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1714, 02 (2)
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MERCURE
GALAN T.
FEVRIER 1714
NCV
NIN
THEQUE
LYON
1893*
DE
ASPARISS
M. DCCXIV
Q ૩ .
Avec Privilege du Roy,
MERCURE
GALANT.
Par le Sicur Du F ***
Mois
de Fevrier
1714.
Le prix eft 3o. fols relié en veau ,
25 fols , broché,
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLET , au Livre
Royal, au bout du Pont S.Michel
du côté du Palais.
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis,
fur le Quay des Auguftins.
CILLES LAMESL l'entrée de la ru
du Foin du côté de la ruë
Saint Jacques.
AvecAprobasion,& Privilège duRei .
MERCURE
GALAN
LYON
DE
AVANTURE
nouvelle.
NoGentilhomme
d'un veritable mes
rite , & d'une naiſſance
affez diftinguée
pour a
voir pris de nom de Mar-
Fev . 1714. A ij
MERCURE
quis fans qu'on pût dire
qu'il l'eût ufurpé , étant
un jour allé entendre un
concert , où il fut mené
par un ami , trouva dans
la maiſon où il ſe faifoit
une Demoiſelle dont la
beauté lui parut piquante.
Elle étoit blonde ,
avoit les traits affez reguliers
, le teint d'un
éclat qui furprenoit
' &
une douceur toute charmante
répanduë fur fon
vifage. Il fit fi bien qu'il
>
GALANT. S
fe plaça auprés d'elle ; &
tandis que tout le mon
de prêtoit l'oreille avec
foin aux belles voix dont
le concert etoit compo
fé , il eut les yeux toûjours
attachez ſur cette
aimable perfonne. Les
paroles qu'on chanta lui
donnerent lieu de l'en
tretenir. Il en tirade
quoy la flaterfur fon merite
; & s'il la mit dans
quelque embarras à force
de lui donner des
A iij
6 MERCURE


loüanges , il ne laiffa pas
de s'appercevoir qu'elle
avoit l'efprit aife , &
que le filence qu'elle gardoit
quelquefois étoit un
effet de fa modeftie . Il
ne fortit point de l'affem
blée fans avoir appris qui
elle étoit. Il fçut que fa
qualité répondoit à fon
merite , & qu'ayant perdu
fon pere & fa mere
dans fon plus bas âge ,
elle demeuroit chez une
tante qui s'étoit chargée
GALANT.7.
de fa conduite . Comme
il l'avoit trouvée toute
aimable , l'envie de la
voir avec quelque liberté
lui fit chercher accés
auprés de la tante ; &
vous jugez bien qu'ayant
de l'efprit & du fçavoirfaire
, il n'eut pas de peine
à y reüffir. Dans les
premiers foins qu'il s'ac
tacha à lui rendre , fon
unique vûë fut le plaifir
d'un amuſement honnête
qui l'occupât pendant
A iiij
8 MERCURE
quelques
heures . If dit
force douceurs
à la belle
,fe preparant
au triomphe
d'attendrir
un jeune
coeur. Ce ne lui fut
pas une chofe aifée . Elle
saccoûtuma
à l'entendre
, fans qu'aucun
fentiment
particulier
lui
fit découvrir
qu'elle fût´
touchée ; & cette efpece
d'indifference bleffant le
Marquis , qui étoit fier
naturellement , il ne
put
fouffrir fans
beaucoup
GALANT . 9
de peine qu'elle lui ôtât
la gloire de lui laiffer re
marquer en elle un commencement
de paffion .
Ce n'eft pas qu'elle n'eût
pour lui des honnêtetez ,
dont il eût eu lieu d'être
content , s'il n'eût fouhaité
que de l'eftime :
mais ce n'étoient point
des honnêtetez de diftinction
, & il regardoit
comme une honte , qu '
elle attendît fon entier
hommage pour fe de10
MERCURE
clarer , aprés que partout
ailleurs on l'avoit
prefque toûjours préve
nu par des avances . Cependant
les manieres de
la belle , de quelque froideur
qu'elles lui paruffent
, ne laifferent pas
de l'enflâmer , & même
on peut dire que ce fut
ce qui porta fon amour
à toute la violence qu'il
commença de fentir. Il
s'y abandonna malgré
lui , & à quelque prix
GALANT . 11
que ce pût être , il refolut
de fe donner le plai
fir de fe faire dire qu'il
étoit aimé . Ses empreffemens
, qu'il redoubla
,
le firent voir le plus amoureux
de tous les
hommes . Il dit à la belle
les choſes les plus flateufes
, & ne douta point
qu'en lui declarant qu'il
la vouloit époufer
, il ne
lui causât toute la joye
que lui devoit inſpirer
une alliance
fi avanta12
MERCURE
geufe. La belle reçat
cette declaration avec
beaucoup de reconnoiffance
; & aprés lui
avoir marqué en termes
fort ferieux qu'elle
lui étoit fenfiblement
obligée de l'honneur
qu'il lui faifoit , elle ajoû
ta que dépendant d'une
tante , dont les volontez
regloient les fiennes , c'é
toit à elle qu'il fe devoit
adreffer. Une réponſe fi
peu attendue déplut au
GALANT. 13
Marquis. Il dit à la belle
avec un peu de chagrin ,
qu'il ne fongeoit à fe
marier que pour vivre
heureux ; qu'il ne pouvoit
l'être s'il n'avoit fon
coeur , & que ne voulant
le devoir qu'à ellemême
, il feroit fort inutile
de lui faire demander
le confentement
de
Les parens , tant qu'il la
verroit dans cette referye.
Il fit ce qu'il put pour
l'en tirer , & fes plus for14
MERCURE
tes prieres n'obtintent
rien de plus favorable
pour fa pallion ; qu'une
afſurance qu'elle » fuivroit
fon devoir fans aucune
peine , & qu'auffirôt
que fa tante auroit
parlé , il auroit ſujet dêtre
content . Le Marquis
tira de là une confequence
qui fit fouffrir fa delicateffe
. Il s'en expliqua
avec la belle , & lui dit
d'un ton de plainte, qu'il
lui devoit estre bien fa
GALANT. ་ ་
cheux de voir que fi fa
tante s'oppofoit à fon
bonheur, elle feroit prefte
à le dégager pour la
fatisfaire. La belle lui repliqua
qu'il fe faifoit
tort de craindre qu'on
n'euſt pas pour lui les
égards qui étoient deus
& à fon merite & à la
naiffance
; & n'ayant pu
l'obliger de fe declarer
plus precifément , il lui
fit connoître qu'il alloit
remettre
au temps le
16 MERCURE
fuccés de fes deffeins
afin que l'impreffion que
fes fervices feroient fur
fon coeur lui fit tenir
d'elle feule ce que fon
amour ne pouvoit devoir
à d'autres. Il continua
fes foins , qui furent tou
jours reçus d'une ma
niere affez engageante
.
L'état où il fe trouvoit a
voit quelque chofe d'extraordinaire.
Il aimoit
avec excés ; & quoique
la belle lui fît voir beau-
Coup
GALANT. 17
coup d'eftime , & qu'il
ne remarquât rien qui
lui fit apprehender
que
fa recherche ne lui fuft
pas agreable , il ne pouvoit
fe refoudre à preffer
de rien conclure
parce qu'il ne voyoit pas
qu'elle euft pour luy les
empreffemens dont il
croyoit que fa paffion le
rendroit digne. Les choſes
ayant encore demeuré
un peu de temps dans
ces mefmes termes , elles
Ᏼ .
Fév.1714.

18 MERCURE
changerent de face par
un incident qui eut des
fuites qu'on n'attendoit
pas . Le Marquis avoit
un frere qu'on nommoit
le Chevalier. Il eftoit à
Rome depuis trois ou
quatre années , & il en
revint en ce temps- là .
Le Marquis qui avoit
toujours vefcu avec luy
dans la plus étroite liaifon
que l'amitié ait jamais
établie entre deux
freres , ne manqua pas
GALANT . 19
un peu aprés fon retour,
de l'entretenir de fa maiftreffe
. Il ne luy parla
ni de fon efprit ni de fa
beauté , & voulant qu'il
en jugeaſt par luy-mefme
, ille mena chez cette
jeune perfonne. Le Chevalier
qui avoit acquis
dans fes Voyages cer
taines manieres pleines
d'agrément qui perfec
tionnent les heureux talens
que l'on a reccus de
la natute ,brilla fort avec
Bij
20 MERCURE
la belle dans une affez
longue converfation qui
fut auffi vive qu'enjoüéc .
Il fut touché de ce qu'il
connut d'aimable en elle ,
& fon frere luy ayant
demandé fon fentiment,
il luy en dit mille biens ,
& ne pouvoit fe laffer
de luy applaudir fur le
choix qu'il avoit fait.
Le Marquis ravi d'eftre
approuvé , & ne trouvant
point de plus grand
plaifir que d'entendre
GALANT. 21
parler d'elle , engagea le
Chevalier à la voir fouvent.
C'eſtoient toujours
de nouveaux applaudiffemens
qu'il recevoit fur
fa paffion ; & comme il
eftoit ailé de voir que le
Chevalier luy parloit de
bonne foy , & que rien
n'enflâme tant que les
louanges qu'on entend
donner à ce qu'on aime ,
le Marquis fans y penfer
prenoit des redoublemes
d'amour
dont il ne pou22
MERCURE
voit démefler toute la
force. Il trouvoit que fa
maiftreffe avoit plus d'ef
prit de jour en jour , &
il ne comprenoit pas
qu'il lui étoit inſpiré par
l'envie de plaire. La belle
ne fçavoit pas ellemefme
d'où lui venoient
de certains je ne fçay
quoy qui la rendoient
plus charmante , & qui
lui donnoient en tout
une vivacité extraordi
naire. Elle fuivoit un

L
GALANT 23
panchant qu'elle ne connoiffoit
pas , & le Chevalier
ne faifant rien qui
ne parlaſt à ſon avanta-
, elle abandonnoit fon
coeur avec plaisir à des
fentimens qu'elle n'avoit
jamais eus. Elle ne s'apge
,
4
perceut mefme qu'ils
étoient nouveaux pour
elle , que lorfque le Chevalier
paffa trois ou quatre
jours fans la venir
voir avec fon frere. Elle
en montra quelque trou24
MERCURE
ble , & l'empreffement
qu'elle avoit à demander
ce qui l'occupoit ailleurs
, étoit une marque
qu'elle y prenoit inteicft
. Elle étoit moins
gaye le reste du jour , &
quand le Chevalier revenoit
, outre la joye
qu'elle laiffoit éclater fur
fon viſage , elle lui fais
foit de fi obligeans reproches
de fa negligence
, qu'elle ne pouvoit
lui dire plus ouvertement
GALANT 25
ment que rien ne lui
plaifoit tant que ſes vifites
. Elle ne cachoit rien
de tout cela au Marquis ,
parce qu'agiffant naturellement
, & n'ayant jamais
connu ce que c'étoit
que l'amour , elle
étoit bien éloignée de
penfer qu'il y euft rien
dans fes fentimens dont
il lui faluft faire myftere.
Cependant comme
un amant veritablement
touché à les yeux bien
Fev . 1714.
*
C
26 MERCURE
éclairez fur les moindres
chofes , le Marquis
connut bientôt que fa
maîtreffe fentoit pour le
Chevalier ce qu'il n'avoit
jamais pu lui faire
fentir pour lui. Il en cut
un depit fecret qui fut
foutenu par fa fierté ;
& au lieu d'y donner
ordre en l'empeſchant
de le voir , il s'en fit ac
compagner toutes les
fois qu'il alla chez elle.
Il étoit toujours de bons
GALANT. 27
ne humeur ; & fans laiffer
échaper aucun mouvement
ni de jalouſie ,
ni de chagrin , il montroit
un esprit libre qui
auroit trompé les plus
clairvoyans. Le Chevalier
y fut abufé , & ne
crut point que par cette

fauffe liberté d'efprit il
fe ménageât celle d'obferver
ce qui fe paffoit
dans le coeur de fa maî
treffe : mais comme la
belle avoit pour lui une
Cij
28 MERCURE
honnefteté qui lui découvroit
des ſentimens
plus forts que l'eftime ,
& qu'il fe feroit fenti de
grandes difpofitions à y
répondre fans l'engagement
où il la voyoit , il
refolut , & pour ſon repos
, & pour s'acquitter
de ce qu'il devoit à l'amitié
du Marquis , de renoncer
à une veuë agreable
, mais qui pouvoit
le mettre en peril d'aller
plus loin qu'il ne lui
GALANT . 29
étoit permis . Il avoit déja
ceffé de parler fi fortement
à fon frere du
merite de la belle , de
peur que le plaifir d'en
dire du bien ne découvrit
trop ce qu'il cuft
voulu pouvoir fe déguifer
à lui- mefme ; & le
Marquis , homme attentif
à tout remarquer
,
avoit jugé comme il le
devoit de cette reſerve.
Ainfi quand le Chevalier
lui dit qu'il avoit
Ciij
30 MERCURE
deffein de faire un voyage
, il entra d'abord dans
le motif qui en étoit caufe
; & ce que la belle lui
avoit fait paroître avec
ingenuité de fes nouveaux
fentimens , ne lui
permettant point de
douter que leurs coeurs
ne s'entendiffent fans
s'être expliquez , il fit
un effort fur lui pour
ne montrer aucune foibleffe
. Après avoir pris
un vilage gai , il dit à
GALANT . 31
:
fon frere qu'il voyoit
fon
embarras ; que non.
feulement il aimoit la
belle mais qu'il avoit
dû s'appercevoir
qu'il
avoit touché fon coeur ;
& que pour n'écouter
pas une paffion qui lui
pouvoit attirer le blâme
de s'être fait fon rival ,
il fe refolvoit à s'éloi
gner. Là deffus il l'embraffa
, comme lui étant
fort obligé des égards
honnêtes qu'il avoit
C iiij
32 MERCURE
pour lui , & lui dit en--
fuite que le plus grand
plaifir qu'il lui pouvoit
faire étoit de ne point
partir , & de continuer
à voir fa maitreffe . Il
ajoûta qu'il l'aimoit
beaucoup par les belles
qualitez qui la rendoient
eſtimable : mais que fon
amour n'ayant jamais
été affez fort pour lui
faire vaincre l'averfion
qu'il avoit toûjours fentie
pour le mariage , il
GALANT. 33
s'étoit tenu dans les feuls
termes d'amant , fans avoir
ofé pouffer les chofes
plus loin qu'aprés
l'ouverture qu'il lui faifoit,
c'étoit à lui à fe confulter
, & que s'il étoit
affez amoureux pour
vouloir bien époufer la
belle , il lui cederoit fes
pretentions avec d'autant
plus de joye , qu'il
empêcheroit en l'époufant
qu'on ne ſe plaignift
de lui. Ce difcours
34 MERCURE
furprit tellement le Chevalier
, qu'il en demeura
embaraffe . Il répondit
que n'ayant rien à fe reprocher
dans fa conduite
, il ne fe défendroit
point des fentimens qu'-
on lui vouloit imputer ;
qu'il ne defavoüoit pas
que l'efprit & la beauté
de la perfonne dont il
s'agiffoit ne l'euffent rendu
fenfible : mais que
tout ce qu'il fentoit demeurant
foumis à fa raiGALANT.
35
fon , il n'avoit point à
s'expliquer là - deffus ;
qu'il confentoit à ne
point partir , fi l'on jugeoit
à propos qu'il fuf.
pendift fon voyage : mais
qu'il feroit inutile de
lui demander qu'il fiſt
encore des vifites ; qu'-
abfolument il n'en rendroit
aucune à la belle
que la fortune ne fuft
arreftée ; que le Marquis
ayant tant de fujet de
l'aimer , pouvoit fatis36
MERCURE
faire fon amour , puis
qu'il ne tenoit qu'à lui
de fe rendre heureux ;
& que s'il étoit vrai qu'il
fuft affez ennemi du mariage
pour eftre bien aife
de rompre l'engagement
qu'il avoit pris avec elle
, il pouvoit donner
telle parole qu'il lui plai
roit en fon nom , nom , avec affurance
qu'il ne feroit
point defavoüé . Le Marquis
n'en voulut point
fçavoir davantage . Il alGALANT.
37
la trouver la belle , & lui
dit qu'il étoit temps
qu'il connuft s'il étoit
aimé veritablement. La
belle , qui crut qu'il pretendoit
encore la faire
expliquer , & qui fe
fentoit moins difpofée
que jamais à fe réjoüir
des marques qu'il lui .
pouvoit donner de fa
paffion , lui répondit avec
beaucoup de froideur
, que fa tante feule
pouvoit difpofer de fes
38 MERCURE
volontez , comme elle
l'en avoit déja aſsuré ,
& qu'il n'étoit pas befoin
qu'il la confultât
fur ce qu'il avoit à faire.
