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NOUVEAU
MERCURE
SEPTEMBRE 1720.
Le prix eft de la piece de 30
fols courante
DE
LYON
1893*
.A PARIS.
Chez GUILLAUME CAVELIER , au Palais.
La Veuve de PIERRE RIBOU , Quay des
Auguftins , à l'Image S. Louis .
Et GUILLAUME CAVELIER , Fils , ruë
S. Jacques , à la Fleur- de- Lys d'Or.
M DCC. X X.
Avec Approbation & Privilege du Roy.
AVIS INTERESSE
L
de l'Auteur du Mercure ,
Au Public
defintereẞé.
Es frais pour l'impreffion du
Mercure , étant au moins triplés
, l'Auteur de ce Livre fe voit
de nouveau dans la neceffité d'en
augmenter le prix. Ainfi , il ne peut
fe difpenfer de le vendre à l'avenir
la pièce de trente fols courante ,
avec promeffe de le diminuer de
mois en mois , jufqu'à ce qu'elle
ſoit deſcenduë à vingt- cinq fols.
L'Adreffe de l'Auteur , eft.
A Monfieur Bu CHET , Cloître
5. Germain l'Auxerrois.
De l'Imprimerie de C. L. THIBOUST
Place de Cambray.
496081 %
LE
NOUVEAU
TABLUE
LYON
DE
MERCURE:
.
VILLE,
DES ROIS ET DES PRINCES
du Sang de France qui ont vû
leurs Petits- Fils & Arriere- Petits-
Fils.
Par Monfieur de Camps , Abbé de Signy.
P
EU de jours après la mort du
Roy Louis XIV. de glorieuſe
memoire , quelques perfonnes de
confideration m'ont demandé
s'il étoit vrai qu'aucun autre de nos Rois
eût vû fes Arriere- petits Fils : Je leur ai
dit que je croyois que Louis le Grand étoit
le premier à qui Dieu eut accordé cette
grace ; neanmoins crainte de n'être pas
affez inftruit , j'y ai fait quelques reflexions
& j'ayreconnu que je ne me fuis pas trompé.
Il y a eu quelques Princes du Sang de
y a gu
A ij
LE MERCURE
France qui ont vu leurs Arriere- petits-
Fils ; c'est ce que l'on peut remarquer par
les obfervations fuivantes.
La premiere comprend d'abord les Rois
de France ; & la feconde , les Princes de
leur Sang qui ont vû leurs petits - Fils &
leurs Arriere- petits- Fils. J'y ai obſervé ,
autant qu'il m'a été poffible , le temps que
ces Monarques ont vêcu , celui de leur
Regne , l'âge des Princes du Sang , & l'année
de leur decès . J'ay placé les Rois de
France les premiers , & j'ay rangé les Princes
du Sang par ordre Chronologique de
leur decès , fans avoir égard s'ils avoient
été Rois ou non . On y obfervera que Louis
le Grand eft le premier des Rois & des
Princes de fon Sang , qui dans un âge
encore affez éloigné du dernier terme de
fa vie , ait eu la confolation de voir fes
Arriere- petits- Fils.
C'est une fuite des benedictions que
Dieu a répandues fur će Monarque , le plus
pieux , le plus fage , & le plus grand de
tous ceux qui ont regné dans le monde
depuis plufieurs ficcles,
DE SEPTEMBRE. S
LEGAL
ROIS DE FRANCE
qui ont vu leurs Petits- Fils.
Lovis I. a vêcu quarante - cinq ans ,
CLOV
& en a regné trente. Il a vû Theodebert
, fils de Thieri fon fils ; & ce même
Theodebert étoit déja grand , comme nous
l'aprenons de Gregoire de Tours , qui dit ;
Habebatjam tunc Thendericusfilium nomine
Theudebertum elegantem atque utilem. *
Clotaire 1. a regné cinquante ans , &
en a yêcu environ foixante. Il a vû les
filles de fon fils Chrame .
Charlemagne a régné quarante- fix ans ,
quatre mois & trois jours , & en a vêcu
foixante douze . Il a vu quatre de fes Petits-
Fils , fçavoir , les trois fils aînez de Louis
le Debonnaire , Lothaire , Pepin , & Bernard
fils de Pepin. Bernard fut marié quelques
mois avant la mort de Charlemagne .
Louis le Debonnaire a regné trentefept
ans , fçavoir , dix ans & demi en
Aquitaine du vivant de fon pere , & vingtfix
ans cinq mois & dix-huit jours fur
toute la Monarchie Il a vêcu foixantequatre
ans. Il a vu les fils & les filles de
fes trois fils aînez ; fçavoir , Louis &
* Greg. Tur. 1. 3. c. I.
A iij
6 LE MERCURE
Lothaire II . fils de Lothaire fon fils ainé ,
Carloman & Louis , fils de Louis le Ger--
manique , & Pepin II , & Bernard , fils de
Pepin I. Roi d'Aquitaine.
Louis le Germanique , Roi de Germanie
, fils de Louis le Debonnaire , a vû
Arnoul fils naturel de Carloman fon fils,
aîné . Il a vû auffi le jeune Prince Louis ,
fils unique legitime de Louis Roy d'Allemagne
, & enfuite de Baviere , fon fecond
fils.
Louis le Germanique a regné vingt-fept
ans depuis la mort de fon pere ,
& en tout
cinquante-trois , & en a vêcu foixante- dix .
Charles le Chauye a vêcu cinquantequatre
ans , & en a regné trente -fept. Il
a vû les deux fils aînez de Louis le Begue
fon fils ; fçavoir , Louis III. & Carloman .
Louis VII.. Roi de France a vû Henri
II. Comte de Champagne , & Henri III.
auffi Comte de Champagne , après la mort
de fon frere . Ils étoient fils de Marie fa
fille aînée , & de Henri le Large , Comte
de Champagne. Il a aufli vû Louis Comte
de Blois , fils d'Alix de France ,fa feconde
fille , & de Thibaud V. Comte de Blois.
Ce Monarque regna quarante- trois ans.
un mois & dix - fept jours , il avoit vêcu
près de foixante- dix ans.
Philippe Augufte a regné quarante -trois:
ans , huit mois & quatorze jours depuis
DE SEPTEMBRE.
la mort de fon père , & a vêcu cinquantefix
ans & onze mois moins huit jours . Il
a vu les quatre fils aînçz de Louis VII
fon fils ; fçavoir , le Prince Philippe , qui
mourut jeune , Saint Louis , Robert Comte
d'Artois , & Alphonie Comte de Poitou
& de Toulouſe.
Saint Louis a vêcu cinquante - cinq ans
& quatre mois , & a regné quarante- trois
ans , neuf mois & dix-huit jours . Il a vi
Philippe le Bel fon petit -fils , ce Prince
étant né en 1268.
Philippe le Bel a vêcu quarante fix ans,
& a été Roi de France vingt-neuf ans ,
un mois & vingt- trois jours. Il a vû les
filles de fes deux fils ainez Louis Hutin
& Philippe le Long ; fçavoir , Jeanne
fille de Louis Hutin , & Jeanne & Manguerite
filles de Philippe le Long.
Philippe de Valois a vêcu cinquantefept
ans , & a regné vingt deux ans cinq
mois & vingt jours . Il a vû Charles V.
fon petit-fils , qui étoit déja dans la treiziéme
année. Il a vû auffi les autres fre
res de cejeune Prince ; fçavoir , Louis Duc
d'Anjou , puis Roi de Sicile , Jean Duct
de Berry , & Philippe Duc de Bourgogne .
Louis XIV. dit le Grand , eft decedé
dans fa foixante dix- feptiéme année . Il a
regné foixante douze ans . Il a vû trois de
Les Petits- Fils ; fçavoir , M. le Duc de
A iiij
8 LE MERCURE
Bourgogne , Philippe V. Roi d'Efpagne ,
& Mr. le Duc de Berri . Il a vû fix Arriere
- Petits- Fils , trois en France , & trois
en Espagne ; & il a eu la confolation de
laiffer à Louis XV. aujourd'hui regnant ,
la plus belle & la plus noble Couronne
qui foit dans le monde : Bonheur que n'ont
eu aucuns des autres Rois de France fes
predeceffeurs.
La naiffance & la' confervation de Louis
X V. eft une fuite des benedictions que
Dieu a répanduës fur ce grand Monarque,
fon Bifayeul , qui a mis toute fa gloire
dans le cours de fon Regne , à faire regner
la pieté & la juftice , à fe rendre le Pere
& le Protecteur des Rois , le foutien le
plus ferme de la veritable Religion , l'amour
& les delices de fes Peuples , la terreur
& en même tems l'admiration de fes
ennemis. On doit regarder la longue
pofterité de ce Monarque , comme un
préfage certain de la perpetuité de la Cou-
- ronne de France & de celle d'Eſpagne fur la
tête de fes defcendans , & de l'agrandiffement
des deux Monarchies .
.
DE SEPTEMBRE.
PRINCES DU SANG DE FRANCE
qui ont vu leurs Petits - Fils.
OBERT de France , Daic de Bour-
Rgogne , Fils de Robert Roi de France ,
a vû les cinq fils de Henri fon fils aîné ;
fçavoir , Hugues & Eudes fucceffivement
Ducs de Bourgogne , Robert Evêque de
Langres , Henri tige des Rois de Portugal ,
& Renaud fon arriere- petit- fils étoit majeur
lors de fa mort , arrivée l'an 1075 .
Alphonfe I. Roi de Portugal , Prince
du Sang de la Branche de Bourgogne ,
ancien , mourut l'an 1185 , âgé de loixante
feize ans , ou felon quelques Auteurs de
quatre-vingts onze , après en avoir regné
foixante trois. Il a vû naître peu avant ſa
mort Alphonfe II. fon petit- fils , fils de
Sanche I. fon fils aîné. Ce Roi Alphonfe
I. étoit fils de Henri de Bourgogne ,
Comte de Portugal , Prince du Sang de
France , mort feptuagenaire.
Robert I. Comte de Dreux , fils du Roi
Louis le Gros , mourut l'onze Octobre
1188. Il a vû les enfans de Robert II.
du nom , Comte de Dreux , fon fils aîné
du troifiéme lit , entre autres Robert III .
Comte de Dreux , Pierre , dit Mauclerc ,
Duc de Bretagne , & Henri de Dreux Ar
chevêque de Reims .
10 LE MERCURE
Sanche I. du nom , Roi de Portugal , fils
d'Alphonfe I. qui, vêcut cinquante - huit
ans , & en regna dix fept , mourut en
1212 , neuf années après la naiffance de
Sanche II. & d'Alphonfe III . fils d'Alphonfe
II. fon fils ainé.
Robert II. du nom , Comte de Dreux ,
fils aîné de Robert I. auffi Comte , deceda
le 28 Decembre 1218. Il a vû Jean I
Comte de Dreux , fils de Robert fon fils
aîné .
Pierre de Dreux , dit Mauclerc , Duc de
Bretagne , Prince du Sang , & fils de Robert
I. Comte de Dreux , mourut dans
un âge avancé l'an 1250 ; il avoit vù fon .
petit- fils Jean II. qui étoit même âgé de
onze ans , & qui étoit fils aîné de Jean T
fils de Pierre de Dreux.
Hugues IV. Duc de Bourgogne , Prince
du Sang , fils d'Eudes III. aufli Duc de
Bourgogne , mort en 1272 , âgé de foixante
ans , a vû les filles de les deux fils
aînez Eudes & Jean , & les fils de queb
ques- uns des premiers enfans de Robert
fon troifiéme fils , & fon fucceffeur au
Duché de Bourgogne , ayant exclus de fa
fucceffion les filles de fes fils aînez .
Charles de France , frere de Saint Louis,
fils de Louis VIII. & Roi de Sicile , Comte
d'Anjou , du Maine & de Provence ,.
mort en 128 , âgé de foixante- fix ans ou
DE SEPTEMBRE. TE
environ , fut pere de Charles II . Roi de
Jerufalem & de Sicile , duquel il a vû
plufieurs enfans , entr'autres Charles I.
Roi d'Hongrie , né dès l'an 1272 , Saint
Louis , dit de Marſeille , Evêque de Touloufe
, & Robert Roi de Jerufalem & de
Sicile .
Jean I. Duc de Bretagne , mort le 8
Octobre 1286 , âgé de foixante- neuf ans ;
il étoit fils aîné de Pierre de Mauclerc ,
& avoit vu fon petit fils , Artus Duc de
Bretagne , âgé de vingt- quatre ans , marić
& ayant un fils qui étoit né au mois de
Mars de la même année , Ce fils étoit Jean-
III. depuis Duc de Bretagne. Ce Duc Jean-
I. eft le feul des Ducs de Bretagne qui ait
vû la troifiéme generation.
Robert II. du nom , Comte d'Artois,,
fils aîné de Robert de France I. du nom ,-*
Comte d'Artois , tué à la bataille de Furnes
le 1 Juillet 1302 , âgé de cinquantetrois
ans , avoit vú mourir dès l'an 1281
le Prince Philippe fon fils aîné , qui laiffoit
cinq enfans ; fçavoir , Robert d'Artois ,
Comte de Beaumont, & quatre filles . Le
predecès du Prince Philippe caufa ce fameux
procès pour le Comté d'Artois ,.
dont les fuites ont été fi funeftes à la
France .
Jean II. Duc de Bretagne , fils de Jeanauffi
Duc de Bretagne , mort de fes
12 LE MERCURE
bleffures le 18 Novembre 1305 , avoit vù
Jean III. fon petit- fils marié il y avoit
neuf ans ; mais fans enfans. Il n'en eut
aucun.
Charles II. du nom , Roi de Sicile ,
&c. Duc d'Anjou , &c. Comte de Provence
, &c. dit le Boiteux , Petit - Fils de
France , & fils de Charles I. Roi de Sicile ,
mourut le 6 May 1309 , âgé de foixanteun
ans. Il vit fon fils Charles Martel Roi
d'Hongrie, & celui- ci étant mort en i301 ;
fon fils Charles II . ou Charobert Roi
d'Hongrie lui fucceda , & fut marié avant
la mort de fon Ayeal .
Ce même Charles II. avoit un troifiéme
fils nommé Robert , qui lui fucceda
aux Royaumes de Jerufalem & de Sicile ,
& qui avant la mort de fon pere eut Charles
Duc de Calabre.
Robert de France , Comte de Clermont
, Sire de Bourbon , & cinquiéme fils
de Saint Louis , mourut en 1307 , étant
fort âgé ; il a vû naître Pierre I. du nom ,
Duc. de Bourbon , Jacques de Bourbon
mort jeune , & Jacques de Bourbon Comte
de la Marche & de Vandôme , fils de
Louis I. Duc de Bourbon fon fils aîné.
Charles Comte de Valois , fils de Philippe
le Hardi , & pere de Philippe de
Valois , a vû naître le Roi Jean fon petitfils
, qui même étoit âgé de fept à huit ans.
DE SEPTEMBRE.
13
Ce même Prince a vû les fils de Jeanne
fa fille , Comteffe de Hainaut , ceux de
Marguerite de Valois , Comteffe de Blois ,
auffi fa fille. Ce Comte mourut le 9 De.
cembre 1325 , âgé de près de foixante
ans.
Louis I. Duc de Bourbon , fils aîné de
Robert de France , Comte de Clermont ,
mort en 1341 , âgé de près de foixante
ans , a vû les enfans de Pierre I. du nom
fon fils ; fçavoir , Louis II . Duc de Bourbon
, Jeanne de Bourbon , femme de Charles
V. Roi de France , & Blanche , femme
dé Pierre le Cruel , Roi de Caftille.
Eudes I V. Duc de Bourgogne , fils de
Robert II , du nom , Duc de Bourgogne
& d'Alix de France , mort en 1349, avoit
vû naître trois ans auparavant Philippe ,
dit du Roure , fon petit-fils, ( il lui fucceda)
qui étoit fiis de Philippe de Bourgogne,
Comte de Bourgogne & d'Artois fon fils.
Philippe de France , dit le Hardi , Duc
de Bourgogne , quatriéme fils de Jean Roi
de France, mort en 1404 , âgé de foixantequatre
ans , a vû Philippe le Bon , fils de
Jean Duc de Bourgogne fon fils aîné , &
l'a vû âgé de huit à neuf ans.
Louis de Bourbon Comte de Vandôme
& de Caftres , fils puîné de Jean Comte.
de la Marche , mourut en 1313 , après
avoir vu François de Bourbon Comte de
14 LE MERCURE
Vandôme , de Converfan , & de Saint Pol ,
& Louis de Bourbon Prince de la Rochefur-
Yon , tige des Ducs de Montpenfier ,
fils de Jean de Bourbon II . du nom ., Comte
de Vandôme fon fils .
Louis II. du nom , Duc de Bourbon , fils
de Pierre 1. Duc de Bourbon , mourut
âgé de foixante - treize ans en 1410 ; il 2
vù Charles I. du nom, Duc de Bourbon ,
Als aîné de Jean I. aufli Duc de Bourbon.
Il avoit été marié trois ans auparavant.
Jean de France Duc de Berri , mort en
1416 , âgé de foixante- feize ans , á vû
Charles d'Artois Comte d'Eu , fils aîné
de Marie de Berri fa fille , & l'a vû âgé
de vingt-trois à vingt- quatre ans , pour le
moins , mais fans enfans . Il a vù auffi ,
Charles I. Duc de Bourbon , fils de la
même Marie & de Jean I. Duc de Bourbon
fon fecond mari.
་
Jean I. du nom , Roi de Portugal , fils
naturel du Roi Dom Pierre , vêcut foixante-
feize ans , en regna quarante- neuf,
quatre mois & neuf jours , & mourut let
14 Août 1433 , uunn aann après la naiſſance
d'Alphonfe V. fils du Prince Edouard fon
fils aîné .
René d'Anjou , dit le Bon , Roi de Naples
, de Sicile , d'Arragon , &c. Duc d'Anjou
, de Lorraine & de Bar , Marquis de
Pont , Comte de Provence & de ForcalDE
SEPTEMBRE. IS
quier , a vêcu foixante & treize ans . Il eft
mort en 1480. Il a vû Marguerite de
Calabre fon Arriere-petite- fille , étant fille
naturelle de Jean Duc de Calabre fon
• petit- fils .
Jean de Bourgogne , Prince du Sang de
France , Duc titulaire de Brabant , &
Comte de Nevers , d'Eu , de Rethel ,
d'Auxerre , &c . mort en 1491 , âgé de
foixante-feize ans , a vû Jean II . du nom,
Duc de Cleves , & Engilbert de Cleves
Comte de Nevers , & c . fils d'Elifabeth
de Bourgogne fa fille aînée ; & il a vù
les enfans de ces mêmes Jean & Engilbert
qui étoient par confequent fes Arrierepetits
- fils .
Louis II. Prince de Condé , mort en
1686 , a vu le Duc de Bourbon fon petit
fils , & l'a vu marié , l'ayant été le 24.
Juillet de l'année 1684 .
Feu Monfieur , Frere unique de Sa
Majefté , a vu les petites filles de Madame
Royale fa feconde fille , & a vû l'aînée
mariée à feu Mr le Duc de Bourgogne.
Il a vu de plus les filles de Monfieur le
Duc d'Orleans , & les enfans de Madame
de Lorraine fa fille.
Henri Jules de Bourbon Prince de
Condé , a vû les fils & les filles du Duc
de Bourbon fon fils aîné , de la Princeffe
de Conti , & de la Ducheffe du Maine
Les filles,
16 LE MERCURETout
ce qu'il y a de bons François .
doivent demander à Dieu que Monfeigneur
le Duc d'Orleans Regent du Royaume ,
ait la joie de voir ûne auffi longue pofterité
que celle de Lauis le Grand .
CHANDRAAHSEN
Roman Indien.
Traduit mot à mot du Talanga on Badaga ,
Langue Indienne.
Utrefois regnoit dans le Nort
le celebre Raja Segaren , pere
de Chandraahſen , ce Prince prit
en main le gouvernement de
fes Etats le feptième jour de la Lune ; mais
comme ce jour eft finiftre , deflors toutes
fes affaires commencerent d'aller en décadence
; la maladie emporta tous fes chevaux
fes Elephans s'imaginant voir en
dormant un lion qui les devoroit , moururent
tous de frayeur : une espece de vertige
fit perir toutes fes vaches : pendant
qu'il étoit hors de fon Palais , les voleurs y
entrerent de nuit , & enleverent fes pierreries
& tous les trefors .
Le Roy Dontchaketon fut bien- tôt averti
par
DE SEPTEMBRE. 17
}
par les efpions que ce pauvre Prince étoit
fans force & fans fecours : à cette nouvelle
il affembla auffi tôt toutes fes troupes , &
vint inveſtir Rajaguini capitale du Royau
me . Au bruit de fa marche Segaren le voyant fe
hors d'état de faire tête à fon ennemy , fe
dépouilla de fes habits Royaux , pour fe
revêtir de ceux de penitent. En cet état il
fortit de la capitale , fans être connu de
fa
qui que ce fut , & il donna ordre à toutes
fes femmes de le futivre de près . La frayeur
les empêcha de fonger au petit Chandraahfen
qu'elles laifferent dans la ville : comme
elles fe furent enfoncées bien avant
dans une foreft voifine , où le Roi déguifé
en penitent s'étoit retiré , elles le rencontrerent
enfin.
Auffi-tôt qu'il les apperçut : Ou eft mon
fils , dit- il ? Seigneur , l'épouvente nous a
fait oublier de le prendre avec nous . A cette
trifte nouvelle , ce pauvre pere fut accablé
d'une douleur fi amere , qu'il ne put s'empêcher
de faire de fanglants reproches à
les femmes , qui étoient elles- mêmes plongées
dans le chagrin de leur peu d'attention
pour le falur du jeune Prince . Alors
Segaren prit la refolution d'aller trouver
des Religieux Brames , & de bâtir dans
ces bois une petite maifon , pour paffer le
refte de les jours dans la folitude.
Cependant Deutchaketou prit la capitale,
B
48 LE MERCURE
1
y entra , la pilla , & s'empara de tourle
Royaume , dont il fut en peu de
tems paisible poffeffeur. Un jour ce Prince
tenant un grand confeil de fes. parens
de fes amis , de fes Miniftres , de plufieurs
Rois & Brames , le petit Chandraahfen
entra dans la Salle à pas chancelans , traverfa
la foule , & vint s'affeoir auprès du
Roy. Le Brame Sebanam qui en étoit fort.
proche , remarqua fur le vifage de cet enfant
des traits , & un air de grandeur, qui
lui firent connoître que c'étoit le fils du
Raja fugitif. Voilà , dit- il , à l'oreille de
quelqu'un , le legitime Souverain . Ce bruit
fourd fe répandit dans l'affemblée , & vinc:
jufqu'aux oreilles du Roy ; mais il ne fit.
pas femblant de l'entendre. Profitant ce◄
pendant de ce qui s'étoit dit , il congedia
peu à peu tout fon Confeil , pour prendre
les. moyens de fe defaire de Chandraabſen.
Il fit donc venir quatre Pareas , & leur
ordonna de conduire le jeune Prince fecre
tement dans la foreft , de le tuer , de lui
couper le gros doigt du pied , & de le lui
apporter , comme une marque de l'execu
tion de fes ordres . Pour les y engager da
vantage , il leur promit de leur donner
quatre villages . Ceux cy répondirent qu'ils
étoient prefts à tout , & fur le champ ils
conduifirent à l'infçeu de qui que ce fût le
jeune enfant dans le bois.
DE SEPTEMBRE. 19
Comme ils étoient près de le maffaeter
; Pourquoi , dit le plus confiderable
des quatre , faut-il que nous trempions nos
mains dans le fang innocent ? Faut - il que
nous foyons les Miniftres d'une paflion
aveugle & cruelle ? que Dontchaketon nous .
donne quatre villages , ou ne les donne pas,,
notre condition fera- t'elle meilleure ou pire
? ferons- nous par là lavez du crime dont
nous allons nous foüiller ? A ce difcours.
les autres touchez de compaffion , furent
de même avis : ainfi , pour faire croire au
Roy qu'ils avoient obci , ils fe contenterent
de couper à cet enfant le gros doigt du
pied ; ils tuerent un animal , & tremperent
leurs épées dans fon fang, & en cet état ,
inrent trouver le Roy , lui prefenterent
le doigt de ce jeune Prince , & leurs épées
enfanglantées , affurant qu'ils avoient tué
le fils du Raja. Pendant que le Roy goutoit
dans fon Palais le fruit de fon crime,
le jeune Prince ne pouvant fupporter la
douleur que lui caufoit fa playe , faifoit
retentir le bois de fes cris , & fe rouloit
dans fon fang. En ce tems- là cette foreft:
appartenoit à un Seigneur nommé Dandi ,,
qui en payoit tribut au nouveau Roy de:
Rajaguini. Ce Seigneur vint en Pallanquin
avec un grand cortege de chevaux & de
foldats fe promener dans ce bois : dès qu'il
cut penetré un peu loin , il entendit les
Bij
$20 LE MERCURE
cris d'un enfant : C'eft une choſe bien extraordinaire
, dit it , à fon Officier , qu'un
enfant fe trouve au milieu de cette foreft : ·
pourquoi pleure - t'il ? il faut voir ce qui
en eft ; il avance donc avec fes gardes vers
l'endroit d'où venoient les cris ; il trouve
un petit enfant qui nageoit dans ſon ſang ;
il le regarde avec attention & avec des yeux
de compaffion ; il le reconnoît à la couleur
& aux traits de fon vifage . Penetié
de joye d'avoir trouvé le fils d'un Raja fi
illuftre : Quoi , dit- il en lui- même , je n'ay
point d'enfant de dix femmes que j'ay épou
fées ; fans doute que le Dieu Vichnon
m'envoye celui- ci pour me récompenfer
des oeuvres de pieté que j'ay faires en fon
honneur. Auffi - tôt il fait effuyer le fang
dont ce petit innocent étoit tout couvert ,
fait panfer fa playe , le fait mettre dans
fon Pallanquin , l'emmene dans fon Palais ,
& le remet entre les mains de fes femmes
pour l'élever foigneufement. Ses femmes
épriſes de la beauté du petit Prince , l'éleverent
avec une affection & ime tendreffe
extraordinaire ; elles lui mirent aux oreilles
des pendans magnifiques , aux mains & aux
pieds des braffelers fuperbes ; tous les jours
elles lui lavoient le corps quatre fois , &
le frottoient de poudres odoriferentes .
Tous ceux qui voyoient le nouveau fils de
Dandi , en étoient charmez ; car il avoit
DE . SEPTEMBRE. 21
tin naturel admirable , l'efprit vif , le corps
bien formé & propre à tous les exercices ;
enfin toute fa perfonne répondoit à fa haute
naiffance ; auffi en peu de temps il appric
à tirer de l'arc en perfection , & fit de
grands progrès dans les fciences fous la
conduite des plus fameux Brames qu'il eut
pour Maîtres.
"
Dès qu'il fut un peu grand , il s'affocia
à des jeunes gens de ton âge & de ſa
qualité , & tout fon plaifir étoit d'aller
avec eux à la chaffe . Après avoir paffé
quelques années dans cet exercice , il affembla
un corps de Troupes , & s'en alla dans
des païs éloignez pour éprouver fon courage.
Là , il fe fit par les hauts faits une
réputation qui effaçoit déja celle des plus
celebres guerriers , car il vainquit plufieurs
Rois fort puiffants , & s'en revint chargé
de gloire & de butin. Il amena une quan
tité prodigieufe de chevaux , d'élephans ,
de joyaux d'or & d'argent : il prefenta
le tout à fon pere Dandi , & le pere voyant
un fils fi accompli , fi brave , & qu'il ſour
haitoit de revoir avec paffion , ne put retenir
fes larmes en Fembraffant. Je ne fçay ,
fui dit-il , qui de nous deux eft le plus
heureux ? ou moy , d'avoir un fils qui me
rend le plus glorieux & le plus fortuné
de tous les peres ; ou vous , d'avoir
un pere qui vous aime plus que lui-même,
2*2* EE MERCURE
& qui vous a fourni les occafions d'acquerir
plus de gloire que tous les guerriers
enfemble n'en ont acquis ? Si je me fuisfait
quelque reputation , repartit le Prince,
ce n'est que parce que vous avez prodigué
vos biens pour moy ; ce n'eft que parce
que j'ay fuivi avec docilité vos confeils ;
je tiens tout de vous , & je me fais gloire
de tenir tout de vous . Après avoir paffé
quelques jours en divertiffements de toutes
efpeces , Chandraahſen ennemi du repos ,
forma au milieu de la campagne un camp
pour y loger fes Troupes & fon butin ';
mais le camp croiffoit fi fort de jour en
jour , qu'il reffembla bien- tôt à une grande
Ville ; car il y fit bâtir des Palais fuper
bes & quantité de maifons : les Brames ,
les Rajas , les Marchands & les Choutres
y abordoient de toutes parts , attirez par
la réputation , par la magnificence & par les
liberalitez dų Prince . Ainfi cette Ville fut
en peu de tems remplie d'habitans , de
foldats , de chevaux , d'élephans & de Pal
lanquins. Dandi voyant fon fils fi puiffant
ne fe preffoit pas de payer tribut au Roi de
Rajaguini. C'est pourquoi ce Prince fit ve
nir fon premier Miniftre , & lui dit : Dandi
en eft venu à ce point de fierté , qu'il ne
veut plus fe reconnoiſtre mon tributaire ;
il refufe depuis long- tems de me rendre
hommage ; allez vous -même l'y.contrain
DE SEPTEMBRE. .
23.
dre par la force ; pillez fon pays , & me
l'amenez mort ou vif. Le Miniitre auffitôt
affemble cent Elephans , mille chevaux ,
& dix mille hommes d'infanterie : avec
ce corps d'armée, il s'avance juſques fur les
terres de Dandi ; de là il vint lui-même
avec un Sauf-conduit trouver Dandi , &
lui intima l'ordre de fon Maistre . Dandi
auffitôt fit appeller fon fils, & lui dit que le
premier Miniftre du Roi de Rajaguini , à
la tête d'une armée , venoit pour l'obliger
à payer le tribut ordinaire. Quoi ! répondit
Chandraabfen , j'ai fait tributaires tant
de puiffans Rois , & nous ferons tributaires.
nous-mêmes ? Dites à votre Maiftre de ma
part , ajouta t'il un peu échauffé , que je
ne fçai ce que c'eft que de payer tribut,
& que c'eft à moi à qui il est dû.Le General
furpris d'une réponſe fi ficre , ne laiffa pas
de faire de nouvelles inftances ; pour toute
réponſe , Chandraahfen tire fon fabre , &
le menace de lui abattre la tête. Il n'eft pas.
encore tems pour moi de mourir , dit ent
lui-même ce Heros ; il faut porter cette.
réponse au Roy. Là - deffus il fe retira
à Rajaguini , & dit à fon Maitre que
le fils de Dandi faifoit difficulté de payer
le tribut qu'il devoit ; qu'on ne pouvait l'y
contraindre à force ouverte , parce qu'il.
paroiffoit extrêmement brave & fort déterminé
: outre qu'il avoit dans fon Camp
24 LE MERCURE
une armée fuperieure à la fenne. Ah quoi !
dit le Roy , ce petit Souverain , ce Paleakrem
n'avoit point d'enfant ; d'où lui eft
venu celui ci , & fi fubitement ? Cela me
paroît fort étrange ; il faut que j'aille en
perfonne le combattre ; qu'on mette ordre
à tout.
Le Roy avoir un fils & une fille ; celuici
avoit nom Vichao , celle- ci Vichaa . II
laffe le gouvernement du Royaume à Vichao
, & vient avec une puiffante armée
camper proche de Chandraafen ; il examine
la fituation & l'ordre de fon Camp ; il s'informe
de les forces , & il apprit qu'elles
étoient égales aux fiennes en nombre , mais
fort fuperieures en bravoure , & bien difciplinées
. Là- deffus , il affemble fon Conſeil
de guerre pour fçavoir ce qu'il y avoit à faire.
Tous fes Officiers répondirent unanimement
que tout étoit perdu , fi on en venoit
à une bataille ; qu'on fçavoit par des avis
fecrets qu'un autre corps confiderable de
troupes ennemies avançoit pour prendre
P'armée en flanc ; qu'il valoit beaucoup
mieux diffimuler pour un tems , & traiter
Dandi en ami. Le Roy fuivit cet avis , &
lui envoya fon premier Officier pour le
prier de le venir voir en toute feureté.
Chandraahfen voyant que fon pere vouloit
abfolument y aller , voulut lui- même
être de la partie ; il confentit qu'on lui
donnât
DE SEPTEMBRE.. 25
donnât comme prefent , & non comme
tribut , quelques joyaux , des chevaux ,
des élephans , des tigres , des ours , &
quelques autres animaux curieux , avec
des parfums & des rafraîchiffemens. Il prit
des habits magnifiques , tout couverts de
pierreries , & ils allerent enſemble bien
eſcortez , & avec un train (uperbe , faluer
Doutchaketou. Le Roy voyant un homme
fi fuperbement vêtu , demanda à Dandi
qui il étoit à quoi Dandi répondit que
c'étoit fon fils. Mais , réprit le Roy , vous
n'avez jamais eu d'enfant ; d'où vous eft
donc venu celui - ci ? Il y a quelques années
, répondit Dandi , qu'allant à la chaffe
dans la Foreft de Rajaguini , j'entendis
les cris d'un enfant ; je m'avançai pour
voir ce que c'étoit , & je le trouvai couvert
de fang qui couloit de fon pied , dont
on lui avoit coupé l'orteil : parce que je
n'ai point eu d'enfant , dis je alors , le Dieu
Vichnon me donne celui - ci ; je le pris dans
mon Palanquin ; je l'amenai dans mon Palais
, & je l'ai fait élever avec beaucoup
de foin dans la fuite. Comme il eft fort
brave , il a fait la guerre à de puiffans
Rois , les a vaincus , & il eft venu chargé
de leurs dépouilles . Dontchaketon étrangement
furpris de toutes ces avantures ,
» Voilà cet enfant que j'avois ordonné
» qu'on fiſt mourir ; ces quatre Pareas
C
dit :
2.6 -LE
MERCURE
و ر
m'ont trompé , m'affurant qu'ils l'avoient
tué ; ils lui ont feulement coupé le gros
» doigt du pied ; c'eft lui-même certainement
; fes grands exploits font affez connoître
fa bravoure : puifqu'il a fubjugué
tant de Rois , il pourroit bien troubler
smatranquillité, fi je l'irritois : il faut trou-
» ver moyen de s'en defaire par adreffe ; &
»pour éloigner tout foupçon , il faut lui
faire des careffes . Raja , lui dit le Roy ,
votre reputation s'eft répandue par tout ;
votre air & vos manieres furpaffent votre
» reputation ; il faut que je vous donne ma
fille en mariage ; je m'en vas écrire pour
cela une Lettre à mon fils , que vous lui
>> rendrez vous -même , dans laquelle je lui
›› marquerai mes volontez . Chandraahſen
confentit à tout , & remercia ce Prince . Il
écrivit donc une lettre à fon fils , dont voici
le contenu : Vous donnerez du poiſon à qui
vous prefentera ma lettre. Il la figna de fa
main , & la remit à Chandraahſen , en le
priant de partir inceffamment. Il alla fur le
champ prendre congé de Dandi , & monta
un cheval extrêmement vîte , pour être
plûtôt rendu à Rajaguini ; mais quand il
fut proche de la Ville , il fe trouva ſi fatigué
, qu'il fût contraint de mettre pied à
terre , pour le repofer dans un jardin de
⚫ fleurs fort agreable qui étoit fur le chemin..
Apeine fut-il étendu fur le gazon , que la
•
DE SEPTEMBRE. 27
laffitude & les charmes du lieu l'inviterent
au fommeil. Pendant que Chandraahſen
goûtoit les douceurs d'un profond fommeil
, la Princeffe Vichaa vint avec les filles
d'honneur & quelques- unes de les amies
dans le même jardin , pour le baigner.
Après avoir pris le bain , elle s'écarta de fa
fuite , pour cueillir elle- même des fleurs.
Au milieu de ces parterres elle apperçue
Chandraahfen qui dormoit ; elle le regarda
attentivement , & à mesure qu'elle l'envifageoit
, elle fentit naître dans fon coeur
des fentimens de tendreffe pour lui ; elle
apperçut auffi la lettre qui étoit attachée à
fon habit ; elle eut la curiofité de la tirer, de
la decacheter & de la lire : Mon pere , ditelle
toute effrayée , eft-il affez cruel pour
faire mourir par des voyes fi indignes un
homme de ce merite ? Et il fe fert de mon
frerepour un crime fi noir ? Cela ne fera pas.
Pour cet effet , elle ne fit que tirer un trait
au dernier jambage de l'M , qui eſt à la fin
de Vicham*, & par ce petit artifice elle y
fubftitua fon propre nom , Poifonnée. Enfuite
elle referma la lettre , & la remit dans
le même endroit d'où elle l'avoit tirée.
Aprés quoi elle vint rejoindre auffitôt ſes
fuivantes , avec lesquelles étant retournée
à la Ville , elle fe renfe ma dans fon appar
* Vicham, qui fignifie poifon , en tirant une
queue à l'm, v. g. Vicham, fait Poisonnée.
Cij
28 LE MERCURE
tement , pour reflechir fur l'avanture qui
venoit de lui arriver, & fur les fuites qu'elle
pouvoit avoir.
Cependant Chandraahlen , après avoir
repolé quelque tems , s'éveille , fe leve &
fe lave le viſage , monte à Cheval , & fe
rend à Rajaguiny. Il va droit au Palais
& demande une audiance ; on l'introduit
dans la Salle du Confeil où les Grands ,
les parens & les amis du Prince Regent
étoient affemblez . Chandraahfen falue le
Regent en lui preſentant la Lettre du Roy.
Il ne l'eut pas plutôt lùe , qu'ayant confideré
attentivement Chandraahfen ; Mon
pere, dit -il , a fait là une tres - bonne affaire ,
il ne pouvoit trouver à Vicham, * un mari
qui lui convint mieux ; ce Raja eſt beau
comme un aftre , & fort brave : puifque·
mon pere fouhaite ce mariage , il faut en
preffer la conclufion . Sur le champ il fait
appeller les Braines , pour fçavoir d'eux
quel feroit le moment favorable . Ceux- ci
ayant oblervé quels étoient les noms des
étoiles qui dominoient ce jour- là , déterminerent
que trois heures aprés le foleil couché
c'étoit un tems favorable au mariage.
Vichayo ordonne qu'on faffe dans toute la
Ville les préparatifs neceffaires pour rendre
cette ceremonie plus éclattante ; qu'on
tende toutes les rues de tapifferies ; qu'on
* Poiionnée.
}
DE SEPTEMBRE. 1,
orne les murs de feftons de verdure , qu'on
difpofe par tout des parafols , & qu'on
n'oublie rien pour celebrer cette fefte .
Lorfque tout fut difpofé dans la Ville , on
habilla Chandraahſen & Vichaya de riches
étoffes d'or & de foye , on le couvrit de
joyaux , de colliers , de parfums , & on les
maria au fon de toutes fortes d'inftrumens ,
accompagnez des benedictions des Brames ,
qui ne les épargnerent pas. On les monta
enfuite l'un & l'autre fur les deux plus
beaux Elephans qu'on eût jamais vûs . Dans
cet appareil on leur fit faire le tour de la
Ville , qui retentiffoit des acclamations des
peuples , & qui paroiffoit embratée par
la
quantité prodigieufe des feux d'artifices
dont toutes les places étoient remplies. La
journée fe paffa en feftins & en concerts ;
la nuit fuivante fut encore plus magnifique
que la premiere.
Pendant que tout ceci fe paffoit à Rajaguini
, fans que Dontchaketon en fut informé,
à caufe de la diftance des lieux , le
Roy ne doutant point que fon fils n'eût
fait mourir par le poifon Chandraahfen ,
tomba tout à coup fur Dandi , qui ne
s'y attendoit pas , le furprend , le fait arrêter
avec toutes les femmes , le charge de
fers , pille fa Ville , & fe met en marche
pour revenir à Rajaguiny. Mais dés qu'il
fut proche de la Ville , il vit l'air tout
Cij
30 LE MERCURE
brillant de fufées volantes , & entendit les
échos des montagnes voifines qui portoient
aux forêts éloignées le bruit des inftrumens.
Que veut dire cette nouveauté , dit le Roy
furpris d'un fpectacle fi extraordinaire ? De
mauvais préſages augmenterent encore
fon étonnement , fa crainte , & fes foupçons
; car ce jour- là , un Serpent ſe prefenta
à lui ; un Chien maron * cria de
jour , & il parut en l'air des Etoiles en➡
flammées. Tout cela joint enſemble , agita
étrangement fon efprit , portant fes foup
çons tantôt fur une chofe , tantôt fur une
autre , comme la crainte & le danger augmentent
à mesure qu'un vaiffeau pouffé
par un vent violent , approche d'un Rocher
; ainfi , plus le Roy s'approchoit
de la Ville , plus la défiance agitoit fon
efprit . Cependant , comme il n'avoit com
muniqué à qui que ce foit de fa Cour le
fujet de fes , inquietudes , il diffimula le
trouble de fon coeur , & entra dans la Ville
penfif & rêveur.
›
Il appelle le Capitaine de Garde , & lai
demande ce que fignifioit cette feste. Seit
gneur , vous avés donné la Princeffe votre
Fille au Fils de ce Raja que vous avés
envoyé ; on les a mariés , & on les montre
Efpeces de Renards qui crient la nuit pour
s'affembler les uns les autres , & qui mangend
les charognes .
DE SEPTEMBRE. 3r
au peuple. Cette réponſe fut un coup de
foudre poyr le Roy qui en demeura dé
concerté & interdit ; mais les tenebres derobérent
aux yeux de ceux qui l'accom
pagnoient , la ſurpriſe violente dans laquelle
cette nouvelle l'avoit jetté.
Chandraahfen & Vichaya , furent bientôt
avertis de l'arrivée du Roy ; ils allerent
au-devant de lui , & le faluérent.
Le Roy , fans prefque faire attention à leurs
civilités , alla fe renfermer dans fon Palais
fans leur répondre. A peine fe vit- il feul
qu'il fait venir fon fils. Que t'ai -je écrit,
lui dit- il en colere ? Sont-ce là les ordres
que je t'ay donnés ? J'ay execuré , Seigneur,
ce que contient votre Lettre , répond Vi
chayo , en la lui prefentant. Le Roy la lit,
reconnoit fon écriture & fon feing : quel
prodige , s'écria - t'il tout effrayé ! que
vois- je ? agité & confus , il congedie fon
fils , pour penfer plus à loifir aux moyens
de fe défaire fecretement de Chandraakſen.
Après y avoir mûrement refléchi , il le fait
appeller , & lui dit avec un air affez ouvert
, mon Gendre , il y a une coutume
établie dans mon Palais , c'est que quiconque
fe marie , doit faire un facrifice à
la Déeffe Maia , dont le Temple eft hors
de la Ville ; ainfi , il faut que vous preniés
des fleurs & des habits convenables
aller facrifier à cette Déeffe ; mais il pour
C iiij
32
LE MERCURE
faut être feul
fait à ce devoir , vous reviendrés au Palais
; Chandraahfen fe mit en état d'obéir
au Roy. Pendant que dans un appartement
different , il prepare à la hâte toutes les
chofes neceffaires pour le Sacrifice , Donchaketout
fait venir en fecret les quatre
Pareas & leur dit d'un ton fevere ne
vous avois je pas ordonné de tuer le fils
de ce Raja ? Au lieu de m'obéir Vous
lui avez feulement coupé le gros doigt du
pied , & vous l'avés laiffé dans le bois 5
mais je vous pardonne cette infidelité , à
condition que vous executerés exactement
les ordres que je vais vous donner.
dès que vous aurés fatis-
>
,
›
Ce même Chandraahfen va bien - tôt
aller feul dans le Temple de Maia , & il
porte avec lui tout ce qui convient pour
faire un facrifice à cetteDéeffe. Il faut le prévenir
, avant qu'il s'y rende. Vous vous
cacherés derriere la porte du Temple , &
dès qu'il fera entré, vous le facrifierez vousmême
, en lui ôtant la vie. Au refte , je
veux être obéi , ou votre tête m'en répondra.
La crainte de la mort les déter--
mina fur le champ à executer les ordres
du Roy. Ils partent , & vont fe pofter
derriere une des portes du Temple. Pendant
ce temps - là , les femmes de la Princeffe
la paroient magnifiquement pour la
conduire dans l'appartement où elle devoit
DE SEPTEMBRE. 33
coucher. Lorqu'elles y eurent donné tous
leurs foins , elles avertirent Vichayo de faire
conduire Chandraahfen dans le même appartement
où la Princeffe l'attendoit. Comme
il ne fe trouvoit point , Vichayo impatient
parcourt tout le Palais ; & après bien
des recherches il le rencontre comme il
fortoit du Palais : furpris de l'équipage dans
lequel il le voyoit, que fignifie tout cecy,mon
cher Chandraabfen :mon beau pere, répondit
Chandraahfen , m'a ordonné d'aller faire un
facrifice à la Déeffe Maia, j'y vais ; laiffés tout
cet équipage , répondit Vichayo , je prends
ce foin fur moy; & l'excufe qu'il faudra faire
au Roy pour vous , je m'en charge , &
je la ferai en votre intention ; ne vous
embaraffez de rien , allés feulement trouver
votre époule. Vichayo prend dans
l'inftant les habits , les fleurs , & s'en va
feul au Temple ; mais à peine eût- il mis
le pied fur le feuil de la porte ; que les
affaffins , fans l'examiner , le percerent de
coups de poignards , & l'étendirent mort
fur la place. Pendant tout cecy , Chan
draahlen tout brillant de pierreries
& orné de fleurs s'étoit renfermé
avec fa femme. Cependant les quatre
Pareas reviennent au Palais , & font
rapport au Roy de leur commiflion , en
l'affurant qu'ils avoient tué Chandraahſen.
A cette nouvelle , le Roy fait appeller fa
›
34 LE MERCURE
fille pour la confoler ; mais elle lui fit dire
qu'elle étoit avec fon mary , & qu'elle
ne pouvoit pas quitter. Le Roy étrangement
furpris de cette réponſe fait monter
les quatre Pareas ; que veut dire tout
cecy ? Chandraahfen eft dans le Palais ;
Seigneur , nous l'avons certainement tué,
nos poignards font encore teints de fon
fang. Sur cela , le Roy fit appeller Vichayo ,
les Officiers le cherchent par tout le Palais
, mais inutilement . Le Roy beaucoup
plus en peine qu'auparavant , prend avec
lui les quatre Pareas , & fe tranfporte avec
eux au Temple de la Déeffe , pour verifier
la chofe par fes yeux ; mais qu'y vit it ?
le premier objet qui le frappe , fur le corps
de Vichayo , étendu mort fur la place , &
baigné dans fon fang ; à ce funefte fpectacle
il fut faifi d'une fi grande frayeur ,
qu'il tomba évanoui , & fa chûte fut fi funefte
, que donnant de la tête contre une
marche de pierre , il expira peu de tems
après devant la ftatuë de la Déeffe . Cette
nouvelle fe répand bien- tôt dans le Palais ;
au premier bruit Chandraahfen fort & court
au Temple l'épée à la main , il y voit ent
entrant fon beau pere , & fon beau- frere
nageans dans leur fang & couverts de
bleffures ; après avoir deploré leur trifte
deftinée & s'être abandonné à la douleur
la plus vive , il adreffe fes prieres à la
Déeffe : il la conjure avec larmes ou de
>
>
DE SEPTEMBRE.
35
>
lui donner la mort , ou de rendre la vie
à ceux qui lui étoient fi chers ; mais la
Déeffe fourde à fa demande , fut impi-
Loyable . Picqué alors de n'avoir pas été
exaucé , & plus encore du filence de cette
cruelle Déeffe , il forme le deffein de brifer
cette ftatue , & de fe tuer lui-même
après. Plein de defefpoir , il change fes
prieres en infulte ; Je vois bien que tu
n'es qu'une femme infenfible & barbare
pour obtenir quelque chofe de toy , il faut
que je t'abatte la tête : en prononçant ces
paroles il leve le fabre , alors Maïa touchée
de compaffion , & du courage de-
Chandraahfen lui arrête le bras , & lui dit ,
Prince , ton beau pere eft un fcelerat qui
a mis tout en ufage pour te faire mourir
par les voyes les plus infames , pendant
que tu le traitois avec tout le refpect ima
ginable , & qu'ignorant fes indignes pratiques
, tu t'abandonnois à lui avec une entiere
confiance ; il porte maintenant la
peine duc à fes crimes. Gouverne en paix
& en profperité un Royaume qui t'appartient
legitimement.
Mais repartit , Chandraahfen , que dirat'on
de moy dans le monde , puifqu'on ne
fçait point comment les chofes fe font paffees.
Ainfi , afin que ma reputation n'en
fouffre pas , & que je puiffe vivre dans la
meilleure partie de moy-même , il faut ,
36
LE
MERCURE
s'il vous plaît , puiffante Déeffe , que vous
reffufcitiés le pere & le fils , autrement
cette même épée va prevenir l'effet de la
douleur , car je ne sçaurois , & je ne veux
point furvivre à deux perfonnes qui doivent
m'être fi cheres. La Déeffe fenfible
à fes prieres , fe laiffa fléchir , & voulut
bien les lui rendre tous deux pleins de vie.
Chandraabfen , après avoir rendu graces à
Maia , eut la fatisfaction de ramener dans
la Ville fon beau- pere & fon beau - frere ;
dès qu'ils furent arrivés au Palais , le Roy
ayant declaré à fon gendre toutes fes perfidies
, il lui remit entre les mains fes
Etats , ne prit avec lui que fes femmes ,
& forma le deffein de fe retirer dans une
forêt , pour y paffer le refte de fes jours
dans l'oubli des hommes , & dans la pe
nitence.
Le premier foin du nouveau Roy fut
d'envoyer fur le champ tirer de priſon
Dandi & les femmes ; il les confole fur
leurs malheurs paffés , & les renvoye dans
leurs Etats , comblés de prefens & d'hon--
neurs ; enfuite il fit venir auprès de lui le
Raja Sagaron avec fes femmes , & leur
fournit de quoy vivre , conformément à
leur naiffance.
e3439
*
DE SEPTEMBRE. 37
LA RELIGION.
ODE
A MADAME
LOUISE - ADELAIDE
D'ORLEANS,
ABBESSE DE CHELLES.
Par M. ASSELIN , Chanoine de l'Eglife
Metropolitaine de Tous.
Tol
01 , qui tires ton origine
Du Ciel , ton immortel fejour ,
Defcends , Religion divine ;
Du Vrai viens m'inspirer l'amour.
Viens m'échauffer , remplis ma veine
De cette force fouveraine
Sous qui ploya tout l'Univers :
Et portant le jour dans mon ame ,
Daigne y lancer des traits de flame ,
Qui rejailliffent fur mes Vers.
38 MERCURE LE
Déja , comme un de tes Eléves ,
Pour jouir de la Verité ,
D'un vol rapide tu m'enleves
Au fein de la Divinité :
Parmi fes clartés éternelles ,
Si j'ofe à l'ombre de fes ailes
Tenter l'aspect d'un Dieu fi grand ,
Frappé de fa Majesté fainte ,
Mon coeur fe perd , faifi de crainte ,
Dans les abimes du neant.
L'Immenfité fait fon Royaumes
Et tous les êtres réunis
Sont un imperceptible atôme
Dans des efpaces infinis.
Tout est foumis à sa puiſſance :
L'homme feul par l'indépendance
Veut s'égaler au Createur.
Cieux , fuyez ; que la Terre zremble :
Que tous les Elemens ensemble
Vengent les droits de leur Auteur.
· Dieu Tout-puiſſant , dont la juftice
Eft égale à la fainteté ,
Par quel auguste facrifice
S'appaifera ta Majesté ?
Du fein de ta gloire adorable'
Defcendu pour l'homme coupable
Ton propre Fils s'aſſujettit,
DE SEPTEMBRE.
39.
Dans un corps formé de la terre
Un Etre immense se refferre ;
Et l'Eternel s'anéantit.
Grand Dieu , par un fi digne hommage
Tes droits fouverains font remplis ;
Et tous les traits de ton image
Dans l'homme enfin font rétablis.
A t'aimer tu le follicites :
Tu lui tiens compte des merites
Dont ta grace la revêtu :
Les dons qu'elle lui communique
Te font un Trône magnifique
D'un coeur paré de la vertu.
Rempli d'un objet qui m'enflame
Seigneur , quel divin mouvement
De l'excellence de mon ame
Fait naître en moi le fentiment ?
Cette ame à Toi toute livrée
Doit à jamais être enivrée
Du torrent de ta volupté ,
Vivre abîmée en ton eſſence ,
Et contemplant ta gloire immenſe
Partager ta felicité.
Infenfés , dont l'orgueil infulte
A ces fublimes veritez ,
Qui blafphemex contre le culte
40
LE MERCURE
Du Dieu par qui vous existez.
Plongés dans une nuit funefte ,
Des biens purs , du bonheur celefte
Vous n'avez point connu le prix .
Diffipez les ombres du vice ,
Et du Soleil de la justice
Le jour luira fur vos efprits.
Quelle est la main qui dans leur courſe
Retint des flots tumultueux ,
Et du Jourdain jusqu'à fa fource
Fit le reflux impetueux ?
Sous cette main toute puiſſante
Notre coeur , qu'entraînait fa pente ,
Sent vers le Ciel un faint retour :
Et cherchant fa fource fuprême ,
Il va fe perdre dans Dieu même ,
Principe & fin de fon amour.
Ainfi l'éprouve ADELAIDE :
Ses yeux par la grace éclairés
Dans fes grandeurs ont vû le vuide
Des biens par le monde adorés.
Talent , efprit , delicateſſe ,
Doux attraits , brillante jeuneſſe ,
Rang auguste , éclat enchanteur ,
Vous êtes pour fon coeur fublime
Les fleurs qui parent la victime
Qu'un faint zéle offre au Createur.
Fuyant
DE SEPTEMBRE. 41
Fuyant le dangereux commerce
D'un monde vain qui nous féduit ,
Dans les deferts elle converſe
Avec le Dieu qui l'y conduit.
Unie à l'objet qu'elle adore ,
L'amour qui pour lui la devore
Sans ceffe allume fes foupirs ,
Et par de vives étincelles
Jufques aux voutes éternelles
Porte le feu de fes defirs.
O vous , en qui la grace immole
Tant de grandeurs & tant d'attraits ,
PRINCESSE AUGUSTE , un bien frivole
Pouvoit-il flatter vos fouhaits ?
Tout l'Univers daiv diſparoître
Aux yeux qui du fouverain Etre
Ont contemplé la majesté :
Du monde faux la vaine idole
Ne retient point un coeur qui vole
la fuprême Verité.
42 LE MERCURE
LES MEDECINS.
O D E.
Qvelle mortelle triſteſſe
Vient me faifir malgré moi !
Damon , connois ma tendreffe &
Au bruit du mal qui te preffe ,
Mon coeur eft glacé d'effroi.
Les Enfers pour te combattre .
T'envelopent d'affaffins ::
Et leur haine opiniâtre ,
Va rassembler pour t'abbattre ;
La goute & les Medecins.
Renverfe un complot perfide à
Fallas , daigne m'exaucer ::
Prête au fage ton égide ,
Il a "
comme un autre Alcide ,
Plus d'un Monstre à terraffer..
Mille traits imperceptibles;
Le déchirent tour à tour ::
En proye à des maux borribles;
Des feux fubtils terribles
Le dévouent nuit &jourą.
DE SEPTEMBRE. 43
Des bords de l'affreux Ténare ,
Je vois fortir Atropos.
Elle conduit un Barbare ;
→ Déja fa main te prepare
Les noirs poifons de Colchos.
Je vois groffir la tempête s
Damon , tu vas fuccomber.
Arréte ; cruel , arrête :
Apprens qu'avec cette tête y
Cet Empire doit tomber
Ecoutons les hyperboles
De l'Efculape nouveau.
Que de maximes frivoles !!
Quel prodige ! fes paroles.
Nous dérobent au tombeau.
Du chimerique affemblage ,
i De vaines comparaisons ,
Il fçait orner fon langage ::
Il donne au fou , comme au fager
De grands mots pour des raisons..
Applaudis , mortel crédule ,
A fon fçavoir incertain ;
Tu verras un ridicule , a
Qui fuppute avec fcrupule
Ies pores du corps humain.
On connoît des Medecins qui fixent le nombre dèss
press.C'eft leur raifonnement qu'on combat dans ce
Ouvrage
Dij
42 LE MERCURE
LES MEDECINS.
O D E.
Q velle mortelle triſteſſe
Vient me faifir malgré moi !
Damon , connois ma tendreſſe &
Au bruit du mal qui te preffe ,
Mon coeur eft glacé d'effroi..
Les Enfers pour te combattre
T'envelopent d'affaffins ;
Et leur haine opiniâtre ,
Va rassembler pour t'abbattre ;
La goute & les Medecins.
Renverfe un complot perfides.
Pallas , daigne m'exaucer :
Prête au fage ton égide ,
Il a " comme un autre Alcide ,
Plus d'un Monftre à terraffer..
Mille traits imperceptibles;
Le déchirent tour à tour ::
En proye à des maux borribles:
Des feux fubtils & terribles
Le déverent nuit &jour .
DE SEPTEMBRE..
43
Des bords de l'affreux Ténare ,
Je vois fortir Atropos.
Elle conduit un Barbare ;
Déja fa main te prepare
Les noirs poifons de Colchos.
Je vois groffir la tempête ;
Damon , tu vas fuccomber.
Arrétes cruel , arrête :
Apprens qu'avec cette tête
Cet Empire doit tomber.
Ecoutons les hyperboles
De l'Esculape nouveau.
Que de maximes frivoles !'
Quel prodige ! fes paroles
Nous dérobent au tombeau.
Du chimerique affemblage ,.
De vaines comparaisons ,
Il fçait orner fon langage ::
Il donne au fou , comme au fage
De grands mots pour des raisons..
Applaudis , mortel crédule ,
A fon fçavoir incertain ;
Tu verras un ridicule , a
Qui fuppute avec fcrupule
Tes pores du corps humain.
On connoît des Medecins qui fixent le nombre dèss
press. C'eft leur raifonnement qu'on combat dans ce
Duvrage,
Dij
44 MERCURE LE
Porte ailleurs , bouche indifcrette ,
Tes difcours mal affortis :
Ma Phyfique les rejette :
Voit- on avec ta lunette
Les infiniment petits.
Tu juges par habitude
Sur la foy des fens trompeurs
Et ton ame en fervitude ,
Veut puifer la certitude
Dans la fource des erreurs..
L'infaillible Providence
Borne tes jours & les miens s
Quoique le Vulgaire en pense
Damon l'humaine ſcience ,
N'en étend pas les liens .
Préjugez , trifte manie ;
Ceffez de nous engager :
Déplorable phrénéfie ;
Parce que j'aime la vie ,
Je m'obstine à l'abreger.
>
Efclave de l'imposture
Dont on te fait abreuver
Imprudente creature ,
Tu négliges la nature
Toujours prête à te fauvery
DE
44
SEPTEMBRE ."
Reviens , bienfaiſante mere ,
Tu vas rentrer dans tes droits .
Je renonce à la chimere ,
Et chaffe le Mercenaire ,
Qui me preferit d'autres Loix.
Mais que vois-je ? une Déeffe ,
Defcend & prévient nos pleurs ;
Le doux Zéphir la careffe
Les Amours & l'Allegreffe ,
Sous fes pas fément des fleurs.
Une jeuneſſe éternelle
Couronne cette beauté.
A fa fraîcheur naturelle ,
Afa vigueur immortelle ,
Je reconnois la Santé.
Arrêtez , Nimphe charmante :
Comblez nos voeux les plus doux.
Loin de vous rien ne nous tente ;
Les richeffes qu'on nous vante ,
Ne font pas des biens fans vous,"
46
LE
MERCURE
LORGUE.
Fose
1
POEM E.
'Ofe chanter ce Dieu , qui fçut parsa puissance,
Des Aquilons fougueux captivant l'inconftance ,
Du fonds d'un inftrument flexible au gré des doigts,,
Faire à la fois fortir cent differentes voix.
Toi , quijadis dufeu de ton divin génie ,
Embrafas les efprits du Chantre d'Aufonie ,
Dans mon hardi projet , ô Mufe , foutiens - moi :
Tu dois à mon ardeur des Vers dignes de toi.
Fertile en agrémens , la Mufique attrayante, •
Signaloit en tous lieux faforce triomphante ,
Et fes dignes foutiens , mille Inftrumens divers
De leurs fons differens rempliffoient l'univers.
L'ame d'étonnement , & de plaiſir ſaiſie ,
Les Mortels admiroient leur aimable harmonie :
De leurs charmes les Dieux fentoient même l'effet ;.
Phoebus , le feul Phoebus ſe ſent peu fatisfait.
Quoi , dit- il , peufoigneux d'illuftrer ma memoire ,
Ace que j'ai produit je bornerois ma gloire.
Non , non , par mes travaux , & mes vaſtes projets,
Je veux me signaler encor plus quejamais.
Ces divers Inftrumens qu'on admire, & qu'on aime,
Sont defoibles effais de mon pouvoir ſuprême ; ·
DE SEPTEMBRE.
47
Leurs accords pour mon coeur n'ont enfin rien de
doux ;:
K
Je veux en former un qui l'emporte fur tous.
Apollon , digne Fils de Jupiter fon Pere ,
Benfe n'avoir rien fait fi- tôt qu'ilpeut mieux faire..
Il dit , & par fon ordre , à fes côtez marchant ,
Le Meffager des Dieux , Mercure au pied volant ,
D'un pas prompt & rapide il vole en Eolie :
Dans cette Ifle où des flots éclate la furie.
Impatiens du joug , les brayans Aquilon's
D'horribles fifflemens font retentir les Monts ,
Et dans ces mêmes lieux les Cyclopes difformes
Frappent l'air du bruit fort de leurs marteaux
énormes.
Làfe quittent les Dieux. Mercure inftruit ; foudain
Du deffein d'Apollon court inftruire Vulcain ,.
Tandis qu'au puiſſant Dieu qui commande à l'orages
Le Vainqueur de Pithon va tenir ce langage :
Toy , qui par le pouvoir que tu reçûs des Cieux
Difpofes à ton gré des vents impetueux ,
Seconde mes projets , favorife mon zele ;
Grand Dieu , je veux , fuivant une route nouvelle
Par la production du plus bel Inftrument ,
Répandre dans les coeurs un doux étonnement ; -
Je n'y puis réuffix , fi tu ne m'es propice. ;.
Ordonne que des vents la troupe m'obéiffe ;
Je t'en conjure , Eole , au nom de notre amour
Au nom de Jupiter qui nous donna le jour
48
LE
MERCURE
Ames voeux aujourd'hui que ta bonté ſe rende.
C'eft affez , dit le Dieufenfible à fa demandez
Puiffant Pere du jour , je te vais obéir ;
Moi-même en te fervant dûßé je me trahir.
Je m'enfouviens encor ; jadis pour te complaire
De la Reine des Cieux affrontant la colere ,
*F'écartai les Vaisseaux de ce Grec renommé ,
Qui revenoit vainqueur d'Ilion confumé.
Par mon ordre fur lui s'élevant la tempête ,
Cent fois à l'écrafer il vit la foudre prête 3.
Ses compagnons plongez dans le fein dutrépas
Je le forçai d'errer de climats en climats ;
Et victime des flots foulevez par l'orage,
Par moi de dix Printemps il ne revit fa plage.
Tel que jefus alors , je veux l'être aujourd'hui :
Eole pour jamais t'affure fon appui.
Aces mots il ſe taît , & d'une main puiſſante ,
Ilfrappe de fon dard la grotte mugiſſante.
Tous les Vents auffitôt fortent de leur priſon
Triomphant , fur fespas les conduit Apollon .
Cependant par les foins de Vulcain , de Mercure
Du fuperbe Inftrument fe hâtoit la structure ;
Déja brilloient aux yeux les differens tuyaux ,
* J'ai cru pouvoir introduire Apollon comme le mo
teur des maux d'Uliffe à caufe de la haine qu'il portoit
aux Grecs , à l'exemple de Virgile , qui introduit Junon ,
comme la motrice des maux d'Enée , à caufe de la haine
qu'elle portoit aux Troyens , appuyé d'ailleurs fur cette
regle d'un grand Poëte : Cuilibet audendi femper fuit æqua
poteftas
Les
DE 49 SEPTEMBRE.
a Les canaux , les reffors & ces étroit's cachots ,
b D'où devoit une main prudemment negligente,
Faire partir des Vents la Cohorte bruyante .
• Bien-tôt tout est en ordre ; & Phoebus arrivé,
S'applaudit à l'aspect de l'ouvrage achevé,
Il l'admire , & foudain à Vulcain rendant grace?
De Mercure fuivi regagne le Parnaffe. ,
D'un vol précipité , tous les Vents à fon gré
Vont placer l'inftrument dans le lieu préparé;
Er dufils de Maya fecondant la prudence ,
Dans tous les Jeux divers coulent en abondance.
A l'aspect des neuf Soeurs , que flate un doux espoir
Apollon fait pour lors l'eſſay defon pouvoir.
Tel que ce bruit affreux qui menace la Terre ,
Quand Jupiter jaloux lui declare la guerre ,
CTel eft ce bruit nouveau qu'Apollon fous fes doigts ,
Fait naître dans l'inftant du mêlange de voix.
Aces brayans éclats les Mufes étonnées ,
Fuyent... Mais qui les a fi foudain ramenées ?
Erato , je te vois applaudir tour à tour ,
Aux chants qu'ont enfantés à l'Allegreffe & e l'Amour.
·Ciel! qu'apperçois - je en cor ! Calliope furprise
Se prépare à chanter quelque grande entrepriſe.
Sans doute du combat au bruit fier qu'elle entend,
Les Soupapes.
b Les bufets.
e Le prélude
d Le cornet.
e La voix humaine.
f La Trompete.
F
f
LE MERCURE
Elle a crû qu'on donnoit le fignal éclattant.
Cut change , & l'immortel que le Berger révère ,
Vvent entendre des a fons dont il fe croit le Pere
Euterpe à fa furprise applaudit d'un fouris.
Mai prodige nouveau ! des Satyresfuivis, b
Les Faunes , les Sylvains , les Dryades ruftiques ;
Viennent tout réjouir par leurs danfes comiques .
Et mélant à leurs chants le langage des yeux ?
Ils disputent enſemble à qui plaira le mieux.
Mortels que tardez- vous ? Venez de toutes plages ,
Rendre au Dieu de Delos vos finceres hommages ;
Il a fçu le premier montrer aux yeux furpris ,
Dans un feul Inftrument mille Inftrumens compris.
*KK KKKKKKKKK
EGLOGUE.
Apeine le Soleil forti du ſein des taux¸
Eclairoit de fes feux le faite des côtéaux ,
Lorfque pour celebrer une Fête champétre ,
Les Bergers d'un hameau commencent à paroître
Silvanire s'avance ; unefoule d'Amans
s'empreffe à lui marquer les mêmes ſentimens.
Elle avoit l'humeur fière , & depuis fon enfance
Elle n'avoit aimé que fon indifference ,
Lycas enorgueilli d'une vaine beauté,
♦
a La Flare douce.
Clairon & les divers Jeux de Baffe.
DE SEPTEMBRE
Avoit tentéfans fruit de vaincre fa fiervé ,
Et de tous les Bergers Damon le plus aimable,
N'avoit pas éprouvé de fort plus favorable.
Tircis , que follicite un amour
"
tout nouveau ,
Se propofe en ce jour un triomphe ſi beau.
Plein de ce doux espoir , contre l'idifferente,
Il mediteren fon coeur une rufe innocente ;
Moyen dont les Bergers méprifoient le fecours ;
Mais qui depuis , dit on a fervi mille Amours.
Sous le voile emprunté d'une froideur paisible ,
Aux yeux de Silvanire il fe montre infenfible.
Si l'on danfe , toujoursfidele à fon deffein s
Il évite aver foin de lui donner la main ;
Et tandis qu'à l'envi cent Paftours autour d'elle ,
Briguent l'heureux moment de fignaler leur gele ,
Il fe tient à l'écart ; fon air fier & glacé
Montre affez qu'il condamne un amour infenfé.
Mais ce qui plus encore offenfe la Bergere ,
Il s'adreſſe aux Bergers empreſſez à lui plaire.
Euyez , dit-il , l'amour &fes traits odieux ;
Seul il cauſe les maux qui regnent en ces lieux.
Depuis que parmi nous les Fêtes font frequentes
Sans guide dans les champs les brebis ſont errantes,
Dans nos jeux tout confpire à feduire les coeurs ,
Et l'Enfant de Cypris en fait tous les honneurs
Tropfaciles toujours àfe laiffer furprendre ,
Les Bergeres devroient éviter de s'y rendre.
Lour affect dangereux srouble notre devoir,
E ij
12
LE MERCURE
2
Et c'est trop acheter le plaifir de les voir.
La rufe eut ſon effet : Silvanire inquiète ;
Du coupable Tircis médite la défaite.
Tantôt vers le Berger un regard courroucé
Exprime le dépit d'un amour offense ,
Et tantôt fans raifon , elle quitte fa place ,
S'approche de Tircis , & d'un air plein de grace ,
Lui reproche un discours temeraire , offenfant.
Pour un Amant caché le pas étoit gliſſant .
Affectant toutefois de ne la pas entendre ,
Il s'excufe en Berger plus honnête que tendre.
Il en fouffre ; cent fois las de celer fon feu ,
Il fe voit fur le point d'en hazarder l'aveu.
Mais enfin rappellant sa fierté ſi pénible ,
Il imagine encore un trait bien plus fenfible.
De la courfe l'on vient à diſputer le prix ;
Il en fort le vainqueur. Tout autre que Tircis
N'eût pas manqué d'offrir le prix à fon Amante 3
Mais Tircis plus habile , à Doris le prefente .
Doris, quoique moins belle , avoit un air charmanp
Et fouvent la beauté cede au vifagrément.
A ce mépris nouveau , Silvanire interdite ,
Ne peut plus renfermer le dépit qui l'agite ,
Et fe livrant enfin aux plus vives douleurs ,
Loin de ce lieu fatal elle porte fes pleurs .
Ici le feul Tircis ofe m'être contraire ,
Lit- elle , & c'est lui feul à qui je voudrois plaire
Quand je le preferois à tant d'autres Amanı ,
DE SEPTEMBRE.
13
་
A-t-il paru touché de mes empreffemens ?
Mais pourquoi ce Berger , avec son dir fauvage
De nos fêtes tantôt condamnoit- il ruſage ;
Luy qui fidele Amant de la jeune Doris ,
S'eft empreffé d'abord à lui porter leprix ?
Certes il te fied bien de blâmer un coeur tendrés.
Toi qui contre l'Amour n'as pas fçû te défendre
Avant que d'infulter les Jeux & les Amours &
Tu devrois profiter de tes fages difcours
Tircis charmé de voir la Bergere diftraite ,
L'avoit fecretement fuivie en fa retraite ,
Maintenant affuré de for heureux furcès ,
Aux pieds de fon Amante il marqueſes regrèts.
Je n'ai pas merité , dit-ilàla Bergère ,
Les reproches amers que l'on ofe me faire ;
Et mon coeur enflamé d'un veritable Amour ,
N'eft pas tel qu'il a feint de paroître en ce jour
Oui , j'aime ; mais Doris n'eft pas celle que j'aime :
Elle n'a fait qu'aider au tendre stratagême.
Inftruit que les aveux de la plus vive ardeur
N'avoient pú jufqu'ici flechir votrerigueur ;
Pour vous rendre à l'Amour deformais moins rebelles'
J'ai voulu me choisir une route nouvelle.
1
J'ai cris qu'unfier mépris à vos yeux preſenté
Pourroit de vos mépris combattre la fierté ,
Quefaite àtout charmer , il falloit pour vous plaire
Vous montrer un Berger d'un nouveau caractère.
Heureux , fi les combats qu'eut à rendre mon coeur ,
Biij
54 LE MERCURE
Pouvoient de mon pardon obtenir la faveur !
Silvanire éprouvant le fuccès de la ruſe ,
Peut- elle de Tircis ne pas cherir l'excuſe?
Le Soleil n'avoit pas encor fini fon tour
Quand de l'heureux Berger elle approuve l'amour
Que dis-je ? En peu de temps le Berger put comprens
dre ,
Que pouraimerplus tard , on n'en eftpas moins tem
dre.
ARRESTS , EDITS
& Declarations.
A
RREST du Confeil du rr Aouſt 1720 , pas
lequel Sa Majefté fait tres expreffes défenfes
& inhibitions à tous marchands , Negocians
& autres de faire fortir du Royaume , par quelque
voie que ce puiffe eftre , du Bois de Noyer non
ouvragé , à peine de confifcation & de trois
mille livres d'amende ; & ce jufqu'à ce qu'il en
ait efté par Sa Majefté autrement ordonné.
ARREST du Confeil du 23 Aouft 1720 , par
lequel S. M commet let Seurs Angran & Vatan
Maiftres des Requeftes ordinaires de fon Hôtel ,
pour l'execution de l'Article II . de la Declaration
du Roi du 19 Juin dernier : Ordonne Sa Majefté
que conformément à icelle , il fera par lef
dits Sieurs Commiffaires dreflé Procès verbal des
Billets de Banque qui ont efté ou feront ci- aprés:
apportez au Trefor Royal pour l'acquifition def
DS SEPTEMBRE.
dites Rentes , pour eftre enfuite lesdits Billets
de banque brulez audit Hôtel de Ville de Paris en
prefence des Prevoft des Marchands & Echevins
de ladite Ville , qui en drefferont pareillement
Procés verbal.
ARREST du Confeil du 23 Aouft 1720 , qui
erdonne que les Recepiffez donnez par le Sieur
Miotte pour affranchiffement de droits Seigneuriaux
dûs à S. M. dans la Ville de Paris , feront
reprefentez pardevant le Sieur d'Ombreval , pour
fur la liquidation qui fera par lui faite , être
pourvû au rembourſement des fommes y contenues
DECLARATION du Roy du 24 Aoust 1720,
par laquelle S. M. veut que dans chacun des Sieges
des Greniers à Sel dans l'étendue de fes Gabelles
de France , où l'Office de Prefident a été
acquis par les Officiers defdits Greniers , &
reuni à leurs Corps en confequence de la Declaw
ration du 8 May 169r , il foit ineeffament pour
vú aufdits Offices de Prefidens de perfonnes capables
, fur les Quittances de Finance qui en feront
delivrées par le Treforier de fes Revenus cafuels g
à l'effet de quoy lefdits Offices feront & demeu
reront defunis du Corps defdits Greniers , com.
me par ces prefentes S. M. les en défunit; & qu'en
confequence ceux qui voudront acquerir lefdits
Offices feront tenus d'en remettre leurs foumiffions
dans un mois , à compter du jour de l'Enregistrement
de la prefente Declaration , entre
les mains des Sieurs Intendans & Commiffaires
départis dans fes Provinces , pour eftre les fou
miffions qu'ils auront reçues , envoiées en fon
Confeil , huitaine après l'expiration dudit mois ,
fur lesquelles il fera arrefté des Rolles au profio
de ceux qui auront fait les offres les plus avam
E iiij
36
LE
MERCURE
tageufes , pour jouir par les pourvûs desdits Offces
, des Privileges , Exemptions , Droits d'un
demi Minot de Franc- falé, portez par ledit Edit
du mois de Novembre 1689 , & des Gages attribuez
aufdits Offices par les Rolles arreftez au
Confeil en execution du même Edit , enfemble
des droits , honneurs , Privileges & prérogatives
dont jouiflent les pourvûs de pareils Offices de
Prefidens dans fes autres Greniers , en payant par
les Acquereurs , les fommes pour lesquelles ils
feront employez dans lefdits Rolles , fans deux fole
pour livre , dont S. M. les difpenfe.
ARREST du Confeil du 24 Aouft 1720 par
lequel S. M. ordonne ,
ARTICLE PREMIER .
Qu'à commencer du premier Janvier 1721 ,
les Villes & Communautez du Royaume qui font
chargées de Rentes , n'en paycront les arrerages
que fur le pied du denier Cinquante. Fait défenfes
aux Officiers Municipaux & à leurs Treforiers
& Receveurs d'en faire le payement fur um
plus haut pied , à peine de radiation.
II. Les Creanciers defdites Villes & Commumautez
, qui voudront conferver leurs Rentes en
confentant la reduction au denier cinquante ,
ferent tenus d'en faire dans un mois , à compter
du jour de la publication du prefent Arreit , leurs
Declarations aux Sieurs Intendans & Commiffaires
départis dans les Provinces ou à leurs Subdeleguez
; & feront faire mention de la reduction
par tel Notaire qu'ils voudront choiſir , fur les
Titres de leurs Creances , de laquelle mention
ils remettront une expedition au Greffe des Hôtels
ou Maifons communes des Villes , ou aux
Syndics des Communautez qui n'ont point de
Maifons communes & de Greffes .
IL Faute par les Creanciers defdites Villes &
DE SEPTEMBRE. 57
Communautez de confentir à la Reduction de
leurs Rentes , dans le tems & en la maniere cideffus
ordonnez , Sa Majesté a dès à préfent autorifé
& autorife lefdits Officiers Municipaux ,
& autres qui ont l'adminiftration des affaires
defdites Villes & Communautez , d'emprunter au
denier cinquante à conftitution de Rente , ou par
obligation portant interefts , dans les lieux où
lefdites obligations font en ufage , les fommes
neceffaires pour acquiter les principaux de leurs
anciennes dettes , même pour en payer les arre
rages & interefts , en cas qu'il ne fe trouve point
dans le produit de leurs Revenus des fonds fuffifans
pour payer lefdits arrerages & interefts .
IV . Les nouveaux Creanciers qui prêteront
aufdites Villes & Communautez , feront & demeureront
fubrogez aux droits , Privileges &
hypoteques des anciens Creanciers qui feront
rembourfez de leurs deniers , en faifant des fti-
-pulations & declarations d'employ requifes &
ordinaires pour acquerir la fubrogation,
V. Les Proprietaires des Rentes qui ne font
pas libres , & qui ne font pas en état de recevoir
les rembourſemens , feront tenus de faire
ceffer dans trois mois , à compter auffi du jour
de la publication du prefent Arreft , les faifies
& autres empêchemens , finon & faute de les
faire ceffer dans ledit tems , les Rentes qui leur
font dûes par lefdites Villes & Communautez ,
demeureront reduites de plein droit , & les arrerages
ne leur en feront plus payez qu'au denier
cinquante , à commencer dudit jour premier
Janvier 1721 .
VI . Fait S. M. tres- expreffes défenſes aux
Offic`ets Municipaux defdites Villes & Communautez
de rembourfer aucunes dettes , & à leurs
Receveurs & Treforiers d'en payer aucuns arretages
ou interefts , fi leſdites dettes n'ont eſté ve
18
LE
MERCURE
rifiées par Arrefts
du Confeil
ou par Ordonnanees
des Sieurs
Commiffaires
départis
dans les
Provinces
, auffi à peine de radiation
des payemens.
Enjoint
à ceux , qui fe prétendent
Creanciers
defdites
Villes & Communautez
, dont
les Creances
n'ont point efté verifiées
, de faire
proceder
à la verification
de leursdites
Creances
dans le même tems de trois mois ; aprés
laquelle
verification
faite , leurs Rentes
feront
reduites
, ou ils feront rembourſez
, infi qu'il eft
ci-deflus ordonné
.
VII. Fait pareillement S. M. défenfes aufdits
Officiers Municipaux , de faire aucuns emprunts
pour rembourfer celles des dettes defdites Villes
& Communautez , à l'acquittement defquelles il
a efté pourvû par Arrefts du Confeil , foit par
Impofitions , établissement d'Octrois où aurrement,
ni d'accepter la reduction des arrerages &
interefts defdites dettes, voulant que lefdites Villes
& Communautez en foient totalement liberées
fuivant les Arreſts qui ont eſté rendus à
get effer.
ARREST du Confeil du 27 Aouft 1720 ,
par lequel S. M. permet aux Directeurs & Intereffez
de l'Armement du Vaiffeau nommé la
Paix , de faire la vente de toutes les Balles
de Caffé , pour eftre confommé dans le Royaume
, en payant les mêmes droits qui fe perçoivent
for les Caffez qui entrent par le Port de
Marſeille : défend Sa Majefté de faire fortir aucun
Caffé hors du Royaume pour quelque caufe ou
fous quelque pretexte que ce puiffe eftre , jufqu'à
ce qu'autrement il en ait efté ordonné par
Sa Majefté.
ARREST du Confeil du 29 Aouft 1720 ,
par lequel Sa Majefté ordonne ce qui fuit
DE SEPTEMBRE. 59
>
Art. I. Que fon tres cher & tres amé Oncle le
Duc d'Orleans Regent , qui en cette qualité a
accepté le titre de Protecteur de ladite Compagnie
des Indes , en fera & demeurera auffi
Gouverneur perpetuel , & qu'il fera établi un
Confeil pour la Regie & adminiſtration generale
de tout ce qui pourra concerner ladite
Compagnie.
II. Ordonne Sa Majefté pour éviter la con-
Bufion dans le travail , empêcher que le fecret
ne foit divulgué , & diminuer en même temps
les dépenfes de ladite Compagnie , que le nombre
des Directeurs fera reduit à vingt - quatre ,
fuivant l'état attaché à la minutte du prefent
Arreft , les honoraires defquels Directeurs feront
reglez par provifion à vingt mille livres
pour chacun , en attendant l'Affemblée generale.
III. Veut Sa Majefté que chacun des Disecteurs
confervez , & qui fuivant la difpofition
de l'Article XVI. de l'Edit du mois de Decem
bre 1717 , doivent avoir au moins deux cens
Actions en compte fur les Livres de la Compagnie
, foit tenu de dépofer dans quinzaine , à
compter du jour de la publication du prefent
Arreſt , dans les Livres de dépoft de la Compagnie
deux cens Actions remplies , dont il ne
pourra difpofer pendant le temps de fon adminiftration.
IV. Veut pareillement Sa Majefté que les
Directeurs de chaque Département rendent
compte de leur regie & adminiſtration au fieur
Lavv , que Sa Majefté a nommé & établi Di-
Lecteur general de ladite Compagnie & de la
Banque , & qui fera rapporteur des affaires de
LE MERCURE
ladite Compagnie audit Confeil ; & que fur les
Bilans particuliers que lesdits Directeurs feront
chacun de leur département , il foit fait un Bilan
general des profits & pertes de la Compagnie
par le Directeur general, pour eftre prefenté &
communiqué aux Actionnaires dans les Affemblées
generales qui feront tenues , conformément
à l'Article XLII . de l'Edit du mois d'Aouſt
1717.
V. Ne pourront les Actionnaires de ladite
Compagnie avoir voix déliberative dans les Af-
Lemblées qu'ils ne foient Proprietaires de cinquante
Actions remplies , conformément à l'Article
XXXVII. de l'Edit du mois d'Aouſt 1717.
Et pour en mieux juftifier la proprieté , ils feront
tenus de les avoir en compte ouvert dans :
les Livres de la Compagnie avant la tenue de
chaque Affemblée , dont la premiere fera au 20-
Decembre prochain , & en ce cas ils auront
autant de voix qu'ils auront de cinquante Actions
dépofées.
VI. Permet Sa Majefté aufdits Actionnaires ช
dans leurs Affemblées generales , de changer à
Ja pluralité des voix les Directeurs dénomméz
dans l'état attaché à la minute du prefent Arseft
, s'ils le jugent à propos.
par
VII Veut Sa Majesté que conformément
l'Article XLVII. de fon Edit du mois d'Aouft
1717 , & à l'Article V. de celui du mois d'Aouſt
1664 , confirmé fon Edit du mois de May
1719 , les Directeurs de la Compagnie des Indes
he puiffent eftre inquietez ni contraints en
leurs perfonnes & biens pour raifon des affaires
de la Compagnie , tant pour celles du Commer
ae, que par rapport aux adjudications de fes
DE SEPTEMBRE. 61
fermes faires à ladite Compagnie , & aux regies
& adminiftrations dont elle a été & pourroit
cftre chargée dans la fuite , & qu'ils foient feulement
tenus de leur fait perfonnel : Declare
Sa Majesté nul & de nul effet tout ce qui pourroit
avoir efté fait contre lefdits Directeurs au
préjudice defdites difpofitions , fe refervant do
pourvoir à la feûreté du cautionnement de fes
Fermes & de fes Recettes Generales , & à la forme
des comptes qui en feront rendus .
VIII. Pour faire ceffer les bruits que des
gens mal intentionnez continuent de répandre
dans le Public , Sa Majefté a declaré & declare ,
ainfi qu'Elle a cy- devant fait , que les Actionnaires
de la Compagnie des Indes ne pourront
en aucun temps & fous quelque pretexte que
ce foit , eftre taxez pour raiſon des profits
qu'ils ont faits , ou pourront faire dans ladite
Compagnie,
IX. Et en confequence du prefent Reglement"
les fonctions des Commiffaires du Confeil
nommez tant pour la Banque , que pour la Compagnie
des Indes , cefferont du jour de la publication
du preſent Arreſt. A
DEPARTEMENS DES DIRECTEURS
de la Compagnie des Indes .
COMMERCE.
Meffieurs Hardancourt & Martin , Indes &
vente des Marchandiſes.
Meffieurs Dartaguiete & Morin , Loüifianne,
Senegal & Barbarie,
Meffieurs Rigby , & la Franquerie , l'Orient.
Meffieurs Mouchard & de Premenil , Arme
mens.
82 LE MERCURE
Meffieurs Caftanier & Morin , Achapts des
marchandifes.
Meffieurs Fromaget & Caftanier , Changes
Etrangers & Monnoyes.
Meffieurs la Porte & Godeheu , Livres , Caiffes
Repartitions .
Monfieur S. Juan , Voyages,
FINANCES.
Meffieurs d'Artaguiette & Nouveau , Recettes
Generales & Contrôle General.
Meffieurs La Porte & Lallemant . Gabelles.
Meffieurs La Haye , Peiner , Villemur , Savalete
& Julie. Aydes , Contrôle des Actes , Franc-
Fiefs , c.
Mellieurs Le Gendre & Dupleix . Cinq Groffes
Fermes Tabac .
Meffieurs Laugeois & Nouveau Livres Journaux.
Monfieur Corneau. Affaires des Confeils.
ARREST du Confeil du 30 Août 1720.
par lequel Sa Majesté ordonne que par les fieurs
de Bauffan & Bertin Confeillers du Roy en fes
Confeils , Maîtres des Requêtes ordinaires de fon
Hôtel , il fera inceſſamment dreffé Procès verbal
des Billets de Banque de Dix mille livres & de
Mille livres qui ont été portez en Compte en
Banque , tant à l'Hôtel de ladite Banque à Paris
, qu'aux Hôtels des Monnoyes dans les Provinces
, après qu'ils auront été envoyez au fieur
Bourgeois Treforier General de la Banque , pour
être lefdits Billets de Banque coupez en travers
par le milieu & brûlez enfuire en l'Hôtel de
Ville de Paris .
ARREST du Confeil du 30 Août 1720. par
lequel Sa Majefté ordonne ce qui fuit.
ART. I. Les Pourvûs de Soixame Offices de
Confeillers Agents de Change , Banque , Com
DE SEPTEMBRE . 61
merce & Finance , feront tenus de rapporter inceffamment
pardevant le fieur le Pelletier Desforts
Premier & principal Commiflaire pour les
Finances , leurs Titres de proprieté , pour être
procedé à la Liquidation de leur Finance , &
enfuite pourvû à leur Remboursement.
II. Au lieu & place desdits Soixante Anciens
Officiers , il fera établi Soixante Conteillers du
Roy Agents de Change , en vertu des Commiffions
du grand Sceau , pour exercer les mêmes
fonctions & jouir des mêmes Lroits , Privileges
& Exemptions dont ont joüi lefdits Anciens Officiers
en confequence defdits Edits du mois
d Août 1708 & Novembre 1714. à l'exception
du Franc Salé fculement.
› de
III. Seront tenus les Particuliers qui ferone ,
choifis pour exercer lefdites Commiflions
rapporter avant que leurs . Commiffions leur
puiffent être expediées , un Certificat du Commis
du Depôt en Fanque pour justifier qu'ils y
auront depofé Dix Actions nouvelles de la Compagnie
des Indes , provenant de la Converfion
des anciennes , ou Quinze Actions Rentieres
& ne pourront lefdies Actions leur ètre rendues
tant qu'ils exerceront ladite Commiffion ,
mais en recevront feulement les Dividendes de
fix mois en fix mois , ainfi que les autres Actionnaires
de la Compagnie.
›
IV. Nul ne pourra être admis dans le nom.
bre defdits Confeillers du Roy Agens de Change
, qu'il ne foit âgé de vingt- cinq ans au moins,
& qu'il ne faffe apparoir de fa fuffifance & capacité
pour en exercer les fonctions ? par un
Certificat des Juges Confuls de la Ville de Paris
, & des Gardes en Charge des fix Corps des
Marchands de ladite Ville .
V. Seront tenus en outre lefdits Particuliers
aufquels il aura été expedié des Commiffione
#4
LE MERCURE
d'Agens de Change , de s'y faire recevoir &
prêter ferment devant le fieur Prevôt de Paris ou
fes Lieutenans , en la maniere accoutumée ; Pour
laquelle Reception ils payeront la fomme de
Trente livres feulement pour tous Droits
compris ceux du Subftitut du Procureur General
& du Greffier.
>
. y
VI. Ceux qui auront fait Faillite , Contract
d'Atermoyement , ou obtenu Lettres de Repy
ne pourront être admis au nombre defdits Agens
de Change conformément à l'Article III. du
Titre XI. de l'Ordonnance du mois de Mars
1673. Et lefdits Agens de Change ne pourront
faire aucun Contrat d'Atermoyement , obtenir
Lettres de Repy , ni eftre admis au Benefice de
Ceffion pour raifon des Effets qui leur auront
été confiez ; Et en cas de retention defdits
Effets ou de Faillite , leur Procés leur fera fait
comme pour Banqueroute frauduleufe .
>
VII. Ne pourront lefdits Agens de Change
avoir de Caiffe ni faire aucune Negociation
pour leur compte , ni Endoffer aucunes Lettres
ou Billes que pour en certificr la fignature ve
ritable , le tout à peine de nullité des Engagemens
qu'ils pourroient avoir contractez , privation
de leurs Emplois , & de Deux mille livres
d'amende , applicable moitié au profit du Roy &
l'autre au denonciateur.
VIII. Ne pourront pareillement lefdits Agens
de Change faire aucune Negociation de Lettres
ou Billets de Change de Cinq cens livres &
au deflus , ni pour vente de Marchandifes en
gros , autrement qu'en Compte de Banque , à
peine de Cinq cens livres d'amende & de deſtitution
de leur Employ.
IX. Fait Sa Majefté tres expreffes inhibitions
& deffenfes à toutes perfonnes de s'immifcer
dans les fonctions des Agens de Change , d'exiger
DE SEPTEMBRE. 65
ger ni de recevoir aucuns Droits pour quelque
Negociation que ce puiffe être , à peine de
Trois mille livres d'amende , même de Prifon
& de plus grandes peines , s'il y écher , contre
les Domestiques, Apprentifs , Compagnons , Ouvriers
& Gens fans aveu.
2 au
X. Seront tenus lefdits Agens de Change de '
fe conformer , tant pour leur Police interieure,
que pour l'Exercice de leur Commiffron
Reglement cejourd'hui arrêté au Confeil d'Etat
du Roy , & cy attaché fous le Contre- feel de
prefent Arrêt.
REGLEMENT que Sa Majesté venst
& entend être gardé & obfervé par les
Confeillers du Roy Agens de Change
Banque , Commerce & Finance , qui feront
établis en confequence de l'Arrêt du Con
feil d'Etat du Roy de ce jour.
I.
ART. Lge, Banque , Commerce & Finance
Es Confeillers du Roy Agens de Chande
la Ville de Paris , pour s'acquitter digne-"
ment de leurs Emplois & pour entretenir entre
eux l'union & l'amitié fraternelle . feront cele
brer le premier jour ouvrable de chaque année,
à huit heures , une Meffé folemnelle du Saint-
Efprit en l'Eglife des Peres de la Doctrine ruë
Saint Martin ; Et lorfque quelqu'un d'entr'eux
viendra à déceder ils feront celebrer une
Meffe de Requiem en la même Eglife , aux jours
& heures marquez par le Sindic qui en fera ?
avertir les Agens de Change ; Et ceux qui n'y
affifteront point , feront tenus de payer Six livres
applicables au pain des Prifonniers de la Concier
gerie du Palais , à moins qu'ils n'ayent des ca
Cafes legitimes.
>
F
66 LE MERCURE
"
II. Il fera élû entr'eux tous les premiers jours
d'Aflemblée de chaque année , a la pluralité des .
voix , un Sindic & un Adjoint pour pendant
ladite année rediger , figner & expedier les Deliberations
, & generalement faire tout ce qui dépendra
des fonctions de leurs Emplois , pour l'eta.
bliffement & confervation des interêts de la
Compagnie , conformément aux Edits & Reglemens
, fans que lefdits Sindics & Ajoints puiflent
rien innover ni conclurre , que de l'avis de la
Compagnie affemblée .
III. Le Syndic , & à fon deffaut d'Ajoint , convoquera
la Compagnie tou es les fois qu'il en
fera befoin, & chacun s'y rendra ponctuellement,
à peine de Six livres d'amende payable par ceux
qui ne s'y trouveront point fans caufes legitimes
, lefquel'es Six livres feront applicables .
anx befoins de la Compagnie , Et fera delivré
un Jetton d'Argent pour drait de prefence à
chacun de ceux qui fe feront rendus à ladite
Affemblée.
-
>
IV. Lorfqu'un Agent de Change fera en conference
avec quelque Banquier , Negociant ou
autre pour quelque Negociation un fecond
Agent de Change furvenant ne pourra les écou
ter ni les interrompre , à peine de Cinquante livres
d'amende payable par le contrevenant au
profir du plaignant, fans neanmoins que la liberté
fot ôtée audit Banquier , Negociantou autre , de
conferer en particuliet avec le dernier , même
de conclurre avec lui , s'il le juge à propos, plude
qu'avec le premier..
V. Ne pourront lefdits Agents de Change exiger
ni recevoir aucune fomme au- delà des Droits
qui leur font attribuez par les Edits des mois
'Août 1708. & Novembre 1714. fous peine de
Concuffion , & leur fera loifible de le faire payer
de leurs Droits après la confomination de car
DE SEPTEMBRE.
que Negociation , ou fuivant l'ancien ufage fur
des Memoires qu'ils fourniront de trois mois en
trois mois des Negociations faites par leur entremife
aux Banquiers , Negocians ou autres. ,
pour le compte defquels ils les auront faites
mais ne feront preferez & privilegiez fur les
Effets mobiliers defdits Banquiers , Negocians
ou autres , que pour lefdits Droits de Negociations
qu'ils auront faites pendant les trois
derniers mois,
VI. Il fera tenu un Regiſtre pour les Delibe
rations de la Compagnie , & un autre pour l'Enregiſtrement
des Edits , Arrêts & Reglemens fur
le fait defdits Emplois , & un troifiéme pour l'En--
registrement des Commiflions & Sentences de
Reception de chacun defdits Employez , lefquels
Registres & autres Pieces concernant ladite Comparnie
feront mis dans un Coffre qui reftera dans ›
le Bureau , & dont la clef demeurera entre les
mains du Sindic , pour les reprefenter quand be--
foin fera ..
1
VII. Chaque Syndic fortant de Charge fera
tenu de reprefenter fon Compte de Recerte &
de Dépenfe , trois mois après fon année d'Exereice
, fur le Bureau de l'Affemblée ordinaire
auquel jour feront nommées deux perfonnes dela
Compagnie pour l'examiner & en faire leur
rapport à l'Affemblée fuivante , Et ce qui fe:
trouvera dépensé pour le bien & l'utilité de la
Compagnie fera alloué fans difficulté , Et ce done:
le Syndic fe trouvera redevable fera par lui payé
au Syndic entrant en Charge , Et en cas qu'il foitdû
au Syndic fortant , la Compagnie lui en feras
le Remboursement.
VIII. Seront les prefeas Articles & Reglemens
las à routes les Affemblées qui fe tiendront pour
l'Election des Sindyes & Ajoints , auſquels il cft
enjoint de tenir la main à leur execution
Bijj
63 LE MERCURE
ARREST du Confeil du 30. Août 17201
concernant le Remboursement des Rentes de
l'Hôtel de Ville de Paris , affignées fur le Clergé,
& des Payeurs & Contrôleurs defdites Rentes
& le payement des Arrerages dûs. par lefdits
Paycurs
ORDONNANCE du Roy du 31 Août
720. par laquelle Sa Majef é ordonne..
ART. I. Le Confeil de Marine fe tiendra à
F'ordinaire deux fois par femaine , & même plus
fouvent , felon que la multiplicité des affaires
l'exigera.
>
II. I fera compofé de M. le Comte de Tou
loufe Amiral de France du fieur Marêchal
d'Eftrées en qualité de Prefident , du fieur Ma
rêchal de Teffé ; du feur Chevalier, d'Orleans
Grand Prieur de France , General des Galeres ,
du Geur Marquis de Coetlogon , du fieur Marquis
d'Asfeld , du fieur Comte de Champigny ,
du fieur de Cours , du fieur de la Grandville ,
du feur de Vauré , en qualité de Confeillers ,
& du fieur de la Chapelle en qualité de Secre
taire dudit Confeil.
III . Ce Confeil fera chargé de tout ce qui concer
ne la Marine du Levant & du Ponant , les Galeres,
les Confulats, les Colonies , Pays & Conceffions
des Indes Orientales & Occidentales & d'Afri
que les Fortifications des Places Maritimes cyaprès
denommées ; fçavoir , Dunkerque, Calais,
Ambleteufe , Boulogne , le Treport , Saint Va
lery , Dieppe , Fefcamp , le Havre , Honfleur ,
Ja Hogue , Cherbourg , Grandville , Saint Malo
Fort de la Conchée , Château du Taureau , Breſt,
Fort de Rofcan vel ', Fort de l'Ifle longue , Fort
de Camaret , Port Louis , Belle Ifle , Tour de
Pifle d'Hedie , Tour de l'Ifle d'Honnac , Cha
peau de Nantes , Saint Mastin de Ré , Fort de
DE SEPTEMBRE. 69
>
y
la Prée , Redoute de Sablanceau , Redoute dur
Martray , Redoute des Portes , la Rochelle , Fors
de l'Ifle d'Aix , Fouras , Rochefort , Fort Lupin
& Fort de la Pointe , Redoute de l'Eguille , Redoute
de l'Ile- Madame , Fort du Chapus , Brouage ,
Citadelle de l'Ile d'Olleron , Port de Socoa
Port de Vendre , Port de Cette , Canal de Com .
munication du Languedoc , Marſeille Nôtre-
Dame de la Garde Tour de Bouc , Château
d'If, Pomegues & Ratanneau , Toulon , Ifle de
Porquerolles , Ifle de Portecros , Brigançon ,
Saint Tropez , & Antibes ; Tout ce qui regarde
la conftruction , l'entretien & reparation des
Arcenaux , Quays , Formes , Baffins , Eclufes ,
Jettées & Batteries pour la confervation , l'entrée
& la deffenfe des Ports & des Rades , Et
auffi l'entretien des Corps de Gardes dans les
Capitaineries Garde Coftes.
IV . Il aura infpection fur les Negocians qui
compofent en chaque Echelle le Corps de la
Nation , en tout ce qui ne regardera point le:
detail de leur Commerce.
V. Il aura -foin de maintenir les Privileges des
Negocians fous la Banniere de France ; de reprimer
les abus du Pavillon , & les fraudes de ceux
qui prêtent leurs noms aux Etrangers .
VI. Il aura . la Direction des Compagnies des
Indes Orientales , du Senegal & autres , pour
tout ce qui regarde la Guerre & les Etabliffe
mens où il y a des Troupes & des Commandans.
VII. Il aura foin de faciliter aux Vaiffeaux
Marchands les fecours dont ils auront befoin :
dans les Pays Etrangers , & de faire ceffer les
troubles & les obftacles qu'ils y pourront recevoir
par des faifies , ou autres empêchemens.
dans leur Navigation .
VIII. Il propofera l'expedition des ordres me
LE MERCURE
ceffaires pour ouvrir & fermer les Ports , & de
ceux pour l'Envoy des Eſcadres ou Eſcortes deftinées
à la protection du Commerce , & à la fûreté
des Côtes & des Bâtimens Marchands .
IX. Les ordres expediez pour ouvrir & fer
mer les Ports feront envoyez par le Confeil aux
Commandans , Intendans & Ordonnateurs des
Ports , & par l'Amiral aux Officiers de l'Ami
rauté.
X. Le Confeil fera chargé des Negociations
& Traitez avec les Puiffances d'Alger , de Tunis
, de Tripoly, & avec le Roy de Maroc ; il
fera auffi chargé du Rachat & de l'Echange des
Efclaves , & de la Protection des Saints lieux de
Jerufalem .
"
XI. Les Memoires en forme d'inftruction con⚫
cernant la Marine pour les Ambaffadeurs & En
voyez , feront donnez par le Confeil & portez par
M. le Comte de Touloufe au Confeil de Regence
, où étant approuvez ils feront enfuite
communiquez au Secretaire d'Etat ayant le département
des Affaires Estrangeres , qui en in
ferera Copie dans fes Regiftres avec les Inſtructions
aufdits Ambaffadeurs & Envoyez.
XII . Les Marchez pour les Fournitures gene
rales & particulieres pour le fervice de la Ma.
rine , feront faits & arrêtez au Confe: l ; & s'il
convient pour le bien du fervice d'ordonner
quelque Marché dans les Ports , il ne pourra
avoir lieu qu'après avoir été approuvé par les
Con feil.
XIII. Les Comptes de Recette & Dépenfe des-
Invalides de la Marine feront farrêtez chaque
année par le Confeil , & les arrêtez defdits
Comptes ferviront au Treforier general & aux-
Commis prepofez aux Recettes particulieres
de décharges valables par tout où il appartien
drav
DE SEPTEMBRE. 71
XIV. La Sufcription des Paquets envoyez des
differens Departemens fera faite à S. A. R. Monfeigneur
le Duc d'ORLEANS , Regent du Royaume„
Four le Confeil de Marine , Et tous les Paquets
ainfi fufcrits feront remis par le Commis de la
Pofte au Secretaire du Confeil , qui les portera
tous les jours à M. le Comte de Toulouſe pour
les ouvrir.
·XV. Les affaires étant deliberées dans le Con--
feil , M. le Comte de Toulouſe recueillera les
voix ; Et s'il y a partage , la fienne fera préponderante
, de même qu'en fon abfence , celle
de Prefident , en l'absence du Prefident , celle
du Confeiller qui prefidera.
XVI. Quand il farviendra des affaires qui demanderont
une longue difcuffion , M. le Comte
de Touloufe les diftribuëra aux Confeillers pour
les examiner , & en faire enfuite leur rapport
au Confeil.
XVII. Les Deliberations du Confeil prononsées
par M. le Comte de Toulouſe , feront inferées
par le Secretaire du Confeil dans l'Extrait:
dont aura été fait Rapport , en marge de chaque
Article mis en deliberation chacune de .ces
Deliberations paraphée par M. le Comte de
Toulouſe , & les Extraits fignez en fin par lui ,
& contre-fignez par le Secretaire , qui les con
fervera pour Minutes dans le Secretariat .
XVIII. Le même ordre fara obfervé à l'égard des
Memoires,projets & autres differentes Expeditions
dont aura efté fait rapport & delibere dans le
Confeil'; & les Minutes ainfi paraphêes , fignées.
& contrefignées , fetont mifes en depoft dans la
Secretariat.
XIX . Le Secretaire du Confeil fera tenu de
faire tranfcrire & rediger en corps de volume
toutes lefdites Minutes , & feront lefdits volumes
Cottez & paraphez par M. le Comte de Toulouze.
XX. M, le Comte de Toulouze fe rendra aus
72
LE
MERCURE
jours ordonnez chez le Regent , pour lui rendre
compte des affaires , fur lefquelles il fera neceffaire
de recevoir fes ordres.
XXI: Lorfqu'il y en aura qui ne concerneront
que les Galeres , M. le Comte de Touloufe enavertira
le Sieur Chevalier d'Orleans , pour qu'il
fe rende avec lui chez le Regent , & en faffe le :
Rapport.
XXII. M. le Comte de Toulouſe rapportera au
Confeil deRegence les affaires qui devront y eftre
rapportées , avec les Deliberations du Confeil de
Marine fur chaque affaire ; & pourra neanmoins ,
quand il le jugera neceffaire , propofer au Regent
d'appeller au Confeil de Regence le Mailtre.
des Requeftes Confeiller au Confeil de Marine ,
pour y faire rapport de celles qui lui auront eſtédiftributes
.
XXIII . Les Decifions du Confeil de Regencer
féront inferées dans les Extraits fur lefquels le
Rapport aura efté fait precedemment au Confeil
de Marine , & paraphées par M. le Comte de Tou
Loufe.
XXIV . Les Depêches & autres Expeditions
faites au nom du Confeil , feront fignées par M.
le Comte de Toulouſe feul , à l'exception de
celles concernant le fervice des Galeres , qui fe- -
ront fignées conjointement par lui & par le Sieur
Chevalier d'Orleans ; & celles concernant les
Fortifications des Places maritimes , qui feront
auffi fignées conjointement par lui & par le Sieur
Marquis d'Asfeld .
XXV. Les Expeditions fignées au nom du Con
feil , feront celles dénommées cy-après.
Les Congez des Officiers de Marine & des Ga
leres , tant d'Epée que de Plume
Les Congez abfolus aux Officiers fubalternesde
la Marine & des Galeres , Gardes de la Masine
, Officiers Mariniers , Matelots & Soldats .
Les
DE SEPTEMBRE. 75
-
Les Certificats des Gardes de la Marine.
Les Brevets des Officiers fubalternes , tant
d'Epée que de plume, dont l'adreffe ne fera point
faite à l'Amiral ou au General des Galerés .
Les Etats & ordres pour le payement des Appointemens
des Officiers d'Epée & de plume
dans les differens Departemens .
Les Lettres pour toutes les Charges fubalternes
de l'Infanterie de la Marine & des Galeres.
Celles pour faire fervir en pied les Officiers
qui feront reformez.
Celles pour changer d'une Compagnie à une
autre les Capitaines qui ont déja eu Commiffion.
Les ordres pour la diftribution des Fonds arrê
tez par le Roy chaque année pour la dépenfe de
la Marine , des Galeres & des Fortifications des
Places Maritimes mentionnées en l'Article III .
Les ordres pour la marche des Troupes de la
Marine.
Les ordres pour l'adminiſtration des Commif
faires & autres employez.
Les ordres pour la reforme des Officiers , ca
leur confervant la moitié de leurs Appointemens.
Les Ordres pour recevoir les Officiers - Mariniers
, Matelots & Soldats à la demie folde des
Invalides de la Marine .
Les Liftes pour marquer les Departemens de
chaque Officier au commencement de l'année.
Les ordres pour les changemens des Officiers
d'un Departement à un autre.
Les Liftes d'Officiers choifis par le Roy pour
commander & fervir fur les Vaiffeaux & Galeres
que Sa Majefté fera armer .
Toutes lefquelles Expeditions feront fignées
ainfi qu'il a efté dit par l'Article XXIV . & contrefignées
par le Secretaire du Conſeil.
XXVI. Les Minutes des Arrefts rendus fur les
Affaires deliberées au Confeil de Marine , & por
G
74
LE MERCURE
tées au Confeil de Regence , feront fignées par
M. le Comte de Touloufe ; feront auffi lefdites
Minutes fignées fuivant l'ufage ordinaire par M.le
Chancelier , & enfuite remifes au Secretaire d'Ezat
, qui en fignera les Expeditions .
XXVII. Le Secretaire d'Etat fignera les autres
Expeditions ci - après denommées.
Les Provifions & Commiffions fcellées du grand
Sceau .
Les Brevets ou ordres dont l'adreffe eft faite
à l'Amiral ou au General des Galeres.
Les Brevets de Grace ou de Commutation de
peine.
Liberté des Forçats.
Brevets d'Affurance.
Les Proviſions de Grand'Croix , Commandeurs
& Chevaliers de l'Ordre de Saint Louis , avec les
Lettres pour les faire recevoir.
Les Brevets de Penfions .
Les Etats au vrai des Recettes & Depenfes de
la Marine & des Galeres .
Les Ordonnances du Roy pour les Fonds de la
Marine , & autres qui s'expedieront fur le Trefor
Royal.
Les Lettres d'Anobliffement pour le fervice militaire
dans la Marine .
Celles de furannation fur l'Annobliffement.
Les Paffeports accordez par le Roy aux Vaiffeaux
Marchands dans les cas expliquez par l'Ediz
du mois de Fevrier 1716.
Les Lettres d'Etat.
Les Ratifications des Traitez.
Toutes les Ordonnances de Penfions ou de
Gratifications .
Tous les Ordres & Etats de décharge de la dépenfe
de la Marine & des Galeres qui paffent à la
Chambre des Comptes.
Les Ordonnances pour la levée & l'augmen
DE SEPTEMBRE. 75
ation des Troupes de la Marine & des Galeres.
Les ordres pour ouvrir & fermer les Ports .
Ceux pour caffer les Officiers , pour les rétablir
, pour les interdire , & pour lever l'interdi-
Яtion.
Les-Amnisties , & generalement toutes les Ordonnances
concernant les Officiers , Matelots &
Soldats des Vaiffeaux & des Galeres.
Les Ordres pour la conftruction , vente &
demolition des Vaiffeaux ou Galeres appartenant
à Sa Majesté.
XXVIII. Lorfqu'il fera remis au Secretaire d'Etat
des Expeditions pour eftre fignées par lui , il
lui fera delivré en même tems un Etat en forme
de Lifte , defdites Expeditions , figné par M. le
Comte de Toulouſe , lefquelles Liftes ainfi fgnées
demeureront au Secretaire d'Etat pour fa
décharge.
XXIX. En cas d'abfence ou de maladie de M.
le Comte de Toulouſe , qui le mette hors d'état
ou de portée de vacquer aux affaires , toutes les
fonctions à lui attribuées par le prefent Reglement
feront remplies & exercées par le Prefident
du Confeil , & au defaut dudit Sieur Prefident ,
par le premier des Confeillers qui feront prefens.
EDIT du Roy, donné au mois d'Aouſt 1720,
par lequel sa Majefté ordonne que dans les lieux
qui feront par Elle indiquez , il foit inceffamment
fabriqué fept cens cinquante mille Marcs de
laons & demis fols , à la taille de quarante au
Marc , deux pieces de remede par Marc , & pareille
quantité de Marcs de quarts de fols , à la
taille de quatrevingts au Mare , quatre pieces de
remede au Marc ; le tout fans retour , mais feulement
le fort portant le foible , le plus également
que faire fe pourra ; lefquels Flaons pourront
eftre monnoyez dans tous nos Hôtels de nos
Gij
76 MERCURE LE
Monnoyes , & porteront les mêmes Empreintes
que celle des fols de cuivre , figurez dans les
Cahiers attachez fous le Contrefcel de fes Edits .
des mois de May & de Juillet 1719. veut Sa Majesté
que lefdites Efpeces ayent cours dans tous
les lieux de fa domination , fçavoir , les demis
fols pour feize deniers piece , & les quarts de
fols pour huit deniers .
ARREST du Confeil du premier Septembre
1720 , par lequel S. M. ordonne que fon Edit
du mois d'Aouſt dernier fera excuté ſelon ſa forme
& teneur & en confequence a commis &
commet le Sieur Marandon pour recevoir les
fommes principales qui doivent provenir des
buit Millions de livres de Rentes alienez au denier
cinquante. Ordonne Sa Majesté que le principal
deftites Rentes fera payé en Billets de
Banque fur les Recepiffez dudit Sieur Marandon
, ou fur ceux des Receveurs des Tailles qui
feront par lui commis & prépofez , portant promeffe
de fournir dans un mois Quittance du Garde
du Trefor Royal en exercice , lefquels Rece-
. piffez ainfi délivrez aux Acquereurs desdites Rentes
, feront reprefentez aux Sicurs Intendans &
Commiflaires départis dans les Provinces & Generalitez
, ou à leurs Subdeleguez dans le Cheflieu
de l'Election , pour eftre par eux vifez , à
peine de nullité ; & feront les Billets de Banque
qui auront efté fournis pour l'acquifition defdites
Rentes , biffez en prefence des Porteurs , & par
eux timbrez Pour acquifition de Rentes fur les
Recettes Generales , & le Sieur Marandon tenu
d'en compter ainfi qu'il fera ordonné par Sa
Majefté.
ARREST du Confeil du 2 Septembre 1720 ,
portant qu'il fera fabriqué pour cinquante MitDE
SEPTEMBRE. 778
lions de Billets de cinquante liv . & de dix liv.
SENTENCE du 6 Septembre 170 , qui condáinne
la femme du nommé Gaydon , Maistre
Chandelier , en cent liv. d'Amende , avec confifcation
de fa chandelle , & le nommé Girard ,
Jure Chandelier , en cinq cens livres d'amende ,
& le deftitue de ſa Jurande , & du droit d'ancienneté
.
Portant auffi défenfes à tous particuliers de receler
chez eux de la chandelle , à peine d'amende
& de confiſcation .
ARREST du Confeil du 7 Septembre 1720 ,
pour le remboursement des Creanciers de la
Communauté des nouveaux Vendeurs de vin à
Paris .
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S M. ordonne qu'à l'avenir , & à commencer
pour la prefente année 1720 , les Receveurs
des Tailles des vingt Generalitez des Pays
d'Election , & les Receveurs particuliers des Provinces
d'Alface , Metz , Franche Comté , Flandres
, Haynaut & Rouffillon , porteront directe.
ment au Trefor Royal les fonds provenants des
Impofitions des Tailles , Capitations , & autres
Impofitions extraordinaires , deduction faite des
Gages des Officiers & autres charges , qui feront
employez dans les Eftats qui feront arreſtez pour
le payement defdits gages & charges .
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S. M. ordonne que les Augmentations
de gages appartenans aufdites Communautez des
Ports , Halles , Quays & Marchez de la Ville de
Paris , fupprimées par Edit du mois de septembre
1719 , continueront de leur eftre remboursées par
le Garde du Trefor Royal , ainfi & de la même
G iij
78 LE MERCURE
maniere-qu'auparavant l'Arreft du Confeil du 2
Aouft dernier , & nonobftant ce qui eft porté par
icelui , auquel S. M. a derogé & deroge pour
cet égard feulement , & fans tirer à confequence,
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S. M. ordonne que l'Arreft du Confeil'
du 25 Aouft dernier fera executé felon fa forme
& teneur , & en confequence , que toutes les Parties
dont la Reduction a efté ou dû eftre faite fur
le pied du denier vingt- cinq , en execution de
l'Edit du mois de Janvier 1716 , demeureront
reduites au denier cinquante , à commencer du
premier Janvier dernier ; & que l'emploi en fera
fait fur ce pied dans les Etats qui feront arreſtez
à l'avenir ; & à l'égard de celles qui fe trouvent
compriſes dans les Eftats qui ont efté arreſtez
pour la prefente année 172c . Ordonne Sa Majefté
qu'elles ne feront payées que fur le pied
du denier cinquante , & que l'Excedent fera porté
au Trefor Royal en vertu du prefent Arreſt.
ARREST du Confeil du 13 Septembre 1720,
qui ordonne que les Billets de dix mille livres
& de mille livres , retirez du Public , pour la fomme
de cent millions , feront inceffamment portez
en l'Hoftel de Ville de Paris , pour y eftre brulez
en la maniere accoutumée .
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S. M. accepte les offres de la Compagnie
des Indes , En confequence a fubrogé &
fubroge la lite Compagnie aux droits , noms
raifons & pretentions appartenant à la Compagnie
de Saint- Domingue tant en France qu'à l'Amerique
& autre, lieux ; lefquels Droits ont efté re
trocedez à Sa Majefté par ladite Compagnie de
Saint- Domingue , par Acte paffé le 2 Avril der-
›
DE SEPTEMBRE. 79
nier pardevant Verani & de Mahault Notaires , à
condition que le recouvrement defdits droits
pourra eftre fait au nom de S. M. & aux conditions
compriſes au Memoire inferé en la deliberation
de ladite Compagnie des Indes , annexée à
la Minute du prefent Arreft : à la charge toutefois
par ladite Compagnie des Indes , de payer'
fuivant les offres la fomme de fix millions d'une
part , qui fera remife à le Fevre Notaire , pour
eftre par lui diftribuée ainsi qu'il fera ordonné
par Sa Majefté ; & celle de quarante fept mille
neuf cens cinquante deux liv. neuf fols deux deniers
d'autre part , pour pareille femme dûe à
S. M. par ladite Compagnie de Saint - Domingue ,
laquelle fomme fera payée par ladite Compagnie.
des Indes au fieur GaudionTreforier de la Marine,
Extrait des Regiftres du Conseil d'Etat.
E Roi
LE
ayant fait examiner dans fon Confeil
l'eftat du Credit public , des Changes étran
gers , des Monnoyes de fon Royaume , & du prix
des Denrées ; S. M. a jugé qu'il convenoit de
prendre un arrangement general , tant par rapport
aux Efpeces , Billets de Banque , Actions de la
Compagnie des Indes & Comptes en Banque, que
pour l'ordre des payemens : Au moyen de quoy
S. M. fe propofe d'augmenter la circulation , &
procurer la diminution des Denrées : A quoi voulant
pourvoir , ouy le Rapport. Sa Majesté étant
en fon Confeil , de l'avis de Monfieur le Due
d'Orleans Regent , a ordonné & ordonne.
ART. I. Que l'Arreft de fon Confeil du 30 Juillet
dernier fera executé felon fa forme & teneur
& en confequence que les diminutions fur les
Efpeces indiquées par icelui , auront leur plein
& entier effet.
II. Veut Sa Majesté qu'à commencer du jou
Giiij
80 LE MERCURE
de la publication dú prefent Arreft , & jufqu'au
premier Octobre prochain , les Billets de Banque ..
de 1000 liv . & de 10000 liv. ne puiffent eftre
donnez en payement , tant dans les Bureaux de
fes Recettes & Fermes, que de particulier à particulier
, qu'avec moitié Efpeces : à l'exception
neanmoins des dettes anterieures au jour de la
publication du prefent Arreft , lefquelles pourfont
eftre acquittées en entier en Billets de 1000
liv . & de 10000 liv . fuivant l'Arreft du Aouft
dernier, & ce jufqu'au premier O&obre prochain
exclufivement , après lequel jour lefdits Billets
feront hors de cours , & ne feront plus reçus
que dans les débouchez & pendant le tems indiquez
par ledit Arreſt .
III. Veut pareillement S. M. qu'à commencer
du jour de la publication du préfent Arreſt , les
Billets de Banque de 100 liv. de so liv. &. de 10
liv . ne foient reçus dans les Recettes de S. M. &
Bureaux de fes Fermes , & de particulier à particulier
, en payement des fommes de vingt livres
& audeffus , qu'avec moitié Efpeces , & pour les
fommes au deffous de vingt liv . le payement ne
pourra eftre fait qu'en Efpeces.
IX . Ordonne S. M. que les Billets de Banque
de cent , de cinquante , & de dix liv . feront reçus
en total & fans Efpeces , tant en payement des
dettes contractées anterieurement à la publication
du prefent Arreft , qu'en acquifition de Rentes
fur les Aydes & Gabelles , tant perpetuelles que
viageres , créées par Edits des mois de Juin &
Aouft derniers , où des Rentes créées fur les Recettes
generales par autre . Edit auffi du mois
d'Aouft dernier , & ce jufqu'au premier Novembre
exclufivement, après lequel terme lefdits Billets
de cent , de cinquante & de dix liv . ne ſesont
reçûs en entier , & fans Efpeces , que pour
l'acquisition defdites Rentes , fauf à continuer
DE SEPTEMBRE. 81
de les donner en payement avec moitié Efpeces
fuivant l'Article precedent.
V. N'entend S. M. comprendre dans le prefent
Reglement les Payeinens ftipulez en Efpeces , conformément
à l'Arreft du 15 Aouft dernier , lefquels
feront faits fuivant lefdites ftipulations ,
niles Lettres de Change , Billets de Commerce .
& ventes de marchandiſes en gros , qui feront
acquittées en Comptes courans en Banque , ainfi
qu'il a efté ordonné par l'Arreſt du 13 Juillet
dernier.
VI. Veut S. M. qu'à compter du jour de la publication
du prefent Arreft, les fommes écrites en
Comptes courans en Banque foient & demeurent
fixées au quart de la valeur pour laquelle elles y
ont efté portées , fi mieux n'aiment les Proprietaires
defdites fommes les retirer en Billets de Banque
de mille & de dix mille liv. ce qu'ils feront
tenus de faire en ce cas dans le cours du prefent :
aprés quoi ils n'y feront plus reçûs.
VII. Les Actions de la Compagnie des Indes
remplies feront fixées à l'avenir fur le pied de 2000
liv. en Comptes en Banque , eû égard à la fixation
portée par l'Article precedent,& pourront en tout
tems eftre converties en Viremens ou Comptes en
Banque fur ledit pied de 2000 liv . & pareillement
ceux qui auront credit en Banque pourront acquerir
de ladite Compagnie des Actions fur le même
pied de 2000 liv . monnoie de Banque , ainfi
qu'il eft dit ci deffus. Pourront neanmoins les
Particuliers qui auront des Actions ou des Comptes
en Banque , les negocier contre argent courant
ou Billets de Banque , de gré à gré , ainſ
qu'ils le jugeront à propos.
VIII. Sa Majefté a permis à la Compagnie des
Indes de faire cinquante mille nouvelles Actions
en cinq cens mille Billets d'un Dixième d'Action
hacun , qui feront Numerotez depuis le N.
82 LE MERCURE
jufques & compris le N. 500000. faifant lefdites
cinquante mille nouvelles Actions , avec les
200000. ordonnées par l'Arreft du 3 Juin dernier,
la quantité de 250000 Actions ; pourront lefdits
Dixièmes d'Actions eftre acquis fur le pied de 800
liv. chacun en Billets de 100 , de so , & de 1ò liv.
ou eftre convertis en Virement ou Compte en
Banquefur le pied & à proportion des Actions entieres
, & le Dividende defdits Dixiémes d'Aétions
fera de 36 livres par an , à raiſon de 360
liv . l'Action.
IX. Les foufcriptions ordonnées par les Arreſts
des 31 Juillet & 14 Aouft derniers , feront reçues
fur le pied de 1000 liv. en acquifition de Dixiémes
d'Actions , qui feront fournis par la Compagnie
des Indes , à raiſon de 800 liv . chacun , fi
mieux n'aiment les Porteurs des Soufcriptions les
remplir ,fuivant qu'il eft ordonné par l'Arreft du
Is du même mois d'Aouft.
L
X. Veut S. M. que le montant des Actions , Dixièmes
d'Actions & Comptes en Banque , ne
puifle exceder la fomme de cinq cens Millions
Monnoye de Banque : A l'effet de quoi il reftera
toujours en dépot à la Compagnie des Indes une
partie defdites 250000 Actions , égale au montant
du Credit en Banque fur le pied de 2000 liv .
l'Action & lorfque la lite fomme de cinq cens
Millions fe trouvera remplie , tant en credit qu'en .
Actions , S. M. fait tres expreffes défenſes aux
Directeurs d'en recevoir audelà , à peine de
répondre de l'excedent en leur propre & privé
nom,
i.
XI. Le Prevoft des Marchands de la Ville de
Paris , affifté de l'ancien Echevin de ladite Ville,.
tiré du Corps des Marchands , qui par l'Article
onziéme de l'Arreft du treize Juillet dernier a
l'infpection generale des Ecritures , pourra ſe faire
reprefenter , toutes les fois qu'il le jugera à preDE
SEPTEMBRE. 35
-
pos , les Actions qui feront en depoft à la Compagnie
pour le montant du Credit en Banque , à
l'effet d'examiner fi la quantité defdites Actions
dépofées eft égale au montant dudit Credit , dont
il dreffera Procès verbal, qui fera figné par le Depofitaire
chargé par la Compagnie de la garde
defdites Actions , & par les Directeurs de ladite
Compagnie qui auront ce Departement .
XII. Les Repartitions qui demeureront entre
les mains de la Compagnie des Indes pour la valeur
du credit qu'elle aura donné à ceux qui auront
converti des Actions en Ecritures & Compres
en Banque , accroiftront à ceux qui feront
reftez Actionnaires , & feront partagées entre eux
à proportion de leur intereſt dans ladite Compagnie.
XIII . Sa Majesté voulant mettre un taux fixe
& certain au payement des droits d'entrée & fortie
de fon Royaume , & éviter les pertes caufées
par la foibleffe des Monnoyes , Elle ordonne qu'à
commencer au premier Octobre prochain , lefdits
droits feront acquittez en Ecritures en Ban
que , fans augmentation ni diminution du prix
des Baux des Fermes de Sa Majesté
XIV. Toutes Lettres de Change , Billets dé
Commerce & Ventes de Marchandifes en gros ,
faites avant la publication du prefent Arreft , ou
auparavant qu'il ait pu être connu dans les Pays
Etrangers , & qui fuivant l'Arreft du 13 Juillet
dernier doivent être payées en Ecritures en
Banque , feront acquittées en nouvelles Ecritures
, fur le pied du quart auquel elles font fixées
par l'Article VI. du preſent Arreſt ; au
moyen duquel quart , la fomme totale portée
par lefdites Lettres de Change , Billets de Commerce
& Ventes de Marchandifes en gros fera
acquittée en entier .
XV. Les Billets de Cent , de Cinquante &
84
LE MERCURE
de Dix livres qui feront employez , tant en aequifition
de Rentes qu'en acquisition de Dixiémes
d'Actions , feront biffez & brûlez en l'Hôtel
de Ville de Paris , en la forme preferite par
les Arrefts du Confeil precedemment rendus ;
Et pour l'execution du prefent Arreft feront expediées
toutes Lettres Patentes à ce neceffaires .
Fait au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majellé y
étant , tenu à Paris le quinziéme de Septembre
mil fept cent vingt . Signé , PHELY PEAUX.
ARREST du Confeil du 18 Septembre
1720 , par lequel Sa Majesté ordonne que les .
Particuliers qui voudront en execution de l'Art .
6. de l'Arreft du 15 du prefent mois , retirer
les fommes qu'ils ont en Comptes e .. Banque ,
tant à Paris que dans les Villes de Provinces
où leflits comptes ont été établis , feront tenus
de paffer écritures au compte de la Compagnie
des Indes pour la partie qu'ils voudront reti
rer, pour valeur de laquelle il leur fera déli
vré à Paris & à Lyon un Certificat en leur nom
du montant de ladite Partie , figné des Dire-
Aeurs , vifé du Controlleur , & certifié par les
Prevost des Marchands defdites Villes ; & dans
les autres Villes un Certificat figné des Directears
defdits comptes en Banque , & vifé par
les Intendans & Commiffaires départis dans les
Provinces , lefquels Certificats feront reçûs jufqu'au
dernier Octobre prochain inclufivement
comme Billets de Banque , pour acquifition de
Rentes fur les Aydes & Gabelles , tant perpetuelles
que viageres , créées par Edits des mois.
de Juin & d'Aouft derniers , ou des Rentes fur
les Recettes generales créées par autre Edit dudit
mois d'Aouft , après lequel jour dernier
Octobre prochain lefdits Certificats ne feront
plus reçûs ; & en remettant par le Garde du TreDE
SEPTEMBRE. 59
<
for Royal lefdits Certificats à la Caiffe de la Compagnie
des Indes , la valeur lui en fera fournie
en Billets de mille & de dix mille livres biffez
lefquels feront enfuite brûlez en l'Hôtel de Ville
de Paris en la maniere prefcrite par les Arreſts
cy devant rendus . Veut Sa Majesté que lesdits
Certificats qui n'auront pas été portez au dernier
Octobre prochain en acquifition desdites Rentes,
foient convertis en Actions Rentieres ou Dixiemes
d'Actions Rentieres fur la Compagnie des
Indes , ainfi qu'il a été ordonné par l'Arreft du
15 Aouft dernier pour les Billets de Banque de
mille & de dix mille livres , lequel Arreſt aura
le même effet pour lefdits Certificats .
ARREST du Confeil du 19 Septembre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne que la
fabrication des Billets de cinquante livres ordonnée
par l'Arreft du 2 du prefent mois fera
continuée pour cinquante millions , compofant
mille Regiftres de mille Billets chacun , numerotez
depuis le numero joooo , jufques & compris
le numero 100000 , lefquels Billets de
cinquante livres ne feront point fignez à la main,
mais feulement en ca acteres d'impreffion au nom
du fieur Delanauze pour le fieur Bourgeois Treforier
de la Banque , du fieur Giraudeau pour fe
fieur Fenellon Infpecteur , & du fieur Graner
pour le fieur Dureveft Controlleur , fcellez du
Sceau de la Banque , & timbrez de ces mots imprimez
, Divifion ordonnée par Arrest du 2 Septembre
1729 , & ne ferviront uniquement , ainfi
que les vingt cinq millions cy devant fabriquez
& diftribuez dans le Public , qu'à couper les
Billets de dix mille livres & de mille livres , &
à payer le dixiéme des fommes qui feront placées
dans les differens emplois cy devant indiquez.
Veut Sa Majesté qu'au fur & à mesure qu'i
86 LE MERCURE
fera delivré defdits Billets de cinquante livres ,
ceux de dix mille livres & de mille livres , en
échange defquels ils auront été donnez , foient
fur le champ b ffez en prefence des Parties , &
enfuite brûlez en l'Hôtel de Ville de Par s avec
les formalitez ordinaires & prefcrites par les Arrefts
qui ont été precedemment rendus à te fu et :
Veut au furplus Sa Majefté que les cinquante
millions de billets de cinquante livres ordonnez
par le prefent Arreft du 2 du prefent mois , ayent
le même cours dans le public que ceux de cent
& de dix livres cy devant fabriquez .
ARREST du Confeil du 19 Septembre 1720 ,
par lequel Sa Majesté permet à la Compagnie des
Indes de continuer la converfion en actions de
ladice Compagnie non remplies , pendant le
cours du prefent mois de Septembre feulement ,
des Actions d'Occident , Soufcriptions , Primes
& Promeffes , fur le pied & de la maniere qu'il
s'eft pratiqué avant l'Arreft du 3 Juin dernier.
Veut Sa Majefté qu'après le dernier jour dudit
mois de Septembre , lefdites Actions d'Occident,
Soufcriptions , Primes & Promeffes qui n'auront
pas été converties , demeurent nulles ; Fait défenfes
de les negocier , à peine de reſtitution &
de trois mille livres d'amende.
ARREST du Confeil du 21 Septembre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne qu'à commencer
du jour de la publication du preſent Arreft
, les Liards de France ne feront plus expofez
dans tout le Royaume que pour fix deniers piece,
au lieu de huit qu'ils valent actuellement : Les
Pieces dites de fix deniers , pour douze deniers ,
au lieu de feize ; Les fols de cuivre pour vingtquatre
deniers au lieu de trente- deux deniers ,
es demis & quarts de fols à proportion ; Les
DE SEPTEMBRE . 87
4
Tols ou douzains de Billon , pour trente - deux
deniers au lieu de trois fols fix deniers ; Les
Pieces dites de trente deniers ou Moufquetaires ,
pour trois fols neuf deniers au lieu de cinq fols ;
& que les Phenins qui ont cours en Alface pour
douze denies , y feront reduits à neuf deniers
les demis à proportion ; fur lequel pied toutes
Jefdites efpeces refteront jufqu'à ce qu'il plaife
à Sa Majefté de les reduire à leur jufte valeur.
ई
EDIT du Roy , donné au mois d'Août 1720..
Regiftré en la Chambre des Comptes , par lequel
Sa Majesté ordoane ce qui fuit. Nous avons
créé & érigé , & par le prefent Edit créons &
érigeons en titres d'Offices formez & hereditaires
, deux nos Conſeillers Treforiers Receveurs
Generaux & Payeurs des Rentes fur l'Hôtel de
Ville de Paris , Receveurs des Confignations ,
Dépofitaires des Debers de Quittances , Commiffaires
aux Rentes faifies réellement , Greffiers
des Feuilles & Immatricules & principaux Commis
y joints , & deux nos Confeillers - Controlleurs
Generaux defdits Payeurs , lefquels feront
à commencer de la prefente année la Recette
le Payement & le Controlle defdites Rentes viageres
créées par
noftre Edit du prefent mois
fuivant les Etats de diftribution qui en feront
arreftez tous les ans en notre Confeil ; à l'effer
de quoy lefdites Rentes viageres feront partagées
en deux Parties que Nous avons établies
& établiffons par notre prefest Edit , pour faire
avec les douze établies par autre notre Edit da
mois de Juin dernier , le nombre de quatorze
Parties : Attribuons à chacun des Payeurs créez
par notre prefent Edit , trois mille fept cens
cinquante livres de gages effectifs , & pareille
fomme de trois mille fept cens cinquante livres
par forme de taxations , frais & droits d'exer,
88 LE MERCURE
cice ; enfemble pour les façons , vacations &
frais de reddition de compte , & à chacun des
Controlleurs douze cens cinquante livres de gages
effectifs , & fept cens cinquante livres de
droits d'exercice ; defquels gages , taxations &
droits d'exercice , l'employ fera fait dans les
Etats de diftribution defdites Rentes : Entendons
que l'acquifition des gages defdits Offices de
Payeurs & de Controlleurs foit faite à raifon
du denier quarante de la Finance , & que les
acquereurs joüiffent defdites taxations & droits
d'exercice fans payer aucune Finance : Voulons
en outre que lesdits Payeurs & lefdits Controlleurs
joüiffent du droit de Committimus en nos
grande & petite Chancelleries , & de tous les
autres droits , fonctions , exemptions , privile
ges & prerogatives attribuez cy devant aux
Payeurs & Controlleurs des Rentes dudit Hôtel
de Ville , par differens Edits , Declarations &
Arrefts de notre Confeil , de la même maniere
que s'ils étoient plus amplement ſpecifiez par
notre prefent Edit.
ARREST du Confeil du 31 Aouft 1720 ,
par lequel Sa Mjefté ordonne que tous les Creanciers
des Etats de Bretagne , pour arrerages de
conftitution de Rentes , appointemens , gages ,
gratifications , ou fous tels autres titres que ce
puiffe eftre , feront tenus de recevoir ce qui leur
eft du par lefdits Etats avant le quinzième de
Septembre de la prefente année , paflé lequel
temps les fommes deſtinées à leur payement demeureront
par forme de confignation entre les
mains du fieur de Montaran , Treforier defdits
Etats , aux rifques , defdits Creanciers , fans
qu'ils puiffent prétendre d'eftre payez dans la
fuite en autres efpeces qu'en Billets de Banque de
10000 1. & de 1000 liv. pour les parties qui feront
defdites
DE SEPTEMBRE. 89
A
defdites fommes & au deffus ; & en Billets de
Banque de cent livres & de dix livres pour les
Parties qui fe trouveront au deffous de mille
livres. Ordonne en outre Sa Majefté que les
Particuliers qui feront employez pour arrerages
de conftitution de Rentes , appointemens , gages
, gratifications , ou fous tels autres titres
que ce puiffe eftre , dans l'état de fonds qui
doit eftre arrefté dans la prochaine affemblée
pour les dépenfes des années mil fept cent vingt,
mil fept cent vingt un , & mil fept cent vingtdeux
, feront tenus de recevoir leur payement
dans le mois , à compter de l'écheance du terme
auquel ils auront été affignez dans ledit état à
& que faute par ceux dont le payement aura
été affigné , de le recevoir dans le courant dudit
mois , les fonds deftinez audit payément demeureront
par forme de confignation entre les mains
du Treforier defdits Etats , à leurs rifques , fans
qu'ils puiffent prétendre d'être payez autrement
qu'en efpeces qui avoient cours alors , & fur le
même pied qu'elles étoient reçues dans le Public.
