorfqu'il eft preferit par le
Teftament , parce qu'il y a des folemnités
qui neconviennent pas en toutes fortes d'occafions.
Si les titres des Archives de Coutance
remontoient bien haut , on y trouveroit
des preuves de ce que je dis. Je ne croirai
, qu'avec bien de la peine , que ce ſoit
de l'Eglife d'une Ville , qui n'eft fur aucune
grande route , & qui eft à l'extrêmité du
Royaume , la moins fréquentée, que foit éma-
C vj
né
1740 MERCURE DE FRANCE.
né l'ufage , qu'on dit introduit dans le refte
des Provinces ,
Au refte, je n'ai pas intention de rabaiffer
Teftime qu'on doit avoir de l'Abrégé des
Vies des Evêques de Coutance ; cet abrégé
contient plufieurs traits fort curieux. Par
exemple , la tranflation du Siége Epifcopal
de Coutance dans la Ville même de Rouen ,
au commencement du x. fiécle,pendant que
Ies Danois, encore Payens, occupoient Coutance
& le Côtemtin . Cette tranflation du
Siége de l'Evêque Théodoric à S.Sauveur de
Rouen , depuis S. Lo , fait conjecturer , que
ce pourroit bien être pour quelque raifon
femblable , & environ dans le même tems
que fe feroit formée l'origine du droit qu'à
l'Evêque de Lizieux fur l'Eglife de S. Candre
de la même Ville de Rouen . Il n'eft pas
impoffible que quelque Prélat de cette Eglife
, qui n'a pas dû être plus épargnée que
les autres , obtint de Rollon , chef des Normands
, un Lieu de retraite dans la Capitale
de la Province.
On trouve à la page 245. du volume de
M.Rouault , que l'Evêque Louis d'Erquery,
fut le premier des Evêques , qui mit à la tête
de fes Mandemens & autres Lettres , en
1347. ou 1348 , par la mifericorde de Dien&
la grace du S. Siége Apoftolique , en reconnoiffance
de ce qu'il avoit été confirmé par
AOUST. 1743 . 1741
le Pape. Sous Jean de Marles, fait Evêque en
1414, il obferve que les Evêques fuffragans
de Rouen, devoient un repas , certum paftum ,
aux Chanoines de la Métropole, avant leur
inſtallation. A la page 3 41 , le récit des fouffrances
d'Artus de Coffé , de la part des Cal
viniftes , mérite d'être lûì.
En finiffant mes remarques , je ne puis
omettre , qu'il eut été à fouhaiter que
M. Rouault , avant que de publier fon
Livre , eut confulté à la Bibliothéque du
Roi, les Notes que M. Baluze a faites fur
les Evêques de Coutance , dans fon Exemplaire
de l'ancien Gallia Chriftiana , comme
fus tous les autres Evêques renfermés dans la
même Collection.Sans prévenir ce qui pent
y avoir été observé , je vous avouerai que
je ne fuis gueres porté à admettre un certain
Evêque, auquel on donne le nom bizarre de
Lifta , qu'on place fur la fin du 1x fiécle , &
duquel on ne peut rien produire.M.Rouault
dit que Flodoart en parle : Hift. Rem. Lib.
1v. Cap. 1. Cependant , on n'y en trouve
rien. Comme je fais profeffion de franchife ,
je dirai ingénuement la per fée qui m'eft
venue à l'ouverture du Catalogue des Evêques
de Coutance , donné par le P. Beffin.
Ce Bénédictin , page 530. de fes Conciles ,
infere entre l'Evêque Sigenand & l'Evêque
Algerund , une ligne compofée de ces trois
mots : Lifta
1742 MERCURE DE FRANCE.
Lifta . Ragenardus. Agebertus.
A fuivre le chemin frayé , on dira, que voilà
trois Evêques nommés en cette ligne. Pour
moi , je n'y en apperçois que deux ; fçavoir,
Ragenard & Agebert. Souvenons- nous ici
que les anciens Catalogues ont fouvent été
écrits fur des bandes de parchemins , & que
les Hiftoriens ou Compilateurs les ont quelquesfois
cité pour remplir des lacunes : relifez
du Cange , Edition nouvelle , au mot
Lifta. Je fuis , & c .
A Paris , ce 13 Juillet 1743 .
೧೮೮೧೮೧೧೧೧೧೧೧೧
LE Procureur Borgne , & le Procureur ·
Manchot.
CONTE.
DEux Procureu´s, l'un manchot , l'autre borgne,
S'entre-exaltoient de la façon qui fuit :
Tu n'as qu'un oeil , mais cet oeil en vaut huit
Dit le premier , pour voir , dès qu'il les lorgue
De tes oifons quel fera le produit ,
Et fur ce point jamais tu ne t'abuſes .
›
Moi , reprit l'autre , oh bon ! fi de mes rufes ,.
Près de tes tours : fi tu n'as qu'une main ,
Elle en vaut dix pour bien plumer tes buſes ,
Et n'en n'eft tel que d'aflurer fon gain.
F .....
QUEST.
AOUST. 1743 .
1943
QUESTION IMPORTANTE
Jugée au Parlement de Paris le
و ر
S
3 Mai 1743 .
I un immeuble échu à un cohéritier
par partage & licitation , eft fujet aux
hypotéques des créanciers particuliers de
» fes cohéritiers.
FAIT.
Le Sieur Claude Jacqueffon & Marguerite-
Angélique de la Pie, fon époufe, avoient
eu de leur mariage trois enfans , Jean- Baptifte
, Lambert & Elifabeth Jacqueffon ; ces
trois enfans étoient en bas âge , lorfque leur
Mere mourut en 1698 , leur laiffant pour
tout bien , une Maiſon fcife grande ruë du
Fauxbourg S. Antoine.
Lambert Jacqueffon , ayant , ayant fait profeſfion
chés les Minimes en 1716 , fon pere
fut fon héritier mobilier , & fa portion afférente
dans la maifon , laiffée
accrut à fon frere & àfa foeur .
par
fa mere
Les deux autres enfans renoncerent à la
communauté de biens , qui avoit été entre
leurs pere & mere ; le pere leur rendit un
comptedututelle,par lequel il revintà chacun
une modique fomme d'argent , pour les reprifes
1744 MERCURE DE FRANCE
prifes de leur mere , & pour les joiiiffances
de la Maifon , enforte qu'ils n'avoient rien
en commun , que cette Maiſon provenante
de leur mere.
Le Sr. J. B. Jacqueffon , & la Dame ſa
foeur , joüirent de la maiſon par indivis ,
jufqu'en 1726 , que ledit Sieur Jacqueffon
fit affigner la Dame fa foeur , & M. Dunot
fon mari , pour procéder à la licitation de
lear maifon , attendu qu'elle ne fe pouvoit
pas partager.
Les Sieur & Dame Bunot , ayant acquief
cé à cette demande , la licitation fut faite
devant Notaires , le 9 Août 1726 , & la
maifon fut adjugée & délaiffée à la Dame
Dunot , par forme de licitation & partage ,
moyennant 18000. liv. dont la Dame Bunot
confondoit moitié en elle - même , & à la
charge de payer les cens & rentes foncieres,
& 30. liv. de penfion viagere au P.Jacquesfon
Minime.
Les 9000 liv. revenantes au Sr. Jacqueffon
, lui furent payées en une rente au capital
de sooo liv . & les 4000. liv . reftantes en
argent comptant.
La Dame Bunot avoit joti tranquillement
de cette Maifon , jufqu'au 19. Mai
1732 , qu'elle fût affignée au Châtelet en
déclaration d'hypotéque par les Di es.
du Four , fe difant Créancieres du Sieur
>
JacAOUST.
1743 : 1745
Jacqueffon , d'une fomme de 309. liv. & intérêts,
pour laquelle il leur avoit hypotéqué
ladite Maifon.
Par Sentence rendue fur productions refpectives
, la Maifon fut déclarée affectée
& hypotéquée à la créance des Dlles , da
Four.
La Dame Bunot interjetta Appel de cette
Sentence , ce qui fit la matiére d'un Procès
en la troifiéme Chambre des Enquêtes , au
rapport de M. Hurfon , Confeiller.
Le moyen d'Appel de la Dame Bunot ,
étoit que la Maifon en queftion , ne lui avoit
point été délaiffée par un Contrat de vente ,
mais par forme de licitation & partage , &
par un premier Acte , paffé entr'elle & fon
cohéritier
, pour faire ceffer entr'eux l'indivis
des biens de la fucceffion de leur mere ;
enforte, que quelque nom qu'on eut donné
à cet Acte , on ne l'auroit pas moins confidéré
comme un partage , fuivant la note de
M. le Camus, Art . 8o . de la Cour , de Paris, &
d'Argentré , fur l'Art. 73. de la Coûtume de
Bretag. note 4. nom. 3 .
On fait dans les partages differentes opé
rations , fuivant le nombre des héritiers , &
l'état des biens qui y font fujets. On fait ou
des lots égaux, ou des lots inégaux , avec des
foultes , ou enfin , on adjuge le tout à un
feul , à la charge de remplir les portions de
fes
1746 MERCURE DE FRANCE.
fes cohéritiers , en argent , ou autres effets,
comme on avoit fait dans l'efpéce de la Dame
Bunot ; de quelque façon que les cohéritiers
opérent, c'eft un partage. DuMoulin,
fur Paris , Art. 33. gl. 1. qu . 22. & Art.73 .
gl. 3.n. 11. 12.
&
M. Talon , dans un Plaidoyer , rapporté
par Brodeau , fur l'Art. 154. de la Coût , de
Paris , établit que la licitation entre cohéritiers
, eft la même chofe que le partage , &
que celui qui s'eft rendu propriétaire par l'une
ou l'autre de ces deux voyes , eft reputé
l'avoir toujours été , le partage & la licitation
ayant un effet rétroactif.
C'eft auffi à préfent une Jurifprudence
certaine , que l'immeuble licité entre cohé
ritiers , eft propre pour le tout à l'adjudicataire
, d'où il s'enfuit , que cette licitation
n'eft point confiderée comme une vente.
L'hypotéque qui eft acquife aux créanciers
particuliers , de chacun des cohéritiers,
fur les immeubles d'une fucceffion inque
divife , ne peut être
conditionnelle
, en
cas que le débiteur
devienne
propriétaire
de ces immeubles
, chacun de ces héritiers
ne pouvant
donner à fes créanciers
plus de
droit fur ces immeubles
, qu'il n'en a lui-même
; & c'est une maxime certaine
, que les
immeubles
, qui font abandonnés
fans fraude
à un héritier dans un partage , ne font
point
AOUST. 1743
747
point fujets aux hypotéques particuliéres de
Les cohéritiers , comme l'obferve M. le Camus
, fur l'Art, 80 , de la Coûtume de Paris
num. 2.
De la part des Dlles du Four , intimées
, on "difoit : que dans l'Acte du 29
Août 1726 , on ne s'étoit fervi du nom de
partage & de licitation , que pour
fe
ga.
rantir des droits Seigneuriaux ; que dans le
vrai c'étoit une vente , puifque les Sieur &
Dame Bunot n'étoient devenus propriétaires
de la portion des Sieur & Dame Jacqueffon
, que moyennant le payement qu'ils
en avoient fait de leurs biens perfonnels.
Si la prétention de la Dame Bunot étoit
admife , il feroit impoffible au créancier de
celui qui poffède des biens indivis , de ſe
faire payer de ce qui lui eft dû ; il feroit aifé
à ce débiteur de l'en fruftrer , en transfe
rant la propriété de fes biens à fon cohé
ritier.
Nous ne connoiffons parmi nous que les
décrets & la prefcription , qui foient capables
de faire perdre les hypotéques acquifes
aux créanciers fur les biens de leur
débiteur ; le partage , ni la licitation ne
purgent point les hypotéques , & la lici
tation , même entre cohéritiers , eft telle
ment confidérée comme une vente , que de
Renuffon en fon Traité des propres , ch. 1.
décide
1748 MERCURE DE FRANCE:
décide
expreffément , que l'héritier des pro
pres retiendra la totalité de l'héritage ac
quis par licitation , mais en indemnifant
l'héritier des acquêts de pareille fomme ,
que le défunt avoir payée pour ce qui excédoit
fa part & portion ; ce qui fuppofe
que les portions acquifes par licitation ,
font des acquêts en la perfonne de l'adju
dicataire , & que la licitation est une véritable
vente.
Par Arrêt du 3 Mai 1743 , la Sentence
du Châtelet a été infirmée. Ce qui juge que
l'héritier , devenu propriétaire de la totalité
d'un immeuble de la fucceffion , foit par
partage , on licitation , même à prix d'argent
, n'eft point foumis aux hypotéques
des créanciers particuliers de fes cohéritiers.
A MADAME **
Vous ,
Pour le jour defa Fête.
Ous , qui joignez aux graces de Cypris
La vertu de Diane , & l'efprit de Minerve :
Vous que fuivent par tout les Amours & les Ris ,
Et pour qui , quoiqu'abſent , en tout tems je con-
Lerve
F.co
AOUST. 1743. 1740
Les fentimens les plus vifs , les plus doux ;
Daignerez - vous , belle Themire ,
Ecouter les fons de ma Lyre ?
Sera-t- elle digne de vous ?
***
Que ce jour et charmant ! Avec ces fleurs nou
velles
Il m'eft permis de vous offrir mes voeux ,
Et je dois vous parler des feux
Qu'infpirent vos appas aux coeurs les plus rebelles
Dans cet écrit les Mufes dicté ,
par
Je puis vous dire en vers mainte agréable chofe;
Que dans vos fers mon coeur eft arrêté ;
Que je chéris ma chaîne , & les maux osì m'expoſe
La perte de una liberté.
Que ne puis-je le dire en profe
Phebus de fes dons précieux
Eft avare , il est vrai , dans le fiécle oùnous fommes
Il est beau de parler le langage des Dieux ;
Mais avoüez qu'il vaudroit mieux ,
Themire, vous parler le langage des hommes
N'allez pas vous armer d'un frivole courroux,
Excufez ce tranfport lyrique.
Une licence poëtique
Doit exciter des mouvemens plus doux
·Parmi tant d'heureux traits , qu'on voit brøller en
YOUS
Et
1750 MERCURE DE FRANCE.
Et qui foumettent tout à votre aimable empire ,
Vous n'avez qu'un défaut, fi c'en eft un , Themire,
De n'être pas fenfible aux feux qu'on fent pour
vous.
EXPLICATION.
D'une Pierre gravée , antique , du Cabinet
du Chevalier D. L. R.
L
+
que
A Fable de Pfiché & de l'Amour , eft
trop connue , pour pouvoir douter
la Pierre gravée , antique , dont on donne
ici le Deffein , ne repréfente Pfiché , à qui
l'Amour reproche fa curiofué. On fçait cue
cette belle perfonne croyant habiter avec un
-Monftre , fa crainte , & la curiofité naturelle
aux femmes , excitée par la jaloufie de fes
foeurs , lui infpirérent la hardieffe de le voir
à la clarté d'une lampe , dans le tems qu'il
dormoit. Sa furprife de trouver l'Amour, au
lieu d'un Monftre effroyable , fit qu'elle
laiffa tomber de l'huile brûlante fur lui,
qui l'éveilla. Alors ce Dieu parten colère ; il
reproche à Pfiché le piége qu'elle lui a tendu ,
la douleur quefa curiofité lui caufe. Voilà
Te moment du fujer que préfente cette Pierce.
La lampe que tient Pfiché , l'Amour qui
s'envole,
ΘΗΤΑ ΦΥΛΕΟ
ΤΠΟΟΣ
PSICHE
A qui l'Amour reproche sa curiosite
Gravesur une Grandeur bellissimeJacinthe
Du Cabinetdu chCh dela dela Rocque.
Pierre
Dornique SoulyoitTHE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY
.
ASTOR
, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
AOUST. 1743 .
s'envole, & l'Infcription Grecque , font
autant de Tipes qui paroiffent ne pas permettre
d'en douter. Quant à la gravûre de
cette belle Pierre , on ne peut trop admirer,
outre la beauté du Deffein du tout enfemble
, une fineffe de caractére fur la tête de
Pfiché , où l'on voit exprimés avec un art
admirable fon étonnement & fon déſeſpoir;
tout le refte de la Figure répond parfaite
ment , par fon attitude en défordre , à la
beauté de l'expreffion de tête.
QUNUDUDUDUDUDU DU DUDU DÜNYAVİNunu
L'ETUDE.
O D E
E Tude riante ou févère ,
Au gré de nos changeans défirs ;
Qui fçais brifer la chaîne auftére
Que trainent d'ennuyeux lo:firs ;
Toi , par qui méritant l'aveu de la Nature ,
L'Art , fous les agrémens d'une fimple parure ,
Livre aux Mortels fes heureux traits ;
Viens décorer l'ébauche où je te rends hommage
Qu'on doute à fon afpect , fi tu fers davantage
Par tes fruits , ou par tes attraits .
+34
Qu'efta
1752 MERCURE DE FRANCE.
Qu'est- ce que l'homme en fon enfance a
Un Etre à lui- même étranger :
Tributaire de l'ignorance ,
Cherche-t-il à s'en dégager ?
De nuages épais fa Raifon entourée ,
D'un organique instinct à peine féparée ,
Aux fens fe laiſſe prévenir.
Erreur , dans les replis ſon eſprit s'embarraffe ;
Peu frappé du préfent , fon oeil troublé n'embrasfe
Ni le paffé , ni l'avenir.
De cette Nuit aviliffante
Bientôt l'Etude l'affranchit ;
Par fes fecours plus agiflante
Son ame réfout , réfléchit :
Déja de la Science il voit briller l'aurore ;
Le jour de la Raifon , qui s'empreffe d'éclore
Lui découvre un monde nouveau :
Il renaît ; fa lumiére au bonheur l'affocie :
Le fçavoir eft pour l'homme une feconde vie ,
L'ignorance un premier tombeau.
Par de flateufes découvertes ,
Source d'honneurs , d'utilités ,
Son efprit rachete fes pertes ,
Sa raifon fes obfcurités :
A fes effais vainqueurs tout paroît acceffible ;
Aux
AOUST. 1743 . 175
Aux règles du vrai beau la Critique infléxible
Alligne fon gout , fes talens :
D'un fens droit , épuré , formant fes loix fuprêmes ;
Auteurs , par vos efforts , & par vos chûtes mêmes,
Il monte à des fuccès brillans.
**
Mufe , fuivons le vol rapide
Que prend l'efprit laborieux ;
Retrace l'ardeur qui le guide :
Quel feu quel effort glorieux !
Tantôt par fes regards , que le progrès raffure ;
Il perce les fecrets , les fins , que la Nature
Récéle fous fa Majeſté ;
Et tantôt franchiffant la célefte barriére ,
De la vérité fainte il s'ouvre la carrière ;
C'eft furpafler l'humanité.
++
Que vois-je ? Les Arts l'environnent
Que fon Triomphe paroît beau !
Les Lauriers dont ils le couronnent ,
Lui fauvent l'horreur du tombeau.
Que de nobles travaux ! que de fçavantes veilles !
Mes efprits enchantés adorent ces merveilles :
L'Etude les voit , les produit ;
Sans elle , la Science expire avec fa gloire ,
Et les faits des Héros , au Temple de Mémoire ,
Sont enveloppés dans la nuit,
D Foible
1754 MERCURE DE FRANCE
Foible crayon des avantages
Qu'enfantent fes doctes fecours ;
Par eux les moeurs dans tous les âges
Se produifent fous d'heureux jours.
De folles paffions qu'une ligue nombreuſe
Trace à l'oifiveté la route ténébreuſe
Des vices les plus déteſtés ;
Dans les fages liens d'un Travail Littéraire ;
Souverains de nos voeux , fçachons les fatisfaire
Par d'innocentes voluptés.
***
Paroiffez , Nations incultes ;
Servez d'ombres à ce Tableau :
L'Erreur eft le Dieu de vos cultes
Sur vos yeux je vois fon bandeau.
L'aveugle opinion vous proméne fans ceffe
Dans les illufions , dans la perfide yvreffe
De vos coeurs & de vos efprits :
Des plaifirs effrénés adoptant les maximes ,
१
Au grade des vertus vous élevez des crimes ;
Dont les horreurs vous ont flétris.
****
Ah ! puiffent ces Peuples fauvages ...
Mais où vont m'entraîner mes voeux ?
Fayez trop lugubres images ;
Je cherche des afpects heureux.
AOUST.
1743 .
1755
7
Sur les faſtes des tems jettons , fixons la vûë ;
Quels précieux dépôts la Lecture affidue
Etale
mes yeux dévoilés !
Les ans font reproduits , tout m'inftruit ; tout m'éxerce
;
Avec des Morts charmans liant un doux com
merce ,
Je vis aux fiécles écoulés.
*3*
Deffus fon aile fugitive
Que Saturne emporte nos jours,
Eteints dans une étude active ,
L'acquit fait revivre leur cours.
Aux vains amuſemens dès que l'on facrifie ,
Dans le cercle préfent , où s'échape la vie ,
On perd les momens à venir :
Exerce-t -on l'efprit à penfer, à connoître è
Ces plaifirs fructueux , chaque inſtant les voit
croître ;
La Mort feule les voit finir.
XXX
Quoi ! d'un voile philofophique
Obfcurciffant fes doux loifirs ,
Faut -il à l'âpreté ftoïque
Immoler les goûts , les défirs ?
Non ; l'efprit ftudieux à la gayeté s'allie
Le fçavoir bien conduit, en cent façons fe plie;
Dij
Dieux
1756 MERCURE
DE FRANCE.
Dieux ! qu'il décéle de beautés !
Il parle ; quel filence ! il inftruit ; on l'approuve į
Par fes charmes puiffans dans un feul homme on
trouve
De nombreuſes ſociétés .
GAUTIER , Chanoine Rég.
de la Congrég, de N, Sauveur
A Nancy 1743 •
MANDEMENT
De M. l'Archevêque d'Avignon , au suje
d'une Société nouvellement formée dans
fon Diocèfe,
JOSEPH
OSEPH DE GUYON DE CROCHANS,
par la Grace de Dieu & du S , Siége Apof
tolique , Archevêque d'Avignon : Aux Fidéles
de cette Ville , Salut & bénédiction,
Nous venons , nos très- chers Frères , vous
ouvrir notre coeur , & dépofer dans les
vôtres les vives inquiétudes que nous
cauſe l'avis détaillé & circonftancié , qui
nous eft revenu depuis peu d'une Société
nouvelle de Perfonnes des deux féxes ,
qui , fous le nom de Félicité , s'eft élevée
dans
AOUST. 1743 . 1757
dans le voisinage , & dont l'objet n'eft , fans
doute le fervice de Dieu , ni un noupas
,
vel engagement pour une plus grande perfection
, qui paroît , au contraire , n'être
que la même Société , formée , il y a peu
d'années , fous un autre nom , & profcrite
par le S. Siége avec tant de zéle & avec tant
d'éclat.
Nous laiffons auGouvernement Politique
à examiner , avec fa prudence ordinaire , fi
ces fortes d'Affociations ne font pas contraires
au vrai bien , & au repos de la Société
Civile , & nous renfermant dans notre Miniftére
, nous ne les envifageons que comme
oppofées à l'efprit de Religion , qui doit
uniquement occuper les véritables Chré
tiens , dans toutes fortes de tems, mais furtout
dans celui de tribulation , où nous nous trouvons
,par la Guerre prefque générale qui défole
leMonde Chrétien,fans épargner même
les belles Provinces des Etats du S. Siége.
Au lieu de fe livrer aux folles joyes qui
ont coûtume d'accompagner ces fortes d'Affemblées
& de Sociétés , un vrai Chrétien
doit dans de pareilles circonftances tâcher
d'appaiſer par la pénitence , & par la pratique
de toutes fortes de bonnes oeuvres , la
colére de Dieu , & de rappeller fes anciennes
miféricordes . Notre tendreffe pour
cher troupeau qui nous a été confié , & dont
Dij nous
le
1758 MERCURE DE FRANCE.
nous devons rendre compte , ne nous per
met pas de garder le filence fur le poifon
qui lui eft préparé , nous ne pouvons nous
difpenfer de lui faire connoître le péril qui
le ménace , & de l'exhorter , de tout notre
de l'éviter . Nous nous flattons qu'il
fuffira ,, pour le préfent , d'avertir nos cheres
ouailles du danger inféparable de ce mêlange
des deux fexes , avec les cérémonies frivoles
& indécentes , pour ne rien dire de
plus , qui accompagnent la réception des
Chevaliers ; nous efpérons que cet Avertiffement
, dicté par notre amour pour elles
les obligera de n'y prendre aucune part , &
de s'éloigner de ces Sociétés , au moins fufpectes
à l'Eglife , & à l'Etat , & de les reregarder
comme oppofées à la Religion
fainte que nous profeffons , qui ne prêche
que pénitence , & que renoncement aut
monde , & à fes plaifirs.
Le préfent Mandement fera publié aux
Prônes des Eglifes. Paroiffiales de cette
Ville , & affiché aux portes des mêmes
Eglifes. A Avignon ce 23 Juin 1743 .
Signé JOSEPH , Archev. d'Avignon .
ZASE
REP
AOUST. 1743 :
1759
REPONSE
à la Queſtion proposée dans
le Mercure de Juin 1743 .
Pour décider la Queftion ,
Que propoſe l'Enfant qu'on adore à Cythere ;
Sans grands efforts d'imagination ,
Une feule réfléxion
Peut dévoiler cet amoureux myſtére .
Le Berger couronné des mains de fa Bergére ;
Eft à mon fens le Berger préferé :
E'le a récompenfé fa flame humble & fincére ;
Son triomphe eft certain ; fon bonheur affuré. -
De quel oeil , en effet , cette Amante voit-elle
L'autre Berger , conduit par la préfomption ,
Ofer fe couronner,
la Belle
Déclare en fa faveur la tendre affection !
même avant que
D'une jufte indignation
La Bergere outragée , en vain veut fe deffendre
Sa vanité choquée, en fecret fait entendre
Ces reproches impétueux.
De quel droit aujourd'hui couronnes - tu ta tête
Qui t'a donc affuré que j'étois ta conquête ?
Retire - toi présomptueux
:
Mais ne te flatte pas que ces fleurs éclatantes
Annonceront
par tout tes amours triomphantes ;
Je veux humilier ton front audacieux ;
D iiij
Je
1760 MERCURE DE FRANCE .
Je veux faire tomber cette couronne vaine ,
Dont la préfomption ceint la tête hautaine.
Crois-tu donc mériter un don fi précieux ?
Non , non mais ton rival , tendre , & moins faftueux
,
Eft plus digne que toi de régner fur mon ame.
Approche - toi , Berger : oui j'agréé ta flâme ;
Viens , viens , je veux combler tes feux reſpec
tueux .
Quoi tu doutes encor ? Tu veux une couronne
Tiens , tiens, voilà la mienne, à toi feul je la donne,
Puiffe le tendre amour , propice à mes déſirs,
Régler fur mes fouhaits tes jours & tes plaifirs ↓
La conduite de la Bergére
Fait entendre à mon fens de ſemblables difcours
Elle punit un Berger téméraire ,
Et peu digne de ſes amours >
Qui fe laiffant guider par une vaine gloire ,
Et de fes charmes convaincu ,
Ofe célébrer la victoire ,
Avant même d'avoir vaincu.
Devaricourt , Avoc
Ce 2 Juillet 1743.
LET.
AOUST . 1743 . 1761
LETTRE de M. l'Abbé de S. F.
l'origine du mot Vipa , qu'on lit dans
l'Ecole de Salerne.
Bis duo Vipa facit. Ch. 18.
Quand
Sur
Monfieur ,
Uand je ne fçaurois pas ,
d'ailleurs, que
bare , ce feroit au cepa eft un mot baraffés
pour me le perfuader ,
qu'il parût étranger à M. le Préſident de
B ...., & on cherchera inutilement dans
les Dictionnaires & dans les Vocabulaires ,
pour l'intelligence de la Langue Latine ;
ce qu'il ne trouvera pas dans la mémoire.
Outre que ce qu'il a écrit en cette Langue
pourroit paffer pour être du tems de fa plus
grande pureté , c'eft-à-dire depuis Ciceron ,
ou fort peu au-deffus , jufqu'à l'Empereur
Tibére , il eft d'une fi vafte érudition , que
depuis les Hymnes des Saliens , compofées
par Numa , & que Quintilien dit que les
Prêtres mêmes qui les chantoient , n'entendoient
déja plus de fon tems , depuis , disje
, les Loix des Rois & les Annales des
premiers Pontifes jufqu'aux Ouvrages de
Boece , qui pour la maniere d'écrire , eft
nommé le dernier des Romains , il n'y a
rien en Latin de fi obfcur que M. de B.
Dy n'éclair1762
MERCURE DE FRANCE.
n'éclairciffe , rien de fi confus qu'il ne développe
fans peine. Ainfi votre Vipa , qui
n'eft pas connu de lui , eft un barbare , déguifé
fous la terminaifon , comme fous.
l'habit d'un Romain , mais qui avec tout
fon déguiſement n'a pû en impofer à un
homme fi éclairé. En effet , ce mot , qui eft
compofé des premieres fyllabes de Vinum &
de Panis , ne fe trouve que dans l'Ecole de
Salerne , & il eft purement de l'invention
de celui qui a fait ce Livre..
Vous ne ferez peut-être pas.
fâché
que je
vous diſe en paffant , qui en a été l'Auteur.
René Moreau , très-célebre Médecin de la
Faculté de Paris , & qui a fait auffi un
docte Commentaire fur cette Ecole de
Salerne dit qu'elle eft l'Ouvrage d'un
Jean de Milan , Docteur de cette Univerfité
d'Italie , & que cet Ouvrage fut dédié ,
comme je vous difois dernierement , à Robert
, fils de Guillaume le Conquérant, Roi
d'Angleterre. C'est donc à lui qu'il faut ар-
pliquer ce premier Vers :
,
Anglorum Regi fcribit Schola tota Salerni..
Ce Robert , pourtant , ne fut jamais Roi,
parce que fon cadet Hen i ufurpa le Trône
fur lui , ce qui arriva entre la fin de l'onziéme
& le commencement du douziéme
fécle. Mais pour revenir à Vipa , il eft
certain
AOUST. 1743. 1763
certain que c'eft une licence de ce foannes
deMediolano,que l'ufage n'a point autorifée ;
& hors l'Ecole de Salerne , je ne l'ai trouvée
que dans le vocabulaire de Laurentius Lucenfis
, que je vous ai fait voir , & où vous
lûtes avec moi , Vipa , turunda panis vine
humectata , offa in aliis liquoribus. Encore
n'a-t'il point démontré ce compofé ; ce
qu'il falloit faire pour en faire remarquer
Fétymologie , comme il n'a point auffi cité
l'Auteur des Ouvrages duquel il l'a tiré. Il
eft quelquefois permis à un Auteur particulier
d'inventer des mots , pour exprimer
des chofes nouvelles. Horace , qui eft un
Critique fans pédanterie , & qui ne fe conduit
que par le bon fens , en convient luimême.
Si forte neceffe eft
Indiciis monftrare recentibus abdita rerum.
Mais c'eft avec cette précaution que ce
mot nouveau s'éclaircira par ceux auxquels
il fera joint dans la ftructure du difcours, &
qu'il retiendra en Latin quelques marques
& quelques veftiges de fon origine Grecque
Or il eft vifible que ce Vipa n'a nulle
ment l'air du Pays Attique , & que pour
fe
faire recevoir à Rome , il n'a point pris de
paffeport à Athènes . On trouve pourtant
dans Athènée le mot angariou , qui figni-
D vj fic
1764 MERCURE DE FRANCE.
fie en Grec , comme le remarque Cafaubon,
ce que l'Auteur de l'Ecole de Salerne a
voulu exprimer en Latin par celui de Vipa.
Mais le bon Joannes de Mediolano n'y regardoit
pas de fi près , & vrai-femblablement
la Langue Grecque ne lui étoit pas affés
connue , pour pouvoir faire des emprunts
fur elle. Le Grec ne commença en Occident
à fortir du tombeau où les Barbares l'avoient
enfeveli , que long-tems après que
le Livre , dont nous parlons , eût parû.
Le premier qui le reffufcita en Italie , fut
Emanuel Chryfolore , qui l'enfeigna publiquement
à Rome , à Florence , à Veniſe ,
vers la fin du quatorziéme fiécle ; or il y
avoit déja plus de deux cent ans que votre
Vipa étoit au monde , fi bien que le Grec
étant encore enterré en ce tems-là pour
plus de deux fiécles , il n'avoit garde de
contribuer à fa naiffance . Mais il ne faut pas
rendre refponfable l'Auteur de l'Ecole de
Salerne du ravage des Gots & des Lombards,
ni prétendre qu'il dût être en fond de Grec,
lors même qu'en Italie on ne fçavoit prefque
plus ce que c'étoit que la belle Latinité.
On le peut juger par le goût bizarre qui
regnoit alois , & par l'entêtement où l'on
étoit encore pour les Vers rimés , tels que
ceux - ci.
Si
AOUST. 1743 . 1765
Si vis incolumen , fi vis te reddere fanum
Curas tolle graves ; irafci erede profanum .
ou de ces autres qui l'étoient , & à la fin &
dans le milieu ,
Fonsfpeculum , gramen , hac dant oculis relevamen ;
Mane igitur montes ; fub ferum inquirito fontes.
dit l'Ecole de Salerne . Ce n'étoit- là qu'un
jeu de mots fade & puerile ; cependant nonfeulement
on eftimoit cette puerilité , mais
on ne pouvoit fouffrit les Ouvrages où elle
ne fe rencontroit pas . C'eft ce que remarque
Jules Céfar Scaliger dans fa Poëtique ,
L. 2. C. 29. où après avoir rapporté cet
exemple ,
Vir precor uxori ; frater fuccurre forori.
Il dit , en parlant de cette forte de Vers ,
Semiprifcis adeo approbati ut fine illis quidquid
fcriberent , ineptum putaretur. Recentiores
illud commenti funt. Il avouë pourtant
qu'il ne fçait point pourquoi ces vers étoient
appellés Leonins. Nominis caufam ignoro.
Pafquier , L. IV. des Recherches , p. 228.
croit que c'étoit à caufe de l'extrême cas
qu'on en faifoit , comme s'ils avoient été
les premiers en nobleffe & en dignité , comme
le Lion l'eft entre les animaux . Voici
fes paroles. Appellant telle maniere de Vers
Leonins , comme plus hautains que tous ceux
do
#766 MERCURE DE FRANCE.
de l'Ancienneté. Fauchet avoit pourtant die
avant lui , que leur nom venoit d'un Pape
Leon , au fentiment de plufieurs. L'Auteur ,
dit-il , eft jufques ici incertain , néanmoins
il y en a qui l'attribuent à un Pape Leon.
Je ne fçais fi c'eft celui qui tenoit le Siége
de Rome l'an 684, lequel on dit avoir réformé
le Chant & les Hymnes de l'Eglife,
Le P. Garaffe , an contraire , dans le Livre
qu'il a fait contre Pafquier , p. 350. foutient
que ce Leon ou Leoninus étoit Moine
de S. Victor.
Voilà , M. tout ce que j'en fçais , & l'affaire
ne mérite pas , ce me femble , une
plus exacte & plus curieufe difcuffion . Mais
ce qui m'étonne , c'eft de voir que Scaliger,
qui fçavoit tout , ait écrit que cette maniére
de Vers , dont l'art confiftoit dans une confonance
des mêmes fyllabes , foit de l'invention
auffi bien que du goût des modernes.
Recentiores , dit-il , illud commenti funt.
Cependant Aulugelle , L. 18. C. 8. jufti
que du tems du Satyrique Lucilius , c'eſtà-
dire , vers la fin de la République , on
avoit déja donné dans cette puérilité. Voici
comme ce Critique parle des Omoiotelephtes,
qui fignifient cette efpece de confonance ,,
quam fint infipida & inertia & puerilia , fa
cetiffime bercle fignificat in quinto Satyrarum
Lucilius. Enfuite de quoi il rapporte less
fie
Vers
AOUST. 1743 . 1767
Vers où ce Poëte traite ce jeu de mots , ces
rimes Latines , d'affectation baffe , vulgaire
& puerile ; & dans ces Vers , Lucilius , qui
n'épargnoit perfonne , ne s'épargne pas luimême
, car ils étoient de fa façon.. Il écrivoit
à un de fes amis , & fe plaignant de ce
que pendant fa maladie il n'avoit point demandé
de fes nouvelles , il ne laiſſe pas de
lui en donner, & de lui dire qu'il croit qu'il
eft de ces gens qui voudroient que tous
ceux à qui ils ont manqué de rendre quelque
devoir , vinffent à mourit , pour être à
couvert des reproches qu'ils fe font attirés
d'eux.
Quando in ea numero manſi quo in maxima nunc eſt
Pars hominum , ut periffe velis quem nolueris , cùm
Vifere debueris hoc nolueris , & debueris „ te ,
Si minus delectat , quod &rexvev Ifocratium hoc eft.
Cet a7sxnov Ifocratium , qui fignifie une
imitation vicieuſe d'Ifocrate , au fujet dont
nous parlons, fait voir aufli que dès ce temsla
cette affectation dans le choix des mots:
rimés , étoit pratiquée par quelques- uns ,
qui , dans Lafage qu'ils en faifoient , s'imaginoient
imiter cet Orateur célébré , quoiqu'elle
fut condamnée par les gens de bon
goût , comme vous venez de voir qu'elle
Pétoit par Lucilius dans fes
vrages .
propres Ou-
Er
1768 MERCURE DE FRANCE.
Et la même raifon pour laquelle elle a toujours
dû l'être en cette Langue, par ceux qui
en connoiffent le génie , c'eft apparemment
parce que cette nouvelle contrainte retenoit
l'efprit dans fon plus noble effort , &
le détournoit de l'application qu'il devoit
avoir aux chofes , pour ne l'occuper que du
ftérile foin de chercher des mots , non -feulement
d'une certaine quantité , mais qui
finiffent encore par les mêmes lettres. Il en
fera pourtant ce qu'il plaira à Scaliger ; je
ne prétends pas oppofer de foibles conjectures
à l'autorité de ces décifions .
En voilà peut- être , M. plus que vous
n'en vouliez , & je crois qu'une autrefois
vous ferez plus retenu à me faire des queftions,
pour ne me pas donner lieu de fatiguer
votre patience. Mais pour finir par où
j'ai commencé, de tout ce que je vous ai dir,
il n'ya rien de fi fort contre Vipa , rien qui
ruine fi abfolument la prétention qu'il avoit
de paffer pour un mot Latin, que de n'être
pas connu de M. le Préfident de B. Rien ne
peut le furprendre ou l'abufer ; d'un funple
d'oeil il diftingue un paffevolant , &
le fait fortir des rangs.
coup
J'ai l'honneur d'être , &c.
L'Auteur de cette Lettre a , fans doute ,
raifon de penfer que Vipa eft un mot pu
rement factice. La nouvelle Edition du
Gloffaire
A OUST. 1743. 1769
Gloffaire De Ducange renferme ce mot ,
lequel manquoit dans la premiére. Les deux
témoignages , qui y font cités , d'Hermolaus
& de Bufchius , défignent fuffisamment que
ce n'est que l'abregé des deux mots Vinum
& Panis , & qu'il s'agit de foupe au vin ou
de roties au fucre.
EPITRE ,
A M. Bouguer , de l'Académie Royale des
Sciences de Paris & de celle de Bordeaux ,
la veille de la Fête de S. Pierre & S. Paul.
Petit Port du Croific , folitaire Patrie ,
Où le Soleil d'abord vint éclairer mes yeux ,
Sejour à jamais glorieux
D'avoir vu commencer la vie
De l'illuftre Bouguer , dont la docte Uranie
Fait voler l'éloge en tous lieux ;
Les feux qu'un faint plaiſir apprête ,
Annoncent le jour de fa Fête ;
Ce jour , comme nos coeurs , affemble nos Patrons.
C'eſt le même Curé qui nous donna les noms ,
Bouguer , à toi , du Chef , dont fur l'unique Eglife ,
Dans tous fes Succeffeurs le pouvoir s'éternife ,
A moi , de l'Apôtre indompté ,
Qui livroit aux Chrétiens une fanglante guerre ,
Quand
1770 MERCURE DE FRANCE .
Quand la Grace invincible eut recours au Tonnerre
Pour triompher d'un coeur contre elle révolté.
En l'honneur de Bouguer , roule fur nos rivages ,
Ecumeux Océan , tes plus beaux Coquillages ,
Où l'argent étincelle entre mille couleurs ;
Pour couronner fon front , Terre , enfante des
Aeurs ;
Doux Zéphirs , portez -lui ces baiſers fur vos aîles
Autour de fon Vaiffeau * volez , & dites - lur ,
Que toujours pénétré de ſentimens fidéles ,
En attendant de fes nouvelles ,
Je me confume dans l'ennui.
Conçois-tu bien, Bouguer, en quel gouffre de peines
D'un plus prochain retour que tu m'avois promis ,
* Mrs Bouguer , Gaudin, de la Condamine , partirent
de Rochefort en 1735- pour Quito dans l'Amé
rique , Ville fituée près de la Ligne , afin d'obſerver
& d'examiner , entre plufieurs chofes , la grandeur des
degrés du Méridien fous l'Equateur , par rapport à la
grandeur du même Méridien fous la Latitude , tan
de la France que du Cercle Polaire , où l'on envoya
auffi des Mathématiciens , afin d'en conclure quelle
eft la figure de la Terre : Si elle eft allongée ou applatie
parfes Poles , & de combien à peu près . Queſtion célebre
, agitée entre les François les Anglois , les premiers
prétendoient qu'elle étoit allongée, les feconds,
qu'elle étoit applatie. Il paroit par les Obfervations
qu'on a faites , que les derniers avoient raison. M. de
Juffieu , Médecin de la Faculté de Paris a accompagné
les trois Aftronomes , pour examiner la vertu & les
qualités des Flantes du Pérou , & faire , s'ilfe pou
voit, quelque découverte dans la Botanique.
L'efpes
A O UST. 1743 . 1771
L'efperance a jetté le plus vrai des Amis ?
Huit fois le Chien céleſte a bû l'eau des Fontaines ,
Et huit fois les cruels hyvers
Ont dévoré l'émail des Plaines ,
Depuis qu'au gré des vents les Ondes incertaines
T'emportent, Curieux , en cent climats divers.
Cependant tu difois , non fans verfer des larmes ,
( Peut-être voulois-tu moderer mes allarmes )
Qu'avant que l'Aftre des Saifons
Trois fois du Zodiaque eût revû les maiſons ,
Tu reviendrois puifer & repuifer encore
Les tendres fentimens que la foeur des Amours
Dès le berceau pour toi dans mon coeur fit éclore ,
Qu'acheva la raifon & qui durent toujours.
Les careffes des Grands , leur jufte confiance ,
Et l'honneur, plus puiffant que les Rois & les Dieux,
Que l'or & tous les dons de la pleine abondance ,
T'ont détaché de nous , pour juger par tes yeux
Le differend audacieux ,
Qu'ont avec nos François les Sçavans d'Angleterre ›
Sur la Aructure de la Terre.
Eh ! que m'importe à moi , retiré fur ces bords ,
Qu'elle foit ronde ou bien ovale ,
Applatie en fes bouts ; fi victime fatale
Des avis oppofés , qui troublent leurs accords,
1772 MERCURE DE FRANCE.
Je perdois un ami plus cher que les tréfors ,
Que forme en mugiflant la Mer Orientale ?
Mais , depuis ton départ tu ne fçais point auffi ;
Quelle foule de maux a fondu fur ma vie ,
du fouci ,
En
proye aux
vapeurs
Aux caprices du fort conftamment affervie
J'ai vu l'affreufe trahison
Difpofant l'appareil de fa fourbe fccrette ,
Au lieu du miel du Mont Himette ,
Me faire avaler du poiſon.
J'ai vu les faux fermens feconder fa malice ,
Et l'infléxible dureté ,
De fes noires horreurs confacrant l'artifice ,
M'immoler à fa cruauté.
Oui , l'inhumaine , je l'ai vûë ,
D'une équité perfide alléguant les défirs ,
Par un dernier coup de maffuë
Précipiter mon ame & mes derniers foupirs.
Ah! quand dans fes decrets fiérement obstinée ,
L'inéxorable. Deftinée
Au Mortel qui naîtra prépare des revers ,
Rien n'en peut détourner les périls , les traverfes ;
Eût-il les yeux d'Argus,tous fes yeux font couverts
Au-devant des gouffres ouverts ;
Qu'il prenne cent formes diverfes ,
Qu'i Igaloppe fur Terre, ou qu'il fende les Mers,
Elle est à fes côtés Compagne inféparable ,
E
AOUST. 1743 177)
Et fa préſence inévitable
Ne l'abandonne pas dans le fein des Enfers.
Mais pourquoi ce récit & ces lugubres plaintes
La prompte fimpathie avec des traits certains ,
Peut-être en ces elimâts lointains
T'a fait de mes douleurs preffentir les atteintes
Neptune fous fa Nefapplani ton azur ,
Pere & maître des Vents , renferme leur cohorte
Dans le fond de ton Antre obfcur ,
Et n'entr'ouvre la vaſte porte ,
Qu'à celui dont le fouffle avec un doux effort
Doit pouffer fûrement mon Ami juſqu'au Port,
N'attends pas , cher Bouguer , la ſaiſon la plus rude
Uliffe défiré , viens banir mon chagrin ,
Et borner mon inquiétude.
L'odorant Serpolet avec le Jonc Marin
Forment dans la rocaille , épars à l'avanture ;
Des tapis naturels de fleurs & de verdure ,
Et l'Allouette le matin
En dégoifant fa ritournelle ,
s'éleve dans la nue , & fon doux chant rappelle
L'Aurore qui fommeille auprès du vieux Tithon ,
Sous des rideaux rayés de Rofe & de Citron.
Reviens, comme autrefois errans au bord des Ondes,
Nous y retrouverons loin du Peuple indifcret ,
Ces Grottes fraîches & profondes ,
Où le filence dort dans les bras du fecret ,
Où la Nature ingénieuſe ,
Simple
1774 MERCURE DE FRANCE
Simple avec agrément , fans art induſtrieuſe ,
A dreffé des fauteuils , une table , un buffet ,
Et des rafraîchiffoirs , où mettre la bouteille
Pleine de la liqueur vermeille *
Dont le fin Bourdelois groffit fes revenus.
C'eft de-là quelquefois que fans être apperçus ;
Nous avonsvû nos Néreïdes
Baigner leur fein d'albâtre , & loin des yeux per
fides ,
Des Tritons effrontés , à les fuivre affidus ,
Courir en folâtrant für les rives humides ,
Et fe faire , à l'envi , mille tours ingénus.
Momens que je regrette , hélas ! vous n'êtes plus ,
Mes plaifirs ont paffé , comme une Onde coulante ,
Dont l'argent éclatoit für un fond fabloneux ,
Languit à la chaleur brulante ,
Se deffeche & n'eft plus qu'un terrein limoneux .
Ah ! l'adverſe fortune , à me perdre acharnée ,
Sans défunir nos coeurs , me féparant de toi ,
Chaque jour , cher Bouguer , me paroît une année ,
Et ma trifte Patrie eft un exil pour moi.
Par M. Desforges Maillard.
* Le vin de Bretagne n'étant pas d'une excellente
qualité , on en tire de Gascogne , c'est le vin que
l'on boit dans toutes les bonnes Maifons de cette Pros
vince.
EXTRAIT
A O
UST.
1743.
1775
ર ર ૯ ૨૩૯ ૯ ૨૯ ર ૯ ટ રટ રટ ૨૯ ૩૯ ૨૯
EXTRAIT d'une Lettre de M. F. Auteur
de la Topographie du Pays de Cotentin
écrite à M. D. L. R. le 29 Juillet 1743 .
V
M
Ous me faites l'honneur de me dire ,
Monfieur › que quelques Lecteurs
éclairés ont été fcandalifés de trouver , page
1091 du Mercure de Juin , I. Vol. que l'Auteur
du Manufcrit que je cite dans ma Defcription
du Cotentin , a pris le Carentonium
du Regiſtre de S. Denis , cité dans les Preuves
de l'Hiftoire de la Maiſon de Montmorency
, par le fçavant du Chefne , pour notre
Ville de Carentan , au lieu
que c'eft Charenton
, près de Paris , dont il s'agit dans ce
Registre.
Je ſuis bien éloigné , M, de vouloir deffendre
cet endroit du MM . en queſtion.
Avant qu'un tel deffein entre dans ma penſée ,
On pourra voir la Seine à la Saint Jean glacée ,
Arnaud à Charenton devenir Huguenot ,
Saint Sorlin Janfenifte , & Saint Pavin dévot.
Je confens donc de tout mon coeur ,
qu'on l'efface , ce rifible , ou fi vous voulez
, ce ſcandaleux endroit , & qu'on lui
fubftituë , pour ne rien perdre , fi on le
juge à propos , pour l'honneur de notre Carentan
,
1776 MERCURE DE FRANCE.
-
rentan , un fait très - grave , & de plus ;
très édifiant , du moins au gré de l'Auteur
de qui je l'emprunte. Cet Auteur eft
le célébre M, Thiers . Voici ce qu'il rapporte
dans fa finguliere Hiftoire des Perruques
, imprimée à fes dépens à Paris en
1690. page 271 .
SERTON , Evêque de Sées , qui cer-
> tainement avoit affifté au Concile Pro-
» vincial de Rouen , comme il eft dit dans
» la Préface & dans la Conclufion de ce
» Concile , fit encore quelque chofe d'auffi
extraordinaire , que S. Anfelme, deux ans
» après le Concile National de Londres.
» Orderic Vital , Moine de S, Evroul , rapporte
( 12. l. 3. Epift . 62. 11. l. 15. Hift.
»ad an. 1104, ) que Henri I , Roi d'Angle-
» terre , étant à Carentan le Samedi de Pâques
avec toute la Cour , & toute fon
»Armée , ce Prélat , après l'avoir exhorté
à faire la guerre à ceux qui troubloient
» & pilloient la Normandie , lui dit & à
» toute fa fuite , qu'il étoit mefféant à des
»hommes de porter de grands cheveux ,
» comme des femmes : omnes foemineo more
» criniti eftis, quod non decet : que cela étoit
» déteftable dans la penfée de S. Paul : Viros
crinitos effe quam incongruum & deteftabile,
fic Paulus ait , &c.
J'omets , M. plus d'une demie page de
AOUST. 1743 1777
la narration de M. Thiers , pour venir plutôt
à la conclufion .
>
» Il pria enfuite S. M. de donner en ce-
» la un loüable éxemple à fes Sujets : Unde
gloriofe Rex , obfecro te ut exemplum fub-
»jectis præbeas laudabile inprimis videant
in te qualiter debeant præparare fe.
» Et ce Prince lui ayant témoigné , qu'il le
» vouloit bien , Serton tira aufli- tôt des ci-
» feaux de fa manche , & lui coupa lui-
» même les cheveux. Il en fit autant au
» Comte de Meulan , & à beaucoup d'Of-
» ficiers. Toute la Cour , & toute l'Armée
» fe les firent auffi couper à l'envi , & té-
» moignerent beaucoup de mépris pour une
chofe dont ils avoient fait auparavant
beaucoup de cas . His dictis Rex cum opti-
➜matibus exultans acquiefcit , & prius Regem,
» ac poft modum Comitem Mellenticum , Procerefque
plurimos propriis manibus tetondit.
»Omnis Familia Regis & Concurrentes unde-
» cumque certatim attonfi funt , & Edictum
principale formidantes , pretiofos olim capillos
prefecuerunt , & amicam dudum Cafa-
» riem , ut viles quifquilias , pedibus conculca-
» verunt , &c.
33
Que penfez- vous , M. de cet abbatis
général de cheveux ? Carentan n'a- t - il pas
été en cette occafion , le théatre d'une avanture
en effet bien extraordinaire ? ne le
E voila1778
MERCURE DE FRANCE:
voilà-t-il pas en même tems dédommagé
de l'ignorance d'un Auteur , qui l'avoit
confondu avec Charenton , faute fans doute
d'avoir voyagé ?
J'efpere m'acquitter au premier jour de
votre commiffion auprès de M. le Marquis
de M. . . . J'ai toujours oublié de vous
faire part de trois couplets fur l'Air , Vous
qui vous mocquez par vos ris , &c, que je fis
à la hâte , il y a quelque tems à la prière
d'une Troupe de jeunes gens , qui ayant
reprefenté à Vallogne la Tragédie de Brutus
de M, de Voltaire , avec affés de fuccès
allerent le lendemain la repréfenter encore
au Château de la B. fuivant l'invitation gracieuse
de l'illuftre & aimable Famille qui
Phabite. Ces Couplets fervirent de Prologue
, & c'est par eux que je vais terminer
ma longue Lettre.
A M. le Marquis , & à Madame la Mar
quife de M .....
V Ous que l'Hymen joint par les Noeuds
De l'Amour véritable ,
Tendres Epoux , Maîtres heureux
De ce féjour aimable ,
Daignez , Seigneurs , faire à nos jeux
Un accueil favorable.
>
A
AOUST. 1743 . 1779.
A Mademoiselle leur Fille unique.
Nymphe , dont les appas naiffans
Parent mieux ce bocage ,
Que tous les autres ornemens ,
Qu'y met l'Art en ufage :
Brutus , l'ennemi des Tyrans ,
Vient vous y rendre hommage.
Tullie aux Romains affranchis
Caufant beaucoup d'allarmes ,
Seulement pour vaincre le Fils ,
A d'affés fortes armes .
Mais le Pere même eft foumis
En faveur de vos charmes.
J'ai l'honneur d'être , &c.
EXPLICATION de deux Paffages
de Virgile .
I.
Tuque adeò quem mox quafint habitura Deorum
Concilia incertum eft, &c. Georg. lib . 1. V. 24. & 25.
5
J'implore auffi le fecours de votre Divinité , ô
» Cefar , quoiqu'il foit encore incertain quelle Claffe
des Dieux vous devez bientôt choiſir pour y
admis.
être
A Traduction litterale qu'on voit ici
Lde cefameux paffage à critiqué & fimal
E ij entendu
1780 MERCURE DE FRANCE.
entendu , fuppofe 1 ° . Qu'on avoit décerné
des honneurs divins à Augufte , quand Virgile
lui adreffa cette invocation : 2 ° . Qu'on
avoit laiffé à ce nouveau Dieu la liberté de
choifir fa place parmi les Divinités du Ciel
ou de laTerre,de la Mer ou même de l'Enfer:
3 °. Qu'Auguſte n'avoit point encore pris de
parti , mais qu'il devoit bientôt fe déclarer
fur ce point. Or c'est là précisément ce que
le Poëte a fuppofé,
D'abord , il eft inconteftable qu'Augufte
a été adoré comme un Dieu , même de fon
vivant : Horace le dit en termes exprès :
Prafenti tibi maturos largimur honores ,
Jurandafque tuum per nomen ponimus aras . Epift. 1
Lib. 2:
Et les derniers mots du compliment que
Virgile fait ici à fon Héros , démontrent
évidemment que celui-ci étoit regardé comme
un Dieu , quand l'Auteur compofa co
brillant morceau :
Et votis jam nunc affuefce vocari.
En fecond lieu , on avoit laiffé à Augufte
la liberté de fe faire reconnoître & adorer ,
ou comme un Dieu de la Terre , ou comme
un Dieu du Ciel , &c. Du moins le Poëte
nous en affûre en termes formels.
?
On ignore encore , dit-il à Céfar , fi vous
ne choifirez pas les Villes & les Campagnes
pour y préfider : Vrbiſne invifere , Caſax ,
Ter
AOUST. 1743 . 1785
Terrarumque velis curam , &c. Ou fi vous
n'aimerez pas mieux régner fur les Mers :
An Deus immenfi venias Maris , &c. Ce qui
vient d'être rapporté eft clair , & ce qui fuit
dans le Poëte , ne l'eft pas moins.
Enfin Augufte n'avoit pas encore pris de
parti , mais il étoit fur le point de faire connoître
en quelle claffe des Dieux il vouloit
être admis. C'eft pour la premiére de ces
raifons , que Virgile invoque ce Prince ,
après avoir invoqué tous les Dieux qui préfidoient
aux campagnes. En effet , il pouvoit
arriver qu'Augufte , qui n'avoit pas encore
fait ufage du choix qu'il avoit en fon pouvoir
, prît place parmi ces derniéres Divinités.
Pour ce qui regarde la deuxième Partie
de ma Propofition , elle eft démontrée
par le mox du paffage que j'explique.
De ces trois principes , qui paroiffent
également indubitables , il refulte 1 ° . Que
ce compliment , ou fi l'on veut , cette invocation
que Virgile adreffe ici à Octavien,
a été composée dans le tems où les Romains
commencerent à lui rendre des honneurs
divins. Mais en quelle année de Rome ce
Prince devint - il l'objet d'un culte fuperftitieux
? c'eft un point fur lequel les fentimens
font partagés. Si l'on en croit Appien,
ce fut en l'année de Rome 719. Selon cette
opinion , & la Chronologie du P. de la Ruë,
E iij que
1782 MERCURE DE FRANCE.
que je crois la plus éxacte , il n'y avoit pour
lors que deux ans que Virgile avoit commencé
à compofer les Géorgiques. Ainfi les
dix-neuf vers qui regardent Augufte , peuvent
avoir été faits la même année & ajoûtés
au premier Livre des Géorgiques , qui
ne parurent que cinq ans après , fuppofé
que Virgile ait employé fept ans à la compofition
de cet Ouvrage.
Quiconque admet cette Chronologie ,
n'eft point obligé de dire avec quelques
Modernes , qu'ici Virgile porte la flaterie à
l'excès , ni d'avoir recours à je ne fçais
quelle Prédiction & efpece d'Oracle prononcé
par un efprit Prophétique , & il fe perfuade
fans peine qu'il n'y a point ici plus de Prophétie
, qu'il ne s'en trouve au fixiéme Livre
de l'Enéïde .
Au refte , fi on s'attache à l'Auteur de la
vie de Virgile , comme l'a fait le Sçavant P.
Catrou , pour faire raifonner le Poëte fenfément
, fans en faire un Prophéte , il faudra
dire que le brillant morceau dont il s'agit
, fut écrit & inferé dans les Géorgiques
vers l'an de Rome 724. où , felon ce Syftême
, Augufte commença à recevoir des
honneurs divins : autrement on expliquera
toujours mal les termes Et votis jam nunc affuefce
vocari , qui marquent avec la derniere
précifion l'époque de cet événement.
Il
AOUST. 1743 . 1783
Il réfulte 2 ° . qu'on doit lire ici Concilia
par un c. Ce mot eft au plurier par le privilége
qu'ont les Poëtes d'employer ce
nombre au lieu du fingulier , & fignifie la
même chose que claffis , c'eſt-à-dire , claſſe,
ordre , &c .
>
Pour mieux concevoir ma pensée , on
doit fe fouvenir , que chés les anciens Idolâtres
, les Dieux étoient divifés en quatre
claffes principales , qui étoient compofées
la premiere des Dieux du Ciel , la feconde
des Dieux de laTerre , la troifiéme des Dieux
de la Mer , & la quatrième des Dieux de
l'Enfer. Au moyen de cette obfervation, tirée
de l'endroit que je tâche d'éclaircir , on
voit difparoître toutes les difficultés ; on
conçoit que l'incertitude du Poëte , incertum
eft , ne venoit que de ce qu'il ignoroit encore
, dans laquelle de ces quatre differentes
claffes de Divinités , Augufte voudroit
entrer : on apperçoit qu'on s'eft lourdement
trompé , en accufant Virgile de s'être
ici oublié , jufqu'au point d'avoir paru fouhaiter
une mort prompte à fon Prince.
Cette opinion fi peu honorable
pour le
plus poli & le plus fenfé des Poëtes , fuppofe
néceffairement
que notre Auteur avoit
dit de fon Héros , qu'il devoit bientôt choifir
une place parmi les Dieux , & qu'en conféquence
, il ne devoit pas refter long-tems
E iiij
fur
1784 MERCURE DE FRANCE.
1
fur la Terre : mais heureufement pour Virgile
, il n'a pas même fongé à ce qu'on voudroit
ici lui attribuer. Augufte , qui avoit
été mis au nombre des Dieux de fon vivant,
pouvoit bien encore entrer dans l'une des
claffes qu'ils compofoient , fans être obligé
de quitter la vie.Qu'on juge maintenant des
interprétations , & des traductions ordinaires
de ce paffage.
I I.
Pafcite , ut ante , boves , pueri ; ſubmittite tauros:
Eglog. I. v. 46.
Bergers , faites paître des géniffes à l'ordinaire ,
» Et domptez des taureaux comme autrefois.
Virgile exprime ici en un feul vers ce qu'il
expofe plus au long au troifiéme Livre des
Georgiques , où il dit que pour élever des
géniffes , il fuffit de les laiffer paître , mais
qu'à l'égard des jeunes boeufs , qu'on deſtine
aux ufages de la ferme , on doit travailfer
à les dompter , tandis qu'ils font encore
dociles , & que leur âge les rend capables
d'inftruction :
Catera pafcuntur virides armenta per herbas . v. 162i
Jam vitulos hortare , viamque infifte domandi,
Dum faciles animi juvenum, dum mobilis atas. vi
164. & 165.
Le Poëte fuppofe que Tityre s'occupois
AOUST. 1743 . 1785
a
c'eſt
á élever des bêtes à cornes , c'est-à - dire ,
faire paître des géniffes : Ille meas errare
boves , &c. & à dompter des taureaux pour
fon ufage particulier , & peut - être même
pour en faire commerce : fubmittite tauros.
Je ne fçais fi c'eft prévention , ou non ÿ
mais je fuis pleinement convaincu , que
là le vrai & l'unique fens du vers Pafcite ,
ut ante , &c. D'autant plus 1 °. que Virgile
s'énonce plus clairement ailleurs : 2°.
les verbes fubmittere & domare font parfaitement
fynonimes ; 3 ° . que les interprétations
ordinaires des mots fubmittite tauros ,
font trop recherchées & trop forcées , pour
contenter un Grammairien , qui fe pique
tant foit peu d'exactitude.
8
A Crepy le 28 Juillet 1743-
que
LE MEDECIN mis en réputation,
CONTE
Tiré du Latin.
:
CErtaine Fiévre ayant , par rude affaut ,
fine , Réduit au lit le Payſan Thibaut ,
Sa Femme Luce , active , mais peu
L'allarme au coeur , & leslarmes aux yeux
E v Courut
1786 MERCURE DE FRANCE,
Courut foudain confulter de fon mieux
Meffer Evrard, Docteur en Médecine ,
Dont le fçavoir n'étoit pas fort prifé ;
Voire , d'autant qu'Evrard n'étoit ailé ,
Maint concluoit que c'étoit un franc Ane ;
Conclufion digne d'un franc Cheval.
Notre Docteur , lorfque la Payfanne ,
En fon jargon fimple & non doctoral ,
L'eut informé des ſymptômes du mal ,
Mit par écrit , comme il n'y manquoit guéres;
Son Ordonnance aniple & telle en tout point ,
Qu'elle eût primé chés les Apoticaires ,
Defquels , au refte , Evrard ne parla point
A Luce , neuve en ces fortes d'affaires.
Lui donnant donc le Papier d'une main ,
Et tenant l'autre ouverte aux Honoraires ;
Que votre Epoux , dit - il , demain matin
» Prenne cela dans un verre de vin ;
ל כ
» Moyennant quoi , j'ofé bien lui promettre
» Soulagement. Luce au pié de la lettre
Entend la chofe , & fans rien acheter
30
Qu'un peu de vin , s'en retourne au plus vite
Bien réfolué à tout exécuter ,
Et defirant heureuſe réuffite :
Defir qu'en elle il eft bon de noter.
Tout étant prêt pour l'Aurore naiflante ;
La Campagnarde à fon Mari préfente
Vin & Papier dans un Vaſe de bois.
Thibaur
AOUST. 1743 . 1787
Thibaut , muni d'un grand figne de Croir ,
Sans trop d'efforts , fçut , avec confiance ,
Venir à bout d'avaller l'Ordonnance ,
Qui flatte moins fon goût que la boiſſon.
Qu'arriva-t'il après ? Rien que de bon.
Le mal fit place à la convalefcence ,
En peu de jours ; & cette guérifon
Au Médecin fit un honneur immenfe.
F. M. F.
LETTRE de M..... au fujet de la
Chronologie , & de la Topographie des
Legendes.
J
E n'ai pû , Mr, répondre plutôt à l'empreffement
que vous avez de fçavoir ce
que je penfe de la Chronologie & de la Topographie
du nouveau Bréviaire de Paris ,
&c. Le peu de tems qu'il y a que je poffede
ce Livre ; la multitude d'affaires dont je me
fuis trouvé accablé depuis que je l'ai ; &
par
deffus tout les douze ou treize Tables
dont il eft compofé , & dont il faut parcourir
la meilleure partie , pour voir le but
de l'Auteur fur un feul nom , foit de Lieu,
foit de Saint , tout cela , dis -je , m'a empêché
de pouvoir vous fatisfaire plus promptement.
Voici feulement quelques réflé-
E vj xions
1788 MERCURE DE FRANCE.
xions , tant fur la Préface , que fur l'Ou
Vrage en général. Je pourrai dans la fuite
éxaminer de plès chaque article , &
vous en dire mons plus à loifir.
L'Auteur , qui ne donne que comme à
regret quelques Eloges à la Géographie des
Légendes , tâche d'attirer de fon côté tous
les avantages par le grand nombre de differences
, qu'il fuppofe entre ces deux Ouvrages
: & l'on veut bien croire qu'il parle
fincerement , lorfqu'il dit qu'il en fupprime
te détail , comme trop long.
Mais. puifqu'il propofe au Lecteur de découvrir
ces differences , je vais vous expofer
celles qquuee jj''aaii cru appercevoir, & qui,
felon moi , font plus pour la Géographie ,
que pour la Chronologic.
Il n'eft que trop vrai que dans le précis
que fait le Chronologifte du titre de la Géographie
, & où il convient que les noms de
Lieux quife rencontrent dans les Martyrologes,
les Légendes des Saints , & à la tête des Canons
de Conciles des nouveaux Bréviaires de France,
fe trouvent renfermés dans cette Brochure ;
it donne le pas à ce premier Ouvrage fur le
fien propre , fans peut- être , le fçavoir , puifqu'il
déclare par- là , d'une maniere tacite ,
que for Volume , qui n'avoit en vûë d'abord
le feul Diocèfe de Paris , ne devient
utile qu'après coup , & par forme de
que
SupAOUST.
1743. 1785
Supplément à quatre autres Diocèfes , fans
même leur fournir la Chronologie , qui
leur eft propre , & fans c .... prendre aucuns
Martyrologes . En déclarant donc que fon
Volume embraffe moins de matiéres , & fe
borne dans des Provinces tout autrement limitées
, qu'environ les vingt Diocèfes , où
F'on dit que la Géographie a été reçuë avec
applaudiffement , il reconnoît une premiére
difference. Je paffe aux autres.
Je conviendrai avec le Chronologiste ,
qu'il y a des fautes dans la Géographie : mais,
outre que la plupart femblent être des fautes
feulement d'impreffion , celles où l'Auteur
s'eft réellement égaré , m'ont fait conclure
qu'il étoit bien plus facile de polir ,
en plus de fix ans , un Ouvrage affés borné ,
que de réuffir également, en moins d'un an ,
àun autre qui eft prefque univerfel en fon
genre. Les dattes des Approbations des deux
Ouvrages , m'ont fait naître cette réfléxion ,
& cette feconde difference.
Troifiéme difference . C'eft cet amas ac
cablant de Tables fur Tables , dont il eſt
impoffible de ne pas feüilleter le plus grand
nombre , pour ne trouver fouvent que ce
qu'on vient de lire dans la Légende , qui a
occafionné cette fatigante recherche alt
lieu que l'unique Table , qui forme la
Géographie , ne peut furcharger celui qui
"
a
1790 MERCURE DE FRANCE.
a le moins de tems à foi.
Je ne trouve point , que la Géographie
des Légendes fe donne pour une Géographie
complette , mais feulement pour un Supplément
des Dictionnaires Géographiques , pour ce
qui regarde les Légendes : auffi je ne fçais fur
quoi eft fondé ce reproche , qu'on lui fait
de n'être qu'un fimple Vocabulaire , ou Dictionnaire
de mots. Il ne paroît pas que cette
Brochure ait jamais eu d'autre objet.
Mais la fuite de cette même difference ,
qu'étale le Chronologifte , ne peut guéres
lui attirer la bienveillance du plus grand
nombre de fes Lecteurs. En effet , lui , qui
fe donne pour Prêtre , fait un affés mauvais
compliment à tout le Clergé , & même
à tout l'Ordre Sacerdotal , lorfqu'il taxe la
Géographie de n'être pas fuffifante pour mettre,
un Lecteur peu verfé dans l'Art Géographique,
aufait de la jufte pofition des Lieux, &c, Plus
bas il compte s'exprimer avec l'étenduë néceffaire
pour expofer la plupart des Lieux prefque
fous les yeux du Lecteur le moins éclairé.
Au contraire , le Géographe fuppofe , avec
fondement les perfonnes qui auront befoin de fon
Quorage , inftruites des principes dela Géographie.
Avec une difference fi palpable , y at-
il encore à douter auquel des deux Auseurs
le Clergé donnera la préférence : De
telles expreffions de la part du Chronolo
giſte
AOUST. 1743 . 1791
gifte , ne demandent point de réfléxions.
Le corps de la Topographie iépond parfaitement
à l'idée que fon Auteur donne
d'une grande partie de fes Lecteurs dans fa
Préface. C'est pour cela , qu'après les mots
François , par exemple Avranches ou Nan
res , il ajoûte de fuite : Ville de France en
Normandie , en Bretagne , & c. comme s'il y
avoit des Prêtres à Paris affés peu verfés dans
Art Géographique , pour placer la Bretagne
en Turquie , ou la Normandie en Aſie .
Peut-être feroit-ce là encore une difference
pour la forme , qui paroîtra être peu honorable
au Chronologifte
.
Le Géographe n'eft pas moins Prêtre que
le Chronologifte , fr l'on en croit le Privilége
général , imprimé en 1740. à la tête
de fa Brochure. Ainfi la Géographie n'eft
pas pour lui l'objet de fon Art , auquel on
donne à entendre qu'il s'eft adonné d'une
maniére fervile . Mais il auroit cru , ce femble
, infulter à fes Confreres , aufquels il
paroît n'avoir préfenté fon Ouvrage qu'en
tremblant , s'il avoit répété en François &
à diverfes repriſes les faits énoncés dans les
Légendes , & que chacun vient de lire en
Latin. C'eft fe donner un peu trop gratuirement
pour le guide des Prêtres les moins
éclairés , que de leur répéter fans ceffe une
leçon , qu'ils doivent fçavoir , auffi bien
que
1792 MERCURE DE FRANCE;
que celui qui la donne , à l'exception de
cinq ou fix mots barbares , & qu'ils étoient
fürs de trouver dans la Géographie des Légendes.
Voici donc l'efpéce de Lecteurs qui pourront
être peu verfes dans l'Art Géographique.
Ce font ceux qui récitent en François le nouveau
Bréviaire de Paris. Mais en fuppofant
ce correctif, le Clergé des quatre Diocèfes ,
ajoutés à celui de Paris , pour la Topogra
phie , eft toujours cenfé
éclairé & peu
verfé dans l'Art Géographique , puifque le
Bréviaire de ces Diocèfes n'eft point encore
traduit , & ainſi n'eft destiné que pour
ceux qui entendent la Langue Latine , dont
le Clergé forme la plus grande partie .
n'a
peu
Il eft fingulier que dans un Ouvrage qui
pour but que la connoiffance des Tems &
des Lieux mentionnés dans les Légendes des
Saints , dans les Canons de Prime , on ait
jugé à propos d'indiquer les principaux Myftérés
de J. C. dont à peine le nom fe trouvet'il
dans les Légendes , fans qu'il fe life aucun
trait du Saint des Saints dans aucune
Leçon qui rapporte les Vies des Saints , excepté
quelque chofe dans les Apôtres.
Il est également fingulier de voir avec
quelle forte d'emphaſe l'Auteur prend pour
fes garants les Tillemonts , les Baillets , les
Fleuris , tant qu'il traite la Chronologie :
mais
AOUST. 1743 . 1793
mais dès qu'il deviendra [ Topographiste ] ,
Il abandonnera , fans s'en vanter , ces mêmes
fameux Auteurs , pour fe repofer uniquement
fur la bonne-foi des Traditions
douteufes , que chaque Diocèfe conferve ,
trop précieufement peut- être , & qui fe trouvent
fouvent démenties par ces mêmes Auteurs
, dont notre Chronologifte s'étoit paré
, lorſqu'ils lui étoient moins néceſſaires
, & dont la Critique ne lui convient
apparemment , qu'autant qu'elle eft conforme
aux Traditions Diocèfaines , tant bien
que mal fondées. Quittons la Préface.
La premiére page de la Chronologie préfente
une inadvertance dans laquelle font
également tombés tous ceux qui ont eu part
à l'Edition de cette énorme maſſe de Tables
; la voici .
Les Réglettes employées au- deffous d'une
année , marquent les faits differens arrivés
cette même année.
Or après avoir lû :
L'an 167. avant l'Ere vulgaire de J. C.
Martyre des Machabées , on trouve au deffous
:
-Conception de la Ste . Vierge , & c.
Naiffance de la Ste Vierge , &c.
-Préfentation de la Ste. Vierge , & c.
Tout Lecteur , peu verfe dans la connoiſſance
des tems , pourra croire , fans faire attention
à
1794 MERCURE DE FRANCE.
à la fuite , que la Conception , la Naiſſance,
& même la Préfentation de la Ste. Vierge ,
font arrivées dans le cours de la feule année
167 , avant l'Ere vulgaire , & environ 163 .
ans avant J. C. fon Fils .
L'emplacement de Curube vers la Sicile ,
( p. 18. ) n'eft pas mis prefque fous les yeux
du Lecteur le moins éclairé : Le contour de
cette Ifle eft d'une affés grande étenduë : le
feul côté qui regarde l'Affrique , doit faire
faire bien du chemin , à moins qu'on n'ait
recours à la Topographie . J'ignore quel eft
le garant du Chronologifte fur le Diaconat
de S. Cheron , ( p . 22. ) regardé feulement
felon ce qu'en dit le Bréviaire de Paris.
La Gaule , l'Italie , le Languedoc & la
Septimanie , ( p. 233. & 246. ) [ ces deux
Provinces font la même ] font données toutes
quatre pour la Patrie de S. Sébastien .
En voilàun peu trop pour un Lecteur, pen
verfé dans l'Art Géographique : furtout lorf
qu'on n'entre avec lui dans aucune expofition
de l'ancienne & de la nouvelle diftribution
de Provinces , & qu'on ne le prévient
fur ce qu'on entend par Patrie , c'eſt-àdire
, tantôt Pays de la propre naiffance du
Saint , tantôt Pays de la naiffance de fes
Peres.
pas
M. Baillet ne fut jamais le guide de notre
Chronologiſte , pour ce qui concerne S. Eu❤
gene
AOUST. 1743 . 1795
gene ,
S. Euftache , S. Lucain , Ste. Marine ,
Ste. Urfule , & une infinité d'autres , non
plus que pour la Tradition , qui place les
Reliques de S. Jacques le Majeur, à Compof
telle. ( p. 217. ) Mais je m'apperçois que je
deviens , fans y penfer l'accufateur d'un
inconnu. Je m'arrête tout court, & je pourrois
bien m'en tenir à ce que je viens de vous
écrire , fi ma Lettre ne paffe pas jufqu'à celui
qui y eft intéreffé : fi par hazard il la
voyoit , & qu'il y répondit , je pourrois
encore trouver quelques fujets de critique à
lui objecter , car je ne crois pas avoir épuisé
la matiére : mais comptez que vous ferez
toujours le premier inftruit fur cet article.
J'oubliois de vous dire que la Table de
la page 469. eft faite pour le même ufage que
celle de la page 335. Mais cette Table de la
même page 335. étant dreffée en faveur de
ceux qui lifent le Bréviaire en François , celle
de la page 469. devient parfaitement inutile
& de trop , puifqu'il n'y a pas d'apparence
qu'il y ait de Bréviaire François dans
les quatre Diocèles , en faveur defquels on a
augmenté le Supplément à la Topographie.
Je fuis , &c.
A Nogent le 18. Octobre 1742.
VERS
1796 MERCURE DE FRANCE.
VERS
Pour le Portrait de M. Deshayes , Acteur du
Théatre Italien.
Connoifant Onnoiffant à fond le Théâtre
Il en compofe l'ornement ;
Le Public en eft idolâtre ,
Et le trouve toujours charmant
Il rit avec tant de jufteffe ,
Qu'avec lui tout le monde rit ;
Oui , fes larmes ont tant d'adreffe ,
Que la vertu même en ſourit.
Par M. Laffichard.
VERS
Pour le Portrait de Mlle Deshayes , Actrice
du même Théatre.
Dans l'art flateur de Terpficore
Elle réunit tous les goûts :
La vertu feule la décore
De cet air charmant , fi doux.
Qu'une Agnès parle par fa bouche ,
Elle enchante , faifit , & touche ,
Et quand elle exprime l'amour ,
Chacun le reffent à fon tour .
Parle même.
Les
AO UST. 17437 1797
Les mots des Enigmes & du Logogryphe
du Mercure de Juillet , font les Dents , le
Violon & Heauton- timorumenos , Titre d'une
Comédie de Terence . On trouve dans le Logogryphe
, Mer , Eau , Air , Os , Mort , Ino,
Hermione , Hermite , Jafon , Envie , Homme ,
Trabifon , Jeûne , Aumône , Honneur , Vérité,
Etna , Un , Trois , Huit , Satin , Hier , Mi
tre Hêtre , Ormeau , Jour , Nuit , Minos
Roi , Titres , Sénateur , Moife , Mahomet,
Thou , Suetone , Aufone , Efther , Ire , Ane,
Remus , Jerôme , & Rat.
>
ENIGM E,
LE même inftant nous a vû naître,
Et le même fort nous attend ;
En même-tems on nous voit croître ,
Et nous nous reffemblons , mais fi parfaitement;
Que les yeux les plus fins s'y trompent aiſement
Dans le fiécle d'Aftrée ,
Et les aimables jours de Saturne & de Rhée ;
1
Où regnoit la candeur ,
L'équité , la droiture ;
Où le crime étoit en horreur ,
Ainfi que l'impoſture ,
Nous
1798 MERCURE DE FRANCE,
Nous vivions tous en paix dans la fimplicité ,
Où nous avoit créé la divine Bonté .
Ces beaux jours ne font plus ; il faut changer de
ftyle ;
A préſent on ſe fait un jeu
De porter parmi nous & le fer & le feu ;
On nous tourmente , on nous mutile.
Oui ; nos tourmens ſont infinis ;
Vous le fçavez , belle Philis ;
On ne nous verroit pas fi fouvent à la gêne ;
Et les martyrs de votre vanité ,
Si pour pour plaire au charmant Sylene ,
Il ne falloit prendre la peine
De cultiver votre beauté.
ဦး ဦး ဦး ဦး ဦး ဦး ၊
LOGOGRYP HE.
ENnemi déclaré d'un préambule long ,
Je vais , fans plus tarder , t'expliquer ma nature ;
Huit pieds, ami Lecteur , compofent ma ftructure
Je laiffe à ton efprit fécond
Le foin de les unir enſemble ,
Et de trouver tous les mots que j'affemble.
Docte Enfant du raiſonnement ,
Le bon fens forme mes parties ,
Et quand avec efprit l'Art les a réünies ,
Je fçais convaincre fortement.
Mes deux extremités , prifes avec jufteffe ,
Te
AOUST. 1743 . 1792
Te donneront ce qui faitla richeſſe,
Combine tout differemment ,
Tu trouveras ce qui ferme une Ville ;'
Un vuide dedans fort utile ;
Le rendez-vous de la moindre vapeur ;
Un animal qui n'eft point en honneur ;
Ce qu'on entend crier aux Cochers dans les rues
Ce qui fait cheminer les Nuës ;
Les noms d'un Saint , d'un légume , d'un fruit ,
S'offrent , fans doute , à ta penfée ;
Ornement féminin dont la mode eſt paſſée ;
Ce qu'on doit voir roder pendant la nuit
Dans une Ville policée ;
D'Eau bourbeufe un confus amas ;
Une Ville de France , une des Pays - Bas ;
De plus , chofe qui joint la France à l'Amérique à
L'A , B , C , D , de la Muſique ;
Sorte de Bouclier ; ce que tient un Forçat ;
Aux Pourceaux ce qui fert de plat ;
Ce qu'en un Livre on voit à toutes pages ,
Mais qu'on ne trouve point écrit ;
Terme de Droit , qui bon effet produit ;
Un Element ; le nom d'un de ces Sages ,
Dans l'Egypte autrefois fameux ;
parure
Un Animal dont la riche fourure
'Aux uns fervant de meubles , aux autres de
Defend contre un froid rigoureux ;
Ce qui dans une femme eft l'idole des yeux ;
Un
1800 MERCURE DE FRANCE:
Un mot Latin connu de tout le monde
Sur lequel notre espoir fe fonde ;
Un meuble utile dans l'hyver ;
Une Note ; accident qui nous fait voir la Mer ;
Ce qui donne la mort ou conferve la vie ;
Ce que fait la Maman , qui trop aime fon fils ;
Mais c'eft aflés , Lecteur ; devine qui je ſuis ,
Car t'accabler de mots, n'eft pas ce que j'envie .
25asasasásés ésés ésésésésés ésésésés- ésasassess
NOUVELLES LITTERAIRES ,
DES BEAUX- ARTS, &c.
OUVEAU RECUEIL , contenant 1 °. des
Differtations fur l'Hiftoire Eccléfiaftique
& Civile deParis , 2 ° . une Differtation
fur plufieurs points de l'Hiftoire des Enfans
de Clovis, premier du nom , Roi de France ,
& fur quelques ufages des Francs , 3 ° . la
Vie de Charles V. dit le Sage , Roi de France
, écrite par Chriſtine de Piſan , Dame qui
vivoit de fon tems ; enfin des Notes fur
cette Hiftoire , par M, l'Abbé Lebeuf , Cha
noine de l'Eglife d'Auxerre , & Membre de
l'Académie Royale des Infcriptions & Belles-
Lettres , connu dans la République des
Lettres par plufieurs Ouvrages touchant
notre Hiftoire.
SUP
AOUST. 1743. 1801.
SUPPLEMENT au Dictionnaire Oeconomique
, contenant divers moyens d'augmenter
fon bien , de conferver fa fanté , confidérablement
augmenté par divers Curieux , enrichi
d'un très- grand nombre de figures ,
1743. Deux Volumes in folio. A Paris ,
chés les veuves Etienne & Ganeau , Libraires
, ruë S, Jacques,
VIES des Hommes Illuftres de la France
depuis le commencement de la Monarchie
jufqu'à preſent , par M. d'Auvigny, VII . &
VIII. Tomes , 1743. in- 12. A Paris , chés
le Gras , Libraire , Grand '- Sale du Palais , à
I'L couronnée,
NOUVELLE EDITION du Dictionnaire
de M. l'Abbé Antonini , comprenant
deux parties ; la premiere eft le Dictionnaire
Italien , Latin François , contenant non
feulement un abbregé du Dictionnaire de la
Crufca, mais encore tout ce qu'il y a de plus
· remarquable dans les meilleurs Lexicographes
, Etymologiftes & Gloffaires , qui ont
paru en differentes Langues. La feconde eft
fe Dictionnaire François , Latin , Italien ,
& c. Celle-ci n'avoit pas encore paru. Deux
Volumes in-4° . A Paris , chés Prault , fils ,
Quai de Conti , à la Charité.
LE GUIDE des Accoucheurs , ou le Maî-
F tre
1802 MERCURE DE FRANCE.
tre dans l'Art d'accoucher les femmes , &
de les foulager dans les maladies & accidens
dont elles font très-fouvent attaquées, Ouvrage
des plus utiles pour les perfonnes qui
veulent faire une pratique particuliére de
l'Opération des Accouchemens , le tout en
forme d'Examen , Par Jacques Mefnard ,
Chirurgien Juré , ancien Prévôt de la Communauté
des Chirurgiens de la Ville de
Rouen , & Accoucheur , 1743 , in- 8 ° , de
382. pages , y compris la Table des Chapitres
, & fans la Préface , qui en contient 32,
avec plufieurs figures en Taille-douce , contenues
en is . Planches. A Paris , chés Debure
, l'aîné , Quai des Auguftins , à S. Paul,
chés le Breton , petit-fils d'Houry , ruë de la
Harpe , au S. Efprit ; & chés Durand , ruë
S. Jacques , à S. Landry & au Griffon ,
HISTOIRE DE GRECE , traduite de
l'Anglois de Temple Stanian , in- 1 2. 3. Vol .
A Paris , chés Briaffon , 1743 ;
L'Ouvrage , que nous annonçons au Public
, eft écrit avec toute la force & le difcernement
qu'on peut attendre d'un homme
profond dans l'Hiftoire ancienne , &
d'un efprit fupérieur , qui a long-tems mé
dité fa matiére , & qui n'a rien épargné
pour découvrir la vérité , foit par fes recherches
, foit par la comparaiſon des Auteurs
AOUST. 1743 . 1803
teurs les uns avec les autres , foit encore
par l'étude des anciens Monumens. C'eſt le
travail d'un Politique , à qui le Gouvernement
de la Grece unie ou divifée , a été
d'autant moins difficile à pénetrer , qu'il eſt
plus inftruit des maximes des Peuples qui
vivent fous l'Etat Républicain . La Puiffance
des Grecs a précédé celle des Romains, & en
a été comme le prélude ; il eſt donc très- important
de connoître les intérêts , les vûës
& les actions des uns , pour lire les progrès
des autres ; ainfi nous avons tout lieu de
croire que le Public fera bien aiſe d'avoir cet
important Ouvrage , imprimé dans le même
goût & dans la même forme que l'Hiftoire
Romaine , traduite de l'Anglois d'Echard ;
preffé comme elle dans la narration , & entierement
difpofé pour y être joint . Le Traducteur
de Stanian a aufli lieu d'efperer que
La Traduction n'affoiblira pas la réputation
que l'Original s'eft acquis fi juftement en
Angleterre.
CoÛTUME du Comté & Bailliage d'Au
zerre , avec le Procès verbal . Nouvelle Edition
, 25 . fols relié. A Auxerre , chés François
Fournier, Imprimeur de la Ville, 1743 .
in- 32 . de 308. pages , fans l'Epitre Dédicatoire
, l'Avis de l'Editeur , & la Table des
Matiéres , & fe trouve à Paris , chés C. F.
Fij Simon ,
1804 MERCURE DE FRANCE,
Simon , fils , rue de la Parcheminerie ,
ABBREGE' de l'Hiftoire Ancienne , ou
des cinq grands Empires , qui ont précédé la
Naiffance de J. C. fçavoir , I. celui des Babyloniens
, & des Affyriens . II , Celui des
Chaldéens . III . Celui des Medes & des Perfes
. IV . Celui des Grecs , V. Çelui des Romains.
ACCOMPAGNE de la Chronologie
de ces Empires , d'une Carte Géographique ,
de Notes qui fervent à l'éclairciffement du
Texte. Par le R. P. DU CHESNE , de la
Compagnie de JESUS , Précepteur de Meffeigneurs
les INFANTS D'ESPAGNE . I.
Vol. in-8°. de 427 , pages. A Paris , chés
Chaubert , Quai des Auguftins , & Durand ,
ruë. S. Jacques.
On peut mettre ce Volume dans la Claffe
des bons Livres , tant pour l'importance de
la Matiére , que pour l'ordre qui y eft obfervé
, par la clarté & la netteté du ftyle. Il
eft précédé d'un petit Avis , qu'il eft important
de lire , & par le Sommaire des cinq
Livres , qui répondent au nombre desEmpires
, de l'Hiftoire defquels l'Auteur donne
l'Analyſe ou l' Abbrege. Ces Sommaires font
tous compofés en Vers François , cequi ne
peut manquer de plaire , furtout à la Jeuneffe
, qui a de la mémoire , qui les apprendra
par coeur , & fe facilitera par-là l'acquifition
AOUST. 1743 .
1805
quifition & l'intelligence de ces grandes
Hiftoires , en s'amufant agréablement.
DE LA REFORMATION DU THEATRE ,
par Louis Riccoboni , Ouvrage in- 12 . 1743 .
A Paris , chés Debure , l'aîné , Quai des Auguftins
, le Breton , ruë de la Harpe , & Durand
, rue S. Jacques.
PROGRAMME d'un nouveau Recueil
de Poëfie , intitulé Bibliothéque Poëtique , ou
nouveau Choix des plus belles Piéces de Vers
en tout genre, depuis Marot , jufqu'aux Poëtes
de nos jours , avec leurs Vies & des Remarques
fur leurs Ouvrages , 1743. Quatre
Volumes in-4°. A Paris , chés Briaffon , Libraire
, ruë S. Jacques , à la Science.
MEMOIRES pour fervir à l'Hiftoire des
Infectes , par M. de Reaumur , de l'Académie
Royale des Sciences , de la Société
Royale de Londres , des Académies de Peterbourg
& de Berlin , & de l'Inftitut de
Bologne , Commandeur & Intendant de
l'Ordre Royal & Militaire de S. Louis .
Tome VI . Suite de l'Hiftoire des Mouches
à quatre aîles , avec un Supplément à celle
des Mouches à deux aîles. A Paris , de l'Imprimerie
Royale , 1743. in- 4° . de 608. pages
, fans une longue Préface , Planches de-
Fiij tachées
1806 MERCURE DE FRANCE .
tachées 43. chés Durand , Libraire , ruë
S. Jacques , à S. Landry & au Griffon.
CoÛTUME DE PARIS , rédigée dans
l'ordre naturel de la difpofition de fes Articles
, avec la réfolution des Queſtions , que
l'ambiguité ou l'obfcurité du Texte ont fait
naître , le fentiment des Auteurs fur chaque
difficulté , & les raifons, tant de douter
que de décider. Par M. PIERRE LE
MAISTRE , Avocat au Parlement. Nou-
VELLE EDITION , revûë & augmentée
de plufieurs Notes , fondées fur plufieurs
Arrêts célébres & Reglemens intervenus
depuis la premiére Edition , avec le Texte
de plufieurs Articles des nouvelies Ordonnances
fur les Donations & les Teftamens
qui ont changé les Décifions de l'Auteur.
Par M.... Avocat au Parlement. Un Volume
in-folio . A Paris , chés le Gras, Saugrain ,
de Nully , Brunet , au Palais , & chés Jacques
Rollin , fils , Quai des Auguftins.
DISSERTATION fur la Géométrie ,
avec le premier Chapitre des nouveaux
Principes ou Elémens des Mathématiques ,
par M. Liger , Commis au Bureau de la
Guerre. A Paris , chés Claude- Pierre Gueffier,
Parvis Notre-Dame , à la Libéralité , 1743 .
Prix 20, fols.
Char
AOUST. 1743. 1807
n
Charles - Antoine Jombert , Libraire du
Roi pour l'Artillerie , Quai des Auguftins
, au coin de la rue Gift- le -coeur , à
l'Image Notre-Dame , vient de mettre en
vente un nouveau Livre intitulé , Elémens
de la Guerre , des Siéges , ou Traité de l'Artillerie
, de l'attaque de la défenfe des Places,
à l'ufage des jeunes Militaires , par M. le
Blond , Profeffeur de Mathématiques des
Pages du Roi , en trois , Volumes in - octavo ,
imprimés avec foin, fur de beau papier , ornés
de Vignettes , & enrichis de plus de
trente grandes Planches fort bien gravées.
Le prix eft de 15. livres relié.
Cet Ouvrage eft divifé en trois parties ,
qui forment autant de Traités féparés : le
premier Volume contient l'Artillerie . Comme
les Armes ou les Machines en ufage à la
Guerre depuis l'invention de la Poudre , in-
Aluent non-feulement dans l'ordre & l'arrangement
des troupes pour combattre , mais
encore dans l'Attaque & la Défenſe des
Places , où la connoiffance en eft fort utile ;
J'Auteur a crû qu'ayant à traiter de ces deux
dernieres opérations, il étoit à propos de les
faire précéder par cet Ouvrage, qui leur fert
d'introduction , & contient les ufages & les
proprietés de nos principales armes à feu.
On y voit d'abord un précis de la compofition
& de la fabrique de la Poudre , ce
F iiij qu'il
1808 MERCURE DE FRANCE.
qu'il y a de plus effentiel à obferver dans
nos Canons , Mortiers , Pierriers , &c. cè
qui regarde leur fervice & leur charge . On
y donne enfuite un détail raifonné fur les
Mines , leur calcul & leur construction . On
y traite des compofitions d'Artifice, les plus
en ufage dans l'Attaque & la Défenfe des
Places ; des ponts de batteaux, dont la conftruction
regarde l'Artillerie ; des munitions
de guerre & de bouche , dont les armées doivent
être pourvûës , foit pour tenir la Campagne
, foit pour former des Siéges. Enfin
l'on a renfermé dans ce Traité tout ce que
l'Artillerie a de plus utile & de plus inté
reffant pour les gens de guerre .
Le fecond Volume a pour objet l'Attaque
des Places. L'excellent Traité que M. le Maréchal
de Vauban nous a laiffé fur cette matiére
, ſemble exclure tout autre Ouvrage
fur le même fujet , ou du moins le sendre
inutile . Mais comme le principal objet de
ce grand homme a été feulement de faire
connoître fa Méthode , & de prouver la né- ,
ceffité de la fuivre , on a crû qu'un Traité
Elémentaire fur la même matiére & felon
fes principes , pourroit être de quelque utilité
à nos jeunes Militaires , & ferviroit à
les faire entrer plus aifément dans l'efprit
de cette Méthode , & à la leur rendre plus
propre & plus familiére.
C'eft
AOUST. 1743 . 1809
C'est le but qu'on s'eft propofé dans ce
Ouvrage , & indépendamment de tout ce
qui a été enfeigné de fondamental par M.
de Vauban , on s'eft fervi de ce qui a été pratiqué
de particulier dans nos Siéges les plus
fameux, & de ce que l'on trouve écrit fur
la même matiére par les Militaires célébres,
comme M. de Feuquieres , M. Goulon , M.
-le Chevalier Folard , &c. Enforte qu'à plufieurs
égards cet Ouvrage eft beaucoup plus
complet & plus étendu que les Mémoires
mêmes de M. le Maréchal de Vauban.
On y trouve fort en détail tout ce qui
concerne les travaux & les opérations d'un
Siége Royal , ou d'une Ville fortifiée felon
les regles de l'Art. La méthode & les principes
néceffaires pour tracer d'abord les
principaux Ouvrages fur le papier , & enfuite
pour les rapporter fur le terrein ; l'attaque
des differens dehors les plus en ufage
dans la fortification ; ce que celle des petites
Villes , Châteaux & autres poftes qui
fe rencontrent fouvent dans le cours de la
guerre , peut demander de particulier . On
y traite auffi des furpriſes des Villes , & des
Efcalades. En un mot, le deffein de l'Auteur
eft de mener , comme par la main , un jeune
Officier dans tous les travaux , de le faire
entrer dans l'efprit de leur conftruction , &
de les mettre en état d'en conduire de pareils
Fv dans
1810 MERCURE DE FRANCE.
dans le befoin , & même d'en imaginer de
differens , fuivant les circonftances des tems
& des lieux , pour répondre aux mêmes
fins..
Le dernier Volume traite de la Défenfe
des Places. Comme on a appris dans l'Attaque
les premiers principes de la Défenſe, on
détaille ici plus particulierement les chicanes
les plus propres à retarder , autant qu'il
eft poffible , la prife des Ouvrages attaqués.
L'objet de cet Ouvrage eft donc de faire
connoître les principaux moyens qu'on peut
employer dans la Défenfe des Places . On y
traite d'abord de la garnifon & de la quan
tité de munitions de guerre & de bouche
qu'il doit y avoir dans une Place , relativement
à fa grandeur , & des difpofitions générales
qu'on peut y faire pour fe préparer
à une vigoureufe défenfe . On y donne enfuire
le détail de la Défenfe , propre à chaque
ouvrage de la Fortification . On s'y étend
beaucoup fur ce qui regarde la Défenſe des
petites Villes , Châteaux , & même des Maifons
dans lesquelles on peut être attaqué..
Dans tout cela on a deffein de réveiller l'attention
de nos jeunes Militaires , & de leur
faire voir qu'il n'y a gueres de poftes qui ne
puiffent être foutenus , contre une attaque
de peu de durée , lorfque l'on prend toutes.
les précautions, convenables pour les bien
défendre... Pour
AOUST, 1743+
1811
Pour ne rien laiffer à défirer dans cet Ou
vrage , on l'a enrichi des excellentes Ta
bles, dreffées par M. le Maréchal de Vauban
où l'on voit d'un coup d'oeil toutes les mu
nitions de guerre & de bouche , néceffaires
dans une Place affiégée , relativement à fa
grandeur & à fa garnifon. Elles ont été corrigées
avec beaucoup de foin , de quantité
de fautes qui s'y étoient gliffées dans differens
Livres où on les a inferées. On y a joint
an petit Mémoire,contenant differentes Obfervations
fur la vifite des Places , qui vient
d'un fort habile Ingénieur. On l'a rapporté
ici d'autant plus volontiers , qu'on a confideré
l'avantage qu'en pourront retirer nos
jeunes Militaires , pour fe former une idée
plus certaine fur ce qu'il y a de plus effentiel
à remarquer dans une Place de guerre . On
уа fait quelques Notes pour le rendre en
core plus utile , & feulement aux endroits
où elles ont par les plus néceffaires ..
Enfin cet Ouvrage eft terminé par un pe
tit, Dictionnaire des Termes les plus ufités dans
la Fortification , l'Artillerie , l'Attaque & la
Défenfe des Places. Au refte , pour que rien
ne puiffe arrêter les jeunes Militaires , ou
leur caufer quelque difficulté dans la lectu
re de cer Ouvrage , l'Auteur s'eft attaché à
Le rendre clair & facile , & n'y fait, pour
ainfi- dire , aucun ufage de la Géométrie , ne
F vj fuppofant
1812 MERCURE DE FRANCE.
fuppofant gueres d'autre connoiffance que
celle de la Fortification , dont il a donné, il
y a quelques années, unpetit Traité Elémen
taire, écrit avec beaucoup d'ordre & de clarté
, qui fe vend chés le même Libraire.
PROSPECTUS de differens nouveaux
Ouvrages far les Mathématiques & l'Art
Militaire , qui s'impriment actuellement
chés Charles -Antoine Fombert , Libraire da
Roi pour Artillerie & le Génie , demeurant
ci- devant rue S. Jacques , & à préfent fur le
Quai des Auguftins , au coin de la rue Giftle-
coeur , à l'Image Notre -Dame . A Paris
, 1742.
Le parfait Ingénieur François , contenant
la Construction , l'Attaque & la Défenſe
des Places régulières & irrégulières , fuivant
M. de Vauban , & les plus habiles Auteurs.
Par M. l'Abbé Deidier , Profelleur
Royal des Mathématiques aux Ecoles d'Artillerie
de la Fere. Nouvelle Edition , confiderablement
augmentée , & enrichie de so.
Planches in- quarto , 1742.
Ce Livre fut imprimé pour la premiére
fois , il ya cinq ou fix ans . Le but de l'Auteur
eft de donner au Public une efpéce de
Bibliothèque qui renferme tout ce qui a été
écritjufqu'à nos jours fur la Conftruction ,
l'Attaque & la Défenſe des Places , avec des
ParalAOUST.
1743 .
1813
Paralleles des principaux Auteurs , capable
de faire juger du bon & du mauvais de
tout ce qui a été pratiqué jufqu'ici. Par ce
moyen , il facilite l'étude des Fortifications
à un grand nombre d'Officiers , qui n'ont
pas toujours , ni le pouvoir d'acheter une
foule de Livres , ni le tems de les lire , &
qui n'ont point l'intelligence du Latin & des
Langues étrangeres , dans lefquelles la plûpart
de ces Traités fe trouvent écrits.
Comme cet Ouvrage eft le premier de tous
ceux que cet illuftre Auteur a compofés , il
ne voulut point alors fe hazarder d'y mettre
fon nom à la tête , d'autant plus que la matiére
qu'il y traitoit , paroiffant incompatible
avec l'état qu'il avoit embraffé , auroit
pu prévenir d'abord contre l'Ouvrage. C'eſt
ce qui a donné lieu à M. B ** de V ** ,
voyant que perfonne ne le reclamoit , de lui
faire l'honneur de fe l'approprier dans fon
Architecture Militaire. Ce nouvel Auteur ,
dont la plume fertile vient d'inonder la Hollande
de quantité de Volumes fous le beau
titre de Cours de la Science Militaire , ayant
formé le projet de faire tomber & d'anéan
tir tous les Livres de Mathématiques , qui ,
felon lui , étoient devenus trop nombreux
& trop chers pour un Officier , s'eft donné
la peine d'extraire de chaque Livre ce qui
lui a paru le meilleur , & de coudre tous ces
mory
1814 MERCURE DE FRANCE
morceaux enfemble , pour en compoſer te
fien. A l'égard de notre Parfait Ingénieur
François , comme il le jugea digne d'être
confervé , il a bien voulu le prendre fous:
fa protection , & de peur qu'il ne fe trouvât
confondu avec tous les autres , & enfeveli
fous leur ruine , il a adopté ce Livre
, & l'a honoré de fon illuftre nom. Une
préférence fi marquée mérite bien que l'Auteur
& le Libraire s'uniffent pour lui en
témoigner leur reconnoiffance.
La premiére Edition du Parfait Ingénieur ,
s'étant débitée en très - peu de tems , l'accueil
favorable avec lequel il fut goûté du
Public ,
encouragea l'Auteur à le travailler
de nouveau. Dans cette vûë , il eut recours
aux plus habiles & aux plus expérimentés
dans le métier de la Guerre , qui voulurent
bien lui communiquer leurs lumières , & le
mirent en état d'en faire une feconde, beaucoup
plus parfaite , où après avoir corrigé
bien des fautes qui avoient échapé dans la
premiére , il y ajoûta quantité de choſes uti–
les & intéreffantes , dont il n'avoit aucune
connoiffance , quand il compofa cer Ouvrage
.
Pour faire l'application des préceptes re
pandus dans ce Traité , à quelque chofe de
réel & d'exécuté , on a donné pour exem
ple d'une bonne Fortification , le Neuf- Bri
fack
AOUST. 1743 . 1815
fack & la Ville de Luxemboug , telle qu'elle
eft aujourd'hui. On y verra que tout a été
conftruit felon les meilleures maximes , &
qu'on n'y a multiplié les dehors & les Ouvrages
avancés , qu'autant que le demandoit
la fituation de la Place & les confidérations
que l'on doit toujours avoir dans ces fortes
de conftructions. Et pour exemple de l'Attaque
& de la Défenfe des Places, l'on a choifi
deux des plus fameux Siéges qui fe foient
faits fous le Régne de Louis XIV . & qui
ont le plus relevé la gloire des François. Le
premier eft celui de Lille , où M. de Bou-
Alers fit une fi belle & fi vigoureufe défenſe
contre les attaques vives & redoublées du
Prince Eugene , qui étoit alors à la tête de
l'Armée des Confédérés. Le fecond eft celui
de Namur , où fa Majefté commandoit en
perfonne , & où M. de Vauban dirigeoit
les travaux. La feule lecture de ces deux
Relations eft capable d'animer l'émulation
des perfonnes qui s'adonnent au Génie , &
de les porter à fe mettre en état d'imiter de
fi beaux exemples.
Ce Livre eft achevé d'imprimer en un
Volume in- quarto , de format plus grand
que l'ancienne Edition ; on n'a rien négli
gé de tout ce qui pouvoit contribuer à la
beauté de fon exécution , & on l'a orné d'un
fort beau Frontifpice & de Vignettes relatives
1816 MERCURE DE FRANCE.
tives aux fujets qui y font traités. Il fe vend
relié 15 liv.
NOUVEAU TARIF du Toifé de la Maçonnerie
tant fuperficielle que folide , où l'on
trouve les calculs du Toifé tout faits , fans
mettre la main à la plume , avec le Toifé
des Bâtimens , fuivant la Coûtume de Paris,
& le Toifé du Bout-avant. Ouvrage utile
aux Architectes , Maçons , Entrepreneurs ,
Menuifiers , &c. & à tous les Bourgeois qui
font bâtir. /n- 8° . prix 7 liv. relié.
Dans cet Ouvrage il n'y a point d'Addition
à faire , comme dans les Comptes Fairs
de Barreme. L'on y trouve tout d'un coup
les produits dont on a befoin , fans mettre la
main à la plume , pourvû toutefois que cela
ne paffe pas vingt pieds fur 72 pieds , à
quoi l'on s'eft reftraint pour rendre l'Ouvrage
portatif. On a fupplée à ce défaut par
une Méthode courte & facile , qui fe trouve
à la fin des calculs . On trouvera enfuite
un autre Tarif du Toifé Solide , avec
un petit Traité de Géométrie , appliqué à la
façon dont les Architectes & Entrepreneurs
de Paris , mefurent les Bâtimens , qui
eft la plus ufitée à préfent. On y a joint la
maniére de toifer les Bâtimens fuivant les
us & Coûtumes de Paris , felon M. de Ferriere
& M. Blondel , qui font les Auteurs
les
AOUST. 1743 ..