Le dépit qui animoit le
Marquis depuis quelque
temps , le fit paſser
par - defsus l'aigreur de
cette réponſe. Il repliqua
qu'elle n'étoit pas
entrée dans ce qu'il avoit
voulu lui dire ; que
s'étant examiné dans les
fentimens qu'il avoit
GALANT. 39
pour elle , il s'étoit connu
fi mal diſpoſé au mariage
, que dans la crainte
de ne la pas rendra
auffi heureuſe qu'elle
meritoit de l'eftre , il la
prioit , fi elle avoit un
peu de bonté pour lui ,
de vouloir bien recevoir
fon frere en fa place , &
de trouver bon qu'il al
lât traiter cette affaire
avec fa tante. L'émotion
que fit voir la belle trahit
tout le fecret de fon
40 MERCURE
coeur. Elle ne fçut que
répondre , tant la joye
l'avoit faifie ; & ce ne
fut qu'aprés que le Marquis
, en continuant à
lui parler , lui eut donné
le temps de vaincre fon
trouble , qu'elle lui dit ,
quoy qu'un peu deconcertée
, qu'elle fe feroit
toûjours un ſujet de joye
de l'obliger : mais qu'-
elle n'avoit pas lieu de
prefumer affez d'elle- même
, pour ſe flater qué
le
GALANT . 41
le mariage qu'il lui propoſoit
fût agreable à fon
frere. Le Marquis en répondit
, & cette affurance
mit la belle dans un
état de plaifir , qui lui fit
connoître tout ce que
l'amour avoit produit
pour le Chevalier. L'entiere
certitude qu'il en
cut par là le fit refoudre
à ne plus fonger à elle ,
& s'applaudifant de ce
deffin , comme s'il eût
dû la punir & le van-
Fév.1714.
D
42 MERCURE
ger , parce qu'en effet le
parti du Chevalier
lui
étoit moins avantageux
,
il alla trouver
la tante
.
Elle fut furpriſe
de ce
changement : mais il
lui parla d'un air fi libre
, & lui peignit avec
tant de force le dégoût
prefque invincible qu'il
avoit du mariage , ( ce
qui l'avoit obligé d'amener
fon frere chez fa
niece , dont il avoit bien
prévû qu'il deviendroit
GALANT. 43
amoureux ) qu'elle demeura
perfuadée qu'il
ne diſoit rien qui ne fût
vrai .Elle ne voulut pourtant
lui donner aucune
parole , qu'elle n'eût fçû
les fentimens de fa niece.
Elle les avoit déja penc
trez, & lui reprocha qu'-
elle perdoit le rang de
Marquife pour ne s'être
pas affez poffedée : mais
c'étoit un jeune coeur
furpris par l'amour , fans
qu'il fe fuft fait connoî-
1
Dij
44 MERCURE
tre. La belle ne put s'empêcher
de parler du Che
valier d'une maniere fort
avantageuſe ; & fa tante
la vit tellement fatisfaite
de ce choix , qu'elle
y donna fon confentement.
Le Chevalier refifta
long - temps à ce
que fon frere avoit fait
pour lui. Il le pria de
fe mieux examiner , &
de craindre qu'un peu
de chagrin n'euft part à
la reſolution qu'il avoit
GALANT. 45
prife mais plus il fit
voir pour lui d'honnêteté
là - deffus , plus le
Marquis l'affura que rien
ne lui pouvoit faire tant
de plaifir que fon mariage
, & il lui reitera ces
afſurances avec des manieres
fi ouvertes & d'un
eſprit fi content , qu'il
ne laiffa plus de fcrupule
au Chevalier. Il continua
de fe fervir du même
pretexte ; & pour
mieux faire paroître que
46 MERCURE
fon coeur étoit entièrement
libre , il fit dreffer
le contrat lui - même , &
voulut faire les frais de
la noce . Rien ne lui fit
peine en tout cela , & il
le proteſta à tous les amis
. Cependant on ne
fut pas plutôt revenu de
l'Eglife où le mariage
venoit d'eftre fait , qu'on
fut furpris de le voir tomber
dans un chagrin extraordinaire.
Il dit qu'il
fe trouvoit mal , & en
GALANT. 47
effet deux heures aprés
la fievre le prit avec une
extreme violence . Cet
accident troubla fort la
joye des mariez ; & leur
déplaifir augmeta beaucoup
le lendemain
quand le tranfport au
cerveau ne le laifsant
plus maître de fa raifon,
fit connoître la vraie caufe
defon mal . Il dit cent
chofes touchantes fur ce
qu'il n'avoit pu fe faire
aimer de la belle , & fur
48 MERCURE
la neceffité où il s'étoit
veu de la ceder à fon
frere. On connut par là
qu'il s'étoit fait violence,
& que la contrainte qu'il
avoit tâché de s'impoſer
l'avoit reduit au malheureux
état où il fe trouvoit.
Il vécut encore trois
jours , pendant lefquels
fes agitations redoublerent
, fans qu'il cefsât
de parler du deſeſpoir
où l'avoit jetté fon trop
de delicatesse.
Nou
GALANT. 49
BIDDOPCIXX
·De la neceffité de la critique ,
ou le grand Prevôt
du Parnaffe.
ON gronde contre la
C
fatyre ,
Et Cotin dit qu'on a raifon
:
Mais quoy que Cotin puiſſe
dire
Dans l'étrange demangeaifon
Qu'en nôtre fiecle on a d'écrire
Il nous faut ce cótre- poifon.
Fev .
1714.
E
50 MERCURE
Ecrire en vers , écrire en
profe ,
Au temps paffé c'étoit un
art ,
Au temps preſent c'eſt autre
choſe :
รุ
Tant bien que mal , à tout
hazard ,
Rime qui veut , qui veut
compofe ,
ou le fup-
Se dit habile
poſe ,
Entre au chorus , ou chante
à part ,
Eft pour un tiers , ou pour
un quart ,
Fournit le texte , en fait la
glofe ,
GALANT.
51
Et tout le monde en veut
La
part.
Dites - nous , Muſes , d'où
peut naître
Cette heureufe fecondité ?
Eft -on fçavant quand on
Cela n'a
veut l'être?
pas toûjours été ;
Il en coûtoit à nos ancêtres
Ce ne fut pas pour eux un
jeu :
Ce qui coûtoit à ces grands
Maîtres ,
D'où vient nous coûte - t-il
fi peu ?
E ij
52
MERCURE
Vanité fotte ! qui prefume
Par un aveugle & fol orgüeil
De fon efprit & de ſa plume
:
Voila d'abord le grand écüeil.
Item , le Temple de Memoire
Eft un trés- dangereux ap
pas :
Mais en griffonnant pour
la gloire
L'encre toûjours ne coule
pas ,
Et quelquefois
avient le
cas
GALANT.
53
Que l'on caffe fon écritoire.
Item foit à bon titre ou
,
non ,
On dit , mes oeuvres , mon
Libraire ,
Et l'on voit en gros caractere
Afficher fon livre & fon
nom .
Item, chacun a fa folic ;
Item , aujourd'hui tout eft
bon ,
Et tout ouvrage fe publie.
Ce qu'un homme a rêvé la
nuit
Ce qu'il a dit à fa ſervante ,
E iij
$4
MERCURE
Ce qu'il fait entre ſept &
huit ,
Qu'on l'imprime & le mette
en vente
L'ouvrage trouve du debit ;
Et quelquefois , fans qu'il
s'en
vante ,
L'auteur y gagne un bon
habit.
Item , quand on ne fçait
mieux faire ,
On forge , on ment dans
un écrit.
Item , on ne sçauroit ſe taire
,
Et nous avons tous trop
d'efprit.
GALANT.
SS
Autre grand item, il faut vivre
;
Voila comment fe fait un
livre.
De là nous viennent à foifon
Maigres livrets de toute
forte
;
Ils n'ont ni rime , ni raiſon ,
Cela fe vend toûjours , qu'-
importe ?
Tous les fujets font preſque
ufez ,
Et tous les titres épuifez ,
Jufques à des Contes de
Fée ,
E iiij
56 MERCURE
Dont on a fait long- temps
trophée.
Le defordre croît tous les
jours ,
Je crie , & j'appelle au fecours
;
Quand viendra - t - il quelque
critique
Pour reformer un tel abus ,
Et purger nôtre Républi
que
De tant d'Ecrivains de Bibus
?
A l'aſpect d'un cenſeur farouche
Qui fçait faire valoir fes
droits ,
GALANT.
ST
Un pauvre auteur craindra
la touche ,
Et devant que d'ouvrir la
bouche ,
Y penfera plus de deux
fois.
Je touche une fâcheufe
corde ,
Et crois déja de tous côtez
Entendre à ce funefte exorde
Nombre d'auteurs épouvantez
Crier tout haut , Miſericorde.
Soit fait , Meffieurs , j'en
58 MERCURE
fuis d'accord :
Mais quand le public en
furie
Contre vous & vos oeuvres
crie
Mifericorde encor plus
fort ,
Que lui répondre , je vous
prie ?
C'eſt un mal , je ne dis pas
non ,
Qu'un cenfeur rigide & fevere
,
Qui le prend fur le plus
haut
ton ,
Qu'on hait , & pourtant
~
GALANT.
59
qu'on revere :
Mais fi c'eſt un mal , c'eſt
fouvent
Un mal pour nous bien neceffaire
;
Un critique en pays fçavant
Fait le métier de Commiffaire.
Bornons . nous , fans aller
plus loin ,
A la feule gent poëtique ;
Plus que tout autre elle a
befoin
Pour Commiffaire, d'un critique.
60 MERCURE
Les Poëtes font infolens ,
Et fouvent les plus miferables
Se trouvent les plus intraitables
;
Fiers de leurs pretendus talens
,
Ils prendront le pas au Parnaffe
Et fur Virgile & fur Horace
,
S'il n'eſt des cenfeurs vigiláns
Pour chaffer ces paſſe -volans
,
Et marquer à chacun fa
place.
GALANT. 61
D'abord ces petits avortons
Viennent fe couler à tâ
tons ,
Ils font foûmis , humbles ,
dociles ,
Souples à prendre les leçons
Des Horaces & des Virgi
les ,
Et devant ces auteurs habiles
Sont muëts comme des
poiffons :
Mais quand enfin cette vermine.
10
Sur le Parnaffe a pris racine
,
62 MERCURE
Elle s'ameute & forme un
corps
Qui fe revolte & fe mutine.
Dés qu'une fois elle domine
,
Adieu Virgile & ſes confors
;
Dans quelque coin on les
confine ,
Et fi Phebus faifoit la mine
,
Lui - même on le mettroit
dehors !
Comment Ronfard & fa
I pleyade ,
GALANT .
63
Dont un
temps le regne
a
duré ,
Nous l'avoient ils défiguré
Dans leur grotesque mafcarade
?
Plus bigaré qu'un Arlequin
,
Affublé d'un vieux cafa-
Fait à
quin,
peu prés à la Françoiſe
,
Mais d'étoffe antique &
Gauloife ,
Sans goût , fans air , le tout
enfin
Brodé de Grec & de Latin
.
64 MERCURE
C'étoit dans ce bel équipage
Qu'Apollon noir comme
un lutin
Se faifoit partout rendre
hommage :
Mais aprés un long eſclavage
,
Enfin Malherbe en eut picié,
Et l'ayant pris en amitié ,
Lui débarbouilla le vifage ,
Et le remit fur le bon pié,
Renvoyant à la friperie
Ses haillons & fa broderie.
ob Showt
Alors dans le facré vallon
On
GALANT . 65
On décria la vieille mode
Et Malherbe fous Apollon
Fit publier un nouveau code
,
Défendant ces vieux paſſemens
Qu'avec de grands empreffemens
On alloit chercher piece à
piece
Au Latium & dans la Grece.
Ronfard enfut triste & mâri
,
Perdant beaucoup à ce dé-
Fev .
1714.
cri ;
F
66 MERCURE
Il en pleura même , & de
rage
Il fe fouffleta le viſage ,
Es s'alla cacher dans un trou
En fe fouffletant tout fon
foû.
Les Muſes n'en firent que
rire ,
Et
demandoient par quel
hazard
Ronfard fi vanté pour bien
dire utal an .91 L
Donnoit des foufflets à Ron-
· fard .
Cependant tout changea
de face
GALANT . 67
Sur l'Helicon & le Parnaffe
;
C'étoit un air de propreté
Plein de grandeur & de
nobleffe ;
Rien de fade ni d'affecté
N'en alteroit la dignité ;
Le bon goût & la policeffe
Brilloient dans la fimplicité
,
Laiffant la frivole
parure
Aux
fades
heros
de Romans
; immoot
On emprunta de la nature
Ses plus luperbes ornemens .
Vous cuffiez vû les jours de
fêtes
Fij
68 MERCURE
1
Phebus & les neuf doctes
Soeurs
N'employer pour orner
leurs têtes
Que des lauriers mêlez de
fleurs :
Mais cette mode trop unie
Ennuya bientôt nos François
,
Au mépris des nouvelles
loix
Ils revinrent à leur genie ,
Et reclamerent tous leurs
droits.
Nous aimons trop la bigarure
Je ne puis le dire affez haut,
GALANT . 69
Voila nôtre premier défaut
,
Et c'eft depuis long- temps
qu'il dure :
Il durera , j'en fuis garant ,
Quoique le bon fens en
murmure .
Si l'on le quitte , on le reprend
,
Même en dépit de la cenfure
:
On veut du raré & du nouveau
,
Le tout fans regle & fans
mefure
,
On outre , on caffe le pince.
u :
70 MERCURE
Mais à charger trop le tableau
,
On vient à gâter la peinture
,
Et voulant le portrait trop
beau ,
On fait grimacer la figure.
Soit Poëtes , foir Orateurs ,
C'eſt là qu'en font bien des
auteurs .
Nous nous mettons à la
torture
Pour alambiquer un écrit ,
Nous voulons partout de
l'efprit ,
Du brillant , de l'enluminure.
GALANT . 71
C'eſt un abus , ne forçons
rien ,
Laiffons travailler la nature
,
Et fans effort nous ferons
bien ;
Il en coûte pour l'ordinaire
Par cet entêtement fatal
Plus à certains pour faire
mal ,
Qu'il n'en coûteroit pour
bien faire .
Me voila dans un fort beau
champ :
Mais je prêche , & peut - être
ennuye
72 MERCURE
Comme bien d'autres en
prêchant.
Je finis donc , & je m'ef
fuye.
Bel exemple fans me flater
,
Si l'on vouloit en profiter.
Or durant cette maladie
Dont l'Helicon fut infecté ,
On bannit la fimplicité
Sous Malherbe tant applaudie
,
Pointes
, équivoques
dans
: peu ,
Et jeux de mots vinrent en
jeu :
On
GALANT .
73
On vit
l'affemblage gro .
teſque
Du ferieux & du burlef
que ;
Le Phebus, le Gali - Mathias
Parurent avec affurance ,
Et comme fi l'on n'étoit
pas
Affez fou , quand on veut
en France ,
On fut avec avidité
Chercher jufques dans l'Italie
Des fecours dont par charité
-Elle afſiſta nôtre folie.
Apollon fe tuoit en vain
Fev
. 1714
.
G
74 MERCURE
De faire mainte remontrance
,
Et de prêcher à toute outrance
,
Nos gens fuivoient toûjours
leur train ,
Et tout alloit en decadence.
Mais quand ce Dieu plein
de prudence
Eut pris Boileau pour fon
Prevôt ,
Combien d'auteurs firent le
faut ?
On voyoit détaler en bnade
GALANT . 75
Tous ces Meffieurs de contrebande.
Chapelain couvert de lauriers
Sauta lui - même des premiers
,
Et perdit , dit- on , dans la
crotte
Et fa perruque & fa calotte.
Il crioit prêt à trébucher :
Sauvez l'honneur de la pu
د ن
celle .
Mais Boileau plus dur qu'un
rocher
N'eut pitié ni de lui , ni
d'elle.
G ij
76 MERCURE
Pradon voulant parlementer
,
Fit d'abord de la refiftance
,
Et parut quelque temps luter
,
Même en Poëte d'importance
;
Il appella de la fentence :
Mais il falut toûjours fauter
,
Et l'on n'a point jugé l'inftance
.
Sous le manteau de Regulus
On eût épargné fa perfonne
:
GALANT . 77
Mais le pauvre homme n'avoit
plus
Que le juſt- au - corps d'Antigone.
Quinaur par la foule emporté
,
Quinaut même fit la culbute
:
Mais un appel interjetté
Le vangea bientôt de fa
chute.
On vit les Mufes en rumeur
A l'envi prendre en main
fa cauſe.
Quelques gens de mau
Giij
78 MERCURE
vaiſe humeur
Vouloient pouffer plus loin
la chofe ,
Infiftant qu'on fift au plûtôt
Le procés au pauvre Prevật
:
Mais helas qu'un Prevôt
s'échape
,
Le cas eft digne de pardon
;
Il n'eſt pas infaillible , non :
Plus ne pretendroit , fût - il
Pape.
Cependant les plus emportez
GALANT. 79
Dans cette émeute generale
Eftoient les rimeurs maltraitez
.
Les Cotins chefs de la cabale
Murmuroient & crioient
tout haut :
Voyez
- moy ce Prevôt
de
bale ,
Il n'a pas épargné Quinaut.
Mais Phebus d'une oeillade
fiere
Les rejettant avec mépris ,
Leur dit d'un ton ferme &
fevere :
G iiij
80 MERCURE
Paix , canailles de beaux
efprits ,
Qui n'avez fait ici que braire
;
Si fur Quinaut on s'eft mépris
,
J'y veillerai , c'eſt mon af-
: faire ;
Quant à vous , perdez tout
eſpoir ,
Er ne ne rompez plus la
tête ,
Mon Prevôt a fait fon devoir.