Enjoint Sa Majefté aux Treforiers defdits Etatsde
fe conformer à l'execution du prefent Arreſt,
H
90 LE MERCURE
DECLARATION
DU ROY ,
Touchant la conciliation des Evêques du
Royaume , au fujet de la Conftitution
UNIGENITUS.
Donnée à Paris le 4. Aouſt 1720 .
Lo
OUIS pár la grace de Dieu Roy de France
& de Navarre : à tous ceux qui ces pre
fentes Lettres verront , Salut . Dés le temps de
mor e avenement à la Couronne , nous avons crû
que notre principal devoir étoit de confacrer à
la Religion le premier ufage de notre Puiffance ,
& de meriter le titre glorieux de Fils aîné de
l'Eglife , qui Nous diftingue entre les Rois , en
failant fervir notre autorité à appaifer les troubles
qui s'étoient élevés dans notre Royaume ,
au fujet de la Bulle donnée par N. S. P. le Pape,
contre le Livre intitulé , Reflexions morales fur
le Nouveau Teftament : Notre tres cher & tresamé
Oncle le Duc d'Orleans Regent de notre
Royaume , a feconde la fincerité de nos voeux,
par l'étendue de fes lumieres , au milieu des
foins qu'exigeoient de lui des conjonctures difficiles
il a toujours regardé une paix fi defirable
> comme l'objet le plus digne de fon attention
& c'eſt à la perfeverance de fes tra
vaux que nous devons la fatisfaction de pouvoir
annoncer aujourd'hui à tous nos Sujets la fin
d'une divifion , dont les fuites dangereuſes al-
Larmoient également ceux qui aiment veritables
›
DE SEPTEMBRE.. 91
>
ment l'Eglife , & ceux qui font fincerement attachez
aux interêts de l'Etat ; des explications
dreffées dans un efprit de concorde & de charité
pour empêcher que l'on n'abufe de la Bulle
par des interpretations fauffes & contraires à
fon veritable fens ont été unanimement approuvées
par tous les Cardinaux , tous les Archevêques
& prefque tous les Evêques de notre
Royaume ceux qui avoient déja accepté la
Conftitution ont attefté autentiquement dans la
Lettre qu'ils ont écrite à notre tres cher & tresamé
Oncle le Duc d'Orleans , que ces explications
étoient conformés à la doctrine de l'Eglife,
à celle de la Bulle & de l'Intruction Paftorale
publiée en 1714. & la plupart des Prelats
qui jufques icy avoient fufpendu leur acceptation
, ont adopté ccs mêmes explications pour
les prefenter à leur peuple en acceptant la Bulle,
comme renfermant fon veritable feus ; ainfi
Nous avons la confolation de voir les troubles
qui affligeoient l'Eglife de France , calmez , les
doutes éclaircis , les conteftations fur l'acceptation
de la Bulle finies , la paix fi ardemment
defirée par le feu Roy notre Bifayeul enfin rendue
aux Eglifes , & la Conftitution UNI GENITUS
accompagnée d'explications fi autentiques
, que ceux qui avoient eu jufqu'icy des
peines & des difficultez , ne pourront plus hefiter
à s'y foumettre & à fe conformer à la
voix & à l'exemple de leurs rafteurs . Dans ces
circonstances notre zéle pour la Religion &
pour le bien de l'Eglife , le refpect filial dont
Nous fommes remplis à l'exemple de nos Predeceffeurs
, pour N. S. P. le Pape , la confiance
que Nous avons dans les lumieres des Evêques
du Royaume , le foin que Nous devons avoir
de rétablir l'ordre & fa tranquillité dans nos
Etats , ne fouffrent pas que Nous differions de
>
,
Hij
92 LE ME R CURE
:
mettre le Sceau de notre autorité à une paix fí
precieufe , & de prendre en même tems toutes
les précautions convenables , pour étouffer les
anciennes femences de difcorde , empêcher que
l'inquietude , le faux zéle & l'efprit de parti
n'en faffent naître de nouvelles , & maintenir
dans l'Eglife une fubordination auffi jufte que
neceffaire Nous entrerons par là dans les fentimens
du feu Roy notre tres honoré Seigneur
& Bifayeul , lorfqu'il a donné fes Lettres Patentes
du 14, Fevrier 1714 & Nous efperons
que tous les Prelats de l'Eglife de France , fe
reüniffant dans le même efprit , la fageffe & la
charité de leur conduite acheveront , & confirnieront
pour toujours l'ouvrage de leur zéle
pour la verité & de leur amour pour la paix.
A CES CAUSES , après Nous avoir fait reprefenter
les Lettres Patentes du 14. Fevrier
1714. les Arrêts d'Enregistrement defdits Lettres
en notre Cour de Parlement de Paris , & autres
Parlemens & Cours de notre Royaume , l'Inftruction
publiée en 1714. les Explications fur
la Bulle UNIGENITUS la Lettre approbative
defdites Explications , fignée par tous les
Cardinaux , tous les Archevêques , & prefque
tous les Evêques de l'Eglife.de France , enfemble
tous les Mandemens ou Actes d'acceptation
defdits Evêques de l'avis de notre tres cher
& tres - amé Oncle le Duc d'Orleans petit - Fils
de France Regent ; de notre tres cher & tres amé
Oncle le Duc de Chartres premier Prince de
notre Sang ; de notre tres cher & tres- amé Coufin
le Duc de Bourbon ; de notre tres- cher &
tres amé Coufin le Comte de Charollois ; de
notre tres- cher & tres amé Coufin le Prince de-
Conty , Princes de notre Sang ; de notre trescher
& tres- amé Oncle le Comte de Toulouſe
Prince legitimé , & autres Pairs de France
,
DE SEPTEMBRE. 55
Grands & Notables Perfonnages de notre Royau,
me, Nous avons par notre prefente Declaration ,
dit , ftatué & ordonné , difons , ftatuons & ordonnons
, voulons & Nous plaift ce qui fuit.
ARTICLE PREMIER .
Confirmant en tant que befoin feroit par ces
Prefentes fignées de notre main , les Lettres Patentes
du 14. Fevrier 1714. enſemble les Arrêts
d'enregistrement defdites Lettres , tant de notre
Cour de Parlement à Paris du 15. Fevrier audit
an , que des autres Parlemens & Cours de notre
Royaume Ordonnons que lesdites Lettres Patentes
& lefdits Arrêts d'Enregistrement foient
executez felon leur forme & teneur ; ce faifant,
que la Constitution UNIIGENITUS reçue par les
Evêques de notre Royaume , foit obfervée dans
tous les Etats , Pays , Terres & Seigneuries de
notre obéiffance ; & en confequence défendons à
Tous nos Sujets de quelque état , qualité & condition
qu'ils foient , à tous Corps, Communautez &
Perfonnes feculières ou regulieres , exemptes &
non exemptes , de quelque Ordre , Congregation
oa Societé qu'elles foient même aux Univer
fitez de notre Royaume , & notamment aux Fa
cultez de Theologie , de rien dire , écrire , foutenir
, enfeigner , debiter & diftribuer directement
ou indirecter ent foit contre la Conftitution ,
foit contre l'Inftruction Paſtorale publiée dans
l'Affemblée de 1714. & adoptée par plus de cenz
Evêques de France , & contre les explications
fur la Bulle UNIGENITUS approuvées par lefdits
Cardinaux , Archevêques & Evêques de notre
Royaume , comme conformes à la doctrine de
l'Eglife & au veritable fens de la Bulle.
II.
>
Defirant proteger l'unanimité des Evêques
& allurer dans leurs Diocefes une paix fi neceffaire
au rétablillement du bon ordre & de la
94 LE MERCURE
difcipline Canonique , faifons pareillement tres
expreffes inhibitions & défenfes de faire directement
ou indirectement aucun acte contre la Con -`
&
ftitution & d'en interjetter appel au futar
Concile , fous quelque pretexte que ce puiffe
être ; voulons pour afferinir à l'avenir ladite
union , que les Actes precedemment faits ,
les appels cy devant interjettez , foient regardez
comme de nul effet ; Défendons à tous nos Sujets
de s'en fervir en quelque maniere que ce puiffe
être 2
& à nos Juges d'y avoir aucun égard
moyennant quoi , il ne pourra être permis d'a
gir en quelque maniere que ce foit , ni de faire
ou continuer aucunes pourfuites ou procedures
pour raifon defdits Actes & Appels , & de tout
ce qui s'eft paffé à ce fujet ; exhortons & neantmoins
enjoignons aux Archevêques & Evêques
de notre Royaume , de tenir la main à l'execu
tion des prefentes difpofitions dans l'efprit de
paix & de charité , dont ils Nous ont donné
tant de preuves en cette occafion ; Enjoignons
à nos Cours de Parlement d'obferver & de faire
obferver inviolablement tout le contenu en cet
Article , nommément en ce qui regarde les Ap ..
pels & de declarer nul & abufif tout ce qui
pourroit être fait au prejudice des Prefentes ;
N'entendons par le prefent Article donner at
teinte aux regles de l'Eglife & aux maximes du
Royaume fur le droit d'appeller au futur Concile.
>
III.
28
Voulant arrêter la licence avec laquelle on a
répandu divers Ecrits contraires à l'autorité &
à la doctrine de l'Eglife , & aux maximes inviolablement
obfervées dans notre Royaume ,
réprimer la temerité des efprits turbulents , indociles
& fans regles , qui fe font fervis des dernieres
difputes , foit pour renouveller les erreurs
de Janfenius , foit pour attaquer l'autorité de
DE SEPTEMBRE.
95
"
l'Eglife , foit pour autorifer des maximes contraires
à celles du Royaame , aux droits de l'Epifcopat
, & aux Libertez de l'Eglife Gallicane
ou des principes d'une Morale relâchée , Nous
voulons que les Ordonnances des Rois nos Predeceffeurs
, & les nôtres , concernant la Police ,
la Difcipline Ecclefiaftique , & l'execution des
Jugemens de l'Eglife en matiere de Doctrine ,
foient executées felon leur forme & teneur "
notamment les Lettres Patentes fur les Bulles
des Papes Innocent X. & Alexandre VII . contre
le Janfenifme , l'Edit du mois d'Avril 1665. fur
la fignature du Formulaire , les Lettres patentes
du 31. Aoult 1705. fur la Bulle de N. S. P. le
Pape , qui commence par ces mots VINE AM
DOMINI
SABAOTH. N'entendons neanmoins
qu'il puiffe être exigé directement ni indirectement
aucunes nouvelles Formules de foufcriptions
, à l'occafion des Bulles des Papes qui
ont été reçûes dans notre Royaume , n'étant pas
permis d'en introduire fans Deliberation des
Evêques revêtue de notre autorité .
IV .
,
Les Ordonnances , Edits & Declarations donnez
par les Rois nos predecefleurs fur la Jurif
diction Ecclefiaftique , & fpecialement l'Article
XXX. de l'Edit du mois d'Avril 1695. feront
executez felon leur forme & teneur & em
confequence , la connoiffance & le jugement de
la Doctrine concernant la Religion appartiendra
aux Archevêques & Evêques , & leurs jugemens
à cet égard feront executez contre toutes Communautez
& Perfonnes feculieres ou regulieres
exemptes ou non exemptes , fans que tout ce qui
pourroit avoir été fait ou entrepris au contraire,
pendant le cours des dernieres difputes , puiffe
nuire ni préjudicier à la Jurifdicton des Evêques
ni rien innover à cet égard . Enjoignons
$6 LE MERCURE
"
à nos Cours de Parlement & à tous autres nos ·
Juges conformément audit Article XXX . de
l'Edit du mois d'Avril 1695. de renvoyer aux
Evêques la connoiffance & le jugement de la
Doctrine , de leur donner l'aide dont ils auront
befoin pour l'execution des Cenfures qu'ils en
Fourront faire , & de proceder à la punition des
coupables , fans préjudice à nofdites Cours &
Juges , fuivant ledit Article XXX . de pourvoir
par les autres voyes qu'ils eftimeront convena ..
bles , à la réparation du fcandale & trouble de
l'ordre & tranquillité publique , & contravention
aux Ordonnances que la publication de ladite
Doctrine auroit pâ caufer.
V
Voulons que les Arrêts du 13 May 1668. &
f . Mars 1703. foient executez felon leur forme
& teneur ; & en confequence , défendons tresexpreffément
à tous nos Sujets de quelque état
& qualité qu'ils foient , de s'ataquer ni provo
quer les uns les autres par des termes injurieux
de Novateurs , Janfeniftes , Schifmatiques , Heretiques
& autres noms de party ; le tout à peine
contre ceux qui contreviendront à notre prefente
Declaration , d'être traitez comme rebelles
défobéiffans à nos ordres , feditieux & perturbateurs
du repos public. Exhortons , & neanmoins
enjoignons à tous les Archevêques & Evêques
de notre Royaume , de veiller chacun dans leur
Dioceſe › à ce que la paix & le filence que
Nous prefcrivons par ces Prefentes , foient charitablement
& inviolablement obfervez . Enjoignons
auffi à nos Cours de Parlement & à tous
nos Juges & Officiers chacun en droit foi ,
tenir la main à l'execution des Lettres Patentes
du 14. Fevrier 1714. & de notre prefente Declaration
, notamment au fujer des Livres & Libelles
; Faifons tres expreffes inhibitions & déde
fenfes
DE SEPTEMBRE. 97
1
*
Fenfes d'en compofer , vendre , debiter , ou au-,
trement diftribuer , fur tout de ceux qui feroient .
contraires au reſpect qui eft dû à Ñ. S. P. le
Pape & aux Evêques de notre Royaume , ou aux
Libertez de l'Eglife Gallicane , ou qui attaque.
roient directement ou indirectement ladite Conftitution
, l'Inftruction de 1714. & lefdites Explications
, ou qui feroient faites en faveur du
Livre des Reflexions Morales , & des Propofitions
condamnées & generalement tous ceux qui regarderoient
les conteftations qui viennent d'être
terminées , fur lesquelles Nous impofons un filence
general Voulons qu'à la Requête de nos Procureurs
Generaux & de leurs Subfticuts , il foit
informé contre ceux qui auroient compofé ,
vendu , debité ou autrement diftribué des Livres
, Libelles & Ecrits contraires aux Prefences ,
lefquels feront punis felon la rigueur des Ordonnances
, & lefdits Livres , Libelles ou Ecrits ,
fupprimez , même lacerez ou brûlez , s'ils y échet .
SI DONNONS EN MANDEMENT à nos amez & feaux
Confeillers les Gens tenans notre Grand Confeil
à Paris , que ces Prefentes ils ayent à faire lire ,
publier & enregistrer , & le contenu en icelles
garder & obferver felon leur forme & teneur
fans y contrevenir , ni fouffrir qu'il y foit contrevenu
en quelque forte & maniere que ce puiffe
être : CAR tel eft notre plaifir . DONNE' à Paris
le quatrième jour d'Août , l'an de grace mil
fept cent vingt , & de notre Regne le cinquième.
Signé , LOUIS ; Et plus bas , Par le Roy , LE Duc
D'ORLEANS Regent prefent PHELYPEAUX. Et
fcellée du grand Sceau de cire jaune.
و ا
Lue , publiée à l'Audiance , Registrée ès Registres
du Grand Confeil du Roy , pour être exe .
cutée , gardée & obfervée felon fa forme & teneur
, oйy & ce requerant le Procureur General
I
98
LE MERCURE RCURE
du Roy , & copies collationnées d'icelle feront envoyées
aux Bailliages , Senéchauffées & Prefidiaux
du Royaume qu'il appartiendra , pour y étre pareillement
lues , publiés , registrées & executés ?
Enjoint aux Subftituts du Procureur General du
Roy d'y tenir la main , & d'en certifier le Conseil
dans un mois , ſuivant l'Arrêt du Conseil de ce
jourd'hui vingt - trois Septembre mil sept cent
vingt. Signé , VERDUC . •
LETTRES PATENTES ,
PORTANT évocation & attribution
au Grand - Confeil de toutes les conteftations
nées & à naitre au fujet de
la Conſtitution UNIGENITUS ,
OUIS par la grace de Dieu Roy de Fran-
Lotce & de Navarre : A nos amez & feaux
Confeillers les Gens tenans notre Grand Confeil
à Paris , Salut. Après vous avoir envoyé le
14 de ce mois notre Déclaration donnée le 4
Aouft dernier , pour autorifer à proteger la conciliation
des Evêques de notre Royaume fur les
conteftations qui s'étoient élevées entr'eux à
l'occafion de la Conftitution de N. S. P. fe Pape ,
qui commence par ces mots , UNIGENITUS
DEI FILIUS , pour être par vous procedé à
f'enregistrement de ladite Déclaration La confiance
que nous avons en votre capacité & votre
experience dans les marieres Ecclefiaftiques ,
& les preuves que nous avons de votre zele
pour la tranquillité de l'Eglife & de l'Etat
Nous ont porté à vous attribuer la connoiffance
des conteſtations & differends furvenus ou qui
>
SILATE
DE
SEPTEMBRE.
LYON
DE
pourroient furvenir à l'occafion de ladite Com93
tution dans le reffort de notre Parlement de Pa
ris. A CES CAUSES , & autres confiderations
à ce Nous mouvans , de l'avis de notre trés cher
& tiés- amé Oncle le Duc d'Orleans Petit Fils de
France Regent ; de notre très cher & très-amé
Oncle le Duc de Chartres premier Prince de notre
Sang ; de notre très - cher & très - amé Coufin
le Duc de Bourbon ; de notre trés - cher & trésamé
Coufin le Comte de Charollois ; de notre
trés cher & trés amé Coufin le Prince de Conty ,
Princes de notre Sang ; de notre trés cher & trésamé
Oncle le Comte de Touloufe Prince Legitimé
, & autres Pairs de -France , Grands &
Notables Perfonnages de notre Royaume , & de
notre pleine puiffance & autorité Royale , Nous
avons évoqué & évoquons à Nous & à notre
Confeil , toutes les conteftations neés & à naitre
dans l'étenduë du Reffort de notre Cour de
Parlement , transferé à Pontoife , au fujet de
l'acceptation & obfervation de ladite Conftitu
tion & Lettres Patentes données en confequence ,
les oppofitions faites & à faire , les appels comme
d'abus interjettez & à interjetter , & generallement
tous les procés civils & criminels mûs
& à mouvoir à l'occafion de ladite Conſtitution ,
& icelles avec leurs circonftances & dépendancès
, avons renvoyées , & par ces Prefentes fignées
de noftre main , renvoyons pardevant vous,
vous attribuant à cet effet toute Cour , Jurif
diction & connoiffance dans le reffort de notre
dite Cour de Palemement , & icelle interdifons
à tous autres Juges ; voulons que les parties
puiffent le pourvoir pardevant vous par les voyes
de droit contre les Arrefts & Jugemens intervenus
ou qui pourroient intervenir Faifons tresexpreffes
inhibitions & défenfes à toutes perfonnes
de proceder ailleurs fur les conteftations
>
LA VILLE
I ij
100 LE MERCURE
-
à l'occafion de ladite Conftitution , & à tous
Juges d'en connoiftre , à peine de nullité des
procedures , caffation des Jugemens , trois mille
livres d'amende , & de tous dépens , dominages
& interefts . Enjoignons à notre Procureur
General en notredit Grand - Confeil , de tenir la
main à l'execution des Prefentes , & de Nous
informer des contraventions qui pourroient y.
être faites. SI Yous MANDONS que ces
Prefentes vous ayez à faire lire , publier & enregistrer
, & le contenu en icelles , garder ,
obferver , & faire executer felon leur forme &
teneur : CAR tel eft notre plaifir . DONNE'à
Paris le quinziéme jour de Septembre , l'an de
grace mil fept cent vingt , & de notre Regne
le fixiéme. Signé , LOUIS ; Er plus bas , Par
le Roy , LE Duc D'ORLEANS Regent , prefent.
PHELYPE AUX . Et fcellées du grani
Sceau de cire jaune.
Lies , publiées à l'Audience , & registrées és
Registres du Grand- Confeil du Roy , pour être
executées , gardées & obfervées felon leur forme
& teneur , ony & ce requerant le Procureur General
du Roy , & copies collationnées d'icelles feront
envoyées au Baillages , Senechquſſées & Préfidiaux
du Royaume qu'il appartiendra , pour
y être pareillement lies , publiées , registrées &
executées Enjoint aux Subftituts du Procureur
General du Roy d'y tenir la main , & d'en certifier
le Confeil dans un mois , fuivant l'Arrest
du Confeil de ce jourd'huy vingt - trois Septembre
mil fept cent vingt, Sigué , VER DUC.
DE SEPTEMBRE. 101
2. T
DISSERTATION
Sur les Dignitez hereditaires attachees
aux Terres titrées.
INSTITUTION des Dignitez en
France , a commencé prefqu'en
même temps que la Royauté ,
comme
neceffaires pour fervir
d'apuy & d'ornemens à la Souveraineté.
Les unes font réelles , les autres perfonnelles
.
Les unes purement Laïques , les autres
purement Ecclefiaftiques .
Mais il y en a de mixtes , c'est - à- dire
Ecclefiaftiques & Eaïques , & ce font celles-
là qui donnent aux Chanoines du fameux
Chapitre de Saint Jean de Lyon les
qualitez de Comtes ; aux Chanoineffes de
Remiremont celle de Comteffes , & à plufieurs
des Archevêques & Evêques de
France les qualitez de Princes , de Ducs
& Pairs , de Comtes , & d'autres titres de
Seigneuries.
Plus ces Dignitez font élevées , plus
elles honorent les Souverains , & ceux qui
en font revêtus , par ce qu'elles font la
recompenfe de la vertu qui fe les attire , &
I iij.
102 LE MERCURE
elles font pour ces derniers des monumens
perpetuels d'honneur & de gradation.
Comme elles émanent de la Souveraineté
, plufieurs y font retournées comme
à leur centre , par la voye de reverſion ou
de réunion.
Mais il en reste encore.un grand nombre
qui font toujours hereditaires & inſeparables
des grands Fiefs aufquels elles.
font attachées .
Prefque tous les Princes de l'Europe ont
'été dans cet ufage , & les principales Charges
ou Dignitez de l'Empire font encore
actuellement , & feront toujours poffedées.
par les Princes Electeurs , qui ont droit
d'élite eux mêmes les Empereurs , & de
les choisir parmi eux.
Celles de France ne font pas moins confiderables
, puifque les Princes du Sang.
même , le font toujours fait honneur d'en
eftre revêtus.
La preuve fe tire des fonctions des Pairs,
qui confiftent principalement dans l'inveftiture
qu'ils donnent au Roy de la
Royauté , dans l'habillement des ornemens
Royaux à fon Sacre & à fon Couronnement
, & à juger avec luy les diffe
rens de fes Vaffaux , & lorfqu'ils font féans
avec le Parlement , ils compofent la Cour:
des Pairs ; or ceci n'eft rapporté que pour
La Roque , p. 119. & 120
DE SEPTEMBRE. 103
-
juftifier que les Pairies en France font
réelles , le Roy fait bien des Ducs par Brevet
, mais il ne fait des Pairies que par
Lettres d'érection ; d'où il faut conclure
que la Dignité de Pairs eft attachée aux
Pairies ; elles paffent même aux femmes ,
puifqu'il y en a eu d'érigées tant pour les
mâles que pour les filles .
Cette realité fe prouve encore par le
rang des Pairs dans les grandes ceremonies
où ils font, chacun felon l'ancienneté
de fa Pairie , à l'exception des Princes du
Sang , aufquels Henry II . cn 1576. par
POrdonnance de Blois donna la préféance ,
& par plufieurs décifions données en faveur
des femmes , qui quoique naturellement
exclues des Offices , ont neanmoins
été jugées capables de Pairies , & en ong
confervé le rang :
SÇAVOIR ,
Une Ducheffe d'Aquitaine en 1141.
Une Comteffe de Toulouſe en 1150 .
Une Ducheffe de Bourgogne , & und
Comteffe de Flandres en 1210.
Une autre Comteffe de Flandre fa foeur ,
en 12-24.
Une Jeanne de France , Ducheffe de
Bourgogne & Comteffe d'Artois , pour la
Pairie de laquelle il fut rendu deux fameux
Arrefts en 1299 & 1318 , confirmez par
le Roy Philippe de Valois.
iiij.
104 LE MERCURE
Et une Marie de Bourgogne Comteffe
de Flandre & d'Artois , en 1477 .
L'on trouve encore que les érections de
Blois , de Dunois , de Soiffons , de Vertus,
& de Coucy , furent faites pour Valentine
de Milan , Ducheffe d'Orleans , en 1405.
Et que des Reines de France & d'autres
Princeffes ont eu des Pairies attachées à
la Maifon de Bourbon .
Les titres de Marquifats , Comtez &
Baronnies , que portent plufieurs autres
Terres après les Pairies , dénotent bien encore
la dignité & le rang qui y font attachez
, & qui demandent neceffairement
dans le poffeffeur une naffance noble de
fang , ou à fon defaut d'autres vertus éminentes
, qui le rendent capable de les poffeder
valablement.
Mais plufieurs de ces Terres titrées font
decorées d'une double Dignité , par Charge
ou Office d'honneur & d'ancienne inftitution
, dont l'exercice & les fonctions
s'étendent ou à l'adminiſtration de la Juftice
, ou au Service Militaire , ou à celui de
la Couronne ; & ces doubles Dignitez
font tellement attachées à ces Seigneuries ,
qu'elles en font une partie réelle , effentielle
, & infeparable , font inferées dans
les Actes de foy & hommage , aveus &
dénombremens , & fe tranfmettent conjointement
en pleine proprieté perpetuelle
DE SEPTEMBRE.
105
& hereditaire par fucceffion & par
vente.
* Il y avoit , par exemple , autrefois un
Office illuftre de grand Senechal de France
, dont la Dignité étoit annexée à la
Maiſon d'Anjou , l'on croit qu'il eft devenu
celui de grand Maître d'aujourd'huy.
Il paroît que le Roy Robert avoit conferé
à un Grifegonnelle Comte d'Anjou ,
l'Office de grand Senechal hereditaire de
ladite Province.
Qu'un Comte de Charny s'eft dit Sene
chal hereditaire de Bourgogne.
Qu'un Guillaume de Vergy y a exercé
pareillement en heredité l'Office de Maréchal.
Er que le Baron de Thil fut fait Connêtable
hereditaire de la même Province.
Le Hainaut a eu pendant long- temps
les Seigneurs de Verchin pour Senéchaux
hereditaires , c'eft aujourd'hui un grand
Bailliage poffedé par le PrinceDuc d'Aremberg
, & l'ancien Armorial general de la--
dite Province dreffé fous Philippe V. y
marque encore huit grands Offices here--
ditaires attachez à des Seigneuries .
Le Brabant en a eu quatre de la même
qualité ; fçavoir , le Baron de Rocheclair
pour Senéchal , le Baron Darfcot pour
Chambellan , le Marquis de Berg pour
* Dutilleul 343
106. LE MERCURE
Grand Veneur , & les Barons de Weſtmale
de Louvain , our Maréchaux . ( a )
*
Dans Papologie de la Maifon d'Orange ,
de l'an 1581 ; un Prince d'Efpinoy s'eft
donné le titre de Senechal perpetuel de
la Province d'Artois .
Un Sire de Joinville ( b) fut fait Senéchal
hereditaire de la Province de Champagne .
En Dauphiné le Baron de Clermont s'en
eft dit Connêtable hereditaire.
En Poitou , le Vicomte Daunay , Senéchal
hereditaire.
En Navarre , le Marquis de Cortais fut
fait Connêtable hereditaite.
Le Châtelain de Tonnay- Charente "
étoit Chambelan hereditaire de Xaintonge.
(c ) La Bretagne a cu pour Amiral
hereditaire le Vicomte Dufou en 1200 .
(d ) Pour grand Ecuyer hereditaire le
Seigneur de Blozac , & un Vicomte de
Refey prit la même qualité dans le procès
verbal de reformation de la Coutume en
1580.
En Languedoc un Baron de Mirepoix
de la Maifon de Levi , étoit Maréchal
hereditaire de la Foy par titres très anciens
de fa famille .
( a ) Guichardin , en fa Gaule Belgique.
( b ) La Roque , page 60 .
c) Anciennes Chartres de 1200 .
( d) d'Argentré , 1.11.de fon hift. ch . 389.
DE SEPTEMBRE. 107
Le Laonnois a eu auffi fes Officiers
hereditaires ; SCAVOIR ,
Un Lancelot de Boffu pour Maréchal ..
Un Seigneur de Lierval pour Vidame.
Er un Seigneur de Bligny pour Prevôt .
Celle de Nivernois , le Baron de la Ferté
Chauderon , pour Maréchal hereditaire.
Er le Gouvernement de la Franche-
Comté , étoit hereditaire dans la Maiſon
de Châlons .
On pourroit rapporter encore plufieurs
autres exemples du dehors du Royaume
comme de Lorraine , Angleterre , Caſtille,
Portugal , & Carinthie , ou les Dignitez
de Connêtables , Chambellans , Maréchaux
, Senéchaux , & d'Ecuyers étoient
pareillement hereditaires dépendantes des
plus confiderables Fiefs , & remplies par
des Sujets de haute naiffance.
Mais outre les Provinces de France ,
plufieurs Seigneuries particulieres & titrées.
ont eu auffi leurs Officiers feodaux , perpetuels
, & hereditaires , & les exemples
en font affez communs.
Le Fief de la Connêtablie hereditaire de
Châteaugontier fut adjugé par Arrêt du
Parlement du 13 Septembre 1578 à Mathurin
de la Rouffardiere , à caufe de la
Seigneurie de la Randiere à laquelle cet
Office Fiefé eft annexé hereditairement..
Le Comté du Perche a eu pour Sene
108 LE MERCURE
chal hereditaire , le Seigneur de la Puyfaye
, fuivant le Procès verbal de refor
matión de la Coutume dudit Comté.
Le Titre & Office de Châtelain de Be-
1 tify , appartient hereditairement au Seigneur
de Nery en Valois .
Celui de Maréchal hereditaire de Ponthieu
, eft au Seigneur de Pelerot & de
Lanieres.
Un Seigneur de Mouy s'eft attribué la
qualité de Châtelain perpetuel & herediraire
de Coucy en Picardie , à caufe d'uni
Fief qu'il poffedoit dans la dépendance du→
dit Coucy.
L'Office de Senechal Fieffé du Comté
d'Eu appartenoit autrefois au Fief de
Gauffreville , il a même été exercé
Seigneur d'O .
par un
La Vicomté hereditaire de Rennes en
Bretagne , eft à la Baronnie de Vitré.
L'Evêché de Bayeux a eu pour fon Ma
rêchal hereditaire un Seigneur de Champigny.
* Dans la Ville de Bezançon , il y avoit
encore lorfque le feu Roy en fit la conquête
, un Maréchal hereditaire de l'Empire
, auquel appartenoit le cheval ſur lequel
l'Empereur faifoit fon entrée dans
ladite Ville.
Memoires d'Olivier de la Marche , liv. premier
, ch. 7:
DE SEPTEMBRE.
"
109
Enfin l'Abbaye Royale de Saint Denis
en France , a eu auffi fes Officiers Feodaux
& hereditaires , unis aux Fiefs qui
relevent d'elle , notamment la Charge de
Maréchal Feodal , attachée à la Chatellenie
& Vicomté de Steins , qui donneroit au
Seigneur de cette Terre , le Commandement
des Troupes Militaires de ladite Abbaye
, fi elle étoit encore dans l'ufage d'en
mettre fur pied , pour le Service du Roy.
Tous ces exemples generaux & particuliers
font fuccinctement rapportez pour
-appuyer ceux de la Normandie , qui de
toutes les Provinces de France , eft celle
où l'ufage de ces Offices a été le plus
commun.
Un Sire d'Angerville en a été Maréchal
hereditaire,
Un Baron d'Enneval Vidame Heredi ,
taire.
Un Seigneur de Conches Porte - Guidon
ou Cornette hereditaire , à caufe de fadite
Seigneurie.
Un Guillaume Dupleffis de Lardeiviere
Reformateur hereditaire des Poids & Mefures.
Et un Pierre de Poiffy Seigneur de Goiiy,
Pannetier hereditaire.
A l'égard des grandes Dignitez de ladite
Province , comme de Connêtable , & de
Grand Chambellan hereditaires & perpeLE
MERCURE
tuels ; elles font encore actuellement exiftantes
& annexées au Comté de Tancarville
.
Il paroît qu'un Guillaume du Hommet,
un Guillaume Crefpin Chevalier Seigneur
d'Eftrepagny , & un Jean Dehotor Seigneur
de Beaumont le Richard , ont poffedé fucceffivement
celle de Connêtable .
a Un Auteur a voulu infinuer qu'en 1272
& 1274. le Parlement avoit défendu par
deux Arrêts aux Seigneurs de Tancarville
de prendre ladite qualité de Connêtable'
hereditaire ; mais cette citation incertaine -
ne donne pas d'atteinte au droit des Comtes
de Tancarville, car elle fe détruit par des
Titres authentiques , & tout à fait contraires
, même pofterieurs à ces prétendus
Arrêts , puifque l'on trouve , b que Jean
Vicomte de Melun , & Jeanne Crespin
fa femme à l'exemple de leurs predeceffeurs
, ont toujours pris la qualité de
Connêtable & de Chambellan hereditaires
de Normandie ; ce qui fe juftifie par deux
Arrêts de l'Eichiquier des années 1374-
& de 1400.
Que Guillaume d'Harcourt leur fucceffeur
, pris les mêmes qualitez en d'autres
Arrêts des années 1431. 1454. 1471. &
1474. fans qu'on leur ait oppofé les deux
a Chopin , liv. 3. du Domaine , tom, 26.
b La Roque , p、61.
'
DE SEPTEMBRE. III
anciens cy- deffus rapportez.
Et que par les Lettres Patentes de Sa
Majefté du mois de Juin 1718. accordées
à Monfieur le Comte d'Evreux & de
Tancarville , verifiées au Parlement de
Rouen le 18 Novembre 1719 ; Ces deux
Dignitez font attribuées fans oppofition
audit Comté de Tancarville.
( a ) Surquoi il fera ajoûté pour fortifier
ce petit Ouvrage recherché avec foin
qu'un Auteur très fameux rapporte encore
que les Comtes de Tancarville ont poffedé
fucceffivement l'Office de Grand Chambellan
de France , & l'ont prétendu hereditaire
dans leur Maifon.
Même que Jean bâtard d'Orleans , ayant
épousé Marie d'Harcourt heritiere de ce
Comté , poffeda ce même Office ; qu'ayant
paffé auffi à fon fils , il y fur troublé
par les brouilleries qu'il eut avec Louis
XI. ( b )
Mais que fi-tôt que fes defcendans
furent
rentrez en grace fous Louis XII . dont
ils étoient parents , ledit Office leur fut
rendu ; qu'ils en ont joui jufqu'au decès
du Duc François , après la mort duquel .
le Duc de Guife fon Tuteur en fut pourvû,
& que fes defcendans en joüiffoient encore
( a ) Loifeau , des . Officiers de la Couronne ,
liv . 4. chap. 2. P. 422.
( b ) Nota , En étoit pourvû en 1447 .
LE MERCURE
lorfque le Livre de l'Auteur fut mis en lumiere
en l'année 1609 .
( a ) Ce qui le trouve avoir une entiere
conformité avec ce qu'un ancien Hiſtorien
François avoit rapporté trente-fix ans auparavant
; car parlant des devoirs & fonctions
du Grand Chambellan , il dit ,
qu'aux hommages qui fe rendoient au Roy
en perfonne , le Grand Chambellan étoit
à fon côté , & avoit l'autorité de dire par
éerit ou de bouché au Vaffal ce qu'il devoit
au Roy , & qu'après avoir été ré
pondu oäi par le Vaffal , le Grand Chumbellan
parloit pour le Roy , difant au Valfal
qu'il le recevoit , & le Roy l'avoiioit.
(b) Surquoi il rapporte qu'ainfi en fut ufé
par le Vicomte de Melun , qualifié Grand
Chambellan , à l'hommage du Duché de
Guyenne , rendu en la Ville d'Amiens par
le Roy d'Angleterre au Roy Philippe de
Vallois.
(c ) Par Jean de Melun Comte de Tan .
carville , & Grand Chambellan , à un autre
hommage que rendit Jean de Montx)
Du Haillan , fol. 349.
b ) C'étoit Jean premier Vicomte de Melun,
qui fut fait Chambellan en 1318 , & mourut
en 1350 .
(c ) C'étoit Jean fecond , Vicomte de Mélun ,
qui fucceda à fon pere en 1351 , & mourut en
1382.
fort
DE SEPTEMBRE.
ΓΙΑ
fort Duc de Bretagne au Roy Charles V.
en lá Ville de Paris.
* Et par Jean bâtard d'Orleans , auſſi
Grand Chambellan , à un autre hommage
que rendit le Duc Pierre de Bretagne à
Charles VH.
Après quoi cet Hiftorien ajoûte , que les
Comtes de Tancarville ont tenu cet état fi
long- temps , que vulgairement on les appelloit
, les Chambellans de Tancarville
& que ce nom pourroit auffi leur avoir
été donné , parce que ceux de Tancarville
étoient en même temps Connêtables & Cham
bellans hereditaires de Normandie , comme
la chofe fe voit en leurs Tombeaux de
l'Abbaye du Jard près de Melun , & en
tous leurs Titres , Chartes & Monumens.
Il y a auffi d'autres Tombeaux des Com
res de Tancarville à l'Abbaye de S. Georges-
Parroiffe S. Martin de Beaucherville près
de Rouen , dont ils font Fondateurs , &
où l'on trouvera divers Titres concernans
fes rangs & dignitez annexez à la Comté
de Tancarville.
*
Cy.devant cité comme ayant épousé l'heri
tlere de Tancarville .
114
LE MERCURE
NOUVELLES ETRANGERES .
A Conftantinople le 15 Aouft 1720.
L
E rétabliſſement de la fanté du
Grand Seigneur a caufé une joie
univerſelle dans cette Ville , & dans
tout l'Empire Ottoman . Le Sultan a regalé
d'une velte de martre zibeline & d'une
bourſe de cinq cens écus un Medecin Juif
qui l'a traité pendant fa maladie. Le 8 dece
mois Sa Hauteffe alla à cheval , ſuivant
l'ancienne coutume , faire le Bairam dans :
la principale Moſquée * . Les Algeriens ,.
qui fous differens pretextes s'étoient excufez
jufqu'à prefent d'accepter la mediation
du Grand Seigneur , & d'executer fes ordres
, qui leur défendoient toutes fortes
d'hoftilitez contre les Sujets de la Republique
de Hollande , ont été enfin obligez:
de s'y foumettre. Ces difpofitions de la
Porte font efperer que la paix entre les
Etats Generaux & la Regence d'Alger ,
fera inceffamment renouvellée . On a d'au
tant plus lieu de l'efperer , qu'il eft arrivé
ici trois. Députez d'Alger , qui font chargez
des pouvoirs neceffaires pour traiter.
Autrefois l'Eglife. de Sainte. Sophie..
-
DE SEPTEMBRE.
avec M. Colliers Ambaffadeur des Etats
Generaux à la Porte , du renouvellement
de cette paix par la mediation du Grand
Seigneur. Ces mêmes Députez ont ordre
de demander la permiffion de lever quelques
Troupes dans l'étendue de l'Empire:
Ottoman , pour fervir contre le Roy de
Maroc ; & afin d'obtenir plus facilement
cette permiffion , ils arment quatre Vaiffeaux
pour apporter au Grand Seigneur le
tribut ordinaire. Ibrahim Baffa , qui arriva
ici le mois paffé de fon ambaffade à la
Cour Imperiale , a été obligé de faire fon
entrée en cette Ville incognito , à cauſe de
l'indifpofition du Grand Seigneur . Il a été
reçu très favorablement par le grand Vizir
, qui l'a gratifié d'une place de Vizir
de l'Empire Ottoman.
A Varfovie le 15 Septembre 1720.
Obats durant la Diete generale , qui eft
N prévoit qu'il y aura de grands detoujours
fixée au 30 de ce mois , quoique
le Roy prenne toutes les précautions ima
ginables pour les prévenir. Les petites
Dietes qui la precedent ordinairement ,
ont été rompues en partie , après de forres
conteftations entre les membres quii
les compofoient : c'est ce qui a engagé Sai
Majefté à faire expedier de nouveaux Uni-
Kiji
116 LE MERCURE
"
verfaux pour le renouement de ces Dietes.
Le Roy a mandé ici le grand Maréchal
de la Couronne , afin de trouver des
moyens d'ajuſter à l'amiable le differend
qui regne depuis fi long- temps , par rapport
au Commandement de l'Armée. Ler
Palatin de Maſovie eft attendu inceffam- ·
ment ici . On travaille à percer un côteau
près de cette Ville , pour y faire une éclufe
afin d'établir la communication des canaux
avec la Viftule.
A Petersbourg les Septembre 1720.
Es Vaiffeaux de guerre & les fregates
LES
du Czar fe tiennent toujours à Revel
& à Croonflot ; quoiqu'ils foient prêts à :
mettre à la voile , on ne croit pas cependant
qu'ils tiennent la mer cette année.
Le Prince de Repnin a reçu ordre de,
partager l'armée de terre qu'il commande..
On en doit envoyer une partie en Curlande,
& l'autre vers Smolensko .. On reçut ici
ces jours paffez un Exprès dépêché par le
General Galiczin , avec avis que le Vice-
Amiral Suedois Zeoblad , avoit attaqué
le 7 d'Août avec fon Eſcadre , nos Gale--
res qui étoient alors proche de Lameland
mais que quatre des Fregattes ennemies
ayant échoué fur un banc de fable , avoient
été prifes par nos Galeres : Que l'on y
DE SEPTEMBRE. IT7
& avoit trouvé 150 pieces de canons ,
400 hommes d'équipage , outre 200 tuez,
& 300 de bleffez pendant le combat.
Nous n'y avons perdu de notre côté que 80
hommes : cependant malgré cet avantage ,
le Czar a refolu d'envoyer l'Adjudant general
Romanosfki à Stokholm , pour y
complimenter le Roy fur fon avenement
à la Couronne , & y declarer en mêmetemps
la derniere refolution de Sa Majeſté
Czarienne touchant la Paix.
A Hambourg le 18 Septembre 1720.-
Comme la Cour Imperiale perfifte à vouloir que cette Ville envoye un
Bourguemeftre à Vienne pour y demander
excufe de ce qui eft arrivé à l'occafion
du dernier tumulte , on s'eft enfin reſolu
de donner cette fatisfaction à l'Empereur.
On mande de Coppenhague , que le Lord
Polwarth fe prepare à faire au premier
jour fon entrée publique dans cette Ca--
pitale , en qualité d'Ambaffadeur Plenipotentiaire
de S. M. Britanique : que le Vice-
Amiral Rozenpalm étoit attendu incef-
- famment de Norwege avec fon Eſcadre..
- Le Colonel Reichwey , nommé Envoyé de
S M. D. à la Cour de Vienne , n'a pas
encore reçû fes inftructions. Ees digues
ris LE MERCURE
de Dithmarre , qui avoient été rompuës ,
font entierement reparées. Le jour pour la
publication de la paix , entre les Rois de
Suede & de Dannemarck à Coppenhague,
eft fixé au 8 du mois prochain .
On apprend que M. Strick , Confeiller
Privé de Holftein eft arrivé à Hannovre ,
pour y negocier la reftitution de ce Duché.
Les deux Compagnies Danoifes , qui
étoient à Wilmar, font forties de cette der--
niere Ville ; mais on croit que les Trou
pes d'Hannovre
y refteront jufqu'à la tenue
du Congrès de Brunswick.
L
A Stokholm le 12 Septembre 17 20.
27
'Amiral Norris , qui eft en cette Cour,
& qui a laiffé les deux Flotes à Elfenap,
fe prepare à retourner en Angleterre avec:
fa Flote. On affure que le Baron de Bothmar
, qui arriva ici de Copenhague le
du paffé , eft venu propofer de la part du
Roi de la Grande Bretagne , fon Maître
, une fufpenfion d'armes , entre la
Suéde & le Czar de Mofcovie . M. Burmania
Ambaffadeur des Etats Generauxs'embarqua
ici le 24 du mois paffé à Bord
d'une Fregate , pour s'en retourner en Hollande
. Le Prince Guillaume de Heffe- Caffel
, frere du Roy , partit le deux de ce
mois pour retourner à Caffel. Il a avancé
DE SEPTEMBRE. 1.197
fon voyage fur la nouvelle de la naiffance
d'un Prince , dont la Princeffe fon Epoule:
eft accouchée. S.M. l'a accompagné jufqu'à
Eckolmzond avec quatrte Senateurs. La
Reine a regalé ce Prince de fon Portrait
enrichi de diamans , d'une épée & d'une
canne fort riche , outre une penfion de
6000 écus. Le Prince Dolhorucki , Ambaffadeur
du Czar à la Cour de Dannemarc
, a été rapellé . Il eft parti fur une
fregate , pour le rendre à Petersbourg. On
croit qu'il pouroit bien aller en qualité de
Plenipotentiaire au Congrés de Brunſwick.-
Les Députés de la Nobleffe & des Etats
de cette partie de la Pomeranie , qui doit
être reftituée à la Courone de Suede , ont
été admis à l'audience de leurs Majeftés . Ils
ont ordre de demander la confirmation de :
leurs anciens Privileges, & particulierement:
le droit de Nobleffe que le feu Roi Charles
XII . avoit accordé aux Magiftrats de
Stralfund..
A Vienne le 18 Septembre 1720.
Es Recrues pour les troupes de l'Enr
Lpereur ,le continuent avec beaucoup . ſe
de fuccès dans toute l'étendue de fes Païs
Hereditaires . Le 4 de ce mois , le Prince
Lubomirski partit d'icy pour la Pologne ,
afin d'affifter à la prochaine Diette gene
120 LE MERCURE
,
9.
rale. Le Comte d'Erdoedi , Evêque de
Neutra fe mit en chemin le 14 pour
Varfovie , avec la qualité d'Ambaſſadeur
de S. M. I. M. de Holtzen nouveau Miniftre
de Dannemarc , arriva le 6 en cette
Ville. On a publié une Ordonnance dans
tous les Pays Hereditaires , qui défend'
l'entrée des diamans venans de France &
des Pays étrangers. Il eft certain qu'il en a
déja été vendu pour plus de 100000.
Rifdales , & qu'il y en a encore en chemin
pour des fommes confiderables . L'Empereur
fit declarer le à la Diette de Ratisbonne
, qu'il fouhaittoit avoir le fentiment
des Electeurs , des Princes & Etats
de l'Empire , au fujer des Duchés de Tofcanne
& de Parme , au cas que la ligne®
maſculine vint à manquer . S. M. I. a fair
auffi demander à la Diette , fi l'Empire
étoit dans le deffein de nommer une Députation
pour le Congrès de Cambray ,
ou de lui envoyer un plein pouvoir . Le
Duc de Mekelbourg , qui eft toujours icy,
infifte fortement pour que l'on examine
les Memoires qu'il a prefentés contre les
procedures de la Commiffion Imperiale
établie dans fes Etats . On prétend qu'il
n'a pû jufqu'à prefent l'obtenir , à cauſe
des oppofitions du Prefident de la Cham-
Bre Aulique , qui en a fait voir les confequences.
On affure qu on agitera dans la
Diette
DE SEPTEMBRE. 1211
Diette des Etats de Hongrie , qui doit
commencer le 17 de ce mois , & dans
celle des Etats de Bohême , l'affaire de la
fucceffion , pour les Etats de la Maiſon
d'Autriche. Le Duc de Holſtein continuë
d'être fort content de fon féjour en cette
Cour.
L'Etat de Milan a fait porter fes plaintes
icy , touchant le grand nombre de troupes
qui font répandues en differents quartiers
de ce Duché elles fe montent à 22000.
hommes , en comprenant celles qui font
diftribuées dans le Mantoüan. L'Empereur
étant allé ces jours paffés à Fernfeldt chez
le Baron de Mikoſch , pour y voir la nouvelle
fabrique des Miroirs , en parut ſi ſatisfait
, qu'il fit preſent de 30 mille florins
à ce Baron .
L'Imperatrice Amelie particicy le 29
du paffé , pour fe. rendre à Afchau , où
elle restera quelques jours avec la Ducheffe
d'Hannovre fa mere , qui eft toujours dans
la refolution de continuer fon voyage vers
la France , quoique l'Empereur lui ait
fait propofer fa refidence au Château de
Lintz , ou dans quelqu'autre des Pays Hereditaires
de la Maifon d'Autriche , qui
lui plairoit davantage. Les Turcs continuent
à reparer les fortifications de leurs
Places frontieres , tant du côté de la Hongrie
, que de la Pologne & de la Mofco- .
L
122 LE MERCURE
vie. La Chambre du Commerce a eu avis
de Conftantinople & de Smyrne , que les
Sujets de l'Empereur y continuoient avec
fuccès le Commerce rétabli depuis le
dernier Traité , & qu'ils efperoient dans
la fuite en retirer des avantages encore
plus confiderables. Les Deputez de l'Electeur
de Cologne arrivés depuis peu en
cette Cour , font l'Abbé de Damas pour le
Clergé , le Baron de Horion pour la Nobleffe
, & le fieur Habinx pour le Tiers-
Etat. On le flate icy que le Cardinal de
Saxe-Zeitz , qui doit être à prefent à Ratisbonne
, terminera en peu de tems toutes
les conteftations qui fe font élevées entre
les Catholiques & les Proteftans. Le Comtede
Caunitz eft chargé de plufieurs Com--
miffions de S. M. I. qu'il doit exécuter
en differentes Cours de l'Empire.
On doit envoyer inceffamment des inftructions
que l'on a dreffées ici , pour les
deux Miniftres de l'Empereur qui doivent
fe rendre au Congrés de Cambray . M. le
Comte de Vindifgratz , Miniftre de cette
Cour à la Haye , ira en qualité de premier
Plenipotentiaire , & M. le Baron de Pentenriedder
, qui eſt à la Cour de France ,
en qualité de fecond Plenipotentiaire .
Les lettres écrites par un Marquis Italien
, fort injurieufes à l'Empereur , ont
été déchirées par le Prevôt Aulique , en
DE SEPTEMBRE. โฐ
prefence de ce Marquis qui a été enfuite
banni des Pays hereditaires.
A la Haye le 25 Septembre 1720.
ES Etats nommerent le 12 M. de
LHoornbeck, Penfionnaire de Rotter
>
dam ,, pour
Confeiller
Penfionnaire
de Hol
lande
, & M. de Wafnaer
- Starremberg
,
Prefident
des Confeillers
députez
de cette
Province
, pour Garde
du grand
ſceau ,
Stadhouder
des Fiefs de la même
Province
&
M. le Comte de Morville , qui a diſcontinué
fes preparatifs pour fon voyage de
Cambray , a de frequentes conferences avec
le Marquis Beretti-Landi. On remarque
que ce dernier s'abftient entierement de
voir le Miniftre de Portugal.
Les Conferences que le Comte de Sunderland
a euës avec les députez de l'Etat ,
ont roulé principalement fur les points
fuivans. 10. Le payement de ce que l'Angleterre
doit à cet Etat depuis la derniere
guerre. 2. L'affaire de la Religion dans
l'Empire. 3°. Le Commerce des Oftendois.
4. L'intereft de cette Republique , par
rapport au prochain Congrès de Cambray.
A l'égard du premier point , Milord
Sunderland n'a fait que réiterer la réponſe
qu'il avoit déja donnée à cette occafion à
M. Van- Borfelen Miniftre de L. H.P.à
Lij
724 LE MERCURE
Londres ; ajoutant quelques reproches fur
l'irrefolution & la lenteur de cette Repu
blique , à l'égard de fon acceffion à la
Quadruple Alliance .
Pour les déliberations fur l'affaire de la
Religion , elles ont été affez conformes à
la derniere reſolution de l'Empereur , dont
le Comte de Vindiſgratz a donné connoiffance
à l'Etat.
Quant au Commerce des Oftendois , ce
qui s'eſt paffé à ce sujet , eft tenu fi ſecret ,
qu'on n'en a aucune connoiffance. Milord
Sunderland partit le 15 pour fe rendre à
Hanover.
M. Hop , Ambaffadeur de L. H. P. à
Paris , a demandé & obtenu la permiflion
de venir faire un tour en ce païs. On ne
fçait fi c'est pour les affaires particulieres ,
ou celles de la Republique.
La Compagnie des Indes Occidentales,
qui a augmenté depuis peu fon capital de
plufieurs millions , a demandé à L. H. P.
la permiffion de faire une nouvelle foufcription
pour 3000 Actions.
Le Roy d'Eſpagne a declaré à M. Colſter,
Miniftre de L. H. P. à Madrid , que fes
armemens ne regardoient que les Maures.
On parle d'un projet , pour unir toutes
les Compagnies qui fe font formées dans
les Villes de Nort- Hollande. Il feroit encore
plus à propos d'en former une de toute
DE SEPTEMBRE. 125
la Province , fans quoi il fera difficile que
ces differentes Compagnies fe foutiennent
encore long-temps.
Le nouveau Confeiller Penfionnaire de
Hoornebeck , affifta le 16 à l'Affemblée
des Etats Generaux .
A Londres , le 28 Septembre 1720 .
Comércé
Es profits immenfes qui ont été faits
jufqu'à prefent dans le Commerce de
la Mer du Sud , attirent l'attention generale
, principalement depuis que l'on a détruit
les Babbles ou Projetteurs chimeriques 3
chacun s'empreffant à y avoir quelque part :
Les voleurs de grand chemin s'en mêlent
auffi de leur côté ; car ces fripons , fous pretexte
d'avoir vendu des Actions à+ 1000 .
pour livrer à l'ouverture des Livres , demandent
honnêtement à ceux qu'ils rencontrent
, non la bourfe , comme cy- devant
, mais qu'ils veüillent bien leur
la Difference.
payer
A ce propos , voici ce qui arriva ces jours
paffez à un bon Bourgeois de cette Ville ;
celui-ci revenant de fa campagne , fut
arrêté par un voleur , qui le pria de payer
la Difference qu'il lui devoit pour des
Actions fournies fur la Compagnie de la
Mer du Sud. Le Bourgeois furpris d'une
pareille demande , lui répondit , Monfieur,
apparemment que vous vous troïpez ; je
Liij
726 LE MERCURE
>
n'ay jamais tien acheté de vous ... Vous
l'avez fans doute oublié , repliqua le Voleur;
& lui prefentant en même temps un
piftolet de poche , lui dit ,
n'eft- ce pas là
la marque certaine que vous me donnâtes,
lors que nous conclûmes notre marché? ...
Ecoutez , Monfieur , ajouta le voleur fi
vous ne me donnez pas fatisfaction fur le
champ , je ferai obligé de me fervir de
cette Obligation qui pourroit vous eftre
funefte... Le Bourgeois épouvanté , lui
demanda pardon , & convint qu'il l'avoit
oublié , ayant fait ce marché avec trop de
précipitation. Mais , Monfieur , continua→
t-il , voilà dix guinées , en attendant que
je vous paye le refte , & foyez für que
je vous fatisferai la premiere fois que je
vous rencontreray . Le Voleur voulut bien
s'en contenter , & fe retira.
Il y en a d'une autre efpece , qui en
volant les paffans , leur difent , nous prenons
ceci comme un gage que nous vous
rendrons, lorfque vous nous payerez ce que
vous nous devez. Quoique les prifons
foient pleines de ces malheureux , & que
l'on en ait arrêté 8 la femaine paffée , il
femble que le nombre n'en diminuë pas
à la
campagne .
..
Le fieur Blunt , cy-devant Payeur de la
Lotterie des Claffes , & parent du Cheva→
lier Jean Blunt , un des Directeurs de la
DE SEPTEMBRE. 127
Compagnie de la Mer du Sud , le coupa
la gorge le 15 , & ne mourut cependant
que le 18. On raiſonne fort differemment
fur le fujet d'un pareil defefpoir. On en
eft d'autant plus furpris , qu'il laiffe par
ce coup plus de 300 mille livres fterlings.
Les Etrangers , après avoir vendu leurs
Actions fur la Compagnie de la Mer du
Sud , fur lesquelles ils ont fait des profits
très conſiderables , non contens de ce gain,
font acheter par des Juifs tout l'or-& l'argent
étranger , qu'ils font paffer journellement
dans leurs païs . Cette manoeuvre eft
caufe que le prix de l'argent a été au delà
de fix Schellings * l'once , & l'or à proportion.
De plus , ils tirent tout autant de
guinées & d'efpeces d'argent du Royaume
qu'ils peuvent en découvrir .
y
*
Il eft certain que l'extinction des Bubbles
a caufé des pertes infinies à ceux qui
avoient intereft . Plufieurs Seigneurs , &
perfonnes de diftinction y avoient part ,
ainfi qu'un grand nombre d'Agioteurs qui
ont manqué. A l'égard des Boutiquiers , &
.des Artifans , qui n'avoient que 100 , 200
& 300 liv. fterlings , ils font entierement
ruinez. D'un autre côté , la Compagnie
d'Affurance de Londres , dont les Actions
étoient hauffées jufqu'à 170 , & qui font
* Le Schelling eft de douze fols , valeur intrinfeque.
L iiij
128 LE MERCURE
enfuite baiffées à 5s , a achevé de porter
la defolation parmi tous ces gens - là.
L'Affemblée generale approuva le 19 le
Dividend que les Directeurs avoient refolu
de faire ; fçavoir , de 30 pour 100 à Noël
prochain , & enfuite so pour cent annuellement
pendant douze ans ; & fur la prepofition
qui a été faite , fi on accorderoit
à ceux qui ont foufcrit dans la derniere
foufcription , le pouvoir de retirer leurs
-annuitez , comme plufieurs le fouhaittoient
, cette propofition a été rejettée.
1
La Compagnie des mines de cuivre ,
dont le Duc de Richemond eſt Gouverneur
, a tenu une affemblée generale ,
dans laquelle ce Seigneur declara par un
difcours , qu'après avoir confulté les plus
celebres Avocats fur la validité de leurs
Chartres , ils avoient opiné qu'elle étoit
bonne & valable. Sur cette affurance
l'Affemblée refolut de continuer fon travail
avec plus de diligence qu'auparavant ,
afin de procurer de plus grands avantages
à la Compagnie.
Les Directeurs de la Compagnie des
Indes Orientales , font convenus d'équiper
au plutôt neuf Vaiffeaux , pour aller
faire le nouvel établiffement qu'ils ont
refolu fur la côte du Sud d'Affrique. Ils
fe flatent toujours qu'ils y trouveront une
mine d'or fort abondante , fuivant les
DE SEPTEMBRE. 129
Memoires qu'on leur en a fournis . Ces
mêmes Directeurs ont fait fretter de plus
17 Vaiffeaux pour envoyer à Maderas ,
Bingal , Bombé , & autres Places . L'Adiffon,
le Darmourth , & le bon Compagnon ,
feront bien-tôt prêts à faire voile. Les
deux premiers font deftinez à tranſporter
quelques Compagnies de Soldats avec des
Officiers , pour aller reprendre Bencolen ,
dont les Indiens fe font rendus maîtres
depuis quelque temps , après avoir maffacré
une grande partie de la garniſon que
la Compagnie y entretenoit.
Les Directeurs de la Compagnie de
York-Buildings ou Luftrins , ayant donné
des affurances au Gouvernement , qu'ils
fe conformeroient exactement pour la regie
des affaires de cette Compagnie , aux
ordres qui leur font prefcrits , & qui font
conformes à la loy , les Seigneurs Jufticiers
ont revoqué l'ordre qu'ils avoient
donné au Procureur General de les pourfuivre.
Le Comte de Galloway , François de Nation
, qui mourut le 14 , a établi un fonds
pour payer les penfions qu'il faifoit à plufieurs
François refugiez . Il a ordonné aux
Executeurs de fon Teftament , qu'auffitôt
qu'ils auront nouvelle de la mort de quelqu'un
de fes Penfionnaires , ils remplif
fent fa place de quelque autre Refugié qu'ils
jugeront à propos .
130 LE MERCURE
M. de Crawford, Secretaire de l'Ambaffade
d'Angleterre à la Cour de France auprés
du Comte de Stairs , fera continué , fuivant
toutes les apparences , dans ce pofte , pour
veiller aux affaires d'Angleterre pendant
l'abſence de M. le Chevalier Robert Sutton.
On travaille actuellement à cinq Caroffes
magnifiques , & à de riches Livrées ,
que l'on dit être pour le Comte de Stanhope
, le Lord Carteret & M. Sutton , nommez
Ambaffadeurs & Plenipotentiaires de
S. M. B. au Congrés de Cambray.
Le Lord Polewarth , Envoyé du Roy à
la Cour de Danemarck , a efté revêtu par
S. M. du caractere de fon Ambaffadeur à
la même Cour.
Les Lettres de Leverpool & d'Wighan
dans le Comté de Lancastre , portent qu'un
grand nombre de Païfans travaillent à rendre
navigable la Riviere de Douglas ; ce qui
fera d'un très grand avantage pour le Pays,
à caufe du charbon & de la pierre que l'on
en tirera par cette Riviere.
Le Parlement a efté prorogé par commiffion
des Seigneurs Jufticiers jufqu'au
premier Novembre prochain , & celui d'Irlande
, jufqu'au 4. Avril 1721. On a pu
blié ici la Proclamation , pour obliger tous
les Vaiffeaux venans de la Mediterranée , à
faire quarantaire , avant qu'ils puiffent être
reçus dans aucun licu ou Port de la Grande
Bretagne .
DE SEPTEMBRE. 137
On écrit de Bristol , que le Charles
Snow , Vaiffeau chargé pour Opporto , a
été pris dans fon paffage par un Pirate de
Salé , mais que tout l'Equipage avoit cu le
bonheur de fe fauver à terre. D'autres Pirates
de Salé fe font auffi emparé de qua→
tre Vaiffeaux appartenans à nos Marchands,
dont un a été repris par l'Experience , Vaiffeau
de Guerre , & mené à Gibraltard ;
mais les Maures, en l'abandonnant , en ont
enlevé l'Equipage qu'ils ont conduit en
efclavage. Le refte des Vaiffeaux de la Compagnie
des Indes Orientales eft arrivé dans
nos Ports richement chargés.
Le Chevalier Leak , ci- devant Amiral ,
& Commandant en chef la Flote , mourat
au commencement de ce mois à Grenwich
Le Duc de Liria , fils du Duc de Berwich,
doit arriver ici dans peu, pour y voir le Duc
& la Ducheffe de Marlbourough , la Ducheffe
de Tyrconnel , & Madame Godefrey
fa grand'mere. Les deux filles du fameux
Juif Da Cofta ont efté mariées , l'une au
Docteur Menzes , Medecin Juif , & l'autre
à unfrere du Baron Swartz , qui paffe pour
le plus riche Juif de l'Europe.
On a eu la confirmation de la trifte nou
velle que douze Vaiffeaux Marchands de
la Flote venant de la Jamaïque , étoient
peris avec le Vaiffeau de Guerre nommé le
Mille -fort , qui leur fervoit de convoi. Cette .
932 LE MERCURE
perte
n'eft
pas fi grande
pour
nos Mar- chands
, que pour la Compagnie
d'Affurance
, qui avoit
affuré
fur ces Bâtimens
foixante
& douze
mille
livres
Sterlings
.
Il y a quelque tems que des Marchands
de cette Ville envoyerent à Liſbonne un
projet d'érection d'une Compagnie de Commerce
dans tous les Pays de conquêtes des
Portugais , à la referve du Brefil. Ce projet
avoit efté renvoyé ici fur quelques difficultez
que cette Cour leur fit ; mais on
prétend que ces obftacles ont efté levez , &
qu'il a été derechef envoyé à Lisbonne ,
où l'on fuppofe qu'il a enfin été approuvé.
Comme nos Negocians ont une grande
idée de cet établiffement , ils ont fait remettre
depuis peude groffes fommes à leurs
Correfpondans à Lisbonne ; ce qui a fait
confiderablement hauffer le Change.
Les Lords Jufticiers ont envoyé des ordres
au Comte de Portmore Gouverneur
de Gibraltard , & à tous les Officiers des
Regimens qui y font en garnifon , de fe
rendre inceffamment à leurs poftes. On
affure même que deux Regimens ont ordre
de s'embarquer pour aller renforcer cette
garnifon, & celle de fle de Minorque. Le
Chevalier Jean Norris eft attendu dans pen
avec ſon Eſcadre de la Mer Baltique ; la faifon
avancée ne lui permettant plus de rien
entreprendre contre la Flotte Mofcovite ,
DE SEPTEMBRE. 133
*
ni de faire de tentatives fur aucun Port dé
pendant du Czar.
A Madrid le 16 Septembre 1720.
Es,troupes qui ont marché de Catalogne
& d'autres Provinces , font touttes
arrivées aux environs de Cadix , où on
équippe en toute diligence les Vaiffeaux
du koy , qui y font en tres petit nombre.
On y attend auffi des Vaiffeaux Hollandois-
& Anglois. Le ; du courant il arriva à Malaga
un convoi de plus de 80 Bâtimens.
tant Vaiffeaux , Barques, que Tartanes , eſ-
⚫ cortez de fix Galeres d'Eſpagne , qui venoient
de Barcelonne , Alicante & Cartagene
, chargés de troupes & de munitions :
ils ont laiffé deux Regimens à Malaga , &
ont pourfuivi leur route à Cadis . Le Marquis
de Lede arrivé ici de Sicile le 7 , a été
reçu de S. M. avec beaucoup de témoignage
d'amitié ; il a été fait Grand d'Efpagne
de la premiere Claffe , & il eft parti
pour Cadis le ro , avec pouvoir abfolu de
pourvoir à tous les emplois de l'Armée
qui feront vaquans : il va commander dans
cette nouvelle Expedition , dont on ne'
fçait pas encore le deffein , quoiqu'il ſoir
apparent qu'il regarde la Barbarie ou le
Royaume d'Alger.
On parle de former fur les Côtes d'An134
LE MERCURE
daloufie un gros Corps de troupes , qui feront
commandées en chef par le Prince de
Cellamare , qui aura fous lui quatre Lieutenans
Generaux,
La Cour a eu avis que le dernier Convoi
parti le 13 Juillet pour Ceuta , avoit
fait fon debarquement à la faveur du Canon
de nos Vaiffeaux , & que ce ſecours
étoit entré fort heureufement dans la Place,
malgré le feu de deux Batteries que lés
Maures avoient dreffées fur une éminence
proche du rivage , foutenus de 3000 hommes
de leur Infanterie poftée derriere des
rochers.
M. Martinet , qui a commandé notre
Efcadre dans la Mer du Sud , eft regardé de
fort bon oeil par L. M. C.
On a appris par un Courrier extraordinaire
dépêché de Cadix , que l'Eſcadre de
charge , commandée par D. Balthafar Guevara
, étoit arrivée à la Havanne le premierde
May , & qu'aprés avoir executé les ordres
de S. M. elle avoit mis à la voile le 27
du mois de Juin pour la Vera- Crux , d'où
elle eft inceffamment attenduë.
On écrit de Lisbonne que la Flote de
Fernambuque , compofée de plufieurs Bâtimens
chargez de tabac , de fucre , & de
marchandiſes des Indes , y étoit arrivée ,
aprés trois mois de navigation . Ces mêmes
Lettres ajoutent que M. de Mornay , Ar-
#
DE SEPTEMBRE. 135
chevêque de Befançon , & Ambaffadeur de
France en cette Cour , étoit parti de cette
Capitale , pour retourner en France , après
avoir pris congé de L. M.
Le Marquis de Pozzo- Bueno partit le premier
de ce mois , pour le rendre à Hannover
auprès du Roy de la Grande- Bretagne
en qualité d'Ambaffadeur de S. M. C.
Le Prince des Afturies affifte à tous les
Confeils qu'on tient en prefence du Roy:
Il est mort en cette Ville une Religieuſe du
Monaftere d'Arouça de l'Ordre de S. Benoift
, âgée de 122 ans.
ANaples le 8 Septembre 1720.
E Duc de Monteleon a fait faifir tous
Lesbiens de tous les effets des Siciliens
qui ont fuivi les Efpagnols , & il a
fait mettre en prifon les habitans qui avoient
commencé à s'emparer des biens abandondonnez
. Il a fait auffi publier une Ordonnánce
par laquelle ceux qui ont en leur
poffeffion quelques effets appartenans aux
Siciliens , qui le font refugiez en Affrique ,
feront obligez de les declarer fous des peines
tres rigoureuſes .
Les précautions pour empêcher que le
mal contagieux ne fe communique dans les
terres de ce Royaume , ont été redoublées ,.
Les dernieres Lettres de Sicile confir
136 . LE MERCURE
ment que le Comte de Mercy en étoit parti
avec les Troupes Allemandes , pour paffer
en Italie : celles qui restent en Sicile, feront
commandées par le General Zumzunghien.
Il est arrivé ici un Exprés du Grand Duc
de Toſcane , pour informer le Cardinal Vi.
ceroi qu'il avoit achevé de payer le refte
des contributions exigées par l'Empereur ,
& pour demander en même tems que les
troupes Allemandes debarquées à Orbitello ,
ne traverfaffent point ſes Etats.
A Rome le 15 Septembre 1720 .
Cardinal Altham fit fon entrée
pu-
Lblique le 18 du mois paffé dans cette
Ville. L'on y remarqua avec plaifir les Caroffes
du Cardinal Acquaviva ; ce que l'on
regarde comme une marque de reconciliation
entre S. M. I. & le Roy Catholique.
Cette Entrée parut beaucoup , à cauſe du
grand nombre des Domestiques tant à pied
qu'à cheval de ce nouveau Miniftre ; joint
a cela que la plupart des perfonnes de diftinction
, qui avoient envoié audevant de cette
Eminence , ordonnerent que leurs Caroffes
à fix chevaux fuivroient les fiens . Il y avoit
à chaque côté de celui dans lequel ce Cardinal
étoit , fix Heiduques , trois à chaque
portiere. Cette marque de diftinction lui a
été accordée en faveur du Miniftere dont il
eft
DE SEPTEMBRE. 137
eft chargé. Quelques jours auparavant le
Cardinal De -Giudice avoit remis l'adminiſtration
des affaires de l'Empereur , & avoit
configné tous les papiers concernans ce Miniftere
au Cardinal Altham . Le 26 ce nouvel
Ambaffadeur de l'Empereur eut pour la
premiere fois Audience de S. S. à qui il
prefenta fes Lettres de creance . Ce Miniftre
infifta de nouveau fur l'élevation du Pere
San- Fuegos au Cardinalat , & en même
rems fur l'érection de l'Eglife Epifcopale de
Vienne en Archevêché.
Le Duc de Bracciano a perdu ſa fille unique
âgée de dix- huit mois ; il gagne " par
cette mort la dot de 100 mille Ecus que fa
femme lui avoit apportée en mariage ; ce
qui pourroit bien donner lieu à quelqu'autre
mariage.
Le Prince & la Princeffe de Palestrina
font allés à Lucques y prendre les Bains ,
dans l'efperance d'obtenir par ce moyen des
énfans.
Le Prince & la Princeffe de Civitella ont
été aux Bains de Nocheres pour le même fujet
; cette derniere ayant déja plufieurs an
nées de mariage , fans avoir encore pû don
ner aucun figne de fécondité.
Le Pape a dépêché un Exprès à Vienne ,
avec de nouvelles inftructions pour M.
Alexandre Albani , qui doit fe rendre au
Congrès de Cambray , pour y menager les
interefts du S. Siege.
M.
138 LE MERCURE
On a affiché un nouveau Placard , por
tant que toutes les perfonnes qui fortiront
de cette Ville & de l'Etat Ecclefiaftique ,
n'y pourront rentrer fans donner des certificats
valables d'une fanté parfaite . Les
Marchandifes & les effets qui viendront
des Etats voiſins , n'auront pas plus de pri
vilege . On eft ici dans une fi grande crainte
que le mal contagieux ne penetre juſque
dans cette Capitale , que non content d'avoir
interdit tout commerce avecla proven
ce , le Languedoc & le Lyonnois , on l'à
même défendu avec Genes . On a établi dans:
un des Fauxbourgs de cette Ville un Laza
ret , & on parfume avec grand foin toutes,
les Lettres de ces Provinces .
Le Pape celebra dernierement la Meffe
dans l'Eglife de S. Roch , il y eut un con
cours infini de peuples. La ceffation du
Commerce avec divers Etats caufe un tres
grand préjudice à cette Ville..
On mande de Civitavechia , qu'un Vaiſ
feau François venant de Marſeille , s'étoit
prefenté pour entrer dans le Port : le Gou
verneur lui en a refufé l'entrée , fur ce qu'il
ne put pas produire un Certificat de fanté.
Les Armes de l'Empereur ont été mifes.
fur la porte du Palais qu'occupe le Cardimal
Altham , qui a reçu depuis fon entrée
les vifites des Cardinaux , & entre autres.
celle du Cardinal Acquaviva , accompagné
DE SEPTEMBRE. F39
des Auditeurs Espagnols de la Rote.
M. Grimaldi , Nonce en Pologne , a été
nommé pour aller à la Cour de Vienne avec
la même qualité.
Le Procès du Cardinal Alberoni eſt toujours
au même état.
Depuis peu , l'on voit dans le Public un Etat
general des fommes que lefeu Roy Louis
XIV. devoit à fa mort , arrivée le premier
Septembre 1715-
CE
Ette Piéce , felon toute apparence
fera trouvée d'autant plus curieufe
par ceux qui aiment l'ordre & l'arrangement
des Finances , qu'elle paroît avoir
été composée avec beaucoup de foin &
d'exactitude , & par ordre fuperieur , puifqu'elle
renferme une partie des principales
operations de la Regence , & qu'il eft dit
que la verification en a été faite au Confeil,,
ce qui la rend d'autant plus digne de foy ,
& exempte de critique : car l'on n'auroit
pas fouffert qu'elle fût rendue publique par
Pimpreffion , fi elle n'étoit entierement
conforme à la verité.
per
L'on n'ignoroit pas que ces dettes ne
fuffent tres- confiderables ; mais peu de
fonnes en fçavoient la nature & la con
Mij
+140 LE MERCURE
fiftance ; plufieurs même par erreur
croyoient qu'il n'y en avoit point d'autres ,
que celles qui avoient été réduites & converties
en 250. millions de Billets de l'Etat.
Mais le Memoire qui paroît aujourd'hui ,
nous fait voir qu'il s'en eft trouvé beaucoup
au- delà , qui n'avoient pû être comprifes
dans cette reduction , ni être plus
promtement liquidées .
D'ailleurs les Finances ordinaires , les
Fermes du Roy , & les autres Revenus de
Sa Majeſté , ſe trouvant prefque abſorbez
par toutes fortes de Rentes , Gages d'Officiers
, Augmentations de Gages , & autres
Charges de Finances , l'on a été indifpenfablement
obligé d'en liberer l'Etat par
la
voye des fupreffions.
Et la neceffité de foulager les Sujets ,
& de rétablir le Commerce au- dedans &
au-dehors du Royaume , a donné encore
lieu à la revocation & extinction d'uné
infinité de nouveaux droits , qui n'avoient
été établis par le feu Roy , que pour fe
procurer des fecours dans les deux dernieres
guerres qu'il a foutenues.
Toutes ces grandes operations font le
fruit des travaux de S. A. R. Monſeigneur
le Regent , qui continuellement appliqué
au foulagement de l'Etat , la liberé de fes
dettes , & de la plus. confiderable partie.
de les charges.
*
DE SEPTEMBRE. 140
Ces fuppreffions & exinctions ont à la
verité groli les rembourſemens , mais elles
ont auffi produit un bien infini à tous les
Sujets , & les moyens naturels dont on
s'eft fervi pour y fatisfaire , ( après que
tous les précedens mis en ufage ont manqué
) font encore l'effet de les lumieres
fuperieures , & c'eſt à les bontez & à les
foins que les Peuples font aujourd'hui
redevables de tous les foulagemens & avantages
qui paroiffent par cet état leur avoir
été procurez .
•
Comme il eft répandu dans le Public ,
cela nous difpenfe de l'inferer icy en fom
entier ; mais ce que nous en allons rapporter
, fuffira pour donner une jufte idée
de ce qu'il contient , à ceux qui ne l'ont
pas vu.
Suivant cet Etat , une partie de plus de
fix cens millions de differentes dettes , a
été reduite & convertie dès l'année 1716
à 250. millions de Billets de l'Etat qui ont
coûté des interêts au Roy jufqu'à la fin de
1718.
Celles des Vivres , Fourrages & Etapes.
étoient d'environ cent foixante-fept mil-.
lions , & ont été liquidées à cent huit millions
deux cens fix mille fept cens quavinge
dix-neuf livres .
Celles dûës, aux Recettes generales des
Finances en fix parties , pour Billers.
142 LE MERCURE
Avances , & Charges arrierées , le font
trouvées monter à cent deux millions fix
cens quarante - deux mille quatre - vingt
neuf livres.
"
Celles dûes aux anciens Fermiers Ge
neraux des Baux de Dufauffoy , Yfambert ,
Nerville & Lambert , en cinq parties
pour avances & fonds de Charges arrierés ,
le font trouvées monter à quarante quatre
millions fept cens deux mille quatre cens
trente & une livres.
Celles dues aux Sous Fermiers en trois
parties , pour avances , indemnitez & non
jouïffances , fe font trouvées monter à trois
millions fix cens cinquante - quatre mille
quatre cens quatre- vingt treize livres.
Celles dues aux Traitans & Compagnie
de Gens d'Affaires , en plufieurs parties
reduites à trois , pour avances , fe font
trouvées monter à vingt- fix millions cinquante
mille huic cens foixante-fix livres,
Les parties de dépenfes arrierées , & daës
aux Treforiers des Bâtimens , de l'Artillerie
, des Fortifications & de la Marine
fe font trouvées monter à fix millions cinq:
cens vingt-fept mille cent foixante & qua
torze livres.
>
La finance des alienations de Droits &
Affranchiſſemens de Tailles revoquées en
diverſes parties , reduites à deux Articles ,
monte à quatorze millions deux cens qua
DE SEPTEMBRE. 143
Y
tre-vingt- quatorze mille quatre-vingt cinq
livres.
>
Le capital des Rentes perpetuelles éteintes
tant fur l'Hôtel '9 de Ville de Paris
qu'autres , en trois articles , s'eft trouvé
monter à neuf cens foixante- quatre millions
fix cens foixante- quatre mille fept:
cens foixante-quatre mille fept cens quatre-
vingt trois livres ..
Les Affignations fur le Trefor Royal
reftans à payer pour matieres d'or & d'ar
gent venues de la Mer du Sud en 1709%
étoient de deux millions..
La finance des Augmentations de Ga +
ges , créés depuis le premier Janvier 16-83.
& fupprimés par divers Arrêts du Confeil,,
s'eft trouvée de deux cens millions de livres
en capitala
Par quatre-vingt dix -neuf Edits , Decla
rations du Roy & Arrêts du Confeil , inferés
audit Etat , il paroît qu'il a été fup ..
primé un tres- grand nombre de toute
forte d'Offices dans toute l'étendue dus
Royaume, Cours , Sieges , & Jurifdictions,
tant de Police , que de Justice & Finan
ses , & que les finances liquidées , ou à
liquider de ces Offices , montent en total
à deux cens cinquante- quatre millions trois
sens foixante- dix-fept mille trois cens quasante
& une livres.
Er toutes les fommes cy- deffus jointes
144 LE MERCURE
'
eniemble , compofent un total de dix - neuf
cens foixante & dix - fept millions cent
yingt mille foixante & une livres .
Qui coûtoient au Roy chaque année en
rentes ou interêts , quatre- vingt neuf millions
neuf cens quatre - vingt trois mille
quatre cens cinquante -trois livres.
Le même Etat contient un autre Chapitre
en dix fept Articles de Droits éteints
& fupprimez depuis la Regence , & dont
les Sujets du Roy fe trouvent foulagez &
déchargez au moyen defdites fuppreflions,
le produit defquels Droits a été verifié , &
s'eft trouvé monter année commune à trente
cinq millions fix cens quatre - vingt - deux
mille deux cens quatre - vingt quatorze livres.
Il en contient encore un autre de plufieurs
autres Droits auffi éteints & fupprimez
en faveur du Commerce , dont les
produits au jufte n'ont pû être verifiez .
Un autre Chapitre des Impofitions
dont Sa Majefté a fait remife à fes Sujets ,
& les en a tenus quittes & déchargés par
divers Arrêts , lefquelles fe font encore
trouvées monter à cinquante deux millionscent
foixante & dix - huit mil cinq cens
quarante- fix. livres.
Et enfin un quatriéme chapitre de plu
fieurs autres avantages que Sa Majeſté a
encore procurés à ſes Sujets par divers: Ar-
Lefts
DE SEPTEMBRE 145
refts du Confeil , particulierement pour le
Commerce , dont le Profit & le Benefice
ne peuvent être évalués.
Enfuite vient la Recapitulation generale
dudit état , de laquelle il refulte ,
1° Que les Droits éteints pendant la
Regence à la décharge des Peuples monrent
par an , à trente cinq millions fix
cens quatre vingts deux mille deux cens
quatre vingts quatorze livres.
2° Qu'il y a eu plufieurs autres Droits ,
auffi éteints , reduits ou moderez à la décharge
& en faveur du Commerce , dont
l'on n'a pu verifier ni fixer les produits
par année.
Et que les impofitions remiſes aux Peuples
des années anterieures à 1719 fe font
trouvées monter , à cinquante deux millions
, cent foixante & dix-huit mille , cinq
cens quarante- fix livres.
Que des dix neuf cens foixante & dixfept
millions , cent vingt mille foixante &
une livre de dettes capitales , qui coutoient
au Roy annuellement en gages ,
augmentations de gages , taxations , rentes
, interefts , ou autres charges de Finances
, quatre vingts neuf millions , neuf
cens quatre vingts trois mille quatre cens
cinquante trois livres , la Compagnie des
Indes , en a payé ou doit payer, feize cens
millions, qui a trois pour cent , ne cou-
N
146
LE MERCURE
teront à Sa Majefté , que quarante - huis
millions
Plus , qu'il en a été acquitté par le
Trefor Royal en differentes parties , depuis
la mort du feu Roy , jufqu'au premier
Septembre 1719 , trente fept millions
deux cens trente un mille deux cens
quatre vingts dix - neuf livres.
Au moyen de quoy , le Roy ne doit plus
en principal que trois cens trente-neuf millions
huit cens quatre - vingts huit mille ,
fept cens foixante- deux livres , qui au denier
so ne couteront d'intereſt que fix
millions fept cens quatre- vingts dix-fept
mille fept cens foixante & quinze livres.
"
Et que par confequent le Roy ne payant
plus , pour toutes les dettes de l'Etat , que
cinquante quatre millions fept cens quatre
vingts dix-fept mille fept cens foixante &
quinze livres , Sa Majesté épargne par ans
née trente cinq millions , cent quatre-vingts
cinq mille fix cens foixante & dix - huit
livres , dont les Etats du Roy ou des Finan
ces feront de moins chargés pour l'avenir ,
Il fe trouve encore à la derniere page
une autre Recapitulation' dans la forme
qui fuit.
Sommes dont les Etats du
Roy doivent être déchargés
par année
,
Sommes ou droits dont les
35185678.A
DE SEPTEMBRE. 142
Sujets du Roy , font foulagés
tous les ans ,
Somme dont les Revenus .
du Roy font augmentez
depuis la Regence , fçavoir
Fermes generales , Aides
& Domaines de 10200000 .
de
Ferme du Tabac .
2020000
Et Fermes des Domaines
& Salines de Lorraine , Alface
, & Franche - Comté
de 230000
Par confequent les Finan-
`ces du Royaume , depuis la
Regence de Monfeigneur le
Duc d'Orleans , font ameliorées
par année de quatrevingts
trois millions trois
cens dix- fept mille neuf cens.
foixante & douze livres >
су
356822940
12450000
83317972.
Et l'on obſerve enfuite que depuis ledit
Etat , il s'eft trouvé encore quatre articles
confiderables , qui n'y font pas compris
, quoy que payez pendant la Regence.
Le premier de
Le fecond de
Le troifiéme de
9917940
liv,
5100000
Nij
148 LE MERCURE
Le quatriéme de
20000000
Ce qui revient encore à la fomme de
quatre vingts cinq millions dix- fept mille
neuf cens quarante livres.
Laquelle jointe aux dix - neuf cens foi
xante & dix- fept millions cent vingt mille
foixante & une livre , cy devant raportés,
font un total de dettes dont l'Etat étoit
chargé à la mort du feu Roy de deux milliars
foixante deux millions cent trente huit
mille une livre , ou payement de laquelle
fomme S. A. R. Monfeigneur le Regent
a pourvû , comme il a été dit cy- deffus .
N
Ous reparons volontiers l'omiffion
que nous avons faite dans notre Mercure
precedent ; elle regarde l'article de
la fête de Saint Louis , jour auquel l'Academie
Françoiſe a ajugé le prix à M. de
Saint Difdier , Chevalier de Saint Lazare .
Nous nous contenterons d'en rapporter
quelques endroits , qui fuffiront à tout
Lecteur délicat , pour décider du merite
de certe Ode . Le fujet donné étoit , que
Louis le Grand par la maniere dont il
accordoit des graces , y ajoutoit toujours un
nouveau prix.
L'Auteur après avoir parlé digneinent
DE SEPTEMBRE. 149
du caractere de generofité du feu Roy ,
fait la reflexion fuivante.
Le ciel nous montre peu de ces Rois bien faiſans ,
Inftruits dans le grand art d'embellir leurs prefens.
On voit des Souverains dont la magnificence
Verfe de toutes parts les biens en abondance ;
Mais quefert de donner , fi l'on n'oblige pas )
Les bienfaits dans leurs mains perdent tous leurs
appas.
Ces Rois n'éprouvent point cette fenfible joye ,
Qui fait que notre coeur dans nos yeux fe deploye,
Et qui répandfur nous & fur nos actions
Ces charmes furs garents de nos affections .
Leur generofité qu'un vain honneur anime ,
Peut à peine acquerir un droit fur notre eftime :
De leurs dons prodiguez le coeur n'estoint touché,
Et ce n'est point aufi ce qu'ils ont recherché.
Paroître genereux , eft la gloire vulgaire ,
Que leur aveugle orgueil demande pour ſalaire. )
Ils negligent un prix qu'ils ne connoiffent pas ,
Et de femblables mains font fouvent des ingrats ;
Mais du bonheur d'autruy, quifait fon bonheur
même ,
Recueille abondamment les fruits des biens qu'il
Seme.
M. de Saint Difdier , après avoir donné
la derniere main à fon portrait , termine .
cotte Ode par une priere pour le Roy.
Nij
150
LE MERCURE
Dans ta puiffante main tu tiens les coeurs des Rois ,
Grand Dieu, forme LOUIS , 'remplis no:re eſperance,
Quand il gouvernera le timon de la France ,
'il Fais que de ta fageffe il écoute la voix.
A
MADEMOISELLE DU G.
fur ce qu'elle aimoit beaucoup
à dormir.
Par M. le Chevalier de Pontbriand, Officier
de
Dragons.
FAur il que de jaloufes ombres
Sur vos yeux retombent toujours ?
Et que Morphée en des nuits fombres
Change les plus beaux de vos jours.
Le cours rapide, des journées
Vous montre en vain le prix du temps i
Dans l'espace de dix années ,
A peine vivez vous trois ans.
Encor, fi ce fommeil , Silvie ,
Pouvoit prolonger votre fort ;
Si la mort rendoit à la vie
Ce
que vous donnez à la mort!
Mais , non , dans les fombres demeures
DE SEPTEMBRE.
Clothe file fans s'arrêter ,
Et vous compte toutes les heures
Que vous ne pouvez pas compter.
Profitez mieux de votre vie ;
Pour l'Amour veillez aujourd'huy
Ou du moins , aimable Silvie ,
Apprenez à dormir pour luy.
Jadis , dans un bois folitaire
La Déeffe des mers dormant ,
Le malin enfant de Cithere
Prit foin d'y guider fon amant .
La belle croyoit que Morphée
L'occupoit de fonges divers ,
Et cependant l'heureux Pelée
Donnoit Achille à l'Univers.
Charmant objet de ma tendreſſe ,
Puifque dans vous tout eft divin ,
Que vous propoferois -je enfin
Que l'exemple d'une Déeſſe &
LA FORCE DE L'HABITUDE.
EPIGRAMME.
SEigneur Jasmin , Partiſan devenu
Grut qu'il étoit un fameux personnage ;
N iiij
752 LE
MERCURE
Et
calculant fon ample revenu
,
Se refolut de prendre un équipage.
Impatient , il en fait tous les frais :
Belle maifon , chevaux , cocher , laquais ,
Caroffe prêt à briller par la Ville ,
Tous fes flateurs à l'entour regardans ;
Tvre d'honneurs , Jaſmin d'un pas agile
Sauta derriere , au lieu d'entrer dedans.
Le mot de la premiere Enigme du mois
paffé étoit le Sel, & celuy de la feconde,
l'Epée.
V
ENIGM E.
Ne fois 'on m'a vû du ſoleil éclairé :
Alors contraire aux uns , aux autres favorable,
On mit ordre , dit- on , qu'unfait fi memorable
Fút tranfmis à jamais à la poſterité.
Voyagez ici-bas fur la terre & fur l'onde ,
Vos Joins pour me trouver, font des foinsfuperflus
F'étois dans ce tems - là ce que je ne fuis plus ,
Et fuis ce que j'étois dès l'enfance du monde.
AUTRE.
E voy le jour, & n'ûs jamais de peres
Je n'habitay jamais la terre :
Je ne fuis point né dans les eaux ;
Et je ne fus jamais du nombre des oiſeaux
BIBLIO
FILE
DE
LYON
*
18934
Coupons , , mettons -nous en tra
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LIIVTE NES VIJENN
DE
SEPTEMBRE.
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Chacun , comme il veut , me fait naître ;
Mais auffi-tôt je ceffe d'être :
Et le moment qui voit mon fort ,
Voit prefque en même temps ma mort.
F'ay pour retraite un fort étroit paſſage ;
Je fers à bien plus d'un uſage :
L'Artifan me poffede , ainsi que le plus riche,
Je fuis au liberal , tout ainsi qu'au plus chiche.
CHANSON.
Faifons tous revivre Bachusi
Amis travaillons à ce jus ,
Pour nous fi neceffaire ;
Si le buvant dans nos repas ,
Il fçait fi bien nous plaire ;
Que nous devons trouver d'appas ,
De plaifirs à le faire !
C'est un employ digne des Dieux
De cueillir ce jus précieux :
Ce don fi falutaire ,
C'est la fource de nos plaifirs ,
N'en faifons point myftere ,
C'eft but de tous nos defirs;
Quel plaifir de le faire !
Coupons , ga , mettons- nous en train$
$ 54
MERCURE LE
Que la cuve du moindre grain
Soit la dépofitaire ;
Et puis portons fur le preſſoir
Sa depoüille fi chere:
Ce jus coulera jusqu'auſoir,
Hâtons nous de le faire.
Velques perfonnes ſe plaignent qu'il
Qſemble que je neglige plus l'article d
Mariages que celui des Morts. Il eft facile
de répondre à ce reproche. Il mefuffira
de dire que je fuis inftruit des derniers par
les Billets Mortuaires , an lien que je ne
fuis informé des premiers que par la voix
publique , qui n'est pas toujours bienſure ,
à moins que les familles ne m'en donnent la
confirmation par un Billet . Au reste, je remercie
M. l'Abbé D. T. qui a bien voulu
me donner cet avis , & en même temps .
m'inftruire des Mariages , & d'autres nonvelles
qui font venuës à ſa connoiſſance: Je
le prie de me continuer la même grace.
MARIAGES
.
M. le Comte de Sainte Maure Premier
Ecuyer du Roy , & Commandant fes Ecuries
en furvivance de M. le Comte de
Sainte Maure fon oncle & Colonel du
,
DE SEPTEMBRE.
>
Regiment Royal Etranger , époufa le
d'Aouft Mademoiſelle de la Neuville , fille
heritiere de Mre. Defchiens de la Neuville,
Seigneur de la Longue , Layon , Broife ,
Moulignes &c. Confeiller du Roy en tous
fes Conteils Maître des Requêtes ordinaire
de fon Hôtel , Intendant des Ordres
du Roy , Prefident à Mortier au Parlement
de Navarre , & Intendant de Justice,
Police , Finances , Fortifications & Marine
de Franche-Comté, & des troupes de S. M
fur cette Frontiere. Le Roy , les Princes &
Princeffes du Sang Royal ont figné leur
Contrat de Mariage. Perfonne n'ignore
l'ancienneté de la Maifon de Sainte Maures
Moreri , du Chefne , le Pere Anfelme ,
en font de bons garans.
Mre. Jean-René de Longüeil , Marquis
de Maifons , Prefident à Mortier au Parlement
de Paris , époufa le du
- même mois Mademoifelle de Menars fille
de M. le Preſident de Mcnars .
M. le Marquis de Mailly Colonel du
Regiment de ce nom , & neveu de M. le
Cardinal de Mailly Archevêque de Reims,
époufa le d'Aouft Mademoiſelle de
Bournonville fille du feu Prince de Bournonville
.
Le 12 du mois paffé , M. le Marquis du
Caila , Baron de Laribe , Seigneur de
Pignan , Sauffan & autres lieux , iffu d'une
156 LE MERCURE
des plus nobles & des plus anciennes Maifons
de la Province de Languedoc , époufa
à Paris Mlle. d'Eſtrades , fille de feu M.
le Comte d'Eftrades , Lieutenant General
des Armées du Roy , tué en Hongrie auprès
de M. le Prince de Dombes dans la
derniere guerre des Imperiaux contre les
Turcs , & petite- fille de M. d'Eftrades Maréchal
de France .
La nuit du 3 au 4 Septembre M. le
Marquis d'Alincourt époula Mademoiſelle
de Bouflers dans le Choeur de l'Eglife de
Saint Paul Paroiffe de la Demoifelle , dont
les Portes étoient occupées par les Gardes
de la Connêtablie de France , auffi bien .
que l'efpace depuis le grand Portail jufqu'au
Choeur qu'ils bordoient des deux côtez.
Les nôces fe firent à l'Hôtel de Bouflers ,
où l'affemblée fut des plus brillantes par
le grand nombre de perfonnes diftinguées
de la Cour qui la compofoient . On y admira
la belle ordonnance & la magnifi
cence du feftin. Le lendemain M. le Maréchal
de Villeroy donna à la même Com
pagnie une grande fête à l'Hôtel de Lef
diguieres.
>
M. leMarquis d'Alincourt s'appelle François
Camille de Neufville de Villeroy
Marquis d'Alincourt , Meftre de Camp
du Regiment de Villeroy , Lieutenant pour
le Roy des Ville de Lyon & Provinces
DE SEPTEMBRE. 157
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois.
Il eft fecond fils de Louis Nicolas de
Neufville Duc de Villeroy , Pair de France,
Capitaine de la premiere & plus ancienne
Compagnie Françoife des Gardes du Corps
du Roy , Lieutenant General pour Sa Ma-.
jeſté des Ville de Lyon & Provinces de
Lyonnois , Forêt & Beaujollois : & de
feue Marguerite le Tellier.
,
"
Il est petit - fils de M. le Maréchal de
Villeroy , François de Neufville Duc de
Villeroy Pair & Premier Maréchal de
France , Gouverneur de la Perfonne du
Roy , Chevalier de fes trois Ordres , Gou
verneur des Ville de Lyon & Provinces
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois , Miniftre
d'Etat au Confeil de Regence , &
Chef des Confeils de Finances & de Commerce.
Ses Frere & Saurs.
François-Louis de Neufville Marquis de
Villeroy , Colonel du Regiment Lyonnois ,
Capitaine reçû en furvivance de la prémiere
& plus ancienne Compagnie Françoife
des Gardes du Corps du Roy, Lieutenant
General pour le Roy des Ville de
Lyon & Provinces de Lyonnois , Forêt &
Beaujollois. Il a époufé N ... de Montmorency
- Luxembourg , fille de Charles-
François-Frederic de Montmorency Duc
156 LE MERCURE
des plus nobles & des plus anciennes Maifons
de la Province de Languedoc , épouſa
à Paris Mlle. d'Eftrades , fille de feu M.
le Comte d'Eftrades , Lieutenant General
des Armées du Roy , tué en Hongrie auprès
de M. le Prince de Dombes dans la
derniere guerre des Imperiaux contre les
Turcs , & petite- fille de M. d'Eftrades Maréchal
de France.
6
La nuit du 3 au 4 Septembre M. le
Marquis d'Alincourt époula Mademoiſelle
de Bouflers dans le Choeur de l'Eglife de
Saint Paul Paroiffe de la Demoifelle , dontles
Portes étoient occupées par les Gardes
de la Connêtablie de France , auffi bien.
que l'efpace depuis le grand Portail jufqu'au
Choeur qu'ils bordoient des deux côtez.
Les nôces fe firent à l'Hôtel de Bouflers ,
où l'affemblée fut des plus brillantes par
le grand nombre de perfonnes diftinguées ,
de la Cour qui la compofoient. On y admira
la belle ordonnance & la magnificence
du feftin . Le lendemain M. le Maréchal
de Villeroy donna à la même Compagnie
une grande fête à l'Hôtel de Leſdiguieres.
M. leMarquis d'Alincourt s'appelle François
Camille de Neufville de Villeroy ,
Marquis d'Alincourt Meftre de Camp
du Regiment de Villeroy , Lieutenant pour
le Roy des Ville de Lyon & Provinces
DE SEPTEMBRE: 157
-
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois.
Il eft fecond .fils de Louis Nicolas de
Neufville Duc de Villeroy, Pair de France,
Capitaine de la premiere & plus ancienne
Compagnie Françoife des Gardes du Corps
du Roy , Lieutenant General pour Sa Majefté
des Ville de Lyon & Provinces de
Lyonnois , Forêt & Beaujollois : & de
feue Marguerite le Tellier.
T
Il eſt petit-fils de M. le Maréchal de
Villeroy , François de Neufville Duc de
Villeroy , Pair & Premier Maréchal de
France , Gouverneur de la Perſonne du
Roy , Chevalier de fes trois Ordres , Gou
verneur des Ville de Lyon & Provinces
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois , Miniftre
d'Etat au Confeil de Regence , &
Chef des Confeils de Finances & de Commerce
.
Ses Frere & Soeurs.
François-Louis de Neufville Marquis de
Villeroy , Colonel du Regiment Lyonnois
Capitaine reçû en furvivance de la pre
miere & plus ancienne Compagnie Françoife
des Gardes du Corps du Roy, Lieutenant
General pour le Roy des Ville de
Lyon & Provinces de Lyonnois , Forêt &
Beaujollois. Il a époufé N ... de Montmorency
- Luxembourg , fille de Charles-
François-Frederic de Montmorency Duc
158 LE MERCURE
de Luxembourg , de Piney & de Beaufort
Montmorency .
Marguerite- Louife- Sophie de Neufville,
mariée à François Duc d'Harcourt , Capitaine
des Gardes du Corps du Roy , mort
le 4 Juin 1716.
Mademoiſelle de Villeroy.
Mademoiſelle de Bouflers s'appelle Ma
rie-Jofephine de Bouflers , née le 10 Septembre
1704 .
Elle eft fille de Louis François Duc de
Bouflers , Pair & Marêchal de France
Chevalier des trois Ordres du Roy , & de
la Toifon d'Or , Capitaine des Gardes du
Corps du Roy , Grand Bailly & Gouver
neur hereditaire de la Ville de Beauvais
& de Beauvoifis , Gouverneur & Lieute
nant General pour Sa Majefté des Provinces
de Flandres & de Hainault , Gouverneur
Particulier de la Ville & Citadelle de Lille,
Souverain Bailly de la même Ville & Châtellenie
de Lille ; Et de Catherine - Char
lotte de Graminont.
Ses freres & foeurs.
Antoine- Charles-Louis Comte de Bouflers
né le rs Decembre 1696. Gouver- -
neur General des Provinces de Flandres &
de Hainault , Gouverneur Particulier des
DE SEPTEMBR E. 139
Ville & Citadelle de Lille Souverain
Bailly de la même Ville & Chatellenie de
Lille , Colonel d'un Regiment d'Infanterie ;'
mort le 22. Mars 1711 .
Louis - François - Gombert de Bouflers
Comte de Ponches , né le 12 juillet 1700 ,
mort le 24 Decembre 1706 .
Joleph- Marie Duc de Bouflers , Pair de
France , né le 22. May 1706. Gouver
neur General des Provinces de Flandres &
de Hainault , Gouverneur Particulier des
Ville & Citadelle de Lille , Souverain Bailly
de la même Ville & Châtellenie de Lille ,
Lieutenant General pour le Roy dans le
Beauvoifis , Grand Bailly & Gouverneur
de la Ville de Beauvais & du Beauvoifis.
Louife-Antoinette- Charlotte de Bouflers,
née le premier Octobre 1694. mariée à
fon parent François Charles de Bouflers ,
Marquis de Kemiencourt , Maréchal des
Camps & Armées du Roy.
Antoinette-Hippolyte de Bouflers , née le
23. Septembre 1695. morte Religieufe le
premier Mars 1717.
Charlotte- Julie de Bouflers , née le 1o.
Juillet 1698. Coadjutrice de Madame fa
Tante , Abbeffe de l'Abbaye Royale d'Avenoy.
Catherine-Berthe de Bouflers , née le 21
Septembre 1702. mariée en Efpagne , on
elle eft Dame du Palais , à Jofeph-Can
160 LE MERCURE
telmo Stuart , Prince de Pettorano
,
fils
unique de Roftain Cantelmo Stuart Duc.
de Popoli , Grand d'Efpagne , Gouverneur
du Prince des Afturies & des Infants , Capitaine
des Gardes du Corps de S. M. C.
EXTRAIT Ꭰ Ꮦ DISCOURS
de M. Cadry , Vicaire de s. Paul, au Mariage
de M. le Marquis d'Alincourt avec
Mademoiselle de Boufflers , le 4 Septembre
1720.
Cmariages quais celui qui vous eft per-
E font là quelques - uns des devoirs du
fonnel, & dans lequel vous retrouverez tous
les autres , c'eft de copier les grands modeles
que vous avez devant les yeux , & par
lefquels vous avez été formez . Quels avantages
ne promet pas un Mariage qui unit
deux Maiions , où les plus grands fentimens
de vertu , d'honneur , de probité , de fidelité
au Roy , d'amour de la Patrie , de zele
pour le bien public , fe font fait remarquer
avec tant d'éclat , & ont fi juftement enlevé
tous les fuffrages.
Ce font ces vertus , Monfieur , qui ont
acquis à vos illuftres Ancêtres l'honneur
hereditaire de veiller à l'éducation de nos
Rois , & de leur infpirer des fentimens dignes
du Thrône. Et comment ont- ils rempli
DE SEPTEMBRE .
4
›
&
pli un Employ fi glorieux en lui-mêine ,
fi intereffant pour l'honneur du Prince &
pour la felicité de fes peuples ? Je ne rappelle
point ici les exemples anciens ; celur
fur lequel les yeux de tous les bons François
font fixez , fera à jamais la gloire de
Votre Maifon. Qu'il vive , cet illuftre Ayeul,
avec le facré Dépôt qui lui a été fi fagement
confié , & dont la feule confervation peut
confoler la France dans fes calamités ! qu'il
foit témoin encore long- tems de l'amour
des Peuples pour un jeune Roy qu'il aime
lui- mênie fi tendrement ! qu'il jouïffe dans
une longue paix du fruit de fes veilles !
qu'il voye accomplir les juftes eſperances
qu'il nous fait concevoir d'un Roy Religieux
& Jufte , & d'un Regne heureux
& pacifique. Et tandis qu'il travaille fi utilement
pour le bonheur de la France
foyez vous même fa confolation & une
partie de fa recompenfe en imitant fes
vertus & celles de votre illuftre Pere , pour
les tranfmettre enfuite aux enfans que Dieu
vous donnera , s'il veut bien écouter les
prieres que nous lui en faifons plus d'une
fois dans cette fainte Ceremonie .
*
Pour vous , Mademoifelle , je craindrois
de troubler la joye de ce jour en vous rappellant
le fouvenir d'un Pere , que la mort
savit trop tôt aux fouhaits & aux befoins
de la France , qui merita fi juftement
Ο
162 LE MERCURE
le refpect & la confiance des Peuples , qui
fe facrifia lui-même pour le falut de l'Etat
, & qui après avoir donné des preuves
fi éclatantes de ſa valeur dans les occafions
les plus difficiles , en a donné à cette Eglife
de fa Religion & de fon zéle pour la Maifon
de Dieu » que nous n'oublierons ja
mais , & qui nous font regarder fes précieufes
dépouilles qui s'y confervent avec
le refpect qu'elles meritent.
2
Vous avez dans Madame votre Mere
une regle vivante & un modele des vertus
Civiles & Chrétiennes qu'il me fuffit de
vous propofer. Faites-vous un devoir conftant
de demander & de fuivre en tout fes
confeils, & de marcher fur fes traces : fa
fageffe , fes lluummiieerreess , fa regularité fa
pieté fincere qui nous édifie , fa charité
envers les pauvres dont nous fommes fou
vent témoins , fa modeftie que je crains.
de bleffer icy , vous font connues plus qu'à
perfonne : elle vous en donne tous les jours
des, leçons, d'autant plus utiles , qu'elles
font toutenues de fes exemples ! Ne vous
laffez point de les fuivre dans un temps.
où elles vous feront plus neceffaires , &
ne craignez que de perdre de vue un guidedont
vous avez befoin pour ne pas vous
égarer dans les routes difficiles du monde..
Et vous , Seigneur , daignez confirmer ,
DE SEPTEMBRE. 163
M. de Fleurance , Preſident de la Cour
des Monnoyes de Paris , & ci - devant Ecuyer
ordinaire de Madame la Dauphine , épouſa
la nuit du 16 au 17 de ce mois en l'Eglife
de Saint Gervais , Damoiſelle Jeanne Maffon
, fille de feu M. Maffon Treforier General
de la Marine au Departement de Marfeille
& Toulon. La Maiſon de M. de Fleurance
eft tres-connue ; David de Fleurance
fon grand Oncle fut fait Gentilhomme de
la Chambre du Roy Henry le Grand le 4
Novembre 1603. En 1612, après la mort
de M. de Gueteaux , il fut fait Précepteur
en chef du Roy Louis XIII . & le 4 Aouft
de la même année il fut fait Confeiller d'Etat.
En 1615 il eut l'honneur d'accompa
gner par ordre du Roy Madame Elifabeth
de France , mariée avec le Roi d'Eſpagne .
Le fixiéme Ayeul de M. de Fleurance étoit
Maistre d'Hoftel ordinaire du Roi Charles
VIII . en 1490 , & fut honoré de plufieurs
commiffions importantes tant au dedans»
qu'au dehors du Royaume..
Georges Mordant , frere du Comte de
Petersbourg , époufa à Londres le Juil
let N. fille du feu Colonel Coliers.
N. Comte de Martinitz époufa à Vienne
le 21 Aouft N. Comteffe de Trautfon.
Le même jour N. Comte de Goez épou
fa N. Comteffe de Tierheim .
O ij
164 LE MERCURE
MORTS DE PARIS.
Effire Eufebe Renaudot , Prieur de
M Froffay, Pun des Quarante de l'Academie
Françoiſe & de celle des Infcriptions
& Belles Lettres , mourut le premier
Septembre , en fa 73. année.
Dame Marie-Madelaine Fouquet , Veuve
de, Meffire Emanuel de Cruffol , Marquis
de Montfalé , mourut le 7 Septembre
Meffire Philippe , Marquis de Courcil
Ion & de Dangeau , Comte de Civray
Melle & Uffon , Baron de Sainte-Hermine
, de Breffuivre , & de Château du Loir ,"
Seigneur de Chaufferais , &c . Chevalier
des Ordres du Roy , Confeiller d'Etat
d'Epée , Grand Maître des Ordres Royaux,
& Hofpitalier de Notre Dame de Mont-
Carmel & de Saint Lazare , de Jerufalem
, tant deçà qu'au delà des Mers ,
Gouverneur & Lieutenant General pour
le Roy de la Province de Touraine , Gouverneur
particulier de la Ville & Château
de Tours , Doyen de l'Academie Françoiſe ,
& cy-devant Chevalier d'honneur de feuë
Madame la Dauphine , mourut le 9 Sep-.
tembre en fa quatre - vingt - quatriéme
année.
M. le Marquis de la Carte , pere de
M. le Marquis de la Carte , Lieutenant
DE SEPTEMBRE. 165
General pour le Roy dans la Province du
Bas Poitou , & frere de M. de la Carte ,
Grand Prieur d'Aquitaine , mourut le 9
Septembre 1720 , en fon Château d'Uzé
près Saint Mexant , âgé de 84 ans , &
univerſellement regretté de toute la Pro
vince.
Meffire Gafton - Jean- Baptifte- Louis de
Noailles , Evêque & Comte de Châlons
Pair de France , eft mort dans fon Château
de Sari le 15 Septembre âgé de 5 ans ,
2 mois 8 jours il étoit né le 7 Juillet
1669 : il avoit fait fes premieres études à
Chaalons , fous les yeux de fon Eminen
tiffime frere Monfeigneur le Cardinal de
Noailles , depuis Archevêque de Paris .
Cette heureufe éducation le forma de bonne
heure à l'Etat Ecclefiaftique , & lui merita
d'être nommé fon fucceffeur dans le Sicge
de Chaalons le 15 Decembre 1695 .
Meffire Charles Roger de la Tournelle,
Chanoine de la Sainte Chapelle de Dijon,
& Prieur de Chaftel- Chinon , mourut lę
15 Septembre.
Dame Louife Marie Magdelaine Charpentier
, époufe de Meffire Louis Paul
Bellanger , Avocat general de la Cour des
Aydes , mourut le 17 Septembre .
Meffire N. Marquis du Chafteler , Gou
verneur du Château de Vincennes , mou-
Septembre .
rut le
136. LE MERCURE :
MORTS ETRANGERES.
N. Cafini , Maître des ceremonies du
Pape , mourut à Rome le 14 Juillet 1720.
L'Abbé Chiaponni lui a fuccedé dans
cette Charge.
Dom Diego Urtado de Mendoza &
Sandoual , Comte de Corzana , Chevalier
de l'Ordre de Saint Jacques , Grand d'Efpagne
, Lieutenant General des Armées du
Roy Catholique Charles H. Infpecteur &
Directeur des Guerres en Eſpagne , &
Confeiller d'Etat actuel de l'Empereur ,
mourut à Vienne le 16 Juillet , âgé de
74 ans.
Le Baron Frederic de Weiberg , Confeiller
d'Etat du Roy de Dannemarck , Chevalier
de l'Ordre de Dannebrock , & for
Envoyé extraordinaire vers l'Empereur
mourut à Vienne le 21 Juillet , âgé de
$3 ans.
Le fieur Gio Bembo , Evêque de Civi
del de Bellua , dans l'Etat de Venife , y
mourut le
Juillet , âgé de 70 ans.
$
Dona Jeanne Fernandez de Cordoue &
Arragon , fille de Louis - Ignace de Cor-.
doue & Figueroa , Duc de Feria , qui
avoit époufé en 1669 Paſcal-François de
Borgia , Duc de Gandie , Marquis de Lombay
, Comte d'Oliva , &c. mourut veuve
DE SEPTEMBRE. 167
le
Aouſt 1720 , âgée de 68 ans .
Dom Juan Rofillo , du Confeil Royal
de Caftille , mourut le Aouft en fa
quatre-vingt - fixiéme année.
Le fieur Earle , Lieutenant General des
Armées du Roy d'Angleterre , & cy - devant
Gouverneur de Portsmouth , mourut le
3. Aouſt.
Dom Louis Alvarés de Caftro , Marquis
de Cafcaës , Confeiller du Confeil
d'Etat , & de celui de la Guerre , cy- devant
Ambaffadeur extraordinaire de Portugal
à la Cour de France , mourut à Lisbonne
le 27 Juillet , en fa foixante- dix-feptiéme
année.
CHARGES ET DIGNITEZ..
Le
Aouft , le Roy d'Espagne nommas
à l'Evêché de Barcelonne D. André de
Orbé , Inquifiteur de Seville..
Sa Majesté Catholique nomma Capiraine
General de fes Armées N. Marquis
de Cala- Fuerte , qui avoit commandé dans
Pifle de Mayorque..
Nomma Lieutenant de Roy de Denia ,
Dom Francifco Ramirez de Eftenos , Colonel
.
++
Donna une place dans le Confeil des
Indes à Dom Juan de Valcarcel Dato
Prefident du Confeil d'Arragon.
168 LE MERCURE
Et la Charge de Prefident du Confeil
d'Arragon , à Dom Antonio Cala de Vargas
, qui avoit exercé la même Charge en
Cerdaigne .
JOURNAL DE PARIS.
Line
E 24 Aouft dernier , le Roy a donné
une Penfion de 3000 livres à M. Thierry
, premier Avocat General au Parlement
de Dijon .
Le 30 M. l'Abbé de Saint Albin foutine
fa Sorbonnique , ayant eu difpenfe de la
faire avant le temps prefcrit.
Le 30 du mois dernier , veille du jour
de l'Anniverfaire du Roy Louis XIV , let
Roy entendit dans la Chapelle des Tuilleries
, la Meffe de Requiem chantée par la
Mufique.
Le 2 Septembre 17 20 , on celebra dans
l'Eglife de l'Abbaye Royale de Saint Denis,
un Service pour le repos de l'ame du Roy
Louis XIV. où M. l'Evêque de Tarbes
Officia . M. le Comte de Toulouſe , & plufreurs
Seigneurs de la Cour s'y trouverent,
ainſi qu'un grand nombre de Prelats .
Le 2 le Regent coucha pour la premiere
fois au Louvre , dans l'appartement de
feue Madame la Ducheffe.
Le
DE SEPTEMBRE. 169
A
Le M. le Comte de Saujon , Aide-
Major des Gardes du Corps du Roy , prêta
ferment entre les mains de Sa Majeſté , en
prefence de M. le Duc d'Orleans , pour la
Charge de Lieutenant de Roy du Bazadois
en Guyenne.
M. Augier a été rétabli dans fa Charge
de Treforier du Clergé de Paris.
M. de la Ruë de Bernapré , a obtenu
une penfion de 1200 livres fur l'Abbaye
de Savigny , Ordre de Cîteaux.
M. de Carnoüet , Senéchal de Pontivi ,
a obtenu la grande députation des Etats
de Bretagne .
*
Madame la Ducheffe de Villars- Brancas
la jeune , a été gratifiée d'une penfion de
12000 livres.
Le 12 le Roy fit Chevalier de l'Ordre
Militaire de Saint Louis , M. Gauvin de
Virville , Gentilhomme Bourguignon , &
Major du Château de Dijon. Depuis près
de 34 ans que M. Gauvin eft au Service
du Roy , il s'y est toujours diſtingué par
fon zele & par fon attachement.
M. Perrin , Maréchal de Camp , doit
commander à Aix les Troupes de Sa Majefté
qui font dans cette Province , fous
M. le Marquis de Caylus , Lieutenant general
, qui fe tiendra à Tarrafcon.
M. de Chabanas de Curion , a vendu
fon Regiment des Cravattes deux cens
P
1.70
LE MERCURE
quarante mille livres à M. le Marquis de
Joyeule.
M. Olivieri , parent du Pape , eft arrivé.
de Rome à Paris.
L'Abbaye de Beaupré , Ordre de Cî-
Diocefe de Toul , vaque par teaux >
mort de M. l'Evêque de Verdun.
la
Le Comté de Nevers a été erigé en
Duché- Pairie . Les Lettres d'enregistrement
en furent expediées le 7 de ce mois.
M. le Marquis de Gandelu , fecond fils
de M. le Duc de Trefmes , Gouverneur de
Paris , a eu l'agréement du Roy pour acheter
le Regiment de Champagne de M. le Che->
valier de Teffé , qui a été fait Maréchal de
Camp.
La Dignité de Grand- Maître des Ordres
de Notre - Dame de Mont- Carmel & de
Saint Lazare , étant vacante par la mort
de M. le Marquis de Dangeau , le Roy a
nommé M. le Duc de Chartres , Grand-
Maître de ces deux Ordres.
Le procès des Indiens de Pontichieri
contre M. Hebert Conful , & Pun des Directeurs
de la Compagnie des Indes , a
été decidé au Confeil en faveur des deux
freres.
Il vaque par la mort de M. l'Abbé de
la Tournelle , le Prieuré de Chastel-
Chinon.
M. le Marquis de Roye , Lieutenant -
DE SEPTEMBRE. 171
general des Galeres , a eu la furvivance
de cette Charge pour fon fils , âgé de 9 à
10 ans.
M. le Marquis de Cannillac , Lieute
nant general des Armées du Roy & du
Confeil de Regence , eft monté à la place
de Confeiller d'Etat d'épée qu'avoit feu
M. le Marquis de Dangeau.
M. le Comte d'Armagnac a été nommé
par le Roy Grand- Vicaire des Ordres de
Notre-Dame du Mont Carmel & de Saint
Lazare.
Le Prieuré de Froffai en Bretagne a été
donné par M. l'Abbé d'Auvergne , au
Prince Frederic fon frere. M. le Chevalier
de Caumartin a eu pat fon Indult celui
de Saint Chriftophe de Châteaufort. Ces
deux Beneficés étoient vacans par la mort
de M. l'Abbé Renaudot .
Madame la Ducheffe de Valentinois-
' Monaco , eft accouchée d'un fils . Il y a
eu à l'occasion de cette naiffance de grandes
illuminations à l'Hôtel de Matignon.
Par un Courier extraordinaire dépêché
de Modene , le Palais Royal a été tiré
d'inquietude , en apprennant que la Princeffe
hereditaire de Modene étoit entierement
hors de danger de la petite verole
dont elle a été à l'extremité.
L'ouverture des Etats de Bretagne fe fit
à Ancenis , fuivant les ordres de S. M. le
Pij
172
LE MERCURE
7 de ce mois , fur les trois heures aprés
midi ; M. le Maréchal d'Eftrées qui y prefide
, ouvrit la feance par un difcours qui
fat applaudi de toute l'Affemblée. Cette
harangue fut fuivie de plufieurs ,autres en
la maniere accoutumée . L'Affemblée étoit
compofée de près de huit cens Gentils-
hommes , outre le Clergé & le Tiers-
Etat, qui étoient auffi fort nombreux . M.
le Comte d'Ancenis entra dans cette Ville
accompagné de quatre à cinq cens Gentils
-hommes tous trés bien montés . Le 18
les Etats accorderent 3 millions de don
gratuit , pour les années de 1720 , 1721
& 1722. Cette fomme fera payée en differens
termes , fçavoir 500 mille livres au
premier Novembre de cette année , pareille
femme au premier Janvier prochain,
& les deux autres millions en vingt- quatre
payemens égaux de mois en mois ,pendant
les deux années de 1721 & 1722 .
M. le Comte de Coetlogon oncle à la mode
de Bretagne de M. le Marquis de Coetlogon
, s'étant demis de la Charge de Procureur
General des Sindics , les trois Ordres
accepterent fa demiffion en faveur du
premier , & nommerent en même tems
M. de Bedée Prefident au Parlement de
Rennes , pour exercer l'autre Charge de Procureur
General des Sindics .
Le 24 M. de la Beffiere fut élu TreDE
SEPTEMBRE. 173
forier des Etats à la place de M. de Mon- ,
taran par les trois Ordres. Deux Gentilshommes
de la Province fe font offerts pour
être garands du maniment du nouvel Elu ,
jufqu'à ce qu'il ait fourni une caution en
forme , ce qui a été accepté. Aprés fa reception
, toute la Seance fut occupée à
deliberer fur l'emprunt que la Province
a deffein de faire pour achever de rembourfer
ce que le Roi avoit prêté aux .
Etats. Les trois Ordres furent d'abord d'avis
de partager entr'eux ce qu'il y avoit
à
emprunter, qui confifte en huit millions ,
fçavoir , trois millions pour la Nobleffe
trois millions pour l'Eglife , & deux millions
pour le Tiers-Etat . Comme on trouva
ce moyen impraticable , on remit la
décifion à une députation de fix Com
miffaires de chaque Corps avec les Prefidens
; enfin aprés plufieurs débats & conteſtations
, il a été mis de nouveau en déliberation
, qu'au lieu de cent mille francs.
qu'on vouloit impofer à ceux qui étoient
aux Etats , on fe contenteroit de trente
mille livres pour chacun d'eux.
On doit cet éloge à M. le Maréchal
d'Eftrées, qu'à peine a- t'il paru , qu'il s'eft
concilié tous les efprits de l'Affemblée &
de la Province . Sa magnificence jointe à
la dignité & aux égards avec lefquels il
accompagne tout ce qu'il fait , n'ont pas
,
Piij
174 LE MERCURE
1
peu
contribué à achever de lui attirer l'efti
me publique. Ce Seigneur a tous les jours
chez lui plus de deux cens couverts : l'abondance
& la délicateffe des mets s'y trou
vent reunis. Madame la Maréchale d'Eftées
le feconde de fon côté à merveille ,
ayant toute l'attention imaginable à partager
les honneurs de la Prefidence de
M. le Maréchal fon Epoux .
Le 19 le Roi accompagné de M. le Duc
de Bourbon & de M. le Maréchal Duc de
Villeroy, fe rendit en caroffe au Camp qui
eft dans la plaine des Sablons , où M. le
Duc d'Orleans & M. le Duc de Chartres
fe trouverent. Le Roi monta à cheval , &
fit la reveue des quatre Bataillons de fon
Regiment , paffa dans les rangs & les vit
défiler. Mademoiſelle de Charolois habillée
en Amazone avec plufieurs Dames de la
Cour , fuivit le Roi. Le 21 S. M. fit une
feconde revue de fon Regiment qui partit
le 23 de la plaine des Sablons , où ilavoit
campé depuis le 17 de ce mois . Le 22 le
Roi fit Chevaliers de l'Ordre Militaire de
Saint Louis , douze Officiers de fon Regiment.
I accorda plufieurs Penfions de
500 livres à differens Officiers de ce Corps,
outre quelques gratifications de 1000 liv.
S. M. avoit fait diftribuer le 20 8000 liv .
en efpeces aux quatre Bataillons de ce Regiment.
M. le Chevalier de Peze , qui en
DE SEPTEMBRE.
175
eft Colonel- Lieutenant , a fait tous les honneurs
depuis le 17 jufqu'au 23. Il tenoit
deux Tables de 40 couverts chacune.
Il vaque par la mort de M. l'Abbé de
Maulevrier- Langeron , l'Abbaye de Saint
Jean , de dix mille livres de rentes ; & celle
de Saint Pierre de Châlons- fur- Saone , de
cinq mille livres.
M. Mellier
,
General des Finances de
Bretagne , a été fait Chevalier de l'Ordre
de Saint Lazare.
1
Les Lettres de Modene portent que le
Prince Antonio de Modene doit époufer
la Princeffe Sobieski , foeur cadette de
Epoufe du Pretendant.
Les Lettres de Marfeille du 22. font
roujours trés- affligeantes . Quoique le mal
contagieux femble agir avec moins de violence
, fur-tout lorfque le vent de Maeftral
fouffle , il ne laiffe pas d'emporter journellement
plufieurs des Habitans de cette
Ville & des Baftides qui font aux environs.
On fe flate cependant que la fraîcheur
des nuits & des matinées du mois.
d'Octobre , calmeront de plus en plus ce
mal , & que l'hyver pourra le faire ceffer
entierement. De plus , le bon ordre que
l'on a établi , & l'attention toute particutliere
de la part de la Cour , pour fecourir
cette Ville font efperer que
>
›
l'on viendra à bout d'en arrêter le cours.
P iiij.
176 LE MERCURE
On a obfervé qu'il y étoit mort beaucoup
plus de femmes que d'hommes . Les Galeres
fe tiennent toujours derriere la Derfe ,
où fuivant toutes les apparences , elles hyverneront
, pour empêcher que la maladie
ne s'y communique.
Le Lundy 23 M. le Duc Regent , les
Princes du Sang , M. le Chancelier , Mrs
les Ducs & Pairs & Maréchaux de
France , plufieurs Confeillers d'Etat & Mai
tres des Requêtes , fe rendirent au Grand
Confeil. Après que M. le Doyen du Grand
Confeil eut fait le rapport des pieces concernant
la Declaration & les Lettres Patentes
, on alla aux opinions , & il fut ordonné
que ces deux dernieres pieces feroient
enregistrées . En confequence de cet
enregistrement, M. le Procureur General du
Grand Confeil a envoyé la piece fuivante.
Monfieur le Procureur du Roy ,
Je vous envoye la Declaration que Sa Majesté
vient de rendre, pour pacifier les troubles
dont l'Eglife de France eft affligée de
puis long-temps par les conteftations qui fe
font élevées au fujet de la Conftitution
UNIGENITUS : ayez agreable , auffi - tôt que
vons aurez reçû cette Declaration , de lafaire
publier dans votre Siege avec les Lettres Pa-
Bentes d'attribution au Confeil de toutes les
contraventions qui pourront y survenir.
DE SEPTEMBRE.
177
5
L'intention du Roy & de S. A. R. eft , que
von's apportiez tous vos foins pour faire exe -`
cuter cette Loy , qui doit rétablir la paix dans
l'Etat , & la fubordination dans le Clergé :
je ne peux vous prefenter d'objet plus digne
de votre zele , & il n'y a point d'occaſion
où vous puissiez en donner des preuves plus
utiles & plus effentielles ; que dans celle-cy
le Roy m'ordonnant de luy rendre un compte
exact de tout ce qui fe paffera à ce sujet , Je
vous prie de m'informer tous les mois de toutes
les entrepriſes que l'efprit de party pour
roit encore former an préjudice de la paix.
Vous devez vous conduire avec douceur
& moderation à l'égard de ceux dont la foumiffion
aux ordres du Roy ne fera pas auſſi
prompte qu'il eft à defirer qu'elle le foit.
La rigueur est toujours les dernieres armes
que la Justice doit employer , & la verité
ne s'établit jamais mieux que par la paix.
Cependant je prie Dien qu'il vous ait en
Sa fainte garde, & fuis ,
Monfieur le Procureur du Roy ,
A Paris ce 25
septembre 1720.
Votre Confrere & amy.
Le 29. la Declaration pour l'établiffement
d'une Chambre des Vacations fut
fcellée elle fera compofée , partie de
Confeillers d'Etat, & partie de Maîtres des
178 LE MERCURE
Requêtes. M. d'Armenonville a été nommé
pour y prefider. Ces Meffieurs tiendront
leurs Audiences dans la grand- Salle
des Auguftins.
Les Lettres de Londres du 30 , portent
que M. le Duc de Liria y étoit arrivé
d'Espagne. Il a rendu vifite à Madame
Godfrey fa grand- mere & foeur de M. le
Duc de Malborough . L'Eſcadre qui a ordre
de s'affembler aux Dunes, fera compofée
de 10 à 12 Vaiffeaux de Guerre ; ce
qui fait croire à bien des gens qu'elle n'eſt
pas deſtinée pour escorter le Roy à fon
retour d'Hannovre . Les Actions baifferent
le 29 à près de 500. Les Obligations de
la Compagnie perdent 15 pour cent , outre
l'interêt de près de trois mois.
M. l'Archevêque de Cambrai , premier
Plenipotentiaire au Congrès de Cambrai ,
fait travailler à fes Equipages , ainfi que
M. de Morville Ambaffadeur de la Cour
de France en Hollande , & M. de Saint-
Conteſt.
Second Avis pour la nouvelle Eaition des
Jugemens des Sçavans , fur les principaux
Ouvrages des Auteurs.
Par ADRIEN BAILLET.
En fept Volumes in Quarto.
Depuis que nous avons diftribué au
Public des Soufcriptions pour la nouDE
SEPT EM BRE. 179
velle Edition des Jugemens des Sçavans,&'tnous
avons appris par le Mercure que
Monfieur DE LA MONNOYE de l'Academie
Françoile, diftingué par fa reputation en ce
genre de Litérature , travailloit en fon par
ticulier à illuftrer d'un bout à l'autre par
des Notes exactes ces mêmes ouvrages :
cette raiſon nous a fait recourir à lui ; &
il a bien voulu nous faire part de fes Obfervations
fur les Cinq premiers Volumes,
& nous promettre celles qu'il prepare fur
le refte. Nous profitons avec plaisir de
l'occafion qui fe prefente de fatisfaire entierement
le Public , en ajoûtant à notre
Edition ces nouvelles Remarques. Comme
elles augmenteront de beaucoup l'Impreffion
, cette nouvelle dépenfe nous oblige
d'augmenter de Cinq livres les Soufcrip
tions qui nous restent à delivrer , tant du
grand que du petit papier. C'eft-à -dire
que nous recevrons à prefent Trente- cinq
livres au lieu de Trente pour le grand papier
; & Vingt cinq livres au lieu de Vingt
pour le petit ; quoique les Soufcriptions.
ne portent que Trente livres & Vingt livres.
Ceux qui n'auront pas foufcrit , payeront
pour le grand papier Cent vingt livres au
lieu de Cent , & pour le petit Quatrevingt
livres , au lieu de Soixante & dix.
Comme nous avons été obligés, de fuf180
LE MERCURE
pendre pendant près de trois femaines la
diftribution de nos Soufcriptions , nous
avertiffons que nous continuerons d'en delivrer
jufques au dernier Octobre feulement.
Noms
Le 15. Septembre 1720 .
demeures des Libraires.
CHARLES MOETTE , rue de la Bouclerie ,
au bout du Pont S. Michel.
CHARLES LE CLERC , Quai des Auguftins.
PIERRE MORISSET , rue S. Jacques.
PIERRE PRAULT , Quai de Gêvres.
ANT. URBAIN COUSTELIER , Quai des
Auguftins.
;
Il paroît depuis peu un projet d'un nouveau
Breviaire , dans lequel l'Office Divin ,
fans en changer la forme ordinaire , feraparticulierement
compofé de l'Ecriture
Sainte inftructif , édifiant , dans un or
dre naturel , fans renvoi , fans repetitions,
& tres-court , avec des Obfervations fur
les anciens & les nouveaux Breviaires.
Cet Ouvrage doit être d'autant mieux reçû
, que l'Auteur ne donne point fes pro
pres penfées pour des regles infaillibles ;
il ne fait que les propofer feulement come
me des reflexions qu'il a faites fur la maniere
dont on pourroit compofer un Breviaire.
Ce Livre ſe vend chez LOTTIN , FUG
S: Jacques , prés S. Yves , à la verité.
DE SEPTEMBRE . 181
MORTS.
Le 7. de Septembre , 1720 mourut âgé de
92 ans Meflire Nicolas Druel d'Angouille ,
Abbé de Notre- Dame du Val , Ordre de
S. Auguftin , Diocèfe de Bayeux ; c'eſt
lui dont il eft parlé dans la Vie de feu
Monfieur de Rancé Abbé de la Trape
fous le nom de ce Gentilhomme retiré du
fervice & de la Cour , pour fe confacrer.
au rétabliſſement de cette Abbaye , où il
eft mort après l'avoir gouvernée, tant Commandataire
que Regulier , près de foixante
ans , y menant la vie des Abbez des premiers
fiécles de l'Eglife : outre cette Maifon
qu'il a reformée , il a eu beaucoup
de part à toutes les autres Reformes qui
fe font faites dans fon Ordre le fiécle
paffé.
Feue Madame la Princeffe Palatine- >
mere de S. A. Madame la Princeffe , l'honora
de l'execution de fon Teftament :
il s'acquitta de cette commiffion à la fatisfaction
des heritiers & legataires , qui
s'emprefferent à procurer à ce pieux Abbé
un Evêché & des Emplois confiderables ,
mais que fon humilité , & l'amour de la
Retraite luy firent refuler.
On efpere donner au Public la Vie de
cet illuftre Abbé , qui a eu beaucoup de
182 LE MERCURE
liaifon & de relation avec l'Abbé de la
Trappe. On y apprendra plufieurs particularitez
de la Vie de ce dernier , échapées
à la connoiffance de ceux qui l'ont
mife au jour ; on y joindra auffi celle de
N. Druel d'Angouille , foeur de l'Abbé
dont on annonce la mort , auffi decedée
en reputation de Sainteté dans l'Ordre de
la Vilitation.
La Maiſon de Druel d'Angouille eft
Noble & ancienne en Normandie , a toujours
été Militaire , & fourni dans le fiécle
paffé des Officiers Generaux & Gouverneurs
de Places.
ZYX12712
EDIT DUROT ,
Donné à Paris au mois de Septembre ,
Scellé & registré , par lequel Sa Majesté
ordonne ce qui fuit.
ARTICLE
QHo
PREMIER .
U'IL ne foit plus fabriqué dans les
Hôtels de nos Monnoyes d'autres
Efpeces d'Or & d'Argent , que celles qui
porteront les empreintes figurées dans le
cahier attaché fous le contre-fcel du prefent
Edit ; fçavoir ; les Louis d'Or du
titre de vingt-deux Karats , au remede de
DE
SEPTEMBRE.
183
dix trente deuxièmes , à la taille de vingtcinq
au Marc , douze grains de remede ,
les demis à proportion ; & des Louis d'Ar-
4gent ou tiers d'Ecus , du titre de onze deniers
, au remede de trois grains à la taille
de tiente au Marc , une demie piece de
remede , des demis & des quarts à proportion
, à la reſerve du remede de poids qui
fera d'une piece par Marc pour les demis,
& de deux pieces & demi pour les quarts .
II.
Lefquelles efpeces feront marquées
d'un grenetis fur la tranche , & auront
cours dans tout notre Royaume , Païs
Terres & Seigneuries de notre obéïffance ,
fur le pied de cinquante quatre livres les
Louis d'Or , les demis à
proportion , &
de foixante fols les Louis
d'Argent , les
demis & quarts à
proportion.
2
III. Le travail de ladite fabrication
fera jugé en nos Cours des
Monnoyes
conformément à l'Article IV, de notre Edit
du mois de
Decembre 1719.
IV. Voulons & Nous plaît que toutes
les anciennes efpeces d'Or & d'argent , autres
que celles qui feront fpecifiées dans
l'Article fuivant , foient , ainfi que les ef
peces étrangeres , les livres d'Argent & lest
Dixiémes d'Ecus , portées aux Hôtels de
nos
Monnoyes
inceffamment aprés le 15
d'Octobre
prochain , pour yêtre fondues &
converties en Efpeces de la fabrication or
1
184
LE MERCURE
donnée par le preſent Edit.
V. Voulons pareillement que les Loui
d'Or & les demis Louis d'Or de vingt
cinq au Marc , fabriquez en conſequenc
de l'Edit du mois de May 1718. les Ecust
de dix au Marc de la même Fabrication
comme auffi les demis , quarts , fixiémes
& douzièmes defdits Efcus , même les tiers
d'Ecus ou Louis d'Argent , foient portez
aux Hôtels de nos Monnoyes immediatement
aprés ledit jour 15. Octobre prochain
, pour y être remarquez ou reformez
des mêmes Empreintes que celles de la
nouvelle Fabrique ordonnée par le prefent
Edit , & avoir cours ; fçavoir , les Louis
& les demis Louis d'Or fur le même pied
que ceux de fabrique , & les Ecus de Dix
au Marc pour neuf livres , les demis
tiers , quarts ,
fixiémes & douzièmes à
proportion ; leſquelles Efpeces reformées
feront marquées d'un differend , qui fera
prefcrit par les Officiers de nos Cours des
Monnoyes.
>
VI. Entendons que les Diminutions indiquées
fur les Efpeces & Matieres d'Or
& d'Argent , pour les premier & 16. Octobre
prochains , foient executées dans le
Public conformément à l'Arrêt de notre
Confeil du 30. Juillet dernier , & que
celles defdites Elpeces & Matieres qui feront
portées aux Hôtels de nos Monnoyes
P
depuis
DE SEPTEMBRE. 185
depuis ledit jour 16 Octobre jufqu'au premier
Decembre prochain , pour être converties
ou reformées en confequence du
prefent Edit , foient reçûës par les Officiers
defdites Monnoyes , ainfi que par les
Changeurs , fur le pied ; fçavoir , les Louis
d'Or de vingt-cinq au Marc pour Trentefix
livres piece , les demis à proportion ;
les Ecus de Dix au Marc pour Six livres,
les demis , tiers , quarts , fixiémes & douziémes
à proportion , & toutes les autres
Elpeces & Matieres au poids , à proportion
de Neuf cens livres le Marc de Louis
ou de vingt-deux Karats , & Soixante livres
le Marc des Ecus & de l'Argent du
Titre de onze deniers de fin ; & qu'en
joignant par nos Sujets une moitié en fus
du produit de leurs Efpeces & Matieres
en Billets de Banque de Dix livres , de
Cinquante livres & de Cent livres , la totalité
leur foit fournie comptant en nouvelles
Efpeces , fur le pied de Quatrevingt-
dix livres le Marc d'Argent , & l'Or
à proportion. ..