1817
les plus fuivis , & qui ont le mieux traité
cette matiére .
Le même Libraire vient de mettre en
vente un Livre nouveau , intitulé :
PRINCIPES du Systême des petits
Tourbillons , mis à la portée de tout le monde
, & appliqués aux Phénoménes les plus
généraux. Ouvrage auquel on a ajoûté une
Differtation pofthume de M. l'Abbé DE
MOLIERES. Vol. in 12. de 426 pages,
prix 2 liv . 10 f. relié .
DISSERTATION fur un Temple octagone
, & plufieurs bas-reliefs trouvés à Ceftas
, lefquels défignent les Fêtes de Cybéle ,
une initiation à fes Myftéres , & un Sacrifice
qu'on lui a offert. Par M. l'Abbé Faubert
C.D.C. A Bordeaux , chés Jean - Baptiſte
Lacornée. 1743 .
Cet Ouvrage qui eft dédié à Mrs. les Maire
, Sou-Maire & Jurats de la Ville de
Bordeaux , eft rempli d'érudition . L'Auteur
, avant que d'entrer en matiére , &
d'expofer le Temple dont il s'agit , s'étend
amplement fur le Culte de Cybele dans les
Gaules .
A la page 45 , où finit cette efpéce de
Préface , il nous apprend que c'eft l'Eglife
même de la Paroiffe de Ceftas qui eft le
Temple dont il veut parler . cette Paroiffe
eſt,
1818 MERCURE DE FRANCE.
eft , dit-il , limitrophe des Landes , & dans
les Graves de Bordeaux, & dépend de MM.
'les Jurats de cette Ville , comme Seigneurs
de la Comté d'Ornon . On s'attendroit nåturellement
à lire en cet endroit la diftance
à laquelle elle eft de Bordeaux ; mais il
ne la marque qu'à la page 182 , où il met
en marge qu'elle eft fituée à trois lieues
de cette Ville. Ce Lieu étoit anciennement
plein de bois , & l'eft encore , à quelques
défrichemens près, que les Habitans ont été
obligés de faire , pour fe procurer une médiocre
fubfiftance.
Proche la jonction des eaux de Bourde &
de Sale , il y a un chemin appellé Le chemin
du Pas du Luc. De cet endroit on peut
tirer une ligne , qui paffant devant ce Tenple
, va fe terminer , vers le couchant , au
bout du bois , dans le Lieu dit le Bouchon
du Luc , qui eft entouré d'eau , & où l'on
voit une élévation artificielle , qui domine
de près de cinq pieds fur le refte de la campagne.
Si M. Jaubert prétend que les dehors de
cette Eglife , qu'il a fait repréfenter , donnent
aux Lecteurs la facilité de s'imaginer
qu'il y a là un Temple profane de figure
octogone , il n'a pas réufli à notre égard ,
puifque nous n'y appercevons qu'un exté-
.rieur
X
AOUST. 1743.
1819
rieur tel , que l'ont d'ordinaire les Eglifes
de la campagne.
pas
du
La figure qu'il donne à la page 53 .
demi octogone , pourroit aider à l'intelligence
de ce qu'il a voulu dire , fi elle ne paroiffoit
combattre celle de la page 45 »
par la fituation de l'Orient & de l'Occident,
qui font directement oppofés à ce que la
figure de l'Eglife en profil repréfente à la
vue. Mais nous voulons bien croire que
c'eft peut-être le Graveur qui a placé l'Orient
, où devroit être l'Occident , & où
il faut le mettre , fi on veut que les deux
figures s'accordent enfemble .
Nous ne pouvons nous empêcher de dire
ici , que
de la defcription que l'Auteur donne
du dedans de cette Eglife , il n'en doit
pas néceffairement réfulter que l'octogone
ait jamais été parfait . Il n'eft pas.rare que le
Choeur des Eglifes ait la forme d'un demi
octogone , au bout duquel il n'y a jamais
eu autre chofe qu'une Nef oblongue , pour
placer le Peuple . Nous fouhaiterions d'ailleurs
être à portée de voir les deux colomnes
chiffrées 6. & 7 , pour juger plus fainement
de leur antiquité , puifque fans fortir
de Paris , nous appercevons dans quelques
Eglifes des chapiteaux , qui ont des figures
également burlesques & profanes , foit par
la forme des animaux , qui y font fculptés ,
foir
1820 MERCURE DE FRANCE.
foit
par les feuillages & les fruits.
Ce qu'il y auroit de plus fort pour prouver
qu'il y a eu un Temple du Paganiſme à
Ceftas , & qu'on en voit encore les reftes ,
feroient les cinq bas-reliefs dont M. Jaubert
donne la repréfentation , parce qu'il fuffit
que l'un des cinq foit infâme , pour en conclure
que les quatre autres , qui font du même
Ouvrier , ne peuvent avoir été employés
dans un édifice confacré au vrai Dieu . Il eft
vifible que M. Jaubert eft affés fondé , pour
conjecturer que ces bas-reliefs ont fervi à
donner des idées du culte de Cibéle , &
tout ce qu'il en dit eft fuffifammenc appuyé,
pour nous faire croire que , dans le Bordelois
on a été affés infenfé pour donner dans
cette Religion abfurde , avant que la lumiére
de l'Evangile y fût parvenue. Mais comme
ces pierres ( ainfi qu'il le dit p. 85. ) font
dures & grifâtres , & qu'elles ont été fcellées
dans le mur , n'étant d'ailleurs que de
quatorze pouces ou environ , il nous paroît
naturel d'en conclure qu'elles n'ont pas toujours
été là , & qu'elles y ont été tranfportées
d'ailleurs. Nous accorderons même qu'il
pouvoit y en avoir un plus grand nombre de
fcellées ou incruftées dans ce mur , en forte
qu'on y voyoit une efpece de fymétrie . Et
c'eft ce qui infinuera encore mieux que ces
quarrés venoient du débris de quelque Temple
;
AOUST. 1743 .
1821
ple ; mais cela ne perfuadera pas que la Tour
du Clocher de Ceftas , encore moins le
Choeur & le Sanctuaire de cette Paroiffe
foient les restes d'un Temple octogone du
Paganiſme.
Puifque le Village de Ceftas appartient
à la Communauté des Habitans de Bordeaux
, il a été convenable que les Magiftrats
contribuaffent à rebâtir l'Eglife du
Lieu. Ainfi étant maîtres de difpofer de
quelque ancien monument , à demi ruiné
ou des décombres de ce qui pouvoit en avoir
été abattu , ils auront pu autrefois permettre
qu'on les tranfportât à Ceftas , où les
Maçons les ont mis en oeuvre , dans un endroit
obfcur , & où ils ne font apperçut
maintenant , qu'en conféquence de quelques
changemens arrivés dans l'édifice . La
découverte d'un Tombeau de pierre audeffous
de la Tour de ce Clocher , avec les
offemens d'un enfant , eft une circonstance ,
qui a plus de rapport au tems du Chriftia
nifme , qu'à celui du Paganifme .
Mais M. Jaubert , qui eft bien aiſe de
trouver du Paganifme le plus qu'il peut dans
le Village de Ceftas , afin d'appuyer la découverte
qu'il a faite du Temple , en remarque
une , qu'il croit être réellement un
refte de la fuperftition des anciens Druides
& qui auroit paffé de pere en fils à Ceftas ,
juſqu'à
1822 MERCURE DE FRANCE.
jufqu'à l'an 1624. On lit ( dit-il à la page
172. ) dans les Regiftres de cette Eglife ,
que cette année là , fept des Habitans font.
allés à Laguilan- neuf, fuivant la coûtume du
Pays , & ont amaffe douze livres tournoiſes .
tequel argent ils ont dit avoir dévotion qu'il
foit employé à acheter un devant d'Autel.
#
....
Il paroît que l'Auteur trouve ici du mal
dans une chofe qui eft bien innocente : ces
fept Habitans font allés à Laguilan- neuf,
c'est-à-dire , qu'ils font allés demander les.
Etrennes pour l'Eglife du Lieu . Car dans le
dernier fiècle, Laguilan- neuf & les Etrennes,
étoient la même chofe . Cela eft fi véritable
, dans le Perche on dit encore les que
Eguilans , pour les Etrennes. Auguilan - neuf
fe dit dans le Poitou , fuivant M. Chaftelain
, Notes fur le 1. Janvier. En forte
qu'il n'y a pas plus de fuperftition à demander
ou donner les Eguilans , qu'à demander
on donner les Etrennes. Si l'ufage de les
demander pour l'Eglife de Ceftas ne fubfifte
plus , ce ne peut être en vertu de la défenſe
du Concile de Bordeaux , comme le foupçonne
M. Jaubert : c'eſt plûtôt la mifére des
tems qui a fait que ne fe trouvant plus de
contribuans il ne s'eft plus prefenté de
demandeurs. Ce feroit pouffer les chofes à
J'extrémité , & vouloir deviner , que de
dire que les Marguilliers ou Officiers de la
Paroille
AOUST. 1743 . 1823
Paroiffe de Ceftas , alloient en 1624. couper
du Gui dans les bois , qu'enfuite ils le dif
tribuoient dans les maifons , ce qui leur fervoit
à amaffer des aumônes , dont en 1626 .
ils firent faire un parement à l'Autel de
Notre-Dame. Dans Anguilan - neuf de ces
bonnes gens , il n'y avoit que l'expreffion
du Paganifme , & rien de plus ; elle étoit
auffi innocente dans leur bouche , que celle
de dies Luna , dies Martis , dies Jovis , dies
Veneris fancta , dans les vieux Livres d'E
glife ; & Mercredi , Jeudi , Vendredi dans
notre Langage vulgaire.
.. Nous avons écrit Ceftas , comme l'Auteur
l'écrit , quoiqu'il y ait lieu de douter fi ce
n'eft point plûtôt Seftas qu'il eûtfallu écrire,
comme l'a fait le Dictionnaire . Univerfel
de la France ; ce qui fùrement feroit plus
exact , s'il étoit vrai que ce Lieu eft au fixiéme
milliaire , ou , felon une autre maniére
de compter , à la fixiéme lieuë de quelque
Ville mémorable.
ARNOLDI VINNII 7. C. Nota in qua
tuor Libros Inftitutionum , five Elementorum
Juris D. Juftiniani , Sacratiffimi Principis ,
nova Editio emendatior. Acceffit Index locupletiffimus.
Aurelianis ; apud Francifcum
Rouzeau , Typographum. Deux Volumes
in-12. 1743.
MB1824
MERCURE DE FRANCE.
METHODE GENERALI , pour trai
ter les Maladies qui régnent à Grenoble ,
fous le nom de Rhume , par M. Beylié ,
Confeiller, Médecin ordinaire du Roi , Aggrégé
& Profeffeur ordinaire de Médecine
de Grenoble. A Grenoble , chés la veuve
Giroud , Libraire du Parlement , au Palais.
Brochure in- 8°, de 20 , pages,
USAGES
LES MOEURS ET LES
DES GRECS , par M. Menard , Confeil-
Jer au Préfidial de Nîmes , Académicien
Honoraire de l'Académie des Sciences &
des Belles-Lettres de Lyon , & Afſocié à
celle des Belles-Lettres de Marſeille , à Lyon,
chés la veuve de la Roche , & Fils , ruë
Merciere , à l'Occafion ,
'Regnauld Floremain , Imprimeur du Roi à
Reims , avertit le Public , qu'il va mettre
inceffamment en vente les deux premiers
Volumes de l'Ancienne Verfion Italique de
l'Ecriture Sainte .
Le mérite de cette Verfion , fi eftimée dans
l'Antiquité , eft trop connu des Sçavans
pour en faire ici l'éloge ; les fragmens qui
en ont été publiés , faifoient défirer depuis
long- tems que quelqu'un voulût les raffembler
tous , & les réunir fous un feul point
de vûë ; c'est ce qu'on fe flatte d'avoir exécuté
dans cette Edition, Les
AOUST. 1743. 18251
Les plus anciens Manufcrits d'Italie , de
France , d'Angleterre , & les Ecrits des
Peres des premiers fiécles de l'Eglife , font
les fources où l'on a puifé.
Le plan , l'ordre & l'économie de cet
Ouvrage , font détaillés plus au long dans
le Prospectus Latin , qui vient d'être publié.
Il fuffit de remarquer ici , qu'outre le Texte
de la Vulgate , qui fera placé à côté de l'ancienne
Verfion , cette Edition fera enrichie
d'une Préface , qui en fixant les caractéres
de l'ancienne Italique , en affure la certitude.
L'Auteur y a joint un grand nombre de
Notes , des Avertiffemens à la tête de chaque
Livre , & il a placé à la fin une Table
des matiéres , très-ample & très -étenduë.
*
L'Imprimeur n'a rien épargné de fon côté
, pour rendre cette Edition complette,
H fe fatte que le Public fera auffi fatisfait
que l'Editeur de la beauté du papier , des
caractéres , & de l'exécution de tout l'Ouvrage.
De trois Volumes in-folio , dont cette
Edition fera compofée , les deux premiers,
qui contiennent l'Ancien Teftament , font
imprimés , & le troifiéme , qui renfermera
le Nouveau , eft fous preffe . Le prix de
chaque Volume fera de trente 1 vres en
blanc , fin papier d'Auvergne , & de qu '
rante- cinq livres , grand papier auffi d'A
G
vergne.
1826 MERCURE DE FRANCE.
vergne. On n'en a imprimé qu'un cent de
cette derniére forte,
On pourra s'adreffer à Paris , chés Guil
laume Cavelier , le pere , Libraire , rue S,
Jacques , au Lys d'or.
OEUVRES DE BRANTÔME , nou
velle Edition confidérablement augmentée,
& accompagnée de Remarques Hiftori
ques & Critiques. Quinze Volumes in-12 , à
la Haye , M. DCC. XLIII. Les cinq der
niers Vol, fe trouvent à Paris , chés Jombert ,
vis-à-vis le College de la Marche,
Dans un Avertiffement , mis à la tête du
xr. Tome , après avoir fait en deux mots
l'Eloge de çet Ouvrage , on apprend que la
nouvelle Edition , dont il s'agit ici , s'enleve
avec plus d'empreffement encore
que les précédentes , intéreſſant davantage
, parce qu'elle contient les Opufcules
du même Auteur , & des Piéces hiftoriques
, qui n'avoient pas encore vû le jour ,
& qu'on reçoit de fa main , avec cette confiance
qu'il s'eft acquife , par le caractère de
véridicité & de probité répandu dans fes
Ouvrages , qui perfuadent , malgré la fimplicité
& la naïveté du ſtyle. Il eſt fâcheux ,
ajoute-t'on , pour ceux qui ont les anciennes
Editions , d'être privés de ces derniers
morceaux , ou obligés d'acheter en entier
la
AOUST. 1743 . 1827
la nouvelle , dans laquelle ils font confondus.
On a pourvû à ce double inconvé
nient , en donnant au Public , en cinq Volumes
féparés , tout ce qui n'eſt pas dans
les anciennes Editions , & qu'on a fidélement
extrait de celle de Hollande. Au moyen
de quoi ceux qui joindront le Supplément
à l'Edition ancienne , qu'ils ont dans leurs
Bibliothèques , auront exactement tout ce
qui eft compris dans la derniére Edition ,
&par conféquent un Brantôme complet ,
comme s'ils avoient fait la dépenfe de l'Edition
toute entiére. Ces cinq Volumes fe
trouvent à Paris chés plufieurs Libraires.
EXTRAIT d'une Lettre écrite dé Troyes ,
Le 30. Mars 1743 , ausujet d'un Etabliffement
Académique.
Lcomme
A Ville de Troyes croyant pouvoir ,
comme plufieurs Villes du Royaume
, jetter les fondemens d'une Académie
des Belles-Lettres , fept perfonnes d'un mérite
diftingué ont tenu depuis un an des Affemblées,
deux fois la femaine ,fur des fujets
également intéreffans & toujours inftructifs.
M. Tillet , Directeur des Monnoyes , qui
en a donné la premiére idée , & qui en eft
undes Membres , leur aprêté une fale , cue
Gij l'on
1828 MERCURE DE FRANCE.
l'on appellera avec jufte raiſon le bercean
de l'Académie, Les fix autres font M. Com
parot , Premier Préſident de l'Election ,
très-connu par fon intégrité & fon érupar
dition. M. de Bercenay , fon frere , Con.
feiller au Préfidial , qui s'eft toujours at
taché aux Sciences les plus abftraites , M.
Auffroy , Directeur des Aydes , dont le
choix feul de fes illuftres Confreres eft une
éclatante preuve de fon mérite. M.Billebaut,
Médecin , qui joint à la plus parfaite connoiffance
de fon Art , toutes les qualités requifes
dans un homme de Lettres . M. le
Roy , Gentilhomme , très- connu par fon
goût pour les Médailles antiques , qu'il ſe
fait une étude particuliere d'expliquer. Le
dernier enfin , M. le Febvre , Avocat au
Parlement , qui n'a befoin , pour tout éloge
, que du choix qu'en a fait l'Affemblée ,
en le nommant Directeur dans fa premiére
Séance ,
La modeftie de çes Amateurs des Lettres,
les a empêché , jufqu'à prefent , de rendre
publiques les productions de leurs Confé
rences. Mais M, Lévefque de la Ravaliere ,
notre Compatriote , fi connu par des Ouvrages
, qui font entre les mains de tout le
monde , étant venu pour affaire dans cette
Ville , fut prié par M. les Académiciens
de prendre une place dans leurs Affemblées ,
où
AQUST. 1743 : 1829
où il fit le 19. de ce mois le Difcours fuivant
, lequel mérite fans doute de voir le
jour.
»
»
"
MESSIEURS , étranger en quelque
»forte parmi vous , attaché à un genre
d'Etude , peut-être different des vôtres ,
» uni feulement avec vous par les noeuds
généreux , qui lient les Gens de Lettres
» entre eux , aurois -je dû m'attendre à une
» diſtinction auſſi fateufe , que celle dont
» vous m'honorez aujourd'hui ? Je n'ignore
» pas , Mrs , que réuniffant entre vous tous
» les talens & toutes les connoiffances ;
aufquelles la plus nombreufe Académie
pourroit à peine afpirer , vous vous êtież
» déterminés dèsle commencement de votre
» union , à vous borner au nombre de fept,
» qu'on pourroit à juste titre regarder comme
fimbolique. Qu'il eft donc glorieux
»pour moi d'être admis dans une Compagnie
, dont un Réglement aufli fage fem-
» Bloit m'exclure ! Ne vous repentez point,
» Mrs , de cette indulgence ; vous acque-
» rez un admirateur de plus , & qui fera
d'autant plus zélé , qu'il vous verra de
plus près. Si j'en croyois , Mrs , tout ce
que la reconnoiffance & la perfuafion la
» plus intime me dictent à votre fujet , mes
éloges ne tariroient point , & j'offrirois à
» chacun de vous en particulier , l'homma-
"
ور
»
G iij » ge
1830 MERCURE DE FRANCE
» ge général qui vous eft dê , mais comme
» je ne fuis qu'un foible écho de la jufticé
» que vous rend votre Patrie , daignez
compatir à mon impuiffance , & foyez
perfuadés , Mrs , que la connoiffance que
j'ai de la foibleffe de mes talens , m'empêche
d'en dire davantage.
»
Monfieur le Febvre , Directeur , répon
dit avec fon éloquence ordinaire
"
MONSIEUR , l'Académie naiffante
vient de vous recevoir dans fon fein ,
malgré l'exclufion qu'elle a fouvent donnée
à plufieurs Amateurs , qui prétendoient
à cette illuftration : elle avoit été
» jufqu'ici inébranlable dans la réfolution
qu'elle avoit priſe de ſe borner au nombre
» de fept. Mais votre rare mérite nous a
» fait méprifer cette espéce de loi ; oïïi ,
» Mr , je ne crains point de le dire , nous
avons fenti depuis notre Affociation ,
qu'il lui avoit manqué quelque chofe auparavant
; nous réuniffons à la vérité tous
» les differens Etats qui compofent la So-
» ciété civile ; il ne nous manquoit qu'un
Homme de Lettres univerfel ; nous l'a-
» vons trouvé en vous.
وو
1
» Notre deffein , Mr , dans ce noble
exercice , eft d'exciter dans notre Patrie
→ une noble émulation , & de nous préparer
» des Eléves qui puiffent un jour remplir
les
AOUST. 17437 1831
les places que nous occupons aujourd'hui .
Cependant l'ordre de la Providence va
» bientôt vous enlever à notre Société
" pour vous conduire dans un Pays , qui eft ,
pour ainfi dire , le véritable féjour des
" Lettres. Suivez votre destinée , & appre-
» nez , Mr , à Paris étonné , qu'il y a quel
» que bon goût & quelque efprit au fond de
» là Champagne.
--
ESTAMPES NOUVELLES .
DE
Grande Eftampe en hauteur. Pompe Funébre
d'ELISABETH - THERESE
LORRAINE , Reine de Sardaigne , célébrée
dans l'Eglife Métropolitaine de Paris ,
le 12. Septembre 1741 , ordonnée par M.
le Duc de Rochechouart , Pair de France ,
Premier Gentilhomme de la Chambre du
Roi, & conduite par M. de Bonneval , Inrendant
& Controlleur Général de l'Argenterie
, Menus Plaifirs & Affaires de la Chambre
de S. M. & exécutée par les Sieurs Perrot
& Slodtz . Cette Eftampe , qui fait un
grand & fuperbe morceau de Gravure , a
été deffinée & gravée par le Sr. C. N. Co
chin le fils .
Autre Eftampe en hauteur , repréfentant
la Réfurrection du Fils de la Veuve de Naïm.
Cette Eftampe eft excellemment gravée
Giiij par
1832 MERCURE DE FRANCE .
par M. Duchange , Graveur du Roi , ruë 5.
Jacques , Confeiller de l'Académie Royale
de Peinture & Sculpture , à laquelle il dédic
cet Ouvrage , fait dans la 82. année de fon
âge. Le Tableau original de cette Eftampe ,
de la main de l'illuftre Jean Jouvenet , fe
conferve dans l'Eglife des RR. PP . Réco
lets de Verfailles.
Le Sr. Petit , Graveur , rue S. Jacques ,
à la Couronne d'Epines , près les Mathurins
, qui continue de graver la fuite des
Portraits des Hommes Illuftres du feu SE.
Defrochers , Graveur du Roi , vient de mettre
au jour les Portraits fuivans.
JACOBUS VANIERIUS , Societ.
JESU , Auctor Pradii Ruftici , Eclogarum
de Amicitiâ , &c . Obiit Tolofa anno 1739 ,
atatis 76.
Les vers qui font au bas , font de M.
Vaniere , fon neveu.
Afpice quem Gallis alium Natura Maronem ,
Ingeniumque dabant , nec non labor omnia vincens.
Dumpietas , mores , vultus Virtutis amorem
Spirabant , flemus qui flebilis occidit orbi .
Abftulit hunc oculis , animis non invida tollet
Sors , vivet dum vivet amor , dum rura manebunt.
OLIVIER CROMWEL , Protecteur
d'Angleterre , né à Huntington , dans le
Pays
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY.
ABTOR, LENOX AND
TILDEN
FOUNDATIONS.
7 YORK
COMIC
LIBRARY
.
ASTOR, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
1
A O
UST . 1743 .
1833
Pays de Galles , mort à Londres le 3. Septembre
165 8. âgé de 58. ans. Les vers qui
fuivent , font de M. Peffelier.
Pour féduire à fon gré la fuperbe Angleterre ,
Il fçut paroître fier & modefte à propos.
Ufurpateur , il fût en horreur à la Terre ;
Un pouvoir légitime en eut fait un Héros .
Aman
A IR.
'Amant , comme fes traits , déguife fon langage,
Et de plus d'un Oiſeau prend le ton different.
Tantôt , il imite le chant
Du tendre Tourtereau , qui plaint fon esclavage
Tantôt , le léger badinage ,
Les fredons , les éclats & le gofier brillant
Du Serin qui ramage.
52.92$2 2525252:5252
SPECTACLES.
E 18. Août , l'Académie Royale de Mufique
donna la derniere repréfentation
du Ballet Héroïque des Indes Galantes ; la
Dlle. Romainville , qui a de grands talens
pour la Mufique & pour la déclamation ,
chanta après l'Opéra , la Cantate d'Orphée
Gv de
1834 MERCURE DE FRANCE.
de M. Clerambaut ; elle fut généralement
applaudie.
Le 20. la même Académie donna la premiére
repréfentation d'un nouveau Ballet en
trois Actes , précedé d'un Prologue , intitulé
les Caractères de la Folie. Le Poëme eft de
M. Duclos , de l'Académie Royale des Inf
criptions & Belles-Lettres , mis en Mufique
par M. Bury , ordinaire de la Mufique du
Roi; on donnera dans le premier Journal
l'analife de cette Piéce , qui a été reçuë
très-favorablement.
Les Comédiens François ont remis au
Théâtre , la Comédie de l'Ecole des Femmes
de Moliere , que le Public voit depuis longtems
& qu'il ne fe laffe point de voir .. C'eft
le fort des Piéces de cet inimitable Auteur.
Cette derniere reprife fait beaucoup de
plaifir au Public , par la circonftance que la
Dlle . Gauffin y joue le principal perfonnage,
qui eft celui d'Agnès , tout le monde ſçait
avec quel naturel & avec quelle naïveté elle
exprime cette forte de caractére.
Le 29. les mêmes Comédiens donnérent
La premiére repréfentation de la Mort de
Céfar , Tragédie nouvelle en trois Actes de
M. de Voltaire , laquelle a été généralement
applaudie on en parlera plus au long..
Le
AOUST. 1743- 1835
Le 11. Août , les Comédiens Italiens remirent
au Théâtre une petite Piéce en un
Acte , en Vers & en Vaudevilles , qui a
pour titre , les Indes Chantantes , ou les Incas,
Parodie de la deuxième Entrée du Ballet
Héroïque des Indes Galantes , donnée dans
La nouveauté en Septembre 1735. Cette petite
Piéce , qui eft du Sr. Riccoboni & dir
feu Sr. Romagnefy , eft ornée de differens
divertiffemens , très bien exécutés par les
Auteurs de la Troupe. Le feu Sr. Mouret
en avoit compofé la Mufique .
16
Le 22. les mêmes Comédiens remirent
auffi au Théâtre une ancienne Comédie de
M. Autreau , intitulée les Amans ignorans
donnée dans fa nouveauté en Avril 1720.
Cette Piece , qui a eu du fuccès dans le tems,
fait le même plaifir aujourd'hui ; elle eft ornée
de plufieurs divertiffemens de chants &
de danfes très - bien exécutés. On peut voir
le fujet de la Piéce , dans l'Extrait qui en a
été donné dans le Mercure d'Avril 1720 ,
pag. 65.
Le 24, ils remirent au Théâtre la Comédie
de l'Amant Prothée , Piéce du Sieur
Romagnely , en Vers & en trois Actes , ornée
de trois differens divertiffemens , repréfentée
avec beaucoup de fuccès , au mois
de Mars 1739. Cette reprife a été reçûë
favorablement & fort bien exécutée . La
Gvj Mufique
• 836 MERCURE DE FRANCE.
Mafique des trois divertiffemens , eft du
Sieur Blaife , bien caractérifée ; la compofftion
des Ballets du Sr. Riccoboni ; la variété
des Pas a fait beaucoup de plaifir ; on peut
voir l'Extiait , qui en a été donné dans le
Mercure de Juin 1. Vol . 1739. pag. 1196.
Cette Piéce eft imprimée chés Briaffon , rue
S. Jacques.
A la fin de cette Piéce , les Sieurs Rugieri
, Artificiers Italiens, dont on a parlé dans
le dernier Journal , donnerent un troifiéme
Feu d'artifice nouveau , en differens morceaux
ingénieufement compofés & en plus
grand nombre , que les premiers qu'ils ont
déja donnés. Ces divers morceaux font généralement
applaudis par de nombreuſes
affemblées. La Sale avoit été illuminée extraordinairement
dans tout fon pourtour, par
des Plaques garnies de bougies , placées à
chaque montant , qui fait la feparation des
premieres ,des fecondes & des troifiémes Loges,
ce qui rendoit ce Spectacle très-brillant.
Le 13. l'Opéra Comique donna une Piéce
nouvelle d'un Acte en Vaudevilles , qui a
pour titre la Fontaine de Sapience , laquelle
a été reçue favorablement du Public. Elle
eft terminée par un divertiffement compofé
de Pierrots & des Perretes , exécuté au
mieux , & fort applaudi . On a joint depuis
quelAOUST:
1743 .
71837
quelques jours , une Scéne nouvelle à cette
même Piéce , qui a fait beaucoup de plaiſir,
elle eft très-bien jotiće.
Le 23. on remit au Théâtre , les Amours
de Nanterre, ancienne Piéce joüée en 1718.
remife plufieurs fois au Théâtre, & toujours
goûtée du Public .
Nous avons déja annoncé les difpofitions
pour la Danfe de la Dlle . Puvignée , agée de
fept ans ; & nous ne pouvons mieux entrer
dans le détail de fes talens , qu'en publiant
la lettre qu'on va lire fous le nom de Lifon.
LETTRE écrite au Chevalier de St. *** ,
le 22. Juillet 1743 .
L eft , en vérité , ridicule , Chevalier ,
I derefter dans tes Prés , fi long-tems . A
quoi t'amufes-tu? On ne fait pas toujours les
foins . Nous t'attendons depuis un mois ,
avec je ne fçais combien de nouveautés
courues , des Piéces à la mode , de Feux
d'Artifice , qui font tourner la tête par
cent moulinets , plus brillans les uns que les
autres ; & une Lifon , qui danfe : ah ! quelle
Lifon ? Cette Lifon , eft un affemblage des
Etudes de la Rofa Alba , réduit en tabatiere
par Maffe. C'eft Sallé , Camargo , Campionni ,
Barbarina , qui , par extrait , font un petit
tout , que mille riens indéfiniffables compofent.
1838 MERCURE DE FRANCE
fent. Fais ,fur tout , attention à l'âge de fept
ans ,& juge de ſes yeux par ceux de ta grande
Coufine, & des graces de fa tête, par celles
de fa petite foeur. Sa taille paroît modelée
par Terpficare ; elle eft fi bien prife , que
Lifon arrêtée , & fans mouvement , paroît
animée , & former des pas gracieux. Je n'ai
jamais eu tant d'envie de faire des Vers ,
fuffent - ils auffi mauvais que les tiens ; je
chanterois les plus jolies chofes du monde ;
car je compte en Lifon , comme difoit ta
précieufe Marquife, autant de graces qu'elle
a de grains de poudre dans fes cheveux ? Quel
air noble, quel regard, quelle variété, quelle
jufteffe ! Chaque mouvement de bras , d'ac
cord avec fa tête , exprime & reproduit de
nouvelles graces toutes variées. Elle a pour
chaque pas un coup d'oeil different , & l'on
ne fçait jamais fi le coup d'oeil annonce le
pas , ou file
pas annonce le coup d'oeil.
Viens donc , beau Ténébreux ; je t'attens:
à l'Opéra Comique , tu y trouvéras tout Pa
ris : Lifon feule annoblit un Spectacle , &
je maintiens que tour Spectacle eft défectueux
fans Lifon.
ૐ
NOUAOUST.
1743 1819
NOUVELLES ETRANGERES
TURQUIE.
Na appris de Conftantinople , que les difpo
fitions faites par Thamas Kouli -Kan , ne laiffant
plus lieu de douter qu'il n'ait deffein d'attaquer
PEmpire Ottoman , le Grand Seigneur avoit réfolu
de déclarer la guerre à ce Prince , & de ne point
conclure d'accommodeinent avec la Perfe , à moins
qu'elle ne reftituât les Provinces dont les Perfans
fe font emparés dans les guerres précédentes ; que
le 11. Juin dernier les Queues de cheval avoient été
expofées aux portes du Serail , ainfi que cela fe pratique
dans les déclarations de guerre , & qu'on fe
roit inceffamment la céremonie de l'Ordow , qui
s'obferve , lorfque le Grand Vifir doit coinmander
l'armée de Sa Hauteffe ; que les troupes avoient reçû
ordre de fe rendre promptement aux Lieux de
feur deftination: que le Pacha de Bagdad s'étoit
déja mis en marche avec un Corps de plus de 40000.
hommes , pour s'opposer aux entreprifes de Thamas
Kouli-Kan , dont on. difoit que l'armée fe préparoit
à former le Siége de Kars , & que le Capitan
Pacha avoit fait voile le 13. Juin dernier pour la
Mer Noire , avec une Flotte compofée de quatre
Sultanes , de quatorze Galeres & de 80. autres Bâtimens.
On a appris depuis , que le Grand Seigneur fait
aflembler dans le Diarbekir un Corps de troupes ,
qui fera fous les ordres du Gouverneur de cette
Province , & qui fera également à portée de fe
joindre à l'armée que commande le Pacha de Bagdad
1840 MERCURE DE FRANCE.
dad , ou à celle du Pacha d'Erzerum , & qu'on
leve un grand nombre de nouvelles troupes dans
l'Empire Ottoman .
RUSSIE.
N mande de Pétersbourg du 14. du mois der◄
niér , que les Miniftres Plénipotentiaires de la
Czarine & ceux du Roi de Suéde , font convenus
par les articles prélintinaires de paix , fignés à Abo
le 17. Juin dernier , qu'il y auroit à l'avenir une
paix perpétuelle & une amitié parfaite entre les deux
Puiffances , & que leurs Généraux & les autres Officiers
, qui commandent pour elles , tant fur Mer
que fur Terre , feroient ceffer lest actes d'hoftilité ,
auffi-tôt qu'ils feroient informés de la fignature de
ces articles , dont on leur donneroit part le plûtôt
qu'il feroit poffible ; que les Etats du Royaume de
Suéde , en confidération de la recommandation de
la Czarine & de celle du Duc de Holftein , confen
tiroient d'élire & de proclamer le Prince Adolphe
Frederic de Holftein , Evêque de Lubeca , pour
fucceder à la Couronne de Suéde ; que la Suéde cederoit
à perpetuité à la Ruffie , le Gouvernement de
Kimengor jufqu'à la branche de la riviere de Kymen
, la plus voifine de la Bothnie ,
ainfi que
Ville & la Citadelle de Miflor , avec une Lifere à
l'Oueft & au Nord , de la largeur de deux lieuës
Suédoifes ; que toute la rive Occidentale de la derniere
branche de la riviere de Kynen, du côté de la
Bothnie , demeureroit fous la domination de S. M.
Suédoife , & que la Ruffie confèrveroit le Pays fitué
à l'Eft & au Nord de cette riviere , jufqu'aux
Diſtricts de Tavafthus & de Savolax ; que depuis la
Lifiere qui feroit poffedée par la Rufe à l'Oueft
& au Nord de la Ville de Miflot , il feroit tiré une
la
Ligne
AOUST. 17430 1941
Ligne du côté du Sud , vers les Frontieres du Gou
vement de Kimengor , & du côté de l'Eft vers celles
de la Carelie ; que dès qu'on auroit reçû avis que
l'Evêque de Lubeck auroit été élû pour fucceder au
Trône de Suéde , la Czarine reftituëroit à la Suéde ,
non-feulement toute la partie de la Finlande qu'elle
a conquife , mais encore la Botlinie Orientale ; les
Iſles d'Aland ; la Province de Nyland : les Villes de
Biornebourg , d'Abo & de Tavafthus , avec leurs
dépendances ; la partie de la Carelie , qui étoit tombée
en partage à la Suéde par le Traité de Nystadt,
& le Gouvernement de Savolax , à l'exception de
la Ville & de la Citadelle de Miflot ; que le Duc de
Holſtein , en reconnoiffance de l'Election dé l'Evêquejde
Lubeck, renonceroit , tant pour lui que pour
fes defcendans , à toutes les prétentions qu'il peut
avoir fur la Suéde , & qu'il feroit dreffé inceffamment
à ce fujet un Acte formel & convenable ,
que fi , contre toute attente , & en haine de l'Election
qui feroit faite en faveur de l'Evêque de Lubeck,
la Suéde étoit attaquée , ou expolée à quelque trouble
, la Ruffie prendroit , conjointement avec elle
toutes les mefures les plus promptes & les plus
efficaces , pour faire ceffer les inconvéniens de
cette nature ; qu'après la fignature des articles préliminaires
, les Miniftres Plénipotentiaires des deux
Puiflances continuëroient de travailler fans interrup
tion à la conclufion du Traité de paix , lequel auroit
pour baſe celui de Nystadt , à l'exception de
ce qui regarde les nouvelles conventions faites par
rapport aux frontieres de la Finlande , & les autres
articles qui ne font point relatifs aux circonstances
préfentes , & qu'il feroit fait deux copies des articles
préliminaires , dont les Ratifications feroient fignées
par les Puiflances contractantes ,& échangées quinze
jours après la fignature, ou plûtôt, s'il étoit poffible.
Од
1842 MERCURE DE FRANCE;
&
On a appris depuis que le jour de la publication
de la paix conclue entre la Suéde & là Ruffie , la
Czarine avoit donné une Fête magnifique
qu'elle avoit fait préfent au Duc de Holftein d'un
fufil & d'un couteau de chaffe , enrichis de diamans
d'un prix confidérable .
La paix a auffi été publiée à la tête de l'armée de
S. M. Cz. qui a envoyé ordre au Vice-Amiral Bre
dahl de demeurer à Archangel avec l'Efcadre qu'il
commande.
Cette Princefle a fait annoncer dans les Ports de
fa domination , que tous les Vaiffeaux , tant Ruf
fiens qu'Etrangers , pouvoient en fortir librement.
SUEDE.
N apprend de Stockolm du 19. du mois der
nier, que l'Acte de l'Election faite de l'Evêque
de Lubeck par les Etats du Royaume , pour fucceder
à la Couronne , porte que depuis la mort de la
feue Reine , laquelle n'a point laiffé de pofterité , le
Roi s'efttrouvé fans fucceffeur; que les Etats en conféquence
de l'Acte paffé le 24. Mars de l'année 1720.
& eu égard à l'âge avancé de S. M. ont jugé à propos
d'élire un Prince , pour l'élever au Trône après
la mort du Roi , dont ils fouhaitent que Dieu veuille
prolonger les jours ; que pour cet effet ils avoient
choifi le Duc Charles- Pierre Ulrick de Holſtein
qui defcend d'une fille d'un Roi de Suéde , mais
qu'ils n'étoient pas parvenus par-là au but qu'ils
s'étoient propofés , parce que le Duc de Holſtein
avoit embraffé la Religion Grecque , & avoit été
proclamé fucceffeur au Trône de Ruffie ; que l'Evêque
de Lubeck étant non-feulement un des Defcendans
du côté Maternel du Roi Guftave I. done
Ja mémoire doit être à jamais en vénération chés
Les
AOUST. 1743. 1843
les Suédois , mais encore ayant été élevé dans la
Religion Luthérienne , & poffedant de fi grandes
qualités , que le Royaume doit s'attendre
toutes
fortes de profpérités fous le Gouvernement de ce
Prince , les fuffrages des Etats fe font réunis en fa
faveur ; que le Tout- Puiffant paroît vouloir fe fervir
de lui , pour faire jouir la Suéde des plus grands
avantages , ainfi que pour rétablir & affermir fur
le Trône la Famille de Guftave , pendant le regne
duquel le Royaume s'eft vû dans l'état le plus foriflant
; que les Etats par ces confidérations , déclarent
au nom de Dieu , & d'une voix unanime , PEvêque
de Lubecx fucceffeur à la Couronne , af
qu'après la mort du Roi , il foit inauguré & couronné
, & qu'il puiffe gouverner la Suéde fuivant
les Loix & Conftitutions du Royaume , & conformément
aux affûrances , que ce Prince a déja données
, & qu'il renouvellera à fan Couronnement.
Il eft dit dans le méne Afte , que les Defcendans
mâles de l'Evêque de Lubeck feront après lui
héritiers du Trône , felon l'ordre de fucceffion établi
dans le Royaume , & que la Diette enverra inceffamment
des Députés à ce Prince * pour lui porter
Je Diplôme de fon Election .
Le Committé fecret de la Diette a nommé , pour
aller complimenter l'Evêque de Lubeck , le Baron
d'Hamikon , Confeiller de Conférence , & Mrs
Sterncron & Vander. Une Frégate , commandée par
un des Amiraux , a dû fe rendre à Lubeck ou à
Stralfund , pour tranfporter à Stockolm ce Prince ,
& deux Sénateurs ont dû s'embarquer à bord de
cette Frégate , pour aller l'inviter de la part du Sé
nat à fe endre en cette Ville .
Les quatre Ordres du Royaume ont confirmé le
jugement prononcé contre le Comte de Leuven
haupt , & les deux derniers Ordres , en particulier ,
n'ont
1844 MERCURE DE FRANCE.
n'ont point voulu écouter la propofition que la
Noblefle avoit faite d'ordonner la réviſion du prơcès
de ce Géneral .
Le Baron de Buddenbroeck devoit être décapité
le 15. du mois dernier , mais le Roi a fait differer
cette exécution de quelques jours.
Les Miniftres Plénipotentiaires du Roi lui ont dépêché
un Courier , pour l'informer que l'échange
des Ratifications des articles préliminaires de paix
entre la Suéde & la Ruffie s'étoit fait à Abo , &
que la paix avoit été publiée à Pétersbourg avec
une grande folemnité , le jour de la Fête de faint
Pierre.
Depuis le jugement rendu contre le Comte de
Leuvenhaupt & le Géneral Buddenbroeck , le premier
a fait remettre à la Diette un Mémoire dont
les expreffions font extrêmement fortes , & dins lequel
il déclare que ce n'eft point l'idée de la mort ,
ni même celle du fupplice , qui l'effraye , mais que
fe rendant témoignage de fon innocence , il ne peut
regarder fa condamnation que comme injufte , &
qu'il fouhaite que
fa mort n'attire point de nouveaux
malheurs fur la Suéde .
Les Etats ont lû cè Mémoire , & le réſultat de
leur examen a été que le Comte de Leuvenhaupt
n'avoit été condamné
que fur fes propres dépofìfitions,
& après les perquifitions les plus exactes fur
Ja conduite qu'il a tenue en Finlande , & qu'ajnh
les Etats s'étant conformés aux Loix Civiles & Militaires
du Royaume , ils n'avoient aucun reproche
à fe faire d'avoir confirmé la Sentence prononcée
contre ce Géneral.
•
Le fils du Géneral
Buddenbroeck ayant communiqué
à la Diette une lettre qui a été trouvée dans
les papiers de fon pere , & qu'il a crû propre à le
juftifier , les Etats ont décidé que cette lettre ne
pouvoit
AOUST. 1743 . 1845
pouvoit fervir à la juftification de ce Géneral , parce
qu'il n'avoit point dû prendre les confeils fecrets
de quelques amis pour régle de fa conduite dans
des affaires qui intereffoient le Roi & la Nation.
Une partie de la Nobleffe a follicité vivement
pour obtenir que le Roi adoucit la Sentence de ces
deux Géneraux , mais S. M. a repondu que malgré
fon penchant naturel à ufer dc clémence , elle ne
pouvoit rien changer à un jugement confirmé par
les Etats affeinblés.
L'exécution du Comte de Leuwenhaupt a été dif
férée jufqu'au 5 , de ce mois.
On a appris de Stockolm du 31. du mois dernier,
que toutes les follicitations faites en faveur du Géneral
Buddenbroeck , ont été inutiles , & que les
Etats ont perfifté dans la réfolution qu'ils avoient
prife de confirmer la Sentence prononcée contre lui.
Le 23. la Baronne , ſon épouſe , obtint la permiſfion
de lui faire fes derniers adieux , & ce Géneral
ayant employé les jours fuivans à fe préparer à la
mort , il fut conduit le 27. à la Place du Morder
Malm , où il fubit avec beaucoup de fermeté le fupplice
auquel il avoit été condamné .
Après l'exécution , deux de fes domeftiques mirent
fon corps dans un cercueil, que douze Officiers ,
en habit de deuil , porterent au lieu où il devoit être
inhumé.
Ses parens n'ayant pu engager le Roi lui accor
der fa grace , avoient demandé qu'au lieu d'avoir la
tête tranchée , il fût arquebufé , afin de lui épargner
la honte attachée dans ce Royaume au premier de
ces fupplices, mais le Clergé , les Députés des Villes
& l'Ordre des Payfans , s'y font oppofés.
La Baronne de Buddenbroek , qui partit le 24
pour fes Terres , afin de mettre ordre à fes affaires
domeftiques , fe propofe de paffer en Hollande , &
de fe retirer dans un Château près de Steenberge
<
8846 MERCURE DE FRANCE
ALLEMAGNE.
Na apprisde Ratisbonne du 24. du mois der
nier , que toutes les difpofitions ayant été faites
par les troupes Autrichiennes qui formoient le
blocus de Straubingen , pour ouvrir la tranchée de
vant cette Place , les troupes Impériales & Françoi
fes , qui y étoient en garniſon , demanderent le 19.
à capituler , & que par une convention que le Commandant
de la Ville & le Géneral Berencălaw ont
fignée, le premier au nom de l'Empereur , & le fecond
au nom de la Reine de Hongrie , il a été reglé
que la Garaifon en fortiroit avec armes & bagages,
& que les troupes Françoiſes , qui faifoient la prin
cipale partie de cette garnifon , Teroient reconduites
fur les frontiéres de la France par le chemin le plus
court , avec une efcorte fuffifante. En conféquence
de cette convention, ces troupes confiitant en 1200.
hommes , ont dû évacuer le 24. du mois dernier la
Place , & elles étoient attenduës le 25, dans les environs
de Ratisbonne.
Le Régiment de Truchfes , des troupes Impériales
, lequel étoit auffi à Straubingen, en fortit le 23,
pour fe rendre en Suabe , où les autres troupes de
I'Empereur ont pris des quartiers,
Les troupes qui étoient deſtinées à aller renforcer
celles qui bloquent la Ville d'Egra , ont reçû un
contre -ordre,
On mande de Hambourg du 16. du mois dernier,
que le Baron d'Hamilton & Mrs Sterncron &
Vander qui font arrivés en cette Ville , en qualité
de Députés du Committé fecret de la Diette génerale
affemblée à Stockolm , pour complimenter
l'Evêque de Lubeck fur fon Election , eurent le
22. une audience de ce Prince , qui attend inceffamment
une autre Députation de la part des qua-
де
AOUST. 1743 . 1847
tre Ordres du Royaume de Suéde , & qui après l'avoir
reçûe , fe rendra à Lubeck , pour s'y embarfur
une Frégate deſtinée à le tranſporter à Stoc quer
Kolm.
On a appris de Francfort le 28. du mois dernier ,
que le 26. M. de la Noüe , Miniftre du Roi de Fran
ce auprès de la Diette de l'Empire , arrivé en cette
Ville de Ratisbonne , déclara à cette Affemblée ,
que S. M. T. C, ayant été informée de la réfolution
prife par les Etats de l'Empire , d'employer leur
Médiation , pour faire ceffer la guerre qui s'eft allumée
en Allemagne à l'occafion des differentes
prétentions fur la fucceffion de la Maiſon d'Autriche
, elle voit avec un extrême plaifir , qu'il fe foir
préfenté une voye fi naturelle & fi convenable ,
pour rétablir la tranquillité dans l'Empire , & pour
procurer la paix entre les Puiffances qui font en
guerre ; qu'elle a appris avec une égale fatisfaction
que l'Empereur & la Reine de Hongrie étoient en
négociation, afin de ne s'occuper déformais que du
foin de terminer leurs differends à l'amiable ; que
comme les troupes de S. M. n'étoient entrées en
Allemagne qu'en qualité d'auxiliaires , après y avoir
été appellées par le Chef & par plufieurs des plus
puiflans Princes de l'Empire , & comme celles de
S. M. I. font déja en neutralité , elle n'a pas differé
d'envoyer ordre à fes armées de fe retirer fur les
frontiéres de fon Royaume , étant bien aiſe de
donner en cette occurrence au Corps Germanique
un témoignage public de la droiture de fes inten
tions , & de la réfolution dans laquelle elle eft de
concourir à ce qu'il paroît defirer , de-même qu'à
l'affermiffement de la bonne correfpondance & du
bon voisinage entre la France & l'Empire , & fur
le fondement des anciens Traités.
Le Prince Charles de Lorraine arriva le 26. à
Hanaw
1848 MERCURE DE FRANCE.
Hanaw , où il s'eft tenu plufieurs Confeils de guer
re , pour déliberer fur les opérations de l'armée
des Alliés & de celle de la Reine de Hongrie , & il
partit le 28. pour aller rejoindre cette derniere ar❤
mée , qui après avoir paffé le Necare , a traverſé le
Palatinat , & à dirigé fa marche vers le Margraviat
de Dourlach .
La premiere Colonne de cette armée arriva le 22.
Pfortzheim; elle y fut fuivie le 23. par la feconde.
On mande de Vienne du 29. du mois dernier , que
la Reine de Hongrie a appris par un courier du Ġéneral
Berenclaw , que les troupes Impériales &
Françoiles , qui étoient en garnifon dans Straubin
gen , avoient capitulé , & qu'elles en étoient forties
avec les honneurs militaire's .
Les lettres reçues de l'armée commandée par le
Prince Charles de Lorraine , portent qu'elle continuoit
fa marche vers le Brifgav , & que ce Prince
étoit allé à Hanaw , pour avoir quelques audiences
du Roi de la Grande-Bretagne , & quelques Conférences
avec les Géneraux de l'armée commandée
par S. M. B.
Le Comte de Damnitz a mis , par ordre du Prince
Charles de Lorraine dans le Château de Brifach
qui n'a pas été entierement démoli , une garniſon
d'environ 300. hommes.
Le Comte de Traun a mandé à S. M. H. que la
maladie contagieufe , qui s'eft manifeftée en Sicile ,
obligeant ce Géneral de changer le plan des opérations
qu'il avoit projettées, il avoit pris la réſolution
de faire repaffer le Panaro aux troupes qu'il avoit
envoyées dans le Bolonois & dans le Ferrarois , &
de les diftribuer le long de cette riviere , pour couper
toute communication entre l'Etat Ecclefiaftique
& la Lombardie.
On a appris de Ratisbonne du 30. du mois dernier
,
AOUST. 1743 . 1849
nier, que les troupes Françoifes , qui étoient dans
Straubingen , arriverent le 25. au foir dans les environs
de cette Ville , & qu'on leur diftribua des
logemens dans plufieurs Villages.
Le lendemain, elles fe remirent en marche , pour
fe rendre à Donawert , d'où elles ont dû con in uer
leur routeffous une eſcorte de Croa e , qu devoit les
conduire jufqu'au Rhin , vis - à -vis de Spire.
. Il est arrivé à Stat-Am-Hoff plufieurs malades de
l'armée ci devant commandée par le Maréchal de
Broglie , & ils doivent y refter , jufqu'à- ce qu'ils
foient en état de retourner en France.
fui-
Le 26. du mois dernier, le Géneral Berenxlaw prit
la route d'Ingolftadt , dont la garnifon a refufé de
capituler aux conditions qui lui ont été pro pofées.
On mande de Hamburg du 2 de ce mois , que
vant les avis reçûs du camp des troupes Autrichiennes,
commandées par le Comte de Collowrath, Mrs
Brufch & Sollner , Bourguemeftres d'Egra , ont été
députés à ce Général par les habitans de la Place.
pour lui repréfenter que le Marquis d'Herouville
ayoit ordonné aux hìbitans d'en fortir , & que
Comte de Collowrath a dépêché deux Couriers à
la Reine de Hongrie & au Prince Charles de Lorraine
, pour leur en donner avis .
le
On mande de Hanaw du 6. de ce mois , que le
48. du mois dernier , le Prince Charles de Lorraine
partit pour retourner joindre l'armée Autrichienne
qu'il commande , & qu'il y arriva le 30. Une partie
de cette armée s'eft rendue dans le Brifgaw , & la
premiere Colonne eft dans les environs de Fribourg.
Le dernier courier , qui en eft venu , a rapporté
que les Autrichiens faifoient réparer avec toute la
diligence poffible les fortifications de Brifach , &
qu'un grand nombre d'Ouvriers étoit employé à ce
avail
H On
1850 MERCURE DE FRANCE.
On a appris en même tems , que 300. Grenadiers
des troupes de la Reine de Hongrie ayant été déta→
chés pour arrêter neuf Barques chargées de provi
fions pour les troupes Françoifes , ils s'étoient rendus
maîtres de quelques- unes de ces Barques , mais
que les François en avoient coulé une à fond , &
que les autres avoient été emportées par la rapidité
du courant.
Les troupes de la Reine de Hongrie , qui font
dans l'armée des Alliés , fe mirent le 3. de ce mois
en marche & prirent la route de l'Electorat de
Mayence . Elles furent fuivies le 4. & le s . par celles
d'Angleterre , de Hanover & de Heffe.
On mande de Hanaw du 13. de ce mois , que les
troupes d'Angleterre , de Hanovert & de Heffe
allerent le 10. camper près de Roëdelheim , où le
Roi de la Grande-Bretagne établit fon quartier géné
ral, & que ces troupes , après s'être repofées le lendemain
, fe remirent le 11. en marche, pour fe rendre
dans les environs de Mayence.
Les Saiques armées , qui étoient reftées dans les
environs de Ratisbonne,ont remonté le 7 de ce mois
e Danube , & elles fe font renduës au camp devant
Ingolstadt.
Les lettres reçtes de l'armée commandée par le
Prince Charles de Lorraine , marquent qu'elle fai
foit plufieurs marches & contremarches , & qu'on
ne pouvoit encore établir aucune conjecture certaine
touchant les deffeins de ce Princé.
Un nombre des Huffards , qui font fous les ordres ,
ayant paffé le Rhin à la faveur du feu que Partillerie
de Brifach a fait contre le Fort Mortier a brûlé un
moulin de Pautre côté de ce Fleuve .
PRUSSI
AOUST. 17435
1851
PRUSSE .
N mande de Berlin du 24. du mois dernier, que
il
5
18. chés le Comte de Staremberg une conférence ,
dans laquelle on regla le plan des opérations que le
Prince de Lobczowitz doit exécuter en Italie , &
qu'auffi-tôt que ce plan aura été approuvé par la
Reine de Hongrie , ce Général partira , pour aller
prendre le commandement des troupes Autrichienquifont
fous les ordres du Comte de Traun .
Ces avis ajoutent que le même jour il étoit arrivé
à Vienne un Courier , par lequel on avoit appris
que le Prince Charles de Lorraine continuoit de
marcher vers de Rhin, avec l'armée qu'il commande.
nes ,
ITALI EN
N mande de Rome da premier de ce mois ,
que le Pape a confenti à la fuppreffion du Pa
pier Timbré , dont on fe fervoit pour les Expédi
tions de la Datterie.
ESPAGNE.
""! f
Na appris des Canaries , que le 30. Mai der
nier , deux Vaiffeaux de guerre & une Fréga
re , portant Pavillon de France , s'étoient approchés
de.l'ifle de Gomera , pour en reconnoître les Côtes
qu'ils étoient entrés le lendemain dans le Port de
Fife , & qu'ayant arboré Pavillon Anglois , ils
avoient canonné avec beaucoup de vivacité , pendant
plufieurs heures la Ville de Gomera & les deux
Forts qui en font voifins ; que les deux jours fuivans
leur feu avoit été continuel , & que
mois de Juip au foir, l'Officier qui les comman-
Hij
le 2. du
doit ,
1851 MERCURE DE FRANCE.
Codoit
, avoit fait menacer Don Diegue Bueno ,
lonel des Milices de l'ile , lequel , après avoir
pourvû à la défenſe des deux Forts , s'étoit enfermé
dans la Ville avec les troupes qu'il avoit pu raffem.
bler , de ruiner entierement cette Ifle , & d'en paſfer
tous les habitans au fil de l'épée , fi on ne lui ou
vroit la porte de la Ville & des Forts , & fi on ne
lui payoit une contribution confidérable en vivres
& en argent , que Don Diegue Bueno ayant répondu
qu'il étoit déterminé à fe défendre jufqu'à la
derniere extrémité , le Commanda t de l'Eſcadre
Angloife avoit voulu faire un dernier effort pour
tâcher de s'emparer de l'Ifle ; qu'il avoit fait 'defcendre
à terre les troupes de débarquement qui
étoient à bord de fes Vaiffeaux , & que ces troupes
s'étoient avancées pour donner l'aſſiut à la Ville ,
mais qu'elles avoient rencontré un Corps de Mili
ces , qui les avoit attaquées avec tant de valeur ,
qu'elles avoient été obligées de fe retirer , & de re
gagner précipitamment leurs Chaloupes, après avoir
eu un grand nombre de Soldats & de Matelots de
tués & de bleffés ; que ce mauvais fuccès avoit fait
perdre au Commandant des Vaiffeaux ennemis l'ef
pérance de fe rendre maître de l'ifle , & que ces
Vaiffeaux avoient remis à la voile ; qu'ils avoient
éte fort maltraités dans leurs vergues & dans leurs
cordages , mais que les corps des Vaiffeaux n'avoient
été que légerement endommagés , parce que
les Canons des Forts étoient de trop petit calibre.
les
Don Diegue Bueno s'eft extrêmement diſtingué
par marques de valeur , qu'il a données en s'expofant
dans les endroits les plus dangereux , & par
la prudence avec laquelle il a fait fes difpofitions ,
pour rendre inutiles toutes les tentatives des Anglois
; on doit auffi de grands éloges au ! zéle &
à la générofité du Marquis d'Adage , Seigneur de
PLOG
AOUST. 1743- 18531
Pifle de Gomera , lequel , auffi-tôt qu'il fut informé
de l'arrivée de leurs Vaiffeaux, fit diftribuer de l'axgent
, des vivres & des munitions de guerre aux
Mi ices , & a payé de fes propres deniers les Ous
vriers chargés de réparer les breches faites aux
Foits par l'artillerie des ennemis.
Un Armateur Espagnol a pris le Vaiffeau Anglois
Les deux Soeurs , qui alloit d'Excefter à Gibraltar .
L'Intendant de Marine de Galice a mandé au
Roi , que la Frégate le Comte de Chinchon , commandée
par Don Carlos de la Villa , étoit entrée le
25. du mois dernier dans le Port de Bayona , fans
avoir reçûaucun dommage de la part de deux Vaiffeaux
de guerre Anglois , qui l'avoient poursuivie
jufqu'à l'entrée de ce Port , & qu'elle avoit apporté
de la Havane, d'où elle eft partie le 8. Juin dernier,
deux millions de Piaftres & une grande quantité de
marchandifes. Cette Frég te a pris dans le trajet un
Vaiffeau Anglois , fur lequel il y avoit du Sel , & un
autre de la même Nation , chargé de Sucre & dé
Сасао.
Les avis de l'Intendant du Ferol , portent que le
17. du mois dernier , l'Armateur Olivier Colan, en
croifant dans les environs des Illes Berlingues , s'étoit
emparé de la Balandre Angloife l'Indeber , qui
alloit de Londres à l'Ile de Madere .
PORTUGAL.
Na appris de Lisbonne du 23. du mois der
nier , qu'il y eft arrivé depuis peu un habitant
de Tavira & un Irlandois , qui fe font fauvés de
Tanger , où ils ont été efclaves pendant plufieurs ,
années , & qui, ayant hazardé , pour recouvrer leur
liberté , de s'embarquer dans une Chaloupe , que
quelques Barbares avoient abandonnée fur le riva-
Hij
1854 MERCURE DE FRANCE.
ge , ont et le bonheur de rencontrer un Vaiffeau
Espagnol , à bord duquel il ont été reçús, & qui les
conduits dans un Port de Galice.
14 GENES ET ISLE DE CORSE.
ON apprend de Genes du 31. du mois dernier , que Amiral Matthews ayant demandé , que
le Gouvernement obligeât les Bâtimens Catalans ,
& Mayorquains , qui étoient dans ce Port , d'en
fortir ; que le Sénat n'ayant point voulu lui accorder
fa demande , cet Amiral a menacé de brûler ces
Bâtimens , & qu'il avoit même envoyé déja des Lettres
circulaires à tous les Confuls, pour les avertir de
prendre des mefures , afin que les Vaiffeaux de
leur Nation ne fuffent pas confondus avec ceux des
Efpagnols.
Le Sénat s'eft affemblé plufieurs fois , pour délibérer
fur les moyens d'empêcher que l'Amiral Matthews
ne fe portât à quelque violence contre ces
derniers , & après diverfes conférences entre cer
Amiral & les Commiflaires , chargés de traiter avec
lui , on eft enfin convenu que la République s'engageroit
formellement & par écrit , à garder en dé
pot l'artillerie & les munitions de guerre que les
Vaifleaux Efpagnols avoient apportées , avec proineffe
de ne les rendre à l'Efpagne qu'après la conclufion
de la paix entre S. M. C. & le Roi de la
Grande Bretagne , & que pour une plus grande fûreté
, cette artillerie & ces munitions feroient tranf
portées à S. Boniface dans l'ifle de Corfe.
Le Miniftre qui réfide à Genes de la part de la
Cour de Madrid , a fait fes proteftations au fujet
de cette Convention , & l'Amiral Matthews étant
fatisfait de l'engagement pris par la République ,,
remit à la voile le 23 pour retourner aux Iſles,
d'Hieres..
Depuis
AOUST. 1743- 1855
Depuis la fignature de cette Convention , les Bâtimens
qui y ont donné lieu , ont la liberté d'aller
où ceux qui les commandent jugeront à propos
de les conduire , & l'on a travaillé à en débarquer
Partillerie & les munitions de guerre , pour le tranf
port defquelles le Gouvernement a frêté cinq Tartanes.
Deux Vaiffeaux de guerre Anglois font ref
tés , afin de s'aflurer de l'éxécution de ce qui a été
réglé , on croit qu'ils accompagneront ces Tarta
nes jufqu'à S. Boniface , & dans ce cas , la Répu
blique fe difpenfera de faire escorter le Convoi par
fes Galéres.
*
Un Courier , arrivé depuis peu de Corfe , a rap
porté que , felon les apparences , la tranquillité y
feroit bientôt rétablic , que M. Giuftiniani , Com
miffaire Général de la République dans cette Ifle
ayant promis aux Rebelles , que le Gouvernement
leur accorderoit le libre port des armes , & une
amniftie générale pour tout ce qui s'eft paffé depuis
Pannée 1729 ; que la Nobleffe de l'ifle joui
Foit des privileges qu'elle a demandés que la plu
part des Emplois de Judicature & de Finance , ne
feroient donnés qu'à des Corfes ; que l'Evêque
d'Aleria feroit toujours élú par le Clergé & par les:
Magiftrats de la Vi le ; que la Taille feroit réduite
fur l'ancien pied , & qu'elle ne pourroit être augmentée
en aucun tems , fans le confentement des
Députés des douze principales Piéves de l'ifle , les
Rebelles avoient confenti de le foumettre à ces con
ditions , & que l'Acte concernant les engagemens
que la République & les Rebelles fe propofoient
de prendre refpectivement , devoit être figné le 23 ,
par M. Giuftiniani , & par les Députés des Piéves .
Quoique ces nouvelles ayent été confirmées par
des Lettres écrites le 17 de la Baftie , lefquelles af
furent que les Corfes out témoigné beaucoup de
dij joye
1856 MERCURE DE FRANCE .
joye de fe voir à la veille de n'être plus expofées !
une guerre inteftine , on ne fe fre pas encore à
Génes entierement à leurs promeffes ; on craint
que ce ne foit un artifice de leur part , afin d'avoir
le tems de mettre à couvert leur récolte , & Pon
ne croira cette affaire terminée qu'après qu'ils
auront figné leur Acte de foumiffion , & qu'ils auront
remis aux Officiers de la République les poftes
dont ils fe font emparés.
On a appris de Lombardie , que l'on juge par
diverfes difpofitions que fait le Duc de Modéne ,
qu'il a deffein de fe rapprocher du Bolonois avec
Farmée Espagnole , qui eft fous fes ordres.
Le Comte de Traun a toujours fon quartier général
à Carpi , & il n'attend , pour retourner en
Allemagne , que l'arrivée du Prince de Lobckowitz ,
qui doit commander à fa place les troupes de la Reine
de Hongrie en Italie .
O mande de la Romagne , que l'armée Eſpagnole
, qui eft fous les ordres du Duc de Modéne ,
eft plus nombreufe , & en meilleur état qu'elle n'étoit
avant la Bataille de Campo Santo.
GRANDE BRETAGNE.
On apprend de Londres du premier de ce mois ,
que le Capitaine d'un Vaiffeau , arrivé depuis peur de
la Caroline , a rapporté , que le Vaiffeau de guerre
la Rofe , avoit conduit à Charles Town trois Bâtimens
Efpagnols , dont il s'étoit emparé , & qu'il
avoit fait échouer un Arniateur de la mêmeNation,
lequel avoit à bord 155. hommes.
Le Va ffeau l'Entreprife a été pris le 22. du
mois dernier par les Eſpagnols , en allant à Madere
, auffi bien que le Vaiffeau de guerre le S. Phis
lippe , dans la Riviére de la Plata.
Le
AOUST. 1743. 18571
Le 19. Mai dernier , un Vaiffeau de guerre Anglois
prit dans les environs des Açores un Vaiffeau
François qui apportoit de l'argent , & des marchan
difes de la Vera Cruz.
Le Bureau de la Guerre expédia le onze de ce
mois So. Commiffions d'Officiers , dont plufieurs
ont été accordées par le Roi à de fimples Soldats ,
qui fe font diftingués dans le combat d'Ettingen.
Les avis de la Jamaïque portent , que le Vaiffeau
de guerre le Haftings , commandé par le Lord Barnf,
y avoit conduir le Vaiffeau , dont il s'étoit emparé
dans les environs des Açores.
HOLLANDE ET PAYS BAS.
On apprend de la Haye du 9. de ce mois , que
les Régimens d'Infanterie de Sandouville , de
Cromstrom & d'Aylva , le Régiment des Gardes à
Cheval , & celui de Cavalerie du Prince Guillaume
de Heffe , fe font rendus le premier & le deux au
Camp près d'Arnhem , d'où le Régiment des Gardes
à pied , & celui de Sturler , ont dû partir le 3 ,
pour marcher vers le Zalm Heyde .
La premiere Colonne des troupes que la République
fournit à la Reine de Hongrie , a été affemblée
le 4. à Doefbourg , & elle a dû fe mettre le
6. en marche , pour aller joindre l'ermée des Alliés
en Allemagne.
Le Confeil d'Etat a envoyé le Baron de Torck ,
& M. Hogendorp , pour vifiter les fortifications
des Places fituées le long de la Meuſe.
M. Van-Hoey , Ambaffadeur de cette République
auprès du Roi Très-Chrétien , a obtenu fon
rappel.
On a appris de la Haye du 16. de ce mois , que
la premiere divifion des Troupes , qui par ordre de
Hv
la:
1858 MERCURE DE FRANCE.,
la République de Hollande , vont joindre l'armée
des Alliés , étoit arrivée le 8. à Coesfeld dans l'Evêché
de Munfter ; qu'elle devoit continuer la routepar
Nottelen , Rochfel , Telligte , Warendorff ,
Wiadenbrock , Nicùbruck , Paderborn , Nuflen ..
Epentave , Corback , Sharfenberg , Frankenberg,
& Vetter; qu'elle fe rendroit le 29. à Marpurg , &
que. le 3 I elle pafferoit la Riviére de Lahn.
Les quatre autres divifions fuivront le même che
min que la premiére , & elles font parties fuceffivement
de Doefbourg , deux jours l'une après l'autre.
La derniere conduit avec elle l'artillerie , les pon.-
tons & les chariots de munition .
On apprend de Bruxelles du 17. de ce mois , que
les lettres de l'Armée des Alliés marquent que le
Baron de Geming , Colonel Commandant du Régiment
du Duc d'Aremberg , & Quartier Maître
Général des troupes Autrichiennes , s'étoit rendu
en deçà du Rhin , & y avoit marqué un camp pour
ces troupes , qui ont dû commencer le 13. à paffen
ce Fleuve.
La Ducheffe d'Aremberg a appris , qu'on avoit:
fait une nouvelle opération au Duc fon époux , pour
chercher la bale reſtée dans la bleſſure qu'il a reçuë
au combat d'Ettingen..
FRANCE
AOUST. 1743. 1859
FRANCE..
Nouvelles de la Cour , de Paris , &c..
L
י
E Roi a nommé le Maréchal de Coigny,,
pour aller commander dans fon Gouvernement
d'Alface.
S. M. a donné l'agrément du Régiment
de Cavalerie , dont le Duc d'Aumont étoit
Meftre de Camp , au Prince Camille de Lorraine
, fils du Prince de Pons..
La Charge de Sous - Lieutenant de la Compagnie
des Gendarmes de la Garde , vacante
par la mort de M. Jofeph-Antoine le Fournier
, Seigneur de Wargemont , tué au com--
bat donné près du Mein , le 27. Juin der--
nier , a été donnée au Marquis de la Salle
(Marie-Louis Caillebot ) premier Enſeigne
de cette Compagnie , petit - fils de Louis
Caillebot , Marquis de la Salle , Lieutenant:
général des armées du Roi , & Capitaine--
Lieutenant de la même Compagnie des Gendarmes
, nommé à l'Ordre du S., Efprit ,,
mort en 1682.
Et le Guidon de la même Compagnie ,
vacant par la mort du Comte de Meffay ,
tué au même combat ,, au Marquis de Vali
H vjj
belle
1860 MERCURE DE FRANCE.
belle ( Jofeph-Ignace-Come-Alfonfe- Roch
de Valbelle , Marquis de Rians ) Lieutenant
de Roi en Provence , Grand Sénéchal de
Marſeille , Moufquetaire de la premiere
Compagnie , fils de feu M. André Géofroy
de Valbelle, Marquis de Rians , de Montfuron
, & de Breffieu , Comte de Ribiez , Baron
de Meyrargues , Meftre de Camp de
Cavalerie , premier Enfeigne de la Compagnie
des Gendarmes de la Garde du Roi
Confeiller en fesConfeils,GrandSénéchal de
Marfeille , Grand Bailli des Montagnes de
Dauphiné , mort en fon Château de Meyrargues
, le 16. Avril 1735. âgé de 33. ans ,
& de De. Marguerite Delphine de Valbelle
de Tourves , aujourd'hui fa veuve.
M. de Cherifey , Lieutenant Général , &
Lieutenant d'une des Compagnies des Gardes
du Corps de S. M. qui étoit Commandeur
de l'Ordre Royal & Militaire de Saint
Louis , en a été fait Grand-Croix.
M. de Bernage , Confeiller d'Etat & Intendant
en Languedoc , fut élû Prévôt des
Marchands , dans l'Affemblée du Corps de
Ville , qui fe tint le 26. du mois dernier.
M. le Nain , Intendant de la Généralité
de Poitiers, a été nommé Intendant du Languedoc
>
AOUST. 1743 . 18613
guedoc , & il a été remplacé dans l'Intendance
du Poitou , par M. Berrier , Maître
des Requêtes , & Préfident du Grand Confeil.
Le 2. de ce mois , la Reine fe rendit à
l'Eglife des Récollets de Verfailles , qui célébroient
la Fête de Notre- Dame des Anges ;
S. M. y entendit la grande Meffe , & le foir
elle y affifta au Salut .
Le 6. M. Creſcenzi , Archevêque de Naziance
, & Nonce Ordinaire du Pape , eur
une audience particuliere du Roi , & il y fut
conduit par le Chevalier de Sainctot, Introducteur
des Ambaffadeurs.
La Reine entendit le 14. de ce mois , la
Meffe dans la Chapelle du Château de Verfailles
, & S. M. y communia par les mains
de l'Archevêque de Rouen , fon Grand Aumônier
.
Le 15. Fête de l'Affomption de la Sainte
Vierge , le Roi & la Reine entendirent dans
la même Chapelle , la Meffe chantée par la
Mufique. L'après midi , Leurs Majeftés , accompagnées
de Monfeigneur le Dauphin ,
affiſtérent aux Vêfres & à la Procefion , à
laquelle
1862. MERCURE DE FRANCE..
Laquelle l'Abbé Broffeau , Chapelain de la
Chapelle de Mufique , officia..
Le même jour , la Proceffion folemnelle ,
qui fe fait tous les ans à pareil jour , en exé--
cution du Vou de Louis XIII..fe fit avec les
cérémonies ordinaires , & l'Abbé d'Harcourt
, Doyen du Chapitre de l'Eglife Métropolitaine
, y officia. Le Parlement , la
Chambre des Comptes , la Cour des Aydes-
& le Corps de Ville , y affiftérent..
Le 16. pendant la Meffe du Roi , l'Evêque
du Puy prêta Serment de fidélité entre les
mains de S, M ..
Le même jour , dans l'Affemblée générale
du Corps de Ville , M. Baizé , Confeiller de
Ville , & M. Pierre , furent élus Echevins..
Le 22. le Roi prit le deüil
de Mademoiſelle du Maine..
pour la mort
Le 25. Fête de Saint Louis , la Proceffion
des Carmes du Grand Convent , à laquelle
le Corps de Ville affifta , alla fuivant la coûtume
, à la Chapelle du Château des Thuilleries
, où ces Religieux célébrerent la
Meſſe..
Le
:
AOUST. 1743; 1:863
Le même jour , l'Académie Françoife ,,
célébra la même Fête dans la Chapelle du
Louvre, Pendant la Meffe , on chanta un
fort beau Motet , & le R.P. Griffet , de la
Compagnie de Jefus , prononça le Panégyrique
du Saint..
L'Académie Royale des Infcriptions &
Belles-Lettres , & celle des Sciences , célébrérent
la même Fête , dans l'Eglife des Prê--
tres de l'Oratoire , de la rue Saint Honoré
où le Panegyrique du Saint fut prononcé
par M. Richard, Procureur Général de l'Ordre
desPrémontrés.Il y eut auffi un très- beau
Motet en Mufique , qui fut chanté pendant
la Melle..
L'Académie Françoife tint le même jour
une Affemblée publique , dans laquelle elle :
diftribua le Prix d'Eloquence, qui a été rem--
porté par l'Abbé de l'Eclufe des Loges.. Le
Prix de Poëfie a été remis à une autre année ,..
parce qu'aucune des Piéces, qui ont été préfentées
à l'Académie ,, ne lui a paru digne
d'être couronnée ..
Le 26. les Députés des Etats de la Province
de Languedoc , eurent audience du
Roi . Ils furent préfentés par le Maréchal de
Maille
1864 MERCURE DE FRANCE.
Maillebois , Lieutenant Général de la Province
, & par le Comte de Saint Florentin ,
Secrétaire d'Etat , & conduits en la maniere
accoûtumée , par le Marquis de Dreux ,
Grand Maître des Cérémonies , & par M.
Defgranges , Maître des Cérémonies . La !
Députation étoit compofée , pour le Clergé
, de l'Evêque de Nifmes , qui porta la parole
, du Marquis d'Ambres , pour la Nobleffe
; de Mrs. Baillarguet & Dorimieux
Députés du Tiers Etat , & de M. Joubert ,
Syndic Général de la Province. Les mêmes
Députés eurent enfuite audience de la Reide
Monfeigneur le Dauphin & de Mefdames.
Le 27. M. Crefcenzi , Archevêque de
Naziance , Nonce Ordinaire du Pape , eut
une audience du Roi , dans laquelle il prit
congé de S. M. Il fut conduit à cette audience
, ainfi qu'à celles de la Reine , de
Monfeigneur le Dauphin & de Mefdames
de France , par le Chevalier de Sainctot ,
Introducteur des Ambaffadeurs.
Le Roi a donné le Régiment d'Infanterie
de Mortemart , dont le feu Duc de Rochechoüart
étoit Colonel , au Marquis de Laval
, Capitaine dans le Régiment de Cavalerie
Royal Pologne , & celui de Cavalerie
,
AOUST. 1743 . 1865
tie , dont le feu Marquis de Fleury étoit
Meftre de Camp, au Comte de la Viefville ,
Capitaine dans le Régiment de Cavalerie
de Noailles.
S. M. a accordé l'agrément du Régiment
d'Infanterie , dont le Marquis de Chaillou
étoit Colonel , au Marquis de Ségur, Capitaine
dans le Régiment de Cavalerie d'Egmont
, & celui du Régiment de Cambrefis
, au Marquis de la Châtre , Capitaine
dans le Régiment de Dragons de Nicolaï.
La Statue Equeftre du Roi , qui a été
faite à Paris , par M. le Moine , & fonduë
par M. Varin , pour être pofée dans la nouvelle
Place de la Ville de Bordeaux , y ayant
été placée , elle fut découverte le 19. de ce
mois avec beaucoup de cérémonie.
On a appris de Vienne , que le 13. de
ee mois , la Reine de Hongrie y étoit accou
chée d'une Princeffe.
L'armée du Roi , commandée par le Ma
réchal de Noailles , ayant quitté le 12. du
mois dernier le camp de Steinheim , elle
alla le même jour camper à Imhain ; elle ar
riva le 13. à Grabenhaufen , le 14. à Fung
ftatt , & le 15. à Grofvosheim. Elle y féjourna
le 16. & cette armée ayant paffé le Rhin
le
1866 MERCURE DE FRANCE.
le 17. fur le Pont de Bâteaux, que le Maréchal
de Noailles avoit à Rhindurckeim, elle
campa fous Worms.
Les troupes de S. M. qui font fous les
ordres du Comte de Saxe , fe font raffemblées
à Spire , le 13. du mois dernier .
Le 20. & le ZL. le Comte de Saxe a fair
marcher vers la Haute Alface , un détachement
de cette armée , lequel eft commandé
par le Marquis de Clermont Gallerande
Lieutenant Général.
On a appris de Strasbourg du s . de ce
mois ,, que l'Armée du Roi, commandée
par le Maréchal de Noailles , étant partie de
Worms le 25. du mois dernier , elle alla le
même jour à Epeftein, près de Frankendal ,
& qu'ayant continué fa marche le lendemain
, elle campa entre Spire & la Rehute.
Le Maréchal de Noailles a laiffé à Fran-
Kendal M. de Berchiny , avec fix Compagnies
de Grénadiers & le Régiment de Huffards
, dont il eft Meftre de Camp.
Les troupes Françoifes revenues de Baviére
, qui s'étoient raſſemblées à Spire , le
13. du mois dernier , fe font féparées le 24 .
& le 25. en plufieurs Corps , lefquels one
marché vers la Haute & la Baffe Alface , &
fur les Frontières des Trois Evêchés.
La Maiſon du Roi , la Gendarmerie , &
le Régiment Royal des Carabiniers , font
rentrés
AOUST. 1743. 1867
rentrés en Alface , & le Maréchal de Noailles
a laiffé au Comte de Saxe le Commandement
de toutes les troupes , qui font actuellement
dans cette Province. Il a donné
celui des troupes qui font en Lorraine, au
Marquis de Montal, Lieutenant Général ,
& il a envoyé le Duc d'Harcourt , commander
dans fon Gouvernement de Sédan ; le
Comte de Danois à Thyonville , & le Marquis
de Brezé à Sarre- Louis..
Le Maréchal de Noailles a quitté le 13 .
de ce mois , le camp qu'il occupoit près de
Spire , & il s'eft rendu le même jour à Gemershein
; il a campé le lendemain à Rhinzabern
, & il s'eſt rendu le 15. à Lauterbourg.
Les troupes commandées par le Comte
de Saxe , partirent le 15. de Markelfem ,
pour aller camper à Edern , à une lieuë audeffus
du Neuf- Brifack.
Le rs.de ce mois , Fête de l'Affomption
de la Ste . Vierge , il y eutConcert fpirituel au
Château des Tuilleries. On y chanta un Moret
à grand choeur, de la compofition du Sr..
Philidor , ordinaire de la Mufique du Roi ,
lequel fut fuivi d'un Concerto , exécuté fur la
Flute-traverfiere , par le Sieur Blavet. On
donna enfuite un autre Motet à grand
choeur de feu M. de la Lande , dans lequel
la
1868 MERCURE DE FRANCE,
la Dlle. Romainville chanta pour la premiére
fois deux differens Récits , avec beancoup
d'applaudiffement ; on lui trouve la
voix très - belle , chantant avec autant de
goût , que de précifion . Le Concert fut terminé
par un troifiéme Motet , du Sieur de
Mondonville , précédé d'un Concerto, exécuté
par lui-même.
Le 25. Fête de Saint Louis , le Concert
d'Inftruments , que l'Académie Royale de
Mufique , donne tous les ans au Château
des Thuilleries , à l'occafion de la Fête du
Roi , fut exécuté par un grand nombre d'excellens
Symphoniſtes de la même Académie
, qui jouerent differens morceaux de
Mufique de M. de Lully , & d'autres Maîtres
modernes.
L'expofition des Tableaux , Sculptures
Gravûres , Deffeins , & autres Ouvrages de
l'Académie Royale de Peinture & Sculptu
re , établie à Paris fous la protection du Roi,
a commencé le s . de ce mois , & doit durer
jufques & compris le Dimanche premier:
Septembre , dans le grand Salon du Louvre.
Cette Expofition a été ordonnée , felon
l'intention du Roi , par M. Orry , Miniftre
d'Etat , Controlleur Général des Finances ,
Directeur Général des Bâtimens , Jardins
Arts
AOUST. 1743 . 1869
Arts & Manufactures du Roi , & Protec
teur de l'Académie , par les foins du Sieur
Portail , Garde des Plans & Tableaux de
S. M. On en parlera plus au long dans le
premier Journal,
DESCRIPTION de la Pompe funébre ;
du Service folemnel , célébré en l'Eglife
de l'Abbaye Royale de Chelles , le Mardi
23. Juillet 1743. pour le repos de l'Ame
de très Haute , très Puiffante , très- Excellente
, & très pieufe Princeffe , MADAME
LOUISE ADELAIDE D'ORLEANS , Religieu
fe Profeffe , ancienne Abbeffe de cette
Abbaye , morte à Paris , au Prieuré de la
Magdelaine de Trainel , le 20. Février précédent,
·
'Abbaye de Chelles , l'une des plus anciennes,
& des plus célébres de la Chrétienté
, fituée à quatre lieues de Paris ,
vers l'Orient , prefque fur les bords de la
Marne , tire fon origine de la piété de Ste.
Clotilde , Epoufe de CLOVIS - LE - Grand ,
qui fit bâtir en ce Lieu , qui étoit du Domaine
du Roi , au commencement du fixième
fiécle , une Chapelle dédiée à S. Georges ,
avec quelques Cellules, pour y loger un petit
nombre de Vierges confacrées au fervice
de Dieu,
Environ 150. ans après , Sainte Barilde ,
Veuve
870 MERCURE DE FRANCE.
-
Veuve de Clovis fecond , ayant remis à Clo
taire troifiéme , l'aîné de ſes trois fils , le
Gouvernement du Royaume, dont elle avoit
eu la Régence pendant la Minorité , le retira
en cette Communauté , où elle avoit fait
bâtir une Eglife , fous l'invocation de Ste.
Croix , avec un Monaftére fpacieux , capable
de contenir une Communauté nombreufe
, qu'elle y affembla , & la dota de gros
biens , dont la Donation fut ratifiée par les
Princes fes fils.
Elle y établit , pour premiere Abbeſſe ,
Ste. Bertille , Religieufe de Jouars , dont la
place a été fucceffivement remplie , par des
Princeffes du Sang Royal, ou par des Dames
des premiéres & des plus anciennes Maifons
du Royaume.
Mais depuis la Ste. Fondatrice , aucune
Abbeffe n'a autant mérité les regrets de la
Communauté , que MADAME D'ORLE'ANS ,
les bienfaits dont elle a comblé cette Maifon
, étant le moindre motif du tendre &
refpectueux attachement , que la Communauté
avoit pour cette Princeffe. C'étoit la
douceur de fon Gouvernement , fon affabilité
, fa piété , & l'affemblage de toutes les
vertus convenables à l'état qu'elle avoit embraffé
, qui lui avoient gagné le coeur de
toutes fes Religieufes. Elle étoit pour chacune
une tendre Mere , & une fecourable
amie ,
AOUST. 1743 . 1871
amie , & le refpect infini qu'elles lui portoient
, n'intimidoit point la confiance qu'
elles avoient en elle.
Ainfi , on peut juger de la confternation
où cette Communauté fut plongée , lorſque
la Princeffe infpirée d'un efprit de retraite ,
Et la démiffion de fon Abbaye , pour la confier
à Madame de Clermont, dont elle avoit
reçû les Voeux de Religion & qu'elle connoiffoit
feule capable de la gouverner fuiwant
fon efprit.
Ce digne choix , & l'intime correſpon
dance établie entre MADAME D'ORLE'ANS
& la nouvelle Abbeffe , avoient d'autant
mieux calmé la douleur de la Communau
té , qu'elle ne trouvoit aucun changement
dans le Gouvernement , & qu'elle avoit la
fatisfaction de recevoir fouvent dans les vifites
de la Princeffe , des affurances de la tendreffe
qu'elle confervoit pour elle. Il n'y
avoit pas quatre mois , que les Réligieufes
de Chelles avoient eu le bonheur de pofféder
leur ancienne Abbeffe , lorfqu'elles apprirent
fa maladie ,
Chacune d'elles fouhaitoit lui donner en
cette occafion des marques de fon tendre &
refpectueux attachement ; mais la difficulté
du choix , engagea Madame de Clermont a
partir brufquement , accompagnée feule
ment de deux Religieufes , Mad, de Gellan,
fa
1872 MERCURE DE FRANCE.
fa foeur , & Mad . Arnaud , anciennement at
tachée à la Princeffe, Elles eurent la douleur
de la voir expirer, le feptième jour de fa maladie
; & la nouvelle , qui en fut à l'inftant
portée à Chelles, jetta la Communauté dans
un chagrin inexprimable,
Cependant la douleur faifant place au
devoir , Madame l'Abbeffe & la Communauté
, firent de vive-voix & par écrit, toutes
les démarches convenables, pour obtenir
corps de la Princeffe , & commencerent
par donner les ordres pour fon tranfport.
le
Mais elles furent obligées de céder à une
Puiffance , dont les décifions font des ordres
qu'elles refpecteront en toutes occa
fions. Il fut décidé que la maladie , dont la
Princeffe étoit morte , ne permettant pas de
la transferer , elle feroit inhumée au Prieuré
de la Magdelaine de Trainel , où elle étoit
décédée. La cérémonie s'en fit le 21.Février ,
le lendemain de fa mort,
Madame l'Abbeffe & fa Communauté , ſe
voyant privées de la poffeffion des précieux
reftes de MADAME D'ORLE'ANS , firent d'abord
célébrer plufieurs Services à fon intention
, tant dans leur Eglife , que dans les
Paroiffes de leurs Seigneuries , & fe propoferent
de faire une pompe funebre , qui
fut digne de fa naiffance , & qui répondit
au refpect , & à la reconnoiffance , que ces
Dames
AOUST. 1743 . 1875
Dames conferveront éternellement , pour la
mémoire de cette Augufte Princeffe , leur
bienfaitrice & la reftauratrice de leur Maifon.
Elles priérent , de l'agrément de la
Maifon d'Orléans , M. Adam , Docteur de
la Maifon de Navarre , Prédicateur ordinaire
du Roi , & Curé de la Paroiffe de S. Barthélemy
, de ſe charger de l'Eloge funébre .
Mais les fonctions de ce Pafteur ne lui
permirent pas de répondre à l'empreffement
de Mefdames de Chelles ; c'est ce qui a retardé
cette cérémonie. Le jour en ayant été
fixé au 23.Juillet , Madame l'Abbeffe fit diftribuer
fix cent Billets d'invitation , qui furent
précédés de plufieurs Lettres , qu'elle
adreffa aux Puiffances , & aux Perfonnes de
la premiére condition,
On travailla un mois entier aux préparatifs
de la décoration , dont voici la defcription.
L'Eglife bâtie au commencement du neuviéme
fiécle , par l'Abbeffe Gifelle , foeur de
Charlemagne , eft une Croix Latine avec
des bas côtés, L'une des croifées eft occupée
en partie par une Tribune , qui eſt de
plein pied au Dortoir , où les Dames chantent
les Matines à minuit. Toute la Nef,
depuis la croifée , compofe le Choeur des
Dames , qui eft fermé par une magnifique
Grille de fer , de vingt-fix pieds de face , &
I d'Ordre
1876 MERCURE DE FRA NCE.
d'Ordre Corinthien : l'Entablement eft fürmonté
de cinq fupports, cù font pofées cinq
grandes Châffes , celle de Sainte Batilde oc
cupant le milieu . Cet ouvrage admiré de
tous les Connoiffeurs , fut exécuté fous les
ordres de la feuë Princeffe , par Denis , fameux
Ouvrier de Saint Denis ; & c'est l'ouvrage
le plus parfait , qui foit forti de fes
/ mains ,
Le Sanctuaire élevé de quelques marches
, & féparé par une Baluftrade de marbre
noir , renferme un magnifique Autel
adoffé, d'Ordre Compofite, conftruit fous les
ordres de Mad, de la Porte de la Meilleraye,
Abbeffe , il y a près de cent ans.
La Porte extérieure de cette Eglife , eft
au bout d'une Cour oblongue , dont l'entrée
eft à l'autre extrêmité. Cette entrée , qui eft
dans un angle , n'ayant pas la fituation convénable
, pour une décoration extérieure
on ouvrit exprès une Porte au milieu du
mur , qui régne depuis cette entrée , jufqu'à
celle de l'Eglife , & on y éleva des bois de
charpente d'eſpace en efpace , avec des traverfes
pour attacher la tenture , qui fut de
trente - cinq pieds de haut , fur cent cinquante
pieds de face , ornée de deux Litres
de velours , chargées à un pied de diſtance ,
d'Ecuffons aux Armes & Chiffres de laPrincelle.
Entre
AOUST. 1743 . 1877
Entre ces deux Litres , étoient trois grandes
Armoiries , & deux grands Chiffres en
cartouches , ornés de branches dè Cyprès ,
& furmontés de la Couronne de France ouverte
, & d'une Croffe. Cette Porte étoit
fermée d'une barriére , gardée par douze
Suiffes de la Garde du Roi , commandés
par un Sergent , tous en habits de deüil ,
avec pleureuſes aux manches & crêpes aux
chapeaux.
Depuis cette Porte , jufqu'à l'encoignure
du Sanctuaire , on avoit conftruit une Galerie
de cent cinquante pieds de long , tenduë
en plafond jufqu'à terre , à douze pieds de
hauteur , ornée de deux Litres de velours ,
chargées d'Armoiries & de Chiffres. L'intervalle
étoit occupé par trente Girandoles
à trois branches , garnies de bougies d'une
demie-livre.
Dans l'efpace libre des deux croiſées ,
étoient élevées à treize pieds de hauteur ,
deux grandes Tribunes de chaque côté.
qui joignoient immédiatement les piliers du
Choeur , & ceux du Sanctuaire , enforte que
l'Eglife ne formoit plus qu'une grande Chapelle.
On montoit à ces quatre Tribunes ,
par deux Escaliers pratiqués fur le derriére,
La tenture de drap noir , étoit à quarantecinq
pieds de hauteur , c'est -à- dire , de la
naiffance de la voute , juſqu'à terre : les fe-
I ij
nêtres
1878 MERCURE DE FRANCE:
nêtres & les autres vûës étant exactement
bouchées, Toutes les ftalles & le pavé , tant
du Choeur , que du Sanctuaire & de la Nef,
étoient couverts de tapis de drap noir,
Le Sanctuaire , la Nef & le deſſous des
Tribunes , furent remplis de fauteuils
chaifes , plians & carreaux , pour placer les
Perfonnes invitées , fuivant les qualités.
Les quatre Tribunes tendues en plafond
étoient ornées en face , tant en haut qu'en
bas, de grands rideaux retrouffés par degros
cordons d'argent avec leurs glands ; & les
Gradins étoient couverts de drap noir.
Pour faciliter l'entrée dans le Choeur
tant pour y placer les Dames de condition ,
que pour faire les Abfoutes , on avoit enle
vé le devant de la Grille , pour former un
Portique de huit pieds de face , furmonté de
fon entablement , ce qui fut rétabli après le
Service.
Le Catafalque étoit pofé à l'entrée du
Choeur, fur une Eftrade de dix pieds de haut,
couvert d'un poële de velours noir , à Croix
de moire d'argent , & bordé d'hermine , orné
de quatre moyennes Armoiries , A la tête
étoit la Couronne de France ouverte , pofée
fur un Carreau de velours noir à glands &
galons d'argent , & couverte d'un crêpe ,
ainfi q e la Croffe , qui étoit au pied , la
pointe pofée fur un pareil Carreau. Les quatre
AOUST. 17437 1879
coins du poële étoient foutenus par quatre
figures d'Enfans pleurans. Les trois
Gradins de l'Eſtrade , étoient garnis de
tre-vingt-dix Chandeliers d'argent , portant
des cierges armoiriés des deux faces.
Au chef , & au pied des Gradins , étoient
deux figures , de grandeur naturelle , repréfentant
la Charité & la Religion, principales
vertus de la Princeffe . Le Dais élevé à
quarante-
cinq pieds de hauteur, étoit de velours
noir , à crêpines d'argent , furmonté de plumes
, & d'aigrettes noires & blanches ; le
fond & les pentes chargés d'Armoiries. Des
coins du Dais pendoient quatre grands rideaux
de fatin noir , à bandes d'hermine ,
fèmés de larmes d'or , retrouffés avec des
cordons & glands d'argent.
Dans le Choeur des Dames , qui a cent
trente pieds de pourtour , régnoit un filet de
lumiéres , à fleurons dorés , élevé de treize
pieds , garnis de bougies. La première litre
de velours , femée de larmes d'argent , &
chargée d'Armoiries & Chiffres , entourés
de feftons d'hermine , fervoit de pente à ce
filet de lumiére. La feconde litre de velours,
pareillement ornée de larmes , Chiffres &
Armoiries, étoit immédiatement au- deffous
de la naitfance de la tenture .
L'intervalle étoit rempli d'onze grandes
Armoiries & Chiffres , foutenus d'une tête
I iij
de
1880 MERCURE DE FRANCE.
de mort aîlée , furmontée d'une girandole à
cinq lumiéres. Chaque Cartouche , accompagné
de deux pareilles Girandoles , ayant
pour fupport une tête de mort à cyprès. La
Tribune de l'Orgue étoit mafquée par l'u
niformité de la décoration ; on y avoit feulement
pratiqué deux petites Tribunes à
vues mortes .Toutes les têtes de mort étoient
dorées , & les Girandoles argentées.
A la place des cinq Châffes , qui avoient
été ôtées de deffus la Grille , furent pofés
des focles , ornés des deux faces de têtes de
mort aîlées. Celui du milieu occupé par une
grande Croix d'argent. Les quatre autres
des Girandoles à 13. Bougies.
par
Le filet de lumiére régnoit fur les deux
longueurs de la Nef & du Choeur , pofé fur
neuf timpans , ornés de larmes d'argent , &
de têtes de mort aîlées , accompagnés de
piedeftaux , foutenus de pareilles têtes , furmontés
de focles d'argent , portant des Girandoles
à 8. lumières. Les deux litres de velours
, ornées comme celles du Choeur , ré- ,
gnoient à la même élévation .
Les quatre faces des piliers , foutenant les
croifées de l'Eglife , étoient ornées de quatre
grandes Armoiries , foutenues & accom-.
pagnées comme celles du Chour.
Quatre pareilles Armoiries étoient placées
entre les quatre Tribunes , & à la naif
fance
AQUST. 1743 : 1881
Lance de chaque rideau , étoit un grand.
Chiffre.
La Chaire de l'Orateur étoit placée à la
droite de l'Autel , près la Grille, & étoit ornée
d'un tablier , & de pentes de velours
noir , à crépines d'argent , chargés d'Armoiries.
Sur la Baluftrade du Sanctuaire , étoient
deux Girandoles à huit bougies & audeffous
des timpans du filet de lumieres ,
étoient des pentes de velours noir , à crépines
d'argent , chargées d'Armoiries & de
Chiffres , avec les mêmes ornemens & accompagnemens.
Au-deffus de l'Autel , à la hauteur de la
tenture , étoit un Dais de velour noir , à
crépines d'argent , avec fa queue & fes rideaux
de fatin herminé , le tout chargé
d'Armoiries. Les trois Gradins de l'Autel ,
portoient vingt-huit Chandeliers d'argent ,
avec leurs cierges armoriés. Derriere , étoit
un rétable de velours noir , chargé de quatre
moyennes Armoiries , furmonté d'un filet
de douze Chandeliers d'argent , portant
des cierges armoriés. Au-deffus , un timpan
garni de bougies , formoit la continuation
du filet de lumiére . Deux crédences accompagnoient
l'Autel , ayant leurs paremens ,
& rétables de velours noir armoriés , avec
deux Chandeliers d'argent , & furmontés
d'une Girandole à huit branches ; à côté de
I iiij cha .
1882 MERCURE DE FRANCE.
chacune , étoient deux pareilles Girandoles,
pofées fur des piedeftaux.
Le Lundi , 22. Juillet au foir , les Vêpres
des Morts & les Vigiles furent chantées
les Dames .
par
Le lendemain 23. le Service commença
onze heures précifes du matin ; le R. P. Laneau
, Supérieur Général de la Congrégation
de S. Maur , officia , accompagné de
fes Affiftans , & de plufieurs Supérieurs de
la même Congrégation . Il y eut offrande de
pain & de vin , préfentée par trois Officiers
en manteau-long , précédés d'un Maître des
Cérémonies , en robe .
L'Eloge funébre de MADAME D'ORLe'ans ,
prononcé par M. Adam , eut un applaudiffement
Général , & fit verfer des larmes à tout
l'Auditoire , qui fut auffi très - attendri du
chant de l'Office , compofé en trois parties ,
fur le chant Grégorien , par M. Morin , ancien
Maître de Mufique de la feue Princeffe.
Trois baffons , & un ferpent donnoient
le ton par des préludes triftes & lugubres
aux quatre Dames premiéres Chantres, pour
commencer les intonations, qui étoient fuivies
par toute la Communauté , foutenuë de
ces quatre Inftrumens , & de deux Baffes
chantantes.
La Meffe étant finie , le R. P. Général , &
quatre autres Supérieurs de la Congréga,
tion ,
AOUST. 1743.
1883
•
tion , avec leurs Affiftans , firent cinq Abfoutes
, dont les Répons furent chantés par
les Dames , ainfi que le Libera & le De profundis
, en fauxbourdon , avec les mêmes accompagnemens
qu'à la Meffe.
Après l'Office , qui ne finit qu'à trois
heures fonnées , Mad. l'Abbeffe , qui avoit
fait faire fes invitations pour le dîner , tint
une table de quarante couverts , qui fut ſervie
avec une propreté & une décence convenable
, à tous égards.
Il y eut auffi trois autres tables , deux de
trente couverts chacune , & une de
quarante
, très-bien fervies , dont trois Officiers ,
attachés à la Maiſon , firent les honneurs.
Indépendamment de ces quatre tables , il
y en eut plufieurs autres moindres , tant audedans
, qu'au-dehors.
Cette pompe funebre a été ordonnée par
Mad . de Clermont , Abbeffe de Chelles ,
& exécutée par les deux Intendans de
l'Abbaye.
Iv MORTS.
1884 MERCURE DE FRANCE.
MORT S.
Ouis-Anne Clerembauld de Vendeuil
Seigneur de Dieudonne , Marquis de
Vendeuil , Lieutenant des Gardes du Corps,
& Brigadier des Armées du Roi du 15 .
Mars 1740 .a été tué au Combat d'Eftingen
le 27.Juin dernier , à l'âge de 52. ans , avec
Louis Clerembault de Vendeüil , Exempt
des Gardes du Corps , fon fils unique , âgé
de 22. ans , qu'il avoit eût de fon mariage
avec D. Marguerite de Mailly du Breüil ,
étoit fils de François Clerembauld de
Vendeuil , Marquis de Vendeuil , Seigneur
de Dieudonne , Lieutenant Géneral des Armées
du Roi , Lieutenant des Gardes du
Corps de S. M. & Gouverneur de Pecquay ,
mort en 1712. & de D. Marie-Anne de
Rangueil , lefquels , outre le Marquis de
Vendeuil , qui donne lieu à cet article ,
avoient eû pour fils aîné Albert - François
Clerembauld de Vendeuil , Seigneur de
Dieudonne , Comte de Vendeüil , Meſtre
de Camp du Regiment Dauphin Cavalerie
Gouverneur de Pecquay , & Grand-Bailly
d'Orleans , mort le 5. Avril 1712. pere
de Albert-François Clerembauld de Vendeuil
, Seigneur de S. Germain & de Neufville
AOUST. 1743. 1885
ville , Comte de Vendeüil , Capitaine dans
le Régiment Royal Rouffillon , Cavalerie ,
aujourd'hui marié avec Dlle Louife- Marthe
de Melfey,foeur & unique héritiere de feu M.
le Comte de Meffey , Guidon des Gendarmes
de la Garde du Roi , tué au même
Combat d'Ettingen , & dont il a un fils unique
Albert - Louis Clerembauld de Vendeüil
, âgé de 6. ans.
La Maifon de Vendeüil prend fon nom
de la Terre de Vendeüil , fituée fur la Riviere
d'Oife , près Saint Quentin , &
remonte jufqu'à Clerembauld de Vendeuil
, Seigneur de Vendeüil , Chevalier ,
vivant l'an 1096. comme il fe lit dans les
Auteurs qui ont écrit de la premiere Croifade
, & dans l'Hiftoire de la Maifon de
Bethune , par le célébre André du Chefne ,
dans laquelle , Livre IV. fol . 284 & fuivans
, fe voyent d'anciens Sceaux , fur lefquels
font les mêmes Armes que portent
aujourd'hui Mrs de Vendeuil , qui font un
Lion naiffant. L'Hiftoire de la Guerre Sain
te , intitulée la Franciade Orientale, fol. 40.
remarque que le même Clerembauld de
Vendeuil fut un des Seigneurs qui accont→
pagnerent Hugues le Grand, Comte de Ver
mandois, frere du Roi Philippes I. du nomi ,
en fon voyage de la Terre Ste l'an 1996. &
qui furent faits prifonniers avec ce Prince,
I vj par
1886 MERCURE DE FRANCE.
par le Gouverneur de Durazzo pour l'Em
pereur de Conftantinople , & dont la liber
té leur fut procurée par l'entremife & la valeur
de Godefroy de Bouillon.
Clerembault III. du nom , Seignent
Chaftelain de Vendeüil , vivant l'an 1225.
n'eut que deux filles , dont l'aînée, Jeanne
de Vendeuil , porta cette Terre dans la
Maifon de Roye par fon mariage avec Matthieu
de Roye, Seigneur de la Fere, en Ponthieu
, d'où vint Marie de Roye , Dame de
Vendeuil , qu'elle porta dans la Maiſon de
Bethune par fon mariage avec Guillaume de
Be hune, Seigneur de Locres, Chevalier, &c.
Ce Clerembaald de Vendeiiik III. du nom,
Seigneur de Vendeuil eut pour frere puîné
Guy de Vendeuil , Seigneur d'Aubigny ,
duquel defcendoit , par plufieurs degrés ,
Claude de Vendeuil , Seigneur d'Aubigny ,
vivant en 1525. Auteur de toutes les Branches
de ce nom , qui fubfifte à préfent. La
premiere , des Seigneurs d'Aubigny , puis
du Crocq , finie en 1702. par la mort de
Pierre-Thimoleon de Vendeüil , Chevalier
Seigneur du Crocq , Brigadier des armées
du Roi , rné an Combat de Luzarra , érant
nommé Maréchal de Camp. La deuxième ,
des Seigneurs d'Ettelfay, aujourd'hui aînés.
de toute la Maifon , qui fubfifte en la perfonne
de François-Anne de Vendeüil , Chevalier
AOUST. 1743. 97887
valier , Seigneur d'Eftelfay , Ecuyer de la
Grande Ecurie du Roi , ci-devant Capitaine
au Régiment d'Infanterie de Tavannes ,
& d'Antoine- François de Vendeüil , fon
frere , ci-devant Capitaine dans le Régiment
Royal Rouffillon , Cavalerie , & Chevalier
de l'Ordre Militaire de S. Louis ,
qui de fon mariage avec Dlle Marie-Anne-
Geneviève de Vendeuil de Marotes , fa
coufine ; n'a qu'un fils , nommé Marie- Jofeph
de Vendeuil , né le 10. Août 1731 .