Ainfi fe calma la tempête ,
Et Quinaut s'étant preſenté,
Dans les griefs fut écouté.
GALANT . , 81
On declara , vû la Requête,
Bien appellé comme d'abus
,
Dont le Prevôt refta camus.
Il fut même fur le Parnaſſe
Reglé fans conteftation ,
Qu'aupres d'Orphée &
d'Amphion
Il iroit reprendre fa place ;
Et puis Phebus , d'un air
humain ,
Lui mit fa propre lyre en
main ,
Non que la fienne fût uſée :
Mais par un noble & fier
dédain
82 MERCURE
De la voir à tort mépriſée ,
En tombant il l'avoit brifée.
On en fit recueillir foudain
Tous les morceaux jufques
au moindre :
Mais on les recüeillit en
vain
,
Et l'on ne put bien les rejoindre.
Tel fut le deftin de Quinaut
,
Seul de tous où le Commiffaire
,
A fon égard un peu Corfaire
,
GALANT. 83
S'étoit trouvé pris en défaut
:
Pourtant en paya- t- il la
mende ,
Et de mainte Mufe en couroux
Effuya verte reprimande
,
On a dit même quelques
coups.
Dans tout le refte irreprochable
,
Faiſant fa charge avec hauteur
,
A tout mauvais & fot auteur
Il fut Prevôt inexorable
84 MERCURE
Sur les grands chemins
d'Helicon ,
Dontil fit prefque un Montfaucon.
On voyoit de loin les fquelettes
De cent miſerables Poëtes ;
Exemple dont le feul aſpect
Tenoit les rimeurs en ref
pect.
Il eſt bien vrai qu'en fa
vieilleffe
Il laiffa tout à l'abandon ,
Et fit fa charge avec molelle
.
Quand on eft vieux , on
devient bon .
GALANT . 85
Un refte de terreur empreinte
Retenoit pourtant les ef
prits ,
Et l'on ne penfoit qu'avec
crainte
Au fort de tant d'auteurs
profcrits.
Dans cette vieilleffe impuiffante
Son ombre encore menaçante
Arrêtoit les plus refolus :
Mais cette ombre fiere &
glaçante ,
Cette ombre même , helas !
n'est plus.
86 MERCURE
Cependant dans cet interregne.
Tout degenere & déperit
;
Et faute d'un Prevôt qu'on
craigne ,
Chacun fur pied
efprit
de bel
Arbore déja fon enſeigne.
Les Cotins bravant les lardons
,
De tous côtez femblent renaître
,
Et comme en un temps de
pardons ,
On voit
hardiment reparaître
GALANT. 87
+
Les Pelletiers & les Pradons.
Apollon , c'est vous que
j'appelle ,
De ce mal arrêtez le cours ;
Le prix de la gloire immortelle
Eft en proye aux joueurs de
viele ,
Et la plus brillante des
Cours ,
Vôtre Cour , autrefois fi
belle ,
Devient un Grenier de Gabelle
,
Et s'encanaille tous les
jours.
88 MERCURE
Déja qui veut fur le Parnaffe
S'établit comme en fon
foyer :
Tel croit tout charmer, qui
croaffe ;
Tel en chantant femble
aboyer ;
Tel rimant fans grace efficace
,
Paffe tout le jour à broyer,
Et fait des vers , qui , quoy
qu'il fafle ,
Semblent tous faits par contumace.
Tel pour tout titre & tout
loyer
Tire
GALANT . 89
Tire du fond de fa beface
Des vers qu'il prit à la tirace
,
Sçavant dans l'art de gi
boyer.
Confondu parmi cette craf
fe
Corneille , pour garder ſa
place ,
En eft reduit à guerroyer
Et Racine rencontre en
face
Tantôt le Clerc , tantôt
Boyer.
Quel depit pour le grand
Horace !
Fev .
1714.
H
90 MERCURE
D'avoir à foûtenir l'audace
D'un fat qui vient le coudoyer
.
Le mal plus loin va ſe répandre
,
Si l'on n'y met ordre au plûtôt
;
Muſes , fongez à vous défendre
:
Au fpecifique , un bon Prevôt.
Un bon Prevôt ! mais où le
prendre ?
Je pourrois , s'il m'étoit
permis ,
GALANT . 91
En nommer un , digne de
l'être :
Par fes foins en honneur
remis ,
Et plus grand qu'il n'étoit
peut-être ,
Homere affez le fait connoître.
Il a tous les talens qu'il faut
Pour un employ fi neceffaire
;
Je ne lui vois qu'un feul
défaut ,
C'eft que ce métier falutaire
De blâmer ce qui doit dé
plaire ,
Hij
92 MERCURE
De reprendre & n'épargner
rien ,
Ce métier qu'il feroit fi
bien ,
Il ne voudra jamais le faire .
Attaqué par maint trait
felon ,
Jamais cótre le noir frelon
Il n'employa fes nobles
veilles
Et comme le Roy des abeilles
Il fut toûjours fans aiguil
lon .
A fon défaut , cherchez
quelqu'autre ,
GALANT . 93
Qui plus hardi , qui moins
humain ,
Pour votre gloire & pour
la nôtre
Ofe à l'oeuvre mettre la
main .
Du Parnaſſe arbitre fuprê-
1 . me ,
Si vous prifez mon zele
extrême ,
Faites-le voir en m'exau .
çant :
Helas peut - être en vous
preffant
Fais - je des voeux contre
moy-même !
94 MERCURE
Nouvelles.
Les lettres de Hambourg
du 28. Janvier portent qu'il
étoit entré le 23. dans Tonningen
un convoy pour
quinze jours , en preſence
des Commiffaires du Roy
de Danemark , pour empêcher
qu'on n'y fift entrer
que la quantité de provifions
qui a été accordée .
Celles de Berlin du 25 .
Janvier portent que le Roy
de Pruffe faifoit toûjours
travailler à de nouvelles
GALANT.
95
levées , & qu'il pretendoit
avoir fur pied cette année
une armée de cinquante
mille hommes ; qu'un regiment
de dragons de Holftein-
Gottorp étoit entré
dans Stetin .
On mande de Stokholm
que les Etats du Royaume
s'y étoient affemblez le 28 .
Decembre en prefence de
la Princeffe Ulrique Eleonor;
que le Comte de Horn,
Prefident de la Chancellerie
, en avoit fait l'ouverture
par un long difcours , dans
lequel il reprefenta les rai96
MERCURE
fons qui avoit obligé la
Princeffe & le Senat à les
convoquer
. Il les exhorta
à
conferver l'union , & à
concourir de tout leur
pouvoir à la conſervation
du Royaume , que les conferences
des deputez avec
la Princeffe & le Senat commencerent
le 30. Decembre
, & que le General Lieven
étoit parti le 3. Janvier
pour aller trouver le Roy
de Suede avec des dépêches
importantes
.
Ón écrit
d'Andrinople ,
que les ambaffadeurs
du
Czar
GALANT . 97
Czar ayant fait inftance
pour être admis à l'audien
ce du Grand Seigneur , &
recevoir la ratification du
traité qu'ils avoient conclu ,
le Grand Vizir avoit promis
de la leur faire obrenir
mais qu'il fouhaitoit
qu'ils reftaflent à Andrinople
jufqu'à ce que les
limites de la frontiere euffent
été reglées par les
Commiffaires qui avoient
été nommez pour y travailler
avec ceux du Czar ;
le 7. Novembre ils étoient
allez folemnellement
que
Fev .
1714.
I
-98
MERCURE
à l'audience du Grand Seigneur
,
étant conduits par
Le Chaous Bachi , que le
Grand Vizir les ayant reçûs
& regalez à l'ordinaire de
caffé , de parfums & de caftans
, les avoit conduits à
l'audience du Sultan , à qui
le Vice Chancelier fit un
difcours au fujet du traité ,
dont la ratification lui fut
remife ; que le Grand Vizir
leur avoit dit par ordre du
Grand Seigneur , qu'ils
auroient bientôt la permiffion
de retourner vers le
Czar ; que neanmoins ils
CHUNG
DE
YON
7898
VILLE
T
DELA
VILL
GALANT
pouvoient renvoyer
partie de leurs gens ; que
le Sultan étoit parti le 23.
d'Andrinople , pour s'en
retourner à Conftantinople
; & que le Grand Vizir
avant fon départ avoit ordonné
de fournir les chevaux
neceſſaires pour aller
à Conftantinople aux ambafladeurs
de Mofcovie &
de Pologne , auſquels il
permit auffi de renvoyer
une partie de leur fuite.
Celles de Conftantinople
du 29. Janvier portent.
que le Sultan étoit arrivé
I jj
100 MERCURE
le 4. Janvier à un village
prés de Conftantinople , &
que le 7. il avoit fait fon
entrée avec la pompe ordinaire.
Le 10. les ambaf
fadeurs Mofcovites & Polonois
y arriverent d'Andrinople
, avec le Sicur
Fleiſchman Reſident de la
Cour de Vienne . Iffuf Bacha,
ci - devant Grand Vizir
relegué à Rhodes , y a été
étranglé , & fes biens ont
été confifquez. On a depuis
difpofé de plufieurs Gouvernemens
en faveur de
divers Bachas, Les ComGALANT.
101
miffaires
nommez pour
regler les limites devoient
entrer en conference
avec
lės ambaffadeurs
du Czar
& de Pologne , auffitôt que
les deputez du Sultan & du
Kan des Tartares , envoyez
en Pologne
feroient à
Conftantinople
. Le Roy
de Suede étoit toûjours à
Demir Toca , où le Sieur
Funck fon Envoyé eft mort.
On écrit de Vienne que
les Etats de l'Autriche
inferieure,
qui durant la maladie
contagieufe
s'affembloient
dans la maifon du
I iij
102 MERCURE
Comte de Kerenviller leur
Prefident , reprirent le 12 .
Janvier leurs feances dans
le Palais Imperial : que le
Confeil Aulique , qui avoit
été caffé pour la forme ,
afin d'être rétabli au nom
de l'Archiduc , le raffembla
15 .
au nombre de trénte
Confeillers avec deux Secretaires
, outre un Prefident
& un Vice - Chancelier de
l'Empire ; que le même jour
le Preſident prêta ferment
dans le Confeil d'Etat en
prefence de l'Archiduc
pour fa Charge de Prefile
GALANT.
103
dent. Le 22. le regiment de
cuiraffiers du Prince Charles
de Neubourg paffa prés
de
Vienne , pour
Hongrie, fuivi de quelques
autres regimens de l'armée
du haut Rhin , & de deux
regimens Eſpagnols venus
d'Italie , qui étoient déja
, pour aller en
arrivez en Croatie.
Les lettres de Madrid
portent que le Roy a donné
la Charge de Major de
Sarragoffe à Don Guillen
de Gufman , Lieutenant
Colonel , qui a perdu le
bras droit à l'attaque de
I
iiij
104 MERCURE
Campo Mayor ; que le
Marquis de Thouy , Lieu- ›
tenant general , étoit parti
de Madrid le 27. Janvier ,
avec le Marquis de Flavacourt
Maréchal de Camp ,
pour aller commander un
corps d'armée qui fe forme.
au voiſinage de Lerida des
troupes qui font en Arra- ,
gon & à Tortofe ; que Don
Jofeph de Armendariz &
Don Diego de Alarion ,
Lieutenans generaux , &
le Marquis de San Vicente ,
Marechal de Camp , doivent
pareillement s'y ren-.
GALANT. 105
dre du camp devant Barcelonne.
Celles de Catalogne confirment
que Nebot avoit
été tiré de prifon , & envoyé
à Mayorque avec le regiment
d'Allemans
deferreurs
. Le Marquis de Lede ,
Lieutenant general , & Gouss
verneur de Tarragonne ,
ayant été informé qu'il y
avoit une émotion de la
populace de Villafranca de
Panades , fomentée par le
Viguier , le Bailly & le
grand Juré de Villafranca ,
il y envoya quatre cent
106 MERCURE
fantaffins , avec quelque
cavalerie , commandez par
le Chevalier de Lede Maréchal
de Camp , par lc
Colonel Don Gabriel Laffo
de la Vega , & par le Lieutenant
Colonel Don Geronimo
Ordonnez . Ce detachement
fe faifit de trois
Officiers auteurs de la fedition
, qui furent envoyez
prifonniers au château de
Tortofe , & on établit en
leur place des perfonnes
d'une fidelité reconnuë. Un
autre village aux environs
de Cardonne ayant pris les
GALANT. 107
armes pour s'exempter de
payer les contributions a
été brûlé entierement , à la
reſerve de l'Eglife. D'autres
lettres de Catalogne por-
1 tent que la flote qui étoit à
Alicante étoit arrivée le 19.
Janvier auprés de Tarragonne
, ayant été groffie
par les bâtimens qui fe tenoient
prêts en divers endroits
de la côte , juſqu'au
nombre de vingt vaiſſeaux
& de cinquante barques.
Elle eft chargée d'une gran
de quantité d'artillerie , de
munitions de guerre & de
108 MERCURE
proviſions , dont elle avoit
debarqué une partie à Tarragonne
; & le 22. elle fit
voile vers Barcelone , dont
on devoit inceffamment
faire le fiege. Que quelques
lieux s'étoient de nouveau
foûlevez mais que
divers detachemens
ayant
été envoyez contr'eux , en
avoient brûlé fix , & paflé
au fil de l'épée les rebeles
qui s'y étoient trouvez ; ce
qui avoit mis le calme en
ce pays . là.
:
On écrit de Londres ,
qu'il y avoit eu plufieurs
GALANT.
109
changemens dans les charges
& les emplois ; que le
Comte de Bartimore a été
fait Confeiller du Confeil
privé en Irlande , & le Sieur
Molefvvort a été demis
d'un pareil employ par or
dre de la Reine , que Sa Mas
jefté a ordonné de dreffer
une nouvelle Commiffion
pour les Commiffaires de
la Marine , qui font le
Comte de Strafford, le Chevalier
Lake , le Chevalier
Drake , le Sicur Aiflabie ,
le Chevalier Vvishart , & le
Sieur Clarke ; que le Che110
MERCURE
valier Bing a été exclus du
nombre de ces Commiffaires
, & il a été mis à la demi-
paye comme Amiral de
Fefcadre blanche . Le Sieur
Menley a été demis de la
charge de Maître des Pol
tes de Dublin , qui vaut huit
cent livres fterlin de rente ,
& le Sieur Stvvard a été mis
en fa place. Le Sieur Lovvther
, Gouverneur des Barbades
,a été privé de ceGouvernement
. Le Sr Thomas
Harley , coufin du grand
Treforier , a été nommé
pour retourner à la Cour
GALANT. IF
de Hanover en qualité
d'Envoyé extraordinaire.
Le Comte de Lexington ,
ambaffadeur extraordinaire
vers le Roy d'Eſpagne ,
arriva à Londres par la voye
de Portugal le 23. Janvier.
Le lendemain il alla à Vvindfor
faluer la Reine , & lui
rendre compte
negociations.
Sa Majefté a fait
expedier une commiſſion ,
par laquelle elle établit le
Chevalier Guillaume Honivvood
& les Sieurs Vvalter
Hungerford Duncadée,
Guillaume Govvert & Ede
fes
112 MERCURE
douard Hungerford , Juges
des appellations des
jugemens rendus par les
Commiffaires de l'Excife.
La charge de Surintendant
des Forêts & des
Parcs , vacante par le decés
du Sieur Jean ] Manley
, a été donnée au Sieur
Alexandre Pendarves , &
le Gouvernement de la Province
de Maryland , dont
Milord Baltimore eft fon.
dateur & proprietaire , a
été donné au Sieur Jean
Hart.
On mande de Bruxelles,
que
GALANT . 113
que le differend entre le
Roy de Pruffe & les Eftats
de Brabant avoit été terla
fomme de
&
miné
pour
quatre
-vingt
mille
écus
,
payables
en
quatre
ans
,
que
ce qui
regarde
le Hainaut
fera
terminé
de la même
maniere
. Les
Sieurs
Buis
& de
Goflinga
, ambaſſadeurs
extraordinaires
des
Eftats
Generaux
des
Provinces
Unies
auprés
du Roy
en France
, arriverent
le 30 .
Janvier
à Paris
. Ils fe rendirent
à Verfailles
le 6. Fe
vrier
, oùils eurent
audience
Fev.
1714. W
K
114 MERCURE
particuliere du Roy.Enfuite
ils eurent audience de Monfeigneur
le Dauphin , de
Madame la Ducheffe de
Berry , de Madame , & de
Monfieur le Duc d'Orleans,
étant conduits par le Baron
de Breteuil Introducteur
des Ambaffadeurs.