VII. Voulons qu'à commencer du pre
mier Décembre prochain , lefdites anciennes
Efpeces foient decriées de tout cours,
& ne puiffent être expofées ni negociées
dans le Commerce , à quelque prix que
se puiffe être , à peine de confifcation. J
de Trois mille livres d'amende contre
186 LE MERCURE
4
chacun des contrevenans
profit des Denonciateurs .
applicable au
VIII . Ordonnons que paffé ledit jour
premier Decembre , celles defdites Efpeces
qui fe trouveront en la poffeffion des
Particuliers , Communautez & de toutes:
fortes de perfonnes generalement quelconques
, de quelque qualité & condition.
qu'elles foient , même parmi les Meubles
& Effets des Parties faifies ou des perfonnes
decedées , feront & demeureront confifquées
à notre profit , & portées aux Hôtels
de nos Monnoyes , pour y être conver
ties en nouvelles Efpeces , fans que cette·
peine ni les precedentes puiffent être re
putées comminatoires , & que la mainlevée
defdites Efpeces puiffe être accordée
fous quelque prétexte que ce foit.
IX. Enjoignons aux Officiers qui au
ront fait les faifies , appofé & levé les ,
Scellez & dreffé les Inventaires , de donner
avis aux Procureurs Generaux és Cours
de nos Monnoyes , ou à leurs Subftiturs
dans les Provinces , defdites Efpeces an
ciennes qui fe feront trouvées , à peine
d'interdiction & en outre d'être con
damnez en leurs propres & privez noms .
à la valeur de dites Efpeces qui au payer
ront été recelées , & en l'amende qui ne
pourra être moindre que du quadruple
fans que lefdites peines puiffent êtrere..
purées comminatoires..
›
DE SEPTEMBRE. 187
X. Voulons qu'en cas de Denonciation
contre les Particuliers , Communautez ou
Officiers contrevenans , la moitié defdites:
confifcations & amendes foit payée aux
Denonciateurs par les Directeurs de nos
Monnoyes , auffi-tôt qu'ils en auront reçû
le fonds , & ce fur les fimples Certificats
qui feront à cet effet delivrez par les Procureurs
Generaux de nos Cours des Monnoyes
, ou par leurs Subftituts dans les
Provinces , qui auront reçû lefdités De--
nonciations , fans qu'il foit neceffaire d'y
dénommer les Denonciateurs , ni qu'ils
puiffent être tenus de, donner d'autres ac
quits que lesdits Certificats , en vertu deſquels
la moitié qui aura été payée aux porteurs
d'iceux , fera paffée & allouée dans la
dépenfe des Comptes defdirs Directeurs , &
par tout ailleurs fans difficulté .
XI. Entendons que l'Arreft de notre
Confeil du 21 Mars 1716 foit exécuté felon
fa forme & teneur , & qu'en confequence
les Depofitaires des ancienes Efpe .
ces d'or & d'argent de France ou Etrangeres
, feront tenus de les porter aux Monnoyes
dans le tems fufdit ; paffé lequel , &
à commencer ledit jour premier Decembre
, celles qui fe trouveront en leurs mains
ou parmi leurs effets , feront & demeureront
confifquées à notre profit , fauf le res
Cours des Proprietaires ou Creanciers contre
Qij
188 LE MERCURE
lefdits Depofitaires , tant pour le principal
defdites Efpeces , que pour les diminutions
du prix , nonobftant toutes les indemnités
qu'ils pourroient avoir defdits Proprietaires
à ce fujet , lefquelles indemnités faites ou
à faire Nous annullons expreffément par le
prefent Edit.
XII. Défendons à toutes perfonnes , à
peine de la vie , de contrefaire nos Efpeces
; ou de contribuer à l'expofition de celles
qui auroient été contrefaites , même
d'en introduire dans notre Royaume de
la nouvelle Empreinte , quand elles auroient
été fabriquées dans nos Monnoyes.
XIII . Voulons que les Déclarations
Arrests , & Reglemens concernant le tranf
port des Efpeces & matieres d'or & d'argent
,
foient executez felon leur forme &
teneur ; & en confequence , faifons trésexpreffes
inhibitions & défentes à tous nos
Sujets ou Etrangers qui fe trouveront dans
notre Royaume , de tranfporter hors d'i
celui , fans notre permiffion par écrit , aucunes
deldites Efpeces & matieres d'or &
d'argent , à peine de la vie , de fix mille
fivres d'amende , & de confifcation , tant
defdites Efpeces ou matieres , que des marchandifes
dans lefquelles elles pourroient
être emballées , enfemble des Vaiffeaux ,
Chariots , Chevaux , Mulets & autres Equi
pages qui auroient fervi au tranſport , lef
DE SEPTEMBRE. 184
hy
dites confiſcations & amendes applicables.
un quart à notre profit , un autre quart aux
Hôpitaux les plus prochains , & la moitié
reftante aux Dénonciateurs ou à ceux qui
auront arreſté les contrevenans , fans que
la peine de mort puiffe être remife par nos
Juges aufquels la connoiffance en appartient
, à peine d'être exclus pour toûjours.
de tous Offices de Judicature.
XIV. Permettons feulement à nos Su
jets & aux Etrangers fortans de notre
Royaume de porter la quantité d'Efpeces.
fabriquées ou reformées en vertu de notre
prefent Edit , qui fera neceffaire pour
leur fubfiftance & celle de leurs Valets &
équipages.
XV. Défendons à tous Orfevres , Joiïailliers
, & autres Ouvriers travaillans en
or & en argent , de difformer aucunes Epeces
de Monnoye pour les employer à
leurs ouvrages , à peine des Galeres à
perpetuité , comme auffi d'acheter ou vendre
les matieres d'or & d'argent à plus haut
prix que celui qui en doit être payé aux
Hôtels de nos Monnoyes , à peine de confiſcation
, & d'amende arbitraire qui ne
pourra être moindre que de la valeur des
Efpeces confifquées.
XVI. Entendons que les Droits des Di-
*recteurs de nos Monnoyes , enfemble ceux
desMonnoyeurs & des Ajufteurs, foient al
190 LE MERCURE .
loués dans les Comptes de la Regie defdites
Monnoyes , pour la fabrication or
donnée par le prefent Edit , fur le pied fixé
par l'Arreft de notre Confeil du 19 Janvier
1715, ainsi que pour les Livres & Louis
d'argent cy-devant fabriquez , & que les
Droits de tous les Officiers de nofdites
Monnoyes , foient paffez pour la reforma
tion , fur le pied du double de ce dont ils
ent joui dans la precedente..
XVII . Ordonnons que les Billets de
Banque qui feront portez aux Hôtels de
nos Monnoyes , y foient biffez & enfuite
brûlez en l'Hôtel de Ville de Paris , par
les Commiffaires que nous nommerons à
cet effet.
Regiftré en la Cour des Monnoyes , ony,
& ce requerant le Procureur General du Roy,.
pour être executées felon leur forme & teneur,
fuivant l'Areft de ce jour. Fait en
la Cour des Monnoyes , les Semestres affemblez
le trentiéme jour de Septembre milſept:
cent vingt..
Signé , GUEUDRE...
Approbation de M. Demontempuys , Avocat en
Parlement , Cenfeur Royal des Livres.
Ay lû par ordre de Monfeigneur le Chancelier
un Manufcrit intitulé , Le Nouveau Mercu
e pour le mois de Septembre 1720 , dont j'ay paraphé
les feuillets . Fait à Paris ces Octobre 1720.
DEMONTEMPUYS...
D
TABLE.
Es Rois des Princes du Sang de
France qui ont vu leurs Petits- Fils .
Arriere- Petits- Fils , par M. de
Camps , Abbé de Signy.
Chandrashfen , Roman Indien..
3
16
Poefies ; L'Ode des Medecins a été preſentée
à l'Academie des feux Floraux de Tonlonfe.
Arrits , Edits & Declarations.
37
$4
Declaration du Roy touchant la conciliation
des Evêques.. 90
Differtation fur les Dignitez hereditaires
attachées aux Terres titrées-
Nouvelles Etrangeres..
101
114
Etat general des fommes que le feu Roy Louis
XIV. devoit à fa mort , arrivée le premier
Septembre 1715
95
Ode.
Epigramme
Enigmes..
1:399
149
15.1
J452
Chanfon. 153
Mariages.
154
Extrait du Difcours de M. Cadry Vicaire
de Saint Paul.
Morts de Paris.
Morts Etrangeres.
Charges & Dignitez
Journal de Paris.
160
164
166
167
168
Second Avis pour la nouvelle Edition des
Jugemens des Sçavans fur les principaux
Ouvrages des Auteurs,
Morts.
178
181
Edit du Roy , portant qu'il fera fabriqué de
nouvelles Efpeces d'Or & d'Argent , 282
LE
NOUVEAU
MERCURE
OCTOBRE 1720 .
Le prix eft de vingt - cinq fols,
DE
LA
LYON
1893
VILLE
A PARIS.
Chce GUILLAUME CAVELIER , au Palais .
La Veuve de PIERRE RIBOU , Quay des
Auguftins , à l'Image S. Louis.
Et GUILLAUME CAVELIER , Fils , ruë
S. Jacques , à la Fleur-de- Lys d'Or,
M DCC. X X.
Avec Approbation & Privilege du Roya
AVIS.
Ο
N prie ceux qui adreſferont
des Paquets ou
Lettres à l'Auteur du Mercure
, d'en affranchir
le port ,
fans quoy ils resteront au rebut.
Y
L'Adreffe de l'Auteur , eft .
A Monfieur Bu CHET , Cloître
S. Germain l'Auxerrois .
On donne avis, qu'on trouve
chez les Libraires ci -deffus
nommez , tous les Mercures
de l'année 1718 & 1719 , de
même que l'Abregé de la Vie
du CZAR .
De l'Imprimerie de C. L. THIBOUST ,
Place de Cambray
LE
NOUVEAU
MERCURE .
ORIGINE DES
ARMOIRIES ;
& des Surnoms en France.
D
E tout temps on a mis des
ornemens fur les Boucliers ,
Ecus ou Pavois , mais .on
n'a commencé en France d'y
figurer des Armes , pour parler
fuivant le terme en ufage , que dans
le onzième fiecle , environ le temps des
premieres Croiſades pour la conqueste de
la Terre Sainte : Il fe trouve même avant
le voyage de Godefroy de Bouillon , fait
en 1096 , des Sceaux de quelques Princes
& grands Seigneurs qui y paroiffent
à cheval armez avec leurs Boucliers ou
Ecus , tenans quelquefois d'une main un
A ij
LE MERCURE
Guidon fur l'épaule , mais fans aucunes
armes.
La Croifade refoluë en 1095 & faite
en 1096 fous la conduite de Godefroy de
Bouillon , & celles qui fe font faites depuis
, ont donné lieu à établir l'ufage des
Armoiries par la neceffité de fe reconnoître
& de pouvoir diftinguer les Chefs dans
une fi prodigieufe quantité de Croiſez ; la
plupart prirent pour Armes des Croix
de differentes façons par rapport au fujet
de leur voyage , & aux Enfeignes fous
lefquelles ils s'étoient enrôllez . Ils fe figurerent
de differentes couleurs non feulement
fur leurs Ecus , mais auffi fur leurs
Bannieres & fur leurs Cottes - d'Armes ,
à caufe de quoy on les a appellées Armoiries.
Il y a plusieurs exemples qui prouvent
que dans ces commencemens on n'oblervoit
pas les regles' preferites depuis par
les Herauts d'Armes & par l'ufage , &
que les Armes n'ont commencé à eftre
hereditaires que depuis l'an 1200. Elles ne
l'ont pas même été fi regulierement dans
la fuite , que fouvent un Seigneur , un
Prince , même un Roy , ayant nombre de
Fils , les cadets , & quelquefois les aînez
ne quittaffent le furnom & les Armes de
leur père, pour prendre celui de leur mere
cu d'un oncle , parce qu'ils leur avoient
D'OCTOBRE.
laiffé de grandes Terres , ou parce qu'ils
s'étoient mariez avec des heritiers dont
ils prenoient le nom & les Armes par obligation,
ou fuivant l'ufage, de porter le nom
& les Armes de la principale Terre. Le
fujet de ce changement de nom venoit
auffi de ce qu'il y avoit peu de furnoms
fixes jufqu'environ l'an 1200. Avant ce
temps la plus grande partie des perfonnes
étoient connues par leurs noms de Batêmes
, ou indiquez par le nom du lieu de
leur naiffance , ou d'un lieu dont ils étoient
poffeffeurs , ou par leur qualité ou leur
métier , ou par le nom de Batême de leur
pere.
Les anciennes Chartes de nos Rois ne
parlent gueres des Seigneurs de leur Cour ,
& de leurs grands Officiers , que fous les
noms du Comte Thibaut , du Comte
Guillaume , Renaut Bofon , &c . de Raon!
Senechal ou Dapifer , d'Alberic Comes Stabuli
ou Connêtable , d'Arnoul Chancelier,
de Pierre , fils d'Arnoul , &c. Et dans les
foufcriptions ils ne mettoient pareillement
que leur nom de Batême , & celui
de leur dignité. 411
L'Etabliffèment des furnoms s'eft toujours
fortifié depuis l'an 1200 , & tous
les noms ont eu pour origine les noms de
Batême , les Terrès , les Dignitez , les
Profeffions , les fobriquets que l'on don-
A iij
AVIS .
O
N prie ceux qui adreſferont
des Paquets
ou
Lettres à l'Auteur du Mercud'en
affranchir
le port ,
ils resteront au rere
,
fans
quoy
but.
L'Adreffe de l'Auteur , eft .
A Monfieur Bu CHET , Cloître
S. Germain l'Auxerrois .
On donne avis, qu'on trouve
chez les Libraires ci -deffus
nommez , tous les Mercures
de l'année 1718 & 1719 , de
même que l'Abregé de la Vie
du CZAR.
De l'Imprimerie de C. L. THIBOUST ,
Place de Cambray
LE
NOUVEAU
MERCURE .
ORIGINE DES ARMOIRIES ;
& des Surnoms en France.
D
E tout temps on a mis des
ornemens fur les Boucliers ,
Ecus ou Pavois , mais .on
n'a commencé en France d'y
figurer des Armes , pour parler
fuivant le terme en ufage , que dans
le onzième fiecle , environ le temps des
premieres Croisades pour la conqueſte de
la Terre Sainte : Il fe trouve même avant
le voyage de Godefroy de Bouillon , fait
en 1096 , des Sceaux de quelques Princes
& grands Seigneurs qui y paroiffentà
cheval armez avec leurs Boucliers ou
Ecus , tenans quelquefois d'une main un
A ij
LE MERCURE
Guidon fur l'épaule , mais fans aucunes
armes.
La Croifade refoluë en 1095 & faite
en 1096 fous la conduite de Godefroy de
Bouillon , & celles qui fe font faites depuis
, ont donné lieu à établir l'ufage des
Armoiries par la neceffité de fe reconnoître
& de pouvoir diftinguer les Chefs dans
une fi prodigieufe quantité de Croiſez ; la
plupart prirent pour Armes des Croix
de differentes façons par rapport au fujet
de leur voyage , & aux Enfeignes fous
lefquelles ils s'étoient enrôllez . Ils fe figurerent
de differentes couleurs non feulement
fur leurs Ecus , mais auffi fur leurs
Bannieres & fur leurs Cottes - d'Armes ,
à cauſe de quoy on les a appellées Armoiries
.
Il y a plufieurs exemples qui prouvent
que dans ces commencemens on n'oblervoit
pas les regles' preferites depuis par
les Herauts d'Armes & par l'ufage , &
que les Armes n'ont commencé à eftre
hereditaires que depuis l'an 1200. Elles ne
l'ont pas même été fi regulierement dans
la fuite , que fouvent un Seigneur , un
Prince , même un Roy , ayant nombre de
Fils , les cadets , & quelquefois les aînez
ne quittaffent le furnom & les Armes de
leur père, pour prendre celui de leur mere
cu d'un oncle , parce qu'ils leur avoient
D'OCTOBRE.
;
laiffé de grandes Terres , ou parce qu'ils
s'étoient mariez avec des heritiers dont
ils prenoient le nonr & les Armes par obligation,
ou fuivant l'ufage, de porter le nom
& les Armes de fa principale Terre. Le
fujet de ce changement de nom venoit
auffi de ce qu'il y avoit peu de furnoms
fixes jufqu'environ l'an 1200. Avant ce
temps la plus grande partie des perfonnes
étoient connues par leurs noms de Batêmes
, ou indiquez par le nom du lieu de
leur naiffance , ou d'un lieu dont ils étoient
poffeffeurs , ou par leur qualité ou leur
métier , ou par le nom de Batême de leur
pere.
¿Les anciennes Chartés de rios Rois ne
parlent gueres des Seigneurs de leur Cour ,
& de leurs grands Officiers , que fous les
noms du Comte Thibaut , du Comte
Guillaume , Renaut Bofon , & c . de Raonl
Senechal ou Dapifer , d'Alberic Comes Stabuli
ou Connêtable , d'Arnoul Chancelier,
de Pierre , fils d'Arnoul , &c . Et dans les
foufcriptions ils ne mettoient pareillement
que leur nom de Batême , & celui
de leur dignité.
L'Etabliffément des furnoms s'eft toujours
fortifié depuis l'an 1200 , & tous
les noms ont eu pour origine les noms de
Batême , les Terrès , les Dignitez , les
Profeffions , les fobriquets que l'on don-
A iij
6 LE MERCURE
noit fur une profeffion ou imperfection ,
comme le Roy, le Prince, le Duc, le Comte,
le Vicomte , le Baron, le Bouteillier , le Bou
lenger, le Tavernier, le Marêchal , le Blanc,
le Noir , le Rouge , le Roux , le Blond ,
le Brun , le Grand , le Petit , le Boiteux ,
le Borgne , le Bon , le Méchant , &c .
On peut donc compter comme certain
que le commencement des Armes a été
fur la fin du onzième fiecle , & au commencement
du douzième , & qu'elles n'ont
commencé à eftre hereditaires aux familles,
auffi bien que les furnoms, que depuis l'an
i 200.
USAGE DES ARMOIRIES
comme elles font composées.
Après avoir marqué fuccintement le
tems de l'établiffement des Armoiries en
France ; il femble que l'ordre veut que
l'on dife un mot de leur ufage , & comment
elles font compofées.
Autrefois il n'y avoit que la Nobleffe à
qui il fut permis de porter des Armes ;
mais à preſent il eſt établi que chacune
des Provinces , toutes les Villes , & prefque
tous les hommes de quelque diftintion
, même parmi la fimple Bourgeoisie ,
ont des Armes particulieres.
On prend foin de tems en tems de reD'OCTOBRE.
7
primer ces derniers , quand ils portent avec
des Armes des qualitez qui leur donnent
des privileges qui ne font dûs qu'à la veritable
Nobleffe , mais toutes ces précautions
n'ont encore pû en arrêter l'abus.
L'origine de cet abus vient de la multiplicité
des Charges & des Privileges accordez
par nos Rois depuis Philippe le Bel ,
dans des tems de neceffité , ou par reconnoiffance
de quelques fecours ou fervices
fignalez , aux Bourgeois de certaines Villes ,
de pouvoir non feulement poffeder des
Fiefs , mais auffi porter des Armoiries.
Elles font compofées de tant de façons ,
qu'il eft fort difficile de donner des regles
pour les définir toutes , & pour éviter un
nombre infini de termęs bizares , plus capables
de fatiguer la memoire que d'inftruire
; il n'en fera parlé qu'en general ,
& le détail on peut
pour
plufieurs ouvrages qui ont été faits fur
cette matiere , & particulierement par le
P. Meneftrier.
avoir recours à
Les Armes parlantes & les Armes fimples
ont toujours été reputéés les meilleures.
Les Armes parlantes font celles qui
defignent le nom de la famille qui les
porte , & il n'y a rien à y fouhaiter quand
elles font fi anciennes , qu'il eft incertain .
fi la famille a emprunté fon nom des Armes
, ou fi la famille a donné le nom aux
A iij
3 LE MERCURE
Armes. Quand il faut plufieurs pieces differentes
pour en exprimer le nom , elles
fentent le rébus & la compofition d'une
Nobleffe de nouvelle impreffion . A l'égard
des Armes fimples , ce font des Lions ,
des Aigles , des Oileaux , des Fleurs , des
Bandes , des Faces , des Barres , des Pals , -
des Chevrons , des Croix , & c.
Dans le même tems que l'ufage a été
introduit de figurer des Armoiries fur les
Boucliers ou Ecus , fur les Cottes d'Armes
, fur les Bannieres , &c. On s'en eft
aufli fervi fous la même figure d'Ecuffon ou
Banniere pour des Sceaux établis au lieu
des Monogrames pour autorifer les Actes .
C'eft ce qui a rendu les Sceaux fi communs
depuis l'an 120o , jufqu'environ le Regne
de François premier en 1515 ; le Sceau
tenoit lieu de fignature , & étoit fi neceffaire
, que la plus grande partie de la Nobleffe
ne pouvoit autorifer fes fimples
Actes , faute de fçavoir écrire & figner ,
que par les Sceaux fur lefquels étoient figurées
leurs Armes . Depuis l'an 1515 que
la Nobleffe , & même le commun du peuple
, ont cultivé davantage les fciences par
la protection que les Rois & les Princes
leur ont donnée , l'ufage des Sceaux a diminué
& eft réduit à prefent aux provifions
des Charges , aux Certificats , à quelques
Actes publics , & aux fimples Cachets
D'OCTOBRE.
des Lettres ; mais tous les autres Actes , &
particulierement les Acquits des Guerres ,
qui étoient fans nombre , auffi bien qu'à
prefent , & qui étoient tous fcellez , ne
font plus autorilez que par des fignatures .
Ce que l'on appelle Emaux en Armoiries
, font les metaux , les couleurs , & les
fourures.
Les métaux font l'Or , qui eft jaune ,
& l'Argent , qui eft blanc .
Les couleurs que je croy la plûpart avoir
été originairement des fourures, font l'azur,
qui eft bleu ; le gueule , rouge ; le finople ,
verd ; le fable , noir ; & le pourpre , qui
eft très peu en ufage. Il y a même apparence
que cette couleur s'eft formée de
quelqu'autre , qu'on a eu peine à diftinguer.
*
Les fourures font l'hermine , dont le
fond eft blanc ou d'argent , avec des mouchetures
noires ; c'eft la peau d'un Rat ,
appellé par les Latins Mus ponticus , dont
on doubloit les robbes des Rois , Princes ,
Ducs , &c. L'on a ajoûté pour relever la
blancheur du poil de cet animal des mouchetures
noires. Quelques - uns croyent avec
beaucoup de vrai- femblance que ces peaux
nous font d'abord venues par l'Armenie
& que c'est ce qui a donné lieu à les appeller
Armines , puis Hermines. Le Vair
eft auffi compofé de la peau d'un autre
ΙΟ LE MERCURE
Rat Sarmatique ou de Ruffie , moins rare
que l'hermine. Il eft gris fur le dos , approchant
du bleu , & blanchâtre fous le ventre
, approchant de l'argent ; & c'eft pour
cette raison que lors qu'on dit vairé , cela
s'entend d'argent & d'azur , s'il eft autrement
, il faut , l'expliquer . Les naturels du
païs , & plufieurs Auteurs appellent cet
animal Vair. On s'en fervoit auffi anciennement
pour la fourure des habits , ainfi
qu'il feroit aifé de le prouver par quantité.
d'exemples dans l'Hiftoire , & par des Monumens
.
L'Echiquier ou l'Echiqueté & le Lozangé
, qui eft un Echiqué pofé fur les angles ,
peuvent auffi paffer pour une fourure. En
1446 on allegua dans un procès pour autorifer
la Nobleffe de Jean Bureau de Tas,
qu'il étoit communément vêtu de robbes
à lambeaux en échiqueté , en habit de
Gentilhomme ; & l'on en voit encore dans
des habits peints à des vîtres , & à plufieurs
Monumens anciens.
L'ufage ou la regle eft depuis long- tems
établie , qu'on ne peut ajouter en Armoiries
de métail fur métail , ni couleur fur
couleur ; mais il n'y a gueres d'apparence
que dans le commencement de l'ufage des
Armoiries on obfervât ces regles . Les Armes
de Godefroy de Bouillon , qui font
des croix d'or , que l'on appelle de Hieru
D'OCTOBRE..
falem , à caufe de fa conquête, fur un champ
d'argent , en eft une preuve ; car pour la
diftinction que l'on a voulu faire à cauſe
qu'elles font contraires aux regles modernes
, que c'étoit des Armes à anquerre ,
il n'y a pas lieu d'y faire aucun fondement.
A l'égard de la divifion de l'Ecu , elle
fe fait en tant de parties que l'on veut ,
par le party , coupé , tranché , taillé ; que
Fon peut auffi exprimer parti en pal , en
face , en bande & en barre. Ces fignes
fervent pareillement à former les principales
pieces qui compofent les Armoiries ,
comme le pal , la face , la bande , la
barre , la croix , le fautoir , &c. ainſi qu'il
eft rapporté plus au long dans les Livres.
de Blazon .
Des ornemens qui accompagnent l'Ecu
des Couronnes .
Elles n'étoient autrefois que pour ceux
qui avoient droit d'en porter par leur dignité.
Elles ont toujours été en ufage fur la
tête des Rois & Souverains , dans leurs
Monnoyes & dans leurs Sceaux . Leur
Heaume ou Cafque , que l'on mettoit au
deffus de l'Ecu , fe trouvent couronnez depuis
le Regne du Roy Jean , & à leur
imitation la Nobleffe mit pareillement des.
12 LE MERCURE
Couronnes au deffus de leurs Cafques , &
quelquefois dans le col du Cafque ; ainfi
qu'il fe juftifie par une infinité de Sceaux
& d'autres inonumens ou d'anciennes
Armes qui fe font confervés. Les He
rauts d'Armes ont donné pour regle, qué
nul ne devoit porter la Couronne d'or fur
fon timbre , qu'il ne fût Gentilhomme de
nom d'armes & de cry .
L'ufage de mettre des Couronnes directement
au deffus des Ecus d'Armoiries
où il n'y avoit point de Cafque , n'a été
commencé par nos Souverains, que fous
le Regne du Roy Charles VI . Les Ducs .
& les Comtes n'ont pris cet ornement
au deffus de leurs Armes , que depuis
l'an 1500 , & l'abus s'eft introduit par ceux
qui n'ont point de droit que depuis l'an
1600. Il eft à prefent monté à un tel excès ,
qu'il n'y a plus de diftinction , la Couronne
Ducale a paffé à beaucoup de perfonnes
qui ne font ni Marquis ni Comtes ,
& celle de Marquis eft portée par ceux
qui ne font ni l'un ni l'autre ; celle de
Baron n'eft prefque plus en ufage , quoy.
qu'elle fut autrefois la marque de la plus
grande Nobleffe . Elle orne encore la tête
de la figure de Robert de France , Seigneur
de Bourbon ", Chef de la Maiſon
Royale , dans l'Eglife des grands Jacobins
à Paris.
D'OCTOBRE. 13
La Couronne ou Tiarre du Pape eft
faite comme un grand bonnet ceint de
trois Couronnes d'or , étoffées de pierreries
, au fommet de laquelle eft une boule
furmontée d'une croix pomelée .
L'Empereur a une Couronne fermée ,
furmontée d'un globe & d'une croix au
deffus. L'ufage de ce Globe que quelquesuns
veulent faire paffer pour une marque
de fuperiorité fur les autres Princes Souverains
, eft commun aujourd'huy avec
beaucoup de Rois , & l'on voit des Sceaux
des Rois de France dès le commencement
de la troifiéme Race , dans lesquels
ils font reprefentez avec un globe à la
main.
Les Rois de l'Europe portent tous à
prefent des Couronnes fermées , le premier
ufage en eft venu du Roy Charles
VIII . qui fut couronné Empereur d'Orient ,
& porta une Couronne fermée, telle qu'on
la voit encore aujourd'huy à ſon tombeau
à Saint Denis .
Auparavant lui nos Rois l'avoient portée
depuis Hugues Capet ouverte , avec
differens ornemens au deffus du cercle ,
mais plus fouvent fleurdelifée qu'autrement.
Louis XII . fucceffeur du Roy Charles
VIII. la porta ouverte. François premier
la porta fermée dès le commencement
de fon Regne. S'il eft vrai qu'elle
14
MERCURE LE
foit ainfi dans fon Seau au bas du Concordat
qu'il fit avec Leon X en 1516 , mais il
ya plufieurs autres de ces Seaux, Cachets &
Monnoyes où elle eft ouverte , jufqu'environ
l'an 1536 , elle paroît depuis preſque
toujours fermée. Les autres Kois ont fuivi
cet ufage , mais un peu plus tard à
l'exception du Roi d'Angleterre , qui a
commencé à peu prés dans le même tems
que le Roy de France .
Les Princes du Sang la portoient autrefois
feulement , comme la portent aujourd'hui
les Ducs. Depuis ils mêlerent moitié
fleurs de Lys & moitié feuilles d'Aches ,
mais à prefent il n'y a plus que des Fleurs
de Lys.
Les Electeurs de l'Empire portent un
Bonnet d'Ecarlatte rebraffé d'Hermines ,
diadêmé d'un demi- cercle fommé d'un
globe furmonté d'une Croix d'or . On
l'apelle , à caufe de ceux qui le portent, Bonnet
Electoral.
Les Ducs mettent au deffus du cercle des
feuilles d'Aches ; les Marquis moitié feuilles
d'Aches & moitié Perles , quelque fois
en bouquet de trois enfemble.
Les Comtes , au lieu de feuilles d'Aches
que portent les Ducs , y mettent des Perles
; les Vicomtes ne mettent que quatre
Perles dans une diftance égale fur le cercle,
& les Barons brodent feulement le cercle
D'OCTOBRE.
ou tortil de fillets de Perles .
15
Les Cardinaux mettent fur leurs Armes
le Chapeau Rouge à large bord , & quinze
Houpes de gueule floquées ou pendantes de
chaque côté , autrefois il n'y en avoit
qu'une ou deux. Lorfqu'ils font Patriarches
, Archevêques , Primats Primats , ou qu'ils
font envoyés Legats en quelques Provinces
, ils ajoutent , fous le Chapeau & derriere
leur Ecu , une double Croix qui eſt
treflée.
Les Archevêques portent fur leurs Armes
un Chapeau de finople à dix houpes
de chaque côté , derriere l'Ecu une Croix
à une ou deux traverfes felon la dignité
ou Primatie de leur Eglife.
Les Evêques portent pareillement le
Chapeau de finople avec fix houpes de
chaque côté , & derriere leur Ecu une Mitre
qui eft pofée de front au côté droit , `
& une Croffe au côté gauche tournée en
dehors.
Les Abbez portent fur l'Ecu de leurs Armes
un Chapeau de fable , dont les cordons
entrelaffez & pendans fe terminent
en deux houpes auffi de fable. Ceux qui
font mitrés timbrent leurs Ecus d'une Mitre
à droit & en profil , & d'une Croffe
tournée en dedans . Les non - Mitrés mettent
ſeulement la Croffe . Les Abbés qui
font Religieux ont un petit linge attaché
à leur Croffe.
16 LE MERCURE
Les Cardinaux , Archevêques , Evêques
& Abbés qui font Princes , Ducs , Marquis
, ou Comtes , mettent avec droit fur
leurs Ecus - les Couronnes de Princes , de
Ducs , de Marquis &c . ainfi que ceux qui
font fortis de Maifons de Princes, de Ducs ,
&c .
Les Abbeffes portent leurs Armes fur
une Lozange , ainfi que les Filles , & mettent
derriere une Croffe , contournée à
gauche quand elles font Croffées , & autour
un Chapelet de fable .
• Les Chevaliers de Malte portent autour
de leur Ecu le Chapelet d'or entrelaffé
dans les pointes de la grande Croix d'argent,
qui font les Armes de la Religion de
Saint Jean de Jerufalem dont ils font profeffion.
Les Chevaliers Commandeurs ajoutent
derriere leurs Ecus une Epée , dont
la pointe paroît au-deffus & la garde en
bas. Les Grands Maîtres de l'Ordre timbrent
leur Ecu d'une Couronne de Prince.
DES TIMBRES.
des Lambrequins , des Cimiers , & des
Cris de Guerre.
On appelle Timbre ce qui furmonte
l'Ecu comme le Cafque , les Lambrequins ,
les Cimiers & les Cris de Guerre. On dit
un Ecu timbré de fon Cafque , &c.
Il
D'OCTOBRE 17
Il y a environ 400 ans que l'on a commencé
à mettre de ces ornemens au deffus
des Ecus d'Armoiries. Les Calques fe
.mettoient avec moins de façon qu'aujourd'huy.
Il eft vray que ceux des Rois avoient
plus d'ornemens & étoient quelquefois de
front , mais les autres étoient tous de côté,
& les grilles & autres ouvertures des uns &
des autres étoient fans diftinction , fur tout
dans les commencemens. A prefent on reprefente
les Cafques des Souverains ouverts
& de front ; ceux des Princes & des Ducs
n'ont pas tout à fait la vifiere levée ; & tous.
ceux qui font d'une dignité au deffous , la
vifiere en eft abaiffée , & ils y mettent plus
ou moins de grilles , mais on peut compter
pour certain que chacun en met plus
qu'il n'en doit avoir , pour paroître au deffus
de fon veritable état .
Les Lambrequins font des Lambeaux ou
Banderolles pendans du Bourlet du haut
du Cafque pour ornement autour de la
tête , & qui venoient flotter fur les épaules
. On les coloroit ordinairement des
Emaux de l'Ecu: Au lieu de ces Banderolles
, on y mettoit quelquefois des plumes
d'autruche, telles qu'on les voit reprefentées
dans des tapifferies & autres lieux ;
mais ces livrées & couleurs étoient perfonnelles
, & chacun en prenoit felon ſon
goût , pour le faire diftinguer , foit dans un
B
18 LE MERCURE
Tournoy , ou dans un Combat .
Le Cimier eft élevé au - deffus du Calque
, & eft auffi de pure fantaiſie , chacun
en prenoit felon fon inclination , & .
quelquefois la paffion pour la guerre ou
pour autre chofe y avoit bonne part ; d'autres
confervoient par leur Cimier la me
moire de quelque belle action. Il y a beaucoup
de Familles qui les ont formés dé quelques
pieces de leurs Armes ou de leurs.
Dignitez .
La Maiſon Royale a fouvent mis pour
Cimier une double Fleur deLys ; les Ducs de:
Bourgogne ont fait de même & pluſieurs
autres Princes du Sang. D'autres ont pris.
des Aigles , des Lions , & c. Mais cet ufage
eft bien moins pratiqué en France qu'en
Allemagne , où ils chargent fouvent leur
Ecu de plufieurs Cafques & Cimiers .
Les Cris de Guerre étoient autrefois en
ufage pour les Rois , les Princes & les
Seigneurs en état de mener affez de Vaffaux
pour fe faire accompagner à la guerre
& y avoir du commandement. On mettoit
quelquefois des Cris fur des Bannieres,.
& on s'en fervoit ordinairement pour implorer
le fecours du Ciel ; exciter à combatre
vaillamment ; étonner les ennemis ;
demander du fecours dans le befoin ; fe
reconnoître dans la mêlée ; & raſſembler
les guerriers dans une occafion preffante.
D'OCTOBRE. 1.9
Õ ་
Quand ces Bannieres étoient perduës &
écartées , ou à des heures qu'on ne pouvoit
les diftinguer , outre le Cri particuculier
de chaque Banniere ou Chevalier
Banneret , il y avoit le Cri general , qui
étoit ordinairement celui du Souverain ou
du General , duquel toute l'armée fe fervoit
dans le commencement d'une Bataille.
Le Cri de Guerre des Rois de France étoit ,
Montjoye Saint Denis , ce qui fignifie , Mon
Dieu , ou felon que Mathieu Paris l'obferve
, Montjoye , Dieu aide. Ce Cri fut pris
par le Roy Clovis à la Bataille de Tolbiac
appellant à fon ayde , Jefus - Chrift
Dieu de Saint Denis , voyant que la victoire
balançoit du côté des Allemands.
Celui de Bourbon , Bourbon Notre- Dame
ou Efperance. Souvent les Cris de Guerre
des Bannerets & Seigneurs n'étoient autre
chofe que le nom de leur Famille , auquel
on joignoit quelquefois celuy de la Vierge
ou de quelque Saint , pour lequel on
avoit dévotion , mais il n'étoit pas permis
aux puifnez d'avoir le même Cri en entier
que leurs ainez ; il falloit qu'il y ajoutaffent
quelque difference, même qu'il ne leur étoit
pas permis de porter les pleines Armes de
leur Maiſon fans brifure. A l'égard des
Cris dont on fe fervoit dans les Tournois
c'étoit fouvent des rébus, ou des devifes
quiavoient ordinairement pour pretexte QIL
Bij,
20 LE MERCURE
fondement quelque miftere d'amitié .
Des Supports.
On les divife en Suports , Tenans & Ap- !
puis mais cette divifion n'eft bonne qu'à
groffir un Livre , puifque les Figures humaines
que l'on veut qui foient Tenans ,
ne tiennent que pour fuporter l'Ecu . Ainſi
je compte pour Suports tout ce qui fupporte
ou foutient l'Ecu. L'ufage des Suports
eft à peu près de l'ancienneté des
Cimiers &c. & il a toujours été de fantaifie
, les enfans n'ayant jamais pris par obligition
les Suports dont leurs peres s'étoient
fervis. Nos Rois ont changé plufieurs
fois , ils fe font fervis de Lions , de
Cerfs , ainfi que fit Charles VI. de Porcsepis
, comme fit Louis XII . & à prefent
ce font des Anges. L'ufage des Suports eft
plus en pratique en France qu'en nul autre
Etat , & on les peint ordinairement ou de
couleur naturelle , ou des émaux de l'Ecu
qu'ils fupportent.
DES MANTEAUX ,
& autres marques de Dignité.
Nos Rois , qui ne dépendent que de
Dieu & de leur épée , on: le droit & la
dignité du Pavillon , qui eft d'Azur femé
D'OCTOBRE.
de Fleurs-de-Lys , & doublé d'hermines.
Il eft compofé de deux parties , du Comble
, qui eſt ſon chapeau & des Courtines
qui font le Manteau ou le Mantelet . On
met fous le Pavillon ou Dais les Armes
de France foutenues de deux Anges vêtus
en Dalmatiques , tenans chacun une
Banniere aux Armes de France , & au
deffus du Pavillon une Banderolle fur laquelle
eft le Cry de guerre , Montjoye
Saint Denis.
Les Princes de la Maiſon Royale , & les
Ducs portent auffi derriere l'Ecu de leurs
armes un Manteau que l'on appelle Ducal .
Ils s'en fervoient dans les grandes ceremonies
, & particulierement aux Sacres des
Rois , où ils portoient auffi la Couronne
Ducale en tête. Ce Manteau eft en Armoiries
ordinairement brodé des Armes de celui
qui le porte , & doublé d'hermines , &
l'ufage de le mettre derriere l'Ecu , tant en
peinture que fur les Sceaux , n'eſt
puis le milieu du Siecle dernier .
que de-
Depuis peu les Princes étrangers & ceux
qui prétendent au rang de Princes , & qui
ne font pas Ducs , ont auffi decoré leurs Armes
d'un pareil Manteau.
LE MERCURE
(
De plufieurs Colliers des Ordres Mili
taires ou de Confraternité de Chevalerie,
defquels on orne les Ecus.
Les plus confiderables en France font
ceux de Saint Michel , établi par le Roy
Louis XI. en 1469 ; & du Saint Efprit ,
établi par le Roy Henri III . en 1578. Le
Collier de Saint Michel eft fait de doubles.
chaînes d'or entrelaffées , & fur lesquelles
font attachées d'efpace en efpace des coquilles
auffi d'or ; au bas du milieu du Collier
pendune Medaille , fur laquelle eſt un
Saint Michel qui foule le Demon fous fes
pieds. Le Collier de l'Ordre du Saint Efprit
eft fait de noufs de trophées , de Fleursde-
Lys , des angles defquelles fortent des.
flammes , & des premieres lettres du nom
du Fondateur , le tout d'or émaillé des diverfes
couleurs de l'Ordre & du Roy ; au
Bas du milieu du Collier pend une Croix
pommerée , des angles de laquelle fortent
des Fleurs- de- Lys , & fur le milieu une
Colombe blanche , fymbole du Saint Eſprit.
Ces deux Colliers environnent les
Armes de ceux qui font Chevaliers dé ces
Ordres.
DE LA NOBLESSE ,
Elle prendfa fource de differens moyens.
1. De la profeffion des Armes , à laD'OCTOBRE.
23
*
quelle étoit attachée la poffeffion des Fiefs .
2º De la reconnoiffance du Prince par
des Lettres d'annobliſſement pour differens
fervices .
3 ° . Et de la poffeffion des Charges & des.
Dignitez qui acquierent la Nobleffe.
Tous ces differens moyens pourroient
fe fousdivifer en plufieurs efpeces ; mais
qui jetteroient dans un detail qui ne convient
ni à un abregé , ni au deffein que :
l'on a de donner feulement une idée
generale
de l'origine de la Nobleffe Françoife.
,
1º. La profeffion des Armes a été la
plus noble & prefque le feul exercice des
Francs qui entrerent & conquirent peu à
peu les Gaules fous la premiere Race de
nos Rois ; & fans entrer dans la difcuffion
du temps & du lieu où s'eft fait le premier
établiſſement des Fiefs , ou diſtribution
des Benefices , on peut fuppofer que
ces Conquerans partagerent entre eux less
terres de leurs conquêtes , comme ils faifoient
le butin , fuivant les degrez de dignités
& de fubordination qui étoient
parmi eux. Le Roy après avoir pris la portion
, diftribuoit le refte fuivant leurs Loix
militaires , aux conditions. de relever delui
à certaines charges , & d'aller à la
guerre , quand il étoit neceffaire .
Les Generaux avoient certaines portions
de Provinces , qu'ils partageoient enfuite
24 LE MERCURE
aux Officiers ou Capitaines au deffous
d'eux ; & ceux- ci en divifoient encore de
certaines parties aux foldats , à condition
de fuivre leurs Capitaines à la guerre , de
même que leurs Capitaines étoient obligez
de fuivre leurs Generaux , & les Generaux
de fe rendre aux ordres du Roy , quand il
avoit quelque entrepriſe à faire , ou qu'il
étoit obligé d'armer pour conferver ſon
Pays & les conquêtes.
On peut dire que ces divifions & ſousdivifions
qui ſe font pratiquées même ſous
la feconde Race Royale & au commencement
de la troifiéme , font les fources des
grands Fiefs, des Fiefs & des Arrieres Fiefs,
dont nous voyons encore l'image dans les
devoirs des Bans & Arriere Bans.
Les poffeffeurs de ces Fiefs ou des portions
de terres ou pays faifoient profeffion
des armes , & étoient fi bien obligez d'aller
à la guerre , quand ils en avoient reçu la
femonce ; que s'ils y manquoient , ou s'ils
faifoient quelque crime capital , ils étoient
privez de leurs Fiefs ou benefice , ainsi qu'il
eft rapporté dans les Capitulaires de Charlemagne
, & ailleurs.
Le devoir d'aller à la guerre , & la confervation
du Prince & de l'Etat, étoit les
feules charges qui leur étoient impoſées , *
& prefque tout le refte des peuples , excepté
les gens d'Eglife , leur étoient foumis
comme
D'OCTOBRE.
comme ferfs ou comme efclaves , & fupportoient
toutes les autres charges de
P'Etat.
"
pour
Ce font des anciens poffeffeursde ces Fiefs
ou Seigneuries qu'eft fortie notre plus ancienne
Nobleffe . Elle fe reconnoît quand on
la remonter affez haut
peut
la trouver
en poffeffion d'une terre de laquelle elle portoit
le nom , dans le commencement de
l'établiffement des furnoms. Et quoique
faute de titres publics ou domeftiques , il
foit fouvent fort difficile & prefque im
poffible de remonter la filiation des famil
les jufqu'au temps de l'établiffement des
furnoms , il eft neanmoins vrai qu'il y a
en France quantité de Maiſons qui defcendent
de cette ancienne Nobleffe , & il ne
fera pas difficile de le perfuader , quand on
fera reflexion fur la quantité de Fiefs ,
Châteaux , Villages , Bourgs & Villes qui
font en France , lefquels prefque tous ont
donné chacun le nom à une famille de
cette ancienne Nobleffe.
Sous les XIII. & XIV . Siecles , nos
Rois commencerent par la necellité qu'ils
eurent de menager le tiers Etat , ou les
gens qui ne faifoient pas profeflion des
armes , de leur donner des Privileges , &
de leur permettre de poffeder des Fiefs ;
& il y a même des exemples , qu'après les
avoir poffedez un certain temps , & avoir
C
26 MERCURE LE
fait à la guerre le fervice attaché aux Fiefs ,
ils étoient reconnus Nobles en payant une
certaine finance. C'eft en Normandie où
ces exemples font plus communs.
auffi
2. Dans le même temps commença
l'ufage d'annoblir par Lettres Patentes , foit
pour quelque fervice confiderable à la guerre,
ou autrement . Dans ces premiers tems
çes annobliffemens étoient peu frequens ;
mais ils augmenterent beaucoup depuis le
regne de Philippe de Valois . Cependant
après la Nobleffe des Fiefs , ou plutôt celle
qui eft auffi ancienne que la Monarchie ,
celle des annobliffemens doit tenir la premiere
place , puifqu'elle eft faite ou fuppofée
être faite en connoiffance de cauſe ,
& qu'elle s'accorde directement par le Roy
fouvent pour quelque fervice fignalé , particulierement
à la guerre.
3. A l'égard de la Nobleffe qui s'acquiert
par la poffeffion des Charges , elle peut
être divifée en deux claffes ; celle des Maires
& Echevins de plufieurs Villes aufquelles
les Rois ont accordé ce beau privilege
par reconnoiffance de leur fidelité , ou pour
quelqu'autre neceffité , eft la plus ancienne
, mais la moins confiderable , fi on confidere
que quand le Roi a une fois donné le
Privilege de Nobleffe aux Officiers d'une
Ville , ce n'eft plus lui qui en fait le choix ;
il dépend ordinairement d'un nombre de
D'OCTOBRE. 22
Bourgeois & de Marchands , ou d'une populace
affemblée , qui a plus d'égard à élire
ceux defquels ils efperent tirer quelque utilité
, que de diftinguer les plus capables
de pouvoir foutenir avec honneur la qualité
de Nobles qu'ils acquierent par cette
election . Elle ſe fait ordinairement au fon
de la Cloche ; à caufe de quoi on appelle la
Nobleffe qui vient des Maires & Echevins
ou Officiers de Ville Nobleffe de la Cloche.
€
Pour la Nobleffe qui s'acquiert par
les Charges dont le Roy donne les Provifions
, elle diftingue davantage. Les
Secretaires du Roy qui tranfmettent à leurs
fucceffeurs la Nobleffe , quand ils meurent
revétus de leurs Charges , ou qu'ils les
ont exercées vingt ans , n'annobliffoient
pas avant Louis XI . & les poffeffeurs de
ces Charges n'ont commencé que plufieurs
regnes après ce Roy de prendre la qualité
d'Ecuyer. Les defcendans des Officiers des
Cours Superieures , qui ont eu pour pere
& ayeul ces Officiers morts revétus de leurs
Charges , ou qui les ont exercées vingt ans,
font maintenus & leur pofterité dans les
privileges de Nobleffe.
Tous les Nobles de ces differentes Efpeces
fe qualifioient felon les tems , ou leurs
dignitez , ou leurs naiffances , nobles
Ecuyers Valets , Damoifeaux , Chevaliers ,
Chevaliers Bacheliers , & Chevaliers Ban
Cij
28 LE MERCURE
nerers. Toutes ces qualitez vont être expliquées
par ordre ci - après.
De la qualité de Noble.
• La qualité de Noble convient en general
à tout homme qui a droit ou privilege de
Nobleffe , & il eſt défendu par les Ordonnances
de nos Rois fur la requifition des
Etats du Royaume , à toutes perfonnes non
nobles de la prendre , auſſi - bien que celle
d'Ecuyer , à peine d'amende .
Elle a été admife à prouver la Nobleſſe
particulierement dans le Pays du Droit.
écrit , excepté en Provence , où la trop
grande facilité que les ufurpateurs avoient
eue à la prendre , fit ordonner en 1668,
qu'elle ne prouveroit pas fuffifamment
quand elle feroit feule dans les Actes , &
particulierement depuis 1560.
Anciennement elle étoit d'une fi grande
diftinction , qu'elle étoit fouvent donnée
aux perfonnes des Rois , des Princes &
des Seigneurs. On trouve dans l'hiſtoire de
Richard II . Roy d'Angleterre , qu'après
avoir été arrêté prifonnier , & détrôné en
1399. par Henri Comte d'Erby fon coufin
germain , il difoit en fe plaignant : hé ! que
dira le Noble Roy de France ? Il étoit fon
gendre , & avoit époufé Ifabelle de France.
fille de Charles VI.
D'OCTOBRE. 29
Ileft fouvent parlé de nos Rois avec
les epitaphes de Noble Roi , non feulement
dans des Hiftoires anciennes , mais auffi
dans des Traitez- & autres Actes. Les
Princes du Sang l'ont prife dans un fi
grand nombre d'Actes , qu'il feroit fuper-
Alu d'en rapporter les preuves.
Thibaut Comte de Champagne eft qua.
lifié Noble homme dans un Titre de 1 232.
On trouve Noble homme Gaſton pat la
grace de Dieu , Comte de Foix , en 1302 .
Et dans ces tems elle étoit donnée à ceux
qui avoient droit de prendre une qualité
au deffus de celle d'Ecuyer ; à prefent on
la regarde au deffous .
DE LA QUALITE' D'ECUTER.
Elle vient de la fonction de ceux qui
portoient des Ecus ou Boucliers à la guerre
pour leur deffenfe , & cette qualité eft
exprimée dans les anciens Titres Latins &
dans les Hiftoires par Armiger , Scutifer ,
& Scutarius ; mais Armiger a été le plus
en ufage dans les Titres.
Elle eft encore appliquée à ceux qui
avoient du commandement fur l'Ecurie ,
mais on qualifioit ceux qui avoient dé ces
Charges Ecuyers d'Ecurie .
Comme la fonction de porter des Boucliers
étoit toute militaire , & par confe
Ciij
32 LE MERCURE
guerre
de Banniere , & en état de mener à la
leurs Vaffaux , parmi lefquels il y avoit
quelquefois des Chevaliers , avoient la
paye des Chevaliers- Bacheliers , qui étoit
la demie paye des Chevaliers Bannerets.
Cette grande fubordination fervoit à les
exciter d'un violent defir de fe rendre
dignes de la Chevalerie , non feulement
par des actions de valeur & de bonne conduite
, mais auffi par celles de la vertu qui
étoient effentielles pour faire un parfait
Chevalier.
A preſent toutes ces regles font peu obfervées
, la qualité d'Ecuyer prouve toujours
la Nobleffe , mais elle n'eft preſque
plus en ufage que pour la plus petite Nobleffe
, & quoique la recherche de 1666
eut un peu reprimé les abus , on y eft retombé
depuis d'une maniere à donner une
ample matiere à une ample reforme .
DE LA QUALITE DE VALET.
Elle a exprimé, ainfi que celle d'Ecuyer,
un jeune Prince , Seigneur , ou fimple
Gentilhomme , qui n'étant pas encore parvenu
à l'Ordre de Chevalerie , étoit regardé
comme l'inferieur du Chevalier, foumis
& obéïffant à fes ordres , & pour
apprendre le métier de la guerre , à caufe
de quoy on l'appelloit Valet ou Varlet..
D'OCTOBRE.
3.3
Villardouin qualifie dans fon Hiftoire
Alexis fils d'Ifaac , Empereur de Grece ,
le Varlet de Conftantinople.
Nos vieux Romans de 400 ans & plus ,
parlant des Valets , difent ;
N'eft Chevalier , encore eft Valeton.
Le Roman de Rou , parlant de Guillaume
Duc de Normandie , qui vivoit il
y a 600 ans , dir :
•
Guillaume fut Valet petit ,
à Falefe pofe & norrit .
D
Et. Henry 11. Roy d'Angleterre ,
Emprès la mort de fon pere qui Valet &
le laiſſa , &c.
Aimery de Poitiers Valentinois , eſt
qualifié en 1297 Varlet du Roy & Damoifeau.
En 1303 Huet de Beaujeu eft qualifié
Varler de la Reine ; c'étoit comme fon
Ecuyer.
JA
Louis de France , Roy de Navarre , &
Philippe de France Comte de Poitou , enfans
du Roy Philippe le Bel, & depuis
tous deux Rois de France , font qualifiez .
Varlets dans un compte de 1313 .
Cette qualité étant en ufage pour des
perfonnes d'un fi haut rang , ne doit point
eftre regardée comme une qualité fervile ,
puifqu'elle exprimoit la même choſe que
celle d'Ecuyer & Damoifeau ; mais il y a
plus de 200 ans que l'ufage en a ceffé ,
+
34 LE MERCURE
peut- eftre à caufe qu'elle étoit devenuë
commune aux domestiques les plus infe- "
rieurs.
Les Officiers tranchants des Maifons
des Rois & des Princes , font ceux qui
ont confervé la qualité de Valet plus
long- tems. Aujourd'huy on les nomment
Ecuyers tranchans , ou Grands tranchans.
De la qualité de Damoifeau , Damoisel
ou Donzel.
Cette qualité peut eftre un diminutif
de Dominus , & paroît avoir efté appliquée
aux fils des Princes & Seigneurs qui
n'étoient pas encore Chevaliers . Elle a été
fi frequente en certaines Maiſons , qu'elle
y eft demeurée hereditaire , comme dans
celle de Commercy.
Le Roman , de Garin , dit de Pepin
pere de Charlemagne ,
Coronner firent le Damoifel Pepin.
Un ancien Auteur parlant de Louis le
Gros , avant qu'il fut Roy ,
Auquel Confeil le Damoisel
Louis le Gros parla.
Dans un fragment de 1233 , eft dit ,
les Donzelsfont enfans de Chevaliers
qui ne font encore Chevaliers.
Froiffart parlant du fils du Prince des
Galles dit, le jeune Damoiſel Richard
D'OCTOBRE.
35
Cette qualité eft en ufage en France depuis
l'an 1200 , mais on s'en eft plus fervi
dans la Guienne , Poitou , Limofin ,
Auvergne, Languedoc , Provence & Daufiné
qu'ailleurs , & elle eft à prefent tout
à fait hors d'ufage parmi la Nobleſſe .
GENTILHOMME.
•
-Quand on dit cet homme eft Gentilhom
me on le fupofe de race Noble.
François I. dans une Affemblée des Notables
en 1527 , dit qu'il étoit né Gentilhomme
& non Roy , qu'il parloit à Gentilshommes
, & qu'il en vouloit garder les
privileges.
Ily a des exemples plus anciens où ceux
qui étoient appellez Gentilshommes étoient
fort au deffous des derniers Ecuyers.
Les Ecuyers montez à prix avoient 7
fols 6 den. par jour ; les Ecuyers montez
à moins s fols ; pour Gentilhomme à pied ,
2 fols 6 den. pour Sergent & Arbaleſtrier
2 fols , 1340.
DE LA QUALITE DE CHEVALIER
Pour le renfermer dans ce qui regarde
La Nobleffe Françoife , on peut dire que
qualité ou dignité de Chevalier y a toujours
été d'une trés- grande confideration ,,
36 LE MERCURE
puifqu'elle en faifoit la principale diftinc
tion. Elle fe trouve exprimée dans tous les
anciens Titres par le mot Latin de Miles ,
au lieu
que chez les Romains ils y étoient
appelez Equites. Elle a toujours été perfonnelle
& n'a jamais paffé du pere au fils
par heredité. Aucun ne pouvoit être fait
Chevalier qui ne fut Noble , & qui outre
la naiffance , n'eût auffi les qualitez &
facultez neceffaires pour en foutenir la dignité.
Il n'étoit permis à perfonne de fe
qualifier Chevalier s'il ne l'avoit été fait
par le Roy. Cet ufage eft auffi ancien que
notre Monarchie , & nos Hiftoires nous
e fourniffent des exemples depuis plus de
1000 ans. Nos Rois ont toujours marqué
1
efi grande diftinction pour ceux qui
étoient parvenus à ce rang , qu'ils ont bien
voulu fe foumettre eux- mêmes a être faits
Chevaliers , & par là faire voir qu'ils en
jugeoient les qualitez compatibles avec toutes
celles qui fervent à foutenir une grande
Couronne.
Gregoire de Tours raporte que les Rois
de la premiere Race créoient des Chevaliers
de l'Accolade , leur donnant le Baudrier
& la Ceinture dorée , les baiſant à
la joue gauche , & leur difant à l'honneur
du Pere , du Fils , & du Saint Efprit , Je
vous fais Chevaliers.
Charlemagne fit Louis le Debonnaire
-
D'OCTOBRE.
37
fon fils Chevalier à Ratisbonne en lui ceignant
le Baudrier & l'Epée , & lui donnant
l'Accolade & le Baifer.
Guillaume le Conquerant Duc de Normandie
& Roy d'Angleterre fit Chevalier
Henry fon fils à l'age de 19 ans .
Philippes Augufte fit fon fils Chevalier
& cent autres jeunes Seigneurs , l'an 1209 .
Le Roy Saint Louis fit Chevalier Alphonte
fon frere Comte de Toulouſe en
121.
Le même Roy leva en 1270 un droit
de Chevalerie , lorfqu'il fit Philippes fon
fils Chevalier , & ce droit étoit non feulement
deu au Roy par fes Sujets , mais
auffi aux Princes & Seigneurs dans leurs
terres , quand ils faifoient leurs fils ainez
Chevaliers , & on appelloit ce droit Ayde
de Chevalerie. Philippe le Bel le leva en
1285 & Philippes de Valois en 1334.
Le Roy Charles V. dit le Sage , fit faire
Chevalier Charles Dauphin fon fils , depuis
VI du nom Roy de France , par le
Connêtable de Guefelin en 1368 .
Le même Roy Charles V I. revêtu de
fes habits Royaux fit Louis & Charles
d'Anjou fes Coulins Chevaliers , leur don
nant l'Accolade & le Baudrier , & leur
faifoit mettre les Eperons dorez par le Seigneur
de Chaurigny en 1385.
En 1399 Ricahrd II . Roy d'Angleterre
38 LE MERCURE
pris prifonnier & détrôné par Henry de
Lancaftre Comte d'Erby fon Coufin, refufa
des Eperons noirs qu'on lui vouloit faire
mettre , & fit dire à l'ufurpateur , Je suis
Loyal Chevalier , & qui onques n'ay for
fait à la Chevalerie , qu'il m'envoye des Eperons
de Chevalier , ou autrement je ne
chevaucheray point , à donc le Valet luy
aporta des Eperons dorez.
Le Duc de Bourgogne fit Chevalier le
Roy Louis XI. en 1461 , & il en fut fait
en même tems plus de 200 , tant Princes
que Seigneurs .
Le Roy Charles VIII. fut fait Cheva
lier par le Duc d'Orleans depuis Roy Louis
XII.
Le Roy François I. voulut être fait Chevalier
par le fameux Chevalier Bayart.
Le Roy Henry II. n'étant encore que
Dauphin , fut fait Chevalier par le Maréchal
de Biez..
Ce peu d'exemple fuffit pour faire voir
combien les Princes tenoient à honneur
d'être faits Chevaliers, & qu'ils choififfoient
ordinairement pour cette ceremonie quelque
Chevalier d'une haute diftinction non
feulement pour lui faire honneur & faire
éclater fa vertu , mais auffi pour fe choifir
un modele qui pût leur fervir de guide
dans la profeffion de Chevalerie qu'ils
venoient d'embraffer.
D'OCTOBRE. 32 .
A l'égard des Grands Seigneurs & Nobles
qui étoient faits Chevaliers , on les
diftinguoit ordinairement en deux claffes ,
de Chevaliers Bannerets , & de Chevaliers
Bacheliers. Les uns & les autres fe faifoient
avec les mêmes ceremonies felon
l'occafion & le lieu. On choififfoit ordinairement
les grandes Feftes, à quelque fo
lemnité de Sacre , de Mariage , & de Chevalerie
des Rois & Princes , ou à des Tournois.
On en faifoit auffi à l'armée la veille
d'une bataille, d'un affaut , &c. Et dans ces
dernieres occafions on y apportoit moins de
ceremonies , & on fe contentoit ſouvent de
la Ceinture militaire , des Eperons dorez ,
du Coutelas & de l'Accolade . Pour ceux
qui étoient faits Chevaliers avec toutes
les ceremonies ; on les y difpofoit par
la priere , le jeûne , la reception des Sacremens
de Penitence & d'Eucharistie , &
par l'exhortation. On les habilloit enfuite
de tout ce qu'il falloit pour armer alors
un Chevalier prêt à combattre , & à chaque
piece qu'on lui vêtoit , on lui en expliquoit
le fimbole. Les Rois en ont fouvent
fait avec moins de ceremonies , & ils
donnoient quelquefois aux nouveaux Chevaliers
un Manteau & un Palefroy , ainſi
qu'il fe verifie dans les comptes du Trefor
depuis Saint Louis. Quand un Chevalier
avoit fait quelque crime & forfait
. LE MERCURE
40
à Chevalerie , on le devêtoit ignominieufement
avec les mêmes ceremonies qu'il avoit
été fait Chevalier , & il étoit enfuite pu
ny grievement .
Il fe trouve dans les Regiftres Olim
un Arreft du Parlement de la Pentecôte
1281 , qui condamne à 1000 liv . chacun
les deux fils de Philippes du Lieu de Bourbon
, pour s'être fait faire Chevaliers n'étant
pas affez Nobles , & il fut déclaré que
ce droit n'apartenoit qu'au Roy .
Les ufages des Chaſtelets de Paris , d'Orleans
, & de Baronnies, font , que fi aucun
fe faifoit faire Chevalier, qu'il ne fut Gentilhomme
par fon pere , le Roy , ou fon
Seigneur pouvoit lui faire trancher les
Eperons fur le fumier , & prendre les meubles
à fon profit.
Le Chevalier Banneret avoit droit.de
lever Banniere carrée, de mener fes Vaffaux
à la guerre , & commander aux Chevaliers
Bacheliers , & aux Ecuyers. Pour être
Banneret il falloit qu'il eût du bien & des
Vaffaux pour avoir une compagnie de so
hommes d'armes , qui montoit ordinairement
à 150 hommes prefque tous Gentilhommes
, & il avoit la double paye d'un
Chevalier Bachelier. On ne peut rien dire
de fixe fur le prix de cette paye , à cauſe
des differens mouvemens qu'il y a toujours
eu fur le prix des Monnoyes. Quand le
Chevalier
D'OCTOBRE. 41
Chevalier Banneret avoit des Duchez , des
Comtez , & des Baronnies , affez grandes
pour contenir fous lui au nombre de fes
Vaffaux des Bannerets , il les menoit à la
guerre , & c'eft ce qui nous fait voir fouvent
dans les anciens Etats des guerres de
nos Rois au nombre des Bannerets dès.
Ducs de Bourgogne , de Bourbon , de Lorraine
, de Savoye , des Comtes d'Artois
de Foix , d'Armagnac , avec plufieurs Bannerets
& Bacheliers fous eux.
Les Chevaliers Bacheliers étoient de
jeunes Seigneurs qui n'avoient pas encore
herité des biens de leurs peres & meres ,,
& qui par confequent n'étoient pas en état
de lever Banniere ; ou de fimples Seigneurs ,
dont les biens & les terres ne leur fourniffoient
pas affez pour être Bannerets.
Quand ils étoient parvenus à pouvoir lever
Banniere , ils portoient au Roy , au Prin
ce , au General d'Armée , leur Pennon ou
Banniere à longue queue , & demandoient
d'être faits Bannerets . Alors on coupoit les
bouts du Pennon & on le rendoit quarré ;
le Chevalier étoit appellé Banneret , & fa
paye étoit augmentée de moitié.
La Coutume du Maine & d'Anjou dit
qu'il y a aucuns Seigneurs qui ne font
Cointes , Vicomtes , Barons ou Châtelains ,
qui ont Châteaux , Fortereffes , groffes
Maifons , Places ,, qui font parties de Com
De
42 LE MERCURE
⚫
tez , Vicomtez , Baronnies ou Charellenies ,
& tels s'appellent Bacheliers ..
Les Chroniques de Flandres portent que
Marguerite qui fut heritiere du Comte de
Flandres , fut mariée à un vaillant Chevalier
des Marches de Bourgogne , qui fut
appellé Guillaume de Dampiere , & qu'il
n'étoit mie riche. Ses enfans devinrent
Comtes de Flandres.
Les Seigneurs, auffi - bien que le Roy ,
avoient droit de fe faire payer une aide:
de Chevalerie par leurs Sujers , quand ils
êtoient faits Chevaliers , ou qu'ils faifoient
leur fils aîné Chevalier. Plufieurs Coutumes
font mention de ce Droit , & entreautres
la Coutume de Normandie en parle
en 1.204.
Les Chevaliers avoient le privilege de
fçeller à cheval armez de toutes pieces ,
fuivant des, Titres de 1228 & 1241. En
1283 , Philippe le Hardi fit un reglement
portant qu'un Chevalier qui auroit 3.000.
liv . de terre ou plus, ou un Banneret , pourroit
avoir trois paires de Robes par an ,
& que l'une des trois feroit pour l'Eté . Ils
pouvoient fourer leurs habits d'hermines
& de vair , & les broder d'or , fuivant un
compte de 1351. ce qui n'étoit permis.
qu'à eux.
Ils p enoient les qualitez de Monfieur ,
pr
de Meffire & de Monfeigneur , & il n'ap
D'OCTOBRE. 43
partenoit qu'aux femmes de Chevaliers
de fe qualifier Madame.
On trouve auffi des Seigneurs qualifiez
Chevaliers ès Loix en 1340. & depuis
dans la Maifon de Rochefort Pluvaut , qui
a donné deux Chanceliers de France fous
Charles VIII. & Louis XII. mais ces exenaples
font peu frequens..
L'ufage des qualitez de Chevalier Banneret
& Chevalier Bachelier a diminué par
l'établiffement des Compagnies d'Ordonnances
fait par le Roy Charles VII , qui
changea l'ufage de faire aller les Nobles à
la guerre , & par la creation des Chevaliers
de Saint Michel en 1469 , & du Saint
Efprit en 1578. Car outre la qualité de
Chevalier que portoient ceux qui en étoient
revétus , ils avoient une affociation perſonnelle
avec le Roy & les Princes du Sang,des
privileges & des marques de diftinction au
deffus desChevaliers Bannerets & Bacheliers..
On ne trouve prefque plus de Cheva
valiers Bannerets ni Bacheliers depuis l'an
1500. Et quoique dans ce même Siecle nul
ne pût fe qualifier Chevalier , qu'il ne le
fuft effectivement , foit de l'un des Ordres
du Roy , ou autrement , la Nobleffe de
diftinction , & qui avoit du fervice , commença
vers la fin à la faveur des troubles
de l'Etat , & s'attribuoit la qualité de
Meffire & de Chevalier.. L'abus augmen
1
Dij
44 LE MERCURE
tant au commencement du Siecle prefent ,
les Etats generaux du Royaume demande
rent au Roy en 1614 , qu'aucun ne pût
fe qualifier Chevalier , s'il ne l'étoit effectivement
de l'un des Ordres du Roy; & par
l'Ordonnance de 1629 , la qualité de Chevalier
fut défendue à tous ceux qui n'avoiene
pas l'honneur de l'être. Cependant l'abus
étant devenu trop general , on s'eft conrenté
dans les dernieres recherches de retrancher
la qualité de Chevalier à ceux qui
n'avoient pas des dignitez & des fervices
capables de la foutenir..
L'AMOUR PRECEPTEUR.
N revenant d'Italie je paffay par
une Ville de France ; c'étoit fur
la fin de May: prenant le frais.
le foir dans un Jardin où les Dames
fe promenoient , j'en vis une qui me
bleffa dans la foule , fans deffein de me
nuire ; car elle ne m'avoit pas regardé , &:
je ne lui avois pû dire un feul mot . Cependant
j'en devins en moins de deux heu-.
res fi ardemment amoureux , que je fus
toute la nuit fans dormir. Son vifage &
fa taille , fon air & fa mine enjoüée avec
un foûrire flateur , m'avoient tellement
D'OCTOBRE. 45
charmé , que je cherchay avec empreflement
l'occafion de la revoir le lendemain .
Comme je m'en informois j'appris
qu'il y avoit peu de temps qu'elle étoit
mariée , & qu'elle étoit partie le matin
pour retourner dans une maison de campagne
, & que cette maiſon étoit dans un
defert. Je fçus auffi que fon mari étoit
inacceffible aux gens du monde ; qu'il ne
fongeoit qu'à fon ménage , & qu'à goûter
le repos & les douceurs de la retraite. Je
né cherchois que des perfonnes qui puffent
me parler d'elle , & j'en trouvois affez ,
parce que chacun l'aimoit ; tout le bien
que l'on m'en difoit augmentoit de plus
en plus le defir que j'avois de la revoir ,
& m'en ôtoit en même temps l'efperance.
J'étois bien trifte , & je ne fçavois par
où me confoler ; car de l'ôter de mon
coeur , la choſe me fembloit impoffible ;
& quoique le peu d'apparence de pouvoir
paffer ma vie auprès d'elle eût pû me defef
perer , je me plaifois trop à in'en fouvenir
, pour effayer de l'oublier..
-
La maison où demeuroit cette Dame
étoit plantée au milieu d'une grande foreft
, & fituée entre deux collines , par oùcoule
une petite riviere , dont l'eau eft
auffi claire & auffi pure que celle d'une
fource vive ce qui la rend encore plus
confiderable , c'eft que cette Dame s'y efti
46. LE MERCURE
quelquefois baignée. La Ville où j'étois , eft.
à cinq lieues de cette maifon ; j'allois fou
vent m'égarer de ce côté- là , non dans
Pefperance d'y rencontrer cette aimable
perfonne , mais comme je ne me fentois
malheureux que par fon abfence , il me
fembloit que plus je m'approchois du lieu.
où elle étoit , moins j'étois à plaindre..
Voilà , difois-je , l'endroit qui poffede tout
ce qui m'eft cher au monde , & le feul
qui m'eft défendu . Plus je le confiderois ,
plus j'étois vivement touché , & je ne pou
vois m'en éloigner fans redoubler mes fou
pirs & mes plaintes. Helas ! difois - je en
foupirant , que les Domestiques font heu
reux , qui peuvent la regarder , & lui par
ler ! Mais , n'en pourrois- je pas être du
nombre , en me déguilant ? Je ne puis
vivre en l'état qu je fuis , & je n'ay plus
à garder ni mefure ni bienféance. Je ſça.
vois que fon mary avoit deux enfans en→
core jeunes , d'une premiere femme : Je
m'allay mettre dans l'efprit de feindre que
j'étois de ces Precepteurs qui courent le
monde. Un jour que je n'en pouvois plus ,
un de mes gens qui m'avoit faivi , m'a→
vertit que la nuit s'approchoit , & qu'il
n'y avoit point de Lune : Je m'arrêtai dans
un Village à l'entrée de la foreft , & là
parce que cet homme étoit fecret & fidele.
je lui communiquay mon deffein , quis
D'OCTOBRE. 47
l'étonna ; mais il fallut m'obéir. Je le fis
partir tout à l'heure , avec ordre de ce
qu'il avoit à faire , d'envoyer mon équipage
chez moy ; de dire que j'avois pris une
autre route , & de m'apporter un habit
comme je le voulois. C'étoit lui qui m'ha
billoit , & je lui recommanday fur tout de
tarder..
ne pas
Je fus en ce lieu deux jours dans une
grande impatience de commencer le rôle
que j'allois jouer. Enfin , mon homme
revînt fur le midy , & je montay fur le
champ à cheval , & perçay dans la foreſt
pour changer d'habit. J'avançois infenfiblement
du côté de la mailon , & n'en
étant plus qu'à deux mille pas , je defcendis
de cheval au milieu d'une rouffe d'ar
bres fort épaiffe , où je fus long- temps à
m'ajufter : car quoique je paruffe "fort
occupé de mon déguiſement , je fongeois
beaucoup plus a prendre l'air & la mine
d'un honnête homme. Quand je me fus
mis le plus décemment que je pûs , mon
homme prenant mon cheval , fe retira du.
côté de la Ville , & je demeuray feul avec
un petit fac de hardes que je portay fous
mon bras jufqu'à une Ferme proche de la
maiſon , & je priay la Fermiere de me le
garder. Enfuite j'entray dans la cour,
il y avoit trois ou quatre dogues abboyans
qui fe vouloient déchaîner. Le Maître
οι
43 LE MERCURE
fe
étant venu à ce bruit , je le faluai : C'é
toit un homme avancé en âge , fort timide;
& d'une foible conftitution , mais il aimoit
à fe faire craindre , & parce qu'il avoit
erû que ces dogues m'avoient épouvanté ,
il me dit qu'il feroit bien dangereux de
promener la nuit autour de chez luy ;
& me faifant entrer dans une Salle , il me
demanda ce que je cherchois . Je fuis
lui dis-je , un homme de Lettres , qui me
mêle d'inftruire les jeunes gens . Vous
êtes propre & lefte , lui dit-il , mais n'avez
- vous ni bonnet ni chemiſe , & marchez
- vous comme cela fans hardes ? Je
lui répondis que j'avois laiffé mon paquet
chez une femme proche du Château , pour
me prefenter plus refpectueufement , &
pour offrirmon fervice de meilleure grace :
C'est bien fait , me dit-il , & je me doute
que vous fçavez chanter , & faire quel
ques méchans vers. Vos Confreres fe mê
lent de l'un & de l'autre : Je lui repartisque
je fçavois un peu de tout , qu'il n'avoit
pas befoin d'un autre que de moy
pour apprendre à Meffieurs les enfans à
faire des armes & à danfer , parce que
j'avois été cinq ans à Rome auprès d'un
jeune homme de qualité qui m'aimoit ,
& qui me faifoit inftruire par fes Maîtres ;
& pour lui montrer mon adreffé , je me
mis engarde avec une canne que j'avois .
Fallongeois
D'OCTOBRE. 79
j'allongeois & parois , j'avançois & reculois
en Maître ; puis ayant quitté ma canne,
je fis quelques pas forts de Balet , & plufieurs
caprioles qui le rejoüirent ; mais ce
qui lui plût encore , je ne fus pas difficile
pour mes appointemens .
Il m'ordonna de me repofer , & monta
dans l'appartement de Madame , pour
lui
raconter cette avanture. Elle m'envoya
querir tout auffi-tôt ; & cette nouvelle ,
quoique je n'en dûffe pas eftre furpris ,
m'ôtá prefque la refpiration. Je ne pouvois
vivre en l'abſence de cette aimable
perfonne , & je ne l'ofois aborder. J'avois
tant d'amour & de joye , tant de foumiffion
& de crainte , que quand je me vou- .
lus lever , il me prit un tremblement comme
d'un accès de fievre. Enfin m'étant
remis le mieux que je pûs , j'entray dans
un cabinet fort propre , où je fis la reverence
à la plus belle femme qu'on ait jamais
vûë. Je me baiffay avec beaucoup de :
refpect pour lui baifer la robbe ; mais elle
m'en empêcha , & me voulut bien faluer
auffi civilement , que fi je n'euffe pas été
déguifé. Elle tenoit un livre de l'Aftrée.
entre fes mains , & la Jerufalem du Taffe
fur les génoux ; car elle fçavoit parfaitement
la Langue Italienne , & faifoit cas .
de ces deux Livres ; de forte qu'elle aimoit
à s'en entretenir & même à les
›
E
LE MERCURE
entendre lire d'un ton convenable . Je m'en
apperçus bien vite , parce qu'en s'informant
de ce que je fçavois , elle demanda fi je
fçavois lire ; & comme fon mari trouvoir
cette queftion fort plaifante , de s'informer
d'un Docteur s'il fçavoit lire , & qu'il
en rioir de tout fon coeur : Il y a , dit- elle ,
plus de miftere à lire qu'on ne penfe : cette
réponſe me confirma qu'elle s'y plaifoit ,
& qu'elle avoit le fentiment très délicat ;
auffi étoit- ce le principal amufement qu'elle
pouvoit prendre dans une pareille folitude.
On vint avertir Monfieur qu'on avoit
fervi : Il me fit placer près de fes enfans ,
& me dit qu'il fouhaitteroit bien de les
voir fçavans , mais de la fcience du monde,
plutôt que de celle des Pedans , & je me
perfuade que tout ce qu'on doit le plus ambitionner
, c'eft d'être honnête homme , &
d'en acquerir la reputation ; mais pour y
parvenir , que jugeriez - vous de plus à propos
& de plus neceffaire ? Alors je m'écriay
d'une façon modefte & refpectueufe :
Ah ! Monfieur , que vous parlez de bon
fens & en habile homme ! Si vous vouliez
vous - même.inftruire ces Meffieurs , ils
n'auroient que faire d'un autre Gouverneur
pour fe rendre auffi aimables par leurs
manieres , que par leur acquis. Pour répondre
à ce que vous me faites l'honneur
de me demander , il me femble que dans
D'OCTOBRE.
TE
le deffein de fe rendre honnête homme ,
& d'en acquerir la reputation , le plus
important confifte à connoître entre toutes
les chofes , les meilleurs moyens de
plaire , & de les fçavoir pratiquer ; car ,
ce n'eft feulement que pour eftre agreable
qu'il faut fouhaitter d'être honnête hom-
; qui en veut acquerir la qualité , doit
principalement fonger à fe faire aimer : En
effet , on ne loue que bien féchement ce
qu'on n'aime pas , ' quelque bonne opinion
qu'on en puiffe avoir ; & de plus le merite
qui nous eft cher , nous paroît tout
d'un autre prix que celui que nous haïffons.
Je trouve qu'il fied bien de fe montrer
d'une humeur douce & enjoüée , autant
que l'occaſion , le genie , & la bienféance
le peuvent permettre. Cette façon'
de proceder ouvre des entrées que l'air'
grave & ferieux ne donne pas , & fait
bien fouvent qu'on s'émancipe au deffus
de fa volée , & de bonne grace.
D'ailleurs , on addreffe volontiers ce'
qu'on dit d'agreable à des gens d'un accès
facile & gay , au lieu qu'on n'aborde que
par contrainte une mine fombre & enfoncée
; fur tout , il faut eftre hardy en
effet fous une apparence modefte , & ofer
prefque tout ce qui doit réuffir , fans crainare
les évenemens. Le coeur n'eft pas moins
neceffaire que l'efprit , pour eftre d'un
Eij
LE MERCURE
commerce agreable , & je ne croy pas
qu'on puiffe rencontrer un homme fi accomply,
qui n'ait quelque defaut dans
l'un ou dans l'autre. Mais il y a de cerrains
defauts dont l'honnêteté me temble
toujours exemté , & je trouve qu'il eft
bon de les remarquer , afin de la connoître
plus aisément : car , outre qu'elle ne
les a jamais , on les voit quafi par tout
où elle n'eft point , comme l'injuftice , la
vanité , l'avarice , l'ingratitude , la baffeffe ,
le mauvais goût , l'air groffier & peu .
noble , l'air qui fent le Palais , la Bour-.
geoifie , la Province & les affaires , lat
façon de proceder qui s'attache trop aux.
Coutumes , & qui ne voit rien de meil-:
leur. Dire des chofes trop communes ,
des équivoques , des quolibets , &, tout .
ce qui vient d'un efprit mal fait : Eftimer.
plus la fortune que le merite ; fe vouloir
mettre en honneur par de faux moyens
& de lâches flatteries ; eftre dur & fans
complaifance ; preferer en tout fes interefts
à ceux de fes meilleurs amis ; eftre
fourbe ou menteur ; chercher les apparences
plutôt que la verité ; prendre mal fon
temps & fes mefures ; eftre dupe & fe
connoiftre mal en gens ; eftre fujet à
s'encanailler , & même avec les gens de
la plus haute volée ; fouffrir fans reffen-"
timent l'injuftice & les avanies ; n'en pas
D'OCTOBRE
garantir les foibles , quand on le peut , &
fe mettre toujours du party des plus forts' ;
mais principalement n'avoir pas je ne fçay
quoy de noble & d'exquis , qui éleve un
honnête homme au deffus d'un autre honnête
homme. Il faut tant de rares qualitez
pour fe rendre parfaitement ' honnête
homme , qu'il eft plus aisé de dire les
chofes qu'il faut faire , que celles qu'on
doit fuivre ; & je crois qu'en évitant ces
defauts & quelques autres , l'on peut faire
in grand progrès dans l'honnêteté : Enfin ,
je voudrois nourrir ces Meffieurs d'une
maniere fi noble , que la faveur des plus
grands Princes ne leur pût jamais rien
donner , qui ne parût aus deffous de leur
merite .
Comme je parlois de la forte , Madame
me donnoit une attention qui témoignoit
affez qu'elle fe plaifoit à m'entendre. Monfieur
de fon côté , prenant un vifage riant
but à ma fanté ; & me faifant goûter d'excellent
vin , m'en demanda mon avis . Il
aimoit la bonne chere , & fa table étoit bien
fervie. Madame auffi qui plaifoit par tout
étoit de bonne compagnie à la table , &
nous y fûmes prés de deux heures , fans
qu'elle fit le moindre femblant d'en vouloir
fortir. A la fin s'étant levée , elle fe
retira dans fon Cabinet , & le Maître en
fon appartement fort éloigné de celui de
E iij
34
LE MERCURE
fon aimable Epoufe , où il n'alloit que
bien peu ; car on eût dit qu'il ne avoit
époulée que pour l'ôter au monde. On me
donna une chambre fort commode , & je
m'étonnois qu'en un lieu fi fauvage il y eût
tant d'ordre & de propreté ; mais j'admirois
principalement qu'une fi rare perfonne
yfût cachée. Que je ferois heureux , difois-
je en foûpirant d'amour & de joie , ſi
je me pouvois infinuer dans fon coeur ! Le
meilleur moyen qui s'en prefente , dépend
de bien lire . Il faut donc que je tâche de
lui plaire , en tirant la quinteffence de tous
les agrémens qui peuvent la toucher par
cet endroit. Cette maniere confifte à bien
prononcer les maux , & d'un ton conforme
au fujet du difcours : que ma parole la
flatte fans l'endormir ; qu'elle l'éveille fans
la choquer ; que j'ufe d'inflexion pour ne
pas laffer ; que je prononce tendrement
& d'une voix mourante les choſes tendres ;
mais d'une façon fi temperée , qu'elle n'y
fente rien d'affecté. Je fis en peu de jours
tant de progrès en cette étude , qu'elle ne
fe plaifoit plus qu'à me faire lire , & qu'à
s'entretenir avec moy. Son mari en étoit
fort aife , parce que je la defennuyois , &
qu'elle ne lui parloit plus d'aller dans les
villes voifines. Je lui contois fouvent pour
la divertir quelque avanture qui pût fortifier
de plus en plus fon eftime & fa bien-
Ja
D'OCTOBRE
ass
veillance pour moy , perfuadé que le tems
acheveroit le refte .
Ma façon d'agir me concilia , comme
je l'avois prévu , les fuffrages de la Dame,;
& ma methode pour élever les enfans , ceux
du mari. Nous fumes bientôt d'accord , &
dès le lendemain , je donnai les premieres
leçons à mes difciples . Je leur trouvai toutes
les difpofitions favorables pour me
faire honneur ; mais comme leur avancement
n'étoit pas le but que je m'étois propofé
, & qu'il n'étoit qu'un pretexte à un
autre qui me flattoit infiniment plus ; mon
amour propre tiroit peu d'avantage de leur
progrès , & je n'étois occupé que du foin
de réuffir dans mon projet. Je jouiffois toujours
du plaifir de voir ce que j'aimois ;
j'avois celui de l'amufer ; mais je fentois
que mon coeur eût joui d'une fatisfaction
bien plus parfaite , fi j'avois pû parler. Le
defir que j'en avois , étoit retenu par la
crainte de déplaire à cette aimable Dame.
Mon apprehenfion n'étoit pas fans fondement.
J'avois quelquefois préfenti fes penfées
là- deffus , felon que les paffages des
livres , que je lui lifois , m'en fourniffoient
l'occafion ; & je lui avois entendu dire que
fi jamais quelqu'un s'avifoit d'emploier
quelque deguifement pour lui parler de
quelque chofe qui pût intereffer fon honneur
, elle auroit le courage de l'obliger, à
1
E iiij
36 LE MERCURE
fe retirer , quand même fon coeur en devroit
fouffrir. Ces fentimens me faifoient
trembler ; je n'ofois me découvrir . L'amour
eft rarement d'accord avec nos reflexions ;
fa volonté eſt une loy à laquelle notre efprit
est toujours foumis. Il me parla un
langage tout oppofé à mes refolutions ; &
comme il ne manque point de donner le
courage qu'il faut pour executer fes deffeins
, je ne balançai point à lui obéir. C'eft
en vain , me fit- il entendre , que tu paffes
res jours dans cette retraite : le plaifir d'y
voir ta Maîtreffe , n'eft qu'une illuſion ,
tant qu'elle ignorera. qui tu es . Ce qu'elle
peut t'avoir dit ne doit point t'allarmer` ;
les femmes font rarement finceres , quand
on vient m'oppofer à leurs fcrupules. Ce
qu'elles ont coûtume de dire contre mes interefts
, font des maximes generales , dont
l'application eft toujours fauffe ; & leur
éloquence perd beaucoup de fa force en
préſence d'un Amant .
C'eft ainfi que ce Dieu fçût me feduire ;
je me fentis un empreffement que je n'avois
point connu jufques-là. La joie de voir ce
que j'aimois , n'eut plus la force de m'arrêter
; la crainte de perdre cet avantage
difparut , & ce fut un effet de mon amour
propre , qui me perfuada que je n'éprouverois
point ce malheur. Voila comme
une paffion fait recevoir tout ce qu'elle
D'OCTUBRE.
$7
infpite , & comme elle donne cette temerité
que l'évenement a coutume de juftifier.
Je ne fus donc plus occupé qu'à trouver
une occafion favorable pour me découvrir.
Je crus l'avoir fait naiftre . Un
jour je lifois le Prologue de l'Aminte du
Taffe ; le déguilement de l'Amour , qui paroît
fous un habit champêtre , me parut
propre à faire des reflexions qui m'ameneroient
naturellement à mon deffein . L'Amour
, dis-je , a grand tort de fe dégujfer.
Quand on eft fur de plaire & de char
mer , à quoi bon ce myftere ? Cette petite
fupercherie n'eft permife qu'à des Amans
qui fans cet artifice ne pourroient s'expliquer.
Il y a beaucoup de fineffe d'efprit
dans cette remarque , reprit ma Maiſtreſſe ;
mais l'Amour peut avoir eu fes taifons pour
le déguifer. Comme il fçait que fes armes
peuvent effaroucher les jeunes perfonnes
il prend foin de les cacher quelquefois . Il
y a encore des circonftances où la prefence
produiroit un mauvais effet , il lui fuffic
alors de fe faire connoître aux coeurs qu'il
a deffein de toucher ; il n'en fait pas moins
ce qu'il veut , & il trouve par là le
de cacher les myfteres à des perfonnes qui
fe feroient un plaifir malin de les troubler.
Je me rends à vos raifons , repartis je , Madame
, & je conçois préfentement qu'il y
a beaucoup de conjonctures où l'Amour
moyen
>
+38 LE MERCURE
doit fe mafquer pour réuffir. Il lui fuffic
d'être connu aux perfonnes qu'il veut tou
cher. C'eft fur fon exemple , Madame , que
je connois un homme qui a changé d'habit
& de profeffion ; comme je fçais tous
fes fentimens , je pourrois vous les expliquer.
Jamais Amant ne fut plus tendre.
A la faveur de fon déguifement il voit tous
les jours ce qu'il aime ; il demeure dans
fa maifon , il lui parle , il n'ofe fe declarer.
-Cependant il commence à concevoir que
* cette contrainte ne peut pas durer. Il
éprouve mille contradictions. Que ferat-
il dans ces circonftances ? S'il parle , il
appréhende de déplaire. Je vous en laiffe le
Juge , Madame. A vous parler franchementreprit
elle , cette decifion eft embaraffante.
La raifon peut fournir de bons
confeils dans ces fituations ; mais le coeur
peut nous trahir. Ah ! Madame , vous heftez
fur ma condamnation. Permettez que
je profite de ce moment de faveur , pour
vous nommer l'Amant dont j'ai parlé . Alors
je me jettai à fes genoux , & du ton le plus
perfuafif , je lui contai comme je l'avois
vûe , de quelle maniere fes attraits m'avoient
bleffé , & le parti enfin que j'avois
pris pour pouvoir lui exprimer mes fentimens.
*Ce difcours lui caufa une telle ſurpriſe ,
qu'elle ne me répondit point . Son vilage
D'OCTOBRE.
19
prit differentes formes dans un inftant ; fes
yeux marquerent de la colere , du depit &
de la douceur , mais enfin le dépit fut le
mouvement qui fe fixa . Quoi ! dit elle',
vous avez ofé rifquer un pareil ftratagême
, & m'en avertir ! Quelle est votre efperance
auprès d'une femme qui n'eft mariée
que depuis trois mois ? Quelle idée avezvous
conçue de moi , pour hafarder pareilles
chofes ? Et vous - même que deviendriez-
vous , fi mon mari venoit à connoître
qui vous êtes ? Quels affreux foupçons
ne lui feriez - vous point naître contre
moi ? Songez à quitter ces lieux au plûtôt
votre prefence m'inquiete . S'il ne s'agiffoit
que de mon fort , repris- je , Madame , je
ne craindrois point la vengeance de Monfieur
votre mari ; la mort même , fi je devois
la fouffrir , me paroîtroit douce ,
puifqu'elle feroit un effet de l'empreffe
ment de vous voir . Les reflexions que
vous me faites faire fur ce qui vous regarde,
me touchent infiniment davantage ; & fi
je ne craignois qu'une fuite trop prompte
ne devint fufpecte , je vous aurois déja ôté
la vûe d'une perfonne que vous haiffez
tant. Eh bien me dit la Dame , je fuis
d'accord que vous differiez , afin que vous
puiffiez préparer les circonftances , de mamaniere
que vous fortiez de la maifon ,
fans qu'on puiffe attribuer ce deffein qu'à
60 LE MERCURE
2
'votre legereté. Jufqu'à ce tems , je me priverai
de vos entretiens. Tant que j'ai pû les
croire innocens , ils m'ont fait plaifir
mais prefentement je ne les puis fouffris ,
fans me rendre .coupable. J'efpere que
vous aurez affés de difcretion , pour vous
rendre à mes defirs là - deffus. Elle voulut
me quitter après cet ordre funefte. Je pris
la liberté de l'arrêter. J'avois les yeux
mouillez de larines , j'étois au defefpoir ; je
la conjure de me pardonner. Après lui avoir
promis une exacte obéiffance , je la fis
appercevoir que le changement qu'elle
exigeoit dans ma conduite pourroit être
dangereux , qu'il étoit plus convenable que
je lui fiffe la lecture à l'ord- naire , & que je
faurois fi bien me rendre le maître de mes
fentimens , que je ne lui en parlerois de
ma vie. Ma refolution , & la maniere dont
je la pris , la toucherent. Elle voulut bien
que je continuaffe les entretiens comme
auparavant , aux conditions que je m'impofois.
Je la quittai , pour aller donner leçon
à mes difciples. Je vous affure qu'alors un
Maître n'eft gueres en état d'inftruire . Je
les congediai bien-tôt , pour m'occuper
tout entier de mon malheur. Je m'en pris
à l'amour qui m'avoit confeillé fi temerairement.
Je regrettai ma felicité paffée :
J'avois du moins le plaifir de la voir , di◄
D'OCTOBRE.
fois je. Accoutumé aux charmes de fa converfation
, comment pourrois - je m'en
paffer ? Que je vais mener une triſte vie !
Faut-il que je me fois laiffé feduire par
l'excès de ma paffion ? Voilà quelles étoient
mes penfées. Cependant , le croira- t- on ?
un elpoir fecret me foutenoit contre tant
d'allarmes. J'avois peine à concevoir qu'u
ne femme voulût abfolument punir des
fautes dont fes charmes étoient complices.
Toute la nuit fe paffa dans des agitations
continuelles ; le jour parut enfin. L'heure
de mes exercices arriva , & enfuite celui
de mes entretiens avec la Dame. Je vous
affure que la lecture fut courte . Ma Maîtreffe
continua fon dépit . Elle avoit peine à
fe perfuader ce qu'elle voioit ; & laiffant
échapper quelques foupirs : Encore une
fois , me dit- elle , quel eft votre deffein ?
Comme je la regardois avec beaucoup
d'attention , je crus m'appercevoir que fes
yeux marquoient moins de colere que le
jour precedent. Je profitai de cette favorable
difpofition , pour lui expliquer de nouveau
tout ce qui fe paffoit dans mon ame.
Elle en parut touchée , & fans me montrer
de fenfibilité , elle m'en fit affez entendre
pour concevoir qu'on me donneroit tout
le tems que je croirois neceffaire , pour
choifir les circonftances où je jugerois à
propos de m'en aller .
62 LE MERCURE
L'habitude de ce qui nous amufe a plus
de pouvoir qu'on ne s'imagine . On croit ne
point tenir à des chofes , dont le credit .
qu'elles ont acquis fur nous , nous étonne
lorfqu'il les faut quitter. Ma façon de lire ,
étoit du goût de ma Maîtreffe ; elle crut
perdre tout amufement , fi je m'en allois ;
& ce fut là d'abord la raifon qui fit qu'elle
ne m'en preffa plus. Infenfiblement elle
s'accoutuma à ne regarder comme un
homme qui faifoit tout pour lui plaire.
Elle n'étoit plus furpriſe de s'entendre dire
combien je l'aimois. Il n'y a pas loin de
la liberté qu'elle me donnoit là-deffus , julqu'à
la tendreffe. Je ne la preffai pas trop
de s'expliquer davantage. J'avois vû mon
malheur de trop près , pour rien hafarder.
Je commençois donc à jouir avec quelque
forte de tranquillité du plaifir innocent de
vivre avec cette aimable Dame , lorfque
j'effuiai un nouveau peril bien plus grand
que le premier.
Le cadet des deux freres , dont l'éducation
m'étoit fi commode , fouffroit avec
quelque peine les petites préferences que
j'avois pour fon aîné ; mais outre qu'il
avoit plus de douceur , fa belle- mere penchoit
pour lui ; c'en étoit affez pour me
déterminer. Je ne fçai pas à quoi ce jeune
homme connut à peu près mes ſentimens ;
mais je fçai bien qu'un jour que je lui avois
D'OCTOBRE. 63
fait quelque correction , il me fit entendre
qu'il avertiroit fon pere de quelque chofe
fi j'en ufois toujours de même avec lui . Ce
difcours m'étonna ; je feignis pourtant de :
n'y pas faire attention , me refervant le
droit de le queftionner quand il feroit feul .
L'occafion s'en préfenta bientôt. Je le menai
dans le jardin , & après lui avoir fait
quelques careffes pour le difpofer , je le
priai de vouloir m'avouer ce qu'il m'avoiť
voulu dire. Il fit d'abord le difcret , & détournant
fon vifage à la façon des jeunes
gens timides , il me dit qu'il favoit bien
que j'aimois fa mere ; qu'un jour il m'avoit
vi à fes genoux , & que j'avois voulu lui
baifer la main ; mais enfin il m'ajouta qu'il
n'en parleroit point à fon pere , fi je voulois
le bien traiter. On fçait le fond qu'il
y a à faire fur de pareilles promeffes. Je
ne fçavois quel parti prendre. Je n'ofois
èn parler à ma Maîtreffe. D'un autre côté,
j'apprehendois d'être la caufe de les difgraces
, & mon filence me paroiffoit dangereux.
Le repos de la Dame l'emporta
pourtant fur ma propre fatisfaction . Je met
determinai à lui avouer la découverte du
jeune homme ; elle en fut effrayée , &
m'ordonnna par tout le pouvoir qu'elle
crut avoir fur moi , de la quitter inceffamment.
Jamais ordre ne fut plus difficile à
executer. Cependant il fallut s'y refoudre.
64
LE MERCURE
La feule chofe qui me confola , ce fut l'affe
rance que cette aimable Dame voulut bien
me donner , qu'elle fongeroit en moi , &
peutêtre plus qu'il ne conviendroit à fa
tranquillité. Voilà la premiere expreffion
qui me prouva que je ne lui étois pas
indifferent. Elle me donna du courage ;
j'ofai me flatter que l'Amour ne m'abandonneroit
pas en fi beau chemin. Enfin ,
je partis un beau matin , fans avertir perfonne
, & je revins à la même Ville ; où
j'avois vû pour la premiere fois celle que
je quittois avec tant de regret.
Jamais les rigueurs de l'abfence ne-fe
font fait fentir fi fortement ; il me fembloit
qu'on m'avoit arraché la moitié de
moi-même , je ne vivois plus qu'à demi.
Je n'étois occupé que de mes chagrins ,
& je crois que j'y ferois fuccombé , fi ma
Maîtreffe ne m'avoit foutenu par fa bonté .
Un jour un homme inconnu me demanda
fous mon veritable nom que j'avois repris ,
& me prefenta une lettre , fans me dire de
quelle part. Je l'ouvris ; mais comment
vous expliquer ma joie , lorfque je reconnus
la main de l'adorable perfonne , dont
la feparation m'étoit fi cruelle.
Voici les termes de fa lettre .
Je ne doute point de votre inquietude ;
j'en juge par la mienne : fi vous m'aimez ,
mes nouvelles doivent vous confoler . S'il vous
fant
D'OCTOBRE. 65
faut encore des fecours plus puiſſans , je veux
bien vous dire que vous me verrez dans peu
dans le fejour que vous habitez. Mon mari
a une affaire au sujet de la Chaſſe. Il ira
à la Ville pour la faire juger. Adieu . Songex
que je n'ai jamais fait pour perſonne ce
que je fais aujourd'hui . Ne me faites point
de réponſe , il y auroit du danger.
De la melancolie la plus profonde je
paffay tout d'un coup à la plus parfaite
fatisfaction dont foit capable un tendre
coeur. Quelle difference ! mon imagination
ne me prefentoit que des objets fu
neftes ; & dans l'inftant elle me traça les
images les plus charmantes. Je vis d'avance.
toutes les graces que l'arrivée de ma Maîtreffe
devoit ramener . Effectivement , au
bout de quatre jours elle arriva avec fon
mari. Il avoit eu une difpute fort vive au
fujet de la chaffe avec un de fes voisins
ils étoient venus tous deux pour faire dif
cuter leurs droits . J'eus donc occafion
de revoir la plus belle femme du monde ;
mais je ne connoiffois pas encore toute
la grandeur de la felicité qui m'etoit deftinée
; fon mary s'échauffa tellement dans
la pourfuite de fon procès , qu'il en prit
une maladie dont il mourut.
i
Après avoir laiffé expirer le temps qu'on
doit au fouvenir des morts , je propofay
ama Maîtreffe de remplacer celui qu'elle
F
66 LE MERCURE
pleuroit. Ma fortune heureufement étoit
affez bonne , pour la dédommager de ce
qu'elle avoit perdu. J'étois d'une naiſſance
qui n'étoit point inferieure à celle du défunt
, & je n'avois pas trente ans. Je fis
mes offres avec toute la delicateffe qu'on
doit avoir dans les premiers jours d'une
affliction legitime , & j'ajoûtay que je
fçaurois moderer mes empreffemens , pour
ne rien demander qui ne s'accordât avec
les bienséances qu'on doit obferver dans
ces occafions , L'aimable Veuve fut touchée
de mes raifons ; elle y répondit avec
beaucoup de bonté , & lors qu'on eut
donné à la memoire du premier Epoux
tout ce que pouvoit exiger le devoir le
plus exact , je vis arriver ce bienheureux
moment tant defiré. Nous éprouvons depuis
fix ans que nous fommes liez l'im
à l'autre , qu'il n'appartient qu'à l'Amour
de faire des mariages comme le nôtre ..
D'OCTOBRE. 67
ARRESTS , EDITS
A
Declarations .
"' RREST de la Cour de Parlement
rendu à Pontoiſe le 2 Septembre 1720 ,
qui homologue l'Acte en forme de
Refultat de la Communauté des Graveurs fur
tous Métaux , portant Reglement general pour
les Apprentifs & Compagnons de ladite Communauté.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
20 Septembre 1720 , qui condamne le Sieur
André Secretaire du Roy , au payement du
centiéme Denier d'une Terre par luy acquife
enfemble au triple dudit droit , faute d'avoir
fait infinuer le Contract d'acquifition de ladite
Terre dans le temps preferit par les Reglemens.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
20 Septembre 1720 , qui permet à toutes les
Communautez Ecclefiaftiques & Hôpitaux du
Royaume d'acquerir de nouvelles Rentes , mênte:
fur Particuliers , à raifon du Denier cinquante.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
24 Septembre 1720 , par lequel Sa Majesté
permet aux Directeurs de la Compagnie des
Indes , de faire figner pour leur Caiffier les
cinq cens mille Billets d'un dixième d'Action
chacun , ordonnez par l'Arreft de fon Confeil
du prefent mois , & de les faire vifer
dus Fij
68 LE MERCURE
pour eux par les Sieurs Guyot , Cauvin , Motté,
Maricourt , Poftel , Lauriau , Sigonneau , Guyart.
Mabire , Duport , Defroches , Couterot , Pinchart
& Doré : Veut Sa Majesté que lefdits
Commis puiffent figner & vifer concurremment
& indiftinctement lefdits dixiémes d'Actions.
Extrait des Regiftres du Conseil d'Etat.
L&
E ROY ayant jugé à propos d'évoquer par
differens Arrefts à foy & à fon Confeit plufieurs
procès & differens , lefquels ne pouvoient
trouver une expedition affez promte dans les
Tribunaux où ils avoient été portez , & pour
des matieres lefquelles , vû les conjonctures prefentes
, requeroient plus de celerité : Sa Majefté
auroit en même temps nommé des Commiffaires
de fon Confeil , aufquels Elle auroit attribué
toute Cour & Jurifdiction , pour proceder au
Jugement defdits Procès en dernier reffort &
fur leurs derniers erremens , le nombre defquels
Commiffaires auroit efté augmenté par les derniers
Arreſts , afin de procurer aux Parties une
plus promte expedition . Et Sa Majesté voulant
attribuer à tous lefdits Commiffaires un égal
pouvoir , afin que les uns en l'abfence des autres
puiffent proceder en nombre fuffifant au
jugement defdits Procès ; comme auffi regler la
forme dans laquelle il fera procedé pardevant
lefdits Commiffaires pour abreger l'inſtruction
& accelerer le Jugement defdits Procès ; Ouy
Je Rapport : SA MAJESTE' ESTANT EN
SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur le Duc
d'Orleans Regent , a ordonné & ordonne que
tous les Proces & differens qu'Elle a évoquez
par les Arrefts de fondit Confeil des 3 , 12 ,
14 , 19 , 21 & 22 du prefent mois de Septem
bre , feront jugez en dernier reffort par les Sieurs
D'OCTOBRE. 69
d'Armenonville , Bignon , de la Houffaye , de
la Rochepot , de Château neuf , Ferrand , de
Machault , Confeillers d'Etat ; & par les Sieurs
Maboul , de la Grandville , Orry , Angrand ,
de la Vigerie , de Vattan , de Talhouet , de
Tourny , de Bonnelles , Dupuis & de Fontagieu
Maiftres des Requeftes ordinaires de fon Hôtel ,
aufquels Sa Majeſté attribuë à cet effet toute
Cour , Jurifdiction & connoiffance , icelle interdifant
à toutes fes Cours & autres Juges :
Permet Sa Majesté aufdits Commiffaires de proceder
au Jugement defdits Procès , les uns en
kabfence des autres ; pourvû qu'ils foient au
moins au nombre de fept : Et attendu que tous
lefdits Procès ont efté évoquez par lefdits Arrefts
, pour eftre inftruits & jugez fuivant leurs
derniers erremens ; ordonne Sa Majesté que
l'inſtruction en fera continuée pardevant lefdits.
Sieurs Commiffaires , par fimples communications
qui feront par eux ordonnées à ceux qui
fe trouveront Parties affignées ou reçues dans
les Tribunaux où lefdits Procès étoient pendans ,
pour y deffendre dans tels delays qui feront jugez
competans , fauf au cas qu'il y ait lieu d'y
appeller de nouvelles Parties , à eftre procedé
à leur égard par des affignations dans les delays
& en la maniere portée par le Reglement fair
pour la procedure du Confeil le 17 Juin 1687.
Er fera le prefent Arreft executé nonobftant
oppofitions ou empêchemens quelconques , dont
aucuns interviennent , Sa Majesté s'en referve
la connoiffance à foy & à fon Confeil , & icelle
interdit à toutes fes Cours & autres Juges. Fair
au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majefté y eftant ,
tenu à Paris le vingt- quatrième jour de Septembre
mil fept cent vingt. Signé , PHELYPEAUX.
Registré an G´effe de la Commiffion , fuivant
e70 LE MERCURE
l'Ordinnance de Meffieurs les Commiffaires de
cejourd'huy , par moy Greffier de ladite Commiffion ,..
fouffgé. Fait en leur Affemblée tenuë à Paris
le vingt-fixiéme jour de Septembre mil fept cent
vingt. Signé , LORNE.
ARREST du Confeil du 24 Septembre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne qu'il fera
établi daus la Ville de Lyon , ainfi qu'il a eſté
ordondé pour la Ville de Paris , un Controlleur
General des Comptes courans & Viremens de
Parties , & trois Directeurs ; & que dans les
autres Villes du Royaume où il y a Hôtel des
Monnoyes , dans lefquelles il a efté établi un
un Livre de Comptes courans & Viremens de
Parties , & dans toutes celles où il fera jugé
neceffaire de faire de pareils établiffemens , la
Regie defdits Comptes courans & Viremens de
Parties , fera faite par trois Directeurs qui feront
nommez par Sa Majefté dans chacune defdites
Villes , & choifis dans les fix Sujets qui
ont efté ou qui feront prefentez par les Marchands
& Negocians des mêmes Villes , lefquels
Controlleur General dans la Ville de Lyon , &
Directeurs tant dans ladite Ville que dans les
autres Villes des Provinces , fuivront les infructions
qui leur feront envoyées par le Sieur Lavy
Directexr general de la Compagnie des Indes
& de la Banque.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
24 Septembre 1720 , qui difpenfe les Controlleurs
Ambulans des Formules , Domaines , Controlle
des Exploits , & des Actes des Notaires ,
Infinuations , Greffes & Amortiffemens , & les
Commis Buraliftes defdits Droits , de l'obligation
portée par l'Arreft du 20 Aouft dernier
u fujet de la remife de leurs fonds aux Recettes
>
D'OCTOBRE. 71
generales , à l'exception de ceux qui refident
dans les Villes où il y a un Receveur general,
& ordonne qu'il fera dreffé des procès verbaux
des effets qui fe trouveront dans les Caifles
lors des diminutions d'Efpeces.
ARREST du Confeil , du 5 Octobre 1720 ,,
par lequel Sa Majefté ordonne que dans le courant
du prefent mois d'Octobre pour out delay ,
& fans efperance d'aucun autre , tous les Por
teurs d'Actions intereffées non remplies de là
Compagnie des Indes , feront tenus d'acquitter
le fupplément de trois mille livres par Action
ordonné par l'Arreft de fon Confeil du 3 Juin
dernier Veut Sa Majefté : que ledit , Supplément
puiffe eftre fait ou en Billets de Banque de cent
livres , cinquante livres & dix livres , à raison
de trois mille livres par Action , ou en Actions
non remplies qui feront reçûës fur le pied de
trois pour deux ; enforte que pour trois Actions
non remplies , il en fera délivré deux remplies ,
fi mieux n'aiment les Porteurs defdites Actions
non remplies les convertir dans le même delay
en Actions Rentieres : Ordonne Sa Majefté
qu'après ledit jour dernier du prefent mois
Octobre , les Actions de ladito Compagnie
non remplies demeureront nulles & de nul effet.
Fait deffenfes de les negocier , à peine de reftitution
& de trois mille livres d'amende.
ARREST du Confeil , du 8 Octobre 1720 ,
par lequel Sa Majefté ordonne que les anciennes
Efpeces continueront d'eftre reçûës dans le
Public jufqu'au premier jour de Novembre prochain
; fur le pied qu'elles y ont actuellement
cours , pendant lequel temps il fera travaillé
dans les Hôtels des Monnoyes , à la converfion
ou reformation des Efpects & Matieres qui
72 LE MERCURE
y font actuellement , ou de celles qui y feront
portées.
L
Extrait des Registres du Confeil d'Etat.
E Roy s'étant fait reprefenter en fon Confeil
l'Etat annexé à la minute du prefent Arrêt
, de tous les Billets de Banque , tant gra
vez qu'imprimez qui ont été faits en vertu des
differens Arrêts fur ce rendus , Sa Majefté a
reconnu , que la totalité defdits Billets de
toute efpece a monté à la fomme de Deux Milliards
fix cens quatre vingt feize Millions quatre
cens mille livres, fur laquelle quantité defdits
Billets il en a été converti de ceux de
Mille & de Dix Mille livres pour la fomme de
Deux cens Millions , en Billets de Cent , de
Cinquante & de Dix livres , par forme de Divifion
feulement , & fans aucune augmentation de la
fomme totale , Et ce en execution des Arrêts des
26 Juin , 2 & 19 Septembre derniers ; Que de
ladite fomme totale defdits Billers de Banque,
il en été brûlé en l'Hôtel de Ville de Paris
pour Sept cens fept Millions trois cens vingt fept
mille quatre cens foixante livres , fuivant les
Procès verbaux qui en ont été dreffez ,
par les fieurs Commiffaires à ce deputez par
Sa Majefté , que par les fieurs Prevôt des Marchands
& Echevins de ladite Ville , en datte
des 28 Juin , premier , 9 ; 16 , 23 & 30 Juiller,
6 , 20 & 29 Aouft derniers ; Outre laquelle
quantité de Billets brûlez , il a été porté au
Trefor Royal pour acquifition de Rentes Perpetuelles
ou Viageres plus de Cinq cens treate
Millions à la Caiffe de la Banque plus de
Deux cens Millions pour avoir des Comptes
ouverts à ladite Banque , fuivant l'Arrêt du
31 Juillet dernier , Et pour environ Quatre
tant
vingt
D'OCTOBRE.
73
vingt dix Millions dans les differentes Caiffes
de la Compagnie des Indes , de la Banque , &
des Hôtels des Monnoyes , le
, par payement
qui en a été fait en Efpeces , tous lefdits Billets
feront inceflamment brûlez en l'Hôtel de
Ville de Paris , à meſure que lesdits fieurs Commiffaires
du Roy en auront achevé les Proces
verbaux ; Enforte qu'il ne reste plus de Billets
de Banque dans le Commerce que pour la
fomme de Un Milliard cent foixante- neuf Millions
foixante douze mille cinq cens quarante
livres Pour retirer laquelle fomme , outre ce
qui r ra à confommer en Billets du fonds
des Vingt cinq Millions de Rentes créées par
Edit du mois de Juin dernier , il en fera encore
éteint quatre cens Millions pour le Capital
des Huit Millions de Rentes au Denier
Cinquante , créées par Edit du mois d'Aouft
dernier fur les Impofitions des Provinces du
Royaume , Et Cent Millions pour le Capital
des Quatre Millions de Rentes Viageres au Denier
Vingt- Cinq , créées par Edit du mois
d'Aouft dernier Et ce qui n'aura point été
porté aufdits débouchemens pourra , ou être
employé en acquifition de Dixiémes d'Actions ,
fuivant l'Article VIII . de l'Arrêt du 15 Septembre
dernier , montant à Quatre cens Mil→
Hons , ou être porté aux Hôtels des Monnoye
fuivant l'Edit du même mois de Septembre
ou demeurer Actions Rentieres avec la Garantie
du Roy. Et comme par toutes ces difpofitions ,
Sa Majesté a donné aux Billets de Banque des .
débouchemens convenables aux differentes vûëde
fes Sujets , au delà même de ce qui eft neceffaire
pour éteindre lefdits Billets ; Que d'ail
leurs ceux de Cent , de Cinquante , & de Dix
livres , qui ont encore cours dans le Commerce
fuivant les Arrêts precedens , y font
G
>
72 LE MERCURE
y font actuellement , ou de celles qui y feront
portées.
Extrait des Regiftres du Conseil d'Etat.
LE-Roy prisute du prefent Ar-
E Roy s'étant fait reprefenter en fon Confeil
>
rêt , de tous les Billets de Banque , tant gra
vez qu'imprimez qui ont été faits en vertu des
differens Arrêts fur ce rendus , Sa Majefté a
reconnu que la totalité defdits Billets de
toute efpece a monté à la fomme de Deux Milliards
fix cens quatre vingt feize Millions qua
tre cens mille livres, fur laquelle quantité defdits
Billets , il en a été converti de ceux de
Mille & de Dix Mille livres pour la fomme de
Deux cens Millions , en Billets de Cent , de
Cinquante & de Dix livres , par forme de Divifion
feulement , & fans aucune augmentation de la
fomme totale , Et ce en execution des Arrêts des
26 Juin , 2 & 19 Septembre derniers ; Que de
ladite fomme totale defdits Billets de Banque,
il en a été brûlé en l'Hôtel de Ville de Paris
pour Sept cens fept Millions trois cens vingt fept
mille quatre cens foixante livres , fuivant les
Procès verbaux qui en ont été dreffez ,
3.
tant
par les fieurs. Commiffaires à ce deputez par
Sa Majefté , que par les fieurs Prevôt des Marchands
& Echevins de ladite Ville en datte
des 28 Juin , premier , 9 ; 16 , 23 & 30 Juiller,.
6,20 & 29 Aouft derniers Outre laquelle
quantité de Billets brûlez , il a été porté au
Trefor Royal pour acquifition de Rentes Perpetuelles
ou Viageres plus de Cinq cens treate
Millions ; à la Caiffe de la Banque plus de
Deux cens Millions pour avoir des Comptes
ouverts à ladite Banque , fuiyant l'Arrêt du
31 Juillet dernier 2 Et pour environ Quatrevingt
D'OCTOBRE.
73
vingt dix Millions dans les differentes Caifles
de la Compagnie des Indes , de la Banque , &
des Hôtels des Monnoyes , par le payement
qui en a été fait en Efpeces , tous lefdits Billets
feront inceflamment brûlez en l'Hôtel de
Ville de Paris , à meſure que lesdits fieurs Commiffaires
du Roy en auront achevé les Procès
verbaux ; Enforte qu'il ne refte plus de Billers
de Banque dans le Commerce que pour la
fomme de Un Milliard cent foixante- neuf Millions
foixante douze mille cinq cens quarante
livres Pour retirer laquelle fomme , outre ce
qui r ra à confommer en Billets du fonds
des Vingt cinq Millions de Rentes créées par
Edit du mois de Juin dernier , il en fera encore
éteint quatre cens Millions pour le Capi
tal des Huit Millions de Rentes au Denier
Cinquante , créées par Edit du mois d'Aouft
dernier fur les Impofitions des Provinces du
Royaume , Et Cent Millions pour le Capital
des Quatre Millions de Rentes Viageres au Denier
Vingt- Cinq , créées par Edit du mois
d'Aouft dernier , Et ce qui n'aura point été
porté aufdits débouchemens pourra , ou être
employé en acquifition de Dixiémes d'Actions ,
fuivant l'Article VIII. de l'Arrêt du 15 Septembre
dernier , montant à Quatre cens Mil-
Hons , ou être porté aux Hôtels des Monnoye
fuivant l'Edit du même mois de Septembre
ou demeurer Actions Rentieres avec la Garantie
du Roy. Et comme par toutes ces difpofitions ,
Sa Majesté a donné aux Billets de Banque des.
débouchemens convenables aux differentes vûëde
fes Sujets , au delà même de ce qui eft neceffaire
pour éteindre lefdits Billets Que d'ail
leurs ceux de Cent , de Cinquante , & de Dix
livres qui ont encore cours dans le Com-'
meice fuivant les Arrêts precedens ⚫ y font
G
3
74
LE MERCURE
peu de
neanmoins tombez dans un tel difcredit qu'ils
n'y ont plus de valeur comme Efpeces , & qu'on
ne les y confidere que par rapport aux emplois
qu'on en peut faire ; Enforte que le
Payemens qui fe fait encore avec lefdits Billets,
ne fert qu'à empêcher la circulation de l'argent
, & à foutenir le haut prix des Denrées
& Marchandiſes , & à introduire ou à perpe
tuer une infinité d'abus dans le Commerce.
qui ne peuvent ceffer que par le Rétabliffement
des Payemens en Efpeces ; Sa Majeſté a
jugé à propos de l'ordonner dans un terme
convenable , en fe chargeant Elle mate ,
commencer du premier Janvier de la prefente
année , d'acquitter de cette maniere les arrerages
de toutes les Rentes qu'Elle doit , enfem
ble des Penfions , Gages , Appointemens , charges
& dépenfes de quelque nature qu'elles
foient ; A quoy étant neceffaire de pourvoir ,
Quy le Rapport. SA MAJESTE ESTANT EN SON
CONSEIL , de l'Avis de Monfieur le Duc d'Orleans
Regent a Ordonné & ordonne ce qui
fuit ,
>
ART. I. Les Billets de Banque ne pourront
à compter du premier Novembre prochain, être
donnez ni reçus en Payement pour quelque
caufe & pretexte que ce foit ,, que de gré à
gré à l'effet de quoy Sa Majesté a derogé & déroge
aux Articles III, & IV . de l'Arrêt de fon
Confeil du 15 Septembre dernier.
II. Veut neanmoins Sa Majesté qu'à compter
du jour de la publication du prefent Arrêt
il ne foit reçu aucun Billet de Banque dans les
Bureaux de fes Recettes & Fermes , même
pour les Droits & Impofitions duës anterieurement
à la publication dudit Arrêt , Et que lef
dits Droits & Impofitions de quelque forte &
maniere que ce puiffe être , foient acquittezen
D'OCTOBRE.
75
entier en Efpeces , à l'exception neanmoins des
fommes dues tant pour lefdits Droits que
pour lefdites Impofitions ou autrement avant le
premier Janvier dernier , lefquels pourront être
payées jufqu'au premier Decembre prochain en
Billets de Banque de Cent livres , de Cinquante
& de Dix livres.
III. Veut auffi Sa Majefté que les Rentes
Penfions , Appointemens , Gages , & autres Parties
qui restent à payer par Sa Majeſté ſur les
Dépenfes de la prefente année 1720 , foient
acquittées en Efpeces , Et que les fommes par
Elle dues pour les années anterieures à la prefente
, foient feulement payées en Billets de
Banque de Cent , de Cinquante & de Dix li
vres,
IV. Les Dividendes dûs par la Compagnie
des Indes jufqu'au premier Janvier prochain ,
feront payez en Billets de Banque de Cent ,
de Cinquante & de Dix livres ; Et à l'égard des
arrerages tant des Actions Rentieres , que des
Rentes Viageres dûës par ladite Compagnie ,
Veut Sa Majefté qu'ils foient payez en Efpeces,
commencer du premier Juillet dernier.
•
V. Permet Sa Majesté aux Forteurs des Bil
lets de Banque de Cent , de Cinquante & de
Dix livres , de les placer jufqu'au dernier Novembre
prochain inclufivement dans les em
ploys par Elle indiquez , paffé lequel temps ce.
qui reftera defdits Billets ne pourra plus être
converti qu'en Actions Rentieres , ou en Dixiemes
d'Actions mentionnées en l'Article VIII.
de l'Arreft du Confeil du 15 Septembre dernier
; Et fera le prefent Arrêt lû , publié & affiché
par tout ou befoin fera , & feront pour
l'execution d'iceluy toutes Lettres neceffaires
expediées. FAIT au Confeil d'Etat du Roy , Sa
Gij
ne LE MERCURE
Majefte y étant tenu à Pais le dixième jour
d'Octobre mil fept cent vingt.
Signé , PHELYPBAUX .
Total des Billets de Banque.
Billets gravez
Billets imprimez .
Billets fabriquez
Billets brûlez •
• •
•
• · •
769 , 000 , 000 liv,
1 , 000 , 000 , 000 liv,
2,696 , 400 , oco liv.
707, 327,460 liv.
ARREST du Confeil , du 11 Octobre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne qu'à commencer
au 21 du prefent mois d'Octobre les
Payeurs des Rentes dudit Hôtel de Ville payeront
en deniers comptans , & fans aucun Billet
de Banque , les arrerages qui font dûs pour la
prefente année 1720 , tant des Rentes perpetuelles
, que des Rentes viageres & des Tontines
; à l'effet dequoy les fonds neceffaires feront
remis aufdits Payeurs de femaine en femaine
par l'Adjudicataire General de fes Fermes
Unies .
ARREST du Confeil , du 11 Octobre
1720 , par lequel Sa Majefté fait tres expreffes
inhibitions & défenfes , fous peine de la vie ,
à tous Negocians , Marchands , Colporteurs ,
Porte balles & Revendeufes à la Toilette ,
d'introduire dans le Royaume , de faire commerce
, expofer en vente , colporter , debiter ,
& à toutes perfonnes de quelque état & qualité
qu'elles foient , d'acheter en gros ou en
détail , tant par eux que par perfonnes interpofées
, & de recevoir dans leurs maifons aucunes
Etoffes ou Toiles des Indes , de la Chine
& du Levant , comme auffi s Etoffes fabriquées
dans la Ville de Marseille , foit que efdites
Etoffes foient de Soye pure ou mêlées
D'OCTOBRE. 77
dor & d'argent , d'Ecorce d'arbres , Laine ,
Fil ou Cotton , peintes en Furies ou à Fleurs
Toiles de Cotton peintes , imprimées ou blanches
, vieilles ou neuves . en pieces ou en cou
pons , Couvertures , Bonnets ou autres ouvra
ges , meubles , habits ou autres vêtemens compofez
defdites Etoffes & Toiles. Défend pareillement
Sa Majesté fous la même peine , à
tous Fripiers , Tailleurs , Couturieres , Tapiffiers
, Brodeurs , & autres Ouvriers , d'employer
chez eux ou dans les maifons particulieres
, ni d'avoir dans leurs Magazins , Boutiques
ou Chambres aucunes defdites Etoffes &
Toiles , ni aucuns habits , vêtemens ou meubles
faits d'icelles , neufs ou vieux : Ordonne,
au furplus Sa Majefté que les Arrefts & Reglemens
concernant lefdites Toiles & Eroffes , &
notamment celui du 27 Septembre 1719 , feront
executez felon leur forme & teneur.
ARREST du Confeil , du 11 Octobre ,
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne , que du
jour de la publication du prefent Arreft , il ne
fera plus reçû aucuns Billets de Banque dans
aucuns Bureaux de Recettes , foit generales ,
foit particulieres , tant des Pays d'Etats , que
du Clergé general & des Diocefes particuliers.
Enjoint Sa Majefté aux Agents Generaux du
Clergé , & aux Sieurs Intendans & Commiffaires
départis dans les Provinces & Generalitez
du Royaume , de tenir foigneufement la main .
à l'exécution dn prefent Arreſt.
.
ARREST du 12 Octobre 1720, concernant le
remboursement des Offices & Droits fupprimez ,
& des Créanciers des Communautez .
ARREST du Confeil du 12 Octobre 1720 ,
par lequel Sa Majesté permet aux Directeurs
de la Compagnie des Indes de faire figner.
G iij
58 LE MERCURE
pour leur Caiffier , & vifer pour eux les Actions
Rentieres de ladite Compagnie de dix mille livres
& de mille livres , en execution defdits
Arrests des 15 Aouft dernier & du prefent
mois d'Octobre par les Sieurs Guyot , Cauvin ,
Motté , Maricourt , Poftel , Lauriau , Sigonneau ,
Guyart , Mabire , Duport , Defroches , Couterot
, Pinchart & Doré ; Voulant Sa Majesté que
lefdits Commis puiffent figner & vifer concurtemment
& indiſtinctement lefdites Actions .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat. :
E
Confeil du 13 Juillet dernier des Comptes
courants , & Virements de parties pour la feureté
du Commerce , Et Sa Majeſté étant informée
que la facilité indéfinie qui a été accordée
par Arreft du 15 Septembre dernier , de convertir
les Actions en nouvelles Ecritures , donne
lieu à un grand nombre de perfonnes d'augmenter
à un tel point le montant defdites nouvelles
Ecritures , qu'il eft à craindre que leur quantité
exceffive n'en diminuë le Credit dans le public ;
à quoy étant neceffaire de pourvoir ; Oüy le.
Rapport : SA MAJESTE ESTANT EN
SON CONSEIL , & de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a ordonné & ordonne :
Article I. Que les comptes en Banque ne
pourront exceder la fomme de cent millions de
livres en nouvelles Ecritures , lefquelles pourront
eftre converties à l'ordinaire en Actions
de la Compagnie des Indes , fans que lesdites
Actions puiffent eftre converties en Ecritures
que jufqu'à concurrence des fommes qui manqueront
pour parfaire celle de cent millions de liv.
II. Veut Sa Majefté conformément à l'Article
VI. de l'Arreſt de fon Confeil du 13 Juillet
dernier. Que toutes Lettres de Change &
D'OCTOBRE. 79
Billets de Commerce de cinq cens livres & au
deffus enfemble les ventes de marchandifes
en gros dans les Villes où les Livres des Comptes
courants & Virements de parties font établis ',
foient acquittez en Ecritures entre Marchand's
& Negocians , à peine de nullité de payement
& de cinq cens livres d'amende au profit de
la Banque , tant contre le Creancier , que contre
le debiteur. Fait au Confeil d'Etat du Roy,
Sa Majesté y étant , tenu à Paris le vingtdeuxième
jour d'Octobre mil fept cent vingt.
Signé, PHELY PEAUX .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat.
E ROY ayant par Arreft de fon Confeil
Lau Abulf dernier , ordonné que les Produ
30
prietaires des Rentes de l'Hôtel de Ville de Paris
, affignées fur le Clergé , qui en confentiroient
avant le premier du prefent mois d'Octobre
la réduction fur le pied du Denier cinquante ,
ou qui fe prefenteroient pour en recevoir le
remboursement , feroient payez de leurs arrerages
à raifon de deux pour cent , à compter du
premier Janvier 1720 , jufqu'au jour de leur
remboursement , ou de la reduction qui auroit
efté faite defdites Rentes , lequel temps paffé
ils feroient privez defdits arrerages , & de la
faculté qui leur avoit efté accordée par l'Arreſt
du 9 Juillet dernier de conferver leurs Rentes.
Et par les Articles VIII . & IX . dudit Arreft Sa
Majefté ayant pareillement ordonné le rembour
fement des Offices de Payeurs & Contrôlleurs
defdites Rentes , neanmoins ayant eſté informée
que depuis l'expiration du delay accordé par
ledit Arreft aux Proprietaires defdites Rentes ,
plufieurs ont pris la refolution d'en conſentir
la reduction à deux pour cent ; -qu'ainfi il ne
Giiij
80 LE MERCURE
feroit pas juste de les priver de la joiffance des
arrerages qui leur en font dûs depuis le premier
Janvier dernier , & d'être admis à ladite rédu-
Etion , non plus que ceux qui ayant figné les
Quittances de leur remboursement , ont cependant
negligé d'en recevoir les deniers ; Elle
auroit juge à propos de proroger à cet égard
le delay fixé par ledit Arreft , & de pourvoir
en même temps au payement des interefts des
fommes aufquelles fe trouvera monter la liquidation
de la finance des Offices de Payeus &
de Contiôlleurs defdites Rentes ; Ouy le Rapport
SA MAJESTE' ESTANT EN SON
CONSEIL , de l'avis de Monfieur le Duc d'Orleans
Regent ,
Art . I. A prorogé & proroge le delay fixé
par ledit Arreft du Confeil du trente Aouft dernier
en faveur des Proprictaires des Rentes de
l'Hôtel de Ville de Paris , affiguées fur le Cler
gé , jufqu'au premier Novembre prochain , &
en confequence ordonne que ceux defdits Proprietaires
dont les Ordonnances de liquidation
auront été expediées avant ledit jour premier
Novembre, & qui en confentiront la reduction
au Denier cinquante , jouiront des arrerages de
leurs Rentes , à compter du premier Janvier dernier.
Et à l'égard de ceux qui en voudront
recevoir le remboursement , ils feront tenus de
remettre avant ledit jour premier Novembre au
Sieur Dubreuil , les Ordonnances de liquidation
expediées à leur profit , les Titres de proprieté
énoncez en icelles , leurs Quittances portant fubrogation
au profit dudit Dubreuil , enfemble
les Certificats des Confervateurs des hypoteques
fur ce neceffaires ; & faute par eux d'y fatisfaire
dans ledit delay , ordonne Sa Majesté que
leurs
Kentes demeureront reduites fur le pied cy de us,
à compter du premier Janvier mil fept cent vingt.
D' OCTOBRE
II. Les Porteurs des Recepiffez cy devant
délivrez , ou qui le front pendant le prefent
mois par le Sieur Gueux , pour le rembourkement
defdites Rentes , & qui doivent eftre acquittez
par le Sieur Dubreuil , feront tenus de
les rapporter avant le dernier du prefent mois
audic Dubreiiil , finon & à faute de ce fa re dans
Iedit delay, permet S. M. audit Dubreuil , de dépofer
en prefence dudit Gueux, aux rifques , perils &
fortunes des porteurs defdits Recepiffez , ès
mains de le Fevre Notaire , en Billets de Banque
de cent livres , cinquante livres , & de dix
livres , les fommes portées aufdits Recepiffez ;
au moyen de quoy ledit Gueux remettra audit
Dubreuil les Quittances & pieces juftificatives
des rembourfemens mentionnez aufdits Recepiffez
; quoi faifant il en fera valablement déchargé.
III. Les Rentiers dont les Ordonnances auront
été délivrées avant le dernier Decembre prochain ,
feront payez de leurs arrerages à raifon du denier
cinquante , à compter du premier Juillet
1720. Et à l'égard de ceux qui n'auront point reprefenté
leurs Titres avant le dernier Decembre
prochain , ils ne jouiront des arrerages de leurs
Rentes que pour les fix mois dans lesquels leurs
Ordonnances de liquidation feront expediées .
IV. Faute par les Proprietaires des Offices de
Payeurs & Controlleurs defdites Rentes , & des
Gages , Augmentations de Gages & Taxations.
hereditaires y attribuez , qui en ont été payez
en execution des Contrats paffez entre Sa Majefté
& le Clergé , & dont l'emploi eft fait dans les
Comptes qui fe rendent en la Chambre des Comptes
par lefdits Payeurs , d'avoir reprefenté
leurs Titres dans les delais qui leur ont été ac
cordez pour parvenir à leur remboursement ,
Veut Sa Majesté qu'ils en foient privez , &
qu'ils ne jouiffent des interefts de leur finance:
82 LE MERCURE
de deux pour cent , qu'à compter du 'jour que
les Ordonnances de leur liquidation feront expediées
; en cas neanmoins , & non autrement ,
qu'ils ayent fatisfait à ce qui leur a été ordonné
par ledit Arreſt du trente Aouft dernier .
V. Les Droits des Creanciers des Proprietaires
defdites Rentes & defdits Offices de Payeurs
& Controlleurs , Gages , Augmentations de Gages
& Taxations , fubfifteront fur les principaux &
arrerages defdites Rentes , & fur la finance &
les interefts defdits Offices , fans préjudice des
privileges exclufifs de Sa Majeſté & de ceux du
Clergé .
VI. Enjoint Sa Majefté aufdits Payeurs d'accelerer
aux Rentiers l'expedition des Immatricules
qu'ils font tenus de leur délivrer , conformé
.ment audit Arreft du trente Aouft dernier , pour
lefquelles leur fera payé vingt fols par chacune
mutation de proprieté , leur faifant defenſe d'exiger
plus grand droit , à peine de concuffion.
vil. Les Titres de proprieté qui auront été
délivrez audit Dubreuil à caufe des Remboursemens
faits , & qui le feront de fes deniers , feront
par lui remis & depofez aux Archives du Clergé,
& retiendra feulement ledit Dubreuil les Ordonnances
de liquidation & Quittances de Rembourfement
, en vertu defquels arrerages des Rentes
aufquelles il aura été fubrogé , & les interefts des
fommes remboursées pour lefdits Offices , lui feront
payés fans difficulté .
VIII. Il fera remis par lefdits Rentiers & Officiers
aux Agens Generaux du Clergé , des Expeditions
defdites Quittances de Remboursement &
Actes de reduction , pour fervir aux Commiffaires
nommez par Sa Majefté , pour la liquidation
defdites Rentes & Offices , à arrefter les Etats des
parties de Rentes qui fubfifteront , dans lesquels
feront compriſes celles aufquelles ledit Dubreuil
D'OCTOBRE. 83
a été & fera fubrogé par les Quittances de Rem
bourfement d'icelles , enfemble les interefts qui
proviendront de la finance des Offices , Gages ,
Augmentations de Gages & Taxations .
IX. Ceux qui acquerront une ou plufieurs
partics defdites Rentes dudit Dubreuil , remettront
pareillement aux Sieurs Agens Generaux
du Clergé une expedition des Tranſports qui
leur en feront faits par ledit Dubreuil , pour
eftre lesdites Rentes employées fous leurs noms
dans lefdits Etats en un feul article , confor
mément aufdits Tranſports.
X. Remettra auffi le Sieur Geoffroy , ' nommé
par Sa Majesté pour faire la Recette & le payement
des Rentes qui fubfifteront , és mains
defdits Sieurs Agens Generaux , à la fin de chacune
année , un Etat de luy certifié des Mutations
qui feront furvenues fur lesdites Rentes .
Et fera le prefent Arreft lû , publié & executé,
fans qu'il foit befoin d'autre fignification que
la publication d'iceluy , nonobftant oppofitions
ou autres empêchemens quelconques , dont fi
aucuns interviennent , Sa Majesté s'eft refervé à
foy & à fon Confeil la connoiffance , & icelle
interdit , à toutes fes Cours & autres Juges.
Enjoint Sa Majefté aux Agens Generaux du
Clergé d'y tenir la main. Fait au Confeil d'Etat
du Roy , Sa Majesté y étant , tenu à Paris le
quinzième jour d'Octobre mil fept cent vingt
Signé , PHELY PEAUX.
2439
84
LE MERCURE
Copie d'une Lettre écrite à Monfieur.
l'Abbé de Camps , par Monfieur
M arquis de Gravelon , le 16
Septembre 1720.
' Ay reçu , Monfieur , la Lettre que
vous m'avez fait l'honneur de m'écrite
le 6 de ce mois , & dans laquelle
vous me faites la grace de donner
votre approbation au jugement que j'avois
fait de la petite ftatuë de bronze dont je
vous ay envoyé le deffein. Vous m'ordondez
auffi de vous communiquer les motifs
qui m'ont determiné à croire qu'elle reprefente
la fille de l'Empereur Titus , appellée
par les Hiftoriens Julie , Julia Titi ,
& qu'elle étoit un monument de fa Deïfication
& de l'amour qu'avoit eu pour elle
l'Empereur Domitien fon oncle.
J'obéis , & je commence par un paffage
de Suetone , où il eft parlé de cette Princeffe
dans la vie de l'Empereur Domitiem ,
Liv. 8.