La troifiéme , des Seigneurs de Dieudonne
, connus fous le Titre de Marquis &
Comtes de Vendcüil , qui ont donné lieu
à cet article , & dont eft encore Charles
Clerembauld , Seigneur de Pourpry , Capitaine
dans le Régiment Dauphin, Cavalerie ,
leur frere & oncle. Et la quatrième , des
Seigneurs de Marotel , qui ne fubfifte plus
qu'en la perfonne de Philippes- Jofeph de
Vendeuil de Marotel , qui a embraffé l'Etat
Eccléfiaftique , & dans celle de Mad . de
Vendeuil , fa foeur . Vendeüil porte pour
Armes d'azur à un Lion naiſſant d'or,fupdeux
Lions , Cimier un Lion naiſſant
ports
de-même.
Michel - Marie - François de Roncherolles
Pont S Pierre , dit le Chevalier de Roncherolles
, Chevalier non Profès de l'Ordre de
S, Jean de Jérufalem , Exempt des Gardes
du
888 MERCURE DE FRANCE
du Corps du Roi dans la Compagnie d'Har
court , a été tué au Combat d'Ettingen , âgé
de 25. ans , 8. mois , 24. jours. Après avoir
fervi quelques années en qualité de Capitaine
dans le Régiment Royal des Cravates,
qu'avoit alors le Comte de Pont S. Pierre ,
fon frère aîné , il alla faire fes caravannes
à Malthe , où il avoit été reçû de minorité
le 17. Janvier 1720. & à fon retour de
Malthe ,Sa Majefté l'avoit honoré d'un Bâton
d'Exempt dans fes Gardes du Corps. II
étoit fils de Michel de Roncherolles , Marquis
de Pont S. Pierre , premier Baron de
Normandie , Confeiller d'honneur né au
Parlement de Rouen , & de Marie-Anne-
Dorothée Erard-le-Gris , Marquife de Montreüil
& d'Echauffou , Comteffe de Cifey
morte le 29. Janvier 1739. & frere de Michel
-Charles- Dorothée de Roncherolles ,
Comte de Pont S. Pierre , Brigadier des
armées du Roi depuis le premier Janvier
1740. à préfent Enfeigne Chef de Brigade
des Gardes du Corps , Compagnie d'Harcourt
, & de Claude- Thomas-Sibile-Gafpard
-Nicolas - Dorothée de Roncherolles-
Pont S. Pierre , dit le Chevalier de Pont
S. Pierre , reçû auffi de minorité dans l'Ordre
de Malthe en 1709. Brigadier des ar
mées du Roi , Sous-Lieutenant de la Compagnie
des Gendarmes Ecoffois. Nous avons
parlé
A O UST.
1743.1889
parlé plufieurs fois dans nos précédens Mercures
des honneurs & prérogatives de cette
illuftre & très-ancienne Maifon de Roncherolles
, qui compte parmi fes Ancêtres ,
ainfi qu'il eft prouvé par des Monumens
authentiques , un Pierre de Roncherolles ,
mort l'an 1000. inhumé au Prieuré des
deux Amans , dans le voisinage de fa Terre
de Roncherolles , où il avoit fait des fondations
, avec cette Infcription fur fa Tombe
: Egregius vir Petrus de Roncherolles
Miles , lequel eut pour fils Roger de Roncherolles
, vivant encore en 1070. qui fut
pere d'un autre Roger de Roncherolles ,
qui vivoit l'an 1120. par lequel nos plus
fçavans Généalogiftes commencent l'Hif
toire de cette Maifon , & duquel defcend au
20. degré, de mâle en mâle , par une filiation
bien prouvée , le Marquis de Pont
P. Pierre , pere du Comte & du Chevalier
de Pont S. Pierre , & du Chevalier de Ron
cherolles , qui adonné lieu à cet article.
ARRESTS NOTABLES.
ORDONNANCE
DU ROI , du
premier Juin , pour créer & établir
un feptiéme Aide- Major dans le Régiment
de ſes GardesFrançoifes,dont la teneur fuit.
Sa
1890 MERCURE DE FRANCE.
Sa Majefté jugeant du bien de fon fervice;
de créer une feptième place d'Aide- Major
dans le Régiment de fes Gardes Françoifes,
a trouvé bon que le fieur Duc de Grammont,
Colonel de ce Régiment , lui propofe ceux
des Lieutenans du Corps qu'il croira les plus
capables de s'en bien acquitter , afin que
5. M. choififfe celui qu'elle voudra pourvoir
du brévet néceffaire pour en remplir les
fonctions , les exercer , & en jouir aux ap
pointemens qui lui feront reglés , & le faire
reconnoître en ladite qualité , ainfi que
les autres Aides-Majors dudit Régiment , de
tous ceux qu'il appartiendra . Mande & ordonne
S. M. au fieur Duc de Grammont ,
Colonel de fon Régiment des Gardes Françoifes
, aux Commiffaires de fes guerres ,
chargés de leur police, & à tous autres fes Officiers
qu'il appartiendra, de fe conformer à
l'entiére exécution & obfervation de la préfente
, laquelle fera lûe & publiée à la tête
du Régiment , à ce qu'aucun n'en prétende
caufe d'ignorance
.
ORDONNANCE du Roi , du premier
Juillet , portant création de cent cinquante .
deux Compagnies de Cavalerie , dont la teneur
fuit :
Sa Majefté jugeant néceffaire au bien de
fon fervice , de faire une augmentation
dans
AOUST. 17431 : 1891
dans fa Cavalerie - légére , a ordonné &
ordonne :
ART. I. Qu'il fera inceffamment levé cent
cinquante - deux Compagnies de Cavalerie
légére , de trente - cinq Maîtres chacune ,
pour former trente-hit Efcadrons , qu'elle
le réferve de faire joindre aux Régiment
aufquels elle les deſtinera .
II. Chaque Compagnie fera compofée
d'un Capitaine , d'un Lieutenant , un Cornette
, un Maréchal- des- logis , deux Brigadiers
, & trente-trois Cavaliers , y compris
un Trompette ; & payée comme les autres
Compagnies de Cavalerie , conformément
• à l'Ordonnance du premier Novemb.1742 .
portant réglement pour le payement de ſes
Troupes.
III. Les Capitaines que S. M. aura agréés
pour lever lefaites Compagnies , travailleront
le plus promptement qu'il fe pourra ,
pour affembler leurs Cavaliers aux Quar
tiers qu'ils choifiront , & prendront_leurs
mefures , pour rendre leurs Compagnies
complettes à trente-cinq Maîtres, dans le 16 .
du mois de Novembre prochain .
IV. S. M. leur fera fournir les chevaux
néceffaires pour monter leurs Compagnies..
V. Chaque Capitaine levera à fes frais
vingt-cinq Maîtres ; les dix autres , qui formeront
chaque Compagnie à trente-cinq ,
feront
1892 MERCURE DE FRANCE.
feront levés ; fçavoir, fix par le Lieutenant,
& quatre par le Cornette. Le Capitaine fera
tenu de les armer tous , habiller & équiper
à fes dépens , fuivant l'uniforme du Régiment
, à la fuite duquel il devra fervir ; il
payera auffi l'équipement du cheval.
१
VI. S. M. veut bien que du jour , qu'il y
aura cinq Cavaliers d'affemblés au Quartier,
compte des trente- cinq Maîtres , qui formeront
chaque Compagnie , la folde leur
foit payée , à commencer du premier du
mois d'Août prochain , fuivant les revûës
qui en feront faites , par les Commiſſaires
des guerres prépofés à cet effet ; & ce conformément
à l'Ordonnance de S. M. qui régle
le payement de fes Troupes : obfervant
néanmoins , que les appointemens des Capitaines
, Lieutenans , Cornettes , Maréchaux-
des-logis , & la paye des Brigadiers ,
ne doivent être établis , que du jour qu'il y
aura douze Cavaliers pour chaque Compagnie
; & que la maffe fur le pied de trentecinq
Maîtres , ne courra que du jour que
ces Compagnies pafferont en revûë audit
nombre: mandant S. M. à M. le Comte d'Evreux
, Colonel général de fa Cavalerie , &
au Sr. Marquis de Clermont - Tonnerre ,
Meftre de-Camp général de ladite Cavalerie
, de tenir la main , chacun ainfi qu'il lui
appartiendra , à l'exécution de la préfente ,
& c. ARAOUST.
1743 . 1893
ARREST , & Lettres Patentes fur icelui
, du 28. Mai 1743. portant défenfes de
vendre du Tabac rapé , fans la permillion
du Fermier. Regiftrées en la Cour des Aides
, le jo . Juillet fuivant.
AUTRE , du 4. Août , en faveur des
Miliciens de Paris , qui étoient ci - devant
en apprentiffage , ou Compagnons chés des
Marchands , ou Maîtres des Corps & Com
munautés de cette Ville , par lequel S. M
ordonne , que tous les Garçons aufquels
le fort est échû à la Milice de Paris ,
& qui étoient en apprentiffage , ou Compagnons
chés des Marchands des fix Corps ,
ou chés des Maîtres des Communautés ,
pourront , après leurs fix années de fervice
accomplies , & qu'ils auront obtenu des
congés abfolus , fe préfenter pour être reçus
Marchands au Maîtres defdites Communautés
, fi pendant leurs fix années de fervice.
militaire , le tems de leur apprentiffage ou ,
compagnonnage eft expiré ; & dans le cas ,
où il leur refteroit encore un fervice à faire
après lefdites fix années , qui leur feront
comptées , comme s'ils étoient réellement
reftés chés les Marchands ou Maîtres , foitcomme
Apprentifs , foit comme Compagnons
, ils pourront le finir chés les mêmes
Marchards ou Maîtres , ou chés tels autres
qu'ils
1894 MERCURE DE FRANCE:
qu'ils voudront choifir , fans qu'on puiffe
leur imputer , ni l'âge , ni l'interruption du
tems , & fans qu'ils foient obligés de tranfporter
, ni valider leurs anciens Brevêts.
Veut S. M. que tous les Garçons & Comfoient
ad- pagnons , qui feront dans ce cas ,
mis à la Maîtriſe fans difficulté , après leur
apprentiffage & compagnonnage finis de la
maniere ci - deffus expliquée , en juftifiant
feulement de leurs anciens Brevêts , & des
Certificats de leur fervice . Permét S. M.
aux Marchands des fix Corps , & aux Maîtres
des Communautés , de recevoir chés
eux , ceux defdits Miliciens qui voudront
reprendre leur état , & de leur donner les
Brevêts & Certificats , dont ils auront befoin
pour le tems qui restera à expirer de
leurs anciens fans qu'ils puiffent
être inquiétés , dérogeant à cet effet ,
pour ce regard feulement , aux ftatuts & réglemens
des Communautés : & en cas de
conteftations , veut S. M. qu'elles foient
portées devant le Sieur Lieutenant de Police
, pour les juger fommairement , lui en
attribuant toute cour , jurifdiction & connoiffance
; & icelle interdifant à toutes fes
Cours & autres Juges , fauf l'appel au Confeil
, &c.
engagemens ,
TABLE
TABLE .
PIECES FUGITIVES. L'Amour vaincu par la
Raifon , Idille , 1683
1698
Extrait de l'Oraifon Funebre du Card,deFleury , 1688
Paraphrafe de deux Vers Latins ,
Lettre au fujet de Gui de la Tour , Evêque de Clermont
,
1699
Epitre en Vers de M. d'Arnaud à Mlle de B*** . 1706
Differt fur le Syftême des petits Tourbillons, 1708
Traduction de l'Ode d'Anacréon fur les Richeffes
,
1729
Parties de longue Paume , jouées à Dourdan &
Etampes , 1730
1733 Vers à M le Gauffin ,
Obfervations fur l'abbregé de la Vie des Evêques de
Coutance ,
1734
Le Procureur
Borgne
& le Procureur
Manchof
Conte,
1742
Queft. importante
, jugée au Parlem . de Paris, 1743
Vers à Mad . *** pour le jour de fa Fête , 1748
Explication
d'une Pierre gravée , antique ,du Cabinet
du Chevalier
D, L. R.
L'Etude
, Ode ,
1759
1751
Mandement de l'Archevêque d'Avignon , au fujet
d'une nouvelle Société nouvellement formée
dans fon Diocèfe , 1756
Réponse en Vers à une Queſtion propofée dans le
Mercure de Juin ,
Lettre fur l'origine du mot Vipa
1759
1761.
Epitre enVers à M. Bouguer,la veille de ſa Fête , 1769
Ex. de Lettre fur la Topographie du Cotentin , 1775
Vers à M. le Marquis & à Mad, la Marquife de
M ..
A Mile leur fille ,
Explication de deux Paflages de Virgile ,
Le Médecin mis en réputation , Conte,
1778
1779
ibid.
1789
Lettie
1787
Lettre au fujet de la Chronologie & de la Topo
graphie des Légendes ,
Vers pour les Portraits de M. & de Mad. Deshayes ,
1796
Explication des Enigmes & du Logogryphe du Mercure
de Juillet ,
Enigme & Logog yphe ,
1797
ibid.
NOUVELLES LITTERAIRES , DES BEAUX- ARTS,& C.
Nouveau Recueil de Differtations fur l'Hiftoire
Ecclefiaftique & Civile de Paris , 1800
Supplément au Dictionnaire Economique , 1801
VII. & VIII . Tomes de la Vie des Honi Illuft . bid.
Nouv . Edit. du Diction . de l'Abbé Antonini , ibid.
Le Guide des Accoucheurs ,
Hiftoire de Grece ,
Coûtume d'Auxerre ,
Abbregé de l'Hiftoire ancienne ,
ibid.
1802
1803
1804
185
De la réformation du Théatre ,
Programme d'un nouveau Recueil de Poëfie , ibid.
VI. Tome des Mémoires
pour
fervir à l'Hiftoire
des Infectes ,
ibid.
Coûtume de Paris , &c.
1806
ibid.
1807
Differtation fur la Géométrie ,
Elémens de la Guerre , & c
Le parfait Ingénieur François , &c.
1812
Nouveau Tarif du'Toifé de la Maçonnerie , 1816
Principes du Systême des petits Tourbillons , 1817
Differt.fur un Temple octogône, & Remarques,i› id,
Arnoldi Vinnii ] C. nota , &c.
Méthode générale pour guérir le Rhume ,
Les Moeurs & les Ufages des Grecs ,
1823
1824
ibid.
Les deux premiers Volumes de l'ancienne Verſion
Italique de l'Ecriture Sainte ,
Nouvelle Edition des OEuvres de Brantôme ,
ibid.
1826
Extrait de Lettre écrite de Troyes fur un Etabliſſement
Académique ,
Eltampes nouvelles ,
1827
1831
Chanfon
Chanfon notée 1833
ibid. Spectacles ,
Les Caractéres de la Folie , nouveau Ballet repréfenté
à l'Opera , 1834
ibid.
La Mort de Cefar , nouvelle Tragédie repréſentée à
la Comédie Françoiſe ,
Les Indes chantantes , ou les Incas , Comédie repréfentée
par les Comédiens Italiens , 1835
Artitices nouveaux à la Comédie Italienne , 1836
La Fontaine de Sapience , nouvelle Piéce repréfentée
à l'Opera Coinique ,
Jeune Danfeufe , âgée de 7 ans ,
Lettre à fon fujet ,
ibil..
1837
ibid.
Nouvelles Errangeres , Turquie , Ruffie , & c. 1839
France , nouvelles de la Cour , de Paris , &c. 1859
Régimens donnés
M. de Bernage élú Prévôt des Marchands ,
ibid.
1860
Proceffion folemnelle faite à Paris , en exécution du
Vou de Louis XIII,
Nouveaux Echevins ,
Proceffion des Carmes
1862
ibid,
ibid.
Fête de S. Louis célébrée à l'Académie Françoiſe , à
celle des Infcriptions & Belles- Lettres , & à celle
des Sciences , & Prix d'Eloquence donné , 1863
Audience des Deputés des Etats de Languedoc, ibid.
Audience de Congé du Nonce du Pape , 1864
Régimens donnés , ibid.
1865
1868
Statue Equeftre de Louis XV . placée & découverte
à Bordeaux ,
Concert Spirituel au Château des Tuilleries , 1867
Concert d'Inftrumens au même Lieu ,
Expofition des Tableaux au Salon du Louvre , ibid.
Pompe funebre & Service folemnel , célébré à l'Ab.
de Chelles , pour l'Abbefie Mad, d'Orleans, 1869
Morts ,
Arrêts notables ,
1884
1889
Errata
Errata du premier Volume de Juin.
Page 1191. ligne 21. de Vénus , depuis hors d'état
de fervir , lifez , devenus depuis hors d'état
de fervir. P. 1228. 1. 22. fon fils aîné , l . à ſon fils
aîné.
Fantes à corriger dans ce Livre.
PA10.118. refide , L. refide . P. 1703. l . 5. ans ,
Age 1686, à la reclame , Un , lifez , Qu'un.
7. dans. P. 1705. 1. 19. s'alliter , l . s'aliter . P. 1709.
1.2 . du bas , celle , l . par celle . P. 1711. l . 5. parcourreroit,
/. parcourroit . P. 1724. 1. 13. conclurre,
1.
1. conclure. P.1727 . 1. 28 une , l . un . P. 1728. Į . 17.
ôtez la virgule après feroient . P. 1738. l . 7 , près , l .
prêt. P. 1742. 1. 20. lorgue , . lorgne . Ibid. 1. derniere
, n'en , l . rien . P. 1743. 1..15 . fcife , l . fife . P.
1744. 1. 9. & 17. Dunot , Bunot. P. 1753. l . 10.
effort , l . effor. P. 1760 l . 3. la , l. ta. P. 1765. L
premiere , incolumen , 1. incolumem. P. 1772. 1. 9.
fccrette , 1, fecrette . P, 1773. 1. 20. l'Allouette , f.
l'Alouette . P. 1803. 1. s . du bas , relié , l . reliée . P.
1809. 1. derniere , les , l . le . P. 1816. l . 20, ſupplée ;
fupplée. P. 1837. 1. 21. des . 1. de.
命
La Planche gravée doit regarder la page
La Chanfon notée , la page
1710
1833
DE FRANCE ,
DÉDIÉ AU ROT.
JUILLET. 1743 .
RICOLLIGIT
SPARGIT
"pillow
Chés
A PARIS ,
GUILLAUME CAVELIER
ruë S. Jacques.
La Veuve PISSOT , Quai de Conty ,
à la descente du Pont- Neuf.
JEAN DE NULLY , au Palais .
M. DCC. XLIII.
Avec Aprobation & Privilege du Roy,
THEN 7 YORK
PUBLIC LIBRARY
335240 ▲
VIS
A
ASTOR , LENOX AND
TILDEN FOUNDATIONS
150
ADRESSE génerale eft à Monfieur
,
>
à - vis la Comédie Françoife , à Paris . Ceux
qui pour leur commodité voudront remettre
leurs Paquets cachetés aux Libraires qui vendent
le Mercure , à Paris , peuvent je fervir.
de cette voye pour les faire tenir.
On prie très-inftamment , quand on adreffe
des Lettres on Paquets par la Pofte , d'avoir
foin d'en affranchir le port , comme cela s'eft
toujours pratiqué , afin d'épargner , à nous la
déplaifir de les rebuser , & à ceux qui les en
voyent , celui , non feulement de ne pas voir
paroître leurs Ouvrages , mais même de les
perdre , s'ils n'en ont pas gardé de copie.
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les Particuliers qui fouhaiteront
avoir le Mercure de France de la premiere
main, & plus promptement , n'auront qu'à
donner leurs adreſſes à M. Moreau , qui aura
foin de faire leurs Paquets fans perte de tems,
de les faire porter fur l'heure à la Pofte, qu
anx Meſſageries qu'on lui indiquera.
PAIX XXX, SOL
MERCURE
DE
FRANCE ,
DÉDIÉ AV
ROT
JUILLET. 1743.
**********.
PIECES
FUGITIVES,
en Vers & en Profe.
T
EPITRE
A
MERCURE
Oi, dons les talens & l'adreffe ;
Le mérite & l'agilité ,
Le brillant , la varieté ,
La compiaifance & la foupleffe ,
Ton mérite , tout à la fois ,
La préférence des Emplois
Ambaladeur & d'Emiffaire ,
A ij Da
1470 MERCURE DE FRANCE
De Courier , de Dépofitaire ,
D'Interpréte & de Confident
Des Dieux , des Amans & des Belles ;
Et de commun Correſpondant ,
Par qui , tour -à- tour , leurs nouvelles
Paffent , comme auffi , fort fouvent ,
Leurs démêlés & leurs querelles ;
Toi , dont les foins officieux ,
Les expédiens , les reffources ,
Te procurent cent & cent courſes ;
Qui te rendent fi précieux ;
Fils de Jupin , mon cher Mercure ,
Témoin des tourmens que j'endure ,
Apprends -moi donc quelq e fecret
Pour en informer ce que j'aime ,
Ou fais-moi ce plaifir toi- même ,
En te chargeant de mon Paquer.
Affés retenu par la crainte
De me voir refuſer ſecours ,
Las de tramer de tristes jours ,
Dans la réſerve & la contrainte ,
Je reconnois l'égarement ,
Et tout le faux pour un coeur tendre
De balancer le ſentiment
Avec la façon de le rendre
S'exprimer naturellement ;
Ne dire que ce que l'on penfe ;
JUILLET. 1743.
1473
De l'Amour ,
anciennement ,
C'étoit là toute l'éloquence ,
Tout l'art , tout le raffinement
Ces tems plus fages que le nôtre
Ne fouffrant pas que l'on foumîr
Le coeur au clinquant de l'efprit ,
Quittoient l'un en faveur de l'autre ;
Eh ! pourquoi faut- il qu'aujourd'hui
Nous penfions moins bien que nos Peres
Sous des figures menſongeres ,
Je ne donne point mon ennui'
Ni mes tranfports , ni mon martyre' ,
Ni mes peines ni mes langueurs ;
Jamais je ne laiffe au délire
Le foin de broyer ces couleurs.
Je les veux fimples , naturelles,
Et jufqu'aux moindres bagatelles ,
Je ne charge point mes Portraits ;
Je fuis ce que je veux paroître ,
Et je me fatte qu'à ces traits
On n'ofera me méconnoître.
Va donc , hâte-toi , fend les airs ;
Ta fçais qu'aux Amans véritables
Les délais font infupportables
A celle , qui forge mes fers ,
Fais lire & mon Ole & ces Vers ;
Confirme-lui ce que j'annonce ,
A iij
琛
☀ :72 MERCURE DE FRANCE
Et rapporte-m'en la réponſe ,
Le plutôt que tu le pourras ;
Sois fûr de ma reconnoiſſance ;
La meſure en eft l'importance
Du fervice que tu rendras ;
Que ne puis- je de ce meſſage
Te difpenfer & me faifir !
› Mais fi mon aveu mon langage
Peuvent jamais me reuffir ,
Je te promets & je m'engage
Chaque mois de te rendre hommage
Et te confacrer mon loifir,
Jufqu'à ce qu'au bon fens rebelle
La Rime le veüille affervir ,
Ou que le devoir me rappelle
Dans le voifinage du Mein ,
Sur les rives de la Mozelle ,
Sur le Danube ou fur le Rhin.
Mon
T ...
Le Chevalier de P......
ODE
A Mile T. A. D. M.
On état n'eft pas ordinaire ,
il eft tems de parler ;
Il en coûte trop pour fe aire
A qui ne fait diffimuler
Ma
JUILLET. 1743 1473
Ma paffion devient publique ;
Etre rêveur , mélancholique ,
Milantrope , inquiet , jaloux ,
Ne fe pas retrouver foi-même ,
N'eft- ce pas dire qu'on vous aime ,
Et que l'on n'aime plus que vous
*
Déja ce début vous étonne
Et vous ne vous attendez pas
Qu'une jeune plume crayonne
Des fentimens bien délicats ;
Trop ennemi du ton prophane ,
Je ne fçais point être l'organe
Des feux criminels d'Anteros ,
Ni dans mes Vers , comme Catule ,
Rendre un culte honteux , ridicule
A la Déelle de Paphos.
*
Du mérite feal idolâtre ,
Je ne prodigue point l'encens
A ce petit Efant folâtre ,
Qui ne regne que fur les fens ;
Mais ne croyez pas , je vous prie ,
Les noeuds formés par Uranie ,
Moins forts que ceux de Cupidon ;
Evadné même , en fa conduite ,
A j
Nour
1474 MERCURE DE FRANCE
Nous apprend que l'on les évite
-Plus ailément qu'on ne les rompt.
Après la premiere jeuneſſe ,
Libre de tout engagement ,
Qui m'auroit dit que la tendreffe
Put prendre auffi ſubitement ?
Il n'appartient qu'à vous , fans doute ,
De connoître & percer la route
Des coeurs obftinés , endurcis ;
Pour s'être cru moins acceffible ,
Le mien n'en eft que plus fenfible
Aux charmes dont il est épris.
*
L'éloignement , qui d'ordinaire ;
Rend le calme aux coeurs amoureux ,
Jufqu'ici n'a fait , au contraire ,
Qu'irriter encor plus mes feux ;
N'efperez donc pas que l'abſence.
Me rende à mon indépendance ,
Ou me livre à d'autres amours ;
Le pur eft fondé fur l'eftime ,
Et jamais celui , qui m'anime ,
N'aura de terme que mes jours.
*
Entre la crainte & l'eſpérance
Serai -je
JUILLET. 1743 . 1475
Serai- je long- tems partagé ?
Trop de réſerve & de prudence
Tiendroit beaucoup du préjugé ;
Pourquoi faut- il que la fageffe,
Par excès de délicateffe ,
Empêche un éclairciffement ?
Je l'apprehende & le defire ,
Mais l'incertitude eſt le pire ,
Et de tous les maux le plus grand,
Jeu du hazard & du caprice !
Un fimple accident me conduit ;
Famille , accueil , façons , hofpice ,
Maintien , propos , tout me féduit ;.
Les traits partent avec adreſſe ;
Je reçois celui qui me bleffe ,
Avant de l'avoir redouté ;
Et depuis , mon ame éperdue
Dans une feconde entrevûë™
Perd tout-à-fait fa liberté.
15
Avez-vous rien qui m'intereſſe >
Plus j'examine & plus je voi
De graces , d'attraits , de finefle ,
De ce certain je ne fçais quoi ;
Ce n'est pourtant pas à ces charmes
Que
1476 MERCURE DE FRANCE
Que je rends feulement les armes ;
Ce n'eft pas ce qui m'attendrit ,
Et je conviens que je préfere
L'enjoûment , le bon caractére
Et les agrémens de l'efprit.
*
Eft-il un deftin plus bizarre
Je pénetre dans l'avenir ,
Je voi les maux qu'il me prépare ,
Et ne fçaurois les prévenir ;
La froideur & l'indifference
M'annoncent affés par avance
Des tourmens encor ignorés ,
Mais non . 、、、、je n'en fuis plus le maître
Ni ne voudrois chercher à l'être
Des tran ports que vous m'inſpirez.-
*
De vos rigueurs , tendre victime >
Je demande un dernier effort ,
T ..... vous pouvez , fans crime ,
Décider tout haut de mon fort ;
Craignez vous d'être trop crédule ? >
Quel peut être le faux fcrupule
Qui me ravit jufqu'à l'eſpoir ?-
Ceffez du moins d'être muette ;
Prononcez , je vous le répere ;
C'eſt affés donner au devoir,
La
JUILLET. 1745. 1477
La Morale la plus auftére
Ne défend jamais le retour
Pour quiconque aime fans myftére ,
Et le confefle fans détour ;
La félicité pure , eft celle
Qui n'ait d'une ardeur mutuelle ;
Que ne fuit point le repentir ;
Un mot la peut rendre durable ,
Et l'attachement véritable
N'a rien dont on doive rougir.
*
Dans mes refpects toujours févére
Vous ne me verrez pas traiter
Les fermens comme une chimére ,
Que rien difpenfe de garder ;
Ainfidonc point de défiance
Sur mes égards , ma déference ,
Ni fur les douceurs de l'Hymen ;
Pour vous ce n'eft pas un Problême ;.
Et le Myrthe eft fair pour l'Emblême
De votre bonheur & du mien .
*
Je conviens auffi qu'à la lettre 3 ,
On ne peut trop déliberer ,
Loifqu'il s'agit de fe permettre
Un Lien qui doit toujɔurs durer.
Quoique cette Loi m'épouvante ,
Avis
L'affaire
1478 MERCURE DE FRANCE
L'affaire eft affés importante ,
Pour mériter réfléxion ,
Et je ne trouve pas à dire
Que l'on veuille , avant de ſouſcrire ,
Prendre confeil de la raifon.
*
Si cependant j'ofois paroître ,
Et me donner de petits foins ,
Le fort me ferviroit peut être ,
Lorfque j'y compterois le moins ;
Qui fçat i l'aveugle fortune ,
Laffe d'une plainte importune ,
N'aideroit pas à nous unir?
Mais quand j'en aurois le préfage ;
Ce n'est qu'avec votre fuffrage
Que je voudrois y parvenir.
*
Hélas ! que ne puis-je vous rendre
Ce que deux coeurs bien affortis
Trouvent de charmes à s'entendre ,
Et goûtent de plaifirs permis !
Plus d'obftacles , plus d'intervalle ;
Autre Procris , autre Céphale ,
Nouvelle Antigone , autre Hémon ;
Grands Dieux ! qu'il feroit agréable
D'ain fi réalifer la Fable
De Baucis & de Philémon
REPONSE
JUILLET. · 17437 1479
の
888
REPONSE de M. Néricault Destouches,
à la Lettre de M. le C. de C. du 28.
Mai
1743
J'Apprends avec
›
une joye inexprima
M. que mes Lettres contre les
Incrédules & les Libertins , commencent
à faire quelque impreffion fur vous , &
je ne defefpere pas de vous remettre enfin
dans la bonne voye , puifque vous me de
mandez de nouvelles Demonftrations contre
l'Incrédulité. J'avois abfolument abans
donné cette carriére , parce que des gens
exceffivement délicats , trouvent mauvais
que j'aye eû la hardieffe d'y courir , & prétendent
que cet effor me rend ridicule
mais vos inftances réiterées me forcent d'y
rentrer , & duffent les kieurs épuifer fur
moi leur piquante ironie , j'efluyerai volontiers
la honte d'en être l'ob , et , pourvú
que je puiffe acheter à ce prix , la confolation
d'avoir pû contribuer à vous faire
déferter un parti , qui vous entraînoit à
votre perte infaillible, en deshonorant
vos lumiéres , votre efprit & votre raiſon.
Je débute par un Axiôme inconteſtable.
Le voici..
480 MERCURE DE FRANCE
Il faut être aveugle , ou fou , ou enra
, pour ne pas croire en Dieu , & il
faut être exceffivement ignorant , ou exceffivement
vicieux , pour ne vouloir pas
croire en Jefus Chriſt.
Après la grace & la volonté , de Dieu
rien n'a plus contribué à l'établiffement &
au progrès de la Religion Chrétienne
que la beauté & la févérité de fa Morale.
Aujourd'hui c'eft cette Morale toute divine
, qui révolte les efprits fuperficiels &
incapables de réflexion.
Livrés à leurs paffions , ils ferment les
yeux à la lumiére
>
& ils aiment mieux
rifquer tout , que de fe contraindre
rin.
en
Pour mieux réſiſter à la Vérité , ils font
de leurs penchants vicieux un rempart contre
elle . Ils la méconnoiffent ils la rejettent
, ils la nient ; ils fe Attent d'être
parvenus à l'incrédulité . Ils croyent ne rien
croire .
,
L'exemple , les fociétés le ton de cequ'ils
appellent la bonne Compagnie , les
fortifient contre les fcrupules. La mode
de n'en avoir aucun , les féduit. La craine
d'être ridicules , les endurcit , & à la fin ,
ils fe chargent de tant de crimes
n'efperant plus de pouvoir les effacer , ils
, que
prennent
JUILLET.
1481 17433
ou que
Prennent le parti de croire qu'il n'y a point
de crime , parce qu'il n'y a point de Loi
celle qui les condamne , n'eft qu'une
fraude picufe , inventée uniquement pour
maintenir l'ordre , & pour mettre une forte
de frein à la cupidité & à la concupiſcence.
Ils ne reconnoiffent tout au plus qu'une
Loi Naturelle , qu'ils , interprêtent à leur
fa taifie & qu'ils fubordonnent à leurs
paffions dominantes .
Arrivés à ce point de dépravation , ils
regardent la Réligion Chrétienne comme
un joug infupportable , auquel il n'y a que
les fots qui puiffent fe foumettre , par- là
ils fe rendent abſolument incapables d'examiner
fi cette Réligion eft divine , conme
elle l'eft , ou fi elle ne l'eft pas , comme
ils le prétendent.
Leurs paffions ont prononcé fur cette ter
rible matiére , & leur raifon , trop affoiblie ,.
ne peur plus fe faire entendre contre leurs
paffions.
Elle a beau , quelque - fois , reprendre un
peu de vigueur , en ſe hazardant à leur repréfenter
le peril qu'ils courent. Ils la traittent
de folle & de pufillanime , qui s'eft
imbue des préjugés de l'enfance & de l'éducation
, & qui ne confeille rien que de
foible & de puérile.
A leur avis , les paffions font bien plus
judicieuses.
1482 MERCURE DE FRANCE
judicieufes. Elles ne confeillent que ce qui
fatte les fens , & ce n'eft que l'empire
des fens qui procure un folide bonheur.
Mais cette raifon , cette ame , cette penfée
, que deviendra-t'elle car enfin ils ne
peuvent fe cacher qu'ils raifonnent , & qu'il
faut mourir.
و
Ce qu'elle deviendra fe répondent ils
eux mêmes ? elle mourra comme le corps
Comme le corps ? Une fubftance qui
penfe eft- elle materielle pour fe diffoudre
? Pourquoi non ? Dieu n'a-t'il pas pû
faire une portion de matiére fi fubtile
qu'elle fût capable de concevoir , de déliberer
, de raifonner , de choifir ? Ils concluent
de fa toute Puiffance , qu'il l'a pû ,
& par le plus ridicule de tous les Sophif
mes , ils difent , s'il l'a pû , cela eft done
vrai , & par conféquent , mon ame mourra
avec mon corps. Tel eft le beau raifonne
ment des Déiftes & des Libertins.
Dieu , tout Puiffant qu'il eft , peut-il
faire une Montagne fans Vallée ? Peut- il
faire qu'une Partie foit plus grande que le
Tout? Non vraiment. Et comment vou
lez -vous donc , Mrs , que de l'étenduë il
ait extrait la penſée , à force de rafiner la
matiére ? Peut-on extraire une perfection
d'un fujet qui ne l'a pas & qui ne peut
abfolument l'avoir ? Çela eſt abfurde. Donc.
Votre
JUILLET. 1743 1483
totre ame ne peut jamais fe diffoudre . Donc
elle eft immortelle .
Si elle eft immortelle , que devient- elle
après votre mort ? Retourne t'elle à fon
Auteur , pour être jugée felon fes oeuvres ,
ou paffe t'elle en d'autres corps pour les
animer tour à tour à toute éternité ? c'eſt
l'un ou l'autre abfolument. Car enfin , ik
faut que cette ame qui ne fe diffout point ,
& qui doit abandonner ce corps , aille réfider
en quelque autre lieu.
Croyez - vous à la Metempsycofe ? Je vous
croi encore trop fenfes , pour donner dans
une opinion fi folles qu'à l'exception de
fon Inventeur & de fes Sectateurs , tous les
Siécles & tous les Philofophes ont rejettée
comme impertinente , & ont releguée dans
les Indes parmi des Peuples ftupides , grof
fiers , ignorans qui ne peuvent impofer
à des hommes inftruits & fenfés , & à des
Nations , qui ont confervé la faculté de penfer
plus fainement.
›
,
Mais enfin , fuppofons pour un feul mo
ment l'abfurde & l'impoffible. Je vous
accorde donc , fi vous l'exigez , que votre
ame fe promene de corps en corps . Mais
qu'y gagnez-vous ? felon votre fuppofition
même , elle fera toujours fujette à un Etre .
tout Puiffant qui l'a créée , qui doit s'être
réfervé le droit de la juger , & qui par
conféquent
484 MERCURE DE FRANCE
>
conféquent la punira rigoureufement , fi elle
a prévariqué. Car je vous défie de concevoir
un Dieu , fans concevoir un Etre auffi
jufte que puiffant. Attribuez -lui l'infinie
bonté vous le devez , mais il faut que
vous lui attribuyez en même - tems une jufrice
parfaite , auffi fevére qu'infaillible . Les
Difciples de Pythagore la reconnoiffoient , &
la faifoient agir en conféquence ; & par
conféquent ils craignoient des peines , &
ls efperoient des récompenfes , comme
une fuite néceffaire de leurs bonnes ou de
leurs mauvaiſes actions . Ils prêchoient la
vertu ; ils déclamorent contre le vice. Done
ils regardoient la vertu comme la fource
des biens à venir , & le vice comme fujet
aux plus terribles punitions. Donc le
Syfteme de la Métemplycofe , tout infenfe
qu'il eft , ne pourroit difpenfer les hommes
d'aimer le bien , & d'éviter le mal...
Et perfonne n'a jamais ignoré que faire le
bien , confifte à ne fuivre que les Loix de
la Juftice & de la Raifon , & que le mal
confifte à fe permettre ce qui leur eft contraire
, & ce qu'elles défendent : ainſi promenez
votre ame , tant qu'il vous plaira ;
elle eft innocente & pure , elle fera
récompenfée ; fi elle eft fouillée de crimes
& de vices elle fera feverement punie.
Quelles tristes réflexions pour les libertins
›
&
L
JUILLET.
17430 1483
& pour les voluptueux . Quoi donc ! ils
ne trouveront pas la moindre reſource
parmi les rêvéries même des Philofophes ,
qui puiffe les autorifer à être vicieux ou
méchants , & fouvent l'un & l'autre ? Ils
ne peuvent fe diffimuler que leur ame eſt
immortelle qu'elle a été créée par un
Dieu auffi jufte que bon , & qu'il fe réferve
à la punir , fi elle fe fouille de crimes .
De quel côté fe tourneront- ils pour éviter
cette punition ? Leur raiſon a beau s'étourdir
, & leurs paffions fe révolter ; la
volupté a beau les envelopper dans fes filets
, la confcience ne peut fe taire toujours
, elle s'éleve , elle s'inquiette , elle
crie de tems en tems ; & il n'y a que
le fracas du luxe , que le tumulte des
paffions , que la fureur du plaifir , qui
puiffent l'empêcher d'être écoutée , & rendre
fes cris inutiles. Helas ! ils ne le font
que trop fouvent fatiguée de lutrer en
vain , elle fe tait , elle s'endort , & les libertins
tombent enfin dans une affreufe
lethargic , qui ne fe diffippe qu'aux approches
de la mort , & qui même ſouvent
les accompagne jufqu'au tombeau .
Funefte effet de la révolte & de la va
nité ! Je dis de la vanité , car je connois
les libertins ; je les ai long - tems étudiés
& approfondis. L'orgueil , l'ambition & la
uvaiſe
1486 MERCURE DE FRANCE
mauvaiſe honte , ne font gueres moins I
caufe de leur dépravation & de leurs égaremens
, que le pernicieux attrait de la
volupté. Je pourrois entrer dans des détails
infinis , pour vous le prouver , & des
exemples fameux & frappants ne me manqueroient
pas , mais il ne s'agit pas ici de
faire une Satyre , & de m'attirer de nouveaux
ennemis ; il eft queftion de vous
prouver la vérité , fans chercher d'autreappui
qu'elle - même. L'ame de l'homme eſt
immortelle. Je viens de vous le démontrer
; & tout homme qui fait un légiti
me ufage de fa raifon , ne peut fe cacher.
cette vérité. Les pitoyables Argumens de
Lucrece ne peuvent lui porter la moindre
atteinte , & notre fiècle , tout per vers
qu'il eft , eft trop éclairé , pour donner dans
fes Sophifmes , fondés uniquement fur une
difpute de mots
& fur une fauffe définition
de l'ame. Il faut donc , comme je
vous l'ai déja dit , qu'après qu'elle eſt ſeparée
du corps , elle aille réfider ailleurs.
9
Paffe t'elle de corps en corps ? vous ne
pouvez plus d'outer que cette opinion ne
foit extravagante. Cette ame immortelle
retourne donc à fon Créateur , Créateur
infiniment jufte . Quelle terrible vérité !
S'il eft infiniment jufte , traitera - t'il l'ame
d'un fcelerat , comme celle d'un homme
་
qui
JUILLET. 1743 : 1487
qui a vecu dans l'innocence , ou qui s'eſt
repenti de fes égaremens ? cela ne peut
être. Je croirois plutôt que Dieu n'exiſte
pas ; il faut donc que l'ame du juſte ou
du penitent foit récompenfée , & que
l'ame du fcelerat ou de l'impénitent foit
punie. Les hommes plongés dans les plus
épaiffes ténebres de l'Idolatrie ont con
fervé cette idée de la Juftice divine . Point
de Dieu fans Juftice. Point de Juſtice fans
récompenfe pour les bons , & fans punition
pour les méchants.
>
Mais qu'eft- ce que le bon ? Qu'est- ce
que le méchant ?
Le bon , eft celui qui fuit les Commandemens
de Dieu .
Le méchant , eft celui qui ne les fuit
pas.
Et où font-ils ces Commandemens ? Qui
me les enfeignera ?
L'ancien & le nouveau Teftament. Les
Commandemens & les Traditions de l'Eglife.
,
Eh ! qui m'affurera. direz -vous , que
toutes ces fources , où vous voulez que
je puife les Loix que je dois fuivre , émanent
directement de Dieu ?
Qui vous l'affurera ? ce qu'il y a de plus
für fous le Soleil. Tout vous en fera garent
fi vous croyez les gens inftruits ;
1488 MERCURE DE FRANCE
›
ou fi vous prenez le foin de vous inftruire
par vous- même . Prenez , lifez , écoutez
bientôt vous ferez convaincus que Dieu
exiſte , que Dieu eft jufte , & qué fes
Loix font contenues dans les faintes Ecritures
, & dans les Traditions & les Com .
mandemens de l'Eglife . Mais je vous con
nois , orgueilleux , incrédules ; à moins que
Dieu ne faffe un miracle pour vous , jamais
vous n'aurez le courage ni la volon
té d'entreprendre ce falutaire examen . Votre
présomption , votre pareſſe vos paffions
s'y oppoferont toujours , fi Dieu n'a
pitié de vous. Un refpect humain , joint
>
tous ces obftacles , vous forcera de fermer
les yeux à la lumière , & vous ferez
affés fous pour vous expofer à être éternellement
malheureux , plutôt que de cou
rir le rifque de paroître foibles & ridicu
les aux yeux de cette bonne Compagnie ,
qui vous guide & qui vous impoſe , &
qui peut- être produira quelque jour de
faints pénitents , dont vous ne mériterez
pas de fuivre l'exemple. Que je vous plains,
& que vous me paroiffez ridicules par la
peur exceffive de le devenir !
La Religion Chrétienne eft fondée fur
des Principes & des Faits fi inconteftables ,
qu'un bon efprit , qui prend le foin de les
méditer & de les vérifier
pêcher de s'y rendre.
ne peut s'em-
L'empire
JUILLET . 1743. 1482
L'empire des paffions n'eft que trop puiffant
; je l'avoue , & je viens de le prouver
, mais l'empire de la vérité l'eft infiniment
plus. Les paffions nous entraînent
loin d'elle , & nous la font perdre de vûë ;
mais la raiſọn , notre plus cher interêt , le
bon fems , un peu de réflexion & d'attention
, nous rameneront infenfiblement vers
elle. Nous la craignons , nous la fuyons ,
nous allons quelquefois , jufqu'à fouhaiter
qu'elle n'éxifte pas ( car de quel excès , de
quelle extravagance les paffions ne fontelles
pas capables ? ) Mais fi une fois noust
commençons à l'entrevoir , nous nous fentons
comme forcés à défirer de la voir plus
clairement. Elle a de puiffants attraits qui
nous attirent , dès que nous parvenons
jufqu'à l'approcher ; plus nons l'envifageons,
plus nous la refpectons , plus elle reprend
fes droits fur nos coeurs ; & ces droits
qui nous paroiffent fi durs & fi gênants ,
deviennent pour nous un joug , auquel nous
nous accoûtumons avec foumiffion , d'abord ,
& enfuite , avec un plaifir inexprimable.
Voilà , M. ce que vous éprouverez bientôt
; je vous le prédis , pour peu que vous
perfiftiez à vouloir ouvrir les yeux à la
lumiére qui commence à vous frapper.
Comparez la vérité à l'erreur , fource de
votre révolte & de vos égaremens , vous
You
£490 MERCURE DE FRANCE
vous étonnerez que l'erreur ait pû vous
féduire , jufqu'au point de vous faire haïr ,
de vous faire craindre, de vous faire méprifer ,
de vous faire éviter la fource des vrais plaifirs,
des feuls plaifirs ,dignes d'une créature raifonnable
; difons plus , d'un honnête homme .
Car au fond , M. qu'eft ce qu'un Chrétien
? j'entends un bon Chrétien . C'eſt
vraiment l'honnête homme. Que prêche la
Morale Chrétienne d'aimer Dieu. Eft - il
rien de plus jufte ? & fon prochain comme
foi- même. Eft- il rien de plus raifonnable
, rien de plus capable de maintenir
l'ordre , la paix & la bonne foi ?
Si tous les hommes aimoien Dieu , ils
feroient tous leurs efforts pour ne le point
offenfer. Que de loüables actions réfulteroient
de ces efforts !
Si tous les hommes s'aimoient fincére
ment , quelle tranquillité , quelle douceur ,
quelle harmonie , regneroient dans le mon
de ! par conféquent quel feroit le bonheur
des hommes il égaleroit en cela
celui des Anges.
Qu'est-ce donc après tout , que la Réligion
Chrétienne exige de nous ? que nous
foyons affés juftes & affés raisonnables
pour nous rendre heureux dès ce monde .
ci. Car la Religion Chrétienne , bien pratiquée
, rameneroit , ou pour mieux dire,
feroit
JUILLET. 1743. 1491
feroit naître le Siécle d'or . Lifez les Actes
des Apôtres vous envierez le bonheur
& la joye ineffables que goûtoient leurs
Profelices , par l'amour & la charite qui
regnoient entr eux.
?
Mais & voici ce qui eft dmirable
) elle ne fe borne pas , cette Religion
Chrétienne , à vouloir nous rendre vraiment
heureux fur la Terre , en nous excitant
à pratiquer fa Morale fi fainte ,
fi conforme à nos vrais interêts ; pour
nous recompenfer de nous y être procurés
une folide félicité elle nous proinet
une félicité fans comparailon plus parfaite,
& qui ne finira jamais . Et nous n'aimerons
pas Dieu qui nous aime , jufqu'à nous
donner les moyens de nous rendre heureux
, pendant les tems , & pendant l'éternité
En vérité l'homme eft incompréhenfible.
Mais non. La caufe de fon aveuglement
& de fes erreurs n'eft que trop
facile à comprendre : c'eft le funefte effet
de l'égarement de fon premier Ancêtre.
Sans cette cauſe fi trifte & fi déplorable
d'où proviendroient nos injuftes dégoûts ?
Pourquoi des plaifirs faux & paffagers ,
nous feroient - ils abandonner nos vrais in
terêts ? Pourquoi ces plaifirs , fi peu dignes
de nous , & fi peu capables de nous
fatisfaire , nous paroîtroient- ils préférables
B
1492 MERCURE DEFRANCE
?
à des plaifirs infiniment plus réels ? Enfin ,
pourquoi ferions- nous fi infirmes & fi méchants
Notre premier Pere a pris le change
, & nous le prenons auffi . O déplorable
Adam que ta foibleffe nous coûte
de maux , & que tu nous a rendu de pitoyables
Créatures !
Mais prenez y garde , M ... cette juſte
réflexion prouve invinciblement la vérité
de la Religion Chrétienne . Où trouver ailleurs
la vraie cauſe du mal Moral & Phyfique
? Tous les Philofophes Payens l'ont
cherché vainement. Ils n'ont dit & penfé
que des abfurdités fur un fujet , fi incompréhensible
à tout homme , que Dieu n'a
pas éclairé par fa révélation.
Quelques impies , difons mieux , quelques
infenfés comme Manès & fes déteftables
Difciples , ont cru qu'ils avoient
coupé le noeud Gordien , en imaginant
deux Dieux , dont l'un infiniment bon ,
étoit le principe de tout bien , & l'autre
infiniment méchant , étoit le principe de
tout mal ; en forte que ces deux Etres
diamétralement oppofés , fe combattoient
fans ceffe , l'un pour faire notre bonheur ,
& l'autre pour nous rendre malheureux.
Mais quels Monftres que deux Etres
tout puiffants ! Quels Etres Chimériques !
Comment peut-il y avoir deux Infinis ?
Ne
JUILLET. 1743. 1493
Ne voilà- t'il pas une belle folution d'un
Problême inexplicable , fans la lumière de la
Révélation de cette Révélation divine
qui nous ouvre les yeux , & qui fatisfait
pleinement notre raiſon ?
,
Dieu forme l'homme pour le rendre heureux
pour toute l'éternité , ( deffein digne
d'un Etre infiniment bon ) fi un homme
n'abuſe pas de fa liberté , pour défobeir
à la Loi de fon Créateur : deffein digne
d'un Dicu infiniment jufte.
>
Quelle eft cette Loi qu'il lui impofe ?
Une Loi unique , dont l'obſervation n'eſt
nullement pénible . C'eft de ne jamais goûter
un fruit dont le Tout puiffant fui défend
l'ufage.
Il étoit bien jufte que Dieu donnât matiére
à fa Créature , de fignaler fon obeiffance
& fa foumiffion : c'étoit la moindre reconnoiffance
qu'elle dût à fon Créateur."
11 falloit bien qu'elle eût fans ceffe un moyen
de faire quelque effort fur elle- même ,
pour le conferver la joüiffance de fon bonheur.
teur
Mais l'homme , ingrat envers fon Créa
fe laiffe féduire par les pernicieux
confeils de fa femme , ou plutôt du Démon
qui l'avoit féduit elle - même ; & plein
d'une ambition funefte , qui le fait afpirer
à devenir égal au Tout-puiffant , il ofe
Bij enfin
1494 MERCURE DE FRANCE
enfin goûter le fruit défendu , & fe rend
indigne de tous les bienfaits , dont il avoit
été comblé par ce divin Maître , qui pour
le punir , comme il ne l'avoit que trop
mérité , le chaffe du Paradis terreftre , fejour
délicieux , & le condamne , lui & fa déplorable
pofterité , au travail , aux fouffrances
, aux maladies , à la mort . L'homme
eft maudit. Fatale malediction qui affujertit
fon ame aux mouvemens de la concupifcence
, & fon corps aux infirmités ! Malediction
terrible & trop méritée , qui condamne
cette ame & ce corps à fe féparer un
jour , & à rompre douloureufement les liens
qui devoient les unir éternellement ! La
nourriture qu'il doit déformais fe procurer
à la fueur de fon front , devient pour
lui un aliment néceffaire & funefte , qui
porte en foi le principe de la mort.
Voilà donc le Myſtére révelé . Voilà l'Enigme
du mal Moral & Phyfique , clairement
expliquée ; & fi clairement , que tou
te autre explication , n'eft qu'un amas confus
d'erreurs & de contradictions.
Et qui nous a donné cette explication ?
C'eft Dieu lui même , puifque c'eft luimême
qui a dicté à Moile le Livre Saint ,
qui nous apprend notre origine , & la terrible
caufe de nos malheurs. Livre faint
& le plus ancien qui nous foit connu &
que
JUILLET: 17430 1.495
que la Providence a faitpaffer de fiécle en fiécle
jufqu'au notre , pour confondre l'orgueil
des impies & des libertins , & pour leur faire
voir , s'ils veulent ouvrir les yeux , les fondemens
inébranlablesde laRéligion Chrétienne .
Ouvrez les votres , M. & ne differez plus.
Je vous en dis affés pour vous y exciter , &
pour vous indiquer la voye qu'ils doivent fuivre
& qui ne peut plus vous égarer . La Grace
commence à vous éclairer , à vous toucher ;
gardez -vous de lui refifter plus long-tems ;
peut-être vous feroit-elle fouftraite, en punition
de votre réſiſtance . Confültez de plus habiles
gens que moi. Ils ont de quoi détruire
tous vos doutes. Rien ne leur eft plus facile ,
fi vous fouhaitez de bonne foi que ces doutes
difparoiffent , & fe changent en une
certitude évidente . Pour moi , je me tiendrai
trop heureux , fi je puis vous avoir
conduit jufqu'à former ces voeux falutaires.
Mes foibles lumiéres ne fçauroient vous
conduire au- delà . Plût au Ciel qu'elle's
puffent égaler mon zéle ! Vous feriez bientôt
auffi perfuadé , que je le défire , de l'in
conteſtable vérité de la Réligion Chrétien
ne. Mais je me reconnois auffi incapable ,
qu'indigne de la défendre contre les impfes
& les libertins . Vous trouverez ailleurs
mille fources pures & fécondes , où
yous pourrez puifer cette vérité divine..
B iij Cherchez1496
MERCURE DE FRANCE
:
>
Cherchez les , M. elles s'offriront à vous :
frappez , on vous ouvrira demandez
priez , vous obtiendrez , vous ferez exaucé
,& vous vous appercevrez avec autantde
joye que de furpriſe , qu'un Prophane a
cû le bonheur de vous ouvrir une carriére
, feule digne d'un aufi honnête homme
que vous , & feule capable de vous
conduire à cette félicité parfaite , que vous
n'avez jamais pû trouver , que vous ne
goûterez jamais dans ce monde , qui vous
feduifoit , & qui ne fe préfente qu'à ceux
qui ont le courage de le fuir & de le mé
prifer. J'ai l'honneur d'être , M. &c.
A Fortoifean ce 26. Juin 1743 .
洗完
MELPO ME' N E.
ELEGIE.
Jufques àquand tes coups , inexorable fort ,
Doivent-ils m'accabler fans me donner la mort ?
Et ne m'eft- tu laiffée , origine immortelle ,
Que pour couvrir mes jours d'une honte éternelle ?
Get heureux tems n'eft plus , où docile à ma voix,
Le Mortel n'écoutoit , ne fuivoit que mes Loix;
Et dans un jufte point captivant fon génie ,
N'adoptoit point l'effor d'une aveugle manie.
A
JUILLET . 1497 1743.
À l'ardeur de rimer il ne m'immoloit pas.
Mes Loix & la raifon guidoient toujours fes pasi
Et jamais Melpomene , en Public exposée ,
De ce même Public ne devint la riſée .
Je triomphois alors. Chaque inftant , chaque jour ,
D'illuftres Courtifans embelliffoient ma Cour.
Mais , de ce fouvenir à jamais poffedée ,
Mon ame , ne sçauroit en fupporter l'idée ,
Et plus , j'ai vû ma gloire au faîte de l'honneur
Plus , mon état préfent augmente ma douleur .
Je ne me plaindrois point , fi la main qui m'acca
ble.,
Offroit à ma vengeace un Rival méprifable ;
Mais de tous mes Enfans , il eft le plus cheri .
Celui , qui fut toujours men plus cher favori ;
Le Goût , c'eft ce cruel qui détruit mon Empire
Et ce cher ennemi , que je n'oſe détruire ,
C'eftlui que j'idolâtre ; & c'eft lui dont la main
Enfonce avec fureur le poignard dans mon fein .
Ciel devois - je efperer une telle injuſtice . . . .
Non , de pareils forfaits , le Goût n'eſt point com
plice.
Il ne m'outrage point. Dans ces productions ,
Ou plutôt , cet amas de folles viſions ,
Dont le bon fens gémit , puis - je le reconnoître !
N'y vois-je pas plutôt cet impofteur , ce traître
Ce monftre * dont toujours par mille & mille traits ,
* Le mauvais Goût.
B iiij J'ai
1498 MERCURE DE FRANCE
J'ai tâché , mais en vain , d'étouffer le progrès ?
Mais ce n'eft pas affés d'infulter ma mifere ;
Le barbare a le front de m'appeller fa mere.
C'est moi même , dit-il , qui dirige les fons.
Si par fois , quelqu'Auteur , fidele à mes leçons;
De fon menfonge affreux dévoile l'impofture :
Il foutient , que tout change , & que de la Nature
Ces Révolutions entretiennent l'éclat ;
Qu'il n'en eft pas
du Goût , ainfi que d'un Etat :
Qu'un Etat , n'eft brillant qu'autant qu'il eft durable
,
Que l'effence du Goût , eft d'être variable
Qu'il dépend des faifons , ainfi que des climats :
Que ce qui plaît un jour , dans l'autre ne plaît
pas ;
Que Corneille viellit , que le tendre Racine
N'excite plus en nous une terreur divine :
Qu'il .... Arrête facril ge , épargne des Héros ,
Dot ta feule fureur a caufé tous les maux ;
Et fi ton impofture ufurpe les fuffrages ,
Ne ternis pas du moins leurs celeftes Ouvrages.
Refpe &te- les , Barbare , apprends que leurs Ecrits ,
A la Pofterité , dignes d'être tranfmis
Sont les feuls , qui du Goût foient les Dépofitaires .
Ils ne font pas formés fur des vapeurs légeres
Tel's , que ces avortons que ta fureur produit ,
Que l'erreur auto.ife , & la raifon détruit .
Apprends ,
JUILLET 1499 1743
Apprends , que ces Héros , que diffame ta haine
Sont les feuls Courtifans dignes de Melpomene.
Sur leur ruine , envain tu prétends t'établir ...
Non , tous tes faux brillans ne sçauroient m'ébloüir.
Simples dans leurs récits , naïfs dans leurs pein
tures ,
Il's ne s'égarent point dans de vaines figures.
Leur pinceau n'offre aux yeux que de nobles
objets .
Tant de charmes enfin vielliffent- ils jamais ?
Le tems peut il fur eux étendre ſon Empire ?
Peut-il les terraffer ? ah ! loin de les détruire ,
Le tems les fait marcher à l'immortalité ,
Et les met à l'abri de fa fatalité.
Mais s'ils font à couvert de fes traits redoutables ;
Pour tes enfans , Barbare , ils font inévitables .
Auffi prompt que l'éclair , le tems.vole pour eux.
Et comment pourroit- il tranſmettre à tes neveux
Ces frivoles efforts d'une Verve égarée ,
Où la fage raiſon n'eft jamais préféréc ,
Où le caprice feul , décide d'un Auteur´;
Où mes régles enfin cedent à ta fureur ?
Cependant il triomphe , & dans mon infortune ;
11. ne me reste plus qu'une plainte importune.
Je vois avec fureur les aveugles Mortels
Ace monftre odieux élever des Autels .
By
380240
C'en
1500 MERCURE DE FRANCE
C'en eft fait , à jamais , France je t'abandonne ;
Je cede à l'ennemi que ta fureur couronne.
Trifte & cruel retour de mes bontés pour toi !
Vainement contre lui tout te parle pour moi
Tu n'examines pont fi la main qui m'opprimee ,
M'ufurpe fans raifon un encens légitime.
La nouveauté t'entraîne : aveugle dans ton choix;
Je prétendrois envain faire entendre ma voix.
Par M. R. d'Aix.
********* ** *****
f
EXTRAIT d'une Lettre de M. W....
Prieur de Moulins en Puifaye , à M. le
C. D. L. R an fujet des Antiquités de
Corfeil , en Bretagne.
N fuivant le projet que j'ai fait , & que
ENE vous favorifez fi bien , M. de produire
les Monumens antiques , qui viennent à ma
connoiffance , pour en procurer l'explication
au Public , je vous envoye celui que vous reclamez
par la derniere lettre que vous m'avez
fait l'honneur de m'écrire le 3. Avril dernier
, & que j'ai retrouvé avec peine . C'eſt
une Epitaphe très ancienne fi je ne me
trompe , qui paroît mériter attention . Elle fe
trouve dans un Canton de la Haute Bretagne
, diftingué ar les reftes des Monumens
que
JUILLET.
ISOI 1743
que les Romains y ont érigés. L'Infcription ,
dont il s'agit , eft fur une Pierre , enclavée
dans un des Piliers duChoeur d'une Eglife Paroiffiale
, deffervie par des Chanoines Réguliers
, & qui eft un Bénéfice dépendant de
l'Abbaye de N. D. de Beaulieu , à trois lieuës
de Dinant. Le Lieu fe nomme Corfeüil. C'eft
un refte de Ville d'une affés grande étenduë, à
en juger par le grand nombre de fondemens
d'anciens Edifices , qui fe trouvent à une
diſtance confidérable de cette Eglife Paroiffiale.
Les Peuples qui habitent le Canton ,
s'appelloient anciennement Curiofolyta , terme
allés analogique à celui de Corfeuil.
La Pierre a environ trois pieds de hauteur,
fur un pied & demi de largeur , & femble
avoir été enchaffée dans un des Piliers des plus
proches de l'Autel , du côté de l'Epître , afin
qu'elle fût plutôt remarquée . Voici l'Infcription
copiée exactement fur l'original & dans
le même arrangement des Lignes & des
Lettres.
D. M. S.
SILICIA NAMGID
DE Do
Mo AERKA
EXIMIA PIETATE
FILIUM SECUTA
B vj Hic HIC
1502 MERCURE DE FRANCE
HIC SITA EST .
VIXIT AN. IXV.
CILIANUS VARus
,,, POSUIT.
La Dame, nommée fur le Monument, vivoit
vraisemblablement fous le Regne d'un
des premiers Céfars ; je penferois même fous
Jules. Cet Empereur a certainement fejourné
en Bretagne , & l'Hiftoire du Pays nous apprend
qu'il fit mourir les Sénateurs de l'ancienne
Vannes ; je ne fçais fur quel fondement
on affure que leurs corps furent enterrés
dans un Lieu Maritime , voifin de cette
derniere Ville , & dont j'ai vû le Plan , qui
fe nomme Lomariaker. Ce qui peut donner
lieu à cette Tradition , eft que l'on voit dans
cet Endroit un grand nombre de Pierres Sépulchrales
, qui paroiffent taillées exprès ,
d'une grandeur & d'une beauté remarquables
, & places à une certaine distance les
unes des autres.
J'ai vu à Corfeüil un refte de Thermes ,
ou Bains antiques , confiftant en une Loge
ou petite Chambre quarrée & découverte
enfoncée en terre de la hauteur de quatre
pieds ou environ , & au niveau du Terrein ,
qui peut avoir feize pieds de diametre. Les
murailles en font revêtues de petites Pierres
de deux couleurs differentes , larges & quar
réesJUILLET.
1743 .
ISO
rées . On y voit auffi un refte de l'Aqueduc
par lequel fe déchargeoient les Eaux des
Bains dans la Mer , qui baignoit autrefois le
Bas-Corfenil , Lieu que l'on nomme encore
aujourd'hui la Baye de Corfenil , quoique la
Mer en foit à préfent éloignée de deux lieuës.
Il eſt donc naturel de penſer , à la vûë de
ces antiquités , que le féjour que fit Jules-
Céfar dans la Contrée de Corfeuil , lorfqu'il
parcourut la plus grande partie des Gaules ,
donna lieu aux Monumens que je viens de
citer , & à d'autres qui fe trouvent répandus
dans le même Canton . Telles font les ruines
d'un Temple , élevé jadis de l'autre côté de
la Baye de Corfeuil , & féparé de cette Ville
par le Bras de Mer qui formoit la Baye . Ce
Temple eft rond dans fon contour extérieur ,
mais pentagone ou hexagone en dedans ( car
j'écris fur l'idée qui m'en refte , ayant manqué
d'en prendre les dimenfions fur le Lieu .)
Il regnoit tout au tour , à la hauteur d'environ
vingt pieds , une Corniche foutenue
par des Pilaftres .
Une autre preuve de la grandeur de
Fancienne Corfeuil , eft la quantité prodigeufe
de vieilles Biques employées aux
anciens Edifices , qui ont fervi depuis à conf
truire les nouveaux Remparts de S. Malo.
Et une preuve particuliere de l'ancienneté
de ce Licu , ce font les Médailles que l'on y
504 MERCURE DE FRANCE
a trouvées & que l'on y trouve journellement
de prefque tous les Empereurs du Haut
Empire , jufqu'à Poſthume , dont j'ai acquis
quelques - unes des meilleures.
La plus grande partie des Médailles trouvées
à Corfeuil , eft entre les mains d'un Préfident
à Mortier du Parlement de Bretagne ,
( M. de Robiens , fils , ) fort verſé dans l'Antiquité,
très -curieux & très riche en toutes fortes
de Monumens. Il eft poffeffeur entre autres
d'une petite Idole de Bronze , qui a l'index
de la droite pofé fur la bouche ; elle fut trouvée
à Corfeuil dans des terres , exprès, terres, remuées
pour y déterrer des Antiques .
Il est étonnant , M. que le P. Lobineau
dans fon Hiftoire de Bretagne , n'ait rien dit
de Corfeuil & de fes Antiquités. Il fait cependant
mention de trois Piliers , qui fe voyent
dans la Paroiffe de S. Meloir des Ondes , diftante
de Corfeüil d'une lieuë au plus , & il dit
que ces Monumens font un Mémorial d'un¸ ·
Sacrifice offert en ce Lieu par Victorin & par
fon armée.
Je reviens à l'Infcription , ou à l'Epitaphe ,
qui fait le principal fujet de ma Lettre , & je
perfe que ce qui doit réveiller la curiofité, &
exercer la fcience de Mrs les Antiquaires ,
c'est de fçavoir quelle eft cette SILICIA NAMGID,
de qui elle étoit temme, quel eft le fils
qui avoit précedé dans le Tombeau , de
quelle
JUILLET. 1743 1505
quelle Maifon elle étoit , &c. J'ai confulté
les Familles Confulaires de Fulvius Urfinus ,
& je n'ai point trouvé de Famille du nom
Aerka. Cilianus Varus cft encore un Perſonnage
bien inconnu pour moi , à moins qu'il
ne fût l'Epoux de Silicia ; ainfi je laiffe à des
yeux plus clairvoyans que les miens le foin
de percer ces antiques obfcurités , très - difpofé
à m'en rapporter au fentiment des Sçavans,
qui voudront bien expliquer l'Enigme
J'ai l'honneur d'être , &c.
Ce 3. Juillet. 1743 .
EPITRE
A Mile Des .... D. L, M. D. L. R.
Hemire , dont le goût fe reffent des douceurs.
De la Morale & de l'Erude ;
Qui plus que tout le refte , aimez la folitude ,
Mais qui n'en cueillez que les fleurs ;
Que faites - vous à la Campagne ?
Défolée à préfent du départ de Zéphir
Et de fon aimable Compagne ,
Quel charme a- t'elle à vous offrir
Contre les dégoûts qu'accompague
Себ
for MERCURE DE FRANCE
Cet Effein de fâcheux , prompts à s'y réünir ,
Ce cercle d'Importans , ennuyeux à mourir ,
Et fots jufqu'au vin de Champagne è
Comment pouvez-vous y tenir ,
Vous , de qui Moliere & Montagne
Occuperoient mieux le loiſir ?
Cependant bien loin de les fuir ,
Loin d'y perdre à les voir , votre enjoûment y
gagne ;.
I convertit tout en plaifir ;
Leurs erreurs font pour vous des Châteaux en Efpagne
;
C'est là votre fecret , en vain vous leur plaifez ;
Vous jouiffez des fots & vous les méprifez,
Faite pour vivre avec ce Monde
Qu'il faut voir par néceffité ,
Vous réfift z par la gayeté
Aux vins ennuis dont il abonde ;
Votre heureux naturel de tout tire du fruit ,
Du taux comme du vrai s'eft fait une habitude
De s'amufer partout , & de mettre à profit
Jufqu'à la folle inquiétude
D'une imbécille multitude
Qui vous entoure & qui vous fuit.
Oü . C'eſt le véritable efprit ,
Bien digne du nom de fageffe ,
Qui fe bornant au fentiment ,.
Bien
JUILLET. 1743 .
150%
Bien loin de la fombre trifteffe ,
Devient le plus bel ornement
D'une vive & tendre Jeunefle
Dont il annoblit l'enjoûment ,
Paros moins vertu qu'agrément ,
Raifon , moins que délicateffe ,
Et moins devoir qu'amuſement ;
Plaire au monde en le méprifant ,
Sans caprice , ni fans rudeffe ,
C'est tout , c'eſt cet accord charmant
De bon fens & de politeffe ,
Qui plus que beauté , voix , talent ,
Fait qu'à tous géneralement
Vous plaifez naturellement ,
Même aux fats de la fine efpece ,
Nommés Beau monde plaiſamment
Peuple fou qui vous fuit fans ceffe ,
Et toujours inutilement ;
Mais que , grace à votre fineffe ,
Qu'il foit fot , ou qu'il foit méchant ,
Vous renvoyez toujours content
De fa burlesque gentilleſſe
Ou de fon vain emportement.
Charmant ufage de la vie
Au-deffus des dépits de la Philoſophie !
Fi de ce Milantrope aigri ,
D'envie
508 MERCURE DE FRANCE
D'envie & de haine paitri ,
Qui toujours fur la controverfe ,
Et toujours feul de fon parti ,
Contre la Nature perverle
N'a qu'un argument & qu'un cri ,
Et dont la tête fe renverse ,
Pour le déclarer l'ennemi
D'un Monde , moins pervers que lui ,
Et fe rendre partie adverfe
De fon Juge & de fon appui.
Eh ! quoi , des fotifes d'autrui.
Faut -il tomber à la renverſe ?
Votre coeur n'eft point fait ainfi ;
Du Monde l'utile commerce
Le tient .fans qu'il foit affervi ,
Et fur cette Scéne diverfe
De faux , de caprice & d'ennui ,
Par l'épreuve plus affermi ,
Aucun trouble ne bouleverſe
Votre efprit libre , fimple , uni .
Enfin , s'il eft quelque traverfe
Dont il ne puiffe être à l'abri ,
En rire eft fon meilleur parti.
Contre ce Monde qui l'exerce ,
Qu'y faire ? C'eſt un étourdi
Qu'il faut que l'on flatte & qu'on berce ,
Pour avoir la paix avec lui .
L. M. D. S. S.
JUILLET. 1743. 1509
•
LETTRE de M. B. ** au fujet de celle
qui eft imprimée dans le Mercure de Mai
de cette année.
'Ai lû , Monfieur , dans votre Mercure
du mois de Mai dernier , une Lettre qui
vous a été adreffée au ſujet du Livre intitulé,
la Chronologie & la Topographie du nouveau
Bréviaire de Paris. Quoique je fois l'Auteur
de cet Ouvrage , & dès - là intereffé à en
prendre la défenſe , je ne prétends pas néan
moins le venger au préjudice de la raison. Je
ne me prévaudrai donc point des éloges dont
plufieurs perfonnes,affés connues dans la Ré
publique des Lettres , & qu'il me feroit facile
de nommer , ont bien voulu honorer à
mon infçû ce petit travail , & j'avouërai franchement
que je ne l'ai jamais cru moi - même
tout- à-fait exempt de fautes. Outre qu'il eft
peu d'Ouvrages , en quelque genre que ce
foit , où il ne refte rien à reprendre , il étoit
prefque impoffible que dans une Collection
telle que la mienne , remplie d'une fi grande
diverfité de faits , il n'échappât à l'égard de
quelques - uns certaines mépriſes. Tel eft principalement
le fort de ceux qui , comme moi ,
s'appliquent à des matiéres de Chronologie
& de Géographie. La varieté des fentimens
touchant
1510 MERCURE DE FRANCE
›
touchant ce qui a rapport à la connoiffance
des tems ; d'un autre côté l'éloignement des
Lieux,qui empêche que l'on en puiffe parler,
du moins de la plûpart , comme témoin oculaire
; voilà , ce me femble , les deux caufes
les plus ordinaires des erreurs fur les points
hiftoriques . Ce font ces raifons qui me mettent
aujourd'hui dans l'a néceffité de recourir
à l'indulgence ou plutôt à l'équité des Lecteurs.
Au refte, M. comme je n'ai eû en vûë
que leur feule utilité , loin de me fâcher
qu'on me faffe conr oître en quoi je pourrois
m'être trompé , je ferai fincérement obligé
aux perfonnes qui daigneront me faire part
là deffus de leurs lumières , & je tâcherai de
mettre à profit tous les avis qui me parɔî,
tront folidement appuyés :
Pour venir , M. à la lettre dont j'ai l'honneur
de vous parler , celui qui en eft l'Auteur,
trouvera bon , qu'après l'avoir remercié
des réflexions judicieufes qu'il m'a donné
occafion de faire touchant mon Livre , &
dont je n'ai pas manqué de faire ufage , j'entreprenne
de donner ici quelques éclairciffemens
fur les difficultés qu'il objecte. Voici
donc en peu de mots ce que je réponds fur
chacun des articles conteftés .
On prétend d'abord que je me fuis abuſe
fur deux Villages des environs de Paris , par
rapport à leur diſtance de cette Capitale
fçavoir
JUILLET. 17437 Isir
›
fçavoir , Clichy & Croiffy. A l'égard de ce
lui-ci , je confens de le mettre à trois petites
lieues de Paris , au lieu de deux que j'avois
marqué ( page 220. ) & cela d'autant mieux
que Croilly paroît être véritablement à une
lieuë en- deça de S. Germain en Laye , que
j'ai placé , felon la commune eftimation , à
quatre lieuës de Paris.
Pour ce qui eft de Clichy , j'ai peine à me
rendre au fentiment de ceux qui comptent
deux lieuës de Paris à ce Village. En effet ,
le Dictionnaire de la Martiniere, le plus moderne
de tous , & qui paffe pour l'un des plus
exacts , ne compte qu'une lieuë. D'ailleurs
Clichy eft certainement renfermé dans la
Banlieuë de Paris ; or qui ne fçait qu'une Ban
lieuë n'excede point ordinairement la longueur
d'une lieuë aux environs de la Ville ?
Remarquez de plus que Clichy n'eft
pas même
à l'extrêmité de la Banlieuë ; pour cela il
faudroit qu'il ne fût pas à environ un demi
quart de lieuë en deça de la Seine , qui fert
de borne à la Banlieuë de ce côté- là C'eſt
fur ces fondemens , qui m'ont parû aſſurés
que j'ai placé ( page 214. ) le Village dont il
s'agit , à une lieuë feulement de Paris; encore
je la crois bien petite.
On m'impute en fecond lieu , de trouver
trop facilement des Pourgs & même des Villes
où il n'y en a jamais eu le moidre veftige.
Les
512 MERCURE DE FRANCE
Les Lieux qu'on cite en particulier font Montmeillan
, Châlis , Clervaux , Prémontré . Parcourons
- les , & entrons dans le détail.
On veut que Montmeillan , auquel je
donne le nom de Bourg ( page 275. ) ne foit
qu'un fimple Village . Je le veux auffi , mais
à condition que le Montmeillan dont je parle,
fera ce Lieu que l'Auteur de la Lettre dit avoir
vû de fort près , & n'y avoir apperçû que
cinq ou fix maiſons , & qu'il reconnoît pour
une Paroiffe du Diocèfe de Paris. N'auroitil
point confondu lui -même ce petit Lieu
avec Montmeillan , qu'il dit avec raifon être
dans le Diocèse de Senlis , & auquel il ne
paroît pas refufer la qualité de Bourg ? Pour
moi , je ne vois qu'un Montmeillan , qui eft
effectivement dans le Diocèfe de Senlis ,
quoique je l'aye mis par mégarde dans le
Territoire de Paris . A l'égard de ce petit Village
, que notre Obfervateur appelle auffi
Montmeillan , c'eft , felon toutes les apparences
, S. Vit-fous - Montmeillan , Paroille du
Diocèfe de Paris , contigu de ce côté - là à
celui de Senlis.
Voici donc , tout bien cofideré , comment
je réforme l'endroit en queſtion . Sans reconnoître
qu'un Montmeillan , & fans même lui
ôter le nom de Bourg , je le déplace du Territoire
de Paris , & je le remets au Diocèſe
de Senlis. Après cela je détache le fait qui
fuit
JUILLET. 1743 .
1513
fuit la Defcription de Montmeillan, touchant
le Corps du Martyr S. Vit , & je transfere
ce même fait fous un nouvel article qui fera
S. Vit-fous-Montmeillan , dont j'ai parlé cideffus
. Par ce moyen , les chofes fe trouveront
rétablies dans leur ordre naturel. Paffons aux
autres articles .
Quand j'ai avancé ( page 209. ) que l'Ab .
baye de Châlis eft fituée dans un Bourg du
même nom , je ne l'ai nullement controuvé.
On peut voir le P. Baunier , Bénedictin
dans fon Recueil des Abbayes de France
imprimé à Paris en 1726. c'eft à la page 610.
Tome 2. c'eſt de lui que j'ai tiré ce qu'on me
reproche. Au refte , le principe qu'on allegue
contre ce Fait , me paroît trop general , & il
me femble qu'il n'eft point fans quelque exception,
C'eft , dit- on , que les Abbayes des
Bernardins ne font jamais fituées dans des
Bourgs . Si cela eft , la Martiniere fe trompe
dans fon Dictionnaire , lorfque parlant de
plufieurs Abbayes du même Ordre , il les
met dans des Bourgs . Voyez -y entre autres
Igny, en Champagne, la Ferté- fur- Grofne , en
Bourgogne , Gimont en Gafcogne. Si jamais
Abbaye de Bernardins n'eft fituée dans un
Bourg , ou près d'un Bourg ( car c'eſt la même
chofe dans le deffein de mon Livre )
comment n'a - t'on point formé de difpute
touchant Citeaux , Chef de tout l'Ordre des
Bernardins,
512 MERCURE DE FRANCE
Les Lieux qu'on cite en particulier font Montmeillan
, Châlis , Clervaux , Prémontré. Parcourons
- les , & entrons dans le détail.
On veut que Montmeillan , auquel je
donne le nom de Bourg ( page 275. ) ne foit
qu'un fimple Village. Je le veux auffi , mais
à condition que le Montmeillan dont je parle,
fera ce Lieu que l'Auteur de la Lettre dit avoir
vû de fort près , & n'y avoir apperçû que
cinq ou fix maiſons , & qu'il reconnoît pour
une Paroifle du Diocèfe de Paris . N'auroitil
point confondu lui -même ce petit Lieu
avec Montmeillan , qu'il dit avec raiſon être
dans le Diocèse de Senlis , & auquel il ne
paroît pas refufer la qualité de Bourg ? Pour
moi , je ne vois qu'un Montmeillan , qui eft
effectivement dans le Diocèfe de Senlis
quoique je l'aye mis par mégarde dans le
Territoire de Paris. A l'égard de ce petit Village
, que notre Obfervateur appelle auffi
Montmeillan , c'eſt , felon toutes les apparences
, S. Vit-fous - Montmeillan , Paroille du
Diocèfe de Paris , contigu de ce côté- là à
celui de Senlis .
Voici donc , tout bien cofideré , comment
je réforme l'endroit en queftion . Sans reconnoître
qu'un Montmeillan , & fans même lui
ôter le nom de Bourg , je le déplace du Territoire
de Paris , & je le remets au Diocèse
de Senlis . Après cela je détache le fait qui
fuic
JUILLET. 1743 . 1513
fuit la Defcription de Montmeillan, touchant
le Corps du Martyr S. Vit , & je transfere
ce même fait fous un nouvel article qui fera
S. Vit-fous-Montmeillan , dont j'ai parlé cideffus.
Par ce moyen , les chofes fe trouveront
rétablies dans leur ordre naturel. Paffons aux
autres articles .
¿
Quand j'ai avancé ( page 209.) que l'Abbaye
de Châlis eft fituée dans un Bourg du
même nom , je ne l'ai nullement controuvé.
On peut voir le P. Baunier , Benedictin
dans fon Recueil des Abbayes de France ,
imprimé à Paris en 1726. c'eft à la page 610.
Tome 2. c'eft de lui que j'ai tiré ce qu'on me
reproche. Au refte , le principe qu'on allegue
contre ce Fait , me paroît trop géneral , & il
me femble qu'il n'eft point fans quelque exception
. C'eft , dit - on , que les Abbayes des
Bernardins ne font jamais fituées dans des
Bourgs. Si cela eft , la Martiniere fe trompe
dans fon Dictionnaire , lorfque parlant de
plufieurs Abbayes du même Ordre , il les
met dans des Bourgs . Voyez -y entre autres
Igny,en Champagne, la Ferté -fur - Grofne, en
Bourgogne , Gimont en Gafcogne . Si jamais
Abbaye de Bernardins n'eft fituée dans un
Bourg , ou près d'un Bourg ( car c'eft la même
chofe dans le deffein de mon Livre )
comment n'a - t'on point formé de difpute
touchant Citeaux , Chef de tout l'Ordre des
Bernardins,
1514 MERCURE DE FRANCE
Bernardins , quoique je l'aye auffi qualifiée
Bourg & Abbaye, ( page 213 ? ) j'ai toujours
cru , & je le crois encore , que pour être en
droit de s'exprimer de la forte , il fuffit qu'il
y ait un Bourg & une Abbaye , voifins l'un
de l'autre , & portant le même nom , foit
que l'Abbaye ait donné fon nom au Bourg
qui en aft proche , foit qu'elle l'ait reçû ellemême
de ce Bourg. Je ne pense pas que ce
ſentiment doive paroître fingulier à perlonne.
Nonobftant ces raifons , je veux bien , pour
plus grande fûreté , retrancher le mot de
Bourg dans l'article particulier de Châlis.
J'en uferai volontiers de la même maniére
à l'égard de Prémontré. Ce ne fera neanmoins
qu'après avoir cité l'autorité de Baudrand
, fur laquelle je me fuis repofé. Voici
fes propres paroles fidellement traduites du
Latin : » Prémontré , dit- il , eft un Bourg de
» France ( Burgus Gallia ) dans la Province
» de Picardie, avec un Monaftére qui a don-
» né fon nom à l'Ordre de Prémontré , & où
» le Géneral de cet Ordre fait fa demeure.
Quant à Clervaux je ne puis y foufcrire avec
la même facilité. Cette Abbaye , troifiéme
fille de Câteaux , eft certainement accompagnée
d'une petite Ville , ou , fi l'on veut ,
d'un Bourg qui porte le même.nom , témoins
les Dictionnaires de Trévoux & de la Martiniere
, qui en parlent ainfi. Ces deux Lieux
ne
JUILLET. 1743 .
ne font féparés l'un de l'autre que par une
distance des plus petites . La Ville , comme je
l'appelle , n'a été formée qu'à la faveur du
célebre Monaftére & c'eft de lui qu'elle a emprunté
fon nom. On a donc pû , pour les
raifons déja alleguées , défigner Clairvaux ,
comme Ville & Abbaye . Je ne nie pas pour
cela que l'Abbaye de Clairvaux , confiderée:
dans fa propre enceinte, foit dans un lieu
plus folitaire. Venons à d'autres Chefs .
Je ne me dédis point non plus au fujet de
l'Eglife de S. Crêpin à Soiffons , & je foutiens
ce que j'en ai dit dans mon Livre. Je fçais
bien qu'il y a en cette Ville deux Eglifes du
nom de ce faint Martyr , l'une appellée faint
Crêpin le Grand , qui eft une Abbaye de Bénedictins
; l'autre nominée S. Crêpin en - Cage
, qui appartient aux Chanoines Réguliers.
Mais celle du fixiéme fiècle , dont je parle
page 388. & que je remarque ne plus fubfifter
aujourd'hui, eft une Eglife toute differente
des deux autres , defquelles je ne fais aucune
mention , non pas que je nie leur existence
actuelle , mais parce que le Bréviaire de Paris
n'en dit mot , non plus que les autres , fur
lefquels j'ai étendu mon travail. Quoique
certe Eglife du fixième fiécle ait porté le même
nom de S. Crêpin , elle ne repréſente
néanmoins ni l'Eglife des Bénédictins , ni
celle des Chanoines Réguliers , qu'on voi
5
1516- MERCURE DE FRANCE
à préfent. Bien loin de cela , on ne marque
nulle part en quel endroit de la Ville étoit
fituée notre ancienne Eglife. Et pour être
convaincu qu'elle n'étoit point la même
que les deux d'aujourd'hui , il n'y a qu'à
lire M Baillet dans la Vie de Saint Crêpin ,
au 25. Octobre , Num. 2. on voyoit à
» Soiffons , dit ce fçavant. Ecrivain , dans le
» fixième fiècle une Eglife bâtie en l'honneur
» de S. Crêpin & de S. Crêpinien ; & le Roi
Chilperic y fit enterrer fon fils aîné Chro-
" dobert. On parle , continuë- t'il , d'une au-
» tre Eglife ( remarquez ce mor ) bâtie fur
» leur Tombeau , & l'on croit que c'est ce
» qui a fervi de fondement a la conftruction
» de l'Abbaye de Bénédictins qu'on y a bâtie
depuis , & qui fe nomme S. Crêpin le
» Grand, pour être diftinguée d'une autre
» qui eft aux Chanoines Réguliers , & qui ſe
» nomme S. Crêpin- en - Cage. Tout ceci me
paroit clair & fans réplique .
ور
C'est donc inutilement qu'on m'oppoſe
Fexemple de l'Eglife Cathédrale de fainte
Croix d'Orleans , & celui de l'Eglife de faint
Paul de Paris , qui fembleroient me mettre
en contradiction avec moi - même , vû que ,
felon la remarque véritable de l'Obfervateur ,
je reconnois ces deux dernieres Eglifes pour
être les mêmes que celles d'autrefois , quoique
rebâties, en divers tems. Je dis , felon fa
remarque,
JUILLET. 1743. 1517
remarque car c'eft ce qu'il infinuë clairement
par les paroles dont il fe fert, Mais , ne
lui en déplaife , on ne peut rien conclure de
fon argument
, & la difparité eft vifible . L'Eglife
de fainte Croix & celle de S. Paul . ces
deux anciennes Eglifes , font cenfées ſubſiſter
par celles qu'on voit aujourd'hui fous le même
titre , & celles ci les r préfentent , quoique
les Bâtimens , qu'on voit aujourd'hui, ne
foient plus les mêmes , je le veux ; la premiere
ayant été édifiée par S. Euverte au quatrième
fiécle , & la feconde par S. Eloy au feptiéme
fiécle ; & s'étant écoulé depuis ces tems -là.
plus d'un millier d'années , ces deux Eglifes ,
dis-je , font cenfees encore fubfifter , parce
que , outre qu'elles portent le même nom
qu'autrefois , elles n'ont jamais changé de
place Il n'en eft pas de même de l'ancienne
Eglife de S. Crêpin à Soiffons ; il n'en paroît
plus aucun veftige certain , ainfi que je crois
l'avoir fuffisamment prouvé. Elle ne fubfilte
donc plus , & ne peut même en repréſenter
aucune aurre.
Il ne reste plus qu'à avouer ingénument
deux fautes que j'avois déja moi - même bienapperçûës
, & qui ne fe font gliffées dans .
l'Ouvrage que par un défaut d'attention
que l'Auteur de la Lettre veut bien lui même
regarder comme leger. La premiere eft
le Chef de S. Denis l'Areopagite , mis en
Cij deux
518 MERCURE DE FRANCE
deux Endroits , à Longpont ( page 256. ) &
à Pontigny ( page 293. ) Il faut effacer de ce
dernier Lieu l'article en queftion . La feconde
faute , qui paroît n'être que d'impreffion ,
confifte dans un feul chiffre qui a été mal
pofé. C'est à la page 408. dans l'article de
S. Jean de Falaiſe , tout à la fin. Au lieu de
l'an 1030. il faut lire l'an 1130. il n'y aura
plus alors de contradiction ni d'anachronisme.
Outre l'aveu de ces efpeces d'inadvertances
, l'amour propre ne m'empêchera point
d'avertir ici que l'Eglife de S. Marc à Veniſe
page 266. ) n'a point dû être qualifiée de
Patriarchale , mais feulement de Collégiale .
En effet l'Eglife Patriarchale de Venife porte
le nom de S. Pierre , au lieu que celle de
S. Marc n'eft que comme la Chapelle du Do.
ge , ornée cependant d'un Chapitre de Chanoines,
qui eft confidérable. Il eft bon de remarquer
auffi , en paffant, que le même article
de S. Marc eft un peu hors de fon rang , ей
égard à l'ordre alphébetique.
De tout ce qui vient d'être dit , il réfulte
qu'entre les Obfervations de M. A. D. P. il
y en a plufieurs auxquelles j'ai foufcrit avec
plaifir , & d'autres auxquelles je ne me fuis
point cru obligé de foufcrire. Comme j'aurois
tort de l'accufer d'aigreur ou de partialité à
mon égard , je me perfuade aifément qu'il ne
me fçaura point mauvais gré,fije ne défere pas
fans
JUILLET. 1743 : 1519
fans réserve à fes avis. Je n'ai fait que propofer
mes raifons , fans aucune intention d'oftenfer
per onne , & je déclare d'avance que
comme enfant de paix & ennemi de toute
difpute , je n'oppoferai que le tilence à toutes
les Critiques ( j'entends mal fondées , ) que
l'on pourroit faire déformais au fujet de mon
Ouvrage.
C'eft fur le pied de mes précédentes refléxions
qu'elt dreffé un petit Errata , que j'ai
ajoûté à la fin du Livre. C'eux qui fouhaiteront
le joindre aux Exemplaires dont ils
font déja pourvûs , ne manqueront pas de le
trouver chés l'Imprimeur , ruë neuve Notre-
Dame , aux trois Vertus.
Voila , M. tout ce que j'avois à vous marquer
la -deffus ; j'efpere que vous voudrez
bien , pour la juftice de ma caufe , en inftruire
le Public , en inférant ma Lettre dans
votre Journal. Je fuis , &c.
A Paris , le premier Juillet 1743.
C iij
LA
1520 MERCURE DE FRANCE
******** :*: *******
D
LA ROSE ,
CANTATE.
Ans les Lieux enchantés , une Rofe nouvelle
De l'amoureux Zéphire animoit les foupirs ;
Charmé de fes attraits , cet Amant auprès d'elle
Exprimoit par ces mots les plus tendres defirs .
C'eft votre Beauté qui m'engage ;
Vous m'enflâmez de mille ardeurs ;
A la plus charmante des fleurs
Mon coeur veut rendre un tendre hommage.
Vénus dans fa brillante Cour ,
Ne m'offre rien qui vous égale .
C'est par vous qu'au jeune Céphale
L'Aurore donne de l'amour.
C'est votre Beauté qui m'engage ;
Vous m'enflâmez de mille ardeurs ;
A la plus charmante des fleurs
Mon coeur veut rendre un tendre hommage.
Mais Zéphire bien - tôt dans un nouveau (éjour
S'envole , & fuit fon inconftance ;
Flatt
JUILLET . 1743 .
1522
Flatté de la douce eſpérance
De retrouver encor la Roſe à ſon retour.
Pour cueillir cette fleur aimable ,
Qu'attendois- tu , volage Amant ?
Efperois-tu que le moment
Te feroit toujours favorable
Pour cueillir cette fleur aimable ,
Qu'attendois - tu , volage Amant ?
Que vois-je ! quel épais nuage
Tout-à-coup obfcurcit les Cieux !
Qel bruit quels fifflemens ! ah ! quel affreux orage }
Le trouble regne dans ces Lieux .
Le bruit du Tonnerré
Fait trembler la Terre ;
Les Tyrans des Airs
Déclarent la guerre
A tout l'Univers .
Les Antres mugiffent ;
Les Monts retentiffent ;
Saifis de douleur ,
Les Mortels frémiffent
D'une jufte horreur.
Dans ces beaux Lieux , que l'orage déſole ;
La Rofe tombe & perd tous les appas.
Contens de leurs forfaits , les Miniftres d'Eole
Cij Ceffent
322 MERCURE DE FRANCE
Ceffent de troubler l'Air par d'horribles combats.
Le calme rappélie Zéphire ;
Il revient pour cueillir ... mais ô foins fuperflus !
C'eft en vain que fon coeur loupire
Cette fleur qu'il aimoit , cette Rofe n'eſt plus ,
Auprès d'un objet agréable
L'Amant qui pouffe des foupirs ,
Doit faifir l'inſtant favorable
Que l'Amour offre à fes defirs .
Quand ce Dieu charmant nous invite
A goûter les plus doux appas ,
Bienheureux celui qui profite
D'un moment , qui ne revient pas:
Auprès d'un objet agréable
L'Amant qui pouffe des foupirs ,
Doit faifir l'inftant favorable
Que l'Amour offre à fes défirs .
Par M. B ** d'Aix.
DISA
JUILLET. 1743-
1523
hhhhh:
DISSERTATION curieufe , où l'on
prouve que la Lune Pafchale n'est pas
celle de Mars , par A. F. Labeffe.
I uns difent mal à propos , que Pâques Left ban de fçavoir que quelquesvient
le premier Dimanche d'après la pleine
Lune de Mars. Il faudroit dire que
cette Fête arrive toujours le premier Dimanche
, qui fuit la pleine Lune , qui arrive
à l'Equinoxe
du Printems , fixé
par PE
glife au 2r. Mars . En effet le grand Dictionnaire
de l'Académie Françoife dit , en parlant
de Pâques , que cette Fête fe célebret
toujours , le premier Dimanche , qui fuit immédiatement
la pleine Lune de l'Equinoxe.
Comme cela regarde particuliérement
le
Comput Ecclefiaftique
, qui a fes Régles.
certaines , pour nous faire connoître toutes
les Fêtes mobiles , qui dépendent de celle
de Pâques , & que cette derniére depend
de la pleine Lune de l'Equinoxe , il eft:
évident que toutes les fois que le Nombre
d'or nous donne pour Epacte * qui
n'eſt d'aucun nombre , le premier de Jan
vier eft auffi le premier jour de la Lune
de Janvier ; car l'Epacte n'eft autre choſe:
CⓇ que
1524 MERCURE DE FRANCE
que l'âge de la Lune au commencement
de l'année , c'est à dire , au premier de Janvier
, ou au premier de Mars ; ainfi de
faire commencer l'année Lunaire au premier
de Janvier ou au premier de Mars , c'eft la
même chofe . Mais puifque notre année
Civile commence préfentement au premier
de Janvier , & que Jules Céfar en l'etabliffant
, attendit , pour la commencer
au premier de Janvier , parce qu'il étoit
nouvelle Lune précisément à minuit , afin de
faire commencer l'année Lunaire avec l'année
Solaire , de fo te qu'il eft à propos que
ce foit là qu'elles commencent : en effet
tous les Auteurs en font d'accord Ainfi
l'année Solaire commune étant de 365 .
jours , furpaffe l'année Lunaire commune de
11. jours , laquelle n'eft que de 354 jours s
ainti il y a communement 11. jours de
difference ; ces 11. jours font l'Epacte de
l'année , c'eft à - dire l'âge de la premiére
Lunaifon , au premier de Janvier. Effecti-
´vement le Bréviaire de Bourges dit : quand
la premiére Lunaifon s'acheve dans les
1. premiers jours de Janvier , l'année eft
Embolifrique , c'est à dire de 13. Lunes, attendu
qu'il reste encore après cette premiére
Luce finie , 34. jours dans l'année , qui
fuffisent pour faire 12. Lunaifons diftinctes.
Cela arrivera en 1747. qui aura pour
Epacte
JUILLET. 1743 1525
,
>
,
Epacte 18. ainfi la premiére Lunaiſon s'ag
chevera dans les 11. premiers jours de Jans
vier de l'année 1747. il reftera par conféquent
354. jours de cette année , qui feront
12. Lunaifons diftinctes ; où il faut
bien prendre garde que cette année étant
de 13. Lunes , il y en aura 2. de Décembre
, la premiére de 29. jours , qui
commencera le 3. de Novembre & finira
le premier de Décembre , & la feconde
de 30. jours , qui commencera le 2 .
de Décembre & qui finira le 31. du
même mois. Cela fait voir que les Lunes
font du mois où elles finiffent comme
le P. Clavius le prouve dans plufieurs de
fes Ouvrages , entr'autres dans le Chapitre
17. du Comput , & dans fon grand Ouvrage
de la Réformation du Calendrier ,
où il dit que la Lune eft toujours celle
du mois dans lequel elle finit In quo
completur , menfi lunatio detur ; afin qu'on
ne s'y trompe pas , il ajoute : In quo finitur
, menfi lunatio detur ; & il dit que cette
Régle eft reçuë de tous les Computiftes ;
Ita Computifte omnes. M. Blondel , de l'Académie
Royale des Sciences , & Maî
tre de Mathématique , dans fon excellent
Ouvrage , qui a pour Titre : l'Hiftoire du
Calendrier Romain , nous donne cette même
Régle du P. Clavius , dans la fecon-
C vj
de
1526 MERCURE DE FRANCE
que
, de Partie Ch. IV. page 136. où il dir
c'eſt l'ancienne maxime des Computiftes
, que chaque Lune appartient au mois.
où elle fe termine ; cela n'eft fufceptible d'aucune
équivoque ; en voici la caufe toute
claire , qui fe comprendra facilement par
une fuite d'années que je vais citer avec
leurs Epactes.
"
L'année Lunaire , commençant au premier
de Janvier , comme il arrivera en
1748. qui aura pour Epacte * qui marque.
qu'il n'y aura alors aucune difference de
l'année Lunaire fur la Solaire , attendu que
le 31. de Décembre de 1747. qui la précede
fera le dernier jour de la Lune &
de l'année lunaire ; & que par conféquent
l'année Lunaire , cette année , finira précifement
avec l'année Solaire , & que les
deux années recommençant au même jour
les jours du mois feront aufli les jours de
la Lune C'est ce qu'on peut voir dans
POidre des jours de tous les mois de l'année
, qu'on trouve au commencement de
tous les Bréviaires , où l'on découvre que
le premier de Janvier a pour Epacte * c'eſtdonc
là le premier jour de la premiére.
Lune de l'année , & étant tout au plus de
30. jours , cette Lune de Janvier l'an 1748 .
finira le 30. de ce même mois , qui eft
e plus tard que puifle jamais fe terminer
la
JUILLET. 1743. 1527
*
> >
la Lune de Janvier. Cette même Epacte fe retrouvant
encore le 31. de Janvier , nous fait
voir que c'eft là le premier jour de la feconde
Lune , qui n'ayant que 29. jours ,
finit le 28. de Février ; & on ne peut nier
que ce ne foit- là celle de Février. Cette
Épacte fe retrouvant encore le premier de
Mars , nous fait connoître que c'eft - là le
premier jour de la troifiéme Lune de l'année
, & étant de 30 jours , elle finit le
30. du mois & elle eft avec la plus
grande certitude , la Lune de Mars. Et
continuant toujours de fuite toutes autres
Lunes dans le même ordre , on verra aifément
qu'il faut néceffairement qu'elles finiffent
toutes dans les mois dont elles
doivent l'une après l'autre porter le nom.
Celle d'Avril , le 28. d'Avril ; celle de
Mai , le 28. de Mai ; celle de Juin , le
26. de Juin ; celle Juillet , le 26. de Juillet
; celle d'Août , le 24. d' Août ; celle de
Septembre , le 23. de Septembre ; celled'Octobre
, le 22. d'Octobre ; celle de
Novembre , le 21 de Novembre , & enfin ,
celle de Décembre , le 20. de Décembre..
Ainfi , les 12. mois Lunaires étant finis
le 20. de Décembre il reste 11. jours ,
que doit encore durer l'année Solaire , qui
eft précilement l'Epacte , dans fa plus grande
exactitude , c'eſt- à- dire , la difference
>
de
28 MERCURE DE FRANCE
de l'année Solaire , à la Lunaire ; ce qui!
fait voir que la Lune de Janvier rétrograde
cette année de 11. jours dans Décembre.
Le Comput Eccléfiaftique nous donne effectivement
11. pour Epacte de 1749. qui
fuit immediatement , & qui nous marque
le nombre des jours qu'aura la Lune au
premier de Janvier. Et continuant pour
l'année 1749. à compter du 21. de Décembre
dernier , où fe trouve encore la petite
* jufqu'à 30. on tombe fur le 19. de
Janvier , où doit finir la Lune de Janvier
de cette année , comptant de là jufqu'à
29. parce que les mois Lunaires font alternativement
de 30. & 29. jours , on 3༠ .
tombe fur le 17. de Février , où doit finir
la Lune de Févier , & comptant de - là jufqu'à
30. on tombe fur le 19. de Mars où
où doit finir la Lune de Mars. Comptant
de -là jufqu'à 29. on tombe fur le
d'Avril où doit finir la Lune d'Avril .
Comptant de-là jufqu'à 30. on tombe fur
le 17. de Mai de , où doit finir la Lune
de Mai. Comptant de-là jufqu'à 29. on
tombe fur le 15. Juin , où doit finir la
Lune de Juin. Comptant de-là jufqu'à
30. on tombe fur le 15. de Juillet , où
doit finit la Lune de Juillet. Comptant
de-là jufqu'à 29. on tombe fur le 13.
17.
d'Août ,
JUILLET. 1743.
1529
G
d'Août , où doit finir la Lune d'Août.
Comptant de-là jufqu'à 30. on tombe fur
le 12 de Septembre , où doit finir la Lune
de Septembre. Comptant de-là jufqu'à
29. on tombe fur le 11. d'Octobre
où doit finir la Lune d'Octobre . Comptant
de là jufqu'à 30 on tombe fur le 10. de
Novembre , où doit finir la Lune de Novembre.
Enfin comptant de là jufqu'à 29.
on tombe fur le 9. de Décembre où
doit finir la Lune de Décembre , & le der
nier mois de l'année Lunaire. On voit encore
ici que les 22. jours de Décembre
qui restent , nous donnent l'Epacte de l'année
fuivante 1750. & le nombre des jours
dont l'année Lunaire retrograde la Solaire
qui commence toujours le premier de
Janvier.
>
>
En effet , felon les Régles du Comput
Eccléfiaftique on trouve 22. pour l'E
pacte de 1750. & comptant du 10. 10. de
Décembre de l'année 1749. où a commencé
une nouvelle année Lunaire , jufqu'à
30. on tombe fur le 8. de Janvier ,
où a fini cette Lune , qui doit en porter le
nom . Recommençant à compter de là juf
qu'à 29. on tombe 2 °. fur le 6. de Février.
3 °. fur le 8. de Mars. 4°. fur le 6..
d'Avril. . fur le 6. de Mai . 6 ° . fur le
4. de Junin. 7° . fur le 4. de Juillet. 8 °.
fur
530 MERCURE DE FRANCE
fur le 2. d'Août. 9º. fur le 1. de Septembre
. 10. encore fur le 30. de Septembre.
11. fur le 30. d'Octobre . 12 °.
fur le 28 de Novembre. & 13º. fur le
28. de Décembre , où il faut bien remar
quer , que cette trei ziéme Lune donnant
fa fin le 28. de Décembre , l'année Solaire
n'étant point encore finie , cette année
fera de 13. Lunaifons qui porteront
chacune refpectivement le nom du mois
où elles finiront. Et il y en aura cette
année pareillement deux dans un même
mois , qui feront dans Septembre ; la premiére
de 30. jours , qui commençera le 3 .
d'Août , & qui finira le 1. de Septembre
; & la feconde de 29. jours , qui com
mencera le 2. de Septembre , & qui finira
le 30. du même mois ; & les trois jours
qui restent après cette treiziéme Lune finie
le 28. de Décembre jufqu'à la fin de l'année
, font l'Epacte de l'année 1751. qui
marque toujours le nombre des jours ,
dont l'année Lunaire retrograde la Solaire.
Si l'on continuoit pendant un Cycle Lunaire
, c'eſt à dire , depuis 1748. juſqu'à
1767. à compter toutes les Lunes dans le
même ordre , on verroit qu'il s'y trouverroit
dans les 19. ans , qui eft la révolution
du Nombre d'or , 7. années Em-
Bolifmiques , ou 7. Lunes Intercalaires ; &
cela
JUILLET. 1743 : 1537
*
cela les années 1751. 1754. 1757. 1759 .
1762. 1765. & 1767. qui aura également
pour Epacte comme l'année 1748. qui
eft 19. ans auparavant ; & il feroit aife
de voir la raifon de la diftribution du
Nombre d'or pendant les 19. ans ; mais
ce feroit entrer dans un trop grand détail
, qui d'ailleurs feroit inutile , ceci étant
fuffifant pour donner une idée du fujet.
