→ Vous voyez ici les données brutes du contenu. Basculez vers l'affichage optimisé.
Nom du fichier
1730, 12, vol. 2
Taille
8.34 Mo
Format
Nombre de pages
219
Source
Année de téléchargement
Texte
MERCURË
DE FRANCE ,
DÉDIÉ AU ROT.
DECEMBRE . 1730 .
SECOND VOLUME
QUE
COLLIGIT
SPARGIT
Chez
A PARIS ,
GUILLAUME CAVE LIER , rue
S.Jacques , au Lys d'Or.
LA VEUVE PISSÓT, Quay de Conty.
à la defcente du Pont- Neuf , au coin
de la rue de Nevers , à la Croix d'Or,
JEAN DE NULLY , au Palaise
à l'Eçu de France & à la Palme.
M. D C C. X X X.
Avec Approbation & Privilege du Roy:
+
XXXXXXXXXX **XXXX
LA
A VIS.
' ADRESSE generale eft à
Monfieur MOREAU , Commis au
Mercure vis - à - vis la Comedie Frangoife
, à Paris. Ceux qui pour leur commodité
voudront remettre leurs Paquets cachetez
aux Libraires qui vendent le Mer
cure, à Paris , peuvent fe fervir de cette voye
pour les faire tenir.
On prie très-inflamment , quand on adreffe
des Lettres ou Paquets par la Pofte , d'avoir
foin d'en affranchir le Port , comme cela s'eft
oujours pratiqué , afin d'épargner , à nous
le déplaifir de les rebuter , & à ceux qui
les envoyent , celui , non -feulement de ne
pas voir paroître leurs Ouvrages , mais
même de les perdre , s'ils n'en ont pas gardé
de copie.
Les Libraires des Provinces & des Pays
Etrangers , ou les Particuliers qui souhaiteront
avoir le Mercure de France de la premiere
main, & plus promptement ,
n'auront
? qu'à donner leurs adreffes à M. Moreau
qui aura foin de faire leurs Paquets fan's
perte de temps , & de les faire porter fur
Pheure à la Pofte , ou aux Meffageries qu'on
Ini indiquera.
PRIX XXX. SOLS,
MERCURE
DE FRANCE ,
DÉDIÉ AV ROT.
DECEMBRE . 1730 .
XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX
PIECES FUGITIVES ,
en Vers & en Profe.
LE ROMAN COMIQUE ,
CHAPITRE PREMIER,
POEM E.
Une Troupe de Comediens arrive dans la
Ville du Mans.
Onfieur Phoebus , allant bon train ,
M Etoit plus d'à moitié chemin ;
ZOON Et fon Char penchant vers le Monde ,
Roulloit en s'approchant de l'Onde ;
Il ne tenoit qu'à fes Chevaux ,

II. Vol. A ij D'entrer
2762 MERCURE DE FRANCE
D'entrer promptement dans les caux ?
Mais ils fecouoient leurs gourmettes
Et ne faifoient que des courbettes
En refpirant un air Marin ,
Qui ne fent pas le Romarin ;
?
Ce fameux Char , ou bien ce Coche ,
Avec l'attelage étoit proche
De la Mer , dans laquelle on dit ,
Que Maître Phoebus a fon lit
> Où toutes les nuits il repoſe
Peut-être y fait- il autre chofe.
Pour parler plus humainement
Et plus intelligiblement ,
Car tout ceci n'eft que pour rire
Il faut prefentement vous dire
En termes un peu plus concis ,
Qu'il étoit entre cinq & fix ,
Qu'on débitoit quelque Gazette
Lorfqu'à grand bruit une Charette,
Entra dans les Halles du Mans ;
ر ف
Que je fois pendu fi je ments ;
Jamais l'on ne vit telle entrée ;
Cette Charette étoit tirée ,
?
Par quatre Boeufs , dont la maigreur ,
Aux plus effrontez faifoit peur ,
Ces quatre Boeufs étoient derriere ,
Une Cavale pouliniere ,
Dont le Poulain alloit , venoit ,
II. Vol. Comme
DECEMRBE . 1736. 2763
Comme un petit fou qu'il étoit :
Des Paquets , des Coffres , des Malles ,
Toilles Peintes & Linges fales
Le tout entaffé par hazard ,
Rempliffoit ce fuperbe Char ;
Et formoit une Piramide ,
Ambulante & fort peu folide;
Puifque fouvent elle panchoit ;
Sur cette hauteur paroifſoit
Une espece de Damoiselle ,
Qui n'étoit ni laide ni belle ,
Mais d'un heureux temperament
Habillée affez plaiſamment ,
Moitié Campagne , moitié Ville ,
Avec tout l'air d'une Sybile ,
Mangeant un morceau de pain bis.
Un jeune homme , pauvre d'habits ,
Mais cependant riche de mine ,
Sur l'épaule une Carabine ,
Marchoit auprès du Chariot ,
Ce n'étoit pas un idiot ,
On n'en reçoit point au Théatre ;
Il avoit une grande emplatre ,
Sur l'oeil gauche , ou bien fur l'oeil droit.
Je ne fçai fur lequel c'étoit ,
Elle cachoit prefque ſa joüe ,
Et lui faifoit faire la moüe ,
Comme la feroit un profcrit ,
-11. Vol. A iij Ii
2764 MERCURE DE FRANCÉ
Il avoit pourtant de l'efprit ,
Sur tout il tiroit à merveilles ;
Plufieurs Geais , nombre de Corneilles ,
Dont il avoit été vainqueur ,
Faifoient voir qu'il étoit chaffeur ;
Il les portoit en Bandouliere ,
Qui pendoit fort bas par derriere ,
Avec une Poulle , un Oifon ,
Pris au bord de quelque maiſon ;
Il aimoit la petite guerre ,
Autant que Chaffeur de la Terre.
Sur fa tête , au lieu de Chapeau ,
Il portoit un Bonnet de peau ,
Epouventail à chenevieres ,
Entortillé de jarretieres ,
De cent differentes couleurs ,
Et de cent diverſes largeurs
Cependant cette bigarure ,
Sur cette plaifante Coëffure ,
Avec un gros noeud de ruban ,
Formoit un affez beau Turban
Auquel une habile Ouvriere ,
N'avoit pas
Y
mis la main derniere.
De Cravate il n'en portoit point ;
Il avoit au lieu de pourpoint ,
Par deffus une Chemiſette ,
Une Cafaque de griſette ,
Ceinte avec un morceau de cuir ,
II. Vol.
Qui
DECEMBRE. 1730. 2765
Qui lui fervoit à foutenir ,
Une grande & terrible brette ;
Qui certainement fans fourchette
Ne pouvoit fervir aisément ,
Si Meffire Scaron ne ment.
On voyoit fur lui mainte tache ,
Et fes chauffes à bas d'attache ,
Reffembloient parfaitement bien ,
A celles d'un Comédien ,
Qui dans une Piece tragique ,
Repréſente un Héros antique ;
Il avoit au lieu d'Eſcarpins ,
Une paire de Brodequins ,
Qui lui fervoient comme de Bottes ,
Car ils étoient couverts de crottes,
Jufqu'à la cheville du pié ,
Ou peut-être juſqu'à moitié ,
Du moins cela paroît probable ;
Un Vieillard affez venerable ,
Vétu plus régulierement ,
Quoique pourtant fort pauvrement
Marchoit à côté du jeune homme ,
Mais il n'eft pas temps que je nomme ,
Ici ces deux fameux Héros ,
Ce Vieillard portoit fur fon dos ,
Sa groffe Baffe de Violé ,
Attachée à quelque bricole ;
Comme il marchoit en dandinant ;
II. Vol.
Et
A iiij
2766 MERCURE DE FRANCE
Et qu'il fe courboit en marchant
Avec fa tête chauve & nuë ,
"' On l'eût pris pour une Tortuë ,
Qui fe promenoit fur deux pieds ,
Trop foibles & mal déliez ;
Peut-être ici quelque Critique ,
S'empreffe à me faire la nique ,
En blâmant ma Deſcription ,
Par le peu de proportion ,
D'un homme avec une Tortuë,
Mais hardiment je le faluë ,
Et prétends bien le confoler ,
En difant que j'entens parler ,
De ces groffes qu'on voit dans l'Inde ,
Morbleu fi je prens une Olinde ,
Mais , paix , je veux parler ainfi ,
bien qu'il s'en aille d'ici ,
Car je n'aime point la chicane.
Revenons à la Caravane ,
Elle paffa , dit notre Auteur ,
Avecque beaucoup de rumeur ,
Devant le Tripót de la Biche ,
Dont le Maître n'étoit pas riche ,
Parce qu'il aimoit le piot ;
A la porte de ce Tripot ,
Фи
Etoit une Troupe civile
Des plus gros Bourgeois de la Ville
Faineants en gros , en détail ;
II. Vol.
La
DECEMBRE. 1730. 2767.
1730.2767
* La nouvéauté de l'attirail ,
Et le grand bruit de la canaille ,
Que l'on peut appeller marmaille ,
Affemblée à l'entour du Char ,
Attirerent un prompt regard ,
De ces illuftres Bourguemeftres ,
Sur l'équipage & les pedeſtres ,
Ou Pietons , n'importe , auffi- tôt ,
Un fier Lieutenant de Prévôt ,
Nommé Monfieur la Rapiniere ;
Portant une longue rapiere ,.
Fut celui qui les aborda ,
Et cependant leur demanda ,
Avec l'autorité d'un Juge.,.
S'ils ne cherchoient point un réfuge
Enfin , quelles gens ils étoient ,
Et dans quel endroit ils alloient.
Auffi réfolu que Bartole ,
Le jeune homme prit la parole ,
Faifant
quatre pas en avant ,
Sans mettre les mains au Turban.,
Car la gauche étoit occupée ,
A retenir la longue épée ,
Qui batoit fur fes flageolets &
II.Vola Av Puil
2768 MERCURE DE FRANCE
Puifqu'il n'avoit point de molets ,
De l'autre aifément l'on devine ,
Qu'il tenoit une Carabine ,
Parce que je l'ai déja dit ,
Et cependant il répondit ,
Qu'ils étoient François de naiffance ,
Comédiens par excellence ,
Que fon nom étoit le Deſtin
Que celui du vieux Roquentin ,
Etoit Monfieur de la Rancune ,
Qui cherchoit à faire fortune,
Un peu tard , à la verité ;
Mais qu'il étoit de qualité ;
Que cette jeune Damoiselle ,
Du moins auffi fage que belle ,
Juchée ainsi qu'un Perroquet ,
En Charette fur un Paquet ,
Et plus brillante que lanterne ,
Portoit le nom de la Caverne ,
Ce nom bifare & peu commun
Fit d'abord éclater quelqu'un ,
Comme fi c'étoit baliverne ;
Hé! quoi le nom de la Caverne,
Adjoute le Comédien
II. Vol.
DoitDECEMBRE.
1730. 2769
Doit-il vous paroître plus chien ,
Que ceux de Meffieurs la Montagne ,
La Rofe , Lépine ou Champagne ,
De la Valée ou Pavillon ;
Enfin la converſation ,
Ne finit point fans incartade ,
On vit donner quelque gourmadé ,
Capable de caffer les dents ,
L'on entendit des juremens ,
A la tête de l'Equipage ,
Et l'on fut ému du ravage ;
C'étoit le Valet du Tripot ,
Qui ne paffoit pas pour un fot,
Il caroiffoit à coups de barre ,
Le bon Chartier , fans dire garre,
Parce que fes Boeufs , fa Jument ,
Ufoient un peu trop librement ,
D'un tas de foin devant la porte ;
Mais cependant l'on fit enforte ,
D'appaifer la noife , en un mot ,
La Maîtreffe dé ce Tripót ,
Qui Chériffoit la Comédie ,
Et goutoit une Tragédie ,
Bien plus que Vêpres ni Sermon
Appela fon Valet Démon ,
Et par une belle maniere
Rare chez une Tripotiere ,
Elle confentit de bon coeur ,
II. Vol. Qu'un A vj
2770 MERCURE DE FRANCE
>
Qu'un pauvre Chartier de malheur ,
Laiffât fes bêtes vivre à l'aiſe ;
Mais cependant , ne vous déplaiſe ,
L'Auteur prit un de
peu repos ,
Et rumina fort à propos ,
Ce qu'il vous diroit dans la ſuite .
Car pour à prefent il vous quitte.
Par M. le Tellier d'Orvilliers , Lieutenant
General d'Epée , à Vernon .
La fuite pour le Mercure Prochain.
SUITE de la setième lètre , sur la
bibliotèque des enfans , etc ..
§. 7. Casseau portatif de sis celules.
Ebles literaires de l'enfant , on augaugmentant
peu à peu les meumonte
en même tems le nombre de ses
idées ; on passe du simple au composé, et
du facile au dificile , ou au moins facile.
L'enfant reçoit encore avec plaisir un casseau
portatifde sis celules , trois en haut
et trois en bas , pour les tèmes à lire ou
à faire ; savoir , deus celules pour les
tèmes françois , deus pour les tèmes latins,
II.Vol
et
DECEMBRE. 1730. 2771
et deus pour les tèmes en caractères itafiques
ou manuscrits. Ce casseau poura
entrer dans la cassète , et servir à tenir
les premières cartes donées à l'enfant , et
mème à tenir ensuite le jeu des declinaisons
et des conjugaisons .
Il faut avoir soin de retirer de ces sis
logètes , et en l'absence de l'enfant, les tèmes
qu'il a bien lus, bien faits , et en faire
de petits jeus , dans lesquels on poura de
tems en tems le faire relire après avoir
batu , melé et doné à couper les cartes ,
come l'on a fait en lui montrant à conoltre
les lètres ; cète aparence de jeu
réussit toujours. D'ailleurs , si l'on ne retiroit
de tems en tems quelques tèmes
de ces log tes , le grand nombre pourolt
fatiguer l'élève et mème le dégouter. On
doit y laisser cependant les tèmes historiques
, conus et afectionés ; de peur de
facher l'enfant . très - sensible à l'enlevement
de ses petits éfets. Tout est digne
d'atention , quand on veut voir de grans
progrès , tels qu'on les a vus dans un enfant
qui à trois ans , et sans épeler ,
lisoit bien dans plusieurs livres latins et
françois, et mème dans des manuscrits .
On n'auroit jamais cru que dans quel
ques mois de plus , il ût pris plaísir à séparer
lui- mème les tèmes qu'il savoit bien
Lire , d'avec les autres , et de les mètre
13
II. Vola
dans .
2772 MERCURE DE FRANCE
dans des celules diférentes . L'enfant lisoit
seul distinctement et à haute vois , dans
divers petits livres et sur des cartons ,
pendant des heures entieres , et toujours
avec plaisir et en badinant , si l'on avoit
voulu le suivre il auroit lassé les autres ,
plutot que de se lasser lui- mème , il aìmolt
à lire à haute vois , quoique seul ; le
petit Guillot fait à peu près la mème chose
dans le fameus colège où il est à present
, avec son bureau tipografique. La
plupart des écoliers ne lisent pas volontiers
seuls , ils ont d'ailleurs peine à lire ,
faute d'avoir été bien montrés , ou pour
avoir été rebutés par les épines de la métode
vulgaire , ou faute d'habitude à pouvoir
lire à livre ouvert toute sorte de livres
françois et latins , en prose et en vers.
Au moindre dégout ou ennui qu'on apercevoit
dans le petit Candiac , on le menoit
d'abord ailleurs , et ce n'étoit que
par récompense qu'une autrefois on le remetoit
en possession de son cabinet ; on
ne le menaçoit de l'en faire fortir .que
pour le punir de quelque faute morale ,
et non literaire ; ce qui produisoit tout
l'éfet possible : le bureau étoit toujours
inocent , et cheri de l'enfant.
§ . 8. Porte-tèmes , sac , etc.
La métode du bureau tipografique est
II. Vol.
si
DECEMBRE . 1730. 2773
si amusante dans le plus fort de son instruction
, qu'elle fournit tous les jours
quelque idée nouvele et ingénieuse pour
augmenter le nombre des éfets et des
idées literaires de l'enfant. Il faudra lui
doner un petit sac dans lequel il puisse
tenir une centaine de cartes numerotées ,
qui seront autant de tèmes choisis sur
l'histoire et sur la fable. On poura aussi
faire à l'enfant un joli porte- tèmes de sis
poches , numerotées de bas en haut , I.
2. 3. 4. 5. 6. pour y tenir les tèmes d'une,
de deus , de trois , de quatre , de cinq
et de sis lignes. Ce porte- tèmes fait de
quelque étofe , peut être pendu à un
clou , à un crochet , et à la hauteur de
l'enfant, qui y tiendra ses tèmes les plus
beaus. Cète espece de trousse servira aussi
ensuite pour les sis cas des terminaisons ,
des noms , ou des declinaisons ; pour les
modes et les tems des verbes conjugués ,
etc. Le bureau de l'imprimerie devenant
familier à l'enfant , on doit songer à celui
du rudiment pratique , et à celui du dictionaire
que l'on ppeeuutt aussi réduire en
casserins , pour suivre la rapidité des progrès
literaires de l'enfant amusé et ocupé
des jeus tipografiques.
§. 9. Rudiment pratique.
Le rudiment composé d'un casseau
II.Vol.
de
1774 MERCURE DE FRANCE
de deus rans de cassetins , met aus cinq
premiers d'en bas les cinq declinaisons ,
ou les cas et leurs terminaisons a , a, am,
â; arum , abus , is , as , etc. us , i , 0,um,
eorum , is , os , etc. et au 6 cassetin on.
met encore de semblables terminaisons
pour les noms des cinq declinaisons ;
aus cinq logètes d'en haut on met les
cinq pronoms, ego, tu , ille, hic,qui, en latin
et en françois , chaque cas séparement
sur des cartes en noir et en rouge ou en
caractére manuscrit ; et à la 6 , les ter
minaisons enclitiques des pronoms.Exem
ple en latin ; nam , libet , etc. exemple en
françois , ci , la , - meme , etc..
Les cinq logètes suivantes sont pour
présent , l'imparfait , le passé ou le prétérit
parfait , le plusque parfait, et le fu
tur de l'indicatif ; et les cinq logètes d'en
bas sont pour les mèmes tems du subjonctif;
les deus suivantes d'en haut sont
l'une pour l'impératif , l'autre pour le
gérondif et les supins ; les deus d'en bas,
Fune pour l'infinitif et l'autre. pour les
participes actifs et passifs . Ensuite en haut
les figuratives ou les terminaisons actives
; et en bas les terminaisons passives
des verbes , quoiqu'il y en ait déja de distribuées
dans les logètes de tous les tems
de chaque mode.
· -
**
le
Les quatre logètes suivantes en haut et
.
II. Vol. en
DECEMBRE. 1730. 2775
en bas sont pour mètre des exemples des
verbes comuns , déponens , neutres , irégu
liers ,fubstantifs , vocatifs , défectifs , impersonels
, réciproques, etc. selon l'ordre que
chacun jugera le plus convenable , sans
s'asservir à aucun . On doit encore dire ici
que metant toutes les parties du discours
dans des logètes , c'est moins pour faciliter
à l'enfant l'expedition de son tème
que pour lui aprendre à conoìtre et
sentir l'usage de toutes ces diferentes parties
du discours , et cela dans un age propre
à saisir plutot par pratique que par
téorie le distinctif et la nature de tous
les mots apelés vulgairement parties d'oraison.
Si les maitres se flatent de pouvoir
bien endoctriner leurs élèves avec ·
ła seule métode des rudimens vulgaires;
à plus forte raison doivent- ils esperer de
le faire encore mieux , plus facilement
et plutot avec le nouveau secours du
bureau tipografique à cent quatre- vint
bouches toujours ouvertes pour l'ins
truction de l'enfant.
La logète suivante qui est à la colone
T, contient en haut les terminaisons
françoises des verbes, et en bas les terminaisons
françoises des noms , et des
et des pronoms.
Quand l'enfant saura distinguer les
verbes substantifs et auxiliaires je suis ,
etc. j'ai , etc. il faudra les distribuer dans
11. Vol..
Ies
2776 MERCURE DE FRANCE
و
les logètes des tems , de l'indicatif et du
fubjonctif, afin qu'il aprene à mieus connoitre
par pratique et par sentiment ,
les modes , les tems , les persones , et les
nombres des verbes. Des dis logètes suivantes
, la ie en haut contient le verbe
auxiliaire françois , je suis , tu es , il est ,
etc. et en bas le verbe auxiliaire ; j'ai ,
tu as , il a , etc. la 2º en haut , contient des
noms substantifs et en bas , l'article
françois le , la , les , etc. Cète logète de
l'article françois est d'un grand usage et
instruit de bone heure l'enfant , la 3e en
haut , contient des adjectifs , des positifs,
des comparatifs , et des superlatifs ; et
en bas , des terminaisons pour les dégrés
de comparaison ; exemp. ïor, ïus , ssimus ,
etc. la 4 , haut et bas , toute sorte de
pronoms , françois et latins , démonstratifs
et possessifs ; la se en haut , des verbes
françois ; et en bas , des participes
françois le 6 en haut est pour les participes
, les questions de lieu , les indéclinables
, adverbes , prépositions , conjonctions
, et interjections en latin; et en
bas pour
les mèmes mots françois, c'est-àdire
que les particules séparables et inséparables
pouront aussi y avoir place. Ces
mèmes mots passeront ensuite dans les
logètes du dictionaire , selon l'ordre abécédique.
Les quatre logètes suivantes en
;
II. Vol. haut
DECEMBRE. 1730. 2777
haut , sont pour les genres , les déclinaisons
, les conjugaisons
, et la sintaxe. On
peut y mètre bien des noms , des verbes
et les principales
regles de la métode de
MM. de P.R. ou de meilleures, en prose et
non en vers;ce qui fournira le sujet de plus
sieurs petits tèmes élementaires
, en latin
et en françois , en glose , mot à mot , ou
en interlinéaire
. Les quatre derniéres
logètes
d'en bas sont pour doner des exemples
de toutes ces regles , et de toutes ces
espèces
exemple
: Hic homo , inis. amo ,
avi. ego amo deum , etc. ce qui seroit trop
long à détailler
ici ; on prendra donc là
peine d'aler voir la garniture
et l'assortiment
de quelque bureau complet et ent
plein exercice,come celui du petit Guillot,
qui en sis mois , a apris à lire le latin
le françois , et le grec , et qui sans savoir
écrire s'ocupe
avec succès à la version
et à la composition
des tèmes qu'on lui
done sur des cartes ou sur des livres , et
qu'on tache de lui rendre sensibles par
la doctrine
tipografique
, et par la prati
que journalière
de la version interlinéaire
.
§ .10. Dictionaire
de sis rans de cassetins.
Le dictionaire composé d'un casseau de
sis rangées de 22 ou de go celules chacune ,
metra abecediquement dans la 1 rangée
en bas les verbes et les participes ; dans la
II.Vol.
2de
2778 MERCURE DE FRANCE
2 de, en montant on metra les noms adjec
tifs ; dans la 3e les noms apellatifs ; dans
la 4. les indeclinables , come adverbes ,
prépositions, conjonctions, interjections ;
dans la s . les noms propres qui sont autant
de racines historiques qu'il faut do
her et prodiguer à l'enfant selon son age ,
son état , sa condition et surtout relativement
à la profession à laquelle on le
destine. Dans la 6 rangée on y tiendra le
magasin abécedique des mots de toute
partie du discours , l'étiquete des rangées
sera mise perpendiculairement sur le bois
du premier montant à la tête de chaque
rang ; et l'on metra les letres de l'A , B
Chorisontalement au haut de chaque
colone sur le bois de la plus haute traver
, la letre K sera mise à coté du Qan
haut de sa colone , et les letres X , Y , Z
feront l'étiquete de la 22° colone qui est
la derniere du dictionaìre ; on pouroit se
passer des autres huit colones, suposé que
l'endroit ne permit pas toute la longueur
du dictionaire ou de la bibliotèque de
l'enfant. Les montans et les traversans
du dictionaire ne sont que de trois à
quatre
lignes d'épaisseur , excepté ceus de la
caisse ou du bâtis exterieur qui seront de
neuf lignes ou de la hauteur du corps
des lètres capitales qui doivent servir à
étiqueter les rans et les colones des cassetins.
Pour
DECEMBRE. 1730. 2779
Pour profiter des huit dernières logètes
de chaque rang , on poura mètre au haut
de la colone de la 23 logète , et sur le
bois de la traverse , l'étiquète du mot
noms ; et au bas de la colone sur le bois
de la plus basse travèrse on metra la lètre
a pour indiquer la logète de la 1 ° declinaison
; les autres trous de la colone
pouront également servir pour les autres
declinaisons ; et la 6. logète de cète colone
sera pour les noms de nombre. La
24. colone en haut sera marquée du mot
pronoms et le bas de la colone sera marqué
du mot ego ; les autres logètes de la colone
étant pour toute sorte de pronoms.
Les 25 et 26 colones en haut seront
marquées des mots verbes , verbes ; et au
plus bas elles seront marquées des mots
indicatif, subjonctif; ces logètes serviront
de suplément et de magasin pour tenir
les cartes qui ne pouront plus ètre mises
ou contenues dans les logètes du rudiment
, etc.
,
,
Les quatre dernieres colones en haut
et sur le bois de la traverse , seront marquées
des mots histoire , fable , géografie
cronologie quand le mot ne poura pas
ètre mis tout au long , on le metra en
abregé ou simplement en petites lètres
initiales ; au bas de ces quatre colones et
sur le bois de la traverse on metra les
mots
2-780 MERCURE DE FRANCE
mots bible , mitologie , sphere , époques , en
petites lètres initiales , files capitales ocupent
trop d'espace. La caisse de ce dictionaire
sera mise en long ou d'une maniere
brisée et en plusieurs lignes vis- àvis
du bureau tipografique , ou à coté
ou deriere et adossée selon que le lieu et
les fenètres de la chambre le permetront.
§ . 11. Claffes du bureau tipografique.
Je divise en quatre classes l'exercice du
bureau tipografique
,
Premiere classe.
Pour le jeu de la première classe , je
tire au hazard de la cassete abécédique
les cartes X , M , C , T , S , P , F , G , J
etc. après quoi je montre à un enfant de
deus à trois ans , ou à sa gouvernante la
manière de ranger ces mèmes cartes sur
la table du premier bureau abécédique
c'est à dire de les présenter et de les poser
vis à vis la mème letre ou figure marquée
sur chaque carte. Je mets donc la
carte X vis à vis la letre ou caractère X ,
la carte M vis à vis la letre M ; je fais
la mème chose des autres cartes tirées au
hazard , et je les présente tout le long de
1'4 BC etc. qui regne imprimé sur le lia
b c
2
II. Vol. teau ,
DECEMBRE. 1730. 2781
prateau
, la tringle ou la regle de bois qui
indique vis à vis de l'enfant le deriere
de la table abécédique , come on le
tique en province aus bureaus de la poste,
L'enfant qui ne sait pas encore le nom des
letres poura cependant présenter , et ranger
les cartes vis à vis les signes dont elles
sont marquées , en atendant qu'il sache
leur nom et leur vraie dénomination , ce
qui doit ètre estimé environ la moitié de
la silabisation . un enfant sourd et muet
peut être mis de bone heure à l'exercice
du bureau tipografique , et y aprendre
par les ieus la plupart des choses que les
autres aprènent par l'oreille.
2º Claffe.
Un enfant qui conoìt bien la figure
le vrai nom et la valeur réèle et efective
des letres doit ètre mis à l'exercice de la
segonde classe du bureau latin composé
de deus rans de logetes , l'un pour l'usage
des letres capitales , et l'autre pour
celui des petites letres . Je montre donc à
l'enfant et à son domestique la manière
de ranger , de composer , d'imprimer ou
d'écrire sur la table du bureau tipografique
les 16 cartes ou les 16 letres nécessaires
pour former la ligne des deus mots
latins dominus dominorum , et ensuite les
yint et une cartes ou letres nécessaires
44. Vol
pour
2781 MERCURE DE FRANCE
former une autre ligne composée
pour
de ces sis mots françois mon dieu , je vous
aime bien. Je fais pratiquer la mème chose
à l'égard des autres mots latins ou
françois , c'est à dire que l'enfant les imprime
et les écrit en quelque manière par
le moyen de l'ABC mouvant , en employant
, etrange ant sur la table en une
ligne autant de cartes qu'il y a de letres
dans chaque mot , ou dans chaque frase
qu'on lui done à imprimer.
fais
3º Claffe.
Lorsque l'enfant a travaillé avec succès
à l'exercice de la segonde classe , je le
passer au plutot au jeu de la troisième
classe ou du bureau françois latin , et je
lui montre pour lors la manière d'imprimer
les mots et les frases , non seulement
letre à letre , come le pratiquent
les imprimeurs ordinaires , mais encore
selon le sistème des sons de la langue françoise
; c'est à dire , que je lui enseigne à
chercher métodiquement les 16. cartes ou
les 16 letres nécessaires pour former la
mème ligne déja imprimée en 21. letres,
mon dieu , je vous aime bien , et c'est ici la
véritable et la principale classe où l'enfant
aprend par pratique et par téorie l'usage
des letres , des sons , des chifres , et des
signes employés dans l'impression des
II. Vollivres
DECEMBRE.
1730.
2791
livres ; c'est ici qu'il se forme dabord à
l'ortografe des sons et de l'oreille , en
atendant qu'il aprene l'ortografe des ieus
ou de l'usage vulgaire.
4. Classe.
Quand
l'enfant sait
imprimer letre
letre , et selon les sons de la langue , les
mots et les lignes qu'on lui dicte ou qu'on
lui done sur une carte , je le mets à la
quatrième classe . C'est cèle du casseau du
rudiment
pratique , et je lui montre à
imprimer non seulement letre à letre,sonà
son , mais encore mot à mot ,
employant
par exemple ,sis cartes pour former la mè
me ligne ci dessus ,mon dieu , je vous aime
bien , et ainsi des autres lignes en latin et
en
françois , come on l'a fait en composant
le tème gravé au bas de la planche
du bureau
tipografique §. 12 .
L'avantage des deus premieres classes
consiste à pouvoir amuser et instruire les
enfans de bone heure ; et par une métode
plus agréable , plus courte , plus facile et
plus sure que la métode vulgaire .
L'avantage de la troisième classe est de
mètre les petits enfans en état non seulement
de
travailler utilement seuls et en
l'absence des maitres , mais encore d'aprendre
de bone heure à conoìtre , à sentir,
et à distinguer les sons de chaque mot,
II. Vol.
Co
2792 MERCURE DE FRANCE
ce que bien des gramaìriens , s'il m'est
permis de le dire , ignorent toute leur vie.
L'avantage de la quatrième classe est de
metre un enfant en état d'aprendre les
langues mortes,avant que de savoir écrire,
en imprimant sur la table du bureau les
mots , les lignes et les tèmes qu'on lui aura
dictés ou qu'on lui aura donés sur des
cartes. Or tous ces avantages incomparablement
plus grans que les avantages des
métodes et des rudimens vulgaires, doivent
nécessairement influer en bien sur
la suite des études et même sur toute
la vie ; car par là on préserve les enfans:
de l'oisiveté , de la fénéantise etc. et on
leur épargne les dégouts et l'amertume
des métodes vulgaires , en un mot , on
leur done de bone heure le gout du travail
, du devoir , et des bones choses , ce
que l'experience a déja heureusement
confirmé sur plusieurs enfans.
,
§. 12. Exemple de deus petits tèmes gravés
sur laplanche de la bibliotèque des enfans,
et donés sur une carte à un enfant qui
doit les composer sur la table du les bure an
tipografique.
L'enfant aïant lu et relu ces tèmes ;
poura ensuite les composer sur la table
du bureau , de la mème maniere qu'il l'a
II. Vol.
praz
DECEMBRE. 1730 2793
pratiqué à l'égard des lètres , et des
mieres combinaisons en latin et en françois.
9
ab bo fli pru Bb
Dd Pp Qq & f
§ J'aime Dieu , parce qu'il
¶ Ego amo Deum , quia ille
eft bo ainfi foit - il.
eft bon Amen
A Paris ce 29. Jui
Parifiis die XXIX . Junii
1730. &c. Fin.
M. DCC. XXX. &c. Finis.
pre-
Pour lui montrer cet exercice , je prens
dans sa cassete les deus crois de pardieu
ou de Jesus , les dis combinaisons des
lètres qui ont servi de premier amusement
literaire , je range surla table les
dis cartes de ces dis combinaisons élementaires
; mais pour le tème interlinéaire
latin-françois , j'ai recours au
F
4
1
II. Vol Bij grand
2794 MERCURE DE FRANCE
·
grand bureau , et je prens dans les lọ-
gètes des signes le paragrafe §.et le pié de
mouche , ensuite je cherche le J' ou
lej capital apostrofé dans la celule du
J , ou dans cèle du pronom de la première
persone ( Ego ) J' , je du rudiment
pratique , que je continue toujours d'expliquer
à l'enfant. Je prens la diftongue
oculaire ai dans la troisième colone ou
celule des è ouverts composés de plusieurs
lètres et au- dessous de la celule des chifres
VII 7. ensuite le m et l'e muet dans leurs
celules , ce qui me done le premier mot
en quatre sons et en quatre cartes , que
je range à l'ordinaire . Ce seroit, par exemple
, une faute tipografique dans cète
classe , d'avoir employé les deus cartes a
pour le seul son de l'è ouvert du
et i
mot j'aime.
Pour le latin j'opère de- mème , je prens
en caracteres rouges italiques ou diferens
et manuscrits , le pronom Ego, dans la lo- gète
des pronoms
de la premiere
perso- ne et le mot amo dans le rudiment
ou
dans le dictionaire
pratique
, à la logète
des verbes ; ce que je montre
et explique
peu à peu à l'enfant , pour lui rendre
sensibles
toutes les parties du discours
. Dn poura composer
le françois
tout de
suite , et après cela le latin , ou chaque
langue mot à mot, ce qui fera plus d'im-
II. Vol. pres
DECEMBRE. 1730. 2795
de pression à l'enfant , et lui permetra
bien espacer les lètres et les mots , mais
il sera bon de pratiquer l'une et l'autre
manière pour varier l'exercice du jeu tipografique.
Je
prens le D capital
, la voyele
i et la
diftongue
oculaire
eu , dans
leurs
celules
,
et je range
ensuite
les trois
cartes
des trois
sons
du mot
Dien. Ce seroit
une faute
tipografique
dans
cette
classe
, d'employer
les deus
cartes
e et u pour
le seul son de
l'e françois
soutenu
en ; l'enfant
qui ,dans
la segonde
classe
, comence
d'imprimer
ou de composer
avec
le seul
premier
bureau
latin
, suivra
le sistème
des lètres
,
come
les imprimeurs
ordinaires
, mais
dès.
que l'enfant
sera mis au bureau
françoislatin
de la troisième
classe
, il doit
ètre
enseigné
et montré
selon
le sistème
des
sons. Je prens
le mot
Deus
dans
le dictionaire
à la celule
D des
noms
apellatifs
, et je mets un m sur le s du mot
Deus,
ou bien
je prens
um dans
la logète
des
terminaisons
des noms
, et je le mets
sur l'us
du mème
mot
Deus , ou bien
je prens
le
D , l'e et l'um
dans
leurs
logètes
, de mème
que les virgules
.
Je trouverai parceque dans le dictionalre
à la celule P des indéclinables , ou les
trois silabes par , ce , qu' , dans trois logètes
diferentes , savoir par , dans la lo-
II. Vol. B iij gète
2796 MERCURE DE FRANCE
gète des indeclinables du bureau tipografique;
ce, dans la celule du pronom hic, et
le qu'apostrofé dans cèle du pronom relatif
qui ou dans la troisiéme celule de la colone
q composé. Je trouve également il dans la
celule du pronom de la troisiéme persone.
La setiéme celule du plus haut rang où
est le tems present de l'indicatif , done
le verbe est , à moins qu'il ne soit encore
dans la celule du verbe substantif, qui est
dans le mème rang. Le mot bo , se prend
dans la logète du b , et dans cèle de la
voyele nazale , en deus cartes pour les
deus sons , au lieu d'en doner trois , qui
d'abord pourolent induire l'enfant en erreur
et lui faire lire b , o , ne , au lieu de
b, ō; ce qui est important pour faire bien
distinguer le n consone et le n nazal ;
distinction utile , qui ne doit point scandaliser
les témoins de cet exercice literaire
, puisque les voyeles nazales á , é ,
í , õ , ũ , où les voyeles à titres se trouvent
non - seulement dans de vieus livres,
mais encore dans des breviaires et dans
des HEURES de l'anée courante. Le latìn
se compose de mème , on prend quia
dans la celule des indéclinables du bureau
ou du dictionaire , et ille , est dans
leurs celules come en françois , de mème
que pour le mot bonus , qu'on trouvera
dans la celule B des noms adjectifs , ou
II.Vol.
bien
DECEMBRE. 1730. 2797
bien on prendra les lètres b , o , n , dans
leurs celules , et le bus ou le petit abregé
dans la troisième celule de la colone u .
Pour le mot composé ainsi soit- il , je
prens un ai d'une seule carte dans les
celules des voyèles nazales ; si , s , oit,-il,
dans leurs logères ; savoir , si , dans la
troisiéme logète de la colone f, qui me
done le s ; oit , dans les terminaisons des
verbes françois ; le tiret apelé division ,
dans les logères des signes , et il dans
cèle de la troisiéme persone . Le mot latin
amen , se trouvera dans la celule A des
indéclinables du dictionaire tipografique ;
les poins dans leur logète ; là accentué
dans la troisième logète de la colone a ;
pour le mot Paris , on cherchera et l'on
a toutes les lètres de ce mot ,a moins
qu'on ne l'ut mis dans la logète des noms
substantifs , dans la logète géografique , ou
dans la logète des noms propres à la lètre
P du dictionìare ; ce, dans la celule du
pronom hit ; 29. et 1730. en latin et en
françois dans la logète du livrèt , ou dans
la derniere des chifres . Ju , en trois cartes
pour les trois sons pris dans les trois celules
du J , u , 7 : etc. dans la troisieme
celule de la colone ; fi en deus cartes
pour les deus sons f, i , pris dans leurs celules
, et le mot finis dans la logète F
des mots apellatifs du dictionaire tipo-
1.
II. Vol. Bilj gra2798
MERCURE DE FRANCE
grafique. Le mot die latin est pris dans la
logète des paradigmes ou des exemples
de la cinquieme déclinaison , etc.
la
On voit par la composition de ce petit
tème , de quelle naniere on doit s'y prendre
pour tous les autres , l'essentiel est
de bien expliquer et de bien faire sentir
à l'enfant la nature , l'usage de chaque
partie du discours , en començant par
langue françoise et passant ensuite à la
langue latine , c'est ainsi qu'on montrera
peu à peu et en mème tems les raports
d'une langue à l'autre. Quand l'enfant
aura plusieurs fois le mème mot dans
son tème , il ne le trouvera qu'une fois
dans le dictionaìre de son bureau , et cela
sufit , ensuite il composera les autres avec
les lètres et les sons de l'A B C mouvant ,
selon les règles de la segonde et de la troisième
classe , je dis ceci par raport aus
mots de moins d'usage , et non pour les
verbes auxiliaires , les pronoms , les prépositions
, l'article et autres mots qui revienent
souvent. J'oubliois de dire que
quand le mot latin sera le mème que le
mot françois , à la terminaison près , il
sufira d'ajouter cète terminaison latine
sous le mot françois ; par exemple : pour
metre à l'acusatif les mots action , immortalité
, etc. on aprendra à l'enfant qu'il
sufit de metre les cartes onem sous l'o d'ac
II. Vol.
tion
DECEMBRE . 1730. 279 9
tion , et cèles d'atem , sous l'é du mot immortalité,
ce qui doit s'entendre et se pra
tiquer pour toutes les parties du discours
déclinables , indéclinables et conjugables,
qui ne seront distinguées du latin que
par les seules terminaisons , et c'est ici
que l'enfant comence de bone heure à
mieus apercevoir les raports et les diferences
de la langue latine et de la langue
françoise avantage téorique et pratique,
que ne peuvent doner aussi - tot les
rudimens ordinaires , fussent- ils tous les
jours articulés et récités sans faute depuis
le comencement jusqu'à la fin.
En voilà , je pense , bien assés pour
metre au fait les maitres judicieus et non
prévenus , qui n'ignorent pas tout à-fait
la doctrine des sons de la langue françoise ,
ceus qui n'en ont aucune conoìssance
pouront lire les essais de M. l'Abé de Dangeau
, et la grammaire du R. P. Buffier
suposé que ces maitres aiment l'analise des
choses et les reflexions sur cète matiere ,
sans quoi ils ne pouront jamais savoir ces
minuties à fond, l'étude én est cependant
nécessaire aus bons maitres qui se piquent
de bien montrer ; l'indiference ou le mépris
sur cet article ne peut jamais leur
faire honeur. Quelques petites que puissent
paroître ces minuties et ces reflexions
aus ïeus de ceus de certaines persones in-
II.Vel.
Bv Ca
2800 MERCURE DE FRANCE
capables de juger du pris et du vraì mérite
des petites choses , il n'en est pas
moins vrai que les maltres , les régens , et
les professeurs payés pour enseigner les
enfans , doivent ètre des premiers à
aprouver la métode du bureau tipografique
suposé qu'elle produise les efets
avantageus que je lui atribue , et qu'elle
alt en bien des choses la superiorité que
je luidone sur toute autre métode conue,
verité que je vais démontrer dans la huitiélètre
et que je ne crains point de publier
tous les jours au centre mème du pays latin,
en faveur des enfans de notre Empire et
des enfans de toute l'Europe . Je suis , etc.
Nota. Les persones curieuses de lire toutes
Les letres sur la biblioteque des enfans , prendront
la peine d'en comencer la lecture dans
le segond volume du Mercure du mois de
Juin 1730 .
On trouvera dans le Mereure de Janvier
un abregé somaire , ou une récapitulation de
tous les avantages de la métode du bureau.
pografique.
11. Vol. VER ?
DECEMBRE 1730. 2801
its its its its its its
aaaaaaaaaaaaa
VERTUMNE ET POMONE .