Fratris filiam adhuc virginem , oblatam
in matrimonium fibi , cum devinctus Domitia
nuptiis pertinaciffimè recufaffet non
multo poft , alii collocatam ultrò corrupit *
quidem vivo etiam tùm Tito , mox patre
D'OCTOBRE. 85
at viro orbatam ardentiffimè palamque dilexis
, ut etiam caufa mortis extiterit , coalte
conceptum à fe abigere.
,
Ceux qui ont vu des Medailles de cette
Princeffe , conviendront fans doute comme
yous, que le vifage & la coëffure de la petite
ftatue reffemblent aux portraits que nous
en avons fur celles qui ont été battuës
pour elle ; vous m'en avez donné , Monfeur
, encore plus de certitude , en me
communiquant la belle Empreinte du buſte
de cette Princeffe , gravé fur un faphir
qui eft dans le Trefor de l'Abbaye de Saint
Denis ; comme il eft mieux confervé que
les Medailles , étant beaucoup plus dur .
on y voit plus au naturel & plus diftin-
&tement les traits du vifage de cette Princoffe.
, avec la coëffure , lefquel j'ay ſouvent
comparez avec la ftatuë dont il eſt
queftion , & toujours trouvé une tresgrande
reffemblance & une conformité
de coëffure.
ne fera
La reffemblance étant donc établie , il
bien difficile de prouver par
pas
l'autorité d'un Poëte contemporain , que
l'Empereur Domitien , qui avoit fait éri
ger plufieurs Statues en faveur de Julie fa
niéce , en avoit fait fabriquer une qui a
fervi de modele à notre petite ftatuë. Je
ne vous affurerai pas fi ce fut pendant fa
vie , puifque les Hiftoriens gardent un
84 LE MERCURE
1
Copie d'une Lettre écrite à Monfieur
l'Abbé de Camps , par Monfieur
Marquis de Gravefon , le 16
Septembre 1720.
'Ay reçu , Monfieur , la Lettre que
vous m'avez fait l'honneur de m'écrite
le 6 de ce mois, & dans laquelle
vous me faites la grace de donner
votre approbation au jugement que j'avois
fait de la petite ftatuë de bronze dont je
vous ay envoyé le deffein. Vous m'ordondez
auffi de vous communiquer les motifs
qui m'ont determiné à croire qu'elle reprefente
la fille de l'Empereur Titus , appellée
par les Hiftoriens Julie , Julia Titi ,
& qu'elle étoit un monument de fa Deïfication
& de l'amour qu'avoit eu pour elle
l'Empereur Domitien fon oncle.
J'obéis , & je commence par un paffage
de Suetone , où il eft parlé de cette Princeffe
dans la vie de l'Empereur Domitier ,
Liv. 8.
Fratris filiam adhuc virginem , oblatam
in matrimonium fibi , cum devinitus Domitia
nuptiis pertinaciffimè recuſaſſet non
multo poft , alii collocatam ultrò corrupit ,
quidem vivo etiam tùm Tito , mox patre
D'OCTOBRE. 85
at viro orbatam ardentiffimè palamque dilexis
, ut etiam caufa mortis extiterit , coalte
conceptum à fe abigere.
Ceux qui ont vu des Medailles de cette
Princeffe , conviendront fans doute comme
yous, que le vifage & la coëffure de la petite
ftatue reffemblent aux portraits que nous
en avons fur celles qui ont été battuës
pour elle ; vous m'en avez donné , Monfeur
, encore plus de certitude , en me
communiquant la belle Empreinte du buſte
de cette Princeffe , gravé fur un faphir
qui eft dans le Trefor de l'Abbaye de Saint
Denis ; comme il eft mieux confervé que
les Medailles , étant beaucoup plus dur .
on y voit plus au naturel & plus diftin-
&tement les traits du vifage de cette Prin
coffe. , avec la coëffure , lefquel j'ay ſouvent
comparez avec la ftatuë dont il eſt
queftion , & toujours trouvé une tresgrande
reffemblance & une conformité
de coëffure.
ne fera
La reffemblance érant donc établie , il
bien difficile de prouver par
pas
l'autorité d'un Poëte contemporain , que
l'Empereur Domitien , qui avoit fait éri
ger plufieurs Statues en faveur de Julie fa
niéce , en avoit fait fabriquer une qui a
fervi de modele à notre petite ftatuë. Je
ne vous affurerai pas fi ce fut pendant fa
vie , puifque les Hiftoriens gardent un
86
LE MERCURE
grand filence fur le tems de la mort de
cette Princeffe ; mais il eft, plus croyable
que ç'a été aprés fa mort , non feulement
à caufe que la plus grande partie des Medailles
que nous avons d'elle , a été battuë
dans ce tems-là , & marque fon apotheofe,
mais auffi parce que l'attitude repreſente
Julie deifiée fous la forme de Clotho , la
premiere des Parques dont le Tribunal
étoit dans les Enfers avec Lachefis & Atropos
fes foeurs. Si l'on doutoit que Domitien
eut fait ériger des Statues à Julie fa
niéce , on n'a qu'à jetter les yeux fur la
treiziéme Epigramme du fixiéme livre de
Martial. Ce Poëte y fait mention d'une
Statue à l'honneur de cette Princeffe fous
la forme de Venus :
Quis te Phidiacoformatam , Julia , calo ,
Vel quis Palladia non putet artis opus ?
Cette Epigramme fuffit pour prouver
ce fait , mais nous avons dans la quatrième
Epigramme du même Livre , une preuve.
bien precife de la deïfication de cette
Princeffe , quoique les Hiſtoriens nous
l'ayent cachée , dans laquelle ce Poëte
parle d'elle fous la forme de la premiere
des Parques , & dans l'attitude de nôtre
petite ftatue , qui eft celle de Clotho , que
Paufanias dit être la même que la Venus
celefte des Syriens , qu'on nomma AftarD'OCTOBRE.
87
tis , & qui prefidoit à la naiffance des
hommes , defquels elle filoit la trame heureufe
ou malheureuſe.
- Nafcere Dardanio promiffum nomen Iulo ,
Vera Deum foboles , naſcere magne puer ,
Cui pater aternas poft facula tradat habenas ,
Quique regas orbem cum feniore fenex ,
Ipfa tibi niveo trahet aurea pollice fila ,
Et totam Phrixi Julia nebit ovem .
Il y a bien de l'apparence , comme j'ay
dit , que Julie étoit morte lorfque le fils de
Domitien vint au monde. On voit dans
la vie de cet Empereur que fon frere Titus
l'avoit comme fiancé avec Julie fa fille ,
mais que ce Prince refufa de l'époufer
lorfqu'il devint amoureux de Domitia, qu'il
époufa , & qu'il repudia bien-tôt à caufe du
déreglement de fa conduite . Ce fut pendant
ce divorce, qui ne dura pas long- tems , qu'il
ralluma les feux qu'il avoir reffentis pour
Julie avant fon mariage , & qui coutérent
la vie à cette Princeffe , comme le remarque
Suetone ; l'amour que ce Prince avoit
eu pour elle la fit honorer , après fa mort ,
de l'Apotheofe , & fans doute ériger les
Statues , dont Martial a parlé , la petite.
dont il eft question peut être regardée de
deux manieres , ou comme le modele d'une
plus grande , ou comme une de ces Statues
de Divinité domeftique ou Penate , que
88 LE MERCURE
l'on gardoit & que l'on adoroit dans l'interieur
des mailons ; mais dans quelque
fens qu'on la regarde , on ne doutera point
que ce ne foit la ftatuë de Julie. Les Parques
ont été des Divinitez bien redoutables
à ceux qui les croyoient les Souve
raines de la deflinée des hommes , & de
la durée du cours de leur vie . C'eſt pour
cette raison que l'amour que Domitien
avoit eu pour fa niéce , lui fuggera après
fa mort de la faire reprefenter fous la figure
d'une Divinité , que l'interêt de tous
les hommes les obligeroit d'adorer , & qui
étoit adorée en tout lieu fous le nom d'Aftartis
ou Venus Celefte . Il feroit inutile
d'en dire davantage. Il y a pourtant une
chofe à oblerver dans Martial , qui eſt une
preuve que Julie étoit morte , lorfqu'il a
compofé la quatriéme Epigramme fur la
naiffance du fils de Domitien ; & même
toutes celles qui font dans le Recueil que
nous avons de lui , qui eft , qu'il n'y en a
pas une qui foit adreffée à Julie , à quoi
je fuis perfuadé que ce Poëte n'auroit pas.
manqué pour flatter l'amour d'un Prince ,
auquel il étoit de fon interêt de bien faire
fa Cour.
Je finis , Monfieur , en vous priant de
jetter encore une fois les yeux fur le deffein
que vous avez de cette petite figure , &
vous penfcrez comme moy que la meilleure
preuve
D'OCTOBRE. 89.
›
preuve de toutes eft fa reffemblance avec
l'effigie qui eft fur les Medailles de cette
Princeffe , & particulierement comparée
avec le portrait qui eft gravé fur le faphir.
de S. Denis ; fi on y joint l'autorité de
Martial on en compoſera une preuve
complette pour perfuader que cette petite
Statuë de bronze trouvée dans le Terroir
d'Arles fous les racines d'un arbre qu'un
Payfan venoit d'arracher , eft un monument
de la deification de Julie , & de l'amour
que Domitien avoit eu pour elle :
Je fuis , &c.
LA SAGESSE.
D
ODE..
Efcends de la celefte voure ,
Minerve , éclaire notre erreur
Enfeigne à l'homme quelle route
Conduit au fouverain bonheur.
Quelque terme qu'il fe propofe,
Unfunefte penchant s'oppofe
Au choix qu'il avoit embraſſés
Aveugle , il s'égare lui- même z
Il cherche le bonheur ſuprême
@ les Dieux ne Lont pas place
90 LE MERCURE
D'où revient ce Marchand avide
Qui fend le vafte fein des eaux :
Il couvre la plaine liquide
Des richeffes de fes vaiffeaux.
Chargé du précieux mélange
Des trefors de l'Inde & du Gange
Il découvre déja le Port-
Eft- il heureux ? La foudre gronde :
Ses vaiffeaux s'abîment fous l'onde :
Il échappe à peine à la mort.
Vous ,qui rampiez dans la pouffiere ,
Quel Dieu vous tire du néant ?
Plutus vous voit dans fa carriere
Avancer à pas de Géant.
Vous moiffonnez dans les alarmes $
Chaque jour le fang les larmes
Enflent vos criminels tresors.
Leur éclat n'a rien qui m'étonnes.
Et le crime qui vous les donne ».
Vous en punit par les remords..
20
Fortune , reprens tes largeſſes
Ceffe de nous en amufer.
Pauvres au milieu des richeſſes ,
Nous ne fçavons pas en ufer.
Qui les cherche , aime la contraintej
Les foucis , l'importune crainte
D'OCTOBRE.
91
T viennent méler leur poison.
L'Homme devoit- il y prétendre ,
Lui qui n'a jamais fçû les rendre
Tributaires de fa raiſon ?
Mais qui font ces Mortels qu'adore
L'Univers tremblant à leur voix.
Le peuple à genoux les implore ,
Et leurs volontez font nos loix.
Thémis leur remet fa balance ,
Jupiter la foudre qu'il lance ,
Mars feme pour eux la terreur ;
Ces Rois que notre hommage encense ,
Portraits des Dieux par leur puiſſance ,
Le feroient- ils par leur bonheur ?
Venge César, pourſuis Antoine,
Triomphe , Otarie , de Sextus ,
Rougis les champs de Macédoine
Du fang du malheureux Brutus ;
Finis par où Neron commence ,
Ofte à Rome par ta clemence
Le fouvenir de tes forfaits.
Flate toy d'en être l'Idole ;
Cinna t'attend au Capitale
Pour te punir de tes bienfaits.
Perçons l'éclat dont les Monarques·
Se font un rempart à nos yeux ,
Oftons -leur ces auguftes marques
Hij
.9.2 LE MERCURE
Qui les rendent égaux aux Dieux.
Leur coeur est une énigme étrange
F'y découvre un affreux mélange ,
Et de crimes de vertus ;
Et Porus qui vient de fe rendre ..
Pourroit méconnoître Alexandre.
Dans le meurtrier de Clitus .
Quel est donc l'heureux ? c'eft ce Sage,
Maitre des plus legers tranfports ,
Pour qui le Pactole & le Tage
Roulent d'inutiles trésors ;
Qui voit comme un amas de boue ,
Ce cercle d'honneur où se joue
L'ambition des vains Mortels..
Digne enfin de l'encens des hommes ,
Si dans l'ingrat fiecle où nous sommes
La vertu trouvoit des Autels.
Qu'au trône fon deftin l'attende ;
C'eft un Monarque généreux ,
Qu'il y monte , qu'il en deſcende ,
Toujours égal il est heureux.
C'est lui que Rome Secourue
Voit retourner à la charruë ,
Après de glorieux combats.
Plus charmé des Champs qu'il façonne ,
Que de ceux où ſon bras: moiſſonne ·
Des lauriers qu'il n'envioit pas..
D'OCTOBRE... 25
Al'innocence , à la droiture
Il confacre fes premiers ans ;
Il ne détruit pas la Nature ,
Il en regle les mouvemens.
L'interêt , l'Amour , la Vengeance
Sont des monftres qu'à leur naiſſance
On lui vit d'abord étouffer.
S'il fent les foibleffes humaines ,
Nas vains defirs , nos craintes vaines
Il les fent pour en triompher.
LA MORT
D'ALCESTE
チェ
POEME .
E chante les efforts d'un Amour magnanime™,
Alcefte , de l'Hymen & Prêtreſſe , & Victime ;
One Epouse arrachée aux liens les plus doux ,
Et qui fauve en mourant les jours de fon Epoux-
Admete à l'Univers , parfa valeur rapide ,
Annonçoit un Héros dans un Ami d'Alcide :
La victoire fanglante avoit fuivi fes pas.
Le paſſage est trop prompt, de la gioire au trepus
94 LE MERCURE
Frappé d'un coup mortel dans un combatfuneffe ,
Admete doit mourir , & mourir loin d'Alcoftes
D'Alcefte dont fa gloire alarmoit trop l'amour
Et dont les voeux tremblans imploroient fon rétour,
Elle apprend fon deftin , le peril la conſterne ;
Aux Autels d'Apollon Alcefte fe profterne ;
Elle forme des voeux , & les croit fuperflus :
Admete les exige , & peut-être n'est plus.
Grand Dieu , fi la pitié trouve accès dans tom
Temple ,
Tourne-la fur un Roi qui t'en donna l'exemple ;
Tu femblois dire au Ciel un éternel adieu ,
Et les bienfaits d'un Roy protegerent un Diew;
Vois fon Epoufe en pleurs implorer tes oracles ;
Aux malheurs des Héros le Ciel doit des miracles
Reine , pour votre Epoux ne versez plus de pleurs 3
Les bontez d'Apollon balancent vos malheurs.
Du parti des Héros l'Enfer même fe ranget,
Et l'avare Acheron vous permet une échange.
Ce jour de votre Epoux doit éclaircir le forts.
Qui périra pour lui , le ravit à la mort.
Alcefte fe troublois , l'Oracle la raffure.
Moins le Ciel a choifi , plus la victime eftfåre;
Et puisque le trépas peut encor s'échanger,
L'Epoufe eftfans alarme , & l'Epoux fans danger
Enfin , graces , dit- elle , à la bonté celeste,
Admete infortuné connoîtra toute Alceste.
Des jours qu'il me devra , grands Dieux , foyer
Lappuy
D'OCTOBRE. 95
Il vit digne de moy , je meurs digne de lui .
Déja pour les Autels la Victime s'apprête ,
De myrthes , de lauriers elle pare sa tête.
Dans le Temple des Dieux on voit fumer l'encens
Ony voit expirer les taureaux gemiſfans .
Dans les Eaux du Pénée elle fe purifie:
On ignore à quels Dieux Alcefte facrifie :
Et le peuple abufé , regarde avec transport
L'apprêt d'un facrifice en l'apprêt de fa mort
Defabufé bien-tôt , il tremble pour la Reine.
Vers le lit nuptial ſa tendreſſe l'entraîne:
Lit , où pour moy l'Hymen allumafonflambeau
Lit , quepour moi l'Amour va changer en tombeau
Ne crains point qu'à ta¸vûe une Epouſe fremiſſe i
Monfang t'arrofera , fans qu'Alceste en gémiffe.
Ses mains à ce difcours s'arment pour fon trépass
Mais fes enfans en pleurs lui retiennent le brasu
Ces enfans dignes fruits de l'amour de leur Pere ,
Par des cris redoublez redemandent leur Mere.
Ils n'ontpour la flechir que des gemiſſemens s
Ils retardent fa mort par leurs embraſſemens.
Enfans , Amis , Sujets , elle a tout à combattres
La nature l'étonne , & ne fauroit l'abbatres
Et quand à la troubler tout femble_concourir ,
Chaque inftant la fait voir plus digne de mouries ,
Quels foupirs, mes Enfans , me faites- vous en
tendre ?
Alcestefans vos pleurs n'est déja que trop tendre
96.
MERCURE LE
Je vous conſerve un Pere ; & le Ciel m'eft témoin
Que mon amour four vous ne peut aller plus loin.
Je pleure fur vous feuls ; pleurez moi fans me
plaindre ;
Quife livre à la mort , ne marque pas la craindre.
Quand dans les champs de Mars vous repandrez
l'effroy ,
Vous la verrez , mon fils , des yeux dont je la voy.
Confolez de ma perte un Pere qui vous aime :
Vivez pour lui , pour vous , pour l'Etat , pour moimême.
Ceffez par vos douleurs d'irriter mes ennuis :
Ne voyezpoint ma mort ; n'envoyez que lesfruits..
Confiderez Admete animé par la gloire ,
Formant dans les combats vos mains à la victoire
Puniſſant à vos yeux par de ginèreux coups »
L'ennemi qui me force à sauver un Epoux.
Et vous , qui fremiſſez du fort qui nous fepare
Vous , pour qui la pitié de mon ame s'empare ,
Ma fille , à quels excès voulez - vous la porter ?
Mon trepas vous rend plus qu'il ne peut vous ôter.
Me conferver pour vous , c'eft perdre votre Pere..
Je meurs j'étois Epoufe avant que d'être Mere
Admete fur mon coeur eut des droits plus anciens.
Que ne puis-je accorder les vôtres & les fiens !
Si jamais un Epoux de votre coeur difpofe ,
Vous fentirez les loix que l'Amour nous impofe.
Rift anjour le Héros qui vous est destiné
ajure
D'OCTOBRE. 97
Viure auffi grand qu'Admete , & moins infortuné
Mais fi contre fes jours les Parques obſtinées ,
Sur mon fort rigoureux reglent vos deftinées ;
Si le perdre ou mourir , est un de vos malheurs
Vivant comme je vis , mourez comme je meurs.
Un poignard à ces mots fert l'ardeur qui l'anime;
Le Ciel par fon tonnerre accepte la Victime ;
Et le peuple frappé d'un exemple fi grand ,
Immobile & fans voix admire enfoupirant.
GALATEE.
EG LOGU E.
GALATE'E , DAMON.
GALATE'E.
Enfin aprés huit jours coulez dans la triſteſſe .
Le Ciel , mon cher Damon , te rend à ma tendreffe,
Tout languiffoit ici : nos champs infortunez ,
De Flore & de Cerès étoient abandonnez.
Privez des tendres fons de ta douce muſete ,
Les oifeaux de nos bois quittoient cette retraite ;
Tandis que nuit & jour j'invitois les Zéphirs
De porter jusqu'à toi mes voeux & mes foûpirs,
Apprens moy par quel charme une terre écartée ·
I
+
LE MERCURE
Tefaifoit oublier la trist e Galatée .
Bacchus de plus beaux dons orne-t - il les côteaux ?
Tvoit-on dans les prez couler plus de ruiffeaux ?
Le Soleil plus brillant é ayant les boccages ,
Voit il plus de Silvains danfer fur les rivages ?
Les Bergers micux unis y font ils moins jaloux ?
Mais peut-être c'étoit quelque lien plus doux .
Tu te tais . Ah grands Dieux ! cette abfence cruelle
Auroit elle rendu mon Berger infidele ?
DAMON.
Monfilence eft l'effet du trouble imperieux
Qui vient faifir mon coeur , quand je vois vos
beaux yeux.
Ah! pourqui vous livrer à de telles alarmes ?
Connoiffez- vous fi peu le pouvoir de vos charmes ?
Ne vous fouvient - il plus que fur eux mes fermens
Ont appuié la foy de mes engagemens ?
GALATE' E.
Comme ces noeuds d'Amour que fur le fable on
trace ,
Qu'unflot mobile emporte ou qu'un Zephir efface ;
De nos jeunes Bergers telle est souvent la foi ,
Et l'Enfant de Cypris n'a point pour eux de loi .
Quelle autre eut plus d'attraits que la jeune Sylvie
?
Eurilas paroiffait l'aimer plus que fa vie ;
Et cependant Cloris avec bien moins d'appas ,
Sçut lui ravir le coeur du volage Eurilas.
D'OCTOBRE.
DAMON.
LIO
DE
LA
LYON
Aux Belles fans remords on nefait pointenjanja
Qu'il s'est bien repenti d'avoir été parjure !.
Ses prez font inondez , fes moiſſons fans vigueur
Et pour furcroît , Cloris le traite avec rigueur.
Mais ce n'eft point des Dieux la vengeanceſuprême
Qui maintient mes fermens , & fait queje vous
aime:
Ces attraits fi touchans qu'on voit briller en vous,
Pour retenir mon coeur font des noeuds bien plus
doux .
GALATE'E
VILLE
Helas! j'ai de la peine à te croire coupable :
Mais toujours aux Amans l'abſence eft redoutable .
Quand tu quittas ces lieux , mille foucis divers
Volvient autour de moi fous ces ombrages werds &
Depuis ils n'ont ceffé d'alarmer ma tendreffe.
( Peut-être les Berg.rs ont - ils moins de foibleffe
Si le crystal des eaux me paroiffoit moins pur,
Ou fi les Cieux voilez nous cachoient leur azur,
Ton Amante auſſi tôt dans ces vaines images,
De ta legereté croioit voir les préſages.
Ces lieux où tes troupeaux paifoient avec les miens,
Où ſouvent nous avions d'aimables entretiens ,
Lorsque je les voyois ces lieux fi pleins de charmes
>
Un tendre fouvenir faifoit couler mes larmes.
Mais ce qui m'affligeolt le plus dans mon malheur ,
C'étoit de voir Daphné rire de ma douleur.
I ij
100 LE MERCURE
Sans doute fa fierté conferve la memoire
De ce jour où du chant j'emportai la victoire.
DA MON.
Qu'il lui fouvient bien mieux que ſouvent dans
nos prez
Tos doux attraits aux fiens ont été préferez.
GALAT E' E.
De tous ces beaux difcours la flateufe apparence.
Doit elle me donner une entiere affurance?
Peut-être Amour témoin d'un langage affecté ,
Sourit malignement de ma credulité.
Rends le calme , Berger , à mon ame flotante.
Comment couloient tes jours , dis moi , fans ton
Amante ?
Lorfque cent fois le jour mon coeur voloit vers toi ,
Quelqu'un de tes foûirs s'échapoit- il vers moi ?
Quelquefois occupé de ta jeane Bergere ,
Cherchois- tu les gazons d'un antre folitaire ?
Plaignois -tu mes ennuis dans ce ſombre ſejour ?
Mais non , tu n'eus jamais un fi parfait amour.
En vain Paris jura d'aimer toujours OEnone ;
Dès qu'il ne la voit plus , cet ingrat l'abandonne
Tout femble m'annoncer de ſemblables malheurs,
• Je ne te revois plus paré des mêmes fleurs ;
D'un autre air à mes yeux tu portes ta boulete :
Dans le trouble où je fuis , belas ! tout m'inquiete.
Pardonne aux vains soupçons qui viennent m'alarmer
;
L'on n'eft point fans foupçons quand on peut tant
aimer.
D'OCTOBRE. ΤΟΥ
DAM O N.
1
Soupçons injurieux à ma flâme fincere ,
Phantômes vains , ceſſez d'attriſter ma Bergere ;
Et vous , qui de ses yeux paffâtes dans mon coeur
Amours , peignez- lui bien jusqu'où va ma langueur.
Loin de fes doux attraits quand le deftin m'exile '
Ce coeur où vous regnez , a - t- il esté tranquille ?
Demes plus cher: fecrets affidus confidens ,
5.
Vous fçavez où tendoient mes voeux les plus ardens .
Vous avez vú les pleurs que j'ai verfez pour elle.
Helas ! fut il jamais un Amant plus fidele ?
Sous un kêtre touffu , dans ces lieux écartez ,
J'apperçus un marin quelquesjeunes Beautez :
Tandis que leurs Bergers levez avant l'Aurore ,
Moiffonnoient dans les prez les doux prefens deFlore
Ces Belles dont les traits avoient pú tout charmer,
Par leurs tendres regards voulurent m'enflamer ;
Mon coeur toujours conftant refufa fon bommage ;
Et d'abord la rougeur parut fur leur visage.
Elles virent affez à mon air dédaigneux
Qu'un objet plus touchant attiroit tous mes voeux.
Quand le fon des hautbois infpiroit l'allegreffe ,
Dans l'horreur des forefts je cachois ma triſteſſe.
Qu'euffé je fait alors fur les gazons fleuris ?
Interdit je penfois aux beaux yeux qui m'ont pris.
Tantôt aux bords de l'onde , en mes vives alarmes
Je priois les ruiffeaux de vous porter mes larmes ,
On je chantois ces vers qu'un jour je fis pour vous ,
Ces vers dont nos Bergers ont efté fijaloux.
•
I iij
102 . LE MERCURE
Par mes accens plaintifs Philomele excitée
Oublioit fes malheurs pour chanter Galatée ;
Et toutjufqu'aux rochers fenfible à ma chanson ,
Aprés moi dans ces lieux repetoit ce beau nom.
C'est en vain que Morphée en cette folitude ,
Crut calmer ma douleur & man inquietude.
Mille fonges malins qui compofent fa Cour ,
Par leurs illuſions nourriffoient mon amour.
Avant que dans mon coeur ce beau feu s'amortiffe
›
L'on me verra
charmé
de la fiere Artenice
' :
Elle à qui vous cauſez
un depit envieux
,
Et qui s'eft attiré
le courroux
de nos Dieux.
Ces Dieux , qui de mon coeur vous ont rendu
maîtreffe ,
Verront finir mes jours plutôt que ma tendreffe.
GALATEE.
•
Avant qu'un autre amour mefoumette à fesloix
Du rauque Lycidas j'écouterai la voix ;
De l'importun Egon fier de fes paturages ,
Je pourrai fans degoût recevoir les hommages';
Et fi j'ecoute encor un soupçon trop leger ,
Puifsé je perdre enfin le coeur de mon Berger &
D' OCTOBRE. 103
Le mot de la premiere Enigme du mois
paffé , étoit le paffage de la Mer Rouge
& celuy de la feconde , le fouffle , ou la
respiration.
FJE
ENIGME.
E fuis femelle , connue en tout lien
Pour gourmande pour laronneffe ;
Mais lardez moi par le milieu
• Du commencement de fageffe ,
Vous m'allez voir d'abord , en depit des amours?
Une merveille de nos jours
7E
Des plus rares dans mon efpece .
AUTRE ,
Par la Mufe Prifonniere.
E fuis un compoté de bien peu d'aſſemblage ,
Le fexe feminin me met feul en uſage :
Selon les tems , les lieux , je change mes couleurs ›
Je porte quelquefois des bouquets & des fleurs ;
Je fuis l'ouvrage enfin d'habiles ouvrieres ;
Je fçais en cent façons contenter les plus fieres .
Avec tout leur favoir cent Poëtes divers
N'ont pu placer mon nom à la fin de leurs Vers.
I iiij
104 LE MERCURE
CHANSON.
Tor , qui formes les plus beaux noeuds',
Vole , Amour , viens me rendre heureux.
Pour toucher l'objet que j'adore ,
Peins-lui mes tourmens amoureux ;
Pour allumer de tendres feux
Prends de celui qui me devore.
Que l'infenfible toute en flâme ,
Te fente enfin victorieux :
Ne t'arrête plus dans ses yeux ,
Oye penetrer dans fon ame.
Omme rien n'eft plus précieux que la
Canté, a
'Santé , il nous a paru que le Public nous
Sçauroit peut-être gré de lui communiquer
les Recettes qui peuvent la lui conſerver .
Nous donnons d'autant plus volontiers la
fuivante , qu'elle est approuvée par M. Dodart
premier Medecin de Sa Majesté
& par M. Boulduc , premier Apotiquaire
du Corps du Roy . Le grand nombre de perfonnes
qui doivent leur guerifon à l'uſage
qu'elles en ont fait , nous autorise à en
porter un jugement avantageux .
le
Amour,
le am viensmerendreheu
ments amoureux .Pouralluore
.Toy, qui formes les
X
TELEF
YON
DE
D'OCTOBRE. 105
Alkermes , ou Aurifique Mineral ,
à la maniere de Glauber .
I'd
L faut prendre du Salpêtre ou Nitre de
deux eaux , l'écrafer , puis le mettre
dans un creufet d'Allemagne , mettre le
creufet dans un fourneau : ayant eu foin.
de mettre deffous un tuilleau , l'on entourera
le creufet de charbon allumé . Le Salpêtre
fondu , on jettera par projection du
charbon groffierement pulverifé , jufqu'à
parfaite faturation : on jettera la matiere
fondue dans un Cône ou Mortier bien net ;
puis refroidie dans un vaiffeau de verre
on l'expofera à l'air jufqu'à ce qu'elle foit
en eau ; on filtrera la liqueur par un papier
gris.
Prenez quatre livres de bon Antimoine
de Hongrie , caffé par petits morceaux ,
& dont vous aurez feparé la poudre fine
par un tamis de crin ; mettez- le dans une
Caffetiere qui tienne quatre pintes & plus ;
verfez deffus une livre de liqueur de Nitre.
fixe , décrite cy - deffus , & quatre pintes
d'eau de pluye : faites bouillir le tout pendant
deux heures à feu & bouillon égaux ,
après quoy on retirera la Caffetiere du
feu , & on filtrcra les deux tiers de la
›
106 LE MERCURE
liqueur encore boüillante , par un enton
noir garni de papier gris.
On remplira de nouveau la Caffetiere
d'eau de pluye bouillante ; on y ajoûtera
douze onces de la liqueur de Nitre fixe ,
ce que l'on fera bouillir pendant deux
heures avec égalité de feu & bouillon ,
comme auparavant ; puis la Caffetiere retirée
du feu , on filtrera de nouveau les deux'
tiers de la liqueur , comme cy- devant."
›
Enfuite l'on remplira pour la troifiéme
fois la Caffetiere d'eau de pluye bouillante,"
& on y ajoûtera huit onces de la liqueur
de Nitre fixe ; on fera boüillir le tour
encore deux heures , & la Caffetiere retirée
du feu , on filtrera toute la liqueur
bouillante. On verfera ces trois decoctions
dans une grande terrine de grès ; on les
laiffera vingt- quatre heures fans les remuer
, & après ce temps on verfera par
inclination la liqueur qui furnagera une
poudre rouge que l'on trouvera au fond
de la terrine , laquelle poudre fera mife
fur un entonnoir garni de papier gris ,
pour s'y égouter ; après quoy on verfera
deffus de l'eau pendant qu'elle fera encore
fur l'entonnoir , jufqu'à ce que les gouttes
d'eau qui tombent à travers le filtre, n'ayent
plus aucune falure.
On laiffera deffecher cette poudre à
Pair : quand elle fera feche on la détachera
D'OCTOBRE. 107
exactement du papier , pour eftre mife:
enfuite dans une petite écuelle de terre
verniffée , & on verfera deffus environ
quatre onces de bonne Eau-de- vie que
l'on enflammera ; on deffechera enfuite la
poudre , en la remuant avec une petiteefpatule
de bois ; on y rebrûlera de nouveau
de l'Eau- de- vie en même quantité ,
& on deffechera la poudre comme auparavant
, & cela, à deux repriſes.
Approuvé par M. Boulduc , premier
Apotiquaire du Corps du Roy , & pir M.
Dodart , premier Medecin de Sa Majesté .
Vertus & ufage de la veritable
Poudre Aurifique.
E remede eft un des plus grands qui
Cait paru , d'autant plus qu'il tient de
l'univerfel par fes parties alcalines , fulfu
reufes & balfamiques , & par fa vertu
anodine , qui s'infinuant par les digeſtions
& la circulation du fang dans toute l'habitude
du corps , en corrige tous les vices
& impuretez , pouffant par une fenfible
ou infenfible tranſpiration , du centre à la
circonference , tout ce qui peut empêcher
fa fluidité : fi les matieres viciées font dans
les premieres voyes , il agit par un doux
& leger vomiffement ; fi elles font dans
les inteftins , elles fe trouvent precipitées
108 LE MERCURE
fans aucune violence par en bas ; fi les
reins fe trouvent furchargez , ou le genre
nerveux embarraffé de quelque humeur
acre , le remede précipitant par les urines ,
foulage le malade ; en telle forte qu'aidant
la nature , & n'operant que de concert .
avec elle , il luy rend le premier calme
qu'elle avoit perdu par le dérangement des
humeurs , & la met en état de faire joüir
d'une fanté parfaite.
La doze eft depuis un grain jufqu'à
trois , dans un véhicule convenable ; le '
plus ordinaire eft le vin d'Alicante , ou à
on defaut le vin ordinaire , dans lequel
on ajoûtera autant de fucre que de poudre
dans une cuillerée de vin ; prenant deux
ou trois cuillerées du même vin pardeſſus ,
& deux heures après un bouillon.
Pour les fiévres intermittentes & continuës
, après avoir fait preceder la faignée,
on en donnera le lendemain ; ou fi la
maladie preffe , fix heures après la faignée,
on en donnera deux ou trois grains avant
le friffon , ou fur la fin de l'accès : l'on
peut même les partager & en donner un
grain & demi au commencement du friffon
dans trois cuillerées de jus ou d'eau diftilée
de bourrache , & autant fur la fin de
l'accès : le furlendemain de même.
Mais lorsque la fiévre eft continuë avec
des redoublemens marquez , on le prend
avant le redoublement .
D'OCTOBRE... 109
On le prend de même dans les fièvres
malignes , où il convient fort.
Et fi la caufe de la fiévre vient de l'abondance
des mauvais fucs crus & indigeftes
dans les premieres voyes , ou d'un embarras
& obftruction dans les vifceres , il les. guerit
infailliblement fans retour : Et fi une
premiere prife de deux grains ne fait rien
de fenfible , on en prend trois grains la
feconde prife.
Pour l'hydropifie , on en donne deux
ou trois grains de deux jours l'un , dans
trois onces d'eau de Parietaire , demi- once
d'huile d'amande douce , & un gros de
fucre , jufqu'à ce que le malade foit gueri.
Pour les vapeurs ou vertiges , on en
prendra deux prifes de trois grains chacune
, à deux jours l'une de l'autre , enfuite
un grain pendant huit jours , & puis
deux fois la femaine pendant un mois
& après cela on fe contentera d'en prendre
tous les quinze jours une prife de deux
grains , pour prévenir le mal.
•
Pour l'apoplexie , l'on en prendra trois
grains dans trois cuillerées de vin ou dans
une once des eaux diftilées de Muguet ,
de Betoine , de Meliffe ou de Sauge ; fi
cela n'opere point , on réiterera trois ou
quatre heures après la même doze , & fi
la premiere agit , l'on en donnera deux
grains quatre heures après , faifant pro110
LE MERCURE
mener le malade fi l'on peut , ou le tenant
bien chaudement dans fon lit , afin que le
remede fe porte plus aifément dans l'habitude
du corps : s'il y a difpofition de vo
mir , l'on donnera de l'eau tiéde ou du
bouillon gras , afin de caufer l'évacuation
des glaires coagulées par les acides impurs
& vicieux.
Pour le flux diffenterique & autres cours
de ventre , l'on en donne deux ou trois
grains pour la premiere fois , & l'on en
continue un grain pendant trois ou quatre
jours dans trois cuillerées d'une décoction
de Sumac , ou dans trois onces d'eau de
Plantain diftilée , ou dans trois cuillerées
de vin d'Alicante , ou d'autre bon vin
vieux.
Pour la gravelle ou difficulté d'uriner ,
après une faignée , fi l'on craint l'inflammation
, & quelque lavement fait avec une
poignée de fon & de graine de lin , &
après avoir bú plufieurs verres d'Emulfion ,
l'on fera prendre deux ou trois grains de
cette poudre dans trois cuillerées de vin .
blanc , ou dans trois onces d'eau d'ortie
blanche avec un peu de fucre , & l'on continuera
d'en prendre un grain de deux jours
l'un , pendant douze ou quinze jours.
Dans le commencement d'une fluxion
de poitrine , fix heures après avoir faigné
le malade , on luy donnera trois grains de
D'OCTO BR E. III
cette poudre dans trois cuillerées de vin ,
& fi le malade n'eft pas foulagé , fix heures
après on réiterera la faignée & le même
remede ; & fi la fiévre continue avec
la douleur de côté , l'on peut faigner le
malade le matin , & à midy on luy donnera
le remede , c'est-à- dire trois grains
que l'on met avec deux onces d'eau de
Chardon beni , deux onces d'eau de Coquelicot
, demie - once de firop d'oeillet ,
& demy gros de confection d'hyacinthe :
on luy fait prendre le tout en le tenant
chaudement , & s'il n'eft pas foulagé fur
les huit heures du foir , on reitere la faignée ;
l'on fait la même manoeuvre pendant les
trois ou quatre premiers jours de la maladie
, lorfqu'elle eft confiderable ; mais
fur la fin de la maladie , c'est - à - dire
vers le fept & le neuf , file malade
n'eft pas foulagé , on fe contentera de mettre
trois ou quatre grains de la poudre
dans une potion cordiale faite avec trois
onces d'eau de Scabieufe , trois onces d'eau.
de Coquelicot , trois onces d'eau de Reine
des prez , une once de firop d'oeillet , & un
gros de confection d'hyacinthe : on mêlera
bien le tout enfemble , & l'on donnera au
malade d'heure en heure une cuillerée de
cette potion, après avoir remué la bouteille.
Pour la petite verole l'on en donne deux
grains d'abord dans trois cuillerées de vin
112 LE MERCURE
d'Alicante , & l'on continuë d'en donner
un demy grain matin & foir pendant neuf
jours.
Ceux dont la fanté paroît le déranger ,
& qui ont befoin d'être purgez , peuvent
en prendre une prife de trois grains dans
trois cuillerées de vin d'Alicante , ou à fon
defaut d'autre bon vin , dans laquelle on
ajoûtera autant de fucre que de poudre ,
deux heures après il faut prendre un boüillon
, & s'il donne quelque envie de vomir
, l'on boit plufieurs verrées d'eau
chaude.
La doze de deux grains ou même d'un
grain , guérit les vomiffemens & les maux
d'eftomach , en le prenant dans deux onces
d'eau diftilée de Mante ou de Pouliot , ou
bien en forme de Thé , dans trois cuillerées
de ces herbes . A Paris le 20 Septembre
1720.
NOUVELLES ETRANGERES.
A Conftantinople le 20 Septembre 1720.
L
Es Députez d'Alger , qui arriverent
à Smirne le 20 du mois
de Juillet , ont obtenu la permillion
du Grand Seigneur de
fe rendre ici . Comme ils font chargez des
pouvoirs
D' OCTOBRE. 113
pouvoirs neceffaires pour renouveller la
Paix avec les Etats Generaux , il y a.apparence
que cette affaire fera terminée à
la fatisfaction des Puiffances Unies. M.
Emo , Baïl de la Republique de Venife ,
arriva icy le 19 du mois paffé , & le Procurateur
Carlo Ruzini , Ambaffadeur extraordinaire
de la même Republique , fe
difpofe à retourner inceffamment à Venife.
Celebi-Mehemet- Effendi , nommé Ambaffadeur
de la Porte à la Cour de France ,
s'eft embarqué pour s'y rendre avec une
fuite nombreuſe. La ceremonie de la circoncifion
du jeune Sultan fe fit le 17 de
ce mois avec une pompe extraordinaire.
A Varfovie le 12 Octobre 1720.
L'A
'Affemblée de la Diete generale fit fon
'ouverture le 30 du mois paffé , jour
auquel elle avoit été indiquée. Le nombre
des Senateurs & des Nonces n'eft pas
encore fort confiderable , à caufe que plufieurs
Diettes particulieres fe font feparées
infructueuſement , & que les maladies contagieufes
qui fe font répandues dans les
Palatinats de Cracovie , Ruffie , Mohilovv,
c. retardent l'arrivée des autres Nonces .
On n'a pû encore convenir fur l'élection
d'un nouveau Marêchat , fans laquelle les
Etats ne peuvent point commencer leurs
K
114
LE MERCURE
déliberations , fuivant les Conftitutions du
Royaume qui exigent cette ceremonie. La
premiere affaire qui fera examinée dans la
Diete generale , roulera fur les negociations
du Palatin de Mazovie , dont il a été chargé
par la Republique auprès du Czar , &
des réponſes qu'il en a reçûës. Ce Palatin
arriva ici le 12 de l'autre mois de Petersbourg.
Sa Majesté avoit mandé au Grand
General de la Couronne , & à celui du
grand Duché de Lithuanie , de fe rendre
ici pour affifter à ces Conferences ; mais
ils s'en font deffendus , alleguant qu'ils ne
pouvoient point y venir , à moins qu'ils
ne fuffent entierement rétablis dans leurs
Charges. Il eft parti d'icy depuis peu un
nouveau détachement de Troupes , & un
grand nombre d'ouvriers , pour faire avancer
les travaux du Palais que le Roy fait
conftruire à Ujafdo. On conftruit des Cazernes
hors les Portes de cette Ville , pour
les Troupes qui doivent venir renforcer
la Garnifon , & empêcher que ceux qui
viendront des lieux fufpects , puiffent y
entrer. Ces précautions font d'autant plus
neceffaires , qu'on a appris que le mal contagieux
avoit emporté plufieurs perfonnes
à Leopol, où perfonne n'entre fans un certificat
de fanté.
Le Czar a fait affembler un grand nombre
de Troupes en Livonie , où il s'eſt déja
D'OCTOBRE
affemblé quinze Regimens. L'armée qui
étoit fur le Borifthene , défile pour s'y
rendre.
Le Comte Erdodi , Evêque de Neutra ,
& Ambaffadeur de l'Empereur, étant arrivé
ici le 3 , a eu une audience particuliere
du Roy. Le Velt - Marêchal de la Couronne
s'y eft auffi rendu . M. Trautfetter ,
Miniftre du Roy de Suede , arriva le mois
paffé en cette Ville .
A Stokholm le 13 Octobre 1720.
Openhague la ratification du Traité de
N efpere recevoir dans peu de Cop-
Paix qui a été fignée entre Sa Majesté
Suedoife & le Roy de Dannemarck. Auffitôt
qu'elle fera arrivée , on publiera cette
Paix avec les ceremonies ordinaires dans
toutes les Villes du Royaume. Le Major
General Romanzoff eut le 27 fa premiere
audience du Roy. Il felicita Sa Majefté
de la part du Czar fon Maître , fur fon
élevation au Tróne. On fe flatte que cet
Envoyé eft chargé de quelques propofitions
préliminaires ; on le fouhaite d'au
tant plus , que les Troupes Moscovites
qui font affemblées en Finlande , ne don
nent pas lieu de le croire . Comme ces
Troupes pourroient faire quelque mouve
ment , & qu'on craint toujours quelque
Kij
116 LE MERCURE
1
defcente , on a envoyé de nouveaux ordres
pour prendre les précautions neceffaires
contre les entreprifes que le Czar pourroit
former. Le Roy eft party pour Upfal , où
il va faire la revûe de fes Troupes . On
n'attend fon retour que dans un mois.
Lorfque Sa Majeſté ſe tranſporta en dernier
lieu à bord de la Flotte Angloile ,
elle fit diftribuer 3000 Ducats aux Equipages.
On fe flatte toujours qu'une partie
de cette Flotte hyvernera dans ce Port ,
& que l'autre partie retournera inceffamment
dans la Grande Bretagne . Le Prince
Lubomirski , Ambaffadeur du Roy de Pologne
& de la Republique en cette Conr ,
s'eft embarqué à bord d'un Vaiffeau qui
doit le transporter à Dantzic , d'où il fe
rendra par terre à Varsovie .
A Hambourg le 20 Octobre 1720 .
E Prince Guillaume de Heffe- Caffel ,
Frere du Roy de Suede , étant arrivé
>
en cette Ville le 30 du paffé , en partit
le 2 du courant au bruit de l'artillerie
pour fe rendre à Hannover avec le Miniftre
du Roy de Suede qui l'a accompagné
pendant fon voyage , & qui eft
chargé , à ce que l'on prétend , de plufieurs
negociations auprés du Roy d'Angleterre.
Sur la nouvelle que les follicitaD'OCTOBRE.
117
notre
tions des Députez de la Regence de cette
Ville à la Cour Imperiale , n'avoient eu aucun
fuccès , il fe tint le 2 de ce mois une
affemblée complette de notre Bourgeoisie ,
dans laquelle on delibera fur plufieurs
affaires , & particulierement fur la promte
fatisfaction que l'Empereur exige de cette
Ville. Comme S. M. I. demande qu'on
lui envoye un Bourguemeftre ,
Bourgeoifie a enfin confenti au payemenɛ
d'une impofition extraordinaire , pour
fournir aux dépenfes de cette deputation ,
qui doit être envoyée à Vienne , pour reparer
l'attentat commis contre la Maifon
& la Chapelle de fon Refident. Le Roy
d'Angleterre est toujours à Herrenhofen ,
où il a tenu plufieurs Confeils : on ne fçait
point encore quand S. M. partira pour repaffer
en Angleterre , fes équipages n'ayant
reçu auçun ordre de prendre les devants .
.
Le Refident de Mofcovie , qui étoit icy,
a fait toucher de l'argent aux Officiers
Allemands qui fe font engagés au fervice
du Czar. La plupart ont déja pris les devans
pour ſe rendre à Petersbourg , d'où
on mande que le Czar a fait affembler à
Riga 30 mille hommes , fans qu'on fache
encore a quoi ils font deſtinés.
On écrit de Coppenhague , que le Prince
Dolhorouki , Ambaffadeur du Czar , qui
devoit partir pour fe rendre à Brunfwick,
118 LE MERCURE
avoit reçu ordre de fon Maître de differer
fon départ jufqu'à l'arrivée du Refident de
Moravie qui a été nommé pour le rem
placer.
On apprend de Petersbourg , que les
quatre Fregates Suedoifes , enlevées le
du mois d'Aouft par les Galeres Ru
fiennes , entrerent le 18 du paffé dans ce
Port , au bruit de l'artillerie des deux Fortereffes
. Elles étoient efcortées par fix Galeres
Mofcovites, qui s'avancerent juſqu'au
Pont de l'Eglife de la Trinité , où elles
débarquerent une partie des Prifonniers
Suedois. Elles étoient fuivies des quatre
Fregattes Suedoifes qui jetterent l'anchre
devant le Port ; aprés quoy l'on fit affembler
fur le Pont tous les prifonniers. Il y
avoit quelques Compagnies des Gardes ,
rangez en haye , fous les ordres du Major
Mamonoff. On fit pafier ces prifonniers
devant une Pyramide qui avoit été élevée
à cette occafion ; & après avoir été conduits
, comme en triomphe , devant les
Colleges & les Boutiques des Marchands,
on les renferma enfuite dans la Fortereffe,,
fous l'escorte d'une Compagnie des Gardes..
Le Czar & la Czarine furent du nombre
des Spectateurs ; aprés quoy L. M. retournerent
dans les appartemens du Senat
où il fe trouva un grand nombre de cou
verts , non ſeulement pour la famille Cza
D'OCTOBRE. 119
rienne , mais encore pour les Miniſtres
Etrangers & ceux de la Cour. Le foir ,
toute la Ville fut illuminée , & l'on tira
un trés beau feu d'artifice fur l'eau. Ces
rejoüiffances
ont continué les deux jours
fuivans .
On écrit de Hannover du 18 , que le
Roy partit pour Gohr , accompagné des
Comtes de Stanhope & de Sunderland .
Les Miniftres & Envoyés des Cours Etrangeres
y ont fuivi le Roy. M. de Witworth
Mniniftre de S. M. B. arriva le 14 à Hannover.
Le Duc de Holſtein fe tient toujours
à Breflaw. On recommence à parler
du mariage de ce Prince , avec une
Princeffe niéce du Czar. Le Roy de Danemarc
arriva le 7 à Gottorp avec le Prince
Royal. On prétend que S. M. n'a entre
pris ce voyage , que pour vifiter fes Places
, les Digues qu'Elle a fait rétablir , &
faire la revue de fes Troupes.
A Vienne le 16 Octobre 1720.
E Prince Ottajano de Medicis eft ar
Live icy de Sardaigne , où il avoit été
envoyé par l'Empereur , pour recevoir ce
Royaume des Eſpagnols , & le remettre au
Baron de Saint - Remy , Plenipotentiaire
du Roy de Sardaigne , fuivant les ordres
de S. M. I. qui lui avoient été donnez
120 LE MERCURE
On eft encore fort incertain touchant
P'ouverture du Congrès de Brunſwick .
L'Empereur a écrit aux Puiffances du
Nord. , pour les engager à y envoyer inceffamment
leurs Plenipotentiaires ; &
pour en donner l'exemple , S. M. I.
a donné ordre au Baron Keller , l'un de
Les Plenipotentiaires , de fe tenir prêt à s'y
rendre. Suivant les dernieres Lettres de
Ratisbonne , il paroît que les differends
fur la Religion feront inceffamment terminés
, à la fatisfaction des Catholiques
& des Proteftans. Les Etats de Hongrie
ont commencé leur feance à Presbourg ,
& ils travaillent tous les jours aux affaires
pour lesquelles ils ont été convoquées . On
écrit de Haft en Tranfilvanie , qu'il y
étoit tombé les du mois paffé une fi grande
quantité de fourmis volantes , qu'elles
avoient couvert les toits de toutes les maifons
de cette Ville ; mais que le vent & la
pluye qui furvinrent la nuit fuivante ,
détruifirent & diffiperent entierement ces
infectes. Malgré le détachement de Dragons
que l'on avoit fait marcher vers les
frontieres d'Autriche, pour donner la chaffe
à un grand nombre de Mendians & de
Vagabonds , on apprend cependant que ces
Bandis continuent à commencer toute forte
de defordres , & qu'ils fe font même emparés
du Château d'Enftbrun qu'ils ont
pillé
D'OCTOBRE. 121
pillé & enfuite détruit. Ce Château appartient
au Comte de Zinfendorff. C'eſt
ce qui a obligé cette Cour à faire publier
un Edit très rigoureux contre ces Brigands.
La Compagnie de Commerce , qui a
été formée dans cette Capitale l'année
derniere , continue fon établiſſement avec
beaucoup de fuccès. La Ducheffe de Hannover,
après avoir vu l'Imperatrice Amelie
fa fille , & l'Archiducheffe fa petite fille
à Afchan , en partit le 20 du paffé , pour
continuer fon voyage vers la France . Elle
doit faire quelque fejour en Baviere , pour
determiner la route qu'elle doit prendre
afin de n'être pas obligée d'obferver la
Quarantaine.
On a publié icy un Edit , par lequel
il eft ordonné à tous les Ecclefiaftiques
de vendre à des Laïcs tous les
biens en fonds de terre que les premiers
ont acquis depuis l'année 1669 , fans qu'ils
puiffent s'en conferver la proprieté , fous
quelque pretexte que ce foit. On ne leur
accorde que trois mois pour l'execution
de cet Edit. Ce terme expiré , ces biens
feront cedés à ceux qui voudront s'en
charger pour le prix qu'ils auront été appreciés.
On affure que M. Albani , neveu
du Pape , a porté des plaintes à l'Empereur
, par ordre de S. S. au fujet de cet
Edit ; mais on doute fort que S. M. Impexiale
change de refolution.
L
222 LE MERCURE
On mande de Carelsbourg en Tranfilvanie
, que l'Evêque de cette Ville étoit
allé recevoir 115 Efclaves Chrétiens qui
ont été rachetés en Tartarie : qu'il les
avoit enfuite conduits dans l'Eglife Cathedrale
, où le Te Deum fut chanté.
Le Pape & le Grand Duc de Toſcane,
ont enfin obtenu de cette Cour , que les
troupes Imperiales qui doivent paffer de
la Sicile dans l'Etat de Milan , feront tranfportées
à Raven & à Livourne , pour continuer
enfuite leur route par terre ; mais
elles ne fe mettront point en marche
qu'elles n'ayent touché les arrerages que
le Pape & le Grand Duc ont promis .
Le General Harfch , cy- devant Com
mandant à Fribourg , qui va relever le
General Zunzunghien , pour prendre le
Commandement des troupes en Sicile , eft
parti pour s'y rendre.
S'il en faut croire les nouvelles venuës
par la voye de Conftantinople , l'Empereur
de la Chine a rendu un Edit qui ordonne
à tous les Miffionnaires envoyés.
par le Pape dans cet Empire , de fortir dans
un terme limité de toutes les Terres qui
en font dépendantes , à la referve d'un
petit nombre de Jefuites qui font établis
à Macbao ; mais cette nouvelle merite
confirmation.
Le Duc de Mekelbourg continue fon
ejour en cette Ville. Le Confeil de Guerre
D'OCTOBRE. 123
a ordonné aux Chefs des Regimens , de
les.rétablir fur le même pied qu'ils étoient
avant la derniere guerre , fçavoir, les Regimens
d'Infanterie à 2000 hommes , &c.
ceux de Cavalerie , à 850 chevaux. Le
furplus de chaque Regiment fera incorporé
dans les autres pour qu'ils foient
égaux en nombre ; & au cas que ce moyen
ne fuffife pas pour les rendre complets
on y fuppléera par les recrues & les remontes
que les Etats des Pays Hereditaires
doivent fournir . Le Comte de Kinski
frere du Chancelier de Boheme , a été
nommé par l'Empereur pour fe rendre auprés
du Czar en qualité d'Envoyé Extraordinaire.
Comme les differends de Religion font
fur le point d'être terminés , on ne doute
point que l'Empereur ne donne inceffamment
l'inveftiture des Duchés de Bréme
& Wehrden au Roy de la Grande' Bretagne
, & celui de Stettin au Roy de Pruffe.
Le Baron de Houldenberg , Envoyé de
S. M. Britanique , comme Electeur d'Han.
nover , a déja reçu les Pleins- pouvoirs
pour cet effet. Il arriva ces jours paffés un
Exprès de Rome , avec des plantes de ce
que le Cardinal d'Althan , Miniftre de
S. M. I. avoit fait arrêter par force le
Courier ordinaire de Milan , auquel on
avoit enlevé & porté chez cette Emi-
Lij
124 LE MERCURE
nence les Lettres , qui avoient été enfuite
renvoyées à la Pofte , fans être parfumées .
Les Etats de Hongrie continuent leurs
feances à Presbourg. On eft perfuadé qu'ils
y declareront leur fentiment , par rapport
à la fucceffion de ce Royaume , en cas de
mort de S. M. I. fans hoirs mâles .
Le Gouvernement de Bude a été conferé
au Comte Jofeph de Taun ; celui de
Temefwar au General Comte de Mercy ,
& celui de Luxembourg au Comte de
Kinigleg , cy- devant Ambaffadeur de Sa
Majefté Imperiale à la Cour de France.
On a joint à cette grace le Regiment de
Wachtendonk. Le Comte de Virmond a
auffi obtenu un Gouvernement en Efcla-
Vonie.
M. le Comte de Gergy , Miniftre do
France à Ratisbonne , eft retourné à Paris.
Il a laiffé le Sieur Groffey pour y demeurer
en attendant que cet employ foit
rempi .
A Londres , le 25 Octobre 1720.
Ans l'Affemblée generale de la Com-
Dpagnie de la Mer du Sud , qui fe
tint le 11 de ce mois , les Directeurs declarerent
que la Banque s'étoit chargée de
faire circuler pour trois millions 775 mille
livres sterlin des Obligations de la ComD'OCTOBRE..
125
pagnie . L'Affemblée approuva ce qui avoit
été arrêté par les Directeurs fur cette affaire
Sur cette declaration les Actions de la
Compagnie commencerent à prendre plus
de faveur dans le public , s'étant relevécs
au deffous de 100 où elles étoient tombées
, à 270. On convint dans la même
Affemblée que la troifiéme & quatriéme
Soufcription qui avoit été delivrée fur le
pied de 1000 pour 100 , feroit reduite à
400. Ces refolutions ne furent prifes qu'après
de grands debats , parce que plufieurs
Particuliers en donnant leur voix , demanderent
qu'on fit une recherche exacte de
la conduite de quelques Directeurs , dont
l'empreffement à le défaire des fonds qu'ils
avoient à la Compagnie , avoit caufé le
difcredit des Actions & des Soufcriptions.
Sur ces plaintes le Comte de Ifla , frere du
Duc d'Argile , reprefenta à l'Affemblée
qu'il s'agiffoit moins d'accufer les Directeurs
de leur malverfation , que de prendre des
expediens convenables , pour rétablir les
affaires de la Compagnie . Qu'à l'égard des
Directeurs qui feroient trouvez coupables ,
ils pouvoient s'affurer qu'on les obligeroit
de comparoitre dans un lieu où il feroit
aflis , pour examiner leur adminiſtration .
Qu'ils devoient s'attendre qu'on ne les
menageroit pas , & qu'on leur rendroit la
juftice qu'ils meritoient. M. Craggs Se
Liij
826 LE MERCURE
cretaire d'Etat , & plufieurs autres , porterent
auffi la parole pour calmer les efprits.
•
à com-
La Compagnie des lames d'épée , qui
avoit difcontinué fes payemens ,
mencé à payer cinq pour cent de toutes
les Obligations qu'elle doit , & elle fe promet
de continuer toutes les Semaines juſqu'à
ce qu'elle foit entierement acquittée.
Il paroît que l'empreffement avec lequel
on retiroit l'argent de la Banque , eft un
peu diminué. On remarque que plufieurs
Banquiers qui s'étoient abfentez , parce
qu'ils n'étoient pas en état de fatisfaire à ·
leurs engagemens , ont commencé à payer :
cependant les Sieurs Northcok , freres Banquiers
, ont manqué pour une fomme très
confiderable depuis ces arrangemens . M.
Spencer-Compton, Orateur de la Chambre
des Communes , & Treforier du Prince de
Galles , a foufcrit so mille livres sterlin
pour S. A. R. Le Duc de Malborrough
25 mille , & le Duc de Norfolk & fon
époufe , 70 mille , à la foufcription de la
Banque , pour faire circuler les Obligations
de la Compagnie de la Mer du Sud ,
& pour foutenir le credit public. On fabrique
actuellement à la Tour 4 ou 500
mille livres sterlins d'argent , pour le compte
de la Banque . Elle en reçut 150 milie
de l'Echiquier , dans le temps qu'elle étoit
affiegée de toutes parts .
D'OCTOBRE. 127
Les équipages de M. le Marquis de
Senectere s'embarquerent le 15 pour retourner
en France ; c'est ce qui fait croire
que fon Excellence ne reviendra plus ici ,
quoi qu'Elle n'ait pas pris fon audience
de congé du Roy.
M. Hambden , Membre du Parlement ,
& Treforier de la Flotte , s'eft démis de
cette derniere Charge. On croit qu'elle eft
deftinée pour le Chevalier Jean Norris.
Les ordres font donnez pour armer deux
Vaiffeaux de guerre , afin de donner la
chaffe aux Pirates qui ont détruit plufieurs
de nos Vaiffeaux , pendant qu'ils étoient
à la pêche fur le banc de Terre Neuve ,
ainft que plufieurs autres fur la côté dự
Nord de l'Amerique. La Compagnie des
Indes Orientales fait continuer l'armement
des dix- fept Vaiffeaux qui doivent partir
vers la fin de ce mois fous l'eſcorte de trois
Vaiffeaux de guerre que le Gouvernement
a accordez à cette Compagnie.
Les Seigneurs Commiffaires de la Treforerie
font dans la refolution d'accorder
fous le bon plaifir du Roy , aux deux
Compagnies d'Affurance , non feulement
le pouvoir d'affurer les Maifons contre le
feu dans toute l'Angleterre , mais aufli la
vie des Particuliers. Ils ont envoyé à cet
effet un Memoire à Hannover pour avoir
l'approbation du Roy. Le Comte de Port-
Liiij
128 LE MERCURE
more s'eft embarqué à bord du Paquebot
nommé le Mercure , pour fe rendre à
Lisbonne , d'où il doit paffer à Gibraltard ,
dont il eft Gouverneur . Le Roy a accordé
au Duc de Bolton une penfion de 3000
livres fterlins. Le Lord Naffau Pawlet ,
fils de ce Duc , a obtenu la furvivance
d'Auditeur general du Royaume d'Irlande.
.
On a arrêté le Sieur François Cawod ;
pour avoir pris des Soufcriptions , & délivré
des reçûs pour la valeur de quatre millions
fterlins , fous pretexte de l'établiffement
d'une Compagnie de la Mer du Nord.
On proceda leto à l'élection d'un nouveau
Lord Maire pour l'année prochaine ,
& le choix tomba fur le Chevalier Friard.
Les Lords Jufticiers attendent avec impatience
les réponfes du Roy aux dépêches
qui ont été envoyées depuis peu à Hanhover
; & comme ils efperent que Sa Majefté
reviendra inceffamment ici , pour remedier
aux defordres que le difcredit des
Actions caufe en ce païs , ils ont ordonné
qu'on preparât des Yachts pour ramener
le Roy, L'Efcadre qui doit l'escorter fera
commandée par le Chevalier Jean Jernings.
Les Lords Jufticiers , après avoir
entendu de part & d'autre les Avocats fur
les plaintes formées par les Habitans de
la Caroline contre les Proprietaires de
cette Province , ont arrêté en confequence
D'OCTOBRE 129
que
le Procureur General drefferoit un
Acte portant revocation de cette Chartre ,
& l'union de la proprieté de cette Province
à la Couronne ; & cela fur ce qu'il
a été prouvé que les Proprietaires avoient
contrevenu à plufieurs Articles qui leur
étoient prefcrits par ladite Chartre . Le
Colonel Nicholſon en a été nominé Gouverneur
pour le Roy. Les Commiffaires
de l'Amirauté ont expedié un Paffeport à
douze Maures Sujets du Roy de Maroc
pour s'en retourner dans leur païs. Ils
étoient tombez entre les mains de nos
Croifeurs , après que le Vaiffeau fur lequel
ils étoient , eut échouéprès de Darmouth.
Le Lord Glenorchy , Ecuyer des jeunes
Princeffes , & Ambaffadeur d'Angleterre
auprès du Roy de Dannemarc , s'eft embarqué
pour aller relever en cette Cour
le Lord Polwarth , qui y eft en qualité
d'Envoyé.
On leve en Irlande un certain nombre
d'homines choifis , qui doivent avoir au
moins fix pieds & deux pouces de haut ;
de plus jeunes , bien faits & proportionnez .
On affure que Sa Majefté a deffein d'en
faire prefent au Roy de Pruffe , pour rendre
fon Regiment Royal de Grenadiers
complet.
On a appris par les Lettres de Port-
Royal dans la Jamaïque , du 25 de Juin ,
728 LE MERCURE
more s'eft embarqué à bord du Paquebot
nommé le Mercure , pour fe rendre à
Lisbonne , d'où il doit paffer à Gibraltard ,
dont il eſt Gouverneur. Le Roy a accordé
au Duc de Bolton une penfion de 3000
livres fterlins . Le Lord Naffau Pawlet ,
fils de ce Duc , a obtenu la furvivance
d'Auditeur general du Royaume d'Irlande.
1
On a arrêté le Sieur François Cawod ;
pour avoir pris des Soulcriptions , & délivré
des reçûs pour la valeur de quatre millions
fterlins , fous pretexte de l'établiffement
d'une Compagnie de la Mer du Nord.
On proceda leto à l'élection d'un nouveau
Lord Maire pour l'année prochaine ,
& le choix tomba fur le Chevalier Friard.
Les Lords Jufticiers attendent avec impa
tience les réponſes du Roy aux dépêches
qui ont été envoyées depuis peu à Hanhover
; & comme ils efperent que Sa Majefté
reviendra inceffamment ici , pour remedier
aux defordres que le difcredit des
Actions cauſe en ce païs , ils ont ordonné
qu'on preparât des Yachts pour ramener
le Roy, L'Efcadre qui doit l'escorter fera
commandée par le Chevalier Jean Jernings.
Les Lords Jufticiers , après avoir
entendu de part & d'autre les Avocats fur
les plaintes formées par les Habitans de
la Caroline contre les Proprietaires de
cette Province , ont arrêté en confequence
D'OCTOBRE 149
que
le Procureur General drefferoit un
Acte portant revocation de cette Chartre ,
& l'union de la proprieté de cette Province
à la Couronne ; & cela fur ce qu'if
a été prouvé que les Proprietaires avoient
contrevenu à plufieurs Articles qui leur
étoient prefcrits par ladite Chartre. Le
Colonel Nicholſon en a été nominé Gouverneur
pour le Roy. Les Commiffaires
de l'Amirauté ont expedié un Paffeport à
douze Maures Sujets du Roy de Maroc
pour s'en retourner dans leur païs. Ils
étoient tombez entre les mains de nos
Croifeurs , après que le Vaiffeau fur lequel
ils étoient , eut échoué-près de Darmouth .
Le Lord Glenorchy , Ecuyer des jeunes
Princeffes , & Ambaffadeur d'Angleterre
auprès du Roy de Dannemarc , s'eft embarqué
pour aller relever en cette Cour
le Lord Polwarth , qui y eft en qualité
d'Envoyé.
On leve en Irlande un certain nombre
d'homines choifis , qui doivent avoir au
moins fix pieds & deux pouces de haut ;
de plus jeunes, bien faits & proportionnez.
On affure que Sa Majefté a deffein d'en
faire prefent au Roy de Pruffe , pour rendre
fon Regiment Royal de Grenadiers
complet.
On a appris par les Lettres de Port-
Royal dans la Jamaïque , du 25 de Juin ,
130 LE MERCURE
que la Marie Vaiffeau de guerre Anglois,
avoit repris fur les Eſpagnols deux de nos
Vaiffeaux , fçavoir le Rubyfnovv , de Briftol,
& la Revanche de Londres. Ces mêmes
Lettres ajoûtent que la Marie , qui s'étoit
jointe au Ludlovv, autre Vaiffeau de guerre
du Roy , avoit attaqué trois Vaiffeaux de
guerre Espagnols de 70 , 60 , & de 30
pieces de canon : que le Ludlow ayant
perdu fon grand mats , couroit rifque
d'être pris , fi la Marie ne l'avoit fecouru
Après quelques heures d'un combat fort
vif, les Efpagnols avoient continué leur
route pour la Havanne.
M. Kelfal , un des Commis de la Treforerie
, foufcrivit le 17 à la Banque 100
mille livres sterlins le , pour compte du
Roy. L'on envoya la femaine paffée en
Hollande 450 onces d'or & 4000 d'argent.
L'Amiral Bing qui eft attendu inceffamment
d'Hannover a été fait Treforier
de la Marine , à la place de M. Hampden.
Le Lord How , gendre de Madame
la Comteffe de Kilman (eck , a obtenu la
furvivance de la Charge de Clerc de la
Pipe, qui dépend de celle de la Table Verte,
poffedée par le Lord Newhare.
Voicy la traduction du Difcours que M.
Budgell fit le 11 de ce mois à l'Affemblée
de la Compagnie de la Mer du Sud , il a
été rendu public . Ce Difcours étoit adreffé
D'O CTOBRE.
au Chevalier Fellows , Sous- Gouverne
de la Compagnie.
On ne sçauroit avoir un coeur Anglois , &
être infenfible aux calamitez de la Patrie..
Le credit de notre Nation , qui juſqu'à prefent
a été facré & inviolable , & qui a ſöntenu
le choc de tant de guerres , la fureur
de differens partis , & tous les efforts de nos
Ennemis communs , touche au moment defa
ruine. Nos richeſſes imaginaires diſparoiſſent,
dans le temps même que nous croyons les
poffeder. Chaque jour de transport d'Actions
caufe la ruine de cent Familles , & il n'y a
prefque aucun de ceux qui m'entendent , qui
n'ait fenti les fuites fatales de ce qui vient
d'arriver , on en fa propre perfonne , ou en
selle de fes parens on amis. Non seulement
quelques Particuliers , mais nos plus riches
Orfevres , & même des Compagnies entieres ,
ne payent plus : la faillite eft prefque venuë
à la mode.
La raison en eft manifefte : nos Efpeces
commencent à fuccomber fous le faix de nôthe
Papier , à moins qu'on ne donne aux
gens le tems de fe remettre de leurs frayeurs ,
de rappeller leur argent de Hollande
de Portugal , il n'y a point d'homme fage
qui n'en doive craindre les fuites..
J'avonë , Monfieur , que je fuis fâché
de voir que mes Compatriotes , qui étoient
fenflés de la profperité , ſont ſi abbatus par
LE MERCURE
evers ; & felon moy , leurs craintes font
prefent autant déraisonnables , que leurs
efperances l'étoient auparavant . Cependant,
elle nous font à tous un tort infini ; tout le
monde fouffre de ce que les neceffités & les
apprehenfions des Particuliersfont le prix des
Actions.
si le plat -fond de cette grande Salle où
nous sommes affemblés , étoit prêt à tomber ,
que chacun de nous courût en foule à la
porte pour fortir tous à la fois , combien de
gens de cette affemblée ne feroient - ilspas neceffairement
étouffés ? Cette comparaiſon , de
la maniere dont nous nous conduisons aujourd'hui
, eft trop claire , pour avoir beſoin
d'explication.
Quelqu'un de l'Affemblée ayant en cet
endroit interrompu le fieur Budgell , & demandé
qu'on ailât aux opinions , il reprit
fon difcours , & dit :
Monfieur ,
Si la perfonne qui demande qu'on aille
aux opinions , a quelque chose de plus important
à dire que ce que j'ay à propoſer , je
Pécouterai avec la même patience que je fonbaitte
qu'il m'écoute.
Je ne doute pas , Monfieur , que vous &
nos Directeurs n'ayez fait avec les Rentiers,
& avec ceux qui ont foufcrit à la troifiéme
& quatrieme Soufcription , le meilleur marché,
que la fituation prefente des affaires l'a pû
D'OCTOBRE. 133
permettre Vous êtes , ou du moins , vous de
vés être les meilleurs Juges pour connoître ce
qui est avantageux à la Compagnie : cependant
j'en connois qui auroient fouhaitté que
vous enffiez encore attendu une occafion plus
favorable , dans laquelle vous enffiés en même
tems pû declarer un Dividend.
Je donne volontiers les mains à toutes les
´refolutions que vous nous avez commniquées,
à la reſerve d'une ſeule.
Je vois , Monfieur , par la lecture que
votre Secretaire en a faite , que vous avés
deffein de delivrer les Recepiffés de la troifiéme
& quatrieme Soufcription dans la même
forme qu'ils doivent être conçus : Il n'eft
perfonne qui ne voye , que c'eft afin que les
marchés exorbitans que se font faits pour
les Recepiffés de ces deux Soufcriptions , demeurent
fermes & valides . Mais , lorfque
vous retreciffés votre plan , dans le tems que
tout est fi fort changé depuis qu'on a fait ces
marchés , je crois que nous devons mûrement
confiderer fi une telle chofe eft jufte & raifonnable.
Je fuis perfuadé que notre édifice , quoique
fort facré , en eft cependant devenu
beaucoup plus ferme ; & j'espere de le voir
encore fi degagé , que les gens de moyenne
condition ( qui font le gros de la Nation , )
feront en état d'acheter nos Actions. Il
regnoit il y a quelque tems un certain ef
134
LE MERCURE
prit parmi ces fortes de gens , lequel , s'il car
été dirigé à propos , auroit pû être d'un
grand usage à cette Compagnie , au lieu de
Téteindre entierement , comme on afait. Je
fouhaitterois que les gens de tous rangs &
de toute efpece , trouvaffent leur interêt à
contribuer au foutien de ce grand Syſtême
qui à preſent est devenu une partie de notre
Conftitution. Si quelque Ennemi commun
prenoit avantage de nos defordres preſents,
il n'y a que Dieu qui fçache quelles en feroient
les fuites ,&c.
A la Haye le 26 Octobre 1720.
Es Lettres de Bruxelles du 24 de ce
Lmois ,portent qu'un Vaiffeau de Marfeille
n'ayant pû obtenir la permiffion d'aborder
à Dunkerque , avoit fait force de
voiles pour entrer dans le Port d'Oftende :
qu'à fon approche , on avoit tiré deffus
deux coups de canon pour l'obliger à ſe
retirer que ce Vaiffeau forcé par la tempête
, avoit échoué le 18 fur un banc de
fable à un quart de lieuë d'Oftende. L'équipage
,tour épuifé qu'il étoit , & preffé
par la faim , trouva le moyen de gagner
la terre ferme. On détacha d'abord quel-
Soldats de la garnifon pour l'empêcher
de penetrer plus avant dans le Pays ;
& comme il a été deffendu de leur porter
ques
D'OCTOBRE. 135
des vivres , ils font en danger de mourir
bient -tôt de faim . On efpere cependant ,
que malgré cet ordre , ceux d'Oftende
pourvoiront à leur fubfiftance , en prenant
toutes les precautions neceffaires pour ne
s'expofer à aucun danger ; d'autant plus
que M. le Marquis de Prié a envoyé M.
Coppieters , Confeiller des Finances , afin
de concerter fur les moyens de procurer
des vivres à ces pauvres malheureux .
Le Vicomte d'Enghien , s'étant battu en
duel avec un Major , a été tué.
M. de Nortwick , Prefident de Semaine
de l'Affemblée des E. G. a été complimenter
M. le Comte de Morville fur fon
départ , au nom de L. H. P. Il y a apparence
que S. Ex. fe rendra à Paris avant
que d'aller au Congrès de Cambray. M.
de Burmania cy- devant Ambaffadeur des
E. G. à la Cour de Suede , eft arrivé ,
ainfi que le Comte de Stairs , de Hannover
, d'où un Exprès quia paffé icy allant
à Londres > nous a apporté la nouvelle
de l'arrivée prochaine du Roy de la G. Br.
pour repaffer dans les Royaumes.
A Madrid , le 16 Octobre 1720.
LERoy , la Reine & le Prince des Alturies
, partirent en fort bonne fanté le
25 du mois paffé pour le Château de Bal136
LE
MERCURE
fain. S, M. après avoir travaillé aux dépê-·
ches pendant quelques jours , a fait partic
plufieurs Exprès pour differents Ports de ce
Koyaume. Il en a dépêché un au Marquis
de Léde qui commande les troupes qui
ont eu ordre de s'affembler en Andaloufic. w
S. M. en lui donnant ce Commandement
lui a permis de difpofer de la plupart des
Emplois qui pourroient vaquer dans l'armée.
Ce Marquis a écrit qu'il n'avoit pas
trouvé les preparatifs qui avoient été ordonnés
, auffi avancés qu'on l'avoit crû ;
mais qu'il y arrivoit tous les jours des
troupes & des munitions de divers Ports
de ce Royaume.
S. M. a ordonné qu'outre les trois Services
folemnels que le Roy a fondés depuis
quelque tems dans l'Eglife du Monaftere
de l'Efcurial , il en feroit celebré
un quatrième pour le repos de l'ame de
la feuë Reine Marie- Louife , fille de feu
Monfieur , & premiere femme du feu Roy
Charles II ; ce qui ne s'étoit point obſervé
jufqu'à prefent pour les Reines mortes
fans enfans. Les premiers Services ont été
fondés pour le repos des ames du feu Roy
Charles II . de la Reine Marie d'Autriche
fa mere , & de la feuë Reine Marie Louife-
Gabrielle de Savoye .
Suivant nos avis de Malaga , les grands
vents qui fe font élevés depuis quelque
tems
D'OCTOBRE. 137
>
tems fur cette Côte , y ont fait échouer
ou perir plufieurs Bâtimens , du nombre
defquels étoit un Corfaire de Barbarie
dont l'équipage a été fait prifonnier par
les Habitans , qui l'ont conduit à Malaga.
Ces Lettres ajoûtent qu'on y avoit lancé
à l'eau un Vaiffeau de Guerre percé pour
80 pieces de canon.
Don Louis d'Achuna , Miniftre du Roy
de Portugal en cette Cour , n'attend plus
que les derniers ordres de fon Maître ,
pour le rendre en qualité de Plenipotentiaire
à l'Affemblée qui doit le tenir à
Cambray. Il fera remplacé icy par Don
Antonio Guedez- Pereira . Le Duc d'Alb.
kerque paroît fort content du Decret que
S. M. a rendu en fa faveur par lequel
Elle approuve la conduite qu'il a tenuë
pendant fa Vice-Royauté du Mexique. A
Pégard des 700 mille pieces de huit , qui
ont été confifquées à fon retour en Eſpa
>
gne , & portées au Trefor Royal , on
s'engage de lui donner 1 pour d'intérêt
par an , en attendant
qu'on foit en état .
de lui en rendre le fonds. M. Pattigno ,
Intendant
General de l'Andaloufie
eſt
parti en pofte pour Cadix , d'où on mande
que la Flote avoit enfin fait voile de ce
Port , & qu'elle avoit débarqué quinze
Bataillons à Centa. On eft fort impatient
de fçavoir quel fera le fuccès de cette en-
M
138
LE MERCURE
trepriſe dans une fation fi avancée .
Suivant quelques avis de la Havanne , il
y a eu une espece de foulevement de la
part des peuples de la campagne , qui mécontens
des nouveaux impôts fur le Tabac,.
s'étoient réunis , & s'étoient avancés , pour
couper la communication de l'eau à cette
Ville ; qu'à leur approche les troupes de
la garnifon avoient fait fur eux une fortie
qui ne leur avoit pas réuffi , puifqu'elles
avoient été repouffées avec une perte confiderable
; on dit même que le Gouverneur
de la Havanne , qui les commandoit , eft
du nombre des morts , & que l'Intendant
s'eft fauvé du côté de la Vera-Crux. Aptés.
cet avantage , les mutins ont brûlé leurs
plantations de Tabac , menaçant de n'en
plus cultiver , à moins qu'ils ne fuffent
maîtres d'en difpofer.
M.de Caflagneta a été nommé Lieutenant
General d'Artillerie , pour fervir fous M. le
Marquis de Lede , avec une penfion de :
1500 piftoles. M. le Marquis de Solre eft:
parti pour fe rendre au Congrès de Cambray.
On mande de Lisbonne , que le Roy
s'étoit fait reprefencer la permiffion qui a
été accordée en 1709 , aux Gouverneurs
des Pays conquis , de faire le commerce
comme les autres Sujets . Qu'après en avoir
examiné tous les inconveniens , il avoin
D'OCTOBRE. 139%
revoqué cette permiffion par un Decret
qui a été enregistré en la grande Chancelerie.
Il est défendu par ce Decret à tous
Vicerois , Capitaines Generaux , Gouverneurs
, Officiers de Guerre & de Juftice ,
de faire aucun commerce , tel qu'il foit ;
& le Roy declare que ceux qui contreviendront
à cette Loi , feront privez de
tous leurs emplois , penfions & charges ,
& qu'ils feront incapables d'en poffeder
jamais aucunes. Une flote compofée de
35 Vaiffeaux Marchands , mit à la voile le
mois paffé , fous l'efcorte de deux Vaiffeaux
de guerre ; vingt-neuf de ces Vaiffeaux
vont au Brefil , à Angola & au Cap- verd ,
& les fix autres à Fernambuque.
On a appris d'Angola , que plufieurs Prin
ces & Seigneurs de ce Royaume , ayant
pris les armes pour fe foultraire à la domination
des Portugais , le Gouverneur Generaf
de ce Royaume avoit envoié le Ma
jor de la Fortereffe de Bengal , avec un corps
de troupes contre ces rebelles , qui ont été
entierement diffipez. Quatre de leurs principaux
Chefs ayant été faits prifonniers ,
ont été envoiez au Gouverneur General ,,
avec un butin tres confiderable .
Le projet pour l'étaliffement d'une Com
pagnie de commerce à Lisbonne , n'a point:
été accepté.
Mij
13.83 LE MERCURE
il
trepriſe dans une ſation ſi avancée .
Suivant quelques avis de la Havanne ,
y a eu une efpece de foulevement de la
part des peuples de la campagne , qui mécontens
des nouveaux impôts fur le Tabac,.
s'étoient réunis , & s'étoient avancés , pour
couper la communication de Peau à cette
Ville ; qu'à leur approche les troupes de:
la garnifon avoient fait fur eux une fortie
qui ne leur avoit pas réuffi , puifqu'elles
avoient été repouffées avec une perte confiderable
; on dit même que le Gouverneur
de la Havanne , qui les commandoit , eft
du nombre des morts , & que l'Intendant
s'eft fauvé du côté de la Vera-Crux. Aprés
cet avantage , les mutins ont brûlé leurs
plantations de Tabac , menaçant de n'en
plus cultiver , à moins qu'ils ne fuffent
maîtres d'en difpofer.
M.de Caftagneta a été nommé Lieutenant
General d'Artillerie , pour fervir fous M. le-
Marquis de Lede , avec une penfion de :
1500 piſtoles. M. le Marquis de Solte eft:
parti pour fe rendre au Congrès de Cambray..
On Ón mande de Lisbonne , que le Roy
s'étoit fait reprefencer la permiffion qui a
été accordée en 1709 , aux Gouverneurs.
des Pays conquis , de faire le commerce
comme les autres Sujets . Qu'après en avoir
examiné tous les inconveniens , il avoin
D'OCTOBRE. 139
revoqué cette permiffion par un Decret
qui a été enregiftré en la grande Chancelerie.
Il est défendu par ce Decret à tous
Vicerois , Capitaines Generaux , Gouverneurs
, Officiers de Guerre & de Juftice ,
de faire aucun commerce , tel qu'il foit ;
& le Roy declare que ceux qui contreviendront
à cette Loi , feront privez de
tous leurs emplois , penfions & charges ,
& qu'ils feront incapables d'en poffeder
jamais aucunes. Une flote compofée de
35 Vaiffeaux Marchands , mit à la voile le
mois paffé , fous l'efcorte de deux Vaiffeaux
de guerre ; vingt- neuf de ces Vaiffeaux.
vont au Brefil , à Angola & au Cap- verd ,
& les fix autres à Fernambuque.
On a appris d'Angola , que plufieurs Princes
& Seigneurs de ce Royaume , ayant
pris les armes pour fe foultraire à la domination
des Portugais , le Gouverneur Generaf
de ce Royaume avoit envoié le Ma
jor de la Fortereffe de Bengal , avec un corps
de troupes contre ces rebelles , qui ont été
entierement diffipez. Quatre de leurs principaux
Chefs ayant été faits prifonniers ,
ont été envoiez au Gouverneur General,
avec un butin tres confiderable .
Le projet pour l'étaliffement d'une Com
pagnie de commerce à Lisbonne , n'a point:
été accepté.
Mij
140
LE MERCURE
LE
A Naples le 10 Octobre 1720.
E. Comte de Vallis , Gouverneur de
Melline , eft parti pour Rome , d'où
il fe rendra à Vienne. On a envoyé à
Palerme un Vaiffeau de guerre & fept Tartanes
, fur lefquelles on a embarqué 800 .
hommes de recrue , & une grande quantité
de provifions. Toutes les Troupes Imperiales
qui arrivent ici de Sicile , ont ordre
de fe rendre en differens quartiers de
la Lombardie. Le Vaiffeau de guerre nommé
Sainte-Barbe , venant de Sicile , a été
foumis à la quarantaine , que l'on fait obferver
avec beaucoup d'exactitude . Le 19:
du mois paffé , la fête de S. Janvier , Patron
de cette Ville , fur celebrée dans l'Eglife
Metropolitaine avec un grand concours
de peuples. On eut la fatisfaction de
voir le miracle ordinaire du Sang , qui fe
Liquefie , lorfqu'il fut mis proche du Chef
de ce Saint. Le même miracle s'eft renouvellé
pendant toute l'Octave ; ce qui fait
efperer au peuple que cet Etat fera préfervé
du mal contagieux .
On a appris de Sardaigne , que le Comte
de Saint-Rhemy , qui a pris poffeffion de
ce Royaume au nom du Duc de Savoie ,
avoit retenu à Cagliari le Comte de Porto,
qui y reftera en otage , jufqu'à ce que les
D'OCTOBRE. 141
Espagnols ayent renvoyé les Canons apar→
tenans à ce Royaume , qu'ils ont fait paffer
en Eſpagne avant que de s'embarquer.
A Rome le 12 Octobre 1720 .
N ici à prendre toutes les
Oprécautions neceffaires ,pour empêcher
que le mal contagieux ne puiffe fe coinmuniquer
à l'Etat Ecclefiaftique. Il a été arrêté
que les Portes de la Ville aufquelles on a
mis des barrieres , feroient fermées une
heure après le Soleil couché , & que toutes
les lettres , fans en excepter aucune ,
feroient portées à la Douanne pour y être
parfumées , à caufe qu'il s'y trouvoit ordinairement
des Lettres de France. Le Cardinal
d'Althan , Ambaffadeur de l'Empereur
en cette Cour , n'ayant pas voulu que
le Courier de Milan fût foumis à cet ordre
, envoya un de fes Gentils- hommes
audevant du Courier , auquel il prit la valife.
Les Magiftrats de la Santé en portes
rent leurs plaintes , & fe recrierent fort fur
le mepris que l'on faifoit des ordres de
Sa Sainteté. Le Gentilhomme & fon Cocher
furent decretez . Cela n'a pas empêché
que le Cardinal d'Althan n'ait renvoyé
Pordinaire fuivant , un autre Gentilhomme,
qui fe contenta d'enlever les Lettres à
Fadreffe de cette Eminence , & obligea
5
842 LE MERCURE
le Courier de retourner à Milan . Cette
affaire fait grand bruit ici , & l'on craint
qu'elle n'ait des fuites facheufes .
Le Pape a été voir les marbres & les
belles ftatues que l'on a placées depuis peu
dans la grand'Salle du Vatican. Le Cardinal
Scotti a fait prendre les allignemens
de la rue qui va de la porte de Saint Paul
à cette Eglife. On prétend que le Pape a
deffein d'y faire conftruire des Galleries en
portiques pour la commodité des Pelerins .
On fe flatte que M. Aldobrandini , qui
eft parti pour l'Épagne en qualité de Nonce
de S. S. réuffira dans fes negociations au
fujer de l'accommodement entre la Cour
de Rome & celle de Madrid . Les Imperiaux
continuent de lever des contributions
qu'ils ont impofées fur differens Etats
de l'Italie . Le Duc de Parme y a fatisfait
entierement. Le Pape a donné les ordres ,
pour faire embarquer 2000 mefures de
bled pour Marſeille , & 1000 pour Avignon .
Il a permis aux Marchands d'en faire fortir
de l'Etat Ecclefiaftique à condition:
qu'ils ne pourroient le tranfporter qu'en
Provence , pour procurer quelque foulage
ment au Peuple. S. S. dans un Confiftoire
qui fe tint le mois dernier , ouvrit & ferma
la bouche au Cardinal Salerno , & au
Cardinal d'Althan. Il donna au premier
le uitre de Sainre Prixque , & au. fecond.
›
D'OCTOBRE. 143
celui de Sainte Sabine . Le Cardinal Zondodari
eft parti pour Sienne la patrie , où
il doit faire quelque fejour. On n'a point
tenu Chapelle le jour de la Nativité de
la Sainte Vierge dans l'Eglife de Sainte .
Marie Majeure , fuivant la fondation du
Roy d'Efpagne , par la raifon que le Cardinal
d'Althan a pretendu que c'étoit à
lui à la tenir , parce que cette fondation
à été faite au moyen du revenu annuel
qui a été affigné au Chapitre de l'Eglife
de Sainte Marie Majeure fur le Royaume
de Sicile que l'Empereur poffede à pre-
Tent ; infiftant que le Cardinal Acquaviva
ne pouvoit en faire les honneurs , qu'après .
que le Roy d'Eſpagne auroit affigné un
autre fonds pour cette fondation. On ne
trouva pas d'autres moyens de fufpendre
ces differends > qu'en remettant cette ceremonie
à un autre jour. Le Cardinal Acquaviva
a fait la fonction de donner la
Clef d'Or à Don Antonio Colonna , par
ordre du Roy d'Efpagne , en confiderations
de fes fervices .
Les dernieres Lettres de Modene marquent
que la Princeffe Hereditaire étoit
entierement rétablie de fa petite verole
& que l'aînée des Princeffes , qui en avoit
été auffi attaquée , commençoit à fe mieux
porter.
Le 30 du mois paflé , le Pape tint Confi
144 LE MERCURE
ftoire , dans lequel il fit une promotion
de trois Cardinaux , qui font M. Gio Francefco
Barbarigo, Venitien , Evêque de Brefcia
, de l'Ordre des Prêtres , qui avoit été
relervé in petto dans la promotion du 29
Novembre 1719 M. Carlo - Borgia , Efpagnol
, Patriarche des Indes , & le Pere
Alvaro Cienfuegos , Efpagnol , de la
Compagnie de Jefus , qui elt auprès de
l'Empereur , l'un & l'autre de l'Ordre des
Prêtres . On dit par avance que M. Buffi
portera le Bonnet au Cardinal Cienfuegos.
à Vienne M. Bianchini au Cardinal Barbarigo
, & l'Abbé Caudi au Cardinal Borgia
en Espagne. Il cft arrivé enfin un Courrier
de Milan avec les Lettres qu'on avoit retenues
pendant deux femaines à Aquapendente
, pour y être parfumées , fuivant
les ordres qui en avoient été donnés . Les
Bulles que le Pape a accordées à pour éri
ger l'Evêché de Vienne en Archevêché
ont été expediées depuis quelque tems pour
la Cour de Vienne.
:
L'Abbé Archinto , Nonce à Cologne ,,.
a été nommé pour aller en Pologne remplacer
l'Abbé Grimaldi qui va à la Cour
de Vienne. Le Pape a nonumé M. Nicolas
, pour porter les Langes à la Princeffe
Epoufe du Pretendant , après qu'elle fera
accouchée.
Extra
D'OCTOBRE
MORTS DE PARIS.
Mã
Effire Pierre de la Brouë , Evêque
de Mirepoix , mourut en fon Diocefe
le Septembre.
Dame Antoinette Chaffebras , veuve de .
Meffire Claude Antoine Comte de Harville
, Seigneur de la Selle , Beaumoret ,
&c. mourut le 25 Septembre.
Meffire François Pidou , Chevalier
Seigneur de Saint Olon , Gentilhomme
ordinaire du Roy , cy-devant Envoyé Extraordinaire
de Sa Majesté vers la Republique
de Gennes , & fon Ambaffadeur à
Maroc , Commandeur de l'Ordre Royal
Militaire & Hofpitalier de Notre - Dame
de Mont- Carmel & de Saint Lazare de
Jerufalem , mourut le 27 Septembre.
Meffire André François Bombes , Cha
noine de l'Eglife Cathedrale de Paris ,
mourut le 29 Septembre.
Meffire Mathieu de Montholon , Doyen
des Confeillers au Chaftelet , mourut le
29 Septembre.
Meffire Paul Hippolyte Sanguin de
Livry , Chevalier de l'Ordre de Saint Jean
de Jerufalem , & Marêchal des Camps &
Armées du Roy , mourut le 4 Octobre
Antoine Coyzevox , natif de la Ville
N
146 LE MERCURE
de Lyon , Sculpteur ordinaire du Roy ;
ancien Directeur , Chancelier & Recteur
de l'Academie Royale de Peinture & Sculpture
, mourut le 10 Octobre , âgé de
8 ans , ayant travaillé jufqu'à l'âge de
So ans avec le même feu , & acteint au
plus haut degré de fon Art , tant par l'extréme
correction , que par la quantité &
la promte execution de fes ouvrages.
•
Meffire Potier de Novion , fils unique
de M. de Novion Prefident à Mortier ,
mourut le de ce mois.
Meffire Jean Brebart , qui avoit été
reçu Maistre des Comptes en 1668 en'
mourut Doyen le 13 Octobre.
Dame Françoife- Agnès de Loyzes de
Paraffy , Epoufe de Meffire . Claude de
Machault , Chevalier de l'Ordre de Saint
Louis , & Officier des Vaiffeaux du Roy ,
mourut le 21 Octobre 1720 .
*
Dame Suzanne Midorge , veuve de
Meffire François de Venault de la Lande ,
Seigneur de Blaridy , ancien Exempt des
Gardes du Corps du Roy , mourut le 22
Octobre.
Meffire Antoine Bochart , Comte de
Champigny , Chef d'Efcadre & Confeiller
au Confeil de Marine , mourut le 23 Octobre
, âgé de 70 ans.
Meffire Antoine Charles Duc de GramD'OCTOBRE.
$42
mont , Pair de France , Souverain de Bidache
, Sire de Lefparre , Chevalier des '
Ordres du Roy & de la Toifon d'or ,
Gouverneur & Lieutenant General pour
Sa Majefté en Navarre & Bearn , Gouverneur
de la Ville , Citadelle & Châteaux
de Bayonne , du païs adjacent , & de la
Citadelle de Saint Jean Pied-de - Port ,
mourut le 24 Octobre , âgé de
ans .
Le Sieur Nicolas de Fer , connu par les
Cartes de Geographie qu'il a données au
Public , mourut le 25 Octobre.
MORTS ETRANGERES.
Ona Maria -Toda Coutinho - Centellas
Dde Guzinan , qui étoit entrée Religieufe
en 1606 à l'âge de huit à neuf ans
dans le Monaftere d'Arouca de l'Ordre de
Saint Bernard à Lisbonne , y mourut le
Aouft 1720 , âgée de 122 ans , après
avoir vû trois fiecles : Elle étoit fille de
Gafton Coutinho , Commandeur de l'Ordre
de Chrift , & de Dona Philippa de
Soufa , & foeur de Don Gonçale Coutinho
, Confeiller d'Etat & Gouverneur
des Algatues..
Don Louis de Vafconcellos de Soufa'
de Camera , ſecond Comte de Caſtelmelhor
, Confeille d'Alfonfe VI. de
d'Etat
Don Pedro II. & de Jean V. Rois de
Portugal , Miniftre & Secretaire d'Etat ,
Nij
LE MERCURE
&c. mourut le is Aoult , âgé de 85 ans
Leandre Comte d'Anguiflola , Lieute
nant Colonel & premier Ingenieur des
Fortifications de l'Empereur , mourut à
Vienne le 30 Aouſt , âgé de 68 ans.
Françoiſe Dorothée , fille de Jean Leopol
Donat , Prince de Trautfon , Comte de
Falckenftein , Chevalier de la Toifon d'or ,
& Confeiller d'Etat de l'Empereur , mourut
le 5 Septembre s , âgée de neuf ans.
•
N. de Konigferg , Evêque de Leitmaritz
en Boheme , Doyen de la Cathedrale de
Cologne , Chanoine de Strasbourg , Confeiller
de Sa Majefté Imperiale , & premier
Miniftre d'Etat de l'Electeur de Cologne
, mourut à Bonn le 6 Septembre ,
en fa 71 année.
Ignace de Louina , Evêque de Neustadt,
qui avoit efté Precepteur de PEmpereur
Charles VI . mourut le 11 Septembre.
Le Sieur Marimont , Auditeur de Rote ,
Efpagnol , mourut à Rome le 10 Septembre.
. Jean Antoine , Comte de Wurben &
Freidental , Chambellan de l'Empereur ,
mourut à Vienne le 17 Septembre , âgé
de 56 ans.
>
Angela de Mello , veuve du Vicomte
Martin Correa Dame d'honneur de
feuë Marie- Sophie Reine de Portugal ,
mourut à Lisbonne le Septembre 1720.
D'OCTOBRE. 149
La Comteffe de Lincoln , mourut à
Londres le 6 Octobre.
CHARGES ET DIGNITEZ.
Le Prince de Saint Maurice , Lieutenant
Maréchal General de Camp , & Gouverneur
de Cremone , fut nommé par
l'Empereur le 10 Septembre , General
d'Artillerie .
Le Pere François Sangueffa , Ex- Provincial
des Recollets de la Province de
la Baffe- Allemagne , fut nommé en Septembre
par l'Empereur , Coadjuteur de l'Evêque
de Ruremonde.
N. Erdedi , Evêque de Neutra , premier
Affeffeur du Confeil Aulique de
Hongrie , fut nommé en Septembre Vice-
Chancelier du même Confeil , & quelques
jours après , Confeiller d'Etat de l'Empereur.
Le Prince de Wirtemberg , a été nommé
Gouverneur general de la Servie.
Le Septembre , le fieur Crifpo Auditeur
de Rote , fut nommé par le Pape
Archevêque de Ravenne .
En Septembre le Roy d'Efpagne accorda
au Marquis de Lede , qui avoit commandé
les Troupes de Sa Majefté en Sicile , la
dignité de Grand d'Espagne.
Nomma Lieutenant General Don
Niij
150 LE MERCURE
Antonio Gaſtaneta , General d'Artillerie.
Sa Majefte Catholique nomma auffi à
l'Evêché de Tuy , vacant par la démiſſion
volontaire de Don Anfelme de la Torre
Don Fernand Ignace d'Arango , Abbé de
Saint Ifidore de Leon.
Donna cette Abbaye à Don Marcellino
de San Pedro , Inquifiteur de Barcelonne.
Le Gouvernement de Motril , à Don
Jofeph de Miranda , Lieutenant Colonel,
& celuy de Valdivia , à Don Joſeph d'Olazagutia.
Extrait des Regiftres du Confeil d'Eftat.
au
SUR
UR ce qui a efté repréſenté au Roi ,
étant en fon Confeil , que la condition
de ceux qui font demeurez Actionnai→
res de la Compagnie des Indes , fe contentant
de profiter du benefice attaché aux
Actions , eft fi differente de celle d'un
grand nombre de particuliers qui ont retiré
la plus grande partie de leurs fonds de ladite
Compagnie , pour porter ailleurs la
fortune confiderable qu'ils ont faite en
convertiffant leurs Actions en Billets de
Banque ; que pendant que les uns ont le
deplaifir de voir baiffer le prix des Actions
beaucoup audeffous de ce qu'elles leur ont
coûté , les autres au contraire font parveD'OCTOBRE.
151
nas en peu de tems à une opulence odieufe
au public , & contraire au bien de l'Etat ;
Que pour s'en affurer la durée , il y en a
qui ont fait paffer des fommes immenfes
dans les Pays étrangers , qu'ils y ont pla
cées dans les fonds publics , ou emploiées
en achats de Diamants & autres Marchandifes
auffi précieufes que fuperflues ; Que
d'autres ont abufé de leur fortune fubite
pour acheter des fonds de Terre ou des
maifons, qu'ils ont portées à un prix exceffif,
ou pour faire des amas de toute forte de
denrées , voulant encore augmenter leurs
richeffes par un monopole puniffable fuivant
les Loix ; Qu'enfin prefque tous ont
refferré les Efpeces d'or & d'argent qu'ils
n'ont pû emploier ; Enforte que tous ces
abus ont cauſé en grande partie la cherté
des Denrées , le difcredit des Actions &
des Billets de Banque , l'interruption du
travail des Manufactures , & la neceflité
où fe trouve réduite une partie confiderable
des habitans des meilleures Villes du
Royaume : Et quoique ces defordres caufez
par des richeffes fi inégalement partagées ,
puffent engager Sa Majesté à taxer ceux
qui en font un fi mauvais ufage , Elle a
jugé neanmoins que pour ne pas alarmer
les Actionnaires de bonne foi, qui ont confervé
leurs Actions , par l'exemple d'une
taxe dont les confequences pourroient leur
Niiij
952
LE MERCURE
paroître dangereufes , Elle devoit remedier
a ces maux par une voie plus douce & plus
facile , en obligeant les anciens Actionnaires
qui en font la caufe , à racheter des
Actions pour un fonds proportionné à celui
qu'ils avoient auparavant , & remettre par
là dans le Commerce au moins une partie
des richeffes qu'ils en ont detournées , afin
que leur fortune devenant utile au Royaume
& à eux-mêmes , elle ferve à foutenir
un établiffement qui peut eftre auffi avantageux
à l'Etat que celui de la Compagnie
des Indes : A quoi étant neceffaire de pourvoir,
Oui le Rapport , SA MAJESTE ETANT
EN SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a ordonné &
ordonne .
ART. I. Que ceux defdits anciens Action
naires de la Compagnie des Indes qui fe
trouveront compris dans les Rolles qui feront
à cet effet arrêtés au Confeil , foient
tenus dans quinzaine du jour de la fignification
qui leur fera faite dudit Rolle , de
rapporter en compte à ladite Compagniele
nombre d'Actions pour lequel ils feront
emploiez ; A quoi faire ils feront contraints
par toutes voies , comme pour les propres
deniers & affaires de Sa Majefté.
II. Veut Sa Majefté que les Actions.
rapportées en compte à ladite Compagnie ,
y, teftent pendant le tems de trois années,
D'OCTOBRE.
853
à compter du jour dudit dépoft , pendant
lequel tems les Dividendes des Actions dépofées
, feront payez aufdits Actionaires ,
après quoi lesdites Actions leur feront remiles
pour en difpofer ainfi que bon leur
femblera , fans que dans aucun tems , &
fous quelque prétexte que ce foit , ils puiffent
eltre taxez pour raifon des profits qu'ils
ont faits ou pourront faire ci après dans
ladite Compagnie , conformément à l'Article
VIII. de l'Arreft du Confeil du 29
Aouft derniere!
III . Et aqtendu que ladite Compagnie
des Indes fe trouve encore avoir une quantité
confiderable d'Actions , du nombre de
deux cens cinquante mille , fixé par l'Arreft
du Confeil du 15 Septembre dernier ,
ceux defdits anciens Actionnaires qui
n'auront plus en leur poffeffion , ou qui
n'auront pù trouver à acheter le nombre
d'Actions pour lequel ils feront compris
aufdits Rolles , pourront en acquerir de
ladite Compagnie fur le pied de treize mille
cinq cens livres l'Action , en Billets de
Banque , qui feront enfuite brûlez en la
forme prefcrite par les differens Arreſts du
Confeil fur ce rendus.
?
IV. Et pour parvenir à connoître & à
diftinguer les Actionnaires de bonne foy
qui ont confervé les Fonds qu'ils avoient
dans la Compagnie , & qui ne doivent
154
LE MERCURE
pas être compris dans les Rolles qui feront
arreftez en execution du prefent Arreß ;
Sa Majesté a ordonné & ordonne que tous
ceux qui font porteurs d'Actions remplies
de ladite Compagnie des Indes , foient te
nus dans huitaine , à compter du jour de la
publication du prefent Arreft , de les dépofer
en Compte d'Actions entre les mains
du Sieur Delanauze , Prépofé pour tenir
les Livres des Comptes d'Actions , lefquelles
y refteront feulement jufqu'au 15 Novembre
prochain , paffé leqsiat jour les
Actionnaires pourront en difpofer , après
qu'elles auront été timbrées d'um fecond
Sceau de la Compagnie. Fait au Confeil
d'Etat du Roy , Sa Majesté y eſtant , tenu
à Paris le vingt- quatrième jour d'Octobre
1720. Signé PHELYPEAUX .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat.
Su
Ur ce qui a efté reprefenté au Roy ,
étant en fon Confeil , par les Directeurs
de la Compagnie des Indes , que quoique
Sa Majesté lui ait accordé le bénefice du
travail des Monnoyes pendant neuf ans ,
par l'Arreft du 25 Juillet 1719. ladite
Compagnie voulant cependant donner de
nouvelles marques de fon zele pour le
fervice de Sa Majeſté , luy propoſe d'ordonner
que les Elpeces & Matieres d'or
D'OCTOBRE.
iss
& d'argent foient reçûës dans les Hôtels
des Monnoyes fans Billets de Banque ,
fur le pied de foixante dix-huit livrés le
Marc d'Argent de onze deniers de fin , &
de onze cens foixante - dix livres le Marc
d'Or de vingt- deux Karats , & les autres
Efpeces & Matieres à proportion , moyennant
quoy ladite Compagnie s'engageroit
à payer , par forme de don gratuit , à Sa
Majesté vingt millions , à raifon de cinq
millions par mois , à commencer au mois
de Novembre prochain , & de fournir en
outre dix millions par mois à commencer
au premier Novembre prochain , tant fur
le prix des Fermes Unies , que fur les
autres Recouvremens dont elle eft chargée
: Lefquelles propofitions ayant eté examinées
par Sa Majefté , elles luy ont paru
d'autant plus avantageufes , qu'il a efté
par Elle indiqué des débouchez fuffifans
pour tous les Billets de Banque qui font
dans le Commerce , & qu'Elle ſe trou.
vera par là en état de fatisfaire aux engagemens
qu'Elle a pris par l'Arreft du
10 du prefent mois , de payer en Efpeces
tout ce qui refte par Elle dû du courant.
de la prefente année ; Ouy le Rapport :
SA MAJESTE ESTANT EN
SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a accepté
& accepte les offres de la Compagnie des
356 LE MERCURE
Indes , & en confequence ordonne qu'i
lui fera payé par forme de don gratuit ,
la fomme de vingt millions en quatre
termes & payemens égaux de mois en
mois , à raifon de cinq millions chacun ,
à commencer au mois de Novembre prochain
; outre laquelle femme de vingt
millions il luy fera encore payé par ladite
Compagnie , fuivant ces offres , celle de
dix millions par chacun mois , à commen→
cer au premier Novembre prochain , fur
& en déduction , tant du prix des Fer→
mes Unies , que des autres Recouvremens
dont elle eft chargée : Veut en conſequence
Sa Majesté qu'à commencer du
jour de la publication du prefent Arreſt ,
il ne foit plus reçû de Billets de Banque
dans les Hôtels des Monnoyes , & que
les Efpeces & Matieres qui y feront por
tées , foient reçûës à raifon de quarante
fix livres feize fols le Louis de vingtcinq
au Marc , les demis à proportion ;
de lept livres feize fols l'Ecu de dix au
Marc , les demis , tiers d'Ecus, ou Louis
d'argent , les quarts , fixiémes & douziémes
à proportion ; de onze cens foixante
dix livres le Marc des anciens Louis , &
de l'Or du titre de vingt-deux Karats ;
& de foixante dix- huit livres le Marc des
anciens Ecus & de l'argent du titre de
onze deniers de, fin , les autres Efpeces
DOCTO BR E.
157
Matieres d'Or & d'Argent à proportion
: Sur lequel pied la valeur en fera
payée comptant en Efpeces de la nouvelle
fabrication ou reforme ordonnée par l'Edit
du mois de Septembre dernier . Fait
au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majesté
y étant , tenu à Paris le vingt- quatriéme
jour d'Octobre mil fept cent vingt
Signé , PHELY PEAUX.
Extrait des Regifres du Confeil d'Etat.
LE
E Roy s'étant fait repréſenter
en fon
Confeil fon Edit du mois de Septembre
dernier , par lequel Sa Majefté auroit fixé
le prix des nouvelles
Efpeces d'Argent fur
le pied de quatre -vingt- dix livres le Marc ,
& celles d'or à proportion : & Sa Majesté
defirant de rendre la Monnoye
plus forte
pour l'avantage
du Commerce
& la dimi
nution du prix des Denrées. Ouy le Rapport
, SA MAJESTE ' ESTANT EN SON CONSEIL
,
de l'Avis de Monfieur le Duc
d'Orleans
Regent , a ordonné & ordonne.
ART.I. Que les nouvelles Efpeces d'Or
& d'Argent
fabriquées en confequence
de
P'Edit du mois de Septembre
dernier , auront
cours dans le public jufqu'au premier
Decembre
prochain , fur le pied porté par
ledit Edit , fçavoir , les Louis d'Or pour
$ 4. livres , les demis à proportion
, & les
158
LE MERCURE
Ecus pour 9 livres , les demis, tiers , quarts ,
fixiémes & douzièmes à proportion ; que
les anciennes Efpeces continueront d'être
reçues dans le Commerce jufqu'audit jour
premier Decembre , fur le pied qu'elles y
ont actuellement cours , & que les Efpeces
& Matieres , tant à reformer qu'à conver
tir , feront reçues dans les Hôtels des Monnoies
, à commencer du jour de la publication
du prefent Arreft , fur le pied , fçavoir,
de 46 livres 16 fols les Louis à reformer
de vingt- cinq au Marc , les demis à proportion
; de 7 livres 16 fols les Ecus de
dix au Marc , les demis , tiers , quarts ,
fixiémes & douzièmes à proportion ; de
1170 livres le Marc d'anciens Louis , & de
l'or du titre de vingt- deux karats , & de
78 livres le Marc des anciens Ecus ou de
l'argent du titre de onze deniers .
II. Qu'audit jour premier Decembre
lefdites Efpeces de nouvelle fabrique &
reforme n'auront plus cours que pour 45
livres le Louis , & 7 livtes 10 fols l'Ecu ;
les anciennes Efpeces pour 36 livres le
Louis de vingt-cinq au Marc , 45 livres
celui de vingt au Marc , 30 livres celui de
trente au Marc , 24 livres 12 fols celui de
trente- fix un quart au Marc ; 6 livres
l'Ecu de dix au Marc , 7 livres 10. fols ,
l'Ecu de huit au Marc , 6 livres 12
fols celui de neuf au marc , & de 20 fols
la livre d'argent , les demis & autres diD'OCTOBRE.
159
minutions defdites efpeces à proportion ;
Et cependant que les Efpeces à reformer
feront payées dans les Hôtels des Monnoies
, à commencer ledit jour premier
Decembre prochain , fur le pied de 37 liv..
16 fols le Louis de vingt- cinq au Marc ,
& de 6 livres 6 fols l'Ecu de dix au Marc ;
Et les matieres à proportion de 945 liv.
le Marc des anciens Louis à convertir , ou
de l'or du titre de vingt-deux Karats , &
de 63 livres le Marc des anciens Ecus à
convertir , ou de l'argent du titre de onze
deniers , & ce jufqu'au premier jour de Janvier
de l'année prochaine 172 1 .
III. Veut Sa Majefté qu'à commencer
audit jer premier Janvier , les Elpeces
neuves foient réduites à 36 livres le Louis ,
& à 6 livres l'Ecu ; Comme auffi que les
anciennes Efpeces foient reduites dans le
public à 27 livres le Louis de vingt- cinq
au Marc , 33 livres 15 fols celui de vingt
au Marc , 22 livres 10 fols celui de trente
au Marc ; 18 livres 9 fols celui de trentefix
un quart au Marc : De 4 livres io fols
l'Ecu de dix au Marc , s livres 12 fols celui
de huit au Marc , 5 livres celui de neuf
au Marc , & de quinze fols la livre d'argent
, Et neanmoins que les Efpeces à reformer
feront payées dans les Hôtels des
Monnoyes , à commencer ledit jour premier
Janvier prochain , fur le pied de 28
livres 16 fols le Louis de vingt cinq au
160 LE MERCURE "
Marc , & de 4 livres 16 fols l'Ecu de dix
au Marc, & les matieres à convertir , à
proportion de 720 livres le Marc d'anciens
Louis , ou de l'or de vingt- deux Karats ,
& de quarante-huit livres le Marc des anciens
Ecus , oude l'argent de onze deniers.
Fait au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majesté
y étant , tenu à Paris le vingt quatrième
jour d'Octobre mil fept cent vingt. Signé
PHELYPEAUX.
E TAT CONTENANT
LES NOMS
furnoms des Treforiers - Receveurs Geueraux
& Payeurs des Rentes de l'Hôtel
de Ville de Paris , & des Controlleurs
Generaux defdits Payeurs , que le Roy
étant en fon Confeil a nommés & choifis
pour faire , à commencer en la prefente
année ml fept cent vingt , la Recette
le Payement & le Controlle des quatorze
Parties de Rentes établies par les Edits
de Sa Majesté du mois de Juin dernier ,
du prefent mois d'Aouft , dans lef
quelles quatorze Parties , les Rentes perpetuelles
& viageres créées par autres
Edits dudit mois de Juin , & du prefent
mois , & les Rentes viageres dites
Tontines avec les anciennes Rentes viageres
ci-devant conftituées fur ledit Hộ-
tel de Ville feront diftribuées ; fçavoir
les
D' OCTOBRE. 161
les Rentes perpetuelles dans les dix premieres
Parties, & les Rentes viageres
des Tontines avec les autres Rentes viageres
tant anciennes que nouvelles , dans
les quatre dernieres Parties , fuivant
conformément aufdits Edits du mois de
Juin dernier , & du prefent mois.
PREMIERE PARTIE.
Me Martin-Bernard Fredy , Payeurs.
Me Jean Peronnet , Controlleur.
DEUXIEM E.
Me Michel Defponty , Payeur..
Me Nicolas Foreftier , Controlleur.
ཐ་
TROISIEM E.
Me Jofeph- Pierre Iffaly , Payeur.
Me Jean-Horace Peftel , Controlleur..
QUATRIEM E.-
Me Charles Dorel , Payeur.
Me Henri Sauvage , Controlleur.
CINQUIEM E.
Me René Berger , Payeur.
Me Gilles Germain , Controlleur-
SIXIEME..
Me Claude Guillois , Payeur.
Me Guillaume Lafnier , Controlleur.-
162 LE MERCURE
SEPTIEME.
M Eftienne le Droit , Payeur.
Me Jofeph- Simon Chebron , Controlleur.
HUITIEM E.
Me Louis -Jacques Baudry , Payeur.
Me Nicolas Thierriot , Controlleur .
NEUVIEME.
Me. Eftienne Garnier , Payeur.
Mc André Thevenot , Controlleur.
DIXIEME .
Me Louis Marchand , Payer.
Me Eftienne Lambert , Controlleur.
ONZIEME.
Me Antoine de Pigis , Payeur.
Me Antoine Chevrot , Controlleur.
DOUZIEM E.
Me Nicolas Morel , Payeur.
Me Jacques Garnier , Controlleur.
TREISIEM E.
Me Antoine Eſtival , Payeur..
M Jean-Baptifte le Grand , Controlleur.
QUATORZIEME.
Me Louis- Denis Longuet , Payeur .
Me Jean Sandré , Controlleur.
Fait & arrêté au Confeil d'Etat du Roy
D'OCTO BR E. 163
tenu à Paris le trente uniéme jour d'Aouft
mil fept cent vingt. Signé PHELYPEAUX.
Regiftré en la Chambre des Comptes le 21
Octobre 1720. & Collationné.
Extrait des Registres du Confeil d'Etat
Surc
fe
Ur ce qui a été reprefenté au Roy ,
étant en fon Confeil , qu'en execution
de l'Arseft rendu en iceluy le 30 Aoust
dernier , portant qu'en vertu des Commillions
du grand Sceau , il fera établi
foixante Confeillers du Roy Agents de
Change , Banque , Commerce & Finances ,
aufquels feuls il fera permis de s'immifcer
dans les negociations , il vient d'être choiſi
& agréé foixante Sujets pour remplir lef
dites Commiffions ; mais qu'il eft neceffaire
de leur donner un temps fuffifant pour
mettre en état de les obtenir , en fatisfaifant
aux conditions tequiles à cet effet
par ledit Arreft ; & que cependant il eft
de l'intereft public de permettre dès à
fent aufdits foixante particuliers agréez ,
d'entrer dans l'Exercice deídites fonctions
avec défenſes à tous autres de s'y immifcer;
lefdits foixante Agents de Change
étant plus que fuffifans pour toutes les
negociations au moyen de quoy il n'y
aura plus aucune neceffité de tolerer plus
>
pre-
>>
O ij
164
LE MERCURE
t
long- temps l'affemblée tumultueufe qui fe
fait à la Bourfe , & qui nonobftant toures
les précautions qu'on a pû y apporter,
préjudicie confiderablement aux Arts &
Métiers , & donne lieu à une infinité
d'abus , de fraudes & de defordres : A quoy
Sa Majesté voulant pourvoir , Ouy le Rap
port : LE ROY ESTANT EN
SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a accordé
& accorde aux foixarte Particuliers choifis :
& agréez pour remplir lefdites Comuniffions
d'Agents de Change , le temps &
efpace d'un mois , à compter du jour de
la publication du prefent Arreft , pour fe
mettre en état de pouvoir eftre pourvûs
defdites Commiffions , en fatisfáifant aux
conditions requifes à cet effet par PArreſt:
du Confeil du 30 Aouft dernier ; & faure
par eux d'y fatisfaire dans lèdit temps , &
iceluy paffé, veut Sa Majefté qu'ils ne
puiffent eftre admis aufdites Commiffions,.
aufquelles il fera pourvû : Et cependant :
permet Sa Majefté aufdits foixante Parti--
enliers agréez & dénommez dans l'Etat :
annexé à la minute du prefent Arreft , de :
commencer du jour de la publication diceluy
l'Exercice défdites fonctions d'Agents
de Change Fait Sa Majefté défenſes à
tous Courtiers & autres , de s'immifcer
dans, lefdites fonctions , & de femefter
D' OCTOBRE.
165
d'aucunes negociations , & à tous Banquiers
, Marchands , Negocians ou autres ,
de fe fervir à cet effet de leur entremife ,.
à peine de trois mille livres d'amende contre
chacun des contrevenans , appliquable
moitié à l'Hôpital , & moitié au dénonciateur
: Ordonne Sa Majefté que Mardy
29 du prefent mois , la Bourſe établie à
l'Hôtel de Soiffons fera & demeurera fermée:
Fait Sa Majesté défenfes à toutes
perfonnes de s'y affembler à l'avenir , ni
aux environs , ni en aucuns autres lieux.
& quartiers que ce puiffe eftre , à peine de
prifon ; comme auffi à toutes autres per--
fonnes que lefdits foixante Agents de Change
, de tenir Bureaux pour les negocia
tions , à peine de trois mille livres d'ámende.
Enjoint Sa Majefté au Sieur Lieutenant
General de Police de la Ville de
Paris , de tenir là main à l'execution du
prefent Arreft , lequel fera lû , publié &.
affiché par tout où befoin fera. Fait au
Confeil d'Etat du Roy , Sa Majeſté y
étant , tenu à Paris le vingt- cinquiéme
jour d'Octobre mil fept cent vingt.
signé , PHELYPEAUX.
•
166 LE MERCURE
ETAT DES AGENTS DE CHANGE
agréez pour remplir les Soixante
Commiffions.
Le Gras.
Prevoft.
Dallée l'aîné.
Dallée le jeune .
Navarre.
Geneſteft.
Chabert,
De la Croix .
Carret.
Dufaux.
Beaubec de Vallerey.
Gaftebois .
Baudouyn.
Moret.
Pifcatory.
Gibert.
De Mogé.
Prevoft l'aîné.
Caumont.
Frecot.
Collin le Maître
Brillon.
Barbier de S. Mars.
Rabuffeau.
Payrefaube.
Regnouf.
Perié.
Guinoix.
Olivier.
Boulay.
Duffol.
Fremyot.
Prevost Depreaux.
Herinx. A
De Lavau.
Ragon.
Faure.
Pouget.or
Guyot .
Demarine.
De la Cou Pignard.
May.
Ducoin.
Amiot Dumeſnil.
Daudement.
Savoye.
Sandelyon .
Lefcalier.
Poirfin..
t
D'OCTOBRE. 167
Duchefne.
Demonflys.
Holbach .
Ferlet.
La Garde.
Walon.
Defarcy.
Le Jay.
Duchefne .
Rulault de Che nerun
.
*
Fait & arrefté à Paris le vingt- cinquié
me jour d'Octobre mil fept cent vingt
Signé , PHELY PEAUX .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat.
E ROY ayant par refultat de fon Con
Lei
feil de ce jourd'hui , accepté les offres
des Directeurs de la Compagnie des Indes
, de payer le prix du Bail des Fermes
Generales en douze payemens égaux de
mois en mois , à commencer du premier
Novembre prochain , & même pour affarer
la regularité defdits Payemens , de remettre
par forme d'avance entre les mains
du Garde du Trefor Royal jufqu'à concurrence
de la fomme de dix Millions de liv.
le tout aux charges & conditions portées
par ledit Refultat ; & Sa Majesté voulant
leur faciliter les moiens de faire ladite
avance , Ouy le Rapport: SA MAJESTE'
ESTANT EN SON CONSEIL , de l'Avis de
Monfieur le Duc d'Orleans Regent , a per
168 LE MERCURE
mis & permet aux Directeurs de la Com
pagnie des Indes d'emprunter jufqu'à la
fomme de quinze Millions , les deux tiers
en efpeces , & l'autre tiers en Billets de
Banque , à raifon de quatre pour cent d'inrereft
par années , auquel effet lefdits Directeurs
feront leurs Billets foli daires de la
totalité defdites fommes , payables au porteur
en Louis d'argent de trente au Maro
de la nouvelle fabrication , au cours du
jour de l'emprunt ; lefquels Billets feront
fignez indiftinctement par trois Directeurs
de ladite Compagnie des Indes ; & feront
fur le prefent Arreft toutes Lettres neceffaires
expediées . Fait au Confeil d'Etat
du Roy , Sa Majesté y étant , tenu à Paris
le vingt- feptième jour d'Octobre mil ſept
vingt. Signé, PHELYPEAUX.
DECLARATION DU ROY,
Contre les Collecteurs de l'impoft du Sel ,
qui y mêlent des corps étrangers.
QUIS & c. Par l'Article vir du
Lov
Titre IX. de la revente du Sel à petite
mefure de l'Ordonnance des Gabelles , du
mois de May 1680. il eft défendu aux Regratiers
d'alterer les meſures , & de mêler
aucun Sel de falpêtre ou de verrerie , ou
autres corps étrangers , parmi le Sel qu'ils
debiteront , à peine de cinq années de Galeres
D' OCTOBRE 169
leres contre les hommes , & du fouet &
banniffement de cinq ans contre les femmes
; mais quoique les Collecteurs de
l'impoft du Sel foient encore plus coupa
bles , puifque les particuliers compris dans
les Rolles de l'impoft du Sel , font forcez
de prendre & de payer le Sel de leur
impoft , au lieu qu'aucun de nos Sujets
n'eft obligé d'acheter du Sel à petites me
fures du Revendeur de la Paroiffe de fa
demeure ; que d'ailleurs les Collecteurs qui
mêlent des corps étrangers dans le Sel de
l'impoft , commettent le faux-faunage par
la vente qu'ils font du Sel qu'ils retien
nent en la place des corps étrangers
qu'ils mettent dans celui qu'ils délivrent ;
neanmoins la même Ordonnance du mois
de May 1680. ni aucunes des Declarations
rendues depuis , n'ont pourvû au genre
de peine qui eft dûë à ce crime , qui intereffe
les plus pauvres , & par confequent
les plus favorables de nos Sujets ; en forte
que les Officiers des Greniers à Sel fe
contentent pour l'ordinaire de prononcer
contre les coupables de fimples peines pecuniaires
: A ces Caufes , de l'Avis & c.
Nous avons par ces Préfentes fignées de
notre main , dit & ordonné , difons &
-ordonnons , voulons & Nous plaîft , que
J'Article VII du Titre de la Revente du
Sel à petites mefures , de l'Ordonnance
P
176 LE MERCURE
des Gabelles , du mois de May 1680. fort
executé contre les Collecteurs de l'impoft
du Sel , qui feront convaincus d'en avoir.
fait la délivance avec des mefures de fauffe .
continence , ou d'avoir mêlé dans le Sel
de l'impoft aucuns corps étrangers tels
qu'ils foient ; & en confequence que les
Collecteurs de l'iinpoft coupables defdits
crimes , foient pourſuivis à la requeſte de
nos Procureurs dans lefdits Greniers au
defaut des Parties civiles , & condamnez
par les Juges defdits Greniers , aux Galeres
pour cinq ans , fans préjudice des
reftitutions felon l'exigence des cas . Donné
à Paris le vingt- deuxième jour de Septem
bre 1720.
22172: CA LOA:DIZ
JOURNAL DE PARIS.
LE
E 29 du mois piffé M. le Comte de
Cruffol , fils aîné de M. le Duc d'Uzés ,
premier Pair de France , prêta ferment
de fidelité entre les mains du Roy , en
prefence de M. le Duc d'Orleans , pour
la furvivance du Gouvernement d'Angoumois.
Le 4 Octobre 1720 le Roy accompagné
de M. le Duc d'Orleans , de M. le
Duc de Chartres , & de M. le MaréchalD'OCTOBRE.
- 171
Duc de Villeroy , fit dans les Champs
Elifées la Revue des deux Compagnies des
Moufquetaires .
Le 7 entre neuf & dix heures du matin
, les Commiffaires du Confeil qui
compofent la Chambre des Vacations ,
s'affemblerent pour la premiere fois aux
Grands Auguftins . Ils entendirent d'abord
la Meffe du Saint Efprit , & allerent enfuite
dans la Salle qui leur avoit été préparée
, où l'on fit publiquement la lecture
des Lettres Patentes du Roy , en forme de
Commiffion , portant l'établiſſement de ladite
Chambre des Vacations , du 27 Septembre
dernier , Registrées en ladite Chambre le
7 du prefent mois , fur la requifition de
M. de Vaftan , Procureur General du
Roy.
Le 13 M. Rolin , ancien Recteur de
l'Univerfité , fut élu de nouveau , pour
remplir cette dignité à la place de M.
Coffin , qui s'en eft acquitté très dignement
pendant les deux ans qu'il en a fait
les fonctions .
M. le Maréchal de Montefquiou eft
parti en pofte , pour commander en chef
dans le Languedoc , la Provence & les
Cevennes.
L'Abbaye de Vauchelles en regle ,
Ordre de Cifteaux , Dioceſe de Cambray,
eſt vacante.
P ij
172 LE MERCURE
M. de Berthier , Premier Prefident du
Parlement de Toulouze , a efté gratifié
d'une penfion de 8000 livres , & M. le
Mazuyer , Procureur General du même
Parlement , d'une autre de 3000 livres .
M. de Harlay de Cely eft retourné
à Metz reprendre les fonctions de l'Intendance
.
Le Roy a donné le Prieuré de Saint
Marcel, Dioceſe de Besançon , à M. l'Abbé
Doroz , fils de M. le Procureur General
du même Parlement.
Il vaque par la mort de M. l'Abbé Belot
, les Abbayes de Maſdyon & de Bonlieu
; la premiere Ordre de Saint Benoift,,
Dioceſe de Saintes ; & la feconde , Ordre
de Cifteaux , Diocefe de Bordeaux.
Le 18 M. le Cardinal de Rohan partit
en pofte pour fe rendre à Strasbourg ,
où il fera un fejour de fix femaines.
Le 21 l'Hôtel de Ville commença
payer en Efpeces les arrerages des fix premiers
mois des Rentes nouvellement créées.
fur la Ville , ainfi que les viageres .
Le même jour M. "Dagueffeau Avocat
du Roy au Châtelet , & fils aîné de M.
le Chancelier , prononça à la rentrée du
Châtelet un difcours qui merita les applaudiffemens
de tous les auditeurs . Ce
Difcours roula fur la fimplicité dans le
ftile qui étoit preferable à tout autre . Il
D'OCTOBRE. 173
eta Homere , comme le modele de cette
belle fimplicité , qui avoit fait par cet endroit
l'admiration de tous les fiècles , malgré
les préjugez du nôtre . M. d'Argouges
Lieutenant Civil , fit enfuite un fort
beau difcours , dans lequel il fit voir en
quoy confiftoit la veritable éloquence du
Barrean.
M. le Cardinal d'Alface , Archevêque
de Malines , & frere du Prince de Chimay
, qui a fait un fejour de quelques
femaines à Paris , eft retourné à Malines.
Les Etats de Bretagne finirent leur:
féance le 24 de ce mois ; ils ont obtenu
de fe mettre au lieu & place de la Compagnie
des Indes , pour le remboursement
des Creanciers de cette Province . A l'é
gard des Rentes que l'on créera de nous
veau pour la Province , il n'y aura que
les Bretons qui y feront admis. Les Fermes
generales de Bretagne ont efté adju
gées à M. André , & à fa Compagnie ,
fur le pied de quatre millions 330 mille
livres , les frais en dehors , & ´cela pour
trois ans.
M. Gaudron a été nommé Intendant
des Invalides , à la place de M. de Verloris
qui eft decedé.
La maladie contagieufe continue à Mar
feille , ainfi que dans les Baftides ou mai
fons de campagne qui font aux environs
Piij
174 LE MERCURE
de cette Ville ; elle a fait auffi de grands
Favages à Aubagne , qui n'en eft qu'à
trois lieuës. Saint Canadet , Meyrargues
& Sainte Tulle , n'en font pas exempts.
Elle ne s'eft prefque pas fait fentir jufqu'à
prefent à Aix , dont le Parlement s'eft.
retiré à Saint Rhemi .
M. le Commandeur du Frefnoy eſt
mort ; il avoit une Commanderie en
Brie de 12000 livres de rentes , & une
penfion de 5000 livres fur l'Abbaye de
Saint Taurin d'Evreux.
Le General des Benedictins a preſenté
à Sa Majesté un Livre compofé par des
Religieux du même Ordre , intitulé la
France Chretienne , dans lequel on voit
l'origine de tous les Benefices , & des
fondations qui en ont efté faites par les
Rois de France .
Le 24 M. l'Evêque de Toul benit la
nouvelle Eglife de l'Abbaye de Nôtre-
Dame aux Bois , Fauxbourg Saint Germain.
Mehemet Effendi , qui vient en qualité
d'Ambaffadeur extraordinaire de la
Porte en France , eft arrivé à Toulon
où il fait quarantaine.
Le 18 M. le Comte de Sainte Maure
& M. le Marquis de Rouvroy , furent
faits Lieutenans Generaux de Marine .
Ce dernier eft monté à ce grade - par la
D'OCTOBRE. 175
mort de M. de Champigny , qui laiffe
un cordon rouge & une place de Confeiller
de Marine à remplir. M. le Comte
de Bethune de Séel , a été nommé Chef
d'Efcadre dans la même promotion .
M. le Marquis de Brancas , Sur - Intendant
des Haras de France , a fait venir
de Barbarie cinquante beaux chevauxbarbes
, pour l'Ecurie du Roy.
M. le Comte de San- Eftevan , premier
Miniftre - Plenipotentiaire du Roy
d'Efpagne au Congrès de Cambray , après
quelque fejour à Paris , eft parti pour fe
rendre à Cambray.
Approbation de M. Demontempuys , Avocat en
Parlement , Cenfeur Royal des Livres,
Моя
Ay là
JA
par ordre de Monfeigneur le Chancelier
un Manufcrit intitulé , Le Nouveau Mercure
pour le mois d'Octobre 1720 , dont j'ay paraphé
les feuillets. Fait à Paris ĉe 4 Novembre 1720 .
DEMONTEMPUYS
TABL E.
O
RIGINE des Armoiries & des
Surnoms en France, 3
L'Amour Precepteur
Arrefts , Edits & Declarations. 76
Copie d'une Lettre écrite à Monfieur l'Abbé
de Camps , par M. le Marquis de
Gravelon.
Poëfies
Enigmes
Chanfon
84
89
103
104
Alkermes , ou Aurifique Mineral , à la
maniere de Glauber.
108
Nouvelles Etrangeres. 112
Morts de Paris.
145
Morts Etrangeres.
147
Charges & Dignitez. 149
Arrefts importans. 150
Journal de Paris. 1:6-8
Avis
Ο
A VIS
N fe croit obligé de detromper le Public
fur le faux bruit qui s'est répandu
touchant l'aveuglement de M. de VVoolhouſe
, celebre Oculifte . Cette fanffeté ne
peut provenir que de la jalousie que certaines
perfonnes ont conçue contre lui , puiſque
cet habile homme travaille journellement
avec tout le fuccés imaginable. On doit fçao
voir que M. de VVoolhouſe pratique quarante
trois operations , plus qu'aucun autre
Oculifte n'a fait juſqu'à prefent ; ce qui a
engagé plufieurs Souverains à lui envoyer
des Eleves , pour leur apprendre ces operations.
On n'oubliera pas que depuis le
commencement de la difpute fur la Cataracte
Membraneufe , on a trouvé fix Cataractes
de cette efpece , rapportées dans le Journal
des Savans; de forte que toutes les Academies
de l'Europe conviennent de la difference
qui fe trouve entre la Cataracte &
le Glancome , quoique les Operateurs ordinaires
n'en faffent aucune mention ; ce qui ·
préjudicie fort à la guerifon des malades
, qui fe contentent de se faire éguilleter
les yeux dans l'efperance de recouvrer
la vûe.
M. de Woolhoufe demeure à Paris aux
Quinze- Vingts , dans la Grande Aumônerie
, vis-à- vis M. Roffignol , fameux
Ecrivain.
********SE SESJESELSKSESE
A V I S.
E Sieur CORDIER , Gendre & feut
ris , ayant fait annoncer dans differentes Gazettes
de Hollande , la vertu des Calotes &
Peaux Divines , a cru devoir avertir le Public :
Que les Peaux Divines font immanquables pour
toutes fortes de Maux de tête ; qu'elles en font
fortir les Abfcès, Fluxions , Rhumatifmes , Coups
ou contre Coups , & le Sang qui peut s'y eſtre extravafé
par chute ou autrement. Qu'elles gueriffent
les Migraines , les Eblouiffemens , les
Vapeurs , les Bourdonnemens d'oreilles , & tous
maux de Tête , de quelque caufe qu'ils puiffent
provenir. Qu'elles attirent les eaux qui coulent
fur les yeux , fur le vifage , far le rimpan des
oreilles , fur les dents , dans la poitrine , & autres
parties du corps : enfin qu'elles gueriffent
la furdité , & cela par une tranfpiration douce
au travers des pores , fans faire aucun mal , &
fans enlever la peau.
Les Peaux Divines font excellentes pour les
Paralifies nouvellement formées , pour toutes
fortes de rhumati fmes , pour les goutes feiatiques,
les humeurs froides , maux de côté , & d'eftomac
, pour l'apoplexie , les fluxions qui fe forment
fur le vifage , les groffeurs qui viennent
à la gorge & autres parties du corps , pour les
fluxions & oppreffions de poitrine , pour les
maux de reins , pour les douleurs que l'on reffent
entre les épaules , dans les épaules & par
tout le corps.
Elles font bonnes pour les enfures des jambes
& des genoux. Elles attirent les eaux acres ,
les ferofités , & les humeurs glaireufes qui font
entre cuir & chair , & elles adouciflent les nerfs
& les muſcles .
Enfin les Calotes & Peaux Divines ont quatre
vertus principales . 1o De reveiller la chaleur
naturelle où elle paroît interdite. 20 D'ouvrir
les pores. 30 De fondre les humeurs. 4°
De les faire tranfpirer fans faire aucune cicatrice
ni ouverture , & en laiffant la partie du
corps où elles font appliquées , auffi faine &
plus belle qu'auparavant.
Les Peaux Divines étant refolutives & attractives
, on les trouve , en les ôtant , pleines
de ferofitez ; le tout par tranfpiration .
Le Sieur Cordier fournit à part un Memoire
exact des perfonnes qui ont été gueries , & de
la maniere avec laquelle on doit fe fervir des
Calotes & Peaux Divines , qui fe confervent
l'espace de vingt années , fans rien perdre de
leurs vertus ni qualitez . On en fait des envois
dans les Provinces & Pays étrangers .
Le Sieur Cordier a établi des Bureaux où l'on
diftribue les mêmes Peaux divines : Sçavoir ,
A Lyon , chez le Sieur Thomas Marchand ,
grande rue Merciere. A Rouen , chez le Sieur
Maugy , rue Grand Pont. A Caën , chez le Sieur
Layé , Marchand Epicier , rue Saint Jean , proche
la Porte Millay . A Saint- Malo , chez le Sicur
Defroziers , Marchand devant la grande Porte.
A Rennes , chez le Sieur de la Vigne Marchand ,
à côté du Palais . ANantes , chez le Sieur Meziers
Marchand , à la Foffe , & A la Rochelle chez
M. Merle , Marchand .
Le Sicur Cordier demeure à Paris chez M. Metas,
Marchand Epicier , au haut de la rue de la
Coutellerie de la Vannerie , vis-à- vis Saint-
Jacques de la Boucherie au premier Appartement.
MERCURE
SEPTEMBRE 1720.
Le prix eft de la piece de 30
fols courante
DE
LYON
1893*
.A PARIS.
Chez GUILLAUME CAVELIER , au Palais.