Pour revenir à la Lune Pafchale que
le comumn veut être la Lune de Mars ,
voions fi elle le peut être. La Lune
de Mars ; fuivant le principe ci deffus ,
reçu de tous les Computites qui nous
ont précédé , devant finir en Mars , il eft
évident que cette Lune n'eft point la Pafchale
; car pour être la Lune Pafchale , il
faut de toute néceffité que fon 14. árri
ve après le 20. de Mars. Mais le 14. de
cette Lune de Mars , tombant auffi le 14.
du mois , nous voions qu'il précéde l'Equinoxe
du Printems de fix jours : cette
Lune n'eft donc jamais la Lune Paſchale :
car toutes les années dont j'ai fait mens
tion , auront pour Lune Pafchale celle d'Avril
où elles finiffent. Il eft impoffible
qu'une Lune dont le 14. arrive le 21. de
Mars , ou après , puiffe fe terminer en
Mars ; elle fe termine donc en Avril ,
celle-là eft la Lune Pafchale , qui doit être
&
appellé e
3532 MERCURE DE FRANCE
du
2
>
appellée Lune de l'Equinoxe , & non point
Lune de Mars. C'est ainsi qu'en parlent
M. M. de l'Académie Françoife , & ils ont
une grande raifon ; parce qu'en la nonimant
de même
on ne s'y peut jamais tromper
, quand même elle feroit du mois de
Mai comme il arriva en 1734 attenque
la Lune de l'Equinoxe ne peut
être appellée ainsi qu'elle ne tombe
pleine après le 20. de Mars. Or en 1734 .
la nouvelle Lune étoit le s. de Mars ,
qui en attribuant la Lune au mois dans
lequel elle commence , auroit été la Lune
de Mars ; ainfi puifque c'étoit la lune
dé Mars , fuivant l'opinion commune , &
que Pâques devant être dans cette Lune,
je demande pourquoi cette Lune n'a point
été la Pafchale ? c'est parce que fon 14.
eft arrivé au 19. de Mars , par confequent
avant le 21. qui eft l'Equinoxe . C'est pourquoi
elle n'a pu étre appellée Lune de
l'Equinoxe , ni Lune Pafchale. Et la fuivante
, qui étoit la Lune Pafchale , étoit
nouvelle le 4. Avril & comme fon 14 .
tomba au 18. du même mois , qui éto
un Dimanche , pour ne point judaïfer
il a fallu , fuivant la décision du Concile
de Nicée mettre Pâques au Dimanch:
fuivant 25. ainfi cette année , le commun
a cru , conime beaucoup d'autres
›
que
JUILLET. 1743
1533
que Pâques étoit dans la Lune de Mars ,
parce qu'il femble que cette Lune doit
être appellée la premiére Lune de l'année ,
peut-être à caufe que l'on comm nçoit
autrefois l'année à Pâques , ou que les
Juifs célébroient leurs Pâques le 14. de
la Lune de l'Equinoxe , ( c'eft par cette
raifon qu'il a été arrêté que toute Lune
qui arriveroit pleine avant le 21. Mars
feroit rejettée & ne feroit point Lune Pafchale
. ) Tout cela n'eft point une raiſon
pour dire que Pâques vient dans la Lune
de Mars ; car fi cela étoit , il auroit fal ·
lu dire en 1734. nouvelle Lune de Mars le
4. d'Avril , cela n'auroit il pas été de la
derniére abfurdité ? Elle n'auroit été ni
du mois où elle auroit commencée ni
de celui où elle auroit fini , & il auroit
été ridicule de dire que la Lune de
Mars eut fini cette année en Mai.
D'ailleurs fi la nouvelle Lune eut com.
mencé cette année le 6. de Mars au lieu
du s . elle auroit pû être la Lune Pafchale
; car en 1742. la nouvelle Lune Pafchale
étoit le 6. de Mars qui eft le plutôt
qu'elle peut être , fuivant le Calcul
Aftronomique , car fuivant les Tables Pafchales
, elle n'eft marquée qu'au 8. ) elle
étoit également le 6. de Janvier prefque
à la même heure , ce qui fait voir qu'il
importeroit
1534 MERCURE DE FRANCE
importeroit peu de faire commencer l'année
Lunaire au premier de Mars , au lieu
du premier de Janvier parce que le mê
me nombre des Epactes convient à l'un
comme à l'autre.
Quand on voudroit abfolument attribuer
la Lune au mois où elle commence
ce qui feroit contre toutes les régles
& le bon fens , attendu qu'il faudroit que
com .
l'année Solaire fut inferieure à l'année Lunaire
, Pâques ne viendroit pas toujours
dans la Lune de Mars : en voici une preuve
évidente exemple. Je fuppofe pous
un moment , que la nouvelle Lune Pafchale
de cette année 1743. étant nouvelle le
24. de Mars , foit tout le contraire de ce
que je dis , c'eft à - dire au lieu d'être cel
le d'Avril que ce foit celle de Mars
comme le Public le veut ; ainfi la Lune
Pafchale retrogradant tous les ans
muns , c'est-à- dire , ceux qui n'ont que
12. Lunaifons de 11. jours ou environ
l'année 1744. la nouvelle Lune Pafchale arrivera
le 14. de Mars , celle de l'année
1745. arrivera le 3. de Mars , qui ne fera
cependant point la Lune Pafchale , quand
bien même elle feroit Lune de Mars , à caufe
qu'elle arriveroit pleine avant l'Equinoxe ;
mais point du tout , ce ne fera que la
fuivante qui fera Lune Pafchale , qui tombera
JUILLET. 1743. 1535
bera pleine le Samedi 17. d'Avril , & le
lendemain 18. fera Pâques , & cette Lune
finiflant en Mai , fera du mois de Mai .
Enfin l'année fuivante 1746. la nouvelle
Lune Pafchale qui fera celle d'Avril , arrivera
le 22. de Mars , au lieu que l'année
précédente elle fera le 3. du mois de
Mars , & ne pourra point être Lune Paf
chale ; ainfi cette année au lieu que la
Lune retrograde , elle anticipe , à caufe
que l'année 1745. qui la précéde fera de
13. lunes , que l'on compte ordinairement
pour 384 jours. Et moyennant cette treiziéme
lune , les mois Lunaires fe rapro-:
chent des mois Solaires : autrement fi l'on
ne faifoit point de compte des jours qui
reftent après que l'année Lunaire eft finie
, les Lunes parcourreroient tous les mois.
de l'année en rétrogradant , de façon que
la Lune de Janvier commençant au premier
du mois , comme en 1748. commenceroit
la troifiéme année d'enfuite le
28. de Novembre ; l'année d'après le 17.
du même mois , & enfuite dans tous les
autres mois de l'année ; mais pour empêcher
cet inconvenient , quand le nombre
des jours. furpaffe 30. après que la
12. Lune eft finie on en fait une 13 .
qui s'appelle intercalaire comme fi l'on
difoit année Biffextile , qui fe fait la 4.
anné
"
1536 MERCURE DE FRANCE
année des 6. heures qui restent pour maintenir
l'Equinoxe en fa place ; ainfi il en eft
de même des Lunes pour maintenir les
mois Lunaires avec les Solaires , ou pour
égaler le cours du Soleil à celui de la
Lune.
on
›
Quoique cette Differtation ne foit qu'ébauchée
, attendu que le fujet eft fort abftrait
, fur tout pour ceux qui ne font point
verfés dans ces fortes de matiéres
prie les Curieux & les Sçavans de faire
voir , par une régle fûre & générale
files Lunes ne font point du mois
dans lequel elles finillent , comme il a été
démontré. Pour M M. de l'Obfervatoire
ils difent , que quand la Lune commence
avec le mois , elle eft de ce même mois ,
& par une conféquence néceflaire , toutes
les Lunes fuivantes doivent finir dans leurs
mois , attendu qu'elles leur font infé
rieures.
VERS pour le Portrait de Mlle Silvia ,
Attrice de la Comédie Italienne.
Brillante Rillante éleve de Thalie ,
Les jeux , les ris accompagnent fes pas ,
Et la fageffe , & la folie ,
Lui
JUILLET. 1537 1743
Lui doivent tour à tour leurs plus charmans appas
Elle connoît de l'art les beautés les plus vives ;
Elle fçait lui donner des loix ;
Sur tous les coeurs elle a des droits ,
Et les graces font les captives .
Laffichard.
LETTRE écrite de S. Pierre de la
Martinique , le 25. Avril 1743. par
M. Flameng , à M. du Bocage de Bleville
, au Havre de Grace.
U
,
Ne Truye de groffeur ordinaire ;
de fa premiére portée , mit bas le
2. Avril dernier dans une Etable de
ce Bourg , fix petits animaux domeſtiques
: de ce nombre , cinq fe font trouvés
de petits cochons ordinaires en tout
point , tels qu'ils ont coûtume de naître
fans la moindre ni la plus légere difference
, car ce n'en eft pas une , que quatre
foient tout à fait noirs , & le cinquième
prefque tout blanc ; jufques- là , il n'y a
rien de fort particulier , me direz vous ?
tout n'eft il pas dans l'ordre naturel ? j'en
conviens mais vous conviendrez avec
la même facilité , que les circonstances
fuivantes font fi extraordinaires
• que je
>
crois
538 MERCURE DE FRANCE
crois pouvoir avancer hardiment que
la Nature n'a encore rien produit de fi
étrange que le fixiéme des ces animaux :
il a le corps plus gros que fes freres ;
fi on peut les nommer tels , puifqu'ils
ne le font ni par l'efpéce , ni par aucun
autre endroit , de couleur bife , ou fi vous
voulez , de celle d'un bois de noyer brut
& non poli , fans poils , ni foyes , exceptés
quelques - uns fort clair femés fur les
jambes , & au -deffous de la machoire inférieure
fa queue eft entiérement femblable
à celle d'un gros Rat , ménuë par
conféquent , toujours en diminuant & fi .
niffant en pointe , noüeufe enfin , comme
celle de ces petits animaux ; celui ci , par
Parenthéfe , eft du genre féminin , & la
partic , qui le diftingue à cet égard , eft
la même que celle d'une Truye ordinaire
, & dans une égale pofition : ſes jambes
font affés femblables à celles des
petits cochons de lait , cependant un peu
plus plus groffes , fans être plus longues :
la corne de fes pieds , ou plutôt fes ongles
, font divifés en quatre parts bien diftinctes
, deux également grands au milieu ,
& deux plus courts & plus petits aux côtés
:: cette corne eft de couleur blanche &
prefque tranfparente , à peu près comme
la Nacre terne ; mais ce qui rend encore
cette
JUILLET. 1743 1539
maux >
cette partie plus fingulière , c'eft que l'extrémité
des ongles de fes quatre pieds , qui
font tout à fait plats , au lieu d'être recourbés
ou crochus en deffous , comme
ceux des Chiens , des Chats & autres anifont
au contraire recourbés en
deffus , & fe bouclent , pour ainfi - dire ,
comme des cheveux ; c'eft la comparaifon
la plus jufte que j'aye pû trouver
pour vous dépeindre exactement les ongles
de cet animal monftrueux ; mais
venons à fa tête , dont chaque partie peut
donner matiére aux plus fçavantes Differtations
; épuiſer , j'ofe le dire , en raiſonnemens
, les plus profonds Naturaliftes , &
digne à coup fûr , d'occuper une place
diftinguée dans les Mémoires curieux de
P'Académie des Sciences .
Cette tête est un peu moins longue que
la hure ordinaire d'un petit cochon qui
vient de naître ; le devant eft un peu enfoncé
; le front releve néanmoins , à рец
près comme celui d'un petit Dogue ; du
milieu du front , fort une Trompe de la
longueur de deux pouces ou environ , &
de la groffeur du petit doigt , prefqu'auf
fi groffe dans fon extrémité que dans fa
naillance cette Trompe qui eft exactement
conforme à celle d'un Elephant , occupe
quafi soute la furface de la partie
D gauche
540 MERCURE DE FRANCE
,
1
gauche du front de l'animal , & eft tant
foit peu penchée fur le côté , comme celle
d'un Elephant : elle porte de même
dans fon extrémité , une efpéce de Bourrelet
, & une ouverture enfin , dans fon
milieu , d'une forme triangulaire imparfaite
& colorée que vous dirai-je de plus ?
c'eft parfaitement le front & la Trompe
d'un Elephant ; j'en parle avec certitude ;
j'en ai vû un autrefois à Marſeille , & je
tiens en main pour plus grande fûreté
le Dictionnaire de la Bible du R. P. Dom
Calmet où se trouvent , comme vous
fçavez , plufieurs de ces animaux formidables
, exactement repréfentés. Au deffous
de cette Trompe entre le mufeau & le
front , eft dans un milieu fort exact ,
une feule prunelle livide contenant des
particules d'un fang extravafé , d'un gris
Tale ou plutôt bleuâtre , groffe au moins,
comme un oeuf de Pigeon , qui femble
toute fois renfermer fous le même cryftallin
, deux prunelles égales & de la grandeur
ordinaire de celles des petits cochons
de cet âge ; enfin dans la partie inférieure
de cette même groffe prunelle , au travers
de ce cryftallin , on apperçoit une figure
de bouche , formée par deux levres
colorées , ce qui donne à cette partie quelque
forte de reffemblance avec la face que
les
JUILLET. 1743
1541
?
›
Les bonnes gens croient appercevoir dans
l'orbite de la Lune en fon plein : au refte ,
il faudroit diflequer cette prunelle &
l'on y trouveroit immanquablement des
particularités naturelles , peut être plus furprenantes
que tout ce que je détaille ici ;
jufques-là , vous voiez , M. que ce Monftre
eft un petit Elephant Cyclope , ajoute
l'Auteur de la Lettre ! fes oreilles font
tout à fait applaties & collées fur le derriére
de la tête de la grandeur & de
la forme , à peu près d'une feuille de lierre
, un peu plus grande ; à l'égard de leur
fituation elle eft dans l'ordre naturel .
Pour fon muzeau , fon groüin , fa gueule
ou fa bouche ( car on ne fçait comment
dénommer cette partie ) voici à peu près
comme elle eft conftruite. La machoire fupérieure
eft plus courte que l'inférieure , de
quatre à cinq lignes , fort pointuë , n'ayant
qu'une dent à fon extrémité , déja fort
dure & fort groffe ; & pour plus grande
fingularité la levre de cette machoire
porte fur fon extrémité , une forme de petite
corne , mollaffe , prefque diaphane , de
deux ou trois lignes au plus de longueur
& plantée ou fituée , à peu près comme
les Voyageurs nous dépeignent celle que
les Rinoceros portént fur leurs nez la
machoire inférieure eft un peu plus álon-
Dij gée
›
>
1
1542 MERCURE DE FRANCE
gée & arrondie par fon extrémité , formant
ce qu'on appelle communement un
menton de galoche , avec trois dents menuës
de chaque côté vers l'extrémité de
la machoire , feparées également entr'elles ,
& d'ailleurs affés reffemblantes à celles
d'un poiffon , du poids de quatre à cinq
livres. Si j'avois pû parvenir à avoir en
ma poffeffion cet étrange animal , je me
ferois fait un devoir de vous l'adreffer
le mieux conditionné qu'il m'eût été poffible
ce qui me confole , c'eft que je
viens d'apprendre que Mrs Antheaumé l'ont
acheté de la bonne femme , à qui appartient
la Truye qui l'a mis bas ; l'un de
ces Mrs dont vous connoiffez au moins
le nom , étant vos Compatriotes , doit
paffer inceffamment en France , & comme
je penfe qu'il ne manquera pas de l'y porter,
ou de l'y envoyer , il vous fera fort aifé
de le voir & de l'examiner à loifir , puifqu'il
abordera au Havre je ne fuis point
affés Anatomifte , cependant . j'ofe me
flater , que s'il eft bien confervé Vous
trouverez ma rélation exacte
>
pour
fatisfaire votre curiofité & la mienne
j'euffe fouhaité qu'un habile homme l'eût
fur le champ diffequé , & m'eût mis à
même de vous apprendre fi les parties internes
de cet animal ont auffi quelque
choſe
JUILLET.
1743. 1543-
chofe de fingulier , ou fi elles font fimplement
comme celles des cochons ordinaires
. Il ne s'eft fait entendre par aucun
cri , & n'a vécu que quelques heures ,
tant parce que fa gueule , toujours entr'ouverte
, fa langue épaiffe & arondie ,
& fortant enfin du côté gauche , de la
longueur d'un pouce ou environ ne lúi
laiffoit pas la liberté de prendre le pis
de fa meré , que parce qu'on l'a extrémement
tracaffé , & que la Truye même
qui l'a mis bas , ne vouloit en aucune fa
çon le fouffrir auprès d'elle : je penfe même
qu'il n'eut pas été prudent de le lui livrer ;
elle l'auroit peut- être dévoré : fi ce détail
, quoique long , peut vous faire quelque
plaifir , j'en ferai très- aife , &c. Vous
pouvez même , fi vous le trouvez bon
me citer comme une perfonne incapable
d'en impofer. Au furplus , je ne ferai pas
le feul , parmi tant de gens qui l'ont vû .,
qui en écrirai en France ; le Navire qui
vous porte cette Lettre , en portera plufieurs
d'autres, où il en fera fait mention, &c.
Je fuis , & c.
D iij RE
1544 MERCURE DE FRANCE
akkkkkkkkkkkkkk
REPONSE à la Queftion du Mercure
d'Octobre 1742. lequel de deux Amans
doit être plus flatté , de celui qui fait la fortune
de fa Maîtreffe en l'époufant ou de celui
qui la tient d'elle ?
LE plaifir de donner l'emporte
Sur le plaifir de recevoir ;
Ce dernier après lui traîne toujours l'escorte .
Des foins reconnoiffans & du trifte devoir.
Il fait naître l'inquiétude
Dans un coeur vraiment délicat ;
Il y feme l'horreur de paffer pour ingrat ,
Où l'importun foupçon qu'on prenne pour étude
Les effets de fa gratitude.
En géneral , voilà les traits
Qui font qu'au fein de l'indigence
L'homme qui fent*, l'homme qui penfe ,
Même en les défirant , redoute les bienfaits ;
Et dans la douleur qui l'affiége ,
Les confidere comme un piége ,
Que bien fouvent la vaniré ,
Sous des dehors trompeurs , tend à fa libertê,
Détaillons maintenant la chofe ,
Et voyons fi ce qu'on propofe
Peut fournir quelque exception.
Non ,
JUILLET. 1743 .
1542
Non , fi j'en crois mon inclination ,
Car , felon moi , la volupté fuprêmeˆ
Eft de combler de biens l'objet qu'on aime.
Quel plaifir , en effet , plus doux & plus flatteur
Que de pouvoir fe redire à foi-même ,
Mes bienfaits font garants de ce que fent mon coeur
Je ne décide pas qu'il n'eft point de douceur
A tenir d'une femme aimable & génereufe ,.
Un aifance qui peut ajoûter au bonheur,
Je m'en fais au contraire un portrait enchanteur}
Mais cette aifance eft ſouvent dangereuſe ;
Et nuit à la félicité
De celui qui d'abord peut en être enchanté.
Ses foins , quoique toujours dictés par la tendreffe
N'ont qu'à paroître un inftant moins preffants ,
Ils ne font bien-tôt plus que foins reconnoiſſants
Il a beau protefter de fa délicateffe ,
Un coeur qui des foupçons goûte la trifte yvreffe
Nous juge fans nous écouter.
Trop heureux mille fois , fi dans cette détreffe a
Le reproche honteux ne vient point éclatter ↓
Car je connois un peu les Belles ,
Et foit dit feulement ici pour badiner ,
1
Souvent fans trop examiner ,
J
Soit par des plaintes éternelles ,
Soit à force de foupçonner
છે
CO
La vérité des feux dont nous brulons pour elles ;
D iiij
En
#546 MERCURE DE FRANCE
En cherchant à nous ramener ,
Elles nous rendent infideles .
L'homme , un peu moins fujet à ces folles erreurs ,
Ne cherche point à fe créer des peines ,
Qui dégenerent en aigreurs.
Si fes bienfaits donnent des chaînes ,
Il fçait les adoucir par mille traits flateurs ,
Et ces traits font l'oubli des biens qu'un amour
tendre
Pour fon feul plaifir fçait reprendre..
Ainfi donc tout bien compaffé ,
Je finis & conclus comme j'ai commencé.
J. D. F.
XXXXXXXXXXXXX ** X*
DISCOURS fur l'Etude des Mathématiques ,
où l'on effaye d'établir que les Enfans font
capables de s'y appliquer. Par M. DE LA
CHAPELLE. Brochure in - 12 . A Paris ,
chés Prault, Pere & Fils , & le Clerc , 1743 .
N remarque que les jeunes gens recueillent
très- peu de fruit de l'étude
'des Mathématiques . La coûtume que l'on
prend ordinairement , pour une bonne
raifon , veut que l'on commence à s'y appliquer
à 16. ou 18. ans ; mais à cet age les
paffions occupent beaucoup plus que les reflexions
;
JUILLET. 1743. 1547
flexions ; il faut d'ailleurs un tems confidé
rable pour plier fon efprit à cette préciſion ,
à cette exactitude fcrupuleufe , que deman
dent les Mathématiques , & on croit que
l'on en fçait bien affés , après les avoir étu
diées une année pendant d'affés courts in
tervalles .
Cette confidération a déterminé M. de la
Chapelle à examiner fi les Enfans , qui ont
tout le tems de cultiver leur efprit , ne fes
roient pas capables de recevoir les idées Ma-)
thématiques , & fur tout celles de la Géo
métrie.
Soutenu de l'expérience , que fon étas
lui fournit fouvent, il ofe avancer que de
toutes les Sciences , les Mathématiques Elémentaires
font le plus à la portée des En
fans.
En effet, prefque toutes les connoiffances
par où l'on commence à inftruire les Enfans,
en fuppofent d'autres que l'on renvoye à un
âge plus mur , enforte que ce qu'ils ap
prennent n'eft reçû dans leur efprit , pour
ainfi- dire , que par leur crédulité.
Mais en ouvrant les yeux pour la premiere
fois , ils tombent fur les Elémens , fur les
premiers Principes de la Géométrie , on ne
voit d'abord que des lignes , des furfaces ;
des corps qui font , comme l'on fçait , l'ob
jet de la Géométric .
D v L'Auteur
1548 MERCURE DE FRANCE
-L'Auteur fait un très-grand ufage de ce
fait inconteftable : » Les fens , font donc
» en Géométrie nos premiers Maîtres , & ils
» confervent une grande autorité dans toute
la fuite de nos raifonnèmens.
Il fait enfuite remarquer l'extrême curiofité
qui agite l'efprit des Enfans , la mobilité qui
les pouffe aux Opérations méchaniques à la
Géométrie ayant le double avantage de frapper
vivement par les figures qu'elle offre , &
d'amufer par celles qu'elle fait conftruire ,réü
nit tout ce qui eft capable d'exciter l'attention
des Enfans ; d'autant plus que nous
» fommes naturellement portés à compter &
» à mefurer , le feul inftinct nous mene - là .
» Des Enfans prennent ils la largeur d'un
chemin La perpendiculaire eft la ligne
» qu'ils cherchent ; ils n'en fçavent pas le
nom mais le nom ne fait rien aux idées )
» ils ne veulent pas qu'elle biaife ; ils ont
» grand foin que celui qui eft à l'autre bout
de la corde foit bien de face avec le premier
; ils font de la Géométrie fans le fça-
» voir.
Il n'en eft pas ainfi des Belles - Lettres ; elles
font le fiuit de la plus fine attention & de
l'experience la plus confommée » au lieu
" qu'Euclide peut être étudié à fix ans ;: on
a à cet âge des yeux & des mains,
JUILLET. 1743 *- 1549
Il eſt donc convenable de commencer l'éducation
par les Mathématiques, qui ne fuppofent
aucune expérience , aucun raifonnement,&
de la continuer & finir par les Belles-
Lettres , qui n'en fuppofent jamais trop.
On le doit d'autant plus,que les Enfans oppofent
beaucoup moins d'obstacles de ce
côté-là que, les perfonnes un peu plus faites.
Il y a lieu de croire qu'on fera content des
raifons qu'en apporte l'Auteur , on peut les
voir dans le Difcours même ; qui intereffe
la Societé ; il eft d'ailleurs affés curieux de
fçavoir comment on établit cette efpece de
Paradoxe .
I Lluf
BOUQUET
A. M. d'H*****
Lluftre Ami , voici ta Fête.
Qu'Apollon , pour me fecourir ,
De Lierre couronne ta tête ;
Je n'ai que des voeux à t'offrir ;
Accepte-les. Ton nom eft Pierre ;
Ton Patron tient la Clef des Cieux ,
Coffre fort des biens précieux ,
Qu'on ne trouve point fur la Terre.
Il a fon lot ; garde le tien
Devj
腐趣
sso MERCURE DE FRANCE
En attendant la jouiffance
Des tréfors mis en la puiflance ,
Et promis à tout bon Chrétien .
Quant au préſent , de ton partage
On peut tirer quelque avantage .
Horace , ton Maître & le mien ,
'Auteur à Morale très-ſage ,
Place l'or au-deffous du rien ,
Si l'on n'en fait un bon uſage ;
C'eſt à quoi tu ne manques pas,
Tu fais voir par mainte largeffe ,
Que son or n'eſt point dans le cas ,
Qui deshonore la richeffe ;
J'en inftruis quiconque m'entend
A ce témoignage éclattant ;
Si tel , plus têtu qu'une Mule ,
Doute encor d'un fait fi conftant ,
Pour mieux convaincre l'incrédule ,
Voici ma réponſe experto ,
Lui dis-je , crede Roberto.
Par l'Abbé Pellegrin
LET
JUILLET.
1743.
LETTRE de M. l'Abbé L. au R. P. D.
Timothée Veyrel , Prieur de S. Euronl en
Normandie au fujet des Ouvrages de Gui
Aretin, avec quelques Remarques en faveur
de la mémoire de ce célebre Muficien.
>
Ous poffedez , M. R. P. dans votre
Abbaye un Manufcrit complet des
Euvres de Gui Aretin , fçavant Muſicien du
commencement de l'onzième fiécle ; & en
cela vous êtes plus riche que les Bibliothéques
qui n'en ont que des fragmens , par le
moyen defquels on ne peut connoître qu'imparfaitement
cet Auteur. Le tems eft venu ,
ce me femble , de rendre les Ouvrages de ce
grand Muficien plus communs qu'ils ne le
font , & je fuis perfuadé que dès-lors que je
vous aurai exposé ce qui a été écrit depuis
peu contre la mémoire de ce Religieux , vous
voudrez bien prendre la peine de vous faire
inftruire de ce qui eft confervé à la Bibliothéque
du Roi, des OEuvres Musicales de Gui ;
pour y fournir ce qui y manque , afin que les
Curieux de Paris puiffent y avoir recours
dans le befoin.
Vous n'aurez peut-être connu le nouveau
Livre de M. Rouffeau , intitulé : Differtation
Sur
552 MERCURE DE FRANCE
fur la Mufique moderne , que par l'Extrait
qu'en donnent les Journaux. Le grand nombre
fe fera repofé , quant au Systême de la
maniere de chiffrer le Chant , fur ce que l'évenement
& la fuite du tems pourront en
apprendre.Mais je ne croi pas qu'aucun Journaliſte
ait rapporté les propres termes de M.
Rouffeau.. » Il n'eft pas aifé , dit- il , page 2 .
" de fçavoir précisément en quel état étoit la
Mufique , quand Gui d'Arezze s'avifa de
fupprimer tous les caractéres que l'on y
employoit , pour leur fubftituer les Notes
qui font en ufage aujourd'hui. Ce qu'il y a
» de vraisemblable , eft que les premiers caractéres
étoient les mêmes avec lefquels
» les anciens Grecs exprimoient cette Mufi-
» que merveilleuse , de laquelle , quoiqu'on
"
33
לכ
en dife , la nôtre n'approchera jamais, quant
» à fes effets , & ce qu'il y a de fûr , c'eft que
» Gui rendit un fort mauvais fervice à la Mu-
» fique ; & qu'il eft fâcheux pour nous qu'il
» n'ait pas trouvé en fon chemin des Mufi-
» ciens auffi indociles que ceux d'aujourd'hui.
Plus bas , il s'étonne qu'on ne faffe pas au
jourd'hui pour la perfection de la Mufique
ce ¡ue Gui d' Arezze a fait pour la gâter.
Il ne paroît que M.Rouffeau n'a pas connû.
fuffifamment Gui Aretin avant que d'entre
prendre d'en parler. Il auroit pû fe mettre au
fait de la fituation où étoit l'art d'écrire le
Chant
JUILLET 1743. 1553
Chant avant le tems de ce Religieux , en
confultant le Livre de votre Confrere Dom
Jacques le Clercq , imprimé à Paris ,
in 4.
en 1673. mais s'il a négligé de citer mêmele
petit Livre du Pere Souhaitty , Cordelier, je
fuis plus étonné qu'il ait ignoré que Dom le
Clercq a fait graver des morceaux de Chant
notés , fuivant l'uſage obfervé avant le fiécle
de Gui Aretin , par le moyen de quels on voit
qu'à la vérité les fept premieres lettres de
Alphabet Latin ont fervi à defigner les fons
dans le Chant Romain , mais qu'il y avoit en
même- tems des Notes de différentes fo : mesqu'on
plaçoit fur les paroles , à des diftances.
arbitraires. Les lettres a , b, c , d, e, f g, étoient
les fept noms des fons ; les Notes quarrées
ou en équerre ou à queue, ou un fimple trait
de plume tiré perpendiculairement , ou bien
finiffant en croffe , avec des points entremêlés
étoient les Notes de ces fiécles , fans ligues
ni fans clefs . Ainfi un même fon , qui:
revenoit de tems en tems , étoit placé à la
fantaifie du Noteur ou Notateur , de maniere
que des Ecoliers à qui on avoit fait
chanter les fons de la Gamme a, b ,c, d, e , f, g
par intervalles disjoints , ne fçavoient plus à
quoi s'en tenir, & il étoit néceffaire à tout moment
que le Maître les remît en chemin , &
retraçât à leur mémoire, que tel figne devoit
produire le fon b , celui- ci le fon d , cet
autre
1554 MERCURE DE FRANCE
autre le fon f. Par exemple , fur l'Introït Sta²
tuit , leur ayant dit. que le premier fon étoit
le fon d , ils voyoient confufément que le fon
fuivant devoit être plus aigu , mais ils ne fçavoyent
pas de combien il devoit l'être , ni
s'il falloit du d. proceder au g. ou à l'a. Il
falloit que le Maître prît la peine de
prononcer toujours la lettre de la Note qui
en indiquoit le fon , de la faire fonner ou de
la voix ou fur fon Monocorde , Inftrument
alors fort ufité , où la touche des fons
étoient marquée par le moyen des bandes de
differentes couleurs , alternativement. Si le
Maître s'en difpenfoit , tout à coup les Ecoliers
fortoient de leur chemin. Si pour s'éxempter
cette peine , il écrivoit les lettres fous
les Notes , ou s'il fe contentoit d'employer
les fept lettres fur le Texte , les Ecoliers
avoient , à la vérité , des guides devant eux ,
mais c'étoient encore des guides muers, pour
ainfi-dire, & qui ne repréfentoient qu'obſcu
rément le fon dont la fignification leur étoit
attachée .
Que fit Gui Aretin ? Ce grand Maître , à
force de travailler à infinuer & inculquer le
Chant à la mémoire des jeunes Moines de
Pompofe , s'apperçût qu'ils le retenoient plus
aifément en voyant où il plaçoit fon doigt
fur le Monocorde , pour former chaque fon
de la Gamme , qu'il vouloit qu'ils rendiffent
confor
JUILLET.. 1743. 1555
conformément aux Notes de la Piéce de
Chant qui étoit à exécuter. Il conclut de - là,
que l'imagination des Ecoliers feroit beaucoup
foulagée & même invariablement fixée ,
fi fur chaque fyllabe du Texte à chanter , il
repréfentoit le Monocorde , au moins par
extrait. Ainfi par exemple pour l'In-
,
troit Statuit , il imagina de figurer d'abord
Stapuis
puis
tu it , & ainfi du refte.
C'eſt ainfi que fe forma ce qu'on appella depuis,
une portée ou une pattée de la longueur
d'une ligne de paroles , par le moyen des
differentes repréſentations de la touche du
Monocorde, jointes & réunies enſemble. On
lui donna depuis le nom d'échelle , à cauſe
de la reffemblance .
Dès- lors , on put , hardiment fe fervir des
termes clairs de monter & de defcendre , de
chant haut , de chant bas , au lieu qu'auparavant
on n'employoit que les termes obfcurs de
chant aigu , de chant grave , aller dans l'aigu,
aller dans le grave:
A mesure que cette clarté devint fenfible ,
elle fit plaifir aux gens portés pour le progrès
des Sciences , & elle défola ceux qui
apparemment auroient été bien aifes
Chant fût refté difficile à apprendre , foit afin
d'être regardés comme des Maîtres néceſſaique
le
res ,
556 MERCURE DE FRANCE
&
}
res , foit afin de mériter plus long tems l'ho
noraire dû à leurs peines . Je ne vous apprendrai
rien de nouveau , M. R. P. vous êtes à
la fource. Mais qu'il me foit permis de faire
ufage de ce que Dom le Clercq , & depuis.
lui , Dom Mabillon ont publié d'après votre
Manufcrit.
Ce ne fut pas en ce que Gui Aretin enfei
gna à commencer l'octave par le fon C , faifant
fuivre ainfi les fignes en montant , c d
e, f, g, a, b, c, qu'il rendit la Science du Chant
Grégorien ( alors qualifié Mufique ) plus aifée
à apprendre ; il contrevint en cela à l'étymologie
du mot de Gamme , qui étoit venuë
de ce que le G, fe trouvoit au haut des fept let
tres , quand la plus baffe ou la plus graveé toit
la lettre a ; ce qui faifoit alors a , b , c , d , e ,
f, g. Ce ne fut pas non plus de ce qu'il ima
gina de donner de nouveaux noms aux tons fignifiés
précédemment par , c, d, e,f,g,a,fçavoir,
ut , ré, mi, fa, fol, la , lefquels noms il prit au
commencement de chaque hemiftiche de la
premiere Strophe d'Ut queant laxis. Mais la
facilité vint de ce que fur chaque fyllabe de
la parole , ceux qui chantoient , voyoient à
quel dégré ou à quel étage , pour ainfi- dire, ils
devoient porter leur voix: car il retint l'uſage
des trois lettres anciennes , fçavoir , la lettre
C, qu'il plaça au commencement de la corde
où il vouloit qu'on fit fonner ce qu'il appel
loit
JUILLET. 1743-
1557
loit ut ; la lettre F , qu'il plaça au commencement
de la corde où il vouloit qu'on fit fonnerfa,
c'est ce qu'on a depuis appellé les Clefs
du Chant , & enfin la lettre b , qui étoit deftinée
dans certains cas à être placée dans le
degré immédiatement inférieur à la corde c ,
pour fignifier que de cette corde c à la corde
b, l'intervalle étoit d'un ton. J'avouerai cependant
qu'il reftoit une chofe à defirer dans
les nouveaux noms que Gui Aretin donnoit
aux fons de la Gamme. On fait naturellement
fept fons confécutifs , jufqu'à ce qu'on attei
gne le huitième , appellé communément
Octave. Gui ne jugea à propos d'employer
que fix noms; il en reftoit un à fuppléer, & ce
fut en quoi peut- être les ennemis de ce Religieux
auroient été mieux fondés à combattre
fa Méthode , comme infuffifante . Mais je me
doute que fi on examinoit exactement fes
Ouvrages , on verroit qu'il ne fe contentoit
pas de ces fix fyllabes ut re mi fa fol la , &
qu'il y en avoit une feptiéme qu'il faifoit prononcer
be, dont le figne étoit out . Ainf
voici quelle étoit l'Octave de Gui Aretin :
tre mifa fol la bent.
Quelques - uns de ceux, qui remarquerent
que les quatre fons d'enhaut , ne font proportionellement
pris , que la repetition des
quatre fons d'en bas,ne voulant retenir aucun
nom tiré d'une des fept premieres lettres feules
dc
1558 MERCURE DE FRANCE
.
de l'alphabet , s'aviferent de propofer , com
me plus convenable , lorfqu'il y auroit , par
exemple , felon notre ufage actuel , cette
progreffion à faire ,,
ut re mifa fol la fi ut re mi ,
s'aviferent , dis-je , de propofer de chanter ;
ut re mifa fel la mifa fol la.
Ce fut ce qu'on appella chanter par les
muances ,,
parce qu'avant que de retrouver
le fon huitiéme ou octave , on reprènoit
, pour fignifier des fons qui la rendiffent
complette , des noms déja employés une
fois ces repetitions de noms avec muance
ou changement de fon , étoient très - incommodes
, & cependant elles fubfifterent
jufqu'à ce qu'un particulier vainquie
L'entêtement qu'on avoit de ne pas donner
le nom de beau feptiéme fon
&
vint à bout d'éliminer la répetition de la
fyllabe mi , en lui fubftituant la fyllabe fi.
Mais j'en reviens à dire , que tout cela
n'a pas dû être imputé à Gui Aretin , qui
fourniffant fix. noms nouveaux & confervant
le feptiéme , donnoit de quoi fatisfaire
les commençans . Il ne reftoit rien
que de clair dans fon Syftême , parce que
Le feptiémede fes fons étoit figuré ou ou
,
, felon le different fon qu'il convenoit de
former dans l'intervalle du la à l'ut. L'échelle
qui regnoit fur la parole d'un côté
dc
1
1
JUILLET . 1743..
1559
,
de la page à l'autre , fut un foulagement
admirable. Le Chant Grégorien fut appris
en peu de tems par les enfans de Choeur de
l'Eglife d'Arrezzo , & un petit enfant en fçût
plus en un mois que les vieillards les plus
âgés de tous les autres Pays . ( a ) En effet
quand même un Chantre cût vecu cent
ans il n'auroit pû encore au bout du
fiécle fe tirer lui tout feul d'une Antienne
( b ) Le Pape Jean XX . ayant
oui parler de ce prodige , fit venir à Rome
le Moine Gui , avec l'Antiphonier noté
à fa maniére , pour s'affûrer lui même
de la vérité. Ce Souverain Pontife s'étant
fait expliquer les nouvelles régles par l'Auteur
même, & ayant un peu refléchi deffus ,
prit l'Antiphonier , fit l'effai fur un Verfet
qui étoit nouveau pour lui : il le chanta
fans faute , & l'apprit à l'heure même
( a ) Ecclefia ( Aretina ) etiam pueri in modulandi
ftudio perfectos aliorum quarunque locorum superant
fenes. Guido Ep . ad Theodald. Ep. Aret .
Quidam eorum imitatione chorda & noftrarum notarum
uju exercitati ante unius menfis fpatiun invifes
inaudites cantus ita primo intu tu indubitanter
cantabant , ut maximum ſpectaculum plurimis
praberent. Ibid.
( b) Maximè dolui de noftris cantoribus qui etfi
centum annis in canendi ftudio perfeverent , numquam
tamen vel minimam Antiphonam per fe valent ef
ferre. Ibid.
560 MERCURE DE FRANCE
en préfence du Réligieux . ( c ) Si c'eſt- là
rendre unfort mauvais fervice à la Mufique
, fi c'eft - là gâter l'Art d'enfeigner le
Chant , je ne fçais pas comment il falloit
qu'il s'y prit , pour réüffir au goût de
M. Rouffeau.
Il est vrai que ces témoignages nous font
tranfmis par l'Auteur même ; mais ne convenoit-
il pas qu'il fe défendit contre fes
émules que la jaloufie animoit plutôt qu'un
zéle véritable , felon qu'il fut facile de s'en
appercevoir ? Auffi arriva- t'il que ces adverfaires
voyant le progrès immenfe que
fit le nouveau fecret de peindre le Chant
& de l'apprendre
n'oferent rien écrire
contre Gui , à qui ils ſe virent obligés de
laiffer le champ libre.
J'allois finir ici cette Lettre , M. R. P.
lorfqu'un de vos Confreres , qui vifite affi
dûment tous les Manufcrits du Berry ,
pour donner l'Hiftoire de cette Province ,
a eu la bonté de me faire part de quelques
Extraits plus amples des Ouvra-
( c) Pontifex noftrum velut quoddam prodigium
revolvens Antiphonardum , prafixasque ruminans regulas
, non prius deftitit , aut de loco in quo fedebat
abceffit , donec unum verficulum inauditum voti
compos edifceret , ut quod vix credebat in aliis , tam
fubitò in fe recognofceret . Guido Ep. ad Michaël.
Annal. Bened. T. IV. P. 324.
ges
JUILLET. 1743 . 1561
,
ges du même Aretin fur un Manufcrit
confervé dans l'Abbaye de Chezalbenoît,
Je fuis perfuadé que vous ayez déja ceci
dans la collection qui eft parmi les Manufcrits
de S. Evroul . Je ne vous prie d'y
faire attention , qu'afin de nous confirmer
de plus en plus dans le fentiment que
Gui Aretin rendit un très - grand fervice à
l'Eglife & à tous les Chantres en inventant
une nouvelle maniére claire & aifée
, de noter le Chant. La connoiffance de
cette Science étoit fi obfcure & fi embrouillée
, que Gui fe vit obligé de dire
que de fon tems les Chantres » étoient
les plus infenfés ou les plus à plaindre
» de tous les hommes. ( a ) Dans tous les
» Arts communement, dit-il , on en apprend
» plus de foi- même que les Maîtres n'en ont
» enfeigné . Les enfans ayant appris à lire le >>
( a ) Temporibus noftris fuper omnes homines fatui
funt cantores. In omni enim arte plura funt valdè
qua fenfu noftro cognofcimus quam que à magiſtro
didicimus. Perfecto enim folo Pfalterio , omnium li,
brorum lectiones cognofcunt pueruli ; & agricultura
fcientiam fubitò intelligunt ruftici . Qui enim
unam vincam putare , unam arbusculam inferere
unum afinum onerare cognovit , ficut in in uno faeit
, in omnibus fimiliter , aut etiam meliùs facit &
non dubitat. Miferabiles autem cantores eorumque
difcipuli , etiamfi per centum annos quotidie decantent
, nunquam per fe fine magiftro vel parvulam
cantabunt Antiphonam , c.
* Plautier
562 MERCURE DE FRANCE
» Pfcautier
>>
›
lifent après cela feuls tou-
>> tes fortes de Livres . Les Payfans apde
tems les travaux de
prennent en peu
la Campagne. Quand ils fçavent railler
" une Vigne , planter ou enter un Arbre ;
charger une Bête , ils fe réglent fur ce
» qu'ils ont fait une fois , pour le faire tou-
» jours de même , & quelquefois encore
>> mieux ; & ils font fürs de réuffir. Mais
» pour ce qui eft des miferables Chantres
» & de leurs Difciples , quand même ils
>> chanteroient tous les jours pendant cent
>> ans jamais ils ne feront en état de
>> chanter d'eux - mêmes , & fans le fecours
» du Maître , la moindre petite Antienne...
» Et ce qui eft plus fatal , c'est que plu-
» fieurs Clercs & Moines , voyant qu'ils
» perdent leur tems , en eflayant d'appren-
» dre à chanter négligent l'affiftance à
» l'Office Divin. En effet , ajoute - t'il , lorf-
» qu'on l'entend célébrer , il femble qu'on
» voye des gens difputer les uns contre
les autres ; à peine deux voix font-
» elles à l'unifon , le Difciple ne s'accor-
» de ni avec fon Maître , ni avec fon Condifciple.
La maniere de noter , inventée
Dar Aretin , remédia à tout cela ; le Chant
Grégorien , qui étoit la principale Mufi
que de ces tems là , fut appris facilement
, & fut chanté à l'unifon fans dif
cordance
,
JUILLET. 1743. 1563
ce
cordance & même avec goût : & ce fût
cette facilité qui fit naître tous les rafinemens
qu'on trouva depuis . Que M. Rouffeau
ait donc la bonté d'effacer de fon
Livre , que Gui Aretin rendit un fort mauvais
fervice à la Mfique , & qu'il eſt à
propos de faire pour fa Perfection ,
que Gui d'Arezze a fait pour la gater.
Enfin , que ce même Gui apprit aux hommes
à chanter difficilement. Toutes ces Propofitions
étant tauffes , ne peuvent que
défigurer un Livre, où l'Auteur fait profeffion
de vouloir dire la vérité l'expérience fit
voir évidemment que le Chant étoit devenu
infiniment plus aifé à apprendre par
fa méthode , que par les précédentes : c'eft
le feul Fait que j'ai entrepris de prouver ,
& qui me proît très bien établi par les
témoignages tirés des Ouvrages du tems
même de l'invention . Cette méthode continuera
, & acquerrera de nouvelles perfections
avec le tems. Loin qu'elle perde
de fon mérite , je fuis témoin qu'un fçavant
Magiftrat de Paris a encheri, deffus en donnant
des noms aux onze femitons qui font
entre l'ut inférieur à l'ut fupérieur , c'eftà-
dire , qu'outre les noms de re mi fa fol
la fi , il a admis les trois fyllabes mafi fa ,
de l'Antiphonier de Paris , auxquelles il
en a joint deux de fa façon , l'un pour l'ut
E dicze .
1564 MERCURE DE FRANCE
dièze , & l'autre pour le fol dièze . Ces
multiplications de noms , qui font fi légitimes
, que j'ai fi fort fouhaittés , & qui ferviroient
fi utilement à s'entendre clairement
les uns les autres , lorfqu'on parle
de tranfpofitions de Chant , font bien oppofées
à la prétendue fimplification que
M. Rouffeau propofe. L'idée qui m'eft venuë
de peindre aux yeux des enfans qui com
mencent à apprendre le chant, les diftances.
réelles des cordes de l'ancienne échelle d'Aretin
, & que j'ai communiquée au Pablic
il y a deux ans , n'y eft pas moins
oppofée. Ainfi , M. R, P. vous voyez que
je fuis intereffé à foutenir ce que j'ai imaginé
pour la plus grande facilité de ceux qui
feront ufage de l'echelle d'Aretin . J'accorderai
bien que les chiffres 1.2. 3 4.5.6.7.
reffemblent à ces fept premiéres lettres de
l'Alphabet Latin abcdefg , & c'est parce
qu'elles ne leur reffemblent que trop , que
je prétends que l'une des méthodes n'eft
pas plus commode que l'autre , pour enfeigner
le Chant d'une maniére claire
palpable , & intelligible aux enfans qui
commencent , & qui font , pour ainfi dire
à la Croix de par Dieu de la Mufique,
Comme donc l'ufage d'employer feulement
les fept premiéres lettres de l'Alphabet
Latin , a été reprouvé pour fon infuffifance,
JUILLET. 1743 1565:
218
ce , il y a tout licu de craindre que l'em
ploi des fept premiers chiffres n'ait le même
fort; il en fera de ce feptiéme , comme des Notes
de Tiron , qu'on employe pour écrire
en abregé , & écrire auffi vite que l'Orateur
qui prononçoit un Difcours : on s'en
fervira pour épargner le papier , pour éviter
de former un Volume de ce qui peut
être cont nu en quelques, pages ; pour envoyer
aufli beaucoup auth d'airs notés dans une
fimple Lettre. On en agira ainfi de Maître
à Maître , mais non de Maître à écolier
, & je ne croirai jamais qu'il ſe trouve
des écoliers , qui n'ayant aucune teinture
de Chant , & qui étant abfolument neufs
dans cet Art , apprennent facilement à
chanter fimplement par 1. 2.3.4 5.6.7.
fans échelle ; ou s'il s'en trouve , je foutiens
que ces enfans autoient appris encore beau
coup plus facilement par la méthode
de l'Echelle de Gui Aretin , telle qu'elle
a été perfectionnée jufques ici , & qu'elle
pourra l'être encore par la fuite.
Il ne me reste plus , M. R. P, qu'à vous
demander , fi votie Manufcri de Gui Are
tin , eit aufli riche en Figures , que celui
que je viens de découvrir à Chezalbenoît
; c'est-à-dire , fi on y trouve des
Figures de Joueurs de toute forte d'Inf
trumens , à commencer par de petites clo-
E ij
ches ,
1566 MERCURE DE FRANCE
>
ches , & qui font qualifiés Percuffionales
Tenfibiles Inflatiles , &c. Cela eft affés
digne d'attention dans le Manufcrit de
Chezalbenoît , que l'on dit être du XI.
ou XII . fiécle. En même tems , fouffrez
que je vous prie de faire examiner , fi en
quelque endroit de votre Exemplaire , Gui
eft appellé Guide Augens Aretinus , comme
le Pere de Montfaucon l'appelle dans
les Tables de fon Ouvrage , intitulé Bibliotheca
Bibliothecarum . II peut fe faire qu'il y
ait eu un Guido Augenfis qui ait écrit fur la
Mufique , & que la reflemblance du nom foit
caufe que des deux on n'en aura fait qu'un .
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Paris , ce 30 Juin , 1743-
VERS préſentés à Madame ***
le jour de fa Fête.
Serois - je offrir à vos charmes
Des Vers qu'a dictés le refpect ?
: Ofons d'ua coeur trop circonfpect
Ecartons les vaines alarmes .
Un innocent amuſement
Ne fçauroit offenfer les Graces
Ni
JUILLET. 174317 $ 567
Ni la Vertu qui fur les traces
Vous voit marcher fi conftamment.
J'eufle pû faire une Couronne
De Jafmin , de Refes , de Lys ,
Mais leurs attraits font avilis :
Déja le Peuple s'en couronne.
Les couleurs dont Flore fe peint ,
Seroient auprès de votre teint ,
Ce qu'eft l'ombre auprès de l'Aurore,
Que ne puis-je mieux peindre encore
La beauté , qu'en fécret j'adore ;
Pour rendre hommage à vos apas ,
Orner cette heureuſe journée !
Amours , & vous fruits d'Hymenée ,
Hâtez- vous de la célébrer :
Hatez-vous , aimable Jeuneffe ,
Tout vous invite à vous livrer.
Avec tranfport à l'allegreffe
Aux Jeux uniffant Paction
Bientôt vos pas avec adreſſe ,
Portés fur les airs d'Amphion
Banniront l'oifive parefle ,
Que fuit l'odieufe trifteffe.
ENVOI
Madame , ma témerité
Ne mérite point d'indulgence.
È iij J'ai
1568 MERCURE DE FRANCE
J'ai peint avec haïveté
Ce qu'il falloit admirer en filence :
Au témeraire impofez penitence ,
Il fe foumet à votre volonté.
178
Par J. J. B. D. L. V.
7654 9
On a dû expliquer les mots des Enigmes
& des Logogryphes du Mercure de
Juin premier Volume Par
la Cloche
Silentium , le Portefeuille , & la Grace. On
trouve dans le premier Logogryphe , Fen ,
Lire , Vie , If, Fort , Oeuil , Port , Or.
Dans le fecond , Race , Rage , Age , Grec
Ut , Car , Arc , Cage , & Gâre.
:
( V
Les mots de l'Enigme & du Logogryphe
du fecond Volume , font le Tournebroche
& Cartouche. On trouve dans le
Logogryphe, Cachet, Torche , Cloche, Arche,
Char toucher Art ,
>
Couche.
Ruche Roc &
و
ENIGM E.
Ous fommes plufieurs foeurs , à peu près de
N même âge ;
Dans deux rangs differens , mais d'un femblable
ufage ;
Nous
JUILLET. 1743 1560
maiſon ,
Nous avons en naiffant un Palais
pour
Qu'on pourroit mieux nommer une étroite priſon .
Il faut nous y forcer , pour qu'une de nous forte ,
Quoique cent tois le jour on nous ouvre la porte ,
J
AUTRE.
E pafferai toujours pour choſe inanimée ;
Dans mon corps cependant une ame eft enfermée .
Quoique tout à fait creux , Lecteur, j'ai des boyaux,
Mais , differens des animaux ,
C'eft en dehors que je les porte ;
Pour finir en deux mots, j'ai la voix douce & forte,
Par Mlle .... d Arras.
#
JE
LOGOGRYPHE.
E fuis Grec d'origine , & le bruit de won nom
Exciteroit l'attention
De l'homme le plus flegmatique .
D'un habile Ecrivain l'Ouvrage Dramatique ,
Dès l'abord , cher Lecteur , me préfente à tes yeux.
En vain à me trouver cependant on s'applique ,
Si l'on n'apporte pas un regard curieux .
Des membres de mon corps le nombre épouvantable
Produit une foule innombrable
D'Etres grands & petits , d'objets tous differens ,
E j Qui,
1570 MERCURE DE FRANCE
Qui,tour à tour , courent des premiers rangs
Occuper à l'envi la place.
J'obſerve en commençant la liquide furface ;
Deux des quatre Elémens , de nos corps les appuis.
Par 10. 6. 12. 5. facilement je puis
Du plaintif Bucheron fatisfaire l'envie.
Cette Divinité , qui pour fauver la vie
Des fureurs d'un mari jaloux ,
Avec fon fils fe noya de courroux
Au milieu de l'onde Thébaine ,
Dès l'inftant paroît ſur la Scéne .
Combine encore un peu , tu trouveras foudain
Dans 1. 2. 12. 10. 9. 6. 7. 15. enfin
Celle qui lui donna naiſſance ;
Et retranchant 6. 7. fi tu mets 5. d'abord ,
Tu verras ce Mortel , enfant de l'ignorance ,
Qui fous un Capuchon , & d'un foûmis abord ,
S'en vient des champs nous prôner l'indigence,
Qu'il éprouve en fon trifte fort.
Prens 9. 3. 18. 6. & 7. tu vois paroître
Jadis le Chef & l'intrépide Maître
D'une noble Expédition .
Mais c'est trop m'arrêter , Lecteur, car j'enviſage
De Cain contre Abel l'infâme paffion ,
De la Divinité la reffemblante image ,
Et l'inhumaine trahiſon.
Ce que l'Eglife en certains tems ordonne ;
Ce
JUILLET. 1171 17437
Ce que la charité nous prône ;
Ce que l'homme de bien pourfuit avec raiſon ;
De plus , ce qu'avec foin cherche un vrai Philoſo
phe ;
Un Mont fouvent en feu ; trois nombres ; une étoffes
Un jour anéanti , l'ornement d'un Prélat ;
Deux arbres , & da tems les deux difpenfatrices
Un des Juges d'Enfer ; le Maître d'un Etat ;
Des grands Seigneurs les plus cheres délices
Le Mortel qui d'un Roi s'imagine l'égal ;
Le Conducteur des Juifs ; des Turcs le grand Pro
phéte ;
Un grave Hiftorien , moderne , impartial ;
Un autre , né Latin , de-même qu'un Poëte ,
D'Affuerus l'Epoufe ; un Péché capital ;
La plus vile bête de fomme ;
Un des deux Fondateurs de l'ancienne Rome;
Un Pere de l'Eglife , enfin un animal' ,
Beaucoup amateur du fromage,
Mais ; t'entretenir davantage ,
N'est-ce pas, cher Lecteur , pure indifcrétion
Je borne donc ici le pompeux étalage
Des objets infinis de ma combinaiſon.
Gavory, de Toulon
I v NOU
1572 MERCURE DE FRANCE
NOUVELLES LITTERAIRES ,
DES BEAUX ARTS, &c.
ROJET d'une nouvelle Edition de l'Hif
met , Abbé de Senones.
La plus grande partie des Exemplaires de
l'Hiftoire de Lorraine , compofée par le R. P.
Dom Auguftin Calmet , pour lors Abbé de
S. Leopold de Nancy , imprimée en 1728 en
quatre Volumes in-folio, par feu J.B. Cuffon ,
étant deja diftribuée , le Public informé que
dans cette premiere Edition il y a eû plufieurs
chofes omifes ou retranchées , a ſouhaité
qu'on en donnât une nouvelle, revûë, corrigée
& augmentée.
Pour fatisfaire au defir du Public , l'Auteur
a pris la réfolution de faire réimprimer
inceffamment fon Hiftoire , & d'y joindre
plufieurs nouvelles Découvertes, diverfes Corrections
quelques Differtations , quantité de
Pieces , de Notes , & de Morceaux curieux, qui
l'enrichiront confidérablement , & la rendront
beaucoup plus ample & plus parfaite
que la premiere.
7
Voici les principales Piéces qu'on fe propofe
de faire entrer dans cette réimpreffion .
1º.
JUILLET. 1743-
5573
1º. Trois ou quatre cent Piéces ou Titres
nouveaux , avec des Notes Littérales & Hif
toriques , fans compter un très- grand nom
bre d'autres Notes de même nature , qui
étoient deftinées à éclaircir les endroits obfcurs
des Actes & des Titres de la premiere
Edition , & qui n'ont pû être imprimées , à
caufe de la groffeur des Volumes.
Sept nouvelles Differtations ; fçavoir :
2º. Differtations fur les Monnoyes de
Lorraine.
3. Differtations fur la Nobleffe de Lor
raine.
: 4. Differtations fur les grands Chemins de
Lorraine.
5. Sur les Seigneurs avoüés des Eglifes.
6. Differtation fur l'origine des Dixmes &
des Revenus Eccléfiaftiques.
7. Sur l'ancienne Jurifprudence de Lor
raine.
8. Sur la Généalogie de faint Arnould ;
Evêque de Metz.
9. Remarques fur le tems & les autres
circonftances de la fondation des Abbayes
de Vôges.
10. Une bonne partie du Poëme ou du
Roman intitulé , Garin le Loherans , dont
on fera connoître l'Auteur , le deffein & le
caractére .
11 Ilias Lotharingica , Piéce en Vers fut
E vj
les
1574 MERCURE DE FRANCE
les malheurs de la Lorraine, après les Gueres
du Duc Charles IV.
12. La Vie du Duc Antoine par Hercu
fanus , Chanoine de S Diey , plus exacte &
plus étendue que celle qui a été imprimée
dans la premiere Edition.
13. Les Statuts Synodaux de M. Bertrand
de la Tour , Evêque de Toul en 1359.
14. Les Statuts Synodaux de M. Liebaut
de Cufance , Evêque de Verdun , de l'an
1401 .
15. On pourra auffi réimprimer , fi le
Public le fouhaite , la Nanceide de Pierre
de Blarû , Chanoine de S. Diey ; Poëme
Héroïque , concernant la Guerre du Duc
René II. contre Charles le Hardi Duc de
Bourgogne. Cet Ouvrage eft devenu fort
rare.
16. Le Poëme de Laurent Pillart ou Pil
tadius , auffi Chanoine de S. Diey , fur la
Guerre du Duc Antoine contre les Payfans
Luthériens d'Allemagne , revoltés en 1525.
Ouvrage extrêmement rare.
17. Mémoire Manufcrit fur la Ville de
Nancy.
18. Mémoire fur la décadence de la Mai
fon d'Apremont.
19. Memoires de Forget , Médecin du Duc
Charles IV.
20. Mémoires de M. le Baron d'Hennequin.
21.
JUILLET . 1743. 1578
21. Voyage de M. de Maillane , envoyé
de la part du Duc Charles III. vers le Roi
d'Angleterre.
22. Remarques de M. l'Abbé de Riguet ,
Grand Prévôt de S. Diey , fur les anciens
Titres de cette Eglife.
23. Un Poëme fur le fiége de la Motte ;
intitulé , Mota emota.
24. Une nouvelle Differtation fur l'origine
de la Maifon de Lorraine , que l'Auteur veut
faire deſcendre des anciens Ducs Bénéficiers
de Lorraine , depuis Renier , qui vivoit en
906. ou 907. jufqu'à Gerard d'Alface , qui
commença à regner en 1048 .
25. Réfléxions critiques fur le nouveau
Syftême du R. P. Marquart Hergotte , Bénénedictin
de S. Blaife dans la Forêt noire ,
touchant la Généalogie de la Maiſon de
Hafbourg , ou de la Maifon d'Autriche.
26. Remarques fur la Maifon d'Egefheim
, par rapport à la fondation de l'Ab
baye d'Altrof
27. Interrogatoire prêté par François de
Rofieres au fujet de fon Livre intitulé ,
Stemmata Lotharingia , avec les Piéces qui
ont rapport à cette affaire .
28. Le Dialogue de Jean & de Lud' , Sécrétaires
du Duc René II . fur les affaires de
leur tems.
29. Lifte des Hommes Illuftres , qui fe
fong
1576 MERCURE DE FRANCE
font diftingués en Lorraine & dans les trois
Evêchés , tant en matiere de Littérature
que des Beaux Arts , avec le Titre de leurs
Ouvrages & un Abrégé de leur Vie .
30. Plufieurs Additions faites à la Lifte
des Auteurs qui ont écrit fur l'Hiftoire de
Lorraine , déja imprimée dans la premiere
Edition.
31. Grand nombre de nouvelles Liftes
d'Abbés , oubliés ou omis dans la premiere
Edition ; comme auffi quelques Additions
à la Lifte des Evêques de Trêves , Toul ,
Metz & Verdun.
32. Le Plan de l'Eglife Cathédrale de
Verdun & des Edifices adjacens.
33. Un des plus beaux côtés de l'Eglife
Cathédrale de Metz .
34. Hiftoire de l'Univerfité de Pont - à-
Mouffon, écrite en Latin par le P. Abram,
Jefuite.
35. Diverſes Médailles & Monnoyes, tant
anciennes que modernes concernant la
Lorraine.
>
36. Les Antiquités qui fe trouvent à Framont
, à Léomont , à Vaudemont , à Toul ,
à Metz , & c . le tout gravé en Tailles - Douces
, avec des explications Hiftoriques.
37. Les Généalogies des Maifons d'Apre
mont , du Deuilly , du Chatellet , de Lenon-
Court , de Nancey , de Rofieres , de Ligniville ,
JUILLET. 1743. 1577
de Haraucourt , des Comtes de Ligny , de
Toul , de Sarbuck , &c . 1
38. Des Remarques nouvelles fur les Maifons
de Bayon , de Dafbourg ou Dabo , de
Caftres , de Sarverden , de Couffey , de
Paroye , & c.
39. Quelques Ecrits fur la mouvance du
Barrois.
40. Enfin , on fe propofe d'écrire l'Hiftoire
du Régne du Duc LEOPOLD I. de
glorieufe mémoire , & celle de la Ceffion
de la Lorraine faite en 1737. par le Duc
François III. aujourd'hui Grand Duc de
Tofcane .
On invite les Curieux d'envoyer à l'Auteur
ce qu'ils croiront propre à illuftrer l'Ouvrage
& à lui dire leur avis fur ce qu'il pourra ajoûter
ou corriger dans le Plan qu'il leur propoſe ,
fous promeffe de faire honneur à ceux qui voudront
bien l'aider dans l'exécution de ce Projet..
Antoine Lefeure Imprimeur ordinaire
du Roi à Nancy , qui s'eft chargé de cette
nouvelle Edition , la donnera au Public
par voye de Soufcription en fix Tomes
in-folio.
,
Chacun des fix Tomes!, fera de huit cent
Pages , de caractéres pareils à ceux du Projet
, & de même Papier.
Il fournira un Tome tous les fix mois.
Le prix de la Soufcription fera de foixante
dix
78 MERCURE DE FRANCE.
dix-huit Livres , au cours de France pour
lesfix Tomes en feuilles , & ceux qui voudront
fouferire , payeront.
SÇAVOIR , en fouſcrivant ,
En recevant le premier Tome ,
En recevant le ſecond
En recevant le troifiéme
En recevant le quatrième ,
En recevant le cinquième ,
Rien pour le dernier
18. liv.
12.
12.
12.
12.
12.
Total , 78. liv.
Le prix fera de cent livres , au même cours,
pour ceux qui n'auront pas foufcrit.
On a ouvert les Soufcriptions le premier
Mai , & on ne pourra plus foufcrire au dermier
Septembre de la préfente année 1743 .
Noms des Villes où l'on pourra foufcrire.
EN LORRAINE .A Nancy, chés l'Imprimeur ,
qui fera honneur aux Lettres de ceux qui
voudront foufcrire. On pourra auffi s'adreſſer
à tous les Imprimeurs & Libraires de cette
Province.
EN FRANCE. A Paris , chés Lemercier
Imprimeur , & de Hanfy, Marchand Libraire.
A Lyon, chés les Freres Bruyfei , Imprimeurs,
& la veuve Journel , Marchand Libraire. A
Ramën , chés Boisjourin , Marchand Libraire.
A Meaux, chés l'Imprimeur de M. l'Evêque .
A
JUILLET. 1743. 1579
A Rheims , chés Delaitre , Pere & Fils , Imprimeurs.
A Chaalons , chés Begin , Marchand
Libraire. A Strasbourg , chés Doulfecker ,
Marchand Libraire. A Troyes , ch's Oudot ,
Imprimeur. A Besançon , chés Charmet ,.
Marchand Libraire, A Dijon , chés Defay ,
Imprimeur Libraire. A Langres , chés Dre-
Marchand Libraire.
von ,
EN HOLLANDE , A Amfterdam, chés Chatelain
, Marchand Libraire. A la Haye , chés
Jean Neaulme , Marchand Libraire . A An
vers , chés Verdufen , Imprimeur
AUX PAYS - BAS. A Bruxelles, chés Frifck
Imprimeur , & Devos , Marchand Libraire.
A Louvain, chés Van- Overbeke, Imprimeur.
A Mons , chés Migeot , Imprimeur. A Namur
, chés Hinne , Imprimeur. A Gand
chés Ser anders , Imprimeur. A Lille , chés
la veuve Danel, Marchand Libraire A Liége,
chés Kinft , Imprimeur. A Luxembourg, chés
Chevalier , Imprimeur.
EN ALLEMAGNE . A Vienne, chés Briffau',
Marchand Libraire . A Francfort , chés Varentrap.
A Ratisbonne, chés Petit, Imprimeur.
A Leipzic , chés J. Gottl , Imprimeur. A Cologne,
chés Roderique, Imprimeur. A Tréves,
chés l'Imprimeur de M. l'Archevêque. A
Colmar , chés Petit , Imprimeur.
EN SUISSE. A Bafle , chés Brandemuler. A
Genève , chés Cramer & les Freres Philibert.
LEÇONS
1580 MERCURE DE FRANCE
LEÇONS DE PHYSIQUE , contenant les Elemens
de la Phyfique , déterminés par les
feules Loix des Méchaniques , expliquées au
College Roval , par M. l'Abbé Jofeph Privat
de Moliéres , Profeffeur au College
Royal de France , Affocié de l'Académie
Royale des Sciences , & de la Société de
Londres 4. Volumes in- 12 . 12. livres.
LEÇONS DE MATHEMATIQUES , par le
même. Volume in 12. 3. livres.
ELE'MENS DE GEOMETRIE , par le même.
Volume in- 12. 2. liv. 10. fols , à
Paris chés la Veuve Brocas , ruë S. Jacques
, au Chef S. Jean ; les Freres Guerin
, rue S. Jacques , à S. Thomas d'A
quin ; Jean Defaint , ruë S. Jean de Beau .
vais , & Claude Jombert , Quai des Auguſtins.
,
Ces Ouvrages font géneralement eftimés
des Sçavans ; ils font , fur tout utiles
pour les Colléges , & on les enfeigne non
feulement dans plufieurs Univerfités du
Royaume , mais encore dans les Pays Etrangers.
On les a affichés de nouveau , pour
indiquer les Libraires chés qui ils fe vendront
dans la fuite , parce que M. l'Abbé
de Moliéres les débitoit lui-même de
fon vivant.
Nou
JUILLET.
1743. 1581
و
& NOUVEAUX ELE'MENS D'ALGEBRE
de la Geometrie , reduite à fes vrais Principes
, dédiés à M. d'Argenfon , Miniftre
& Sécretaire d'Etat au Département de la
Guerre , par M. laife , Maître de Mathématiques
, à Paris , chés Antoine Boudet ,
Imprimeur- Libraire , rue S. Jacques , 1743-
in-4° . de 293 pages , fans l'Epître dédi
catoire , la Préface & les Figures.
La premiére Partie de cet Ouvrage contient
les Principes de l'Arithmétique & de
l'Algébre. La feconde traite des Elémens
de la Géometrie ; l'Auteur y employe la
méthode Géometrique des anciens , & l'élegance
& la clarté des modernes ; tout
y eft démontré par Lignes & par Figures ;
le Cercle n'y eft point changé en Poligone
regulier d'une infinité de côtés ; la
Sphère y eft confiderée comme Sphére ,
& non comme un Poliedre infini ; il ex .
clud toute démonftration par Algébre &
par les Indivifibles ; cet Ouvrage eft en
cela bien different de ceux , qui paroiffent
depuis long- tems fur la même matiére ;
la parfaite evidence s'y rencontre par tout.
EXPERIENCES PHYSIQUES fur la maniére
de rendre l'Eau de la Mer potable ;
fur la maniére de conferver l'Eau douce
le Bifcuit & le Bled , & fur la maniére
de
# 82 MERCURE DE FRANCE
de faler les Animaux , lues dans les Affemblées
de la Société Royale de Londres
par M. Hales , Docteur en Théologie , &
de la Société Royale . Ouvrage extrémement
utile pour la Marine . On trouve à
la fin une Table méthodique des Expériences
de l'Analyfe de l'Air , du même
Auteur , à Paris , chés Rollin , Fils , Quai
des Auguftins , 1741. Volume in- 12 , de
plus de 300. pages.
INTRODUCTION A LA CHYMIE , accompagnée
de deux Traités , l'un fur le Sel
des Métaux , & l'autre fur le Soufre Ano
din du Vitriol , par M. G. Rothe , Médécin
de Leipfix , avec une Analyle rai
fonnée de l'Antimoine & un Traité fur
les Teintures Antimoniales , par M. Meuder
, Docteur en Médécine , traduits de
l'Allemand , par J. L. Clanfier , Médécin
de Paris. A Paris , chés les Freres Guerin
, rue S. Jacques. Tome in- 12 . 174F.
HISTOIRE DE CICERON tirée de fes
Ecrits & des Monumens de fon fiécle >
avec les preuves & des éclairciffemens ; 4.
Volumes in- 12. Tome premier de 360
pages , fans un Avertiffement & une Préface.
Le fecond de 385. Le troifiéme de
346. & le quatrième de 406. A Paris ,
chés
JUILLET.
1743. 1585
à la
chés Didot , Quai des Auguſtins
Bible d'or.
MONTE'SUMA , ou Fernand Cortez ;
Tragédie de M. Dryden , célébre Poëte
Anglois , & traduite par l'Abbé D. B,
Brochure in- 8°. Prix 24. fols . A Paris
chés Jean Lefclapart , rue S. André des
Arts , Vis-à- vis la rue Pavée , à l'Espé
rance couronnée , & chés Lefclapart Fils
Quai de Conty , entre la ruë de Nevers
& la rue Guénegaud , à l'Espérance , 1743 ,
On trouve à la tête de cette Brochure 1
l'Argument qu'on va lire.
›
Montéfuma , Roi du Mexique , étoit
célébre dans le Nouveau Monde par fon
habileté dans la Guerre & dans le Gou
vernement. Alfyre , Reine de Taxalla , en
devint éperdûment amoureufe : fuivant la
Coûtume du Pays , elle fit les plus ten .
dres avances envers Montéfuma celui- ci
n'y répondit que par fes outrages & par
fes mépris. L'amour d'Alfyre fe changea
bientôt en fureur. Elle époufa Traxallan
Général de fes armées , à condition qu'il
attaqueroit le Royaume du Mexique , &
ne conclûroit jamais la paix avec Montéfuma.
Traxallan jura mille fois la mort de
l'ennemi d'Alfyre , mais la Victoire ne
devoit pas fe déclarer en fa faveur. Son
armée
1584 MERCURE DE FRANCE
armée fut entiérement défaite ; il fut lui
même mis à mort par Montéfuma , & ce
Conquérant après s'être délivré d'Alfyre ,
affervit entiérement le Royaume des Traxallains.
Les Vaincus s'efforcerent bientôt
de fecouer le joug. Tandis que la guerre
étoit déclarée entre les deux Koyaums ,
Cortez envoyé par Charles - Quint , arrive
avec des troupes Eſpagnoles fur les Côtes
du Mexique. Il profite de la divifion des Indiens
, fe joint aux Traxallains , attaque l'armée
de Montéfuma , remporte fur lui la Victoire
, & le force de fe renfermer dans fa
Capitale avec fon armée . Cortez l'alliége
dans cette Ville , & par des prodiges de
waleur , force fes ennemis à fe rendre.
ои
3
ALMANACH CHRONOLOGIQUE ,
véritable connoiffance des tems pour l'année
1743. contenant les évenemens les plus
remarquables , les Princes & Princeffes ,
le Clergé , les Confeils du Roi , le Département
de M M. les Secretaires d'Etat ,
la Lifte de M M. les Officiers du Parlement
, Chambre des Comptes , Bureau des
Finances , & autres Juftices de la Ville
de Dijon avec les principaux Officiers
des Bailliages de cette Province & leurs
dépendances ; les noms des Premiers Préfidens
Procureurs & Avocats Géneraux
>
de
JUILLET. 1743.- 1585
de tous les Parlemens de France , les Edits
Lettres Patentes & Arrêts du Confeil'
avec une Supputation exacte du lever &
du coucher du Soleil , un Tarif de toute
forte d'interêts & de comptes , &c . Par
M. AIBA , à Dijon. Chés Arnaud J. B.
Auger Imprimeur Libraire du Roi , du
Parlement , de M. l'Evêque & du Collége.
Nous n'avions pas encore eû connoif
fance de cet Almanach , qui a été donné
au Public pour la première fois en 1741. 11
eft dans le goût de l'Almanach Royal de
Paris , & fon Volume eft à peu près égal ;
il y a feulement entr'eux cette difference ,
que l'Almanach Royal eft d'un ufage plus
univerfel , au lieu que celui - ci eft principalement
à l'ufage de la Province de
Bourgogne ; il contient beaucoup de chofes
curieufes & utiles , entr'autres :
1. A côté de chaque jour du mois ,
il marque les évenemens les plus mémo
rables arrivés ce jour - là , de même
dans les Hpéhémérides.
que
20. Des Remarques fur les differens Mé
ridiens comparés à celui de Dijon.
3°. Un Journal du Parlement de Dijon ,
où on diftingue les differentes Audiences
entr'autres , les Audiences appellées de Mife
ricordiâ , qui font les quatre Séances que
la
1586 MERCURE DE FRANCE
la Cour va tenir pour les Prifonniers la veille
des Kameaux , de l'Affomption , de faint
Simon S. Jude , & de S. Thomas.
4°. Plufieurs Liftes des Officiers du Parlement
de Bourgogne , des Avocats & des
Procureurs au même Parlement ; des Officiers
de la Chancellerie , de ceux de la
Table de Marbre, de la Chambre des Comptes
, du Bureau des Finances , les Comptables
de ce Bureau , la Chambre des Elus
Généraux du Duché de Bourgogne , les
Maires qui y ont entrée , les Receveurs
de la Province , l'Univerfité de Dijon , les
Officiers des Bailliages , Chancellerie &
Préfidial de Dijon ; une Lifte des Lieux
qui dépendent de cette Chancellerie pour
le Siége principal de Dijon , la Maîtriſe
des Eaux & Forêts , la Mairie , les Officiers
de la Milice Bourgeoife ceux de la
Juftice Confulaire : les Maréchauffées de
Bourgogne & de Breffe , les Officiers de
la Monnoye , ceux des Juftices particuliéres
de Dijon & des Juftices Seigneuiales
de la Province , avec les Lieux qui
font de leur reffort ; une Lifte des 18 .
Notaires de Dijon , où l'on marque à chacun
le nom de fon Prédéceffeur , ou de
celui à qui il avoit fuccedé , & le nom
des Notaires décédés depuis long tems ,
dont les minutes font dans les Archives
des
JUILLET . ` 1743 .
1587
des Notaires de Dijon,avec les dates du tems
où commencent & finiffent ces minutes ;
ce qui feroit bon à ajouter dans l'Almanach
Royal , une Lifte des Officiers
des Bailliages & Chancelleries de la Province
, avec les Lieux qui en dépendent ;
les Gouverneurs des Provinces & Places
de Bourgogne & Breffe. Les Officiers
de l'Intendance & tous les Subdélégués
de l'Intendant ; les differens Bureaux pour
les Droits du Roi , la Maîtriſe particuliére
d'Avalon ; l'Académie des Sciences
de Dijon.
5 °. Un Tarif pour liquider les Rentes
à toute forte d'interêt.
6°. Une Lifte des Foires de la Provin
ce de Bourgogne.
7°. Un Mémoire inftructif fur les me
fures ufitées dans la Province pour les grains ,
vins , aunage , poids , chemins , terres .
8°. Une Chronologie des Papes .
9º. Une Chronologie des Conciles.
10. Ce qui concerne le Clergé , & par
ticuliérement celui de la Province de Bourgogne
, l'Evêché , les Collégiales , les Cu
res , les Officiaux de l'Evêché de Dijon
la Chambre des Pauvres.
11º. Les Souverains & Principaux Prin
ces de l'Europe .
Enfin un Extrait des Ordonnances , Edits ,
F Déclarations
rjs8 MERCURE DE FRANCE
Déclarations & Arrêts intervenus pendant
les années 1741. & 1742. concernant la
Province de Bourgogne.
Lyon & quelques autres Villes avoient
déja de femblables Almanacks , qui leus
font propres.
DISSERTATION fur un Temple Octogo
ne, & plufieurs Bas - Reliefs, trouvés à Ceftas ,
lefquels défignent des Fêtes de Cibele
une Initiation à fes Myftéres , & un Sacrifice
qu'on lui a offert , enrichie de figu .
res en taille Douce & des Notes curieufes
, par
M.
PAbbé
Jaubert
, C.
D.
C.
à
Bordeaux
chés Jean - Baptiste Lacornée
Imprimeur de la Cour du Parlement ;
rue S. Jâmes , vis - à - vis la ruë de Gourgue.
Volume de 189. pages , fans l'Epître
dédicatoire • 1743. & à Paris , chés
Théodore Debanfy , Libraire fur le Pont
au Change , à S. Nicolas.
HISTORIA GENEALOGICA da Cafa Real
Portugmeza , &c . c'est - à - dire , Hiftoire Gé
néalogique de la Maifon Royale de Portugal
, depuis fon origine jufqu'à préfent ,
où font marquées les Maifons Illuftres
qui tirent leur origine des Rois & des
Ducs de la Maifon de Bragance , juftifiée par
des Autorités & par des Monumens inconteftables
JUILLET. 1743 1589
conteftables , & dédiée au Roi Don Jean
V. par le R. P. Dom Antoine Cajetan de
Soufa , Clerc Régulier , & de l'Académie
Royale. Sept Volumes in- 4°. Tome 1. à
Lifbonne , chés Jofeph Antoine de Sylva ,
Imprimeur de l'Académie Royale , 1735 .
DISCOURS prononcés dans l'Académie
Françoife le Jeudi 16. Mai 1743. à
la Reception de M. L'EVEQUE DE BAYEUX.
Brochure in-4°. A Paris , de l'Imprimerie
de Jean Baptifte Coignard , Imprimeur.
du Roi de l'Académie Françoife.
M
ONSIEUR L'EVEQUE DE BAYEUX
ayant été élû par Meffieurs de l'Académie
Françoiſe à la place de feu S. E. M.
LE CARDINAL DE FLEURY , y vint prendre
féance le Jeudi 16. Mai 1743. & prononça
avec beaucoup d'éloquence & de
dignité un Difcours qui fut univerſellement
applaudi , & qu'il faudroit rappor
ter en entier , pour n'en omettre rien de
confidérable . On en jugera par ce trait ,
qui termine l'un des plus beaux Eloges
qui ayent été faits de M. LE CARDINAL DE
FLEURY :
» Je finis , MESSIEURS , par un trait qui
>>>fuffireit feul pour fon Eloge; c'eft que le Roi
Fij
» 2
1590 MERCURE DE FRANCE
а * a eû pour lui une eftime fi folide & fi
» conftante , que rien n'a jamais pû l'affoi-
>> blir , ( cependant que ne tentent point
» l'envie & la jaloufie , contre un homme
» élevé dans une auffi grande place ! ) &
» ne peut- on pas dire , que fi M. LE CAR-
» DINAL DE FLEURY a été le feul Miniftre
» qui ait eû un crédit auffi inébranlable ,
c'cft que le Roi eft le feul Prince , qui
» ait été auffi inacceffible à la furprife & à la
» prévention ?
13
Qu'il eft beau , MESSIEURS , de voir
notre Roi , prendre un de fes Sujets pour
fon ami ; avoir pour lui toute la ten-
» dreffe , toute la confiance , toute la gé-
» nérosité de l'amitié la plus parfaite ;
» pleurer fa mort avec la fenfibilité du
» coeur le plus tendre ; honorer fa mé-
» moire par des Eloges immortaliſer fa
» reconnoiffance envers lui , par les Monu-
» mens les plus auguftes & les plus dura-
» bles , & ne fe fervir de fa grandeur , que
» pour relever d'avantage par la Majesté
» du Trône , les fentimens de fa bonté &
» de fon humanité !
,
>> Que maître de lui - même , il modére
» jufqu'à la paffion de la gloire , paſſion
» ordinairement abfoluë fur l'ame des Sou-
» verains , & que l'interêt de fes Peuples
» décide feul de la guerre ou de la paix.
* Qua
JUILLET 1743 1991
>
» Que dans le cabinet il faffe voir à fes
» Miniftres une élevation de génie , une
» étenduë de connoiffances , qui nous apprend
, qu'il fe fuffifoit à lui-même pour
>> nous gouverner.
» Ces merveilles , MESSIEURS , excitent no-
» tre admiration, mais ells n'intereffent point
» autant notre coeur. C'eft dans le coeur du
Roi qu'eft établi le fondement de la feli-
» cité publique ; & quelle confolation pour
»fes Peuples , d'y voir des fentimens qui
répondent auffi fûrement de leur bonheur !
M. de Moncrif , en qualité de Directeur
, répondit au Difcours de M. L'EVEQUE
DE BAYEUX , & dit de très - belles
chofes. Nous n'en pouvons gueres rapporter
que le commencement , pour ne point
exceder certaines bornes.
MONSIEUR ,
» Vous n'avez pû l'ignorer , un fuffra-
» ge unanime vous a déféré la Place que
» vous occupez aujourd'hui , & vous de-
» mandez à quel titre vous la rempliffez a
" Le Difcours où vous venez de nous ex-
>> pofer vos craintes , prouve lui -même com-
» bien elles font peu fondées ; & ce n'eft pas
naffés pour vous raffurer? Nous n'en fom mes
>> pas furpris ;MONSIEUR ; la modeftie est une
» vertu qu'on ne trouve ordinairement que
» dans ceux qui ont de vrais facrifices à lui
« faire: F iij k Mieux
592 MERCURE DE FRANCE
» Mieux inftruite que vous- même , ou
» du moins plus frappée des motifs qui
> l'ont engagée à vous adopter , l'Acadé-
» mie attendoit avec impatience ce jour ,
» où elle a la liberté de s'applaudir pu-
» bliquement de l'acquifition qu'elle a
» faire.
"> Eclairée par fon propre interêt fur le
» mérite destiné à lui appartenir , pouvoit-
» elle ignorer cet amour que vous avez
» toujours marqué pour les Lettres , ce
» zéle ingenieux à faifir toutes les occa
» fions de les favorifer ? Une Académie
"
"
›
(a ) où l'émulation éteinte laiffoit lan-
» guir les talens , n'a - t'elle pas repris fous
» vos yeux une nouvelle vie ? Comme fon
» établiffement fut l'ouvrage d'un de nos
plus célebres Prédéceffeurs ( b ) elle
» avoit attiré nos regards dans fes diver-
» ſes fortunes : nous regrettions fa gloire
» paflée , fans prévoir que le renouvelle-
» ment de cette même gloire ajoûteroit
» un jour à la notre . C'eft un avantage
» que vous nous procurez. Vous pouviez
» vous contenter du titre éclatant de Ref
» taurateur , & nous voions avec une extrême
reconnoiffance , que vous ne l'avez
( a ) L'Académie de Caën.
( b ) M. de Segrais .
regardé
JUILLET. 1743 1593
regardé que comme un moyen de plus ,
d'acquerir ici le rang de Citoyen.
» Ouvrir des tréfors Littéraires à quicon-
» que veut s'inftruire ; engager ceux qui
» font inftruits ; à fe communiquer leurs
» connoiffances , & à developper leurs talens
, c'eft encourager les efprits , fans
» doute ; mais les guider en même tems
» dans les differentes routes qu'ils peuvent
» prendre leur faire fentir combien l'efprit
de méthode eft indifpenfable ; quels
» font certains défauts qui , fans violer les
» régles , ôtent cependant ce qui fait le
fuccès des Ouvrages , parce que le goût
» s'y trouve bleffé , c'eft avancer le progrès
» de l'efprit méme , & c'est ce que vous
» avez fait dans cette Académie , qui vous
» doit fon nouveau luftre. Elle conferve
précieufement les Difcours que vous y
» avez prononcés. Vous y expofiez les
principes de la véritable Eloquence ;
quel moyen plus fûr de les accréditer !
» Vous donniez à la fois les régles & les
» exemples.
19
Fiiij DIS
1594 MERCURE DE FRANCE
DISCOURS prononcé par M. Borde
Président de l'Académie des Beaux - Arts de
Lyon , à l'ouverture de l'Affemblée publique
du 9. Mai 1743 .
MESSIEURS ,
Les Académies en géneral ont pour objet
le bien & les avantages de la Societé ; mais
celles dont l'établiffement porté tout entier
fur les fecours néceffaires aux Arts , & qu'ils
ne fçauroient trouver ailleurs , ont un objet
fans doute , plus rapproché des befoins indif
penfables des hommes.
Le Tableau de la vie humaine met néceffairement
fous les yeux le prix des Sciences
& des Arts. L'inftant qui condamna l'homme
à mourir , fut le même qui l'affujettit au travail
; de - là cette multitude de befoins , de
difficultés & d'obftacles ; de - là l'ignorance
même des fecours que la Nature lui avoit
préparés; dans ce premier état, la Terre femble
lui refufer fes tréfors. L'eau ne lui fait voir
que des abîmes immenfes ; le feu ne lui préfente
qu'un Elément dangereux ; l'Air fous un
voile tranfparent , lui cache les plus mortels
poifons ; ces Globes immenfes fufpendus
dans les Cieux , lui femblent prêts à fe détacher
, & par leurs differens Phénomenes lui
annoncer tous les malheurs.
Tel
JUILLET. 1743 1595
Tel eft l'état de l'homme livré aux fuites
funeftes de fa condamnation; mais voyons - le
guidé par une Loi moins févere .
La néceffité bien- tôt induftrieuſe lui ouvre
les yeux ; fes nouvelles lumieres préfentent
des fecours à fes premiers befoins; le tems les
multiplie ; les lumieres deviennent plus vives
, les connoiffances augmentent , & enfin
les Arts fuccedent à l'ignorance.
Le Phyficien placé dans le centre des opé
rations de la Nature , devient en quelque
forte le protecteur de la vie. En vain Nature
fe dérobe , il l'épie , il la pourfuit , & fa
conſtance lui arrache le voile mystérieux qui
la couvre ; les Elémens aident à fon triomphe
, l'Anatomie lui ouvre le tréfor méchantque
du corps humain , la Botanique lui offre
les précieufes dépouilles des Plantes , des
Fruits & des Fleurs. La Chymie lui préfenté
les Huiles & les Sels cachés dans le fein des
Minéraux , préfens dignes des fes foins , &
d'heureuſes refſources pour les infirmités hue
maines . Tout ce qui exifte fait l'objet de fes
recherches : le plus petit Infecte préfente à
fes regards , plus intereffés que curieux , un
méchanifme qui l'étonne , un arrangement
de parties , des organes fimples , des mouve
mens combinés & variés à l'infini ; des applications
heureuſes fuccedent à fes recherches;
il fait ufage de tout , & fage imitateus de la
Fv Nature,
1596 MERCURE DE FRANCE
Nature , il la force de lui céder fes droits.
L'Aftronome porte fes regards dans les
Cieux. Le nombre , la grandeur , la diſtance
& les diverfes révolutions de fes maffes roulantes
font comptés & méfurés ; il rapproche
l'immenfité des Cieux , & préfente à
la Terre étonnée; les objets de fes préjugés
de fes terreurs & de fes préfages chimériques;
tout eft prévû & annoncé , Eclipfes , Cométes
, Aurores Boréales ; l'ordre eft entretenu
dans la fucceffion du tems, & il ne refte
plus à l'homme qu'à admirer avec refpect ,
mais fans crainte , l'ordre invariable & natu's
rel des mouvemens céleftes .
La Navigation lui ouvre le fein des Mers ;
fes Tables , fes Ephémérides, fes Calculs, fes
Inftrumens , y conduisent le Pilote .
La Géographie lui fait des chemins & des
routes dans les Terres ; la correfpondance de
fes obfervations établit & fixe la diftance des
unes aux autres , & marque la pofition exacte
des Lieux ; des bafes mefurées & des triangles
calculés , tracent la courbure du Globe ;
maître , pour ainfi dire, du Monde entier , il
affigne à chaque Puiffance l'étenduë de fon
Domaine , il donne des bornes à l'Océan ,
& Créateur d'un Monde racourci , il pré
fente aux yeux du Voyageur & du Curieux
un Tableau fidele des Terres des
Mers, des Rochers dangereux qu'elles renferment.
,
JUILLET. 1743- 1597
ferment. Tableau qui fatisfait infiniment l'imagination
, & lui donne cette fécurité fi
néceffaire au commerce des hommes.
Le Méchanicien , Miniftre puiffant de la
Nature, augmente , diminuë & détruit , à fon
gré , la réfiftance des corps , guide , regle &
détermine la viteffe de leurs mouvemens
multiplie à l'infini la force des hommes & des
animaux , & contraint les Elémens à recon
noître fes loix .
La Terre eft forcée de s'ouvrir, fes entrailles
font dépouillées des Métaux & des Minéraux
; fa fuperficie eft accablée fous le
poids immenfe des Bâtimens, fes Montagnes
gémiffent fous la chute de leurs vaftes Forêts ,
& fes Rochers font brifés pour tirer de leurs
ruines des amas prodigieux de matériaux de
toute efpece ; fes Plaines font déchirées , pour
mettre en mouvement les fels qu'elles renferment
, & en arracher les productions néceffaires
à la nourriture ; fes Eaux font forcées
de monter fur le fommet des Montagnes
; fes Fleuves refferrés dans de juftes limites
& fes valons creufés en canaux pour
la communication des Mers ; l'Eau , l'Air &
le Feu , deviennent les agens d'une infinité
de machines , & foumis à des loix juftes &
bien digérées , aident aux differens befoins
de la vie.
Le Géométre enfin, guidé,conduit par la véri
F vj
;
4598 MERCURE DE FRANCE
té , vient répandre la lumiere , communiquer
l'efprit de découverte , reconnoître la nature
des mouvemens , en déterminer la quantité,
les réduire fous les loix d'un Calcul méthodi
que ; examiner les differens rapports d'une
grandeur à une autre , la chute des corps, les
prodigieufes combinaiſons des nombres , en
un mot , affocier fes principes à la pratique
de tous les Arts.
Voilà , Meffieurs , le Plan de nos Etudes &
de nos occupations ; telle eft notre tâche ;
elle eft belle , elle eft noble , mais eft - elle
fans difficultés ? Des Etudes fauvages & épineufes
, des Calculs abftraits , des Obferva
tions fatigantes , des Expériences fans nombre,
des nouveautés reconnues bonnes & fouvent
mal reçûës affoibliroient peut - être notre
zéle , fi l'utilité de nos foins ne prêtoit des
forces à l'émulation , fi le Public éclairé ne
venoit l'animer & la foûtenir en adoptant
nos travaux, en les regardant comme fon propre
bien, & en fe prêtant fincerement à l'envie
que nous avons de lui être utile , plutôt qu'à
celle de lui plaire.
Que ne m'eft- il permis , Meffieurs , de préfenter
au Public , qui nous fait l'honneur
d'affifter à nos Séances , vos derniers Ouvrages
Académiques dans leur état naturel ? il
y trouveroit , fans doute , le bon & l'utile
qui les caractérife . En voici cependant quelques
Extraits L'ART
JUILLET . 1743 1599
L'ART de fortifier la mémoire.
Le R. P. Tolomas , Auteur de cette Differtation
, a recueilli avec foin les regles de cet
Art , qui nous ont été confervées par Ciceron
& par Quintillien ; la nature & les proprietés
de la mémoire ont occupé les plus céle
bres Philofophes , cependant il ne paroît pas
qu'on ait acquis de grandes connoiffances
fur cette matiere ; d'ailleurs il importe peu
de connoître la ftructure des organes de la
mémoire , pourvû que leur jeu foit aifé &
jufte F'Art peut , fans doute , beaucoup y
contribuer, & c'eft -là l'objet de la Differtation.
OBSERVATIONS für le Cabestan de
M. Maffoteau de S. Vincent , dont il eſt
parlé dans le Journal de Trévoux du mois
de Septembre 1742.
,
M. Delorme , Auteur de ces Obfervations ;
examine en Méchanicien exact , les avantages
annoncés de ce nouveau Cabeftan ; il
découvre bien tôt l'illufion d'un appareil de
roues qui doivent doubler & fa force & fa
viteffe . Les principes qui amenent la démont
tration du contraire , font fi évidens , qu'il
faut que M. Maffotteau n'ait pas bien calculé
ou n'ait point calculé du tout ; fon Cabeftan
eft donc réduit par les Obfervations de M.
Delorme , à ne produire que le quart de Veffet
600 MERCURE DE FRANCE
fet des Cabeftans ordinaires . Ces Obfervations
ne font pas feulement critiques , elles
font appercevoir la nouveauté de l'invention
& les applications utiles qu'on en pourroit
faire. Combién , en effet , d'inventions & de
machines n'ont pas rempli l'objet de leur
conſtruction , mais qui tombées dans des
mains plus heureufes ou plus habiles , font
devenues une fource d'utilités !
DISCOURS fur le Neuf, dans les productions
du Génie.
M. Bouillond , après avoir donné dans ce
Difcours une définition de ce qu'on appelle
Neuf dans les Ouvrages de l'efprit , s'attache
à faire voir combien les Sciences Phyfiques
& les Arts font plus fufceptibles de ce genre
de nouveauté, que les Belles - Lettres ; il préfente
avec ordre les progrès étonnans de la
Phyfique moderne , de- là il vient aux Arts ;
il les voit s'enrichir continuellement de nouveautés
utiles & intereffantes à la Societé.
Cette gradation de découvertes & de nouveautés
dans les Sciences & dans les Arts
préfentent tout- à- la fois les differentes vûës
de l'efprit humain , qui font prefque infinies
& l'admirable fécondité de la Nature.
MEMOIRE fervant d'explication à pluſieurs
Machines propres à l'Artillerie.
M. Grollier de Servieres poffede un tréfor
• ineſtimaJUILLET.
1743. IGO
ineftimable d'inventions & de Machines
de feu M. fon Ayeul ; celles qu'il nous préfente
dans ce Mémoire , paroiffent extrê
mement fimples dans leur conftruction &
dans leurs ufagés , & propres a faciliter con
fidérablement les travaux de l'Artillerie ; elles
nous ont été préfentées de main de Maître.
PROJET de Recherches fur la caufe
du Bled nielé.
M. de Ruolz a pris dans la Phyfique un
fujet d'autant plus important qu'il ne paroît
point avoir été l'objet des recherches de ceux
qui ont écrit fur l'Agriculture, ni de ceux qui
par état y confacrent leur vie. Le Bled noirci
fur plante , les caufes de cette corruption
préfentent à l'Auteur de ces Recherches un
vafte champ de raifonnemens & d'expérien
ces, où le tems , les circonftances & les déran
gemens des faifons , doivent entrer néceſſairement
. Son zéle pour le bien public , nous
elt un fûr garand de fes promeffes à cet égard .
OBSERVATIONS Météorologiques de
Dannée 1742. par le R P. Beraud , faites
dans cette Ville , & comparées avec celles de
Toulon , qui nous ont été envoyées par le
R. P. du Chatelard , l'un de nos Académiciens
Affociés , celles de M. Boeuf, Con
feiller au Parlement d'Aix.
Leréfultat de ces Obfervations comparées ,
nous
1602 MERCURE DE FRANCE
que
nous apprend que le froid de Provence a été
moins grand que celui de Lyon de 5. degrés
& demi au Termometre de M. de Reaumur,
& la chaleur moins grande de 8. degrés.
Nous apprenons encore par ces Obfervations,
les hauteurs du Barometre , obfervées
dans ces differentes Villes , s'accordent toutes
affés exactement, relativement à la difference
de hauteur des Lieux au deffus du niveau
de la Mer ; nous voyons done que le Barometre
fur la fin de Décembre & dans le
commencement de Janvier , eft parvenu aux
deux termes extrêmes de fa marche , ce qui
n'arrive que très-rarement. On a auffi appris
que dans le tems de la plus baffe defcente
du Mercure dans les Barometres , un vent
de Sud impétueux fit foulever les Eaux de la
Mer & les porta bien avant dans la Camarques
& la plus grande élevation du Mercure fut
pour ainsi dire, l'époque des maladiesfâcheufes
qui ont affligé toute l'Europe pendant le
cours de cet hyver .
Ces efpeces d'Obfervations , foigneufement
recueillies , contribueront à répandre
des connoiffances & des lumieres fur la nature
des vents , fur leurs caufes & fur les va
riations & intempéries de l'air. Il ne faut
point fe laffer d'obferver.
MEMOIRE
JUILLET. 1743. 1601
MEMOIRE fur l'Optique , confideré par
rapport à la vifion & aux Télescopes
Microfcopes & autres Verres,qui fervent à
conferver & à aider la vûe,
>
,
M. Beffen confidere dans cet Ouvrage les.
rayons de lumiere & les couleurs qui en refultent
, comme un effet naturel de leurs differens
arrangemens , & non comme un effet
des differentes teintes qu'ils ont prises en
paffant à travers des corps colorés ; il appuye
ce fentiment fur des Experiences , & en fait
des applications utiles.
MEMOIREfur l'Arithmétique.
M. l'Abbé du Gaibi s'eft propofé dans ce
Mémoire un moyen nouveau de faire la divifion
, l'extraction de la racine quarrée , &
de la racine cubique. Il a conftruit, à l'ufage
de ces opérations des tables qui en donnent
le réfultat , pour tous les nombres naturels,
depuis l'unité jufques à 10000. Il y propoſe
encore un moyen d'additionner toutes efpeces
de fractions , & de divifer des lignes en
parties quelconques , avec le fecours de
quelques échelles & du compas.
C'eft ainfi que les Sciences prêtent des
commodités à de certains ufages de pratique,
& mettent l'Art qu'elles traitent à la
portée de tout le Monde.
MEMOIRE
604 MERCURE DE FRANCE
MEMOIRE fur la Phifiologie.
M. Colomb donne une explication détaillée
des parties folides , & des differens
fluides qui compofent le corps humain
d'où il eft évident que fes fonctions ne dépendent
pas feulement de la ftructure des
parties folides , tant internes qu'externes ;
mais encore du cours des efprits animaux
portés avec le fang dans toutes les parties
folides , & qu'ainfi leur action doit être rés
ciproque.
MEMOIRE fur la Théorie des forces cena
tralles des Aftres , dont les apcides ne font
pasfixes.
M. Mathon de la Cour s'eft propofé cet
Ouvrage pour fervir de Commentaire à la
premiere partie de la Section 9. du premier
Livre de Newton . Il s'eft efforcé de le mettre
à la portée des moins avancés en Géo
métrie.
La Géométrie , dépouillée avec Art de ce
'qu'elle peut avoir d'abſtrait & de difficile
ne manquera jamais de plaire ; fes principes
& fes vérités appliqués à la Phyfique , feront
les guides fûrs de fes découvertes.
THEORIE pratique des Ponts volans
faifant leur trajet fur un centre de mouvement
.
M.
JUILLET. 1743 1605
M. Delorme donne dans ce Mémoire une
Méthode fimple pour déterminer & pour
reconnoître le centre de mouvement fur la
furface de l'eau. Une ancre pour tenir fûrement
le bac , des fupports propres à tenir le
cordage & l'empêcher de fubmerger ; un
mât mobile pour l'abaiffer , l'élever & en
tranfporter le point de traction , & la conftruction
de bac la plus convenable
préfentent chacun en particulier des defcriptions
raifonnées de la nouveauté de
leurs conftructions & de leurs ufages . Ce
Mémoire eft terminé par une explication
Théorique de la manoeuvre de ces Ponts
volans , dans leur trajet des conftructions
fimples , des manoeuvres aifées & fûres font
ordinairement les objets d'une méchanique
exacte & fcrupuleuſe.
DISSERTATION générale fur les diver
fes maniéres de mesurer les Vaiſſeaux ronds,
appellés communement Tonneaux.
Le R. P. Grégoire , l'un de nos Académi
ciens affociés , a eu pour objet dans cette
Differtation de faciliter au Public le jaugeage
des Tonneaux , en lui préfentant une
nouvelle jauge fimple dans la pratique ;
promte dans l'opération , & exacte dans fon
réfultat ; trois conditions évidemment néceffaires
, & qui font parfaitement remplies
par
606 MERCURE DE FRANCE
par la nouvelle jauge . Il falloit à l'Auteur
pour parvenir à ce point de précision , un
examen févere , & une exacte difcuffron des
bonnes & mauvaifes qualités des diverſes
jauges employées dans le mefurage Public ;
c'eft auf une des parties confidérables de
cet Ouvrage .
MEMOIRE fur les enveloppes générales du
corps humain.
M. Colomb , après une explication détaillée
des differentes enveloppes du corps humain
, fait voir que le tiffu eft percé d'une
infinité de petites ouvertures que l'on nomme
pores , pour donner paffage à la matiére
de la tranfpiration , & à celle des fueurs.
Les évacuations fenfibles ou non fenfibles
font ordinairement les caufes de la fanté ;
eu de la maladie . Elles ne fçauroient être
fupprimées fans danger , ni confidérablement
augmentées fans un grand affoibliffement
du corps animal.
DISSERTATION fur plufieurs anciens
Temples, comparés avec nos Eglifes modernes.
M. de la Monce , Auteur de cette Differ
tation , ne met pas feulement nos Eglifes
modernes en parallele avec les anciens Tem>
ples , tels que celui de Jupiter Capitolin , &
celui de la Paix dans l'ancienne Rome ; il
fait
JUILLET. 1743. 1607
fait plus , il leur donne une entiere préférence
, fondée fur un détail des belles proportions
& des bonnes régles de l'Architecture
obfervées dans ces Eglifes . Les Anciens
étoient plus flattés de la richeffe & de la
décoration de leurs Temples , que du bon
goût & de la Nobleffe de l'exécution . M. de
la Monce finit cette Differtation ', par une
defcription du Temple de Salomon ; fes
remarques fur cet Edifice l'ont conduit néceffairement
à éclaircir plufieurs endroits de
l'Ecriture , qui ont du rapport avec les cérémonies
qui s'obfervoient dans ce Temple .
C'eft ainfi que tous les divers genres d'Etude
fe prêtent mutuellement des connoiffances
inftructives , utiles , ou fimplement
curieufes.
DISCOURS fur les Questions ou Problèmes
de maximis & minimis.
M. l'Abbé de Valernod a tâché d'éclaircir
dans ce Difcours , plufieurs endroits des
grands Maîtres , fur cette matiere. Il préfente
une Méthode fimple pour réfoudre une infinité
de Queſtions ; il l'applique à la folution
de deux Problèmes très-utiles. Le premier a
pour objet la viteffe que doit avoir une
roue de Moulin , pour recevoir de la pare
du courant qui la meut , la plus grande
quantité de mouvement ; c'eft - à- dire , que
le
1608 MERCURE DE FRANCE
le produit de fa viteffe , par la force avec
laquelle elle eft müe , foit le plus grand de
tous les produits poffibles . On trouve par la
folution de ce Problème , que la viteffe de
la roue , prife au centre de gravité de ſes
aubes, doit être le tiers de celle du courant,
dans l'état d'équilibre.
Le fecond Problème a pour objet , de
trouver l'angle d'inclinaifon des aîles d'un
Moulin à vent fur leur axe , pour recevoir
du vent , la plus grande impreffion poffible.
Le principe qui résulte de cette folution, eft de
former l'inclinaifon de l'aîle par rapport à l'axe,
fur un angle de 55. degrés un peu moins.
Des applications auffi utiles font connoître
évidemment l'importance de cette méthode
, puifqu'elle eft la feule qui puiffe découvrir
folidement des vérités auffi cachées.
MEMOIRE fur les organes , fervans à la
digeftion.
Ce Mémoire donné par M. Colomb , préfente
des détails intereffans ; les organes de
la digeftion y font expliqués avec ordres la
matiere alimentaire changée en chile , le
chile obligé de paffer par une infinité de
conduits , pour être porté dans la maffe du
fang , & y travailler à la fanguification ; ces
détails nous font plus admirer ce méchanif
me , qu'ils ne nous le font comprendre .
MEMOIRE
JUILLET. 1743 . 1609
MEMOIRE fur la dilatation du Mercure
dans le Thermométre.
M. Chriftin nous y préfente une nouvelle
découverte qu'il doit à une longue fuite de
raiſonnemens & d'expériences qu'il a faits
fur les diverfes conftructions des Thermomètres
, foit ceux d'efprit de vin , foit ceux
de Mercure ; il donne la préférence à ces
derniers . Une expérience raifonnée , fimple
& délicate,fur la dilatabilité du Mercure, lui
a fait connoître qu'une quantité de Mercure,
condenſée par le froid de la glace pilée ,
& enfuite dilatée par la chaleur de l'eau
bouillante , formoit dans ces deux états , des
volumes , qui étoient entr'eux , comme 66.
à 67. & qu'un volume de 6600. parties condenfées
, eft devenu , par la dilatation , un
volume de 6700. parties.
La difference 100. de la condenſation à la
dilatation , eft le nombre de dégrés qu'il
donne à l'Echelle d'un nouveau Thermomètre
de Mercure , entre ces deux points .
Ce nombre fe trouve avantageux , pour la
précifion des obfervations .