Obfervations fur une mort
Subite. )
Un jeune homme de feize
ans , qui depuis l'âge de
quatorze ans maigriſſoit
étoit fujet à une toux & à
GALANT . ng
&
une difficulté de refpirer
& tomboit en foibleffe
quand il avoit fait quelque
exercice violent , ou s'étoit
mis dans une grande colere
, s'étant un foir emporté
avec excés contre un
camarade qu'il avoit ,
ayant aprés cela foupé deux
fois plus qu'à l'ordinaire
fe coucha à dix heures , &
dormit jufqu'à deux , qu'il
fut réveillé par une toux
violente, à laquelle fucceda
un grand crachement de
fang , & la mort à cinq
heures du matin, Stive
Kij
116 MERCURE
On l'ouvrit , & on lui
trouva beaucoup de fang
fort peu écumeux dans la
trachée & dans fes bronches
; du fang noirâtre & à
demi caillé dans les deux
troncs de la veine cave ,
dans le ventricule droit du
coeur , & dans l'artere pulmonaire
; pas une goutte
de fang dans le ventricule
gauche,
Le tronc de la veine du
poumon étoit extraordinairement
dilaté , & auffi
gros, que tout le coeur , &
la cavité étoit affez exacte-
ར།
GALANT . 117
ment occupée par un corps
étranger rond , & épais de
deux pouces
.
>
Le cercle membraneux
qui entoure interieurement
l'embouchure de l'oreillette
gauche dans le coeur
étoit par fon bord inferieur
plus épais qu'à l'ordinaire ,
offeux & plus étroit que par
le bord fuperieur , ce qui
eft contraire à la confor
mation commune.
Pour rendre raiſon de la
mort de ce jeune homme ,
& des accidens qui l'ont
precedée, on ne fe fert que
118 MERCURE
d'un feul des faits qu'on a
obfervez , & on en deduit
tous les autres.” /
Le cercle membraneux
placé à l'embouchure de
loreillette gauche du coeur
eft une espece de petit entonnoir
, dont l'ouverture
la plus étroite eft tournée
vers le haut ou vers la bafe
du coeur. Le fang pouffé
par la contraction de l'oreillette
gauche eft obligé
d'augmenter ſa vîteffe , pour
paffer d'abord par la partie
la plus étroite de cet entonnoir
; aprés quoy il coule
GALANT. 119
fans difficulté par la partie
la plus large dans le ventricule
gauche .
Suppofé , comme il eft
affez vrai- femblable , que
par la premiere conformation
du corps de ce jeune
homme cet entonnoir fût
renverfé , & que le bord le
plus étroit du cercle membranenx
fût en bas , le fang
qui a paffé d'abord par
partie la plus large fans augmenter
ſa vîteſſe , n'a pû
paffer facilement par la
-partie la plus étroite ; &
dans l'effort qu'il a fait conla
120 MERCURE
tre l'obftacle , c'est à dire
contre le bord inferieur de
ce cercle , il l'a frapé lavec
plus de force , & a pouflé
dans les interftices de ces
fibres des particules ſalines ,
qui non feulement l'ont
rendu à la longe plus épais,
parce qu'elles s'y amaf
foient en grande quantité :
mais qui l'ont encore rendu
offeux , parce qu'elles é-
-toient falines .
2
Ce bord devenu offeux a
perdu fa flexibilité, & quand
le fang de la veine du pou-
-mon fe prefentoit pour entrer
GALANT.
trer dans le ventricule gauche
, & que le cercle membraneux
auroit dû s'élargir
pour faciliter fon entrée ,
l'offification l'en empêchoit
, & une partie du fang
demeuroit dans la veine.
De là l'extrême dilatation
de ce vaiffeau , & le polype.
f
Le polype formé , le fang
ne paffoit plus qu'avec
beaucoup de peine dans la
veine du poumon , & par
confequent fejournoit dans
les arteres de cette partie ,
s'y amaffoit , les dilatoit ,
Fev. 1714.
L
122 MERCURE
&
Les
les rendoit plus minces ,
élargiffoit leurs
parties les plus fubtiles du
fang , comme fes fels & les
pores.
*
ferofitez,s'échapoient donc
*
aifément par ces pores
agrandis , & de là elles ne
pouvoient paffer que dans
la cavité des cellules du
poûmon , dans les bronches
& dans la trachée.
Cette caufe de la toux &
de la difficulté de reſpirer
eft affez évidente. Il est clair
auffi que la colere ou un
grand exercice fubtilifant
encore plus le fang , lui
GALANT. 123
donnoient encore plus de
facilité à paffer dans les
conduits de la reſpiration ,
& que comme il abandonnoit
prefque entierement
la route des veines pulmonaires
, & que par`confequent
le ventricule gauche
avoit peu de fang à pouffer
dans l'aorte , les foibleffes
devoient s'en enfuivre , &
enfin la mort , lors qu'il ne
paffa aucun fang de la veine
du poûmon dans le ventricule
gauche.
A tout cela il eft aifé de
joindre ce que les alimens
Lij
124 MERCURE
pris avec excés dans de pareilles
circonstances , peuvent
avoir contribué à une
mort fi prompte.
Article des Enigmes .
Parodie de la premiere
Enigme , dont le mot
eft le grais ou rocher.
Mainte Poëte appelle
audacieux ,
Et dans fes vers éleve
juſqu'aux cieux
Ces rochers dont le grais
GALANT . 125
a pris fon origine.
Quelquefois pour m'avoir
dans la carriere
on mine
Pour le
bourgeois , pour
le
manant.
Je fuis groffier en pierre,
en lable fin pourtant.
Grais en pavé les
voyageurs
beniſſent ,
Rude pav les voyageurs
maudiffent.
Telle Cervante
Qui rit & chante ,
L
iij
126 MERCURE
Enécurant des doigts pétrit
,
Avecfes deux mains attendrit
Le grais , & fait pleuvoir
dansfon écuelle ,
En l'arroufant , en l'af
pergeant.
Le pave carefféparmainte
Demoiselle.
Demoiselle
eft du paveur
l'inftrument ,
Et par elle affermi pavé
conftant. ferme
GALANT . 127
Parodie de la feconde
Enigme , dont le mot
eft le tifon.
Perfonne ne l'a devinée
; car elle eft plus indevinable
que belle.
Jamais dans aucunefamille
Nom ne fut fi fouvent
changé ;
Or devinez donc quel
nom j'ai.
Liiij
128 MERCURE
Ce n'est point le nom de
ma fille.
La cendre ett fille du
tifon ,
Puifque tifon engendre
,
Forme la cendre
Dans le foyer , où le tifon
Prend fon nom.
Ma mere perd le fien ,
qu'elle prit non d'un
pere.
La buche du tiſon eſt
mere ,
GALANT. 129
Et prit fon nom
Du bucheron .
C'est un quidan bon compagnon,
Qui batife avec fa coignée
Buche , qui n'a ce nom
que quand elle est
formée.
Or tifon eft le petit-fils
D'un ayeul dont le nom
fut pris
Ni de fon pere ,
Ni de fa meres
Car l'arbre
qui buche

130 MERCURE ,
engendra ,
Et la terre que pour
mere a.
L'arbre qui terre he fe
nomme ,
Prouve mon dire , &
voila comme
Buche , cendre , tifon ,
Terre , arbre , bucheron
Ont chacun leur nom en
partage.
L'as-tu deviné ? non , je
gage.
GALANT . 131
ENIGME
nouvelle .
Comme on coupe un gâ-
7 teau des Rois ,
Fe coupe le cruel qui met
l'homme aux abois ;
Je mange à belles dents.
celui
Qui me mange avec mon
étui .
Faifant envie à tous
& n'ayant nulle
envie ,
132 MERCURE
Je vais tambourinant
ma vie ;
Car vie l'on peut appeller,
Du moins par façon de
parler ,
Le train dont je vais
par le monde ,
En fuivant la brune &
la blonde
,
Suivant auffi brun 5
blondin ,
Et mainte defoeuvré badin
,
Qui trés -fouvent n'aime
GALANT. 133
que ma parure ,
Et qui s'amuse à m'ôter
ma coifure ,
A la
remettre ,
lorgner ,
à
me
Sans les coups qu'avec
lui je rifque de ga-.
gner.
II. ENIGME.
D'un pere fedentaire
étant fille ambulante
,
De fa nature auffijefuis
34 MERCURE
participante.
Mepromenantfort bien
fans fortir de chez
moy ,
Mepromenant auffi par
ville & par campagne
,
Des bons rameurs le fignal
m'accompagne
.
Parfois mon feul aspect
caufera de l'effroy
Aux poltrons qui foupent
en ville.
A qui dort je fuis inutile
,
GALANT.
135 .
S'il n'a pris par avance
un fage arrangement
,
Comme aucun Directeur
le prend communément.
Je dirige qui me dirige
,
Avec les fous j'ai le vertiges
Je guide quelquefois
dans le spirituel ,
Pour acheminer vers le
Ciel,
Eftant propre à mon136
MERCURE
ter , et non pas
defcendre.
à
Ce que je ne feai pas de
moy tu peux l'apprendre.
Qui nous prend
mine a tort i
à la
Car il en eft de nous comme
des hypocrites,
Des femmes & des chatemites
,
Belle montre
de
rapport.
છે
pe
SaGALANT.
137
Samedi 17. Fevrier ,
-jour de la naiſſance de
la Reine de la Grande
,
Bretagne Monfieur
Prior , Plenipotentiaire
de Sa Majefté , traita
magnifiquement le Duc
de Richemont , le Comte
de Karnvvarth , les
Chevaliers Horbarts ,
Hatton , Vvebb, & plufieurs
autres Seigneurs
Anglois. Ils parurent
tous magnifiquement
habillez , dans une oc-
Fev . 1714.
M
138 MERCURE
cafion où il s'agifsoit de
celebrer la naiſsance d'une
Princeffe trés - aimée
de toute la nation . Il y
avoit deux tables de
vingt perfonnes , & une
autre de quinze , toutes
trois à quatre fervices &
deffert. Le Duc de Richemont
fit les honneurs
de la premiere table , &
Monfieur Prior de la feconde.
Le repas fut fuivi
d'un trés - beau concert
; le foir il y eut de
GALANT. 139
grandes illuminations ,
on donna une trés - belle
collation . Tous les gens
de la fuite des
Seigneurs
furent auffi bien regalez .
Tout le jour fe palla
dans une joye univerfelle
les fantez principales
qu'on portoit au
fon des trompettes &
des timbales , furent cel
les de la Reine de la
Grande Bretagne , à la
paix generale , au bon
Parlement prochain , &
M ij
140 MERCURE
à la bonne correfpondance
éternelle entre la
Grande Bretagne & la
France.
Ceremonie du Couronnement
du Roy de la
Reine de Sicile.
Les lettres de Palerme
du mois de Janvier portent
qu'on fit le 24. Decembre à
Palerme la ceremonie du
Couronnement du Roy &
de la Reine de Sicile. L'Archevêque
de Palerme fit
GALANT. 141
cette fonction , affifté des
Evêques de Mazzara , dė
Syracufe & de Cefalu . L'Eglife
Metropolitaine étoit
ornée magnifiquement
,
& on prepara un trône pour
le Roy du côté de l'Evanla
Reine
gile , & un pour
qui avoit un degré de moins .
Les ornemens
royaux avoient
été mis dans une
Chapelle
voifine. Sur les
quinze heures d'Italie leurs
Majeſtez ſe rendirent à l'Eglife
. Le Roy de Sicile alla
d'abord dans une Chapelle
prendre des habits militai142
MERCURE
res , & à l'entrée du Choeur
il fut reçû par deux Evêques
qui le conduifirent à l'autel ,
où il fut preſenté à l'Archevêque
, auquel ils demanderent
qu'il le couronnât . D'abord
on lui prefenta la Profeffion
de Foy , qu'il fit en
mettant la main fur les Evagiles
. On recita les prieres
prefcrites dans lePontifical ,
durant leſquelles
le Roy étoit
à genoux profterné fur
des carreaux . Aprés la benediction
, il fe leva, & fe mit à
genoux devant l'Archevê
que , qui lui fit les onctions
GALANT .
143
fur le bras droit & entre les
épaules . La Meffe fut commencée
, & au Graduel le
Roy alla dans la Chapelle fe
revêtir du manteau royal.
Aprés le Graduel , l'Archevêque
s'affit, la mitre en tête
; le Roy defcendit du trône
, & , conduit par les deux
Evêques , il reçut à genoux
l'épée nue,&la rendit à l'Archevêque,
qui l'aïant fait remettre
dans le fourreau , la
lui ceignit. Sa Maj. la tira; &
l'ayant élevée , la remit de
même.Puis
le Roy à genoux.
reçut la couronne, que l'Ar144
MERCURE
chevêque lui mit fur la tête ,
& le fceptre en main . Le
grand Ecuyer porta l'épée
devant le Roy ,lorfque l'Archevêque,
accompagné des
deux Affiftans le códuifit &
le plaça fur le trône , aprés
quoy le Te Deum fut chanté.
La Reine fut couronnée enfuite
, reçut les onctions , puis
elle fut revêtuë du manteau
royal. A l'Offertoire , leurs
Maj . allerent à l'offrande, la
couronne en tête & le ſceptre
en main. Ces ceremonies.
furent accompagnées d'une
triple falve d'artillerie .
GALANT . 145
LA
CRITIQUE
OD E.
Q Vel orage eft preft à
fondre ?
Lanuë obfcurcit lesCieux,
Defonfein pour me confondre
Sort un effeinfurieux.
Le Préjugéfanatique ,
L'aveugle
Amour de
Antique ,
L'Orgueil au hardi regard
,
Février 1714.. N
146 MERCURE
L'Envie
> à nuire fi
prompte
La fedinienfe honte
Defe détromper trop tard,
Eft- ce peu divin Homere
Qu'aux yeux de tout
PUnivers
,
Je l'aye avoué le Pere
De la Fable & des beaux
Vers ?
J'ai dit , devois -je plus
dire ?
Qu'en tes mains nâquit
GALANT. 147.
la Lyre
Avec l'art de l'accorder ;
Que comme au Roy du
Parnaffe ,
L'Auteur * mefme qui
t'efface
Doit encore te ceder.
Falloit - il , Fuge pen
fage,
Sans difcerner tes travaux
Honorer du mefme hom
mage
Les beautez & les dé-
• Virgilo.
148 MERCURE
fauts ?
Falloit-il par un miracle,
Te faire vaincre l'obstacle
Des moeurs , du temps &
du lieu ?
De quelque nom qu'on te
nomme
Tu n'étois enfin qu'un
homme ;
Falloit-iltefaire un Dieu ?
L'Erreur te croit infaillible.
Sors , viens la défavoüer
De ce mérite impoffible
GALANT: 149
Dont elle ofe te loüer.
Vois par quelles réveries
L'Abus des Allégories
Veutfurprendre notrefois
Et de tes faux interprétes
Déments les glofes abf
traites ,
Impénétrables pour toi.
Si tu gardes le filence ,
Au défaut de ton fecours
J'ai du moins pour ma
defenfe
Les vrais fçavants de nos
jours.
iij
150 MERCURE
J'en fçais qui malgré les
ages
Péfent les plusgrandsfuf
frages
Au poids exact du bon
Jenss
La Raifon , dès fa naiffance,
Afur eux plus de puif-
Lance
Qu'une erreur de trois
mille ans.
* Du Précepteur d'Alexandre
* Ariftote.
GALANT
H
Le fophiftique chaos
Si long-temps a vû s'étendre
Un vain fyftême de mots.
Malgré ce regne paisible,
De l'Obfcur , l'Intelligible
Triomphe enfin à fon tours
Et malgré leurs privileges
Au fonds mefme des Col
leges
La vérité s'eft fait jour.
Loin donc refpects ido-
Laftres
Des erreurs des temps
N iiij
152 MERCURE
paffez ,
Préjugez, opiniaftres ,
Taifez- vous , difparoiſſez
Sur l'opinion vulgaire ,
L'examen le plus fevere
N'eft jamais hors de faifon
.
C'est à la voix de Dieu
même
Qu'appartient
le droit
Supreme
De captiver la Raifon .
Que tout le refte fubiſſe
Le Tribunal érigé.
GALANT . 151
Venez , entrez dans la
C
lice
Orateurs du Préjugé.
Mais avant que l'Eloquence
Prenne par vous la défenfe
Des droits de l'Antiquité,
Souffrez encor qu'en ces
rimes
Je vous trace les maximes
Que me dicte l'Equité.
Bravant , d'un dédain
facile ,
154 MERGURE
Mes traits les mieux ai
guifez ,
Diriez - vous que vrai
Zoile
J'emprunte des traits
ufez ?
Qu'à ces raisons impru
dentes .
Déja centplumesfçavan
tes
Ontfaitperdre leurcredit?
N'importe il faut les
confondre ,
Duffiez - vous pour y répondre
GALANT. 159
Dire auffi ce qu'on a dit.
N'allez pas de phrafes
vuides
Enfler vos raifonnements,
Par des principes folides
Jettez en les fondements :
Qu'ils foient féconds , immuables
;
Dans vos conféquences
ftables
Qu'ils gardent toûjours
leurs droits ;
Et fimples dans la dif
pute ,
Craigne qu'on ne vous
156 MERCURE
impute
Deux meſures & deux
poids.
De l'Ironie infultante
Fuyez lefrefle fouftien :
Malgréfagrace piquante
Un bon mot ne prouve
rien .
Plus d'un m'eft venu foûrire
s
Je me ferois mieux fait
lire
S'ils égaycient mes écrits ;
Mais loin que je les reGALANT.
157
grette ,
D'une louange fecrette
Mon coeur m'en donne le
prix.
Du * Heros de l'Iliade
N'imitez pas le couroux;
C'eft Neftor quiperfuades
Emprunte fonftile doux.