CANTATE.
Ans les charmans Vergers qu'embellit fa
D prefence ,
Pomone , peu fenfible au pouvoir de fes yeux ,
Affure par ces mots fa paifible innocence
Contre les Traits victorieux ,
Que l'Enfant de Cithere fance
Vous faites ma felicité ,
Bois épais , agréable ombrage ;
Sous votre aimable obfcurité ,
Je fais l'amoureux efclavage ,
Je fais gloire de ma fierté ,
A l'abri de votre feüillage.
Si nos coeurs vouloient réfifter ,
L'Amour n'auroit point de victoire
Nous lui cedons fans difputer ;
Notre foibleffe fait fa gloire.
Quelles féduifantes erreurs !
Accable de maux neceffaires ,
On peut ménager fes douleurs
On en cherche de volontaires,
Si nos coeurs , &c.
>
II.Vol. B vį Malgré
2802 MERCURE DE FRANCE
Malgré l'excès de fa rigueur ,
Vertumne , dès long- temps languiffant fous fa
chaine ,
Suit les traces de l'Inhumaine ,
#
Qu'il veut perfuader de fa fincere ardeur,
Et pour fléchir l'objet de fa tendreffe ,
Il emprunte foudain par un prompt changement ;
Le vifage de la Vieilleffe .
Vainement vous bravez le plus puissant des
Dieux ,
Dit-il en l'abordant , ceffex , jeune Pomone ,
De refufer des foins qu'exigent vos beaux yeux;
Au coeur que Vertumne vous donne .
N'oppofez plus de regards dédaigneux ;
La fincerité de fes feux ,
Mérite qu'àjamais votre ardeur les couronne.
Quand l'Amour nous fait languir ,
C'eft l'effet de ſa vengeance ;
Cédons lui fans réſiſtance ,
Ou redoutons de l'aigrir .
Loin la fiere indifference:
Un coeur en eft le martir ;
'Aimons , & loin de punir ,
Le petit Dieu récompenfe.
Quand l'Amour , &c
dl. Vol
DECEMBRE. 1730. 2803
Il parle un baiſer plein de flamme ,
Suit auffi -tôt fon diſcours enchanteur ,
L'Amour qui conſume ſon ame ,
A
Des levres de Pomone a coulé jufqu'au coeur ,
Il découvre ſes traits : la Belle qu'il enflamme ,
Pour le dédommager de fa longue rigueur ;
Entre fes bras tombe en langueur ;
Dans les doux tranſports qui la pâme ,
Le tendre Amant affure ſon bonheur
Elle eft forcée à chérir fon erreur.
Un coeur qui peut fe contraindre ,
Tôt ou tard fe fait aimer ;
Amans , fi vous fçavez feindre ;
Soyez certains de charmer..
Aimez-vous une Rebelle ?"
Confultez le tendre Amour ;
Il fe déguiſe auprès d'elle ,
Pour l'enchaîner à ſon tour
Un coeur , &c .
"
Le Chevalier de Montador
3
IL Vol LETTRE
1804 MERCURE DE FRANCE
LETTRE de M.Treüillot de Ptoncour,
Curé d'Anfacq , à Madame la Princeffe
de Conty , troifiéme Douairiere , &
Relation d'un Phénomene très extraordinaire
, &c.
MADAM ADAME ,
Fay cru avoir remarqué dans mes deux
Voyages de l'Ile-Adam , queVOTRE Altesse
SERENISSIME n'y venoit de tems en tems que
poury gouter les amusemens de la Campagne
; une Ménagerie , la Chaffe , la Pêche ,
les Promenades , les ouvrages de l'aiguille
ou de la Tapiffèrie , & fur tout d'agréables
lectures , font , ce me femble , tout ce qui peut
former l'aimable varieté de vos innocens plaifirs.
Que je ferois heureux , MADAME ,
fi je pouvois y contribuer en quelque³ maniere,
& augmenter cette varieté par la petite
Relation que je prens la liberté de vous
prefenter!
Tout y refpire l'air de la Campagne ; tout
ce qui y eft contenu s'eft paffé à la Campagnes
c'eft fur le témoignage de gens de la Campagne
que le fait dont il s'agit eft appuyé ;
II. Fol. c'eft
DECEMBRE . 1730. 2803
c'est enfin un Curé , mais le Curé de toutes
vos Campagnes , le plus fidele , le plus zelé ,
& le plus refpectueux , qui a l'honneur de
vous la communiquer.
Le fujet de cette Relation , toute effrayant
qu'il ait parn aux gens de la Campagne qui
difent, en avoir été témoins , devient naturellement
pour les efprits folides , & fur tout
pour celui de V. A. S. un vrai divertiffement
& une matiere agréable de recherches ,
de reflexions, fuppofe fa réalité.
Il s'agit d'un bruit extraordinaire dans
Fair, qui a toutes les apparences d'un Prodige
; prefque tous les habitans du lieu où
il s'eft fait, affurent , jurent & protestent l'avoir
bien entendu.
Ces Témoins , comme gens de la Campagne
, appellent cet évenement un Sabbat ; les
efpritsforts l'appelleront comme ils voudront,
pourront raifonner , ou plutôt badiner à
Leur aife.
> Aux
Pour moi , dans la Differtation que j'ay
mife à la fin , je lui donne le nom grec d'Akoulmate
, pour fignifier une chofe extraor
dinaire qui s'entend dans l'air , comme on
donne le nom grec de Phénomene
chofes qui paroiffent extraordinairement
dans
te même Element ; mais je me garde bien de
rien décider fur le fond ni fur les cauſes .
Quoiqu'il en soit , Efprits , Lutins , Sorciers
, Magiciens , Météores , Conflictions
II. Vol .
de
2806 MERCURE DE FRANCË
de vapeurs , Combats d'Elemens ; je laiffe
aux Curieux à choisir ou à trouver d'autres
caufes : ilme fuffit d'affurer V.A.S. que les
Témoins de ce prétendu Prodige , m'ont paru
de bonne foi , & que les ayant interroge
plufieurs fois , & leur ayant donné tout le
tems de fe contredire & d'oublier dans leurs
deux , trois & quatrième dépofitions , ce qu'ils
m'avoient dit dans la premiere , ils se font
néanmoins foutenus à merveilles , & n'ont
point varié dans la moindre circonftance.
C'en eft affez pour mon deffein , qui fe
termine uniquement au divertiffement de
V. A. S. elle a dans fa Cour & à la suite
de Monfeigneur le PRINCE DE CONTY,
des R R. Peres Jefuites , qui font ordinairement
des perfonnes trés-lettrées & trés- verfées
dans les fecrets de la Nature : fi vous voulez
, MADAME , leur communiquer cette
Relation , & qu'ils veuillent bien en dire
leur fentiment, je ferai charmé de profiter de
leurs lumieres, & je m'engagerai même à rendre
publique leur opinion , avec leur permiffion,
s'entend, je ne voudrois pour toute chofe
au monde , jamais rien faire qui pût leur
déplaire.
Au refte , V. A. S. doit prendre d'autant
plus de part à cet évenement , qu'il eft arrivé
dans une de fes Terres.
Si ce font des Efprits de l'Air, comme les
Perdrix & les autres Oifeaux qui habitent
II. Vol. Le
DECEMBRE. 1730. 2807
le même Element dans l'étenduë du Territoire
d'Amfacq , appartiennent de droit à
V. A. S. fans doute que ces Efprits , pourvn
qu'ils foient familiers & bienfaifants , doivent
vous appartenir par la même raifon ;
en tout cas mon unique but n'eft , encore un
coup , MADAME , que de vous diver
tir, auffi-bien que Monfeigneur LE PRINCE
DE CONTY ; faffe le Ciel quej'y aye réuſſi
aujourd'huy , en attendant que je puiffe donner
des marques plus ferieufes de l'attachement
infini & du refpect profond avec lequel
je fuis de V. A. S. MADAME , & c.
RELATION d'un bruit extraordinaire
comme de voix humaines , entendu dans
l'Airpar plufieurs Particuliers de la Paroiffe
d'Anfacq , Diocéfe de Beauvais
la nuit du 27. au 28. Janvier 1730 .
E Samedi 28. Janvier de la prefente
Lannée , le bruit le répandit dans la
Paroiffe d'Anfacq , près Clermont en
Beauvoifis , que la nuit précédente plufieurs
Particuliers des deux fexes , avoient
entendu dans l'Air une multitude prodigieufe
comme de voix humaines de
differens tons , groffeurs & éclats , de tout
âge , de tout fexe , parlant & criant toutes
enfemble , fans néanmoins que ces Par-
IIV ol.
ticu1808
MERCURE DE FRANCE
ticuliers ayent pu rien diftinguer de ce
que les voix articuloient ; que parmi cette
confufion de voix , on en avoit reconnu
& diftingué un nombre infini qui pouffoit
des cris lugubres & lamentables , comme
de perfonnes affligées , d'autres des cris de
joye & des ris éclatans , comme de perfonnes
qui fe divertiffent ; quelques- uns
ajoûtent qu'ils ont clairement diftingué
parmi ces voix humaines , ſoit- diſant , les
fons de differens inftrumens.
Cette nouvelle vint bientôt jufqu'à
moi , & comme je n'ajoûte pas foi
aifément à ces fortes de bruits populai
res , & que je fuis affez pyrrhonien à l'égard
de tous les contes nocturnes qui fe
débitent fi fouvent dans l'apparition des
Efprits , des Sabbats & de tant d'autres
bagatelles de cette efpece , je me contentai
d'abord de rire de celle-cy & de la regarder
comme un effet ordinaire d'une
Imagination frappée & bleffée de la frayeur
qu'inſpirent ordinairement les tenebres
de la nuit , fur tout à des efprits groffiers
& ignorans , comme ceux de la plupart
gens de la Campagne , qui font nour
ris & élevés par leurs parens dans cette
perfuafion qu'il y a des Sorciers & des
Sabbats , & qui ajoûtent plus de foi aux
contes ridicules qui s'en débitent parmi
eux , qu'aux veritez effentielles de l'Evangile
& de la Religion.
des
DECEMBRE 1730. 2800
Je badinai ainfi jufqu'au lendemain Dimanche
29. dudit mois , me divertiffant
toujours à entendre raconter la chofe par
tous ceux & celles qui difoient l'avoir entenduë.
Entre ceux- là , deux de mes Paroiffiens,
des premiers du lieu , bons Laboureurs ,
gens d'honneur & de probité , beaucoup
plus éclairez & moins crédules que ne
le font ordinairement les gens de la Campagne
, me vinrent faire l'un après l'autre
leur Relation , comme ayant entendu
de près tout ce qui s'étoit paffé .
Ils m'affurerent qu'alors ils étoient dans
un bons fens parfait, qu'ils revenoient de
Senlis , environ à deux heures après minuit
, & qu'ils étoient fùrs d'avoir bien
entendu & fans être trop effrayez , tour
ce qui eft rapporté au commencement de
cette Relation .
Après les avoir bien interrogez & tour.
nez de toutes fortes de manieres , je tâchai
de leur perfuader qu'ils s'étoient trompez,
& que la crainte & la préoccupation leur
avoient fait prendre quelques cris d'Oifeaux
nocturnes pour des voix humaines;
mais leurs réponſes ont toujours été les
mêmes , fans fe les être communiquées
& je n'ai pû y découvrir ni malice , ni
tromperies , ni contradictions .
J'ai eu beau leur faire à chacun en
-II. Vol.
par2810
MERCURE DE FRANCE
particulier toutes les objections qui me
vinrent alors dans l'imagination , ils ont
toujours perfifté& perfiftent encore à affu
rer que lorfqu'en revenant de Senlis ils
s'entretenoient tranquilement d'une affai
re pour laquelle ils avoient été obligez d'aller
en cette Ville ; ils avoient tout à coup
entendu près d'eux un cri horrible d'une
voix lamentable , à laquelle répondit à
fix cens pas delà une voix femblable &
par un même cri , que ces deux cris furent
comme le prélude d'une confuſion
d'autres voix d'hommes , de femmes , de
vieillards , de jeunes gens , d'enfans, qu'ils
entendirent clairement dans l'efpace renfermé
entre les deux premieres voix ,
& que parmi cette confufion ils avoient
diftinctement reconnu les fons de dif
ferens inftrumens comme Violons
Baffes , Trompettes , Flutes , Tambours ,
&c.
Quoique tout cela n'ait pû me tirer
encore de mon pyrrhonifme , je n'ofe
néanmoins traiter de vifionnaires un fi
grand nombre de perfonnes raifonnables ,
entre lefquelles il s'en trouve fur tout
fept ou huit qu'on peut appeller gens
de mérite & de probité pour laCampagne
qui dépofent toutes unanimement la même
chofe , fans fe démentir ni fe contredire
en la moindre circonftance , quoi-,
II. Vol.
qu'elle
DECEMBRE. 1730. 2811
qu'elles ne fe foient ni parlé ni commu❤
niqué , étant logées dans differens quartiers
du Village éloignez l'un de l'autre
& la plupart defunies par des difcusions
d'interêt qui rompent en quelque maniere
entre elles le commerce ordinaire de la
focieté ; enforte que je ne vois nulle apparence
qu'il puiffe s'être formé entre
elles un complot pour me tromper ou
pour fe tromper elles- mêmes.
C'est ce qui m'a déterminé , à tout hazard
, à prendre la dépofition de chaque
Particulier qui dit avoir entendu les bruits
en queſtion , & d'en faire une efpece de
procès verbal , pour le communiquer à
des perfonnes plus éclairées que moi ,
moi , afin
que fuppofé le fait veritable , elles puiffent
exercer leurs efprits & leurs penetrations
à chercher les caufes naturelles
ou furnaturelles d'un évenement fi extraordinaire.
Quoique j'euffe pris d'abord cette réfo
lution , j'avois pourtant négligé de l'executer
, & le procès verbal que j'avois commencé
dès les premiers jours de Fevrier ,
étoit demeuré imparfait. Mais cette efpece
de prodige étant encore arrivé la nuit du
9. au 10. du mois de May , & plufieurs
perfonnes raisonnables en ayant été témoins
, je me fuis enfin déterminé tout à
fait à continuer avec foin cette efpece
d'enquête,
DE2812
MERCURE DE FRANCE
DEPOSITIONS.
Cejourd'hui 17. May 1730. a comparu
pardevant nous, Prêtre, Docteur en Théologie
, Curé d'Anfacq , le nommé Charles
Defcoulleurs , Laboureur , âgé d'environ
48. ans , lequel interrogé par nous ,
s'il étoit vrai qu'il eût entendu le bruit
extraordinaire qu'on difoit s'être fait dans
l'Air la nuit du 27. au 28. Janvier dernier
, & fommé de nous dire la verité
fans détours & fans déguiſemens.
>
A répondu , que cette nuit là , revenant
avec fon frere François Defcoulleurs , de la
Ville de Senlis , & ayant paffé par Mello ,
où ils auroient eu quelques affaires ; ils auroient
été obligez d'y refterjufques bien avant
dans la nuit, mais que voulant neanmoins
revenir coucher chez eux , ils feroient arrivez
environ à deux heures après minuit audeffus
des murs du Parc d'Anfacq , du côté
du Septentrion , & que prêts à defcendre la
Côte par un fentier qui cottoye ces murs , &
conduit au Village , s'entretenant de leurs
affaires , ils auroient été tout à coup interrompus
par une voix terrible , qui leur parut
éloignée d'eux environ de vingt pas ;
qu'une autre voix femblable à la premiere
auroit répondu fur le champ du fond d'une
gorge entre deux Montagnes , à l'autre exremité
du Village , & qu'immédiatement
II. Vol.
aprés
DECEMBRE. 1730. 281 }
leaprés
, une confufion d'autres voix comme
humaines , fe feroient fait entendre dans
Pefpace contenu entre les deux premieres
articulant certain jargon clapiſſant , que
dit Charles Defconlleurs dit n'avoir pû com
prendre , mais qu'il avoit clairement diftinqué
des voix de vieillards , de jeunes hommes
, defemmes ou de filles & d'enfans, &
parmi tout cela les fons de differens Inftru
mens.
Interrogé. Si ce bruit lui avoit paru éloigné
de lui & de fon frere ? A répondu
de quinze on vingt pas. Interrogé , fi ces
voix paroiffoient bien élevées dans l'Air ?
A répondu. A peu près à la hauteur de
vingt ou trente pieds , les unes plus , les autres
moins, & qu'il leur avoit femblé même
que quelques-unes n'étoient qu'à la hauteur
d'un homme ordinaire , & d'autres comme
fi elles fuffent forties de terre.
Interrogé. S'il n'auroit pas pris les cris
de quelques bandes d'Oyes fauvages , de
Canards , de Hyboux , de Renards , ou
les hurlemens de Loups , pour des voix
humaines ? A répondu. Qu'il étoit aufait
de tous ces fortes de cris , & qu'il n'étoit pas
homme ſi aisé à fe frapper , ni fi fufceptible
de crainte, pour prendre ainfi le change .
Interrogé. S'il n'y auroit pas eu un peu
de vin qui lui eut troublé la raiſon , auffibien
qu'à fon frere ? A répondu . Qu'ils
II. Vol étoient
1814 MERCURE DE FRANCE
étoient l'un & l'autre dans leur bon fens
& que bien loin d'avoir trop bû , ils étoient
au contraire dans un besoin preſſant de boire
& de manger, & qu'après le bruit ceffé , il
s'étoit rendu dans la maifon de fon frere , &
là buvant un coup , ils s'étoient entreteaus
de ce qui venoit de fe paffer , fortant de
tems-en-tems dans la cour pour écouter s'ils
'entendroient plus rien.
que
Interrogé. Si le bruit étoit fi grand qu'il
pût s'entendre de bien loin ? A répondu.
Qu'il étoit tel , que fon frere & lui avoient
eu peine à s'entendre l'un & l'autre en parlant
trés-haut.
Interrogé. Combien cela avoit duré ?
A répondu. Environ une demie heure.
Interrogé. Si lui & fon frere s'étoient
arrêtez & n'avoient pas voulu approcher
pour s'éclaircir davantage ? A répondu.
Que fon frere François avoit bien en le def
fein d'avancer & d'examiner dans l'endroit
ce que ce pouvoit être , mais que lui¸ Charles
, l'en avoit empêché.
Interrogé.Comment cela s'étoit terminé ?
Répondu. Que tout avoit fini par des éclats
de rire fenfibles , comme s'il y eût en trois
ou quatre cens perfonnes qui ſe miſſent à rire
de toute leur force.
Ces Articles lûs & relûs audit Charles
Defcoulleurs , a dit iceux contenir tous
verité , que ce n'étoit même qu'une par-
II. Vol. tic
DECEMBRE . 1730. 2815
tie de ce qu'il auroit entendu , qu'il ne
trouvoit point de termes affez forts pour
s'exprimer , qu'il juroit n'avoir rien mis
de fon invention , & que fi fa dépofition
étoit défectueufe , c'étoit plutôt pour n'avoir
pas tout dit , que pour avoir amplifié,
Et a figné à l'Original.
Ce 18. May 1730. a comparu , &c.
François Defcoulleurs , Laboureur d'Anfacq
, âgé de 38. ans, lequel interrogé s'il
auroit entendu le bruit furprenant de la
nuit du 27. au 28. Janvier dernier , a
répondu à chaque demande que nous lui
avons faites , les mêmes chofes , mot pour
mot , que Charles Defcoulleurs fon frere ;
enforte que lui ayant fait la lecture de
tous les articles contenus dans la dépofition
dudit Charles , a dit les reconnoître
pour veritables , n'ayant rien à y ajouter,
finon qu'à la fin de ce tumulte il s'étoit
fait deux bandes. féparées , fe répondant
l'une à l'autre par des cris & des éclats de
rire , que ledit François Defcoulleurs a
imitez devant nous , exprimant les ris des
vieillards par a, a , a , a , a ; tels que font
les ris des perfonnes décrépites à qui les
dents manquent ; les autres ris des jeunes
kommes , femmes & enfans , par ho ,
bo , bo
ho , bo ; hi , hi , hi , hi ; & cela d'une maniere
fi éclatante & avec une fi grande
confufion , que deux hommes auroient eu
...II Vol

1
1-
C peine
2816 MERCURE DE FRANCE
peine à le faire entendre dans une converfation
ordinaire ; lecture lui a été faite
de cette dépofition , a dit contenir verité ,
y a perfifté , & l'a fignée , auffi- bien que
celle de fon frere Charles , qu'il a voulu
figner avec la fienne.
Ce 23. May 1730. ont comparu Louis
Duchemin , Marchand Gantier , âgé de
30, ans , & Patrice Toüilly , Maître Maçon
, âgé de 58. ans , demeurant l'un &
L'autre à Anfacq , lefquels interrogez , ont
répondu : Que la nuit du 27. au 28. Fanvier
dernier , ils feraient partis enſemble environ
à deux heures aprés minuit , afin de
Se rendre au point du jour à Beauvais
diftant d'Anfacq de fix lieues ; qu'étant audeffus
de la Côte oppofée à celle où Charles
François Defconlleurs étoient à la même
heure revenant de Senlis , la Vallée d'Anfacq
entre les uns les autres , ils auroient
entendu le même bruit, & en même temps que
lefdits Defcoulleurs qu'eux Louis Duchemin
& Patrice Touilly , fe feroient arrêtez
d'abord pour écouter avec plus d'attention ,
que faifis de crainte , ils auroient déliberé
entre eux de retourner fur leurs pas ;
que comme il auroit fallu paffer dans l'endroit
où ces voixfe faifoient entendre , ils fe
feroient déterminez à s'en éloigner en continuant
leur voyage , toujours en tremblant :
qu'ils auroient entendu le même bruit pendant
mais
II, Vel
-une
DECEMBRE . 1730. 2817
une demie lieuë de chemin , mais foiblement
à mesure qu'ils s'éloignoient. Et ont figné
à
l'Original.
Le même jour a comparu pardevant
nous le fieur Claude Defcoulleurs , ancien
Garde de la Porte , & Penfionnaire de feu
M. le Duc d'Orleans , âgé de 56. ans , lequel
interrogé , a répondu : Que non -feulement
il avoit bien entendu ce bruit du mois de
Janvier , mais encore celui de la nuit du 9.
au 10. du prefent mois de May ; que lors
du premier il étoit bien éveillé & avoit oui
diftinctement tout ce qui s'étoit paffé : que
comme alors il faifoit froid, il ne s'étoit pas
levé pour cette raisons mais que comme la
porte de fa chambre eft vis-à-vis fon lit &
tournée à peu près du côté du Parc d'Anfacq
, il avoit auffi bien entendu que s'il eût
été dans fa cour & dans le lieu même ; que
le bruit étoit fi grand & fi extraordinaire,
que quoiqu'il fut bien enfermé , il n'avoit
pas laiffé d'être effrayé , & de reffentir dans
toutes les parties de fon corps un certain frémiffements
enforte que fes cheveux s'étoient
hériffez. Qu'à la feconde fois étant endormi,
le même bruit l'ayant éveillé en furſaut , il
feroit levé fur le champ ; mais que tandis
qu'il s'habilloit,la Troupe Aërienne avoit en
Le
temps
de s'éloigner; enforte que quand il
fut dans fa cour , il ne l'avoit plus entendrë
que de loin & foiblement , que cependant
11. Vol.
il
Cij
2818 MERCURE DE FRANCE
il en avoit oui affez defon lit & de fa chambre,
pourjuger & reconnoîtrefenfiblement que
ce fecond évenement étoit femblable en toutes
manieres au premier & de même nature.
Interrogé , s'il ne pourroit pas nous
donner une idée plus claire de cet évenement
par la comparaifon de quelque chofe
à peu près femblable , & tirée de
l'ordre ordinaire de la Nature & du Commerce
du Monde ? A répondu de cette.
maniere.
Il n'eft pas , Monfieur , dit-il , que vous
nayez vu plufieurs fois des Foires oufrancs
Marchez vous avez , fans doute, remarqué
que dans ces fortes de lieux deux ou trois
mille perfonnes forment une espece de cabos
ou de confufion de voix d'hommes , de femmes
, de vieillards , de jeunes gens & d'enfans
, où celui qui l'entend d'un peu loin ne
peut abfolument rien comprendre , quoique
chaque Particulier qui fait partie de la confufion
, articule clairement & fe faffe entendre
à ceux avec lesquels il traite de fes affaires
& de fon Commerce . Imaginez- vous donc
être à la porte des Hales à Paris unjour de
grand Marché , ou dans les Sales du Palais
avant l'Audience ; ou enfin à la Foire faint
Germain fur le foir , lorsqu'elle eft remplie
d'un monde infini , n'entend-on pas dans
tous ces lieux, & principalement dans le dernier
un charivari épouvantable , ( ce font fes
II Vol. mêmes
DECEMBRE. 1730. 28 19

mêmes termes ) dans lequel on ne comprend
rien en general, quoique chacun en particulier
parle clairement & ſe faſſe diſtinctement entendre?
ajoûtez à tout cela lesfons des Violons ,
des Baffes , Hautbois , Trompettes , Flutes
Tambours & de tous les autres Inftrumens
dont on joue dans les Loges des Spectacles
& qui fe mêlent à cette confufion de voix ,
vous aurez une idée jufte & naturelle des
bruits que j'ai entendus & dans lesquels j'ai
remarqué diftinctement des voix humaines en
nombre prodigieux , auffi - bien que les fons
de differens Inftrumens . Après la lecture
de fa dépofition , a dit , juré & protesté
contenir verité & a figné à l'Original .
ans ,
Le même jour a comparu Alexis Allou ,
. Clerc de la Paroiffe d'Anfacq , âgé de 34.
lequel interrogé &c . a répondu :
...que la même nuit étant couché & endormi,
Sa femme qui ne dormoit pas auroit été frappée
d'un grand bruit , comme d'un nombre
-prodigieux de perfonnes de tout fexe , de tout
age ; que faifie de frayeur , elle auroit éveillé
ledit Allou , fon mari , & qu'alors le même
bruit continuant & augmentant toujours ,
ils auroient crû l'un & l'autre que le feu étoit
à quelque maifon de la Paroiffe , & que les
cris provenoient des habitans accourus an
Secours que lui Allou dans cette perſuaſion
fe feroit levé avec précipitation ; mais qu'étant
prêt à fortir , & avant d'ouvrir fa
II. Vol. Cij porte
2820 MERCURE DE FRANCÉ
porte il auroit entendu paſſer devant fa
maifon une multitude innombrable de perfonnes
, les unes pouffant des cris amers
( ce font fes termes ) les autres des cris de
joye , & parmi tout cela les fons de differens
inftrumens que cette multitude lui avoit femblé
fuivre le long de la rue jufqu'à l'Eglife ,
mais qu'alors unfriſſon l'ayant faifi , il n'auroit
pas ofé écouter plus long- tems , & auroit
étéfe recoucher auffi tôt pour fe raffurer auffi
bien que fa femme qui trembloit de frayeur
dans fon lit. Et a figné à l'original.
Ce 24. May 1730. a comparu Nicolas
de la Place , Laboureur , âgé d'environ
45. ans , demeurant audit Anfacq , lequel
a déclaré : que la nuit du 27 au 28. Janvier
n'étant point encore endormi , il auroit tout
à
coup entendu un bruit extraordinaire , é
que croyant qu'il feroit arrivé quelque accident
dans la Paroiffe , il fe ferait levé nud
en chemife , & qu'après avoir ouvert la porte
de fa chambre , il auroit oùi comme un nombre
prodigieux de perfonnes , de tout âge &
de toutfexe , qui paffoient devant fa maison,
fife proche l'Eglife , & au milieu du Village
, formant un bruit confus , mais éclatant,
de voix comme humaines , mêlées de differens
inftrumens ; qu'alors la crainte & le
froid l'auroient obligé de refermer promtement
fa porte & de fe remettre au lit , d'où
il auroit encore entendu le même bruit & les
II. Vol.
mêmes.
DECEMBRE. 1730. 2821
mêmes voix , comme fi elles euffent monté
la ruë , & paffé devant la Maifon Pres
biterale. Et a figné à l'original.
Le même jour ont comparu Nicolas
Portier , Laboureur , âgé de 25. ans , &
Antoine Le Roi , garçon Marchand Gantier
, âgé d'environ 34. ans , lefquels ont
déposé que ladite nuit & à la même heure
ils auroient entendu paffer le long de la ruë,
dite d'Enbaut , qui conduit à Clermont , &
entre notre Maiſon Presbiterale & la leur,
comme une foule de monde , de tout âge , de
tout fexe , dont une partie pouffoit des cris
affreux , les autres parlant tous ensemble ,
& articulant certain jargon inintelligible s
que le bruit étoit fi grand & fi affreux que
leurs chiens qui étoient couchés dans la
Cour pour lagarde de la maiſon, en avoient
été tellement effrayés , que fans pouffer un
feul aboyement ils s'étoient jettes à la porte
de la chambre de ladite maifon , la mordant
& la rongeant comme pour la forcer , l'ouvrir
& fe mettre à couvert , fuivant l'instinct
naturel de ces animaux. Et ont figné à l'original.
Ce z. Juin 1730. ont comparu Jean
Defcoulleurs , âgé de 40. ans , Jacques
Daim , Etienne Baudart , Chriſtophe Denis
Deftrés , Jean Beugnet , Paul le Roi ,
Jean Caron & un grand nombre d'autres
perfonnes des deux fexes , lefquels ont
II. Vol. Cilj tous
2822 MERCURE DE FRANCÉ

tous déclaré d'avoir bien entendu nonfeulement
le bruit aërien du 27 au 28.
Janvier , mais encore celui du 9 au 10.
dé May dernier , fe rapportant tous dans
les mêmes circonftances ; enforte qué
leur ayant fait lecture de toutes les dépofitions
ci-deffus , ont dit icelles contenir
verité , & ont figné l'Original , ceux
qui fçavent écrire , n'ayant pas jugé à
propos de prendre les marques de plus
de vingt perfonnes qui dépofent toutes
les mêmes chofes , mais qui ont declaré
ne fçavoir figner.
Nous fouffigné , Prêtre , Docteur en
Theologie , Curé de S. Lucien d'Anfacq',
Diocèfe de Beauvais , certifions que toutes
les dépofitions ci-deſſus fontfidelles , & telles
qu'on nous les a fournies ; qu'elles font fignées
enforme dans l'Original , & que cette
copie lui eft conforme en toutes fes parties ,
que nous n'avons ajouté ni rien changé dans
Fun & dans l'autre que l'arrangement &
la diction , ayant fcrupuleufement Suivi toutes
les circonftances qui nous ont été données.
Fait à Anfacq , ce 26. Octobre 1730. figné
TREUILLOT DE PTONCOURT , Curé
d'Anfacq.

REFLEXIONS.
Avant que de rendre publique cette Relation
, j'ai crû devoir la communiquer à
11. Vol. quelques
DECEMBRE. 1730. 2823
quelques perfonnes éclairées & d'érudition
de mes amis particuliers , leurs ſuffrages
m'ont paru néceffaires pour la rendre
plus autentique , s'agiffant fur tout
d'un évenement qui tient trop du merveilleux
, pour ne pas devenir le fujet
des railleries & du mépris des efprits
forts.
Je fuis bien aife d'avertir ces Meffieurs
que j'ai été jufqu'ici de leur nombre &
leur confrere fidele en ce genre feulement;
mais quoique je ne fois pas encore bien
réfolu de faire faux- bon à leur confrairie
, je les fupplie néanmoins de me permettre
de demeurer neutre entre leur
parti & celui des crédules , jufqu'à ce
que des gens de poids pour la fcience &
pour la pénetration ayent décidé du fait.
dont il s'agit , & m'ayent tiré de la perplexité
où je refterai jufqu'à leur jugement,
Les efprits forts ne peuvent me refuſer
qu'injuftement cette fufpenfion ; je ne
fçai pas bien s'il ne feroit pas auffi injufte
& auffi ridicule de traiter de vifionaires
tant de gens de probité , quoique de
la Campagne , qui conviennent tous du
même fait , que de croire legérement tout
ce que le vulgaire ignorant débite fi fouvent
des fabbats & des autres fottifes de
ce genre.
II. Vol. Cy Quoi
2824 MERCURE DE FRANCE
Quoiqu'il en foit , mes amis , bien loin
de me diffuader de donner au Public cette
relation , avec le procès verbal fait en
conféquence , m'ont prié , au contraire ,
non feulement de ne point héfiter à
le faire , mais d'y joindre encore une
deſcription Topographique du Village
d'Anfacq , afin de donner lieu à ceux
qui croirone pouvoir expliquer cet évenement
par des caufes naturelles d'exercer
toute leur Phyfique & leur Philofophie.
En effet , fi les Phénoménes extraor
dinaires qui ont paru dans l'air depuis
cinq ans ont tant exercé les beaux efprits
& ont fait la matiere de plufieurs affemblées
de Meffieurs de l'Académie des
Sciences , pourquoi un événement qui
tombe fous un autre fens , qui n'eft pas
moins réél , ni moins effentiel à l'homme
le fens de la vûë , ne meritera- t'if
que
pas autant l'attention & la curiofité des
mêmes Sçavans !
>
Tout le monde fçait que Phénoméne
eft un mot Grec, que l'on a francifé comme
beaucoup d'autres , parce qu'il ne fe
trouve point dans notre Langue de termes
d'une fignification affez énergique ,
pour exprimer feul & par lui -même les
objets qui paroiffent extraordinairement
dans l'air. Notre Langue ne nous fournit
II. Vol. pas
DECEMBRE. 1730. 2825
pas non plus d'expreffions pour défigner
fes bruits extraordinaires qui fe font , où
qui pourroient fe faire entendre. Mais.
comme ces derniers font bien moins communs
que les premiers , on ne s'eft point
encore avifé jufqu'ici de francifer un mot
Grec pour les exprimer.
; .
L'évenement dont il s'agit , ne pourroit
il donc pas m'autorifer à le faire moimême
? & de même qu'il a plû à nos
Anciens d'appeller , Phénoménes , les
objets extraordinaires qui paroiffent dans
l'air ne pourroit-on pas , par la même
raifon , défigner le bruit étonnant & prodigieux
qui vient de fe faire entendre par
ce mot , Akoufméne , ou pour parler plus
regulierement Grec en François , Akousmate
? Le premier fignifie une chofe qui
paroît extraordinairement ; le fecond fi
gnifiera une chofe qui fe fait entendre
extraordinairement
.
Ce principe établi , je prétens que fi les
Phénoménes font du reffort de la curio
fité des Sçavans , les Akoufmates , ne le
font pas moins , fuppofé leur réalité . Or,
on ne peut guere douter de celui - ci : trop
de gens
raifonnables en font le rapport ,
& s'accordent trop dans les mêmes circonftances
, pour n'y pas ajouter foi .
On me dira peut être ,qu'il y a une grande
difference pour l'autenticité entre les Phe-
II. Vol. Cavi no
2826 MERCURE DE FRANCE
noménes & mes prétendus Akoufmates :
que lorfque les premiers paroiffent , tous
les hommes qui ont le même horiſon naturel
& même rationel , peuvent les appercevoir;
au lieu que les feconds , fuppofé
leur réalité , ne peuvent être entendus
que de peu de perfonnes , & de celles feulement
qui en font à portée & qui demeurent
dans le même lieu où ces Akoufmates arrivent.
Que par confequent un Phénoméne
qui eft apperçu par tous les Sunorifontaux ,
emporte avec foi une autenticité bien
plus grande , qu'un Akoufmate qui ne peut
être entendu que par un petit nombre de
particuliers habitans d'un même lieu.
A cela je répons : que la Sphère d'activité
de la vûë étant bien plus étenduë
que celle de l'oüie , les Phénoménes & les
Akoufmates , ne requiérent pas le même
nombre de témoins pour les rendre autentiques
: que les premiers pouvant être apperçus
de tous les Sunorifontaux , il eſt
neceffaire que le plus grand nombre des
hommes qui habitent l'horifon fur lequel
un Phénoméne paroît , en rende témoignage
; au lieu que pour les feconds , il .
fuffit , ce me femble , qu'il ayent été entendus
par la plus grande & la plus faine
partie des habitans d'un même lieu , &
renfermés dans la Sphère d'activité de
l'oüie.
II. Vol.
Mais
DECEMBRE. 1730. 2827
le
Mais pour rendre le fait dont il s'agit
plus autentique encore , il fuffit de remarquer
que le fens de la vûë eft ordinairement
plus fujet à l'erreur & à l'illuſion ,
le fens de l'oüie . Il n'y a pour
que
prouver qu'à fe reffouvenir de toutes les
extravagances qui ſe débiterent à l'occafion
des derniers Phénoménes & fur tout
de celui du mois d'Octobre 1726.Combien
de gens cturent voir au milieu de l'efpece
de Dôme de feu qui parut alors , les uns
une Colombe ou S. Efprit , les autres un
Ange , un Autel , un Dragon , &c . toutes
chofes qui n'avoient de réalité que
dans leur imagination frappée , ou dans
leurs yeux fatigués & éblouis ?
Mais ici où il ne s'agit que du fens de
l'oiie , tant de gens raifonnables ont ils
pû fe tromper fi groffiérement , que de
s'imaginer entendre quelque chofe lorfqu'il
n'entendoient rien ? Un prétendu
bruit épouventable dans l'air qui n'auroit
confifté qu'en quelques hurlemens de
Loups fur la terre ? Une multitude infinie
de voix comme humaines mêlées de
differens fons d'inftrumens, qui n'auroient
été que des cris d'Oyes ou de Canards
Sauvages . Des perfonnes à dix pas du
lieu où fe paffoit ce charivari , des perfonnes
en voyages qui font arrêtées par
cet accident , & qui difent les avoir en-
II. Vol.
tendu
2828 MERCURE DE FRANCE
tendu finir par des éclats de rire de toute
efpece , tandis que d'autres pouffoient
des cris horribles ? Seroit-il poffible que
tant d'oreilles euffent été enchantées
pour ainfi dire , pour croire entendre ce
qu'elles n'entendoient pas ? C'eft ce que
je ne fçaurois jamais m'imaginer . Je ne
veux néanmoins m'attacher à aucun fentiment
, qu'autant qu'il fera celui de perfonnes
plus habiles que moi.
Defcription du Village.
ANacq cft fitué dans un Vallonformé par
deux Coteaux ou Montagnes , entre Clermont
en Bauvoifis au Nord - Eft , & le Bourg de
Mouy au Sud - Oueft. A peu près à la même diftance
de l'un & de l'autre; trois Gorges fort étroites
, l'une au Nord- Eft , celle du milieu au Nord,
& la troifiéme au Nord - Oueft , font comme les
racines du principal Vallon , forment une espéce
de patte d'Oye, & fe rapprochant, viennent le réünir
à un quart de lieuë d'Anfacq...
Sur la hauteur environ à fix cens pas communs
de la naiffance de ces Gorges ,, eft le commencement
de la Forêt de Haye , dite communément
la Forêt de la Neuville. La Seigneurie du
Pleffier Bilbault , de la Paroiffe d'Anfacq , eft fi
tuée proche la liziere de ladite Forêt , à 400. pas
ou environ de la naiffance de la Gorge du milieu
ou de celle du Nord..
Le Village commence du côté de Clermont
au Nord - Eft , par une rue affés longue , bâtie le
long de la côte Orientale , fur une douce pente,
& vient fe terminer à l'Eglife , dont le principal
II. Vol.
Portail
DECEMBRE . 1730. 2829'
Portail fait face du côté du Couchant , à une Pla
ce bordée de maiſons de part & d'autre , & terminée
par un petit ruiffeau , au delà duquel d'autres
maifons font face au Portail.
De l'Eglife , une autre rue conduit jufqu'aux
murs du Parc vers le Sud- Qüeft : & c'eft au bout
de cette rue , & en dedans du Parc , que les bruits
furprenans dont-il eft ici question , commencent
& le font entendre ordinairement. C'eft auffi audeffus
de l'extrémité de cette ruë , & vers les mêmes
murs , que Charles & François Defcoulleurs,
étoient placés , lorfqu'en revenant de Senlis , ils
furent obligés de s'arrêter , à caufe de ce bruit
étonnant.
>
On fe fouviendra encore de ce qui eft dit dans
la dépofition defdits Defcoulleurs , que deux cris
affreux furent comme le prélude de la confufion
qu'ils entendirent immédiatement après. Le premier
fe fit entendre du fond d'une des Gorges
qui fervent de racines au principal Vallon ,,
c'eft à dire , de la troifiéme qui eft vers le Nord-
Oueft , le fecond cris répondit au premier dans
le Parc , au bout de la rue même dont je viens
de parler , & à quinze ou viage pas de l'endroit
ou lefdits Defcoulleurs étoient. Le Vallon d'Anfacq
ainfi formé , comme je l'ai dit , par la jonc
tion des trois Gorges , continue à peu près de la
même largeur jufqu'au Parc & au Château , éloi
gné du Village environ de huit cent pas.
Le Parc qui peut contenir quatre cens arpens,.
eft un grand quarré long , dont la partie Orien
tale forme dans toute fa longueur du Nord au
Sad un Amphithéatre , ou deux grandes Terraffes
l'une far l'autre qui emportent environ la
moitié de fa largeur , & font ombragées par tout:
d'une petite fotaye de chênes , & en quelques ens
droits de buiffons épais & forts.
11. Vol.
Ꮮ e
2830 MERCURE DE FRANCE
Le Château d'un gout antique avec Tours &
Tourelles eft fitué à cent pas du pied de l'Amphithéatre
, entre deux Cours , dont celle d'entrée
& la principale , regarde le Couchant , l'autre
F'Orient , l'une & l'autre environnées de bâtimens
pour la commodité d'un Laboureur.
Prés du Château on trouve trois Jardins
entourés de Murs , lefquels coupant aflez bifarrement
l'endroit du Parc où ils font placés , forment
trois quarrés & differentes efpeces de chemins
couverts qui les féparent l'un de l'autre , &
conduifent à differentes portes , tant pour entrer
dans la principale Cour que pour ſortir du Parc ;
tout le refte confifte en pâturages , Aulnois ,
plans de faules & Arbres fruitiers.