Depuis Zero , point de la congélation ;
les nombres expriment , en defcendant, les
dégrés de froid , plus grands que celui de la
glace , & depuis le terme 100. point de la
dilatation , les nombres marquent en montant
,
1610 MERCURE DE FRANCE
tant , les dégrés de chaleur , qui excede celle
de l'eau bouillante .
7
M. Cazati , dont l'induftrieuſe pratique
dans les Ouvrages de cette espéce nous
eft parfaitement connue , a prêté fes mains à
cetre expérience . Elle a été faite de quatre
manieres differentes , avec diferens volumes
, differens calibres & differens Mercures
, qui ont toujours donné le même
réfultat.
M. Chriftin a fait remarquer que l'on peut
tirer plufieurs avantages de cette découveite
; entre autres , celle de pouvoir conftruire
les Thermomètres de Mercure , par
le moyen de l'eau bouillante , fans le lecours
de la congélation ; & réciproquement avec
de la glace , fans la chaleur de l'eau boüillante
.
M. Chriftin fe croît donc bien fondé d'a
vancer que cet Inftrument eft porté a fon
point de perfection , puifque ce n'eft pas
feulement un à peu près , comme il femble
qu'on devroit s'en contenter en matiere de
Phyfique ; mais une vérité prefque aufli démontrée
que celles de Géométrie .
Les Difcours qui doivent remplir cette
préf nte Séance , font
Le Mémoire de M. Beffen , fur la conftruction
des Etangs , matiere affés interreflante,
La
•
JUILLET. 1743 1611
Le Mémoire de M. l'Abbé du Gaibi , fur
la conftruction & les ufages de deux inftrumens
de fon invention , pour tracer avec fa
cilité des Cadrans Solaires .
Et le Difcours du R. P. Tolomas , fur l'invention
de la poudre à canon , dont il croît
pouvoir faire remonter l'époque à des fiés
cles plus reculés .
MORTS DE PERSONNES ILLUSTRES.
LETTRE de M…………. écrite de Genève le
22. Juin 1743. à M. le C. D. L. R. fur la
mort de Jacques - Antoine Arlaud , habile
Peintre de Genève.
E fçais M. que vous avez connu autrefois
à Paris M. Arlaud , Peintre fort célebre
en miniature ; il ma fouvent parlé de
vous comme d'un de fes amis , dont il fai
foit beaucoup de cas. J'ai à vous apprendre
`aujourd'hui la mort : nous l'avons perdu il y
a environ un mois : Il s'eft affés diftingué
dans fon Art , pour mériter une place dans
votre Mercure ; lié avec lui depuis plus de
quarante ans , je puis vous fournir quelques
particularités de fa vie & de fes Ouvrages.
Jacques- Antoine Arlaud étoit né à Ge
néve le 18. Mai 1668. il fit fort exactement
fes premieres études jufqu'à l'âge de 16. ou
17. ans ; il les auroit continuées s'il y avoie
G cû
612 MERCURE DE FRANCE
eû un peu plus de bien dans fa famille . Il
chercha donc à s'occuper plus utilement , &
fe tourna du côté de la Peinture , pour laquelle
il fe fentoit de l'inclination & de la
difpofition. On jugera aifément que c'étoit
là la vocation , quand on fçaura qu'il n'a appris
à deffiner que pendant deux mois , &
que pour la Peinture il n'a point eû d'autre
maître que lui- même .
A vingt ans , fe s'entant déja affés fort
pour le Portrait , il partit pour Paris. Pendant
le jour il peignoit , pour avoir dequoi
fubfifter , & pendant une partie de la nuit iļ
deffinoit , pour fe fortifier dans une partie fi
effentielle à un Peintre.
Son talent pour la miniature fe dévelop
pa avec une rapidité furprenante. Dans l'efpace
de peu d'années il fe fit une grande réputation
, & il effaça bientôt tous ceux qui
Te mêloient de ce genre de Peinture . Germain
Brice , dit de lui dans fa Defcription
de Paris , qu'il réüſſit ſi bien dans les Portraits
en miniature , qu'aucun autre Maître ne le
lui peut difputer en ce genre.
Outre la fineffe & la délicateſſe de fon
Pinceau , outre la beauté du Coloris , en
quoi il a excellé , on trouvoit encore dans
fa miniature une force extraordinaite . Feu
M. le Duc d'Orleans Régent , bon juge fur
Ces matiéres, a dit plus d'une fois , les Pein
tres
JUILLET. 1743 1613
tres en ce genre n'ont fait jufqu'ici que des
Images ; Arlaud leur a appris à faire des
1ortraits fa miniature s'ex, rime auffifortement
que la Peinture à huile.
Ses Portraits étoient très - reffemblans ;
mais il avoit encore l'art d'exprimer le caractére
& les qualités de l'ame de la perfonne
qu'il peignoit , étant d'ailleurs très
bon phifionomiſte.
La réputation de M. Arlaud parvint bientôt
jufqu'au Roi Louis XIV . qui voulut
le connoître & voir de fes Ouvrages . Ce
grand Prince , qui aimoit les Arts & les
Sciences , & qui avoit une attention parti
culiere à les favorifer , lui accorda une audience
très gracicule dans fon Cabinet , &
témoigna la fatisfaction qu'il avoit de voir
Les Ouvrages.
Je reviens à M. le Duc d'Orleans ; il ne
fe contenta pas de louer M. Arlaud ; on
fçait que ce Prince avoit beaucoup de goût
pour les beaux Arts , & fur tout pour la
Peinture. I deffinoit très-bien , & manioit
même quelquefois le Pinceau . Il trouva à propos
de s'attacher M. Arlaud , pour l'avoir
lous fa main ; il lui donna même un appartement
dans fon Château de S. Cloud , où
ce Prince exerçoit la Peinture fous les yeux
de M. Arlaud , qu'il appeloit fon Maître .
Le Prince trouvoit que nôtre Genévois
Gij enteng
A614 MERCURE DE FRANCE
entendoit fon Art foncierement , qu'il er
connoiffoit les véritables principes , & qu'il
étoit auffi fort pour la Théorie que pour la
pratique .
MADAME , Princeffe Palatine , Mere du
Régent , affectionnoit auffi beaucoup notre
Peintre . Elle s'eft tojours déclarée ſa géné
reufe Protectrice . En 1718 , elle lui donna
fon Portrait en grand , avec une riche bord
dure. Il la légué par fon Teftament à la Bibliothéque
publique de Genéve , avec d'au
tres beaux morceaux de Peinture .
En 1721. M. Arlaud fit le voyage d'Angleterre
; MADAME eut la bonté de le recommander
à la Princeffe de Galles , morte
dans la fuite Reine d'Angleterre , Cette recommandation
, jointe aux Ouvrages qu'il
produifit , le firent recevoir d'une maniere
diftinguée dans cette Cour. Il en rapporta
plufieurs Médailles d'or qui ont été mifes
dans la Bibliothèque de Genéve.
Notre Peintre ne fe bornoit pas au Por
trait , & il s'élevoit de tems en teras jufqu'à
'Hiftoire , quoique ce foit le propre de la
Peinture à huile . Nous avons de lui la Famille
Sainte , un des plus grands morceaux
qu'on voye en miniature .
On a auffi de lui une Magdeleine , a peu
peu près de la même, grandeur , repréfentée
dans le commencement de fa converfion, &
qui
JUILLET. 1743 1615
qui eft auffi d'une grande beauté. J'étois à
Paris quand il termina cet Ouvrage fur une
grande feuille de velin ; il me marqua quelque
regret de n'avoir pas mis au bas de cette
feuille quelque légende convenable au fujet.
M. l'Abbé de Longuerue , qui étoit fort de:
fes amis , lui confeilla en ma préfence de
mettre en beaux caracteres ces paroles du
Miferere , Seigneur créez en moi un coeur
pur ; formez de nouveau au dedans de moi
un efprit rempli de droiture , &c.
Ces deux Ouvrages fe confervent dans la
Bibliothèque de Genéve.
Mais le morceau qui lui a fait le plus
d'honneur , c'eft fa fameufe Leda , Ouvrage
autli fingulier que féducteur ; permettez mok
de vous en rappeller ici l'Hiftoire en peu
de mots. M. Arlaud ayant trouvé à Paris
dans le Cabinet de M. Cromelin , un Bas
Relief original du célebre Michel- Ange
Buonarotti , eut envie de le copier au crayon
noir pour fa propre étude , mais ce fimple
crayon acquerant tous les jours de nouvelles
perfections & paroiffant aux yeux avoir autant
de relief que l'original , M. Arlaud
redoubla fes foins & fon application , pour le
mettre dans l'état admirable où il eft au
jourd'hui , faifant abfolument fous l'oeil du
fpectateur & même à une très - petite dif
tance , le même effet que l'Original en mar-
G iij bre ;
1616 MERCURE DE FRANCE
bre; il employa pour cet effet , principalement
l'encre de la Chine & bien d'autres
couleurs légerement pointillées , avec une
délicateffe & un art inimitables , enforte que
la fimple vûë ne peut pas diffipet l'erreur du
Spectateur ; il faut abfolument que la main
& le toucher le convainquent , pour n'être
pas feduit.
Nos connoiffeurs difent que ce qui fait le
caractere diftintif de cet Ouvrage , c'eft
que le clair obfcur y eft employé avec une
fublime intelligence , ainfi que la diftribution
enchantereffe des jours & des ombres
ce qui rend les Figures tout a fait faillantes
, d'où réfalte l'illufion des Sens. Tout
Paris admira la Leda , & on l'alloit voir
avec empreffement dans le Cabinet de M.
Arlaud : On ma affûré même qu'un Seigneur
François en avoit offert juſqu'à douze
cent piftoles , mais quoique les parties fuffent
d'accord & le tableau livré , le
marché n'eut pas lieu. M. Arlaud reprit
fon tableau , & on lui donna quatre où cinq
cent piftoles de dédommagement.
,
M. Arlaud quitta Paris en 1730. après un
féjour de quarante années & porta dans
fon Pays environ 40. mille ecus qu'il avoit
gagnés ; il emporta auffi quantité de tableaux
des bons Auteurs anciens & modernes , &
'oublia pas fa chere Leda.-
On
JUILLET. 1743: 1617
On n'a appris qu'après fa mort le facrifice
qu'il fit de cet Ouvrage fi cheri , dont le
fujet lui parut trop libre , & il l'étoit en
effet ; par principe de confcience il le mit
en piéces. Quelques curieux en confervent
encore cherement des fragmens , mais ce
qui aidera beaucoup à conferver la mémoire
qui
de ce fameux crayon , c'eft le Portrait de
M. Arlaud peint à Paris , par le célebre N.
de Largilliere , fon ami. Il l'a peint de grandeur
naturelle , affis , le crayon à la main ·
travaillant à fa Leda.
Une circonstance que je ne veux pas oublier
, c'eft que le Grand Duc de Tofcane
avoit fait une grande collection de Portraits
des plus illuftres Peintres faits par eux -mêmes ;
ce Prince fouhaita d'avoir celui de M. Arlaud
, & le lui fit demander en 1736. M.
Arlaud flaté de l'honneur qu'on lui faifoit
expédia promptement ce Portrait & l'envoya
au Grand Duc qui le fit placer dans la fameuſe
Galerie de fon Palais parmi les autres grands
Peintres de la collection dont on a parlé .
Le Grand Duc lui marqua fa reconnoillance
par une très belle Médaille d'or qu'il lui envoya
; on la conferve auffi dans la Bibliothéque
de Genéve , à laquelle M. Arlaud la
léguée par fon Teftament , avec plufieurs
autres Tableaux , plufieurs Portefeuilles
d'Estampes , & quantité de livres rares &
curieux.
Ģ iiij
M.
1618 MERCURE DE FRANCE
M. Arlaud avoit la réputation bien établie
d'homme de probité ; il avoit les moeurs douces
& fort réglées , il étoit charitable & bon
ami ; il mourut prefque fubitement dans a
Maifon deCampagne auprès de Genéve ,le 25 .
Mai dernier , dans la 75. année de fon âge
n'ayant jamais été marié . Je fuis M. &c.
ESTAMPES NOUVELLES.
>
Deux nouvelles Eftampes en hauteur , dont
T'une eft intitulée le Menage , & l'autre la
Maitreffe d'Ecole ; la premiere eft caractérifée
par un vieux homme allis , & par une
affés belle femme aflife vis - à - vis de lui ;
leurs habits , leurs meubles , quelques potzeries
& uftenfiles répandus fur le plancher
, expriment une grande indigence ; on
Noit dans l'autre , une femme affife tenant un
livre ouvert fur fes genoux , un enfant de
bout devant elle , avec un jeune garçon &
une petite fille un peu plus loin . Ces deux
morceaux , qui font d'une naïveté & d'une
fimplicité admirables , font fort goûtés des
connoiffeurs ; ils font de la compofition de
M. Pierre , gravés à l'eau forte par C. S. &
terminés au burin par le fieur Feffard , chés
lequel ces Eftampes fe vendent dans le
Cloître S. Germain de l'Auxerrois.
Le fieur etit , Graveur , ruë S. Jacques à
la
JUILLET. 1743 1619
fa couronne d'Epines , près la rue des Mathurins
, qui continuë de graver la fuite des
Portraits des Hommes Illuftres du feu fieur
Defrochers , Graveur du Roi , vient de met.
tre au jour les Portraits fuivans.
MARIE - THERESE Reine de Hongrie ;
gravée d'après le Tableau original de M. de
Maïtens que M. Gundel , chargé des affaire
de Sa Majefté Hongroise à la Cour de
France , à confié au fieur Petit.
FRANÇOIS - ETIENNE DE LORRAINE
Grand Duc de Tofcane , gravé d'après le
Tableau qui eft dans le Cabinet de M. le
Marquis de Stainville , Envoyé de fon Al
teffe Royale à la Cour de France .
JEANNE DE FRANCE , premiere femme du
Roi Louis XII . En 1498. fon mariage fut
déclaré nul ; fa pieté la porta à inftituer l'Ordre
de l'Annonciade dans la Ville de Bourges
, où elle mourut en odeur de Sainteté
l'an 1504. Elle a été Beatifiée cette année
1743. On lit ces Vers au bas.
Sur fon front eft gravé l'augufte caractére ,
Du Dieu, quelle a toujours aimé comme ſon Pere
Elle invite fon fexe à fuivre la ferveur
En fondant un Saint Monaftére ,
Pour les Epoufes du Sauveur.
MLLE NINON L'ENCLOS , célebre par fa
Gy beauté
1620 MERCURE DE FRANCE
f
beauté & par fon efprit , née à Paris , & morte
le 17.Octobre 1705. âgée de 90. ans ; les Vers
qu'on lit au bas font de M. de S. Evremont.
L'indulgente & fage Nature
A formé la belle Ninon ,
De la volupté d'Epicure ,
Et de la vertu de Caton.
Le fieur le Menu de S. Philbert , fait gra
ver actuellement fa cinquième Cantatille
qui a pour titre l'Etincelle , qui fera inceffament
fuivie d'une fixieme , intitulée les
mans , & d'un Livre de principes de Mufique
, très - court & très facile . Nous
croyons faire plaifir aux Amateurs de cet
Art de leur annoncer les Ouvrages de cet
Auteur , puifqu'ils ont été fatisfaits de ce
qu'il a donné précedemment.
Le fieur Rofa , Chirurgien Hernicre , demeurant
ruë S. André dès- Arcs au Bandage
couronné , près le Pont S. Michel , continuë
de donner des preuves de fon habileté
pour la guerifon des defcentes de toute
efpece .
Ses Bandages font des meilleurs qui fe
affent & font très commodes & trèslegers.
On peut verifier ces Faits , fi l'on
yeut s'adreffer aux perfonnes qu'il a guerics
JUILLET. 1743. 1611
ries depuis peu , & qui ont bien voulu
pour l'utilité publique , que leurs noms
paruffent. Il y en a trois qui demeurent
dans la rue des Canettes , Fauxboug Saint
Germain : le fieur Bizot Tourneur : une
Dlle de 18. ans , chés Doffeville , Cordonnier
, laquelle eft venue au monde avec
une defcente du côté droit un enfant,
nommé Tallard , âgé de 8. ans , qui en a
cû une à 4 ans au côté gauche. Les autres
font le nommé Duchâtelet , demeurant
au marché de Biffy , près de la Gril
le : Hachette , Cordonnier dans la ruë de
la Joüaillerie , du côté de l'Apport Paris
: le fieur Roüel , Poulaillier , Quai de la
Volaille , gueri d'une Defcente des deux
côtés avec laquelle il étoit né , & un
garçon Boucher , de la petite Boucherie ;
Fauxbourg S. Germain , chés le fieur Du
pont , Boucher ; tous ont été gueris radi
calement & en peu de tems.
,
Le fieur Rofa recevra en penfion chés
lui les jeunes gens attaqués de Defcentes ,
& s'engagera a les guerir fans retour , en
moins de 6. mois , fi elles font fufceptibles
de guerifon ; les perfonnes qui font éloignées
, pourront , en affranchiffant le port
des Lettres ou Paquets , lui envoyer la
meſure de leurs corps , & nommer le côté
de la Defcente ; il leur procurera une
parfaite guérison,
G vj
La
1622 MERCURE DE FRANCE
commerce ,
La veuve Bailly renouvelle au Public
fes affûrances , qu'elle n'a point quitté fon
& que les véritables Savon
nettes de pure crème de Savon , dont elle
feule a le Secret , fe diftribuent toujours.
chés elle , rue du petit Lion , à l'Image S.
Nicolas , proche la rue Françoiſe , Quartier
de la Comédie Italienne.
17
Q
AIR.
Ue mon fort eft digne d'envie !
Je vois couronner mes ardeurs ;
Tircis , l'heureux Tircis eft cher à fa Silvie ,
Mais un cruel poiſon eft caché fous ces fleurs ;
On doit te craindre ,Amour jufques dans tes faveurs,
Dans les tranfports dont mon ame eft ravie.
Du plaifir d'être aimé je vais perdre la vie ;
Qu'auroient fait de plus tes rigueurs ?
Par M. Campan , O. D. L. R.
VAUDEVILLE du Divertiffement de
la Comédie de l'ifle fauvage.
DUU bel efprit au vrai génie ,
Du tintamare à l'harmonie ,
De la fuffifance au fçavoir ;
Quoique
A
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY.
ABTOR, LENOX AND
TILDEN
FOUNDATIONS.
NAN
f
T
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY.
ASTOR, LENOX AND
TILDEN
FOUNDATIONS.
Du tintamare a l'harmonie 2
De la fuffifance au ſçavoir ;
Quoique
JUILLET.
1623 1743 .
que la brigue emporte la balance ,
C'eft la difference
Du blanc au noir
*
Pendant le jour , la jeune Life
Pleure un Mari comme Artemife ,
Mais vers le foir un tendre Amant
fa contrainte en tapinois la venge ,
Et la veuve change
Du noir au blanc.
*
Quelle eft modefte, cette fille ,
Qui le matin fort de la grille ,>
Et qui devient femme le foir !
lendemain quel ton , quelle arrogance ,
C'eft , & c.
Près d'une Agnès, qu'il veut furprendre,
Un petit Maître eft foumis , tendre
D'un rien il fe fait un devoir ,
pauvre dupe eft elle en fa puiffance
C'eft , & c .
*
Climene fort de fa toilette ;
Elle eft d'une beauté parfaite 5
Elle a confulté fon Miroir
Qu'on
24 MERCURE DE FRANCE
Qu'on la furprenne avant fa prévoyance ,
C'eft , & c.
*
Doux , prévenant , plein de tendreffe ,
L'Amant veut vous prouver fans ceffe
Le plaifir qu'il goûte à vous voir ;
L'Hymen arrive , ah ! quelle diffonnance !
C'eft , &c.
*
Une Blonde avoit mon fuffrage ,
Mais de fes fers je me dégage ,
Une Brune obtient le mouchoir.
Qui m'a conduit à pareille inconftance ?
C'eft , & c.
*
Quand j'apperçois venir ma mere ;
Je prends un air froi & févere ;
Du doigt j'impofe à mon Amant ,
Sommes-nous feuls ; l'Amour fe récompenfe ?
C'est la difference
Du noir au blanc .
*
L'Amour & l'Hymen pour leur gloire
Se font difputés ma victoire ;
Ils m'ont chacun fait un préſent ;
Epoux muet , Amant plein d'eloquence ;
C'ef
JUILLET. 1743 1821
C'eft la difference
Du noir au blanc .
Dans nos jeux la fombre critique
Cherche à noircir Piéce & Mufique;
L'Auteur , l'Acteur , tout s'en reffent ;
Mais du Public la flatteufe indulgence
Fait tourner la chance
Du noir au blanc.
&&
SPECTACLES
.
Académie Royale de Mufique , qui
و
cès les répréfentations du Baller des Indes
Galantes , y ajouta le 16. une quatrième
Entrée qui a pour titre les Sauvages , la
quelle a été reçuë auffi favorablement
que lorsqu'elle fut ajoutée au même Ballet
en Mars 1736. On peut en voir l'Extrait
qui en a été donné dans le Mercure de
Mars de la même année
, pag. 534.
Le 8. Juillet , les Comédiens François
repréſenterent une Comédie nouvelle en
trois Actes , précédée d'un Prologue , &
ferminée par un Divertiffement . Cette Piéce
116 MERCURE DE FRANCE.
ce a pour titre l'Ile Sauvage ; elle eft de
l'Auteur de l'Oracle & du Silphe , deux
Comédies qui ont eû beaucoup de fuccès
fur les Théatres François & Italien .
On peut dire que cette premiere repréfentation
ne fut rien moins que pailible ,
& qué la Piéce fut jugée tumultueufement .
par le Parterre , fans l'avoir entenduë. La
feconde & la troifiéme repréfentation qu'on
en donna , furent écoutées paffiblement ,
fans trouble & fans cabale . Le Public
rendit juſtice à cet Ouvrage , qui eft ingenieufement
compofé , très- bien écrit &
parfaitement repréfenté. L'indifpofition du
Sieur Grandval empéche qu'on n'en continue
les repréſentations ; quand on les reprendra
nous nous mettrons en état d'en
donner l'Extrait .
Le 31. les mêmes Comédiens repréfenterent
la Tragédie d'Electre , dans laquelle
le fieur Roffelois , nouvel Acteur
repréſenta le Rolle de Palamede , avec applaudiffement
, & celui de Nicodeme dans
la petite Piéce du Deül ; le même Acteur
avoit deja debuté fur le même Théatre
au mois de Mai 1738. où il avoit repréfenté
le Rolle de Mithridate. Il avoit encore
joué au mois d'Octobre fuivant , à Fond
tainebleau le Rolle de Neoptoleme , dans
La Tragedie de Pyrrhus.
Le
JUILLET. ` 1743. 1627
Le 2. les Comédiens Italiens donnerent
la premiere repréfentation d'une Comédie
nouvelle en Vers & en trois Actes , qui
a pour titre les Petits Maîtres , de laquelle
on pourra parler plus au long.
Le 15. les mêmes Comédiens donnerent
une Piéce nouvelle Italienne , en
4. Actes , qui a pour titre , Arlequin &
Scapin , Magiciens par hazard , laquelle
été reçûë favorablement & a attiré de:
nombreuſes affemblées à l'Hôtel de Bourgogne
, par le Jeu continuel des deux
excellens Acteurs Arlequin & Scapin , que
le Public voit toujours avec plaifir. Ils
entreprennent dans cette Piéce de devenir
les Rivaux de leurs Maîtres , & d'enlever
leurs Maîtreffes mais ayant manqué
leur coup , ils quittent la Ville & fe retirent
dans un Bois , avec chacun un fufil
, dans le deffein d'y vivre de leur
chaffe. Au premier coup que tire Arlequin
, il voit tomber d'un Arbre , à fes pieds
un Livre , ou efpece de Grimoire , lequel
contient tous les fecrets de la Magie
ils ouvrent ce Livre & auffitôt
trois Diablotins , ou Génies viennent
leur offrir tout ce qu'ils demanderont.
Ces Génies font ce qu'ils fouhaitent.
Tantôt Scapin , tantôt Arlequin , munis
du Grimoire , font diverfes niches à leurs
,
Maîtres
1628 MERCURE DE FRANCE
ras
>
>
avec
Maîtres. Arlequin fe trouvant en prifon ,
pendant que Scapin a le Livre , il fe voit
prêt à être condamné à mort . Scapin revient
avec le Grimoire , le tire d'embarle
fait difparoître aux yeux de
fes Juges , & enlever par deux Diables
dans une Chaife à porteurs. Enfin
l'or qu'ils ont reçus des Génies , ils pren--
nent la réfolution de demander pardonà
leurs Maîtres , & de bruler le Grimoire.
La Piéce eft terminée par un morceau
d'Artifice des plus ingenieux , placé
dans le fond du Théatre , compofé de
Soleils de Lunes , d'Etoiles , d'un Globe
de Fufées croifées , de Chutes d'eau ,
de Croix de Malthe , & de tout ce qu'on
peut préfenter aux yeux des Spectateurs
de plus merveilleux & de plus fingulier
en ce genre , fans compter l'exécution qui
eft parfaite , & géneralement applaudie . Les
fieurs Ruggieri , Freres , Italiens , natifs de
la Ville de Bulogne , Eleves du fameux
Longi , qui a eté le premier Inventeur de
toutes fortes de Feux d'Artifices , font les
Auteurs de celui dont on vient de parler.
,
›
Le 27. les mêmes Comédiens repréfenterent
une autre Piéce nouvelle Italienne
en deux Actes , intitulée les Soldats , qui
n'a point été goûtée : elle fut précédée de
l'Epreuve , petite Piece de M. de Marivaux ,
&
•
JUILLET. 1743 1629.
›
& fuivie du Silphe , Comédie en un Actes
repréſentée avec fuccès le 5. Février der
nier. On a joint à cette Piéce un Diver
tiffement de chants & de danfes très
bien exécuté par les Acteurs de la Trou
pe. Les paroles du Divertiffement font du
fieur Favart , la Mufique du fieur Blaiſe
& la Compofition du Ballet du fieur Deshayes
. On peut voir dans le Mercure de
Mars dernier , pag. 537. ce qui a été dic
au fujet de cette Piéce .
Le premier Juillet , l'Opera Comique ;
fous la direction d'un nouvel Entrepreneur
, fit l'ouverture de fon Théatre à la.
Foire S. Laurent . On y repréfenta une Piéce
nouvelle d'un Acte , en Vaudevilles ,
précédée d'un Prologue , intitulée le Siége
de Cythere , avec des Intermedes de chants
& de danfes , laquelle fut très bien exécutée
& applaudie du Public ; elle fut fuivie
d'une autre petite Piéce en un Acte ,
intitulée le Coq du Village , jouée pour
la clôture du Théatre à la derniere Foire
S. Germain le 6. Avril dernier. La Dlle
Cheret , connuë fous le nom de la Petite
Tante , qui avoit joué le Rolle de Pier
rot , qui eft le principal de la Piéce , a
repréſenté le même Rolle à cette repriſe ,
avec les mêmes applaudiffemens.
La
2
1630 MERCURE DE FRANCE
Le
13.
,
13. on remit au Théatre une Piéce
d'un Acte , en Vaudevilles , de la Compofition
de Mrs le S. ** & Dor. ** in
titulée la Reine du Baroftan , laquelle
avoit été repréfentée en 1730. fous la direction
du fieur Pontau , fur un Theatre
qu'il avoit fait conftruire dans un Jeu de
Paume de la rue de Buffy. Le fieur Hamoche
, connu depuis long tems pour un
excellent Acteur Comique , y jouoit le
Rolle de Pierrot , avec un applaudiffement
géneral . Ce même Acteur vient de reparoître
aujourd'hui jouant fon même Rolle
& dans la même Piéce avec les mêmes
applaudiffemens dont le Public l'avoit deja
honoré , il fit un compliment qui fut
très-bien reçû ; il chanta après un nombre
de Vaudevilles fans fuite & interrompus
, dans le goût burlesque de Scarron,
ce qu'on appelle communément un otpourri
; il fut terminé par un Air Italien
que le même Acteur chanta , jouant de
la Guittarre , d'une manière tout a fait comiques.
On repréfenta enfuite le Coq du Village
dont on vient de parler ; la Dile
Lany , cadette , danfa les nouveaux Caractéres
de la Danfe , avec toute l'intelligence
& la précision poffibles.
Le 24. la Dlle Puviguée , nouvelle Danfeufe
JUILLET. 1743. 163r
feufe , âgée de fept ans , danfa feule une
Entrée avec toutes les graces & la vivacité
pollibles ; elle fut géneralement ap
plaudie.
Le 30. on remit au Théatre une Piéce
d'un Acte , en Vaudevilles avec des Divertif
femens , qui a pour titre , les jeunes Mariés
, laquelle avoit été donnée dans fa
nouveauté à l'ouverture de la Foire Saint
Laurent 1740. L'Auteur y a fait quelques
changemens qui ont été goûtés du
Public.
On croit devoir avertir que le nouvel
Entrepreneur de ce Jeu , a fait quelques
changemens très - convenables dans la Salle
de ce Spectacle ; il a fait conftruire un
nouveau Parterre dans la même pofition ,
où font les Parterres des autres Théatres
de Paris , où toutes fortes d'honnêtes gens ,
Bourgeois & autres , peuvent être placés
fans crainte d'y être confondus avec les
gens de Livrée le Roi ayant défendu
par fon Ordonnance du 17. Juin dernier
, aux Laquais & aux autres gens de
Livrées d'entrer à l'avenir fous auçun
prétexte , même en payant , au Spectacle
de l'Opera Comique comme cela fe
pratique pour tous les autres Théatres de
Paris.
,
On a conftruit auffi un nouvel Ama
phitéatr
1632 MERCURE DE FRANCE
phiteatre contigu au Parterre , où l'on eſt
placé beaucoup plus commodément que
dans l'ancien Parquet.
*********** *****
NOUVELLES ETRANGERES .
TURQUIE.
Na appris de Conftantinople , que
les trou
Erzerum, pour s'oppofer aux entrepriſes de Thamas
Kouli - Kan ; que la Flotte deftinée pour la Mer
Noire , fe difpofoit à mettre à la voile , & que le
Grand Seigneur avoit ordonné d'embarquer fur
quelques - uns des Bâtimens de cette Flotte cent
piéces de canon, de douze livres de bale, qui avoient
été fondues nouvellement à Topkana .
On a appris depuis , que l'on continuoit avec toute
la diligence poffible les préparatifs de guerre , pour
s'opposer aux entreprifes de Thamas Kouli- Kan ,
qu'on dit s'être avancé à Amadan avec une armée
nombreufe , & qui paroît être dans le deffein de
former le Siége de Bagdad .
RUSSIE.
N mande de Pétersbourg , que le 6. du mois
dernier, le Sénat avoit envoyé ordre au Comte
de Munich , fils de celui qui eft exilé en Sibérie , de
fe retirer à Wologda avec toute fa famille ; de ne
mener avec lui aucun domestique étranger , & que
ce Comte feroit déja parti pour s'y rendre, fi la Czagine
ne lui avoit permis de differer fon départ jufqu'après
JUILLET. 17439 1635
qu'après les couches de la Comtelle fon épouſe . Les
biens que S. M.Cz. lui avoit laiffés après la difgrace
de fon pere , ont été confifqués , & cette Princeffe
ne lui accorde qu'une Pention de 1000. Roubles
pour fa fubfiftance.
SUEDE,
N apprend de Stockolm du 21 du mois ders
nier , que le Colonel Palmſtruck , à la tête
de 150. Suedois , a défait dans la Bothnie Occiden
tale un détachement d'Infanterie , de Dragons & de
Huffards , des troupes de la Czarine.
L'équipage d'un Vaiffeau , venu des Côtes de
Finlande , a rapporté que le 31. Mai dernier , les
Galeres Ruffiennes , commandées Par le Géneral
Keyth , avoient attaqué celles de Suede , qui font
fous les ordres du Vice - Amiral Falkengren , & que
les unes & les autres s'étoient canonnées & bombardées
pendant plufieurs heures avec beaucoup de
vivacité.
On appris de Pétersbourg , que S. M. Cz. & le
Roi de Pologne , Electeur de Saxe , avoient ronou
vellé le Traité conclu entre la Ruffie & la Pologne
fous le Regne de la feuë Czarine.
Le 30. du mois dernier , le Lieutenant Colonel
Lingen arriva à Stockolm d'Abo , d'où il a été dépêché
au Roi par les Barons de Cederncreutz & de
Nolcken, pour informer S. M. que le 27. du même
mois les articles préliminaires de la paix entre la
Suede & la Ruffie avoient été fignés par les Miniftres
Plénipotentiaires des deux Puiffances , lefquels
étoient convenus, qu'en attendant la conclufion d'un
Traité définitif , on cefferoit de part & d'autre lès
actes d'hoſtilité. Cette nouvelle , qui fut publiée le
lendemain
434 MERCURE DE FRANCE
lendemain au bruit des timbales & des trompettes
, a caufé une joye génerale.
La Suede s'eft engagée par les articles prélimimaires
de l'accommodement , de ceder à la Ruffie la
partie de la Finlande , qui eft de l'autre côté de la
riviere de Kymen, & la Fortereffe de Miflot avec le
territoire qui en dépend , & on affure que la Ruffic
reftituera à la Suede la Bothnie, la Province de Nyland
& la Carélie Suedoife , avec les diſtricts d'Abo,
de Biornebourg & de Tavafthus.
S. M. a envoyé ordre à les Géneraux de faire
rentrer les troupes dans leurs quartiers & aux Galeres
, de revenir dans le Port de Stockolm , pour y
être défarmées.
Le Roi , accompagné du Sénat , fe rendit le 3. de
ce mois à l'Affemblée des Etats , & S. M. s'étant
placée fur fon Trône , les Etats élurent unanimement
Frederic Adolphe , Prince de Hoftein , Evêque
de Lubec , pour fucceder à la Couronne . Ce
Prince fut proclamé le 4. en cette qua ité avec les
céremonies accoûtumées en pareille occafion , & le
même jour , on fit partir deux couriers , P'un
lui
pour
porter la nouvelle de fon Election , & l'autre
pour remettre aux Miniftres Plénipotentiaires du
Roi la Ratification des articles préliminaires de paix
fignée par S. M.
Les Commiffaires établis par les Etats du Royaume
, pour juger les Géneraux qui ont été arrêtés ,
prononcerent le premier de ce mos la Sentence
du Comte de Leuwenhaupt , qui a été condamné
à avoir la tête tranchée , & dont les biens ont été
confifqués.
La Sentence , qui avoit été prononcée il y a quel
que tems par les mêmes Commiffaires contre le
Géneral Buddenbroeck , a été confirmée par la
Diette.
ALLB
JUILLET. 1743- 164
O
ALLEMAGNE.
N apprend de Vienne du 22. du mois dernier,
que le Colonel Buckow , fecond Adjudant du
Prince Charles de Lorraine , arriva le 12. de Parmée
commandée par ce Prince , lequel l'a dépêché
pour porter à l'Impératrice Douairiere la nouvelle
de la prife de Friedberg. On a fçu par cet Officier ,
que la garnison de ce Château , compofée de 83 .
Officiers & de 1226. Soldats , avoit été faite pri
fonniere de guerre.
les trou-
On mande du 30. du mois dernier , que
pes Françoiſes , qui étoient en Baviere , étant dé➡
campées des environs d'Ingolstadt , fe font raflemblées
à Donawert , & que le 26. du même mois ,
le Corps de réſerve , commandé par le Prince de
Conty , qui a fous fes ordres le Marquis du Chayla,
Lieutenant Géneral , & les Marquis d'Argouges &
de Rambure , Maréchaux de Camp , le remit en
marche pour s'approcher du Neckre. Ce Corps de
réferve eft compofé de la Brigade des Vaifleaux Infanterie,
de la Brigade de Cavalerie de Choiſeul , &
des Régimens de Dragons d'Orleans & de Vibraye .
Le reste de l'armée a pris la même route en quatre
Divifions , dont la premiere , compofée des Brigades
d'Infanterie de Champagne , de Royal & de
la Couronne ; des Brigades de Cavalerie de Chepy
& de la Peroule , & du Régiment Colonel Géneral
des Dragons , partit le 27. Cette Divifion eft commandée
par le Marquis de Clermont Gallerande
lequel a fous fes ordres le Comte de Monteflon ,
Lieutenant Géneral ; les Marquis de Chaferon & du
Chafteler , le Prince de Pons , le Marquis de Langerön
, le Marquis de Maupeou & le Comte de la Luzerne
, Maréchaux de Camp.
La feconde Divifion , laquelle décampa le 28 .
H eft
1626 MERCURE DE FRANCE
La feconde Divifion , laquelle décampa le 20
eft compofée des Brigades d'Infanterie de Bourbonnois
, de Lyonnois & de la Saarre ; de celles de Cavalerie
de Coffé & de Fitzjames , & elle eft commandée
par M. de Louvigny , qui a fous lui le-
Comte de Danois , Lieutenant Géneral, le Duc de
Boutteville , le Marquis de Caraman , le Comte de
Clermont Tonnerre , le Comte de Rupelmonde ,
le Comte de Mauroy & le Duc de Briffac , Maré-,
chaux de Camp..
Elle fut fuivie le 29. par la troifiéme Diviſion , à
la tête de laquelle font M. de Lutteaux , le Marquis
du Cayla & le Comte de Coigny , Lieutenans Gé
neraux ; le Marquis de Brun , le Comte de Rieux ,
le Marquis de Brezé , le Comte de Fontaine Martel ,
le Marquis d'Hautefort & le Comte d'Harcourt ,
Maréchaux de Camp , & qui eft compoſée des Brigades
de Normandie , de Poitou & de Bretagne ,
Infanterie ; de deux Brigades de Cavalerie & du
Régiment de Dragons de la Reine.
La quatrième & derniere Divifion marcha le 30.
fous les ordres de M. Phelippes , du Comte de Baviére
& du Prince de Montauban , Lieutenans Gé❤
neraux , & des Marquis de Refuge , de Beranger ,
de la Ravoye , de Monconfeil , d'Armentieres , du
Comte de Biffy & du Prince des deux Ponts , Ma
réchaux de Camp. Dans cette Divifion , font les
Brigades d'Infanterie de Picardie , de Bouzols , de
Montmorin & d'Alface ; celles de Nugent , de Rofen
& de Cruffol , Cavalerie , & les Régimens de
Dragons de fainte Mefme & de Lillebonne .
Le rendez- vous de ces troupes étoit à Wimpfen ,
& la route qu'elles ont dû fuivre , étoit à Oppinguen,
à Norling, à Bopfinguen , à Neuhim, à Thann ,
à Hall , à Stingen & à Hoentheim.
On a appris de Francfort que l'Empereur y étoit
arrivé d'Ausbourg le 28. du mois dernier.
T
JUILLET. 1745 1627
M
Selon les lettres reçûes de Bavière», le Comté de
纂
Kevenhuller y a fait publier de la part de la Reine
de Hongrie une Déclaration , portant que tous les
habitans des Villes , Bourgs & Villages de cet blecrorat
, lefquels le foumettront volontairement aux
troupes de cette Princeffe , & qui fe tiendront tran
quilles dans les lieux de leur demeure , feront nonfeulement
traités avec douceur , mais encore qu'on
feur fournira des grains & les beftiaux dont ils aut
ront befoin , pour cultiver leurs terres ; & qu'on
ufera des dernieres rigueurs de la guerre contre
-ceux qui attaqueront les troupes de S. M. H.
19. Ces lettres ajoûtent que le du mois dernier ,
ile General Nadafti s'étoit mis en marche du Camp
de Geiffenfeldt avec un Corps de 2300. hommes de
Cavalerie Hongroife , pour s'avancer vers le Mein ,
& pour aller joindre l'armée des Alliés , que le
Colonel Pichel étoit parti du même Camp avec le
Corps d'Artillerie , pour diriger les opérations du
Siége de Braunau , qu'on avoit conduit de Palla
devant cette Place douze piéces de gros canon ,
pour la battre en breche ; que le 18. on avoit tra
vaillé à les mettre en batterie , & que les20. elles
avoient commencé à tirer .
On aprend de Stockolm , que le bruit y couroit
que les Miniftres Plénipotentiaires , qui afliitent au
Congrez d'Abo de la part de la Czarine & du Roi
de Suéde , y avoient figué la Convention Prélimi
naire d'un Armistice entre les troupes des deux
Puiffances .
On a appris du Camp de Selingeftatt du 30, da
mois dernier , que le Comte de Stairs ayant quitté
celui de Hoefcht , qui eft au - deffous de Francfort ,
& ayant fait marcher le 17. & le 18. fur le Hauté
Mein les troupes qu'il commande , le Maréchal de-
Noailles partit de Geraw avec l'armée du Roi , &
Hij qu'il
1628 MERCURE DE FRANCE
qu'il arriva en trois jours dans la Plaine vis- à vis
Afchaffembourg , dont les Alliés avoient été à
portée de s'empater , parce que cette Ville étoit de
leur côté.
Les deux armées étant campées en préfence Pune
de l'autre , le Mein entre deux , le Maréchal de
Noailles , après avoir placé deux Brigades vis - à- vis
de Pont de pierre d'Afchaffembourg , fit occuper fur
le Haut & fur le Bas Mein differens poftes , pour
ter aux Alliés les moyens de faire arriver des fubtances
dans leur Camp . Cette pofition de l'armée
du Roi produifit l'effet qu'on en attendoit , & le Comte
de Stairs ayant reconnu qu'il lui étoit impoffible
de refter plus long tems dans fon Camp , lequel
étoit appuyé par la droite au Village de Kleimoftheim
, & par la gauche à Afchaffembourg , il fe
mit en mouvement la nuit du 26. au 27. pour marcher
fur Hanaw.
Le Maréchal de Noailles , qui en fut averti à une
heure après minuit , monta à cheval , & ayant donné
l'ordre pour que les troupes du Roi ſe tinſſent
prêtes à marcher , il alla reconnoître les mouvemens
des Alliés qu'il vit en marche fur deux Colonnes.
Il revint à Selingeftatt, où il y avoit deux Ponts,
fur lefquels il fit paffer le Mein aux trois Brigades
d'Infanterie d'Auvergne , de Touraine & d'Orleans,
qui furent jointes peu de tems après par laBrigade des
Gardes Françoifes & par celle de Noailles . Pendant
que l'Infanterie paffa le Mein far le Pont de Selingeftatt
, 11. Efcadrons -de Cavalerie, 21. de Dragons
& 6. de Huffards , pafferent la même Riviere aux
qués qui y avoient été reconnus .
Ces troupes étant arrivées au de- là du Mein , le
Maréchal de Noailles plaça une Brigade d'Infanterie
fur le bord du Mein dans un Village qui fermoit
fa droite ; il appuya ſa gauche à un bois , &
la
JUILLET. 1743 1629.
la Cavalerie ayant occupé le centre , la Plaine fe
trouva entierement fermée .
Le Maréchal de Noailles , après avoir fait cette
premiere difpofition , repaffa le Mein , pour donner
fes ordres aux troupes auxquelles il n'avoit pas fait
paffer la Riviere , & pour obferver les mouvemens
des Alliés. Il découvrit qu'aulieu de continuer leur
marche , ils le formoient fur plufieurs Lignes compofées
alternativement , fans aucun intervalle, d'Infanterie
& de Cavalerie , & que les troupes du Roi
s'avançoient au de- là du Village d'Ettingen par un
défilé formé par un Ravin , fur lequel il n'y avoit
qu'un feul Pont. Le Maréchal de Noailles fe porta
aufli tôt au Village d'Ettingen , mais les cinq Brigades
d'Infanterie & une partie de la Cavalerie
ayant déja paflé le défilé , & ces troupes le trouvant
fort près de l'armée des Alliés , qui étoit en bataille,
le Maréchal de Noailles ne s'occupa qu'à faire la
meilleure difpofition que le terrain permettoit .
Les troupes du Roi effuyerent , fans tirer , le feu
de la Moulqueterie des Alliés , & elles les attaquerent
trois fois , mais elles ne purent rompre leur
première Ligne , laquelle étoit foutenue par deux
autres , appuyées au Mein & à des bois qu'on ne
pouvoit tourner.
Le Maréchal de Noailles s'étant déterminé par
cette raiſon & par celle de la fuperiorité du nombre
des Alliés fur celui des troupes du Roi , à faire ceffer
l'attaque , nos troupes repafferent le défilé en
très-bon ordre , & elles retournerent camper à Selingeftatt
.
Dans ce combat, qui a duré plus de trois heures,
& pendant lequel le feu des Alliés a été auffi vif que
continuel , les François ont eû environ 600 , hommes
de tués & 1200. de bleffés , dont un grand
nombre l'a été légerement. Les Alliés y ont perdu
H iij environ
1630 MERCURE DE FRANCE
ehviron sooo . hommes , dont In plus grande partie
a été tuée par notre artillerie , & on leur a pris trois
pieces de canon & quelques Etendarts.
* Pendant la nuit , le Comte de Stairs ſe mit en
marche pour le rendre à Hanaw , & il s'eft retiré
avec tant de précipitation, qu'il alaiffé fur le champ
de bataille deux piécés de canon, & 600. bleffés que··
le Maréchal de Noailles a fait tranſporter dans nos
Hôpitaux , où on en prend beaucoup de foin .
Les principaux Officiers que nous avons perdus
dans cet e action , font le Duc de Rochechouart , le
Comte de Sabran , & le Marquis de Fleury le Marquis
de Chabannes Marioles & le Marquis de Vandüil
, Lieutenans des Gardes du Corps ; de la Ro
chejaquelin' , de Quiffelin , le Chevalier de Roncherolles
& de Vandeuil , Exempts ; les Marquis
de Wargemont & de Meffey , Officiers de la Com
pagnie des Gendarmes ; le Coigneux Officier de
la Compagnie des Chevau- Legers , le Comte de .
Coedlogon , Enfigne de la feconde Compagnie des
Moufquetaires , MsPinon , le Marquis de Langey;
Boucoiran , Boiffon . , Charpentier & d'Averolles ,
Capitaines au Régiment des Gardes Françoires .
Les principaux Officiers bleflés , font le Comte
d'Eu , le Duc d'Harcourt , le Duc de Boufflers , le-
Comte de Beuvron ; Mrs de Cherifey, des Cajeul,&
de Montgibaut , Lieutenans des Gardes du Corps ;
de Beaumont, Enfeigne ; le Baron d'Ordrė,Mrs d'Andelau
, d'Efpinchal , de Poi , de Chalabre de Mo--
rinval , de Maneville , de Blaru , d'Anger , de Verceil
de Saint Chamant , de Sept Maifons , de Levignan
de Vogue, H tier & d'Arnianville , Exempts
des Gardes du Corps , és Marquis de S. Chamant
& de Merinville Officiers de la Compagnie des
Gendarmes , le Comte de Marigoane , Sous- Lieufenant
de la Compagne des Chevaus Eegers , le
2.
Marquis
JUILLET.17430 1631
Marquis de Chabannes , Cornette de la feconde.
Compagnie des Moufquetaires ; Mrs de Gault & de
Combes , Lieutenans des Grenadiers à cheval ; le
Marquis de Bourdeilles , le Comte de Biron , le
Vicomte de Coetlogon , les Marquis de Guftine , de
Maupeou , de Vaubecourt , de Balleroy , Colonels
d'Infanterie , M. de Chabot la. Serre , Mestre de
Camp de Cavalerie , & Mrs de S. Maurice , de Soupire
, de S. Aubin & de Chambon , Capitaines au
Régiment des Gardes Françoiſes.
On a appris de Lintz , que la Reine de Hongrie
y avoit reçu le 25. du mois dernier l'hommage des
Etais de la Haute Autriche , & qu'elle avoit confir
mé à cette occafion les priviléges des habitans de
·cette Province . S. M. H. a accordé le pardon à plufieurs
perfonnes, qui avoient été arrêtées pour avoir
montré de l'attachement aux interêts de l'Empereur ,
On mande de Wimphem , que 2000. Huflards
ont fait prifonniers les malades qui fuivoient l'armée
du Maréchal de Broglie , & les Soldats qui
-leur fervoient d'escorte.
Les avis reçûs de Bavière portent que l'Empeseur
étoit convenu d'une fufpenfion d'armes avec
la Reine de Hongrie.
On a appris du Camp de Steinheim du 12. de ce
mois , que le Comte de Stairs ayant fait marcher le
28. du mois dermier à la pointe du jour , l'armée
qu'il commande , pour fe rendre à Hanaw , il cam
pa ce jour-là dans les environs de cette Ville ; qu'il
s'avança le lendemain à Enckheim fous Bergen ,
entre Hanaw & Francfort , & qu'il envoya
camp fur la Nied , à Wiebel & à Grunauw , dif
ferens Corps de troupes , lefquels le porterent le 3.
de ce mois du côté de Hoefcht.
de ce
Le Maréchal de Noailles , qui étoit resté depuis
le 27. du mois dernier à Séliugeftatt , en decampa
Hij le
1532 MERCURE DE FRANCE
le 2. de ce mois , pour ſe rendre à Steinheim , où
étoit plus à portée d'obſerver les mouvemens de
l'armée des Alliés . Il y apprit le . que le Comte de
Stairs avoit porté une partie affés confidérable de
fes troupes du côté de Felhenheim , pendant qu'il
en raffembloit d'autres à Hoefcht , & fur cet avis
il fit partir le même jour le Marquis de Montal ,
Lieutenant Géneral , avec les trois Brigades d'Infanterie
, du Roi , Dauphin , & des Irlandois ; les Brigades
de Cavalerie des Cuiraffiers & des Carabiniers
; la Brigade du Meftre de Camp General de
Dragons ; les deux Régimens de Huffards de Berchiny
& d'Esterhazy , avec vingt piéces de canon ,
& il lui dona ordre d'aller camper avec ces troupes
dans la Plaine d'Offembach. Ce Géneral fit
avancer en même tems à Sprinlingen , fous les ordres
du Chevalier d'Apcher , Maréchal de Camp ,
les Régimens de Cavalerie Royal Allemand , &
Royal & le Régiment de Dragons de Surgeres.
Le Maréchal de Noailles a laiffé l'armée Françoife
dans cette pofition jufqu'au 12. de ce mois au matin
, qu'il a pris le parti de le rapprocher du Rhin.
La Reine de Hongrie a nommé le Prince de
Lobckowitz , pour commander fes troupes en Italie
, à la place du Comte de Traus.
On a appris de Baviére , que les troupes Bavaroifes
, qui étoient en garnifon dans Braunaw , ont
capitulé .
On mande de Hambourg du 12. de ce mois , qu'il
y arriva le 9. de Stockolm un courier , par lequel
l'Evêque de Lubeck a appris qu'il avoit été élû pour
fucceder à la Couronne de Suéde.
Selon les avis de Suabe la premiere Colonne de
l'armée , commandée par le Prince Charles de Lorraine
, pafla le 8 de ce mois au matin le Danube ;
elle fut fuivie le même jour après midi par la fe
conde
JUILLET. 1743. 1633
conde Colonne , & le lendemain par la troifiéme
On mande de Braunaw , que les Troupes Impé
riales , qui y étoient en garnifon , en étoient fortie
le 4.de ce mois , conformément à la Capitulatio
dont le Gouverneur de la Place eft convenu avec le
Commandant des troupes Autrichiennes , qui em
ont formé le Siége .
Les mêmes avis portent que le Comte de Sec
kendorf ayant envoyé le Comte, Rambaldi au Ba
ron de Berencklau , pour traiter de l'évacuation de
Straubingen avec ce Géneral , ce dernier avoit fait
réponse qu'il ne pouvoit entrer en aucune négocia
tion à ce fujet , fans la participation du Prince
Charles de Lorraine .
On a appris de Studgard , que les trois Colonnes
de l'armée commandée par ce Prince , ont dû arri
ver le 18. de ce mois fur le bord du Neckre.
ESPAGN, L.
N apprend de Madrid du 2. de ce mois , que
l'Intendant de Marine de Malaga a mandé au
Roi , qu'un Pacquetbot Anglois , commandé par le
Capitaine Davidfon, avoit été pris dans les environs
d'Alhucemas par l'Armateur François Marie Valenzula
, & que les Armateurs Don Jofeph Vila
& Sebaftien de Morales , avoient enlevé fur la Côte
de Barberia , à la hauteur de l'Ile d'Alboran,les deux
Vaiffeaux la Marie & le Guillaume Marie.
Deux autres Bâtimens de le même Nation , nommés
le Succés & la Charmante Galiotte , ont été
conduits au Port de Bayona , par l'Armateur François
Barrera , qui s'en eft rendu maître fur la Côte
de Portugal.
On a appris de Guarnizo , que la Frégate le
Royal Biscayen, armée en courfe par Don François
Hv Larrera 2
1634 MERCURE DE FRANCE
Larrea, eft rentrée dans la Riviere de Santander avec
le Vai..cau Anglois le Suift , dont elle s'eft emparée
dans les environs du Cap de Clare.
Les Armateurs Eſpagnols ont encore pris depuis
peu les Valleaux la Vierge , t Efperance , l'Aigle ,
le Guillaume , Agréable , le Henry , le Glocester , le
Jofeph , le Loyal , le Betfey , & le Profit.
Deux Armateurs Efpagnols out brulé fur la Côte
d'Afrique les Vaifleaux le Cap Coart, l'Aigle de Rhodes
ifland & le S. Jacques , ils le font rendu maîtres
des Vailleaux la Reine de Hongrie & le Worcester ,
& ils on obligé le Vaiffeau d'Hironde.le , d'aller
échouer fur la ôte. •
Un autre Armateur Espagnol s'eft emparé du
Vaiffeau le Succés , commandé par le Capitaine
Gibſon.
•
Le Gouverneur de Porto Cavallo a mandé au
Roi, que le Chef d'Efcadre Knowles, n'ayant point
été découragé par le mauvais fuccès qu'il avoit
éprouvé à l'attaque de la Guerra avoit remis à la
voile de Caraçao le 31. Mars dernier avec onze
Vaiffe aux de guerre de l'Efca fie Ang oile
qu'il commande , une Galiotte à Bombes , deur Bâtimens
de transport , & quatre autres Vaifleaux ,
qu'il a contraint les Hollandois de ui fournir , contre
les intentions & les ordres des Erats Géneraux ,
& qu'étant arrivé le 26. du mois d'Avril dans les
environs de Porto Cavallo , il avoit jetté l'ancre à
'Eft de cette Place fous les Quais de Barbara ; qu'il
avoit fait avancer deux Vaifleaux , pour tâcher de
démonter deux batteries l'une de douze & l'autre
de fept canons placées à la pointe baile du côté
oppofé au Château , mais que ces Vaifteaux , quoique
tirant de revers fur ces batteries ne leur avoient
caufé aucun dommage que fur le foir toutes les
troupes de débarquement , qui étoient fur les Vaiffeaux
JUILLET. 1743. 1635
feaux de l'Escadre ennemie , étoient defcendues a
terre , & qu'elles avoient attaqué les troupes Efpa
gnoles qui gardoient les batteries ; que les Anglois,
malgré la vivacité de leur feu, avoient été mis en dé,
route , qu'ils avoient regagné précipitamment leurs
chaloupes ,& que les Espagnols en avoient tué ungrand
nombre,en les pourſuivant;que le 4. du mois de Mai,
le Chef d'Efcadre Knoulles avoit fait canonner en
même tems le Château, les deux batteries de la poine.
te baffe , & trois autres batteries que les Espagnols
avoient établies fur le rivage ; que le feu des Anglois
avoit duré depuis midi, jufqu'à neuf heures du
foir, mais que la plupart de leurs Vaiffeaux avoient été
fi maltraités qu'ils avoient été obligés de fe retirer,&
que leur Efcadre n'étant plus en état de former auçu- /
ne entréprile , avoit repris la route de la Jamaïque ,
Les Espagnols ont pris les Vailleaux Marchands
la Fourmy , le Lyon & le Gibraltar.
O
ITALIE.
N apprend de Venife , que l'on a fenti à Palerme
& à Catanea , une fecouffe de tremble "
ment de terre , qui a caufé à ces deux Villes un
dominage confidérable .
GENES ET ISLE DE COR SE.
N mande de Genes , que M. Giuſtiniani eſt
enfin arrivé à la Baftie , & que depuis le r2 .
du mois dernier qu'il y eft débarqué, il ne s'y étoit
rendu perfonne de la Campagne , à caufe des défenfes
rigoureufes que les Chefs des Rebelles leug
ont faites d'entretenir aucun commerce avec les
Genois .
1
Les Rebelles ont réfolu de ne commettre aucune
hoſtilité contre la République ni contre les Infu
H vj laires
1637 MERCURE DE FRANCE
laires qui lui font demeurés fidéles , à moins qu'ils
n'en fuffent attaqués ; ils n'ont jamais paru fi unis
qu'ils le font préfentement ; ils obéiffent aveuglément
à leurs Chefs , lefquels ont fait pafler par les
armes un habitant de Roftino , convaincu de vol &
d'aflaffinat , & ont fait brûler la maifon d'un autre,
coupable des mêmes crimes.
Le 21. du mois dernier , la Ducheffe de Modéne
reçût de France un courier , dont les dépêches
Pont déterminée à partir inceflamment pour s'y
rendre , & la République lui ayant accordé une
Galére pour la tranfporter à Maifeille , cette Princeffe
n'attendoit plus qu'un tems favorable pour
s'embarquer.
Une Barque fur laquelle étoient douze Forçats
avec deux Bonevoglies , un Algouzin & quatre
foldats , ayant mis à la voile pour aller chercher
du Left à la Plage de S Pierre d'Arena , les For
Cats fe font foulevés , & ayant jetté à la Mer ceux
de l'équipage qui ont voulu leur faire réfiftance
ils le font réfugiés à bord d'un. Vaiffeau de guerre
Anglois , dont le Capitaine a refufé de les rendre ,
prétendant qu'ils devoient jouir de la protection ,
du Pavillon de la Grande Bretagne.
>
Le Senat envoya le 20. du mois dernier des Députés
à M. de Jonville , Envoyé Extraordinaire du
Roi de France , pour faire des excuſes à ce Miniftre
, de la violence commife par des Sbiires , lef
quels avoient tenté d'enlever un priſonnier qui s'é- -
toit fauvé dans l'Hôtel de cet Envoyé & pour
l'aflurer que ces Sbirres avoient été condamnés à
fix nois de prifon , & que leur Officier avoit été
caffé .
M. Giuſtiniani a mandé au Senat que peu de
jours après fon arrivée à la Baftie il avoit adreflé à
toutes les Piéves une Lettre Circulaire , par la
quelle
JUILLET. 1743.1837
quelle il les exhortoit à envoyer leurs Députés
pour lui déclarer leurs prétentions , & que par la
même Lettre il leur avoit fait efperer que la Répu
blique , pourvû qu'ils fuflent véritablement difpo-.
fés à demeurer fous fon obéillance , leur accorde
roit tout ce qu'ils demanderoient de jufte & de
raifonnable , que les Députés de plufieurs Piéves
s'étoient déja rendus à la Baftie , & que l'Evêque
Mariotti étoit de ce nombre.
1
On a appris de Calvi que les Rebelles , qui s'é
toient allemblés dans les environs de Campoloro ,
s'étoient déterminés , auffitôt qu'ils ont été infor
més du débarquement de M. Gruftiniani , de s'avancer
a Cazinca , afin d'être plus à portée de
traiter avec ce Commiffaire Géneral.
>
Les avis de Lombardie marquent que deux Régimens
d'Infanterie & deux de Cavalerie des
troupes Pien ontoifes qui font dans les Duchés de
Parme & de Plaifance , s'étoient mis en marche
par ordre du Roi de Sardaigne , pour retourner
dans le Piémont .
•
t
On a appris qu'il y a eu dans le Duché de Plaifance
un Ouragan fi terrible , que plufieurs maifons
ont été renversées , & que la plupart des ar
bres ont été abbatus. Cet accident ajetté dans une
extrême confternation les peuples de ce Duché ,
Jefquels craignent de ne pouvoir continuer de
payer les 6000 florins , qu'ils font obligés de :
fournir tous les mois , pour fubvenir aux dépenfes
de la guerre.
On mande de la Baftie, que les Rebelles ont dû
tenir le 14 de ce mois une Affemblée génerale , &
qu'ils avoient répondu à l'Officier Génois qui leur :
avoit été envoyé par M Giuftiniani , Commiffaire
Géneral de la République qu'ils avoient expofé
leurs prétentions au feu Marquis Spinola : que c'é
3
Loit
1638 MERCURE DE FRANCE
toit à M. Giuftiniani à déclarer ce que la Républi
blique vouloit leur accorder , & que lorsqu'ils en
feroient inftruits , ils examineroient , fi les condi
tions qui leur feroient propolées , pourroient leur
convenir.
O
GRANDE - BRETAGNE.
N mande de Londres du 4 de ce mois qu'il
y arriva le 3. de l'armée fur le Mein un courier
dépêché par le Lord Carteret , pour informer
les seigneurs Régens du Royaume , que le 27. du
mois dernier , il y avoit eû une action très vive
entre cette armée & une partie des troupes Françoiſes
, commandées par le Maréchal de Noailles ;
fuivant les dépêches de ce courier , il paroît que
P'armée des Alliés , quoiqu'elle s'attribuë lavantage
de ce combat , a fait une perte beaucoup plus
confidérable que celle de S. M. T. C. & qu'elle a
été obligée en fe retirant vers Hanaw , de laiffer
fes bleffés fur le champ de bataille , & fes malades
dans le cimp qu'elle a abandouné .
Le Duc de Cumberland a eû la jambe percée
d'une bale; le Duc d'Aremberg , Géneral en Chef
des troupes Autrichiennes , a été auffi bleflé d'un
coup de feu , le Lord Clayton , Brigadier Général
au fervice du Roi , a été tué ; le Baron d'Illan & le
Comte de Monroy , Lieutenans G néraux dans les
troupes Hanoveriennes , ont reçû plufieurs bleffures
, & le Régiment Anglois de Ligonier a beau
coup fouffert , ainfi que plufieues au res , particulierement
ceux de Ligne & de Stirum , des trou--
pes de la Reine de Hongrie , les batteries que ·les
François avoient établies fur le bord du Mein
ayant été fervies avec la plus grande vivacité , & le
canon ayant tué beaucoup de monde..
L'Equi-
"
JUILLET.
17431639
L'Equipage d'un Bâtiment , revenu de Port Ma
hon , a rapporté que la Galiotte armée en courfe
par le Capitaine Smith s'étoit emparéé d'un
Vaiffeau Elpagnol , chargé de vin , de cochenille'
& de bois de Campeche.
On a appris par un Bâtiment arrivant de la nou
velle Yorck , qu'un Brigantin de la même Nation
fur lequel il y avoit des munitions de guerre defti
nées pour la Guerra , avoit été pris par le Vaiffeau
de guerre te Lancefton , ainfi que deux autres Bâti
l'un de 300. tonneaux , & l'autre de 2500
dont la charge confiftoit en argent , en cochenille
& en cuirs .
mens ,
Depuis l'arrivée du courier par lequel on a ap
pris l'action du 27: du mois dernier , on en a reçû
un autre qui a apporté une Rélation de ce com →
bat , laquelle contient les particularités fuivantes.
Le Roi ayant été informé le 26. que le Maréchal
de Noailles fe propofoit d'empêcher la jonc
tion de l'armée des Alliés avec les huit Bataillons
qui étoient venus de Hanover , pour la renforcer
& avec le Corps de troupes Heffoifes , qui eft
fous les ordres du Prince Georges de Heffe , S. M.
manda à ce Prince de s'arrêter p ès de Hanaw , &
elle réfolur de faire rapprocher fon armée de celle
du Roi Très-Chrétien .
de
Dès que le Maréchal de Noailles eut reçû avis
le ce mouvement , il fir marcher le long de Mein
vers Se ingeftatt l'armée qu'il tommande , & il fir
paffer la Riviere fur deux Ponts à cinq Brigales
d'Infanterie , pendant que 19. Efcadrons la paflerent
à gué . L'artillerie qu'il avoit placée fur le
bord du Mein , ayant commencé vers les dix heu
res du matin , à tirer fur l'armée des Alliés , qu'elle
bitoit en flanc , le Roi ordonna d'établir auff
quelques batteries , & les troupes des Alliés s'étant
avancées
1640 MERCURE DE FRANCE
avancées malgré la vivacité du feur de l'artille sie
des François , elles arriverent à un bois , derrière
lequel les 25. Bataillons & les 29. Efcadrons.
auxquels le Maréchal de Noailles avoit fait patfer
le Mein , s'étoient rangés en bataille.
L'Armée des Alliés fe forma fur plufieurs Lignes
fans aucun inter compofées alternativement
valle , d'Infanterie & de Cavalerie , & elles s'éten
dirent devant le front des troupes Françoiles , autant
que le terrain pouvoit le permettre . Les trou
pes de la Reine de Hongrie occupoient le centre
Paîle droite étoit formée par les troupes Angloifes ,
& celles de Hanover étoient à l'aile gauche , &
ces differentes troupes avoient avec elles leur artillerie.
Les François elluyerent , fans tirer , le feu de
la Moufqueterie des Alliés , & ils les attaquerent
trois fois. Dans la premiere attaque , la Cavalerie
de la Maifon du Roi Très - Chrétien chargea avec
une extrême valeur les troupes Autrichiennes &
elle les fit d'abord plier , mais ces troupes fe rallierent
en peu de tems , & elles foutinrent tous les
efforts que cette Cavalerie fit pour les enfoncer.
•
Le Maréchal de Noailles voyant que les Fran
çois pouvoient d'autant moins efperer de rompre
la premiere Ligne des Alliés , que ceux - ci étoient
fort fupérieurs en nombre il fe détermina à faire
teffer l'attaque , & le Corps de troupes Françoi
fes , qui avoit pallé le Mein , retourna au camp de
Selingeftatt , le Maréchal de Noailles ayant laiffè
à Aich ffembourg le détachement par lequel il
avoir fait occuper ce pofte avan : le combat.
La nuit fuivante , l'armée des Alliés décampa
pour le retirer fou Hanaw , & n'ayant pas ailés
de chariots pour tranſporter tous fes bleilés , elle
a été obligée d'en laiffer environ 600. ſur le champ
de bataille .
Les
JUILLET. 1743 164
Les François affûrent n'avoir eu que 600. hom
mes de tués & 1200. de bleffés . La perre des Alliés
eft beaucoup plus confidérable , & l'on prétend
qu'elle monte au moins à sooo . hommes.
Outre le Duc de Cumberland , le Duc d'Arem→
berg , le Baron d'Ifin & le Comte de Monroy , il
y a cû plufieurs autres Officiers de diftinction de
bleffés , & le Géneral Ligonier , les Majors Géné
raux Honey wood & Johnſon , le Brigadier Général
Hafck , le Colonel Peers & le fils du Comte de
Monroy , font de ce nombre
La bleffure du Duc de Cumberland , qui a eût le
gras de la ambe percé d'une balle , n'eft pas re-.
gardée comme dangereufe , mais on craint que
celle du Duc d'Aremberg , auquel on a tiré une
balle qui lui étoit restée dans l'épaule y ne foit
pas fitot guérie.
Le Roi a été pendant tout le tems de l'action ;
à la tête des troupes Angloifes , & étant defcendu
de cheval , il s'eft porté avec la plus grande intrépidité
dans les endroits où il y avoit le plus de
péril.
Les Vaiffeaux de guerre le Biddefort & la Lime, qui
étoient allés croifer dans la Manche,font rentrés dans :
le Port de Plymouth , où le Vaiffeau l'Aldborough
s'eft rendu de Liverpool , & le premier y a conduir a
une prife Espagnole , à bord de laquelle il y avoit
un grand nombre de barils de poudre.
ly
On a appris de lá Jamaïque , que les Vaiffeaux
de guerre le Gowey , le Reppon & l'Aventure , ont
enlevé plufieurs Batimens Efpagnols , parmi lef-:
quels eft le Vaiffeau le Saint Joseph Elias el Defsdero
, de foo. tonneaux , qui alloit de Cadix à la
Vera Cruz , & dont on dir que la charge eſt eſti- :
mée 100000. livres fterlings.
On mande des laes fous le vent , que deux Ac«
mateurs
1
1642 MERCURE DE FRANCE
•
mateurs Espagnols avoient été conduits à Saint
Kits , & que le Vaiffeau , de guerre le Southfea-
Cafle s'étoit emparé d'un autre Armateur de la
même Nation , de vingt canons & de 140. hommes
d'équipage.
>
Les Vaiffeaux de guerre , le Pembroke , la Prife
de Pembroke & le Garland font arrivés aux
Dunes , ayant fous leur convoi plufieurs Bâ: imens
entr'autres le Vaiffeau de Reg : fire Le
Saint Rofaire , qui a été pris & conduit à Gibraltar
, par le Vaiffeau le Romney,
Un Vaiffeau de guerre Anglois a coulé à fond
dans les environs du Cap de Gat , un Armateur
Efpagnol , de 20. Canons & de 150. hommes
d'équipage.
O
HOLLANDE ET PAYS-BAS.
$
N mande de la Haye du 19. de ce mois
que la Biette de l'Empire a écrit aux Etats
Généraux une Lettre , laquelle porte que l'Empereur
, par un effet du zéle louable dont il
eft animé pour le bien Public , a non -feulement
fait connoître fes difpofitions pour la Paix
mais encore a fouhaité que l'Empire , conjointement
avec les autres Puiffances qui feront invitées
, contribuât par fa médiation & par fes,
bons offices , à terminer les differends de S. M. I.
& de la Reine de Hongrie ; que les Electeurs ,
Princes & Etats de l'Empire , fe fentent d'autant
plus obligés de travailler à procurer un accommodement.
entre ces deux Puiffances , qu'ils
fçavent combien la Paix eft néceffaire à l'Al-
1 magne & à toute l'Europe ; qu'ayant exami
né cette affaire dans leurs déliberations particu-,
liéres , & ayant pelé mûrement toutes les cir
conftances
JUILLET. 1743 1.6.43
conftances , ils ont pris unanimement , dès le
17. du mois de Mai dernier , la reſolution demployer
tous les moyens qui dépenatoient d'eux ,
pour retablir la tranquillité en Allemagne , & de
fe charger de la médiation entre l'Empereur &
la Reine de Hongrie , moyennant le concours
du Roi de la Grande Bretagne & des Etats Gé
néraux , & une affurance fuffifante , de la part
des deux Puiffances engagées dans la guerre ,
les pour l'acceptation de cette médiation ; que
preuves éclatantes , qu'en plufieurs occafions les
Etats Généraux ont données de leur affection
pour le Corps Germanique , ne laiffent point
hieu à la Diette de douter qu'ils n'ayent pour
agréable la communication qu'on leur fait fur
ane matiére fi importante ; que le Corps Germanique
les prie de vouloir bien lui faire fçavoir
s'ils veulent être Médiateurs conjointement
avec l'Empire , & que dans ce cas , les Electeurs
, Princes & Etats de l'Empire , ne man◄
queront pas de faire de leur côté tout ce qu
féra poffible & convenable dans les conjonctu
fes préfentes , pour faire réüffir la Médiation.
Le 15. de ce mois , le Comte de Sintzheim
Miniftre Plénipotentiaite de l'Empereur auprès
de la République de Hollande , donna part aux
Etats Généraux de l'Armistice conclu par les Comtes
de Seckendorf & de Kevenhuller.
le
Les Régimens Anglois de Rothe & de Ho
ward , & celui des Montagnards , arriverent le
10. du mois dernier à Bruxelles , & le lendealler
main ils continuerent leur route > pour
par commandée joindre l'armée des Alliés ,
Comte de Stairs . 400. Chariots chargés d'habits
& de plufieurs autres chofes néceflaires aux
troupes dont cette armée eft compoſée, marchent
avec ces Régimens,
1644 MERCURE DE FRANCE
> Le dernier courier qui eft arrivé de Hanaw
, a rapportté que le Duc d'Aremberg éroit
hors de danger , & qu'on efperoit qu'il feroit
bientôt rétabli de fa bleflure.
Le 8 de ce mois le Baron de Reischach ,
Envoyé Extraordinaire de la Reine de Hongrie ,
communiqua au Préfident de l'Affemblée des
Etats Généraux quelques dépêches qu'il avoit
reçues de Vienne le même jour par un courier
extraordinaire & par lefquelles il appris
que la Reine de Hongrie n'avoit poire voulu
fatifier l'Armiſtice dont le Conte de Kevenbul-
Jer étoit convenu conditionellement avec le Comte
de Seckendorf , jufqu'à ce qu'elle fut inftruite
des intentions de fes Alliés .
,
Toutes les roupes que la République a confenti
de fournir à la Reine de Hongrie , feront
affemblées le deux du mois prochain à
Doësbourg , & le jour fuivant elles marcheront
vers Munfter , où elles feront reçues par
les Comm ffaires de S. M H Le Comte Maurice
de Naffau , qui les commande en chef , a
pris le 26 de ce mois la route d'Arnhem , avee
Je Baron de Ginkel , un des Generaux
doivent fervir fous fes Ordres.
, qui
FRANCE
JUILLET. 1743 164
FRANCE ,
NOUVELLES DE LA COUR , DE PARIS , &C
1
E 2. de ce mois , le Prince de Grim
berghen , Ambaffadeur Extraordinaire
de l'Empereur
eut une audience particu
liere du Roi , && iill y fut conduit par le
Chevalier de Saintot , Introducteur des Ambaffadeurs.
La Charge de Premier Gentilhomme de
la Chambre qu'avoit le Duc de Rochechouart
, qui a été tué au Combat , donné
près du Mein le 27. de ce mois , a
été accordée par le Roi au Fils de ce
Duc.
Un courier dépêché de Stockholm le
5. de ce mois par le Marquis de Lanmary
, & arrivé à Verfailles le 17. a apporté
la nouvelle de la conclufion de la
Paix entre la Ruffie & la Suéde , & de
l'Election faite unanimement pour fucceder
au Trône de Suéde , de l'Evêque de
Lubeck , lequel a été proclamé le 4.
On ne fait pas encore le détail des
conditions
1646 MERCURE DE FRANCE
> conditions de la Paix & on a feulement
appris que par les Articles Préliminaires
du Traité , la Suéde eft convenuë
de ceder à la Ruffie le Gouvernement de
Kimengor , jufqu'à la premiere branche de
la Riviere de Kimen , du côté de la Suéde
, ainsi que la Fortereffe de Miflot , &
fon territoire , qui eft d'environ deux lieuës .
Le Roi a quitté le 11. de ce mois le
deüil que S. M. avoit pris le 20. du mois
dernier pour la mort de la Ducheſſe Doüairiere
de Bourbon.
Le Roi a fait Maréchaux de Camp , le
Duc de Chartres & le Duc de Penthié
vre , & S. M. a nommé Brigadier M. de
Cremille Maréchal des Logis de l'armée
du Roi , commandée par le Maréchal de
Noailles.
›
M. Boucher , Intendant de la Généralité
de Bourdeaux ayant demandé au
Roi la permiffion de revenir , S. M. a
nommé , pour lui fuccéder , M. de Tourny
,Intendant de la Géneralité de Limoges ,
lequel eft remplacé par M de la Chataigneraye
, Maître des Requêtes.
Le Roi a donné la place de Confeiller
d'Etat
JUILLET. 1743 . 1647
>
' Etat , vacante par la mort de M. de Vaſtan ,
. M. de la Galaifiere Maître des Recuêtes
& Intendant en Lorraine , & celle
e Confeiller d'Honneur au Parlement
u'avoit M. de Cramaille , à M. de Feriol
Argental , Confeiller au Parlement,
>
Les troupes Françoifes qui étoient en
3aviére fous les ordres du Maréchal de
Froglie étant retournées à Dona wert ,
lles en repartirent le 26. du mois derier
& les jours fuivans
, pour aller à
Vimphen fur le Nekre. Ces troupes y font
arrivées fucceffivement par divifions , & le
. de ce mois , elles s'y font trouvées enerement
raffemblées. Le Maréchal de Brolie
s'eft rendu à Wimphén , à la tête de
troificme divifion , & il en eft parti le
9. après avoir remis le Commandement
ae l'armée au Comte de Saxe. Ce Lieu
tenant Géneral commandera fous les orres
du Maréchal de Noailles toutes ces
Troupes , qui fe font mifes en marche ;
pour aller à Spire.
BENEFICES DONNE'S.
L'Abbaye de S. Georges des Bois , Orre
de S. Auguftin , Diocèfe du Mans
vacante par le decès du dernier Titulaire , à
M. Lefevre de Megrigny , Acolythe du Diocèfe
de Paris.
1648 MERCURE DE FRANCE
,
Celle de la Reole Ordre de S. Be
noit , Diocèfe de Tarbes , vacante par le
decès de M. de S. Marfault de Chateillaillon,
à M. de Beaupoil de S. Aulaire , Prêtre ,
Vicaire Géneral de Tarbes.
Celle de Sandras , Ordre de S. Be
noir , Diocèfe d'Alais , vacante par la mort
de M. de Maniban , Archevêque de Bordeaux
, à M. l'Abbé Hardoin , Prédica,
teur de S. M.
Celle de S. Pierre d'Auxerre , Ordre de
S. Auguſtin , à M. l'Abbé de Boucoiran ,
( Jofeph de Calviere ) frere de feu M. de
Boucoiran , Capitaine au Regiment des
Gardes Françoiles , tué au Combat donné
près du Mein le 27. du mois dernier.
Le Prieuré de S. Blaife du Houx , dans
la Paroiffe de Supille , Diocèfe du Mans ,
vacant par le decès de M. Chevalier , à
M. Froger.
Le 31. de ce mois Monfeigneur le
Dauphin alla voir l'Hôtel des Invalides
pour la premiere fois ; ce Prince y arrriva
vers les cinq heures après midi & entra
par la porte du Dôme , du côté de la
Campagne; M. le Comte d'Argenfon, Minif
tre de la Guerre , avec le Gouverneur de
PHôtel , & un détachement des foldats qui
étoient fous les armes , le reçûrent à la
porte, Le
JUILLET . 17437 1649
Le Curé des Invalides , accompagné de
fon Clergé , lui préfenta l'Eau benite &
le harangua. Ce Prince a été gardé fuivant
P'ufage par les Invalides mêmes , & dans
la vifite qu'il a faite dans toutes les
parties de l'Hôtel , il a éte fuivi par une
garde de bas Officiers,
,
Tous les Invalides qui étoient en prifon
furent rélâchés par ordre de Monfeigneur
le Dauphin , qui ordonna auffi
d'en faire rentrer plufieurs dans l'Hôtel qui
en avoient été chaffés pour differens fujets.
Monfeigneur le Dauphin qui avoit été
chargé d'annoncer de la part du Roi , au
Gouverneur , que S. M. lui donnoit 4000.
livres de penfion fur l'Ordre de S. Louis,
& la Croix de S. Louis au Major , leur
fit part de ces graces avec beaucoup de
bonté. On fit trois falves de l'Artillerie
des Invalides. Ce Prince fortit de l'Hôtel
par la grande porte , traverfa la Cour , les
foldats Invalides étant fous les armes ; il
fe rendit à l'Hôtel de Chaſtillon , chés M.
le Duc de Chaftillon fon Gouveneur , où
il foupa à une table de quinze Couverts ,
Il y eût trois autres tables , fçavoir une
pour les Officiers des Gardes du Corps ,
une pour les Gardes du Corps , & une
autre pour les Pages , fans compter tous
les gens de Livrée du Roi auxquels on donna
auffi à fouper.
I U
1650 MERCURE DE FRANCE
Il y eut une tres - belle illumination dāns
Le Jardin de cet Hôtel & un Feu d'Artifice
. Monfeigneur le Dauphin parut fort
content de ce brillant Spectacle. Il partit
de l'Hôtel de Chaftillon vers les 11. heures
; il rendit une Vifite à Madame la Ducheffe
d'Orleans qui étoit à Chaillot , chés
laquelle la Reine foupoit ce Prince y
refta une demie heure , & de là il retourha
à Verfailles.
Le 31. Juillet , la Reine accompagnée
des Officiers de fa Maiſon & des Dames
de fa Cour , arriva fur les fept heures du
foir au Monaftére de Chaillor , où S. M.
vit d'abord S. A. R. Madame la Ducheffe
d'Orleans , & eut une converfation avec
cette Princeffe dans les Bofquets du Jardin.
La Reine alla enfuite vifiter le Convent
,
& à fon retour elle entra avec S. A. R.
dans un Cabinet de verdure , où l'on fervit
des Glaces . Sur les huit heures & demie
, S. M. & S. A. R. fe mirent à table
; le Souper dura jufqu'à dix heures
; il y eût plufieurs autres tables fervies
avec la même profufion & la même
délicateffe , & quantité de toutes fortes de
rafraichiffemens. Vers les 11. heures , Monfeigneur
le Dauphin , qui au retour de l'Hôtel
des Invalides , avoit foupé chés M. le
Duc
JUILLET. · 1743. 1655
•
Duc de Chaftillon , entra dans le Salon
Ce Prince , après avoir embraffé S. A. R
refta environ une demie heure, & retourna
enfuite à Verfailles , S. A R.
étoit accompagnée de la Ducheffe de
Modéne & de la Princeffe de Mo ' éne
;
fa fille aînée . La Reine joüa enfuite au
Jeu de Cavagnote , & retourna à Verfailles
vers les trois heures du matin..
Le premier , le 6. le 8. & le 10. Juil
let il y eût Concert chés la Reine
M. de Blamont , Sur - Intendant de la Mufique
du Roi en femeftre , fit chanter le
Ballet des Fêtes Venitiennes , dont les principaux
rolles furent parfaitement bien exécutés
par les Dlles Lalande , Romainville
& Deschamps , & par les fieurs d'Angerville
, Dubourg & Poirier .
Le 13. le 17. & le 20. M. Royer fit
concerter devant la Reine fon dernier Bal
let du Pouvoir de l'Amour , lequel fut exécuté
au mieux , & fit beaucoup de plaifir
à toute la Cour ; les principaux rolles
furent remplis par les Dlles Fel & Mathieu
, & par les fieurs Benoît & Jelyot ,
& par les autres fujets qu'on vient de
nommer.
Le 22. le 24. & le 27. la Reine entendit
le Ballet de l'Europe Galante ; la
I ij Dile
1852 MERCURE DE FRANCE
Dlle Romainville remplit le rolle de
Roxane , les autres furent chantés par les
mêmes fujets.
EXTRAIT d'une Lettre , écrite de Troyes
au fujet de l'Election d'un Maire.
M
Pré-
Onfieur Remond , Ecuyer , ancien
Confeiller aux Bailliage & Siége
.
,
y
fidial de Troyes , & Confeiller de Ville ,
dans l'Election qui fe fit le 11. Juin dernier
à la Maifon de Ville fut nommé
Maire , & réunit tous les fuffrages ; il
a peu d'exemples d'une Election auffi unanime
; un Choix auffi généralement -applaudi
, juftifie celui que M. le Pelletier
de Beaupré , Intendant de la Province de
Champagne fit de fa perfonne , en le nommant
fon Subdelgué au mois de Mai 1741 .
Le nouveau Maire qui fut installé le 27.
Juin avec les cérémonies ufitées avec
un concours extraordinaire de peuple , qui
témoigna par fes acclamations réiterées
la joye dont il étoit penetré , donna le 9,
Juillet , dans la grande Salle de la Maifon
de Ville un fuperbe Souper ; il y eût
deux tables de trente Couverts , fervies
avec autant de profufion que de délica
teffe ; les vins les plus exquis , & les lie
queurs les plus rares y furent diftribués
abondamment ; on admira fur tout l'or
dre
JUILLET 1743 165$
are & l'arrangement des Deflerts , dont le
goût ne fut pas moins fatisfait que le
coup d'oeil.
MORTS ET NAISSANCÈS.
L
E 29. Juin , M. François- Honoré de
Maniban de Cafaubon , Archevêque de
Bordeaux & Abbé de l'Abbaye de Sandras
O. S. B. Diocèfe d'Alais , mourut fans fon
Diocèfe . Il fut nommé à l'Abbaye de Sandras
le: 15. Août 1712. Il fut fait au mois de
Juillet 1714. Vicaire Géneral du Diocèfe de
Touloufe & Grand Archidiacre. Il fut nommé
Evêque de Mirepoix le 8. Janvier 1721 .
fut facré & prêta ferment de fidelité entre les
mains du Roi, le11 . Novembre de la même
année. Il fut nommé le ... Octobre 1729.
à l'Archevêché de Bordeaux , & prêta ferment
de fidelité au Roi le 11. Avril 1730 .
Il étoit fils de François Lancelot de Maniban
de Cafaubon , Confeiller au Parlement de
Toulouſe , & de D. & Coufin germain de
M. Gafpard-Jofeph de Maniban , Marquis
de Maniban & de Campagne , Baron de
Cafaubon & de Bufca , aujourd'hui Premier
Préfident du Parlement de Toulouſe , depuis
le 9. Octobre 1721. qui de fon mariage avec
I iij
D.
1654 MERCURE DE FRANCE
D. Jeanne-Chriftine de Lamoignon Blancmefnil,
n'a que deux filles ; fçavoir Made. la-
Marquife de Malaufe Bourbon , & Made. la
Marquife de Livry Sanguin ; la famille de
Maniban connuë autrefois fous le nom de la
Baffa , eft noble & Originaire du Pays d'Armagnac
; & elle porte pour Armes ,
d'Azur à deux bourdons de Pelerin , d'or
paffés en fautoir , les pointes baffes , &
accompagnés en chef d'un Croiffant d'or , &
en pointe de trois larmes d'argent , pofées ,
une à chaque flanc , & l'autre en pointe.
Le 11. Juillet , M. Nicolas Havetel , Seigneur
de Vauciennes , le Camoy , la Chapotte
& c . Prêtre Chanoine & Grand Archicre
de l'Eglife Cathédrale de Châlons , en
Champagne , & Grand Vicaire du Diocèfe
mourut à Epernay , âgé de plus de 80. ans
au grand regret de tous les Pauvres , dont
il étoit le pere ; il étoit fils de Claude Havetel
, Ecuyer Seigneur de Vauciennes , Préfident
des Tréforiers de France à Châlons
& de Dlle Catherine Maillet ; il avoit pour
frere M. de Vauciennes , fous Lieutenant au
Régiment des Gardes Françoiſes en 1687%
par la mort du quel fans alliance , il étoit devenu
l'héritier de fa famille , & pour foeur
Catherine Havetel , mariée le 7. Juin 1695 .
avec Antoine Mathieu Vidard , Chevalier
Seigneur de S. Clair , Lieutenant au . Régiment
JUILLET. 1655 1743
ment des Gardes Françoiſes , puis Lieutenant
de Roi en Champagne au Département de
Reims , dont elle fut la premiere femme &
mere d'André- Claude- Amable Vidard , Seigneur
de S. Clair , Meftre de Camp de Cavalerie
, Exempt des Gardes du Corps , Che
valier de S. Louis & Lieutenant de Roi en
Champagne , & Louis- Antoine Vidard de S.
Clair , Seigneur de Vauciennes , auffi Meſtre
de Camp de Cavalerie , Exempt des Gardes
du Corps & Chevalier de l'Ordre Militaire
de S. Louis . Le corps de l'Abbé de Vauciennes
, qui donne lieu à cet article , fut
tranfporté le lendemin 12. Juillet en fon
Château de Vauciennes , à une lieue d'Epernay
, pour y être inhumé dans la Chapelle
de fa famille .
·
Le 12. Meffire Jacques- Benigne Boffuet
ancien Evêque de Troyes , depuis 1718
& Abbé de Saint Lucien de Beauvais
depuis le 12 Avril 1704 , mourut à Paris
,
âgé de 82 ans ; il étoit neveu de M.
Jacques Benigne Boffuet , Evêque de
Meaux , l'un des plus fçavans Prélats qui
ayent paru dans l'Eglife , mort à Paris le
12 Avril 1704 ; il étoit fils d'Antoine Boffuet
Maître des Requêtes ordinaire de
l'Hôtel du Roi , mort le 29 Janvier
1699 , & de Dame Renée - Gaureau du
Mont , & il avoit pour frere aîné Louis ,
I iiij Boffuet ,
*
1656 MERCURE DE FRANCE
i
,
Mat- Boffuet , Seigneur d'Azû-les- Cofne
tre des Requêtes ordinaires de l'Hôtel du
Roi , mort le.... laiffant de fon mariage avec
Dame Marguerite de la Briffe , Demoiselle
Marguerite Benigne Boffuer fille unique
mariée à l'âge de 19 ans , le 21 Mai 1722 .
avec Louis- Antoine de la Roche-Fontenilles
, Marquis de Rambures & de Fontenilles
, & morte fans enfans le 25. Octo
bre 1728 .
,
,
Le .... Juillet , M. Jean Mathias Barthetemy
de Grammont de Lanta , Evêque de Perpignan
, facré le 26. Mai 1726. Abbé de
Calers , O. C. Diocèfe de Rieux , depuis
1717. de Nôtre-Dame d'Arles , Ó. S. B.
Diocèse de Perpignan , depuis 1723. & de
la Réale dans la Ville de Perpignan , depuis
1725. mourut dans fon Diocèfe , âgé dess .
ans ; il étoit fils puîné de Jacques - Barthele
my de Grammont , Baron de Lanta , & de
D. Catherine de Riquet , foeur de M. de
Riquet , Préfident à Mortier au Parlement
de Touloufe , & de feu M. le Comte de
Caraman , Lieutenant Géneral des Armées
du Roi , la famille de Barthelemy Grammont
Originaire d'Avergne , & de puis tranf
plantée , il y a environ 200. ans , à Touloufe
, & où elle eft regardée comme l'une des
premieres du Parlement , porte pour Armes
d'Azur à trois bandes d'or
Le
JUILLET. 1743. 1657
avec
Le 17. M. Paul -Eftienne Defmaretz dé
Cramaille , Confeiller au Parlement de Paris
, reçû le 20 Février 1714 , puis Confeiller
d'honneur au même Parlement
depuis le .... Janvier 1738 , mourut à Pas
ris âgé de 5 ans & fans être marié ; il
étoit frere de D. Henriette- Magdelaine Def
maretz mariée le 20 Fevrier 1702 ,
Charles d'Angennes , Marquis de Poigny !
Colonel du Régiment Royal de la Ma
rine & Brigadier des Armées du Roi , tué
à la Bataille de Malplaquet , le ir
Septembre 1709 ; il étoit fils de M. Jean-
Baptifte Defmaretz de Vaubourg , Sire &
Baron de Cramailles , mort Sous - Doyen
des Confeillers d'Etat & Privé du Roi , le
26 Avril 1740. & de Dame Marie- Magdeleine
-Voifin de la Noiray , morte le 9
Mai 1711. M. de Cramailles étoitcoufingermain
de M. le Maréchal de Maillebois
, & la Généalogie de fa famille fera
rapportée dans le Supplément à l'Hiftoire
des Grands Officiers de la Couronne
auquel on travaille actuellement.
Le 20. M. Felix Aubery , Chevalier
Marquis de Vaftan , Baron de Vieuxpont ,
Confeiller d'Etat , Prevôt des Marchands
de la Ville de Paris y mourut dans la
cinquante - deuxième année de fon âge.
étoit fils aîné de M. Jean- Aubery ,
I v Chevalier
1658 MERCURE DE FRANCE
.
Chevalier Marquis de Vaftan , Villeneuve
fous Barillon , Baron de Cernieres , Confeiller
du Roi en fes Confeils , Licutenant
pour le Roi au Gouvernement de
P'Orléanois & Pays Blaifois , & de feue
Dame Magdeline Louite de Bailleul , ayant
pour frere M. Jean Baptifte- Louis Aubery
de Vaftan , Chevalier non- Profés de l'Ordre
de S. Jean de Jerufalem , Capitaine
au Régiment des Gardes Françoifes , &
pour foeurs Dame Marie- Catherine- Louife
Aubery de Vaftan veuve de M. Jean-
Anne Aubery Chevalier Comte de S.
Ines , Seigeur de Trilport & de S. Vaubourg
, & Dame Marie-Jeanne Aubery de
Vaftan , veuve de M. Armand de Be
thune , Comte d'Orval , Seigneur & Prince
Souverain de Boisbelle & d'Enrichemont.
>
,
Il avoit épo fe en premieres nôces
Damoifelie Thérefe Fontaine fille de
Claude Fontaine Ecuver Confeiller Sécrétaire
du Roi , Maiſon Couronne de
France & de fs Finances , & de Dame
Louife- Jeanne de Gondre court, fon épouse:
Il avoit eu de ce mariage Dame Marthe-
Antoinette Aubery de Vaftan , mariée en
1732 , à M. Jean Louis Portail , Confeilfer
du Roi en tous fes Confeils , Préfident
du Parlement de Paris , feul fils de
feu
JUILLET. 1745. $659
feu M. Portail , premier Préfident du même
Parlement , & en fecondes nôces , Damoi
felle Marie - Renée le Mairat , fille de M.
Jean-Louis le Mairat , Confeiller du Roi
en fes Confeils , Maître des Requêtes Honoraire
de fon Hôtel & de Dame Renée
Ballet , fon épouſe.
11 refte de ce dernier mariage deux fils
& une fille ; il avoit été fucceffivement
Avocat du Roi au Châtelet de Paris en
1715 , Confeiller au Parlement en 1716
Maître des Requêtes en 1718 .
Il fût nommé Intendanr du Hainaut en
-1723 & de la Généralité de Caën en
1727 ; Prevôt des Marchands de la Ville
2
de Paris en 1740 , & Confeiller
d'Etag
au mois de Mars dernier.
Il a rempli ces différentes p'aces en
homme qui les méritoit , & s'y eft rendu
recommandable par un attachement inviolable
à fes devoirs , un amour conftant
pour la Juftice , & une fupériorité de ta
lens , qui le rendoit digne des plus grands
employs.
Une fimplicité noble , un génie élevé ,
des connoiffances étendues un caractére
bien faifant étoient joints en lui à la
plus haute vertu .
L'eftime générale qu'il s'étoit acquife par
tant de rares qualités , & les regrets fin-
I vj
ceres
660 MERCURE DE FRANCE
ceres des Grands & du Peuple , juftifient
affés cet éloge .
Le 20 Mai dernier , Dame Anne Ma
rie -Jeanne Dupuis , époufe de Meffire Louis-
Alexandre de Savary , Seigneur de Saint-
Juft &c. Confeiller du Roi en fes Confeils
, grand Maître des Eaux & Forêts de
France au Département de Normandie
& mariée le 10 Septembre de l'année
derniére , accoucha d'un fils , fon premier
enfant , qui fût ondoyé le même jour ; le 9
Juin fuivant , les cérémonies du Baptême
furent fupplées , en l'Eglife de Saint Germain
de l'Auxerrois fa Paroiffe , à cet
enfant qui fut nommé fur les Fonds
Charles- Louis. Le Parain a été Meffire ...
de Savary , Seigneur du Tronc &c . Abbé
de Beaulieu , Diocèfe de Langres , Doyen
& Vicaire Général d'Evreux , fon oncle
paternel. La Maraine , Dame Marie - Anne
l'Epinau , veuve de M.Charles- Ruau Dutronchot
, Chevalier de l'Ordre de faint
Michel , fa bifayeule maternele.
Le 21 Juin dernier , Dame Elifabeth-
Maric Dupuis , époufe de Meffire Louis-
Léon de Bouthillier Chauvigny , Comte
de Beaujeu Baron de Lorme &c. &
mariée le 14 Août de l'année derniere ,
accoucha d'un fils , fon premier enfant
qui fut baptifé en l'Eglife de S. Euſtache
La
JUILLET. 1743- 1661
fa Paroille
•
& nommé fur les Fonds de
Baptême Charles -Léon .
Vi-
Le Parain a été M. Claude-Léon de
Bouthillier de Chauvigny , Marquis de
Vandeuvre , des Hayes d'Angylon
comte de Rhodes , Brigadier & c. fon oncle
paternel , la Maraine a été Dame Marie-
Anne l'Epinau , veuve de M. Charles - Ruau
Dutronchot , Chevalier de l'Ordre de S. Michel
, fa bifaycule maternelle.
******** :X :XXXXX **
ARRETS NOTABLES.
RDONNANCE du Roi du ro
Juillet, portant augmentation de 36000.
hommes de Milice , dont la teneur fuit
Sa Majefté jugeant néceffaire pour le bien
de fon fervice, d'augmenter de 36000. hom
mes le corps de Milices , elle en a fait dreffer
de répartition fur les Provinces & Générali→
rés du Royaume , & en conféquence , elle a
ordonné & ordonne ce qui fuit.
ART. I. Il fera levé dans les Provinces
& Géneralités du Royaume , conformément
à l'état de répartition qui fera joint à la prés
fente Ordonnance, 36000. hommes de nou
velle Milice , lefquels feront répartis par
Intendaas defd . Provinces & Generalités , par
les
préference
1662 MERCURE DE FRANCE
préference fur les Villes , & fubfidiairement
fur les Paroiffes du plat- Pays , eû égard au
nombre de feux ou de familles dont elles
feront composées,& tiré au fort entre tous les
garçons demeurant actuellement dans lefd .
Villes & Paroiffes , de l'âge de 16, ans & au
deffus jufqu'à 40. de taille de cinq pieds au
moins , & de force convenable à fervir.
II. Les jeunes gens mariés , de l'âge de
vingt ans & au - deffous ayant la taille & les
qualités ci - deffus prefcrites , feront aſſu
jettis à tirer au fort concurremment avec les
garçons, fans qu'aucun puiffe en être diſpenſé
pour quelque caufe & fous quelque prétexte
que ce foit ; & à leur défaut le fort fera tiré
entre tous les hommes mariés , de l'âge de
40. ans & au- deffous.
III . Ordonne S.M. auxd. garçons ou hommes
mariés , qui fe trouveront dans le cas de
tirer au fort , de comparoître pardevant le
Commiffaire chargé de la levée , le jour qui
aura été indiqué pour tirer , à peine d'être
déclarés Miliciens , & contraints de fervir à
la place de ceux à qui le fort fera échu .
IV. S. M. voulant que lad. Milice foit affemblée
du 15. Octobre prochain au premier
Novembre fuivant au plus taid , tous ceux
à qui le fort fera échu ou qui auront été
déclarés Miliciens pour caufe d'abfence ,
feront tenus de fe rendre dans ledit tems
aux
JUILLET 1743 1669
aux Lieux de l'affemblée , à peine des ga
léres perpétuelles.
V. Le ſervice defdits Miliciens fera de
fix années , & ils ne pourront s'abfenter ,
fans congé , de la troupe dont ils feront
à peine d'être pourſuivis & punis de mort
comme déferteurs , fuivant la rigueur des
Ordonnances.
- VI. Entend S. M. que jufqu'an jour de
l'affemblée , ceux des Miliciens qui feront
journaliers , foient employés par les Paroiffes
, par préférence à tous autres habitans
, & en cas qu'ils aillent travailler
dans les Paroiffes voifines , leur enjoint
S. M. d'en avertir les Officiers des Com
munautés , de leur déclarer le Lieu où ils
fe rendront , & de fe trouver à l'affemblée
dans le tems ordonné fous les peines
portées par l'Article IV. de la préſente
Ordonnance.
VII. Conformément à l'Article VIII. de
l'Ordonnance du 12. Novembre 1733. dont
S. M. a jugé à propos de renouveller les
difpofitions , tout Milicien qui aura fervi
pour fa Paroiffe le tems de fix années ,
ne pourra être impofé à la Taille perfons
nelle ou induſtrielle que deux années
après l'expiration de fon fervice , pour fes
biens propres , ou pour ceux qui lui viendront
du chef de fa femme , s'il fe ma
rie
1664 MERCURE DE FRANCE
rie dans le cours defdites deux années
& dans le cas où ledit Milicien prendra ,
pendant ledit tems , des Fermes ou Explotations
étrangeres , il fera pour raifon
d'icelles , taxé d'office modérément par les
Intendans dans la Province pour laquelle
il aura fervi. Ordonne S. M. que le Mi
licien qui fe trouvera marié lorfqu'il mar
chera pour fa Paroiffe , foit diminué de
dix livres fur fa quote perfonnelle pour
chacune de fes années de fervice. Veut au
furplus S. M. que les peres defdits Miliciens
foient exempts de Collecte pendant
que leurs enfans ferviront à ladite Mili-
& que pendant ledit tems leurs quo
tes de Taille ne puiffent être augmentées
par les Collecteurs .
ce ,
VIII. Lors de l'affemblée defdits Mili
ciens , il leur fera fourni par les Paroif
fes , un bon Chapeau bordé en argent faux ,
avec les autres parties de l'habillement
& l'argent reglé par l'Article XII. de l'Or
donnance du 12. Novembre 1733 .
IX. Veut au furplus S. M. que fes Or
donnances précédentes auxquel les Elle n'en
tend déroger, qu'à l'égard de ce qui fe trous
vera de contraire à la préfente , foient
exécutées felon leur forme & teneur. Mande
& ordonne S. M. aux Gouverneurs & fes
Lieutenans Generaux en fes Provinces , aux
Intendans
JUILLET . 1745. 1665
Intendans defdites Provinces , de s'employer
chacun à fon égard , & felon qu'il leur eft
prefcrit , à l'exacte obfervation & exécution
de la préfente Ordonnance . Ordonne
auffi S. M. aux Gouverneurs de fes Villes
& Places , à tous Baillis , Sénéchaux
Prévôts , Juges , leurs Lieutenans & autres
fes Officiers qu'il appartiendra , de tenir
la main à ladite exécution . Fait à Verfailles
, le 10. Juillet 1743. figné LOUIS
Et plus bas M. P. DE VOYER D'ARGENSON .
ETAT contenant la répartition de 36000.
hommes de Milice , qui doivent être fournis
par les Villes & fubfidiairement par
tes Paroiffes du plat- Pays des Provinces
& Generalités du Royaume , en exécution
de l'Ordonnance du 10. Juillet 1743..
La Generalité de Paris fournira 2160.
hommes .
La Generalité de Soiffons fournira 1080.
hommes.
I
La Géneralité d'Amiens fournira 1080.
hommes .
La Generalité de Rouen fournira 1800.
hommes.
La Géneralité de Caën fournira 1080.
hommes.
La Géneralité d'Alençon fournira 1440
hommes.
La
1666 MERCURE DE FRANCE
La Géneralité de Châlons fournirà 1800 .
hommes.
Le Département du Duché de Bourgogne
fournira 180c . hommes.
La Géneralité d'Orléans fournira 1440.
hommes .
La Generalité de Moulins fournira 720.
hommes.
La Géneralité de Tours fournira 1440.
hommes.
La Province de Bretagne fournira 25201
hommes.
La Géneralité de Poitiers fournira 1080.
hommes.
La Géneralité de Limoges fournira 720.
hommes.
La Géneralité de Riom fournira 7201
hommes .
La Géneralité de Lyon fournira 720.
hommes.
-
La Generalité de Grénoble fournira 720
hommes.
La Provence fournira 720. hommes.
La Géneralité de Montauban fournira
1080. hommes.
La Géneralité d'Aufch fournira 1080:
hommes.
La Géneralité de Bordeaux fournira 2160.
hommes.
La Generalité de Bourges fournira 720.
hommes,
JUILLET. 1743- 1667
Le Comté de Bourgogne fournira 1800 .
hommes.
La Province de Languedoc fournira 2520 .
hommes .
La Géneralité de la Rochelle fournira 360 .
hommes.
La Province d'Artois fournira 720. hommes.
Le Département des trois Evêchés fournira
900. hommes.
La Province d'Alface fournira 900. hom;.
mes .
La Province de Flandre c& elle du Hay
nault fourniront 720. hommes.
TOTAL 36000. hommes
J
APRO ATION.
'Ai lû par ordre de Monſeigneur le Chancelier,
le Mercure de France du mois de Juillet , & j'ai
cru qu'on pouvoit en permettre l'impreffion. A Pa
ris , le premier Août 1743 .
HARDIO N.
TABL E.
P
IECES FUGITIVES . Epitre à Mercure , & Ode
à Mlle *** 1469
Réponse de M. Néricault Deftouches à la Lettre du
28. Mai , touchant la Religion Chrétienne, 1475
Melpomene , Elégie , 1496
Extrait de Lettre fur les Antiquités de Corfeuil , en
Bretagne ,
Epitre en Vers à Mlle Des ...
1500
1509
Lettre au fujet de la Chronologie & la Topographie
du nouveau Bréviaire de Paris ,
La Rofe Cantate ,
1509
1520
Differtation où l'on prouve que la Lune Pafchale
n'eft pas celle de Mars , 7523
Vers pour le Portrait de Mlle Silvia , 1536
Lettre fur un animal extraordinaire , 7137
Réponse en Vers à la Queftion propofée dans le
Mercure d'Octobre dernier , 3544
Difcours fur l'Etude des Mathématiques , 3546
Bouquet à M. d’H *** 1549
Lettre fur les Ouvrages de Gui Aretin , Muficien
155x
1566 Vers à Mad . *** , le jour de fa Fête ,
Explication des Enigmes & des Logogryphes des
Mercures de Juin premier & fecond Volume ,
Enigmes & Logogryphe ,
1568
Ibid
NOUVELLES LITTERAIRES , DES BEAUX ARTS,
&c. Projet d'une nouvelle Edition de l'Hiftoire
de Lora ne ,
OEuvres de M. l'Abbé Privat de Moliéres ,
Nouveaux Flemens d'Algébre ,
Introduction à la Chymie ,
Hiftoire de Ciceron
Montéfuma , Tragédie ,
Almanach
Chronologique ,
157%
1580
1581
1582
ibid.