Ceux que leur fiel empoifonne
5
Le droit fens les abandonne
,
Les livre aux Illufions s
L'imprudent Paralogifme
* Aehille.
458 MERCURE
Et le fuperbe Sophifme
Sont enfans des Paffions.
Ouy , malheur à qui
dédaigne
D'inviolables égards :
Qu'entre nous l'amitié
regne
Düſſent perir tous les Arts,
Il est des vérite faintes ,
Qu'aux mépris des lafches
craintes
Le zéle doit fouftenir.
Mais fur des beautez,
mortelles
GALANT. 159
Nos lumieres valent- elles
La paix qui doit nous
unir ?
Il n'est rien que je ne
faffe
Pour conferver cette paix:
Fallût-il
demander grace
Aux deux partis ; je le
fais s
Aux adorateurs d'Ho
mere
Je m'avouerai téméraire ,
D'en avoir trop rejetté's
Et que ceux qu' Homere
160 GALANT .
bleſſe ,
Me pardonnent la foibleſſe
D'en avoir trop adopté.
L'INDIEN
ET LE SOLEIL,
FABLE.
Grand Roy , qui vois
les Arts d'un regard
favorable ,
Et dont avec transport
j'eprouve la bonté ,
Souffre
GALANT. 165
Souffre qu'ici la Verité
Se cache un moment
fous
la Fable.
UN habitant de l'Inde
adoroit le Soleil.
Un zéle renaissant nuit
5 jour le devore ,
Et , plein de l'objet qu'il
adore ,
L'ardeur de le louer interrompt
fon Sommeil.
Quelquefois celebrant (a
lumiere féconde ,
D'un regard attentif il le
Février
1714.
162 MERCURE
fuit dans fon cours ,
Admire en lui l'Ame du
monde ;
Toûjours chantant , & fe
plaignant toujours
Qu'a ce qu'ilfent nul terme
ne réponde.
Il peint tantôt le celefte
flambeau
Vainement affiegé par les
fombres nuages ,
Et bien - toft
vainqueur
des
orages
Reparoiffant encore plus
GALANT. 163
beau.
Il fait
Hymne fur
Hymne , en remplit
la contrée ;
Tout accourt àfa voix, 5.
chacun
l'écoutant ,
Beniffoit la puiffance en
fes vers célébrée ,
Tandis que du plaifir de
la voir adorée
Le
chantre fe tient trop
content.
Le Soleil touché de ce
zéle
,
164 MERCURE
J
Surfes champs deffechez
jette un oeil carefant.
Soudain , moiffon double
65 plus belle
fleurif- Verger fertile
fant.
Soleil , dit l'Indien , je
rends à tes largeffes
Tout
l'hommage que je
leur doi :
Tes bienfaits cependant
n'acquiérent
rien fur
Tu
moi ;
peux augmenter mes
richeffest -
GALANT. 1651
Mais non pas mon zele
pour toi.
LETTRE.
de Catalogne.
Ilyaa long- temps , Mon
fieur , que je n'ay eu l'honneur
de vous eſcrire , parce
qu'il n'y a rien eu qui fuft
digne de vous eftre mandé,
mais ce qui fe paffe icy
preſentement merite bien
que vousen foyez informé ;
tous les peuples de la Catalogne
fe font foulevés &
ont pris les armes. Mr. le I
T
166 MERCURE
Duc de Popoly a fait de
gros détachements , l'un
pour envoyer fur laViguerre
de Villa França , & l'autre
dans le Valles.
J'apprends par un Courier
qu'il m'envoye qu'ils
ont fort bien fait l'un &
l'autre , que celuy de Valles
commandé par le Comte
de Montemart aprés
avoir chaffé les rebelles de
plufieurs poftes qu'ils occupoient
, bruflé entierement
Caldas de Montbouy
& une partie de S.
Manat , le calme paroifGALANT.
167
foit reftably de ce coſté là.
Il eft depuis entré dans la
plaine de Vich , & comme
l'arrivée des troupes dans
celuy-cy avoit attiré tous
les rebelles de ce cofté
pour nous difputer un paſfage
que l'on appelle le
Col Secabra , il trouva celuy
du Congoft libre &
fans refiftance , il chaffa les
Miquelets & rebelles qui
en formoient le blocus &
qui tenoient Mr. de Bracamonte
trés refferré dans
eette Ville.
Il les fuivit avec toute la
168 MERCURE
diligence poffible & les
attaqua dans un poſte
avantageux que l'on appelle
N. Señora de la Gleva
, il les y força aprés en
avoir tué 200. & 104. faits
prifonniers , & aprés avoir
chaffé un corps de revoltés.
qui étoient dans la monta .
gne de S. Hypolite , il fit
piller ce Village & le fit
brusler & tout ce qui en
dépendoit .
J'avois envoyé un déftachement
affez confiderable
à l'Equerol pour diffiper
les rebelles qui fe pourroient
GALANT, 169
roient trouver de ce coſté,
mais ils n'attendirent pas
l'arrivée des troupes & tout
fe retira dans le moment ,
cela paroift encore finit
pour un temps dans la
plaine de Vich à la referve
des Villages du ? On
Mont
Senis qui ont encore les
armes à la main , le Comte
de Montemart doit aller
dans le Lluzanes y
joindre le Brigadier Dom
Jofeph Vallejo. Tous les
rebelles fe font retirés de
ce cofté- là & de celuy
de Manréfa & de Solfon
P Février
1714 .
170 MERCURE
ne , il me paroift que le
cofté de Sollonne eft celuy
qui donne le plus d'inquiétude
Dom Joſeph
Vallejo avoit beaucoup de
troupes à fes ordres & les
avoit fort diviſées dans des
quartiers differens pour
refferrer autant qu'il pour
roit la garniſon de Cardonne
, mais tout d'un
coup elles fe trouverent
invefties fans fe pouvoir
donner la main l'un à l'autre
, mefme Vallejo ayant
affemblé un Corps de troupes
allez confiderable , ne
2
GALANT. 171
puft y aller luy mefme leur
porter du fecours , le grand
nombre des rebelles qu'il
y a de ce coſté-là , luy en
ayant fermé le paffage.
Dom Diego Gonzales
qui eftoit party du Camp
avec un autre deftachement
arriva tres à propos
pour fecourir le Regiment
de Brabant Cavalerie Wal
lone , qui eftoit affiegé
dans Yqualada où il fe
deffendoit , & ayant bruſlé
le Village de S. Quintin
il marcha à la Puebla
où les rebelles s'étoient
Pij
172 MERCURE
retirés & fortifiez , & les
y ayant forcé & paſſé au
fil de l'efpée tout ce qui ſe
rencontroit , il y avoit mis
le feu , il eftoit revenu depuis
à Mattorell où il attendoit
du Canon & des
mineurs pour attaquer
trois Chafteaux qui font
prés de- là , occupés par
les rebelles , tres bons
pour leurs fituations &
qui incommodent fort la
communication du Camp.
La nouvelle la plus importante
, eft celle de l'arrivée
de la Flotte de Ca-
-
GALANT . 173
dix à Tarragone avec
toutes les munitions de
guerre & de bouche que
l'on attendoit dont M. le
Duc de Popoly me fait
part par fon dernier Courrier
, il compte quelle fera
inceflamment devant Barcelonne.
J'ay l'honneur d'eftre
avec un refpectueux attachement
, Monfieur , voftre
trés - humble & tresobéiffant
Serviteur
FIENNES.
Piij
174 MERCURE
MARIAGE.
LE trente Janvier _dernier
Mr. Henault Préfi
dent au Parlement Fils
de Monfieur Henault Fermier
General
> époufa
Mademoiſelle de Montargis
, Fille de Mr. de Møntargis
Garde du Tréfor
Royal.
Voici des Vers qui ont
efté faits à l'occafion de
ce mariage .
GALANT. 175
PA un beau jour de la
nouvelle année
Rendit vifite à meſſer
Hymenée
Dame raifon ; deſſein judicieux
Guidoit fes pas , elle s'offre
à fes yeux .
Qui fuft furpris n'eſt befoin
de le dire
bien l'entendez , à fon
abord le Sire ?
Fait grife mine , oh , dit- il,
par mon chef ,
i
Là donc icy vient nous
porter mechef ,
Pij
176 MERCURE
Car long- temps qu'en mes
S.. eftats pour caufe
De tout fans elle à mon
gré je difpofe ;
Là pour détruire un injuſte
ſoupçon
di
Raifon fourit & parla
,
fur ce ton.
Dieu des Epoux dont le
trop dur empire
Contre ton joug revolte
maint beau Sire ,
Et qui veras fi reglement
n'y mettre
Ton regne choir par faute
de ſujets ,
Efcoute- mmoy ; tes avares
GALANT. 177
tap miniftres ,
L'humble intereft , & les
fraudes finiftrés
le faux honneur , qui fouvent
fuit tes pas ,
Font feuls le mal qui regne
en tes Eftats ;
Bannis , crois- moy , cette
troupe perfide ,
Qu'à tes confeils au lieu
d'eux je préfide ,
Tu regneras paisible , &
les mortels
Viendront en foule encenfer
tes Autels ;
Que fi ne veux croire à
mon témoignage ,
178 MERCURE
Eprouve au moins que
2. mon confeil eft fage!
Prés d'un Hoftel par Thé
mis habité
Azile fur contre l'iniquité,
Chez Mecenas eft gentille
Donzelle
Que je cheris par grand
excés de zele ,
Car fa jeuneffe inftruite en
mes devis
Oncques ne fuft rebelle à
mes avis ,
Mon amitié ja long-tems
luy reſerve
Un favori de Thémis , de
Minerve ,
GALANT. 179
A mes leçons tres - docile
fujer ,
Et qui fans moy ne forme
aucun projet ,
Que fi fon nom tu ne connois
encore angl
Damon s'appelle , Apollon
qu'il honore
N'a gueres encor charmé
de fes écrits
Du beau parler luy decerne
le prix ;
Enfin tous deux femblent
faits l'un pour l'autre
Et ton aveu doit ſuivre icy
le noftre
Amour fera de la fefte ; &
180 MERCURE
je crois
Qu'il m'obéit pour la premiere
fois >
A ces propos
hymen
rompt le filence ,
Et fans tenir fa réponſe en
I balance
C'a repond- il éprouvons ,
j'y confens
Si tant de maux douloureux
& cuifans
N'adviendroient point aux
époux en ménage
Faute d'avoir pris de toy
confeil fage ,
Allons , je cede à tes empreffements
GALANT . 181
Et vais unir à tes yeux nos
Amans ;
Il dit , bien-toft l'un & l'autre
ils arrivent
Au lieu marqué , les ris les
jeux les fuivent ,
Ils font furpris d'y rencontrer
l'amour .
Qu'ils n'attendoient
que
vers la fin du jour ,
Le couple heureux joint
d'un lien durable
Dans beau Palais trouve
excellente table
Dieu des feftins d'y repandrefes
mets demo
12
Cerés , Bachus , d'y verfer
182 MERCURE
fes
bienfaits ,
Amour , Hymen , raiſon
d'entrer en danſe ,
Jeux & plaifirs de fauter
en cadence ,
Tant que ce Dieu qui
donne le repos
Sur maints beaux yeux
vient verfer fes pavots ,
Alors amour luy mefme
deshabille
Dans lit benit met pucelle
377911
gentillean
Et qui bien-tolt pucelle ne
fera ,
Le mefme Dieu bon ordre
197 y donnera ;
GALANT. 183
Enfin ayant fait Harangue
à fa mode
Promet Poupons comme
c'eft la méthode
Ferme rideaux & delogeant
fans bruit
Laiffe à l'Amour le foin
de cette nuit.
A
184 MERCURE
A MONSIEUR
LE PRESIDENT
HENAULT,
EPITALAME.
L'Autre jour c'étoit feſte
aux rives du Permeffe ,
Venus y préfidoit: aux pieds
de la Déeffe
En preſence des Ris , des
Graces , & des Jeux
Phebus & les neuf Soeurs
renouvelGALANT•
f
185
renouvelloient leurs
voeux :
Voeux dont , l'Amour jadis
adreffa le Formulaire ,
Voeux d'aimer pour aimer,
fans autre engagement
,
De promettre , mais fans
ferment
Ou fans garans du moins,
que le defir de plaire :
Tous voeux écrits au Rite
de Cythere
Ennemy d'un joug plus févere
.
Mufes à ce grand jour
étoient vos favoris .
Ceux qui du beau langage
Février 1714. Q
186 MERCURE
ont obtenu le prix ,
Les Catulles nouveaux ;
dont l'amoureufe lyre
Attendrit Lefbie , ou Thamire
,
Les Théocrites foupirans ,
Les Tragiques fameux
qui , par de certains
charmes ,
Des plus plus beaux yeux tirent
des larmes ,
Ces derniers en grand
deüil : les Quinauts
plus galans
Vêtus d'habits legers , & de
Cothurnes blanes .
Regne Amour , regne feul
GALANT. 187
fur les bords d'Hypocrene
S'écrioyent les neuf foeurs.
à l'invocation
Tous les Choeurs répondoient.
Tel que le
*
zele entraîne
Donne même à l'Hymen
quelque imprécation .
Hylas prés d'Apollon avoit
alors fa place,
Hylas couvert de lauriers
tous nouveaux
Hylas qui jeune encor , loin
de nos vieux Rivaux
Se traça deux chemins au
chemin de Parnaſſe ,
Q ij
188 MERCURE
Du pur & libre Amour il
maintenoit les droits .
Euterpe ayant en main le
ruſtique Hautbois
C'eft moy, dit- elle , Amour,
qui fuis bien affurée
D'enſeigner tes loix aux
humains
Selon leur texte pur telles
que de tes mains
Je les reçus fous le regne
d'Aftrée ,
Diftingue auffi mes fujets
entre tous .
Mes leçons ont formé plus
d'Amans que d'Epoux.
Amoureux du loifir que
GALANT. 189
I'ldyle refpire
·
Où vivroyent ils mieux
que fous ton Empire ?
Du fexe ils font affez
cheris ....
Elle regarde Hylas avec
un doux fouris ,
Mais tout àcoup une clarté
plus pure
Luit au double Vallon
on reconnoift Mercure
Qui defcend d'un vol
promt du celefte
lambris
,
$
>
Amy de tout illuftre , &
qui donne au merite
Les mefmesfoins qu'il doit
>
190 MERCURE
aux affaires des Cieux .
A - t'il tort les hommes
d'Elite
Ne fons-ils pas les vrais
enfans des Dieux ?
Chacun fçait quel reſpect
le Parnaffe luy porte
L'hymen marchoit tout
fier d'une fi bonne
efcorte
Et Plutus les fuivoit tous
deux
Peu de gens dans ce lieu
connoiffoient fon viſage
Dieu pefant , qui cent fois
a foulé fous fes pas
Les fleurs dont le Permeffe
GALANT. 191
embellit fon rivage
Il eftoit ce jour - là plus
humain , moins ſauvage
Il répend fes trésors aux
pieds du jeune Hylas.
Hylas ne regardoit
que
Mercure
, & les Mufes ,
Je veux ton coeur , ta main
ne me refuſe pas
Dit Mercure l'Hymen
t'offrira des appas ....
Hylas pour refuſer meditoit
des excufes
Quand l'Hymen à fes yeux,
pour premier de fes
dons
Dévoila le portrait d'une
192 MERCURE
1
Nymphe charmante ,
Il s'arrefte , il contemple ..
Eh bien nous te perdons
S'écria la troupe fçavante
Cette Nymphe à jamais
te dérobe à ces lieux
Elle va t'occuper de foins
plus ferieux ,
Elle n'eft pas voſtre ennemie
Répond l'Interprete
Dieux
des
Son Pere eft pour nos Arts
un amy précicux
Dont , contre le faux gouſt

la raiſon affermie
Affure au vray merite un
accueil
GALANT. 193
accueil glorieux.
Pauleftre , cette Nymphe
a nos plaifirs fidelle ,
Suivra fouvent icy fon pere
& fon Epoux ,
Je vois dans l'avenir, d'une:
chaine fi belle , ator
Les fruits fe confacrer à 1
yous.
+
Par cet efpoir flateur , la
troupe un peu remiſe ,
Reçoit l'Hymen , approuve
le party
L'Amourfuivit Hylas chez
la Nymphe promiſe ,
Il fi trouva fi bien , qu'il :
n'en eft point forti.
Février 1714 . R
194 MERCURE
A MADRID
ce 29. Janvier , 1714 ,
Un des jours de la femaine
derniere , le Roy fe
rendit au Pardo pour chalfér
; c'eft le feul divertif
fement que Sa Majesté
prend pour diffiper le chagrin
que lui caufe la maladie
de la Reine. On avoit
depuis deux jours enfermé
un Sanglier qui n'eftoit pas
des plus grands ; mais la
faim & la foif qu'il avoir
enduré avoient : beauGALANT.
195
coup augmenté
fa colere
& fa ferocité. Aufſi - toſt
qu'il eut été lâché , on luy
donna les chiens , mais en
ayant tué un , les autres
s'épouventerent. Le Roy
luy tira un coup de fufil
qui ne le bleffa pas affez
pour l'arrefter , & il courut
avec une furie extraor
dinaire droit à Sa Majeſté.