>
De l'extrémité du Parc , du côté du Sud - Oueſt;
le Vallon continuë pendant une demie lieuë , &
va enfin fe rendre dans la grande Vallée de
Mouy. Il eft partagé dans toute fa longueur par
un petit Ruiffeau , formé par plufieurs fources
qui fortent du pied de la Montagne d'où naiffent
les trois Gorges. Ce Ruiffeau ombragé par
tout de bois aquatiques comme Saules , Peupliers
, Aulnes &c. vient paffer au- deffous des
Jardins de la rue de Clermont , bâtie , comme
je l'ai déja dit , fur la pente de la côte Orientale,
entre enfuite dans le Village par l'extrémité de
la Place qui fait face à l'Eglife , & continuant
fon cours vers le Sud - Oueft , il va fe rendre dans
le Parc ; delà toujours en ferpentant il va arrofer
le principal Jardin , d'où il tombe par une
efpece de petite Caſcade dans les foffez du Châ
teau qu'il parcourt fans les remplir , parceque
les digues en font rompues. Il fort enfuite des
foffez & de la grande Cour pour rentrer dans
l'autre partie du Parc , & cotoyant le pied de
PAmphithéatre il en reffort par le Sud- Ouest, &
II. Vol. va
DECEMBRE. 1730. 2831
a former à fix cens pas delà un petit étang
pour faire moudre un Moulin . En fortant du
Moulin , il fe recourbe un peu vers le Sud ou
Midi , & après une demie lieuë du refte de fon
cours il va fe rendre dans la grande Vallée , &
fe décharger dans la petite Riviere du Terrin ,
entre Mouy & Bury. Le Vallon d'Anfacq depuis
fes racines jufqu'à l'endroit où il fe rend
dans la grande Vallée peut avoir dans toute fa
longueur 3000. pas géometriques, ou une grande
lieuë de France.
༥༤ ་
Outre les trois Gorges dont j'ai parlé, il fe trouve
encore dans toute cette étendue pluſieurs cavées
ou chemins creux de part & d'autre qui
conduisent en differens endroits fur les deux coteaux
oppofés dont le Vallon eft formé.
Il faut obferver que dans toute la longueur da
Vallon il ne fe trouve point d'échos confiderables
qui fe renvoyant les fons les uns aux autres
puiffent fervir de fondement au fentiment de
ceux qui voudroient attribuer les bruits en queftion
à ces cauſes ordinaires & naturelles . C'eft
ce dont j'ai voulu moi - même faire l'experience
pendant une belle nuit & un tems calme , en fai
Tant marcher en même tems que moi plufieurs
perfonnes tant fur les côteaux que dans la Vallée,
& en les faifant crier de tems en tems. J'entêndis
bien les voix de plus de quinze perfonnes ,
hommes & petits garçons qui s'acquiterent parfaitement
de la commiffion que je leur avois donnée
, en criant quelquefois de toutes leurs forces ,
& en parlant de tems en tems , & tous enſemble
à voix haute ; mais cette experience ne produifit
rien qui pût m'éclaircir ; les principaux témoins
de notre prodige que j'avois avec moi , ne
convinrent jamais que ces voix en approchaffent,
& lui reffemblaffent en la moindre circonftance.
II Fol. Il
2832 MERCURE DE FRANCE
Il est vrai , me dirent -ils , que dans le Sabbat
que nous avons entendu , ( ce font leurs mêmes
termes ) il y avoit à peu près des voix ſemblables
mais en bien plus grand nombre , & qui formoient
une confufion horrible de cris lugubres ,
de cris de joye & de fons d'Inftrumens.Celles - cy,
continuoient- ils , font difperfées & à terre, aulieu
que les autres étoient toutes raffemblées , & la
plus grande partie dans l'Air ; nous entendons le
langage de ceux- cy , mais nous ne comprîmes
jamais rien dans le jargon des autres . Et d'ailleurs
quand ce que nous entendons actuellement approcheroit
en quelque forte de ce que nous avons
entendu;quelle apparence qu'un nombre fi prodigieux
de monde fe fût affemblé dans le Pare
d'Anfacq? Il auroit donc fallu pour cela que tous
les habitans , hommes , femmes , enfans & Menetriers
de tous les Villages à deux lieues à la
ronde , euffent formé ce complot ; & à quel ufa
ge : Les uns pour crier , chanter & rire ? Les autres
pour pleurer , fe plaindre & gémir ? Tel fue
le fruit de mon experience : une plus grande in→
certitude.
ADDITION
Le 31. Octobre dernier , veille de la Touffaint,
le même bruit fe fit entendre au- deffus du Parc
d'Anfacq , entre 9. & 10. heures du ſoir ; il fut fi
épouventable , que non- feulement une partie du
Village l'entendit , mais que des moutons parquez
auprés delà en furent fi effrayez , qu'ils forcerent
le Parc & fe répandirent par la Campagne , enforte
que le Berger fut obligé d'aller chercher
quelques Payfans des environs pour l'aider à raſfembler
fon Troupeau. La femme de ce même
Berger couchée avec lui dans fa Cabane , en fut
fépouventée qu'elle en eft tombée malade.
II. Vol. Comme
DECEMBRE. 1730. 283 3°
Comme j'avois ordonné qu'on m'avertit en
cas que ce même bruit fe fit entendre de nouveau,
on ne manqua pas de courir chez moi dans le
moment , mais ma maiſon étant un peu éloignée
du Parc d'Anfacq , quelque diligence que je puffe
faire pour me rendre fur le lieu , j'y arrivai trop
tard & ne puis rien entendre. J'ay chargé une
perfonne de veiller pendant tout l'hyver jufqu'à
minuit , afin de pouvoir être averti s'il arrivoit
que ce bruit fe fit encore entendre.
y
Ayant communiqué à plufieurs de mes amis ce
ce qui s'eft paffé dans ma Paroiffe ; un d'entre'
eux, homme de Lettres, & ayant une Charge dans
la Justice de Clermont en Beauvoifis , me dit qu'il
avoit quinze ans que paffant la nuit par le Village
d'Anfacq pour s'en retourner à Clermont
étant feul à cheval à quelque diftance dudit Vilge
, il entendit un bruit fi épouventable en l'Air
& fi prés de lui , qu'il en fut tranfi de frayeur . Il
fe jetta à bas de fon cheval & fe mit à genoux
en prieres jufques à ce que ce bruit fut paffé ,
aprés quoi il continua fon chemin. Arrivé chez
lui il eut honte de fa peur & n'oſa jamais ſe
vanter de ce qui lui étoit arrivé , de peur qu'on
ne le prêt pour un vifionaire , mais que puifque
cette avanture devenoit fi fréquente , il avoüoit
fans peine ce qu'il lui étoit arrivé.
II. Vol. EPI34
MERCURE DE FRANCÉ
´s į į į į į į į į į ṛ § : § § § § § į § § § å å ののね
EPIGRAMME.
Pour répondre à M. L. G. A. D. L. O.S
qui fe plaignit par un Sonnet en Bouts-
Rimez , imprimé dans le premier Volume
du Mercure de Décembre 1729.
que Mile de Bellefont , eût donné fous
fon nom une Enigme fur les Bas , qu'il
dit lui appartenir . Par Mlle de Malcrais
de la Vigne.
LA Demoifelle de Vernon ,
Eut tort de donner fous fon nom ,
Votre Poëme Enigmatique ;
Mais avec le beau Sexe il faut filer plus doux ;
Vous fçavez que quand on fe pique,
Ce n'eft pas le moyen de réüffir chez nous .
Cependant radouciffez - vous.
Si votre Verve trop cauſtique ,
Pour un fi petit vol entre en fi grand couroux ,
Qu'eût elle fait , Monfieur , pour un Poëme
Epique.
-
AUTRE .
MAître Perrin , gauffeur habile ;
Demandoit à certain Bâtier ,
Combien pouvoit par an lui valoir fon Métier ,
Si les afnes, Monfieur, qui marchent dans la Ville,
II. Vol. Etoient
DECEMBRE . 1730. 2835
Etoient , lui dit- il , tous bâtez ,
J'aurois mainte & mainte pratique ,
Et les écus chez nous pleuvant de tous côtez
Je fermerois bien-tôt boutique..
Par la même.
EXTRA IT d'une Lettre écrite de
Laufanne , le premier Decembre 1739 .
par M. le Confeiller Seigneux , à M. de
Veze , au fujet d'une forme finguliere de
Jugement criminel , & fur un Phénoméne
arrivé dans le même Pais au mois d'Oc
tobre dernier,
J
E fortis hier d'une fonction oratoire .
que je craignois un peu , comme ne
m'étant pas trop familieres. Nous avons
dans cette ville une forme de Jugement
criminel , quand il s'agit d'un meurtre ,
qui fe fait avec beaucoup de folemnité au
milieu de la Place publique , on y forme
par des barrieres une Salle ou Parc , en
quarré long , à la tête de laquelle font
trois Tribunaux élevez de quelques pieds
chacun. A droite & à gauche font placez
quatre vingt-dix - neuf Juges ; au devant
eft la Secretairerie ; il y a auffi un Magif-
II. Vol.
trat
2836 MERCURE DE FRANCE
trat debout, nommé Gros Saultier , tenant
un bâton d'argent , le Herault de la Ville
& beaucoup d'Huiffiers. Les trois Magiftrats
qui occupent les Tribunaux ont chacun
un Sceptre à la main. Au milieu du
Parquet font les habits fanglans de l'homme
mort , expofé fur une planche & formant
triftement une figure de corps giffant.
Aux quatre coins de la Salle font des
barrieres qui s'ouvrent & fe ferment pardes
Huiffiers qui en font les Gardes , c'eſt
là cque fe tiennent trois Affifes , deux dans
un même jour , & la troifiéme quinze
jours après . Les proclamations étant faites ,
fr l'accufé paroît , il entre armé dans le
Parc ! fi c'eft un Gentilhomme , il l'eſt de
toutes pieces , fuivi de fes parens & amis
qui restent à la porte du Parc.
L'Accufé étant entré feul , on le défarme;
il plaide ou fait plaider fa cauſe. Un
Avocat nommé par le Confeil plaide
pour le Lieutenant Criminel. fi après les
Plaidoyers & le jugement rendu , l'Accufé
eft abfous, on le revêt de fes armes , & il
fe retire fuivi d'un nombreux cortege ;
s'il eft condamné on le conduit droit au
fupplice , à moins qu'il n'ait recours à la
clémence des Juges qui peuvent lui accorder
fa grace.
On appelle cette Cour , Cour impériale ,
II. Vol, parce
DECEMBRE. 1730. 2837:
parce que la forme & le droit nous en
viennent des Empereurs, Elle s'affemble
affez rarement , parce qu'elle n'exerce
cette jurifdiction folemnelle que dans les
cas d'homicide , commis feulement dans
la ville de Lauzane.
C'est là où j'ai été appellé , & où
j'ai fait deux fonctions , d'abord un Difcours
à l'ouverture du Tribunal , &
quinze jours après un long plaidoyer ,dans
lequel après avoir expofé les raifons préfomptives
de l'Accufe qui étoit abfent , &
la difpofition des loix , j'ai enfin conclu
felon les circonstances du fait , les regles
de la Juftice , & le devoir de mon miniftere
, cette fonction répond affez à celle
d'Avocat General dans les Parlemens de
France.
Cette formalité , au refte , eft très -ancienne
; car quoi qu'on puiffe en rappor
ter l'établiffement au tems de la race Carlovingienne
, je crois qu'on peut en remonter
la premiere origine à ces Campi
Maji , Madii on Martii , dont parle du
Gange , qu'on appella enfuite , Mallum
Placitum generale , Conventus generalis
dans lefquels fe rendoient les jugemens
militaires ufitez chez les anciens Francs .
Voici une autre nouvelle d'une espece
bein differente : Nous avons vû dans les
hauteurs des environs , un Phénoméne
II. Vol
2838 MERCURE DE FRANCE
très- fingulier. La nuit du 14. au 15. Octobre
dernier , il fe fit par un brouillard
épais une gelée fi forte , que tous les arbres
, feuilles & fruits fe couvrirent d'un
verglas épais. Enforte que dans un Chàteau
de ma connoiffance , à quatre lieuës
d'ici , on fervit aufruit des poires , pommes
,prunes & pêches qui étoient abfolument
enchaffées dans une maniere de boëte
de criſtal d'environ un pouce d'épaiffeur.
C'étoit chez Madame ... foeur du
Vicomte de Bardonenches. Un leger cordeau
de fil tendu dans le Jardin y devint
au rapport de cette Dame , prefque de
l'épaiffeur du bras , parce qu'à mesure
que le brouillard diftilloit , une bife
des plus piquantes faifoit congeler ce
cordon.
*
Le 15. tout demeura abfolument glacé,
ce qui eutfait un très beau fpectacle fans
le froid extrême & la perte de la recolte.
Le 15 & le 16. quantité d'arbres furchargés
de ce poids de glace , fe rompirent
en éclats.
Au reste , pendant deux nuits , on entendit
un bruit affreux dans les bois , &
on vit enfuite la terre par tout couverte.
de leurs débris. Il y a telle petite Com,
munauté qui a perdu plus de mille écus .
par cet accident , ce fut un dégar des
plus triftes. On m'écrit que du côté d'Or-
RII. Vol. .be
DECEMBRE . 1730. 2839
be , Ville très - ancienne, le bruit que l'on
entendoit dans la Campagne reffembloit
à celui d'une bataille des plus acharnées .
Je n'ai pas encore eu le tems de m'infor
mer exactement de toutes les autres circonftances
& particularités ; mais je le
ferai , & cela en vaut , je crois , la peine .
L'Hiftoire nous apprend mille chofes
moins curieufes.
XXXXXXXXXXXXXXX
RONDE A U.
Sans confequence , ofez tout , me dit-on ,
Quand par hafard approchant d'un Tendron ,
Je lui dérobe une faveur legere ;
A mes defirs perfonne n'eft contraire .
Veux -je un baiſer ? jamais on ne dit non ;
Bien loin delà ; la Belle fans façon ,
Quand je m'approche , avance le menton ,
Comme une foeur qu'embrafferoit fon frere ,
Sans confequence.
Doit-on traiter autrement un garçon
De quatorze ans ? Mais vous , belle Manon ,
Y penfez-vous , de faire la févere ?
On y pourroit foupçonner du miftere ,
Vous ne pouvez le prendre fur ce ton ;
Sans confequence.
De Bologne , Americain
H₂ Veh D NOUS
2840 MERCURE DE FRANCE
XX**X* X*XXXXXXXXXX
NOUS croyons faire plaifir au Public ,
de lui communiquer une Lettre qui nous
eft tombée entre les mains ; elle eft d'une
Religienfe de S. Cyr , qui rend compte à
une de fes amies , de la conduite qu'on a
tenue dans la petite Vérole , dont cette
Maifon a été affligée cette année. Nous
aurions fouhaité pouvoir la donner en
entier; mais comme il n'étoit pas poffible
de la renfermer dans un feul volume
nous nous fommes déterminez à retrancher
de cent trente articles qu'elle contenoit
ceux qui étoient les moins interreffans.
1
L eft aifé de voir par votre Lettre, MADAME ,
qu'on ne nous a point épargnées dans le Public
fur la conduite que nous avons tenue dans la
petite Verole , dont notre Maiſon vient d'être
accablée . On nous blafme fur tour de n'avoir pas
féparé du reste de la Maifon celles qui en ont été
attaquées. Des perfonnes refpectables , dites -vous,
nous accufent de témerité & d'imprudence . Le
reproche auroit fans doute été plus loin , fi l'on
avoit fçû le traitement, avant que d'être informé
du fuccès. Je vais vous rendre compte de ce qui
s'eft paffé chez nous dans cette occafion ; ce fera
un expofé fimple de notre conduite. Vous y
verrez la maniere dont on a penfé fur la crainte
de gagner la petite Vérole , les moyens dont on
s'eft fervi pour la détruire;les obſervations qu'on
a faites , l'ordre qu'on a gardé dans les Infirmeries,
l'état des malades & les remedes qu'on a em-
LI, Vol. ployez
DECEMBRE. 1730. 2841
ployez. L'efperance de nous juftifier du moins
auprès de vous , me fait entreprendre ce détail.
Les preuves que j'ai de votre amitié pour notre
Mailon & de votre indulgence pour moi , achevent
de m'y déterminer ; je ne vous écrirai que
des faits ils fuffiront pour les perfonnes équitables
& fenfées .
Au commencement de cette année nous eûmes
à S. Cyr quelques Fiévres malignes . Vers les
premiers jours de Février , il parut tout à coup
quatorze petites Véroles. L'effroi fe rendit auffitôt
dans la Maiſon. Madame la Superieure confulta
le Medecin , fur le parti qu'il y avoit à
prendre , en prefence des Infirmieres & de plufieurs
autres Religieufes. Le temps feul , nous
dit-il , ou la conftitution particuliere de l'air
difpofe infenfiblement les liqueurs à produire la
petite Vérole , bien- tôt l'experience vous convaincra
que cette caufe agit également fur toutes
les perfonnes qui habitent le même lieu ; que la
fréquentation des malades n'y a aucune part , &
qu'il est bien plus fage de ne point féparer les
malades , & de ne mettre aucune difference dans
leur fervice. Il ajouta pour celles qui étoient
chargées du foin des Infirmeries , que l'ancienne
méthode de donner des cordiaux & de procurer
une chaleur exceffive aux malades , étoit meurtriere
, que l'Emétique & la Saignée étoient prefles
feuls fecours fur lefquels il y eut à compter
, & que dans les cas preffans , il faudroit y
recourir , pour ainfi dire , fans nombre & fans
mefure.
que
Un pareil difcours , de tou autre , nous auroit
paru fort étrange ; mais comme il nous eft atta
ché depuis plufieurs années , & qu'il a notre confiance
, fa maniere de penfer fut notre regle. On
laila les malades enfemble , & tout le monde
II. Vol com- Dij
4
2842 MERCURE DE FRANCE
cominença à fe raffurer . Dix- huit ou vingt jours
s'écoulerent & la convalefcence de nos malades
s'avançoit , lorfqu'il nous furvint en moins de
trois jours près de cinquante petites Véroles.
L'inquiétude vint , mais nous trouvâmes dans
cet évenement même de quoi la diffiper. 1. Prefque
aucune des dernieres malades , n'avoit eu de
communication avec les précédentes . 2. Nos Infirmieres
auffi - bien que Madame la Superieure ,
qui partageoit leurs travaux , étoient préfervées
au milieu des malades , quoique la pluſpart n'euffent
point en la petite Vérole.Ces deux faits diffiperent
nos préventions , & l'expérience du paffé
nous rendit cette vérité plus fenfible.
L'ancien ufage de la Maiſon étoit de ſéparer
les malades au moindre foupçon de petite Vérole
; malgré cette précaution,nos Journaux font
foy , qu'il n'y avoit pas moins de malades , &
nous fçavons par le témoignage des anciennes ,
que celles qui avoient le plus d'attention à fuír le
danger , étoient ordinairement plutôt attaquées
que les autres,
Mais fi la chofe étoit alors égale pour le nombre
, lorfque la communication étoit févérement
interdite , il n'en étoit plus de même pour les inconveniens.
La féparation jettoit dans les malades
qu'on tranfportoit un effroy inévitable , qui
en augmentoit infiniment le danger. C'étoit au
commencement de l'éruption qu'on les changeoit
de lieu ; moment précieux pour agir &
qu'on ne retrouve quelquefois plus dans le cours
de la maladie ; ( on fçait à quel point la crainte
ralentit le mouvement du coeur , & qu'elle donne
occafion à l'air d'agir fur les liqueurs avec plus
de force ) d'ailleurs , au milieu de la confternation
, le fecours manque , peu de perfonnes ont
affez de courage pour folliciter les malades , &
LL. Vol.
nc
DECEMBRE. 1730. 2843
ne le font qu'en tremblant. La Maiſon regrette
encore les funeftes fuites & la féparation à laquelle
on étoit autrefois affervi.
Affranchies de bonne heure des préjugez ordinaires
, nous fûmes en état d'examiner les differens
momens qui fe paffoient dans nos petites
Véroles , & de les comparer aux veritez que
nous avions déja apperçues. Notre Medecin nous
les dévelopoit d'une maniere fi fimple, que nous
étions à portée de les entendre. Elles ont tant de
rapport entr'elles qu'elles forment une démonftration
pour les perfonnes qui aiment à voir
clair.
;
Pendant trois mois que la petite Vérole a regné
à S.Cyr , nous n'avons pas eu une feule maladie
d'une autre nature les fantés délicates
étoient plus fermes , quelques perfonnes qui
avoient eu déja la petite Vérole , font venues à
l'Infirmerie avec des maux de Coeur , des douleurs
de reins , une pefanteur de Tête & la Fiévre
vive ; tous ces accidens ont ordinairement
diminué du 3 au 4, & le refte de la maladie a été
fi conforme à la petite Vérole, que quoi qu'il n'y
ait point eu d'éruption , nous n'avons pas douté
que ce ne fut une vraye Fiévre de petite Vérole.
On ne pouvoit les diftinguer au commencement
que parce que la malade avoit eu déja la petite
Vérole ; car il eft prefque fans exemple que quelqu'une
dans la maiſon l'ait euë veritablement
deux fois .
Toutes nos malades en general ont rendu une
Bile extremement verte dans les petites Véroles
dans les Fiévres du même caractere , dans les
convalefcences , dans les perfonnes qui ont été
purgées par précaution ou après des chutes ; nous
avons toujours remarqué le même caractere
d'humeur. Dès que le temps changeoit, nous re-
11. Vol.
Diij mar2844
MERCURE DE FRANCÈ
marquions du changement dans nos petites Véroles
, & lorfque le vent tournoit bruſquement
au Nord ,
ordinairement les accidens reparoiffoient
ou devenoient plus preffans.
De plus de vingt perfonnes qui ont rempli les
diverfes fonctions de l'Infirmerie , dont plus de
la moitié n'avoient pas eu la petite Vérole , une
feule en a été attaquée , encore par un effet viſible
de la frayeur ; car ce fut à la fuite d'un Difcours,
fur la crainte de gagner cette maladie , dont elle
fut fi vivement faifie, qu'elle tomba ſur le champ
dans des
friffonnemens qui ne cefferent que par
l'éruption.
Raffemblons ces faits & convenons du vrai,
Puifqu'il n'y a eu aucun autre genre de maladie
à S. Cyr pendant plus de trois mois que la
petite Vérole y a régné ; puifque toutes les
fonnes de la Maiſon qui ont été purgées dans
perquelque
circonftance que ce fut , ont rendu une
bile
extrémement verte; puifque les
changemens
de temps, en ont régulierement produit dans nos
malades ,, que d'ailleurs les perfonnes écartées des
malades , en ont été par proportion moins ga-
Tanties que celles qui en approchoient, & ces faits
conftament obfervez dans une
Communauté de
près de quatre cent perfonnes ; où l'on a compté
130 malades ; il faut
neceffairement reconnoître
une caufe generale dans l'air ,
de cette maladie , & avouer que la
fréquentation , pour feul principe
des malades n'y a aucune part.
Les differentes époques de petite Vérole qu'a
eues notre Maiſon , font voir qu'elle attaque plus
de perfonnes àproportion qu'il s'eft écoulé plus de
temps fans qu'elle y ait paru. En 1715. nous en
eûmes près de cent ; il n'y avoit alors pas plus de
quatre ans que nous en étions exemtes. Depuis il
n'en a pas paru à S. Cyr , & la Maiſon s'eſt preſ-
11. Vel.
que
DECEMBRE 1730. 2845
que entierement renouvellée; ainfi il n'eft pas furprenant
qu'en dernier lieu , le nombre de nos
malades ait été plus confidérable .
Nous remarquâmes dès les premiers temps que
celles qui n'avoient pas été faignées & purgées
dans le commencement de leur maladie , avoient
une fupuration & une convalefcence plus difficiles.
Dans la fuite on a d'abord employé ces fetours
, pour peu que la Fiévre fut forte , & on
prenoit foin de faire les faignées fort grandes
pour ne pas effrayer le nombre ; très- fouvent des
petites Véroles qui s'annonçoient par les accidens
les plus effrayans , prenoient un caractere heureux
après trois ou quatre faignées du pied , brufquement
faites , & d'amples évacuations , procurées
par l'Emétique .
Je viens à l'état de nos malades , je ne m'arreterai
point fur les accidens ordinaires , ni fur la
figure des boutons à laquelle notre Médecin ne
faifoit aucune attention à moins qu'ils n'euffent
difparu. Vous verrez par les partis qu'il a pris
dans les cas particuliers , que le feul dégré de la
Fiévre , comparé avec l'état du cerveau , a toujours
déterminé fa conduite. Pour éviter la confufion
& n'être point obligée de citer l'âge de
chaque Demoiselle , je fuivrai l'ordre des Claffes.
Comme il fera neceffaire de parler de leur temperamment
, j'ai cru devoir me difpenfer de vous
marquer leurs noms. Les Demoifelles Noires font
dans leur vingtiéme année ; les Bleues ont depuis
dix-fept jufqu'à vingt ans ; les Jaunes depuis quatorze
jufqu'à dix fept ; les Vertes , depuis onze
jufqu'à quatorze , les Rouges , depuis fept jufqu'à
onze.
Demoiselles NOIRES . 19. Infirme , quoique replette
, & fe plaignant d'une douleur habituelle
au côté droit , eut une Fiévre affez forte , des
II. Vol. D iiij maux
2846 MERCURE DE FRANCE
maux de reins & une pefanteur de tête . Elle fut
faignée du pied le 1 & le 2 jour , & le 3 abondamment
purgée avec l'Emétique. Immédiatement
après la petite Vérole parut en petite quantité.
Dans la fupuration , un mal de gorge
étouffement confiderable donnerent de l'inquiétude.
Une troifiéme faignée du pied la diffipa.
& un
2º. D'une forte conftitution , eût la Fiévre
très-vive,un grand accablement, la poitrine ferrée
& un mal de tête des plus violens. En quatre jours
elle fut faignée huit fois du pied. Le cinquiéme
on donna l'Emétique en lavage , qu'on continua
plufieurs jours. Les accidens diminuerent par ces
évacuations ; mais la convalefcence avoit de la
peine à fe montrer. Vers le 20. à la fuite d'un
mouvement de Fiévre plus fort & d'une augmentation
de mal de tête , la petite Vérole fe declara.
Comme elle ne parut pas confidérable par la
quantité,& que les accidens fe calmerent , on ne
fit rien jufqu'au temps de la fupuration , qu'on
fut obligé de purger la malade,& de foûtenir l'évacuation
à caufe d'une bouffifure confidérable
& que la tête redevenoit pefante.
30. Tres-infirme depuis long-temps, & épuisée
par beaucoup de maladies , eut la Fiévre & une
pefanteur de tête confidérable. On la faigna du
pied le 1 & le 2 jour. Le 3 il furvint un dévoiement
fereux ; on purgea la malade avec deux
grains de Tartre émétique , qu'on réitera le lenlemain.
L'éruption fe fit , & le refte de la maladie
fe paffa fans accidens , quoique la petite Vérole
fut fort abondante & prefentât un mauvais
aspect.
4°. D'une bonne fanté , tomba dans un accablement
profond , la Fiévre étoit forte & la tête
prife ; on lui tira d'abord fix paletes de fang du
pied. La faignée fut réiterée le ſoir , dans la nuit
II. Vel. &
DECEMBRE. 1730. 2847
& le lendemain , le troifiéme jour il furvint une
perte abondante ; la petite Vérole fortit en médiocre
quantité , la Fiévre & les accidens furent
plus moderés , le 2 , le 3 & le 4 de l'éruption.
Les , la perte ceffa, le tranfport devint plus violent
& fut accompagné de convulfions . În tenta
quatre grains de Tartre émétique en lavage ,
qu'on réitera fans fuccez. La Fievre ayant redoublé
du 5 au 6 , on réitera la faignée du pied ; il falut
encore y revenir le lendemain une fixiéme &
feptiéme fois, enfuite les boiffons émétiſées qu'on
fut obligé de changer jufqu'à en confommer
plus de trente grains en 24 heures , & d'y joindre
les Ptifannes laxatives. Il fallut continuer les
évacuations jufqu'au 18 de l'éruption , à cauſe de
la pefanteur de tête qui fe renouvellois ; des Symcopes
dans le temps des convulfions firent recourir
au Lilium deux fois . Il eft à remarquer que
fur la fin , lorfque le tranfport ceffoit , la vue
reftoit éteinte, & que la malade fe plaignoit d'une
péfanteur , & d'un froid infuportable à la tête
enfin tous les accidens difparurent & la malade
revint en convalefcence.
;
5º. D'un temperamment robufte , fa maladie
commença par une Fiévre forte , avec des redoublemens
fréquens , des maux de reins & une
grande pefanteur de tête ; on la faigna du pied.
La nuit il y eu du tranſport ; on réitera la faignée
la même nuit , & le lendemain ; le 3 il y eut
du relâche dans la Fiévre ; on jetta fix grains de
Tartre émétique fur la boiffon ; l'évacuation fut
ample , la petite Vérole fortit confluante, les accidens
& la Fiévre diminuerent, la liberté du ventre
fut foûtenue par une boiffon émétiſée. Du 4
aus de l'éruption , la Fiévre devint plus forte ,
la gorge & la tête enflerent fi prodigieufement ,
qu'il fallut faire deux faignées dupied ; on char-
>
II. Vol: D Y gea
2848 MERCURE DE FRANCE
gea enfuite davantage les boiffons émétifées, l'é
vacuation diffipa les accidens. La nuit du 10 au
1 la tête devint plus pefante & la gorge plus
ferrée. On revint aux évacuations , qu'on continua
jufqu'à la convaleſcence.
6º. Délicate , fentit d'abord du mal aux reins
& à la tête, avec peu de Fiévre , on la faigna du
pied. La nuit fuivante la fiévre devint forte , le
poux paru embarraffé ; on réitera la faignée du
pied deux fois , la fiévre & le mal de tête ayant
diminué , le 3 on la purgea avec l'émétique
abondamment ; à l'entrée du 4 la petite Vérole
fortit confluante , la fiévre diminua confiderablement.
Du 3 au 4 de l'éruption , la gorge fut
tres douloureufe , la tête enfla exceffivement , il
furvint une forte hémoragie , la tête étoit embaraffée
, on revint à la faignée du pied , qu'ilfailut
réiterer jufqu'à la fixième fois , alors l'hémoragie
ceffa , & les autres accidens diminuerent ; on
chargea les boiffons d'émétique , & on les continua
jufqu'au 14 de l'éruption , que tous les
accidens difparurent.
I
7. D'une affez bonne fanté , eut des maux de
reins & de tête , & la fiévre affez forte ; on la
faigna du pied le 1 & le a jour , le 3 elle fut purgée
avec l'émétique en lavage . La petite Vérole
fortit le 4, en médiocre quantité , la fiévre & les
accidens tomberent dans la fupuration, la tête devint
fort lourde , la fiévre étoit forte , on réitera
la faignée du pied jufqu'à la quatrième fois , on
y joignit les boiffons émétifées , & tous les accidens
cefferent.
Demoiselles BLEUES. 8. Languiffantes. de pâles
couleurs depuis long - temps , avoit effuie une
diffen rie extrême , pour laquelle on l'avoit faignée
8 fois, dont elle étoit à peine rétablie, tomba
dans un profond accablement , avec des élan
11. Vola cemen
DECEMBRE. 1730. 2849
cemens à la tête & une fiévre fi vive , qu'il fallut la
faigner 3 fois du pied le mêmejour. Le lendemain.
le poux s'étant un peu relâché, on tenta un lavage
de Tartre émétique; les élancemens de tête qui augmentoient,
obligerent de l'interrompre. A la fin
du 3 la petiteVérole fortit confluante,la fiévre& les .
accidens diminuerent fort peu. Le 3 de l'éruption
la petite Vérole n'avoit prefque point fait de progrès
, on revint à la faignée du pied , les boiffons
émétifées pafferent. La petite Vérole fit du progrès
& il y cut plus de modération dans les accidens
jufques au 6. La nuit fuivante la fiévre devint
plus forte , les élancemens à la tête furent
extrêmes , on la refaigna 2 fois du pied & les
boiffons émétifées furent continuées plufieurs
jours de fuite. La convalefcence ne fe montra que
yers le 17. Il y eut plufieurs Sincopes dans le
cours de la maladie qui firent recourir au Lilium.
9. Sujette à de fréquents éréfipelles à la tête
fentit tout à coup un violent mal de tête,il parut
une difpofition éréfipélateufe au vifage. La fiévre
devint quarte , la malade fut faignée du pied les
a premiers jours ; le 3 il y eut du relâche , on
lui donna 4 grains de Tartre émétique en lavage,
l'évacuation fut abondante & produifit un calme
de trois jours ; la fiévre fe ralluma, le mal de tête
& les élancemens furent extrêmes ; on revint à la
faignée du pied 2 fois le même jour . Le lendemain
la petite Vérole fe déclara en médiocre
quantité , avec une difpofition éréfipélateuſe ; la
fiévre & les accidens perfifterent. Comme il n'y
avoit point de diminution le 3. de l'éruption , on
la faigna , on jetta quelques grains de Tartre
émétique fur les boiffons ; malgré ce fecours ,
aídé des lavemens , les élancemens à la tête & la
fiévre augmenterent à un point , qu'il fallut la
11. Vol. D vj refai
2850 MERCURE DE FRANCE
refaigner dans le temps de la fupuration une fixiéme
& feptiéme fois du pied , & entretenir les
boiffons émétifées jufqu'au is de l'éruption que
l'état de la malade fut affuré.
10. D'un temperament robufte , avec de l'embonpoint
, eut une fiévre forte , de grands maux
de reins & la tête extrêmement pefante ; on la
faigna 2 fois du pied le 1 jour ; dès le fecond la
petite Vérole parut confluante ; la fiévre & les
autres accidens ne diminuerent prefque point;les
boutons ne faifoient aucun progrès . On réitera
la faignée du pied le 1 & le 2 jour de l'éruptions
il y eut quelque relâche. Les boiffons furent égui
fées par le Tartre émétique , mais une perte
abondante qui furvint , obligea de le fufpendre.
Le même état continua jufqu'au temps de la fapuration
que la fiévre devint plus vive , avec
des feux à la tête & un gouflement prodigieux .
On réitera deux fois la faignée du pied; on chargea
les boiffons de Tartre émétique , quoique la
perte continua. Les premieres évacuations firent
ceffer la perte & modererent les autres accidens ;
il fallut infifter fur la liberté du ventre pour
combattre la pefanteur de tête , juſqu'au 16 de
l'éruption que la convalefcence parut.
11. Peu forte , tomba dans un grand affou
piffement ; la fiévre & l'accablement étoient confiderables.
Les deux premiers jours elle fut faignée
du pied 3 fois. Le 3 , il y eut quelque degré
de moderation dans la fievre ; on tenta l'émetique
en lavage ; mais comme les accidens
augmentoient , il fallut l'interrompre & revenir
à la faignée du pied . La petite Verole fortit le
4 , la fievre fut plus moderée. Le 4 de l'éruption
on tenta de nouveau les boiffons émétifées ; la
fievre devint plus forte ; on les fufpendit ; on fit
une cinquiéme faignée du pied à l'entrée de la
II. Vola ſup
DECEMBRE. 1730. 2851
.
fupuration ; alors les boiffons émétifées pafferent
; on les continua juſqu'à la fin de la maladie,
parce que la tête redevenoit pefante dès que le
ventre ceffoit d'aller.
12. D'une bonne fanté , fut prise d'une fievre
qui augmentoit par redoublement , accompagnée
de maux de reins & d'une violente douleur de
tête. Les 2 premiers jours on la faigna 3 fois du
pied. Le 3 & le 4 on effaya le Tartre émetique
en lavage , fans prefque aucun fruit ; les , la petite
Verole fortit très- abondante , & en mêmetemps
il furvint une pcrte ; la fievre ſe ſoutint .
Le z de l'éruption , la tête fut priſe ; on revint à
la faignée du pied . Les accidens ayant augmenté
à l'entrée de la fuppuration , on fir une cinquiéme
faignée du pied , & on jetta, malgré la perte,
quelques grains de Tartre émetique fur la boiffon.
Ôn continua les évacuations , jufqu'à ce que tous
les accidens euffent entierement diſparu.
2
13. D'un bon temperament , eut une fievre &
un mal de reins , des élancemens à la tête violens
qui obligerent de la faigner 3 fois du pied les 2
premiers jours. Le 3 on chargea la boiffon de
Tartre émetique ; la petite Verole fortit pendant
l'évacuation & fut affez abondante , mais la
fievre perfifta . Le 3 de l'éruption elle devint plus
forte , la tête s'embaraffa , on recourut à la faignée
du pied, & on la réitera pour la cinquième
fois dans la fupuration , parce que l'embaras de
la tête fubfiftoit , & qu'il y avoit une tenfion generale.
Les boiffons émetifées pafferent avec le
fecours des lavemens enfuite , & il fallut foutenir
les évacuations jufqu'au 14. de l'éruption .
14. D'une forte fanté , eut une fievre & un
mal de tête fort vifs ; les 2 premiers jours , elle
fut faignée 3 fois du pied ; le 3 purgée avec l'émetique
, immédiatement après la petite Vérole
II. Vol
fortit
2852 MERCURE DE FRANCE
fortit abondamment; il reftoit encore de la fieyre.
Le 3 de l'éruption , la tête devint fort pefante ;
on revint à la faignée du pied & on éguifa les
boiffons de Tartre émetique , jufqu'à la conva¬
lefcence , pour empêcher que la tête ne s'embaraffât.
Le 4,

15.Bien conftituée, eut d'abord une fievre tres- violente
avec des élancemens à la tête & un faigne.
ment de nez confiderable. On la faigna 3 fois du
pied la même nuit . Il parut le lendemain quelque
modération dans la fievre & dans les accidens.On
tenta l'émetique en lavage , qu'on continua le 3 .
la petite Verole fortit en médiocre quan→
tité,mais elle fut accompagnée d'une oppreffion &
d'un fond d'affoupiffement ; la fievre étoit affez
forte ; on revint à la faignée & à l'émetique.L'abondance
des évacuations procura de la modération
dans les accidens jufqu'au 5. La nuit du 5 au
6 , les boutons rentrerent , & à leur place parut
un Eréfipelle univerfel. La fievre & l'affoupiffement
devinrent plus forts ; la tête ſe prit , le poux
étoit embaraffé , ou réitera la faignée du pied 2
fois à peu de diftance ; quelques heures après on
revint à l'émetique en lavage , on foutint les évacuations
par des Prifannes laxatives. Dans le tems
des évacuations il furvint une Syncope fi forte ,
qu'on fut obligé de recourir au Lilium .La petite
Verole reprit fon cours , les accidens fe modererent
, on continua les évacuations juſqu'au 14 de
P'éruption que tous les accidens furent calmez.
16. Délicate , eut une fievre affez forte , un faignement
de nez , & la tête extrêmement lourde .
Le 1 jour elle fut faignée 2 fois du pied ; la petite
Verole fortit le 2 abondante, entremêlée de marques
pourprées. Le 3 , on employa les boiffons
émetifées , l'évacuation modera les accidens. La
fievre fe foutenoit , elle augmenta vivement du s
IL, Vol.
au •
9
DECEMBRE. 1730. 2853
au 6 de l'éruption ; la tête fe prit , on réitera la
faignée du pied la nuit & le lendemain pour la
cinquième fois. Enfuite on continua les boiffons
émetifées , qu'il fallut foutenir jufqu'au 14.
17. Très-forte , tomba dans un accablement
profond , la tête prife , des convulfions & des
fyncopes ; la fievre étoit forte , le poux embaraffé
.Ces accidens augmenterent à tel point qu'on
fut obligé de faigner la malade du pied , f fois
en moins de 30 heures ; enfuite l'émétique en lavage
, qu'il fallut aider par les lavemens & des
ptifannes laxatives; on infifta fur l'émétique for
tement ; à la fin le ventre ſe déboucha , l'évacuation
fut foutenuë , & la nuit du 3 au 4 la petite
Verole fortit abondamment , les accidens fe calmerent
, & la maladie finit fans autre fecours
qu'une boiſſon émetifée , aux aproches de la fupuration
, parce que la tête redevenoir pefante.
Damoifelles JAUNES. 18. D'une bonne fanté..
Sa fievre marqua d'abord entiere ; au troifiéme
accès elle devint continuë ; la douleur de tête étant
devenue forte , on la faigna du pied ; il fallut réiterer
la nuit & le lendemain. On purgea la ma→
lade avec l'émetique , l'évacuation fut abondante
, & fuivie d'un relâchement prefque entier.
Trois jours fe pafferent dans le même calme. La
petite Verole parut le quatriéme en médiocre
quantité & fans accidens , le 4 de l'éruption les
boutons difparurent, la fievre fe railuma , la tête
fut prife avec de violents étouffemens ; on revint
à la faignée du pied , qu'on repeta 3 fois à peu de
diftance. Toute l'habitude du corps étoit devenue:
érefipelateufe. Le 6 , la malade fouffroit exceffivement
, il fallut faire une e faignée du pied..
Quelques heures après on chargea la boiffon de
Tartre émetique , la tenfion érefipelateufe dimi
nua ; les boutons reprirent corps , on foutint les
Io. Vola
éva
2854 MERCURE DE FRANCE
évacuations jufqu'au 17 de l'éruption pour def
fendre la tête qui fe reprenoit de tems en tems.
19. La poitrine délicate , parut fort afſoupie
avec une fievre ardente ; on la faigna 2 fois du
pied le même jour ; dès le foir il parut quelquesboutons
, fans que les accidens euffent diminués ;
la peau devint pourprée ; on revint à la faignée
du pied le 2 , & le 3 la petite Verole ne faifoit
aucun progrès , & les accidens avoient fort peu
relâché. Les de l'éruption, la fievre augmenta, on
fit une se faignée ; il furvint un vomiffement
que l'on foutint par une boiffon émetifée. Les
accidens fe calmerent , on continua la même
boiffon le refte de la maladie.
20. D'une grande délicateffe , fut prise d'un
mal de tête & d'une fievre fi forte , qu'on fut obligé
de la faigner cinq fois du pied les deux premiers
jours. Le 3. il y eut de la modération
on mit trois grains de tartre fur la boiſſon. A
la fuite de l'évacuation , la petite Verole fortit
& tous les accidens tomberent .