1583
1584
Differ
Differtation fur un Temple octogone ,
Hiftoire de la Maifon de Portugal ,
1588
ibid.
Difcours prononcés dans l'Académie Françoife , à
la Réception de l'Evêque de Bayeux , 1589
Difcours prononcés à l'Académie des Beaux- Arts
de Lyon ,
Morts de Perfonnes Illuftres ,
Eftampes nouvelles
Remede pour les Defcentes >
Chanfon notée & Vaudeville ,
1594
1611
16 : 8
1620
1622
Spectacles , 1625
Nouvelles Etrangeres , Turquie ,
1632
Ruffie ,
ibid.
Suede ,
1633
Allemagne ,
1635
Espagne ,
1633
Italie ,
1635
Genes & Ile de Corfe , ibid.
Grande Bretagne , 1638
Hollande & Pays- Bas , 1642
France , Nouvelles de la Cour , de Paris , & c. 1645
Bénéfices donnés , 1647
Monfeigneur le Dauphin va aux Invalides , 1648
La Reine và voir Mad. la Ducheffe d'Orleans à
Chaillot
Concerts chés la Reine ,
Extrait de Lettre fur l'Election d'un Maire ,
Morts & Naiffances ,
Arrêts Notables , I
1650
1651
1652
1653
1661
P
Errata du premier Volume de Juin,
Age 1088. ligne premiere , Deſcription de la
Haute Normandie , lifez du Pays de Cotentin .
P. 1089. 1. 12. & fuivantes , 1. de cette maniere le
chiffres
... chiffres Chronologiques , 1346. 1364. 1418
P. 1228. 1. 21. Farancourt , l . Favancourt.
Même page , 1. 21. fon fils , 1. à ſon fils.
P. 1242. 1. 5. du bas , de Bades . I. de Budes.
P. 12 50. 1. 26. confultez la Généalogie , & c . I.
confultez l'Hiftoire de la Maiſon Caraffe par Aldimari
, 3. vol . in-fol.
P. 1251. Maître des Requêtes Honoraire , ajoû–
tez , & Confeiller d'Etat Ordinaire .
P. 1253. 1. 15. & 16 , deux mille livres , l. mille
livres.
Errata di fecond Volume de Juin.
Age 1360. ligne 4. du bas , Chaulieu , lifez
de Chaulieu . Page
P. 1432. l. 18. D D. MANSAT , . D D. MANSART.
P. 1444. l. 11. d'Anjou , l. à Angers,
Ibid. 1. 20. e Simonn , l . Simonne.
P
Fautes à corriger dans ce Livre.
Age premiere , ligne 13. ton mérite , liſex
t'ont mérité.
P. 1473 . 1: 20. Efant , . Enfant .
P. 1476. l1.. 1177.. otez la virgule après rigueurs.
P. 1482. . . & 6. penfée , l. penfée.
P. 1485. 1. 3. refource , l . reffource.
P. 1489. 1. 19. nons , 1. nous.
P. 1492. l. 14. cherché , l. cherchée.
P. 1496. 1. 21. m'eft , l . m'es.
P. 1497. 1. 2. otez la virgule apris forfaits.
P 1498. 1. 16, viellit , . vieillit.
P. 1499. l. 12. vielliffent , l . vieillient.
P.
P. Isco . 1. 6. m'opprimee , 1. m'opprime.
P. 1502. 1. 6. du bas . Chambre quarrée &c.
1. parfaitement quarrée & profonde du rez de
chauffée , juſqu'à fon fol , d'environ 4. pieds .
P. 1512. 1. 2. Clervaux , l . Clairvaux .
P.
1514. 1. 25, Clervaux
, 1. Clairvaux
.
P. 1520. 1. 4. les , l. des.
P. 1528. 1. 21. où , otez ce mot.
P. 129. 1. derniere , Junin , . Juin.
Pp 1531. 1. 2, cela , ajoutez, pendant.
P. 1533. l. 18. commencée , 1. commencé,
P. 1538. L. 10. & 11. exceptés , 1. excepté.
P. 1541. 1. 1o. Lettré , l . Lettre ;
Ibid. 1. 14, grande , l. grandes.
P.
1543. 1. 2 . du bas , d'autres , l . autres .
P. 1544. 1. 14. Où , l. Ou ,
P. 1546. 1. 1. reprendre , l. repandre.
P. 1549. 1. 9. là que , l. là , que
Ibid. 1. 11. on , l ; on
Ibid. 1. 12. même ; l. même ,
P. 1550. 1. 15. mentend , l . m'entend
Ibid. 1. 16. éclattant ; 1 , éclatant ,
P. 1553. 1. 6. je , je ne .
P. 1554. 1 . étoient
13. > 1. étoit.
P. 1556. l. 17. gravectoit , l. grave étoit.
P. 1559. 1. 25. Spatiun. 1. Spatium .
P. 1563. 1. 7. du bas , encheri , deffus 1. encheri
deflus ,
P. 1567. l . 10. & 11. du bas , livrer. l . livrer ,
l'allegreffe . Pallegreffe.
P. 1568.1, 12. oeuil . 1. oeil.
1. l'enrichiront
P.
1572. 1. 23. l'lenrichiront
P. 1574. 1. 2. Gueres
, 1. Guerres
.
P. 1581.
1. 6. laife 1. Blaife .
P. 1593. l. 6. inftruits ; l . inſtruits ,
P. 1596. 1. 8. etonnée ; l. etonnée ,
P. 1599, 1. 9. aequis 1. acquis,
поп
P. 1613. 1. 6. étoient très reffemblans . I. étoient
non feulement très- reffemblans.
Ibtd. 1. 2. du bas appeloit . . appelloit.
P. 1614. 1. 11. la . l. là.
P. 1615. 1. 3. du bas , fous 1. à .
P. 1616. 1. 11. diftintif . L. diftinctif.
1. 9. affaire . 1. affaires
P.
1619.
Ibid. 1. 24. otez la virgule après caractére
P. 1620. 1. 20. dès . 1. des
P. 1621. 1. 5. Fauxboug. 1. Fauxbourg
P. 1622. 1. 16. mettez une virgule après ravie
P. 1628. 1. 23. Bulogne. 1. Bologne
1.
P. 1630. l . 24. & 25. comiques , 1. comique ,
P. 1633. 1. 22. & 23. ronouvellé . 1. renouvellé
Ibid. 1. 27. Cedemcreutz. 1. Cederncreutz
Ibid. 1. 28. Noleken. 1. Nolcken
Ibid. 1. 32. du . 1. d'un.
P. 1634. 1. 5. du bas confifqués. 1. confiſqués
MERCURE
DE FRANCE .
DÉDIÉ
AU
ROI ,
AOUST
1743.
Che
ACOLLIGIT
SPARGITE
A PARIS ,
GUILLAUME
ruë S, Jacques.
CAVELIER ,
La Veuve PISSOT , Quai de Conty,
à la defcente du Pont-Neuf.
JEAN DE NULLY , au Palais .
M. DCC, XLIII
Avec Approbation & Privilege du R
AVIS.
L
ADRESSE générale eft à Monfieur
MOREAU , Commis au Mercure ,
vis - à- vis la Comédie Françoife , à Paris.
Ceux qui pour leur commodité voudront remettre
leurs Paquets cachetés aux Libraires qui
vendent le Mercure à Paris , peuvent ſe ſervir
de cette voye pour les faire tenir.
On prie très-inftamment , quand on adreſſe
des Lettres on Paquets par la Pofte , d'avoir
foin d'en affranchir le Port , comme cela s'eft
toujours pratiqué , afin d'épargner , à nous
Le déplaifir de les rebuter , & à ceux qui
les envoyent , celui , non - feulement de ne
pas voir paroître leurs Ouvrages , mais
même de les perdre , s'ils n'en ont pas gardé
de copie.
*
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les Particuliers qui fouhaiteront
avoir le Mercure de France de la premiere
main , & plus promptement , n'auront
quà donner leurs adreffes à M. Moreau
qui aura foin de faire leurs Paquets fans
perte de temps , de les faire porter fur
Pheure à la Pofte , ou aux Meffageries qu'on
Ini indiquera.
PRIX XXX, SOLS
MERCURE
DE FRANCE .
DÉDIÉ AU
ROI.
AOUST 1743 .
PIECES FUGITIVES
1
en Vers & en Profe.
IDILE.
L'AMOUR vaincu par la Raifon.
D
Igne fujet des voeux des Bergers d'Ar
cadie ,
Philis dans la forêt porta la réverie ;
L'Amour y conduifit autrefois fon Berger;
A ij
Philis
1684 MERCURE DE FRANCE.
Philis craint , & Philis aime encor le danger.
Que ne peux-tu , Berger , y revenir comme elle
Ah ! Philis , trop d'amour n'a fait qu'un infidelle.
L'ingrat ne chérit plus l'objet qui l'a charmé ;
Meris feroit conftant , s'il étoit moins aimé.
Elle implore Venus ; mais Venus , peu fidelle ,
Ne protegea jamais que qui change comme elle.
Philis vit fes moutons errer fur un coteau ;
Si Philis n'eut aimé , trop fortuné
troupeau ,
Vous brouteriez encor le floriffant Citiſe !
Ses yeux , libres alors , vous gardoient de ſurpriſe:
Mais tout change en aimant ; vous êtes malheureux
L'Amour de tous les maux eft le plus dangereux.
Revenez , dit Philis , heureufe indifference ;
Mes malheurs ne font dûs qu'à votre longue abſence,
L'Amour , ce Dieu cruel que fuivent les ennuis ,
A fait de nos beaux jours les plus ameres nuits ;
Et, vous aimable joug , Raifon , brifez mes chaî
nes ;
Les douceurs de l'Amour ne valent pas vos peines.
La Raifon , à ces mots ,fe préfente à fes yeux,
L'Amour l'avoit bannie autrefois de ces lieux.
Ce Dieu ne fut jamais ami de la Sageffe .
Philis , dít la Raiſon , quelle est votre foibleffe ?
Fuyez , fuyez l'Amour ; fes traits font dangereux ;
Les plaifirs font trompeurs , & l'Amour l'eft comine
eux .
Rappellez les vertus de votre ſage mere ;
Joignez
AOUST. 1743 . 1685
Joignez à fes leçons ſon exemple ſevere ;
De l'Amour , difoit- elle , évitez les dangers ;
Gardez-vous moins des loups , Philis , que des Bergers
.
Inutile leçon le coeur change avec l'âge.
Pouvez -vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage
Voyez-vous ce troupeau , qui preffant fon retour ,
Semble de tous fes maux accufer votre amour ?
Votre chien fuit le loup , & le loup en furie
Approche impunément de votre bergerie.
›
Yos agneaux n'aiment plus à bondir dans les
prés ,
Et le boeuf à regret fillonne vos guerets.
Dans le miroir des eaux regardez votre image ;
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage
L'Amour a fait pâlir vos roſes & vos lis ;
Philis , tout parle en vous de l'amour de Philis ;
Vous voyiez autrefois avec indifference
Les Bergers à vos chants accommoder leur danfe .
Fuyons , leur difiez -vous , tout amoureux fouci.
Mais les tems font changés , & votre coeur auffi .
Vous êtiez affès belle , en étant affés ſage ;
Pouvez- vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage ?
Meris fait vos plaiſirs , ou plûtôt vos malheurs ;
L'Amour n'aura jamais que de fauffes douceurs.
Dans le bois , Philomele à peine raffurée ,
A iij Vous
1686 MERCURE DE FRANCE.
Vous dit jufqu'à quel point l'Amour porta Terée
Elle n'aima jamais ; douce félicité !
Mais l'Amour abufa de fa crédulité.
Le plus difcret Amant n'eft jamais affés fage .
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage ?
Combien de fois Meris , redoxblant fes foupirs ,
Vous montra du danger dans fes moindres de
firs?
Rappellez -vous d'Echo le rigoureux fupplice ;
Autrefois elle aima le dangereux Narciffe.
Trop épris de lui-même , il eft fourd à fes pleurs
Echo , fidéle Echo , tu n'as que fes rigueurs !
Il n'eft point de beauté que le tems ne ravage : 1
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage >
Le tems flêtrit la roſe ; il flêtrit nos beaux jours ;
La beauté plaît un tems ; la vertu plaît toujours.
De vos charmes naiflans innocente victime ,
Ignorez -vous encor que l'Amour est un crime ?
Philis , méfiez - vous d'un Berger complaiſant ;
Un ennemi qui plaît eft toujours trop puiffant.
La beauté fans vertu n'eft qu'un frêle avantage :
Pouvez - vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage
Heureux le jeune coeur , qui fage en fes plaifirs ,
Dans la feule Raiſon a puiſé ſes défirs !
Il goûtera les fruits que produit l'innocence ;
Les plaifirs ne font faits que pour l'indifference.
Un
AOUST. 1743 . 1687
Qu'un coeur foit fans amour , il fera fans ennui
Il est toujours content , s'il eft content de lui.
Ma fille , vous pleurez . Meris eft un volage .
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage ?
Ennuyé de fervir une même beauté ,
Dans des liens nouveaux Meris eft arrêté .
La
pomme qu'il jetta contre la jeune Ifmene ,
Ne m'a que trop inftruit de fa nouvelle chaîne ;
C'étoit là le fignal de quelque rendez - vous ;
Laiffez-lui ce volage , il n'eft pas fait pour vous.
Mettez au rang des biens le defir d'être fage :
Pouvez-vous de l'Amour méconnoître l'ouvrage !
La Raifon par ces mots triomphant à fon tour ,
Emut Philis , & prit la place de l'Amour.
Par M. Roffignol.
A iiij
ORAISON
1688 MERCURE DE FRANCE.
-s és és és és és és -és és és ésis
ORAISON FUNEBRE
De S. E. M. le Cardinal de FLEURY ,
Miniftre d'Etat, &c. prononcée au Service
faitpar ordre du Roi , dans l'Eglife de Paris
le 25. May 1743. Par le R. P. DE NEUVILLE
, de la Compagnie de JESUS , imprimée
à Paris chés J. B. Coignard & les Frères
Guerin, ruë S. Jacques 1743. avec Approbation
& Privilege du Roi . vol . in- 4° .grand
papier , pages 78.
'Orateur a pris pour fon texte ces paro-
L'Orateurs Proverbes , Bears
homo qui invenit fapientiam ....... longitudo
dierum in dextera ejus , & infiniftrâ illius divitie
, gloria. Via ejus , via pulchra , &
omnesfemita illius pacifica , qu'il traduit ainfi :
» Heureux l'homme qui a trouvé la fagcffe !
>> ..... elle a la longueur des jours dans fa
droite , & dans fa gauche les richeffes &
» la gloire. Ses voies font belles ; tous les
»fentiers font pleins de paix.
» L'avenir s'étoit-il dévoilé aux yeux de
» Salomon ? ( dit le Pere de Neuville ) Dans
» ce portrait du Sage qu'il vient de tracer ,
» ne reconnoiffez - vous pas le Sage que nous
»regrettons , fes deffeins pacifiques , fes
» titres , fes dignités , fes honneurs , la
n longue
AOUST . 1743 . 1689
longue durée & la conftante profpérité de
»fes jours ?
Après avoir donné une idée générale des
caractéres de la véritable fageffe & des biens
folides qu'elle procure , le P. de Neuville
fait fentir combien les exemples en font
rares , & dit que la Providence en a fourni
unmodéle accompli dans la perfonne de fen
M. le Cardinal de Fleury.
Il divife enfuite fon Difcours en trois
parties.
Dans la premiere , il fait voir que M. le
Cardinal de Fleury étoit parvenu aux honneurs
par fon mérite & par fes fervices ;
dans la feconde partie , qu'il s'y eft foutenu
par fes talens , & dans la troifiéme , qu'il a
illuftré les honneurs par fes vertas.
En parlant de fon élévation , l'Orateur
demande fi ce fut un de ces hommes qu'une
heureuſe occafion , ane circonstance imprévûë
, que l'activité de l'ambition empreffée
& hardie à précipiter le moment de la fortune
, place tout à coup à la tête de l'Empire
, étonné de les voir franchir d'un feul
pas
l'immenfité de la diftance , & paroître au
bout de la carrière avant que de l'avoir parcourue
? .... Fut-il un de ces hommes dont
l'ambition profonde & diffimulée forme le
tiffu , nouë le fil de fes intrigues à l'ombre
& dans le filence , s'enveloppe dans un cer-
A v cle
1690 MERCURE DE FRANCÉ.
cle de projets obfcurs , de manoeuvres igno
rées ? ...... Regardera-t'on fon élévation
comme un effet du hafard , le hafard , mor
vuide , inventé par l'ignorance , pour cacher
fa honte , adopté par l'impiété , pour
fe défendre contre la raifon , employé par
la malignité timide & politique , pour cenfurer
fans péril le choix du Prince ?
Un mérite connu , eftimé , éprouvé , fut
le principe de l'élévation du Cardinal de
Fleury ; on n'y voit point de voiles ni de
nuages ; une dignité prépare à une autre
dignité; on voit fon élévation croître par
degrés , avertir la jaloufie , lui donner le
tems de fe précautionner , & lui ôter l'efpérance
de réuffir.
Le P. de Neuville fait en cet endroit un
portrait naturel des intrigues de la Cour , &
de la fageffe avec laquelle l'Abbé de Fleury
s'y conduifit , fagelle qui le fit élever à l'Epifcopat.
Il reprefente l'Evêque de Frejus , uniquement
occupé du foin de fon Diocèfe , oublier
dans les montagnes de la Provence fes
talens , qui deviennent inutiles. L'occasion
les demande ; il les retrouve.
Le Duc de Savoye , après avoir vû fa Capitale
, prête à tomber fous nos armes , devenir
par une révolution imprevûë le terme
fatal de nos triomphes sentraîné par le cours
de
AOUST. 1743 . 1691
de nos difgraces & de fes profpérités , pénetre
dans nos Provinces.. Comment l'Evêque
de Frejus fe comportera- t'il dans une
pofition fi délicate ? ne craignez ni les imprudences
d'une fermeté trop auftere , ni les
baffeffes d'une rampante & timide politique.
Guidé par la fageffe , il portera au Duc de
Savoye le tribut de vénération & de complaifance
que l'on doit à tous les Trônes ;
fidéle à fon Maître , il ne déshonorera point
le nom François par de lâches hommages
rendus à la fortune. Ses attentions refpectueufes
lui attirent les regards & la bonté du
Prince : une noble liberté lui concilie fon
eftime : il refufe de fe dire fujer , & il n'eſt
point traité en ennemi ; il défarme la Victoire
, fans fe foumettre au Vainqueur. .. .. 11
fignale fon zéle pour fon Roi , & fauve fon
Peuple des fureurs de la Guerre.
Louis XIV. avoit vû paffer comme l'on
bre fa nombreuſe poſtérité : ſeul dans fes Palais
immenfes , il femble ſe ſurvivre à luimême:
fes yeux,prêts à fe fermer,n'apperçoivent
à la place de tant de fleurs moiffonnées
dans leur Printems , qu'une fleur à peine
écloſe ..... Nouveau Joas , unique refte du
fang de David , arraché au débris de fon
augufte Maifon..... O fi du moins il pouvoit
, par fes leçons & par fes exemples , le
former dans le grand art de regner ; mais
A vj
le
1692 MERCURE DE FRANCE.
le tems coule ; il penfe donc à fe remplacer
auprès de fon fucceffeur. Sur qui tombera
le choix de ce Prince , vieilli dans la connoiffance
des hommes , de ce Prince dont le
choix des Boffuet & des Fenelon avoit prouvé
les lumiéres ? il appelle l'Evêque de Frejus
; il lui remet les deſtinées de fon fang &
de fon Royaume.
. Ici l'Orateur voudroit terminer fon Dif
cours. Le fuffrage du Pere , & les vertus du
Fils : Louis XIV. & Louis XV. Avoir mérisé
la confiance de ce Roi qui fit la gloire de la
France , avoir élevé à la France ce Roi qui
en fait le bonheur : entreprendre d'ajouter
à cet éloge , ne feroit- ce pas d'affoiblir ?
En effet , file plus heureux effort de l'ef
prit humain eft de former un autre efprit ,
que fera-ce d'élever un Prince né pour le
Trône ? Le P. de Neuville fait ici l'énumé
ration de toutes les grandes qualités que doit
avoir celui à qui eft confiée l'éducation d'un
Prince ; mais s'il eft fi difficile d'élever un
Prince né pour le Trône , qu'est - ce qu'élever
un Prince déja Roi ? Un enfant que le
Trône attend , n'ignore pas qu'il a un Maî
tre : un enfant qui occupe le Trône , ignore-
t'il qu'il eft Roi ? Je ne fçais quel cri du
coeur l'avertit de fa grandeur ; il la fent
avant que de la connoître. Trop prompte
élevation d'un Prince , à quels périls n'expofezAOUST.
1743 .
pour re-
Lez-vous pas fa vertu ? Quel efprit réunira
affés de lumières , de fageffe...
prendre fon Roi fans lui déplaire , pour le
contredire fans l'irriter , concilier la fermeté
avec la complaifance , l'autorité avec le
refpect , le ton de Maître avec la foumiffion
de Sujet ? A ce portrait chacun nomme l'Evêque
de Frejus , &c.
Dans la feconde partie , le P. de Neuville
fait voir que quelque difficile qu'il foit
d'arriver aux premiers Emplois avec l'eftime
& l'applaudiffement des Peuples , il eſt
encore plus difficile d'y foutenir , que d'y
aporter une grande réputation ; le Cardinal
de Fleury honoré de la confiance du Roi ,
juftifie le choix du Prince par les talens les
plus utiles & les plus néceffaires au bonheur
de l'Etat.
Notre Orateur admire dans le Cardinal
de Fleury fa pénétration & la jufteffe de fon
efprit , fa facilité à dicter les dépêches les
plus importantes , la fidélité de fa înémoire,
ce calme & cette tranquillité d'efprit que
rien ne pouvoit alterer . Vit-on jamais en lui ,
dit-il , cet air de recueillement trifte & farouche
, partage des hommes bornés , qui
font toujours à leurs penfées ; à quelque
inftant que vous aprochiez du Cardinal de
Fleury , fi vous ne cherchez que l'ami , le
citoyen ; le Ministre , l'homme d'Etat a
difparu .
De1694
MERCURE DE FRANCE.
De-là cette force , cette vigueur conftante
& inalterable de l'efprit & de la fanté.
De-là ce fecret impénétrable ; de- là cette
variété infinie de connoiffances,Commerce,
Finance , Guerre , Marine , Juftice , Religion
, Fonctions & prérogatives des Charges
, droits du Prince & du Peuple. Qui
fçut mieux que lui difcuter les differens
interêts des Princes : l'Ambaffadeur arrivé
à Versailles , doure en quelque façon , s'il
a quitté Rome , Vienne , Londres , Madrid
; s'il parle à un des Miniftres de for
Prince , ou au Miniftre du Roi auprès duquel
on l'envoye .
A tant de talens de l'efprit & du génie
ajoûtez les talens de raifon pure & éclairée,
de vraie & faine politique ; ce talent fans
lequel les autres ne font rien , celui de les
employer & de les rendre utiles à la Patrie.
Quel Miniftre fe montra jamais fi dévoué
à la félicité publique à peine le Roi a-t'il
déclaré qu'il veut gouverner lui - même fon
Royaume par les confeils de l'Evêque de
Frejus ; l'efprit de douceur & de modération
préfide à la deftinée de l'Empire & à
la fortune du Citoyen. Les anciennes dettes
de l'Etat font acquittées ; la confiance
renaît ; l'argent circule ; nulle variation
dans les monnoyes ; cet article fi délicat ,
l'objet de tant de remontrances , de voeux ,
de
AOUST. 1743 . 1695
.
de défirs , qu'on avoit prefque ceffé de fouhaiter
, parce qu'on n'ofoit l'efperer , dans
le cours de tant d'années , dans des conjonc
tures fi critiques, ne fouffre aucune atteinte.
...
Le Cardinal de Fleury n'enviera point
à des Miniftres avides de réputation , l'a
vantage de fe fignaler par des projets tumul
tueux d'imiter ces torrens , ces incendies
, qui laiffent le fouvenir de leur paffage
dans les débris & les ruines des Empires ;
on l'a dit ; heureufe la nation dont les faftes.
n'amuferont point par le récit des fanglantes
révolutions ! L'Orateur rapelle ici combien
le Cardinal de Fleury fe donna de
foins & de mouvemens pour entretenir
une longue paix ; il rappelle auffi cerre époque
glorieufe pour la France , le Congrès
de Soiffons , où le Cardinal de Fleury fembloit
préfider ,comme chef du Sénat de l'Europe.
Lorfque la Providence permet que la
paix , que l'Orateur appelle la fanté de l'Etat,
enfante tout-à-coup les fureurs de la guerre,
Louis ordonne , le Cardinal de Fleury
met en mouvement les forces du Royaume :
déja le Rhin & le Pô coulent fous nos loix ;
deux batailles gagnées en Italie; mais la moderation
du vainqueur arrête la victoire
dans fon cours le plus rapide ; l'Europe pacifiée
rentre dans le calme & le filence ; les
impôts
1696 MERCURE DE FRANCE,
impôts difparoiffent ; la France oublieroit
qu'elle fut obligée de combattre , fi la gloire
& le frait de fes victoires ne lui en rapelloient
le fouvenir.
La Maifon d'Autriche alloit périr avant
fon Chef , fi le Cardinal de Fleury n'eût
dicté un traité f fage , que l'un y trouve le
prix de fes travaux & de fes triomphes , &
l'autre trouve dans la paix des avantages
propres à le confoler des difgraces de la
guerre. Dieu jufte ! ( s'écrie l'Orateur Chrétien
) ... vous voyez cette Maifon échappée
au naufrage , enorgueillie de quelques fuccès
, entreprendre de nous forcer à regretter
notre générofité , à nous repentir de l'avoir
mise en état d'oublier nos bienfaits :
confondez , puniffez ... mon coeur forme
des voeux plus dignes d'être entendus dans
le fanctuaire .... Seigneur , commandez
aux vents & aux fots ; le calme fuccedera
à la tempête ; que les Puiffances ennemies
fe fouviennent que dans leurs malheurs
la France fut leur reffource . Non ,
qu'elles l'oublient. Le fouvenir des dif
graces paffées irrite l'orgueil , & la jalonhe
ne pardonne point les fervices , lorfqu'ils
montrent tant de force & de pouvoir.
Un Miniftre guidé par ces grandes vûës
d'une politique lage & vertueufe , n'auroitpas
démenti tous ces principes , s'il avoit il
négligé
AOUST. 1743 . 1697
négligé les interêts de la Religion ? &c. Le
P. de Neuville s'eft beaucoup étendu fur cet
article , que nous fommes obligés d'abreger.
Dans la troifiéme partie , l'Orateur réfute
cette injufte perfuafion où l'on eft , que la
vertu foutient mal les honneurs, les dignités.
Après avoir vû le génie , les talens , les
ſervices du Cardinal de Fleury , qu'on étudie
fes vertus ; fes moeurs , les manieres
changerent - elles avec fa fortune ? La faveur
, ordinairement fi fiére , fi méprifante ,
ne perdit-elle pas avec lui fes hauteurs , fon
fafte , fon empire ?
Doux , modefte , prévenant , d'un accès
facile , d'une humeur toujours égale , libre
d'interêt & de cupidité ; s'il fut des momens
où il fouhaita d'être riche , ce fut pour foulager
les malheureux. Le P. de Neuville
fait connoître chacune de ces vertus en particulier.
Le Cardinal de Fleury touche enfin à fes
derniers momens. Son Roi vient lui donner
les dernieres marques de fon eſtime ,
& les larmes qu'il répand font la gloire du
Monarque , & l'éloge du Miniftre.
Enfin le Pere de Neuville rend compte
des difpofitions édifiantes dans lesquelles
eft mort le Cardinal , & prend de là occafion
de faire plufieurs réflexions Chrétiennes
& folides , fur le peu de durée des grandeurs
1698 MERCURE DE FRANCE.
deurs humaines , qui paffent comme l'ombre.
PARAPHRASE
De ces deux Vers latins :
· Donec eris felix multos numerabis amicos ;
Tempora fifuerint nubila , folus eris.
DAinon , quand les Deftins propices
Nous font jouir en fûreté ,
Dans le port trompeur des délices ,
D'une douce félicité ,
Nous voyons le long du rivage
Grand nombre de parens , d'amis & de flateurs
S'empreffer de nous rendre hominage ,
Et fe difputer l'avantage
D'être nos zélés ferviteurs ;
Sans ceffe leur cohorte avide
Court où l'abondance réfide ,
Par des foubaits renouvellés
Marquer l'intérêt qui les guide ;
Empreffement , foins redoublés ;
Dans tout enfin leur coeur confpire
A marquer ce que leur infpire
La plus honteufe lâcheté ,
Plûtôt que la fincerité.
Mais auffi-tôt qu'un vent contraire
Nous
AOUST. 1743 . 1699
Nous prépare l'horreur d'un trait capricieux ,
Nous
voyons
ralentir les foins ambitieux
De cette troupe mercénaire.
Que vois-je ! un coup foudain nous confond dans
les flots !
De tant d'amis un refte charitable
Voudra-t'il nous prêter une main fecourable ,
Du moins compatir à nos maux ?
Hélas ! un gouffre épouvantable
Ne va laiffer bientôt à nos regards confus ,
Que mille regrets fuperflus ,
Que nous poufferons feuls dans un fort déplorable.
Brun Sie Catherine , Eleve Ecrivain du Roi.
M
.....
LETTRE DE M.
I
Ecrite à M. D. L. R. au fujet de GUI DE
LA TOUR , Evêque de Clermont , fous le
Regne de S. Louis.
L me femble , Monfieur , que vous n'avez
encore rien dit dans votre Journal
du Livre des Illuftres de l'Ordre de S. Dominique
, publié depuis quelques mois par
le R. P. Touro , Religieux du même Ordre.
J'attendois que vous en euffiez parlé , pour
vous propofer quelques doutes fur un de
ces Illuftres. C'eft Gui de la Tour , qui fut
Evêque de Clermont au XIII . fiécie.
Dom
1700 MERCURE DE FRANCE,
Dom Denis de Sainte Marthe , fous les
yeux duquel a été redigé le Catalogue des
Evêques de Clermont , contenu dans le fecond
Tome de l'Ouvrage intitulé , Gallia
Chriftiana , ne peut croire que S. Loüis ait
demandé l'Epifcopat pour ce Dominiquain.
Il nous apprend qu'il avoit été élû, fans même
qu'on eut demandé à la Cour la permiffion
de proceder à l'Election , & que la Rei
ne Blanche refufa , pour cette raifon , de
lui quitter la Regale ; cependant un peu
après,il conjecture que cette Reine employa
fes prieres , pour faire valider l'Election du
jeune Gui , lequel , felon l'opinion de ces
derniers tems , n'étoit âgé que de 17. à 18.
ans. Mais le fçavant Bénédictin ne peut
s'empêcher d'ajouter aufli -tôt ces paroles :
Certe mirum eft Beatum Philippum Berruyer
banc Electionem ratam habuiffe contra Canomes.
Il veut parler du faint Archevêque de
Bourges , qui étoit le Métropolitain de Clermont.
Je ne blâme point le P. Touron , de
n'avoir pas trop infifté fur les Obfervations
de Dom de Sainte Marthe ; il n'avoit pas
deffein de compofer une Hiftoire Critique.
Mais à prefent que l'Eloge de Gui de la
Tour eft entre les mains de tout le monde ,
il ne peut pas trouver mauvais que les Lecteurs
lui communiquent leurs remarques ,
& qu'ils le prient d'éclaircir leurs doutes .
11
AOUST, 1743 1701
Il m'en eft venu un touchant l'âge de 17. à
18. ans , que les Dominiquains donnent à
ce Gui de la Tour , élû Evêque de Clermont
en 1250. Eft-il bien certain qu'il n'eût
que cet age-là ? A- t'on des témoignages du
tems , qui le certifient , ou qui le faffent
néceffairement conclure ? S'il en eft parlé
dans les Regiftres du Tréfor des Chartes ,
où le nouveau Gallia Chriftiana dit qu'il eft
fait mention du Droit de Régale ; fi l'obſtacle
de l'âge eft levé par quelque Acte du
tems , ou au moins s'il eft certifié , que
quoiqu'on pût y avoir égard , on paffa par
deffus , pour lors je n'aurai rien à dire,
Mais n'a-t'il pas auffi pû arriver que les
Ecrivains Dominiquains des moyens ou des
`derniers tems , Auteurs d'Infcriptions affés
récentes , ayent pris un Gui de la Tour pour
un autre de même nom ?
Je trouve en effet que dès l'an 1240 , il
y avoit à Lyon un Archidiacre , nommé
Gui de la Tour, Il ne feroit pas étonnant que
cet Archidiacre eût embraffé l'Ordre de S.
Dominique entre l'an 1240. & 1250 , &
qu'il eût été élû Evêque , âgé de 35. à 40.
ans. On a trop d'exemples de Dignités & de
Chanoines de Cathédrales , faits Domini
quains du tems de S. Louis , pour douter
de la poffibilité. Si le P. Touron fouhaite
recourir à la preuve qu'il y eut à Lyon un
Archi1702
MERCURE DE FRANCE.
·
Archidiacre , nommé Gui de la Tour , il la
trouvera dans l'Hiftoire des Archevêques de
cette Métropole , donnée par Severt , à la
page 268. L'Acte commence ainfi : Nos Arnoudus
Decanus , Capitulum Lugduni & Guido
de Turre , Archidiaconus Lugdunenfis , de
cujus Patronatu eft Ecclefia Sancti R. Lugd.
& finit en ces termes : Datum anno Domini
1240. Menfe Decembri. Je ne crois pas qu'on
puiffe confondre cet Archidiacre avec un
Perſonnage du même nom , qui n'auroit eu ,
dix ans après que l'âge de 17. ans , puifqu'il
en réfulteroit que l'Eglife de Lyon auroit
eu un Archidiacre , qui n'étoit que dans la
huitième année de fon âge.
•
Ainfi il faut diftinguer ces deux Gui de
la Tour, & avouer qu'il a pu fe faire , que
le premier foit entré chés les Dominiquains,
( en quoi le dernier auroit fuivi fon exem
ple ) & que comme il étoit au fait du Gouvernement
d'un Diocèfe , par fon ancienne
qualité d'Archidiacre , il ait été choisi pour
remplir le Siége de Clermont. Ceci à au
moins plus d'apparence que n'en a l'Election
d'un jeune Dominiquain de 17. à 18. ans ,
pour gouverner en qualité d'Evêque ce vafte
Diocèfe' , laquelle Election n'eft atteſtée
clairement que par une Infcription , ajoûtéc
au-deffous d'un Tableau ou d'une Peinture
affés moderne , telle qu'on en trouve affés
fou
AOUST. 1743. 1701
fouvent dans les Eglifes ou dans les Cloîtres
des Dominiquains & d'autres Religieux .
A la bonne heure qu'on trouve fon nom
ans des Actes de l'an 1250. 1251. & fuivans
, concernant le Temporel de l'Evêché
de Clermont , cela peut s'accommoder avec
le jeune âge d'un Prélat , qui jouit de fon
temporel , fans être facré. Mais que peut dire
le P. Touron de la Tranflation folemnelle
, que le même Gui fit le 16 Novembre
1253. du corps de S. Ceran ; Evêque de Paris
, du Tombeau dans une Châfe en l'Eglife
de Sainte Geneviève de Paris , dont
on a l'Acte avec fon fceau ? J'ai de la peine
à croire que cette Abbaye de Chanoines
Réguliers ait employé pour une telle Cérémonie
un Evêque qui n'auroit eu que 20 .
& qui n'auroit pas encore été facré ;
car je regarde comme une Fable ce que l'on
dit , fçavoir que Pierre de Colle medio , Archevêque
de Rouen , l'avoit facré , puifque
dès l'an 1245. il y avoit à Rouen un autre
Archevêque . Le P. Touron ne trouvera
point dans le Breviaire de Paris le fait de la
Tranflation que je lui rapporte , parce qu'on
ne l'a découvert que depuis peu , mais il en
aura l'éclairciffement , quand il voudra , à
Sainte Geneviève , & on efpere que les fufures
Editions du Bréviaire de Paris n'omettront
point ce qui regarde le culte de ce faint
Evêque de Paris.
ans ,
J'ai
1704 MERCURE DE FRANCE;
J'ai eu la curiofité de confulter le troifiéme
, le quatrième , le cinquiéme & le fixié
me Tomes de Gallia Chriftiana , croyant
y trouver dans les Additions , dont les Auteurs
enrichiffent ces Volumes , par forme
de Supplément aux Tomes précédens , quelque
chofe qui favorisât mon fentiment , outre
ce que Dom Denis de Sainte Marthe a
écrit , pour porter fes Lecteurs à fufpendre
leur jugement , mais mes recherches ont été
inutiles , quant à ce point. J'ai feulement été
convaincu par mes yeux que le P. Touron
s'en eft rapporté, fur un autre article qui regarde
le même Evêque , à ce que Dom de
Sainte Marthe avoit écrit d'abord dans le
corps de l'Ouvrage du fecond Tome ,
Col. 279. Conftat hunc Antiftitem fuiffe in
Ecclefia Cathedrali fepultum , S'il eut confulté
les Préliminaires du quatriéme Tome ,
Col. 26 , il y auroit lû que depuis l'impreffion
du fecond Volume , on avoit averti
Dom de Sainte Marthe ou fes Collegues
qu'il y avoit dans le Sanctuaire de l'Eglife
de Saint Martin du Bourg d'Ouzoir , Dio .
cèſe d'Auxerre , une Tombe , fur laquelle ,
avant que le tems eut un peu effacé les caractéres
, on lifoit : Hic jacet D. D. Guido
de Turre , quondam Epifcopus Claromont , &
qu'on y appercevoit encore actuellement
des traits de cette Infcription , avec la figure
d'un
AOUST : 1743 . 1705
d'un Evêque. On doit en conclure que Gui
fut inhumé en ce Lieu , & que fi fon corps
eft aujourd'hui dans la Cathédrale de Clermont
, c'eft qu'il y a été porté depuis. Les
Auteurs de Gallia Chriftiana ont trouvé ce
Monument d'autant plus propre à
prouver
que Gui de la Tour mourut à Ouzoir & y
fut inhumé , que cette circonftance s'accorde
très-bien avec le Teftament de ce Prélat, qui
eft datté du même lieu d'Ouzoir au Diocèfe
d'Auxerre, le jeudi , lendemain des Cendres
1285. Nous ignorons fi Gui avoit quelques
parens demeurans dans ce Bourg, On fçait
feulement qu'il eft fur le bord de la grande
route de l'Auvergne à Paris. Il y a toute
apparence que la maladie obligea l'Evêque
de Clermont , qui alloir à Paris , ou qui en
revenoit , à s'alliter en ce Lieu , & à y écrire
fes derniéres difpofitions . Il le fit le premier
jour de Mars , qui étoit le Jeudi , lendemain
des Cendres, & mourut le 4º . Dimanche
du Carême , qui étoit le 24 du même
mois. C'eſt au moins le jour qu'on célé
broit autrefois fon Anniverfaire dans l'Eglife
de Clermont, Il m'eft venu de ce Payslà
l'Extrait d'un Registre ou Livre in fº ,
qui eft dans la Chambre de la Pointerolle de
la Cathédrale , dans lequel font écrits les
Anniverfaires & Livraifons , fondés dans
cette Eglife , On y lit au 23 Mars : Anniverfaire
B
1706 MERCURE DE FRANCE.
niverfaire du Reverend Pere en Dieu Monfeigneur
Meffire Guy de la Tour Evefque. Par ce
ij livres, Et au 1er Juillet : Eodem die fit
memoria Domini Guidonis de la Tour , pro .
quo fit libratio panis & vini per Receptorem
Horarum. Je croirois que cette feconde commémoration
feroit celle du fecond enterrement
de cet Evêque , c'eft-à-dire , quand fes
os rapportés d'Ouſoir, furent inhumés dans
fa Cathédrale. Je fuis & c .
A Paris , ce 20 Juillet 1743 .
EPITRE
De M. d'Arnaud à Mademoifelle de B *
T
U veux donc jeune , belle & fçavante Uranie ,
Aux leçons de Reftaut foumettre ton efprit :
Quoi , n'eft- ce point affés que la Philofophie
De fon faux éclat l'ait féduit ?
Faut-il encor que ton génie ,
Ce géant qui parcourt l'univers à fon gré ,
Efclave de la fimétrie ,
Dans un cercle de mots languiffant , refferré ,
Ne foit plus qu'un enfant timide ,
Corps de l'efprit d'autrui fans ceffe pénétré ,
Qui de la main des yeux s'attachant à fon guide ;
Ne marche que d'un pas tremblant & meſure ?
Eaut
AOUST. 1743 . 1757
Faut - il , dis-je , que cette prude ,
Cette monotone Beauté ,
L'ennuyeufe grammaire , au maintien concerté
Penfant , parlant , faifant tout par étude ,
Ayant un grand défaut , la, régularité ,
Afervifle aux langueurs de l'uniformité ,
Aujoug des régles , joug fans doute le plus rude ¿
Ce défordre expreffif , cette vivacité ,
Qui naiffant de la liberté ,
Languit, meurt dans la fervitude ,
Et ne fe reproduit que par la nouveauté ?
Le moyen d'être aimable avec l'exactitude
Le grand art, l'art de plaire eft la variété ,
Et cet art eft à toi res yeux l'ont inventé ;
Crois-moi , de tes difcours bannis toute im pofture
Dois tu craindre la vérité ?
N'es -tu pas de ces traits l'image la plus pure
Avec la négligence , on aime la Nature .
L'heureux défaut c'eft la fimplicité ;
Les graces n'ont jamais recherché la parure ;
Emprunte leurs atours , elles ont la beauté ;
Ne point voiler la nudité ,
C'eſt expoſer toujours la même belle ;
Le fentiment fait place à la réfléxion ;
La laiffer deviner par un adroit foupçou ,
C'est la multiplier en la rendant nouvelle ,
Et réveiller le goût , plus sûr que la raiſon ;
Oma chere Uranie , imite ce modelle ;
вії.
3
Cache
1708 MERCURE DE FRANCE;
Cache à l'oeil curieux les fublimes refforts
Qui font de ton efprit mouvoir le vaſte corps.
Dans tes difcours fans fard que ton ame étincelle
Penfer , fentir , voilà l'étude digne d'elle ,
Ou fi tu veux apprendre un jargon enchanteur ,
Qui mieux que le François touche fon auditeur ?
Des froids Grammairiens laiſſe là les harangues ;
Dis feulement un j'aime avec ardeur ;
Sçache parler le langage du coeur
Et tu fçauras toutes les Langues,
2
DISSERTATION
Sur le Système des Petits Tourbillons ;
Dmontrer la fauffeté de leurs principes,
Etruire les opinions des autres , déc'eft
le fruit de quelques années d'étude ;
mais trouver un Syftême qui faffe le monde
du cahos , qui s'accorde avec toutes les
expériences ; que l'Architecte lui- même
fous le canon du rempart repouffe tous les
traits des affaillans , voilà le chef d'oeuvre
où l'efprit humain ne pourra jamais atteindre.
La difficulté qu'il y a de réuffir dans un fi
noble deffein , excita Deſcartes & Newton
à y travailler ; ces grands hommes l'ont fait
avec
AOUST. 1743 . 1709
avec un fuccès prefque égal ; le commun
de nos Philofophes prétend néanmoins
qu'aucun n'eft encore venu à bout de fon
entrepriſe. M. de Moliéres cependant mérite
la loüange d'avoir fait quelques efforts
pour répandre le goût de la Phyfique . Il
a fait voir les loix du Méchaniſme parmi les
Phyficiens. Mais fon Syftême , tout ingénieux
qu'il eft , ne laiffe pas de fouffrir bien
des difficultés...
Premierement , les deux principes de
Mouvement , fur lefquels roule principale
ment le Systême , font abfolument faux. Le
premier , eft qu'un mobile pouffé par deux
forces,dont les directions forment entr'elles
un angle , doit parcourir uniformément
la diagonale d'un parallelograme , dont les
côtés feront en raifon des forces , de forte
cependant que ce mobile ne mettra pas plus
de tems à décrire la diagonale , ( qui fera
par exemple l'hypotenufe d'un ifocele ) qu'il
en eût mis à parcourir un des côtés.
La feconde régle , eft que fi un globe mû
d'un mouvement uniforme , tomboit obliquement
fur un plan inébranlable , & que
la force, avant la percuffion , fût repréſentée
par le finus total , la force avec laquelle il
frapperoit le plan , feroit exprimée par le
finus de l'angle de l'incidence , celle qu'il
perdroit par le finus verfe , & celle qu'il
B iij
confer1710
MERCURE DE FRANCE.
conferveroit après la percuffion par le finus
de l'angle du complément. Or il eft facile
de démontrer la fauffeté de l'un & de l'autre
principe.
1 °. Suppofons que le globe a foit pouffé
par des forces égales diamétralement oppofées
qu'arrivera - t'il? le mobile s'arrê
tera. Pourquoi ? parce que la force qui eft
du côté de l'Orient ; par exemple , s'exerce
toute entiere à fupporter les efforts de la
force qui eft du côté de l'Occident ; il en eſt
de même de l'autre vice versâ.
2º . Ce principe pofé , fi l'angle qui eft
formé par les deux directions , eft extrémement
aigu , l'action des deux forces fe
peri
dra toute dans leur vifus ; il ne reſtera
qu'une très - petite partie qui agira fur le
mobile. Par conféquent , fi l'angle formé
par les côtés du parallelograme eft infiniment
petit , le globe a ne doit parcourir
qu'une partie infiniment petite dans la diagonale.
Si au contraire l'angle formé par les directions
, a 18. degrés , moins quelques
fecondes , alors les forces ne feront prefque
point oppofées ; elles agiront donc toutes
deux contre le mobile , qui , n'ayant point
de force par lui-même pour réfifter à cette
double action , décrira une ligne plus granque
la diagonale ; en effet il n'y a que
de
quel
AOUST. 1743 . 1711
quelques fecondes qui empêchent que les
deux forces ne s'exercent toutes fur le mobile.
Or fi elles agiffoient toutes deux contre
le globe , il parcourreroit un espace plus
grand que la diagonale , puifqu'il décrifoit
les deux côtés d'un parallelograme ,
qui , felon tous les Géométres , font plus
grands que la diagonale. D'où il fuit , que
des mobiles pouffes par des forces, dont les
directions forment entr'elles des angles ,
parcourreront des efpaces qui feront en raifon
de l'oppofition de ces mêmes forces.
Dans la feconde régle , & dans tout le
Systême , on fuppofe une décompofition
de forces , dont nous parlerons ci - après :
mais ce qui frappe d'abord , c'eſt que le
globe , qui tombe obliquement fur un plan
inébranlable , ne perde de fa force felon
le finus verfe , & que celle qu'il retient
après fa percuffion , foit exprimée par le finus
de l'angle du complément.
que
Il eft vrai que fi le globe, en tombant fur
le plan immobile , eût fuivi la ligne perpendiculaire
, il auroit dû perdre tout fon
mouvement. Si le même globe eût décrit
une ligne parallele au plan , il l'eût entiétément
confervé ; donc felon les Partifans du
Syftême , la ligne oblique étant compofée
de la parallele & de la perpendiculaire , il
Biiiji doit
1
1
1712 MERCURE DE FRANCE.
doit perdre une partie du mouvement , &
.conferver l'autre.
fi
Le finus total n'étant qu'un rayon , eft
égal au finus de l'incidence , & au finus
verfe , qui joints enfemble , donnent un
autre rayon du même cercle ; par conféquent,
pour connoître la force que le mobile garde
après la percuffion , on retranche d'abord
du finus total une ligne égale au finus dur
complément , felon lequel le globe ne touche
point le plan inébranlable , le reste du
finus total fera égal au finus verſe. Le mo
bile conferve de fon mouvement , felon le
finus du complément , puifque felon ce finus
, il ne touche pas le plan ; il faut donc
qu'il en perde , felon le finus verfe ; car ce
finus , avec celui du complément , eft égal
au finus total.
Mais raifonnons felon les principes du
Systême ; & pour fixer l'imagination , il
faudra fuppofer que la ligne que fuivra
le globe en tombant fur le plan , fera la diagonale
d'un quarré parfait. Cette ligne tient
le milieu entre la perpendiculaire & l'hori-
-zontale ; le globe doit conferver le mouvement
repréfenté par la ligne horizontale.
puifqu'en fuivant cette direction , il décrit
une ligne parallele au plan, fans le toucher.
Mais auffi il perd toute fa force , exprimée
par la ligne perpendiculaire. En effet , dans
le
AOUST. 1743 . 1713
le fyfteme , un corps qui tomberoit perpendiculairement
fur un autre infiniment
plus grand , lui communiqueroit tout fon
mouvement. Or le plan immobile eft le
corps en queftion , puiſqu'il réfifte autant à
l'action du globe , que le corps, infiniment
plus grand. Le mobile doit donc perdre de
fon mouvement , comme la moitié du finus
total , & en conferver , comme l'autre . Or
la moitié du finus total eft plus grande que
le finus verfe , & l'autre moitié plus petite
que le finus du complément. Donc , dans le
cas particulier , le globe ne doit pas perdre
de fon mouvement felon le finus verfe , &
en conferver felon le finus du complément.
En fecond lieu , M. de Moliéres demande,
pour former fon monde , que Dieu air créé
une matiere homogéne , qu'il ait divifée en
grands tourbillons , qui renfermeront d'autres
tourbillons. Ceux- ci en contiendront
d'autres ; en un mot , il demande autant de
tourbillons que l'on en aura befoin pour
expliquer les Phénomenes.
Quelle idée préfente à l'efprit cette multitude
de tourbillons , renfermés les uns
dans les autres ? Plufieurs Philofophes ont
cru la matiere divifible à l'infini ; mais perfonne,
avant M. de Moliéres , ne l'a affirmé
divifée. Les Tourbillons du troifiéme Elément
, comme on le verra dans la fuite , ont
By pour
1714 MERCURE DE FRANCE.
pour points ceux du fecond Elément , qui
ont pour leurs côtés infiniment petits ceux
du premier Elément : or un cercle a une
infinité de ces côtés infiniment.petits . Voilà
donc une partie de matiére qui eft divifée
actu à l'infini.
Il me femble voir un Général qui auroit
80 , 000 , 000 , 000 , 0000 , 000 , de Soldats
à ranger en bataille ; chaque Soldat en
contiendroit environ 20 , 000 , 000 , 000
chacun de ces petits hommes formés , felon
l'idée de Guliver , en renfermeroit autant
d'autres,infiniment plus petits que lui . Ceuxci
en
contiendroient encore de plus petits ,
& ainfi du refte . Je crois qu'avec cette multitude
infinie d'hommes, de Pygmées , d'Homoncules
, le Général feroit fort embarraffé,
Voilà ce qui doit arriver àl'Auteur des Tourbillons
; l'application fe préfente d'elle- même
. Mais avant que de les mettre en campagne
, examinons leur force centrifuge &
centrale .
Si l'on croit l'Auteur du Systême , un
mobile qui décrira une circonference d'un
mouvement uniforme , doit frapper cette
circonference en tous fes points , felon la
direction d'une ligne perpendiculaire à la
tangente. Pour démontrer cette Propofi
tion , il faut fuppofer deux lignes qui for
ment un angle oblique. Ces deux lignes.
peuvent
AOUST. 1743 . 1715
peuvent être regardées comme deux côtés
infiniment petits du poligone que le mobile
décrit. Si l'on produit un de ces côtés infiniment
petits , pour avoir la tangente, le
globe qui paffera de l'autre côté infiniment
petit,à celui-là, en fuivant une ligne oblique,
doit frapper la circonférence felon la direc
tion d'une ligne perpendiculaire tirée depuis
l'extrémité fupérieure de la ligne oblique,
jufqu'au côté infiniment petit prolongé.
La raifon eft que ce globe doit frapper la
circonférence , comme s'il tomboit fur un
plan . Or s'il tomboit fur un plan , en fuivant
une ligne oblique , il frapperoit le plan fe
lon la direction d'une ligne perpendiculaire.
La ligne oblique tenant le milieu entre
l'horizontale & la perpendiculaire , elle
peut être fans contredit décomposée en
deux lignes differentes ; mais que la force
repréfentée par cette ligne , fe décompoſe
en deux , qui , priſes enfemble , foient plus
grandes queleur fomme : voilà un paradoxe,
que l'on n'établira jamais. Suppofons que
cette ligne oblique foit la diagonale d'un
quarré ; un des côtés perpendiculaires du
quarré , doit repréfenter la direction de la
ligne perpendiculaire à la tangente ; mais
comme la ligne oblique eft moyenne entre
la perpendiculaire & l'horizontale , il faut
donc décompoſer le refte de la ligne obli-
Bvj que
1716 MERCURE DE FRANCE.
que en une autre ligne horizontalê du quar
ré. Voilà donc une force repréfentée par
l'hipoténufe d'un triangle ifocèle décompo
fée en deux côtés du même triangle. L'hipoténufe
, qui , felon tous les Géométres , eft
incommenfurable aux deux côtés du triangle
, leur doit donc être égale. L'axiome
d'Archimede , qui dit , que deux côtés d'un
triangle font plus grands qu'un troifiéme ,
feroit donc abfolument faux , quoique la
vérité en foit démontrée dans la Géométrie
Elémentaire.
Un autre principe qui a de grandes utili
tés dans le Systême , c'eft que les cercles
étant égaux , les forces centrifuges font
comme les quarrés des viteffes , parce que
le globe , qui a le double de viteffe , décrit
deux fois fon cercle , lorfque l'autre ne le
parcourt qu'une fois , & chaque coup doit
être double de l'autre , puifque la vitelle
eft double. Il a donc de la force centrifuge
, comme 4 , qui eft le quarré de 2 , ou
de la viteffe exprimée par ce nombre.
Si l'on calcule exactement toutes ces forces
, on y verra quelque petite difference.
Le mobile qui a de la viteffe , comme 2 ,
frappe deux fois chaque point de fa circonference
, lorfque l'autre , qui n'a de la viteffe
que comme un , ne frappe qu'une fois
les côtés infiniment petits de fon cercle,
Chaque
AOUST. 1743 . 1717
Chaque coup eft double ; il a donc dans
fes chocs de la force comme 4. Il parcourt
deux fois fon cercle , égal au cercle de l'autre
; voilà de la force comme 2 , qui , ajoûté
à 4 , donne 6 ; qui , de l'aveu de tout le
monde , n'eft point le quarré de la viteffe
exprimée par 2. D'où il fuit que , dans le Syf
tême , les forces centrifuges de deux globes
qui fe meuvent dans les circonferences de
deux cercles differens , ne font pas entr'elles
comme les quarrés des viteffes divifés par
leurs rayons , puifque ce n'eft qu'un corollaire
de la précédente . Paffons à la force
centrale .
Dans un tourbillon fphérique , fi l'on
confidere un globule qui tourne autour du
centre de la fphére , ce globule , felon l'Auteur
du Systême , frappera le globule fupérieur
avec une certaine force, que l'on nomme
force centrale ; & dont la direction fera
le rayon de la fphére , qui paffera par le centre
de ce globule. Il faut remarquer , que la
force centrale n'eft pas réellement diftinguée
de la force centrifuge , dont elle n'eſt
qu'une décompofition , qui , dans le Syſtême
, fe doit faire felon les loix du mouvement
oblique. Mais qu'il me foit permis
de remarquer que n'y ayant point d'oblicité
, il ne doit pas non plus y avoir de force
centrale.
En
1716 MERCURE DE FRANCE.
que en une autre ligne horizontale du quar
ré. Voilà donc une force repréfentée par
l'hipoténufe d'un triangle ifocèle décompo
fée en deux côtés du même triangle. L'hipoténufe
, qui , felon tous les Géométres , eft
incommenfurable aux deux côtés du triangle
, leur doit donc être égale. L'axiome
d'Archimede , qui dit , que deux côtés d'un
triangle font plus grands qu'un troifiéme ,
feroit donc abfolument faux , quoique la
vérité en foit démontrée dans la Géométrie
Elémentaire.
Un autre principe qui a de grandes utili
tés dans le Système , c'eft que les cercles
étant égaux , les forces centrifuges font
comme les quarrés des viteffes , parce que
le globe , qui a le double de viteffe , décrir
deux fois fon cercle , lorfque l'autre ne
parcourt qu'une fois , & chaque coup d
être double de l'autre , puife
eft double. Il a donc de 1
fuge , comme 4 , qui eft le
de la viteffe exn
ces
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1719
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coup eft double ; il a donc dans cercle
fes chocs dela force comme 4. Ilparcourt
deux fois fon cercle , égal au cercle de l'alu glo
tre ; voilà de la force comme 2 , qui , ac
té à 4 , donne 6; qui , de l'aveu de toute
monde ,n'eft point le quarré de la vite
exprimée par 2. D'où il fuit que dans le que,dans leyf
tême , les forces centrifuges
de deuxgoes
qui fe meuvent dans les circonferences
de
deux cercles differens , ne fontpasserelles
comme les quarrés des vinelles divifés par
leurs rayons , puifque ce n'est qu'un co
rollaire de la précédente
. Pafons à lafor ce centrale .
e centri
ces prin
droient
'y auroit
preuve :
une line
vient
ge dans les
La
grave.
e par
conféquent,
Dans un tourbillon fphérique , filon
it cette ligne , confidere un globale qui tourneautourde tendance
vers
centre de lafphere, ce globule ,felon l'Au
teur du Syfteme, frappera le globalefape tendit au cen
rieur avec unecertaine force, queloans fa chute fuime
force centrale, & dont
Jent
lafphere,qo
bale.Ilfar
n'eft
KCCCCDCE
pedition
'axe de la Terre.
t tomber perpens
tous les cercles
La force centrifu de 9
fe des circonfp
....
tourne auprèxe qe ǝ
nité de fois la 8
fe meut fous l'Exe de 9
urellement 4 p....
force ce дәрәжеде ә
H18 18
e de sb sxe de 9
+ 0.04-
18 MERCURE DE FRANCE.
En effet le globule , qui tournera dans un
des petits cercles auprès des poles , frappera
la circonference , en fuivant une ligne , dont
la direction fera perpendiculaire à la tangente.
On ne peut donc pas dire qu'il frappe
le globule fupérieur felon une direction
oblique. Pour cela il faudroit que le rayon
qui paffe par le centre du globule , & qui
aboutit au centre du cercle qu'il décrit , für
oblique au point de l'autre globule fur lequel
il tombe : or il n'y eft point oblique ,
puifqu'il ne fait avec le point ni angle ob
us , ni angle aigu ; car ces angles ne fe forment
que par la differente pofition d'une ligne
fur une autre , & non pas fur un point ,
qui n'eft que la continuation du rayon du
petit cercle. D'ailleurs je ne comprens pas
comment , dans les principes du Syftême ,
on peut former un Tourbillon fphérique.
Je viens de démontrer qu'il y a égale réfifrance
auprès des poles & de l'Equateur , puifque
j'ai fait voir qu'il n'eft point de force
centrale. On nous a repréfenté jufqu'ici
une matiére qui tourne avec égale viteffe autour
d'un axe. Cela pofé , j'apperçois un
tourbillon cilindrique ; mais le fphérique
me paroît une chimére.
On nous dir que dans un tourbillon
fphérique , la force centrale d'un globule
qui tourne auprès des poles , eft à la force
centri
AOUST. 1743 . 1719
centrifuge comme le rayon du petit cercle
qu'il décrit , eft au rayon de la fphére. On
ajoûte encore que la force centrale du glo
bule qui tourne auprès des poles , eft égale
à celle de celui qui parcourt le cercle de l'Equateur,
& que ce dernier a une force centri
fuge égaleà fa force centrale . De tous ces prin
cipesileft facile de démontrer qu'il n'y auroit
que fousl'Equateur que les graves tendroient
au centre de la Terre. En voici la preuve :
1° . La gravité , felon le Syftême , ne vient
que de l'excès de force centrifuge dans les
parties qui environnent le corps grave. La
force centrifuge eft repréfentée par une li
gne perpendiculaire à l'axe. Par conféquent,
le grave , qui dans fa chûte fuit cette ligne ,
tombe fur l'axe , fans aucune tendance vers
le centre .
2º. Pour que le corps grave tendît au cen
tre de la Terre , il devroit dans fa chûre fuivre
une ligne oblique à l'axe de la Terre.
Or, dans le Systême, il doit tomber perpendiculairement
à l'axe , dans tous les cercles ,
excepté fous l'Equateur . La force centrifuge
croiffant en raifon inverfe des circonféren
ces , celle du globe qui tourne auprès des
poles , furpaffe une infinité de fois la force
centrifuge de celui qui fe meut fous l'Equa
teur. Il doit donc naturellement fuivre plû
tôt la direction de la force centrifuge , que
celle
1720 MERCURE DE FRANCE
celle de la force centrale , puifqu'un mo
bile fuit toujours la plus forte impreffion.
Par conséquent il doit tomber perpendiculairement
à l'axe de la Terre.
3º. Accordons à M. de Moliéres , que le
corps grave doive obéir à la force centrale
centripete dans fa chûte; le globe de la Terre
a environ 3000.lieues de diamètre, par conféquent
fon rayon eft de 1500. lieuës . Suppofons
un grave qui tourne dans un cercle
éloigné du pole de 100. lieuës , la direction
de la force centripete s'exprimera par
une ligne parallele au rayon de la fphére terreftre
, & qui doit aboutir à un plan , qui ,
dans le Syftême tient lieu de tangente à la
couche fphérique. Cette ligne parallele ,qui
repréfente la force centrale , fe terminera au
centre du petit cercle éloigné du pole de
100. lieuës , avec le rayon duquel elle fera
un angle aigu. Si donc le mobile obéit à la
force centripete , fa chûte & fon cours fe
termineront au lieu où finit la ligne qui repréfente
la direction de la force centrale ,
c'eft-à-dire , au centre du petit cercle éloigné
du pole de 100. lieuës . Il faudroit donc
que le mobile roulât environ 1400. lieuës
pour arriver au centre de la Terre. Il eſt
évident que ce feroit plutôt un jeu qu'une
explication de Phyfique.
M. de Moliéres qui s'eft fait une loi d'admettre
AOUST. 1743 . 1728
mettre les Obfervations de Newton , & de
les expliquer par une fimple caufe , que l'on
nomme impulfion , a démontré , comme l'illuftre
Anglois l'avoit prouvé par fes expériences
, que la force centrale croiffoit en
raifon inverfe du quarré des diftances , &
que dans un tourbillon fphérique , où les
forces font en équilibre , les viteffes étoient
entre elles , en raifon inverfe des racines
quarrées des rayons.
Pour que la propofition fût vraie , il faudroit
que la viteffe de la couche inférieure
fût à celle de la couche fupérieure , comme
4 eft à 2 , fuppofé que les diftances du centre
fuffent 4 & 16. Or cela implique , felon
les loix du mouvement répandues dans le
fyftême. On nous fait d'abord entendre que
fi ur globe parfaitement dur a plus de vitelle
qu'un autre qu'il rencontre , & qui fe meut
felon la même ligne , il doit lui communiquer
de fon excès de viteffe , en raison des
maffes , de forte qu'enfuite , ne faifant qu'un
même corps , ils fuivent une même détermination
or la couche inférieure , eft à la
couche fupérieure ,comme le globe parfaitement
dur , qui en rencontre un autre qui a
moins de viteffe . Par conféquent , elle doit
lui en communiquer en raifon des malfes.
Ce raifonnement , tout fimple qu'il eft , dérange
bien les idées du fyftême , & démon1722
MERCURE DE FRANCE,
tre affés la contradiction des principes qu'il
eft impoffible d'accorder avec la loi aftronomique
de Kepler.
Si un tourbillon a plus de force centrale
qu'un autre , il doit lui arracher des couches
, jufqu'à ce qu'ils foient en équilibre ;
ce qui doit bientôt arriver , felon M. de
Moliéres. Si cela eft , dans quel tourbillon
doit tourner la matiére enlevée ? fi c'eſt dans
le tourbillon qui l'a enlevé , qui remplira
fa place dans celui dont elle a été enlevée ?
Elle ne peut fe mouvoir dans le tourbillon
dont elle a été enlevée , puifqu'elle n'y eſt
-plus. Peut-être , dira-t'on , que la matiére
qui eft entre les efpaces du tourbillon , fuccéde
à la couche enlevée . Mais cette matiére
n'a par elle aucun mouvement ; il faudroit
donc la faire tourner autour d'un centre particulier
& d'un centre commun. Car il eft à
remarquer que dans le fyftême , chaque
point eft devenu un petit tourbillon , qui a
un mouvement autour de fon centre , & un
autre autour du centre commun , parce que
le grand tourbillon feroit d'abord diffipé.
Semblable à plufieurs oeufs que l'on remuë
dans un creufet , un inftant après on ne voit
qu'un corps liquide fans figure d'oeuf.
Quoique l'on ait ôté des couches fphériques
aux tourbillons , ils confervent toujours
le même nom . Ce qui revient au même
2
AOUST. 1743. 1723
me, que fi Defcartes , après avoir écarné
fes cubes par leurs frottemens , les comprenoit
encore fous le nom de parties cubiques .
Il s'agit maintenant de fçavoir fi l'on peut
faire marcher ces tourbillons , & s'ils peuvent
nous former une Planette .
On nous fait entendre d'abord que l'équilibre
troublé entre les tourbillons , peut
fe reftituer peu à peu , de forte qu'il paffe
continuellement de la matiere d'un tourbillon
à l'autre. Comment accorder cette
propofition avec un principe du fyfteme
qui dit que , toute matiere qui n'eft point
grave , ne réfifte point à la divifion de fes
parties? De-là vient que les Planettes , ces
corps fi immenfes , qui ont une viteffe qui
paffe les bornes de notre imagination , ne
trouvent aucune réfiftance dans l'Ether : d'où
il fuit que la matiére Ethérée eft toujours en
équilibre.
Or les tourbillons , avant que l'équilibre
fût troublé , n'étoient autre chofe que la
matiére Ethérée ; n'étant chargés d'aucuns
globules durs , ils n'avoient ni denfité , ni
gravité , mais femblables à l'Ether , ils confervoient
une égale force centrifuge.
Les particules qui paffent d'un tourbillon
à l'autre , peuvent fe rencontrer avec des
déterminations égales , & diamétralement
oppofées alors elles perdent de leur mou
vement
1724 MERCURE DE FRANCE:
vement de corrotation ; elles font pouffées
au centre du tourbillon , ayant moins de
force centrifuge. Preffées de tout côté , elles
prennent une figure fphérique , & forment
des globules durs aux centres des tourbillons
de different ordre.
Pourquoi ces particules defcendroientelles
aux centres des tourbillons ? il eſt vrai
qu'après avoir perdu leur mouvement autour
de leur propre centre , elles ne font
plus en équilibre avec la matiére qui les environne
; d'où il faut conclurre que cette
matiére doit les enlever , femblable à l'air
qui mis en mouvement , balaye les vapeurs,
& les exhalaifons qu'il rencontre. D'ailleurs,
on nous a dir qu'un tourbillon plus fort
qu'un autre , doit lui enlever des couches
fphériques ; pourquoi donc la même chofe
n'arriveroit-elle pas à l'égard d'une matiére
qui aura perdu fon mouvement de corrotation
?
Suppofé que ces parties defcendent au
centre , je ne je ne vois pas quelle peut être la
caufe qui en fera des globules durs . Si c'eft
l'excès de force centrifuge dans les parties
qui l'environnent , comme M. de Moliéres
le prétend , la matiére contenue entre les
efpaces des tourbillons , doit avoir de la
gravité , puifqu'elle eft environnée de toutbillons
qui ont un mouvement de corrota
tion
AOUST. 1749 .
1725
tion , une force centrale , une force centrifuge
dont elle eft dépourvûë . Elle doit donc
tomber dans le centre de quelque tourbillon
, car effentiellement tout corps grave
tend à un centre. Qui eft- ce qui remplacera
cette matiére? ce ne peut pas être des tourbillons
, autrement on multiplieroit les intervalles
qu'ils laiffent entre eux . Si c'eft de
la matiére , elle fera pareillement un corps
grave ; il faut donc admettre des vacuoles
entre les tourbillons , ce qui ne s'accommode
pas avec le fyftême du plein.
Nous avons vû des tourbillons de differens
ordres , chargés de globules durs , les
uns plus , les autres moins ; les tourbillons
ayant perdu de leur facilité de tourner autour
de leur propre axe , ont été comprimés
par ceux qui les entouroient. Or un tas
de tourbillons preffé par le fluide qui l'environne
, doit nous donner , dit-on , un
corps opaque , denſe , ſolide , tel qu'eſt la
Terre.
Mais l'Auteur auroit- il voulu lui-même
habiterune pareille Planette ? j'en doute fort;
il feroit à craindre que l'Architecte refusât
de loger fous le toit qu'il auroit conſtruit.
L'équilibre , quand même il auroit pû être
troublé , fe feroit rétabli en moins de trois
minutes , puifque la force des tourbillons
vainqueurs , diminuë en raifon inverſe du
quarré
1726 MERCURE DE FRANCE.
quarré des rayons ; la force des vaincus au
contraire augmente en même raiſon. Eft-il
donc poflible qu'en fi peu de tems il foit
tombé une multitude de globules durs , affés
confidérable, pour former la Terre, les Mers ,
le Soleil , les Planettes , les Etoiles, le Monde
entier ?
Après avoir formé la Planette , M. de
Moliéres compofe fon Atmoſphére du troifiéme
Elément. Pour entendre cette propofition
, il eſt à remarquer , que les grands
tourbillons répondent aux tourbillons de
Defcartes, les grands tourbillons fe divifent
immédiatement en tourbillons, femblables
à la matiére globuleufe ; de-là vient
qu'on les appelle tourbillons du fecond Element
, qui ont pour points d'autres petits
tourbillons qui équivalent à la matiére fubtile
, & que l'on nomme tourbillons du
mier Elément.
pre-
Les tourbillons du fecond Elément , qui
n'avoient pas tant de globules durs que ceux
qui formoient la Planette, & qui par conféquent
étoient les plus éloignés du centre ,
s'arrangérent enfuite autour de ce corps opaque.
C'est ce qui forme la matiére du troifiéme
Elément. D'où il fuit que les tourbillons
les plus grands , & les plus chargés de
globules , font les plus proches de la Terre.
Ceux qui font les plus petits , & qui one
plus
AOUST. 1743 . 1727
plus de force centrale , en font les plus éloignés.
Voilà donc les principes de l'équilibre
, qu'on nous avoit établis avec tant de
foins , renverfés de fond en comble.
Je bornerai là mes obfervations fur un
fyftême que j'ai défendu il y a quelques
mois , avec toute l'ardeur d'un écolier qui
foutient un fentiment. Il m'en a coûté
pour
me défaire de mes préjugés ; mais la vérité
éxigeoit de moil'hommage que je lui ai rendu
, & m'a fait connoître que , fouvent il y
a bien loin de la Géométrie , aux régles que
garde la Nature.
>
Le fyftême, quoiqu'impliqué, eft un chefd'oeuvre
d'imagination , quifera vivre éternellement
fon Auteur. L'air , les fluides , la
lumiére , les météores , l'activité du feu
les phoſphores , la variété des corps . &
prefque tous les phénoménes s'expliquent
heureuſement par les tourbillons . En leur
donnant une force centrale particuliére , &
& une autre commune , ils font incomparablement
plus forts que ceux des Cartéfiens
. Je crois donc qu'il feroit à propos dans
la Phyfique , d'admettre des petits tourbillons
, fans chercher leur origine, Le progrès
furprenant d'une incendie ; des témoins oculaires
, qui ont vû la formation du tonnerre,
les fermentations , les vents qui , dans leur
furie , déracinent les arbres , les fluides , &
plufieurs
1728 MERCURE DE FRANCE .
plufieurs phénoménes paroiffent en démontrer
l'éxiftence.
>
Mais fi l'on admet les principes du fyſtème
, il feroit à craindre que tout notre tourbillon
ne fût abſorbé par le tourbillon voiſin ,
ce qui arriveroit , s'il tomboit fur le Soleil
une fi grande quantité de matiére du fecond
Elément , que cet Aftre ne pût les difliper.
Peut-être qu'avec nos maiſons , nos champs
notre air même , nous nous trouverions
tranfplantés dans d'autres plages. Nous aurions
d'autres lieux , un nouveau Soleil, &
pendant la nuit de nouveaux points de vûë.
Peut-être auffi que perfonne ne fouffriroit
de ce dérangement , à l'exception des Aftronômes
qui feroient , forcés d'oublier ce
qu'ils avoient appris , & de jetter d'autres
fondemens de leur Art. Auffi eft-il à craindre
que le fyftême ne faffe fortune chés
pas
eux.
LACOSTE
A Dijon le 2. Avril 1743 .
$25252
$252
TRADUC
AOUST. 1743 . 1729
25252525252252
TRADUCTION
Dé l'Ode XXIII. d'Anacréon , fur les
Richeffes.
S1 for faifoit durer la vie ,
Je bornerois mes foins & ma plus forte envie
A me munir de grands tréfors ,
Afin que quand la Parque avide
Viendroit me menacer de fa faux homicide ,
Ce tribut m'exemptât d'aller aux fombres bords ;
Mais , puifque la cruelle eft fourde à nos promefles,
Et que les plus grandes Richeffès
Ne fçauroient adoucir la rigueur de fes loix ,
D'en amafler je n'ai que faire.
Bacchus , & le Fils de Cythere
Déterminent mon fage choix ,
Et peuvent feuls me fatisfaire,
C JEU
1730 MERCURE DE FRANCE.
JEU de longue Paume , & célébres Parties
janées. Extrait d'une Lettre écrite de Dourdan
le 27 Juin 1743 .
ON a conftruit ici depuis peu un Jeu de
longue Paume , dans les foffés qui régnent
le long des murs de la Ville ; il remplit
l'efpace qui eft entre les deux Tours
& eft fermé d'un côté par ces murs , & de
l'autre par une paliffade de charmille , &
par une allée de tilleuls , plantés fur le revers
du foffé. Entre les tilleuls & l'extrémité
du revers , eft un efpace de huit ou dix
pieds, couvert d'un beau gafon ; c'eft de-là
que les fpectateurs , fans courir aucun rifque,
décident, par leur filence , ou par leurs
acclamations , du mérite des Joueurs .
Le bruit de l'établiffement de ce Jeu s'eft
répandu dans le Pays ; les Dourdanois s'y
font faits une réputation , qui a allarmé les
Villes voifines ; celle d'Etampes , qui a toujours
été en poffeffion de l'emporter fur les
autres , a tremblé pour fa gloire. Son émulation
a été excitée , & a paru par un défi ,
qui fut auffi tôt accepté. La partie fut fixée
la veille du jour de S. Jean , 23. de ce
mois. Les Joueurs de Dourdan ont parfaitement
PAOUST. 1743 . 1731
ment foutenu l'idée qu'ils avoient donnée
de leur adreffe ; on étoit convenu de joüer
deux parties , qu'ils gagnérent , malgré les
efforts & l'habileté de leurs adverfaires ;
chaque partie étoit de quinze louis d'or.
Mr d'Etampes demanderent auffi -tôt leur
revanche , on la leur accorda. La premiere
partie s'étoit faite à Dourdan , la revanche
fut donnée à Etampes , où Mr de Dourdan
fe rendirent le lendemain ; ceux - ci
avoient déja gagné la premiere partie , &
trois jeux fur la feconde, quand l'un de leurs
meilleurs Joiieurs , le fameux Boiſemon , le
trouva incommodé ; Mrs d'Etampes , qui
s'en apperçurent , propoférent poliment de
remettre la partie ; mais Mrs de Dourdan
affés flattés de leur premier fuccès , & charmés
de trouver l'occafion de confoler Mr
d'Etampes de leur perte , refuferent cette
propofitions on continua , & la partie fut
terminée à l'avantage de Mrs d'Etampes .
Il ne faut pas oublier de vous dire , que
la premiere partie avoit attiré à Dourdan
une partie de la Nobleffe des environs
beaucoup de Damès des Châteaux voifins
& de la Ville d'Etampes. On avoit dreffé
des tentes pour elles , on en avoit auſſi
dreffé pour les rafraîchiffemens . Il n'y eut
ni difpute , ni confufion ; il y avoit des Juges
nommés, décider des coups , entre
Cij
pour
les
1732 MERCURE DE FRANCE:
les Joueurs , & des Gardes de M. le Duc
d'Orléans , pour contenir le peuple , & em
pêcher le defordre, La partie dura depuis
deux heures après midi jufqu'à fepts il y
eut dans la Ville plufieurs foupers , où furent
priés les Dames & les Mrs , que la
curiofité avoit attirés,
Après le fouper , on retourna au Jeu de
Paulme ; Mrs de Dourdan avoient fait illuminer
les tilleuls , les tentes & le gafon, du
côté du mur de la Ville , lequel étoit auffi
garni de lampions. On avoit élevé des
Echafauts de diftance en diftance , pour pla
cer des Joueurs d'inftrumens. A chaqué extrémité
du Jeu, étoit un feu d'artifice , qui
fut très-bien exécuté, Les vainqueurs , ou
bliant leur victoire , firent oublier aux vaincus
leur perte , & les uns & les autres ne
s'occuperent plus que de leurs plaifirs , qui
furent prolongés juſqu'au jour. On danfa
le reste de la nuit,
VERS
AOUST. 17437
1733
VERS
A Mademoiſelle Gauffin.
Pour ébaucher tes traits , adorable Gaufſſin ;
Agité d'une tendre yvreffe ,
-
J'implorois le fecours des Nymphes du Permeffe ;
Lorſque l'Amour,fans doute,inftruit de mon deffein,
Parut , & m'arracha le pinceau de la main ,
Les yeux étincelans d'un courroux légitime :
C'est bien à toi , dit-il , d'entreprendre un Portrait
Dont un efprit rare & fublime
Ne pourroit expofer qu'un crayon imparfait.
Dans cet objet flatteur reconnois mon ouvrage ,
Propagatrice de mes feux ,
Du coeur le plus farouche elle enléve l'hommage ,
Et fixe des mortels les foupirs & les voeux ;
Va , crois-moi , jeune téméraire ,
N'épaife point ta verve en fades complimens
J'entrevois qu'une ardeur fincére
Excite en toi des tranfports fi charmans :
Mais apprens qu'aimer & fe taire ,
Forma toujours des vrais amans
Le rare & brillant caractere.
GAUD **
Cüj
OBSERV
.
1734 MERCURE DE FRANCE.
OBSERVATIONS
De M. L. fur l'Abregé de la Vie des
Evêques de Coutance.
fuffire
L'idée que M. Frigot a donné du Livre
intitulé : Abregé de la Vie des Evêques
de Coutance , ne m'ayant pas paru
pour l'inftruction de la plupart des Lecteurs,
j'ai cru , Monfieur , devoir lire ce Livre , dans
le deffein d'y obferver ce qui me paroîtroit
de plus curieux.
Il contient véritablement dans fa petiteſſe
beaucoup de faits , qui feront plaifir à ceux qui
entreprendront l'Hiftoire généraleduRoïaume.
J'aime furtout la naïveté avec laquelle .
l'Auteur dir, que le Catalogue des Evêques
de Coutance ne remonte pas plus haut que
S. Ereptiole , qu'il croit avoir été Difciple
de S. Germain d'Auxerre. Mais je fuis un
peu étonné , que fur la fin de la vie de S.
Agathée, qu'il qualific de quatorziéme Evê
que de ce Siége , il falfe obferver qu'il y a eu
quatorze Saints Evêques , confécutivement
affis fur le Siége de Coutance ; & qu'il ajoute
tout de fuite. Il n'y a gueres d'autres Egli-
Les en France , qui puiffent fe glorifier du même
bonneur. M.Frigot, adoptant lamême penfée,
femble
AOUST. 1743. 1735
femble enchérir deffus , car après avoir an
noncé S. Ereptiole, comme premier Evêque
établi à Coutance en 430. Il eft remarquable,
dit - il , que les treize Evêques fuivans , font,
comme ce premier Apôtre, autant de Saints reconnus
par l'Eglife .
Quand ces quatorze Evêques feroient reconnus
pourSaints par l'Eglife,il y auroit plufieurs
autres Siéges Epifcopaux dans les Gaules
, qui pourroient produire un nombre
bien fupérieur en Saints Evêques à celui de
l'Eglife de Coutance . Sans fortir de la Gaule
Celtique , nous avons les Eglifes de Lyon
& de Vienne , & celles d'Auxerre & du
Mans ; dans l'Aquitaine , celles de Bourges
& de Clermont ; dans la Belgique, celles de
Tréves & de Metz . Mais pourquoi M.
Rouault , Auteur de l'Hiftoire des Evêques
de Coutance , donne - t'il libéralement à
quatorze Evêques confécutivement le titre
de Saints, pendant que tous les Calendriers
de fon Diocèfe , même le dernier de 1741 ,
n'en admettent que deux , fçavoir, S. Lo &
S. Rumphaire ? Si Dufauffay en a canoniſé
d'autres dans fon Martyrologe , fon autorité
n'a pas encore été admifedans l'Eglife.Ni Dufauffay,
ni d'anciennes Liftes ne fuffifent pas,
pour multiplier ainfi le nombre des Saints
Evêques , & pour s'en prévaloir contre ſes
voifins. Il faut une tradition de culte atteſ-
C iiij
téc
1736
MERCURE DE
FRANCE.
tée
par des
Martyrologes de
l'ancien tems ,
on par de vieux
Calendriers. Or c'eft ce qui
ne fe trouve pas à
Coutance ,
quoique ce fort
dans cette Ville , ou dans fon
Diocèſe , que
les Saints
prétendus
devroient avoir été ho
norés.
Sans
attribuer à
l'Eglife de
Coutance
un plus grand
nombre
d'Evêques , qu’-
elle n'en a de
reconnus
authentiquement
Saints,
M.Rouault ,a dûfe
contenter de faire
l'éloge du
Côtentin , comme da Lieu de
la
retraite de
plufieurs
Solitaires ou Religieux
, dont on
célébre la Fête , & c'eſt une
gloire qu'on ne peut lui refufer. Mais comme
la
qualification de Saint ne lui
coûte
rien , il en a fait une
abondante
diftribution.
Il ne s'eft pas
contenté de la
donner à un
grand
nombre
d'Evêques de
Coutance ; il
en fait auffi part , p. 70. à
Cyprien de Bourdeaux
, à
Licinius de
Tours ,
quoique leurs
Eglifes ne les
reconnoiffent
M.
Frigot , qui paroît avoir goûté,
préfé- pas comme
tels.
rablement aux autres Vies des
Evêques de
Coutance , celle de
Géoffroy , ou
Geffroy
`de
Mombray ,
devroit
rendre à cette occafion
un
fervice
effentiel à
l'Eglife
Cathédra
le. Ce feroit
d'engager
quelqu'un de faire
deffiner le
dehors & le
dedans de cette Eglife
, de
maniere qu'on pût juger de
l'Architecture,
fans être obligé de fe
tranfporter fut
Les
AOUST. 1743 . 4737
les Lieux.Tous ceux qui ont vû cet édifice
affurent qu'il eft très - beau & très - délicatement
travaillé , c'eft tout ce qu'ils en peuvent
dire , mais ils ne peuvent juger de fon
antiquité. Or , c'est ce qui paroît meriter ,
d'être éclairci , pour fermer la bouche à ceux
qui trouvent un efpéce de contrariété , &
d'oppofition entre la date de l'édifice, & la
maniere dont on la dit exécutée.
+
Il refte en France plufieurs Eglifes , qu'on
fçait sûrement bâties dans l'onziéme fiècle
& qui toutes font d'une ftructure groffiére
& maffive . Celles du douzième fiécle , qui
font en plus grand nombre , font un peu
moins baffes moins fombres & moins
groffiéres. Pourquoi donc celle de Coutance
fera - t'elle admirable pour fa délicateffe >
fa clarté , & c Cependant pourquoi ferat'elle
plus ancienne pour l'édifice ,, que la
Cathédrale de Paris , de Rouen , de Reims ?
On prétend que ces deux chofes ne peuvent
s'allier enfemble , fçavoir l'ancienneté & la
délicateffe .
Commeje n'ai pas vû l'Eglife de Coutan
ce , je ne puis en parler par comparaifon ,
avec celle de S. Denis , par exemple , de S.
Cüen de Roüen , avec la Cathédrale d'Amiens
, ou l'Eglife de Royaumont , toutes
belles Eglifes , mais un deffein fidéle peut y
fuppléer , car on ne peut en juger affés fai-
Cv nement
1738 MERCURE DE FRANCE,
nement , par ce qui eft repréfenté au frontifpice
du nouveau Breviaire : fi ce deffein
eft difficile à exécuter , je me contente volontiers
, pour le préfent, du témoignage d'un
Auteur du x1 . ou du x11 . fiécle , qui certifiera
, que le bon Evêque Geffroy , étant près
de mourir , fe fit porter fous la lanterne du
Choeur , où joyeux de voir un fi grand ouvrage
confommé , il prononça le Cantique
Nunc dimittis , &c. reçut enfuite au même
lieu les derniers Sacremens , & y mourut.
M. Rouault , cite à la fin de l'article , où il
rapporte ces faits , l'autorité d'Orderic
Vital , qui n'en dit rien. Ainfi , le fait
refte à prouver , & peut - être n'en trouvera-
t'on jamais d'autre preuve, qu'une tradition
, qu'on débite aujourd'hui , & queje
crois un peu altérée.
Un autre article , qui peut fouffrir difficulté
de la part des Lecteurs, inftruits de l'antiquité
des rites , confifte dans la remarque
de M. Rouault , fur le Cardinal Gilles Defchamps
, Evêque de Coutance , mort en
1413. Il fut le premier , dit -il , à introduire
en France lapienfe coûtume de jetter de l'eaubénite
fur les tombeaux , après y avoir dit Libera
, De profundis , & fini les Oraifons , en
difant Requiefcat in pace. On conferve encore
en original , dans l'Eglife de Coutance &
de Rouen , l'acte de l'inflitution de cette céré
manic,
| AOUST. 1743. 11 1739
90
monie,qui s'eft introduite dans tout le Royaume.
Cette remarque eft importante , en ce
qu'elle fixe le tems de l'inftitution d'une cérémonie.
Mais , eſt - elle bien appuyée ? C'eſt
ce qui pourroit le décider , fi on nous donnoit
l'article du Teftament , où cet ufage eft
prefcrit. Jufqu'à ce qu'il foit produir , on
pourra toujours douter que le Cardinal Gilles
s'y défigne comme le premier Inſtituteur
de cette cérémonie. En effet , de ce que,
pent-être , il aura ordonné & détaillé ce rit
en entier pour fon anniverfaire , il ne s'enfuit
pas de-là , qu'on ne le pratiquoit pas en
d'autres occafions , par exemple aux funéaux
ˇfunérailles
. Un particulier met dans fon Teftament
Volo quod in die obitus mei , &c. il n'en
faut pas conclure , qu'il eft le premier qui
demande telle ou telle chofe ; il faut feulement
inférer de-là , que ce qu'il demande
ne le fait pas toujours , mais quelquefois
feulement , & lorfqu'il eft preferit par le
Teftament , parce qu'il y a des folemnités
qui neconviennent pas en toutes fortes d'occafions.
Si les titres des Archives de Coutance
remontoient bien haut , on y trouveroit
des preuves de ce que je dis. Je ne croirai
, qu'avec bien de la peine , que ce ſoit
de l'Eglife d'une Ville , qui n'eft fur aucune
grande route , & qui eft à l'extrêmité du
Royaume , la moins fréquentée, que foit éma-
C vj
né
1740 MERCURE DE FRANCE.
né l'ufage , qu'on dit introduit dans le refte
des Provinces ,
Au refte, je n'ai pas intention de rabaiffer
Teftime qu'on doit avoir de l'Abrégé des
Vies des Evêques de Coutance ; cet abrégé
contient plufieurs traits fort curieux. Par
exemple , la tranflation du Siége Epifcopal
de Coutance dans la Ville même de Rouen ,
au commencement du x. fiécle,pendant que
Ies Danois, encore Payens, occupoient Coutance
& le Côtemtin . Cette tranflation du
Siége de l'Evêque Théodoric à S.Sauveur de
Rouen , depuis S. Lo , fait conjecturer , que
ce pourroit bien être pour quelque raifon
femblable , & environ dans le même tems
que fe feroit formée l'origine du droit qu'à
l'Evêque de Lizieux fur l'Eglife de S. Candre
de la même Ville de Rouen . Il n'eft pas
impoffible que quelque Prélat de cette Eglife
, qui n'a pas dû être plus épargnée que
les autres , obtint de Rollon , chef des Normands
, un Lieu de retraite dans la Capitale
de la Province.
On trouve à la page 245. du volume de
M.Rouault , que l'Evêque Louis d'Erquery,
fut le premier des Evêques , qui mit à la tête
de fes Mandemens & autres Lettres , en
1347. ou 1348 , par la mifericorde de Dien&
la grace du S. Siége Apoftolique , en reconnoiffance
de ce qu'il avoit été confirmé par
AOUST. 1743 . 1741
le Pape. Sous Jean de Marles, fait Evêque en
1414, il obferve que les Evêques fuffragans
de Rouen, devoient un repas , certum paftum ,
aux Chanoines de la Métropole, avant leur
inſtallation. A la page 3 41 , le récit des fouffrances
d'Artus de Coffé , de la part des Cal
viniftes , mérite d'être lûì.
En finiffant mes remarques , je ne puis
omettre , qu'il eut été à fouhaiter que
M. Rouault , avant que de publier fon
Livre , eut confulté à la Bibliothéque du
Roi, les Notes que M. Baluze a faites fur
les Evêques de Coutance , dans fon Exemplaire
de l'ancien Gallia Chriftiana , comme
fus tous les autres Evêques renfermés dans la
même Collection.Sans prévenir ce qui pent
y avoir été observé , je vous avouerai que
je ne fuis gueres porté à admettre un certain
Evêque, auquel on donne le nom bizarre de
Lifta , qu'on place fur la fin du 1x fiécle , &
duquel on ne peut rien produire.M.Rouault
dit que Flodoart en parle : Hift. Rem. Lib.
1v. Cap. 1. Cependant , on n'y en trouve
rien. Comme je fais profeffion de franchife ,
je dirai ingénuement la per fée qui m'eft
venue à l'ouverture du Catalogue des Evêques
de Coutance , donné par le P. Beffin.
Ce Bénédictin , page 530. de fes Conciles ,
infere entre l'Evêque Sigenand & l'Evêque
Algerund , une ligne compofée de ces trois
mots : Lifta
1742 MERCURE DE FRANCE.
Lifta . Ragenardus. Agebertus.
A fuivre le chemin frayé , on dira, que voilà
trois Evêques nommés en cette ligne. Pour
moi , je n'y en apperçois que deux ; fçavoir,
Ragenard & Agebert. Souvenons- nous ici
que les anciens Catalogues ont fouvent été
écrits fur des bandes de parchemins , & que
les Hiftoriens ou Compilateurs les ont quelquesfois
cité pour remplir des lacunes : relifez
du Cange , Edition nouvelle , au mot
Lifta. Je fuis , & c .
A Paris , ce 13 Juillet 1743 .
೧೮೮೧೮೧೧೧೧೧೧೧೧
LE Procureur Borgne , & le Procureur ·
Manchot.
CONTE.
DEux Procureu´s, l'un manchot , l'autre borgne,
S'entre-exaltoient de la façon qui fuit :
Tu n'as qu'un oeil , mais cet oeil en vaut huit
Dit le premier , pour voir , dès qu'il les lorgue
De tes oifons quel fera le produit ,
Et fur ce point jamais tu ne t'abuſes .
›
Moi , reprit l'autre , oh bon ! fi de mes rufes ,.
Près de tes tours : fi tu n'as qu'une main ,
Elle en vaut dix pour bien plumer tes buſes ,
Et n'en n'eft tel que d'aflurer fon gain.
F .....
QUEST.
AOUST. 1743 .
1943
QUESTION IMPORTANTE
Jugée au Parlement de Paris le
و ر
S
3 Mai 1743 .
I un immeuble échu à un cohéritier
par partage & licitation , eft fujet aux
hypotéques des créanciers particuliers de
» fes cohéritiers.
FAIT.
Le Sieur Claude Jacqueffon & Marguerite-
Angélique de la Pie, fon époufe, avoient
eu de leur mariage trois enfans , Jean- Baptifte
, Lambert & Elifabeth Jacqueffon ; ces
trois enfans étoient en bas âge , lorfque leur
Mere mourut en 1698 , leur laiffant pour
tout bien , une Maiſon fcife grande ruë du
Fauxbourg S. Antoine.
Lambert Jacqueffon , ayant , ayant fait profeſfion
chés les Minimes en 1716 , fon pere
fut fon héritier mobilier , & fa portion afférente
dans la maifon , laiffée
accrut à fon frere & àfa foeur .
par
fa mere
Les deux autres enfans renoncerent à la
communauté de biens , qui avoit été entre
leurs pere & mere ; le pere leur rendit un
comptedututelle,par lequel il revintà chacun
une modique fomme d'argent , pour les reprifes
1744 MERCURE DE FRANCE
prifes de leur mere , & pour les joiiiffances
de la Maifon , enforte qu'ils n'avoient rien
en commun , que cette Maiſon provenante
de leur mere.
Le Sr. J. B. Jacqueffon , & la Dame ſa
foeur , joüirent de la maiſon par indivis ,
jufqu'en 1726 , que ledit Sieur Jacqueffon
fit affigner la Dame fa foeur , & M. Dunot
fon mari , pour procéder à la licitation de
lear maifon , attendu qu'elle ne fe pouvoit
pas partager.
Les Sieur & Dame Bunot , ayant acquief
cé à cette demande , la licitation fut faite
devant Notaires , le 9 Août 1726 , & la
maifon fut adjugée & délaiffée à la Dame
Dunot , par forme de licitation & partage ,
moyennant 18000. liv. dont la Dame Bunot
confondoit moitié en elle - même , & à la
charge de payer les cens & rentes foncieres,
& 30. liv. de penfion viagere au P.Jacquesfon
Minime.
Les 9000 liv. revenantes au Sr. Jacqueffon
, lui furent payées en une rente au capital
de sooo liv . & les 4000. liv . reftantes en
argent comptant.
La Dame Bunot avoit joti tranquillement
de cette Maifon , jufqu'au 19. Mai
1732 , qu'elle fût affignée au Châtelet en
déclaration d'hypotéque par les Di es.
du Four , fe difant Créancieres du Sieur
>
JacAOUST.
1743 : 1745
Jacqueffon , d'une fomme de 309. liv. & intérêts,
pour laquelle il leur avoit hypotéqué
ladite Maifon.
Par Sentence rendue fur productions refpectives
, la Maifon fut déclarée affectée
& hypotéquée à la créance des Dlles , da
Four.
La Dame Bunot interjetta Appel de cette
Sentence , ce qui fit la matiére d'un Procès
en la troifiéme Chambre des Enquêtes , au
rapport de M. Hurfon , Confeiller.
Le moyen d'Appel de la Dame Bunot ,
étoit que la Maifon en queftion , ne lui avoit
point été délaiffée par un Contrat de vente ,
mais par forme de licitation & partage , &
par un premier Acte , paffé entr'elle & fon
cohéritier
, pour faire ceffer entr'eux l'indivis
des biens de la fucceffion de leur mere ;
enforte, que quelque nom qu'on eut donné
à cet Acte , on ne l'auroit pas moins confidéré
comme un partage , fuivant la note de
M. le Camus, Art . 8o . de la Cour , de Paris, &
d'Argentré , fur l'Art. 73. de la Coûtume de
Bretag. note 4. nom. 3 .
On fait dans les partages differentes opé
rations , fuivant le nombre des héritiers , &
l'état des biens qui y font fujets. On fait ou
des lots égaux, ou des lots inégaux , avec des
foultes , ou enfin , on adjuge le tout à un
feul , à la charge de remplir les portions de
fes
1746 MERCURE DE FRANCE.
fes cohéritiers , en argent , ou autres effets,
comme on avoit fait dans l'efpéce de la Dame
Bunot ; de quelque façon que les cohéritiers
opérent, c'eft un partage. DuMoulin,
fur Paris , Art. 33. gl. 1. qu . 22. & Art.73 .
gl. 3.n. 11. 12.
&
M. Talon , dans un Plaidoyer , rapporté
par Brodeau , fur l'Art. 154. de la Coût , de
Paris , établit que la licitation entre cohéritiers
, eft la même chofe que le partage , &
que celui qui s'eft rendu propriétaire par l'une
ou l'autre de ces deux voyes , eft reputé
l'avoir toujours été , le partage & la licitation
ayant un effet rétroactif.
C'eft auffi à préfent une Jurifprudence
certaine , que l'immeuble licité entre cohé
ritiers , eft propre pour le tout à l'adjudicataire
, d'où il s'enfuit , que cette licitation
n'eft point confiderée comme une vente.
L'hypotéque qui eft acquife aux créanciers
particuliers , de chacun des cohéritiers,
fur les immeubles d'une fucceffion inque
divife , ne peut être
conditionnelle
, en
cas que le débiteur
devienne
propriétaire
de ces immeubles
, chacun de ces héritiers
ne pouvant
donner à fes créanciers
plus de
droit fur ces immeubles
, qu'il n'en a lui-même
; & c'est une maxime certaine
, que les
immeubles
, qui font abandonnés
fans fraude
à un héritier dans un partage , ne font
point
AOUST. 1743
747
point fujets aux hypotéques particuliéres de
Les cohéritiers , comme l'obferve M. le Camus
, fur l'Art, 80 , de la Coûtume de Paris
num. 2.
De la part des Dlles du Four , intimées
, on "difoit : que dans l'Acte du 29
Août 1726 , on ne s'étoit fervi du nom de
partage & de licitation , que pour
fe
ga.
rantir des droits Seigneuriaux ; que dans le
vrai c'étoit une vente , puifque les Sieur &
Dame Bunot n'étoient devenus propriétaires
de la portion des Sieur & Dame Jacqueffon
, que moyennant le payement qu'ils
en avoient fait de leurs biens perfonnels.
Si la prétention de la Dame Bunot étoit
admife , il feroit impoffible au créancier de
celui qui poffède des biens indivis , de ſe
faire payer de ce qui lui eft dû ; il feroit aifé
à ce débiteur de l'en fruftrer , en transfe
rant la propriété de fes biens à fon cohé
ritier.
Nous ne connoiffons parmi nous que les
décrets & la prefcription , qui foient capables
de faire perdre les hypotéques acquifes
aux créanciers fur les biens de leur
débiteur ; le partage , ni la licitation ne
purgent point les hypotéques , & la lici
tation , même entre cohéritiers , eft telle
ment confidérée comme une vente , que de
Renuffon en fon Traité des propres , ch. 1.
décide
1748 MERCURE DE FRANCE:
décide
expreffément , que l'héritier des pro
pres retiendra la totalité de l'héritage ac
quis par licitation , mais en indemnifant
l'héritier des acquêts de pareille fomme ,
que le défunt avoir payée pour ce qui excédoit
fa part & portion ; ce qui fuppofe
que les portions acquifes par licitation ,
font des acquêts en la perfonne de l'adju
dicataire , & que la licitation est une véritable
vente.
Par Arrêt du 3 Mai 1743 , la Sentence
du Châtelet a été infirmée. Ce qui juge que
l'héritier , devenu propriétaire de la totalité
d'un immeuble de la fucceffion , foit par
partage , on licitation , même à prix d'argent
, n'eft point foumis aux hypotéques
des créanciers particuliers de fes cohéritiers.
A MADAME **
Vous ,
Pour le jour defa Fête.
Ous , qui joignez aux graces de Cypris
La vertu de Diane , & l'efprit de Minerve :
Vous que fuivent par tout les Amours & les Ris ,
Et pour qui , quoiqu'abſent , en tout tems je con-
Lerve
F.co
AOUST. 1743. 1740
Les fentimens les plus vifs , les plus doux ;
Daignerez - vous , belle Themire ,
Ecouter les fons de ma Lyre ?
Sera-t- elle digne de vous ?
***
Que ce jour et charmant ! Avec ces fleurs nou
velles
Il m'eft permis de vous offrir mes voeux ,
Et je dois vous parler des feux
Qu'infpirent vos appas aux coeurs les plus rebelles
Dans cet écrit les Mufes dicté ,
par
Je puis vous dire en vers mainte agréable chofe;
Que dans vos fers mon coeur eft arrêté ;
Que je chéris ma chaîne , & les maux osì m'expoſe
La perte de una liberté.
Que ne puis-je le dire en profe
Phebus de fes dons précieux
Eft avare , il est vrai , dans le fiécle oùnous fommes
Il est beau de parler le langage des Dieux ;
Mais avoüez qu'il vaudroit mieux ,
Themire, vous parler le langage des hommes
N'allez pas vous armer d'un frivole courroux,
Excufez ce tranfport lyrique.
Une licence poëtique
Doit exciter des mouvemens plus doux
·Parmi tant d'heureux traits , qu'on voit brøller en
YOUS
Et
1750 MERCURE DE FRANCE.
Et qui foumettent tout à votre aimable empire ,
Vous n'avez qu'un défaut, fi c'en eft un , Themire,
De n'être pas fenfible aux feux qu'on fent pour
vous.
EXPLICATION.
D'une Pierre gravée , antique , du Cabinet
du Chevalier D. L. R.
L
+
que
A Fable de Pfiché & de l'Amour , eft
trop connue , pour pouvoir douter
la Pierre gravée , antique , dont on donne
ici le Deffein , ne repréfente Pfiché , à qui
l'Amour reproche fa curiofué. On fçait cue
cette belle perfonne croyant habiter avec un
-Monftre , fa crainte , & la curiofité naturelle
aux femmes , excitée par la jaloufie de fes
foeurs , lui infpirérent la hardieffe de le voir
à la clarté d'une lampe , dans le tems qu'il
dormoit. Sa furprife de trouver l'Amour, au
lieu d'un Monftre effroyable , fit qu'elle
laiffa tomber de l'huile brûlante fur lui,
qui l'éveilla. Alors ce Dieu parten colère ; il
reproche à Pfiché le piége qu'elle lui a tendu ,
la douleur quefa curiofité lui caufe. Voilà
Te moment du fujer que préfente cette Pierce.
La lampe que tient Pfiché , l'Amour qui
s'envole,
ΘΗΤΑ ΦΥΛΕΟ
ΤΠΟΟΣ
PSICHE
A qui l'Amour reproche sa curiosite
Gravesur une Grandeur bellissimeJacinthe
Du Cabinetdu chCh dela dela Rocque.
Pierre
Dornique SoulyoitTHE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY
.
ASTOR
, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
AOUST. 1743 .
s'envole, & l'Infcription Grecque , font
autant de Tipes qui paroiffent ne pas permettre
d'en douter. Quant à la gravûre de
cette belle Pierre , on ne peut trop admirer,
outre la beauté du Deffein du tout enfemble
, une fineffe de caractére fur la tête de
Pfiché , où l'on voit exprimés avec un art
admirable fon étonnement & fon déſeſpoir;
tout le refte de la Figure répond parfaite
ment , par fon attitude en défordre , à la
beauté de l'expreffion de tête.
QUNUDUDUDUDUDU DU DUDU DÜNYAVİNunu
L'ETUDE.
O D E
E Tude riante ou févère ,
Au gré de nos changeans défirs ;
Qui fçais brifer la chaîne auftére
Que trainent d'ennuyeux lo:firs ;
Toi , par qui méritant l'aveu de la Nature ,
L'Art , fous les agrémens d'une fimple parure ,
Livre aux Mortels fes heureux traits ;
Viens décorer l'ébauche où je te rends hommage
Qu'on doute à fon afpect , fi tu fers davantage
Par tes fruits , ou par tes attraits .
+34
Qu'efta
1752 MERCURE DE FRANCE.
Qu'est- ce que l'homme en fon enfance a
Un Etre à lui- même étranger :
Tributaire de l'ignorance ,
Cherche-t-il à s'en dégager ?
De nuages épais fa Raifon entourée ,
D'un organique instinct à peine féparée ,
Aux fens fe laiſſe prévenir.
Erreur , dans les replis ſon eſprit s'embarraffe ;
Peu frappé du préfent , fon oeil troublé n'embrasfe
Ni le paffé , ni l'avenir.
De cette Nuit aviliffante
Bientôt l'Etude l'affranchit ;
Par fes fecours plus agiflante
Son ame réfout , réfléchit :
Déja de la Science il voit briller l'aurore ;
Le jour de la Raifon , qui s'empreffe d'éclore
Lui découvre un monde nouveau :
Il renaît ; fa lumiére au bonheur l'affocie :
Le fçavoir eft pour l'homme une feconde vie ,
L'ignorance un premier tombeau.