Dom Alonfo Manrique
Comte de Montenuevo
premier Ecuyer & Gentilhomme
de la Chambre de
Sa Majefté qui l'avoit toujours
fuivie dans les voya-
R ij
196 MERCURE
ges , & à la guerre depuis
fon avenement à la Couronne
ſe trouvant prés
d'elle , il prit en un mo-
>
ment le parti le plus prudent
& le plus heureux qu'il
auroit pû prendre , aprés y
avoir penfe long - tems . Il
fe jetta à corps perdu audevant
de la befte afin de
donner au Roy le temps
d'eftre fecouru . Le Sanglier
lui donna plufieurs
coups de fes deffenfes , qui
luy déchirerent fes bottines
, fon haudechaufes &
fes habits , jufqu'à luy dé-
1
GALANT. 197
couvrir le haut de la cuiffe
; mais fans aucune autre
bleffure que quelques
contufions. Ainfi il ſe tira
d'un peril qui lui pouvoir
eftre funefte avec un applaudiffement
general , &
une gloire à laquelle plufieurs
autres Seigneurs auroient
voulu avoir part.
LETTRE
de M. le C. D. F .::
S. Felion de Pallerols le 11.
Février.
Depuis ma Lettre écrite
R iij
198 MERGURE
du 25. du mois paffé , le
Comte de Montemart ne
fe trouvant pas affé fort avec
le détachement qu'il
avoit pour entrer dans le
Llufanes , s'en fut à Moya ,
& delà ayant marché par
Manrefa du côté de Solfone
, j'ai fçu qu'aprés avoir
raffemblé les quartiers difperfées
de Vallejo , & s'être
joint à lui , il avoit fecouru
Bergue & le Château
de Gironelle que les
Rebelles avoient bloqué ,
de maniere qu'il n'y pouyoit
rien entrer
& que
BE
THEQUE
GALANT.
BIBLIE
LYON
LYOU
VILLE
925
les affaires de Llufane
l'ayant obligé d'y revenir
diligemment il y eftoit entré
fans beaucoup de refiftance,
& y avoit bruflé prés
de Llufanes , S. Feliou
Caffera , Oriſta , plufieurs
autres Villages & plufieurs
Fermes répandus dans le
Pays , il eftoit arrivé le 7.
a Auftot où il attendoit
de nouveaux ordres de M.
de Popoli .
La plaine de Wic paroift
prefentement tranquille
parce que nous y touchons
, M. de Caraffa elt 2
Rij
200 MERCURE
encore à l'Efquero
qui
eft à deux lieues du Pont de
la Roda qui eft à l'entrée
de cette plaine , & tient
par là tout le Pays. Il n'y
a que les Villages du
Montſeny qui font encore
les armes à la main , furtout
depuis qu'Armengol
qui eft venu debarquer à
S. Pol avec 600. hommes.
les a joint , ce petit ſecours
a donné de l'audace a cette
canaille & ibs'eft joint à
lui beaucoup de volontaires
& de Revoltés , je ne
fçay Montemart prendra
GALANT . 20201
la refolution d'aller les
chaffer & chaftier les Vil
lages coupables , où d'aller
à Caftelciudad ou il n'y
avoit le 8. que pour quinze
jours de vivres. D'un
autre cofté le Marquis de
Firmacon que j'ay envoyé
d'icy avec un gros deftachement
du cofté de Campredon
eft à S. Jean de
las Vabades , fa marche a
fait un tres bon effet ; plufieurs
Vallées & d'autres
qui avoient pris les armes
font venus demander mifericorde
mais toute la vi192
MERCURE
Nymphe charmante ,
Il s'arreſte , il contemple
Eh bien nous te perdor
S'écria la troupe fçavar
Cette Nymphe à jam
te dérobe à ces lieux
Elle va t'occuper de for
plus ferieux
Elle n'eft pas voſtre e
nemie
Répond l'Interprete c
Dieux
4
Son Pere eft pour nos A1
un amy précicux
Dont , contre le faux gou
la raiſon affermie
2
Affure au vray merite t
accue
2
GALLST
accpel r
Pauleftre ,
certs
a
Dos
Palm
Suivra
&
Je
vois
damla
Chant
124
Les
fruit
Par
cem
troupe in
Recor
L'Amore
la
Nomine
T.
195 .
colere
iffi . toft
on luy
; mais en
es autres
Le
Roy
de fufil
pas affez
il
couextraor
Majefté.
irique
nuevo
Gentil
bre de
n'en
of
a
Fret
.
oit tous
voya202
MERCURE
*
guerie de Ripole continuë
dans fa rebellion , & tout
eft retiré dans les montagnes
, en forte que l'on fera
obligé de les y forcer ,
pour les réduire . Pour ce
qui regarde le coſté de la
Marine,il y a eu de differen
tes actions dans lesquelles
les Troupes de Sa Majeſté
Catholique ont eu l'avantage
, neanmoins le pofte
de S. Pol qui n'eft qu'à trois
quarts de lieues de Caftella
qui eft le plus avancé que
nous ayons a efté pris & repris
plufieurs fois . Ileft acGALANT.
303
tuellement aux rebelles qui
qui s'y font fi fortifiez qu'il
faut du canon pour le reprendre.
Dom Gabriel Cano
Maréchal de Camp qui
commande fur cette Cofte,
attend un renfort de l'Armée
du Duc de Popoli , &
de
l'artillerie pour pour les y at.
taquer & les en chaffer . On
a envoyé
Dom Diego Gonfales
avecun gros détachement
pour empêcher
leur
communication
avec ceux
qui font au Montſeny
, &
pour les prendre
par derriere
dans le temps que M.
204 MERCURE
-
de Cano attaquera ce pofte.
Les vents d'Eft ont efté fi
violens depuis plufieurs
jours que jufqu'à preſent on
n'a pu faire paffer le canon
deftiné pour l'attaque de
S. Pol , fi toft qu'ils ceffe
ront , c'est une affaire de
quatre ou cinq heures.
Mr. de Valoufe que
j'avois laiffé du côré de la
Marine , pour veiller à ce
qui fe paffoit de ce coſtélà
, a raffemblé tout ce qui
l'a pû de troupes , & s'eft
venu cantonner à Tordera
pour foutenir Oftalric , nos
CALANT . 205
poftes de Pineda - Calella &
Malgrat, & en même tems
ceux de Sancta - Colomba³
& autres qui font vers la
montagne , & pour voir ce
qui fe paffe du cofté de la
Marine. Jay fait paffer
quelques troupes du Rouffillon
à M. Gandolfe pour
conferver les deux Sardaignes
, mais il n'y en a pas
affez pour envoyer à Caf
telciudad qui doit éftre bloqué
par tous les Sommetans
de la Conque de Tremp
du Marquifat de Paillas qui
ont pris les armes , & qui
t
206 MERCURE
doivent fe joindre à ceux
de Baronie de Baga & Portella.
Je ne puis y en envoïer
d'avantage , mais je ſuis
perfuadé que le Comte de
Montemart y marchera
bien- toft , il a le temps.
de le faire , attendu qu'il y
a pour plus de 15.jours de vivres
dans Caftelciudad.lorf
que le Comte de Montemart
fera preft d'y arriver , M.
de Gandolfprofitera de cette
occafion pour y faire entrer
un convoy que l'on a
affemblé à Puïcerda pour y
envoïer.
GALANT. 207
On affure que Monfieur
de Thouy doit venir incef
famment
à Lerida pour
commander depuis Solfone
juſques dans les montagnes
de la Conque de Tremp
& de Paillas , il doit amener
avec luy les Troupes Walones
, douze Efcadrons &
douze Bataillons de celles
qui font venu d'Eftramadure
.
Les Lettres de Perpignan '
du 16. Février portent que
les Troupes que commande
le Comte de Fiennes a-'
voient été attaquées par un
208 MERCURE
gros corps de Rebelles
fi à
l'impourvû
qu'elles avoient.
plié d'abord,mais que s'état
ralliées , elles avoient mis
les Rebelles
en déroute
,
qu'il en étoit refté fur la
place plus de trois cens , &
cent trente faits prifonniers.
Celles de Catalogne
portent que les Barcelonois
au nombre de fix cens hommes
étoient
venus attaquer
une redoute occupée
par les
Espagnols
du cofté des Capucins,
laquelle s'étoit bien
deffendue
, quoiqu'il
n'y eut
que quarante
hommes
dedans
GALANT. 209
dans , les Rebelles ont perdus
cinquante
hommes
dans cette action glorieuſe
pour les Troupes Elpagno
les , & un grand nombre
bleffez.
On écrit de Landau du
14. Février , que le Marquis
de Vieuxpont détácha le 12 .
deux cens hommes des Grenadiers
qui yfont en quar
tier , & un pareil nombre
de Dragons fous les ordres
d'un Colonel : Ils prirent
la route de Spires ,Lounils
furent joidt apar umpareil
détachement. Ils marche
Février 1714 .
S
· 210 MERCURE
rente: enfuite du cofté de
Vorms , où ils trouverent
120. Houffards ennemis qui
prirent la fuite à l'arrivée
du détachement de noftre
Garniſon ; nos Dragons les
pourfuivirent , & en prirent
deux qui dirent qu'il eftoit
forti de Maïence un Convoi
confiderable de toutes
fortes de munitions pour
Philifbourg noftre déta
chement marcha enfuite le
long du Rhin , & nous vénons
d'apprendre que la
plupart de ces bateaux al
voient couldz à fond, & qué
GALANT. 211
les autres avoient regagné
Maïence ; on fçaura le détail
au retour du détachement.
On mande de la Haye
du 19. Fevrier que le Comte
de Strafford qui y eftoit
arrivé avoit eu une longue
conference avec les Plenipotentiaires
d'Efpagne &
enfuite avec les Eftats Generaux
.
On écrit du Port de
Scette en Languedoc ' que
l'ony charge plufieurs Baf
timens de bleds & de
foins pour l'armée d'Efpagne.
Sij
212 MERGURE
MORT.
Mr. Eftienne de Bragel
longne Capitaine au Regiment
des Gardes , Major
general & Brigadier des
Armées du Roy , eft mort
le premier Février , il fut
d'abord dés l'âge de cinq
ans reçû Chevalier de Mal
te , il quitta cet Ordre Militaire,
pour épouſerſa coufine
germaine , commença
à fervir en qualité de Cornette
de Cavalerie , & en
cette qualité il fut pris priGALANT.
213
fonnier à la Bataille de Tréves
à l'âge de quatorze ans ,
où il eut trois chevaux tuez
fous luy ; en fuite S. M. luy
donna une Enſeigne au Régiment
des Gardes. Aprés
la bataille de Steinkerque
le Roy lui donna une Compagnie
dans le mefme Régiment
, enfuite le fit Inf
pecteur d'Infanterie , Major
general, & Brigadier de
fes Armées, il fut bleffé d'un
coup de moufquet à la tête
au Siége de Namur , où il
fervoit en qualité de Májor
general ; il s'eft diſtin214
MERCURE
gué à plufieurs Siéges &
Batailles Il a efté marié
à Marie Hector de Marle
fa coufine germaine .
Il eftoit fils de Thomas
de Bragelone Seigneur
d'Enjenville , premier Prefident
au Parlement de
Metz , & de Dame Marie-
Hector de Marle , & frere
de Chriftophe - François
de Bragelongne , Confeiller
de la grande Chambre
au Parlement de Paris , de
de Geofroy - Dominique
de Bragelongne , Vicomte
d'Edeville , Maître des Re
GALANT. 215
I
queftes ; de Nicolas de Bragelongne
qui eft mort en 1713 .
Doyen & Comte de Sains Julien
de Brionde; de Thomas
de Bragelongne Docteur en
Théologie de la Faculté de Paris
, Chanoine honnoraire de S.
Julien de Brionde , Doyen de
Senlis , puis Chanoine de l'Eglife
de Paris , & de quantité
d'autres freres & foeurs ,fa mere
ayant eu 17. ou 18. enfans
La famille de Bragelogne eft
tres confiderable dans l'Epée &
dans la Robe , dont on raporte
fon origine à Gelogne Seigneur
de Bray , Fondateur de la
Terre de Bragelongne que l'on
croit fils puifné de Landry
Comte de Nevers & d'Auxerre ;
& de Mathilde de Bourgogne216
MERCURE
Comté , quoy qu'il en foit elle
eft tres confiderable à Paris depuis
Thomas de Bragelongne
Ecuyer Seigneur de Jouy de
de Braffy & de Ouzé, qui époufa
en premieres Nôces Thomafe
Regnier , & en fecondes Noces
Marie Favier , il eut des enfans
des deux lits du premier il eut
Martin de Bragelongne Lieute
nant particulier, civil & crimi
nel au Chaſtelet de Paris & Prevôt
des marchands en 1558. fon
frere du 2. lit Thomas de Bragelongne
fut Lieutenant criminel
au Châtelet de Paris laiffa pofterité
qui eft éteinte
Mais de Martin de Bragelongne
fon frere aîné toutes les branches de
cette maifon font forties. Il eut fix
garçons , fçavoir Jean, Jerôme,Thomas
,Marttin,Nicolás & Jacqués qui
ont fait chacune une branche qui sốt
raportées juftes dans le Morery.
GALANT. 217
********SO
MEMOIRE
furla circulationdufang
des Poiffons qui ont des
oüies , & fur leur ref
piration.
D
Ans les divers Memoi
res qu'on a lûs à l'Academie
, on a fait voir qu'elle
étoit la ftructure du coeur des
Poiffons , & celles de leurs
ouïes . Pour fuivre cette matiere
, il eft à propos de parler
de leurs ufages ; Mais pour
Février 1714. T
218 MERCURE
les rendre intelligibles à tout
le monde ; il eft neceffaire de
faire ici une brieve recapitulation
de ce que j'ay dir touchant
cette même structure.
On remarquera donc qu'el
le eft differente dans les differentes
efpeces de Poiffons où
l'on trouve ces parties . On a
fait voir à l'Academic des
Exemples de ces differences ;
mais je m'arreſte aujourd'huy
particulierement à la Carpe
que l'on trouve commodément
, & fur laquelle on pourra
avec facilité verifier tout ce
que je vais dire.
GALANT 219
Chacun fçait que le coeur
de tous les Poiffons qui ne
refpirent pas l'air n'a qu'une
cavité , & par confequent
qu'une oreillette à l'embouchure
du vaiffeau qui y rapporte
le fang. Celle du coeur
de la Carpe eft appliquée au
cofté gauche .
La chair du coeur eft fort
épaiffe , par rapport à fon volume
, & fes fibres font trescompactes
: Auffia - t'il befoin
d'une forte action pour la circulation
comme on le verra
dans la fuite.
Il n'y a perfonne qui ne
Tij
220 MERCURE
fçache ce que c'eft que des
ouïes ; mais tout le monde
ne fçait pas que ce font ces
parties qui fervent de poumons
aux Poiffons. Leur
charpente eft composée de
quatre coftes de chaque coſté
qui fe meuvent tant fur ellesmêmes
en s'ouvrant & fe refferrant
qu'à l'égard de lours
deux appuis fuperieur & inferieur
en s'écartant de l'une &
de l'autre , & en s'en raprochant.
Le cofté convexe de
chaque cofte eft chargé ſur
fes deux bords de deux efpeces
de feüillers , chacun def.
GALANT. 221
quels eft compofé d'un rang
de lames , étroites & rangées
& ferrées l'une contre l'autre
qui forment comme autant
de barbes ou franges femblables
à celles d'une plume à
écrire ; & ce font ces franges
qu'on peut appeller proprement
le poumon des Poiffons .
Voila une fituation de parties
fort extraordnaire & fort
finguliere . La poitrine eft
dans la bouche auffi - bien'
que le poumon . Les coftes
portent le poumon , & l'animal
refpire l'eau .
Les extremitez de ces cof-
T iij
222 MERCURE
tes qui regardent la gorge font
jointes enfemble par plufieurs
petits os , qui forment une
efpece de fternon , enforte
néanmoins que les coftes ont
un jeu beaucoup plus libre
fur ce fternon & peuvent s'écarter
l'une de l'autre beaucoup
plus facilement que celles
de l'homme , & que ce fternon
peut-eftre foulevé & abaiffe.
Les autres extremitez
qui regardent la bafe du
crane font auffi jointes par
quelques offelers qui s'articulent
avec cette même baſe &
qui peuvent s'en éloigner , ou
GALANT. 223
s'en approcher.
Chaque cofte eft compofée
de deux pieces jointes par
un cartilage fort fouple , qui
eft dans chacune de ces parties
ce que font les charnieres
dans les ouvrages des artifans.
La premiere piece eft
courbée en arc, & fa longueur
eft environ la fixiéme portion
du cercle dont elle feroit la
partie.
La feconde décrit à
peuprés
une fromaine majuſcule.
La partie convexe de chaque
coſte eft creusée en goutiere
, & c'eft le long de ces

Tiiij
224 MERCURE
goutieres que coulent les vaiffcaux
dont il fera parlé ciaprés.
Chacune des lames dont
les füillers font compofez ,
à la figure du fer d'une faux ,
& à fa naiffance , elle a comme
un pied ou talon qui ne
pofe que par fon extremité fur
fur le bord de la cofte.