21. D'une forte fanté , eut la fievre , des maux
de coeur & une pefanteur de tête confiderable.
Le premier jour on la faigna deux fois du pied.
Dès le fecond la petite Verole fortit très- abondante.
La pefanteur de tête continuoit : on chargea
les boiffons de tartre émetique qu'il fallut
continuer toute la maladie , & les foutenir par
des ptifanes laxatives ; car dès que le ventre ceffoit
de couler , la pefanteur de tête augmentoit.
L'état de la malade ne fut certain que vers le 14.
de l'éruption .
22. D'un temperament délicat , avoit une fievre
vive & des redoublemens fréquens. La tête étoit
menacée ; on la faigna du pied quatre fois les
deux premiers jours. Le la 3 on purgea avec
l'émetique en lavage ; l'éruption fe fit. L'embardda
Vol
ras
DECEMBRE. 1730. 2855
ras de la tête continuoit encore le 3. de l'éruption
; on fit une cinquiéme faignée du pied ; l'émetique
en lavage fut repeté chaque jour juſqu'
la fin de la maladie .
que
23. Foible , fe plaignoit d'un grand mal de
tête , quoique la fievre ne fut pas forte. Une faignée
du pied calma cette douleur pendant deux
jours. Le 3. elle eut un tranfport & un étouffement
violent fans la fievre fut beaucoup augmentée
; on fit une feconde & une troifiéme faignée
du pied , & enfuite l'émetique en lavage.
La petite Verole fe déclara à la fin de l'évacuation
; mais fon progrès fut lent , la tête demeura
embaraffée , on réitera chaque jour l'émetique
en lavage. Le 6. de l'éruption le poux parut embaraffé
, le tranfport étoit plus violent , & la tête
avoit prodigieufement enflé ; on fit une cinquié
me faignée du pied qui produifit un relâchement)
fenfible. On infifta fur les évacuations , & tous
les accidens fe calmerent.
24. Bien conftituée , eut des élancemens à la
tête , & une fievre vive qui augmentoit à differentes
heures . Les deux premiers jours elle fut
faignée du pied trois fois. Le 3. il furvint un af
foupiffement , un tranfport & des étouffemens
fréquents ; on fut obligé de réiterer la faignée'
du pied deux fois ; il falut y revenir le lendemain
pour la fixième fois , enfuite l'émetique en lavage
; comme elle avoit de la peine à pouffer , on
eut recours aux ptifannes laxatives. Après deux
jours d'évacution la petite Verole fortit , & tous
les accidens tomberent.
25. D'une fanté foible , eut la fievre & mal à
la tête pendant près de huit jours fans fe plaindre
; alors la fievre & le mal de tête ayant augmenté
, elle fut faignée trois fois du pied en deux
jours , & purgée enfuite avec l'émétique en la-
II. Vol. vage!
2856 MERCURE DE FRANCE
vage. Le furlendemain la petite Verole fe déclara
; commè les accidens réfiftoient encore , on
continua les boiffons émetifées jufqu'à la fin de
la maladie .
26. D'une bonne conftitution ,fut prise d'un vo .
miffement & d'un accablement confiderable . La
fievre étoit forte , & marquoit par redoublemens .
Elle fut faignée trois fois du pied les deux premiers
jours ; le 3 purgée avec l'émetique en
lavage , la petite Verole fortit abondamment , les
accidens fe modererent. A l'entrée de la fuppuration
, la malade tomba dans une fincope qui
fut fuivie de mouvemens convulfifs & d'une
falivation abondante. Comme la fievre n'avait
pas augmenté à proportion des accidens , on fe
contenta de revenir au tartre émetique dont il
fallut aider l'effet par les ptifanes laxatives. Dès
que les évacuations diminuoient , il furvenoit des
étouffemens , ce qui obligea de les continuer juf
qu'au quatorze de l'éruption.
1. A
27. D'une bonne fanté , eut une fievre forte ,
accompagnée d'un point fixe dans les reins ,
d'un faignement de nez & d'une douleur de tête
infuportabie. On la faigna quatre fois du pied los
deux premiers jours.. Le 3. il y eut de la modération
, le 4. elle fut purgée avec l'émetique en
lavage ; la petite Verole fortit confluante , les
accidens diminuerent confiderablement ; on favorifa
la liberté du ventre par quelques grains
de tartre émetique fur la boiffon jufqu'à la fin
de la maladie , qui fe termina fans aucun autre
accident.
"
28. Sujette aux maux d'eftomach eut les mêmes
douleurs. Comme elles augmentoient , qu'il
y avoit de la fievre , accompagnée de mal de tête ,
on la faigna du pied le 3 , fes & le 6. Le 7. elle
tomba dans la tranfport , le poux étoit concen-
II. Vol. tré ;
DECEMBRE. 1730. 2857
éré ; on lui donna un lavage de tartre émetique ,
l'évacuation ne fut pas abondante , la fievre devint
plus forte , & l'embarras de la tête continuoit
. On fit deux faignées du pied à peu de diftance
, & on revint à l'émetique qui paffa plus
heureufement. La petite Verole fortit , & ne fut
fuivie d'aucun accident .
: on
D'une forte ſanté , tomba dans un abbatement
extrême , quoique la fievre ne fut pas forte :
la faigna du pied. Le 2. la fievre augmenta , la
faignée fut réiterée. La nuit fuivante la malade
cut de fortes convulfions & une fincope qui fut
portée à l'excès . Il fallut recourir au Lilium
& le repéter au delà des dofes ordinaires : le
poux revint : on fit une troifiéme faignée du pied,
& immédiatement après on donna l'émetique
l'évacuation fut abondante. La petite Verole fortit
en grande quantité , & les accidens commencerent
à fe calmer. On continua les boiffons émetifées
jufqu'à la fin de la maladie , à cauſe que
la tête n'étoit pas dans fon caractere ordinaire.
30. Infirme , eut une fievre vive , accompagnée
d'élancemens à la tête , le poux étoit embaraffé :
on fit trois faignées du pied les deux premiers
jours. La nuit du 2 au 3. la tête fut menacée ,
on revint à la faignée du pied , qui produifit un
relâchement dans la fievre ; l'émetique en lavage
fut employé le lendemain. Après l'évacuation
la petite Verole fortit en médiocre quantité , les
accidens diminuerent ; mais comme il reftoit un
fond de fievre , & que la tête laiffoit quelque inquiétude
on continua les boiffons émetifées
jufqu'à la fin de la maladie.
>
31. Sujette à une toux habituelle , & crachant
quelquefois du fang , fut prife d'une fievre trèsvive
fuivie de fréquents redoublemens. Les
deux premiers jours on fit trois faignées du
II. Vel. pied..
2858 MERCURE DE FRANCË
pied. Le 3. la tête fe prit : on réïtera la faignée
du pied qui produifit quelque modération dans
la fievre. La nuit du 4. la malade tomba dans
un affoupiffement profond ; le poux étoit emba
raffé , on tenta l'émetique inutilement , il fallut
revenir à une cinquiéme faignée du pied . Quelques
heures après la malade eut de fortes convulfions
, accompagnées de fréquentes fyncopes ,
on revint à l'émetique qu'on cut bien de la peins
à faire avaler. Comme il n'agiffoit point , on
força la dofe , le vomiffement débaraffa la tête.
Cependant fur le foir les convulfions redoublerent
, le hoquet fut fréquent & les extrémités
devinrent froides. On infifta fur l'émerique qui
à la fin produifit une abondante évacuation , les
accidens fe calmerent , la petite Verole fortit
très abondante , & finit fans donner d'autre inquiétude.
32. D'une fanté languiffante , cut une fievre
qui varioit à toute heure , accompagnée d'un
grand mal de tête ; elle fut faignée du pied , &
purgée le lendemain avec l'émetique en lavage.
Le foir la malade entra dans un calme parfait ;
les . la fiévre fe ralluma & fut accompagnée
d'un rire continuel & forcé ; on la faigna deux
fois du pied le même jour. Le lendemain la petite
Verole fortit affez abondante , cependant la
fievre & l'embarras de la tête continuerent. Le
3. de l'éruption , la malade tomba dans un aſſoupiffement
profond ; le poux étoit envelopé , on
fit une quatriéme faignée du pied , & enfuite
l'émetique en lavage qu'on réitera le lendemain ,
alors le poux fe dévelopa ; la petite Verole fit du
progrès ; la tête demeura pourtant embaraffée
on continua les boiflons émetifées jufques dans
le fort de la fupuration . Comme la tête étoit un
peu plus libre , & que la fievre avoit augmenté ,
II. Vol. 01 .
DECEMBRE. 1730. 2859
on en fufpendit l'uſage . 24. heures après la petite
Verole rentra: le tranfport accompagné de convulfrons
fut violent, la gorge prodigieufement enflée :
on revint à la faignée du pied , & immédiatement
après l'émerique , l'évacuation fut abondante ; la
petite Verole reprit cours , les accidens fe calmerent
; mais on ne difcontinua plus l'ufage de
la boiffon émetifée , aidée par les lavemens juſqu'au
16. de l'éruption qui termina la maladie.
Demoiselles VERTES . 33. D'une mauvaiſe
fanté , tomba dans un grand accablement , la
févre étoit vive ; elle fut faignée trois fois du
pied le même jour , la petite Verole fortit abondamment.
Il reftoit un fond de fievre à la malade
qui ayant mal à la gorge depuis long- tems
ne put rien avaler le 2 & le 3. de l'éruption . Le
4. on réitera la faignée , & les boiffons émetifées
pafferent enfuite , il falut les continuer le refte
de la maladie à caufe que la gorge & la tête
étoient menacées .
34 D'une fanté foible , cut des maux de reins ,
de violens élancemens à la tête & une fievre quartes
on la faigna deux fois du pied à une heure
de diſtance , on réitera la faignée le lendemain.
Le 3. il y eut du mieux , on employa le tartre
émetique en lavage , la perite Verole fortit trés
abondante , il y eut une remiffion prefque entiere
. A l'entrée de la fupuration la tête devint
fort pefante , la malade y fentoit de grands feux,
la fievre n'étant point forte , on fe contenta
d'employer les boiffons émetifées pendant la fupuration.
35. D'un temperament foible , eut d'abord peu
de fievre. Le 3. la fievre s'alluma avec un violent
tranfport , on la faigna trois fois du pied à
peu de distance , la fievre fe modera , on mit
trois grains de tartre émetique fur la boiffon.
14. Vol.
Après
2860 MERCURE DE FRANCE
Après l'évacuation la petite Verole fortit confluante
, la tête refta embaraffée , & la fievre ,
quoique moderée , perfiftoit ; on réitera la faignée
du pied le 3. de l'éruption , & on reprit
l'ufage des boiffons émetifées , qu'on continua
jufqu'au 14. de l'éruption que la tête fut totalement
debarraffée.
36. D'une forte fanté , eut de grands maux de
reins , un faignement de nez , la fievre étoit vive,
& fuivie de redoublemens . Les deux premiers
jours on la faigna du pied trois fois , à l'entrée
du 4. on reitera la faignée , la petite Verole ne
fit que fe montrer pendant deux jours , & dif-
La malade tomba dans un accablement
parut.
& un affoupiffement profond , le poux étoit petit ;
on jetta quatre grains de tartre émetique fur la
boiffon , l'évacuation fut abondante. La petite
Verole fit des progrès , & les accidens tomberent,
la fupuration fut longue , mais elle n'exigea aucun
fecours.
37. Délicate , avoit de la fievre depuis plufieurs
jours , & mal à la tête ; elle fut faignée & purgée.
Il y eut du mieux pendant huit jours , enfuite
elle tomba dans une fincope forte , la tête.
fe prit , la fievre étoit vive ; on la faigna deux
fois du pied à une heure de diftance. Quelque
tems après il y eut du relâche dans la fievre , on
mit quatre grains de tartre dans la boiffon , on
infifta fur le même remede . Le lendemain l'évacuation
fut forte , les accidens diminuerent , la
petite Verole fortit abondament , on continua
les évacuations juſqu'à la fin de la maladie.
38. D'une délicateffe extrême , eut un grand
accablement , la tête embarraffée , & une fievre
vive qui augmentoit par redoublemens ; le premier
jour on lui fit 2. faignées du pied ; le 2. on
réitera ; le 3. il y avoit quelque relâche , on
11. Vol "
mit
DECEMBRE. 1730. 2.86-1
mit deux grains de Tartre émetique fur la boiffon
, la petite Verole fortit confluante , la fievre &
l'embarras de tête diminuerent confiderablement,
il reftoit encore une grande pefanteur qui détermina
à continuer la boiffon émetiſée pendant le
refte de la maladie , qui par ce moyen finit heureufement.
39. D'un bon tempérament , eut un grand accablement
, un point fixe dans les reins ; la fievre
étoit forte & le poux embarraffé , des redoublemens
fréquents , le tranfport s'y joignit ; le premier
jour on lafaigna deux fois du pied , on réi
tira la faignée la nuit , le lendemain la fievre étoit
relâchée , on mit 4. grains de Tartre émetique
fur la boiffon ; la petite Verole fortit confluante,
du 3 au 4 les accidens tomberent prefque entierement;
le 4 de l'éruption la petite Verole rentra,
la tête fe prit , il y avoit de l'embarras dans le
poux & des étouffemens frequens ; on fit une 4° .
& se. faignée du pied , & enfuite l'émetique en
lavage fur lequel on infifta ; l'évacuation fur
abondante , la petite Verole reprit corps , les ac
cidens diminuerent , on continua la boiffon émetifée
jufqu'au 14. de l'éruption qu'on foutenoit
les lavemens : dès le ventre ceffoit d'aller
l'embarras de la tête & les étouffemens reparoif
foient .
par
que
40. Damoifelles ROUGES. Fort replette ,
tomba dans un grand affoupiffement , la fievre
étoit forte , la refpiration gênée ; elle fut faignée
3. fois du pied les 2. premiers jours ; le 3. on mit
3. grains de Tartre émetique fur la boiffon ;
L'embarras de la tête ceffa , la petite Verole
fortit en grande quantité , les accidens fe calmerent
, la fuppuration fut très- laborieufe ; mais
comme la fievre n'étoit pas forte , on fe contenta
de tenir le ventre libre par les boiffons émetiſées,
AI. Volo
2862 MERCURE DE FRANCE
& les lavemens jufqu'à la fin de la maladie.
41. D'une forte fanté, eut la fievre vive , accompagnée
de tranfport ; on la faigna 2. fois du
pied le même jour ; le lendemain le relâchement
de la fievre donna lieu à Pémetique ; l'évacuation
fut abondante & fuivie de l'éruption , l'embarras
de la tête & un mouvement de fievre continuoits
on infifta fur la boiffon émetifée pendant toute
la maladie , parce que la tête fe broüilloit dès que
le ventre n'alloit plus.
1
42. Delicate , fut près de 8. jours languiffante,
eut enfuite un éclat de tranfport & un rire forcé
qui ne difcontinuoit pas ; la fievre n'étoit pas vive;
elle fut faignée 3. fois du pied les 2. premiers jours
& purgée le 3. avec l'émerique ; une éruption
abondante fuivit de près l'évacuation ; les accidens
diminuerent , mais il reftoit une pente à l'affoupiffement
& la tête n'étoit pas entierement libre
, ce qui détermina à continuer les boiffons
émetifées pendant la maladie.
43. Valetudinaire , eut la fievre par redoublemens
; la tête étoit prife , elle fut faignée 2. fois
du pied le premier jour ; le fecond , à la faveur
d'une rémiffion fenfible dans le poux , on tenta
l'émetique qu'il fallut interrompre & revenir à la
faignée le foir ; le 3. la tête étoit toujours priſe ,
mais le poux étoit petit ; après quelques grains
de Tartre émetique fur la boiffon qui n'agiffoient
pas , on donna le vin d'Eſpagne émetique ; l'évacuation
fut foutenuë le lendemain , le 5. P'éruption
fut très -abondante , les accidens fe calmerent
; on aida la liberté du ventre dans le cours
de la maladie , parce que la tête avoit une difpotion
à s'embarafler.
44. D'une bonne fanté , eut une forte fievre ,
accompagnée d'un faignement de néz. On fit 3 .
Laignées du pied le premier jour ; la petite Ve
11. Vol
role
DECEMBRE. 1730. 2863
role fortit le lendemain ; comme les accidens s'étoient
moderez , on ne fit rien juſqu'au 3. de l'éruption
que la fievre augmenta ; la tête ſe prit ,
on revint à la faignée du pied , & enfuite à l'émetique
en lavage ; les évacuations débarafferent la
tête , on les a continuées jufqu'à la fin de la fupuration.
45. D'une fanté médiocre , fut prife d'un grand
accablement ; la fievre étoit forte , on la faigna
2 fois du pied le premier jour ; un peu de relâche
le lendemain détermina à donner un lavage de
Tartre émetique; l'évacuation fut fuivie d'un calme
de 4. jours ; la fievre fe ralluma , le tranſport
& de fortes convulfions s'y joignirent , le poux
étoit embaraffé ; on refit deux faignées du pied à
peu de diftance , & immediatement après l'émetique
en lavage ; on foutint l'évacuation ; la petite
Verole fortit le lendemain , accompagnée de
marques pourprées ; les accidens ſe modererent ,
on a foutenu foigneuſement la liberté du ventre
jufqu'à la fin de la maladie.
45. Robufte , eut une groffe fievre , accompa
gnée d'un faignement de nez & de violens élancemens
à la tête ; on la faigna du pied & la petite
Verole parut le même jour confluante. Les accidens
ne diminuerent point ; les boutons ne faifoient
aucun progrès ; la faignée du pied fut réïterée
le 2. & le 3. La nuit du 3. au 4. de l'éruption
il furvint un redoublement vif ; on refaigna
la Malade , elle fut vuidée le lendemain avec l'E
netique en lavage. L'évacuation qui fut abondante
modera les accidens jufqu'au 7. que la
fievre devint plus forte ; la tête fe prit & enfla
prodigieufement. On réïtera la faignée du pied
& l'ufage des boiffons émetifées qui furent continuées
jufqu'à la fin de la maladie.
47. Bien conftituée , fut lauguiffante plufieurs
11. Vol.
jours E
2864 MERCURE DE FRANCE
jours , la petite Verole fortit en petite quantité
fans accident ni mouvement de fievre. Le 4. de
P'éruption elle tomba dans un affoupiffement ;
la tête fut prife , il furvint un faignement de nez ;
on fit deux faignées du pied à peu de diftance , &
Pufage d'une boiffon emetifée qu'on continuą
plufieurs jours , débaraffa la tête.
48. Infirme & fujette à des coliques d'eftomach
, eut le même accident , accompagné d'une
fievre très-vive & d'une grande pefanteur de tête;
elle fut faignée quatre fois du pied les deux premiers
jours , le trois il y eut de la moderation ;
on jetta 4. grains de Tartre émetique fur la boif
fon , qui pafferene heureufement , & à la fin de
Pévacuation la petite Verole fortit ; il a fallu
foutenir la liberté du ventre le reſte de la maladie,
pour combattre la pefanteur de tête.
49. D'une médiocre fanté , eut une grande pefanteur
de tête , un faignement de nez , la fievre
étoit vive , les 2. premiers jours elle fut faignée
4. fois du pied ; le 3. la petite Verole fortit , le
4. l'éruption ne faifoit nul progrès ; on éguifa les
boiffons de quelques grains de Tartre émetique ,
il fallut en augmenter la doſe dans les tems de la
fupuration.
so, Dune délicateffe extrême , la fievre & les
accidens ne furent pas confiderables ; on ne fit
rien , la petite Verole fortit en médiocre quantité.
A l'entrée de la fupuration là fievre devint vive ,
la tête fè prit ; on fit deux faignées du pied à peu
de diftance , & les boiffons émetifées enfuite
qu'on continua jufqu'au 12. de l'éruption .
SI. DAMES RELIGIEUSES. Agée de
8, ans , d'un tempérament affez fort , quoique
fujette à des maux d'eftomach , cut une fievre des
plus vives , un grand accablement , des maux de
teins , un fond d'affoupiffement & des friffonne-
11. Vols
mens
DECEMBRE. 1730. 2865
3.
mens continuels ; on lui fit quatre fortes faignées
du pied les deux premiers jours ; comme il y eur
de la modération dans la fievre , le elle fut purgée
avec quatre grains de Tartre émetique en layage
, qui produifirent peu d'effet . On y revint le
lendemain , l'évacuation fut plus heureuſe , la petite
Verole fe déclara confluante & fut accompagnée
d'un fond de fievre & d'affoupiffement ; on
continua les boiffons émetifées qu'on aidoit par
les lavemens foir & matin. Malgré ces fecours le
. de l'éruption le ventre ne coula plus , l'affoupiffement
devint profond ; la fievte n'ayant pas
augmenté à proportion des autres accidens , on
fe contenta de doubler la doſe de l'émetique ; le
ventre ne s'ouvrant pas , on infifta fur le même
remede , aidé par les Ptifannes laxatives ; enfin on
eut recours au vin d'Efpagne émerique qui fut
fuivi d'une évacuation abondante . La Malade
avoit pris dans les 24 heures la valeur de plus de
30 grains de Tartre émetique ; la petite Verole
repouffa , la tête fut déchargée ; on continua les
boiffons émetifées jufqu'à la fin de la maladie :
l'état de la Malade n'a été certain que vers le 15
de l'éruption.
52. Agée de 56 ans , d'un temperament trèsdélicat
, fujette à cracher du fang , & les jambes
fouvent enflées , eut une fievre affez vive , accompagnée
de maux de reins & d'une grande
douleur de tête , on la faigna deux fois du pied
les deux premiers jours ; le 3. il y eut un dévoiement
; on mit deux grains de Tartre fur la boiffon
, qu'on réitera le lendemain. La petite Verole
fortit à la fin du 4. en médiocre quantité, tous les
accidens fe modererent. Le 5. de l'éruption , la
pefanteur de tête & le dévoiement recommencerent
, on mit encore deux. grains de Tartre fur
la boiffon , on les repeta le lendemain & la maladie
finit heureuſement. Eij 53
2866 MERCURE DE FRANCE
53. Agée de 24. ans , d'un tempérament fort
vif , dans une difpofition à une fievre étique , eut
des élancemens à la tête , des maux de reins , des
fux dans la poitrine ; la fievre étoit forte , elle
fut faignée trois fois du pied les 2 premiers jours,
il y eut peu de moderation le 3. Le 4. elle étoit
plus fenfible ; on mit deux grains de Tartre fur
la boiffon ; la petite Verole fortit en affez grande
quantité. Le 3. de l'éruption la fievre & les élancemens
à la tête augmenterent ; on revint à la faignée
du pied qui calma les accidens ; le refte de
la maladie elle n'eut befoin que d'une Eau de
Pavot pour calmer les tiraillemens de poitrine
qui fe réveilloient de tems en tems , plutôt comme
une fuite de fa difpofition habituelle , que de
la maladie preſente.
>
54. Agée de 23. ans , fortoit d'une fluxion de
poitrine , pour laquelle on avoit été obligé de la
faigner plufieurs fois ; la convalefcence n'étoit
pas entièrement confirmée , lorfqu'elle fut prife -
d'une fievre vive , accompagnée d'élancemens à
la tête , & en même- tems d'une perte confiderable.
On fit 2. faignées du pied le premier jour
le 3. on réitera ; de la moderation dans la
fievre & dans la perte firent paffer à un lavage
de Tartre émetique ; l'évacuation fut ample , elle
diminua tous les accidens , fit ceffer la perte . La
petite Verole fortit abondante ; le 5. l'éruption ,
la pefanteur de tête revint , on mit quelques
grains de Tartre fur la boiffon, qui ne produifirent
prefque aucun effet ; la pefanteur de tête fut plus
forte & la fievre augmenta , on fit une quatrième
faignée du pied & enfuite les boiffons émetifées
pafferent heureufement , on en continua l'ufage
jufqu'à la fin de la maladie.
55. Agée de 35. ans , d'un bon temperament
& fort replete,cut de violens maux de reins,la tête
14 Vol
CxDECEMBRE
. 1730. 2867
extrémement pefante & la fievre forte ; on fit 4.
grandes faignées du pied les deux premiers jours ;
le 4. il fallut réiterer quelque moderation
donna lieu à l'émetique en lavage ; après l'évacuation
la petite Verole fortit confluante ; il reftoit
encore de la pefanteur à la tête ; on inſiſta
fur les boiffons émetifées qu'il fallut aider plus
d'une fois par des Ptifannes laxatives & les lavemens
jufqu'au 14. de l'éruption .
Voilà,Madame,un Extrait bien fidele du Journal
de nos Malades ; j'y ai trouvé qu'en 3. mois nous
avons fait près de 500. faignées du pied , &
donné environ 2000. grains de Tartre émetique ;
à la verité je comprens toujours dans nos petites
Veroles , les fievres du même tems , parce qu'excepté
les boutons , c'étoit le même caractere , &
qu'on y a employé les mêmes fecours ; j'en citerai
feulement une des plus fortes pour exemple.
>
Mle *** âgée de 18. ans , avoit de l'embonpoint
& des couleurs vives , toutefois fujette aux
maux de tête ; elle tomba dans un grand accablement
la fievre étoit forte & la pefanteur de tête extrême
, elle avoit des maux de reins,des envies de
vomir & un fond d'oppreffion ; on la faigna 5 .
fois du pied les deux premiers jours ; le 3, un peu
de modération fit tenter l'émetique en "lavage
mais inutilement ; la fievre augmenta , on réïtera
la faignée le foir ; le 4. il y eut du mieux ; on
revint à l'émetique , on y joignit le fecours des
lavemens ; on continua le 5. le 6. & le 7. la pefanteur
de tête diminuoit à mefure des évacuations
. Du 8. au 9. la fievre devint plus forte , la
tête fe prit totalement ; on apperçut quelques
mouvemens convulfifs ; il fe répandit un engourdiffement
abfolu fur tout le côté droit ; on fit
2. faignées du pied à peu de diſtance; la fievre ſe
modera , & on revint à l'émetique en lavage ; les
II. Vol.
éva- E iij
2868 MERCURE DE FRANCE
évacuations foutenues pendant plufieurs jours
diffiperent enfin les accidens , & là convalefcence
commença vers le 20 .
Notre Medecin avoit extrémement fimplifié
notre travail , la boiffon étoit l'eau naturelle ; on
la faifoit tiédir lorfque les malades étoient dans
la moiteur ; la nourriture , un bouillon fort fimple
que l'on fuprimoit les premiers jours , & méme
dans le cours de la maladie , lorfque les accidens
étoient violens. On changeoit les Malades
de linge & de lit dans tous les tems de la maladie,
lorfqu'elles en avoient befoin. Il n'y avoit ni plus
de couvertures , ni plus de feu dans les Infirme
ries que pendant les autres maladies . Les lavemens
étoient d'un ufage journalier. Quelque narcotique
, du Lilium dans les fyncopes fortes , nul
remede exterieur pour préferver les Malades de
l'impreffion que cette maladie laiffe ordinairement,
perfuadez qu'ils font inutiles, & que c'eft du caractere
du fang que dépend cette impreffion,du refte
la faignée & l'émetique. On adopte fans peine
une pratique aufli fimple, fur tout lorfqu'elle eft
fuivie d'un fuccès auffi heureux . Il paroiffoit difficile
à croire à ceux qui n'en ont pas été témoins.
De plus de 125. Demoifelles, il n'en eft pas inort
une feule , & de 7. Religieufes & une Soeur , nous
n'en avons perdu qu'une , plus encore par fes
grandes infirmitez & fon âge avancé , que par la
maladie courante qui ne put pas fortir
J'avoue qu'il y a des années où la petite Verole
n'eft pas meurtriere, & qu'elle feroit peu de ravage
, quand même on n'y donneroit aucun fecours;
mais celle-cy étoit bien differente , l'excès où l'on
a été obligé de porter la faignée du pied & les autres
évacuations dans la plupart des Malades , ne
prouve que trop fa violence. Dans le Village de S.
Cyr,où cette maladie étoit en même tems répan-
II. Vol
duë ,
DECEMBRE . 1730. 2869
2
due , & fans autre fecours que celui qu'admet le
préjugé, on a perdu un grand nombre de Malades;
or fi la petite Verole a fait beaucoup de defordre
dans un Village où la jeuneffe jouit d'une forte
fanté , parce qu'elle vit dans une liberté entiere
quel ravage n'auroit-elle pas fait avec de fi foibles
fecours dans une Maifon où un grand nombre
de Demoifelles raffemblées dès leur enfance , vi
vent dans une grande régularité & dans une con
tention d'efprit perpetuelle à remplir leur devoir,
on parconfequent les meilleures fantez ne font pas
fans nuage, & parmi lesquelles il y en a beaucoup
d'infirmes ?
Mais s'il a fallu porter les évacuations auffi
loin dans des perfonnes qui menent une vie fimple
, que ne faudrait - il point faire dans celles
dont le fang nourri d'excès & de Liqueurs fpiritueufes
eft toujours prêt à s'enflammer ?
Ce n'eft pas pour faire valoir nos foins que
fais ici ces Reflexions , c'eft uniquement pour
détruire la prévention où prefque tout le monde
eft de croire que l'émetique & la faignée font
d'un ufage dangereux , fur tout lorfque la petite
Verole eft fortie. Je vous avoue que je fuis indi
gnée contre moi- même d'avoir penfé de la forte
autrefois , revenue de mon erreur , je ne laiffe
paffer aucune occafion d'écrire ou de parler des
prodiges que la faignée & l'émetique ont operez
chez nous dans cette maladie. Je fuis bien affurée
que vous ne trouverez pas l'expreffion trop forte,
fi vous vous faites une idée qui approche de la
réalité fur les horreurs où nous nous fommes
trouvées. Il y a eu des nuits où nous avions 5. à
6.Malades à tel point d'extrémité, qu'on n'auroit
ofé répondre de la vie d'aucune pour quelques
heures. Il nous eft arrivé plus d'une fois d'abandonner
une Malade avec la veine ouverte dans
II. Vol. Ejuj l'eau
2870 MERCURE DE FRANCE
l'eau pour courir à une autre qui tomboit dans
an accident plus brufque. Nous ne manquions
pas alors de propofer à notre Medecin d'employer
une quantité de remedes vantez pour cette malaladie
, comme la Poudre de la Comteffe , le Befoard
, la Poudre de Vipere , le Sang de Bouquetin
, &c. mais il nous répondoit froidement que
´ces cas là étoient trop férieux pour s'en tenir à
des amufemens. Les Vefiçatoires furent rejettez ,
même en nous difant leur effet étoit d'entreque
tenir & de fondre le fang , deux écueils les plus
redoutables dans cette maladie.
Je crois n'avoir pas befoin de vous dire que ce
récit eft d'une grande exactitude , je fuis perfuadée
que vous n'aurez aucun doute fur cela ; mais comme
vous pouriez le faire lire à d'autres perfonnes ,
& que je fuis bien aife que le parti de la verité ait
de la force , j'ai prié Mefdames de Garnier , de
Vaudancour , de Montchevreuil , d'examiner s'il
ne me feroit point échappé d'alterer ou de groffir
quelque circonftance , & d'y mettre leurs fignatures
, fi elles le trouvoient dans une exacte verité.
Leur témoignage doit faire foi , puifque les deux
premieres ont foutenu le fort du travail en qualité
d'Infirmieres principales , & que la troifiéme partageoit
avec moi les foins de l'Apoticairerie . J'ai
l'honneur d'être , &c. Signé , Soeurs de Garnier.
De Vaudancour. De Montchevreüil. De Texier.
AS. Cyr , ce 30. Août 1730.
II.Vol. ENIGME.
DECEMBRE. 1730 287 1
Sortis
ENIGM E.
Ortis d'un animal groffier de fa nature.
Lecteur , nous fommes deux d'une même figure ›
Travaillez avec art ; voici notre tableau :
Quoique blancs en naiffans , on nous noircit la
peau ,
Par nous , deux combattans ſe diſputent la gloire
;
Et par nous , l'un des deux remporte la victoire
Chaque Athlete à fon tour dans fa creufe prifon
,
Nous tient avec grand bruit dans l'agitation ;
Mais quand avec éclat , fon caprice nous chaffe
Sur le champ de Bataille à l'inſtant renverſez ,,
Nous donnons grace à l'un , à l'autre la difgrace
;
Nous décidons enfin , quand nous fommes tombez.
F. M. N..
LOGO G R Y P HE.
Cinq Lettres compofent mon nom 5
Je fuis à la fois homme & femme ;
Si l'on ne s'attache qu'au fon ,
Je fournis dans mon anagramme , ta
II. Vol.
Uni Ev
2872 MERCURE DE FRANCE
Un mot refpectable aux amis.
Dix-fept , neuf , douze & cinq , grace à maints
beaux efprits ,
A la raiſon je fuis fouvent contraire.
Un , douze , cinq , dix-fept , je deviens falutaire,
Et produits un tres-bon effet ,
Malgré la grimace qu'on fait.
Un neuf, dix- fept , j'enfante des miracles ,
Inconnus aux fameux Oracles
De la fuperbe antiquité.
Pris dans un autre fens, je fuis tranquille , affable,
Poly , gracieux , agréable ,
Plein de douceur ou de févérité.
Neuf , dix-fept , cinq , craignez mon courroux
redoutable.
Douze , un , neuf , je deviens un mois
Douze , un , dix -fept , neuf, j'enrage pas fois
Mon mal , hélas ! eſt incurable.
Un , douze & cinq, foibles humains ,
Quand de vous un inſtant je parois éloignée ,
Quel changement !, . . vos jours & votre deftinée
,
Sont nuit & jour entre mes mains.
A. C. D. M. E. B.
DEUXIE'ME LOGOGRYPHE.
IL lui faut de l'argent , finon point de quartier
Il en demande au nom du Diadême.
11. Vel
Lecteur,
DECEMBRE . 1730. 2873
Lecteur , ne laiffez pas cet homme tout entier
Coupez fon col , il n'eft plus , c'eſt vous
même.
G...
>
On donnera avec les nouvelles Enigmes
du mois de Janvier l'explication de
celles- ci , & celles du premier volume
de ce mois.
XXXX:XXXXXXX :XXXX
NOUVELLES LITTERAIRES
DES BEAUX ARTS , &c,
M
EMOIRES DE M. DU GUE'-TROUIN ,
Chef- d'Efcadre de S. M. T. C. &
Grand - Croix de l'Ordre Militaire de
S. Louis. A Amfterdam , chez P. Mortier.
1730. in 8.
RECUEIL DE LITTERATURE , de Philofophie
& d'Hiftoire . Amft. chez Fr. Honoré.
1730. in 12.
.M
HISTOIRE DE DANEMARCK
> avant &
depuis le commencement de la Monarchie
, par M. des Broffes. Amfterd. chez
Fanffon , &c. 6. vol , in 12 .
II. Vol. E vj Hif
2874 MERCURE DE FRANCE
HISTOIRE dela vie & du culte du Rien
heureux Gérard Tenque, Fondateur de l'Ordre
de S. Jean de ferufalem , par Pierre-
Jofeph de Haitze . A Aix , chez Jofeph
David , Imprimeur du Roy , 1730. in 12 .
pages 179 .
M. de Haitze remarque dans fa Préface
, qu'il eft rare qu'il y ait un Fondateur
d'Ordre , qui depuis fept fiécles n'ait pas.
rencontré jufqu'aujourd'hui aucun Ecrivatn
qui ait daigné de configner , en particulier ,
Ja Vie à la pofterité. Cependant le B. Gế-
rard Tenque n'a encore trouvé perfonne
qui l'ait voulu faire connoître particulierement.
Ce n'eft pas qu'il foit entierement
demeuré dans l'oubli , puiſque
beaucoup d'Hiftoriens ont fait une mention
honorable de lui , mais en tres- peu
de mots , & en fe copiant les uns les
autres.
M. de Haitze cite ces Hiftoriens , qui
font effectivement en grand nombre ;
mais en les citant , il défigure quelquefois
leurs noms ; il en ufe auffi fans ceremonie
à l'égard des meilleurs & des
plus récens..
Du Vertot , en fon Hiftoire des Chevaliers
, &c. C'eft ainfi que notre Ecrivain
indique l'Hiftoire des Chevaliers Hofpitaliers
de S. Jean de Jérufalem , & c. par.
M. l'Abbé de Vertot , Commandeur de
II. Fol
San
DECEMBRE 1730. 2871
&
Santeni , quoique cet Autheur , illuftre
par plufieurs endroits , foit encore vivant,
que fon ouvrage foit tout nouveau
C'eſt , au refte, par pur amour pour la
fa Patrie , que M. de Haitze a écrit la vie
de fon Compatriote ; car Gérard Tenque
étoit de la Ville de Martigues , né dans
le 11 fiecle, & mort à Jerufalem au commencement
du x11 ° fieçle , la 1ere année
du Règne de Baudouin II. Son Corps.
tranfporté en Europe , repofe à Manof
que , dans l'Eglife de la Commanderie de
cette Ville. L'Autheur ne fçait pas bien
le temps & les raifons de cette transferance
à Manofque ; mais il donne là - deſſus
des conjectures plaufibles . Notre Hiftorien
ajoute que Carbonel de Luffan , Baillifde
Manofque , entreprit de placer une partie
du Chef, qui eft le Crane , dans une Chaffe
d'argent , qui le reprefente en Bufte , afin de
pouvoir l'expofer dignement & folemnellement
à la veneration des fideles.
Pierre Puget , Marſeillois , tres - celebre
Sculpteur , donna le deffein de ce Bufte
& en fit le modele , fur lequel l'Argentier
travailla le Bufte , où cette Relique fut
enfermée. Il n'y a pas , felon l'Autheur ,
un plus beau Bufte dans tout le Royaume
; la Tête eft du dernier beau , elle
fe fait admirer. En finiffant cet ouvrage
hiſtorique , M. de Haitze répete qu'il l'a
11. Vol. entres
2876 MERCURE DE FRANCE
entrepris pour l'honneur de la Provence.
Un peu plus d'attention au ftile & à la
pureté de la diction , n'auroit rien eu de
contraire à une intention fi loüable.
AIRS SE'RIEUX IT A BOIRE , mêlez de
Brunettes , Ariétes & Rondes de table
de M. Naudé l'aîné , Maître à chanter.
A Paris , chez Ballard , feul Imprimeur du
Roy pour la Mufique , & chez Boivin &
Le Clerc. Prix so fols. 1731 .
Ce Livre contient trente- deux Airs ,
où la varieté & le gout fe trouvent. Le
fieur Naudé a déja fait preuve de fon
talent par plufieurs Vaudevilles finguhiers
, qui font actuellement en vogue à
la Cour , à la Ville & dans les Provinces.
Il commence fon oeuvre par une belle In
vocation à l'harmonie , & par un récit de
Baffe , où l'auteur par des Roulades neuves
& des Traits variez , a excellemment
caracteriſé ce morceau , dont voicy les
paroles :
Tremble , Lucas , voici la fin du monde ,
Difoit à fon Epoux , Claudine l'autre nuit
Eveille -toi , du tonnerre qui gronde ,
N'entens- tu pas l'épouventable bruit !
Laiffe , dit-il , gronder l'affreux tonnerre ,
Je ne fuis point troublé de fon fracas ;
II. Vol
Mais
DECEMBRE. 1730. 2877
Mais quand au Cabaret tu me livres la guerre ,
Tout tremble , la Maiſon , la Bouteille & Lucas
Nous croyons faire plaifir d'avertir
qu'un Vaudeville qui eft dans ce Livre
& qui commence par ces mots : En verité
, fevere Margoton , vous le prenez fur
un drolle de ton , & c. eft tres- bien carac
térifé.
M. l'Affichard , connu par diverfes
piéces de Poëfies , eft l'auteur de preſque
toutes les paroles de ce Livre.
LE CALENDRIER CHRONOLOGIQUE ET
HISTORIQUE , &C. Ce petit Livre eft fort
curieux & fort utile à toutes fortes de perfonnes
. Comme il eft déja connu , nous
nous difpenferons d'en faire le détail ,
mais on avertira qu'étant toujours changé
tous les ans ; cela fait qu'en réüniſſant
les Editions, on peut,du tout, former un
petit corps d'Hiftoire fivie , qui pour
avoir été écrite année annuellement , à
meſure & au moment que le temps
fournie , ne fera pas fujette aux méprifes
qui fe gliffent fouvent dans le récit le
plus fidele des évenemens , pour n'avoir
été écrits que long- temps après qu'ils font
arrivez . D'ailleurs , quelle diverfité de
matieres variées en tout genres . En voici
le titre pour l'année 1731 .
l'a
II. Vol Veritable
2878 MERCURE DE FRANCE
Veritable Calendrier Chronologique &
Hiftorique pour l'année 1731. contenant la
connoifance des temps & autres mouvemens
celeftes . Ensemble , une fuite Chronologique
des Evenemens les plus curieux ; les Confeils
du Roys un état des Cardinaux , & c. avec
les Naiffances & Morts des Rois , Reines .
Princes & Princeffes de l'Europe; enrichies de
Remarques Hiftoriques; & auſſi pluſieurs autres
differentes nouvelles matieres curieufes &
utiles , détaillées dans la Table alphabetique,
jointe audit Calendrier.Dédié à Monseigneur
le Duc d'Orleans , premier Prince du Sang..
A Paris , de l'Imprimerie de Giffey , ruë
de la Vieille-Bouclerie , au bas du Pont
S. Michel , à l'Arbre de Jeffé .
>
On remarquera que les Exemplaires de ce
Livre font tous paraphez par l'Auteur ,
pour en affurer au Public la verité , & les
diftinguer plus facilement.
Les Sçavans ayant bien voulu contribuer de
leurs lumieres jufqu'à prefent , pour enrichir cet
Ouvrage , font invitez de nouveau à continuer
de faire part de leurs Mémoires , & d'y déclarer
le choix qu'ils défirent & eftiment que l'on
faffe des matiéres , pour leur plus grande fatisfaction
& utilité , & celle du Public , qui eft le
principal point de vue de l'Auteur , dans la compofition
de ce Calendrier.