La Veuve de PIERRE RIBOU , Quay des
Auguftins , à l'Image S. Louis .
Et GUILLAUME CAVELIER , Fils , ruë
S. Jacques , à la Fleur- de- Lys d'Or.
M DCC. X X.
Avec Approbation & Privilege du Roy.
AVIS INTERESSE
L
de l'Auteur du Mercure ,
Au Public
defintereẞé.
Es frais pour l'impreffion du
Mercure , étant au moins triplés
, l'Auteur de ce Livre fe voit
de nouveau dans la neceffité d'en
augmenter le prix. Ainfi , il ne peut
fe difpenfer de le vendre à l'avenir
la pièce de trente fols courante ,
avec promeffe de le diminuer de
mois en mois , jufqu'à ce qu'elle
ſoit deſcenduë à vingt- cinq fols.
L'Adreffe de l'Auteur , eft.
A Monfieur Bu CHET , Cloître
5. Germain l'Auxerrois.
De l'Imprimerie de C. L. THIBOUST
Place de Cambray.
496081 %
LE
NOUVEAU
TABLUE
LYON
DE
MERCURE:
.
VILLE,
DES ROIS ET DES PRINCES
du Sang de France qui ont vû
leurs Petits- Fils & Arriere- Petits-
Fils.
Par Monfieur de Camps , Abbé de Signy.
P
EU de jours après la mort du
Roy Louis XIV. de glorieuſe
memoire , quelques perfonnes de
confideration m'ont demandé
s'il étoit vrai qu'aucun autre de nos Rois
eût vû fes Arriere- petits Fils : Je leur ai
dit que je croyois que Louis le Grand étoit
le premier à qui Dieu eut accordé cette
grace ; neanmoins crainte de n'être pas
affez inftruit , j'y ai fait quelques reflexions
& j'ayreconnu que je ne me fuis pas trompé.
Il y a eu quelques Princes du Sang de
y a gu
A ij
LE MERCURE
France qui ont vu leurs Arriere- petits-
Fils ; c'est ce que l'on peut remarquer par
les obfervations fuivantes.
La premiere comprend d'abord les Rois
de France ; & la feconde , les Princes de
leur Sang qui ont vû leurs petits - Fils &
leurs Arriere- petits- Fils. J'y ai obſervé ,
autant qu'il m'a été poffible , le temps que
ces Monarques ont vêcu , celui de leur
Regne , l'âge des Princes du Sang , & l'année
de leur decès . J'ay placé les Rois de
France les premiers , & j'ay rangé les Princes
du Sang par ordre Chronologique de
leur decès , fans avoir égard s'ils avoient
été Rois ou non . On y obfervera que Louis
le Grand eft le premier des Rois & des
Princes de fon Sang , qui dans un âge
encore affez éloigné du dernier terme de
fa vie , ait eu la confolation de voir fes
Arriere- petits- Fils.
C'est une fuite des benedictions que
Dieu a répandues fur će Monarque , le plus
pieux , le plus fage , & le plus grand de
tous ceux qui ont regné dans le monde
depuis plufieurs ficcles,
DE SEPTEMBRE. S
LEGAL
ROIS DE FRANCE
qui ont vu leurs Petits- Fils.
Lovis I. a vêcu quarante - cinq ans ,
CLOV
& en a regné trente. Il a vû Theodebert
, fils de Thieri fon fils ; & ce même
Theodebert étoit déja grand , comme nous
l'aprenons de Gregoire de Tours , qui dit ;
Habebatjam tunc Thendericusfilium nomine
Theudebertum elegantem atque utilem. *
Clotaire 1. a regné cinquante ans , &
en a yêcu environ foixante. Il a vû les
filles de fon fils Chrame .
Charlemagne a régné quarante- fix ans ,
quatre mois & trois jours , & en a vêcu
foixante douze . Il a vu quatre de fes Petits-
Fils , fçavoir , les trois fils aînez de Louis
le Debonnaire , Lothaire , Pepin , & Bernard
fils de Pepin. Bernard fut marié quelques
mois avant la mort de Charlemagne .
Louis le Debonnaire a regné trentefept
ans , fçavoir , dix ans & demi en
Aquitaine du vivant de fon pere , & vingtfix
ans cinq mois & dix-huit jours fur
toute la Monarchie Il a vêcu foixantequatre
ans. Il a vu les fils & les filles de
fes trois fils aînez ; fçavoir , Louis &
* Greg. Tur. 1. 3. c. I.
A iij
6 LE MERCURE
Lothaire II . fils de Lothaire fon fils ainé ,
Carloman & Louis , fils de Louis le Ger--
manique , & Pepin II , & Bernard , fils de
Pepin I. Roi d'Aquitaine.
Louis le Germanique , Roi de Germanie
, fils de Louis le Debonnaire , a vû
Arnoul fils naturel de Carloman fon fils,
aîné . Il a vû auffi le jeune Prince Louis ,
fils unique legitime de Louis Roy d'Allemagne
, & enfuite de Baviere , fon fecond
fils.
Louis le Germanique a regné vingt-fept
ans depuis la mort de fon pere ,
& en tout
cinquante-trois , & en a vêcu foixante- dix .
Charles le Chauye a vêcu cinquantequatre
ans , & en a regné trente -fept. Il
a vû les deux fils aînez de Louis le Begue
fon fils ; fçavoir , Louis III. & Carloman .
Louis VII.. Roi de France a vû Henri
II. Comte de Champagne , & Henri III.
auffi Comte de Champagne , après la mort
de fon frere . Ils étoient fils de Marie fa
fille aînée , & de Henri le Large , Comte
de Champagne. Il a aufli vû Louis Comte
de Blois , fils d'Alix de France ,fa feconde
fille , & de Thibaud V. Comte de Blois.
Ce Monarque regna quarante- trois ans.
un mois & dix - fept jours , il avoit vêcu
près de foixante- dix ans.
Philippe Augufte a regné quarante -trois:
ans , huit mois & quatorze jours depuis
DE SEPTEMBRE.
la mort de fon père , & a vêcu cinquantefix
ans & onze mois moins huit jours . Il
a vu les quatre fils aînçz de Louis VII
fon fils ; fçavoir , le Prince Philippe , qui
mourut jeune , Saint Louis , Robert Comte
d'Artois , & Alphonie Comte de Poitou
& de Toulouſe.
Saint Louis a vêcu cinquante - cinq ans
& quatre mois , & a regné quarante- trois
ans , neuf mois & dix-huit jours . Il a vi
Philippe le Bel fon petit -fils , ce Prince
étant né en 1268.
Philippe le Bel a vêcu quarante fix ans,
& a été Roi de France vingt-neuf ans ,
un mois & vingt- trois jours. Il a vû les
filles de fes deux fils ainez Louis Hutin
& Philippe le Long ; fçavoir , Jeanne
fille de Louis Hutin , & Jeanne & Manguerite
filles de Philippe le Long.
Philippe de Valois a vêcu cinquantefept
ans , & a regné vingt deux ans cinq
mois & vingt jours . Il a vû Charles V.
fon petit-fils , qui étoit déja dans la treiziéme
année. Il a vû auffi les autres fre
res de cejeune Prince ; fçavoir , Louis Duc
d'Anjou , puis Roi de Sicile , Jean Duct
de Berry , & Philippe Duc de Bourgogne .
Louis XIV. dit le Grand , eft decedé
dans fa foixante dix- feptiéme année . Il a
regné foixante douze ans . Il a vû trois de
Les Petits- Fils ; fçavoir , M. le Duc de
A iiij
8 LE MERCURE
Bourgogne , Philippe V. Roi d'Efpagne ,
& Mr. le Duc de Berri . Il a vû fix Arriere
- Petits- Fils , trois en France , & trois
en Espagne ; & il a eu la confolation de
laiffer à Louis XV. aujourd'hui regnant ,
la plus belle & la plus noble Couronne
qui foit dans le monde : Bonheur que n'ont
eu aucuns des autres Rois de France fes
predeceffeurs.
La naiffance & la' confervation de Louis
X V. eft une fuite des benedictions que
Dieu a répanduës fur ce grand Monarque,
fon Bifayeul , qui a mis toute fa gloire
dans le cours de fon Regne , à faire regner
la pieté & la juftice , à fe rendre le Pere
& le Protecteur des Rois , le foutien le
plus ferme de la veritable Religion , l'amour
& les delices de fes Peuples , la terreur
& en même tems l'admiration de fes
ennemis. On doit regarder la longue
pofterité de ce Monarque , comme un
préfage certain de la perpetuité de la Cou-
- ronne de France & de celle d'Eſpagne fur la
tête de fes defcendans , & de l'agrandiffement
des deux Monarchies .
.
DE SEPTEMBRE.
PRINCES DU SANG DE FRANCE
qui ont vu leurs Petits - Fils.
OBERT de France , Daic de Bour-
Rgogne , Fils de Robert Roi de France ,
a vû les cinq fils de Henri fon fils aîné ;
fçavoir , Hugues & Eudes fucceffivement
Ducs de Bourgogne , Robert Evêque de
Langres , Henri tige des Rois de Portugal ,
& Renaud fon arriere- petit- fils étoit majeur
lors de fa mort , arrivée l'an 1075 .
Alphonfe I. Roi de Portugal , Prince
du Sang de la Branche de Bourgogne ,
ancien , mourut l'an 1185 , âgé de loixante
feize ans , ou felon quelques Auteurs de
quatre-vingts onze , après en avoir regné
foixante trois. Il a vû naître peu avant ſa
mort Alphonfe II. fon petit- fils , fils de
Sanche I. fon fils aîné. Ce Roi Alphonfe
I. étoit fils de Henri de Bourgogne ,
Comte de Portugal , Prince du Sang de
France , mort feptuagenaire.
Robert I. Comte de Dreux , fils du Roi
Louis le Gros , mourut l'onze Octobre
1188. Il a vû les enfans de Robert II.
du nom , Comte de Dreux , fon fils aîné
du troifiéme lit , entre autres Robert III .
Comte de Dreux , Pierre , dit Mauclerc ,
Duc de Bretagne , & Henri de Dreux Ar
chevêque de Reims .
10 LE MERCURE
Sanche I. du nom , Roi de Portugal , fils
d'Alphonfe I. qui, vêcut cinquante - huit
ans , & en regna dix fept , mourut en
1212 , neuf années après la naiffance de
Sanche II. & d'Alphonfe III . fils d'Alphonfe
II. fon fils ainé.
Robert II. du nom , Comte de Dreux ,
fils aîné de Robert I. auffi Comte , deceda
le 28 Decembre 1218. Il a vû Jean I
Comte de Dreux , fils de Robert fon fils
aîné .
Pierre de Dreux , dit Mauclerc , Duc de
Bretagne , Prince du Sang , & fils de Robert
I. Comte de Dreux , mourut dans
un âge avancé l'an 1250 ; il avoit vù fon .
petit- fils Jean II. qui étoit même âgé de
onze ans , & qui étoit fils aîné de Jean T
fils de Pierre de Dreux.
Hugues IV. Duc de Bourgogne , Prince
du Sang , fils d'Eudes III. aufli Duc de
Bourgogne , mort en 1272 , âgé de foixante
ans , a vû les filles de les deux fils
aînez Eudes & Jean , & les fils de queb
ques- uns des premiers enfans de Robert
fon troifiéme fils , & fon fucceffeur au
Duché de Bourgogne , ayant exclus de fa
fucceffion les filles de fes fils aînez .
Charles de France , frere de Saint Louis,
fils de Louis VIII. & Roi de Sicile , Comte
d'Anjou , du Maine & de Provence ,.
mort en 128 , âgé de foixante- fix ans ou
DE SEPTEMBRE. TE
environ , fut pere de Charles II . Roi de
Jerufalem & de Sicile , duquel il a vû
plufieurs enfans , entr'autres Charles I.
Roi d'Hongrie , né dès l'an 1272 , Saint
Louis , dit de Marſeille , Evêque de Touloufe
, & Robert Roi de Jerufalem & de
Sicile .
Jean I. Duc de Bretagne , mort le 8
Octobre 1286 , âgé de foixante- neuf ans ;
il étoit fils aîné de Pierre de Mauclerc ,
& avoit vu fon petit fils , Artus Duc de
Bretagne , âgé de vingt- quatre ans , marić
& ayant un fils qui étoit né au mois de
Mars de la même année , Ce fils étoit Jean-
III. depuis Duc de Bretagne. Ce Duc Jean-
I. eft le feul des Ducs de Bretagne qui ait
vû la troifiéme generation.
Robert II. du nom , Comte d'Artois,,
fils aîné de Robert de France I. du nom ,-*
Comte d'Artois , tué à la bataille de Furnes
le 1 Juillet 1302 , âgé de cinquantetrois
ans , avoit vú mourir dès l'an 1281
le Prince Philippe fon fils aîné , qui laiffoit
cinq enfans ; fçavoir , Robert d'Artois ,
Comte de Beaumont, & quatre filles . Le
predecès du Prince Philippe caufa ce fameux
procès pour le Comté d'Artois ,.
dont les fuites ont été fi funeftes à la
France .
Jean II. Duc de Bretagne , fils de Jeanauffi
Duc de Bretagne , mort de fes
12 LE MERCURE
bleffures le 18 Novembre 1305 , avoit vù
Jean III. fon petit- fils marié il y avoit
neuf ans ; mais fans enfans. Il n'en eut
aucun.
Charles II. du nom , Roi de Sicile ,
&c. Duc d'Anjou , &c. Comte de Provence
, &c. dit le Boiteux , Petit - Fils de
France , & fils de Charles I. Roi de Sicile ,
mourut le 6 May 1309 , âgé de foixanteun
ans. Il vit fon fils Charles Martel Roi
d'Hongrie, & celui- ci étant mort en i301 ;
fon fils Charles II . ou Charobert Roi
d'Hongrie lui fucceda , & fut marié avant
la mort de fon Ayeal .
Ce même Charles II. avoit un troifiéme
fils nommé Robert , qui lui fucceda
aux Royaumes de Jerufalem & de Sicile ,
& qui avant la mort de fon pere eut Charles
Duc de Calabre.
Robert de France , Comte de Clermont
, Sire de Bourbon , & cinquiéme fils
de Saint Louis , mourut en 1307 , étant
fort âgé ; il a vû naître Pierre I. du nom ,
Duc. de Bourbon , Jacques de Bourbon
mort jeune , & Jacques de Bourbon Comte
de la Marche & de Vandôme , fils de
Louis I. Duc de Bourbon fon fils aîné.
Charles Comte de Valois , fils de Philippe
le Hardi , & pere de Philippe de
Valois , a vû naître le Roi Jean fon petitfils
, qui même étoit âgé de fept à huit ans.
DE SEPTEMBRE.
13
Ce même Prince a vû les fils de Jeanne
fa fille , Comteffe de Hainaut , ceux de
Marguerite de Valois , Comteffe de Blois ,
auffi fa fille. Ce Comte mourut le 9 De.
cembre 1325 , âgé de près de foixante
ans.
Louis I. Duc de Bourbon , fils aîné de
Robert de France , Comte de Clermont ,
mort en 1341 , âgé de près de foixante
ans , a vû les enfans de Pierre I. du nom
fon fils ; fçavoir , Louis II . Duc de Bourbon
, Jeanne de Bourbon , femme de Charles
V. Roi de France , & Blanche , femme
dé Pierre le Cruel , Roi de Caftille.
Eudes I V. Duc de Bourgogne , fils de
Robert II , du nom , Duc de Bourgogne
& d'Alix de France , mort en 1349, avoit
vû naître trois ans auparavant Philippe ,
dit du Roure , fon petit-fils, ( il lui fucceda)
qui étoit fiis de Philippe de Bourgogne,
Comte de Bourgogne & d'Artois fon fils.
Philippe de France , dit le Hardi , Duc
de Bourgogne , quatriéme fils de Jean Roi
de France, mort en 1404 , âgé de foixantequatre
ans , a vû Philippe le Bon , fils de
Jean Duc de Bourgogne fon fils aîné , &
l'a vû âgé de huit à neuf ans.
Louis de Bourbon Comte de Vandôme
& de Caftres , fils puîné de Jean Comte.
de la Marche , mourut en 1313 , après
avoir vu François de Bourbon Comte de
14 LE MERCURE
Vandôme , de Converfan , & de Saint Pol ,
& Louis de Bourbon Prince de la Rochefur-
Yon , tige des Ducs de Montpenfier ,
fils de Jean de Bourbon II . du nom ., Comte
de Vandôme fon fils .
Louis II. du nom , Duc de Bourbon , fils
de Pierre 1. Duc de Bourbon , mourut
âgé de foixante - treize ans en 1410 ; il 2
vù Charles I. du nom, Duc de Bourbon ,
Als aîné de Jean I. aufli Duc de Bourbon.
Il avoit été marié trois ans auparavant.
Jean de France Duc de Berri , mort en
1416 , âgé de foixante- feize ans , á vû
Charles d'Artois Comte d'Eu , fils aîné
de Marie de Berri fa fille , & l'a vû âgé
de vingt-trois à vingt- quatre ans , pour le
moins , mais fans enfans . Il a vù auffi ,
Charles I. Duc de Bourbon , fils de la
même Marie & de Jean I. Duc de Bourbon
fon fecond mari.
་
Jean I. du nom , Roi de Portugal , fils
naturel du Roi Dom Pierre , vêcut foixante-
feize ans , en regna quarante- neuf,
quatre mois & neuf jours , & mourut let
14 Août 1433 , uunn aann après la naiſſance
d'Alphonfe V. fils du Prince Edouard fon
fils aîné .
René d'Anjou , dit le Bon , Roi de Naples
, de Sicile , d'Arragon , &c. Duc d'Anjou
, de Lorraine & de Bar , Marquis de
Pont , Comte de Provence & de ForcalDE
SEPTEMBRE. IS
quier , a vêcu foixante & treize ans . Il eft
mort en 1480. Il a vû Marguerite de
Calabre fon Arriere-petite- fille , étant fille
naturelle de Jean Duc de Calabre fon
• petit- fils .
Jean de Bourgogne , Prince du Sang de
France , Duc titulaire de Brabant , &
Comte de Nevers , d'Eu , de Rethel ,
d'Auxerre , &c . mort en 1491 , âgé de
foixante-feize ans , a vû Jean II . du nom,
Duc de Cleves , & Engilbert de Cleves
Comte de Nevers , & c . fils d'Elifabeth
de Bourgogne fa fille aînée ; & il a vù
les enfans de ces mêmes Jean & Engilbert
qui étoient par confequent fes Arrierepetits
- fils .
Louis II. Prince de Condé , mort en
1686 , a vu le Duc de Bourbon fon petit
fils , & l'a vu marié , l'ayant été le 24.
Juillet de l'année 1684 .
Feu Monfieur , Frere unique de Sa
Majefté , a vu les petites filles de Madame
Royale fa feconde fille , & a vû l'aînée
mariée à feu Mr le Duc de Bourgogne.
Il a vu de plus les filles de Monfieur le
Duc d'Orleans , & les enfans de Madame
de Lorraine fa fille.
Henri Jules de Bourbon Prince de
Condé , a vû les fils & les filles du Duc
de Bourbon fon fils aîné , de la Princeffe
de Conti , & de la Ducheffe du Maine
Les filles,
16 LE MERCURETout
ce qu'il y a de bons François .
doivent demander à Dieu que Monfeigneur
le Duc d'Orleans Regent du Royaume ,
ait la joie de voir ûne auffi longue pofterité
que celle de Lauis le Grand .
CHANDRAAHSEN
Roman Indien.
Traduit mot à mot du Talanga on Badaga ,
Langue Indienne.
Utrefois regnoit dans le Nort
le celebre Raja Segaren , pere
de Chandraahſen , ce Prince prit
en main le gouvernement de
fes Etats le feptième jour de la Lune ; mais
comme ce jour eft finiftre , deflors toutes
fes affaires commencerent d'aller en décadence
; la maladie emporta tous fes chevaux
fes Elephans s'imaginant voir en
dormant un lion qui les devoroit , moururent
tous de frayeur : une espece de vertige
fit perir toutes fes vaches : pendant
qu'il étoit hors de fon Palais , les voleurs y
entrerent de nuit , & enleverent fes pierreries
& tous les trefors .
Le Roy Dontchaketon fut bien- tôt averti
par
DE SEPTEMBRE. 17
}
par les efpions que ce pauvre Prince étoit
fans force & fans fecours : à cette nouvelle
il affembla auffi tôt toutes fes troupes , &
vint inveſtir Rajaguini capitale du Royau
me . Au bruit de fa marche Segaren le voyant fe
hors d'état de faire tête à fon ennemy , fe
dépouilla de fes habits Royaux , pour fe
revêtir de ceux de penitent. En cet état il
fortit de la capitale , fans être connu de
fa
qui que ce fut , & il donna ordre à toutes
fes femmes de le futivre de près . La frayeur
les empêcha de fonger au petit Chandraahfen
qu'elles laifferent dans la ville : comme
elles fe furent enfoncées bien avant
dans une foreft voifine , où le Roi déguifé
en penitent s'étoit retiré , elles le rencontrerent
enfin.
Auffi-tôt qu'il les apperçut : Ou eft mon
fils , dit- il ? Seigneur , l'épouvente nous a
fait oublier de le prendre avec nous . A cette
trifte nouvelle , ce pauvre pere fut accablé
d'une douleur fi amere , qu'il ne put s'empêcher
de faire de fanglants reproches à
les femmes , qui étoient elles- mêmes plongées
dans le chagrin de leur peu d'attention
pour le falur du jeune Prince . Alors
Segaren prit la refolution d'aller trouver
des Religieux Brames , & de bâtir dans
ces bois une petite maifon , pour paffer le
refte de les jours dans la folitude.
Cependant Deutchaketou prit la capitale,
B
48 LE MERCURE
1
y entra , la pilla , & s'empara de tourle
Royaume , dont il fut en peu de
tems paisible poffeffeur. Un jour ce Prince
tenant un grand confeil de fes. parens
de fes amis , de fes Miniftres , de plufieurs
Rois & Brames , le petit Chandraahfen
entra dans la Salle à pas chancelans , traverfa
la foule , & vint s'affeoir auprès du
Roy. Le Brame Sebanam qui en étoit fort.
proche , remarqua fur le vifage de cet enfant
des traits , & un air de grandeur, qui
lui firent connoître que c'étoit le fils du
Raja fugitif. Voilà , dit- il , à l'oreille de
quelqu'un , le legitime Souverain . Ce bruit
fourd fe répandit dans l'affemblée , & vinc:
jufqu'aux oreilles du Roy ; mais il ne fit.
pas femblant de l'entendre. Profitant ce◄
pendant de ce qui s'étoit dit , il congedia
peu à peu tout fon Confeil , pour prendre
les. moyens de fe defaire de Chandraabſen.
Il fit donc venir quatre Pareas , & leur
ordonna de conduire le jeune Prince fecre
tement dans la foreft , de le tuer , de lui
couper le gros doigt du pied , & de le lui
apporter , comme une marque de l'execu
tion de fes ordres . Pour les y engager da
vantage , il leur promit de leur donner
quatre villages . Ceux cy répondirent qu'ils
étoient prefts à tout , & fur le champ ils
conduifirent à l'infçeu de qui que ce fût le
jeune enfant dans le bois.
DE SEPTEMBRE. 19
Comme ils étoient près de le maffaeter
; Pourquoi , dit le plus confiderable
des quatre , faut-il que nous trempions nos
mains dans le fang innocent ? Faut - il que
nous foyons les Miniftres d'une paflion
aveugle & cruelle ? que Dontchaketon nous .
donne quatre villages , ou ne les donne pas,,
notre condition fera- t'elle meilleure ou pire
? ferons- nous par là lavez du crime dont
nous allons nous foüiller ? A ce difcours.
les autres touchez de compaffion , furent
de même avis : ainfi , pour faire croire au
Roy qu'ils avoient obci , ils fe contenterent
de couper à cet enfant le gros doigt du
pied ; ils tuerent un animal , & tremperent
leurs épées dans fon fang, & en cet état ,
inrent trouver le Roy , lui prefenterent
le doigt de ce jeune Prince , & leurs épées
enfanglantées , affurant qu'ils avoient tué
le fils du Raja. Pendant que le Roy goutoit
dans fon Palais le fruit de fon crime,
le jeune Prince ne pouvant fupporter la
douleur que lui caufoit fa playe , faifoit
retentir le bois de fes cris , & fe rouloit
dans fon fang. En ce tems- là cette foreft:
appartenoit à un Seigneur nommé Dandi ,,
qui en payoit tribut au nouveau Roy de:
Rajaguini. Ce Seigneur vint en Pallanquin
avec un grand cortege de chevaux & de
foldats fe promener dans ce bois : dès qu'il
cut penetré un peu loin , il entendit les
Bij
$20 LE MERCURE
cris d'un enfant : C'eft une choſe bien extraordinaire
, dit it , à fon Officier , qu'un
enfant fe trouve au milieu de cette foreft : ·
pourquoi pleure - t'il ? il faut voir ce qui
en eft ; il avance donc avec fes gardes vers
l'endroit d'où venoient les cris ; il trouve
un petit enfant qui nageoit dans ſon ſang ;
il le regarde avec attention & avec des yeux
de compaffion ; il le reconnoît à la couleur
& aux traits de fon vifage . Penetié
de joye d'avoir trouvé le fils d'un Raja fi
illuftre : Quoi , dit- il en lui- même , je n'ay
point d'enfant de dix femmes que j'ay épou
fées ; fans doute que le Dieu Vichnon
m'envoye celui- ci pour me récompenfer
des oeuvres de pieté que j'ay faires en fon
honneur. Auffi - tôt il fait effuyer le fang
dont ce petit innocent étoit tout couvert ,
fait panfer fa playe , le fait mettre dans
fon Pallanquin , l'emmene dans fon Palais ,
& le remet entre les mains de fes femmes
pour l'élever foigneufement. Ses femmes
épriſes de la beauté du petit Prince , l'éleverent
avec une affection & ime tendreffe
extraordinaire ; elles lui mirent aux oreilles
des pendans magnifiques , aux mains & aux
pieds des braffelers fuperbes ; tous les jours
elles lui lavoient le corps quatre fois , &
le frottoient de poudres odoriferentes .
Tous ceux qui voyoient le nouveau fils de
Dandi , en étoient charmez ; car il avoit
DE . SEPTEMBRE. 21
tin naturel admirable , l'efprit vif , le corps
bien formé & propre à tous les exercices ;
enfin toute fa perfonne répondoit à fa haute
naiffance ; auffi en peu de temps il appric
à tirer de l'arc en perfection , & fit de
grands progrès dans les fciences fous la
conduite des plus fameux Brames qu'il eut
pour Maîtres.
"
Dès qu'il fut un peu grand , il s'affocia
à des jeunes gens de ton âge & de ſa
qualité , & tout fon plaifir étoit d'aller
avec eux à la chaffe . Après avoir paffé
quelques années dans cet exercice , il affembla
un corps de Troupes , & s'en alla dans
des païs éloignez pour éprouver fon courage.
Là , il fe fit par les hauts faits une
réputation qui effaçoit déja celle des plus
celebres guerriers , car il vainquit plufieurs
Rois fort puiffants , & s'en revint chargé
de gloire & de butin. Il amena une quan
tité prodigieufe de chevaux , d'élephans ,
de joyaux d'or & d'argent : il prefenta
le tout à fon pere Dandi , & le pere voyant
un fils fi accompli , fi brave , & qu'il ſour
haitoit de revoir avec paffion , ne put retenir
fes larmes en Fembraffant. Je ne fçay ,
fui dit-il , qui de nous deux eft le plus
heureux ? ou moy , d'avoir un fils qui me
rend le plus glorieux & le plus fortuné
de tous les peres ; ou vous , d'avoir
un pere qui vous aime plus que lui-même,
2*2* EE MERCURE
& qui vous a fourni les occafions d'acquerir
plus de gloire que tous les guerriers
enfemble n'en ont acquis ? Si je me fuisfait
quelque reputation , repartit le Prince,
ce n'est que parce que vous avez prodigué
vos biens pour moy ; ce n'eft que parce
que j'ay fuivi avec docilité vos confeils ;
je tiens tout de vous , & je me fais gloire
de tenir tout de vous . Après avoir paffé
quelques jours en divertiffements de toutes
efpeces , Chandraahſen ennemi du repos ,
forma au milieu de la campagne un camp
pour y loger fes Troupes & fon butin ';
mais le camp croiffoit fi fort de jour en
jour , qu'il reffembla bien- tôt à une grande
Ville ; car il y fit bâtir des Palais fuper
bes & quantité de maifons : les Brames ,
les Rajas , les Marchands & les Choutres
y abordoient de toutes parts , attirez par
la réputation , par la magnificence & par les
liberalitez dų Prince . Ainfi cette Ville fut
en peu de tems remplie d'habitans , de
foldats , de chevaux , d'élephans & de Pal
lanquins. Dandi voyant fon fils fi puiffant
ne fe preffoit pas de payer tribut au Roi de
Rajaguini. C'est pourquoi ce Prince fit ve
nir fon premier Miniftre , & lui dit : Dandi
en eft venu à ce point de fierté , qu'il ne
veut plus fe reconnoiſtre mon tributaire ;
il refufe depuis long- tems de me rendre
hommage ; allez vous -même l'y.contrain
DE SEPTEMBRE. .
23.
dre par la force ; pillez fon pays , & me
l'amenez mort ou vif. Le Miniitre auffitôt
affemble cent Elephans , mille chevaux ,
& dix mille hommes d'infanterie : avec
ce corps d'armée, il s'avance juſques fur les
terres de Dandi ; de là il vint lui-même
avec un Sauf-conduit trouver Dandi , &
lui intima l'ordre de fon Maistre . Dandi
auffitôt fit appeller fon fils, & lui dit que le
premier Miniftre du Roi de Rajaguini , à
la tête d'une armée , venoit pour l'obliger
à payer le tribut ordinaire. Quoi ! répondit
Chandraabfen , j'ai fait tributaires tant
de puiffans Rois , & nous ferons tributaires.
nous-mêmes ? Dites à votre Maiftre de ma
part , ajouta t'il un peu échauffé , que je
ne fçai ce que c'eft que de payer tribut,
& que c'eft à moi à qui il est dû.Le General
furpris d'une réponſe fi ficre , ne laiffa pas
de faire de nouvelles inftances ; pour toute
réponſe , Chandraahfen tire fon fabre , &
le menace de lui abattre la tête. Il n'eft pas.
encore tems pour moi de mourir , dit ent
lui-même ce Heros ; il faut porter cette.
réponse au Roy. Là - deffus il fe retira
à Rajaguini , & dit à fon Maitre que
le fils de Dandi faifoit difficulté de payer
le tribut qu'il devoit ; qu'on ne pouvait l'y
contraindre à force ouverte , parce qu'il.
paroiffoit extrêmement brave & fort déterminé
: outre qu'il avoit dans fon Camp
24 LE MERCURE
une armée fuperieure à la fenne. Ah quoi !
dit le Roy , ce petit Souverain , ce Paleakrem
n'avoit point d'enfant ; d'où lui eft
venu celui ci , & fi fubitement ? Cela me
paroît fort étrange ; il faut que j'aille en
perfonne le combattre ; qu'on mette ordre
à tout.
Le Roy avoir un fils & une fille ; celuici
avoit nom Vichao , celle- ci Vichaa . II
laffe le gouvernement du Royaume à Vichao
, & vient avec une puiffante armée
camper proche de Chandraafen ; il examine
la fituation & l'ordre de fon Camp ; il s'informe
de les forces , & il apprit qu'elles
étoient égales aux fiennes en nombre , mais
fort fuperieures en bravoure , & bien difciplinées
. Là- deffus , il affemble fon Conſeil
de guerre pour fçavoir ce qu'il y avoit à faire.
Tous fes Officiers répondirent unanimement
que tout étoit perdu , fi on en venoit
à une bataille ; qu'on fçavoit par des avis
fecrets qu'un autre corps confiderable de
troupes ennemies avançoit pour prendre
P'armée en flanc ; qu'il valoit beaucoup
mieux diffimuler pour un tems , & traiter
Dandi en ami. Le Roy fuivit cet avis , &
lui envoya fon premier Officier pour le
prier de le venir voir en toute feureté.
Chandraahfen voyant que fon pere vouloit
abfolument y aller , voulut lui- même
être de la partie ; il confentit qu'on lui
donnât
DE SEPTEMBRE.. 25
donnât comme prefent , & non comme
tribut , quelques joyaux , des chevaux ,
des élephans , des tigres , des ours , &
quelques autres animaux curieux , avec
des parfums & des rafraîchiffemens. Il prit
des habits magnifiques , tout couverts de
pierreries , & ils allerent enſemble bien
eſcortez , & avec un train (uperbe , faluer
Doutchaketou. Le Roy voyant un homme
fi fuperbement vêtu , demanda à Dandi
qui il étoit à quoi Dandi répondit que
c'étoit fon fils. Mais , réprit le Roy , vous
n'avez jamais eu d'enfant ; d'où vous eft
donc venu celui - ci ? Il y a quelques années
, répondit Dandi , qu'allant à la chaffe
dans la Foreft de Rajaguini , j'entendis
les cris d'un enfant ; je m'avançai pour
voir ce que c'étoit , & je le trouvai couvert
de fang qui couloit de fon pied , dont
on lui avoit coupé l'orteil : parce que je
n'ai point eu d'enfant , dis je alors , le Dieu
Vichnon me donne celui - ci ; je le pris dans
mon Palanquin ; je l'amenai dans mon Palais
, & je l'ai fait élever avec beaucoup
de foin dans la fuite. Comme il eft fort
brave , il a fait la guerre à de puiffans
Rois , les a vaincus , & il eft venu chargé
de leurs dépouilles . Dontchaketon étrangement
furpris de toutes ces avantures ,
» Voilà cet enfant que j'avois ordonné
» qu'on fiſt mourir ; ces quatre Pareas
C
dit :
2.6 -LE
MERCURE
و ر
m'ont trompé , m'affurant qu'ils l'avoient
tué ; ils lui ont feulement coupé le gros
» doigt du pied ; c'eft lui-même certainement
; fes grands exploits font affez connoître
fa bravoure : puifqu'il a fubjugué
tant de Rois , il pourroit bien troubler
smatranquillité, fi je l'irritois : il faut trou-
» ver moyen de s'en defaire par adreffe ; &
»pour éloigner tout foupçon , il faut lui
faire des careffes . Raja , lui dit le Roy ,
votre reputation s'eft répandue par tout ;
votre air & vos manieres furpaffent votre
» reputation ; il faut que je vous donne ma
fille en mariage ; je m'en vas écrire pour
cela une Lettre à mon fils , que vous lui
>> rendrez vous -même , dans laquelle je lui
›› marquerai mes volontez . Chandraahſen
confentit à tout , & remercia ce Prince . Il
écrivit donc une lettre à fon fils , dont voici
le contenu : Vous donnerez du poiſon à qui
vous prefentera ma lettre. Il la figna de fa
main , & la remit à Chandraahſen , en le
priant de partir inceffamment. Il alla fur le
champ prendre congé de Dandi , & monta
un cheval extrêmement vîte , pour être
plûtôt rendu à Rajaguini ; mais quand il
fut proche de la Ville , il fe trouva ſi fatigué
, qu'il fût contraint de mettre pied à
terre , pour le repofer dans un jardin de
⚫ fleurs fort agreable qui étoit fur le chemin..
Apeine fut-il étendu fur le gazon , que la
•
DE SEPTEMBRE. 27
laffitude & les charmes du lieu l'inviterent
au fommeil. Pendant que Chandraahſen
goûtoit les douceurs d'un profond fommeil
, la Princeffe Vichaa vint avec les filles
d'honneur & quelques- unes de les amies
dans le même jardin , pour le baigner.
Après avoir pris le bain , elle s'écarta de fa
fuite , pour cueillir elle- même des fleurs.
Au milieu de ces parterres elle apperçue
Chandraahfen qui dormoit ; elle le regarda
attentivement , & à mesure qu'elle l'envifageoit
, elle fentit naître dans fon coeur
des fentimens de tendreffe pour lui ; elle
apperçut auffi la lettre qui étoit attachée à
fon habit ; elle eut la curiofité de la tirer, de
la decacheter & de la lire : Mon pere , ditelle
toute effrayée , eft-il affez cruel pour
faire mourir par des voyes fi indignes un
homme de ce merite ? Et il fe fert de mon
frerepour un crime fi noir ? Cela ne fera pas.
Pour cet effet , elle ne fit que tirer un trait
au dernier jambage de l'M , qui eſt à la fin
de Vicham*, & par ce petit artifice elle y
fubftitua fon propre nom , Poifonnée. Enfuite
elle referma la lettre , & la remit dans
le même endroit d'où elle l'avoit tirée.
Aprés quoi elle vint rejoindre auffitôt ſes
fuivantes , avec lesquelles étant retournée
à la Ville , elle fe renfe ma dans fon appar
* Vicham, qui fignifie poifon , en tirant une
queue à l'm, v. g. Vicham, fait Poisonnée.
Cij
28 LE MERCURE
tement , pour reflechir fur l'avanture qui
venoit de lui arriver, & fur les fuites qu'elle
pouvoit avoir.
Cependant Chandraahlen , après avoir
repolé quelque tems , s'éveille , fe leve &
fe lave le viſage , monte à Cheval , & fe
rend à Rajaguiny. Il va droit au Palais
& demande une audiance ; on l'introduit
dans la Salle du Confeil où les Grands ,
les parens & les amis du Prince Regent
étoient affemblez . Chandraahfen falue le
Regent en lui preſentant la Lettre du Roy.
Il ne l'eut pas plutôt lùe , qu'ayant confideré
attentivement Chandraahfen ; Mon
pere, dit -il , a fait là une tres - bonne affaire ,
il ne pouvoit trouver à Vicham, * un mari
qui lui convint mieux ; ce Raja eſt beau
comme un aftre , & fort brave : puifque·
mon pere fouhaite ce mariage , il faut en
preffer la conclufion . Sur le champ il fait
appeller les Braines , pour fçavoir d'eux
quel feroit le moment favorable . Ceux- ci
ayant oblervé quels étoient les noms des
étoiles qui dominoient ce jour- là , déterminerent
que trois heures aprés le foleil couché
c'étoit un tems favorable au mariage.
Vichayo ordonne qu'on faffe dans toute la
Ville les préparatifs neceffaires pour rendre
cette ceremonie plus éclattante ; qu'on
tende toutes les rues de tapifferies ; qu'on
* Poiionnée.
}
DE SEPTEMBRE. 1,
orne les murs de feftons de verdure , qu'on
difpofe par tout des parafols , & qu'on
n'oublie rien pour celebrer cette fefte .
Lorfque tout fut difpofé dans la Ville , on
habilla Chandraahſen & Vichaya de riches
étoffes d'or & de foye , on le couvrit de
joyaux , de colliers , de parfums , & on les
maria au fon de toutes fortes d'inftrumens ,
accompagnez des benedictions des Brames ,
qui ne les épargnerent pas. On les monta
enfuite l'un & l'autre fur les deux plus
beaux Elephans qu'on eût jamais vûs . Dans
cet appareil on leur fit faire le tour de la
Ville , qui retentiffoit des acclamations des
peuples , & qui paroiffoit embratée par
la
quantité prodigieufe des feux d'artifices
dont toutes les places étoient remplies. La
journée fe paffa en feftins & en concerts ;
la nuit fuivante fut encore plus magnifique
que la premiere.
Pendant que tout ceci fe paffoit à Rajaguini
, fans que Dontchaketon en fut informé,
à caufe de la diftance des lieux , le
Roy ne doutant point que fon fils n'eût
fait mourir par le poifon Chandraahfen ,
tomba tout à coup fur Dandi , qui ne
s'y attendoit pas , le furprend , le fait arrêter
avec toutes les femmes , le charge de
fers , pille fa Ville , & fe met en marche
pour revenir à Rajaguiny. Mais dés qu'il
fut proche de la Ville , il vit l'air tout
Cij
30 LE MERCURE
brillant de fufées volantes , & entendit les
échos des montagnes voifines qui portoient
aux forêts éloignées le bruit des inftrumens.
Que veut dire cette nouveauté , dit le Roy
furpris d'un fpectacle fi extraordinaire ? De
mauvais préſages augmenterent encore
fon étonnement , fa crainte , & fes foupçons
; car ce jour- là , un Serpent ſe prefenta
à lui ; un Chien maron * cria de
jour , & il parut en l'air des Etoiles en➡
flammées. Tout cela joint enſemble , agita
étrangement fon efprit , portant fes foup
çons tantôt fur une chofe , tantôt fur une
autre , comme la crainte & le danger augmentent
à mesure qu'un vaiffeau pouffé
par un vent violent , approche d'un Rocher
; ainfi , plus le Roy s'approchoit
de la Ville , plus la défiance agitoit fon
efprit . Cependant , comme il n'avoit com
muniqué à qui que ce foit de fa Cour le
fujet de fes , inquietudes , il diffimula le
trouble de fon coeur , & entra dans la Ville
penfif & rêveur.
›
Il appelle le Capitaine de Garde , & lai
demande ce que fignifioit cette feste. Seit
gneur , vous avés donné la Princeffe votre
Fille au Fils de ce Raja que vous avés
envoyé ; on les a mariés , & on les montre
Efpeces de Renards qui crient la nuit pour
s'affembler les uns les autres , & qui mangend
les charognes .
DE SEPTEMBRE. 3r
au peuple. Cette réponſe fut un coup de
foudre poyr le Roy qui en demeura dé
concerté & interdit ; mais les tenebres derobérent
aux yeux de ceux qui l'accom
pagnoient , la ſurpriſe violente dans laquelle
cette nouvelle l'avoit jetté.
Chandraahfen & Vichaya , furent bientôt
avertis de l'arrivée du Roy ; ils allerent
au-devant de lui , & le faluérent.
Le Roy , fans prefque faire attention à leurs
civilités , alla fe renfermer dans fon Palais
fans leur répondre. A peine fe vit- il feul
qu'il fait venir fon fils. Que t'ai -je écrit,
lui dit- il en colere ? Sont-ce là les ordres
que je t'ay donnés ? J'ay execuré , Seigneur,
ce que contient votre Lettre , répond Vi
chayo , en la lui prefentant. Le Roy la lit,
reconnoit fon écriture & fon feing : quel
prodige , s'écria - t'il tout effrayé ! que
vois- je ? agité & confus , il congedie fon
fils , pour penfer plus à loifir aux moyens
de fe défaire fecretement de Chandraakſen.
Après y avoir mûrement refléchi , il le fait
appeller , & lui dit avec un air affez ouvert
, mon Gendre , il y a une coutume
établie dans mon Palais , c'est que quiconque
fe marie , doit faire un facrifice à
la Déeffe Maia , dont le Temple eft hors
de la Ville ; ainfi , il faut que vous preniés
des fleurs & des habits convenables
aller facrifier à cette Déeffe ; mais il pour
C iiij
32
LE MERCURE
faut être feul
fait à ce devoir , vous reviendrés au Palais
; Chandraahfen fe mit en état d'obéir
au Roy. Pendant que dans un appartement
different , il prepare à la hâte toutes les
chofes neceffaires pour le Sacrifice , Donchaketout
fait venir en fecret les quatre
Pareas & leur dit d'un ton fevere ne
vous avois je pas ordonné de tuer le fils
de ce Raja ? Au lieu de m'obéir Vous
lui avez feulement coupé le gros doigt du
pied , & vous l'avés laiffé dans le bois 5
mais je vous pardonne cette infidelité , à
condition que vous executerés exactement
les ordres que je vais vous donner.
dès que vous aurés fatis-
>
,
›
Ce même Chandraahfen va bien - tôt
aller feul dans le Temple de Maia , & il
porte avec lui tout ce qui convient pour
faire un facrifice à cetteDéeffe. Il faut le prévenir
, avant qu'il s'y rende. Vous vous
cacherés derriere la porte du Temple , &
dès qu'il fera entré, vous le facrifierez vousmême
, en lui ôtant la vie. Au refte , je
veux être obéi , ou votre tête m'en répondra.
La crainte de la mort les déter--
mina fur le champ à executer les ordres
du Roy. Ils partent , & vont fe pofter
derriere une des portes du Temple. Pendant
ce temps - là , les femmes de la Princeffe
la paroient magnifiquement pour la
conduire dans l'appartement où elle devoit
DE SEPTEMBRE. 33
coucher. Lorqu'elles y eurent donné tous
leurs foins , elles avertirent Vichayo de faire
conduire Chandraahfen dans le même appartement
où la Princeffe l'attendoit. Comme
il ne fe trouvoit point , Vichayo impatient
parcourt tout le Palais ; & après bien
des recherches il le rencontre comme il
fortoit du Palais : furpris de l'équipage dans
lequel il le voyoit, que fignifie tout cecy,mon
cher Chandraabfen :mon beau pere, répondit
Chandraahfen , m'a ordonné d'aller faire un
facrifice à la Déeffe Maia, j'y vais ; laiffés tout
cet équipage , répondit Vichayo , je prends
ce foin fur moy; & l'excufe qu'il faudra faire
au Roy pour vous , je m'en charge , &
je la ferai en votre intention ; ne vous
embaraffez de rien , allés feulement trouver
votre époule. Vichayo prend dans
l'inftant les habits , les fleurs , & s'en va
feul au Temple ; mais à peine eût- il mis
le pied fur le feuil de la porte ; que les
affaffins , fans l'examiner , le percerent de
coups de poignards , & l'étendirent mort
fur la place. Pendant tout cecy , Chan
draahlen tout brillant de pierreries
& orné de fleurs s'étoit renfermé
avec fa femme. Cependant les quatre
Pareas reviennent au Palais , & font
rapport au Roy de leur commiflion , en
l'affurant qu'ils avoient tué Chandraahſen.
A cette nouvelle , le Roy fait appeller fa
›
34 LE MERCURE
fille pour la confoler ; mais elle lui fit dire
qu'elle étoit avec fon mary , & qu'elle
ne pouvoit pas quitter. Le Roy étrangement
furpris de cette réponſe fait monter
les quatre Pareas ; que veut dire tout
cecy ? Chandraahfen eft dans le Palais ;
Seigneur , nous l'avons certainement tué,
nos poignards font encore teints de fon
fang. Sur cela , le Roy fit appeller Vichayo ,
les Officiers le cherchent par tout le Palais
, mais inutilement . Le Roy beaucoup
plus en peine qu'auparavant , prend avec
lui les quatre Pareas , & fe tranfporte avec
eux au Temple de la Déeffe , pour verifier
la chofe par fes yeux ; mais qu'y vit it ?
le premier objet qui le frappe , fur le corps
de Vichayo , étendu mort fur la place , &
baigné dans fon fang ; à ce funefte fpectacle
il fut faifi d'une fi grande frayeur ,
qu'il tomba évanoui , & fa chûte fut fi funefte
, que donnant de la tête contre une
marche de pierre , il expira peu de tems
après devant la ftatuë de la Déeffe . Cette
nouvelle fe répand bien- tôt dans le Palais ;
au premier bruit Chandraahfen fort & court
au Temple l'épée à la main , il y voit ent
entrant fon beau pere , & fon beau- frere
nageans dans leur fang & couverts de
bleffures ; après avoir deploré leur trifte
deftinée & s'être abandonné à la douleur
la plus vive , il adreffe fes prieres à la
Déeffe : il la conjure avec larmes ou de
>
>
DE SEPTEMBRE.
35
>
lui donner la mort , ou de rendre la vie
à ceux qui lui étoient fi chers ; mais la
Déeffe fourde à fa demande , fut impi-
Loyable . Picqué alors de n'avoir pas été
exaucé , & plus encore du filence de cette
cruelle Déeffe , il forme le deffein de brifer
cette ftatue , & de fe tuer lui-même
après. Plein de defefpoir , il change fes
prieres en infulte ; Je vois bien que tu
n'es qu'une femme infenfible & barbare
pour obtenir quelque chofe de toy , il faut
que je t'abatte la tête : en prononçant ces
paroles il leve le fabre , alors Maïa touchée
de compaffion , & du courage de-
Chandraahfen lui arrête le bras , & lui dit ,
Prince , ton beau pere eft un fcelerat qui
a mis tout en ufage pour te faire mourir
par les voyes les plus infames , pendant
que tu le traitois avec tout le refpect ima
ginable , & qu'ignorant fes indignes pratiques
, tu t'abandonnois à lui avec une entiere
confiance ; il porte maintenant la
peine duc à fes crimes. Gouverne en paix
& en profperité un Royaume qui t'appartient
legitimement.
Mais repartit , Chandraahfen , que dirat'on
de moy dans le monde , puifqu'on ne
fçait point comment les chofes fe font paffees.
Ainfi , afin que ma reputation n'en
fouffre pas , & que je puiffe vivre dans la
meilleure partie de moy-même , il faut ,
36
LE
MERCURE
s'il vous plaît , puiffante Déeffe , que vous
reffufcitiés le pere & le fils , autrement
cette même épée va prevenir l'effet de la
douleur , car je ne sçaurois , & je ne veux
point furvivre à deux perfonnes qui doivent
m'être fi cheres. La Déeffe fenfible
à fes prieres , fe laiffa fléchir , & voulut
bien les lui rendre tous deux pleins de vie.
Chandraabfen , après avoir rendu graces à
Maia , eut la fatisfaction de ramener dans
la Ville fon beau- pere & fon beau - frere ;
dès qu'ils furent arrivés au Palais , le Roy
ayant declaré à fon gendre toutes fes perfidies
, il lui remit entre les mains fes
Etats , ne prit avec lui que fes femmes ,
& forma le deffein de fe retirer dans une
forêt , pour y paffer le refte de fes jours
dans l'oubli des hommes , & dans la pe
nitence.
Le premier foin du nouveau Roy fut
d'envoyer fur le champ tirer de priſon
Dandi & les femmes ; il les confole fur
leurs malheurs paffés , & les renvoye dans
leurs Etats , comblés de prefens & d'hon--
neurs ; enfuite il fit venir auprès de lui le
Raja Sagaron avec fes femmes , & leur
fournit de quoy vivre , conformément à
leur naiffance.
e3439
*
DE SEPTEMBRE. 37
LA RELIGION.
ODE
A MADAME
LOUISE - ADELAIDE
D'ORLEANS,
ABBESSE DE CHELLES.
Par M. ASSELIN , Chanoine de l'Eglife
Metropolitaine de Tous.
Tol
01 , qui tires ton origine
Du Ciel , ton immortel fejour ,
Defcends , Religion divine ;
Du Vrai viens m'inspirer l'amour.
Viens m'échauffer , remplis ma veine
De cette force fouveraine
Sous qui ploya tout l'Univers :
Et portant le jour dans mon ame ,
Daigne y lancer des traits de flame ,
Qui rejailliffent fur mes Vers.
38 MERCURE LE
Déja , comme un de tes Eléves ,
Pour jouir de la Verité ,
D'un vol rapide tu m'enleves
Au fein de la Divinité :
Parmi fes clartés éternelles ,
Si j'ofe à l'ombre de fes ailes
Tenter l'aspect d'un Dieu fi grand ,
Frappé de fa Majesté fainte ,
Mon coeur fe perd , faifi de crainte ,
Dans les abimes du neant.
L'Immenfité fait fon Royaumes
Et tous les êtres réunis
Sont un imperceptible atôme
Dans des efpaces infinis.
Tout est foumis à sa puiſſance :
L'homme feul par l'indépendance
Veut s'égaler au Createur.
Cieux , fuyez ; que la Terre zremble :
Que tous les Elemens ensemble
Vengent les droits de leur Auteur.
· Dieu Tout-puiſſant , dont la juftice
Eft égale à la fainteté ,
Par quel auguste facrifice
S'appaifera ta Majesté ?
Du fein de ta gloire adorable'
Defcendu pour l'homme coupable
Ton propre Fils s'aſſujettit,
DE SEPTEMBRE.
39.
Dans un corps formé de la terre
Un Etre immense se refferre ;
Et l'Eternel s'anéantit.
Grand Dieu , par un fi digne hommage
Tes droits fouverains font remplis ;
Et tous les traits de ton image
Dans l'homme enfin font rétablis.
A t'aimer tu le follicites :
Tu lui tiens compte des merites
Dont ta grace la revêtu :
Les dons qu'elle lui communique
Te font un Trône magnifique
D'un coeur paré de la vertu.
Rempli d'un objet qui m'enflame
Seigneur , quel divin mouvement
De l'excellence de mon ame
Fait naître en moi le fentiment ?
Cette ame à Toi toute livrée
Doit à jamais être enivrée
Du torrent de ta volupté ,
Vivre abîmée en ton eſſence ,
Et contemplant ta gloire immenſe
Partager ta felicité.
Infenfés , dont l'orgueil infulte
A ces fublimes veritez ,
Qui blafphemex contre le culte
40
LE MERCURE
Du Dieu par qui vous existez.
Plongés dans une nuit funefte ,
Des biens purs , du bonheur celefte
Vous n'avez point connu le prix .
Diffipez les ombres du vice ,
Et du Soleil de la justice
Le jour luira fur vos efprits.
Quelle est la main qui dans leur courſe
Retint des flots tumultueux ,
Et du Jourdain jusqu'à fa fource
Fit le reflux impetueux ?
Sous cette main toute puiſſante
Notre coeur , qu'entraînait fa pente ,
Sent vers le Ciel un faint retour :
Et cherchant fa fource fuprême ,
Il va fe perdre dans Dieu même ,
Principe & fin de fon amour.
Ainfi l'éprouve ADELAIDE :
Ses yeux par la grace éclairés
Dans fes grandeurs ont vû le vuide
Des biens par le monde adorés.
Talent , efprit , delicateſſe ,
Doux attraits , brillante jeuneſſe ,
Rang auguste , éclat enchanteur ,
Vous êtes pour fon coeur fublime
Les fleurs qui parent la victime
Qu'un faint zéle offre au Createur.
Fuyant
DE SEPTEMBRE. 41
Fuyant le dangereux commerce
D'un monde vain qui nous féduit ,
Dans les deferts elle converſe
Avec le Dieu qui l'y conduit.
Unie à l'objet qu'elle adore ,
L'amour qui pour lui la devore
Sans ceffe allume fes foupirs ,
Et par de vives étincelles
Jufques aux voutes éternelles
Porte le feu de fes defirs.
O vous , en qui la grace immole
Tant de grandeurs & tant d'attraits ,
PRINCESSE AUGUSTE , un bien frivole
Pouvoit-il flatter vos fouhaits ?
Tout l'Univers daiv diſparoître
Aux yeux qui du fouverain Etre
Ont contemplé la majesté :
Du monde faux la vaine idole
Ne retient point un coeur qui vole
la fuprême Verité.
42 LE MERCURE
LES MEDECINS.
O D E.
Qvelle mortelle triſteſſe
Vient me faifir malgré moi !
Damon , connois ma tendreffe &
Au bruit du mal qui te preffe ,
Mon coeur eft glacé d'effroi.
Les Enfers pour te combattre .
T'envelopent d'affaffins ::
Et leur haine opiniâtre ,
Va rassembler pour t'abbattre ;
La goute & les Medecins.
Renverfe un complot perfide à
Fallas , daigne m'exaucer ::
Prête au fage ton égide ,
Il a "
comme un autre Alcide ,
Plus d'un Monstre à terraffer..
Mille traits imperceptibles;
Le déchirent tour à tour ::
En proye à des maux borribles;
Des feux fubtils terribles
Le dévouent nuit &jourą.
DE SEPTEMBRE. 43
Des bords de l'affreux Ténare ,
Je vois fortir Atropos.
Elle conduit un Barbare ;
→ Déja fa main te prepare
Les noirs poifons de Colchos.
Je vois groffir la tempête s
Damon , tu vas fuccomber.
Arréte ; cruel , arrête :
Apprens qu'avec cette tête y
Cet Empire doit tomber
Ecoutons les hyperboles
De l'Efculape nouveau.
Que de maximes frivoles !!
Quel prodige ! fes paroles.
Nous dérobent au tombeau.
Du chimerique affemblage ,
i De vaines comparaisons ,
Il fçait orner fon langage ::
Il donne au fou , comme au fager
De grands mots pour des raisons..
Applaudis , mortel crédule ,
A fon fçavoir incertain ;
Tu verras un ridicule , a
Qui fuppute avec fcrupule
Ies pores du corps humain.
On connoît des Medecins qui fixent le nombre dèss
press.C'eft leur raifonnement qu'on combat dans ce
Ouvrage
Dij
42 LE MERCURE
LES MEDECINS.
O D E.
Q velle mortelle triſteſſe
Vient me faifir malgré moi !
Damon , connois ma tendreſſe &
Au bruit du mal qui te preffe ,
Mon coeur eft glacé d'effroi..
Les Enfers pour te combattre
T'envelopent d'affaffins ;
Et leur haine opiniâtre ,
Va rassembler pour t'abbattre ;
La goute & les Medecins.
Renverfe un complot perfides.
Pallas , daigne m'exaucer :
Prête au fage ton égide ,
Il a " comme un autre Alcide ,
Plus d'un Monftre à terraffer..
Mille traits imperceptibles;
Le déchirent tour à tour ::
En proye à des maux borribles:
Des feux fubtils & terribles
Le déverent nuit &jour .
DE SEPTEMBRE..
43
Des bords de l'affreux Ténare ,
Je vois fortir Atropos.
Elle conduit un Barbare ;
Déja fa main te prepare
Les noirs poifons de Colchos.
Je vois groffir la tempête ;
Damon , tu vas fuccomber.
Arrétes cruel , arrête :
Apprens qu'avec cette tête
Cet Empire doit tomber.
Ecoutons les hyperboles
De l'Esculape nouveau.
Que de maximes frivoles !'
Quel prodige ! fes paroles
Nous dérobent au tombeau.
Du chimerique affemblage ,.
De vaines comparaisons ,
Il fçait orner fon langage ::
Il donne au fou , comme au fage
De grands mots pour des raisons..
Applaudis , mortel crédule ,
A fon fçavoir incertain ;
Tu verras un ridicule , a
Qui fuppute avec fcrupule
Tes pores du corps humain.
On connoît des Medecins qui fixent le nombre dèss
press. C'eft leur raifonnement qu'on combat dans ce
Duvrage,
Dij
44 MERCURE LE
Porte ailleurs , bouche indifcrette ,
Tes difcours mal affortis :
Ma Phyfique les rejette :
Voit- on avec ta lunette
Les infiniment petits.
Tu juges par habitude
Sur la foy des fens trompeurs
Et ton ame en fervitude ,
Veut puifer la certitude
Dans la fource des erreurs..
L'infaillible Providence
Borne tes jours & les miens s
Quoique le Vulgaire en pense
Damon l'humaine ſcience ,
N'en étend pas les liens .
Préjugez , trifte manie ;
Ceffez de nous engager :
Déplorable phrénéfie ;
Parce que j'aime la vie ,
Je m'obstine à l'abreger.
>
Efclave de l'imposture
Dont on te fait abreuver
Imprudente creature ,
Tu négliges la nature
Toujours prête à te fauvery
DE
44
SEPTEMBRE ."
Reviens , bienfaiſante mere ,
Tu vas rentrer dans tes droits .
Je renonce à la chimere ,
Et chaffe le Mercenaire ,
Qui me preferit d'autres Loix.
Mais que vois-je ? une Déeffe ,
Defcend & prévient nos pleurs ;
Le doux Zéphir la careffe
Les Amours & l'Allegreffe ,
Sous fes pas fément des fleurs.
Une jeuneſſe éternelle
Couronne cette beauté.
A fa fraîcheur naturelle ,
Afa vigueur immortelle ,
Je reconnois la Santé.
Arrêtez , Nimphe charmante :
Comblez nos voeux les plus doux.
Loin de vous rien ne nous tente ;
Les richeffes qu'on nous vante ,
Ne font pas des biens fans vous,"
46
LE
MERCURE
LORGUE.
Fose
1
POEM E.
'Ofe chanter ce Dieu , qui fçut parsa puissance,
Des Aquilons fougueux captivant l'inconftance ,
Du fonds d'un inftrument flexible au gré des doigts,,
Faire à la fois fortir cent differentes voix.
Toi , quijadis dufeu de ton divin génie ,
Embrafas les efprits du Chantre d'Aufonie ,
Dans mon hardi projet , ô Mufe , foutiens - moi :
Tu dois à mon ardeur des Vers dignes de toi.
Fertile en agrémens , la Mufique attrayante, •
Signaloit en tous lieux faforce triomphante ,
Et fes dignes foutiens , mille Inftrumens divers
De leurs fons differens rempliffoient l'univers.
L'ame d'étonnement , & de plaiſir ſaiſie ,
Les Mortels admiroient leur aimable harmonie :
De leurs charmes les Dieux fentoient même l'effet ;.
Phoebus , le feul Phoebus ſe ſent peu fatisfait.
Quoi , dit- il , peufoigneux d'illuftrer ma memoire ,
Ace que j'ai produit je bornerois ma gloire.
Non , non , par mes travaux , & mes vaſtes projets,
Je veux me signaler encor plus quejamais.
Ces divers Inftrumens qu'on admire, & qu'on aime,
Sont defoibles effais de mon pouvoir ſuprême ; ·
DE SEPTEMBRE.
47
Leurs accords pour mon coeur n'ont enfin rien de
doux ;:
K
Je veux en former un qui l'emporte fur tous.
Apollon , digne Fils de Jupiter fon Pere ,
Benfe n'avoir rien fait fi- tôt qu'ilpeut mieux faire..
Il dit , & par fon ordre , à fes côtez marchant ,
Le Meffager des Dieux , Mercure au pied volant ,
D'un pas prompt & rapide il vole en Eolie :
Dans cette Ifle où des flots éclate la furie.
Impatiens du joug , les brayans Aquilon's
D'horribles fifflemens font retentir les Monts ,
Et dans ces mêmes lieux les Cyclopes difformes
Frappent l'air du bruit fort de leurs marteaux
énormes.
Làfe quittent les Dieux. Mercure inftruit ; foudain
Du deffein d'Apollon court inftruire Vulcain ,.
Tandis qu'au puiſſant Dieu qui commande à l'orages
Le Vainqueur de Pithon va tenir ce langage :
Toy , qui par le pouvoir que tu reçûs des Cieux
Difpofes à ton gré des vents impetueux ,
Seconde mes projets , favorife mon zele ;
Grand Dieu , je veux , fuivant une route nouvelle
Par la production du plus bel Inftrument ,
Répandre dans les coeurs un doux étonnement ; -
Je n'y puis réuffix , fi tu ne m'es propice. ;.
Ordonne que des vents la troupe m'obéiffe ;
Je t'en conjure , Eole , au nom de notre amour
Au nom de Jupiter qui nous donna le jour
48
LE
MERCURE
Ames voeux aujourd'hui que ta bonté ſe rende.
C'eft affez , dit le Dieufenfible à fa demandez
Puiffant Pere du jour , je te vais obéir ;
Moi-même en te fervant dûßé je me trahir.
Je m'enfouviens encor ; jadis pour te complaire
De la Reine des Cieux affrontant la colere ,
*F'écartai les Vaisseaux de ce Grec renommé ,
Qui revenoit vainqueur d'Ilion confumé.
Par mon ordre fur lui s'élevant la tempête ,
Cent fois à l'écrafer il vit la foudre prête 3.
Ses compagnons plongez dans le fein dutrépas
Je le forçai d'errer de climats en climats ;
Et victime des flots foulevez par l'orage,
Par moi de dix Printemps il ne revit fa plage.
Tel que jefus alors , je veux l'être aujourd'hui :
Eole pour jamais t'affure fon appui.
Aces mots il ſe taît , & d'une main puiſſante ,
Ilfrappe de fon dard la grotte mugiſſante.
Tous les Vents auffitôt fortent de leur priſon
Triomphant , fur fespas les conduit Apollon .
Cependant par les foins de Vulcain , de Mercure
Du fuperbe Inftrument fe hâtoit la structure ;
Déja brilloient aux yeux les differens tuyaux ,
* J'ai cru pouvoir introduire Apollon comme le mo
teur des maux d'Uliffe à caufe de la haine qu'il portoit
aux Grecs , à l'exemple de Virgile , qui introduit Junon ,
comme la motrice des maux d'Enée , à caufe de la haine
qu'elle portoit aux Troyens , appuyé d'ailleurs fur cette
regle d'un grand Poëte : Cuilibet audendi femper fuit æqua
poteftas
Les
DE 49 SEPTEMBRE.
a Les canaux , les reffors & ces étroit's cachots ,
b D'où devoit une main prudemment negligente,
Faire partir des Vents la Cohorte bruyante .
• Bien-tôt tout est en ordre ; & Phoebus arrivé,
S'applaudit à l'aspect de l'ouvrage achevé,
Il l'admire , & foudain à Vulcain rendant grace?
De Mercure fuivi regagne le Parnaffe. ,
D'un vol précipité , tous les Vents à fon gré
Vont placer l'inftrument dans le lieu préparé;
Er dufils de Maya fecondant la prudence ,
Dans tous les Jeux divers coulent en abondance.
A l'aspect des neuf Soeurs , que flate un doux espoir
Apollon fait pour lors l'eſſay defon pouvoir.
Tel que ce bruit affreux qui menace la Terre ,
Quand Jupiter jaloux lui declare la guerre ,
CTel eft ce bruit nouveau qu'Apollon fous fes doigts ,
Fait naître dans l'inftant du mêlange de voix.
Aces brayans éclats les Mufes étonnées ,
Fuyent... Mais qui les a fi foudain ramenées ?
Erato , je te vois applaudir tour à tour ,
Aux chants qu'ont enfantés à l'Allegreffe & e l'Amour.
·Ciel! qu'apperçois - je en cor ! Calliope furprise
Se prépare à chanter quelque grande entrepriſe.
Sans doute du combat au bruit fier qu'elle entend,
Les Soupapes.
b Les bufets.
e Le prélude
d Le cornet.
e La voix humaine.
f La Trompete.
F
f
LE MERCURE
Elle a crû qu'on donnoit le fignal éclattant.
Cut change , & l'immortel que le Berger révère ,
Vvent entendre des a fons dont il fe croit le Pere
Euterpe à fa furprise applaudit d'un fouris.
Mai prodige nouveau ! des Satyresfuivis, b
Les Faunes , les Sylvains , les Dryades ruftiques ;
Viennent tout réjouir par leurs danfes comiques .
Et mélant à leurs chants le langage des yeux ?
Ils disputent enſemble à qui plaira le mieux.
Mortels que tardez- vous ? Venez de toutes plages ,
Rendre au Dieu de Delos vos finceres hommages ;
Il a fçu le premier montrer aux yeux furpris ,
Dans un feul Inftrument mille Inftrumens compris.
*KK KKKKKKKKK
EGLOGUE.
Apeine le Soleil forti du ſein des taux¸
Eclairoit de fes feux le faite des côtéaux ,
Lorfque pour celebrer une Fête champétre ,
Les Bergers d'un hameau commencent à paroître
Silvanire s'avance ; unefoule d'Amans
s'empreffe à lui marquer les mêmes ſentimens.
Elle avoit l'humeur fière , & depuis fon enfance
Elle n'avoit aimé que fon indifference ,
Lycas enorgueilli d'une vaine beauté,
♦
a La Flare douce.
Clairon & les divers Jeux de Baffe.
DE SEPTEMBRE
Avoit tentéfans fruit de vaincre fa fiervé ,
Et de tous les Bergers Damon le plus aimable,
N'avoit pas éprouvé de fort plus favorable.
Tircis , que follicite un amour
"
tout nouveau ,
Se propofe en ce jour un triomphe ſi beau.
Plein de ce doux espoir , contre l'idifferente,
Il mediteren fon coeur une rufe innocente ;
Moyen dont les Bergers méprifoient le fecours ;
Mais qui depuis , dit on a fervi mille Amours.
Sous le voile emprunté d'une froideur paisible ,
Aux yeux de Silvanire il fe montre infenfible.
Si l'on danfe , toujoursfidele à fon deffein s
Il évite aver foin de lui donner la main ;
Et tandis qu'à l'envi cent Paftours autour d'elle ,
Briguent l'heureux moment de fignaler leur gele ,
Il fe tient à l'écart ; fon air fier & glacé
Montre affez qu'il condamne un amour infenfé.
Mais ce qui plus encore offenfe la Bergere ,
Il s'adreſſe aux Bergers empreſſez à lui plaire.
Euyez , dit-il , l'amour &fes traits odieux ;
Seul il cauſe les maux qui regnent en ces lieux.
Depuis que parmi nous les Fêtes font frequentes
Sans guide dans les champs les brebis ſont errantes,
Dans nos jeux tout confpire à feduire les coeurs ,
Et l'Enfant de Cypris en fait tous les honneurs
Tropfaciles toujours àfe laiffer furprendre ,
Les Bergeres devroient éviter de s'y rendre.
Lour affect dangereux srouble notre devoir,
E ij
12
LE MERCURE
2
Et c'est trop acheter le plaifir de les voir.
La rufe eut ſon effet : Silvanire inquiète ;
Du coupable Tircis médite la défaite.
Tantôt vers le Berger un regard courroucé
Exprime le dépit d'un amour offense ,
Et tantôt fans raifon , elle quitte fa place ,
S'approche de Tircis , & d'un air plein de grace ,
Lui reproche un discours temeraire , offenfant.
Pour un Amant caché le pas étoit gliſſant .
Affectant toutefois de ne la pas entendre ,
Il s'excufe en Berger plus honnête que tendre.
Il en fouffre ; cent fois las de celer fon feu ,
Il fe voit fur le point d'en hazarder l'aveu.
Mais enfin rappellant sa fierté ſi pénible ,
Il imagine encore un trait bien plus fenfible.
De la courfe l'on vient à diſputer le prix ;
Il en fort le vainqueur. Tout autre que Tircis
N'eût pas manqué d'offrir le prix à fon Amante 3
Mais Tircis plus habile , à Doris le prefente .
Doris, quoique moins belle , avoit un air charmanp
Et fouvent la beauté cede au vifagrément.
A ce mépris nouveau , Silvanire interdite ,
Ne peut plus renfermer le dépit qui l'agite ,
Et fe livrant enfin aux plus vives douleurs ,
Loin de ce lieu fatal elle porte fes pleurs .
Ici le feul Tircis ofe m'être contraire ,
Lit- elle , & c'est lui feul à qui je voudrois plaire
Quand je le preferois à tant d'autres Amanı ,
DE SEPTEMBRE.
13
་
A-t-il paru touché de mes empreffemens ?
Mais pourquoi ce Berger , avec son dir fauvage
De nos fêtes tantôt condamnoit- il ruſage ;
Luy qui fidele Amant de la jeune Doris ,
S'eft empreffé d'abord à lui porter leprix ?
Certes il te fied bien de blâmer un coeur tendrés.
Toi qui contre l'Amour n'as pas fçû te défendre
Avant que d'infulter les Jeux & les Amours &
Tu devrois profiter de tes fages difcours
Tircis charmé de voir la Bergere diftraite ,
L'avoit fecretement fuivie en fa retraite ,
Maintenant affuré de for heureux furcès ,
Aux pieds de fon Amante il marqueſes regrèts.
Je n'ai pas merité , dit-ilàla Bergère ,
Les reproches amers que l'on ofe me faire ;
Et mon coeur enflamé d'un veritable Amour ,
N'eft pas tel qu'il a feint de paroître en ce jour
Oui , j'aime ; mais Doris n'eft pas celle que j'aime :
Elle n'a fait qu'aider au tendre stratagême.
Inftruit que les aveux de la plus vive ardeur
N'avoient pú jufqu'ici flechir votrerigueur ;
Pour vous rendre à l'Amour deformais moins rebelles'
J'ai voulu me choisir une route nouvelle.
1
J'ai cris qu'unfier mépris à vos yeux preſenté
Pourroit de vos mépris combattre la fierté ,
Quefaite àtout charmer , il falloit pour vous plaire
Vous montrer un Berger d'un nouveau caractère.
Heureux , fi les combats qu'eut à rendre mon coeur ,
Biij
54 LE MERCURE
Pouvoient de mon pardon obtenir la faveur !
Silvanire éprouvant le fuccès de la ruſe ,
Peut- elle de Tircis ne pas cherir l'excuſe?
Le Soleil n'avoit pas encor fini fon tour
Quand de l'heureux Berger elle approuve l'amour
Que dis-je ? En peu de temps le Berger put comprens
dre ,
Que pouraimerplus tard , on n'en eftpas moins tem
dre.
ARRESTS , EDITS
& Declarations.
A
RREST du Confeil du rr Aouſt 1720 , pas
lequel Sa Majefté fait tres expreffes défenfes
& inhibitions à tous marchands , Negocians
& autres de faire fortir du Royaume , par quelque
voie que ce puiffe eftre , du Bois de Noyer non
ouvragé , à peine de confifcation & de trois
mille livres d'amende ; & ce jufqu'à ce qu'il en
ait efté par Sa Majefté autrement ordonné.
ARREST du Confeil du 23 Aouft 1720 , par
lequel S. M commet let Seurs Angran & Vatan
Maiftres des Requeftes ordinaires de fon Hôtel ,
pour l'execution de l'Article II . de la Declaration
du Roi du 19 Juin dernier : Ordonne Sa Majefté
que conformément à icelle , il fera par lef
dits Sieurs Commiffaires dreflé Procès verbal des
Billets de Banque qui ont efté ou feront ci- aprés:
apportez au Trefor Royal pour l'acquifition def
DS SEPTEMBRE.
dites Rentes , pour eftre enfuite lesdits Billets
de banque brulez audit Hôtel de Ville de Paris en
prefence des Prevoft des Marchands & Echevins
de ladite Ville , qui en drefferont pareillement
Procés verbal.
ARREST du Confeil du 23 Aouft 1720 , qui
erdonne que les Recepiffez donnez par le Sieur
Miotte pour affranchiffement de droits Seigneuriaux
dûs à S. M. dans la Ville de Paris , feront
reprefentez pardevant le Sieur d'Ombreval , pour
fur la liquidation qui fera par lui faite , être
pourvû au rembourſement des fommes y contenues
DECLARATION du Roy du 24 Aoust 1720,
par laquelle S. M. veut que dans chacun des Sieges
des Greniers à Sel dans l'étendue de fes Gabelles
de France , où l'Office de Prefident a été
acquis par les Officiers defdits Greniers , &
reuni à leurs Corps en confequence de la Declaw
ration du 8 May 169r , il foit ineeffament pour
vú aufdits Offices de Prefidens de perfonnes capables
, fur les Quittances de Finance qui en feront
delivrées par le Treforier de fes Revenus cafuels g
à l'effet de quoy lefdits Offices feront & demeu
reront defunis du Corps defdits Greniers , com.
me par ces prefentes S. M. les en défunit; & qu'en
confequence ceux qui voudront acquerir lefdits
Offices feront tenus d'en remettre leurs foumiffions
dans un mois , à compter du jour de l'Enregistrement
de la prefente Declaration , entre
les mains des Sieurs Intendans & Commiffaires
départis dans fes Provinces , pour eftre les fou
miffions qu'ils auront reçues , envoiées en fon
Confeil , huitaine après l'expiration dudit mois ,
fur lesquelles il fera arrefté des Rolles au profio
de ceux qui auront fait les offres les plus avam
E iiij
36
LE
MERCURE
tageufes , pour jouir par les pourvûs desdits Offces
, des Privileges , Exemptions , Droits d'un
demi Minot de Franc- falé, portez par ledit Edit
du mois de Novembre 1689 , & des Gages attribuez
aufdits Offices par les Rolles arreftez au
Confeil en execution du même Edit , enfemble
des droits , honneurs , Privileges & prérogatives
dont jouiflent les pourvûs de pareils Offices de
Prefidens dans fes autres Greniers , en payant par
les Acquereurs , les fommes pour lesquelles ils
feront employez dans lefdits Rolles , fans deux fole
pour livre , dont S. M. les difpenfe.
ARREST du Confeil du 24 Aouft 1720 par
lequel S. M. ordonne ,
ARTICLE PREMIER .
Qu'à commencer du premier Janvier 1721 ,
les Villes & Communautez du Royaume qui font
chargées de Rentes , n'en paycront les arrerages
que fur le pied du denier Cinquante. Fait défenfes
aux Officiers Municipaux & à leurs Treforiers
& Receveurs d'en faire le payement fur um
plus haut pied , à peine de radiation.
II. Les Creanciers defdites Villes & Commumautez
, qui voudront conferver leurs Rentes en
confentant la reduction au denier cinquante ,
ferent tenus d'en faire dans un mois , à compter
du jour de la publication du prefent Arreit , leurs
Declarations aux Sieurs Intendans & Commiffaires
départis dans les Provinces ou à leurs Subdeleguez
; & feront faire mention de la reduction
par tel Notaire qu'ils voudront choiſir , fur les
Titres de leurs Creances , de laquelle mention
ils remettront une expedition au Greffe des Hôtels
ou Maifons communes des Villes , ou aux
Syndics des Communautez qui n'ont point de
Maifons communes & de Greffes .
IL Faute par les Creanciers defdites Villes &
DE SEPTEMBRE. 57
Communautez de confentir à la Reduction de
leurs Rentes , dans le tems & en la maniere cideffus
ordonnez , Sa Majesté a dès à préfent autorifé
& autorife lefdits Officiers Municipaux ,
& autres qui ont l'adminiftration des affaires
defdites Villes & Communautez , d'emprunter au
denier cinquante à conftitution de Rente , ou par
obligation portant interefts , dans les lieux où
lefdites obligations font en ufage , les fommes
neceffaires pour acquiter les principaux de leurs
anciennes dettes , même pour en payer les arre
rages & interefts , en cas qu'il ne fe trouve point
dans le produit de leurs Revenus des fonds fuffifans
pour payer lefdits arrerages & interefts .
IV . Les nouveaux Creanciers qui prêteront
aufdites Villes & Communautez , feront & demeureront
fubrogez aux droits , Privileges &
hypoteques des anciens Creanciers qui feront
rembourfez de leurs deniers , en faifant des fti-
-pulations & declarations d'employ requifes &
ordinaires pour acquerir la fubrogation,
V. Les Proprietaires des Rentes qui ne font
pas libres , & qui ne font pas en état de recevoir
les rembourſemens , feront tenus de faire
ceffer dans trois mois , à compter auffi du jour
de la publication du prefent Arreft , les faifies
& autres empêchemens , finon & faute de les
faire ceffer dans ledit tems , les Rentes qui leur
font dûes par lefdites Villes & Communautez ,
demeureront reduites de plein droit , & les arrerages
ne leur en feront plus payez qu'au denier
cinquante , à commencer dudit jour premier
Janvier 1721 .
VI . Fait S. M. tres- expreffes défenſes aux
Offic`ets Municipaux defdites Villes & Communautez
de rembourfer aucunes dettes , & à leurs
Receveurs & Treforiers d'en payer aucuns arretages
ou interefts , fi leſdites dettes n'ont eſté ve
18
LE
MERCURE
rifiées par Arrefts
du Confeil
ou par Ordonnanees
des Sieurs
Commiffaires
départis
dans les
Provinces
, auffi à peine de radiation
des payemens.
Enjoint
à ceux , qui fe prétendent
Creanciers
defdites
Villes & Communautez
, dont
les Creances
n'ont point efté verifiées
, de faire
proceder
à la verification
de leursdites
Creances
dans le même tems de trois mois ; aprés
laquelle
verification
faite , leurs Rentes
feront
reduites
, ou ils feront rembourſez
, infi qu'il eft
ci-deflus ordonné
.
VII. Fait pareillement S. M. défenfes aufdits
Officiers Municipaux , de faire aucuns emprunts
pour rembourfer celles des dettes defdites Villes
& Communautez , à l'acquittement defquelles il
a efté pourvû par Arrefts du Confeil , foit par
Impofitions , établissement d'Octrois où aurrement,
ni d'accepter la reduction des arrerages &
interefts defdites dettes, voulant que lefdites Villes
& Communautez en foient totalement liberées
fuivant les Arreſts qui ont eſté rendus à
get effer.
ARREST du Confeil du 27 Aouft 1720 ,
par lequel S. M. permet aux Directeurs & Intereffez
de l'Armement du Vaiffeau nommé la
Paix , de faire la vente de toutes les Balles
de Caffé , pour eftre confommé dans le Royaume
, en payant les mêmes droits qui fe perçoivent
for les Caffez qui entrent par le Port de
Marſeille : défend Sa Majefté de faire fortir aucun
Caffé hors du Royaume pour quelque caufe ou
fous quelque pretexte que ce puiffe eftre , jufqu'à
ce qu'autrement il en ait efté ordonné par
Sa Majefté.
ARREST du Confeil du 29 Aouft 1720 ,
par lequel Sa Majefté ordonne ce qui fuit
DE SEPTEMBRE. 59
>
Art. I. Que fon tres cher & tres amé Oncle le
Duc d'Orleans Regent , qui en cette qualité a
accepté le titre de Protecteur de ladite Compagnie
des Indes , en fera & demeurera auffi
Gouverneur perpetuel , & qu'il fera établi un
Confeil pour la Regie & adminiſtration generale
de tout ce qui pourra concerner ladite
Compagnie.
II. Ordonne Sa Majefté pour éviter la con-
Bufion dans le travail , empêcher que le fecret
ne foit divulgué , & diminuer en même temps
les dépenfes de ladite Compagnie , que le nombre
des Directeurs fera reduit à vingt - quatre ,
fuivant l'état attaché à la minutte du prefent
Arreft , les honoraires defquels Directeurs feront
reglez par provifion à vingt mille livres
pour chacun , en attendant l'Affemblée generale.
III. Veut Sa Majefté que chacun des Disecteurs
confervez , & qui fuivant la difpofition
de l'Article XVI. de l'Edit du mois de Decem
bre 1717 , doivent avoir au moins deux cens
Actions en compte fur les Livres de la Compagnie
, foit tenu de dépofer dans quinzaine , à
compter du jour de la publication du prefent
Arreſt , dans les Livres de dépoft de la Compagnie
deux cens Actions remplies , dont il ne
pourra difpofer pendant le temps de fon adminiftration.
IV. Veut pareillement Sa Majefté que les
Directeurs de chaque Département rendent
compte de leur regie & adminiſtration au fieur
Lavv , que Sa Majefté a nommé & établi Di-
Lecteur general de ladite Compagnie & de la
Banque , & qui fera rapporteur des affaires de
LE MERCURE
ladite Compagnie audit Confeil ; & que fur les
Bilans particuliers que lesdits Directeurs feront
chacun de leur département , il foit fait un Bilan
general des profits & pertes de la Compagnie
par le Directeur general, pour eftre prefenté &
communiqué aux Actionnaires dans les Affemblées
generales qui feront tenues , conformément
à l'Article XLII . de l'Edit du mois d'Aouſt
1717.
V. Ne pourront les Actionnaires de ladite
Compagnie avoir voix déliberative dans les Af-
Lemblées qu'ils ne foient Proprietaires de cinquante
Actions remplies , conformément à l'Article
XXXVII. de l'Edit du mois d'Aouſt 1717.
Et pour en mieux juftifier la proprieté , ils feront
tenus de les avoir en compte ouvert dans :
les Livres de la Compagnie avant la tenue de
chaque Affemblée , dont la premiere fera au 20-
Decembre prochain , & en ce cas ils auront
autant de voix qu'ils auront de cinquante Actions
dépofées.
VI. Permet Sa Majefté aufdits Actionnaires ช
dans leurs Affemblées generales , de changer à
Ja pluralité des voix les Directeurs dénomméz
dans l'état attaché à la minute du prefent Arseft
, s'ils le jugent à propos.
par
VII Veut Sa Majesté que conformément
l'Article XLVII. de fon Edit du mois d'Aouft
1717 , & à l'Article V. de celui du mois d'Aouſt
1664 , confirmé fon Edit du mois de May
1719 , les Directeurs de la Compagnie des Indes
he puiffent eftre inquietez ni contraints en
leurs perfonnes & biens pour raifon des affaires
de la Compagnie , tant pour celles du Commer
ae, que par rapport aux adjudications de fes
DE SEPTEMBRE. 61
fermes faires à ladite Compagnie , & aux regies
& adminiftrations dont elle a été & pourroit
cftre chargée dans la fuite , & qu'ils foient feulement
tenus de leur fait perfonnel : Declare
Sa Majesté nul & de nul effet tout ce qui pourroit
avoir efté fait contre lefdits Directeurs au
préjudice defdites difpofitions , fe refervant do
pourvoir à la feûreté du cautionnement de fes
Fermes & de fes Recettes Generales , & à la forme
des comptes qui en feront rendus .
VIII. Pour faire ceffer les bruits que des
gens mal intentionnez continuent de répandre
dans le Public , Sa Majefté a declaré & declare ,
ainfi qu'Elle a cy- devant fait , que les Actionnaires
de la Compagnie des Indes ne pourront
en aucun temps & fous quelque pretexte que
ce foit , eftre taxez pour raiſon des profits
qu'ils ont faits , ou pourront faire dans ladite
Compagnie,
IX. Et en confequence du prefent Reglement"
les fonctions des Commiffaires du Confeil
nommez tant pour la Banque , que pour la Compagnie
des Indes , cefferont du jour de la publication
du preſent Arreſt. A
DEPARTEMENS DES DIRECTEURS
de la Compagnie des Indes .
COMMERCE.
Meffieurs Hardancourt & Martin , Indes &
vente des Marchandiſes.
Meffieurs Dartaguiete & Morin , Loüifianne,
Senegal & Barbarie,
Meffieurs Rigby , & la Franquerie , l'Orient.
Meffieurs Mouchard & de Premenil , Arme
mens.
82 LE MERCURE
Meffieurs Caftanier & Morin , Achapts des
marchandifes.
Meffieurs Fromaget & Caftanier , Changes
Etrangers & Monnoyes.
Meffieurs la Porte & Godeheu , Livres , Caiffes
Repartitions .
Monfieur S. Juan , Voyages,
FINANCES.
Meffieurs d'Artaguiette & Nouveau , Recettes
Generales & Contrôle General.
Meffieurs La Porte & Lallemant . Gabelles.
Meffieurs La Haye , Peiner , Villemur , Savalete
& Julie. Aydes , Contrôle des Actes , Franc-
Fiefs , c.
Mellieurs Le Gendre & Dupleix . Cinq Groffes
Fermes Tabac .
Meffieurs Laugeois & Nouveau Livres Journaux.
Monfieur Corneau. Affaires des Confeils.
ARREST du Confeil du 30 Août 1720.
par lequel Sa Majesté ordonne que par les fieurs
de Bauffan & Bertin Confeillers du Roy en fes
Confeils , Maîtres des Requêtes ordinaires de fon
Hôtel , il fera inceſſamment dreffé Procès verbal
des Billets de Banque de Dix mille livres & de
Mille livres qui ont été portez en Compte en
Banque , tant à l'Hôtel de ladite Banque à Paris
, qu'aux Hôtels des Monnoyes dans les Provinces
, après qu'ils auront été envoyez au fieur
Bourgeois Treforier General de la Banque , pour
être lefdits Billets de Banque coupez en travers
par le milieu & brûlez enfuire en l'Hôtel de
Ville de Paris .
ARREST du Confeil du 30 Août 1720. par
lequel Sa Majefté ordonne ce qui fuit.
ART. I. Les Pourvûs de Soixame Offices de
Confeillers Agents de Change , Banque , Com
DE SEPTEMBRE . 61
merce & Finance , feront tenus de rapporter inceffamment
pardevant le fieur le Pelletier Desforts
Premier & principal Commiflaire pour les
Finances , leurs Titres de proprieté , pour être
procedé à la Liquidation de leur Finance , &
enfuite pourvû à leur Remboursement.
II. Au lieu & place desdits Soixante Anciens
Officiers , il fera établi Soixante Conteillers du
Roy Agents de Change , en vertu des Commiffions
du grand Sceau , pour exercer les mêmes
fonctions & jouir des mêmes Lroits , Privileges
& Exemptions dont ont joüi lefdits Anciens Officiers
en confequence defdits Edits du mois
d Août 1708 & Novembre 1714. à l'exception
du Franc Salé fculement.
› de
III. Seront tenus les Particuliers qui ferone ,
choifis pour exercer lefdites Commiflions
rapporter avant que leurs . Commiffions leur
puiffent être expediées , un Certificat du Commis
du Depôt en Fanque pour justifier qu'ils y
auront depofé Dix Actions nouvelles de la Compagnie
des Indes , provenant de la Converfion
des anciennes , ou Quinze Actions Rentieres
& ne pourront lefdies Actions leur ètre rendues
tant qu'ils exerceront ladite Commiffion ,
mais en recevront feulement les Dividendes de
fix mois en fix mois , ainfi que les autres Actionnaires
de la Compagnie.
›
IV. Nul ne pourra être admis dans le nom.
bre defdits Confeillers du Roy Agens de Change
, qu'il ne foit âgé de vingt- cinq ans au moins,
& qu'il ne faffe apparoir de fa fuffifance & capacité
pour en exercer les fonctions ? par un
Certificat des Juges Confuls de la Ville de Paris
, & des Gardes en Charge des fix Corps des
Marchands de ladite Ville .
V. Seront tenus en outre lefdits Particuliers
aufquels il aura été expedié des Commiffione
#4
LE MERCURE
d'Agens de Change , de s'y faire recevoir &
prêter ferment devant le fieur Prevôt de Paris ou
fes Lieutenans , en la maniere accoutumée ; Pour
laquelle Reception ils payeront la fomme de
Trente livres feulement pour tous Droits
compris ceux du Subftitut du Procureur General
& du Greffier.
>
. y
VI. Ceux qui auront fait Faillite , Contract
d'Atermoyement , ou obtenu Lettres de Repy
ne pourront être admis au nombre defdits Agens
de Change conformément à l'Article III. du
Titre XI. de l'Ordonnance du mois de Mars
1673. Et lefdits Agens de Change ne pourront
faire aucun Contrat d'Atermoyement , obtenir
Lettres de Repy , ni eftre admis au Benefice de
Ceffion pour raifon des Effets qui leur auront
été confiez ; Et en cas de retention defdits
Effets ou de Faillite , leur Procés leur fera fait
comme pour Banqueroute frauduleufe .
>
VII. Ne pourront lefdits Agens de Change
avoir de Caiffe ni faire aucune Negociation
pour leur compte , ni Endoffer aucunes Lettres
ou Billes que pour en certificr la fignature ve
ritable , le tout à peine de nullité des Engagemens
qu'ils pourroient avoir contractez , privation
de leurs Emplois , & de Deux mille livres
d'amende , applicable moitié au profit du Roy &
l'autre au denonciateur.
VIII. Ne pourront pareillement lefdits Agens
de Change faire aucune Negociation de Lettres
ou Billets de Change de Cinq cens livres &
au deflus , ni pour vente de Marchandifes en
gros , autrement qu'en Compte de Banque , à
peine de Cinq cens livres d'amende & de deſtitution
de leur Employ.
IX. Fait Sa Majefté tres expreffes inhibitions
& deffenfes à toutes perfonnes de s'immifcer
dans les fonctions des Agens de Change , d'exiger
DE SEPTEMBRE. 65
ger ni de recevoir aucuns Droits pour quelque
Negociation que ce puiffe être , à peine de
Trois mille livres d'amende , même de Prifon
& de plus grandes peines , s'il y écher , contre
les Domestiques, Apprentifs , Compagnons , Ouvriers
& Gens fans aveu.
2 au
X. Seront tenus lefdits Agens de Change de '
fe conformer , tant pour leur Police interieure,
que pour l'Exercice de leur Commiffron
Reglement cejourd'hui arrêté au Confeil d'Etat
du Roy , & cy attaché fous le Contre- feel de
prefent Arrêt.
REGLEMENT que Sa Majesté venst
& entend être gardé & obfervé par les
Confeillers du Roy Agens de Change
Banque , Commerce & Finance , qui feront
établis en confequence de l'Arrêt du Con
feil d'Etat du Roy de ce jour.
I.
ART. Lge, Banque , Commerce & Finance
Es Confeillers du Roy Agens de Chande
la Ville de Paris , pour s'acquitter digne-"
ment de leurs Emplois & pour entretenir entre
eux l'union & l'amitié fraternelle . feront cele
brer le premier jour ouvrable de chaque année,
à huit heures , une Meffé folemnelle du Saint-
Efprit en l'Eglife des Peres de la Doctrine ruë
Saint Martin ; Et lorfque quelqu'un d'entr'eux
viendra à déceder ils feront celebrer une
Meffe de Requiem en la même Eglife , aux jours
& heures marquez par le Sindic qui en fera ?
avertir les Agens de Change ; Et ceux qui n'y
affifteront point , feront tenus de payer Six livres
applicables au pain des Prifonniers de la Concier
gerie du Palais , à moins qu'ils n'ayent des ca
Cafes legitimes.
>
F
66 LE MERCURE
"
II. Il fera élû entr'eux tous les premiers jours
d'Aflemblée de chaque année , a la pluralité des .
voix , un Sindic & un Adjoint pour pendant
ladite année rediger , figner & expedier les Deliberations
, & generalement faire tout ce qui dépendra
des fonctions de leurs Emplois , pour l'eta.
bliffement & confervation des interêts de la
Compagnie , conformément aux Edits & Reglemens
, fans que lefdits Sindics & Ajoints puiflent
rien innover ni conclurre , que de l'avis de la
Compagnie affemblée .
III. Le Syndic , & à fon deffaut d'Ajoint , convoquera
la Compagnie tou es les fois qu'il en
fera befoin, & chacun s'y rendra ponctuellement,
à peine de Six livres d'amende payable par ceux
qui ne s'y trouveront point fans caufes legitimes
, lefquel'es Six livres feront applicables .
anx befoins de la Compagnie , Et fera delivré
un Jetton d'Argent pour drait de prefence à
chacun de ceux qui fe feront rendus à ladite
Affemblée.
-
>
IV. Lorfqu'un Agent de Change fera en conference
avec quelque Banquier , Negociant ou
autre pour quelque Negociation un fecond
Agent de Change furvenant ne pourra les écou
ter ni les interrompre , à peine de Cinquante livres
d'amende payable par le contrevenant au
profir du plaignant, fans neanmoins que la liberté
fot ôtée audit Banquier , Negociantou autre , de
conferer en particuliet avec le dernier , même
de conclurre avec lui , s'il le juge à propos, plude
qu'avec le premier..
V. Ne pourront lefdits Agents de Change exiger
ni recevoir aucune fomme au- delà des Droits
qui leur font attribuez par les Edits des mois
'Août 1708. & Novembre 1714. fous peine de
Concuffion , & leur fera loifible de le faire payer
de leurs Droits après la confomination de car
DE SEPTEMBRE.
que Negociation , ou fuivant l'ancien ufage fur
des Memoires qu'ils fourniront de trois mois en
trois mois des Negociations faites par leur entremife
aux Banquiers , Negocians ou autres. ,
pour le compte defquels ils les auront faites
mais ne feront preferez & privilegiez fur les
Effets mobiliers defdits Banquiers , Negocians
ou autres , que pour lefdits Droits de Negociations
qu'ils auront faites pendant les trois
derniers mois,
VI. Il fera tenu un Regiſtre pour les Delibe
rations de la Compagnie , & un autre pour l'Enregiſtrement
des Edits , Arrêts & Reglemens fur
le fait defdits Emplois , & un troifiéme pour l'En--
registrement des Commiflions & Sentences de
Reception de chacun defdits Employez , lefquels
Registres & autres Pieces concernant ladite Comparnie
feront mis dans un Coffre qui reftera dans ›
le Bureau , & dont la clef demeurera entre les
mains du Sindic , pour les reprefenter quand be--
foin fera ..
1
VII. Chaque Syndic fortant de Charge fera
tenu de reprefenter fon Compte de Recerte &
de Dépenfe , trois mois après fon année d'Exereice
, fur le Bureau de l'Affemblée ordinaire
auquel jour feront nommées deux perfonnes dela
Compagnie pour l'examiner & en faire leur
rapport à l'Affemblée fuivante , Et ce qui fe:
trouvera dépensé pour le bien & l'utilité de la
Compagnie fera alloué fans difficulté , Et ce done:
le Syndic fe trouvera redevable fera par lui payé
au Syndic entrant en Charge , Et en cas qu'il foitdû
au Syndic fortant , la Compagnie lui en feras
le Remboursement.
VIII. Seront les prefeas Articles & Reglemens
las à routes les Affemblées qui fe tiendront pour
l'Election des Sindyes & Ajoints , auſquels il cft
enjoint de tenir la main à leur execution
Bijj
63 LE MERCURE
ARREST du Confeil du 30. Août 17201
concernant le Remboursement des Rentes de
l'Hôtel de Ville de Paris , affignées fur le Clergé,
& des Payeurs & Contrôleurs defdites Rentes
& le payement des Arrerages dûs. par lefdits
Paycurs
ORDONNANCE du Roy du 31 Août
720. par laquelle Sa Majef é ordonne..
ART. I. Le Confeil de Marine fe tiendra à
F'ordinaire deux fois par femaine , & même plus
fouvent , felon que la multiplicité des affaires
l'exigera.
>
II. I fera compofé de M. le Comte de Tou
loufe Amiral de France du fieur Marêchal
d'Eftrées en qualité de Prefident , du fieur Ma
rêchal de Teffé ; du feur Chevalier, d'Orleans
Grand Prieur de France , General des Galeres ,
du Geur Marquis de Coetlogon , du fieur Marquis
d'Asfeld , du fieur Comte de Champigny ,
du fieur de Cours , du fieur de la Grandville ,
du feur de Vauré , en qualité de Confeillers ,
& du fieur de la Chapelle en qualité de Secre
taire dudit Confeil.
III . Ce Confeil fera chargé de tout ce qui concer
ne la Marine du Levant & du Ponant , les Galeres,
les Confulats, les Colonies , Pays & Conceffions
des Indes Orientales & Occidentales & d'Afri
que les Fortifications des Places Maritimes cyaprès
denommées ; fçavoir , Dunkerque, Calais,
Ambleteufe , Boulogne , le Treport , Saint Va
lery , Dieppe , Fefcamp , le Havre , Honfleur ,
Ja Hogue , Cherbourg , Grandville , Saint Malo
Fort de la Conchée , Château du Taureau , Breſt,
Fort de Rofcan vel ', Fort de l'Ifle longue , Fort
de Camaret , Port Louis , Belle Ifle , Tour de
Pifle d'Hedie , Tour de l'Ifle d'Honnac , Cha
peau de Nantes , Saint Mastin de Ré , Fort de
DE SEPTEMBRE. 69
>
y
la Prée , Redoute de Sablanceau , Redoute dur
Martray , Redoute des Portes , la Rochelle , Fors
de l'Ifle d'Aix , Fouras , Rochefort , Fort Lupin
& Fort de la Pointe , Redoute de l'Eguille , Redoute
de l'Ile- Madame , Fort du Chapus , Brouage ,
Citadelle de l'Ile d'Olleron , Port de Socoa
Port de Vendre , Port de Cette , Canal de Com .
munication du Languedoc , Marſeille Nôtre-
Dame de la Garde Tour de Bouc , Château
d'If, Pomegues & Ratanneau , Toulon , Ifle de
Porquerolles , Ifle de Portecros , Brigançon ,
Saint Tropez , & Antibes ; Tout ce qui regarde
la conftruction , l'entretien & reparation des
Arcenaux , Quays , Formes , Baffins , Eclufes ,
Jettées & Batteries pour la confervation , l'entrée
& la deffenfe des Ports & des Rades , Et
auffi l'entretien des Corps de Gardes dans les
Capitaineries Garde Coftes.
IV . Il aura infpection fur les Negocians qui
compofent en chaque Echelle le Corps de la
Nation , en tout ce qui ne regardera point le:
detail de leur Commerce.
V. Il aura -foin de maintenir les Privileges des
Negocians fous la Banniere de France ; de reprimer
les abus du Pavillon , & les fraudes de ceux
qui prêtent leurs noms aux Etrangers .
VI. Il aura . la Direction des Compagnies des
Indes Orientales , du Senegal & autres , pour
tout ce qui regarde la Guerre & les Etabliffe
mens où il y a des Troupes & des Commandans.
VII. Il aura foin de faciliter aux Vaiffeaux
Marchands les fecours dont ils auront befoin :
dans les Pays Etrangers , & de faire ceffer les
troubles & les obftacles qu'ils y pourront recevoir
par des faifies , ou autres empêchemens.
dans leur Navigation .
VIII. Il propofera l'expedition des ordres me
LE MERCURE
ceffaires pour ouvrir & fermer les Ports , & de
ceux pour l'Envoy des Eſcadres ou Eſcortes deftinées
à la protection du Commerce , & à la fûreté
des Côtes & des Bâtimens Marchands .
IX. Les ordres expediez pour ouvrir & fer
mer les Ports feront envoyez par le Confeil aux
Commandans , Intendans & Ordonnateurs des
Ports , & par l'Amiral aux Officiers de l'Ami
rauté.
X. Le Confeil fera chargé des Negociations
& Traitez avec les Puiffances d'Alger , de Tunis
, de Tripoly, & avec le Roy de Maroc ; il
fera auffi chargé du Rachat & de l'Echange des
Efclaves , & de la Protection des Saints lieux de
Jerufalem .
"
XI. Les Memoires en forme d'inftruction con⚫
cernant la Marine pour les Ambaffadeurs & En
voyez , feront donnez par le Confeil & portez par
M. le Comte de Touloufe au Confeil de Regence
, où étant approuvez ils feront enfuite
communiquez au Secretaire d'Etat ayant le département
des Affaires Estrangeres , qui en in
ferera Copie dans fes Regiftres avec les Inſtructions
aufdits Ambaffadeurs & Envoyez.
XII . Les Marchez pour les Fournitures gene
rales & particulieres pour le fervice de la Ma.
rine , feront faits & arrêtez au Confe: l ; & s'il
convient pour le bien du fervice d'ordonner
quelque Marché dans les Ports , il ne pourra
avoir lieu qu'après avoir été approuvé par les
Con feil.
XIII. Les Comptes de Recette & Dépenfe des-
Invalides de la Marine feront farrêtez chaque
année par le Confeil , & les arrêtez defdits
Comptes ferviront au Treforier general & aux-
Commis prepofez aux Recettes particulieres
de décharges valables par tout où il appartien
drav
DE SEPTEMBRE. 71
XIV. La Sufcription des Paquets envoyez des
differens Departemens fera faite à S. A. R. Monfeigneur
le Duc d'ORLEANS , Regent du Royaume„
Four le Confeil de Marine , Et tous les Paquets
ainfi fufcrits feront remis par le Commis de la
Pofte au Secretaire du Confeil , qui les portera
tous les jours à M. le Comte de Toulouſe pour
les ouvrir.
·XV. Les affaires étant deliberées dans le Con--
feil , M. le Comte de Toulouſe recueillera les
voix ; Et s'il y a partage , la fienne fera préponderante
, de même qu'en fon abfence , celle
de Prefident , en l'absence du Prefident , celle
du Confeiller qui prefidera.
XVI. Quand il farviendra des affaires qui demanderont
une longue difcuffion , M. le Comte
de Touloufe les diftribuëra aux Confeillers pour
les examiner , & en faire enfuite leur rapport
au Confeil.
XVII. Les Deliberations du Confeil prononsées
par M. le Comte de Toulouſe , feront inferées
par le Secretaire du Confeil dans l'Extrait:
dont aura été fait Rapport , en marge de chaque
Article mis en deliberation chacune de .ces
Deliberations paraphée par M. le Comte de
Toulouſe , & les Extraits fignez en fin par lui ,
& contre-fignez par le Secretaire , qui les con
fervera pour Minutes dans le Secretariat .
XVIII. Le même ordre fara obfervé à l'égard des
Memoires,projets & autres differentes Expeditions
dont aura efté fait rapport & delibere dans le
Confeil'; & les Minutes ainfi paraphêes , fignées.
& contrefignées , fetont mifes en depoft dans la
Secretariat.
XIX . Le Secretaire du Confeil fera tenu de
faire tranfcrire & rediger en corps de volume
toutes lefdites Minutes , & feront lefdits volumes
Cottez & paraphez par M. le Comte de Toulouze.
XX. M, le Comte de Toulouze fe rendra aus
72
LE
MERCURE
jours ordonnez chez le Regent , pour lui rendre
compte des affaires , fur lefquelles il fera neceffaire
de recevoir fes ordres.
XXI: Lorfqu'il y en aura qui ne concerneront
que les Galeres , M. le Comte de Touloufe enavertira
le Sieur Chevalier d'Orleans , pour qu'il
fe rende avec lui chez le Regent , & en faffe le :
Rapport.
XXII. M. le Comte de Toulouſe rapportera au
Confeil deRegence les affaires qui devront y eftre
rapportées , avec les Deliberations du Confeil de
Marine fur chaque affaire ; & pourra neanmoins ,
quand il le jugera neceffaire , propofer au Regent
d'appeller au Confeil de Regence le Mailtre.
des Requeftes Confeiller au Confeil de Marine ,
pour y faire rapport de celles qui lui auront eſtédiftributes
.
XXIII . Les Decifions du Confeil de Regencer
féront inferées dans les Extraits fur lefquels le
Rapport aura efté fait precedemment au Confeil
de Marine , & paraphées par M. le Comte de Tou
Loufe.
XXIV . Les Depêches & autres Expeditions
faites au nom du Confeil , feront fignées par M.
le Comte de Toulouſe feul , à l'exception de
celles concernant le fervice des Galeres , qui fe- -
ront fignées conjointement par lui & par le Sieur
Chevalier d'Orleans ; & celles concernant les
Fortifications des Places maritimes , qui feront
auffi fignées conjointement par lui & par le Sieur
Marquis d'Asfeld .
XXV. Les Expeditions fignées au nom du Con
feil , feront celles dénommées cy-après.
Les Congez des Officiers de Marine & des Ga
leres , tant d'Epée que de Plume
Les Congez abfolus aux Officiers fubalternesde
la Marine & des Galeres , Gardes de la Masine
, Officiers Mariniers , Matelots & Soldats .
Les
DE SEPTEMBRE. 75
-
Les Certificats des Gardes de la Marine.
Les Brevets des Officiers fubalternes , tant
d'Epée que de plume, dont l'adreffe ne fera point
faite à l'Amiral ou au General des Galerés .
Les Etats & ordres pour le payement des Appointemens
des Officiers d'Epée & de plume
dans les differens Departemens .
Les Lettres pour toutes les Charges fubalternes
de l'Infanterie de la Marine & des Galeres.
Celles pour faire fervir en pied les Officiers
qui feront reformez.
Celles pour changer d'une Compagnie à une
autre les Capitaines qui ont déja eu Commiffion.
Les ordres pour la diftribution des Fonds arrê
tez par le Roy chaque année pour la dépenfe de
la Marine , des Galeres & des Fortifications des
Places Maritimes mentionnées en l'Article III .
Les ordres pour la marche des Troupes de la
Marine.
Les ordres pour l'adminiſtration des Commif
faires & autres employez.
Les ordres pour la reforme des Officiers , ca
leur confervant la moitié de leurs Appointemens.
Les Ordres pour recevoir les Officiers - Mariniers
, Matelots & Soldats à la demie folde des
Invalides de la Marine .
Les Liftes pour marquer les Departemens de
chaque Officier au commencement de l'année.
Les ordres pour les changemens des Officiers
d'un Departement à un autre.
Les Liftes d'Officiers choifis par le Roy pour
commander & fervir fur les Vaiffeaux & Galeres
que Sa Majefté fera armer .
Toutes lefquelles Expeditions feront fignées
ainfi qu'il a efté dit par l'Article XXIV . & contrefignées
par le Secretaire du Conſeil.
XXVI. Les Minutes des Arrefts rendus fur les
Affaires deliberées au Confeil de Marine , & por
G
74
LE MERCURE
tées au Confeil de Regence , feront fignées par
M. le Comte de Touloufe ; feront auffi lefdites
Minutes fignées fuivant l'ufage ordinaire par M.le
Chancelier , & enfuite remifes au Secretaire d'Ezat
, qui en fignera les Expeditions .
XXVII. Le Secretaire d'Etat fignera les autres
Expeditions ci - après denommées.
Les Provifions & Commiffions fcellées du grand
Sceau .
Les Brevets ou ordres dont l'adreffe eft faite
à l'Amiral ou au General des Galeres.
Les Brevets de Grace ou de Commutation de
peine.
Liberté des Forçats.
Brevets d'Affurance.
Les Proviſions de Grand'Croix , Commandeurs
& Chevaliers de l'Ordre de Saint Louis , avec les
Lettres pour les faire recevoir.
Les Brevets de Penfions .
Les Etats au vrai des Recettes & Depenfes de
la Marine & des Galeres .
Les Ordonnances du Roy pour les Fonds de la
Marine , & autres qui s'expedieront fur le Trefor
Royal.
Les Lettres d'Anobliffement pour le fervice militaire
dans la Marine .
Celles de furannation fur l'Annobliffement.
Les Paffeports accordez par le Roy aux Vaiffeaux
Marchands dans les cas expliquez par l'Ediz
du mois de Fevrier 1716.
Les Lettres d'Etat.
Les Ratifications des Traitez.
Toutes les Ordonnances de Penfions ou de
Gratifications .
Tous les Ordres & Etats de décharge de la dépenfe
de la Marine & des Galeres qui paffent à la
Chambre des Comptes.
Les Ordonnances pour la levée & l'augmen
DE SEPTEMBRE. 75
ation des Troupes de la Marine & des Galeres.
Les ordres pour ouvrir & fermer les Ports .
Ceux pour caffer les Officiers , pour les rétablir
, pour les interdire , & pour lever l'interdi-
Яtion.
Les-Amnisties , & generalement toutes les Ordonnances
concernant les Officiers , Matelots &
Soldats des Vaiffeaux & des Galeres.
Les Ordres pour la conftruction , vente &
demolition des Vaiffeaux ou Galeres appartenant
à Sa Majesté.
XXVIII. Lorfqu'il fera remis au Secretaire d'Etat
des Expeditions pour eftre fignées par lui , il
lui fera delivré en même tems un Etat en forme
de Lifte , defdites Expeditions , figné par M. le
Comte de Toulouſe , lefquelles Liftes ainfi fgnées
demeureront au Secretaire d'Etat pour fa
décharge.
XXIX. En cas d'abfence ou de maladie de M.
le Comte de Toulouſe , qui le mette hors d'état
ou de portée de vacquer aux affaires , toutes les
fonctions à lui attribuées par le prefent Reglement
feront remplies & exercées par le Prefident
du Confeil , & au defaut dudit Sieur Prefident ,
par le premier des Confeillers qui feront prefens.
EDIT du Roy, donné au mois d'Aouſt 1720,
par lequel sa Majefté ordonne que dans les lieux
qui feront par Elle indiquez , il foit inceffamment
fabriqué fept cens cinquante mille Marcs de
laons & demis fols , à la taille de quarante au
Marc , deux pieces de remede par Marc , & pareille
quantité de Marcs de quarts de fols , à la
taille de quatrevingts au Mare , quatre pieces de
remede au Marc ; le tout fans retour , mais feulement
le fort portant le foible , le plus également
que faire fe pourra ; lefquels Flaons pourront
eftre monnoyez dans tous nos Hôtels de nos
Gij
76 MERCURE LE
Monnoyes , & porteront les mêmes Empreintes
que celle des fols de cuivre , figurez dans les
Cahiers attachez fous le Contrefcel de fes Edits .
des mois de May & de Juillet 1719. veut Sa Majesté
que lefdites Efpeces ayent cours dans tous
les lieux de fa domination , fçavoir , les demis
fols pour feize deniers piece , & les quarts de
fols pour huit deniers .
ARREST du Confeil du premier Septembre
1720 , par lequel S. M. ordonne que fon Edit
du mois d'Aouſt dernier fera excuté ſelon ſa forme
& teneur & en confequence a commis &
commet le Sieur Marandon pour recevoir les
fommes principales qui doivent provenir des
buit Millions de livres de Rentes alienez au denier
cinquante. Ordonne Sa Majesté que le principal
deftites Rentes fera payé en Billets de
Banque fur les Recepiffez dudit Sieur Marandon
, ou fur ceux des Receveurs des Tailles qui
feront par lui commis & prépofez , portant promeffe
de fournir dans un mois Quittance du Garde
du Trefor Royal en exercice , lefquels Rece-
. piffez ainfi délivrez aux Acquereurs desdites Rentes
, feront reprefentez aux Sicurs Intendans &
Commiflaires départis dans les Provinces & Generalitez
, ou à leurs Subdeleguez dans le Cheflieu
de l'Election , pour eftre par eux vifez , à
peine de nullité ; & feront les Billets de Banque
qui auront efté fournis pour l'acquifition defdites
Rentes , biffez en prefence des Porteurs , & par
eux timbrez Pour acquifition de Rentes fur les
Recettes Generales , & le Sieur Marandon tenu
d'en compter ainfi qu'il fera ordonné par Sa
Majefté.
ARREST du Confeil du 2 Septembre 1720 ,
portant qu'il fera fabriqué pour cinquante MitDE
SEPTEMBRE. 778
lions de Billets de cinquante liv . & de dix liv.
SENTENCE du 6 Septembre 170 , qui condáinne
la femme du nommé Gaydon , Maistre
Chandelier , en cent liv. d'Amende , avec confifcation
de fa chandelle , & le nommé Girard ,
Jure Chandelier , en cinq cens livres d'amende ,
& le deftitue de ſa Jurande , & du droit d'ancienneté
.
Portant auffi défenfes à tous particuliers de receler
chez eux de la chandelle , à peine d'amende
& de confiſcation .
ARREST du Confeil du 7 Septembre 1720 ,
pour le remboursement des Creanciers de la
Communauté des nouveaux Vendeurs de vin à
Paris .
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S M. ordonne qu'à l'avenir , & à commencer
pour la prefente année 1720 , les Receveurs
des Tailles des vingt Generalitez des Pays
d'Election , & les Receveurs particuliers des Provinces
d'Alface , Metz , Franche Comté , Flandres
, Haynaut & Rouffillon , porteront directe.
ment au Trefor Royal les fonds provenants des
Impofitions des Tailles , Capitations , & autres
Impofitions extraordinaires , deduction faite des
Gages des Officiers & autres charges , qui feront
employez dans les Eftats qui feront arreſtez pour
le payement defdits gages & charges .
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S. M. ordonne que les Augmentations
de gages appartenans aufdites Communautez des
Ports , Halles , Quays & Marchez de la Ville de
Paris , fupprimées par Edit du mois de septembre
1719 , continueront de leur eftre remboursées par
le Garde du Trefor Royal , ainfi & de la même
G iij
78 LE MERCURE
maniere-qu'auparavant l'Arreft du Confeil du 2
Aouft dernier , & nonobftant ce qui eft porté par
icelui , auquel S. M. a derogé & deroge pour
cet égard feulement , & fans tirer à confequence,
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S. M. ordonne que l'Arreft du Confeil'
du 25 Aouft dernier fera executé felon fa forme
& teneur , & en confequence , que toutes les Parties
dont la Reduction a efté ou dû eftre faite fur
le pied du denier vingt- cinq , en execution de
l'Edit du mois de Janvier 1716 , demeureront
reduites au denier cinquante , à commencer du
premier Janvier dernier ; & que l'emploi en fera
fait fur ce pied dans les Etats qui feront arreſtez
à l'avenir ; & à l'égard de celles qui fe trouvent
compriſes dans les Eftats qui ont efté arreſtez
pour la prefente année 172c . Ordonne Sa Majefté
qu'elles ne feront payées que fur le pied
du denier cinquante , & que l'Excedent fera porté
au Trefor Royal en vertu du prefent Arreſt.
ARREST du Confeil du 13 Septembre 1720,
qui ordonne que les Billets de dix mille livres
& de mille livres , retirez du Public , pour la fomme
de cent millions , feront inceffamment portez
en l'Hoftel de Ville de Paris , pour y eftre brulez
en la maniere accoutumée .
ARREST du Confeil du 10 Septembre 1720 ,
par lequel S. M. accepte les offres de la Compagnie
des Indes , En confequence a fubrogé &
fubroge la lite Compagnie aux droits , noms
raifons & pretentions appartenant à la Compagnie
de Saint- Domingue tant en France qu'à l'Amerique
& autre, lieux ; lefquels Droits ont efté re
trocedez à Sa Majefté par ladite Compagnie de
Saint- Domingue , par Acte paffé le 2 Avril der-
›
DE SEPTEMBRE. 79
nier pardevant Verani & de Mahault Notaires , à
condition que le recouvrement defdits droits
pourra eftre fait au nom de S. M. & aux conditions
compriſes au Memoire inferé en la deliberation
de ladite Compagnie des Indes , annexée à
la Minute du prefent Arreft : à la charge toutefois
par ladite Compagnie des Indes , de payer'
fuivant les offres la fomme de fix millions d'une
part , qui fera remife à le Fevre Notaire , pour
eftre par lui diftribuée ainsi qu'il fera ordonné
par Sa Majefté ; & celle de quarante fept mille
neuf cens cinquante deux liv. neuf fols deux deniers
d'autre part , pour pareille femme dûe à
S. M. par ladite Compagnie de Saint - Domingue ,
laquelle fomme fera payée par ladite Compagnie.
des Indes au fieur GaudionTreforier de la Marine,
Extrait des Regiftres du Conseil d'Etat.
E Roi
LE
ayant fait examiner dans fon Confeil
l'eftat du Credit public , des Changes étran
gers , des Monnoyes de fon Royaume , & du prix
des Denrées ; S. M. a jugé qu'il convenoit de
prendre un arrangement general , tant par rapport
aux Efpeces , Billets de Banque , Actions de la
Compagnie des Indes & Comptes en Banque, que
pour l'ordre des payemens : Au moyen de quoy
S. M. fe propofe d'augmenter la circulation , &
procurer la diminution des Denrées : A quoi voulant
pourvoir , ouy le Rapport. Sa Majesté étant
en fon Confeil , de l'avis de Monfieur le Due
d'Orleans Regent , a ordonné & ordonne.
ART. I. Que l'Arreft de fon Confeil du 30 Juillet
dernier fera executé felon fa forme & teneur
& en confequence que les diminutions fur les
Efpeces indiquées par icelui , auront leur plein
& entier effet.
II. Veut Sa Majesté qu'à commencer du jou
Giiij
80 LE MERCURE
de la publication dú prefent Arreft , & jufqu'au
premier Octobre prochain , les Billets de Banque ..
de 1000 liv . & de 10000 liv. ne puiffent eftre
donnez en payement , tant dans les Bureaux de
fes Recettes & Fermes, que de particulier à particulier
, qu'avec moitié Efpeces : à l'exception
neanmoins des dettes anterieures au jour de la
publication du prefent Arreft , lefquelles pourfont
eftre acquittées en entier en Billets de 1000
liv . & de 10000 liv . fuivant l'Arreft du Aouft
dernier, & ce jufqu'au premier O&obre prochain
exclufivement , après lequel jour lefdits Billets
feront hors de cours , & ne feront plus reçus
que dans les débouchez & pendant le tems indiquez
par ledit Arreſt .
III. Veut pareillement S. M. qu'à commencer
du jour de la publication du préfent Arreſt , les
Billets de Banque de 100 liv. de so liv. &. de 10
liv . ne foient reçus dans les Recettes de S. M. &
Bureaux de fes Fermes , & de particulier à particulier
, en payement des fommes de vingt livres
& audeffus , qu'avec moitié Efpeces , & pour les
fommes au deffous de vingt liv . le payement ne
pourra eftre fait qu'en Efpeces.
IX . Ordonne S. M. que les Billets de Banque
de cent , de cinquante , & de dix liv . feront reçus
en total & fans Efpeces , tant en payement des
dettes contractées anterieurement à la publication
du prefent Arreft , qu'en acquifition de Rentes
fur les Aydes & Gabelles , tant perpetuelles que
viageres , créées par Edits des mois de Juin &
Aouft derniers , où des Rentes créées fur les Recettes
generales par autre . Edit auffi du mois
d'Aouft dernier , & ce jufqu'au premier Novembre
exclufivement, après lequel terme lefdits Billets
de cent , de cinquante & de dix liv . ne ſesont
reçûs en entier , & fans Efpeces , que pour
l'acquisition defdites Rentes , fauf à continuer
DE SEPTEMBRE. 81
de les donner en payement avec moitié Efpeces
fuivant l'Article precedent.
V. N'entend S. M. comprendre dans le prefent
Reglement les Payeinens ftipulez en Efpeces , conformément
à l'Arreft du 15 Aouft dernier , lefquels
feront faits fuivant lefdites ftipulations ,
niles Lettres de Change , Billets de Commerce .
& ventes de marchandiſes en gros , qui feront
acquittées en Comptes courans en Banque , ainfi
qu'il a efté ordonné par l'Arreſt du 13 Juillet
dernier.
VI. Veut S. M. qu'à compter du jour de la publication
du prefent Arreft, les fommes écrites en
Comptes courans en Banque foient & demeurent
fixées au quart de la valeur pour laquelle elles y
ont efté portées , fi mieux n'aiment les Proprietaires
defdites fommes les retirer en Billets de Banque
de mille & de dix mille liv. ce qu'ils feront
tenus de faire en ce cas dans le cours du prefent :
aprés quoi ils n'y feront plus reçûs.
VII. Les Actions de la Compagnie des Indes
remplies feront fixées à l'avenir fur le pied de 2000
liv. en Comptes en Banque , eû égard à la fixation
portée par l'Article precedent,& pourront en tout
tems eftre converties en Viremens ou Comptes en
Banque fur ledit pied de 2000 liv . & pareillement
ceux qui auront credit en Banque pourront acquerir
de ladite Compagnie des Actions fur le même
pied de 2000 liv . monnoie de Banque , ainfi
qu'il eft dit ci deffus. Pourront neanmoins les
Particuliers qui auront des Actions ou des Comptes
en Banque , les negocier contre argent courant
ou Billets de Banque , de gré à gré , ainſ
qu'ils le jugeront à propos.
VIII. Sa Majefté a permis à la Compagnie des
Indes de faire cinquante mille nouvelles Actions
en cinq cens mille Billets d'un Dixième d'Action
hacun , qui feront Numerotez depuis le N.
82 LE MERCURE
jufques & compris le N. 500000. faifant lefdites
cinquante mille nouvelles Actions , avec les
200000. ordonnées par l'Arreft du 3 Juin dernier,
la quantité de 250000 Actions ; pourront lefdits
Dixièmes d'Actions eftre acquis fur le pied de 800
liv. chacun en Billets de 100 , de so , & de 1ò liv.
ou eftre convertis en Virement ou Compte en
Banquefur le pied & à proportion des Actions entieres
, & le Dividende defdits Dixiémes d'Aétions
fera de 36 livres par an , à raiſon de 360
liv . l'Action.
IX. Les foufcriptions ordonnées par les Arreſts
des 31 Juillet & 14 Aouft derniers , feront reçues
fur le pied de 1000 liv. en acquifition de Dixiémes
d'Actions , qui feront fournis par la Compagnie
des Indes , à raiſon de 800 liv . chacun , fi
mieux n'aiment les Porteurs des Soufcriptions les
remplir ,fuivant qu'il eft ordonné par l'Arreft du
Is du même mois d'Aouft.
L
X. Veut S. M. que le montant des Actions , Dixièmes
d'Actions & Comptes en Banque , ne
puifle exceder la fomme de cinq cens Millions
Monnoye de Banque : A l'effet de quoi il reftera
toujours en dépot à la Compagnie des Indes une
partie defdites 250000 Actions , égale au montant
du Credit en Banque fur le pied de 2000 liv .
l'Action & lorfque la lite fomme de cinq cens
Millions fe trouvera remplie , tant en credit qu'en .
Actions , S. M. fait tres expreffes défenſes aux
Directeurs d'en recevoir audelà , à peine de
répondre de l'excedent en leur propre & privé
nom,
i.
XI. Le Prevoft des Marchands de la Ville de
Paris , affifté de l'ancien Echevin de ladite Ville,.
tiré du Corps des Marchands , qui par l'Article
onziéme de l'Arreft du treize Juillet dernier a
l'infpection generale des Ecritures , pourra ſe faire
reprefenter , toutes les fois qu'il le jugera à preDE
SEPTEMBRE. 35
-
pos , les Actions qui feront en depoft à la Compagnie
pour le montant du Credit en Banque , à
l'effet d'examiner fi la quantité defdites Actions
dépofées eft égale au montant dudit Credit , dont
il dreffera Procès verbal, qui fera figné par le Depofitaire
chargé par la Compagnie de la garde
defdites Actions , & par les Directeurs de ladite
Compagnie qui auront ce Departement .
XII. Les Repartitions qui demeureront entre
les mains de la Compagnie des Indes pour la valeur
du credit qu'elle aura donné à ceux qui auront
converti des Actions en Ecritures & Compres
en Banque , accroiftront à ceux qui feront
reftez Actionnaires , & feront partagées entre eux
à proportion de leur intereſt dans ladite Compagnie.
XIII . Sa Majesté voulant mettre un taux fixe
& certain au payement des droits d'entrée & fortie
de fon Royaume , & éviter les pertes caufées
par la foibleffe des Monnoyes , Elle ordonne qu'à
commencer au premier Octobre prochain , lefdits
droits feront acquittez en Ecritures en Ban
que , fans augmentation ni diminution du prix
des Baux des Fermes de Sa Majesté
XIV. Toutes Lettres de Change , Billets dé
Commerce & Ventes de Marchandifes en gros ,
faites avant la publication du prefent Arreft , ou
auparavant qu'il ait pu être connu dans les Pays
Etrangers , & qui fuivant l'Arreft du 13 Juillet
dernier doivent être payées en Ecritures en
Banque , feront acquittées en nouvelles Ecritures
, fur le pied du quart auquel elles font fixées
par l'Article VI. du preſent Arreſt ; au
moyen duquel quart , la fomme totale portée
par lefdites Lettres de Change , Billets de Commerce
& Ventes de Marchandifes en gros fera
acquittée en entier .
XV. Les Billets de Cent , de Cinquante &
84
LE MERCURE
de Dix livres qui feront employez , tant en aequifition
de Rentes qu'en acquisition de Dixiémes
d'Actions , feront biffez & brûlez en l'Hôtel
de Ville de Paris , en la forme preferite par
les Arrefts du Confeil precedemment rendus ;
Et pour l'execution du prefent Arreft feront expediées
toutes Lettres Patentes à ce neceffaires .
Fait au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majellé y
étant , tenu à Paris le quinziéme de Septembre
mil fept cent vingt . Signé , PHELY PEAUX.
ARREST du Confeil du 18 Septembre
1720 , par lequel Sa Majesté ordonne que les .
Particuliers qui voudront en execution de l'Art .
6. de l'Arreft du 15 du prefent mois , retirer
les fommes qu'ils ont en Comptes e .. Banque ,
tant à Paris que dans les Villes de Provinces
où leflits comptes ont été établis , feront tenus
de paffer écritures au compte de la Compagnie
des Indes pour la partie qu'ils voudront reti
rer, pour valeur de laquelle il leur fera déli
vré à Paris & à Lyon un Certificat en leur nom
du montant de ladite Partie , figné des Dire-
Aeurs , vifé du Controlleur , & certifié par les
Prevost des Marchands defdites Villes ; & dans
les autres Villes un Certificat figné des Directears
defdits comptes en Banque , & vifé par
les Intendans & Commiffaires départis dans les
Provinces , lefquels Certificats feront reçûs jufqu'au
dernier Octobre prochain inclufivement
comme Billets de Banque , pour acquifition de
Rentes fur les Aydes & Gabelles , tant perpetuelles
que viageres , créées par Edits des mois.
de Juin & d'Aouft derniers , ou des Rentes fur
les Recettes generales créées par autre Edit dudit
mois d'Aouft , après lequel jour dernier
Octobre prochain lefdits Certificats ne feront
plus reçûs ; & en remettant par le Garde du TreDE
SEPTEMBRE. 59
<
for Royal lefdits Certificats à la Caiffe de la Compagnie
des Indes , la valeur lui en fera fournie
en Billets de mille & de dix mille livres biffez
lefquels feront enfuite brûlez en l'Hôtel de Ville
de Paris en la maniere prefcrite par les Arreſts
cy devant rendus . Veut Sa Majesté que lesdits
Certificats qui n'auront pas été portez au dernier
Octobre prochain en acquifition desdites Rentes,
foient convertis en Actions Rentieres ou Dixiemes
d'Actions Rentieres fur la Compagnie des
Indes , ainfi qu'il a été ordonné par l'Arreft du
15 Aouft dernier pour les Billets de Banque de
mille & de dix mille livres , lequel Arreſt aura
le même effet pour lefdits Certificats .
ARREST du Confeil du 19 Septembre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne que la
fabrication des Billets de cinquante livres ordonnée
par l'Arreft du 2 du prefent mois fera
continuée pour cinquante millions , compofant
mille Regiftres de mille Billets chacun , numerotez
depuis le numero joooo , jufques & compris
le numero 100000 , lefquels Billets de
cinquante livres ne feront point fignez à la main,
mais feulement en ca acteres d'impreffion au nom
du fieur Delanauze pour le fieur Bourgeois Treforier
de la Banque , du fieur Giraudeau pour fe
fieur Fenellon Infpecteur , & du fieur Graner
pour le fieur Dureveft Controlleur , fcellez du
Sceau de la Banque , & timbrez de ces mots imprimez
, Divifion ordonnée par Arrest du 2 Septembre
1729 , & ne ferviront uniquement , ainfi
que les vingt cinq millions cy devant fabriquez
& diftribuez dans le Public , qu'à couper les
Billets de dix mille livres & de mille livres , &
à payer le dixiéme des fommes qui feront placées
dans les differens emplois cy devant indiquez.
Veut Sa Majesté qu'au fur & à mesure qu'i
86 LE MERCURE
fera delivré defdits Billets de cinquante livres ,
ceux de dix mille livres & de mille livres , en
échange defquels ils auront été donnez , foient
fur le champ b ffez en prefence des Parties , &
enfuite brûlez en l'Hôtel de Ville de Par s avec
les formalitez ordinaires & prefcrites par les Arrefts
qui ont été precedemment rendus à te fu et :
Veut au furplus Sa Majefté que les cinquante
millions de billets de cinquante livres ordonnez
par le prefent Arreft du 2 du prefent mois , ayent
le même cours dans le public que ceux de cent
& de dix livres cy devant fabriquez .
ARREST du Confeil du 19 Septembre 1720 ,
par lequel Sa Majesté permet à la Compagnie des
Indes de continuer la converfion en actions de
ladice Compagnie non remplies , pendant le
cours du prefent mois de Septembre feulement ,
des Actions d'Occident , Soufcriptions , Primes
& Promeffes , fur le pied & de la maniere qu'il
s'eft pratiqué avant l'Arreft du 3 Juin dernier.
Veut Sa Majefté qu'après le dernier jour dudit
mois de Septembre , lefdites Actions d'Occident,
Soufcriptions , Primes & Promeffes qui n'auront
pas été converties , demeurent nulles ; Fait défenfes
de les negocier , à peine de reſtitution &
de trois mille livres d'amende.
ARREST du Confeil du 21 Septembre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne qu'à commencer
du jour de la publication du preſent Arreft
, les Liards de France ne feront plus expofez
dans tout le Royaume que pour fix deniers piece,
au lieu de huit qu'ils valent actuellement : Les
Pieces dites de fix deniers , pour douze deniers ,
au lieu de feize ; Les fols de cuivre pour vingtquatre
deniers au lieu de trente- deux deniers ,
es demis & quarts de fols à proportion ; Les
DE SEPTEMBRE . 87
4
Tols ou douzains de Billon , pour trente - deux
deniers au lieu de trois fols fix deniers ; Les
Pieces dites de trente deniers ou Moufquetaires ,
pour trois fols neuf deniers au lieu de cinq fols ;
& que les Phenins qui ont cours en Alface pour
douze denies , y feront reduits à neuf deniers
les demis à proportion ; fur lequel pied toutes
Jefdites efpeces refteront jufqu'à ce qu'il plaife
à Sa Majefté de les reduire à leur jufte valeur.
ई
EDIT du Roy , donné au mois d'Août 1720..
Regiftré en la Chambre des Comptes , par lequel
Sa Majesté ordoane ce qui fuit. Nous avons
créé & érigé , & par le prefent Edit créons &
érigeons en titres d'Offices formez & hereditaires
, deux nos Conſeillers Treforiers Receveurs
Generaux & Payeurs des Rentes fur l'Hôtel de
Ville de Paris , Receveurs des Confignations ,
Dépofitaires des Debers de Quittances , Commiffaires
aux Rentes faifies réellement , Greffiers
des Feuilles & Immatricules & principaux Commis
y joints , & deux nos Confeillers - Controlleurs
Generaux defdits Payeurs , lefquels feront
à commencer de la prefente année la Recette
le Payement & le Controlle defdites Rentes viageres
créées par
noftre Edit du prefent mois
fuivant les Etats de diftribution qui en feront
arreftez tous les ans en notre Confeil ; à l'effer
de quoy lefdites Rentes viageres feront partagées
en deux Parties que Nous avons établies
& établiffons par notre prefest Edit , pour faire
avec les douze établies par autre notre Edit da
mois de Juin dernier , le nombre de quatorze
Parties : Attribuons à chacun des Payeurs créez
par notre prefent Edit , trois mille fept cens
cinquante livres de gages effectifs , & pareille
fomme de trois mille fept cens cinquante livres
par forme de taxations , frais & droits d'exer,
88 LE MERCURE
cice ; enfemble pour les façons , vacations &
frais de reddition de compte , & à chacun des
Controlleurs douze cens cinquante livres de gages
effectifs , & fept cens cinquante livres de
droits d'exercice ; defquels gages , taxations &
droits d'exercice , l'employ fera fait dans les
Etats de diftribution defdites Rentes : Entendons
que l'acquifition des gages defdits Offices de
Payeurs & de Controlleurs foit faite à raifon
du denier quarante de la Finance , & que les
acquereurs joüiffent defdites taxations & droits
d'exercice fans payer aucune Finance : Voulons
en outre que lesdits Payeurs & lefdits Controlleurs
joüiffent du droit de Committimus en nos
grande & petite Chancelleries , & de tous les
autres droits , fonctions , exemptions , privile
ges & prerogatives attribuez cy devant aux
Payeurs & Controlleurs des Rentes dudit Hôtel
de Ville , par differens Edits , Declarations &
Arrefts de notre Confeil , de la même maniere
que s'ils étoient plus amplement ſpecifiez par
notre prefent Edit.
ARREST du Confeil du 31 Aouft 1720 ,
par lequel Sa Mjefté ordonne que tous les Creanciers
des Etats de Bretagne , pour arrerages de
conftitution de Rentes , appointemens , gages ,
gratifications , ou fous tels autres titres que ce
puiffe eftre , feront tenus de recevoir ce qui leur
eft du par lefdits Etats avant le quinzième de
Septembre de la prefente année , paflé lequel
temps les fommes deſtinées à leur payement demeureront
par forme de confignation entre les
mains du fieur de Montaran , Treforier defdits
Etats , aux rifques , defdits Creanciers , fans
qu'ils puiffent prétendre d'eftre payez dans la
fuite en autres efpeces qu'en Billets de Banque de
10000 1. & de 1000 liv. pour les parties qui feront
defdites
DE SEPTEMBRE. 89
A
defdites fommes & au deffus ; & en Billets de
Banque de cent livres & de dix livres pour les
Parties qui fe trouveront au deffous de mille
livres. Ordonne en outre Sa Majefté que les
Particuliers qui feront employez pour arrerages
de conftitution de Rentes , appointemens , gages
, gratifications , ou fous tels autres titres
que ce puiffe eftre , dans l'état de fonds qui
doit eftre arrefté dans la prochaine affemblée
pour les dépenfes des années mil fept cent vingt,
mil fept cent vingt un , & mil fept cent vingtdeux
, feront tenus de recevoir leur payement
dans le mois , à compter de l'écheance du terme
auquel ils auront été affignez dans ledit état à
& que faute par ceux dont le payement aura
été affigné , de le recevoir dans le courant dudit
mois , les fonds deftinez audit payément demeureront
par forme de confignation entre les mains
du Treforier defdits Etats , à leurs rifques , fans
qu'ils puiffent prétendre d'être payez autrement
qu'en efpeces qui avoient cours alors , & fur le
même pied qu'elles étoient reçues dans le Public.
Enjoint Sa Majefté aux Treforiers defdits Etatsde
fe conformer à l'execution du prefent Arreſt,
H
90 LE MERCURE
DECLARATION
DU ROY ,
Touchant la conciliation des Evêques du
Royaume , au fujet de la Conftitution
UNIGENITUS.