Chacun de ces fcüllets eft
compofé de cent trente- cinq
lames ; ainfi les feize contiennent
huit mil fix cens quaran
te furfaces , que je compte icy
parce que les deux furfaces de
chaque lame font revêtues
GALANT. 225
5
dans toute leur étenduë d'une
membrane tres fine , fur la
quelle fe font les ramifications
prefque innombrables des
vaiffeaux capillaires de ces
fortes de
poumons
.
J'ay fait voir à la compa
gnie qu'il y a quarante - fix
mufcles qui font employez
aux mouvemens de ces coftes ;
il y en a huit qui en dilate l'intervale
, & feize qui le refferrent
, fix qui élargiffent le cintre
de chaque cofte , douze
qui le retrefiffent , & qui en
même temps abaiſſent le ſternon,
& quatre qui le foule
vent.
226 MERGURE
le
Les ouïes ont une large ou
verture , fur laquelle eft pofé
un couvercle compofé de
plufieurs pieces d'affemblage ,
qui a le même afage que
panneau d'un fouffler , & chaque
couvercle eft formé avec
un tel artifice qu'en s'écartant
l'un de l'autre , ils ſe voutent
en dehors pour augmenter la
capacité de la bouche , tandis
qu'une de leurs pieces qui
jouë fur une espece de genou
tient fermées les ouvertures
des ouïes , & ne les ouvre que
pour donner paffage à l'eau
que l'animal a refpiré , ce qui
GALANT. 227
fe fait dans le tems que le
couvercle s'abat & fe referre.
Il ya deux muſcles qui fervent
à foulever le couvercle ,
& trois qui fervent à l'abatre
& à le referrer .
On vient de dire que l'affemblage
qui compoſe la
charpente des couvercles les
rend capables de fe vouter en
dehors. On ajoûtera deux
autres circonstances. La premiere
eft que la partie de ce
couvercle qui aide à former
le deffous de la gorge eft
plié en éventail fur de petites
lames d'os pour fervir en fe
228 MERCURE
deployant à la dilatation de la
gorge dans l'infpiration de
feau: La feconde que chaque
couvercle eft revêtu par dehors
& par dedans d'une peau
qui luy eft fort adherente.
Ces deux peaux s'uniffent enfemble
, fe prolongent
au
delà de la circonférence du
couvercle d'environ deux à
trois lignes , & vont toûjours
en diminuant d'épaiffeur. Ce
prolongement eft beaucoup
plus ample fous la gorge que
vers le haut de la tefte , Il
eft extrêmement
ſouple, pour
s'appliquer plus exactement à
GALANT. 229
l'ouverture fur laquelle il porte
, & pour la tenir fermée au
premier moment de la dila
tation de la bouche pour la
refpiration.nombo
brat
Voila pour ce qui regarde
la ftructure des oüies : paffons
à prefent à la diftribution
de
leurs vaiffeaux . bon condt al
L'Artere qui fort du coeur
fe dilate de telle maniere ,
qu'elle en couvre toute la ba
fe : enfuite fe retrefiffant peu
à peu elle forme une efpece
de corne. A l'endroit où elle
eft ainfi dilatée , elle eft
3.1
garnie
en dedans de plufieurs
230 MERCURE
colonnes charnues qu'on peut
confiderer comme autant de
muſcles qui font de cet en
droit de l'aorte comme un
fecond coeur , ou du moins
comme in fecond ventricule
lequel joignant fa compreffion
à celle du coeur , double
la force neceffaire à la diftri
bution du fang pour la circulation.
Cette artere montant par
l'intervalle que les ouies laiffent
entre- elles, jette vis- à- vis
de chaque paire de côtes de
chaque côté une groffe bran
che creufée fur la furface exte
GALANT. 231
rieure de chaque côte & qui
s'étend le long de cette goutiere
d'une extremité à l'autre
du feüillet. Voila tout le corps
de l'Aorte dans ce genre d'a
nimaux. L'Aorte qui dans les
autres animaux porte le fang
du centre à la circonference
de tout le corps , ne parcourt
de chemin dans ceux- ci que
depuis le coeur jufqu'à l'extre
mité des oüles , où elle finit.
Cette branche fournit autant
de rameaux qu'il y a de lames
furl'un ou furl'autre bord
de la côte. La groffe branche
fe termine à l'extremité de la
232 MERCURE
côte , ainfi qu'il a efté dit , &
les rameaux finiffent à l'extre
mité des lames aufquelles
chacun d'eux fe diftribuë.
Pour peu que l'on foir inf
truit de la circulation & des
vaiffeaux qui y fervent , on
fera en peine de fçavoir par
quels autres vaiffeaux on a
trouvé un expedient pour ànimer
& mouvoir tout le corps
depuis le bout d'en bas des
oüies jufques à l'extrémité de
la queue. Cet expedient paroîtra
clairement dés qu'on
aura conduit le fang jufqu'à
l'extremité des oüies.
Chaque
GALANT . 233
-
Chaque rameau d'artere
monte le long du bord interieur
de chaque lame des
deux feüillers poſez fur chaque
côte , c'est- à- dire le long
des deux tranchans des lames
qui fe regardent : ces deux rameaux
s'abouchent au milieu
de leur longueur , & conținuant
leur route parviennent,
comme j'ay dit , à la pointe
de chaque lame . Là chaque
rameau de l'extremité de l'artere
trouve l'embouchure d'une
veine , & deux embouchures
appliquées l'une à l'autre
immediatement ne faifant
Février 1714
. V
234 MERCURE
qu'un même canal malgré la
differente confiftance des
deux vaiffeaux , la veine s'abbat
fur le tranchant exterieur
de chaque lame , & parvenuë
au bas de la lame elle verfe
fon fang dans un gros vaiffeau
veineux couché prés de
la branche d'artere dans toute
l'étendue de la goutiere de
de la côte : mais ce n'eſt
pas
feulement par cet abouchement
immediat des deux extrêmitez
de l'artere & de la
veine que l'arrere fe décharge
dans la veine , c'eft encore par
toute la route.
GALANT . 235
Voici comment le rameau
d'artere dreffé fur le tranchant
de chaque lame , jette dans
toute fa route fur le plat de
chaque lame de part & d'autre
, une multitude infinie de
vaiffeaux , qui partant deux à
deux de ce rameau l'un d'un
côté de la lame , l'autre de
l'autres chacun de fon côté
va droit à la veine qui defcend
fur le tranchant oppoſé de la
lame , & s'y abbouche par un
contact immediat. C'eft ainfi
que le fang paffe dans ce genre
d'animaux , des arteres de
leur poumon dans leurs vei-
Vij
236 MERCURE
nes d'un bout à l'autre. Les
arteres y font de vrayes arte- sy
res , & par leurs corps & par
leur fonction de recevoir le
fang. Les veines y font de
vrayes retines , & par leur
fonction de recevoir le fang
des anteres & par la delicateſ
fe extrême de leur confiftan-
Il n'y ajufques - là rien qui
ne foit de l'economie ordinaire
: mais ce qu'il y a de fingulier
eft premierement l'abbouchement
immediat des
arteres avec les veines , qui ſe
trouve à la verité dans les pou-
-mons d'autres animaux ; fur
GALANT. 237
*
tout dans ceux des grenouilles
& des tortuës : mais qui
n'eft pas fi manifefte que dans
les oüies des poiffons. 2. La
regularité de la diſtribution
qui rend cet abbouchement
plus vifible dans ce genre d'animaux
; car toutes les branches
d'arreres montant le
long des lames dreffées fur les
côtes , font auffi droites &
auffi également diftantes l'une
de l'autre que les lames : les
rameaux tranfverfaux capillaires
qui partent de ces branches
à angles droits , font également
diftans l'un de l'autre ;
238 MERCURE
de forte que la direction & les
intervales de ces vaiffeaux tant
montans que tranſverſaux ,
eftant auffi reguliers que s'ils
avoient efté dreffez à la regle
& cfpacez au compas ; on les
fuit à l'oeil & au microſcope.
On voit donc que les arteres
tranfverfales finiffent immediatement
au corps de la veine
defcendante , & chacune
de ces veines defcendante
ayant reçu le fang des arteres
capillaires tranfverfalles
de part & d'autre de la lame ,
s'abbouche à plomb avec le
tronc de la veine couchée
GALANT. 239
dans la gouttiere.
Il faut avouer que cette
diftribution eft fort fingulicre:
ce qui fuit l'eft encore da
vantage. On eft en peine de la
diftribution du fang pour la
nourriture & la vie des autres
parties du corps de ces animaux.
Nous avons conduit le
fang du coeur par les arteres
du poumon dans les veines
du poumon. Le coeur ne jette
point d'autres arteres que celles
du poumon. Que deviendront
les autres parties , le
cerveau , les organes des fens ?
Ce qui fuit le fera voir.
246 MERCURE

Ces troncs de veines pleins
de fang arteriel fortant de
chaque côte par leur extre
mité qui regarde la bafe du
crane , prennent la confiſtance
& l'épaiffeur d'arteres & viennent
le réunir deux à deux de
chaque côté. Celle de la pre
miere côte , fournit avant fa
réunion des branches qui diftribuënt
le fang aux organes
des fens , au cerveau & aux
parties voifines , & fait par ce
moyen les fonctions qui appartiennent
à l'aorte afcendante
dans les animaux à quatre
pieds enfuite elle fe re- :
joint
GALANT. 241
joint à celle de la feconde
côte ; & ces deux enſemble ne
font plus qu'un tronc , lequel
coulant le long de la bafe du
crane reçoit encore de chaque
côte une autre branche formée
par la réunion des veines
de la
troifiéme &
quatrieme
paires de côtes , & toutes enfemble
ne font plus qu'un
tronc.
Aprés cela ce tronc dont
toutes les racines eftoient
veines dans le
poumon , devenant
artere par fa tunique
& par fon office , continuë
fon cours le long des verte-
Février
1714. X
242 MERCURE
bres , & difturbuant le fang
arteriel à toutes les autres parties
, fair la fonction d'artere
defcendante & le fang arteriel
eft diftribué par ce moyen également
à toutes les parties
pour les nourrir & les ani
mer ; & il rencontre par tout
des racines qui reprennent le
refidu & le rapportant par
plufieurs troncs formez de l'u
nion de toutes ces racines , au
refervoir commun qui le doit
rendreau coeur ; c'est ainsi que
s'acheve la circulation dans
ces animaux.
Voila comment les veines
du poumon de ce genre deGALANT.
243
viennent arteres pour animer
& pour nourrir la tefte & le
refte du corps.
Mais ce qui
augmente la
fingularité , c'est que ces mêmes
veines du poumon fortant
de la goutiere des côtes
par leur
extrennité qui segarde
la gorge, confervent
la tu .
nique & la fonction de veines
en rapportant
dans le refervoir
de tout le fang veinal
, une portion du fang arteriel
qu'elles ont reçu des arteres
du poumon .
Comme le mouvement
des machines contribue auffi
X ij
244 MERCURE
à la refpiration des Poiffons ,
il ne fera pas hors de
hors de propos
1
de faire remarquer que la fupericure
eft mobile, qu'elle eft
compolée de plufieurs pieces
qui font naturellement engagées
les unes dans les autres
, de telle maniere qu'elles
peuvent en fe déployant
dilater & allonger la machoire
fuperieure.
+
Toutes les pieces qui fervent
à la refpiration de la
Carpe , montent à un nombre
fi furprenant , qu'on ne
fera pas fâché d'en voir icy le
denombrement.
GALANT. 245
Les pieces offeufes font au
nombre de quatre mille trois
cens quatre - vingt fix : il y a
foixante-neuf mufcles.
Les arreres des oüies , utres
leurs huit branches principales
, jettent quatre mille trois
cent vingt rameaux ; & chaque
rameau jette de chaque
lame , une infmité d'arteres
capillaires tranfverfales , dont
le nombre ne fera pas difficile ,
& paffera de beaucoup tous
ces nombres enfemble.
Il y a autant de nerfs que
d'arteres les ramifications
des premiers fuivant exacte-
X jij
246 MERCURE
ment celles des autres.
Les veines ainfi que les
arteres
, outre leurs huit branches
principales jettent quatre
mille trois cent vingt rameaux
, qui font de fimples
tuyaux , & qui à la difference
des rameaux des arteres ne
jettent point de vaiſſeaux capillaires
tranfverfaux.
Le fang qui eft rapporté de
toutes les parties du corps des
poiffons , entre du refervoir ,
ou fe dégorgent toutes les
veines , dans l'oreillette , &
de là dans le coeur ; qui par fa
contraction le pouffe dans
GALANT. 247
l'aorte , & dans toutes les ramifications
qu'elle jette fur
les lames des oüies : & comme
à fa naiffance elle eft garnie
de plufieurs colonnes charnuës
fort épaiffe , ce qui refferrent
immediatement aprés , elle feconde
& fortifie par fa compreffion
l'action du coeur , qui
eft de pouffer avec beaucoup
de force le fang dans les rameaux
capillaires tranfverfaux
,fituez de part & d'autre,
fur toutes les lames des düies.
On a fait obſerver que ces
te artere & fes branches , ne
parcouroient de chemin que
X iiij
248 MERCURE
depuis le coeur , juſqu'à l'extremité
des oüies , où elles fir
niffent. Ainfi à coup de piston
redoublé doit fuffire , pour
pouffer le fang avec impetuofité
dans ce nombre infini
d'arterioles fi droites & fi reguliere
, où le fang ne trouve
d'autre obstacle que le fimple
contact , & non le choc & les
reflexions , comme dans les
autres animaux où les arteres
fe ramifient en mille manicres
, fur tout dans les dernieres,
fubdivifions.
Voila pour ce qui concerne
le paffage du fang dans le
GALANT. 249
poumon. Voici comment s'en
fait la préparation.
to Je fuppofe que les particules
d'air qui font dans l'eau ,
comme l'eau eft dans une é
ponge , peuvent s'en dégager
en plufieurs manieres.
1. Par la chaleur ainfi qu'on
le voir dans l'eau qui bout
fur le feu. 2. Par l'affoiblif
fement du reffors de l'air , qui
preffe l'eau où ces particules
d'air font engagées ; comme
on le voit dans la machine du
vuide.3 . Par le froiffement
&l'extrême divifion de l'eau ,
fur tout quand elle a quelque
*
-
250 MERCURE
degré de chaleur.
On ne peut pas douter qu '
il n'y ait beaucoup d'air dans
tout le
corps des poiffons , &
que cet air ne leur foit fort
neceffaire. La machine du vuide
fait voir l'un & l'autre.
Jay mis une Tanche fore
vive dans un vaiffeau plein
d'eau que l'on a placé fous le
recipient ; & aprés avoir donné
cinq ou fix coups de piſton on
a remarqué que cette Tanche
étoit toute couverte d'une in
finité de petites bulles d'air qui
fortoient d'entre les écailles ,
& que tout le corps paroiffoit
perlé.
GALANT. 251
Il en fortoit auffi un tres
grand nombre par les oüies
beaucoup plus groffes que
celles de la furface du corps :
Enfin il en fortoit par la bouche
, maisen moindre quantirecommençant
à pom- té. En
per tout de nouveau deux ou
trois fois de fuite , ce qui fut
fait à plufieurs repriſes , on
remarquoit que le poiffon s'agitoit
& fe tourmentoit extraordinairement
, & qu'il re£
piroit plus frequemments.
aprés avoir paffé un gros quare
d'heure dans cet eftat , il come
ba en langueur , tout le corps
252 MERCURE
& même les oüies n'ayant
plus aucun mouvement fenfi
ble. Pour lors ayant tiré le
vaiffeau de deffous le recipient
, on jetta le poiſſon dans
de l'eau ordinaire , où il com
mença à reſpirer & à nager ;
mais foiblement , & il fut
longtemps à revenir à fon
eftat naturel.
J'ay fait la même experien
ce fur une Carpe : jelay mife
dans la même machine , &
ayant pompé l'air trois ou
quatre fois comme on l'avoit
fait à la Tanche , le poiffon
commença d'abord à s'agiter :
2
GALANT. 253
toute la furface du corps de
par la vint perlée ; il fortit
bouche & par les oüies une
infinité de bulles d'air fort
groffes , & la región de la veſfied'air
s'enfla beaucoup,quoique
cette Carpe fut plus grof
fe que la Tanche , le battement
des oüies ceffa plutoft,
Lorſqu'on recommençoit à
pomper , les oüies recommençoient
auffi à battre , mais
tres- peu de temps , & fort for
blement. Enfin elle demeura
fans aucun mouvement , &
la region de la veffie devint fi
gonfléc & fi tenduë , que la
254 MERCURE
laitte fortoit en s'éfilant par
l'anus. Cela dura environ trois
quarts d'heure , au bout def
quels elle mourut , eſtant devenue
fort platte. L'ayant ou
verte , on trouva la veffie cre-
*
véc.
100 000
On a auffi experimenté
qu'un poiffon mis dans de
Feau purgée d'air n'y peut vivre
longtemps. Outre ces experiences
qu'on peut faite
dans la machine du vuide , en
voici d'autres qui prouvent
aufli que l'air , qui eft mêlé
dans l'eau , a la principale part
à la refpiration des poillons.