LA HENRIADE , nouvelle édition , revûë
, corrigée & augmentée de beaucoup,
11. Vol..
avec
DECEMBRE. 1730. 2879
avec des notes. A Londres , chez Jérôme
Bold-Truth , à la Vérité. 1730. in 8. de
349 pages , fans la Préface , qui en contient
24. Cette Edition , à laquelle il n'y
a rien à fouhaiter pour la correction & la
beauté des caracteres & du papier , que
l'Auteur donne proprement reliée ; & une
autre in 4° . avec des Eftampes , qui eft actuellement
fous preffe , feront délivrées
aux Soufcripteurs , fans qu'ils ayent aucun
payement à faire.
On trouve dans la Préface de cette Edition
in 8 °. l'Hiftoire abregée , écrite de
main de Maître , des Evénemens fur lefquels
eft fondée la Fable du Poëme de la.
Henriade ; l'Idée de ce Poëme & l'efprit
dans lequel il a été compofé. Mais pour
ne point alterer la pureté du ftyle , ni la
force & la grace de la diction , prenons
de la Préface même ce que nous croyons
en devoir mettre fous les yeux de nos
Lecteurs.
ג כ
Ce Poëme fut commencé en l'année
» 1717. M. de Voltaire n'avoit alors que
» 19. ans , & quoiqu'il eût fait déja la
Tragédie d'Oedipe , qui n'avoit pas en-
» core été reprefentée , il étoit très incapable
de faire un Poëme Epique à cet
» âge ; auffi ne commença- t'il la Henria-
» de que dans le deffein de fe procurer
» un fimple amufement dans un tems &
»
II. Vol.
dans
2880 MERCURE DE FRANCE
» dans un lieu où il ne pouvoit guere
» faire que des Vers. Il avoit alors le malheur
d'être prifonnier par Lettre de
» Cachet dans la Baftille . Il n'eft pas inu
tile de dire que la calomnie qui lui
» avoit attiré cette difgrace ayant été
» reconnuë , lui valut des bienfaits de la
>> Cour , ce qui fert également à la jufti-
» fication de l'Auteur & du Gouverne
» ment & c .
>>
L'Auteur ayant été près d'un an en
prifon , fans papier & fans livres , il y
» compofa plufieurs Ouvrages , & les re-
» tint de mémoire , La Henriade fut le feut
qu'il écrivit au fortir de la Baftille ; il
n'en avoit alors fait que fix Chants ,
» dont il ne reste aujourd'hui que le fe-
» cond , qui contient les Maffacres de la
» S. Barthelemi. Les cinq autres étoient
» très foibles , & ont été depuis travaillés
fur
un autre plan ; mais il n'a jamais pû
>> rien changer à ce fecond Chant qui eft
» encore peut- être le plus fort de tous
» l'Ouvrage.
» En l'année 1723. il parut une Edition
de la Henriade fous le nom de La Ligues
>>> L'Ouvrage
étoit informe , tronqué ,
» plein de lacunes. Il y manquoit
un
Chant , & les autres étoient déplacés.
» De plus , il étoit annoncé comme un
Poëme Epique.
>>
II. Vol. En
DÉCEMBRE. 1730. 2881
En l'année 1726. l'Auteur étant en
» Angleterre, y trouva une protection ge-
>> nerale & des encouragemens qu'il n'au-
>> roit jamais pû efperer ailleurs . On y fa-
» vorifa l'impreffion d'un Ouvrage Fran-
» çois , écrit avec liberté & d'un Poëme
» plein de verités , fans flatterie.
»
La Henriade parut donc alors pour
la
>> premiere fois fous fon veritable nom ,
» en dix Chants , & ce fut d'après les
>> Editions de Londres que furent faites
depuis celles d'Amfterdam, de la Haye,
» & de Geneve toutes inconnues en
>> France.
>>
L'Auteur ayant encore fait depuis de
» grands changemens à la Henriade , don-
» ne aujourd'hui cette nouvelle Edition
» comme moins mauvaiſe que toutes les
précedentes ; mais comme fort éloignée
» de la perfection dont il ne s'eft jamais
» Aatté d'approcher.
Ce Poëme , compofé de dix Chants
commence ainſi :
Je chante le Heros qui regna fur la France ,
Et par droit de conquête , & par droit de naiffance
,
Qui par le malheur même apprit à gouverner,
Perfecuté long- tems , fçut vaincre & pardonner,
Confondit & Mayenne , & la Ligue & Libere ,
Et fut de fes Sujets le Vainqueur & le Pere.
II. Vol.
Un
2882 MERCURE DE FRANCE
Un des plus confiderables changemens
eft à la page 205. du Chant feptiéme :
le voici :
Dans le centre éclatant de ces orbes îmmenfes
,
Qui n'ont pû nous cachér leur marche & leurs
diſtances ,
Luit ces Aftres du jour par Dieu même allumé ,
Qui tourne autour de foi fur fon axe enflamé.
De lui partent fans fin des torrens de lumiere ;
Il donne en ſe montrant la vie à la matiere ,
Et difpenfe les jours , les faifons & les ans
A des Mondes divers autour de lui flotans.
Ces Aftres affervis à la loi qui les preffe ,
S'attirent dans leur courſe * & s'évitent fans ceffe,
Et fervant l'un à l'autre & de regle & d'appui
Se prêtent les clartés qu'ils reçoivent de lui.
Au delà de leurs cours , & loin dans cet eſpace
Où la matiere nage , & que Dieu feul embraffe ,
Sont des Soleils fans nombre & des Mondes fans
fin ;
Dans cet abîme immenſe il leur ouvre un chemin.
Par delà tous ces Cieux le Dieu des Cieux réfide;
C'est là que le Heros fuit fon celefte guide ;
* Que l'on admette l'attraction de l'illuftre
M. Nevvton , toujours demeure- t'il certain que
les Globes celeftes s'approchant s'éloignant
tour à tour , paroient s'attirer & s'éviter.
II. Vol. C'est
DECEMBRE. 1730. 2883
C'eft là que font formés tous ces efprits divers
Qui rempliffent les corps , & peuplent l'Univers;
Là font après la mort nos ames replongées ,
De leur prifon groffiere à jamais degagées ;
Un Juge incorruptible y raffemble à ſes pieds
Ces immortels Efprits que fon foufle a créés.
C'eft cet Etre infini qu'on fert & qu'on ignore ;
Sous cent noms differens le Monde entier l'adore.
Du haut de l'Empirée il entend nos clameurs ;
Il regarde en pitié ce long amas d'erreurs ,
Ces Portraits infenfés que l'humaine ignorance
Fait avec pieté de fa fageffe immenſe.
La mort auprés de lui , fille affreuſe du tems ,
De ce trifte Univers conduit les habitans ;
Elle amene à la fois les Bonzes , les Bracmanes
Du grand Confucius les Difciples profanes ,
Des antiques Perfans les fecrets fucceffeurs ,
De Zoroaftre encor aveugles fectateurs ,
Les pâles habitans de ces froides Contrées
Qu'affiegent de glaçons les mers hiperborées ,
Ceux qui de l'Amerique habitent les Forêts ,
Du pere du menfonge innombrables Sujets .
Eclairés à l'inftant , ces morts dans le filence
En Perfe les Guebres ont une Religion à
part , qu'ils prétendent être la Religion fondée
par Zoroastre , & qui paroit moins folle que
les autres fuperftitions humaines , puifqu'ils
rendent un culte fecret an Soleil , comme à
une image du Createur.
IL. Vol-
Atten
2884 MERCURE DE FRANCE
Attendent en tremblant l'éternelle ſentence :
Dieu qui voit à la fois , entend & connoit tout ,
D'un coup d'oeil les punit , d'un coup d'oeil les
abfout.
Henri n'approcha pas vers le Trône invifible .
D'où part à chaque inftant ce Jugement terrible,
Où Dieu prononce à tous les arrêts éternels ,
Qu'ofent prévoir envain tant d'orgueilleux Mor
tels.
Quelle eft , difoit Henri , s'interrogeant luimême
,
Quelle eft de Dieu fur eux la Juftice fuprême ?
Ce Dieu les punit- il d'avoir fermé leurs yeux
» Aux clartés que lui-même il plaça fi loin d'eux;
» Pourroit-il les juger tel qu'un injufte Maître
Sur la Loi des Chrétiens qu'ils n'ont point pu
>> connoître ?
Non , Dieu nous a créés , Dieu nous veut fauver
tous ;
» Par tout il nous inftruit , par tout il parle à
» nous ;
»Il
grave en tous les coeurs la loi de la nature
Seule à jamais la même , & feule toujours pure ;
Sur cette Loi , fans doute , il juge les Payens ,
» Et fi leur coeur fut jufte , ils ont été Chrétiens,
Tandis que du Heros la raifon confonduë
Portoit fur ce miftere une indifcrete vuë ,
Aux pieds du Trone même une voix s'entendit ,
Le Ciel s'en ébranla , l'Univers en frémit ,
II. Vol.
Ses
DECEMBRE . 1730. 2885
Ses accens reffembloient à ceux de ce Tonnerre
Quand du Mont Sinaï Dieu parloit à la Terre :
Le Choeur des Immortels fe tût pour l'écouter
Et chaque Aftre en fon cours allá la repeter:
A ta foible raifon garde- toi de te rendre :
Dieu t'a fait pour l'aimer , & non pour le come
»prendre.
» Invifible à tes yeux , qu'il regne dans ton coeur,
» Il pardonne aux Humains une invincible er
» reur ;
Mais il punit auffi toute erreur volontaire.
Mortel , ouvre les yeux quand fon Soleil t'é
claire.
Henri paffe à l'inftant auprès d'un Globe affreux,
Rebut de la Nature , aride , tenebreux :
Ciel d'où partent ces cris , ces cris épouventa-
!
bles ,
Ces torrens de fumée , & ces feux effroyables ?
Quels Monftres , dit Bourbon , volent dans ces
climats ?

Quels gouffres enflamés s'entr'ouyent fous mes
pas !
Ọ mon fils , vous voyez les portes de l'abîme
Creufé par la Jufticè , habité par le crimé :
Suivez - moi , les chemins en font toujours ou
verts ;
Ils marchent auffi-tôt aux portes des Enfers. *
* Les Theologiens n'ont pas decidé comme
un article de foi que l'Enfer fut au centre de
la Terre , ainsi qu'il étoit dans la Theologie
AIR Voka
La
2886 MERCURE DE FRANCE
Là git la fombre Envie à l'oeil timide & louche
Verfant fur des lauriers les poifons de fa bouche
Le jour bleffe fes yeux dans l'ombre étincelans ,
Trifte Amante des Morts , elle hait les Vivans.
Elle apperçoit Henri , fe détourne & foupire :
Auprès d'elle est l'Orgueil qui ſe plaît & s'admire
La Foibleffe au teint pâle , aux regards abbatus ,
Tiran qui cede au crime , & détruit les vertus ,
L'Ambition fanglante , inquiéte , égarée ,
De Trônes , de Tombeaux , d'Eſclaves entourée
La tendre Hipocrifie aux yeux pleins de douceur
( Le Ciel eft dans fes yeux , l'Enfer eft dans fon
coeur )
Le faux zele étalant fes barbares maximes
Et l'Interêt enfin , pere de tous les crimes.
Les autres changemens font de 20. ou
30. Vers , & le trouvent répandus dans
tout l'Ouvrage. En voici un au Chant
quatrième, page 125.

..... Loin ... des pompes mondaines ,
Des temples confacrés aux vanités humaines
Dont l'appareil fuperbe impofe à l'Univers.
L'humble Religion fe cache en des deferts ,
Elle y vit avec Dieu dans une paix profonde ,
Cependant que fon nom profané dans le monde
Payenne quelques- uns l'ont placé dans le
Soleil on l'a mis ici dans un Globe deftiné
uniquement à cet usage.
1
11. Vol.
E4
DECEMBRE. 1730. 2887
*
Eft le prétexte faint des fureurs des Tirans ,
Le bandeau du Vulgaire & le mépris des Grands
Souffrir eft fon deftin , benir eft fon partage :
Elle prie en fecret pour l'ingrat qui l'outrage.
Sans ornement , fans art , belle de ſes attraits ,
Sa modefte beauté fe dérobe à jamais
Aux hypocrites yeux de la foule importune
Qui court à fes Autels encenfer la fortune &c.``
Ce beau Poëme eft terminé par ces
Vers :
Tout le peuple changé dans ce jour falutaire
Reconnoît fon vrai Roi , fon Vainqueur & fon
Pere.
Dès lors on admira ce Regne fortuné ,
Et commencé trop tard , & trop tôt terminé.
L'Eſpagnol en trembla ; juſtement deſarmée ,
Rome adopta Bourbon , Rome s'en vit aimée ;
La Difcorde rentra dans l'éternelle Nuit :
A reconnoitre un Roi Mayenne fut réduit ,
Et foumettant enfin fon coeur & fes Provinces
Fut le meilleur fujet du plus jufte des Princes.
ELEGIES de M. L. B. C. avec un
Difcours fur ce genre de Poëfie & quelques
autres Pieces du même Auteur. A
Paris , chez Chaubert , à l'entrée du Quay
des Auguftins , 1731. in 12. de 163. pages.
Cet Ouvrage eft de M. le Blanc , de la
Societé Académique des Arts , déja con-
II Vol.
F nu .
2888 MERCURE DE FRANCE
nu par plufieurs petites Pieces , tant en
Prole qu'en Vers , imprimées dans nos
Mercures , dans le Journal des Sçavans , les
Memoires de Litterature & autres femblables
Recueils , qui depuis long- temps
avoient donné lieu au Public d'attendre
de l'Auteur ce qui en paroît aujourd'hui.
Comme cet Ouvrage eft tout à fait nouveau
, & que d'ailleurs il eft tout autre
chofe que ce que le titre femble
tre , nous ne pouvons nous difpenfer ,
attendu fa fingularité , d'en donner l'Extrait,
& nous pouvons affurer par avance
qu'il feroit très-injufte de le juger fur
l'Affiche . On connoît bien des Elegies
, mais on ne connoît pas celles - cy ;
elles font prefque toutes ennuyeufes , &
celles-cy ne le font pas.
promet-
Il n'y a qu'une voix parmi les gens de
Lettre fur le Difcours ; tous l'ont approuvé:
il eft du nombre de ceux dont on
ne peut guere faire l'Extrait qu'en les
défigurant , & qu'on eft obligé de copier
pour en donner l'idée . On démêle fans
peine les beautez qui fe trouvent noïées
dans un Ouvrage , quand il eft fait avec
art , on craint toujours d'en perdre quelqu'une.
M. le Blanc commence par juftifier le
deffein qu'il a pris de traiter de l'Elegie
par la neceffité où il eft de faire voir l'in
-
II. Vol.
justice
DECEMBRE . 1730. 288 9.
juftice du mépris que quelques-uns ont
eu jufqu'ici pour ce Poëme. Par fa nature
elle n'eft autre chofe que la plainte d'un
amour mécontent.
Grand fond pour la Poëfie , la plainte
étant fi naturelle à l'homme . Et une plainte
amoureuſe ne peut qu'être interreffante.
Le IV. Livre de Virgile , le Monologue
d'Amarillis dans le Paftor Fido ,
Berenice , toutes nos Tragedies enfin en
font de fûrs garants. Un homme malheureux
dans fon amour , dit l'Auteur , une
femme traversée dans fa paſſion , ſçauront
toujours nous attendrir , pourvû qu'ils fçachent
fe plaindre. Tout le monde s'intereffe
au fort des malheureux , fouvent même de
ceux qui méritent de l'être , & c. Nous n'aimonspas,
continue-il , qu'un autre nous vante
fon bonheur, parce qu'il fe met , pour ainfi
dire, au-deffus de nous nous nous plaifons
à lui entendre raconter fes infortunes , parce
qu'il femble par-là reconnoître notre fuperiorité.
Il nous prend pour Juges entre le fort
& lui. Voilà comme notre amour propre eft
la caufe de tous nos mouvemens & la ſource
de tous nos plaifirs . Mais quand on eft malbeureux
fans l'avoir merité , on eft für d'être
plaint , d'être aimé , fouvent même d'être admiré.
Je dirois volontiers que pour un honnête
homme , c'est une espece de bonheur que
d'être malheureux . Voilà , felon l'Auteur ,
II. Vol. се
Fij
2890 MERCURE DE FRANCE
ce qui caufe l'interêt que l'on prend à
la Tragédie, & ce qui par confequent doit
caufer celui de l'Elegie.
M. le Blanc explique enfuite les condi
tions qu'elle doit avoir pour produire ces
effets. Il exige fur tout qu'elle foit naturelle
& remplie de fentimens, & rejette
tous les ornemens frivoles dont la Poëfic
eft quelquefois fufceptible , & où l'efprit
a plus de part que le coeur. Il faut ,
dit- il , de la tendreffe & non de la fadeur,
de la délicateffe & non de l'affectation.
Il faut que le coeur feul parle dans l'Elegie.
Après cela l'Auteur expofe les fujets
dont elle eft fufceptible , & paffe tout
de fuite à l'examen des Auteurs Elegiaques
, tant anciens que modernes. Après
avoir rendu juſtice aux Elegiaques Latins ,
Tibulle , Properce , Ovide , il cherche
la caufe du peu de fuccès des Auteurs
François en ce genre ; & la raifon qu'il
en donne , c'est que les veritables Poëtes ne
font des Elegies que lorfqu'ils ne font encore
qu'écoliers , & que ceux qui ne le font pas
Je flatent trop aifément d'y réuffir. Les uns
la regardent comme le Rudiment de la Poëfie,
les autres comme l'Alphabet ; mais
les uns les autres fe trompent & l'aviliffent
, &c.
L'Auteur prévient enfuite l'accufation
11. Vol. qu'on
DECEMBRE. 1730. 2891
qu'on pourroit lui faire de la témericé
qu'il y a de courir une carrière ſi funeſte
à tant d'autres. Leurs fautes , dit-il , m'ont
tenu lieu d'inftruction . Du moins , continuë-
t'il , je me fuis flaté qu'on me tiendroit
quelque compte de ce qu'en peignant les
paffions amoureuses , je ne l'ai pas fait d'une
maniere quifut capable deféduire . On écoute
volontiers les leçons des Poëtes : ils ne font
nififeveres que les Théologiens,ni fi fecs que
Les Philofophes. Enfin les hommes ne veulent
point de Maîtres & les Poëtes le font
fans le paroître. Il ajoûte à cela plufieurs
autres réfléxions auffi folides qu'ingenieuſes.
Comme dans les Elegies le ftile & le
fond , tout eft nouveau , il dit les taifons
qui l'ont porté à peindre les violence's
de l'amour plutôt que fes douleurs. Le
veritable but de la Poëfie , de quelque efpece
qu'elle foit , dit M. le Blanc , doit tendre à
corriger les hommes. Un Poëte doit faire refpecter
& aimer la vertu , hair & fuir le
vice , plaindre& appréhender les foibleffes :
& des Elegies doucereufes , qui feroient
affez bonnes pour fe faire lire , opéreroient
tout le contraire. L'amour eft tel qu'on ne
peut en parler fans l'infpirer , ou fans le faire
craindre. Qu'on nous le reprefente dans fa
naiffance , ce n'est que jeu , que badinage ,
que plaifir ; quoi de plus féduifant ? Dan's
II. Vol. Fiij fes
2892 MERCURE DE FRANCE
fes excès ce n'eft que pleurs , qu'ennuis , que
defefpoirs quoi de plus terrible !
....
Il n'a fait parler que des femmes dans
fes Elegies, & voici pourquoi : Le langage
de l'amourfied bien mieux dans leur bouche
Et elles en pouffent la délicateſſe &
les violences à un plus haut point que nous.
C'est ce qu'un Poëte doit obferver dans fes
Ouvrages. Et delà vient que Corneille , de
même que Virgile , donne plutôt les excès
d'amour aux femmes qu'aux hommes , de
peur de dégrader fes Heros , & c.
Quoiqu'il n'y ait pas de Livre où l'on
n'ait parlé de l'Amour & des femmes &
que la matiere paroiffe devoir être épuifée
, le Difcours de M. le Blanc contient
des chofes fi neuves & fi fenfées , que
nous ne pouvons nous empêcher d'en
copier ici quelques morceaux.
Elles ont tant de peine , dit-il , à avoйer
qu'elles aiment , que fouvent elles en donnent
des marques avant que d'en convenir. Mais
une femme qui fait tant que d'aimer & de
de le dire , veut abfolument être aimée , &
quand même elle vous aimeroit fans votre
confentement , c'est un crime envers elles que
de n'avoir pas du retour .
Enfin l'honneur qui leur deffend l'amour,
leur doit encor infpirer desfentimens pluo vifs:
ce n'est que le retourqu'on a pour leur tendreffe
qui peut les raffurerfur ce point.... Une femme
II. Vol.
me
DECEMBRE. 1730. 2893 "
qui n'aime pas un homme dont elle eft aimée ,
croit qu'elle ne fait que fondevoir. En aimet-
elle un autre & fans trouverdu retouric'eft un
affront , c'est une injustice , c'est un crime
qui merite la mort. Manque -t-elle de foi
envers fon Amant ? qu'il s'en confole. En
manque-t'il envers elle ? qu'il prenne garde
à lui. Le Sexe alors quitte toute fa foibleffe
& devient intrépide : fa haine eft irréconciliable
& fa vengeance à craindre.
Les premieres impreffions que les femmes
reçoivent , ce font les defirs ; elles en ontlors
même qu'elles en ignorent encore le but
& bientôt après ellespeuvent êtrefans Amans
mais non pas fans amour. Enfin toutes les
femmes n'aiment pas , mais toutes aiment a
aimer: & quand elles n'auroient pas reçu de
la Nature ce penchant à la tendreffe , l'éducation
& l'habitude le leur inspireroient.
L'amourfait leur unique occupation dés leur
tendre enfance , car envain teur deffend-on
d'aimer en leur apprenant les moyens deplaire
, & c.
Nous fommes obligez malgré nous de
rous en tenir là pour parler des Elegies
mêmes . Elles font au nombre de douze
d'environ cent Vers chacune ; & malgré
des bornes fi étroites , toutes très- intereffantes
, on les pourroit à bon droit nommer
des Monologes de Tragedie. Le Lecteur
en jugera par les deux dont nous
II. Vol.
F iiij allons
2894 MERCURE DE FRANCE
allons faire l'Extrait : le choix , au refte ,
nous a fort embarraffez & nous avons
prefque été contraints de nous en remettre
au hazard.
Fulvie , qui eft la IV. eft une Amante
qui fe plaint de la trahison de fon Amant,
qu'elle vient de furprendre dans le tems
qu'il engageoit fa foi à une autre. Elle
commence ainſi :
Où fuis -je ? Dieux , pourquoi me rendez - vous
la vie !
De quels nouveaux tourmens fera-t'elle fuivie
Après le coup affreux qui vient de m'accabler,
A la vie , aux douleurs . Pourquoi me rappeller,
Ah ! perfide Créon , &c.
Voici comme elle continue fes plaintes.
Aux pieds de ma Rivale, oui, c'eft là que le traître,
Lui juroit une foi dont il n'étoit plus maître ,
Lui promettoit de vivre à jamais fous fa Loi ,
De ne me plus revoir , de renoncer à moi ;
Et lorfque j'aurois dû par la mort la plus promte
Effacer dans fon fang & fon crime & ma honte ,
Ma force m'abandonne. Helas ! mon foible coeur,
Au lieu de fe venger, fuccombe à ſon malheur,&c.
Delà elle paffe à des Projets de fa vengeance
que fa tendreffe lui empêche toujours
d'executer : elle veut lui pardonner,
mais enfin la fureur l'emporte fur la foiblefle.
Qüi ,
DECEMBRE. 1730. 2895
Oui , je veux que ma main à tous les deux fatale
Immole entre tes bras mon indigne Rivale ,
Pour lui donner ton coeur tu fçûs me l'arracher ,
Ingrat , c'eft dans le tien que je l'irai chercher
, &c.
On y trouve de tems en tems des morceaux
de la plus grande force ; le Lecteur
en jugera par celui - cy.
Mon fexe dangereux , quoique foible & timide,
Outré dans fon amour fut toûjours intrépide ;
Les meurtres , les poiſons , mille crimes divers
N'ont que trop par nos mains effrayé l'Univers.
3
Fulvie continue & termine cette Elegie
fur le ton qu'elle l'a commencée , c'est - àdire,
par des emportemens qui ne fieroient
pas mal dans la bouche même d'Hermione
, & que Racine peut-être n'auroit pas
defavoüés.
Déja par les fureurs où mon ame s'emporte ,
La haine dans mon coeur fe montre la plus forte
La pitié , les remords lui font place à leur tour ,
Et je fens à la fin que je n'ai plus d'amour .
Où du moins fi. c'eſt lui , qui malgré moi m'entraîne
,
C'est un amour cent fois plus cruel que là haîner
Moi -même en cet inftant, il me glace d'horreur
Ah ! cet excès d'amour en eft un de fureur.
II. Vol. C'cx F v
2896 MERCURE DE FRANCE
C'en eft fait . Livrons - nous aux tranſports de ma
rage ,
Et c'eft peu du trépas de celle qui m'outrage ,
Il faut punir l'ingrat qui vient de me trahir ,
Du moins de ce qu'envain je voudrois le haïr ,
L'un pour l'autre ils ont beau ſe
vivre ,
promettre de
Ils mourront , & contente auffi- tôt de les fuivre ,
Moi-même de mes jours je romprai le lien ,
Pour punir leur amour & contenter le mien .
On voit par ce morceau feul que des
Elégies de cette elpece doivent produire
toute autre chofe que l'ennui , & que
par l'interêt que le coeur y prend & la
chaleur dont elles font écrites , elles pourroient
bien plutôt operer l'infomnie.
M. le Blanc qui a intitulé Thamire la
onziéme Elegie , y reprefente une femme
extrémement aimable , & éperdument
amoureuſe de fon époux , qui après avoir
paffé trois ans avec elle dans une union
& une joye parfaite , a été obligé de la
quitter pour fuivre la gloire & fervir fon
Roi. Il y a long- tems qu'elle n'a reçû
de fes nouvelles uniquement occupée à
le regretter , elle fait un fonge qui l'effraye
, c'eft dans cette fituation qu'elle
lui écrit. Nous paffons mille chofes trèstouchantes
& très - patéthiques , comme
la Relation du fonge , les marques de
II. Vola tendreffe
DECEMBRE. 1730. 2897
tendreffe qu'elle lui donne , pour donner
tout entier un morceau où le Poëte
exprime avec tant de force les avantages
de l'amour conjugal .
Non ce n'eft qu'un lien fi faint , fi légitime ,
Qui peut nous rendre heareux . Que procure le
crime ?
Des momens de plaifir courts & tumultueux :
Le vrai bonheur eſt fait pour les coeurs vertueux.
L'Amour qui joint deux coeurs également fideles,
Reçoit de la vertu mille graces nouvelles ,
Qui nous charment toujours , ne nous laffent
jamais.
L'innocence peut feule en conferver la paix ;
Rien ne l'altere alors . L'objet que l'on poffede
Ne refroidit qu'autant qu'un autre lui fuccede ;
Les defirs fatisfaits tariffent les plaifirs ,
*
Mais tant qu'on s'aime on a toujours mille
defirs.
La plainte que Thamire ajoûte fur ce
que la gloire , fon unique Rivale , lui a
enlevé fon époux , ne font pas moins
touchantes . Delà elle paffe à des Refićxions
fur la valeur de fon époux , fur
le péril qu'il court , fur le fort des armes,
elle lui rappelle la tendreffe de leurs
adieux , qui font du moins auffi touchans
que ceux d'Hector & d'Andromaque ;
enfin elle finit en le priant de ne pas
II. Vol. F vj tarder
2898 MERCURE DE FRANCE
tarder à lui donner de fes nouvelles.
Ce Tableau fi touchant de la tendreffe
conjugale , n'eft pas la feule Piece accomplie
de ce Recueil . La XII. Elegie eft encore
une espece de chef-d'oeuvre en ce
genre. C'eft la plainte d'une fille que fes
parens ont faite Religieufe avant que l'â
ge lui eût donné le tems de connoître le
monde. L'Amour vient la troubler au
' fond de fa retraite , les combats qui fe
livrent dans fon coeur , entre la vertu &
la paffion , la déchirent de mille remords ;
mais enfin la vertu triomphe & calme le
defordre de fon ame. Ce fujet , tout délicat
qu'il paroît , eft très heureuſement
manié , les moeurs y font obfervées & la
Religion même n'en devient que plus ref
pectable.
Les autres Elegies & les Poëfies diverfes
qui font à la fuite , contiennent beaucoup
d'autres beautez que nous ne pouvons
renfermer dans les bornes d'un Extrait
; ainfi nous laifferons au Public la
fatisfaction de les voir & de les examinier
dans leur veritable place. Il y a
long- tems qu'on n'a imprimé de Livre de
Poëlie dont le titre promît moins de fuccès,
& qui en doive avoir un plus grand.
Il est dédié à S. A. S. Monfeigneur le
Comte de Clermont , & on ne fera pas
fâché de voir ici les Vers que M. le Blane
II. Vol.
cut
DECEMBRE. 1730. 2899
eut l'honneur de lire à S. A. S. le jour
qu'il lui préfenta fon Ouvrage , d'autant
plus qu'ils ne font imprimez nulle
>
>
part..
Jeune fur les bords du Permeffe ,
J'ai chanté des Sujets divers ,
Et ce font aujourd'hui ces Vers ,
Que je confacre à Votre Alteffe ;
Mais mes efforts font impuiffans
GRAND PRINCE , quand je veux décrire
Tant de vertus qu'en vous j'admire ,
Et qui méritent notre encens ;
Au fen que mon zele m'inſpire
Ma Mufe ne fçauroit fuffire :
Rien n'exprime ce que je fens..
Ainfi déplorant ma foibleffe ,
Je ne m'en prens qu'à ma jeuneffe ,.
Et telle eft notre vanité ;
Oui, PRINCE , fur tout à mon âge ,
Tout paroît manquer de courage ,
Et même l'incapacité.
Peut être d'un orgueil extrême ,.
Pourrois-je encore être repris ,
Et c'eft paroître trop furpris ,
De ma foibleffe & de moi-même..
Car enfin Virgile autrefois ,
Avant que de chanter d'Augufte ,.
Et les Vertus & les Exploits,
II. Vol
2990 MERCURE DE FRANCE
"
A Coridon prêta ſa voix ,
Et fouvent fous un tendre Arbufte ,
Chanta les Bergers & leurs Loix.

Devois- je montrer plus d'audace ?
Toutes fois fi quelque fuccès ,
Couronnoit mes foibles Effais ,
Si moi- même fur le Parnaſſe ,
J'obtenois un jour une place ,
Prince , je n'y chanterois plus ,
Que vos bienfaits & vos Vertus.
NOUVEAU CALENDRIER HISTORIQUE
pour l'année 1731. contenant
l'Origine de Paris , des Evenemens
remarquables arrivés chaque jour , un
Traité de la Sphere , les poids & mefures
, les Naiffances des Princes , les Archevêchés
& Evêchés , les Créations des
Parlemens & autres Jurifdictions , les Bibliotheques
, les Académies , l'Inftitution
des Chevaleries , les Vacations du Parlement
& de la Cour des Aides ; enrichi
de figures. AParis , chez Alexis Mefnier,
rue S. Severin , & au Palais ruë
d'Or.
,
au Soleil
ALMANACH DES MARCHANDS
& Négocians pour l'année 1731. dans
lequel les jeunes Commerçans trouveront
les noms des principales Marchandiſes
II. Vol.
ErranDECEMBRE.
1730. 2901
"
Etrangeres , ainfi que ceux des Pays d'où
elles font amenées à Paris , & la maniere
dont trafiquent certains habitans de plufieurs
Ifles d'Afie , d'Afrique & d'Amérique
, avec la divifion des poids & mefures
, les principales Routes & Foires
du Royaume. A Paris , chez le même
Libraire.
NOUVELLES POESIES SPIRI
TUELLES ET MORALES fur les plus
beaux Airs de la Mufique Françoiſe &
Italienne , avec une Baffe continuë. Deuxiéme
Recueil . A Paris , chez Guillaume
Defprez , rue S. Jacques &c. 1731. in 4-
prix 6. livres broché.
On a fait dans ce Recueil comme dans
l'autre un choix des Airs les plus parfaits
& les plus eftimés de M M. Lully , Lambert
, Campra , Defmarets , Deftouches
Clerambaut , Debouffet &c . On y trou
vera tous les fujets de pieté & de morale
que l'on peut défirer ; on l'a orné d'une
Cantate Françoife & d'une Cantate Italienne.
*
Ces deux Recueils enfemble contiennent
près de deux cens Airs fur tous les
differens caracteres de la Mufique Françoiſe
& Italienne , tant vocale qu'inftru
* Sunt breves mundi rofa.
II.Vol. mentalej
2902 MERCURE DE FRANCE
mentale , Airs de Violon , Piéces de Clavecin
& de Viole, Mufettes , Doubles dans
le gout de M. Lambert , & un grand
nombre d'Airs de Baffe , aufquels on a
ajouté une Clef pour en faciliter le chant
à un Deffus ; & afin qu'une même perfonne
puiffe chanter tout l'Ouvrage , on
a mis à la portée de la voix toutes les
Piéces qui le compofent ; on les a diftribuées
de maniere qu'on n'eft prefque
jamais obligé de tourner la feuille , ce
qui n'eft pas une petite commodité pour
ceux qui chantent & qui jouënt en même
tems de quelque Inftrument. Les
Baffes ont été chiffrées avec grand foin ,
& l'on a marqué à chaque Air fon mouvement
& les agrémens qui lui conviennent.
La plus grande partie de ces Airs
peuvent fervir de Piéces pour le Clavecin,
la Baffe de Viole , le Violon & la Flute.Allemande.
On trouvera dans les deux Recueils
environ cinquante Chanfons Morales
qui peuvent plaire indifferemment à tout
le monde , & fervir même aux perfonnes
de pieté , que la complaifance oblige
quelquefois de chanter en compagnie.
On y trouvera de plus cinquante Fables
choifies dans le gout de M. De la
Fontaine , fur des Vaudevilles & petits'
Airs aifés à chanter , avec leur Baffe &
II.. Vol.
une
DECEMBRE . 1730. 2903
une Baffe en Mufette , en faveur des enfans
qui pourront facilement les accompagner
fur le Clavecin ou fur tout autre
inftrument. Ces Fables peuvent fervir aut
même ufage que les Chanfons Morales .
pour-
On a ajouté à la fin de l'Ouvrage un
Supplément de petits Airs , avec leur
Baffe & une Baffe en. Mufette , fur lefquels
ceux qui aiment la diverfité
ront encore chanter la plupart des Fables,
comme celle du Renard & du Bouc , fur
l'Air Attendez - moi fous l'Orme , ou Or
nous dites, Marie.
On travaille à un troisième Recueil dans
le même gout.
DEUXIE'ME RECUEIL d'Airs nouveaux
férieux & à boire , dédié au Public
, compofés par M. Debouffet , Maî
tre de Mufique &c. A Paris , chez l'Auteur
, rue du Plâtre , au Marais. Chez, Boivin
& Le Clerc. 1731. prix 3. livres.
DESCRIPTION ABREGE' de la Carte
Genérale & Hiftorique , de la Monarchie & du
Militaire de France , tant ancien que moderne
avec les explications &c. Dédiée au Roi , préfentée
à Sa Majeſté , à Marli le 17. Fevrier
1730.
>
PREMIERE FEUILLE ou Planche. Un
Soleil , fimbole de la France , au Frontispice ,
accompagné de Cornes d'abondance &c. le Pa-
11. Vol. villon
2904 MERCURE DE FRANCË
villon Royal dans toute fa fplendeur , aux Armes
de France & de Navarre , avec les Supports
tenans les Bannieres de France & de Navarre ,
orné des Colliers des Ordres du Roi , du Cocq.
de la France , avec cette Devife : Implet terrore
Leones , de l'ancien cri de guerre de nos Rois ,
Mont joye S. Denis , le tems de fon origine ,
de l'ancienne devife des Lys , Lilia non laborant,
neque nent. En S. Mathieu , Chapitre 6.
&
;
Au- deffus du Pavillon eft une Minerve * affife
dans fa gloire , appuyée à fa droite fur le Fortrait
du Roi , au milieu de fon bouclier , couronné
par une Renommée , & foutenu par l'Hiftoire
, & à fa gauche eft un Génie heureux qui
apporte à cette Déeffe le Portrait de la Reine
orné de Lys , accompagné des Attributs de la
Sageffe , de la Gloire & de la Science qui l'environnent.
Aux côtés de ce Cartouche font les
Repréfentations en Blazon des Colliers & des
Gordons des Ordres S. Michel & du S. Efprit ,
avec le tems de leurs Inftitutions par les Rois
les Portraits d'Henri le Grand & de Louis le
Grand , Ayeuls de Louis 15. placés au-deffus de
deux Arcs de Triomphes ornés des Armes du
Roi , & cette Devile : Simili candore corufcant,
des Armes de la Reine , & cette devife : Fulget.
inardefcens radiis , des Armes du Dauphin , &
cette Devife : Gratior it dies , des Armes de
Navarre , & cette Devife : Numerat pro dote
triumphos ; & au bas eft le grand Titre en lettres
Aeuronnées qui annonce le fujet de cet Ouvrage,
au deffous duquel eft un nouvel Attribut de la
Paix , repréfenté par trois Lys en fleurs für pied,
un Aigle & un Lion aux côtés , & cette Devife:
Pace data eoeunt Reges , avec une Epigramme
fur l'origine des Lys. Ce grand Cartouche eft
fermé
par de riches ornemens , accompagné de
11. Vel
*deux
DECEMBRE . 1730. 2905
deux grands Palmiers qui foutiennent des Trophées
anciens & modernes , executé en Tailledouce
, fur les deffeins officieux de M. Oppenor.
II. Feuille. Abregé de la Vie des Rois de France
qui ont créé , formé & regimenté les Troupes
du Royaume , avec les évenemens arrivés dans
le cours de leurs Regnes , depuis Pharamond ,
premier Roi , jufqu'à la fin du Regne de Louis
XIV. 65 Roi. Cette Hiftoire renferme l'origine
du nom François , le commencement de la Monarchie
, la naiffance du Chriftianifme dans la
Monarchie , le nombre de Rois de la premiere ,
deuxième & troifiéme Race , & le tems de leurs
durées jufqu'à prefent , avec les Conquêtes & évenemens
mémorables pendant le Regne de Louis
le Grand , détaillés par jours , mois & années ;
enfuite la maladie , les dernieres paroles & la
mort de ce grand Roi , en huit colonnes dans
une Bordure enrichie des Portraits des Rois de
France , & d'Emblêmes de leurs Regnes en Taille
douce.
III . Feuille. Grands & premiers Officiers Militaires
de France qui ont été nommés & gradués
par les Rois depuis le tems de leurs créations &
& inftitutions jufqu'à préfent , fous quels Rois ,
& en quelles années ils ont fervi , diftribués en
dix grandes colonnes.
L
avec-
IV. Feuille . Vue & Perfpective de la Ville de
Paris , Capitale du Royaume , du côté du Pont
Royal les Armes de la Ville au-deffus ,
cette Infcription : Prona fides Principis Urbium.
La defcription abregée de Paris , avec les noms
des Officiers du Gouvernement ; d'un côté eft
la Chronologie des Rois de France & les années
de leurs Regnes , depuis Pharamond , premier
Roi , jufqu'à Louis XV. 66e Roi , & de l'autre
la tige & la Génealogie de la Maifon Royale de
II. Vol. Bourbon ,
2906 MERCURE DE FRANCE
1
Bourbon , depuis Louis de Bourbon , Comte de
Clermont , Petit- Fils de S. Louis IX . 44 Roi ,
jufqu'à Henri IV . Roi de France & de Navarre,
avec les alliances. Enfuite la Maifon du Roi &
fon origine , compofée de huit Compagnies de
la Garde à Cheval & d'une Compagnie de Grenadiers
à Cheval , avec l'Etat Major de la Cour,
ornée aux côtés du Titre de Trophés ancien &
moderne , en Taille -douce , ainfi que les Unifor
mes , Etendarts & Armures d'ordonnance ; ces
premieres Troupes font détaillées fuivant leurs
rangs , & partagées en 15. colonnes fur neuf
lignes , depuis leurs créations jufqu'au 15. Fevrier
1730. avec le nombre des Officiers , des
Ecuyers & Maîtres qui les compofent.
V. Feuille. Vue & Perfpective de Verſailles , du
côté de la grande Place d'Armes , on y voit l'entrée
du Roi dans la premiere Cour , les Gardes
Françoifes & les Gardes Suiffes fous les armes
l'Ecu de France aîlé au - deffus , avec cette Infcription
: Regia Solis , & au deffous la Defcription
abregée de la Ville & Château Royal de
Verfailles & les noms des Officiers du Gouvernement
; d'un côté font les Génealogies & Alliances
de la premiere , deuxième & troifiéme
Branche de la Maiſon Royale de Bourbon , & de
l'autre les Génealogies & Alliances de la quatriéme
& cinquième Branche , dont font iffus depuis
Henri IV. les Rois de France , Philippe V.
Roi d'Espagne , & les Maifons d'Orleans , de
Condé & de Conti.
Enfuite la Gendarmerie & fon origine , compofée
de quatre Compagnies de Gendarmes du
Roi , de fix Compagnies de Gendarmes & de fix
Compagnies de Chevaux-Legers des Princes, avec
l'Etat Major , ornée aux côtés du Titre de Trophées
anciens & modernes , ainfi que leurs Uni-
11. Vel.
formes,
DECEMBRE . 1730. 2907
formes , Etendarts & Armures d'ordonnance . Ces
Compagnies qui marchent après la Maifon du
Roi font détaillées fuivant leurs rangs , & partagées
en 15. colonnes fur feize lignes , depuis
leurs créations juſqu'au 15. Fevrier 1730. avec
le nombre des Officiers.