Par de flateufes découvertes ,
Source d'honneurs , d'utilités ,
Son efprit rachete fes pertes ,
Sa raifon fes obfcurités :
A fes effais vainqueurs tout paroît acceffible ;
Aux
AOUST. 1743 . 175
Aux règles du vrai beau la Critique infléxible
Alligne fon gout , fes talens :
D'un fens droit , épuré , formant fes loix fuprêmes ;
Auteurs , par vos efforts , & par vos chûtes mêmes,
Il monte à des fuccès brillans.
**
Mufe , fuivons le vol rapide
Que prend l'efprit laborieux ;
Retrace l'ardeur qui le guide :
Quel feu quel effort glorieux !
Tantôt par fes regards , que le progrès raffure ;
Il perce les fecrets , les fins , que la Nature
Récéle fous fa Majeſté ;
Et tantôt franchiffant la célefte barriére ,
De la vérité fainte il s'ouvre la carrière ;
C'eft furpafler l'humanité.
++
Que vois-je ? Les Arts l'environnent
Que fon Triomphe paroît beau !
Les Lauriers dont ils le couronnent ,
Lui fauvent l'horreur du tombeau.
Que de nobles travaux ! que de fçavantes veilles !
Mes efprits enchantés adorent ces merveilles :
L'Etude les voit , les produit ;
Sans elle , la Science expire avec fa gloire ,
Et les faits des Héros , au Temple de Mémoire ,
Sont enveloppés dans la nuit,
D Foible
1754 MERCURE DE FRANCE
Foible crayon des avantages
Qu'enfantent fes doctes fecours ;
Par eux les moeurs dans tous les âges
Se produifent fous d'heureux jours.
De folles paffions qu'une ligue nombreuſe
Trace à l'oifiveté la route ténébreuſe
Des vices les plus déteſtés ;
Dans les fages liens d'un Travail Littéraire ;
Souverains de nos voeux , fçachons les fatisfaire
Par d'innocentes voluptés.
***
Paroiffez , Nations incultes ;
Servez d'ombres à ce Tableau :
L'Erreur eft le Dieu de vos cultes
Sur vos yeux je vois fon bandeau.
L'aveugle opinion vous proméne fans ceffe
Dans les illufions , dans la perfide yvreffe
De vos coeurs & de vos efprits :
Des plaifirs effrénés adoptant les maximes ,
१
Au grade des vertus vous élevez des crimes ;
Dont les horreurs vous ont flétris.
****
Ah ! puiffent ces Peuples fauvages ...
Mais où vont m'entraîner mes voeux ?
Fayez trop lugubres images ;
Je cherche des afpects heureux.
AOUST.
1743 .
1755
7
Sur les faſtes des tems jettons , fixons la vûë ;
Quels précieux dépôts la Lecture affidue
Etale
mes yeux dévoilés !
Les ans font reproduits , tout m'inftruit ; tout m'éxerce
;
Avec des Morts charmans liant un doux com
merce ,
Je vis aux fiécles écoulés.
*3*
Deffus fon aile fugitive
Que Saturne emporte nos jours,
Eteints dans une étude active ,
L'acquit fait revivre leur cours.
Aux vains amuſemens dès que l'on facrifie ,
Dans le cercle préfent , où s'échape la vie ,
On perd les momens à venir :
Exerce-t -on l'efprit à penfer, à connoître è
Ces plaifirs fructueux , chaque inſtant les voit
croître ;
La Mort feule les voit finir.
XXX
Quoi ! d'un voile philofophique
Obfcurciffant fes doux loifirs ,
Faut -il à l'âpreté ftoïque
Immoler les goûts , les défirs ?
Non ; l'efprit ftudieux à la gayeté s'allie
Le fçavoir bien conduit, en cent façons fe plie;
Dij
Dieux
1756 MERCURE
DE FRANCE.
Dieux ! qu'il décéle de beautés !
Il parle ; quel filence ! il inftruit ; on l'approuve į
Par fes charmes puiffans dans un feul homme on
trouve
De nombreuſes ſociétés .
GAUTIER , Chanoine Rég.
de la Congrég, de N, Sauveur
A Nancy 1743 •
MANDEMENT
De M. l'Archevêque d'Avignon , au suje
d'une Société nouvellement formée dans
fon Diocèfe,
JOSEPH
OSEPH DE GUYON DE CROCHANS,
par la Grace de Dieu & du S , Siége Apof
tolique , Archevêque d'Avignon : Aux Fidéles
de cette Ville , Salut & bénédiction,
Nous venons , nos très- chers Frères , vous
ouvrir notre coeur , & dépofer dans les
vôtres les vives inquiétudes que nous
cauſe l'avis détaillé & circonftancié , qui
nous eft revenu depuis peu d'une Société
nouvelle de Perfonnes des deux féxes ,
qui , fous le nom de Félicité , s'eft élevée
dans
AOUST. 1743 . 1757
dans le voisinage , & dont l'objet n'eft , fans
doute le fervice de Dieu , ni un noupas
,
vel engagement pour une plus grande perfection
, qui paroît , au contraire , n'être
que la même Société , formée , il y a peu
d'années , fous un autre nom , & profcrite
par le S. Siége avec tant de zéle & avec tant
d'éclat.
Nous laiffons auGouvernement Politique
à examiner , avec fa prudence ordinaire , fi
ces fortes d'Affociations ne font pas contraires
au vrai bien , & au repos de la Société
Civile , & nous renfermant dans notre Miniftére
, nous ne les envifageons que comme
oppofées à l'efprit de Religion , qui doit
uniquement occuper les véritables Chré
tiens , dans toutes fortes de tems, mais furtout
dans celui de tribulation , où nous nous trouvons
,par la Guerre prefque générale qui défole
leMonde Chrétien,fans épargner même
les belles Provinces des Etats du S. Siége.
Au lieu de fe livrer aux folles joyes qui
ont coûtume d'accompagner ces fortes d'Affemblées
& de Sociétés , un vrai Chrétien
doit dans de pareilles circonftances tâcher
d'appaiſer par la pénitence , & par la pratique
de toutes fortes de bonnes oeuvres , la
colére de Dieu , & de rappeller fes anciennes
miféricordes . Notre tendreffe pour
cher troupeau qui nous a été confié , & dont
Dij nous
le
1758 MERCURE DE FRANCE.
nous devons rendre compte , ne nous per
met pas de garder le filence fur le poifon
qui lui eft préparé , nous ne pouvons nous
difpenfer de lui faire connoître le péril qui
le ménace , & de l'exhorter , de tout notre
de l'éviter . Nous nous flattons qu'il
fuffira ,, pour le préfent , d'avertir nos cheres
ouailles du danger inféparable de ce mêlange
des deux fexes , avec les cérémonies frivoles
& indécentes , pour ne rien dire de
plus , qui accompagnent la réception des
Chevaliers ; nous efpérons que cet Avertiffement
, dicté par notre amour pour elles
les obligera de n'y prendre aucune part , &
de s'éloigner de ces Sociétés , au moins fufpectes
à l'Eglife , & à l'Etat , & de les reregarder
comme oppofées à la Religion
fainte que nous profeffons , qui ne prêche
que pénitence , & que renoncement aut
monde , & à fes plaifirs.
Le préfent Mandement fera publié aux
Prônes des Eglifes. Paroiffiales de cette
Ville , & affiché aux portes des mêmes
Eglifes. A Avignon ce 23 Juin 1743 .
Signé JOSEPH , Archev. d'Avignon .
ZASE
REP
AOUST. 1743 :
1759
REPONSE
à la Queſtion proposée dans
le Mercure de Juin 1743 .
Pour décider la Queftion ,
Que propoſe l'Enfant qu'on adore à Cythere ;
Sans grands efforts d'imagination ,
Une feule réfléxion
Peut dévoiler cet amoureux myſtére .
Le Berger couronné des mains de fa Bergére ;
Eft à mon fens le Berger préferé :
E'le a récompenfé fa flame humble & fincére ;
Son triomphe eft certain ; fon bonheur affuré. -
De quel oeil , en effet , cette Amante voit-elle
L'autre Berger , conduit par la préfomption ,
Ofer fe couronner,
la Belle
Déclare en fa faveur la tendre affection !
même avant que
D'une jufte indignation
La Bergere outragée , en vain veut fe deffendre
Sa vanité choquée, en fecret fait entendre
Ces reproches impétueux.
De quel droit aujourd'hui couronnes - tu ta tête
Qui t'a donc affuré que j'étois ta conquête ?
Retire - toi présomptueux
:
Mais ne te flatte pas que ces fleurs éclatantes
Annonceront
par tout tes amours triomphantes ;
Je veux humilier ton front audacieux ;
D iiij
Je
1760 MERCURE DE FRANCE .
Je veux faire tomber cette couronne vaine ,
Dont la préfomption ceint la tête hautaine.
Crois-tu donc mériter un don fi précieux ?
Non , non mais ton rival , tendre , & moins faftueux
,
Eft plus digne que toi de régner fur mon ame.
Approche - toi , Berger : oui j'agréé ta flâme ;
Viens , viens , je veux combler tes feux reſpec
tueux .
Quoi tu doutes encor ? Tu veux une couronne
Tiens , tiens, voilà la mienne, à toi feul je la donne,
Puiffe le tendre amour , propice à mes déſirs,
Régler fur mes fouhaits tes jours & tes plaifirs ↓
La conduite de la Bergére
Fait entendre à mon fens de ſemblables difcours
Elle punit un Berger téméraire ,
Et peu digne de ſes amours >
Qui fe laiffant guider par une vaine gloire ,
Et de fes charmes convaincu ,
Ofe célébrer la victoire ,
Avant même d'avoir vaincu.
Devaricourt , Avoc
Ce 2 Juillet 1743.
LET.
AOUST . 1743 . 1761
LETTRE de M. l'Abbé de S. F.
l'origine du mot Vipa , qu'on lit dans
l'Ecole de Salerne.
Bis duo Vipa facit. Ch. 18.
Quand
Sur
Monfieur ,
Uand je ne fçaurois pas ,
d'ailleurs, que
bare , ce feroit au cepa eft un mot baraffés
pour me le perfuader ,
qu'il parût étranger à M. le Préſident de
B ...., & on cherchera inutilement dans
les Dictionnaires & dans les Vocabulaires ,
pour l'intelligence de la Langue Latine ;
ce qu'il ne trouvera pas dans la mémoire.
Outre que ce qu'il a écrit en cette Langue
pourroit paffer pour être du tems de fa plus
grande pureté , c'eft-à-dire depuis Ciceron ,
ou fort peu au-deffus , jufqu'à l'Empereur
Tibére , il eft d'une fi vafte érudition , que
depuis les Hymnes des Saliens , compofées
par Numa , & que Quintilien dit que les
Prêtres mêmes qui les chantoient , n'entendoient
déja plus de fon tems , depuis , disje
, les Loix des Rois & les Annales des
premiers Pontifes jufqu'aux Ouvrages de
Boece , qui pour la maniere d'écrire , eft
nommé le dernier des Romains , il n'y a
rien en Latin de fi obfcur que M. de B.
Dy n'éclair1762
MERCURE DE FRANCE.
n'éclairciffe , rien de fi confus qu'il ne développe
fans peine. Ainfi votre Vipa , qui
n'eft pas connu de lui , eft un barbare , déguifé
fous la terminaifon , comme fous.
l'habit d'un Romain , mais qui avec tout
fon déguiſement n'a pû en impofer à un
homme fi éclairé. En effet , ce mot , qui eft
compofé des premieres fyllabes de Vinum &
de Panis , ne fe trouve que dans l'Ecole de
Salerne , & il eft purement de l'invention
de celui qui a fait ce Livre..
Vous ne ferez peut-être pas.
fâché
que je
vous diſe en paffant , qui en a été l'Auteur.
René Moreau , très-célebre Médecin de la
Faculté de Paris , & qui a fait auffi un
docte Commentaire fur cette Ecole de
Salerne dit qu'elle eft l'Ouvrage d'un
Jean de Milan , Docteur de cette Univerfité
d'Italie , & que cet Ouvrage fut dédié ,
comme je vous difois dernierement , à Robert
, fils de Guillaume le Conquérant, Roi
d'Angleterre. C'est donc à lui qu'il faut ар-
pliquer ce premier Vers :
,
Anglorum Regi fcribit Schola tota Salerni..
Ce Robert , pourtant , ne fut jamais Roi,
parce que fon cadet Hen i ufurpa le Trône
fur lui , ce qui arriva entre la fin de l'onziéme
& le commencement du douziéme
fécle. Mais pour revenir à Vipa , il eft
certain
AOUST. 1743. 1763
certain que c'eft une licence de ce foannes
deMediolano,que l'ufage n'a point autorifée ;
& hors l'Ecole de Salerne , je ne l'ai trouvée
que dans le vocabulaire de Laurentius Lucenfis
, que je vous ai fait voir , & où vous
lûtes avec moi , Vipa , turunda panis vine
humectata , offa in aliis liquoribus. Encore
n'a-t'il point démontré ce compofé ; ce
qu'il falloit faire pour en faire remarquer
Fétymologie , comme il n'a point auffi cité
l'Auteur des Ouvrages duquel il l'a tiré. Il
eft quelquefois permis à un Auteur particulier
d'inventer des mots , pour exprimer
des chofes nouvelles. Horace , qui eft un
Critique fans pédanterie , & qui ne fe conduit
que par le bon fens , en convient luimême.
Si forte neceffe eft
Indiciis monftrare recentibus abdita rerum.
Mais c'eft avec cette précaution que ce
mot nouveau s'éclaircira par ceux auxquels
il fera joint dans la ftructure du difcours, &
qu'il retiendra en Latin quelques marques
& quelques veftiges de fon origine Grecque
Or il eft vifible que ce Vipa n'a nulle
ment l'air du Pays Attique , & que pour
fe
faire recevoir à Rome , il n'a point pris de
paffeport à Athènes . On trouve pourtant
dans Athènée le mot angariou , qui figni-
D vj fic
1764 MERCURE DE FRANCE.
fie en Grec , comme le remarque Cafaubon,
ce que l'Auteur de l'Ecole de Salerne a
voulu exprimer en Latin par celui de Vipa.
Mais le bon Joannes de Mediolano n'y regardoit
pas de fi près , & vrai-femblablement
la Langue Grecque ne lui étoit pas affés
connue , pour pouvoir faire des emprunts
fur elle. Le Grec ne commença en Occident
à fortir du tombeau où les Barbares l'avoient
enfeveli , que long-tems après que
le Livre , dont nous parlons , eût parû.
Le premier qui le reffufcita en Italie , fut
Emanuel Chryfolore , qui l'enfeigna publiquement
à Rome , à Florence , à Veniſe ,
vers la fin du quatorziéme fiécle ; or il y
avoit déja plus de deux cent ans que votre
Vipa étoit au monde , fi bien que le Grec
étant encore enterré en ce tems-là pour
plus de deux fiécles , il n'avoit garde de
contribuer à fa naiffance . Mais il ne faut pas
rendre refponfable l'Auteur de l'Ecole de
Salerne du ravage des Gots & des Lombards,
ni prétendre qu'il dût être en fond de Grec,
lors même qu'en Italie on ne fçavoit prefque
plus ce que c'étoit que la belle Latinité.
On le peut juger par le goût bizarre qui
regnoit alois , & par l'entêtement où l'on
étoit encore pour les Vers rimés , tels que
ceux - ci.
Si
AOUST. 1743 . 1765
Si vis incolumen , fi vis te reddere fanum
Curas tolle graves ; irafci erede profanum .
ou de ces autres qui l'étoient , & à la fin &
dans le milieu ,
Fonsfpeculum , gramen , hac dant oculis relevamen ;
Mane igitur montes ; fub ferum inquirito fontes.
dit l'Ecole de Salerne . Ce n'étoit- là qu'un
jeu de mots fade & puerile ; cependant nonfeulement
on eftimoit cette puerilité , mais
on ne pouvoit fouffrit les Ouvrages où elle
ne fe rencontroit pas . C'eft ce que remarque
Jules Céfar Scaliger dans fa Poëtique ,
L. 2. C. 29. où après avoir rapporté cet
exemple ,
Vir precor uxori ; frater fuccurre forori.
Il dit , en parlant de cette forte de Vers ,
Semiprifcis adeo approbati ut fine illis quidquid
fcriberent , ineptum putaretur. Recentiores
illud commenti funt. Il avouë pourtant
qu'il ne fçait point pourquoi ces vers étoient
appellés Leonins. Nominis caufam ignoro.
Pafquier , L. IV. des Recherches , p. 228.
croit que c'étoit à caufe de l'extrême cas
qu'on en faifoit , comme s'ils avoient été
les premiers en nobleffe & en dignité , comme
le Lion l'eft entre les animaux . Voici
fes paroles. Appellant telle maniere de Vers
Leonins , comme plus hautains que tous ceux
do
#766 MERCURE DE FRANCE.
de l'Ancienneté. Fauchet avoit pourtant die
avant lui , que leur nom venoit d'un Pape
Leon , au fentiment de plufieurs. L'Auteur ,
dit-il , eft jufques ici incertain , néanmoins
il y en a qui l'attribuent à un Pape Leon.
Je ne fçais fi c'eft celui qui tenoit le Siége
de Rome l'an 684, lequel on dit avoir réformé
le Chant & les Hymnes de l'Eglife,
Le P. Garaffe , an contraire , dans le Livre
qu'il a fait contre Pafquier , p. 350. foutient
que ce Leon ou Leoninus étoit Moine
de S. Victor.
Voilà , M. tout ce que j'en fçais , & l'affaire
ne mérite pas , ce me femble , une
plus exacte & plus curieufe difcuffion . Mais
ce qui m'étonne , c'eft de voir que Scaliger,
qui fçavoit tout , ait écrit que cette maniére
de Vers , dont l'art confiftoit dans une confonance
des mêmes fyllabes , foit de l'invention
auffi bien que du goût des modernes.
Recentiores , dit-il , illud commenti funt.
Cependant Aulugelle , L. 18. C. 8. jufti
que du tems du Satyrique Lucilius , c'eſtà-
dire , vers la fin de la République , on
avoit déja donné dans cette puérilité. Voici
comme ce Critique parle des Omoiotelephtes,
qui fignifient cette efpece de confonance ,,
quam fint infipida & inertia & puerilia , fa
cetiffime bercle fignificat in quinto Satyrarum
Lucilius. Enfuite de quoi il rapporte less
fie
Vers
AOUST. 1743 . 1767
Vers où ce Poëte traite ce jeu de mots , ces
rimes Latines , d'affectation baffe , vulgaire
& puerile ; & dans ces Vers , Lucilius , qui
n'épargnoit perfonne , ne s'épargne pas luimême
, car ils étoient de fa façon.. Il écrivoit
à un de fes amis , & fe plaignant de ce
que pendant fa maladie il n'avoit point demandé
de fes nouvelles , il ne laiſſe pas de
lui en donner, & de lui dire qu'il croit qu'il
eft de ces gens qui voudroient que tous
ceux à qui ils ont manqué de rendre quelque
devoir , vinffent à mourit , pour être à
couvert des reproches qu'ils fe font attirés
d'eux.
Quando in ea numero manſi quo in maxima nunc eſt
Pars hominum , ut periffe velis quem nolueris , cùm
Vifere debueris hoc nolueris , & debueris „ te ,
Si minus delectat , quod &rexvev Ifocratium hoc eft.
Cet a7sxnov Ifocratium , qui fignifie une
imitation vicieuſe d'Ifocrate , au fujet dont
nous parlons, fait voir aufli que dès ce temsla
cette affectation dans le choix des mots:
rimés , étoit pratiquée par quelques- uns ,
qui , dans Lafage qu'ils en faifoient , s'imaginoient
imiter cet Orateur célébré , quoiqu'elle
fut condamnée par les gens de bon
goût , comme vous venez de voir qu'elle
Pétoit par Lucilius dans fes
vrages .
propres Ou-
Er
1768 MERCURE DE FRANCE.
Et la même raifon pour laquelle elle a toujours
dû l'être en cette Langue, par ceux qui
en connoiffent le génie , c'eft apparemment
parce que cette nouvelle contrainte retenoit
l'efprit dans fon plus noble effort , &
le détournoit de l'application qu'il devoit
avoir aux chofes , pour ne l'occuper que du
ftérile foin de chercher des mots , non -feulement
d'une certaine quantité , mais qui
finiffent encore par les mêmes lettres. Il en
fera pourtant ce qu'il plaira à Scaliger ; je
ne prétends pas oppofer de foibles conjectures
à l'autorité de ces décifions .
En voilà peut- être , M. plus que vous
n'en vouliez , & je crois qu'une autrefois
vous ferez plus retenu à me faire des queftions,
pour ne me pas donner lieu de fatiguer
votre patience. Mais pour finir par où
j'ai commencé, de tout ce que je vous ai dir,
il n'ya rien de fi fort contre Vipa , rien qui
ruine fi abfolument la prétention qu'il avoit
de paffer pour un mot Latin, que de n'être
pas connu de M. le Préfident de B. Rien ne
peut le furprendre ou l'abufer ; d'un funple
d'oeil il diftingue un paffevolant , &
le fait fortir des rangs.
coup
J'ai l'honneur d'être , &c.
L'Auteur de cette Lettre a , fans doute ,
raifon de penfer que Vipa eft un mot pu
rement factice. La nouvelle Edition du
Gloffaire
A OUST. 1743. 1769
Gloffaire De Ducange renferme ce mot ,
lequel manquoit dans la premiére. Les deux
témoignages , qui y font cités , d'Hermolaus
& de Bufchius , défignent fuffisamment que
ce n'est que l'abregé des deux mots Vinum
& Panis , & qu'il s'agit de foupe au vin ou
de roties au fucre.
EPITRE ,
A M. Bouguer , de l'Académie Royale des
Sciences de Paris & de celle de Bordeaux ,
la veille de la Fête de S. Pierre & S. Paul.
Petit Port du Croific , folitaire Patrie ,
Où le Soleil d'abord vint éclairer mes yeux ,
Sejour à jamais glorieux
D'avoir vu commencer la vie
De l'illuftre Bouguer , dont la docte Uranie
Fait voler l'éloge en tous lieux ;
Les feux qu'un faint plaiſir apprête ,
Annoncent le jour de fa Fête ;
Ce jour , comme nos coeurs , affemble nos Patrons.
C'eſt le même Curé qui nous donna les noms ,
Bouguer , à toi , du Chef , dont fur l'unique Eglife ,
Dans tous fes Succeffeurs le pouvoir s'éternife ,
A moi , de l'Apôtre indompté ,
Qui livroit aux Chrétiens une fanglante guerre ,
Quand
1770 MERCURE DE FRANCE .
Quand la Grace invincible eut recours au Tonnerre
Pour triompher d'un coeur contre elle révolté.
En l'honneur de Bouguer , roule fur nos rivages ,
Ecumeux Océan , tes plus beaux Coquillages ,
Où l'argent étincelle entre mille couleurs ;
Pour couronner fon front , Terre , enfante des
Aeurs ;
Doux Zéphirs , portez -lui ces baiſers fur vos aîles
Autour de fon Vaiffeau * volez , & dites - lur ,
Que toujours pénétré de ſentimens fidéles ,
En attendant de fes nouvelles ,
Je me confume dans l'ennui.
Conçois-tu bien, Bouguer, en quel gouffre de peines
D'un plus prochain retour que tu m'avois promis ,
* Mrs Bouguer , Gaudin, de la Condamine , partirent
de Rochefort en 1735- pour Quito dans l'Amé
rique , Ville fituée près de la Ligne , afin d'obſerver
& d'examiner , entre plufieurs chofes , la grandeur des
degrés du Méridien fous l'Equateur , par rapport à la
grandeur du même Méridien fous la Latitude , tan
de la France que du Cercle Polaire , où l'on envoya
auffi des Mathématiciens , afin d'en conclure quelle
eft la figure de la Terre : Si elle eft allongée ou applatie
parfes Poles , & de combien à peu près . Queſtion célebre
, agitée entre les François les Anglois , les premiers
prétendoient qu'elle étoit allongée, les feconds,
qu'elle étoit applatie. Il paroit par les Obfervations
qu'on a faites , que les derniers avoient raison. M. de
Juffieu , Médecin de la Faculté de Paris a accompagné
les trois Aftronomes , pour examiner la vertu & les
qualités des Flantes du Pérou , & faire , s'ilfe pou
voit, quelque découverte dans la Botanique.
L'efpes
A O UST. 1743 . 1771
L'efperance a jetté le plus vrai des Amis ?
Huit fois le Chien céleſte a bû l'eau des Fontaines ,
Et huit fois les cruels hyvers
Ont dévoré l'émail des Plaines ,
Depuis qu'au gré des vents les Ondes incertaines
T'emportent, Curieux , en cent climats divers.
Cependant tu difois , non fans verfer des larmes ,
( Peut-être voulois-tu moderer mes allarmes )
Qu'avant que l'Aftre des Saifons
Trois fois du Zodiaque eût revû les maiſons ,
Tu reviendrois puifer & repuifer encore
Les tendres fentimens que la foeur des Amours
Dès le berceau pour toi dans mon coeur fit éclore ,
Qu'acheva la raifon & qui durent toujours.
Les careffes des Grands , leur jufte confiance ,
Et l'honneur, plus puiffant que les Rois & les Dieux,
Que l'or & tous les dons de la pleine abondance ,
T'ont détaché de nous , pour juger par tes yeux
Le differend audacieux ,
Qu'ont avec nos François les Sçavans d'Angleterre ›
Sur la Aructure de la Terre.
Eh ! que m'importe à moi , retiré fur ces bords ,
Qu'elle foit ronde ou bien ovale ,
Applatie en fes bouts ; fi victime fatale
Des avis oppofés , qui troublent leurs accords,
1772 MERCURE DE FRANCE.
Je perdois un ami plus cher que les tréfors ,
Que forme en mugiflant la Mer Orientale ?
Mais , depuis ton départ tu ne fçais point auffi ;
Quelle foule de maux a fondu fur ma vie ,
du fouci ,
En
proye aux
vapeurs
Aux caprices du fort conftamment affervie
J'ai vu l'affreufe trahison
Difpofant l'appareil de fa fourbe fccrette ,
Au lieu du miel du Mont Himette ,
Me faire avaler du poiſon.
J'ai vu les faux fermens feconder fa malice ,
Et l'infléxible dureté ,
De fes noires horreurs confacrant l'artifice ,
M'immoler à fa cruauté.
Oui , l'inhumaine , je l'ai vûë ,
D'une équité perfide alléguant les défirs ,
Par un dernier coup de maffuë
Précipiter mon ame & mes derniers foupirs.
Ah! quand dans fes decrets fiérement obstinée ,
L'inéxorable. Deftinée
Au Mortel qui naîtra prépare des revers ,
Rien n'en peut détourner les périls , les traverfes ;
Eût-il les yeux d'Argus,tous fes yeux font couverts
Au-devant des gouffres ouverts ;
Qu'il prenne cent formes diverfes ,
Qu'i Igaloppe fur Terre, ou qu'il fende les Mers,
Elle est à fes côtés Compagne inféparable ,
E
AOUST. 1743 177)
Et fa préſence inévitable
Ne l'abandonne pas dans le fein des Enfers.
Mais pourquoi ce récit & ces lugubres plaintes
La prompte fimpathie avec des traits certains ,
Peut-être en ces elimâts lointains
T'a fait de mes douleurs preffentir les atteintes
Neptune fous fa Nefapplani ton azur ,
Pere & maître des Vents , renferme leur cohorte
Dans le fond de ton Antre obfcur ,
Et n'entr'ouvre la vaſte porte ,
Qu'à celui dont le fouffle avec un doux effort
Doit pouffer fûrement mon Ami juſqu'au Port,
N'attends pas , cher Bouguer , la ſaiſon la plus rude
Uliffe défiré , viens banir mon chagrin ,
Et borner mon inquiétude.
L'odorant Serpolet avec le Jonc Marin
Forment dans la rocaille , épars à l'avanture ;
Des tapis naturels de fleurs & de verdure ,
Et l'Allouette le matin
En dégoifant fa ritournelle ,
s'éleve dans la nue , & fon doux chant rappelle
L'Aurore qui fommeille auprès du vieux Tithon ,
Sous des rideaux rayés de Rofe & de Citron.
Reviens, comme autrefois errans au bord des Ondes,
Nous y retrouverons loin du Peuple indifcret ,
Ces Grottes fraîches & profondes ,
Où le filence dort dans les bras du fecret ,
Où la Nature ingénieuſe ,
Simple
1774 MERCURE DE FRANCE
Simple avec agrément , fans art induſtrieuſe ,
A dreffé des fauteuils , une table , un buffet ,
Et des rafraîchiffoirs , où mettre la bouteille
Pleine de la liqueur vermeille *
Dont le fin Bourdelois groffit fes revenus.
C'eft de-là quelquefois que fans être apperçus ;
Nous avonsvû nos Néreïdes
Baigner leur fein d'albâtre , & loin des yeux per
fides ,
Des Tritons effrontés , à les fuivre affidus ,
Courir en folâtrant für les rives humides ,
Et fe faire , à l'envi , mille tours ingénus.
Momens que je regrette , hélas ! vous n'êtes plus ,
Mes plaifirs ont paffé , comme une Onde coulante ,
Dont l'argent éclatoit für un fond fabloneux ,
Languit à la chaleur brulante ,
Se deffeche & n'eft plus qu'un terrein limoneux .
Ah ! l'adverſe fortune , à me perdre acharnée ,
Sans défunir nos coeurs , me féparant de toi ,
Chaque jour , cher Bouguer , me paroît une année ,
Et ma trifte Patrie eft un exil pour moi.
Par M. Desforges Maillard.
* Le vin de Bretagne n'étant pas d'une excellente
qualité , on en tire de Gascogne , c'est le vin que
l'on boit dans toutes les bonnes Maifons de cette Pros
vince.
EXTRAIT
A O
UST.
1743.
1775
ર ર ૯ ૨૩૯ ૯ ૨૯ ર ૯ ટ રટ રટ ૨૯ ૩૯ ૨૯
EXTRAIT d'une Lettre de M. F. Auteur
de la Topographie du Pays de Cotentin
écrite à M. D. L. R. le 29 Juillet 1743 .
V
M
Ous me faites l'honneur de me dire ,
Monfieur › que quelques Lecteurs
éclairés ont été fcandalifés de trouver , page
1091 du Mercure de Juin , I. Vol. que l'Auteur
du Manufcrit que je cite dans ma Defcription
du Cotentin , a pris le Carentonium
du Regiſtre de S. Denis , cité dans les Preuves
de l'Hiftoire de la Maiſon de Montmorency
, par le fçavant du Chefne , pour notre
Ville de Carentan , au lieu
que c'eft Charenton
, près de Paris , dont il s'agit dans ce
Registre.
Je ſuis bien éloigné , M, de vouloir deffendre
cet endroit du MM . en queſtion.
Avant qu'un tel deffein entre dans ma penſée ,
On pourra voir la Seine à la Saint Jean glacée ,
Arnaud à Charenton devenir Huguenot ,
Saint Sorlin Janfenifte , & Saint Pavin dévot.
Je confens donc de tout mon coeur ,
qu'on l'efface , ce rifible , ou fi vous voulez
, ce ſcandaleux endroit , & qu'on lui
fubftituë , pour ne rien perdre , fi on le
juge à propos , pour l'honneur de notre Carentan
,
1776 MERCURE DE FRANCE.
-
rentan , un fait très - grave , & de plus ;
très édifiant , du moins au gré de l'Auteur
de qui je l'emprunte. Cet Auteur eft
le célébre M, Thiers . Voici ce qu'il rapporte
dans fa finguliere Hiftoire des Perruques
, imprimée à fes dépens à Paris en
1690. page 271 .
SERTON , Evêque de Sées , qui cer-
> tainement avoit affifté au Concile Pro-
» vincial de Rouen , comme il eft dit dans
» la Préface & dans la Conclufion de ce
» Concile , fit encore quelque chofe d'auffi
extraordinaire , que S. Anfelme, deux ans
» après le Concile National de Londres.
» Orderic Vital , Moine de S, Evroul , rapporte
( 12. l. 3. Epift . 62. 11. l. 15. Hift.
»ad an. 1104, ) que Henri I , Roi d'Angle-
» terre , étant à Carentan le Samedi de Pâques
avec toute la Cour , & toute fon
»Armée , ce Prélat , après l'avoir exhorté
à faire la guerre à ceux qui troubloient
» & pilloient la Normandie , lui dit & à
» toute fa fuite , qu'il étoit mefféant à des
»hommes de porter de grands cheveux ,
» comme des femmes : omnes foemineo more
» criniti eftis, quod non decet : que cela étoit
» déteftable dans la penfée de S. Paul : Viros
crinitos effe quam incongruum & deteftabile,
fic Paulus ait , &c.
J'omets , M. plus d'une demie page de
AOUST. 1743 1777
la narration de M. Thiers , pour venir plutôt
à la conclufion .
>
» Il pria enfuite S. M. de donner en ce-
» la un loüable éxemple à fes Sujets : Unde
gloriofe Rex , obfecro te ut exemplum fub-
»jectis præbeas laudabile inprimis videant
in te qualiter debeant præparare fe.
» Et ce Prince lui ayant témoigné , qu'il le
» vouloit bien , Serton tira aufli- tôt des ci-
» feaux de fa manche , & lui coupa lui-
» même les cheveux. Il en fit autant au
» Comte de Meulan , & à beaucoup d'Of-
» ficiers. Toute la Cour , & toute l'Armée
» fe les firent auffi couper à l'envi , & té-
» moignerent beaucoup de mépris pour une
chofe dont ils avoient fait auparavant
beaucoup de cas . His dictis Rex cum opti-
➜matibus exultans acquiefcit , & prius Regem,
» ac poft modum Comitem Mellenticum , Procerefque
plurimos propriis manibus tetondit.
»Omnis Familia Regis & Concurrentes unde-
» cumque certatim attonfi funt , & Edictum
principale formidantes , pretiofos olim capillos
prefecuerunt , & amicam dudum Cafa-
» riem , ut viles quifquilias , pedibus conculca-
» verunt , &c.
33
Que penfez- vous , M. de cet abbatis
général de cheveux ? Carentan n'a- t - il pas
été en cette occafion , le théatre d'une avanture
en effet bien extraordinaire ? ne le
E voila1778
MERCURE DE FRANCE:
voilà-t-il pas en même tems dédommagé
de l'ignorance d'un Auteur , qui l'avoit
confondu avec Charenton , faute fans doute
d'avoir voyagé ?
J'efpere m'acquitter au premier jour de
votre commiffion auprès de M. le Marquis
de M. . . . J'ai toujours oublié de vous
faire part de trois couplets fur l'Air , Vous
qui vous mocquez par vos ris , &c, que je fis
à la hâte , il y a quelque tems à la prière
d'une Troupe de jeunes gens , qui ayant
reprefenté à Vallogne la Tragédie de Brutus
de M, de Voltaire , avec affés de fuccès
allerent le lendemain la repréfenter encore
au Château de la B. fuivant l'invitation gracieuse
de l'illuftre & aimable Famille qui
Phabite. Ces Couplets fervirent de Prologue
, & c'est par eux que je vais terminer
ma longue Lettre.
A M. le Marquis , & à Madame la Mar
quife de M .....
V Ous que l'Hymen joint par les Noeuds
De l'Amour véritable ,
Tendres Epoux , Maîtres heureux
De ce féjour aimable ,
Daignez , Seigneurs , faire à nos jeux
Un accueil favorable.
>
A
AOUST. 1743 . 1779.
A Mademoiselle leur Fille unique.
Nymphe , dont les appas naiffans
Parent mieux ce bocage ,
Que tous les autres ornemens ,
Qu'y met l'Art en ufage :
Brutus , l'ennemi des Tyrans ,
Vient vous y rendre hommage.
Tullie aux Romains affranchis
Caufant beaucoup d'allarmes ,
Seulement pour vaincre le Fils ,
A d'affés fortes armes .
Mais le Pere même eft foumis
En faveur de vos charmes.
J'ai l'honneur d'être , &c.
EXPLICATION de deux Paffages
de Virgile .
I.
Tuque adeò quem mox quafint habitura Deorum
Concilia incertum eft, &c. Georg. lib . 1. V. 24. & 25.
5
J'implore auffi le fecours de votre Divinité , ô
» Cefar , quoiqu'il foit encore incertain quelle Claffe
des Dieux vous devez bientôt choiſir pour y
admis.
être
A Traduction litterale qu'on voit ici
Lde cefameux paffage à critiqué & fimal
E ij entendu
1780 MERCURE DE FRANCE.
entendu , fuppofe 1 ° . Qu'on avoit décerné
des honneurs divins à Augufte , quand Virgile
lui adreffa cette invocation : 2 ° . Qu'on
avoit laiffé à ce nouveau Dieu la liberté de
choifir fa place parmi les Divinités du Ciel
ou de laTerre,de la Mer ou même de l'Enfer:
3 °. Qu'Auguſte n'avoit point encore pris de
parti , mais qu'il devoit bientôt fe déclarer
fur ce point. Or c'est là précisément ce que
le Poëte a fuppofé,
D'abord , il eft inconteftable qu'Augufte
a été adoré comme un Dieu , même de fon
vivant : Horace le dit en termes exprès :
Prafenti tibi maturos largimur honores ,
Jurandafque tuum per nomen ponimus aras . Epift. 1
Lib. 2:
Et les derniers mots du compliment que
Virgile fait ici à fon Héros , démontrent
évidemment que celui-ci étoit regardé comme
un Dieu , quand l'Auteur compofa co
brillant morceau :
Et votis jam nunc affuefce vocari.
En fecond lieu , on avoit laiffé à Augufte
la liberté de fe faire reconnoître & adorer ,
ou comme un Dieu de la Terre , ou comme
un Dieu du Ciel , &c. Du moins le Poëte
nous en affûre en termes formels.
?
On ignore encore , dit-il à Céfar , fi vous
ne choifirez pas les Villes & les Campagnes
pour y préfider : Vrbiſne invifere , Caſax ,
Ter
AOUST. 1743 . 1785
Terrarumque velis curam , &c. Ou fi vous
n'aimerez pas mieux régner fur les Mers :
An Deus immenfi venias Maris , &c. Ce qui
vient d'être rapporté eft clair , & ce qui fuit
dans le Poëte , ne l'eft pas moins.
Enfin Augufte n'avoit pas encore pris de
parti , mais il étoit fur le point de faire connoître
en quelle claffe des Dieux il vouloit
être admis. C'eft pour la premiére de ces
raifons , que Virgile invoque ce Prince ,
après avoir invoqué tous les Dieux qui préfidoient
aux campagnes. En effet , il pouvoit
arriver qu'Augufte , qui n'avoit pas encore
fait ufage du choix qu'il avoit en fon pouvoir
, prît place parmi ces derniéres Divinités.
Pour ce qui regarde la deuxième Partie
de ma Propofition , elle eft démontrée
par le mox du paffage que j'explique.
De ces trois principes , qui paroiffent
également indubitables , il refulte 1 ° . Que
ce compliment , ou fi l'on veut , cette invocation
que Virgile adreffe ici à Octavien,
a été composée dans le tems où les Romains
commencerent à lui rendre des honneurs
divins. Mais en quelle année de Rome ce
Prince devint - il l'objet d'un culte fuperftitieux
? c'eft un point fur lequel les fentimens
font partagés. Si l'on en croit Appien,
ce fut en l'année de Rome 719. Selon cette
opinion , & la Chronologie du P. de la Ruë,
E iij que
1782 MERCURE DE FRANCE.
que je crois la plus éxacte , il n'y avoit pour
lors que deux ans que Virgile avoit commencé
à compofer les Géorgiques. Ainfi les
dix-neuf vers qui regardent Augufte , peuvent
avoir été faits la même année & ajoûtés
au premier Livre des Géorgiques , qui
ne parurent que cinq ans après , fuppofé
que Virgile ait employé fept ans à la compofition
de cet Ouvrage.
Quiconque admet cette Chronologie ,
n'eft point obligé de dire avec quelques
Modernes , qu'ici Virgile porte la flaterie à
l'excès , ni d'avoir recours à je ne fçais
quelle Prédiction & efpece d'Oracle prononcé
par un efprit Prophétique , & il fe perfuade
fans peine qu'il n'y a point ici plus de Prophétie
, qu'il ne s'en trouve au fixiéme Livre
de l'Enéïde .
Au refte , fi on s'attache à l'Auteur de la
vie de Virgile , comme l'a fait le Sçavant P.
Catrou , pour faire raifonner le Poëte fenfément
, fans en faire un Prophéte , il faudra
dire que le brillant morceau dont il s'agit
, fut écrit & inferé dans les Géorgiques
vers l'an de Rome 724. où , felon ce Syftême
, Augufte commença à recevoir des
honneurs divins : autrement on expliquera
toujours mal les termes Et votis jam nunc affuefce
vocari , qui marquent avec la derniere
précifion l'époque de cet événement.
Il
AOUST. 1743 . 1783
Il réfulte 2 ° . qu'on doit lire ici Concilia
par un c. Ce mot eft au plurier par le privilége
qu'ont les Poëtes d'employer ce
nombre au lieu du fingulier , & fignifie la
même chose que claffis , c'eſt-à-dire , claſſe,
ordre , &c .
>
Pour mieux concevoir ma pensée , on
doit fe fouvenir , que chés les anciens Idolâtres
, les Dieux étoient divifés en quatre
claffes principales , qui étoient compofées
la premiere des Dieux du Ciel , la feconde
des Dieux de laTerre , la troifiéme des Dieux
de la Mer , & la quatrième des Dieux de
l'Enfer. Au moyen de cette obfervation, tirée
de l'endroit que je tâche d'éclaircir , on
voit difparoître toutes les difficultés ; on
conçoit que l'incertitude du Poëte , incertum
eft , ne venoit que de ce qu'il ignoroit encore
, dans laquelle de ces quatre differentes
claffes de Divinités , Augufte voudroit
entrer : on apperçoit qu'on s'eft lourdement
trompé , en accufant Virgile de s'être
ici oublié , jufqu'au point d'avoir paru fouhaiter
une mort prompte à fon Prince.
Cette opinion fi peu honorable
pour le
plus poli & le plus fenfé des Poëtes , fuppofe
néceffairement
que notre Auteur avoit
dit de fon Héros , qu'il devoit bientôt choifir
une place parmi les Dieux , & qu'en conféquence
, il ne devoit pas refter long-tems
E iiij
fur
1784 MERCURE DE FRANCE.
1
fur la Terre : mais heureufement pour Virgile
, il n'a pas même fongé à ce qu'on voudroit
ici lui attribuer. Augufte , qui avoit
été mis au nombre des Dieux de fon vivant,
pouvoit bien encore entrer dans l'une des
claffes qu'ils compofoient , fans être obligé
de quitter la vie.Qu'on juge maintenant des
interprétations , & des traductions ordinaires
de ce paffage.
I I.
Pafcite , ut ante , boves , pueri ; ſubmittite tauros:
Eglog. I. v. 46.
Bergers , faites paître des géniffes à l'ordinaire ,
» Et domptez des taureaux comme autrefois.
Virgile exprime ici en un feul vers ce qu'il
expofe plus au long au troifiéme Livre des
Georgiques , où il dit que pour élever des
géniffes , il fuffit de les laiffer paître , mais
qu'à l'égard des jeunes boeufs , qu'on deſtine
aux ufages de la ferme , on doit travailfer
à les dompter , tandis qu'ils font encore
dociles , & que leur âge les rend capables
d'inftruction :
Catera pafcuntur virides armenta per herbas . v. 162i
Jam vitulos hortare , viamque infifte domandi,
Dum faciles animi juvenum, dum mobilis atas. vi
164. & 165.
Le Poëte fuppofe que Tityre s'occupois
AOUST. 1743 . 1785
a
c'eſt
á élever des bêtes à cornes , c'est-à - dire ,
faire paître des géniffes : Ille meas errare
boves , &c. & à dompter des taureaux pour
fon ufage particulier , & peut - être même
pour en faire commerce : fubmittite tauros.
Je ne fçais fi c'eft prévention , ou non ÿ
mais je fuis pleinement convaincu , que
là le vrai & l'unique fens du vers Pafcite ,
ut ante , &c. D'autant plus 1 °. que Virgile
s'énonce plus clairement ailleurs : 2°.
les verbes fubmittere & domare font parfaitement
fynonimes ; 3 ° . que les interprétations
ordinaires des mots fubmittite tauros ,
font trop recherchées & trop forcées , pour
contenter un Grammairien , qui fe pique
tant foit peu d'exactitude.
8
A Crepy le 28 Juillet 1743-
que
LE MEDECIN mis en réputation,
CONTE
Tiré du Latin.
:
CErtaine Fiévre ayant , par rude affaut ,
fine , Réduit au lit le Payſan Thibaut ,
Sa Femme Luce , active , mais peu
L'allarme au coeur , & leslarmes aux yeux
E v Courut
1786 MERCURE DE FRANCE,
Courut foudain confulter de fon mieux
Meffer Evrard, Docteur en Médecine ,
Dont le fçavoir n'étoit pas fort prifé ;
Voire , d'autant qu'Evrard n'étoit ailé ,
Maint concluoit que c'étoit un franc Ane ;
Conclufion digne d'un franc Cheval.
Notre Docteur , lorfque la Payfanne ,
En fon jargon fimple & non doctoral ,
L'eut informé des ſymptômes du mal ,
Mit par écrit , comme il n'y manquoit guéres;
Son Ordonnance aniple & telle en tout point ,
Qu'elle eût primé chés les Apoticaires ,
Defquels , au refte , Evrard ne parla point
A Luce , neuve en ces fortes d'affaires.
Lui donnant donc le Papier d'une main ,
Et tenant l'autre ouverte aux Honoraires ;
Que votre Epoux , dit - il , demain matin
» Prenne cela dans un verre de vin ;
ל כ
» Moyennant quoi , j'ofé bien lui promettre
» Soulagement. Luce au pié de la lettre
Entend la chofe , & fans rien acheter
30
Qu'un peu de vin , s'en retourne au plus vite
Bien réfolué à tout exécuter ,
Et defirant heureuſe réuffite :
Defir qu'en elle il eft bon de noter.
Tout étant prêt pour l'Aurore naiflante ;
La Campagnarde à fon Mari préfente
Vin & Papier dans un Vaſe de bois.
Thibaur
AOUST. 1743 . 1787
Thibaut , muni d'un grand figne de Croir ,
Sans trop d'efforts , fçut , avec confiance ,
Venir à bout d'avaller l'Ordonnance ,
Qui flatte moins fon goût que la boiſſon.
Qu'arriva-t'il après ? Rien que de bon.
Le mal fit place à la convalefcence ,
En peu de jours ; & cette guérifon
Au Médecin fit un honneur immenfe.
F. M. F.
LETTRE de M..... au fujet de la
Chronologie , & de la Topographie des
Legendes.
J
E n'ai pû , Mr, répondre plutôt à l'empreffement
que vous avez de fçavoir ce
que je penfe de la Chronologie & de la Topographie
du nouveau Bréviaire de Paris ,
&c. Le peu de tems qu'il y a que je poffede
ce Livre ; la multitude d'affaires dont je me
fuis trouvé accablé depuis que je l'ai ; &
par
deffus tout les douze ou treize Tables
dont il eft compofé , & dont il faut parcourir
la meilleure partie , pour voir le but
de l'Auteur fur un feul nom , foit de Lieu,
foit de Saint , tout cela , dis -je , m'a empêché
de pouvoir vous fatisfaire plus promptement.
Voici feulement quelques réflé-
E vj xions
1788 MERCURE DE FRANCE.
xions , tant fur la Préface , que fur l'Ou
Vrage en général. Je pourrai dans la fuite
éxaminer de plès chaque article , &
vous en dire mons plus à loifir.
L'Auteur , qui ne donne que comme à
regret quelques Eloges à la Géographie des
Légendes , tâche d'attirer de fon côté tous
les avantages par le grand nombre de differences
, qu'il fuppofe entre ces deux Ouvrages
: & l'on veut bien croire qu'il parle
fincerement , lorfqu'il dit qu'il en fupprime
te détail , comme trop long.
Mais. puifqu'il propofe au Lecteur de découvrir
ces differences , je vais vous expofer
celles qquuee jj''aaii cru appercevoir, & qui,
felon moi , font plus pour la Géographie ,
que pour la Chronologic.
Il n'eft que trop vrai que dans le précis
que fait le Chronologifte du titre de la Géographie
, & où il convient que les noms de
Lieux quife rencontrent dans les Martyrologes,
les Légendes des Saints , & à la tête des Canons
de Conciles des nouveaux Bréviaires de France,
fe trouvent renfermés dans cette Brochure ;
it donne le pas à ce premier Ouvrage fur le
fien propre , fans peut- être , le fçavoir , puifqu'il
déclare par- là , d'une maniere tacite ,
que for Volume , qui n'avoit en vûë d'abord
le feul Diocèfe de Paris , ne devient
utile qu'après coup , & par forme de
que
SupAOUST.
1743. 1785
Supplément à quatre autres Diocèfes , fans
même leur fournir la Chronologie , qui
leur eft propre , & fans c .... prendre aucuns
Martyrologes . En déclarant donc que fon
Volume embraffe moins de matiéres , & fe
borne dans des Provinces tout autrement limitées
, qu'environ les vingt Diocèfes , où
F'on dit que la Géographie a été reçuë avec
applaudiffement , il reconnoît une premiére
difference. Je paffe aux autres.
Je conviendrai avec le Chronologiste ,
qu'il y a des fautes dans la Géographie : mais,
outre que la plupart femblent être des fautes
feulement d'impreffion , celles où l'Auteur
s'eft réellement égaré , m'ont fait conclure
qu'il étoit bien plus facile de polir ,
en plus de fix ans , un Ouvrage affés borné ,
que de réuffir également, en moins d'un an ,
àun autre qui eft prefque univerfel en fon
genre. Les dattes des Approbations des deux
Ouvrages , m'ont fait naître cette réfléxion ,
& cette feconde difference.
Troifiéme difference . C'eft cet amas ac
cablant de Tables fur Tables , dont il eſt
impoffible de ne pas feüilleter le plus grand
nombre , pour ne trouver fouvent que ce
qu'on vient de lire dans la Légende , qui a
occafionné cette fatigante recherche alt
lieu que l'unique Table , qui forme la
Géographie , ne peut furcharger celui qui
"
a
1790 MERCURE DE FRANCE.
a le moins de tems à foi.
Je ne trouve point , que la Géographie
des Légendes fe donne pour une Géographie
complette , mais feulement pour un Supplément
des Dictionnaires Géographiques , pour ce
qui regarde les Légendes : auffi je ne fçais fur
quoi eft fondé ce reproche , qu'on lui fait
de n'être qu'un fimple Vocabulaire , ou Dictionnaire
de mots. Il ne paroît pas que cette
Brochure ait jamais eu d'autre objet.
Mais la fuite de cette même difference ,
qu'étale le Chronologifte , ne peut guéres
lui attirer la bienveillance du plus grand
nombre de fes Lecteurs. En effet , lui , qui
fe donne pour Prêtre , fait un affés mauvais
compliment à tout le Clergé , & même
à tout l'Ordre Sacerdotal , lorfqu'il taxe la
Géographie de n'être pas fuffifante pour mettre,
un Lecteur peu verfé dans l'Art Géographique,
aufait de la jufte pofition des Lieux, &c, Plus
bas il compte s'exprimer avec l'étenduë néceffaire
pour expofer la plupart des Lieux prefque
fous les yeux du Lecteur le moins éclairé.
Au contraire , le Géographe fuppofe , avec
fondement les perfonnes qui auront befoin de fon
Quorage , inftruites des principes dela Géographie.
Avec une difference fi palpable , y at-
il encore à douter auquel des deux Auseurs
le Clergé donnera la préférence : De
telles expreffions de la part du Chronolo
giſte
AOUST. 1743 . 1791
gifte , ne demandent point de réfléxions.
Le corps de la Topographie iépond parfaitement
à l'idée que fon Auteur donne
d'une grande partie de fes Lecteurs dans fa
Préface. C'est pour cela , qu'après les mots
François , par exemple Avranches ou Nan
res , il ajoûte de fuite : Ville de France en
Normandie , en Bretagne , & c. comme s'il y
avoit des Prêtres à Paris affés peu verfés dans
Art Géographique , pour placer la Bretagne
en Turquie , ou la Normandie en Aſie .
Peut-être feroit-ce là encore une difference
pour la forme , qui paroîtra être peu honorable
au Chronologifte
.
Le Géographe n'eft pas moins Prêtre que
le Chronologifte , fr l'on en croit le Privilége
général , imprimé en 1740. à la tête
de fa Brochure. Ainfi la Géographie n'eft
pas pour lui l'objet de fon Art , auquel on
donne à entendre qu'il s'eft adonné d'une
maniére fervile . Mais il auroit cru , ce femble
, infulter à fes Confreres , aufquels il
paroît n'avoir préfenté fon Ouvrage qu'en
tremblant , s'il avoit répété en François &
à diverfes repriſes les faits énoncés dans les
Légendes , & que chacun vient de lire en
Latin. C'eft fe donner un peu trop gratuirement
pour le guide des Prêtres les moins
éclairés , que de leur répéter fans ceffe une
leçon , qu'ils doivent fçavoir , auffi bien
que
1792 MERCURE DE FRANCE;
que celui qui la donne , à l'exception de
cinq ou fix mots barbares , & qu'ils étoient
fürs de trouver dans la Géographie des Légendes.
Voici donc l'efpéce de Lecteurs qui pourront
être peu verfes dans l'Art Géographique.
Ce font ceux qui récitent en François le nouveau
Bréviaire de Paris. Mais en fuppofant
ce correctif, le Clergé des quatre Diocèfes ,
ajoutés à celui de Paris , pour la Topogra
phie , eft toujours cenfé
éclairé & peu
verfé dans l'Art Géographique , puifque le
Bréviaire de ces Diocèfes n'eft point encore
traduit , & ainſi n'eft destiné que pour
ceux qui entendent la Langue Latine , dont
le Clergé forme la plus grande partie .
n'a
peu
Il eft fingulier que dans un Ouvrage qui
pour but que la connoiffance des Tems &
des Lieux mentionnés dans les Légendes des
Saints , dans les Canons de Prime , on ait
jugé à propos d'indiquer les principaux Myftérés
de J. C. dont à peine le nom fe trouvet'il
dans les Légendes , fans qu'il fe life aucun
trait du Saint des Saints dans aucune
Leçon qui rapporte les Vies des Saints , excepté
quelque chofe dans les Apôtres.
Il est également fingulier de voir avec
quelle forte d'emphaſe l'Auteur prend pour
fes garants les Tillemonts , les Baillets , les
Fleuris , tant qu'il traite la Chronologie :
mais
AOUST. 1743 . 1793
mais dès qu'il deviendra [ Topographiste ] ,
Il abandonnera , fans s'en vanter , ces mêmes
fameux Auteurs , pour fe repofer uniquement
fur la bonne-foi des Traditions
douteufes , que chaque Diocèfe conferve ,
trop précieufement peut- être , & qui fe trouvent
fouvent démenties par ces mêmes Auteurs
, dont notre Chronologifte s'étoit paré
, lorſqu'ils lui étoient moins néceſſaires
, & dont la Critique ne lui convient
apparemment , qu'autant qu'elle eft conforme
aux Traditions Diocèfaines , tant bien
que mal fondées. Quittons la Préface.
La premiére page de la Chronologie préfente
une inadvertance dans laquelle font
également tombés tous ceux qui ont eu part
à l'Edition de cette énorme maſſe de Tables
; la voici .
Les Réglettes employées au- deffous d'une
année , marquent les faits differens arrivés
cette même année.
Or après avoir lû :
L'an 167. avant l'Ere vulgaire de J. C.
Martyre des Machabées , on trouve au deffous
:
-Conception de la Ste . Vierge , & c.
Naiffance de la Ste Vierge , &c.
-Préfentation de la Ste. Vierge , & c.
Tout Lecteur , peu verfe dans la connoiſſance
des tems , pourra croire , fans faire attention
à
1794 MERCURE DE FRANCE.
à la fuite , que la Conception , la Naiſſance,
& même la Préfentation de la Ste. Vierge ,
font arrivées dans le cours de la feule année
167 , avant l'Ere vulgaire , & environ 163 .
ans avant J. C. fon Fils .
L'emplacement de Curube vers la Sicile ,
( p. 18. ) n'eft pas mis prefque fous les yeux
du Lecteur le moins éclairé : Le contour de
cette Ifle eft d'une affés grande étenduë : le
feul côté qui regarde l'Affrique , doit faire
faire bien du chemin , à moins qu'on n'ait
recours à la Topographie . J'ignore quel eft
le garant du Chronologifte fur le Diaconat
de S. Cheron , ( p . 22. ) regardé feulement
felon ce qu'en dit le Bréviaire de Paris.
La Gaule , l'Italie , le Languedoc & la
Septimanie , ( p. 233. & 246. ) [ ces deux
Provinces font la même ] font données toutes
quatre pour la Patrie de S. Sébastien .
En voilàun peu trop pour un Lecteur, pen
verfé dans l'Art Géographique : furtout lorf
qu'on n'entre avec lui dans aucune expofition
de l'ancienne & de la nouvelle diftribution
de Provinces , & qu'on ne le prévient
fur ce qu'on entend par Patrie , c'eſt-àdire
, tantôt Pays de la propre naiffance du
Saint , tantôt Pays de la naiffance de fes
Peres.
pas
M. Baillet ne fut jamais le guide de notre
Chronologiſte , pour ce qui concerne S. Eu❤
gene
AOUST. 1743 . 1795
gene ,
S. Euftache , S. Lucain , Ste. Marine ,
Ste. Urfule , & une infinité d'autres , non
plus que pour la Tradition , qui place les
Reliques de S. Jacques le Majeur, à Compof
telle. ( p. 217. ) Mais je m'apperçois que je
deviens , fans y penfer l'accufateur d'un
inconnu. Je m'arrête tout court, & je pourrois
bien m'en tenir à ce que je viens de vous
écrire , fi ma Lettre ne paffe pas jufqu'à celui
qui y eft intéreffé : fi par hazard il la
voyoit , & qu'il y répondit , je pourrois
encore trouver quelques fujets de critique à
lui objecter , car je ne crois pas avoir épuisé
la matiére : mais comptez que vous ferez
toujours le premier inftruit fur cet article.
J'oubliois de vous dire que la Table de
la page 469. eft faite pour le même ufage que
celle de la page 335. Mais cette Table de la
même page 335. étant dreffée en faveur de
ceux qui lifent le Bréviaire en François , celle
de la page 469. devient parfaitement inutile
& de trop , puifqu'il n'y a pas d'apparence
qu'il y ait de Bréviaire François dans
les quatre Diocèles , en faveur defquels on a
augmenté le Supplément à la Topographie.
Je fuis , &c.
A Nogent le 18. Octobre 1742.
VERS
1796 MERCURE DE FRANCE.
VERS
Pour le Portrait de M. Deshayes , Acteur du
Théatre Italien.
Connoifant Onnoiffant à fond le Théâtre
Il en compofe l'ornement ;
Le Public en eft idolâtre ,
Et le trouve toujours charmant
Il rit avec tant de jufteffe ,
Qu'avec lui tout le monde rit ;
Oui , fes larmes ont tant d'adreffe ,
Que la vertu même en ſourit.
Par M. Laffichard.
VERS
Pour le Portrait de Mlle Deshayes , Actrice
du même Théatre.
Dans l'art flateur de Terpficore
Elle réunit tous les goûts :
La vertu feule la décore
De cet air charmant , fi doux.
Qu'une Agnès parle par fa bouche ,
Elle enchante , faifit , & touche ,
Et quand elle exprime l'amour ,
Chacun le reffent à fon tour .
Parle même.
Les
AO UST. 17437 1797
Les mots des Enigmes & du Logogryphe
du Mercure de Juillet , font les Dents , le
Violon & Heauton- timorumenos , Titre d'une
Comédie de Terence . On trouve dans le Logogryphe
, Mer , Eau , Air , Os , Mort , Ino,
Hermione , Hermite , Jafon , Envie , Homme ,
Trabifon , Jeûne , Aumône , Honneur , Vérité,
Etna , Un , Trois , Huit , Satin , Hier , Mi
tre Hêtre , Ormeau , Jour , Nuit , Minos
Roi , Titres , Sénateur , Moife , Mahomet,
Thou , Suetone , Aufone , Efther , Ire , Ane,
Remus , Jerôme , & Rat.
>
ENIGM E,
LE même inftant nous a vû naître,
Et le même fort nous attend ;
En même-tems on nous voit croître ,
Et nous nous reffemblons , mais fi parfaitement;
Que les yeux les plus fins s'y trompent aiſement
Dans le fiécle d'Aftrée ,
Et les aimables jours de Saturne & de Rhée ;
1
Où regnoit la candeur ,
L'équité , la droiture ;
Où le crime étoit en horreur ,
Ainfi que l'impoſture ,
Nous
1798 MERCURE DE FRANCE,
Nous vivions tous en paix dans la fimplicité ,
Où nous avoit créé la divine Bonté .
Ces beaux jours ne font plus ; il faut changer de
ftyle ;
A préſent on ſe fait un jeu
De porter parmi nous & le fer & le feu ;
On nous tourmente , on nous mutile.
Oui ; nos tourmens ſont infinis ;
Vous le fçavez , belle Philis ;
On ne nous verroit pas fi fouvent à la gêne ;
Et les martyrs de votre vanité ,
Si pour pour plaire au charmant Sylene ,
Il ne falloit prendre la peine
De cultiver votre beauté.
ဦး ဦး ဦး ဦး ဦး ဦး ၊
LOGOGRYP HE.
ENnemi déclaré d'un préambule long ,
Je vais , fans plus tarder , t'expliquer ma nature ;
Huit pieds, ami Lecteur , compofent ma ftructure
Je laiffe à ton efprit fécond
Le foin de les unir enſemble ,
Et de trouver tous les mots que j'affemble.
Docte Enfant du raiſonnement ,
Le bon fens forme mes parties ,
Et quand avec efprit l'Art les a réünies ,
Je fçais convaincre fortement.
Mes deux extremités , prifes avec jufteffe ,
Te
AOUST. 1743 . 1792
Te donneront ce qui faitla richeſſe,
Combine tout differemment ,
Tu trouveras ce qui ferme une Ville ;'
Un vuide dedans fort utile ;
Le rendez-vous de la moindre vapeur ;
Un animal qui n'eft point en honneur ;
Ce qu'on entend crier aux Cochers dans les rues
Ce qui fait cheminer les Nuës ;
Les noms d'un Saint , d'un légume , d'un fruit ,
S'offrent , fans doute , à ta penfée ;
Ornement féminin dont la mode eſt paſſée ;
Ce qu'on doit voir roder pendant la nuit
Dans une Ville policée ;
D'Eau bourbeufe un confus amas ;
Une Ville de France , une des Pays - Bas ;
De plus , chofe qui joint la France à l'Amérique à
L'A , B , C , D , de la Muſique ;
Sorte de Bouclier ; ce que tient un Forçat ;
Aux Pourceaux ce qui fert de plat ;
Ce qu'en un Livre on voit à toutes pages ,
Mais qu'on ne trouve point écrit ;
Terme de Droit , qui bon effet produit ;
Un Element ; le nom d'un de ces Sages ,
Dans l'Egypte autrefois fameux ;
parure
Un Animal dont la riche fourure
'Aux uns fervant de meubles , aux autres de
Defend contre un froid rigoureux ;
Ce qui dans une femme eft l'idole des yeux ;
Un
1800 MERCURE DE FRANCE:
Un mot Latin connu de tout le monde
Sur lequel notre espoir fe fonde ;
Un meuble utile dans l'hyver ;
Une Note ; accident qui nous fait voir la Mer ;
Ce qui donne la mort ou conferve la vie ;
Ce que fait la Maman , qui trop aime fon fils ;
Mais c'eft aflés , Lecteur ; devine qui je ſuis ,
Car t'accabler de mots, n'eft pas ce que j'envie .
25asasasásés ésés ésésésésés ésésésés- ésasassess
NOUVELLES LITTERAIRES ,
DES BEAUX- ARTS, &c.
OUVEAU RECUEIL , contenant 1 °. des
Differtations fur l'Hiftoire Eccléfiaftique
& Civile deParis , 2 ° . une Differtation
fur plufieurs points de l'Hiftoire des Enfans
de Clovis, premier du nom , Roi de France ,
& fur quelques ufages des Francs , 3 ° . la
Vie de Charles V. dit le Sage , Roi de France
, écrite par Chriſtine de Piſan , Dame qui
vivoit de fon tems ; enfin des Notes fur
cette Hiftoire , par M, l'Abbé Lebeuf , Cha
noine de l'Eglife d'Auxerre , & Membre de
l'Académie Royale des Infcriptions & Belles-
Lettres , connu dans la République des
Lettres par plufieurs Ouvrages touchant
notre Hiftoire.
SUP
AOUST. 1743. 1801.
SUPPLEMENT au Dictionnaire Oeconomique
, contenant divers moyens d'augmenter
fon bien , de conferver fa fanté , confidérablement
augmenté par divers Curieux , enrichi
d'un très- grand nombre de figures ,
1743. Deux Volumes in folio. A Paris ,
chés les veuves Etienne & Ganeau , Libraires
, ruë S, Jacques,
VIES des Hommes Illuftres de la France
depuis le commencement de la Monarchie
jufqu'à preſent , par M. d'Auvigny, VII . &
VIII. Tomes , 1743. in- 12. A Paris , chés
le Gras , Libraire , Grand '- Sale du Palais , à
I'L couronnée,
NOUVELLE EDITION du Dictionnaire
de M. l'Abbé Antonini , comprenant
deux parties ; la premiere eft le Dictionnaire
Italien , Latin François , contenant non
feulement un abbregé du Dictionnaire de la
Crufca, mais encore tout ce qu'il y a de plus
· remarquable dans les meilleurs Lexicographes
, Etymologiftes & Gloffaires , qui ont
paru en differentes Langues. La feconde eft
fe Dictionnaire François , Latin , Italien ,
& c. Celle-ci n'avoit pas encore paru. Deux
Volumes in-4° . A Paris , chés Prault , fils ,
Quai de Conti , à la Charité.
LE GUIDE des Accoucheurs , ou le Maî-
F tre
1802 MERCURE DE FRANCE.
tre dans l'Art d'accoucher les femmes , &
de les foulager dans les maladies & accidens
dont elles font très-fouvent attaquées, Ouvrage
des plus utiles pour les perfonnes qui
veulent faire une pratique particuliére de
l'Opération des Accouchemens , le tout en
forme d'Examen , Par Jacques Mefnard ,
Chirurgien Juré , ancien Prévôt de la Communauté
des Chirurgiens de la Ville de
Rouen , & Accoucheur , 1743 , in- 8 ° , de
382. pages , y compris la Table des Chapitres
, & fans la Préface , qui en contient 32,
avec plufieurs figures en Taille-douce , contenues
en is . Planches. A Paris , chés Debure
, l'aîné , Quai des Auguftins , à S. Paul,
chés le Breton , petit-fils d'Houry , ruë de la
Harpe , au S. Efprit ; & chés Durand , ruë
S. Jacques , à S. Landry & au Griffon ,
HISTOIRE DE GRECE , traduite de
l'Anglois de Temple Stanian , in- 1 2. 3. Vol .
A Paris , chés Briaffon , 1743 ;
L'Ouvrage , que nous annonçons au Public
, eft écrit avec toute la force & le difcernement
qu'on peut attendre d'un homme
profond dans l'Hiftoire ancienne , &
d'un efprit fupérieur , qui a long-tems mé
dité fa matiére , & qui n'a rien épargné
pour découvrir la vérité , foit par fes recherches
, foit par la comparaiſon des Auteurs
AOUST. 1743 . 1803
teurs les uns avec les autres , foit encore
par l'étude des anciens Monumens. C'eſt le
travail d'un Politique , à qui le Gouvernement
de la Grece unie ou divifée , a été
d'autant moins difficile à pénetrer , qu'il eſt
plus inftruit des maximes des Peuples qui
vivent fous l'Etat Républicain . La Puiffance
des Grecs a précédé celle des Romains, & en
a été comme le prélude ; il eſt donc très- important
de connoître les intérêts , les vûës
& les actions des uns , pour lire les progrès
des autres ; ainfi nous avons tout lieu de
croire que le Public fera bien aiſe d'avoir cet
important Ouvrage , imprimé dans le même
goût & dans la même forme que l'Hiftoire
Romaine , traduite de l'Anglois d'Echard ;
preffé comme elle dans la narration , & entierement
difpofé pour y être joint . Le Traducteur
de Stanian a aufli lieu d'efperer que
La Traduction n'affoiblira pas la réputation
que l'Original s'eft acquis fi juftement en
Angleterre.
CoÛTUME du Comté & Bailliage d'Au
zerre , avec le Procès verbal . Nouvelle Edition
, 25 . fols relié. A Auxerre , chés François
Fournier, Imprimeur de la Ville, 1743 .
in- 32 . de 308. pages , fans l'Epitre Dédicatoire
, l'Avis de l'Editeur , & la Table des
Matiéres , & fe trouve à Paris , chés C. F.
Fij Simon ,
1804 MERCURE DE FRANCE,
Simon , fils , rue de la Parcheminerie ,
ABBREGE' de l'Hiftoire Ancienne , ou
des cinq grands Empires , qui ont précédé la
Naiffance de J. C. fçavoir , I. celui des Babyloniens
, & des Affyriens . II , Celui des
Chaldéens . III . Celui des Medes & des Perfes
. IV . Celui des Grecs , V. Çelui des Romains.
ACCOMPAGNE de la Chronologie
de ces Empires , d'une Carte Géographique ,
de Notes qui fervent à l'éclairciffement du
Texte. Par le R. P. DU CHESNE , de la
Compagnie de JESUS , Précepteur de Meffeigneurs
les INFANTS D'ESPAGNE . I.
Vol. in-8°. de 427 , pages. A Paris , chés
Chaubert , Quai des Auguftins , & Durand ,
ruë. S. Jacques.
On peut mettre ce Volume dans la Claffe
des bons Livres , tant pour l'importance de
la Matiére , que pour l'ordre qui y eft obfervé
, par la clarté & la netteté du ftyle. Il
eft précédé d'un petit Avis , qu'il eft important
de lire , & par le Sommaire des cinq
Livres , qui répondent au nombre desEmpires
, de l'Hiftoire defquels l'Auteur donne
l'Analyſe ou l' Abbrege. Ces Sommaires font
tous compofés en Vers François , cequi ne
peut manquer de plaire , furtout à la Jeuneffe
, qui a de la mémoire , qui les apprendra
par coeur , & fe facilitera par-là l'acquifition
AOUST. 1743 .
1805
quifition & l'intelligence de ces grandes
Hiftoires , en s'amufant agréablement.
DE LA REFORMATION DU THEATRE ,
par Louis Riccoboni , Ouvrage in- 12 . 1743 .
A Paris , chés Debure , l'aîné , Quai des Auguftins
, le Breton , ruë de la Harpe , & Durand
, rue S. Jacques.
PROGRAMME d'un nouveau Recueil
de Poëfie , intitulé Bibliothéque Poëtique , ou
nouveau Choix des plus belles Piéces de Vers
en tout genre, depuis Marot , jufqu'aux Poëtes
de nos jours , avec leurs Vies & des Remarques
fur leurs Ouvrages , 1743. Quatre
Volumes in-4°. A Paris , chés Briaffon , Libraire
, ruë S. Jacques , à la Science.
MEMOIRES pour fervir à l'Hiftoire des
Infectes , par M. de Reaumur , de l'Académie
Royale des Sciences , de la Société
Royale de Londres , des Académies de Peterbourg
& de Berlin , & de l'Inftitut de
Bologne , Commandeur & Intendant de
l'Ordre Royal & Militaire de S. Louis .
Tome VI . Suite de l'Hiftoire des Mouches
à quatre aîles , avec un Supplément à celle
des Mouches à deux aîles. A Paris , de l'Imprimerie
Royale , 1743. in- 4° . de 608. pages
, fans une longue Préface , Planches de-
Fiij tachées
1806 MERCURE DE FRANCE .
tachées 43. chés Durand , Libraire , ruë
S. Jacques , à S. Landry & au Griffon.
CoÛTUME DE PARIS , rédigée dans
l'ordre naturel de la difpofition de fes Articles
, avec la réfolution des Queſtions , que
l'ambiguité ou l'obfcurité du Texte ont fait
naître , le fentiment des Auteurs fur chaque
difficulté , & les raifons, tant de douter
que de décider. Par M. PIERRE LE
MAISTRE , Avocat au Parlement. Nou-
VELLE EDITION , revûë & augmentée
de plufieurs Notes , fondées fur plufieurs
Arrêts célébres & Reglemens intervenus
depuis la premiére Edition , avec le Texte
de plufieurs Articles des nouvelies Ordonnances
fur les Donations & les Teftamens
qui ont changé les Décifions de l'Auteur.
Par M.... Avocat au Parlement. Un Volume
in-folio . A Paris , chés le Gras, Saugrain ,
de Nully , Brunet , au Palais , & chés Jacques
Rollin , fils , Quai des Auguftins.
DISSERTATION fur la Géométrie ,
avec le premier Chapitre des nouveaux
Principes ou Elémens des Mathématiques ,
par M. Liger , Commis au Bureau de la
Guerre. A Paris , chés Claude- Pierre Gueffier,
Parvis Notre-Dame , à la Libéralité , 1743 .
Prix 20, fols.
Char
AOUST. 1743. 1807
n
Charles - Antoine Jombert , Libraire du
Roi pour l'Artillerie , Quai des Auguftins
, au coin de la rue Gift- le -coeur , à
l'Image Notre-Dame , vient de mettre en
vente un nouveau Livre intitulé , Elémens
de la Guerre , des Siéges , ou Traité de l'Artillerie
, de l'attaque de la défenfe des Places,
à l'ufage des jeunes Militaires , par M. le
Blond , Profeffeur de Mathématiques des
Pages du Roi , en trois , Volumes in - octavo ,
imprimés avec foin, fur de beau papier , ornés
de Vignettes , & enrichis de plus de
trente grandes Planches fort bien gravées.
Le prix eft de 15. livres relié.
Cet Ouvrage eft divifé en trois parties ,
qui forment autant de Traités féparés : le
premier Volume contient l'Artillerie . Comme
les Armes ou les Machines en ufage à la
Guerre depuis l'invention de la Poudre , in-
Aluent non-feulement dans l'ordre & l'arrangement
des troupes pour combattre , mais
encore dans l'Attaque & la Défenſe des
Places , où la connoiffance en eft fort utile ;
J'Auteur a crû qu'ayant à traiter de ces deux
dernieres opérations, il étoit à propos de les
faire précéder par cet Ouvrage, qui leur fert
d'introduction , & contient les ufages & les
proprietés de nos principales armes à feu.
On y voit d'abord un précis de la compofition
& de la fabrique de la Poudre , ce
F iiij qu'il
1808 MERCURE DE FRANCE.
qu'il y a de plus effentiel à obferver dans
nos Canons , Mortiers , Pierriers , &c. cè
qui regarde leur fervice & leur charge . On
y donne enfuite un détail raifonné fur les
Mines , leur calcul & leur construction . On
y traite des compofitions d'Artifice, les plus
en ufage dans l'Attaque & la Défenfe des
Places ; des ponts de batteaux, dont la conftruction
regarde l'Artillerie ; des munitions
de guerre & de bouche , dont les armées doivent
être pourvûës , foit pour tenir la Campagne
, foit pour former des Siéges. Enfin
l'on a renfermé dans ce Traité tout ce que
l'Artillerie a de plus utile & de plus inté
reffant pour les gens de guerre .
Le fecond Volume a pour objet l'Attaque
des Places. L'excellent Traité que M. le Maréchal
de Vauban nous a laiffé fur cette matiére
, ſemble exclure tout autre Ouvrage
fur le même fujet , ou du moins le sendre
inutile . Mais comme le principal objet de
ce grand homme a été feulement de faire
connoître fa Méthode , & de prouver la né- ,
ceffité de la fuivre , on a crû qu'un Traité
Elémentaire fur la même matiére & felon
fes principes , pourroit être de quelque utilité
à nos jeunes Militaires , & ferviroit à
les faire entrer plus aifément dans l'efprit
de cette Méthode , & à la leur rendre plus
propre & plus familiére.
C'eft
AOUST. 1743 . 1809
C'est le but qu'on s'eft propofé dans ce
Ouvrage , & indépendamment de tout ce
qui a été enfeigné de fondamental par M.
de Vauban , on s'eft fervi de ce qui a été pratiqué
de particulier dans nos Siéges les plus
fameux, & de ce que l'on trouve écrit fur
la même matiére par les Militaires célébres,
comme M. de Feuquieres , M. Goulon , M.
-le Chevalier Folard , &c. Enforte qu'à plufieurs
égards cet Ouvrage eft beaucoup plus
complet & plus étendu que les Mémoires
mêmes de M. le Maréchal de Vauban.
On y trouve fort en détail tout ce qui
concerne les travaux & les opérations d'un
Siége Royal , ou d'une Ville fortifiée felon
les regles de l'Art. La méthode & les principes
néceffaires pour tracer d'abord les
principaux Ouvrages fur le papier , & enfuite
pour les rapporter fur le terrein ; l'attaque
des differens dehors les plus en ufage
dans la fortification ; ce que celle des petites
Villes , Châteaux & autres poftes qui
fe rencontrent fouvent dans le cours de la
guerre , peut demander de particulier . On
y traite auffi des furpriſes des Villes , & des
Efcalades. En un mot, le deffein de l'Auteur
eft de mener , comme par la main , un jeune
Officier dans tous les travaux , de le faire
entrer dans l'efprit de leur conftruction , &
de les mettre en état d'en conduire de pareils
Fv dans
1810 MERCURE DE FRANCE.
dans le befoin , & même d'en imaginer de
differens , fuivant les circonftances des tems
& des lieux , pour répondre aux mêmes
fins..
Le dernier Volume traite de la Défenfe
des Places. Comme on a appris dans l'Attaque
les premiers principes de la Défenſe, on
détaille ici plus particulierement les chicanes
les plus propres à retarder , autant qu'il
eft poffible , la prife des Ouvrages attaqués.
L'objet de cet Ouvrage eft donc de faire
connoître les principaux moyens qu'on peut
employer dans la Défenfe des Places . On y
traite d'abord de la garnifon & de la quan
tité de munitions de guerre & de bouche
qu'il doit y avoir dans une Place , relativement
à fa grandeur , & des difpofitions générales
qu'on peut y faire pour fe préparer
à une vigoureufe défenfe . On y donne enfuire
le détail de la Défenfe , propre à chaque
ouvrage de la Fortification . On s'y étend
beaucoup fur ce qui regarde la Défenſe des
petites Villes , Châteaux , & même des Maifons
dans lesquelles on peut être attaqué..
Dans tout cela on a deffein de réveiller l'attention
de nos jeunes Militaires , & de leur
faire voir qu'il n'y a gueres de poftes qui ne
puiffent être foutenus , contre une attaque
de peu de durée , lorfque l'on prend toutes.
les précautions, convenables pour les bien
défendre... Pour
AOUST, 1743+
1811
Pour ne rien laiffer à défirer dans cet Ou
vrage , on l'a enrichi des excellentes Ta
bles, dreffées par M. le Maréchal de Vauban
où l'on voit d'un coup d'oeil toutes les mu
nitions de guerre & de bouche , néceffaires
dans une Place affiégée , relativement à fa
grandeur & à fa garnifon. Elles ont été corrigées
avec beaucoup de foin , de quantité
de fautes qui s'y étoient gliffées dans differens
Livres où on les a inferées. On y a joint
an petit Mémoire,contenant differentes Obfervations
fur la vifite des Places , qui vient
d'un fort habile Ingénieur. On l'a rapporté
ici d'autant plus volontiers , qu'on a confideré
l'avantage qu'en pourront retirer nos
jeunes Militaires , pour fe former une idée
plus certaine fur ce qu'il y a de plus effentiel
à remarquer dans une Place de guerre . On
уа fait quelques Notes pour le rendre en
core plus utile , & feulement aux endroits
où elles ont par les plus néceffaires ..
Enfin cet Ouvrage eft terminé par un pe
tit, Dictionnaire des Termes les plus ufités dans
la Fortification , l'Artillerie , l'Attaque & la
Défenfe des Places. Au refte , pour que rien
ne puiffe arrêter les jeunes Militaires , ou
leur caufer quelque difficulté dans la lectu
re de cer Ouvrage , l'Auteur s'eft attaché à
Le rendre clair & facile , & n'y fait, pour
ainfi- dire , aucun ufage de la Géométrie , ne
F vj fuppofant
1812 MERCURE DE FRANCE.
fuppofant gueres d'autre connoiffance que
celle de la Fortification , dont il a donné, il
y a quelques années, unpetit Traité Elémen
taire, écrit avec beaucoup d'ordre & de clarté
, qui fe vend chés le même Libraire.
PROSPECTUS de differens nouveaux
Ouvrages far les Mathématiques & l'Art
Militaire , qui s'impriment actuellement
chés Charles -Antoine Fombert , Libraire da
Roi pour Artillerie & le Génie , demeurant
ci- devant rue S. Jacques , & à préfent fur le
Quai des Auguftins , au coin de la rue Giftle-
coeur , à l'Image Notre -Dame . A Paris
, 1742.
Le parfait Ingénieur François , contenant
la Construction , l'Attaque & la Défenſe
des Places régulières & irrégulières , fuivant
M. de Vauban , & les plus habiles Auteurs.
Par M. l'Abbé Deidier , Profelleur
Royal des Mathématiques aux Ecoles d'Artillerie
de la Fere. Nouvelle Edition , confiderablement
augmentée , & enrichie de so.
Planches in- quarto , 1742.
Ce Livre fut imprimé pour la premiére
fois , il ya cinq ou fix ans . Le but de l'Auteur
eft de donner au Public une efpéce de
Bibliothèque qui renferme tout ce qui a été
écritjufqu'à nos jours fur la Conftruction ,
l'Attaque & la Défenſe des Places , avec des
ParalAOUST.
1743 .
1813
Paralleles des principaux Auteurs , capable
de faire juger du bon & du mauvais de
tout ce qui a été pratiqué jufqu'ici. Par ce
moyen , il facilite l'étude des Fortifications
à un grand nombre d'Officiers , qui n'ont
pas toujours , ni le pouvoir d'acheter une
foule de Livres , ni le tems de les lire , &
qui n'ont point l'intelligence du Latin & des
Langues étrangeres , dans lefquelles la plûpart
de ces Traités fe trouvent écrits.
Comme cet Ouvrage eft le premier de tous
ceux que cet illuftre Auteur a compofés , il
ne voulut point alors fe hazarder d'y mettre
fon nom à la tête , d'autant plus que la matiére
qu'il y traitoit , paroiffant incompatible
avec l'état qu'il avoit embraffé , auroit
pu prévenir d'abord contre l'Ouvrage. C'eſt
ce qui a donné lieu à M. B ** de V ** ,
voyant que perfonne ne le reclamoit , de lui
faire l'honneur de fe l'approprier dans fon
Architecture Militaire. Ce nouvel Auteur ,
dont la plume fertile vient d'inonder la Hollande
de quantité de Volumes fous le beau
titre de Cours de la Science Militaire , ayant
formé le projet de faire tomber & d'anéan
tir tous les Livres de Mathématiques , qui ,
felon lui , étoient devenus trop nombreux
& trop chers pour un Officier , s'eft donné
la peine d'extraire de chaque Livre ce qui
lui a paru le meilleur , & de coudre tous ces
mory
1814 MERCURE DE FRANCE
morceaux enfemble , pour en compoſer te
fien. A l'égard de notre Parfait Ingénieur
François , comme il le jugea digne d'être
confervé , il a bien voulu le prendre fous:
fa protection , & de peur qu'il ne fe trouvât
confondu avec tous les autres , & enfeveli
fous leur ruine , il a adopté ce Livre
, & l'a honoré de fon illuftre nom. Une
préférence fi marquée mérite bien que l'Auteur
& le Libraire s'uniffent pour lui en
témoigner leur reconnoiffance.
La premiére Edition du Parfait Ingénieur ,
s'étant débitée en très - peu de tems , l'accueil
favorable avec lequel il fut goûté du
Public ,
encouragea l'Auteur à le travailler
de nouveau. Dans cette vûë , il eut recours
aux plus habiles & aux plus expérimentés
dans le métier de la Guerre , qui voulurent
bien lui communiquer leurs lumières , & le
mirent en état d'en faire une feconde, beaucoup
plus parfaite , où après avoir corrigé
bien des fautes qui avoient échapé dans la
premiére , il y ajoûta quantité de choſes uti–
les & intéreffantes , dont il n'avoit aucune
connoiffance , quand il compofa cer Ouvrage
.
Pour faire l'application des préceptes re
pandus dans ce Traité , à quelque chofe de
réel & d'exécuté , on a donné pour exem
ple d'une bonne Fortification , le Neuf- Bri
fack
AOUST. 1743 . 1815
fack & la Ville de Luxemboug , telle qu'elle
eft aujourd'hui. On y verra que tout a été
conftruit felon les meilleures maximes , &
qu'on n'y a multiplié les dehors & les Ouvrages
avancés , qu'autant que le demandoit
la fituation de la Place & les confidérations
que l'on doit toujours avoir dans ces fortes
de conftructions. Et pour exemple de l'Attaque
& de la Défenfe des Places, l'on a choifi
deux des plus fameux Siéges qui fe foient
faits fous le Régne de Louis XIV . & qui
ont le plus relevé la gloire des François. Le
premier eft celui de Lille , où M. de Bou-
Alers fit une fi belle & fi vigoureufe défenſe
contre les attaques vives & redoublées du
Prince Eugene , qui étoit alors à la tête de
l'Armée des Confédérés. Le fecond eft celui
de Namur , où fa Majefté commandoit en
perfonne , & où M. de Vauban dirigeoit
les travaux. La feule lecture de ces deux
Relations eft capable d'animer l'émulation
des perfonnes qui s'adonnent au Génie , &
de les porter à fe mettre en état d'imiter de
fi beaux exemples.
Ce Livre eft achevé d'imprimer en un
Volume in- quarto , de format plus grand
que l'ancienne Edition ; on n'a rien négli
gé de tout ce qui pouvoit contribuer à la
beauté de fon exécution , & on l'a orné d'un
fort beau Frontifpice & de Vignettes relatives
1816 MERCURE DE FRANCE.
tives aux fujets qui y font traités. Il fe vend
relié 15 liv.
NOUVEAU TARIF du Toifé de la Maçonnerie
tant fuperficielle que folide , où l'on
trouve les calculs du Toifé tout faits , fans
mettre la main à la plume , avec le Toifé
des Bâtimens , fuivant la Coûtume de Paris,
& le Toifé du Bout-avant. Ouvrage utile
aux Architectes , Maçons , Entrepreneurs ,
Menuifiers , &c. & à tous les Bourgeois qui
font bâtir. /n- 8° . prix 7 liv. relié.
Dans cet Ouvrage il n'y a point d'Addition
à faire , comme dans les Comptes Fairs
de Barreme. L'on y trouve tout d'un coup
les produits dont on a befoin , fans mettre la
main à la plume , pourvû toutefois que cela
ne paffe pas vingt pieds fur 72 pieds , à
quoi l'on s'eft reftraint pour rendre l'Ouvrage
portatif. On a fupplée à ce défaut par
une Méthode courte & facile , qui fe trouve
à la fin des calculs . On trouvera enfuite
un autre Tarif du Toifé Solide , avec
un petit Traité de Géométrie , appliqué à la
façon dont les Architectes & Entrepreneurs
de Paris , mefurent les Bâtimens , qui
eft la plus ufitée à préfent. On y a joint la
maniére de toifer les Bâtimens fuivant les
us & Coûtumes de Paris , felon M. de Ferriere
& M. Blondel , qui font les Auteurs
les
AOUST. 1743 ..
1817
les plus fuivis , & qui ont le mieux traité
cette matiére .
Le même Libraire vient de mettre en
vente un Livre nouveau , intitulé :
PRINCIPES du Systême des petits
Tourbillons , mis à la portée de tout le monde
, & appliqués aux Phénoménes les plus
généraux. Ouvrage auquel on a ajoûté une
Differtation pofthume de M. l'Abbé DE
MOLIERES. Vol. in 12. de 426 pages,
prix 2 liv . 10 f. relié .
DISSERTATION fur un Temple octagone
, & plufieurs bas-reliefs trouvés à Ceftas
, lefquels défignent les Fêtes de Cybéle ,
une initiation à fes Myftéres , & un Sacrifice
qu'on lui a offert. Par M. l'Abbé Faubert
C.D.C. A Bordeaux , chés Jean - Baptiſte
Lacornée. 1743 .
Cet Ouvrage qui eft dédié à Mrs. les Maire
, Sou-Maire & Jurats de la Ville de
Bordeaux , eft rempli d'érudition . L'Auteur
, avant que d'entrer en matiére , &
d'expofer le Temple dont il s'agit , s'étend
amplement fur le Culte de Cybele dans les
Gaules .
A la page 45 , où finit cette efpéce de
Préface , il nous apprend que c'eft l'Eglife
même de la Paroiffe de Ceftas qui eft le
Temple dont il veut parler . cette Paroiffe
eſt,
1818 MERCURE DE FRANCE.
eft , dit-il , limitrophe des Landes , & dans
les Graves de Bordeaux, & dépend de MM.
'les Jurats de cette Ville , comme Seigneurs
de la Comté d'Ornon . On s'attendroit nåturellement
à lire en cet endroit la diftance
à laquelle elle eft de Bordeaux ; mais il
ne la marque qu'à la page 182 , où il met
en marge qu'elle eft fituée à trois lieues
de cette Ville. Ce Lieu étoit anciennement
plein de bois , & l'eft encore , à quelques
défrichemens près, que les Habitans ont été
obligés de faire , pour fe procurer une médiocre
fubfiftance.
Proche la jonction des eaux de Bourde &
de Sale , il y a un chemin appellé Le chemin
du Pas du Luc. De cet endroit on peut
tirer une ligne , qui paffant devant ce Tenple
, va fe terminer , vers le couchant , au
bout du bois , dans le Lieu dit le Bouchon
du Luc , qui eft entouré d'eau , & où l'on
voit une élévation artificielle , qui domine
de près de cinq pieds fur le refte de la campagne.
Si M. Jaubert prétend que les dehors de
cette Eglife , qu'il a fait repréfenter , donnent
aux Lecteurs la facilité de s'imaginer
qu'il y a là un Temple profane de figure
octogone , il n'a pas réufli à notre égard ,
puifque nous n'y appercevons qu'un exté-
.rieur
X
AOUST. 1743.
1819
rieur tel , que l'ont d'ordinaire les Eglifes
de la campagne.
pas
du
La figure qu'il donne à la page 53 .
demi octogone , pourroit aider à l'intelligence
de ce qu'il a voulu dire , fi elle ne paroiffoit
combattre celle de la page 45 »
par la fituation de l'Orient & de l'Occident,
qui font directement oppofés à ce que la
figure de l'Eglife en profil repréfente à la
vue. Mais nous voulons bien croire que
c'eft peut-être le Graveur qui a placé l'Orient
, où devroit être l'Occident , & où
il faut le mettre , fi on veut que les deux
figures s'accordent enfemble .
Nous ne pouvons nous empêcher de dire
ici , que
de la defcription que l'Auteur donne
du dedans de cette Eglife , il n'en doit
pas néceffairement réfulter que l'octogone
ait jamais été parfait . Il n'eft pas.rare que le
Choeur des Eglifes ait la forme d'un demi
octogone , au bout duquel il n'y a jamais
eu autre chofe qu'une Nef oblongue , pour
placer le Peuple . Nous fouhaiterions d'ailleurs
être à portée de voir les deux colomnes
chiffrées 6. & 7 , pour juger plus fainement
de leur antiquité , puifque fans fortir
de Paris , nous appercevons dans quelques
Eglifes des chapiteaux , qui ont des figures
également burlesques & profanes , foit par
la forme des animaux , qui y font fculptés ,
foir
1820 MERCURE DE FRANCE.
foit
par les feuillages & les fruits.
Ce qu'il y auroit de plus fort pour prouver
qu'il y a eu un Temple du Paganiſme à
Ceftas , & qu'on en voit encore les reftes ,
feroient les cinq bas-reliefs dont M. Jaubert
donne la repréfentation , parce qu'il fuffit
que l'un des cinq foit infâme , pour en conclure
que les quatre autres , qui font du même
Ouvrier , ne peuvent avoir été employés
dans un édifice confacré au vrai Dieu . Il eft
vifible que M. Jaubert eft affés fondé , pour
conjecturer que ces bas-reliefs ont fervi à
donner des idées du culte de Cibéle , &
tout ce qu'il en dit eft fuffifammenc appuyé,
pour nous faire croire que , dans le Bordelois
on a été affés infenfé pour donner dans
cette Religion abfurde , avant que la lumiére
de l'Evangile y fût parvenue. Mais comme
ces pierres ( ainfi qu'il le dit p. 85. ) font
dures & grifâtres , & qu'elles ont été fcellées
dans le mur , n'étant d'ailleurs que de
quatorze pouces ou environ , il nous paroît
naturel d'en conclure qu'elles n'ont pas toujours
été là , & qu'elles y ont été tranfportées
d'ailleurs. Nous accorderons même qu'il
pouvoit y en avoir un plus grand nombre de
fcellées ou incruftées dans ce mur , en forte
qu'on y voyoit une efpece de fymétrie . Et
c'eft ce qui infinuera encore mieux que ces
quarrés venoient du débris de quelque Temple
;
AOUST. 1743 .
1821
ple ; mais cela ne perfuadera pas que la Tour
du Clocher de Ceftas , encore moins le
Choeur & le Sanctuaire de cette Paroiffe
foient les restes d'un Temple octogone du
Paganiſme.
Puifque le Village de Ceftas appartient
à la Communauté des Habitans de Bordeaux
, il a été convenable que les Magiftrats
contribuaffent à rebâtir l'Eglife du
Lieu. Ainfi étant maîtres de difpofer de
quelque ancien monument , à demi ruiné
ou des décombres de ce qui pouvoit en avoir
été abattu , ils auront pu autrefois permettre
qu'on les tranfportât à Ceftas , où les
Maçons les ont mis en oeuvre , dans un endroit
obfcur , & où ils ne font apperçut
maintenant , qu'en conféquence de quelques
changemens arrivés dans l'édifice . La
découverte d'un Tombeau de pierre audeffous
de la Tour de ce Clocher , avec les
offemens d'un enfant , eft une circonstance ,
qui a plus de rapport au tems du Chriftia
nifme , qu'à celui du Paganifme .
Mais M. Jaubert , qui eft bien aiſe de
trouver du Paganifme le plus qu'il peut dans
le Village de Ceftas , afin d'appuyer la découverte
qu'il a faite du Temple , en remarque
une , qu'il croit être réellement un
refte de la fuperftition des anciens Druides
& qui auroit paffé de pere en fils à Ceftas ,
juſqu'à
1822 MERCURE DE FRANCE.
jufqu'à l'an 1624. On lit ( dit-il à la page
172. ) dans les Regiftres de cette Eglife ,
que cette année là , fept des Habitans font.
allés à Laguilan- neuf, fuivant la coûtume du
Pays , & ont amaffe douze livres tournoiſes .
tequel argent ils ont dit avoir dévotion qu'il
foit employé à acheter un devant d'Autel.
#
....
Il paroît que l'Auteur trouve ici du mal
dans une chofe qui eft bien innocente : ces
fept Habitans font allés à Laguilan- neuf,
c'est-à-dire , qu'ils font allés demander les.
Etrennes pour l'Eglife du Lieu . Car dans le
dernier fiècle, Laguilan- neuf & les Etrennes,
étoient la même chofe . Cela eft fi véritable
, dans le Perche on dit encore les que
Eguilans , pour les Etrennes. Auguilan - neuf
fe dit dans le Poitou , fuivant M. Chaftelain
, Notes fur le 1. Janvier. En forte
qu'il n'y a pas plus de fuperftition à demander
ou donner les Eguilans , qu'à demander
on donner les Etrennes. Si l'ufage de les
demander pour l'Eglife de Ceftas ne fubfifte
plus , ce ne peut être en vertu de la défenſe
du Concile de Bordeaux , comme le foupçonne
M. Jaubert : c'eſt plûtôt la mifére des
tems qui a fait que ne fe trouvant plus de
contribuans il ne s'eft plus prefenté de
demandeurs. Ce feroit pouffer les chofes à
J'extrémité , & vouloir deviner , que de
dire que les Marguilliers ou Officiers de la
Paroille
AOUST. 1743 . 1823
Paroiffe de Ceftas , alloient en 1624. couper
du Gui dans les bois , qu'enfuite ils le dif
tribuoient dans les maifons , ce qui leur fervoit
à amaffer des aumônes , dont en 1626 .
ils firent faire un parement à l'Autel de
Notre-Dame. Dans Anguilan - neuf de ces
bonnes gens , il n'y avoit que l'expreffion
du Paganifme , & rien de plus ; elle étoit
auffi innocente dans leur bouche , que celle
de dies Luna , dies Martis , dies Jovis , dies
Veneris fancta , dans les vieux Livres d'E
glife ; & Mercredi , Jeudi , Vendredi dans
notre Langage vulgaire.
.. Nous avons écrit Ceftas , comme l'Auteur
l'écrit , quoiqu'il y ait lieu de douter fi ce
n'eft point plûtôt Seftas qu'il eûtfallu écrire,
comme l'a fait le Dictionnaire . Univerfel
de la France ; ce qui fùrement feroit plus
exact , s'il étoit vrai que ce Lieu eft au fixiéme
milliaire , ou , felon une autre maniére
de compter , à la fixiéme lieuë de quelque
Ville mémorable.
ARNOLDI VINNII 7. C. Nota in qua
tuor Libros Inftitutionum , five Elementorum
Juris D. Juftiniani , Sacratiffimi Principis ,
nova Editio emendatior. Acceffit Index locupletiffimus.
Aurelianis ; apud Francifcum
Rouzeau , Typographum. Deux Volumes
in-12. 1743.
MB1824
MERCURE DE FRANCE.
METHODE GENERALI , pour trai
ter les Maladies qui régnent à Grenoble ,
fous le nom de Rhume , par M. Beylié ,
Confeiller, Médecin ordinaire du Roi , Aggrégé
& Profeffeur ordinaire de Médecine
de Grenoble. A Grenoble , chés la veuve
Giroud , Libraire du Parlement , au Palais.
Brochure in- 8°, de 20 , pages,
USAGES
LES MOEURS ET LES
DES GRECS , par M. Menard , Confeil-
Jer au Préfidial de Nîmes , Académicien
Honoraire de l'Académie des Sciences &
des Belles-Lettres de Lyon , & Afſocié à
celle des Belles-Lettres de Marſeille , à Lyon,
chés la veuve de la Roche , & Fils , ruë
Merciere , à l'Occafion ,
'Regnauld Floremain , Imprimeur du Roi à
Reims , avertit le Public , qu'il va mettre
inceffamment en vente les deux premiers
Volumes de l'Ancienne Verfion Italique de
l'Ecriture Sainte .
Le mérite de cette Verfion , fi eftimée dans
l'Antiquité , eft trop connu des Sçavans
pour en faire ici l'éloge ; les fragmens qui
en ont été publiés , faifoient défirer depuis
long- tems que quelqu'un voulût les raffembler
tous , & les réunir fous un feul point
de vûë ; c'est ce qu'on fe flatte d'avoir exécuté
dans cette Edition, Les
AOUST. 1743. 18251
Les plus anciens Manufcrits d'Italie , de
France , d'Angleterre , & les Ecrits des
Peres des premiers fiécles de l'Eglife , font
les fources où l'on a puifé.
Le plan , l'ordre & l'économie de cet
Ouvrage , font détaillés plus au long dans
le Prospectus Latin , qui vient d'être publié.
Il fuffit de remarquer ici , qu'outre le Texte
de la Vulgate , qui fera placé à côté de l'ancienne
Verfion , cette Edition fera enrichie
d'une Préface , qui en fixant les caractéres
de l'ancienne Italique , en affure la certitude.
L'Auteur y a joint un grand nombre de
Notes , des Avertiffemens à la tête de chaque
Livre , & il a placé à la fin une Table
des matiéres , très-ample & très -étenduë.
*
L'Imprimeur n'a rien épargné de fon côté
, pour rendre cette Edition complette,
H fe fatte que le Public fera auffi fatisfait
que l'Editeur de la beauté du papier , des
caractéres , & de l'exécution de tout l'Ouvrage.
De trois Volumes in-folio , dont cette
Edition fera compofée , les deux premiers,
qui contiennent l'Ancien Teftament , font
imprimés , & le troifiéme , qui renfermera
le Nouveau , eft fous preffe . Le prix de
chaque Volume fera de trente 1 vres en
blanc , fin papier d'Auvergne , & de qu '
rante- cinq livres , grand papier auffi d'A
G
vergne.
1826 MERCURE DE FRANCE.
vergne. On n'en a imprimé qu'un cent de
cette derniére forte,
On pourra s'adreffer à Paris , chés Guil
laume Cavelier , le pere , Libraire , rue S,
Jacques , au Lys d'or.
OEUVRES DE BRANTÔME , nou
velle Edition confidérablement augmentée,
& accompagnée de Remarques Hiftori
ques & Critiques. Quinze Volumes in-12 , à
la Haye , M. DCC. XLIII. Les cinq der
niers Vol, fe trouvent à Paris , chés Jombert ,
vis-à-vis le College de la Marche,
Dans un Avertiffement , mis à la tête du
xr. Tome , après avoir fait en deux mots
l'Eloge de çet Ouvrage , on apprend que la
nouvelle Edition , dont il s'agit ici , s'enleve
avec plus d'empreffement encore
que les précédentes , intéreſſant davantage
, parce qu'elle contient les Opufcules
du même Auteur , & des Piéces hiftoriques
, qui n'avoient pas encore vû le jour ,
& qu'on reçoit de fa main , avec cette confiance
qu'il s'eft acquife , par le caractère de
véridicité & de probité répandu dans fes
Ouvrages , qui perfuadent , malgré la fimplicité
& la naïveté du ſtyle. Il eſt fâcheux ,
ajoute-t'on , pour ceux qui ont les anciennes
Editions , d'être privés de ces derniers
morceaux , ou obligés d'acheter en entier
la
AOUST. 1743 . 1827
la nouvelle , dans laquelle ils font confondus.
On a pourvû à ce double inconvé
nient , en donnant au Public , en cinq Volumes
féparés , tout ce qui n'eſt pas dans
les anciennes Editions , & qu'on a fidélement
extrait de celle de Hollande. Au moyen
de quoi ceux qui joindront le Supplément
à l'Edition ancienne , qu'ils ont dans leurs
Bibliothèques , auront exactement tout ce
qui eft compris dans la derniére Edition ,
&par conféquent un Brantôme complet ,
comme s'ils avoient fait la dépenfe de l'Edition
toute entiére. Ces cinq Volumes fe
trouvent à Paris chés plufieurs Libraires.
EXTRAIT d'une Lettre écrite dé Troyes ,
Le 30. Mars 1743 , ausujet d'un Etabliffement
Académique.
Lcomme
A Ville de Troyes croyant pouvoir ,
comme plufieurs Villes du Royaume
, jetter les fondemens d'une Académie
des Belles-Lettres , fept perfonnes d'un mérite
diftingué ont tenu depuis un an des Affemblées,
deux fois la femaine ,fur des fujets
également intéreffans & toujours inftructifs.
M. Tillet , Directeur des Monnoyes , qui
en a donné la premiére idée , & qui en eft
undes Membres , leur aprêté une fale , cue
Gij l'on
1828 MERCURE DE FRANCE.
l'on appellera avec jufte raiſon le bercean
de l'Académie, Les fix autres font M. Com
parot , Premier Préſident de l'Election ,
très-connu par fon intégrité & fon érupar
dition. M. de Bercenay , fon frere , Con.
feiller au Préfidial , qui s'eft toujours at
taché aux Sciences les plus abftraites , M.
Auffroy , Directeur des Aydes , dont le
choix feul de fes illuftres Confreres eft une
éclatante preuve de fon mérite. M.Billebaut,
Médecin , qui joint à la plus parfaite connoiffance
de fon Art , toutes les qualités requifes
dans un homme de Lettres . M. le
Roy , Gentilhomme , très- connu par fon
goût pour les Médailles antiques , qu'il ſe
fait une étude particuliere d'expliquer. Le
dernier enfin , M. le Febvre , Avocat au
Parlement , qui n'a befoin , pour tout éloge
, que du choix qu'en a fait l'Affemblée ,
en le nommant Directeur dans fa premiére
Séance ,
La modeftie de çes Amateurs des Lettres,
les a empêché , jufqu'à prefent , de rendre
publiques les productions de leurs Confé
rences. Mais M, Lévefque de la Ravaliere ,
notre Compatriote , fi connu par des Ouvrages
, qui font entre les mains de tout le
monde , étant venu pour affaire dans cette
Ville , fut prié par M. les Académiciens
de prendre une place dans leurs Affemblées ,
où
AQUST. 1743 : 1829
où il fit le 19. de ce mois le Difcours fuivant
, lequel mérite fans doute de voir le
jour.