GALANT 255
Si vous enfermez des poiffons
dans un vailleau de verre
plein d'eau , ils y vivent quel
que temps , pourvû que l'eau
foit renouvellée : mais fi vous
couvrez le vaiffeau , & le bouchez
en forte que l'ait n'y
puiffe point entrer des poiffons
feront étouffez . Cela
prouve bien que l'eau ne fery
à leur refpiration , qu'autant
qu'elle a la liberté de siem
preigner d'air, no sulgenti
Mettez plufieurs poiffon's
dans un vaiffeau qui ne
foit pas entierement rempli
d'eau , fi vous le fermez , ces
256 MERCURE
poiffons qui auparavant nå
geoient en pleine liberté , &
s'égayoient , s'agiteront & fe
prefferont à qui prendra le
deffus pour refpirer la portion
de l'eau qui eft la plus voifine
de l'air.
#
On remarque auffi quelorf
que la furface des Etangs eft
gelée , les poiffons qui font
dedans , meurent plus ou
moins vite , durant que l'Etang
a plus ou moins d'érendue
& de profondeur , & on
obferve que quand on caffe
la glace en quelque endroit ,
les poiffons s'y prefentent
avec
GALANT . 257
avec empreffement pour ref
pirer cette cau impregnée
d'un nouvel air. Ces experiences
prouvent manifeftement
la neceffité de l'air pour
las refpiration des poiffons.
Voyons maintenant ce qui fe
paffe dans le temps de cette
refpirations
La bouche s'ouvre , les lé
vres s'avancent , parlà la concavité
de la bouche eſt allongée
, la gorge s'enfle , les cou
vercles des oüies , qui ont le
même mouvement que les
panneaux d'un fouffler , s'écartantl'un
de l'autre ,fe voû
Février
1714. Y
258 MERCURE
tent en dehors par leur milieu
feulement , tandis qu'une de
leurs pieces qui joue fur une
efpece de gomme , tient fermées
les ouvertures des ouïes ,
en fe foulevant toutefois un
peu , fans permettre cependant
à l'eau d'entrer ; parce
que la petite peau qui borde
chaque couvercle, ferme cractement
l'ouverture des ouïes.
Tout cela augmente
, &
élargit en tout ſens la capacité
de la bouche , & détermine
l'eau à entrer dans fa
´cavité , de même que l'air entre
par la bouche & los nari ,
8
GALANT 259
nes , dans la trachée artere &
les poumons , par la dilatation
de la poitrine . Dans ce
même temps les coftes des
Quics s'ouvrent en s'écartanr
les unes des autres , leur cinare
eft élargi le fternon eft
écarté en s'éloignant du pa
Jais ; ainfi tour confpire à faire
entrer l'eau en plus grande
quantité dans la bouche,Cieft
ainfi que fe fait l'inſpiration
des poiffons. Enfuite la bouche
fe ferme, les léyres aupo-
Javant allongées ſe racourcif
fent , fur tour la fuperieure
qui le plicen éventail , la lé vre
Y ij
260 MERCURE
inferieure fecole à la fuperieu
re par le moyen d'une petite
peau en forme de croiffant qui
s'abbat comme un rideau de
haut en bas & qui empêche
l'eau de fortir . Le couvercle
s'applatit fur la baye de l'ouverture
des ouies. Dans le mê
me temps les côtes fe ferrent
les unes contre les autres , leur
cintre fe retreffit , & le fternon
s'abbat fur le Palais .
--Tour "cela contribuë &
comprime l'eau qui eſt entrée
par la bouche. Elle ſe preſente
alors pour fortir par tous.
lés intervalles des côtes & par
GALANT 261
y
ceux de leurs lames , & elle
paffe comme par autant de fi
lieres ; & par ce mouvement la
bordure membraneufe des
couvercles eft relevée , & l'eau
preffée s'échappe par cette ouverture.
C'eft ainfi que fe
fait l'expiration dans les poiffons.
On voit par là que l'eau
entre par la bouche , & fortant
par les oüies . Tout au contrai
re de ce qui arrive dans lès animaux
à quatre pieds dans lef
quels l'air entre & fort alternativement
par la trachée artere .
Voila tout ce qui concerhe
les mouvemens de la refpiration
des poiffons.
262 MERCURE
MARIAGE.
Mr Nicolas Digues , Seigneur
de Carlande & d'Interville
, Confeiller du Roy .
Commiffaire General en fa
Cour des Monnoyes , Direc
teur General des Etalons de
France , paffa contrat de mariage
le onze de ce mois , avec
Damoiſelle Marie Angelique-
Antoinette Bidault , l'une des
vingt - quatre Femmes de
Chambre de Monfeigneur le
Dauphin, Le Roy & Monfeigneur
le Dauphin honorerens
GALANT: 263
1
ce contrat de leur fignature.
Plufieurs Seigneurs & Dames
de la Cour fe firent un plaifir
de le figner auffi.
MORTS,
M Henry - François de
Candale , Duc de Rendan
Pair de France , Chevalier de
l'Ordre du S. Esprit , Captal
de Buch , mourut le 22. Fé
vrier. Ce Seigneur defcend
des anciens Comtes de Foix
du Languedoc par Ifabelle ;
Comtefle de Foix , Vicomteffe
de Bearn , foeur & heritiere
264 MERCURE
-de Mathieu Comte de Foix }
qui époufa Archambaud de
Grefly , Captal de Buch ' , qui
eftoit defcendu de Jean , Sei
gneur de Grefly , Vicomte de
Benauge , & de Blanche de
Foix , qui eftoit fille de Gaſton
Comte de Foix , & de Jeanne
d'Artois. La pofferité d'Archambaud
poffeda le Comté
de Foix , & en prirent le nom
& les armes , & c'eft d'une
branche de cette Mailon qu'
eft defcendu Mr le Duc de
Foix qui eft celle de Candaler
Le Duché de Rendan dont
il -eſtoit-en -poſſeilion fut- érigé
GALANT 265
gé en Duché Pairie par le Roy
Louis XIV . au mois de Mars
1661. verifié le 15. Decembre
1663. en faveur de Dame
Marie- Catherine de la Roche
faucault , Comteffe de Rendan
, Gouvernante de Sa Ma
jefté,qui eftoitveuve de Henry
de Bauffremont , Marquis de
Senneçay , & auffi en faveur de
Marie-Claire de Beauffremont
fa fille unique qui eftoir auffi
veuve de Jean Baptiſte Gaſton
de Fleix. Cette Dame Comteffe
de Fleix eut entr'autres 2 .
enfans mâles , qui furent Jean-
Baptifte de Foix & Henry-
Février
1714. Z
266 MERCURE
François - Madame la Comteffe
de Randan leur ayeule ,
& Madame la Comteffe de
Fleix leur mere , firent la démiffion
du Duché de Randan
en faveur de Jean - Baptifte
Gaſton de Foix leur fils aîné ;
ainfi par cette ceffion . Il fuc
Duc de Randan , il époufa
Dame Magdelaine Charlotte
d'Ailly , fille de Henry Louis
d'Ailly , Duc de Chaunes , &
il mourut fans enfans ; & comme
la mere & fon ayeule lors
de la ceffion du Duché , luy
cederent à charge de reverfion
faute d'enfans mafles , &
GALANT. 267°
comme par fa mort il n'en
laiffa pas , le Duché revint à
Madame de Randan & à Madame
fa fille , qui firent une
nouvelle donation en faveur
de Henry François de Foix ,
frere puifné de Jean Baptifte
de Foix Duc de Randan , qui
venoit de mourir , ainfi Henry
François de Foix fut Duc de
Randan , & l'a poffedé jufques
à la mort, & comme il ne laiffa
point d'enfans de Dame
Marie - Charlotte de Roquelaure
fon epoufe , ce Duché
Le trouve aujourd'huy éteint ,
& en même temps tous ceux
Zij
268 MERCURE
du nom de Foix , qui a cfté fi il.
luftre pendant plufieurs ficcles
Mr. le Marquis de Montpeyroux
cft mort le 25. Fevrier.
Il fe nommoit Eleonor-
François Palatin de Dio , Marquis
de Montpeyroux , Roquefeuil
& Caftelnau , Comte
de Saligny , Baron de la Roche
en Berry, Meftre de Camp
de la Cavalerie Legere de
France & Lieutenant General
des Armées du Roy . Il eftoit
fils de Noël - Eleonor Palatin
de Dio , Seigneur & Marquis
de Montpeyroux , Comte de
la Roche , de Saligny & de
GALANT. 269 1
Roquefeuil ; & de Dame Marie
Ilabeau de Coligny , fille
de Gafpard de Coligny troifiéme
du nom , Marquis d'Orné
, Capitaine- Lieutenant des
Gens -d'Armes de la Reine ,
qui fut tué à l'attaque de Charenton
le 8. Fevrier 1649. &
de Dame Gilberte de Roquefeuil
, qui aprés fa mort ſe remaria
à Me Charles - Yves
Marquis d'Alegre , dont elle
eut une fille qui fut premiere
femme de Mr le Marquis de
Seignelay . Mr le Marquis de
de Montpeyroux qui vient de
mourir avoit épousé le 19.
Z iij
270 MERCURE
Avril 1709. Dame Françoife .
de Harville , fille de Claude-
Antoine de Harville Paloifeau
, Comte de la Salle , Lieutenant
General du Pays Chartrain
. Il en a eu deux fils &
une fille qui font morts jeunes
; ainfi il ne laiffe pas de
poſterité.
Supplement aux Nouvelles.
Les Lettres de Hambourg
du 16. portent que les Habitans
& la Garnifon de Tonningen
eftant réduits à la derniere
extremité faute de vivres
, le Colonel Wolf qui y
commandoit, fut obligé d'enGALANT.
271
voyer le 7. à Tottembuttel ,
au Brigadier Kneil qui commandoit
le Blocus de la Plaçe
, pour demander à capituler
. Que la Capitulation fut
reglée le 8. en plufieurs Articles.
Sçavoir
:
Que la Garnifon fortiroit
avec toutes les marques d'honneur
deux pieces de canon de
fix livres de bale & des munitions
pour tirer douze coups ;
Qu'on lui fourniroit quatre-
vingt un Chariots à quatre
chevaux , pour porter les
bagages ;
Qu'elle feroit conduite à
Z iiij
171 MERCURE
Eutin , ne faifant que deux
lieuës par jour , & féjournant
le troifiéme.
Qu'aucun foldat ne feroit
forcé à prendre parti.
*
Qu'on fourniroit en payant
des remedes aux Officiers &
aux folats malades jufqu'à leur
entiere guerifon.
Que les perfonnes qui font
au fervice du Duc de Hoftein
pourront librement ſe retirer
de la Ville , ou y refter.
Que les effets qui ont eſté

retirez dans la Ville feront
rendus de bonne foy.
Que la Ville & fon difGALANT.
273
T
trict confervera fes priviléges
& fera exemte de contributions
, & les Bourgeois pareillement
; & que ceux qui font
prifonniers feront relaſchez
fans payer rançon , &c.
Le 10. la Garniſon fortit
au nombre de trois cent cinquante
hommes portans aroutre
plus de quatre mes ,
cent malades reftez dans la
place , dont le Colonel Arnoldi
a efté fait Commandant
.
On y a trouvez cent quarante
pieces de canon , vingt- cinq
mortiers , & cent foixantefeize
milliers de poudre ; mais.
"
&
274 MERCURE
fi peu de vivres qu'il n'y ref
toit
que
rine.
feize mefures de fa-
On mande de Stokholm
que les Etats de Suede continuent
leurs féances avec
beaucoup d'union , qu'ils tra
vailloient à augmenter l'Ar
méc jufqu'à foixante ou foixante-
dix mille hommes , & à
faire prendre les armes aux
Miniftres pour eftre en état
de repouffer les Danois & les
Mofcovites qui fe preparent
à attaquer la Suede en même
tems du cofté du Pays de la
Finlande.
GALANT 275
On écrit de Vienne que le
Miniftre du Roy de Sicile a
efté congedié , & qu'il fe prés
pare à partir inceffamment
pour retourner en Italie , &
qu'on a envoyé un Mande .
ment à Aufbourg au Comte
de Borgole , Miniftre du
même Prince , avec ordre de
fortir de la Ville dans deux
jours , & dans quinze jours
des Terres de l'Empire.
MORTS.
Damoiſelle Claude Elizabeth
le Ragois de Bretonvilliers
, fille de feu M Benigne
le Ragois , S de Bretonvil
276 MERCURE
Bretonvilliers , Prefident en la
Chambre des Comptes, moufut
le2 . Février en fa 17.année .
Dame Artemire de Ref
mond , épouse de Meffire Jean
Louis de Raffin , Chevalier
Seigneur d'Hauterive , Brigadier
des Armées du Roy , &
Commandant pour fa Majefté
à Sedan , mourut le 5 .
Février.
Meffire Louis François Achilles
de Harlay , Abbé de S.
Colombe de Sens , mourut le
14. Février. Il eftoit fils puif
né de feu Meffire Nicolas Auguſte
de Harlay , Seigneur de
GALANT . 277
Boneüil & de Cély , Confeiller
d'Etat ordinaire , & Plenipotentiaire
à la Paix de Riſwick ,
& de Dame Anne - Françoiſe
Loüife- Marie Boucherat . On
a fi fouvent parlé de la Maiſon
du Harlay qu'on renvoye le
Lecteur aux precedens Mercures.
Dame Elizabeth de Pons ,
veuve de François Amanicu
d'Albret ,Comte de Mioffens,
mourut le 23. Février dans
ſon appartement au Palais du
Luxembourg , âgée de 78 .
ans. On a promis pour le
Mercure prochain un Mc278
MERCURE
moire fur cette Maiſon .
Les Lettres de Madrid du
18 portent que la Reine étoit
morte le 14. On parlera dans
le Mercure de Mars de la mort
de cette Princeffe .
Le Roy a nommé le Cardinal
del Giudice . avec le
Marquis de Mejorada , &
Don Jofeph Grimaldo , Secretaire
d'État , pour expedier
durant quelques jours les affaires
ordinaires , & même les
plus importantes aufquelles
le retardement pourroit ap
porter préjudice.
Les Lettres de Catalogne
GALANT . 279
portent que la Flote du Roy
eftoit arrivée le premier de ce
mois devant Barcelone
; qu'-
elle avoit moüillé à l'embou
chure du Llobregat
, & du
Befos : que ce même jour on
devoit débarquer les munitions
de guerre & les provifions
deftinées pour l'Armée
& pour le Siege de Barcelone
: que depuis quelques jours
il en eftoit venus plufieurs deferteurs
qui affuroient que les
Habitans fouffroient extrêmement
faute de vivres : &
que les Détachemens
envoycz
par le Duc de Popoli contre
280
MERCURE
les Rebelles , les avoient pour
la plufpart détruits & diffipcz.
On écrit de Londres qu'on
travailloit à mettre au net le
Traité de Commerce entre
l'Eſpagne & la Grande Bretagne
, qu'on avoit reçû par un
Exprés arrivé d'Utrecht , pour
eftre ratifié par la Reine . Sa
Majefté a figné la Commiffion
du ficur Jean Hart , nommé
au Gouvernement de Maryland.
Le fieur Jean Wetham
a eſté
fait Commiffaire
de l'Excife.
La Reine a conferé la di-
A
gnité
GALANT . 281
gnité de Chevalier Baronet de
la Grande Bretagne au fieur
Guillaume Defbowreries.
Le Comte Marshal , Pair
d'Ecoſſe , a eſté fait Capitaine
de la Seconde Compagnie des
Grenadiers à cheval Ecoffois
de la Garde , à la place du feu
Comte de Crawford ...
La Reine a accordé au Duc
de Shrewsbury la permiffion
de revenir en Angleterre , &
elle a ordonné de dreffèr une
Commiffion pour établir Regents
en fon abfence l'Archevêque
d'Armagh , le ſicur
Phips, Chancelier , & l'Arche-
Aa Février
1714.
282 MERCURE
vêque de Tuam .
On mande de Verſailles
que le Roy avoit pris le deüil
pour la mort de la Reine d'Efpagne.
Les Lettres Patentes pour
l'enregistrement
de la Conftitution
du Pape , acceptée par
l'Affemblée des Prelats convoquez
extraordinairement
par Sa Majefté , & qui porte
condamnation d'un Livre intitulé
: Le Nouveau Teftament
en François, avec des Reflexions
morales , &c. furent enregiftrées
au Parlement le premier
jour de Mars
HEQUE
BALIQ
THE
LYON
1893
Fwwwwwwwww .
TABLE.
Avanture
nouvelle. 3
De la neceffité de la Critique ,
ou le grand Prevost du Parnaſſe.
49
Nouvelles.
94.
Obfervation fur une
mort
Subite.
114
Article des Enigmes." 124
Ceremonie du Couronnement du
Roy de la Reine de Sicile,
faite à Palerme, 140
La Critique , Ode. 145
L'Indien le Soleil,Fable. 160
TABLE.
165 Lettre de Catalogne.
Mariage de Monfieur Henault,
Epitalame.
74
Lettre de Madrid.
174
194
Lettre de M. L. C. de F. à
Saint Faliou de Pallercol , le
1. Février
.
Morts.
197
212
Memoire fur la circulation du
fang des Poißons qui ont des
ouies , & fur leur ref
piration. 217
Mariage.
2624
Morts.
263
Suplément aux Nouvelles, 270
Morts.
275
TABLE.
278 Nouvelles d'Espagne.
Nouvelles d'Angleterre. 280
Nouvelles de Versailles. 282
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le