VI. Feuille. Infanterie Françoife & Etrangere ,
fon origine , fous quel Roi , & en quelle année
elle a été regimentée avec les Etats Majors , ornée
aux côtés du Titre de Trophées anciens & modernes
; enfuite font les noms des Colonels Géneraux
de l'Infanterie Françoife & Etrangere ,
des Suiffes & Grifons au 15. Fevrier 1730. - lacréation
de fes Charges & le tems de leur nomination.
Au deffous font les noms , qualités &
grades des Directeurs & Infpecteurs Géneraux
de l'Infanterie , avec leurs créations , nominations
& départemens. Cette Infanterie eft compofée
de cent Régimens François & de vingt Régimens
Etrangers , à commencer par les Gardes
Françoifes & les Gardes Suiffes , qui font partie
de la Maifon du Roi , & marchent à la tête de
toute l'Infanterie de France , par le Reglement
de Louis XIV . & enfuite de Picardie , Piemier
Régiment &c. détaillés fuivant leurs rangs,
avec leurs Drapeaux , Uniformes & armures
d'ordonnance , & partagées en trois grandes colonnes
, qui comprennent 15. colonnes chacune
fur dix-fept lignes
VII. Feuille. Suite de l'Infanterie Françoiſe
& Etrangere , compriſe dans 3. grandes colonnes,
qui forment quinze colonnes chacune , ſur 23.
Tignes , détaillée comme ci - deffus , & au bas le
nombre géneral des Officiers , celui des Régimens
fur pied , des Cadets , Sergens , Soldats ,
Tambours & Fifres qui les compofent , tant
François qu'Etrangers , avec le nombre géneral
11, Vol.
de
2908 MERCURE DE FRANCE
de leurs Drapeaux , Colonels & armures d'or
donnance jufqu'au 15. Fevrier 1730.
VIII. Feuille. Cavalerie Legere Françoife
& Etrangere & fon origine , fous quel Roí , &
quelle année elle a été régimentée avec les
Etats Majors , ornêe aux côtez du titre de Trophées
ancien & moderne , les noms des Cololonels
, Meftre de Camp & Commiffaires Geneneraux
de la Cavalerie ; au 15. Février 1730. là
création de fes Charges & le tems de leur nominations
; au-deffous les noms , qualitez & Grades
des Directeurs & Infpecteurs Generaux de la Cavalerie
, avec leurs créations , nominations &
départemens ; cette Cavalerie eft compofée de 54.
Régimens François , à commencer par celui du
Colonel General , premier Régiment, &c. y compris
le Régiment Royal de Carabiniers , & de 5 .
Régimens étrangers , compris les deux Régimens
d'Huffarts , détaillez fuivant leurs rangs , avec
leurs Etendarts uniformes & Armures d'Ordonnance
, & partagées en 3. grandes Colonnes qui
comprennent 14. Colonnes chacune , fur trente
lignes.
IX. Feuille , fuite de la Cavalerie Legere Françoife
& Etrangere , détaillée comme cy- deffus
& au bas le nombre general des Officiers , celui
des Régimens fur pied , des Maréchaux des Logis
, des Brigadiers , Fouriers , Maîtres , Trompettes
& Timballiers qui les compofent , tant
François qu'Etrangers , avec le nombre general
de leurs Etendarts , juſques & compris l'Ordonnance
du Roi du 30. Mars 1730.
en
Dragons & leur origine , fous quel Roi ,
quelle année ils ont été régimentez , avec les Etats
Majors ; ornée aux côtez du titre de Trophée
ancien & moderne , enfuite font les noms des
Colonels & Meftres de Camp generaux des Dra-
2
II. Vol gons
DECEMBRE. 1730. 2909
gons , au 15. Février 1730. la création de fes
Charges & le tems de leur nomination . Ces
Dragons font compofez de 15. Régimens , à
commencer par celui du Colonel General , premier
Régiment , &c. fuivant leurs rangs , avec
leurs Etendarts uniformes & Armures d'Ordonnance
, partagez en deux grandes Colomnes qui
comprennent 14. Colonnes chacune , fur 15. lidans
la 8 & 9e Feuille ; & au bas le nombre
general des Officiers , celui des Régimens fur
pied , des Maréchaux des Logis , des Brigadiers,
Fouriers , Dragons & Tambours qui les compofent
, avec le nombre general de leurs Etendarts ,
jufqu'au 15. Février 1730 .
gnes ,
Troupes formées en Compagnies , Bataillons ,
Efcadrons & Brigades , au nombre de 822. Compagnies
& un quart de Compagnie , tant François
qu'Etrangers , avec les Etats - Majors , qui
font , la Compagnie des cent Gardes Suiffes ordinaires
du Corps du Roi ; celle des Gardes de la
Porte ; celle des Gardes de la Prévôté de l'Hôtel ;
les deux Compagnies des Cadets Gentilhommes ;
les Compagnies de l'Hôtel Royal des Officiers &
Soldats Invalides ; celles des Soldats de Milices ;
les Compagnies Franches & de Partifans ; celle
de la Connétablie de France ; & les Compagnies
des Maréchauffées duRoyaume, qui font Militaires
depuis l'Ordonnance du Roi de 1720. détaillez
depuis leurs créations jufqu'au 15. Février 1739.
ornée aux côtez du titre de Trophée ancien &
moderne , ainfi que leurs Drapeaux , Etendarts
uniformes & Armures d'Ordonnance ; avec le
nombre general d'Officiers & d'hommes qu'elles
compofent.
Dixiéme Feuille . Maréchaux de France , vivans
au 15 Février 1730. ornée aux côtez du titre des
Bâtons des Maréchaux de France , & des Bâtons
11. Vel.
de
2910 MERCURE DE FRANCE
de Commandans ; leur origine & dates de leurs
Promotions , avec celles de leurs Receptions de
Chevaliers des Ordres du Roy ; les noms , &
qualitez des Gouverneurs & Lieutenans Generaux
des Provinces du Royaume & leur origine ; les
années de leurs nominations & receptions de
Chevaliers des Ordres du Roy , la fuite des Chevaliers
des Ordres du Roy & dattes de leurs receptions
, le nombre general des Gouverneurs
Lieutenans de Roy , Commandans , Majors ,
Aydes- Majors & Capitaines des Portes, des Etats
Majors des Villes principales & Places de Guerre
du Royaume.
A droite , font les Officiers Generaux des Armées
, vivans au 15 Février 1730. qui comprennent
les noms & qualitez des Lieutenans Generaux
& des Maréchaux de Camp; leurs créations,
dattes de leurs nominations & leurs receptions de
Chevaliers des Ordres du Roy. De l'autre côté ,
font les noms & qualitez des Brigadiers des Armées
du Roy , vivans au 15 Février 1730 .
de
l'Infanterie , de la Cavalerie , & des Dragons ,
avec leurs créations , dattes de leurs nominations
& receptions de Chevaliers des Ordres du Roy.
Enfuite font les noms & qualitez des Maréchaux
Generaux des Logis , des Camps & Armées du
Roy , du Major General de l'Infanterie, du Maréchal
general, & des deux Maréchaux des Logis
de la Cavalerie , avec leurs créations & nominations.
Au bas eft le commencement des Batailles
mémorables que les François ont gagnées ,
depuis la Fondation de la Monarchie,depuis Tolbiac
, en 496. jufqu'en 1485. fous quels Rois &
en quelles années , reprefentées en fept Tableaux.
Onziéme feuille. Commencement de l'Hiftoire
abregée de Louis XV. 66 Roy , avec les prin-
>
II. Vol
cipaux
DECEMBRE. 1730. 2911
cipaux évenemens arrivez depuis la naiffance de
Sa Majefté , juſqu'au 15 Février 1730. Vingtiéme
année accomplie de Sa Majefté , ornée de
Portiques Royaux , & cette devife : Dulce & decorum,
reprefentée en taille douce par la Maffuë
d'Hercule , debout ; entrelaffée de branches d'Olivier
& de Laurier. Au deffous font les armes du
Duc d'Orleans , premier Prince du Sang, Grand
Maître de l'Ordre Royal, Militaire & Hofpitalier
de Notre-Dame du Mont Carmel & de S. Lazare
de Jerufalem ; fa nomination par le Roy , Protecteur
& Fondateur de l'Ordre , & la devife :
Dieu, & mon Roy. L'origine & la Defcription
de l'Ordre de S. Lazare , & de celui de Notre-
Dame du Mont- Carmel , réuni par Henri IV.
Au côté droit et l'Artillerie de France , avec
fes Attributs , les Armes du Duc du Maine, Prince
du Sang , Grand Maître & Capitaine general ,
avec fa nomination par Louis XIV . & cette Devife
: Ratio ultima Regum. Les Principaux Officiers
de l'Artillerie nommez , depuis fon origine
jufqu'au 15 Février 1730. Au bas , le Corps
des Off..Ingén.du Roy,& fon origine ordinaire ;
détaillez fous les ordres du Marquis d'Asfeld ,
Directeur general des Fortifications de France ,
&c. De l'autre côté , la dignité de Miniſtre & Sécretaire
d'Etat de la Guerre , la création de cette
Charge , les noms , & années des nominations
dés Intendans , Commiffaires du Roy , départis
dans les Généralitez du Royaume , les Capitaines
, Prevots , Grands - Baillifs & Sénéchaux
d'Epée , qui commandent la Nobleſſe de France ,
& leur origine , avec leurs Lieutenans d'Epée ,
dans les Pays & Généralitez où ils réfident ; les
noms des Commiflaires ordinaires , Provinciaux
des Guerres , dans les départemens du Royaume,
& leur création.Au deffous font tous les Officiers
11. Vol. G Prin2912
MERCURE DE FRANCE
Principaux en charge & par commiffion , tant
d'Epée , que de Finances , attachez au Militaire ,
fuivant leurs créations , départemens & années
d'exercice. Au bas eft la fuite des Batailles mémorables
que les François ont gagnées depuis
1488. jufqu'en 1645 , fous quels Rois & en quelles
années , en fept Tableaux .
Douziéme Feuille. Récapitulation generale des
Officiers & des Troupes , ornée aux côtez de
Trophées & d'attributs militaires ; fçavoir , les
nombres generaux des Officiers de la Maifon du
Roy, de la Gendarmerie , des Colonels , Meftres
de Camp , Lieutenans Colonels , Commandans ,
Majors , Aydes- Majors , Capitaines , Lieutenans
& Officiers fubalternes de toutes les Troupes dų
Roy , en pied , regimentées, & formées en Compagnie
, avec leur montant general,tant François
qu'Etrangers.
Les nombres generaux des Brigadiers d'armée,
Meftres de Camp , Lieutenans Colonels, Majors ,
Capitaines & Lieutenans Réformez , tant à la fuite
de l'Infanterie , de la Cavalerie Françoise &
Etrangere , que des Dragons ; à la fuite des Places
de Guerre , & formez par Brigades fur les
Frontiéres ; ainfi que les Officiers retirez dans
les Provinces , par leurs anciens fervices ; avec
leur montant general, tant François qu'Etrangers,
Au côté droit , font les Récompenfes honorables
; reprefentées. par la Vertu , jointe aux attri
buts militaires , en forme de Trophée; les Ordres
du Roy , avec cette Devile : Honori non prada ,
au deffous font les Defcriptions des premiers
Ordres de S. Michel , & du S. Efprit , depuis
leurs inftitutions jufqu'à préfent.De l'autre côté,
font les Récompenfes Militaires , l'Ordre Royal
des Chevaliers de S. Louis , reprefenté par la vûë
de l'Hôtel Royal des Invalides, avec cette devife !
Beili II. Vol.
DECEMBRE 1730. 2913
Bellica Præmium Virtutis . Son établiſſement par
LOUIS XIV. jufqu'à prefent , &c. Au deffous
font les nombres generaux détaillez par rangs ,
des Ecuyers , Maîtres de la Maiſon du Roy , des
Maîtres de la Gendarmerie , des Soldats de l'In,
fanterie , des Maîtres de la Cavalerie , François
& Etrangers , & des Dragons , diftinguez par
colonnes , avec le nombre general des Bataillons
& d'Eſcadrons de chaque Corps de Troupes, formées
en Compagnies & en Regimens fur pied ,
le 15 Février 1730. Et au bas , le montant general
des Troupes de Terre , tirées complettes ,
fuivant la derniere Ordonnance du Roy, du 10
Decembre 1727.qui regle le payement des Troupes
de Sa Majefté; au côté droit eft l'étimologic
du mot d'Infanterie , fon origine & changement,
fucceffivement jufqu'à prefent ; l'origine de la
Maifon du Roy , & des premiers Gardes de la
Perfonne Sacrée des Rois ; de la premiere Gendarmerie
, de la premiere Cavalerie legere & des
premiers Dragons de France. Au deffous eft la
Notice des Ordonnances Royales & Militaires &
des Ecrivains que l'Auteur de cette compilation
a confultez , avec la datte des Editions de leurs
ouvrages. Et au côté gauche , des Obfervations
abrégées pour la Regle & la Difcipline des Troupes
, extraites de l'Ordonnance du Roy de 1727.
Au bas de cette derniere feuille , eft la fuite des
Batailles mémorables, gagnées par les François,
depuis 1645.jufqu'en 1712.de la derniere Guerre,
qui font terminées par le vrai caractere & qualitez
que doit avoir un parfait homme de Guerre ;
reprefentées en fept Tableaux.
La Bordure de cette Carte a fept pouces de
large ; dans tout fon contour , elle renferme 110
Plants,avec les Deſcriptions aux côtez & le nombre
d'Officiers des Etats Majors complets & non
11. Vol.
Gij coms
2914 MERCURE
DE FRCEAN
complets , de chacune des principales Places de
Guerre & Maritimes du Royaume,diftinguez par
départemens & gouvernemens generaux des Provinces,
avec leurs diftances de Paris , & de l'une à
l'autre ; fçavoir , de Picardie , Artois , Flandres ,
Haynault ,Champagne,des Trois - Evêchez, Alface,
Franche-Comté , Bourgogne , Dauphiné , Provence
, Languedoc , Rouffillon , Béarne & Bifcaye,
Guyenne, Pays d'Aunis, Bretagne & Normandie
, le tout exécutez en Taille douce ; ornées
de Fleurs de Lys, de Palmes , & de Lauriers ;
le milieu de la Bordure de la droite renferme la
Defcription hiftorique du Royaume de France
fondé l'an 420. & le milieu de la gauche , la Deſcription
hiftorique du Royaume du Pologne ,
fondé l'an 550. Le milieu du bas de cette Bordure
eft enrichi des Chifres Royaux ,couronnez des armes
de la Reine & du Dauphin,toujours en taille
douce;& les coins font fermez par la Repréſentation
des quatre Principaux vents , avec Trompettes
& Banderolles de France & de Navarre
en forme de Renommée.
?
Pour la facilité de l'ufage & de la vente de cette
Carte , à un prix raifonnable , on la mettra dans
toute fon étendue,fur Gorges, elle aura fept pieds
en quarré , compris fa Bordure ; laquelle contiendra
dix - neuf demie- feuilles de papier grand
de 22 Aigle , affemblées par ordre militaire ,
pouces fur 16 pouces de haut chaque feuille , elle
pourra fe mettre dans une place proportionnée
à cette étendue.
Pour la facilité & la portée de la vûë, la Carte
fera féparée en deux parties,montées fur Gorges,
par moitié , confervant toujours fa même largeur
, réduite à trois pieds & demi de hauteur ,
que pourra placer de bout en bout
a vis, dans une Salle ou Galerie, &
l'on
pour
3 ou visla
com-
II. Vol
moDECEMBRE.
1730. 2915
modité du Cabinet, des Bibliotheques & du tranf
port ; cette Carte ſera réduite & formée en livre
de dix-neuf feuilles ou Planches entieres , numérotées
, de la même hauteur & largeur que les
feuilles cy-deffus expliquées, attachées à onglets ,
& couvert d'un papier marbré ; grand in folio ,
que
l'on pourra
faire relier, non compris la feuille
d'Avertiffement qui y fera jointe, pour trouver
& joindre enfemble facilement les differens fujets
de cet Ouvrage , aifez à fatisfaire la connoiffance
de l'Hiftoire & du Militaire.
L'Auteur ſe promet , par fon extrême diligence
, de pouvoir faire achever la gravure & l'impreffion
dans le courant de l'année prochaine
1731. Et quant aux differents changemens
& mutations du Militaire arrivez depuis
l'Epoque de cette Carte , du 'IS Fév. 1730
& qui arriveront juſqu'au 15 Fév. 1731. l'Auteur
donnera alors un petit Livret imprimé, fous
le titre de Supplément aux Explications Militai
res , qu'il continuera de donner à peu de frais ,
d'année en année , le même jour 15 Février, pour
fuppléer & foutenir l'état préfent, en tous temps,
de la Carte generale de la Monarchie & du Militaire
de France , tant ancien que moderne , en
vertu de fon Privilége.
Le fieur Lemau Delajaiffe Auteur & Inventeur
, ancien Officier de la Maiſon d'Orleans , &
dans l'Ordre de S. Lazare , loge à Paris , ruë
près la Fontaine de Richelieu , où il fera voir
l'Original de cet Ouvrage.
II. Vol. & iij LETTRE
2916 MERCURE DE FRANCE
EXTRAIT d'une Lettre du R.P.Emmanuel
de Viviers , Capucin , écrite de
Toulouse le 30. Novembre 1730.
J'A
'Ay lû dans le Journal de Verdun de
ce mois , que le P. Papon , Capucin , a
obfervé l'Aurore Boréale qui parut le 7
d'Octobre dernier à Gannat , en Bourbonnois.
J'envoyai mon obfervation à
M. Caffini , deux jours après l'aparition'
de ce Phénoméne , dont voici le détail.
Le 7 Octobre , environ fur les fept
heures & demie du foir , j'apperçus une
petite lumiere fort vive , à l'endroit où
le Soleil s'étoit couché. Cette lumiere
s'augmenta peu à peu & devint fort éclatante.
Elle étoit dirigée au Nord- Oüeft ,
changeoit fouvent de figure, s'élevoit fur
Phorifon par intervalles , & s'abbaiffoit
en même-temps, jettánt de petites flammes
vives & legeres , qui étoient quelquefois
ondoyantes ; de forte, qu'environ
vers les neuf heures " , elle occupa une efpace
de l'horifon , d'environ cinquante
dégrez.
Če Phénomené demeura dans cette fi-.
tuation jufqu'à onze heures & demie ,
qu'il s'éleva inſenſiblement à la hauteur
de plus de 40 dégrez,& fe divifa en trois
bandes , prefque paralleles entr'elles,dont
It. Vol.
les.
DECEMBRE. 1730. 2917
les extrémitez étoient canellées . Ces bandes
jettoient un grand nombre de flammes
, qui s'étendoient par tout le ciel , &
éclairoient toute la campagne. A douze
heures & environ 30 minutes , une de
ces bandes changea de figure , & devint
comme un tapis de quatre toifes de largeur
, formant une queue femblable à
celle d'une Cométe , laquelle étoit variée
de differentes couleurs . Ce Phénomene
dura jufqu'à quatre heures & demie. Les
obfervations que plufieurs Membres de
notre nouvelle Académie ont faites en
leur particulier fe. trouvent conformes à
ce que j'ai l'honneur de vous mander.Ce
jour-là il fit un vent marin tres- violent,
accompagné d'éclairs , & de tonnerres ,
qui furentfuivis de quelque peu de pluie.
Le fieur Cuffon , Libraire à Nancy
vient de nous envoyer deux Brochures
in 4°. dont l'une eft de grand & l'autre
de petit papier. C'eft un effay d'une nouvelle
Edition de l'Imitation de J. C. mife
en vers par M. Corneille , à la fuite de
laquelle on trouvera l'Office de la fainte
Vierge , les fept Pleaumes de la Peniten
ce , les Vêpres du Dimanche, les Hymnes
du Breviaire Romain , pour tout le cours
de l'année ; le tout mis en vers par le
même Auteur,avec le Texte latin en mar-
"
II. Vol. G iiij ge.
2918 MERCURE DE FRANCE
ge. A Nancy , chez J. B. Cuffon , Imprimeur-
Libraire de S. A. R.
L'Imprimeur diftribue ces deux Brochures
, pour confulter le public fur l'édition
qu'il médite . Comme il a réformé
plufieurs endroits de la Traduction de
I'Imitation , & qu'il a changé des termes
furannez , des tours un peu durs , des
pluriels hors d'ufage & quelques autres
negligences pardonnables au fiecle de l'Illuftre
Traducteur , il ne veut pas s'expofer
à donner ainfi les Ouvrages de M. Corneille
fans favoir auparavant fi ces Réformations
feront reçues favorablement , &
fi on agréera qu'un tel Auteur ait été retouché.
Il rend compte dans l'avis qu'il donne
au Lecteur , à la tête de la grande Brochure
, de l'arrangement qu'il prendra
dans cette Edition . Il y joindra l'ancien
Texte des endroits retouchez. Il avoit
d'abord mis dans le petit effay , l'ancien
Texte au bas des pages : mais après avoir
confideré que ces Scholies ne font pas du
gout de tout le monde , il s'eft déterminé
à les réferver pour la fin , & à les y placer
dans une espece d'Errata , à deux colonnes
, dont l'une contiendra la Lifte des
endroits retouchez , & l'autre expoſera
l'ancienTexte. On trouvera auffi dans cette
Edition un abrégé de la vie de M. Corneille.
II
DECEMBRE. 1730. 2919
pour
Il paroît que l'Imprimeur ne veut rien
épargner , ni pour la bonté du papier, ni ,
la beauté & la netteté des caracte
res . Il s'eft déterminé à fuivre la forme de
la grande Brochure , dans fon Edition , fi
on en juge par l'avis qu'il y donne au
Lecteur, & qui ne fe trouve point dans la
petite. Il eft au refte à fouhaiter que l'Editeur
enrichifle fon Livre de Vignettes
dignes de cet Ouvrage . Celles des Effays
ne paroiffent pas affez choifies , & ne répondent
point à la beauté des caracteres .
Le Sieur L. SURUGUE , Graveur du
Roy , donne avis au public , qu'il diftribue
les 4 & 5 Eftampes du Roman Comique
, d'après les Tableaux de M. Pater. Il
demeure rue des Noyers , entre les deux
premieres Portes cocheres , en entrant par
la rue S. Jacques, vis - à- vis le mur de faint
Yves , à Paris. Nous avons donné les fujets
des trois premieres. Celles- cy qui ne
font pas moins bien traitées , reprefentent
: Rabotin à Cheval, la Carabine tirant
fous lui , & la Rapiniere tombant fur ba
Chevre.
On mande de Lisbonne que le 4 du
mois de Janvier , vers les 8 heures du foir
il parut à l'horifon une Aurore Boréale ,
d'une feule colonne , qui une heure après
IF. Vol. fe Gv
1 2920
MERCURE
DE FRANCE
fe fépara en quatre. Leur lumiere fut
vive vers les onze heures du foir , mais
elle diminua enfuite infenfiblement & difparut
entierement à minuit . Ce Phénoméne
a été vû à Elvas , à Campo-Mayor ,
à Evora , à Porto , & dans plufieurs autres
Villes de Portugal.
Nous fommes trop attentifs à celebrer
le progrès des beaux Arts en France,
pour ne pas dire quelque chofe d'un
grand Ouvrage d'Orfévrerie , fait depuis
peu par M. Meiffonniere , & que quantité
de Curieux ont été voir chez lui avec
une tres- grande fatisfaction .
و
C'eft la Châffe ou Tombeau de S. Aignan
qui doit être pofée à Orleans
dans l'Eglife érigée fous l'invocation de
ce Saint. Elle a la forme d'une efpece
de Tombe antique. Au deffus font
deux Cherubins , dont les aîles entrelaffées
foutiennent une Croix , & des
Rayons au bas des Cherubins ; le long
des deux côtez tombent des Fef
tons de fleurs izolées. Au corps du
deffous de cette Tombe font deux basreliefs
, couronnez par deux frontons
ceintrez ; un devant , l'autre derriere
haut de 20 pouces , où font repréſenteż
deux fujets de la vie de S. Aignan ; on
voit à celui de devant le Saint en priere,
11. Vol.
au
DECEMBRE. 1730. 2921
au bas d'un Autel , pour implorer la délivrance
d'Orleans , pour lors affiégé par
Atila ; à l'autre , S. Aignan qui guérit
Agripin , General des Romains , d'une
bleffure à la tête . Les principales figures
de ces deux bas- reliefs ont 15 pouces de
proportion , & font prefque izolées . Le
pourtour eft orné de Palmes , & au deffus
du fronton fortent des Guirlandes de
Feuilles de Chêne , qui entourent le
Corps de la Châffe . Aux deux bouts font
des Cartelles , où font d'un côté les Armes
de l'Evêque d'Orleans & de M. le
Coadjuteur; & de l'autre , les Armes de
la Ville & du Chapitre. La Châffe a cinq
pieds de haut , fur quatre pieds & demi
de long & deux pieds & demi de large .
Voicy la Defcription de l'Autel & la
décoration magnifique où la Châffe fera
pofée , pour pouvoir juger de l'effet
qu'elle fera.
.
L'Eglife eft gotique , le fond du Chour
eft angulaire , & chaque Angle eft percé
d'une arcade qui éclaire les bas côtez :
l'Autel eft izolé a huit pieds de diftance
du fond de la Nef, & élevé au
deffus de fept marches , dont la forme eft
circulaire , & foutenu par deux Confoles
de marbre de ferrancolin ; au deffus eft
pofée une Croix , formée par quatre
rayons ; au centre eft une Couronne d'EII.
Vol.
Govj - pine
2922 MERCURE DE FRANCE
pine , & au deffous un Groupe de Cherubins
& de nuages d'argent , pofez fur
un pied deftail , en partie doré , & fix
Chandeliers d'une belle forme ; le Retable
eft de Bréche violette, orné de bronze
doré .
L'Arcade du milieu du fond de la
Nef eft ceintrée fur fon plan , & s'éleve
en vouffure , dont le couronnement eft
de deux pieds & demi , plus élevé du percé
de l'Arcade , qui eft revêtu de marbre
Verdcampam , de même que les pieds
droits & les bandeaux des deux Arcades
des côtez , au deffus de la vouffure;
qui a trois pieds de fallie fur le nu du
mur , il y aun Socle haut de deux pieds;
au deffus du Socle eft la Châffe d'argent.
On voit derriere un Globe de verre
jaune, qui recevra le jour , entouré d'une
Gloire d'Anges & de nuages , d'où fortent
plufieurs rayons dorez , qui paffent derriere
des Anges qui font aux 2 côtez de
la Châffe, affis fur la vouffure. Ces Anges
qui ont fix pieds de proportion , ainfi
que la Gloire , feront de marbre blanc.
Au deffous de la vouffure eft un Ange
qui tient une Lampe ; & aux deux Arcades
des côtez , le long des deux pieds
droits de celle du milieu , font fufpendues
des Confoles ou Cartalames ,
tiennent chacune une Lampe.
qui
II. Vol
On
DECEMBRE . 1730. 2923
du
On apprend de Londres , que la nuit
27 au 28 du mois dernier il y eut deux
Marées dans la Tamife : Phénoméne extraordinaire
, dont on a peu d'exemples ;
& qui occupe actuellement tous les Phyficiens
de cette Ville , pour en découvrir
la cauſe ..
On a appris de Florence , que le Gr. Duc
a fait placer dans la grande Galerie de l'ancien
Palais , les deux Statues de marbre ,
reprefentant Adam & Eve , que quelques
Chanoines de l'Eglife Métropolitaine
avoient fait ôter du principal Autel de
cette Eglife , fous prétexte qu'elles font
trop découvertes . Ces deux figures, d'une
finguliere beauté , font de Baccio Bandinelli
, fameux Sculpteur & Peintre, mort
en 1559. âgé de 72 ans . Il étoit difciple
& imitateur de Michel Ange , & tresgrand
Deffinateur. Quoique l'ouvrage
qui donne lieu à cet article , ſoit admiré
de tout le monde , on a toujours fort
blâmé ce ftatuaire d'avoir fait Eve plus
grande qu'Adam .
Nous donnons au public , avec plaifir,
la premiere Médaille du Pape , qui nous
eft tombée entre les mains . Elle eft d'ar
gent.On y voit d'un côté la tête du S.Pere
avec cette Légende : CLEMENS XII .
H. Val. PONT.
2924 MERCURE DE FRANCE
PONT. M. & de l'autre le fymbole
qui convient le plus ; fçavoir , une Charité
Romaine , avec cette Infcription : NON
QUÆRIT QUE SUA SUNT . Les Coins de
cette Médaille ont été faits par Hameranus
, fameux Graveur Romain , qui a
un talent particulier pour donner la reffemblance
& pour animer les figures.
Nous l'avons faite graver ici en Tailledouce
par une bonne main.
plu
Outre cette Médaille , il y en a eu auffi
quelques autres, frappées depuis à Rome,
en or & en argent , pour S. S. dont la
plus diftinguée nous a paru être celle qui
lui fut préfentée en ceremonie le jour de
fa prife de poffeffion de l'Eglife Patriarchale
de S. Jean de Latran. On y voit
d'un côté la tête du Pape avec la même
Légende : CLEMENS XII.PONT.M. &
fur le revers , la Juftice , tenant d'une
main des Balances , & de lautre un Laurier
, avec cette Infcription : R BCTIS
CORDE LÆTITIA & dans l'Exergue ' , M.
DCC. X X X,
II.Vol. SPEC
QUÆ
QUARIT
NON
SUA
SUNT
PONT
. M.

DECEMBRE. 1730. 2925
******:*:XXXXX :XXX
LA
SPECTACLES.
A Tragédie nouvelle de Brutus , de
M. de Voltaire , fut repréſentée à la
Cour le Samedi 30. de ce mois , avec un
très-grand fuccès ; on la donna le lendemain
fur le Théatre François pour la neu
viéme fois , & toujours avec beaucoup
d'applaudiffemens.
La Scene de cette Piéce dont nous
avons promis de parler , fe paffe dans le
Capitole. Les principaux perfonnages font
Brutus , Conful , Titus , fon fils , & Tullie,
fille de Tarquin. Les S Sarrazin , Du
Freſne , & la Dile Du Frefne rempliffent
ces trois Rôles . Ceux de Valerius Publicola
, deuxième Conful , de Proculus , de
Meffala , Romain , conjuré dans le parti
de Tarquin , d'Aruns , Ambaffadeur du
Roi d'Etrurie , d'Albin , fon Confident,
& d'Argine , Confidente de Tullie , font
remplis par les Srs Grandval , Dubreuil ,
Montmenil , Le Grand , Berci , & la De
Jouvenot , fans parler des fix Senateurs .
, ,
La Piéce commence par une Affemblée
du Senat , où l'on introduit un Ambaffadeur
de Porfenna & de Tarquin . Ce Miniftre
remontre tout ce qu'un Royalite
II. Vol.
zelé
2926 MERCURE DE FRANCE
zelé peut dire en faveur des droits des
Souverains. Le Conful Brutus répond
tout ce qu'un Republicain rigide doit
dire pour le Peuple Romain. Il s'exprime
ainfi :
Nous avons fait , Aruns , en lui rendant hommage
,
Serment d'obéiffance , & non pas d'efclavage ,
Et puifqu'il vous fouvient d'avoir vu dans ces
lieux ,
Le Senat à fes pieds faifant pour lui des voeux ,
Songez qu'en ces lieux même , à cet Autel augufte
,
Devant ces mêmes Dieux il jura d'être juſte ;
De fon peuple & de lui tel étoit le lien.
Il nous rend nos fermens quand il trahit le fien
Et dès qu'aux loix de Rome il ofe être infidele
Rome n'eſt plus fujette , & lui ſeul eft rebelle.
Aruns.
Ah ! quand il feroit vrai que l'abfolu pouvoir
Eut entraîné Tarquin par delà fon devoir ,
Qu'il en eut trop ſuivi l'amorce enchantereffe ,
Quel homme eft fans erreur , & quel Roi fans
foibleffe ?
Eft- ce à vous de prétendre au droit de le punir ?
Vous nés tous fes Sujets , vous faits pour obéir?
Un fils ne s'arme point contre un coupable pere
Il détourne les yeux , le plaint & le revere.
II. Vol.
Les
DECEMBRE. 1730. 2927
Les droits des Souverains font - ils moins précieux
?
Nous fommes leurs enfans , leurs Jages font les
Dieux ;
Si le Ciel quelquefois les donne en fa coleré ,
N'allez pas mériter un préfent plus fevere ,
Trahir toutes les loix en voulant les vanger ,
Et renverser l'Etat au lieu de le changer .
Inftruit par le malheur
l'homme ,
› ce grand Maitre de
Tarquin fera plus jufte & plus digne de Rome ;
Vous pouvez
raffermir par un accord heureux
Des Peuples & des Rois les legitimes noeuds ,
Et faire encor fleurir la liberté publique
Sous l'ombrage facré du pouvoir Monarchique.
Brutus plein de fes fentimens refuſe la
paix au nom du Sénat , quoiqu'affiegé
par deux Rois . Le Sénat jure fur l'Autel
de Mars de ne jamais admettre les Tarquins
dans Rome ; l'Ambaffadeut jure
fur le même Autel une guerre éternelle
aux Romains. Cependant ce Miniftre demande
fierement qu'on lui remette Tullie,
fille de Tarquin , jeune Princeffe qui n'avoit
pû fe fauver de Rome dans le commencement
de la Guerre civile , & que
le Sénat faifoit élever chez la femme de
Brutus le Sénat ordonne qu'on rende à
Tarquin fa fille & tous fes biens ; & Bru-
II. Vol.
tus
2928 MERCURE DE FRANCE
tus , l'organe du Sénat , dit à ce Miniftre:
Qu'à Tarquin déformais rien ne refte en ces
lieux
Que la haine de Rome & le couroux des Dieux ;
Pour emporter au Camp l'or qu'il faut y conduire
Rome vous donne un jour , ce tems doit vous
fuffire .
Ma Maiſon cependant eſt votre fûreté &c.
Ce Miniftre ayant donc la liberté de
refter un jour dans Rome veut employer
ce tems à ruiner la liberté des Romains ;
il avoit depuis long- tems une fecrete cor
refpondance avec un Citoyen nommé
Meffala , homme adroit & intrépide ,
qui defefperant de faire fa fortune fous
le gouvernement fevere d'une Républi
que , vouloit s'élever en rappelant les Tirans.
C'eft un vrai confpirateur.
Maître de fon fecret , & maître de lui-même ,
Impenetrable & calme en fa fureur extrême ;
Il a déja gagné quelques amis ; mais ,
dit- il , à l'Ambaffadeur :
Ne prétendez pas
Qu'en aveugles Sujets ils fervent des ingrats ;
Ils ne fe piquent point du devoir fanatique
De fervir de victime au pouvoir defpotique ,
II. Vol.
Ni
DECEMBRE. 1730. 2929.
Ni du zele inſenſé de courir au trépas
Pour venger un Tiran qui ne les connoît pas.
Tarquin promet beaucoup ; mais devenu leur
maître ,
Il les oublira tous , ou les craindra peut -être :
Je connois trop les Grands dans le malheur
amis ,
;
Ingrats dans la fortune , & bientôt ennemis..
Nous fommes de leur gloire un inftrument fervile
Rejetté par dédain dès qu'il eft inutile ,
Et brifé fans pitié s'il devient dangereux.
Meffala avoit befoin d'un Chef digne
de pareils conjurés , affez illuftre par fa
naiffance pour le faire obéir , affez.courageux
pour faire réuffir l'entreprife ,
affez hardi même pour forcer le Roi ,
Même après le fuccés à leur tenir la foi.
Titus , fils du Conful Brutus , jeune
homme impétueux dans fes défirs , qui
venoit de triompher des deux Rois , mais
qui n'avoit pû obtenir le Confulat , pa-'
roit à ces deux conjurés un homme propre
à mettre à la tête de leur parti . Titus,
à la verité , aime tendrement Rome &
fon
pere ; il eft le plus grand ennemi des
Rois , il adore la liberté , mais il eft piqué
contre le Sénat ; & Meffala a découvert
qu'il a depuis long- tems une paſſion fu-
II. Vol.
rieufe
29 30 MERCURE DE FRANCE
rieule
pour la fille de Tarquin : Titus a
été jufqu'à préfent le maître de fa paffion ;
mais il y peut fuccomber. Meffala ajoute :
Dans le champ de la gloire il ne fait que d'en
trer ,
Il y marche en aveugle , on l'y peut égarer ;
La bouillante Jeuneffe eft facile à féduire .
Cependant Tullie , cette fille de Tarquin
, nourriffoit depuis long- tems une
inclination fecrette pour le jeune Titus ;
elle vouloit haïr l'ennemi de fon pere &
le fils de Brutus ; mais elle l'aimoit d'autant
plus , qu'il ne fouffroit plus qu'il pa-.
rut en fa préfence depuis que la Guerre
étoit déclarée . Ainfi Titus & Tullie s'adorant
l'un l'autre , & n'ofant fe voir
combattoient en fecret leur paffion . Enfin
le moment arrive qui doit les féparer
pour jamais ; alors Titus entraîné malgré
lui vers Tullie , vient pour lui dire un
éternel adieu , & l'aveu de fon amour lui
échape .
Ce feu que jufqu'alors il avoit fçû contraindre
S'irrite en s'échapant , & ne peut plus s'éteindre
L'adroit Ambaffadeur qui fçait bientôt
à quelles agitations Titus eft livré , faifit
ces momens pour tenter fa fidelité ; il
oppofe tous les artifices à la hauteur im
II. Vol. pétueufe
DECEMBRE. 1730. 2931
pétueufe de Titus ; il lui repréfente la
trifte feverité d'une République & tous
les charmes d'une Cour , il effaye de
l'attendrir pour Tarquin ; enfin il lui dit
que Tarquin avoit autrefois le deffein de
lui donner fa fille Tullie en mariage.
L'Ambaffadeur en lui parlant ainfi , obferve
attentivement l'émotion involontaire
du jeune Romain. Meffala , ce Chef
de conjurés , vient encore envenimer la
bleffure de Titus. L'Ambaffadeur fait plus,
il a découvert la paffion de Tullie , & il
veut s'en fervir pour fes deffeins. Oui ,
dit il ,
N'attendons des humains rien que par leur foibleffe.
Il ne perd point de tems , il envoye
un homme fûr au Camp de Tarquin ; ce
Courrier rapporte une Lettre du Roi ;
l'Ambaffadeur donne la Lettre à la Princeffe
: elle lit , elle voit avec furpriſe que
fon pere lui permet
de refufer le Roi de
Ligurie qu'elle devoit époufer , & que
c'eft à Titus qu'il la deftine ; qu'en un
mot il ne tient qu'à Titus de rappeler
Tarquin , de regner avec lui & d'époufer
Tullie. Cette Princeffe à la lecture de
cette Lettre eft partagée entre le trouble
& la joye , entre la défiance & l'efpoir ;
l'Ambafladeur la raffure & l'encourage ;
ĮI. Ful
1
2932 MERCURE DE FRANCE
il lui dit que Titus eft déja ébranlé , qu'il
eft prêt à relever le Trône de Tarquin
qu'un mot de la bouche va tout achever.
La jeune Princeffe pleine de l'efperance
de rétablir fon pere & d'être unie avec
fon Amant , envoye chercher Titus , lui
fait lire cette Lettre ; mais quelle furprife
& quelle douleur pour elle ! Titus
eft penetré d'horreur à l'afpect de ce billet
de Tarquin , par lequel on lui propoſe de
trahir Brutus & Rome. Son Amante s'écrie
:
Infpirez -lui , grands Dieux , le parti qu'il doit
prendre.
Mon choix eft fait.
Titus.
Tullie.
Eh bien ! crains -tu de me l'apprendre ♣
Parle , ofe mériter ta grace ou mon courroux ;
Quel fera ton deftin ?
Titus.
D'être digne de vous ,
Digne encor de moi-même , à Rome encor fidele
,
Brulant
d'amour
pour
vous , de
combattre
pour
elle ,
D'adorer vos vertus , mais de les imiter ,
De vous perdre , Madame , & de yous mériter &c.
II. Vol
Ац
DECEMBRE. 1730. 2933-
Au milieu de cette conteftation douloureuſe
, Brutus arrive , & dit à Tullie
qu'il faut partir ; déja même il l'emmene.
Titus defefperé arrête un moment l'Ambaffadeur
qui feint de vouloir partir , &
qui jouir tranquilement du trouble affreux
de cet Amant ; Titus lui demande
un moment d'entretien , & le prie de
retarder le départ d'une heure. C'eſt pendant
ce court efpace de tems que Meffala
fe découvre enfin à Titus , c'eft alors qu'il
lui apprend que Tiberinus , fon propre
frere
,
eft de la conjuration . Titus fe
trouve réduit à être le délateur ou le
complice de fon frere. Dans ce moment
même l'Ambaffadeur lui fait dire que
Tullie l'attend ; il parle à Tullie pour la
derniere fois , & c'est là que cedant à fa
paffion , penetré d'amour , d'horreur &
de remords , & fe trouvant dans le cas
de dire : Video meliora proboque , deteriora
fequor , il dit à Tullie :
› Eh hien , cruelle , il faut vous fatisfaire ;
Le crime en eft affreux ; mais j'y cours pour vous
plaire ;
D
t plus malheureux que dans ma paffion ;
Mon coeur n'a pour excufe aucune illufion ,
Que je ne goute point dans ce défordre extrême
Le trifte & vain plaifir de me tromper moimême
,
11. Vol, Que
2934 MERCURE DE FRANCE
Que l'amour aux forfaits me force de voler ,
Que vous m'avez vaincu fans pouvoir m'aveugler
,
Et qu'encor indigné de l'ardeur qui m'anime ,
Je chéris la vertu , mais j'embraffe le crime .
Haiffez-moi , fuyez , quittez un malheureux
Qui meurt d'amour pour vous , & detefte ſes
feux & c .
A peine Titus emporté par tant de paſfions
a -t'il promis de trahir Rome , que
Brutus inftruit qu'on doit donner un affaut
la nuit même,vient remettre le commandement
de la Ville de la part du
Sénat entre les mains de Titus même ; le
defeſpoir de Titus augmente à cette marque
de confiance ; une cruelle irréfolution
l'agite ; fon pere en eft étonné ; mais
dans le moment même le fecond Conful
annonce à Brutus que l'on confpire . On
n'a encore que des foupçons , & ces foupçons
ne tombent point fur les fils de Brutus.