Donnée à Paris le 4. Aouſt 1720 .
Lo
OUIS pár la grace de Dieu Roy de France
& de Navarre : à tous ceux qui ces pre
fentes Lettres verront , Salut . Dés le temps de
mor e avenement à la Couronne , nous avons crû
que notre principal devoir étoit de confacrer à
la Religion le premier ufage de notre Puiffance ,
& de meriter le titre glorieux de Fils aîné de
l'Eglife , qui Nous diftingue entre les Rois , en
failant fervir notre autorité à appaifer les troubles
qui s'étoient élevés dans notre Royaume ,
au fujet de la Bulle donnée par N. S. P. le Pape,
contre le Livre intitulé , Reflexions morales fur
le Nouveau Teftament : Notre tres cher & tresamé
Oncle le Duc d'Orleans Regent de notre
Royaume , a feconde la fincerité de nos voeux,
par l'étendue de fes lumieres , au milieu des
foins qu'exigeoient de lui des conjonctures difficiles
il a toujours regardé une paix fi defirable
> comme l'objet le plus digne de fon attention
& c'eſt à la perfeverance de fes tra
vaux que nous devons la fatisfaction de pouvoir
annoncer aujourd'hui à tous nos Sujets la fin
d'une divifion , dont les fuites dangereuſes al-
Larmoient également ceux qui aiment veritables
›
DE SEPTEMBRE.. 91
>
ment l'Eglife , & ceux qui font fincerement attachez
aux interêts de l'Etat ; des explications
dreffées dans un efprit de concorde & de charité
pour empêcher que l'on n'abufe de la Bulle
par des interpretations fauffes & contraires à
fon veritable fens ont été unanimement approuvées
par tous les Cardinaux , tous les Archevêques
& prefque tous les Evêques de notre
Royaume ceux qui avoient déja accepté la
Conftitution ont attefté autentiquement dans la
Lettre qu'ils ont écrite à notre tres cher & tresamé
Oncle le Duc d'Orleans , que ces explications
étoient conformés à la doctrine de l'Eglife,
à celle de la Bulle & de l'Intruction Paftorale
publiée en 1714. & la plupart des Prelats
qui jufques icy avoient fufpendu leur acceptation
, ont adopté ccs mêmes explications pour
les prefenter à leur peuple en acceptant la Bulle,
comme renfermant fon veritable feus ; ainfi
Nous avons la confolation de voir les troubles
qui affligeoient l'Eglife de France , calmez , les
doutes éclaircis , les conteftations fur l'acceptation
de la Bulle finies , la paix fi ardemment
defirée par le feu Roy notre Bifayeul enfin rendue
aux Eglifes , & la Conftitution UNI GENITUS
accompagnée d'explications fi autentiques
, que ceux qui avoient eu jufqu'icy des
peines & des difficultez , ne pourront plus hefiter
à s'y foumettre & à fe conformer à la
voix & à l'exemple de leurs rafteurs . Dans ces
circonstances notre zéle pour la Religion &
pour le bien de l'Eglife , le refpect filial dont
Nous fommes remplis à l'exemple de nos Predeceffeurs
, pour N. S. P. le Pape , la confiance
que Nous avons dans les lumieres des Evêques
du Royaume , le foin que Nous devons avoir
de rétablir l'ordre & fa tranquillité dans nos
Etats , ne fouffrent pas que Nous differions de
>
,
Hij
92 LE ME R CURE
:
mettre le Sceau de notre autorité à une paix fí
precieufe , & de prendre en même tems toutes
les précautions convenables , pour étouffer les
anciennes femences de difcorde , empêcher que
l'inquietude , le faux zéle & l'efprit de parti
n'en faffent naître de nouvelles , & maintenir
dans l'Eglife une fubordination auffi jufte que
neceffaire Nous entrerons par là dans les fentimens
du feu Roy notre tres honoré Seigneur
& Bifayeul , lorfqu'il a donné fes Lettres Patentes
du 14, Fevrier 1714 & Nous efperons
que tous les Prelats de l'Eglife de France , fe
reüniffant dans le même efprit , la fageffe & la
charité de leur conduite acheveront , & confirnieront
pour toujours l'ouvrage de leur zéle
pour la verité & de leur amour pour la paix.
A CES CAUSES , après Nous avoir fait reprefenter
les Lettres Patentes du 14. Fevrier
1714. les Arrêts d'Enregistrement defdits Lettres
en notre Cour de Parlement de Paris , & autres
Parlemens & Cours de notre Royaume , l'Inftruction
publiée en 1714. les Explications fur
la Bulle UNIGENITUS la Lettre approbative
defdites Explications , fignée par tous les
Cardinaux , tous les Archevêques , & prefque
tous les Evêques de l'Eglife.de France , enfemble
tous les Mandemens ou Actes d'acceptation
defdits Evêques de l'avis de notre tres cher
& tres - amé Oncle le Duc d'Orleans petit - Fils
de France Regent ; de notre tres cher & tres amé
Oncle le Duc de Chartres premier Prince de
notre Sang ; de notre tres cher & tres- amé Coufin
le Duc de Bourbon ; de notre tres- cher &
tres amé Coufin le Comte de Charollois ; de
notre tres- cher & tres amé Coufin le Prince de-
Conty , Princes de notre Sang ; de notre trescher
& tres- amé Oncle le Comte de Toulouſe
Prince legitimé , & autres Pairs de France
,
DE SEPTEMBRE. 55
Grands & Notables Perfonnages de notre Royau,
me, Nous avons par notre prefente Declaration ,
dit , ftatué & ordonné , difons , ftatuons & ordonnons
, voulons & Nous plaift ce qui fuit.
ARTICLE PREMIER .
Confirmant en tant que befoin feroit par ces
Prefentes fignées de notre main , les Lettres Patentes
du 14. Fevrier 1714. enſemble les Arrêts
d'enregistrement defdites Lettres , tant de notre
Cour de Parlement à Paris du 15. Fevrier audit
an , que des autres Parlemens & Cours de notre
Royaume Ordonnons que lesdites Lettres Patentes
& lefdits Arrêts d'Enregistrement foient
executez felon leur forme & teneur ; ce faifant,
que la Constitution UNIIGENITUS reçue par les
Evêques de notre Royaume , foit obfervée dans
tous les Etats , Pays , Terres & Seigneuries de
notre obéiffance ; & en confequence défendons à
Tous nos Sujets de quelque état , qualité & condition
qu'ils foient , à tous Corps, Communautez &
Perfonnes feculières ou regulieres , exemptes &
non exemptes , de quelque Ordre , Congregation
oa Societé qu'elles foient même aux Univer
fitez de notre Royaume , & notamment aux Fa
cultez de Theologie , de rien dire , écrire , foutenir
, enfeigner , debiter & diftribuer directement
ou indirecter ent foit contre la Conftitution ,
foit contre l'Inftruction Paſtorale publiée dans
l'Affemblée de 1714. & adoptée par plus de cenz
Evêques de France , & contre les explications
fur la Bulle UNIGENITUS approuvées par lefdits
Cardinaux , Archevêques & Evêques de notre
Royaume , comme conformes à la doctrine de
l'Eglife & au veritable fens de la Bulle.
II.
>
Defirant proteger l'unanimité des Evêques
& allurer dans leurs Diocefes une paix fi neceffaire
au rétablillement du bon ordre & de la
94 LE MERCURE
difcipline Canonique , faifons pareillement tres
expreffes inhibitions & défenfes de faire directement
ou indirectement aucun acte contre la Con -`
&
ftitution & d'en interjetter appel au futar
Concile , fous quelque pretexte que ce puiffe
être ; voulons pour afferinir à l'avenir ladite
union , que les Actes precedemment faits ,
les appels cy devant interjettez , foient regardez
comme de nul effet ; Défendons à tous nos Sujets
de s'en fervir en quelque maniere que ce puiffe
être 2
& à nos Juges d'y avoir aucun égard
moyennant quoi , il ne pourra être permis d'a
gir en quelque maniere que ce foit , ni de faire
ou continuer aucunes pourfuites ou procedures
pour raifon defdits Actes & Appels , & de tout
ce qui s'eft paffé à ce fujet ; exhortons & neantmoins
enjoignons aux Archevêques & Evêques
de notre Royaume , de tenir la main à l'execu
tion des prefentes difpofitions dans l'efprit de
paix & de charité , dont ils Nous ont donné
tant de preuves en cette occafion ; Enjoignons
à nos Cours de Parlement d'obferver & de faire
obferver inviolablement tout le contenu en cet
Article , nommément en ce qui regarde les Ap ..
pels & de declarer nul & abufif tout ce qui
pourroit être fait au prejudice des Prefentes ;
N'entendons par le prefent Article donner at
teinte aux regles de l'Eglife & aux maximes du
Royaume fur le droit d'appeller au futur Concile.
>
III.
28
Voulant arrêter la licence avec laquelle on a
répandu divers Ecrits contraires à l'autorité &
à la doctrine de l'Eglife , & aux maximes inviolablement
obfervées dans notre Royaume ,
réprimer la temerité des efprits turbulents , indociles
& fans regles , qui fe font fervis des dernieres
difputes , foit pour renouveller les erreurs
de Janfenius , foit pour attaquer l'autorité de
DE SEPTEMBRE.
95
"
l'Eglife , foit pour autorifer des maximes contraires
à celles du Royaame , aux droits de l'Epifcopat
, & aux Libertez de l'Eglife Gallicane
ou des principes d'une Morale relâchée , Nous
voulons que les Ordonnances des Rois nos Predeceffeurs
, & les nôtres , concernant la Police ,
la Difcipline Ecclefiaftique , & l'execution des
Jugemens de l'Eglife en matiere de Doctrine ,
foient executées felon leur forme & teneur "
notamment les Lettres Patentes fur les Bulles
des Papes Innocent X. & Alexandre VII . contre
le Janfenifme , l'Edit du mois d'Avril 1665. fur
la fignature du Formulaire , les Lettres patentes
du 31. Aoult 1705. fur la Bulle de N. S. P. le
Pape , qui commence par ces mots VINE AM
DOMINI
SABAOTH. N'entendons neanmoins
qu'il puiffe être exigé directement ni indirectement
aucunes nouvelles Formules de foufcriptions
, à l'occafion des Bulles des Papes qui
ont été reçûes dans notre Royaume , n'étant pas
permis d'en introduire fans Deliberation des
Evêques revêtue de notre autorité .
IV .
,
Les Ordonnances , Edits & Declarations donnez
par les Rois nos predecefleurs fur la Jurif
diction Ecclefiaftique , & fpecialement l'Article
XXX. de l'Edit du mois d'Avril 1695. feront
executez felon leur forme & teneur & em
confequence , la connoiffance & le jugement de
la Doctrine concernant la Religion appartiendra
aux Archevêques & Evêques , & leurs jugemens
à cet égard feront executez contre toutes Communautez
& Perfonnes feculieres ou regulieres
exemptes ou non exemptes , fans que tout ce qui
pourroit avoir été fait ou entrepris au contraire,
pendant le cours des dernieres difputes , puiffe
nuire ni préjudicier à la Jurifdicton des Evêques
ni rien innover à cet égard . Enjoignons
$6 LE MERCURE
"
à nos Cours de Parlement & à tous autres nos ·
Juges conformément audit Article XXX . de
l'Edit du mois d'Avril 1695. de renvoyer aux
Evêques la connoiffance & le jugement de la
Doctrine , de leur donner l'aide dont ils auront
befoin pour l'execution des Cenfures qu'ils en
Fourront faire , & de proceder à la punition des
coupables , fans préjudice à nofdites Cours &
Juges , fuivant ledit Article XXX . de pourvoir
par les autres voyes qu'ils eftimeront convena ..
bles , à la réparation du fcandale & trouble de
l'ordre & tranquillité publique , & contravention
aux Ordonnances que la publication de ladite
Doctrine auroit pâ caufer.
V
Voulons que les Arrêts du 13 May 1668. &
f . Mars 1703. foient executez felon leur forme
& teneur ; & en confequence , défendons tresexpreffément
à tous nos Sujets de quelque état
& qualité qu'ils foient , de s'ataquer ni provo
quer les uns les autres par des termes injurieux
de Novateurs , Janfeniftes , Schifmatiques , Heretiques
& autres noms de party ; le tout à peine
contre ceux qui contreviendront à notre prefente
Declaration , d'être traitez comme rebelles
défobéiffans à nos ordres , feditieux & perturbateurs
du repos public. Exhortons , & neanmoins
enjoignons à tous les Archevêques & Evêques
de notre Royaume , de veiller chacun dans leur
Dioceſe › à ce que la paix & le filence que
Nous prefcrivons par ces Prefentes , foient charitablement
& inviolablement obfervez . Enjoignons
auffi à nos Cours de Parlement & à tous
nos Juges & Officiers chacun en droit foi ,
tenir la main à l'execution des Lettres Patentes
du 14. Fevrier 1714. & de notre prefente Declaration
, notamment au fujer des Livres & Libelles
; Faifons tres expreffes inhibitions & déde
fenfes
DE SEPTEMBRE. 97
1
*
Fenfes d'en compofer , vendre , debiter , ou au-,
trement diftribuer , fur tout de ceux qui feroient .
contraires au reſpect qui eft dû à Ñ. S. P. le
Pape & aux Evêques de notre Royaume , ou aux
Libertez de l'Eglife Gallicane , ou qui attaque.
roient directement ou indirectement ladite Conftitution
, l'Inftruction de 1714. & lefdites Explications
, ou qui feroient faites en faveur du
Livre des Reflexions Morales , & des Propofitions
condamnées & generalement tous ceux qui regarderoient
les conteftations qui viennent d'être
terminées , fur lesquelles Nous impofons un filence
general Voulons qu'à la Requête de nos Procureurs
Generaux & de leurs Subfticuts , il foit
informé contre ceux qui auroient compofé ,
vendu , debité ou autrement diftribué des Livres
, Libelles & Ecrits contraires aux Prefences ,
lefquels feront punis felon la rigueur des Ordonnances
, & lefdits Livres , Libelles ou Ecrits ,
fupprimez , même lacerez ou brûlez , s'ils y échet .
SI DONNONS EN MANDEMENT à nos amez & feaux
Confeillers les Gens tenans notre Grand Confeil
à Paris , que ces Prefentes ils ayent à faire lire ,
publier & enregistrer , & le contenu en icelles
garder & obferver felon leur forme & teneur
fans y contrevenir , ni fouffrir qu'il y foit contrevenu
en quelque forte & maniere que ce puiffe
être : CAR tel eft notre plaifir . DONNE' à Paris
le quatrième jour d'Août , l'an de grace mil
fept cent vingt , & de notre Regne le cinquième.
Signé , LOUIS ; Et plus bas , Par le Roy , LE Duc
D'ORLEANS Regent prefent PHELYPEAUX. Et
fcellée du grand Sceau de cire jaune.
و ا
Lue , publiée à l'Audiance , Registrée ès Registres
du Grand Confeil du Roy , pour être exe .
cutée , gardée & obfervée felon fa forme & teneur
, oйy & ce requerant le Procureur General
I
98
LE MERCURE RCURE
du Roy , & copies collationnées d'icelle feront envoyées
aux Bailliages , Senéchauffées & Prefidiaux
du Royaume qu'il appartiendra , pour y étre pareillement
lues , publiés , registrées & executés ?
Enjoint aux Subftituts du Procureur General du
Roy d'y tenir la main , & d'en certifier le Conseil
dans un mois , ſuivant l'Arrêt du Conseil de ce
jourd'hui vingt - trois Septembre mil sept cent
vingt. Signé , VERDUC . •
LETTRES PATENTES ,
PORTANT évocation & attribution
au Grand - Confeil de toutes les conteftations
nées & à naitre au fujet de
la Conſtitution UNIGENITUS ,
OUIS par la grace de Dieu Roy de Fran-
Lotce & de Navarre : A nos amez & feaux
Confeillers les Gens tenans notre Grand Confeil
à Paris , Salut. Après vous avoir envoyé le
14 de ce mois notre Déclaration donnée le 4
Aouft dernier , pour autorifer à proteger la conciliation
des Evêques de notre Royaume fur les
conteftations qui s'étoient élevées entr'eux à
l'occafion de la Conftitution de N. S. P. fe Pape ,
qui commence par ces mots , UNIGENITUS
DEI FILIUS , pour être par vous procedé à
f'enregistrement de ladite Déclaration La confiance
que nous avons en votre capacité & votre
experience dans les marieres Ecclefiaftiques ,
& les preuves que nous avons de votre zele
pour la tranquillité de l'Eglife & de l'Etat
Nous ont porté à vous attribuer la connoiffance
des conteſtations & differends furvenus ou qui
>
SILATE
DE
SEPTEMBRE.
LYON
DE
pourroient furvenir à l'occafion de ladite Com93
tution dans le reffort de notre Parlement de Pa
ris. A CES CAUSES , & autres confiderations
à ce Nous mouvans , de l'avis de notre trés cher
& tiés- amé Oncle le Duc d'Orleans Petit Fils de
France Regent ; de notre très cher & très-amé
Oncle le Duc de Chartres premier Prince de notre
Sang ; de notre très - cher & très - amé Coufin
le Duc de Bourbon ; de notre trés - cher & trésamé
Coufin le Comte de Charollois ; de notre
trés cher & trés amé Coufin le Prince de Conty ,
Princes de notre Sang ; de notre trés cher & trésamé
Oncle le Comte de Touloufe Prince Legitimé
, & autres Pairs de -France , Grands &
Notables Perfonnages de notre Royaume , & de
notre pleine puiffance & autorité Royale , Nous
avons évoqué & évoquons à Nous & à notre
Confeil , toutes les conteftations neés & à naitre
dans l'étenduë du Reffort de notre Cour de
Parlement , transferé à Pontoife , au fujet de
l'acceptation & obfervation de ladite Conftitu
tion & Lettres Patentes données en confequence ,
les oppofitions faites & à faire , les appels comme
d'abus interjettez & à interjetter , & generallement
tous les procés civils & criminels mûs
& à mouvoir à l'occafion de ladite Conſtitution ,
& icelles avec leurs circonftances & dépendancès
, avons renvoyées , & par ces Prefentes fignées
de noftre main , renvoyons pardevant vous,
vous attribuant à cet effet toute Cour , Jurif
diction & connoiffance dans le reffort de notre
dite Cour de Palemement , & icelle interdifons
à tous autres Juges ; voulons que les parties
puiffent le pourvoir pardevant vous par les voyes
de droit contre les Arrefts & Jugemens intervenus
ou qui pourroient intervenir Faifons tresexpreffes
inhibitions & défenfes à toutes perfonnes
de proceder ailleurs fur les conteftations
>
LA VILLE
I ij
100 LE MERCURE
-
à l'occafion de ladite Conftitution , & à tous
Juges d'en connoiftre , à peine de nullité des
procedures , caffation des Jugemens , trois mille
livres d'amende , & de tous dépens , dominages
& interefts . Enjoignons à notre Procureur
General en notredit Grand - Confeil , de tenir la
main à l'execution des Prefentes , & de Nous
informer des contraventions qui pourroient y.
être faites. SI Yous MANDONS que ces
Prefentes vous ayez à faire lire , publier & enregistrer
, & le contenu en icelles , garder ,
obferver , & faire executer felon leur forme &
teneur : CAR tel eft notre plaifir . DONNE'à
Paris le quinziéme jour de Septembre , l'an de
grace mil fept cent vingt , & de notre Regne
le fixiéme. Signé , LOUIS ; Er plus bas , Par
le Roy , LE Duc D'ORLEANS Regent , prefent.
PHELYPE AUX . Et fcellées du grani
Sceau de cire jaune.
Lies , publiées à l'Audience , & registrées és
Registres du Grand- Confeil du Roy , pour être
executées , gardées & obfervées felon leur forme
& teneur , ony & ce requerant le Procureur General
du Roy , & copies collationnées d'icelles feront
envoyées au Baillages , Senechquſſées & Préfidiaux
du Royaume qu'il appartiendra , pour
y être pareillement lies , publiées , registrées &
executées Enjoint aux Subftituts du Procureur
General du Roy d'y tenir la main , & d'en certifier
le Confeil dans un mois , fuivant l'Arrest
du Confeil de ce jourd'huy vingt - trois Septembre
mil fept cent vingt, Sigué , VER DUC.
DE SEPTEMBRE. 101
2. T
DISSERTATION
Sur les Dignitez hereditaires attachees
aux Terres titrées.
INSTITUTION des Dignitez en
France , a commencé prefqu'en
même temps que la Royauté ,
comme
neceffaires pour fervir
d'apuy & d'ornemens à la Souveraineté.
Les unes font réelles , les autres perfonnelles
.
Les unes purement Laïques , les autres
purement Ecclefiaftiques .
Mais il y en a de mixtes , c'est - à- dire
Ecclefiaftiques & Eaïques , & ce font celles-
là qui donnent aux Chanoines du fameux
Chapitre de Saint Jean de Lyon les
qualitez de Comtes ; aux Chanoineffes de
Remiremont celle de Comteffes , & à plufieurs
des Archevêques & Evêques de
France les qualitez de Princes , de Ducs
& Pairs , de Comtes , & d'autres titres de
Seigneuries.
Plus ces Dignitez font élevées , plus
elles honorent les Souverains , & ceux qui
en font revêtus , par ce qu'elles font la
recompenfe de la vertu qui fe les attire , &
I iij.
102 LE MERCURE
elles font pour ces derniers des monumens
perpetuels d'honneur & de gradation.
Comme elles émanent de la Souveraineté
, plufieurs y font retournées comme
à leur centre , par la voye de reverſion ou
de réunion.
Mais il en reste encore.un grand nombre
qui font toujours hereditaires & inſeparables
des grands Fiefs aufquels elles.
font attachées .
Prefque tous les Princes de l'Europe ont
'été dans cet ufage , & les principales Charges
ou Dignitez de l'Empire font encore
actuellement , & feront toujours poffedées.
par les Princes Electeurs , qui ont droit
d'élite eux mêmes les Empereurs , & de
les choisir parmi eux.
Celles de France ne font pas moins confiderables
, puifque les Princes du Sang.
même , le font toujours fait honneur d'en
eftre revêtus.
La preuve fe tire des fonctions des Pairs,
qui confiftent principalement dans l'inveftiture
qu'ils donnent au Roy de la
Royauté , dans l'habillement des ornemens
Royaux à fon Sacre & à fon Couronnement
, & à juger avec luy les diffe
rens de fes Vaffaux , & lorfqu'ils font féans
avec le Parlement , ils compofent la Cour:
des Pairs ; or ceci n'eft rapporté que pour
La Roque , p. 119. & 120
DE SEPTEMBRE. 103
-
juftifier que les Pairies en France font
réelles , le Roy fait bien des Ducs par Brevet
, mais il ne fait des Pairies que par
Lettres d'érection ; d'où il faut conclure
que la Dignité de Pairs eft attachée aux
Pairies ; elles paffent même aux femmes ,
puifqu'il y en a eu d'érigées tant pour les
mâles que pour les filles .
Cette realité fe prouve encore par le
rang des Pairs dans les grandes ceremonies
où ils font, chacun felon l'ancienneté
de fa Pairie , à l'exception des Princes du
Sang , aufquels Henry II . cn 1576. par
POrdonnance de Blois donna la préféance ,
& par plufieurs décifions données en faveur
des femmes , qui quoique naturellement
exclues des Offices , ont neanmoins
été jugées capables de Pairies , & en ong
confervé le rang :
SÇAVOIR ,
Une Ducheffe d'Aquitaine en 1141.
Une Comteffe de Toulouſe en 1150 .
Une Ducheffe de Bourgogne , & und
Comteffe de Flandres en 1210.
Une autre Comteffe de Flandre fa foeur ,
en 12-24.
Une Jeanne de France , Ducheffe de
Bourgogne & Comteffe d'Artois , pour la
Pairie de laquelle il fut rendu deux fameux
Arrefts en 1299 & 1318 , confirmez par
le Roy Philippe de Valois.
iiij.
104 LE MERCURE
Et une Marie de Bourgogne Comteffe
de Flandre & d'Artois , en 1477 .
L'on trouve encore que les érections de
Blois , de Dunois , de Soiffons , de Vertus,
& de Coucy , furent faites pour Valentine
de Milan , Ducheffe d'Orleans , en 1405.
Et que des Reines de France & d'autres
Princeffes ont eu des Pairies attachées à
la Maifon de Bourbon .
Les titres de Marquifats , Comtez &
Baronnies , que portent plufieurs autres
Terres après les Pairies , dénotent bien encore
la dignité & le rang qui y font attachez
, & qui demandent neceffairement
dans le poffeffeur une naffance noble de
fang , ou à fon defaut d'autres vertus éminentes
, qui le rendent capable de les poffeder
valablement.
Mais plufieurs de ces Terres titrées font
decorées d'une double Dignité , par Charge
ou Office d'honneur & d'ancienne inftitution
, dont l'exercice & les fonctions
s'étendent ou à l'adminiſtration de la Juftice
, ou au Service Militaire , ou à celui de
la Couronne ; & ces doubles Dignitez
font tellement attachées à ces Seigneuries ,
qu'elles en font une partie réelle , effentielle
, & infeparable , font inferées dans
les Actes de foy & hommage , aveus &
dénombremens , & fe tranfmettent conjointement
en pleine proprieté perpetuelle
DE SEPTEMBRE.
105
& hereditaire par fucceffion & par
vente.
* Il y avoit , par exemple , autrefois un
Office illuftre de grand Senechal de France
, dont la Dignité étoit annexée à la
Maiſon d'Anjou , l'on croit qu'il eft devenu
celui de grand Maître d'aujourd'huy.
Il paroît que le Roy Robert avoit conferé
à un Grifegonnelle Comte d'Anjou ,
l'Office de grand Senechal hereditaire de
ladite Province.
Qu'un Comte de Charny s'eft dit Sene
chal hereditaire de Bourgogne.
Qu'un Guillaume de Vergy y a exercé
pareillement en heredité l'Office de Maréchal.
Er que le Baron de Thil fut fait Connêtable
hereditaire de la même Province.
Le Hainaut a eu pendant long- temps
les Seigneurs de Verchin pour Senéchaux
hereditaires , c'eft aujourd'hui un grand
Bailliage poffedé par le PrinceDuc d'Aremberg
, & l'ancien Armorial general de la--
dite Province dreffé fous Philippe V. y
marque encore huit grands Offices here--
ditaires attachez à des Seigneuries .
Le Brabant en a eu quatre de la même
qualité ; fçavoir , le Baron de Rocheclair
pour Senéchal , le Baron Darfcot pour
Chambellan , le Marquis de Berg pour
* Dutilleul 343
106. LE MERCURE
Grand Veneur , & les Barons de Weſtmale
de Louvain , our Maréchaux . ( a )
*
Dans Papologie de la Maifon d'Orange ,
de l'an 1581 ; un Prince d'Efpinoy s'eft
donné le titre de Senechal perpetuel de
la Province d'Artois .
Un Sire de Joinville ( b) fut fait Senéchal
hereditaire de la Province de Champagne .
En Dauphiné le Baron de Clermont s'en
eft dit Connêtable hereditaire.
En Poitou , le Vicomte Daunay , Senéchal
hereditaire.
En Navarre , le Marquis de Cortais fut
fait Connêtable hereditaite.
Le Châtelain de Tonnay- Charente "
étoit Chambelan hereditaire de Xaintonge.
(c ) La Bretagne a cu pour Amiral
hereditaire le Vicomte Dufou en 1200 .
(d ) Pour grand Ecuyer hereditaire le
Seigneur de Blozac , & un Vicomte de
Refey prit la même qualité dans le procès
verbal de reformation de la Coutume en
1580.
En Languedoc un Baron de Mirepoix
de la Maifon de Levi , étoit Maréchal
hereditaire de la Foy par titres très anciens
de fa famille .
( a ) Guichardin , en fa Gaule Belgique.
( b ) La Roque , page 60 .
c) Anciennes Chartres de 1200 .
( d) d'Argentré , 1.11.de fon hift. ch . 389.
DE SEPTEMBRE. 107
Le Laonnois a eu auffi fes Officiers
hereditaires ; SCAVOIR ,
Un Lancelot de Boffu pour Maréchal ..
Un Seigneur de Lierval pour Vidame.
Er un Seigneur de Bligny pour Prevôt .
Celle de Nivernois , le Baron de la Ferté
Chauderon , pour Maréchal hereditaire.
Er le Gouvernement de la Franche-
Comté , étoit hereditaire dans la Maiſon
de Châlons .
On pourroit rapporter encore plufieurs
autres exemples du dehors du Royaume
comme de Lorraine , Angleterre , Caſtille,
Portugal , & Carinthie , ou les Dignitez
de Connêtables , Chambellans , Maréchaux
, Senéchaux , & d'Ecuyers étoient
pareillement hereditaires dépendantes des
plus confiderables Fiefs , & remplies par
des Sujets de haute naiffance.
Mais outre les Provinces de France ,
plufieurs Seigneuries particulieres & titrées.
ont eu auffi leurs Officiers feodaux , perpetuels
, & hereditaires , & les exemples
en font affez communs.
Le Fief de la Connêtablie hereditaire de
Châteaugontier fut adjugé par Arrêt du
Parlement du 13 Septembre 1578 à Mathurin
de la Rouffardiere , à caufe de la
Seigneurie de la Randiere à laquelle cet
Office Fiefé eft annexé hereditairement..
Le Comté du Perche a eu pour Sene
108 LE MERCURE
chal hereditaire , le Seigneur de la Puyfaye
, fuivant le Procès verbal de refor
matión de la Coutume dudit Comté.
Le Titre & Office de Châtelain de Be-
1 tify , appartient hereditairement au Seigneur
de Nery en Valois .
Celui de Maréchal hereditaire de Ponthieu
, eft au Seigneur de Pelerot & de
Lanieres.
Un Seigneur de Mouy s'eft attribué la
qualité de Châtelain perpetuel & herediraire
de Coucy en Picardie , à caufe d'uni
Fief qu'il poffedoit dans la dépendance du→
dit Coucy.
L'Office de Senechal Fieffé du Comté
d'Eu appartenoit autrefois au Fief de
Gauffreville , il a même été exercé
Seigneur d'O .
par un
La Vicomté hereditaire de Rennes en
Bretagne , eft à la Baronnie de Vitré.
L'Evêché de Bayeux a eu pour fon Ma
rêchal hereditaire un Seigneur de Champigny.
* Dans la Ville de Bezançon , il y avoit
encore lorfque le feu Roy en fit la conquête
, un Maréchal hereditaire de l'Empire
, auquel appartenoit le cheval ſur lequel
l'Empereur faifoit fon entrée dans
ladite Ville.
Memoires d'Olivier de la Marche , liv. premier
, ch. 7:
DE SEPTEMBRE.
"
109
Enfin l'Abbaye Royale de Saint Denis
en France , a eu auffi fes Officiers Feodaux
& hereditaires , unis aux Fiefs qui
relevent d'elle , notamment la Charge de
Maréchal Feodal , attachée à la Chatellenie
& Vicomté de Steins , qui donneroit au
Seigneur de cette Terre , le Commandement
des Troupes Militaires de ladite Abbaye
, fi elle étoit encore dans l'ufage d'en
mettre fur pied , pour le Service du Roy.
Tous ces exemples generaux & particuliers
font fuccinctement rapportez pour
-appuyer ceux de la Normandie , qui de
toutes les Provinces de France , eft celle
où l'ufage de ces Offices a été le plus
commun.
Un Sire d'Angerville en a été Maréchal
hereditaire,
Un Baron d'Enneval Vidame Heredi ,
taire.
Un Seigneur de Conches Porte - Guidon
ou Cornette hereditaire , à caufe de fadite
Seigneurie.
Un Guillaume Dupleffis de Lardeiviere
Reformateur hereditaire des Poids & Mefures.
Et un Pierre de Poiffy Seigneur de Goiiy,
Pannetier hereditaire.
A l'égard des grandes Dignitez de ladite
Province , comme de Connêtable , & de
Grand Chambellan hereditaires & perpeLE
MERCURE
tuels ; elles font encore actuellement exiftantes
& annexées au Comté de Tancarville
.
Il paroît qu'un Guillaume du Hommet,
un Guillaume Crefpin Chevalier Seigneur
d'Eftrepagny , & un Jean Dehotor Seigneur
de Beaumont le Richard , ont poffedé fucceffivement
celle de Connêtable .
a Un Auteur a voulu infinuer qu'en 1272
& 1274. le Parlement avoit défendu par
deux Arrêts aux Seigneurs de Tancarville
de prendre ladite qualité de Connêtable'
hereditaire ; mais cette citation incertaine -
ne donne pas d'atteinte au droit des Comtes
de Tancarville, car elle fe détruit par des
Titres authentiques , & tout à fait contraires
, même pofterieurs à ces prétendus
Arrêts , puifque l'on trouve , b que Jean
Vicomte de Melun , & Jeanne Crespin
fa femme à l'exemple de leurs predeceffeurs
, ont toujours pris la qualité de
Connêtable & de Chambellan hereditaires
de Normandie ; ce qui fe juftifie par deux
Arrêts de l'Eichiquier des années 1374-
& de 1400.
Que Guillaume d'Harcourt leur fucceffeur
, pris les mêmes qualitez en d'autres
Arrêts des années 1431. 1454. 1471. &
1474. fans qu'on leur ait oppofé les deux
a Chopin , liv. 3. du Domaine , tom, 26.
b La Roque , p、61.
'
DE SEPTEMBRE. III
anciens cy- deffus rapportez.
Et que par les Lettres Patentes de Sa
Majefté du mois de Juin 1718. accordées
à Monfieur le Comte d'Evreux & de
Tancarville , verifiées au Parlement de
Rouen le 18 Novembre 1719 ; Ces deux
Dignitez font attribuées fans oppofition
audit Comté de Tancarville.
( a ) Surquoi il fera ajoûté pour fortifier
ce petit Ouvrage recherché avec foin
qu'un Auteur très fameux rapporte encore
que les Comtes de Tancarville ont poffedé
fucceffivement l'Office de Grand Chambellan
de France , & l'ont prétendu hereditaire
dans leur Maifon.
Même que Jean bâtard d'Orleans , ayant
épousé Marie d'Harcourt heritiere de ce
Comté , poffeda ce même Office ; qu'ayant
paffé auffi à fon fils , il y fur troublé
par les brouilleries qu'il eut avec Louis
XI. ( b )
Mais que fi-tôt que fes defcendans
furent
rentrez en grace fous Louis XII . dont
ils étoient parents , ledit Office leur fut
rendu ; qu'ils en ont joui jufqu'au decès
du Duc François , après la mort duquel .
le Duc de Guife fon Tuteur en fut pourvû,
& que fes defcendans en joüiffoient encore
( a ) Loifeau , des . Officiers de la Couronne ,
liv . 4. chap. 2. P. 422.
( b ) Nota , En étoit pourvû en 1447 .
LE MERCURE
lorfque le Livre de l'Auteur fut mis en lumiere
en l'année 1609 .
( a ) Ce qui le trouve avoir une entiere
conformité avec ce qu'un ancien Hiſtorien
François avoit rapporté trente-fix ans auparavant
; car parlant des devoirs & fonctions
du Grand Chambellan , il dit ,
qu'aux hommages qui fe rendoient au Roy
en perfonne , le Grand Chambellan étoit
à fon côté , & avoit l'autorité de dire par
éerit ou de bouché au Vaffal ce qu'il devoit
au Roy , & qu'après avoir été ré
pondu oäi par le Vaffal , le Grand Chumbellan
parloit pour le Roy , difant au Valfal
qu'il le recevoit , & le Roy l'avoiioit.
(b) Surquoi il rapporte qu'ainfi en fut ufé
par le Vicomte de Melun , qualifié Grand
Chambellan , à l'hommage du Duché de
Guyenne , rendu en la Ville d'Amiens par
le Roy d'Angleterre au Roy Philippe de
Vallois.
(c ) Par Jean de Melun Comte de Tan .
carville , & Grand Chambellan , à un autre
hommage que rendit Jean de Montx)
Du Haillan , fol. 349.
b ) C'étoit Jean premier Vicomte de Melun,
qui fut fait Chambellan en 1318 , & mourut
en 1350 .
(c ) C'étoit Jean fecond , Vicomte de Mélun ,
qui fucceda à fon pere en 1351 , & mourut en
1382.
fort
DE SEPTEMBRE.
ΓΙΑ
fort Duc de Bretagne au Roy Charles V.
en lá Ville de Paris.
* Et par Jean bâtard d'Orleans , auſſi
Grand Chambellan , à un autre hommage
que rendit le Duc Pierre de Bretagne à
Charles VH.
Après quoi cet Hiftorien ajoûte , que les
Comtes de Tancarville ont tenu cet état fi
long- temps , que vulgairement on les appelloit
, les Chambellans de Tancarville
& que ce nom pourroit auffi leur avoir
été donné , parce que ceux de Tancarville
étoient en même temps Connêtables & Cham
bellans hereditaires de Normandie , comme
la chofe fe voit en leurs Tombeaux de
l'Abbaye du Jard près de Melun , & en
tous leurs Titres , Chartes & Monumens.
Il y a auffi d'autres Tombeaux des Com
res de Tancarville à l'Abbaye de S. Georges-
Parroiffe S. Martin de Beaucherville près
de Rouen , dont ils font Fondateurs , &
où l'on trouvera divers Titres concernans
fes rangs & dignitez annexez à la Comté
de Tancarville.
*
Cy.devant cité comme ayant épousé l'heri
tlere de Tancarville .
114
LE MERCURE
NOUVELLES ETRANGERES .
A Conftantinople le 15 Aouft 1720.
L
E rétabliſſement de la fanté du
Grand Seigneur a caufé une joie
univerſelle dans cette Ville , & dans
tout l'Empire Ottoman . Le Sultan a regalé
d'une velte de martre zibeline & d'une
bourſe de cinq cens écus un Medecin Juif
qui l'a traité pendant fa maladie. Le 8 dece
mois Sa Hauteffe alla à cheval , ſuivant
l'ancienne coutume , faire le Bairam dans :
la principale Moſquée * . Les Algeriens ,.
qui fous differens pretextes s'étoient excufez
jufqu'à prefent d'accepter la mediation
du Grand Seigneur , & d'executer fes ordres
, qui leur défendoient toutes fortes
d'hoftilitez contre les Sujets de la Republique
de Hollande , ont été enfin obligez:
de s'y foumettre. Ces difpofitions de la
Porte font efperer que la paix entre les
Etats Generaux & la Regence d'Alger ,
fera inceffamment renouvellée . On a d'au
tant plus lieu de l'efperer , qu'il eft arrivé
ici trois. Députez d'Alger , qui font chargez
des pouvoirs neceffaires pour traiter.
Autrefois l'Eglife. de Sainte. Sophie..
-
DE SEPTEMBRE.
avec M. Colliers Ambaffadeur des Etats
Generaux à la Porte , du renouvellement
de cette paix par la mediation du Grand
Seigneur. Ces mêmes Députez ont ordre
de demander la permiffion de lever quelques
Troupes dans l'étendue de l'Empire:
Ottoman , pour fervir contre le Roy de
Maroc ; & afin d'obtenir plus facilement
cette permiffion , ils arment quatre Vaiffeaux
pour apporter au Grand Seigneur le
tribut ordinaire. Ibrahim Baffa , qui arriva
ici le mois paffé de fon ambaffade à la
Cour Imperiale , a été obligé de faire fon
entrée en cette Ville incognito , à cauſe de
l'indifpofition du Grand Seigneur . Il a été
reçu très favorablement par le grand Vizir
, qui l'a gratifié d'une place de Vizir
de l'Empire Ottoman.
A Varfovie le 15 Septembre 1720.
Obats durant la Diete generale , qui eft
N prévoit qu'il y aura de grands detoujours
fixée au 30 de ce mois , quoique
le Roy prenne toutes les précautions ima
ginables pour les prévenir. Les petites
Dietes qui la precedent ordinairement ,
ont été rompues en partie , après de forres
conteftations entre les membres quii
les compofoient : c'est ce qui a engagé Sai
Majefté à faire expedier de nouveaux Uni-
Kiji
116 LE MERCURE
"
verfaux pour le renouement de ces Dietes.
Le Roy a mandé ici le grand Maréchal
de la Couronne , afin de trouver des
moyens d'ajuſter à l'amiable le differend
qui regne depuis fi long- temps , par rapport
au Commandement de l'Armée. Ler
Palatin de Maſovie eft attendu inceffam- ·
ment ici . On travaille à percer un côteau
près de cette Ville , pour y faire une éclufe
afin d'établir la communication des canaux
avec la Viftule.
A Petersbourg les Septembre 1720.
Es Vaiffeaux de guerre & les fregates
LES
du Czar fe tiennent toujours à Revel
& à Croonflot ; quoiqu'ils foient prêts à :
mettre à la voile , on ne croit pas cependant
qu'ils tiennent la mer cette année.
Le Prince de Repnin a reçu ordre de,
partager l'armée de terre qu'il commande..
On en doit envoyer une partie en Curlande,
& l'autre vers Smolensko .. On reçut ici
ces jours paffez un Exprès dépêché par le
General Galiczin , avec avis que le Vice-
Amiral Suedois Zeoblad , avoit attaqué
le 7 d'Août avec fon Eſcadre , nos Gale--
res qui étoient alors proche de Lameland
mais que quatre des Fregattes ennemies
ayant échoué fur un banc de fable , avoient
été prifes par nos Galeres : Que l'on y
DE SEPTEMBRE. IT7
& avoit trouvé 150 pieces de canons ,
400 hommes d'équipage , outre 200 tuez,
& 300 de bleffez pendant le combat.
Nous n'y avons perdu de notre côté que 80
hommes : cependant malgré cet avantage ,
le Czar a refolu d'envoyer l'Adjudant general
Romanosfki à Stokholm , pour y
complimenter le Roy fur fon avenement
à la Couronne , & y declarer en mêmetemps
la derniere refolution de Sa Majeſté
Czarienne touchant la Paix.
A Hambourg le 18 Septembre 1720.-
Comme la Cour Imperiale perfifte à vouloir que cette Ville envoye un
Bourguemeftre à Vienne pour y demander
excufe de ce qui eft arrivé à l'occafion
du dernier tumulte , on s'eft enfin reſolu
de donner cette fatisfaction à l'Empereur.
On mande de Coppenhague , que le Lord
Polwarth fe prepare à faire au premier
jour fon entrée publique dans cette Ca--
pitale , en qualité d'Ambaffadeur Plenipotentiaire
de S. M. Britanique : que le Vice-
Amiral Rozenpalm étoit attendu incef-
- famment de Norwege avec fon Eſcadre..
- Le Colonel Reichwey , nommé Envoyé de
S M. D. à la Cour de Vienne , n'a pas
encore reçû fes inftructions. Ees digues
ris LE MERCURE
de Dithmarre , qui avoient été rompuës ,
font entierement reparées. Le jour pour la
publication de la paix , entre les Rois de
Suede & de Dannemarck à Coppenhague,
eft fixé au 8 du mois prochain .
On apprend que M. Strick , Confeiller
Privé de Holftein eft arrivé à Hannovre ,
pour y negocier la reftitution de ce Duché.
Les deux Compagnies Danoifes , qui
étoient à Wilmar, font forties de cette der--
niere Ville ; mais on croit que les Trou
pes d'Hannovre
y refteront jufqu'à la tenue
du Congrès de Brunswick.
L
A Stokholm le 12 Septembre 17 20.
27
'Amiral Norris , qui eft en cette Cour,
& qui a laiffé les deux Flotes à Elfenap,
fe prepare à retourner en Angleterre avec:
fa Flote. On affure que le Baron de Bothmar
, qui arriva ici de Copenhague le
du paffé , eft venu propofer de la part du
Roi de la Grande Bretagne , fon Maître
, une fufpenfion d'armes , entre la
Suéde & le Czar de Mofcovie . M. Burmania
Ambaffadeur des Etats Generauxs'embarqua
ici le 24 du mois paffé à Bord
d'une Fregate , pour s'en retourner en Hollande
. Le Prince Guillaume de Heffe- Caffel
, frere du Roy , partit le deux de ce
mois pour retourner à Caffel. Il a avancé
DE SEPTEMBRE. 1.197
fon voyage fur la nouvelle de la naiffance
d'un Prince , dont la Princeffe fon Epoule:
eft accouchée. S.M. l'a accompagné jufqu'à
Eckolmzond avec quatrte Senateurs. La
Reine a regalé ce Prince de fon Portrait
enrichi de diamans , d'une épée & d'une
canne fort riche , outre une penfion de
6000 écus. Le Prince Dolhorucki , Ambaffadeur
du Czar à la Cour de Dannemarc
, a été rapellé . Il eft parti fur une
fregate , pour le rendre à Petersbourg. On
croit qu'il pouroit bien aller en qualité de
Plenipotentiaire au Congrés de Brunſwick.-
Les Députés de la Nobleffe & des Etats
de cette partie de la Pomeranie , qui doit
être reftituée à la Courone de Suede , ont
été admis à l'audience de leurs Majeftés . Ils
ont ordre de demander la confirmation de :
leurs anciens Privileges, & particulierement:
le droit de Nobleffe que le feu Roi Charles
XII . avoit accordé aux Magiftrats de
Stralfund..
A Vienne le 18 Septembre 1720.
Es Recrues pour les troupes de l'Enr
Lpereur ,le continuent avec beaucoup . ſe
de fuccès dans toute l'étendue de fes Païs
Hereditaires . Le 4 de ce mois , le Prince
Lubomirski partit d'icy pour la Pologne ,
afin d'affifter à la prochaine Diette gene
120 LE MERCURE
,
9.
rale. Le Comte d'Erdoedi , Evêque de
Neutra fe mit en chemin le 14 pour
Varfovie , avec la qualité d'Ambaſſadeur
de S. M. I. M. de Holtzen nouveau Miniftre
de Dannemarc , arriva le 6 en cette
Ville. On a publié une Ordonnance dans
tous les Pays Hereditaires , qui défend'
l'entrée des diamans venans de France &
des Pays étrangers. Il eft certain qu'il en a
déja été vendu pour plus de 100000.
Rifdales , & qu'il y en a encore en chemin
pour des fommes confiderables . L'Empereur
fit declarer le à la Diette de Ratisbonne
, qu'il fouhaittoit avoir le fentiment
des Electeurs , des Princes & Etats
de l'Empire , au fujer des Duchés de Tofcanne
& de Parme , au cas que la ligne®
maſculine vint à manquer . S. M. I. a fair
auffi demander à la Diette , fi l'Empire
étoit dans le deffein de nommer une Députation
pour le Congrès de Cambray ,
ou de lui envoyer un plein pouvoir . Le
Duc de Mekelbourg , qui eft toujours icy,
infifte fortement pour que l'on examine
les Memoires qu'il a prefentés contre les
procedures de la Commiffion Imperiale
établie dans fes Etats . On prétend qu'il
n'a pû jufqu'à prefent l'obtenir , à cauſe
des oppofitions du Prefident de la Cham-
Bre Aulique , qui en a fait voir les confequences.
On affure qu on agitera dans la
Diette
DE SEPTEMBRE. 1211
Diette des Etats de Hongrie , qui doit
commencer le 17 de ce mois , & dans
celle des Etats de Bohême , l'affaire de la
fucceffion , pour les Etats de la Maiſon
d'Autriche. Le Duc de Holſtein continuë
d'être fort content de fon féjour en cette
Cour.
L'Etat de Milan a fait porter fes plaintes
icy , touchant le grand nombre de troupes
qui font répandues en differents quartiers
de ce Duché elles fe montent à 22000.
hommes , en comprenant celles qui font
diftribuées dans le Mantoüan. L'Empereur
étant allé ces jours paffés à Fernfeldt chez
le Baron de Mikoſch , pour y voir la nouvelle
fabrique des Miroirs , en parut ſi ſatisfait
, qu'il fit preſent de 30 mille florins
à ce Baron .
L'Imperatrice Amelie particicy le 29
du paffé , pour fe. rendre à Afchau , où
elle restera quelques jours avec la Ducheffe
d'Hannovre fa mere , qui eft toujours dans
la refolution de continuer fon voyage vers
la France , quoique l'Empereur lui ait
fait propofer fa refidence au Château de
Lintz , ou dans quelqu'autre des Pays Hereditaires
de la Maifon d'Autriche , qui
lui plairoit davantage. Les Turcs continuent
à reparer les fortifications de leurs
Places frontieres , tant du côté de la Hongrie
, que de la Pologne & de la Mofco- .
L
122 LE MERCURE
vie. La Chambre du Commerce a eu avis
de Conftantinople & de Smyrne , que les
Sujets de l'Empereur y continuoient avec
fuccès le Commerce rétabli depuis le
dernier Traité , & qu'ils efperoient dans
la fuite en retirer des avantages encore
plus confiderables. Les Deputez de l'Electeur
de Cologne arrivés depuis peu en
cette Cour , font l'Abbé de Damas pour le
Clergé , le Baron de Horion pour la Nobleffe
, & le fieur Habinx pour le Tiers-
Etat. On le flate icy que le Cardinal de
Saxe-Zeitz , qui doit être à prefent à Ratisbonne
, terminera en peu de tems toutes
les conteftations qui fe font élevées entre
les Catholiques & les Proteftans. Le Comtede
Caunitz eft chargé de plufieurs Com--
miffions de S. M. I. qu'il doit exécuter
en differentes Cours de l'Empire.
On doit envoyer inceffamment des inftructions
que l'on a dreffées ici , pour les
deux Miniftres de l'Empereur qui doivent
fe rendre au Congrés de Cambray . M. le
Comte de Vindifgratz , Miniftre de cette
Cour à la Haye , ira en qualité de premier
Plenipotentiaire , & M. le Baron de Pentenriedder
, qui eſt à la Cour de France ,
en qualité de fecond Plenipotentiaire .
Les lettres écrites par un Marquis Italien
, fort injurieufes à l'Empereur , ont
été déchirées par le Prevôt Aulique , en
DE SEPTEMBRE. โฐ
prefence de ce Marquis qui a été enfuite
banni des Pays hereditaires.
A la Haye le 25 Septembre 1720.
ES Etats nommerent le 12 M. de
LHoornbeck, Penfionnaire de Rotter
>
dam ,, pour
Confeiller
Penfionnaire
de Hol
lande
, & M. de Wafnaer
- Starremberg
,
Prefident
des Confeillers
députez
de cette
Province
, pour Garde
du grand
ſceau ,
Stadhouder
des Fiefs de la même
Province
&
M. le Comte de Morville , qui a diſcontinué
fes preparatifs pour fon voyage de
Cambray , a de frequentes conferences avec
le Marquis Beretti-Landi. On remarque
que ce dernier s'abftient entierement de
voir le Miniftre de Portugal.
Les Conferences que le Comte de Sunderland
a euës avec les députez de l'Etat ,
ont roulé principalement fur les points
fuivans. 10. Le payement de ce que l'Angleterre
doit à cet Etat depuis la derniere
guerre. 2. L'affaire de la Religion dans
l'Empire. 3°. Le Commerce des Oftendois.
4. L'intereft de cette Republique , par
rapport au prochain Congrès de Cambray.
A l'égard du premier point , Milord
Sunderland n'a fait que réiterer la réponſe
qu'il avoit déja donnée à cette occafion à
M. Van- Borfelen Miniftre de L. H.P.à
Lij
724 LE MERCURE
Londres ; ajoutant quelques reproches fur
l'irrefolution & la lenteur de cette Repu
blique , à l'égard de fon acceffion à la
Quadruple Alliance .
Pour les déliberations fur l'affaire de la
Religion , elles ont été affez conformes à
la derniere reſolution de l'Empereur , dont
le Comte de Vindiſgratz a donné connoiffance
à l'Etat.
Quant au Commerce des Oftendois , ce
qui s'eſt paffé à ce sujet , eft tenu fi ſecret ,
qu'on n'en a aucune connoiffance. Milord
Sunderland partit le 15 pour fe rendre à
Hanover.
M. Hop , Ambaffadeur de L. H. P. à
Paris , a demandé & obtenu la permiflion
de venir faire un tour en ce païs. On ne
fçait fi c'est pour les affaires particulieres ,
ou celles de la Republique.
La Compagnie des Indes Occidentales,
qui a augmenté depuis peu fon capital de
plufieurs millions , a demandé à L. H. P.
la permiffion de faire une nouvelle foufcription
pour 3000 Actions.
Le Roy d'Eſpagne a declaré à M. Colſter,
Miniftre de L. H. P. à Madrid , que fes
armemens ne regardoient que les Maures.
On parle d'un projet , pour unir toutes
les Compagnies qui fe font formées dans
les Villes de Nort- Hollande. Il feroit encore
plus à propos d'en former une de toute
DE SEPTEMBRE. 125
la Province , fans quoi il fera difficile que
ces differentes Compagnies fe foutiennent
encore long-temps.
Le nouveau Confeiller Penfionnaire de
Hoornebeck , affifta le 16 à l'Affemblée
des Etats Generaux .
A Londres , le 28 Septembre 1720 .
Comércé
Es profits immenfes qui ont été faits
jufqu'à prefent dans le Commerce de
la Mer du Sud , attirent l'attention generale
, principalement depuis que l'on a détruit
les Babbles ou Projetteurs chimeriques 3
chacun s'empreffant à y avoir quelque part :
Les voleurs de grand chemin s'en mêlent
auffi de leur côté ; car ces fripons , fous pretexte
d'avoir vendu des Actions à+ 1000 .
pour livrer à l'ouverture des Livres , demandent
honnêtement à ceux qu'ils rencontrent
, non la bourfe , comme cy- devant
, mais qu'ils veüillent bien leur
la Difference.
payer
A ce propos , voici ce qui arriva ces jours
paffez à un bon Bourgeois de cette Ville ;
celui-ci revenant de fa campagne , fut
arrêté par un voleur , qui le pria de payer
la Difference qu'il lui devoit pour des
Actions fournies fur la Compagnie de la
Mer du Sud. Le Bourgeois furpris d'une
pareille demande , lui répondit , Monfieur,
apparemment que vous vous troïpez ; je
Liij
726 LE MERCURE
>
n'ay jamais tien acheté de vous ... Vous
l'avez fans doute oublié , repliqua le Voleur;
& lui prefentant en même temps un
piftolet de poche , lui dit ,
n'eft- ce pas là
la marque certaine que vous me donnâtes,
lors que nous conclûmes notre marché? ...
Ecoutez , Monfieur , ajouta le voleur fi
vous ne me donnez pas fatisfaction fur le
champ , je ferai obligé de me fervir de
cette Obligation qui pourroit vous eftre
funefte... Le Bourgeois épouvanté , lui
demanda pardon , & convint qu'il l'avoit
oublié , ayant fait ce marché avec trop de
précipitation. Mais , Monfieur , continua→
t-il , voilà dix guinées , en attendant que
je vous paye le refte , & foyez für que
je vous fatisferai la premiere fois que je
vous rencontreray . Le Voleur voulut bien
s'en contenter , & fe retira.
Il y en a d'une autre efpece , qui en
volant les paffans , leur difent , nous prenons
ceci comme un gage que nous vous
rendrons, lorfque vous nous payerez ce que
vous nous devez. Quoique les prifons
foient pleines de ces malheureux , & que
l'on en ait arrêté 8 la femaine paffée , il
femble que le nombre n'en diminuë pas
à la
campagne .
..
Le fieur Blunt , cy-devant Payeur de la
Lotterie des Claffes , & parent du Cheva→
lier Jean Blunt , un des Directeurs de la
DE SEPTEMBRE. 127
Compagnie de la Mer du Sud , le coupa
la gorge le 15 , & ne mourut cependant
que le 18. On raiſonne fort differemment
fur le fujet d'un pareil defefpoir. On en
eft d'autant plus furpris , qu'il laiffe par
ce coup plus de 300 mille livres fterlings.
Les Etrangers , après avoir vendu leurs
Actions fur la Compagnie de la Mer du
Sud , fur lesquelles ils ont fait des profits
très conſiderables , non contens de ce gain,
font acheter par des Juifs tout l'or-& l'argent
étranger , qu'ils font paffer journellement
dans leurs païs . Cette manoeuvre eft
caufe que le prix de l'argent a été au delà
de fix Schellings * l'once , & l'or à proportion.
De plus , ils tirent tout autant de
guinées & d'efpeces d'argent du Royaume
qu'ils peuvent en découvrir .
y
*
Il eft certain que l'extinction des Bubbles
a caufé des pertes infinies à ceux qui
avoient intereft . Plufieurs Seigneurs , &
perfonnes de diftinction y avoient part ,
ainfi qu'un grand nombre d'Agioteurs qui
ont manqué. A l'égard des Boutiquiers , &
.des Artifans , qui n'avoient que 100 , 200
& 300 liv. fterlings , ils font entierement
ruinez. D'un autre côté , la Compagnie
d'Affurance de Londres , dont les Actions
étoient hauffées jufqu'à 170 , & qui font
* Le Schelling eft de douze fols , valeur intrinfeque.
L iiij
128 LE MERCURE
enfuite baiffées à 5s , a achevé de porter
la defolation parmi tous ces gens - là.
L'Affemblée generale approuva le 19 le
Dividend que les Directeurs avoient refolu
de faire ; fçavoir , de 30 pour 100 à Noël
prochain , & enfuite so pour cent annuellement
pendant douze ans ; & fur la prepofition
qui a été faite , fi on accorderoit
à ceux qui ont foufcrit dans la derniere
foufcription , le pouvoir de retirer leurs
-annuitez , comme plufieurs le fouhaittoient
, cette propofition a été rejettée.
1
La Compagnie des mines de cuivre ,
dont le Duc de Richemond eſt Gouverneur
, a tenu une affemblée generale ,
dans laquelle ce Seigneur declara par un
difcours , qu'après avoir confulté les plus
celebres Avocats fur la validité de leurs
Chartres , ils avoient opiné qu'elle étoit
bonne & valable. Sur cette affurance
l'Affemblée refolut de continuer fon travail
avec plus de diligence qu'auparavant ,
afin de procurer de plus grands avantages
à la Compagnie.
Les Directeurs de la Compagnie des
Indes Orientales , font convenus d'équiper
au plutôt neuf Vaiffeaux , pour aller
faire le nouvel établiffement qu'ils ont
refolu fur la côte du Sud d'Affrique. Ils
fe flatent toujours qu'ils y trouveront une
mine d'or fort abondante , fuivant les
DE SEPTEMBRE. 129
Memoires qu'on leur en a fournis . Ces
mêmes Directeurs ont fait fretter de plus
17 Vaiffeaux pour envoyer à Maderas ,
Bingal , Bombé , & autres Places . L'Adiffon,
le Darmourth , & le bon Compagnon ,
feront bien-tôt prêts à faire voile. Les
deux premiers font deftinez à tranſporter
quelques Compagnies de Soldats avec des
Officiers , pour aller reprendre Bencolen ,
dont les Indiens fe font rendus maîtres
depuis quelque temps , après avoir maffacré
une grande partie de la garniſon que
la Compagnie y entretenoit.
Les Directeurs de la Compagnie de
York-Buildings ou Luftrins , ayant donné
des affurances au Gouvernement , qu'ils
fe conformeroient exactement pour la regie
des affaires de cette Compagnie , aux
ordres qui leur font prefcrits , & qui font
conformes à la loy , les Seigneurs Jufticiers
ont revoqué l'ordre qu'ils avoient
donné au Procureur General de les pourfuivre.
Le Comte de Galloway , François de Nation
, qui mourut le 14 , a établi un fonds
pour payer les penfions qu'il faifoit à plufieurs
François refugiez . Il a ordonné aux
Executeurs de fon Teftament , qu'auffitôt
qu'ils auront nouvelle de la mort de quelqu'un
de fes Penfionnaires , ils remplif
fent fa place de quelque autre Refugié qu'ils
jugeront à propos .
130 LE MERCURE
M. de Crawford, Secretaire de l'Ambaffade
d'Angleterre à la Cour de France auprés
du Comte de Stairs , fera continué , fuivant
toutes les apparences , dans ce pofte , pour
veiller aux affaires d'Angleterre pendant
l'abſence de M. le Chevalier Robert Sutton.
On travaille actuellement à cinq Caroffes
magnifiques , & à de riches Livrées ,
que l'on dit être pour le Comte de Stanhope
, le Lord Carteret & M. Sutton , nommez
Ambaffadeurs & Plenipotentiaires de
S. M. B. au Congrés de Cambray.
Le Lord Polewarth , Envoyé du Roy à
la Cour de Danemarck , a efté revêtu par
S. M. du caractere de fon Ambaffadeur à
la même Cour.
Les Lettres de Leverpool & d'Wighan
dans le Comté de Lancastre , portent qu'un
grand nombre de Païfans travaillent à rendre
navigable la Riviere de Douglas ; ce qui
fera d'un très grand avantage pour le Pays,
à caufe du charbon & de la pierre que l'on
en tirera par cette Riviere.
Le Parlement a efté prorogé par commiffion
des Seigneurs Jufticiers jufqu'au
premier Novembre prochain , & celui d'Irlande
, jufqu'au 4. Avril 1721. On a pu
blié ici la Proclamation , pour obliger tous
les Vaiffeaux venans de la Mediterranée , à
faire quarantaire , avant qu'ils puiffent être
reçus dans aucun licu ou Port de la Grande
Bretagne .
DE SEPTEMBRE. 137
On écrit de Bristol , que le Charles
Snow , Vaiffeau chargé pour Opporto , a
été pris dans fon paffage par un Pirate de
Salé , mais que tout l'Equipage avoit cu le
bonheur de fe fauver à terre. D'autres Pirates
de Salé fe font auffi emparé de qua→
tre Vaiffeaux appartenans à nos Marchands,
dont un a été repris par l'Experience , Vaiffeau
de Guerre , & mené à Gibraltard ;
mais les Maures, en l'abandonnant , en ont
enlevé l'Equipage qu'ils ont conduit en
efclavage. Le refte des Vaiffeaux de la Compagnie
des Indes Orientales eft arrivé dans
nos Ports richement chargés.
Le Chevalier Leak , ci- devant Amiral ,
& Commandant en chef la Flote , mourat
au commencement de ce mois à Grenwich
Le Duc de Liria , fils du Duc de Berwich,
doit arriver ici dans peu, pour y voir le Duc
& la Ducheffe de Marlbourough , la Ducheffe
de Tyrconnel , & Madame Godefrey
fa grand'mere. Les deux filles du fameux
Juif Da Cofta ont efté mariées , l'une au
Docteur Menzes , Medecin Juif , & l'autre
à unfrere du Baron Swartz , qui paffe pour
le plus riche Juif de l'Europe.
On a eu la confirmation de la trifte nou
velle que douze Vaiffeaux Marchands de
la Flote venant de la Jamaïque , étoient
peris avec le Vaiffeau de Guerre nommé le
Mille -fort , qui leur fervoit de convoi. Cette .
932 LE MERCURE
perte
n'eft
pas fi grande
pour
nos Mar- chands
, que pour la Compagnie
d'Affurance
, qui avoit
affuré
fur ces Bâtimens
foixante
& douze
mille
livres
Sterlings
.
Il y a quelque tems que des Marchands
de cette Ville envoyerent à Liſbonne un
projet d'érection d'une Compagnie de Commerce
dans tous les Pays de conquêtes des
Portugais , à la referve du Brefil. Ce projet
avoit efté renvoyé ici fur quelques difficultez
que cette Cour leur fit ; mais on
prétend que ces obftacles ont efté levez , &
qu'il a été derechef envoyé à Lisbonne ,
où l'on fuppofe qu'il a enfin été approuvé.
Comme nos Negocians ont une grande
idée de cet établiffement , ils ont fait remettre
depuis peude groffes fommes à leurs
Correfpondans à Lisbonne ; ce qui a fait
confiderablement hauffer le Change.
Les Lords Jufticiers ont envoyé des ordres
au Comte de Portmore Gouverneur
de Gibraltard , & à tous les Officiers des
Regimens qui y font en garnifon , de fe
rendre inceffamment à leurs poftes. On
affure même que deux Regimens ont ordre
de s'embarquer pour aller renforcer cette
garnifon, & celle de fle de Minorque. Le
Chevalier Jean Norris eft attendu dans pen
avec ſon Eſcadre de la Mer Baltique ; la faifon
avancée ne lui permettant plus de rien
entreprendre contre la Flotte Mofcovite ,
DE SEPTEMBRE. 133
*
ni de faire de tentatives fur aucun Port dé
pendant du Czar.
A Madrid le 16 Septembre 1720.
Es,troupes qui ont marché de Catalogne
& d'autres Provinces , font touttes
arrivées aux environs de Cadix , où on
équippe en toute diligence les Vaiffeaux
du koy , qui y font en tres petit nombre.
On y attend auffi des Vaiffeaux Hollandois-
& Anglois. Le ; du courant il arriva à Malaga
un convoi de plus de 80 Bâtimens.
tant Vaiffeaux , Barques, que Tartanes , eſ-
⚫ cortez de fix Galeres d'Eſpagne , qui venoient
de Barcelonne , Alicante & Cartagene
, chargés de troupes & de munitions :
ils ont laiffé deux Regimens à Malaga , &
ont pourfuivi leur route à Cadis . Le Marquis
de Lede arrivé ici de Sicile le 7 , a été
reçu de S. M. avec beaucoup de témoignage
d'amitié ; il a été fait Grand d'Efpagne
de la premiere Claffe , & il eft parti
pour Cadis le ro , avec pouvoir abfolu de
pourvoir à tous les emplois de l'Armée
qui feront vaquans : il va commander dans
cette nouvelle Expedition , dont on ne'
fçait pas encore le deffein , quoiqu'il ſoir
apparent qu'il regarde la Barbarie ou le
Royaume d'Alger.
On parle de former fur les Côtes d'An134
LE MERCURE
daloufie un gros Corps de troupes , qui feront
commandées en chef par le Prince de
Cellamare , qui aura fous lui quatre Lieutenans
Generaux,
La Cour a eu avis que le dernier Convoi
parti le 13 Juillet pour Ceuta , avoit
fait fon debarquement à la faveur du Canon
de nos Vaiffeaux , & que ce ſecours
étoit entré fort heureufement dans la Place,
malgré le feu de deux Batteries que lés
Maures avoient dreffées fur une éminence
proche du rivage , foutenus de 3000 hommes
de leur Infanterie poftée derriere des
rochers.
M. Martinet , qui a commandé notre
Efcadre dans la Mer du Sud , eft regardé de
fort bon oeil par L. M. C.
On a appris par un Courrier extraordinaire
dépêché de Cadix , que l'Eſcadre de
charge , commandée par D. Balthafar Guevara
, étoit arrivée à la Havanne le premierde
May , & qu'aprés avoir executé les ordres
de S. M. elle avoit mis à la voile le 27
du mois de Juin pour la Vera- Crux , d'où
elle eft inceffamment attenduë.
On écrit de Lisbonne que la Flote de
Fernambuque , compofée de plufieurs Bâtimens
chargez de tabac , de fucre , & de
marchandiſes des Indes , y étoit arrivée ,
aprés trois mois de navigation . Ces mêmes
Lettres ajoutent que M. de Mornay , Ar-
#
DE SEPTEMBRE. 135
chevêque de Befançon , & Ambaffadeur de
France en cette Cour , étoit parti de cette
Capitale , pour retourner en France , après
avoir pris congé de L. M.
Le Marquis de Pozzo- Bueno partit le premier
de ce mois , pour le rendre à Hannover
auprès du Roy de la Grande- Bretagne
en qualité d'Ambaffadeur de S. M. C.
Le Prince des Afturies affifte à tous les
Confeils qu'on tient en prefence du Roy:
Il est mort en cette Ville une Religieuſe du
Monaftere d'Arouça de l'Ordre de S. Benoift
, âgée de 122 ans.
ANaples le 8 Septembre 1720.
E Duc de Monteleon a fait faifir tous
Lesbiens de tous les effets des Siciliens
qui ont fuivi les Efpagnols , & il a
fait mettre en prifon les habitans qui avoient
commencé à s'emparer des biens abandondonnez
. Il a fait auffi publier une Ordonnánce
par laquelle ceux qui ont en leur
poffeffion quelques effets appartenans aux
Siciliens , qui le font refugiez en Affrique ,
feront obligez de les declarer fous des peines
tres rigoureuſes .
Les précautions pour empêcher que le
mal contagieux ne fe communique dans les
terres de ce Royaume , ont été redoublées ,.
Les dernieres Lettres de Sicile confir
136 . LE MERCURE
ment que le Comte de Mercy en étoit parti
avec les Troupes Allemandes , pour paffer
en Italie : celles qui restent en Sicile, feront
commandées par le General Zumzunghien.
Il est arrivé ici un Exprés du Grand Duc
de Toſcane , pour informer le Cardinal Vi.
ceroi qu'il avoit achevé de payer le refte
des contributions exigées par l'Empereur ,
& pour demander en même tems que les
troupes Allemandes debarquées à Orbitello ,
ne traverfaffent point ſes Etats.
A Rome le 15 Septembre 1720 .
Cardinal Altham fit fon entrée
pu-
Lblique le 18 du mois paffé dans cette
Ville. L'on y remarqua avec plaifir les Caroffes
du Cardinal Acquaviva ; ce que l'on
regarde comme une marque de reconciliation
entre S. M. I. & le Roy Catholique.
Cette Entrée parut beaucoup , à cauſe du
grand nombre des Domestiques tant à pied
qu'à cheval de ce nouveau Miniftre ; joint
a cela que la plupart des perfonnes de diftinction
, qui avoient envoié audevant de cette
Eminence , ordonnerent que leurs Caroffes
à fix chevaux fuivroient les fiens . Il y avoit
à chaque côté de celui dans lequel ce Cardinal
étoit , fix Heiduques , trois à chaque
portiere. Cette marque de diftinction lui a
été accordée en faveur du Miniftere dont il
eft
DE SEPTEMBRE. 137
eft chargé. Quelques jours auparavant le
Cardinal De -Giudice avoit remis l'adminiſtration
des affaires de l'Empereur , & avoit
configné tous les papiers concernans ce Miniftere
au Cardinal Altham . Le 26 ce nouvel
Ambaffadeur de l'Empereur eut pour la
premiere fois Audience de S. S. à qui il
prefenta fes Lettres de creance . Ce Miniftre
infifta de nouveau fur l'élevation du Pere
San- Fuegos au Cardinalat , & en même
rems fur l'érection de l'Eglife Epifcopale de
Vienne en Archevêché.
Le Duc de Bracciano a perdu ſa fille unique
âgée de dix- huit mois ; il gagne " par
cette mort la dot de 100 mille Ecus que fa
femme lui avoit apportée en mariage ; ce
qui pourroit bien donner lieu à quelqu'autre
mariage.
Le Prince & la Princeffe de Palestrina
font allés à Lucques y prendre les Bains ,
dans l'efperance d'obtenir par ce moyen des
énfans.
Le Prince & la Princeffe de Civitella ont
été aux Bains de Nocheres pour le même fujet
; cette derniere ayant déja plufieurs an
nées de mariage , fans avoir encore pû don
ner aucun figne de fécondité.
Le Pape a dépêché un Exprès à Vienne ,
avec de nouvelles inftructions pour M.
Alexandre Albani , qui doit fe rendre au
Congrès de Cambray , pour y menager les
interefts du S. Siege.
M.
138 LE MERCURE
On a affiché un nouveau Placard , por
tant que toutes les perfonnes qui fortiront
de cette Ville & de l'Etat Ecclefiaftique ,
n'y pourront rentrer fans donner des certificats
valables d'une fanté parfaite . Les
Marchandifes & les effets qui viendront
des Etats voiſins , n'auront pas plus de pri
vilege . On eft ici dans une fi grande crainte
que le mal contagieux ne penetre juſque
dans cette Capitale , que non content d'avoir
interdit tout commerce avecla proven
ce , le Languedoc & le Lyonnois , on l'à
même défendu avec Genes . On a établi dans:
un des Fauxbourgs de cette Ville un Laza
ret , & on parfume avec grand foin toutes,
les Lettres de ces Provinces .
Le Pape celebra dernierement la Meffe
dans l'Eglife de S. Roch , il y eut un con
cours infini de peuples. La ceffation du
Commerce avec divers Etats caufe un tres
grand préjudice à cette Ville..
On mande de Civitavechia , qu'un Vaiſ
feau François venant de Marſeille , s'étoit
prefenté pour entrer dans le Port : le Gou
verneur lui en a refufé l'entrée , fur ce qu'il
ne put pas produire un Certificat de fanté.
Les Armes de l'Empereur ont été mifes.
fur la porte du Palais qu'occupe le Cardimal
Altham , qui a reçu depuis fon entrée
les vifites des Cardinaux , & entre autres.
celle du Cardinal Acquaviva , accompagné
DE SEPTEMBRE. F39
des Auditeurs Espagnols de la Rote.
M. Grimaldi , Nonce en Pologne , a été
nommé pour aller à la Cour de Vienne avec
la même qualité.
Le Procès du Cardinal Alberoni eſt toujours
au même état.
Depuis peu , l'on voit dans le Public un Etat
general des fommes que lefeu Roy Louis
XIV. devoit à fa mort , arrivée le premier
Septembre 1715-
CE
Ette Piéce , felon toute apparence
fera trouvée d'autant plus curieufe
par ceux qui aiment l'ordre & l'arrangement
des Finances , qu'elle paroît avoir
été composée avec beaucoup de foin &
d'exactitude , & par ordre fuperieur , puifqu'elle
renferme une partie des principales
operations de la Regence , & qu'il eft dit
que la verification en a été faite au Confeil,,
ce qui la rend d'autant plus digne de foy ,
& exempte de critique : car l'on n'auroit
pas fouffert qu'elle fût rendue publique par
Pimpreffion , fi elle n'étoit entierement
conforme à la verité.
per
L'on n'ignoroit pas que ces dettes ne
fuffent tres- confiderables ; mais peu de
fonnes en fçavoient la nature & la con
Mij
+140 LE MERCURE
fiftance ; plufieurs même par erreur
croyoient qu'il n'y en avoit point d'autres ,
que celles qui avoient été réduites & converties
en 250. millions de Billets de l'Etat.
Mais le Memoire qui paroît aujourd'hui ,
nous fait voir qu'il s'en eft trouvé beaucoup
au- delà , qui n'avoient pû être comprifes
dans cette reduction , ni être plus
promtement liquidées .
D'ailleurs les Finances ordinaires , les
Fermes du Roy , & les autres Revenus de
Sa Majeſté , ſe trouvant prefque abſorbez
par toutes fortes de Rentes , Gages d'Officiers
, Augmentations de Gages , & autres
Charges de Finances , l'on a été indifpenfablement
obligé d'en liberer l'Etat par
la
voye des fupreffions.
Et la neceffité de foulager les Sujets ,
& de rétablir le Commerce au- dedans &
au-dehors du Royaume , a donné encore
lieu à la revocation & extinction d'uné
infinité de nouveaux droits , qui n'avoient
été établis par le feu Roy , que pour fe
procurer des fecours dans les deux dernieres
guerres qu'il a foutenues.
Toutes ces grandes operations font le
fruit des travaux de S. A. R. Monſeigneur
le Regent , qui continuellement appliqué
au foulagement de l'Etat , la liberé de fes
dettes , & de la plus. confiderable partie.
de les charges.
*
DE SEPTEMBRE. 140
Ces fuppreffions & exinctions ont à la
verité groli les rembourſemens , mais elles
ont auffi produit un bien infini à tous les
Sujets , & les moyens naturels dont on
s'eft fervi pour y fatisfaire , ( après que
tous les précedens mis en ufage ont manqué
) font encore l'effet de les lumieres
fuperieures , & c'eſt à les bontez & à les
foins que les Peuples font aujourd'hui
redevables de tous les foulagemens & avantages
qui paroiffent par cet état leur avoir
été procurez .
•
Comme il eft répandu dans le Public ,
cela nous difpenfe de l'inferer icy en fom
entier ; mais ce que nous en allons rapporter
, fuffira pour donner une jufte idée
de ce qu'il contient , à ceux qui ne l'ont
pas vu.
Suivant cet Etat , une partie de plus de
fix cens millions de differentes dettes , a
été reduite & convertie dès l'année 1716
à 250. millions de Billets de l'Etat qui ont
coûté des interêts au Roy jufqu'à la fin de
1718.
Celles des Vivres , Fourrages & Etapes.
étoient d'environ cent foixante-fept mil-.
lions , & ont été liquidées à cent huit millions
deux cens fix mille fept cens quavinge
dix-neuf livres .
Celles dûës, aux Recettes generales des
Finances en fix parties , pour Billers.
142 LE MERCURE
Avances , & Charges arrierées , le font
trouvées monter à cent deux millions fix
cens quarante - deux mille quatre - vingt
neuf livres.
"
Celles dûes aux anciens Fermiers Ge
neraux des Baux de Dufauffoy , Yfambert ,
Nerville & Lambert , en cinq parties
pour avances & fonds de Charges arrierés ,
le font trouvées monter à quarante quatre
millions fept cens deux mille quatre cens
trente & une livres.
Celles dues aux Sous Fermiers en trois
parties , pour avances , indemnitez & non
jouïffances , fe font trouvées monter à trois
millions fix cens cinquante - quatre mille
quatre cens quatre- vingt treize livres.
Celles dues aux Traitans & Compagnie
de Gens d'Affaires , en plufieurs parties
reduites à trois , pour avances , fe font
trouvées monter à vingt- fix millions cinquante
mille huic cens foixante-fix livres,
Les parties de dépenfes arrierées , & daës
aux Treforiers des Bâtimens , de l'Artillerie
, des Fortifications & de la Marine
fe font trouvées monter à fix millions cinq:
cens vingt-fept mille cent foixante & qua
torze livres.
>
La finance des alienations de Droits &
Affranchiſſemens de Tailles revoquées en
diverſes parties , reduites à deux Articles ,
monte à quatorze millions deux cens qua
DE SEPTEMBRE. 143
Y
tre-vingt- quatorze mille quatre-vingt cinq
livres.
>
Le capital des Rentes perpetuelles éteintes
tant fur l'Hôtel '9 de Ville de Paris
qu'autres , en trois articles , s'eft trouvé
monter à neuf cens foixante- quatre millions
fix cens foixante- quatre mille fept:
cens foixante-quatre mille fept cens quatre-
vingt trois livres ..
Les Affignations fur le Trefor Royal
reftans à payer pour matieres d'or & d'ar
gent venues de la Mer du Sud en 1709%
étoient de deux millions..
La finance des Augmentations de Ga +
ges , créés depuis le premier Janvier 16-83.
& fupprimés par divers Arrêts du Confeil,,
s'eft trouvée de deux cens millions de livres
en capitala
Par quatre-vingt dix -neuf Edits , Decla
rations du Roy & Arrêts du Confeil , inferés
audit Etat , il paroît qu'il a été fup ..
primé un tres- grand nombre de toute
forte d'Offices dans toute l'étendue dus
Royaume, Cours , Sieges , & Jurifdictions,
tant de Police , que de Justice & Finan
ses , & que les finances liquidées , ou à
liquider de ces Offices , montent en total
à deux cens cinquante- quatre millions trois
sens foixante- dix-fept mille trois cens quasante
& une livres.
Er toutes les fommes cy- deffus jointes
144 LE MERCURE
'
eniemble , compofent un total de dix - neuf
cens foixante & dix - fept millions cent
yingt mille foixante & une livres .
Qui coûtoient au Roy chaque année en
rentes ou interêts , quatre- vingt neuf millions
neuf cens quatre - vingt trois mille
quatre cens cinquante -trois livres.
Le même Etat contient un autre Chapitre
en dix fept Articles de Droits éteints
& fupprimez depuis la Regence , & dont
les Sujets du Roy fe trouvent foulagez &
déchargez au moyen defdites fuppreflions,
le produit defquels Droits a été verifié , &
s'eft trouvé monter année commune à trente
cinq millions fix cens quatre - vingt - deux
mille deux cens quatre - vingt quatorze livres.
Il en contient encore un autre de plufieurs
autres Droits auffi éteints & fupprimez
en faveur du Commerce , dont les
produits au jufte n'ont pû être verifiez .
Un autre Chapitre des Impofitions
dont Sa Majefté a fait remife à fes Sujets ,
& les en a tenus quittes & déchargés par
divers Arrêts , lefquelles fe font encore
trouvées monter à cinquante deux millionscent
foixante & dix - huit mil cinq cens
quarante- fix. livres.
Et enfin un quatriéme chapitre de plu
fieurs autres avantages que Sa Majeſté a
encore procurés à ſes Sujets par divers: Ar-
Lefts
DE SEPTEMBRE 145
refts du Confeil , particulierement pour le
Commerce , dont le Profit & le Benefice
ne peuvent être évalués.
Enfuite vient la Recapitulation generale
dudit état , de laquelle il refulte ,
1° Que les Droits éteints pendant la
Regence à la décharge des Peuples monrent
par an , à trente cinq millions fix
cens quatre vingts deux mille deux cens
quatre vingts quatorze livres.
2° Qu'il y a eu plufieurs autres Droits ,
auffi éteints , reduits ou moderez à la décharge
& en faveur du Commerce , dont
l'on n'a pu verifier ni fixer les produits
par année.
Et que les impofitions remiſes aux Peuples
des années anterieures à 1719 fe font
trouvées monter , à cinquante deux millions
, cent foixante & dix-huit mille , cinq
cens quarante- fix livres.
Que des dix neuf cens foixante & dixfept
millions , cent vingt mille foixante &
une livre de dettes capitales , qui coutoient
au Roy annuellement en gages ,
augmentations de gages , taxations , rentes
, interefts , ou autres charges de Finances
, quatre vingts neuf millions , neuf
cens quatre vingts trois mille quatre cens
cinquante trois livres , la Compagnie des
Indes , en a payé ou doit payer, feize cens
millions, qui a trois pour cent , ne cou-
N
146
LE MERCURE
teront à Sa Majefté , que quarante - huis
millions
Plus , qu'il en a été acquitté par le
Trefor Royal en differentes parties , depuis
la mort du feu Roy , jufqu'au premier
Septembre 1719 , trente fept millions
deux cens trente un mille deux cens
quatre vingts dix - neuf livres.
Au moyen de quoy , le Roy ne doit plus
en principal que trois cens trente-neuf millions
huit cens quatre - vingts huit mille ,
fept cens foixante- deux livres , qui au denier
so ne couteront d'intereſt que fix
millions fept cens quatre- vingts dix-fept
mille fept cens foixante & quinze livres.
"
Et que par confequent le Roy ne payant
plus , pour toutes les dettes de l'Etat , que
cinquante quatre millions fept cens quatre
vingts dix-fept mille fept cens foixante &
quinze livres , Sa Majesté épargne par ans
née trente cinq millions , cent quatre-vingts
cinq mille fix cens foixante & dix - huit
livres , dont les Etats du Roy ou des Finan
ces feront de moins chargés pour l'avenir ,
Il fe trouve encore à la derniere page
une autre Recapitulation' dans la forme
qui fuit.
Sommes dont les Etats du
Roy doivent être déchargés
par année
,
Sommes ou droits dont les
35185678.A
DE SEPTEMBRE. 142
Sujets du Roy , font foulagés
tous les ans ,
Somme dont les Revenus .
du Roy font augmentez
depuis la Regence , fçavoir
Fermes generales , Aides
& Domaines de 10200000 .
de
Ferme du Tabac .
2020000
Et Fermes des Domaines
& Salines de Lorraine , Alface
, & Franche - Comté
de 230000
Par confequent les Finan-
`ces du Royaume , depuis la
Regence de Monfeigneur le
Duc d'Orleans , font ameliorées
par année de quatrevingts
trois millions trois
cens dix- fept mille neuf cens.
foixante & douze livres >
су
356822940
12450000
83317972.
Et l'on obſerve enfuite que depuis ledit
Etat , il s'eft trouvé encore quatre articles
confiderables , qui n'y font pas compris
, quoy que payez pendant la Regence.
Le premier de
Le fecond de
Le troifiéme de
9917940
liv,
5100000
Nij
148 LE MERCURE
Le quatriéme de
20000000
Ce qui revient encore à la fomme de
quatre vingts cinq millions dix- fept mille
neuf cens quarante livres.
Laquelle jointe aux dix - neuf cens foi
xante & dix- fept millions cent vingt mille
foixante & une livre , cy devant raportés,
font un total de dettes dont l'Etat étoit
chargé à la mort du feu Roy de deux milliars
foixante deux millions cent trente huit
mille une livre , ou payement de laquelle
fomme S. A. R. Monfeigneur le Regent
a pourvû , comme il a été dit cy- deffus .
N
Ous reparons volontiers l'omiffion
que nous avons faite dans notre Mercure
precedent ; elle regarde l'article de
la fête de Saint Louis , jour auquel l'Academie
Françoiſe a ajugé le prix à M. de
Saint Difdier , Chevalier de Saint Lazare .
Nous nous contenterons d'en rapporter
quelques endroits , qui fuffiront à tout
Lecteur délicat , pour décider du merite
de certe Ode . Le fujet donné étoit , que
Louis le Grand par la maniere dont il
accordoit des graces , y ajoutoit toujours un
nouveau prix.
L'Auteur après avoir parlé digneinent
DE SEPTEMBRE. 149
du caractere de generofité du feu Roy ,
fait la reflexion fuivante.
Le ciel nous montre peu de ces Rois bien faiſans ,
Inftruits dans le grand art d'embellir leurs prefens.
On voit des Souverains dont la magnificence
Verfe de toutes parts les biens en abondance ;
Mais quefert de donner , fi l'on n'oblige pas )
Les bienfaits dans leurs mains perdent tous leurs
appas.
Ces Rois n'éprouvent point cette fenfible joye ,
Qui fait que notre coeur dans nos yeux fe deploye,
Et qui répandfur nous & fur nos actions
Ces charmes furs garents de nos affections .
Leur generofité qu'un vain honneur anime ,
Peut à peine acquerir un droit fur notre eftime :
De leurs dons prodiguez le coeur n'estoint touché,
Et ce n'est point aufi ce qu'ils ont recherché.
Paroître genereux , eft la gloire vulgaire ,
Que leur aveugle orgueil demande pour ſalaire. )
Ils negligent un prix qu'ils ne connoiffent pas ,
Et de femblables mains font fouvent des ingrats ;
Mais du bonheur d'autruy, quifait fon bonheur
même ,
Recueille abondamment les fruits des biens qu'il
Seme.
M. de Saint Difdier , après avoir donné
la derniere main à fon portrait , termine .
cotte Ode par une priere pour le Roy.
Nij
150
LE MERCURE
Dans ta puiffante main tu tiens les coeurs des Rois ,
Grand Dieu, forme LOUIS , 'remplis no:re eſperance,
Quand il gouvernera le timon de la France ,
'il Fais que de ta fageffe il écoute la voix.
A
MADEMOISELLE DU G.
fur ce qu'elle aimoit beaucoup
à dormir.
Par M. le Chevalier de Pontbriand, Officier
de
Dragons.
FAur il que de jaloufes ombres
Sur vos yeux retombent toujours ?
Et que Morphée en des nuits fombres
Change les plus beaux de vos jours.
Le cours rapide, des journées
Vous montre en vain le prix du temps i
Dans l'espace de dix années ,
A peine vivez vous trois ans.
Encor, fi ce fommeil , Silvie ,
Pouvoit prolonger votre fort ;
Si la mort rendoit à la vie
Ce
que vous donnez à la mort!
Mais , non , dans les fombres demeures
DE SEPTEMBRE.
Clothe file fans s'arrêter ,
Et vous compte toutes les heures
Que vous ne pouvez pas compter.
Profitez mieux de votre vie ;
Pour l'Amour veillez aujourd'huy
Ou du moins , aimable Silvie ,
Apprenez à dormir pour luy.
Jadis , dans un bois folitaire
La Déeffe des mers dormant ,
Le malin enfant de Cithere
Prit foin d'y guider fon amant .
La belle croyoit que Morphée
L'occupoit de fonges divers ,
Et cependant l'heureux Pelée
Donnoit Achille à l'Univers.
Charmant objet de ma tendreſſe ,
Puifque dans vous tout eft divin ,
Que vous propoferois -je enfin
Que l'exemple d'une Déeſſe &
LA FORCE DE L'HABITUDE.
EPIGRAMME.
SEigneur Jasmin , Partiſan devenu
Grut qu'il étoit un fameux personnage ;
N iiij
752 LE
MERCURE
Et
calculant fon ample revenu
,
Se refolut de prendre un équipage.
Impatient , il en fait tous les frais :
Belle maifon , chevaux , cocher , laquais ,
Caroffe prêt à briller par la Ville ,
Tous fes flateurs à l'entour regardans ;
Tvre d'honneurs , Jaſmin d'un pas agile
Sauta derriere , au lieu d'entrer dedans.
Le mot de la premiere Enigme du mois
paffé étoit le Sel, & celuy de la feconde,
l'Epée.
V
ENIGM E.
Ne fois 'on m'a vû du ſoleil éclairé :
Alors contraire aux uns , aux autres favorable,
On mit ordre , dit- on , qu'unfait fi memorable
Fút tranfmis à jamais à la poſterité.
Voyagez ici-bas fur la terre & fur l'onde ,
Vos Joins pour me trouver, font des foinsfuperflus
F'étois dans ce tems - là ce que je ne fuis plus ,
Et fuis ce que j'étois dès l'enfance du monde.
AUTRE.
E voy le jour, & n'ûs jamais de peres
Je n'habitay jamais la terre :
Je ne fuis point né dans les eaux ;
Et je ne fus jamais du nombre des oiſeaux
BIBLIO
FILE
DE
LYON
*
18934
Coupons , , mettons -nous en tra
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LIIVTE NES VIJENN
DE
SEPTEMBRE.
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Chacun , comme il veut , me fait naître ;
Mais auffi-tôt je ceffe d'être :
Et le moment qui voit mon fort ,
Voit prefque en même temps ma mort.
F'ay pour retraite un fort étroit paſſage ;
Je fers à bien plus d'un uſage :
L'Artifan me poffede , ainsi que le plus riche,
Je fuis au liberal , tout ainsi qu'au plus chiche.
CHANSON.
Faifons tous revivre Bachusi
Amis travaillons à ce jus ,
Pour nous fi neceffaire ;
Si le buvant dans nos repas ,
Il fçait fi bien nous plaire ;
Que nous devons trouver d'appas ,
De plaifirs à le faire !
C'est un employ digne des Dieux
De cueillir ce jus précieux :
Ce don fi falutaire ,
C'est la fource de nos plaifirs ,
N'en faifons point myftere ,
C'eft but de tous nos defirs;
Quel plaifir de le faire !
Coupons , ga , mettons- nous en train$
$ 54
MERCURE LE
Que la cuve du moindre grain
Soit la dépofitaire ;
Et puis portons fur le preſſoir
Sa depoüille fi chere:
Ce jus coulera jusqu'auſoir,
Hâtons nous de le faire.
Velques perfonnes ſe plaignent qu'il
Qſemble que je neglige plus l'article d
Mariages que celui des Morts. Il eft facile
de répondre à ce reproche. Il mefuffira
de dire que je fuis inftruit des derniers par
les Billets Mortuaires , an lien que je ne
fuis informé des premiers que par la voix
publique , qui n'est pas toujours bienſure ,
à moins que les familles ne m'en donnent la
confirmation par un Billet . Au reste, je remercie
M. l'Abbé D. T. qui a bien voulu
me donner cet avis , & en même temps .
m'inftruire des Mariages , & d'autres nonvelles
qui font venuës à ſa connoiſſance: Je
le prie de me continuer la même grace.
MARIAGES
.
M. le Comte de Sainte Maure Premier
Ecuyer du Roy , & Commandant fes Ecuries
en furvivance de M. le Comte de
Sainte Maure fon oncle & Colonel du
,
DE SEPTEMBRE.
>
Regiment Royal Etranger , époufa le
d'Aouft Mademoiſelle de la Neuville , fille
heritiere de Mre. Defchiens de la Neuville,
Seigneur de la Longue , Layon , Broife ,
Moulignes &c. Confeiller du Roy en tous
fes Conteils Maître des Requêtes ordinaire
de fon Hôtel , Intendant des Ordres
du Roy , Prefident à Mortier au Parlement
de Navarre , & Intendant de Justice,
Police , Finances , Fortifications & Marine
de Franche-Comté, & des troupes de S. M
fur cette Frontiere. Le Roy , les Princes &
Princeffes du Sang Royal ont figné leur
Contrat de Mariage. Perfonne n'ignore
l'ancienneté de la Maifon de Sainte Maures
Moreri , du Chefne , le Pere Anfelme ,
en font de bons garans.
Mre. Jean-René de Longüeil , Marquis
de Maifons , Prefident à Mortier au Parlement
de Paris , époufa le du
- même mois Mademoifelle de Menars fille
de M. le Preſident de Mcnars .
M. le Marquis de Mailly Colonel du
Regiment de ce nom , & neveu de M. le
Cardinal de Mailly Archevêque de Reims,
époufa le d'Aouft Mademoiſelle de
Bournonville fille du feu Prince de Bournonville
.
Le 12 du mois paffé , M. le Marquis du
Caila , Baron de Laribe , Seigneur de
Pignan , Sauffan & autres lieux , iffu d'une
156 LE MERCURE
des plus nobles & des plus anciennes Maifons
de la Province de Languedoc , époufa
à Paris Mlle. d'Eſtrades , fille de feu M.
le Comte d'Eftrades , Lieutenant General
des Armées du Roy , tué en Hongrie auprès
de M. le Prince de Dombes dans la
derniere guerre des Imperiaux contre les
Turcs , & petite- fille de M. d'Eftrades Maréchal
de France .
La nuit du 3 au 4 Septembre M. le
Marquis d'Alincourt époula Mademoiſelle
de Bouflers dans le Choeur de l'Eglife de
Saint Paul Paroiffe de la Demoifelle , dont
les Portes étoient occupées par les Gardes
de la Connêtablie de France , auffi bien .
que l'efpace depuis le grand Portail jufqu'au
Choeur qu'ils bordoient des deux côtez.
Les nôces fe firent à l'Hôtel de Bouflers ,
où l'affemblée fut des plus brillantes par
le grand nombre de perfonnes diftinguées
de la Cour qui la compofoient . On y admira
la belle ordonnance & la magnifi
cence du feftin. Le lendemain M. le Maréchal
de Villeroy donna à la même Com
pagnie une grande fête à l'Hôtel de Lef
diguieres.
>
M. leMarquis d'Alincourt s'appelle François
Camille de Neufville de Villeroy
Marquis d'Alincourt , Meftre de Camp
du Regiment de Villeroy , Lieutenant pour
le Roy des Ville de Lyon & Provinces
DE SEPTEMBRE. 157
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois.
Il eft fecond fils de Louis Nicolas de
Neufville Duc de Villeroy , Pair de France,
Capitaine de la premiere & plus ancienne
Compagnie Françoife des Gardes du Corps
du Roy , Lieutenant General pour Sa Ma-.
jeſté des Ville de Lyon & Provinces de
Lyonnois , Forêt & Beaujollois : & de
feue Marguerite le Tellier.
,
"
Il est petit - fils de M. le Maréchal de
Villeroy , François de Neufville Duc de
Villeroy Pair & Premier Maréchal de
France , Gouverneur de la Perfonne du
Roy , Chevalier de fes trois Ordres , Gou
verneur des Ville de Lyon & Provinces
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois , Miniftre
d'Etat au Confeil de Regence , &
Chef des Confeils de Finances & de Commerce.
Ses Frere & Saurs.
François-Louis de Neufville Marquis de
Villeroy , Colonel du Regiment Lyonnois ,
Capitaine reçû en furvivance de la prémiere
& plus ancienne Compagnie Françoife
des Gardes du Corps du Roy, Lieutenant
General pour le Roy des Ville de
Lyon & Provinces de Lyonnois , Forêt &
Beaujollois. Il a époufé N ... de Montmorency
- Luxembourg , fille de Charles-
François-Frederic de Montmorency Duc
156 LE MERCURE
des plus nobles & des plus anciennes Maifons
de la Province de Languedoc , épouſa
à Paris Mlle. d'Eftrades , fille de feu M.
le Comte d'Eftrades , Lieutenant General
des Armées du Roy , tué en Hongrie auprès
de M. le Prince de Dombes dans la
derniere guerre des Imperiaux contre les
Turcs , & petite- fille de M. d'Eftrades Maréchal
de France.
6
La nuit du 3 au 4 Septembre M. le
Marquis d'Alincourt époula Mademoiſelle
de Bouflers dans le Choeur de l'Eglife de
Saint Paul Paroiffe de la Demoifelle , dontles
Portes étoient occupées par les Gardes
de la Connêtablie de France , auffi bien.
que l'efpace depuis le grand Portail jufqu'au
Choeur qu'ils bordoient des deux côtez.
Les nôces fe firent à l'Hôtel de Bouflers ,
où l'affemblée fut des plus brillantes par
le grand nombre de perfonnes diftinguées ,
de la Cour qui la compofoient. On y admira
la belle ordonnance & la magnificence
du feftin . Le lendemain M. le Maréchal
de Villeroy donna à la même Compagnie
une grande fête à l'Hôtel de Leſdiguieres.
M. leMarquis d'Alincourt s'appelle François
Camille de Neufville de Villeroy ,
Marquis d'Alincourt Meftre de Camp
du Regiment de Villeroy , Lieutenant pour
le Roy des Ville de Lyon & Provinces
DE SEPTEMBRE: 157
-
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois.
Il eft fecond .fils de Louis Nicolas de
Neufville Duc de Villeroy, Pair de France,
Capitaine de la premiere & plus ancienne
Compagnie Françoife des Gardes du Corps
du Roy , Lieutenant General pour Sa Majefté
des Ville de Lyon & Provinces de
Lyonnois , Forêt & Beaujollois : & de
feue Marguerite le Tellier.
T
Il eſt petit-fils de M. le Maréchal de
Villeroy , François de Neufville Duc de
Villeroy , Pair & Premier Maréchal de
France , Gouverneur de la Perſonne du
Roy , Chevalier de fes trois Ordres , Gou
verneur des Ville de Lyon & Provinces
de Lyonnois , Forêt & Beaujollois , Miniftre
d'Etat au Confeil de Regence , &
Chef des Confeils de Finances & de Commerce
.
Ses Frere & Soeurs.
François-Louis de Neufville Marquis de
Villeroy , Colonel du Regiment Lyonnois
Capitaine reçû en furvivance de la pre
miere & plus ancienne Compagnie Françoife
des Gardes du Corps du Roy, Lieutenant
General pour le Roy des Ville de
Lyon & Provinces de Lyonnois , Forêt &
Beaujollois. Il a époufé N ... de Montmorency
- Luxembourg , fille de Charles-
François-Frederic de Montmorency Duc
158 LE MERCURE
de Luxembourg , de Piney & de Beaufort
Montmorency .
Marguerite- Louife- Sophie de Neufville,
mariée à François Duc d'Harcourt , Capitaine
des Gardes du Corps du Roy , mort
le 4 Juin 1716.
Mademoiſelle de Villeroy.
Mademoiſelle de Bouflers s'appelle Ma
rie-Jofephine de Bouflers , née le 10 Septembre
1704 .
Elle eft fille de Louis François Duc de
Bouflers , Pair & Marêchal de France
Chevalier des trois Ordres du Roy , & de
la Toifon d'Or , Capitaine des Gardes du
Corps du Roy , Grand Bailly & Gouver
neur hereditaire de la Ville de Beauvais
& de Beauvoifis , Gouverneur & Lieute
nant General pour Sa Majefté des Provinces
de Flandres & de Hainault , Gouverneur
Particulier de la Ville & Citadelle de Lille,
Souverain Bailly de la même Ville & Châtellenie
de Lille ; Et de Catherine - Char
lotte de Graminont.
Ses freres & foeurs.
Antoine- Charles-Louis Comte de Bouflers
né le rs Decembre 1696. Gouver- -
neur General des Provinces de Flandres &
de Hainault , Gouverneur Particulier des
DE SEPTEMBR E. 139
Ville & Citadelle de Lille Souverain
Bailly de la même Ville & Chatellenie de
Lille , Colonel d'un Regiment d'Infanterie ;'
mort le 22. Mars 1711 .
Louis - François - Gombert de Bouflers
Comte de Ponches , né le 12 juillet 1700 ,
mort le 24 Decembre 1706 .
Joleph- Marie Duc de Bouflers , Pair de
France , né le 22. May 1706. Gouver
neur General des Provinces de Flandres &
de Hainault , Gouverneur Particulier des
Ville & Citadelle de Lille , Souverain Bailly
de la même Ville & Châtellenie de Lille ,
Lieutenant General pour le Roy dans le
Beauvoifis , Grand Bailly & Gouverneur
de la Ville de Beauvais & du Beauvoifis.
Louife-Antoinette- Charlotte de Bouflers,
née le premier Octobre 1694. mariée à
fon parent François Charles de Bouflers ,
Marquis de Kemiencourt , Maréchal des
Camps & Armées du Roy.
Antoinette-Hippolyte de Bouflers , née le
23. Septembre 1695. morte Religieufe le
premier Mars 1717.
Charlotte- Julie de Bouflers , née le 1o.
Juillet 1698. Coadjutrice de Madame fa
Tante , Abbeffe de l'Abbaye Royale d'Avenoy.
Catherine-Berthe de Bouflers , née le 21
Septembre 1702. mariée en Efpagne , on
elle eft Dame du Palais , à Jofeph-Can
160 LE MERCURE
telmo Stuart , Prince de Pettorano
,
fils
unique de Roftain Cantelmo Stuart Duc.
de Popoli , Grand d'Efpagne , Gouverneur
du Prince des Afturies & des Infants , Capitaine
des Gardes du Corps de S. M. C.
EXTRAIT Ꭰ Ꮦ DISCOURS
de M. Cadry , Vicaire de s. Paul, au Mariage
de M. le Marquis d'Alincourt avec
Mademoiselle de Boufflers , le 4 Septembre
1720.
Cmariages quais celui qui vous eft per-
E font là quelques - uns des devoirs du
fonnel, & dans lequel vous retrouverez tous
les autres , c'eft de copier les grands modeles
que vous avez devant les yeux , & par
lefquels vous avez été formez . Quels avantages
ne promet pas un Mariage qui unit
deux Maiions , où les plus grands fentimens
de vertu , d'honneur , de probité , de fidelité
au Roy , d'amour de la Patrie , de zele
pour le bien public , fe font fait remarquer
avec tant d'éclat , & ont fi juftement enlevé
tous les fuffrages.
Ce font ces vertus , Monfieur , qui ont
acquis à vos illuftres Ancêtres l'honneur
hereditaire de veiller à l'éducation de nos
Rois , & de leur infpirer des fentimens dignes
du Thrône. Et comment ont- ils rempli
DE SEPTEMBRE .
4
›
&
pli un Employ fi glorieux en lui-mêine ,
fi intereffant pour l'honneur du Prince &
pour la felicité de fes peuples ? Je ne rappelle
point ici les exemples anciens ; celur
fur lequel les yeux de tous les bons François
font fixez , fera à jamais la gloire de
Votre Maifon. Qu'il vive , cet illuftre Ayeul,
avec le facré Dépôt qui lui a été fi fagement
confié , & dont la feule confervation peut
confoler la France dans fes calamités ! qu'il
foit témoin encore long- tems de l'amour
des Peuples pour un jeune Roy qu'il aime
lui- mênie fi tendrement ! qu'il jouïffe dans
une longue paix du fruit de fes veilles !
qu'il voye accomplir les juftes eſperances
qu'il nous fait concevoir d'un Roy Religieux
& Jufte , & d'un Regne heureux
& pacifique. Et tandis qu'il travaille fi utilement
pour le bonheur de la France
foyez vous même fa confolation & une
partie de fa recompenfe en imitant fes
vertus & celles de votre illuftre Pere , pour
les tranfmettre enfuite aux enfans que Dieu
vous donnera , s'il veut bien écouter les
prieres que nous lui en faifons plus d'une
fois dans cette fainte Ceremonie .
*
Pour vous , Mademoifelle , je craindrois
de troubler la joye de ce jour en vous rappellant
le fouvenir d'un Pere , que la mort
savit trop tôt aux fouhaits & aux befoins
de la France , qui merita fi juftement
Ο
162 LE MERCURE
le refpect & la confiance des Peuples , qui
fe facrifia lui-même pour le falut de l'Etat
, & qui après avoir donné des preuves
fi éclatantes de ſa valeur dans les occafions
les plus difficiles , en a donné à cette Eglife
de fa Religion & de fon zéle pour la Maifon
de Dieu » que nous n'oublierons ja
mais , & qui nous font regarder fes précieufes
dépouilles qui s'y confervent avec
le refpect qu'elles meritent.
2
Vous avez dans Madame votre Mere
une regle vivante & un modele des vertus
Civiles & Chrétiennes qu'il me fuffit de
vous propofer. Faites-vous un devoir conftant
de demander & de fuivre en tout fes
confeils, & de marcher fur fes traces : fa
fageffe , fes lluummiieerreess , fa regularité fa
pieté fincere qui nous édifie , fa charité
envers les pauvres dont nous fommes fou
vent témoins , fa modeftie que je crains.
de bleffer icy , vous font connues plus qu'à
perfonne : elle vous en donne tous les jours
des, leçons, d'autant plus utiles , qu'elles
font toutenues de fes exemples ! Ne vous
laffez point de les fuivre dans un temps.
où elles vous feront plus neceffaires , &
ne craignez que de perdre de vue un guidedont
vous avez befoin pour ne pas vous
égarer dans les routes difficiles du monde..
Et vous , Seigneur , daignez confirmer ,
DE SEPTEMBRE. 163
M. de Fleurance , Preſident de la Cour
des Monnoyes de Paris , & ci - devant Ecuyer
ordinaire de Madame la Dauphine , épouſa
la nuit du 16 au 17 de ce mois en l'Eglife
de Saint Gervais , Damoiſelle Jeanne Maffon
, fille de feu M. Maffon Treforier General
de la Marine au Departement de Marfeille
& Toulon. La Maiſon de M. de Fleurance
eft tres-connue ; David de Fleurance
fon grand Oncle fut fait Gentilhomme de
la Chambre du Roy Henry le Grand le 4
Novembre 1603. En 1612, après la mort
de M. de Gueteaux , il fut fait Précepteur
en chef du Roy Louis XIII . & le 4 Aouft
de la même année il fut fait Confeiller d'Etat.
En 1615 il eut l'honneur d'accompa
gner par ordre du Roy Madame Elifabeth
de France , mariée avec le Roi d'Eſpagne .
Le fixiéme Ayeul de M. de Fleurance étoit
Maistre d'Hoftel ordinaire du Roi Charles
VIII . en 1490 , & fut honoré de plufieurs
commiffions importantes tant au dedans»
qu'au dehors du Royaume..
Georges Mordant , frere du Comte de
Petersbourg , époufa à Londres le Juil
let N. fille du feu Colonel Coliers.
N. Comte de Martinitz époufa à Vienne
le 21 Aouft N. Comteffe de Trautfon.
Le même jour N. Comte de Goez épou
fa N. Comteffe de Tierheim .
O ij
164 LE MERCURE
MORTS DE PARIS.
Effire Eufebe Renaudot , Prieur de
M Froffay, Pun des Quarante de l'Academie
Françoiſe & de celle des Infcriptions
& Belles Lettres , mourut le premier
Septembre , en fa 73. année.
Dame Marie-Madelaine Fouquet , Veuve
de, Meffire Emanuel de Cruffol , Marquis
de Montfalé , mourut le 7 Septembre
Meffire Philippe , Marquis de Courcil
Ion & de Dangeau , Comte de Civray
Melle & Uffon , Baron de Sainte-Hermine
, de Breffuivre , & de Château du Loir ,"
Seigneur de Chaufferais , &c . Chevalier
des Ordres du Roy , Confeiller d'Etat
d'Epée , Grand Maître des Ordres Royaux,
& Hofpitalier de Notre Dame de Mont-
Carmel & de Saint Lazare , de Jerufalem
, tant deçà qu'au delà des Mers ,
Gouverneur & Lieutenant General pour
le Roy de la Province de Touraine , Gouverneur
particulier de la Ville & Château
de Tours , Doyen de l'Academie Françoiſe ,
& cy-devant Chevalier d'honneur de feuë
Madame la Dauphine , mourut le 9 Sep-.
tembre en fa quatre - vingt - quatriéme
année.
M. le Marquis de la Carte , pere de
M. le Marquis de la Carte , Lieutenant
DE SEPTEMBRE. 165
General pour le Roy dans la Province du
Bas Poitou , & frere de M. de la Carte ,
Grand Prieur d'Aquitaine , mourut le 9
Septembre 1720 , en fon Château d'Uzé
près Saint Mexant , âgé de 84 ans , &
univerſellement regretté de toute la Pro
vince.
Meffire Gafton - Jean- Baptifte- Louis de
Noailles , Evêque & Comte de Châlons
Pair de France , eft mort dans fon Château
de Sari le 15 Septembre âgé de 5 ans ,
2 mois 8 jours il étoit né le 7 Juillet
1669 : il avoit fait fes premieres études à
Chaalons , fous les yeux de fon Eminen
tiffime frere Monfeigneur le Cardinal de
Noailles , depuis Archevêque de Paris .
Cette heureufe éducation le forma de bonne
heure à l'Etat Ecclefiaftique , & lui merita
d'être nommé fon fucceffeur dans le Sicge
de Chaalons le 15 Decembre 1695 .
Meffire Charles Roger de la Tournelle,
Chanoine de la Sainte Chapelle de Dijon,
& Prieur de Chaftel- Chinon , mourut lę
15 Septembre.
Dame Louife Marie Magdelaine Charpentier
, époufe de Meffire Louis Paul
Bellanger , Avocat general de la Cour des
Aydes , mourut le 17 Septembre .
Meffire N. Marquis du Chafteler , Gou
verneur du Château de Vincennes , mou-
Septembre .
rut le
136. LE MERCURE :
MORTS ETRANGERES.
N. Cafini , Maître des ceremonies du
Pape , mourut à Rome le 14 Juillet 1720.
L'Abbé Chiaponni lui a fuccedé dans
cette Charge.
Dom Diego Urtado de Mendoza &
Sandoual , Comte de Corzana , Chevalier
de l'Ordre de Saint Jacques , Grand d'Efpagne
, Lieutenant General des Armées du
Roy Catholique Charles H. Infpecteur &
Directeur des Guerres en Eſpagne , &
Confeiller d'Etat actuel de l'Empereur ,
mourut à Vienne le 16 Juillet , âgé de
74 ans.
Le Baron Frederic de Weiberg , Confeiller
d'Etat du Roy de Dannemarck , Chevalier
de l'Ordre de Dannebrock , & for
Envoyé extraordinaire vers l'Empereur
mourut à Vienne le 21 Juillet , âgé de
$3 ans.
Le fieur Gio Bembo , Evêque de Civi
del de Bellua , dans l'Etat de Venife , y
mourut le
Juillet , âgé de 70 ans.
$
Dona Jeanne Fernandez de Cordoue &
Arragon , fille de Louis - Ignace de Cor-.
doue & Figueroa , Duc de Feria , qui
avoit époufé en 1669 Paſcal-François de
Borgia , Duc de Gandie , Marquis de Lombay
, Comte d'Oliva , &c. mourut veuve
DE SEPTEMBRE. 167
le
Aouſt 1720 , âgée de 68 ans .
Dom Juan Rofillo , du Confeil Royal
de Caftille , mourut le Aouft en fa
quatre-vingt - fixiéme année.
Le fieur Earle , Lieutenant General des
Armées du Roy d'Angleterre , & cy - devant
Gouverneur de Portsmouth , mourut le
3. Aouſt.
Dom Louis Alvarés de Caftro , Marquis
de Cafcaës , Confeiller du Confeil
d'Etat , & de celui de la Guerre , cy- devant
Ambaffadeur extraordinaire de Portugal
à la Cour de France , mourut à Lisbonne
le 27 Juillet , en fa foixante- dix-feptiéme
année.
CHARGES ET DIGNITEZ..
Le
Aouft , le Roy d'Espagne nommas
à l'Evêché de Barcelonne D. André de
Orbé , Inquifiteur de Seville..
Sa Majesté Catholique nomma Capiraine
General de fes Armées N. Marquis
de Cala- Fuerte , qui avoit commandé dans
Pifle de Mayorque..
Nomma Lieutenant de Roy de Denia ,
Dom Francifco Ramirez de Eftenos , Colonel
.
++
Donna une place dans le Confeil des
Indes à Dom Juan de Valcarcel Dato
Prefident du Confeil d'Arragon.
168 LE MERCURE
Et la Charge de Prefident du Confeil
d'Arragon , à Dom Antonio Cala de Vargas
, qui avoit exercé la même Charge en
Cerdaigne .
JOURNAL DE PARIS.
Line
E 24 Aouft dernier , le Roy a donné
une Penfion de 3000 livres à M. Thierry
, premier Avocat General au Parlement
de Dijon .
Le 30 M. l'Abbé de Saint Albin foutine
fa Sorbonnique , ayant eu difpenfe de la
faire avant le temps prefcrit.
Le 30 du mois dernier , veille du jour
de l'Anniverfaire du Roy Louis XIV , let
Roy entendit dans la Chapelle des Tuilleries
, la Meffe de Requiem chantée par la
Mufique.
Le 2 Septembre 17 20 , on celebra dans
l'Eglife de l'Abbaye Royale de Saint Denis,
un Service pour le repos de l'ame du Roy
Louis XIV. où M. l'Evêque de Tarbes
Officia . M. le Comte de Toulouſe , & plufreurs
Seigneurs de la Cour s'y trouverent,
ainſi qu'un grand nombre de Prelats .
Le 2 le Regent coucha pour la premiere
fois au Louvre , dans l'appartement de
feue Madame la Ducheffe.
Le
DE SEPTEMBRE. 169
A
Le M. le Comte de Saujon , Aide-
Major des Gardes du Corps du Roy , prêta
ferment entre les mains de Sa Majeſté , en
prefence de M. le Duc d'Orleans , pour la
Charge de Lieutenant de Roy du Bazadois
en Guyenne.
M. Augier a été rétabli dans fa Charge
de Treforier du Clergé de Paris.
M. de la Ruë de Bernapré , a obtenu
une penfion de 1200 livres fur l'Abbaye
de Savigny , Ordre de Cîteaux.
M. de Carnoüet , Senéchal de Pontivi ,
a obtenu la grande députation des Etats
de Bretagne .
*
Madame la Ducheffe de Villars- Brancas
la jeune , a été gratifiée d'une penfion de
12000 livres.
Le 12 le Roy fit Chevalier de l'Ordre
Militaire de Saint Louis , M. Gauvin de
Virville , Gentilhomme Bourguignon , &
Major du Château de Dijon. Depuis près
de 34 ans que M. Gauvin eft au Service
du Roy , il s'y est toujours diſtingué par
fon zele & par fon attachement.
M. Perrin , Maréchal de Camp , doit
commander à Aix les Troupes de Sa Majefté
qui font dans cette Province , fous
M. le Marquis de Caylus , Lieutenant general
, qui fe tiendra à Tarrafcon.
M. de Chabanas de Curion , a vendu
fon Regiment des Cravattes deux cens
P
1.70
LE MERCURE
quarante mille livres à M. le Marquis de
Joyeule.
M. Olivieri , parent du Pape , eft arrivé.
de Rome à Paris.
L'Abbaye de Beaupré , Ordre de Cî-
Diocefe de Toul , vaque par teaux >
mort de M. l'Evêque de Verdun.
la
Le Comté de Nevers a été erigé en
Duché- Pairie . Les Lettres d'enregistrement
en furent expediées le 7 de ce mois.
M. le Marquis de Gandelu , fecond fils
de M. le Duc de Trefmes , Gouverneur de
Paris , a eu l'agréement du Roy pour acheter
le Regiment de Champagne de M. le Che->
valier de Teffé , qui a été fait Maréchal de
Camp.
La Dignité de Grand- Maître des Ordres
de Notre - Dame de Mont- Carmel & de
Saint Lazare , étant vacante par la mort
de M. le Marquis de Dangeau , le Roy a
nommé M. le Duc de Chartres , Grand-
Maître de ces deux Ordres.
Le procès des Indiens de Pontichieri
contre M. Hebert Conful , & Pun des Directeurs
de la Compagnie des Indes , a
été decidé au Confeil en faveur des deux
freres.
Il vaque par la mort de M. l'Abbé de
la Tournelle , le Prieuré de Chastel-
Chinon.
M. le Marquis de Roye , Lieutenant -
DE SEPTEMBRE. 171
general des Galeres , a eu la furvivance
de cette Charge pour fon fils , âgé de 9 à
10 ans.
M. le Marquis de Cannillac , Lieute
nant general des Armées du Roy & du
Confeil de Regence , eft monté à la place
de Confeiller d'Etat d'épée qu'avoit feu
M. le Marquis de Dangeau.
M. le Comte d'Armagnac a été nommé
par le Roy Grand- Vicaire des Ordres de
Notre-Dame du Mont Carmel & de Saint
Lazare.
Le Prieuré de Froffai en Bretagne a été
donné par M. l'Abbé d'Auvergne , au
Prince Frederic fon frere. M. le Chevalier
de Caumartin a eu pat fon Indult celui
de Saint Chriftophe de Châteaufort. Ces
deux Beneficés étoient vacans par la mort
de M. l'Abbé Renaudot .
Madame la Ducheffe de Valentinois-
' Monaco , eft accouchée d'un fils . Il y a
eu à l'occasion de cette naiffance de grandes
illuminations à l'Hôtel de Matignon.
Par un Courier extraordinaire dépêché
de Modene , le Palais Royal a été tiré
d'inquietude , en apprennant que la Princeffe
hereditaire de Modene étoit entierement
hors de danger de la petite verole
dont elle a été à l'extremité.
L'ouverture des Etats de Bretagne fe fit
à Ancenis , fuivant les ordres de S. M. le
Pij
172
LE MERCURE
7 de ce mois , fur les trois heures aprés
midi ; M. le Maréchal d'Eftrées qui y prefide
, ouvrit la feance par un difcours qui
fat applaudi de toute l'Affemblée. Cette
harangue fut fuivie de plufieurs ,autres en
la maniere accoutumée . L'Affemblée étoit
compofée de près de huit cens Gentils-
hommes , outre le Clergé & le Tiers-
Etat, qui étoient auffi fort nombreux . M.
le Comte d'Ancenis entra dans cette Ville
accompagné de quatre à cinq cens Gentils
-hommes tous trés bien montés . Le 18
les Etats accorderent 3 millions de don
gratuit , pour les années de 1720 , 1721
& 1722. Cette fomme fera payée en differens
termes , fçavoir 500 mille livres au
premier Novembre de cette année , pareille
femme au premier Janvier prochain,
& les deux autres millions en vingt- quatre
payemens égaux de mois en mois ,pendant
les deux années de 1721 & 1722 .
M. le Comte de Coetlogon oncle à la mode
de Bretagne de M. le Marquis de Coetlogon
, s'étant demis de la Charge de Procureur
General des Sindics , les trois Ordres
accepterent fa demiffion en faveur du
premier , & nommerent en même tems
M. de Bedée Prefident au Parlement de
Rennes , pour exercer l'autre Charge de Procureur
General des Sindics .
Le 24 M. de la Beffiere fut élu TreDE
SEPTEMBRE. 173
forier des Etats à la place de M. de Mon- ,
taran par les trois Ordres. Deux Gentilshommes
de la Province fe font offerts pour
être garands du maniment du nouvel Elu ,
jufqu'à ce qu'il ait fourni une caution en
forme , ce qui a été accepté. Aprés fa reception
, toute la Seance fut occupée à
deliberer fur l'emprunt que la Province
a deffein de faire pour achever de rembourfer
ce que le Roi avoit prêté aux .
Etats. Les trois Ordres furent d'abord d'avis
de partager entr'eux ce qu'il y avoit
à
emprunter, qui confifte en huit millions ,
fçavoir , trois millions pour la Nobleffe
trois millions pour l'Eglife , & deux millions
pour le Tiers-Etat . Comme on trouva
ce moyen impraticable , on remit la
décifion à une députation de fix Com
miffaires de chaque Corps avec les Prefidens
; enfin aprés plufieurs débats & conteſtations
, il a été mis de nouveau en déliberation
, qu'au lieu de cent mille francs.
qu'on vouloit impofer à ceux qui étoient
aux Etats , on fe contenteroit de trente
mille livres pour chacun d'eux.
On doit cet éloge à M. le Maréchal
d'Eftrées, qu'à peine a- t'il paru , qu'il s'eft
concilié tous les efprits de l'Affemblée &
de la Province . Sa magnificence jointe à
la dignité & aux égards avec lefquels il
accompagne tout ce qu'il fait , n'ont pas
,
Piij
174 LE MERCURE
1
peu
contribué à achever de lui attirer l'efti
me publique. Ce Seigneur a tous les jours
chez lui plus de deux cens couverts : l'abondance
& la délicateffe des mets s'y trou
vent reunis. Madame la Maréchale d'Eftées
le feconde de fon côté à merveille ,
ayant toute l'attention imaginable à partager
les honneurs de la Prefidence de
M. le Maréchal fon Epoux .
Le 19 le Roi accompagné de M. le Duc
de Bourbon & de M. le Maréchal Duc de
Villeroy, fe rendit en caroffe au Camp qui
eft dans la plaine des Sablons , où M. le
Duc d'Orleans & M. le Duc de Chartres
fe trouverent. Le Roi monta à cheval , &
fit la reveue des quatre Bataillons de fon
Regiment , paffa dans les rangs & les vit
défiler. Mademoiſelle de Charolois habillée
en Amazone avec plufieurs Dames de la
Cour , fuivit le Roi. Le 21 S. M. fit une
feconde revue de fon Regiment qui partit
le 23 de la plaine des Sablons , où ilavoit
campé depuis le 17 de ce mois . Le 22 le
Roi fit Chevaliers de l'Ordre Militaire de
Saint Louis , douze Officiers de fon Regiment.
I accorda plufieurs Penfions de
500 livres à differens Officiers de ce Corps,
outre quelques gratifications de 1000 liv.
S. M. avoit fait diftribuer le 20 8000 liv .
en efpeces aux quatre Bataillons de ce Regiment.
M. le Chevalier de Peze , qui en
DE SEPTEMBRE.
175
eft Colonel- Lieutenant , a fait tous les honneurs
depuis le 17 jufqu'au 23. Il tenoit
deux Tables de 40 couverts chacune.
Il vaque par la mort de M. l'Abbé de
Maulevrier- Langeron , l'Abbaye de Saint
Jean , de dix mille livres de rentes ; & celle
de Saint Pierre de Châlons- fur- Saone , de
cinq mille livres.
M. Mellier
,
General des Finances de
Bretagne , a été fait Chevalier de l'Ordre
de Saint Lazare.
1
Les Lettres de Modene portent que le
Prince Antonio de Modene doit époufer
la Princeffe Sobieski , foeur cadette de
Epoufe du Pretendant.
Les Lettres de Marfeille du 22. font
roujours trés- affligeantes . Quoique le mal
contagieux femble agir avec moins de violence
, fur-tout lorfque le vent de Maeftral
fouffle , il ne laiffe pas d'emporter journellement
plufieurs des Habitans de cette
Ville & des Baftides qui font aux environs.
On fe flate cependant que la fraîcheur
des nuits & des matinées du mois.
d'Octobre , calmeront de plus en plus ce
mal , & que l'hyver pourra le faire ceffer
entierement. De plus , le bon ordre que
l'on a établi , & l'attention toute particutliere
de la part de la Cour , pour fecourir
cette Ville font efperer que
>
›
l'on viendra à bout d'en arrêter le cours.
P iiij.
176 LE MERCURE
On a obfervé qu'il y étoit mort beaucoup
plus de femmes que d'hommes . Les Galeres
fe tiennent toujours derriere la Derfe ,
où fuivant toutes les apparences , elles hyverneront
, pour empêcher que la maladie
ne s'y communique.
Le Lundy 23 M. le Duc Regent , les
Princes du Sang , M. le Chancelier , Mrs
les Ducs & Pairs & Maréchaux de
France , plufieurs Confeillers d'Etat & Mai
tres des Requêtes , fe rendirent au Grand
Confeil. Après que M. le Doyen du Grand
Confeil eut fait le rapport des pieces concernant
la Declaration & les Lettres Patentes
, on alla aux opinions , & il fut ordonné
que ces deux dernieres pieces feroient
enregistrées . En confequence de cet
enregistrement, M. le Procureur General du
Grand Confeil a envoyé la piece fuivante.
Monfieur le Procureur du Roy ,
Je vous envoye la Declaration que Sa Majesté
vient de rendre, pour pacifier les troubles
dont l'Eglife de France eft affligée de
puis long-temps par les conteftations qui fe
font élevées au fujet de la Conftitution
UNIGENITUS : ayez agreable , auffi - tôt que
vons aurez reçû cette Declaration , de lafaire
publier dans votre Siege avec les Lettres Pa-
Bentes d'attribution au Confeil de toutes les
contraventions qui pourront y survenir.
DE SEPTEMBRE.
177
5
L'intention du Roy & de S. A. R. eft , que
von's apportiez tous vos foins pour faire exe -`
cuter cette Loy , qui doit rétablir la paix dans
l'Etat , & la fubordination dans le Clergé :
je ne peux vous prefenter d'objet plus digne
de votre zele , & il n'y a point d'occaſion
où vous puissiez en donner des preuves plus
utiles & plus effentielles ; que dans celle-cy
le Roy m'ordonnant de luy rendre un compte
exact de tout ce qui fe paffera à ce sujet , Je
vous prie de m'informer tous les mois de toutes
les entrepriſes que l'efprit de party pour
roit encore former an préjudice de la paix.
Vous devez vous conduire avec douceur
& moderation à l'égard de ceux dont la foumiffion
aux ordres du Roy ne fera pas auſſi
prompte qu'il eft à defirer qu'elle le foit.
La rigueur est toujours les dernieres armes
que la Justice doit employer , & la verité
ne s'établit jamais mieux que par la paix.
Cependant je prie Dien qu'il vous ait en
Sa fainte garde, & fuis ,
Monfieur le Procureur du Roy ,
A Paris ce 25
septembre 1720.
Votre Confrere & amy.
Le 29. la Declaration pour l'établiffement
d'une Chambre des Vacations fut
fcellée elle fera compofée , partie de
Confeillers d'Etat, & partie de Maîtres des
178 LE MERCURE
Requêtes. M. d'Armenonville a été nommé
pour y prefider. Ces Meffieurs tiendront
leurs Audiences dans la grand- Salle
des Auguftins.
Les Lettres de Londres du 30 , portent
que M. le Duc de Liria y étoit arrivé
d'Espagne. Il a rendu vifite à Madame
Godfrey fa grand- mere & foeur de M. le
Duc de Malborough . L'Eſcadre qui a ordre
de s'affembler aux Dunes, fera compofée
de 10 à 12 Vaiffeaux de Guerre ; ce
qui fait croire à bien des gens qu'elle n'eſt
pas deſtinée pour escorter le Roy à fon
retour d'Hannovre . Les Actions baifferent
le 29 à près de 500. Les Obligations de
la Compagnie perdent 15 pour cent , outre
l'interêt de près de trois mois.
M. l'Archevêque de Cambrai , premier
Plenipotentiaire au Congrès de Cambrai ,
fait travailler à fes Equipages , ainfi que
M. de Morville Ambaffadeur de la Cour
de France en Hollande , & M. de Saint-
Conteſt.
Second Avis pour la nouvelle Eaition des
Jugemens des Sçavans , fur les principaux
Ouvrages des Auteurs.
Par ADRIEN BAILLET.
En fept Volumes in Quarto.
Depuis que nous avons diftribué au
Public des Soufcriptions pour la nouDE
SEPT EM BRE. 179
velle Edition des Jugemens des Sçavans,&'tnous
avons appris par le Mercure que
Monfieur DE LA MONNOYE de l'Academie
Françoile, diftingué par fa reputation en ce
genre de Litérature , travailloit en fon par
ticulier à illuftrer d'un bout à l'autre par
des Notes exactes ces mêmes ouvrages :
cette raiſon nous a fait recourir à lui ; &
il a bien voulu nous faire part de fes Obfervations
fur les Cinq premiers Volumes,
& nous promettre celles qu'il prepare fur
le refte. Nous profitons avec plaisir de
l'occafion qui fe prefente de fatisfaire entierement
le Public , en ajoûtant à notre
Edition ces nouvelles Remarques. Comme
elles augmenteront de beaucoup l'Impreffion
, cette nouvelle dépenfe nous oblige
d'augmenter de Cinq livres les Soufcrip
tions qui nous restent à delivrer , tant du
grand que du petit papier. C'eft-à -dire
que nous recevrons à prefent Trente- cinq
livres au lieu de Trente pour le grand papier
; & Vingt cinq livres au lieu de Vingt
pour le petit ; quoique les Soufcriptions.
ne portent que Trente livres & Vingt livres.
Ceux qui n'auront pas foufcrit , payeront
pour le grand papier Cent vingt livres au
lieu de Cent , & pour le petit Quatrevingt
livres , au lieu de Soixante & dix.
Comme nous avons été obligés, de fuf180
LE MERCURE
pendre pendant près de trois femaines la
diftribution de nos Soufcriptions , nous
avertiffons que nous continuerons d'en delivrer
jufques au dernier Octobre feulement.
Noms
Le 15. Septembre 1720 .
demeures des Libraires.
CHARLES MOETTE , rue de la Bouclerie ,
au bout du Pont S. Michel.
CHARLES LE CLERC , Quai des Auguftins.
PIERRE MORISSET , rue S. Jacques.
PIERRE PRAULT , Quai de Gêvres.
ANT. URBAIN COUSTELIER , Quai des
Auguftins.
;
Il paroît depuis peu un projet d'un nouveau
Breviaire , dans lequel l'Office Divin ,
fans en changer la forme ordinaire , feraparticulierement
compofé de l'Ecriture
Sainte inftructif , édifiant , dans un or
dre naturel , fans renvoi , fans repetitions,
& tres-court , avec des Obfervations fur
les anciens & les nouveaux Breviaires.
Cet Ouvrage doit être d'autant mieux reçû
, que l'Auteur ne donne point fes pro
pres penfées pour des regles infaillibles ;
il ne fait que les propofer feulement come
me des reflexions qu'il a faites fur la maniere
dont on pourroit compofer un Breviaire.
Ce Livre ſe vend chez LOTTIN , FUG
S: Jacques , prés S. Yves , à la verité.
DE SEPTEMBRE . 181
MORTS.
Le 7. de Septembre , 1720 mourut âgé de
92 ans Meflire Nicolas Druel d'Angouille ,
Abbé de Notre- Dame du Val , Ordre de
S. Auguftin , Diocèfe de Bayeux ; c'eſt
lui dont il eft parlé dans la Vie de feu
Monfieur de Rancé Abbé de la Trape
fous le nom de ce Gentilhomme retiré du
fervice & de la Cour , pour fe confacrer.
au rétabliſſement de cette Abbaye , où il
eft mort après l'avoir gouvernée, tant Commandataire
que Regulier , près de foixante
ans , y menant la vie des Abbez des premiers
fiécles de l'Eglife : outre cette Maifon
qu'il a reformée , il a eu beaucoup
de part à toutes les autres Reformes qui
fe font faites dans fon Ordre le fiécle
paffé.
Feue Madame la Princeffe Palatine- >
mere de S. A. Madame la Princeffe , l'honora
de l'execution de fon Teftament :
il s'acquitta de cette commiffion à la fatisfaction
des heritiers & legataires , qui
s'emprefferent à procurer à ce pieux Abbé
un Evêché & des Emplois confiderables ,
mais que fon humilité , & l'amour de la
Retraite luy firent refuler.
On efpere donner au Public la Vie de
cet illuftre Abbé , qui a eu beaucoup de
182 LE MERCURE
liaifon & de relation avec l'Abbé de la
Trappe. On y apprendra plufieurs particularitez
de la Vie de ce dernier , échapées
à la connoiffance de ceux qui l'ont
mife au jour ; on y joindra auffi celle de
N. Druel d'Angouille , foeur de l'Abbé
dont on annonce la mort , auffi decedée
en reputation de Sainteté dans l'Ordre de
la Vilitation.
La Maiſon de Druel d'Angouille eft
Noble & ancienne en Normandie , a toujours
été Militaire , & fourni dans le fiécle
paffé des Officiers Generaux & Gouverneurs
de Places.
ZYX12712
EDIT DUROT ,
Donné à Paris au mois de Septembre ,
Scellé & registré , par lequel Sa Majesté
ordonne ce qui fuit.
ARTICLE
QHo
PREMIER .
U'IL ne foit plus fabriqué dans les
Hôtels de nos Monnoyes d'autres
Efpeces d'Or & d'Argent , que celles qui
porteront les empreintes figurées dans le
cahier attaché fous le contre-fcel du prefent
Edit ; fçavoir ; les Louis d'Or du
titre de vingt-deux Karats , au remede de
DE
SEPTEMBRE.
183
dix trente deuxièmes , à la taille de vingtcinq
au Marc , douze grains de remede ,
les demis à proportion ; & des Louis d'Ar-
4gent ou tiers d'Ecus , du titre de onze deniers
, au remede de trois grains à la taille
de tiente au Marc , une demie piece de
remede , des demis & des quarts à proportion
, à la reſerve du remede de poids qui
fera d'une piece par Marc pour les demis,
& de deux pieces & demi pour les quarts .
II.
Lefquelles efpeces feront marquées
d'un grenetis fur la tranche , & auront
cours dans tout notre Royaume , Païs
Terres & Seigneuries de notre obéïffance ,
fur le pied de cinquante quatre livres les
Louis d'Or , les demis à
proportion , &
de foixante fols les Louis
d'Argent , les
demis & quarts à
proportion.
2
III. Le travail de ladite fabrication
fera jugé en nos Cours des
Monnoyes
conformément à l'Article IV, de notre Edit
du mois de
Decembre 1719.
IV. Voulons & Nous plaît que toutes
les anciennes efpeces d'Or & d'argent , autres
que celles qui feront fpecifiées dans
l'Article fuivant , foient , ainfi que les ef
peces étrangeres , les livres d'Argent & lest
Dixiémes d'Ecus , portées aux Hôtels de
nos
Monnoyes
inceffamment aprés le 15
d'Octobre
prochain , pour yêtre fondues &
converties en Efpeces de la fabrication or
1
184
LE MERCURE
donnée par le preſent Edit.
V. Voulons pareillement que les Loui
d'Or & les demis Louis d'Or de vingt
cinq au Marc , fabriquez en conſequenc
de l'Edit du mois de May 1718. les Ecust
de dix au Marc de la même Fabrication
comme auffi les demis , quarts , fixiémes
& douzièmes defdits Efcus , même les tiers
d'Ecus ou Louis d'Argent , foient portez
aux Hôtels de nos Monnoyes immediatement
aprés ledit jour 15. Octobre prochain
, pour y être remarquez ou reformez
des mêmes Empreintes que celles de la
nouvelle Fabrique ordonnée par le prefent
Edit , & avoir cours ; fçavoir , les Louis
& les demis Louis d'Or fur le même pied
que ceux de fabrique , & les Ecus de Dix
au Marc pour neuf livres , les demis
tiers , quarts ,
fixiémes & douzièmes à
proportion ; leſquelles Efpeces reformées
feront marquées d'un differend , qui fera
prefcrit par les Officiers de nos Cours des
Monnoyes.
>
VI. Entendons que les Diminutions indiquées
fur les Efpeces & Matieres d'Or
& d'Argent , pour les premier & 16. Octobre
prochains , foient executées dans le
Public conformément à l'Arrêt de notre
Confeil du 30. Juillet dernier , & que
celles defdites Elpeces & Matieres qui feront
portées aux Hôtels de nos Monnoyes
P
depuis
DE SEPTEMBRE. 185
depuis ledit jour 16 Octobre jufqu'au premier
Decembre prochain , pour être converties
ou reformées en confequence du
prefent Edit , foient reçûës par les Officiers
defdites Monnoyes , ainfi que par les
Changeurs , fur le pied ; fçavoir , les Louis
d'Or de vingt-cinq au Marc pour Trentefix
livres piece , les demis à proportion ;
les Ecus de Dix au Marc pour Six livres,
les demis , tiers , quarts , fixiémes & douziémes
à proportion , & toutes les autres
Elpeces & Matieres au poids , à proportion
de Neuf cens livres le Marc de Louis
ou de vingt-deux Karats , & Soixante livres
le Marc des Ecus & de l'Argent du
Titre de onze deniers de fin ; & qu'en
joignant par nos Sujets une moitié en fus
du produit de leurs Efpeces & Matieres
en Billets de Banque de Dix livres , de
Cinquante livres & de Cent livres , la totalité
leur foit fournie comptant en nouvelles
Efpeces , fur le pied de Quatrevingt-
dix livres le Marc d'Argent , & l'Or
à proportion. ..