»
»
"
MESSIEURS , étranger en quelque
»forte parmi vous , attaché à un genre
d'Etude , peut-être different des vôtres ,
» uni feulement avec vous par les noeuds
généreux , qui lient les Gens de Lettres
» entre eux , aurois -je dû m'attendre à une
» diſtinction auſſi fateufe , que celle dont
» vous m'honorez aujourd'hui ? Je n'ignore
» pas , Mrs , que réuniffant entre vous tous
» les talens & toutes les connoiffances ;
aufquelles la plus nombreufe Académie
pourroit à peine afpirer , vous vous êtież
» déterminés dèsle commencement de votre
» union , à vous borner au nombre de fept,
» qu'on pourroit à juste titre regarder comme
fimbolique. Qu'il eft donc glorieux
»pour moi d'être admis dans une Compagnie
, dont un Réglement aufli fage fem-
» Bloit m'exclure ! Ne vous repentez point,
» Mrs , de cette indulgence ; vous acque-
» rez un admirateur de plus , & qui fera
d'autant plus zélé , qu'il vous verra de
plus près. Si j'en croyois , Mrs , tout ce
que la reconnoiffance & la perfuafion la
» plus intime me dictent à votre fujet , mes
éloges ne tariroient point , & j'offrirois à
» chacun de vous en particulier , l'homma-
"
ور
»
G iij » ge
1830 MERCURE DE FRANCE
» ge général qui vous eft dê , mais comme
» je ne fuis qu'un foible écho de la jufticé
» que vous rend votre Patrie , daignez
compatir à mon impuiffance , & foyez
perfuadés , Mrs , que la connoiffance que
j'ai de la foibleffe de mes talens , m'empêche
d'en dire davantage.
»
Monfieur le Febvre , Directeur , répon
dit avec fon éloquence ordinaire
"
MONSIEUR , l'Académie naiffante
vient de vous recevoir dans fon fein ,
malgré l'exclufion qu'elle a fouvent donnée
à plufieurs Amateurs , qui prétendoient
à cette illuftration : elle avoit été
» jufqu'ici inébranlable dans la réfolution
qu'elle avoit priſe de ſe borner au nombre
» de fept. Mais votre rare mérite nous a
» fait méprifer cette espéce de loi ; oïïi ,
» Mr , je ne crains point de le dire , nous
avons fenti depuis notre Affociation ,
qu'il lui avoit manqué quelque chofe auparavant
; nous réuniffons à la vérité tous
» les differens Etats qui compofent la So-
» ciété civile ; il ne nous manquoit qu'un
Homme de Lettres univerfel ; nous l'a-
» vons trouvé en vous.
وو
1
» Notre deffein , Mr , dans ce noble
exercice , eft d'exciter dans notre Patrie
→ une noble émulation , & de nous préparer
» des Eléves qui puiffent un jour remplir
les
AOUST. 17437 1831
les places que nous occupons aujourd'hui .
Cependant l'ordre de la Providence va
» bientôt vous enlever à notre Société
" pour vous conduire dans un Pays , qui eft ,
pour ainfi dire , le véritable féjour des
" Lettres. Suivez votre destinée , & appre-
» nez , Mr , à Paris étonné , qu'il y a quel
» que bon goût & quelque efprit au fond de
» là Champagne.
--
ESTAMPES NOUVELLES .
DE
Grande Eftampe en hauteur. Pompe Funébre
d'ELISABETH - THERESE
LORRAINE , Reine de Sardaigne , célébrée
dans l'Eglife Métropolitaine de Paris ,
le 12. Septembre 1741 , ordonnée par M.
le Duc de Rochechouart , Pair de France ,
Premier Gentilhomme de la Chambre du
Roi, & conduite par M. de Bonneval , Inrendant
& Controlleur Général de l'Argenterie
, Menus Plaifirs & Affaires de la Chambre
de S. M. & exécutée par les Sieurs Perrot
& Slodtz . Cette Eftampe , qui fait un
grand & fuperbe morceau de Gravure , a
été deffinée & gravée par le Sr. C. N. Co
chin le fils .
Autre Eftampe en hauteur , repréfentant
la Réfurrection du Fils de la Veuve de Naïm.
Cette Eftampe eft excellemment gravée
Giiij par
1832 MERCURE DE FRANCE .
par M. Duchange , Graveur du Roi , ruë 5.
Jacques , Confeiller de l'Académie Royale
de Peinture & Sculpture , à laquelle il dédic
cet Ouvrage , fait dans la 82. année de fon
âge. Le Tableau original de cette Eftampe ,
de la main de l'illuftre Jean Jouvenet , fe
conferve dans l'Eglife des RR. PP . Réco
lets de Verfailles.
Le Sr. Petit , Graveur , rue S. Jacques ,
à la Couronne d'Epines , près les Mathurins
, qui continue de graver la fuite des
Portraits des Hommes Illuftres du feu SE.
Defrochers , Graveur du Roi , vient de mettre
au jour les Portraits fuivans.
JACOBUS VANIERIUS , Societ.
JESU , Auctor Pradii Ruftici , Eclogarum
de Amicitiâ , &c . Obiit Tolofa anno 1739 ,
atatis 76.
Les vers qui font au bas , font de M.
Vaniere , fon neveu.
Afpice quem Gallis alium Natura Maronem ,
Ingeniumque dabant , nec non labor omnia vincens.
Dumpietas , mores , vultus Virtutis amorem
Spirabant , flemus qui flebilis occidit orbi .
Abftulit hunc oculis , animis non invida tollet
Sors , vivet dum vivet amor , dum rura manebunt.
OLIVIER CROMWEL , Protecteur
d'Angleterre , né à Huntington , dans le
Pays
THE
NEW
YORK
PUBLIC
LIBRARY.
ABTOR, LENOX AND
TILDEN
FOUNDATIONS.
7 YORK
COMIC
LIBRARY
.
ASTOR, LENOX
AND
TILDEN
FOUNDATIONS
.
1
A O
UST . 1743 .
1833
Pays de Galles , mort à Londres le 3. Septembre
165 8. âgé de 58. ans. Les vers qui
fuivent , font de M. Peffelier.
Pour féduire à fon gré la fuperbe Angleterre ,
Il fçut paroître fier & modefte à propos.
Ufurpateur , il fût en horreur à la Terre ;
Un pouvoir légitime en eut fait un Héros .
Aman
A IR.
'Amant , comme fes traits , déguife fon langage,
Et de plus d'un Oiſeau prend le ton different.
Tantôt , il imite le chant
Du tendre Tourtereau , qui plaint fon esclavage
Tantôt , le léger badinage ,
Les fredons , les éclats & le gofier brillant
Du Serin qui ramage.
52.92$2 2525252:5252
SPECTACLES.
E 18. Août , l'Académie Royale de Mufique
donna la derniere repréfentation
du Ballet Héroïque des Indes Galantes ; la
Dlle. Romainville , qui a de grands talens
pour la Mufique & pour la déclamation ,
chanta après l'Opéra , la Cantate d'Orphée
Gv de
1834 MERCURE DE FRANCE.
de M. Clerambaut ; elle fut généralement
applaudie.
Le 20. la même Académie donna la premiére
repréfentation d'un nouveau Ballet en
trois Actes , précedé d'un Prologue , intitulé
les Caractères de la Folie. Le Poëme eft de
M. Duclos , de l'Académie Royale des Inf
criptions & Belles-Lettres , mis en Mufique
par M. Bury , ordinaire de la Mufique du
Roi; on donnera dans le premier Journal
l'analife de cette Piéce , qui a été reçuë
très-favorablement.
Les Comédiens François ont remis au
Théâtre , la Comédie de l'Ecole des Femmes
de Moliere , que le Public voit depuis longtems
& qu'il ne fe laffe point de voir .. C'eft
le fort des Piéces de cet inimitable Auteur.
Cette derniere reprife fait beaucoup de
plaifir au Public , par la circonftance que la
Dlle . Gauffin y joue le principal perfonnage,
qui eft celui d'Agnès , tout le monde ſçait
avec quel naturel & avec quelle naïveté elle
exprime cette forte de caractére.
Le 29. les mêmes Comédiens donnérent
La premiére repréfentation de la Mort de
Céfar , Tragédie nouvelle en trois Actes de
M. de Voltaire , laquelle a été généralement
applaudie on en parlera plus au long..
Le
AOUST. 1743- 1835
Le 11. Août , les Comédiens Italiens remirent
au Théâtre une petite Piéce en un
Acte , en Vers & en Vaudevilles , qui a
pour titre , les Indes Chantantes , ou les Incas,
Parodie de la deuxième Entrée du Ballet
Héroïque des Indes Galantes , donnée dans
La nouveauté en Septembre 1735. Cette petite
Piéce , qui eft du Sr. Riccoboni & dir
feu Sr. Romagnefy , eft ornée de differens
divertiffemens , très bien exécutés par les
Auteurs de la Troupe. Le feu Sr. Mouret
en avoit compofé la Mufique .
16
Le 22. les mêmes Comédiens remirent
auffi au Théâtre une ancienne Comédie de
M. Autreau , intitulée les Amans ignorans
donnée dans fa nouveauté en Avril 1720.
Cette Piece , qui a eu du fuccès dans le tems,
fait le même plaifir aujourd'hui ; elle eft ornée
de plufieurs divertiffemens de chants &
de danfes très - bien exécutés. On peut voir
le fujet de la Piéce , dans l'Extrait qui en a
été donné dans le Mercure d'Avril 1720 ,
pag. 65.
Le 24, ils remirent au Théâtre la Comédie
de l'Amant Prothée , Piéce du Sieur
Romagnely , en Vers & en trois Actes , ornée
de trois differens divertiffemens , repréfentée
avec beaucoup de fuccès , au mois
de Mars 1739. Cette reprife a été reçûë
favorablement & fort bien exécutée . La
Gvj Mufique
• 836 MERCURE DE FRANCE.
Mafique des trois divertiffemens , eft du
Sieur Blaife , bien caractérifée ; la compofftion
des Ballets du Sr. Riccoboni ; la variété
des Pas a fait beaucoup de plaifir ; on peut
voir l'Extiait , qui en a été donné dans le
Mercure de Juin 1. Vol . 1739. pag. 1196.
Cette Piéce eft imprimée chés Briaffon , rue
S. Jacques.
A la fin de cette Piéce , les Sieurs Rugieri
, Artificiers Italiens, dont on a parlé dans
le dernier Journal , donnerent un troifiéme
Feu d'artifice nouveau , en differens morceaux
ingénieufement compofés & en plus
grand nombre , que les premiers qu'ils ont
déja donnés. Ces divers morceaux font généralement
applaudis par de nombreuſes
affemblées. La Sale avoit été illuminée extraordinairement
dans tout fon pourtour, par
des Plaques garnies de bougies , placées à
chaque montant , qui fait la feparation des
premieres ,des fecondes & des troifiémes Loges,
ce qui rendoit ce Spectacle très-brillant.
Le 13. l'Opéra Comique donna une Piéce
nouvelle d'un Acte en Vaudevilles , qui a
pour titre la Fontaine de Sapience , laquelle
a été reçue favorablement du Public. Elle
eft terminée par un divertiffement compofé
de Pierrots & des Perretes , exécuté au
mieux , & fort applaudi . On a joint depuis
quelAOUST:
1743 .
71837
quelques jours , une Scéne nouvelle à cette
même Piéce , qui a fait beaucoup de plaiſir,
elle eft très-bien jotiće.
Le 23. on remit au Théâtre , les Amours
de Nanterre, ancienne Piéce joüée en 1718.
remife plufieurs fois au Théâtre, & toujours
goûtée du Public .
Nous avons déja annoncé les difpofitions
pour la Danfe de la Dlle . Puvignée , agée de
fept ans ; & nous ne pouvons mieux entrer
dans le détail de fes talens , qu'en publiant
la lettre qu'on va lire fous le nom de Lifon.
LETTRE écrite au Chevalier de St. *** ,
le 22. Juillet 1743 .
L eft , en vérité , ridicule , Chevalier ,
I derefter dans tes Prés , fi long-tems . A
quoi t'amufes-tu? On ne fait pas toujours les
foins . Nous t'attendons depuis un mois ,
avec je ne fçais combien de nouveautés
courues , des Piéces à la mode , de Feux
d'Artifice , qui font tourner la tête par
cent moulinets , plus brillans les uns que les
autres ; & une Lifon , qui danfe : ah ! quelle
Lifon ? Cette Lifon , eft un affemblage des
Etudes de la Rofa Alba , réduit en tabatiere
par Maffe. C'eft Sallé , Camargo , Campionni ,
Barbarina , qui , par extrait , font un petit
tout , que mille riens indéfiniffables compofent.
1838 MERCURE DE FRANCE
fent. Fais ,fur tout , attention à l'âge de fept
ans ,& juge de ſes yeux par ceux de ta grande
Coufine, & des graces de fa tête, par celles
de fa petite foeur. Sa taille paroît modelée
par Terpficare ; elle eft fi bien prife , que
Lifon arrêtée , & fans mouvement , paroît
animée , & former des pas gracieux. Je n'ai
jamais eu tant d'envie de faire des Vers ,
fuffent - ils auffi mauvais que les tiens ; je
chanterois les plus jolies chofes du monde ;
car je compte en Lifon , comme difoit ta
précieufe Marquife, autant de graces qu'elle
a de grains de poudre dans fes cheveux ? Quel
air noble, quel regard, quelle variété, quelle
jufteffe ! Chaque mouvement de bras , d'ac
cord avec fa tête , exprime & reproduit de
nouvelles graces toutes variées. Elle a pour
chaque pas un coup d'oeil different , & l'on
ne fçait jamais fi le coup d'oeil annonce le
pas , ou file
pas annonce le coup d'oeil.
Viens donc , beau Ténébreux ; je t'attens:
à l'Opéra Comique , tu y trouvéras tout Pa
ris : Lifon feule annoblit un Spectacle , &
je maintiens que tour Spectacle eft défectueux
fans Lifon.
ૐ
NOUAOUST.
1743 1819
NOUVELLES ETRANGERES
TURQUIE.
Na appris de Conftantinople , que les difpo
fitions faites par Thamas Kouli -Kan , ne laiffant
plus lieu de douter qu'il n'ait deffein d'attaquer
PEmpire Ottoman , le Grand Seigneur avoit réfolu
de déclarer la guerre à ce Prince , & de ne point
conclure d'accommodeinent avec la Perfe , à moins
qu'elle ne reftituât les Provinces dont les Perfans
fe font emparés dans les guerres précédentes ; que
le 11. Juin dernier les Queues de cheval avoient été
expofées aux portes du Serail , ainfi que cela fe pratique
dans les déclarations de guerre , & qu'on fe
roit inceffamment la céremonie de l'Ordow , qui
s'obferve , lorfque le Grand Vifir doit coinmander
l'armée de Sa Hauteffe ; que les troupes avoient reçû
ordre de fe rendre promptement aux Lieux de
feur deftination: que le Pacha de Bagdad s'étoit
déja mis en marche avec un Corps de plus de 40000.
hommes , pour s'opposer aux entreprifes de Thamas
Kouli-Kan , dont on. difoit que l'armée fe préparoit
à former le Siége de Kars , & que le Capitan
Pacha avoit fait voile le 13. Juin dernier pour la
Mer Noire , avec une Flotte compofée de quatre
Sultanes , de quatorze Galeres & de 80. autres Bâtimens.
On a appris depuis , que le Grand Seigneur fait
aflembler dans le Diarbekir un Corps de troupes ,
qui fera fous les ordres du Gouverneur de cette
Province , & qui fera également à portée de fe
joindre à l'armée que commande le Pacha de Bagdad
1840 MERCURE DE FRANCE.
dad , ou à celle du Pacha d'Erzerum , & qu'on
leve un grand nombre de nouvelles troupes dans
l'Empire Ottoman .
RUSSIE.
N mande de Pétersbourg du 14. du mois der◄
niér , que les Miniftres Plénipotentiaires de la
Czarine & ceux du Roi de Suéde , font convenus
par les articles prélintinaires de paix , fignés à Abo
le 17. Juin dernier , qu'il y auroit à l'avenir une
paix perpétuelle & une amitié parfaite entre les deux
Puiffances , & que leurs Généraux & les autres Officiers
, qui commandent pour elles , tant fur Mer
que fur Terre , feroient ceffer lest actes d'hoftilité ,
auffi-tôt qu'ils feroient informés de la fignature de
ces articles , dont on leur donneroit part le plûtôt
qu'il feroit poffible ; que les Etats du Royaume de
Suéde , en confidération de la recommandation de
la Czarine & de celle du Duc de Holftein , confen
tiroient d'élire & de proclamer le Prince Adolphe
Frederic de Holftein , Evêque de Lubeca , pour
fucceder à la Couronne de Suéde ; que la Suéde cederoit
à perpetuité à la Ruffie , le Gouvernement de
Kimengor jufqu'à la branche de la riviere de Kymen
, la plus voifine de la Bothnie ,
ainfi que
Ville & la Citadelle de Miflor , avec une Lifere à
l'Oueft & au Nord , de la largeur de deux lieuës
Suédoifes ; que toute la rive Occidentale de la derniere
branche de la riviere de Kynen, du côté de la
Bothnie , demeureroit fous la domination de S. M.
Suédoife , & que la Ruffie confèrveroit le Pays fitué
à l'Eft & au Nord de cette riviere , jufqu'aux
Diſtricts de Tavafthus & de Savolax ; que depuis la
Lifiere qui feroit poffedée par la Rufe à l'Oueft
& au Nord de la Ville de Miflot , il feroit tiré une
la
Ligne
AOUST. 17430 1941
Ligne du côté du Sud , vers les Frontieres du Gou
vement de Kimengor , & du côté de l'Eft vers celles
de la Carelie ; que dès qu'on auroit reçû avis que
l'Evêque de Lubeck auroit été élû pour fucceder au
Trône de Suéde , la Czarine reftituëroit à la Suéde ,
non-feulement toute la partie de la Finlande qu'elle
a conquife , mais encore la Botlinie Orientale ; les
Iſles d'Aland ; la Province de Nyland : les Villes de
Biornebourg , d'Abo & de Tavafthus , avec leurs
dépendances ; la partie de la Carelie , qui étoit tombée
en partage à la Suéde par le Traité de Nystadt,
& le Gouvernement de Savolax , à l'exception de
la Ville & de la Citadelle de Miflot ; que le Duc de
Holſtein , en reconnoiffance de l'Election dé l'Evêquejde
Lubeck, renonceroit , tant pour lui que pour
fes defcendans , à toutes les prétentions qu'il peut
avoir fur la Suéde , & qu'il feroit dreffé inceffamment
à ce fujet un Acte formel & convenable ,
que fi , contre toute attente , & en haine de l'Election
qui feroit faite en faveur de l'Evêque de Lubeck,
la Suéde étoit attaquée , ou expolée à quelque trouble
, la Ruffie prendroit , conjointement avec elle
toutes les mefures les plus promptes & les plus
efficaces , pour faire ceffer les inconvéniens de
cette nature ; qu'après la fignature des articles préliminaires
, les Miniftres Plénipotentiaires des deux
Puiflances continuëroient de travailler fans interrup
tion à la conclufion du Traité de paix , lequel auroit
pour baſe celui de Nystadt , à l'exception de
ce qui regarde les nouvelles conventions faites par
rapport aux frontieres de la Finlande , & les autres
articles qui ne font point relatifs aux circonstances
préfentes , & qu'il feroit fait deux copies des articles
préliminaires , dont les Ratifications feroient fignées
par les Puiflances contractantes ,& échangées quinze
jours après la fignature, ou plûtôt, s'il étoit poffible.
Од
1842 MERCURE DE FRANCE;
&
On a appris depuis que le jour de la publication
de la paix conclue entre la Suéde & là Ruffie , la
Czarine avoit donné une Fête magnifique
qu'elle avoit fait préfent au Duc de Holftein d'un
fufil & d'un couteau de chaffe , enrichis de diamans
d'un prix confidérable .
La paix a auffi été publiée à la tête de l'armée de
S. M. Cz. qui a envoyé ordre au Vice-Amiral Bre
dahl de demeurer à Archangel avec l'Efcadre qu'il
commande.
Cette Princefle a fait annoncer dans les Ports de
fa domination , que tous les Vaiffeaux , tant Ruf
fiens qu'Etrangers , pouvoient en fortir librement.
SUEDE.
N apprend de Stockolm du 19. du mois der
nier, que l'Acte de l'Election faite de l'Evêque
de Lubeck par les Etats du Royaume , pour fucceder
à la Couronne , porte que depuis la mort de la
feue Reine , laquelle n'a point laiffé de pofterité , le
Roi s'efttrouvé fans fucceffeur; que les Etats en conféquence
de l'Acte paffé le 24. Mars de l'année 1720.
& eu égard à l'âge avancé de S. M. ont jugé à propos
d'élire un Prince , pour l'élever au Trône après
la mort du Roi , dont ils fouhaitent que Dieu veuille
prolonger les jours ; que pour cet effet ils avoient
choifi le Duc Charles- Pierre Ulrick de Holſtein
qui defcend d'une fille d'un Roi de Suéde , mais
qu'ils n'étoient pas parvenus par-là au but qu'ils
s'étoient propofés , parce que le Duc de Holſtein
avoit embraffé la Religion Grecque , & avoit été
proclamé fucceffeur au Trône de Ruffie ; que l'Evêque
de Lubeck étant non-feulement un des Defcendans
du côté Maternel du Roi Guftave I. done
Ja mémoire doit être à jamais en vénération chés
Les
AOUST. 1743. 1843
les Suédois , mais encore ayant été élevé dans la
Religion Luthérienne , & poffedant de fi grandes
qualités , que le Royaume doit s'attendre
toutes
fortes de profpérités fous le Gouvernement de ce
Prince , les fuffrages des Etats fe font réunis en fa
faveur ; que le Tout- Puiffant paroît vouloir fe fervir
de lui , pour faire jouir la Suéde des plus grands
avantages , ainfi que pour rétablir & affermir fur
le Trône la Famille de Guftave , pendant le regne
duquel le Royaume s'eft vû dans l'état le plus foriflant
; que les Etats par ces confidérations , déclarent
au nom de Dieu , & d'une voix unanime , PEvêque
de Lubecx fucceffeur à la Couronne , af
qu'après la mort du Roi , il foit inauguré & couronné
, & qu'il puiffe gouverner la Suéde fuivant
les Loix & Conftitutions du Royaume , & conformément
aux affûrances , que ce Prince a déja données
, & qu'il renouvellera à fan Couronnement.
Il eft dit dans le méne Afte , que les Defcendans
mâles de l'Evêque de Lubeck feront après lui
héritiers du Trône , felon l'ordre de fucceffion établi
dans le Royaume , & que la Diette enverra inceffamment
des Députés à ce Prince * pour lui porter
Je Diplôme de fon Election .
Le Committé fecret de la Diette a nommé , pour
aller complimenter l'Evêque de Lubeck , le Baron
d'Hamikon , Confeiller de Conférence , & Mrs
Sterncron & Vander. Une Frégate , commandée par
un des Amiraux , a dû fe rendre à Lubeck ou à
Stralfund , pour tranfporter à Stockolm ce Prince ,
& deux Sénateurs ont dû s'embarquer à bord de
cette Frégate , pour aller l'inviter de la part du Sé
nat à fe endre en cette Ville .
Les quatre Ordres du Royaume ont confirmé le
jugement prononcé contre le Comte de Leuven
haupt , & les deux derniers Ordres , en particulier ,
n'ont
1844 MERCURE DE FRANCE.
n'ont point voulu écouter la propofition que la
Noblefle avoit faite d'ordonner la réviſion du prơcès
de ce Géneral .
Le Baron de Buddenbroeck devoit être décapité
le 15. du mois dernier , mais le Roi a fait differer
cette exécution de quelques jours.
Les Miniftres Plénipotentiaires du Roi lui ont dépêché
un Courier , pour l'informer que l'échange
des Ratifications des articles préliminaires de paix
entre la Suéde & la Ruffie s'étoit fait à Abo , &
que la paix avoit été publiée à Pétersbourg avec
une grande folemnité , le jour de la Fête de faint
Pierre.
Depuis le jugement rendu contre le Comte de
Leuvenhaupt & le Géneral Buddenbroeck , le premier
a fait remettre à la Diette un Mémoire dont
les expreffions font extrêmement fortes , & dins lequel
il déclare que ce n'eft point l'idée de la mort ,
ni même celle du fupplice , qui l'effraye , mais que
fe rendant témoignage de fon innocence , il ne peut
regarder fa condamnation que comme injufte , &
qu'il fouhaite que
fa mort n'attire point de nouveaux
malheurs fur la Suéde .
Les Etats ont lû cè Mémoire , & le réſultat de
leur examen a été que le Comte de Leuvenhaupt
n'avoit été condamné
que fur fes propres dépofìfitions,
& après les perquifitions les plus exactes fur
Ja conduite qu'il a tenue en Finlande , & qu'ajnh
les Etats s'étant conformés aux Loix Civiles & Militaires
du Royaume , ils n'avoient aucun reproche
à fe faire d'avoir confirmé la Sentence prononcée
contre ce Géneral.
•
Le fils du Géneral
Buddenbroeck ayant communiqué
à la Diette une lettre qui a été trouvée dans
les papiers de fon pere , & qu'il a crû propre à le
juftifier , les Etats ont décidé que cette lettre ne
pouvoit
AOUST. 1743 . 1845
pouvoit fervir à la juftification de ce Géneral , parce
qu'il n'avoit point dû prendre les confeils fecrets
de quelques amis pour régle de fa conduite dans
des affaires qui intereffoient le Roi & la Nation.
Une partie de la Nobleffe a follicité vivement
pour obtenir que le Roi adoucit la Sentence de ces
deux Géneraux , mais S. M. a repondu que malgré
fon penchant naturel à ufer dc clémence , elle ne
pouvoit rien changer à un jugement confirmé par
les Etats affeinblés.
L'exécution du Comte de Leuwenhaupt a été dif
férée jufqu'au 5 , de ce mois.
On a appris de Stockolm du 31. du mois dernier,
que toutes les follicitations faites en faveur du Géneral
Buddenbroeck , ont été inutiles , & que les
Etats ont perfifté dans la réfolution qu'ils avoient
prife de confirmer la Sentence prononcée contre lui.
Le 23. la Baronne , ſon épouſe , obtint la permiſfion
de lui faire fes derniers adieux , & ce Géneral
ayant employé les jours fuivans à fe préparer à la
mort , il fut conduit le 27. à la Place du Morder
Malm , où il fubit avec beaucoup de fermeté le fupplice
auquel il avoit été condamné .
Après l'exécution , deux de fes domeftiques mirent
fon corps dans un cercueil, que douze Officiers ,
en habit de deuil , porterent au lieu où il devoit être
inhumé.
Ses parens n'ayant pu engager le Roi lui accor
der fa grace , avoient demandé qu'au lieu d'avoir la
tête tranchée , il fût arquebufé , afin de lui épargner
la honte attachée dans ce Royaume au premier de
ces fupplices, mais le Clergé , les Députés des Villes
& l'Ordre des Payfans , s'y font oppofés.
La Baronne de Buddenbroek , qui partit le 24
pour fes Terres , afin de mettre ordre à fes affaires
domeftiques , fe propofe de paffer en Hollande , &
de fe retirer dans un Château près de Steenberge
<
8846 MERCURE DE FRANCE
ALLEMAGNE.
Na apprisde Ratisbonne du 24. du mois der
nier , que toutes les difpofitions ayant été faites
par les troupes Autrichiennes qui formoient le
blocus de Straubingen , pour ouvrir la tranchée de
vant cette Place , les troupes Impériales & Françoi
fes , qui y étoient en garniſon , demanderent le 19.
à capituler , & que par une convention que le Commandant
de la Ville & le Géneral Berencălaw ont
fignée, le premier au nom de l'Empereur , & le fecond
au nom de la Reine de Hongrie , il a été reglé
que la Garaifon en fortiroit avec armes & bagages,
& que les troupes Françoiſes , qui faifoient la prin
cipale partie de cette garnifon , Teroient reconduites
fur les frontiéres de la France par le chemin le plus
court , avec une efcorte fuffifante. En conféquence
de cette convention, ces troupes confiitant en 1200.
hommes , ont dû évacuer le 24. du mois dernier la
Place , & elles étoient attenduës le 25, dans les environs
de Ratisbonne.
Le Régiment de Truchfes , des troupes Impériales
, lequel étoit auffi à Straubingen, en fortit le 23,
pour fe rendre en Suabe , où les autres troupes de
I'Empereur ont pris des quartiers,
Les troupes qui étoient deſtinées à aller renforcer
celles qui bloquent la Ville d'Egra , ont reçû un
contre -ordre,
On mande de Hambourg du 16. du mois dernier,
que le Baron d'Hamilton & Mrs Sterncron &
Vander qui font arrivés en cette Ville , en qualité
de Députés du Committé fecret de la Diette génerale
affemblée à Stockolm , pour complimenter
l'Evêque de Lubeck fur fon Election , eurent le
22. une audience de ce Prince , qui attend inceffamment
une autre Députation de la part des qua-
де
AOUST. 1743 . 1847
tre Ordres du Royaume de Suéde , & qui après l'avoir
reçûe , fe rendra à Lubeck , pour s'y embarfur
une Frégate deſtinée à le tranſporter à Stoc quer
Kolm.
On a appris de Francfort le 28. du mois dernier ,
que le 26. M. de la Noüe , Miniftre du Roi de Fran
ce auprès de la Diette de l'Empire , arrivé en cette
Ville de Ratisbonne , déclara à cette Affemblée ,
que S. M. T. C, ayant été informée de la réfolution
prife par les Etats de l'Empire , d'employer leur
Médiation , pour faire ceffer la guerre qui s'eft allumée
en Allemagne à l'occafion des differentes
prétentions fur la fucceffion de la Maiſon d'Autriche
, elle voit avec un extrême plaifir , qu'il fe foir
préfenté une voye fi naturelle & fi convenable ,
pour rétablir la tranquillité dans l'Empire , & pour
procurer la paix entre les Puiffances qui font en
guerre ; qu'elle a appris avec une égale fatisfaction
que l'Empereur & la Reine de Hongrie étoient en
négociation, afin de ne s'occuper déformais que du
foin de terminer leurs differends à l'amiable ; que
comme les troupes de S. M. n'étoient entrées en
Allemagne qu'en qualité d'auxiliaires , après y avoir
été appellées par le Chef & par plufieurs des plus
puiflans Princes de l'Empire , & comme celles de
S. M. I. font déja en neutralité , elle n'a pas differé
d'envoyer ordre à fes armées de fe retirer fur les
frontiéres de fon Royaume , étant bien aiſe de
donner en cette occurrence au Corps Germanique
un témoignage public de la droiture de fes inten
tions , & de la réfolution dans laquelle elle eft de
concourir à ce qu'il paroît defirer , de-même qu'à
l'affermiffement de la bonne correfpondance & du
bon voisinage entre la France & l'Empire , & fur
le fondement des anciens Traités.
Le Prince Charles de Lorraine arriva le 26. à
Hanaw
1848 MERCURE DE FRANCE.
Hanaw , où il s'eft tenu plufieurs Confeils de guer
re , pour déliberer fur les opérations de l'armée
des Alliés & de celle de la Reine de Hongrie , & il
partit le 28. pour aller rejoindre cette derniere ar❤
mée , qui après avoir paffé le Necare , a traverſé le
Palatinat , & à dirigé fa marche vers le Margraviat
de Dourlach .
La premiere Colonne de cette armée arriva le 22.
Pfortzheim; elle y fut fuivie le 23. par la feconde.
On mande de Vienne du 29. du mois dernier , que
la Reine de Hongrie a appris par un courier du Ġéneral
Berenclaw , que les troupes Impériales &
Françoiles , qui étoient en garnifon dans Straubin
gen , avoient capitulé , & qu'elles en étoient forties
avec les honneurs militaire's .
Les lettres reçues de l'armée commandée par le
Prince Charles de Lorraine , portent qu'elle continuoit
fa marche vers le Brifgav , & que ce Prince
étoit allé à Hanaw , pour avoir quelques audiences
du Roi de la Grande-Bretagne , & quelques Conférences
avec les Géneraux de l'armée commandée
par S. M. B.
Le Comte de Damnitz a mis , par ordre du Prince
Charles de Lorraine dans le Château de Brifach
qui n'a pas été entierement démoli , une garniſon
d'environ 300. hommes.
Le Comte de Traun a mandé à S. M. H. que la
maladie contagieufe , qui s'eft manifeftée en Sicile ,
obligeant ce Géneral de changer le plan des opérations
qu'il avoit projettées, il avoit pris la réſolution
de faire repaffer le Panaro aux troupes qu'il avoit
envoyées dans le Bolonois & dans le Ferrarois , &
de les diftribuer le long de cette riviere , pour couper
toute communication entre l'Etat Ecclefiaftique
& la Lombardie.
On a appris de Ratisbonne du 30. du mois dernier
,
AOUST. 1743 . 1849
nier, que les troupes Françoifes , qui étoient dans
Straubingen , arriverent le 25. au foir dans les environs
de cette Ville , & qu'on leur diftribua des
logemens dans plufieurs Villages.
Le lendemain, elles fe remirent en marche , pour
fe rendre à Donawert , d'où elles ont dû con in uer
leur routeffous une eſcorte de Croa e , qu devoit les
conduire jufqu'au Rhin , vis - à -vis de Spire.
. Il est arrivé à Stat-Am-Hoff plufieurs malades de
l'armée ci devant commandée par le Maréchal de
Broglie , & ils doivent y refter , jufqu'à- ce qu'ils
foient en état de retourner en France.
fui-
Le 26. du mois dernier, le Géneral Berenxlaw prit
la route d'Ingolftadt , dont la garnifon a refufé de
capituler aux conditions qui lui ont été pro pofées.
On mande de Hamburg du 2 de ce mois , que
vant les avis reçûs du camp des troupes Autrichiennes,
commandées par le Comte de Collowrath, Mrs
Brufch & Sollner , Bourguemeftres d'Egra , ont été
députés à ce Général par les habitans de la Place.
pour lui repréfenter que le Marquis d'Herouville
ayoit ordonné aux hìbitans d'en fortir , & que
Comte de Collowrath a dépêché deux Couriers à
la Reine de Hongrie & au Prince Charles de Lorraine
, pour leur en donner avis .
le
On mande de Hanaw du 6. de ce mois , que le
48. du mois dernier , le Prince Charles de Lorraine
partit pour retourner joindre l'armée Autrichienne
qu'il commande , & qu'il y arriva le 30. Une partie
de cette armée s'eft rendue dans le Brifgaw , & la
premiere Colonne eft dans les environs de Fribourg.
Le dernier courier , qui en eft venu , a rapporté
que les Autrichiens faifoient réparer avec toute la
diligence poffible les fortifications de Brifach , &
qu'un grand nombre d'Ouvriers étoit employé à ce
avail
H On
1850 MERCURE DE FRANCE.
On a appris en même tems , que 300. Grenadiers
des troupes de la Reine de Hongrie ayant été déta→
chés pour arrêter neuf Barques chargées de provi
fions pour les troupes Françoifes , ils s'étoient rendus
maîtres de quelques- unes de ces Barques , mais
que les François en avoient coulé une à fond , &
que les autres avoient été emportées par la rapidité
du courant.
Les troupes de la Reine de Hongrie , qui font
dans l'armée des Alliés , fe mirent le 3. de ce mois
en marche & prirent la route de l'Electorat de
Mayence . Elles furent fuivies le 4. & le s . par celles
d'Angleterre , de Hanover & de Heffe.
On mande de Hanaw du 13. de ce mois , que les
troupes d'Angleterre , de Hanovert & de Heffe
allerent le 10. camper près de Roëdelheim , où le
Roi de la Grande-Bretagne établit fon quartier géné
ral, & que ces troupes , après s'être repofées le lendemain
, fe remirent le 11. en marche, pour fe rendre
dans les environs de Mayence.
Les Saiques armées , qui étoient reftées dans les
environs de Ratisbonne,ont remonté le 7 de ce mois
e Danube , & elles fe font renduës au camp devant
Ingolstadt.
Les lettres reçtes de l'armée commandée par le
Prince Charles de Lorraine , marquent qu'elle fai
foit plufieurs marches & contremarches , & qu'on
ne pouvoit encore établir aucune conjecture certaine
touchant les deffeins de ce Princé.
Un nombre des Huffards , qui font fous les ordres ,
ayant paffé le Rhin à la faveur du feu que Partillerie
de Brifach a fait contre le Fort Mortier a brûlé un
moulin de Pautre côté de ce Fleuve .
PRUSSI
AOUST. 17435
1851
PRUSSE .
N mande de Berlin du 24. du mois dernier, que
il
5
18. chés le Comte de Staremberg une conférence ,
dans laquelle on regla le plan des opérations que le
Prince de Lobczowitz doit exécuter en Italie , &
qu'auffi-tôt que ce plan aura été approuvé par la
Reine de Hongrie , ce Général partira , pour aller
prendre le commandement des troupes Autrichienquifont
fous les ordres du Comte de Traun .
Ces avis ajoutent que le même jour il étoit arrivé
à Vienne un Courier , par lequel on avoit appris
que le Prince Charles de Lorraine continuoit de
marcher vers de Rhin, avec l'armée qu'il commande.
nes ,
ITALI EN
N mande de Rome da premier de ce mois ,
que le Pape a confenti à la fuppreffion du Pa
pier Timbré , dont on fe fervoit pour les Expédi
tions de la Datterie.
ESPAGNE.
""! f
Na appris des Canaries , que le 30. Mai der
nier , deux Vaiffeaux de guerre & une Fréga
re , portant Pavillon de France , s'étoient approchés
de.l'ifle de Gomera , pour en reconnoître les Côtes
qu'ils étoient entrés le lendemain dans le Port de
Fife , & qu'ayant arboré Pavillon Anglois , ils
avoient canonné avec beaucoup de vivacité , pendant
plufieurs heures la Ville de Gomera & les deux
Forts qui en font voifins ; que les deux jours fuivans
leur feu avoit été continuel , & que
mois de Juip au foir, l'Officier qui les comman-
Hij
le 2. du
doit ,
1851 MERCURE DE FRANCE.
Codoit
, avoit fait menacer Don Diegue Bueno ,
lonel des Milices de l'ile , lequel , après avoir
pourvû à la défenſe des deux Forts , s'étoit enfermé
dans la Ville avec les troupes qu'il avoit pu raffem.
bler , de ruiner entierement cette Ifle , & d'en paſfer
tous les habitans au fil de l'épée , fi on ne lui ou
vroit la porte de la Ville & des Forts , & fi on ne
lui payoit une contribution confidérable en vivres
& en argent , que Don Diegue Bueno ayant répondu
qu'il étoit déterminé à fe défendre jufqu'à la
derniere extrémité , le Commanda t de l'Eſcadre
Angloife avoit voulu faire un dernier effort pour
tâcher de s'emparer de l'Ifle ; qu'il avoit fait 'defcendre
à terre les troupes de débarquement qui
étoient à bord de fes Vaiffeaux , & que ces troupes
s'étoient avancées pour donner l'aſſiut à la Ville ,
mais qu'elles avoient rencontré un Corps de Mili
ces , qui les avoit attaquées avec tant de valeur ,
qu'elles avoient été obligées de fe retirer , & de re
gagner précipitamment leurs Chaloupes, après avoir
eu un grand nombre de Soldats & de Matelots de
tués & de bleffés ; que ce mauvais fuccès avoit fait
perdre au Commandant des Vaiffeaux ennemis l'ef
pérance de fe rendre maître de l'ifle , & que ces
Vaiffeaux avoient remis à la voile ; qu'ils avoient
éte fort maltraités dans leurs vergues & dans leurs
cordages , mais que les corps des Vaiffeaux n'avoient
été que légerement endommagés , parce que
les Canons des Forts étoient de trop petit calibre.
les
Don Diegue Bueno s'eft extrêmement diſtingué
par marques de valeur , qu'il a données en s'expofant
dans les endroits les plus dangereux , & par
la prudence avec laquelle il a fait fes difpofitions ,
pour rendre inutiles toutes les tentatives des Anglois
; on doit auffi de grands éloges au ! zéle &
à la générofité du Marquis d'Adage , Seigneur de
PLOG
AOUST. 1743- 18531
Pifle de Gomera , lequel , auffi-tôt qu'il fut informé
de l'arrivée de leurs Vaiffeaux, fit diftribuer de l'axgent
, des vivres & des munitions de guerre aux
Mi ices , & a payé de fes propres deniers les Ous
vriers chargés de réparer les breches faites aux
Foits par l'artillerie des ennemis.
Un Armateur Espagnol a pris le Vaiffeau Anglois
Les deux Soeurs , qui alloit d'Excefter à Gibraltar .
L'Intendant de Marine de Galice a mandé au
Roi , que la Frégate le Comte de Chinchon , commandée
par Don Carlos de la Villa , étoit entrée le
25. du mois dernier dans le Port de Bayona , fans
avoir reçûaucun dommage de la part de deux Vaiffeaux
de guerre Anglois , qui l'avoient poursuivie
jufqu'à l'entrée de ce Port , & qu'elle avoit apporté
de la Havane, d'où elle eft partie le 8. Juin dernier,
deux millions de Piaftres & une grande quantité de
marchandifes. Cette Frég te a pris dans le trajet un
Vaiffeau Anglois , fur lequel il y avoit du Sel , & un
autre de la même Nation , chargé de Sucre & dé
Сасао.
Les avis de l'Intendant du Ferol , portent que le
17. du mois dernier , l'Armateur Olivier Colan, en
croifant dans les environs des Illes Berlingues , s'étoit
emparé de la Balandre Angloife l'Indeber , qui
alloit de Londres à l'Ile de Madere .
PORTUGAL.
Na appris de Lisbonne du 23. du mois der
nier , qu'il y eft arrivé depuis peu un habitant
de Tavira & un Irlandois , qui fe font fauvés de
Tanger , où ils ont été efclaves pendant plufieurs ,
années , & qui, ayant hazardé , pour recouvrer leur
liberté , de s'embarquer dans une Chaloupe , que
quelques Barbares avoient abandonnée fur le riva-
Hij
1854 MERCURE DE FRANCE.
ge , ont et le bonheur de rencontrer un Vaiffeau
Espagnol , à bord duquel il ont été reçús, & qui les
conduits dans un Port de Galice.
14 GENES ET ISLE DE CORSE.
ON apprend de Genes du 31. du mois dernier , que Amiral Matthews ayant demandé , que
le Gouvernement obligeât les Bâtimens Catalans ,
& Mayorquains , qui étoient dans ce Port , d'en
fortir ; que le Sénat n'ayant point voulu lui accorder
fa demande , cet Amiral a menacé de brûler ces
Bâtimens , & qu'il avoit même envoyé déja des Lettres
circulaires à tous les Confuls, pour les avertir de
prendre des mefures , afin que les Vaiffeaux de
leur Nation ne fuffent pas confondus avec ceux des
Efpagnols.
Le Sénat s'eft affemblé plufieurs fois , pour délibérer
fur les moyens d'empêcher que l'Amiral Matthews
ne fe portât à quelque violence contre ces
derniers , & après diverfes conférences entre cer
Amiral & les Commiflaires , chargés de traiter avec
lui , on eft enfin convenu que la République s'engageroit
formellement & par écrit , à garder en dé
pot l'artillerie & les munitions de guerre que les
Vaifleaux Efpagnols avoient apportées , avec proineffe
de ne les rendre à l'Efpagne qu'après la conclufion
de la paix entre S. M. C. & le Roi de la
Grande Bretagne , & que pour une plus grande fûreté
, cette artillerie & ces munitions feroient tranf
portées à S. Boniface dans l'ifle de Corfe.
Le Miniftre qui réfide à Genes de la part de la
Cour de Madrid , a fait fes proteftations au fujet
de cette Convention , & l'Amiral Matthews étant
fatisfait de l'engagement pris par la République ,,
remit à la voile le 23 pour retourner aux Iſles,
d'Hieres..
Depuis
AOUST. 1743- 1855
Depuis la fignature de cette Convention , les Bâtimens
qui y ont donné lieu , ont la liberté d'aller
où ceux qui les commandent jugeront à propos
de les conduire , & l'on a travaillé à en débarquer
Partillerie & les munitions de guerre , pour le tranf
port defquelles le Gouvernement a frêté cinq Tartanes.
Deux Vaiffeaux de guerre Anglois font ref
tés , afin de s'aflurer de l'éxécution de ce qui a été
réglé , on croit qu'ils accompagneront ces Tarta
nes jufqu'à S. Boniface , & dans ce cas , la Répu
blique fe difpenfera de faire escorter le Convoi par
fes Galéres.
*
Un Courier , arrivé depuis peu de Corfe , a rap
porté que , felon les apparences , la tranquillité y
feroit bientôt rétablic , que M. Giuftiniani , Com
miffaire Général de la République dans cette Ifle
ayant promis aux Rebelles , que le Gouvernement
leur accorderoit le libre port des armes , & une
amniftie générale pour tout ce qui s'eft paffé depuis
Pannée 1729 ; que la Nobleffe de l'ifle joui
Foit des privileges qu'elle a demandés que la plu
part des Emplois de Judicature & de Finance , ne
feroient donnés qu'à des Corfes ; que l'Evêque
d'Aleria feroit toujours élú par le Clergé & par les:
Magiftrats de la Vi le ; que la Taille feroit réduite
fur l'ancien pied , & qu'elle ne pourroit être augmentée
en aucun tems , fans le confentement des
Députés des douze principales Piéves de l'ifle , les
Rebelles avoient confenti de le foumettre à ces con
ditions , & que l'Acte concernant les engagemens
que la République & les Rebelles fe propofoient
de prendre refpectivement , devoit être figné le 23 ,
par M. Giuftiniani , & par les Députés des Piéves .
Quoique ces nouvelles ayent été confirmées par
des Lettres écrites le 17 de la Baftie , lefquelles af
furent que les Corfes out témoigné beaucoup de
dij joye
1856 MERCURE DE FRANCE .
joye de fe voir à la veille de n'être plus expofées !
une guerre inteftine , on ne fe fre pas encore à
Génes entierement à leurs promeffes ; on craint
que ce ne foit un artifice de leur part , afin d'avoir
le tems de mettre à couvert leur récolte , & Pon
ne croira cette affaire terminée qu'après qu'ils
auront figné leur Acte de foumiffion , & qu'ils auront
remis aux Officiers de la République les poftes
dont ils fe font emparés.
On a appris de Lombardie , que l'on juge par
diverfes difpofitions que fait le Duc de Modéne ,
qu'il a deffein de fe rapprocher du Bolonois avec
Farmée Espagnole , qui eft fous fes ordres.
Le Comte de Traun a toujours fon quartier général
à Carpi , & il n'attend , pour retourner en
Allemagne , que l'arrivée du Prince de Lobckowitz ,
qui doit commander à fa place les troupes de la Reine
de Hongrie en Italie .
O mande de la Romagne , que l'armée Eſpagnole
, qui eft fous les ordres du Duc de Modéne ,
eft plus nombreufe , & en meilleur état qu'elle n'étoit
avant la Bataille de Campo Santo.
GRANDE BRETAGNE.
On apprend de Londres du premier de ce mois ,
que le Capitaine d'un Vaiffeau , arrivé depuis peur de
la Caroline , a rapporté , que le Vaiffeau de guerre
la Rofe , avoit conduit à Charles Town trois Bâtimens
Efpagnols , dont il s'étoit emparé , & qu'il
avoit fait échouer un Arniateur de la mêmeNation,
lequel avoit à bord 155. hommes.
Le Va ffeau l'Entreprife a été pris le 22. du
mois dernier par les Eſpagnols , en allant à Madere
, auffi bien que le Vaiffeau de guerre le S. Phis
lippe , dans la Riviére de la Plata.
Le
AOUST. 1743. 18571
Le 19. Mai dernier , un Vaiffeau de guerre Anglois
prit dans les environs des Açores un Vaiffeau
François qui apportoit de l'argent , & des marchan
difes de la Vera Cruz.
Le Bureau de la Guerre expédia le onze de ce
mois So. Commiffions d'Officiers , dont plufieurs
ont été accordées par le Roi à de fimples Soldats ,
qui fe font diftingués dans le combat d'Ettingen.
Les avis de la Jamaïque portent , que le Vaiffeau
de guerre le Haftings , commandé par le Lord Barnf,
y avoit conduir le Vaiffeau , dont il s'étoit emparé
dans les environs des Açores.
HOLLANDE ET PAYS BAS.
On apprend de la Haye du 9. de ce mois , que
les Régimens d'Infanterie de Sandouville , de
Cromstrom & d'Aylva , le Régiment des Gardes à
Cheval , & celui de Cavalerie du Prince Guillaume
de Heffe , fe font rendus le premier & le deux au
Camp près d'Arnhem , d'où le Régiment des Gardes
à pied , & celui de Sturler , ont dû partir le 3 ,
pour marcher vers le Zalm Heyde .
La premiere Colonne des troupes que la République
fournit à la Reine de Hongrie , a été affemblée
le 4. à Doefbourg , & elle a dû fe mettre le
6. en marche , pour aller joindre l'ermée des Alliés
en Allemagne.
Le Confeil d'Etat a envoyé le Baron de Torck ,
& M. Hogendorp , pour vifiter les fortifications
des Places fituées le long de la Meuſe.
M. Van-Hoey , Ambaffadeur de cette République
auprès du Roi Très-Chrétien , a obtenu fon
rappel.
On a appris de la Haye du 16. de ce mois , que
la premiere divifion des Troupes , qui par ordre de
Hv
la:
1858 MERCURE DE FRANCE.,
la République de Hollande , vont joindre l'armée
des Alliés , étoit arrivée le 8. à Coesfeld dans l'Evêché
de Munfter ; qu'elle devoit continuer la routepar
Nottelen , Rochfel , Telligte , Warendorff ,
Wiadenbrock , Nicùbruck , Paderborn , Nuflen ..
Epentave , Corback , Sharfenberg , Frankenberg,
& Vetter; qu'elle fe rendroit le 29. à Marpurg , &
que. le 3 I elle pafferoit la Riviére de Lahn.
Les quatre autres divifions fuivront le même che
min que la premiére , & elles font parties fuceffivement
de Doefbourg , deux jours l'une après l'autre.
La derniere conduit avec elle l'artillerie , les pon.-
tons & les chariots de munition .
On apprend de Bruxelles du 17. de ce mois , que
les lettres de l'Armée des Alliés marquent que le
Baron de Geming , Colonel Commandant du Régiment
du Duc d'Aremberg , & Quartier Maître
Général des troupes Autrichiennes , s'étoit rendu
en deçà du Rhin , & y avoit marqué un camp pour
ces troupes , qui ont dû commencer le 13. à paffen
ce Fleuve.
La Ducheffe d'Aremberg a appris , qu'on avoit:
fait une nouvelle opération au Duc fon époux , pour
chercher la bale reſtée dans la bleſſure qu'il a reçuë
au combat d'Ettingen..
FRANCE
AOUST. 1743. 1859
FRANCE..
Nouvelles de la Cour , de Paris , &c..
L
י
E Roi a nommé le Maréchal de Coigny,,
pour aller commander dans fon Gouvernement
d'Alface.
S. M. a donné l'agrément du Régiment
de Cavalerie , dont le Duc d'Aumont étoit
Meftre de Camp , au Prince Camille de Lorraine
, fils du Prince de Pons..
La Charge de Sous - Lieutenant de la Compagnie
des Gendarmes de la Garde , vacante
par la mort de M. Jofeph-Antoine le Fournier
, Seigneur de Wargemont , tué au com--
bat donné près du Mein , le 27. Juin der--
nier , a été donnée au Marquis de la Salle
(Marie-Louis Caillebot ) premier Enſeigne
de cette Compagnie , petit - fils de Louis
Caillebot , Marquis de la Salle , Lieutenant:
général des armées du Roi , & Capitaine--
Lieutenant de la même Compagnie des Gendarmes
, nommé à l'Ordre du S., Efprit ,,
mort en 1682.
Et le Guidon de la même Compagnie ,
vacant par la mort du Comte de Meffay ,
tué au même combat ,, au Marquis de Vali
H vjj
belle
1860 MERCURE DE FRANCE.
belle ( Jofeph-Ignace-Come-Alfonfe- Roch
de Valbelle , Marquis de Rians ) Lieutenant
de Roi en Provence , Grand Sénéchal de
Marſeille , Moufquetaire de la premiere
Compagnie , fils de feu M. André Géofroy
de Valbelle, Marquis de Rians , de Montfuron
, & de Breffieu , Comte de Ribiez , Baron
de Meyrargues , Meftre de Camp de
Cavalerie , premier Enfeigne de la Compagnie
des Gendarmes de la Garde du Roi
Confeiller en fesConfeils,GrandSénéchal de
Marfeille , Grand Bailli des Montagnes de
Dauphiné , mort en fon Château de Meyrargues
, le 16. Avril 1735. âgé de 33. ans ,
& de De. Marguerite Delphine de Valbelle
de Tourves , aujourd'hui fa veuve.
M. de Cherifey , Lieutenant Général , &
Lieutenant d'une des Compagnies des Gardes
du Corps de S. M. qui étoit Commandeur
de l'Ordre Royal & Militaire de Saint
Louis , en a été fait Grand-Croix.
M. de Bernage , Confeiller d'Etat & Intendant
en Languedoc , fut élû Prévôt des
Marchands , dans l'Affemblée du Corps de
Ville , qui fe tint le 26. du mois dernier.
M. le Nain , Intendant de la Généralité
de Poitiers, a été nommé Intendant du Languedoc
>
AOUST. 1743 . 18613
guedoc , & il a été remplacé dans l'Intendance
du Poitou , par M. Berrier , Maître
des Requêtes , & Préfident du Grand Confeil.
Le 2. de ce mois , la Reine fe rendit à
l'Eglife des Récollets de Verfailles , qui célébroient
la Fête de Notre- Dame des Anges ;
S. M. y entendit la grande Meffe , & le foir
elle y affifta au Salut .
Le 6. M. Creſcenzi , Archevêque de Naziance
, & Nonce Ordinaire du Pape , eur
une audience particuliere du Roi , & il y fut
conduit par le Chevalier de Sainctot, Introducteur
des Ambaffadeurs.
La Reine entendit le 14. de ce mois , la
Meffe dans la Chapelle du Château de Verfailles
, & S. M. y communia par les mains
de l'Archevêque de Rouen , fon Grand Aumônier
.
Le 15. Fête de l'Affomption de la Sainte
Vierge , le Roi & la Reine entendirent dans
la même Chapelle , la Meffe chantée par la
Mufique. L'après midi , Leurs Majeftés , accompagnées
de Monfeigneur le Dauphin ,
affiſtérent aux Vêfres & à la Procefion , à
laquelle
1862. MERCURE DE FRANCE..
Laquelle l'Abbé Broffeau , Chapelain de la
Chapelle de Mufique , officia..
Le même jour , la Proceffion folemnelle ,
qui fe fait tous les ans à pareil jour , en exé--
cution du Vou de Louis XIII..fe fit avec les
cérémonies ordinaires , & l'Abbé d'Harcourt
, Doyen du Chapitre de l'Eglife Métropolitaine
, y officia. Le Parlement , la
Chambre des Comptes , la Cour des Aydes-
& le Corps de Ville , y affiftérent..
Le 16. pendant la Meffe du Roi , l'Evêque
du Puy prêta Serment de fidélité entre les
mains de S, M ..
Le même jour , dans l'Affemblée générale
du Corps de Ville , M. Baizé , Confeiller de
Ville , & M. Pierre , furent élus Echevins..
Le 22. le Roi prit le deüil
de Mademoiſelle du Maine..
pour la mort
Le 25. Fête de Saint Louis , la Proceffion
des Carmes du Grand Convent , à laquelle
le Corps de Ville affifta , alla fuivant la coûtume
, à la Chapelle du Château des Thuilleries
, où ces Religieux célébrerent la
Meſſe..
Le
:
AOUST. 1743; 1:863
Le même jour , l'Académie Françoife ,,
célébra la même Fête dans la Chapelle du
Louvre, Pendant la Meffe , on chanta un
fort beau Motet , & le R.P. Griffet , de la
Compagnie de Jefus , prononça le Panégyrique
du Saint..
L'Académie Royale des Infcriptions &
Belles-Lettres , & celle des Sciences , célébrérent
la même Fête , dans l'Eglife des Prê--
tres de l'Oratoire , de la rue Saint Honoré
où le Panegyrique du Saint fut prononcé
par M. Richard, Procureur Général de l'Ordre
desPrémontrés.Il y eut auffi un très- beau
Motet en Mufique , qui fut chanté pendant
la Melle..
L'Académie Françoife tint le même jour
une Affemblée publique , dans laquelle elle :
diftribua le Prix d'Eloquence, qui a été rem--
porté par l'Abbé de l'Eclufe des Loges.. Le
Prix de Poëfie a été remis à une autre année ,..
parce qu'aucune des Piéces, qui ont été préfentées
à l'Académie ,, ne lui a paru digne
d'être couronnée ..
Le 26. les Députés des Etats de la Province
de Languedoc , eurent audience du
Roi . Ils furent préfentés par le Maréchal de
Maille
1864 MERCURE DE FRANCE.
Maillebois , Lieutenant Général de la Province
, & par le Comte de Saint Florentin ,
Secrétaire d'Etat , & conduits en la maniere
accoûtumée , par le Marquis de Dreux ,
Grand Maître des Cérémonies , & par M.
Defgranges , Maître des Cérémonies . La !
Députation étoit compofée , pour le Clergé
, de l'Evêque de Nifmes , qui porta la parole
, du Marquis d'Ambres , pour la Nobleffe
; de Mrs. Baillarguet & Dorimieux
Députés du Tiers Etat , & de M. Joubert ,
Syndic Général de la Province. Les mêmes
Députés eurent enfuite audience de la Reide
Monfeigneur le Dauphin & de Mefdames.
Le 27. M. Crefcenzi , Archevêque de
Naziance , Nonce Ordinaire du Pape , eut
une audience du Roi , dans laquelle il prit
congé de S. M. Il fut conduit à cette audience
, ainfi qu'à celles de la Reine , de
Monfeigneur le Dauphin & de Mefdames
de France , par le Chevalier de Sainctot ,
Introducteur des Ambaffadeurs.
Le Roi a donné le Régiment d'Infanterie
de Mortemart , dont le feu Duc de Rochechoüart
étoit Colonel , au Marquis de Laval
, Capitaine dans le Régiment de Cavalerie
Royal Pologne , & celui de Cavalerie
,
AOUST. 1743 . 1865
tie , dont le feu Marquis de Fleury étoit
Meftre de Camp, au Comte de la Viefville ,
Capitaine dans le Régiment de Cavalerie
de Noailles.
S. M. a accordé l'agrément du Régiment
d'Infanterie , dont le Marquis de Chaillou
étoit Colonel , au Marquis de Ségur, Capitaine
dans le Régiment de Cavalerie d'Egmont
, & celui du Régiment de Cambrefis
, au Marquis de la Châtre , Capitaine
dans le Régiment de Dragons de Nicolaï.
La Statue Equeftre du Roi , qui a été
faite à Paris , par M. le Moine , & fonduë
par M. Varin , pour être pofée dans la nouvelle
Place de la Ville de Bordeaux , y ayant
été placée , elle fut découverte le 19. de ce
mois avec beaucoup de cérémonie.
On a appris de Vienne , que le 13. de
ee mois , la Reine de Hongrie y étoit accou
chée d'une Princeffe.
L'armée du Roi , commandée par le Ma
réchal de Noailles , ayant quitté le 12. du
mois dernier le camp de Steinheim , elle
alla le même jour camper à Imhain ; elle ar
riva le 13. à Grabenhaufen , le 14. à Fung
ftatt , & le 15. à Grofvosheim. Elle y féjourna
le 16. & cette armée ayant paffé le Rhin
le
1866 MERCURE DE FRANCE.
le 17. fur le Pont de Bâteaux, que le Maréchal
de Noailles avoit à Rhindurckeim, elle
campa fous Worms.
Les troupes de S. M. qui font fous les
ordres du Comte de Saxe , fe font raffemblées
à Spire , le 13. du mois dernier .
Le 20. & le ZL. le Comte de Saxe a fair
marcher vers la Haute Alface , un détachement
de cette armée , lequel eft commandé
par le Marquis de Clermont Gallerande
Lieutenant Général.
On a appris de Strasbourg du s . de ce
mois ,, que l'Armée du Roi, commandée
par le Maréchal de Noailles , étant partie de
Worms le 25. du mois dernier , elle alla le
même jour à Epeftein, près de Frankendal ,
& qu'ayant continué fa marche le lendemain
, elle campa entre Spire & la Rehute.
Le Maréchal de Noailles a laiffé à Fran-
Kendal M. de Berchiny , avec fix Compagnies
de Grénadiers & le Régiment de Huffards
, dont il eft Meftre de Camp.
Les troupes Françoifes revenues de Baviére
, qui s'étoient raſſemblées à Spire , le
13. du mois dernier , fe font féparées le 24 .
& le 25. en plufieurs Corps , lefquels one
marché vers la Haute & la Baffe Alface , &
fur les Frontières des Trois Evêchés.
La Maiſon du Roi , la Gendarmerie , &
le Régiment Royal des Carabiniers , font
rentrés
AOUST. 1743. 1867
rentrés en Alface , & le Maréchal de Noailles
a laiffé au Comte de Saxe le Commandement
de toutes les troupes , qui font actuellement
dans cette Province. Il a donné
celui des troupes qui font en Lorraine, au
Marquis de Montal, Lieutenant Général ,
& il a envoyé le Duc d'Harcourt , commander
dans fon Gouvernement de Sédan ; le
Comte de Danois à Thyonville , & le Marquis
de Brezé à Sarre- Louis..
Le Maréchal de Noailles a quitté le 13 .
de ce mois , le camp qu'il occupoit près de
Spire , & il s'eft rendu le même jour à Gemershein
; il a campé le lendemain à Rhinzabern
, & il s'eſt rendu le 15. à Lauterbourg.
Les troupes commandées par le Comte
de Saxe , partirent le 15. de Markelfem ,
pour aller camper à Edern , à une lieuë audeffus
du Neuf- Brifack.
Le rs.de ce mois , Fête de l'Affomption
de la Ste . Vierge , il y eutConcert fpirituel au
Château des Tuilleries. On y chanta un Moret
à grand choeur, de la compofition du Sr..
Philidor , ordinaire de la Mufique du Roi ,
lequel fut fuivi d'un Concerto , exécuté fur la
Flute-traverfiere , par le Sieur Blavet. On
donna enfuite un autre Motet à grand
choeur de feu M. de la Lande , dans lequel
la
1868 MERCURE DE FRANCE,
la Dlle. Romainville chanta pour la premiére
fois deux differens Récits , avec beancoup
d'applaudiffement ; on lui trouve la
voix très - belle , chantant avec autant de
goût , que de précifion . Le Concert fut terminé
par un troifiéme Motet , du Sieur de
Mondonville , précédé d'un Concerto, exécuté
par lui-même.
Le 25. Fête de Saint Louis , le Concert
d'Inftruments , que l'Académie Royale de
Mufique , donne tous les ans au Château
des Thuilleries , à l'occafion de la Fête du
Roi , fut exécuté par un grand nombre d'excellens
Symphoniſtes de la même Académie
, qui jouerent differens morceaux de
Mufique de M. de Lully , & d'autres Maîtres
modernes.
L'expofition des Tableaux , Sculptures
Gravûres , Deffeins , & autres Ouvrages de
l'Académie Royale de Peinture & Sculptu
re , établie à Paris fous la protection du Roi,
a commencé le s . de ce mois , & doit durer
jufques & compris le Dimanche premier:
Septembre , dans le grand Salon du Louvre.
Cette Expofition a été ordonnée , felon
l'intention du Roi , par M. Orry , Miniftre
d'Etat , Controlleur Général des Finances ,
Directeur Général des Bâtimens , Jardins
Arts
AOUST. 1743 . 1869
Arts & Manufactures du Roi , & Protec
teur de l'Académie , par les foins du Sieur
Portail , Garde des Plans & Tableaux de
S. M. On en parlera plus au long dans le
premier Journal,
DESCRIPTION de la Pompe funébre ;
du Service folemnel , célébré en l'Eglife
de l'Abbaye Royale de Chelles , le Mardi
23. Juillet 1743. pour le repos de l'Ame
de très Haute , très Puiffante , très- Excellente
, & très pieufe Princeffe , MADAME
LOUISE ADELAIDE D'ORLEANS , Religieu
fe Profeffe , ancienne Abbeffe de cette
Abbaye , morte à Paris , au Prieuré de la
Magdelaine de Trainel , le 20. Février précédent,
·
'Abbaye de Chelles , l'une des plus anciennes,
& des plus célébres de la Chrétienté
, fituée à quatre lieues de Paris ,
vers l'Orient , prefque fur les bords de la
Marne , tire fon origine de la piété de Ste.
Clotilde , Epoufe de CLOVIS - LE - Grand ,
qui fit bâtir en ce Lieu , qui étoit du Domaine
du Roi , au commencement du fixième
fiécle , une Chapelle dédiée à S. Georges ,
avec quelques Cellules, pour y loger un petit
nombre de Vierges confacrées au fervice
de Dieu,
Environ 150. ans après , Sainte Barilde ,
Veuve
870 MERCURE DE FRANCE.
-
Veuve de Clovis fecond , ayant remis à Clo
taire troifiéme , l'aîné de ſes trois fils , le
Gouvernement du Royaume, dont elle avoit
eu la Régence pendant la Minorité , le retira
en cette Communauté , où elle avoit fait
bâtir une Eglife , fous l'invocation de Ste.
Croix , avec un Monaftére fpacieux , capable
de contenir une Communauté nombreufe
, qu'elle y affembla , & la dota de gros
biens , dont la Donation fut ratifiée par les
Princes fes fils.
Elle y établit , pour premiere Abbeſſe ,
Ste. Bertille , Religieufe de Jouars , dont la
place a été fucceffivement remplie , par des
Princeffes du Sang Royal, ou par des Dames
des premiéres & des plus anciennes Maifons
du Royaume.
Mais depuis la Ste. Fondatrice , aucune
Abbeffe n'a autant mérité les regrets de la
Communauté , que MADAME D'ORLE'ANS ,
les bienfaits dont elle a comblé cette Maifon
, étant le moindre motif du tendre &
refpectueux attachement , que la Communauté
avoit pour cette Princeffe. C'étoit la
douceur de fon Gouvernement , fon affabilité
, fa piété , & l'affemblage de toutes les
vertus convenables à l'état qu'elle avoit embraffé
, qui lui avoient gagné le coeur de
toutes fes Religieufes. Elle étoit pour chacune
une tendre Mere , & une fecourable
amie ,
AOUST. 1743 . 1871
amie , & le refpect infini qu'elles lui portoient
, n'intimidoit point la confiance qu'
elles avoient en elle.
Ainfi , on peut juger de la confternation
où cette Communauté fut plongée , lorſque
la Princeffe infpirée d'un efprit de retraite ,
Et la démiffion de fon Abbaye , pour la confier
à Madame de Clermont, dont elle avoit
reçû les Voeux de Religion & qu'elle connoiffoit
feule capable de la gouverner fuiwant
fon efprit.
Ce digne choix , & l'intime correſpon
dance établie entre MADAME D'ORLE'ANS
& la nouvelle Abbeffe , avoient d'autant
mieux calmé la douleur de la Communau
té , qu'elle ne trouvoit aucun changement
dans le Gouvernement , & qu'elle avoit la
fatisfaction de recevoir fouvent dans les vifites
de la Princeffe , des affurances de la tendreffe
qu'elle confervoit pour elle. Il n'y
avoit pas quatre mois , que les Réligieufes
de Chelles avoient eu le bonheur de pofféder
leur ancienne Abbeffe , lorfqu'elles apprirent
fa maladie ,
Chacune d'elles fouhaitoit lui donner en
cette occafion des marques de fon tendre &
refpectueux attachement ; mais la difficulté
du choix , engagea Madame de Clermont a
partir brufquement , accompagnée feule
ment de deux Religieufes , Mad, de Gellan,
fa
1872 MERCURE DE FRANCE.
fa foeur , & Mad . Arnaud , anciennement at
tachée à la Princeffe, Elles eurent la douleur
de la voir expirer, le feptième jour de fa maladie
; & la nouvelle , qui en fut à l'inftant
portée à Chelles, jetta la Communauté dans
un chagrin inexprimable,
Cependant la douleur faifant place au
devoir , Madame l'Abbeffe & la Communauté
, firent de vive-voix & par écrit, toutes
les démarches convenables, pour obtenir
corps de la Princeffe , & commencerent
par donner les ordres pour fon tranfport.
le
Mais elles furent obligées de céder à une
Puiffance , dont les décifions font des ordres
qu'elles refpecteront en toutes occa
fions. Il fut décidé que la maladie , dont la
Princeffe étoit morte , ne permettant pas de
la transferer , elle feroit inhumée au Prieuré
de la Magdelaine de Trainel , où elle étoit
décédée. La cérémonie s'en fit le 21.Février ,
le lendemain de fa mort,
Madame l'Abbeffe & fa Communauté , ſe
voyant privées de la poffeffion des précieux
reftes de MADAME D'ORLE'ANS , firent d'abord
célébrer plufieurs Services à fon intention
, tant dans leur Eglife , que dans les
Paroiffes de leurs Seigneuries , & fe propoferent
de faire une pompe funebre , qui
fut digne de fa naiffance , & qui répondit
au refpect , & à la reconnoiffance , que ces
Dames
AOUST. 1743 . 1875
Dames conferveront éternellement , pour la
mémoire de cette Augufte Princeffe , leur
bienfaitrice & la reftauratrice de leur Maifon.
Elles priérent , de l'agrément de la
Maifon d'Orléans , M. Adam , Docteur de
la Maifon de Navarre , Prédicateur ordinaire
du Roi , & Curé de la Paroiffe de S. Barthélemy
, de ſe charger de l'Eloge funébre .
Mais les fonctions de ce Pafteur ne lui
permirent pas de répondre à l'empreffement
de Mefdames de Chelles ; c'est ce qui a retardé
cette cérémonie. Le jour en ayant été
fixé au 23.Juillet , Madame l'Abbeffe fit diftribuer
fix cent Billets d'invitation , qui furent
précédés de plufieurs Lettres , qu'elle
adreffa aux Puiffances , & aux Perfonnes de
la premiére condition,
On travailla un mois entier aux préparatifs
de la décoration , dont voici la defcription.
L'Eglife bâtie au commencement du neuviéme
fiécle , par l'Abbeffe Gifelle , foeur de
Charlemagne , eft une Croix Latine avec
des bas côtés, L'une des croifées eft occupée
en partie par une Tribune , qui eſt de
plein pied au Dortoir , où les Dames chantent
les Matines à minuit. Toute la Nef,
depuis la croifée , compofe le Choeur des
Dames , qui eft fermé par une magnifique
Grille de fer , de vingt-fix pieds de face , &
I d'Ordre
1876 MERCURE DE FRA NCE.
d'Ordre Corinthien : l'Entablement eft fürmonté
de cinq fupports, cù font pofées cinq
grandes Châffes , celle de Sainte Batilde oc
cupant le milieu . Cet ouvrage admiré de
tous les Connoiffeurs , fut exécuté fous les
ordres de la feuë Princeffe , par Denis , fameux
Ouvrier de Saint Denis ; & c'est l'ouvrage
le plus parfait , qui foit forti de fes
/ mains ,
Le Sanctuaire élevé de quelques marches
, & féparé par une Baluftrade de marbre
noir , renferme un magnifique Autel
adoffé, d'Ordre Compofite, conftruit fous les
ordres de Mad, de la Porte de la Meilleraye,
Abbeffe , il y a près de cent ans.
La Porte extérieure de cette Eglife , eft
au bout d'une Cour oblongue , dont l'entrée
eft à l'autre extrêmité. Cette entrée , qui eft
dans un angle , n'ayant pas la fituation convénable
, pour une décoration extérieure
on ouvrit exprès une Porte au milieu du
mur , qui régne depuis cette entrée , jufqu'à
celle de l'Eglife , & on y éleva des bois de
charpente d'eſpace en efpace , avec des traverfes
pour attacher la tenture , qui fut de
trente - cinq pieds de haut , fur cent cinquante
pieds de face , ornée de deux Litres
de velours , chargées à un pied de diſtance ,
d'Ecuffons aux Armes & Chiffres de laPrincelle.
Entre
AOUST. 1743 . 1877
Entre ces deux Litres , étoient trois grandes
Armoiries , & deux grands Chiffres en
cartouches , ornés de branches dè Cyprès ,
& furmontés de la Couronne de France ouverte
, & d'une Croffe. Cette Porte étoit
fermée d'une barriére , gardée par douze
Suiffes de la Garde du Roi , commandés
par un Sergent , tous en habits de deüil ,
avec pleureuſes aux manches & crêpes aux
chapeaux.
Depuis cette Porte , jufqu'à l'encoignure
du Sanctuaire , on avoit conftruit une Galerie
de cent cinquante pieds de long , tenduë
en plafond jufqu'à terre , à douze pieds de
hauteur , ornée de deux Litres de velours ,
chargées d'Armoiries & de Chiffres. L'intervalle
étoit occupé par trente Girandoles
à trois branches , garnies de bougies d'une
demie-livre.
Dans l'efpace libre des deux croiſées ,
étoient élevées à treize pieds de hauteur ,
deux grandes Tribunes de chaque côté.
qui joignoient immédiatement les piliers du
Choeur , & ceux du Sanctuaire , enforte que
l'Eglife ne formoit plus qu'une grande Chapelle.
On montoit à ces quatre Tribunes ,
par deux Escaliers pratiqués fur le derriére,
La tenture de drap noir , étoit à quarantecinq
pieds de hauteur , c'est -à- dire , de la
naiffance de la voute , juſqu'à terre : les fe-
I ij
nêtres
1878 MERCURE DE FRANCE:
nêtres & les autres vûës étant exactement
bouchées, Toutes les ftalles & le pavé , tant
du Choeur , que du Sanctuaire & de la Nef,
étoient couverts de tapis de drap noir,
Le Sanctuaire , la Nef & le deſſous des
Tribunes , furent remplis de fauteuils
chaifes , plians & carreaux , pour placer les
Perfonnes invitées , fuivant les qualités.
Les quatre Tribunes tendues en plafond
étoient ornées en face , tant en haut qu'en
bas, de grands rideaux retrouffés par degros
cordons d'argent avec leurs glands ; & les
Gradins étoient couverts de drap noir.
Pour faciliter l'entrée dans le Choeur
tant pour y placer les Dames de condition ,
que pour faire les Abfoutes , on avoit enle
vé le devant de la Grille , pour former un
Portique de huit pieds de face , furmonté de
fon entablement , ce qui fut rétabli après le
Service.
Le Catafalque étoit pofé à l'entrée du
Choeur, fur une Eftrade de dix pieds de haut,
couvert d'un poële de velours noir , à Croix
de moire d'argent , & bordé d'hermine , orné
de quatre moyennes Armoiries , A la tête
étoit la Couronne de France ouverte , pofée
fur un Carreau de velours noir à glands &
galons d'argent , & couverte d'un crêpe ,
ainfi q e la Croffe , qui étoit au pied , la
pointe pofée fur un pareil Carreau. Les quatre
AOUST. 17437 1879
coins du poële étoient foutenus par quatre
figures d'Enfans pleurans. Les trois
Gradins de l'Eſtrade , étoient garnis de
tre-vingt-dix Chandeliers d'argent , portant
des cierges armoiriés des deux faces.
Au chef , & au pied des Gradins , étoient
deux figures , de grandeur naturelle , repréfentant
la Charité & la Religion, principales
vertus de la Princeffe . Le Dais élevé à
quarante-
cinq pieds de hauteur, étoit de velours
noir , à crêpines d'argent , furmonté de plumes
, & d'aigrettes noires & blanches ; le
fond & les pentes chargés d'Armoiries. Des
coins du Dais pendoient quatre grands rideaux
de fatin noir , à bandes d'hermine ,
fèmés de larmes d'or , retrouffés avec des
cordons & glands d'argent.
Dans le Choeur des Dames , qui a cent
trente pieds de pourtour , régnoit un filet de
lumiéres , à fleurons dorés , élevé de treize
pieds , garnis de bougies. La première litre
de velours , femée de larmes d'argent , &
chargée d'Armoiries & Chiffres , entourés
de feftons d'hermine , fervoit de pente à ce
filet de lumiére. La feconde litre de velours,
pareillement ornée de larmes , Chiffres &
Armoiries, étoit immédiatement au- deffous
de la naitfance de la tenture .
L'intervalle étoit rempli d'onze grandes
Armoiries & Chiffres , foutenus d'une tête
I iij
de
1880 MERCURE DE FRANCE.
de mort aîlée , furmontée d'une girandole à
cinq lumiéres. Chaque Cartouche , accompagné
de deux pareilles Girandoles , ayant
pour fupport une tête de mort à cyprès. La
Tribune de l'Orgue étoit mafquée par l'u
niformité de la décoration ; on y avoit feulement
pratiqué deux petites Tribunes à
vues mortes .Toutes les têtes de mort étoient
dorées , & les Girandoles argentées.
A la place des cinq Châffes , qui avoient
été ôtées de deffus la Grille , furent pofés
des focles , ornés des deux faces de têtes de
mort aîlées. Celui du milieu occupé par une
grande Croix d'argent. Les quatre autres
des Girandoles à 13. Bougies.
par
Le filet de lumiére régnoit fur les deux
longueurs de la Nef & du Choeur , pofé fur
neuf timpans , ornés de larmes d'argent , &
de têtes de mort aîlées , accompagnés de
piedeftaux , foutenus de pareilles têtes , furmontés
de focles d'argent , portant des Girandoles
à 8. lumières. Les deux litres de velours
, ornées comme celles du Choeur , ré- ,
gnoient à la même élévation .
Les quatre faces des piliers , foutenant les
croifées de l'Eglife , étoient ornées de quatre
grandes Armoiries , foutenues & accom-.
pagnées comme celles du Chour.
Quatre pareilles Armoiries étoient placées
entre les quatre Tribunes , & à la naif
fance
AQUST. 1743 : 1881
Lance de chaque rideau , étoit un grand.
Chiffre.
La Chaire de l'Orateur étoit placée à la
droite de l'Autel , près la Grille, & étoit ornée
d'un tablier , & de pentes de velours
noir , à crépines d'argent , chargés d'Armoiries.
Sur la Baluftrade du Sanctuaire , étoient
deux Girandoles à huit bougies & audeffous
des timpans du filet de lumieres ,
étoient des pentes de velours noir , à crépines
d'argent , chargées d'Armoiries & de
Chiffres , avec les mêmes ornemens & accompagnemens.
Au-deffus de l'Autel , à la hauteur de la
tenture , étoit un Dais de velour noir , à
crépines d'argent , avec fa queue & fes rideaux
de fatin herminé , le tout chargé
d'Armoiries. Les trois Gradins de l'Autel ,
portoient vingt-huit Chandeliers d'argent ,
avec leurs cierges armoriés. Derriere , étoit
un rétable de velours noir , chargé de quatre
moyennes Armoiries , furmonté d'un filet
de douze Chandeliers d'argent , portant
des cierges armoriés. Au-deffus , un timpan
garni de bougies , formoit la continuation
du filet de lumiére . Deux crédences accompagnoient
l'Autel , ayant leurs paremens ,
& rétables de velours noir armoriés , avec
deux Chandeliers d'argent , & furmontés
d'une Girandole à huit branches ; à côté de
I iiij cha .
1882 MERCURE DE FRANCE.
chacune , étoient deux pareilles Girandoles,
pofées fur des piedeftaux.
Le Lundi , 22. Juillet au foir , les Vêpres
des Morts & les Vigiles furent chantées
les Dames .
par
Le lendemain 23. le Service commença
onze heures précifes du matin ; le R. P. Laneau
, Supérieur Général de la Congrégation
de S. Maur , officia , accompagné de
fes Affiftans , & de plufieurs Supérieurs de
la même Congrégation . Il y eut offrande de
pain & de vin , préfentée par trois Officiers
en manteau-long , précédés d'un Maître des
Cérémonies , en robe .
L'Eloge funébre de MADAME D'ORLe'ans ,
prononcé par M. Adam , eut un applaudiffement
Général , & fit verfer des larmes à tout
l'Auditoire , qui fut auffi très - attendri du
chant de l'Office , compofé en trois parties ,
fur le chant Grégorien , par M. Morin , ancien
Maître de Mufique de la feue Princeffe.
Trois baffons , & un ferpent donnoient
le ton par des préludes triftes & lugubres
aux quatre Dames premiéres Chantres, pour
commencer les intonations, qui étoient fuivies
par toute la Communauté , foutenuë de
ces quatre Inftrumens , & de deux Baffes
chantantes.
La Meffe étant finie , le R. P. Général , &
quatre autres Supérieurs de la Congréga,
tion ,
AOUST. 1743.
1883
•
tion , avec leurs Affiftans , firent cinq Abfoutes
, dont les Répons furent chantés par
les Dames , ainfi que le Libera & le De profundis
, en fauxbourdon , avec les mêmes accompagnemens
qu'à la Meffe.
Après l'Office , qui ne finit qu'à trois
heures fonnées , Mad. l'Abbeffe , qui avoit
fait faire fes invitations pour le dîner , tint
une table de quarante couverts , qui fut ſervie
avec une propreté & une décence convenable
, à tous égards.
Il y eut auffi trois autres tables , deux de
trente couverts chacune , & une de
quarante
, très-bien fervies , dont trois Officiers ,
attachés à la Maiſon , firent les honneurs.
Indépendamment de ces quatre tables , il
y en eut plufieurs autres moindres , tant audedans
, qu'au-dehors.
Cette pompe funebre a été ordonnée par
Mad . de Clermont , Abbeffe de Chelles ,
& exécutée par les deux Intendans de
l'Abbaye.
Iv MORTS.
1884 MERCURE DE FRANCE.
MORT S.
Ouis-Anne Clerembauld de Vendeuil
Seigneur de Dieudonne , Marquis de
Vendeuil , Lieutenant des Gardes du Corps,
& Brigadier des Armées du Roi du 15 .
Mars 1740 .a été tué au Combat d'Eftingen
le 27.Juin dernier , à l'âge de 52. ans , avec
Louis Clerembault de Vendeüil , Exempt
des Gardes du Corps , fon fils unique , âgé
de 22. ans , qu'il avoit eût de fon mariage
avec D. Marguerite de Mailly du Breüil ,
étoit fils de François Clerembauld de
Vendeuil , Marquis de Vendeuil , Seigneur
de Dieudonne , Lieutenant Géneral des Armées
du Roi , Lieutenant des Gardes du
Corps de S. M. & Gouverneur de Pecquay ,
mort en 1712. & de D. Marie-Anne de
Rangueil , lefquels , outre le Marquis de
Vendeuil , qui donne lieu à cet article ,
avoient eû pour fils aîné Albert - François
Clerembauld de Vendeuil , Seigneur de
Dieudonne , Comte de Vendeüil , Meſtre
de Camp du Regiment Dauphin Cavalerie
Gouverneur de Pecquay , & Grand-Bailly
d'Orleans , mort le 5. Avril 1712. pere
de Albert-François Clerembauld de Vendeuil
, Seigneur de S. Germain & de Neufville
AOUST. 1743. 1885
ville , Comte de Vendeüil , Capitaine dans
le Régiment Royal Rouffillon , Cavalerie ,
aujourd'hui marié avec Dlle Louife- Marthe
de Melfey,foeur & unique héritiere de feu M.
le Comte de Meffey , Guidon des Gendarmes
de la Garde du Roi , tué au même
Combat d'Ettingen , & dont il a un fils unique
Albert - Louis Clerembauld de Vendeüil
, âgé de 6. ans.
La Maifon de Vendeüil prend fon nom
de la Terre de Vendeüil , fituée fur la Riviere
d'Oife , près Saint Quentin , &
remonte jufqu'à Clerembauld de Vendeuil
, Seigneur de Vendeüil , Chevalier ,
vivant l'an 1096. comme il fe lit dans les
Auteurs qui ont écrit de la premiere Croifade
, & dans l'Hiftoire de la Maifon de
Bethune , par le célébre André du Chefne ,
dans laquelle , Livre IV. fol . 284 & fuivans
, fe voyent d'anciens Sceaux , fur lefquels
font les mêmes Armes que portent
aujourd'hui Mrs de Vendeuil , qui font un
Lion naiffant. L'Hiftoire de la Guerre Sain
te , intitulée la Franciade Orientale, fol. 40.
remarque que le même Clerembauld de
Vendeuil fut un des Seigneurs qui accont→
pagnerent Hugues le Grand, Comte de Ver
mandois, frere du Roi Philippes I. du nomi ,
en fon voyage de la Terre Ste l'an 1996. &
qui furent faits prifonniers avec ce Prince,
I vj par
1886 MERCURE DE FRANCE.
par le Gouverneur de Durazzo pour l'Em
pereur de Conftantinople , & dont la liber
té leur fut procurée par l'entremife & la valeur
de Godefroy de Bouillon.
Clerembault III. du nom , Seignent
Chaftelain de Vendeüil , vivant l'an 1225.
n'eut que deux filles , dont l'aînée, Jeanne
de Vendeuil , porta cette Terre dans la
Maifon de Roye par fon mariage avec Matthieu
de Roye, Seigneur de la Fere, en Ponthieu
, d'où vint Marie de Roye , Dame de
Vendeuil , qu'elle porta dans la Maiſon de
Bethune par fon mariage avec Guillaume de
Be hune, Seigneur de Locres, Chevalier, &c.
Ce Clerembaald de Vendeiiik III. du nom,
Seigneur de Vendeuil eut pour frere puîné
Guy de Vendeuil , Seigneur d'Aubigny ,
duquel defcendoit , par plufieurs degrés ,
Claude de Vendeuil , Seigneur d'Aubigny ,
vivant en 1525. Auteur de toutes les Branches
de ce nom , qui fubfifte à préfent. La
premiere , des Seigneurs d'Aubigny , puis
du Crocq , finie en 1702. par la mort de
Pierre-Thimoleon de Vendeüil , Chevalier
Seigneur du Crocq , Brigadier des armées
du Roi , rné an Combat de Luzarra , érant
nommé Maréchal de Camp. La deuxième ,
des Seigneurs d'Ettelfay, aujourd'hui aînés.
de toute la Maifon , qui fubfifte en la perfonne
de François-Anne de Vendeüil , Chevalier
AOUST. 1743. 97887
valier , Seigneur d'Eftelfay , Ecuyer de la
Grande Ecurie du Roi , ci-devant Capitaine
au Régiment d'Infanterie de Tavannes ,
& d'Antoine- François de Vendeüil , fon
frere , ci-devant Capitaine dans le Régiment
Royal Rouffillon , Cavalerie , & Chevalier
de l'Ordre Militaire de S. Louis ,
qui de fon mariage avec Dlle Marie-Anne-
Geneviève de Vendeuil de Marotes , fa
coufine ; n'a qu'un fils , nommé Marie- Jofeph
de Vendeuil , né le 10. Août 1731 .
La troifiéme , des Seigneurs de Dieudonne
, connus fous le Titre de Marquis &
Comtes de Vendcüil , qui ont donné lieu
à cet article , & dont eft encore Charles
Clerembauld , Seigneur de Pourpry , Capitaine
dans le Régiment Dauphin, Cavalerie ,
leur frere & oncle. Et la quatrième , des
Seigneurs de Marotel , qui ne fubfifte plus
qu'en la perfonne de Philippes- Jofeph de
Vendeuil de Marotel , qui a embraffé l'Etat
Eccléfiaftique , & dans celle de Mad . de
Vendeuil , fa foeur . Vendeüil porte pour
Armes d'azur à un Lion naiſſant d'or,fupdeux
Lions , Cimier un Lion naiſſant
ports
de-même.
Michel - Marie - François de Roncherolles
Pont S Pierre , dit le Chevalier de Roncherolles
, Chevalier non Profès de l'Ordre de
S, Jean de Jérufalem , Exempt des Gardes
du
888 MERCURE DE FRANCE
du Corps du Roi dans la Compagnie d'Har
court , a été tué au Combat d'Ettingen , âgé
de 25. ans , 8. mois , 24. jours. Après avoir
fervi quelques années en qualité de Capitaine
dans le Régiment Royal des Cravates,
qu'avoit alors le Comte de Pont S. Pierre ,
fon frère aîné , il alla faire fes caravannes
à Malthe , où il avoit été reçû de minorité
le 17. Janvier 1720. & à fon retour de
Malthe ,Sa Majefté l'avoit honoré d'un Bâton
d'Exempt dans fes Gardes du Corps. II
étoit fils de Michel de Roncherolles , Marquis
de Pont S. Pierre , premier Baron de
Normandie , Confeiller d'honneur né au
Parlement de Rouen , & de Marie-Anne-
Dorothée Erard-le-Gris , Marquife de Montreüil
& d'Echauffou , Comteffe de Cifey
morte le 29. Janvier 1739. & frere de Michel
-Charles- Dorothée de Roncherolles ,
Comte de Pont S. Pierre , Brigadier des
armées du Roi depuis le premier Janvier
1740. à préfent Enfeigne Chef de Brigade
des Gardes du Corps , Compagnie d'Harcourt
, & de Claude- Thomas-Sibile-Gafpard
-Nicolas - Dorothée de Roncherolles-
Pont S. Pierre , dit le Chevalier de Pont
S. Pierre , reçû auffi de minorité dans l'Ordre
de Malthe en 1709. Brigadier des ar
mées du Roi , Sous-Lieutenant de la Compagnie
des Gendarmes Ecoffois. Nous avons
parlé
A O UST.
1743.1889
parlé plufieurs fois dans nos précédens Mercures
des honneurs & prérogatives de cette
illuftre & très-ancienne Maifon de Roncherolles
, qui compte parmi fes Ancêtres ,
ainfi qu'il eft prouvé par des Monumens
authentiques , un Pierre de Roncherolles ,
mort l'an 1000. inhumé au Prieuré des
deux Amans , dans le voisinage de fa Terre
de Roncherolles , où il avoit fait des fondations
, avec cette Infcription fur fa Tombe
: Egregius vir Petrus de Roncherolles
Miles , lequel eut pour fils Roger de Roncherolles
, vivant encore en 1070. qui fut
pere d'un autre Roger de Roncherolles ,
qui vivoit l'an 1120. par lequel nos plus
fçavans Généalogiftes commencent l'Hif
toire de cette Maifon , & duquel defcend au
20. degré, de mâle en mâle , par une filiation
bien prouvée , le Marquis de Pont
P. Pierre , pere du Comte & du Chevalier
de Pont S. Pierre , & du Chevalier de Ron
cherolles , qui adonné lieu à cet article.
ARRESTS NOTABLES.
ORDONNANCE
DU ROI , du
premier Juin , pour créer & établir
un feptiéme Aide- Major dans le Régiment
de ſes GardesFrançoifes,dont la teneur fuit.
Sa
1890 MERCURE DE FRANCE.
Sa Majefté jugeant du bien de fon fervice;
de créer une feptième place d'Aide- Major
dans le Régiment de fes Gardes Françoifes,
a trouvé bon que le fieur Duc de Grammont,
Colonel de ce Régiment , lui propofe ceux
des Lieutenans du Corps qu'il croira les plus
capables de s'en bien acquitter , afin que
5. M. choififfe celui qu'elle voudra pourvoir
du brévet néceffaire pour en remplir les
fonctions , les exercer , & en jouir aux ap
pointemens qui lui feront reglés , & le faire
reconnoître en ladite qualité , ainfi que
les autres Aides-Majors dudit Régiment , de
tous ceux qu'il appartiendra . Mande & ordonne
S. M. au fieur Duc de Grammont ,
Colonel de fon Régiment des Gardes Françoifes
, aux Commiffaires de fes guerres ,
chargés de leur police, & à tous autres fes Officiers
qu'il appartiendra, de fe conformer à
l'entiére exécution & obfervation de la préfente
, laquelle fera lûe & publiée à la tête
du Régiment , à ce qu'aucun n'en prétende
caufe d'ignorance
.
ORDONNANCE du Roi , du premier
Juillet , portant création de cent cinquante .
deux Compagnies de Cavalerie , dont la teneur
fuit :
Sa Majefté jugeant néceffaire au bien de
fon fervice , de faire une augmentation
dans
AOUST. 17431 : 1891
dans fa Cavalerie - légére , a ordonné &
ordonne :
ART. I. Qu'il fera inceffamment levé cent
cinquante - deux Compagnies de Cavalerie
légére , de trente - cinq Maîtres chacune ,
pour former trente-hit Efcadrons , qu'elle
le réferve de faire joindre aux Régiment
aufquels elle les deſtinera .
II. Chaque Compagnie fera compofée
d'un Capitaine , d'un Lieutenant , un Cornette
, un Maréchal- des- logis , deux Brigadiers
, & trente-trois Cavaliers , y compris
un Trompette ; & payée comme les autres
Compagnies de Cavalerie , conformément
• à l'Ordonnance du premier Novemb.1742 .
portant réglement pour le payement de ſes
Troupes.
III. Les Capitaines que S. M. aura agréés
pour lever lefaites Compagnies , travailleront
le plus promptement qu'il fe pourra ,
pour affembler leurs Cavaliers aux Quar
tiers qu'ils choifiront , & prendront_leurs
mefures , pour rendre leurs Compagnies
complettes à trente-cinq Maîtres, dans le 16 .
du mois de Novembre prochain .
IV. S. M. leur fera fournir les chevaux
néceffaires pour monter leurs Compagnies..
V. Chaque Capitaine levera à fes frais
vingt-cinq Maîtres ; les dix autres , qui formeront
chaque Compagnie à trente-cinq ,
feront
1892 MERCURE DE FRANCE.
feront levés ; fçavoir, fix par le Lieutenant,
& quatre par le Cornette. Le Capitaine fera
tenu de les armer tous , habiller & équiper
à fes dépens , fuivant l'uniforme du Régiment
, à la fuite duquel il devra fervir ; il
payera auffi l'équipement du cheval.
१
VI. S. M. veut bien que du jour , qu'il y
aura cinq Cavaliers d'affemblés au Quartier,
compte des trente- cinq Maîtres , qui formeront
chaque Compagnie , la folde leur
foit payée , à commencer du premier du
mois d'Août prochain , fuivant les revûës
qui en feront faites , par les Commiſſaires
des guerres prépofés à cet effet ; & ce conformément
à l'Ordonnance de S. M. qui régle
le payement de fes Troupes : obfervant
néanmoins , que les appointemens des Capitaines
, Lieutenans , Cornettes , Maréchaux-
des-logis , & la paye des Brigadiers ,
ne doivent être établis , que du jour qu'il y
aura douze Cavaliers pour chaque Compagnie
; & que la maffe fur le pied de trentecinq
Maîtres , ne courra que du jour que
ces Compagnies pafferont en revûë audit
nombre: mandant S. M. à M. le Comte d'Evreux
, Colonel général de fa Cavalerie , &
au Sr. Marquis de Clermont - Tonnerre ,
Meftre de-Camp général de ladite Cavalerie
, de tenir la main , chacun ainfi qu'il lui
appartiendra , à l'exécution de la préfente ,
& c. ARAOUST.
1743 . 1893
ARREST , & Lettres Patentes fur icelui
, du 28. Mai 1743. portant défenfes de
vendre du Tabac rapé , fans la permillion
du Fermier. Regiftrées en la Cour des Aides
, le jo . Juillet fuivant.
AUTRE , du 4. Août , en faveur des
Miliciens de Paris , qui étoient ci - devant
en apprentiffage , ou Compagnons chés des
Marchands , ou Maîtres des Corps & Com
munautés de cette Ville , par lequel S. M
ordonne , que tous les Garçons aufquels
le fort est échû à la Milice de Paris ,
& qui étoient en apprentiffage , ou Compagnons
chés des Marchands des fix Corps ,
ou chés des Maîtres des Communautés ,
pourront , après leurs fix années de fervice
accomplies , & qu'ils auront obtenu des
congés abfolus , fe préfenter pour être reçus
Marchands au Maîtres defdites Communautés
, fi pendant leurs fix années de fervice.
militaire , le tems de leur apprentiffage ou ,
compagnonnage eft expiré ; & dans le cas ,
où il leur refteroit encore un fervice à faire
après lefdites fix années , qui leur feront
comptées , comme s'ils étoient réellement
reftés chés les Marchands ou Maîtres , foitcomme
Apprentifs , foit comme Compagnons
, ils pourront le finir chés les mêmes
Marchards ou Maîtres , ou chés tels autres
qu'ils
1894 MERCURE DE FRANCE:
qu'ils voudront choifir , fans qu'on puiffe
leur imputer , ni l'âge , ni l'interruption du
tems , & fans qu'ils foient obligés de tranfporter
, ni valider leurs anciens Brevêts.
Veut S. M. que tous les Garçons & Comfoient
ad- pagnons , qui feront dans ce cas ,
mis à la Maîtriſe fans difficulté , après leur
apprentiffage & compagnonnage finis de la
maniere ci - deffus expliquée , en juftifiant
feulement de leurs anciens Brevêts , & des
Certificats de leur fervice . Permét S. M.
aux Marchands des fix Corps , & aux Maîtres
des Communautés , de recevoir chés
eux , ceux defdits Miliciens qui voudront
reprendre leur état , & de leur donner les
Brevêts & Certificats , dont ils auront befoin
pour le tems qui restera à expirer de
leurs anciens fans qu'ils puiffent
être inquiétés , dérogeant à cet effet ,
pour ce regard feulement , aux ftatuts & réglemens
des Communautés : & en cas de
conteftations , veut S. M. qu'elles foient
portées devant le Sieur Lieutenant de Police
, pour les juger fommairement , lui en
attribuant toute cour , jurifdiction & connoiffance
; & icelle interdifant à toutes fes
Cours & autres Juges , fauf l'appel au Confeil
, &c.
engagemens ,
TABLE
TABLE .
PIECES FUGITIVES. L'Amour vaincu par la
Raifon , Idille , 1683
1698
Extrait de l'Oraifon Funebre du Card,deFleury , 1688
Paraphrafe de deux Vers Latins ,
Lettre au fujet de Gui de la Tour , Evêque de Clermont
,
1699
Epitre en Vers de M. d'Arnaud à Mlle de B*** . 1706
Differt fur le Syftême des petits Tourbillons, 1708
Traduction de l'Ode d'Anacréon fur les Richeffes
,
1729
Parties de longue Paume , jouées à Dourdan &
Etampes , 1730
1733 Vers à M le Gauffin ,
Obfervations fur l'abbregé de la Vie des Evêques de
Coutance ,
1734
Le Procureur
Borgne
& le Procureur
Manchof
Conte,
1742
Queft. importante
, jugée au Parlem . de Paris, 1743
Vers à Mad . *** pour le jour de fa Fête , 1748
Explication
d'une Pierre gravée , antique ,du Cabinet
du Chevalier
D, L. R.
L'Etude
, Ode ,
1759
1751
Mandement de l'Archevêque d'Avignon , au fujet
d'une nouvelle Société nouvellement formée
dans fon Diocèfe , 1756
Réponse en Vers à une Queſtion propofée dans le
Mercure de Juin ,
Lettre fur l'origine du mot Vipa
1759
1761.
Epitre enVers à M. Bouguer,la veille de ſa Fête , 1769
Ex. de Lettre fur la Topographie du Cotentin , 1775
Vers à M. le Marquis & à Mad, la Marquife de
M ..
A Mile leur fille ,
Explication de deux Paflages de Virgile ,
Le Médecin mis en réputation , Conte,
1778
1779
ibid.
1789
Lettie
1787
Lettre au fujet de la Chronologie & de la Topo
graphie des Légendes ,
Vers pour les Portraits de M. & de Mad. Deshayes ,
1796
Explication des Enigmes & du Logogryphe du Mercure
de Juillet ,
Enigme & Logog yphe ,
1797
ibid.
NOUVELLES LITTERAIRES , DES BEAUX- ARTS,& C.
Nouveau Recueil de Differtations fur l'Hiftoire
Ecclefiaftique & Civile de Paris , 1800
Supplément au Dictionnaire Economique , 1801
VII. & VIII . Tomes de la Vie des Honi Illuft . bid.
Nouv . Edit. du Diction . de l'Abbé Antonini , ibid.
Le Guide des Accoucheurs ,
Hiftoire de Grece ,
Coûtume d'Auxerre ,
Abbregé de l'Hiftoire ancienne ,
ibid.
1802
1803
1804
185
De la réformation du Théatre ,
Programme d'un nouveau Recueil de Poëfie , ibid.
VI. Tome des Mémoires
pour
fervir à l'Hiftoire
des Infectes ,
ibid.
Coûtume de Paris , &c.
1806
ibid.
1807
Differtation fur la Géométrie ,
Elémens de la Guerre , & c
Le parfait Ingénieur François , &c.
1812
Nouveau Tarif du'Toifé de la Maçonnerie , 1816
Principes du Systême des petits Tourbillons , 1817
Differt.fur un Temple octogône, & Remarques,i› id,
Arnoldi Vinnii ] C. nota , &c.
Méthode générale pour guérir le Rhume ,
Les Moeurs & les Ufages des Grecs ,
1823
1824
ibid.
Les deux premiers Volumes de l'ancienne Verſion
Italique de l'Ecriture Sainte ,
Nouvelle Edition des OEuvres de Brantôme ,
ibid.
1826
Extrait de Lettre écrite de Troyes fur un Etabliſſement
Académique ,
Eltampes nouvelles ,
1827
1831
Chanfon
Chanfon notée 1833
ibid. Spectacles ,
Les Caractéres de la Folie , nouveau Ballet repréfenté
à l'Opera , 1834
ibid.
La Mort de Cefar , nouvelle Tragédie repréſentée à
la Comédie Françoiſe ,
Les Indes chantantes , ou les Incas , Comédie repréfentée
par les Comédiens Italiens , 1835
Artitices nouveaux à la Comédie Italienne , 1836
La Fontaine de Sapience , nouvelle Piéce repréfentée
à l'Opera Coinique ,
Jeune Danfeufe , âgée de 7 ans ,
Lettre à fon fujet ,
ibil..
1837
ibid.
Nouvelles Errangeres , Turquie , Ruffie , & c. 1839
France , nouvelles de la Cour , de Paris , &c. 1859
Régimens donnés
M. de Bernage élú Prévôt des Marchands ,
ibid.
1860
Proceffion folemnelle faite à Paris , en exécution du
Vou de Louis XIII,
Nouveaux Echevins ,
Proceffion des Carmes
1862
ibid,
ibid.
Fête de S. Louis célébrée à l'Académie Françoiſe , à
celle des Infcriptions & Belles- Lettres , & à celle
des Sciences , & Prix d'Eloquence donné , 1863
Audience des Deputés des Etats de Languedoc, ibid.
Audience de Congé du Nonce du Pape , 1864
Régimens donnés , ibid.
1865
1868
Statue Equeftre de Louis XV . placée & découverte
à Bordeaux ,
Concert Spirituel au Château des Tuilleries , 1867
Concert d'Inftrumens au même Lieu ,
Expofition des Tableaux au Salon du Louvre , ibid.
Pompe funebre & Service folemnel , célébré à l'Ab.
de Chelles , pour l'Abbefie Mad, d'Orleans, 1869
Morts ,
Arrêts notables ,
1884
1889
Errata
Errata du premier Volume de Juin.
Page 1191. ligne 21. de Vénus , depuis hors d'état
de fervir , lifez , devenus depuis hors d'état
de fervir. P. 1228. 1. 22. fon fils aîné , l . à ſon fils
aîné.
Fantes à corriger dans ce Livre.
PA10.118. refide , L. refide . P. 1703. l . 5. ans ,
Age 1686, à la reclame , Un , lifez , Qu'un.
7. dans. P. 1705. 1. 19. s'alliter , l . s'aliter . P. 1709.
1.2 . du bas , celle , l . par celle . P. 1711. l . 5. parcourreroit,
/. parcourroit . P. 1724. 1. 13. conclurre,
1.
1. conclure. P.1727 . 1. 28 une , l . un . P. 1728. Į . 17.
ôtez la virgule après feroient . P. 1738. l . 7 , près , l .
prêt. P. 1742. 1. 20. lorgue , . lorgne . Ibid. 1. derniere
, n'en , l . rien . P. 1743. 1..15 . fcife , l . fife . P.
1744. 1. 9. & 17. Dunot , Bunot. P. 1753. l . 10.
effort , l . effor. P. 1760 l . 3. la , l. ta. P. 1765. L
premiere , incolumen , 1. incolumem. P. 1772. 1. 9.
fccrette , 1, fecrette . P, 1773. 1. 20. l'Allouette , f.
l'Alouette . P. 1803. 1. s . du bas , relié , l . reliée . P.
1809. 1. derniere , les , l . le . P. 1816. l . 20, ſupplée ;
fupplée. P. 1837. 1. 21. des . 1. de.
命
La Planche gravée doit regarder la page
La Chanfon notée , la page
1710
1833
Qualité de la reconnaissance optique de caractères