On affemble le Sénat ; l'Ambaffadeur
y vient rendre compte de fa conduite
; Brutus le renvoye avec mépris &
avec horreur. On renouvelle les fermens
de punir fans remiffion quiconque auroit
confpiré en faveur des Rois ; Brutus qui
fait ce ferment eft bien éloigné de croire
fes Enfans coupables ; il apprend au milieu
du Sénat même que Tiberinus eft un
II. Vol.
des
DECEMBRE . 1730. 2935
des conjurés ; l'inftant d'après il apprend
que fon cher fils Titus , le Deffenfeur de
Rome , eft le Chef de la Confpiration .
Tiberinus eft tué en fe deffendant , avec
quelques complices . Titus qui avoit horreur
d'un crime qu'il n'avoit pas même
confommé , & dont il n'avoit été coupable
qu'un inftant , vient s'accuſer devant
fon Pere ; Brutus qui l'aime tendrement
le condamne à la mort en pleurant , &
Titus reçoit fon Arrêt en grand Homme.
Tullie defefperée ſe tuë . Ainfi finit cette
Piéce que l'on regarde dans Paris comme
l'Ouvrage Dramatique que M. de Voltaire
ait le mieux écrit , mais qui exige
une grande execution , extrêmement difficile
& neceffaire , pour avoir un long
fuccès au Théatre.
Le 29. Decembre le Roi honora de
fa préfence l'Opera de Phaeton , qui fut
executé dans fa plus grande perfection :
on danfa par extraordinaire à la fin dư
Divertiffement du quatriéme Acte le Pas
de Trois , dont on a déja parlé , exécuté
par les Srs Blondi , Dumoulin le jeune , &
la Dile Camargo . S. M. étoit placée dans
fa Loge, accompagnée des Ducs de Charoft
, de la Roche-Foucault & d'Harcourt;
les autres Loges du même côté étoient
occupées par les autres Seigneurs & Officiers
de fa Maiſon, H Nous
=
2936 MERCURE DE FRANCE
Nous avons affez parlé de cet Opera la
derniere fois qu'il fut remis au Théatre
au mois de Novembre 1721 , des paroles,
de la Muſique , du Ballet , des Habits &
des Décorations de ce tems- là , avec une
Deſcription particuliere de celle du Palais
du Soleil.
Dans cette repriſe les habits ſont très
magnifiques & très bien caracteriſés . Les
Balets,toujours compofés par le St Blondi,
font auffi ingénieux que variés.
Les principaux Danfeurs font les fieurs
Dumoulin , Dupré , Malterre & Laval ,
& la De Camargo en Egyptienne , termine
le Divertiffement du cinquième
Acte. Les principaux Rôles dans la Tragedie
de Lybie , de Theone & de Climene
font remplis par les Diles Antier , le
-Maure & Erremens ; ceux de Phaëton
d'Epaphus , de Protée & du Soleil fort
repréſentés par les fieurs Tribou , Chaſſe,
Dun & du Mas.
A l'égard des deux principales Décorations
dont nous avons à parler , celle
du fecond Acte repréfente une des Entrées
d'un Palais du Roy d'Egypte , d'ordre
Dorique. On y voit une grande Arcade
de chaque côté , aux côtez deſquelles
font deux Colonnes , dont l'entrecolonne
eft d'un Diametre & demi
felon l'ordre Dorique.
II. Vol. Après
DECEMBRE . 1730. 2937
Après les Arcades on voit un Veftibule
qui forme un quarré , fe reliant avec les
autres Colonnes . Ce Veftibule eft foutenu
par huit Colonnes , efpacées de 4
Diametres au milieu , & fur les côtez ,
d'un Diamétre & demi ; & fous le Veftibule
, de chaque côté , il y a deux autres
Arcades , comme les premieres , ayant
3 diametres de large , & 3 quarts de colonnes
& 8 diametres de haut.
Les Colonnes ont 2 pieds 3 pouces de
diametre ; elles pofent fur un Socle, font
canelées jufqu'au tiers , & font de marbre
d'Egypte , ainfi que la frife , les chapiteaux
, les bazes & les triglifles , faits en
confole , font de bronze , ainfi que le
refte des ornemens.
Ce Veftibule porte une grande Terraſſe
avec une Balustrade , qui fuppofe après
l'efcalier , conduire dans le reste du Palais
; & à travers le Veftibule , on voit
une continuation d'Arcades , portées
par des Colonnes qui ne fe voyent qu'obliquement.
L'habile Architecte fuppofe
par là y en avoir autant de l'autre côté
en fimetrie , & ce point de vûë qui eft
tres - pictorefque & tres- ingénieulement
imaginé , fait parfaitement l'effet qu'il
doit faire. L'air de grandeur & de noble
fimplicité de cette magnifique décoration
la font admirer par tous les Spectateurs
II. Vol.
inte-
Hij
2938 MERCURE DE FRANCE
intelligens. Elle eſt éclairée par une lumiere
douce qui donne le repos & le relief
convenable à toutes les parties. La
Perfpective & le Clair- obfcur y font employez
avec un art infini . On a remarqué,
Tans doute , que cette décoration fait un
parfait contraſte avec celle dont nous alfons
parler ; ce qui marque le génie &
l'habileté du fieur Servandoni , qui a fait
l'une & l'autre.
Le Palais du Soleil , au 4° Acte , eft tresélevé,
& ouvert en plufieurs endroits ; il
paroît à la vûë d'un vafte prodigieux par
la quantité des Colonnes & des Arcades
qui s'y trouvent , & qui fuppofent conduire
dans Pimmenfe étendue des nuages
qui paroiffent porter le Palais , & qui s'y
introduifent de toutes parts.
Le Thrône du Soleil eft placé au fond
d'une grande Galerie , ornée à droite &
à gauche d'une colonade d'ordre Compofite
, & entre les colonnes font de
grandes & magnifiques arcades .
Derriere le Thrône eft une Baluftrade
circulaire , à hauteur d'appui , au deffus
de laquelle ou voit plufieurs Divinitez
& grand nombre de Génies ; partie perfonnages
vivans , partie figures en relief,
imitant parfaitement le naturel.
Au delà de la Balustrade fe voyent
grandes Arcades , portées par des Co-
II.Vol
lonDECEMBRE
. 1730. 29 39
·
lonnes couplées , qui forment des ouvertures
pour
aller , par un plan de niveau
, derriere les colonnes de la Galerie,
& qui, font voir par la Perfpective un
magnifique Salon , formé par des Arcades
, foutenues par des Colonnes , de
même que la Galerie.
Vers le milieu de la Galerie , on commence
à monter au Thrône du Soleil ; on
y trouve une Baluftrade interrompuë au
milieu par trois marches , pour monter
fur un grand Palier , après lequel font
trois autres marches & un fecond Palier ,
par lequel on arrive par trois autres marches
circulaires au Thrône du Soleil. Ce
fecond Palier eft à niveau des bazes des
colonnes .
Toutes les colonnes font torfes , portées
par des piedeftaux compofez ; leurs chapiteaux
& entablemens font auffi compofez
pour placer les ornemens & les pierreries
dont ils font enrichis .
Le plafond de la Galerie eft en ceintre,
formé d'une colonne à l'autre , & enrichi
de feftons & autres ornemens . Entre
les travées font des ouvertures ovales
par où entrent les nuées , & aux bas côtez
du plafond , entre chaque colonne
il y a des médaillons , chacun reprefentant
quelque Attribut du Soleil .
>
Le Thrône eſt d'une forme prefque py.
II. Vol. Hij rami
2940 MERCURE DE FRANCE
ramidale & majeftueufe , il eft entouré
par derriere de rayons , formez avec du
tranfparent de gazes d'or , à travers lefquelles
on voit une lumiere fi vive & fi
brillante , que les yeux ont peine à en
foutenir l'éclat . Cette lumiere fort du
Thrône , & fe rependant de tous côtez ,
éclaire le Salon , la Galerie & tout le refte
de la Décoration , laquelle paroît fi chargée
d'or & de pierreries , de differentes
couleurs , comme Diamans , Rubis , Topafes
, Emeraudes , Perles , Lapis , &c.
qu'il eft impoffible d'imaginer quelque
chofe qui approche de fa richeſſe & de fa
fplendeur.
Ces Pierreries , qui font au nombre de
plus de 7000. & dont les plus petites
ont au moins un pouce & demi de diametre
, jettent à la lumiere un éclat & un
brillant prodigieux , tant par rapport à
leurs formes convexes , concaves & à facettes
, que par le grand poly & les cou
leurs tranfparentes qu'on leur a données.
Le public voit tous les jours avec beaucoup
de plaifir & de nouveaux applaudiffemens
, ce pompeux & refplandiffant
Spectacle , aujourd'hui le plus magnifique
de l'Europe ; le Roy qui a voulu
le voir, a témoigné publiquement en avoir
été tres fatisfait.
Le fieur Servandoni , Florentin , dont
II. Vol Dous
DECEMBRE. 1730. 2941
nous avons eu occaſion de parler tant de
fois , & dont nous avons donné des def
criptions des décorations qu'il a faites .
comme celle du Palais de Ninus , le Tem
ple de Minerve , les Champs élizées dans
Proferpine , la vafte Galerie dans Pyrrhus
la Calcade ou Torrent avec fluctuation ;
la chute du Nil , ou grande Cafcade ;
une Forêt , & c . & plufieurs autres Décorations
qui ont été generalement ap
plaudies & reconnues poffibles dans l'execation
réelle , felon les Regles de l'Architecture
. Il a fait auffi le Feu d'artifice
fur la Riviere,à l'occafion de la naiffance
de Monfeigneur le Dauphin ; les Plans &
Profils , pour bâtir l'Eglife des Grands
Auguftins ; pour un Arc de Triomphe à
la Porte de la Conference ; pour un nou
veau Théatre avec toutes fes dépendances
; le modele d'un Temple fait par
coupe de pierres , au nombre de plus de
fooo. toutes les parties le foutenant par
la coupe des pierres . Tous ces deffeins &
modeles qui lui ont été ordonnez par la
Cour , ont attiré chez lui grand nombre
de Seigneurs & de Curieux de diftinction,
qui l'ont honoré de leurs aplaudiffemens.
Il a fait encore au Château de Trenel
pour la Ducheffe d'Orleans plufieurs Ou
vrages que tous les Princes du Sang &
Seigneurs de la Cour ont vû avec une
finguliere fatisfaction .
2942 MERCURE DE FRANCE
,
Le 28 Décembre , le fieur Théveneau
Chanteur de la Comédie Italienne , depuis
plus de 12 ans , qui outre fes talens
pour la Mufique & le Chant , en a en-
Tore beaucoup pour la Déclamation &
l'action Théatrale , a été reçû dans cette
Troupe. On ne doute pas qu'il ne devienne
un tres bon fujet.
XXXXXX:XX :XX :XXXXX
NOUVELLES ETRANGERES.
Extrait de plufieurs Lettres de Turquie.
E Sultan Achmet IV. après un Regne de 28
Lans ,vient d'être dépofé. Le G.Vifir Hibraim
Pacha , fon gendre & fon favori, avoit gouverné
PEmpire fous lui pendant douze ans, & connoiffant
le defir du Sultan pour les richeſſes , il n'avoit
rien oublié pour en amaffer ; mais le Kiaia
& les perfonnes qu'il avoit employées pour cela ,
s'étant rendues infupportables par leur orgueil ,
leurs monopoles & leurs véxations ; & le G.Viz.
après avoir amufé long- temps les peuples par
des préparatifs de Guerre , ayant enfin affemblé
une Armée près de Scutari , & mécontenté les
Docteurs de la Loy & les Troupes , qui en general
n'approuvoient pas la Guerre contre les
Perfans , fe défiant d'ailleurs des réfolutions
chancelantes & myfterieufes du Vizir , toutes
ces circonstances animerent un certain Janiffaire ,
furnommé Patrona , Albanois de nation , homme
hardi & intriguant , à entreprendre la Révolution
arrivée le 28 Septembre dernier . Il s'affo-
II. Vel. cia
DECEMBRE. 1730. 2943
cia pour cet effet avec un nommé Emir-Ali , &
fix autres hommes .
Ce jour- là , 28 Septembre , à 8 heures du matin
, ces 8 perfonnes parurent fur la grande Place,
avec une ferme réfolution d'exécuter leur deffein
Ils attacherent au bout d'un bâton un morceau
de vieux Taffetas , en guife de Drapeau ; &
parcourant toute la Place; un criant à haute voix:
Que tout vrai Muſulman devoit fuivre leur parti
& s'affembler dans la grande Place d'Atmeidan ,
pour deffendre le bien public & faire exécuter les
Loix. Delà ils fe rendirent au grand Bezenften ,
qui eft un Place ou Halle , couverte d'un Toît, &
où il y a plus de mille Boutiques, de toutes fortes
de riches Marchandiſes . Ils ordonnerent à l'Inf→
pecteur de cette Place d'en fermer les Portes , &
commanderent la même chofe aux Marchands ,
qui là- deffus fermerent leurs Boutiques & fe retirerent
chez eux. Cette entrepriſe fi hardie ne promettoit
pas une heureuſe iffuë ; neanmoins une
concurrence tacite des habitans de Conftantino .
ple paroiffoit la favorifer plutôt qu'aucun ſe- cours réel.
Quelques autres Janiflaires voyant la hardieffe
de ces Mécontens , en furent émus ; ils ſe joignirent
à eux avec quelques Gebelis , qui font
ceux qui fervent l'Artillerie , & coururent tous
au Marché aux Armes , où ils s'armérent. Ils allerent
enfuite à la Maiſon des Janiſſaires , qui eft
un grand Bâtiment , au milieu de Conftantinople
, partagé en plufieurs Chambres , & où l'on
peut loger quelques milliers de cette Milice : Ils
s'arréterent devant la 1ere & st Chambres,qui en
font les principales , & inviterent les Janiffaires
de fe joindre à eux . Les principaux Officiers de ces
Chambres les avoient abandonnées pour aller au
Rendez -vous , où on avoit porté le Drapeau des •
II. Vol.
Hv Janif
2944 MERCURE DE FRANCE
Janiflaires.Les Chefs de cette Milice & le Chaoux
Bachi , s'étoient auffi retirez , tant pour n'être
pas accufez d'être les Auteurs de cette Révolte
que pour n'être pas obligez de s'opposer aux
Mécontens qui s'étoient partagez en Compagnies
, & avoient pofé des Sentinelles pour la
fureté des Marchands & des grandes Places..
Pendant ce temps là , l'Infpecteur du Bezenften
tâcha à diverſes repriſes de r'ouvrir cette Place
, & d'y faire revenir les Marchands ; il fut fecondé
en cela par diverfes perfonnes , que le Capitan
Pacha , ou Grand Amiral , qui commandoit
en l'abfence du G Viz. lui avoit envoyées
mais inutilement , plufieurs de ces derniers fe
joignirent aux Mécontens,& l'Aga des Janiflairés
étant venu en perfonne , & voyant qu'il étoit
trop tard pour arrêter le mal , jugea à propos.
de fe retirer dans fa Maiſon , & ne parut plus
depuis. Le Kiaia ou Lieute ant du Gr Vizir
qui étoit venu ce jour là à Conftantinople pour
Les affaires particulieres , fut fi faifi d'épouvente à.
la premiere nouvelle de cette émotion , qu'il fe
fauva avec deux de fes confidens , à bord d'un:
pest Bitiment.
Le Capitan Pacha qui étoit dans fon Palais ;
fur le Canal de la Mer Noire , ayant appris la
révolte , vint d'abord à Conftantinople , où il fit
de nouveaux efforts pour faire r'ouvrir le Buzenften
& les Boutiques qui y font . Il tâcha auffi
par toutes fortes de moyens d'appaifer le tumulte,
fans néanmoins y employer la force ; &
voyant que tous fes efforts étoient inutiles , il fe
retira pour aller joindre le Sultan , après avoir
laiffé quelques ordres à l'Arſenal.
Tous les autres Pa has en firent de même. Le
G. V. à la reception de la trifte nouvelle , monta
à cheval , & alla trouver le Sultan qui étoit dans
1.Vol le
DECEMBRE . 1730. 2945
Le Palais de la Sultane Chahige fa foeur , fitué
près de Scutari. On y tint un grand Confeil ,
pour déliberer fur les moyens d'arrêter le progrès
de la révolte.
A l'iffue du Conſeil , le Sultan fe retira dans
fon Serrail , & le foir il partit pour Conftantinople.
On dit qu'à cette occafion la Sultane Chahige
confeilla a fon frere de ne pas permettre que
fes principaux Vizirs abandonnaflent fa perfonne
, parce que , comme il étoit à préfumer que
les Mécontens en vouloient à fes Miniftres ,
pourroit , en les facrifiant à leur vengeance, fe
tirer d'affaires , au cas que le mal fut fans remede.
>"
il
La nouvelle de cette révolte mit tout le Camp
dans une grande confufion & dans la derniere
confternation ; ceux qui poffedoient des Charges
en furent les plus allarmée ; ils fe cacherent
tous , & fans fonger au devoir auquel ils étoient
obligez par leurs Charges , ils abandonnerent lâchement
leurs Maîtres ; enforte que le G. Viz.
lorfqu'il arriva au Serrail n'étoit fuivi que
de fon Ecuyer , de fon Valet de Chambre & de
autres domeftiques . Ce Miniftre fongea d'abord
à employer la force , pour mettre les Rebelles à
la raiſon. Il envoya pour cet effet les Ordres
au Camp pour en faire venir du monde ; mais il
ne put affembler cette nuit que cent perfonnes.
On employa neanmoins quelques Matelots pour
tranfporter du Camp au Serrail le tréfor & les
effets les plus précieux du Sultan.
Quoique les Mécontens fe donnaffent de leur
côté tous les mouvemens poffibles pour augmenter
leur parti , ils ne purent affembler ce jour-là
que 300 hommes , qui pafferent la nuit au lieu de
leur rendez -vous; mais le lendemain leur nombre
augmenta fi confiderablement , u'ils furent bientôt
en état de donner la loy à toute la Ville 3 ils
I L. Vol. Hovi déla
2946 MERCURE DE FRANCE
détacherent plufieurs Compagnies pour ouvrir
toutes les priſons , & délivrer tous les Galeriens;
dans cette confufion quantité d'Efclaves Chréziens
eurent le bonheur d'être mis en liberté.
Les Révoltés voyant que leur entrepriſe avoit
tout le fuccès qu'ils en pouvoient attendre , réfolurent
d'élire un Aga des Janiffaires ; ils choifirent
pour cet effet un nommé Chanefey , homme
hardi,bon Soldat,& qui avoit déja exercé la
Charge d'Aga des Janiflaires dans le Bamat deTemefvar,
mais dont il avoit été privé fous le précédent
Gouvernement; ils choiſirent enfuite les plus
courageux d'entre eux pour remplir les places
vacantes par l'abſence des Officiers des Janiflaires
, qui s'étoient cachés ou qui refufoient de
fuivre leur parti. Ils élurent auffi un Topigi Bachi
, ou Genéral de l'Artillerie ; & s'étant emparés
du grand Etendart , ils le porterent au lieu
de leur Rendez- vous , où ils drefferent leurs Tenzes
, & formerent leur Camp ; après quoi ils pri
rent les mesures convenables pour pourvoir à
la fureté publique , & pouffer à bout leur entreprife
, fi heureufement commencée. Pendant ce
rems là le G. S. ne fe trouvant pas en état d'appaifer
ce tumulte par la force , envoya un de fes
principaux Officiers aux Mécontens , pour leur
demander la raifon de leur révolte , & ce qu'ils
fouhaitoient de S.H. Ils répondirent à cet Offcier
que les malverfations des Miniftres du Sultan
en étoient la caufe , & qu'ils demandoient
qu'on les leur livrât. Sur cette nouvelle , le Grand
Vízir tâcha d'infinuer au Sultan que la demande
que les Mécontens venoient de faire n'étoit
qu'un prétexte pour cacher le deffein qu'ils méditoient
de le détrôner , & peut- être de lui ôter
la vie. S. H. en fut émuë , & fe retira dans le
Harem , ou Appartement des femmes.
11. Velo
DECEMBRE. 1730. 2947
Cependant ce premier Miniftre & le Kiaya
après avoir tenu divers Confeils fur la trifte fitua
tion de leurs affaires , ſe voyant fans reffource ,
réfolurent dans cette extrémité d'avoir recours
l'Etendart de Mahomet , dans l'efperance que le
refpect pour la Religion animeroit le Peuple à
fe ranger par devoir & par affection du côté du
Sultan. Ils arborerent effectivement cet Etendart
fur la deuxième porte du Sérail , & firent faire
de grandes promeffes au Peuple pour l'engager à
prendre les armes contre les Mécontens , en ordonnant
en même- tems aux Topigis ou Canoniers
de venir au Sérail pour le défendre contre
les ennemis de S. H. mais tous leurs efforts furent
inutiles ; l'expofition de l'Etendart imprima
bien quelque venération dans le coeur des habitans
de Conftantinople , fans que perfonne néanmoins
prit les armes pour la défenſe du G. S.
& les Topigis refuferent de le rendre au Sérail .
Les Boftandgis , ou Jardiniers , & les Baltagis
qui fervent de Gardes du Corps auroient été
en état de défendre le Sérail , mais la défunion
fe mit entr'eux ; de forte que le G. Vizir réduit
au defefpoir , couroit comme un infenfé dans le
Sérail , animant tout le monde à prendre les
armes & demandant à chaque inftant fi les
Rebelles ne s'étoient pas encore rendu maîtres
du Sérail . Tout ceci fe paffa le 29. Septembre.
Le 30. les Mécontens firent venir dans leur
armée le Morza Sibelfackiafcher , qui eft un
des Grands Juges de l'Empire que le G. V. avoit
exilé , pour avoir parlé trop librement dans le
Confeil contre les deffeins de ce Miniftre ; ils
le reçurent avec beaucoup de refpect , le reconaurent
pour leur Legiflatcur , & envoyerent enfuite
un Détachement à Topana pour inviter les
Topigis de fe joindre à eux , ce qu'ils firent le
même jour.
La
2948 MERCURE DE FRANCE
<
Le Sultan confera la Charge de Capitan Pacha
, ou Grand- Amiral , à l'Alidy , ou Premier
Capitaine des Vaiffeaux de Guerre , afin de fe
conferver par fon moyen , en cas de beſoin , la
poffeffion de l'Arfenal. Cet Officier accepta ce
grand Emploi , & fit même en cette qualité fon
Entrée à PArfenal , où il fut reçû au bruit de 9.
pieces de Canon de chaque Vaiffeaux de Guerre ;
mais jugeant que la neceffité lui avoit procuré
cet honneur , & prévoyant bien que fon autorité
ne feroit pas de longue durée , il fe retira peu
après , & alla joindre les Mécontens , qui le
confirmerent dans la Charge de Grand- Amiral.
Après qu'il eut pris quelques mefures avec eux ,
il retourna à l'Arfenal , où il fit équiper 4. Galeres
qu'il envoya devant le Sérail , afin d'en couper
la communication , & empêcher l'entrée du
fecours on défendit en même tems fous de
groffes peines d'y porter des vivres , & on ferna
tous les Acqueducs..
D'un autre côté le nouvel Aga des Janiffaires
donna les ordres neceffaires pour procurer l'abondance
dans la Ville ; il mit des Gardes par
tout pour la fûreté des Marchands ,
& pour empêcher
le pillage . I fi: punir feverement ceux
qui contrevenoient à fes ordres .
Cependant le Sultan étoit dans des angoiffes
morte les ; il fe voyoit abandonné de tout le
monde ; & fe trouvant fans reffource , il réfolut
de faire un dernier effort fur l'efprit des Mécontens
, il leur envoya pour cet effet l'Iprizade
& le Mirza Effendi'; mais les Mécontens furent
inexorables , & perfifterent dans la demande qu'ils .
avoient faite des principaux Miniftres , fur quoi
Je Sultan réfolut enfin d'envoyer en prifon le
G. V. le Kiaia & le Capitan Pacha , & i envoya
le Mufti en exil dans une des Iles de l'Archipel.
Le
DECEMBRE. 1730. 2949
Le premier Octobre 7000. Janiffaires , qui
quelques jours auparavant avoient été détachés
pour la Perfe , ayant appris la Revolte , revinrent
fur leurs pas , & allerent joindre l'arméedes
Mécontens. Ils étoient commandés par uns
Pacha à neuës , qui en paffant à Scutari avoit
pris avec lui le prétendu Prince de Perfe , &
l'avoit conduit à l'armée des Rebelles , ou par
honneur on lui donna une Garde. Ce Prince fe
difoit fits aîné du dernier Roi de Perfe ; il étoit
venu à Conftantinople pour demander la protection
de la Porte contre le Prince Thamas fon
frere.
Cependant la confufion continuoit au Sérail ;
des amis du Sultan lui repréſenterent la neceſſité
qu'il y avoit de facrifier fes 3. Miniftres à la
vengeance des Mécontens , comme étant l'unique
moyen d'appaifer leur animofité , & même de
conferver la vie. Sur quoi S. H. ordonna qu'ils
fuffent étranglés , & qu'on envoyar leurs corps
aux Mécontens , ce qui fut executé , & chaque
corps fut mis fur un Chariot attelé de boeufs . On
ne (çauroit exprimer les injures que les Mécontans
vomirent contre ces 3. miferables corps
fur lefques ils exercerent tout ce que la rage leur
pouvoient infpirer ; enfin après avoir affouvi
leur vengeance, ils jetterent le corps du Kiaya dans.
un puits rempli d'immondices , mais aux inſtantes
prieres & aux larmes de la mere du Capitan
Pacha , ils lui rendirent celui de fon fils. Quant:
au corps du G. V les Chefs des Mécontens pu
blierent que le Sultan les avoit trompés , que ce
corps n'étoit pas celui d'Ibrahim Pacha , mais
le corps d'une autre perfonne qui lui reffembloit.
Dans cette croyance les Mécontens attacherent
ce corps
à la queue d'un cheval , & le:
traînerent devant le Sérail auprès d'une magnifi
LL. Vol. que
2950 MERCURE DE FRANCE
que fontaine que le G. V. avoit fait élever , &
le jetterent en proye aux chiens.
Les Chefs des Mécontens qui avoient déja
réfolu de détrôner le Sultan , publierent exprès
que le corps du G.V. étoit un corps fuppofé ,
dans la crainte que l'indulgence que S. H. avoit
euë de facrifier fes plus chers favoris , n'appaifàt
la colere des Soldats. C'eſt ainfi que les 3. premiers
Miniftres de l'Empire Ottoman finirent
miferablement leur vie. On dit que le G. V. appréhendant
d'être livré vif aux Mécontens , s'étoit
empoisonné dans la prifon. On dit auffi que
le Mufti , envoyé par le Sultan en exil dans une
des Inles de l'Archipel , y a été jetté dans la Mer,
de même que le Finfulch Molla , que S. H. y
avoit pareillement exilé.
Les Mécontens ayant obtenu tout ce qu'ils
avoient defiré par rapport aux Miniftres , réfolurent
de mettre en execution le deffein qu'ils
avoient conçu de détrôner le Sultan Achmet , &
de mettre à la place le Sultan Mahmoud , fon
neveu , fils du Sultan Muſtapha , déposé en 1703 .
En confequence de cette réfolution , ce Prince
fut proclamé Empereur le même jour premier
Octobre à 11. heures du foir par toute la Milice.
Dès que le Sultan Achmet eut reçû cette triſte
nouvelle , il donna ordre qu'on fit fortir ce nouveauSultan
de l'Appartement
où il l'avoit fait gar.
der avec foin , & après s'être entretenu quelque
tems avec lui , il le fit entrer dans l'Apartement
Imperial , & fe retira enfuite dans celui qui est
deftiné pour les Sultans déposez.
Après les proclamations du nouvel Empereur
le Seliktar , à qui le Sultan Achmet avoit donné
les Sceaux de l'Empire , fut confirmé par les Méso
ntens dans la Charge de G. V. mais feulement
II. Vol. par
DECEMBRE. 1730. 2951
par provifion & en attendant le retour d'Abdalab
Kuperly , Pacha d'Egypte , qu'ils avoient choifi
pour exercer cette haute dignité.
Les Janniffaires & les autres Troupes , afin de
fe rendre plus formidables , réfolurent enfuite
d'augmenter leur Corps par de nouvelles Recrues;
ce qu'ils commencerent à executer dès cette nuit
même le nombre de ceux qui fe preſentoient
pour être enrollez , fut d'autant plus grand
qu'ils étoient animez par l'efperance de recevoir .
les 15. Piaftres qu'on donne à chaque Janniflaire
à l'avenement au Trône d'un nouveau Sultan.Le
2. le Kul-Kiaya , qui eft chargé de faire entrer
dans les Coffres du G. S. la finance provenant
des droits que les Sujets payent au Souverain , fut
mis en piece par les Mécontens , à cauſe qu'il
avoit repréfenté qu'il ne falloit pas augmenter la
dépenfe du Tréfor Imperial par un plus grand
nombre de Troupes.
Ce jour là & les deux jours fuivans , furent em
ployez à vifiter les Palais des Miniftres & les
Maifons de leurs adherans ; on trouva dans celui
du Kiaya ou Lieutenantt du G. V. des
fommes immenfes , quantité de Vaiffeile d'argent
& beaucoup de Diamans. On chercha par tout le
Reis Effendi ou Grand- Chancelier & plufieurs
autres créatures des Miniftres , fans les trouver.
Les Mécontens ordonnerent aux Changeurs
Arméniens & Juifs, & à diverfes autres perfonnes
qui avoient la réputation de s'être enrichi , de
ne ss'habiller que de drap ou d'étoffe d'une certaine
couleur , & de ne porter à l'avenir que des bas
jaunes , cette couleur étant après le noir , celle
que les Turcs ont le plus en horreur. Cet ordre
fut executé avec beaucoup de rigueur envers
ceux qui y contrevenoient , leurs habits ayant été
arrachez de leurs corps & déchirez en pleine rue.
I I. Vol. Pendant
2952 MERCURE DE FRANCE
Pendant ce tems-là le nouveau Sultan ayant fouhaité
de voir les principaux Chefs des Mécontens,
ils les fit venir , & après leur avoir fait diverfes
queftions , il leur offrit de les faire Pachas ; mais
dans la crainte que cet honneur ne leur devint un
jour fatal , ils s'excuferent de l'accepter.
Le 5. Octobre on tint un grand Divan ; le 6.
fe fit le Couronnement du nouveau Sultan , dont
toute la ceremonie confifte à lui mettre le Sabre
d'Othoman au côté , dans la Moſquée d'Ajoub
qui eft à l'extremité du Port. Le Sultan , precedé
des Chefs des Rebelles , s'y rendit avec un magnifique
cortege ; pendant la Marche on jetta de
l'argent au peuple & à la Milice qui étoient rangez
le long des rues. Après cette ceremonie S. H
fe rendit à la Moſquée de Sultan Mahomet , y
fit fa priere du midi , & retourna enfuite au Serrail.
;
Les Chefs des Rebelles,à qui le Sultan avoit fais
prefent de très- beaux chevaux magnifiquement
harnachez , retournerent au Camp , d'où confervant
toujours leur autorité , ils députerent quelques
perfonnes au Sultan , pour le prier de leur
accorder les furetez convenables pour leur vie
ils demanderent aufſi qu'on rafa jufqu'aux fondemens
la belle Maifon de plaifance que le dernier
G. V. avoit fait bâtir fur le Canal de la Mer
Noire , à deux lieues de Conftantinople , dont
ce Miniftre fe fervoit pour fes plaifirs . Le premier
Chef des Rebelles nommé Patrona, alla ce jour là.
voir le G.V. qui le reçut très gracieuſement, fans
l'obliger à aucune des foumiffions que ce Minif
tre exige même des plus Grands de l'Empire , &
le fit mettre à fes côtez.
Le 7. on confera divers emplois : le Teftherdar
ou Chef des Finances , fut confirmé dans
cette Charge : Miri- Alem , qui eft en faveur au-
II. Vol. près
DECEMBRE. 1730. 2953
près de la Sultane Validé , Mere du Sultan regnant
, fut fait Kiaia , & l'on rétablit le Sulelm
qui eft fort aimé des Troupes , dans la Charge de
Secretaire du G. V. qu'il l'avoit exercée fous le
Vizir Ali-Pacha , qui fut défait à la bataille de
Peter-Waradin. Le même jour le Reys - Effendi ,
le Vaivode de Galata & quelques autres qu'on
avoit cherchez pendant plufieurs jours , furent
enfis trouvez ; mais au moyen de préfens confiderables
, ils obtinrent leur pardon des Chefs
des Rebelles.
Le 8. Hazi -Achmet , Pacha , fut inftallé dans
la Charge de Capitan Pacha , ou Grand- Amiral.
Le 9. & le 10. on paya aux Troupes les
Piaftres
par tête , dont on a parlé , après quoi on pu
blia un ordre de r'ouvrir le grand Bezeftan & les
Boutiques des Marchands ; fur quoi les Soldats
commencerent le foir à rentrer dans leurs anciens
quartiers , où l'on porta les Drapeaux & autres
fignes Militaires , ce que l'on continua le 11. &
le 12.
EXTRAIT d'une Lettre écrite de
Conftantinople le 9. Octobre 1730 , au sujet
de la derniere Révolution arrivée dans
cette Ville.
JE
E ne veux pas , Monfieur , vous laiffer ignorer
un Evenement auffi fingulier qu'intereffant ,
dont nous venons d'être les témoins. Sur la fin
du mois dernier , les Janniffaires fe révolterent.
fous un Chef nommé Patrona , c'eft un homme
qui avoit dépensé tout fon petit argent à ſe ménager
un équipage pour fuivre l'Armée Turque ,
deftinée contre la Perfe ; voyant qu'elle ne partoit
point, il employa la derniere Piaftre qui lui reftoit
11. Vela
2954 MERCURE DE FRANCE
à l'achat d'un Mouton , dont il régala fes Camarades
, au nombre de 12. Janniffaires . Après le
Repas il leur dit : Vous venez de manger tout ce
qui me reftoit au monde , demain je n'aurai
pas de quoi payer une taffe de Caffé ; fi vous êtes
gens
à
vous procurer une meilleure fortune, il n'y
a qu'à m'aider à fecouer le joug. Le complot fut
à peine projetté , qu'il fut exccuté ; ces douze
convives fe répandirent dans la Ville , en criant
Liberté , & ils exciterent une fédition qui a eu
des fuites très-confiderables , comme vous allez
le voir.
Si le G. S. eût eu la prudence d'étouffer d'abord
cette émeute , ce qui étoit facile , il ne feroit pas
réduit à l'état où il eft aujourd'hui ; mais ayant
méprifé tous les avis qui lui furent donnez , il fe
contenta de quitter fon Serrail d'Afie , pour venir
occuper celui d'Europe , il s'y enferma avec quelques
Pieces de Canon & des munitions de bouche
& de guerre pour trois mois. A peine y fut-il
entré qu'il arbora le Pavillon Imperial, & promit
20. Piaftres à tous ceux qui viendroient ſe ranger
deffous.On étoit fi mécontent du Gouvernement,
que perfonne ne bougea.
Le lendemain les Janniffaires qui n'étoient pas
plus de 12. le jour précedent , furent renforcez
par les Rebelles qui quittoient l'Armée, & par la
populace qu'ils contraignirent d'entrer dans leur
parti , par des promeffes ou par de mauvais traitemens.
Quand les Mutins fe virent les maîtres , ils allerent
en tumulte à la porte du Serrail, demander
qu'on leur livrât le G. V. le Capitan Pacha & le
Kiaya; le Sultan eut la foibleffe de les faire étrangler
tous trois , & il envoya leurs corps aux Rebelles
, qui vinrent lui faire audacieuſement des
reproches de ce qu'il ne les leur avoit pas livrez
II. Vol. en
DECEMBRE. 1730. 2955
en vie, ajoutant que c'étoit à eux de les faire mourir.
Ils pendirent ces cadavres par les pieds , leur
firent mille indignitez & les abandonnerent enfin
aux chiens.
Le Mufti fut arrêté quelque temps après , on
lui donna la qualité de Pacha , pour effacer en
quelque maniere le caractere dont il étoit revêtu ,
on le décapita enfuite. Il n'eſt pas permis de faire
mourir un Mufti qu'il n'ait été auparavant dégradé.
Le nombre des Grands que les Rebelles ont
profcrit eft de 90. la plupart ont pris la fuite ;
mais on en arrête tous les jours quelqu'un , auquel
les Rebelles font fouffrir les plus cruels fupplices.
De la maniere dont ils s'y prennent , il n'y
a pas d'apparence qu'aucun puiffe échapper à leur
fureur. Enfin le 30. Septembre ils dépoferent le
G. S. qu'ils mirent en prifon , & ils éleverent fur
le Trône Sultan Mahmout , Prince de grande efperance,
& fous lequel on fe flate que les chofes
prendront une meilleure face .
Il faut avouer que le Sultan dépofé s'eſt attiré
lui-même fa difgrace par le peu de part qu'il prenoit
au Gouvernement , duquel il fe repofoit entierement
fur le G. V. celui- cy en faifoit autant
à l'égard de fon Kiaya , qui étoit l'homme du
monde le plus méchant. Les autres Seigneurs
fuivoient , à l'envi , l'exemple du Maître.
&
On dit que Patrona , Chef de la Revolte , veut
obliger le nouvel Empereur à demeurer à Andrinople
, & de faire la guerre aux Chrétiens ,
qu'en attendant il lui fait dire de demeurer tranquille
& de le laiffer faire. Enfin cet homme qui
n'avoit pas le fol il y a 8. jours , eft aujoud'hui
le Maître à Conftantinople ; il eſt monté fur un
Cheval de mille Piaftres,& jette les Sequins à pleiges
mains. Il fit hier un Capitan Pacha, & il vient
II. Vol.
2956 MERCURE DE FRANCE
aujourd'hui de lui faire couper la tête : il a faiɛ
auffi un G. V. mais il le menace de le faire
mourir , s'il ne lui trouve dans trois jours un
certain homme qu'il lui demande. On dit qu'on.
a trouvé trente-cinq millions dans les Coffres du
Capitan Pacha.
Des Lettres venues par l'Italie , écrites de Conftantinople
le 13. Novembre, s'il n'y a point d'erreur
dans la date , portent que ce jour - là la Milice
étoit encore fous les armes , qu'elle avoit déclaré
qu'elle ne les poferoit pas avant qu'on eût
execute les promeffes qu'on lui avoit faites ; que
les] Troupes demandoient la guerre , que fur la
propofition qui leur avoit été faite de la faire aur
Perfans , les Janiffaires l'avoient rejettée , fous
prétexte qu'ils ne vouloient pas être féparez, qu'ils
le plaignoient fortement des injuftices faites par,
le dernier Gouvernement à Gianon - Coggia , qui
a été banni de la Cour , & dont ils demandent le
retour avec beaucoup d'inftances. Ces Lettres
ajoûtent qu'on a trouvé des Tréfors immenfes
dans les coffres du dernier Sultan , du G. V. du
Kiaya & du Kaimakan .
Les dernieres Lettres de Conftantinople, venues
auffi par l'Italie , portent qu'on avoit reçû avis
que l'Aga des Janniffaires s'étoit fauvé du côté
de la Morée , que le Mufti avoit été arrêté &
étranglé à deux journées de Conftantinople; que
les fils du Sultan dépofé , qui étoient reftez dans
le Camp de Scutari , avoient été arrêtez & renfermez
aux Sept Tours ; qu'on efperoit que la
guerre avec les Perfans feroit inceffamment terminée
par un Traité dont on avoit déja reçû les
Préliminaires ; que le nouveau Sultan gouvernoit
Les Sujets avec beaucoup de douceur , qu'il leur
faifoit rendre la juftice avec la plus grande exac-
II. Vol.
titude
DECEMBRE 1730. 2957
titude , & qu'il avoit menacé de faire punir de
mort les Juges qui prévariqueroient dans les fon-
Etions de leurs Charges.
L
RUSSIE.
E bruit court à Mofcou qu'il y a un nouveau
Traité d'Alliance conclu entre la Czarine ,
l'Empereur & le Roi de Pruffe , par lequel ils
doivent fe donner des fecours mutuels en cas de
guerre.
S. M. Cz. a envoyé des ordres dans diverſes
Provinces pour faire des levées de Soldats , cette
Princeffe ayant réfolu d'augmenter les Troupes
ſes
de 60000. hommes.
Les Négociations qui fe font entre les Princes
du Nord , donnent beaucoup d'inquiétude, & l'on
craint qu'il n'y ait quelque Alliance entre ces
Puiffances , pour réduire cet Etat à fes anciennes
limites.
Le Duc de Liria , Ambaffadeur d'Eſpagne en
Ruffie , partit de Mofcou le 30. Novembre pour
retourner à la Cour du Roi Catholique. La Cza
rine a ordonné qu'on le défrayât jufqu'aux Frontieres
de la Pologne , ayant dirigé la route par
Warfovie. S. M. Cz. a affuré S. Ex. avant fon
départ , dans les termes les plus obligeans , qu'elle
étoit fort fatisfaite de fa conduite, & qu'elle ne
négligeroit rien pour conferver l'amitié du Roi
fon Maître , & qu'elle favoriferoit en toute occafion
le Commerce établi entre l'Eſpagne & la
Ruffie.
On a appris par Mofcou , que le Pacha de Babylone
qui avoit été obligé de ſe retirer vers
Bagdat avec les Troupes du G. S. qu'il commande
, avoit trouvé le moyen de figner un Traité
d'accommodement avec le Roi de Perfe , en pro-
11. Vol. mettant
2958 MERCURE DE FRANCE
mettant au nom de S. H. de fournir à ce Prince
les fecours néceffaires pour l'aider à reprendre
toutes les Places conquifes en Perfe par le feu
Czar Pierre I. & qu'il avoit dépêché un Exprès
à Conftantinople pour faire ratifier ce Traité
le nouveau Sultan.
par
Des Lettres de l'Ukraine , portent que les Turcs
font divers mouvemens de ce côté là , & que les
Tartares voifins ont reçû ordre de ſe joindre à
eux dans un mois ou fix femaines .