VII. Voulons qu'à commencer du pre
mier Décembre prochain , lefdites anciennes
Efpeces foient decriées de tout cours,
& ne puiffent être expofées ni negociées
dans le Commerce , à quelque prix que
se puiffe être , à peine de confifcation. J
de Trois mille livres d'amende contre
186 LE MERCURE
4
chacun des contrevenans
profit des Denonciateurs .
applicable au
VIII . Ordonnons que paffé ledit jour
premier Decembre , celles defdites Efpeces
qui fe trouveront en la poffeffion des
Particuliers , Communautez & de toutes:
fortes de perfonnes generalement quelconques
, de quelque qualité & condition.
qu'elles foient , même parmi les Meubles
& Effets des Parties faifies ou des perfonnes
decedées , feront & demeureront confifquées
à notre profit , & portées aux Hôtels
de nos Monnoyes , pour y être conver
ties en nouvelles Efpeces , fans que cette·
peine ni les precedentes puiffent être re
putées comminatoires , & que la mainlevée
defdites Efpeces puiffe être accordée
fous quelque prétexte que ce foit.
IX. Enjoignons aux Officiers qui au
ront fait les faifies , appofé & levé les ,
Scellez & dreffé les Inventaires , de donner
avis aux Procureurs Generaux és Cours
de nos Monnoyes , ou à leurs Subftiturs
dans les Provinces , defdites Efpeces an
ciennes qui fe feront trouvées , à peine
d'interdiction & en outre d'être con
damnez en leurs propres & privez noms .
à la valeur de dites Efpeces qui au payer
ront été recelées , & en l'amende qui ne
pourra être moindre que du quadruple
fans que lefdites peines puiffent êtrere..
purées comminatoires..
›
DE SEPTEMBRE. 187
X. Voulons qu'en cas de Denonciation
contre les Particuliers , Communautez ou
Officiers contrevenans , la moitié defdites:
confifcations & amendes foit payée aux
Denonciateurs par les Directeurs de nos
Monnoyes , auffi-tôt qu'ils en auront reçû
le fonds , & ce fur les fimples Certificats
qui feront à cet effet delivrez par les Procureurs
Generaux de nos Cours des Monnoyes
, ou par leurs Subftituts dans les
Provinces , qui auront reçû lefdités De--
nonciations , fans qu'il foit neceffaire d'y
dénommer les Denonciateurs , ni qu'ils
puiffent être tenus de, donner d'autres ac
quits que lesdits Certificats , en vertu deſquels
la moitié qui aura été payée aux porteurs
d'iceux , fera paffée & allouée dans la
dépenfe des Comptes defdirs Directeurs , &
par tout ailleurs fans difficulté .
XI. Entendons que l'Arreft de notre
Confeil du 21 Mars 1716 foit exécuté felon
fa forme & teneur , & qu'en confequence
les Depofitaires des ancienes Efpe .
ces d'or & d'argent de France ou Etrangeres
, feront tenus de les porter aux Monnoyes
dans le tems fufdit ; paffé lequel , &
à commencer ledit jour premier Decembre
, celles qui fe trouveront en leurs mains
ou parmi leurs effets , feront & demeureront
confifquées à notre profit , fauf le res
Cours des Proprietaires ou Creanciers contre
Qij
188 LE MERCURE
lefdits Depofitaires , tant pour le principal
defdites Efpeces , que pour les diminutions
du prix , nonobftant toutes les indemnités
qu'ils pourroient avoir defdits Proprietaires
à ce fujet , lefquelles indemnités faites ou
à faire Nous annullons expreffément par le
prefent Edit.
XII. Défendons à toutes perfonnes , à
peine de la vie , de contrefaire nos Efpeces
; ou de contribuer à l'expofition de celles
qui auroient été contrefaites , même
d'en introduire dans notre Royaume de
la nouvelle Empreinte , quand elles auroient
été fabriquées dans nos Monnoyes.
XIII . Voulons que les Déclarations
Arrests , & Reglemens concernant le tranf
port des Efpeces & matieres d'or & d'argent
,
foient executez felon leur forme &
teneur ; & en confequence , faifons trésexpreffes
inhibitions & défentes à tous nos
Sujets ou Etrangers qui fe trouveront dans
notre Royaume , de tranfporter hors d'i
celui , fans notre permiffion par écrit , aucunes
deldites Efpeces & matieres d'or &
d'argent , à peine de la vie , de fix mille
fivres d'amende , & de confifcation , tant
defdites Efpeces ou matieres , que des marchandifes
dans lefquelles elles pourroient
être emballées , enfemble des Vaiffeaux ,
Chariots , Chevaux , Mulets & autres Equi
pages qui auroient fervi au tranſport , lef
DE SEPTEMBRE. 184
hy
dites confiſcations & amendes applicables.
un quart à notre profit , un autre quart aux
Hôpitaux les plus prochains , & la moitié
reftante aux Dénonciateurs ou à ceux qui
auront arreſté les contrevenans , fans que
la peine de mort puiffe être remife par nos
Juges aufquels la connoiffance en appartient
, à peine d'être exclus pour toûjours.
de tous Offices de Judicature.
XIV. Permettons feulement à nos Su
jets & aux Etrangers fortans de notre
Royaume de porter la quantité d'Efpeces.
fabriquées ou reformées en vertu de notre
prefent Edit , qui fera neceffaire pour
leur fubfiftance & celle de leurs Valets &
équipages.
XV. Défendons à tous Orfevres , Joiïailliers
, & autres Ouvriers travaillans en
or & en argent , de difformer aucunes Epeces
de Monnoye pour les employer à
leurs ouvrages , à peine des Galeres à
perpetuité , comme auffi d'acheter ou vendre
les matieres d'or & d'argent à plus haut
prix que celui qui en doit être payé aux
Hôtels de nos Monnoyes , à peine de confiſcation
, & d'amende arbitraire qui ne
pourra être moindre que de la valeur des
Efpeces confifquées.
XVI. Entendons que les Droits des Di-
*recteurs de nos Monnoyes , enfemble ceux
desMonnoyeurs & des Ajufteurs, foient al
190 LE MERCURE .
loués dans les Comptes de la Regie defdites
Monnoyes , pour la fabrication or
donnée par le prefent Edit , fur le pied fixé
par l'Arreft de notre Confeil du 19 Janvier
1715, ainsi que pour les Livres & Louis
d'argent cy-devant fabriquez , & que les
Droits de tous les Officiers de nofdites
Monnoyes , foient paffez pour la reforma
tion , fur le pied du double de ce dont ils
ent joui dans la precedente..
XVII . Ordonnons que les Billets de
Banque qui feront portez aux Hôtels de
nos Monnoyes , y foient biffez & enfuite
brûlez en l'Hôtel de Ville de Paris , par
les Commiffaires que nous nommerons à
cet effet.
Regiftré en la Cour des Monnoyes , ony,
& ce requerant le Procureur General du Roy,.
pour être executées felon leur forme & teneur,
fuivant l'Areft de ce jour. Fait en
la Cour des Monnoyes , les Semestres affemblez
le trentiéme jour de Septembre milſept:
cent vingt..
Signé , GUEUDRE...
Approbation de M. Demontempuys , Avocat en
Parlement , Cenfeur Royal des Livres.
Ay lû par ordre de Monfeigneur le Chancelier
un Manufcrit intitulé , Le Nouveau Mercu
e pour le mois de Septembre 1720 , dont j'ay paraphé
les feuillets . Fait à Paris ces Octobre 1720.
DEMONTEMPUYS...
D
TABLE.
Es Rois des Princes du Sang de
France qui ont vu leurs Petits- Fils .
Arriere- Petits- Fils , par M. de
Camps , Abbé de Signy.
Chandrashfen , Roman Indien..
3
16
Poefies ; L'Ode des Medecins a été preſentée
à l'Academie des feux Floraux de Tonlonfe.
Arrits , Edits & Declarations.
37
$4
Declaration du Roy touchant la conciliation
des Evêques.. 90
Differtation fur les Dignitez hereditaires
attachées aux Terres titrées-
Nouvelles Etrangeres..
101
114
Etat general des fommes que le feu Roy Louis
XIV. devoit à fa mort , arrivée le premier
Septembre 1715
95
Ode.
Epigramme
Enigmes..
1:399
149
15.1
J452
Chanfon. 153
Mariages.
154
Extrait du Difcours de M. Cadry Vicaire
de Saint Paul.
Morts de Paris.
Morts Etrangeres.
Charges & Dignitez
Journal de Paris.
160
164
166
167
168
Second Avis pour la nouvelle Edition des
Jugemens des Sçavans fur les principaux
Ouvrages des Auteurs,
Morts.
178
181
Edit du Roy , portant qu'il fera fabriqué de
nouvelles Efpeces d'Or & d'Argent , 282
LE
NOUVEAU
MERCURE
OCTOBRE 1720 .
Le prix eft de vingt - cinq fols,
DE
LA
LYON
1893
VILLE
A PARIS.
Chce GUILLAUME CAVELIER , au Palais .
La Veuve de PIERRE RIBOU , Quay des
Auguftins , à l'Image S. Louis.
Et GUILLAUME CAVELIER , Fils , ruë
S. Jacques , à la Fleur-de- Lys d'Or,
M DCC. X X.
Avec Approbation & Privilege du Roya
AVIS.
Ο
N prie ceux qui adreſferont
des Paquets ou
Lettres à l'Auteur du Mercure
, d'en affranchir
le port ,
fans quoy ils resteront au rebut.
Y
L'Adreffe de l'Auteur , eft .
A Monfieur Bu CHET , Cloître
S. Germain l'Auxerrois .
On donne avis, qu'on trouve
chez les Libraires ci -deffus
nommez , tous les Mercures
de l'année 1718 & 1719 , de
même que l'Abregé de la Vie
du CZAR .
De l'Imprimerie de C. L. THIBOUST ,
Place de Cambray
LE
NOUVEAU
MERCURE .
ORIGINE DES
ARMOIRIES ;
& des Surnoms en France.
D
E tout temps on a mis des
ornemens fur les Boucliers ,
Ecus ou Pavois , mais .on
n'a commencé en France d'y
figurer des Armes , pour parler
fuivant le terme en ufage , que dans
le onzième fiecle , environ le temps des
premieres Croiſades pour la conqueste de
la Terre Sainte : Il fe trouve même avant
le voyage de Godefroy de Bouillon , fait
en 1096 , des Sceaux de quelques Princes
& grands Seigneurs qui y paroiffent
à cheval armez avec leurs Boucliers ou
Ecus , tenans quelquefois d'une main un
A ij
LE MERCURE
Guidon fur l'épaule , mais fans aucunes
armes.
La Croifade refoluë en 1095 & faite
en 1096 fous la conduite de Godefroy de
Bouillon , & celles qui fe font faites depuis
, ont donné lieu à établir l'ufage des
Armoiries par la neceffité de fe reconnoître
& de pouvoir diftinguer les Chefs dans
une fi prodigieufe quantité de Croiſez ; la
plupart prirent pour Armes des Croix
de differentes façons par rapport au fujet
de leur voyage , & aux Enfeignes fous
lefquelles ils s'étoient enrôllez . Ils fe figurerent
de differentes couleurs non feulement
fur leurs Ecus , mais auffi fur leurs
Bannieres & fur leurs Cottes - d'Armes ,
à caufe de quoy on les a appellées Armoiries.
Il y a plusieurs exemples qui prouvent
que dans ces commencemens on n'oblervoit
pas les regles' preferites depuis par
les Herauts d'Armes & par l'ufage , &
que les Armes n'ont commencé à eftre
hereditaires que depuis l'an 1200. Elles ne
l'ont pas même été fi regulierement dans
la fuite , que fouvent un Seigneur , un
Prince , même un Roy , ayant nombre de
Fils , les cadets , & quelquefois les aînez
ne quittaffent le furnom & les Armes de
leur père, pour prendre celui de leur mere
cu d'un oncle , parce qu'ils leur avoient
D'OCTOBRE.
laiffé de grandes Terres , ou parce qu'ils
s'étoient mariez avec des heritiers dont
ils prenoient le nom & les Armes par obligation,
ou fuivant l'ufage, de porter le nom
& les Armes de la principale Terre. Le
fujet de ce changement de nom venoit
auffi de ce qu'il y avoit peu de furnoms
fixes jufqu'environ l'an 1200. Avant ce
temps la plus grande partie des perfonnes
étoient connues par leurs noms de Batêmes
, ou indiquez par le nom du lieu de
leur naiffance , ou d'un lieu dont ils étoient
poffeffeurs , ou par leur qualité ou leur
métier , ou par le nom de Batême de leur
pere.
Les anciennes Chartes de nos Rois ne
parlent gueres des Seigneurs de leur Cour ,
& de leurs grands Officiers , que fous les
noms du Comte Thibaut , du Comte
Guillaume , Renaut Bofon , &c . de Raon!
Senechal ou Dapifer , d'Alberic Comes Stabuli
ou Connêtable , d'Arnoul Chancelier,
de Pierre , fils d'Arnoul , &c. Et dans les
foufcriptions ils ne mettoient pareillement
que leur nom de Batême , & celui
de leur dignité. 411
L'Etabliffèment des furnoms s'eft toujours
fortifié depuis l'an 1200 , & tous
les noms ont eu pour origine les noms de
Batême , les Terrès , les Dignitez , les
Profeffions , les fobriquets que l'on don-
A iij
AVIS .
O
N prie ceux qui adreſferont
des Paquets
ou
Lettres à l'Auteur du Mercud'en
affranchir
le port ,
ils resteront au rere
,
fans
quoy
but.
L'Adreffe de l'Auteur , eft .
A Monfieur Bu CHET , Cloître
S. Germain l'Auxerrois .
On donne avis, qu'on trouve
chez les Libraires ci -deffus
nommez , tous les Mercures
de l'année 1718 & 1719 , de
même que l'Abregé de la Vie
du CZAR.
De l'Imprimerie de C. L. THIBOUST ,
Place de Cambray
LE
NOUVEAU
MERCURE .
ORIGINE DES ARMOIRIES ;
& des Surnoms en France.
D
E tout temps on a mis des
ornemens fur les Boucliers ,
Ecus ou Pavois , mais .on
n'a commencé en France d'y
figurer des Armes , pour parler
fuivant le terme en ufage , que dans
le onzième fiecle , environ le temps des
premieres Croisades pour la conqueſte de
la Terre Sainte : Il fe trouve même avant
le voyage de Godefroy de Bouillon , fait
en 1096 , des Sceaux de quelques Princes
& grands Seigneurs qui y paroiffentà
cheval armez avec leurs Boucliers ou
Ecus , tenans quelquefois d'une main un
A ij
LE MERCURE
Guidon fur l'épaule , mais fans aucunes
armes.
La Croifade refoluë en 1095 & faite
en 1096 fous la conduite de Godefroy de
Bouillon , & celles qui fe font faites depuis
, ont donné lieu à établir l'ufage des
Armoiries par la neceffité de fe reconnoître
& de pouvoir diftinguer les Chefs dans
une fi prodigieufe quantité de Croiſez ; la
plupart prirent pour Armes des Croix
de differentes façons par rapport au fujet
de leur voyage , & aux Enfeignes fous
lefquelles ils s'étoient enrôllez . Ils fe figurerent
de differentes couleurs non feulement
fur leurs Ecus , mais auffi fur leurs
Bannieres & fur leurs Cottes - d'Armes ,
à cauſe de quoy on les a appellées Armoiries
.
Il y a plufieurs exemples qui prouvent
que dans ces commencemens on n'oblervoit
pas les regles' preferites depuis par
les Herauts d'Armes & par l'ufage , &
que les Armes n'ont commencé à eftre
hereditaires que depuis l'an 1200. Elles ne
l'ont pas même été fi regulierement dans
la fuite , que fouvent un Seigneur , un
Prince , même un Roy , ayant nombre de
Fils , les cadets , & quelquefois les aînez
ne quittaffent le furnom & les Armes de
leur père, pour prendre celui de leur mere
cu d'un oncle , parce qu'ils leur avoient
D'OCTOBRE.
;
laiffé de grandes Terres , ou parce qu'ils
s'étoient mariez avec des heritiers dont
ils prenoient le nonr & les Armes par obligation,
ou fuivant l'ufage, de porter le nom
& les Armes de fa principale Terre. Le
fujet de ce changement de nom venoit
auffi de ce qu'il y avoit peu de furnoms
fixes jufqu'environ l'an 1200. Avant ce
temps la plus grande partie des perfonnes
étoient connues par leurs noms de Batêmes
, ou indiquez par le nom du lieu de
leur naiffance , ou d'un lieu dont ils étoient
poffeffeurs , ou par leur qualité ou leur
métier , ou par le nom de Batême de leur
pere.
¿Les anciennes Chartés de rios Rois ne
parlent gueres des Seigneurs de leur Cour ,
& de leurs grands Officiers , que fous les
noms du Comte Thibaut , du Comte
Guillaume , Renaut Bofon , & c . de Raonl
Senechal ou Dapifer , d'Alberic Comes Stabuli
ou Connêtable , d'Arnoul Chancelier,
de Pierre , fils d'Arnoul , &c . Et dans les
foufcriptions ils ne mettoient pareillement
que leur nom de Batême , & celui
de leur dignité.
L'Etabliffément des furnoms s'eft toujours
fortifié depuis l'an 1200 , & tous
les noms ont eu pour origine les noms de
Batême , les Terrès , les Dignitez , les
Profeffions , les fobriquets que l'on don-
A iij
6 LE MERCURE
noit fur une profeffion ou imperfection ,
comme le Roy, le Prince, le Duc, le Comte,
le Vicomte , le Baron, le Bouteillier , le Bou
lenger, le Tavernier, le Marêchal , le Blanc,
le Noir , le Rouge , le Roux , le Blond ,
le Brun , le Grand , le Petit , le Boiteux ,
le Borgne , le Bon , le Méchant , &c .
On peut donc compter comme certain
que le commencement des Armes a été
fur la fin du onzième fiecle , & au commencement
du douzième , & qu'elles n'ont
commencé à eftre hereditaires aux familles,
auffi bien que les furnoms, que depuis l'an
i 200.
USAGE DES ARMOIRIES
comme elles font composées.
Après avoir marqué fuccintement le
tems de l'établiffement des Armoiries en
France ; il femble que l'ordre veut que
l'on dife un mot de leur ufage , & comment
elles font compofées.
Autrefois il n'y avoit que la Nobleffe à
qui il fut permis de porter des Armes ;
mais à preſent il eſt établi que chacune
des Provinces , toutes les Villes , & prefque
tous les hommes de quelque diftintion
, même parmi la fimple Bourgeoisie ,
ont des Armes particulieres.
On prend foin de tems en tems de reD'OCTOBRE.
7
primer ces derniers , quand ils portent avec
des Armes des qualitez qui leur donnent
des privileges qui ne font dûs qu'à la veritable
Nobleffe , mais toutes ces précautions
n'ont encore pû en arrêter l'abus.
L'origine de cet abus vient de la multiplicité
des Charges & des Privileges accordez
par nos Rois depuis Philippe le Bel ,
dans des tems de neceffité , ou par reconnoiffance
de quelques fecours ou fervices
fignalez , aux Bourgeois de certaines Villes ,
de pouvoir non feulement poffeder des
Fiefs , mais auffi porter des Armoiries.
Elles font compofées de tant de façons ,
qu'il eft fort difficile de donner des regles
pour les définir toutes , & pour éviter un
nombre infini de termęs bizares , plus capables
de fatiguer la memoire que d'inftruire
; il n'en fera parlé qu'en general ,
& le détail on peut
pour
plufieurs ouvrages qui ont été faits fur
cette matiere , & particulierement par le
P. Meneftrier.
avoir recours à
Les Armes parlantes & les Armes fimples
ont toujours été reputéés les meilleures.
Les Armes parlantes font celles qui
defignent le nom de la famille qui les
porte , & il n'y a rien à y fouhaiter quand
elles font fi anciennes , qu'il eft incertain .
fi la famille a emprunté fon nom des Armes
, ou fi la famille a donné le nom aux
A iij
3 LE MERCURE
Armes. Quand il faut plufieurs pieces differentes
pour en exprimer le nom , elles
fentent le rébus & la compofition d'une
Nobleffe de nouvelle impreffion . A l'égard
des Armes fimples , ce font des Lions ,
des Aigles , des Oileaux , des Fleurs , des
Bandes , des Faces , des Barres , des Pals , -
des Chevrons , des Croix , & c.
Dans le même tems que l'ufage a été
introduit de figurer des Armoiries fur les
Boucliers ou Ecus , fur les Cottes d'Armes
, fur les Bannieres , &c. On s'en eft
aufli fervi fous la même figure d'Ecuffon ou
Banniere pour des Sceaux établis au lieu
des Monogrames pour autorifer les Actes .
C'eft ce qui a rendu les Sceaux fi communs
depuis l'an 120o , jufqu'environ le Regne
de François premier en 1515 ; le Sceau
tenoit lieu de fignature , & étoit fi neceffaire
, que la plus grande partie de la Nobleffe
ne pouvoit autorifer fes fimples
Actes , faute de fçavoir écrire & figner ,
que par les Sceaux fur lefquels étoient figurées
leurs Armes . Depuis l'an 1515 que
la Nobleffe , & même le commun du peuple
, ont cultivé davantage les fciences par
la protection que les Rois & les Princes
leur ont donnée , l'ufage des Sceaux a diminué
& eft réduit à prefent aux provifions
des Charges , aux Certificats , à quelques
Actes publics , & aux fimples Cachets
D'OCTOBRE.
des Lettres ; mais tous les autres Actes , &
particulierement les Acquits des Guerres ,
qui étoient fans nombre , auffi bien qu'à
prefent , & qui étoient tous fcellez , ne
font plus autorilez que par des fignatures .
Ce que l'on appelle Emaux en Armoiries
, font les metaux , les couleurs , & les
fourures.
Les métaux font l'Or , qui eft jaune ,
& l'Argent , qui eft blanc .
Les couleurs que je croy la plûpart avoir
été originairement des fourures, font l'azur,
qui eft bleu ; le gueule , rouge ; le finople ,
verd ; le fable , noir ; & le pourpre , qui
eft très peu en ufage. Il y a même apparence
que cette couleur s'eft formée de
quelqu'autre , qu'on a eu peine à diftinguer.
*
Les fourures font l'hermine , dont le
fond eft blanc ou d'argent , avec des mouchetures
noires ; c'eft la peau d'un Rat ,
appellé par les Latins Mus ponticus , dont
on doubloit les robbes des Rois , Princes ,
Ducs , &c. L'on a ajoûté pour relever la
blancheur du poil de cet animal des mouchetures
noires. Quelques - uns croyent avec
beaucoup de vrai- femblance que ces peaux
nous font d'abord venues par l'Armenie
& que c'est ce qui a donné lieu à les appeller
Armines , puis Hermines. Le Vair
eft auffi compofé de la peau d'un autre
ΙΟ LE MERCURE
Rat Sarmatique ou de Ruffie , moins rare
que l'hermine. Il eft gris fur le dos , approchant
du bleu , & blanchâtre fous le ventre
, approchant de l'argent ; & c'eft pour
cette raison que lors qu'on dit vairé , cela
s'entend d'argent & d'azur , s'il eft autrement
, il faut , l'expliquer . Les naturels du
païs , & plufieurs Auteurs appellent cet
animal Vair. On s'en fervoit auffi anciennement
pour la fourure des habits , ainfi
qu'il feroit aifé de le prouver par quantité.
d'exemples dans l'Hiftoire , & par des Monumens
.
L'Echiquier ou l'Echiqueté & le Lozangé
, qui eft un Echiqué pofé fur les angles ,
peuvent auffi paffer pour une fourure. En
1446 on allegua dans un procès pour autorifer
la Nobleffe de Jean Bureau de Tas,
qu'il étoit communément vêtu de robbes
à lambeaux en échiqueté , en habit de
Gentilhomme ; & l'on en voit encore dans
des habits peints à des vîtres , & à plufieurs
Monumens anciens.
L'ufage ou la regle eft depuis long- tems
établie , qu'on ne peut ajouter en Armoiries
de métail fur métail , ni couleur fur
couleur ; mais il n'y a gueres d'apparence
que dans le commencement de l'ufage des
Armoiries on obfervât ces regles . Les Armes
de Godefroy de Bouillon , qui font
des croix d'or , que l'on appelle de Hieru
D'OCTOBRE..
falem , à caufe de fa conquête, fur un champ
d'argent , en eft une preuve ; car pour la
diftinction que l'on a voulu faire à cauſe
qu'elles font contraires aux regles modernes
, que c'étoit des Armes à anquerre ,
il n'y a pas lieu d'y faire aucun fondement.
A l'égard de la divifion de l'Ecu , elle
fe fait en tant de parties que l'on veut ,
par le party , coupé , tranché , taillé ; que
Fon peut auffi exprimer parti en pal , en
face , en bande & en barre. Ces fignes
fervent pareillement à former les principales
pieces qui compofent les Armoiries ,
comme le pal , la face , la bande , la
barre , la croix , le fautoir , &c. ainſi qu'il
eft rapporté plus au long dans les Livres.
de Blazon .
Des ornemens qui accompagnent l'Ecu
des Couronnes .
Elles n'étoient autrefois que pour ceux
qui avoient droit d'en porter par leur dignité.
Elles ont toujours été en ufage fur la
tête des Rois & Souverains , dans leurs
Monnoyes & dans leurs Sceaux . Leur
Heaume ou Cafque , que l'on mettoit au
deffus de l'Ecu , fe trouvent couronnez depuis
le Regne du Roy Jean , & à leur
imitation la Nobleffe mit pareillement des.
12 LE MERCURE
Couronnes au deffus de leurs Cafques , &
quelquefois dans le col du Cafque ; ainfi
qu'il fe juftifie par une infinité de Sceaux
& d'autres inonumens ou d'anciennes
Armes qui fe font confervés. Les He
rauts d'Armes ont donné pour regle, qué
nul ne devoit porter la Couronne d'or fur
fon timbre , qu'il ne fût Gentilhomme de
nom d'armes & de cry .
L'ufage de mettre des Couronnes directement
au deffus des Ecus d'Armoiries
où il n'y avoit point de Cafque , n'a été
commencé par nos Souverains, que fous
le Regne du Roy Charles VI . Les Ducs .
& les Comtes n'ont pris cet ornement
au deffus de leurs Armes , que depuis
l'an 1500 , & l'abus s'eft introduit par ceux
qui n'ont point de droit que depuis l'an
1600. Il eft à prefent monté à un tel excès ,
qu'il n'y a plus de diftinction , la Couronne
Ducale a paffé à beaucoup de perfonnes
qui ne font ni Marquis ni Comtes ,
& celle de Marquis eft portée par ceux
qui ne font ni l'un ni l'autre ; celle de
Baron n'eft prefque plus en ufage , quoy.
qu'elle fut autrefois la marque de la plus
grande Nobleffe . Elle orne encore la tête
de la figure de Robert de France , Seigneur
de Bourbon ", Chef de la Maiſon
Royale , dans l'Eglife des grands Jacobins
à Paris.
D'OCTOBRE. 13
La Couronne ou Tiarre du Pape eft
faite comme un grand bonnet ceint de
trois Couronnes d'or , étoffées de pierreries
, au fommet de laquelle eft une boule
furmontée d'une croix pomelée .
L'Empereur a une Couronne fermée ,
furmontée d'un globe & d'une croix au
deffus. L'ufage de ce Globe que quelquesuns
veulent faire paffer pour une marque
de fuperiorité fur les autres Princes Souverains
, eft commun aujourd'huy avec
beaucoup de Rois , & l'on voit des Sceaux
des Rois de France dès le commencement
de la troifiéme Race , dans lesquels
ils font reprefentez avec un globe à la
main.
Les Rois de l'Europe portent tous à
prefent des Couronnes fermées , le premier
ufage en eft venu du Roy Charles
VIII . qui fut couronné Empereur d'Orient ,
& porta une Couronne fermée, telle qu'on
la voit encore aujourd'huy à ſon tombeau
à Saint Denis .
Auparavant lui nos Rois l'avoient portée
depuis Hugues Capet ouverte , avec
differens ornemens au deffus du cercle ,
mais plus fouvent fleurdelifée qu'autrement.
Louis XII . fucceffeur du Roy Charles
VIII. la porta ouverte. François premier
la porta fermée dès le commencement
de fon Regne. S'il eft vrai qu'elle
14
MERCURE LE
foit ainfi dans fon Seau au bas du Concordat
qu'il fit avec Leon X en 1516 , mais il
ya plufieurs autres de ces Seaux, Cachets &
Monnoyes où elle eft ouverte , jufqu'environ
l'an 1536 , elle paroît depuis preſque
toujours fermée. Les autres Kois ont fuivi
cet ufage , mais un peu plus tard à
l'exception du Roi d'Angleterre , qui a
commencé à peu prés dans le même tems
que le Roy de France .
Les Princes du Sang la portoient autrefois
feulement , comme la portent aujourd'hui
les Ducs. Depuis ils mêlerent moitié
fleurs de Lys & moitié feuilles d'Aches ,
mais à prefent il n'y a plus que des Fleurs
de Lys.
Les Electeurs de l'Empire portent un
Bonnet d'Ecarlatte rebraffé d'Hermines ,
diadêmé d'un demi- cercle fommé d'un
globe furmonté d'une Croix d'or . On
l'apelle , à caufe de ceux qui le portent, Bonnet
Electoral.
Les Ducs mettent au deffus du cercle des
feuilles d'Aches ; les Marquis moitié feuilles
d'Aches & moitié Perles , quelque fois
en bouquet de trois enfemble.
Les Comtes , au lieu de feuilles d'Aches
que portent les Ducs , y mettent des Perles
; les Vicomtes ne mettent que quatre
Perles dans une diftance égale fur le cercle,
& les Barons brodent feulement le cercle
D'OCTOBRE.
ou tortil de fillets de Perles .
15
Les Cardinaux mettent fur leurs Armes
le Chapeau Rouge à large bord , & quinze
Houpes de gueule floquées ou pendantes de
chaque côté , autrefois il n'y en avoit
qu'une ou deux. Lorfqu'ils font Patriarches
, Archevêques , Primats Primats , ou qu'ils
font envoyés Legats en quelques Provinces
, ils ajoutent , fous le Chapeau & derriere
leur Ecu , une double Croix qui eſt
treflée.
Les Archevêques portent fur leurs Armes
un Chapeau de finople à dix houpes
de chaque côté , derriere l'Ecu une Croix
à une ou deux traverfes felon la dignité
ou Primatie de leur Eglife.
Les Evêques portent pareillement le
Chapeau de finople avec fix houpes de
chaque côté , & derriere leur Ecu une Mitre
qui eft pofée de front au côté droit , `
& une Croffe au côté gauche tournée en
dehors.
Les Abbez portent fur l'Ecu de leurs Armes
un Chapeau de fable , dont les cordons
entrelaffez & pendans fe terminent
en deux houpes auffi de fable. Ceux qui
font mitrés timbrent leurs Ecus d'une Mitre
à droit & en profil , & d'une Croffe
tournée en dedans . Les non - Mitrés mettent
ſeulement la Croffe . Les Abbés qui
font Religieux ont un petit linge attaché
à leur Croffe.
16 LE MERCURE
Les Cardinaux , Archevêques , Evêques
& Abbés qui font Princes , Ducs , Marquis
, ou Comtes , mettent avec droit fur
leurs Ecus - les Couronnes de Princes , de
Ducs , de Marquis &c . ainfi que ceux qui
font fortis de Maifons de Princes, de Ducs ,
&c .
Les Abbeffes portent leurs Armes fur
une Lozange , ainfi que les Filles , & mettent
derriere une Croffe , contournée à
gauche quand elles font Croffées , & autour
un Chapelet de fable .
• Les Chevaliers de Malte portent autour
de leur Ecu le Chapelet d'or entrelaffé
dans les pointes de la grande Croix d'argent,
qui font les Armes de la Religion de
Saint Jean de Jerufalem dont ils font profeffion.
Les Chevaliers Commandeurs ajoutent
derriere leurs Ecus une Epée , dont
la pointe paroît au-deffus & la garde en
bas. Les Grands Maîtres de l'Ordre timbrent
leur Ecu d'une Couronne de Prince.
DES TIMBRES.
des Lambrequins , des Cimiers , & des
Cris de Guerre.
On appelle Timbre ce qui furmonte
l'Ecu comme le Cafque , les Lambrequins ,
les Cimiers & les Cris de Guerre. On dit
un Ecu timbré de fon Cafque , &c.
Il
D'OCTOBRE 17
Il y a environ 400 ans que l'on a commencé
à mettre de ces ornemens au deffus
des Ecus d'Armoiries. Les Calques fe
.mettoient avec moins de façon qu'aujourd'huy.
Il eft vray que ceux des Rois avoient
plus d'ornemens & étoient quelquefois de
front , mais les autres étoient tous de côté,
& les grilles & autres ouvertures des uns &
des autres étoient fans diftinction , fur tout
dans les commencemens. A prefent on reprefente
les Cafques des Souverains ouverts
& de front ; ceux des Princes & des Ducs
n'ont pas tout à fait la vifiere levée ; & tous.
ceux qui font d'une dignité au deffous , la
vifiere en eft abaiffée , & ils y mettent plus
ou moins de grilles , mais on peut compter
pour certain que chacun en met plus
qu'il n'en doit avoir , pour paroître au deffus
de fon veritable état .
Les Lambrequins font des Lambeaux ou
Banderolles pendans du Bourlet du haut
du Cafque pour ornement autour de la
tête , & qui venoient flotter fur les épaules
. On les coloroit ordinairement des
Emaux de l'Ecu: Au lieu de ces Banderolles
, on y mettoit quelquefois des plumes
d'autruche, telles qu'on les voit reprefentées
dans des tapifferies & autres lieux ;
mais ces livrées & couleurs étoient perfonnelles
, & chacun en prenoit felon ſon
goût , pour le faire diftinguer , foit dans un
B
18 LE MERCURE
Tournoy , ou dans un Combat .
Le Cimier eft élevé au - deffus du Calque
, & eft auffi de pure fantaiſie , chacun
en prenoit felon fon inclination , & .
quelquefois la paffion pour la guerre ou
pour autre chofe y avoit bonne part ; d'autres
confervoient par leur Cimier la me
moire de quelque belle action. Il y a beaucoup
de Familles qui les ont formés dé quelques
pieces de leurs Armes ou de leurs.
Dignitez .
La Maiſon Royale a fouvent mis pour
Cimier une double Fleur deLys ; les Ducs de:
Bourgogne ont fait de même & pluſieurs
autres Princes du Sang. D'autres ont pris.
des Aigles , des Lions , & c. Mais cet ufage
eft bien moins pratiqué en France qu'en
Allemagne , où ils chargent fouvent leur
Ecu de plufieurs Cafques & Cimiers .
Les Cris de Guerre étoient autrefois en
ufage pour les Rois , les Princes & les
Seigneurs en état de mener affez de Vaffaux
pour fe faire accompagner à la guerre
& y avoir du commandement. On mettoit
quelquefois des Cris fur des Bannieres,.
& on s'en fervoit ordinairement pour implorer
le fecours du Ciel ; exciter à combatre
vaillamment ; étonner les ennemis ;
demander du fecours dans le befoin ; fe
reconnoître dans la mêlée ; & raſſembler
les guerriers dans une occafion preffante.
D'OCTOBRE. 1.9
Õ ་
Quand ces Bannieres étoient perduës &
écartées , ou à des heures qu'on ne pouvoit
les diftinguer , outre le Cri particuculier
de chaque Banniere ou Chevalier
Banneret , il y avoit le Cri general , qui
étoit ordinairement celui du Souverain ou
du General , duquel toute l'armée fe fervoit
dans le commencement d'une Bataille.
Le Cri de Guerre des Rois de France étoit ,
Montjoye Saint Denis , ce qui fignifie , Mon
Dieu , ou felon que Mathieu Paris l'obferve
, Montjoye , Dieu aide. Ce Cri fut pris
par le Roy Clovis à la Bataille de Tolbiac
appellant à fon ayde , Jefus - Chrift
Dieu de Saint Denis , voyant que la victoire
balançoit du côté des Allemands.
Celui de Bourbon , Bourbon Notre- Dame
ou Efperance. Souvent les Cris de Guerre
des Bannerets & Seigneurs n'étoient autre
chofe que le nom de leur Famille , auquel
on joignoit quelquefois celuy de la Vierge
ou de quelque Saint , pour lequel on
avoit dévotion , mais il n'étoit pas permis
aux puifnez d'avoir le même Cri en entier
que leurs ainez ; il falloit qu'il y ajoutaffent
quelque difference, même qu'il ne leur étoit
pas permis de porter les pleines Armes de
leur Maiſon fans brifure. A l'égard des
Cris dont on fe fervoit dans les Tournois
c'étoit fouvent des rébus, ou des devifes
quiavoient ordinairement pour pretexte QIL
Bij,
20 LE MERCURE
fondement quelque miftere d'amitié .
Des Supports.
On les divife en Suports , Tenans & Ap- !
puis mais cette divifion n'eft bonne qu'à
groffir un Livre , puifque les Figures humaines
que l'on veut qui foient Tenans ,
ne tiennent que pour fuporter l'Ecu . Ainſi
je compte pour Suports tout ce qui fupporte
ou foutient l'Ecu. L'ufage des Suports
eft à peu près de l'ancienneté des
Cimiers &c. & il a toujours été de fantaifie
, les enfans n'ayant jamais pris par obligition
les Suports dont leurs peres s'étoient
fervis. Nos Rois ont changé plufieurs
fois , ils fe font fervis de Lions , de
Cerfs , ainfi que fit Charles VI. de Porcsepis
, comme fit Louis XII . & à prefent
ce font des Anges. L'ufage des Suports eft
plus en pratique en France qu'en nul autre
Etat , & on les peint ordinairement ou de
couleur naturelle , ou des émaux de l'Ecu
qu'ils fupportent.
DES MANTEAUX ,
& autres marques de Dignité.
Nos Rois , qui ne dépendent que de
Dieu & de leur épée , on: le droit & la
dignité du Pavillon , qui eft d'Azur femé
D'OCTOBRE.
de Fleurs-de-Lys , & doublé d'hermines.
Il eft compofé de deux parties , du Comble
, qui eſt ſon chapeau & des Courtines
qui font le Manteau ou le Mantelet . On
met fous le Pavillon ou Dais les Armes
de France foutenues de deux Anges vêtus
en Dalmatiques , tenans chacun une
Banniere aux Armes de France , & au
deffus du Pavillon une Banderolle fur laquelle
eft le Cry de guerre , Montjoye
Saint Denis.
Les Princes de la Maiſon Royale , & les
Ducs portent auffi derriere l'Ecu de leurs
armes un Manteau que l'on appelle Ducal .
Ils s'en fervoient dans les grandes ceremonies
, & particulierement aux Sacres des
Rois , où ils portoient auffi la Couronne
Ducale en tête. Ce Manteau eft en Armoiries
ordinairement brodé des Armes de celui
qui le porte , & doublé d'hermines , &
l'ufage de le mettre derriere l'Ecu , tant en
peinture que fur les Sceaux , n'eſt
puis le milieu du Siecle dernier .
que de-
Depuis peu les Princes étrangers & ceux
qui prétendent au rang de Princes , & qui
ne font pas Ducs , ont auffi decoré leurs Armes
d'un pareil Manteau.
LE MERCURE
(
De plufieurs Colliers des Ordres Mili
taires ou de Confraternité de Chevalerie,
defquels on orne les Ecus.
Les plus confiderables en France font
ceux de Saint Michel , établi par le Roy
Louis XI. en 1469 ; & du Saint Efprit ,
établi par le Roy Henri III . en 1578. Le
Collier de Saint Michel eft fait de doubles.
chaînes d'or entrelaffées , & fur lesquelles
font attachées d'efpace en efpace des coquilles
auffi d'or ; au bas du milieu du Collier
pendune Medaille , fur laquelle eſt un
Saint Michel qui foule le Demon fous fes
pieds. Le Collier de l'Ordre du Saint Efprit
eft fait de noufs de trophées , de Fleursde-
Lys , des angles defquelles fortent des.
flammes , & des premieres lettres du nom
du Fondateur , le tout d'or émaillé des diverfes
couleurs de l'Ordre & du Roy ; au
Bas du milieu du Collier pend une Croix
pommerée , des angles de laquelle fortent
des Fleurs- de- Lys , & fur le milieu une
Colombe blanche , fymbole du Saint Eſprit.
Ces deux Colliers environnent les
Armes de ceux qui font Chevaliers dé ces
Ordres.
DE LA NOBLESSE ,
Elle prendfa fource de differens moyens.
1. De la profeffion des Armes , à laD'OCTOBRE.
23
*
quelle étoit attachée la poffeffion des Fiefs .
2º De la reconnoiffance du Prince par
des Lettres d'annobliſſement pour differens
fervices .
3 ° . Et de la poffeffion des Charges & des.
Dignitez qui acquierent la Nobleffe.
Tous ces differens moyens pourroient
fe fousdivifer en plufieurs efpeces ; mais
qui jetteroient dans un detail qui ne convient
ni à un abregé , ni au deffein que :
l'on a de donner feulement une idée
generale
de l'origine de la Nobleffe Françoife.
,
1º. La profeffion des Armes a été la
plus noble & prefque le feul exercice des
Francs qui entrerent & conquirent peu à
peu les Gaules fous la premiere Race de
nos Rois ; & fans entrer dans la difcuffion
du temps & du lieu où s'eft fait le premier
établiſſement des Fiefs , ou diſtribution
des Benefices , on peut fuppofer que
ces Conquerans partagerent entre eux less
terres de leurs conquêtes , comme ils faifoient
le butin , fuivant les degrez de dignités
& de fubordination qui étoient
parmi eux. Le Roy après avoir pris la portion
, diftribuoit le refte fuivant leurs Loix
militaires , aux conditions. de relever delui
à certaines charges , & d'aller à la
guerre , quand il étoit neceffaire .
Les Generaux avoient certaines portions
de Provinces , qu'ils partageoient enfuite
24 LE MERCURE
aux Officiers ou Capitaines au deffous
d'eux ; & ceux- ci en divifoient encore de
certaines parties aux foldats , à condition
de fuivre leurs Capitaines à la guerre , de
même que leurs Capitaines étoient obligez
de fuivre leurs Generaux , & les Generaux
de fe rendre aux ordres du Roy , quand il
avoit quelque entrepriſe à faire , ou qu'il
étoit obligé d'armer pour conferver ſon
Pays & les conquêtes.
On peut dire que ces divifions & ſousdivifions
qui ſe font pratiquées même ſous
la feconde Race Royale & au commencement
de la troifiéme , font les fources des
grands Fiefs, des Fiefs & des Arrieres Fiefs,
dont nous voyons encore l'image dans les
devoirs des Bans & Arriere Bans.
Les poffeffeurs de ces Fiefs ou des portions
de terres ou pays faifoient profeffion
des armes , & étoient fi bien obligez d'aller
à la guerre , quand ils en avoient reçu la
femonce ; que s'ils y manquoient , ou s'ils
faifoient quelque crime capital , ils étoient
privez de leurs Fiefs ou benefice , ainsi qu'il
eft rapporté dans les Capitulaires de Charlemagne
, & ailleurs.
Le devoir d'aller à la guerre , & la confervation
du Prince & de l'Etat, étoit les
feules charges qui leur étoient impoſées , *
& prefque tout le refte des peuples , excepté
les gens d'Eglife , leur étoient foumis
comme
D'OCTOBRE.
comme ferfs ou comme efclaves , & fupportoient
toutes les autres charges de
P'Etat.
"
pour
Ce font des anciens poffeffeursde ces Fiefs
ou Seigneuries qu'eft fortie notre plus ancienne
Nobleffe . Elle fe reconnoît quand on
la remonter affez haut
peut
la trouver
en poffeffion d'une terre de laquelle elle portoit
le nom , dans le commencement de
l'établiffement des furnoms. Et quoique
faute de titres publics ou domeftiques , il
foit fouvent fort difficile & prefque im
poffible de remonter la filiation des famil
les jufqu'au temps de l'établiffement des
furnoms , il eft neanmoins vrai qu'il y a
en France quantité de Maiſons qui defcendent
de cette ancienne Nobleffe , & il ne
fera pas difficile de le perfuader , quand on
fera reflexion fur la quantité de Fiefs ,
Châteaux , Villages , Bourgs & Villes qui
font en France , lefquels prefque tous ont
donné chacun le nom à une famille de
cette ancienne Nobleffe.
Sous les XIII. & XIV . Siecles , nos
Rois commencerent par la necellité qu'ils
eurent de menager le tiers Etat , ou les
gens qui ne faifoient pas profeflion des
armes , de leur donner des Privileges , &
de leur permettre de poffeder des Fiefs ;
& il y a même des exemples , qu'après les
avoir poffedez un certain temps , & avoir
C
26 MERCURE LE
fait à la guerre le fervice attaché aux Fiefs ,
ils étoient reconnus Nobles en payant une
certaine finance. C'eft en Normandie où
ces exemples font plus communs.
auffi
2. Dans le même temps commença
l'ufage d'annoblir par Lettres Patentes , foit
pour quelque fervice confiderable à la guerre,
ou autrement . Dans ces premiers tems
çes annobliffemens étoient peu frequens ;
mais ils augmenterent beaucoup depuis le
regne de Philippe de Valois . Cependant
après la Nobleffe des Fiefs , ou plutôt celle
qui eft auffi ancienne que la Monarchie ,
celle des annobliffemens doit tenir la premiere
place , puifqu'elle eft faite ou fuppofée
être faite en connoiffance de cauſe ,
& qu'elle s'accorde directement par le Roy
fouvent pour quelque fervice fignalé , particulierement
à la guerre.
3. A l'égard de la Nobleffe qui s'acquiert
par la poffeffion des Charges , elle peut
être divifée en deux claffes ; celle des Maires
& Echevins de plufieurs Villes aufquelles
les Rois ont accordé ce beau privilege
par reconnoiffance de leur fidelité , ou pour
quelqu'autre neceffité , eft la plus ancienne
, mais la moins confiderable , fi on confidere
que quand le Roi a une fois donné le
Privilege de Nobleffe aux Officiers d'une
Ville , ce n'eft plus lui qui en fait le choix ;
il dépend ordinairement d'un nombre de
D'OCTOBRE. 22
Bourgeois & de Marchands , ou d'une populace
affemblée , qui a plus d'égard à élire
ceux defquels ils efperent tirer quelque utilité
, que de diftinguer les plus capables
de pouvoir foutenir avec honneur la qualité
de Nobles qu'ils acquierent par cette
election . Elle ſe fait ordinairement au fon
de la Cloche ; à caufe de quoi on appelle la
Nobleffe qui vient des Maires & Echevins
ou Officiers de Ville Nobleffe de la Cloche.
€
Pour la Nobleffe qui s'acquiert par
les Charges dont le Roy donne les Provifions
, elle diftingue davantage. Les
Secretaires du Roy qui tranfmettent à leurs
fucceffeurs la Nobleffe , quand ils meurent
revétus de leurs Charges , ou qu'ils les
ont exercées vingt ans , n'annobliffoient
pas avant Louis XI . & les poffeffeurs de
ces Charges n'ont commencé que plufieurs
regnes après ce Roy de prendre la qualité
d'Ecuyer. Les defcendans des Officiers des
Cours Superieures , qui ont eu pour pere
& ayeul ces Officiers morts revétus de leurs
Charges , ou qui les ont exercées vingt ans,
font maintenus & leur pofterité dans les
privileges de Nobleffe.
Tous les Nobles de ces differentes Efpeces
fe qualifioient felon les tems , ou leurs
dignitez , ou leurs naiffances , nobles
Ecuyers Valets , Damoifeaux , Chevaliers ,
Chevaliers Bacheliers , & Chevaliers Ban
Cij
28 LE MERCURE
nerers. Toutes ces qualitez vont être expliquées
par ordre ci - après.
De la qualité de Noble.
• La qualité de Noble convient en general
à tout homme qui a droit ou privilege de
Nobleffe , & il eſt défendu par les Ordonnances
de nos Rois fur la requifition des
Etats du Royaume , à toutes perfonnes non
nobles de la prendre , auſſi - bien que celle
d'Ecuyer , à peine d'amende .
Elle a été admife à prouver la Nobleſſe
particulierement dans le Pays du Droit.
écrit , excepté en Provence , où la trop
grande facilité que les ufurpateurs avoient
eue à la prendre , fit ordonner en 1668,
qu'elle ne prouveroit pas fuffifamment
quand elle feroit feule dans les Actes , &
particulierement depuis 1560.
Anciennement elle étoit d'une fi grande
diftinction , qu'elle étoit fouvent donnée
aux perfonnes des Rois , des Princes &
des Seigneurs. On trouve dans l'hiſtoire de
Richard II . Roy d'Angleterre , qu'après
avoir été arrêté prifonnier , & détrôné en
1399. par Henri Comte d'Erby fon coufin
germain , il difoit en fe plaignant : hé ! que
dira le Noble Roy de France ? Il étoit fon
gendre , & avoit époufé Ifabelle de France.
fille de Charles VI.
D'OCTOBRE. 29
Ileft fouvent parlé de nos Rois avec
les epitaphes de Noble Roi , non feulement
dans des Hiftoires anciennes , mais auffi
dans des Traitez- & autres Actes. Les
Princes du Sang l'ont prife dans un fi
grand nombre d'Actes , qu'il feroit fuper-
Alu d'en rapporter les preuves.
Thibaut Comte de Champagne eft qua.
lifié Noble homme dans un Titre de 1 232.
On trouve Noble homme Gaſton pat la
grace de Dieu , Comte de Foix , en 1302 .
Et dans ces tems elle étoit donnée à ceux
qui avoient droit de prendre une qualité
au deffus de celle d'Ecuyer ; à prefent on
la regarde au deffous .
DE LA QUALITE' D'ECUTER.
Elle vient de la fonction de ceux qui
portoient des Ecus ou Boucliers à la guerre
pour leur deffenfe , & cette qualité eft
exprimée dans les anciens Titres Latins &
dans les Hiftoires par Armiger , Scutifer ,
& Scutarius ; mais Armiger a été le plus
en ufage dans les Titres.
Elle eft encore appliquée à ceux qui
avoient du commandement fur l'Ecurie ,
mais on qualifioit ceux qui avoient dé ces
Charges Ecuyers d'Ecurie .
Comme la fonction de porter des Boucliers
étoit toute militaire , & par confe
Ciij
32 LE MERCURE
guerre
de Banniere , & en état de mener à la
leurs Vaffaux , parmi lefquels il y avoit
quelquefois des Chevaliers , avoient la
paye des Chevaliers- Bacheliers , qui étoit
la demie paye des Chevaliers Bannerets.
Cette grande fubordination fervoit à les
exciter d'un violent defir de fe rendre
dignes de la Chevalerie , non feulement
par des actions de valeur & de bonne conduite
, mais auffi par celles de la vertu qui
étoient effentielles pour faire un parfait
Chevalier.
A preſent toutes ces regles font peu obfervées
, la qualité d'Ecuyer prouve toujours
la Nobleffe , mais elle n'eft preſque
plus en ufage que pour la plus petite Nobleffe
, & quoique la recherche de 1666
eut un peu reprimé les abus , on y eft retombé
depuis d'une maniere à donner une
ample matiere à une ample reforme .
DE LA QUALITE DE VALET.
Elle a exprimé, ainfi que celle d'Ecuyer,
un jeune Prince , Seigneur , ou fimple
Gentilhomme , qui n'étant pas encore parvenu
à l'Ordre de Chevalerie , étoit regardé
comme l'inferieur du Chevalier, foumis
& obéïffant à fes ordres , & pour
apprendre le métier de la guerre , à caufe
de quoy on l'appelloit Valet ou Varlet..
D'OCTOBRE.
3.3
Villardouin qualifie dans fon Hiftoire
Alexis fils d'Ifaac , Empereur de Grece ,
le Varlet de Conftantinople.
Nos vieux Romans de 400 ans & plus ,
parlant des Valets , difent ;
N'eft Chevalier , encore eft Valeton.
Le Roman de Rou , parlant de Guillaume
Duc de Normandie , qui vivoit il
y a 600 ans , dir :
•
Guillaume fut Valet petit ,
à Falefe pofe & norrit .
D
Et. Henry 11. Roy d'Angleterre ,
Emprès la mort de fon pere qui Valet &
le laiſſa , &c.
Aimery de Poitiers Valentinois , eſt
qualifié en 1297 Varlet du Roy & Damoifeau.
En 1303 Huet de Beaujeu eft qualifié
Varler de la Reine ; c'étoit comme fon
Ecuyer.
JA
Louis de France , Roy de Navarre , &
Philippe de France Comte de Poitou , enfans
du Roy Philippe le Bel, & depuis
tous deux Rois de France , font qualifiez .
Varlets dans un compte de 1313 .
Cette qualité étant en ufage pour des
perfonnes d'un fi haut rang , ne doit point
eftre regardée comme une qualité fervile ,
puifqu'elle exprimoit la même choſe que
celle d'Ecuyer & Damoifeau ; mais il y a
plus de 200 ans que l'ufage en a ceffé ,
+
34 LE MERCURE
peut- eftre à caufe qu'elle étoit devenuë
commune aux domestiques les plus infe- "
rieurs.
Les Officiers tranchants des Maifons
des Rois & des Princes , font ceux qui
ont confervé la qualité de Valet plus
long- tems. Aujourd'huy on les nomment
Ecuyers tranchans , ou Grands tranchans.
De la qualité de Damoifeau , Damoisel
ou Donzel.
Cette qualité peut eftre un diminutif
de Dominus , & paroît avoir efté appliquée
aux fils des Princes & Seigneurs qui
n'étoient pas encore Chevaliers . Elle a été
fi frequente en certaines Maiſons , qu'elle
y eft demeurée hereditaire , comme dans
celle de Commercy.
Le Roman , de Garin , dit de Pepin
pere de Charlemagne ,
Coronner firent le Damoifel Pepin.
Un ancien Auteur parlant de Louis le
Gros , avant qu'il fut Roy ,
Auquel Confeil le Damoisel
Louis le Gros parla.
Dans un fragment de 1233 , eft dit ,
les Donzelsfont enfans de Chevaliers
qui ne font encore Chevaliers.
Froiffart parlant du fils du Prince des
Galles dit, le jeune Damoiſel Richard
D'OCTOBRE.
35
Cette qualité eft en ufage en France depuis
l'an 1200 , mais on s'en eft plus fervi
dans la Guienne , Poitou , Limofin ,
Auvergne, Languedoc , Provence & Daufiné
qu'ailleurs , & elle eft à prefent tout
à fait hors d'ufage parmi la Nobleſſe .
GENTILHOMME.
•
-Quand on dit cet homme eft Gentilhom
me on le fupofe de race Noble.
François I. dans une Affemblée des Notables
en 1527 , dit qu'il étoit né Gentilhomme
& non Roy , qu'il parloit à Gentilshommes
, & qu'il en vouloit garder les
privileges.
Ily a des exemples plus anciens où ceux
qui étoient appellez Gentilshommes étoient
fort au deffous des derniers Ecuyers.
Les Ecuyers montez à prix avoient 7
fols 6 den. par jour ; les Ecuyers montez
à moins s fols ; pour Gentilhomme à pied ,
2 fols 6 den. pour Sergent & Arbaleſtrier
2 fols , 1340.
DE LA QUALITE DE CHEVALIER
Pour le renfermer dans ce qui regarde
La Nobleffe Françoife , on peut dire que
qualité ou dignité de Chevalier y a toujours
été d'une trés- grande confideration ,,
36 LE MERCURE
puifqu'elle en faifoit la principale diftinc
tion. Elle fe trouve exprimée dans tous les
anciens Titres par le mot Latin de Miles ,
au lieu
que chez les Romains ils y étoient
appelez Equites. Elle a toujours été perfonnelle
& n'a jamais paffé du pere au fils
par heredité. Aucun ne pouvoit être fait
Chevalier qui ne fut Noble , & qui outre
la naiffance , n'eût auffi les qualitez &
facultez neceffaires pour en foutenir la dignité.
Il n'étoit permis à perfonne de fe
qualifier Chevalier s'il ne l'avoit été fait
par le Roy. Cet ufage eft auffi ancien que
notre Monarchie , & nos Hiftoires nous
e fourniffent des exemples depuis plus de
1000 ans. Nos Rois ont toujours marqué
1
efi grande diftinction pour ceux qui
étoient parvenus à ce rang , qu'ils ont bien
voulu fe foumettre eux- mêmes a être faits
Chevaliers , & par là faire voir qu'ils en
jugeoient les qualitez compatibles avec toutes
celles qui fervent à foutenir une grande
Couronne.
Gregoire de Tours raporte que les Rois
de la premiere Race créoient des Chevaliers
de l'Accolade , leur donnant le Baudrier
& la Ceinture dorée , les baiſant à
la joue gauche , & leur difant à l'honneur
du Pere , du Fils , & du Saint Efprit , Je
vous fais Chevaliers.
Charlemagne fit Louis le Debonnaire
-
D'OCTOBRE.
37
fon fils Chevalier à Ratisbonne en lui ceignant
le Baudrier & l'Epée , & lui donnant
l'Accolade & le Baifer.
Guillaume le Conquerant Duc de Normandie
& Roy d'Angleterre fit Chevalier
Henry fon fils à l'age de 19 ans .
Philippes Augufte fit fon fils Chevalier
& cent autres jeunes Seigneurs , l'an 1209 .
Le Roy Saint Louis fit Chevalier Alphonte
fon frere Comte de Toulouſe en
121.
Le même Roy leva en 1270 un droit
de Chevalerie , lorfqu'il fit Philippes fon
fils Chevalier , & ce droit étoit non feulement
deu au Roy par fes Sujets , mais
auffi aux Princes & Seigneurs dans leurs
terres , quand ils faifoient leurs fils ainez
Chevaliers , & on appelloit ce droit Ayde
de Chevalerie. Philippe le Bel le leva en
1285 & Philippes de Valois en 1334.
Le Roy Charles V. dit le Sage , fit faire
Chevalier Charles Dauphin fon fils , depuis
VI du nom Roy de France , par le
Connêtable de Guefelin en 1368 .
Le même Roy Charles V I. revêtu de
fes habits Royaux fit Louis & Charles
d'Anjou fes Coulins Chevaliers , leur don
nant l'Accolade & le Baudrier , & leur
faifoit mettre les Eperons dorez par le Seigneur
de Chaurigny en 1385.
En 1399 Ricahrd II . Roy d'Angleterre
38 LE MERCURE
pris prifonnier & détrôné par Henry de
Lancaftre Comte d'Erby fon Coufin, refufa
des Eperons noirs qu'on lui vouloit faire
mettre , & fit dire à l'ufurpateur , Je suis
Loyal Chevalier , & qui onques n'ay for
fait à la Chevalerie , qu'il m'envoye des Eperons
de Chevalier , ou autrement je ne
chevaucheray point , à donc le Valet luy
aporta des Eperons dorez.
Le Duc de Bourgogne fit Chevalier le
Roy Louis XI. en 1461 , & il en fut fait
en même tems plus de 200 , tant Princes
que Seigneurs .
Le Roy Charles VIII. fut fait Cheva
lier par le Duc d'Orleans depuis Roy Louis
XII.
Le Roy François I. voulut être fait Chevalier
par le fameux Chevalier Bayart.
Le Roy Henry II. n'étant encore que
Dauphin , fut fait Chevalier par le Maréchal
de Biez..
Ce peu d'exemple fuffit pour faire voir
combien les Princes tenoient à honneur
d'être faits Chevaliers, & qu'ils choififfoient
ordinairement pour cette ceremonie quelque
Chevalier d'une haute diftinction non
feulement pour lui faire honneur & faire
éclater fa vertu , mais auffi pour fe choifir
un modele qui pût leur fervir de guide
dans la profeffion de Chevalerie qu'ils
venoient d'embraffer.
D'OCTOBRE. 32 .
A l'égard des Grands Seigneurs & Nobles
qui étoient faits Chevaliers , on les
diftinguoit ordinairement en deux claffes ,
de Chevaliers Bannerets , & de Chevaliers
Bacheliers. Les uns & les autres fe faifoient
avec les mêmes ceremonies felon
l'occafion & le lieu. On choififfoit ordinairement
les grandes Feftes, à quelque fo
lemnité de Sacre , de Mariage , & de Chevalerie
des Rois & Princes , ou à des Tournois.
On en faifoit auffi à l'armée la veille
d'une bataille, d'un affaut , &c. Et dans ces
dernieres occafions on y apportoit moins de
ceremonies , & on fe contentoit ſouvent de
la Ceinture militaire , des Eperons dorez ,
du Coutelas & de l'Accolade . Pour ceux
qui étoient faits Chevaliers avec toutes
les ceremonies ; on les y difpofoit par
la priere , le jeûne , la reception des Sacremens
de Penitence & d'Eucharistie , &
par l'exhortation. On les habilloit enfuite
de tout ce qu'il falloit pour armer alors
un Chevalier prêt à combattre , & à chaque
piece qu'on lui vêtoit , on lui en expliquoit
le fimbole. Les Rois en ont fouvent
fait avec moins de ceremonies , & ils
donnoient quelquefois aux nouveaux Chevaliers
un Manteau & un Palefroy , ainſi
qu'il fe verifie dans les comptes du Trefor
depuis Saint Louis. Quand un Chevalier
avoit fait quelque crime & forfait
. LE MERCURE
40
à Chevalerie , on le devêtoit ignominieufement
avec les mêmes ceremonies qu'il avoit
été fait Chevalier , & il étoit enfuite pu
ny grievement .
Il fe trouve dans les Regiftres Olim
un Arreft du Parlement de la Pentecôte
1281 , qui condamne à 1000 liv . chacun
les deux fils de Philippes du Lieu de Bourbon
, pour s'être fait faire Chevaliers n'étant
pas affez Nobles , & il fut déclaré que
ce droit n'apartenoit qu'au Roy .
Les ufages des Chaſtelets de Paris , d'Orleans
, & de Baronnies, font , que fi aucun
fe faifoit faire Chevalier, qu'il ne fut Gentilhomme
par fon pere , le Roy , ou fon
Seigneur pouvoit lui faire trancher les
Eperons fur le fumier , & prendre les meubles
à fon profit.
Le Chevalier Banneret avoit droit.de
lever Banniere carrée, de mener fes Vaffaux
à la guerre , & commander aux Chevaliers
Bacheliers , & aux Ecuyers. Pour être
Banneret il falloit qu'il eût du bien & des
Vaffaux pour avoir une compagnie de so
hommes d'armes , qui montoit ordinairement
à 150 hommes prefque tous Gentilhommes
, & il avoit la double paye d'un
Chevalier Bachelier. On ne peut rien dire
de fixe fur le prix de cette paye , à cauſe
des differens mouvemens qu'il y a toujours
eu fur le prix des Monnoyes. Quand le
Chevalier
D'OCTOBRE. 41
Chevalier Banneret avoit des Duchez , des
Comtez , & des Baronnies , affez grandes
pour contenir fous lui au nombre de fes
Vaffaux des Bannerets , il les menoit à la
guerre , & c'eft ce qui nous fait voir fouvent
dans les anciens Etats des guerres de
nos Rois au nombre des Bannerets dès.
Ducs de Bourgogne , de Bourbon , de Lorraine
, de Savoye , des Comtes d'Artois
de Foix , d'Armagnac , avec plufieurs Bannerets
& Bacheliers fous eux.
Les Chevaliers Bacheliers étoient de
jeunes Seigneurs qui n'avoient pas encore
herité des biens de leurs peres & meres ,,
& qui par confequent n'étoient pas en état
de lever Banniere ; ou de fimples Seigneurs ,
dont les biens & les terres ne leur fourniffoient
pas affez pour être Bannerets.
Quand ils étoient parvenus à pouvoir lever
Banniere , ils portoient au Roy , au Prin
ce , au General d'Armée , leur Pennon ou
Banniere à longue queue , & demandoient
d'être faits Bannerets . Alors on coupoit les
bouts du Pennon & on le rendoit quarré ;
le Chevalier étoit appellé Banneret , & fa
paye étoit augmentée de moitié.
La Coutume du Maine & d'Anjou dit
qu'il y a aucuns Seigneurs qui ne font
Cointes , Vicomtes , Barons ou Châtelains ,
qui ont Châteaux , Fortereffes , groffes
Maifons , Places ,, qui font parties de Com
De
42 LE MERCURE
⚫
tez , Vicomtez , Baronnies ou Charellenies ,
& tels s'appellent Bacheliers ..
Les Chroniques de Flandres portent que
Marguerite qui fut heritiere du Comte de
Flandres , fut mariée à un vaillant Chevalier
des Marches de Bourgogne , qui fut
appellé Guillaume de Dampiere , & qu'il
n'étoit mie riche. Ses enfans devinrent
Comtes de Flandres.
Les Seigneurs, auffi - bien que le Roy ,
avoient droit de fe faire payer une aide:
de Chevalerie par leurs Sujers , quand ils
êtoient faits Chevaliers , ou qu'ils faifoient
leur fils aîné Chevalier. Plufieurs Coutumes
font mention de ce Droit , & entreautres
la Coutume de Normandie en parle
en 1.204.
Les Chevaliers avoient le privilege de
fçeller à cheval armez de toutes pieces ,
fuivant des, Titres de 1228 & 1241. En
1283 , Philippe le Hardi fit un reglement
portant qu'un Chevalier qui auroit 3.000.
liv . de terre ou plus, ou un Banneret , pourroit
avoir trois paires de Robes par an ,
& que l'une des trois feroit pour l'Eté . Ils
pouvoient fourer leurs habits d'hermines
& de vair , & les broder d'or , fuivant un
compte de 1351. ce qui n'étoit permis.
qu'à eux.
Ils p enoient les qualitez de Monfieur ,
pr
de Meffire & de Monfeigneur , & il n'ap
D'OCTOBRE. 43
partenoit qu'aux femmes de Chevaliers
de fe qualifier Madame.
On trouve auffi des Seigneurs qualifiez
Chevaliers ès Loix en 1340. & depuis
dans la Maifon de Rochefort Pluvaut , qui
a donné deux Chanceliers de France fous
Charles VIII. & Louis XII. mais ces exenaples
font peu frequens..
L'ufage des qualitez de Chevalier Banneret
& Chevalier Bachelier a diminué par
l'établiffement des Compagnies d'Ordonnances
fait par le Roy Charles VII , qui
changea l'ufage de faire aller les Nobles à
la guerre , & par la creation des Chevaliers
de Saint Michel en 1469 , & du Saint
Efprit en 1578. Car outre la qualité de
Chevalier que portoient ceux qui en étoient
revétus , ils avoient une affociation perſonnelle
avec le Roy & les Princes du Sang,des
privileges & des marques de diftinction au
deffus desChevaliers Bannerets & Bacheliers..
On ne trouve prefque plus de Cheva
valiers Bannerets ni Bacheliers depuis l'an
1500. Et quoique dans ce même Siecle nul
ne pût fe qualifier Chevalier , qu'il ne le
fuft effectivement , foit de l'un des Ordres
du Roy , ou autrement , la Nobleffe de
diftinction , & qui avoit du fervice , commença
vers la fin à la faveur des troubles
de l'Etat , & s'attribuoit la qualité de
Meffire & de Chevalier.. L'abus augmen
1
Dij
44 LE MERCURE
tant au commencement du Siecle prefent ,
les Etats generaux du Royaume demande
rent au Roy en 1614 , qu'aucun ne pût
fe qualifier Chevalier , s'il ne l'étoit effectivement
de l'un des Ordres du Roy; & par
l'Ordonnance de 1629 , la qualité de Chevalier
fut défendue à tous ceux qui n'avoiene
pas l'honneur de l'être. Cependant l'abus
étant devenu trop general , on s'eft conrenté
dans les dernieres recherches de retrancher
la qualité de Chevalier à ceux qui
n'avoient pas des dignitez & des fervices
capables de la foutenir..
L'AMOUR PRECEPTEUR.
N revenant d'Italie je paffay par
une Ville de France ; c'étoit fur
la fin de May: prenant le frais.
le foir dans un Jardin où les Dames
fe promenoient , j'en vis une qui me
bleffa dans la foule , fans deffein de me
nuire ; car elle ne m'avoit pas regardé , &:
je ne lui avois pû dire un feul mot . Cependant
j'en devins en moins de deux heu-.
res fi ardemment amoureux , que je fus
toute la nuit fans dormir. Son vifage &
fa taille , fon air & fa mine enjoüée avec
un foûrire flateur , m'avoient tellement
D'OCTOBRE. 45
charmé , que je cherchay avec empreflement
l'occafion de la revoir le lendemain .
Comme je m'en informois j'appris
qu'il y avoit peu de temps qu'elle étoit
mariée , & qu'elle étoit partie le matin
pour retourner dans une maison de campagne
, & que cette maiſon étoit dans un
defert. Je fçus auffi que fon mari étoit
inacceffible aux gens du monde ; qu'il ne
fongeoit qu'à fon ménage , & qu'à goûter
le repos & les douceurs de la retraite. Je
né cherchois que des perfonnes qui puffent
me parler d'elle , & j'en trouvois affez ,
parce que chacun l'aimoit ; tout le bien
que l'on m'en difoit augmentoit de plus
en plus le defir que j'avois de la revoir ,
& m'en ôtoit en même temps l'efperance.
J'étois bien trifte , & je ne fçavois par
où me confoler ; car de l'ôter de mon
coeur , la choſe me fembloit impoffible ;
& quoique le peu d'apparence de pouvoir
paffer ma vie auprès d'elle eût pû me defef
perer , je me plaifois trop à in'en fouvenir
, pour effayer de l'oublier..
-
La maison où demeuroit cette Dame
étoit plantée au milieu d'une grande foreft
, & fituée entre deux collines , par oùcoule
une petite riviere , dont l'eau eft
auffi claire & auffi pure que celle d'une
fource vive ce qui la rend encore plus
confiderable , c'eft que cette Dame s'y efti
46. LE MERCURE
quelquefois baignée. La Ville où j'étois , eft.
à cinq lieues de cette maifon ; j'allois fou
vent m'égarer de ce côté- là , non dans
Pefperance d'y rencontrer cette aimable
perfonne , mais comme je ne me fentois
malheureux que par fon abfence , il me
fembloit que plus je m'approchois du lieu.
où elle étoit , moins j'étois à plaindre..
Voilà , difois-je , l'endroit qui poffede tout
ce qui m'eft cher au monde , & le feul
qui m'eft défendu . Plus je le confiderois ,
plus j'étois vivement touché , & je ne pou
vois m'en éloigner fans redoubler mes fou
pirs & mes plaintes. Helas ! difois - je en
foupirant , que les Domestiques font heu
reux , qui peuvent la regarder , & lui par
ler ! Mais , n'en pourrois- je pas être du
nombre , en me déguilant ? Je ne puis
vivre en l'état qu je fuis , & je n'ay plus
à garder ni mefure ni bienféance. Je ſça.
vois que fon mary avoit deux enfans en→
core jeunes , d'une premiere femme : Je
m'allay mettre dans l'efprit de feindre que
j'étois de ces Precepteurs qui courent le
monde. Un jour que je n'en pouvois plus ,
un de mes gens qui m'avoit faivi , m'a→
vertit que la nuit s'approchoit , & qu'il
n'y avoit point de Lune : Je m'arrêtai dans
un Village à l'entrée de la foreft , & là
parce que cet homme étoit fecret & fidele.
je lui communiquay mon deffein , quis
D'OCTOBRE. 47
l'étonna ; mais il fallut m'obéir. Je le fis
partir tout à l'heure , avec ordre de ce
qu'il avoit à faire , d'envoyer mon équipage
chez moy ; de dire que j'avois pris une
autre route , & de m'apporter un habit
comme je le voulois. C'étoit lui qui m'ha
billoit , & je lui recommanday fur tout de
tarder..
ne pas
Je fus en ce lieu deux jours dans une
grande impatience de commencer le rôle
que j'allois jouer. Enfin , mon homme
revînt fur le midy , & je montay fur le
champ à cheval , & perçay dans la foreſt
pour changer d'habit. J'avançois infenfiblement
du côté de la mailon , & n'en
étant plus qu'à deux mille pas , je defcendis
de cheval au milieu d'une rouffe d'ar
bres fort épaiffe , où je fus long- temps à
m'ajufter : car quoique je paruffe "fort
occupé de mon déguiſement , je fongeois
beaucoup plus a prendre l'air & la mine
d'un honnête homme. Quand je me fus
mis le plus décemment que je pûs , mon
homme prenant mon cheval , fe retira du.
côté de la Ville , & je demeuray feul avec
un petit fac de hardes que je portay fous
mon bras jufqu'à une Ferme proche de la
maiſon , & je priay la Fermiere de me le
garder. Enfuite j'entray dans la cour,
il y avoit trois ou quatre dogues abboyans
qui fe vouloient déchaîner. Le Maître
οι
43 LE MERCURE
fe
étant venu à ce bruit , je le faluai : C'é
toit un homme avancé en âge , fort timide;
& d'une foible conftitution , mais il aimoit
à fe faire craindre , & parce qu'il avoit
erû que ces dogues m'avoient épouvanté ,
il me dit qu'il feroit bien dangereux de
promener la nuit autour de chez luy ;
& me faifant entrer dans une Salle , il me
demanda ce que je cherchois . Je fuis
lui dis-je , un homme de Lettres , qui me
mêle d'inftruire les jeunes gens . Vous
êtes propre & lefte , lui dit-il , mais n'avez
- vous ni bonnet ni chemiſe , & marchez
- vous comme cela fans hardes ? Je
lui répondis que j'avois laiffé mon paquet
chez une femme proche du Château , pour
me prefenter plus refpectueufement , &
pour offrirmon fervice de meilleure grace :
C'est bien fait , me dit-il , & je me doute
que vous fçavez chanter , & faire quel
ques méchans vers. Vos Confreres fe mê
lent de l'un & de l'autre : Je lui repartisque
je fçavois un peu de tout , qu'il n'avoit
pas befoin d'un autre que de moy
pour apprendre à Meffieurs les enfans à
faire des armes & à danfer , parce que
j'avois été cinq ans à Rome auprès d'un
jeune homme de qualité qui m'aimoit ,
& qui me faifoit inftruire par fes Maîtres ;
& pour lui montrer mon adreffé , je me
mis engarde avec une canne que j'avois .
Fallongeois
D'OCTOBRE. 79
j'allongeois & parois , j'avançois & reculois
en Maître ; puis ayant quitté ma canne,
je fis quelques pas forts de Balet , & plufieurs
caprioles qui le rejoüirent ; mais ce
qui lui plût encore , je ne fus pas difficile
pour mes appointemens .
Il m'ordonna de me repofer , & monta
dans l'appartement de Madame , pour
lui
raconter cette avanture. Elle m'envoya
querir tout auffi-tôt ; & cette nouvelle ,
quoique je n'en dûffe pas eftre furpris ,
m'ôtá prefque la refpiration. Je ne pouvois
vivre en l'abſence de cette aimable
perfonne , & je ne l'ofois aborder. J'avois
tant d'amour & de joye , tant de foumiffion
& de crainte , que quand je me vou- .
lus lever , il me prit un tremblement comme
d'un accès de fievre. Enfin m'étant
remis le mieux que je pûs , j'entray dans
un cabinet fort propre , où je fis la reverence
à la plus belle femme qu'on ait jamais
vûë. Je me baiffay avec beaucoup de :
refpect pour lui baifer la robbe ; mais elle
m'en empêcha , & me voulut bien faluer
auffi civilement , que fi je n'euffe pas été
déguifé. Elle tenoit un livre de l'Aftrée.
entre fes mains , & la Jerufalem du Taffe
fur les génoux ; car elle fçavoit parfaitement
la Langue Italienne , & faifoit cas .
de ces deux Livres ; de forte qu'elle aimoit
à s'en entretenir & même à les
›
E
LE MERCURE
entendre lire d'un ton convenable . Je m'en
apperçus bien vite , parce qu'en s'informant
de ce que je fçavois , elle demanda fi je
fçavois lire ; & comme fon mari trouvoir
cette queftion fort plaifante , de s'informer
d'un Docteur s'il fçavoit lire , & qu'il
en rioir de tout fon coeur : Il y a , dit- elle ,
plus de miftere à lire qu'on ne penfe : cette
réponſe me confirma qu'elle s'y plaifoit ,
& qu'elle avoit le fentiment très délicat ;
auffi étoit- ce le principal amufement qu'elle
pouvoit prendre dans une pareille folitude.
On vint avertir Monfieur qu'on avoit
fervi : Il me fit placer près de fes enfans ,
& me dit qu'il fouhaitteroit bien de les
voir fçavans , mais de la fcience du monde,
plutôt que de celle des Pedans , & je me
perfuade que tout ce qu'on doit le plus ambitionner
, c'eft d'être honnête homme , &
d'en acquerir la reputation ; mais pour y
parvenir , que jugeriez - vous de plus à propos
& de plus neceffaire ? Alors je m'écriay
d'une façon modefte & refpectueufe :
Ah ! Monfieur , que vous parlez de bon
fens & en habile homme ! Si vous vouliez
vous - même.inftruire ces Meffieurs , ils
n'auroient que faire d'un autre Gouverneur
pour fe rendre auffi aimables par leurs
manieres , que par leur acquis. Pour répondre
à ce que vous me faites l'honneur
de me demander , il me femble que dans
D'OCTOBRE.
TE
le deffein de fe rendre honnête homme ,
& d'en acquerir la reputation , le plus
important confifte à connoître entre toutes
les chofes , les meilleurs moyens de
plaire , & de les fçavoir pratiquer ; car ,
ce n'eft feulement que pour eftre agreable
qu'il faut fouhaitter d'être honnête hom-
; qui en veut acquerir la qualité , doit
principalement fonger à fe faire aimer : En
effet , on ne loue que bien féchement ce
qu'on n'aime pas , ' quelque bonne opinion
qu'on en puiffe avoir ; & de plus le merite
qui nous eft cher , nous paroît tout
d'un autre prix que celui que nous haïffons.
Je trouve qu'il fied bien de fe montrer
d'une humeur douce & enjoüée , autant
que l'occaſion , le genie , & la bienféance
le peuvent permettre. Cette façon'
de proceder ouvre des entrées que l'air'
grave & ferieux ne donne pas , & fait
bien fouvent qu'on s'émancipe au deffus
de fa volée , & de bonne grace.
D'ailleurs , on addreffe volontiers ce'
qu'on dit d'agreable à des gens d'un accès
facile & gay , au lieu qu'on n'aborde que
par contrainte une mine fombre & enfoncée
; fur tout , il faut eftre hardy en
effet fous une apparence modefte , & ofer
prefque tout ce qui doit réuffir , fans crainare
les évenemens. Le coeur n'eft pas moins
neceffaire que l'efprit , pour eftre d'un
Eij
LE MERCURE
commerce agreable , & je ne croy pas
qu'on puiffe rencontrer un homme fi accomply,
qui n'ait quelque defaut dans
l'un ou dans l'autre. Mais il y a de cerrains
defauts dont l'honnêteté me temble
toujours exemté , & je trouve qu'il eft
bon de les remarquer , afin de la connoître
plus aisément : car , outre qu'elle ne
les a jamais , on les voit quafi par tout
où elle n'eft point , comme l'injuftice , la
vanité , l'avarice , l'ingratitude , la baffeffe ,
le mauvais goût , l'air groffier & peu .
noble , l'air qui fent le Palais , la Bour-.
geoifie , la Province & les affaires , lat
façon de proceder qui s'attache trop aux.
Coutumes , & qui ne voit rien de meil-:
leur. Dire des chofes trop communes ,
des équivoques , des quolibets , &, tout .
ce qui vient d'un efprit mal fait : Eftimer.
plus la fortune que le merite ; fe vouloir
mettre en honneur par de faux moyens
& de lâches flatteries ; eftre dur & fans
complaifance ; preferer en tout fes interefts
à ceux de fes meilleurs amis ; eftre
fourbe ou menteur ; chercher les apparences
plutôt que la verité ; prendre mal fon
temps & fes mefures ; eftre dupe & fe
connoiftre mal en gens ; eftre fujet à
s'encanailler , & même avec les gens de
la plus haute volée ; fouffrir fans reffen-"
timent l'injuftice & les avanies ; n'en pas
D'OCTOBRE
garantir les foibles , quand on le peut , &
fe mettre toujours du party des plus forts' ;
mais principalement n'avoir pas je ne fçay
quoy de noble & d'exquis , qui éleve un
honnête homme au deffus d'un autre honnête
homme. Il faut tant de rares qualitez
pour fe rendre parfaitement ' honnête
homme , qu'il eft plus aisé de dire les
chofes qu'il faut faire , que celles qu'on
doit fuivre ; & je crois qu'en évitant ces
defauts & quelques autres , l'on peut faire
in grand progrès dans l'honnêteté : Enfin ,
je voudrois nourrir ces Meffieurs d'une
maniere fi noble , que la faveur des plus
grands Princes ne leur pût jamais rien
donner , qui ne parût aus deffous de leur
merite .
Comme je parlois de la forte , Madame
me donnoit une attention qui témoignoit
affez qu'elle fe plaifoit à m'entendre. Monfieur
de fon côté , prenant un vifage riant
but à ma fanté ; & me faifant goûter d'excellent
vin , m'en demanda mon avis . Il
aimoit la bonne chere , & fa table étoit bien
fervie. Madame auffi qui plaifoit par tout
étoit de bonne compagnie à la table , &
nous y fûmes prés de deux heures , fans
qu'elle fit le moindre femblant d'en vouloir
fortir. A la fin s'étant levée , elle fe
retira dans fon Cabinet , & le Maître en
fon appartement fort éloigné de celui de
E iij
34
LE MERCURE
fon aimable Epoufe , où il n'alloit que
bien peu ; car on eût dit qu'il ne avoit
époulée que pour l'ôter au monde. On me
donna une chambre fort commode , & je
m'étonnois qu'en un lieu fi fauvage il y eût
tant d'ordre & de propreté ; mais j'admirois
principalement qu'une fi rare perfonne
yfût cachée. Que je ferois heureux , difois-
je en foûpirant d'amour & de joie , ſi
je me pouvois infinuer dans fon coeur ! Le
meilleur moyen qui s'en prefente , dépend
de bien lire . Il faut donc que je tâche de
lui plaire , en tirant la quinteffence de tous
les agrémens qui peuvent la toucher par
cet endroit. Cette maniere confifte à bien
prononcer les maux , & d'un ton conforme
au fujet du difcours : que ma parole la
flatte fans l'endormir ; qu'elle l'éveille fans
la choquer ; que j'ufe d'inflexion pour ne
pas laffer ; que je prononce tendrement
& d'une voix mourante les choſes tendres ;
mais d'une façon fi temperée , qu'elle n'y
fente rien d'affecté. Je fis en peu de jours
tant de progrès en cette étude , qu'elle ne
fe plaifoit plus qu'à me faire lire , & qu'à
s'entretenir avec moy. Son mari en étoit
fort aife , parce que je la defennuyois , &
qu'elle ne lui parloit plus d'aller dans les
villes voifines. Je lui contois fouvent pour
la divertir quelque avanture qui pût fortifier
de plus en plus fon eftime & fa bien-
Ja
D'OCTOBRE
ass
veillance pour moy , perfuadé que le tems
acheveroit le refte .
Ma façon d'agir me concilia , comme
je l'avois prévu , les fuffrages de la Dame,;
& ma methode pour élever les enfans , ceux
du mari. Nous fumes bientôt d'accord , &
dès le lendemain , je donnai les premieres
leçons à mes difciples . Je leur trouvai toutes
les difpofitions favorables pour me
faire honneur ; mais comme leur avancement
n'étoit pas le but que je m'étois propofé
, & qu'il n'étoit qu'un pretexte à un
autre qui me flattoit infiniment plus ; mon
amour propre tiroit peu d'avantage de leur
progrès , & je n'étois occupé que du foin
de réuffir dans mon projet. Je jouiffois toujours
du plaifir de voir ce que j'aimois ;
j'avois celui de l'amufer ; mais je fentois
que mon coeur eût joui d'une fatisfaction
bien plus parfaite , fi j'avois pû parler. Le
defir que j'en avois , étoit retenu par la
crainte de déplaire à cette aimable Dame.
Mon apprehenfion n'étoit pas fans fondement.
J'avois quelquefois préfenti fes penfées
là- deffus , felon que les paffages des
livres , que je lui lifois , m'en fourniffoient
l'occafion ; & je lui avois entendu dire que
fi jamais quelqu'un s'avifoit d'emploier
quelque deguifement pour lui parler de
quelque chofe qui pût intereffer fon honneur
, elle auroit le courage de l'obliger, à
1
E iiij
36 LE MERCURE
fe retirer , quand même fon coeur en devroit
fouffrir. Ces fentimens me faifoient
trembler ; je n'ofois me découvrir . L'amour
eft rarement d'accord avec nos reflexions ;
fa volonté eſt une loy à laquelle notre efprit
est toujours foumis. Il me parla un
langage tout oppofé à mes refolutions ; &
comme il ne manque point de donner le
courage qu'il faut pour executer fes deffeins
, je ne balançai point à lui obéir. C'eft
en vain , me fit- il entendre , que tu paffes
res jours dans cette retraite : le plaifir d'y
voir ta Maîtreffe , n'eft qu'une illuſion ,
tant qu'elle ignorera. qui tu es . Ce qu'elle
peut t'avoir dit ne doit point t'allarmer` ;
les femmes font rarement finceres , quand
on vient m'oppofer à leurs fcrupules. Ce
qu'elles ont coûtume de dire contre mes interefts
, font des maximes generales , dont
l'application eft toujours fauffe ; & leur
éloquence perd beaucoup de fa force en
préſence d'un Amant .
C'eft ainfi que ce Dieu fçût me feduire ;
je me fentis un empreffement que je n'avois
point connu jufques-là. La joie de voir ce
que j'aimois , n'eut plus la force de m'arrêter
; la crainte de perdre cet avantage
difparut , & ce fut un effet de mon amour
propre , qui me perfuada que je n'éprouverois
point ce malheur. Voila comme
une paffion fait recevoir tout ce qu'elle
D'OCTUBRE.
$7
infpite , & comme elle donne cette temerité
que l'évenement a coutume de juftifier.
Je ne fus donc plus occupé qu'à trouver
une occafion favorable pour me découvrir.
Je crus l'avoir fait naiftre . Un
jour je lifois le Prologue de l'Aminte du
Taffe ; le déguilement de l'Amour , qui paroît
fous un habit champêtre , me parut
propre à faire des reflexions qui m'ameneroient
naturellement à mon deffein . L'Amour
, dis-je , a grand tort de fe dégujfer.
Quand on eft fur de plaire & de char
mer , à quoi bon ce myftere ? Cette petite
fupercherie n'eft permife qu'à des Amans
qui fans cet artifice ne pourroient s'expliquer.
Il y a beaucoup de fineffe d'efprit
dans cette remarque , reprit ma Maiſtreſſe ;
mais l'Amour peut avoir eu fes taifons pour
le déguifer. Comme il fçait que fes armes
peuvent effaroucher les jeunes perfonnes
il prend foin de les cacher quelquefois . Il
y a encore des circonftances où la prefence
produiroit un mauvais effet , il lui fuffic
alors de fe faire connoître aux coeurs qu'il
a deffein de toucher ; il n'en fait pas moins
ce qu'il veut , & il trouve par là le
de cacher les myfteres à des perfonnes qui
fe feroient un plaifir malin de les troubler.
Je me rends à vos raifons , repartis je , Madame
, & je conçois préfentement qu'il y
a beaucoup de conjonctures où l'Amour
moyen
>
+38 LE MERCURE
doit fe mafquer pour réuffir. Il lui fuffic
d'être connu aux perfonnes qu'il veut tou
cher. C'eft fur fon exemple , Madame , que
je connois un homme qui a changé d'habit
& de profeffion ; comme je fçais tous
fes fentimens , je pourrois vous les expliquer.
Jamais Amant ne fut plus tendre.
A la faveur de fon déguifement il voit tous
les jours ce qu'il aime ; il demeure dans
fa maifon , il lui parle , il n'ofe fe declarer.
-Cependant il commence à concevoir que
* cette contrainte ne peut pas durer. Il
éprouve mille contradictions. Que ferat-
il dans ces circonftances ? S'il parle , il
appréhende de déplaire. Je vous en laiffe le
Juge , Madame. A vous parler franchementreprit
elle , cette decifion eft embaraffante.
La raifon peut fournir de bons
confeils dans ces fituations ; mais le coeur
peut nous trahir. Ah ! Madame , vous heftez
fur ma condamnation. Permettez que
je profite de ce moment de faveur , pour
vous nommer l'Amant dont j'ai parlé . Alors
je me jettai à fes genoux , & du ton le plus
perfuafif , je lui contai comme je l'avois
vûe , de quelle maniere fes attraits m'avoient
bleffé , & le parti enfin que j'avois
pris pour pouvoir lui exprimer mes fentimens.
*Ce difcours lui caufa une telle ſurpriſe ,
qu'elle ne me répondit point . Son vilage
D'OCTOBRE.
19
prit differentes formes dans un inftant ; fes
yeux marquerent de la colere , du depit &
de la douceur , mais enfin le dépit fut le
mouvement qui fe fixa . Quoi ! dit elle',
vous avez ofé rifquer un pareil ftratagême
, & m'en avertir ! Quelle est votre efperance
auprès d'une femme qui n'eft mariée
que depuis trois mois ? Quelle idée avezvous
conçue de moi , pour hafarder pareilles
chofes ? Et vous - même que deviendriez-
vous , fi mon mari venoit à connoître
qui vous êtes ? Quels affreux foupçons
ne lui feriez - vous point naître contre
moi ? Songez à quitter ces lieux au plûtôt
votre prefence m'inquiete . S'il ne s'agiffoit
que de mon fort , repris- je , Madame , je
ne craindrois point la vengeance de Monfieur
votre mari ; la mort même , fi je devois
la fouffrir , me paroîtroit douce ,
puifqu'elle feroit un effet de l'empreffe
ment de vous voir . Les reflexions que
vous me faites faire fur ce qui vous regarde,
me touchent infiniment davantage ; & fi
je ne craignois qu'une fuite trop prompte
ne devint fufpecte , je vous aurois déja ôté
la vûe d'une perfonne que vous haiffez
tant. Eh bien me dit la Dame , je fuis
d'accord que vous differiez , afin que vous
puiffiez préparer les circonftances , de mamaniere
que vous fortiez de la maifon ,
fans qu'on puiffe attribuer ce deffein qu'à
60 LE MERCURE
2
'votre legereté. Jufqu'à ce tems , je me priverai
de vos entretiens. Tant que j'ai pû les
croire innocens , ils m'ont fait plaifir
mais prefentement je ne les puis fouffris ,
fans me rendre .coupable. J'efpere que
vous aurez affés de difcretion , pour vous
rendre à mes defirs là - deffus. Elle voulut
me quitter après cet ordre funefte. Je pris
la liberté de l'arrêter. J'avois les yeux
mouillez de larines , j'étois au defefpoir ; je
la conjure de me pardonner. Après lui avoir
promis une exacte obéiffance , je la fis
appercevoir que le changement qu'elle
exigeoit dans ma conduite pourroit être
dangereux , qu'il étoit plus convenable que
je lui fiffe la lecture à l'ord- naire , & que je
faurois fi bien me rendre le maître de mes
fentimens , que je ne lui en parlerois de
ma vie. Ma refolution , & la maniere dont
je la pris , la toucherent. Elle voulut bien
que je continuaffe les entretiens comme
auparavant , aux conditions que je m'impofois.
Je la quittai , pour aller donner leçon
à mes difciples. Je vous affure qu'alors un
Maître n'eft gueres en état d'inftruire . Je
les congediai bien-tôt , pour m'occuper
tout entier de mon malheur. Je m'en pris
à l'amour qui m'avoit confeillé fi temerairement.
Je regrettai ma felicité paffée :
J'avois du moins le plaifir de la voir , di◄
D'OCTOBRE.
fois je. Accoutumé aux charmes de fa converfation
, comment pourrois - je m'en
paffer ? Que je vais mener une triſte vie !
Faut-il que je me fois laiffé feduire par
l'excès de ma paffion ? Voilà quelles étoient
mes penfées. Cependant , le croira- t- on ?
un elpoir fecret me foutenoit contre tant
d'allarmes. J'avois peine à concevoir qu'u
ne femme voulût abfolument punir des
fautes dont fes charmes étoient complices.
Toute la nuit fe paffa dans des agitations
continuelles ; le jour parut enfin. L'heure
de mes exercices arriva , & enfuite celui
de mes entretiens avec la Dame. Je vous
affure que la lecture fut courte . Ma Maîtreffe
continua fon dépit . Elle avoit peine à
fe perfuader ce qu'elle voioit ; & laiffant
échapper quelques foupirs : Encore une
fois , me dit- elle , quel eft votre deffein ?
Comme je la regardois avec beaucoup
d'attention , je crus m'appercevoir que fes
yeux marquoient moins de colere que le
jour precedent. Je profitai de cette favorable
difpofition , pour lui expliquer de nouveau
tout ce qui fe paffoit dans mon ame.
Elle en parut touchée , & fans me montrer
de fenfibilité , elle m'en fit affez entendre
pour concevoir qu'on me donneroit tout
le tems que je croirois neceffaire , pour
choifir les circonftances où je jugerois à
propos de m'en aller .
62 LE MERCURE
L'habitude de ce qui nous amufe a plus
de pouvoir qu'on ne s'imagine . On croit ne
point tenir à des chofes , dont le credit .
qu'elles ont acquis fur nous , nous étonne
lorfqu'il les faut quitter. Ma façon de lire ,
étoit du goût de ma Maîtreffe ; elle crut
perdre tout amufement , fi je m'en allois ;
& ce fut là d'abord la raifon qui fit qu'elle
ne m'en preffa plus. Infenfiblement elle
s'accoutuma à ne regarder comme un
homme qui faifoit tout pour lui plaire.
Elle n'étoit plus furpriſe de s'entendre dire
combien je l'aimois. Il n'y a pas loin de
la liberté qu'elle me donnoit là-deffus , julqu'à
la tendreffe. Je ne la preffai pas trop
de s'expliquer davantage. J'avois vû mon
malheur de trop près , pour rien hafarder.
Je commençois donc à jouir avec quelque
forte de tranquillité du plaifir innocent de
vivre avec cette aimable Dame , lorfque
j'effuiai un nouveau peril bien plus grand
que le premier.
Le cadet des deux freres , dont l'éducation
m'étoit fi commode , fouffroit avec
quelque peine les petites préferences que
j'avois pour fon aîné ; mais outre qu'il
avoit plus de douceur , fa belle- mere penchoit
pour lui ; c'en étoit affez pour me
déterminer. Je ne fçai pas à quoi ce jeune
homme connut à peu près mes ſentimens ;
mais je fçai bien qu'un jour que je lui avois
D'OCTOBRE. 63
fait quelque correction , il me fit entendre
qu'il avertiroit fon pere de quelque chofe
fi j'en ufois toujours de même avec lui . Ce
difcours m'étonna ; je feignis pourtant de :
n'y pas faire attention , me refervant le
droit de le queftionner quand il feroit feul .
L'occafion s'en préfenta bientôt. Je le menai
dans le jardin , & après lui avoir fait
quelques careffes pour le difpofer , je le
priai de vouloir m'avouer ce qu'il m'avoiť
voulu dire. Il fit d'abord le difcret , & détournant
fon vifage à la façon des jeunes
gens timides , il me dit qu'il favoit bien
que j'aimois fa mere ; qu'un jour il m'avoit
vi à fes genoux , & que j'avois voulu lui
baifer la main ; mais enfin il m'ajouta qu'il
n'en parleroit point à fon pere , fi je voulois
le bien traiter. On fçait le fond qu'il
y a à faire fur de pareilles promeffes. Je
ne fçavois quel parti prendre. Je n'ofois
èn parler à ma Maîtreffe. D'un autre côté,
j'apprehendois d'être la caufe de les difgraces
, & mon filence me paroiffoit dangereux.
Le repos de la Dame l'emporta
pourtant fur ma propre fatisfaction . Je met
determinai à lui avouer la découverte du
jeune homme ; elle en fut effrayée , &
m'ordonnna par tout le pouvoir qu'elle
crut avoir fur moi , de la quitter inceffamment.
Jamais ordre ne fut plus difficile à
executer. Cependant il fallut s'y refoudre.
64
LE MERCURE
La feule chofe qui me confola , ce fut l'affe
rance que cette aimable Dame voulut bien
me donner , qu'elle fongeroit en moi , &
peutêtre plus qu'il ne conviendroit à fa
tranquillité. Voilà la premiere expreffion
qui me prouva que je ne lui étois pas
indifferent. Elle me donna du courage ;
j'ofai me flatter que l'Amour ne m'abandonneroit
pas en fi beau chemin. Enfin ,
je partis un beau matin , fans avertir perfonne
, & je revins à la même Ville ; où
j'avois vû pour la premiere fois celle que
je quittois avec tant de regret.
Jamais les rigueurs de l'abfence ne-fe
font fait fentir fi fortement ; il me fembloit
qu'on m'avoit arraché la moitié de
moi-même , je ne vivois plus qu'à demi.
Je n'étois occupé que de mes chagrins ,
& je crois que j'y ferois fuccombé , fi ma
Maîtreffe ne m'avoit foutenu par fa bonté .
Un jour un homme inconnu me demanda
fous mon veritable nom que j'avois repris ,
& me prefenta une lettre , fans me dire de
quelle part. Je l'ouvris ; mais comment
vous expliquer ma joie , lorfque je reconnus
la main de l'adorable perfonne , dont
la feparation m'étoit fi cruelle.
Voici les termes de fa lettre .
Je ne doute point de votre inquietude ;
j'en juge par la mienne : fi vous m'aimez ,
mes nouvelles doivent vous confoler . S'il vous
fant
D'OCTOBRE. 65
faut encore des fecours plus puiſſans , je veux
bien vous dire que vous me verrez dans peu
dans le fejour que vous habitez. Mon mari
a une affaire au sujet de la Chaſſe. Il ira
à la Ville pour la faire juger. Adieu . Songex
que je n'ai jamais fait pour perſonne ce
que je fais aujourd'hui . Ne me faites point
de réponſe , il y auroit du danger.
De la melancolie la plus profonde je
paffay tout d'un coup à la plus parfaite
fatisfaction dont foit capable un tendre
coeur. Quelle difference ! mon imagination
ne me prefentoit que des objets fu
neftes ; & dans l'inftant elle me traça les
images les plus charmantes. Je vis d'avance.
toutes les graces que l'arrivée de ma Maîtreffe
devoit ramener . Effectivement , au
bout de quatre jours elle arriva avec fon
mari. Il avoit eu une difpute fort vive au
fujet de la chaffe avec un de fes voisins
ils étoient venus tous deux pour faire dif
cuter leurs droits . J'eus donc occafion
de revoir la plus belle femme du monde ;
mais je ne connoiffois pas encore toute
la grandeur de la felicité qui m'etoit deftinée
; fon mary s'échauffa tellement dans
la pourfuite de fon procès , qu'il en prit
une maladie dont il mourut.
i
Après avoir laiffé expirer le temps qu'on
doit au fouvenir des morts , je propofay
ama Maîtreffe de remplacer celui qu'elle
F
66 LE MERCURE
pleuroit. Ma fortune heureufement étoit
affez bonne , pour la dédommager de ce
qu'elle avoit perdu. J'étois d'une naiſſance
qui n'étoit point inferieure à celle du défunt
, & je n'avois pas trente ans. Je fis
mes offres avec toute la delicateffe qu'on
doit avoir dans les premiers jours d'une
affliction legitime , & j'ajoûtay que je
fçaurois moderer mes empreffemens , pour
ne rien demander qui ne s'accordât avec
les bienséances qu'on doit obferver dans
ces occafions , L'aimable Veuve fut touchée
de mes raifons ; elle y répondit avec
beaucoup de bonté , & lors qu'on eut
donné à la memoire du premier Epoux
tout ce que pouvoit exiger le devoir le
plus exact , je vis arriver ce bienheureux
moment tant defiré. Nous éprouvons depuis
fix ans que nous fommes liez l'im
à l'autre , qu'il n'appartient qu'à l'Amour
de faire des mariages comme le nôtre ..
D'OCTOBRE. 67
ARRESTS , EDITS
A
Declarations .
"' RREST de la Cour de Parlement
rendu à Pontoiſe le 2 Septembre 1720 ,
qui homologue l'Acte en forme de
Refultat de la Communauté des Graveurs fur
tous Métaux , portant Reglement general pour
les Apprentifs & Compagnons de ladite Communauté.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
20 Septembre 1720 , qui condamne le Sieur
André Secretaire du Roy , au payement du
centiéme Denier d'une Terre par luy acquife
enfemble au triple dudit droit , faute d'avoir
fait infinuer le Contract d'acquifition de ladite
Terre dans le temps preferit par les Reglemens.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
20 Septembre 1720 , qui permet à toutes les
Communautez Ecclefiaftiques & Hôpitaux du
Royaume d'acquerir de nouvelles Rentes , mênte:
fur Particuliers , à raifon du Denier cinquante.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
24 Septembre 1720 , par lequel Sa Majesté
permet aux Directeurs de la Compagnie des
Indes , de faire figner pour leur Caiffier les
cinq cens mille Billets d'un dixième d'Action
chacun , ordonnez par l'Arreft de fon Confeil
du prefent mois , & de les faire vifer
dus Fij
68 LE MERCURE
pour eux par les Sieurs Guyot , Cauvin , Motté,
Maricourt , Poftel , Lauriau , Sigonneau , Guyart.
Mabire , Duport , Defroches , Couterot , Pinchart
& Doré : Veut Sa Majesté que lefdits
Commis puiffent figner & vifer concurremment
& indiftinctement lefdits dixiémes d'Actions.
Extrait des Regiftres du Conseil d'Etat.
L&
E ROY ayant jugé à propos d'évoquer par
differens Arrefts à foy & à fon Confeit plufieurs
procès & differens , lefquels ne pouvoient
trouver une expedition affez promte dans les
Tribunaux où ils avoient été portez , & pour
des matieres lefquelles , vû les conjonctures prefentes
, requeroient plus de celerité : Sa Majefté
auroit en même temps nommé des Commiffaires
de fon Confeil , aufquels Elle auroit attribué
toute Cour & Jurifdiction , pour proceder au
Jugement defdits Procès en dernier reffort &
fur leurs derniers erremens , le nombre defquels
Commiffaires auroit efté augmenté par les derniers
Arreſts , afin de procurer aux Parties une
plus promte expedition . Et Sa Majesté voulant
attribuer à tous lefdits Commiffaires un égal
pouvoir , afin que les uns en l'abfence des autres
puiffent proceder en nombre fuffifant au
jugement defdits Procès ; comme auffi regler la
forme dans laquelle il fera procedé pardevant
lefdits Commiffaires pour abreger l'inſtruction
& accelerer le Jugement defdits Procès ; Ouy
Je Rapport : SA MAJESTE' ESTANT EN
SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur le Duc
d'Orleans Regent , a ordonné & ordonne que
tous les Proces & differens qu'Elle a évoquez
par les Arrefts de fondit Confeil des 3 , 12 ,
14 , 19 , 21 & 22 du prefent mois de Septem
bre , feront jugez en dernier reffort par les Sieurs
D'OCTOBRE. 69
d'Armenonville , Bignon , de la Houffaye , de
la Rochepot , de Château neuf , Ferrand , de
Machault , Confeillers d'Etat ; & par les Sieurs
Maboul , de la Grandville , Orry , Angrand ,
de la Vigerie , de Vattan , de Talhouet , de
Tourny , de Bonnelles , Dupuis & de Fontagieu
Maiftres des Requeftes ordinaires de fon Hôtel ,
aufquels Sa Majeſté attribuë à cet effet toute
Cour , Jurifdiction & connoiffance , icelle interdifant
à toutes fes Cours & autres Juges :
Permet Sa Majesté aufdits Commiffaires de proceder
au Jugement defdits Procès , les uns en
kabfence des autres ; pourvû qu'ils foient au
moins au nombre de fept : Et attendu que tous
lefdits Procès ont efté évoquez par lefdits Arrefts
, pour eftre inftruits & jugez fuivant leurs
derniers erremens ; ordonne Sa Majesté que
l'inſtruction en fera continuée pardevant lefdits.
Sieurs Commiffaires , par fimples communications
qui feront par eux ordonnées à ceux qui
fe trouveront Parties affignées ou reçues dans
les Tribunaux où lefdits Procès étoient pendans ,
pour y deffendre dans tels delays qui feront jugez
competans , fauf au cas qu'il y ait lieu d'y
appeller de nouvelles Parties , à eftre procedé
à leur égard par des affignations dans les delays
& en la maniere portée par le Reglement fair
pour la procedure du Confeil le 17 Juin 1687.
Er fera le prefent Arreft executé nonobftant
oppofitions ou empêchemens quelconques , dont
aucuns interviennent , Sa Majesté s'en referve
la connoiffance à foy & à fon Confeil , & icelle
interdit à toutes fes Cours & autres Juges. Fair
au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majefté y eftant ,
tenu à Paris le vingt- quatrième jour de Septembre
mil fept cent vingt. Signé , PHELYPEAUX.
Registré an G´effe de la Commiffion , fuivant
e70 LE MERCURE
l'Ordinnance de Meffieurs les Commiffaires de
cejourd'huy , par moy Greffier de ladite Commiffion ,..
fouffgé. Fait en leur Affemblée tenuë à Paris
le vingt-fixiéme jour de Septembre mil fept cent
vingt. Signé , LORNE.
ARREST du Confeil du 24 Septembre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne qu'il fera
établi daus la Ville de Lyon , ainfi qu'il a eſté
ordondé pour la Ville de Paris , un Controlleur
General des Comptes courans & Viremens de
Parties , & trois Directeurs ; & que dans les
autres Villes du Royaume où il y a Hôtel des
Monnoyes , dans lefquelles il a efté établi un
un Livre de Comptes courans & Viremens de
Parties , & dans toutes celles où il fera jugé
neceffaire de faire de pareils établiffemens , la
Regie defdits Comptes courans & Viremens de
Parties , fera faite par trois Directeurs qui feront
nommez par Sa Majefté dans chacune defdites
Villes , & choifis dans les fix Sujets qui
ont efté ou qui feront prefentez par les Marchands
& Negocians des mêmes Villes , lefquels
Controlleur General dans la Ville de Lyon , &
Directeurs tant dans ladite Ville que dans les
autres Villes des Provinces , fuivront les infructions
qui leur feront envoyées par le Sieur Lavy
Directexr general de la Compagnie des Indes
& de la Banque.
ARREST du Confeil d'Etat du Roy , du
24 Septembre 1720 , qui difpenfe les Controlleurs
Ambulans des Formules , Domaines , Controlle
des Exploits , & des Actes des Notaires ,
Infinuations , Greffes & Amortiffemens , & les
Commis Buraliftes defdits Droits , de l'obligation
portée par l'Arreft du 20 Aouft dernier
u fujet de la remife de leurs fonds aux Recettes
>
D'OCTOBRE. 71
generales , à l'exception de ceux qui refident
dans les Villes où il y a un Receveur general,
& ordonne qu'il fera dreffé des procès verbaux
des effets qui fe trouveront dans les Caifles
lors des diminutions d'Efpeces.
ARREST du Confeil , du 5 Octobre 1720 ,,
par lequel Sa Majefté ordonne que dans le courant
du prefent mois d'Octobre pour out delay ,
& fans efperance d'aucun autre , tous les Por
teurs d'Actions intereffées non remplies de là
Compagnie des Indes , feront tenus d'acquitter
le fupplément de trois mille livres par Action
ordonné par l'Arreft de fon Confeil du 3 Juin
dernier Veut Sa Majefté : que ledit , Supplément
puiffe eftre fait ou en Billets de Banque de cent
livres , cinquante livres & dix livres , à raison
de trois mille livres par Action , ou en Actions
non remplies qui feront reçûës fur le pied de
trois pour deux ; enforte que pour trois Actions
non remplies , il en fera délivré deux remplies ,
fi mieux n'aiment les Porteurs defdites Actions
non remplies les convertir dans le même delay
en Actions Rentieres : Ordonne Sa Majefté
qu'après ledit jour dernier du prefent mois
Octobre , les Actions de ladito Compagnie
non remplies demeureront nulles & de nul effet.
Fait deffenfes de les negocier , à peine de reftitution
& de trois mille livres d'amende.
ARREST du Confeil , du 8 Octobre 1720 ,
par lequel Sa Majefté ordonne que les anciennes
Efpeces continueront d'eftre reçûës dans le
Public jufqu'au premier jour de Novembre prochain
; fur le pied qu'elles y ont actuellement
cours , pendant lequel temps il fera travaillé
dans les Hôtels des Monnoyes , à la converfion
ou reformation des Efpects & Matieres qui
72 LE MERCURE
y font actuellement , ou de celles qui y feront
portées.
L
Extrait des Registres du Confeil d'Etat.
E Roy s'étant fait reprefenter en fon Confeil
l'Etat annexé à la minute du prefent Arrêt
, de tous les Billets de Banque , tant gra
vez qu'imprimez qui ont été faits en vertu des
differens Arrêts fur ce rendus , Sa Majefté a
reconnu , que la totalité defdits Billets de
toute efpece a monté à la fomme de Deux Milliards
fix cens quatre vingt feize Millions quatre
cens mille livres, fur laquelle quantité defdits
Billets il en a été converti de ceux de
Mille & de Dix Mille livres pour la fomme de
Deux cens Millions , en Billets de Cent , de
Cinquante & de Dix livres , par forme de Divifion
feulement , & fans aucune augmentation de la
fomme totale , Et ce en execution des Arrêts des
26 Juin , 2 & 19 Septembre derniers ; Que de
ladite fomme totale defdits Billers de Banque,
il en été brûlé en l'Hôtel de Ville de Paris
pour Sept cens fept Millions trois cens vingt fept
mille quatre cens foixante livres , fuivant les
Procès verbaux qui en ont été dreffez ,
par les fieurs Commiffaires à ce deputez par
Sa Majefté , que par les fieurs Prevôt des Marchands
& Echevins de ladite Ville , en datte
des 28 Juin , premier , 9 ; 16 , 23 & 30 Juiller,
6 , 20 & 29 Aouft derniers ; Outre laquelle
quantité de Billets brûlez , il a été porté au
Trefor Royal pour acquifition de Rentes Perpetuelles
ou Viageres plus de Cinq cens treate
Millions à la Caiffe de la Banque plus de
Deux cens Millions pour avoir des Comptes
ouverts à ladite Banque , fuivant l'Arrêt du
31 Juillet dernier , Et pour environ Quatre
tant
vingt
D'OCTOBRE.
73
vingt dix Millions dans les differentes Caiffes
de la Compagnie des Indes , de la Banque , &
des Hôtels des Monnoyes , le
, par payement
qui en a été fait en Efpeces , tous lefdits Billets
feront inceflamment brûlez en l'Hôtel de
Ville de Paris , à meſure que lesdits fieurs Commiffaires
du Roy en auront achevé les Proces
verbaux ; Enforte qu'il ne reste plus de Billets
de Banque dans le Commerce que pour la
fomme de Un Milliard cent foixante- neuf Millions
foixante douze mille cinq cens quarante
livres Pour retirer laquelle fomme , outre ce
qui r ra à confommer en Billets du fonds
des Vingt cinq Millions de Rentes créées par
Edit du mois de Juin dernier , il en fera encore
éteint quatre cens Millions pour le Capital
des Huit Millions de Rentes au Denier
Cinquante , créées par Edit du mois d'Aouft
dernier fur les Impofitions des Provinces du
Royaume , Et Cent Millions pour le Capital
des Quatre Millions de Rentes Viageres au Denier
Vingt- Cinq , créées par Edit du mois
d'Aouft dernier Et ce qui n'aura point été
porté aufdits débouchemens pourra , ou être
employé en acquifition de Dixiémes d'Actions ,
fuivant l'Article VIII . de l'Arrêt du 15 Septembre
dernier , montant à Quatre cens Mil→
Hons , ou être porté aux Hôtels des Monnoye
fuivant l'Edit du même mois de Septembre
ou demeurer Actions Rentieres avec la Garantie
du Roy. Et comme par toutes ces difpofitions ,
Sa Majesté a donné aux Billets de Banque des .
débouchemens convenables aux differentes vûëde
fes Sujets , au delà même de ce qui eft neceffaire
pour éteindre lefdits Billets ; Que d'ail
leurs ceux de Cent , de Cinquante , & de Dix
livres , qui ont encore cours dans le Commerce
fuivant les Arrêts precedens , y font
G
>
72 LE MERCURE
y font actuellement , ou de celles qui y feront
portées.
Extrait des Regiftres du Conseil d'Etat.
LE-Roy prisute du prefent Ar-
E Roy s'étant fait reprefenter en fon Confeil
>
rêt , de tous les Billets de Banque , tant gra
vez qu'imprimez qui ont été faits en vertu des
differens Arrêts fur ce rendus , Sa Majefté a
reconnu que la totalité defdits Billets de
toute efpece a monté à la fomme de Deux Milliards
fix cens quatre vingt feize Millions qua
tre cens mille livres, fur laquelle quantité defdits
Billets , il en a été converti de ceux de
Mille & de Dix Mille livres pour la fomme de
Deux cens Millions , en Billets de Cent , de
Cinquante & de Dix livres , par forme de Divifion
feulement , & fans aucune augmentation de la
fomme totale , Et ce en execution des Arrêts des
26 Juin , 2 & 19 Septembre derniers ; Que de
ladite fomme totale defdits Billets de Banque,
il en a été brûlé en l'Hôtel de Ville de Paris
pour Sept cens fept Millions trois cens vingt fept
mille quatre cens foixante livres , fuivant les
Procès verbaux qui en ont été dreffez ,
3.
tant
par les fieurs. Commiffaires à ce deputez par
Sa Majefté , que par les fieurs Prevôt des Marchands
& Echevins de ladite Ville en datte
des 28 Juin , premier , 9 ; 16 , 23 & 30 Juiller,.
6,20 & 29 Aouft derniers Outre laquelle
quantité de Billets brûlez , il a été porté au
Trefor Royal pour acquifition de Rentes Perpetuelles
ou Viageres plus de Cinq cens treate
Millions ; à la Caiffe de la Banque plus de
Deux cens Millions pour avoir des Comptes
ouverts à ladite Banque , fuiyant l'Arrêt du
31 Juillet dernier 2 Et pour environ Quatrevingt
D'OCTOBRE.
73
vingt dix Millions dans les differentes Caifles
de la Compagnie des Indes , de la Banque , &
des Hôtels des Monnoyes , par le payement
qui en a été fait en Efpeces , tous lefdits Billets
feront inceflamment brûlez en l'Hôtel de
Ville de Paris , à meſure que lesdits fieurs Commiffaires
du Roy en auront achevé les Procès
verbaux ; Enforte qu'il ne refte plus de Billers
de Banque dans le Commerce que pour la
fomme de Un Milliard cent foixante- neuf Millions
foixante douze mille cinq cens quarante
livres Pour retirer laquelle fomme , outre ce
qui r ra à confommer en Billets du fonds
des Vingt cinq Millions de Rentes créées par
Edit du mois de Juin dernier , il en fera encore
éteint quatre cens Millions pour le Capi
tal des Huit Millions de Rentes au Denier
Cinquante , créées par Edit du mois d'Aouft
dernier fur les Impofitions des Provinces du
Royaume , Et Cent Millions pour le Capital
des Quatre Millions de Rentes Viageres au Denier
Vingt- Cinq , créées par Edit du mois
d'Aouft dernier , Et ce qui n'aura point été
porté aufdits débouchemens pourra , ou être
employé en acquifition de Dixiémes d'Actions ,
fuivant l'Article VIII. de l'Arrêt du 15 Septembre
dernier , montant à Quatre cens Mil-
Hons , ou être porté aux Hôtels des Monnoye
fuivant l'Edit du même mois de Septembre
ou demeurer Actions Rentieres avec la Garantie
du Roy. Et comme par toutes ces difpofitions ,
Sa Majesté a donné aux Billets de Banque des.
débouchemens convenables aux differentes vûëde
fes Sujets , au delà même de ce qui eft neceffaire
pour éteindre lefdits Billets Que d'ail
leurs ceux de Cent , de Cinquante , & de Dix
livres qui ont encore cours dans le Com-'
meice fuivant les Arrêts precedens ⚫ y font
G
3
74
LE MERCURE
peu de
neanmoins tombez dans un tel difcredit qu'ils
n'y ont plus de valeur comme Efpeces , & qu'on
ne les y confidere que par rapport aux emplois
qu'on en peut faire ; Enforte que le
Payemens qui fe fait encore avec lefdits Billets,
ne fert qu'à empêcher la circulation de l'argent
, & à foutenir le haut prix des Denrées
& Marchandiſes , & à introduire ou à perpe
tuer une infinité d'abus dans le Commerce.
qui ne peuvent ceffer que par le Rétabliffement
des Payemens en Efpeces ; Sa Majeſté a
jugé à propos de l'ordonner dans un terme
convenable , en fe chargeant Elle mate ,
commencer du premier Janvier de la prefente
année , d'acquitter de cette maniere les arrerages
de toutes les Rentes qu'Elle doit , enfem
ble des Penfions , Gages , Appointemens , charges
& dépenfes de quelque nature qu'elles
foient ; A quoy étant neceffaire de pourvoir ,
Quy le Rapport. SA MAJESTE ESTANT EN SON
CONSEIL , de l'Avis de Monfieur le Duc d'Orleans
Regent a Ordonné & ordonne ce qui
fuit ,
>
ART. I. Les Billets de Banque ne pourront
à compter du premier Novembre prochain, être
donnez ni reçus en Payement pour quelque
caufe & pretexte que ce foit ,, que de gré à
gré à l'effet de quoy Sa Majesté a derogé & déroge
aux Articles III, & IV . de l'Arrêt de fon
Confeil du 15 Septembre dernier.
II. Veut neanmoins Sa Majesté qu'à compter
du jour de la publication du prefent Arrêt
il ne foit reçu aucun Billet de Banque dans les
Bureaux de fes Recettes & Fermes , même
pour les Droits & Impofitions duës anterieurement
à la publication dudit Arrêt , Et que lef
dits Droits & Impofitions de quelque forte &
maniere que ce puiffe être , foient acquittezen
D'OCTOBRE.
75
entier en Efpeces , à l'exception neanmoins des
fommes dues tant pour lefdits Droits que
pour lefdites Impofitions ou autrement avant le
premier Janvier dernier , lefquels pourront être
payées jufqu'au premier Decembre prochain en
Billets de Banque de Cent livres , de Cinquante
& de Dix livres.
III. Veut auffi Sa Majefté que les Rentes
Penfions , Appointemens , Gages , & autres Parties
qui restent à payer par Sa Majeſté ſur les
Dépenfes de la prefente année 1720 , foient
acquittées en Efpeces , Et que les fommes par
Elle dues pour les années anterieures à la prefente
, foient feulement payées en Billets de
Banque de Cent , de Cinquante & de Dix li
vres,
IV. Les Dividendes dûs par la Compagnie
des Indes jufqu'au premier Janvier prochain ,
feront payez en Billets de Banque de Cent ,
de Cinquante & de Dix livres ; Et à l'égard des
arrerages tant des Actions Rentieres , que des
Rentes Viageres dûës par ladite Compagnie ,
Veut Sa Majefté qu'ils foient payez en Efpeces,
commencer du premier Juillet dernier.
•
V. Permet Sa Majesté aux Forteurs des Bil
lets de Banque de Cent , de Cinquante & de
Dix livres , de les placer jufqu'au dernier Novembre
prochain inclufivement dans les em
ploys par Elle indiquez , paffé lequel temps ce.
qui reftera defdits Billets ne pourra plus être
converti qu'en Actions Rentieres , ou en Dixiemes
d'Actions mentionnées en l'Article VIII.
de l'Arreft du Confeil du 15 Septembre dernier
; Et fera le prefent Arrêt lû , publié & affiché
par tout ou befoin fera , & feront pour
l'execution d'iceluy toutes Lettres neceffaires
expediées. FAIT au Confeil d'Etat du Roy , Sa
Gij
ne LE MERCURE
Majefte y étant tenu à Pais le dixième jour
d'Octobre mil fept cent vingt.
Signé , PHELYPBAUX .
Total des Billets de Banque.
Billets gravez
Billets imprimez .
Billets fabriquez
Billets brûlez •
• •
•
• · •
769 , 000 , 000 liv,
1 , 000 , 000 , 000 liv,
2,696 , 400 , oco liv.
707, 327,460 liv.
ARREST du Confeil , du 11 Octobre
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne qu'à commencer
au 21 du prefent mois d'Octobre les
Payeurs des Rentes dudit Hôtel de Ville payeront
en deniers comptans , & fans aucun Billet
de Banque , les arrerages qui font dûs pour la
prefente année 1720 , tant des Rentes perpetuelles
, que des Rentes viageres & des Tontines
; à l'effet dequoy les fonds neceffaires feront
remis aufdits Payeurs de femaine en femaine
par l'Adjudicataire General de fes Fermes
Unies .
ARREST du Confeil , du 11 Octobre
1720 , par lequel Sa Majefté fait tres expreffes
inhibitions & défenfes , fous peine de la vie ,
à tous Negocians , Marchands , Colporteurs ,
Porte balles & Revendeufes à la Toilette ,
d'introduire dans le Royaume , de faire commerce
, expofer en vente , colporter , debiter ,
& à toutes perfonnes de quelque état & qualité
qu'elles foient , d'acheter en gros ou en
détail , tant par eux que par perfonnes interpofées
, & de recevoir dans leurs maifons aucunes
Etoffes ou Toiles des Indes , de la Chine
& du Levant , comme auffi s Etoffes fabriquées
dans la Ville de Marseille , foit que efdites
Etoffes foient de Soye pure ou mêlées
D'OCTOBRE. 77
dor & d'argent , d'Ecorce d'arbres , Laine ,
Fil ou Cotton , peintes en Furies ou à Fleurs
Toiles de Cotton peintes , imprimées ou blanches
, vieilles ou neuves . en pieces ou en cou
pons , Couvertures , Bonnets ou autres ouvra
ges , meubles , habits ou autres vêtemens compofez
defdites Etoffes & Toiles. Défend pareillement
Sa Majesté fous la même peine , à
tous Fripiers , Tailleurs , Couturieres , Tapiffiers
, Brodeurs , & autres Ouvriers , d'employer
chez eux ou dans les maifons particulieres
, ni d'avoir dans leurs Magazins , Boutiques
ou Chambres aucunes defdites Etoffes &
Toiles , ni aucuns habits , vêtemens ou meubles
faits d'icelles , neufs ou vieux : Ordonne,
au furplus Sa Majefté que les Arrefts & Reglemens
concernant lefdites Toiles & Eroffes , &
notamment celui du 27 Septembre 1719 , feront
executez felon leur forme & teneur.
ARREST du Confeil , du 11 Octobre ,
1720 , par lequel Sa Majefté ordonne , que du
jour de la publication du prefent Arreft , il ne
fera plus reçû aucuns Billets de Banque dans
aucuns Bureaux de Recettes , foit generales ,
foit particulieres , tant des Pays d'Etats , que
du Clergé general & des Diocefes particuliers.
Enjoint Sa Majefté aux Agents Generaux du
Clergé , & aux Sieurs Intendans & Commiffaires
départis dans les Provinces & Generalitez
du Royaume , de tenir foigneufement la main .
à l'exécution dn prefent Arreſt.
.
ARREST du 12 Octobre 1720, concernant le
remboursement des Offices & Droits fupprimez ,
& des Créanciers des Communautez .
ARREST du Confeil du 12 Octobre 1720 ,
par lequel Sa Majesté permet aux Directeurs
de la Compagnie des Indes de faire figner.
G iij
58 LE MERCURE
pour leur Caiffier , & vifer pour eux les Actions
Rentieres de ladite Compagnie de dix mille livres
& de mille livres , en execution defdits
Arrests des 15 Aouft dernier & du prefent
mois d'Octobre par les Sieurs Guyot , Cauvin ,
Motté , Maricourt , Poftel , Lauriau , Sigonneau ,
Guyart , Mabire , Duport , Defroches , Couterot
, Pinchart & Doré ; Voulant Sa Majesté que
lefdits Commis puiffent figner & vifer concurtemment
& indiſtinctement lefdites Actions .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat. :
E
Confeil du 13 Juillet dernier des Comptes
courants , & Virements de parties pour la feureté
du Commerce , Et Sa Majeſté étant informée
que la facilité indéfinie qui a été accordée
par Arreft du 15 Septembre dernier , de convertir
les Actions en nouvelles Ecritures , donne
lieu à un grand nombre de perfonnes d'augmenter
à un tel point le montant defdites nouvelles
Ecritures , qu'il eft à craindre que leur quantité
exceffive n'en diminuë le Credit dans le public ;
à quoy étant neceffaire de pourvoir ; Oüy le.
Rapport : SA MAJESTE ESTANT EN
SON CONSEIL , & de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a ordonné & ordonne :
Article I. Que les comptes en Banque ne
pourront exceder la fomme de cent millions de
livres en nouvelles Ecritures , lefquelles pourront
eftre converties à l'ordinaire en Actions
de la Compagnie des Indes , fans que lesdites
Actions puiffent eftre converties en Ecritures
que jufqu'à concurrence des fommes qui manqueront
pour parfaire celle de cent millions de liv.
II. Veut Sa Majefté conformément à l'Article
VI. de l'Arreſt de fon Confeil du 13 Juillet
dernier. Que toutes Lettres de Change &
D'OCTOBRE. 79
Billets de Commerce de cinq cens livres & au
deffus enfemble les ventes de marchandifes
en gros dans les Villes où les Livres des Comptes
courants & Virements de parties font établis ',
foient acquittez en Ecritures entre Marchand's
& Negocians , à peine de nullité de payement
& de cinq cens livres d'amende au profit de
la Banque , tant contre le Creancier , que contre
le debiteur. Fait au Confeil d'Etat du Roy,
Sa Majesté y étant , tenu à Paris le vingtdeuxième
jour d'Octobre mil fept cent vingt.
Signé, PHELY PEAUX .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat.
E ROY ayant par Arreft de fon Confeil
Lau Abulf dernier , ordonné que les Produ
30
prietaires des Rentes de l'Hôtel de Ville de Paris
, affignées fur le Clergé , qui en confentiroient
avant le premier du prefent mois d'Octobre
la réduction fur le pied du Denier cinquante ,
ou qui fe prefenteroient pour en recevoir le
remboursement , feroient payez de leurs arrerages
à raifon de deux pour cent , à compter du
premier Janvier 1720 , jufqu'au jour de leur
remboursement , ou de la reduction qui auroit
efté faite defdites Rentes , lequel temps paffé
ils feroient privez defdits arrerages , & de la
faculté qui leur avoit efté accordée par l'Arreſt
du 9 Juillet dernier de conferver leurs Rentes.
Et par les Articles VIII . & IX . dudit Arreft Sa
Majefté ayant pareillement ordonné le rembour
fement des Offices de Payeurs & Contrôlleurs
defdites Rentes , neanmoins ayant eſté informée
que depuis l'expiration du delay accordé par
ledit Arreft aux Proprietaires defdites Rentes ,
plufieurs ont pris la refolution d'en conſentir
la reduction à deux pour cent ; -qu'ainfi il ne
Giiij
80 LE MERCURE
feroit pas juste de les priver de la joiffance des
arrerages qui leur en font dûs depuis le premier
Janvier dernier , & d'être admis à ladite rédu-
Etion , non plus que ceux qui ayant figné les
Quittances de leur remboursement , ont cependant
negligé d'en recevoir les deniers ; Elle
auroit juge à propos de proroger à cet égard
le delay fixé par ledit Arreft , & de pourvoir
en même temps au payement des interefts des
fommes aufquelles fe trouvera monter la liquidation
de la finance des Offices de Payeus &
de Contiôlleurs defdites Rentes ; Ouy le Rapport
SA MAJESTE' ESTANT EN SON
CONSEIL , de l'avis de Monfieur le Duc d'Orleans
Regent ,
Art . I. A prorogé & proroge le delay fixé
par ledit Arreft du Confeil du trente Aouft dernier
en faveur des Proprictaires des Rentes de
l'Hôtel de Ville de Paris , affiguées fur le Cler
gé , jufqu'au premier Novembre prochain , &
en confequence ordonne que ceux defdits Proprietaires
dont les Ordonnances de liquidation
auront été expediées avant ledit jour premier
Novembre, & qui en confentiront la reduction
au Denier cinquante , jouiront des arrerages de
leurs Rentes , à compter du premier Janvier dernier.
Et à l'égard de ceux qui en voudront
recevoir le remboursement , ils feront tenus de
remettre avant ledit jour premier Novembre au
Sieur Dubreuil , les Ordonnances de liquidation
expediées à leur profit , les Titres de proprieté
énoncez en icelles , leurs Quittances portant fubrogation
au profit dudit Dubreuil , enfemble
les Certificats des Confervateurs des hypoteques
fur ce neceffaires ; & faute par eux d'y fatisfaire
dans ledit delay , ordonne Sa Majesté que
leurs
Kentes demeureront reduites fur le pied cy de us,
à compter du premier Janvier mil fept cent vingt.
D' OCTOBRE
II. Les Porteurs des Recepiffez cy devant
délivrez , ou qui le front pendant le prefent
mois par le Sieur Gueux , pour le rembourkement
defdites Rentes , & qui doivent eftre acquittez
par le Sieur Dubreuil , feront tenus de
les rapporter avant le dernier du prefent mois
audic Dubreiiil , finon & à faute de ce fa re dans
Iedit delay, permet S. M. audit Dubreuil , de dépofer
en prefence dudit Gueux, aux rifques , perils &
fortunes des porteurs defdits Recepiffez , ès
mains de le Fevre Notaire , en Billets de Banque
de cent livres , cinquante livres , & de dix
livres , les fommes portées aufdits Recepiffez ;
au moyen de quoy ledit Gueux remettra audit
Dubreuil les Quittances & pieces juftificatives
des rembourfemens mentionnez aufdits Recepiffez
; quoi faifant il en fera valablement déchargé.
III. Les Rentiers dont les Ordonnances auront
été délivrées avant le dernier Decembre prochain ,
feront payez de leurs arrerages à raifon du denier
cinquante , à compter du premier Juillet
1720. Et à l'égard de ceux qui n'auront point reprefenté
leurs Titres avant le dernier Decembre
prochain , ils ne jouiront des arrerages de leurs
Rentes que pour les fix mois dans lesquels leurs
Ordonnances de liquidation feront expediées .
IV. Faute par les Proprietaires des Offices de
Payeurs & Controlleurs defdites Rentes , & des
Gages , Augmentations de Gages & Taxations.
hereditaires y attribuez , qui en ont été payez
en execution des Contrats paffez entre Sa Majefté
& le Clergé , & dont l'emploi eft fait dans les
Comptes qui fe rendent en la Chambre des Comptes
par lefdits Payeurs , d'avoir reprefenté
leurs Titres dans les delais qui leur ont été ac
cordez pour parvenir à leur remboursement ,
Veut Sa Majesté qu'ils en foient privez , &
qu'ils ne jouiffent des interefts de leur finance:
82 LE MERCURE
de deux pour cent , qu'à compter du 'jour que
les Ordonnances de leur liquidation feront expediées
; en cas neanmoins , & non autrement ,
qu'ils ayent fatisfait à ce qui leur a été ordonné
par ledit Arreſt du trente Aouft dernier .
V. Les Droits des Creanciers des Proprietaires
defdites Rentes & defdits Offices de Payeurs
& Controlleurs , Gages , Augmentations de Gages
& Taxations , fubfifteront fur les principaux &
arrerages defdites Rentes , & fur la finance &
les interefts defdits Offices , fans préjudice des
privileges exclufifs de Sa Majeſté & de ceux du
Clergé .
VI. Enjoint Sa Majefté aufdits Payeurs d'accelerer
aux Rentiers l'expedition des Immatricules
qu'ils font tenus de leur délivrer , conformé
.ment audit Arreft du trente Aouft dernier , pour
lefquelles leur fera payé vingt fols par chacune
mutation de proprieté , leur faifant defenſe d'exiger
plus grand droit , à peine de concuffion.
vil. Les Titres de proprieté qui auront été
délivrez audit Dubreuil à caufe des Remboursemens
faits , & qui le feront de fes deniers , feront
par lui remis & depofez aux Archives du Clergé,
& retiendra feulement ledit Dubreuil les Ordonnances
de liquidation & Quittances de Rembourfement
, en vertu defquels arrerages des Rentes
aufquelles il aura été fubrogé , & les interefts des
fommes remboursées pour lefdits Offices , lui feront
payés fans difficulté .
VIII. Il fera remis par lefdits Rentiers & Officiers
aux Agens Generaux du Clergé , des Expeditions
defdites Quittances de Remboursement &
Actes de reduction , pour fervir aux Commiffaires
nommez par Sa Majefté , pour la liquidation
defdites Rentes & Offices , à arrefter les Etats des
parties de Rentes qui fubfifteront , dans lesquels
feront compriſes celles aufquelles ledit Dubreuil
D'OCTOBRE. 83
a été & fera fubrogé par les Quittances de Rem
bourfement d'icelles , enfemble les interefts qui
proviendront de la finance des Offices , Gages ,
Augmentations de Gages & Taxations .
IX. Ceux qui acquerront une ou plufieurs
partics defdites Rentes dudit Dubreuil , remettront
pareillement aux Sieurs Agens Generaux
du Clergé une expedition des Tranſports qui
leur en feront faits par ledit Dubreuil , pour
eftre lesdites Rentes employées fous leurs noms
dans lefdits Etats en un feul article , confor
mément aufdits Tranſports.
X. Remettra auffi le Sieur Geoffroy , ' nommé
par Sa Majesté pour faire la Recette & le payement
des Rentes qui fubfifteront , és mains
defdits Sieurs Agens Generaux , à la fin de chacune
année , un Etat de luy certifié des Mutations
qui feront furvenues fur lesdites Rentes .
Et fera le prefent Arreft lû , publié & executé,
fans qu'il foit befoin d'autre fignification que
la publication d'iceluy , nonobftant oppofitions
ou autres empêchemens quelconques , dont fi
aucuns interviennent , Sa Majesté s'eft refervé à
foy & à fon Confeil la connoiffance , & icelle
interdit , à toutes fes Cours & autres Juges.
Enjoint Sa Majefté aux Agens Generaux du
Clergé d'y tenir la main. Fait au Confeil d'Etat
du Roy , Sa Majesté y étant , tenu à Paris le
quinzième jour d'Octobre mil fept cent vingt
Signé , PHELY PEAUX.
2439
84
LE MERCURE
Copie d'une Lettre écrite à Monfieur.
l'Abbé de Camps , par Monfieur
M arquis de Gravelon , le 16
Septembre 1720.
' Ay reçu , Monfieur , la Lettre que
vous m'avez fait l'honneur de m'écrite
le 6 de ce mois , & dans laquelle
vous me faites la grace de donner
votre approbation au jugement que j'avois
fait de la petite ftatuë de bronze dont je
vous ay envoyé le deffein. Vous m'ordondez
auffi de vous communiquer les motifs
qui m'ont determiné à croire qu'elle reprefente
la fille de l'Empereur Titus , appellée
par les Hiftoriens Julie , Julia Titi ,
& qu'elle étoit un monument de fa Deïfication
& de l'amour qu'avoit eu pour elle
l'Empereur Domitien fon oncle.
J'obéis , & je commence par un paffage
de Suetone , où il eft parlé de cette Princeffe
dans la vie de l'Empereur Domitiem ,
Liv. 8.