On mande auffi de Conftantinople, qu'on y chargeoit
un grand nombre de Barques de Munitions
de guerre , qu'elles devoient traverſer la Mer
Noire , & que le bruit couroit que tous les préparatifs
qu'on faifoit , étoient contre les Mofcovites.
Il a été ftipulé par le Traité de Commerce ,
que le Duc de Liria , Ambaſſadeur Extaordinaire
de S. M. Cath. a conclu à Mofcou , que tous les
Vaiffeaux Mofcovites , foit de guerre , foit Mar
chands , feront reçus dans les Ports d'Eſpagne
comme les Vaiffeaux des autres Nations ; que
ceux qui apporteront des Goudrons , des bois
propres à la conftruction des Vaiffeaux & d'autres
Marchandiſes convenables à la Marine , ne payeront
qu'un droit très-modique , & que les Vaiffeaux
Eſpagnols qui iront dans les Ports de Mofcovie
, jouiront de la même liberté & des mê→
mes franchiſes .
POLOGNE.
LE-Roy ayant réfolu d'augmenter jufqu'à
de Saxe , S. M. a envoyé fes ordres à Dreſde
pour y faire délivrer aux Officiers les fonds neceffaires
pour cette augmentation , & pour faire
remplir les Magazins de toutes fortes de munitions.
SUIDA
DECEMBRE. 1730 2959
A
ON
SUEDE.
N affure qu'il a été figné à Stokolm , an
commencement de ce mois, un Traité d'Alliance
deffenfive entre le Roi , le Roi de la Grande
Bretagne & le Duc de Brunfwik- Wolfembutel,
pour la confervation & défenſe mutuelle de leurs
Etats d'Allemagne. Suivant ce Traité , ces trois
Puiffances doivent raffembler dans la Baff: Saxe
un Corps de Troupes de 35000. hommes , & on
invitera les autres Puiffances voifines d'acceder à
ce Traité pour la fureté de leurs Etats.
Il a été réſolu dans le Conſeil du Roi , de faire
drefler une Lifte de tous les jeunes gens depuis 20
juſqu'à 36. ans , dans toutes les Vilies , Bourgs
& Villages de fes Etats d'Allemagne , on établira
pour cet effet des Magazins d'Armes dans les Arfenaux
de Caffel , de Ziegenheim & de Marpurg.
Le Miniftre du Roi à Warfovie , a écrit que le
Roi de Pologne avoit accordé aux Proteftans de
fon Royaume le libre exercice de leur Religion
& qu'ils efperoient que dans la prochaine Diete
generale on les remettroit en poff ffion des biens
qu'on leur a enlevez depuis 12. ou 15. ans.
On
DANNEM ARC K.
Na découvert aux environs de Konigsberg
en Norwege une Mine d'argent dont les
produits font trés-confiderables.
Le Corps du teu Roy fut porté le 13. du mois
dernier d'Odenfée à la Fregate qui devoit le tranfporter
en Zelande , au bruit de plufieurs décharges
d'artillerie. Les Seigneurs de la Cour & les
Officiers de ce Prince s'embarquerent fur divers
Batinens , & pafferent le Belt en trés- peu de
! 11. Vol. 1 tems
2960 MERCURE DE FRANCE
temps. Auffi - tôt que la Fregate eut jetté l'ancre ,
le Corps du Roy fut reçu à terre par un étachement
de Cavalerie , qui le conduifit à Rofchild
, où eſt la Sepulture des Rois de Dannemarck.
La marche du Convoi commença dans la
Ville par un Eſcadron des Gardes à cheval , qui
étoit fuivi de 34. Caroffes de deuil , où étoient les
Chevaliers de l'Ordre de l'Elephant , & de l'Ordre
de Dannebrock , des Pages du Roy , des
Trompettes & des Hautbois de S. M. de plufieurs
Officiers portant des Drapeaux & des Etendarts
aux Armes des differentes Provinces de ce Royau
me , & de trois Lieutenans Colonels qui portoient
le grand Etendart Royal. Le Corps du feu Roy
étoit dans un Carofle à huit chevaux , précedé
du Grand - Maréchal de la Cour , du Grand-
Chambellan , & du Grand- Ecuyer. Le Roy qui
s'y etoit rendu pour recevoir le Corps à la Porte
-de l'Eglife , revint à Copenhague aprés la ceremonie.
ALLEMAGNE.
N écrit de Vienne qu'on a envoyé au Roy
O agile de V, cone a au
& au Duc de Brunſwick- Woltembutel , un Refcript
Imperial , concernant les affaires du Duché
de Meckelbourg , par lequel ces Princes font priés
de repréfenter au Duc Charles Leopold les fuites fâcheufes
de fa longue defobéiflance aux Refcripts de
P'Empereur,&de faire leurs efforts pour l'engager à
fe foumettre fans aucune reſtriction , d'empêcher
que les peuples du Duché de Meckelbourg ne
foient ruinez par les véxations des troupes d'execution
, & a'employer toutes fortes de moyens
pour mettre à l'abri de toutes violences le Duc
Chrétien Louis , fa Famille , & la Nobleffe qui
luy eft affectionnée,
II. Vole Оп
DECEMBRE . 1730. 2961
On a reçu avis de Roftock , depuis la publica
tion de ce Decret , que la Nobleffe & les Etats du
Duché de Mekelbourg devoient s'aſſembler au
commencement de l'année prochaine , pour déliberer
fur les affaires du Duché , conformément
aux intentions de S. M. Imp .
On a auffi reçu avis de Conftantinople , que le
G. S. avoit refolu de renforcer de 40000. homines
les garnifons qui font fur les frontieres de
Tranfilvanie , & de faire marcher au Printems
prochain , vers les mêmes Frontieres , une armée
de 150. mille hommes .
On a appris d'Hanover que S. M. Brit. auroit
dans cet Electorat au Printems prochain 34000.
hommes , non compris la Milice & les Compagnies
d'Invalides qui font diftribuées dans divers
endroits.
On écrit de Dantzick que le Roi de Pologne
avoit refufé le paffage par ce Royaume aux
30000. Mofcovites que la Czarine a promis de
fournir à l'Empereur en cas de guerre.
ITALI E.
E 30. Novembre les Peres de la Compagnie
de Jefus élurent pour leur General le Pere
François Res , du Royaume de Bohéme , âgé de
54. ans ; il exerçoit la Charge de Vicaire Genéral
de leur Ordre depuis la mort de leur préce
dent General.
On a affiché un ordre du Pape , figné par le
Cardinal Secretaire d'Etat , par lequel M. Cofcia,
Evêque Titulaire de Targa , eft cité à comparoître
dans un mois aux pieds de S. S à peine de
fufpenfion à divinis , de l'entrée de l'Eglife &
de faifie de tous fes revenus Ecclefiaftiques ; fi
dans le fecond mois il n'a pas encore company ,
}
19
II. Vol. Loij tous
2962 MERCURE DE FRANCE
tous les Benefices feront impetrables , & s'il continue
ae defobéir jufqu'au troifiéme mois , il encourera
l'excommunication majeure , & fera privé
de la Dignité Epifcopale.
Le Cardinal de Polignac eft allé à Orviette tenir
fur les Fonts de Baptême , au nom du Roi
T. Ch. le fils du Marquis Gualterio , & il doit
remettre à la Mere de l'enfant un portrait de
$. M. T. Ch . enrichi de diamans .
Le 11. Decembre , il y eut dans l'Antichambre
du Pape un Confiftoire fecret , dans lequel
S. S. propofa fix nouveaux Evêques , après quoi
elle nomma le Cardinal Aldobrandini à la Lega.
tion de Bologne ; le Cardinal Grimaldi à celle
de Ferrare & le Cardinal Maffei à celle de la
Romagne.
L'affaire du Grand - Prieur de Rome a été décidée
en faveur du Cardinal Cibo , mais le Pape
ayant voulu charger ce Prieuré d'une penfion
confiderable , affectée à l'entretien des Galeres
de Malte , ce Cardinal s'en eſt démis entre les
mains de S. S. qui l'a donné au Cardinal Rufpoli
, à la charge d'une penfion pour le Cardinal
Cibo.
Dans le Confiftoire du 11. de ce mois le Cardinal
Ottoboni , Protecteur des affaires de France
, propofa l'Evêché de Mirepoix pour le Pere
Boyer , Théatin , l'Abbaye de S. Etienne de Bal
fac Ordre de S. Benoît , Diocèle de Saintes
pour l'Abbé de la Vigerie ; il préconifa enfuite
' Abbé de Vaugirauld , pour l'Evêché d'Angers,
dont il étoit Grand- Vicaire.
Dans le Confiftoire du 18. le même Cardinal
propofa Evêché de Carcaffonne & l'Abbaye
de la Graffe dans le même Diocèfe , pour l'Abbé
de Bezons , & l'ivêché d'Angers pour l'Abbé
de Vaugirauld. Il préconifa l'Abbé de Forbin
,
11. Vol
d'Oppede
DECEMBRE. 1730. 2963
d'Oppede , Aumônier du Roi T. Ch. pour l'Abbaye
de S. Florent- lez - Saumur , Diocèſe d'An
gers.
On a appris que le peuple de Benevent s'étoit
attroupé , & que malgré les défenſes il avoit arraché
du Portail du Palais Archiepifcopal les
Armes du Cardinal Coſcia. On mande de Rome
que ce Cardinal n'offrant fa démiffion de l'Archevêché
de Benevent qu'à condition de retenir
deffus une penfion de 3000. écus , & de conferver
la collation des Benefices qui en dépendent,
fa démiffion n'a point été acceptée. Le bruit
court qu'en cas que ce Cardinal foit forcé de
fe demettre fans referve de cet Archevêché , il
fera donné au Cardinal Grimaldi.
On mande de Genes que M. Jerôme Venerofo
qui étoit allé dans l'Ile de Corfe en qualité
de Commiffaire de la République , eft revenu
à Genes avec les deux Galeres qui l'avoient
accompagné , & l'on croit que M. Camille Doria
ira en fa place dans cette Ifle , d'où l'on
mande que les Revoltés des Montagnes s'étoient
retirés dans leurs habitations , après avoir
remis leurs armes dans des Magazins publics
ESPAGNE.
QTelques Troupes du Roy font occupées à
revêtir le retranchement qui empêche la
Contrebande qu'on pourroit faire de Gibraltar
dans l'intérieur du Pays , & à conſtruire un Fort
à la pointe Occidentale de la Baye de Gibraltar.
GRANDE BRETAGNE .
Orilhomme, d'une des plus anciennes Familles
Na arrêté depuis peu à Wincheſter un Gendu
Comté de Warwick , & un Lieutenant d'un
II. Vol. Vaif-
I iij
2964 MERCURE DE FRANCE
Vaiffeau de Guerre du Roy , accufez d'avoir fait
deux vols de grand chemin.
On mande de Dublin , du z 5 du mois dernier
que ce jour-là le fieur Richard Johnfton , frere
d'un fameux Avocat , & le fieur Jean Porter , fils
aîné de M. Porter , Alderman de cette Ville,&
cy devant Maire , y avoient été exécutez pour
meurtre, quoiqu'ï's euffent nié le fait juſques à la
-mort; & que peu après leur exécution , il y arriva
un répit pour 40 jours , du Duc de Dorfet ,
Viceroy d'Irlande , mais trop tard , au grand
regret de tous les Spectateurs , qui étoient extrê
mement touchez du malheur de ces deux Gentilshommes
.
Suivant l'Extrait des Regiftres Baptiftaires &
Mortuaires des Paroiffes de Londres , on a bap-
-tifé pendant l'année 1730., tant dans cette Ville ,
que dans les dépendances de Weftminſter 8606
garçons , & 812. filles , ce qui fait en tout
17118 enfans. Il eft mort pendant la même an.
née 13306 hommes ou enfans , & 13455 femmes
ou filles . Le nombre des morts eft moindre que
celui de l'année précedente de 2951, Dans le
nombre des morts de cette année, il y en a 10368
au deffous de l'âge de 2 ans , 2448. entre 2 & 5
ans , 1092 entre 5 & 10 ans , 901. entre 10 &
entre 30
20 ans , 2048. entre 20 & 30. 2471
40. 2373. entre 40 & 50. 1713. entre 50 & 60.
1577. entre 60 & 70. 1001. entre 70 & 80.
622. entre 80 & 90. 138. entre 90 & 100. 22
101 ans. 2 à 103. ans. 3 à 104. & un à 105 .
&
II. Vol. MORT'S
DECEMBRE . 1730. 2965
శ్రీ శ్రీ
MARIAGES
des Pais Etrangers.
LE Mariage du Duc de Guaftella , avec la Princeffe
Marie Eléonore de Holftein - Weiffembourg
a été conclu à Vienne depuis peu, avec l'agrément
de l'Empereur.
On mande de Turin que le Baron de Sthall
Confeiller Privé de l'Electeur Palatin , y étoit arrivé
avec les pleins pouvoirs du Prince hereditaire
de Sultzbach , pour la conclufion du Mariage de
ce Prince avec la Princeffe de Heffe - Rheinfels .
foeur de la Reine de Sardaigne, & de la Princeffe,
Epoufe du Duc de Bourbon ; que le 8 de ce mois
les articles de Mariage avoient été fignez par
cette Princeffe & par le Baron de Sthall , au nom
du Pr.'de Sultzbach , en prefence du Roy , de la
Reine de Sardaigne & des principaux Seigneurs
de la Cour , que le 9 , cet Envoyé avoit preſenté
à la Princeffe une Caffette pleine de Bijoux ; que
le. 20 , jour deſtiné pour la cérémonie dn mariage
, la Princeffe de Heffe , conduite par le Baron
de Sthall , s'étoit rendue à la grande Salle du Palais
, où l'Archevêque de Turin leur avoit donné
la Benediction nuptiale ; que le foir il y avoit eu
un Feftin, & enfuite un Bal magnifique dans l'ap
partement de la Princeffe de Sultzbach ; que le 21
elle avoit pris congé de L. M. & que le 22. elle
étoit partie pour fe rendre à Manheim,
II. Vol. FRAN
2966 MERCURE DE FRANCE
***************
FRANCE
,
Nouvelles de la Cour , de Paris , &c.
L
E 23 la Lotterie de la Compagnie des Indes ,
pour le Remboursement des Actions , fut tirée
en la maniere accoûtumée , à l'Hôtel de la Compagnie.
La Lifte des Numero des Actions & Dixiemes
d'Action , qui doivent être remboursées ,
a été renduë publique , faiſant en tout le nombre
de trois cens Actions.
Le Roy a nommé à l'Evêché de Soiffons l'Abbé
'de Sefmaifons , Aumônier de S. M.
Le Roy a accordé l'Abbaye de S. Quentin de
Beauvais , Ordre de S. Auguftin , à l'Abbé Labifenski
, Confeffeur de la Reine.
Jkakakakakakakakakakak
MORTS , NAISSANCES
M® Chriftople Pajot , Abbé Commandataire
des Abbayes Royales de S.Jacques deProvins
de N. D. de Valfainte , Confeiller en la Grand'-
Chambre du Parlement , eft decedé le 24. Novembre
, âgé d'environ 80. ans.
-
Dame Magdelaine le Tellier , veuve de Germain
Chriftophe de. Thumery , Seigneur de
Boiflifle-le- Roy , &c. Doyen des Préfidens des
Enquêtes, eft décedée le 11.Decembre, âgée de 96.
ans 5. mois 15. jours .
Nicolas Clérambault , Secretaire du Roy , pre-
Lla Vol
mier
DECEMBRE. 1730. 2967
mier Commis du Comte de Maurepas , Secretaire
d'Etat , décéda le 11 Décembre , âge de 87
à 88 ans. Il est mort comme il a vécu , dans une
grande pratique de vertu & de charité . Il a été
chargé pendant 30 ans de la diftribution des aumônes
du Roy aux nouveaux Catholiques &
aux pauvres de Paris.
>
Charles Amelot de Gournay , Préfident à Mortier
, mourut à Paris le 25. de ce mois‚âgé d'erviron
51. ans.
Dame Eléonor Thomelin , veuve de M. Nicolas
Aunillon , Ecuyer, Confeiller du Roy, premier
Préſident de l'Election de Paris , eft décédée
le 25 Decembre , âgée de 66 ans .
Dame Marie-Anne -Françoife Bignon , Epoufe
de M. François - Michel de Verthamont , Commandeur
des Ordres du Roy , & Premier Préfr
dent du Grand-Confeil , mourut à Paris le 26.
dans la 70 année de fon âge.
Dame Charlotte - Felice - Armande de Durfort ,
Epoufe de Paul- Jules Mazarin , Duc de Mazarin
de la Meilleraye & de Mayenne , Pair de France ,
Prince de Chateau- Portien , Gouverneur des Villes
& Citadelles de Port-Louis , &c . mourut le
27. Decembre , âgée de 58. ans. Elle fut portéé le
24. au foir à S. Roch , fa Paroiffe , & enfuite
tranfportée dans la Chapelle du College Mazarin.
Dans l'une & dans l'autre Egliſe il n'y eut
aucune tenture , ainfi qu'elle l'avoit ordonné.
M. Bence , Curé de S. Roch , en préfentant le
Corps à M. Robbe , Grand- Maître du College
Mazarin , dit que dans la maladie dont elle eft
morte , elle avoit demandé avec empreffement à
recevoir les Sacremens de l'Eglife , & qu'elle les
avoit reçus avec des ſentimens de pieté & d'édifrcation
non communs. M. le Grand- Maître en recevant
le corps , loua la pieté de cette Ducheffe
LI Vol Iv
2968 MERCURE DE FRANCE
fa patience dans fa maladie : & il exprima en
peu de mots les regrets de tout le College fur la
perte d'une Dame qui vouloit bien honorer de fes
bontés & de fa protection tous les Membres de
ce Corps.
La maladie de cette Ducheffe a été longue , elle
ne la regardoit dans le commencement que comme
des vapeurs. La mort de Mad. de Ñefle , ſa
fille , qu'elle reffentit vivement , augmenta beaucoup
fon mal. Pendant long- temps elle fut attaquée
de violentes coliques. Malgré les douleurs
dont elle fe plaignoit , fa famille ne croyoit pas
que fa mort fut fi prochaine. On l'ouvrit , & on
luy trouva plufieurs caufes de mort , entr'autres
la grande aorte offifiée , deux Polypes au coeur
& le foye gâté.
Elle a eu trois enfans de Mr le Duc de Mazarin
, qu'elle époufa en 1685 , fçavoir Armande-
Felice Mazarin , Epoufe de Louis de Mailly, Marquis
de Nefle , décedée à Verſailles le 14. Octobre
1729. dans fa trente- huitième année. Guy-
Paul-Jule Mazarin , Duc de la Meilleraye , qui
époufa le 26. Avril 1716. Louife de Rohan- Soubize.
Et Paul Jule Mazarin , Duc de Mayenne ,
qui mourut le 28. Juin 1715. âgé de douze ans.
La Ducheffe de Mazarin étoit fille de Jacques
Henry de Durfort , Duc de Duras , Marechal
de France , & de Marguerite Felice de Levi Vantadour
, mariés en 1668. La Maifon de Durfort
eft des plus anciennes , & affez connue pour que
nous nous difpenfions d'entrer icy dans un long
détail fur ce fujet : nous dirons feulement que Arnault
de Durfort époufa vers 1300. la Marquife,
de Gouth , fille d'Arnault Garcie de Gouth , Vicomte
de Loumagne & de Miramonde de Mauleon.
Cette Dame étoit niéce du Pape Clement V.
& foeur de Regine , qui époula Bernard de Dur-
11 Vol.
fort
DECEMBRE. 1730. 2969
fort , Seigneur de Flamarins. Le Roy Philippe le
"Bel étant à Poitiers , luy donna & à fon Epoufe ,
en 1308. la Juftice de la Terre de Montaguillon.
C'eſt par ce mariage que la Terre de Duras & au
tres font entrées & font encore dans cette Maiſon.
On peut confulter là - deffus les Genealogiftes , les .
Hiftoriens de France , d'Angleterre , &c.
Le 28. Jean-Antoine Chef- de-ville , Ecuyer ,,
Confeiller du Roy , Subftitut du Procureur Ge
neral du Parlement , mourut âgé de 72 ans.
Le 30. Lucius - Henry Cary , Vicomte de Falkland,
Pair de la Grande Bretagne, mourut à Pa--
ris , âgé d'environ 43 ans.
Jeanne Gradou , veuve de Jean du Chefne, l'un
des Cent - Suiffes du Roy , mourut à Paris le 31
Decembre , âgée de 103 ans 9 mois , étant née
au mios d'Avril 1627 .
François Mornay , de Montchevreuil, Abbé de
P'Abbaye de S. Quentin de Beauvais , Ordre de
S. Auguftin , mourut à Paris le 2. de ce mois ,
âgé de 72. ans .
Ca-
D. Louife Elifabeth le Maffon de Tréves ,
Epoufe de Charles Louis Baron d'Haubits ,
pitaine dans le Régiment Allemand de la Mark ,
accoucha le 28 Novembre d'un fils qui fut nom
mé Marie Louis par Louis Engelbert , Comte de
la Mark , Colonel , & par D. Marie Anne Ce--
farée de Lanty , Ducheffe d'Havré & de Croy.
D. Françoife Magdelaine Chauvelin , Epoufe
de Louis Denis Talon , Marquis du Boulay ,.
Avocat Genéral au Parlement , accoucha le 2.
Decembre d'une fille qui fut nommée Françoife:
Magdelaine par M. Guillaume François Joly de
Fleury , Procureur Genéral du Parlement
par D. Louife Marthe Billard , Veuve de Jerômes
Bignon , Confeilier d'Etat ordinaire , & Ancien.
·2 &
Prevêt des Marchands,
2970 MERCURE DE FRANCE
D. Anne Charlotte de Cruffol , Epouſe d'Armand
Louis de Vignerod du Pleffis , de Richelieu
, Comte d'Agenois , Duc d'Aiguillon &c.
accoucha le s . du même mois d'un fils qui fut
nommé Armand Jules Charles.
D. Emilie de la Roche- Foucault Epoufe de
Charles_Emmanuel de Cruffol S. Sulpice , Duc
de Cruffol , Meftre de Camp du Régiment de
Medoc Infanterie , accoucha le 29. Decembre
d'un fils qui fut nommé Charles Emmanuel par
Jean Charles de Cruffol , Duc d'Ufez , Premier
Pair de France , Prince de Soyon , Comte de
Cruffol &c. Chevalier des Ordres du Roi , Gouverneur
& Lieutenant Genéral pour Sa Majeſté
en fes Provinces de Xaintonge & Angoumois ,
& Gouverneur particulier des Villes & Châteaux
de Xaintes & d'Angoulême , & par D. Magdelaine
Charlotte Le Tellier de Louvois , Ducheffe
de la Roche- Foucault.
TABLE
A
GENERALE ,
de
l'année 1730.
Bfalon, Tragedie ,
Académie Françoiſe
-Des Sciences ,
-Des Belles Lettres ,
Des Jeux Floraux ,
De Pau ,
De Marſeille ,
A.
2:
1832
552.2252
366.763
. 2680
758.2680
179
167
1398
De
DES MATIERES.
De Montpellier ,
29-3
De Lisbonne ,
123
De Petersbourg ,
2054
De Peinture , 2017.2466
Acheron , comment fe doit prononcer , 1557
Acta Eruditorum 1795
Alcione , Opera ,
1188
Ame des Bêtes ,
752
Anevrifme mixte gueri ,
294
Angleterre ( Abregé de l'Histoire d' ) 1990
Anjou ( Naiffance du Duc d' ) 1900
Antiquitez , 463. 642. 1096. 1225. 1814
Arden , fignifie Forêt , 1.300
Ardennes , Abbaye , 1300
Arrêts d'Amour 950
Arquebufiers ( établiffement d'y 1560
Affemblée du Clergé , 1238
Avocats. Arrêt au fujet de leurs Confultations
2543
Autreau , fes Ouvrages ,
1.379
B.
Bacon ,
Acchus ( refte de la Fête de ) 2185
Baron , Eloge de François ) Conful en Syrie,
Baron , Comedien
Bafile ( OEuvres de S. )
Benoît XIII. ( Mort de )
1269. 1503-
15.97.2233
2010
592. 596.
Biblioteque des enfans , 1319. 1511. 1696. 1912.
2117. 2336. 255.4.
Bigarures calotines ,
Blainville. Village ,,
2770
2668
1307
Bouillons ( les ) nourriffent autant que les alimens
ordinaires ,
Bouquet , 47. 1730. 1972. 2315. 2364.
Bouquet du Roi ( le ) Opera Comique ,
Bregance ( Nobleffe du B. Barthelemi de )
Broderie
1175
2614.
2022.
2147
2265
Bruit
TABLE
Bruit extraordinaire entenda dans l'Air , 2304
Brutus, Tragedie ,
Budé , ( Guillaume )
Adran univerfel ,
C.
Canonifation de S. Fidel ,
Callifthene. Tragedie ,
Canons d'une nouvelle invention ,
2688.2925
343.734-
356
1039
370. 569
970
Cantate , injufte foupçon , 250. Le defefpoir
Amoureux , 425. L'Amant fidele & malheureux.
650. L'Ombre de Pétarque , 2202 .
Ariane & Thefée , 2551. Vertumne & Pomone
Caprice d'Erato
Carnaval & la Folie ( le ) Opera ,
2801
2273
1622
Carte des environs de Paris , 355. Generale &
Hiftorique de la Monarchie & du Militaire
de France > 2903
Caftel ( Mathématique univerfelle du P. ) 1973
Cataractes Criſtallines ,
IIOS
Cavalerie ( Ecole de ) 2250
Cazernes de Metz , 1035
Cerceau ( Mort & Eloge du P. Jean - Antoine
du ) 1962
Châffe de S. Aignan , 2920
Clavecin (Obfervation fur la Méthode d'Accompagnement
pour le ) 253. 489. 880. 1079 .
Clement XII. ( Election de )
College Royal ,
Commerce Litteraire neceffaire à la Botanique ,
Comete vûë en 1723. à la Chine ,
Conte. Les Serins , 635. Le Belier ,
Corneille ( Imitation de J. C. de )
Corneilles. Moyen de les détruire ,
Cornicula ( fignification de ,
Couleurs nouvellement inventées ,
Crifpin bel efprit , Comedie, 2687
1337. 1945
1649
2684
1174
1983
744
2917
557
1350
968
DES MATIERES.
Czar. Son Mariage , 172. Sa Mort ,
D.
DE
Eclaration fur la Conftitution
Délivrande , Village , -
Démocrite prétendu fou , Comedie ,
Diamans ( Mine de ) au Brefil ,
584
839
1301
991
124.
Divorce ( le ) Comedie , 807. 1003. L'Ile du
Divorce , Comedie , 2040
Docteur (ceremonie de la prife de Bonet de ) 1890
Duchefne ( le Livre des Antiquitez des Villes ,
Châteaux , &c . n'eft pas d'André ,
Ea
E.
340
Aux de Bourbon ( Analife des ) 5. Qualité
de l'Eau de vie , 868. 1721. 1732 2195. 2369
Egypte ( Trouble d' )
Elegies de l'Abbé le Blanc ,
Eloge des Grans hommes ,
682
2884
1969
Enigmes , 95. 331. 534. 733. 946. 1154. 1359 .
1572. 1791. 1988. 2211. 2419. 2650 2871 .
Leur Explication en Vers , 945. I154. 2650.
Epigramme , 940-1788 . 2834.
Epitalame ,
Epitaphe du Cardinal de Noailles , 121. D'Ælia ,
Lælia Crifpis expliquée, 1794. D'une Chienne,
471
2270
Epitre en Vers du P. A. J. 24. A Me de Chabrillant,
437 . A la Comteffe de B... , 1518. A l'Abbé
de , 1565. Retour d'un Voyage , 1739. à l'Evêque
de Grenoble , 2142
Effai de comparaifon entre la Déclamation & la
Poëfie Dramatique ( Remarques Critiques fur
1' ) 908 . Effais hebdomadaires , 1992
Eftampes , 551. 768. 1184. 1831. 2465. 2919
Etrennes ,
Eu (Hiftoire naturelle , civile & Ecclefiaftique
du Comté d' )
Evêques de Nortumberland ,
176
1541. 1742. 1952
1063
TABLE
F
Fable. Le Corbeau & le Pigeon 1538. Le Re- nard & l'Afne
Facardins ( les quatre )`
1967
1998
Fête pour le Dauphin. 49. 111. 155….159. 304.
378. 390. 586. 604. 702. 1007. 1012. 1202 .
1429. 1716. Pour le Duc d'Anjou 2088. De
Nemours 1457
Fiefs Remarques fur les Principes du Droit
François fur les )
Fierte ( Cerémonie de la )
35. 850 2399
Í 122 Flocel, fi c'eft un Saint de Normandie
1678
Foi & hommage rendu par le Duc de Loraine
Foire des Poëtes ( la ) Comedie ,
Aronne , Riviere ,
G
G Gelée extraordinaire
Glace , comment elle fe fond
Goute ( Remede pour la )
408
2033
I555
2838
301
554
Grammaire Françoiſe ( Principes generaux &
raifonnés de la )
Grammaire Hébraïque
2237
2677
Gregoire VII. ( Arrêt au fujet de la Legende de )
H
Aggi Calfah , Auteur moderne
621
360
Hinque de M. Gaulliere 238. de M. Cho
plet, 599.Des Peres Porée & la Sante, 654.Du
P. du Parc , 671. Au Prince de Conti , 1669.
1674.
Henriade ( la ) Poëme , 2878 Herrera ( Memoire fur deux Editions nouvelles
des Decades d'Antonio
de )
544 Hiſtoire des Hommes Illuftres dans la Républi- que des Lettres ( Mémoires
pour fervir à P' ),
339.1574.2225.2453
. 2652. Bifantine, ssa.
De
DES MATIERES.
I
De l'Eglife de France
I
754
Dille fur le Dauphin , 916. Les Defordres de
l'Amour dans l'Ile de la Sageffe , 92 5. A la
Marquife de , 1691 . Les Hirondelles , 2577
Jettons , 125
Jeu de l'Amour & du hazard ( le ) Comedie , 145 •
Imprimerie de Conſtantinople,
772
317
Incendie, 1027 . 1435.D'une Forêt de la Finlande,
Induſtrie , ( l' ) Prologue ,
Ino & Melicerte , Tragedie ,
Infecte particulier , 1551. Infectes d'Angleterre ,
Journal de Paris ,
Jouvenet ( vie de ) Peintre ,
2282
1402
127
1607
2616
1484
Jugement criminel ( forme finguliere de ) 2835
Ivraye ( Analife de l' )
Juvifi ( chemin , Pont & Fontaine de )
L
Anguedoc ( Hiftoire generale de )
29.9
1783
2425
Langues Orientales , ncceffairespour làconnoiffance
de l'Hiftoire , 759
Latin ( Méthode pour apprendre le ) 1185. 1816
Lecouvreur ( mort & éloge d'Adrienne ) 577.
1600. 2234
Lettre de l'Archevêque de Paris au Roi , 474 .
Réponſe ,487 A Milord fur Baron & Lecouvreur,
Lifou ( Batailles données à )
Lit de Juftice ,
f
1596
205
833
Logogryphe , 95. 328. 532. 733. 947. 1155 .
1359. 1573 1791. 1988. 2212. 2420. 2651 .
2871. Leur explication en Vers , 94. 531. 731 .
943. 945. 2650 ·
Lyon ( Hiftoire Litteraire de ) 2432.2662.
M.
TABLE
M
MAchine extraordinaire pour rejoindre une
voute d'Eglife ,
Madrigal , 285. 292. 1559. 1790 1976. 2399
Malade par complaitance ( le ) Comedie , 371
Maladies ( Méthode pour connoître toutes les )
2441. Il faut guerir l'efprit en même - tems
que le corps ,
Marſeille Sçavante ,
Martial d'Auvergne , Poëte
1 2602
1267
947
Mafiai , Palais des Rois de la premiere Race, 212
Maurice , Tragedie , 1856
Médailles qui font mention des Cohortes & Legions
de Caraufiùs , 503 . De François I. 1134.
1568. D'Attila, 1805. Du Roi,2467. Du Pape ,
Métal qui imite l'or
2923
769
.
Microſcope par reflection
Mignard ( vie de Pierre )
Minerve ( Eglife de la )
Miffel de Chartres ,
970. 1393
1159. 1365
1391
2281
2582
Mines d'or en Calabre , 366. en Siberie ,
Miffiffipi ( longitude de l'embouchure du ) 1985
Modes
2311. 2624
Monnoye de Philippe Augufte & de S. Louis
( explication de la Legende d'une
Monftres marins
Mullberg ( Camp de )
9.2 Ö
2015
1437. 1641. 2057
2678 Cco nouvelle Edition de l' ).
Ode. La Raifon , 229. Sur la Fête des Ambaffadeurs
d'Efpagne , 702. 1086. La Poefie
861. Sur la Naiffance du Dauphin , 875 . 1935 .
1940. Du Palinod, 892.Polymnie, 1059. L'A
mour de la Patrie , 1074. La Beauté , 1263 .
Les Conquêtes de Villars, 1286. A la Princeffe
de Corsi, 1330. La Douceur, 1479 . A M. D. C.
1549
DES MATIERES.
1549. Anacreontique , 1553. Les Miracles ,
1752. Sur la Na flance au Duc d'Anjou ,2083.
2097. 2163. 2417. L'Amour deguilé , 2116.
Les Jardins de S. Martin , 2181 L'Enfer, 2331 .
La gloire des Saints, 2597. 2641. La Jeuneffe,
2628
524
Imitée du Cantique de Moyfe, 1.Du Vexilla,
715. Du Victima Pafchali , 847. D'Horace ,
447. 2623. D'Anacreon ,
Oldfield ( Miftris Anne ) Comédienne. Sa mort
& fon éloge,
2494
Orateurs ( fi la gloire des ) eft préferable à celle
des Poëtes ,
1773. 2382
Ortographe par principes 743. Projet pour per
fectionner l'Ortographe desLangues de l'Europe,
Oudart derivé d'Odon
Alinod ,
P.
1581
439
361
Prangurique de S.Sulpice , 266.de S. Jean Bap .
1395 de S. Louis , 2006. de S. Auguſtih, 2215
Paranimphes de Medecine , 2257
Perfe , 51. 376. 583. 699. 808. 1011. 1 © 25 .
1201. 220. 2496 .
Phenoméne celefte , 553. 1977. 2462. 2916.25 19
Phoſphores nouveaux ,
Pierres extraordinaires dans les reins
pereil lateral ,
Plomb Moulin pour faire des
2263 .
$ 2681
, 929. Ap-
1176. 1826
Tables de }
Poeme , le jeune Eléazar , 263. Traduit de Petrone
,
Poefies fpirituelles ,
Poetes voy. Orateurs.
1310. 1494
114
Poudre à Canon. Quand elle a été trouvée, 1954
Prince de Noifi ( le ) Comédie , 2482
du
Profeffion religieufe , s'il y faut le confentement
TABLE
'du Pere ;
Punique ( effai fur la langue , )
Pyrrhus , Opera ,
Q
Q
897
1800
2469
Ueftion , qu'elle eft la femme la plus malheureufe
, ou celle qui a un mari qu'elle
hait , & dont elle eft aimée ; ou celle qui a un
mari qu'elle aime & dont elle eft haie ,
Eflexions ,
R
Remedes chauds ( abus des )
Renaudot ( Eufebe )
Réputarices , explication de ce mot ,
Réunion forcée ( la ) , Comédie ,
Rhume ( regime contre le ) ,
429
"
1355. 2205. 2646
IIII
8454. 2652
709
1853
285
Rituel de Blois ,
2242
Roman Comique ( le ) en vers,
2761
Rondeau ,
2839
Routes du monde ( les ) Comedie , 1414
S
Sonnet au Roy ,
Songe ,
Soufleur réponſe du )
Stances ,
Ainte Ménéhould rebâtie
S.Sallufte (Traduction de )
Saluftii Opera.
Samfon Tragedie.
Sang ( changer dans le corps la diftribution du )
526.
Sciences ( cours des )
Sels , contenus dans l'air
Silphide , ( la ) Comedie ,
Sponde ( Henri de )
105
450
2044
2231
2115
2168
2232
.1147. 1961
1864
1149
103
2259
581. 794
Suivantes , ( les deux ) Comédie
Supplications de la Faculté de Théologie , 1465
T
DES MATIERES.
T
Able Reglemens pour la dépenfe de la) 2617
Tabicaux , 1184. 1682. 2299.2465
TA
Theatre des Grecs ,
Telémaque , Opera.
Jean de Jerufalem ,
1381
375. 779
Tenque ( Gérard ) Fondateur de l'Ordre de faint
Théiée , nouvelle décoration de )
Théfes fupprimées ,
2874
147
1056. 1057
Tibulle a connu le vrai caractere de l'Elégie ,
363.
Tourbillon de Montpellier , 295
Tourneli , mort d'Honoré ) 122
Tragédie en profe , ( la ) Comedie , 807. 1005
Tragédies Italiennes , Recueil de ) 967.968
Tremblement de terre , 1223. 1448. 1646. 2462 ·
Triomphe de l'Interêt , ( le , Comedie ,
Troy ( mort & éloge de François de )
24, 2
973
Turquie. Empereur dépofé , 2511. 2733. 2750
V
Albonnays ( mort & éloge de Jean - Pierre
de ›
Venceslas , Tragedie,
(
Vérole , petite ) de S. Cyr ,
976
2689
2840
Vers , Triomphe de Pallas , 461. Sur la mort
d'un Chien , 502 , à Gribouri , 679. Printems ,
905. Le Rhume à la mode , 1 100. Imitez des
Vers latins de la Monoye , 1109. Les Fléches
de l'Amour , 1119. Remerciment , 1132 Le
Bandeau , 1251. Au P. & à la P.de Conti, 1334.
Sur le rétabuiflement de la fanté de M . 1344 .
Pour Corinte , Chienne , 1554. Sur une Brulure
, 1570. Le Moucheron , 1718. A Mlie de
V. 1781 , Remerciment, 1786. A Madamoiſelle
Pafquier , 1787. L'homme , 1903. Avis à une
Demoiſelle de 12 ans, 1951.Le veritable amour
perdu , 2192. Cauſe de fa perte , 2193. Portrait
TABLE DES MATIERES.
trait de l'Amant , 2379. Portrait de la Maîtreffe
, 381. A Fontenelle , 2620.
Verfification n'eft pas peceffaire à la Tragedie
1173.
Vice , (le ) rend hommage à la vertu ,
Victor Amédée II. ( abdication de )
Vieilleffe extraordinaire ,
2075.
Vieux , village ,
2631
2078
171. 421. 598. 599.
7
1293
Vinci têtes de caractere & de charge de Leonard
de )
Vocations forcées , ( les ) Comédie ,
Voyage de baffe Normandie ,

Z
Z Emine & Almanfor , Comédie ,
1818
557
1292
1407
Fin de la Table des Matieres.
TABL E.
léces fugitives . Le Roman comique , Poëme ,
Pléces
&c .
2764
2773
Suite de la feptiéme Lettre , fur la Bibliotheque
des Enfans , &c.
Vertumne & Pomene , Cantate , 2801
Relation d'un Phénoméne extraordinaire, arrivé
à fept lieues d'icy ,
Epigrammes ,
2804
2834
Lettre de Laufanne , au fujet d'une forme fingu
liere de Jugement criminel , & fur un Phénoméne
arrivé au mois d'Oct. dern .
2835
2839
Lettre fur la petite Vérole,dont les Religieufes &
Rondeau ,
les Demoifelles de S.Cyr ont été affligées , 1840
Enigme. Logogryphes , 2871
Nouvelles Litteraires , &c. 2873
Hiftoire du B. H. Gérard Tenque ,
2874
Airs férieux & à boire , & c. 2876
Le Calendrier chronologique & hiftorique , & c.
2877
La Henriade , nouvelle édition. Poëme, 2878
Elegies de M. L. B. C. avec un Difcours fur ce
genre de Poefie, & quelques autres Piéces , &c.
2887
Nouvelles Poëfies fpirituelles & morales , fur les
plus beaux Airs , &c.
Defcription abregée de la Carte generale & hiftorique
de la Monarchie & du Militaire de
France , &c.
Phénomene , &c.
Imitation de J. C. &c.
Roman Comique en Eftampe ,
2901
2903
2916
2917
2919
2920 Châffe d'argent de S. Aignan ,
Médaille du Pape , gravée en taille doucè , 2923
؟
Spec
2925
2936
Spectacles , Tragedie de Brutus , Extrait ,
L'Opera de Phaéton , Décorations ,
Nouvelles étrangeres , extraites de plufieurs Lettres
de Conftantinople , fur la révolution , &c.
De Ruffie , de Pologne ,
Suede , Dannemarc ,
Allemagne ,
Italie ,
2942
2957
2959
2960
1961
Efpagne , Grande Bretagne >
2963
Morts des Pays Etrangers 2965
France. Nouvelles de la Cour, de Paris, &c.2966
Morts , Naiffances ,
ibid.
Errata du premier volume de Decembre.
Page Age 2620. lig 7.Papebroch , lifez Bollandus.
Fantes à corriger dans ce Livre.
PAge 2792. ligne 25. les , ôtez ce mos.
Pag. 2809. 1. 17 dans , lifez de.
P. 28 17. 1. 26. il feroit , lif. il fe fercit.
P. 284. 1. 11. effrayer le , f. effrayer par le.
P. 2853. 1. 20. entiere , lif. en tierce.
P. 2877. I. 21. année , ôtez ce mot.
P. 2882. 1. 8. ces aftres , tif. cet aſtre.
P. 2919. 1. 23. Rabotin , lif. Ragotin.
Ibid. 1. 26. 4. du mois de Janvier , lif. le 14 du
mois dernier.
P. 2910. l. 12. Meiffonniere , lif. Meiffonnier,
La Médaille gravée doit regarder la page
2923.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le