Fratris filiam adhuc virginem , oblatam
in matrimonium fibi , cum devinctus Domitia
nuptiis pertinaciffimè recufaffet non
multo poft , alii collocatam ultrò corrupit *
quidem vivo etiam tùm Tito , mox patre
D'OCTOBRE. 85
at viro orbatam ardentiffimè palamque dilexis
, ut etiam caufa mortis extiterit , coalte
conceptum à fe abigere.
,
Ceux qui ont vu des Medailles de cette
Princeffe , conviendront fans doute comme
yous, que le vifage & la coëffure de la petite
ftatue reffemblent aux portraits que nous
en avons fur celles qui ont été battuës
pour elle ; vous m'en avez donné , Monfeur
, encore plus de certitude , en me
communiquant la belle Empreinte du buſte
de cette Princeffe , gravé fur un faphir
qui eft dans le Trefor de l'Abbaye de Saint
Denis ; comme il eft mieux confervé que
les Medailles , étant beaucoup plus dur .
on y voit plus au naturel & plus diftin-
&tement les traits du vifage de cette Princoffe.
, avec la coëffure , lefquel j'ay ſouvent
comparez avec la ftatuë dont il eſt
queftion , & toujours trouvé une tresgrande
reffemblance & une conformité
de coëffure.
ne fera
La reffemblance étant donc établie , il
bien difficile de prouver par
pas
l'autorité d'un Poëte contemporain , que
l'Empereur Domitien , qui avoit fait éri
ger plufieurs Statues en faveur de Julie fa
niéce , en avoit fait fabriquer une qui a
fervi de modele à notre petite ftatuë. Je
ne vous affurerai pas fi ce fut pendant fa
vie , puifque les Hiftoriens gardent un
84 LE MERCURE
1
Copie d'une Lettre écrite à Monfieur
l'Abbé de Camps , par Monfieur
Marquis de Gravefon , le 16
Septembre 1720.
'Ay reçu , Monfieur , la Lettre que
vous m'avez fait l'honneur de m'écrite
le 6 de ce mois, & dans laquelle
vous me faites la grace de donner
votre approbation au jugement que j'avois
fait de la petite ftatuë de bronze dont je
vous ay envoyé le deffein. Vous m'ordondez
auffi de vous communiquer les motifs
qui m'ont determiné à croire qu'elle reprefente
la fille de l'Empereur Titus , appellée
par les Hiftoriens Julie , Julia Titi ,
& qu'elle étoit un monument de fa Deïfication
& de l'amour qu'avoit eu pour elle
l'Empereur Domitien fon oncle.
J'obéis , & je commence par un paffage
de Suetone , où il eft parlé de cette Princeffe
dans la vie de l'Empereur Domitier ,
Liv. 8.
Fratris filiam adhuc virginem , oblatam
in matrimonium fibi , cum devinitus Domitia
nuptiis pertinaciffimè recuſaſſet non
multo poft , alii collocatam ultrò corrupit ,
quidem vivo etiam tùm Tito , mox patre
D'OCTOBRE. 85
at viro orbatam ardentiffimè palamque dilexis
, ut etiam caufa mortis extiterit , coalte
conceptum à fe abigere.
Ceux qui ont vu des Medailles de cette
Princeffe , conviendront fans doute comme
yous, que le vifage & la coëffure de la petite
ftatue reffemblent aux portraits que nous
en avons fur celles qui ont été battuës
pour elle ; vous m'en avez donné , Monfeur
, encore plus de certitude , en me
communiquant la belle Empreinte du buſte
de cette Princeffe , gravé fur un faphir
qui eft dans le Trefor de l'Abbaye de Saint
Denis ; comme il eft mieux confervé que
les Medailles , étant beaucoup plus dur .
on y voit plus au naturel & plus diftin-
&tement les traits du vifage de cette Prin
coffe. , avec la coëffure , lefquel j'ay ſouvent
comparez avec la ftatuë dont il eſt
queftion , & toujours trouvé une tresgrande
reffemblance & une conformité
de coëffure.
ne fera
La reffemblance érant donc établie , il
bien difficile de prouver par
pas
l'autorité d'un Poëte contemporain , que
l'Empereur Domitien , qui avoit fait éri
ger plufieurs Statues en faveur de Julie fa
niéce , en avoit fait fabriquer une qui a
fervi de modele à notre petite ftatuë. Je
ne vous affurerai pas fi ce fut pendant fa
vie , puifque les Hiftoriens gardent un
86
LE MERCURE
grand filence fur le tems de la mort de
cette Princeffe ; mais il eft, plus croyable
que ç'a été aprés fa mort , non feulement
à caufe que la plus grande partie des Medailles
que nous avons d'elle , a été battuë
dans ce tems-là , & marque fon apotheofe,
mais auffi parce que l'attitude repreſente
Julie deifiée fous la forme de Clotho , la
premiere des Parques dont le Tribunal
étoit dans les Enfers avec Lachefis & Atropos
fes foeurs. Si l'on doutoit que Domitien
eut fait ériger des Statues à Julie fa
niéce , on n'a qu'à jetter les yeux fur la
treiziéme Epigramme du fixiéme livre de
Martial. Ce Poëte y fait mention d'une
Statue à l'honneur de cette Princeffe fous
la forme de Venus :
Quis te Phidiacoformatam , Julia , calo ,
Vel quis Palladia non putet artis opus ?
Cette Epigramme fuffit pour prouver
ce fait , mais nous avons dans la quatrième
Epigramme du même Livre , une preuve.
bien precife de la deïfication de cette
Princeffe , quoique les Hiſtoriens nous
l'ayent cachée , dans laquelle ce Poëte
parle d'elle fous la forme de la premiere
des Parques , & dans l'attitude de nôtre
petite ftatue , qui eft celle de Clotho , que
Paufanias dit être la même que la Venus
celefte des Syriens , qu'on nomma AftarD'OCTOBRE.
87
tis , & qui prefidoit à la naiffance des
hommes , defquels elle filoit la trame heureufe
ou malheureuſe.
- Nafcere Dardanio promiffum nomen Iulo ,
Vera Deum foboles , naſcere magne puer ,
Cui pater aternas poft facula tradat habenas ,
Quique regas orbem cum feniore fenex ,
Ipfa tibi niveo trahet aurea pollice fila ,
Et totam Phrixi Julia nebit ovem .
Il y a bien de l'apparence , comme j'ay
dit , que Julie étoit morte lorfque le fils de
Domitien vint au monde. On voit dans
la vie de cet Empereur que fon frere Titus
l'avoit comme fiancé avec Julie fa fille ,
mais que ce Prince refufa de l'époufer
lorfqu'il devint amoureux de Domitia, qu'il
époufa , & qu'il repudia bien-tôt à caufe du
déreglement de fa conduite . Ce fut pendant
ce divorce, qui ne dura pas long- tems , qu'il
ralluma les feux qu'il avoir reffentis pour
Julie avant fon mariage , & qui coutérent
la vie à cette Princeffe , comme le remarque
Suetone ; l'amour que ce Prince avoit
eu pour elle la fit honorer , après fa mort ,
de l'Apotheofe , & fans doute ériger les
Statues , dont Martial a parlé , la petite.
dont il eft question peut être regardée de
deux manieres , ou comme le modele d'une
plus grande , ou comme une de ces Statues
de Divinité domeftique ou Penate , que
88 LE MERCURE
l'on gardoit & que l'on adoroit dans l'interieur
des mailons ; mais dans quelque
fens qu'on la regarde , on ne doutera point
que ce ne foit la ftatuë de Julie. Les Parques
ont été des Divinitez bien redoutables
à ceux qui les croyoient les Souve
raines de la deflinée des hommes , & de
la durée du cours de leur vie . C'eſt pour
cette raison que l'amour que Domitien
avoit eu pour fa niéce , lui fuggera après
fa mort de la faire reprefenter fous la figure
d'une Divinité , que l'interêt de tous
les hommes les obligeroit d'adorer , & qui
étoit adorée en tout lieu fous le nom d'Aftartis
ou Venus Celefte . Il feroit inutile
d'en dire davantage. Il y a pourtant une
chofe à oblerver dans Martial , qui eſt une
preuve que Julie étoit morte , lorfqu'il a
compofé la quatriéme Epigramme fur la
naiffance du fils de Domitien ; & même
toutes celles qui font dans le Recueil que
nous avons de lui , qui eft , qu'il n'y en a
pas une qui foit adreffée à Julie , à quoi
je fuis perfuadé que ce Poëte n'auroit pas.
manqué pour flatter l'amour d'un Prince ,
auquel il étoit de fon interêt de bien faire
fa Cour.
Je finis , Monfieur , en vous priant de
jetter encore une fois les yeux fur le deffein
que vous avez de cette petite figure , &
vous penfcrez comme moy que la meilleure
preuve
D'OCTOBRE. 89.
›
preuve de toutes eft fa reffemblance avec
l'effigie qui eft fur les Medailles de cette
Princeffe , & particulierement comparée
avec le portrait qui eft gravé fur le faphir.
de S. Denis ; fi on y joint l'autorité de
Martial on en compoſera une preuve
complette pour perfuader que cette petite
Statuë de bronze trouvée dans le Terroir
d'Arles fous les racines d'un arbre qu'un
Payfan venoit d'arracher , eft un monument
de la deification de Julie , & de l'amour
que Domitien avoit eu pour elle :
Je fuis , &c.
LA SAGESSE.
D
ODE..
Efcends de la celefte voure ,
Minerve , éclaire notre erreur
Enfeigne à l'homme quelle route
Conduit au fouverain bonheur.
Quelque terme qu'il fe propofe,
Unfunefte penchant s'oppofe
Au choix qu'il avoit embraſſés
Aveugle , il s'égare lui- même z
Il cherche le bonheur ſuprême
@ les Dieux ne Lont pas place
90 LE MERCURE
D'où revient ce Marchand avide
Qui fend le vafte fein des eaux :
Il couvre la plaine liquide
Des richeffes de fes vaiffeaux.
Chargé du précieux mélange
Des trefors de l'Inde & du Gange
Il découvre déja le Port-
Eft- il heureux ? La foudre gronde :
Ses vaiffeaux s'abîment fous l'onde :
Il échappe à peine à la mort.
Vous ,qui rampiez dans la pouffiere ,
Quel Dieu vous tire du néant ?
Plutus vous voit dans fa carriere
Avancer à pas de Géant.
Vous moiffonnez dans les alarmes $
Chaque jour le fang les larmes
Enflent vos criminels tresors.
Leur éclat n'a rien qui m'étonnes.
Et le crime qui vous les donne ».
Vous en punit par les remords..
20
Fortune , reprens tes largeſſes
Ceffe de nous en amufer.
Pauvres au milieu des richeſſes ,
Nous ne fçavons pas en ufer.
Qui les cherche , aime la contraintej
Les foucis , l'importune crainte
D'OCTOBRE.
91
T viennent méler leur poison.
L'Homme devoit- il y prétendre ,
Lui qui n'a jamais fçû les rendre
Tributaires de fa raiſon ?
Mais qui font ces Mortels qu'adore
L'Univers tremblant à leur voix.
Le peuple à genoux les implore ,
Et leurs volontez font nos loix.
Thémis leur remet fa balance ,
Jupiter la foudre qu'il lance ,
Mars feme pour eux la terreur ;
Ces Rois que notre hommage encense ,
Portraits des Dieux par leur puiſſance ,
Le feroient- ils par leur bonheur ?
Venge César, pourſuis Antoine,
Triomphe , Otarie , de Sextus ,
Rougis les champs de Macédoine
Du fang du malheureux Brutus ;
Finis par où Neron commence ,
Ofte à Rome par ta clemence
Le fouvenir de tes forfaits.
Flate toy d'en être l'Idole ;
Cinna t'attend au Capitale
Pour te punir de tes bienfaits.
Perçons l'éclat dont les Monarques·
Se font un rempart à nos yeux ,
Oftons -leur ces auguftes marques
Hij
.9.2 LE MERCURE
Qui les rendent égaux aux Dieux.
Leur coeur est une énigme étrange
F'y découvre un affreux mélange ,
Et de crimes de vertus ;
Et Porus qui vient de fe rendre ..
Pourroit méconnoître Alexandre.
Dans le meurtrier de Clitus .
Quel est donc l'heureux ? c'eft ce Sage,
Maitre des plus legers tranfports ,
Pour qui le Pactole & le Tage
Roulent d'inutiles trésors ;
Qui voit comme un amas de boue ,
Ce cercle d'honneur où se joue
L'ambition des vains Mortels..
Digne enfin de l'encens des hommes ,
Si dans l'ingrat fiecle où nous sommes
La vertu trouvoit des Autels.
Qu'au trône fon deftin l'attende ;
C'eft un Monarque généreux ,
Qu'il y monte , qu'il en deſcende ,
Toujours égal il est heureux.
C'est lui que Rome Secourue
Voit retourner à la charruë ,
Après de glorieux combats.
Plus charmé des Champs qu'il façonne ,
Que de ceux où ſon bras: moiſſonne ·
Des lauriers qu'il n'envioit pas..
D'OCTOBRE... 25
Al'innocence , à la droiture
Il confacre fes premiers ans ;
Il ne détruit pas la Nature ,
Il en regle les mouvemens.
L'interêt , l'Amour , la Vengeance
Sont des monftres qu'à leur naiſſance
On lui vit d'abord étouffer.
S'il fent les foibleffes humaines ,
Nas vains defirs , nos craintes vaines
Il les fent pour en triompher.
LA MORT
D'ALCESTE
チェ
POEME .
E chante les efforts d'un Amour magnanime™,
Alcefte , de l'Hymen & Prêtreſſe , & Victime ;
One Epouse arrachée aux liens les plus doux ,
Et qui fauve en mourant les jours de fon Epoux-
Admete à l'Univers , parfa valeur rapide ,
Annonçoit un Héros dans un Ami d'Alcide :
La victoire fanglante avoit fuivi fes pas.
Le paſſage est trop prompt, de la gioire au trepus
94 LE MERCURE
Frappé d'un coup mortel dans un combatfuneffe ,
Admete doit mourir , & mourir loin d'Alcoftes
D'Alcefte dont fa gloire alarmoit trop l'amour
Et dont les voeux tremblans imploroient fon rétour,
Elle apprend fon deftin , le peril la conſterne ;
Aux Autels d'Apollon Alcefte fe profterne ;
Elle forme des voeux , & les croit fuperflus :
Admete les exige , & peut-être n'est plus.
Grand Dieu , fi la pitié trouve accès dans tom
Temple ,
Tourne-la fur un Roi qui t'en donna l'exemple ;
Tu femblois dire au Ciel un éternel adieu ,
Et les bienfaits d'un Roy protegerent un Diew;
Vois fon Epoufe en pleurs implorer tes oracles ;
Aux malheurs des Héros le Ciel doit des miracles
Reine , pour votre Epoux ne versez plus de pleurs 3
Les bontez d'Apollon balancent vos malheurs.
Du parti des Héros l'Enfer même fe ranget,
Et l'avare Acheron vous permet une échange.
Ce jour de votre Epoux doit éclaircir le forts.
Qui périra pour lui , le ravit à la mort.
Alcefte fe troublois , l'Oracle la raffure.
Moins le Ciel a choifi , plus la victime eftfåre;
Et puisque le trépas peut encor s'échanger,
L'Epoufe eftfans alarme , & l'Epoux fans danger
Enfin , graces , dit- elle , à la bonté celeste,
Admete infortuné connoîtra toute Alceste.
Des jours qu'il me devra , grands Dieux , foyer
Lappuy
D'OCTOBRE. 95
Il vit digne de moy , je meurs digne de lui .
Déja pour les Autels la Victime s'apprête ,
De myrthes , de lauriers elle pare sa tête.
Dans le Temple des Dieux on voit fumer l'encens
Ony voit expirer les taureaux gemiſfans .
Dans les Eaux du Pénée elle fe purifie:
On ignore à quels Dieux Alcefte facrifie :
Et le peuple abufé , regarde avec transport
L'apprêt d'un facrifice en l'apprêt de fa mort
Defabufé bien-tôt , il tremble pour la Reine.
Vers le lit nuptial ſa tendreſſe l'entraîne:
Lit , où pour moy l'Hymen allumafonflambeau
Lit , quepour moi l'Amour va changer en tombeau
Ne crains point qu'à ta¸vûe une Epouſe fremiſſe i
Monfang t'arrofera , fans qu'Alceste en gémiffe.
Ses mains à ce difcours s'arment pour fon trépass
Mais fes enfans en pleurs lui retiennent le brasu
Ces enfans dignes fruits de l'amour de leur Pere ,
Par des cris redoublez redemandent leur Mere.
Ils n'ontpour la flechir que des gemiſſemens s
Ils retardent fa mort par leurs embraſſemens.
Enfans , Amis , Sujets , elle a tout à combattres
La nature l'étonne , & ne fauroit l'abbatres
Et quand à la troubler tout femble_concourir ,
Chaque inftant la fait voir plus digne de mouries ,
Quels foupirs, mes Enfans , me faites- vous en
tendre ?
Alcestefans vos pleurs n'est déja que trop tendre
96.
MERCURE LE
Je vous conſerve un Pere ; & le Ciel m'eft témoin
Que mon amour four vous ne peut aller plus loin.
Je pleure fur vous feuls ; pleurez moi fans me
plaindre ;
Quife livre à la mort , ne marque pas la craindre.
Quand dans les champs de Mars vous repandrez
l'effroy ,
Vous la verrez , mon fils , des yeux dont je la voy.
Confolez de ma perte un Pere qui vous aime :
Vivez pour lui , pour vous , pour l'Etat , pour moimême.
Ceffez par vos douleurs d'irriter mes ennuis :
Ne voyezpoint ma mort ; n'envoyez que lesfruits..
Confiderez Admete animé par la gloire ,
Formant dans les combats vos mains à la victoire
Puniſſant à vos yeux par de ginèreux coups »
L'ennemi qui me force à sauver un Epoux.
Et vous , qui fremiſſez du fort qui nous fepare
Vous , pour qui la pitié de mon ame s'empare ,
Ma fille , à quels excès voulez - vous la porter ?
Mon trepas vous rend plus qu'il ne peut vous ôter.
Me conferver pour vous , c'eft perdre votre Pere..
Je meurs j'étois Epoufe avant que d'être Mere
Admete fur mon coeur eut des droits plus anciens.
Que ne puis-je accorder les vôtres & les fiens !
Si jamais un Epoux de votre coeur difpofe ,
Vous fentirez les loix que l'Amour nous impofe.
Rift anjour le Héros qui vous est destiné
ajure
D'OCTOBRE. 97
Viure auffi grand qu'Admete , & moins infortuné
Mais fi contre fes jours les Parques obſtinées ,
Sur mon fort rigoureux reglent vos deftinées ;
Si le perdre ou mourir , est un de vos malheurs
Vivant comme je vis , mourez comme je meurs.
Un poignard à ces mots fert l'ardeur qui l'anime;
Le Ciel par fon tonnerre accepte la Victime ;
Et le peuple frappé d'un exemple fi grand ,
Immobile & fans voix admire enfoupirant.
GALATEE.
EG LOGU E.
GALATE'E , DAMON.
GALATE'E.
Enfin aprés huit jours coulez dans la triſteſſe .
Le Ciel , mon cher Damon , te rend à ma tendreffe,
Tout languiffoit ici : nos champs infortunez ,
De Flore & de Cerès étoient abandonnez.
Privez des tendres fons de ta douce muſete ,
Les oifeaux de nos bois quittoient cette retraite ;
Tandis que nuit & jour j'invitois les Zéphirs
De porter jusqu'à toi mes voeux & mes foûpirs,
Apprens moy par quel charme une terre écartée ·
I
+
LE MERCURE
Tefaifoit oublier la trist e Galatée .
Bacchus de plus beaux dons orne-t - il les côteaux ?
Tvoit-on dans les prez couler plus de ruiffeaux ?
Le Soleil plus brillant é ayant les boccages ,
Voit il plus de Silvains danfer fur les rivages ?
Les Bergers micux unis y font ils moins jaloux ?
Mais peut-être c'étoit quelque lien plus doux .
Tu te tais . Ah grands Dieux ! cette abfence cruelle
Auroit elle rendu mon Berger infidele ?
DAMON.
Monfilence eft l'effet du trouble imperieux
Qui vient faifir mon coeur , quand je vois vos
beaux yeux.
Ah! pourqui vous livrer à de telles alarmes ?
Connoiffez- vous fi peu le pouvoir de vos charmes ?
Ne vous fouvient - il plus que fur eux mes fermens
Ont appuié la foy de mes engagemens ?
GALATE' E.
Comme ces noeuds d'Amour que fur le fable on
trace ,
Qu'unflot mobile emporte ou qu'un Zephir efface ;
De nos jeunes Bergers telle est souvent la foi ,
Et l'Enfant de Cypris n'a point pour eux de loi .
Quelle autre eut plus d'attraits que la jeune Sylvie
?
Eurilas paroiffait l'aimer plus que fa vie ;
Et cependant Cloris avec bien moins d'appas ,
Sçut lui ravir le coeur du volage Eurilas.
D'OCTOBRE.
DAMON.
LIO
DE
LA
LYON
Aux Belles fans remords on nefait pointenjanja
Qu'il s'est bien repenti d'avoir été parjure !.
Ses prez font inondez , fes moiſſons fans vigueur
Et pour furcroît , Cloris le traite avec rigueur.
Mais ce n'eft point des Dieux la vengeanceſuprême
Qui maintient mes fermens , & fait queje vous
aime:
Ces attraits fi touchans qu'on voit briller en vous,
Pour retenir mon coeur font des noeuds bien plus
doux .
GALATE'E
VILLE
Helas! j'ai de la peine à te croire coupable :
Mais toujours aux Amans l'abſence eft redoutable .
Quand tu quittas ces lieux , mille foucis divers
Volvient autour de moi fous ces ombrages werds &
Depuis ils n'ont ceffé d'alarmer ma tendreffe.
( Peut-être les Berg.rs ont - ils moins de foibleffe
Si le crystal des eaux me paroiffoit moins pur,
Ou fi les Cieux voilez nous cachoient leur azur,
Ton Amante auſſi tôt dans ces vaines images,
De ta legereté croioit voir les préſages.
Ces lieux où tes troupeaux paifoient avec les miens,
Où ſouvent nous avions d'aimables entretiens ,
Lorsque je les voyois ces lieux fi pleins de charmes
>
Un tendre fouvenir faifoit couler mes larmes.
Mais ce qui m'affligeolt le plus dans mon malheur ,
C'étoit de voir Daphné rire de ma douleur.
I ij
100 LE MERCURE
Sans doute fa fierté conferve la memoire
De ce jour où du chant j'emportai la victoire.
DA MON.
Qu'il lui fouvient bien mieux que ſouvent dans
nos prez
Tos doux attraits aux fiens ont été préferez.
GALAT E' E.
De tous ces beaux difcours la flateufe apparence.
Doit elle me donner une entiere affurance?
Peut-être Amour témoin d'un langage affecté ,
Sourit malignement de ma credulité.
Rends le calme , Berger , à mon ame flotante.
Comment couloient tes jours , dis moi , fans ton
Amante ?
Lorfque cent fois le jour mon coeur voloit vers toi ,
Quelqu'un de tes foûirs s'échapoit- il vers moi ?
Quelquefois occupé de ta jeane Bergere ,
Cherchois- tu les gazons d'un antre folitaire ?
Plaignois -tu mes ennuis dans ce ſombre ſejour ?
Mais non , tu n'eus jamais un fi parfait amour.
En vain Paris jura d'aimer toujours OEnone ;
Dès qu'il ne la voit plus , cet ingrat l'abandonne
Tout femble m'annoncer de ſemblables malheurs,
• Je ne te revois plus paré des mêmes fleurs ;
D'un autre air à mes yeux tu portes ta boulete :
Dans le trouble où je fuis , belas ! tout m'inquiete.
Pardonne aux vains soupçons qui viennent m'alarmer
;
L'on n'eft point fans foupçons quand on peut tant
aimer.
D'OCTOBRE. ΤΟΥ
DAM O N.
1
Soupçons injurieux à ma flâme fincere ,
Phantômes vains , ceſſez d'attriſter ma Bergere ;
Et vous , qui de ses yeux paffâtes dans mon coeur
Amours , peignez- lui bien jusqu'où va ma langueur.
Loin de fes doux attraits quand le deftin m'exile '
Ce coeur où vous regnez , a - t- il esté tranquille ?
Demes plus cher: fecrets affidus confidens ,
5.
Vous fçavez où tendoient mes voeux les plus ardens .
Vous avez vú les pleurs que j'ai verfez pour elle.
Helas ! fut il jamais un Amant plus fidele ?
Sous un kêtre touffu , dans ces lieux écartez ,
J'apperçus un marin quelquesjeunes Beautez :
Tandis que leurs Bergers levez avant l'Aurore ,
Moiffonnoient dans les prez les doux prefens deFlore
Ces Belles dont les traits avoient pú tout charmer,
Par leurs tendres regards voulurent m'enflamer ;
Mon coeur toujours conftant refufa fon bommage ;
Et d'abord la rougeur parut fur leur visage.
Elles virent affez à mon air dédaigneux
Qu'un objet plus touchant attiroit tous mes voeux.
Quand le fon des hautbois infpiroit l'allegreffe ,
Dans l'horreur des forefts je cachois ma triſteſſe.
Qu'euffé je fait alors fur les gazons fleuris ?
Interdit je penfois aux beaux yeux qui m'ont pris.
Tantôt aux bords de l'onde , en mes vives alarmes
Je priois les ruiffeaux de vous porter mes larmes ,
On je chantois ces vers qu'un jour je fis pour vous ,
Ces vers dont nos Bergers ont efté fijaloux.
•
I iij
102 . LE MERCURE
Par mes accens plaintifs Philomele excitée
Oublioit fes malheurs pour chanter Galatée ;
Et toutjufqu'aux rochers fenfible à ma chanson ,
Aprés moi dans ces lieux repetoit ce beau nom.
C'est en vain que Morphée en cette folitude ,
Crut calmer ma douleur & man inquietude.
Mille fonges malins qui compofent fa Cour ,
Par leurs illuſions nourriffoient mon amour.
Avant que dans mon coeur ce beau feu s'amortiffe
›
L'on me verra
charmé
de la fiere Artenice
' :
Elle à qui vous cauſez
un depit envieux
,
Et qui s'eft attiré
le courroux
de nos Dieux.
Ces Dieux , qui de mon coeur vous ont rendu
maîtreffe ,
Verront finir mes jours plutôt que ma tendreffe.
GALATEE.
•
Avant qu'un autre amour mefoumette à fesloix
Du rauque Lycidas j'écouterai la voix ;
De l'importun Egon fier de fes paturages ,
Je pourrai fans degoût recevoir les hommages';
Et fi j'ecoute encor un soupçon trop leger ,
Puifsé je perdre enfin le coeur de mon Berger &
D' OCTOBRE. 103
Le mot de la premiere Enigme du mois
paffé , étoit le paffage de la Mer Rouge
& celuy de la feconde , le fouffle , ou la
respiration.
FJE
ENIGME.
E fuis femelle , connue en tout lien
Pour gourmande pour laronneffe ;
Mais lardez moi par le milieu
• Du commencement de fageffe ,
Vous m'allez voir d'abord , en depit des amours?
Une merveille de nos jours
7E
Des plus rares dans mon efpece .
AUTRE ,
Par la Mufe Prifonniere.
E fuis un compoté de bien peu d'aſſemblage ,
Le fexe feminin me met feul en uſage :
Selon les tems , les lieux , je change mes couleurs ›
Je porte quelquefois des bouquets & des fleurs ;
Je fuis l'ouvrage enfin d'habiles ouvrieres ;
Je fçais en cent façons contenter les plus fieres .
Avec tout leur favoir cent Poëtes divers
N'ont pu placer mon nom à la fin de leurs Vers.
I iiij
104 LE MERCURE
CHANSON.
Tor , qui formes les plus beaux noeuds',
Vole , Amour , viens me rendre heureux.
Pour toucher l'objet que j'adore ,
Peins-lui mes tourmens amoureux ;
Pour allumer de tendres feux
Prends de celui qui me devore.
Que l'infenfible toute en flâme ,
Te fente enfin victorieux :
Ne t'arrête plus dans ses yeux ,
Oye penetrer dans fon ame.
Omme rien n'eft plus précieux que la
Canté, a
'Santé , il nous a paru que le Public nous
Sçauroit peut-être gré de lui communiquer
les Recettes qui peuvent la lui conſerver .
Nous donnons d'autant plus volontiers la
fuivante , qu'elle est approuvée par M. Dodart
premier Medecin de Sa Majesté
& par M. Boulduc , premier Apotiquaire
du Corps du Roy . Le grand nombre de perfonnes
qui doivent leur guerifon à l'uſage
qu'elles en ont fait , nous autorise à en
porter un jugement avantageux .
le
Amour,
le am viensmerendreheu
ments amoureux .Pouralluore
.Toy, qui formes les
X
TELEF
YON
DE
D'OCTOBRE. 105
Alkermes , ou Aurifique Mineral ,
à la maniere de Glauber .
I'd
L faut prendre du Salpêtre ou Nitre de
deux eaux , l'écrafer , puis le mettre
dans un creufet d'Allemagne , mettre le
creufet dans un fourneau : ayant eu foin.
de mettre deffous un tuilleau , l'on entourera
le creufet de charbon allumé . Le Salpêtre
fondu , on jettera par projection du
charbon groffierement pulverifé , jufqu'à
parfaite faturation : on jettera la matiere
fondue dans un Cône ou Mortier bien net ;
puis refroidie dans un vaiffeau de verre
on l'expofera à l'air jufqu'à ce qu'elle foit
en eau ; on filtrera la liqueur par un papier
gris.
Prenez quatre livres de bon Antimoine
de Hongrie , caffé par petits morceaux ,
& dont vous aurez feparé la poudre fine
par un tamis de crin ; mettez- le dans une
Caffetiere qui tienne quatre pintes & plus ;
verfez deffus une livre de liqueur de Nitre.
fixe , décrite cy - deffus , & quatre pintes
d'eau de pluye : faites bouillir le tout pendant
deux heures à feu & bouillon égaux ,
après quoy on retirera la Caffetiere du
feu , & on filtrcra les deux tiers de la
›
106 LE MERCURE
liqueur encore boüillante , par un enton
noir garni de papier gris.
On remplira de nouveau la Caffetiere
d'eau de pluye bouillante ; on y ajoûtera
douze onces de la liqueur de Nitre fixe ,
ce que l'on fera bouillir pendant deux
heures avec égalité de feu & bouillon ,
comme auparavant ; puis la Caffetiere retirée
du feu , on filtrera de nouveau les deux'
tiers de la liqueur , comme cy- devant."
›
Enfuite l'on remplira pour la troifiéme
fois la Caffetiere d'eau de pluye bouillante,"
& on y ajoûtera huit onces de la liqueur
de Nitre fixe ; on fera boüillir le tour
encore deux heures , & la Caffetiere retirée
du feu , on filtrera toute la liqueur
bouillante. On verfera ces trois decoctions
dans une grande terrine de grès ; on les
laiffera vingt- quatre heures fans les remuer
, & après ce temps on verfera par
inclination la liqueur qui furnagera une
poudre rouge que l'on trouvera au fond
de la terrine , laquelle poudre fera mife
fur un entonnoir garni de papier gris ,
pour s'y égouter ; après quoy on verfera
deffus de l'eau pendant qu'elle fera encore
fur l'entonnoir , jufqu'à ce que les gouttes
d'eau qui tombent à travers le filtre, n'ayent
plus aucune falure.
On laiffera deffecher cette poudre à
Pair : quand elle fera feche on la détachera
D'OCTOBRE. 107
exactement du papier , pour eftre mife:
enfuite dans une petite écuelle de terre
verniffée , & on verfera deffus environ
quatre onces de bonne Eau-de- vie que
l'on enflammera ; on deffechera enfuite la
poudre , en la remuant avec une petiteefpatule
de bois ; on y rebrûlera de nouveau
de l'Eau- de- vie en même quantité ,
& on deffechera la poudre comme auparavant
, & cela, à deux repriſes.
Approuvé par M. Boulduc , premier
Apotiquaire du Corps du Roy , & pir M.
Dodart , premier Medecin de Sa Majesté .
Vertus & ufage de la veritable
Poudre Aurifique.
E remede eft un des plus grands qui
Cait paru , d'autant plus qu'il tient de
l'univerfel par fes parties alcalines , fulfu
reufes & balfamiques , & par fa vertu
anodine , qui s'infinuant par les digeſtions
& la circulation du fang dans toute l'habitude
du corps , en corrige tous les vices
& impuretez , pouffant par une fenfible
ou infenfible tranſpiration , du centre à la
circonference , tout ce qui peut empêcher
fa fluidité : fi les matieres viciées font dans
les premieres voyes , il agit par un doux
& leger vomiffement ; fi elles font dans
les inteftins , elles fe trouvent precipitées
108 LE MERCURE
fans aucune violence par en bas ; fi les
reins fe trouvent furchargez , ou le genre
nerveux embarraffé de quelque humeur
acre , le remede précipitant par les urines ,
foulage le malade ; en telle forte qu'aidant
la nature , & n'operant que de concert .
avec elle , il luy rend le premier calme
qu'elle avoit perdu par le dérangement des
humeurs , & la met en état de faire joüir
d'une fanté parfaite.
La doze eft depuis un grain jufqu'à
trois , dans un véhicule convenable ; le '
plus ordinaire eft le vin d'Alicante , ou à
on defaut le vin ordinaire , dans lequel
on ajoûtera autant de fucre que de poudre
dans une cuillerée de vin ; prenant deux
ou trois cuillerées du même vin pardeſſus ,
& deux heures après un bouillon.
Pour les fiévres intermittentes & continuës
, après avoir fait preceder la faignée,
on en donnera le lendemain ; ou fi la
maladie preffe , fix heures après la faignée,
on en donnera deux ou trois grains avant
le friffon , ou fur la fin de l'accès : l'on
peut même les partager & en donner un
grain & demi au commencement du friffon
dans trois cuillerées de jus ou d'eau diftilée
de bourrache , & autant fur la fin de
l'accès : le furlendemain de même.
Mais lorsque la fiévre eft continuë avec
des redoublemens marquez , on le prend
avant le redoublement .
D'OCTOBRE... 109
On le prend de même dans les fièvres
malignes , où il convient fort.
Et fi la caufe de la fiévre vient de l'abondance
des mauvais fucs crus & indigeftes
dans les premieres voyes , ou d'un embarras
& obftruction dans les vifceres , il les. guerit
infailliblement fans retour : Et fi une
premiere prife de deux grains ne fait rien
de fenfible , on en prend trois grains la
feconde prife.
Pour l'hydropifie , on en donne deux
ou trois grains de deux jours l'un , dans
trois onces d'eau de Parietaire , demi- once
d'huile d'amande douce , & un gros de
fucre , jufqu'à ce que le malade foit gueri.
Pour les vapeurs ou vertiges , on en
prendra deux prifes de trois grains chacune
, à deux jours l'une de l'autre , enfuite
un grain pendant huit jours , & puis
deux fois la femaine pendant un mois
& après cela on fe contentera d'en prendre
tous les quinze jours une prife de deux
grains , pour prévenir le mal.
•
Pour l'apoplexie , l'on en prendra trois
grains dans trois cuillerées de vin ou dans
une once des eaux diftilées de Muguet ,
de Betoine , de Meliffe ou de Sauge ; fi
cela n'opere point , on réiterera trois ou
quatre heures après la même doze , & fi
la premiere agit , l'on en donnera deux
grains quatre heures après , faifant pro110
LE MERCURE
mener le malade fi l'on peut , ou le tenant
bien chaudement dans fon lit , afin que le
remede fe porte plus aifément dans l'habitude
du corps : s'il y a difpofition de vo
mir , l'on donnera de l'eau tiéde ou du
bouillon gras , afin de caufer l'évacuation
des glaires coagulées par les acides impurs
& vicieux.
Pour le flux diffenterique & autres cours
de ventre , l'on en donne deux ou trois
grains pour la premiere fois , & l'on en
continue un grain pendant trois ou quatre
jours dans trois cuillerées d'une décoction
de Sumac , ou dans trois onces d'eau de
Plantain diftilée , ou dans trois cuillerées
de vin d'Alicante , ou d'autre bon vin
vieux.
Pour la gravelle ou difficulté d'uriner ,
après une faignée , fi l'on craint l'inflammation
, & quelque lavement fait avec une
poignée de fon & de graine de lin , &
après avoir bú plufieurs verres d'Emulfion ,
l'on fera prendre deux ou trois grains de
cette poudre dans trois cuillerées de vin .
blanc , ou dans trois onces d'eau d'ortie
blanche avec un peu de fucre , & l'on continuera
d'en prendre un grain de deux jours
l'un , pendant douze ou quinze jours.
Dans le commencement d'une fluxion
de poitrine , fix heures après avoir faigné
le malade , on luy donnera trois grains de
D'OCTO BR E. III
cette poudre dans trois cuillerées de vin ,
& fi le malade n'eft pas foulagé , fix heures
après on réiterera la faignée & le même
remede ; & fi la fiévre continue avec
la douleur de côté , l'on peut faigner le
malade le matin , & à midy on luy donnera
le remede , c'est-à- dire trois grains
que l'on met avec deux onces d'eau de
Chardon beni , deux onces d'eau de Coquelicot
, demie - once de firop d'oeillet ,
& demy gros de confection d'hyacinthe :
on luy fait prendre le tout en le tenant
chaudement , & s'il n'eft pas foulagé fur
les huit heures du foir , on reitere la faignée ;
l'on fait la même manoeuvre pendant les
trois ou quatre premiers jours de la maladie
, lorfqu'elle eft confiderable ; mais
fur la fin de la maladie , c'est - à - dire
vers le fept & le neuf , file malade
n'eft pas foulagé , on fe contentera de mettre
trois ou quatre grains de la poudre
dans une potion cordiale faite avec trois
onces d'eau de Scabieufe , trois onces d'eau.
de Coquelicot , trois onces d'eau de Reine
des prez , une once de firop d'oeillet , & un
gros de confection d'hyacinthe : on mêlera
bien le tout enfemble , & l'on donnera au
malade d'heure en heure une cuillerée de
cette potion, après avoir remué la bouteille.
Pour la petite verole l'on en donne deux
grains d'abord dans trois cuillerées de vin
112 LE MERCURE
d'Alicante , & l'on continuë d'en donner
un demy grain matin & foir pendant neuf
jours.
Ceux dont la fanté paroît le déranger ,
& qui ont befoin d'être purgez , peuvent
en prendre une prife de trois grains dans
trois cuillerées de vin d'Alicante , ou à fon
defaut d'autre bon vin , dans laquelle on
ajoûtera autant de fucre que de poudre ,
deux heures après il faut prendre un boüillon
, & s'il donne quelque envie de vomir
, l'on boit plufieurs verrées d'eau
chaude.
La doze de deux grains ou même d'un
grain , guérit les vomiffemens & les maux
d'eftomach , en le prenant dans deux onces
d'eau diftilée de Mante ou de Pouliot , ou
bien en forme de Thé , dans trois cuillerées
de ces herbes . A Paris le 20 Septembre
1720.
NOUVELLES ETRANGERES.
A Conftantinople le 20 Septembre 1720.
L
Es Députez d'Alger , qui arriverent
à Smirne le 20 du mois
de Juillet , ont obtenu la permillion
du Grand Seigneur de
fe rendre ici . Comme ils font chargez des
pouvoirs
D' OCTOBRE. 113
pouvoirs neceffaires pour renouveller la
Paix avec les Etats Generaux , il y a.apparence
que cette affaire fera terminée à
la fatisfaction des Puiffances Unies. M.
Emo , Baïl de la Republique de Venife ,
arriva icy le 19 du mois paffé , & le Procurateur
Carlo Ruzini , Ambaffadeur extraordinaire
de la même Republique , fe
difpofe à retourner inceffamment à Venife.
Celebi-Mehemet- Effendi , nommé Ambaffadeur
de la Porte à la Cour de France ,
s'eft embarqué pour s'y rendre avec une
fuite nombreuſe. La ceremonie de la circoncifion
du jeune Sultan fe fit le 17 de
ce mois avec une pompe extraordinaire.
A Varfovie le 12 Octobre 1720.
L'A
'Affemblée de la Diete generale fit fon
'ouverture le 30 du mois paffé , jour
auquel elle avoit été indiquée. Le nombre
des Senateurs & des Nonces n'eft pas
encore fort confiderable , à caufe que plufieurs
Diettes particulieres fe font feparées
infructueuſement , & que les maladies contagieufes
qui fe font répandues dans les
Palatinats de Cracovie , Ruffie , Mohilovv,
c. retardent l'arrivée des autres Nonces .
On n'a pû encore convenir fur l'élection
d'un nouveau Marêchat , fans laquelle les
Etats ne peuvent point commencer leurs
K
114
LE MERCURE
déliberations , fuivant les Conftitutions du
Royaume qui exigent cette ceremonie. La
premiere affaire qui fera examinée dans la
Diete generale , roulera fur les negociations
du Palatin de Mazovie , dont il a été chargé
par la Republique auprès du Czar , &
des réponſes qu'il en a reçûës. Ce Palatin
arriva ici le 12 de l'autre mois de Petersbourg.
Sa Majesté avoit mandé au Grand
General de la Couronne , & à celui du
grand Duché de Lithuanie , de fe rendre
ici pour affifter à ces Conferences ; mais
ils s'en font deffendus , alleguant qu'ils ne
pouvoient point y venir , à moins qu'ils
ne fuffent entierement rétablis dans leurs
Charges. Il eft parti d'icy depuis peu un
nouveau détachement de Troupes , & un
grand nombre d'ouvriers , pour faire avancer
les travaux du Palais que le Roy fait
conftruire à Ujafdo. On conftruit des Cazernes
hors les Portes de cette Ville , pour
les Troupes qui doivent venir renforcer
la Garnifon , & empêcher que ceux qui
viendront des lieux fufpects , puiffent y
entrer. Ces précautions font d'autant plus
neceffaires , qu'on a appris que le mal contagieux
avoit emporté plufieurs perfonnes
à Leopol, où perfonne n'entre fans un certificat
de fanté.
Le Czar a fait affembler un grand nombre
de Troupes en Livonie , où il s'eſt déja
D'OCTOBRE
affemblé quinze Regimens. L'armée qui
étoit fur le Borifthene , défile pour s'y
rendre.
Le Comte Erdodi , Evêque de Neutra ,
& Ambaffadeur de l'Empereur, étant arrivé
ici le 3 , a eu une audience particuliere
du Roy. Le Velt - Marêchal de la Couronne
s'y eft auffi rendu . M. Trautfetter ,
Miniftre du Roy de Suede , arriva le mois
paffé en cette Ville .
A Stokholm le 13 Octobre 1720.
Openhague la ratification du Traité de
N efpere recevoir dans peu de Cop-
Paix qui a été fignée entre Sa Majesté
Suedoife & le Roy de Dannemarck. Auffitôt
qu'elle fera arrivée , on publiera cette
Paix avec les ceremonies ordinaires dans
toutes les Villes du Royaume. Le Major
General Romanzoff eut le 27 fa premiere
audience du Roy. Il felicita Sa Majefté
de la part du Czar fon Maître , fur fon
élevation au Tróne. On fe flatte que cet
Envoyé eft chargé de quelques propofitions
préliminaires ; on le fouhaite d'au
tant plus , que les Troupes Moscovites
qui font affemblées en Finlande , ne don
nent pas lieu de le croire . Comme ces
Troupes pourroient faire quelque mouve
ment , & qu'on craint toujours quelque
Kij
116 LE MERCURE
1
defcente , on a envoyé de nouveaux ordres
pour prendre les précautions neceffaires
contre les entreprifes que le Czar pourroit
former. Le Roy eft party pour Upfal , où
il va faire la revûe de fes Troupes . On
n'attend fon retour que dans un mois.
Lorfque Sa Majeſté ſe tranſporta en dernier
lieu à bord de la Flotte Angloile ,
elle fit diftribuer 3000 Ducats aux Equipages.
On fe flatte toujours qu'une partie
de cette Flotte hyvernera dans ce Port ,
& que l'autre partie retournera inceffamment
dans la Grande Bretagne . Le Prince
Lubomirski , Ambaffadeur du Roy de Pologne
& de la Republique en cette Conr ,
s'eft embarqué à bord d'un Vaiffeau qui
doit le transporter à Dantzic , d'où il fe
rendra par terre à Varsovie .
A Hambourg le 20 Octobre 1720 .
E Prince Guillaume de Heffe- Caffel ,
Frere du Roy de Suede , étant arrivé
>
en cette Ville le 30 du paffé , en partit
le 2 du courant au bruit de l'artillerie
pour fe rendre à Hannover avec le Miniftre
du Roy de Suede qui l'a accompagné
pendant fon voyage , & qui eft
chargé , à ce que l'on prétend , de plufieurs
negociations auprés du Roy d'Angleterre.
Sur la nouvelle que les follicitaD'OCTOBRE.
117
notre
tions des Députez de la Regence de cette
Ville à la Cour Imperiale , n'avoient eu aucun
fuccès , il fe tint le 2 de ce mois une
affemblée complette de notre Bourgeoisie ,
dans laquelle on delibera fur plufieurs
affaires , & particulierement fur la promte
fatisfaction que l'Empereur exige de cette
Ville. Comme S. M. I. demande qu'on
lui envoye un Bourguemeftre ,
Bourgeoifie a enfin confenti au payemenɛ
d'une impofition extraordinaire , pour
fournir aux dépenfes de cette deputation ,
qui doit être envoyée à Vienne , pour reparer
l'attentat commis contre la Maifon
& la Chapelle de fon Refident. Le Roy
d'Angleterre est toujours à Herrenhofen ,
où il a tenu plufieurs Confeils : on ne fçait
point encore quand S. M. partira pour repaffer
en Angleterre , fes équipages n'ayant
reçu auçun ordre de prendre les devants .
.
Le Refident de Mofcovie , qui étoit icy,
a fait toucher de l'argent aux Officiers
Allemands qui fe font engagés au fervice
du Czar. La plupart ont déja pris les devans
pour ſe rendre à Petersbourg , d'où
on mande que le Czar a fait affembler à
Riga 30 mille hommes , fans qu'on fache
encore a quoi ils font deſtinés.
On écrit de Coppenhague , que le Prince
Dolhorouki , Ambaffadeur du Czar , qui
devoit partir pour fe rendre à Brunfwick,
118 LE MERCURE
avoit reçu ordre de fon Maître de differer
fon départ jufqu'à l'arrivée du Refident de
Moravie qui a été nommé pour le rem
placer.
On apprend de Petersbourg , que les
quatre Fregates Suedoifes , enlevées le
du mois d'Aouft par les Galeres Ru
fiennes , entrerent le 18 du paffé dans ce
Port , au bruit de l'artillerie des deux Fortereffes
. Elles étoient efcortées par fix Galeres
Mofcovites, qui s'avancerent juſqu'au
Pont de l'Eglife de la Trinité , où elles
débarquerent une partie des Prifonniers
Suedois. Elles étoient fuivies des quatre
Fregattes Suedoifes qui jetterent l'anchre
devant le Port ; aprés quoy l'on fit affembler
fur le Pont tous les prifonniers. Il y
avoit quelques Compagnies des Gardes ,
rangez en haye , fous les ordres du Major
Mamonoff. On fit pafier ces prifonniers
devant une Pyramide qui avoit été élevée
à cette occafion ; & après avoir été conduits
, comme en triomphe , devant les
Colleges & les Boutiques des Marchands,
on les renferma enfuite dans la Fortereffe,,
fous l'escorte d'une Compagnie des Gardes..
Le Czar & la Czarine furent du nombre
des Spectateurs ; aprés quoy L. M. retournerent
dans les appartemens du Senat
où il fe trouva un grand nombre de cou
verts , non ſeulement pour la famille Cza
D'OCTOBRE. 119
rienne , mais encore pour les Miniſtres
Etrangers & ceux de la Cour. Le foir ,
toute la Ville fut illuminée , & l'on tira
un trés beau feu d'artifice fur l'eau. Ces
rejoüiffances
ont continué les deux jours
fuivans .
On écrit de Hannover du 18 , que le
Roy partit pour Gohr , accompagné des
Comtes de Stanhope & de Sunderland .
Les Miniftres & Envoyés des Cours Etrangeres
y ont fuivi le Roy. M. de Witworth
Mniniftre de S. M. B. arriva le 14 à Hannover.
Le Duc de Holſtein fe tient toujours
à Breflaw. On recommence à parler
du mariage de ce Prince , avec une
Princeffe niéce du Czar. Le Roy de Danemarc
arriva le 7 à Gottorp avec le Prince
Royal. On prétend que S. M. n'a entre
pris ce voyage , que pour vifiter fes Places
, les Digues qu'Elle a fait rétablir , &
faire la revue de fes Troupes.
A Vienne le 16 Octobre 1720.
E Prince Ottajano de Medicis eft ar
Live icy de Sardaigne , où il avoit été
envoyé par l'Empereur , pour recevoir ce
Royaume des Eſpagnols , & le remettre au
Baron de Saint - Remy , Plenipotentiaire
du Roy de Sardaigne , fuivant les ordres
de S. M. I. qui lui avoient été donnez
120 LE MERCURE
On eft encore fort incertain touchant
P'ouverture du Congrès de Brunſwick .
L'Empereur a écrit aux Puiffances du
Nord. , pour les engager à y envoyer inceffamment
leurs Plenipotentiaires ; &
pour en donner l'exemple , S. M. I.
a donné ordre au Baron Keller , l'un de
Les Plenipotentiaires , de fe tenir prêt à s'y
rendre. Suivant les dernieres Lettres de
Ratisbonne , il paroît que les differends
fur la Religion feront inceffamment terminés
, à la fatisfaction des Catholiques
& des Proteftans. Les Etats de Hongrie
ont commencé leur feance à Presbourg ,
& ils travaillent tous les jours aux affaires
pour lesquelles ils ont été convoquées . On
écrit de Haft en Tranfilvanie , qu'il y
étoit tombé les du mois paffé une fi grande
quantité de fourmis volantes , qu'elles
avoient couvert les toits de toutes les maifons
de cette Ville ; mais que le vent & la
pluye qui furvinrent la nuit fuivante ,
détruifirent & diffiperent entierement ces
infectes. Malgré le détachement de Dragons
que l'on avoit fait marcher vers les
frontieres d'Autriche, pour donner la chaffe
à un grand nombre de Mendians & de
Vagabonds , on apprend cependant que ces
Bandis continuent à commencer toute forte
de defordres , & qu'ils fe font même emparés
du Château d'Enftbrun qu'ils ont
pillé
D'OCTOBRE. 121
pillé & enfuite détruit. Ce Château appartient
au Comte de Zinfendorff. C'eſt
ce qui a obligé cette Cour à faire publier
un Edit très rigoureux contre ces Brigands.
La Compagnie de Commerce , qui a
été formée dans cette Capitale l'année
derniere , continue fon établiſſement avec
beaucoup de fuccès. La Ducheffe de Hannover,
après avoir vu l'Imperatrice Amelie
fa fille , & l'Archiducheffe fa petite fille
à Afchan , en partit le 20 du paffé , pour
continuer fon voyage vers la France . Elle
doit faire quelque fejour en Baviere , pour
determiner la route qu'elle doit prendre
afin de n'être pas obligée d'obferver la
Quarantaine.
On a publié icy un Edit , par lequel
il eft ordonné à tous les Ecclefiaftiques
de vendre à des Laïcs tous les
biens en fonds de terre que les premiers
ont acquis depuis l'année 1669 , fans qu'ils
puiffent s'en conferver la proprieté , fous
quelque pretexte que ce foit. On ne leur
accorde que trois mois pour l'execution
de cet Edit. Ce terme expiré , ces biens
feront cedés à ceux qui voudront s'en
charger pour le prix qu'ils auront été appreciés.
On affure que M. Albani , neveu
du Pape , a porté des plaintes à l'Empereur
, par ordre de S. S. au fujet de cet
Edit ; mais on doute fort que S. M. Impexiale
change de refolution.
L
222 LE MERCURE
On mande de Carelsbourg en Tranfilvanie
, que l'Evêque de cette Ville étoit
allé recevoir 115 Efclaves Chrétiens qui
ont été rachetés en Tartarie : qu'il les
avoit enfuite conduits dans l'Eglife Cathedrale
, où le Te Deum fut chanté.
Le Pape & le Grand Duc de Toſcane,
ont enfin obtenu de cette Cour , que les
troupes Imperiales qui doivent paffer de
la Sicile dans l'Etat de Milan , feront tranfportées
à Raven & à Livourne , pour continuer
enfuite leur route par terre ; mais
elles ne fe mettront point en marche
qu'elles n'ayent touché les arrerages que
le Pape & le Grand Duc ont promis .
Le General Harfch , cy- devant Com
mandant à Fribourg , qui va relever le
General Zunzunghien , pour prendre le
Commandement des troupes en Sicile , eft
parti pour s'y rendre.
S'il en faut croire les nouvelles venuës
par la voye de Conftantinople , l'Empereur
de la Chine a rendu un Edit qui ordonne
à tous les Miffionnaires envoyés.
par le Pape dans cet Empire , de fortir dans
un terme limité de toutes les Terres qui
en font dépendantes , à la referve d'un
petit nombre de Jefuites qui font établis
à Macbao ; mais cette nouvelle merite
confirmation.
Le Duc de Mekelbourg continue fon
ejour en cette Ville. Le Confeil de Guerre
D'OCTOBRE. 123
a ordonné aux Chefs des Regimens , de
les.rétablir fur le même pied qu'ils étoient
avant la derniere guerre , fçavoir, les Regimens
d'Infanterie à 2000 hommes , &c.
ceux de Cavalerie , à 850 chevaux. Le
furplus de chaque Regiment fera incorporé
dans les autres pour qu'ils foient
égaux en nombre ; & au cas que ce moyen
ne fuffife pas pour les rendre complets
on y fuppléera par les recrues & les remontes
que les Etats des Pays Hereditaires
doivent fournir . Le Comte de Kinski
frere du Chancelier de Boheme , a été
nommé par l'Empereur pour fe rendre auprés
du Czar en qualité d'Envoyé Extraordinaire.
Comme les differends de Religion font
fur le point d'être terminés , on ne doute
point que l'Empereur ne donne inceffamment
l'inveftiture des Duchés de Bréme
& Wehrden au Roy de la Grande' Bretagne
, & celui de Stettin au Roy de Pruffe.
Le Baron de Houldenberg , Envoyé de
S. M. Britanique , comme Electeur d'Han.
nover , a déja reçu les Pleins- pouvoirs
pour cet effet. Il arriva ces jours paffés un
Exprès de Rome , avec des plantes de ce
que le Cardinal d'Althan , Miniftre de
S. M. I. avoit fait arrêter par force le
Courier ordinaire de Milan , auquel on
avoit enlevé & porté chez cette Emi-
Lij
124 LE MERCURE
nence les Lettres , qui avoient été enfuite
renvoyées à la Pofte , fans être parfumées .
Les Etats de Hongrie continuent leurs
feances à Presbourg. On eft perfuadé qu'ils
y declareront leur fentiment , par rapport
à la fucceffion de ce Royaume , en cas de
mort de S. M. I. fans hoirs mâles .
Le Gouvernement de Bude a été conferé
au Comte Jofeph de Taun ; celui de
Temefwar au General Comte de Mercy ,
& celui de Luxembourg au Comte de
Kinigleg , cy- devant Ambaffadeur de Sa
Majefté Imperiale à la Cour de France.
On a joint à cette grace le Regiment de
Wachtendonk. Le Comte de Virmond a
auffi obtenu un Gouvernement en Efcla-
Vonie.
M. le Comte de Gergy , Miniftre do
France à Ratisbonne , eft retourné à Paris.
Il a laiffé le Sieur Groffey pour y demeurer
en attendant que cet employ foit
rempi .
A Londres , le 25 Octobre 1720.
Ans l'Affemblée generale de la Com-
Dpagnie de la Mer du Sud , qui fe
tint le 11 de ce mois , les Directeurs declarerent
que la Banque s'étoit chargée de
faire circuler pour trois millions 775 mille
livres sterlin des Obligations de la ComD'OCTOBRE..
125
pagnie . L'Affemblée approuva ce qui avoit
été arrêté par les Directeurs fur cette affaire
Sur cette declaration les Actions de la
Compagnie commencerent à prendre plus
de faveur dans le public , s'étant relevécs
au deffous de 100 où elles étoient tombées
, à 270. On convint dans la même
Affemblée que la troifiéme & quatriéme
Soufcription qui avoit été delivrée fur le
pied de 1000 pour 100 , feroit reduite à
400. Ces refolutions ne furent prifes qu'après
de grands debats , parce que plufieurs
Particuliers en donnant leur voix , demanderent
qu'on fit une recherche exacte de
la conduite de quelques Directeurs , dont
l'empreffement à le défaire des fonds qu'ils
avoient à la Compagnie , avoit caufé le
difcredit des Actions & des Soufcriptions.
Sur ces plaintes le Comte de Ifla , frere du
Duc d'Argile , reprefenta à l'Affemblée
qu'il s'agiffoit moins d'accufer les Directeurs
de leur malverfation , que de prendre des
expediens convenables , pour rétablir les
affaires de la Compagnie . Qu'à l'égard des
Directeurs qui feroient trouvez coupables ,
ils pouvoient s'affurer qu'on les obligeroit
de comparoitre dans un lieu où il feroit
aflis , pour examiner leur adminiſtration .
Qu'ils devoient s'attendre qu'on ne les
menageroit pas , & qu'on leur rendroit la
juftice qu'ils meritoient. M. Craggs Se
Liij
826 LE MERCURE
cretaire d'Etat , & plufieurs autres , porterent
auffi la parole pour calmer les efprits.
•
à com-
La Compagnie des lames d'épée , qui
avoit difcontinué fes payemens ,
mencé à payer cinq pour cent de toutes
les Obligations qu'elle doit , & elle fe promet
de continuer toutes les Semaines juſqu'à
ce qu'elle foit entierement acquittée.
Il paroît que l'empreffement avec lequel
on retiroit l'argent de la Banque , eft un
peu diminué. On remarque que plufieurs
Banquiers qui s'étoient abfentez , parce
qu'ils n'étoient pas en état de fatisfaire à ·
leurs engagemens , ont commencé à payer :
cependant les Sieurs Northcok , freres Banquiers
, ont manqué pour une fomme très
confiderable depuis ces arrangemens . M.
Spencer-Compton, Orateur de la Chambre
des Communes , & Treforier du Prince de
Galles , a foufcrit so mille livres sterlin
pour S. A. R. Le Duc de Malborrough
25 mille , & le Duc de Norfolk & fon
époufe , 70 mille , à la foufcription de la
Banque , pour faire circuler les Obligations
de la Compagnie de la Mer du Sud ,
& pour foutenir le credit public. On fabrique
actuellement à la Tour 4 ou 500
mille livres sterlins d'argent , pour le compte
de la Banque . Elle en reçut 150 milie
de l'Echiquier , dans le temps qu'elle étoit
affiegée de toutes parts .
D'OCTOBRE. 127
Les équipages de M. le Marquis de
Senectere s'embarquerent le 15 pour retourner
en France ; c'est ce qui fait croire
que fon Excellence ne reviendra plus ici ,
quoi qu'Elle n'ait pas pris fon audience
de congé du Roy.
M. Hambden , Membre du Parlement ,
& Treforier de la Flotte , s'eft démis de
cette derniere Charge. On croit qu'elle eft
deftinée pour le Chevalier Jean Norris.
Les ordres font donnez pour armer deux
Vaiffeaux de guerre , afin de donner la
chaffe aux Pirates qui ont détruit plufieurs
de nos Vaiffeaux , pendant qu'ils étoient
à la pêche fur le banc de Terre Neuve ,
ainft que plufieurs autres fur la côté dự
Nord de l'Amerique. La Compagnie des
Indes Orientales fait continuer l'armement
des dix- fept Vaiffeaux qui doivent partir
vers la fin de ce mois fous l'eſcorte de trois
Vaiffeaux de guerre que le Gouvernement
a accordez à cette Compagnie.
Les Seigneurs Commiffaires de la Treforerie
font dans la refolution d'accorder
fous le bon plaifir du Roy , aux deux
Compagnies d'Affurance , non feulement
le pouvoir d'affurer les Maifons contre le
feu dans toute l'Angleterre , mais aufli la
vie des Particuliers. Ils ont envoyé à cet
effet un Memoire à Hannover pour avoir
l'approbation du Roy. Le Comte de Port-
Liiij
128 LE MERCURE
more s'eft embarqué à bord du Paquebot
nommé le Mercure , pour fe rendre à
Lisbonne , d'où il doit paffer à Gibraltard ,
dont il eft Gouverneur . Le Roy a accordé
au Duc de Bolton une penfion de 3000
livres fterlins. Le Lord Naffau Pawlet ,
fils de ce Duc , a obtenu la furvivance
d'Auditeur general du Royaume d'Irlande.
.
On a arrêté le Sieur François Cawod ;
pour avoir pris des Soufcriptions , & délivré
des reçûs pour la valeur de quatre millions
fterlins , fous pretexte de l'établiffement
d'une Compagnie de la Mer du Nord.
On proceda leto à l'élection d'un nouveau
Lord Maire pour l'année prochaine ,
& le choix tomba fur le Chevalier Friard.
Les Lords Jufticiers attendent avec impatience
les réponfes du Roy aux dépêches
qui ont été envoyées depuis peu à Hanhover
; & comme ils efperent que Sa Majefté
reviendra inceffamment ici , pour remedier
aux defordres que le difcredit des
Actions caufe en ce païs , ils ont ordonné
qu'on preparât des Yachts pour ramener
le Roy, L'Efcadre qui doit l'escorter fera
commandée par le Chevalier Jean Jernings.
Les Lords Jufticiers , après avoir
entendu de part & d'autre les Avocats fur
les plaintes formées par les Habitans de
la Caroline contre les Proprietaires de
cette Province , ont arrêté en confequence
D'OCTOBRE 129
que
le Procureur General drefferoit un
Acte portant revocation de cette Chartre ,
& l'union de la proprieté de cette Province
à la Couronne ; & cela fur ce qu'il
a été prouvé que les Proprietaires avoient
contrevenu à plufieurs Articles qui leur
étoient prefcrits par ladite Chartre . Le
Colonel Nicholſon en a été nominé Gouverneur
pour le Roy. Les Commiffaires
de l'Amirauté ont expedié un Paffeport à
douze Maures Sujets du Roy de Maroc
pour s'en retourner dans leur païs. Ils
étoient tombez entre les mains de nos
Croifeurs , après que le Vaiffeau fur lequel
ils étoient , eut échouéprès de Darmouth.
Le Lord Glenorchy , Ecuyer des jeunes
Princeffes , & Ambaffadeur d'Angleterre
auprès du Roy de Dannemarc , s'eft embarqué
pour aller relever en cette Cour
le Lord Polwarth , qui y eft en qualité
d'Envoyé.
On leve en Irlande un certain nombre
d'homines choifis , qui doivent avoir au
moins fix pieds & deux pouces de haut ;
de plus jeunes , bien faits & proportionnez .
On affure que Sa Majefté a deffein d'en
faire prefent au Roy de Pruffe , pour rendre
fon Regiment Royal de Grenadiers
complet.
On a appris par les Lettres de Port-
Royal dans la Jamaïque , du 25 de Juin ,
728 LE MERCURE
more s'eft embarqué à bord du Paquebot
nommé le Mercure , pour fe rendre à
Lisbonne , d'où il doit paffer à Gibraltard ,
dont il eſt Gouverneur. Le Roy a accordé
au Duc de Bolton une penfion de 3000
livres fterlins . Le Lord Naffau Pawlet ,
fils de ce Duc , a obtenu la furvivance
d'Auditeur general du Royaume d'Irlande.
1
On a arrêté le Sieur François Cawod ;
pour avoir pris des Soulcriptions , & délivré
des reçûs pour la valeur de quatre millions
fterlins , fous pretexte de l'établiffement
d'une Compagnie de la Mer du Nord.
On proceda leto à l'élection d'un nouveau
Lord Maire pour l'année prochaine ,
& le choix tomba fur le Chevalier Friard.
Les Lords Jufticiers attendent avec impa
tience les réponſes du Roy aux dépêches
qui ont été envoyées depuis peu à Hanhover
; & comme ils efperent que Sa Majefté
reviendra inceffamment ici , pour remedier
aux defordres que le difcredit des
Actions cauſe en ce païs , ils ont ordonné
qu'on preparât des Yachts pour ramener
le Roy, L'Efcadre qui doit l'escorter fera
commandée par le Chevalier Jean Jernings.
Les Lords Jufticiers , après avoir
entendu de part & d'autre les Avocats fur
les plaintes formées par les Habitans de
la Caroline contre les Proprietaires de
cette Province , ont arrêté en confequence
D'OCTOBRE 149
que
le Procureur General drefferoit un
Acte portant revocation de cette Chartre ,
& l'union de la proprieté de cette Province
à la Couronne ; & cela fur ce qu'if
a été prouvé que les Proprietaires avoient
contrevenu à plufieurs Articles qui leur
étoient prefcrits par ladite Chartre. Le
Colonel Nicholſon en a été nominé Gouverneur
pour le Roy. Les Commiffaires
de l'Amirauté ont expedié un Paffeport à
douze Maures Sujets du Roy de Maroc
pour s'en retourner dans leur païs. Ils
étoient tombez entre les mains de nos
Croifeurs , après que le Vaiffeau fur lequel
ils étoient , eut échoué-près de Darmouth .
Le Lord Glenorchy , Ecuyer des jeunes
Princeffes , & Ambaffadeur d'Angleterre
auprès du Roy de Dannemarc , s'eft embarqué
pour aller relever en cette Cour
le Lord Polwarth , qui y eft en qualité
d'Envoyé.
On leve en Irlande un certain nombre
d'homines choifis , qui doivent avoir au
moins fix pieds & deux pouces de haut ;
de plus jeunes, bien faits & proportionnez.
On affure que Sa Majefté a deffein d'en
faire prefent au Roy de Pruffe , pour rendre
fon Regiment Royal de Grenadiers
complet.
On a appris par les Lettres de Port-
Royal dans la Jamaïque , du 25 de Juin ,
130 LE MERCURE
que la Marie Vaiffeau de guerre Anglois,
avoit repris fur les Eſpagnols deux de nos
Vaiffeaux , fçavoir le Rubyfnovv , de Briftol,
& la Revanche de Londres. Ces mêmes
Lettres ajoûtent que la Marie , qui s'étoit
jointe au Ludlovv, autre Vaiffeau de guerre
du Roy , avoit attaqué trois Vaiffeaux de
guerre Espagnols de 70 , 60 , & de 30
pieces de canon : que le Ludlow ayant
perdu fon grand mats , couroit rifque
d'être pris , fi la Marie ne l'avoit fecouru
Après quelques heures d'un combat fort
vif, les Efpagnols avoient continué leur
route pour la Havanne.
M. Kelfal , un des Commis de la Treforerie
, foufcrivit le 17 à la Banque 100
mille livres sterlins le , pour compte du
Roy. L'on envoya la femaine paffée en
Hollande 450 onces d'or & 4000 d'argent.
L'Amiral Bing qui eft attendu inceffamment
d'Hannover a été fait Treforier
de la Marine , à la place de M. Hampden.
Le Lord How , gendre de Madame
la Comteffe de Kilman (eck , a obtenu la
furvivance de la Charge de Clerc de la
Pipe, qui dépend de celle de la Table Verte,
poffedée par le Lord Newhare.
Voicy la traduction du Difcours que M.
Budgell fit le 11 de ce mois à l'Affemblée
de la Compagnie de la Mer du Sud , il a
été rendu public . Ce Difcours étoit adreffé
D'O CTOBRE.
au Chevalier Fellows , Sous- Gouverne
de la Compagnie.
On ne sçauroit avoir un coeur Anglois , &
être infenfible aux calamitez de la Patrie..
Le credit de notre Nation , qui juſqu'à prefent
a été facré & inviolable , & qui a ſöntenu
le choc de tant de guerres , la fureur
de differens partis , & tous les efforts de nos
Ennemis communs , touche au moment defa
ruine. Nos richeſſes imaginaires diſparoiſſent,
dans le temps même que nous croyons les
poffeder. Chaque jour de transport d'Actions
caufe la ruine de cent Familles , & il n'y a
prefque aucun de ceux qui m'entendent , qui
n'ait fenti les fuites fatales de ce qui vient
d'arriver , on en fa propre perfonne , ou en
selle de fes parens on amis. Non seulement
quelques Particuliers , mais nos plus riches
Orfevres , & même des Compagnies entieres ,
ne payent plus : la faillite eft prefque venuë
à la mode.
La raison en eft manifefte : nos Efpeces
commencent à fuccomber fous le faix de nôthe
Papier , à moins qu'on ne donne aux
gens le tems de fe remettre de leurs frayeurs ,
de rappeller leur argent de Hollande
de Portugal , il n'y a point d'homme fage
qui n'en doive craindre les fuites..
J'avonë , Monfieur , que je fuis fâché
de voir que mes Compatriotes , qui étoient
fenflés de la profperité , ſont ſi abbatus par
LE MERCURE
evers ; & felon moy , leurs craintes font
prefent autant déraisonnables , que leurs
efperances l'étoient auparavant . Cependant,
elle nous font à tous un tort infini ; tout le
monde fouffre de ce que les neceffités & les
apprehenfions des Particuliersfont le prix des
Actions.
si le plat -fond de cette grande Salle où
nous sommes affemblés , étoit prêt à tomber ,
que chacun de nous courût en foule à la
porte pour fortir tous à la fois , combien de
gens de cette affemblée ne feroient - ilspas neceffairement
étouffés ? Cette comparaiſon , de
la maniere dont nous nous conduisons aujourd'hui
, eft trop claire , pour avoir beſoin
d'explication.
Quelqu'un de l'Affemblée ayant en cet
endroit interrompu le fieur Budgell , & demandé
qu'on ailât aux opinions , il reprit
fon difcours , & dit :
Monfieur ,
Si la perfonne qui demande qu'on aille
aux opinions , a quelque chose de plus important
à dire que ce que j'ay à propoſer , je
Pécouterai avec la même patience que je fonbaitte
qu'il m'écoute.
Je ne doute pas , Monfieur , que vous &
nos Directeurs n'ayez fait avec les Rentiers,
& avec ceux qui ont foufcrit à la troifiéme
& quatrieme Soufcription , le meilleur marché,
que la fituation prefente des affaires l'a pû
D'OCTOBRE. 133
permettre Vous êtes , ou du moins , vous de
vés être les meilleurs Juges pour connoître ce
qui est avantageux à la Compagnie : cependant
j'en connois qui auroient fouhaitté que
vous enffiez encore attendu une occafion plus
favorable , dans laquelle vous enffiés en même
tems pû declarer un Dividend.
Je donne volontiers les mains à toutes les
´refolutions que vous nous avez commniquées,
à la reſerve d'une ſeule.
Je vois , Monfieur , par la lecture que
votre Secretaire en a faite , que vous avés
deffein de delivrer les Recepiffés de la troifiéme
& quatrieme Soufcription dans la même
forme qu'ils doivent être conçus : Il n'eft
perfonne qui ne voye , que c'eft afin que les
marchés exorbitans que se font faits pour
les Recepiffés de ces deux Soufcriptions , demeurent
fermes & valides . Mais , lorfque
vous retreciffés votre plan , dans le tems que
tout est fi fort changé depuis qu'on a fait ces
marchés , je crois que nous devons mûrement
confiderer fi une telle chofe eft jufte & raifonnable.
Je fuis perfuadé que notre édifice , quoique
fort facré , en eft cependant devenu
beaucoup plus ferme ; & j'espere de le voir
encore fi degagé , que les gens de moyenne
condition ( qui font le gros de la Nation , )
feront en état d'acheter nos Actions. Il
regnoit il y a quelque tems un certain ef
134
LE MERCURE
prit parmi ces fortes de gens , lequel , s'il car
été dirigé à propos , auroit pû être d'un
grand usage à cette Compagnie , au lieu de
Téteindre entierement , comme on afait. Je
fouhaitterois que les gens de tous rangs &
de toute efpece , trouvaffent leur interêt à
contribuer au foutien de ce grand Syſtême
qui à preſent est devenu une partie de notre
Conftitution. Si quelque Ennemi commun
prenoit avantage de nos defordres preſents,
il n'y a que Dieu qui fçache quelles en feroient
les fuites ,&c.
A la Haye le 26 Octobre 1720.
Es Lettres de Bruxelles du 24 de ce
Lmois ,portent qu'un Vaiffeau de Marfeille
n'ayant pû obtenir la permiffion d'aborder
à Dunkerque , avoit fait force de
voiles pour entrer dans le Port d'Oftende :
qu'à fon approche , on avoit tiré deffus
deux coups de canon pour l'obliger à ſe
retirer que ce Vaiffeau forcé par la tempête
, avoit échoué le 18 fur un banc de
fable à un quart de lieuë d'Oftende. L'équipage
,tour épuifé qu'il étoit , & preffé
par la faim , trouva le moyen de gagner
la terre ferme. On détacha d'abord quel-
Soldats de la garnifon pour l'empêcher
de penetrer plus avant dans le Pays ;
& comme il a été deffendu de leur porter
ques
D'OCTOBRE. 135
des vivres , ils font en danger de mourir
bient -tôt de faim . On efpere cependant ,
que malgré cet ordre , ceux d'Oftende
pourvoiront à leur fubfiftance , en prenant
toutes les precautions neceffaires pour ne
s'expofer à aucun danger ; d'autant plus
que M. le Marquis de Prié a envoyé M.
Coppieters , Confeiller des Finances , afin
de concerter fur les moyens de procurer
des vivres à ces pauvres malheureux .
Le Vicomte d'Enghien , s'étant battu en
duel avec un Major , a été tué.
M. de Nortwick , Prefident de Semaine
de l'Affemblée des E. G. a été complimenter
M. le Comte de Morville fur fon
départ , au nom de L. H. P. Il y a apparence
que S. Ex. fe rendra à Paris avant
que d'aller au Congrès de Cambray. M.
de Burmania cy- devant Ambaffadeur des
E. G. à la Cour de Suede , eft arrivé ,
ainfi que le Comte de Stairs , de Hannover
, d'où un Exprès quia paffé icy allant
à Londres > nous a apporté la nouvelle
de l'arrivée prochaine du Roy de la G. Br.
pour repaffer dans les Royaumes.
A Madrid , le 16 Octobre 1720.
LERoy , la Reine & le Prince des Alturies
, partirent en fort bonne fanté le
25 du mois paffé pour le Château de Bal136
LE
MERCURE
fain. S, M. après avoir travaillé aux dépê-·
ches pendant quelques jours , a fait partic
plufieurs Exprès pour differents Ports de ce
Koyaume. Il en a dépêché un au Marquis
de Léde qui commande les troupes qui
ont eu ordre de s'affembler en Andaloufic. w
S. M. en lui donnant ce Commandement
lui a permis de difpofer de la plupart des
Emplois qui pourroient vaquer dans l'armée.
Ce Marquis a écrit qu'il n'avoit pas
trouvé les preparatifs qui avoient été ordonnés
, auffi avancés qu'on l'avoit crû ;
mais qu'il y arrivoit tous les jours des
troupes & des munitions de divers Ports
de ce Royaume.
S. M. a ordonné qu'outre les trois Services
folemnels que le Roy a fondés depuis
quelque tems dans l'Eglife du Monaftere
de l'Efcurial , il en feroit celebré
un quatrième pour le repos de l'ame de
la feuë Reine Marie- Louife , fille de feu
Monfieur , & premiere femme du feu Roy
Charles II ; ce qui ne s'étoit point obſervé
jufqu'à prefent pour les Reines mortes
fans enfans. Les premiers Services ont été
fondés pour le repos des ames du feu Roy
Charles II . de la Reine Marie d'Autriche
fa mere , & de la feuë Reine Marie Louife-
Gabrielle de Savoye .
Suivant nos avis de Malaga , les grands
vents qui fe font élevés depuis quelque
tems
D'OCTOBRE. 137
>
tems fur cette Côte , y ont fait échouer
ou perir plufieurs Bâtimens , du nombre
defquels étoit un Corfaire de Barbarie
dont l'équipage a été fait prifonnier par
les Habitans , qui l'ont conduit à Malaga.
Ces Lettres ajoûtent qu'on y avoit lancé
à l'eau un Vaiffeau de Guerre percé pour
80 pieces de canon.
Don Louis d'Achuna , Miniftre du Roy
de Portugal en cette Cour , n'attend plus
que les derniers ordres de fon Maître ,
pour le rendre en qualité de Plenipotentiaire
à l'Affemblée qui doit le tenir à
Cambray. Il fera remplacé icy par Don
Antonio Guedez- Pereira . Le Duc d'Alb.
kerque paroît fort content du Decret que
S. M. a rendu en fa faveur par lequel
Elle approuve la conduite qu'il a tenuë
pendant fa Vice-Royauté du Mexique. A
Pégard des 700 mille pieces de huit , qui
ont été confifquées à fon retour en Eſpa
>
gne , & portées au Trefor Royal , on
s'engage de lui donner 1 pour d'intérêt
par an , en attendant
qu'on foit en état .
de lui en rendre le fonds. M. Pattigno ,
Intendant
General de l'Andaloufie
eſt
parti en pofte pour Cadix , d'où on mande
que la Flote avoit enfin fait voile de ce
Port , & qu'elle avoit débarqué quinze
Bataillons à Centa. On eft fort impatient
de fçavoir quel fera le fuccès de cette en-
M
138
LE MERCURE
trepriſe dans une fation fi avancée .
Suivant quelques avis de la Havanne , il
y a eu une espece de foulevement de la
part des peuples de la campagne , qui mécontens
des nouveaux impôts fur le Tabac,.
s'étoient réunis , & s'étoient avancés , pour
couper la communication de l'eau à cette
Ville ; qu'à leur approche les troupes de
la garnifon avoient fait fur eux une fortie
qui ne leur avoit pas réuffi , puifqu'elles
avoient été repouffées avec une perte confiderable
; on dit même que le Gouverneur
de la Havanne , qui les commandoit , eft
du nombre des morts , & que l'Intendant
s'eft fauvé du côté de la Vera-Crux. Aptés.
cet avantage , les mutins ont brûlé leurs
plantations de Tabac , menaçant de n'en
plus cultiver , à moins qu'ils ne fuffent
maîtres d'en difpofer.
M.de Caflagneta a été nommé Lieutenant
General d'Artillerie , pour fervir fous M. le
Marquis de Lede , avec une penfion de :
1500 piftoles. M. le Marquis de Solre eft:
parti pour fe rendre au Congrès de Cambray.
On mande de Lisbonne , que le Roy
s'étoit fait reprefencer la permiffion qui a
été accordée en 1709 , aux Gouverneurs
des Pays conquis , de faire le commerce
comme les autres Sujets . Qu'après en avoir
examiné tous les inconveniens , il avoin
D'OCTOBRE. 139%
revoqué cette permiffion par un Decret
qui a été enregistré en la grande Chancelerie.
Il est défendu par ce Decret à tous
Vicerois , Capitaines Generaux , Gouverneurs
, Officiers de Guerre & de Juftice ,
de faire aucun commerce , tel qu'il foit ;
& le Roy declare que ceux qui contreviendront
à cette Loi , feront privez de
tous leurs emplois , penfions & charges ,
& qu'ils feront incapables d'en poffeder
jamais aucunes. Une flote compofée de
35 Vaiffeaux Marchands , mit à la voile le
mois paffé , fous l'efcorte de deux Vaiffeaux
de guerre ; vingt-neuf de ces Vaiffeaux
vont au Brefil , à Angola & au Cap- verd ,
& les fix autres à Fernambuque.
On a appris d'Angola , que plufieurs Prin
ces & Seigneurs de ce Royaume , ayant
pris les armes pour fe foultraire à la domination
des Portugais , le Gouverneur Generaf
de ce Royaume avoit envoié le Ma
jor de la Fortereffe de Bengal , avec un corps
de troupes contre ces rebelles , qui ont été
entierement diffipez. Quatre de leurs principaux
Chefs ayant été faits prifonniers ,
ont été envoiez au Gouverneur General ,,
avec un butin tres confiderable .
Le projet pour l'étaliffement d'une Com
pagnie de commerce à Lisbonne , n'a point:
été accepté.
Mij
13.83 LE MERCURE
il
trepriſe dans une ſation ſi avancée .
Suivant quelques avis de la Havanne ,
y a eu une efpece de foulevement de la
part des peuples de la campagne , qui mécontens
des nouveaux impôts fur le Tabac,.
s'étoient réunis , & s'étoient avancés , pour
couper la communication de Peau à cette
Ville ; qu'à leur approche les troupes de:
la garnifon avoient fait fur eux une fortie
qui ne leur avoit pas réuffi , puifqu'elles
avoient été repouffées avec une perte confiderable
; on dit même que le Gouverneur
de la Havanne , qui les commandoit , eft
du nombre des morts , & que l'Intendant
s'eft fauvé du côté de la Vera-Crux. Aprés
cet avantage , les mutins ont brûlé leurs
plantations de Tabac , menaçant de n'en
plus cultiver , à moins qu'ils ne fuffent
maîtres d'en difpofer.
M.de Caftagneta a été nommé Lieutenant
General d'Artillerie , pour fervir fous M. le-
Marquis de Lede , avec une penfion de :
1500 piſtoles. M. le Marquis de Solte eft:
parti pour fe rendre au Congrès de Cambray..
On Ón mande de Lisbonne , que le Roy
s'étoit fait reprefencer la permiffion qui a
été accordée en 1709 , aux Gouverneurs.
des Pays conquis , de faire le commerce
comme les autres Sujets . Qu'après en avoir
examiné tous les inconveniens , il avoin
D'OCTOBRE. 139
revoqué cette permiffion par un Decret
qui a été enregiftré en la grande Chancelerie.
Il est défendu par ce Decret à tous
Vicerois , Capitaines Generaux , Gouverneurs
, Officiers de Guerre & de Juftice ,
de faire aucun commerce , tel qu'il foit ;
& le Roy declare que ceux qui contreviendront
à cette Loi , feront privez de
tous leurs emplois , penfions & charges ,
& qu'ils feront incapables d'en poffeder
jamais aucunes. Une flote compofée de
35 Vaiffeaux Marchands , mit à la voile le
mois paffé , fous l'efcorte de deux Vaiffeaux
de guerre ; vingt- neuf de ces Vaiffeaux.
vont au Brefil , à Angola & au Cap- verd ,
& les fix autres à Fernambuque.
On a appris d'Angola , que plufieurs Princes
& Seigneurs de ce Royaume , ayant
pris les armes pour fe foultraire à la domination
des Portugais , le Gouverneur Generaf
de ce Royaume avoit envoié le Ma
jor de la Fortereffe de Bengal , avec un corps
de troupes contre ces rebelles , qui ont été
entierement diffipez. Quatre de leurs principaux
Chefs ayant été faits prifonniers ,
ont été envoiez au Gouverneur General,
avec un butin tres confiderable .
Le projet pour l'étaliffement d'une Com
pagnie de commerce à Lisbonne , n'a point:
été accepté.
Mij
140
LE MERCURE
LE
A Naples le 10 Octobre 1720.
E. Comte de Vallis , Gouverneur de
Melline , eft parti pour Rome , d'où
il fe rendra à Vienne. On a envoyé à
Palerme un Vaiffeau de guerre & fept Tartanes
, fur lefquelles on a embarqué 800 .
hommes de recrue , & une grande quantité
de provifions. Toutes les Troupes Imperiales
qui arrivent ici de Sicile , ont ordre
de fe rendre en differens quartiers de
la Lombardie. Le Vaiffeau de guerre nommé
Sainte-Barbe , venant de Sicile , a été
foumis à la quarantaine , que l'on fait obferver
avec beaucoup d'exactitude . Le 19:
du mois paffé , la fête de S. Janvier , Patron
de cette Ville , fur celebrée dans l'Eglife
Metropolitaine avec un grand concours
de peuples. On eut la fatisfaction de
voir le miracle ordinaire du Sang , qui fe
Liquefie , lorfqu'il fut mis proche du Chef
de ce Saint. Le même miracle s'eft renouvellé
pendant toute l'Octave ; ce qui fait
efperer au peuple que cet Etat fera préfervé
du mal contagieux .
On a appris de Sardaigne , que le Comte
de Saint-Rhemy , qui a pris poffeffion de
ce Royaume au nom du Duc de Savoie ,
avoit retenu à Cagliari le Comte de Porto,
qui y reftera en otage , jufqu'à ce que les
D'OCTOBRE. 141
Espagnols ayent renvoyé les Canons apar→
tenans à ce Royaume , qu'ils ont fait paffer
en Eſpagne avant que de s'embarquer.
A Rome le 12 Octobre 1720 .
N ici à prendre toutes les
Oprécautions neceffaires ,pour empêcher
que le mal contagieux ne puiffe fe coinmuniquer
à l'Etat Ecclefiaftique. Il a été arrêté
que les Portes de la Ville aufquelles on a
mis des barrieres , feroient fermées une
heure après le Soleil couché , & que toutes
les lettres , fans en excepter aucune ,
feroient portées à la Douanne pour y être
parfumées , à caufe qu'il s'y trouvoit ordinairement
des Lettres de France. Le Cardinal
d'Althan , Ambaffadeur de l'Empereur
en cette Cour , n'ayant pas voulu que
le Courier de Milan fût foumis à cet ordre
, envoya un de fes Gentils- hommes
audevant du Courier , auquel il prit la valife.
Les Magiftrats de la Santé en portes
rent leurs plaintes , & fe recrierent fort fur
le mepris que l'on faifoit des ordres de
Sa Sainteté. Le Gentilhomme & fon Cocher
furent decretez . Cela n'a pas empêché
que le Cardinal d'Althan n'ait renvoyé
Pordinaire fuivant , un autre Gentilhomme,
qui fe contenta d'enlever les Lettres à
Fadreffe de cette Eminence , & obligea
5
842 LE MERCURE
le Courier de retourner à Milan . Cette
affaire fait grand bruit ici , & l'on craint
qu'elle n'ait des fuites facheufes .
Le Pape a été voir les marbres & les
belles ftatues que l'on a placées depuis peu
dans la grand'Salle du Vatican. Le Cardinal
Scotti a fait prendre les allignemens
de la rue qui va de la porte de Saint Paul
à cette Eglife. On prétend que le Pape a
deffein d'y faire conftruire des Galleries en
portiques pour la commodité des Pelerins .
On fe flatte que M. Aldobrandini , qui
eft parti pour l'Épagne en qualité de Nonce
de S. S. réuffira dans fes negociations au
fujer de l'accommodement entre la Cour
de Rome & celle de Madrid . Les Imperiaux
continuent de lever des contributions
qu'ils ont impofées fur differens Etats
de l'Italie . Le Duc de Parme y a fatisfait
entierement. Le Pape a donné les ordres ,
pour faire embarquer 2000 mefures de
bled pour Marſeille , & 1000 pour Avignon .
Il a permis aux Marchands d'en faire fortir
de l'Etat Ecclefiaftique à condition:
qu'ils ne pourroient le tranfporter qu'en
Provence , pour procurer quelque foulage
ment au Peuple. S. S. dans un Confiftoire
qui fe tint le mois dernier , ouvrit & ferma
la bouche au Cardinal Salerno , & au
Cardinal d'Althan. Il donna au premier
le uitre de Sainre Prixque , & au. fecond.
›
D'OCTOBRE. 143
celui de Sainte Sabine . Le Cardinal Zondodari
eft parti pour Sienne la patrie , où
il doit faire quelque fejour. On n'a point
tenu Chapelle le jour de la Nativité de
la Sainte Vierge dans l'Eglife de Sainte .
Marie Majeure , fuivant la fondation du
Roy d'Efpagne , par la raifon que le Cardinal
d'Althan a pretendu que c'étoit à
lui à la tenir , parce que cette fondation
à été faite au moyen du revenu annuel
qui a été affigné au Chapitre de l'Eglife
de Sainte Marie Majeure fur le Royaume
de Sicile que l'Empereur poffede à pre-
Tent ; infiftant que le Cardinal Acquaviva
ne pouvoit en faire les honneurs , qu'après .
que le Roy d'Eſpagne auroit affigné un
autre fonds pour cette fondation. On ne
trouva pas d'autres moyens de fufpendre
ces differends > qu'en remettant cette ceremonie
à un autre jour. Le Cardinal Acquaviva
a fait la fonction de donner la
Clef d'Or à Don Antonio Colonna , par
ordre du Roy d'Efpagne , en confiderations
de fes fervices .
Les dernieres Lettres de Modene marquent
que la Princeffe Hereditaire étoit
entierement rétablie de fa petite verole
& que l'aînée des Princeffes , qui en avoit
été auffi attaquée , commençoit à fe mieux
porter.
Le 30 du mois paflé , le Pape tint Confi
144 LE MERCURE
ftoire , dans lequel il fit une promotion
de trois Cardinaux , qui font M. Gio Francefco
Barbarigo, Venitien , Evêque de Brefcia
, de l'Ordre des Prêtres , qui avoit été
relervé in petto dans la promotion du 29
Novembre 1719 M. Carlo - Borgia , Efpagnol
, Patriarche des Indes , & le Pere
Alvaro Cienfuegos , Efpagnol , de la
Compagnie de Jefus , qui elt auprès de
l'Empereur , l'un & l'autre de l'Ordre des
Prêtres . On dit par avance que M. Buffi
portera le Bonnet au Cardinal Cienfuegos.
à Vienne M. Bianchini au Cardinal Barbarigo
, & l'Abbé Caudi au Cardinal Borgia
en Espagne. Il cft arrivé enfin un Courrier
de Milan avec les Lettres qu'on avoit retenues
pendant deux femaines à Aquapendente
, pour y être parfumées , fuivant
les ordres qui en avoient été donnés . Les
Bulles que le Pape a accordées à pour éri
ger l'Evêché de Vienne en Archevêché
ont été expediées depuis quelque tems pour
la Cour de Vienne.
:
L'Abbé Archinto , Nonce à Cologne ,,.
a été nommé pour aller en Pologne remplacer
l'Abbé Grimaldi qui va à la Cour
de Vienne. Le Pape a nonumé M. Nicolas
, pour porter les Langes à la Princeffe
Epoufe du Pretendant , après qu'elle fera
accouchée.
Extra
D'OCTOBRE
MORTS DE PARIS.
Mã
Effire Pierre de la Brouë , Evêque
de Mirepoix , mourut en fon Diocefe
le Septembre.
Dame Antoinette Chaffebras , veuve de .
Meffire Claude Antoine Comte de Harville
, Seigneur de la Selle , Beaumoret ,
&c. mourut le 25 Septembre.
Meffire François Pidou , Chevalier
Seigneur de Saint Olon , Gentilhomme
ordinaire du Roy , cy-devant Envoyé Extraordinaire
de Sa Majesté vers la Republique
de Gennes , & fon Ambaffadeur à
Maroc , Commandeur de l'Ordre Royal
Militaire & Hofpitalier de Notre - Dame
de Mont- Carmel & de Saint Lazare de
Jerufalem , mourut le 27 Septembre.
Meffire André François Bombes , Cha
noine de l'Eglife Cathedrale de Paris ,
mourut le 29 Septembre.
Meffire Mathieu de Montholon , Doyen
des Confeillers au Chaftelet , mourut le
29 Septembre.
Meffire Paul Hippolyte Sanguin de
Livry , Chevalier de l'Ordre de Saint Jean
de Jerufalem , & Marêchal des Camps &
Armées du Roy , mourut le 4 Octobre
Antoine Coyzevox , natif de la Ville
N
146 LE MERCURE
de Lyon , Sculpteur ordinaire du Roy ;
ancien Directeur , Chancelier & Recteur
de l'Academie Royale de Peinture & Sculpture
, mourut le 10 Octobre , âgé de
8 ans , ayant travaillé jufqu'à l'âge de
So ans avec le même feu , & acteint au
plus haut degré de fon Art , tant par l'extréme
correction , que par la quantité &
la promte execution de fes ouvrages.
•
Meffire Potier de Novion , fils unique
de M. de Novion Prefident à Mortier ,
mourut le de ce mois.
Meffire Jean Brebart , qui avoit été
reçu Maistre des Comptes en 1668 en'
mourut Doyen le 13 Octobre.
Dame Françoife- Agnès de Loyzes de
Paraffy , Epoufe de Meffire . Claude de
Machault , Chevalier de l'Ordre de Saint
Louis , & Officier des Vaiffeaux du Roy ,
mourut le 21 Octobre 1720 .
*
Dame Suzanne Midorge , veuve de
Meffire François de Venault de la Lande ,
Seigneur de Blaridy , ancien Exempt des
Gardes du Corps du Roy , mourut le 22
Octobre.
Meffire Antoine Bochart , Comte de
Champigny , Chef d'Efcadre & Confeiller
au Confeil de Marine , mourut le 23 Octobre
, âgé de 70 ans.
Meffire Antoine Charles Duc de GramD'OCTOBRE.
$42
mont , Pair de France , Souverain de Bidache
, Sire de Lefparre , Chevalier des '
Ordres du Roy & de la Toifon d'or ,
Gouverneur & Lieutenant General pour
Sa Majefté en Navarre & Bearn , Gouverneur
de la Ville , Citadelle & Châteaux
de Bayonne , du païs adjacent , & de la
Citadelle de Saint Jean Pied-de - Port ,
mourut le 24 Octobre , âgé de
ans .
Le Sieur Nicolas de Fer , connu par les
Cartes de Geographie qu'il a données au
Public , mourut le 25 Octobre.
MORTS ETRANGERES.
Ona Maria -Toda Coutinho - Centellas
Dde Guzinan , qui étoit entrée Religieufe
en 1606 à l'âge de huit à neuf ans
dans le Monaftere d'Arouca de l'Ordre de
Saint Bernard à Lisbonne , y mourut le
Aouft 1720 , âgée de 122 ans , après
avoir vû trois fiecles : Elle étoit fille de
Gafton Coutinho , Commandeur de l'Ordre
de Chrift , & de Dona Philippa de
Soufa , & foeur de Don Gonçale Coutinho
, Confeiller d'Etat & Gouverneur
des Algatues..
Don Louis de Vafconcellos de Soufa'
de Camera , ſecond Comte de Caſtelmelhor
, Confeille d'Alfonfe VI. de
d'Etat
Don Pedro II. & de Jean V. Rois de
Portugal , Miniftre & Secretaire d'Etat ,
Nij
LE MERCURE
&c. mourut le is Aoult , âgé de 85 ans
Leandre Comte d'Anguiflola , Lieute
nant Colonel & premier Ingenieur des
Fortifications de l'Empereur , mourut à
Vienne le 30 Aouſt , âgé de 68 ans.
Françoiſe Dorothée , fille de Jean Leopol
Donat , Prince de Trautfon , Comte de
Falckenftein , Chevalier de la Toifon d'or ,
& Confeiller d'Etat de l'Empereur , mourut
le 5 Septembre s , âgée de neuf ans.
•
N. de Konigferg , Evêque de Leitmaritz
en Boheme , Doyen de la Cathedrale de
Cologne , Chanoine de Strasbourg , Confeiller
de Sa Majefté Imperiale , & premier
Miniftre d'Etat de l'Electeur de Cologne
, mourut à Bonn le 6 Septembre ,
en fa 71 année.
Ignace de Louina , Evêque de Neustadt,
qui avoit efté Precepteur de PEmpereur
Charles VI . mourut le 11 Septembre.
Le Sieur Marimont , Auditeur de Rote ,
Efpagnol , mourut à Rome le 10 Septembre.
. Jean Antoine , Comte de Wurben &
Freidental , Chambellan de l'Empereur ,
mourut à Vienne le 17 Septembre , âgé
de 56 ans.
>
Angela de Mello , veuve du Vicomte
Martin Correa Dame d'honneur de
feuë Marie- Sophie Reine de Portugal ,
mourut à Lisbonne le Septembre 1720.
D'OCTOBRE. 149
La Comteffe de Lincoln , mourut à
Londres le 6 Octobre.
CHARGES ET DIGNITEZ.
Le Prince de Saint Maurice , Lieutenant
Maréchal General de Camp , & Gouverneur
de Cremone , fut nommé par
l'Empereur le 10 Septembre , General
d'Artillerie .
Le Pere François Sangueffa , Ex- Provincial
des Recollets de la Province de
la Baffe- Allemagne , fut nommé en Septembre
par l'Empereur , Coadjuteur de l'Evêque
de Ruremonde.
N. Erdedi , Evêque de Neutra , premier
Affeffeur du Confeil Aulique de
Hongrie , fut nommé en Septembre Vice-
Chancelier du même Confeil , & quelques
jours après , Confeiller d'Etat de l'Empereur.
Le Prince de Wirtemberg , a été nommé
Gouverneur general de la Servie.
Le Septembre , le fieur Crifpo Auditeur
de Rote , fut nommé par le Pape
Archevêque de Ravenne .
En Septembre le Roy d'Efpagne accorda
au Marquis de Lede , qui avoit commandé
les Troupes de Sa Majefté en Sicile , la
dignité de Grand d'Espagne.
Nomma Lieutenant General Don
Niij
150 LE MERCURE
Antonio Gaſtaneta , General d'Artillerie.
Sa Majefte Catholique nomma auffi à
l'Evêché de Tuy , vacant par la démiſſion
volontaire de Don Anfelme de la Torre
Don Fernand Ignace d'Arango , Abbé de
Saint Ifidore de Leon.
Donna cette Abbaye à Don Marcellino
de San Pedro , Inquifiteur de Barcelonne.
Le Gouvernement de Motril , à Don
Jofeph de Miranda , Lieutenant Colonel,
& celuy de Valdivia , à Don Joſeph d'Olazagutia.
Extrait des Regiftres du Confeil d'Eftat.
au
SUR
UR ce qui a efté repréſenté au Roi ,
étant en fon Confeil , que la condition
de ceux qui font demeurez Actionnai→
res de la Compagnie des Indes , fe contentant
de profiter du benefice attaché aux
Actions , eft fi differente de celle d'un
grand nombre de particuliers qui ont retiré
la plus grande partie de leurs fonds de ladite
Compagnie , pour porter ailleurs la
fortune confiderable qu'ils ont faite en
convertiffant leurs Actions en Billets de
Banque ; que pendant que les uns ont le
deplaifir de voir baiffer le prix des Actions
beaucoup audeffous de ce qu'elles leur ont
coûté , les autres au contraire font parveD'OCTOBRE.
151
nas en peu de tems à une opulence odieufe
au public , & contraire au bien de l'Etat ;
Que pour s'en affurer la durée , il y en a
qui ont fait paffer des fommes immenfes
dans les Pays étrangers , qu'ils y ont pla
cées dans les fonds publics , ou emploiées
en achats de Diamants & autres Marchandifes
auffi précieufes que fuperflues ; Que
d'autres ont abufé de leur fortune fubite
pour acheter des fonds de Terre ou des
maifons, qu'ils ont portées à un prix exceffif,
ou pour faire des amas de toute forte de
denrées , voulant encore augmenter leurs
richeffes par un monopole puniffable fuivant
les Loix ; Qu'enfin prefque tous ont
refferré les Efpeces d'or & d'argent qu'ils
n'ont pû emploier ; Enforte que tous ces
abus ont cauſé en grande partie la cherté
des Denrées , le difcredit des Actions &
des Billets de Banque , l'interruption du
travail des Manufactures , & la neceflité
où fe trouve réduite une partie confiderable
des habitans des meilleures Villes du
Royaume : Et quoique ces defordres caufez
par des richeffes fi inégalement partagées ,
puffent engager Sa Majesté à taxer ceux
qui en font un fi mauvais ufage , Elle a
jugé neanmoins que pour ne pas alarmer
les Actionnaires de bonne foi, qui ont confervé
leurs Actions , par l'exemple d'une
taxe dont les confequences pourroient leur
Niiij
952
LE MERCURE
paroître dangereufes , Elle devoit remedier
a ces maux par une voie plus douce & plus
facile , en obligeant les anciens Actionnaires
qui en font la caufe , à racheter des
Actions pour un fonds proportionné à celui
qu'ils avoient auparavant , & remettre par
là dans le Commerce au moins une partie
des richeffes qu'ils en ont detournées , afin
que leur fortune devenant utile au Royaume
& à eux-mêmes , elle ferve à foutenir
un établiffement qui peut eftre auffi avantageux
à l'Etat que celui de la Compagnie
des Indes : A quoi étant neceffaire de pourvoir,
Oui le Rapport , SA MAJESTE ETANT
EN SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a ordonné &
ordonne .
ART. I. Que ceux defdits anciens Action
naires de la Compagnie des Indes qui fe
trouveront compris dans les Rolles qui feront
à cet effet arrêtés au Confeil , foient
tenus dans quinzaine du jour de la fignification
qui leur fera faite dudit Rolle , de
rapporter en compte à ladite Compagniele
nombre d'Actions pour lequel ils feront
emploiez ; A quoi faire ils feront contraints
par toutes voies , comme pour les propres
deniers & affaires de Sa Majefté.
II. Veut Sa Majefté que les Actions.
rapportées en compte à ladite Compagnie ,
y, teftent pendant le tems de trois années,
D'OCTOBRE.
853
à compter du jour dudit dépoft , pendant
lequel tems les Dividendes des Actions dépofées
, feront payez aufdits Actionaires ,
après quoi lesdites Actions leur feront remiles
pour en difpofer ainfi que bon leur
femblera , fans que dans aucun tems , &
fous quelque prétexte que ce foit , ils puiffent
eltre taxez pour raifon des profits qu'ils
ont faits ou pourront faire ci après dans
ladite Compagnie , conformément à l'Article
VIII. de l'Arreft du Confeil du 29
Aouft derniere!
III . Et aqtendu que ladite Compagnie
des Indes fe trouve encore avoir une quantité
confiderable d'Actions , du nombre de
deux cens cinquante mille , fixé par l'Arreft
du Confeil du 15 Septembre dernier ,
ceux defdits anciens Actionnaires qui
n'auront plus en leur poffeffion , ou qui
n'auront pù trouver à acheter le nombre
d'Actions pour lequel ils feront compris
aufdits Rolles , pourront en acquerir de
ladite Compagnie fur le pied de treize mille
cinq cens livres l'Action , en Billets de
Banque , qui feront enfuite brûlez en la
forme prefcrite par les differens Arreſts du
Confeil fur ce rendus.
?
IV. Et pour parvenir à connoître & à
diftinguer les Actionnaires de bonne foy
qui ont confervé les Fonds qu'ils avoient
dans la Compagnie , & qui ne doivent
154
LE MERCURE
pas être compris dans les Rolles qui feront
arreftez en execution du prefent Arreß ;
Sa Majesté a ordonné & ordonne que tous
ceux qui font porteurs d'Actions remplies
de ladite Compagnie des Indes , foient te
nus dans huitaine , à compter du jour de la
publication du prefent Arreft , de les dépofer
en Compte d'Actions entre les mains
du Sieur Delanauze , Prépofé pour tenir
les Livres des Comptes d'Actions , lefquelles
y refteront feulement jufqu'au 15 Novembre
prochain , paffé leqsiat jour les
Actionnaires pourront en difpofer , après
qu'elles auront été timbrées d'um fecond
Sceau de la Compagnie. Fait au Confeil
d'Etat du Roy , Sa Majesté y eſtant , tenu
à Paris le vingt- quatrième jour d'Octobre
1720. Signé PHELYPEAUX .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat.
Su
Ur ce qui a efté reprefenté au Roy ,
étant en fon Confeil , par les Directeurs
de la Compagnie des Indes , que quoique
Sa Majesté lui ait accordé le bénefice du
travail des Monnoyes pendant neuf ans ,
par l'Arreft du 25 Juillet 1719. ladite
Compagnie voulant cependant donner de
nouvelles marques de fon zele pour le
fervice de Sa Majeſté , luy propoſe d'ordonner
que les Elpeces & Matieres d'or
D'OCTOBRE.
iss
& d'argent foient reçûës dans les Hôtels
des Monnoyes fans Billets de Banque ,
fur le pied de foixante dix-huit livrés le
Marc d'Argent de onze deniers de fin , &
de onze cens foixante - dix livres le Marc
d'Or de vingt- deux Karats , & les autres
Efpeces & Matieres à proportion , moyennant
quoy ladite Compagnie s'engageroit
à payer , par forme de don gratuit , à Sa
Majesté vingt millions , à raifon de cinq
millions par mois , à commencer au mois
de Novembre prochain , & de fournir en
outre dix millions par mois à commencer
au premier Novembre prochain , tant fur
le prix des Fermes Unies , que fur les
autres Recouvremens dont elle eft chargée
: Lefquelles propofitions ayant eté examinées
par Sa Majefté , elles luy ont paru
d'autant plus avantageufes , qu'il a efté
par Elle indiqué des débouchez fuffifans
pour tous les Billets de Banque qui font
dans le Commerce , & qu'Elle ſe trou.
vera par là en état de fatisfaire aux engagemens
qu'Elle a pris par l'Arreft du
10 du prefent mois , de payer en Efpeces
tout ce qui refte par Elle dû du courant.
de la prefente année ; Ouy le Rapport :
SA MAJESTE ESTANT EN
SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a accepté
& accepte les offres de la Compagnie des
356 LE MERCURE
Indes , & en confequence ordonne qu'i
lui fera payé par forme de don gratuit ,
la fomme de vingt millions en quatre
termes & payemens égaux de mois en
mois , à raifon de cinq millions chacun ,
à commencer au mois de Novembre prochain
; outre laquelle femme de vingt
millions il luy fera encore payé par ladite
Compagnie , fuivant ces offres , celle de
dix millions par chacun mois , à commen→
cer au premier Novembre prochain , fur
& en déduction , tant du prix des Fer→
mes Unies , que des autres Recouvremens
dont elle eft chargée : Veut en conſequence
Sa Majesté qu'à commencer du
jour de la publication du prefent Arreſt ,
il ne foit plus reçû de Billets de Banque
dans les Hôtels des Monnoyes , & que
les Efpeces & Matieres qui y feront por
tées , foient reçûës à raifon de quarante
fix livres feize fols le Louis de vingtcinq
au Marc , les demis à proportion ;
de lept livres feize fols l'Ecu de dix au
Marc , les demis , tiers d'Ecus, ou Louis
d'argent , les quarts , fixiémes & douziémes
à proportion ; de onze cens foixante
dix livres le Marc des anciens Louis , &
de l'Or du titre de vingt-deux Karats ;
& de foixante dix- huit livres le Marc des
anciens Ecus & de l'argent du titre de
onze deniers de, fin , les autres Efpeces
DOCTO BR E.
157
Matieres d'Or & d'Argent à proportion
: Sur lequel pied la valeur en fera
payée comptant en Efpeces de la nouvelle
fabrication ou reforme ordonnée par l'Edit
du mois de Septembre dernier . Fait
au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majesté
y étant , tenu à Paris le vingt- quatriéme
jour d'Octobre mil fept cent vingt
Signé , PHELY PEAUX.
Extrait des Regifres du Confeil d'Etat.
LE
E Roy s'étant fait repréſenter
en fon
Confeil fon Edit du mois de Septembre
dernier , par lequel Sa Majefté auroit fixé
le prix des nouvelles
Efpeces d'Argent fur
le pied de quatre -vingt- dix livres le Marc ,
& celles d'or à proportion : & Sa Majesté
defirant de rendre la Monnoye
plus forte
pour l'avantage
du Commerce
& la dimi
nution du prix des Denrées. Ouy le Rapport
, SA MAJESTE ' ESTANT EN SON CONSEIL
,
de l'Avis de Monfieur le Duc
d'Orleans
Regent , a ordonné & ordonne.
ART.I. Que les nouvelles Efpeces d'Or
& d'Argent
fabriquées en confequence
de
P'Edit du mois de Septembre
dernier , auront
cours dans le public jufqu'au premier
Decembre
prochain , fur le pied porté par
ledit Edit , fçavoir , les Louis d'Or pour
$ 4. livres , les demis à proportion
, & les
158
LE MERCURE
Ecus pour 9 livres , les demis, tiers , quarts ,
fixiémes & douzièmes à proportion ; que
les anciennes Efpeces continueront d'être
reçues dans le Commerce jufqu'audit jour
premier Decembre , fur le pied qu'elles y
ont actuellement cours , & que les Efpeces
& Matieres , tant à reformer qu'à conver
tir , feront reçues dans les Hôtels des Monnoies
, à commencer du jour de la publication
du prefent Arreft , fur le pied , fçavoir,
de 46 livres 16 fols les Louis à reformer
de vingt- cinq au Marc , les demis à proportion
; de 7 livres 16 fols les Ecus de
dix au Marc , les demis , tiers , quarts ,
fixiémes & douzièmes à proportion ; de
1170 livres le Marc d'anciens Louis , & de
l'or du titre de vingt- deux karats , & de
78 livres le Marc des anciens Ecus ou de
l'argent du titre de onze deniers .
II. Qu'audit jour premier Decembre
lefdites Efpeces de nouvelle fabrique &
reforme n'auront plus cours que pour 45
livres le Louis , & 7 livtes 10 fols l'Ecu ;
les anciennes Efpeces pour 36 livres le
Louis de vingt-cinq au Marc , 45 livres
celui de vingt au Marc , 30 livres celui de
trente au Marc , 24 livres 12 fols celui de
trente- fix un quart au Marc ; 6 livres
l'Ecu de dix au Marc , 7 livres 10. fols ,
l'Ecu de huit au Marc , 6 livres 12
fols celui de neuf au marc , & de 20 fols
la livre d'argent , les demis & autres diD'OCTOBRE.
159
minutions defdites efpeces à proportion ;
Et cependant que les Efpeces à reformer
feront payées dans les Hôtels des Monnoies
, à commencer ledit jour premier
Decembre prochain , fur le pied de 37 liv..
16 fols le Louis de vingt- cinq au Marc ,
& de 6 livres 6 fols l'Ecu de dix au Marc ;
Et les matieres à proportion de 945 liv.
le Marc des anciens Louis à convertir , ou
de l'or du titre de vingt-deux Karats , &
de 63 livres le Marc des anciens Ecus à
convertir , ou de l'argent du titre de onze
deniers , & ce jufqu'au premier jour de Janvier
de l'année prochaine 172 1 .
III. Veut Sa Majefté qu'à commencer
audit jer premier Janvier , les Elpeces
neuves foient réduites à 36 livres le Louis ,
& à 6 livres l'Ecu ; Comme auffi que les
anciennes Efpeces foient reduites dans le
public à 27 livres le Louis de vingt- cinq
au Marc , 33 livres 15 fols celui de vingt
au Marc , 22 livres 10 fols celui de trente
au Marc ; 18 livres 9 fols celui de trentefix
un quart au Marc : De 4 livres io fols
l'Ecu de dix au Marc , s livres 12 fols celui
de huit au Marc , 5 livres celui de neuf
au Marc , & de quinze fols la livre d'argent
, Et neanmoins que les Efpeces à reformer
feront payées dans les Hôtels des
Monnoyes , à commencer ledit jour premier
Janvier prochain , fur le pied de 28
livres 16 fols le Louis de vingt cinq au
160 LE MERCURE "
Marc , & de 4 livres 16 fols l'Ecu de dix
au Marc, & les matieres à convertir , à
proportion de 720 livres le Marc d'anciens
Louis , ou de l'or de vingt- deux Karats ,
& de quarante-huit livres le Marc des anciens
Ecus , oude l'argent de onze deniers.
Fait au Confeil d'Etat du Roy , Sa Majesté
y étant , tenu à Paris le vingt quatrième
jour d'Octobre mil fept cent vingt. Signé
PHELYPEAUX.
E TAT CONTENANT
LES NOMS
furnoms des Treforiers - Receveurs Geueraux
& Payeurs des Rentes de l'Hôtel
de Ville de Paris , & des Controlleurs
Generaux defdits Payeurs , que le Roy
étant en fon Confeil a nommés & choifis
pour faire , à commencer en la prefente
année ml fept cent vingt , la Recette
le Payement & le Controlle des quatorze
Parties de Rentes établies par les Edits
de Sa Majesté du mois de Juin dernier ,
du prefent mois d'Aouft , dans lef
quelles quatorze Parties , les Rentes perpetuelles
& viageres créées par autres
Edits dudit mois de Juin , & du prefent
mois , & les Rentes viageres dites
Tontines avec les anciennes Rentes viageres
ci-devant conftituées fur ledit Hộ-
tel de Ville feront diftribuées ; fçavoir
les
D' OCTOBRE. 161
les Rentes perpetuelles dans les dix premieres
Parties, & les Rentes viageres
des Tontines avec les autres Rentes viageres
tant anciennes que nouvelles , dans
les quatre dernieres Parties , fuivant
conformément aufdits Edits du mois de
Juin dernier , & du prefent mois.
PREMIERE PARTIE.
Me Martin-Bernard Fredy , Payeurs.
Me Jean Peronnet , Controlleur.
DEUXIEM E.
Me Michel Defponty , Payeur..
Me Nicolas Foreftier , Controlleur.
ཐ་
TROISIEM E.
Me Jofeph- Pierre Iffaly , Payeur.
Me Jean-Horace Peftel , Controlleur..
QUATRIEM E.-
Me Charles Dorel , Payeur.
Me Henri Sauvage , Controlleur.
CINQUIEM E.
Me René Berger , Payeur.
Me Gilles Germain , Controlleur-
SIXIEME..
Me Claude Guillois , Payeur.
Me Guillaume Lafnier , Controlleur.-
162 LE MERCURE
SEPTIEME.
M Eftienne le Droit , Payeur.
Me Jofeph- Simon Chebron , Controlleur.
HUITIEM E.
Me Louis -Jacques Baudry , Payeur.
Me Nicolas Thierriot , Controlleur .
NEUVIEME.
Me. Eftienne Garnier , Payeur.
Mc André Thevenot , Controlleur.
DIXIEME .
Me Louis Marchand , Payer.
Me Eftienne Lambert , Controlleur.
ONZIEME.
Me Antoine de Pigis , Payeur.
Me Antoine Chevrot , Controlleur.
DOUZIEM E.
Me Nicolas Morel , Payeur.
Me Jacques Garnier , Controlleur.
TREISIEM E.
Me Antoine Eſtival , Payeur..
M Jean-Baptifte le Grand , Controlleur.
QUATORZIEME.
Me Louis- Denis Longuet , Payeur .
Me Jean Sandré , Controlleur.
Fait & arrêté au Confeil d'Etat du Roy
D'OCTO BR E. 163
tenu à Paris le trente uniéme jour d'Aouft
mil fept cent vingt. Signé PHELYPEAUX.
Regiftré en la Chambre des Comptes le 21
Octobre 1720. & Collationné.
Extrait des Registres du Confeil d'Etat
Surc
fe
Ur ce qui a été reprefenté au Roy ,
étant en fon Confeil , qu'en execution
de l'Arseft rendu en iceluy le 30 Aoust
dernier , portant qu'en vertu des Commillions
du grand Sceau , il fera établi
foixante Confeillers du Roy Agents de
Change , Banque , Commerce & Finances ,
aufquels feuls il fera permis de s'immifcer
dans les negociations , il vient d'être choiſi
& agréé foixante Sujets pour remplir lef
dites Commiffions ; mais qu'il eft neceffaire
de leur donner un temps fuffifant pour
mettre en état de les obtenir , en fatisfaifant
aux conditions tequiles à cet effet
par ledit Arreft ; & que cependant il eft
de l'intereft public de permettre dès à
fent aufdits foixante particuliers agréez ,
d'entrer dans l'Exercice deídites fonctions
avec défenſes à tous autres de s'y immifcer;
lefdits foixante Agents de Change
étant plus que fuffifans pour toutes les
negociations au moyen de quoy il n'y
aura plus aucune neceffité de tolerer plus
>
pre-
>>
O ij
164
LE MERCURE
t
long- temps l'affemblée tumultueufe qui fe
fait à la Bourfe , & qui nonobftant toures
les précautions qu'on a pû y apporter,
préjudicie confiderablement aux Arts &
Métiers , & donne lieu à une infinité
d'abus , de fraudes & de defordres : A quoy
Sa Majesté voulant pourvoir , Ouy le Rap
port : LE ROY ESTANT EN
SON CONSEIL , de l'avis de Monfieur
le Duc d'Orleans Regent , a accordé
& accorde aux foixarte Particuliers choifis :
& agréez pour remplir lefdites Comuniffions
d'Agents de Change , le temps &
efpace d'un mois , à compter du jour de
la publication du prefent Arreft , pour fe
mettre en état de pouvoir eftre pourvûs
defdites Commiffions , en fatisfáifant aux
conditions requifes à cet effet par PArreſt:
du Confeil du 30 Aouft dernier ; & faure
par eux d'y fatisfaire dans lèdit temps , &
iceluy paffé, veut Sa Majefté qu'ils ne
puiffent eftre admis aufdites Commiffions,.
aufquelles il fera pourvû : Et cependant :
permet Sa Majefté aufdits foixante Parti--
enliers agréez & dénommez dans l'Etat :
annexé à la minute du prefent Arreft , de :
commencer du jour de la publication diceluy
l'Exercice défdites fonctions d'Agents
de Change Fait Sa Majefté défenſes à
tous Courtiers & autres , de s'immifcer
dans, lefdites fonctions , & de femefter
D' OCTOBRE.
165
d'aucunes negociations , & à tous Banquiers
, Marchands , Negocians ou autres ,
de fe fervir à cet effet de leur entremife ,.
à peine de trois mille livres d'amende contre
chacun des contrevenans , appliquable
moitié à l'Hôpital , & moitié au dénonciateur
: Ordonne Sa Majefté que Mardy
29 du prefent mois , la Bourſe établie à
l'Hôtel de Soiffons fera & demeurera fermée:
Fait Sa Majesté défenfes à toutes
perfonnes de s'y affembler à l'avenir , ni
aux environs , ni en aucuns autres lieux.
& quartiers que ce puiffe eftre , à peine de
prifon ; comme auffi à toutes autres per--
fonnes que lefdits foixante Agents de Change
, de tenir Bureaux pour les negocia
tions , à peine de trois mille livres d'ámende.
Enjoint Sa Majefté au Sieur Lieutenant
General de Police de la Ville de
Paris , de tenir là main à l'execution du
prefent Arreft , lequel fera lû , publié &.
affiché par tout où befoin fera. Fait au
Confeil d'Etat du Roy , Sa Majeſté y
étant , tenu à Paris le vingt- cinquiéme
jour d'Octobre mil fept cent vingt.
signé , PHELYPEAUX.
•
166 LE MERCURE
ETAT DES AGENTS DE CHANGE
agréez pour remplir les Soixante
Commiffions.
Le Gras.
Prevoft.
Dallée l'aîné.
Dallée le jeune .
Navarre.
Geneſteft.
Chabert,
De la Croix .
Carret.
Dufaux.
Beaubec de Vallerey.
Gaftebois .
Baudouyn.
Moret.
Pifcatory.
Gibert.
De Mogé.
Prevoft l'aîné.
Caumont.
Frecot.
Collin le Maître
Brillon.
Barbier de S. Mars.
Rabuffeau.
Payrefaube.
Regnouf.
Perié.
Guinoix.
Olivier.
Boulay.
Duffol.
Fremyot.
Prevost Depreaux.
Herinx. A
De Lavau.
Ragon.
Faure.
Pouget.or
Guyot .
Demarine.
De la Cou Pignard.
May.
Ducoin.
Amiot Dumeſnil.
Daudement.
Savoye.
Sandelyon .
Lefcalier.
Poirfin..
t
D'OCTOBRE. 167
Duchefne.
Demonflys.
Holbach .
Ferlet.
La Garde.
Walon.
Defarcy.
Le Jay.
Duchefne .
Rulault de Che nerun
.
*
Fait & arrefté à Paris le vingt- cinquié
me jour d'Octobre mil fept cent vingt
Signé , PHELY PEAUX .
Extrait des Regiftres du Confeil d'Etat.
E ROY ayant par refultat de fon Con
Lei
feil de ce jourd'hui , accepté les offres
des Directeurs de la Compagnie des Indes
, de payer le prix du Bail des Fermes
Generales en douze payemens égaux de
mois en mois , à commencer du premier
Novembre prochain , & même pour affarer
la regularité defdits Payemens , de remettre
par forme d'avance entre les mains
du Garde du Trefor Royal jufqu'à concurrence
de la fomme de dix Millions de liv.
le tout aux charges & conditions portées
par ledit Refultat ; & Sa Majesté voulant
leur faciliter les moiens de faire ladite
avance , Ouy le Rapport: SA MAJESTE'
ESTANT EN SON CONSEIL , de l'Avis de
Monfieur le Duc d'Orleans Regent , a per
168 LE MERCURE
mis & permet aux Directeurs de la Com
pagnie des Indes d'emprunter jufqu'à la
fomme de quinze Millions , les deux tiers
en efpeces , & l'autre tiers en Billets de
Banque , à raifon de quatre pour cent d'inrereft
par années , auquel effet lefdits Directeurs
feront leurs Billets foli daires de la
totalité defdites fommes , payables au porteur
en Louis d'argent de trente au Maro
de la nouvelle fabrication , au cours du
jour de l'emprunt ; lefquels Billets feront
fignez indiftinctement par trois Directeurs
de ladite Compagnie des Indes ; & feront
fur le prefent Arreft toutes Lettres neceffaires
expediées . Fait au Confeil d'Etat
du Roy , Sa Majesté y étant , tenu à Paris
le vingt- feptième jour d'Octobre mil ſept
vingt. Signé, PHELYPEAUX.
DECLARATION DU ROY,
Contre les Collecteurs de l'impoft du Sel ,
qui y mêlent des corps étrangers.
QUIS & c. Par l'Article vir du
Lov
Titre IX. de la revente du Sel à petite
mefure de l'Ordonnance des Gabelles , du
mois de May 1680. il eft défendu aux Regratiers
d'alterer les meſures , & de mêler
aucun Sel de falpêtre ou de verrerie , ou
autres corps étrangers , parmi le Sel qu'ils
debiteront , à peine de cinq années de Galeres
D' OCTOBRE 169
leres contre les hommes , & du fouet &
banniffement de cinq ans contre les femmes
; mais quoique les Collecteurs de
l'impoft du Sel foient encore plus coupa
bles , puifque les particuliers compris dans
les Rolles de l'impoft du Sel , font forcez
de prendre & de payer le Sel de leur
impoft , au lieu qu'aucun de nos Sujets
n'eft obligé d'acheter du Sel à petites me
fures du Revendeur de la Paroiffe de fa
demeure ; que d'ailleurs les Collecteurs qui
mêlent des corps étrangers dans le Sel de
l'impoft , commettent le faux-faunage par
la vente qu'ils font du Sel qu'ils retien
nent en la place des corps étrangers
qu'ils mettent dans celui qu'ils délivrent ;
neanmoins la même Ordonnance du mois
de May 1680. ni aucunes des Declarations
rendues depuis , n'ont pourvû au genre
de peine qui eft dûë à ce crime , qui intereffe
les plus pauvres , & par confequent
les plus favorables de nos Sujets ; en forte
que les Officiers des Greniers à Sel fe
contentent pour l'ordinaire de prononcer
contre les coupables de fimples peines pecuniaires
: A ces Caufes , de l'Avis & c.
Nous avons par ces Préfentes fignées de
notre main , dit & ordonné , difons &
-ordonnons , voulons & Nous plaîft , que
J'Article VII du Titre de la Revente du
Sel à petites mefures , de l'Ordonnance
P
176 LE MERCURE
des Gabelles , du mois de May 1680. fort
executé contre les Collecteurs de l'impoft
du Sel , qui feront convaincus d'en avoir.
fait la délivance avec des mefures de fauffe .
continence , ou d'avoir mêlé dans le Sel
de l'impoft aucuns corps étrangers tels
qu'ils foient ; & en confequence que les
Collecteurs de l'iinpoft coupables defdits
crimes , foient pourſuivis à la requeſte de
nos Procureurs dans lefdits Greniers au
defaut des Parties civiles , & condamnez
par les Juges defdits Greniers , aux Galeres
pour cinq ans , fans préjudice des
reftitutions felon l'exigence des cas . Donné
à Paris le vingt- deuxième jour de Septem
bre 1720.
22172: CA LOA:DIZ
JOURNAL DE PARIS.
LE
E 29 du mois piffé M. le Comte de
Cruffol , fils aîné de M. le Duc d'Uzés ,
premier Pair de France , prêta ferment
de fidelité entre les mains du Roy , en
prefence de M. le Duc d'Orleans , pour
la furvivance du Gouvernement d'Angoumois.
Le 4 Octobre 1720 le Roy accompagné
de M. le Duc d'Orleans , de M. le
Duc de Chartres , & de M. le MaréchalD'OCTOBRE.
- 171
Duc de Villeroy , fit dans les Champs
Elifées la Revue des deux Compagnies des
Moufquetaires .
Le 7 entre neuf & dix heures du matin
, les Commiffaires du Confeil qui
compofent la Chambre des Vacations ,
s'affemblerent pour la premiere fois aux
Grands Auguftins . Ils entendirent d'abord
la Meffe du Saint Efprit , & allerent enfuite
dans la Salle qui leur avoit été préparée
, où l'on fit publiquement la lecture
des Lettres Patentes du Roy , en forme de
Commiffion , portant l'établiſſement de ladite
Chambre des Vacations , du 27 Septembre
dernier , Registrées en ladite Chambre le
7 du prefent mois , fur la requifition de
M. de Vaftan , Procureur General du
Roy.
Le 13 M. Rolin , ancien Recteur de
l'Univerfité , fut élu de nouveau , pour
remplir cette dignité à la place de M.
Coffin , qui s'en eft acquitté très dignement
pendant les deux ans qu'il en a fait
les fonctions .
M. le Maréchal de Montefquiou eft
parti en pofte , pour commander en chef
dans le Languedoc , la Provence & les
Cevennes.
L'Abbaye de Vauchelles en regle ,
Ordre de Cifteaux , Dioceſe de Cambray,
eſt vacante.
P ij
172 LE MERCURE
M. de Berthier , Premier Prefident du
Parlement de Toulouze , a efté gratifié
d'une penfion de 8000 livres , & M. le
Mazuyer , Procureur General du même
Parlement , d'une autre de 3000 livres .
M. de Harlay de Cely eft retourné
à Metz reprendre les fonctions de l'Intendance
.
Le Roy a donné le Prieuré de Saint
Marcel, Dioceſe de Besançon , à M. l'Abbé
Doroz , fils de M. le Procureur General
du même Parlement.
Il vaque par la mort de M. l'Abbé Belot
, les Abbayes de Maſdyon & de Bonlieu
; la premiere Ordre de Saint Benoift,,
Dioceſe de Saintes ; & la feconde , Ordre
de Cifteaux , Diocefe de Bordeaux.
Le 18 M. le Cardinal de Rohan partit
en pofte pour fe rendre à Strasbourg ,
où il fera un fejour de fix femaines.
Le 21 l'Hôtel de Ville commença
payer en Efpeces les arrerages des fix premiers
mois des Rentes nouvellement créées.
fur la Ville , ainfi que les viageres .
Le même jour M. "Dagueffeau Avocat
du Roy au Châtelet , & fils aîné de M.
le Chancelier , prononça à la rentrée du
Châtelet un difcours qui merita les applaudiffemens
de tous les auditeurs . Ce
Difcours roula fur la fimplicité dans le
ftile qui étoit preferable à tout autre . Il
D'OCTOBRE. 173
eta Homere , comme le modele de cette
belle fimplicité , qui avoit fait par cet endroit
l'admiration de tous les fiècles , malgré
les préjugez du nôtre . M. d'Argouges
Lieutenant Civil , fit enfuite un fort
beau difcours , dans lequel il fit voir en
quoy confiftoit la veritable éloquence du
Barrean.
M. le Cardinal d'Alface , Archevêque
de Malines , & frere du Prince de Chimay
, qui a fait un fejour de quelques
femaines à Paris , eft retourné à Malines.
Les Etats de Bretagne finirent leur:
féance le 24 de ce mois ; ils ont obtenu
de fe mettre au lieu & place de la Compagnie
des Indes , pour le remboursement
des Creanciers de cette Province . A l'é
gard des Rentes que l'on créera de nous
veau pour la Province , il n'y aura que
les Bretons qui y feront admis. Les Fermes
generales de Bretagne ont efté adju
gées à M. André , & à fa Compagnie ,
fur le pied de quatre millions 330 mille
livres , les frais en dehors , & ´cela pour
trois ans.
M. Gaudron a été nommé Intendant
des Invalides , à la place de M. de Verloris
qui eft decedé.
La maladie contagieufe continue à Mar
feille , ainfi que dans les Baftides ou mai
fons de campagne qui font aux environs
Piij
174 LE MERCURE
de cette Ville ; elle a fait auffi de grands
Favages à Aubagne , qui n'en eft qu'à
trois lieuës. Saint Canadet , Meyrargues
& Sainte Tulle , n'en font pas exempts.
Elle ne s'eft prefque pas fait fentir jufqu'à
prefent à Aix , dont le Parlement s'eft.
retiré à Saint Rhemi .
M. le Commandeur du Frefnoy eſt
mort ; il avoit une Commanderie en
Brie de 12000 livres de rentes , & une
penfion de 5000 livres fur l'Abbaye de
Saint Taurin d'Evreux.
Le General des Benedictins a preſenté
à Sa Majesté un Livre compofé par des
Religieux du même Ordre , intitulé la
France Chretienne , dans lequel on voit
l'origine de tous les Benefices , & des
fondations qui en ont efté faites par les
Rois de France .
Le 24 M. l'Evêque de Toul benit la
nouvelle Eglife de l'Abbaye de Nôtre-
Dame aux Bois , Fauxbourg Saint Germain.
Mehemet Effendi , qui vient en qualité
d'Ambaffadeur extraordinaire de la
Porte en France , eft arrivé à Toulon
où il fait quarantaine.
Le 18 M. le Comte de Sainte Maure
& M. le Marquis de Rouvroy , furent
faits Lieutenans Generaux de Marine .
Ce dernier eft monté à ce grade - par la
D'OCTOBRE. 175
mort de M. de Champigny , qui laiffe
un cordon rouge & une place de Confeiller
de Marine à remplir. M. le Comte
de Bethune de Séel , a été nommé Chef
d'Efcadre dans la même promotion .
M. le Marquis de Brancas , Sur - Intendant
des Haras de France , a fait venir
de Barbarie cinquante beaux chevauxbarbes
, pour l'Ecurie du Roy.
M. le Comte de San- Eftevan , premier
Miniftre - Plenipotentiaire du Roy
d'Efpagne au Congrès de Cambray , après
quelque fejour à Paris , eft parti pour fe
rendre à Cambray.
Approbation de M. Demontempuys , Avocat en
Parlement , Cenfeur Royal des Livres,
Моя
Ay là
JA
par ordre de Monfeigneur le Chancelier
un Manufcrit intitulé , Le Nouveau Mercure
pour le mois d'Octobre 1720 , dont j'ay paraphé
les feuillets. Fait à Paris ĉe 4 Novembre 1720 .
DEMONTEMPUYS
TABL E.
O
RIGINE des Armoiries & des
Surnoms en France, 3
L'Amour Precepteur
Arrefts , Edits & Declarations. 76
Copie d'une Lettre écrite à Monfieur l'Abbé
de Camps , par M. le Marquis de
Gravelon.
Poëfies
Enigmes
Chanfon
84
89
103
104
Alkermes , ou Aurifique Mineral , à la
maniere de Glauber.
108
Nouvelles Etrangeres. 112
Morts de Paris.
145
Morts Etrangeres.
147
Charges & Dignitez. 149
Arrefts importans. 150
Journal de Paris. 1:6-8
Avis
Ο
A VIS
N fe croit obligé de detromper le Public
fur le faux bruit qui s'est répandu
touchant l'aveuglement de M. de VVoolhouſe
, celebre Oculifte . Cette fanffeté ne
peut provenir que de la jalousie que certaines
perfonnes ont conçue contre lui , puiſque
cet habile homme travaille journellement
avec tout le fuccés imaginable. On doit fçao
voir que M. de VVoolhouſe pratique quarante
trois operations , plus qu'aucun autre
Oculifte n'a fait juſqu'à prefent ; ce qui a
engagé plufieurs Souverains à lui envoyer
des Eleves , pour leur apprendre ces operations.
On n'oubliera pas que depuis le
commencement de la difpute fur la Cataracte
Membraneufe , on a trouvé fix Cataractes
de cette efpece , rapportées dans le Journal
des Savans; de forte que toutes les Academies
de l'Europe conviennent de la difference
qui fe trouve entre la Cataracte &
le Glancome , quoique les Operateurs ordinaires
n'en faffent aucune mention ; ce qui ·
préjudicie fort à la guerifon des malades
, qui fe contentent de se faire éguilleter
les yeux dans l'efperance de recouvrer
la vûe.
M. de Woolhoufe demeure à Paris aux
Quinze- Vingts , dans la Grande Aumônerie
, vis-à- vis M. Roffignol , fameux
Ecrivain.
********SE SESJESELSKSESE
A V I S.
E Sieur CORDIER , Gendre & feut
ris , ayant fait annoncer dans differentes Gazettes
de Hollande , la vertu des Calotes &
Peaux Divines , a cru devoir avertir le Public :
Que les Peaux Divines font immanquables pour
toutes fortes de Maux de tête ; qu'elles en font
fortir les Abfcès, Fluxions , Rhumatifmes , Coups
ou contre Coups , & le Sang qui peut s'y eſtre extravafé
par chute ou autrement. Qu'elles gueriffent
les Migraines , les Eblouiffemens , les
Vapeurs , les Bourdonnemens d'oreilles , & tous
maux de Tête , de quelque caufe qu'ils puiffent
provenir. Qu'elles attirent les eaux qui coulent
fur les yeux , fur le vifage , far le rimpan des
oreilles , fur les dents , dans la poitrine , & autres
parties du corps : enfin qu'elles gueriffent
la furdité , & cela par une tranfpiration douce
au travers des pores , fans faire aucun mal , &
fans enlever la peau.
Les Peaux Divines font excellentes pour les
Paralifies nouvellement formées , pour toutes
fortes de rhumati fmes , pour les goutes feiatiques,
les humeurs froides , maux de côté , & d'eftomac
, pour l'apoplexie , les fluxions qui fe forment
fur le vifage , les groffeurs qui viennent
à la gorge & autres parties du corps , pour les
fluxions & oppreffions de poitrine , pour les
maux de reins , pour les douleurs que l'on reffent
entre les épaules , dans les épaules & par
tout le corps.
Elles font bonnes pour les enfures des jambes
& des genoux. Elles attirent les eaux acres ,
les ferofités , & les humeurs glaireufes qui font
entre cuir & chair , & elles adouciflent les nerfs
& les muſcles .
Enfin les Calotes & Peaux Divines ont quatre
vertus principales . 1o De reveiller la chaleur
naturelle où elle paroît interdite. 20 D'ouvrir
les pores. 30 De fondre les humeurs. 4°
De les faire tranfpirer fans faire aucune cicatrice
ni ouverture , & en laiffant la partie du
corps où elles font appliquées , auffi faine &
plus belle qu'auparavant.
Les Peaux Divines étant refolutives & attractives
, on les trouve , en les ôtant , pleines
de ferofitez ; le tout par tranfpiration .
Le Sieur Cordier fournit à part un Memoire
exact des perfonnes qui ont été gueries , & de
la maniere avec laquelle on doit fe fervir des
Calotes & Peaux Divines , qui fe confervent
l'espace de vingt années , fans rien perdre de
leurs vertus ni qualitez . On en fait des envois
dans les Provinces & Pays étrangers .
Le Sieur Cordier a établi des Bureaux où l'on
diftribue les mêmes Peaux divines : Sçavoir ,
A Lyon , chez le Sieur Thomas Marchand ,
grande rue Merciere. A Rouen , chez le Sieur
Maugy , rue Grand Pont. A Caën , chez le Sieur
Layé , Marchand Epicier , rue Saint Jean , proche
la Porte Millay . A Saint- Malo , chez le Sicur
Defroziers , Marchand devant la grande Porte.
A Rennes , chez le Sieur de la Vigne Marchand ,
à côté du Palais . ANantes , chez le Sieur Meziers
Marchand , à la Foffe , & A la Rochelle chez
M. Merle , Marchand .
Le Sicur Cordier demeure à Paris chez M. Metas,
Marchand Epicier , au haut de la rue de la
Coutellerie de la Vannerie , vis-à- vis Saint-
Jacques de la Boucherie au premier Appartement.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères